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De la gratuité sur internet. Etude de cas de Google inc.

( Télécharger le fichier original )
par Clara Pillet
CELSA - Master 2 2015
  

Disponible en mode multipage

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Master professionnel

Mention : Information et Communication
Spécialité : Médias et Communication

Option : Médias Informatisés et Stratégies de Communication

De la gratuité sur Internet
Etude de cas de Google Inc.

Responsable de la mention information et communication
Professeure Karine Berthelot-Guiet

Tuteur universitaire : Marion Rollandin

Nom, prénom : Pillet Clara Promotion : 2014-2015 Soutenu le : 28/09/2015 Note du mémoire : 15/20

École des hautes études en sciences de l'information et de la communication - Université Paris-Sorbonne 77, rue de Villiers 92200 Neuilly tél. : +33 (0)1 46 43 76 76 fax : +33 (0)1 47 45 66 04 www.celsa.fr

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3

Remerciements

À Marion Rollandin et Gabriel Delattre, d'avoir accepté de suivre l'évolution de mon travail et de me conseiller pour ce mémoire.

À Cédric Diridollou pour le contenu de son cours sur les modèles économiques appliqués à Internet qui m'aura beaucoup aidé, et pour avoir répondu gracieusement à toutes mes questions.

Aux 160 personnes qui ont répondu à mon questionnaire, à ceux qui l'ont gentiment partagé sur les réseaux sociaux (Pierre-Marie, Sarra, et Anja), et à ma famille pour avoir accepté d'être mes cobayes.

À mes parents pour le confort et le soutien, et pour toute leur aide pendant la rédaction et la relecture.

À la promotion MISC 2015 pour leur aide, leur soutien et les commentaires stupides et drôles qui ont égayé la rédaction (thanks Anouk & Samuel), à Maxime pour m'avoir dit qu'il croyait en moi, à Clarisse pour son aide et ses messages d'encouragements continus, à mes collègues de stage pour leur soutien et leur précieux conseils, et à Anthony pour ce qu'il est.

Et, à Google Inc., pour proposer des outils gratuits et nécessaires à la rédaction d'un mémoire dont le sujet porte sur Google Inc., comme Google Forms, Google Docs, Google Scholar et bien sûr Google.

4

Introduction 7

Problématique 12

Hypothèses 13

Méthodologie 14

Annonce de plan 15

I. De la gratuité : la donnée personnelle comme objet de toutes les convoitises dans un

système de surveillance généralisée 16

1. Les données personnelles 16

- La donnée personnelle comme trace 17

- La valeur de la donnée 19

2. Le fonctionnement de Google et son business model 21

- La publicité selon Google Inc. 21

- La donnée personnelle au coeur des échanges économiques 24

- Du gratuit rentable ? Essai sur le don - tome 2 26

- L'utilisateur, produit de Google Inc 29

3. Le produit-utilisateur au coeur d'une économie foucaldienne 31

- Le sur-mesure de masse 31

- De l'économie de l'information à et l'économie de l'attention 32

- De l'économie de l'attention à l'économie de surveillance 35

II. « Je te déteste, mais je reste » ; le paradoxe des internautes au coeur de l'écosystème

de Google Inc. 38

1. Le profil des sondés 39

- Démographie 39

- Utilisation des services de Google Inc. 40

2. Les utilisateurs face à l'utilisation de leurs données personnelles 44

- La position des utilisateurs par rapport à leurs données personnelles 44

- L'opinion des utilisateurs par rapport à l'utilisation de leurs données personnelles par Google

Inc. 48

- Quelles stratégies de repli ? 49

3. La place des utilisateurs dans le modèle économique de Google Inc. 50

- L'opinion des utilisateurs face à la gratuité de Google Inc. 51

- Payer ou se faire payer pour l'utilisation de ses données personnelles ? That is the question
52

- Le consommateur producteur 54

5

III. Google Inc., une entreprise de droit divin partie à la conquête de la confiance des

internautes 59

1. La mise en forme du monde 62

- Google Inc. et sa philosophie 62

- De Babel à Xanadu : l'organisation de toute l'information du monde 63

- Google Inc. : centre de l'univers ou monopole social ? 65

2. La mise en forme de l'utilisateur 68

- De la collecte et l'exploitation de la donnée 68

- De la donnée à l'information 71

3. Google Inc., une entreprise qui vous veut du bien 72

- Google Inc. au service de l'internaute 74

- La confiance : le Saint Graal de Google 76

Conclusion 81

Bibliographie 86

Table des annexes 91

Résumé 125

Mots-clés 126

6

7

Introduction

« Les premiers usages du réseau [Internet] seront fortement marqués par cette culture de la liberté, de la gratuité et de l'ouverture aux contributions informelles et décentralisées. L'accès sans entrave à l'information, sa libre circulation, la propriété publique des infrastructures apparaissent comme les conditions sine qua non de réalisation de ce projet utopique. »1

Internet a été imaginé, conçu et développé par l'armée américaine dans les années 1950 aux Etats-Unis, avant que des scientifiques du MIT et du CNRS ne s'en emparent et que le Web tel que nous le connaissons, apparaisse au début des années 1990. Internet, comme un réseau de communication entre individus, a été pensé comme un espace libre et gratuit. La gratuité est une valeur intrinsèque d'Internet. En effet, le réseau Internet et le Web ont été imaginés et conçus en dehors de toute valeur marchande et économique : le seul objectif était la mise en communication d'individus, de manière libre, facile et gratuite. Ces idées seront reprises en 1984, dans l'Ethique des Hackers, transcrites dans le livre de Steven Levy : « l'accès aux ordinateurs et tout ce qui pourrait vous apprendre quelque chose sur la façon dont le monde fonctionne doivent être illimités et totales », et « toute l'information doit être gratuite »2.

Ainsi, les internautes doivent seulement payer les moyens d'accès (soit l'infrastructure technique, comme un terminal ou un ordinateur, et la connexion au réseau) pour avoir accès à « toute l'information du monde » de manière gratuite et libre.

Ainsi, la gratuité est le modèle fondamental d'Internet : l'information y est libre et gratuite, ainsi que les communications entre individus et les différents services proposés comme Google.

Google Inc. est une entreprise emblématique de la culture de la gratuité sur Internet : développée dans les années 1990, l'entreprise a profité du développement d'Internet et du Web pour lancer un service de recherche sur Internet, sans avoir de modèle économique. Google Inc. est une entreprise américaine, crée en 1998 par Larry Page et Serguey Brin. A

1 PROUX S & GOLDENBERG A., « Internet et la culture de la gratuité ». Revue du MAUSS 1/2010 (n° 35). Disponible : http://www.cairn.info/revue-du-mauss-2010-1-page-503.htm (consulté le 27 août 2015)

2 LEVY Steven, Hackers : Heroes of the computer revolution, Dell Publishing, 1994, p.32-33. Disponible : http://www.temarium.com/wordpress/wp-content/documentos/Levy S-Hackers-Heroes-Computer-Revolution.pdf (consulté le 5 septembre)

l'origine, Google est un moteur de recherche, c'est-à-dire, une application web qui permet de retrouver des fichiers et des pages web sur Internet. Son fonctionnement est basé sur trois processus : l'exploration du web, soit la recherche de tous les sites webs, documents, et fichiers existants sur le réseau Internet, l'indexation de ces informations, et enfin la recherche qui permet de les retrouver facilement.

À sa création, Google est le premier moteur de recherche à utiliser un algorithme de recherche et de classement des pages web : le fonctionnement de Google est basé sur l'intervention d'une machine, qui classe, trie, et répertorie tous les sites.

En plus de son moteur de recherche lexical, Google Inc. a développé plusieurs autres services de recherche : Google Image, Googles News, Google Map et Google Earth. Ils sont tous complémentaires et interconnectés, car ils fonctionnent ensemble. Depuis 2004, Google Inc. développe des services annexes comme Gmail, une messagerie électronique, Google Drive, un service de stockage en ligne, Android, un système d'exploitation pour smartphonesÉ ; en 2015, Google Inc. propose 51 services différents3. Ces produits sont des compléments, car ces produits et services tendent à être consommés ensemble.

Quelques chiffres :

- Aujourd'hui, Google est le leader mondial du moteur de recherche : il pèse 89% du marché mondial, avec 77% de parts de marché aux Etats-Unis, et 94% en France4.

- En 2014, Google Inc. a réalisé un chiffre d'affaires de 66 milliards de dollars, soit une progression de 19% par rapport à l'année précédente5.

- La firme a traité plus de 100 milliards de recherches par mois en 20136.

- 89% du chiffre d'affaires de Google Inc. est issu de la publicité7.

Ainsi, il devient essentiel de s'intéresser à Google Inc. : les chiffres concernant la recherche sur Internet ainsi que les chiffres financiers montrent que cette entreprise est un acteur majeur sur le Web.

3 « About Google - Products » https://www.google.com/intl/en/about/products/ (consulté le 19 juillet 2015)

4 Chiffres de Juin 2015, via StatCounter http://gs.statcounter.com/#search engine-FR-monthly-201406-201506 (consulté le 19 juillet 2015)

5 « Google Inc. Announves Fourth Quarter and Fiscal Year 2014 Results », Press release, January 29, 2015. https://investor.google.com/earnings/2014/Q4 google earnings.html (consulté le 19 juillet 2015)

6 « 2013 Founders'Letter » https://investor.google.com/corporate/2013/founders-letter.html

7 « Google Inc. Announces Fourth Quarter and Fiscal Year 2014 Results », Press release, January 29, 2015. https://investor.google.com/earnings/2014/Q4 google earnings.html (consulté le 19 juillet 2015)

8

9

À noter que Google réfère au moteur de recherche développé par l'entreprise Google Inc. Ainsi, je différencie ces deux entités durant tout mon argumentaire, afin de marquer la différence entre l'entreprise et un de ses services, différence qui n'est pas souvent relevée dans le langage courant, Google étant souvent utilisé pour désigner l'entreprise toute entière.

J'ai également choisi de parler de Google Inc. et non de Alphabet. En effet, le 10 août dernier8, les fondateurs de Google, Serguey Brin et Larry page ont annoncé avoir créé une nouvelle entreprise, Alphabet, qui sera composée de 8 filiales, dont Google Inc. et ses différents services, Calico, Nest, Fiber, Sidewalks Labs, Google Capital, VC Google Venture et Google X. Le groupe se structure ainsi par filiales et grands projets pour afficher des résultats financiers détaillés par activité. J'ai donc choisi de mentionner uniquement Google Inc., et non Alphabet : cette décision juridique et financière est encore très récente, tous les contours de cette nouvelle entité n'ont pas encore dessinés, et Google Inc. reste l'entité qui développe et monétise tous les services utilisés par les internautes comme le moteur de recherche ou Gmail.

Ainsi, Alphabet peut être considéré comme un « conglomérat numérique », car l'entreprise propose des services très diversifiés. J'ai cependant choisi de ne mentionner que les principaux services de la nouvelle entité Google Inc. (soient les services en ligne), et plus particulièrement Google et Gmail. En effet, Google étant le premier service de l'entreprise, celui par lequel tout a commencé, j'ai choisi de ne mentionner que ce dernier. De plus, le nombre de services étant trop élevé et trop diversifié, j'ai choisi de me concentrer sur ceux qui sont le plus utilisés, sachant que tous les services de l'entreprise répondent tous à une même logique économique.

Ainsi, Google Inc. est le porte-étendard de la gratuité pour les utilisateurs : Google est présent sur la plupart des navigateurs Internet, il est utilisé par une écrasante majorité d'individus, qui ne payent jamais pour utiliser le moteur de recherche. Par ailleurs, ces utilisateurs ne payent jamais pour utiliser Gmail, pour stocker leurs photos sur Google Photos, pour réaliser du traitement de texte collaboratif en ligne grâce à Google DocsÉ Google Inc. a débuté en étant

8 « Alphabet ou l'illusion de la transparence », Usine Digitale, le 19 août 2015 http://www.usine-digitale.fr/editorial/alphabet-ou-l-illusion-de-la-transparence.N345289 (Consulté le 19 août 2015)

un service gratuit, sans modèle économique, et sans aucune rentabilité pour les investisseurs. Aujourd'hui, cette entreprise qui propose des services gratuits pèse plusieurs milliards de dollars, et est la 40ème entreprise la plus riche des Etats-Unis selon le classement Fortune9.

En effet, si Internet a été pensé pour être gratuit, et que les premières entreprises qui l'ont investi comme Google Inc. ont débuté sans modèle d'affaires et en proposant des services gratuits pour les utilisateurs, le problème de la rentabilité s'est très vite imposé.

Ethan Zuckerman, inventeur de la publicité pop-up contextuelle, explique comment la gratuité comme modèle d'affaires n'est pas compatible avec la mise en informations du monde, la libre circulation de contenus et la gratuité de services, idées fondamentales d'Internet.

« What we wanted to do was to build a tool that made it easy for everyone, everywhere to share knowledge, opinions, ideas and photos of cute cats. As everyone knows, we had some problems, primarily business model problems, that prevented us from doing what we wanted to do the way we hoped to do it. »10

Il explique alors comment la publicité est alors apparue comme le seul moyen de rentabiliser un service gratuit. L'utilisateur ne paye toujours pas le service, et la publicité permet aux créateurs de sites web et de services en ligne de gagner de l'argent et aux entreprises d'être rentables et bénéficiaires, afin de continuer à proposer des services gratuits pour les utilisateurs. Afin que ces publicités soient toujours rentables pour l'annonceur et efficaces pour le consommateur, la publicité est devenue ciblée, en utilisant les données personnelles des utilisateurs. Ainsi, la donnée est devenue importante pour que les créateurs de ces différents services puissent « raconter de meilleures histoires »11.

C'est ainsi que la gratuité est devenu le modèle d'affaires par excellence sur Internet, car soutenu par la publicité en ligne.

9 2015 Fortune 500 http://fortune.com/fortune500/#methodology (Consulté le 19 août 2015)

10 ZUCKERMAN Ethan, « The Internet's Original Sin », The Atlantic, le 14 août 2014.

Traduction : « Ce que nous voulions, c'était créer un outil qui rende facile pour tous et partout dans le monde le partage de connaissances, d'opinions, d'idées et de photos de chats mignons. Comme chacun le sait, nous avons eu quelques problèmes, principalement des problèmes de modèle d'affaires, qui nous ont empêché de faire ce que nous voulions faire de la façon dont nous espérions faire. » Disponible : http://www.theatlantic.com/technology/archive/2014/08/advertising-is-the-internets-original-sin/376041/ (Consulté le 12 juin 2015)

11 Cegowski cité par Ethan Zuckerman dans « The Internet's Original Sin »

10

En effet, dès l'année 2000, Google Inc. lance AdWords qui permet aux entreprises d'afficher de la publicité en ligne ciblée et contextuelle à côté des résultats de recherche, en combinant les données de recherches et les données personnelles des utilisateurs. En 2003, l'entreprise lance AdSense, soit un système de régie publicitaire, qui permet d'afficher de la publicité ciblée sur des sites web. Grâce à la publicité, Google Inc. devient rapidement rentable et engrange des bénéfices.

Ainsi, Google Inc. a transposé des outils marketing déjà existants à Internet : la publicité ciblée était déjà appliquée notamment à la télévision, grâce à l'analyse des audiences. Cependant, Google Inc. a augmenté d'un cran la publicité ciblée, en la rendant contextuelle et pertinente pour les utilisateurs, grâce à leurs données personnelles, et efficaces et rentables pour les annonceurs qui ne payent que les clics obtenus.

La publicité en ligne proposée par Google Inc. a donc permis à ce que ses services restent gratuits pour les utilisateurs. Cependant, Milton Friedman12, un économiste américain de l'Ecole de Chicago a déclaré « There is no such thing as free lunch », soit « Un repas gratuit, ça n'existe pas », insinuant que la gratuité dans un modèle économique supposait automatiquement un paiement déguisé.

11

12 FRIEDMAN Milton, There's No Such Thing as a Free Lunch, Open Court Publishing Company, 1975

12

Problématique

Le phénomène de gratuité sur Internet est donc à interroger, et notamment la place de l'utilisateur au coeur des relations économiques qui se jouent avec l'entreprise de services gratuits. Peut-on réellement parler d'un Internet gratuit, soit d'une utilisation de services web gratuite pour le consommateur ? Quels sont les enjeux sociaux, économiques et communicationnels qui sous-tendent la gratuité sur Internet ?

En effet, la gratuité, comme notion économique, soulève de nombreuses interrogations concernant le rôle de l'individu-consommateur et son rôle social au sein des échanges marchands qui se créent avec l'entreprise, et au niveau communicationnel en ce qui concerne la valorisation de la gratuité au niveau social et économique. On peut ainsi se demander dans quelle mesure l'utilisation d'un service gratuit sur Internet place l'individu au coeur de relations économiques complexes avec l'entreprise créatrice de ce service gratuit. Google est-il gratuit ? Et comment son système économique permet d'impliquer le consommateur dans son développement ? L'utilisateur est-il conscient du rôle qu'il joue dans cet écosystème ?

In fine :

Dans quelles mesures un modèle économique basé sur la gratuité, implique les internautes aux niveaux économique et social dans le développement d'une entreprise comme Google Inc. ?

13

Hypothèses

De cette tension au sujet de la gratuité et des conséquences économiques, sociales et communicationnelles qu'implique ce modèle d'affaires sur le web découle plusieurs hypothèses qui permettent de répondre à cette problématique.

Hypothèse 1 : Google Inc. ne propose pas de services gratuits, l'utilisateur paye avec ses données personnelles. Ainsi, je cherche à vérifier l'affirmation d'ordre générale, qui possède aujourd'hui une valeur de proverbe : « si le service est gratuit, l'utilisateur est le produit ». Je suppose alors que l'utilisateur est le produit de Google Inc., soit l'élément constitutif des relations marchandes de l'entreprise, au coeur d'un système économique complexe, où trois agents (l'entreprise, l'utilisateur et les annonceurs) opèrent.

Hypothèse 2 : L'utilisateur est conscient de la collecte et du traitement de ses données personnelles effectués par Google Inc., et conscient des relations d'échanges qui se jouent entre lui-même et l'entreprise. Ainsi, l'utilisateur se sait produit et producteur de la richesse de Google Inc. : il a conscience de payer les services avec ses données personnelles, d'être le produit de l'échange entre Google Inc. et les annonceurs, et il a également conscience d'être le producteur de la richesse de Google Inc., en améliorant les services proposés par sa seule utilisation, ce qui permet d'attirer toujours plus d'utilisateurs.

Hypothèse 3 : Google Inc. produit des discours idéologiques pour légitimer son mode de fonctionnement et euphémiser les relations d'échange économique qui lient les utilisateurs à l'entreprise. En effet, l'utilisateur étant conscient de ces relations d'échanges, il s'agit de le rassurer sur l'exploitation de ses données personnelles, et sur le rôle qu'il joue au sein du système économique mis en place par Google Inc.

Méthodologie

Une méthodologie reposant sur deux outils sera utilisée pour répondre à ces hypothèses.

Le premier consiste en une analyse de la réception des utilisateurs des services de Google Inc., grâce à un questionnaire13. J'ai choisi le questionnaire et non l'entretien, afin d'avoir un large échantillon de réponses, qui puisse être facilement quantifiable. Ainsi, j'ai réalisé une étude quantitative et qualitative, en introduisant des réponses à champ libre, me permettant d'avoir une analyse plus large et de dépasser mes hypothèses en laissant les réponses des utilisateurs me guider. L'analyse des réponses me permettra de comprendre comment les utilisateurs se placent par rapport à l'écosystème construit par Google Inc. et de comprendre leurs opinions face aux stratégies de développement de l'entreprise.

Le deuxième consiste en une analyse de discours de Google Inc. Ainsi, j'ai choisi un corpus de trois discours produits par l'entreprise14, de natures différentes et avec des objectifs différents, afin d'étudier les discours d'accompagnements de l'entreprise Google Inc. L'analyse de la stratégie de communication de l'entreprise, par l'étude de ces discours me permettra de comprendre la position que Google Inc. adopte face à ses utilisateurs.

13 Annexe 1, p. 92

14 Annexes 2, 3, et 4, p. 110, p.115 et p.122

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15

Annonce de plan

Dans un premier temps, il convient d'interroger la notion de données personnelles et de gratuité. En effet, je suppose que l'utilisateur paye les services de Google Inc. grâce à ses données personnelles qui deviennent alors l'objet de toutes les convoitises pour Google Inc. et les annonceurs. J'expliquerai également quel est le mode de fonctionnement de Google Inc. et son business model, en insistant sur la place de l'utilisateur dans cet écosystème basé sur la surveillance de l'individu.

Ensuite, je tâcherais de comprendre si les utilisateurs sont conscients de la collecte et du traitement de leurs données personnelles effectués par Google Inc., grâce à l'analyse de leur réception via un questionnaire. Ainsi, je tâcherai de rendre compte de la place de l'utilisateur, tel qu'il le ressent, au sein du modèle économique, et quelle est son opinion en tant que produit et producteur de la richesse de l'entreprise.

Enfin, la stratégie de communication de Google Inc. sera étudiée, grâce à l'analyse de trois discours, afin de montrer comment l'entreprise conçoit et entretient une idéologie pour légitimer son mode de fonctionnement et rassurer les utilisateurs afin de garder leur confiance et de garantir son monopole.

16

I. De la gratuité : la donnée personnelle comme objet de toutes les

convoitises dans un système de surveillance généralisée

Google Inc., créé en 1998, a toujours été un service gratuit pour les internautes : personne n'a jamais payé pour utiliser les différents services que l'entreprise propose. Cependant, on peut observer un certain paradoxe : des services gratuits permettent à l'entreprise d'avoir un chiffre d'affaire supérieur à 45 000 dollars en 2014. En effet, le modèle d'affaires est basé sur un échange monétaire entre Google Inc. et les publicitaires qui se servent des plateformes de Google Inc. pour y afficher leurs produits. Cependant, pour que ces publicités soient mises en place et soient rentables pour les deux parties, la présence de l'utilisateur des différents services de Google Inc., qui est la cible de ces publicités, est absolument nécessaire.

J'émets l'hypothèse que Google Inc. propose des services gratuits car l'utilisateur paye l'utilisation de ces services avec ses données personnelles. L'utilisateur est alors le produit de la richesse de Google Inc. Il convient alors d'interroger la relation économique de Google Inc. avec ses utilisateurs, pour comprendre quels sont les mécanismes qui sont mis en place par l'entreprise pour être rentable en proposant des services gratuits.

Dans un premier temps, il convient de définir les données personnelles pour comprendre quelle peut être leur valeur. Ensuite, le fonctionnement et le modèle d'affaire de Google Inc. doivent être expliqués afin d'évaluer la place de l'utilisateur au sein d'un système économique complexe.

1. Les données personnelles

La donnée personnelle est le fondement de l'économie numérique, et notamment du modèle d'affaires de Google Inc. Sa définition est complexe, et son statut économique et juridique reste encore à déterminer.

Premièrement, la donnée est « ce qui est connu et admis, le point sur lequel on fonde un raisonnement, qui, étant indiscutable ou indiscuté, sert de base à une recherche, un examen quelconque ». La donnée réfère également à « une représentation conventionnelle d'une

17

information en vue de son traitement informatique »15. La donnée informatique est donc le plus petit élément composant une information numérique. Les données représentent donc l'ensemble des éléments connus et admis qui doivent être traités de manière informatique pour donner du sens.

À cette définition de la donnée informatique, s'ajoute la définition juridique de la donnée personnelle. L'article 2 de la directive européenne 95/46 du 24 octobre 1995 ainsi que l'article 2 de la loi « Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978 définissent les « données à caractère personnel » comme « toute information concernant une personne physique identifiée ou identifiable ; est réputée indentifiable une personne qui peut être identifiée, directement ou indirectement, notamment par référence à une numéro d'identification ou à un ou plusieurs éléments spécifiques, propres à son identité physique, physiologique, psychique, économique, culturelle ou sociale. » Cette définition concerne aussi bien les données directement nominatives que celles qui le sont indirectement comme une adresse, un numéro de téléphone, une adresse IP, les traces des données de connexion - tout ce qui permet de remonter indirectement à un individu.

Ainsi, les données à caractère personnel qui font l'objet de collecte et de traitement dans un environnement numérique sont très diverses ; elles peuvent être transactionnelles, collaboratives, issues de système de gestion, de registres officiels, de médias sociaux, de capteurs d'objets connectés. Les données structurées, comme les fiches clients ou les bases de données, différentes des données non structurées, comme les requêtes des utilisateurs d'un moteur de recherche, qui permettent d'analyser leurs discours et leurs comportements. De plus, contrairement aux bases de données statiques, elles se présentent sous forme de flux, sont constamment mises à jour, et se renouvellent en permanence16.

- La donnée personnelle comme trace

Ainsi, les données personnelles peuvent également être automatiquement produites à l'occasion d'un calcul, d'une connexion, sans que le sujet en soit conscient. À chaque fois que

15Trésor de la Langue Française Informatisé

16 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015.

l'internaute effectue une recherche sur Google, il crée des traces, des empreintes de connexion, et laisse derrière lui des informations à son sujet. Nous pouvons alors reprendre le premier des cinq axiomes de la communication développés par Watzlawick, Bavelas et Beavin17 : « on ne peut pas ne pas communiquer ». Tout comportement porte un message, et même un non comportement a un sens dans une situation d'interaction. Ainsi, on peut dire qu'en matière de comportement numérique, on ne peut pas ne pas laisser de traces et de données personnelles dans un environnement numérique.

