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Université du Mans
Mémoire de 2ème année de
Master
Mention Gestion des territoires et développement local
Parcours Transition énergétique et développement
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Conflits hommes-faune sauvage en Inde du Sud
:
déterminants spatiaux et
socioculturels
Paul Badaire
Mémoire dirigé par Mr. Andreu-Boussut
Session de Juin
Année universitaire 2017/2018
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REMERCIEMENTS
Je tiens à remercier dans un premier temps mon
directeur de mémoire, Mr. Andreu-Boussut, dont les conseils et les
remarques ont permis d'enrichir ma réflexion et d'améliorer
grandement la qualité de ce travail.
Je souhaite remercier aussi Mme Anitha, du Kerala Forest
Resarch Institute, qui m'a suggéré le sujet des conflits
hommes-animaux et sensibilisé sur les défis associés. En
approfondissant la littérature sur ce sujet, j'ai découvert un
champ d'étude, la coexistence hommes-faune sauvage, et une discipline,
la géographie animale, passionnants.
Je remercie, de plus, Mr Madhusoodhanan, directeur adjoint de
l'Aralam Wildlife Sanctuary et Mr Mir Mohammed, District Collector du district
de Kannur, de m'avoir donné les autorisations nécessaires pour
mener à bien le travail de ce mémoire, qui découle d'une
initiative personnelle, sur le terrain de l'ouest de l'Aralam Wildlife
Sanctuary.
Je remercie également Akhil, qui m'a assisté
lors de l'enquête sur le terrain, à la fois pour la traduction et
pour l'adaptation du questionnaire aux contraintes de la langue et des
habitants.
Je remercie, en outre, les personnes qui ont accepté de
participer à l'enquête et aux entretiens, à la fois pour la
franchise et l'enthousiasme partagés.
Je remercie enfin Mrs. Karanth, Mrs. Emel, Mr. Sudakhar et
Mrs. Talukdar pour leurs conseils et pour avoir gracieusement mis à ma
disposition leurs articles scientifiques.
3
SOMMAIRE
REMERCIEMENTS 2
SOMMAIRE 3
1. INTRODUCTION 4
2. CONTEXTE DE L'ÉTUDE 24
3. MÉTHODOLOGIE 30
4. CARACTÉRISTIQUES SOCIOÉCONOMIQUES DE LA
POPULATION
INTERVIEWÉE 34
5. CARACTÉRISTIQUES DES CONFLITS HOMMES-ANIMAUX EN
PÉRIPHÉRIE DE
L'AWS 40
6. CONFIGURATIONS SPATIALES ET RISQUES DE DÉGRADATIONS
AGRICOLES
..49
7. ATTITUDES DES HABITANTS ET DÉTERMINANTS
SOCIO-CULTURELS 68
8. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS 83
9. CONCLUSION 93
ANNEXES 95
BIBLIOGRAPHIE 105
TABLE DES FIGURES 118
TABLE DES TABLEAUX 118
TABLE DES MATIERES 119
4
1. INTRODUCTION
1.1. Conservation et coexistence conflictuelle entre
hommes et animaux
À l'ère de l'Anthropocène, le processus
de domestication des terres émergées de la planète par les
hommes pour répondre aux besoins provoqués par l'accroissement
démographique et le développement économique semble
irréfrénable, notamment dans les pays tropicaux. L'érosion
de la biodiversité résultante atteint des niveaux
inquiétants (UICN, 2018). Les forêts tropicales sont
particulièrement soumises à d'intenses pressions et sont de plus
en plus fragmentées (Taubert et al., 2018), alors qu'elles sont
sources de bénéfices essentiels aux sociétés
humaines, localement et globalement, et qu'elles forment les habitats naturels
de faune et de flore endémiques d'une richesse exceptionnelle (Brandon,
2014; Gadgil et al., 2011). Leur protection est donc devenue un enjeu
majeur pour l'humanité.
Les Aires Protégées (AP) sont un des outils de
conservation ayant montré une certaine efficacité pour
préserver la biodiversité dans les forêts tropicales
(Beaudrot et al., 2016). Elles représentaient 15 % des terres
émergées et 7 % des océans de la Terre à la fin
2017 (UICN, 2018). En Inde, elles représentent en 2018 : 4,93% du
territoire1 et protègent la majorité de la
biodiversité du pays (Karanth et al., 2008). Les AP sont
définies dans l'article 2 de la Convention sur la Diversité
Biologique, traité international signé au Sommet de la Terre de
Rio en 1992, comme « a geographically defined area which is designated
or regulated and managed to achieve specific conservation objectives
» (United Nations, 1992, p. 6). Une aire protégée
correspond donc à un espace géographiquement
délimité et réglementé dans un but de protection
particulier, comme sauvegarder un écosystème endémique en
danger ou simplement fournir aux faunes locales un espace libre des pressions
anthropiques. Cependant, loin d'être des espaces unidimensionnels
fermés, ces aires se caractérisent plus par la notion d'interface
et sont des lieux de coexistence de nombreux acteurs, humains et non-humains,
dont les actions et interactions impactent l'équilibre de ces aires.
Malgré l'établissement d'une démarcation
administrative entre les aires humaines et animales, les territoires de ces
derniers ne sont pas étanches et ils ont tendance à
s'entrecroiser (Bortolamiol et al., 2017). Les espaces vitaux des
animaux s'inscrivent en effet souvent dans des écosystèmes plus
larges que les délimitations administratives des AP et les restrictions
spatiales imposées aux communautés locales peuvent être en
inadéquation avec leurs besoins
1
http://www.wiienvis.nic.in/Database/Protected_Area_854.aspx
5
(De Fries et al., 2010). Par exemple, certains
animaux peuvent sortir de l'aire protégée lors de migrations, ou
bien les habitants locaux peuvent y rentrer pour récolter certaines
ressources forestières telles que des plantes médicinales. De
même, une AP peut être connectée à plusieurs
territoires humains différents selon les groupes d'acteurs les
composants. Les AP et leurs périphéries sont ainsi des lieux de
vie en commun (Estebanez et al., 2013), des espaces complexes de
rencontres, de relations mais aussi de conflits possible entre les acteurs
locaux, qu'ils soient humains ou animaux.
Dans les faits, l'établissement d'AP s'accompagne
souvent de conséquences négatives pour les habitants en
périphérie, notamment dans les pays tropicaux (DeFries et
al., 2010). Les conflits homme-faune sauvage représentent ainsi
le principal défi des politiques de conservation (Dickman, 2010). Les
animaux sauvages ont en effet tendance à sortir de ces aires et peuvent
provoquer des dégâts agricoles, matériels,
physiques...(Seiler et Robbins, 2016). Les communautés vivant aux
alentours des AP sont de plus souvent déjà vulnérables et
ont peu de moyens pour faire face aux conséquences de ces conflits.
Naughton-Treves et Treves (2005) notent ainsi que les plus
désavantagés sont souvent les plus exposés aux risques de
conflits avec les animaux. Les effets de ces conflits peuvent donc être
dévastateurs sur la vie des habitants. Face à ces impacts, les
humains peuvent répliquer, par exemple en tuant les animaux
problématiques ou en détruisant leurs habitats naturels (Sillero
et al., 2006). Ces conflits entre hommes et animaux sauvages peuvent
ainsi remettre en cause la soutenabilité écologique et sociale de
ces AP et le succès des politiques de conservation.
L'établissement d'AP peut donc mettre en
compétition hommes et animaux sur l'accès et l'utilisation des
ressources environnementales. La restriction spatiale imposée
crée en outre une forme d'inégalité environnementale, que
soit en termes d'accès ou sur d'exposition aux risques, dont les
victimes sont les communautés locales en périphérie des AP
(Sukumar, 1994). Les AP peuvent donc être sources de conflits à la
fois entre hommes et animaux mais également entre hommes. La
conciliation des besoins humains et de la faune sauvage est en
conséquence un enjeu majeur des politiques de conservation de la
biodiversité à la fois pour des raisons d'efficacité (pour
atteindre l'objectif de conservation), mais aussi éthiques (Sillero et
al., 2006). Une gestion durable des AP doit donc viser à
articuler les intérêts globaux et locaux. Elle se doit ainsi de
prendre en compte les besoins et les intérêts des
communautés locales, tout en satisfaisant l'objectif de
préservation de la diversité biologique.
Étant donné la nature ouverte des AP, encourager
la cohabitation entre les hommes et la faune est donc primordiale pour
atteindre les objectifs environnementaux et sociaux. La compréhension
des tenants des conflits hommes-animaux et la recherche de solutions visant
à
6
les limiter et à promouvoir la coexistence est ainsi
une des préoccupation principales de la conservation (Pooley et
al., 2017; Redpath et al., 2015), d'autant plus que les
conflits ont tendance à augmenter globalement avec la croissance
démographique (WWF, 2008).
1.2. Les conflits hommes-animaux sauvages
Pour Johansson (2009), un conflit apparaît quand un
animal ou un homme passe la frontière (symbolique mais qui peut
correspondre à une frontière réelle) entre nature et
culture. Suite à cette transgression, il n'est plus à la place
qu'il lui était attribué. Mauz (2002) parle de « juste place
», dont la conception varie selon les personnes et qui peut
également être déterminée par la loi, comme dans le
cas d'une AP. Le conflit survient quand l'animal transgresse les limites de la
juste place qui lui a été attribuée. La notion de conflit
homme-animal est donc intimement liée à l'espace et peut
évoluer selon les sensibilités individuelles et collectives et
les réglementations.
Les conflits hommes-faune sauvage peuvent prendre deux formes
: quand les besoins et les comportements des animaux ont des effets
néfastes sur les activités humaines ou quand ces dernières
ont des effets néfastes sur les besoins de la faune sauvage (Madden,
2004).
Ces conflits peuvent affecter les hommes et les animaux
directement sur la santé (blessures, décès, transmission
de maladie...) ou sur le mode de vie (dégradations agricoles,
dégradations matérielles, déprédation d'animaux
domestiques, destruction d'habitats naturels...) (Nyhus, 2016). Ils peuvent
également générer des coûts indirects pour les
personnes touchées : coût d'opportunité du gardiennage ou
de transaction lors du temps passé pour déposer une demande de
réclamation, insécurité alimentaire et malnutrition,
affectation psychologique à cause de l'insécurité physique
ressentie, non-scolarisation des enfants pour participer au gardiennage ou
impossibilité d'aller à l'école à cause du danger
posé par certaines espèces animales... (Barua et al.,
2013). Par exemple, outre les dégradations agricoles, la taille et la
puissance de l'éléphant peut créer un fort sentiment
d'insécurité, dont la dimension psychologique renforce le
sentiment de conflit et impacte le bien-être psychosocial.
Globalement, la fréquence et la gravité des
conflits hommes-animaux ont tendance à augmenter avec le temps sous
l'expansion spatiale humaine et la proximité accrue entre les deux
(Hill, 2015; Karanth et al., 2013, WWF, 2008). À titre
d'exemple, en Inde, entre 2005 et 2010, 330 km2 de cultures ont
été détruites et 350 personnes tuées chaque
année à cause des
7
éléphants. En réponse, une cinquantaine
d'éléphants ont été tués par an en moyenne
et de nombreuses forêts détruites (Rangarajan et al.,
2010)
Une multitude de facteurs biologiques, écologiques et
humains a été suggéré dans la littérature
comme expliquant la propension des espèces animales à sortir des
AP : manque de ressources alimentaires et hydriques dans l'AP,
préférences alimentaires, qualité de l'habitat,
intensité des d'activités humaines, types de limites de l'AP...
(Linkie et al., 2007; Nyhus et Tilson, 2004; Parker et Osborn, 2006;
Seiler et Robbins, 2016; Sillero et al., 2006; Sitati et al.,
2003; Sukumar, 1994). Les réactions des populations aux incursions de
ces animaux peuvent, en outre, aggraver les conflits. Une réactions
humaine courante est en effet de chasser et d'exterminer l'animal
problématique (Naughton-Treves et Treves, 2005). Madden (2004) insiste
également sur le fait que les conflits hommes-animaux peuvent devenir
des conflits hommes-hommes à propos des animaux et s'aggraver
considérablement, par exemple quand les populations locales ressentent
que la priorité est donnée aux animaux.
La réduction de ces conflits varie selon les contextes
économiques, culturels, réglementaires... Afin de protéger
la faune, certains gouvernements ont instauré des lois visant à
interdire ou limiter la chasse hors des AP (Sukumar, 1994). Un grand nombre de
méthodes différentes existent pour limiter les visites des
animaux, comme par le contrôle létal ou la relocalisation des
animaux problématiques, les mesures de ségrégation
spatiale, les mesures de prévention comme le gardiennage, l'utilisation
de moyens de dissuasion olfactifs, visuels ou sonores, la plantation de
cultures tampon entre l'AP et les champs, l'aménagement du territoire...
(Nyhus, 2016). Des mesures économiques visant à promouvoir des
sources de revenus alternatives à l'agriculture ou fournissant une
compensation financière aux pertes existent également (Dickman,
2010).
La gestion des conflits hommes-animaux a traditionnellement
été exclusivement confiée aux gestionnaires des AP.
Cependant, de plus en plus, l'importance d'associer les acteurs locaux au
management (Larson et al., 2016; Sillero et al., 2006) et
l'utilité de leurs savoirs, à la fois sur la faune et sur
l'environnement (Goldman, 2007), sont de plus en plus reconnues. Lier la
conservation avec le développement durable en privilégiant le
local est en effet un des courants principal de la conservation depuis les
années 1980, où une cogestion avec les autorités voire une
gestion communautaire sont appelées pour améliorer la gestion de
la conservation, même si cela peine à se matérialiser
concrètement et efficacement (Rodary, 2008). Globalement, la
nécessité de prendre en compte la dimension sociale dans
l'étude des conflits et de leur résolution est de plus en plus
acceptée (Dickman, 2010; Manfredo et Dayer, 2004; Nyhus, 2016; Redpath
et al., 2015).
8
Les phénomène des conflits hommes-animaux et
leur résolution sont cependant complexes et il n'existe pas de solution
« one-size fits all » (Madden, 2004). Ils sont en effet
corollaires des spécificités du système
socio-écologique dans lequel ils s'inscrivent et sont influencés
par les facteurs historiques, sociaux, politiques, culturels, biologiques et
environnementaux locaux (Dickman, 2010; Pozo et al., 2017). Pour
comprendre ces conflits et les mitiger, il s'agit donc de prendre en compte
à la fois les dimensions humaines et animales, ainsi que leur contexte
socio-spatial (Bortolamiol et al., 2017; K K. Karanth et al., 2012; Marchand,
2013; Sitati et al., 2005).
1.3. Dimension environnementale des conflits
hommes-animaux sauvages
Les conflits entre des communautés humaines et des
animaux sauvages s'inscrivant donc dans les caractéristiques
sociétales et environnementales du système
socio-écologique les englobant, Guerbois, Chapanda, et Fritz (2012)
estiment que l'implantation de solutions efficaces pour faciliter la
cohabitation est subordonnée à la compréhension de la
spécificité du contexte local et des processus endogènes
à l'oeuvre. Poinsot (2012) soutient en effet que la gestion de la faune
sauvage implique la prise en compte de la diversité du milieu
géographique. Outre le contexte sociétal, il estime que trois
variables en interrelations et aux caractéristiques à la fois
naturelles et sociales conditionnent l'intensité des conflits : les
densités humaines et animales, les formes (contours et taille de l'aire
protégée, couverture des sols...) et l'accessibilité
(mesures d'aménagement humaines, topographie...). Les espèces
animales concernées dans les conflits hommes-animaux sont, de plus, en
grande majorité mobiles, et dotés d'une capacité à
s'adapter aux contraintes du milieu. L'étude de leurs écologies
dans le contexte de leurs territoires et leurs spatialisations sont donc
également nécessaires pour appréhender correctement les
tenants de ces conflits (Sitati et al., 2005).
Une variété de facteurs peut donc
accroître (ou décroître) les risques de conflits. Ces
facteurs s'inscrivent dans un territoire, un lieu et un espace aux
caractéristiques particulières, et sont intimement liés
à ces dernières. L'analyse des configurations spatiales à
l'origine de ces conflits permet donc d'intégrer différents types
de données (éthologiques, agro-écologiques,
sociodémographiques, géographiques...) afin de mieux
interpréter ces conflits et leurs causes. L'intérêt d'une
telle étude est double : identifier les zones de
vulnérabilité pour optimiser l'utilisation des moyens de
réduction des conflits et déterminer les solutions les plus
adaptées selon les situations.
9
1.3.1. Dimension animale : des comportements et des
préférences évolutives
Dans le cadre de leurs stratégies alimentaires, les
animaux effectuent des choix qui visent à optimiser ces
stratégies (Graham et al., 2010; Sitati et al., 2005;
Sukumar, 1994). Les décisions prises découlent d'un arbitrage
entre bénéfices possibles et risques perçus (Guerbois et
al., 2012). Ce mémoire autour de l'AP d'Aralam dans
l'État du Kerala au sud de l'Inde, se concentrera sur les
dégradations agricoles par les espèces animales herbivores.
L'accès à l'intérieur de l'aire protégée
d'Aralam étant interdit, les conflits ont en effet pour principale cause
la transgression de ses limites par la faune et sont en très grande
majorité l'oeuvre d'herbivores qui viennent ponctuellement dans à
la recherche de moyens de subsistance (Rajan, Madhusoodhanan, communications
personnelles).
Plusieurs raisons ont été avancées pour
expliquer ce qui attire les herbivores hors de leurs habitats naturels. En
Inde, l'insuffisance de nourriture ou de sources d'eau à
l'intérieur des AP est souvent proposée dans la
littérature, par exemple à cause de la réduction de
l'habitat naturel (Everard et al., 2017) ou de la propagation
d'espèces végétales invasives non comestibles telle que le
lantanier qui diminuent les sources de nourriture (Pant et al., 1999).
L'expansion spatiale des activités humaines impacte ainsi l'habitat
naturel de la faune sauvage et sa qualité. Cette constriction spatiale
de l'habitat de la faune sauvage peut limiter fortement la disponibilité
des ressources nécessaires pour la faune. DeFries, Karanth et Pareeth
(2010) indiquent par exemple que les ressources hydriques dans une AP peuvent
diminuer drastiquement si les sources sont situées hors de l'aire et ne
font pas l'objet d'une gestion durable.
Les herbivores peuvent également être
attirés par la valeur nutritive supérieure des cultures agricoles
par rapport à celle des plantes sauvages, ainsi que par leur groupement
spatial qui permet une quête de nourriture plus efficace (Sukumar, 1990).
De même, certains types de récoltes semblent plus appétents
selon les espèces animales, comme le bambou pour
l'éléphant asiatique ou la canne à sucre pour le sanglier
(Baskaran, 2013; Naughton-Treves, 1997). La proximité à des
activités humaines peut donc provoquer des changements de comportements
et d'habitudes alimentaires chez certains animaux.
Chaque espèce a également un type d'habitat qui
lui est plus propice. Par exemple, le cervidé sambar (Rusa
Unicolor) préfère les forêts denses et les terrains
accidentés, mais a besoin d'espaces de végétation
intermédiaire pour se nourrir (Pant et al. 1999) alors que
l'éléphant asiatique préfère les espaces de
végétation herbacée ouverts (Baskaran et al., 2013).
10
D'une manière générale, les forêts
secondaires sont très prisées pour leur diversité
végétale (Sillero et al., 2006).
Les comportements individuels des animaux influencent aussi
leurs stratégies alimentaires. Srinivasaiah et al. (2012)
montrent ainsi que les éléphants mâles solitaires sont plus
susceptibles de ravager les cultures humaines que les éléphants
appartenant à un troupeau. Ces cultures présentant plus de
risques pour les animaux (à cause de la proximité humaine) mais
une qualité et une quantité de nourriture supérieure, ils
estiment ainsi que éléphants mâles solitaires sont plus
audacieux et ont une aversion inférieure au risque par rapport aux
éléphants vivant en groupe, fondant ainsi leurs stratégies
alimentaires sur le mode « high risk/high gain ».
Gubbi (2012) et Shivaraju (2016), dans des études au
sud de l'Inde, montrent de plus l'influence du facteur temporel sur les
comportements des animaux. Ils notent que la saison sèche (Mars-Avril)
coïncide avec un accroissement des conflits à cause d'une moindre
disponibilité en eau et ressources alimentaires. La période de
récolte post-mousson en Novembre-Janvier de nombreuses cultures semble
également être associée avec une recrudescence des raids
sur les cultures agricoles.
1.3.2. Activités humaines et dynamiques
paysagères
L'utilisation des sols et le choix des cultures
plantées sont donc des facteurs déterminants de conflits selon
les préférences alimentaires des animaux. L'agriculture de
subsistance, courante dans les pays en développement, se fonde souvent
sur des cultures hautement nutritionnelles et donc attractives pour les animaux
sauvages (Naughton-Treves, 1997). L'irrigation des cultures peut de plus
être un facteur d'attraction de la faune sauvage (Sukumar, 1989), bien
que Gubbi (2012) dans une étude extensive au centre du Kerala ne trouve
pas de relation entre conflits et irrigation. Outre les cultures agricoles, la
plupart des foyers du Kerala entretiennent également des potagers et des
vergers domestiques, ce qui renforce les risques de dégradations
animales. Les monocultures d'arbres, comme les plantations
d'hévéa très présentes au Kerala, sont en revanche
peu visitées par la faune sauvage à cause de la faible
diversité végétale (Baskaran et al. 2013).
L'identification des types de récoltes
particulièrement prisées par la faune et leur substitution avec
d'autres moins appétentes, voire non comestibles, permettraient de
limiter les raids de ces animaux (Parker et Osborn, 2006). Ceci est bien
entendu conditionné à la présence de ressources
alimentaires suffisantes à l'intérieur des aires
protégées, ainsi qu'à la volonté et
possibilité pour les habitants de modifier leurs pratiques de
production. L'adaptabilité de la
11
faune aux conditions de son environnement rend cependant
difficile une généralisation de ces préférences et
requiert des études spécifiques à chaque environnement.
Bal et al. (2011) ont ainsi récemment découvert que les
éléphants asiatiques à Kodagu (dans le sud de l'Inde) se
nourrissaient de baies de café. Ces dégradations agricoles
peuvent également simplement résulter de comportements
opportunistes, notamment lors des migrations qui les amènent d'une aire
protégée à une autre (Sukumar, 1990), ce qui peut fausser
les analyses statistiques des relations entre types de cultures et
dégradations agricoles.
Les conflits hommes-éléphants procèdent
ainsi principalement d'une utilisation des sols inadéquate (Sitati et
al., 2003). L'éléphant requiert en effet une zone vitale
très large pour accommoder ses besoins en termes de migrations, et la
fragmentation de son habitat naturel le met naturellement en contact avec les
sociétés humaines, où il a tendance à compenser en
venant s'y nourrir (Sukumar, 1994).
Le type de couverture de sol influence également les
raids d'herbivores sauvages. Nyhus et Tilson (2004) notent ainsi que la
présence d'une végétation dense peut servir de protection
à la faune sauvage pour effectuer des incursions rapides. Les
plantations servent par exemple de refuge lors de raids dans les cultures en
Inde (Bal et al. 2011). De même, Paleeri, Jayson, et Govind
(2016) indiquent que l'absence d'espace dégagé entre la
lisière de la forêt et les cultures renforce
considérablement les problèmes dus aux écureuils
géants indiens et aux singes. En effet, ces espaces
dégagés augmentent fortement le risque ressenti, notamment pour
les petits mammifères essentiellement arboricoles.
En revanche, la proximité de signes de présence
humaine, que ce soit des habitations ou des routes, a tendance à
s'accompagner d'une baisse des pillages agricoles, en augmentant les risques
perçus par la faune sauvage (Pozo et al., 2017). Guerbois et
al. (2012) trouvent ainsi que la densité d'habitation en
Ouganda tend à réduire les risques de conflits, en
considérant une zone d'influence circulaire de 100 m de rayon autour de
chaque foyer. Cependant, dans un contexte de forêt fragmentée au
Kerala, Ananda Kumar et al. (2011) concluent que les habitations et
les routes ne sont pas des facteurs déterminants de conflits. La
densité d'habitations, ainsi que le type de couverture des sols
environnant semblent donc influencer le risque de conflits.
L'utilisation de mesures de prévention vise
également à renforcer les risques perçus par les animaux.
Les mesures de ségrégation spatiale telles que les clôtures
électriques ou les tranchées sont efficaces mais
requièrent une maintenance importante (Gubbi 2012; Karanth et
al. 2012). Dans une étude très complète en Inde,
Karanth et al. (2013) estiment que l'utilisation d'animaux de garde et
de barrières tend à réduire légèrement les
pertes agricoles. Sinu et
12
Nagarajan (2015) ajoutent que la méthode traditionnelle
de clôtures de tissus demeure la plus efficace contre les sangliers.
L'utilisation de mesures traditionnelles de gardiennage humain est
estimée efficace par certains (Guerbois et al., 2012; Karanth
et al., 2012), mais beaucoup moins par d'autres (Kumar et
al., 2017; Linkie et al., 2007). Les caractéristiques
territoriales et temporelles peuvent avoir un impact sur l'efficacité de
ces mesures. Par exemple, Linkie et al. (2007) indiquent qu'en
période de pluie le gardiennage est beaucoup moins effectif.
Globalement, le contexte local influence l'efficacité des mesures de
réduction des conflits. D'une manière générale,
l'intelligence des animaux et leur capacité à apprendre de leurs
expériences rend, de plus, souvent inefficace sur le long terme, la
plupart de ces mesures (Dickman, 2010; Lenin et Sukumar, 2008).
Enfin, beaucoup d'études analysent certaines
caractéristiques environnementales liées à
l'accessibilité comme l'altitude, la pente, l'orientation de la pente,
la distance à l'AP, la distance à la source d'eau la plus
proche... La proximité à l'AP est en grande partie jugée
être un facteur déterminant des risques de pillages de cultures
(Goswami et al., 2015; Gubbi, 2012; Guerbois et al., 2012;
Karanth et al., 2012).
Chacune de ces dimensions joue donc, à divers
degrés selon les spécificités du terrain et des acteurs
engagés, sur la possibilité de subir une incursion animale. La
compréhension de leur relation dans l'espace offre l'opportunité
de révéler les configurations spatiales à l'origine des
conflits (Ananda Kumar et al., 2011).
Si l'analyse des configurations spatiales favorisant les
conflits hommes-faune sauvage est importante pour identifier des solutions
appropriées, ce seul point de vue environnemental et écologique
n'est pas suffisant. En effet, la dimension humaine de la cohabitation entre
hommes et animaux aux alentours d'espaces protégés joue un
rôle essentiel dans la gestion des espèces animales sauvages
(Treves et al., 2006). Le contexte socioculturel et socio-spatial est
donc à prendre en compte pour résoudre ces conflits (Bortolamiol
et al., 2017; Marchand, 2013; Redpath et al., 2015).
