Le présent travail
s'intitule « déforestation et dynamiques
socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf : contribution
à une anthropologie du développement » Cette
partie introductive, fait ressortirla procédure scientifique qui nous a
permis de collecter, d'analyser et d'interpréter nos données.
Elle est structurée par les éléments
développés dans l'ordre chronologique suivant : le contexte
de la recherche, la justification du choix du sujet, le problème, la
problématique, les questions de recherche, les hypothèses, les
objectifs, la méthodologie, l'interprétation,
l'intérêt, les limites de la recherche et les difficultés
rencontrées.
1. CONTEXTE DE LA RECHERCHE
La question relative à la déforestation,
à l'érosion de la biodiversité, à la
dégradation de l'environnement, au développement durable,
à l'éthique environnementale et à la survie de des peuples
autochtones, semblent constituer de nos jours, une préoccupation
majeure pour les pouvoirs publics et la communauté scientifique. Elle
s'inscrit dans les nouvelles politiques gouvernementales auxquelles, les
cahiers de charge imposent une nouvelle vigilance. Déforestation,
changement climatique, pollution industrielle, érosion de la
biodiversité, matérialisent la manifestation des dangers et
alertes résultant d'une action anthropique insoucieuse de l'avenir
auxquels notre planète fait face. NKE-NDIH (2008), soutien d'ailleurs
que la protection de l'environnement est devenue depuis quelques
décennies, une préoccupation majeure pour la communauté
internationale.
Au Cameroun, le problème de développement que
tente de résoudre les pouvoirs publics depuis des décennies,
passe par l'exploitation des nombreuses richesses qu'offre l'environnement.
D'ailleurs, WILKIE et LAPORTE (2001), soutiennent que la couverture
forestière au Cameroun est considérée comme la meilleure
d'Afrique centrale. Cette exploitation implique alors la
déforestation et le déboisement dans un cadre légal
c'est-à-dire régie par des actes juridiques bien définis
par le gouvernement central. Cependant, les zones forestières du Sud et
de l'Est, qui ont deux types de populations que sont les Bantu et les
Pygmées, sont les deux espaces environnementaux qui couvrent la majeure
partie du massif forestier camerounais. Cet état des choses fait de ces
deux régions l'un des foyers où la déforestation aux
causes multiples s'est installée depuis plusieurs décennies et
s'accélère à un rythme très
inquiétant. DE WASSEIGE et al.,(2009), pensent
que les causes de cette déforestation sont multiples et incluent
l'augmentation de la pression démographique, l'intensification des
pratiques agropastorales, l'expansion de l'industrie minière ou encore
la multiplication des pratiques illégales. Pour certains, la
tentation est grande de compter l'ensemble des sociétés
forestières.
Comme certaines localités qui disposent d'une richesse
forestière considérable, la zone de Lolodorf est une cible de la
déforestation. Naturellement dans ce site vivent certaines
sociocultures qui ont défini des rapports très liés avec
la forêt : Les Nkola/Ngyéli. Pour BAHUCHET, S. et al.,(1999),
Des milliers d'êtres humains y vivent et entretiennent avec ces
forêts, des relations culturelles, sociales et symboliques, anciennes,
intenses et profondes. Ces forêts et ces hommes ont évolué
et continuent à évoluer ensemble. Leurs histoires et leurs
destins sont étroitement liés.
Dans cette localité, la déforestation est
pratiquée de façon légale et illégale par plusieurs
acteurs. Qu'il s'agisse des firmes forestières, des acteurs
isolés ou des bandes des populations locales et
étrangères, les torts causés à la forêt sont
énormes. Cependant, les communautés locales qui vivent dans ces
forêts comme les Nkola/Ngyéli ou hors de ces forêts comme
les Bantu, subissent les effets de cette érosion de la
biodiversité sur plusieurs aspects. Mais les plus touchés par ce
phénomène sont lesNkola/Ngyéli. Il en ressort dont de
cette situation, des changements socioculturels liés à la
dégradation de leur cadre naturel de vie. La destruction de la
forêt n'étant pas exclusivement une disparition physique, à
conséquence environnementale, est aussi une disparition culturelle et
humaine et par conséquent, a un effet socioculturel direct sur les
communautés qui en dépendent.
Progressivement, des multiples problèmes de survie
auxquels les Nkola/Ngyéli font face se font ressentir à vue
d'oeil et interpellent tant la communauté scientifique, les organismes
d'aides que les pouvoirs publics. L'érosion de la biodiversité
qui s'accélère de façon terrifiante dans leur milieu
naturel semble ne plus favoriser efficacement leur système de vie.
Inévitablement, leur culture est contrainte à des dynamiques de
plusieurs ordres afin de s'accommoder aux réalités
environnementales devenues hostiles et appauvries. Au regard de tout ce qui
précède, nous voulons inscrire notre recherche, dans une
approche socioculturelle afin d'évaluer l'impact de la
déforestation sur la culture des Nkola/Ngyéli de Lolodorf.
2. JUSTIFICATION DU CHOIX
DU SUJET
Deux raisons majeures justifient le choix de notre
sujet. La première est personnelle et la seconde est scientifique.
1. 2-1. Raison
personnelle
Nous avons passé notre enfance à
Nkouambpoer I, un des villages de l'arrondissement de Lolodorf qui abrite dans
ses forêts, des campements Nkola/Ngyéli. Nous avons presque
vécu au quotidien en voyant de moins en moins les activités
intenses de déforestation et en percevant les modes de vie des
Nkola/Ngyéli s'arrimer à l'abondance des richesses que leur
procurait ce cadre naturel de vie. Mais au fur et à mesure où
l'exploitation de la forêt va grandissante et par conséquent
dégrade progressivement la forêt de ses ressources animales et
végétales, les modes de vie des Nkola/Ngyéli changent
également. Ces peuples qui vivaient de la chasse, la cueillette et du
ramassage le font de moins en moins. De nos jours où ce
phénomène a atteint sa vitesse de croisière, les
Nkola/Ngyéli sont méconnaissables dans plusieurs aspects de
leurs modes de vie longtemps connus. Il naît donc progressivement
auprès de nous une réelle motivation à comprendre ce que
deviendront les Nkola/Ngyéli de Lolodorf aux lendemains de la
déforestation.
2. 2-2. Raison
scientifique
La revue de la littérature relative à la
déforestation et à l'histoire des Nkola/Ngyéli, leur
organisation sociale, leur patrimoine culturel et leur vécu quotidien
mentionne que la forêt est le cadre naturel de vie de ces derniers.
Celle-ci très abondante, a majoritairement été faite sur
approche clinique détournée de tout aspect culturel. Nous avons
donc opté de mener une recherche sur ce pan en univers culturel
Nkola/Ngyéli de Lolodorf.
De toute évidence leur adaptation aux dynamiques
socioculturelles et nouveaux modes de vie est d'une nécessité
capitale et inévitable. Comment ces Nkola/Ngyéli font-ils face
à l'érosion de leur milieu de vie ? Il apparait que
plusieurs recherches et thématiques d'ordre scientifiques ont
été développées à leur sujet. Ainsi, nous
avons trouvé judicieux d'exprimer notre travail scientifique et
méthodologique dans l'optique d'apporter notre modeste contribution
à la littérature disponible sur les effets de la
déforestation chez les Nkola/Ngyéli, dans le cadre de
l'anthropologie en général et de l'anthropologie du
développement en particulier.
3. PROBLEME DE
RECHERCHE
Selon, AKTOUF (1987), définir un
problème de recherche, c'est, au-delà de la formulation de ses
preuves et indices, apporter un éclairage le plus complet possible sur
son étendue, les points principaux dont il appelle le traitement, sa
position par rapport aux problèmes identiques déjà
étudiés par d'autres, en d'autres lieux...
Le fondement de toute recherche scientifique repose sur un
problème. Le problème scientifique ne surgit pas
spontanément dans la conscience du chercheur. Il naît au sein d'un
contexte qui le révèle. Le chercheur est également
inséré dans un contexte culturel, social, institutionnel et
scientifique donné. Les questions qu'il posera dépendront de ce
contexte. Le problème est une série d'énoncés ou
d'interrogations sur des phénomènes socioculturels.
La déforestation comme il a été
évoqué plus haut se fait dans un souci de développement.
Qu'il s'agisse de l'exploitation forestière, de la réalisation
des grandes plantations, des champs agricoles, de la construction des routes,
des barrages hydroélectriques, des ports en eaux profondes,
d'infrastructures de santé, d'éducation, des espaces de loisirs,
ou de la construction des logements, la forêt constitue par essence le
cadre physique sur lequel reposent ces réalisations qui ont pour but
d'améliorer les conditions de vie des populations. Cependant, ces
travaux s'accompagnent toujours des changements socioculturels auprès
des sociétés qui y vivent.
La superficie approximative de Lolodorf fait état de
12OO KM2. Dans cette localité vivent d'une part les Bantu
mais aussi les Nkola/Ngyéli dont la vie dépend directement de la
forêt. Mais à chaque fois que des actions de développement
touchant la forêt sont engagées dans ces milieux, elles
n'impactent pas de la même manière les modes de vie de ces deux
groupes. Quand il s'agit des Bantu, la déforestation ne s'accompagne pas
d'une modification substantielle de mode de vie. Mais quand il est question des
Nkola/Ngyéli, l'érosion de la biodiversité se
matérialise directement par un changement profond des modes de vie.
La réalité de cette déforestation est
palpable à plusieurs niveaux. Les torts ainsi causés à cet
environnement naturel ont un impact direct sur la culture de tous les peuples
qui y vivent mais plus particulièrement sur les Nkola/Ngyéli.
Pour ces peuples, la forêt est leur source de vie. Elle a toujours
efficacement contribué à leur harmonie sociale, à leur
bien-être. Il était donc non seulement déraisonnable de
nier l'importance des différentes significations que revêt cette
forêt, mais surtout aussi irrespectueux de s'attaquer à cette
forêt qui pour ces peuples, constitue leur identité. Cette
approche, fait des Nkola/Ngyéli, des peuples chasseurs et cueilleurs,
vivant dans la forêt et avec la forêt. Cela atteste ces mots de
MIMBOH (2000), ces populations qui vivent de /et dans la
forêt.
Constat fait, il naît suite à la
dégradation de l'environnement des difficultés de survie pour ces
peuples de forêts. Dès lors, le problème qui émerge
de cette contradiction est celui de la réaction différentielle de
deux peuples (Bantu et Nkola/Ngyéli) face à un stimulus identique
qui est la déforestation. GAUTHIER (1987), confirme par ailleurs
qu'il y a problème de recherche lorsqu'on prend conscience de la
nécessité de combler certaines lacunes dans nos connaissances de
la réalité, ces dernières constituant un ensemble
d'informations relativement organisées (théories, modèles,
hypothèses, et....)
4-
PROBLEMATIQUE
Par définition, nous pouvons dire qu'on désigne
parproblématique, l'étape introductive du projet de recherche
à l'intérieur de laquelle sont formulés le problème
général de recherche, la question principale et les questions
spécifiques de recherche. C'est l'ensemble des hypothèses, des
orientations, des problèmes envisagés dans une théorie,
dans une recherche. La problématique est l'approche ou la perspective
théorique que l'on décide d'adopter pour traiter le
problème posé par la question de départ. Trois temps
peuvent caractériser la construction d'une problématique :
Ø exploitation des lectures et entretiens,
détermination des différents aspects du problème
posé par la question de départ ainsi que les liens qu'ils
entretiennent entre eux.
Ø Choix de l'orientation qui semble la plus pertinente,
ou élaboration d'une nouvelle orientation transcendant les
précédentes à travers des points de vue ou des
orientations théoriques.
Ø Explicitation du cadre conceptuel qui
caractérise la problématique retenue, c'est-à-dire
description du cadre théorique dans lequel s'inscrit la démarche
de l'étudiant ; c'est la précision des concepts fondamentaux, des
liens qu'ils ont entre eux.
L'exploitation forestière dans toutes ses dimensions,
bat son plein dans le massif forestier de Lolodorf et particulièrement
dans la grande forêt où vivent les communautés
Nkola/Ngyéli depuis plusieurs décennies. Dans la phase de
réalisation de ces travaux, les compagnies forestières ont de
plus en plus transporté les billes de bois. Les forêts ont
été dévastées avec fureur. Culturellement, il se
trouve dans cette localité un peuple auquel la vie en dépend
totalement. Dès lors, un certain nombre d'interrogations surgissent
afin de mieux synthétiser la situation à laquelle les
Nkola/Ngyéli font face suite à la dégradation de leur
mamelle nourricière.
Au-delà de tout constat, il convient de souligner que
la question de la crise environnementale a profondément modifié
les modes de vie des communautés Nkola/Ngyéli. Cependant,
étudier ces dynamiques socioculturelles nous invite à une
imprégnation totale de leur culture. Comprendre ces changements, impose
une réelle interrogation de ces modes de vie avant la
déforestation et après la déforestation afin de palper ces
mutations. Il sera ainsi question de revisiter plusieurs fragments de leur
culture en donnant la parole aux Nkola/Ngyéli, et en les observant.
En interrogeant la théorie de l'écologie
culturelle développée par J.H. STEWARD, de l'anthropologie
écologique définie par Leslie WHITE, il conviendra de
s'intéresser à l'interaction entre un groupe culturel
donné et de son milieu naturel. La théorie du fonctionnalisme de
MALINOWSKI et RADCLIFFE BROWN nous permettra de saisir la fonction que remplit
chaque élément dans un ensemble culturel et quels changements
peuvent entrainer la dysfonction de cet élément.
Notre problématique fait intervenir plusieurs questions
de recherche.
5- QUESTIONS DE
RECHERCHE
Cette recherche est adossée sur deux types de
question : une question principale et deux questions secondaires.
3. 5-1. Question
principale
La question principale se formule ainsi qu'il
suit :
Ø Pourquoi la déforestation entraine-t-elle la
dynamique de la culture chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf ?
4. 5-2. Questions
secondaires
Ø Quels sont les modes d'expression de la
déforestation dans la localité de Lolodorf ?
Ø Quels sont les fragments de la culture
Nkola/Ngyéli qui sont affectés par la
déforestation ?
6- HYPOTHESES DE
RECHERCHE
Le terme hypothèse est étymologiquement
formé de deux racines : hypo qui veut dire sous, en dessous, en
deçà de... et thèse qui est une proposition
à soutenir, à démontrer.
Les hypothèses constituent les soubassements,
les fondations préliminaires de ce qui est à démontrer ou
à vérifier sur le terrain.
Selon MBONJI, E(2005), l'hypothèse est
proposition de savoir, c'est-à-dire une idée pour
« voir », une réponse provisoire, anticipée,
une tentative attendant confirmation ou infirmation au travers de
l'épreuve des faits dont la mise en rapport d'antécédence
de l'un avec l'autre fonctionne comme une relation de causalité,
d'induction ou plus simplement de justification comme de l'ordre vécu
par le recours à l'ordre conçu.
Les hypothèses qui sous-tendent cette recherche sont
de deux ordres: une hypothèse principale et deux hypothèses
secondaires.
5. 6-1.
Hypothèse principale
Ø La déforestation est responsable de la
dynamique culturelle chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf parce qu'elle
détruit l'environnement physique qui leur sert de cadre de vie
naturelle.
Cette hypothèse fait appelle à deux
hypothèses secondaires.
6. 6-2.
Hypothèses secondaires
Ø La surexploitation, la réalisation des champs
agricoles, les champs industriels, la construction des routes, des
infrastructures de recherche au développement sont autant des modes
d'expression qui permettent de matérialiser la déforestation
à Lolodorf.
Ø Les croyances, les habitudes alimentaires, la
médecine, la santé, les relations avec autrui, les parures, bref
plusieurs fragments de la culture Bakola/Bagyéli sont affectés
par la déforestation.
7. 7- OBJECTIFS DE LA RECHERCHE
Les
objectifs à atteindre dans ce travail de recherche sont de deux types :
l'un principal et les autres secondaires.
8. 7-1. Objectif principal
Ø Montrer comment et pourquoi la déforestation
à travers la surexploitation, et la recherche au développement
est responsable de la dynamique culturelle des Nkola/Ngyéli de
Lolodorf.
9. 7-2. Objectifs
secondaires
Ø Identifier, décrire les manifestations
et les pratiques de la déforestation dans la localité de
Lolodorf.
Ø Présenter et décrire les
fragments de la culture Nkola/Ngyéli qui sont affectés par la
déforestation et qui attestent du changement de mode de vie.
10. 8-METHODOLOGIE
Selon AKTOUF (1987), la méthodologie peut se
définir comme étant l'étude du bon usage des
méthodes et techniques. A ce sujet, il ajoute qu'il ne suffit
pas de les connaître, encore faut-il savoir les utiliser comme il se
doit, c'est-à-dire savoir comment les adapter, le plus rigoureusement
possible, d'une part à l'objet précis de la recherche ou de
l'étude envisagée, et d'autre part aux objectifs poursuivis.
Dans le cadre de notre recherche, nous avons fait usage des
deux orientations méthodologiques propres aux sciences sociales et
humaines. A la suite de la recherche documentaire qui s'est effectuée
dans la ville de Yaoundé, la recherche de terrain a eu lieu dans la
localité de Lolodorf.
11. 8-1. Recherche documentaire
Il s'agit de présenter le déroulement de notre
recherche bibliographique.
12. 8-1-1. Coordonnées spatio-temporelles
Il est question de faire une description des espaces et les
périodes pendant lesquelles nous avons effectué notre recherche
documentaire.
En effet, ellea été réalisée dans
la ville de Yaoundé du 22 juillet 2013 au 20 septembre 2013 et s'est
effectuée dans les bibliothèques suivantes :
Ø Bibliothèque de L'AEFALSH ;
Ø Bibliothèque de l'Université
Protestante d'Afrique Centrale ;
Ø Bibliothèque du Ministère de la
Recherche Scientifique et de l'innovation ;
Ø Bibliothèque centrale de l'Université
de Yaoundé I.
Cette recherche nous a permis de constituer une fiche
bibliographique de 135 ouvrages repartis en six (06) ouvrages
généraux, soixante (59) ouvrages spécialisés,
quarante-neuf (49) articles, quinze ouvrages méthodologiques(15), quatre
(04) Thèses, deux (05) Mémoires et cinq (05) sites internet.
La plupart de ces ouvrages de références ont
été soumis à la lecture et accompagnés de prise de
note.
13. 8-1-2. Regroupement thématique
Il s'agit des différents thèmes que nous avons
recensés et classés lors de nos lectures. La réalisation
de ces fiches nous a conduit à la composition de huit (8) thèmes
principaux:
Ø La déforestation au Cameroun ;
Ø La déforestation dans la localité de
Lolodorf ;
Ø L'écologie
Ø L'environnement
Ø Le développement
Ø Les conséquences de la
déforestation ;
Ø Les Pygmées en général ;
Ø Les Nkola/Ngyéli de Lolodorf.
14. 8-2. Recherche de terrain
Il s'agit de la collecte des données auprès des
informateurs sélectionnés dans notre site de recherche.
15. 8-2-1. Coordonnées spatio-temporelles
Cette partie concerne les lieux où la recherche a
été effectuée, et le temps que nous avons mis à la
collecte de nos données.
En effet, nos informations ont été
collectées dans la localité de Lolodorf, auprès de huit
campements Nkola/Ngyéli, deux bureaux administratifs, une agence de
voyages, une gare routière, des espaces publics, une échoppe et
auprès de deux centres de santé. S'agissant des campements
Nkola/Ngyéli, la sélection des informateurs a donné lieu
aux choix suivants. Pour le campement de Mimbiti, deux personnes ont
été interrogées. Deux à Ngomanguelé, deux
à Nséyéle, deux à Oding Otoh, deux à Yom,
deux à Nabozouendi et deux à Mbango Pinda. Cesphases ont
respectivement été réalisées du 05 novembre 2013 au
14 février 2014 suivant le passage ci-après :
Ø Mimbiti I et II : Les 07, 08, 09 et 13
novembre 2013 ;
Ø Ngomanguelé : Les 10, 15 et 16
novembre 2013 ;
Ø Nséyéle : Les 10 et
11 novembre 2013 ;
Ø Oding Otoh : Le 09 novembre
2013 ;
Ø Yom : Le 10 novembre
2013 ;
Ø Nkuongio : Le 02 décembre
2013 ;
Ø Nabozouendi : Le 04 décembre
2013 ;
Ø Mbango Pinda : Le 06 décembre 2013.
Pour les informateurs Bantu, cette collecte a été
effectuée dans les lieux ci-dessous et suivant le calendrier
ci-après :
Ø Lolodorf : Les 06, 24 Janvier
2014 ;
Ø Mbango : Le 15 janvier
2014 ;
Ø Mill : Le 15 janvier
2014 ;
Ø Ngovayang : Le 14 janvier 2014 ;
Ø Ngoyang : Le 12 janvier
2014 ;
Ø Nkouambpoer I : Le 13 janvier 2014 ;
Ø Samal : Le 13 janvier 2014.
16. 8-2-2. Justification du site de l'étude
Le choix de Lolodorf comme zone d'étude ne
relève pas du hasard. Au regard de notre préoccupation relative
à la thématique en étude et à la suite des
interrogations qui se sont dégagées de notre
problématique, la localisation d'un site forestier abritant les
Nkola/Ngyéli était d'une urgence. C'est dans cette optique que
ces campements ont retenu notre attention.
Tout d'abord, il y a eu l'exploitation forestière
industrielle qui était organisée par les compagnies
forestières et qui par la suite a entrainé une dégradation
très avancée de l'environnement. Par ailleurs, s'est
ajoutée à cette pratique, une forme plus récente
d'exploitation traditionnelle de la forêt qui bat son plein dans cette
même localité organisée cette fois-ci tant par les Bantou
sous-traitant que des bandes isolées. De ces deux types d'exploitation
découlent la dégradation de celle-ci et des nouveaux modes de vie
chez les communautés Nkola/Ngyéli. C'est au regard de ces
préoccupations que notre choix a été porté dans
cette zone. Toutefois, il y a lieu de souligner que ces campements ne sont pas
les seuls où les difficultés de survie face à la crise
écologique font écho.
17. 9- Echantillon de la recherche
Constituer un échantillon dans une recherche revient au
choix d'un sous-ensemble caractéristique d'une population ou d'un
domaine d'activités. Celui-ci sous une forme réduite, doit
être représentatif de la population concernée. Pour que
l'échantillon soit représentatif d'une population dans une
enquête d'opinions, il faut interroger des sujets appartenant à
différents groupes d'âge, de sexe, de profession, de milieu, en
proportion de leur importance réelle dans cette population.
Dans le cadre de notre recherche, nous avons constitué
un échantillon de 32 personnes composées de sept femmes et 25
hommes. Ces informateurs étaient constitués des notables, des
chefs traditionnels, des représentants de l'administration, des
chasseurs, des exploitants forestiers, des ex agents des firmes
forestières, des transporteurs, des guérisseurs traditionnels, et
des gestionnaires des échoppes. L'âge des informateurs variait
entre trente et quatre-vingt ans. S'agissant de la répartition ethnique,
nous avons les Nkola/Ngyéli, les Boulou, les Ewondo, les Fang, les
Mbvumbo et quelques allochtones.
A cette sélection ont été
appliquées les techniques de collecte des données.
18. 9-1. Collecte des données
Le souci de mieux collecter les informations crédibles,
nous a conduit à l'usage de quatre types de techniques
fréquemment utilisées en sciences humaines et sociales. Il s'agit
des entretiens individuels et approfondis, des entretiens non structurés
des Focus group, et de l'observation directe.
19. 9-1-1. Entretiens approfondis
Ici, il a été question de donner la parole aux
acteurs de la déforestation sur certains thèmes conçus en
avance. Après avoir expliqué l'objet de notre présence,
nous recevons le consentement verbal des informateurs. Ces entretiens nous ont
permis de saisir les idées, les points de vue et les hypothèses
développées autour de la déforestation. Nous avons donc pu
saisir leurs différentes opinions sur la déforestation d'une part
et sur le devenir des peuples qui en dépendent directement. Cette
technique a été utilisée auprès des acteurs de la
déforestation, les autorités administratives et traditionnelles,
les Nkola/Ngyéli et les autres acteurs qui entrent dans cette longue
chaîne.
20. 9-1-2. Entretien non structuré
Cette technique est largement utilisée en anthropologie
culturelle. Ici, le chercheur a une certaine idée des thèmes qui
doivent être couverts et peut utiliser une liste des thèmes comme
aide-mémoire, mais doit exercer un contrôle minimal sur l'ordre
dans lequel sont traités les thèmes et sur les réponses
des participants.
Nous l'avons opérationnaliser auprès des
Nkola/Ngyéli afin qu'ils nous parlent de leur culture avant la
déforestation et après la déforestation. Il s'agit
particulièrement de collecter les informations sur leurs modes vie et
les changements qui ont été opérés. Par ailleurs
nous l'avons opérationnaliser auprès des boutiquiers, des
infirmiers et des gérants des débits de boissons qui sont
censés recevoir les Nkola/Ngyéli pour des raisons multiples.
21. 9-1-3. Focus group discussion
C'est une méthode de recherche qualitative, une
méthode d'animation du milieu, un processus de communication
multidimensionnelle. Il s'agit d'une discussion organisée
structurée de manière flexible qui regroupe de 6 à 12
participants. Elle dure normalement 1 à 2 heures et permet en effet
d'assurer la participation de tout le monde et d'offrir un temps de parole
à chaque participant.
Dans le cadre de notre collecte des données, cette
technique nous a permis de rassembler les informateurs afin qu'ils nous livrent
leurs points de vue, leurs connaissances et leurs représentations sur la
déforestation d'une part et sur ses effets sur leur culture d'autre
part.
Bref il était question de synthétiser le
discours local développé par les informateurs sur les
préoccupations de notre étude. Nous avons d'abord
sélectionné les informateurs qui ont une certaine maitrise des
thèmes que nous nous sommes fixé de débattre. Ensuite nous
avons fixé un rendez-vous sur le jour, le lieu et l'heure qui
paraissaient propice pour une bonne discussion. Il fallait également
tenir compte de l'emploi du temps de nos informateurs. Une fois la
présentation terminée, nous avons reçu le consentement
libre et verbal des informateurs et la séance d'entretien pouvait
commencer. Le but visé était d'avoir une compréhension
considérable du sujet à l'étude. A travers cette
technique, nous avons eu un portrait exact de la réalité de la
déforestation telle qu'elle est vécue. Par ailleurs, elle nous a
aussi permis d'évaluer les besoins et de formuler les interventions. A
la fin de l'entretien, nous avons partagé avec nos informateurs, le
rafraichissant réservé à cet effet.
22. 9-1-4. Observation directe
Cette méthode de collecte des données
ethnographiques, nous a permis d'observer de près, les manifestations de
la déforestation et les modes de vie actuelles des Nkola/Ngyéli.
En effet, il était question de faire une immersion dans les sites
où sont pratiqués la déforestation et auprès des
campements Nkola/Ngyéli afin de toucher du doigt leur vécu
quotidien. Nous avons donc pu assister à l'abattage des arbres, à
leur découpage à leur transport et parfois à
l'écoulement sur les points commerciaux de certaines essences.
Auprès des Nkola/Ngyéli, nous avons cheminé en longueur de
journée avec eux et nous avons ainsi perçu leur vécu
quotidien.
23. 10- Analyse
Les informations glanées sur le terrain ont
été dépouillées à la fin de chaque semaine.
Ici, nous avons fait appelle à deux techniques d'analyse des
données : l'analyse de contenu et l'analyse iconographique.
L'analyse de contenu est une technique d'étude
détaillée des contenus de documents. Elle a pour rôle d'en
dégager les significations, associations, intentions... non directement
perceptibles à la simple lecture des documents.
Ces techniques nous ont permis de chercher les
éléments de base qui structurent la réflexion et leur
relation avec notre recherche. Les entretiens individuels, les entretiens
approfondis et les focus group effectués en Nkola/Ngyéli, en
Kwassio, en Ewondo, en fang et en Français ont été
enregistrés par le biais d'un dictaphone et avec le consentement des
informateurs sélectionnés. Après cet exercice, ces
données ont été retranscrites et saisies à l'aide
d'un ordinateur portable. Nous les avons ensuite rangées en fonction des
objectifs de notre recherche.
S'agissant de l'analyse iconographique, il a été
question de sélectionner les prises de vue que nous avons
réalisées pendant la phase de notre terrain. En effet il
était question à l'aide notre appareil photo numérique, de
procéder au choix des images qui seront utilisées à titre
illustratif dans notre recherche.
24. 10-1. Types des données
Notre recherche a fait l'objet de la collecte des
données deux types : les données quantitatives et les
données qualitatives.
25. 10-1-1. Données quantitatives
Cette partie a consisté à consulter
auprès des statistiques administratives, les données relatives au
nombre d'exploitants, aux essences exploitées et à la
quantité des produits exploitées de façon
journalière, mensuelle et annuelle.