Les données personnelles des internautes peuvent être considérées comme des traces, « construite[s] ou retrouvée[s], d'une communication en même temps qu'un élément de systèmes identitaires. »18 En effet, la trace est ce qui subsiste de quelque chose, d'un passage, d'une action réalisée dans le passé. Dispositif de mémoire, elle agit comme un témoignage qui doit être analysé pour créer du sens. La trace n'est pas un message, et doit être combinée à d'autres pour faire sens. Les données produites par les individus sont des données chiffrées, des bits, des logs et non des informations. Alexandre Serres19 distingue deux types de traces : celles qui résultent d'une « interaction homme/machines » et celles qui réfèrent à une suite d'événements ordonnés. On peut distinguer les traces « profilaires », liées au support technique utilisé (adresse IP, cookie), les traces déclaratives (les données nominatives ou démographiques volontairement inscrites), les traces navigationnelles (les requêtes effectuées sur Google, les achats effectués en ligne ; toute action prise sur un site web), et les traces comportementales (l'historique de navigation). La trace assigne une signature invisible à un comportement informationnel. Ces données personnelles sont reliées à une énonciation incertaine, différée, et sans marqueurs corporels. Les données personnelles sont des déictiques qui signalent une identité, de manière contextuelle, en reliant l'activité d'un individu à son identité, mais elles sont dissociables de leur production, car ce sont des « unités solvables, agençables et calculables »20. Les données personnelles ne dépendent donc d'aucun support matériel et ne font pas l'objet d'un droit de propriété au niveau juridique. Ainsi, les données de tous types, y compris celles à caractère personnel sont très malléables, et transformables à

17 WATZLAWICK, JACKSON & BEAVIN, Pragmatics of Human Communication, W. W. Norton & Company, 2011. Disponible : https://books.google.fr/books?id=Ob9UAgAAQBAJ&pg=PA29&source=gbs toc r&cad=4#v=onepage&q&f=false, p. 29

18 PEDAUQUE T. Roger, La redocumentarisation du monde, Editions Cépaduès, 2007.

19 SERRES Alexandre, « Quelle(s) problématique(s) de la trace ? », Texte d'une communication prononcée lors du séminaire du CERCOR (actuellement CERSIC), le 13 décembre 2002. Disponible : http://archivesic.ccsd.cnrs.fr/sic 00001397/document (Consulté le 12 janvier 2015)

20 PEDAUQUE T. Roger, La redocumentarisation du monde, Editions Cépaduès, 2007.

18

19

l'infini21 et elles doivent être exploitées et transformées pour devenir une information : les données personnelles ne prennent de sens que quand elles sont collectées en masse et exploitées, transformées pour y extraire de la valeur marchande.

- La valeur de la donnée22

Il convient alors d'interroger la valeur de la donnée personnelle. En effet, l'essor d'Internet et l'explosion de ses usages ont fait croître de manière importante le nombre de données produites par les internautes. Dans ce cadre, les entreprises se sont intéressées à ces données reliées à des individus dans un but commercial. En effet, les données personnelles permettent d'identifier des consommateurs de manière ultra précise pour leur proposer des produits adaptés, garantissant ainsi l'acte d'achat. Un prix, soit une somme d'argent, est attribué aux données personnelles qui acquièrent alors une valeur marchande dans un environnement numérique. Il convient alors d'interroger le statut économique de ces données personnelles et de déterminer comment un prix correspondant à ces données peut être appliqué.

La donnée est un bien non rival, public et de non exclusion car sa consommation ne prive pas les autres agents de son usage ; elle peut être faîte simultanément par plusieurs agents économiques sans que ses caractéristiques soient affectées ; et son usage ne peut être exclu sans dispositifs techniques spécifiques ou droits de propriété. D. Quah précise en plus que la donnée est « reproductible à l'infini, a-spatiale, indivisible et recomposable »23. La donnée personnelle est un « capital circulant » dont la valeur, loin d'être détruite, s'accroît au cours des transmissions entre les différents agents24. Ainsi, elle est un bien d'abondance, car non destructible et reproductible. Les données sont des biens informationnels et intangibles (comme les services) mais qui peuvent être stockées (comme les produits), d'où son statut économique hybride.

21 MERZEAU Louise, « Du signe à la trace, l'information sur mesure », Hermès, N° 53, Traçabilité et réseaux, CNRS éditions, 2009. Disponible : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00483292 (Consulté le 12 janvier 2015)

22 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015.

23 Cité par BARBET Philippe & LIOTARD Isabelle, Sociétés de l'information : enjeux économiques et juridiques, Ed. L'Harmattan, Paris, 2006, p. 35

24 Sous la direction de BARBET Philippe & LIOTARD Isabelle, Sociétés de l'information : enjeux économiques et juridiques, Ed. L'Harmattan, Paris, 2006. p.16

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Il est intéressant de noter que la donnée peut avoir plusieurs valeurs, selon le temps, le lieu, les personnes interrogées, et le contexte. En effet, la valeur de la donnée est changeante, et dépend notamment de la finalité et de l'objectif que la donnée permet d'atteindre. Elle a une valeur immédiate : la donnée d'aujourd'hui a plus de valeur que celle d'hier. En effet, le volume et la vitesse de croissance de ces données personnelles les rendent obsolètes dans le temps, car changeantes et instables. Cependant, la somme des données passées acquiert de la valeur dans la mesure où elle permet de définir les algorithmes des moteurs de recherche par exemple, ou de définir le profil d'un individu. La donnée possède une valeur d'option, soit une valeur attribuée à un usage potentiel futur.

Simon Chinard explique que « la première valeur d'une donnée n'est pas monétaire. C'est d'abord et avant tout une valeur de levier : l'usage qui va en être fait et qui va permettre de changer les processus de décisions ou de produire différemment certains services. C'est donc la capacité de relier une donnée à une autre, de la croiser, qui va faire sa valeur »25. Ainsi, les données personnelles brutes, ne valent pas tant pour ce qu'elles sont, mais plutôt pour ce qu'elles permettent de faire ; c'est un bien d'expérience, dont la qualité ne se révèle qu'à l'usage.

En effet, la valeur de la donnée se co-construit avec d'autres données. En reprenant les termes de la loi de Metcalfe, la valeur d'une donnée est proportionnelle au carré du nombre de données auxquelles elle est associée26. Ainsi, la donnée ne prend de la valeur que quand elle est utilisée et transformée pour donner du sens. La donnée est collectée à l'état brut par une entreprise et elle doit subir une transformation et être croisée avec d'autres données pour la rendre propre à l'échange et à l'utilisation. La loi « Informatique et Libertés » du 6 janvier 1978 définit le traitement des données à caractère personnel comme « toute opération de collecte de traitement de la donnée » (art.2). De plus, le responsable du traitement des données réfère « à toute personne physique ou morale qui détermine les finalités et les

25 Simon Chignard, dans « Les données personnelles, une denrée sous-utilisées par les collectivités », la Gazette des Communes, publié le 2 juillet 2015, par Claire Chevrier. Disponible : http://www.lagazettedescommunes.com/374186/la-capacite-a-croiser-une-donnee-a-une-autre-fait-sa-valeur/# (consulté le 3 juillet 2015)

26 La loi de Metcalfe, énoncée par Robert Metcalfe, un ingénieur américain à l'origine du protocole Ethernet, annonce que « la valeur d'un réseau est proportionnelle au carré du nombre de ses utilisateurs ». Cette loi annonce que plus il y a d'utilisateurs de réseau, plus ce réseau a de la valeur. Ainsi, plus il y a d'utilisateurs de Google Inc., plus les services de l'entreprise ont de la valeur d'utilité pour les utilisateurs, et de la valeur économique. Citée dans Sociétés de l'information : enjeux économiques et juridiques, Ed. L'Harmattan, 2006, Paris, sous la direction de BARBET Philippe & LIOTARD Isabelle, p.42

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moyens du traitement » (art.3) et réfère à la personne ou l`entreprise qui engage sa responsabilité en mettant en place un fichier de collecte et des outils de traitements des données à caractère personnel.

Dans le cas de Google Inc., la donnée personnelle acquiert une valeur car elle permet d'établir le profil des utilisateurs pour leur proposer les publicités adéquates. Ainsi, « l'information, c'est-à-dire, la décision que permet l'analyse de données a une valeur d'utilité plus forte que la donnée elle-même »27. Il convient alors d'interroger le modèle économique de Google Inc. et de comprendre la place de la donnée personnelle au sein de ce modèle.

2. Le fonctionnement de Google et son business model

Le modèle d'affaire de Google Inc. n'est pas basé sur la production et la vente de contenus, mais sur le profit de contenus déjà existants sur le web. Par le biais de la publicité en ligne, juxtaposée à des contenus externes, Google Inc. propose des plateformes de services gratuits. Ainsi, l'entreprise joue un rôle d'intermédiaire entre les contenus et les annonceurs, en récoltant des informations marketing à partir des données personnelles de ses utilisateurs. « L'économie du médium a remplacé l'économie du message »28. Ce sont les plateformes et les dispositifs que Google Inc. met à disposition de ses utilisateurs qui rapportent de l'argent à l'entreprise, et en aucun cas les contenus qui y sont hébergés. Google Inc. a ainsi pour objectif de se positionner comme un point de rencontre exclusif et obligé entre les internautes, les contenus et les annonceurs. 29

- La publicité selon Google Inc.

Le modèle économique de Google Inc. est donc basé sur la publicité, dont 89%30 de son chiffre d'affaire est issu. L'entreprise propose des services aux entreprises et annonceurs qui

27 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015, p.43

28 MELOT M., préface de PEDAUQUE T. Roger, Le Document à la lumière du numérique, 2006.

29 BOUQUILLON Philippe & MATTHEWS Jacob T., Le web collaboratif, mutations des industries de la culture et de la communication, Ed. Presse Universitaire de Grenoble, coll. « La communication en + », 2010. p.42

30 « Google Inc. announces Fourth Quarter and Fiscal Year Results 2014 », 29 Janvier 2015, Disponible : https://investor.google.com/earnings/2014/Q4 google earnings.html (Consulté le 12 juillet 2015)

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veulent faire de la publicité pour leurs produits. Ces services se caractérisent par le ciblage des publics, pour rendre les publicités plus efficaces, pertinentes et rentables pour l'annonceur.

Selon Hervé Le Crosnier31, trois types de publicités ciblées peuvent être distinguées. En premier lieu, la publicité personnalisée qui consiste à savoir, selon plusieurs critères, qui est la personne derrière l'écran en fonction des sites web qu'il aura visités. L'autre forme de publicité ciblée est contextuelle où l'analyse se porte sur le contenu que recherche l'internaute et donc, quels sont ses désirs et ses besoins à un moment précis. Enfin, la publicité comportementale est le type de publicité le plus complet : l'individu est suivi en permanence et tout ce qu'il fait est enregistré. Lors de chaque visite d'un site web, un cookie est déposé sur l'ordinateur de l'individu qui l'identifie et regroupe toutes ses informations en matière de comportement.

Ainsi, Google Inc. propose à la fois de la publicité personnalisée, contextuelle et comportementale, comme nous allons le détailler ci-dessous.

Le premier service de publicité proposé par Google Inc. est AdWords, soit de la publicité contextuelle. Les annonceurs créent des annonces publicitaires sous forme de liens, comme les résultats des requêtes sur le moteur de recherche Google. Ces annonces sont combinées à des mots clés en rapport avec l'activité des annonceurs, qui misent dessus. Quand un utilisateur effectue une requête avec un de ces mots clés, l'annonce apparaît sur la même page que les résultats naturels, dans un encart dédié aux annonces commerciales. L'annonceur qui a misé la plus grosse somme d'argent sur un mot clé verra son lien commercial apparaître en premier. Quand l'utilisateur clique sur le lien sponsorisé, l'annonceur va payer la somme mise en enchère à Google Inc. ; on parle de CPC (Coût par Clic). Ce système permet d'afficher de la publicité en rapport avec la recherche effectuée par l'utilisateur. On parle alors de marketing ciblé : cette stratégie permet d'afficher des résultats pertinents pour l'utilisateur, ce qui augmente les chances pour l'annonceur de voir l'utilisateur cliquer sur son lien proposé. À noter que le classement des annonces dépend à la fois des enchères faîtes par les annonceurs et du taux de clics effectués par les utilisateurs sur ces annonces. Ainsi, le système

31 LE CROSNIER Hervé., « Usage des traces par la publicité comportementale », Traces numériques, de la production à l'interprétation, CNRS Editions, 2013

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d'AdWords prend en compte à la fois la somme d'argent dépensée par les annonceurs et le retour des utilisateurs : si un lien sponsorisé n'est jamais cliqué, il n'apparaîtra plus. Grâce à ce système de revenus, Google Inc. met ainsi en relation une recherche de contenus avec une entreprise. Les mots-clés de recherche sur Google sont « monétisés » et deviennent des objets de ventes aux enchères selon des critères de popularité.

Google Inc. possède également une régie publicitaire, AdSense. Ce programme permet aux producteurs de contenus sur Internet, propriétaire d'un nom de domaine, de générer des revenus en diffusant des annonces publicitaires ciblées sur leur site Web. La publicité affichée est déterminée en fonction du contenu de la page web : on peut parler de publicité personnalisée. Ainsi, Google Inc. est également présent sur le marché du display, soit l'affichage de bannières publicitaires sur les sites web. Ici, Google Inc. peut être rémunéré financièrement de deux façons ; le CPM (coût par mille), où l'annonceur paie en fonction du nombre supposé d'internautes exposés à l'annonce, et le CPC (Coût par clic), où l'annonceur ne paie qu'en proportion du nombre de clics sur le lien sponsorisé ou l'annonce.

En plus de ces deux services de publicité, Google Inc. propose des solutions de retargeting. L'entreprise utilise des cookies32 pour profiler les internautes et récupérer leurs données de navigation. Le cookie est un petit fichier texte stocké sur le navigateur d'un utilisateur qui permet de faciliter sa navigation en conservant ses données ; l'utilisateur pourra voir des messages publicitaires apparaître en fonction des recherches qu'il a effectuées auparavant et des sites qu'il a pu consulter.

Ainsi, les revenus de Google Inc. sont issus de la somme que les annonceurs paient pour que leurs publicités soient visibles par les utilisateurs de Google Inc.

Le modèle économique de Google Inc. est donc celui d'une régie publicitaire qui vend des espaces à des annonceurs sous forme de liens dits « commerciaux » ou « sponsorisés ». Cette pratique joue sur une illusion de surgissement contextuel pertinent.33 En effet, plus que de l'espace, qui est infini sur le web, Google Inc. vend les intentions des utilisateurs qu'ils ont exprimées sous la forme d'une simple requête sur le moteur de recherche. Cette pratique est

32 « Types of cookies used by Google » https://www.google.com/policies/technologies/types/ (consulté le 19 août 2015)

33 ERTSCHEID O., GALEEZOT G & BOUTIN E., « PageRank : entre sérendipité et logiques marchandes », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p.125

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également une transformation radicale de l'économie de l'information, puisque ce n'est plus le résultat qui fait l'objet d'une certaine valeur, mais la requête en elle-même34. C'est donc le besoin d'information de l'utilisateur qui se monétise, car les entreprises accordent de la valeur au fait de se trouver au bon endroit et au bon moment pour combler ce besoin d'information de l'utilisateur, futur consommateur. La visibilité possède une importance toute particulière pour les annonceurs qui souhaitent être immanquables pour le consommateur.

Google Inc. revendique l'utilisation des données personnelles de ses utilisateurs pour satisfaire au mieux ses besoins d'information et satisfaire le besoin de rentabilité des entreprises qui utilisent ces services de publicité. « Le moteur de recherche [É] exploite et trace entièrement et continuellement les comportements de tous ceux qui utilisent ses services, afin de « profiler » leurs habitudes et d'insérer dans leurs activités (navigation, courrier électronique, gestion des dossiers...) une publicité personnalisée, contextualisée, légère et omniprésente. »35 La mise en réseau des ordinateurs et la mise en commun de tous les sites Internet par Google, permettent de capter des informations sur les internautes et ces ressources sont mises à dispositions d'acteurs externes pour développer leurs activités. Le modèle d'affaire de Google Inc. est basé sur un échange entre l'entreprise et ses utilisateurs, et l'entreprise et les annonceurs.

- La donnée personnelle au coeur des échanges économiques

Le web et les services de Google Inc. sont fondés sur une interconnexion de sites et les données personnelles des utilisateurs sont disséminées à travers le réseau. En effet, la collecte et l'utilisation des données sont au coeur du modèle d'affaire de Google Inc., grâce à ses services de moteur de recherche, courrier électronique, et autres.

Google Inc. recueille des informations sur ses utilisateurs pour parfaire la segmentation de ses utilisateurs et leur proposer les informations qui ont le plus de chance d'attirer leur attention.

34 SIMONOT Brigitte, « De l'usage des moteurs de recherche par les étudiants », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p 101

35 KYROU Ariel, Google God, Ed. Inculte, Paris, 2010.

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Le moteur de recherche aspire les données des utilisateurs et leur « expédie » également des messages personnalisés36.

En ce qui concerne les coûts de collecte, de traitement et d'exploitation des données personnelles par Google Inc., ils sont très bas et chutent très vite, en raison de ses économies d'échelles. Les volumes de données produits par les utilisateurs des services de Google Inc. sont tels, et augmentent tellement que les coûts de traitement de ces données baissent drastiquement, et l'entreprise peut négocier les meilleurs tarifs pour ses matériels de traitement et de stockage, la bande passante et l'électricité nécessaire à son activité, et ainsi accroître sa rentabilité, en fournissant ces données aux annonceurs.

Ainsi, la stratégie commerciale de Google Inc. est basée sur le marketing relationnel, soit « la politique et les outils destinés à établir des relations individualisées et interactives avec les clients, en vue de créer et d'entretenir chez eux des attitudes positives et durables à l'égard de l'entreprise et de la marque »37. Cependant, ce n'est pas au profit direct de Google Inc. que cette stratégie est mise en place ; ce sont les annonceurs qui ont besoin de cette relation individualisée avec les consommateurs, et c'est Google Inc. qui met en place les dispositifs qui identifient le consommateur personnellement et enregistrent sa manière de consommer pour accroître la rentabilité de l'annonceur, et indirectement de Google Inc. si ces dispositifs sont efficaces.

En effet, en utilisant les données personnelles des utilisateurs, les annonceurs qui payent pour avoir des publicités ciblées réduisent les coûts des publicités qui seront montrées à des consommateurs non réceptifs, et augmentent leur revenus en proposant des informations utiles et ajustées à l'intérêt des consommateurs. Les données personnelles permettent également de mesurer et d'améliorer l'efficacité de ces publicités en ligne. Elles acquièrent alors une valeur marchande pour les entreprises qui visent une valorisation publicitaire.

Google Inc. possède donc un modèle économique biface : l'entreprise exerce un rôle d'intermédiaire entre deux acteurs du marché, que sont les utilisateurs de ses services et les annonceurs. L'existence d'une face représente de la valeur pour l'autre ; si l'un des deux

36 DUJARIER Marie-Anne, Le travail du consommateur : de McDo à Ebay, comment nous coproduisons ce que nous achetons, Ed. La Découverte, Collection Poche/Essais, 2014, p.89

37 idem, p.91

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acteurs du marché (utilisateur ou annonceur) se retire, Google Inc. n'a plus de raison d'être, et sa rentabilité n'est plus assurée. Ainsi, Google Inc. est dépendant à la fois de ses utilisateurs, et des annonceurs pour exister.

L'on peut alors constater que la seule limite de la croissance de Google Inc. est le rythme de croissance du Web lui-même : si le nombre de pages web augmente trop et que l'algorithme de Google Inc. n'est pas capable d'indexer les sites et de satisfaire les besoins des utilisateurs, ces derniers n'utiliseront plus les services de Google Inc., entraînant le retrait des annonceurs. Ainsi, les services de Google Inc. produisent des effets de réseaux : l'utilité réelle de ses différents services techniques dépend en effet de la quantité d'utilisateurs de ses services. C'est également cet effet de réseau qui permet à Google Inc. de proposer des services gratuits.

- Du gratuit rentable ? Essai sur le don - tome 2

D'un point de vue économique, le modèle d'affaire de Google Inc. ne semble pas relever du modèle marchand puisque ses services sont entièrement gratuits et qu'il n'y a pas d'échange d'argent entre l'entreprise et ses consommateurs finaux. Il convient alors d'interroger ce modèle d'affaires et de comprendre comment l'entreprise peut être bénéficiaire tout en proposant des services gratuits.

À noter que la gratuité des services de Google Inc. n'est pas uniquement une étape intermédiaire dans son modèle économique avant de passer à un modèle payant : la gratuité est bien au coeur de la philosophie de Google Inc.

Chris Anderson, dans Free ! Entrez dans l'économie du gratuit38, explique comment Google Inc. a adopté un modèle basé sur la gratuité selon trois phases historiques :

- En 1998, Serguey Brin et Larry Page ont inventé un moteur de recherche basé sur un modèle algorithmique et automatique, qui classe les sites web selon le degré de confiance et de recommandation accordé par les internautes. Entre 1999 et 2001, la société Google Inc. a transformé son moteur de recherche pour qu'il s'améliore au lieu de se dégrader au fur et à mesure que le Web prenait de l'ampleur.

38 ANDERSON Chris, Free ! Entrez dans l'économie du gratuit, Ed. Pearson, coll. Economie/nouvelles technologies, 2009, p. 139

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- À partir de 2001, l'entreprise a adopté une méthode qui permet aux annonceurs de créer en libre-service des annonces publicitaires correspondant à des mots-clés de requêtes ou des contenus. Pour que les annonces soient les mieux placées dans les résultats de requête, les annonceurs doivent d'enchérir entre eux. Avec la création d'AdWords et d'AdSense, Google Inc. est vite devenu une entreprise rentable qui réalise des bénéfices.

- À partir de 2003, grâce aux bénéfices réalisés par la publicité sur son moteur de recherche, Google Inc. a pu investir dans de nouvelles ressources pour créer d'innombrables services et produits qui élargissent la présence de l'entreprise, renforçant l'attachement des consommateurs à son égard.

Il est intéressant de noter que à sa création, Google a été pensé comme un service gratuit et accessible à tous. Le besoin de rentabilité et de bénéfices monétaires est apparu face au succès grandissant de Google et le besoin de toujours l'améliorer au niveau technique et commercial. Par la suite, les bénéfices liés à la publicité ont seulement permis de créer de nouveaux services gratuits, utiles pour les internautes.

À noter que ce modèle d'affaire basé sur la gratuité est également la meilleure manière de toucher un marché le plus vaste possible et de faire adopter massivement ses produits et services. Eric Schmidt, CEO de Google Inc. de 2001 à 2011, parle de « mass strategy » et affirme que cette stratégie deviendra la règle sur les marchés de l'information39. En effet, la gratuité permet d'accroître le volume de consommateurs et de monétiser cette audience croissante. Si le nombre de consommateurs croît, les publicités sont d'autant plus rentables car elles touchent plus d'audience, et les revenus de ces publicités permettent de créer de nouveaux services qui accroissent encore le nombre de consommateurs et, par corrélation, le revenu des publicités. Le modèle d'affaire de Google Inc. est donc un cercle vertueux, basé sur le nombre croissant de ses utilisateurs.

Cependant, la gratuité pour l'acteur final, ici l'utilisateur des services de Google Inc., ne signifie pas que son modèle est hors du modèle marchand. Un service gratuit ne l'est jamais réellement : « Le coût est loin d'être nul, il est simplement invisible », explique Pierre-Michel

39 ANDERSON Chris, Free ! Entrez dans l'économie du gratuit, Ed. Pearson, coll. Economie/nouvelles technologies, 2009, p. 142

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Menger, professeur de sociologie au Collège de France, dans un entretien accordé à Marianne40.

Le terme « gratuit » vient du latin « gratia », et s'applique aux deux parties en présence lors d'un échange : celui qui accueille avec faveur et celui qui est accueilli avec faveur. Benveniste parle de « valeur réciproque » dans un échange gratuit41. Dans le cadre marchand, gratuit signifie sans valeur d'échange. Or dans le système économique de Google Inc. il existe une valeur d'échange qu'il convient d'interroger. De plus, la pensée marchande affirme que la gratuité est impossible dans les faits, le récepteur devrait toujours finir par payer « There is no such thing such as free lunch » soit « un repas gratuit gratuit, ça n'existe pas » : il existe toujours des coûts d'opportunités dans la gratuité, soit le fait de renoncer à quelque chose pour avoir accès à autre chose.

On peut donc parler du modèle d'affaires de Google Inc. comme du « troc implicite de données contre services »42. En effet, le troc réfère à l'échange d'un bien contre un autre, sans aucune intervention de monnaie. La logique du troc réfère également à la logique du don explicitée par les ethnologues, qui fait référence à l'action de donner quelque chose à quelqu'un. Il est intéressant de noter que le terme « don » trouve son étymologie dans le latin « data », terme qui est aujourd'hui utilisé en anglais pour désigner la donnée informatique. Ainsi, la donnée personnelle peut être considérée comme un don de la part de l'utilisateur envers Google Inc. en attente d'un retour de services, comme ceux que Google Inc. propose. Le don rejette donc le modèle d'affaires basé sur la gratuité prôné par Google Inc. qui indique l'absence de valeur d'échange, car la relation du don n'est que phénomène de réciprocité et implique une valeur d'échange43. De plus, les services de Google Inc. valent les données personnelles de ses utilisateurs ; or dans le marché, il y a « la nécessité psychologique d'obtenir une chose d'une valeur égale ou sacrifiée », dit Simmel44 et dans la logique du don, le contre-don doit être égal ou supérieur au don pour être valable. De plus, dans une logique

40 Entretien de Pierre-Michel Menger réalisé par Elodie Emery, « Un enjeu démocratique sans précédent », Marianne, le 13 avril 2015. Disponible : http://www.marianne.net/enjeu-democratique-precedent-100232625.html (Consulté le 2 mai 2015)

41 GODBOUT T. Jacques, en collaboration avec CAILLE Alain, L'esprit du don, Ed. La découverte & Syros, Paris, 2000, p.248

42 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015.

43 GODBOUT T. Jacques, en collaboration avec CAILLE Alain, ibid, p.17

44 Cité par GODBOUT T. Jacques, en collaboration avec CAILLE Alain, L'esprit du don, Ed. La découverte & Syros, Paris, 2000, p.252

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de don et de contre-don, « la valeur réside dans le lien entre les deux entités »45, le don étant symbole et « performateur » des relations. Ainsi, c'est par la valeur des biens échangés (services contre données) que la relation entre les deux entités (utilisateur et entreprise) prend de la valeur. En effet, Google Inc. ne saurait se passer de la relation avec l'utilisateur, sans quoi ses services n'existeraient plus.

Enfin, selon Marcel Mauss, les relations de don sont soumises à des contraintes, notamment dues à la nature de la chose donnée : « Ce qui, dans le cadeau reçu, échangé, oblige, c'est que la chose reçue n'est pas inerte. Même abandonnée par le donateur, elle est encore quelque chose de lui »46. En effet, les données personnelles, données par les utilisateurs sont quelque chose d'eux, puisqu'on l'a vu précédemment, elles permettent de leur donner une identité. Ainsi, les données personnelles liées à l'utilisateur, comme objet de don, deviennent des produits de l'échange.

- L'utilisateur, produit de Google Inc.

« Google vend des consommateurs à des annonceurs ». Cette phrase pourrait résumer à elle seule le modèle d'affaire de Google Inc., basé sur la collecte et le traitement des données personnelles des utilisateurs pour affiner les publicités aux profits des annonceurs. L'utilisateur peut être considéré comme le produit de Google Inc. que l'annonceur achète avec de la publicité.