1.4. Dimension humaine des conflits hommes-animaux
sauvages
L'importance de l'aspect social pour comprendre les conflits
hommes-animaux est effectivement de plus en plus reconnue (Nyhus, 2016). La
collaboration de toutes les parties prenantes est de plus
considérée primordiale pour réduire ces conflits et
améliorer les politiques
13
de conservation (Larson et al., 2016; Treves et
al., 2006). Selon Dickman (2010), les facteurs sociaux peuvent avoir
une part plus significative dans ces conflits que les dommages directement
causés par les animaux.
En effet, la manière dont les hommes perçoivent
leur environnement (dont les animaux font partie) modèle leurs niveaux
de tolérance et leurs attitudes envers la faune (Lassiter, 2002). Mauz
(2002) indique que la conception de la juste place des animaux par les hommes
est liée aux représentations personnelles et collectives qu'ils
en ont. Cette représentation définit donc la démarcation
entre les aires humaines et animales, même au-delà de la place
légalement démarquée comme pour les PA, et par extension
détermine le conflit et ses conditions d'apparition. Les attitudes des
habitants locaux et des différents groupes d'acteurs envers les animaux
et les institutions de conservation influent de plus leur niveau de
coopération aux actions de conservation, la participation aux mesures de
prévention des conflits et les réactions aux situations de
conflits (Carter et al., 2014; Manfredo et Dayer, 2004). La
compréhension du contexte socio-culturel local aide aussi à
cibler les actions d'information et de sensibilisation pour désamorcer
les conflits (Marchand, 2013).
Afin de comprendre les conflits hommes-animaux, de cibler les
mesures de réduction des conflits efficaces et d'encourager la
coopération avec les acteurs locaux, il semble donc essentiel de mettre
au jour les représentations que les acteurs locaux ont des animaux et
leurs attitudes envers les politiques de conservation, ainsi que les facteurs
les déterminants.
1.4.1. Des représentations subjectives et
complexes
Selon Wolch, Emel et Wilbert (2003), la manière dont on
perçoit les animaux, et par extension les politiques de conservation, se
construisent à la fois à l'aide de facteurs personnels
(expériences vécues, préférences
particulières), locaux (sociaux, culturels, institutionnels) et globaux
(mouvements économiques et politiques).
D'après Pooley et al. (2017), la prise en
compte de cette complexité des facteurs influençant les
représentations est d'autant plus nécessaire que les
professionnels de la conservation ont tendance à les négliger.
Dickman (2010) estime ainsi que nombre de ces derniers se basent sur des
hypothèses comportementales reposant seulement sur les
expériences vécues et les faits scientifiques, et qui
s'avèrent souvent erronées. La perception des risques par les
habitants locaux et leurs réactions aux conflits sont ainsi souvent
disproportionnées. Les dommages réels occasionnés par la
faune peuvent, de plus, être inférieurs aux dommages perçus
par les victimes (Webber et Hill, 2014), notamment lorsque ces conflits
s'ajoutent à des tensions
14
déjà existantes avec les autorités.
Dickman argumente que des critères de rationalité seuls ne sont
pas suffisants pour expliquer la sensibilité personnelle à une
situation de conflit avec un animal, mais qu'il faut aussi prendre en compte le
contexte socioculturel local. Les gens ont en effet tendance à valoriser
leur ressenti alors que les scientifiques privilégient les faits
(Sillero et al., 2006). Johnston (2008) estime également que
les perceptions et l'esthétisme jouent plus que les faits scientifiques
dans la conception des représentations.
1.4.2. Un contexte socioculturel à prendre en
compte
Des travaux de géographie animale (Johansson, 2009;
Lassiter, 2002; Wolch et al., 2003), ainsi que les contributions
d'autres sciences sociales (ethnographie, psychologie...), ont montré
que les valeurs et les représentations associées aux animaux sont
intimement liées au contexte socioculturel (Pooley et al.,
2017), qui est lié à l'espace et au lieu.
L'exposition à un risque de conflit avec un animal
sauvage influence également les représentations et les attitudes
et peut varier selon l'âge, le sexe, l'ethnicité, la richesse, la
classe sociale, la profession... (Karanth et al., 2008). Ceci est
lié au concept de vulnérabilité. Naughton-Treves et Treves
(2005) définissent ce concept à travers deux notions :
vulnérabilité biophysique (risques plus importants dus à
la situation spatiale) et vulnérabilité sociale (capacité
à faire face aux dommages). Par exemple, Naughton-Treves (1997) analyse
l'influence de l'ethnicité, du sexe et de la richesse sur les
perceptions de risques de conflits avec la faune sauvage en Ouganda. Elle
observe que les perceptions des habitants sont déterminées en
grande partie par leur ethnicité. Ogra (2008) montre qu'en Inde, les
femmes ne vivent pas de la même manière que les hommes la
proximité avec la faune sauvage. Elle note qu'elles ont plus de chance
d'être en contact avec les animaux, qu'elles supportent des coûts
associés à cette proximité plus élevés et
que leurs perceptions de la faune sauvage est plus négative.
Ces facteurs sociaux ont également un impact sur la
valeur que chacun accorde à la faune sauvage (Hill, 2015). Pour Manfredo
et Dayer (2004), ces valeurs sont déterminées par les croyances
intérieures et le rapport à la nature et définissent le
comportement humain et ses réponses face à une situation de
conflit avec un animal. Ces valeurs peuvent prendre des formes variées :
matérialiste où l'animal est vu à travers son
utilité (coûts ou bénéfices), mutualiste où
il est considéré plutôt comme un être vivant ayant
des droits (Teel et al., 2007). Ils ajoutent que l'évolution de
ces valeurs est souvent liée à celui de la société
et du développement économique. Carter et al. (2014),
dans une étude sur les attitudes envers le tigre au Népal,
montrent ainsi que les valeurs accordées au tigre sont liées
à la place occupée dans la hiérarchie sociale.
15
Sillero, Sukumar et Treves (2006) mettent en garde cependant
contre une liaison systématique du niveau d'éducation et de
développement économique et la tolérance de la faune
sauvage. Ils ajoutent que la réalité est plus complexe et qu'avec
l'évolution actuelle de la société, la valeur
donnée aux animaux peut diminuer. Ainsi, pour certaines
communautés hindoues démunies, les singes sont
considérés comme l'émanation du dieu Hanuman et ils ne
seront pas perçus négativement, malgré les nuisances
occasionnées (Sukumar, 1994). Le contexte culturel et les croyances ont
donc également un impact.
1.4.3. Un contexte socio-spatial et des jeux d'acteurs
déterminants
Cependant, si le territoire des animaux sauvages est plus ou
moins continu d'un point de vue écologique, il peut rencontrer plusieurs
sous espaces aux dynamiques sociales et préoccupations
différentes (Bortolamiol et al., 2017). Les conflits
hommes-animaux peuvent en effet révéler des conflits
humains-humains sous-jacents, dont la non-résolution limitera
l'efficacité de toute tentative de réduction des conflits avec
les animaux (Hill, 2015). Redpath, Bhatia et Young (2015) argumentent donc que
toute étude sur les conflits hommes-animaux doit d'abord s'attacher
à identifier les différents groupes d'acteurs et les
intérêts qui déterminent leurs actions et interactions. La
prise en compte des dynamiques territoriales et du contexte socio-spatial est
donc capitale (Marchand 2013).
Les aires animales se caractérisent en effet plus par
la continuité que par la séparation avec les
sociétés humaines. Les rencontres hommes-animaux et les acteurs
engagés se multiplient sous la pression démographique qui peut
aller jusqu'à réduire l'habitat de nombreuses espèces aux
seules aires protégées. La complexité du partage de
l'espace qui s'ensuit peut expliquer en partie les conflits hommes-faune
sauvage (Bortolamiol et al., 2017). En effet, les espaces
protégés sont connectés avec plusieurs territoires aux
contextes sociaux, économiques, culturels, institutionnels...
variés et mettant en relation plusieurs groupes d'acteurs ayant des
logiques et des intérêts qui peuvent être antagonistes, et
ayant des capacités d'actions très inégales.
La représentation de la faune peut ainsi varier
fortement selon les catégories d'acteurs concernées: nuisance
pour les agriculteurs et les populations vulnérables en bordure des
aires protégées, produit touristique pour les classes moyennes
urbaines et les professionnels du tourisme, patrimoine de la
biodiversité à protéger pour les autorités
forestières, représentation religieuse pour certains...
(Lassiter, 2002). Chaque groupe d'acteurs a sa propre conception de
16
la juste place de l'animal déterminée par sa
représentation associée (Mauz, 2002). La place de l'animal est
donc en constante négociation à travers les jeux des acteurs
concernés et leurs intérêts. En conséquence de
cause, les perceptions des animaux sont aussi politiques (Kamau, 2017).
Les comportements envers les animaux et les politiques de
conservation s'inscrivent en effet souvent dans un cadre social plus large
où la perception d'inégalités et de différentiels
de pouvoir génèrent des attitudes négatives (Dickman,
2010). Dans le cas des aires protégées, où les actions
humaines sont restreintes au profit de la conservation de la faune par les
institutions, les conflits hommes-animaux se retrouvent souvent être
utilisés comme proxys par les habitants des alentours au conflit les
opposant aux autorités (Emel et Urbanik, 2010).
Ces dissensions ont de plus tendance à s'exacerber dans
les pays en développement, où les habitants autour de ces aires
sont souvent déjà vulnérables socialement et
dépendent des ressources naturelles et forestières pour leurs
besoins (Karanth et al. 2013). Les perceptions des animaux et les
attitudes face à la conservation peuvent être influencées
par le sentiment que le droit à subvenir à ses besoins n'est pas
respecté ou pour l'accès aux ressources naturelles (Sillero et
al., 2006). Les populations locales peuvent ainsi avoir le sentiment
que les animaux sont protégés par les autorités à
leur détriment, et percevoir ces animaux comme appartenant à ces
derniers.
Les problèmes de confiance et d'antagonisme entre les
parties prenantes locales peuvent de plus aggraver ces dissensions (Dickman,
2010). Ceci est d'autant plus important que certains acteurs peuvent chercher
à instrumentaliser les espèces animales et viser à
modifier les représentations afin de servir leurs propres objectifs
(Emel et Urbanik, 2010).
Certaines approches de political ecology (Barua,
2014; Kamau, 2017) en mobilisant l'histoire socio-écologique du lieu,
ont d'ailleurs permis de mieux comprendre les différents processus et
phénomènes ayant impacté les différents acteurs et
leurs stratégies. Ils ont ainsi pu expliquer l'évolution et la
différenciation des représentations et attitudes des
différents groupes d'acteurs envers les animaux et la conservation.
Un nombre important d'études tend de plus à
omettre l'agentivité des animaux et leurs capacités à
être des acteurs à part entière (Campbell, 2009). Ceci
questionne pourtant l'étude des relations hommes-animaux par le seul
biais des perceptions et représentations (Estebanez et al.,
2013). L'animal possède un libre arbitre et des stratégies qui
lui sont propres, qui l'amènent à dépasser les limites qui
lui sont imposées et les perceptions à son égard (Wolch
et
17
al., 2003). Il est capable de s'adapter selon les
contraintes qui lui sont imposées ou les changements paysagers, ce qui
peut apporter un décalage entre la juste place donnée par l'homme
et sa place réelle (Mauz, 2002). Cette intelligence lui permet
d'ailleurs de trouver des solutions face à un obstacle, de choisir sa
place et force les humains à modifier leur modes de cohabitation avec
les animaux (Luquiau, 2013). La subjectivité et le point de vue des
animaux, qui est un des champs majeur de la géographie animale
contemporaine, est cependant un domaine encore largement inconnu (Emel et
Urbanik, 2010).
Les facteurs sociaux tendent ainsi à impacter à
la fois les représentations de la faune et les attitudes envers les
actions de conservation, à travers, entre autre, les
vulnérabilités biophysiques et sociales, les différences
de valeurs et de croyances, ainsi que les jeux d'acteurs et pouvoirs
antagonistes. Ces facteurs trouvent leur source dans le contexte socio-spatial
et les dynamiques territoriales du lieu, et ses caractéristiques
culturelles, démographiques, politiques... L'étude du volet
humain des conflits hommes-animaux se doit également donc d'être
spécifique à chaque situation.
1.5. La géographie et l'étude des
relations hommes-animaux sauvages
Bien que les enjeux des conflits hommes-faune sauvage ne
soient pas récents, les travaux scientifiques sur les conflits et la
coexistence hommes-animaux ne se sont réellement multipliés sur
la question que depuis une vingtaine d'années (Nyhus, 2016). Alors que
l'étude des relations homme-faune relève de problématiques
socio-écologiques et demande par essence une approche
pluridisciplinaire, ce sont traditionnellement les sciences naturelles qui se
sont attachées à étudier ces conflits (Carter et
al., 2014). Cependant, ces approches ont tendance à omettre
l'importance de l'aspect humain de ces conflits. En conséquence, les
sciences sociales sont de plus en plus appelées à participer
à ces recherches (Dickman, 2010). Nyhus (2016) propose ainsi le
développement d'une nouvelle discipline l'anthrothérologie, qui
réunirait les chercheurs de différents horizons pour traiter la
coexistence et les conflits hommes-faune sauvage. D'une manière
générale, les processus endogènes sous-tendant les
relations entre les hommes et la faune et leur cohabitation sont encore
très peu compris (Guerbois et al., 2012).
La géographie ne s'est cependant encore que peu
attachée à étudier ce domaine (Marchand, 2013),
malgré le fait que la notion d'espace et le concept de territoire soient
centraux à ces conflits. Comme Emel et Urbanik (2010, p. 203)
l'indiquent : « The contribution
18
of geographers are unique precisely because of their
emphasis on the historical and spatial contexts of specifics lives and
relationships: in effect space, place, landscapes are instrumental to
furthering the goals of Human-Animal studies », la géographie
peut offrir un angle d'analyse particulièrement fructueux sur la
question des relations entre hommes et animaux en étudiant la question
à travers le prisme spatial. En effet, les relations entre les
activités humaines, la faune sauvage et les paysages sont liés
aux particularités du territoire dans lequel ils s'inscrivent
(Bortolamiol et al., 2013; Wilson et al., 2015). Étant
donné la mobilité et l'agentivité des animaux (Poinsot,
2012 ; Estebanez et al., 2013), il est, en outre, indispensable
d'intégrer à la fois les perspectives humaines et animales et de
spatialiser le milieu de vie de ces derniers afin de mieux saisir les processus
sous-tendant leurs rencontres. Comprendre les interactions existantes entre les
hommes, les animaux et l'espace qu'ils occupent conjointement est donc
essentiel pour appréhender ces conflits et leurs tenants.
La géographie animale connaît un renouveau depuis
20 ans, notamment en France avec un numéro d'Espaces et
Sociétés consacré à ce courant en 2002 ainsi qu'un
numéro de Carnets de Géographes en 2013. Les significations de la
vie sauvage pour les humains ont fait l'objet de nombreux travaux de la part de
la géographie animale culturelle (Marchand, 2013). Cette dernière
se focalise autour de deux grands thèmes : l'impact socioculturel des
animaux dans la construction de l'espace et de la culture humaine, et
l'évolution spatio-temporelle de la ligne de démarcation entre
les hommes et les animaux (Johansson, 2009; Wolch et al., 2003). Par
exemple, les travaux des géographes comme Mauz (2002) visent à
déterminer la place de l'animal selon les humains, afin de
définir la notion de conflit. Selon Blanc et Cohen (2002) et Lorimer et
Srinivasan (2013), la géographie animale cherche à comprendre le
monde du point de vue de l'animal et à déterminer les dynamiques
sous-tendant la mobilité des animaux. La géographie humanimale
d'Estebanez et al. (2013) met plus l'accent sur l'étude des
relations entre hommes et animaux et la manière dans ces derniers
transforment les sociétés humaines. En intégrant une
dimension sociale et l'agentivité des animaux, la géographie
animale permet donc d'aller plus loin que le seul point de vue
écologique dans la compréhension de l'animal et de sa
mobilité quand il entre en interaction avec les sociétés
humaines.
De même, la question des conflits environnementaux et
l'intégration de la dimension politique et des rapports de pouvoir sont
des parties intégrantes du champ disciplinaire de la géographie
(Chartier et Rodary, 2007; Marchand, 2013).
Selon Caloz et Collet (2011, p. 3), l'analyse spatiale
correspond à « décomposer un phénomène de
l'espace en ses éléments essentiels afin d'en saisir les rapports
et de donner un
19
modèle de l'ensemble ». Dans le cadre des
conflits hommes-animaux, elle permet donc d'étudier les diverses
variables géographiques influençant l'occurrence de
déprédations agricoles et déterminer les règles
reliant ces variables explicatives au phénomène à
expliquer. L'analyse spatiale, qu'elle soit par le biais des statistiques ou de
Systèmes d'Informations Géographiques (SIG), autorise la
combinaison d'échelles différentes et de données provenant
de différentes disciplines et peut ainsi offrir une connaissance plus
approfondie des facteurs favorisant les incursions animales.
D'une manière générale, la
géographie permet d'intégrer la dimension pluridisciplinaire des
conflits hommes-animaux en les étudiant à travers le prisme
spatial et du territoire (Bortolamiol et al., 2017; Marchand, 2013).
Les concepts, les outils et les méthodes de la géographie peuvent
ainsi aider tant au niveau de la compréhension des causes de ces
conflits que de la mise en place de solutions (Sitati et al., 2005),
d'autant plus que l'aménagement du territoire est souvent
considéré comme une des causes principales (Nyhus, 2016).
En intégrant à la fois les dimensions sociales
et environnementales du cadre territorial local, la géographie peut donc
aider à la mieux comprendre les conflits entre les
sociétés humaines et la faune sauvage en périphérie
d'AP, ainsi que les processus à l'oeuvre les déterminants. Elle
peut ainsi participer à révéler les configurations
spatiales à l'origine de ces conflits et la complexité de la
dimension sociale des conflits hommes-animaux.
1.6. Les conflits hommes-animaux en
périphérie de l'Aralam Wildlife Sanctuary
Bien que les études sur les conflits hommes-animaux
sauvages dans les pays en développement, et leurs corrélats
socio-écologiques, se multiplient, il existe néanmoins un fort
biais sur l'Afrique et les éléphants (Graham et al.,
2010; Guerbois et al., 2012; Hoare, 1999; Kamau, 2017; Sitati et
al., 2005). Les dégradations agricoles par les animaux sauvages
en Asie sont relativement peu étudiées (Karanth et Kudalkar,
2017; Linkie et al., 2007), alors que les densités de
populations plus élevées augmentent les risques.
En Inde, malgré une densité démographique
imposante et des conflits hommes-animaux associés importants, la
tolérance envers de nombreuses espèces est élevée
grâce au contexte religieux et culturel, et les représailles
létales sont rares (Karanth et al., 2013). Cependant, les
populations habitants en proximité des AP subissent des dommages
majeurs, que ce soit directement par les prédations d'animaux
domestiques ou les dégâts agricoles et indirectement sur le
bien-être et la sécurité alimentaire (Barua et
al., 2013). Étant pour beaucoup dépendants
20
des ressources forestières, la restriction de
l'accès à ces AP peut de plus renforcer les
vulnérabilités des habitants et par conséquent
accroître les conflits avec les autorités forestières
(Lenin et Sukumar, 2008). Officiellement, la politique de conservation indienne
vise à intégrer les parties prenantes locales, mais la mise en
oeuvre pratique demeure très inégale (Ogra, 2008).
L'Aralam Wildlife Sanctuary (AWS) est une petite aire
protégée de catégorie 4 de l'Union Internationale pour la
Conservation de la Nature (UICN) de 55 km2 située au sud de
l'Inde. Les lisières de l'AWS se confondent globalement avec la
démarcation entre forêts et sociétés humaines (sauf
pour les frontières contigües à d'autres AP et pour un
tronçon de 1,5 km à l'ouest). L'accès y étant
interdit pour les habitants, et cette interdiction globalement
respectée, la grande majorité des conflits hommes-faune sauvage
se déroule dans les aires humaines. Ils concernent principalement les
herbivores : majoritairement macaques, sangliers, éléphants et
sambars (grands cervidés). Les dommages causés sont en grande
partie agricoles, bien que les confrontations physiques soient en augmentation
(3 personnes sont mortes en 2017 à cause d'éléphants). Les
dommages matériels sont minimes, ainsi que les cas de prédation
d'animaux domestiques (5 en moyenne par an sur les 5 dernières
années). La chasse et toutes mesures pouvant menacer
l'intégrité physique des animaux sauvages sont prohibées
par le gouvernement. Dans la pratique, il n'y a que peu de cas de braconnage,
à la fois pour des raisons culturelles et pratiques
(dénonciations courantes). En Inde, les animaux sont souvent
associés au religieux et la tolérance est relativement
élevée par rapport à d'autres régions du monde
(Karanth et al., 2008; Sukumar, 1994).
Les conflits sont donc principalement le fait d'herbivores.
Les sources d'eau sont nombreuses dans l'AWS, mais cette dernière
étant exclusivement une forêt dense, l'absence de prairie
amène les herbivores à chercher des espaces ouverts de
pâturages disponibles à l'extérieur. Les limites de l'AWS
ne correspondent donc pas à la zone vitale des animaux sauvages
l'habitant. Ces conflits apparaissent ainsi essentiellement quand les
herbivores sont à la recherche de nourriture hors de l'AWS.
L'ouest de l'AWS, dont j'habite à une douzaine de
kilomètres, correspond à l'endroit le plus conflictuel de l'aire
protégée et du district de Kannur selon Mr. Rajan, responsable de
la division forestière de Kannur. Cette partie est, de plus,
habitée par des populations particulièrement vulnérables
et ayant peu de moyens pour faire face à ces conflits. Cet espace est
une ancienne ferme gouvernementale de 5000 hectares. En 2004, la moitié
a été conservée comme ferme gouvernementale, l'Aralam
Farm. La seconde moitié, la zone du Programme de Réhabilitation
des Adivasi (PRA), a été réservée dans le
cadre d'un programme de distribution
21
de terres aux peuples autochtones à tradition
forestière ; ces derniers ayant perdu progressivement leurs territoires
à cause de la réduction de la surface forestière et de
l'implantation d'aires protégées. Chaque famille a reçu
4000 m2 de terre pour cultiver et construire une maison. Alors que
la culture de ces parcelles était supposée fournir un moyen
d'autonomisation financière et alimentaire pour ces familles, les
incursions animales en limitent la possibilité d'atteindre cet
objectif.
La gouvernance de l'AWS et des conflits hommes-animaux est
exclusivement aux mains des gestionnaires de l'AWS. Dans la lignée des
directives du gouvernement indien visant à plus intégrer les
communautés locales dans la gestion des AP, trois Comités
d'Écodéveloppement (EDC) ont été mis en place. Ces
EDC n'ont cependant qu'un petit rôle à jouer dans la gestion de
l'AWS. Ils servent simplement de relais entre les gestionnaires et les
habitants pour mettre en place plusieurs programmes d'aides, comme la
distribution de cuisinières au gaz ou l'offre d'emplois à la
journée. Les gestionnaires ont néanmoins développé
le programme d'écotourisme du parc en s'appuyant principalement sur les
EDC. Le tourisme est cependant principalement limité à des
groupes d'écoliers des environs.
La démarcation entre l'AP d'Aralam et les espaces
utilisés par les humains est abrupte. Il n'y a pas de zone tampon. Ceci
renforce les incidences de conflits. La vulnérabilité des
habitants en périphérie rend la situation particulièrement
problématique, et accroît la précarité des
résidents. Cependant, aucune étude n'a été
effectuée sur ce terrain spécifique sur les conflits
hommes-animaux.
En outre, la dimension spatiale est souvent
étudiée de manière peu rigoureuse dans les études
sur les conflits hommes-faune en Inde (Karanth et al., 2012). La
complexité de la dimension humaine des conflits influe, de plus, sur la
capacité des acteurs locaux à partager leurs espaces avec les
espèces animales sauvages et est souvent mésestimée. En
Inde, le lien entre le contexte socio-spatial, et notamment les biais du sexe
et des relations intracommunautaires, et les attitudes envers les actions de
conservation sont encore peu étudiés (Ogra, 2009). Plusieurs
études se concentrent sur les perceptions des méthodes de
compensation gouvernementales (Karanth et al., 2012; Rohini et
al., 2017). Les autres études sur les attitudes envers la
conservation (Carter et al., 2014; Mir et al., 2015; Ogra,
2009) ont plus été effectuées dans la région
himalayenne, aux caractéristiques socio-culturelles très
différentes.
Étant donné l'importance des
caractéristiques spécifiques du système
socio-écologique étudié pour l'étude des conflits
hommes-faune sauvage, l'étude de la dimension sociale et de la
22
dimension spatiale est nécessaire pour mieux comprendre
les conflits hommes-faune sauvage sur ce terrain et proposer des solutions
adaptées selon les situations.
Ce mémoire cherchera donc à mieux comprendre les
conflits hommes-animaux sauvages à l'ouest de l'AP d'Aralam et leurs
déterminants spatiaux et sociaux, afin de proposer des pistes de
solutions pour promouvoir la cohabitation entre les hommes et la faune.
1.7. Objectifs du mémoire et
hypothèses
Les principaux objectifs de cette étude sont :
? Déterminer les facteurs spatiaux et environnementaux
favorisant le risque de dégradations agricoles selon chaque
espèce animale
? Déterminer les facteurs socio-culturels impactant les
représentations des habitants envers les animaux sauvages et la
conservation ainsi que leurs attitudes envers la résolution des
conflits
? Proposer des pistes de solutions pour réduire la
fréquence et les impacts des dégradations agricoles animales,
ainsi que pour faciliter la cohabitation hommes-faune et la préservation
de la biodiversité animale
Cette étude s'attachera donc dans un premier temps
à déterminer les configurations spatiales influant le risque de
dégradations agricoles par les sangliers, éléphants,
macaques et sambars. Les hypothèses suivantes seront testées :
1) Certaines récoltes sont particulièrement
attractives et augmentent les risques de conflits.
2) Les mesures de prévention utilisées par les
habitants ne sont pas efficaces.
3) Les conflits diminuent selon la distance à l'Aralam
Wildlife Sanctuary.
4) Les signes de présence humaine (routes,
bâtiments) réduisent les risques de conflits.
5) Selon le type de couverture des sols environnants, les
risques de conflits augmentent : couvert forestier dense pour les primates et
les sangliers, espaces de végétation intermédiaire pour
les éléphants et les sambars.