26. 10-1-2. Données qualitatives
Il a été question de comprendre le discours des
acteurs de la déforestation, les populations locales et la perception
que les Nkola/Ngyéli se font de la déforestation. Ce discours a
été complété par l'observation directe que nous
avons effectuée.
11- INTERPRETATION
De façon général, interpréter
c'est donner un sens, c'est rendre compréhensible. L'outil
méthodologique qui permet d'interpréter c'est le cadre
théorique. S'agissant de notre recherche, nous avons mobilisé
deux théories anthropologiques qui nous ont permis d'apporter une
signification à nos données collectées. Il s'agit
principalement de l'écologie culturelle et du fonctionnalisme.
11-1. L'écologie culturelle
L'écologie culturelle ou l'anthropologie
écologique explique les interactions complexes entre l'homme et son
environnement. Toutes les sociétés humaines sont en contact
permanent avec la terre et ont une influence sur le climat, les plantes, les
animaux qui les entourent. Ces éléments et l'environnement ont
également une influence réciproque sur l'homme. Elle tente de
fournir une explication relevant du matérialisme culturel sur la
société (culture), en tant que produit de son adaptation à
des contraintes environnementales. Elle s'intéresse à la
manière dont une population construit son environnement et aux moeurs
subséquentes. Ces relations forment la vie politique, économique
et sociale des populations.
Pour STEWARD, J (1955), l'écologie culturelle vise
à appréhender la culture à partir des conditions
écologiques. L'écologie culturelle montre que le genre de vie
serait une réponse culturelle à l'environnement. Steward trouve
que la nature aurait pour fonction principale, l'adaptation de la
société à un environnement donné. Mais vers la fin
des années 1960, les théories du déterminisme
environnemental tombent en désuétude pour deux raisons. La
première tient du fait que la supposition selon laquelle les traits
culturels s'adaptent invariablement aux conditions environnementales est mise
en rude épreuve par les observations empiriques. La seconde raison au
déclin des théories déterministes a été la
révolution de l'anthropologie sociale et culturelle contre les
explications causales.
Selon SEYMOUR, S (1986), l'écologie culturelle
doit fournir une explication matérialiste de la société
humaine et de la culture comme le produit de l'adaptation à un
environnement précis et chaque être humain a un potentiel à
s'adapter à un environnement et tient compte de l'influence de cet
environnement dans la construction de sa culture.
Cette théorie a connu la contribution de plusieurs
auteurs dont les plus connus sont : LESLIE White (1900-1975), Julien
STEWARD (1902-1972) et le contemporain MARVIN Harris. Parfois fondue dans leurs
travaux, l'anthropologie écologique s'est voulue une approche globale
des relations ou inter relation entre une communauté donnée, le
volume de cette population, ses activités de production et de
reproduction, bref son mode de vie global et l'environnement naturel dans
lequel vit ladite population. Cette théorie se démarque de
l'écologie classique d'Ernest HAECKEL, en dépassant le populisme
et le caractère militant pour mettre en évidence le lien entre
la sauvegarde du milieu de vie et l'exigence de compréhension
scientifique de l'action de l'homme sur la nature.
S'apparentant à la socioécologie qui met en
évidence la relation entre les pratiques humaines et l'apparition des
déséquilibres dans les écosystèmes, la pollution et
la dégradation de l'environnement. L'anthropologie écologique
peut cependant revendiquer une certaine identité par l'impartition de
ces comportements perturbateurs ou non à des corps culturels
précis. Pour MBONJI,E(2005), en étudiant les
mécanismes par lesquels certaines sociétés ont
réalisé une sorte d'homéostasie entre le milieu naturel et
la culture, l'anthropologie écologique ou écologie culturelle
pourrait aider à comprendre l'attitude des peuples de forêt face
aux mutations survenues dans leur environnement.
C'est autour des années 1950 que l'anthropologie
écologique va prendre un véritable envol et l'explication causale
des relations entre l'homme et son environnement est remplacée par des
nouvelles façons de conceptualisation et de compréhension des
données. Cet itinéraire évolutif a fécondé
quelques grands courants de l'histoire de l'anthropologie
écologique : le déterminisme écologique,
l'écologie culturelle et l'ethnoécologie.
L'idée d'un déterminisme écologique prend
corps dans la pensée anthropologique, du fait de l'affirmation selon
laquelle les traits s'une société et la culture humaine sont
explicables grâce à l'environnement dans lequel ils sont se
développés. Cette conception est renforcée par
l'enthousiasme suscité par les théories de DARWIN sur la
diversité biologique. Il apparaît que c'est le milieu
écologique qui donne forme à la culture.
Au demeurant, l'anthropologie écologique ou
l'écologie culturelle est une science qui s'attèle à
étudier et à comprendre les interrelations entre une
communauté donnée, ses mécanismes de production, de
reproduction, ses valeurs, ses coutumes, ses rites, sa religion ses modes de
vie bref sa culture dans sa globalité et le milieu environnemental dans
lequel elle vit et dépend.
Notre recherche établit la relation entre
l'élément faunique de l'environnement et la culture des
Nkola/Ngyéli dans un contexte d'érosion de la
biodiversité. L'écologie culturelle permet de lire cette
réalité à travers le principe de l'adaptation et de
l'influence réciproque entre une population et son milieu de vie. De
toute évidence, le fait que les Nkola/Ngyéli aient des modes de
vie liés à la forêt n'est pas anodin. C'est justement parce
que leur environnement leur influence qu'ils agissent ainsi. En effet,
l'environnement offre à la culture Nkola/Ngyéli les ressources
globales pour sa survie. Que ce soit au niveau de l'occupation de l'espace avec
la construction des sites d'habitat ; de l'alimentation, de l'organisation
sociale, des croyances, de la médecine, la santé, la maladie,
l'économie, l'art, des parures, les relations avec autrui,
l'environnement fournit à cette culture tout ce qu'elle a besoin pour
vivre.
Comme l'environnement offre à la culture ses
éléments, elle peut donc permettre de comprendre et d'expliquer
la culture. C'est donc dans ce sens que l'écologie culturelle a
aidé à comprendre que la déforestation explique au mieux
la dynamique culturelle chez les Nkola/Ngyéli. La culture
Nkola/Ngyéli étantredevable à l'environnement, son
changement lié à la déforestation entraine obligatoirement
le changement de la culture.
11-2. Le fonctionnalisme
Le fonctionnalisme est une théorie utilisée pour
la première fois par
Bronislaw MALINOWSKI
dans l'ouvrage Les Argonautes du Pacifique occidental, produit d'un
long travail d'
observation
participante qu'il réalisa dans les
îles Trobriand.
Le fonctionnalisme constitue une alternative aux théories
anthropologiques alors dominantes, l'
évolutionnisme
et le
diffusionnisme.
L'évolutionnisme analyse les pratiques des différentes
sociétés comme les résultats de leur évolution.
Postulant l'unicité du genre humain, les évolutionnistes rendent
compte des différences entre les sociétés par leur
degré de développement. Au contraire, le diffusionnisme
considère que les sociétés sont fondamentalement diverses.
Les pratiques qui y sont observées sont le résultat d'emprunts
culturels aux sociétés voisines. Les diffusionnistes expliquent
le fonctionnement des sociétés à partir de l'histoire des
transmissions de connaissance entre différents groupes.
La culture, c'est-à-dire le corps complet
d'instruments, les privilèges de ses groupes sociaux, les idées,
les croyances et les coutumes humaines, constituent un vaste appareil mettant
l'homme dans une meilleure position pour affronter les problèmes
concrets particuliers qui se dressent devant lui dans son adaptation à
son environnement pour donner cours à la satisfaction de ses besoins. Il
suppose donc que toute pratique ait pour fonction de répondre aux
besoins des individus. Mais en même temps, c'est toujours la
totalité de la société, et non ses éléments
séparés, qui répond aux besoins individuels. La culture
est un tout indivis dont les divers éléments sont
interdépendants.
L'anthropologue britannique
Alfred
RADCLIFFE BROWN proposera une analyse alternative en rapportant les
différentes fonctions de la culture non aux besoins des individus mais
à ceux de la société prise comme un ensemble : La fonction
d'un usage social particulier, c'est la contribution qu'il apporte à la
vie sociale considérée comme l'ensemble du fonctionnement du
système social
La théorie du fonctionnalisme est donc la
réaction de ces deux auteurs face aux thèses
évolutionnistes du 19esiècle postulant une trajectoire
unilinéaire à la marche de l'humanité vers la
civilisation. Le fonctionnalisme élabore une théorie faisant de
la culture et donc de la fonction, un enjeu de satisfaction des besoins humains
et sociaux ; la fonction étant définie comme le rôle
joué, la contribution, la part, la fin ou la finalité. Selon
Malinowski cité par MBONJI,E (2005) : dans tous les types de
civilisation, chaque coutume, chaque objet, chaque idée, chaque croyance
remplit une fonction vitale, a une tâche à accomplir,
représente une partie indispensable d'une totalité
organique.
En posant que tout item culturel répond à un
besoin, à une fonction, MALINOWSKI invalide par là même la
notion de survivance. En affirmant également que la fonction d'un
élément culturel est le rôle joué soit pour
satisfaire des besoins individuels, soit pour sceller la cohésion
sociale, le fonctionnalisme se déploie dans deux directions : celle
d'un fonctionnalisme psychologique avec MALINOWSKI mettant l'emphase sur
l'être humain, et celle d'in fonctionnalisme sociologique ou
structuro-fonctionnalisme attribué à Radcliffe-Brown
s'intéressant davantage aux besoins sociaux.
Trois postulats majeurs ont été
énoncés par King MERTON :
Ø Le postulat de l'unité fonctionnelle stipulant
que les éléments d'une culture et d'une société
sont fonctionnels pour le système social entier, ils constituent une
totalité indissociable ;
Ø Le postulat de la nécessité
fonctionnelle : tous les éléments d'une culture tels qu'ils
coexistent sont indispensables et le caractère obligatoire de leur
présence peut être démontré ;
Ø Le postulat de l'universalité fonctionnelle ou
du fonctionnalisme universel : tous les éléments d'une
société remplissent des fonctions sociales effectives.
Les postulats ainsi formés ont fait l'objet de beaucoup
de réactions dont celle de Lévis Strauss soutenant que dire qu'un
élément culturel remplit une fonction est un truisme ; en
revanche, soutenir que dans un système social, tout a une fonction est
une absurdité. Par ailleurs, les principes du fonctionnalisme ont
inspiré les commentaires suivants de la part de Gérard
LENCLUD(1988) soucieux d'en faire apprécier pleinement le contenu :
Ø A l'instar de tout organisme, la
société possède un caractère de
système ; elle est organisée en un tout ;
Ø Chaque élément constitutif de la
société est doté d'une fonction ;
Ø Chaque élément de la
société représente une partie indispensable à la
totalité formée par la société ;
Ø On peut démontrer que toutes les formes
d'organisations effectivement repérables à l'intérieur
d'une société s'impliquent mutuellement ;
Ø Toute société tendrait à
rechercher comme destination, un état sans cesse amélioré
de cohérence ou d'intégration.
Par ailleurs, le fonctionnalisme est un courant qui donne
à chaque fait social une ou des
fonctions qui le
déterminent. Autrement dit, chaque élément de la culture
possède une certaine tâche à accomplir -une
fonction-, qui
présente une part irremplaçable de la totalité organique.
La culture doit être vue dans une perspective synchronique. Si ce courant
a connu des limites, notamment du fait de sa tendance à simplifier les
réalités culturelles, néanmoins sa méthode de
l'observation participante subsiste encore aujourd'hui. La fonction devient un
principe explicatif: tout organe a une fonction (comme dans le corps humain).
Les organes de la société ont pour fonction d'assurer la
cohésion
sociale (lien social entre les individus).
Somme toute, le fonctionnalisme est un corps de doctrines qui,
partant du constat qu'il existe une relation de correspondance entre les faits,
tire des conclusions théoriques sur la nature de la
société. La notion de fonction renvoie à une fin
intentionnellement recherchée, aux services mutuels que se rendraient
les éléments les uns aux autres, avec un caractère de
nécessité auquel s'ajoute le fait de la finalité
dernière du tout social ; les institutions propres d'une
société seraient des solutions aux problèmes universels
qu'affrontent les sociétés humaines en général.
Dans le cadre de notre recherche, le fonctionnalisme nous a
permis de voir le rôle joué et la fonction que remplit chaque
élément dans le domaine de la déforestation. La
déforestation se présente ici comme un corps composé de
plusieurs éléments et ou chaque élément a une
fonction bien déterminé pour la bonne marche de ce composite.
Les fonctions remplies par chaque élément crée une
complémentarité et peuvent être adaptés au postulat
de l'unité fonctionnelle stipulant que les éléments d'une
culture et d'une société sont fonctionnels pour le système
social entier ; ils constituent une totalité indissociable.
Au niveau de la Loi, le rôle et la fonction
régulateurs joués ont trait au cadrage juridique qui
légifère l'effectivité de ce phénomène. Ce
rôle consiste donc à délimiter et à créer
l'orientation nécessaire de tout acte de déforestation ou
d'exploitation de l'environnement. L'environnement appartenant à un
territoire national, son exploitation ne saurait donc se faire hors des
fondements juridiques bien établis, et qui éviterait toute
dérogation. C'est dans ce cadre que des décrets, des
arrêtés, et des décisions sont mis sur pieds afin d'assurer
la bonne pratique de la déforestation. S'agissant des acteurs, leurs
rôles consistent à mettre sur pieds des firmes forestières
et des entreprises dans le but de mieux exploiter la forêt de ses
ressources végétales et animales. Ce rôle va de
l'exploitation, la consommation et la commercialisation des essences
exploitées.
La technologie mobilisée dans la déforestation
est un ensemble des équipements et matériels que les acteurs
utilisent afin d'extraire les produits de la forêt. Pour l'environnement,
son rôle consiste à donner à la culture, les produits
nécessaires à sa survie. Le rôle de la culture quant
à lui, consiste à façonner les personnalités de
base et des modes de vie propres aux Nkola/Ngyéli.
Somme toute, le fonctionnalisme explique au mieux le
rôle et la fonction qu'à chaque élément dans le
processus de la déforestation. Il suppose donc que tout
élément ait pour fonction de répondre aux besoins de la
déforestation. Mais en même temps, c'est toujours la
totalité des éléments, et non ses éléments
séparés, qui répondent aux besoins de la
déforestation.
12-Intérêt de
la recherche
Au regard des thématiques su-évoquées,
s'expriment des préoccupations d'une importance capitale liées
à la déforestation, son impact sur la vie de l'humanité en
général, celle des Nkola/Ngyéli en particulier. Question
aux enjeux multiples depuis près d'un demi-siècle, l'on ne
saurait aujourd'hui resté insoucieux du devenir et de l'avenir des
générations futures. Les communautés Nkola/Ngyéli
qui ont toujours constitué une curiosité scientifique de par
leurs réalités socioculturelles sont classées dans le
statut des peuples autochtones qui nécessitent une protection toute
particulière car subissant la marginalisation et toutes sortes de
discrimination des peuples bantous sur plusieurs aspects de la vie.
L'étude que nous nous proposons de mener s'inscrit dans
une double mesure d'intérêt, tant théorique que pratique.
12-1. Intérêt
théorique
Théoriquement, cette étude se veut une
contribution d'abord à l'anthropologie du développement, car
augmente notre compréhension des problèmes de
développement liés à la déforestation. Ensuite,
elle s'inscrit de façon générale à
l'évolution de la science anthropologique.
12-2. Intérêt pratique
D'entrée de jeu, il faut reconnaitre les limites des
politiques de développement auxquelles les pouvoirs publics font face
dans leur projet d'amélioration des conditions de vie des populations.
Le plus souvent, ces politiques de développement ne tiennent jamais
compte des cultures des populations bénéficiaires et les
multiples échecs observés auprès de ces projets de ne
peuvent que contribuer progressivement au changement voir au
mécontentement de ces communautés. Ainsi, ce modeste travail peut
apporter sa contribution dans la mise sur pieds, des mécanismes et
stratégies de conception et de réalisation des projets et
programmes d'exploitation de l'environnement dans une zone donnée. Par
ailleurs elle peut également répondre à une exigence
importante dans la mise en oeuvre des méthodes participatives capables
d'améliorer considérablement le bien être des sociocultures
Nkola/Ngyéli dans leur environnement naturel.
Cependant, ce travail s'inscrira donc aux côtés
des concepteurs, réalisateurs des programmes et actions de
développement, aux exploitants forestiers, comme un document
stratégique exhortant l'implication, la participation et la
collaboration des communautés Nkola/Ngyéli dans tout processus
de changement de leur milieu naturel, tout en tenant compte de leurs
réalités socioculturelles.
13-Difficultés
rencontrées
Aucun travail de recherche ne saurait se réaliser sans
difficultés. Celles-ci s'expriment à plusieurs niveaux et
constituent une réelle préoccupation à l'endroit des
étudiants.
Sur le plan de la documentation, nous avons eu beaucoup de mal
à trouver les documents dont nous avions besoin. La majeure partie de
ces documents recensés n'étaient plus d'actualité.
Très souvent ils faisaient une présentation sommaire de ce
phénomène.
Sur le terrain la difficulté a été plus
considérable. En effet, le manque de moyen financier ne nous a pas
facilité la tâche. Nous avons réalisé que sans
contrepartie, aucune information ne pouvait être livrée. A vue
d'oeil, la majorité de nos informateurs surtout Bantu exprimait une
certaine méfiance vis-à-vis de nous. Pour eux, nous étions
considérés comme espion malgré le fait de leur avoir
présenter notre autorisation de recherche. Les autorités
administratives plongées dans l'exploitation illégale de la
forêt ont de temps en temps cherché à nous intimider.
Les Nkola/Ngyéli à chaque fois que nous nous
entretenons avec eux imposaient des cadeaux en se fondant sur l'idée que
nous avons été envoyé par une ONG et par conséquent
avons beaucoup d'argent. En outre, les Nkola/Ngyéli étaient
lassés de répondre aux questions touchant leurs modes de vie
actuelles et leur avenir. Pour eux, rien n'a raisonnablement été
fait pour améliorer leurs conditions de vie et que les ONG sont
là pour se moquer d'eux en prenant de financements importants
auprès des bailleurs de fonds pour ne rien réaliser sur le
terrain.
14- Plan du travail
Du lieu des notions ci-dessus indiquées, se
matérialise la structuration de notre travail sur un ensemble de quatre
chapitres outre l'introduction et la conclusion.
Le premier chapitre est intitulé :
présentation des cadres physique et humain du site. Dans son
contenu il est question de Lolodorf dans sa globalité physique et
humaine. Les aspects développés ici ont trait à sa
géolocalisation. Le volet humain présente l'ethnographie de ce
site et l'ethnogenèse de ses communautés. Ensuite sont
rappelés, les rapports entre le milieu physique et notre
thématique d'une part et entre le cadre humain d'autre part, le sujet,
les interactions avec les communautés citées et la forêt.
Ce chapitre est long de 24 pages.
Le deuxième chapitre porte sur l'état de la
question. Il fait intégrer les notions d'écologie,
d'environnement, des Pygmées et de développement. Ici, il est
question de présenter les approches écologiques de
l'environnement et ses théories. Les généralités
sur les Pygmées en sont aussi évoquées. En outre, ce
chapitre s'attèle à présenter le développement
comme une notion polysémique et le définit dans ses multiples
facettes. Bref, il fait un rappel sur la revue documentaire mobilisée
à ce sujet. Ce chapitre est composé de 30 pages.
Le troisième chapitre s'articule autour de
l'ethnographie de la déforestation chez les
Nkola/Ngyéli. Il présente l'avènement de la reforme
forestière au Cameroun, l'histoire de la déforestation à
Lolodorf, ses acteurs, les technologies utilisées, les essences
exploitées, les usages faits à partir de ces essences, les
quantités exploitées et les activités
développées autour de la déforestation. Ce chapitre est
long de 27 pages.
Quant au dernier chapitre intitulé
ethno-anthropologie de la déforestation chez les
Nkola/Ngyéli, il présente et décrit quelques
fragments de la culture Nkola/Ngyéli avant ladéforestation,
après la déforestation et ensuite montre à quel niveau le
changement est intervenu. Il revient alors de montrer que la
déforestation a impacté sur les modes de vie des
Nkola/Ngyéli. Par conséquent ce chapitre nous livre l'apport de
la déforestation dans le changement des modes de vie et montre dans
quelle mesure l'érosion de la biodiversité est responsable des
dynamiques socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli. Ce chapitre est
composé de 25 pages.
Le travail auquel notre recherche se déploie est
construit autour de la responsabilité de la déforestation sur les
dynamiques socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf. Sa
conclusion fait un rappel sur la méthodologie utilisée, et dresse
un bilan sur les résultats auxquels nous sommes parvenus. Par ailleurs,
elle essaie de projeter quelles suggestions et des perspectives liées
à la question de la déforestation et aux Nkola/Ngyéli.
CHAPITRE I :
La présente recherche a été menée
au Cameroun, dans la région du Sud, département de l'Océan
et précisément dans l'arrondissement de Lolodorf qui abrite comme
plusieurs autres zones, les Nkola/Ngyéliauxquels la forêt
constitue le cadre de vie naturel.Ce chapitre sera consacré à la
monographie de ce site en insistant sur les aspects géophysique et
humain.
B. I-1. CADRE PHYSIQUE
Il est tout d'abord question de situer la région du
Sud, puis le département de l'Océan, ensuite notre zone de
recherche et enfin seront évoquer, ses aspects climatiques et de
géolocalisation.
C. I-1-1. Localisation
Lolodorf se trouve en plein forêt équatoriale.
Cette vieille bourgade allemande est administrativement un arrondissement
rattaché au département de l'Océan et à la
région du Sud. Elle est située à environ 190 KM de
Yaoundé capitale politique du Cameroun, 250 Km de Douala capitale
économique, 76 KM d'Ebolowa sa capitale régionale. La distance
avec son chef-lieu de département est estimée à 110 KM.
Lolodorf est culminée par la chaine montagneuse de Ngovayang. Cette
unité administrative a une superficie approximative de 1200
KM2. Ses données de géolocalisation font mention de
3.23314° de latitude Nord et de 10.72852° de Longitude Est sur une
altitude de 443,40 m.
Carte
N°1 :Présentation duCameroun, de la région du
Sud, du répartement de l'Océan, l'arrondissement de Lolodorf et
quelques campements Bakola/Bagyéli.
Source :Google, 2014
D. I-1-2. Relief
Lolodorf fait partie du vaste plateau sud-camerounais
d'altitude moyenne 650 m. son relief est très accidenté du fait
de la présence de la chaîne montagneuse de Ngovayang et plusieurs
autres montagnes qui surplombent la localité.
E. I-1-3. Végétation
La couverture végétale de Lolodorf est
constituée de forêt équatoriale dense et humide
sempervirente de basse et de moyenne altitude. Elle comporte de vieilles
forêts secondaires, de jachères forestières et de
jachères à chomolaena odorata. Les essences
forestières sollicitées pour l'exploitation sont : le
Bubinga, le Moabi, le Sapelli, le Sipo, le Tali, le Movingui, le Bibolo,
l'Ayous, le Bilinga, l'Ekop, l'Azobé, l'Ebène et l'Iroko. On
rencontre aussi des Produits Forestiers Non Ligneux(PFNL) tels que l'Andoo,
l'Ezezang, la Cola, le Bitter cola.
Lolodorf abrite deux Unités Forestières
d'Aménagement (UFA). Il s'agit de la 00001 qu'elle partage avec les
arrondissements d'Eséka et Mvengue et de la 09027 qu'elle partage avec
l'arrondissement de Bipindi. On rencontre aussi deux forêts
communautaires dans les villages Bikoka/Bibondi et Mbango. On note
également la présence d'une forêt de protection
occupée par la chaîne montagneuse de Ngovayang.
F. I-1-4. Faune
Elle est surtout constituée du petit gibier regorgeant
des animaux tels que les lièvres, les chats tigres, les porcs
épics, les hérissons, les singes, les biches, les vipères,
les rats palmistes, les varans... les zones de pêches que sont les cours
d'eau regorgent du poisson, des crevettes et des crabes qui sont très
peu exploités. Mais depuis quelques mois des ressortissants maliens
exercent sur le fleuve principal, une activité intense de
pêche.
G. I-1-5.Hydrographie
Le réseau hydrographique de Lolodorf est important et
appartient au bassin de la Lokoundje. Ce bassin est un vaste réseau de
rivière, des ruisseaux et de marécages. Les plus importants
sont : la Mougué, la Mbikiliki, et Malang. Ces cours d'eau ont
deux rythmes d'écoulement marqués par les épisodes
pluvieux de hautes eaux rendant parfois ces rivières inaccessibles et
une période d'assèchement. Mais, plusieurs petits ruisseaux tels
queBibia Kaba, Mbango, Mvillé et Nkoumbala, viennent s'ajouter à
ces rivières et conditionnent les activités quotidiennes des
populations (Pêche artisanale, vaisselle, bain, lessive, rites de
purification, milieu de vie des totems)
H. I-1-6. Climat
Lolodorf est soumis au climat de type équatorial chaud
et humide, à quatre saisons.
Ø Une grande saison de pluies (mi-aout ;
mi-novembre) ;
Ø Une grande saison sèche (mi-novembre ;
mi-mars) ;
Ø Une petite saison de pluies (mi-mars ;
mi-mai) ;
Ø Une petite saison sèche (mi-mai ;
mi-aout).
La moyenne annuelle des précipitations est de 1700 mm
et celle des températures mensuelles varient entre de 24°C et
27°C. Toutefois, comme nombre de localités camerounaises, il
convient de noter que Lolodorf connait de très fortes perturbations du
rythme saisonnier depuis quelques années.
I. I-1-7. Sol
Les sols appartiennent au groupe des sols ferralitiques. Ce
sont des sols argileux tropicaux de couleur brun-jaunâtre à brun
vif. Le PH est généralement acide. On rencontre aussi des sols
hydromorphes très mal drainés dans les bas-fonds. De
manière globale, il s'agit de sols qui, dans des bonnes conditions,
supportent les cultures arbustives peu exigeantes comme le palmier à
huile, l'hévéa. Ils sont généralement propices
à la culture des tubercules.
J. I-1-8. Infrastructures routières
Pour y accéder, les tronçons reliant Lolodorf
aux localités citées plus haut sont praticables à deux
degrés.
A partir de Yaoundé, vers Douala, en franchissant la
station de péage de Boumneyebel, c'est un parcours bitumé
jusqu'à Lolodorf. Il fait 190 Km etest très dangereux vu
l'incivisme et l'amateurisme auxquels plusieurs chauffeurs font montre, sans
toutefois oublier l'état alarmant de cette route à partir de
Boumneyebel.
Quant à la route Ebolowa-Lolodorf, son état est
fonction des saisons. Non bitumée, elle est assez praticable pendant la
saison sèche (décembre-mars ; mai-juillet) les autres mois
imposent l'usage des véhicules tout terrain communément
appelés 4×4. Les motos sont de plus en plus nombreuses sur cette
route aux cotés des vieux taxis utilisés par les
communautés pour les besoins de déplacement et
d'écoulement des produits agricoles. Les camions lourdement
chargés de billes bois y imposent leur loi. Les communautés sur
ce tronçon attendent avec impatience la promesse des travaux de
réalisation de cette route faite par le président de la
république lors du dernier comice agropastorale tenu à Ebolowa en
2010.
S'agissant de l'axe Kribi-Lolodorf, cette vieille piste de
plus d'un siècle constitue le véritable malheur des
communautés Bagyéli, Bassa, Fang, Mabéa et Mbvumbo en
majoritaire qui longent ce tronçon. Véritable parcours du
combattant, il exige l'usage des véhicules tout terrain dans la mesure
où la présence des bourbiers est constante tout le long de
l'année. Vous trouverez plusieurs sites touristiques notamment la
résidence du colon allemand Zenker Jorgen à Bipindi, le palais en
ruine du célèbre chef supérieur Mbvumbo Minkoua Ntounga,
les cascades de Mbikiliki, la station catholique de Ngovayang, la station
protestante de Bibia. Le vieux pont français abandonné vous
annoncera l'entrée à Lolodorf.
K. I-2- CADRE HUMAIN
Les aspects humains de cette partie, regroupent l'origine
ethnonymique, l'ethnogenèsedes communautés, leur culture etleur
utilisation de la forêt.
L. I-2-1.Grands groupes de peuplement de Lolodorf
Lolodorf est composé de deux types de groupe
composés des autochtones et des allochtones. Ces deux types sont
divisés en quatre grands sous-groupes de peuplement à
savoir :
Ø Les Boulou ;
Ils sont présents dans les villages Mbango Boulou et
Mvog Esson.
Ø Les Ewondo ;
Ceux-ci sont localisés dans les villages Bibondi,
Bikoka, Madong I, Madong II et Ngoyang.
Ø Les Fang;
Ils sont localisés dans les villages Bibia, Kaba,
Mbikiliki, Ngovayang I, Ngovayang II, Ngovayang III ;
Ø Les Mbvumbo ;
Majoritaires, on les trouve dans les villages Bibia,Bigbally,
Bikalla, Bikui, Bingambo, Koumbizik, Mangouma, Mbango Bituer, Mbango Ngoumba,
Mill, Mougue, Mville, Nkouambpoer I, Nkouambpoer II et Sabally.
