Année universitaire 2014-2015
Mention Éducation et formation
Parcours :
Professorat des écoles
L'école, un enjeu de
société
Présenté par : Vincent LE
DANFF
Discipline : PSHS
Site : Évry
Tuteur du mémoire : Martine
MESKEL-CRESTA
3
AUTORISATION DE DIFFUSION DU MÉMOIRE
PROFESSIONNEL
Je soussigné Vincent LE DANFF, agissant en
dehors de toute contrainte et sachant qu'en dehors de l'obligation de
déposer mes travaux, je suis libre d'en permettre ou non la diffusion,
autorise sans limitation de temps l'ESPE de l'Académie de
Versailles et l'Université d'Evry-Val-d'Essonne
à diffuser le mémoire professionnel intitulé
« L'école, un enjeu de société » que
j'ai rédigé en tant qu'étudiant en deuxième
année de Master Professorat des écoles, dans les conditions
suivantes :
Prêt en bibliothèque oui non
Reproduction sous forme numérique
- A des fins de conservation oui non
- A des fins de diffusion oui non
- Sur le réseau interne oui non
- Sur le réseau Internet oui non
Il est entendu que les éventuelles restrictions de mes
travaux ne s'étendent pas à leur signalement bibliographique dans
les catalogues de l'ESPE de l'Académie de Versailles et
l'Université d'Évry-Val-d'Essonne accessibles sur internet.
Lieu et date :
Signature :
5
Lorsqu'on regarde dans la bonne direction, il ne reste plus
qu'à avancer.
Proverbe bouddhiste
A Sophie Charbonnel, qui a su, de la meilleure des
manières, orienter mon regard dans la bonne direction.
7
A Hélène Jacob.
9
REMERCIEMENTS
Je souhaiterais, en tout premier lieu, remercier avec une
profonde sincérité ma tutrice professionnelle, Sophie
CHARBONNEL. Je remercie Sophie pour la confiance qu'elle a su m'accorder
tout au long de l'année, et particulièrement dans les moments
difficiles. Je la remercie pour sa gentillesse, son sens de la
pédagogie, son écoute et sa disponibilité.
Je remercie Pierre VALLÉE, avec qui j'ai eu la
chance de partager ma première année de classe et pour lequel
j'ai un profond respect, ainsi que Martine MESKEL-CRESTA, pour son
aide apportée dans la réalisation de ce mémoire.
Je tiens à remercier mes camarades de promotion,
Kathleen RICHEFEU, Jennifer MILIDATE, Ludivine BILLARD,
Ludivine BEZBAK, Lucie BEAULIEU, Laura GUILLEMINOT,
Xavier VOEGEL, qui m'ont rendu l'année merveilleuse par leur
gentillesse, leur bonne humeur quotidienne, et qui feront de formidables
professeurs des écoles.
Je remercie certaines personnes qui m'apportent le sourire au
quotidien simplement par leur présence et leur amitié : Emma
CHABANI, Eve PHIAKEO, Mark PHIAKEO, Apolline
ORTEGA, Nacéra ALIOUANE, Henry PRZYBILSKI,
Anam NASIR, Sarah DUARTE.
Je remercie aussi de façon non exhaustive toutes les
personnes que je côtoie ou que j'ai eu la chance de côtoyer durant
mes études supérieures et qui ont fait de moi ce que je suis
aujourd'hui : Gille BASSIMBA, Éric MALUNDA, Arthur
LE BÉLIQUARD, Nathalie MOCKA, Sandra BRANCO,
Nima KOOSHKI, Loïck ORVILLE, Tyffen OFFELMAN,
Manon JAFFRE, Céleste HISQUAIN, Laurine PIAT,
Zyed MEDDEB, Lola CHAPUIS, Eddy OUANNA, Jordan
BIDOT, Jordy MAMBU, Marion MARCHISIO, Maxime TONDRE,
Sophie BERNIER...
J'ai également une pensée pour Viennis
MALANDA, avec qui les conversations et débats sont toujours pour
moi source de réflexion et d'élévation intellectuelle,
Claire GAULTIER, dont la gentillesse n'a d'égale limite que sa
bonté, ainsi que pour mes amies, italienne, Giulia BOSCHI, et
russe, Ksenia GRABARNIK, que je porte dans mon coeur.
Et pour finir, je remercie mes parents ainsi que mes
grands-parents, pour l'éducation qu'ils m'ont donnée, leur sens
du sacrifice et leur amour.
11
SOMMAIRE
Remerciements 9
Sommaire 6
Introduction 13
Partie 1 - Les valeurs républicaines françaises
19
Partie 2 - De la théorie à la pratique 37
Partie 3 - Des solutions envisageables 55
Conclusion 63
Annexe 67
Bibliographie 71
13
Introduction
14
15
Dans le préambule du Bulletin Officiel
hors-série n° 3 du 19 juin 2008, est inscrit le passage suivant
: « Donner à chaque enfant les clés du savoir et les
repères de la société dans laquelle il grandit est la
première exigence de la République et l'unique ambition de
l'école primaire ».
Dans cette phrase, deux objectifs primordiaux sont mis en
exergue. D'une part, la transmission des « clés du savoir
». L'école républicaine française doit enseigner
des savoirs théoriques et des savoir-faire, à travers certains
champs disciplinaires tels les mathématiques, le français, les
sciences expérimentales ou encore l'éducation physique et
sportive. D'autre part, la transmission des « repères de la
société dans laquelle il grandit ». L'école
républicaine française doit aussi transmettre des
savoir-être et des attitudes, à travers le champ disciplinaire
qu'est la culture humaniste, et notamment l'instruction civique et morale.
Comme le rappelle la loi d'orientation et de programme pour
l'avenir de l'école du 24-4-2005, l'école a donc comme
mission première, outre la transmission des connaissances, de faire
partager à la jeunesse les valeurs de la République.
Les valeurs de la République sont nombreuses et
rappelées dans la circulaire n° 2011-131 du 25-8-2011. Ces
valeurs sont récapitulées à travers les quatre grands
thèmes de l'instruction civique et morale :
- l'introduction aux notions de la morale .
· le
bien et le mal, le vrai et le faux, la sanction et la réparation, le
respect des règles, le courage, la loyauté, la franchise, le
travail, le mérite individuel ,
·
- le respect de soi .
· la dignité,
l'honnêteté par rapport à soi-même, l'hygiène,
le droit à l'intimité, l'image que je donne de moi-même (en
tant qu'être humain), la protection de soi ,
·
- la vie sociale et le respect des personnes .
·
les droits et les devoirs, la liberté individuelle et ses limites,
l'égalité (des sexes, des êtres humains), la politesse, la
fraternité, la solidarité, l'excuse, la coopération, le
respect, l'honnêteté vis-à-vis d'autrui, la justice, la
tolérance, la maîtrise de soi (être maître de ses
propos et de ses actes), la sécurité des autres
,
·
- le respect des biens .
· le respect du bien
d'autrui, le respect du bien public.
16
Ces valeurs, à la fois règles de conduite et
normes propres à notre société, doivent être tenues
comme universellement valables, incontestables et non négociables. En
effet, la vie sociale n'est possible que s'il existe des repères et des
limites. Ces lois morales jouent ce rôle et sont donc le socle de la vie
en communauté. Elles sont indispensables pour permettre à tous de
vivre ensemble, dans un climat de paix. Cependant, ces valeurs ne sont pas
innées, c'est-à-dire naturelles chez l'enfant. Pourtant, elles
sont nécessaires. Par conséquent, elles doivent être
enseignées, et ce, dès le plus jeune âge. En atteste
l'article L. 321-2 du code de l'éducation qui dispose que «
La mission éducative de l'école maternelle f...] apprend les
principes de la vie en société. ».
L'enseignant contribue donc pleinement à l'acquisition
de ces valeurs. Mais comment doit-il agir ? Doit-il les imposer sans que ses
élèves n'en comprennent le sens ? Doit-il refuser la discussion
et imposer des règles d'action sans chercher à expliciter les
raisons ? Non et comme noté dans la Présentation du Bulletin
Officiel hors-série n° 3 du 19 juin 2008 : « Le
professeur des écoles ne saurait être un simple exécutant :
à partir des objectifs nationaux, il doit inventer et mettre en oeuvre
les situations pédagogiques qui permettront à ses
élèves de réussir dans les meilleures conditions.
». Il doit leur donner les moyens de réfléchir par
eux-mêmes et de forger leur propre opinion. Les élèves
doivent être en mesure d'interroger ces valeurs et comprendre pourquoi ce
sont elles qui nous servent de référence, en permettant de juger
et guider notre action. Ainsi, les élèves peuvent s'affranchir de
toute tutelle et deviennent libres : ils ne sont plus des individus dociles
uniquement soucieux de se conformer à des règles
préalablement établies, sans en comprendre le sens, mais
utilisent leur esprit critique. L'élève doit donc d'une part
comprendre l'importance des principes auxquels il peut se référer
dans sa conduite de tous les jours et d'autre part avoir la volonté
d'agir conformément à ces principes, de façon volontaire
et autonome. Il doit respecter ces valeurs parce qu'il pense que c'est mieux,
et non par peur d'une contrainte extérieure : il est donc responsable
à la fois devant les autres mais surtout, et avant tout, devant sa
propre conscience. Si tel est le cas, l'enseignant, qui a «
l'obligation de s'assurer et de rendre compte régulièrement
des acquis des élèves. » d'après le
Préambule du Bulletin Officiel hors-série n° 3 du 19 juin
2008, aura alors réussi la mission qui lui a été
confiée par l'école Républicaine.
17
Ainsi, et comme résumé dans le JORF
n°0266 du 16 novembre 2013 - Texte 55 : « L'objectif doit
être double : d'une part, aider les élèves à
intégrer dans leur comportement les valeurs fondatrices de la
République, indispensables pour vivre ensemble [...] d'autre part, les
amener à développer leur raison et leur esprit critique, ce qui
en chacun fait de lui un être autonome et responsable. » Les
élèves doivent adhérer aux valeurs de la république
et développer leur capacité de raisonnement.
Une fois que les objectifs théoriques sont
fixés, il est nécessaire de revenir au constat actuel, qui m'a
amené à traiter ce sujet passionnant qu'est l'instruction civique
et morale. Au sein de ma classe, le respect des règles de
civilité et de politesse n'est pas encore totalement acquis. Un travail
est à mener sur les points suivants :
- les formules de politesse telles que « bonjour » ou
encore « merci » ne sont pas habituelles ;
- les règles de vie de classe telles que le fait de
lever le doigt pour obtenir la parole ne sont pas toujours respectées
;
- les relations entre élèves sont parfois
problématiques avec des propos déplacés ou blessant en
classe ou dans la cour de récréation.
Ces comportements sont d'autant plus présents que la
société dans laquelle nous vivons n'est pas toujours en
adéquation avec ces valeurs républicaines : discriminations
quotidiennes, inégalités persistantes, culture de
l'individualisme, nombreuses incivilités, etc. Les principes
républicains sont difficiles à faire admettre et doivent donc
représenter un travail à part entière.
Partant de ce constat au sein de mon école, et plus
particulièrement de ma classe, il va être nécessaire de
trouver des pistes de travail pouvant amener des solutions pour y
remédier. Ce travail devra être réalisé sur deux
points précis :
- dans des séances d'instruction civique et morale
spécifiques (explication des notions, débats, étude de
documents...)
- au quotidien (rituels, travaux de groupes, projets
coopératifs,...)
18
D'où la question qui constitue ma problématique
:
Que faut-il mettre en place au sein de la classe pour
pouvoir amener l'enfant à
développer son esprit critique et
à comprendre, adhérer et agir conformément
aux valeurs
républicaines ?
