Section
II. LA RESPONSABILITE PENALE INDIVIDUELLE POUR
CRIME D'AGRESSION
Au sens pénal du terme, la responsabilité est
l'obligation pour l'agent de répondre de ses actes délictueux et
de subir une peine. Elle suppose que l'agent est imputable et
coupable194. La mise en oeuvre de la responsabilité
pénale d'une personne peut avoir pour objet de l'amener à
réparer les conséquences de ses actes fautifs. C'est la
responsabilité morale en ce qu'elle implique un jugement de valeur sur
l'acte dont la personne doit répondre195. Il y a
responsabilité pénale internationale de l'individu lorsque le
droit international détermine lui-même les faits gravement
illicites comme des infractions au droit international pénal et dont la
répression pénale relève, si possible, d'une juridiction
internationale196. Ainsi, le crime d'agression constitue une
infraction au droit international pénal dont la répression
relève de la CPI. L'article 25 point 1 du Statut de Rome instituant la
CPI dispose que la Cour n'est compétente qu'à l'égard des
personnes physiques.
Dans le cadre de cette section l'analyse portera sur la
responsabilité pénale individuelle pour crime d'agression d'abord
au regard de quelques principes généraux du droit pénal
prévus par le Statut de Rome (§1) ensuite déterminer les
personnes visées par
192G. MABANGA, Op., cit., p. 6.
193Résolution RC/Res.6., Déjà
cité. Annexe II: Amendements relatifs aux éléments des
crimes.
194N. Mwene SONGA, Op. cit., p. 222.
195G. LOPEZ et S. TZITZIS, Dictionnaire des
sciences criminelles, Paris, Dalloz, 2004, p. 832.
196Y. KASHOSI CIRHUZA, La mise en oeuvre de la
responsabilité pénale du chef de l'Etat en Droit
congolais,
Droit français et Droit international,
Mémoire, UCB, Fac. Droit, L2, 2010-2011, inédit, p. 7.
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l'incrimination de l'agression (§2) et enfin, parler des
immunités des dirigeants comme obstacle à la mission judiciaire
de la CPI (§3).
§1. Des principes généraux du droit
pénal
Les principes généraux de droit sont une source
du droit international pénal.
Ils sont composés des principes, des règles
d'allure générale ou universelle qui permettent à un
système juridique déterminé de combler les lacunes ou les
insuffisances des sources principales du droit197.
C'est ainsi qu'en absence des règles conventionnelles
ou coutumières, la CPI est autorisée à appliquer les
principes généraux de droit198, d'où le
caractère subsidiaire199 de cette source.
Le droit international pénal est le corpus normatif qui
interdit certaines catégories de conduite pouvant être
considérées comme des infractions graves ; il règlemente
les procédures régissant les enquêtes, les poursuites et la
répression de ces catégories de conduite, et tient les auteurs de
ces infractions pour individuellement responsables. Ce Droit repose sur
plusieurs principes fondamentaux en ce sens que les crimes internationaux
incluent toujours plus d'éléments extraterritoriaux qui
nécessitent une interaction plus grande entre les États, et il
est capital de coordonner le respect de ces principes.
Ceci dit, il convient alors, dans les lignes qui suivent,
d'étudier quelques principes généraux de Droit
pénal qui ont ainsi été codifiés dans le Statut de
Rome en l'occurrence Nullum crimen, nulla poena sine lege (1), Non
rétroactivité ratione personae (2),
imprescriptibilité (3), Défaut de pertinence de la qualité
officielle (4) et Responsabilité pénale individuelle (5).
a. Nullum crimen, nullapoena sine lege
Ce principe général de droit pénal
inscrit dans le Statut de Rome traduit le principe de la légalité
criminelle qui est sans doute le principe le plus important du droit
pénal en ce que seuls peuvent faire objet d'une condamnation
pénale les faits déjà définis et sanctionnés
par
197 M. DELMAS-MARTY et Alii, Les sources du Droit
international pénal : l'expérience des TPI et le Statut de la
CPI, Unité Mixte de recherche de droit comparé,
Université de Paris I, Vol. 7, 2004, p.75.
198 Article 21 du Statut de Rome. Déjà cité.
199M. DELMAS-MARTY et Alii, Op. cit. p.75.
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le législateur au moment où l'accusé a
commis son acte, et seules peuvent leur être appliquées les peines
édictées à ce moment déjà par le
législateur.
Selon le Statut de Rome, une personne n'est responsable
pénalement que si son comportement constitue, au moment où il se
produit, un crime relevant de la compétence de la Cour. La
définition d'un crime est d'interprétation stricte et ne peut
être étendue par analogie. En cas d'ambiguïté, elle
est interprétée en faveur de la personne qui fait l'objet d'une
enquête, de poursuites ou d'une condamnation200. Une personne
qui a été condamnée par la Cour Pénale
Internationale ne peut être punie que conformément aux
dispositions du Statut de Rome.
De ce qui précède, l'on retiendra que le crime
d'agression n'est pas à confondre avec d'autres crimes relevant de la
compétence de la CPI qui avaient déjà été
définis depuis l'entrée en vigueur du Statut de Rome, le premier
Juillet 2002.
Aux termes des paragraphes 2 des articles 15 bis et
15 ter, la CPI ne pourra exercer sa compétence qu'à
l'égard des crimes d'agression commis un an après la ratification
ou l'acceptation des amendements par au moins trente Etats parties. Les
paragraphes 3 des articles 15 bis et 15 ter prévoient
par ailleurs que l'exercice effectif de la compétence de la Cour
à l'égard du crime d'agression dépendra d'une
décision à prendre après le 1er janvier 2017 par une
majorité de trente Etats.
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