Ø Les Nkola/Ngyéli
Ils sont localisés dans les forêts près
des villages Bingambo, Mbango Bituer, Mbango Mbvumbo, Mbikiliki, Mill,
Ngovayang, Ngoyang, Nkouambpoer I, Nkouambpoer II.
Ø Les autres populations
Elles sont composées des ethnies venant de l'Ouest, du
Sud-Ouest, du Nord et Sud-Ouest, et quelques pays voisins.
Groupes ethniques
|
Localisations
|
Boulou
|
Mbango Boulou et Mvog Esson.
|
Ewondo
|
Bibondi, Bikoka, Madong I, Madong II, Ngoyang
|
Fang
|
Bibia, Kaba, Mbikiliki, Ngovayang I, Ngovayang II, Ngovayang
III
|
Mbvumbo
|
Bigbally, Bikalla Bikui, Bingambo, Koumbizik, Mangouma, Mbango
Bituer, Mbango Ngoumba, Mill, Mougue, Mville, Nkouambpoer I et II, Sabally.
|
Nkola/Ngyéli
|
Mbango, Mbikiliki, Mill, Ngovayang, Ngoyang, Nkouambpoer I et
II,
|
Autres communautés
|
Bigbally, Bikui, Bikoka, Mougué, Ngovayang,
périphéries urbains
|
Tableau N° 1 :
Répartition et localisation des groupes ethniques de
Lolodorf
Source : Nzie 2013
M. I-2-2. Ethnogenèse du peuplement
Située en pleine forêt équatoriale,
Lolodorf est une ancienne station de commandement allemande. Plusieurs
édifices en ruine encore présentes peuvent le
témoigner.Avant l'arrivée des administrateurs coloniaux, les
communautés qui y vivaient la nommaient Bikwui en Kwassio,
Bikwéé en Ewondo et Bikôôn en
Nkola/Ngyéli. Cette appléation vient du nom que porte le fleuve
qui borde et longe les alentours de cette localité. Les tous premiers
colons et exportateurs allemands seraient arrivés à Bikwui vers
1883 en provenance de Kribi à la recherche d'une zone
stratégique. Ils vont y faire la connaissance de Louleh Koutang, chef de
guerre et chef traditionnel du clan Bigbally. Avec l'installation du premier
administrateur allemand et la création d'un poste administratif en 1886,
la communauté prend le nom de Luledorf qui signifie le village
de Louleh. Après le départ des allemands suite à la
première guerre mondiale et l'installation du premier administrateur
français en 1916, Luledorf deviendra Lolodorf. Cependant, les multiples
ethnies autochtones de Lolodorf continuent à le nommer en leur langue.
Les Mbvumbo majoritaires emploient l'expression Bikui. Les Ewondo parlent de
Bikwéé d'autres plus radicaux face à la
domination des Mbvumbo se réfèrent au terme Nkol
mékuk « le mont des Mbvumbo ». Les
Nkola/Ngyéli utilisent l'expression Bikôôn.
N. I-2-2-1.Les Boulou
Localisés dans les villages Mbango Boulou et Mvog
Esson, les Boulou seraient arrivés à Lolodorf à la
recherche des terres d'accueil. Ceux de Mbango Boulou seraient venus du
côté d'Ebolowa. Ceux de Mvog Esson par contre viendraient de
l'autre côté de Mekalat appartenant aussi à Ebolowa. En
effet, pendant les périodes précoloniales, un chef Mbvumbo
très puissant et influent du clan Limanzouang serait allé
chercher les esclaves afin de les installer sur ses terres. Le rôle
à leur conférer était de veiller et dénoncer toute
personne étrangère qui voulait occuper ces terres. Les clans
qu'on y trouve sont composés des Sankok à Mbango et des
Yéwol à Mvog Esson.
O. I-2-2-1-1.La culture Boulou et ses rapports à la
forêt
Sur le plan socioculturel, c'est une société
patrilinéaire caractériséepar le principe gouvernant la
transmission de la parenté par le père. Le lien tracé par
la parenté est avant tout social. Cette société est
composée des clans (groupe de descendants de plusieurs lignages et au
sein duquel tous les membres se disent apparentés à partir d'un
ancêtre unique souvent mythique), des lignages (groupe de descendants
dont les membres peuvent définir leurs liens de parenté à
partir d'un ancêtre commun)
L'organisation sociale longtemps restée attacher aux
normes et valeurs culturelles d'origines, s'arrime de plus en plus à la
modernité. Cependant, elle reste sous la direction d'un chef
entouré de quelques notables chargés d'assurer la cohésion
sociale et le bien-être des personnes. L'exogamie est appliquée et
l'inceste, relation sexuelle prohibée entre individus apparentés
à un degré qui interdit leur union ou appartenant à un
groupe à l'intérieur duquel toute relation sexuelle ou tout
mariage est fortement déconseillé et condamné. Les
relations ego et oncle utérin restent présentes. Les habitudes
alimentaires ont certainement évolué mais avec une
prédominance à la consommation de l'arachide et du manioc. Au
niveau de la danse, le bol qui est leur danse traditionnelle est de moins en
moins pratiqué au profit des rythmes musicaux modernes.
Au niveau des croyances, la création du monde repose
sur un être surnaturel appelé Nkùmbièm
(créateur des choses) qui aurait à sa guise crée le
monde et tout ce qui le peuple afin que l'humanité vive dans l'abondance
et la plénitude. En dehors de la considération
réservée aux défunts, les pratiques du fétichisme
pour les cas de maladie et de sorcellerie, l'aspect religieux actuel semble
s'arrimer aux églises modernes. Sur ce volet, ils sont en majoritaire
protestants avec une prédominance d'appartenance à l'Eglise
Presbytérienne Camerounaise en proie aux multiples divisions
internes.
Leurs activités principales sont liées à
l'agriculture itinérante sur brûlis, la pêche, le braconnage
et l'usage de la pharmacopée. Mais la dégradation du tissu
économique social encourage les Boulu à l'exploitation de la
forêt avec la coupe et le sciage dubois anarchique et illégal.
P. I-2-2-2. Les Ewondo
Il est question de présenter ce peuple à travers
son histoire migratoire vers Lolodorf, sa localisation actuelle, sa culture et
son utilisation de la forêt.
Les Ewondo sont essentiellement localisés dans les
villages Bibondi,Bikoka, Madong I,Madong II et Ngoyang. Les sources
d'informations mentionnent que les Ewondo ne sont pas originellement
autochtones de Lolodorf. Ceux de Bibondi viendraient d'Evuzok et auraient
trouvé des Mbvumbo accueillants qui leur donnèrent cette
hospitalité en leur offrant les terres afin de s'installer. S'agissant
de ceux du village Bikoka, ils viendraient tous de Yaoundé et de
Mbalmayo en passant par Ngomedjap à la fuite de guerres tribales
fréquemment vécues dans leur zone d'origine, ceux-ci auraient
pris le chemin vers la forêt du Sud à la recherche des espaces
vitaux. Ils auraient trouvé les Mbvumbo hospitaliers qui leur ont
cédé une partie de leurs terres et des alliances de
reconnaissance et des pactes de non-agression auraient été
signés. Pour ceux de Madong I et II, ils seraient venus de Ngomedjap
fuyant la sorcellerie et autres guerres tribales qui devenaient très
fréquentes. Certains auraient atterri au niveau du mont Mill avant de
s'installer près des Mbvumbo accueillants et hospitaliers. Cette
installation fait aussi suite à des pactes de non-agression et à
la protection des uns en cas d'attaque. Ceux de Ngoyang aussi seraient venus de
Yaoundé et de Mbalmayo à la recherche des espaces vitaux loin des
guerres tribales qui sévissaient dans leur site d'origine. Ils
trouvèrent que les Bassa avaient été chassé sur ce
site par les Mbvumbo.
Somme toute, les Ewondo de Lolodorf sont originaires de
Yaoundé, Mbalmayo et Ngomedjap. L'itinéraire suivi pour ces
multiples déplacements serait partie de Yaoundé, Mbalmayo,
Ngomedjap, Mvengue avant de se disperser à Lolodorf, Bipindi, Evuzok et
Fifinda. Cette route s'appelle Ndzong Minkan.Les
clans que l'on trouve sont les Mvog fouda, Mvog tsoung Mballa, Tsinga,
Ngoué, Evuzok.... Ces mêmes clans sont localisés dans
plusieurs autres cantons Ewondo.
Q. I-2-2-2-1. La culture Ewondo et ses rapports à la
forêt
Il s'agit de faire une brève présentation de
quelques aspects de cette culture et ses rapports à la forêt.
C'est une société patrilinéaire
caractériséepar le principe gouvernant la transmission de la
parenté par le père. Le lien tracé par la parenté
est avant tout social. Cette société est composée des
clans (groupe de descendants de plusieurs lignages et au sein duquel tous les
membres se disent apparentés à partir d'un ancêtre unique
souvent mythique), des lignages (groupe de descendants dont les membres peuvent
définir leurs liens de parenté à partir d'un ancêtre
commun)
L'organisation sociale longtemps restée attachée
aux normes et valeurs culturelles d'origines, est de plus influencée par
la modernité et la diffusion des traits culturels des autres
communautés. L'éloignement de la culture d'origine a dont
participé aux emprunts culturels. Cependant, cette organisation sociale
reste sous la direction d'un chef entouré de quelques notables
chargés d'assurer la cohésion sociale et le bien-être des
personnes. L'exogamie est appliquée et l'inceste reste très
condamné. Les relations ego et oncle utérin restent aussi
important. Les habitudes alimentaires ont certainement évolué
mais avec une prédominance à la consommation de l'arachide et du
manioc. Au niveau des danses, les Ewondo continuent encore à
matérialiser cette différence avec les Mbvumbo avec la
célébration d'Abok Bokone « la danse
des morts » et l'utilisation des balafons.
En ce qui concerne les croyances, la création du monde
a été faite par un être surnaturel appelé
Nkomyopyéésii (créateur des cieux et de la
terre). Génie créateur cet être surnaturel aurait
créé à sa volonté le monde et tout ce qui le peuple
afin que l'humanité vive dans l'abondance et la plénitude. En
dehors de la considération réservée aux défunts,
les pratiques du fétichisme pour les cas de maladie et de sorcellerie,
l'aspect religieux actuel semble s'arrimer aux églises modernes. Sur ce
volet, ils sont à majoritaire catholique.
Leurs activités principales sont liées à
l'agriculture itinérante sur brûlis, la pêche, le braconnage
et l'usage de la pharmacopée. Mais la dégradation du tissu
économique social et politique encourage les Ewondo à
l'exploitation de la forêt avec le prélèvement des
écorces appelées esoket au sciage desbois.
R. I-2-2-3. Les Fang
En provenance du Nord du Gabon et de la Guinée
Equatoriale, les Fang nous dit-on seraient aussi à la recherche des
espaces vitaux moins hostiles. Ils sont arrivés à Lolodorf par
vagues et se seraient dispersés dans les villages actuels de Bibia,
Kaba, Mbikiliki, Ngovayang I, II, III. Ils auraient reçu ces terres des
Mbvumbo qui avaient chassé les Bassa au niveau de Ngovayang et
Mbikiliki.
S. I-2-2-3-1. La culture Fang et ses rapports à la
forêt
C'est une société patrilinéaire
caractériséepar le principe gouvernant la transmission de la
parenté par le père. Le lien tracé par la parenté
est avant tout social. Cette société est composée des
clans (groupe de descendants de plusieurs lignages et au sein duquel tous les
membres se disent apparentés à partir d'un ancêtre unique
souvent mythique), des lignages (groupe de descendants dont les membres peuvent
définir leurs liens de parenté à partir d'un ancêtre
commun)
Cette organisation sociale reste de moins en moins
attachée aux normes et valeurs culturelles ancestrales. Celle-ci
s'arrimede plus en plus à la modernité. Toutefois, cette
organisation sociale reste sous la direction d'un chef entouré de
quelques notables chargés d'assurer la cohésion sociale et le
bien-être des personnes. L'exogamie est appliquée et l'inceste
reste très condamné. Les relations ego et oncle utérin
demeurent présentes. On y trouve comme clan, les Yembvam, les
Yénang, les Essafane.
Les habitudes alimentaires évoluent mais avec une
préférence sur la consommation de la sauce aux amandes de la
mangue sauvage et de la banane plantain. Au niveau de la danse, les rythmes
musicaux modernes ont progressivement envahi le terrain.
La création du monde au niveau des croyances, repose
sur un être surnaturel appelé
Nkùmsiiyéébièm (créateur de la terre et
des choses) qui aurait à sa guise forgé le monde et tout ce
qui le peuple afin que l'humanité vive dans l'abondance et la
plénitude. En dehors de la considération réservée
aux défunts, les pratiques du fétichisme pour les cas de maladie
et de sorcellerie, l'aspect religieux actuel semble s'arrimer aux
églises modernes. Sur ce volet, ils sont repartis entre catholique et
protestant.
L'utilisation de la forêt est comme celle des autres
groupes axée sur l'agriculture, la pêche, la chasse, la
pharmacopée, le bois de chauffage. Les mêmes problèmes de
misère et de pauvreté qui frappent les populations rurales
obligent les Fang aussi à se retourner vers la forêt afin de
satisfaire leurs multiples besoins.
T. I-2-2-4. Les Mbvumbo
Les connaissances sur le peuplement Mbvumbo restent encore
scientifiquement moins éclairées. Il s'agit d'un grand ensemble
ethnique appelé Kwassio « Collecteurs
d'ivoire », composé des Mbvumbo, des Mabi, des Bissio et des
Makinà. Les premiers sont localisés au Cameroun et principalement
dans le département de l'Océan surtout vers sa partie Nord. Les
Mabi occupent la zone côtière de L'océan atlantique. Les
Bissio sont présents en Guinée Equatoriale et les Makinà
au Sud du Gabon. Les Mabi/Mbvumbo seraient partis d'Egypte en passant par le
Soudan, l'Ethiopie en Afrique orientale. Ce parcours migratoire se
vérifie en ce sens qu'on retrouve au Rwanda et au Burundi des peuples
qui ont le même parlé que les Mabi/Mbvumbo. Ensuite, ils sont
arrivés dans la zone des grands lacs pour atteindre plus tard le sud de
la république centrafricaine, le Congo, le Gabon et la Guinée
Equatoriale.
Selon BOUH MA SITNA (2003), L'histoire migratoire des
Mbvumbo est divisée en deux grands itinéraires. Le premier axe
prend son point de départ à Massamena. Les Mbvumbo seraient
venues de Somalomo, localité située entre Zoetélé
et Massamena. Ils ont ensuite bifurqué par Ngoulémakong qui est
le territoire des Béné. Ils passèrent un certain temps et
le pacte de non-agression signé avec les Béné viendrait
de cette époque. Une autre branche des Mbvumbo serait venue de Djoum et
aurait remonté vers le village du grand chef Pygmée Lima. Cette
branche a marqué un temps d'arrêt à cet
endroit(...)Un jour les Boulou déferlent le village de Lima et
s'inquiétèrent de la présence des Mbvumbo sur ces lieux.
Les Mbvumboleur auraient expliqué l'objet de leur présence et
ceux-ci intimèrent l'ordre aux Mbvumbo de vider les lieux dans les plus
brefs délais. Lorsque les Boulou revinrent plus tard pour faire la
guerre aux Mbvumbo, ils trouvèrent que ceux-ci avaient vidé les
lieux. A la question de savoir où étaient passés les
Mbvumbo, le Chef Pygmée Lima répondit qu'ils avaient simplement
quitté le camp. L'histoire prétend que c'est suite à cette
conversation que serait venu le nom Mékuk. Ce sont les Boulou
nouvellement installées qui donnèrent ce nom à ceux qui
venaient de fuir la guerre. Cette expression générique est encore
de nos jours utilisée par les Béné, les Boulou les Ewondo
voire même les Fang pour désigner les Mabi et les Mbvumbo. Fuyant
l'agresseur Boulou, les Mbvumbo sont allés du côté de
Ngoulémakong ; de là, ils sont descendus en biaisant par
Ebolowa pour se retrouver à Lolodorf en passant par Koumbizik. A partir
de cette base, plusieurs clans ont pris diverses directions. Certains d'entre
eux se sont installés à Lolodorf d'autres ont voulu
continué jusqu'à la cote à la recherche du sel. D'autres
se sont installés à Bikalla et à Bidjouka et durent faire
face à l'hostilité des Bakoko et des Bassa qui s'y étaient
premièrement installés dans cette localité. On y trouve
encore de nos jours des appellations bassa telle que Ngompbass à
Bikalla.
U. I-2-2-4-1.La culture Mbvumbo et ses rapports à la
forêt
Il s'agit de faire une présentation sommaire de
quelques éléments de la culture Mbvumbo et aussi de ressortir son
utilisation et ses rapports à la forêt.
C'est une société patrilinéaire
caractériséepar le principe gouvernant la transmission de la
consanguinité par le père. Le lien tracé par la
parenté est avant tout social. Cette société est
composée des clans (groupe de descendants de plusieurs lignages et au
sein duquel tous les membres se disent apparentés à partir d'un
ancêtre unique souvent mythique), des lignages (groupe de descendants
dont les membres peuvent définir leurs liens de parenté à
partir d'un ancêtre commun).
LesMbvumbo partagent comme plusieurs Bantu, les modes de vie
similaires fondés sur l'organisation de la société
traditionnelle, caractérisée par le regroupement en clan, en
lignage et en famille dans les villages. Les structures sociales
traditionnelles reposent essentiellement sur le système de
parenté et les classes d'âge.Les principales structures claniques
reposent surl'autorité d'un chef assisté des notables
chargés d'assurer la cohésion sociale et le bien-être des
personnes. La famille est la plus petite cellule du clan. Elle englobe outre le
père, la mère et les enfants, les grands parents, les
arrières grands parents et parfois des personnes n'ayant aucun lien de
consanguinité avec les membres de cette famille. Chacun dans ce groupe a
un rôle bien déterminé qui lui confère un statut au
sein de son groupe d'appartenance.
Certains clans ont des noms totémiques
accompagnés de symboles. Chez les Samal par exemple il est interdit de
consommer la panthère parce qu'un mythe révèle qu'une
fille Samal aurait accouché d'une panthère. Chez les Nti leurs
filles respectent l'interdit sur la consommation du rat. La règle de
l'exogamie qui dispose qu'on ne se marie pas à l'intérieur de son
clan, la responsabilité collective et surtout la nomenclature
classificatoire sont autant d'éléments qui harmonisent la
structure sociale chez les Mbvumbo. Il est aussi observé quelques cas de
lévirat et de sororat.L'inceste, relation sexuelle prohibée entre
individus apparentés à un degré qui interdit leur union ou
appartenant à un groupe à l'intérieur duquel toute
relation sexuelle ou tout mariage est fortement déconseillé et
condamné. De nos jours la polygynieofficielle est de moins en moins
pratiquée.L'un des éléments fondamentaux du système
de parenté chez les Mbvumbo est la relation ego-oncle utérin.Les
Mbvumbo sont repartis en plusieurs clans. Mais les plus importants
numériquement sont les Biwandi et les Nti.
Sur le plan alimentaire, le plat traditionnel des Mbvumbo est
le BikuandébiiNdhuahnàsuassàtsir, une
sauce des amandes mélangée aux bananes plantain avec une viande
boucanée.
Le N'zongBidéequi a toujours été
la danse par excellence des Mbvumbo est entrain de céder place aux
rythmes musicaux actuels.En bref comme plusieurs ethnies Bantu, les Mbvumbo
partagent certains aspects socioculturels avec certaines différences.
En ce qui concerne les croyances, les Mbvumbo
représentent la création du monde par un dieu surnaturelle
appelé Nkùmbur (créateur des
hommes). Génie créateur cet être
surnaturel aurait créé à sa volonté le monde et
tout ce qui le peuple. En dehors de la considération
réservée aux défunts, les pratiques du fétichisme
pour les cas de maladie et de sorcellerie, l'aspect religieux actuel semble
s'arrimer aux églises modernes. Cependant les Mbvumbo auraient
récusé la volonté des missionnaires américains qui
imposaient une évangélisation en langue Boulou depuis les
années 1900. Ils se seraient révolté et auraient
tourné le dos à la mission presbytérienne
américaine. Suite à ces éclats de voix, la
Société des Nations a donné droit aux Mbvumbo d'adorer
Dieu en leur langue, d'où la création de l'église
culturelle Mbvumbo en 1934 qui est devenue Eglise Protestante Africaine.
Sur le plan de l'occupation et de l'exploitation de
l'environnement, la forêt est d'abord pour eux une source de vie. Les
activités sont basées sur l'agriculture itinérante sur
brûlis, la pêche, la chasse mais également pour la
pharmacopée et plusieurs rites d'initiation. Mais suite à la
dégradation du tissu socioculturel et politique, les Mbvumbo sont
activement entrés dans l'exploitation anarchique et illégale de
la forêt.
V. I-2-2-5.Les Nkola/Ngyéli
Il s'agit d'un bref aperçu sur cette
société composée des Nkola et Ngyéli. Nous allons
nous focaliser sur leur origine migratoire, leur culture et leurs rapports
à la forêt.
La littérature écrite et orale mentionnent que
les Nkola/Ngyéli présents à Lolodorf auraient
approximativement fait le même parcours que leursmaitresMbvumbo. Ils
étaient utilisés comme des éclaireurs chargés de
localiser des espaces où l'occupation humaine n'était pas encore
signalée. Ils sont composés des Nkola et des Ngyéli. La
différence entre ces deux groupes est liée au partage
effectué lors des compensations légalisant la signature des
pactes de non-agression entre les Bassa et les Mbvumbo. Les Nkola se seraient
rapprochés des Bassa et les Ngyéli des Mbvumbo. A Lolodorf, on
trouve les campements Bakola dans les villages près des Bassa. Il s'agit
principalement des villages Nkouambpoer I, II et Ngoyang. Avec les campements
de Nfangla, Nkuongio, Nkogàpagu, Nvundé, Meh, Nkuliganga, Mimbiti
I et II, Mougo Bandé, Ngomanguelé, Nkoapoudzé, Nseh
yélé, Oding odoh, Yom, Matsindi I et II. Quant aux
campementsBagyéli, ils sont localisés dans les villages de
Mbango, Bikui, Mill, Ngovayang et Mbikiliki avec des hameaux tels que :
Malang-si, Ngongo I et II, Nabozouendi I, II et III, Nabopouama, Madougou
Mbier.Les clans qu'on y trouve sont fonctions des ceux des Bantu
d'appartenance. On peut alors trouver les Samal, les Biwandi, les
Biwyélé, les Sansiang, les Nti, les Sabally.
W. I-2-2-5-1.La culture Nkola/Ngyéli et ses rapports
à la forêt
C'est une société patrilinéaire
caractériséepar le principe gouvernant la transmission de la
consanguinité par le père. Le lien tracé par la
parenté est avant tout social. Cette société est
composée des clans (groupe de descendants de plusieurs lignages et au
sein duquel tous les membres se disent apparentés à partir d'un
ancêtre unique souvent mythique), des lignages (groupe de descendants
dont les membres peuvent définir leurs liens de parenté à
partir d'un ancêtre commun). L'exogamie est le système de mariage
recommandé. L'inceste, relation sexuelle prohibée entre individus
apparentés à un degré qui interdit leur union ou
appartenant à un groupe à l'intérieur duquel toute
relation sexuelle ou tout mariage est fortement déconseillé et
condamné. Chez eux, la responsabilité de la famille ne repose pas
essentiellement sur l'autorité d'un chef suprême comme chez les
Bantu. Il a essentiellement un rôle apparent chargé avec d'autres
ainés de gérer les antécédents qui peuvent survenir
entre les individus. La gestion du pouvoir est essentiellement
gérontocratique.
S'agissant de la religion, les Nkola/Ngyéli sont
solidement liés à leurs croyances ancestrales. Ils mentionnent
qu'un être surnaturel doté de toutes forces et énergies
aurait créé la terre, le ciel, les eaux, la forêt et
l'homme. Cet être surnaturel est appelé
nkômbàmamû. Pour eux, c'est cet esprit qui oriente
et dirige la vie de toute chose. Au-delà de cette conception s'ajoute
plusieurs autres dieux selon les différents aspects les plus importants
de la vie. C'est pour cela qu'ils font recours à ces esprits pour les
cas de maladie, de sorcellerie, de chasse, de protection, de
malédiction, de mort, d'amour. Malgré
l'évangélisation organisée par certaines églises
modernes, auprès des Nkola/Ngyéli, ceux-ci ne manifestent pas un
grand intérêt à ces mouvements religieux.
Pour leurs activités de survie, elles sont
majoritairement basées etliées à l'utilisation durable de
la forêt. Autrefois soudés à la forêt qui
offraittout, Ils commencent à ressentir les torts causés à
la forêt et font face à des difficultés significatives
impactant sur leur mode de vie.
X. I-2-2-6.Les autres communautés
Il est question de faire une présentation sommaire des
communautés allochtones de Lolodorf. Cette description touchera
essentiellement les volets migratoires, les raisons de leur présence et
leur utilisation de la forêt.
L'hospitalité des communautés autochtones de
Lolodorf, fait de cette localité une zone d'accueil par excellence pour
de multiples étrangers. On trouve donc des ressortissants de la
région de l'ouest communément appelés
Bamiléké. Ils sont regroupés en une communauté
placée sous l'autorité du chef du village Bikui. Leurs
principales activités sont basées sur la commercialisation des
produits de consommation. Véritables acteurs économiques à
Lolodorf, ils s'investissent dans tous les secteurs susceptibles de rapporter
du bénéfice. Échoppe, taxi, moto-taxi, débit de
boisson, mécanique, call-box, achat de terre, quincaillerie... bref tous
les secteurs producteurs sont le domaine de prédilection des
ressortissants de l'ouest présents à Lolodorf.
Solidement ancrés à leur culture, ils la
perpétuent toujours mais le voisinage directe ayant effet sur eux, il
très fréquent de réaliser qu'ils s'expriment en Boulou, en
Ewondo, en Fang et en Kwassio. La célébration du culte des
ancêtres ne se pratique jamais à Lolodorf, la grande partie de
leurs défuntsest convoyée à l'Ouest pour les
cérémonies funèbres.
Au niveau de l'occupation des terres, ils ont acquis leurs
espaces vitaux par achat auprès des autochtones. S'agissant de
l'exploitation forestière ils deviennent de plus engagés.
Disposant de ressources financières, ils créent des entreprises
illégales de coupe de bois. Des minables sommes d'argent sont
proposées aux autochtones appauvris par la misère. Ce
phénomène fait donc de ces gens de grands magnats de la
déforestation à Lolodorf.
De plus en plus une communauté anglophone est aussi
présente à Lolodorf. Les activités économiques et
l'exploitation anarchique de la forêt font l'objet de leur
séjour.
On trouve également à Lolodorf une petite
famille ayant des origines grecques. A l'époque, ils ont
évolué sur le transport et aurait formé toute une
génération des chauffeurs. Ensuite se seraient reconvertis
à la gestion d'un débit de boisson et à
l'électronique. De nos jours cette famille partage son quotidien sur les
petites activités économiques. Sur le plan culturel cette famille
métissée n'a aucun lien avec la culture occidentale. Seule la
couleur de la peau essaye de les distinguer des autres peuples de Lolodorf. Ils
ont un mélange de culture tirés des Mbvumbo et des Fang.
Leurs activités sur l'exploitation forestière
sont aussi signalées. En dehors cette famille on trouve aussi une
poignée des expatriés de nationalité comorienne qui font
sur la commercialisation des produits de consommation.
Y. I-2-3. Aspects administratifs
Cette partie est uniquement consacrée à
l'organisation administrative décentralisée et aux chefferies
traditionnelles de notre zone d'étude.
Lolodorf a longtemps été une unité
administrative. Les Allemands furent d'abord les tous premiers à assurer
l'administration à Lolodorf. Des Autorités des colonies
françaises après la première guerre mondiale aux
administrateurs civils camerounais, cette circonscription a déjà
connu au total 90 Chefs de Terres.
Lolodorf compte 28 villages regroupés en chefferies de
troisième degré divisés en 03 groupements de 2e
degré correspondant aux quatre grands groupes ethniques que sont les
Ewondo, les Fang-Boulou, les Mbvumbo et les Nkola/Ngyéli. A ces ethnies
s'ajoutent 23 hameaux Nkola/Ngyéli dispersés essentiellement dans
les villages Bikui, Bingambo, Mbango, Mbikiliki, Mill, Ngovayang, Ngoyang,
Nkouambpoer I et II. On y trouve aussi des communautés originaires de
l'Ouest du Nord, du Nord-Ouest et quelques occidentaux.
Toutes ces ethnies entretiennent des relations fraternelles et
collaborent pacifiquement sauf quelques guerres froides constatées
pendant les périodes électorales.