Dans un deuxième temps, la dimension sociale sera
étudiée pour mieux appréhender la vision des habitants et
des gestionnaires. Les rapports des habitants vis-à-vis des animaux
23
sauvages, de la conservation et des solutions à mettre
en place seront examinés. Plusieurs hypothèses de filtres
socio-culturels pouvant influencer ces représentations et attitudes
seront analysées. Les hypothèses pourront varier selon le type
d'attitude étudié. Par exemple, une personne âgée
peut avoir une représentation positive de la faune sauvage mais une
attitude négative envers la mise en place d'une action collective car
elle ne se sent pas assez dynamique pour s'y impliquer.
1) Le sexe. Par exemple, l'hypothèse sera faite que
les femmes supportent moins la conservation que les hommes.
2) L'âge. Par exemple, l'hypothèse que les
personnes plus âgées sont moins favorables à une initiative
de gestion collective des conflits sera testée.
3) Les expériences passées de coexistence avec
les animaux sauvages. Par exemple, il sera supposé que les personnes
ayant une expérience plus forte de la cohabitation seront plus
favorables à une gestion collective des conflits.
4) La source principale de revenus (agriculture, travail
journalier agricole, travail journalier non-agricole). Par exemple,
l'hypothèse que les agriculteurs sont plus enclins à soutenir une
amélioration du système de compensation sera émise.
5) Les bénéfices obtenus des autorités
de conservation et de l'Aralam Farm (emplois, activités
d'écodéveloppement...). Par exemple, l'hypothèse que les
personnes recevant des bénéfices de l'AWS soient plus satisfaites
de la gestion de la faune par l'AWS sera testée.
Dans un premier temps, le contexte dans lequel cette
étude a été effectuée et la méthodologie
mise en oeuvre seront détaillés. Les caractéristiques
socio-économiques des personnes interviewées seront
également examinées. Ensuite, la nature et le type de conflits
hommes-animaux sur ce terrain seront abordés en prenant en compte le
point de vue des habitants et des gestionnaires de l'AWS. Puis les dimensions
spatiales et sociales de ces conflits seront analysées. Enfin, les
résultats obtenus seront discutés pour des pistes
d'amélioration de la coexistence entre les communautés locales et
la faune sauvage.
24
2. CONTEXTE DE L'ÉTUDE
2.1. L'Aralam Wildlife Sanctuary (AWS)
L'Aralam Wildlife Sanctuary (AWS) est une aire
protégée se situant au nord de l'État du Kerala, au sud de
l'Inde, entre les latitudes nord 11°54' et 11°59 et les longitudes
est 75°47 et 75°57. Créée en 1984 par le gouvernement
indien, elle s'étend sur une superficie de 55 km2 et est
contigüe au nord et à l'est aux AP de Kottiyoor Wildlife Sanctuary
et de Brahmagiri Wildlife Sanctuary, ainsi qu'à la forêt
protégée de Hill Dale. Elle fait partie d'un réseau d'AP
s'étendant sur toute la longueur de la chaîne montagneuse des
Western Ghats, considérée comme une des 8 zones de
biodiversité les plus critiques dans le monde (Myers et al.,
2000). L'AWS forme, de plus, un lien vital entre la partie nord des Western
Ghats, plus sèche, et la partie sud, plus humide.
L'accès à l'intérieur des limites de
l'AWS est strictement interdit depuis son instauration, bien que des
communautés y vivaient auparavant. Les dernières personnes y
habitant en ont été expulsées en 2004. L'AWS a
été séparé en trois parties pour en assurer une
gestion optimale : la zone coeur, considérée comme la zone
critique d'habitat naturel et représentant 88% de l'AWS, une zone tampon
de 10% et une zone de tourisme et d'éducation de 2%.
Le climat est de type tropical à mousson, avec des
précipitations annuelles s'élevant entre 2846mm et 4630mm sur les
10 dernières années et une saison sèche s'étendant
de janvier à mai. L'ensemble des cours d'eau le traversant trouvent
leurs sources soit dans l'enceinte de l'aire ou dans les AP adjacentes.
D'après le directeur-adjoint de l'AWS, Mr Madhusoodhanan, ceci, en
ajoutant la construction de 14 mares et 5 barrages, permet d'assurer
globalement un approvisionnement en eau suffisant pour la faune tout au long de
l'année, sauf les années de sécheresse exceptionnelle.
L'AWS est doté d'une biodiversité très
riche, dont au moins 150 espèces végétales
endémiques dans les Western Ghats. Un tiers de sa superficie est
recouverte par des forêts tropicales à feuilles persistantes et
60% par des forêts tropicales à feuilles caduques. Le reste est
occupé par d'anciennes plantations de teck, dont les gestionnaires
s'efforcent de remettre à l'état naturel. L'aire d'Aralam est
donc exclusivement sous un couvert forestier dense. Les plus proches espaces
ouverts se trouvent dans l'aire adjacente de Kottiyoor Wildlife Sanctuary,
qui
a été notifiée comme AP il y a 5 ans en
partie car elle offre des espaces herbacés essentiels aux
éléphants des environs.
Parmi les vertébrés 16 espèces
d'amphibiens, 53 de reptiles, 233 d'oiseaux, 40 de poissons et 48
espèces de mammifères ont été observées dans
l'AWS (dont 3 endémiques aux Western Ghats). Trois espèces
animales, les tigres, éléphants et macaques à queue de
lion font partie de la liste UICN des espèces animales en danger et six
sont vulnérables (langur du nilgiri, gaur, sambar, chital, martre de
l'Inde du sud, ours lippu).
Dans l'État du Kerala, la densité
démographique est très élevée (860 personnes au
km2 en 20112) alors que 29% de sa superficie correspond
à des forêts protégées3. Bien que la
surface sous couvert forestier ayant une canopée de densité
supérieure à 10% soit de 52%, les forêts
protégées rassemblent peu ou prou l'ensemble des forêts
intactes du Kerala, le reste correspondant à des plantations en
monoculture ou des espaces d'agroforesterie densément peuplés.
Dans ces conditions, les habitats naturels pour la plupart des
mammifères sont réduits aux seuls espaces protégés.
Dans le cas d'Aralam, le sud est bordé par une large rivière,
avec essentiellement des habitations et des plantations de cocotiers et
d'hévéas au-delà. Cet espace n'est que peu visité
par les animaux sauvages du fait de la rivière. Le nord et l'est sont
contigus à d'autres AP. L'ouest concentre ainsi la plupart des conflits
hommes-faune.
25
2
http://spb.kerala.gov.in/EconomicReview2016/web/chapter01_01.php
3
http://www.forest.kerala.gov.in/index.php/forest/forest-area
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels2.png)
Aires protégées de la
région
26
Source : Aralam Wildlife Sanctuary (23/04/18)
Figure 1: Aires protégées de la
région
27
2.2. La zone du Programme de Réhabilitation des
Adivasi (PRA)
Cette étude se concentrera donc sur l'ouest d'Aralam,
où cette étude a été conduite, correspond à
une surface de 30 km2 de forêt entourée de
rivières, qui a été entièrement coupée au
début des années 1970 pour mettre en place une ferme
gouvernementale nationale. En 2004, cette ferme a été
donnée au Programme de Réhabilitation des Adivasi (PRA)
qui l'a séparée en deux portions : la moitié a
été gardée comme ferme, l'Aralam Farm, et l'autre
moitié, adjacente à l'AWS, pour réhabiliter les
Adivasi (et qui sera appelée dans la suite de ce mémoire
zone du PRA). Le PRA a été instauré dans le cadre
d'initiatives visant à compenser les Adivasi, qui sont les
peuples autochtones de l'Asie du Sud pour la perte de leurs territoires
ancestraux.
Ces populations suivaient pour beaucoup un mode de vie «
traditionnel », en partie nomade, centré sur la forêt et ses
ressources. L'expansion spatiale humaine au Kerala, et les restrictions
imposées par la mise en place des AP, ont fortement remis en cause leur
mode de vie car ils n'étaient pas propriétaires des espaces
forestiers où ils habitaient. Le déplacement de ces populations
hors de leurs territoires traditionnels et les difficultés à
maintenir leur mode de vie ont ainsi généré une forte
instabilité dans ces communautés et les ont rendu
particulièrement vulnérables. Ils s'intègrent, en outre,
difficilement au modèle économique actuellement en vigueur,
à la fois à cause de leur situation socioéconomique, mais
également de par leur système culturel.
Le PRA est ainsi un programme visant à distribuer des
terres (4000 m2 par famille dans le cas d'Aralam) aux Adivasi
sans-terre du district afin de leur offrir les possibilités de
pourvoir à leurs besoins de manière autonome à travers
l'agriculture. L'objectif est donc d'offrir à ces personnes une forme de
compensation pour la perte de leur mode de vie. Quatre groupes ethniques s'y
côtoient, les Kurichians, les Mavilans, les Karimpalans et les
Paniyans.
La zone de la PRA était avant principalement une
plantation d'anacardiers (dont le fruit est la noix de cajou), de cocotier et
d'hévéas, qui a été divisé en 3375 parcelles
de 4000 m2, dont seulement 1653 sont occupées à ce
jour (ce qui représente environ 4500 habitants). En effet, de nombreuses
personnes refusent d'y vivre à cause de la venue des animaux sauvages
provenant de l'AWS bien que beaucoup utilisent cependant leur parcelle à
des fins productives sans l'habiter. La plupart des familles ont gardé
les arbres déjà plantés comme sources de revenus et ont
planté d'autres arbres fruitiers, ainsi que des tubercules à des
fins d'autoconsommation. Une agriculture plus intensive et capable de pourvoir
aux besoins familiaux reste cependant une gageure à cause des incursions
animales. Les habitants de la zone
28
du PRA ont donc besoin de compléter leurs moyens de
subsistance, essentiellement à travers des emplois journaliers
d'agriculture ou de construction. Bien qu'une partie soit employée
à l'Aralam Farm adjacente, le reste dépend d'emplois
extérieurs à la zone du PRA. Étant donné
l'éloignement relatif de la zone du PRA et surtout son étalement
sur 15 km2, le manque d'infrastructures de transport en commun
complique néanmoins les possibilités d'emplois à
l'extérieur de la zone du PRA.
De plus, plusieurs programmes de développement des
infrastructures, de construction de maisons en dur... ont été
initiés ou promis depuis le début du PRA, mais leurs
réalisations demeurent au mieux partielles.
La zone du PRA est donc exclusivement formée de
parcelles de 4000 m2. La propriété de ces parcelles
est de plus indivisible et ne peut pas être cédé à
des personnes extérieures à la famille proche. Ceci a
été instauré pour éviter que ces familles ne les
revendent pour une somme modique et se retrouvent de nouveau sans terres et
sans argent. Bien qu'il puisse exister deux habitations sur une parcelle, ceci
est rare. Il ne peut donc pas y avoir de centre urbain. La population est ainsi
répartie extensivement, principalement autour de deux pôles, au
nord et au sud de la zone du PRA. La partie centrale adjacente à l'AWS
demeure essentiellement sauvage.
L'Aralam Farm, toujours sous contrôle gouvernemental,
est composée de plantations d'anarcadiers, de cocotiers, de cacaoyers,
d'hévéas et d'ananas. Elle emploie environ 60% de ses
travailleurs journaliers parmi les habitants de la zone de PRA (ce qui
représente 583 personnes). Elle s'est engagée dans plusieurs
programmes de soutien, notamment par la distribution d'arbres fruitiers.
Les gestionnaires de l'AWS ont implanté trois
comités d'écodéveloppement. À travers ces
comités, ils ont mis en place un certain nombre d'activités
visant à supporter les habitants de la zone PRA : proposition d'emploi
à la journée selon les besoins, distribution de
cuisinières au gaz, construction de mini-barrages... D'après Mr
Madhusoodhanan, ces activités ont permis d'améliorer la relation
entre les autorités de l'AWS et les habitants. Cependant, il n'existe
pas de projets visant à intégrer les habitants, même
partiellement, dans la gestion du parc ou des conflits avec les animaux. Pour
réduire les conflits sur les 10 kilomètres de bordure, il a
été mis en place, avec un succès limité, 3 kms de
mur en béton, 2 kms de tranchées et 5 kms de bordure
électrique. Les garde-forestiers, aidé d'habitants locaux
embauchés, patrouillent les nuits aux alentours de la bordure pour
effrayer les animaux sauvages et intervenir rapidement en cas de
problème grave, notamment avec les éléphants.
29
Trois groupes d'acteurs principaux sont ainsi présents
sur ce terrain : l'institution de conservation de l'AWS, l'institution
gouvernementale de l'Aralam Farm (qui emploie un grand nombre d'habitants de la
zone du PRA) et les habitants de la zone du PRA. Le PRA n'est plus un acteur
très actif sur le terrain, il est seulement en charge de veiller
à la bonne distribution des parcelles.
La zone du PRA est donc une immense zone agroforestière
ouverte habitée, dont une partie est retournée à
l'état sauvage. Alors que le PRA était un programme de justice
(partielle) environnementale visant à fournir aux populations
vulnérables un moyen d'autonomisation, les habitants de la zone du PRA
restent dans un état de précarité certain à cause
du manque d'infrastructures, de la difficulté à changer de mode
de vie et des problèmes avec les animaux sauvages, qui limite les
possibilités d'agriculture,
L'Aralam Wildlife Sanctuary
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels3.png)
Figure 2 : L'Aralam Wildlife Sanctuary Source :
Map Data @2018 Google (27/05/18)
30
3. MÉTHODOLOGIE
Ce mémoire se fonde sur une approche
pluridisciplinaire, intégrant à la fois des notions de
sociologie, d'écologie et de géographie animale, et utilisant des
méthodes qualitatives et quantitatives.
3.1. Entretiens non-structurés
Une série d'entretiens non-structurés avec
plusieurs parties prenantes locales a été menée afin de
mieux appréhender le sujet dans le contexte de ce terrain et d'obtenir
le point de vue des gestionnaires de l'AWS. J'ai ainsi rencontré Mr
Madhusoodhanan, le directeur adjoint de l'AWS (qui est en charge des
opérations courantes), en Janvier pour un entretien préliminaire,
afin de cadrer le sujet, puis en Février pour un entretien plus
approfondi. J'ai ensuite rencontré Mr Rajan, le responsable de la
division forestière du district de Kannur en Février, ainsi que
le responsable du PRA d'Aralam, Mr Sreekumar, et deux travailleurs sociaux
impliqués dans le PRA, Mrs Jobi et Mrs Rohina. Plusieurs entretiens ont
été effectués avec des gardes forestiers de l'AWS, Mr
Biju, Mr Rahul, Mr Jos, entre les mois de Février et d'Avril. Je me suis
également entretenu avec le directeur de l'Aralam Farm, Mr Venugopalan,
en Mars.
3.2. Enquête sociale à l'aide d'un
questionnaire
Une enquête sociale a été menée en
personne auprès des foyers domestiques de la zone du PRA entre le 24
avril et le 8 mai, avec l'aide d'un traducteur (ma maitrise de la langue locale
étant imparfaite). Cette enquête a été
réalisée à partir d'un questionnaire administré
oralement. Il a fallu dans un premier temps former le traducteur aux exigences
de l'enquête sociale qualitative, ainsi qu'effectuer un travail
d'ajustement des questions aux particularités et au vocabulaire de la
langue locale, le Malayalam, pour qu'elles soient clairement exprimées.
L'enquête sociale a été menée de telle
manière à offrir aux interviewés un espace d'expression
allant au-delà de la simple réponse aux questions. Ceci a permis
d'une part d'instaurer une forme de confiance et d'autre part de mieux
comprendre la situation.
Un foyer est défini comme une ou un ensemble
d'habitations où réside une famille. Une personne par foyer a
été interviewée, la personne privilégiée
étant celle ayant le plus de chances d'être confrontée
à un animal sauvage. Bien que de nombreuses parcelles soient
utilisées mais
31
non habitées, la restriction de cette étude aux
seules parcelles habitées découle de deux raisons : le fait d'y
habiter offre des informations beaucoup plus complètes (notamment sur
l'aspect temporel) et, le terrain étant difficile d'accès et le
type d'agriculture pratiqué ne requérant pas forcément de
travail journalier, les personnes non-résidentes ne viennent pas tous
les jours.
Un échantillon aléatoire simple
(Salès-Wuillemin, 2006) de 109 foyers a été
sélectionné parmi les 432 foyers se situant à moins de 1
km de la bordure de l'aire protégée. Pour une population
mère de 432 foyers, à un niveau de confiance de 95% et une
probabilité de réalisation positive p inconnue,
l'échantillon doit être en effet d'au moins 109 en
considérant une marge d'erreur de 8%. Cette distance de 1 km a
été choisie sur les conseils de Mr Madhusoodhanan, directeur
adjoint de l'AWS. Il m'a en effet affirmé que la majorité des
conflits avaient lieu à proximité des bordures de l'AWS, et qu'en
prenant en compte la totalité de la zone du PRA, je risquais d'obtenir
beaucoup de témoignages de foyers non-touchés par les conflits du
fait de l'éloignement aux bordures de l'AWS. Sachant que j'étais
limité en termes de temps, je souhaitais limiter la population
mère de mon échantillon pour conserver une marge d'erreur
raisonnable. Cette distance de 1 km a donc été choisie à
la fois pour permettre d'avoir un échantillon dont les données
obtenues seraient significatives de la population étudiée, ainsi
que pour limiter le biais de la distance dans l'étude des configurations
spatiales favorisant les conflits hommes-animaux sur ce terrain.
Le questionnaire comporte des questions ouvertes et
fermées. Une préenquête sur 10 foyers a été
effectuée. Cette préenquête a permis d'adapter le contenu
du questionnaire aux disponibilités des personnes. L'enquête a
été menée fin Avril-début Mai quand les habitants
sont occupés par la récolte des noix de cajou et les
préparations d'avant-mousson (ex. collecte de bois). Par
conséquent, les habitants n'ayant pas forcément le temps de
répondre à un long questionnaire, ce dernier a été
raccourci, notamment dans la partie des représentations et attitudes,
pour qu'un entretien ne dure pas plus de 30 minutes. D'autre part, il a fallu
l'adapter aux contraintes de la traduction sur le terrain. En effet, certains
concepts se sont avérés finalement plus difficiles à faire
comprendre en Malayalam qu'escompté. Ce langage est, de plus,
subdivisé en une multitude de dialectes locaux, compliquant la
traduction de certaines questions.
Les résultats ont ensuite été
codés sous forme numérique sur Excel. Les réponses des
questions ouvertes ont été traitées dans un premier temps
par regroupement par types thématiques.
32
3.3. Analyse statistique
Les logiciels Excel et R ont été
utilisés. Le choix des tests statistiques pour valider les
hypothèses dépend des types de variables. Les tableaux de
contingence seront initialement étudiés et analysés,
exceptés dans les cas de variables continues où le nuage de
points sera examinées. Les écarts entre les effectifs
théoriques et observés seront particulièrement
observés. Dans un deuxième temps, la significativité de la
relation entre deux variables sera étudié à l'aide du test
du khi2, de la corrélation de Spearman et de la
corrélation de Pearson selon les types de combinaison de variables. Des
regroupements de classes seront effectués si nécessaire et si
pertinent. Le risque d'erreur alpha de rejet de l'hypothèse nulle a
été fixé à 5%.
3.4. Analyse spatiale
Les logiciels QGIS 3.0.3 (QGIS Development Team, 2018), SNAP
6.0 (European Space Agency, 2018) et SPRING 5.5.2 (Camara et al.,
1996) ont été utilisés.
Une image Sentinel-2A du 21/02/2018 de niveau de traitement
1C, sans nuages, ortho rectifiée et ayant une résolution spatiale
de 10 ou 20 mètres pour les bandes sélectionnées (bandes
2, 3, 4, 8, 11 et 12) a été obtenue sur la plateforme Copernicus
de l'European Space Agency4. Un sous-ensemble a
été créé sur SNAP, qui a ensuite été
utilisé pour créer une carte de couverture de sols sur SPRING.
Une carte topographique de Survey of India de 2010 a
été numérisée et exportée vers QGIS pour
digitaliser les routes (« couche des routes ») et les limites de
l'AWS (« couche de l'AWS ») dans le système de
coordonnées WGS 84 zone 43N (EPSG :32463). La couche des routes a
été complétée à de connaissances du terrain.
La carte topographique a gracieusement été mise à
disposition par les gestionnaires de l'AWS.
Une image Bing et une image Google Satellite ont
été importées sur QGIS à l'aide de la
fonctionnalité « XYZ Tile Server » pour digitaliser
les habitations. Afin de digitaliser les foyers situés à moins
d'un kilomètre de l'AWS, la « couche de l'AWS » a d'abord
été reprojetée dans un système de
coordonnées en mètres (EPSG : 24343), puis tamponnée de
1000 mètres à l'aide de l'outil « Buffer ». La
bordure des 1 km a ensuite été extraite à l'aide de
l'outil « Polygons to lines ». Les habitations entre cette
dernière et la bordure de l'AWS ont ensuite
4
https://scihub.copernicus.eu/dhus/odata/v1/Products('1865c921-d011-4547-a5bf-b65317ab8c02')/$value
(04/04/18)
33
été digitalisées. Bien qu'ayant eu peur
que de nombreuses habitations soient omises par cette technique, les
reconnaissances sur le terrain ont montré que seules les maisons les
plus récentes (-de 2 ans) étaient absentes, et ces
dernières sont très minoritaires. La configuration du terrain,
qui est essentiellement une forêt ouverte, a certainement aidé.
Ceci a donc permis d'obtenir la « couche des habitations ». Une
sélection aléatoire sur QGIS a donné la « couche des
foyers interviewés » : les 109 habitations
sélectionnées pour l'enquête sur le terrain.
L'analyse des liens entre les signes de présence
humaines, la couverture des sols et les dégradations agricoles repose
sur l'hypothèse que les animaux viennent directement des forêts
denses pour effectuer des incursions dans la zone du PRA et y retournent
ensuite, comme suggéré par Mr Madhusoodhanan, et plusieurs gardes
forestiers. Les forêts denses qui servent de refuges comprennent ici
l'AWS ainsi qu'une partie du centre de la zone de la PRA adjacente à
l'AWS. Les forêts denses seront assimilées à partir d'ici
à la forêt. À cette fin, une couche comportant les lignes
les plus courtes entre les foyers interviewés et la bordure des
forêts, a été créée sur QGIS en convertissant
d'abord ces bordures en lignes, puis en points, et enfin en utilisant l'outil
« Distance to nearest hub » pour relier les foyers à
la forêt. Les lignes de cette couche ont ensuite été
tamponnées de 50 mètres de chaque côté pour former
la « couche des lignes foyers/forêt » à l'aide de
l'outil « Buffer ».
Guerbois et al. (2012) ont choisi un rayon de 100
mètres dans un environnement assez ouvert et pour des parcelles en
moyenne de 8000 m2. Étant donné les
particularités du terrain, cette distance de 50 mètres qui
traduit la zone d'influence d'un foyer a été choisie car elle
reflète un peu plus que la taille des parcelles et la visibilité
sur ce terrain.
Les procédures spécifiques seront
détaillées dans chaque sous-partie concernée.
34
4. CARACTÉRISTIQUES SOCIOÉCONOMIQUES DE
LA POPULATION INTERVIEWÉE
Sur les 109 foyers sélectionnés de
manière aléatoire, 84 ont pu être interviewés. 25
foyers n'ont pas été interviewés : 18 où les
personnes y habitant étaient absentes, voire définitivement
parties, 7 où les personnes ne souhaitaient pas participer. Un certain
nombre de personnes ont d'ailleurs exprimé dans un premier temps des
réticences à participer à l'enquête, expliquant
qu'ils n'avaient pas été à l'école et qu'ils ne
sauraient pas répondre aux questions. Cependant, en expliquant que
l'étude concernait leur vie quotidienne et la cohabitation avec les
animaux sauvages, la grande majorité a accepté volontiers, voir
avec un grand enthousiasme pour certains.
Au total, la parité hommes-femmes a été
respectée involontairement : 43 hommes (51%) et 41 femmes (49%) ont
été interviewés, alors que je m'attendais à un taux
de femmes supérieur.
La personne la plus jeune avait 14 ans et la plus
âgée 70 ans, pour un âge moyen de 42 ans et un âge
médian de 41 ans. 14,29% ont en dessous de 25 ans et n'ont pas de
famille à charge. 63,1% ont entre 25 et 55 ans. 22,62% ont plus de 55
ans.
Age des interviewés (en % des 84 foyers
interviewés)
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels4.png)
14,29%
22,62%
63,10%
- de 25 ans 25-55 ans + de 55 ans
Figure 3:Age des interviewés
4,36 personnes en moyenne vivent par foyer, avec une
médiane et un mode de 4 personnes. Seuls 3 foyers ne comportaient qu'une
seule personne et le foyer abritant le plus de
35
personnes en comportaient 8. Cette moyenne correspond à
celle du reste de l'État du Kerala, 4,3 (IIPS, 2007), alors que
typiquement les familles les plus pauvres au Kerala, auxquelles appartiennent
une grande majorité des habitants de la zone du PRA, sont plus
nombreuses par foyer. Le fait que nombre d'enfants des 1ères
familles arrivées dans la zone du PRA aient obtenu une parcelle dans la
zone après leurs mariages explique en partie cette différence.
Les résidents interviewés y habitent en moyenne
depuis 9,76 années, avec une médiane et un mode de 10 ans. Parmi
les résidents les plus anciens, beaucoup ne se rappelaient certainement
pas l'année exacte de leur arrivée et ont répondu environ
10 ans. Ceci correspond plus ou moins à la première grande
initiative d'allocation des parcelles dans le cadre du PRA en 2006-2008.
Certaines personnes (dont le maximum est de 20 ans) y habitaient
déjà, illégalement, du temps de la ferme gouvernementale,
où ils y travaillaient. La famille la plus récemment
installée est arrivé en 2017.
La majorité des interviewés (62%) ont
quitté le système éducatif après l'école
primaire, qui correspond à un niveau 5ème en France.
15% se sont arrêtés entre la 5ème et la
terminale, et 4% ont effectué des études supérieures
après et baccalauréat. 19% ne sont jamais allés à
l'école.
Il a également été demandé de
statuer l'activité principale soutenant la vie du foyer. 20% des
familles ont déclaré que l'agriculture était leur
principale source de revenu. 79 % sont des travailleurs journaliers : 47% de
travailleurs agricoles (dont un peu de moins de la moitié travaille
à l'Aralam Farm) et 32% de travailleurs non-agricoles (principalement
dans la construction), la dernière personne étant employée
de banque. Je m'attendais à un pourcentage supérieur de gens
vivant de l'agriculture. La zone du PRA étant en effet une ancienne
plantation dont les arbres n'ont pas été coupés lors du
changement de statut, des opportunités commerciales étaient
déjà présentes. Cependant, de fortes disparités
existent. Les personnes ayant une parcelle d'hévéas n'ont pas
besoin de travailler à côté et sont financièrement
plus aisés. La plupart des familles ayant eu une parcelle d'anarcadiers
ne sont absolument pas en mesure de subvenir à leurs besoins seulement
par l'agriculture et ont besoin d'une source de revenus alternative.
