Section 3 : Les
logiques autour de la disparition des espaces verts
La disparition des espaces est sous tendue par plusieurs
logiques que nous démontrons dans cette section. Car, la gestion des
espaces verts est assurée à Lubumbashi par trois services
étatiques différents comme nous l'avons déjà
souligné dans les lignes précédentes. Ces services
entretiennent des relations qui sont loin d'être amicales. C'est ainsi
que la disparition des espaces vert répond à une logique
conflictuelle observable entre la Division des affaires foncières, la
Coordination urbaine de l'Environnement ainsi que le Service de l'Urbanisme et
Habitat. La disparition des espaces verts répond aussi à une
logique de capitalisation dans la mesure où les dossiers en rapport avec
la vente de ces espaces sont une grande ressource financière. Car,
chaque fois qu'un espace vert est cédé à des
entrepreneurs, les agents chargés de la gestion des espaces verts y
retrouvent leur compte et ils favorisent le même processus pour d'autres
espaces verts. En dehors de services étatiques en charge de la gestion
des espaces verts, il y a l'implication des personnalités politiques
dans la disparition des espaces verts. C'est ainsi que les logiques politiques
justifient aussi la disparition des espaces verts.
Pour arriver à analyser la disparition des espaces
verts à Lubumbashi, la présente section a pour objectif
d'établir les différentes logiques qui justifient cette
disparition. Il s'agit de la logique conflictuelle, de la logique de
capitalisation ainsi que de la logique politique.
3.1. La logique
conflictuelle
La logique conflictuelle illustre la manière dont les
services chargés de la gestion des espaces verts ont du mal à
trouver un compromis dans l'exécution de leurs tâches. En effet,
il existe des interactions entre la Division des Affaires Foncières, la
Coordination Urbaine de l'Environnement et le Service de l'Urbanisme et Habitat
qui sont observables sous forme de rapports conflictuels. Monsieur Diko, agent
du service de l'urbanisme et habitat nous a confirmé ce qui
suit :
« Plusieurs services interviennent dans la
matière de gestion des espaces verts, alors que la loi a
déjà mis les limites et les tâches de chaque division. Mais
il arrive que les autres services attribuent les espaces verts aux
commerçants ou aux hommes politiques sans pour autant nous consulter.
Notre responsabilité n'est pas prise en compte jusqu'à
présent ».
Les agents du service de l'urbanisme et habitat se plaignent
du fait que leur responsabilité n'est pas prise en compte dans l'octroi
des espaces verts à des particuliers. En effet, le service de
l'urbanisme et habitat a pour tâche principale d'aménager le
territoire. Mais ce service se trouve très souvent impuissant pour
résoudre certains dossiers dans lesquels sont impliqués des
acteurs de grande renommée politique. La Coordination urbaine de
l'environnement réclame quant à elle le monopole du traitement
de ses dossiers. En voici un récit illustratif :
« Nous on s'occupe de l'entretien des espaces
verts, et chaque service a sa propre tâche. Mais il y a certains de nos
dossiers dans lesquels on voit la participation des autres services parce qu'il
y a du profit ».
Chaque service possède son propre domaine
d'activité où il traite des dossiers relatifs à ses
attributions. Mais ce que le discours ci-haut tente d'affirmer, ce qu'il y a
une ingérence de la part des autres services dans la manière de
traiter les dossiers. Ainsi, l'octroi ou la vente d'un espace vert à un
particulier est un dossier que chaque service revendique l'exclusivité.
La disparition des espaces verts s'expliquerait par les conflits
d'intérêt qui caractérisent les interactions ou les
rapports entre les trois services de gestion des espaces verts.
Dans notre recherche, nous nous sommes hasardé de
desceller l'extension que prend la logique conflictuelle autour des espaces
verts. Et nous avons découvert qu'au-delà des trois services
précités, d'autres services étatiques interviennent dans
le traitement des dossiers en rapport avec les espaces verts. C'est en
occurrence le Service de Mine et le service d'Agriculture qui entretiennent
aussi des rapports de conflit avec le service de l'urbanisme et habitat dans la
disparition des espaces verts.
Les conflits d'intérêts observables
entre les différents services pourraient être expliqués par
la non observance des textes juridiques, cependant, se borner à cette
compréhension, c'est réduire les actions de ces acteurs à
des simples comportements déviants. Mais nous admettons ensemble avec
Jacques Faget (2005 :3), que la déviance n'est pas inscrite dans la
nature humaine, que l'homme a plutôt tendance à respecter les
normes et ne devient délinquant que parce qu'il y est contraint.
Ces contraintes amènent les agents de différents
services à mener des actions poursuivant des intérêts
spécifiques. C'est dans la recherche interindividuelle
d'intérêts que résulte la logique de conflit entre les
différents services. Car, la Division des Affaires Foncières
attribue des parcelles et garde des portions de terre pour des écoles,
marché, stade, espace vert... Après avoir loti les parcelles, la
Division des Affaires Foncières laisse la gestion à la
Coordination de l'environnement et à l'urbanisme pour la gestion des
espaces verts. Après un temps, les mêmes agents
récupèrent les portions réservées aux espaces verts
pour les revendre lorsque le quartier prend de la valeur.
La disparition des espaces verts découle d'une logique
de conflit entre les divers services qui sont à sa charge. Car, l'octroi
des espaces verts à des particuliers est un dossier très juteux
dans lequel chaque service veut non seulement participer mais aussi avoir le
monopole. Dans la section suivante, nous nous démarquons de la
perspective conflictuelle pour saisir la disparition des espaces verts dans une
logique de capitalisation.
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