Lolodorf en tant que chef-lieu d'arrondissement a une
sous-préfecture, un Commissariat spécial, un Commissariat de
sécurité publique et une Brigade de gendarmerie. Ces
unités administratives concourent à la gestion des affaires
courantes, à la mise en application des prérogatives
étatiques prônées par l'administration centrale et au
rayonnement de l'ordre social et politique.
Toutefois, une délégation d'arrondissement en
charge des questions forestières essaie tant bien que mal, de
réguler l'exploitation forestière qui bat son plein. En outre
l'on trouve également plusieurs autres services publics auxquels les
objectifs s'inscrivent dans les cahiers de charge définis par
l'administration centrale. Cependant, la Commune d'arrondissement qui
reçoit de l'Etat, le transfert des compétences
particulières et les moyens appropriés, est un vrai outil de
développement local auquel l'objectif majeur est de promouvoir une
amélioration des conditions de vie des communautés dans une
approche participative et durable.
Z. I-2-3-1. Education
Il s'agit principalement de présenter le volet
éducatif de notre zone de recherche
Le secteur éducatif à Lolodorf est
considérable en infrastructure mais reste moins impressionnant en
ressources humaines et matériels didactiques. Les enseignants de
formation en si peu nombre, dotés de la science pédagogique ont
du mal à assurer l'éducation et l'encadrement des
élèves. Les dirigeants de ces établissements se trouvent
dans l'obligation de recruter des vacataires d'une compétence parfois
incertaine. Le niveau des élèves et les résultats lors des
examens officiels ne peuvent que témoigner de cet état de chose.
Par ailleurs, on note l'existence des collèges d'enseignement secondaire
que l'on pourrait qualifier de fictif car n'ayant jamais fonctionné
depuis leur création.
Il revient ici noter que la distribution des centres de
formation et autre institution d'éducation serait devenue l'apanage des
hommes influents et autres grands politiciens qui très souvent sans
s'imprégner des réalités socioculturelles d'une
localité décident d'allouer une institution de formation;
d'où les multiples difficultés auxquelles ces institutions font
face par rapport à leur fonctionnement et aux effectifs qui chaque
année tendent vers une régression inquiétante dans les
villages en proie à l'exode rurale. Par ailleurs le problème de
la gratuité des frais scolaires au niveau de l'enseignement primaire
public décrété par le Président de la
république, demeure dans un flou dans la mesure où les frais
exigés par les associations des parents d'élèves vont
grandissant chaque année.
Toutefois, le phénomène de la pauvreté
observé à Lolodorf, et l'exode rural des jeunes entraînent
la déperdition scolaire et par conséquent est un réel
obstacle à la pérennisation de la classe intellectuelle dans
cette localité. Certains parents aussi insoucieux du devenir de leurs
enfants, tendent à abandonner ceux-ci à leur propre sort,
d'où la prolifération des déviances telles que la
consommation de l'alcool frelatés vendus dans les sachets, de la drogue
et la violence qui est devenue leur seul moyen de résolution des
conflits.
Pour l'éducation des enfants Nkola/Ngyéli,
l'école de Ngoyang offre avec l'appui d'une ONG, les moyens
nécessaires pour ce travail. Ainsi, on peut trouver plusieurs enfants
Nkola/Ngyéli de Lolodorf dans cet internat.
Cependant, les écoles d'enseignement primaire de Mill,
de Nkouambpoer II, de Ngoyang, de Ngovayang qui éduquent les enfants
Nkola/Ngyéli, font face au phénomène de déperdition
scolaire. Ce phénomène est un indicateur inquiétant
à l'émancipation intellectuelle des jeunes Nkola/Ngyéli.
La répartition par genre fait mention de plus de garçons que des
filles dans les salles de classe. Les filles disparaissent
généralement pendant la saison de cueillette. Par contre à
ce moment, les pères ne sont pas très proches de leur fils. Ils
préfèrent se faire accompagner par leurs épouses pour
mener leurs activités cynégétiques.
AA. I-2-3-2. Santé
Lolodorf connait une moyenne dotation en quantité des
infrastructures sanitaires reparties dans quelques villages. Ce secteur
comprend un hôpital de district, deux centres de santé
intégré, deux centre de santé confessionnelle. Ce secteur
fait face à plusieurs difficultés liées au fonctionnement
de ces institutions. De plus en plus l'on a du mal à comprendre les
motivations et les raisons qui poussent les populations à opter pour les
soins auprès des infirmiers de rue. Par ailleurs l'ethnomédecine
est fortement présente à Lolodorf. On trouve deux femmes
guérisseurs Mbvumbo dans les villages Bingambo et Nkouambpoer II. Les
Nkola/Ngyéli sont également les grands maîtres de cette
médecine. On peut trouver dans plusieurs campements des
guérisseurs. Les campements de références sont ceux de
Ngomanguelé, Ngouonguio, Nabozouendi. Par ailleurs, certains homme
d'église tendent bien que mal à procurer des soins de
santé à travers des séances de prières et de
délivrances. C'est très souvent le dernier recours face à
la persistance de la maladie.
BB. I-2-3-3.Economie
Il s'agit dans cette partie de présenter et en
même temps de décrire les activités économiques dans
notre zone de recherche.
La forte densité des terres cultivables est un facteur
favorable au développement de l'agriculture à Lolodorf. Cette
activité est la principale dans l'ensemble des villages de Lolodorf.
Mais de plus en plus, les méthodes archaïques et traditionnelles
restent d'actualité : pas de mécanisation, travail manuel,
agriculture itinérante sur brûlis, matériel
végétal douteux, faible application des techniques de lutte
phytosanitaire, quasi absence de fertilisation des sols... justifiant ainsi les
résultats de production faible, et du coût des produits agricoles
très élevés.
Les cultures vivrières aussi bien que les cultures de
rente et les cultures fruitières sont décroissantes. Les produits
vivriers sont principalement destinés à l'autoconsommation, les
quelques surplus sont commercialisés.
Les cultures de rente dont la culture principale est le cacao
sont destinées exclusivement à la commercialisation. On note une
orientation de plus en plus poussée des producteurs vers le palmier
à huile.
Les vergers d'arbres fruitiers sont quasi inexistants, les
arbres poussent généralement de manière spontanée
ou sont plantés autour des maisons.
Toutefois, on retrouve quelques associations des agriculteurs
regroupées en Groupe d'Initiative Commune(GIC).
De manière générale, le secteur agricole
connait beaucoup de problèmes qui limitent fortement ses
performances.
CC. I-2-3-3-1. Elevage et
pêche
Le système d'élevage dominant est
l'élevage traditionnel en divagation. Les chèvres, les moutons et
les porcs sont les principaux animaux élevés. A ceux-ci
s'ajoutent une petite activité saisonnière d'élevage des
poulets de chair à faible production. Dans ce système
d'élevage extensif, très peu de soins sont accordés aux
animaux réduisant ainsi leur rentabilité. Par conséquent,
la production est très faible et est essentiellement destinée
à l'autoconsommation. A cause des dégâts causés sur
les champs principalement pas les porcs et les chèvres en divagation,
cette activité est source de conflits dans les villages. Par ailleurs
on note un élevage des cheptels bovins à Bikoka. La pisciculture
quant à est très peu développée avec quelques
étangs dans les villages Bingambo, Kaba et Ngovayang II.
DD. I-2-3-3-2. Chasse
Elle est pratiquée dans les forêts de Lolodorf.
C'est une activité secondaire dont les produits sont destinés
d'une part à l'autoconsommation, mais surtout de plus en plus à
la commercialisation. Elle est aussi pratiquée par des braconniers ne
disposant d'aucune autorisation.Les outils et les techniques de l'art sont
demeurées traditionnelles avec l'usage des armes à feu la plus
part achetées dans l'illégalité, les pièges, la
chasse à courre très pratiquée par les
Nkola/Ngyéli.
EE. I-2-3-3-3.Exploitation
forestière
Lolodorf compte deux unités forestières
d'aménagements : L'UFA 00 001 et L'UFA 09 027.Par
ailleurs on trouve deux forets communautaires. Le deux UFA font l'objet d'une
exploitation industrielle de bois. A côté de cette exploitation
peu contrôlée, existe une forte activité de coupe sauvage
de bois. Les conséquences de cette exploitation sont nombreuses.
FF. I-2-3-3-4. Artisanat
Malgré d'énormes potentialités locales,
l'artisanat est très faiblement développé à
Lolodorf. Cette activité concerne principalement la vannerie, la
fabrication des pirogues, balafons, tamtams et la menuiserie. S'agissant du
métier du bois, quelques fabricants des meubles évoluent
traditionnellement dans ce domaine pour une clientèle locale ;
toutefois la présence d'un marché de bois étant
incertaine, le marché noir reste le seul moyen de se procurer du bois.
Quelques Nkola/Ngyéli essayent encore de pérenniser l'artisanat
avec la fabrication des hottes.
GG. I-2-3-3-5. Autres activités
commerciales
Le commerce est moyennement développé à
Lolodorf et concerne les produits très variés. Il s'agit
essentiellement des produits manufacturés en provenance des grandes
métropoles que sont Douala et Yaoundé. Nous avons entre autre,
les boites de conserve, les produits brassicoles, la friperie, du poisson, des
ustensiles de cuisines. Ces activités sont pratiquées en
majoritaire par les ressortissants des régions de l'Ouest et du
Nord-Ouest. Par ailleurs il existe des boulangeries aux techniques de
production traditionnelles dirigées par ces ressortissants. On note
aussi la prolifération des produits pharmaceutiques vendus sur les
abords de route.
En dehors des activités économiques ci-dessus
énumérées, plusieurs personnes occupent le secteur
informel. Ces activités regroupent les Call boxeurs, les Moto taximen,
les cordonniers, les coiffeurs, les vendeurs à la sauvette, les
pousseurs, les menuisiers, les mécaniciens...
HH. I-3.RAPPORTS
ENTRE LES CADRES PHYSIQUE, HUMAIN ET LE SUJET
Il s'agit de présenter les rapports qui existent entre
les milieux physique et humain de notre site d'étude et la recherche
que nous menons.
II. I-3-1. Entre le cadre physique et le
sujet
Les forêts du bassin du Congo hébergent une
biodiversité extraordinaire avec un niveau très
élevé d'espèces endémiques. Cette richesse fait des
forêts, un lieu de compétition ardue au niveau de son
exploitation.Selon BILLAND (2012),les forêts situées
près des côtes du Congo abritent la plus grande diversité
d'espèces.
Pour le massif forestier de Lolodorf, c'estun réservoir
génétique unique, notamment pour les espèces
végétales bénéficiant d'un important potentiel pour
les activitésmédicinales et commerciales. Cet environnement
étant riche en couverture végétale, regorge des essences
de grandes qualités que l'on peut trouver dans une forêt
équatoriale. L'existence de ces essences fait de Lolodorf, une cible
particulière pour l'exploitation forestière.Sa proximité
avec l'océan atlantique en est également une raison favorable
à la déforestation au niveau de l'écoulement des produits
vers les pays étrangers.Malheureusement, cette exploitation qui sur
papier est réglementée, est loin de protéger
continuellement la vie des populations qui y
résident.L'amélioration du réseau routier a aussi un
rapport directà la déforestation dans la mesure où les
produits issus de ce phénomène parviennent facilement à
être écoulés vers les centres commerciaux. Par ailleurs,
la construction des scieries au niveau local et la proximité avec celles
construites à Eséka ne peuvent qu'être un atoutàce
phénomène. Ainsi, au-delà dela richesse que regorge la
forêt de Lolodorf, sa proximité avec la mer, et
l'amélioration du réseau routier sont autant des facteurs qui
rendent propice cette déforestation.
I-3-2. Entre le cadre humain et le sujet.
La diversité des communautés présentes
à Lolodorf expliquent au mieux l'occupation et l'utilisation de la
forêt que chacune essaie de mettre sur pieds.L'activité principale
de ces communautés étant basée sur l'agriculture
itinérante sur brûlis, celle-ci a un rapport direct à la
déforestation dans la mesureoù les espaces considérables
sont défrichés et abattus puis brulés pour les travaux
champêtres. De plus en plus, la dégradation du tissu
socioéconomique, politique et culturelle constitue une réelle
source à la déforestation. La pauvreté et la misère
qui spolient les populations autochtones font de ces dernières des
acteurs favorables à la déforestation. Incapables de
résoudre leurs multiples difficultés, ils sont obligés de
se retourner vers la forêt pour survivre.Les Nkola/Ngyéli
longtemps restés en étroite dépendance à la
forêt, l'ont toujours exploité de façon durable. Mais de
nos jours, les Mbvumbo, les Ewondo, les Fang-Boulou sont entrés dans
l'exploitation anarchique de la forêt créant ainsi des torts aux
Nkola/Ngyéli. En outre, les exploitants forestiers venant d'autres
origines socioculturelles, ont développé des travaux
d'exploitation insoucieux de l'avenir des communautés
Nkola/Ngyéli.Par ailleurs la présence de plus en plus massive de
ces personnes pour le transport des planches sciées est un atout
à la déforestation.
Compte tenu de la situation inhérente aux
interrelations entre les communautés présentes à Lolodorf
et la forêt, et en se focalisant sur la réalité
socioculturelle dans notre milieu d'étude, la forêt apparait comme
l'ultime solution à tout problème de recherche de
bien-être. Cependant, l'environnement ayant une influence sur l'humain,
il en ressort que la dégradation de celle-ci cause un changement sur ses
modes de vie. Ainsi, la forêt qui a toujours servi d'environnement vital
naturel aux Nkola/Ngyéli de Lolodorf a longtemps assuré leur
survie et développé en eux des modes de vie propres à cet
environnement.Mais aujourd'hui la déforestation touche les parties les
plus reculées de l'environnement vital des Nkola/Ngyéli de
Lolodorf.Par conséquent, un changement est observé au niveau de
leurs modes de vie et impulse des dynamiques socioculturelles de plusieurs
ordres.
CHAPITRE II :
Ce chapitre vise à présenter les
précisions terminologiques des conceptsclés de notre sujet
à savoir : la déforestation, les dynamiques
socioculturelles, les Nkola/Ngyéli, l'anthropologie et le
développement. Outre ces délimitations, il passera en revue
chacune des notions suivantes: l'écologie, les théories
écologiques, l'environnement, les Pygmées, le
développement, les théories du développement et les modes
d'expression du développement. L'objectif escompté étant
de montrer les limites de notre revue de la littérature afin de faire
ressortir l'originalité de notre travail.
II-1. Approches définitionnelles
Littéralement, la forêt est un vaste terrain
où sont plantés les arbres.Selon BERTRAND(1992), la
forêt est le repère des esprits et le support des
représentations mythiques collectives. La forêt est symbole de
refuge, de protection et de perdition en même temps. C'est le royaume du
diable et de la liberté. Elle est un peu partout un symbole de
connaissances, un lieu d'initiation, on s'y perd pour se retrouver, on y renait
adulte, chasseur ou shaman.
Pour les humains, la nature en général et la
forêt en particulier, ne sont pas seulement des réservoirs de
ressources pour la satisfaction des besoins matériels. La forêt et
les arbres sont ainsi symboles de transformation et de renouvellement, ils sont
des métaphores d'immortalité, de fécondité, de
renaissance, de régulation parfaite et d'harmonie originelle. Le
matériau bois est « vivant » même si l'arbre est mort,
les cercueils en bois sont parfois la matrice pour une autre naissance, pour
l'après-vie
Somme toute, la forêt est un milieu de culture et de vie
sociale. Elle est utile à la formation de l'être et de la
personnalité des populations semi-nomades. Elle leur donne tout : elle
nourrit, soigne, habille et protège.
Ainsi suite aux multiples torts permanents auxquels la
forêt fait face depuis des décennies, le phénomène
de la déforestation est progressivement en train de s'accroitre à
une vitesse inquiétante aux périls des communautés qui en
dépendent. Qu'est-ce que la déforestation ?
La déforestation est synonyme de déboisement,
c'est à dire l'action qui consiste à vider la forêt de son
bois. Cette définition mécaniste et simplificatrice souligne le
caractère imprécis du concept. Les chercheurs qui étudient
la déforestation en milieu tropical privilégient tantôt les
aspects purement écologiques (LENONARD et OSWALD, 1996 ; ROUSSEL,
1999 qui parle tantôt agro-écologiques, VERDEAUX et ALPHA, 1999
qui mentionnent une approche socio-historique, FAUROUX, 2000 ; MOIZO,
2000 ; et enfin MICHON et BOUAMRANE, 2000).
Pour les agro-écologues et les ethnobotanistes, la
déforestation est comme un processus complexe d'enrichissement
végétal et de succession culturale alternant couverts forestiers
et cultures vivrières associées (DOUNIAS, 1996 ; MICHON et
al. 2000 ; Emperaire et LESCURE, 2000).
Pour PUIG (2001), les écologues considèrent
la déforestation comme une diminution ou perte de biodiversité
forestière. Elle correspond au passage du couvert végétal
d'un état « naturel » à un état
artificialisé pouvant se traduire par la perturbation du fonctionnement
de l'écosystème.
Du point de vue pratique, les experts et les organismes
internationaux, intéressés surtout par l'aspect quantitatif,
définissent la déforestation comme étant la transformation
ou la conversion des forêts en d'autres types de couvert,
désormais plus ou moins dépourvus de végétation
ligneuse. Impulsée par l'accroissement démographique, la
déforestation en milieu tropical correspondrait en ce sens au
défrichement progressif de la forêt et à son remplacement
par les champs, les villages, les pâturages, les villes, les
aménagements hydriques, les infrastructures routières et les
autres formes d'utilisation anthropique de l'espace.
Pour la FAO (2001), par exemple, la déforestation
implique la disparition durable ou permanente du couvert forestier ainsi que le
passage à une autre utilisation des terres (...). Elle inclut aussi les
cas où la surexploitation et la modification de l'environnement
affectent la forêt de façon telle qu'elle ne peut maintenir un
couvert arboré dépassant le seuil de 10 pour cent ».
Toutefois, cet organisme précise que le terme « exclut
spécifiquement les zones où les arbres ont été
enlevés par exemple pour en exploiter le bois et où la
forêt devrait se régénérer soit naturellement, soit
avec l'aide de mesures sylvicoles ».
La variété des acceptions que recouvre le terme
déforestation, et donc l'imprécision de son contenu
sémantique, appelle à une grande prudence dans l'emploi de cette
expression. Cette situation souligne la difficulté qu'il y a à
trouver une définition synthétique, car la réalité
géographique et multidisciplinaire exprimée par le concept peut
être différente d'un lieu à un autre, ou d'une discipline
à une autre et très hétérogène dans le
même espace.
Dans le cadre de notre thématique, il apparait que la
déforestation est un phénomène qui s'effectue dans un
souci de recherche du développement. Mais cependant, elle extermine les
zones de vie naturelle des Nkola/Ngyéli. Toutefois, en tant que variable
indépendante, la déforestation a pour variables
intermédiaires l'appauvrissement de la biodiversité dans le
massif forestier de Lolodorf. Les dynamiques socioculturelles et les nouveaux
modes de vie chez ces peuples s'expriment ici en tant que variable
dépendante à ce phénomène. Il revient donc
d'affirmer que la déforestation repose sur la pression
démographique, l'intensification des pratiques agropastorales,
l'expansion de l'industrie minière ou encore la multiplication des
pratiques illégales.
Au regard des approches définitionnelles ci-dessus
évoquées, il en ressort que la déforestation est un
phénomène qui bien que s'effectuant dans un souci de recherche de
bien-être, dégrade et appauvrit aussi considérablement
l'environnement notamment sa biodiversité. Ses conséquences
s'expriment au niveau des changements constatés sur la culture
desNkola/Ngyéli.
Par dynamiques socioculturelles, il est question du
changement, de l'évolution à la transformation et aux mutations
qui interviennent sur les aspects socioculturels et impulsent des nouveaux
modes de vie au sein d'une communauté, d'un groupe humain. C'est un
processus par lequel l'ordre existant d'une société,
c'est-à-dire sa culture sociale, spirituelle et matérielle, passe
d'un type à un autre. Les dynamiques socioculturelles englobent donc les
processus plus ou moins rapides de changements dans la constitution politique
d'une société; dans ses institutions intérieures et ses
méthodes de colonisation territoriale; dans ses croyances et ses
méthodes de connaissance; dans son instruction et ses lois; de
même qu'en ce qui concerne ses outils essentiels et leur emploi, la
consommation des biens sur laquelle est fondée son économie
sociale. Cependant plusieurs auteurs ont développé des approches
différentes sur les dynamiques socioculturelles. Ces approches tiennent
compte des écoles de pensée et des courants
idéologiques.
Pour MALINOWSKI (1941), l'évolution culturelle est
un facteur permanent de civilisation humaine; elle se fait partout et en tous
temps. Elle peut être provoquée par des facteurs et des forces
jaillissant spontanément à l'intérieur de la
communauté, ou elle peut se produire au contact de cultures
différentes. Dans le premier cas, elle prend la forme d'une
évolution indépendante; dans le second, elle constitue le
processus qu'en anthropologie on appelle généralement
diffusion.
Dans le cadre de notre étude, les dynamiques
socioculturelles se matérialisent comme le processus de changement qui
s'opère au sein des communautés Nkola/Ngyéli. Ces
changements se matérialisent sur les aspects tant socioculturels. La
forêt qui a longtemps été moins exploitée est
aujourd'hui saccagée, pillée et détruite. La nature ayant
une influence sur l'homme, les dynamiques socioculturelles se présentent
comme une résultante face au phénomène de la
déforestation.
Le mot pygmée vient du grec pygmaios, haut d'une
coudée, qui désigne étymologiquement, un individu
appartenant à des populations spécifiques
caractérisées par leur petite taille, inférieure à
1,50 m de haut. Cette taille n'est pas liée au
nanisme, maladie due
à la mutation d'un gène, mais d'une adaptation morphologique au
milieu de la
forêt
équatoriale dans laquelle vivent ces populations. Ce terme englobe
les différents groupes ethniques disséminés le long de l'
équateur
dans de nombreux États de l'
Afrique actuelle, tels que
le
Burundi, le
Cameroun, le
Congo, le
Gabon, la République
Centrafricaine, la
République
démocratique du Congo, le
Rwanda, et l'
Ouganda.
Dans l'antiquité, les Grecs ont
appelé Pygmées des êtres, probablement fantastiques, hauts
d'environ 70 cm et vivant au Sud de l'Egypte ou aux alentours de l'
Inde.
Pline l'Ancien,
dans son Histoire naturelle, fait le récit d'une rencontre avec
ces Pygmées.
Aristote mentionne
l'existence de tels êtres, supposés habiter dans des grottes
souterraines. Pygmée était aussi une divinité que les
Carthaginois
représentaient à la proue de leurs navires pour effrayer leurs
ennemis.
Ce terme est également employé comme adjectif
pour définir certaines espèces animales
caractérisées par leur taille réduite comme le
manchot
pygmée, la
baleine
pygmée ou le
ouistiti
pygmée ou l'
hippopotame
pygmée. On trouve aussi les adjectifs : pygmoïde (en
anthropologie),
pygmiforme, ou pygméenne.
Par ailleurs, cette expression traduit le regard
dévalorisant que certaines personnes peuvent porter à l'endroit
des autres. Des propos dégradants tachés de mépris pour
valoriser leur supériorité vis-à-vis des autres sont le
plus souvent utilisés.
Pour les Nkola/Ngyéli, ce sont un des groupes des
êtres humains vivant de la chasse, de la cueillette et du ramassage dans
la forêt équatoriale. Selon MIMBOH (2000), les Pygmées
Bakola /Bagyéli sont des groupes des nomades habitant
principalement le Département de l'Océan qui compte six
Arrondissements : Akom II, Bipindi, Campo, Kribi, Lolodorf, Mvengue et le
District de Nyé'été. Cette région est
habitée par d'autres peuples tels que les Bassa, les Batanga, les
Boulou, les Ewondo, les Fang, les Mabéa, les Ngoumba. Cette
région est traversée de bout en bout par la forêt
équatoriale et connait un climat humide avec quatre saisons.
Dans le cadre de notre étude, les Nkola/Ngyéli
font mention de ces communautés qui ont pour habitat naturel la
forêt. Cette forêt est pour elles une source vitale inestimable car
leur survie en dépend. Cependant, les modes de vie anciens qu'on nous
présentait des Nkola/Ngyéli sont en perpétuel changement
suite à la déforestation. Il nous revient donc ici de
présenter les Nkola/Ngyéli comme des communautés en pleine
dynamiques socioculturelles suite au phénomène de
l'érosion de la biodiversité.
Le terme anthropologie vient de deux mots grecs,
anthrôpos, qui signifie homme (au sens générique),
et logia, qui signifie étude. Littéralement c'est
l'étude sur l'homme. scientifiquement, l'anthropologie est la branche
des
sciences humaines qui
étudie l'
être humain sous
tous ses aspects, à la fois physiques (
anatomiques,
morphologiques,
physiologiques,
évolutifs,
etc.) et
culturels (
socio-
religieux,
psychologiques,
géographiques,
etc.). Cette
discipline
vise particulièrement les faits spécifiques à l'humain par
rapport aux autres animaux (faits anthropologiques comme homo ou
anthrôpos) :
langages articulés et
figuratifs,
rites
funéraires,
politiques ou
magiques,
arts,
religions,
coutumes,
parenté,
habitats,
techniques corporelles,
instrumentales, de mémorisation, de
numération, de
représentations
spatiales et temporelles. Elle s'appuie notamment sur l'étude
comparative des différentes sociétés et ethnies
décrites par l'
ethnologie, et envisage
l'unicité de l'esprit humain à travers la diversité
culturelle.
Selon M. HERSKOVITS, (1950) l'anthropologie est un
discours sur l'homme, ses productions matérielles et
immatérielles, ses coutumes, ses traditions, sa culture au sens de mode
de vie globale d'un peuple. Il revient dont de dire que l'anthropologie en
tant que discipline scientifique est l'étude de l'homme dans sa
diversité culturelle.
S'inspirant des idées ci-dessus évoquées,
il en ressort que l'anthropologie du développement serait une science
humaine qui étudie les mécanismes et les stratégies que
chaque socioculture met en place dans sa recherche de bien-être, et dans
l'objectif de l'amélioration ses conditions de vie.
L'anthropologie du développement s'inscrit donc dans
notre thématique comme la vision du développement d'une
communauté donnée. Mais telle que la déforestation est
pratiquée dans le massif forestier de Lolodorf, elle ne tient pas compte
des réalités socioculturelles des communautés qui y vivent
au quotidien. Elle est perçue et prônée par certains
acteurs extérieurs à ce milieu forestier comme la recherche du
bien-être économique récusant toutes les politiques de
durabilité. Cependant la culture des Nkola/Ngyéli qui y vivent
résiste difficilement à ce phénomène contrairement
à celle des Bantu. Par conséquent, des nouveaux modes de vie
prennent corps.
II. II- 2.
ECOLOGIE
Il s'agit de parcourir quelques contours de ce concept et les
théories émises puis développées par certains
auteurs.
III. II-2-1.
Généralités
L'écologie, entendue au sens large, désigne le
domaine de réflexion qui prend pour objet l'étude des
interactions, et leurs conséquences, entre individus (pris
isolément et/ou en groupe constitué) et les milieux biotique et
abiotique qui les entourent et dont ils font eux-mêmes partie. La
définition de manière précise de l'écologie semble
assez difficile, néanmoins l'acception générale fait de
l'écologie un domaine de réflexion très vaste, puisque par
biotique il faut entendre la totalité du monde vivant (les
animaux, les plantes, les micro-organismes, mais pouvant aussi inclure les
autres individus, la société, etc.) ; et par
abiotique il faut entendre tout ce qui n'est pas vivant (donc aussi
potentiellement les objets, la technologie, la connaissance, etc.).
Dans le champ scientifique, le terme
« écologie » désigne la
science qui se donne pour
objet les relations des
êtres
vivants (animaux, végétaux, micro-organismes, etc.) avec leur
habitat et l'
environnement, ainsi
qu'avec les autres êtres vivants. Elle est l'étude scientifique
des interactions qui déterminent la distribution et l'abondance des
organismes vivants. Ainsi, en science, l'écologie est souvent
classée dans le champ de la biologie. Cette science étudie deux
grands ensembles : celui des
êtres
vivants (
biocénose) et
le milieu physique (
biotope), le tout formant l'
écosystème.L'écologie
étudie les flux d'
énergie et de
matières (réseaux trophiques) circulant dans un
écosystème.
L'écosystème désignant ici une
communauté
biotique et son environnement abiotique.
IV. II-3. QUELQUES
THEORIES ECOLOGIQUES
Il s'agit de la présentation de quelques théories
développées sur l'écologie.