Principales sources de revenus (en % des 84 foyers
interviewés)
1,19%
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels5.png)
32,14%
46,43%
20,24%
Agriculture Emploi journalier agricole Emploi journalier
nonagricole Employes
36
Figure 4 : Principales sources de revenus
Dans un second temps, il a été demandé le
rapport à l'agriculture. L'ensemble des foyers entretient en effet une
forme d'agriculture sur leurs parcelles de terrain : 17 % à des seuls
fins de subsistance, 21 % à des seules fins commerciales, et 62% pour
les deux à la fois.
Les habitants de la zone du PRA sont donc essentiellement dans
une situation de précarité au niveau du travail, et par
conséquent de dépendance aux ressources de leurs terres pour
compléter leurs revenus. La majorité a ajouté qu'ils
souhaiteraient pouvoir cultiver plus leurs parcelles, notamment des
légumes, mais que les incursions journalières des animaux les
décourageaient. Une phrase très couramment entendue lors de la
question sur les espèces végétales cultivées fut
« On a tout planté, mais on ne récolte jamais rien
».
Les cultures pratiquées se trouvent dans le tableau
suivant :
37
Cultures pratiquées (sur 84
foyers)
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels6.png)
Tableau 1: Cultures pratiquées
Aucune famille ne pratique l'élevage en tant
qu'activité principale, mais certaines possèdent quelques animaux
domestiques : 7% ont une vache, 14% ont au moins une chèvre, 15% ont au
moins une poule. Un tiers des foyers ont également au moins un chien,
dont l'utilité demeure dans ses aboiements pour prévenir
l'arrivée d'animaux sauvages.
96% des personnes interviewées ont
déclaré récolter des ressources naturelles dans les
environs : 92 % pour du bois de chauffe, 72% pour de l'eau et 89% pour des
plantes médicinales. Ils marchent en moyenne 7 minutes pour la recherche
de ces ressources. 20% ont indiqué aller occasionnellement dans
l'enceinte de l'AWS, principalement pour aller laver le linge. Beaucoup ont
cependant indiqué qu'ils restent à proximité de la bordure
à cause d'un fort sentiment d'insécurité dans l'AWS.
Le niveau de revenus n'a pas été demandé
pour des raisons de sensibilité.
38
À travers les Comités
d'Écodéveloppement, les gestionnaires de l'AWS ont mis en place
plusieurs programmes d'aides. Il a été demandé s'ils ont
obtenus des bénéfices de la part de ces derniers. Seulement 15%
font partie de ces comités et 15% ont répondu oui (pas
nécessairement les mêmes): 8 personnes reçoivent de temps
en temps du travail, 1 personne a reçu des arbres en pot, 2 de la
nourriture, 2 une cuisinière au gaz.
Bénéfices obtenus de la part des
gestionnaires de l'AWS (nombre de foyers)
80
|
|
|
|
|
71
|
|
70
|
|
|
|
|
|
|
60
|
|
|
|
|
|
|
50
|
|
|
|
|
|
|
40
|
|
|
|
|
|
|
30
|
|
|
|
|
|
|
20
|
|
|
|
|
|
|
|
8
|
|
|
|
|
|
10
|
|
1
|
2
|
2
|
|
|
0
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Emploi
|
Arbres
|
Nourriture
|
Cuisinière au gas Pas de bénéfices
|
|
(temporaire)
|
|
|
|
Figure 5: Bénéfices obtenus de la part des
gestionnaires de l'AWS
Les gestionnaires de l'Aralam Farm ont également mis en
place des programmes au soutien aux habitants de la zone du PRA. 76 % des
habitants interviewés ont obtenu des bénéfices
matériels de la part d'Aralam Farm : 20 personnes y ont un emploi, 42
ont obtenu des arbres en pots, 1 de la nourriture et 1 une cuisinière au
gaz.
Bénéfices obtenus de la part de l'Aralam
Farm (nombre de foyers)
45
|
|
42
|
|
40
|
|
|
|
|
|
35
|
|
|
|
|
|
30
|
|
|
|
|
|
25
|
20
|
|
|
20
|
20
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
15
|
|
|
|
|
|
|
|
10
|
|
|
|
|
|
|
|
5
|
|
|
|
1
|
1
|
|
|
0
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Emploi Arbres Nourriture
|
Cuisinière au gas Pas de bénéfices
|
|
(temporaire)
|
|
39
Figure 6:Bénéfices obtenus de la part de
l'Aralam Farm
Les résidents de la zone du PRA sont donc
installés depuis un certain nombre d'années (10 en moyenne). La
source de revenus principale des habitants repose essentiellement sur des
emplois journaliers précaires. L'agriculture est néanmoins une
source complémentaire importante à la fois de revenus et
nutritionnelle. L'AWS et surtout l'Aralam Farm s'efforcent de plus d'aider les
résidents de la zone du PRA.
40
5. CARACTÉRISTIQUES DES CONFLITS HOMMES-ANIMAUX
EN PÉRIPHÉRIE DE L'AWS
Cette partie s'efforcera d'offrir une meilleure
compréhension des conflits hommes-animaux dans la zone du PRA, à
la fois en prenant en compte le point de vue des personnes touchées, les
habitants de la zone du PRA, et le point de vue des gestionnaires de l'AWS.
5.1. Opinions des habitants de la zone du PRA
Cette sous-partie s'attache à analyser le ressenti que
les habitants de la zone du PRA ont des conflits hommes-animaux et, plus
particulièrement des dégradations agricoles.
5.1.1. Les types de conflits hommes-faune
sauvage
Les 84 foyers interviewés ont tous exprimé vivre
au moins une forme de conflits avec les animaux sauvages.
L'ensemble des foyers subissent des dommages réguliers
sur leurs cultures. Les sangliers sont impliqués dans 79 des 84 cas, les
sambars dans 69 cas, les éléphants dans 49 cas, les macaques dans
15 cas, les calaos (oiseaux nommés « Hornbill » en
anglais) dans 1 cas, les porcs épics dans 2 cas et les écureuils
géants dans 2 cas.
Le 2ème type de conflit le plus
reporté est le sentiment d'insécurité (76,19%). Ce dernier
est causé par 4 animaux : éléphants (pour 59 des 84
foyers), sangliers (6 foyers), tigres (17 foyers) et chiens sauvages (9
foyers).
Seulement 13,10% des foyers ont subi des dommages
matériels (13,10%), à cause d'éléphants (7 foyers),
sangliers (5 foyers) et porc-épic (1 foyer).
Il y a eu des cas de prédation d'animaux domestiques
dans 7,14% des foyers, à cause de tigres (5 foyers) et de python (1
foyer). Ce dernier a mangé 2 chevreaux, alors que les tigres ont
tué 3 chiens et 2 chèvres.
3 foyers (3,57% du total) ont reporté des blessures
physiques non invalidantes : un par un sanglier et deux par des serpents.
Types de conflits reportés (en % des 84
foyers interviewés)
100,00% 90,00% 80,00% 70,00% 60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00%
10,00% 0,00%
|
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76,19%
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13,10%
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3,57%
|
7,14%
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Dommages Matériels
|
Dommages Physiques
|
Prédation d'animaux domestiques
|
Insécurité
|
100,00%
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels7.png)
Dommages agricoles
41
Figure 7:Types de conflits reportés
Il a été également demandé
d'exprimer l'espèce animale étant la plus problématique.
Les sangliers ont été cités dans 78,57% des foyers, alors
que les éléphants et les sambars l'ont été chacun
dans 25% des foyers. Seule une personne a énoncé les macaques.
Les opinions sur les raisons principales poussant les animaux
à sortir de l'AWS sont principalement partagées entre le manque
de nourriture dans l'enceinte de l'AWS et les préférences
alimentaires des animaux (41,67% chacun). Le manque d'eau est beaucoup moins
considéré (14,29%), conformément aux opinions des
gestionnaires de l'AWS. Une personne a répondu que les animaux venaient
pour nuire aux humains et une autre a suggéré que c'était
par peur des prédateurs dans l'AWS.
Seulement 39,29% des foyers ont demandé à se
faire compenser pour les dommages subis, et 72,73% de ces foyers ont obtenu une
compensation financière. Chaque foyer a pourtant le droit de se faire
compenser financièrement par le gouvernement indien pour les
dégâts occasionnés par la faune sauvage une fois par an.
Les habitants se plaignent cependant que les autorités de l'AWS ne
viennent que tardivement vérifier leurs déclarations, quand les
dégâts sont bien moins visibles, ce qui leur permet de d'estimer
à la baisse la gravité des dégâts, voire de les
nier.
60,71% des personnes interviewées ont exprimé
que ces conflits ont un impact important sur leur vie quotidienne, 35,71% un
impact faible et 3,57% ne sont pas dérangés par
42
les animaux sauvages. Ces derniers (3 foyers) possèdent
tous les 3 une plantation d'hévéas, peu sujette aux dommages de
la faune sauvage, dont ils tirent la majorité de leurs revenus.
La source principale de conflits sur ce terrain est les
dégradations agricoles, d'autant plus que l'agriculture sert de
complément de revenus essentiels pour la majorité des foyers.
L'insécurité ressentie est également forte, alors que les
dommages matériels et sur l'intégrité physique des
habitants sont minoritaires. Ce sentiment d'insécurité est de
plus très lié à la venue des éléphants. Le
fait que ces derniers ne soient pas ceux causant le plus de dégâts
matériels semble indiquer que le problème est plus d'ordre
psychologique. Plutôt que les dégâts réels
provoqués, la taille et le potentiel de destruction des
éléphants provoquent certainement ce sentiment. Le sentiment
d'insécurité est de plus causé dans 71% des cas par les
herbivores. Ces derniers sortants de l'AWS essentiellement dans le cadre de
leurs stratégies de recherche de nourriture (Rajan, Madhusoodhanan,
comm. personnelles), le sentiment d'insécurité est donc
lié au problème des dégradations agricoles.
5.1.2. Les dégradations agricoles
L'ensemble des foyers interviewés estime subir
régulièrement des dégradations de leurs cultures par la
faune sauvage. Les espèces animales les plus en cause dans les
dégradations agricoles dans la zone du PRA sont les sangliers (Sus
Scrofa), les sambars (Rusa Unicolor), les éléphants
(Elephas Maximus) et les macaques (Macaca radiata et
Macaca Silenus).
Les dégradations agricoles peuvent être
séparées en deux catégories : les dommages
résultant de la recherche de nourriture sur la plante même (que
l'on appellera par la suite les raids agricoles) et les dommages non
liés directement à la recherche de nourriture, comme le
déracinement d'un arbre par un éléphant (que l'on
appellera par la suite les dommages agricoles collatéraux).
Des raids agricoles ont été reportés par
96,43% des foyers : sangliers (75 des 84 foyers), sambars (67 foyers),
éléphants (44 foyers), macaques (15 foyers), calao (1 cas),
porc-épic (2 foyers) et écureuils géants (2 foyers). Des
dommages agricoles collatéraux ont été signalés par
34,52% des foyers : éléphants (10 foyers), sambars (10 foyers),
sangliers (9 foyers). À titre d'exemple, les sambar utilisent parfois
l'écorce d'un arbre pour soulager une démangeaison,
détruisant au passage les poivriers avec ses rameaux.
43
Contrairement à d'autres études dans un contexte
environnemental similaire, les animaux causant le plus de dégâts
agricoles ne sont donc pas les éléphants, mais plutôt les
sangliers et les sambars (Gubbi, 2012; Karanth et al., 2012).
Espèces animales causant des
dégradations agricoles (en % des 84 foyers
interviewés)
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels8.png)
100,00%
90,00%
94,05%
82,14%
58,33%
17,86%
1,19% 2,38% 2,38%
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
40,00%
30,00%
20,00%
10,00%
0,00%
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels9.png)
Figure 8:Espèces animales causant des
dégradations agricoles
D'après les habitants, les dégradations
agricoles ont lieu principalement la nuit pour les sangliers,
éléphants et sambars (100% des foyers), au coucher du soleil pour
les éléphants et sangliers (33,33%) et dans la journée
pour les éléphants et les singes (25%). De nombreuses personnes
ont mentionné une heure précise de la nuit, 22h. Seulement 15,48%
des foyers ont exprimé une période de l'année
particulièrement corrélée à la venue de la faune
sauvage, la période de début des moussons en Juin-Juillet. Le
reste estime que les dégradations agricoles ont lieu tout au long de
l'année.
63,10% des personnes ont le sentiment que les
dégradations agricoles sont en augmentation par rapport aux
années précédentes, alors que 17,86% estiment qu'elles
sont stables et 19,06% qu'elles sont en diminution.
La fréquence de venue de ces espèces animales
sur les parcelles des habitants de la zone du PRA interviewés varie.
Les sangliers viennent tous les jours chez 91,67% des personnes
interrogées.
Fréquence de venue des sangliers (en % des
84 foyers interviewés)
100,00%
91,67%
90,00% 80,00% 70,00% 60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00% 10,00%
0,00%
|
|
|
|
|
|
|
|
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|
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|
|
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|
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|
4,76% 1,19% 1,19% 1,19%
|
|
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|
|
|
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|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Tous les jours Plus d'une fois Plus d'une fois Plus d'une fois
Jamais
par semaine par mois par an
44
Figure 9: Fréquence de venue des
sangliers
Les sambars viennent également très
fréquemment : tous les jours dans 89,29% des cas.
Fréquence de venue des sambars (en % des
84 foyers interviewés)
100,00%
89,29%
90,00% 80,00% 70,00% 60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00% 10,00%
0,00%
|
|
|
|
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|
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|
5,95% 1,19% 2,38% 1,19%
|
|
|
|
|
|
|
|
Tous les jours Plus d'une fois Plus d'une fois Plus d'une fois
Jamais
par semaine par mois par an
Figure 10: Fréquence de venue des
sambars
45
Les éléphants viennent moins
régulièrement. Ils ne sont en effet observés que sur un
rythme mensuel dans la moitié des foyers.
Fréquence de venue des éléphants
(en % des 84 foyers interviewés)
60,00% 50,00% 40,00% 30,00% 20,00% 10,00%
0,00%
|
|
|
|
|
|
|
51,19%
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
16,67%
|
|
21,43%
|
|
7,14%
|
|
|
|
|
|
|
|
3,57%
|
Tous les jours
|
Plus d'une fois Plus d'une fois Plus d'une fois Jamais
par semaine par mois par an
|
Figure 11: Fréquence de venue des
éléphants
Les macaques sont les moins observés. Ils ne viennent
plus d'une fois par semaine que dans 21,44% des cas. 21,43% des foyers ne les
voient même jamais.
Fréquence de venue des macaques (en % des
84 foyers interviewés)
35,00% 30,00% 25,00% 20,00% 15,00% 10,00% 5,00% 0,00%
|
|
|
|
|
|
29,76%
|
|
|
|
27,38%
|
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|
|
|
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|
14,29%
|
|
|
|
|
|
|
|
|
7,14%
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Tous les jours
|
Plus d'une fois Plus d'une fois Plus d'une fois
par semaine par mois par an
|
21,43%
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels12.png)
Jamais
Figure 12: Fréquence de venue des
macaques
Les habitants ne ressentent donc pas les macaques comme posant
beaucoup de problèmes, comparativement aux trois autres espèces
animales. Leur petite taille fait qu'ils ne sont peut-être pas tout le
temps repérés. De même, ils privilégient les fruits
et la perte de quelque
46
uns de ces fruits peut ne pas être observée. Ils
posent donc peut-être plus de dégâts que reportés,
mais ces dégâts ont un impact beaucoup moins important sur la vie
quotidienne des habitants.
D'après les habitants de la zone du PRA,
l'espèce animale posant le plus de problèmes est donc celle des
sangliers, à cause des dégradations agricoles causées. Les
sambars et les éléphants sont également sources de
destructions de nombreuses cultures. La venue de l'éléphant
crée, en outre, un fort sentiment d'insécurité. La
régularité de la venue des sangliers et des sambars (quasiment
journalière) renforce d'autant plus les problèmes.
5.2. Opinions des gestionnaires de l'AWS
Cette sous-partie se fondera sur les entretiens
non-structurés effectués avec le personnel de l'AWS et le
responsable de la division forestière du district.
La zone du PRA n'étant réellement habitée
que depuis 15 ans (et dont la population est en augmentation
régulière depuis), les conflits hommes-animaux sont une
préoccupation relativement récente et croissante chaque
année. Les autorités de l'AWS avaient d'ailleurs anticipé
le problème que pouvait représenter l'octroi de parcelles
habitables sur la partie adjacente à l'AWS. Ils avaient conseillé
les responsables du PRA de donner plutôt des parcelles
éloignées de la bordure de l'AWS, mais ces derniers sont
restés sourds à leurs remarques. J'ai essayé de comprendre
les raisons sous-jacentes en interrogeant la personne en charge du PRA
d'Aralam, mais cette dernière n'est là que depuis quelques
années et ses prédécesseurs sont à la retraite et
injoignables.
D'une manière plus générale, à
l'échelle du district, Mr Rajan, m'a affirmé que les conflits
hommes-faune sauvage ont véritablement commencé il y a une
quinzaine d'années. Il estime que les habitats naturels des animaux ont
fortement diminué en superficie dans les 30 dernières
années à cause de l'expansion spatiale humaine. Il met notamment
en cause les plantations en monoculture d'hévéas
omniprésentes qui ne sont en aucun cas en mesure de supporter les grands
mammifères. Aujourd'hui, les seuls espaces habités par les grands
mammifères sont les AP et les forêts protégées du
district. Ces dernières correspondent à des espaces où les
activités commerciales et la manipulation de l'environnement sont
interdites, bien que l'accès et la résidence y soient
autorisés. Mr Rajan estime en outre que les changements climatiques sont
en partie la cause de la recrudescence des conflits sur les dernières
années. Il
47
juge en effet que l'augmentation des phénomènes
climatiques extrêmes (sécheresses, inondations) amplifie les
difficultés pour la faune à se nourrir.
Les personnes interviewées ont été
unanimes sur l'origine des conflits hommes-animaux sauvages en
périphérie de l'AWS : le manque d'espaces ouverts dans l'AWS, qui
amène les herbivores à chercher de la nourriture dans la zone du
PRA. Cet espace offre en effet une variété et une qualité
nutritionnelle d'espèces végétales bien supérieures
aux forêts denses de l'AWS, notamment pour les végétations
herbacées prisées par les grands herbivores. De plus, cette zone
étant une ancienne plantation agroforestière en grande partie
conservée, elle se caractérise comme une forêt ouverte,
où les animaux ne ressentent pas l'impression d'être à
découvert, et sont donc plus aventureux. La saison sèche (de
Février à Mai) est estimée correspondre au pic des venues
des animaux sauvages par les professionnels de la conservation, bien que les
habitants de la zone du PRA ne ressentent pas vraiment de variation dans
l'année, si ce n'est une légère augmentation au
début de la saison des moussons en Juin-Juillet.
Les animaux causant le plus de problèmes à
l'échelle du district et de l'AWS sont similaires à ceux
énoncés par les habitants de la zone du PRA : sangliers, sambars,
macaques et éléphants. Cependant, le personnel de l'AWS semble
considérer que les singes causent plus de dégâts que ce qui
est a été reporté lors de l'enquête sociale.
Afin de prévenir les conflits hommes-animaux sauvages
en bordure de l'AWS, les gestionnaires de l'AWS ont essayé un certain
nombre de mesures.
Dans un premier temps, des mesures de séparation
spatiale des espaces de l'AWS et de la PRA ont été
implantés. 5 kilomètres de mur en ciment et en pierre ont
été érigés, mais les éléphants en ont
détruit une partie. 3 kilomètres de tranchées ont
également été creusées et 2 kilomètres de
barrières électriques solaires installées. Bien que la
barrière électrique soit estimée relativement efficace,
les éléphants comprennent vite comment surmonter ces obstacles.
Ils font par exemple tomber des arbres pour effectuer une ouverture ou ils
utilisent leurs paumes très dures pour appuyer sur les barrières
électriques et les faire tomber. De même, ils remblaient les
tranchées à l'aide de terre ou d'arbres pour pouvoir passer. On
m'a ainsi souvent répété que les animaux, surtout les
éléphants, sont plus intelligents que ce que l'on ne croit et
qu'ils sont capables de trouver des solutions à tous types de
problèmes mis en place par les humains. La maintenance étant
très coûteuse, les gestionnaires n'ont pas les moyens de remettre
en état ces barrières physiques à chaque ouverture
faite.
48
J'ai demandé également s'ils utilisaient des
formes de barrières biologiques (« biofencing »),
à partir de haies ou d'arbustes. Mr Madhusoodhanan m'a répondu
que la question des barrières biologiques est plus une sorte de gimmick
utilisé par la presse ou les associations de conservation et que leur
efficacité était infime.
Afin d'offrir des sources de nourriture plus variées et
plus riches, ils s'efforcent de remettre à l'état sauvage une
ancienne plantation de teck à l'intérieur de l'AWS. Ils essaient
également de couper des branches régulièrement et de
conserver des espaces ouverts afin de fournir un espace de
végétation secondaire plus riche. La plantation d'arbres
fruitiers et de bambous pour fournir une source de nourriture plus
régulière aux animaux sauvages a été
pratiquée, mais ces derniers mangent les jeunes arbres ou les
détruisent.
Lorsqu'un éléphant pose plus de problèmes
que les autres, les gestionnaires de l'AWS s'efforcent de le capturer et de le
relocaliser dans d'autres AP plus vastes. Par exemple, en Février, un
mâle qui menait une bande de 4 éléphants à des
incursions particulièrement audacieuses et destructrices a
été capturé et envoyé dans une AP à 150
kilomètres au Sud.
Les gestionnaires de l'AWS m'ont également
indiqué que la provision d'emplois non-agricoles permettrait de
réduire la magnitude des conflits. À cet effet, ils s'efforcent
de développer une activité d'écotourisme à l'AWS,
dont les guides sont des habitants de la zone du PRA. Les revenus obtenus sont
à moitié reversé aux 3 comités
d'écodéveloppement pour financer des fours sans fumées,
des cuisinières au gaz... Cependant, le tourisme demeure très
limité et n'est donc pas en mesure de générer une
véritable source de revenu alternative pour les habitants.
J'ai également demandé s'ils estimaient qu'il
était possible et intéressant d'inclure les habitants dans la
gestion des conflits hommes-faune. Les réponses sont restées
évasives, en affirmant tout le temps que « oui, mais c'est
difficile », et sans donner de véritables réponses.
Globalement, les professionnels de la conservation ont
semblé plutôt désabusés, voir impuissant, sur les
possibilités de prévention des conflits hommes-animaux
sauvages.
Les incursions des animaux sauvages de l'AWS dans la zone du
PRA sont donc sources de conflits, notamment par les dégradations
agricoles et le sentiment d'insécurité ressenti. Ceci est
d'autant plus dommageable que l'agriculture était sensée fournir
aux habitants le moyen de subvenir à leurs besoins. Ces animaux sont
essentiellement des herbivores qui viennent dans le cadre de leurs
stratégies de recherche de nourriture pour profiter des ressources
végétales de la zone du PRA. La gestion de la faune sauvage est
cependant difficile et les solutions mises en place sont peu efficaces.
49
6. CONFIGURATIONS SPATIALES ET RISQUES DE
DÉGRADATIONS AGRICOLES
Cette partie s'attèlera à déterminer les
facteurs spatiaux et environnementaux pouvant influencer les risques de
dégradations agricoles dans le contexte spécifique d'Aralam. Les
résultats obtenus seront ensuite expliqués,
interprétés et comparés avec d'autres études de la
littérature pour chaque sous-partie.
L'ensemble des foyers ayant reporté des
dégradations agricoles, l'influence de ces facteurs sera
étudiée pour chacune des quatre espèces animales, mais ne
fera pas l'objet d'une analyse supplémentaire globale. Les
différentes hypothèses seront testées non pas sur
l'incidence ou non de conflits mais sur la fréquence des venues des
animaux. En effet, certains animaux peuvent venir sur une parcelle mais ne pas
causer de dégâts sur les cultures, par exemple si ces
dernières ne sont pas comestibles. Dans ce cas, le niveau de risque
potentiel de dégradations agricoles, découlant par exemple de
l'utilisation de mesures de prévention ou de la densité humaine,
est tout aussi important que dans le cas d'une parcelle se trouvant dans les
mêmes conditions territoriales et ayant été ravagée
par un animal car les cultures lui étaient particulièrement
appétentes. Les espèces animales étudiées
étant des herbivores dont la stratégie alimentaire guide en
grande partie la mobilité, la fréquence de visite des animaux est
donc considérée ici comme un indicateur pertinent pour juger des
risques de dégradations agricoles.
Dans un premier temps, l'hypothèse de la
préférence alimentaire des animaux sauvages sera testée.
L'efficacité des mesures de réduction des conflits mises en place
sera ensuite analysée. Puis, l'impact des signes de présence
humaine sur la venue des animaux sera étudié. Enfin, le lien
entre le type de couverture des sols et la présence de faune sauvage
sera examiné.
50
6.1. Utilisation des sols et risques de raid
agricoles
Cette partie visera à déterminer si les 4
espèces animales étudiées viennent hors du sanctuaire de
l'AWS pour se nourrir d'espèces végétales cultivées
spécifiques. L'objectif est d'identifier les types de cultures pouvant
potentiellement attirer les animaux sauvages. Tout d'abord la proportion de
foyers reportant l'attaque d'un type de culture par rapport au nombre de foyers
cultivant cette espèce végétale sera calculée pour
estimer les cultures appétentes par espèces. Ensuite, 4 variables
binaires, une pour chaque espèce animale, intitulées «
foyers à risques » seront construites en codant 1 pour les foyers
cultivant au moins une des 3 cultures les plus appétentes de
l'espèce animale et 0 pour les autres. La corrélation entre cette
variable et la fréquence de venue des animaux sera ensuite
étudiée selon chaque espèce animale. La probabilité
que les animaux viennent pour des cultures particulière est
élevée s'ils viennent plus fréquemment dans les foyers
cultivant les cultures les plus appétentes.
