La transition démocratique en Mauritanie à travers la revision constitutionnelle de 2012( Télécharger le fichier original )par Mohamed Sarr Université de Tunis El Manar - Mastère de recherche 2016 |
Première Partie : Les acteurs de la politique mauritanienne : Un dialogue inaudibleDans cette première partie, nous allons dans un chapitre premier dresser d'une manière générale et significative les différents acteurs de la politique du pays (I), afin d'en démontrer la nature conflictuelle de l'interaction entre eux ; Pour ensuite décrire et analyser le résultat de cette interaction, du comportement de certains acteurs par rapport à l'institutionnalisation démocratique (II). Chapitre I : Profil des acteurs de la scène politique mauritanienneNous allons décrire ici les différentes personnalités, les plus significatives, tels que les militaires (I) et les opposants (II), qui donnent vie à la politique du pays. En démontrant les relations qu'ils entretiennent entre eux et avec le pouvoir, ainsi que de la manière dont ils influencent ce pouvoir. Section I : Mauritanie, la caserne des militaires : entre hard-liners et soft-linersLes héritiers du pouvoir militaire de 1978 à 2005, les ex bras droit et tombeurs de Taya, à savoir, principalement, Ely et Aziz sont connus aujourd'hui comme étant les acteurs politiques issues des rangs de l'armée les plus en vue. Cela parce que le premier à diriger la chute de Taya et la transition de 2005-2007, et le second parce qu'il a par la suite mis fin à cette expérience démocratique et s'est arrangé pour avoir le pouvoir. Cependant, ces deux hommes (en uniforme) ne sont que l'infime partie visible d'une large élite militaire habituée au pouvoir et au gout du luxe qui préfère le statu quo. Paragraphe I : Ely le blandosEly était durant plus de vingt ans le « premier flic » et le chef des barbouzes du régime de Taya, il a dirigé la direction générale de la sûreté nationale, comprenez par là qu'il était impliqué dans toutes les « sales affaires » qu'a connu le pays sous le régime autoritaire de Taya, que cela soit la chasse, la déportation et les tueries des civils et militaires négro-africains durant « les années de braise » (1986-1991), les arrestations des activistes politiques « islamistes », « nationalistes », « marxistes »... Rien ne lui échappait des rouages de la répression de Taya. Il est considéré comme un blandos ou de soft-liner du terme de Schmitter pour désigner ceux qui soutenaient un régime autoritaire et à un moment donné ont décidé de ne plus le faire et d'aider le régime à se démocratiser. Car après avoir mis fin au régime dont il a été le bras droit, il décide de mettre le pays sur le chemin de la transition dans un contexte confus par un ensemble de problèmes32(*) qui représentaient les raisons de la chute Taya et surtout l'encombrant dossier « des années de braises », et dont les acteurs de la société civile et certains acteurs politiques demandaient aux leaders de la transition de régler durant cette période. Mais Ely n'en voulait pas et rétorquait que cela ne sera fait que « seulement une fois que toutes les élections auront eu lieu, [...] et que le pays rentre dans la légalité et que toutes les décisions prises soient opposables à la Mauritanie et dans la légalité la plus absolue et non dans une période d'exception »33(*). Ce qui divisa surtout les acteurs politiques entre ceux qui voulaient qu'ils restent et règlent les problèmes et ceux qui voulaient que la transition suit son cours normal et emmène des autorités élues. Dans la compréhension du refus d'Ely de toucher à ces dossiers préoccupants dont il y est fortement trempé, il s'empresse avec ces amis du CMJD d'encourager les candidatures des « indépendants » lors des différentes élections qu'ils vont organiser, et le plus patent est celui de Sidi qui sera encourager à se présenter aux présidentielles et bénéficiera de tous les efforts des militaires pour qu'ils soient élus président34(*). Cette tactique du CMJD relève non seulement d'une volonté de mettre à la tête du pays un homme retiré de la politique depuis les années 8035(*) et qui ignore presque toutes les questions dont faisaient face le pays36(*), mais aussi c'était une stratégie de barrer la route au pouvoir à l'opposition « historique » et notamment en la personne de Ahmed Daddah leader du RFD et petit frère de Moktar Ould Daddah le premier président du pays. Donc Ely et ses colonels s'assureront de donner la présidence à un incognito « peu charismatique » et resteraient dans l'ombre pour gérer avec lui. À la fin de la transition le CMJD remettent le pouvoir aux panoplies de problèmes37(*) aux civils élus. Ely le blandos et « démocrate », se retire de la scène politique, il n'y reviendra que par l'irruption et la mise à pied par son cousin et son partenaire d'alors, dans ce qu'il a construit en dix-huit mois, un régime civil. Il était candidat malheureux aux présidentielles de 2009 face à son cousin-ennemi Aziz. * 32 Pour l'ensemble des questions dont TAYA et le CMJD ont légué aux nouveaux élus, voir ANTIL A. « La Mauritanie après le putsch de 2005 », Politique étrangère, 2005/4 (Hiver), p. 809-819. DOI 10.3917/pe.054.0809 in Cairn.info * 33 Interview accordé par Ely lors de son passage à Paris au média en ligne Kassataya http://www.kassataya.com/mauritanie/6158-ely-ould-mohamed-vall-a-kassataya-il-faut-arreter-de-jouer-sur-les-malheurs-des-mauritaniens * 34 Pour le rôle des militaires lors de la période transitoire et des élections, Voir BEN SAAD A., « Mauritanie : Une transition démocratique sans alternance », L'année du Maghreb [En ligne] , IV 2008, mise en ligne le 1er Octobre 2008 URL : http://anneemaghreb.revues.org/458 * 35 Sa dernière nomination à un poste politique gouvernemental remonte en décembre 1985 et certaines responsabilités de chargé de mission avec le pouvoir de Taya. Voir MARCHESIN P., Tribus, ethnies et pouvoir en Mauritanie, Karthala, 1ère Edition, 1992, p.180. * 36« Deuxième acte », Jeune Afrique, Mai 2008 sur http://www.jeuneafrique.com/70268/politique/deuxi-me-acte/ * 37Ibid. |
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