V. II-3-1.Ecologie politique
C'est un ensemble de courants, largement diffusés
depuis les
années 1970,
qui insistent sur la prise en compte des enjeux écologiques dans
l'action sociale et l'organisation politique. Mouvement culturel nourri
d'influences divers (mouvements féministes, tiers-mondistes, pacifistes
et non-violents, libertaires, socialistes autogestionnaires...)
l'écologie devient politique lorsque la défense d'une culture du
quotidien converge avec la question de la survie de l'espèce humaine et
la prise en compte des modalités concrètes de réalisation
de la démocratie. Alors que l'
écologie s'était
donnée pour objectif d'étudier les rapports entre un organisme et
le milieu
naturel, l'écologie
politique fait en quelque sorte suite à une prise de
conscience des
limites de l'
anthropocentrisme humain,
mais pose aussi des questions essentielles à l'
anthropologie pour
le rôle écologique de l'espèce.
Somme toute, c'est une approche culturelle appliquée de
l'
écologie pour
l'
espèce
humaine qui a recours à la
politique pour
assurer son avenir et celui de sa descendance. Elle constitue également
un
mouvement
social pour transformer la
société,
dans un sens plus adapté à une vision écologique (globale,
intégrant les
générationsultérieures)
du
réel face
aux
réalités.
VI. II-3-2. Ecologie
réductionnelle.
D'après W.H. THORPE, l'un des fondateurs de cette
théorie, le réductionnisme consiste à n'attribuer de
réalité, exclusivement, qu'aux constituants les plus petits et
à interpréter les niveaux supérieurs d'organisation,
à partir des niveaux inférieurs. Aussi pour cette approche,
l'écologie se doit de suivre le modèle proposé par la
physique, afin de se prévaloir du titre de science exacte. En d'autres
termes, faire l'écologie c'est pouvoir quantifier toutes les
données recensées, afin de produire des analyses
concrètes. Pour l'approche réductionniste, seules les
données quantitatives sont fiables et acceptables.
VII. II-3-3.
Hypothèse Gaïa.
C'est une théorie holiste qui a été
développée par James LOVELOCK en 1969. Cette théorie
stipule que l'ensemble des êtres vivants sur terre serait ainsi comme un
vaste organisme appelé « Gaïa », d'après
le nom de la déesse de la mythologie grecque personnifiant la terre et
réalisant l'auto-régularisation de ses composants pour favoriser
la vie. L'hypothèse Gaïa repose sur un modèle scientifique
qui se fonde sur plusieurs constantes écologiques, climatologiques,
géologiques ou encore biologiques à travers la notion
d'éco-évolution et est appelé Earth
systemscience.L'hypothèse Gaïa, appelée
également hypothèse biogéochimique, est une
hypothèse scientifique
controversée, mais également évoquée par d'autres
scientifiques avant lui, selon laquelle la
terre serait «
un système physiologique dynamique qui inclut la
biosphère et
maintient notre planète depuis plus de trois milliards d'années,
en harmonie avec la vie ». Gaïa : une médecine
pour la planète.
Pour LOVELOCK (2001),Gaïa est le nom de la Terre vue
comme une entité vivante, un système physiologique unique qui,
à l'instar des autres organismes vivants, autorégule sa chimie et
sa température en vue d'un état favorable pour ses habitants.
L'une des espèces habitantes, l'homme, par sa démographie
galopante et son mode de vie polluant, semble perturber gravement l'état
de santé de son hôte.Gaïa est-elle en train de couver des
maladies graves dont les premiers symptômes seraient notamment les
accidents climatiques dont nous sommes les témoins ?
Ainsi, James LOVELOCK soumet la planète à un
bilan de santé. Comme le ferait un médecin auprès d'un
patient, il examine son évolution depuis sa naissance, ses maladies
d'enfance, son anatomie, sa physiologie, son métabolisme et sa
biochimie. Il explore les symptômes : les pluies acides, le
réchauffement global, le changement climatique, la
déforestation... Le diagnostic est à la fois fascinant et
terrifiant : l'histoire et l'avenir de la planète Terre sont en train de
se jouer. Combien de temps Gaïa pourra-t-elle supporter les effets
destructeurs de la surpopulation humaine et de ses agressions ? Survivra-t-elle
? Et nous qui sommes à la fois les agents de la maladie et les
observateurs de ses effets, en serons-nous aussi les victimes ?
Devant la multiplication des désastres climatiques, il
est nécessaire de tirer la sonnette d'alarme et de faire le bilan de
l'état de santé de Gaïa. Face à la réticence
des sociétés à prendre en compte le changement climatique,
l'auteur exhorte les hommes à abandonner leur vanité, qui les
persuade de leur aptitude à " gérer " le problème, et
donne des solutions face à la crise planétaire, afin de nous
éviter d'être victimes de la riposte d'une planète
outragée.
VIII. II-4. ENVIRONNEMENT
Le terme environnement recouvre de nombreuses acceptions. A
l'origine, il s'agit d'un anglicisme signifiant milieu. C'est le milieu dans
lequel un être vivant fonctionne; ce milieu incluant l'air, l'eau, le sol
et les ressources naturelles, la flore, la faune et les êtres humains.
L'environnement est aussi, à un moment donné, l'ensemble des
facteurs physiques, chimiques, biologiques et sociaux susceptibles d'avoir un
effet direct ou indirect, immédiat et futur sur les êtres vivants
et les activités humaines.Cependant, ce terme est
considéré et perçu différemment en fonction des
disciplines scientifiqueset d'appartenance socio-professionnelle. Pour un
industriel, il sera question de pollution. Pour un artisan ou un
commerçant, il s'agira plutôt d'une zone commerciale... le terme
environnement est largement contesté par les écologistes qui y
voient une connotation trop anthropocentriste.
Par définition,c'est l'ensemble des
éléments (biotiques ou abiotiques) qui entourent un individu ou
une
espèce et dont
certains contribuent directement à subvenir à ses besoins, ou
encore comme l'ensemble des conditions naturelles (physiques, chimiques,
biologiques) et culturelles, susceptibles d'agir sur les organismes vivants et
les activités humaines. La notion d'environnement
naturel, souvent
désignée par le seul mot « environnement », a
beaucoup évolué au cours des derniers siècles et tout
particulièrement des dernières décennies. Il est compris
comme l'ensemble des composants naturels de la
planète terre, comme l'
air, l'
eau, l'
atmosphère,
les
roches, les
végétaux,
les
animaux, et l'ensemble des
phénomènes et interactions qui s'y déploient,
c'est-à-dire tout ce qui entoure l'
Homme et ses
activités.Compte tenu du caractère pluridimensionnel que
revêt l'environnement, la biodiversité apparaît comme une
de ses composantes qui le définit au mieux.
Cependant par diversité biologique ou
biodiversité,on désigne la variabilité des organismes
vivants de toute origine (des plantes aux animaux, et microorganismes). La
biodiversité se définit donc relativement à la
variétédes espèces. Elle peut aussi être
définieau regard de la variété
desécosystèmes(déserts, forêts, zones humides,
montagnes, lacs, cours d'eau, espaces agricoles..). Dans chaque
écosystème, les êtres vivants, dont les êtres
humains, forment un tout, et interagissent les uns avec les autres, mais aussi
avec l'air, l'eau, et la terre qui les entourent. Ce système
d'interactions entre différentes formes de vie, entre elles, et au sein
d'un écosystème et milieu donné, évolue comme `un
tout' : chacun de ses éléments étant interdépendant
des autres. C'est pourquoi le devenir de l'humanité ne peut se dissocier
du devenir de la biodiversité.
IX. II-4-1.Éthique de
l'environnement
D'après BEAUCHAMP (1993) ; GANOCZY (1995) ;
DES JARDINS (1995) ; LARRERE (2006) et HUYBENS (2010), il est
généralement reconnu que trois modèles permettent
d'expliciter différentes conceptions de l'éthique des
interventions dans la nature.
Le modèle anthropocentriquesépare l'homme
(sujet) et la nature (objet) et met la nature au service de l'humain,
maître absolu ou intendant. Dans le modèle économique
classique, l'humain est maître absolu de la nature. Il peut la soumettre
à tous ses besoins sans contrepartie. Ce modèle a permis le
développement de l'agriculture, des sciences et des technologies et
laisse une empreinte environnementale démesurée parce que la
nature est un objet exclu du champ de l'éthique. Dans la pensée
du développement durable, l'humain devient plus un intendant qui doit
pouvoir satisfaire ses besoins dans la nature et laisser aux
générations futures des écosystèmes pourvoyeurs de
tout ce dont elles auront besoin. L'éthique en lien avec la nature est
utilitariste. Il s'agit de maximiser les conséquences positives pour
l'humain au moindre coût, parfois y compris pour la nature, mais de
manière récente seulement avec le développement durable.
Ce modèle éthique conduit à anthropociser la nature, la
rendre apte à répondre aux besoins humains.
Le modèle biocentriquevalorise le respect de toute vie.
Tous les êtres vivants ont une dignité propre intrinsèque,
quelle que soit leur utilité pour les humains. Il s'agit d'une remise en
question fondamentale de la vision anthropocentrique. Elle dénonce la
violence faite par les humains et ses techniques à la nature. Cette
vision est basée sur une écologie métaphysique,
l'éthique est déontologique : elle est faite de règles
morales et d'interdits. Ce modèle éthique conduit à
anthropomorphiser la nature : la nature a des facultés humaines comme le
suggère James LOVELOCK dans l'hypothèse Gaïa,
Terre-Mère se venge.
Le modèle écocentriquefait de l'humain un
élément de la nature, comme n'importe quel autre, qui doit
connaître et respecter les lois de la nature pour la maintenir dans
l'état où elle se met sans lui. Une grande importance est
accordée aux experts qui connaissent les lois de la nature pour prendre
des décisions qui imitent son fonctionnement ou dans des versions plus
édulcorées, s'en inspirent ou proposent « une gestion proche
de la nature ». Les écosystèmes et leurs fonctionnements
autorégulés sont centraux. Ce modèle éthique
conduit à naturaliser l'humain. L'éthique est
conséquentialiste (éviter les conséquences
négatives sur les écosystèmes) en élaborant des
bonnes pratiques basées sur les lois de la nature. Ces trois
modèles sont possibles dans le cadre de l'ontologie naturaliste
décrite par Descola.
Pour HUYBENS (2010),il faut métamorphoser
l'éthique de l'environnement en articulant ce que chaque
représentation a de mieux dans une forme renouvelée.Le
modèlemulticentriquearticule les complémentarités et
contradictions entre les différents modèles pour inventer une
réponse contemporaine pertinente permettant d'envisager «
l'économie verte » avec une nature partenaire. Elle a cependant
l'avantage de mettre l'accent sur la nécessité de
réfléchir les interventions humaines dans la nature en tenant
compte de la « réponse » de la nature. Le caractère
récursif de la relation ne s'arrête pas là cependant. Cette
rétroaction de la nature sur l'humain façonne à son tour
en partie l'action possible ou souhaitable de l'homme dans la nature.
Ce modèle éthique conduit à humaniser
l'humanité dans ses relations avec la nature et pour cela à
valoriser le dialogue entre les humains. Voir les forêts comme des «
partenaires » et pas seulement comme des « ressources » ou
seulement comme ayant une valeur intrinsèque ou sacrée permet de
réfléchir sur les interventions humaines dans la nature comme
s'il s'agissait de mettre en oeuvre une sorte de contrat qui devrait donner
satisfaction tant à l'humain qu'à la nature. Concevoir un
Co-pilotage, une influence réciproque entre les humains et la nature
permettrait de participer à un monde plus libre (démocratique,
diminue les inégalités), plus juste (création et
répartition des richesses surtout avec les plus démunis,
l'économie est un moyen et pas une fin), plus vert (partenariat avec la
nature) et plus responsable (en portant la responsabilité avec les
générations antérieures de la planète que nous
laisserons aux générations futures).
Somme toute, l'environnement en tant que milieu, est une des
bases de l'écologie qui privilégie les relations des êtres
vivants entre eux et avec le milieu. L'environnement est un pilier et son
respect est une condition sine qua non au développement durable. La plus
importante différence entre les trois domaines de l'écologie, de
l'environnement et du développement durable est la place et l'importance
croissante de l'homme et de ses activités.
X. II-5.PYGMEES
Il s'agit de faire une présentation
générale des Pygmées en Afrique, au Cameroun et dans la
localité de Lolodorf en particulier.
XI. II-5-1.
Généralités et localisations
Le mot Pygmée désigne les différents
groupes ethniques disséminés le long de l'
équateur
dans de nombreux États de l'
Afrique actuelle, tels que
le
Burundi, le
Cameroun, le
Congo, le
Gabon, la République
Centrafricaine, la
République
démocratique du Congo, le
Rwanda, et l'
Ouganda.
Selon BAHUCHET et PHILLIPART (1991),les Pygmées, ne
pratiquant ni l'agriculture, ni l'élevage, font partie des rares peuples
du monde vivant de l'exploitation des ressources spontanées, par la
chasse et la collecte. Ces populations sont
disséminées sur des très vastes zones géographiques
dans le bloc forestier du bassin congolais. Ils forment en
réalité plusieurs groupes différents au point de vue
morphologique, linguistique et dans une certaine mesure également
culturel. Très difficile à évaluer, le nombre de
pygmées d'Afrique est estimé entre 100 et 200.000
âmes.
En Afrique, les Pygmées les plus célèbres
sont les Bambutià l'Est de la République Démocratique du
Congo. Les Baka, présents et repartis au Nord du Congo, au Sud-Est du
Cameroun et en République Centrafricaine. Les Baaka,connus aussi sous
l'appellation des Babinga ou Babenga, sont présents en Centrafrique et
au Nord du Congo. Mais, une partie de ce groupe se nomme Bambenzele. Ces trois
groupes vivent exclusivement dans la région forestière.
Au-delà des groupes auxquels l'importance
numériquement vient d'être mentionnée, nous avons
également l'existence d'autres peuples tels que les
Nkola /Ngyéli au Sud-ouest du Cameroun, les Bédzan dans les
plaines Tikar du Cameroun également. Pour les Aka encore appelés
Babongo, ils se situent au Centre du Gabon. Enfin, une autre communauté
aussi importante, mais morcelée et dispersée est basée au
Burundi, au Centre-ouest du Rwanda mais aussi au Sud de la RDC : Ce sont
les Batwa. Chasseurs-Collecteurs ils sont plus sédentaires et forment
des castes au sein des sociétés, d'agriculteurs. Ainsi, certains
Batwa du Rwanda sont spécialisées dans la poterie,
activité que ne pratiquent pas d'autres groupes.
En dépit de ce qu'une importante bibliographie laisse
supposer, l'approche scientifique des différents groupes Pygmées
d'Afrique est très récente. Leur nomadisme saisonnier dans la
forêt équatoriale humide et les relations étroites qu'ils
entretiennent avec leurs voisins agriculteurs, ceux-ci se posant souvent en
intermédiaires incontournables. Or ce sont justement leurs relations
avec les autres populations forestières qui font l'originalité
profonde des Pygmées d'Afrique.
Somme toute, la localisation des Pygmées en Afrique est
effective dans les pays tels que, le Burundi avec les Batwa. Le Cameroun par
les Baka, les Nkola/Ngyéli, les Bédzan. Au Congo Brazzaville
on retrouve les Batwa, et les Aka ou Babongo. Le Gabon, fait état des
Babongo.Au Rwanda, il est question des Batwa. En République
Centrafrique, il en ressort la présence des Baka et les
Aka.
Carte N°
2 : Localisation des différents groupes Pygmées en
Afrique.
Source : ORSTOM 1978
XII. II-5-2.
Pygmées du Cameroun
Dès 1890, les officiers et les membres scientifiques
des colonnes allemandes d'exploration et de conquête ont signalé
l'existence des Pygmées(Zwerge) dans les trois parties du
Cameroun (Est, Sud et Centre). Sous le mandat français entre 1918 et
1945, quelques missionnaires et administrateurs, tels que M. BERTAUT, les
Pères HOUSSAYE et Ternay, s'intéressent surtout aux Baka.
Après la seconde guerre mondiale, Vallois marque l'intervention de
quelques spécialistes provenant d'établissements universitaires
ou scientifiques Français. Parmi eux, figurent vers la fin de
l'époque coloniale, les jeunes G.ALTHABE et J.F.LOUNG, qui
étudient plus particulièrement l'évolution
économique et sociale. C'est également à cette
époque qu'entre en scène le Père DHELLEMMES, qui se
signalera surtout après l'indépendance par la collecte
progressive des données démographiques dans les ressorts
territoriaux des missions où il sera affecté, puis jusqu'à
sa mort dans la zone du Projet Pygmées Est-Cameroun.
Cependant, la plupart des travaux effectués à
l'époque coloniale ont été axés sur l'anthropologie
physique et sociale. La localisation et le recensement systématique des
communautés Pygmées n'ont jamais été
organisés, contrairement à ce qui se passait pour les autres
ethnies. En effet, ces populations de Chasseurs-collecteurs ne
représentaient qu'un intérêt insignifiant pour les
colonisateurs, dans la mesure où elles ne pouvaient pas être
engagées avec profit dans les activités de mise en valeur et
d'exploitation du territoire soit comme main d'oeuvre ou productrices
autonomes, soit à titre d'assujetties à l'impôt et aux
travaux obligatoires d'intérêt général, soit en
qualité d'auxiliaires ou d'employées des secteurs public ou
privés.
L'existence dans quelques publications des données
géographiques et démographiques attestent certes certaines
statistiques mais celles-ci font ressortir informations très en
deçà de la réalité, échafaudées par
les chefs des subdivisions.
Après l'accession du pays à
l'indépendance, un changement d'optique marqua les mesures visant
à améliorer les conditions d'existence de toutes les composantes
de la jeune Nation. Les pouvoirs publics et certaines ONG ont alors pris
l'initiative de mettre en oeuvre, des actions de développement au
bénéfice des Pygmées. Il s'agissait ainsi de rompre avec
la politique économique et sociale de l'époque coloniale qui
privilégiait certaines régions et certaines ethnies.
D'après MVENG(1963),les Pygmées sont les
premiers habitants de la forêt camerounaise. Ils constituent une
minorité analphabète, primitive et totalement
marginalisée, tant sur le plan social qu'économique ou politique.
La répartition des pygmées au Cameroun, fait mention de trois
groupes ethniques.
Pour LOUNG(1995),le Cameroun compte trois groupes
ethniques Pygmées, d'importance extrêmement inégale. Les
Baka, les Bakola/Bagyéli et les Bédzan.Ces premiers recensements
administratifs de Pygmées ont eu lieu entre 1963 et 1968. Mais ils
n'étaient organisés effectivement que dans certaines
circonscriptions.
XIII. II-5-3. Répartition spatiale et effectif
Il s'agit de présenter les localités dans
lesquelles on trouve les Pygmées au Cameroun, et leurs effectifs
approximatifs.
XIV. II-5-3-1. Les
Baka
LesBakasont implantés dans quatre départements,
dont trois dans la région de l'Est et un dans celle du Sud : Boumba
et Ngoko, Kadey, Haut Nyong et Dja et Lobo. A l'intérieur de ces grandes
divisions administratives, les communautés se concentrent dans certains
secteurs. Les statistiques vieillissantes et approximatives mentionnent qu'ils
sont au nombre de 35000.
La Boumba et Ngoko rassemble à elle seule, plus de la
moitié des effectifs. Environ 11.000 vivent dans l'Arrondissement de
Moloundou et la zone de Salapoumbé. Près de 9.000 habitent
l'Arrondissement de Yokadouma, où les contingents principaux se trouvent
dans les cantons Konabembé et Mvong-Mvong. A cela s'ajoutent quelques
centaines dans l'Arrondissement de Gari-Gombo.
Le Haut-Nyong compte environ 8.500 Baka. 4000 se
répartissent d'une manière assez égale dans les divers
cantons de l'arrondissement de Lomié, vient ensuite l'Arrondissement de
d'Abong Mbang et 2000 se concentrent sur la route de Lomié. Celui de
Massamena et le District de Somalomo avoisinent un millier d'individus. Les
Arrondissements de Dimako et Ngoila comptent chacun quelques centaines
d'individus et celui de Doumé quelques communautés. Dans la
Kadey, seule la partie totalement forestière comprend un peuplement
Baka. Un peu plus de 2.000 dans l'Arrondissement de Mbang, rassemblés
dans les cantons Bangantou et Mézimé ; quelques centaines
dans celui de Ndélélé.
Les effectifs du Dja et Lobo avoisineraient 3.000 personnes.
L'arrondissement de Djoum y compte environ 1.500 individus dont la
moitié se concentre dans les cantons Fang. Puis vient celui de Mintom,
avec près d'un millier dont une importante partie établie sur la
route d'Atali. Le reste est réparti entre les arrondissements de Bengbis
du canton Boulu, Sangmélima (secteur Bikoula-Emvieng),
Méyomessala (secteur de Bityé), et Oveng. Signalons enfin la
communauté de Mébémenko, implantée à l'angle
oriental de l'arrondissement de Mvangane, dans le département de la
Mvila.
XV. II-5-3-2. Les Nkola
/Ngyéli
L'aire de peuplement Bakola/Bagyéliest centrée
sur le département de l'Océan. Celui-ci compte un effectif
à peu plus de 3.700 personnes. Ceux-ci vivent dans les arrondissements
de Lolodorf, Bipindi, Kribi, Akom II et Campo, ainsi que dans le District de
Nyé'été. Il s'y ajoute d'une part la portion du
département du Nyong et Kéllé situé au Sud du
Nyong, et d'autre part dans quelques secteurs de la Vallée du Ntem. On
peut distinguer six zones de regroupement des communautés. Celle de
Bipindi, la plus importante, rassemble pratiquement le tiers des effectifs.
Puis vient celle de Lolodorf et Kribi. L'autre partie s'étale entre la
zone Ebemvok, Akom II, Nyé'été et une petite
communauté à Campo.
Selon MIMBOH, P.-F, (2000),qui s'est consacré
particulièrement sur notre site d'étude, les Pygmées
Bakola /Bagyéli habitent principalement le département de
l'Océan qui compte six Arrondissements : Akom II, Bipindi, Campo,
Kribi, Lolodorf, Mvengue et le District de Nyé'été. Cette
région est habitée par d'autres peuples tels que les Bassa, les
Batanga, les Boulu, les Ewondo, les Fang, les Mabéa, les Ngoumba. Elle
région est traversée de bout en bout par la forêt
équatoriale et connait un climat humide avec quatre saisons. Les
précipitations sont très abondantes et atteignent parfois 4.000
mm/an. On comprend dès lors que cette région ait une grande
vocation agricole et renferme un potentiel forestier très riche et
diversifié.
Les Nkola /Ngyéli de cette région
avoisineraient 3.700 individus éparpillés sur tous les
arrondissements et districts sus mentionnés, avec une proportion
très faible dans le Sud de Mvengue. Il note par ailleurs un autre groupe
dans la Mvila et le Nyong et Kéllé.
XVI. II-5-3-3. Les
Bédzan
Pour les Bédzan, l'aire de peuplement se réduit
à quelques centaines de kilomètres carrés dans la plaine
Tikar, au secteur de Ngambé-Nditam. Elle comporterait en tout six
communautés, installées dans les ressorts territoriaux des
chefferies de Ngambé, Gah, Ngoume et Nditam.
XVII. II-6. CONCEPT DU DEVELOPPEMENT
Le dictionnaire français Larousse, admet plusieurs
acceptions sur le mot « développer». De prime abord,
c'est un verbe du premier groupe doté des significations
plurielles : ôter de l'enveloppe, déployer, dérouler,
faire connaitre, augmenter progressivement, exposer en détail,
s'accroitre, sortir de l'état embryonnaire, faire apparaitre l'image sur
un cliché. Le mot développement quant lui signifierait
évolution vers un stade plus avancé.
C'est un concept polysémique qui évoque
plusieurs dimensions à la fois théoriques et même
idéologiques. Pour les uns, il relève de l'idéologie
LATOUCHE (1990), tandis que pour d'autres, il relève de la croyance RIST
(1996), ou encore de la théorie économique. La définition
du concept de développement est très diversifiée et se
heurte parfois à des versions quelque peu divergentes.
Pour MBONJI,E (1988),le développement est comme un
processus multidimensionnel comprenant les structures de production et
l'expression de la culture et la culture elle-même, l'ensemble des
manifestations productrices tant technologiques qu'économique,
artistique ou quotidienne, bref l'ensemble de tous les aspects de la vie(...)le
développement comme étant une modalité, un paradigme parmi
tant d'autre qui nécessite une vision anthropologique sur les
différentes façons selon lesquelles les sociétés
évoluent, changent. L'Hommeest le bénéficiaire du
développement et celui-ci doit tenir compte de toute sa dimension
culturelle. Il importe donc de préciser que le développement ne
saurait se faire d'une façon uniforme, unicolore. Ainsi, chaque culture
contient donc les germes de son développement, qui est un système
de production et de consommation. Il est autour de nous, dans nos cultures,
dans nos traditions, dans nos génies créateurs.
MBONJI, Einvite donc l'Afrique à opter pour cette
approche du développement afin de sortir de son
sous-développement. Le développement n'est pas une chose qu'on
impose dans nos sociétés, mais un processus qui a pour principe
et pour finalité l'Homme dans sa personnalité culturelle toute
entière. Les cultures africaines ne sont donc pas un frein au processus
du développement de l'Afrique. Il revient à tout projet et
programme de développement d'intégrer les cultures dans le
processus de la conception, de la réalisation et du suivi de ces
actions, entendues comme amélioration des conditions de vie, et de
recherche du bien-être total.
D'après L'UNESCO (1992),le développement est
ce processus complet et holistique multidimensionnel qui va au-delà de
la simple croissance économique pour intégrer toutes les
dimensions dont la vie sociale et toutes les énergies de la
communauté dont tous les membres devraient bénéficier des
résultats qui en découlent. Pour l'UNESCO, la dimension
économique n'est pas la seule dans le processus du
développement. Le développement intègre
toutes les dimensions de la vie. Ce processus qui concerne l'Homme doit
être holistique.La dimension culturelle du
développement ici étant importante.
Selon Olivier DE SARDAN (1995),le développement est
un ensemble de processus sociaux induits par les opérations
volontaristes de transformations d'un milieu social entreprises par le biais
d'institutions extérieures à ce milieu mais cherchant à
mobiliser celui-ci et reposant sur une tentative de greffe de ressource et ou
des techniques et ou de savoirs. Pour lui, le développement peut
être impulsé de l'extérieur par le biais des institutions
et des agences de développement. L'Afrique ici attend le
développement comme modèle standard pensé depuis
l'Occident. Autrement dit, l'auteur nous présente le
développement comme altérité anthropologique et non comme
une opposition entre modernité et tradition.
Quant à Gilbert RIST (1996),le développement
est assimilé au processus qui induit le changement dans
l'évolution naturelle. De l'évolution naturelle au changement
social, la transposition semble assez simple à réaliser.
L'évolution et le changement social deviennent le processus de
développement.
Au total,le développement apparaît comme un
processus de changement ininterrompu, ayant des effets cumulatifs qui sont
irréversibles et qui sont dirigés vers une finalité
précise. Dans cette perspective, le développement est non
seulement irréversible, mais il apparaît aussi inévitable.
XVIII. II-6-1. Trois approches du
développement
Ces trois approches sont un aboutissement des travaux de Jean
Pierre Olivier de Sardan, sur la notion du développement. Pour cet
auteur, une grande confusion règne autour de l'anthropologie
fondamentale du développement dans la littérature anglophone et
francophone de ces dix dernières années.
XIX. II-6-1-1.
Approche discursive
Elle présente le développement comme
étant un discours, elle est avant tout une déconstruction des
discours sur le développement c'est un courant influencé par le
post modernisme et la remise en cause des discours officiels, critique
l'écart entre les normes officielles et les normes pratiques. Le
développement est perçu comme une action politique (une action
volontariste de transformation d'une réalité extérieure)
qui manipule donc un discours idéologique. En effet, ESCOBAR(1995),
reprend les théories développées par E. Saïd sur
« l'orientalisme » pour les appliquer au
développement et créer la notion de développementaliste
qui peut être définie par l'ensemble des discours et des
représentations qu'ont les occidentaux sur les actions de
développement dont ils sont à l'origine dans les pays du Sud.
Les théories de SAÏD sont à l'origine du courant de
pensée post moderne qui se structure autour de la remise en cause des
discours du développement. Gilbert RIST (1996) dans son ouvrage
« le développement : histoire d'une croyance
occidentale » s'inscrit directement dans cette lignée de
déconstruction.
XX. II-6-1-2. Approche populiste
Le développement est non seulement un discours mais en
plus il asservit le peuple et néglige les savoirs populaires. Ce courant
prône la dévalorisation des valeurs culturelles. Olivier de Sardan
pense qu'il faut distinguer le populisme idéologique qui revient
à l'exaltation des savoirs populaires d'un populisme
méthodologique. Ce dernier nous dit que partout, les acteurs ont des
savoirs et le rôle de l'anthropologue est de les connaître mais
cela ne veut pas dire que ces savoirs sont forcément bons ou mauvais.
Avant de vouloir transformer une réalité ou même
l'étudier, il faut avant tout la connaître de façon fine et
détaillée. Le populisme méthodologique revient donc
à cet exercice qui consiste à chercher le sens du dedans d'une
réalité culturelle ou sociale.
