Après 80 ans de colonisation léopoldienne et
belge avec ses corollaires notamment l'implantation des populations Banyarwanda
(hutu et tutsi) dans l'Est venues en plusieurs vagues, les choses vont
s'accélérer ; en janvier 1959, la coïncidence entre le
retour d'un match de football et le meeting de l'ABAKO interdit se tourna
à l'émeute, on dénombra plusieurs morts et blessés.
La communauté internationale se tourne vers le Congo et fait pression
avec les USA en tête. La Belgique panique et voilà que le 20
janvier 1960 il s'ouvrira à Bruxelles une table ronde. Et
l'indépendance sera fixée pour le 30 juin 1960.
La RD Congo recouvre l'indépendance avec Joseph
KASA-VUBU comme Président de la République et Patrice Emery
LUMUMBA comme Premier Ministre. Mais seulement au lendemain de cette
indépendance le Congo enregistrera déjà des moments des
tensions extrêmes avec la mutinerie de l'armée, des
sécessions Katangaise (avec TSHOMBE) et Kasaïenne (avec KALONJI)
vers juillet 1960. De ces tensions naîtra aussi une grave crise
institutionnelle entre LUMUMBA alors 1er Ministre et KASA VUBU
Président de la République se révoquant mutuellement. Le
Colonel Joseph Désiré MOBUTU en profitera pour neutraliser les
deux hommes et établir le Gouvernement des commissaires
généraux où on retrouvait les jeunes cadres
universitaires64. Le 1er Ministre LUMUMBA sera
assigné à résidence surveillée. Mais lorsqu'il
tentait de s'en fuir vers Kisangani où il avait des partisans tel
qu'Antoine GIZENGA, il sera rattrapé et arrêté par les
hommes de MOBUTU. Après avoir subi une détention pénible
et ayant circulé dans des prisons de Kinshasa, Bas Congo, ... il sera
assassiné dans le Katanga de TSHOMBE le 17 janvier 1961 avec la
complicité de la communauté
65 LEONARD, C., Congo. L'autre
histoire. De LEOPOLD II, fer de lance de l'anti esclavagisme, à
l'esclavagisme des multinationales, Ed. Masoin, Bruxelles, 2014,
pp.1-133.
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internationale, la Belgique en tête, car LUMUMBA
était considéré comme un communiste proche de l'URSS dans
un monde en pleine Guerre Froide.
Joseph KASA-VUBU réhabilité dans ses fonctions,
les sécessions prendront fin mais les partisans de LUMUMBA ne baisseront
pas les bras et se constitueront en mouvement armé pour lutter contre le
pouvoir avec par exemple MULELE (1963) dans le Kwilu, L.D. KABILA dans le Kivu
(1961-1997), etc.
Le conflit congolais s'internationalisa avec la participation
directe ou indirecte de l'ONU, des USA, de la Chine, de la Belgique, de
l'URSS...Et c'est dans ce contexte de confusion
généralisée que le colonel Joseph Désiré
MOBUTU se décide de prendre le pouvoir en déposant Joseph KASA
VUBU le 24 novembre 1965.
Il réussira à rétablir l'ordre plus ou
moins, en stabilisant les frontières avec un appui massif de la France
et du Maroc particulièrement entre 1977 et 1978 lors de la guerre de
Shaba contre les rebelles dit ex-gendarmes Katangais venus de l'Angola et
s'affirmant comme étant des Lumumbistes.
Déjà en 1971 la R.D.Congo devint le Zaïre,
et il eut monopartisme avec le MPR (Mouvement Populaire de la
Révolution) parti-Etat. C'est le recours à «
l'authenticité » ou encore l'africanisation de tous les noms
d'origine occidentale. Cette politique d'authenticité sera suivie de
celle dite de la « Zaïrianisation » en 1977 de toutes les
unités de production se trouvant entre les mains des expatriés.
Ça sera ainsi jusqu'en 1990 en passant par un culte
démesuré de la personnalité.
La chute du mur de Berlin en 1989 sera sûrement pour
beaucoup dans le changement politique en R.D. Congo alors
Zaïre65. Le 24 avril 1990, discours à N'Sèle, le
fameux « comprenez mon émotion ! » au rendez-vous, MOBUTU
alors maréchal du Zaïre en larme annonce le multipartisme,
l'ère démocratique venait de sonner.
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Mais la crise économique ayant atteint son comble, en
1991 et 1993 il y aura pillage généralisé dans les grandes
villes du pays y compris Kinshasa.
C'est le début de la descente brutale aux enfers. La
conférence nationale dite souveraine ouverte en 1991, fermée avec
« force » par NGUZ autrefois 1er Ministre puis rouverte en
1992 après un 16 février 1992 particulièrement sanguinaire
avec ce qu'on a appelé le massacre des chrétiens qui marchaient
pour réclamer plus de démocratie, ne changera pas grand-chose car
le Maréchal avec l'aide de son entourage continuait à avoir une
main mise sur l'évolution d'un Etat en transition depuis 1990 en
attendant les élections.
Etienne TSHISEKEDI, ancien membre des 1ères
heures du MPR, devenu grand opposant, sera élu à la
Conférence Nationale Souveraine (CNS) Premier Ministre en 1992, il ne
travailla pas suite à ses conflits personnels avec le Maréchal.
Il sera remplacé par Faustin BIRHINDWA qui amena en 1994 une
réforme monétaire en instaurant les nouveaux Zaïres alors
que l'inflation avait rendu inutile les anciens Zaïres avec plus de 200%
d'inflation de 1971 à 1993.
La C.N.S. alors sous la présidence de Mgr Laurent
MONSENGWO PASINYA archevêque de Kisangani fusionnera avec le parlement de
MOBUTU dirigé par Mr ANZULUNI pour former le Haut Conseil de la
République Parlement de Transition (HCR-PT), car la CNS était
considérée comme un vivier de l'opposition et le Parlement du
palais de marbre était plutôt proche du
Maréchal66.
En 1994, Léon KENGO viendra aux affaires, s'affirmera
comme un Premier Ministre de la rigueur. Mais la crise ayant atteint son
paroxysme dans la région des Grands Lacs avec le génocide
rwandais de 1994 ne lui permit pas de réaliser quoi que ça soit.
Le foyer de tensions dans le Kivu entre réfugiés rwandais et les
populations du Kivu s'aggravait à tel point qu'en octobre 1996 une
guerre éclatera au Sud Kivu, prendra de l'ampleur et MOBUTU malade ne
verra rien venir.
66 LEONARD, C., Op.cit., pp.1-133.
67 BRAECKMAN, C., Les nouveaux
prédateurs. Politique des puissances en Afrique centrale, Ed.
Fayard, Paris, 2003, pp. 179-246.
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