19
Partie 1
LES VALEURS R E P U B L I C A I N E S
FRANÇAISES
21
Mercredi 7 janvier 2015, un attentat terroriste frappe le
journal satirique français Charlie Hebdo. S'en suivent de terribles
évènements. Dans Traité sur
l'inégalité, Voltaire écrivait : « Le droit
à l'intolérance est donc absurde et barbare ; c'est le droit des
tigres, et il est bien horrible, car les tigres ne déchirent que pour
manger, et nous nous sommes exterminés pour des paragraphes. »
Ce texte a été écrit il y a plus de deux siècles et
semble pourtant d'une évidente actualité ces dernières
semaines. Cette fois-ci, des Hommes n'ont pas été
assassinés pour des paragraphes, mais pour des dessins. Des dessins
symboles de liberté. Le bilan humain est lourd. Le bilan moral est
désastreux.
Cet évènement a engendré un élan
de solidarité sans précédent ces dernières
années. Des millions de personnes se sont réunies, partout en
France, pour un même combat : la défense de valeurs universelles,
de droits inaliénables propres à tout être humain. Ces
idées sont prônées :
? au niveau national : la Déclaration des droits de
l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ainsi que la Constitution du
4 octobre 1958 indiquent respectivement « L'ignorance, l'oubli, le
mépris des droits de l'homme sont les seules causes des malheurs publics
et la corruption des gouvernements » et « Le peuple
Français proclame solennellement son attachement aux droits de l'homme
».
? Au niveau européen : la Charte des droits
fondamentaux de l'Union Européenne proclamée le 7 décembre
2000 stipule que « Les peuples de l'Europe, en établissant
entre eux une union sans cesse plus étroite, ont décidé de
partager un avenir pacifique fondé sur des valeurs communes
».
? Au niveau mondial : dans la Déclaration
universelle des droits de l'homme de 1948, est inscrit « La
méconnaissance et le mépris des droits de l'homme ont conduit
à des actes de barbarie qui révoltent la conscience de
l'humanité ».
Pour beaucoup, le malheur des autres a été
ressenti comme un malheur personnel, engendrant un sursaut de
solidarité. John Fitzgerald Kennedy, dans son discours sur les droits
civiques du 11 juin 1963 abondait déjà dans ce sens : «
Menacer les droits d'un seul porte atteinte aux droits de tous. »
Les défenseurs des valeurs universelles ont fait front ensemble.
22
Si cette mobilisation est rassurante, elle est aussi et
surtout très effrayante. Derrière l'image de melting-pot qu'elle
donne, d'un peuple attaché au respect de l'être humain et des
droits dont ils doivent jouir, la réalité est plus sombre. Les
constats de la Commission nationale consultative des droits de l'homme en
2014 l'attestent. Celle-ci note la « résurgence d'un
racisme brutal, biologisant, faisant de l'étranger un bouc
émissaire ». Ainsi, il aura fallu attendre l'accomplissement
d'un pareil acte pour enfin réveiller les consciences des
français. Renouveau certain ou simple union nationale passagère ?
Difficile à dire, mais une chose est certaine : la France, pourtant
nation fondatrice des droits de l'Homme, va mal. Liberté,
Égalité, Fraternité... Notre devise est en danger.
Inquiétant certes, mais bien réel.
Faut-il être fataliste à la lecture de ce constat
? Non, bien évidemment. Faut-il réagir ? Oui,
impérativement ! Faisant un constat allant dans le même sens lors
de son appel du 18 juin 1940 sur les ondes de la BBC, le général
de Gaulle exhortait ainsi les français : « Mais le dernier mot
est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite
est-elle définitive ? Non ! » C'est à ce titre
uniquement que la France retrouvera ses lettres de noblesse et
préservera les libertés qu'elle a mis tant de temps à
acquérir.
23
I. La construction d'un esprit critique
L'Homme possède, en puissance, un esprit critique.
Celui-ci n'est donc pas inné et doit être développé
tout au long de son existence. Dans son Discours sur la servitude
volontaire, Étienne de La Boétie notait que « La
première raison pourquoi les hommes servent volontiers, est pour ce
qu'ils naissent serfs et sont nourris tels ». Il faut donner à
chaque individu les outils intellectuels leur permettant, quelles que soient
leurs convictions initiales ou celles de leurs proches, de devenir des citoyens
lucides, à même de raisonner par eux-mêmes.
Chaque personne doit construire son opinion personnelle et
doit être capable de savoir la remettre en question, la nuancer, voire la
modifier. Ainsi, chaque décision peut être prise en toute
connaissance de cause, et ainsi éviter les conséquences
préjudiciables comme le confirme Étienne de La Boétie,
toujours dans son Discours sur la servitude volontaire : «
C'est le peuple qui s'asservit, qui se coupe la gorge, qui, ayant le choix
d'être serf, ou d'être libre, quitte la franchise et prend le joug,
qui consent à son mal ou plutôt le pourchasse ».
Cette ouverture d'esprit permet ainsi d'aller à
l'encontre de tout conformisme, de tous les bien-pensants qui nous entourent et
pensent pour nous. Ainsi, la pièce de théâtre
d'Eugène Ionesco, Rhinocéros, en est le parfait exemple.
Le protagoniste, Bérenger, pourtant qualifié d'alcoolique, de
malpropre et de paresseux par ses amis au début de la pièce se
voit finalement être le seul capable de penser, de suivre son propre
raisonnement, lorsque les autres succombent à la facilité, en se
soumettant aux usages communément admis, à savoir la
transformation en pachyderme. Il résiste aux tentations, tandis que tous
autour de lui rejoignent progressivement la pensée de masse en faisant
preuve d'impétuosité. La pièce se termine sur les propos
de celui-ci, le montrant comme seul résistant, envers et contre tous.
Une expérience, réalisée en 1951 par le psychologue
Salomon Asch, donne aussi une dimension concrète à ces propos. Il
s'agissait d'une étude dont l'objectif était d'observer comment
certains individus réagissaient au comportement des autres :
24
? Des étudiants furent réunis pour un
prétendu test de vision. Tous étaient complices de
l'expérimentateur, sauf un, qui l'ignorait bien entendu. Des lignes
étaient affichées au tableau : une ligne modèle à
gauche et trois autres lignes à droite. Les étudiants devaient
comparer la longueur de la ligne modèle à celles des trois
autres. Les réponses s'avéraient relativement simples, la
longueur entre les lignes différant de plus de 5 cm. Tous les
étudiants donnaient leur réponse à l'oral. Salomon Asch
observa que le sujet, situé en avant dernière position,
était influencé par les réponses des autres
étudiants. Ainsi, lorsque la consigne était donnée aux
complices de produire à l'unanimité une réponse fausse,
beaucoup des sujets donnaient aussi la même réponse fausse. Un
certain nombre de sujets allaient donc à l'encontre de l'évidence
de leur propre vue, pour se conformer aux autres, du fait de la pression
sociale.
Albert Jacquard, dans son ouvrage intitulé Nouvelle
petite philosophie, écrit l'aphorisme suivant : « Apprendre
à vivre, c'est apprendre à garder les yeux ouverts ».
Garder les yeux ouverts, c'est-à-dire toujours rester sur ses gardes, ne
pas accepter ce que l'on nous dit sans l'avoir vérifié.
Être en quête de la vérité et faire preuve de
dialectique. Il s'agit de la condition nécessaire pour ne pas entrer
dans le jeu des tyrans, qui cherchent à imposer certaines idées,
telles que l'oppression des minorités, et pour qui les peuples ignorants
sont des proies faciles. Ceci peut être observé à travers
cette courte histoire de Raymond Chevalier : « Quatre hommes visitent
l'Australie pour la première fois. En voyageant par train, ils
aperçoivent le profil d'un mouton noir qui broute. Le premier homme en
conclut que les moutons australiens sont noirs. Le second prétend que
tout ce que l'on peut conclure est que certains moutons australiens sont noirs.
Le troisième objecte que la seule conclusion possible est qu'en
Australie, au moins un mouton est noir ! Le quatrième homme, un
sceptique, conclut : il existe en Australie au moins un mouton dont au moins un
des côtés est noir ! » Nous devons refuser les
informations indiscutables qui nous sont assénées,
résultant de comportements dogmatiques. Dans Le racisme
expliqué à ma fille, Tahar Ben Jelloun écrit : «
Les mots sont dangereux. Certains sont employés pour blesser et
humilier, pour nourrir la méfiance et même la haine. D'autres sont
détournés de leur sens profond et alimentent des intentions de
hiérarchies et de discrimination. D'autres sont beaux et heureux.
» Le canular d'Eric Lechner, intitulé « Le tueur
invisible », illustre parfaitement bien l'importance des mots.
L'endoctrinement et l'enfermement de l'esprit débouchent
forcément, petit à petit, sur des conséquences graves.
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Il est un fait certain : de l'ignorance, découle la
peur. Franklin D. Roosevelt, lors de son discours d'investiture à la
présidence des États-Unis le 4 mars 1933 refusait ainsi la peur :
« La seule chose dont il faut avoir peur, c'est de la peur
elle-même, cette peur inexprimable, irraisonnée et
injustifiée qui paralyse les efforts nécessaires à
transformer une déroute en une avancée. » Il faut
refuser la peur et donc l'ignorance. Ce fut le combat mené durant tout
le XVIIIème siècle, dit siècle des
lumières, par de nombreux philosophes tels que Montesquieu et Voltaire.
Comme le dit l'historien Zeev Sternhell, « Les lumières
voulaient libérer l'individu des contraintes de l'histoire, du joug des
croyances traditionnelles et non vérifiées. »
L'Encyclopédie, confectionnée par Denis Diderot et D'Alembert, en
est le symbole. Elle avait pour objectif de mettre le savoir à la
disposition de tous, et ainsi permettre au peuple de résister à
toute forme de propagande. Les propos du Dalaï Lama, lors de la remise du
prix Nobel de la paix, le 10 décembre 1989, résument bien ces
deux facteurs que sont le refus de l'ignorance et l'entraide : « Nous
dépendons les uns des autres à tellement d'égards qu'il
n'est plus possible de vivre dans l'isolement et l'ignorance de ce qui se passe
à l'extérieur. Nous devons nous entraider dans les
difficultés et le malheur, et mettre en commun les privilèges
dont nous jouissons. »
Télévision, radio, presse écrite,
internet,... Les médias de masse s'étant développés
par la suite, se former un jugement autonome, se construire un esprit libre
susceptible d'aller à l'encontre de l'émotionnel de ceux-ci est
devenu encore plus important. Avec l'arrivée d'internet ces
dernières années, les sources d'informations se sont
démultipliées. En effet, tandis que Gutenberg avait, lui, rendu
accessible l'écrit au plus grand nombre, internet l'a rendu beaucoup
plus rapide, voire instantané. L'ignorance n'est donc plus le vrai
problème. Il a été remplacé par l'erreur, comme
l'écrit Rousseau dans son Discours sur l'origine et les fondements de
l'inégalité parmi les hommes : « Recherchons la
première source des désordres de la société, nous
trouverons que tous les maux des hommes leur viennent de l'erreur bien plus que
de l'ignorance, et que ce que nous ne savons point nous nuit beaucoup moins que
ce que nous croyons savoir ». Savoir faire le tri dans le flot
d'informations dont nous sommes assommés est primordial. Les
nouveaux chiens de garde, reportage adapté de l'essai éponyme
de Serge Halimi, insiste sur la méfiance et le recul que nous devons
avoir vis-à-vis des médias. Pierre Bourdieu exprime aussi sa
méfiance vis-à-vis des médias, à travers une
conférence réalisée au collège de France, et
26
retranscrite dans le livre Sur la
télévision. De tous temps, la manipulation des masses fut
omniprésente : George Creel à la tête du Committee on
Public Information, la propagande soviétique au service de la dictature
Stalinienne ou encore Joseph Goebbels, le ministre du troisième Reich
à l'Éducation du peuple et à la Propagande. D'ailleurs, ce
dernier l'expliquait très bien en tenant ces propos : « A force
de répétitions et à l'aide d'une bonne connaissance du
psychisme des personnes concernées, il devrait être tout à
fait possible de prouver qu'un carré est en fait un cercle. Car
après tout, que sont « cercle » et « carré »
? De simples mots. Et les mots peuvent être façonnés
jusqu'à rendre méconnaissable les idées qu'ils
véhiculent. » Plus récemment, on peut citer l'affaire
des couveuses Koweitiennes, qui permit, à travers le faux
témoignage de « l'infirmière Nayirah », de favoriser
l'entrée de l'Occident dans la seconde guerre du Golfe. Dans le
documentaire de Jean-Pierre Garrabos, In democracy we trust, le
journaliste conclut à juste titre : « Celui qui gagnera la
prochaine guerre n'est pas celui qui aura la plus grosse bombe, mais celui qui
racontera la meilleure histoire. ». C'est donc l'inertie qu'il faut
combattre, pas l'hérésie.