Ici, l'auteur fait une critique du populisme
idéologique mais garde le populisme méthodologique. Cependant,
cette question peut être soumise à la réflexion. En fait,
il faut constater l'échec cuisant des politiques de développement
pour s'inscrire dans une approche populiste.
XXI. II-6-1-3.
Enchevêtrement des logiques sociales
L'un des intérêts de l'anthropologie est son
approche à la fois holiste (transversale) et individualiste (en
profondeur). Le chercheur en anthropologie doit se situer entre ces deux
modèles types. La posture individualiste permet de ne pas sombrer dans
le culturalisme. L'anthropologie appliquée du développement.
Selon M. CERNEA (1986),depuis les années 1970, face au constat
d'échec des programmes de développement, les institutions
internationales intègrent de plus en plus de sociologue et les
anthropologues avec une volonté de repenser les politiques publiques
contre les approches classiques du développement dites trop technicistes
et économistes. Son approche est un plaidoyer en faveur de
l'intégration du savoir des sciences sociales dans les projets de
développement. Il prône plutôt les raisons de
l'importance des sciences sociales dans le monde du développement et la
façon dont elles peuvent contribuer à améliorer les
pratiques développementalistes.
Pour cet auteur, il ne s'agit pas d'élaborer de
grandes théories en anthropologie du développement mais
plutôt d'appliquer les multiples connaissances accumulées par les
sciences sociales fondamentales dans les projets et les politiques publiques de
développement. Pour M.CERNEA, l'anthropologie peut et doit se tourner
vers l'action. D'une part, l'anthropologue doit s'impliquer dans les
interventions de développement. D'autre part, il doit sortir du cadre
étroit de sa discipline pour introduire ses travaux dans le processus
même de l'élaboration des politiques publiques. L'anthropologue
doit apporter une contribution plus large au phénomène de
développement pour cela il doit identifier les multiples interventions
des sciences sociales dans un projet de développement.
XXII. II-6-2. Quelques dimensions du
développement
Si le concept de développement revêt un sens
spécifique à travers les différentes définitions
qui lui sont consacrées, il paraît impossible de définir
une frontière sémantique étanche entre lui et les autres
notions dont la diachronie de la pensée économique nous
révèle qu'il procède. C'est un cas archétypal de
système sémantique qui combine, entre autres, des concepts tels
que: «croissance économique», «satisfaction des besoins
fondamentaux» et «gouvernance» se rapportant chacun à une
variante dimensionnelle que la notion de développement a progressivement
intégrée au cours de son évolution.
XXIII. II-6-2-1. Dimension politique
Partant de l'idée que le développement implique
une politique systématique et cohérente de l'État dans le
but de promouvoir le progrès économique et social d'un peuple, il
devient clair que le contenu du concept ne saurait, en aucun cas, se dissocier
des impacts produits par l'intervention des pouvoirs publics dans le processus
de développement. L'histoire contemporaine témoigne de
l'importance du rôle joué par l'État dans les processus
économiques. Déjà, durant la décennie des
années 50, le débat sur le développement se centra autour
de problèmes dont la dimension politique était
déterminante : dégradation des termes de l'échange
extérieurs, inadéquation du système des prix dans
l'orientation des investissements, etc., mais ce complexe
thématique fut quasiment toujours abordé à partir de
cadres conceptuels totalement insuffisants. Avec l'analyse
macro-économique de J.M. KEYNES qui restitua au politique sa
primauté sur l'économique, la valorisation des centres de
décisions nationaux conduisit à mettre l'accent sur la dimension
politique de ce qui se présentait initialement comme problèmes
strictement économiques et à imaginer du même coup le
dépassement du sous-développement dans le cadre d'un projet
politique. Ainsi prend forme la dimension politique du concept de
développement cristallisé dans le rôle crucial que
l'État est appelé à jouer dans le processus de croissance
économique ainsi que dans les transformations sociales et
infrastructurelles qui lui sont liées.
Les luttes pour l'indépendance, et dans certains cas
des processus révolutionnaires, ont souvent donné à
l'État un rôle décisif pour promouvoir le
développement économique et créer des conditions
structurelles pour opérer les transformations sociales indispensables y
afférentes. Qui plus est, l'affirmation de l'indépendance
nationale et de lasouveraineté des choix de développement vers
lesquelles s'orientèrent les formations périphériques, et
surtout l'émergence de l'idée d'intérêtnationalont
généré dans la conception du développement la prise
en compte de l'approche globalisante des processus économiques qui
correspond à la prééminence de l'État comme agent
propulseur et orienteur des activités économiques et arbitre des
conflits de classe.
Même quand la plupart des projets, des politiques et
programmes de développement communs à des ensembles mondiaux sont
définis ou mis en oeuvre dans des cadres internationaux, force est de
reconnaître que dans tous les cas, le cadre d'application des politiques
de développement reste pour l'essentiel, national ou régional.
Cependant, il s'avère impératif de souligner que ces politiques
et programmes de développement, même conçus en dehors des
espaces nationaux dans lesquels ils sont destinés à être
appliqués, sont aussi porteurs de projets politiques spécifiques
qui s'inscrivent pour la plupart dans la mouvance d'un paradigme
idéologique dominant. Ils véhiculent, le plus souvent de
façon implicite, soit une réduction, soit un renforcement des
interventions de l'État dans le processus de développement.
A titre d'exemple, les décennies des années
soixante et soixante-dix, ont été, dans la mouvance du paradigme
de la modernisation, dominées par un économisme interventionniste
où les institutions et les décisions politiques étaient
présentées comme de simples instruments des stratégies de
développement. A l'inverse, les années quatre-vingt furent celles
des programmes d'ajustement structurelles véhiculant le respect de
l'autonomie de l'économie par rapport aux décisions politiques
à travers une séparation de l'État et du marché.
BOUTAUD et DEBLOCK (1986),nous rappellent que l'application des politiques
de développement dépend de la stabilité politique et
sociale d'un Etat.
XXIV. II-6-2-2. Dimension socioculturelle
La fin des années 1960 marque une rupture qui se
traduit potentiellement par une nouvelle vision du concept et des pratiques de
développement. La prise de conscience des imperfections des
modèles de développement axés sur l'économisme, le
productivisme et le technicisme au détriment des véritables
besoins humains et sociaux et des aspirations des populations a imposé
une reconceptualisation des approches développementalistes et
subséquemment, une redéfinition du concept de
développement. À la floraison de stratégies
technocratiques de développement économique des années
1960,succède dans les années 1970 l'inflation des recettes du
développement humaniste. Comme le constata S. LATOUCHE (1986),le
développementétait devenu la projection du désir et du
délire du Tiers Monde, toutes les constructions possibles pourraient
s'abriter désormais derrière ce concept qui, vidé de son
contenu réel/rationnel, perd toute rigueur et devient le point de mirage
de toutes les aspirations.
Ainsi, le concept de développement, en intégrant
le social et l'humain, subit une véritable révolution
sémantique et fait intégrer l'expression des valeurs culturelles
des civilisations issues de l'histoire et des situations sociales
spécifiques. Tous ces qualificatifs associés à la notion
de développement ont pour but de concilier la croissance et le
bien-être social, participant à la structuration du champ
idéologique du développement et concourant subséquemment
à la prise en compte par le concept des nouvelles dimensions qu'ils
véhiculent. Cependant, pour illustrer la dimension socioculturelle du
concept qu'il s'agit ici de mettre en évidence, nous faisons appel au
concept des «besoins fondamentaux» pour rendre compte des
aspects sociaux proprement dits et à la variante «dimension
culturelle du développement».
La persistance de l'analphabétisme et de la
pauvreté dans les pays de la périphérie et surtout leur
incapacité de prendre en main leur développement nonobstant la
croissance brute de leur économie, fit émerger une nouvelle
conceptualisation de la notion de développement qui, pour concilier la
croissance et la justice sociale, intègre dans son champ la satisfaction
des besoins essentiels des populations des pays du Sud. Cette nouvelle approche
dite des «besoins fondamentaux» consiste essentiellement
à exhorter les gouvernements des pays de la périphérie
à se préoccuper davantage des besoins humains essentiels,
c'est-à-dire à améliorer la nutrition, le logement, la
santé, l'éducation et l'emploi de leurs populations. La Banque
Mondiale et l'OIT en ont fait d'ailleurs au cours des années 1970, le
fer de lance de leurs stratégies de développement et les valeurs
que cette approche véhicule traduisent bien la nécessité
de la prise en compte du «social» comme l'une des variantes
dimensionnelles incontournables du concept de développement.
Parallèlement à ce vaste débat s'ajoute la notion du
«développement culturel» qui est venue élargir
le contenu de l'appareil conceptuel dégagé par la
communauté internationale au cours des années 1970, notamment
dans le cadre des conférences intergouvernementales sur les politiques
culturelles organisées par l'UNESCO ou avec sa collaboration.
Le développement culturel, vite transformé en
dimension culturelle du développement, est né de
l'incapacité des modèles dedéveloppement
ethnocentriques à dialoguer avec d'autres conceptions du monde.
Dans le même ordre d'idées, MBONJI, E (1988),
pense que les cultures locales sont appelées au secours de la
réalisation des projets conçus sans elles mais destinées
à leurs populations. Ce n'est que lorsqu'on a compris que le
développement ne sortira pas des conférences mais des hommes, que
l'on a commencé à les étudier.
Un peu plus tard,MBONJI, E (2005),affirme qu'il importe
donc de tenir compte de ces hommes, leurs traditions, de leurs systèmes
de valeurs, autrement le développement ne passera pas. Rythmant ainsi
ses joies et ses peines, ces traditions manifestent l'esprit d'un peuple. Elles
lui ont permis de conserver son identité devant les agressions
extérieures. Mais du même coup, elles rendent le changement
nécessaire encore plus difficile, car les réticences ou les refus
s'appuient sur des raisons qui dépassent la simple raison.
De toute évidence, il a fallu trouver une formule pour
promouvoir un développement à visage culturel qui n'est
d'ailleurs pas une chirurgie facile à opérer. Cette
problématique relative à la dimension culturelle du
développement a fait l'objet d'une production écrite foisonnante
au cours des années 1980. En mettant en évidence la nature
dialectique des rapports qui lient la culture au développement, cette
notion a fortement contribué à la prise de conscience mondiale du
rôle primordial de la culture dans les processus de développement
ainsi que des effets de la modernisation sur les cultures. Qui plus est,
l'émergence de cette dimension a permis de mettre en évidence les
échecs et les dégâts culturels causés par les
modèles uniquement fondés sur la croissance économique.
Elle a fait mesurer, le coût économique, social et humain de la
non prise en compte des spécificités socioculturelles telles le
rapport à la nature, à l'espace, au temps, au travail, à
l'argent et plus encore, le sens donné à la vie et à la
mort.
L'évolution de toute société est un
processus éminemment culturel, la culture doit être coextensive au
développement car elle est cet élément dynamique
fondamental qui donne aux groupes et aux sociétés la force de
freiner ou au contraire de provoquer le changement social. La culture d'un
peuple est la résultante dynamique de l'interaction souvent dialectique
entre l'homme et le milieu environnant dans lequel il vit et évolue.
C'est le génie d'un peuple et son art dans la recherche du
progrès et du bonheur; donc un lieu de globalité où toute
initiative de développement doit nécessairement se
référer.
Dans ce contexte où la promotion d'un
développement endogène et intégral s'est imposée
comme une nécessité, la dimension culturelle du
développement est devenue un leitmotiv incontournable. Celle-ci se
présente indiscutablement comme un facteur déterminant voire
structurant dans l'orientation fondamentale du développement,
conditionnant le type, le style de développement et même les
modalités de son application. Subséquemment, elle s'insère
de façon explicite dans le contenu sémantique du concept de
développement et participe potentiellement aux formulations
définitionnelles qui lui sont consacrées.
XXV. II-7. QUELQUES THEORIES DU DEVELOPPEMENT
Toutes les théories du développement des
années 50-60 sont émises par des économistes. Elles ont
pour objet d'expliquer comment les pays sous-développés peuvent
s'imprégner de l'exemple des pays développés afin de
sortir de leur état actuel.
XXVI. II-7-1. Théorie du décollage ou des
étapes de la croissance
La théorie du décollage fait
référence à la théorie élaborée par
Walt ROSTOW en 1961 qui renvoie aux étapes de la croissance
économique pour marquer l'évolution de sociétés ou
des espaces non développés vers le développement
économique. Pour ROSTOW (1961),ces étapes de la croissance
économique peuvent s'appliquer à toutes les
sociétés et dans tous les pays non développés.
Dans l'optique de cette théorie, les écarts de
développement entre les différentes sociétés sont
transitoires et l'égalisation des conditions est inéluctable. Ces
étapes sont selon RIST (1996),la société
traditionnelle, les conditions préalables du démarrage ou du
décollage, le démarrage, le progrès de la maturité
et l'ère de la consommation de masse
Dans cette théorie, on retrouve la pensée
évolutionniste qui a marqué les débuts des théories
économiques. Encore une fois, le développement y est vu comme un
processus d'évolution vers une finalité, soit la consommation de
masse, qui est présentée comme l'étape ultime du
développement. On retrouve aussi l'idéal uniformisant du
développement qui propose que toutes les sociétés du monde
puissent et doivent passer par les mêmes étapes pour
accéder au développement, en l'occurrence le développement
orienté vers la croissance et la production économique. À
ce sujet, Gilbert RIST affirme que « c'est par un effet de
sociocentrisme que l'historien de l'économie [en l'occurrence Rostow]
imagine que toutes les sociétés se comportent de la même
manière et nourrissent les mêmes désirs. Or l'homo
oeconomicus, frustré par la rareté qui l'oblige à choisir
parmi ses désirs illimités, n'est pas universel ».
XXVII. II-7-2. Théorie de la
dépendance
Si la théorie du décollage a nourri les espoirs
et les illusions sur le développement pendant plusieurs années,
dans une perspective opposée, la théorie de la dépendance,
dénommée aussi théorie du centre et de la
périphérie, a mis en lumière les phénomènes
d'accumulation des pays développés aux dépens des pays en
développement. Les auteurs de la théorie de la dépendance
(Samir AMIN, André GUNDER Frank, Pierre JALEE, Enzo FALETTO,
etc.)d'inspiration marxiste, ces auteurs ont notamment proposé les
concepts d'échange inégal et de la division internationale pour
expliquer le cycle de la dépendance économique des pays en voie
de développement par rapport aux pays dits développés. La
théorie de la dépendance touchait à la fois aux dimensions
interne et externe de l'exploitation des sociétés qu'elle
analysait. C'est-à-dire qu'il ne s'agissait pas simplement de montrer
les mécanismes de l'exploitation capitaliste des pays en voie de
développement par des sociétés transnationales et
multinationales, mais également de démontrer que le
système d'exploitation capitaliste des économies nationales des
pays dominés servait de support et de relais à l'exploitation
capitaliste et monopolistique par des firmes internationales.
Pour RIST (1996),il s'agissait de penser le rapport
développement et sous-développement de manière globale,
dans une perspective historico-structurale, pour montrer que la domination
externe est relayée par une domination interne et que les classes (ou
les alliances de classes) au pouvoir changent en fonction de la structure
interne des économies. Il y a donc dans cette optique un
phénomène de lutte entre les classes sociales pour la domination
et la direction de la société et les luttes à
l'intérieur de chaque formation sociale sont caractérisées
par le mode de production de chacune des sociétés
concernées.
La théorie de la dépendance a constitué
pendant plusieurs années la réponse des théoriciens des
pays en voie de développement ainsi que des auteurs marxistes au
système d'accumulation capitaliste mondiale. Cependant, cette
théorie a fait l'objet de plusieurs critiques, notamment parce qu'elle
ne remettait pas fondamentalement en cause l'économisme du
système capitaliste fondé sur la croissance ininterrompue de
l'économie.
XXVIII. II-7-3.
Théorie des pôles de croissance
La théorie des pôles de croissance a
été développée par l'économiste
François Perroux dans les années cinquante. Elle postule que la
croissance n'apparaît pas uniformément dans l'espace, mais qu'elle
se concentre plutôt en pôle ou en zone de croissance dont les
effets se diffusent sur l'économie immédiate. Selon Philippe
AYDALOT (1985), la théorie des pôles de croissance est
à la fois une théorie du développement économique,
mais aussi une théorie de la diffusion spatiale de la croissance et du
développement. L'avènement de cette théorie a
marqué un changement important dans l'approche classique du
développement économique, car selon cette conception, la vie
économique ne résulte pas de l'action d'agents isolés en
situation de concurrence, mais de l'action spécifique d'unités
économiques [entreprises] qui par leur position et leur dimension
peuvent jouer un rôle dominant.
Au plan de la localisation spatiale, la théorie des
pôles de croissance tend à montrer que la croissance se concentre
dans l'espace, alors qu'au plan du développement économique, le
pôle est un mécanisme inducteur de croissance. La théorie
des pôles de croissance a été très populaire et
très utilisée dans le monde. Toutefois, il semble que le
développement des pôles de croissance a aussi des effets pervers
comme la polarisation du développement dans un espace
délimité, ce qui contribue à créer des espaces
marginalisés autour du pôle de développement. La
théorie des pôles de croissance n'a pas toujours donné les
résultats escomptés, à tout le moins pour le
développement des régions excentriques.
XXIX. II-8.QUELQUES FACETTES DU
DEVELOPPEMENT
Cette partieprésente quelques facettes du concept du
développement et les thèses soutenues par certains auteurs.
XXX. II-8-1.
Développement endogène
Le développement endogène est né avec la
nécessité de freiner les inégalités du
développement dans l'espace et de territorialiser le
développement.C'est une conception du développement basé
sur les ressources disponibles localement, notamment les savoirs, les
expériences, les cultures et le leadership local. Il prend en compte la
manière dont les populations se sont organisées localement et ont
appris à vivre dans leur environnement, avec l'ouverture
nécessaire pour intégrer les connaissances et les pratiques
extérieures. Il inclut les systèmes d'apprentissage et
d'expérimentation historiques générés localement,
en vue de la satisfaction des besoins ressentis par les populations, et
projette de construire des économies locales et suffisamment ouvertes
pour permettre d'y retenir l'essentiel des bénéfices.
Pour Philippe AYDALOT (1985),le développement
endogène est une approche territoriale du développement plus
qu'une théorie de la croissance économique. Il est territorial,
communautaire et démocratique. Ainsi, le territoire est à la base
du développement ; c'est dans un espace particulier que le
développement s'incarne et prend sa source. Il est le fruit de chacune
des composantes territoriales d'un espace, c'est-à-dire les composantes
naturelle, culturelle, économique et sociale. Il est communautaire
puisqu'il fait appel à la participation de la population et
démocratique puisqu'il suppose des structures démocratiques pour
sa mise en oeuvre.
Pour certains auteurs le développement endogène
concerne davantage les pays en développement que les pays
développés. Il est vrai qu'au niveau international, le
développement endogène, connu aussi sous le vocable «
self-reliance ». D'autres (Stöhr, WEAVER, SACHS, PLANQUE, GUIGOU,
BASSAND) parlent de développement autocentré. Pour
Clyde WEAVER, il s'agit du développement par le bas, Bernard
PLANQUE l'assimile au développement décentralisé, ou de
développement ascendant pour Michel BASSAND. De plus, la prise de
conscience environnementale et l'élaboration de théorie comme
celle de l'écodéveloppement, énoncée entre autres
par Ignacy SACHS, a influencé aussi la théorie du
développement endogène.
Somme toute, le développement endogène est
basé sur les besoins fondamentaux des personnes (alimentation, logement,
éducation, travail) et non sur les besoins de la croissance du
marché. Il est axé sur la valorisation des ressources locales au
plan des ressources naturelles, au plan de la culture locale ainsi qu'au plan
des savoir-faire locaux. Le développement endogène est un
développement qui se veut intégré, qui s'effectue à
petite échelle, qui peut parfois proposer une forme d'autarcie
sélective. Le développement endogène s'effectue parfois
dans un contexte d'économie informelle, c'est-à-dire une
économie souterraine non comptabilisée et en dehors des normes de
l'économie officielle.
Ainsi, pour RIST (1996),le concept de développement
autocentré se situe comme une tentative pour objectiver de façon
cohérente des principes et des modes de vie qui ont existé depuis
le début de l'humanité. Selon lui, cette formalisation
s'effectue par rapport au paradigme du développement fondé sur la
croissance, l'accumulation, l'acquisition d'avantages liés à la
concurrence, les gains du commerce international et l'exploitation des
situations dominantes.
Au demeurant, Le développement endogène vise
à rendre les populations responsables de leur destin commun, de leur
insertion dans des ensembles régionaux plus étendus, et des
opportunités qu'elles offrent localement aux générations
futures.
XXXI. II-8-2.
Développement participatif
Le développement participatif, basé sur le
principe de l'approche participative sous-entend une vision du
développement qui accorde une place privilégiée à
l'implication des populations à la définition des
problèmes locaux, à l'identification des solutions et à
leur mise en oeuvre, afin de contribuer à donner plus
d'efficacité et de durabilité aux programmes qui en
résultent. Le principe fondamental de la participation étant le
partage de savoir et de pouvoir, il invoque une approche participative
stipulant que population n'est pas un gisement d'information mais un partenaire
avec qui il faut échanger et partager l'information utile. La
participation, c'est penser et faire avec et non pour, c'est la
responsabilisation, la concertation et la négociation.
L'émergence de ce concept en Afrique, à la fin
des années 1970, découle du constat des limites des
stratégies de développement adoptées au cours des deux
premières décennies des périodes postcoloniales. Ces
approches qui étaient centralisées et verticales, ne laissaient
aucune place à une participation des populations aux processus de prise
de décisions. Au contraire, l'Etat s'est positionné comme
étant en mesure de définir lui-même les besoins des
populations et de décider des actions nécessaires pour les
satisfaire alors que le seul moyen de réussir une politique c'est d'en
confier la réalisation à ceux qui ont intérêt
qu'elle réussisse.
Avec une vision plus globale, le développement
participatif suppose davantage de démocratie, un plus grand rôle
pour les organisations locales, une plus grande autonomie administrative, le
respect des droits de la personne humaine, y compris les systèmes
juridiques efficaces et accessibles.
XXXII. II-8-3. Développement
durable
La définition classique du développement durable
provient du
rapport
Brundtland 1972 de la Commission mondiale sur l'environnement et le
développement. « Le développement durable est un
mode de développement qui répond aux besoins du présent
sans compromettre la capacité des
générations
futures de répondre aux leurs ». Ce rapport
rappelle le propos prêté à
Antoine de
SAINT-EXUPERY: « Nous n'héritons pas de la Terre de
nos ancêtres, nous l'empruntons à nos enfants ». Ce
rapport insiste sur la nécessité de protéger la
diversité des gènes, des
espèces et de
l'ensemble des
écosystèmes
naturels terrestres et aquatiques, et ce, notamment, par des mesures de
protection de la qualité de l'
environnement, par la
restauration, l'aménagement et le maintien des
habitats
essentiels aux espèces, ainsi que par une
gestion durable de
l'utilisation des populations animales et végétales
exploitées.
Cette préservation de l'environnement doit être
accompagnée de la satisfaction des besoins essentiels en ce qui
concerne l'
emploi, l'
alimentation, l'
énergie, l'
eau, la salubrité. Cela
étant, on se heurte à une difficulté, qui est de
définir ce que sont les
besoins des
générations présentes, et ce que seront les besoins des
générations futures. On pourrait retenir par exemple les besoins
élémentaires pour se nourrir, se loger, et se déplacer.
Dans ce contexte, le développement durable a
été inséré parmi les
Objectifs
du millénaire pour le développement fixés par
l'ensemble des États membres de l'ONU. Afin de subvenir aux besoins
actuels sans pour autant se reposer sur l'utilisation non durable de
ressources
non renouvelables, le développement durable repose sur trois
principes fondateurs :
Ø Le développement qui répond aux besoins
du présent sans compromettre la capacité des
générations futures à répondre à leurs
propres besoins. Deux concepts sont inhérents à cette
notion ;
Ø Le concept de « besoins », et
plus particulièrement des besoins essentiels des plus démunis,
à qui il convient d'accorder la plus grande priorité ;
Ø L'idée des limitations que l'état de
nos techniques et de notre organisation sociale impose sur la capacité
de l'environnement à répondre aux besoins actuels et à
venir.
Ainsi, compte tenu de la vision du développement
durable qui exige selon une nouvelle démarche :
« agir local, penser global »,
cette formule employée par
René Dubos au
sommet sur l'environnement de 1972, est souvent invoquée dans les
problématiques de développement durable afin de mettre sur pieds
un ensemble de mécanismes d'actions environnementales propres à
chaque communauté mais visant de façon globale à la survie
de l'environnement et à la satisfaction des besoins des
générations du futures
XXXIII. II-9.
Limites de la littérature disponible et originalité du
travail
Ce chapitre portait sur la revue
de littérature déployée dans le cadre notre recherche. Les
concepts suivants ont été analysés :
l'écologie, l'environnement, les Nkola/Ngyéli et le
développement. Il fait ressortir une littérature importante et
riche. Celle-ci laisse apparaitre que l'écologie et l'environnement sont
deux éléments complémentaires qui définissent et
garantissent la survie de l'humanité si leurs gestions obéissent
aux normes et principes d'éthique pouvant satisfaire les besoins des
générations du futur.
Par ailleurs, au-delà de toutes les informations que
nous avons collectées sur les Nkola/Ngyéli, l'état
vieillissant de ces données et leur non actualisation au niveau de leur
recensement, laisse apparaitre un flou sur l'effectif crédible de la
population Pygmée en Afrique en général, au Cameroun, et
à Lolodorf en particulier.
Les données glanées sont
essentiellement descriptives et revêt un aspect purement clinique.
Cependant, il revient de constater qu'un accent particulier n'a pas
été porté sur leur délimitation à une
socioculture donnée. Compte tenu de ces manquements et conscient de ces
limites, nous avons trouvé judicieux d'exprimer l'originalité de
notre travail dans un cadre purement anthropologique c'est-à-dire
socioculturel dans la mesure où nous allons traiter la question de
l'écologie, de l'environnement, et du développement dans un
rapport direct à la culture desNkola/Ngyéli de Lolodorf.
CHAPITRE III :
Ce chapitre se propose de faire l'ethnographie de la
déforestation chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf. En effet, il
nous invite à présenter l'évolution de la
déforestation au Cameroun et le cadre juridique sur le lequel il se
fonde. Il fait ressortir sa fonction, son évolution, les textes, les
lois les arrêtés et les décrets qui
légifèrent ce phénomène.Par ailleurs, seront aussi
développés, l'avènement de la déforestation
à Lolodorf sur les aspects légaux, la machine institutionnelle
qui intervient, les acteurs sur le terrain, les technologies mobilisées,
les superficies couvertes, les espaces exploitées et les usages faits
des produits exploités.
XXXIV. III-1.
ORIGINE ET EVOLUTION DE LA DEFORESTATION AU CAMEROUN
L'exploitation forestière à des fins
commerciales a débuté pendant la période coloniale, dans
les années 1880, et a pris de l'ampleur après les années
1920. Depuis l'accession du pays à l'indépendance en 1960,
l'interaction entre les sociétés commerciales d'exploitation
forestière et les fonctionnaires de l'État, dans le cadre d'un
fonctionnement clientéliste, a déterminé le rôle des
forêts dans l'économie nationale.
La coupe du bois au Cameroun est en plein développement
depuis la fin des années 1960. Le premier stimulant important date des
années 1970, quand le réseau ferroviaire a été
prolongé jusqu'à l'est du Cameroun. Des forêts
équatoriales impénétrablessont ainsi devenues accessibles
et les coûts des transports se sont considérablement
réduits. C'est à cette période que denombreuses
entreprises européennes ont étendu leurs activités ou ont
quitté les zones déboisées d'Afrique de l'Ouest pour venir
au Cameroun. Depuis 1980, le bois constitue la deuxième source de
recettes d'exportation du Cameroun après le pétrole, avec environ
25 % des rentrées de devises du pays, surpassant de loin toutes les
autres matières premières agricoles.
Cependant, un code forestier avait été
promulgué en 1982 afin d'assurer l'exercice de l'exploitation
forestière dans le territoire national. Mais, celui-ci n'était
plus adapté aux nouveaux enjeux économiques, sociaux et
environnementaux du début des années 1990. Les mêmes
règles s'appliquaient indistinctement à toutes les zones
forestières, sans tenir compte des intérêts
spécifiques des communautés riveraines, des populations
autochtones, de l'Etat ou de l'industrie. Les droits des populations locales,
en particulier, se résumaient strictement aux seuls termes de «
droits d'usage ». Le Code ne comportait aucune disposition imposant une
gestion durable des forêts et les conventions d'attribution de titres
à court terme (d'une durée maximale de cinq ans) encourageaient
l'exploitation rapide. La fiscalité forestière était
fondée sur les taxes à l'exportation. La possibilité
d'utiliser la fiscalité pour encourager les pratiques de gestion durable
était totalement ignorée.
