2.1.2. Les conséquences socio-économiques
de l'exclusion bancaire des particuliers.
La définition du Centre Walras donnée ci-dessus
montre bien que le phénomène de l'exclusion bancaire
s'apprécie alors par des dégâts engendrés sur la
qualité de la vie sociale. Ainsi une personne exclue bancaire est
forcément confrontée à des problèmes sociaux. Cette
causalité se justifie dans le cas de la France où la
législation impose l'utilisation de la monnaie scripturale dans toutes
les transactions27. Ne pas détenir de compte courant ou
être limité à l'usage de tous les services bancaires est
lourd de conséquences non seulement au quotidien mais également
à plus long terme. Ne pas détenir de compte courant signifie en
effet ne pas pouvoir percevoir des revenus sous forme électronique
(salaire, pensions de retraite, allocations sociales), ne pas pouvoir
déposer son argent dans un lieu sûr, ne pas pouvoir
bénéficier des moyens de paiement scripturaux qui lui sont
associés pour effectuer des paiements et réaliser des versements
(Gloukoviezoff, 2005). Ne pas détenir de compte bancaire signifie aussi
ne pas pouvoir bénéficier des autres produits pour lesquels il
constitue le point d'entrée comme le crédit à court terme
(facilités de découverts, crédit à la consommation)
et les produits d'épargne, des produits
27 Les accords de Matignon de 1968 ont
consacré l'usage prioritaire du compte bancaire dans les transactions
avec l'obligation de verser les salaires dans des comptes bancaires (Alain
Plessis dans « Histoire des banques de
France ». Ces dispositions seront par la suite
étendues aux revenus sociaux.
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bancaires pourtant essentiels pour faire face à des
situations d'urgence et se projeter dans l'avenir.
Cela n'est pas exactement le cas des pays anglo-saxons
notamment des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne. Ici, le salaire est parfois
perçu sous forme de chèque non barré ou en
liquidité. L'absence de relation bancaire n'a donc pas
nécessairement un impact direct sur la vie sociale. Contrairement
à la France qui a décrété le droit au compte, la
bancarisation aux Etats-Unis s'est faite par la démocratisation du
crédit (Gloukoviezoff, 2005).
Mais quelque soit le pays développé
considéré, l'absence de relation bancaire est un facteur de
dégradation de la qualité de vie. Le niveau de vie et la
consommation de masse obligent les ménages à recourir à
des crédits et donc à entretenir nécessairement une
relation bancaire. A défaut, ils sont socialement marginalisés.
« L'exclusion bancaire étant elle-même une composante de
désaffiliation sociale » selon Servet (2000). Pour Peachey et Roe
(2004), la question de l'exclusion bancaire est partie intégrante d'une
problématique plus vaste de lutte contre l'exclusion sociale.
Sur le plan économique par son coût, l'exclusion
bancaire a pour conséquence de restreindre la consommation, dont le
rôle social n'est plus à démontrer. Mais elle peut
également la restreindre en décourageant le vendeur, ou
plutôt, un loueur potentiel. Ainsi, l'accès au logement, qui est
un maillon essentiel dans la chaîne de l'exclusion sociale pour les pays
développés, peut être compromis par la privation de moyens
de paiement scripturaux. En effet, l'absence de chéquier pourra rendre
impossible la location d'un logement car le propriétaire en
déduira un risque important d'impayés. L'achat des produits dans
des super marchés qui n'exigent que des cartes bancaires ne pourra plus
être possible pour ces particuliers exclus. Le paiement des factures par
virement bancaire ne pourra pas être possible pour ces particuliers, ce
qui freine l'économie.
Enfin, l'exclusion bancaire peut inciter certaines personnes
à sortir du cadre de l'économie légale. Un exemple permet
d'illustrer ce phénomène. Il concerne les personnes
confrontées à un plan de surendettement insoutenable, qui se
tournent vers l'économie parallèle pour atténuer la
pression budgétaire. Des travailleurs sociaux relatent d'ailleurs les
cas, rares mais particulièrement dramatiques, de femmes ayant
pensé ne plus avoir d'autres alternatives pour échapper au
surendettement que de se prostituer.
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Ce qui montre que la surliquidité bancaire qui pousse
les banques à exclure du système bancaire les particuliers a un
rôle très négatif, vue les conséquences que cela
cause aux exclus dans la société. Mais nous nous demandons si
d'autres facteurs autres que la surliquidité bancaire ne peuvent pas
aussi être à l'origine de cette exclusion bancaire des
particuliers ? Ce qui nous permet de voir les limites de la relation entre
surliquidité et exclusion bancaire.
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