Culture managériale et pérennisation des projets de développement au Cameroun: cas du nazareth agro pastoral training and production centre de menteh (bamenda)( Télécharger le fichier original )par Albert Legrand TODJOM MABOU Université Catholique d'Afrique Centrale - Master Développement et Management des Projets en Afrique 2014 |
B. Le paternalisme et son impact dans la mise en oeuvre du NAPTPCUn projet de développement durable associe à la fois l'ambition de faire évoluer une situation et la prise en compte des contraintes humaines et matérielles du contexte. C'est une entreprise avec des obstacles multiples. La principale difficulté réside dans la multiplicité des acteurs qu'un projet mobilise autour des objectifs communs. Ces difficultés qui peuvent être d'ordre technique, humain ou financier selon le projet et sont parfois liées à la méthode de gestion, comme le paternalisme dans le cas du NAPTPC. 1. Difficultés techniques et financières du NAPTPCDès sa création en 1993, le Centre est confronté à des difficultés techniques. En effet, les premiers promoteurs et dirigeants du projet n'avaient ni formation ni expérience dans le domaine agropastoral. Le seul expert n'a séjourné que très brièvement au NAPTPC. C'est la raison pour laquelle le développement aussi bien de l'unité de formation que de celle de la production a tardé à prendre l'essor espéré. Il faudra attendre l'année 2008 pour que le premier technicien agropastoral formé spécifiquement pour le projet prenne la direction. Le deuxième arrive en 2009 et un troisième est en cours de formation à l'Université Catholique du Cameroun à Bamenda. Mais il convient de noter que le domaine agropastoral est vaste et les deux experts évoqués ne peuvent pas détenir les compétences dans toutes les spécialités. De plus, les seules connaissances agropastorales ne suffisent pas pour une gestion rationnelle du NAPTPC. Celui-ci se situant dans un milieu socioculturel donné, il faudrait encore maîtriser les particularités et les opportunités. Il faudrait ajouter à ces subtilités le fait que le projet mobilise des acteurs distincts qu'il est important de gérer, comme l'affirme Jean Pierre Olivier de Sardan : « Le développement en effet fait intervenir de multiples acteurs sociaux, du côté des `groupes-cibles' comme du côté des institutions de développement. Leurs statuts professionnels, leurs normes d'action, leurs compétences, leurs ressources cognitives et symboliques, leurs stratégies diffèrent considérablement. Le développement `sur le terrain', c'est la résultante de ces multiples interactions, qu'aucun modèle économique en laboratoire ne peut prévoir ».157(*) De ce fait, le NAPTPC est tenu d'avoir recours à une assistance technique. Et cette démarche implique la mobilisation des ressources financières, matérielles et humaines que le projet n'a pas prévues. En effet, les lignes budgétaires annuelles disposent de peu de ressources financières pour la consultance des techniciens agropastoraux externes. Par ailleurs, le renforcement des capacités du personnel existant n'est prévu ni dans le budget ni dans la planification annuelle. Parfois, c'est après des difficultés concrètes que les responsables se sont rendus compte de la nécessité de recourir à une assistance technique, opération qui, avec le ralentissement de la production, creuse plus profondément le déficit budgétaire. La recherche de l'assistance technique ne se limite pas seulement au niveau humain, elle s'étend aussi au niveau matériel. En effet, le NAPTPC n'a pas de laboratoire agrovétérinaire et la location des équipements indiqués pour la production, la formation ou le soin des animaux et des plantes est assez onéreuse. Parfois ces équipements sont difficiles à trouver dans la région du Nord Ouest. Il faut alors les faire venir d'une autre région ou les commander d'Europe. Cependant, la récurrence de ces difficultés techniques dans la gestion des animaux et des plantes produits ont permis au personnel d'acquérir quelque expérience sur les techniques préventives et curatives. Une autre difficulté technique vient de ce que l'accès physique au NAPTPC est perméable, faute de clôture : employés ou étrangers y circulent à leur gré. Ce manque de sécurité accroît les risques de vols d'animaux, de produits agricoles et de matériel. Il est fort possible que cette défaillance soit l'une des causes de la peste porcine qui durement a frappé la ferme et foudroyé plus de deux cent porcs en croissance pour certains et déjà à maturité pour d'autres.158(*)Toutes ces difficultés techniques ont freiné le développement de l'unité de formation et même de production. Lorsqu'en 2008, les problèmes techniques commencent à trouver solution avec l'arrivée du premier technicien agrovétérinaire formé pour le Centre, les difficultés financières quant à elles restent entières. En effet, pendant plusieurs années le Centre manque de personnel qualifié dans la gestion financière. « L'absence de recrutement d'un comptable professionnel justifie certaines erreurs de gestion, la planification budgétaire ne prenant pas en compte tous les aspects importants de la gestion financière et même certains cas de manque transparence financière. En effet, le Directeur du Centre était en même temps comptable. Il ordonnait les dépenses, décaissait les fonds, réalisait les dépenses et parfois même s'occupait encore du contrôle ».159(*) * 157 Jean-Pierre OLIVIER DE SARDAN, Anthropologie et développement, Essai en socio-anthropologie du changement social (Edition numérique), Op. cit., p. 18. * 158 Propos du Directeur recueilli lors de l'enquête du 24 novembre 2013 au Nazareth Centre (Propos traduit de l'anglais par nous-même). * 159 Propos d'un Assistant du Supérieur Provincial des Pères Piaristes (Promoteur) recueillis lors de l'enquête effectuée à Menteh le 2 août 2013. |
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