C'est donc dans cette optique que des mesures seront prises
pour concilier les enjeux économiqueset l'impact écologique et
social en vue de la lutte contre la pauvreté. A cet effet, le Cameroun
a révisé son code forestier et a par la suite adopté une
nouvelle politique visant à exploiter durablement les forêts et
impliquer les communautés locales. Cette initiative le place parmi les
pays qui témoignent d'une forte volonté autant dans l'intention
que dans l'agir, pour une gestion durable des ressources naturelles, de la
conservation de la biodiversité et pour l'amélioration des
conditions de vie de leurs populations. Mais si ce processus est porteur
d'espoir pour certains, il crée des soucis à d'autres à
cause des difficultés liées à l'avenir de certaines
communautés vulnérables et marginalisées.
Pour que le secteur forestier camerounais évolue et
contribue à la relance de l'économie, il fallait en modifier
significativement le cadre législatif et réglementaire. C'est
ainsi que le gouvernement a défini en 1993 pour sa politique
forestière des orientations claires et à long terme.
XXXV. III-2. REFORMES LEGALES DE LA FORESTERIE AU
CAMEROUN
Les politiques d'exploitations forestières mises en
oeuvre par les administrations coloniales successives sont à l'origine
des problèmes empêchant les populations, l'économie
nationale et l'environnement de bénéficier des forêts du
Cameroun. Cette situation s'est accentuée après
l'indépendance, du fait d'un système d'influence et de
clientélisme dans lequel les ressources forestières sont devenues
l'une des monnaies d'échange du soutien politique.
Après la crise économique de 1985, le Cameroun a
sollicité d'urgence le soutien de la communauté internationale
pour l'aider à restaurer son équilibre macroéconomique,
ses secteurs productifs et sa croissance. Initialement le secteur forestier ne
fut pas considéré comme prioritaire par les responsables
politiques. Toutefois, une évaluation réalisée en 1988 par
le Plan d'Action sur les Forêts Tropicales (PAFT) a retenu l'attention
générale parce qu'elle révélait que la contribution
du secteur forestier à l'économie nationale, était
largement inférieure à son potentiel et que l'industrie
forestière était obsolète, peu rentable et
préjudiciable à l'environnement.
Cependant, comme relevé plus haut, les forêts
camerounaises faisaient partie d'un mode de fonctionnement politique
entièrement investi par la corruption et le clientélisme. C'est
dans ce contexte que sont nées les réformes du secteur forestier.
Rétrospectivement il apparaît qu'elles se sont appuyées
essentiellement sur trois piliers:
Ø La Loi de 1994 portant régime des forêts
;
Ø L'effet de levier économique ;
Ø Les synergies et rapprochements qui se sont
noués entre les partisans
XXXVI. III-2-1. Loi de 1994 portant
régime des forêts
La dévaluation du FCFA en 1994 a augmenté la
pression sur les forêts équatoriales. Après cette
dévaluation, les revenus del'exportation du bois ont doublé
tandis que les coûts de production de la foresterie n'ont
augmenté. Le bois du Cameroun est soudainement devenu beaucoup plus
concurrentiel sur le marché mondial et les marges
bénéficiaires pour les produits d'exportation ont sensiblement
augmenté. L'augmentation de la production du bois s'est
considérablement accélérée après la
dévaluation de 1994 : durant l'année fiscale 1994-1995, la
production de bois a augmenté de 34% par rapport à l'année
précédente. Les années suivantes également, la
récolte du bois a continué à croître. Outre la
production du bois, l'intensité de l'abattage par hectare a
également augmenté. Certaines essences de bois, dont
l'exploitation ne semblait pas intéressante auparavant, ont
également été abattues à partir de 1994. Un an
après la dévaluation, l'exportation des produits du bois avait
augmenté de 80 %. Le nombre d'entreprises forestières est
passé au cours de cette période de 194 (1994) à 351
(1995). Le monde des affaires a marqué le plus grand
intérêt pour l'exploitation forestière. Mais
l'intérêt des investisseurs étrangers a également
fortement augmenté après 1994. L'importance des activités
malaises et thaïlandaises dans la foresterie camerounaise est
particulièrement frappante.
Ces reformes constituaient le socle du projet de Loi portant
régime des forêts présenté à
l'Assemblée Nationale en 1994. Ce projet a introduit cinq
réformes fondamentales :
Ø Le domaine forestier a été
réparti en zones distinctes selon les types d'utilisations prioritaires
: forêts permanentes, y compris aires protégées,
forêts de production commerciale et forêts non
permanentes ;
Ø Des titres d'exploitation forestière à
long terme ont été attribués par le biais d'adjudications
publiques fondées sur des critères techniques et
financiers ;
Ø Les organes gouvernementaux ont été
réorganisés pour assurer la gestion des forêts (fonctions
de régulation et de contrôle). Les activités de production
ont été transférées aux concessionnaires et aux
forêts communautaires et communales ;
Ø Les sociétés privées qui
s'étaient vu accorder des concessions à long terme pour
l'exploitation des forêts permanentes de production, ont dû
élaborer et mettre en oeuvre des plans d'aménagement forestier
sous la supervision de l'administration chargée des
Forêts ;
Ø Les communautés locales et les communes ont pu
faire valoir leurs droits à gérer des forêts dans le cadre
d'une relation contractuelle avec l'administration.
XXXVII. III-2-2.
Effet de levier économique
La crise économique a fourni à la Banque
Mondiale et au FMI l'occasiond'initier de profondes réformes dans le
secteur forestier, permettant de le faire contribuer à la croissance
économique et de s'attaquer au clientélisme. Le secteur forestier
constituait en effet l'un des axes majeurs des trois Programmes d'Ajustement
Structurel successifs négociés par le Cameroun auprès de
la Banque Mondiale et du Fonds Monétaire International: le Crédit
de relance économique de 1994, les deuxième et troisième
Crédits d'Ajustement Structurel - CAS II et CAS III - approuvés
respectivement en 1996 et en 1998. Toutefois, le Crédit de relance
économique et le CAS II ont peu intéressé le gouvernement,
de sorte qu'ils n'ont pas fait avancer le programme des réformes.
Contrairement aux précédents programmes d'ajustement structurel,
le CAS III comportait des mesures détaillées
spécifiquement relatives aux forêts. Ces dernières,
visaient à générer et tester un engagement politique en
faveur de la Loi de 1994, à créer un cadre réglementaire
de mise en application, à définir un nouveau régime fiscal
pour le secteur forestier, à améliorer la transparence et la
gouvernance,et à lutter contre la corruption. L'ensemble de ces mesures
devait aboutir à la mise en place d'un système d'accès aux
ressources forestières plus transparent, mieux géré et
durable, susceptible de bénéficier davantageaux populations
camerounaises et à l'environnement.
XXXVIII. III-2-3. Synergie et partenariat
Les réformes n'auraient pu progresser sans
l'énergie collective et les apports décisifs d'un ensemble de
partenaires. Il est question d'un ensemble des partenaires nationaux et
internationaux qui entrent dans la gestion des forêts, l'application, le
respect du cadre juridique des forêts et le suivi de ces
décisions. Il s'agit principalement de :
XXXIX. III-2-3-1. Fond monétaire
international
L'accent mis par le FMI sur la transparence et la
réforme économique, fut un moyen décisif d'inciter l'Etat
à réformer son secteur forestier. Le Crédits d'Ajustements
Structurel III et ses mesures concernant le secteur forestier, ont tenu une
place majeure dans sa « Facilité pour la croissance et la
réduction de la pauvreté », ainsi que dans le suivi de
l'initiative PPTE. Les questions incessantes du FMI sur les avancées de
la réforme forestière l'ont imposée dans les discussions
et ont obligé les décideurs à s'en préoccuper.
XL. III-2-3-2. Communauté des
bailleurs de fonds
Le dialogue sur les réformes forestières avait
commencé entre la Banque mondiale et le gouvernement, mais le
débat s'est considérablement élargi à la fin des
années 1990 lorsque la communauté des bailleurs de fonds qui a
fortement soutenu les réformes a remis en cause le déroulement
des étapes et la priorité accordée à certaines
mesures. Par exemple, la France et le Canada ont estimé que les
institutions de BrettonWoods accordaient trop d'importance à la
fiscalité ainsi qu'au mode d'attribution des concessions, et pas assez
à la promotion de plans d'aménagement forestier. Bien que parfois
houleux, les débats ont enrichi le contenu desréformes et
favorisé le développement d'une approche commune. Cetteapproche a
été formalisée par l'adoption d'un Code de Conduite
paraphé en janvier 2006 par les représentants de 13 partenaires
engagés de longue date dans le secteur et parmi lesquels se trouvent des
organisations non gouvernementales internationales : le Canada, l'Allemagne, la
France, les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l'Union Européenne, la Banque
Africaine de Développement, la Banque mondiale, l'Organisation des
Nations Unies pour l'Alimentation et l'Agriculture (FAO), le Programme des
Nations Unies pour le Développement, le WWF, le SNV et l'Union mondiale
pour la Nature (UICN). Ce Code comprend une grille adoptée conjointement
par le gouvernement camerounais et la communauté des bailleurs de fonds
pour l'évaluation des avancées dans le secteur forestier.
XLI. III-2-3-3.
Organismes Non Gouvernementales
L'attention portée par les ONG aux objectifs de
transparence dans la gestion et de conservation des forêts, la faiblesse
institutionnelle du gouvernement et la nécessité où il
était d'améliorer sa crédibilité internationale,
ont donné à des ONG de renom l'occasion de prendre part aux
réformes forestières.
Ø Global Witness et Resource
Extraction Monitoring
Ces deux organismes permettent au gouvernement et à ses
partenaires de détecter les activités suspectes dans les parcs et
concessions et de rendre l'inaction difficilement justifiable. Des Observateurs
Indépendants ont été associés aux adjudications de
titres forestiers et aux contrôles de terrain, et ont
préparé des rapports faisant état de la qualité de
ces opérations. Ils ont aidé à créer un registre
national des infractions forestières et fauniques. Avec le lancement de
missions de courte durée financées par le Royaume-Uni en 2001,
Global Witness est devenu le premier observateur indépendant de
l'application des lois au Cameroun, avec le soutien, ensuite, de la Banque
mondiale, du DFID et de l'Union Européenne. REM a succédé
à GW en 2005, et collabore avec les agents du MINFOF en participant
à des contrôles de terrain et à des études sur des
questions spécifiques de gouvernance forestière. L'observation
repose sur des techniques éprouvées d'investigation de terrain et
utilise des informateurs locaux. Il participe au suivi des contentieux, et
partage ses constats avec un Comité interne de lecture et directement
avec le Ministre.
Ø Global Forest Watch
Cet organismesoutient les efforts de contrôle forestier
du Cameroun par la télédétection et les systèmes
d'information géographique, et tient à jour, à l'intention
des utilisateurs, des gestionnaires des ressources forestières et
d'autres acteurs intéressés par les forêts camerounaises,
une base de données cartographiques et statistiques. La Banque mondiale
a obtenu que soient nouées des relations officielles entre le
gouvernement camerounais et le GFW dans le cadre du troisième Programme
d'ajustement structurel (CAS III).
Ø World Wide Fund
Ila été impliqué dans la plupart des
initiatives en matière de politique et de conservation
forestière, dont l'organisation du premier Sommet des chefs
d'État d'Afrique centrale sur la conservation et la gestion durable des
Forêts tropicales tenue à Yaoundé en 1999. Ces assises ont
mis sur pieds, l'élaboration des orientations nationales pour la
préservation de la biodiversité et la gestion des principales
aires protégées.
Ø LaWildlife Conservation Society
C'est une organisation engagée un important partenariat
avec le MINFOF et CAMRAIL (la société camerounaise nationale de
transport ferroviaire), elle leur apporte son assistance technique pour la
protection de la diversité biologique des parcs nationaux et la lutte
contre le braconnage.
Ø L'Union Mondiale pour la
Nature
Elle contribue à l'élaboration de politiques de
préservation de la biodiversité et de gestion des ressources
naturelles, de la faune et de la viande de brousse. Elle soutient
également la participation des parlementaires et de la
société civile à l'élaboration de ces politiques et
au suivi de leur mise en oeuvre.
Ø Last Great Ape Organization
Ses actions consistent à s'attaquer aux pratiques
corrompues qui compromettent la protection de la biodiversité en
collaborant avec le MINFOF dans la lutte contre le braconnage commercial et la
vente des espèces protégées. En plus de participer au
monitoring des infractions, LAGA est aussi impliquée dans toutes les
étapes de l'application de la loi camerounaise sur la faune, depuis les
interpellations de terrain jusqu'aux procès par les tribunaux. Elle
entend également investiguer les opérations forestières
dans la mesure où celles-ci faciliteraient les infractions à la
loi sur la faune.
XLII. III-2-4. Autres applications juridiques
Les trois piliers ci-dessus évoqués ne sont pas
les seuls cadres juridiques et législatifs qui entrent dans le domaine
de la foresterie au Cameroun. Un ensemble des Arrêtés,
Décrets et Décisions viennent compléter ces piliers
majeurs. Il s'agit principalement de :
Ø Décret n° 95/531/PM du 23 août 1995
fixant les modalités d'application du Régime des forêts;
Ø 1997, attribution des deux premières
forêts communautaires au Cameroun;
Ø Décision n° 253/D/MINEF/DF, portant
adoption du document Intitulé : «Manuel deProcédures
d'Attribution et des Normes de Gestion des Forêts Communautaires»
Ø Arrêté n° 252/A/CAB/MINEF/DF,
portant adoption du modèle de Convention deGestion des Forêts
Communautaires dans le Domaine National;
Ø 23 février 2001 : signature par le Ministre de
l'Environnement et des Forêts d'une
Lettre circulaire limitant l'exploitation industrielle dans
les Forêts communautaires;
Ø 21 décembre 2001 : signature par le Ministre
de l'Environnement et des Forêts del'Arrêté fixant les
modalités d'attribution en priorité aux communautés
villageoisesriveraines de toute forêt susceptible d'être
érigée en forêt communautaire;
Ø 26 juin 2002 : Décision du Ministre de
l'Environnement et des Forêts fixant lesmodalités d'exploitation
en régie dans le cadre de la mise en oeuvre des planssimples de gestion
des forêts communautaires;
Ø Avril 2003 : présentation aux institutions
financières internationales par le Cameroun, du Document
stratégique de réduction de la pauvreté (DSRP);
Ø Décembre 2003 : État des lieux de la
foresterie communautaire au Cameroun.
XLIII. III-3.
DEFORESTATION LEGALE AU CAMEROUN
Le Cameroun a une superficie de 475 000 KM2 et
compte environ une populationde 20 millions d'habitants. Il se
caractérise par une grande diversité de températures et de
reliefs, du nord sahélien et sec au sud humide. Ce pays a une grande
diversitéethnolinguistique et recèle plus de 200 groupes.Dans le
sud humide et forestier, les groupes ethniques bantous dominants se
caractérisent par une structure sociale qui tourne
généralement autour du clan familial, avec une autorité
plus diffuse. Un certain nombre de groupes ethniques marginalisés tirent
également leur subsistance de ces forêts : les
Nkola/Ngyéli.
L'exploitation forestière y date depuis. Elle est
régit sur un ensemble de lois, décrets et décision. Les
institutions étatiques qui entrent dans ce fonctionnement partent de
l'administration centrale qui délègue ses pouvoirs et ses
compétences aux Ministères en charge des Forêts, et de
l'environnement.Toutes les institutions forestières au Cameroun agissent
sous le contrôle de l'Etat. Il est le garant de cette politique et assure
la mise sur pieds des textes et lois au niveau de l'Assemblée Nationale.
Le ministère des Forêts devenu ministère de l'Environnement
et des Forêts (MINEF) en 1992, puis ministère des Forêts et
de la Faune en 2004 reste le principal acteur national dans le domaine de la
foresterie au Cameroun.
Vu le statut décentralisé de l'Etat camerounais,
l'administration centrale transfert certaines de ses compétences au
niveau des délégations régionales, départementales
jusqu'aux postes forestiers d'arrondissement. Au niveau de l'Administration
Centrale, c'est-à-dire les Directions, les Sous directions, et les
Cellules, il est question de la mise sur pieds des stratégies et
mécanismes d'intervention qui orientent l'exploitation et la sauvegarde
de la forêt. Quant aux services déconcentrés, le rôle
revient d'appliquer sur le terrain les programmes d'actions émises
depuis l'Administration Centrale. Toutes ces unités administratives
décentralisées assurent chacun à son degré au
respect des prérogatives étatiques mises sur pieds dans le cadre
de la foresterie. Les collectivités locales décentralisées
que sont les Communes, entrent aussi dans la gestion des forêts.
L'objectif viséest depermettre aux populations riveraines de lutter
contre la pauvreté en profitant des bénéfices issus de
leurs forêts.
Mais, aucune exploitation forestière du Cameroun ne
satisfait pour l'instant à la définition minimale de
durabilité, à savoir laréalisation d'une récolte de
bois durable.
XLIV. III-3-1.Déforestation dans le massif forestier
de Lolodorf
Cette unité vise à présenter
l'évolution de la déforestation dans le massif forestier de
Lolodorf, les acteurs qui l'ont menée, les superficies couvertes, la
technologie mobilisée, les espèces exploitées, les
quantités journalières, mensuelles, annuelles et les usages faits
des produits issus.
XLV. III-3-1-1.
Bref aperçu historique et types de déforestations.
Le milieu physique de Lolodorf présente un
environnement riche en ressources forestières. Cette situation a
suscité l'intérêt de plusieurs exploitants. En dehors du
fait que cet environnement a longtemps été propice à
l'agriculture itinérante sur brûlis pratiquée par les
populations autochtones, aucune activité d'exploitation industrielle
n'avait alors jamais été signalée jusqu'aux années
1960. Il a donc fallu attendre les lendemains de l'indépendance pour
voir les premières sociétés forestières
foulées les forêts de Lolodorf. Mais cependant, les formes de
déforestation connues sont de plusieurs types et les superficies
couvertes varient selon le type d'exploitation.
XLVI. III-3-1-1-1. Déforestation liée à
l'occupation de l'espace vital
Il est question d'une forme d'exploitation de l'environnement
organisée dans le cadre de la construction des maisons d'habitation. Ces
espaces peuvent variés en fonction de la taille de la population. Elle
est négligeable dans les zones rurales et dans les campements
Nkola/Ngyéli. La superficie couverte peut atteindre un demi-hectare.
XLVII. III-3-1-1-2. Déforestation
liée à l'agriculture itinérante sur brûlis
C'est une forme de déforestation pratiquée par
les populations rurales dans la réalisation des champs agricoles pour
l'autoconsommation. Ses superficies couvrent en moyenne moins de 2 hectares.
XLVIII.
III-3-1-1-3.Déforestation liée à la réalisation des
espaces de loisirs et aux routes
C'est une forme d'exploitation de l'environnement qui
répond aux besoins de réalisation des espaces de distraction, de
loisirs et de communication. Elle concerne la construction des aires des jeux,
des tribunes, des hangars et des routes. Les espaces occupées sont
fonctions de l'infrastructure construite.
XLIX. III-3-1-1-4. Déforestation liéeaux champs
industriels
Il s'agit d'une forme de déforestation mise sur pieds
par les entreprises et les multinationales industrielles dans le cadre de la
réalisation des champs et exploitations à rendement industriel.
Les espaces mobilisés peuvent atteindre des dizaines d'hectares.
L. III-3-1-1-5. Déforestation liée à la
coupe de bois
C'est la plus grande forme de déforestation
qui affecte le plus l'environnement à Lolodorf.Elle
impliquel'exploitation des essences et produits forestiers sur plusieurs
aspects.Les superficies relatives à cette forme de déforestation
peuvent atteindre des milliers de d'hectares.
LI. III-3-2. Différents acteurs
sur le terrain
Les données recensées auprèsdes documents
trouvés au service d'archives de la Sous-Préfecture de Lolodorf,
et celles collectées auprès de certains informateurs mentionnent
que l'exploitation était effectuée par les entreprises telles que
la SAFOR et la SFIL. Dans la localité de Lolodorf cette exploitation de
grande envergure s'est intensifiée dans les années 1980 avec la
société Bois du Cameroun qui après changement de licence
d'exploitation a procédé à la modification de son nom et
est devenue SFOC. Par la suite, se sont installées la WIJMA, la BECOL,
le PK et EXIBOIS.
LII. III-3-2-1.
SAFOR
Cet acronyme renvoie à la Société
d'Exploitation Forestière du Cameroun. Elle est une multinationale
d'origine Française. Ses activités ont trait à
l'exploitation des essences forestières par coupe. Ces produits sont
envoyés à l'étranger en grume et d'autres sont
débités ici dans les scieries. Elle a été l'une des
premières sociétés forestières ayant
exploité le massif forestier de Lolodorf.
LIII. III-3-2-2. SFIL
La signification de ce sigle fait
référence à la Société Forestière et
Industrielle de la Lokoundje. C'est une filiale de la multinationale d'origine
Belge appelée Decdvenaere. Ses activités d'exploitation
répondent également aux besoins de la satisfaction à la
demande en bois industriel et architectural en Europe. Les produits sont
envoyés à l'étranger en grume et d'autres sont
débités ici dans les scieries. Elle a été l'une des
premières sociétés forestières ayant
exploité le massif forestier de Lolodorf.
LIV. III-3-2-3.
SFOC
C'est la Société Forestière du Cameroun.
A l'origine, elle s'appelait SEBC (Société d'Exploitation du Bois
du Cameroun) c'est suite au changement de licence qu'elle est devenue SFOC.
Elle est une multinationale Française qui fait dans l'exploitation
forestière industrielle. Comme les autres, ses travaux portent sur la
coupe de bois et la transformation dans les scieries avant exportation vers
l'Occident. Elle est l'une des firmes forestières ayant exploitée
le massif forestier de Lolodorf.
LV. III-3-2-4.WIJMA
Elle est une entreprise forestière d'origine
Néerlandaise nommée Wood I-JoistManufacturers Association. Comme
d'autres sociétés forestières, ces travaux d'exploitations
sont basés sur la coupe de bois et la commercialisation vers les
marchés occidentaux. Elle est l'une entreprise forestière ayant
exploitée le massif forestier de Lolodorf.
LVI.
III-3-2-5.BECOL
Cetacronyme renvoie à la
signification Belize ElectricityCompagny. C'est une filiale britannique. Comme
d'autres sociétés forestières, ses travaux d'exploitations
sont basés sur la coupe de bois et la commercialisation vers les
marchés occidentaux. Elle est l'une entreprise forestière ayant
exploitée le massif forestier de Lolodorf.
LVII. III-3-2-6. PK
Ce diminutif renvoie à Paul et Khoury. C'est une
filiale Française qui fait dans l'exploitation forestière
industrielle. Ces travaux d'exploitations sont basés sur la coupe de
bois et la commercialisation vers les marchés occidentaux. Elle a
effectué ses travaux d'exploitation dans le massif forestier de Lolodorf
vers les années 1994. Ses travaux étaient basés vers la
partie Nord avec les villages Ngoyang, Nkouambpoer I et II.
LVIII. III-3-2-7. EXIBOIS
Cetacronyme signifie Export Industriel du Bois. C'est une
firme Française. Ses travaux d'exploitations sont basés sur la
coupe de bois et la commercialisation vers les marchés occidentaux. Elle
les a effectués dans le massif forestier de Lolodorf vers les
années 1994. Ses travaux étaient focalisés dans les
villages Bigbally,Bikui, Kaba, Mbango où vivent plusieurs
Ngyéli.
LIX. III-3-3.
Technologies mobilisées
Les travaux d'exploitations forestières se passent dans
un environnement hostile qui est difficile d'accès. Cette
hostilité nécessite la mobilisation d'une technologie plurielle
adaptée à chaque aspect de la déforestation. Cette
technologie s'applique sur l'homme qui est l'acteur de la
déforestation, sur l'environnement physique qui héberge les
produits de la déforestation, et sur les produits de la
déforestation destinés à la consommation.
LX. III-3-3-1. Au niveau de l'homme
Toutes les cultures ne font pas les mêmes distinctions
entre les humains et les non-humains.L'homme, être biologiquement
uniforme sur toute la planète aujourd'hui a produit une diversité
de croyances, de valeurs, de représentations de la nature et du lien
qu'il entretient avec la nature. Si nous sommes tous semblables par nature,
nous sommes aussi tous différents par culture.
Selon HUYBENS (2010), L'arbre est un symbole axial : il
pousse vers le haut et vers le bas, il relie le monde souterrain (les enfers),
le monde terrestre (humain) et le monde divin. L'arbre à prières
rend possible la communication avec le monde divin et rend accessible une
information sacrée. Il est parfois lesigne de la présence de
l'Absolu au sein de la réalité humaine.
Cependant, l'abattage d'un arbre invoque un rite ou une sorte
de prière destinée à demander pardon à Dieu
créateur, face à l'acte qui va être posé. Ce rite
consiste à présenter à Dieu les difficultés de
survie auxquelles on fait face et qu'à travers l'exploitation de cet
arbre quelques solutions de bien être peuvent trouvées.
Ainsi s'agissant de la technologie mobilisée sur
l'homme plusieurs éléments sont utilisés. Nous les tenues
spéciales de couleurs moins claires pour la couverture du corps ;
les gangs; les lunettes; un casque; des couvre oreilles; et les bottes.
Photo
N°1 : Scène d'abattage traduisant la tenue
arborée par un scieur. Cette tenue laisse apparaitre un casque de
protection, des gants, une combinaison spéciale et les bottes. Cette
scène a lieu dans la forêt de Nabozouendi.
Source : Nzie, 2012.
LXI. III-3-3-2. Au
niveau de l'environnement
L'environnement est le cadre physique qui héberge les
produits de la déforestation. A ce niveau, une technologie
particulière est mobilisée :
Ø Les machettes et les limes utilisées dans le
cadre de la création des pistes d'entrée en forêt, la
prospection des essences et le nettoyage de la partie de l'arbre où la
tronçonneuse va scier ;
Ø Les boussoles et les GPS servant à s'orienter
dans les grandes forêts ;
Ø Les voitures tout terrain pour le transport des
équipes de travail ;
Ø Les tronçonneuses;
Ø Les Bulldozers pour créer les pistes dans les
forêts, remorquer les essences abattues, remorquer les grumiers en cas de
difficultés.
Photo
N°2 :Scène d'abattage dans un chantier de
Mbango : ici elle traduit l'utilisation d'une tronçonneuse et
décrit aussi la protection du scieur au niveau de la tête.
Source :Nzie, 2013.
Photo N° 3 :
Bulldozer mobilisé pour la création des voies d'accès vers
les forêts, le débarquage des billes de bois et le transport des
employés.
Source :Nzie, 2011.
Photo N°
4 :Engin 928 mobilisé pour le chargement des camions
grumiers dans un chantier de Ngoyang
Source :Nzie, 2013.
LXII. III-3-3-3. Au niveau des produits exploités
Les produits de la déforestation sont destinés
à la consommation. Pour ce faire, ils doivent être
transportés des forêts vers les lieux où ils seront
écoulés. La technologie mobilisée est fonction du poids du
produit. Pour cela quelques équipements sont utilisés :
Ø Les camions grumiers
Photo
N°5:Camion grumier mobilisé pour le transport des billes
de bois. Lourdement chargé, ce camion est en provenance de Koumbizikpour
Douala.
Source : Nzie, 2013.
LXIII. III-4. PHASE
PRATIQUE DE LA DEFORESTATION ET ESSENCES EXPLOITEES
Cette sous partie fait une description de la
déforestation dans le massif forestier de Lolodorf, et les
différentes essences exploitées.
LXIV. III-4-1. Phase pratique des travaux
D'après Ernest KOH, dans les années 85,
où j'ai été recruté en tant que Chauffeur au sein
de la société forestière SFOC, les travaux d'exploitation
consistaient d'abord à la prospection des essences et à leur
identification.
Avant l'entrée en forêt, le processus
consistait à se rendre auprès de l'administration locale
s'acquitter des modalités pratiques et des pots de vin. Les Populations
riveraines qui devraient bénéficier des avantages issues de cette
exploitation, ne recevaient que quelques sacs de riz, cartons de poissons du
vin et du tabac. Et parfois toute opposition des villageois face à ce
phénomène était sévèrement
réprimandée par l'administration.
La coupe sélective intervenait donc avec les
essences d'une grande importance. Etant donné que cette
société avait une scierie à Eséka et une coupe de
bois qui procédait à une exploitation en grume et en sciage,
toutes les essences étaient exploitées dont les plus connus sont
le Bubinga, le Moabi, le Movingui, l'Azobé. Elle s'occupait aussi de
l'aménagement des voies forestières pour le transport de leurs
produits. La destruction de la forêt et la dégradation de
l'environnement ont été considérable avec une estimation
mensuelle de près de 8000 à 9000 mètres cube
jusqu'à sa fermeture en 1997 avec la compression des ouvriers.
Après il y a eu une autre société
forestière nommée PK qui a étendu ses travaux
d'exploitation de l'autre côté de la route dans le massif
forestier de Ngovayang à partir de Ngoyang vers Melombo. Les processus
d'exploitation étaient quasiment les mêmes mais avec certaines
disparités. Au village Nkouambpoer I il eut un affrontement entre les
employés de cette société et les villageois parce que les
billes de bois avaient été déposées sur un terrain
de football. Après quelques années d'exploitation, elle finit
elle aussi par fermer ses portes avec des mois de salaires impayés aux
ouvriers. La tonalité exploitée serait estimé à
près de 4000 mètres cube le mois.