Il convient d'interroger le terme « produit » qui a plusieurs acceptations dans la langue française : il peut référer à « une substance, marchandise, richesse économique née de l'activité de l'homme » ou « à des choses que l'industrie a su créer. Il est rare qu'un produit soit le résultat d'un seul genre d'industrie »47. Le consommateur peut être considéré comme « une richesse économique » pour Google Inc., « une marchandise » qui permet de créer de la valeur économique. Le profilage est indispensable à la survie d'un modèle économique qui a la gratuité comme principe et la publicité comme outil. Ainsi, le financement du gratuit

45 ibid, p.252

46 MAUSS Marcel, Essai sur le don. Forme et raison de l'échange dans les sociétés archaïques, version numérique produit par Jean-Marie Tremblay, coll. Les classiques des sciences sociales, 2002. Disponible : http://www.congoforum.be/upldocs/essai sur le don.pdf (Consulté le 7 août 2015)

47 Trésor de la Langue Française Informatisé

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suppose d'exploiter la « valeur des consommateurs ». L'utilisateur devient alors une marchandise comme les autres. Les vrais clients de Google Inc. sont les annonceurs, qui achètent de l'espace et des mots clés à Google Inc., et achètent indirectement de l'audience ciblée et des consommateurs. Le produit est l'utilisateur des services de Google Inc.

Le terme produit peut également référer au sens figuré à « ce qui rapporte quelque chose, ce qui est le résultat de quelque chose »48. Dans ce sens, l'utilisateur est ce qui rapporte de l'argent à Google Inc. ; c'est parce que l'internaute utilise les services de Google Inc. qu'il crée de la valeur économique. Avec l'omniprésence de la publicité et notamment la présence de liens sponsorisés sur la même page que les liens de résultats, la recherche d'information peut s'apparenter à une nouvelle forme d' « économie-casino », dans laquelle le langage (les mots-clés) et le comportement des internautes (le clic) sont une source inépuisable de richesse49.

Ainsi, l'échange qui s'opère entre Google Inc. et l'utilisateur de ses services repose sur un échange de données personnelles contre un service gratuit.

« Objet de toutes les attentions et de toutes les convoitises, cette entité [le consommateur] est en passe de devenir la principale monnaie d'une économie numérique où chaque échange se paie en données personnelles. »50

L'utilisateur est produit de Google Inc. en tant que création de l'entreprise qui restitue toutes ses données personnelles échangées de manière indirecte sous forme de produit, qui sont alors vendues contre de l'argent aux annonceurs. Le consommateur, alors délié de ses données personnelles qui ne lui appartiennent pas, devient une monnaie d'échange contre de services. De plus, grâce à la technique, l'individu externalise ses fonctions humaines : grâce à la technologie proposée par Google Inc. l'individu externalise ses fonctions de mémoire, en effectuant des recherches sur le moteur de recherche Google et il externalise également son

48 Trésor de la Langue Française Informatisé

49 SIMONOT Brigitte, « De l'usage des moteurs de recherche par les étudiants », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p.101

50 MERZEAU Louise, « Présence numérique : les médiations de l'identité », Les enjeux de l'information et de la communication n°3, CNRS, Paris, 2009. Disponible : https://www.cairn.info/revue-les-enjeux-de-l-information-et-de-la-communication-2009-1-page-79.htm (consulté le 12 janvier 2015)

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identité51, ce qui consiste en ses préférences, ses intérêts, ses désirs et ses besoins au profit de Google Inc. Lorsque le service est gratuit, l'utilisateur est à la fois le produit et la monnaie.

3. Le produit-utilisateur au coeur d'une économie foucaldienne

Google Inc. a donc mis en place un modèle d'affaire basé sur la gratuité de ses services, et l'utilisation des données personnelles de ses utilisateurs. Pour Google Inc., les données sont à la fois la ressource principale de ses services, le moteur de la réalisation de son revenu et l'arme stratégique de conquête de positions concurrentielles. Il convient alors d'interroger cette troisième affirmation.

- Le sur-mesure de masse

Le fonctionnement de Google Inc. propose donc un sur-mesure de masse : avec plus de 90%52 de parts de marché dans le monde, Google Inc. possède la plus grande base utilisateur du monde. Ces produits d'adressent donc à une masse d'utilisateurs, et pourtant Google Inc. propose à chacun une expérience personnalisée. La donnée personnelle des utilisateurs en tant que trace permet de calibrer les informations sur mesure.

En effet, le numérique tend à personnaliser l'information qu'il dissémine, notamment par son architecture décentralisée. Le web donne à chacun son information, en faisant de la pertinence le seul critère valable. Cette personnalisation suppose un traçage des facteurs singuliers qui affectent l'identité.

Sackmaan, Strucker et Accorsi53 définissent trois formes de personnalisation : les services personnalisés fondés sur l'exploitation des données personnelles qui permettent une communication one-to-one comme de la recommandation, ou la facilitation d'achats selon l'historique de navigation des utilisateurs ; les services individualisés qui ne nécessitent pas d'identification de l'utilisateur mais des données de contexte comme une requête effectuée sur

51 MERZEAU Louise, « Du signe à la trace, l'information sur mesure », Hermès, N° 53, Traçabilité et réseaux, CNRS éditions, 2009. Disponible : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00483292 (Consulté le 12 janvier 2015)

52 Chiffres Google - 2015, via Le blog du modérateur. Dernière mise à jour le 3 août 2015. Disponible : http://www.blogdumoderateur.com/chiffres-google/

53 ROCHELANDET Fabrice, Economie des données personnelles de la vie privée, Ed. La Découverte, coll. Repères, Paris, 2010, p.63

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Google ; et le service universel accessible à chacun et portant sur des données individuelles émises et utilisées par les individus eux-mêmes (commentaires sur un forum) ou sur des fonctionnalités individualisables (comme la recherche sur Google), chaque utilisateur se servant du service en fonction de ses besoins à un moment donné. Google Inc. applique ainsi ces trois formes de personnalisations.

En effet, Google Inc. utilise des techniques de tracking qui consistent à pister les singularités des individus pour cibler toujours plus finement les consommateurs. Les comportements et les préférences des utilisateurs n'existent que par rapport aux autres usages, préférences ou opinions des utilisateurs. Ainsi, la personnalisation s'opère dans un contexte où la communauté est la plus importante, et on peut parler de sur-mesure de masse. Comme l'explique Louise Merzeau54, les données personnelles et personnalisées sont aujourd'hui favorisées ; le but des annonceurs et de Google Inc. n'est pas de connaître les habitudes communes à toute une masse d'individus, mais plutôt celle d'un individu en particulier pour lui proposer un message personnalisé et positif à ses attentes. Ainsi, les entreprises, grâce aux fonctionnalités publicitaires de Google Inc. ciblent les publicités de manière précise sur les internautes.

Les utilisateurs de Google sont à la recherche d'une information, et le service leur propose une information personnalisée et sur mesure. Bill Davidow parle de prison algorithmique55 pour désigner ce phénomène d'hyperpersonnalisation induit par l'utilisation des données massives. Cette prison est telle qu'elle n'est pas connue par les utilisateurs : ils ne savent pas à quelles informations ils n'ont pas accès. On peut donc parler d'un changement de paradigme, où le modèle d'affaires de Google Inc. n'est plus uniquement basé sur l'économie de l'information, mais également sur celle de l'attention.

- De l'économie de l'information à et l'économie de l'attention

Google Inc. base son modèle d'affaires sur le marché d'abondance qu'est celui de l'information. D'une part, les contenus informationnels qui sont sur le Web et que les utilisateurs recherchent, d'autre part les informations de la masse des utilisateurs de Google

54 MERZEAU Louise, « Du signe à la trace, l'information sur mesure », Hermès, N° 53, Traçabilité et réseaux, CNRS éditions, 2009. Disponible : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00483292 (Consulté le 12 janvier 2015)

55 DAVIDOW Bill, « Welcome to Algorithmic prison », The Atlantic, le 20 février 2014. Disponible : http://www.theatlantic.com/technology/archive/2014/02/welcome-to-algorithmic-prison/283985/ (consulté le 13 août 2015)

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Inc. Parce que les contenus augmentent et que les prix de stockage sont en constante réduction, les prix de l'information publique, soit les contenus sur le web, tombent à des prix marginaux.

L'information n'est alors plus un bien rare et ne possède presque plus de valeur économique : l'accès à l'information est facile et simple pour tous les individus qui disposent d'un ordinateur et d'une connexion Internet. En effet, en économie, les produits fait d'idées, au lieu de matière, deviennent plus vite bon marché ; étant des bien non rivaux, qui ne se détruisent pas à l'utilisation, l'information est un bien d'abondance. Ainsi, l'information conserve un coût marginal, qui est si proche de zéro qu'il est préférable d'arrondir. En effet, si la loi veut que les prix chutent jusqu'au coût marginal, la gratuité n'est pas une option, mais un aboutissement inéluctable de l'économie. C'est la racine de l'abondance qui mène à la gratuité56. De plus, l'aspect intangible de l'information favorise sa gratuité. Étant un bien non rival, l'information devient un produit abstrait, qui semble ne rien coûter pour le consommateur. En réalité, Google Inc. a intérêt à ce que l'information soit gratuite, car « plus le coût de l'information diminue, plus l'entreprise gagne de l'argent », explique Nicolas Carr dans The Big Switch. En effet, si l'information est gratuite, les internautes vont utiliser Google pour y avoir accès, et devenir alors consommateurs des publicités.

La multiplication de l'information et son accessibilité font ainsi naître un nouveau paradigme ; c'est l'attention qui a de la valeur, et non plus l'information.

« Dans un monde riche en information, l'abondance des informations signifie une privation d'autre chose, la rareté de quoi que ce soit que l'information consomme. Ce que l'information consomme est l'attention du destinataire. Une abondance d'information crée une disette

d'attention. »57

Ainsi, l'information atteint un coût zéro, tandis que l'attention atteint un coût élevé, puisqu'elle se raréfie étant donné le nombre d'informations croissant auquel l'utilisateur a accès. C'est le contact entre l'utilisateur qui cherche de l'information et Google Inc. qui classe

56 ANDERSON Chris, Free ! Entrez dans l'économie du gratuit, Ed. Pearson, coll. Economie/nouvelles technologies, 2009, p. 96

57 SIMON Herbert, cité par ANDERSON Chris, Free ! Entrez dans l'économie du gratuit, Ed. Pearson, coll. Economie/nouvelles technologies, 2009, p. 209

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et donne accès aux informations, qui est porteur de valeur58. La notion d'attention réfère donc au « temps de cerveau disponible », nécessaire pour que la publicité soit reçue par les consommateurs. Il convient donc de trouver des stratégies efficaces pour que l'utilisateur des services de Google Inc. soit en contact avec les publicités, et AdWords et AdSense sont des moyens efficaces de montrer de la publicité adaptée aux besoins des utilisateurs. Cependant, la notion d'économie d'attention est à questionner.

Pour que l'utilisateur de Google soit réceptif aux publicités, et y accorde son attention, l'entreprise met en place des méthodes pour collecter ses données de recherche et ses données personnelles afin de lui afficher des publicités contextuelles et adaptées. Ainsi, en mettant en place de nombreux services pour les utilisateurs, Google Inc. a accès à un ensemble d'informations qui relèvent de la sphère publique, de la sphère privée ou professionnelle et de la sphère intime des utilisateurs. Avec cette nouvelle configuration des espaces informationnels émerge une nouvelle écologie cognitive, soit « l'étude des interactions entre les déterminants biologiques, sociaux et techniques de la connaissance »59, qui consacre l'interpénétration des deux sphères : celle de la recherche d'informations publiques sur le web, et celle de la recherche d'informations concernant les données personnelles des utilisateurs et possibles consommateurs. En effet, le moteur de recherche de Google permet à la fois aux utilisateurs d'avoir accès à de l'information publique, et à la fois aux annonceurs d'avoir accès à de l'information sur leurs consommateurs. « Ainsi, les individus sont considérés comme des petits éléments dans une machine d'information, quand ils ne sont pas les seules sources ou destinations d'informations. »60 Ce changement de paradigme ouvre des espaces pour le suivi et le traçage des individus à la fois à leur insu et avec leur consentement61.

58 KESSOUS Emmanuel et REY Bénédicte, « Economie numérique et vie privée », Hermès, N°53, Traçabilité et réseaux, CNRS éditions, 2009. Disponible : http://www.cairn.info/revue-hermes-la-revue-2009-1-page-49.htm (Consulté le 12 janvier 2015)

59 BATESON Gregory, cité par ERTSCHEID O., GALEEZOT G & BOUTIN E., « PageRank : entre sérendipité et logiques marchandes », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p..119.

60 LANIER Jaron, Who owns the future ?, Penguin Books, 2014.

61 ERTSCHEID O., GALEEZOT G & BOUTIN E., « PageRank : entre sérendipité et logiques marchandes », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p.119.

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- De l'économie de l'attention à l'économie de surveillance

La publicité sur le web est partie intégrante d'une nouvelle forme d'économie, qui n'est plus l'économie de l'attention, mais l'économie de la surveillance62, qui consiste à ce que toutes les informations qui constituent les individus soient dévoilées pour permettre un ciblage et une personnalisation toujours plus accrue. Les faits et gestes des utilisateurs de Google sont constamment surveillés, et les données personnelles sont collectées pour adapter et affiner au maximum les publicités auxquelles l'utilisateur est confronté.

Les méthodes de profilage de Google Inc. peuvent être reliées à l'idée du panoptique développée par Michel Foucault dans Surveiller et Punir. En effet, Google Inc. « voit sans être vu » les comportements des utilisateurs de ses différents services, et est capable de collecter toutes les traces des utilisateurs et d'analyser leur comportements. « La surveillance prend appui sur un système d'enregistrement permanent, [É] constant et centralisé. » 63 En effet, Google Inc. enregistre de manière permanente et constante tous les comportements de ses utilisateurs, en centralisant ses données personnelles. C'est par la surveillance de ces utilisateurs et la centralisation de ces informations que Google Inc. dégage de la valeur financière. En reprenant les termes de Michel Foucault dans l'introduction de Surveiller et Punir, Google Inc. peut être décrit comme « un espace clos, découpé, surveillé en tout points » ; de la page d'accueil de Google, à la page d'un Google Doc, les espaces où l'utilisateur se sert des services de Google Inc. sont des espaces cloisonnés, et surveillés par l'entreprise. « Les moindres mouvements sont contrôlés, les événements sont enregistrés » ; chaque action, chaque clic, chaque nouvelle requête ou nouvel e-mail est enregistré par Google Inc., qui les centralise pour établir un profil presque parfait de l'utilisateur. L'espace de Google Inc. est également caractérisé par « un travail ininterrompu d'écriture qui relie le centre et la périphérie » ; le centre étant Google Inc. et la périphérie étant les annonceurs qui utilisent les services publicitaires de Google Inc., un travail d'écriture et d'analyse est constamment en marche entre ces deux acteurs, entre lesquels les utilisateurs évoluent et se comportent grâce à l'écriture.

62 SCHNEIER Bruce, « `Stalker economy' here to stay », CNN.com, le 26 novembre 2013. Disponible : http://edition.cnn.com/2013/11/20/opinion/schneier-stalker-economy/index.html (Consulté le 1er mai)

63 FOUCAULT Michel, Surveiller ou Punir, Gallimard, Paris, 1979, Introduction.

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De plus, les méthodes de tracking et de profilage de l'utilisateur réfèrent à un assujettissement politique et économique des individus. Grâce à l'analyse croisée de millions de requêtes, aux fonctions d'historiques de navigation et à l'analyse des données personnelles des utilisateurs, Google Inc. est capable de prédire que l'affichage de tel lien sponsorisé entraînera un clic. L'action prédictive devient un aspect incitatif pour le consommateur, le lien sponsorisé acquérant une valeur de suggestion efficace pour orienter la recherche d'information des internautes64. Ainsi, l'algorithme utilisé pour générer des revenus publicitaires devient un algorithme d'orientation65. Google Inc. « impose une conduite quelconque à une multiplicité humaine quelconque »66 et, comme le panoptique de Michel Foucault, met en place « un ensemble de prescriptions, calculées et raisonnées, selon lesquelles on devrait [É] régler des comportements. » Ce programme de sur-mesure instauré par Google Inc. a sa « régularité propre », et la surveillance, consciente ou non, des utilisateurs instaure des comportements orientés et définis non plus par l'individu mais par Google Inc.

Ainsi, le paradigme se déplace : dans l'économie de l'attention, l'utilisateur contrôle ses agissements, et décide ou non de prendre le temps de voir les publicités selon son intérêt pour elles. Dans l'économie de surveillance, l'utilisateur subit entièrement les publicités, et son comportement est constamment surveillé et orienté pour que la décision de voir et d'agir en fonction des publicités affichées ne se fasse plus. Ainsi, l'utilisateur actif qui prend des décisions pour prêter de l'attention à telle ou telle publicité devient sujet passif et soumis aux règles imposées par Google Inc., et est produit de richesse pour les annonceurs. Jaron Lanier conclue que « Gratuit signifie inévitablement que votre vie va être décidée par quelqu'un d'autre. »67

Ainsi, la donnée personnelle, comme trace de l'utilisateur de Google Inc. prend de la valeur lorsqu'elle est associée à toutes les données personnelles qu'un utilisateur peut laisser lors de son utilisation d'Internet. Ces données sont ensuite valorisées dans un système économique où Google Inc. se place comme un intermédiaire entre les annonceurs et les utilisateurs. Une relation d'échange et de don se met en place entre l'entreprise et l'utilisateur, et on peut

64 ERTSCHEID O., GALEEZOT G & BOUTIN E., « PageRank : entre sérendipité et logiques marchandes », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, , C&F Editions, Paris, 2009, p.125

65 idem p.125-126

66 FOUCAULT Michel, Surveiller ou Punir, Gallimard, Paris, 1979, Préface de Gilles Deleuze.

67 LANIER Jaron, Who owns the future ?, Penguin Books, 2014.

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conclure que la donnée personnelle devient un moyen de paiement, comme dans un échange de troc. Cependant, ce système économique et symbolique complexe font de l'utilisateur un simple produit d'échange, entre Google Inc. et les annonceurs, qui se retrouve à être surveillé tout le temps et partout pour devenir rentable. Cependant, au sein de ces échanges économiques complexes, il convient d'interroger cette notion de produit et d'examiner les relations qu'entretient l'utilisateur avec l'entreprise Google Inc. Le produit pourrait-il être en même temps le producteur de la richesse et du bon fonctionnement de Google Inc. ?

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II. « Je te déteste, mais je reste » ; le paradoxe des internautes au

coeur de l'écosystème de Google Inc.

Il s'agit de comprendre quelle est la position de l'utilisateur face à ces logiques marchandes et aux échanges qui se jouent entre lui-même et Google Inc. Si l'utilisateur de Google Inc. est le produit de la richesse de Google Inc., et est une monnaie d'échange assujettie et contrôlée par l'entreprise et les annonceurs, il s'agit de déterminer s'il a conscience de ce rôle, et comment il conçoit sa relation avec l'entreprise. J'émets l'hypothèse que l'utilisateur est conscient de la collecte et du traitement de ses données personnelles, et qu'il se sait à la fois produit et producteur de la richesse de Google Inc. En effet, en utilisant les services de Google Inc., l'utilisateur participe à la production de la richesse de l'entreprise et à son amélioration technique. Ainsi, si l'utilisateur est le produit d'échange entre Google Inc. et les annonceurs, il est également producteur des services de Google Inc., lui rapportant indirectement de la richesse.

Pour appuyer mon argumentaire, j'ai choisi de réaliser un questionnaire sur les habitudes d'utilisation des services de Google Inc. J'ai réalisé ce questionnaire sur la plateforme Google Forms qui a été diffusé sur les plateformes des réseaux sociaux et par mail auprès de mon entourage. Le questionnaire est disponible en annexe68, avec les justifications de chaque question et les résultats. 160 personnes ont répondu au questionnaire entre le 8 et le 20 juillet 2015. Les résultats ont été arrondis au dixième. Le nombre de réponses est suffisamment important pour que je puisse récolter des réponses et faire des analyses, cependant, je considère que mon échantillon n'est pas assez large pour qu'il soit représentatif de la population française.

Dans un premier temps, le profil des sondés sera détaillé, ainsi que leur habitudes d'utilisation des services de Google Inc. Ensuite, l'opinion des utilisateurs face à l'utilisation de leurs données personnelles par l'entreprise sera explicité, afin de montrer s'ils sont conscients des enjeux que supposent l'utilisation de leurs données personnelles, pour enfin détailler leur rôle actif et conscient au sein du système économique mis en place par Google Inc.

68 Annexe 1, p. 92

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1. Le profil des sondés - Démographie

Le profil des sondés est composé à 68,1% de personnes entre 15 et 30 ans ; ce sont des « digital natives »69, soit la génération qui a grandi dans un environnement numérique. 10,7% des sondés ont plus de 50 ans.

åge

15-20 ans 20-30 ans 30-40 ans 40-50 ans 50-60 ans Plus de 60 ans

6,25%

2,50% 1,90%

4,40%

8,10%

60,00%

De plus, 53,8% des sondés sont étudiants. À noter que 22,5% des sondés évoluent dans le milieu professionnel de la communication et du marketing, qu'ils soient étudiants ou actifs : ce résultat, non représentatif de la population, est lié au fait que j'ai diffusé le questionnaire dans mon entourage, composé d'individus évoluant dans la même sphère professionnelle que moi.

69 PRENSKY Marc, « Digital Natives, Digital Immigrants », extrait de On the Horizon (MCB University Press, Vol. 9 no. 5, Octobre 2001) Disponible : http://www.marcprensky.com/writing/Prensky%20-%20Digital%20Natives,%20Digital%20Immigrants%20-%20Part1.pdf (Consulté le 2 août 2015)

5,00%

5,60%

3,10%

5,00% 4,40% 6,30%

36,30%

Situation professionnelle

18,10%

17,50%

Salarié

Etudiant en communication/ marketing

Etudiant dans une autre filière

Lycéen Fonctionnaire

Professionnel de la communication/marketing Retraité

Sans activité Autres

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- Utilisation des services de Google Inc.

En ce qui concerne l'utilisation des services de Google Inc., 95.2% des sondés utilisent les services de Google. Ainsi, ces résultats sont proches du taux d'utilisation du moteur de recherche Google en France, qui est d'environ 93.5%70.

92.9% des sondés utilisant les services de Google Inc. possèdent un compte Google. Les sondés qui ont indiqué ne pas avoir de compte Google ont plus de 50 ans (70%). À noter qu'un sondé dit ne pas avoir un compte Google, mais utilise le service de messagerie Gmail, ce qui implique d'avoir un compte Google. Il est intéressant de noter que les utilisateurs ne sont pas forcément au courant de l'existence d'un compte Google et que la multiplicité des services que l'entreprise propose n'est pas comprise pour certains sondés comme un « package », mais comme différents services indépendants les uns des autres.

Enfin, concernant les services utilisés par les sondés, une écrasante majorité de sondés qui utilisent les services de Google Inc. utilisent le moteur de recherche Google. À noter que 4.5% des sondés utilisent les services de Google Inc. comme Gmail ou Google Drive mais ne se servent pas du moteur de recherche et utilisent Ecosia ou DuckDuckGo. Les services les plus utilisés sont Youtube avec un taux d'utilisation de 78%, Gmail (68.8%) et Google Drive (56.8%). Des sondés ont également mentionné Google Calendar, qui est utilisé dans certaines entreprises, et sur les smartphones Android, et Blogpost.

70 StatCounter Global Stats, Top 5 Desktop, Tablet & Console Search Engines from July 2014 to July 2015 in France. http://gs.statcounter.com/#search engine-FR-monthly-201407-201507 (consulté le 3 août)

Quels sont les services de Google utilisés par ses utilisateurs ?

14,30%

56,50%

68,80%

1,30% 1,30%

78%

95,50%

Le moteur de recherche

Gmail

Google Drive

Google +

Youtube

Google Calendar

Blogpost

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J'ai ensuite demandé aux utilisateurs des services de Google Inc. quelles étaient les raisons pour lesquelles ils les utilisaient. En effet, quand le prix n'est pas mentionné et qu'il est de zéro, les individus appliquent les normes sociales pour déterminer leur choix et leur effort. Quand un produit ou un service comme ceux de Google Inc. est gratuit, le prix n'est plus un critère de choix pour l'utilisateur ; il se base alors sur les recommandations de ses pairs, sa réputation, son efficacité et son éthique, ainsi que sur l'utilité qu'un tel service peut lui apporter, selon ses besoins et le degré de satisfaction qu'il souhaite accomplir.

Pour une grande majorité des sondés, les raisons d'utilisation du moteur de recherche de Google sont liées à sa facilité d'utilisation. Pour la moitié d'entre eux, le moteur de recherche de Google est le plus pertinent par rapport à ses concurrents : ainsi, la notion d'efficacité est un critère de choix prédominant pour les utilisateurs, qui se base également sur la recommandation de leurs pairs.

32% des sondés évoquent le fait qu'il soit standardisé, et que tout le monde l'utilise. Ainsi, pour un tiers des utilisateurs, la recommandation par les pairs et la réputation sont des critères de choix. De plus, 30,5% des utilisateurs évoquent le fait que le moteur de recherche soit installé par défaut sur le navigateur. En effet, Google a été le moteur de recherche par défaut sur le navigateur Firefox jusqu'en Novembre 201471, et sur Google Chrome, le logiciel de navigation édité par Google Inc. le moteur de recherche y est installé par défaut.

71 « New search Strategy : Promoting Choice and Innovation », The Mozilla Blog, 19 novembre 2014. Disponible : https://blog.mozilla.org/blog/2014/11/19/promoting-choice-and-innovation-on-the-web/ (consulté le 13 août 2015)

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3.2% des sondés ont répondu « Autres » et ont détaillé leur réponses.

Trois sondés citent le design et l'esthétisme du moteur de recherche. L'objet du moteur de recherche apporte un plaisir d'utilisation aux utilisateurs. La page d'accueil, simplissime et ergonomique du moteur de recherche est un critère de choix : elle ne présente qu'une barre de recherche, surmonté du logo de l'entreprise. Une seule action est possible, et l'utilisateur peut se passer de l'usage de la souris ou du pad, en tapant sur entrée. Le design apporte donc une facilité d'utilisation et la sobriété un plaisir d'utilisation.

Deux sondés citent l'interopérabilité entre les différents services et les différents appareils. En effet, Google Inc. a conçu ses services pour qu'ils puissent tous fonctionner entre eux, et être disponibles sur toutes les plateformes et appareils utilisés. Le protocole SaaS qui permet d'avoir toutes ses applications (mail, traitement de textes, stockage de photos) au même endroit, en ligne, qui permet alors de se passer de la possession d'un terminal, est un critère d'utilisation et de satisfaction important pour les utilisateurs.