Le type d'espèces végétales
cultivées est, en effet, souvent proposé dans la
littérature comme un facteur de conflits hommes-herbivores sauvages
(Jayson, 1998; Naughton-Treves, 1997; Sitati et al., 2005). Sukumar
(1990) suggère que la valeur nutritive des plantes cultivées est
supérieure à celle des plantes sauvages. Il estime que le
groupement spatial des premières dans les champs de culture permet une
quête de nourriture bien plus efficace pour les animaux. Ces derniers ont
également tendance à montrer des préférences
alimentaires. Lors des entretiens préliminaires, il a ainsi
été suggéré que, sur le terrain d'Aralam, les
éléphants préféraient les bananes, les sangliers :
les racines du manioc, et les singes : les fruits.
Le tableau suivant présente les espèces
végétales cultivées, le nombre de foyers les cultivant,
ainsi que la proportion de foyers ayant signalé des raids agricoles sur
ces espèces végétales par rapport au nombre de foyers en
cultivant. Cette proportion a été calculée pour chacune
des quatre espèces animales, ainsi qu'au total.
Préférences alimentaires des 4
espèces animales
étudiées
|
51
Types de cultures
|
Nombre de
|
Proportion de foyers ayant subi des raids agricoles (%
des 84
|
|
foyers interviewés)
|
|
foyers
|
|
Par les
|
Par les
|
Par les
|
Par les
|
Total
|
|
cultivant
|
sangliers
|
sambars
|
Éléphants
|
macaques
|
|
|
|
|
|
|
Anarcadiers (noix de cajou)
|
69
|
6%
|
80%
|
0%
|
7%
|
81%
|
Bananiers
|
60
|
50%
|
7%
|
53%
|
7%
|
90%
|
Poivriers
|
57
|
0%
|
67%
|
0%
|
0%
|
67%
|
Cocotiers
|
55
|
24%
|
0%
|
44%
|
9%
|
69%
|
Taro (tubercule)
|
49
|
92%
|
0%
|
0%
|
0%
|
92%
|
Manioc (tubercule)
|
47
|
94%
|
0%
|
0%
|
0%
|
94%
|
Aréquiers (noix de bétel)
|
24
|
0%
|
4%
|
25%
|
0%
|
29%
|
Elephant Foot Yam (tubercule)
|
20
|
85%
|
0%
|
0%
|
0%
|
85%
|
Hévéas
|
16
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
Gingembres
|
15
|
0%
|
0%
|
0%
|
7%
|
27%
|
Jacquiers (fruit)
|
13
|
0%
|
0%
|
23%
|
0%
|
23%
|
Curcuma
|
12
|
0%
|
0%
|
0%
|
8%
|
17%
|
Grands ignames (tubercule)
|
12
|
83%
|
0%
|
0%
|
0%
|
83%
|
Épinards
|
10
|
0%
|
20%
|
0%
|
0%
|
20%
|
Papayers
|
7
|
0%
|
0%
|
0%
|
14%
|
14%
|
Cacaoyers
|
6
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
Manguiers
|
6
|
17%
|
0%
|
33%
|
17%
|
67%
|
Haricots
|
6
|
17%
|
17%
|
0%
|
0%
|
33%
|
Piments verts
|
4
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
Goyaves
|
4
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
Aubergines
|
3
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
Caféiers
|
2
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
0%
|
Tableau 2: Préférences alimentaires des 4
espèces animales étudiées
On peut observer que le sanglier a une alimentation plus
variée que les autres. Il mange principalement les tubercules. Il semble
également très friand des noix de coco et des bananiers,
où il mange le fruit mais également plusieurs parties de la
plante. Les mangues, les haricots et les pommes de l'anacardier semblent plus
être des sources de nourriture complémentaire. Bien que les
tubercules soient fortement touchés, ils sont quand même
plantés par les habitants car leur culture demande une attention minime.
Ces résultats semblent corroborer ceux de Guo et
52
al. (2017) et Chauhan et al. (2009), qui
indiquent que leur régime alimentaire est extrêmement
varié, notamment dans les milieux tropicaux. Paleeri et al.
(2016) ont également trouvé une préférence pour les
bananes, les noix de coco et les tubercules dans le centre du Kerala, bien que
dans leur étude les tubercules soient beaucoup moins touchés.
L'analyse de la table de contingence et le test d'association
entre la variable « foyers à risque » (ceux cultivant du
manioc, du taro ou de l'Elephant Foot Yam) et la fréquence des
venues des sangliers montrent néanmoins une indépendance entre
les 2. Il faut néanmoins prendre en compte que 92% des foyers ont
signalé des visites journalières des sangliers, ce qui limite la
portée du test.
Les sambars se nourrissent principalement de feuilles de
poivriers et d'anacardiers, ainsi que des pommes de l'anacardier. Ils montrent
également une préférence pour les feuilles de
légumes. Dans une étude en Inde, Porwal et al. (1996)
ont d'ailleurs montré que les sambars se nourrissent principalement
d'herbes et de feuilles et privilégient une diète
variée.
L'analyse de la table de contingence et le test d'association
entre la variable « foyers à risque » (ceux cultivant des
poivriers, des anarcadiers ou des épinards) et la fréquence des
venues des sambars indiquent également que les deux sont
indépendants. Sachant que 89% des foyers signalant des visites
journalières des sambars, la significativité du test est
néanmoins faible.
Les éléphants montrent également des
préférences assez marquées, principalement des bananes et
des noix de coco. Ils se nourrissent également de fruits comme le fruit
du jacquier et les mangues, ainsi que des noix de bétels. Le
régime alimentaire de l'éléphant repose essentiellement
sur les végétations herbacées (Baskaran et al.,
2013), mais il mange également des fruits, des brindilles, des racines,
de l'écorce, des bambous...(Sukumar, 1994). La préférence
pour la banane avait déjà été remarquée au
Kerala (Jayson, 1998; Paleeri et al., 2016).
Après l'analyse de la table de contingence et du test
d'association entre la variable « foyers à risque » (ceux
cultivant des manguiers, des bananiers ou des cocotiers) et la fréquence
des venues des éléphants, une indépendance entre les deux
a été trouvée.
Lorsqu'ils viennent dans les parcelles habitées de la
zone du PRA, les macaques mangent essentiellement des fruits (papayes, bananes,
pommes de noix de cajou) et des noix de coco. Ils endommagent également
des pieds de gingembre et de curcuma, car ces derniers sont
53
souvent hôtes de vers prisés par les macaques.
Ces résultats concordent avec ceux de Dileep et Jose (2014) et
Krishnamani (1994), qui ont trouvé que le régime alimentaire des
macaques à bonnets en Inde du sud est essentiellement composé de
fruits, feuilles et invertébrés.
L'hypothèse de dépendance entre la variable
« foyers à risque » (ceux cultivant du manioc, du taro ou de
l'Elephant Foot Yam) et la fréquence des venues des macaques
est également rejetée après l'analyse de la table de
contingence et le test d'association.
Les quatre espèces animales étudiées
suivent globalement un régime alimentaire assez marqué. L'absence
d'association entre la fréquence de venues des animaux et le fait de
cultiver les cultures qui leur semblent être les plus appétentes
(bien que dans le cas des sambars et des sangliers l'analyse statistique soit
sujette à caution) semble indiquer que les raids agricoles sont
essentiellement le fait de comportements opportunistes plutôt que d'une
recherche de nourriture spécifiquement orientée vers une
espèce végétale. Néanmoins, une étude avec
plus de données et dans un environnement plus diversifié (par
exemple, dans des situations de cultures vivrière plus
développées et plus intenses) serait certainement
nécessaire pour statuer sur ces résultats.
6.2. Mesures de réduction des conflits et
risques de dégradations agricoles
Cette partie cherchera à déterminer les mesures
de prévention utilisées par les habitants de la zone de la PRA et
si elles permettent de réduire les risques de dégradations
agricoles. Il est ici supposé qu'elles ne sont pas efficaces. En Inde du
sud, Kumar et al. (2017) et Karanth et al. (2013) jugent en
effet que les mesures traditionnelles sont peu efficaces. Les entretiens
exploratoires ont globalement confirmé l'impression de cette
tendance.
Les mesures de réduction des conflits hommes-animaux
peuvent être séparées en deux catégories. Les
premières sont les mesures de prévention et visent à
empêcher la venue de la faune. Leur efficacité sera
évaluée en les associant à la fréquence de venue
des animaux sur les parcelles des habitants. Les deuxièmes sont les
mesures de réactions et visent à faire partir les animaux ayant
pénétré dans l'espace humain. Leur efficacité sera
analysée en les associant à l'occurrence de dégradations
agricoles
Dans un premier temps, les méthodes utilisées et
la perception de leur efficacité par leurs utilisateurs seront
détaillés. Ensuite, l'hypothèse de non efficacité
de ces mesures sera testée statistiquement pour chaque méthode et
pour chaque espèce animale.
54
Les mesures de prévention utilisés sur ce
terrain sont au nombre de quatre. Les barrières en tissus sont
utilisées par 17 des 84 foyers interviewés. 88% de ces foyers
estiment qu'elles ne sont pas efficaces, et seulement partiellement efficace
pour le reste.
Les barrières biologiques correspondent à la
plantation de bosquets adossés à une barrière en bois ou
bambou et sont utilisés par 37 des foyers. 84% jugent qu'elles sont
inefficaces, 13% partiellement efficaces et 3% (1 personne) efficaces.
Les barrières en fils barbelés ne sont
présentes que dans seulement 4 parcelles, à cause de leur
coût prohibitif. Elles ont été financées dans 3 des
cas par la commune. La moitié estime qu'elles ne sont pas suffisantes
pour empêcher les animaux de passer, et l'autre moitié juge
qu'elles sont partiellement efficaces. 3 estiment cependant qu'elles permettent
de limiter les venues de sambars.
27 familles ont installé des épouvantails, mais
81% de ces derniers les trouvent inefficaces. 14% les jugent néanmoins
partiellement inefficaces alors qu'une seule personne (4%) estime qu'ils
permettent de tenir les animaux éloignés.
Ces mesures de ségrégation sont donc globalement
estimées peu fonctionnelles. Seulement deux personnes ont estimé
garder régulièrement leur parcelle pour y prévenir
l'entrée des animaux. Ce faible nombre peut s'expliquer par le fait que
la plupart des habitants ont un autre travail à côté et le
fait que ceux qui vivent de l'agriculture cultivent principalement des
hévéas qui sont moins sujets aux dégâts animaux. Les
agriculteurs sont, en outre, plus âgés que la moyenne (50 ans) et
donc peut-être moins en mesure de s'opposer aux animaux sauvages, comme
les sangliers ou les éléphants. Le gardiennage préventif a
donc été mis de côté dans cette analyse.
Les habitants de la zone de la PRA ont développé
plusieurs techniques pour effrayer et faire fuir les animaux sauvages ayant pu
rentrer sur leurs parcelles.
L'utilisation de répulsifs sonores est ainsi
pratiquée par 70% des foyers, que ce soient des pétards ou des
percussions. 30% de ces derniers ont indiqué que l'utilisation de telles
méthodes est particulièrement efficace. Un quart juge
néanmoins qu'elles sont inutiles et 45% partiellement efficaces.
Un peu moins de la moitié (46%) des foyers utilise des
répulsifs visuels, essentiellement le feu ou des lampes torches. 23% les
juge efficaces, 31% partiellement efficaces et 36% inefficaces.
55
Un tiers des habitants a également
déclaré avoir des chiens de garde. La moitié les juge
inutiles, un tiers partiellement efficaces et 18% efficaces. Bien que de
nombreuses personnes aient estimé qu'ils n'empêchent pas les
animaux de venir et ne servent principalement qu'à avertir les humains,
cette mesure d'atténuation des conflits hommes-animaux peut être
considérée comme à la fois mesure de prévention et
de réaction. Dans le premier cas, l'hypothèse
considérée est que les aboiements du chien indiquent une
présence humaine aux animaux, réduisant par-là les venues
de ces derniers. Dans le deuxième cas, l'hypothèse
considérée est que les aboiements permettent aux hommes de
connaître la venue d'animaux est donc de pouvoir réagir.
Mesures de réduction des conflits
utilisées et perceptions de leur
efficacité
Barrière en Barrières Barrières Epouvantails
Répulsifs Répulsifs Chiens
tissu biologiques barbelés sonores visuels
Inefficace Partiellement efficace Efficace Nombre de foyers
utilisant
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels13.png)
40,00%
90,00%
80,00%
70,00%
60,00%
50,00%
30,00%
0,00%
20,00%
100,00%
10,00%
% de foyers (sur 84)
Nombre de foyers (sur 84)
40
70
60
50
30
20
10
0
17
37
4
27
59
39
28
Figure 13: Mesures de réduction des conflits
utilisées et perceptions de leur efficacité
L'hypothèse de l'inefficacité des mesures de
réduction des conflits a ensuite été testée
statistiquement pour chaque espèce animale.
Pour les mesures de prévention, cette hypothèse
a été testée en étudiant la relation entre la
fréquence des venues et l'utilisation de ces mesures.
56
Pour les barrières en tissu et biologiques ainsi que
pour les épouvantails, l'hypothèse d'indépendance est
acceptée pour chaque espèce animale. L'étude du tableau de
contingence de l'utilisation de barrières en métal (4 cas) ne
montre pas une fréquence de venue moindre pour les quatre espèces
animales. Le fait de posséder un chien de garde ne montre pas
également une diminution relative de la fréquence des venues.
Pour les mesures de réaction, cette hypothèse a
été testée en étudiant la relation entre
l'incidence de dégradations agricoles et l'utilisation de ces
mesures.
L'utilisation de répulsifs sonores n'est pas
liée à une baisse des dégradations agricoles pour les
sangliers et les singes. Cependant, l'hypothèse d'indépendance
est rejetée pour les sambars (p=0,03482, n=84), mais
l'analyse détaillée indique que l'utilisation de répulsifs
sonores augmente les occurrences de dégradations agricoles. En revanche,
cette technique semble efficace (p=0,004417, n=84) dans le
cas des éléphants.
En revanche, les techniques de répulsifs visuels ne
semblent pas s'accompagner d'une réduction des conflits.
Le fait de posséder un chien de garde montre une
relation négative (p=0,02001, n=84) avec l'occurrence
de dégradations agricoles des éléphants, mais pas pour les
autres espèces animales.
Les mesures de réductions des conflits utilisées
par les habitants de la zone de la PRA correspondent à celles
communément utilisées dans le reste de l'Inde (Karanth et
al., 2012; Lenin et Sukumar, 2008; C. K. Rohini et al.,
2016). Elles ne semblent globalement ne pas s'accompagner d'une
réduction des venues des animaux et des conflits. Ces résultats
correspondent globalement à d'autres études déjà
menées au Inde du sud n'ayant pas trouvé de relations vraiment
significatives entre les mesures de réduction et le risque de
dégradations agricoles (Karanth, Gopalaswamy, et al., 2013;
Kumar et al., 2017; Paleeri et al., 2016). Bien que Sinu et
Nagarajan (2015) suggèrent un impact positif de l'utilisation de
barrières en tissus au nord du Kerala, ceci n'est pas le cas sur ce
terrain.
Néanmoins, bien que cela ne s'accompagne pas de visites
animales plus rares, le fait de posséder un chien est associé
à une réduction de dégradations agricoles causées
par les éléphants, de même que pour les répulsifs
sonores. Ceci concorde avec les résultats de Paleeri et al.,
(2016) dans un contexte similaire. Ceci s'explique peut-être par le fait
que les éléphants sont plus aisément remarqués du
fait de leur taille et de leur moindre discrétion, d'autant plus qu'ils
s'aventurent également en journée contrairement aux sangliers et
sambars. Ceci peut
57
donc permettre aux habitants de réagir plus vite
à leurs venues et de pouvoir les faire fuir avant qu'ils n'aient pu
créer des dommages.
6.3. Analyse spatiale visuelle et distance à la
forêt
Une analyse spatiale visuelle de la carte des conflits sera
dans un premier temps effectuée. Ensuite, la relation entre la distance
à la forêt (AWS et partie centrale de la zone du PRA, voir partie
3.4) et les visites des quatre espèces animales sera
étudiée.
Initialement, une variable de proximité à une
ouverture dans les mesures de ségrégation spatiale (5km de mur,
3km de fossé, 2km de barrière électrique) implantée
par les autorités de l'AWS devait être également
analysée. Cependant, les données nécessaires à
l'élaboration d'une variable de proximité à une ouverture
dans la séparation entre zone du PRA et AWS n'ont pas pu être
obtenues. Les gardes forestiers m'ont en effet interdit de continuer ma
reconnaissance à pied du long de la bordure, car un tigre avait
été repéré plusieurs fois dans les environs, ce qui
est assez rare. Ayant pu effectuer environ un tiers de la bordure avant
d'être interrompu (22/05/2018), j'ai remarqué de nombreux pans de
murs démolis et de tranchées à moitié
remblayées.
Seule la variable de distance à la forêt a donc
été étudiée plus en détail. En effet, de
nombreuses études ont trouvé un lien entre la distance au refuge
le plus proche et l'intensité des conflits en Inde du sud (Gubbi, 2012;
K K. Karanth, Naughton-Treves, et al., 2013; Paleeri et al., 2016). La distance
entre les foyers et la forêt a été obtenue à l'aide
de l'outil « Distance to nearest hub » (voir partie 3.4).
Le foyer dont les résidents ont été
interviewés le plus proche de la forêt est à 18
mètres et la plus éloignée à 1009 mètres,
pour une moyenne de 458 mètres (84 foyers). Le premier quartile est
à une distance de la forêt allant de 18 à 229
mètres, le deuxième de 229 à 449 mètres, le
troisième de 449 à 715 mètres et le dernier de 715
à 1009 mètres. La distribution des foyers est donc relativement
équilibrée.
Les sangliers montrent ainsi une tendance à moins venir
dans les habitations les plus éloignées (r=0,21,
p=0,0559, n=84). Bien que ce résultat statistique peut
être peu pertinent sachant que 92% des foyers ont signalé des
visites quotidiennes, il est intéressant de noter que 4 des 7 foyers
n'ayant pas déclaré de visites quotidiennes font partie du
4ème quartile de distance à la forêt.
58
En outre, une corrélation a été
trouvée entre la distance au refuge le plus proche et la
probabilité de visites des macaques (r=0,2167,
p=0,04774, n=84). Les macaques viennent moins dans les
habitations plus éloignées de la forêt.
Le fait que la mobilité des sangliers soit plus
reliée à la distance que celle des éléphants et des
sambars est assez étonnant. Plusieurs études ont en effet
pointé que les sangliers sont une des espèces les plus
aventureuses (Chauhan et al., 2009; Thinley et al., 2017).
Cependant, encore une fois, la distribution des données pour les
sangliers et les sambars est très asymétrique. La
généralisation de leur analyse se doit donc d'être
prudente.
L'analyse spatiale visuelle de la carte des
dégradations agricoles signalées par les foyers
interviewés selon l'espèce animale (Figure 1) montre une
distribution marquée des conflits avec les macaques. Ces derniers
semblent concentrés dans le nord de la zone du PRA et dans le sud. De
même, les éléphants semblent créer moins de
dégâts au sud. Les dégradations agricoles causées
par les sambars et les sangliers semblent uniformément
réparties.
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels14.png)
Figure 14:Carte de dégradations agricoles
signalées par les foyers interviewés de la zone du PRA
Source : Map Data @2018 Google (27/05/18)
59
Carte des dégradations agricoles
signalées par les foyers interviewés de la zone du PRA
60
6.4. Présences humaines et risques de
dégradations agricoles
Cette partie visera à établir si les signes de
présence humaine tendent à augmenter les risques perçus
par les herbivores sauvages et donc réduire les risques de conflits.
Plusieurs auteurs abondent en effet dans ce sens et indiquent que la plupart
des animaux sauvages évitent s'ils le peuvent le contact avec l'homme
(Pozo et al., 2017 ; Guerbois et al., 2012, Rangarajan et
al., 2010).
Dans cette optique, la relation entre la fréquence de
venue de la faune sauvage et la présence de voisins et de routes entre
la bordure de l'AWS et les foyers sera donc étudiée.
Le nombre de voisins a été calculé en
comptabilisant le nombre d'habitations se trouvant entre un foyer et le refuge
sur QGIS. Pour cela, l'outil « Join attributes by location (summary)
» a été utilisé à partir de la «
couche des habitations », représentant l'ensemble des habitations
digitalisés se trouvant à moins d'un kilomètre de l'AWS,
et de la « couche des lignes foyers/forêt »,
représentant les lignes tamponnées (100m de large) les plus
courtes entre les foyers et la forêt. Cet outil a permis d'obtenir le
nombre d'habitations se trouvant dans chacune de ces lignes
tamponnées.
Un peu moins d'un quart des foyers interviewés de la
zone de la PRA (23%) n'a pas ou qu'un seul voisin entre leur habitation et la
forêt. Un peu plus d'un quart (26%) a 2 ou 3 voisins. Ceux ayant entre 4
et 6 voisins représentent également 26%, alors qu'un dernier
quart de foyer a plus de 7 voisins. 9 foyers n'ont pas de voisins et celui qui
en a le plus en a 16.
Carte du nombre de voisins entre les foyers
interviewés et la forêt
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels15.png)
61
Figure 15: Carte du nombre de voisins entre les foyers
interviewés et la forêt
|
Source : Map Data @2018 Google (27/05/18)
|
62
L'hypothèse de risques supérieurs ressentis par
les animaux en présence d'une forte densité d'habitations a
ensuite été testée statistiquement par espèce
animale.
Dans un premier temps, l'analyse des tableaux de contingence a
montré une tendance faible à relation inverse entre les venues de
la faune sauvage et le nombre de voisins. Cependant, l'occurrence de
dégradations agricoles ne montre pas de relation avec le nombre de
voisins.
La corrélation entre le nombre de voisins et,
respectivement, la fréquence de venue des animaux et les
dégradations agricoles, selon chaque espèce animale, a ensuite
étudiée. Une corrélation significative a été
trouvée entre les venues des sangliers et le nombre de voisins
(rho=0,246 ; p=0.024 ; n=84). Les sangliers ont
ainsi tendance à moins s'aventurer quand la densité d'habitations
augmente.
Globalement, les trois autres espèces animales montrent
également cette tendance, bien que faiblement : le test de
corrélation n'a pas de résultats significatifs (valeur p
variant entre 0,11 et 0,16). Les tests de corrélation entre
dégradations agricoles et nombre de voisins sont beaucoup moins
significatifs.
Les routes sont également des éléments
pouvant augmenter les risques perçus par les animaux sauvages et les
décourager de traverser. Seules les routes principales et les plus
larges sont considérées ici. Elles opèrent en effet une
séparation abrupte et absente de végétation, ce qui ne
laisse pas de couverts accessibles directement. De plus, le trafic, bien que
faible, peut induire un sentiment de danger supplémentaire pour les
animaux. Les routes et chemins secondaires ont été
délaissées car elles ne traduisent pas forcément un
sentiment de séparation et ne semblent plus inclus dans
l'environnement.
Pour calculer le nombre de routes entre la forêt et les
foyers interviewés, l'outil « Join attributes by location
(summary) » a été utilisé dans QGIS à
partir de la « couche des routes », représentant les routes
digitalisées, et de la « couche des lignes foyers/forêt
», représentant les lignes tamponnées (100m de large) les
plus courtes entre les foyers et le refuge le plus proche.
Il n'existe aucune route principale entre les habitations et
la forêt pour la moitié des foyers ayant participé à
l'enquête sociale. Un tiers est séparé par une route
principale et le reste (16,33%) par 2 ou 3 routes.
En analysant les tableaux de contingence, les routes semblent
légèrement réduire la fréquence de venues des
éléphants dans la zone de la PRA, mais pas pour les autres
animaux. Le test d'hypothèse statistique n'a pas
révélé d'association significative entre la
présence de
63
routes et la fréquence de visites de la faune sauvage,
ainsi qu'avec l'occurrence de dégradations agricoles.
Contrairement à ce qui était attendu, les signes
de présence humaine ne semblent pas intimider fortement les
éléphants, les macaques et les sambars dans la zone de la PRA.
Les sangliers montrent cependant une certaine disposition à
côtoyer en priorité les espaces les moins denses en habitations
humaines. La distribution des données sur les visites et les
dégâts des sangliers et des sambars étant fortement
asymétrique, les résultats obtenus sont à prendre avec
prudence.
Ces résultats semblent aller à l'encontre de
Rohini et al. (2016) et Gubbi (2012), qui trouvent une
corrélation entre le nombre d'habitations et les dégradations
agricoles au Kerala. La densité d'habitations est relativement faible
dans la zone du PRA car cette zone est divisée en parcelles de
4000m2. Les habitations sont donc un peu éloignées les
unes des autres et il n'y a donc pas de centre urbain à proprement
parler, bien que l'on puisse observer une certaine forme de regroupements dans
certaines parties. Cet étalement, additionné avec la
végétation relativement haute de la zone, peut offrir à la
faune des espaces de refuges immédiats dans une majorité des
situations favorables, d'autant plus que les incursions sont majoritairement
nocturnes. Il serait intéressant de prolonger l'étude en
comparant les résultats entre l'utilisation des lignes tamponnées
et une analyse à base d'une grille pour étudier plus
profondément le lien entre densité d'habitations et conflits. Par
ailleurs, Ananda Kumar et al. (2011) suggèrent que, dans le
contexte du Kerala, ce n'est pas tant le nombre d'habitations et la
présence de routes qui favorisent les conflits avec la faune sauvage,
mais plutôt la fragmentation de leur habitat naturel et la qualité
de la végétation à disposition.
6.5. Couverture des sols et risques de
dégradations agricoles
Cette sous partie s'attachera à évaluer le lien
entre couverture des sols et dégradations agricoles sur les cultures.
Nyhus et Tilson (2004) ont en effet montré qu'une
végétation dense peut favoriser le risque de raids en offrant un
refuge aisément accessible. Selon les espèces animales et leurs
besoins, certains couverts sont de plus préférés (Linkie
et al., 2007 ; Pant et al., 2009 ; Baskaran et al.,
2013). Un couvert forestier minimal est jugé essentiel pour les petits
primates (Hill et Wallace, 2012). Les macaques d'Aralam restent ainsi
essentiellement dans les arbres, et les rares incursions à terre sont
brèves. De même, les sangliers préfèrent les espaces
de végétation dense dans les milieux tropicaux, qui sont plus
riches en ressources alimentaires
64
(Guo et al., 2017). Thinley et al. (2017)
ont démontré que les sangliers privilégient les
forêts en bordure immédiate de champs. Sur ce terrain, il a de
plus été suggéré que les éléphants et
les cerfs ont tendance à sortir de l'AWS car ce dernier ne comporte pas
d'espaces ouverts, qui sont particulièrement recherchés par les
grands herbivores Les éléphants en particulier ont tendance
à privilégier les espaces de végétation
intermédiaire, qui offrent un compromis entre la qualité
nutritionnelle supérieure des espaces ouverts et la quantité
supérieure de nourriture des espaces denses (Gara et al.,
2016).