Epicure disait « Quand on est jeune, il ne faut pas
hésiter à philosopher et quand on est vieux, on ne doit pas se
lasser de philosopher, car personne n'est trop jeune ni trop vieux pour prendre
soin de son âme. » Il n'y a pas donc pas de bons moments pour
se poser les bonnes questions, pour interroger le monde qui nous entoure, pour
se remettre soi-même mais aussi la société en question.
L'ataraxie passe par la volonté de se poser les bonnes questions et
essayer de les résoudre. Ainsi, plutôt que de contenir une
énergie qui peut devenir néfaste à terme, nous devons
apprendre à la canaliser, à la déplacer vers des formes
constructives comme l'écoute et le dialogue : l'échange tout
simplement.
27
II. Les civilités et le vivre ensemble
Les petites détériorations de l'espace public
entraînent rapidement une dégradation plus globale du cadre de
vie. Ceci est la conclusion de la très célèbre
théorie de la vitre brisée, élaborée en 1969 par le
psychosociologue Philip Zimbardo. Le concept est le suivant : si, dans un
édifice, une vitre brisée n'est pas remplacée
immédiatement, alors toutes les autres vitres de l'environnement
connaîtront le même sort. Il s'agit d'un cercle vicieux, où
l'absence de réaction et de résistance des individus aux
dégradations et aux incivilités engendre la rupture du lien
social. Plus globalement, et par analogie, chaque comportement influe sur celui
des autres. Il est donc nécessaire de faire preuve de civilité,
c'est-à-dire adopter les bonnes manières, ces codes non
écrits de respect mutuel, pour créer le cercle vertueux propice
au bon déroulement des relations humaines.
Certes, nous sommes tous différents, mais comme le
prononça Christiane Taubira, dans son discours du 18 février
1999, dont l'objectif était de faire reconnaître la traite
négrière et l'esclavage comme crime contre l'humanité :
« Nous sommes instruits de la certitude merveilleuse que si nous
sommes si différents, c'est parce que les couleurs sont dans la vie et
que la vie est dans les couleurs, et que les cultures et les desseins,
lorsqu'ils s'entrelacent, ont plus de vie et plus de flamboyance. »
Ces différences sont bénéfiques. Celle-ci ne doivent pas
nous désunir, bien au contraire, mais nous rapprocher. C'est d'ailleurs
par le respect de toutes ces dissemblances, que l'on construit une plus grande
ressemblance. Tels sont les principes républicains de liberté,
d'égalité, et de fraternité. La collectivité n'est
pas une addition d'individualités, elle est bien plus que cela. Ernest
Renan, dans sa conférence du 11 mars 1882, le signifie ainsi : «
N'abandonnons pas ce principe fondamental, que l'homme est un être
raisonnable et moral, avant d'être parqué dans telle ou telle
langue, avant d'être un membre de telle ou telle culture. Avant la
culture française, la culture allemande, la culture italienne, il y a la
culture humaine. » Nous devons dépasser les
hypothétiques barrières qui sont posées entre nous :
culture, langue, caractéristiques physiques, etc. Avant d'être
différents, nous sommes avant tout une même et grande famille :
celle des humains. Le discours du Dalaï Lama, lors de la remise du prix
Nobel de la paix, le 10 décembre 1989, synthétisait avec les mots
suivants :
28
« Tous ceux que je rencontre un peu partout dans le
monde me font sans cesse rappeler que nous sommes semblables : des êtres
humains. Il arrive que nos habits, la couleur de notre peau, nos langues soient
différents. Tout cela reste superficiel. Au fond nous sommes tous des
êtres humains. C'est ce qui nous relie, nous permet de nous comprendre et
de nous rapprocher. »
« Je peux changer en échangeant avec l'autre,
sans me perdre pourtant ni me dénaturer.» Telle est la phrase
d'Édouard Glissant, poète et écrivain français.
C'est dans la différence et le divers que nous nous construisons. C'est
d'ailleurs même à travers les autres que nous existons, que nous
pouvons nous développer en tant que personne. La différence n'est
que richesse. Pour cela, il faut aller au-devant des relations, des rencontres,
des échanges. Le monde est éclectique.
Tahar Ben Jelloun, dans Le racisme expliqué à
ma fille, décrit ainsi les autres : « Regarde les
élèves et remarque qu'ils sont tous différents, que cette
diversité est une belle chose. C'est une chance pour l'humanité.
Ces élèves viennent d'horizons divers, ils sont capables de
t'apporter des choses que tu n'as pas, comme toi tu peux leur apporter quelque
chose qu'ils ne connaissent pas. Le mélange est un enrichissement
mutuel. » Edgar Morin, dans le livre intitulé Au
péril des idées, les grandes questions de notre temps, au
sein duquel est retranscrit son dialogue avec Tariq Ramadan, abonde dans le
même sens en disant : « Qu'est-ce que l'autre ? C'est celui qui
est à la fois différent de soi et semblable à soi. Il est
semblable à soi par la capacité à aimer, à avoir
peur, à souffrir, à être heureux et, en même temps,
il est différent par sa singularité personnelle, par sa culture,
par ses croyances. Respecter la différence tout en reconnaissant que
l'autre est comme soi, c'est cela qui est nécessaire. A ne voir que sa
différence, on ne voit pas que l'autre est comme nous, et à
vouloir le réduire à soi-même, on perd son
originalité. » Chacun apprend de l'autre. Dès notre
plus jeune âge, et notamment à l'école, nous pouvons nous
enrichir des différences des autres. Albert Jacquard, dans Nouvelle
petite philosophie, parle d'école de « l'humanité
» plutôt que d'école de la « République
». Au final, ces deux termes abondent dans le même sens, la
République défendant et prônant des valeurs humanistes.
29
Notre société est devenue une lutte les uns
contre les autres, dont le but final est de sortir vainqueur. Il faut à
tout prix refuser cette vision des choses. Ernest Renan, toujours dans sa
conférence du 11 mars 1882, posait cette question : « Ne
peut-on pas avoir les mêmes sentiments et les mêmes pensées,
aimer les mêmes choses en des langages différents ? ».
Bien sûr que si. Et d'ailleurs, refuser cette idée peut aboutir
à des conséquences désastreuses pour l'humanité.
Ces derniers siècles en sont le parfait exemple, avec notamment la
colonisation ou le nazisme, périodes d'atrocités qui ont fait des
millions de victimes au nom de différents facteurs : haine raciale,
cupidité marchande, missions civilisatrices... Primo Levi,
rescapé des camps de concentration nazi, dans son témoignage
poignant Si c'est un homme, explique que « Beaucoup d'entre
nous, individus ou peuples, sont à la merci de cette idée,
consciente ou inconsciente, que « l'étranger c'est l'ennemi ».
Le plus souvent, cette conviction sommeille dans les esprits comme une
infection latente ; elle ne se manifeste que par des actes isolés, sans
lien entre eux, elle ne fonde pas un système. Mais lorsque cela se
produit, lorsque le dogme informulé est promu au rang de prémisse
majeur d'un syllogisme, alors, au bout de la chaîne, il y a le
Lager. » Personne n'est à l'abri des préjugés,
des stéréotypes et de comportements engendrant des
régressions catastrophiques. Deux expériences de psychologie
peuvent souligner ces dires :
? La première, réalisée en 1971 par
Philip Zimbardo, connue sous le nom d'expérience de Stanford, aboutit
sur la conclusion suivante : toute personne ordinaire, placée dans
certaines conditions bien spécifiques, peut avoir des comportements
anormaux voire déviants. L'expérience avait pour objectif
d'étudier les comportements humains soumis à l'univers
carcéral. Des étudiants furent divisés
aléatoirement en deux groupes : des prisonniers et des surveillants de
prison. Devant durer deux semaines, cette expérience fut
arrêtée au bout de seulement 6 jours, car les étudiants
surveillants de prison infligeaient des traitements dégradants et se
comportaient en sadiques. Des études menées auparavant sur tous
ces étudiants avaient pourtant révélé qu'aucun
d'entre eux n'était susceptible d'avoir ce type de comportement, et
qu'ils paraissaient émotionnellement stable et respectueux de la loi.
? La seconde, réalisée dans les années 60
et passée à la postérité, fut celle de Stanley
Milgram et portait sur l'obéissance. Les résultats aboutirent au
fait que tout individu est capable d'actions terribles si une figure
d'autorité le lui demande. Lors de l'expérience, des volontaires
de tous horizons venaient pour une expérience sur la mémoire.
Deux personnes étaient à chaque fois
30
en présence : le premier, un acteur, devait
réaliser un travail oral de mémoire, tandis que le second, sur
qui portait l'étude, devait le punir à chaque fois qu'il oubliait
des choses en lui administrant des chocs électriques. L'acteur ne
recevait bien évidemment pas les chocs, ce que le second ignorait.
Tandis que l'acteur criait et protestait pour ne pas recevoir de chocs, les
personnes ont bien souvent continué l'expérience malgré
tout. La tutelle d'un médecin, faisant figure d'autorité,
engendrait des comportements odieux vis-à-vis d'innocents.
Ces deux expériences nous montrent à quel point
toute personne est susceptible de changer dans certaines conditions, d'adopter
un comportement qu'elle n'aurait jamais osée avoir dans la vie courante.
Le livre de Kressmann Taylor, Inconnu à cette adresse, l'illustre
parfaitement. Son oeuvre montre, à travers une correspondance
épistolaire, l'évolution d'une amitié entre deux hommes,
confrontée à l'arrivée au pouvoir d'Adolf Hitler et du
système nazi. Martin Schulse, allemand vivant à Berlin, et Max
Eisenstein, juif vivant aux États-Unis sont deux associés unis
par une amitié profonde. Celle-ci va être détruite,
après le changement brutal de comportement de Martin Schulse, devenu
progressivement raciste en cédant à la facilité et en
oubliant tout ce qu'il avait été jusqu'à présent.
Cette trahison aboutira à l'irréparable. Ainsi, nous devons
toujours rester vigilants.
Malgré les leçons tirées de l'histoire,
on remarque que les choses n'avancent que très doucement : il a fallu
attendre 1848 pour enfin voir l'abolition de l'esclavage, 1944 pour que les
femmes puissent voter en France, 1964 et le Civil Right Act pour mettre fin aux
lois Jim Crow sur la ségrégation raciale aux États-Unis ou
encore 1991 pour mettre fin à l'apartheid en Afrique du Sud, etc. Et les
combats à mener sont encore nombreux. Il faut pour cela refuser toute
vie déterminée à l'avance, toute place assignée,
toute identité fermée, engendrant forcément un futur
immobile. Nous sommes tous partie prenante dans l'orientation de l'aventure
collective, dans le chemin que prend l'humanité. Albert Jacquard
écrit ainsi que « S'ouvrir à l'autre, c'est courir un
risque, mais se refuser à la rencontre, c'est jouer perdant. »
Ce n'est qu'au prix de l'échange mais aussi du respect de l'autre que
nous pourrons choisir le bon chemin à suivre.
