§8. La refondation de l'aide internationale
« Aucun peuple ne peut développer l'autre
peuple ». Du fait du poids de l'aide publique dans le budget, la
gouvernance de l'aide est partie intégrante de la gouvernance de la RDC.
Cette gouvernance actuelle est un des facteurs constitutifs de la crise
structurelle du pays. C'est donc à une refondation de cette aide qu'il
faut inviter les Partenaires Techniques Financiers (PTF), accoutumés
à se percevoir comme ceux qui jugent plutôt que ceux qui sont
jugés.
La coordination de l'aide, sur quoi les efforts ont
porté jusqu'à présent, a de grands mérites mais
peut aussi avoir pour effet pervers de réduire encore les marges de
liberté de peuple congolais, face à des prescriptions et
conditionnalités définies en dehors d'eux. Le transfert de l'aide
par projet à l'aide budgétaire était supposé
répondre à cette critique mais il s'est concentré sur le
niveau national et n'a pas permis ou stimulé la réflexion en
amont sur les modalités de la gouvernance congolaise elle-même.
L'aide internationale, au même titre que les ressources
naturelles, est une rente et sa distribution devient un des enjeux majeurs de
la conquête du pouvoir politique, d'autant plus que la rente est
concentrée au niveau national. S'entretenant mutuellement dans
l'aveuglement d'une RDC bon élève de la coopération
internationale, les responsables de l'aide et les responsables politiques de la
RDC se sont trouvé prisonniers, voire victimes, de la fiction qu'ils
avaient eux-mêmes construite et dont il devient de plus en plus difficile
de sortir.
Les différents volets de la stratégie de
refondation de la RDC ont déjà permis d'esquisser les grandes
lignes d'une refondation de l'aide.
v Consacrer 1% de l'aide à l'effort de refondation
permettra aux différents acteurs sociaux du pays de mener la
réflexion collective nécessaire pour l'ensemble du pays tout en
prenant en compte la spécificité de chaque secteur.
v Consacrer 10% de l'aide à un fonds
dédié à la délivrance des services à la
population et 10% à un fonds de développement économique
privilégiant le développement local permettra à la fois
une transparence de l'aide vis à vis des citoyens, ce qui est la
meilleure garantie de lutte contre la corruption, une redistribution de l'aide
au profit des différentes provinces de la RDC.
Tant que les pays riches ou développés
continueront de faire de l'aide au développement un de leurs
instruments de politique et d'influence dans le domaine diplomatique et
commercial, l'esprit de cette aide continuera d'être
dévoyé, corrompu par des considérations qui n'ont
rien à voir avec les motivations exprimées et les
finalités déclarées. Dès lors que cette idée
est rompue, il est possible d'établir entre tous les
partenaires des cadres et des mécanismes de convergence de l'aide au
développement, qui rationalisent celui-ci et le rendent plus
efficaces. Dans ce cadre, l'on doit accepter que ce soient
les partenaires nationaux, bénéficiaires de cette aide qui
définissent les orientations et fixent les priorités et
non l'inverse.
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