Deux sondés citent également l'efficacité et la rapidité du moteur de recherche. Les utilisateurs recherchent un outil capable de répondre de manière rapide et efficace à leurs besoins. La performance est un critère de choix important, qui est également lié à la pertinence des résultats d'une requête. Les utilisateurs veulent que leurs besoins en information soient satisfaits rapidement et de manière pertinente, afin que les coûts de recherche (soit le temps passé à effectuer une recherche) soient les moins élevés possible.

Un sondé cite également la personnalisation des requêtes comme critère de choix. Cet élément fait écho à l'hyper-personnalisation que propose Google en matière de recherche, grâce à l'utilisation des données personnelles de ses utilisateurs. Ainsi, ce sondé souhaite avoir accès à de l'information sur mesure, qui satisfait entièrement ses besoins selon ses préférences et ses intérêts.

Enfin, à noter qu'un sondé explique ne pas connaître d'alternatives au moteur de recherche de Google. Le monopole de Google Inc. est tel que les internautes ne connaissent pas ses concurrents et ne sont pas capables de choisir entre plusieurs services. Cette situation de monopole sera examinée plus tard dans mon argumentaire.

Raisons des utilisations du moteur de recherche de Google

3,20%

0

30,50%

72,10%

58,40%

32,00%

Il est facile d'utilisation

Tout le monde l'utilise, c'est standardisé

Les résultats des autres moteurs de recherche ne sont pas aussi

pertinents

Il est installé par défaut sur le

navigateur L'habitude

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Ainsi, une grande majorité des sondés utilise les services de Google Inc. et plus particulièrement le moteur de recherche de Google. Il est intéressant de noter que les critères d'utilisation sont d'abord liés à son utilisation qui est facile et ne nécessite pas de manuel d'emploi. De plus, la recommandation par les pairs est également un critère de choix : Google devient un point de repère pour toute une population donnée, et son utilisation ne fait pas débat au sein d'une communauté. L'utilisation de Google est standardisée et même institutionnalisée au sein d'une population, qui en fait un objet de référence commune. Enfin, la situation de monopole de Google comme moteur de recherche par défaut est également un critère d'utilisation dominant : les utilisateurs utilisent Google sans avoir auparavant étudié les différentes alternatives sur le marché. Les coûts de transaction liés à la recherche (de prospection, de comparaison, d'études de marché) sont totalement supprimés pour l'utilisateur. On peut donc remarquer que les critères d'utilisation de Google abaissent les coûts liés au temps pour l'utilisateur : le temps de recherche d'un autre moteur de recherche, le temps de compréhension de la plateforme, le temps de recherche de résultats pertinents, etc. La réduction de ces coûts rend Google satisfaisant pour les utilisateurs.

Après ce premier tour d'horizon concernant les habitudes d'utilisation des services de Google Inc. par les sondés, il convient désormais de comprendre quelles sont les relations qui se jouent entre les utilisateurs de Google Inc. et l'entreprise, notamment en ce qui concerne l'utilisation de leurs données personnelles.

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2. Les utilisateurs face à l'utilisation de leurs données personnelles

Après avoir montré dans une première partie que les services de Google Inc. n'étaient pas gratuits pour l'utilisateur, car un échange de données personnelles s'effectuait entre l'utilisateur et l'entreprise, il m'est apparu évident de savoir si les utilisateurs étaient conscients de cet échange économique qui se jouait avec Google Inc. et de comprendre quelle était leur position par rapport à la gratuité des services et à l'utilisation de leurs données personnelles comme monnaie d'échange.

- La position des utilisateurs par rapport à leurs données personnelles

La vie personnelle est aujourd'hui quelque chose d'individuel, dont la définition collective est difficile à trouver. La vie privée peut être définie comme « le droit à être laisser tranquille et à être seul »72, soit le droit de ne pas dévoiler des informations sur soi et de ne pas être importuné par autrui, que ce soit des individus ou des organisations privées. Ainsi, ce droit est de plus en plus revendiqué par les citoyens du monde, notamment en ce qui concerne l'environnement numérique.

Selon l'enquête réalisée par PewResearch Center en mai 201573, 90% des internautes américains veulent garder le contrôle sur leurs données privées, 40% d'entre eux n'approuvent pas le business model de Google Inc. et 66% ne font pas confiance aux moteurs de recherche. J'ai cherché à vérifier ces chiffres grâce à mon questionnaire.

Je suis partie du postulat que tous les sondés sont donc conscients de l'utilisation de leurs données personnelles par Google Inc., et si ce n'était pas le cas, j'ai laissé entendre dans mes questions que l'entreprise collectait, traitait et exploitait les données personnelles de ses utilisateurs. Suite aux réponses, il en ressort que la majorité des sondés sont dérangés par cette pratique.

72 WARREN & BRANDEIS, « The Right to Privacy », Harvard Law Review, Vol. IV, No 5, le 5 décembre 1890. Disponible : http://groups.csail.mit.edu/mac/classes/6.805/articles/privacy/Privacy brand warr2.html (Consulté le 13 août 2015)

73 « American's Atittudes about Privacy, Security and Surveillance », PewResearchCenter, 20 mai 2015. Disponible : http://www.pewinternet.org/2015/05/20/americans-attitudes-about-privacy-security-and-surveillance/ (consulté le 6 juin 2015)

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66% des sondés, non utilisateurs des services de Google Inc. ont un avis négatif sur la collecte des données personnelles par une organisation privée comme Google Inc. En ce qui concerne les sondés utilisateurs de Google Inc., 67,5% se sentent concernés et dérangés par l'utilisation de leurs données personnelles par une organisation privée comme Google Inc. Seuls 35.5% des sondés ne sont pas dérangés par la collecte, le traitement et l'exploitation de leurs données personnelles, dont 37.5% des professionnels de la communication et du marketing, et 25% des étudiants dans ce domaine. Ainsi, les individus évoluant dans ce domaine professionnel sont plus à même d'être informés de cette pratique, et de connaître au niveau technique et commercial son fonctionnement, notamment parce que ce sont des pratiques qu'ils mettent en oeuvre au niveau professionnel. À noter également que 57.2% des sondés sans activité ne sont pas dérangés par l'utilisation de leurs données personnelles, et que seulement 12.5% des retraités le sont.

Ainsi, ces pratiques sont perçues de manière négative par les sondés, qui veulent garder le contrôle sur leurs données personnelles, et n'approuvent pas qu'elles soient traitées par des tiers.

Cependant, il est intéressant de noter que seuls 10.4% des sondés ont lu les conditions d'utilisation des services de Google Inc. Seuls ces sondés ont une connaissance exacte des conditions d'utilisation de leurs données personnelles effectuée par Google Inc. En effet, les conditions d'utilisation de services sur Internet sont très rarement lues par internautes, étant donné la longueur des textes et leur caractère juridique, qui peuvent être compliqués à comprendre pour la plupart des utilisateurs de services.

À noter que parmi les sondés qui ont lu les conditions d'utilisation des services de Google Inc., 14% sont des étudiants, 13.8% sont des salariés, 28.6% sont sans activité. Il semble que la lecture des conditions d'utilisation ayant un coût en temps important, seuls les sondés qui ont des horaires de travail allégées ou qui n'ont pas d'activité peuvent avoir le temps de chercher et de lire ce texte.

De plus, le faible taux d'utilisateurs ayant lu les conditions d'utilisation de Google Inc. s'explique notamment par le fait que leur lecture n'est à aucun moment proposé à l'utilisateur, les conditions d'utilisation précisant que « l'utilisation des services de Google Inc. implique

46

votre acception des présentes conditions d'utilisations »74. L'utilisateur ne doit à aucun moment cocher une case pour accepter les conditions d'utilisations, et s'il ne les cherche pas, elles ne lui sont jamais affichées. Cependant, même si 10% des sondés ont lu les conditions d'utilisation des services de Google Inc., la problématique des données personnelles et de l'exploitation qui est faite par les entreprises se heurte au consentement préalable et limite la possibilité de réutiliser les données. « Il est difficile de demander un consentement pour des traitements dont on a pas encore l'idée », explique Simon Chinard.75 Ici, le consentement des utilisateurs est implicite, ce qui permet à Google Inc. de se réserver le droit de traiter les données personnelles de ses utilisateurs de toutes les manières possibles, sans que l'utilisateur ait son mot à redire. Une des limites essentielles à laquelle se heurte les individus qui cherchent à préserver leur vie privée et l'utilisation de leurs données personnelles est l'incomplétude d'information76 : du fait de l'asymétrie informationnelle entre l'individu et une entreprise comme Google Inc., l'utilisateur a une certaine difficulté à calculer les probabilités d'occurrence d'événements futurs engendrées par son comportement présent. En effet, Google Inc. est seul maître à bord, et est le seul à détenir les informations de collecte et de traitements des données. L'utilisateur, étant en déficit d'informations par rapport à Google Inc., ne peut pas savoir l'usage de ses données personnelles qui va être fait dans le futur, et si cela pourrait être un préjudice pour lui-même ou non.

On peut donc considérer un certain paradoxe de la vie privée : les internautes sont dérangés par la collecte et le traitement de leurs données personnelles, qui relèvent de la vie privée, mais dans le même temps, ils ne prennent pas le temps de lire les conditions d'utilisation des services numériques qu'ils utilisent. En terme de psychologie, les individus préfèrent un plaisir immédiat, une satisfaction à un besoin immédiat à un dommage futur qu'il est difficile d'envisager.

74 Annexe 3, p. 115

75 Simon Chignard, dans « Les données personnelles, une denrée sous-utilisées par les collectivités », la Gazette des Communes, publié le 2 juillet 2015, par Claire Chevrier. Disponible : http://www.lagazettedescommunes.com/374186/la-capacite-a-croiser-une-donnee-a-une-autre-fait-sa-valeur/# (consulté le 3 juillet 2015)

76 ROCHELANDET Fabrice, Economie des données personnelles de la vie privée, Ed. La Découverte, coll. Repères, Paris, p. 82

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Selon Alessandro Acquisiti77, les individus ont des préférences stables en ce qui concerne leurs données personnelles, et ils font des compromis mentaux entre le prix à donner à leurs informations et les bénéfices de leurs partages de données.

« En choisissant l'équilibre entre le partage et la dissimulation des données personnelles (et entre le choix d'exploiter ou de protéger les données personnelles des individus), les individus et les organisations font face à des compromis complexes, parfois intangibles et souvent ambigus. Les individus veulent la sécurité de leurs données, et éviter la masse de leurs informations qu'ils échangent avec d'autres entités. Cependant, ils bénéficient également du partage de ces informations avec leurs pairs et des tierces parties, qui rendent de possibles interactions mutuelles satisfaisantes.»

Ainsi, Google Inc. génère des externalités négatives et positives pour ses utilisateurs car « son activité procure à un autre agent, sans contrepartie monétaire, une utilité, un avantage ou un dommage »78. En effet, son utilisation permet à la fois aux utilisateurs de satisfaire des besoins en information, et en même temps, son utilisation est dommageable pour les utilisateurs qui ne veulent pas que leurs données personnelles soient collectées et exploitées par l'entreprise.

Ainsi, selon Antonio Casilli, « la privacy [NDLA : le droit à la vie privée] est une négociation incessante, dans un cadre de complexité sociale et technologique. »79 La conceptualisation de la vie privée et des données personnelles est façonnée à la fois par les attitudes des utilisateurs, par les efforts des entreprises privées et morales et par les normes imposées par les Etats. La négociation de la vie privée est « collective, conflictuelle et itérative, visant à adapter les règles et les termes d'un service aux besoins de ses utilisateurs ».80 Ainsi, les sentiments des utilisateurs par rapport à l'utilisation de leurs données personnelles sont à mettre en relation avec leur besoin d'utilisation d'un service. J'ai donc choisi de demander

77 ACQUISITI Alessandro, Privacy & Behavioral Economics : The Paradox of Control & Other Studies, Heinz College/CyLab, Carnergie Mellon University, Paduano Symposium, 15 Octobre 2010. Disponible :

http://www.heinz.cmu.edu/~acquisti/papers/acquisti privacy behavioral economics.pdf (Consulté le 16 mars 2015)

78 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, 2015, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », p. 47

79 CASILLI A. Antonio, « Contre l'hypothèse de la « fin de la vie privée », La négociation de la privacy dans les médias sociaux », Revue française des sciences de l'information et de la communication, 2013

80 idem

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aux sondés utilisateurs des services de Google Inc. pourquoi ils utilisaient les services de Google Inc. alors que la collecte et l'utilisation de leurs données par l'entreprise les dérangeaient. Cette question me permet alors de comprendre la relation entre les utilisateurs et l'entreprise Google Inc.

- L'opinion des utilisateurs par rapport à l'utilisation de leurs données personnelles par Google Inc.

Le rapport de force entre les individus et les entreprises est si important que l'échange équitable n'existe pas. On peut remarquer que les services que Google Inc. sont si invasifs que les utilisateurs n'ont pas le choix de refuser ou de négocier les règles d'échange, comme vu précédemment notamment en ce qui concernent les conditions d'utilisation.

En effet, trois sondés expliquent utiliser les services de Google Inc. malgré le fait qu'ils désapprouvent la collecte et l'utilisation de leurs données personnelles par l'entreprise, parce qu'ils n'ont « pas vraiment le choix ». Ils « se sentent pris au piège » par leurs habitudes d'utilisation. Deux sondés citent également une obligation d'utilisation, notamment pour des raisons professionnelles. « Quand tout le monde utilise Google Calendar, je n'ai pas le choix ». Enfin, deux sondés ont répondu : « Je ne sais pas, je ne me suis jamais posé la question ».

A noter que 9% des sondés expriment le fait que les services de Google Inc. sont comme tous les autres services du même type et ne peuvent pas protéger leurs données personnelles. Ainsi, certains individus ne font pas confiance aux entreprises qui créent et proposent des services gratuits, et semblent résignés à l'utilisation qui est faite de leurs données personnelles.

Ainsi, la position de leader de Google Inc. sur le marché du moteur de recherche dans le monde est un critère d'utilisation important pour les utilisateurs, qui ne peuvent se passer du leader et du moteur de recherche référent. De plus, les stratégies d'enfermement, qui peuvent être reliées à l'idée du panoptique de Michel Foucault évoquée dans la première partie, sont également des notions à prendre en compte concernant les sentiments des utilisateurs par rapport à Google Inc. L'utilisateur choisit d'utiliser les services de Google Inc. mais ne peut pas arrêter de les utiliser. En effet, trois sondés utilisent Google et pas d'autres services « par

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flemme ». « De toute façon, il a déjà mes données personnelles en stock ». De plus, 5.4% des sondés expliquent qu'ils utilisent Google par habitude et facilité. En effet, le coût procédural de changement (switching cost), qui concerne le temps, les efforts demandés et l'incertitude liés au repérage d'un nouveau service, son adoption et son utilisation sont trop importants et on peut parler d'effets de réseaux négatifs. Les données personnelles sont une barrière à la mobilité, et permet à Google Inc. de garder sa position de monopole, car les coûts de migration sont trop importants. Le sentiment d'impuissance des internautes face à une surveillance constante qu'ils ne peuvent pas contrôler explique cette passivité : les utilisateurs sont résignés.

- Quelles stratégies de repli ?

Il est intéressant de noter que des stratégies de repli sont mises en oeuvre par une minorité utilisateurs qui désapprouvent l'exploitation de leurs données personnelles par Google Inc. Des comportements de retraits et d'évitement se mettent ainsi en place parmi les utilisateurs. Ainsi, un sondé explique utiliser les services de Google « le moins souvent possible », tandis qu'un autre affirme avoir « réglé les paramètres de confidentialité le plus haut possible, pour que Google ne puisse pas [le] tracer ». Pour reprendre possession de ses traces, et de ses données personnelles, cet individu a mis en place une « sousveillance », où il enregistre les indices de sa présence pour préserver l'intégrité de son identité, et ne pas subir une asymétrie informationnelle face à Google Inc.81

Ainsi, on observe que seule une minorité d'utilisateurs est consciente et dérangée de la collecte de leurs données personnelles et a donc mis en place des stratégies de repli.

En ce qui concerne les sondés non utilisateurs des services de Google Inc., 50% estiment ne pas avoir besoin des services de l'entreprise, et 50% ne veulent pas qu'elle puisse avoir accès à leurs données personnelles. La moitié des sondés a donc fait le choix de ne pas utiliser Google Inc. à cause de son mode de fonctionnement. L'utilisation des données personnelles est donc un critère de choix d'utilisation de services gratuits, pour une minorité d'internautes.

81 MERZEAU Louise, « Du signe à la trace, l'information sur mesure », Hermès, N° 53, Traçabilité et réseaux, CNRS éditions, 2009. Disponible : https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00483292 (Consulté le 12 janvier 2015)

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Ainsi, le repli s'explique par une non utilisation totale des services que propose l'entreprise, ce qui, d'une certaine manière exclue ces internautes, qui ne partagent pas un point de repère avec le reste de la société. Par leur non utilisation de Google Inc., ils s'excluent d'un système où le modèle de référence en termes de moteur de recherche est Google. Ils adoptent alors une position en marge de la société.

3. La place des utilisateurs dans le modèle économique de Google Inc.

Google Inc. propose des services gratuits aux utilisateurs, dans la mesure où ils ne doivent pas débourser une somme d'argent pour utiliser ses services. En revanche, comme évoqué dans la première partie, la gratuité de Google Inc. n'est pas ce qu'elle donne à voir : on peut parler d'une logique de troc et de don en ce qui concerne les échanges qui s'opèrent entre l'utilisateur et Google Inc. L'utilisateur donne ses données personnelles à Google Inc. qui lui fournit en échange différents services. De plus, l'utilisateur devient alors le produit de la richesse de Google Inc., en étant échangé contre une somme d'argent par les annonceurs. Il m'a semblé important de vérifier si les utilisateurs étaient conscients de cette relation d'échange qui s'opérait entre les trois agents économiques du modèle d'affaires de Google Inc., et s'ils étaient conscients du rôle qu'ils tenaient en tant que produit de la richesse de l'entreprise.

En début de questionnaire, j'ai donc choisi de demander aux sondés s'ils pensaient que les services de Google Inc. étaient gratuits afin de comprendre comment ils appréhendaient cette notion, et comment ils envisageaient leurs relations avec Google Inc. : 74.4% des sondés pensent que les services de Google sont gratuits pour les utilisateurs.

« Les individus semblent majoritairement ignorer les coûts d'opportunités associés à l'accès à du contenu gratuit en ligne. Ces coûts comportent le coût d'attention (le fait d'être exposé de manière non volontaire à de la publicité) comme les coûts de recherche (le temps passé à trouver un chanson ou un article gratuit, plutôt que de le payer). » 82

82 SHAMPAN'ER K. & ARIELY D., « How Small is Zero Price ? The True Value of Free Products », MIT, Octobre 2006. Disponible : https://www.bostonfed.org/economic/wp/wp2006/wp0616.pdf (Consulté le 12 janvier 2015)

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Les coûts d'opportunité désignent la perte des biens (ici les données personnelles) auxquels un utilisateur renonce en choisissant d'utiliser un service (les services gratuits de Google Inc.) Ainsi, selon Kristina Shampan'er et Dan Ariely, les utilisateurs ignorent le fait qu'ils renoncent à leurs données personnelles en utilisant les services de Google Inc. et ne sont pas conscients d'être ainsi exposés à de la publicité non volontaire. J'ai choisi de discuter cette citation et de comprendre quel est le sentiment des utilisateurs face à la gratuité des services de Google Inc.

- L'opinion des utilisateurs face à la gratuité de Google Inc.

Il est intéressant de noter que la notion de gratuité évolue durant le questionnaire : si la majorité des utilisateurs considère que les services de Google Inc. sont gratuits, car ils ne payent pas son utilisation avec de l'argent, plus de la moitié d'entre eux considèrent que la gratuité de ses services est liée à l'utilisation des données personnelles réalisée par l'entreprise. (Questions 11a. et 8b.)83 Ainsi, les utilisateurs sont conscients de l'utilisation de leurs données personnelles, et y voit une relation de cause à effet avec la gratuité des services. Pourtant, ils ne semblent pas conscients de l'utilisation de leurs données personnelles en tant que monnaie d'échange, et donc, du fait d'être des produits de Google Inc.

En effet, 66% des sondés non utilisateurs des services de Google Inc. sont d'accord avec l'affirmation suivante « Google Inc. propose des services gratuits car vous lui fournissez vos données personnelles » et pensent donc que la gratuité du service est induite par l'exploitation des données personnelles. À noter que ce taux est plus élevé que celui des sondés utilisant les services de Google Inc. ; 47.4% des sondés utilisateurs des services de Google Inc. considèrent que ses services sont gratuits car ils lui fournissent des données personnelles, dont 75% des professionnels de la communication et du marketing, ainsi que 50% des étudiants en communication et marketing. Seuls 25.9% des étudiants sont d'accord avec cette affirmation. On peut remarquer 48.1% des sondés qui sont dérangés par la collecte et l'utilisation de leurs données personnelles par une organisation privée sont d'accord avec cette affirmation.

De plus, 57% des sondés utilisateurs de Google Inc. pensent que l'utilisation de leurs données personnelles par Google Inc. est le prix à payer pour un service gratuit. La moitié des

83 Annexe 1, p.102. et p.105

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individus sondés sont donc conscients de l'échange qui a lieu entre Google Inc. et eux-mêmes, à savoir des données personnelles contre un service gratuit. Ainsi, l'utilisation des données personnelles par Google Inc. en échange de services gratuits est comprise par la majorité des utilisateurs. Cependant, il convient de distinguer « utilisation des données personnelles contre un service gratuit », contre « donnée personnelle en tant que monnaie d'échange ». En effet, la donnée personnelle devient un bien d'échange qui a de la valeur, au même titre de l'argent. Afin de comprendre si les utilisateurs étaient conscients de cet aspect de leurs données personnelles, j'ai choisi de vérifier la valeur qu'ils accordaient eux-mêmes à leurs données.

- Payer ou se faire payer pour l'utilisation de ses données personnelles ? That is the question.

Si la donnée personnelle est une monnaie d'échange entre l'utilisateur et l'entreprise, elle possède alors une valeur monétaire : cet échange de données contre services pourrait être mesuré en argent. En effet, selon une étude du Boston Consulting Group en 201184, les données personnelles des consommateurs européens valaient 315 milliards d'euros.

Ainsi, j'ai choisi de demander aux sondés quelle valeur ils accordaient à leurs données personnelles avec deux questions. « Seriez-vous prêt à payer une somme d'argent pour accéder à des services équivalents à ceux que propose Google Inc. pour que vos données personnelles ne soient pas utilisées à des fins commerciales ? » pour les utilisateurs des services de Google Inc., et « Seriez-vous prêt à accepter une somme d'argent de la part de Google Inc. pour que l'entreprise puisse collecter, exploiter et stocker vos données personnelles ? » pour les sondés non utilisateurs des services de Google Inc.

Ces deux questions se distinguent, car ne font pas état d'un même paradigme. D'un côté, les sondés doivent évaluer à combien s'élève la protection de leurs données, tandis que de l'autre, à combien s'élève l'utilisation de leurs données. Cependant, ces questions soulèvent une seule et même problématique, celle de la valeur des données : si un utilisateur estime la protection de ses données personnelles à une somme d'argent, on peut considérer que ses données valent

84 « Vos données personnelles valent 315 milliards d'euros », 01net.com, le 12 novembre 2012. Disponible : http://www.01net.com/actualites/vos-donnees-personnelles-valent-315-milliards-d-euros-579867.html (consulté le 19 août 2015)

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cette somme. En cas de non protection de ses données, le dommage causé est estimé à cette même somme par l'utilisateur. De même, pour un utilisateur qui estime l'utilisation de ses données à une somme d'argent : il estime ainsi l'utilité qu'une entreprise peut avoir de ses données personnelles, et donc la valeur de ses données personnelles.

Ces deux questions diffèrent également selon le récepteur de la somme estimée. D'un côté, c'est l'utilisateur qui paye une entreprise pour que ses données soient protégées. L'utilisateur paye un service à une entreprise, et la somme d'argent payée correspond à l'utilité d'un tel service. De l'autre côté, c'est l'entreprise qui paye l'utilisateur, d'une somme d'argent qu'elle juge correspondre à l'utilité de ces données pour son bon fonctionnement.

La valeur monétaire accordée aux données personnelles relève, pour ces questions, de l'utilité qui leur est accordée.

Concernant les utilisateurs de Google Inc. interrogés, seuls 20.2% des sondés seraient prêts à payer une somme d'argent pour accéder à des services similaires à ceux de Google Inc. qui protègent leurs données. 8.6% des étudiants seraient prêts à payer, contre seulement 12.5% des professionnels de la communication et du marketing. À noter que 28.6% des sondés sans activité seraient prêts à payer, malgré leur faible pouvoir d'achat. Il semble que le pouvoir d'achat n'est pas une des premières motivations pour payer un service sur Internet, et que ce sont les sondés qui sont le plus farouchement opposés à l'utilisation de leurs données qui sont le plus à même de payer.

À noter que 30% des répondants à cette question seraient prêts à payer entre 5 et 10 euros par mois, soit « un prix équivalent à un abonnement de téléphonie mobile ». 10% seraient prêts à payer une somme entre 10 et 20 euros par mois. Seuls 2 répondants sont prêts à payer 20 euros par mois. Deux sondés ont soumis des conditions. S'ils seraient prêts à payer, cette somme doit « dépendre du niveau de confidentialité qui est proposé ». Ainsi, le niveau de protection des données personnelles peut être malléable, et le prix dépend ce niveau, induisant que si les données personnelles sont bien protégées (pas de collecte, traitement, exploitation), la somme est plus élevée.

J'ai posé la question de la valeur des données personnelles aux sondés qui n'utilisaient pas les services de Google Inc. Sur 6 répondants, un seul sondé serait prêt à recevoir une somme

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d'argent de la part de Google Inc. pour que ses données personnelles soient utilisées : il a estimé la valeur de ses données personnelles à 10 euros par mois.

Hui85 explique que les individus sont prêts à céder leurs données personnelles contre de petites compensations financières. Or, selon mon sondage, cela ne concerne qu'une minorité d'individus (1 sur 6) qui serait prête à recevoir une somme d'argent de la part d'une entreprise. Il est intéressant de noter que ni la catégorie socioprofessionnelle, ni l'âge ne sont des critères pouvant influer sur cette décision : le sondé prêt à recevoir de l'argent ayant le même profil que d'autres ayant indiqué refuser.

Cependant, cette idée d'une somme reversée par l'entreprise à l'utilisateur pour l'exploitation de ses données personnelles est particulièrement intéressante. Selon Jaron Lannier86, si Google Inc. collecte des informations sur les individus et que cela lui permet d'en tirer des bénéfices et d'augmenter sa richesse, l'entreprise devrait payer une somme à l'utilisateur pour cet usage de données. En tant que producteur de richesse, il aurait droit comme tout salarié d'une entreprise d'être rémunéré pour son travail. Ainsi, l'utilisateur serait alors considéré comme un producteur.