31
III. La citoyenneté et le civisme
Rousseau, dans son Discours sur l'origine et les fondements
de l'inégalité parmi les hommes, comparait trois
régimes distincts, la monarchie, l'aristocratie, la démocratie,
et en tirait les conclusions suivantes : « Le temps vérifia
laquelle de ces formes était la plus avantageuse aux hommes. Les uns
restèrent uniquement soumis aux lois, les autres obéirent
bientôt à des maîtres. Les citoyens voulurent garder leur
liberté, les sujets ne songèrent qu'à l'ôter
à leurs voisins, ne pouvant souffrir que d'autres jouissent d'un bien
dont ils ne jouissaient plus eux-mêmes. En un mot, d'un côté
furent les richesses et les conquêtes, et de l'autre le bonheur et la
vertu. » Il met en avant la démocratie, dans laquelle la
souveraineté appartient au peuple. Elle permet à chacun d'avoir
un pouvoir sur la société dans laquelle il vit. Être
citoyen dans une démocratie engendre des droits mais aussi des devoirs :
tout individu doit se sentir concerné par la société qui
l'entoure et ainsi avoir envie d'exercer son esprit critique, de
réfléchir pour devenir lucide.
Dans une démocratie, la chose publique est donc
primordiale. S'en tenir informé et se former des convictions claires
doit être perçu comme nécessaire pour soi mais aussi pour
la communauté. Léopold Senghor, président de la
République du Sénégal pendant près de vingt
années, déclara, dans son discours du 29 janvier 1957 : «
Comme si l'on pouvait faire le bonheur des peuples sans leur participation
active. » Toute nation est composée d'un ensemble de citoyens
qui doivent décider eux-mêmes de leur vie pour préserver
leurs intérêts. Une démocratie n'existe qu'à travers
ses citoyens. Ceux-ci doivent pour cela donner leur avis, prendre la parole
publiquement et notamment dans les médias, manifester, respecter la
liberté de penser et d'expression. Chaque individu a en main son destin
mais aussi le destin collectif de sa nation. Nous devons tous avoir un
comportement responsable et agir dès que possible, en refusant
l'apathie. Comme le précise Edgar Morin, « A force de reporter
l'essentiel au nom de l'urgence, on finit par oublier l'urgence de l'essentiel
».
La base de la démocratie est l'échange. Nelson
Mandela, lors de son discours d'investiture à la présidence de la
République démocratique d'Afrique du Sud, le 10 mai 1995
utilisait ces propos : « Nous savons bien qu'aucun d'entre nous en
agissant seul ne peut réussir. » La
32
nécessité est l'échange constructif. Rien
ne sert de s'enfermer dans des consensus. Il faut aller au-devant des conflits
et les résoudre au moyen du dialogue. Martin Luther King disait, dans
son très célèbre discours du 28 août 1963 : «
Ne cherchons pas à satisfaire notre soif de la liberté en
buvant à la coupe de l'amertume et de la haine. Nous devons toujours
mener notre combat sur les hauts plateaux de la dignité et de la
discipline. » Les désaccords et les confrontations ne sont pas
des obstacles à la démocratie : ils en sont ses fondements. C'est
à partir de ce constat que nous pourrons avancer. Martin Luther King
ajoutait même : « Nous pouvons transformer les discordes de
notre nation en une merveilleuse symphonie de fraternité. » Il
n'y a pas de conflits éternellement insolubles, simplement un manque de
volonté. L'antagonisme est inévitable donc, mais ce combat ne
doit jamais être mené sur le terrain de la force contre la force,
mais sur celui de l'intelligence contre l'intelligence, tels sont les propos
d'Albert Jacquard. A cela, nous pouvons ajouter les paroles, durant son
procès, de Mohandas Karamchand Gandhi, lors de sa déclaration du
23 mars 1922, en faveur de l'indépendance de l'Inde mais dont les propos
sont universels : « Le mal ne se maintient que par la violence, le
refus de ce mal exige de s'abstenir de toute violence ».
Proclamer la démocratie n'est donc pas suffisant, il
faut la faire vivre, lui donner un contenu effectif. Un fossé s'est
d'ailleurs creusé ces dernières années entre le peuple et
ses représentants élus, entre le peuple formant la masse des
citoyens et ses élites devenues hommes politiques de métier.
Cette dérive est dangereuse. Elle engendre un fait certain : certaines
parties du peuple ne se sentent ni écoutées, ni
représentées, amenant ainsi des sentiments d'exclusion, de
différence. Nous devons éviter le désengagement
vis-à-vis des grandes causes politiques, sous peine d'engendrer le repli
sur soi des citoyens, la défense de leurs propres et uniques
intérêts et l'avènement de régimes totalitaires.
Emmanuel Kant parlait de « renforcer le souci qu'à chacun de
l'intérêt commun ». Ceci est impératif dans tout
régime et l'est encore plus dans une démocratie. Il faut savoir
participer au choix des contraintes collectives qui génèrent les
libertés individuelles. Michel de Montaigne, lui, disait que «
Chaque homme porte la forme entière de l'humaine condition.
» Nous sommes à la fois responsables devant notre conscience mais
aussi devant les autres. Le pasteur Martin Niemöller justifie cette
nécessité à travers un apologue écrit à la
suite des génocides juifs et tsiganes :
33
Quand ils sont venus chercher les communistes, Je n'ai rien
dit,
Je n'étais pas communiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes,
Je n'ai
rien dit,
Je n'étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les juifs,
Je n'ai pas protesté,
Je n'étais pas juif.
Quand ils sont venus chercher les catholiques,
Je n'ai pas
protesté,
Je n'étais pas catholique.
Puis ils sont venus me chercher,
Et il ne restait personne pour protester.
Faber, le vieillard auprès de qui Montag vient chercher
de l'aide, dans Fahrenheit 451 de Ray Bradbury, tient le même
discours : « C'est un lâche que vous avez en face de vous. J'ai
vu où on allait, il y a longtemps de ça. Je n'ai rien dit. Je
suis un de ces innocents qui auraient pu élever la voix quand personne
ne voulait écouter les coupables, mais je n'ai pas parlé et suis
par conséquent devenu moi-même coupable. Et lorsque en fin de
compte les autodafés de livres ont été
institutionnalisés et les pompiers reconvertis, j'ai grogné deux
ou trois fois et je me suis tu, car il n'y avait alors plus personne pour
grogner ou brailler avec moi. Maintenant, il est trop tard. »
34
Il existe une citoyenneté à la française,
qu'il est nécessaire de préserver et développer. Des
hommes et des femmes se sont battus pour défendre la liberté et
l'égalité. La révolution française de 1789 a vu
l'abolition des privilèges. Il faut faire preuve de
fidélité à notre mémoire et à notre
héritage. La démocratie doit être défendue et
préservée ! Jacques Chirac, président sous la
cinquième République française, s'exprimait ainsi : «
Notre pays, la France, chacun doit en être fier. Chacun doit se
sentir dépositaire de son héritage. Chacun doit se sentir
responsable de son avenir ». Les psychologues John Darley et Bibb
Latané, dans une expérience, ont mis en exergue l'effet du
spectateur : plus il y a de personnes dans une situation donnée, moins
nous sommes susceptibles d'intervenir si quelqu'un a besoin d'aide. Le nombre
diminue donc le sentiment individuel de responsabilité lors d'une
situation donnée. Et pourtant, dans une démocratie, chaque
citoyen est important, chaque vote compte : il ne faut pas délaisser ses
droits au profit des autres.
Un peuple est toujours à la merci du totalitarisme, qui
a cette faculté de fasciner, d'aveugler, puis d'anesthésier les
individus. D'ailleurs, Patrice Lumumba, homme politique en faveur de
l'indépendance du Congo Belge, et Aung San Suu Kyi, femme politique en
faveur de l'instauration d'un régime démocratique en Birmanie,
déclaraient respectivement : « Plus nous seront unis, mieux
nous résisterons à l'oppression, à la corruption et aux
manoeuvres de division auxquelles se livrent les spécialistes de la
politique du diviser pour mieux régner » (discours du 22 mars
1959) et « Les étudiants protestaient f...] contre un
régiment totalitaire qui leur déniait le droit de vivre en
privant le présent de toute signification et en ne laissant aucun espoir
pour l'avenir » (discours du 9 juillet 1990). Dans deux de ses
livres, George Orwell décrit très bien cette dystopie, où
le monde n'est fait que de coercition : le parti unique, les boucs
émissaires, la surveillance, la propagande, le culte de la
personnalité, la destruction de la langue, la torture, les procès
infondés, la réécriture du passé, la suspicion
ambiante, etc. Il s'agit de La ferme des animaux et de 1984. Les
deux ouvrages sont complémentaires. Dans le premier, il montre
l'instauration et le développement d'un régime totalitaire tandis
que dans le second, il montre son fonctionnement au quotidien une fois celui-ci
bien ancré dans la société. Le professeur d'histoire Ron
Jones, lui, effectua, en 1967, une étude expérimentale connue
sous le nom de « La troisième vague » auprès de
lycéens qu'il avait en cours. L'objectif était, à travers
une situation concrète, de prouver qu'il était difficile de
résister sous le troisième Reich. Difficile mais pas
impossible.
35
Aimé Césaire, dans son ouvrage intitulé
Discours sur le colonialisme fait l'apologie de la solidarité :
« Notre engagement n'a de sens que s'il s'agit d'un
ré-enracinement certes, mais aussi d'un épanouissement, d'un
dépassement et de la conquête d'une nouvelle et plus large
fraternité. » La fraternité, qui passe par le respect
des libertés et de l'égalité de chacun, est donc la
clé de notre avenir. « Venez, avançons ensemble, forts
de notre unité » conclut Winston Churchill, alors premier
Ministre de la Grande Bretagne, dans son discours du 13 mai 1940.
37
Partie 2
D E L A T H E O R I E A L A PRATIQUE
39
En parlant de la solidarité nationale post attentats du
7 janvier 2015, Abdennour Bidar, dans son Plaidoyer pour la
fraternité résume ainsi la situation : « Prenons
garde à ce qu'elle n'ait pas été un état de
grâce aussi miraculeux que sans lendemain. » Notre
société ne doit pas donc rester statique, mais sans cesse se
renouveler et évoluer. Certes, les valeurs Républicaines
résumées précédemment doivent être
prônées, mais surtout, et avant tout, mises en place
concrètement et vécues au quotidien. Faisons donc en sorte de
passer outre l'émotion de ces tragiques évènements pour
bien les comprendre, pour en tirer des leçons. Les questions doivent
amener des réponses, des solutions et une grande ambition : celle d'un
vivre ensemble et d'une fraternité toujours plus grande.
Rousseau, dans son Discours sur l'origine et les fondements
de l'inégalité parmi les hommes, considère que
l'Homme, à l'état de nature, est inoffensif envers ses
congénères et que c'est la société qui le corrompt.
La nécessité d'agir chez les individus dès leur plus jeune
âge, lorsqu'ils ne sont pas encore dénaturés, paraît
incontestable. Et cela passe par l'éducation. L'éducation se
définit comme permettant de transmettre, d'une génération
à l'autre, les éléments nécessaires à
l'épanouissement personnel des individus et à leur
intégration au sein de la société. D'ailleurs, la Loi
n° 2013-595, du 8 juillet 2013, d'orientation et de programmation pour la
refondation de l'école de la République note que «
L'éducation est la première priorité nationale.
». Celle-ci est la clé de voûte de nos vies. Elle permet
de concilier intérêt individuel et intérêt collectif.
La recherche du bonheur intrinsèque à chaque individu et le vivre
ensemble.
L'Article D321-1 du Code de l'éducation souligne
l'importance de deux acteurs dans cette éducation : «
L'école [...] assure, conjointement avec la famille,
l'éducation globale de l'enfant. » Nous pouvons en ajouter
d'autres : les acteurs périscolaires, les éducateurs sportifs,
les animateurs culturels ou artistiques, les nombreuses rencontres de la vie,
les différents médias et lectures personnelles.