Les incursions animales étant motivées par la
quête de nourriture et les raids agricoles probablement plus
opportunistes que volontaires (voir partie 6.1), la présence d'un type
de couverture des sols particulièrement recherché par certains
animaux peut donc s'accompagner de visites animales et de risques de
dégradations supérieurs pour les foyers à
proximité.
Les hypothèses d'association entre la couverture du sol
et les visites de la faune sauvage seront donc différentes selon les
espèces animales : les espaces de végétation
intermédiaire sont supposés être plus propices aux venues
des sambars et des éléphants, alors que les espaces plus denses
sont supposés être privilégiés par les sangliers et
macaques.
La vérification de ces hypothèses sera
effectuée à partir de la composition des différents types
de couverture des sols entre un foyer et le refuge le plus proche.
Dans un premier temps, une carte de la couverture des sols a
été établie à l'aide de l'image Sentinel 2A et des
connaissances du terrain. Un sous-ensemble correspondant à la zone
étudiée a d'abord été sélectionné sur
SNAP, en ne gardant que les bandes 2, 3, 4, 5, 11 et 12 et en redimensionnant
chaque bande en pixel de 10 mètres. Une classification supervisée
par pixel a ensuite été effectuée sur SPRING, à
l'aide de la méthode couramment utilisée de la « Maximum
Likelihood » à 99% (Lu et Weng, 2007). L'étape de
post classification a ensuite été exécutée
pour réduire le nombre de pixels indépendants ou en très
petit groupe. Un poids de 2 et un seuil de 5 se sont avérés les
plus appropriés.
L'objectif a été de classifier la couverture des
sols en 4 classes : surfaces sans végétation (ex. surfaces
artificielles, eau, sol nu), végétation herbacée ouverte
et basse, végétation intermédiaire (principalement des
fruticées ouvertes et des forêts ouvertes) et
végétation dense (incluant plantations denses). La
vérification de la qualité de la classification a finalement
été jugée à l'aide du coefficient de Kappa
(Congalton, 1991). Ce dernier a été obtenu à l'aide d'une
matrice de confusion construite à partir de 100 points
sélectionnés de manière aléatoire sur QGIS. La
précision totale de la classification effectuée est de 83% et le
coefficient de Kappa
65
s'élève à 77%. Bien que ce
résultat ne soit pas excellent, il demeure raisonnable. La
différence entre végétation basse et intermédiaire
a été la principale source d'erreur (9 des 17 erreurs).
Cette carte de couverture des sols a ensuite été
exportée vers QGIS pour être traitée. Cette couche et une
couche rastérisé de la « couche des lignes
foyers/forêt » (lignes tamponnées entre les foyers et le
refuge le plus proche) ont été croisées à l'aide de
l'outil « Cross-Classification and Tabulation ». Il a fallu
dans un premier temps créer une couche raster par foyer à partir
de la « couche des lignes foyers/forêt » et ensuite les croiser
individuellement. Ceci a permis d'obtenir la composition de la couverture des
sols entre les foyers et le refuge le plus proche. Les données ont
ensuite été extraites sur Excel pour calculer le pourcentage de
chaque type de couverture des sols dans chaque ligne tamponnée
foyer-forêt. Ces valeurs continues ont ensuite transformées en
valeurs discrètes en les regroupant en plusieurs classes.
Une corrélation significative a été
trouvée entre la fréquence de venue des éléphants
et la présence de végétation intermédiaire
(rho=0,24, p=0,028, n=84). Moins il y a de
végétation intermédiaire, plus les éléphants
viennent fréquemment dans les parcelles des foyers. Ce résultat
peut donc indiquer que lorsque le type de végétation qui leur
convient le mieux est abondant, les éléphants ne cherchent pas
à aller chercher de la nourriture chez les hommes. Ceci semble donc
corroborer le résultat de la partie 6 .1 sur l'utilisation des sols: les
éléphants ne semblent pas venir sur les parcelles humaines car
ils préfèrent s'y alimenter, mais plutôt quand ils ne
trouvent pas assez de nourriture.
L'analyse des tables de contingences a montré une
faible corrélation négative entre la présence de
végétation dense et les venues des sangliers. Cependant,
étant donné que 92% des foyers ont signalé des venues
quotidiennes des sangliers, la signification de ce résultat est
faible.
L'hypothèse de lien entre la densité de la
végétation, et donc la présence d'arbres, et les visites
de macaques a été rejetée. Il n'y a également pas
de corrélation entre la présence de végétation
intermédiaire et de végétation dense combinées et
leurs venues. L'hypothèse de lien entre la présence de
végétation intermédiaire et la venue de sambars a
également été rejetée.
66
Carte de couverture des sols
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels16.png)
Figure 16: Carte de couverture des sols
67
L'analyse des configurations spatiales de la zone du PRA a
donc permis de montrer plusieurs tendances. Les animaux sauvages venant de
l'AWS montrent des préférences alimentaires certaines, mais ne
semblent pas spécifiquement pour les cultures qui leur sont
appétentes. Les raids agricoles dans les parcelles habitées
découlent probablement plus d'un comportement opportuniste lors de leurs
venues à la recherche de nourriture. Les éléphants, par
exemple, viennent plus chez les humains quand il y a peu de
végétation intermédiaire (qu'ils favorisent) entre la
forêt et les espaces habités.
La présence d'habitations entre la forêt et les
parcelles visitées a tendance à faiblement limiter les venues des
animaux. Les routes en revanche ne semblent augmenter les risques perçus
par les animaux, si ce n'est faiblement pour les éléphants.
Les mesures de prévention mises en place par les
habitants ne sont pas efficaces, comme estimées par ces derniers. En
revanche, l'usage de méthodes de réaction, telles que des
répulsifs sonores et visuels, permettent généralement de
faire fuir les animaux. Cependant, seulement pour les éléphants,
ceci semble s'accompagner d'une baisse des dégradations agricoles. Le
fait qu'ils soient plus facilement repérables peut permettre aux
habitants de réagir avant qu'ils n'aient causé de
dégâts.
Les macaques ont tendance à rester près de la
forêt et à ne pas s'aventurer au-delà. Ils sont de plus peu
présents entre le Sud et la partie centrale de la zone du PRA. Le fait
que la végétation soit moins dense influe peut-être leur
venues.
Les résultats de cette analyse spatiale sont cependant
limités pour les sangliers et les sambars à cause de la
distribution très marquée des données sur leurs
fréquences de visites et sur leurs dégradations agricoles. Une
classification des dégâts par leur ampleur aurait permis de
procéder à une analyse plus fine. Les résultats les plus
significatifs ont ainsi été trouvés pour les
éléphants. Ces derniers semblent éviter les humains tant
qu'ils ont une source de nourriture à disposition. D'une manière
générale, l'échantillon des 84 foyers interviewés
est certainement trop faible pour donner des résultats suffisants sur ce
terrain.
Bien que l'étude des configurations spatiales
favorisant les conflits soit importante pour concevoir des mesures de
prévention et de réduction des conflits efficaces, l'analyse du
volet social est également indispensable pour mieux comprendre l'origine
des conflits et mettre en oeuvre des solutions adaptées aux habitants
locaux.
68
7. ATTITUDES DES HABITANTS ET
DÉTERMINANTS
SOCIO-CULTURELS
Cette partie abordera le problème des conflits
hommes-animaux dans la zone du PRA d'Aralam sous un prisme plus qualitatif, en
examinant le volet social. Elle se fondera sur des données de
l'enquête sociale, obtenues à travers des questions ouvertes et
fermées, afin d'étudier les rapports des habitants aux animaux
sauvages, à la conservation et à la résolution des
conflits, ainsi que les filtres socio-culturels oeuvrant dans la construction
de ces rapports.
Les habitants de la zone du PRA sont en effet directement et
profondément touchés par les politiques de protection de la
biodiversité comme l'instauration de l'AWS. Ils sont également
des acteurs dont les actions influencent l'atteinte de l'objectif de
conservation de l'AWS. La prise en compte de leur vision du monde, de leurs
valeurs et de leurs intérêts est donc indispensable à la
fois à la mise en oeuvre d'une gestion efficace de l'AWS et à la
mise en place de solutions adaptées pour réduire
l'intensité et la gravité des conflits avec la faune sauvage.
Ceci requiert donc de connaître les attitudes et les
représentations des habitants locaux envers les différents
aspects du problème.
Les filtres socioculturels participant à la
construction des représentations et des attitudes des habitants sont
également importants. L'efficacité d'une action, qu'elle vise par
exemple à instaurer une gestion partagée ou simplement à
sensibiliser sur un thème particulier, repose sur sa correspondance
à un besoin, mais aussi sur l'acceptation et la volonté des
acteurs concernés. Déterminer les filtres pouvant influencer les
opinions permet ainsi d'être en capacité de cibler ces actions et
les adapter selon la réceptivité des divers groupes sociaux.
Tout d'abord, afin de déterminer les tendances
globales, les réponses des habitants seront analysées à
l'aide de statistiques descriptives. Dans un deuxième temps, l'influence
des filtres socio-culturels sur les représentations et les attitudes
sera approfondie sur certaines questions à l'aide des tables de
contingences et du test du khi2. Les facteurs étudiés
seront le sexe, l'âge, les expériences vécues, le rapport
à l'agriculture et les bénéfices reçus des
autorités de conservation. Les hypothèses pourront varier selon
le type d'attitude étudié. Par exemple, une personne
âgée peut avoir une représentation positive de la faune
sauvage mais une attitude négative envers la mise en place d'une action
collective car elle ne se sent pas assez dynamique pour s'y impliquer.
69
La première hypothèse suppose que le sexe
influence les attitudes. Les femmes sont en effet souvent plus
confrontées aux animaux sauvages (ex. lors de la recherche de bois de
chauffe) et peuvent avoir une sensibilité plus aigüe aux
dégâts, notamment lorsqu'ils peuvent remettre en cause la
sécurité alimentaire de la famille (Ogra, 2009).
L'âge est également considéré comme
impactant les représentations et les attitudes (Wang et al.,
2006). Cette variable a été classée en 3 catégories
: moins de 20 ans, 20-55, plus de 55 ans. Ces catégories ont
été choisies car elles représentent plus ou moins les 3
étapes de la vie locale sur ce terrain : jeunes n'ayant pas de famille
à supporter, adultes ayant une famille à supporter, personnes
âgées n'étant plus les principaux supports de la
famille.
Le troisième facteur étudié concerne les
expériences de la coexistence avec la faune sauvage. Cette variable
était supposée être binaire : 1 pour les personnes vivant
depuis au moins 5 ans sur ce terrain ou pour celles y habitant depuis moins de
5 ans mais ayant été en contact avec les animaux dans leur
précédents lieux de vies, 0 sinon. Cependant, seulement 9 foyers
sur 84 interviewés correspondant à la 2ème
catégorie, la pertinence de l'analyse risquait d'être
réduite. Une variable binaire sur la présence d'un sentiment
d'insécurité provoqué par cette proximité avec les
animaux sauvages a été privilégiée par rapport aux
occurrences de dégradations agricoles, dommages matériels et
physique ou prédation d'animaux domestiques, qui présentent une
distribution des données trop asymétrique. En outre,
l'insécurité et son impact psychologique reflète une forme
particulière de conflit, dont les impacts peuvent être
particulièrement profonds (Barua et al., 2013; Ogra, 2008)
L'hypothèse est que le fait de ressentir de l'insécurité
impacte les attitudes.
Le lien entre l'occupation principale des individus et les
représentations sera également approfondi. Cette variable a
été séparée en trois catégories
représentant 83 des 84 foyers interviewés : Agriculteur,
Travailleur journalier agricole, Travailleur journalier non-agricole. En effet,
selon le type de source principale de revenus, et notamment la
dépendance à l'agriculture, les attitudes peuvent varier
(Naughton-Treves et Treves, 2005).
Les bénéfices retirés du fait de
l'existence de l'AWS peuvent également influencer la tolérance et
les attitudes des habitants. Par exemple, les autorités de l'AWS ont
implanté 3 comités d'écodéveloppement pour les
communautés de la zone du PRA et offrent des opportunités
d'emplois, ainsi que des bénéfices matériels (ex.
gazinières). L'Aralam Farm emploie plus de 450 personnes de la zone du
PRA et ont développé plusieurs initiatives d'aides. Bien que ces
bénéfices ne soient pas issus de l'AWS, il peut être
intéressant d'étudier comment les attitudes peuvent changer selon
l'origine des avantages reçus, notamment quand les 2 donateurs sont des
institutions gouvernementales. Ceci peut ainsi indiquer si le conflit est
vécu,
70
en partie, comme causé par l'impératif de
conservation en lui-même ou plus globalement par le gouvernement. Ces
bénéfices ont été séparés en deux
catégories : majeurs (emplois) et mineurs (participation à un
comité d'écodéveloppement et autres
bénéfices).
Les représentations et les attitudes, ainsi que leurs
déterminants socio-culturels, des habitants envers l'AWS et les animaux
sauvages, la conservation, les conflits, les gestionnaires de l'AWS, la
résolution des conflits et la mise en oeuvre d'une solution collective
seront successivement étudiées.
7.1. Représentations de l'aire
protégée et de la faune sauvage
La manière dont l'aire protégée et les
animaux sauvages sont perçus a été examinée en deux
temps. La question « Qu'est-ce que « wildlife »
représente pour vous ? » a d'abord été
posée. L'utilisation du mot « wildlife », qui a
été utilisé tel quel et non traduit en Malayalam, a
été décidée en concertation avec le traducteur et
validé suite à l'enquête préliminaire. En effet, ce
mot représente sur ce terrain un concept englobant à la fois la
vie à proximité de la forêt en tant qu'espace, et les
organismes végétaux et animaux la peuplant. Il correspond donc
plus à « life in the wild ». Ce concept s'inscrit
surtout en opposition aux espaces plus domestiqués par l'homme et
représentant la majeure partie du Kerala. La zone du PRA, forêt
ouverte faiblement domestiqué et adjacente à l'AWS, correspond
ainsi particulièrement à ce concept. L'objectif est de
découvrir les principaux thèmes associés à la vie
à proximité de l'AWS.
Ensuite les réponses à la question suivante
seront étudiées : « Est-ce que certains animaux ont une
importance particulière pour les habitants, leur mode de vie ou
l'environnement ? ». L'objectif est de déterminer si la faune
sauvage, outre sa nuisibilité dans la vie quotidienne, possède un
intérêt pour les personnes de la zone du PRA. Par exemple, dans le
contexte culturo-religieux hindou, certains animaux, comme les serpents ou les
singes, peuvent être liés aux dieux5.
Ces questions étant ouvertes, leur analyse se fera par
regroupement des réponses par types de thématiques.
5 Le polymorphisme et la malléabilité
de l'hindouisme, qui est plus une philosophie qu'une religion, font cependant
que la plupart des croyances et traditions varient fortement d'une
région à une autre, et même d'un temple à un autre,
d'autant plus que l'Inde est un pays d'une diversité culturelle
très importante.
71
Cette question ouverte s'est avérée ardue
à répondre pour plusieurs habitants. Lorsque nous sentions une
réticence, nous indiquions à la personne qu'il n'y avait pas de
bonnes réponses, mais seulement des opinions. Ceci a permis à
plusieurs d'entre elles de prendre confiance et d'y répondre. Au total,
9 personnes n'ont pas répondu. Bien qu'il ait été
spécifié que plusieurs réponses étaient possibles,
peu (17) ont donné plus d'une réponse.
Les réponses à la question « qu'est-ce que
« wildlife » représente pour vous ? » ont
ensuite été réparties en 5 types de thématiques.
Qu'est-ce que « wildlife »
représente pour vous ?
|
Thématiques
|
|
Animaux
|
Nature
|
Vie attractive
|
Vie difficile
|
Utilité matérielle
|
Nombre de réponses (sur 84
foyers)
|
19
|
18
|
29
|
19
|
7
|
Tableau 3: Représentations de la vie en
périphérie de l'AWS
19 personnes ont associé le mot « wildlife
» aux animaux de manière descriptive (animaux, oiseaux). Parmi
celles-ci, 5 ont cité spécifiquement l'éléphant et
une, les serpents. 18 individus ont rapproché ce concept à la
nature de manière descriptive, en citant la forêt, les arbres ou
la verdure. Parmi celles-ci, 5 ont énoncé une
préoccupation face à la déforestation et l'importance de
préserver la nature.
29 personnes ont exprimé un lien avec une vie
attractive : 19 en l'associant à une vie plaisante (vie confortable,
température agréable) et 9 à des considérations
esthétiques (beauté, animaux divertissants). La
préférence par rapport à la vie des gens de la «
ville » (ce qui correspond plus aux gens à l'extérieur de la
zone du PRA qu'aux urbains stricto sensu dans ce contexte) a
été exprimée régulièrement.
19 résidents interviewés ont lié
« wildlife » à une vie difficile. En particulier, 13
d'entre eux ont exprimé une insécurité due aux animaux. 6
ont exprimé des difficultés financières liées
à l'isolement. Le manque de transports en commun et la
nécessité de sortir de la zone du PRA pour effectuer un emploi
journalier expliquent sans doute cela.
Finalement, 7 individus l'ont associé à une
dépendance aux ressources naturelles. Ces personnes ont souvent
exprimé que l'accès à l'AWS permettrait d'améliorer
leur vie quotidienne.
72
L'étude des tables de contingences et le test du
khi2 n'ont pas permis de valider une association entre un des 5
filtres socioculturels et les thématiques exprimées.
La vie en périphérie de l'AWS semble donc offrir
des attraits certains, bien que les problèmes avec les animaux et les
contraintes financières soient également une
préoccupation. Je m'attendais à ce que plus de personnes
expriment des regrets vis-à-vis de l'instauration de l'AWS. Cependant,
les familles interviewées étant installées depuis 10 ans
en moyenne et les dernières expulsions de l'AWS datant de 2004, les
habitants de la zone du PRA jugent peut-être plus leur situation
vis-à-vis de celles des autres habitants du district que par rapport
à la vie forestière. La vie dans la zone du PRA, où la
densité est faible et où les ressources naturelles (bois de
chauffe, eau, plantes médicinales...) sont relativement importantes,
offre ainsi peut-être un compromis intéressant entre la
forêt et le reste du district, qui se caractérise par une
densité démographique élevée et des plantations en
monoculture.
Il est intéressant de noter que 5 personnes ont
cité spécifiquement l'éléphant. Cela montre que ce
dernier, bien qu'il cause moins de dommages et qu'il soit moins présent
que le sanglier ou le sambar, marque plus les esprits et peut entrainer des
réactions humaines disproportionnées par rapport à ses
propres actions, comme l'indiquent Sukumar (1990) et Wilson et al.
(2015).
Afin de déterminer si certaines espèces animales
possèdent une valeur spéciale aux yeux des habitants, les
réponses à la question « Est-ce que certains animaux ont une
importance particulière pour les habitants, leur mode de vie ou
l'environnement ? » ont ensuite été
étudiées.
Les réponses ont été plutôt
équilibrées. 43 des foyers ont répondu oui et 41 non.
Animaux ayant une valeur pour les habitants de la
zone du PRA
Animaux
|
Nombre de foyers
|
Raisons
|
Oiseaux
|
13
|
Esthétique
|
Lapins
|
9
|
Esthétique
|
Chitals (cervidés)
|
7
|
Esthétique
|
Singes
|
5
|
Esthétique
|
Poules sauvages
|
4
|
Esthétique
|
Calaos (oiseau)
|
3
|
Esthétique
|
Chèvres sauvages
|
3
|
Esthétique
|
Tortues
|
2
|
Esthétique
|
Varans
|
2
|
Esthétique
|
Paons
|
1
|
Esthétique
|
73
|
|
Aboient quand les
|
Chiens sauvages
|
1
|
sangliers viennent
|
Hiboux
|
1
|
Esthétique
|
Serpents
|
1
|
Religieux
|
Caméléons
|
1
|
Esthétique
|
Tableau 4 : Animaux ayant une valeur pour les habitants de
la zone du PRA
Contrairement à ce qui était attendu, seulement
une personne a énoncé des raisons religieuses (serpent). Une
personne a également cité les chiens sauvages car ils aboient
quand les sangliers viennent et servent donc de signal. Les autres individus
ont tous cité des raisons d'esthétisme.
Les personnes habitant la zone du PRA entretiennent donc une
vision globalement positive de la vie à proximité de la
forêt. Les animaux occupent de plus une part importante des
représentations de la vie en périphérie de l'AWS, et sont
souvent cités comme ayant des effets négatifs. Les animaux
sauvages appréciés sont essentiellement de petite taille et
inoffensifs (du moins vis-à-vis de l'intégrité physique
des individus) et le sont essentiellement pour des raisons
d'esthétisme.
7.2. Attitudes envers la conservation
Les attitudes envers la conservation ont été
examinées à travers la question suivante. « Est-ce que vous
pensez que les animaux sauvages doivent être protégés ?
». Le lien entre les 5 filtres socioculturels et les réponses
à cette question ont ensuite été étudiés. Il
a également été demandé d'expliquer leurs
réponses, ce qui a été analysé par regroupement des
réponses par mots clés.
60 personnes, ce qui représente 71% des 84 foyers
interviewés, ont exprimé être en faveur de la protection de
la protection de la faune sauvage.
Seulement 33 personnes ont souhaité expliquer leur
réponse, dont aucun n'ayant répondu non, si ce n'est qu'ils sont
sources de problèmes. Parmi ceux ayant répondu oui, 12 ont
statué le droit de vivre des animaux, 11 le fait que leur vie à
la même valeur que celles des humains et 7 qu'ils sont une part
essentielle de l'écosystème. Une personne a répondu qu'ils
broutaient les mauvaises herbes et 2 individus, qu'ils ne nuisent pas aux
animaux.
74
Raisons en faveur de la conservation
|
Thématiques
|
|
Droit de vivre
|
Leur vie à la même valeur que celle des
humains.
|
Ils font partie de l'écosystème
|
Ils broutent les mauvaises herbes
|
Ils ne nuisent pas aux humains
|
Nombre de réponses
|
12
|
11
|
7
|
1
|
2
|
Tableau 5: Raisons en faveur de la
conservation
La 1ère hypothèse était que
les hommes favoriseraient plus la conservation. Bien que la proportion d'hommes
favorisant la conservation soit légèrement supérieure,
l'association n'est pas significative.
La 2ème hypothèse était que
les plus jeunes et les plus âgées supporteraient plus la
conservation. Cette hypothèse a été rejetée suite
au test du khi2.
La 3ème hypothèse était que
l'insécurité ressentie s'accompagnerait d'un refus de la
protection des animaux sauvages. Cette hypothèse a ensuite
été rejetée.
La 4ème hypothèse était que
les personnes dont la source de revenus principale provient de l'agriculture
seraient moins en faveur de la conservation. L'analyse des tables de
contingence et le test du khi2 n'a pas montré de lien entre
les 2.
La 5ème hypothèse supposait que les
individus ayant obtenus des bénéfices de la part de l'AWS ou de
l'AF seraient plus favorables à la conservation. Le test de cette
hypothèse n'a pas montré d'association significative. Les
personnes travaillant ponctuellement pour l'AWS montrent cependant un fort taux
de support pour la préservation de la faune (88%).
Les habitants de la zone du PRA favorisent en grande
majorité la conservation de la faune sauvage. Ce résultat,
malgré la récurrence des conflits hommes-animaux sur ce terrain,
peut s'expliquer par le contexte culturel indien et plus
particulièrement de ces populations à traditions
forestières. La tolérance y est en effet élevée, en
partie à cause des tabous religieux (K K. Karanth et al., 2008; Sukumar,
1994). Le fait que ces personnes possèdent, en outre, une forte
tradition de lien avec la nature peut également y contribuer. Les
explications données, dont deux tiers concernent le droit de vivre ou
l'égalité accordée entre les hommes et les animaux vont
dans ce sens. Plus particulièrement, les personnes travaillant avec les
gardes forestiers manifestent une plus grande sensibilisation à
l'impératif de conservation de la faune sauvage.
75
7.3. Perception de l'impact des conflits
La perception de l'impact des conflits hommes-animaux sur la
vie quotidienne a été examinée en étudiant le lien
entre les 5 facteurs et la magnitude ressentie de l'impact de ces conflits sur
la vie quotidienne.
Pour obtenir cette variable, il a été
demandé lors de la pré-enquête d'estimer l'impact des
animaux sauvages sur la vie quotidienne sur une échelle de 0 à 5.
Ce type de question s'est avéré poser des difficultés lors
de la pré-enquête. Finalement, il a été
décidé de laisser 3 choix à cette question : inexistant,
mineur, majeur.
La majorité des individus (61%) estiment que les
animaux sauvages ont un impact majeur sur leur vie quotidienne. Les
difficultés à cultiver la terre ont été
particulièrement soulignées. Ceci est exacerbé par le fait
que l'utilisation de potagers et l'agroforesterie domestique sont très
répandues au Kérala et fournissent une part
non-négligeable de l'alimentation quotidienne, notamment pour les
familles ayant de faibles revenus. Le sentiment d'insécurité
lié aux éléphants a été également
cité.
Un peu plus d'un tiers (35,71%) ont jugé que les
animaux n'impactaient que partiellement leur vie quotidienne. Seulement 3
personnes (3,57%) ont exprimé de ne pas être gênées
par la présence des animaux. Il est intéressant de noter que ces
trois individus ont pour source de revenus principale la récolte du
latex d'hévéas plantés sur leur parcelle.
Impact ressenti des conflits sur la vie
quotidienne (en % des 84 foyers interviewés)
3,57%
Inexistant Mineur Majeur
Figure 17:Impact ressenti des conflits sur la vie
quotidienne
76
Aucune des hypothèses d'indépendances n'a
été rejetée suite aux tests du khi2.
Néanmoins, on peut observer qu'une proportion supérieure des
personnes de plus de 55 ans et des personnes vivant de l'agriculture,
respectivement 83% et 81%, ressentent un impact majeur. Ces résultats ne
sont pas surprenants. Les personnes âgées sont moins en mesure
d'obtenir du travail manuel journalier que les personnes dans la force de
l'âge, et sont donc plus dépendants des revenus de leurs
parcelles. 37% des plus de 55 ans vivent ainsi de l'agriculture alors que la
moyenne est de 20% sur les 84 foyers.
Il semble donc que la faune sauvage impacte globalement
fortement la population de la zone du PRA, notamment pour les personnes
âgées qui sont plus dépendantes de l'agriculture.
7.4. Opinions de la gestion de l'Aralam Wildlife
Sanctuary
Les opinions sur la gestion de la faune sauvage par les
gestionnaires de l'AWS ont été mesurées à partir de
la question « Comment évaluez-vous les actions menées les
autorités en charge de l'AWS pour la gestion des espèces animales
sauvages ? ». Les liens entre les 5 déterminants socioculturels et
les réponses ont ensuite été analysés.