- Le consommateur producteur

En effet, l'utilisateur des services de Google Inc. peut également être considéré comme le producteur de ses services. Le terme réfère à « une personne qui engendre des biens, par opposition à celui qui s'en sert, qui consomme. »87

Le web repose sur un modèle participatif de création de contenus et d'informations : à l'usage, un simple consommateur se mue en véritable générateur de contenus, notamment les contenus qui sont classés et indexés par Google. Ainsi, avec son moteur de recherche et ses autres services, Google Inc. bénéficie de la créativité et de l'énergie de nombreux acteurs et

85 Cité par ROCHELANDET Fabrice, Economie des données personnelles de la vie privée, Ed. La Découverte, coll. Repères, Paris, 2010, p.78

86 LANIER Jaron, Who owns the future ?, Penguin Books, 2014

87 Trésor de la Langue Française Informatisé

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« capte une partie de la valeur crée par son intermédiaire. »88 En effet, selon l'OCDE89, les revenus publicitaires feraient partie du champ du web collaboratif, participatif. L'utilisateur de Google se sert du moteur de recherche pour avoir accès à des contenus créés par d'autres utilisateurs de Google et non par l'entreprise. C'est l'utilisation de Google qui crée de la valeur monétaire, et Google Inc. profite avant tout de la production de ses utilisateurs pour créer cette valeur, grâce à la publicité en ligne. En effet, la masse de contenus regroupés permet de maximiser le nombre d'internautes et d'acquérir une position sans équivalent dans la publicité sur le web, et l'utilisateur collabore à alimenter les bases de données commerciales utiles à la fabrication d'une offre qui le ciblera. Les individus sont donc à la fois producteurs et récepteurs de leurs propres informations.

L'utilisation des données personnelles des utilisateurs de Google Inc. fait également partie de la stratégie de l'entreprise pour rester le point d'accès d'une partie de l'économie numérique. Google Inc. se sert de ces données notamment pour imaginer de nouveaux services qui vont améliorer l'expérience utilisateur, ce qui bénéfice également aux utilisateurs. Les utilisateurs acceptent « la logique de répartition de la valeur créée par leurs données personnelles. »90 En effet, 62.3% des sondés pensent que l'entreprise Google Inc. s'enrichit grâce à l'exploitation des données personnelles des utilisateurs. A noter que 51.3% d'entre eux sont d'accord avec l'affirmation suivante : « Google Inc. propose des services gratuits car vous lui fournissez des informations personnelles ». Ainsi, l'augmentation du chiffre d'affaires est partiellement décolérée de la gratuité du service, qui permet d'atteindre une base utilisateur suffisamment grande pour pouvoir monétiser ses services et en tirer des bénéfices. De plus, dans la mesure où Google Inc. enregistre toutes les navigations des internautes, leurs choix, leurs hésitations et leurs conversations, on peut considérer que le consommateur collabore à alimenter les bases de données commerciales utiles à la fabrication d'une offre qui le ciblera plus tard. L'utilisateur des services de Google Inc. réalise un travail d'amateur qui trouve sa place dans

88 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015, p. 86

89 BOUQUILLON Philippe & MATTHEWS Jacob T., Le web collaboratif, mutations des industries de la culture et de la communication, Ed. Presse Universitaire de Grenoble, coll. « La communication en + », 2010.

90 CHIGNARD Sinon & BENYAYER Louis-David, Datanomics, Les nouveaux business models des données, Editions FYP, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015. p.39

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le système économique sous une forme marchande euphémisée ; il est simultanément consommateur et producteur91.

De plus, dans sa collecte de données, Google Inc. récupère également des données qui ne servent pas à identifier les utilisateurs de ses services, mais à les améliorer. En effet, l'auto-correction ou l'auto-implémentation proposées par le moteur de recherche lorsqu'un utilisateur effectue une requête seraient impossible sans l'exploitation des requêtes effectuées par les utilisateurs. En effet, pour Google Inc., ce sont les utilisateurs qui alimentent l'algorithme qui calcule le résultat de la requête. L'algorithme de Google PageRank fonctionnant sur le principe de la popularité et de la pertinence, les sites qui apparaissent comme résultats de requête sont ceux qui ont été « choisis » par les consommateurs en le fréquentant et en renvoyant sur ces derniers par des hyperliens. Ainsi, les résultats de requêtes sont une production de l'algorithme de Google aussi bien que de l'usage d'Internet que font les utilisateurs. On peut alors parler de coproduction. Ainsi, 78% des sondés pensent que l'exploitation de leurs données personnelles par Google Inc. permet à l'entreprise d'améliorer ses services.

Enfin, il est intéressant de noter que 62.5% des sondés sont d'accord avec l'affirmation suivante « Le service est gratuit, je suis le produit », soit le même taux de personnes qui pensent que Google Inc. tire sa richesse des données personnelles des internautes. Ce résultat cohérent permet de montrer que la majorité des utilisateurs sont conscients de la relation économique qui se joue entre leurs données personnelles et le modèle économique de Google Inc., et comprennent leur rôle économique dans ce modèle.

On peut donc considérer l'utilisateur des services de Google Inc. à la fois comme le produit de l'entreprise, car ses données personnelles sont monétisées et acquièrent de la valeur à l'échange avec les annonceurs, et à la fois comme producteur de la richesse de l'entreprise, puisqu'il permet d'améliorer ses services, et de produire les contenus nécessaires à sa rentabilité. Dans ce dernier cas, on peut envisager « la réversibilité des rôles de producteur et

91 DUJARIER Marie-Anne, Le travail du consommateur : de McDo à Ebay, comment nous coproduisons ce que nous achetons, Ed. La Découverte, Collection Poche/Essais, 2014.

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de consommateur »92, Google Inc. devenant le consommateur des données personnelles des producteurs de données, soit les consommateurs de ses différents services.

Cependant, il est intéressant de noter que le travail de production effectué par l'utilisateur de Google Inc. n'est pas volontaire. « Travailler, c'est y mettre du sien » : si l'utilisateur s'implique totalement, en fournissant des informations personnelles que lui-même, ce qui trouble la délimitation des frontières érigées entre vie privée et vie publique93, la sphère publique devenant de plus en plus publique et marchande, il n'a pas conscience d'effectuer un travail et de participer au bon fonctionnement de l'entreprise. Si les sondés sont conscients d'améliorer les services de Google Inc. et de participer aux bénéfices de l'entreprise, il faut se demander si, sans le questionnaire auquel je les ai soumis, ils auraient eu conscience de cette réalité.

Ainsi, l'on peut conclure que l'utilisateur est conscient de l'usage de ses données personnelles au sein du système économique de Google Inc. Une écrasante majorité de sondés utilise les services de Google Inc. et sait que ses données personnelles sont exploitées pour améliorer les services de Google Inc. et participer à l'augmentation de bénéfices de l'entreprise. Ainsi, les utilisateurs sont conscients de leur rôle prédominant et nécessaire au fonctionnement des services qu'ils utilisent : ils comprennent, grâce aux questions posées, être à la fois le produit et le producteur de la richesse de Google Inc. Cependant, il est intéressant de noter que si ses utilisateurs sont conscients et sont dérangés par cette utilisation qui est faite de leurs données et de leur identité, très peu envisagent des stratégies de repli. Peu de sondés sont prêts à mettre en place une relation marchande standard, basée sur un échange de services contre argent pour éviter que leurs données personnelles soient utilisées, et très peu sont prêts à changer de service. Les coûts de migration, et les coûts associés à la sécurité de leurs données sont alors trop élevés pour que les utilisateurs puissent faire ce choix. Ainsi, l'on peut dire que le système économique de Google Inc. est gagnant, puisque sa gratuité permet d'attirer et de retenir ses utilisateurs, pour devenir le leader du marché du moteur de recherche et du service en ligne. Cependant, cette position de monopole doit être interrogée, car si les individus continuent d'utiliser les services de Google Inc., ils sont dérangés par la relation d'échange

92 DUJARIER Marie-Anne, Le travail du consommateur : de McDo à Ebay, comment nous coproduisons ce que nous achetons, Ed. La Découverte, Collection Poche/Essais, 2014.

93 idem

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qui se joue avec l'entreprise, qui doit alors mettre en place des stratégies pour rassurer l'utilisateur, et le convaincre que le bénéfice qu'il retire de l'utilisation de ses services est supérieure au dommage causé par l'exploitation de ses données personnelles.

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III. Google Inc., une entreprise de droit divin partit à la conquête de la confiance des internautes

La donnée au coeur d'un système économique comme celui de Google Inc. est source d'inquiétudes pour beaucoup d'utilisateurs. En 2013, l'affaire des écoutes de la NSA a été révélée au public : l'institution gouvernementale américaine surveille les internautes, notamment grâce à des portes d'entrée cachées dans des logiciels comme Google Inc. Depuis, les données personnelles et les enjeux politiques et économiques qu'elles soulèvent sont connus de tous, et les utilisateurs sont dérangés par la collecte et l'utilisation qui en est faite de leurs données personnelles.

Ainsi, les institutions gouvernementales et les entreprises privées comme Google Inc. ont du mettre en place des stratégies pour rassurer les internautes, et restaurer un lien de confiance avec eux. Google Inc. a notamment mis en ligne de nombreux discours, qui font partie de la stratégie de communication corporate de l'entreprise, qui vise à promouvoir l'image de l'entreprise auprès de ses utilisateurs et de tierces parties comme les investisseurs. Ces discours, disponibles sur les pages web éditées et dédiées à l'entreprise de Google Inc. ont donc pour mission de rassurer l'utilisateur et d'exposer les objectifs de l'entreprise.

Les discours de Google Inc. réfèrent à « l'ensemble des expressions sous toutes ses formes, significatives d'une idéologie, d'une croyance ou des représentations sociales à une époque donnée et concernant un domaine ou un sujet donné È.94 Ces discours ont pour mission de convaincre, d'impliquer les acteurs membres d'un projet ainsi que les collaborateurs et les utilisateurs.

J'émets l'hypothèse que les discours de Google Inc. tendent à euphémiser les relations d'échange économique qui lient les utilisateurs à l'entreprise, soit leur rôle de produit et de producteur de richesse de l'entreprise, tout en légitimant son mode de fonctionnement grâce à l'élaboration d'une idéologie.

94 Dictionnaire encyclopédique des sciences de l'information et de la communication

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J'ai donc choisi d'étudier trois discours de Google Inc. : les 10 principes fondamentaux de Google Inc.95, ses conditions d'utilisation96, ainsi qu'un texte relatif à la sécurité et à la confidentialité des données des utilisateurs97. Ces trois textes sont trois discours qui ont pour mission de convaincre et d'impliquer toutes les parties prenantes des services de l'entreprise, de légitimer les actions et les décisions prises par Google Inc., et d'asseoir l'idéologie babélienne et foucaldienne de Google Inc.

À noter que ces textes sont de natures différentes, même s'ils se présentent tous sous forme de liste. La liste est une forme caractéristique de l'écriture, qui permet de classifier et d'organiser le monde98. La liste paraît être l'une des formes d'écriture et de présentation de l'information privilégiée par la société Google Inc. : elle est utilisée pour mettre en forme les résultats des requêtes de son moteur de recherche, selon un classement basé sur la pertinence des résultats. En effet, face à la surcharge informationnelle, Google doit réinjecter de l'ordre, et le modèle canonique de l'ordre est celui de la liste99. Ici, la forme de liste choisie n'est pas ordonnée sur une logique numérique, chronologique ou basée sur un critère de pertinence, mais selon un ordre choisi par les éditeurs de cette page. La liste des résultats est largement adoptée par les utilisateurs de Google, et la confiance en ce dispositif s'accroît avec l'usage100. Ainsi, la forme de liste est également utilisée pour mettre en ordre les discours argumentatifs d'entreprise.

Ces différentes listes sont donc toutes de natures différentes, et ont différents objectifs.

En premier lieu, les conditions d'utilisations de Google Inc. sont un texte juridique, une forme de contrat entre l'entreprise et l'utilisateur qui renseigne les utilisateurs sur les modalités d'utilisation des différents services de l'entreprise. Elles ont pour rôle de déterminer la responsabilité des différents acteurs et tierces parties qui interagissent au sein des différents services de Google Inc.

95 Annexe 2, p.110

96 Annexe 3, p. 115

97 Annexe 4, p. 122

98 GOODY Jack, La Raison Graphique, La domestication de la pensée sauvage, Editions de Minuit, 1979.

99 ERTSCHEID O., GALEEZOT G & BOUTIN E., « PageRank : entre sérendipité et logiques marchandes », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p.117

100 idem, p.133

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Les 10 principes fondamentaux de Google Inc. sont un discours idéologique, composé de dix maximes, soit des préceptes qui tendent vers une valeur de vérité générale. La maxime, qui fait partie des discours argumentatifs, se distingue par sa forme concise, qui impose un jugement sur le monde.

Enfin, les règles relatives à la sécurité et à la confidentialité se présentent comme une Foire aux Questions (FAQ), soit une forme de texte relative aux usages d'Internet. Elle est composée d'une liste de questions posées de manière récurrente sur un sujet donné, accompagnées des réponses correspondantes, afin d'éviter que ces mêmes questions soient toujours posées. Il est intéressant de noter que la forme de la FAQ s'est développée sur des forums, où le mode conversationnel est particulièrement important. Or, les différents services de Google Inc. ne sont pas basés sur la conversation entre l'utilisateur et l'entreprise, pourtant l'entreprise a fait ce choix de discours, en se posant elle-même des questions, et en y donnant les réponses.

De plus, les trois discours, malgré leur différence de nature (juridique ou communicationnel) sont écrits à la première personne du pluriel, qui peut désigner les fondateurs ou l'ensemble des collaborateurs de l'entreprise. Elle s'adresse directement aux utilisateurs, mentionnés grâce à la deuxième personne du pluriel. Les « Googleurs » ou employés de Google Inc. s'adressent de manière unanime à tous les utilisateurs de Google. Cette technique de narration est utilisée de manière récurrente dans la communication et la publicité des entreprises : elle permet d'incarner l'entreprise et ses produits face à un public différencié en plusieurs utilisateurs.

Ainsi, l'étude de ces trois discours permettra de mettre en lumière la mission principale de Google Inc. et ses enjeux qui sont la mise en forme du monde humain et la mise en forme de l'utilisateur. Cette mission, qui positionne Google Inc. comme une entité divine, capable de produire de l'information découpée et éditée selon la philosophie de l'entreprise est justifiée par la seconde mission de l'entreprise : rendre service à l'utilisateur, en lui proposant des services innovants et utiles, pour que ce dernier lui fasse entièrement confiance...

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1. La mise en forme du monde

Google Inc. est une entreprise qui possède une mission : organiser toute l'information du monde. Cette mission est un but, une tâche considérée comme un devoir à laquelle l'entreprise s'est assignée, et qui est un élément central de l'organisation de l'entreprise. Il convient alors de détailler cette mission, et de comprendre comment elle s'incarne dans le fonctionnement de l'entreprise, et son modèle économique.

- Google Inc. et sa philosophie

Google Inc. possède une page de présentation « À propos de Google », qui contribue à façonner chez le lecteur une image de ce qu'est Google Inc., image façonnée par l'entreprise elle-même. Cette page est séparée en plusieurs catégories. « Présentation », « Qui nous sommes », « Produits et services », et « Notre philosophie ».

Ainsi, Google Inc. en tant qu'entreprise, a développé une philosophie, soit « la conception générale de la vie et du monde qu'une personne manifeste dans ses idées et dans sa conduite »101. La société Google Inc. se considère comme une personne physique morale qui a construit sa propre conception du monde. Il est intéressant de noter que l'entreprise porte alors des valeurs fortes, condition impérative pour « motiver » ses utilisateurs et obtenir leur engagement dans l'activité de l'entreprise102. En effet, les utilisateurs doivent adhérer aux finalités de l'organisation et ses valeurs, pour utiliser les services de l'entreprise et également accepter le troc de données qui s'opère. À noter que sur la page anglaise de présentation, cette catégorie s'intitule « What we believe »103.

Cette catégorie a pour sous-titre « 10 principes fondamentaux ». La philosophie de la société de Google Inc. est édictée sous la forme d'une liste de dix points.

L'en-tête de cette page précise que « Nous avons rédigé cette liste quelques années après la création de Google. Nous la mettons régulièrement à jour, afin qu'elle soit toujours d'actualité ». Il est intéressant de noter que cette liste de « principes fondamentaux » n'est,

101 Trésor de la Langue Française Informatisé

102 DUJARIER Marie-Anne, Le travail du consommateur : de McDo à Ebay, comment nous coproduisons ce que nous achetons, Ed. La Découverte, Collection Poche/Essais, 2014.

103 «About Google, Company, What we believe», https://www.google.com/intl/en/about/company/philosophy/ (Consulté le 25 juillet 2015)

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paradoxalement, pas figée : ce qui sert de base et de fondement à la philosophie de Google Inc. n'est pas immuable et est susceptible de changer au fil des années et suivant l'évolution de l'entreprise.

À noter qu'en anglais, cette catégorie a pour titre « Ten things we know to be true » (Dix choses que nous savons être vraies). Les formules « Dix principes fondamentaux » et « Dix choses que nous savons être vraies » sont différentes, mais assurent la même chose : cette liste de dix arguments ne peut être discutée et réfutée par qui que ce soit. Google Inc. fait appel à des notions de principe et de vérité, et ces deux termes soulignent l'irréfutabilité de ce qui va être annoncé par la suite. Google Inc. semble détenir une vérité sur le monde, qu'il est impossible de contester. Ainsi, les principes de l'entreprise peuvent être considérés comme des maximes, qui émettent un jugement sur le monde.

- De Babel à Xanadu : l'organisation de toute l'information du monde

Figure 1. Page de présentation de Google Inc.

Le deuxième principe de Google Inc. concerne le moteur de recherche Google. « Notre coeur de métier est la recherche sur Internet ». Google Inc. explique la raison de son existence et son positionnement en tant qu'entreprise, reprenant les éléments de son slogan principal : « La mission de Google : organiser les informations à l'échelle mondiale pour les rendre accessibles à tous ». Google Inc. inclue tous ses différentes services et produits (Gmail,

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Google Maps) qui ne relèvent pas de la mise en forme de l'information, et de la recherche d'informations, comme une seule et unique mission, qui est la mise en forme et la mise à disposition de toutes les informations pour tous. Il est intéressant de noter que par cet effet de discours, l'entreprise justifie son produit innovant dans une idéologie légitimante pour le pérenniser et lui assurer une reconnaissance sociale104.

« Nous souhaitons poursuivre cet effort en appliquant la puissance de notre technologie de recherche à d'autres terrains afin de permettre aux utilisateurs d'accéder à la masse toujours croissance d'informations disponibles dans le monde ».

Google Inc. met en avant la puissance de son algorithme de recherche qu'il a créé, et veut l'appliquer à tous les domaines. Le volume de données disponible ne cesse de croître, et est un sujet majeur pour les organisations privées et publiques, pour les citoyens, et relayé par la presse au niveau mondial, Google Inc. se place comme le premier et le seul intermédiaire pour les internautes pour classer et trier ces informations qui sont de plus en plus nombreuses et les rendre accessibles à tous.

Le huitième principe repose sur la même idée, qui est développée tout au long des principes, soit l'organisation de l'information du monde entier. Ainsi Google Inc. énonce que : « Notre mission consiste à faciliter l'accès aux informations dans le monde entier, et dans toutes les langues. » Google Inc. se place au centre du monde, en tant que détenteur et indexeur de toutes les informations du monde, et tant qu'entité accessible à tout le monde. Google Inc. se considère alors comme la Bibliothèque de Babel, imaginée par Jorge Luis Borges dans sa nouvelle éponyme, qui contient tous les livres du monde, dans toutes les langues du monde. Cette bibliothèque qu'est Google Inc. renferme toutes les informations du monde qui sont à disposition de tout le monde et fait également référence à l'univers.

Ainsi, dans ces maximes, Google Inc. expose sa vision missionnaire, qui est la découverte par la sérendipité de la « paillette » d'information dans la « mine » de savoir que constitue l'univers. Google Inc. reprend alors le mythe du Xanadu, développé par le poète anglais Coleridge. « Le mythe du Xanadu représente l'idéal de l'accessibilité totale et instantanée de

104 DUMAS P. & DUVERNEY D., « Le googling, un branchement sur l'imaginaire de l'internet », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p.161

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tous les produits de l'esprit humain qui hante les utopies techniciennes. » 105 Google Inc. a pour ambition de donner l'accessibilité à l'humanité entière au savoir du monde entier, grâce à sa seule technique.

Face au défi de l'accroissement des informations disponibles, Google Inc. doit donc sans cesse améliorer sa technologie pour organiser « la masse d'informations [qui] continue de croître ».

« Après avoir indexé plus de pages HTML sur Internet que n'importe quel autre service de recherche [É] nos chercheurs continuent d'explorer de nouvelles possibilités d'offrir toutes les informations disponibles dans le monde aux utilisateurs à la recherche d'une réponse à leurs questions. »

Dans ce paragraphe, Google Inc. laisse entendre qu'elle est la seule société au monde à pouvoir effectuer ce travail de classement des informations. Ainsi, Google Inc. se place en

entité libératrice de l'aliénation humaine, en étant le seul détenteur d'une technologie capable de donner le savoir à tous. Cette position d'entreprise sans concurrence et unique dans ses propositions et son efficacité est donc à interroger.

- Google Inc. : centre de l'univers ou monopole social ?

Par son modèle d'affaire basé sur la gratuité et la collecte des données personnelles de ses utilisateurs, Google Inc. a pu réussir à devenir le leader sur le marché du moteur de recherche en ligne, avec plus de 90% de part de marché dans la recherche sur Internet.

« La stratégie du géant consiste à agréger des données provenant d'une multitude de sources à et à faire dépendre l'efficacité du système de son ubiquité : pour en tirer le meilleur parti, nous devrions laisser les services remplir les moindre recoins de notre quotidien. L'immensité du réservoir de données ainsi constitué protège le géant de toute concurrence.»106

105 Regis Debray dans les Cahiers de médiologie, cité par DUMAS P. & DUVERNEY D., « Le googling, un branchement sur l'imaginaire de l'internet », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009, p.161

106 MOROZOV E., Pour tout résoudre, cliquez ici, cité par CHIGNARD S. & BENYAYER L.-D, Datanomics, Les nouveaux business models des données, FYP Editions, Collection « Entreprendre - Développement professionnel », 2015, p. 84

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En effet, la gratuité, induite par la collecte et l'utilisation des données personnelles des utilisateurs des services de Google Inc., élimine la texture de discrimination par le prix du marché. Au lieu d'un éventail de produits à différents prix, Google Inc., par son modèle gratuit rafle tout, au détriment des services similaires payants ou coûteux en termes de coût de recherche, de transaction, etc. De plus, son efficacité et sa rapidité font baisser les coûts d'opportunités pour ses utilisateurs. Si les autres moteurs de recherche, comme Yahoo et Bing sont gratuits, Google Inc. possède alors une position de monopole sur le marché du moteur de recherche, résultant de circonstances économiques particulières, ici, le gratuit et les stratégies de diversification de services, qui permettent d'avoir l'exclusivité de l'exploitation d'un service. En effet, son algorithme breveté PageRank, associé à ses différents services, place l'entreprise en situation de monopole, les coûts de migration étant trop élevés pour que les utilisateurs fassent le choix de ne plus utiliser les services de Google Inc., souvent installés par défaut. De plus, en associant ses services web à son système d'exploitation développé pour mobile, Android, Google Inc. capte une part encore plus large d'utilisateurs. En proposant un système gratuit pour tous, il est adopté de manière générale et unanime, et les consommateurs de mobile sont alors obligés d'utiliser les services de Google Inc. À noter que cette position est récriée par les diverses autorités de marché, et les différentes institutions exécutives et législatives.107

Cette situation de leader de marché est également intéressante à relever au niveau social, car Google est devenu un nom commun, avec notamment les pratiques de googling. Ainsi, quand une marque devient un substantif, le bien est devenu une nécessité pour la masse des citoyens consommateurs108.

Google Inc. constitue alors un fait social. Emile Durkheim décrit les faits sociaux comme « toute manière de faire, fixée ou non, susceptible d'exercer sur l'individu une contrainte extérieure ; ou bien encore, qui est générale dans l'étendue d'une société d'ordre tout en ayant une existence propre, indépendante de ses manifestations individuelles »109. Plusieurs individus ont la même action, et utilisent les services de Google Inc., dont les services

107 « Abus de position dominante : La Commission adresse une communication des griefs à Google au sujet du service de comparaison de prix et ouvre une procédure formelle d'examen distincte concernant Android », Bruxelles, le 15 avril 2015. http://europa.eu/rapid/press-release IP-15-4780 fr.htm (consulté le 17 août 2015)

108 Cité par DUMAS P. & DUVERNEY D., « Le googling, un branchement sur l'imaginaire de l'internet », dans L'entonnoir : Google sous la loupe des sciences de l'information et de la communication, C&F Editions, Paris, 2009.

109 Idem, p 153.

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constituent alors un fait social. Google Inc. est devenu incontournable et général dans la société, et possède une existence propre en dehors de ses manifestations individuelles, c'est-à-dire, l'entreprise a une genèse extérieure à la société, n'étant pas une création de manifestations individuelles. Google Inc. est devenu un fait social à part entière, grâce à sa facilité d'utilisation et sa gratuité notamment.

Il est alors intéressant de noter que Google Inc. connaît sa situation de leader du marché, et la reconnaît comme étant un avantage, pour poursuivre son développement. Dans son dixième principe, la société affirme : « Google ne considère pas le fait d'être numéro un comme une fin en soi, mais plutôt comme un point de départ ». L'ambition de l'entreprise ne s'arrête pas là : l'entreprise souhaite indexer « toutes les informations disponibles dans le monde », et le résultat auquel est elle arrivée aujourd'hui (soit plus de 30 millions de pages web indexées en 2013110) n'est pas satisfaisant pour Google Inc., qui souhaite poursuivre sa mission, en proposant toujours plus d'outils pour favoriser la recherche d'information.