40
Malgré tout, le travail doit avant tout être
mené par l'un de ces acteurs : l'école. C'est ce que souligne la
Loi n° 2013-595, du 8 juillet 2013, d'orientation et de programmation
pour la refondation de l'école de la République : «
L'avenir de la jeunesse, le redressement de notre pays, son
développement culturel, social et économique dépendent
largement de notre capacité collective à refonder l'école
de la République. [...] Cette refondation porte non seulement
un projet éducatif, mais également un projet de
société. La France, avec la refondation de son école, se
donne les moyens de répondre aux grands défis auxquels elle est
confrontée. »
Précédemment, je refusais la fatalité. Je
le réaffirme une seconde fois : nous sommes les propres artisans de
notre destin personnel et collectif. Celui-ci est étroitement lié
à l'école : celle que nous imaginons, celle que nous voulons,
celle que nous construisons.
Dans cette construction, deux parties prenantes doivent
être mises en exergue :
? En amont, l'orientation de l'école. Des choix sont
réalisés et des programmes sont conçus. Ceux-ci sont
similaires sur tout le territoire français, que ce soit dans les
écoles publiques, dans les écoles privées sous contrat
avec l'État ou via l'enseignement familial. Ils doivent être
appliqués partout.
? Sur le front, le travail des enseignants. Ceux-ci sont les
artisans quotidiens, présents auprès des élèves et
faisant le lien entre la théorie et la pratique. Chacun applique les
programmes, mais, selon la liberté pédagogique,
différemment. Plusieurs facteurs entrent en jeu : la
personnalité, les modes de fonctionnement, les liens avec le domaine
d'enseignement, l'expérience, les envies, etc.
41
Dans la première partie de ce mémoire, je me
suis appliqué à expliquer les choix réalisés par
l'école, le pourquoi de cette transmission des valeurs
Républicaines.
Dans la seconde partie, je vais développer ma relation
à cet enseignement. Il ne s'agira pas de l'exploration des multiples et
diverses méthodes pédagogiques existantes, car leur description
prendrait trop de temps, mais plutôt d'un témoignage.
Le témoignage d'un enseignant qui débute et
découvre le métier et ses spécificités. Le
témoignage d'un enseignant confronté à la
réalité du terrain, devant faire le lien entre un idéal
difficile à atteindre et sa pratique quotidienne, entre sa bonne
volonté et ses lacunes. Le témoignage d'un enseignant avec ses
difficultés et ses réussites. Le témoignage d'un
enseignant dont la pratique se construit au fil des constats, des essais et des
envies mais aussi des erreurs, des errances et des doutes. Le témoignage
d'un enseignant et l'évolution de sa pensée. C'est finalement le
témoignage d'un enseignant souhaitant tout simplement réussir la
tâche qui lui incombe.
42
I. Mon parcours
Kant, dans Réflexions sur l'éducation,
expliquait très justement que « L'homme ne peut devenir homme
que par l'éducation. Il n'est que ce que l'éducation fait de lui.
» L'enseignant permet donc à l'enfant de se construire.
Cependant, Kant, toujours dans Réflexions sur l'éducation,
ajoutait : « Il faut bien remarquer que l'homme n'est
éduqué que par des hommes, et par des hommes qui ont
également été éduqués. C'est pourquoi le
manque de discipline et d'instruction chez quelques hommes, fait de ceux-ci de
mauvais éducateurs pour leurs élèves. » Une
question se pose alors : suis-je légitime pour éduquer les
élèves aux valeurs Républicaines ? La simple obtention du
concours me permet-elle de l'être ? La réponse à ces
questions est sans doute plus complexe qu'un simple hochement de tête
positif ou négatif. Afin d'y parvenir, deux dates, qui me sont
familières, m'apparaissent comme fondamentales.
Faisons un retour en arrière de quelques années
pour y trouver la première : le 12 juillet 2010. Je
viens d'obtenir le baccalauréat depuis quelques jours, non sans mal, et
je me prépare à faire ma grande entrée dans les
études supérieures. Pour ce qui est du domaine, ce sera le
commerce. Cependant, cette date n'est pas à retenir pour cette raison,
mais pour une autre, bien plus symbolique : il s'agit du jour de mon
18ème anniversaire. Je deviens donc majeur et j'obtiens par
là-même mon statut de citoyen. Je peux ainsi pleinement participer
à la vie politique de mon pays, notamment par le droit de vote. Bien
entendu, à cette époque, je suis davantage
préoccupé par maints autres sujets que celui-ci. Pourtant, il a
une très grande importance, mais ça, je ne le remarquerai que
plusieurs années plus tard.
En attendant, je poursuis mes études : un DUT puis une
Licence, tous deux en alternance. Un choix prépondérant. Je
découvre, j'apprends, je grandis, je mûris. Mais plus que tout, je
me questionne. Certes, le commerce m'intéresse, mais plus qu'une simple
lassitude, quelque chose me manque, un « je ne sais quoi » qui
cloche. Nous sommes courant 2013 et, alors que j'y songe depuis plusieurs mois,
j'en suis convaincu : je vais poursuivre mes études dans l'enseignement.
J'ai évidemment encore quelques doutes mais, au fond de moi, je suis
persuadé que ce sera le bon choix.
43
C'est alors avec une volonté certaine que j'entame, en
septembre 2013, mon Master 1 Métiers de l'enseignement, de
l'éducation et de la formation à l'École supérieure
du professorat et de l'éducation de Paris. Dès les premiers
jours, je suis confronté à un choix de la plus grande importance,
car celui-ci conditionnera sans doute ma réussite ou non au concours :
le choix de l'option à préparer en vue de ce dernier.
Géographie ? Musique ? Sciences ? Etonnamment, le doute ne m'effleure
que l'espace de quelques secondes. Mon choix est fait. Ce sera l'instruction
civique et morale. Pourquoi ? Je ne sais guère. Une affinité
particulière pour une raison inconnue. Peut-être est-ce la seule
matière qui n'apporte pas à proprement parler uniquement des
connaissances mais aussi, et avant toute chose, des comportements. Une
réalité sans doute plus concrète à mes yeux, plus
visible en tout cas. Le choix du domaine étant fait, reste celui du
sujet. Le choix s'avère difficile.
Au cours de l'année, tous les étudiants doivent
participer aux ateliers de pratiques professionnelles (APP). Par chance, il en
est proposé un d'instruction civique et morale, que je choisis
immédiatement. Concrètement, il s'agira, à plusieurs, de
mener une séquence dans une classe. Je tombe donc, à l'instar de
cinq autres étudiants, dans la classe de René Étriard,
enseignant en CM2, sous la tutelle de notre professeur d'université,
Patrick Ghrenassia. Pendant six semaines, nous menons donc une séquence
portant sur le génocide des juifs et des tsiganes. Sans le savoir
à ce moment-là, elle allait devenir le sujet de mon option.
Certes, la séquence a déjà été
réfléchie à plusieurs, et menée en classe par nos
soins, mais pour autant, le travail à mener est encore grand : le sujet
est vaste et je souhaite modifier la séquence avec des choix plus
personnels.
Pour cela, je vais alors me plonger pleinement dans ce
dossier. Jamais, jusqu'alors, je n'avais fourni un tel travail. Celui-ci me
conduira, début 2014, de la lecture de nombreux ouvrages
spécialisés jusqu'à la visite du mémorial de la
Shoah à Paris, en passant par un voyage en Pologne pour me rendre dans
les camps d'Auschwitz et de Birkenau. Une implication qui portera ses fruits
quelques mois plus tard, lors de mon oral, mais qui reflète surtout le
début d'évolution de ma pensée. Je n'ai pas fait ces
recherches uniquement parce que l'objectif était grand (il
l'était bien évidemment, il s'agissait de mon avenir), mais aussi
parce que ce sujet m'a passionné, car il est en relation directe avec
notre société, car il nous concerne tout simplement.
44
A ce moment, je suis cependant resté borné aux
limites de mon sujet. Je n'ai pas cherché à aller plus loin,
à m'intéresser à certains évènements qui
pouvaient découler de cette période qu'est la Seconde Guerre
Mondiale. Il n'y a pas encore eu l'élément déclencheur.
L'été qui suit l'obtention du concours, je me retrouve tout de
même à lire certaines oeuvres de la littérature qui
n'avaient jusqu'alors pas suscité mon attention. Le changement se fait
progressivement.
En début de Master 2, je me retrouve à nouveau
confronté à une interrogation, celle du sujet de mon
mémoire. Instinctivement, l'instruction civique et morale, qui m'a tant
plu l'année précédente, me revient à l'esprit. Je
veux encore travailler ce domaine d'enseignement, parfaire mes connaissances et
pouvoir l'adapter à des problématiques réelles et
concrètes auxquelles je serai confronté en classe. En effet, les
conditions de traitement du sujet sont différentes cette année.
La théorie doit en grande partie laisser place à la pratique :
j'enseigne dans une classe composée de 26 élèves et de
niveau CE2, deux jours par semaine. Mon sujet de mémoire va donc
dépendre de mes observations, de mes difficultés ainsi que des
interrogations qui me viennent à l'esprit. Et mon choix de sujet va
très rapidement se préciser.
La théorie, fixée dans les programmes, est
claire, bien définie : éduquer à la citoyenneté et
transmettre les valeurs de la République. La pratique,
réalisée au sein de ma classe, est plus laborieuse : les
séances s'avèrent inefficaces, ou tout du moins, n'ont pas les
effets escomptés. Dès lors, la direction du mémoire est
posée. Malgré tout, il faudra attendre la seconde date
fondamentale pour définitivement voir un changement concret dans ma
réflexion et dans mes démarches. Il s'agit du 7 janvier
2015. Ces évènements vont avoir une influence
majeure.
Ils me poussent à prendre conscience des enjeux de
notre société : la nécessité de prendre part aux
grands débats actuels, le rôle qu'occupe chacun d'entre nous en
tant que citoyen, l'importance de l'école et des valeurs qui en
découlent ainsi que de la nécessité de les transmettre.
Ils me poussent à réellement comprendre la place du professeur
des écoles dans le projet de société.
En 2010, j'obtenais la citoyenneté. Il m'aura donc
fallu quatre années de plus pour acquérir le sens du civisme,
c'est-à-dire la volonté d'exercer pleinement mes
responsabilités.
45
Ma pensée aura donc évolué durant ces
années, et plus particulièrement ces derniers mois en
étant confronté à la réalité des choses.
C'est désormais à travers mon début d'expérience
que je souhaite poursuivre mon témoignage. De l'observation
découlera une analyse pour se terminer par des remédiations.
46
II. Mon expérience
Chaque enfant reçoit une éducation
spécifique, propre à chaque famille. Cette éducation est
différente pour chacun car influencée par différents
facteurs : environnement dans lequel il grandit, coutumes et traditions de la
famille, etc. Au moment de leur entrée à l'école, certains
enfants voient les principes auxquels ils se référent
quotidiennement depuis leur naissance, entrer en contradiction avec ceux de
l'école. Et si certains enfants voient dans l'école une
institution sacrée, à laquelle il faut s'adapter, ce n'est pas le
cas de la majorité d'entre eux. Effectivement, ce n'est pas parce qu'il
y a marqué « école » sur la façade d'un
bâtiment que l'enfant se transforme instantanément en
élève et adopte par conséquent les usages sociaux de
référence. Cela ne se fait pas naturellement : l'enfant
n'abandonne pas miraculeusement ses comportements habituels. Cette
spontanéité se créée et s'entretient
quotidiennement, par différents moyens :
? atmosphère : l'école fonctionne tout
comme la société, selon un système de droits et de
devoirs. Nous allons nous attarder sur ce dernier point. Il existe une
multitude de règles à respecter : se tenir correctement, ne pas
crier, apprendre ses leçons... L'élève doit se soumettre
à la discipline scolaire. Cependant, si celle-ci se doit d'exister dans
les grandes lignes pour fixer certaines limites, il est important qu'elle ne
descende pas jusque dans la minutie des détails. Philippe Meirieu
synthétise ces propos ainsi : « Il est indispensable qu'il y
ait des règles. Il est mauvais que tout soit réglé.
