2. Une ville en mutation permanente
2.1 Le nouveau visage de Bordeaux : des choix
architecturaux disruptifs
Dans le cadre de son troisième grand projet urbain
devant prendre fin à l'horizon 2030, la ville de Bordeaux voit sortir de
terre un grand nombre de constructions de parts et d'autre de son
étendue. Ce projet ayant vu le jour en 2013 a déjà
donné naissance au réaménagement du quartier des Bassins
à flot. La mise en place de ces grands projets a vocation à
décentrer les événements du centre-ville et de les
étendre à la partie Nord de la ville ainsi qu'à la rive
droite. Le quartier des Bassins à flots est le quartier le plus
représentatif de cette volonté d'ouverture de la ville. En
témoignent ces étendues de terrains inhabités
laissés de trop nombreuses années à l'abandon. Ces
transformations successives de la ville de Bordeaux laissent présager un
anéantissement du patrimoine et de l'héritage bordelais.
Cependant, l'ensemble des projets mis en place par la mairie de Bordeaux visent
en réalité à faire cohabiter ville ancienne et ville
moderne et à annihiler toute dualité entre ses deux
représentations de la ville. Le seul contraste qui doit apparaître
dans nos imaginaires est celui des deux rives séparées par le
fleuve de la Garonne. C'est en cela que Bordeaux figure en tant que ville
moderne, mais une partie de sa modernité tient aussi dans le fait qu'il
s'agit d'une ville qui sait s'adapter à son époque. C'est en
effet une ville intelligente qui place les citoyens et les besoins qui leurs
sont propres au centre de ses préoccupations. C'est une ville consciente
de son patrimoine, de la géographie du territoire sur lequel elle est
implantée, et de l'architecture qui la rend si particulière.
Cette modernité est entièrement assumée par la ville, mais
aussi par ses habitants qui ont cette opportunité d'habiter le
patrimoine. C'est un patrimoine vivant et non pas figé, un patrimoine
qui se situe dans la prolongation de nos trajectoires quotidiennes et non pas
un patrimoine qui les interrompt. « Le patrimoine est habité, il
est partagé, il est gratuit, il n'est pas automatiquement ancien. Le
patrimoine c'est le quartier des Chartrons comme les quais rive gauche, le
jardin botanique, comme le palais de la Bourse, le quartier Saint-Michel comme
le jardin public [...] La modernité de Bordeaux, c'est le tramway, sans
caténaire et sans abri voyageur place de la Bourse, le lion bleu de
Xavier Veilhan place Stalingrad comme le Res Publica de Nicolas Milhé en
faut des silos des Bassins à flot, le souci de préservation de la
halle des Douves comme celui de la salle des fêtes du Grand Parc. La
modernité de Bordeaux est dans ce qu'elle a cessé de n'aimer que
l'architecture du XVIIIe siècle et les échoppes, pour s'ouvrir
à d'autres époques, à d'autres styles, modernité
dans sa capacité de s'étendre sans être
défigurée, parce que l'ADN de la ville est trouvé. L'ADN
de Bordeaux, c'est d'abord un paysage et, au centre de ce paysage, le fleuve.
»11 C'est en ces termes exact qu'Alain Juppé,
défend l'identité de la ville de Bordeaux. Une
11Préface d'Alain Juppé dans «
Bordeaux 2030, du croissant de lune à la pleine Lune. »
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ville où les différences d'époques
confluent à merveille afin d'offrir à ses citoyens le meilleur
confort de vie possible mais aussi pour pérenniser la construction du
patrimoine. En témoigne récemment la construction du Pont
Chaban-Delmas et de la Cité des Civilisations du Vin, remarquables
édifices architecturaux qui prennent tous deux place au sein du quartier
des Bassins à flot. Cette continuité dans laquelle se situent ces
deux totems du renouveau architectural de la ville de Bordeaux c'est celle des
« grands tracés urbains dessinés par les intendants au
XVIIIe siècle ». Ils laissent envisager une poursuite du
développement économique de la ville lui permettant de passer du
simple « croissant de Lune à la pleine Lune ».
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