Conclusion partielle
La présentation du milieu physique a permis de
comprendre le milieu dans lequel vit la population de Belgou. Le terroir
présente un paysage varié, avec des sols en général
pauvres et recouverts d'une végétation essentiellement herbeuse.
Les éléments du climat présentent dans leur ensemble une
variation spatio-temporelle. En plus de l'agriculture et de l'élevage,
les populations pratiquent plusieurs autres activités
génératrices de revenus. Parmi ces activités, la plus
importante est l'orpaillage qui mobilise aussi bien les hommes que les femmes.
La pratique de ces différentes activités permet aux populations
d'avoir des revenus pour faire face à l'incertitude climatique. Quelle
est alors la perception de la variabilité et du changement climatique
par les populations ? Que font-elles pour s'adapter à ce
phénomène ?
LA PERCEPTION PAYSANNE ET LES STRATEGIES D'ADAPTATION
AU CHANGEMENT CLIMATIQUE
DEUXIEME PARTIE
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Il s'agit dans cette partie de présenter la perception
paysanne du changement et de la variabilité climatique et de passer en
revue toutes les stratégies mises en place pour y faire face.
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CHAPITRE III :
LE CHANGEMENT ET LA VARIABILITÉ CLIMATIQUES
SELON LES POPULATIONS
Dans ce chapitre nous essayerons de faire ressortir la
perception des populations sur l'évolution du climat durant ces trente
dernières années. A partir des données
météorologiques recueillies à la station synoptique de
Dori, nous analyserons certains paramètres climatiques que nous mettrons
en rapport avec les déclarations des populations.
3.1 - LA REPRESENTATION DE LA VARIABILITE ET DU
CHANGEMENT
CLIMATIQUE PAR LES PAYSANS
Les enquêtes réalisées ont montré
que toute la population reconnaît l'évolution du climat surtout
après les sècheresses des années 1970. Elle
appréhende le changement et la variabilité climatique à
travers le déroulement des saisons et l'observation d'un certain nombre
de phénomènes au fil des ans.
3.1.1 - Les saisons
Les populations peulh de Belgou se basent sur les
éléments climatiques des deux grandes saisons de l'année
(la saison des pluies et la saison sèche) pour caractériser la
variabilité et le changement climatique.
3.1.1.1 - La saison pluvieuse
La saison pluvieuse est la période où on
enregistre les quantités importantes de précipitations. C'est le
moment le plus important de l'année pour les paysans car, la suite de la
saison en dépend. Le début de la saison, sa variation dans le
temps et dans l'espace, les signes annonciateurs de pluie, les quantités
d'eau tombées et les types de pluie sont autant d'indicateurs de
changement et la variabilité climatique pour les populations de
Belgou.
3.1.1.1.1 - Le début de la saison des pluies et
les premiers semis
La majeure partie des populations enquêtées (62%)
estiment que de nos jours, les premières pluies tardent à
s'installer, donc il y a un retard dans l'installation de la saison
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hivernale. Du coup, on constate un recul de la date des
premiers semis. Il y a une trentaine d'années, on enregistrait
suffisamment de pluies en mi-mai pour commencer les travaux champêtres.
Mais de nos jours, il faut attendre le mois de juin avant d'enregistrer les
précipitations suffisantes pour les premiers semis. Cependant d'aucuns
(21%) estiment n'avoir pas observé de changement dans l'installation de
la période hivernale. Les 17% n'ont pas d'opinion sur la question.
Contrairement au début de la saison pluvieuse, les populations pensent
que la saison sèche s'installe plus tôt qu'auparavant. En effet,
la fin des pluies qui se situait au début du mois d'octobre a connu un
recul vers le début du mois de septembre. Cet arrêt précoce
des averses annonce alors le prolongement de la saison sèche qui atteint
souvent 8 mois. Toutes les personnes enquêtées ont souligné
cela.
3.1.1.1.2 - Les signes annonciateurs de pluie
Lors de nos échanges avec certaines personnes
âgées du village, il a été fait cas de changement
observé sur les signes précurseurs de pluie ; c'est le cas de
l'assombrissement du ciel, les forts grondements de tonnerre accompagnés
d'éclairs. Les populations trouvent que ces signes sont aujourd'hui en
voie de s'amenuiser. Selon les interlocuteurs, le changement ou la disparition
progressive de ces signes a fait apparaître un nouveau type de pluie
:"les pluies surprises?. Ce sont des pluies qui tombent de
façon brusque et qui surprennent souvent les agriculteurs dans les
champs. Ils soulignent aussi le fait que généralement ce sont des
pluies de courte durée.