Cette question a été posée sous la forme
fermée et trois réponses ont été proposées.
Un peu moins d'un tiers a estimé que leurs actions étaient
insuffisantes, un peu plus d'un quart qu'elles étaient partiellement
satisfaisantes et 42% qu'elles étaient satisfaisantes.
Les personnes satisfaites ont souvent exprimé que les
autorités font le maximum dans la limite de leurs moyens. Plusieurs ont
rajouté que les gestionnaires de l'AWS essaient d'instaurer des mesures
de séparation efficaces (ex. murs, barrières électriques,
tranchées) mais que les animaux trouvent toujours un moyen de passer,
que ce soit par-dessus, pour dessous ou à travers. De nombreux individus
ont de plus déclaré vouloir que les gardes forestiers viennent
plus fréquemment ou plus rapidement lorsqu'ils sont appelés,
notamment dans le cas de venues d'éléphants. Les habitants
insatisfaits ont ainsi essentiellement répété que les
gardes ne venaient pas quand ils étaient appelés. Cette
réactivité aux appels semble être l'attente principale des
résidents vis-à-vis des activités des gestionnaires du
parc. Une personne a ajouté qu'il y a de la corruption et que les
financements de l'AWS sont détournés.
Perceptions de la gestion de la faune sauvage (%
des 84 foyers interviewés)
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels18.png)
42,86%
26,19%
30,95%
Insuffisant Partiellement satisfaisant Satisfaisant
77
Figure 18:Perceptions de la gestion de la faune
sauvage
Aucun des tests d'hypothèses n'a
révélé d'associations significatives. L'analyse des
tableaux de contingence a cependant permis d'observer plusieurs tendances
faibles.
88% des personnes obtenant ponctuellement des emplois avec
l'AWS sont satisfaits des actions des autorités. Certains participent de
temps en temps aux rondes nocturnes. D'une manière
générale, le fait de travailler pour l'AWS permet certainement de
rendre compte des moyens à disposition et du travail effectué par
les gardes.
Deux tiers des moins de 25 ans louent également la
gestion de la faune par les autorités de l'AWS. Ceci peut s'expliquer
par le fait que les jeunes ressentent moins les conflits avec les animaux
sauvages, et jugent donc plus efficaces les actions des gestionnaires de l'AWS.
Leur implication et leurs informations sur les conflits et leur gestion sont de
plus probablement moindres et leurs réponses peuvent être sans
réels fondements. En revanche, les personnes âgées entre 25
et 55 ans sont plus insatisfaites (42%). Le fait d'avoir une famille à
charge peut probablement diminuer la tolérance et accroître les
attentes.
D'une manière générale, les habitants
sont relativement satisfaits des actions des autorités de l'AWS pour
gérer la faune sauvage, ou du moins conscients qu'ils essaient de faire
leur maximum. La venue des gardes lorsqu'ils sont appelés est cependant
une préoccupation importante, mais qui est souvent source de
désappointement. Ceci semble montrer que les habitants estiment dans
tous les cas que les incursions animales sont impossibles à
prévenir, mais que les responsabilités des autorités
reposent plus sur la gestion des cas d'urgence, par exemple quand les
éléphants sont menaçants.
78
7.5. Attitudes envers la résolution des conflits
hommes-animaux
Les attitudes envers la résolution des conflits ont
ensuite été examinées pour déterminer les types de
mesures favorisées par les habitants de la zone du PRA et si ces choix
sont déterminés en partie par les filtres socioculturels. La
question suivante a été posée : « Comment ces
conflits peuvent être limités ? ».
Plusieurs options ont été proposées :
ségrégation spatiale (mur, clôtures...), compensation
financière systématique des dégâts causés,
offres d'emplois stables, tuer les animaux problématiques, relocaliser
les animaux problématiques, augmenter le nombre de gardes forestiers. Il
a également été spécifié qu'il était
possible de suggérer d'autres mesures.
Lors de la pré-enquête, les options de
compensations financières et d'emplois ont été
interprétées comme un choix de préférence par les
individus interviewés. En discutant avec ces personnes, il s'est
avéré que la compensation est jugée permettre une forme
d'agriculture plus intensive, alors que l'offre d'emplois est comprise comme
permettant d'offrir un revenu rendant superflu l'utilisation de la terre. Les
options de relocalisation et d'élimination des animaux
problématiques ont également été perçues
globalement comme un choix de préférences. Il a été
ensuite décidé de présenter ces options sous la forme de
deux questions de préférences (une pour compensation/emploi et
une pour relocalisation/élimination) entre citant deux options ensemble.
La possibilité de ne pas choisir ou de choisir les deux a bien entendu
été laissée. Finalement, il s'est avéré que
respectivement seulement 14 et 5 (sur 84) personnes ont signalé les deux
à la fois.
La mesure privilégiée par les habitants de la
zone du PRA est la ségrégation spatiale entre leurs parcelles et
les animaux sauvages. Ils souhaitent en grande majorité l'instauration
de barrières barbelées autour de leurs parcelles. Les
autorités de l'AWS ont, en effet, mis en place plusieurs techniques de
ségrégation physique en bordure de l'AWS (barrières
électriques, tranchées, mur en ciment et pierres), mais les
habitants ont signifié qu'elles n'étaient pas efficaces. Quelques
personnes ont cependant suggéré d'agrandir les murs (qui font 2
mètres de haut).
La relocalisation des personnes dans un autre endroit avec une
parcelle de taille similaire est cependant exclue par la majorité des
répondants (79 sur 84). Ce résultat aussi marqué est assez
étonnant. Ceci peut être expliqué par le fait que les
perceptions de la vie dans la zone du PRA soient globalement positives. 40%
soutiennent l'augmentation du nombre de garde-
79
forestiers. Cependant un grand nombre a signifié qu'ils
étaient déjà nombreux et que les augmenter ne servirait
pas à réduire significativement les conflits.
Un tiers des résidents supporte la relocalisation des
animaux problématiques. Beaucoup ont exprimé cependant
l'impossibilité d'une telle mesure face au nombre de sangliers. 31
personnes (36%) sont en faveur de tuer les animaux problématiques, dont
26 ont spécifié seulement les sangliers. Une relation
significative (X2=8,4021, p=0,015, n=84) a
été trouvé entre le fait d'avoir obtenu des
bénéfices de la part de l'AWS et le soutien à la
relocalisation des animaux problématiques. Les hypothèses que les
hommes privilégieraient la relocalisation alors que les femmes
plutôt l'élimination ont également été
émises. Les femmes supportent plus l'élimination des animaux
problématiques que les hommes (X2=3,906, p=0,0488,
n=84). Les jeunes et les personnes âgées sont en revanche
significativement moins en faveur de l'élimination
(X2=13,632, p=0,001, n=84).
Deux-tiers soutienne la mise en place d'un système de
compensation financière systématique et efficace, alors qu'un
tiers supporte la création d'emplois pour créer un revenu stable.
Ces résultats vont dans le sens d'un désir de vivre plus de
l'agriculture.
Attitudes envers la résolution des
conflits
![](Conflits-hommes-faune-sauvage-en-Inde-du-sud-determinants-spatiaux-et-socioculturels19.png)
Nombre de personnes en faveur
Sur 84 personnes
40
70
60
50
30
20
10
0
5
36
31
28 27
55
Figure 19 : Attitudes envers la résolution des
conflits
Les résidents de la zone du PRA demandent donc en
priorité la mise en place de barrières barbelées autour de
leurs parcelles de terrain. Très peu supportent la relocalisation des
habitants. Malgré la récurrence des problèmes, ils
montrent un fort attachement à la zone du PRA. Ceci peut-être
néanmoins dû à un manque de confiance dans la
réalisation d'un tel programme. Le
80
fait qu'une amélioration de la compensation
financière soit beaucoup plus demandée que l'offre d'emploi
stable, montre une certaine forme de préférence pour
l'agriculture.
Les personnes liées à l'AWS, soit par un emploi
ou en participant à un comité d'écodéveloppement,
favorisent la relocalisation des animaux plutôt que leur
élimination. Le fait d'être en contact avec les gardes forestiers
et les gestionnaires de l'AWS, peut être interprété comme
une sensibilisation accrue au bien-être des animaux. Les personnes
âgées et les jeunes y semblent également plus sensibles.
Les femmes, en revanche, montrent une tendance à privilégier
l'élimination des animaux sauvages (principalement des sangliers). Le
fait que soit ces dernières qui s'occupent principalement de
l'agriculture quand le mari possède un travail peut expliquer ce
sentiment, notamment sur les sangliers qui sont cités comme étant
les plus problématiques.
7.6. Attitudes envers une gestion collective des
conflits hommes-animaux
Les attitudes envers une gestion collective des conflits ont
ensuite été analysées à partir de la question
« Seriez-vous prêts à vous engager dans une initiative
collective de réduction des conflits ?». Trois réponses ont
été proposées : réunissant les habitants et les
autorités de l'AWS, réunissant seulement les habitants,
aucune.
Une question sur l'implantation d'une forme d'assurance
collective, où les membres paient un premium chaque mois et sont
indemnisés lors de dégradations agricoles, a également
été prévue. Seulement, cette question s'est
avérée particulièrement difficile à faire
comprendre lors de la pré-enquête. Elle a donc été
malheureusement laissée de côté.
L'importance des cinq filtres socio-culturels dans la
détermination des réponses a été, en outre,
étudiée.
57% des individus interviewés ont exprimé un
intérêt à intégrer une initiative de gestion
collective des conflits en partenariat avec l'AWS. Parmi ces personnes, la
plupart ont montré une réelle volonté de participer dans
une telle structure. 7% ont déclaré de ne pas vouloir participer
si l'AWS était incluse, mais être prêt à rejoindre
une structure comprenant seulement les habitants. Ils ont exprimé qu'il
ne servait à rien d'incorporer les autorités de l'AWS car ces
derniers ne sont pas attentifs à leurs besoins et requêtes. Parmi
les 30 personnes ne souhaitant pas participer dans une initiative collective
(36%), 22 ont cependant fait part de leurs désirs de voir leurs opinions
communiquées à l'AWS, mais qu'ils ne souhaitaient pas
s'engager.
81
Plusieurs personnes âgées ont communiqué
le fait que l'idée est intéressante mais qu'ils ne se sentent pas
capables d'y participer.
Les personnes ressentant une forme d'insécurité
se prononcent significativement en faveur d'une initiative collective, alors
que les autres privilégient la simple expression de leurs opinions ou
aucune des propositions (X2=5,4265, p=0,0198,
n=84).
Attitudes envers une initiative de gestion collective
des conflits
60 50 40 30 20 10 0
|
|
|
48
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
22
|
|
|
6
|
|
|
8
|
|
|
|
|
Initiative avec l'AWS Initiative sans l'AWS
|
Expression des Aucun
opinions
|
Sur 84 personnes
Nombre de personnes
Figure 20:Attitudes envers une initiative de gestion
collective des conflits
Il semble donc exister un fort désir
d'intégration dans la gestion des conflits hommes-animaux chez les
habitants de la zone du PRA, gestion jusqu'à maintenant exclusivement
opérée par les autorités de l'AWS. Il est
intéressant de noter que le sentiment d'insécurité est
fortement lié à cette volonté de participation.
L'étude des déterminants socio-culturels de ces
représentations et attitudes a donc montré une certaine
uniformité dans la construction de ces dernières. Elle a
néanmoins permis de souligner plusieurs faits intéressants. Le
fait d'être en contact plus fréquent avec les autorités de
l'AWS, à travers des travaux temporaires ou la participation à un
comité d'écodéveloppement, semble s'accompagner d'une
sensibilisation accrue à la faune sauvage et aux efforts de gestion de
l'AWS. Les bénéfices reçus de part de l'Aralam Farm ne
s'accompagnent cependant pas d'une modification des attitudes.
Les personnes âgées ressentent plus les effets
négatifs de la coexistence avec les animaux, car elles sont certainement
plus dépendantes de l'agriculture. Les personnes ayant entre 25 à
55 ans sont les moins satisfaites de la gestion des conflits et les femmes sont
celles
82
qui privilégient le plus l'élimination des
animaux problématiques. Le fait d'avoir une famille à charge et
plus de responsabilités peut donc amener une forme de frustration et
d'impatience plus importante.
D'une manière générale, la faune sauvage
provenant de l'AWS fait donc partie intégrante de la vie des populations
de la zone du PRA. Elle impacte fortement la vie quotidienne locale à la
fois en limitant les possibilités d'agriculture qui représentent
une source potentielle de revenus et de nourriture, et en instillant un
sentiment d'insécurité qui peut être très
néfaste. Les sangliers et les éléphants sont
respectivement les plus mis en cause.
Malgré ces difficultés, les habitants supportent
néanmoins la protection de ces animaux. Ils sont attachés
à la vie dans la zone de la PRA, comme le montre le très faible
nombre de personnes supportant la délocalisation des habitants et la
vision globalement positive de la vie à proximité de l'AWS.
Il est très souvent ressorti des interviews que les
habitants souhaitent une séparation des espaces humains et animaux plus
marquée.
Bien que les mesures de réduction des conflits mises en
place par les autorités de l'AWS ne soient pas efficaces, la gestion de
la faune sauvage par ces derniers n'est estimée insatisfaisante que
seulement par un tiers des habitants. Il semble exister une certaine forme de
conscience de la difficulté de la tâche pour les gestionnaires.
Une amélioration de la réactivité des gardes forestiers,
notamment en cas de problèmes avec les éléphants, est
cependant demandée.
La mise en place de barrières barbelées autour
des parcelles est la mesure de prévention des conflits la plus
demandée. La relocalisation des animaux problématiques est exclue
par beaucoup à cause de son infaisabilité pratique. Plus d'un
tiers favorise l'élimination des animaux problématiques, en
particulier les sangliers. Un système de compensation financière
efficace des dégâts est également privilégié,
notamment vis-à-vis de l'assurance d'un emploi stable et
régulier. Ceci semble donc confirmer le désir de ces personnes de
pouvoir subvenir à leurs besoins principalement par l'agriculture. Les
personnes interviewées, notamment celles ressentant une forme
d'insécurité, sont globalement favorables à la
création d'une structure de gestion des conflits hommes-animaux
réunissant à la fois les résidents et les autorités
de l'AWS. La mise en place a minima d'un dialogue plus développé
avec ces derniers est une préoccupation partagée par la
majorité.
83
8. DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
Cette partie abordera d'abord les limites rencontrées.
Les résultats obtenus seront ensuite discutés. Enfin, des pistes
de solutions pour réduire les conflits hommes-animaux en
périphérie de l'AWS et leur impact seront proposées.
8.1. Limites rencontrées
D'une manière générale, il convient
d'être prudent vis-à-vis de l'utilisation de données issues
de méthodes qualitatives, comme celle du questionnaire, quand le sujet
abordé peut soulever des réactions importantes. Il peut y avoir
des risques d'exagération. Les dommages perçus et les dommages
réels peuvent en effet être différents (Dickman, 2010). En
outre, un échantillon de 84 personnes peut être trop limité
pour certaines analyses.
Plus spécifiquement, les données obtenues sur
les conflits hommes-faune sauvage lors de l'enquête se sont
avérées insuffisantes pour mener à bien l'analyse des
configurations spatiales favorisant le risque de dégradations agricoles.
Les données sur la fréquence de venue des sangliers et des
sambars sont, en effet, trop asymétriques, et leurs analyses perdent
toute portée. Je ne m'attendais pas du tout à ce que tous les
foyers signalent des dégradations agricoles, et qu'une grande
majorité observe des sangliers et des sambars quotidiennement. Des
données sur l'ampleur des dégâts provoqués auraient
pu permettre d'offrir une variable assez différenciée pour
être analysée correctement.
La fréquence des venues des sangliers et des sambars a
pu être de plus exagérée par les personnes
interviewées par exaspération vis-à-vis de l'ampleur des
dégâts causés. Ces deux espèces venant
principalement la nuit, les estimations des visites peuvent être
biaisées. Les venues des macaques ont pu également être
sous-estimées, étant donné leur petite taille et
l'omniprésence d'arbres dans la zone du PRA.
Une analyse plus profonde du volet temporel aurait offert des
indices intéressants sur la variation des risques de dégradations
par les herbivores. Par exemple, selon les saisons, les éléphants
peuvent varier leurs régimes alimentaires et donc leurs rythmes de raids
agricoles (Loarie et al., 2009). Ceci demande néanmoins une
étude plus longue et plus régulière sur une année.
Une comparaison sur plusieurs années de l'amplitude des conflits avec
les variations climatiques (pluies, sécheresse et inondations) pourrait
également donner des pistes de réflexions intéressantes.
Les animaux peuvent également favoriser certaines cultures à
une
84
étape particulière de croissance des
espèces végétales cultivées (Jayson, 1998).
L'étude des régimes alimentaires des animaux et des
disponibilités en ressources alimentaires dans l'AWS (ainsi que leur
variation temporelle) permettrait de mieux saisir les motivations les poussant
à sortir de l'AWS. D'une manière générale, une
meilleure compréhension du point de vue de l'animal est certainement
nécessaire.
Il eût également été
intéressant de procéder à une analyse par grille en
comparaison à l'analyse des lignes les plus courtes entre la forêt
et les foyers, afin d'étudier plus en détail l'influence de la
densité humaine et de la couverture des sols.
De même, demander une justification des réponses
sur la question de l'impact ressenti sur la vie quotidienne (par exemple sur la
sécurité alimentaire, sur la sécurité
financière, sur l'insécurité...) aurait permis de mieux
comprendre la nature de l'impact causé par les venues de la faune
sauvage.
Surtout, une des limites principales de ce mémoire est
que je n'ai pas eu le temps de rediscuter avec les autorités de l'AWS
des résultats obtenus, notamment sur le volet social et sur les
réactions vis-à-vis des cas d'urgence. Je compte néanmoins
y remédier dès que possible.
8.2. Un problème de compétition pour
l'espace du PRA et ses ressources
L'établissement d'aires protégées, dont
l'accès est restreint, et les pressions anthropiques sur les
forêts au Kerala ont remis en cause le mode de vie de populations
à tradition forestière et les ont rendues vulnérables
économiquement et culturellement.
Le PRA d'Aralam visait à fournir à ces
populations vulnérables le moyen de subvenir à leurs besoins de
manière autonome par l'agriculture en distribuant des parcelles de
4000m2 pour chaque famille dans un espace adjacent à l'aire
protégée de l'AWS. Cette initiative a globalement
été acceptée par ses bénéficiaires. Ils
apprécient cet espace peu anthropisé par rapport au reste de la
région, qui offre un compromis entre une vie centrée sur la
forêt impossible à mener actuellement et une vie dans un espace
totalement domestiqué par l'homme. Ils manifestent, de plus, un
réel désir de pouvoir vivre de l'agriculture.
Cependant, la proximité à l'AWS remet en cause
l'objectif de l'initiative de la PRA. Les dégradations agricoles
incessantes des herbivores sauvages empêchent les habitants de cultiver
intensivement leurs parcelles, et donc de pouvoir subvenir à leurs
besoins à travers des cultures commerciales ou vivrières. Ces
animaux, particulièrement les éléphants, créent un
fort sentiment d'insécurité chez les habitants. Bien que les
gestionnaires de l'AWS et l'Aralam Farm mettent en oeuvre des programmes de
soutien à ces habitants, ils sont loin d'être suffisants. En
85
conséquence, de nombreuses familles ont choisi de ne
pas venir y vivre, et ceux qui y habitent sont contraints de rechercher des
emplois journaliers, et donc précaires, à l'extérieur de
la zone du PRA.
La mise en oeuvre du PRA s'est donc avérée peu
réfléchie et ne favorise pas la cohabitation entre hommes et
faune sauvage, alors que les autorités de gestion de l'AWS avaient
conseillé de ne pas distribuer de parcelles directement adjacentes
à l'AWS et de conserver plutôt cet espace pour l'Aralam Farm.
Outre des inégalités d'exposition aux risques, la mise en place
du PRA a créée des inégalités lors de la
distribution des parcelles. Certaines personnes ont, en effet, obtenu des
parcelles d'hévéas, dont l'exploitation permet d'assurer
d'importants revenus et qui est peu sujette aux dommages animaux. La plupart
ont cependant obtenu des anarcadiers, dont le prix des fruits
commercialisables, les noix de cajou, a fortement baissé sur les 15
dernières années d'après les habitants.
Malgré la récurrence des conflits et leur impact
sur la vie quotidienne, les habitants de la zone du PRA ne manifestent
cependant globalement pas de sentiments agressifs envers les animaux. La
majorité soutient en effet la conservation de la faune et leur accorde
le droit de vivre. Bien qu'un tiers supporte l'élimination des animaux
problématiques (et non pas l'ensemble de l'espèce), ceci concerne
essentiellement les sangliers, dont les venues sont journalières et les
ravages très conséquents, notamment sur les cultures
vivrières. Le rapport que les résidents de la zone du PRA
entretiennent avec les animaux se caractérise par un respect pour le
droit des animaux à vivre mais aussi par un désir de
séparation spatiale plus marquée.
Je m'attendais à des complaintes beaucoup plus
importantes concernant l'Aralam Farm, qui représente l'héritage
assimilable au PRA, et les gestionnaires de l'AWS, qui sont en charge de la
gestion de la faune. De nombreuses promesses de développement
d'infrastructures n'ont pas été tenues. Cependant, malgré
le fait que les interviews aient intentionnellement largement
débordé le cadre des questions fixées, très peu de
personnes ont déploré la restriction de l'accès aux
ressources de l'AWS ou ont incriminé l'AWS pour les conflits, voir remis
en cause la gestion du PRA à travers l'Aralam Farm. Par exemple,
seulement un peu plus d'un tiers est insatisfait avec la gestion de la faune
sauvage par l'AWS alors que deux tiers des foyers estiment que la faune impacte
fortement la vie quotidienne. Ces personnes insatisfaites ont essentiellement
reproché aux autorités de l'AWS de ne pas assez réagir en
cas d'urgence avec les éléphants. Ceci indique d'une part que les
habitants semblent accepter le fait que les incursions animales soient
inévitables (du moins selon les capacités de l'AWS) et d'autre
part
86
que le sentiment d'insécurité représente
une préoccupation majeure. Le système de compensation actuel fait
également l'objet de critiques.
D'une manière générale, les habitants de
la zone du PRA n'ont donc pas incriminé les autres acteurs humains comme
étant la cause des conflits, directement (ex. les animaux venant de
l'AWS, ils pourraient être assimilés à l'AWS et à
ses gestionnaires) ou indirectement (les autorités de l'AWS sont
supposées prévenir les incursions animales). Le fait d'être
associé avec l'AWS, par exemple lors d'emplois ponctuels, semble
même s'associer d'une tolérance supérieure. Ils sont, en
majorité, seulement critiques d'une partie de la gestion des
conséquences de ces conflits, concernant principalement le
système de compensation et les réactions aux situations
d'urgences. Ils souhaitent globalement pouvoir plus interagir et collaborer
avec les gestionnaires de l'AWS.
L'héritage culturel de ces populations, qui
s'inscrivent plus dans une philosophie du présent, qui ont une
expérience plus importante de la cohabitation avec les animaux et qui
sont moins ancrés dans la matérialité que le reste de la
population kéralaise, participe sans doute à favoriser la
tolérance des animaux sauvages et à tempérer les
sentiments d'injustice et de rancoeur qui pourraient être
légitimement perçus. Beaucoup réussissant à obtenir
quelques journées de travail par semaine en dehors de la zone du PRA et
les parcelles offrant un revenu minimum (ex. noix de cajou), la plupart des
familles est en mesure de subvenir à ses besoins essentiels.
Sur ce terrain, les conflits entre humains ne sont donc que
peu prégnants, alors que les politiques de conservation de la
biodiversité et de compensation des Adivasi sont en grande
partie responsables de la difficile cohabitation avec les animaux sauvages. Les
résidents de la zone du PRA présentent un degré de
tolérance important, mais les incursions animales ont néanmoins
un impact majeur sur la vie quotidienne, principalement sur la capacité
à subvenir aux besoins de manière autonome et à travers le
sentiment d'insécurité ressenti. Les questions de la
mobilité des herbivores sauvages et de sa gestion sont donc au coeur des
conflits hommes-animaux en périphérie de l'AWS.
8.3. Une mobilité des animaux peu
comprise
La mobilité de la faune sauvage et les conditions
l'impactant demeurent encore peu comprises (Emel et Urbanik, 2010; Poinsot,
2012). Une multitude de facteurs peut en effet influencer les
déplacements des animaux. Pour comprendre comment et pourquoi ils sont
sources de conflits, il s'agit de prendre en compte à la fois les
dynamiques animales (leurs
87
stratégies et leurs caractéristiques), les
dynamiques écologiques (qui influencent la qualité et la
quantité de nourriture disponibles), les activités humaines
(l'utilisation des sols et les modifications du paysage) et les pratiques de
gestion des conflits hommes-animaux (ex. clôtures électriques,
relocalisation...) (Guerbois et al., 2012).
Les sangliers, les sambars, les éléphants et les
macaques sont les principaux animaux responsables des conflits sur le terrain
de la zone du PRA d'Aralam. Leurs mobilités sont essentiellement
déterminées par leurs stratégies de recherche
d'espèces végétales comestibles. Une étude des
configurations spatiales et environnementales pouvant favoriser les incursions
animales sur ce terrain a été menée afin de mieux
comprendre les facteurs influençant la mobilité de ces quatre
espèces.
Les animaux de l'AWS ont démontré des
préférences alimentaires plutôt marquées. Ils ne
semblent cependant pas rechercher un type de culture en particulier. D'une
manière générale, la densité humaine augmente
faiblement les risques perçus les animaux. Les routes et la distance au
refuge le plus proche ne s'associent pas à une diminution des venues,
sauf pour les macaques. Le lien entre la couverture des sols, qui est
corrélée à la qualité et la quantité
d'espèces végétales comestibles, et les raids des animaux
n'est également pas significatif, excepté pour les
éléphants. Ces derniers semblent ainsi s'aventurer dans les
parcelles humaines lorsque les espaces de végétation
intermédiaire sont faibles. Les mesures de prévention mises en
place par les habitants ne sont pas efficaces pour prévenir les
incursions. Néanmoins, les méthodes auditives ou visuelles visant
à faire fuir les animaux sont généralement plus ou moins
effectives. Les résultats de ces analyses sont donc globalement
décevants, mais pourraient être améliorés (voir
partie 8.1).