« Même si vous ne savez pas exactement ce que vous recherchez, c'est notre rôle de trouver une réponse sur le Web, et pas le vôtre. [É] Ce refus constant de l'ordre établi est en fin de compte notre véritable force. »

Ainsi, Google Inc. se place comme l'entité qui pose les questions et donne les réponses avant même que ses utilisateurs n'y ait pensé, et laisse ici entendre ses recherches dans le domaine de l'intelligence artificielle. Aujourd'hui, les offres de Google sont « banales », et pourtant elles ont révolutionné le Web à un moment (comme le stockage illimité des mails pour son service de Gmail, Google Inc. étant la première entreprise à proposer ce service) et Google Inc. a pour ambition de continuer à proposer des services et des produits disruptifs, qui changent « l'ordre établi ».

Google Inc. se positionne alors comme une figure divine : omniscient, car capable d'anticiper l'expression du désir de ses utilisateurs et imposant sa loi et sa vision du monde sur ses utilisateurs, en choisissant la forme des informations (liste, Google Maps). Google Inc. fait alors preuve d'hybris, de démesure. Cette notion grecque fait référence à un sentiment inspiré par l'orgueil, qui désigne le fait de vouloir plus que ce qui est attribué. Ainsi, Google Inc. fait

110 « Nearly 500 millions searches a day for thing Google has never heard of », Business Insider, 13 mai 2013 http://www.businessinsider.com/500m-things-google-has-never-heard-of-2013-5?IR=T (consulté le 25 juillet 2015)

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la faute de se prendre pour Dieu, en voulant organiser toute l'information du monde et en affichant de manière claire ses ambitions.

Ainsi, Axelle Lemaire, secrétaire d'Etat chargée du numérique, dans un article des Echos111 résume l'ambition de Google Inc. et son obsession de l'indexation du monde avec ces mots : « Ce qui fait la force de cette entreprise, outre la rapidité de son cycle d'innovation, c'est sa stratégie horizontale de développement. Aucune entreprise n'a cette ambition économique. C'est un acteur dont on a parfois l'impression qu'il veut résumer Internet et dont le projet philosophique semble dépasser le seul aspect commercial. »

Par sa position monopolistique, Google Inc., en tant que dispositif sociotechnique, impose un découpage du monde plutôt qu'il ne propose. Google Inc. est à la fois l'univers en tant que centre de l'information mondiale et l'ordinateur de cette information. Il convient alors de se demander comment Google Inc. met également en information l'utilisateur et comment il le justifie.

2. La mise en forme de l'utilisateur

Si Google Inc. organise toutes les informations du monde, l'entreprise organise également toutes les informations concernant ses utilisateurs. En collectant et en utilisant leurs données personnelles, Google Inc. enrichit sa bibliothèque de savoir, et impose également sa vision sur les données personnelles de ses utilisateurs.

- De la collecte et l'exploitation de la donnée

Dans les Réponses relatives à la confidentialité et la Sécurité et ses conditions d'utilisations, Google Inc. explicite les tenants et aboutissants de la collecte et l'utilisation des données personnelles des utilisateurs qui sont réalisées par l'entreprise. Il est intéressant de noter que les questions concernant les données personnelles des utilisateurs sont reprises dans les conditions d'utilisation de Googles Inc., de manière plus concises.

111 Enjeux Les Echos, « L'affaire Google », Mars 2015

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« En utilisant nos Services, vous acceptez que Google puisse utiliser ces données conformément à ces Règles de confidentialité de Google. »

Ainsi, utilisant les services de l'entreprise, les utilisateurs acceptent la collecte des données qui est décrite par Google Inc. dans ces deux discours.

En premier lieu, l'entreprise définit les données qu'elle collecte et transforme. Les données collectées concernent les informations que l'utilisateur communique à Google Inc. en se créant un compte Google (nom, adresse e-mail, numéro de téléphone, carte de paiement), les informations que l'utilisateur crée en utilisant les services de Google (les vidéos regardées, les sites Web visités, les annonces et contenus de Google consultés, etc.), ainsi que les données relatives à l'appareil utilisé (modèle, version du système d'exploitation, identifiants uniques de l'appareil, informations relatives au réseau mobile).

Google Inc. collecte également les données concernant « la façon dont vous avez utilisé le service concerné, telles que vos requêtes de recherche », l'adresse IP, « des cookies permettant d'identifier votre navigateur ou votre compte Google de façon unique », ainsi que des données de localisation.

Google Inc. considère que les « informations qu'[il] recueille lorsque [l'utilisateur] est connecté à Google peuvent être associées à [son] compte Google. », et les traitent « comme des données personnelles ». Les informations personnelles fournies par l'utilisateur en utilisant un service peuvent être « recoupées avec celles issues d'autres services Google ».

Ensuite, Google Inc. explique les processus de collecte et de transformation de ces données. L'entreprise se donne le droit de contrôler tous les contenus qui sont stockés et qui transitent à travers ses différents services, car la seule utilisation de ces services autorise Google Inc. à utiliser, produire, modifier, communiquer, publier, etc. ces différents contenus pour exploiter, promouvoir ou améliorer les dits services. Ainsi, Google Inc. utilise tous les contenus des utilisateurs pour améliorer ses services, et ainsi rendre ses services meilleurs pour attirer encore plus d'utilisateurs.

« Lorsque vous importez, soumettez, stockez, envoyez ou recevez des contenus à ou à travers de nos Services, vous accordez à Google (et à toute personne travaillant avec Google) une

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licence, dans le monde entier, d'utilisation, d'hébergement, de stockage, de reproduction, de modification, de création d'oeuvres dérivées (des traductions, des adaptations ou d'autres modifications destinées à améliorer le fonctionnement de vos contenus par le biais de nos Services), de communication, de publication, de représentation publique, d'affichage public ou de distribution publique desdits contenus. Les droits que vous accordez dans le cadre de cette licence sont limités à l'exploitation, la promotion ou à l'amélioration de nos Services, ou au développement de nouveaux Services. Cette autorisation demeure pour toute la durée légale de protection de votre contenu, même si vous cessez d'utiliser nos Services. »

Ainsi, l'entreprise s'approprie ses contenus pour enrichir sa bibliothèque d'informations et se donne le droit de les utiliser pour améliorer ses différents services. L'entreprise se laisse également le droit de vérifier la conformité des contenus des utilisateurs qu'elle analyse de manière systématique pour proposer des « fonctionnalités pertinentes sur les produits ». Les utilisateurs ne peuvent en aucun se soustraire à cette analyse automatique, sans quitter les services de Google Inc.

« Nos systèmes automatisés analysent vos contenus (y compris les e-mails) afin de vous proposer des fonctionnalités pertinentes sur les produits, telles que des résultats de recherche personnalisés, des publicités sur mesure et la détection des spams et des logiciels malveillants. Cette analyse a lieu lors de l'envoi, de la réception et du stockage des contenus. »

Cependant, si un service est amené à être interrompu par Google Inc., l'entreprise se doit de prévenir ses utilisateurs qui restent prioritaires des contenus et des « données » qu'ils ont pu stocker.

Ainsi, Google Inc. a modelé ses conditions d'utilisations pour extraire de l'utilisation de ses services tout ce qui est bénéfique pour l'entreprise, et de son fonctionnement. « En nous transmettant des informations, vous nous permettez d'améliorer nos services » Google Inc. exprime ainsi le fait que ses services étant centrés sur l'utilisateur (user-centric), ils ne peuvent fonctionner sans être utilisés par les internautes. De plus, le discours laisse également entendre que l'utilisation de ses services par des internautes permet à tous les autres utilisateurs de bénéficier d'un service de qualité, sécurisé, et personnalisé.

« Les données que nous collectons nous permettent de fournir, gérer, protéger et améliorer nos services, d'en développer de nouveaux, et de protéger aussi bien nos utilisateurs que nous-

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mêmes. Ces données nous permettent également de vous proposer des contenus adaptés, tels que des annonces et des résultats de recherche plus pertinents. »

De plus, Google Inc. utilise les données pour proposer de la publicité et des services gratuits. L'entreprise met en avant le fait que les données sont utilisées pour « présenter de la publicité pertinente et utile » et « ainsi offrir des services gratuits pour tous », dans ses 10 principes fondamentaux. La publicité est d'abord mise en avant comme première raison d'utilisation des données. Ce n'est que dans un second temps, que la gratuité des services est avancée. La gratuité des services est présentée comme une conséquence logique de l'utilisation des données et de la mise en place de la publicité, et non comme un premier objectif.

« Grâce à la publicité, tout le monde peut bénéficier de services gratuits tels que la recherche Google, Gmail et Google Maps »

Ainsi, Google Inc. explicite la collecte et le traitement des données personnelles qui sont réalisées dans ses discours. L'entreprise explique également quels sont les objectifs de cette collecte. Il est intéressant de noter qu'à aucun moment la donnée personnelle n'est considérée comme une monnaie d'échange. L'entreprise exprime seulement sa nécessité de collecter et d'exploiter les données personnelles de ses utilisateurs pour « améliorer » ses services et en « créer de nouveaux », ce qui par un effet de métonymie place l'utilisateur en tant que producteur dans le système économique de Google Inc.

En revanche, il convient de comprendre comment le phénomène de l'utilisateur produit est évoqué par Google Inc.

- De la donnée à l'information

En effet, les termes utilisés par Google Inc. dans les Réponses relatives à la Confidentialité et à la sécurité et les conditions d'utilisation, sont intéressants à relever. Les termes de « données » et d' « informations » sont tour à tour employés, pour désigner les données personnelles des utilisateurs.

Google Inc. n'utilise pas le terme « données personnelles », mais « informations personnelles ». Dans l'écosystème de Google Inc., tout est information, soit une donnée mise en forme par un intermédiaire. En effet, le terme « information » réfère d'abord à l'action de

donner forme. Les données personnelles en tant que données à l'état brut, qui doivent être croisées pour donner sens, sont des informations pour Google Inc. ; c'est l'entreprise qui donne forme et sens aux données, et c'est l'entreprise qui choisit quelle est la forme que ces données vont prendre.

Dans le discours, quand Google Inc. parle de « données », l'adjectif « personnelles » n'est jamais accolé, et les données ne sont jamais exprimées sous le régime de la possession, avec des adjectifs déterminatifs du type « vos ». Google Inc. considère les données d'une manière générale, et non associées à une personne physique et morale, comme l'utilisateur de ses services. Ainsi, Google Inc. met en forme des données, et l'information qui en résulte devient rattachée à un utilisateur. Ainsi, l'utilisateur est le produit d'une mise en forme dirigée par Google Inc. : il devient information, monnayable et avec une valeur pour les annonceurs.

On peut considérer une forme d'asymétrie informationnelle, dans la mesure où Google Inc. a connaissance d'informations qu'il génère grâce aux données de ses utilisateurs, ces derniers n'en ayant aucune connaissance, d'être mis en forme par l'entreprise, à moins d'avoir lu avec attention les différents discours de Google Inc.

Après ces discours explicitant les méthodes de collecte et de traitement des données personnelles des utilisateurs, qui relèvent à la fois du mythe de la bibliothèque de Babel, en tant que méthode d'organisation de toute l'information du monde, et du système de pensée foucaldien, en tant que mise en forme de l'utilisateur, il convient de se demander comment l'entreprise justifie cette position. Pour être ordinateur du monde, Google Inc. doit pouvoir imposer ses valeurs, et créer une relation de confiance avec ses utilisateurs.

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3. Google Inc., une entreprise qui vous veut du bien

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« L'ambivalence de ces technologies, c'est que tout en effrayant par leur potentialité, elles permettent un niveau de confort et de services qui sont à la fois source de sécurité et de

tranquillité »112

En effet, pour que son modèle économique biface fonctionne, Google Inc. doit imposer son mode de fonctionnement, notamment en ce qui concerne l'utilisation des données personnelles de ses utilisateurs. Or, comme évoqué dans la deuxième partie de mon argumentaire, plus de la moitié des utilisateurs des services de l'entreprise sont dérangés par cette pratique.

Ainsi, le sixième point des principes de Google Inc. concerne le modèle d'affaires de l'entreprise et est intitulé « Il est possible de gagner de l'argent sans vendre son âme au diable ». En anglais, « vendre son âme au diable » est exprimé par les termes « doing evil » et fait directement référence au slogan de Google Inc. « Don't be evil ». Google Inc. explique ici sa charte de déontologie des affaires, et explique que « Google est une entreprise » et que la société gagne de l'argent. En effet, Google Inc. proposant des services entièrement gratuits pour les utilisateurs, il doit rappeler son statut d'entreprise, et le fait qu'il gagne de l'argent, ce qui pourrait ne pas être admis par tous, dans la mesure où il ne propose pas de services payants à ses utilisateurs. L'énoncé du principe peut être interprété comme une manière pour Google Inc. de se dédouaner, comme si le fait de gagner de l'argent était forcément relié à une activité malveillante envers les consommateurs.

Ainsi, l'entreprise doit expliquer les bénéfices qu'elle fait, alors que son modèle économique est basé sur la gratuité, et donc écarter tout soupçon de vente directe des données personnelles à des tierces parties. Dans ses Réponses relatives à la confidentialité et à la sécurité, Google Inc. consacre tout un paragraphe destiné à rassurer les utilisateurs sur l'exploitation de leurs données et affirme : « Sachez que nous ne vendons pas vos informations personnelles ». Il est intéressant de relever l'emploi de l'impératif : l'emploi de ce mode de conjugaison permet de donner un ordre aux utilisateurs, et d'insister sur l'affirmation que fait Google Inc. De même, il est intéressant de commenter la dernière phrase « Et que vous contrôlez le type d'informations que nous collectons et utilisons ». En commençant le segment par la conjonction de coordination, un effet d'emphase est ajouté à la phrase, et par la position finale

112 KESSOUS E., « La traçabilité généralisée : un nouveau paradigme de la consommation instrumenté par les objets communicants ? », Consommation et sociétés, 2006

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de cette phrase dans ce paragraphe, Google Inc. veut insister sur le fait que les utilisateurs ont tout le pouvoir sur leurs informations, et non l'entreprise.

Ainsi, Google Inc., l'entreprise qui ne vend pas son âme, ni ses utilisateurs au diable a donc mis en place des stratégies de discours pour rassurer les utilisateurs sur les pratiques de collecte et d'exploitation des données personnelles afin d'instaurer une relation de confiance.

- Google Inc. au service de l'internaute

Afin de rassurer les utilisateurs sur la finalité de ses pratiques concernant leurs données personnelles, Google Inc. se place comme étant au service de l'internaute, avec des services utiles et respectueux de l'individu.

Le premier principe de la philosophie de Google Inc. concerne l'utilisateur : Google Inc. veut proposer « la meilleure expérience utilisateur » et des services centrés sur l'utilisateur.

« Lorsque nous concevons un nouveau navigateur Internet, c'est votre confort que nous cherchons à satisfaire et non un quelconque objectif interne, ni les exigences de résultats de la société »

Google Inc. laisse sous-entendre que la création et l'amélioration de produits et services ne se font uniquement que pour les utilisateurs, et leur confort et satisfaction. Google Inc. nie que si les utilisateurs sont satisfaits des services, ils continuent de les utiliser ce qui améliore la rentabilité de l'entreprise.

Le troisième principe concerne la rapidité de ses services. Déjà énoncé dans le premier principe (« Les pages se chargent instantanément »), la vitesse d'exécution de ses services est une priorité pour la société :

« Google est probablement la seule société au monde dont l'objectif avoué est de faire en sorte que ses visiteurs quittent son site aussi rapidement que possible. »

Google Inc. met en avant sa position disruptive par rapport à toutes les autres sociétés du monde : cette phrase laisse entendre que son fonctionnement est unique, que Google Inc. est unique. De plus, Google Inc. annonce qu'il ne veut surtout pas retenir ses utilisateurs, et

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n'être qu'un site « de passage ». Cet argument est cependant à nuancer : Google Inc. a développé de nombreux services autres que son moteur de recherche et développe des offres dans le « cloud computing »113. En effet, la tendance est aujourd'hui à un basculement massif vers une offre tout en ligne, et mobile qui permet à Google Inc. de garder ses utilisateurs grâce à ses différents services et son système d'exploitation mobile, Android. Google Inc. a crée un écosystème complet qui permet aux utilisateurs de ne jamais quitter les services de Google Inc.

Le quatrième principe s'intitule « La démocratie sur le web existe encore ». Dans ce paragraphe, Google Inc. fait référence au fonctionnement de son algorithme, qui est basé sur le nombre de rétro-liens édités par les internautes.

« Sa technologie [NDLR : la technologie du moteur de recherche Google] fait confiance aux millions d'internautes qui ajoutent des liens sur leur site Web pour déterminer la valeur du contenu d'autres sites ».

Ainsi, l'algorithme du moteur de recherche de Google PageRank considère qu'un lien est un vote, qui indique la popularité et la pertinence d'un site Internet. L'algorithme se base sur le nombre de liens qui pointent vers un site, pour déterminer « les site `élus' comme les meilleures sources d'information via d'autres pages Web. Chaque nouveau site constitue un nouveau point d'information et un nouveau vote à comptabiliser ». Google Inc. expose le fonctionnement de son moteur de recherche et l'entreprise semble se désolidariser complètement de son algorithme et des résultats de requêtes. C'est la technologie du moteur de recherche qui fait confiance aux internautes, c'est l'algorithme qui élie les sites. La technologie semble avoir été crée ex nihilo, sans intervention de l'homme, et c'est elle qui décide de tout, et organise l'information. Ainsi, la démocratie de Google Inc. est un système où les internautes votent pour des sites, et ces votes sont pris en compte par une technologie objective et juste, qui fait fi de la subjectivité et des jugements humains. Cette idée renvoie à la conception de Simondon114 : la technologie de Google Inc. est pensée et présentée comme

113 « Le cloud comuting est un modèle pour permettre un accès omniprésent, pratique et à la demande, à un réseau de ressources informatiques configurés (réseaux, serveurs, stockage, applications et services) qui peuvent être rapidement approvisionné et livré avec un effort de gestion minimum. ». The NIST definition of cloud computing, September 2011, http://csrc.nist.gov/publications/nistpubs/800-145/SP800-145.pdf On peut parler d'informatique en nuage pour tous les services qui étaient habituellement réalisé sur le disque dur d'un ordinateur, et qui sont désormais réalisé en ligne, comme Google Docs, Gmail, etc.

114 SIMONDON Gilbert, Sur la technique, PUF, 2014.

étant « un objet technique ne contenant aucune réalité humaine ». Or, toute technologie est construite et évolue avec et grâce à l'humain, qui pense la technologie. « C'est de l'humain cristallisé ». Il est intéressant de noter que Google présente sa technologie comme étant autonome de l'humain, alors même que cette technologie « fait confiance » aux internautes, pour savoir ce qu'il est juste de faire.

Il convient alors d'interroger la notion de confiance entre l'entreprise et ses utilisateurs et quelle est la valeur symbolique que lui accorde Google Inc.

- La confiance : le Saint Graal de Google

Ainsi, Google Inc. explique avoir confiance dans les choix des internautes pour constituer son algorithme de recherche et de classement de résultats. Google Inc. assure également que ses « utilisateurs font confiance à l'objectivité de Google et rien pourrait justifier la remise en cause de cette confiance », dans sa philosophie. Ainsi, alors que Google Inc. affirme les liens de confiance qui existe entre l'entreprise et l'utilisateur comme étant une vérité générale, il convient de les interroger.

La confiance réfère à « la croyance en la valeur morale d'une autre entité, qui fait que l'on est incapable d'imaginer de sa part une tromperie ou d'une trahison. »115. Elle est l'élément principal de la coopération entre l'entreprise et ses utilisateurs, afin que ces derniers acceptent de collaborer au niveau économique, en autorisant la collecte et l'exploitation de leurs données. Ainsi, la confiance des utilisateurs dans les services de Google Inc. est une des conditions principales relatives à son existence et à sa rentabilité, et l'entreprise nécessite cette confiance pour faire fonctionner ses services.

Si l'entreprise affirme dans ses conditions d'utilisation « Lorsque vous utilisez nos services, vous nous faîtes confiance pour le traitement de vos données. », cette confiance doit pouvoir être justifiée par l'entreprise. Google Inc. a donc mis en ligne toute une catégorie concernant la confidentialité et la sécurité des informations personnelles de ses utilisateurs, intitulé Réponses relatives à la confidentialité et à la sécurité, déjà évoquées plus haut.

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115 Trésor de la Langue Française Informatisé

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Figure 2. Règles de confidentialité et de sécurité

Le haut de la page présente une image, avec trois boucliers, qui symbolisent la protection contre des attaques. Au centre de ces boucliers, des curseurs qui font référence aux paramètres de sécurité et de confidentialité que l'utilisateur peut modifier, un cadenas qui fait référence à la sécurité des données. Au centre, le plus gros bouclier a en son centre la représentation d'une personne, et ce logo est utilisé pour représenter le compte Google des utilisateurs. Ces logos ont un sens admis par tous et sont des symboles, dont la représentation est fondée sur une convention que les utilisateurs de services de Google Inc. connaissent. À noter la couleur bleue des pictogrammes, couleur utilisée dans le domaine de la sécurité informatique, car représentant le calme et la sérénité.

Dès que l'utilisateur arrive sur cette page web, les logos permettent de lui signaler que Google Inc. met tout en oeuvre pour les protéger d'une utilisation frauduleuse de leurs données personnelles, et qu'ils sont protégés.

De plus, dans le discours, Google Inc. insiste sur le fait que les données collectées permettent de protéger l'utilisateur d'intrusions malveillantes, d'oubli de mots de passes et d'utilisation frauduleuse.

« Nous pouvons également analyser les tendances pour vous protéger des logiciels malveillants, du hameçonnage et d'autres activités suspectes [É] Vous êtes protégé par l'une des infrastructures les plus avancées au monde en matière de sécurité lorsque vous utilisez nos services ».

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Ainsi, selon Google Inc., la confiance est de mise car l'entreprise met en place des stratégies de protection des données personnelles de ses utilisateurs. Google Inc., par ses différents discours sur la sécurité et la confidentialité des données de ses utilisateurs, fabrique donc des espaces potentiels de confiance, en créant et maintenant une illusion bienveillante, dans lesquels le réel ne semble pas intervenir116. Cependant, ces notions de sécurité et de confidentialité sont à questionner, puisque Daniel Kaplan, délégué général de la Fing explique que « dans l'industrie numérique, quand on parle de confiance, on parle essentiellement de sécurité. Or, la confiance, dans la vie, c'est justement l'inverse : c'est quand on ne prend pas de mesures de sécurité... justement parce que quelque chose d'autre les remplace : une relation de confiance. »117

Ainsi, la sécurité est un substitut à la confiance, et les contrats qui lient Google Inc. et ses utilisateurs, s'opposent à cette notion de confiance. En effet, si la confiance désigne le fait de prendre un risque en s'en remettant à un autre, la sécurité a pour fonction d'annuler ce risque et donc de rendre la confiance non nécessaire118. À noter qu'il n'existe qu'un seul contrat qui établit les règles de modalités entre les utilisateurs et l'entreprise, qui sont les conditions d'utilisation des services de Google Inc., qui sont acceptées de manière implicite par les utilisateurs.

« L'utilisation de nos Services implique votre acceptation des présentes Conditions d'Utilisation. »

Google Inc. suppose que dès qu'un internaute utilise ses produits et services, il accepte les conditions d'utilisation énoncées par l'entreprise. La régulation de cette collecte de données passe par un principe d'opt-out (l'autorisation de l'utilisation est obtenue par défaut, l'individu doit intervenir a posteriori pour demander la suppression de ses données). De plus, ces conditions d'utilisation sont d'ordre général et certains services peuvent bénéficier de « conditions additionnelles ou particulières ». Ainsi, les conditions d'utilisation qui

116 BELIN Emmanuel, « De la bienveillance positive » (Extrait de sa thèse de sociologie, choisi et présenté par Philippe Charlier et Hugues Peeters), Hermès 25, 1999. Disponible :

http://documents.irevues.inist.fr/bitstream/handle/2042/14992/HERMES 1999 25 245.pdf?sequence=1&isAllowed=y (Consulté le 17 août 2015)

117 « Le Big Data fait-il l'inverse de ce qu'il promet ? », InternetActu.net, le 18 décembre 2013 Disponible : http://www.internetactu.net/2013/12/18/le-big-data-fait-il-linverse-de-ce-quil-promet/ (Consulté le 17 août 2015)

118 « L'autre confiance », InternetActu.net, le 10 mars 2011. Disponible : http://www.internetactu.net/2011/03/10/lautre-confiance/ (Consulté le 17 août 2015)

79

concernent tous les services de Google Inc. ne sont pas centralisées sur une seule page web et l'utilisateur doit les chercher. Ainsi, cette absence d'acceptation du seul contrat qui définit les modalités d'utilisation des services de Google Inc. démontre que l'entreprise veut inciter une relation de confiance de la part des utilisateurs, par omission. En effet, selon Eric Brousseau, la confiance sert à diminuer les coûts de transaction associés à la négociation, l'établissement et la vérification de contrats : plus il y a de confiance, moins on a besoin de formaliser. Or, moins il y a besoin de formaliser une relation économique par des contrats, plus la confiance s'installe facilement.119 Par son absence, les Conditions d'Utilisation permettent de mettre en confiance l'utilisateur des services de Google Inc.

Ainsi, Google Inc., grâce à différents discours, cherche à rassurer de manière continue l'utilisateur quant à l'utilisation de ses données personnelles, afin d'acquérir sa confiance, élément principal de son entreprise.

Ainsi, l'on peut conclure en affirmant que les discours de Google Inc. présentent une idéologie basée sur des mythes littéraires associées à l'infini et au savoir, comme la bibliothèque de Babel et le Xanadu. Cette idéologie permet de légitimer le fonctionnement de Google Inc., et l'utilisation des données personnelles des internautes utilisateurs de ses différents services, tout en euphémisant les relations d'échanges économiques qui lient les utilisateurs à l'entreprise. En effet, si Google Inc. a pour obligation légale de mentionner la collecte et l'utilisation des données qui sont réalisées, les différents discours euphémisent la place de l'utilisateur comme produit et producteur au sein de l'entreprise. La mission de Google Inc. qui est d'organiser toute l'information du monde, interprétée comme une action bénéfique par les individus, permet de ne pas mentionner le rôle de l'utilisateur et sa mise en information également opérée par l'entreprise. De plus, cette mission d'ordre humanitaire et presque religieuse permet également de montrer Google Inc. comme une entreprise humaniste et soucieuse du bien-être de l'internaute avant tout, alors les discours qui mettent en forme cette mission ont également pour but de rechercher la confiance de l'utilisateur, condition sine qua non au bon fonctionnement de l'entreprise. Si la donnée est abondance, la confiance est

119 « Faire confiance », InternetActu.net, Le 05 mai 2010. Disponible : http://www.internetactu.net/2010/05/05/faire-confiance/ (consulté le 17 août 2015)

80

un bien rare, qui possède à la fois une valeur symbolique et monétaire au coeur de l'écosystème de Google Inc.

