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Effets de la mise en œuvre de la zone de libre-échange continentale africaine sur le commerce du Burkina Faso.


par Christian KABORE
Universit de Lund - Master en politique commerciale et droit commercial international 2019
  

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II- Analyse théorique des effets d'un accord commercial

Dans ce chapitre, une analyse théorique des aspects de la libéralisation des échanges par la création d'un accord commercial est faite. Cette analyse fait ressortir les effets possibles d'un accord commercial élaborés par certains auteurs.

La libéralisation du commerce engendre deux effets : les effets statiques et les effets dynamiques. C'est Viner dans son livre «The customs Union issue (1950)» qui a développés les effets statiques traditionnels des zones de libre-échange. Il fait ressortir deux concepts que sont la création de commerce et le détournement de commerce.

La création du commerce est le volume supplémentaire issu de la suppression des barrières commerciales dans une zone de libre-échange (CEA et al. ,2017). Les pays membres peuvent ainsi faire valoir leurs avantages comparatifs à travers une meilleure allocation de leurs ressources et créé ainsi les échanges dans la zone. Selon Viner, il y a création de commerce lorsque la réduction ou la suppression des tarifs résultant de l'accord permet aux pays membres d'importer des produits moins chers. La création de commerce consiste pour tout membre de l'union de substituer la consommation des produits nationaux qui ont un coût de production trop élevé par des produits qui coûtent moins, en termes de production, provenant des autres membres. De ce fait, un accroissement de l'efficacité économique et une amélioration du bien-être du consommateur sont ressentis suite à la suppression ou la réduction des restrictions quantitatives et commerciales émanant de la concurrence née entre les producteurs de l'union.

Le détournement de commerce se manifeste lorsque les échanges entre les pays membres d'une zone de libre-échange se substituent aux échanges avec les pays tiers n'appartenant pas à la zone (CEA et al., 2017). Selon Viner, le détournement de commerce se pose lorsque l'augmentation des échanges entre les pays appartenant à une union se fait au détriment d'un pays tiers par des importations qui coûteraient plus cher en provenance des pays membres de cette union. Il s'agit ici pour les États membres de se détourner des sources d'approvisionnement externes au profit de celles internes à l'union à cause de la hausse des prix relatifs à l'érection des barrières tarifaires avec l'extérieur. Ce détournement de commerce confère aux parties prenantes à l'accord une efficacité qu'elles n'auraient pas eu en dehors du dudit accord. La hausse des droits de douane se fait donc au dépend d'un fournisseur étranger plus compétitif.

Il convient toutefois de noter que l'effet de détournement ne peut se réaliser que si le tarif douanier est suffisamment élevé pour accroitre les prix des marchandises importés hors de l'union malgré l'existence d'un fournisseur plus compétitif. Cette situation pourrait entrainer un renforcement du

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commerce intra-union ainsi qu'une augmentation des prix des produits sur les différents marchés de l'union du fait de la hausse des coûts de production ou de la hausse des tarifs douaniers.

Certains auteurs ont émis des hypothèses de gains statiques concernant la ZLECAf (CEA et al., 2017). À ce titre, Amiti et Konings (2017) estiment que les producteurs africains auront accès à des intrants et à des produits intermédiaires bon marché en provenance des pays africains entrainant ainsi des gains immédiats. Broda et Weinstein (2004) estiment quant à eux que les consommateurs africains devraient bénéficier d'un accès à des produits moins coûteux et plus diversifiés venant des pays africains. Krueger et Bhagwati (1995) pense que la ZLECAf contribue à résoudre l'épineuse question du chevauchement des accords commerciaux en Afrique. Enfin, Maur et Shephered (2015) soutiennent qu'un meilleur accès à des intrants agricoles et à des équipements améliorés peut faciliter l'adaptation des producteurs aux changements climatiques.

Les ACR peuvent aussi avoir des effets dynamiques. Généralement ils constituent une excellente plateforme de coopération et de dialogue, notamment en matière de développement des infrastructures, de transfert de technologie, d'innovation, d'investissement, de résolution de conflits, de paix et de sécurité. En effet, les ACR peuvent conduire à la spécialisation de chaque Etat membre dans la production de certains produits. Ils peuvent par ailleurs entrainer des innovations dans le système de production de ces pays et améliorer la compétitivité de leurs produits. Tout ceci pourrait, à terme, mettre à la disposition des consommateurs des produits à prix bas et de meilleure qualité.

CEA et al. (2012) proposent des effets dynamiques que pourrait engendrer la ZLECAf. À ce titre, il est relevé qu'un marché aussi vaste que la ZLECAf encourage les investissements directs étrangers et les investissements transfrontaliers. Ce marché génère des gains dynamiques grâce à la concurrence entre entreprises africaines. Les entreprises peuvent aussi innover en utilisant de nouvelles variétés d'intrants. L'intégration africaine peut inciter des pôles de croissances régionaux susceptibles de créer des externalités pour les pays moins développés. Une telle intégration peut entraîner une diversification industrielle et faciliter une transformation structurelle.

La théorie de Viner constitue une rupture avec les théories qui soutenaient que les accords commerciaux engendraient toujours des gains. Dans ce sens, Sara LABRAR et Safaa TABIT (2019) révèlent que certains auteurs ont donné une meilleure explication aux effets de la mise en oeuvre d'un ACR. Ils citent alors Robinson et Thierfelder (2002) qui affirment que les accords commerciaux préférentiels entrainent une création de commerce toujours plus grande que le détournement de commerce. Krugman (1991) soutient ce fait en estimant que la formation d'un

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accord préférentiel entre des partenaires naturels réduit le risque d'un détournement du commerce. En effet, si les parties sont proches avec des économies de grandes tailles et similaires il y aura une création du commerce au regard du faible coût de transport.

Krishna (2003) soutient toutefois, à travers un modèle d'équilibre général, que les effets de la proximité géographique et du volume d'échange n'améliorent pas le bien-être si ces deux potentialités ne sont pas suivies d'une suppression des coûts liés au commerce. Les avantages attendus des partenaires naturels sont annulés par des partenaires éloignés ayant des coûts de production faibles. À cet effet, Bhagwati et Panagariya (1996) soutiennent que la conclusion d'un accord commercial avec un partenaire éloigné est plus bénéfique qu'avec un pays similaire proche.

Les parties à un ACR sont généralement motivées par l'amélioration du bien-être de la société qu'engendrerait l'augmentation des flux commerciaux. Dans ce sens, Schiff et Winters (2003) affirment qu'un bloc commercial bien conçu peut améliorer l'efficacité et le bien-être des pays membres par l'accroissement de la concurrence entre les producteurs et l'élargissement des choix des consommateurs. Ce résultat est dû à l'augmentation de l'offre à un coût faible au regard de la réduction des mesures tarifaires et non tarifaires. Il est à souligner toutefois que l'augmentation des flux commerciaux n'entraine pas obligatoirement une amélioration du bien-être.

Il ressort de cette analyse que les accords commerciaux peuvent engendrer des gains ainsi que des pertes pour les parties prenantes. Ces effets seront positifs si les parties signataires réduisent ou suppriment les obstacles aux échanges commerciaux qui existent à l'entrée et sur leurs marchés respectifs. Il ressort aussi que plus les pays sont proches plus leurs échanges s'avèrent importants.

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"La première panacée d'une nation mal gouvernée est l'inflation monétaire, la seconde, c'est la guerre. Tous deux apportent une prospérité temporaire, tous deux apportent une ruine permanente. Mais tous deux sont le refuge des opportunistes politiques et économiques"   Hemingway