Le fait que les incursions soient régulières
dans l'année et autant intenses peut en tous cas indiquer que l'aire de
l'AWS est certainement trop réduite et pas en mesure de satisfaire les
besoins alimentaires des populations animales l'habitant. Les
éléphants, qui sont les principaux créateurs de
brèches dans les mesures de séparation en bordure de l'AWS,
semblent, en particulier, venir pour profiter d'espaces de
végétation moins denses, qui ne sont pas présents dans
l'AWS. Le fait qu'ils montrent une tendance à éviter les signes
de présence humaine mais à venir plus fréquemment dans les
parcelles habitées quand les espaces de végétation
intermédiaires sont moindres va également dans ce sens.
La compréhension des tenants de la mobilité des
animaux sur ce terrain demeure donc un défi majeur pour la
résolution des conflits. Ceci permettrait de pouvoir concevoir des
solutions adaptées selon les espèces et les moyens à
disposition.
88
8.4. La gestion des conflits hommes-animaux en
périphérie de l'AWS
La gestion des conflits hommes-animaux sauvages est
actuellement effectuée à deux niveaux relativement
hermétiques : au niveau individuel par les habitants et au niveau de la
zone du PRA par les gestionnaires de l'AWS.
Les gestionnaires de l'AWS ont mis en place plusieurs mesures
de séparation des espaces humains et animaux sur toute la bordure de
l'AWS avec la zone du PRA : tranchées, murs et clôtures
électriques. Elles sont cependant mises à l'épreuve par
l'inventivité des animaux, notamment des éléphants, et
sont rapidement endommagées. Leurs coûts de mise en place et de
maintenance importants limitent les capacités des autorités de
l'AWS à les remettre en état promptement. Elles sont, en
conséquence, inefficaces comme le montrent l'intensité et la
fréquence de venues des animaux sauvages. Ils patrouillent, en outre,
tous les soirs pour faire fuir les animaux et répondre aux appels des
habitants.
Plusieurs actions d'augmentation des ressources alimentaires
à l'intérieur de l'AWS (plantation de bambous et d'arbres
fruitiers, éclaircissage de certains espaces...) ont également
été menées mais se sont avérées globalement
infructueuses. Des initiatives visant à fournir des moyens de
subsistance alternatifs (écotourisme, emplois forestiers ponctuels...)
ont également été lancées, mais leurs
portées sont très limitées.
Les habitants utilisent un certain nombre de mesures pour
limiter les venues des animaux sauvages (épouvantails, barrières
biologiques et en bois, barrières en tissu, voir barrières en fil
barbelés pour quelque uns), qui ne sont pas efficaces. Bien que
très peu montent la garde régulièrement et
assidûment, les résidents utilisent des méthodes auditives
et visuelles pour faire fuir les animaux une fois qu'ils sont rentrés
sur la parcelle, qui sont globalement efficaces. L'utilisation de chiens, pour
prévenir leurs propriétaires des venues d'animaux, permet
d'ailleurs certainement d'améliorer la vitesse de réaction,
notamment pour les éléphants.
Ils estiment globalement que les mesures de
ségrégation en bordure de l'AWS sont inefficaces et demandent en
priorité la mise en place de barrières barbelées autour de
leurs parcelles. Une meilleure réactivité des garde-forestiers,
lorsqu'ils sont contactés en cas d'urgence, est également
demandée.
La relocalisation des habitants est exclue. Moins d'un tiers
des personnes interrogées, en majorité des femmes, soutienne
l'élimination des sangliers problématiques. Ils montrent
également une préférence claire pour un système de
compensation amélioré, qui permet de
89
dédommager sérieusement les dommages subis,
notamment agricoles. Le fait qu'une grande partie des interviewés ait
interprété la proposition d'une compensation
améliorée comme un choix avec l'offre d'emplois stables confirme
ainsi le désir ressenti de pouvoir vivre des revenus de la parcelle qui
leur a été attribuée. À ce titre, il est dommage
que le concept d'assurance collective n'ait pas pu être bien
expliqué et ait été retiré du questionnaire.
Il existe, de plus, une forte volonté de pouvoir
participer à une initiative de gestion collective des conflits, et au
moins d'instaurer une plateforme d'échanges avec les autorités de
l'AWS.
8.5. Pistes de solutions
En tenant compte des dispositions des habitants, de la nature
des conflits et des particularités de la zone du PRA, plusieurs
solutions sont envisageables.
Dans un premier temps, il semble essentiel d'instaurer une
plate-forme d'échanges sur les conflits hommes-animaux en
complément des comités d'écodéveloppement. Ceci
permettrait à la fois d'obtenir des informations plus
détaillées sur les conflits et leurs tenants spatio-temporels,
ainsi que sur les attitudes et les perceptions des habitants, et
également de servir de support pour la mise en place d'actions
collectives selon les besoins et les possibilités. Ceci renforcerait le
dialogue et la confiance entre les deux parties. La création d'une telle
plateforme serait, de plus, facilitée par la volonté des
résidents de participer plus activement.
Cela peut permettre par exemple de faciliter la maintenance
des mesures de ségrégation spatiale en lisière de l'AWS.
Les habitants pourraient ainsi être responsabilisés sur une
portion de barrière électrique et rendre compte rapidement des
défections, voire de participer à la maintenance, comme c'est le
cas dans certains endroits du district voisin de Wayanad. À travers
cette plateforme, des essais de mesures de réduction des conflits
alternatives pourraient de plus être mis en oeuvre.
La prévention des incursions animales peut être
effectuée à plusieurs niveaux.
Les mesures de ségrégation spatiale modernes
sont déjà utilisées avec peu de succès par les
autorités de l'AWS. Outre la participation des habitants, seule une
augmentation des moyens à leur disposition permettrait d'en
améliorer l'efficacité.
90
Le contrôle des animaux est très difficile dans
ce contexte. La loi indienne interdit toute atteinte à
l'intégrité physique des animaux concernés
ici6, bien que ce statut ait pu être relâché pour
un temps limité dans des cas extrêmes. Par exemple, en 2016, les
macaques rhésus ont été déclarés comme
vermines pour 1 an dans 10 districts du nord de l'Inde, autorisant ainsi le
fait de les tuer7. Ces décisions sont cependant prises au
niveau juridique de l'état (l'Inde est un pays fédéral).
La relocalisation des animaux problématiques est très
coûteuse et n'est possible que pour les éléphants, les
autres espèces étant bien trop nombreuses.
Une solution plus intéressante serait de
développer les sources de nourriture dans l'enceinte de l'AWS. Les
autorités de l'AWS ont déjà essayé mais les plants
de bambous et d'arbres fruitiers ont été mangées ou
détruites avant d'avoir atteint leur maturité. Rishi (2009) a
néanmoins montré qu'il était possible de limiter les
dégâts lors de la croissance des jeunes pousses en les plantant au
milieu d'un couvert de lantaniers, espèce végétale
invasive non comestible par les herbivores et qui est présente au sein
de l'AWS.
Un aménagement du territoire offrirait une solution
beaucoup plus ambitieuse mais difficile à réaliser. Cela pourrait
consister à créer une zone tampon sur la partie adjacente
à l'AWS de la zone du PRA. Les habitants des parcelles
transformées pourraient se voir attribuer une nouvelle parcelle sur
l'espace de l'Aralam Farm, qui est toujours sous contrôle gouvernemental.
Ceci permettrait de fournir un espace ouvert propice aux herbivores absents de
l'AWS, et ainsi réduire les pressions sur les espaces humains. Plus
particulièrement, les éléphants ont montré une
tendance à moins venir dans les foyers quand il y a avait plus d'espaces
de végétation intermédiaire. Une zone tampon avec de tels
espaces d'une dimension suffisante pourrait donc potentiellement limiter les
incursions des pachydermes.
Au niveau des habitations, la plantation de cultures
prisées par les animaux en bordure des parcelles pourrait en limiter les
venues à l'intérieur. Surtout, l'identification de cultures non
appétentes pour la faune sauvage autoriserait une agriculture plus
intensive. À travers la plateforme d'échanges, les habitants
pourraient être sensibilisés aux types de cultures à risque
et à celles non risquées. Une forme d'agroforesterie plus
rentable que les anarcadiers pourrait certainement être
développée. Cependant, l'adaptabilité des animaux peut les
amener à changer de régime alimentaire et il s'agit donc
d'être prudent. Alors que dans cette étude, aucun raid agricole
n'ait été signalé sur les hévéas, Paleeri et
al. (2016) ont ainsi montré que les sambars
6 Selon The Indian Wildlife Act de 1972
(
http://envfor.nic.in/legis/wildlife/wildlife1.html,
accédé le 30/05/18)
7
http://www.downtoearth.org.in/news/rhesus-macaque-declared-vermin-in-himachal-pradesh-54270
(30/05/18)
91
pouvaient se nourrir de jeunes plants d'hévéas.
Bal et al. (2011) ont également démontré que les
éléphants dans les plantations de café en Inde du sud se
nourrissaient de baies de café.
Les mesures de séparation spatiale au niveau des
parcelles peuvent être améliorées. L'efficacité des
barrières barbelées, qui sont très demandées mais
coûteuses, mériterait dans un premier temps d'être
évaluée. Il a été difficile de juger de leur
utilité, car seulement quatre foyers en possédaient parmi les 84
foyers interviewés. Un certain nombre de mesure alternative et
accessible a été essayé à travers le monde avec
plus ou moins de succès : mur en briques faites avec du piment, dont
l'odeur repousse les éléphants (Chang 'a et al., 2016),
clôtures en corde en fibres de coco imbibés d'un mélange de
soufre et d'huile de graisse de sangliers (Vasudeva Rao et al., 2015),
utilisation de ruches d'abeilles pour décourager les
éléphants (Ngama et al., 2016)...
Le système de compensation actuel est
géré par l'AWS et ne permet qu'une seule indemnisation annuelle.
Il est critiqué car les garde-forestiers mettent du temps à venir
vérifier les dégâts et ont tendance à essayer de les
minimiser. Une solution alternative serait de mettre en place une forme
d'assurance collective des dégâts occasionnés par les
animaux sauvages. Chen et al. (2013) proposent ainsi que les habitants
volontaires payent un premium mensuel et se voient compensés en cas de
dégradations agricoles, le gouvernement et les touristes, via une taxe
sur les entrées dans l'AP, participant également
financièrement. Une telle solution serait certainement envisageable,
étant donné que l'AWS est libre de décider les prix
d'entrée de l'aire protégée, et pourrait remplacer la
méthode actuelle. L'amélioration du système de
compensation est cependant dépendante dans un premier temps d'une
réduction des venues des animaux. En effet, dans la situation
présente, si de nombreuses personnes initiaient une agriculture plus
intensive, les dégâts seraient certainement trop
élevés pour être suffisamment compensés.
Il s'agirait aussi de proposer des moyens de subsistance
alternatifs à l'agriculture pour assurer un entre-deux entre
l'agriculture à risque avec les animaux et les emplois journaliers
précaires et éloignés. La remontée de la
filière des noix de cajou pourrait par exemple fournir des
débouchés intéressants. En effet, les noix de cajou sont
actuellement seulement ramassées et directement vendues à bas
prix. D'autres initiatives comme la formation à des techniques et
méthodes de couture pourraient également aider à
diversifier les sources de revenus des habitants de la zone du PRA.
D'une manière générale, les personnes de
plus de 55 ans ressentent le plus intensément les conflits, notamment de
par leur dépendance plus importante à l'agriculture. Des essais
de
92
mesures de prévention plus efficaces devraient donc se
concentrer en partie sur cette partie de la population.
La réduction de la magnitude et des impacts des
conflits hommes-animaux en périphérie de l'AWS requiert
certainement une combinaison de l'ensemble de ces solutions : limiter les
incitations des animaux à sortir de l'AWS, limiter les incursions et les
dégâts sur les parcelles, compenser les dégâts et
fournir des moyens alternatifs de subsistance. L'instauration d'une plateforme
d'échanges et de gestion collective des conflits permettrait de
faciliter la compréhension des conflits et leurs résolutions. Le
fait que les personnes déjà en contact avec l'AWS montrent une
forme de tolérance supérieure incite dans tous les cas à
instaurer des échanges plus importants entre l'AWS et les habitants,
notamment pour les femmes et les personnes ayant une famille à charge
qui semblent moins tolérants.
93
9. CONCLUSION
L'établissement d'aires protégées et la
mise en oeuvre de politiques de réhabilitation de populations
vulnérables ont créé une situation de conflits avec les
animaux sauvages en périphérie de l'Aralam Wildlife Sanctuary.
Les habitants sont relativement tolérants vis-à-vis de la
conservation, mais sont très touchés par ces conflits, notamment
par l'impossibilité de pratiquer une agriculture plus intensive et par
le sentiment d'insécurité ressenti. Ces conflits hommes-faune
dans la zone du PRA sont essentiellement liés aux incursions
d'herbivores sauvages (principalement éléphants, sangliers,
sambars et un peu moins macaques), qui sortent de l'AWS pour rechercher de la
nourriture. La mobilité de ces animaux et sa gestion sont donc au coeur
du problème.
Cette étude s'est attachée dans un premier temps
à déterminer les configurations spatiales et environnementales
associées aux incursions de ces animaux, et par extension, favorisant
les risques de conflits. L'aire de l'AWS ne correspond certainement pas
à la zone vitale des animaux l'habitant. Les mesures de
prévention des visites animales mises en place par les habitants ne sont
pas efficaces. Des préférences alimentaires précises ont
été remarquées, même si les animaux ne semblent pas
venir spécifiquement pour certaines espèces
végétales. Les éléphants montrent une propension
à moins venir dans les espaces humains lorsque les espaces de
végétation intermédiaire sont plus abondants. Les macaques
s'aventurent moins à distance de la forêt. La présence
d'habitations s'accompagne d'une plus faible fréquence de venues des
quatre espèces animales. La présence de routes ne présente
pas d'association significative avec les déplacements de la faune
sauvage. Ces analyses ont cependant été limitées par le
choix des variables et pourraient être affinées, notamment pour
les sangliers et sambars, en intégrant une variable sur l'ampleur des
dégâts causés.
Les habitants de la zone du PRA présentent globalement
des attitudes positives envers les animaux et la conservation, mais souhaitent
une séparation spatiale plus marquée. Ils souhaitent en
priorité l'instauration de barrières barbelées autour de
leurs parcelles, une amélioration du système de compensation et
une meilleure réaction des autorités en cas de situations
d'urgence. Ils ne sont globalement pas en situation de conflit avec les
autorités de l'AWS et sont particulièrement demandeurs d'une
gestion des conflits plus partagée. L'analyse des déterminants
socio-culturels n'a globalement pas montré d'associations.
Néanmoins, les personnes en contact avec l'AWS, notamment par des
emplois ponctuels, sont plus tolérantes et ont une vision plus positive.
Les personnes âgées ressentent plus fortement les conflits.
94
L'amélioration de la gestion des conflits sur ce
terrain requiert certainement une combinaison de mesures visant à
prévenir les incursions animales (amélioration des
clôtures, accroissement des ressources alimentaires dans l'AWS...) et
à diminuer l'impact des dégâts sur les habitants (sources
de revenus alternatives, système de compensation
amélioré...). L'instauration d'une plate-forme d'échanges
et de collaboration entre les gestionnaires de l'AWS et les habitants
permettrait d'améliorer la compréhension des conflits,
d'accroître la tolérance des résidents et de mettre en
oeuvre, conjointement et plus efficacement, ces mesures de réduction des
conflits.
Ce mémoire s'est attaché en priorité
à étudier les conflits hommes-animaux tels qu'ils apparaissent
actuellement sur ce terrain et à chercher des solutions pratiques visant
à les réduire. Les thématiques de justice environnementale
et de droits humains mériteraient cependant d'être approfondies.
Une étude plus qualitative intégrant une dimension ethnographique
et historique à travers une analyse de political ecology
offrirait une meilleure compréhension de la source de ces conflits et de
leurs impacts indirects sur les habitants, notamment d'un point de vue
psychosocial. En outre, une approche de géographie animale rigoureuse
permettrait de mieux saisir le point de vue de l'animal quand il entre en
interaction avec les sociétés humaines, ce qui motive sa
mobilité et comment il s'adapte à ces interactions.
95
ANNEXES
Annexe 1 : Questionnaire administré lors de
l'enquête sociale
Questionnaire - Household survey
This survey is part of a study to better understand the
interactions between people and wild animals around the Aralam Wildlife
Sanctuary. The objective of the survey is to find out what people think about
wildlife and what are the problems associated with the wild animals. All
answers will be kept confidential and considered anonymous.
Household Id No : Location (lat./long.) :
Date:
Basic Information:
1. How many years have you been living here?
2. What is the main source of income of the family? 1) Farming
2) Agricultural
Labour 3) Non-agricultural Labour 4) Other:
3. Are you cultivating your land? 1) Subsistence 2)
Commercial
3) No cultivation If yes, what do you cultivate?
4.
96
Do you have domestic animals? 1) Cows 2) Goats 3) Chickens 4)
Dogs 5)
Others .
5. Do you collect natural resources from the surroundings? 1)
Firewood 2)
Water 3) Medicinal plants 4) Others :
If yes, how far are you going from your home (in minutes)
: .
6. Did you receive any income or benefit from the wildlife
sanctuary? 1) Yes 2) No
If yes: What?
7. Did you receive any income or benefit from the Aralam farm?
1) Yes 2) No
If yes: What?
Human-wildlife conflict:
8. Are you experiencing problems with wild animals? 1) Yes 2)
No
9. What kind of problems? 1) Crop raiding 2) Material damages 3)
Physical injuries 4) Insecurity 5)
Other:
10. Which species are involved?
Species
|
Crop raiding
|
Material Damages
|
Physical injuries
|
Insecurity
|
|
|
Elephants
|
|
|
|
|
|
|
Wild boars
|
|
|
|
|
|
|
Monkeys
|
|
|
|
|
|
|
Sambars
|
|
|
|
|
|
|
Tigers
|
|
|
|
|
|
|
97
Wild dogs
11. Which specie is most problematic?
12. How often are the animals coming?
Conflicts Once
|
in a year More
|
than once in the year
|
Every month
|
Every week
|
Never
|
Elephants
|
|
|
|
|
|
Wild boars
|
|
|
|
|
|
Monkeys
|
|
|
|
|
|
Sambars
|
|
|
|
|
|
Tigers
|
|
|
|
|
|
Wild dogs
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
13. How often are the crops raided?
Conflicts Once
|
in a year More
|
than once in the year
|
Every month Every
|
week
|
Never
|
Elephants
|
|
|
|
|
|
Wild boars
|
|
|
|
|
|
Monkeys
|
|
|
|
|
|
Sambars
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
b.
14. Which crop are raided? a. By elephants:
98
By wild pigs:
c. By monkeys:
d. By sambars:
e. .:
f. :
15. Which crop are damaged? a. By elephants:
b.
99
By wild pigs:
c. By monkeys:
d. By sambars:
e. .:
f. :
16. Which month are the raids most intense?
17. At what time of the day the raids are likely to occur? 1)
Dusk 2) Daytime 3) Dawn 4) Night
18. Why do you think the wild animals are coming out of the
sanctuary? 1) Lack of forage in the sanctuary 2) Lack of water 3) Crop
preferences 4)
Other:
19. 100
Have you applied for compensation? 1) Yes 2) No
If yes, have you received compensation? 3) Yes 4) No If no,
why?:
20. Are the raid increasing in the past years? 1) Highly
increasing 2) Increasing 3) Stable 4) Decreasing
If increasing, why? 1) Wildlife population increases 2) People
and
theirs activities 3) Wildlife behavior 4) Preventive measures
inadequate 5) Other :
21. How much do you feel the wild animals are impacting your
life? 1) Not at all 2) A
bit 3) A lot
22. Were you experiencing conflict with wild animals in your
previous home?
23. What kind of measures are you taking to prevent the
conflicts? Are these measures effective?
Measures
|
Yes/No
|
Not effective
|
Partly Effective
|
Effective
|
Guarding
|
|
|
|
|
Tissu barriers
|
|
|
|
|
Wooden barriers
|
|
|
|
|
Biofencing
|
|
|
|
|
Metal barriers
|
|
|
|
|
Scarecrows
|
|
|
|
|
Dogs
|
|
|
|
|
Noise deterrents
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
Visual deterrents
|
|
|
|
|
101
Management and resolution of conflicts
24. What is wildlife for you?
25. Are some of the local wildlife particularly important to the
local people, their
livelihood or the nature in the area? 1) Yes 2) No
If yes, which species and why?
26. Do you think wild animals should be protected? 1) Yes 2)
No
If yes, why:
27.
102
Do you feel the forest authorities are doing a good job to manage
the animals?
28. What should be done to reduce the conflicts?
a. Better fencing
b. Relocate people
c. Relocate problematic animals
d. Kill problematic animals
e. Support for alternative source of income/crops
f. Better compensation
g. Increase the number of forest guards
...
h. Others:
103
29. Are you involved in one the EcoDevelopment committees? 1) Yes
2) No
30. Are you involved in another committee regarding the wildlife
conflicts? 1) Yes 2) No
31. Would you be interested to be involved in the management
of conflicts? 1) Yes No)
a. Give your opinion to the wildlife sanctuary
b. Participate in a committee supported by the wildlife
sanctuary
c. Participate in a village comitee (only the people
32. Extra suggestions, informations?
104
Other
33. Gender : 1) Male 2) Female
34. Age :
35. Highest education :
36. Number of person in the household : Adults Children
(below 18)
105
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118
TABLE DES FIGURES
Figure 1: Aires protégées de la
région 26
Figure 2 : L'Aralam Wildlife Sanctuary 29
Figure 3:Age des interviewés 34
Figure 4 : Principales sources de revenus 36
Figure 5: Bénéfices obtenus de la part des
gestionnaires de l'AWS 38
Figure 6:Bénéfices obtenus de la part de
l'Aralam Farm 39
Figure 7:Types de conflits reportés 41
Figure 8:Espèces animales causant des
dégradations agricoles 43
Figure 9: Fréquence de venue des sangliers 44
Figure 10: Fréquence de venue des sambars 44
Figure 11: Fréquence de venue des
éléphants 45
Figure 12: Fréquence de venue des macaques 45
Figure 13: Mesures de réduction des conflits
utilisées et perceptions de leur efficacité 55
Figure 14:Carte des dégradations agricoles
reportés par les foyers interviewés 59
Figure 15: Carte du nombre de voisins entre les foyers
interviewés et la forêt 61
Figure 16: Carte de couverture des sols 66
Figure 17:Impact ressenti des conflits sur la vie
quotidienne 75
Figure 18:Perceptions de la gestion de la faune sauvage
77
Figure 19 : Attitudes envers la résolution des
conflits 79
Figure 20:Attitudes envers une initiative de gestion
collective des conflits 81
TABLE DES TABLEAUX
Tableau 1: Cultures pratiquées 37
Tableau 2: Préférences alimentaires des 4
espèces animales étudiées 51
Tableau 3: Représentations de la vie en
périphérie de l'AWS 71
Tableau 4 : Animaux ayant une valeur pour les habitants de la
zone du PRA 73
Tableau 5: Raisons en faveur de la conservation 74
119
TABLE DES MATIERES
REMERCIEMENTS 2
SOMMAIRE 3
1. INTRODUCTION 4
1.1. Conservation et coexistence conflictuelle entre hommes et
animaux 4
1.2. Les conflits hommes-animaux sauvages 6
1.3. Dimension environnementale des conflits hommes-animaux
sauvages 8
1.3.1. Dimension animale : des comportements et des
préférences évolutives 9
1.3.2. Activités humaines et dynamiques
paysagères 10
1.4. Dimension humaine des conflits hommes-animaux sauvages
12
1.4.1. Des représentations subjectives et complexes
13
1.4.2. Un contexte socioculturel à prendre en compte
14
1.4.3. Un contexte socio-spatial et des jeux d'acteurs
déterminants 15
1.5. La géographie et l'étude des relations
hommes-animaux sauvages 17
1.6. Les conflits hommes-animaux en périphérie de
l'Aralam Wildlife Sanctuary 19
1.7. Objectifs du mémoire et hypothèses 22
2. CONTEXTE DE L'ÉTUDE 24
2.1. L'Aralam Wildlife Sanctuary (AWS) 24
2.2. La zone du Programme de Réhabilitation des
Adivasi (PRA) 27
3. MÉTHODOLOGIE 30
3.1. Entretiens non-structurés 30
3.2. Enquête sociale à l'aide d'un questionnaire
30
3.3. Analyse statistique 32
3.4. Analyse spatiale 32
4. CARACTÉRISTIQUES SOCIOÉCONOMIQUES DE LA
POPULATION
INTERVIEWÉE 34
5. CARACTÉRISTIQUES DES CONFLITS HOMMES-ANIMAUX EN
PÉRIPHÉRIE DE
L'AWS 40
5.1. Opinions des habitants de la zone du PRA 40
5.1.1. Les types de conflits hommes-faune sauvage 40
5.1.2. Les dégradations agricoles 42
5.2. Opinions des gestionnaires de l'AWS 46
120
6. CONFIGURATIONS SPATIALES ET RISQUES DE DÉGRADATIONS
AGRICOLES
|
49
|
|
|
|
6.1.
|
Utilisation des sols et risques de raid agricoles
|
50
|
|
6.2.
|
Mesures de réduction des conflits et risques de
dégradations agricoles
|
53
|
|
6.3.
|
Analyse spatiale visuelle et distance à la forêt
|
57
|
|
6.4.
|
Présences humaines et risques de dégradations
agricoles
|
60
|
|
6.5.
|
Couverture des sols et risques de dégradations agricoles
|
63
|
7.
|
ATTITUDES DES HABITANTS ET DÉTERMINANTS SOCIO-CULTURELS
|
68
|
|
7.1.
|
Représentations de l'aire protégée et de
la faune sauvage
|
70
|
|
7.2.
|
Attitudes envers la conservation
|
73
|
|
7.3.
|
Perception de l'impact des conflits
|
75
|
|
7.4.
|
Opinions de la gestion de l'Aralam Wildlife Sanctuary
|
76
|
|
7.5.
|
Attitudes envers la résolution des conflits
hommes-animaux
|
78
|
|
7.6.
|
Attitudes envers une gestion collective des conflits
hommes-animaux
|
80
|
8.
|
DISCUSSIONS ET RECOMMANDATIONS
|
83
|
|
8.1.
|
Limites rencontrées
|
83
|
|
8.2.
|
Un problème de compétition pour l'espace du PRA
et ses ressources
|
84
|
|
8.3.
|
Une mobilité des animaux peu comprise
|
86
|
|
8.4.
|
La gestion des conflits hommes-animaux en
périphérie de l'AWS
|
88
|
|
8.5.
|
Pistes de solutions
|
89
|
9.
|
CONCLUSION
|
93
|
ANNEXES 95
BIBLIOGRAPHIE 105
TABLE DES FIGURES 118
TABLE DES TABLEAUX 118
TABLE DES MATIERES 119
|