» Ainsi, tout ne doit pas être déterminé avec
précision sous peine d'amener les élèves à deux
types de comportements négatifs. Soit l'élève
perçoit la règle comme injuste, odieuse voire absurde et
créée dans le seul but de le contrarier, de l'ennuyer, auquel cas
il devient un révolté. Soit l'élève perçoit
la règle comme impérative, intangible et s'y soumet passivement
sans résistance, s'habitue à ne plus rien faire que par ordre,
auquel cas il devient un inactif. Dans notre société, un individu
doit être capable d'agir par lui-même. Une réglementation
trop envahissante engendre une mauvaise influence. Les grandes lignes
directrices doivent donc être amenées, expliquées en
début d'année, puis respectées tout au long de
l'année et possiblement modifiées, sous certaines conditions,
avec l'aide des élèves.
47
Au sein de ma classe
Tout d'abord, il est important de souligner la présence
de deux maîtres, avec des attentes et des modes de fonctionnement
forcément différents. De plus, il n'existe pas de
règlement écrit, créé conjointement, auquel les
élèves pourraient se référer quotidiennement. Par
conséquent, ceux-ci doivent réaliser un gros travail d'adaptation
au niveau comportemental : ce que tolère l'un des deux enseignants n'est
pas forcément le cas de l'autre, et vice-versa.
En ce qui concerne ma pratique quotidienne, je vais
tâcher de la résumer succinctement. Je n'ai pas
créé, ni demandé à mes élèves de
créer un règlement de la classe, qu'il soit oral ou écrit.
Les élèves ont une certaine liberté, qui a pour limite le
respect : le respect du matériel, le respect des consignes, le respect
des camarades et de l'enseignant. Ma volonté étant de ne pas les
enfermer dans d'innombrables interdictions, et ainsi les réduire
à l'aliénation, mais plutôt de leur laisser une
possibilité d'agir, tout en respectant un cadre.
Cependant, ce type de fonctionnement pose certains
problèmes : les grandes lignes sont émises, mais celles-ci
paraissent floues pour les élèves. Ma gestion de classe est
beaucoup trop axée sur le cas par cas, empêchant les
élèves d'avoir de vrais repères et d'agir sereinement. Je
manque de transparence : je peux très bien accepter une chose un jour et
le lendemain la refuser. Il existe donc une antinomie entre ce que je souhaite
avoir et ce que je mets en place pour l'avoir. Cela se traduit plus par du
despotisme, à savoir la souveraineté absolue et arbitraire de
l'enseignant, que par une démocratie, c'est-à-dire la
souveraineté des élèves par les élèves et
pour les élèves. Ainsi, au lieu d'avoir une classe
composée d'élèves autonomes, ce vers quoi je souhaite
tendre avec mon fonctionnement, c'est l'inverse qui se produit :
hétéronomie, présence de l'enseignant indispensable,
sollicitations permanentes... Pour résumer la situation, je souhaite
offrir la possibilité à mes élèves d'agir
conformément à leur intérêt individuel tout autant
qu'à l'intérêt collectif, mais je ne réussis pas
à leur donner les bonnes cartes, à instaurer la bonne
méthode, pour y parvenir. Il s'agit donc non pas d'un problème de
fin, mais de moyens, et c'est cela que je dois solutionner.
48
? relationnel : en utilisant des propos
métaphoriques, on pourrait dire que, si la classe est un navire,
l'enseignant en est le capitaine tandis que les élèves en sont
les marins. L'enseignant est le seul maître à bord. En tant que
tel, il se doit d'exiger l'écoute et le respect. Cependant,
malgré cette évidente asymétrie, ne doit pas se cacher un
lien unilatéral « élèves vers enseignant
», mais bien un profond respect mutuel. L'enseignant doit traiter ses
élèves avec bienveillance, faire preuve d'empathie et se refuser
à tout comportement condescendant. A ce titre, et uniquement à ce
titre, il pourra attendre, exiger et obtenir la réciprocité
comportementale de ses élèves. « On introduit une
morale, mais en paroles, or c'est par l'exemple que la morale se communique.
», tels sont les propos d'Edgar Morin. Ainsi, l'enseignant doit le
respect à ses élèves tout comme ceux-ci le lui doivent et
se le doivent entre eux. Cette relation triangulaire constitue les rouages du
navire, qui vont permettre à la classe d'être efficiente et
d'avancer dans les meilleures conditions.
Au sein de ma classe
La corrélation entre élèves et enseignant
est très bonne : il existe un respect mutuel. Celui-ci a pour origine un
travail bilatéral. Pour ma part, je mêle exigence et
magnanimité. J'ai des attentes strictes de mes élèves,
mais j'essaye aussi d'être à l'écoute, de tenir compte des
remarques faites et d'agir en conséquence. Quant à eux, ils sont
à l'écoute et respectueux et se refusent à toute
impertinence vis-à-vis de moi. Ce double échange fonctionne
parfaitement.
En revanche, le bât blesse en ce qui concerne le
troisième rouage. Les élèves, en ma présence,
fournissent des efforts nécessaires à leur coopération. En
revanche, ce n'est pas le cas lorsqu'ils sont en autonomie où, tout du
moins, en dehors de la présence d'un adulte à leur
côté. Des retours me sont faits quotidiennement concernant des
problèmes entre les élèves : méchancetés,
mots désobligeants voire même échange de coups. Ces
problèmes, externes, me sont tout de même inhérents et
engagent ma responsabilité d'enseignant. L'histoire de Clever Hans
permet d'illustrer mes propos. Hans était un cheval qui devint
célèbre grâce à son intelligence : il savait
répondre à des questions arithmétiques en tapant avec ses
sabots. Ceci étant, après avoir analysé le
phénomène, des chercheurs conclurent que le cheval ne connaissait
pas réellement les réponses, il interprétait simplement
des signaux envoyés inconsciemment par les visages de ceux qui lui
posaient les questions et trouvait les réponses.
49
Ainsi, lorsqu'il était laissé seul, Hans
n'arrivait plus à trouver les réponses. Par analogie, je remarque
que mes élèves agissent souvent conformément à ce
qu'ils jugent attendu, et que, en dehors de ma présence, leur
comportement change. Je dois donc amener des solutions pour développer
la fraternité de mes élèves et amener l'entraide : dans
les travaux de groupe, dans la cour puis dans tout endroit.
? rôle : au sein de la classe, les rôles
sont bien définis : les élèves sont présents pour
acquérir des connaissances et des compétences que l'enseignant
leur transmet. Cependant, il serait réducteur de restreindre
l'activité des élèves à ces simples faits.
L'élève doit doublement être impliqué : d'une part,
dans ses apprentissages, d'autre part, dans son environnement. Plus
précisément, l'école représente une part importante
de son emploi du temps et par conséquent, il se doit d'être acteur
non pas d'une classe, mais de sa classe. Il doit s'y sentir bien, et pour cela
doit y être partie prenante. Les élèves sont investis d'une
mission, celle de faire vivre leur classe, pour plus tard faire vivre la
démocratie.
Au sein de ma classe
En tant que jeune enseignant, je découvre les facettes
du métier, j'expérimente, je me trompe. Et dans ces erreurs, il
en est une que beaucoup font, et je n'échappe pas à cette
règle : l'omniprésence de l'enseignant pour ses
élèves et le travail en frontal. Ce mode de fonctionnement
rassure le professeur car il a l'impression de pouvoir tout contrôler.
Mais à trop en faire, il a aussi ses méfaits. Mes
élèves deviennent dépendants, ils ont du mal à
réfléchir par eux-mêmes, ils abandonnent rapidement et ne
sollicitent que mon aide plutôt que celle de leurs camarades. Avec ce
fonctionnement, les élèves se formatent et je ne suis plus un
accoucheur d'idées.
Au fil des discussions avec ma tutrice, Sophie Charbonnel,
professeur des écoles maître formateur, et notamment suite
à une visite dans sa classe, j'ai pu me rendre compte à quel
point il est possible d'agir autrement : le travail des élèves,
par les élèves, pour les élèves. Un mode de
fonctionnement très structuré où chaque
élève est acteur de son apprentissage. Madame Charbonnel m'a
appris qu'un bon enseignant devait savoir s'effacer, pour mieux
le,
50
mettre l'élève au coeur de sa pédagogie.
Je tâche, au fur et à mesure qu'avance l'année, de prendre
des dispositions allant dans ce sens : j'essaye de construire des
séances où les élèves arrivent à se passer
de moi, tout en gardant un oeil attentif. Il me faudra encore un certain temps
pour réussir à appliquer cela totalement et ainsi permettre aux
élèves de s'épanouir en agissant par eux-mêmes.
Outre les conditions de travail, mes élèves ne
sont pas assez acteurs de leur environnement, à savoir la classe.
Dès le début d'année, sur recommandation de mon directeur,
Monsieur Vallée, qui partage avec moi la classe, nous avons
instauré quelques rôles : responsable des lumières,
effaceur du tableau, nourrir les poissons, responsable des ballons, etc. Ces
rôles, au nombre de sept, étaient occupés par certains
élèves durant toute une semaine. Deux reproches sont à
faire concernant ce dispositif. La première se porte sur le nombre de
rôles : ceux-ci ne peuvent être occupés que par certains
élèves, laissant les autres frustrés ou passifs
vis-à-vis de la vie de classe. La seconde porte sur l'attention
accordée à ces rôles : il s'agissait simplement d'une aide
pour l'enseignant, laissant les élèves parfois
indifférents. Je pense au contraire que ceux-ci doivent être
sacralisés et considérés par les élèves
comme indispensables.
C'est lors d'une visite dans la classe de ma tutrice que je me
suis rendu compte à quel point cela pouvait avoir son importance. Les
élèves sont extrêmement responsabilisés, amenant
d'une part une certaine fierté chez chacun d'entre eux et, d'autre part,
une délégation importante pour l'enseignant. Tout est fluide dans
la classe de Madame Charbonnel. Chaque élève sait quelle place il
occupe, comment il doit agir et à quel moment, sans qu'elle n'ait besoin
d'intervenir. De la responsable des poésies à celui des
exposés, tous les élèves sont dynamiques,
indépendants dans leur mission et soucieux de la vie de classe.
Dans cette optique, j'ai réfléchi et
instauré un nouveau système qui se situe finalement, entre celui
qui existait précédemment et celui de ma tutrice. Suite à
une discussion que j'ai engagée avec les élèves, nous
avons convenu de la nécessité d'instaurer un plus grand nombre de
rôles. Ceux-ci sont les suivants : plusieurs chefs de rang, un
responsable des affaires, des créateurs des affichages de la classe, un
coursier, un vérificateur des signatures, un responsable de la corbeille
à papier, un essuyeur du tableau, un nettoyeur du tableau, une
responsable de la cantine, une responsable des devoirs, un responsable des
ballons, des ramasseurs et des
51
distributeurs, un responsable de la date, des nourrisseurs des
poissons, un remplaçant. Malgré tout, et si certains tiennent
leur rôle à merveille, la fluidité n'est pas acquise, en
partie par ma faute. D'une part, par un manque d'insistance de ma part quant
à l'extrême nécessité des rôles. D'autre part,
car, dans la précipitation des journées, je ne libère bien
souvent pas de temps pour la réalisation de certains rôles, par
exemple pour les personnes chargées des devoirs, du tableau ou encore de
la corbeille à papier. Je dois travailler sur cette partie : être
davantage exigeant avec moi-même sur ces points pour permettre la mise en
place des actions décidées conjointement.
Ces trois axes de progrès sont donc à
travailler, et peuvent l'être à travers la mise en place d'un
système plus global, qui engagera les élèves dans la voie
de la citoyenneté. Il s'agira d'instaurer une classe
démocratique. Celle-ci aura pour conséquence de créer un
groupe classe, permettant aux élèves d'être acteurs de leur
vie, de prendre des responsabilités qui les concernent, d'agir dans le
respect d'un système. Ce fonctionnement doit être instauré
sur des bases solides et avoir des limites fixées avec précision.
Nous y reviendrons en détails par la suite.