81

Conclusion

Le Web a comme fondement la gratuité associée à la publicité comme business model. Cependant, ce modèle d'affaires implique une relation d'échange particulière entre l'entreprise qui propose des services gratuits et l'internaute qui choisit d'utiliser ses services.

J'ai donc choisi de comprendre quelle était la place de l'internaute au sein d'un système économique complexe comme celui de Google Inc. et quels étaient les enjeux économiques et sociaux qu'un modèle financier basé sur la gratuité impliquait.

En effet, je me suis d'abord posé la question de savoir comment un service entièrement gratuit pour l'utilisateur pouvait gagner de l'argent. Avec l'intuition que les données personnelles étaient une forme de monnaie d'échange, je me suis penchée sur la place de l'utilisateur, producteur de ces données, au sein de l'écosystème de Google Inc., entreprise emblématique de la gratuité sur Internet et ait également pu comprendre qu'une relation basée sur le don se formait entre l'entreprise et l'utilisateur.

De plus, à partir de l'affirmation « le service est gratuit, je suis le produit », je me suis penchée sur cette notion d'utilisateur produit, pour découvrir par la suite que l'utilisateur n'était pas seulement une marchandise échangée entre Google Inc. et les annonceurs, mais également le producteur indirect de la richesse de Google Inc. En améliorant les services de l'entreprise, cette dernière attirait plus d'utilisateurs, qui permettait ensuite de l'enchérir.

Enfin, afin de comprendre quelle était la position de Google Inc. par rapport à ces relations d'échanges avec l'utilisateur, j'ai étudié les discours d'accompagnement de Google Inc. L'on peut remarquer un véritable effet de double discours, notamment en comparant les Conditions d'Utilisation de l'entreprise, et les discours concernant la sécurité et la confidentialité : le texte légal est plus riche en informations et les pratiques décrites m'ont paru effrayantes et peu éthiques, alors que le discours sur la protection des utilisateurs a pour but de les rassurer pour qu'ils aient confiance en l'entreprise. Ainsi, le discours de communication enjolive et euphémise la réalité des pratiques de Google Inc.

Ainsi, j'ai pu montrer que l'utilisation d'un service gratuit impliquait l'internaute dans une relation avec l'entreprise Google Inc. de manière économique, sociale et communicationnelle.

82

Premièrement, Google Inc. propose des services gratuits dans une logique marchande, aucun échange d'argent ne s'opère entre l'internaute et l'entreprise. Cependant, la donnée personnelle acquiert de la valeur dans le modèle économique de Google Inc., basé sur la publicité ciblée, et l'on peut dire que cette donnée devient une monnaie d'échange. Une logique de don passif s'opère entre l'utilisateur et l'entreprise, l'utilisateur devenant alors le produit de Google Inc., revendu aux annonceurs.

Par la suite, j'ai pu montrer que les utilisateurs de Google Inc. étaient conscients de cet échange, et de leur place de produit dans le système de Google Inc. Grâce à l'analyse des réponses à un questionnaire Ð élaboré grâce aux services gratuits de Google Inc. !-, j'ai pu montrer que les utilisateurs étaient dérangés par l'usage de leurs données personnelles par l'entreprise. De plus, les utilisateurs sont également conscients de participer à l'enrichissement de l'entreprise, et à l'amélioration de ses services, condition pour recruter toujours plus d'utilisateurs pour l'entreprise. L'utilisateur est donc à la fois produit et producteur de la richesse de Google Inc. Il est intéressant de noter que malgré cette conscience accrue des utilisateurs et le fait qu'ils n'approuvent pas ces pratiques, aucune stratégie de repli n'est envisagée, et aucun moyen de changement (payer ou se faire payer) n'est réellement envisagée

Enfin, j'ai choisi de disséquer la stratégie de communication corporate de Google Inc., en analysant trois discours produits par l'entreprise, afin de montrer l'idéologie humaniste de Google Inc., qui sert à rassurer et à tisser une relation de confiance avec ses utilisateurs. En effet, l'entreprise met en place une idéologie basée sur la mise en forme du monde pour le bien de tous, et au service de l'internaute, sans mentionner la mise en forme de l'individu qui s'opère également par ces mêmes procédés. De plus, Google Inc. se positionne comme une entreprise qui veut du bien à l'humanité, et qui cherche à se lier de confiance comme une personne physique avec les internautes.

Ainsi, l'utilisateur, en tant que produit de données et producteur de données, se place alors au coeur de l'écosystème bâti par Google Inc., basé sur la gratuité publicitaire. Ce rôle le place au coeur de relations d'échanges complexes, d'ordre économique, social et communicationnel, qui ont pour seul but d'augmenter le nombre d'utilisateurs des services de Google Inc. pour accroître le chiffre d'affaires de l'entreprise.

83

En ce qui me concerne, cette notion de gratuité que j'ai pu analysée durant ce mémoire m'a fait perdre confiance en l'entreprise Google Inc. Cependant, je continue d'utiliser ses différents services car les coûts de recherche et de migration vers un service différent sont trop élevés.

Je pourrais donc conclure en effectuant plusieurs recommandations, à l'égard de Google Inc. et de ses utilisateurs, concernant l'utilisation et l'exploitation des données personnelles de ses utilisateurs.

Les utilisateurs de Google Inc. attendent de l'entreprise qu'elle leur fournisse des services de qualité et gratuits. Mais ils attendent également du respect, de la connaissance et du savoir pour les aider à conduire leur vie, comme peut le faire un service de Google Inc. Ainsi, pour pallier au manque de confiance dont Google Inc. est à la recherche constante, l'entreprise pourrait partager les informations qu'elle détient sur ses utilisateurs, et les décisions induites par cette information. La symétrie d'information entre l'utilisateur et l'entreprise serait la clé d'une confiance durable.

En ce qui concerne les utilisateurs qui ont un avis négatif sur la collecte de leurs données personnelles par l'entreprise, mais qui continuent d'utiliser les différents services qu'elles proposent, les solutions alternatives doivent leur être proposées, afin qu'ils puissent choisir entre différents services. Si la plupart trouvent que les services équivalents, qui sont respectueux de leurs données personnelles (comme les moteurs de recherche DuckDuckGo ou Ecosia), ne sont pas aussi efficaces, une troisième proposition alternative pourrait leur être proposée : le navigateur Tor (The Onion Router), qui permet d'anonymiser le comportement et la connexion des internautes grâce à un protocole technique différent.

En effet, je recommanderais avant tout, la formation des individus aux procédés techniques de collecte et de traitement exécutés par des entreprises comme Google Inc., ainsi que la mise en visibilité des alternatives au « conglomérat numérique » qu'est Alphabet, afin de laisser le choix, en toute connaissance de cause aux internautes.

84

Ici, l'enjeu devient « d'outiller les individus en informations, en moyens d'analyse et de compétences, pour en faire usage à leurs propres fins »120, ou simplement savoir ce qu'une entreprise surveille et collecte, afin de redonner un pouvoir d'information et de liberté à l'individu.

120 KAPLAN E. & FRANCOU R. « Les règles de la confiance sur Internet », le Monde.fr, le 18 mars 2011. Disponible :

http://www.lemonde.fr/technologies/article/2011/03/18/les-regles-de-la-confiance-sur-internet 1495419 651865.html (Consulté le 27 août 2015)

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90

« L'affaire Google », Enjeux Les Echos, n°318, Mars 2015

91

Table des annexes

Annexe 1 : Questionnaire

Annexe 2 : Les dix principes fondamentaux de Google Inc.

Annexe 3 : Conditions d'Utilisation de Google Inc.

Annexe 4 : Réponses relatives à la confidentialité et à la sécurité

2,50%

1,90%

6,25%

4,40%

Âge

8,10%

60,00%

15-20 ans 20-30 ans 30-40 ans 40-50 ans 50-60 ans Plus de 60 ans

92

Annexe 1 : Questionnaire

Disponible à cette adresse :

https://docs.google.com/forms/d/10D__MbPYVKRXtSLTzFQccP8aFi-FsR8j4Ch1vJAyx90/viewform?usp=send form

1. Votre âge : Liste déroulante (Question obligatoire)

15-20 ans

20-30 ans

30-40 ans

40-50 ans

50-60 ans

+ 60 ans

Cette question me permet de comprendre si l'utilisation de Google et la compréhension de son business model sont spécifiques à une certaine tranche d'âge.

5,60%

3,10%

5,00%

5,00%

4,40%

36,30%

6,30%

Situation professionnelle

18,10%

17,50%

Etudiant en communication/ marketing

Etudiant dans une autre filière

Lycéen

Fonctionnaire

Professionnel de la communication/marketing

Retraité

Salarié

Sans activité

93

2. Votre situation professionnelle : Choix unique (Question obligatoire)

Etudiant en communication/marketing

Etudiant dans une autre filière

Lycéen

Fonctionnaire

Professionnel de la communication/marketing numérique

Salarié

Retraité

Sans activité

Autre

J'ai choisi de différencier les sondés exerçant dans le domaine de la communication et du marketing, pour comprendre si ces catégories professionnelles ont des réponses spécifiques par rapport à l'utilisation de leurs données personnelles par Google, et à la gratuité des services de l'entreprise. Je suppose que les professionnels et étudiants en communication sont plus sensibles à ces sujets, et répondent « Oui » aux questions 9a., 11a., et 12a.

Google est gratuit pour les utilisateurs

25,60%

74,40%

OUI NON

94

3. Pensez-vous que Google et ses différents services (moteurs de recherche,

messagerie, stockage en ligne, etc.) sont gratuits pour les utilisateurs ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui Non

Placé en premier dans le questionnaire, cette question permet de savoir comment les internautes comprennent le sens du terme « gratuit », sans être influencés par les autres questions.

95

4. Utilisez-vous les services de Google ? Choix unique (Question obligatoire) Oui

Non

Selon la réponse à cette question, deux questionnaires différents sont proposés aux sondés.

95% des sondés utilisent Google

3,80%

96,20%

Oui NON

5a. Possédez-vous un compte Google ? Un compte Google vous permet

d'accéder à des produits Google, tels que Gmail, Google +, Youtube et bien d'autres avec un nom d'utilisateur et un mot de passe unique. Choix unique (Question obligatoire)

Oui

Non

A cette question, je suppose que les utilisateurs de Google ne sont pas tous avertis que l'inscription à Youtube, ou à un compte de messagerie électronique suppose la création automatique d'un compte Google.

La définition du compte Google est celle donnée par Google Inc. sur son Centre d'aide121.

.

121 « Centre d'aide Comptes Google », https://support.google.com/accounts/answer/27441?hl=fr (consulté le 1er juillet 2015)

Taux de sondés possédant un compte

Google

7,10%

92,90%

Oui Non

96

97

6a. Quels services de Google Inc. utilisez-vous ? Choix multiples (Question

obligatoire)

Le moteur de recherche Google

Gmail (service de messagerie électronique)

Google Drive (Google Docs, Google Forms, Google Photos etc.)

Google + (réseau social

Youtube (plateforme de vidéos)

Google Maps

Autre

Cette question vise à savoir comment les sondés utilisent les différents services de Google Inc. Malgré les 51 services que la firme propose, je n'ai choisi d'en citer que 6 : j'ai basé mon étude de cas que sur les principaux services de Google Inc. soit le moteur de recherche et Gmail, des services qui se servent des données des utilisateurs et de la publicité ciblée pour faire du profit économique.

Quels sont les services de Google utilisés par
ses utilisateurs ?

14,30%

56,50%

68,80%

1,30% 1,30%

78%

95,50%

Le moteur de recherche

Gmail

Google Drive

Google +

Youtube

Google Calendar

Blogpost

98

7a. Vous utilisez le moteur de recherche Google parce que : Choix multiples

(Question obligatoire)

Il est installé par défaut sur votre navigateur

Vous trouvez que les résultats des autres moteurs de recherche ne sont pas

aussi pertinents

Tout le monde l'utilise, c'est standardisé

Il est facile d'utilisation

Autre

Ma recherche étant centrée sur le moteur de recherche Google, j'ai choisi de cibler cette question sur ce service de Google Inc. Les sondés peuvent cocher plusieurs réponses.

Cette question vise à comprendre la motivation des sondés quant à l'utilisation du Google.

Raisons des utilisations du moteur de
recherche de Google

Il est facile d'utilisation

Tout le monde l'utilise, c'est standardisé

Les résultats des autres moteurs de recherche ne sont pas aussi pertinents

Il est installé par défaut sur le navigateur

L'habitude

3,2%0

30,50%

72,10%

58,40%

32,00%

3 sondés citent le design et l'esthétisme du moteur du recherche.

2 sondés citent l'interopérabilité ?

2 sondés citent l'efficacité et la rapidité du moteur de recherche.

1 sondé dit utiliser le moteur de recherche de Google notamment car il ne connaît pas d'autres

alternatives

1 sondé cite la personnalisation des requêtes.

99

8a. Avez-vous lu les conditions d'utilisation de Google Inc. avant d'utiliser les

services que l'entreprise propose ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui Non

Cette question vise à savoir si les utilisateurs des services de Google Inc. sont des utilisateurs conscients des règles d'utilisation des services de l'entreprise.

Les utilisateurs sont conscients des conditions d'utilisation de leurs données

personnelles

10,40%

OUI NON

89,60%

9a. Est-ce que la collecte et le traitement de vos données personnelles par une organisation privée (type Google Inc, Amazon, etc.) à des fins commerciales est quelque chose qui vous dérange ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui

Non

Dans cette question, j'ai choisi délibérément de mentionner des organisations privées, pour faire la part entre organisation publique (gouvernement, agence d'état, etc.) et organisation privée, pour les sondés. J'ai également choisi de mentionner Google Inc et Amazon comme exemples d'organisation privée, pour induire le fait que Google Inc. collecte, exploite et stocke les données personnelles de ses utilisateurs à des fins commerciales. En fonction de

100

cette réponse, et des réponses aux prochaines questions peut permettre de définir un profil d'utilisateur de services gratuits, type Google.

Les utilisations se sentent concernés et
dérangés par l'utilisation de leurs données
personnelles par une organisation privée

32,50%

 

67,50%

OUI NON

10a. Si oui, pourquoi utilisez-vous les services de Google ? Choix multiples (Question non obligatoire)

C'est le prix à payer pour un service gratuit

Les autres services similaires, qui préservent les données personnelles des utilisateurs, ne sont pas aussi pertinents et efficaces

Vous souhaitez avoir accès à des services personnalisés et adaptés à vos besoins

Autre :

Cette question n'est pas obligatoire, car seuls les sondés qui ont répondu « Oui » à la question 9a. sont susceptibles de répondre à cette question.

Cette question vise à comprendre le comportement des utilisateurs des services de Google Inc., qui conscients et dérangés par la collecte et l'exploitation de leurs données personnelles par Google Inc., utilisent quand même ces services.

Raisons d'utilisation de Google alors que les
utilisateurs sont dérangés par la collecte de
données qui est faîte.

9% 5,40%

14,40%

53,20%

34,20%

C'est le prix à payer pour un service gratuit

Les autres services ne sont pas aussi performants

Je souhaite avoir accès à des services personnalisés

Aucun service similaire à celui de Google ne peut protéger mes données

Par habitude et facilité

101

4 104 personnes ont répondu « Oui » à la question 9a. et 111 personnes ont répondu à cette question.

10,8% de résultats « Autres »

2. 2 citent l'obligation d'utiliser les services de Google pour le travail « Quand tout le monde utilise Google Calendar, je n'ai pas le choix »

3. 3 sondés disent « ne pas avoir vraiment le choix », se sentent « pris aux piège » par leurs habitudes d'utilisation.

4. 1 sondé ne connaît pas d'alternatives aux services de Google et au moteur de recherche.

5. 3 sondés utilisent Google « par flemme » et pensent que « de toute façon, il a mes données personnelles »

6. 2 sondés ne savent pas, et ne se sont pas posé la question.

102

11a. Êtes-vous d'accord avec l'affirmation suivante : « Google Inc. propose des

services gratuits car vous lui fournissez vos données personnelles » ? Choix

unique (Question obligatoire)

Oui

Non

Aucun avis

Cette question vise à estimer la compréhension du modèle d'affaire de Google Inc. par ses utilisateurs, et de savoir s'ils sont des utilisateurs conscients ou non par rapport à l'utilisation de leurs données personnelles qui est faîte par Google Inc.

Les utilisateurs considèrent que les services
de Google sont gratuits car ils lui
fournissent des données personnelles

OUI

NON

Aucun Avis

24,60%

47,40%

28%

Je suppose que les sondés qui ont répondu « Oui » à la question 9a. vont répondre « Oui » à cette question.

12a. Seriez-vous prêt à payer une somme d'argent pour accéder à des services

équivalents à ceux que propose Google Inc. pour que vos données personnelles ne soient pas utilisées à des fins commerciales ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui

Non

Cette question permet de comprendre si les utilisateurs accordent de la valeur à leurs données personnelles et aux services de Google Inc., qui sont par défaut gratuits.

Je suppose qu'une part des sondés professionnels de la communication/marketing numérique vont répondre « Oui » à cette question. Je suppose que les étudiants, lycéens et les sondés sans activités vont répondre « Non », en raison de leur faible pouvoir d'achat.

Les utilisateurs ne veulent pas payer pour
un service similaire, protecteur de leur

données

20,20%

79,80%

OUI NON

13a. Si oui, combien seriez-vous prêt à payer mensuellement ? Champ libre (Question non obligatoire)

31 personnes ont répondu « Oui » à la question 11a., tandis que seules 20 ont répondu à cette question.

103

31 personnes ont répondu « Oui »

7.

104

30% des sondés disent vouloir payer entre 5 et 10 euros par mois, soit « un prix équivalent à un abonnement de téléphonie mobile ».

8. 25% seraient prêt à payer 5 euros par mois.

9. 20% seraient prêt à payer 2 euros par mois.

10. 10% seraient prêt à payer une somme entre 10 et 20 euros.

Si les utilisateurs ont répondu « Non » à la question 4 :

5b. Quel moteur de recherche utilisez-vous ? Choix unique (Question

obligatoire)

Yahoo

Bing

DuckDuckGo

Autre :

Ma recherche portant principalement sur le moteur de recherche Google, cette question vise à savoir quelles sont les alternatives utilisée par les sondés qui n'utilisent pas Google.

11. 2 sondés utilisent BING.

12. 4 ont déclaré utiliser le moteur de recherche de Google.

6b. Pourquoi n'utilisez-vous par les services de Google Inc. ? Choix multiples

(Question obligatoire)

Vous ne les trouvez pas efficaces et pertinents

Vous ne voulez pas que Google Inc. ait accès à vos données personnelles

Je n'en ai jamais eu besoin

Autre :

Cette question vise à comprendre quelles sont les raisons des sondés pour ne pas utiliser les services de Google Inc. et notamment son moteur de recherche, alors que son utilisation en France dépasse les 94% de part de marché.

13. 3 sondés répondent « Je n'en ai jamais eu besoin »

14. 3 répondent « Je ne veux pas que Google ait accès à mes données personnelles ».

105

7b. Est-ce que la collecte et le traitement de vos données personnelles par une

organisation privée (type Google Inc., Amazon, etc.) à des fins commerciales

est quelque chose qui vous dérange ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui Non

Cette question est la même que la question 9a. posée aux sondés ayant répondu qu'ils utilisaient les services de Google Inc. Elle permet de déterminer la sensibilité des internautes à l'utilisation commerciale de leurs données personnelles.

Je suppose que les sondés qui ont répondu « Non » à la question 4 vont répondre « Oui » à cette question.

15. 4 sondés ont répondu « Oui »

16. 2 ont répondu « Non »

8b. Êtes-vous d'accord avec l'affirmation suivante : « Google Inc. propose des services gratuits car vous lui fournissez vos données personnelles » ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui

Non

Aucun avis

Cette question est la même que la question 11a. posée aux sondés ayant répondu qu'ils utilisaient les services de Google Inc., pour comprendre si les internautes sont conscients ou non de l'utilisation des données personnelles qui est faîte par Google Inc.

Je suppose que les sondés qui ont répondu « Non » à la question 4 vont répondre « Oui » à cette question.

17. 4 ont répondu « Oui »

18. 1 a répondu « Non »

19. 1 a répondu « Aucun avis »

106

9b. Seriez-vous prêt à accepter une somme d'argent de la part de Google Inc.

pour que l'entreprise puisse collecter, exploiter et stocker vos données personnelles ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui Non

Cette question est une variante de la question 12a. posée aux sondés ayant répondu « Oui » à la question 4. Elle permet de comprendre si les utilisateurs accordent de la valeur à leurs données personnelles

Je suppose qu'une part des sondés professionnels de la communication/marketing numérique vont répondre « Oui » à cette question.

20. 1 sondé a répondu « Oui »

21. 5 ont répondu « Non »

10b. Si oui, quelle somme seriez-vous prêt à percevoir de la part de Google Inc. pour la collecte et l'exploitation de vos données personnelles ?

22. 10 euros par mois.

Après ces deux séries de questions différentes selon les réponses à la question 4, les sondés arrivent sur une nouvelle page de questionnaire, qui leur est commune.

107

5. Êtes-vous d'accord avec l'affirmation suivante : « En utilisant les services de

Google Inc. et en lui fournissant vos données personnelles, vous participez à l'augmentation de son chiffre d'affaires. » ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui Non

Aucun avis

Les sondés pensent que Google Inc. tirent
ses bénéfices de l'exploitation des données
personnelles des utilisateurs

OUI NON

Aucun avis

16,30%

62,50%

21,30%

Cette question permet de savoir si les sondés sont conscients d'être créateur et producteur de richesse pour Google Inc.

108

6. Êtes-vous d'accord avec l'affirmation suivante : « En utilisant les services de

Google Inc. et en lui fournissant vos données personnelles, vous participez à l'amélioration technique de ses services (pertinence du moteur de recherche, publicité ciblée, etc.) » ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui

Non

Aucun avis

Les sondés pensent que leurs données
améliorent les services de Google

OUI NON

Aucun avis

7,50%

14,40%

78,10%

Cette question permet de savoir si les sondés sont conscients d'être co-producteurs du service de Google : s'ils n'utilisent pas Google, ses services ne seraient pas aussi performants qu'ils le sont aujourd'hui, et la part de marché de Google Inc. serait moins importante.

109

7. Êtes-vous d'accord avec l'affirmation suivante : « Le service est gratuit, je suis

le produit » ? Choix unique (Question obligatoire)

Oui Non

Aucun avis

Les sondés sont d'accord avec l'affirmation
"Le service est gratuit, je suis le produit".

OUI

NON

Aucun Avis

21,30%

16,60%

62,50%

Cette question me permet de savoir si les sondés connaissent cette expression, et s'ils se sentent les produits de Google Inc.

110

Annexe 2 : Les 10 principes fondamentaux de Google Inc. Disponible : https://www.google.fr/intl/fr/about/company/philosophy/

Nous avons rédigé cette liste quelques années après la création de Google. Nous la mettons régulièrement à jour afin qu'elle soit toujours d'actualité, et espérons que vous la trouverez pertinente.

1. Recherchez l'intérêt de l'utilisateur ; le reste suivra.

Depuis sa création, la société Google s'efforce d'offrir aux internautes la meilleure expérience utilisateur possible. Lorsque nous concevons un nouveau navigateur Internet ou lorsque nous apportons un plus à l'aspect de notre page d'accueil, c'est votre confort que nous cherchons à satisfaire, et non un quelconque objectif interne, ni les exigences de résultats de la société. L'interface est simple et claire, et les pages se chargent instantanément. L'intégration dans les résultats de recherche n'est pas monnayable, et la publicité doit non seulement être clairement annoncée, mais doit aussi être en rapport avec le contenu. Et lorsque nous créons des outils et applications, nous visons un fonctionnement impeccable, pour éviter une quelconque remise en cause.

2. Mieux vaut faire une seule chose et la faire bien

Notre coeur de métier est la recherche sur Internet. Grâce à une équipe de recherche et développement entièrement dédiée à la résolution des problèmes de recherche, nous continuons à nous consacrer à notre métier premier et au perfectionnement des techniques que nous avons mises au point. En persévérant, nous réussissons à résoudre des problèmes complexes, et nous continuons d'améliorer notre service simple et rapide de recherche d'informations destiné à des millions d'internautes. Nos efforts nous ont déjà permis d'intégrer notre savoir-faire dans de nouveaux produits, notamment Gmail et Google Maps. Et nous souhaitons poursuivre cet effort en appliquant la puissance de notre technologie de recherche à des terrains encore inexplorés afin de permettre aux utilisateurs d'accéder à la masse toujours croissante d'informations disponibles dans le monde.

3. Toujours plus vite

Vous avez besoin de réponses et vous les voulez maintenant. Nous ne pouvons qu'acquiescer. Google est probablement la seule société au monde dont l'objectif avoué est de faire en sorte que ses visiteurs quittent son site aussi vite que possible. En éliminant le moindre bit de

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donnée superflu de nos pages et en optimisant le traitement des résultats, nous avons battu nos propres records de vitesse à de multiples reprises, jusqu'à réduire à une fraction de seconde le temps de réponse moyen pour obtenir un résultat de recherche. La rapidité est au coeur de chacun de nos produits, qu'il s'agisse d'applications mobiles ou du navigateur Google Chrome, dont la rapidité est adaptée au Web moderne. Google ne cesse de rendre son système encore plus rapide.

4. La démocratie sur le Web fonctionne

La recherche Google fonctionne, car sa technologie fait confiance aux millions d'internautes qui ajoutent des liens sur leur site Web pour déterminer la valeur du contenu d'autres sites. Nous évaluons l'importance de chaque page Web à partir de plus de 200 critères et de diverses techniques, dont notre algorithme breveté PageRank qui détermine les sites "élus" comme les meilleures sources d'information via d'autres pages du Web. Cette technique se perfectionne à mesure que le Web se développe, car chaque nouveau site constitue un nouveau point d'information et un nouveau vote à comptabiliser. Dans la même veine, nous participons activement au développement de logiciels Open Source, pour lesquels l'innovation résulte de l'effort collectif d'un grand nombre de programmeurs.

5. Vous n'êtes pas toujours au bureau lorsque vous vous posez une question

Le monde est de plus en plus mobile, et les internautes veulent avoir instantanément accès à l'information, indépendamment de leur situation géographique. Nous créons des technologies et proposons de nouvelles solutions pour services mobiles qui permettent aux utilisateurs du monde entier de réaliser toutes sortes de tâches sur leur téléphone : e-mail, agenda, vidéos, sans parler des nombreuses manières d'accéder à la recherche Google sur un téléphone. En outre, nous espérons offrir encore plus d'innovation aux utilisateurs mobiles du monde entier avec Android, une plate-forme mobile Open Source gratuite. Android reflète l'ouverture qui a modelé Internet dans l'univers mobile. Cette plate-forme profite à la fois aux consommateurs, qui disposent d'un choix plus étendu et de nouvelles expériences mobiles innovantes, et aux opérateurs, fabricants et développeurs auxquels elle offre des opportunités de revenus.