3.1.1.1.3 - La pluviométrie
De façon générale, les populations
perçoivent le changement et la variabilité à travers la
baisse de la pluviométrie. Elles déclarent qu'"il ne pleut plus
comme avant". Le changement est perçu à travers le nombre
d'évènements pluvieux et les quantités d'eau
tombées. La majorité de la population (90%) a observé une
baisse du nombre de jours de pluie. Cependant cette tranche de la population
n'est pas unanime sur l'évolution des quantités d'eau
tombées. En effet des 90%, certains (60%) estiment que malgré le
nombre réduit d'évènements pluvieux les quantités
d'eau reçues aujourd'hui sont supérieures à celles
d'autrefois ; d'autres (30%) par contre soutiennent que la baisse des
évènements pluvieux est synonyme de la baisse de la
quantité d'eau tombée. 2% estiment que le nombre de jours des
pluies et les quantités d'eau sont en hausse. Les 8% restants n'ont
constaté aucun changement
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du nombre de jours de pluie. Cependant leur remarque sur
l'évolution des proportions d'eau diffère car 5% estiment qu'il
ya une augmentation des quantités d'eau tombées et 3% soutiennent
le contraire.
Tous s'accordent sur le fait que quelle que-soit les
quantités d'eau reçues cela ne leur profite pas en saison
sèche car la rivière qui passe à côté du
village draine toute l'eau qui tombe en hivernage. Aussi, le bouli avec sa
faible capacité de rétention due à son ensablement est
soumis à la pression humaine, animale et à l'évaporation.
Il n'arrive donc pas à conserver l'eau pendant longtemps. Cette baisse
généralisée de la pluviométrie a donc un impact sur
la durée de la disponibilité en eau de surface.
3.1.1.1.4 - les pluies de mousson et la période
de crue du cours d'eau
La mousson s'installait au mois d'août. Mais
aujourd'hui, on constate que ce phénomène même s'il
continue d'apparaître, connais des variations dans leurs manifestations
et dans leur durée : installation précoce ou tardive,
irrégularité de l'intensité, etc. Ceci a un impact sur les
périodes de crue du cours d'eau qui borde le village dans sa partie
méridionale. De ce fait, les crues qui s'étalaient sur tout le
mois d'août connaissent également des variations. On observe
souvent des crues en juillet et même souvent en septembre, en fonction de
l'installation de la mousson.
3.1.1.1.5 - Les pauses pluviométriques
Ce sont des poches de sécheresse au cours de la saison
des pluies. Ces trêves pluviométriques n'excédaient pas
généralement dix jours. Aujourd'hui, elles peuvent durer vingt
jours et sont devenues la principale cause des mauvaises récoltes. Les
cultivateurs estiment que lorsque les pauses excèdent deux semaines,
elles jouent sur l'évolution des plantes et peuvent même
entraîner la mort de celles-ci. Elles sont plus dangereuses lorsque les
céréales sont au stade de l'épiaison.
3.1.1.1.6 - La répartition des pluies dans le
temps et dans l'espace
Les paysans ont remarqué une diminution de la
durée de la saison des pluies ainsi que la réduction de la
durée d'une pluie. Selon eux, la saison des pluies pouvait atteindre
auparavant 4 à 5 mois ; mais aujourd'hui elle n'excède pas 3
à 4 mois.
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Quant aux durées des précipitations, les
villageois soulignent la raréfaction des pluies de longue durée.
Avant, il pouvait pleuvoir du matin au soir. Mais actuellement ce sont des
évènements rares.
La répartition des pluies dans l'espace a
été relevée par les paysans comme élément de
changement. Ils constatent que les pluies ne couvrent plus de grandes surfaces.
La preuve on pouvait avoir des pluies qui arrosent tous le département
de Falangountou. Mais aujourd'hui, il peut pleuvoir dans un champ sans que le
voisin ne reçoive aucune goutte d'eau.
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