La vie de classe quotidienne constitue donc le socle pour la
transmission des valeurs Républicaines, l'éducation à la
citoyenneté et la formation d'un esprit critique. Mais ce socle ne va se
développer qu'à travers un travail plus spécifique,
réalisé lors de séquences d'instruction civique et morale.
Celles-ci peuvent prendre diverses formes, dont en voici quelques-unes,
à travers cette liste non exhaustive :
? étude de documents : les documents peuvent
être de différentes natures (photos, images, témoignages,
définitions, etc.) et amènent l'élève à
réfléchir, à se questionner sur une idée ou un
problème concret particulier, puis à en trouver des
éléments de réponse.
? pratiques à visées philosophiques ou
débats : il s'agit de la confrontation argumentée des points
de vue qui favorise le développement du jugement, en entraînant la
délibération interne, et permet ainsi de l'affiner.
52
? dilemmes : ils ont vocation à confronter
l'élève à une situation où il faut choisir une
solution en fonction d'une réflexion sur des valeurs à clarifier,
nommer, éventuellement hiérarchiser en cas de conflit de
légitimité, afin de justifier leur décision.
? étude littéraire, musicale ou
artistique : elle permet d'étudier une situation dans les
détails et surtout d'apporter une nouvelle dimension à
l'apprentissage grâce à la transversalité des
enseignements. Cette étude peut porter sur des supports variés
tels que des romans, des contes philosophiques, des peintures,
des sculptures ou encore des chansons.
Au sein de ma classe
Depuis le début de l'année, et encore
aujourd'hui, j'essaye ces différentes méthodes de travail, sans
pour autant aboutir à un résultat efficient. Je vais
résumer brièvement certaines de mes séances, pour ensuite
amener le fond du problème. Parmi celles réalisées, nous
pouvons retenir ces cinq suivantes :
- Respect : il s'agissait d'une étude de
documents. Les élèves avaient chacun différents types de
documents tels qu'une image, un récit ou encore une définition et
devaient répondre à quelques questions. Après un travail
individuel sur les documents, nous en avons pris connaissance ensemble puis
nous en avons discuté pour comprendre quels sont les comportements
nécessaires à adopter lorsqu'on vit en communauté : est-ce
important de respecter les autres ? Ai-je envie d'être traité de
la même façon que je traite les personnes qui m'entourent ?
Pourquoi la vie en société exige-t-elle certains comportements ?
Etc.
- Discrimination : il s'agissait d'une petite
expérience de quelques minutes. J'avais pris pour complice un
élève de ma classe, à qui j'avais expliqué ce qui
allait se passer. Un matin, prenant un prétexte au hasard, en
l'occurrence la couleur orange du pull de cet élève, j'ai dit
à l'ensemble de ma classe qu'aujourd'hui cet élève allait
être traité différemment, car je n'aimais pas cette
couleur. Après plusieurs réprimandes liberticides (remarques
injustes, privation de récréation sans raison) j'ai
arrêté cet épisode pour en discuter avec mes
élèves : qu'ai-je fait ce matin ? Est-ce normal ? Deviez-vous
réagir ? Pourquoi certains ont réagi et d'autres non ? Que se
serait-il passé si j'avais continué ? Etc.
53
- Fraternité : il s'agissait de l'étude
d'une histoire indienne contemporaine, intitulée « Les deux
sandales ». Après une lecture individuelle puis collective,
nous avons débattu des comportements qu'avaient les protagonistes de
l'histoire. Ensuite, nous avons, par analogie, tâché de voir
comment chacun aurait agi dans cette situation et, plus globalement, comment
nous agissions dans la vie quotidienne : suis-je attentif au bien être
des personnes que je côtoie ? Est-ce que j'aide mes parents lorsqu'ils en
ont besoin ? Suis-je prévenant avec mes camarades ? Etc.
- Racisme : le thème du racisme fut
abordé par la poésie. Les élèves devaient comparer
plusieurs poèmes, dont le thème central était le
même. Il s'agissait de réinvestir les notions de
fraternité, de respect et de discrimination pour montrer qu'elles sont
étroitement liées : de quoi découlent les discriminations
? Pourquoi certaines personnes agissent-elles ainsi ? Est-ce normal ? Que
pouvons-nous faire à notre échelle ? Qu'avons-nous à y
gagner ? Etc.
- Différence : l'entrée de ce
thème s'est faite par l'art visuel. Les élèves devaient
dessiner leur visage, avec toutes leurs caractéristiques (grain de
beauté, lunettes, teinte de peau, etc.) de façon précise.
Ensuite, les élèves devaient découper leur visage en trois
parties égales : des cheveux au nez, du nez à la bouche, de la
bouche au menton. Enfin, tous les parties étaient
mélangées pour que les élèves se retrouvent chacun
avec des parties de camarades : les yeux d'un premier avec le nez d'un autre et
la bouche d'encore un autre. A partir de là, ils devaient créer
un nouveau personnage physiquement, puis lui donner un nom et des
qualités et des défauts. L'objectif était de comprendre
que la différence est une richesse inestimable, qu'il faut savoir en
tirer profit plutôt que de la rejeter.
Ces séances diffèrent toutes dans leur
thème, dans l'entrée dans l'activité ainsi que dans leur
contenu. Pourtant, avec l'avancée de l'année, un défaut
ressort principalement de mon travail en instruction civique et moral : le
manque de lien. Toutes ces séances sont intrinsèquement
intéressantes mais trop éloignées, trop
détachées d'un projet plus global qui leur donnerait davantage de
sens. Elles manquent de clarté pour les élèves, qui n'ont
pas de ligne conductrice et les perçoivent simplement comme une
succession d'apprentissages sans rapport entre eux. Mes démarches ne
poussent l'élève à réfléchir et agir que
sporadiquement. Je m'enferme dans ce que
54
je ne souhaite pas être. Encore une fois, je suis clair
dans mes objectifs et mes finalités mais je n'adopte pas les bonnes
méthodes pour y parvenir. Il me semble important de prendre beaucoup
plus de recul et construire un projet de plus grande ampleur, qui donnerait
à l'élève les moyens à la fois de comprendre et
d'agir ensuite. Pour tâcher de résoudre cette difficulté,
j'ai souhaité conclure sur une idée de projet qui reprendrait
tous les points évoqués précédemment et permettrait
de les gommer.
55
Partie 3
DES SOLUTIONS ENVISAGEABLES
57
J'ai choisi de reprendre les éléments
précédemment analysé pour construire une séquence
applicable en classe et permettant d'aboutir à des résultats
efficients. Seules les grandes lignes du projet sont émises, les
détails dépendant bien évidemment de la
spécificité de chaque classe.
La séquence aura pour socle les articles 12, 13 et
14 de la Convention internationale des droits de l'enfant du 20 novembre
1989, portant sur les libertés d'opinion, d'expression et de
pensée, dont en voici les contenus exacts :
- Article 12 : « Les États parties
garantissent à l'enfant qui est capable de discernement le droit
d'exprimer librement son opinion sur toute question l'intéressant, les
opinions de l'enfant étant dûment prises en considération
eu égard à son âge et à son degré de
maturité. »
- Article 13 : « L'enfant a droit à la
liberté d'expression. Ce droit comprend la liberté de rechercher,
de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute
espèce, sans considération de frontières, sous une forme
orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen du
choix de l'enfant. »
- Article 14 : « Les États parties respectent
le droit de l'enfant à la liberté de pensée, de conscience
et de religion. »
Cette séquence, partant de ces trois libertés,
sera l'occasion d'amener le dialogue sur certaines questions qui
intéressent actuellement tout autant l'école que la
société. En effet, dans une lettre adressée aux personnels
enseignants après les attentats du 7 janvier 2015, la ministre de
l'Éducation nationale, de l'Enseignement supérieur et de la
Recherche, Najat Vallaud-Belkacem, rappelait que « Les valeurs
essentielles de notre République ont été visées :
la liberté d'expression est au fondement de toutes les libertés
,
· la liberté de conscience et le respect des opinions
individuelles sont les principes qui nous permettent de vivre ensemble.
» et réaffirmait que « L'École éduque
à la Liberté : la liberté de conscience, d'expression et
de choix du sens que chacun donne à sa vie ,
· l'ouverture aux
autres et la tolérance réciproque. ».
58
Pour résumer, mon objectif de séquence sera de
conduire mes élèves à « développer le
courage de penser, la passion de comprendre ainsi que la volonté de
s'engager. », principale source d'émancipation et rempart
contre l'obscurantisme.
Le Rapport de la mission sur l'enseignement de la morale
laïque du 22 avril 2013 préconise la méthode suivante :
« Une approche profondément modifiée, l'abandon du
travail par maxime au profit d'une démarche d'apprentissage
méthodique et régulière à partir de supports
diversifiés, textes littéraires, contes, documents, images,
films, situations de la vie quotidienne. » J'ai donc choisi de
construire une séquence utilisant différents supports où
les parties théoriques et pratiques sont étroitement liées
entre elles. La liberté d'expression sera le fil conducteur du projet.
Il s'agira, pour reprendre les termes de ce même rapport, de «
Faire de l'école un lieu où la morale se respire encore plus
qu'elle ne s'enseigne. »
En vertu de l'Article L912-1-1 du Code de
l'éducation relatif à la liberté pédagogique,
« La liberté pédagogique de l'enseignant s'exerce dans
le respect des programmes et des instructions du ministre chargé de
l'éducation nationale et dans le cadre du projet d'école ou
d'établissement avec le conseil et sous le contrôle des membres
des corps d'inspection. », je souhaite organiser mes apprentissages
en deux temps, ainsi résumés dans le schéma suivant :
Démocratie
Correspondance
Journal
Projet
Évènement
59
Éléments de
compréhension
Étude littéraire Matin brun
Étude historique
La révolution française
Étude structurale La Ve République
Étude historique
Le génocide des juifs et des tsiganes
Éléments de
réalisation
60
Les éléments de compréhension :
cette partie théorique sera la première à être
abordée. Le but est d'amener l'élève à
réfléchir, se questionner mais aussi comprendre
l'intérêt et la nécessité de certaines valeurs pour
le bien commun. Elle a pour objectif de donner du sens aux apprentissages qui
vont suivre. Elle est composée de quatre parties, dont en voici un
aperçu succinct :
- étude historique : à travers
l'étude de la révolution française, les
élèves vont être amenés à comprendre ce que
sont et dans quelles conditions furent acquises les valeurs de la
déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.
? Éduscol - Progressions pour le cours
élémentaire deuxième année et le cours moyen -
Histoire : La révolution française : l'aspiration à la
liberté et à l'égalité
- étude littéraire :
l'étude de Matin Brun va permettre aux
élèves de comprendre l'importance de ces valeurs. Elle soulignera
la nécessité d'adopter certains comportements tels que la
volonté de s'intéresser, de se renseigner, de s'exprimer, d'agir
au nom de certaines valeurs telles que le courage et la fraternité.
? Éduscol - Proposition de ressources pour le 1er
degré - Liberté de conscience, liberté d'expression - La
littérature de jeunesse : Matin brun, Franck Pavloff, Cheyne
(l'indifférence face à l'intolérance)
- étude historique : le
génocide des juifs et des tsiganes sera étudié en
parallèle pour apporter une dimension concrète à
l'étude littéraire. Par l'étude des conséquences
tragiques qui ont découlées de certains comportements contraires
à la déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, les
élèves comprendront l'importance des valeurs vues
précédemment et la responsabilité de chaque citoyen.
? Éduscol - Progressions pour le cours
élémentaire deuxième année et le cours moyen -
Histoire : L'extermination des juifs et des tsiganes : un crime contre
l'humanité
- étude structurale : l'étude
de la Ve République permettra de comprendre le fonctionnement de la
République démocratique française, conforme aux valeurs
étudiées, dans laquelle la souveraineté du peuple est
exercée par le peuple et pour le peuple. Il s'agira d'étudier sa
constitution et notamment le rôle du parlement et du gouvernement.