6. Il est possible de gagner de l'argent sans vendre son âme au diable

Google est une entreprise. Les revenus générés par la société proviennent de la technologie de recherche qu'elle offre à d'autres sociétés, et de la vente de publicités diffusées sur Google et sur d'autres sites du Web. Des centaines de milliers d'annonceurs à travers le monde utilisent

112

AdWords pour promouvoir leurs produits, et des centaines de milliers d'éditeurs profitent de notre programme AdSense pour diffuser des annonces en rapport avec le contenu de leur site. Pour nous assurer de répondre aux besoins de tous nos utilisateurs (qu'ils soient ou non annonceurs), nous avons défini un ensemble de principes relatifs à nos programmes et à nos pratiques publicitaires :

- Google n'autorise la diffusion d'annonces sur ses pages de résultats que si ces annonces sont en lien direct avec les résultats obtenus. Google croit fermement que les annonces peuvent fournir des informations utiles si, et seulement si, elles ont un rapport avec l'objet des recherches qui sont effectuées. Il est donc possible que certaines recherches ne déclenchent aucune diffusion d'annonces.

- Nous pensons que la publicité peut être efficace sans être envahissante. Google n'accepte pas les publicités sous forme de fenêtres pop-up, qui gênent la lisibilité des pages consultées. Nous avons constaté que les annonces textuelles ciblées permettaient d'obtenir un taux de clics supérieur aux annonces diffusées de façon aléatoire. Tout annonceur, quelle que soit son envergure, peut tirer parti de ce moyen de communication permettant de cibler une audience de manière très précise.

- Sur Google, pour ne pas compromettre l'intégrité des résultats de recherche, les publicités sont toujours clairement identifiées comme "liens commerciaux". Nous ne manipulons jamais les classements pour favoriser nos partenaires dans les résultats que nous fournissons, et personne ne peut payer pour obtenir un meilleur classement PageRank. Nos utilisateurs font confiance à l'objectivité de Google et rien ne pourrait justifier la remise en cause de cette confiance.

7. La masse d'informations continue de croître

Après avoir indexé plus de pages HTML sur Internet que n'importe quel autre service de recherche, nos ingénieurs se sont tournés vers les informations qui ne sont pas directement accessibles. Dans certains cas, il s'agissait simplement d'intégrer de nouvelles bases de données en ajoutant, par exemple, des fonctionnalités de consultation de numéros de téléphone ou d'adresses, et un annuaire professionnel. Dans d'autres, il a fallu faire preuve d'un peu plus de créativité en ajoutant, par exemple, la possibilité de rechercher parmi des archives d'actualité, des brevets, des publications académiques, des milliards d'images et des millions de livres. Et nos chercheurs continuent d'explorer de nouvelles possibilités d'offrir toutes les informations disponibles dans le monde aux utilisateurs à la recherche d'une réponse à leurs questions.

8. 113

Le besoin d'informations ne connaît aucune frontière

Notre société a été fondée en Californie, mais notre mission consiste à faciliter l'accès aux informations dans le monde entier et dans toutes les langues. C'est pourquoi nous avons des bureaux dans plus de 60 pays, nous gérons plus de 180 domaines Internet, et nos résultats de recherche sont transmis, dans plus de 50 % des cas, à des personnes vivant hors des États-Unis. L'interface de recherche Google est disponible dans plus de 130 langues, et les internautes ont la possibilité de restreindre les résultats de recherche à leur propre langue. Google s'efforce de mettre à disposition tous ses produits et applications dans le plus grand nombre possible de langues et de formats accessibles. Grâce à nos outils de traduction, les internautes peuvent découvrir des contenus rédigés à l'autre bout du monde dans des langues qu'ils ne parlent pas. Ces outils et l'aide de traducteurs bénévoles ont permis d'améliorer considérablement la diversité et la qualité des services que nous sommes en mesure de proposer, même auprès des utilisateurs des régions les plus reculées de la planète.

9. On peut être sérieux sans porter de cravate

Nos fondateurs ont bâti Google autour d'une idée simple : le travail doit représenter un défi, et le défi doit être amusant. Pour stimuler la créativité, nous pensons culture d'entreprise. Mais cette culture ne se résume pas aux lampes magma et aux balles rebondissantes. Nous mettons l'accent sur les réalisations d'équipe et sur la fierté de l'accomplissement individuel qui contribue à notre réussite générale. Nous misons beaucoup sur nos employés, des personnes énergiques et passionnées, aux parcours divers et ayant une approche créative du travail, du jeu et de la vie. Chez Google, l'ambiance est certes détendue, mais chaque nouvelle idée qui émerge dans la file d'attente de la cafétéria, lors d'une réunion d'équipe ou dans la salle de sport est évaluée, testée et mise en pratique à une allure phénoménale. Et ces idées peuvent devenir la plate-forme de lancement de nouveaux projets destinés aux utilisateurs du monde entier.

10. Il faut toujours aller de l'avant

Google ne considère pas le fait d'être le numéro un comme une fin en soi, mais plutôt comme un point de départ. Nous nous fixons des objectifs que nous pensons inatteignables, dans le but de nous dépasser. Par l'innovation et la persévérance, nous partons de quelque chose qui fonctionne bien pour y apporter des améliorations parfois inattendues. Par exemple, lorsque

114

l'un de nos ingénieurs s'est demandé comment se comportaient les recherches en cas de fautes de frappe, il a créé un vérificateur orthographique intuitif et plus efficace.

Même si vous ne savez pas exactement ce que vous recherchez, c'est notre rôle de trouver une réponse sur le Web, et pas le vôtre. Nous nous efforçons d'anticiper les besoins naissants des internautes, à l'échelle internationale, afin d'y répondre par des produits et des services qui s'imposent rapidement comme les standards du marché. Lors de son lancement, Gmail offrait plus d'espace de stockage que n'importe quel autre service de messagerie. Aujourd'hui, ce type d'offre semble banal, puisque le stockage de la messagerie répond à de nouveaux standards. C'est ce type d'accomplissement que nous voulons réaliser, et nous recherchons en permanence de nouvelles opportunités de changer les choses. Ce refus constant de l'ordre établi est en fin de compte notre véritable force.

115

Annexe 3 : Conditions d'utilisation de Google https://www.google.com/intl/fr/policies/terms/ Date de la dernière modification : 14 avril 2014

Bienvenue sur Google !

Merci d'avoir choisi nos produits et services (les « Services »). Les Services sont fournis par la société Google Inc. (ci-après « Google »), sise au 1600 Amphitheatre Parkway, Mountain View, CA 94043, États-Unis.

L'utilisation de nos Services implique votre acceptation des présentes Conditions d'Utilisation. Nous vous invitons à les lire attentivement.

Nos Services sont très variés : il se peut donc que des conditions additionnelles ou particulières à certains Services (p. ex. des conditions de limite d'âge) s'appliquent. Ces conditions additionnelles seront mises à votre disposition avec les Services concernés. Si vous choisissez d'utiliser ces Services, vous acceptez que ces conditions additionnelles fassent alors également partie de votre engagement contractuel avec nous.

Utilisation de nos Services

Vous devez respecter les règles applicables aux Services que vous utilisez.

N'utilisez pas nos Services de façon impropre. Ne tentez pas, par exemple, de produire des interférences avec nos Services ou d'y accéder en utilisant une méthode autre que l'interface et les instructions que nous mettons à votre disposition. Vous ne devez utiliser nos Services que dans le respect des lois en vigueur, y compris les lois et réglementations applicables concernant le contrôle des exportations et ré-exportations. Nous pouvons suspendre ou cesser la fourniture de nos Services si vous ne respectez pas les conditions ou règlements applicables, ou si nous examinons une suspicion d'utilisation impropre.

L'utilisation de nos Services ne vous confère aucun droit de propriété intellectuelle sur nos Services ni sur les contenus auxquels vous accédez. Vous ne devez utiliser aucun contenu obtenu par l'intermédiaire de nos Services sans l'autorisation du propriétaire dudit contenu, à moins d'y être autorisé par la loi. Ces Conditions d'Utilisation ne vous confèrent pas le droit d'utiliser une quelconque marque ou un quelconque logo présent dans nos Services. Vous n'êtes pas autorisé à supprimer, masquer ou modifier les notices juridiques affichées dans ou avec nos Services.

116

Nos Services affichent des contenus n'appartenant pas à Google. Ces contenus relèvent de l'entière responsabilité de l'entité qui les a rendus disponibles. Nous pouvons être amenés à vérifier les contenus pour s'assurer de leur conformité à la loi ou à nos conditions d'utilisation. Nous nous réservons le droit de supprimer ou de refuser d'afficher tout contenu que nous estimons raisonnablement être en violation de la loi ou de notre règlement. Le fait que nous nous réservions ce droit ne signifie pas nécessairement que nous vérifions les contenus. Dès lors, veuillez ne pas présumer que nous vérifions les contenus.

Dans le cadre de votre utilisation des Services et de l'exécution de notre engagement contractuel, nous sommes susceptibles de vous adresser des messages liés au fonctionnement ou à l'administration des Services ainsi que d'autres informations. Vous pouvez choisir de ne plus recevoir certains de ces messages.

Certains de nos Services sont disponibles sur les appareils mobiles. Ne les utilisez pas d'une manière susceptible de vous distraire et de vous empêcher de respecter le code de la route et les règles de sécurité en matière de conduite.

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Protection de la vie privée et des droits d'auteur

Les Règles de confidentialité de Google expliquent comment nous traitons vos données à caractère personnel et protégeons votre vie privée lors de votre utilisation de nos Services. En

117

utilisant nos Services, vous acceptez que Google puisse utiliser ces données conformément à ces Règles de confidentialité de Google.

Nous répondons aux notifications d'atteinte présumée aux droits d'auteur et désactivons les comptes des utilisateurs ayant plusieurs fois porté atteinte à ces droits, conformément à la procédure établie par la loi américaine dénommée « Digital Millennium Copyright Act ».

Nous fournissons aux titulaires de droits d'auteur les informations nécessaires pour les aider à gérer leur propriété intellectuelle en ligne. Si vous pensez qu'un utilisateur porte atteinte à vos droits d'auteur et que vous souhaitez nous en avertir, veuillez suivre les instructions disponibles dans notre Centre d'aide concernant la communication de notifications. Vous y trouverez également des informations sur les règles appliquées par Google concernant la réponse à de telles notifications.

Vos contenus et nos Services

Certains de nos Services vous permettent d'importer, de soumettre, de stocker, d'envoyer ou de recevoir des contenus. Vous conservez tous vos droits de propriété intellectuelle sur ces contenus. En somme, ce qui est à vous reste à vous.

Lorsque vous importez, soumettez, stockez, envoyez ou recevez des contenus à ou à travers de nos Services, vous accordez à Google (et à toute personne travaillant avec Google) une licence, dans le monde entier, d'utilisation, d'hébergement, de stockage, de reproduction, de modification, de création d'oeuvres dérivées (des traductions, des adaptations ou d'autres modifications destinées à améliorer le fonctionnement de vos contenus par le biais de nos Services), de communication, de publication, de représentation publique, d'affichage public ou de distribution publique desdits contenus. Les droits que vous accordez dans le cadre de cette licence sont limités à l'exploitation, la promotion ou à l'amélioration de nos Services, ou au développement de nouveaux Services. Cette autorisation demeure pour toute la durée légale de protection de votre contenu, même si vous cessez d'utiliser nos Services (par exemple, pour une fiche d'entreprise que vous avez ajoutée à Google Maps). Certains Services vous proposent le moyen d'accéder aux contenus que vous avez soumis à ce Service et de les supprimer. Certains Services prévoient par ailleurs des conditions ou des paramètres restreignant la portée de notre droit d'utilisation des contenus que vous avez soumis aux Services en question. Assurez-vous que vous disposez de tous les droits vous permettant de nous accorder cette licence concernant les contenus que vous soumettez à nos Services.

118

Nos systèmes automatisés analysent vos contenus (y compris les e-mails) afin de vous proposer des fonctionnalités pertinentes sur les produits, telles que des résultats de recherche personnalisés, des publicités sur mesure et la détection des spams et des logiciels malveillants. Cette analyse a lieu lors de l'envoi, de la réception et du stockage des contenus.

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Vous trouverez des informations additionnelles sur la manière dont Google utilise et stocke les contenus dans les Règles de confidentialité ou éventuellement dans les conditions d'utilisation additionnelles associées à des Services particuliers. Lorsque vous nous soumettez des réactions ou des suggestions relatives à nos Services, nous sommes en droit de les utiliser sans solliciter votre autorisation.

À propos des logiciels utilisés par ou présents dans nos Services

Si un Service nécessite ou inclut l'utilisation d'un logiciel téléchargeable, les mises à jour de ce logiciel (nouvelles versions ou fonctionnalités) peuvent s'effectuer automatiquement sur votre appareil. Certains Services vous permettent de modifier vos paramètres de mise à jour automatique.

Google vous concède, à titre gratuit, une licence personnelle, non-cessible, non-exclusive et pour le monde entier, d'utilisation du logiciel qui vous est fourni par Google dans le cadre des Services. Cette licence est exclusivement destinée à vous permettre d'utiliser et de bénéficier des Services fournis par Google, dans le respect des présentes Conditions d'Utilisation. Vous n'êtes pas autorisé à copier, modifier, distribuer, vendre ou louer une partie ou la totalité de nos Services ou des logiciels qui en font partie. De même, vous n'êtes pas autorisé à décompiler ou tenter d'extraire le code source de ces logiciels, hormis dans les cas où le droit de décompilation est autorisé par la loi et dans les limites édictées par cette loi, ou que vous avez obtenu notre autorisation préalable écrite.

119

L'utilisation de logiciels Open Source est importante pour nous. Certains des logiciels utilisés par nos Services peuvent être proposés sous une licence Open Source que nous mettrons à votre disposition. La licence Open Source peut contenir des dispositions qui ont expressément priorité sur certaines de ces conditions.

Modification et résiliation de nos Services

Google n'a de cesse de modifier et d'améliorer ses Services. Nous sommes donc susceptibles d'ajouter ou de supprimer des fonctionnalités ou des fonctions, et il peut également arriver que nous suspendions ou interrompions complètement un Service.

Vous pouvez cesser d'utiliser nos Services à tout moment. Nous espérons cependant que vous continuerez de les utiliser. Google est en droit de cesser de vous fournir tout ou partie des Services, ou d'ajouter ou de créer de nouvelles limites à l'utilisation des Services et ce, à tout moment.

Pour nous, vous restez propriétaire des données que vous nous confiez et nous pensons qu'il est important que vous puissiez y accéder. Si nous devons interrompre un Service, dans la mesure du possible, nous vous en avertissons dans un délai raisonnable et vous donnons la possibilité de récupérer des informations de ce Service.

Garanties et clauses de non-responsabilité

Notre offre de Services est soumise à une obligation de moyens, dans les limites de ce qui est commercialement raisonnable. Nous espérons que vous trouverez plaisir à les utiliser. Nos Services font cependant l'objet d'une limitation de garantie.

SAUF TEL QU'EXPRESSÉMENT PRÉVU PAR LES PRÉSENTES CONDITIONS D'UTILISATION OU DES CONDITIONS D'UTILISATION ADDITIONNELLES, NI GOOGLE, NI SES FOURNISSEURS OU DISTRIBUTEURS, NE FONT AUCUNE PROMESSE SPÉCIFIQUE CONCERNANT LES SERVICES. PAR EXEMPLE, NOUS NE NOUS ENGAGEONS AUCUNEMENT CONCERNANT LE CONTENU DES SERVICES, LES FONCTIONNALITÉS SPÉCIFIQUES DISPONIBLES PAR LE BIAIS DES SERVICES, LEUR FIABILITÉ, LEUR DISPONIBILITÉ OU LEUR ADÉQUATION À RÉPONDRE À VOS BESOINS. NOUS FOURNISSONS NOS SERVICES « EN L'ÉTAT ».

CERTAINES JURIDICTIONS N'AUTORISENT PAS L'EXCLUSION DE CERTAINES GARANTIES, TELLES QUE LA GARANTIE IMPLICITE DE QUALITÉ MARCHANDE,

120

D'ADÉQUATION À RÉPONDRE À UN USAGE PARTICULIER ET DE CONFORMITÉ. DANS LES LIMITES PERMISES PAR LA LOI, NOUS EXCLUONS TOUTE GARANTIE.

Responsabilité pour nos Services

DANS LES LIMITES PERMISES PAR LA LOI, GOOGLE, SES FOURNISSEURS ET DISTRIBUTEURS, DÉCLINENT TOUTE RESPONSABILITÉ POUR LES PERTES DE BÉNÉFICES, DE REVENUS OU DE DONNÉES, OU LES DOMMAGES ET INTÉRÊTS INDIRECTS, SPÉCIAUX, CONSÉCUTIFS, EXEMPLAIRES OU PUNITIFS.

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À propos de ces Conditions d'Utilisation

Nous sommes susceptibles de modifier ces Conditions d'Utilisation ou toute autre condition d'utilisation complémentaire s'appliquant à un Service, par exemple, pour refléter des modifications de la loi ou de nos Services. Nous vous recommandons de consulter régulièrement les Conditions d'Utilisation. Les modifications apportées à ces Conditions

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d'Utilisation seront signalées sur cette page. Nous publierons un avis de modification des conditions d'utilisation additionnelles dans le Service concerné. Les modifications ne s'appliqueront pas de façon rétroactive et entreront en vigueur au moins quatorze (14) jours après leur publication. Toutefois, les modifications spécifiques à une nouvelle fonctionnalité d'un Service ou les modifications apportées pour des raisons juridiques s'appliqueront immédiatement. Si vous n'acceptez pas les modifications apportées aux Conditions d'Utilisation d'un Service donné, vous devez cesser toute utilisation de ce Service.

En cas de conflit entre ces Conditions d'Utilisation et des conditions d'utilisation additionnelles, ce sont ces dernières qui prévalent.

Ces Conditions d'Utilisation régissent votre relation avec Google. Elles ne créent pas de droit pour des tiers bénéficiaires.

Si vous ne respectez pas ces Conditions d'Utilisation et que nous ne prenons pas immédiatement de mesure à ce sujet, cela ne signifie pas que nous renonçons à nos droits (par exemple, à prendre une mesure ultérieurement).

S'il s'avère qu'une condition particulière n'est pas applicable, cela sera sans incidence sur les autres conditions de ces Conditions d'Utilisation.

Les éventuels litiges liés aux présentes Conditions d'Utilisation ou aux Services seront régis par les lois de l'État de Californie, États-Unis, à l'exclusion des règles de conflit de lois de cet État. Toute réclamation liée aux présentes Conditions d'Utilisation ou aux Services relèvera exclusivement de la juridiction des tribunaux fédéraux ou des tribunaux d'État du comté de Santa Clara, Californie, États-Unis. Google et vous-même acceptez par les présentes de vous soumettre à la compétence de ces tribunaux.

Pour toute information sur la procédure à suivre pour contacter Google, veuillez consulter la page de prise de contact.

122

Annexe 4 : Réponses relatives à la confidentialité et à la sécurité Disponible : https://privacy.google.com/intl/fr_ALL/index.html

Nous gardons vos informations personnelles privées et sécurisées. Vous seul en avez le contrôle.

Lorsque vous utilisez nos services, vous nous confiez vos informations. Pour commencer, voyons ce que nous faisons avec vos données :

Les données nous permettent de fournir des services tels que le moteur de recherche Google, Gmail et Maps.

Elles nous permettent aussi d'afficher des publicités pertinentes, grâce auxquelles nous pouvons proposer nos services gratuitement à tous.

Sachez que nous ne vendons pas vos informations personnelles.

Et que vous contrôlez le type d'informations que nous collectons et utilisons.

Enfin, personne n'est plus mobilisé que nous pour assurer votre sécurité en ligne et celle de vos données.

Quelles sont les données collectées par Google ?

Les principaux types de données que nous collectons sont basés sur ce que vous faites en utilisant nos services, comme le compte avec lequel vous vous connectez ou les contenus que vous créez.

Lorsque vous utilisez nos services, par exemple lorsque vous effectuez une recherche sur Google, planifiez un itinéraire sur Google Maps, ou regardez une vidéo sur YouTube, nous collectons des informations en fonction de vos activités. C'est ce qui nous permet de vous offrir de meilleurs services. Lorsque vous créez un compte Google, nous retenons les informations principales de votre compte, comme votre nom, votre e-mail et votre mot de passe. Nous conservons et protégeons les contenus que vous créez avec nos services, de sorte que vous puissiez toujours accéder à vos e-mails, photos, vidéos et documents lorsque vous en avez besoin.

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Nous mettons également à votre disposition des outils pour contrôler le type de données que nous collectons et utilisons.

Que fait Google avec les données collectées ?

En premier lieu, nous utilisons les données pour vous offrir des services plus rapides, plus intelligents et plus utiles. Elles nous permettent, par exemple, de vous offrir de meilleurs résultats de recherche et des informations sur les conditions de circulation en temps réel. Nous pouvons également analyser les tendances pour vous protéger des logiciels malveillants, du hameçonnage et d'autres activités suspectes. Par exemple, nous vous avertissons lorsque vous essayez de consulter des sites Web dangereux. Enfin, nous utilisons les données pour vous présenter de la publicité pertinente et utile, et ainsi offrir des services gratuits pour tous.

Mes informations personnelles sont-elles vendues par Google ?

Non, nous ne vendons pas vos informations personnelles.

Nous utilisons certaines informations, telles que les recherches que vous avez effectuées et votre position géographique, pour améliorer la pertinence et l'utilité des annonces que nous vous présentons. Grâce à la publicité, tout le monde peut bénéficier de services gratuits tels que la recherche Google, Gmail et Google Maps. Nous ne partageons pas ces informations avec les annonceurs d'une manière pouvant vous identifier personnellement, sauf si vous nous en donnez l'autorisation. Grâce aux Paramètres des annonces, vous pouvez contrôler les annonces qui s'affichent en fonction de vos centres d'intérêt et de vos recherches.

Quels outils puis-je utiliser pour contrôler mon expérience ?

Nous mettons à votre disposition des outils simples d'utilisation pour vous permettre de contrôler votre expérience.

Mon compte regroupe les outils pour gérer vos informations et vos paramètres de confidentialité. Grâce aux différents paramètres dans Commandes relatives à l'activité, vous pouvez gérer le type de données que nous recueillons, y compris pour la recherche Google, YouTube, ainsi que l'historique de vos positions. Avec notre outil Paramètres des annonces, vous pouvez contrôler les annonces par centres d'intérêt et celles en lien avec les recherches que vous avez effectuées.

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Comment mes informations sont-elles protégées par Google ?

Si vos informations ne sont pas sécurisées, elles ne sont pas privées. C'est pourquoi vous êtes protégé par l'une des infrastructures les plus avancées au monde en matière de sécurité lorsque vous utilisez nos services.

La technologie Navigation sécurisée de Google, qui protège plus d'un milliard de personnes, vous avertit lorsque vous essayez de consulter un site susceptible de contenir un logiciel malveillant ou de pratiquer l'hameçonnage. Le chiffrement garantit une meilleure sécurité de vos informations lorsqu'elles sont transmises de votre appareil à Google. La sécurité intégrée à Gmail vous protège contre le spam, l'hameçonnage et les logiciels malveillants mieux que tout autre service de messagerie.

Que puis-je faire pour naviguer sereinement ?

Tous nos produits bénéficient d'un niveau de sécurité avancé. Voici trois mesures simples mais essentielles pour préserver la sécurité de vos informations.

Vérifiez régulièrement vos paramètres de sécurité pour vous assurer que votre compte Google est toujours sécurisé. Cela ne prend que quelques minutes. Créez un mot de passe sécurisé et ne l'utilisez que pour votre compte Google. Ajoutez un numéro de téléphone mobile à votre compte, pour que nous puissions confirmer votre identité si vous êtes bloqué ou si nous soupçonnons que quelqu'un d'autre essaie de se connecter à votre compte.

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Résumé

« All information should be free » clamaient les hackers dans leur éthique en 1984. Mais l'information sur le web est-elle réellement gratuite pour les internautes ? Ne dit-on pas « There is no such thing as free lunch » ?

Google Inc. (ou Alphabet), entreprise créée en 1998, propose des services gratuits pour les internautes, en passant par le moteur de recherche Google, le service de messagerie électronique Gmail, le stockage de fichiers en ligne... Tous ces services sont entièrement gratuits pour l'utilisateur qui ne paye pas une somme d'argent à l'entreprise en échange de l'utilisation de ces services. En revanche, en utilisant ces services, l'internaute laisse derrière lui des traces, des données personnelles qui permettent de l'identifier pour lui proposer une information sur-mesure et de la publicité ultra-ciblée, afin de le pousser à l'acte d'achat. Cet échange de données contre services permet à Google Inc. de se rémunérer et de gagner de l'argent tout en proposant des services gratuits. Une logique de don et de contre-don s'opère entre ces deux agents économiques, qui place l'utilisateur au sein d'un écosystème de surveillance : chacun de ses gestes sont surveillés pour lui proposer une information calibrée.

Ainsi, l'utilisateur des services est le produit de la richesse de Google Inc., en devenant une monnaie d'échange entre l'entreprise et les annonceurs. S'il se sait conscient de son rôle au sein de cet écosystème, et s'il n'approuve pas cette place de sujet passif qu'il occupe, l'utilisateur est également conscient de participer à l'amélioration technique des services qui lui sont proposés, par leur simple utilisation. Ainsi, l'internaute occupe une place ambiguë dans l'écosystème de Google Inc. en étant à la fois produit et producteur de la richesse de l'entreprise. Pourtant cette place lui apparaît comme étant une position néfaste ; son rôle de consommateur est transformé pour devenir garant de la richesse d'une entreprise en échange de sa vie privée.

Une crise de confiance est alors susceptible d'apparaître entre l'utilisateur et Google Inc. qui a mis en place des discours idéologiques et philosophiques pour rassurer l'utilisateur, et conserver ce lien de confiance, sans lequel sa rentabilité n'est plus assurée. Google Inc., centre de l'univers et bibliothèque de savoir a pour ambition de mettre en forme le monde et ses habitants : à quel prix ?

Mots-clés

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Internet
Gratuité
Google Inc.
Moteur de recherche
Données
Traces
Valeur
Prix
Web
Gmail
Publicité
Attention
Surveillance
Economie
Don
Produit
Producteur
Utilisateur
Google

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"Là où il n'y a pas d'espoir, nous devons l'inventer"   Albert Camus