? Éduscol - Progressions pour le cours
élémentaire deuxième année et le cours moyen -
Histoire : La Ve République
61
Les éléments de réalisation :
cette partie pratique arrive en seconde position car elle doit découler
de ce qui a été vu précédemment. Le but est de
mettre en pratique ce qui a été vu, d'adopter un comportement
actif, nécessaire pour la pleine compréhension de la
séquence. Elle est composée de deux parties, dont en voici un
aperçu succinct :
- classe démocratique : les
élèves, après avoir étudié le fonctionnement
de la République démocratique française, appliqueront un
système ressemblant en classe. Il s'agira de les responsabiliser, de
leur permettre d'agir conformément à tout ce qu'ils ont vu
auparavant et les amener à adopter progressivement des comportements
citoyens. (Voir annexe 1)
? Éduscol - Progressions pour le cours
élémentaire deuxième année et le cours moyen -
Instruction civique et morale : Coopérer à la vie de
classe
- projet : les élèves
mobiliseront ce qu'ils ont appris dans la réalisation d'un projet
concret. Un thème sera choisi telle la préservation de la faune
et de la flore. A partir de celui-ci, les élèves construiront
leur pensée puis tâcheront d'y prendre part à travers trois
objectifs, faisant intervenir la liberté d'expression sous
différentes formes. Il s'agira d'une correspondance avec une classe
touchée par ce problème, la réalisation d'un journal
mettant en oeuvre toutes les disciplines et la création d'un
évènement pour récolter des fonds, telle une pièce
de théâtre ou une course à pied. Les élèves
mèneront un travail de fond notamment sur le langage et la construction
de leur pensée : savoir argumenter, justifier et expliquer à
l'oral comme à l'écrit mais aussi développer un
vocabulaire plus étendu et comprendre que chacun est responsable des
propos qu'il émet.
? Bulletin officiel hors-série n° 3 du 19 juin
2008 : les liens qui existent entre la liberté personnelle et les
contraintes de la vie sociale, la responsabilité de ses actes ou de son
comportement
63
Conclusion
65
L'axiome selon lequel l'enfant se construit par lui-même
une pensée indépendante, libre et critique n'est que
chimère. Pour y parvenir, il est une nécessité
indéniable : l'école. Cette même école ambivalente,
lieu d'émancipation et pourtant parfois source d'inquiétudes et
de critiques : il serait délivrée, sous forme d'endoctrinement,
une morale d'oppression. Loin de ces accusations, elle a comme fondement la
méritocratie, de laquelle doit émaner une certaine justice
sociale, et pour principal dessein le vivre ensemble et l'autonomie de chaque
individu. Refusant les discours véhéments et démagogiques,
qui n'engendreront que velléités chez les élèves,
les enseignants doivent bien au contraire adopter des méthodes
situées aux antipodes de celles-ci. Ils doivent mêler
étroitement compréhension théorique et réalisations
pratiques, non pas sous forme d'un salmigondis d'apprentissages exsangues sans
lien précis entre eux, mais sous forme de projets, aux objectifs clairs
et bien définis, permettant ainsi de créer une réelle
synergie. Ce n'est qu'à partir de ce fonctionnement endémique que
l'on pourra amener les élèves à se sentir pleinement
concernés et ainsi avoir la volonté de réfléchir
pour comprendre, d'aller vers l'autre pour échanger, et finalement agir
pour le bien de tous. C'est ce qui fera la différence entre
pusillanimité et intrépidité citoyenne. Cependant, tout
cela n'est possible qu'à condition d'agir le plus tôt possible, en
refusant toute défection ou tout atermoiement : l'impact de
l'instruction civique et morale sur les enfants pourrait certes ne pas
être immédiatement pleinement apprécié, mais son
incidence sur les adultes de demain sera considérable...
67
ANNEXE
Cette constitution a été créée
par Monsieur Étriard René, qui m'en a fait part. Les mots en gras
sont à définir avec les élèves pour la pleine
compréhension de ce mode de fonctionnement.
Constitution de la
République
Article premier : le
maître de la classe de CM1/CM2 est le président de la
république, ceci pour une durée d'une année
scolaire.
Article second : le président de la
république gouverne avec un premier ministre.
Article troisième : le premier ministre est
élu au suffrage universel direct, à
scrutin majoritaire à deux tours. Tout citoyen
de la république de CM1/CM2 a le droit de
vote. Les élections ont lieu après une
campagne électorale et sont à bulletin
secret. Tout bulletin comportant une rature ou un signe distinctif est
déclaré nul. Les bulletins blancs sont
comptabilisés.
Article quatrième : le président de la
république a le droit de vote.
Article cinquième : le premier ministre nomme
les ministres de son gouvernement et les
secrétaires d'état chargés de remplacer
et d'aider le ministre titulaire.
Article sixième : le président de la
république peut refuser un ministre proposé. Article
septième : un premier ministre ne peut se représenter deux
fois de suite.
Article huitième : le président de la
république peut refuser la candidature aux élections d'un citoyen
souhaitant devenir premier ministre.
Article neuvième : le président de la
république est tenu d'organiser des élections chaque fois que le
premier ministre présente la démission de son gouvernement.
Article dixième : la durée d'un
mandat est variable mais ne peut excéder deux mois.
68
Article onzième : en cas de conflit entre le
premier ministre et le président de la république sur un point
portant sur la vie de la classe, il sera procédé à un
référendum qui départagera les deux
positions.
Article douzième : le premier ministre et le
président de la république peuvent demander à tout instant
un référendum sur tout sujet concernant la vie de la classe.
Article treizième : en cas de manquement grave
à la vie de la classe, le président de la république peut
exiger la démission du premier ministre, dissoudre le
gouvernement et procéder à de nouvelles élections.
Article quatorzième : le premier ministre peut
démissionner en cours de mandat. Sa démission entraîne la
dissolution de son gouvernement. Il sera alors procédé de
nouvelles élections.
Article quinzième : tout ministre peut
présenter sa démission au premier ministre qui peut l'accepter ou
la refuser. En cas de démission acceptée, le premier ministre
nomme alors un nouveau titulaire.
Article seizième : en cas de conflit et de
désaccord entre le premier ministre et l'un de ses ministres, le premier
ministre peut demander la réunion d'un conseil des ministres où
il sera décidé, après un vote, qui l'emporte. Ce conseil
extraordinaire est présidé par le président de la
république qui n'a pas le droit de vote. Le ministre ainsi
désavoué est contraint de présenter sa démission.
Si c'est le premier ministre, se référer l'article
quatorzième de la Constitution.
Article dix-septième : les secrétaires
d'état assistent de droit aux conseils des ministres
extraordinaires.
Article dix-huitième : pour tout problème
concernant la vie de la classe, tout ministre peut
demander la convocation soit :
- D'un conseil élargi où les secrétaires
d'état sont conviés.
- D'un conseil restreint où seuls les ministres
siègent.
Le président de la république peut ne pas
être convié à l'un de ces conseils.
Article dix-neuvième : le premier ministre est
responsable de son gouvernement devant le président de la
république.
69
Article vingtième : un gouvernement comporte
un premier ministre, un ministre de l'intérieur, un ministre des
finances, un ministre des affaires étrangères, un ministre des
postes, un ministre de la santé, un ministre de la culture.
Chaque ministre, excepté le ministre de l'intérieur, est
assisté d'un secrétaire d'état.
En cas de crise grave ou de dysfonctionnement de la vie de la
république, (non-respect de différents articles, mises en
cause dans des problèmes de discipline au niveau de l'école...)
la constitution autorise le président de la république
à prendre les pleins pouvoirs et à prononcer la
dissolution du gouvernement selon l'article treizième. Le
président de la république peut alors gouverner sans
aucun contrôle démocratique et sans organiser de nouvelles
élections.
Cette dictature ne peut qu'être qu'occasionnelle
et permettre de rétablir l'ordre et le bon fonctionnement des
institutions.
Tout ministre peut proposer un nouvel article de loi.
Cet article ne peut être adopté qu'après un
référendum ou/et après un vote du conseil des ministres et
l'acceptation du président de la république.
Ce dernier ne peut néanmoins refuser de signer une loi
votée après référendum. Le président de la
république n'a pas le droit de véto.
Article vingt et unième : le premier ministre
peut nommer un conseiller spécial qui l'aide dans sa
tâche. Ce conseiller siège de droit dans un conseil élargi
mais ne peut siéger dans un conseil restreint. Il n'a pas rang de
ministre.
Article vingt deuxième : un nouveau
ministère peut être créé à la demande du
gouvernement. Pour que ce dernier soit installé, il faut
l'accord du président et un référendum.
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· BEN GOURION David, Nous proclamons la naissance d'un
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· CHIRAC Jacques, Nous disons non, 1978.
· CHURCHILL Winston, Du sang, de la sueur et des
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· DALAÏ LAMA, La vérité est la
seule arme que nous disposons, 1989.
· DANTON et DUFAY, Lançons la liberté
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· DE GAULLE Charles, L'appel du 18 juin,
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· FERRY Jules, Le droit de civiliser, 1885.
· GANDHI, Le mal ne se maintient que par la
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· KENNEDY John, Nous formons un seul et même
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· LUMUMBA Patrice, Africains, levons nous,
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· LUTHER KING Martin, I have a dream, 1963.
· MANDELA Nelson, Le temps est venu, 1994.
· MALCOM X, Le vote ou le fusil, 1964.
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· RABIN Yitzhak, La paix a ses chances,
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· RENAN Ernest, La nation et la race, 1882.
· ROOSEVELT Francklin, Nous surmonterons les
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· SAN SUU KYI Aung, Une révolution des
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· SCHUMAN Robert, Une Europe pour la paix,
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· SENGHOR Léopold, La France est un arbre
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· TAUBIRA Christine, La traite et l'esclavage sont
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· TOURÉ Sékou, Nous
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· TROSKY Léon, Appeler le peuple à la
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· ZWEIG Stefan, Une communauté
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- Bulletin Officiel hors-série n° 3 - 19
juin 2008
- Circulaire n° 2011-131 - 25 août 2011
- Code de l'éducation - Article L912-1-1
- Code de l'éducation - Article L. 321-2
- Code de l'éducation - Article D321-1
- Déclaration des droits de l'homme et du citoyen
- 26 août 1789
- Déclaration universelle des droits de l'homme
- 10 décembre 1948
- Charte des droits fondamentaux de l'Union
Européenne - 7 décembre 2000
- Constitution de la Vème
République - 4 octobre 1958
- Convention internationale des droits de l'enfant -
20 novembre 1989
- JORF n°0266 - Texte 55 - 16 novembre 2013
- Loi n° 2013-595 - 8 juillet 2013
- Loi n° 2005-380 - 24 avril 2005
- Rapport de la Commission nationale consultative des
droits de l'homme - 2014
- Rapport de la mission sur l'enseignement de la morale
laïque - 22 avril 2013
MÉMOIRE PROFESSIONNEL PROFESSORAT DES
ECOLES
FICHE DESCRIPTIVE
AUTEUR : Vincent LE DANFF
ANNÉE DE SOUTENANCE : 2015
DISCIPLINE : PSHS
NIVEAU D'ENSEIGNEMENT : CE2
TUTEUR DU MEMOIRE : Martine
MESKEL-CRESTA
TITRE : L'école, un enjeu de
société
MOTS CLÉS : Instruction civique et
morale - Citoyenneté - Charlie Hebdo - Vivre-ensemble - Valeurs
Républicaines
RÉSUMÉ : Malgré les
enseignements que l'on a pu tirer des diverses périodes sombres de notre
histoire, ces derniers mois nous ont prouvé à quel point les
valeurs de la République française sont fragiles. Symboles de
l'union entre tous les individus, elles furent pourtant touchées en leur
coeur le 7 janvier 2015. Et si c'était déjà le cas
auparavant, ces évènements nous rappellent qu'il est
nécessaire d'agir au quotidien. Agir de façon préventive
plutôt que répressive ou curative. Ceci est le rôle de
l'école et, par conséquent, le mien.