La forêt ou vivent les Bantu et les communautés
Ngyéli de Ngongo I, II et Mbango Pinda a eu à son tour la
présence de la société néerlandaise nommée
WIJMA et EXIBOIS. Vers les années 90, ces sociétésont
également entrepris leurs travaux d'exploitation dans la zone de
Lolodorf et Bipindi. Bien qu'ayant pris en compte quelques doléances des
communautés riveraines avec l'amélioration du réseau
routier locale, la construction de certains bâtiments scolaires, l'emploi
de certains jeunes, le processus n'a pas échappé à la
politique des sacs de riz, cartons de poissons, bouteille de vin et des
enveloppes considérables aux autorités administratives en place.
Les populations locales étaient sommés sans mots dire de voir
leur forêt partir en ruine. Pour les Ngyéli qui y vivent de
façon quotidienne et dont dépendent leur bien-être, la
désolation n'était que chaotique. Les besoins de chasse, de
pêche, de collecte et en pharmacopée commençaient par
s'exprimer en manque. Alors que les avantages que ceux-ci ont pu tirer des
sociétés forestières sont limités, les
inconvénients sont multiples. Par conséquent, la quantité
et la qualité des essences exploitées demeurent inestimables.
Ainsi pour MASHUERPierre, un Ngyéli du campement de
Mbango Pinda, l'attente des réponses satisfaisantes face à
nos préoccupations demeurent dans une impasse. Où devons-nous
vivre maintenant? Que mangeront nos enfants et nous-mêmes? Avec quelles
écorces nous guérirons-nous ? Le gouvernement et nos
frères Bantu tiennent-ils compte de notre situation? Allons-nous
survivre avec la disparition de la forêt ? Autant
d'inquiétudes qui matérialisent la situation des
Nkola/Ngyéli face à l'érosion de la
biodiversité.
Après les multiples études de faisabilité
relatives au projet Pipeline, la phase pratique du lancement des travaux a pris
effet en 2OO1. Le projet Pipeline Tchad-Cameroun avait pour principal objectif,
la construction d'un oléoduc servant à transporter le
pétrole brut des champs pétrolifères de Doba au Tchad, en
traversant le Cameroun vers les côtes maritimes de Kribi. Il mesure 1070
kilomètres dont 890 sur le territoire Camerounais et son emprise large
de 30 mètres. Le coût total du projet est d'environ 2 500
milliards de francs CFA.
L'oléoduc dans sa phase de réalisation a
entraîné la destruction du couvert végétal et le
décapage des sols le long de l'emprise foncière. En dehors de la
déforestation à grande échelle, de la perturbation des
écosystèmes, ses travaux ont aussi entraîné des
déséquilibres socioculturels. Aujourd'hui encore le tuyau qui
transporte ce pétrole crée des destructions environnementales
importantes.
Voici d'ailleurs ce que nous a confié Nkouelisong, un
Nkola de Nkouambpoer II : « nous avons cru que l'argent que
les blancs nous ont donné lors du passage de leur pipeline sur nos
cultures allait nous aider à réaliser quelque chose de durable
mais cet argent maudit s'est envolé on a même encore revendu le
matériel qu'ils nous ont donné à titre de compensation.
Mais aujourd'hui ce long serpent est sous nos terres et on nous interdit
fermement d'entreprendre quoi que ce soit sur son passage de peur de
mourir ». Ces quelques paroles ne peuvent que traduire avec
amertume, le regret de ce Nkola face au passage de l'oléoduc dans leur
zone d'habitat.
Pour le projet GEIFEC qui a pris effet dans la forêt
communautaire de Mbango, les travaux d'exploitation ont été
effectués pendant deux ans. Bien que les populations riveraines aient
tirés des petits avantages, les torts causés à
l'environnement sont largement supérieurs. Les principes d'accès
dans la forêt consistaient à des réunions de
négociation avec l'administration et ensuite avec les populations
locales. Etant donné qu'un haut cadre du commandement militaire
était l'un des actionnaires de ce projet, les villageois ne pouvaient
malheureusement s'opposer face au cahier de charge non respectée par
celui-ci. Les essences exploitées ici étaient d'une importance
capitale. Pour les Ngyéli qui y vivent les réserves de chasse ont
été détruites avec la plus grande frayeur. Les sites pour
cultes des ancêtres démolis, les essences très riches pour
la pharmacopée ont également été emportées,
laissant ceux-ci dans un lendemain inquiétant. La tonalité
estimée pouvait faire en moyenne 3OOO mètres cube par mois,
nous a confirmé Paul Felix MIMBOH, chargé du volet
environnemental dans ce projet.
Toutefois, malgré le fait que ces exploitations ont
grandement dégradé le couvert végétal de Lolodorf,
elles ont néanmoins apporté d'une part, un soutien aux
populations Bantu. Dans ce cas d'espèces, quelques personnes ont pu
trouver des emplois permettant d'assurer le bien-être. Cependant les
populations Nkola/Ngyéli n'ont pas à leur niveau ressenti les
bienfaits de cette exploitation. Pour elles, le phénomène a
considérablement détruit leur milieu de vie sans
bénéfices durables.
Cependant, les essences exploitées sont d'une grande
importance et concerne plusieurs types d'arbres. Le tableau ci-dessus
présente au mieux les essences exploitées.
LXV. III-4-2.
Usages des essences exploitées
Les essences exploitées dans le cadre de la
déforestation sont soumises à des utilisations variées. Le
tableau ci-dessus fait une description de l'utilisation des différentes
essences exploitées dans le massif forestier de Lolodorf.
Noms scientifiques
|
Noms commerciaux
|
Usages
|
Enantiachlorantha
|
Enantia, moambe jaune
|
Médecine (écorce)
|
Entandrophragmacylindricum
|
Sapelli
|
Meuble menuiserie et sculpture
|
Entandrophragma utile
|
Sipo
|
Meuble menuiserie et sculpture
|
Baillonellatoxisperma
|
Moabi
|
Meuble, menuiserie, sculpture et Médecine
|
Guirbourtiatesmanii
|
Bubinga
|
Médecine/industrie du bois
|
Naucléadiderrichi
|
Bilinga
|
Médecine/Industrie du bois
|
Pterocarpussoyauxii
|
Padouk
|
Médecine/Industrie du bois
|
Miliciaexcelsa
|
Iroko
|
Industrie du bois
|
Terminaliasuperba
|
Fraké
|
Bois de coffrage
|
Triploclitonscleroxylon
|
Ayous
|
Bois de coffrage
|
Irvingiagabonensis
|
Mangue de brousse
|
PNFL (fruit et culinaire)
|
Coula edulis
|
Arbre à noisette
|
PNFL (fruit)
|
Rincinodendronheudoltii
|
|
PNFL (culinaire)
|
Garcinia cola
|
Bitter cola
|
PNFL (aphrodisiaque)
|
Tableau N° 2 :
Quelques types d'essences et leurs utilisations
Source : Nzie, 2013.
LXVI. III-5. DEFORESTATION ILLEGALE ET
TECHNOLOGIES MOBILISEES
Il s'agit de décrire la déforestation
pratiquée dans l'ignorance totale de l'ensemble des prérogatives
légales prévues par le gouvernement camerounais. Mais, notre
attention sera focalisée sur notre site d'étude.
LXVII. III-5-1. Déforestation
illégale
La corruption largement répandue et les rares
contrôles sur le terrain favorisent les activités illégales
dans le domaine de la foresterie.C'est un grave problème pour les
autorités camerounaises car il génère d'importantes pertes
de revenus. Ces pratiques constituent en même temps un grand obstacle
pour le passage à des méthodes de foresterie durable. Le respect
strict de la législation dans de telles circonstances est
considéré comme un désavantage concurrentiel. Et il ne
semble malheureusement pas que la situation soit près de changer.
En effet, la déforestation comme nous l'avons dit plus
haute est conditionnée dans un cadre légal. Celui-ci impose la
conduite à tenir pour être en commun accord avec l'administration.
Cette légalité sous-entend, la possession des titres
d'exploitation délivrée par l'administration centrale, les titres
de coupe, et les autorisations d'exploitation dans le cas des forêts
communautaires. Vient s'ajouter ici, le respect du payement des taxes fiscales
auprès des services financiers de tutelle.
Cependant, une autre forme de déforestation dite
illégale se produit dans l'ignorance totale de ces normes. Depuis
quelques décennies, elle est en vue au Cameroun en général
et à Lolodorf en particulier. Devant le silence conditionné des
autorités administratives, et la pauvreté qui ruine les
populations locales, l'accélération de cette pratique est le
quotidien que subissent les forêts de Lolodorf de nos jours.
D'après MBPILE Moise, notable à la chefferie de
groupement Ngoumba centre, « la coupe frauduleuse du bois a
commencé au niveau de Mougué dans la grande forêt de
Nkouambpoer I il y'a plus de dix ans. Le Chef de groupement a pris une
décision relative à l'arrêt de cette exploitation mais
celle-ci n'a pas connu grand effet compte tenu de la misère, la
corruption et la pauvreté qui sévissent dans sa zone de
compétence. Les populations autochtones font entrer dans leur
forêts, des gens venant de tous les horizons. Ces exploitants sont en
majoritaires composés des Anglophones avec leurs équipes de
scieurs et de transporteurs. Le processus consiste d'aller camper en brousse en
bande et puis passer à la prospection des essences importantes comme le
Bubinga, le Moabi et d'autres essences forestières économiquement
rentables. Après avoir localisé un arbre le Bantu à qui
revient la parcelle de forêt vend cet arbre à une valeur
très négligeable. Les produits issus de cette exploitation sont
transportés ensuite par camion vers Lolodorf.
Un autre modèle est lié au
prélèvement d'écorce de certains arbres. Celui-ci est
effectuée en général par les populations Bantu et les
jeunes Nkola/Ngyéli. Le principe consiste à localiser un arbre en
pleine forêt à l'abattre et puis à le débarrasser de
ses écorces.
Plusieurs exemples peuvent être ici
énumérés. A Nkouambpoer I, un certain MAFANG Simon aurait
bradé aux exploitants, un Bubinga qui servait à toute la
communauté pour des besoins thérapeutiques. A titre compensatif,
il aurait reçu une somme de 100000 F CFA. Convoqué par le chef du
village, ce dernier déclara que l'arbre en question lui appartenait et
qu'il était libre de le vendre afin de résoudre ses multiples
problèmes. L'absence de cet arbre cause de nos jours, des sérieux
problèmes aux populations Bantu et Nkola qui y vivent.
Au campement de Mougué situé à une
dizaine de kilomètres de Nkouambpoer I, le même scénario
s'était déroulé. Un exploitant serait venu corrompre les
Nkola en leur proposant d'acheter le Bubinga qui leur servait de culte des
ancêtres, de lieu de rites de purification et de consultations diverses.
Ceux-ci après consommation d'alcool frelaté auraient
accepté la transaction contre en plus de l'alcool, du tabac,d'un sac de
riz, une somme de 50000 F CFA. L'arbre fut coupé alors que les Nkola
étaient ivres. Le lendemain matin surpris par cet acte, ils durent
s'exposer à ce que l'arbre soit débité. La situation
entraina des conflits d'une ampleur inquiétante. Une fois
l'administration consultée, l'arbre avait été
débité et transporté vers la route. Mais face aux
multiples évènements malheureux qui suivirent l'exploitant en
question, celui-ci serait revenu présenter ses regrets aux Nkola. Peine
perdue dans la mesure où l'arbre avait causé plusieurs accidents
mortels avant d'atteindre sa destination finale.
Toutefois, il revient de souligner que Lolodorf devient de
plus en plus une cible pour des multiples exploitants forestiers
illégaux. Plusieurs agissent sous le couvert de certaines
autorités administratives et politiques. Cependant, cette exploitation
qui sévit sur les forêts sans aucune éthique des normes
environnementales est loin de respecter les prérogatives
inhérentes à la Loi N° 94 du 20 Janvier 1994
portant régime des forêts et de la faune au Cameroun.
Interrogé sur cette question, MABANG, un exploitant
sous-traitant nous a livré ces
informations : « Le Cameroun c'est le Cameroun
qu'est-ce que tu appelles documents administratifs liés à
l'exploitation forestière ? Toute cette paperasse ne nous sert
à rien on sait comment ça se passe. Avant de lancer ton chantier
dans un village, tu vas d'abord causer avec le Chef de terre, le Commandant de
brigade, le Commissaire de sécurité publique, le Commissaire
spécial et le Chef de poste forestier. Une fois l'arrangement
passé avec ces autorités, le reste tu négocies sur place
avec les villageois qui sont lessivés par la misère et les
problèmes de toute sorte. Pour les Pygmées tu leur donnes juste
un peu à manger, à boire et à fumer même s'ils se
plaindront plus tard. Toutes les promesses que tu leurs feras ne seront
totalement jamais tenues parce que tu sais que l'administration est à
tes cotés. Et pour convoyer mes planches par camion vers Douala
ou Yaoundé, je cause avec les autorités qui intiment l'ordre
à leurs subalternes de ne pas déranger mon camion dans leur zone
de compétence. Le reste se gère avec des arrangements sur les
barrières de contrôles en route.
LXVIII. III-5-2.
Technologies mobilisées
Dans ce cas d'espèce, la technologie mobilisée
ici est différente de celle utilisée dans la déforestation
légale. En général, elle s'applique aussi sur trois
éléments que sont :
Ø L'homme : une tenue spéciale n'est pas
requise. Ils adaptent leur tenue en fonction du contexte de travail;
Ø L'environnement : Elle fait intervenir les
équipements comme : Les machettes, les limes, les
tronçonneuses, les engins.
Ø Au niveau des produits, les Pick-up, les taxis, les
motos, les tricycles, les camions plateaux et de sur quoi l'homme sont
utilisés.
Photo
N°6 : Moto utilisée pour le transportdu personnel, et
du matérielprès deNgoyang
Source : Nzie, 2013.
Photo N°
7:Scène de sciage d'un arbre à l'aide d'une
tronçonneuse reliée à une lame géante dans un
chantier illégal de Ngomanguelé
Source : Nzie, 2013.
Photo
N°8:Transporteur d'écorce de Womi en provenance de
Mimbitivers le domicile d'un sous-traitant illégal à Nkouambpoer
I.
Source : Nzie, 2013.
Par ailleurs, d'autres activités se développent
grâce au phénomène de la déforestation
illégale. Nous avons par exemple le petit commerce, la prostitution, la
vente de la drogue, la prolifération de l'alcoolisme, les jeux au
hasard, le vol à bande.
Bien que la quantité et la qualité
exploitées soient inférieures à celles
réalisées par les firmes industrielles d'exploitation, les
populations locales d'une part et lesNkola/Ngyéli en sont les victimes
immédiates. Les forêts sont détruites, saccagées,
pillées à grande échelle, et les conséquences ne
peuvent qu'être fâcheuses.
LXIX. III-5-3. Types d'essences exploitées
Les essences directement visées sont. L'Azobé,
Le Bubinga, le Bibolo, le Doussié, l'Iroko, la Moabi,le Movingui, le
Padouk, le Sapelli, le Sipo...En dehors de ces essences, on note aussi
l'exploitation le du Womi et de l'Ezok pour leurs écorces.
Photo N°
9 : Stock des planches de Moabi cachées derrière
une case à Nkouambpoer I
Source : Nzie, 2013.
Photo N°
10 : Stock d'écorces de Womi séchées
près du campement d'Oding Otoh
Source : Nzie, 2013.
L'usage conféré à ces produits
exploitésest fonction de type d'essences. Elles sont toutes
utilisées à titre commercial. Cependant, les unes sont
utilisées pour l'industrie de la menuiserie dans la fabrication des
meubles, lits, décors intérieurs et extérieurs, les
constructions d'habitat, les chantiers ferroviaires, les ponts... d'autres par
contre sont utilisés pour la consommation directe et aussi pour les
besoins médicinaux.
Somme toute, il apparaît clairement que loin
d'être un facteur de développement tel qu'émis par les
objectifs des pouvoirs publics, dans le processus de la recherche du
bien-être des populations, les deux types d'exploitations ci-dessus
indiquées sont plutôt un indicateur de sous-développement
et de misère pour les communautés locales. Mais, les
Nkola/Ngyéli sont les plus touchées dans la mesure où la
recherche à la satisfaction des besoins qui repose sur la forêt,
fait aux difficultés de plusieurs sortes.
CHAPITRE IV :
Ce chapitre montre la fragilité de la culture
Nkola/Ngyéli face à la déforestation. Il explique en
détail comment la culture des Nkola/Ngyéli a subit un changement
avec l'avènement de la déforestation. Ce mécanisme de
transformation s'observe lorsqu'on compare la culture des Nkola/Ngyéli
avant la déforestation à leur mode de vie après la
déforestation.
LXX. IV-1.MILIEU HUMAIN
En général, la plus part des Pygmées en
Afrique centrale qui vivent dans la forêt,ont un mode de vie lié
à leur environnement. Ils développent un style de vie
traditionnel mis sur pieds de façon continue afin de répondre aux
besoins de survie et de bien-être. Mais chaque fois que leur
environnement est menacé, un changement s'opère au niveau de leur
culture.
LXXI. IV-1-1. Mode d'occupation de l'espace avant la
déforestation
L'occupation de l'espace chez les Nkola/Ngyéli se
caractérisait par une structure d'habitat particulière, le
campement était constitué d'un petit nombre de huttes
hémisphériques disposées en cercle. Le campement, lieu
géographique, était le cadre social de la vie
économique ; c'était aussi et surtout, la
matérialisation d'une communauté. La configuration spatiale en
cercle l'indique clairement. La vie quotidienne se déroulait devant la
hutte en plein air sur la place centrale sauf lorsqu'il pleuvait. Ce groupe
local était constitué d'un certain nombre varié de
familles conjugales généralement monogamiques.
En forêt, les Nkola/Ngyéliavaient deux sortes de
résidence. Celui habité de façon permanente s'appelait le
Mpbogà en Nkola et Kwàtoen Ngyéli.
Village de lisière, ce milieu de vie était construit en fonction
de l'environnement forestier et à côté des petits cours
d'eau utilisés pour la lessive, la vaisselle, les toilettes, la
pêche et pour certains rites. Les huttes qu'on y trouvaitétaient
construites à base des larges feuilles de marantacées ou
d'Anthocléista. D'après Aristide BITOUGA(2011),Ces feuilles
étaient fixées à l'ossature végétale de
l'habitat : une encoche était faite sur la nervure, près du
pétiole et les feuilles étaient crochetées en rang. Cette
disposition conférait un aspect en écailles de pangolin.A
l'intérieur de ces huttes on trouvait des lits fabriqués à
l'aide des matériaux locaux. Les peaux d'arbres servaient de matelas et
les nattes aussi.
L'autre habitat ou campement de forêt était
appelé Nyàgô.Il étaitconstruit par les
Nkola/Ngyéli lorsqu'ils devraient s'absenter de leur campement permanent
pour les activités cynégétiques. Le type d'habitat
était le même mais imposait aussi une proximité avec un
cours d'eau ou un ruisseau, qu'il s'agisse d'un camp de ligne de pièges,
d'un bivouac pour quelques jours ou d'une partie de chasse collective pour
plusieurs semaines. Pour Aristide BITOUGA (2O11), le choix de l'emplacement
d'un campement est stratégique dans le sens où il tient de la
configuration physique des lieux. En effet, la faible densité en gros
arbres pour faciliter le dégagement du site ; un sol relativement
meuble pour faciliter l'ancrage de l'ossature de l'habitat et peu inondable,
tiennent lieu de ces exigences. En outre les Bakola/Bagyéli
privilégiaient aussi des sites naturels propices à l'occupation
humaine comme les abris sous roches.
Ici, la présence de plusieurs clans dans une même
communauté donnait lieu à structuration clanique groupale. On
retrouvait donc dans une communauté, plusieurs groupes.
Photo N° 11 : Campement de
lisière pour chasse à Yom
Source : Nzie, 2013.
LXXII. IV-1-2. Mode d'occupation de
l'espace après la déforestation
L'occupation de l'espace chez les Nkola/Ngyélide nos
jours a considérablement changé pour plusieurs raisons
liées à la déforestation. Les huttes sont de moins en
moins présentes dans les campements. On note de plus en plus la
présence des maisons construites en planche et en terre battu et avec un
toit soit en tôles, soit en feuilles de paille de raphia. La
quasi-totalité de ces maisons sont offertes aux Nkola/Ngyélipar
des organismes d'aide au développement qui mesurent le degré de
difficultés auxquelles les Nkola/Ngyéli font face suite à
la déforestation qui a envahi leur lieu d'habitation et leur cadre de
survie.
Depuis la volonté de l'Etat de sédentariser les
Pygmées suite à la dégradation de la forêt, ces
derniers ont progressivement trois types de résidence. Une
résidence d'origine appelée Mpbogà qui est sert de
campement d'origine et le cadre social de la vie économique ; c'est
également la matérialisation d'une communauté. La vie
quotidienne se déroule de moins en moins devant la hutte en plein air
sur la place centrale parce que les distances considérables à
parcourir en pleine forêt à la recherche des produits de survie
imposent des temps important que les Nkola/Ngyéli passent en
forêt. En dehors des Nkola/Ngyéli eux-mêmes, plusieurs
Bantou passent une bonne partie de leur temps avec eux en brousse pour leurs
travaux de déforestation. Les matelas sont fréquemment
utilisés dans la mesure où les arbres qui fournissaient leurs
écorces pour la fabrication des couchettes deviennent de plus en plus
rares.
Photo
N°12 :Maison symbolisantun mixage de matériau dans un
campement de Matsindi.
Source : Nzie, 2013.
Le Nyàgô restel'autre type d'habitat de
forêt. Il estconstruit par les Nkola/Ngyélidans le cadre des
campagnes liées aux activités cynégétiques. Mais de
plus en plus, il est utilisé aussi par certains Bantu et certains
exploitants forestiers comme base de leurs activités de
déforestation. Le troisième type d'habitat est celui construit
à côté des Bantu. En effet, les Nkola/Ngyéli ont des
résidences aux abords des routes. Ces résidences sont construites
par eux-mêmes soit par les organismes d'aides. Ces lieux d'habitation
sont utilisés par les Nkola/Ngyéli pour la recherche du
bien-être. La forêt ne produisant plus assez des produits pour
survivre, ils sont obligés de quitter momentanément la
forêt pour y résider dans les villages Bantu à la recherche
de la satisfaction de leurs besoins.
Photo N°
13 :CasesNkola construites à Samal, village Bantu pour la
recherche du bien-être
Source: Nzie, 2013.
LXXIII.
IV-1-3.Alimentation avant la déforestation
Pour subvenir à leurs besoins, les Nkola/Ngyéli
ont mis sur pieds une organisation qui leur permet d'assurer leur alimentation
journalière. Cette alimentation très riche en protéines,
vient surtout des animaux chassés, consommés frais ou
boucanés ; du poisson, des champignons, des ignames, des tubercules
échangées avec les Bantu, du miel et d'autres produits
collectés dans la nature. Ces aliments sont acquis de plusieurs
manières.
LXXIV. IV-1-3-1. Chasse
Selon notre informateur, les Nkola/Ngyéline
vivaient que de la chasse. Ils utilisaient différentes techniques et
différents matériels pour chasser. Mais les outils de chasse les
plus en vue étaientl'arbalète avec des fléchettes
empoisonnées, des flèches, les filets et les chiens pour la
chasse à courre. Le jeune chasseur devait d'abord subir un rituel qui
constituait à se familiariser aux techniques et aux interdits
liés à la pratique de la chasse.
L'alimentation principale des Nkola/Ngyéli reposait sur
la consommation de la viande. A la diversité des animaux
répondait une grande variété de techniques de capture. A
l'aide d'arbalète et de fléchettes empoisonnées, on sait
tuer les singes en haut des arbres, comme on enfume les porcs épics et
les rats dans leur terrier. Pour la chasse au porc sauvage, l'équipe des
chasseurs se constituait en petit groupe expérimenté. Mais pour
capturer les petites antilopes, l'on se réunissait en large troupe pour
rabattre ces derniers vers les filets de chasse. Mais l'action la plus grave,
la plus prestigieuse, la plus dangereuse aussi, était la chasse à
l'éléphant, pour laquelle les Nkola/Ngyéliétaient
justement renommés depuis des siècles.
Les gibiers capturés ici servaient à
l'autoconsommation, et aux dons faits aux Bantu d'appartenance. Ces animaux
étaient préparés de différentes manières,
généralement dans les sauces de fruits collectés en
brousse. Et mangés à l'aide des ignames sauvages.
LXXV. IV-1-3-2. Pêche
Comme la chasse, la pêche était aussi un moyen de
survit des Nkola/Ngyéli.Elle était pratiquée par les
femmes. La technique consistait à constituer des barrières sur un
cours d'eau en le segmentant et en vidant ces parties afin de collecter les
poissons, les grenouilles Goliath et les toutes les variétés de
crustacés que l'on pouvait trouver. La pêche se pratiquait pendant
les périodes de février et Mars.
LXXVI. IV-1-3-3. Ramassage
Attentifs au rythme des saisons, fins connaisseurs des
ressources disponibles, lesNkola/Ngyéli cherchaient chaque jour dans
l'épaisseur du sous-bois, les légumes de leur repas. Les
tubercules des lianes, d'ignames sont déterrés à l'aide
d'un bâton à fouir, alors que certaines feuilles de lianes et
d'arbustes étaient cueillies à la main. Pour les noix de certains
arbres, elles étaient soigneusement cassées à l'aide d'une
petite hache pour extraire l'amande oléagineuse. Les champignons
étaient spécialement appréciés comme les bestioles,
les chenilles comestibles, les termites, les escargots achatines. L'on pouvait
également attraper quelques mammifères vertébrés
qui se déplacent lentement sur le sol ou dans les arbres. La cueillette
était une activité essentiellement réservée aux
femmes.
Photo
N°14 : Ignames sauvages collectées dans une
forêt d'Oding Otoh
Source : Nzie, 2013.
LXXVII. IV-1-3-4.
Troc
Il a longtemps été le système
d'acquisition de certains produits consommables. En effet, le principe
consistait à procéder à une sorte d'échange entre
les Nkola/Ngyéli et les Bantu. Les produits échangés
étaient d'une part le gibier, le miel, le strophantus du
côté des Nkola/Ngyélicontre les tubercules de manioc, les
régimes de banane douce, et l'alcool chez les Bantu.
LXXVIII. IV-1-4. Alimentation après la
déforestation
De nos jours dans une forêt devenue pauvre, les
Nkola/Ngyéli ont du mal à assurer leur bien-être comme il a
été il y a quelques décennies. Cette alimentation repose
de moins en moins sur du gibier devenu progressivement rare. Les techniques
d'appropriation des aliments de consommations ont considérablement
changées.
LXXIX. IV-1-4-1. Chasse
Notre informateur nous a livré ce point de vue :
les Nkola/Ngyéline vivent plus que du gibier car il est devenu
très rare suite à l'état de nos forêts. De plus en
plus nous achetons du poisson dans les boutiques, du riz, du bâton de
manioc. Les outils et les techniques pour chasser aussi ont changé.
Certaines ne sont même plus utilisées de nos jours. Le fusil est
devenu l'arme fatale sur laquelle les jeunes se ruent à son utilisation.
L'alimentation principale des Nkola/Ngyéli repose de
moins en moins sur la consommation de la viande. Les bruits causés par
la technologie mobilisée dans le cadre de la déforestation et le
braconnage éloignent progressivement les animaux vers les parties les
plus reculées de la forêt. Certains animaux sont devenus
très rares. Au niveau des techniques, l'usage des filets et de
l'arbalète ont disparu. Le fusil reste l'arme la plus redoutable
utilisée par les chasseurs. Les gibiers capturés servent en
dehors de la consommation, mais aussi à la vente.
LXXX. IV-1-4-2. Pêche
Comme la chasse, la pêche est aussi un moyen de survit
des Nkola/Ngyéli.Mais elle est de moins en moins pratiquée sur
les cours d'eaux à proximité des lieux où la
déforestation sévit. Que ce soit les bruits causés sur les
rivières, les déchets toxiques abandonnées dans ces cours
d'eaux, la pauvreté en matière de poissons et de crustacés
reste d'actualité.
LXXXI. IV-1-4-3. Ramassage
La déforestation ayant considérablement
détérioré la forêt, lesNkola/Ngyéli pratique
de moins en moins la collecte de leurs produits. En dehors de quelques
tubercules d'ignames sauvages déterrés à l'aide de la
machette, les noix de certains arbres, les champignons, le miel reste le plus
grand produit cueilli de façon saisonnier. La forêt ne pouvant
plus tout offrir, la pratique de l'agriculture avec la réalisation des
champs et le petit élevage des poulets est plus en plus présente
chez les Nkola/Ngyéli.
LXXXII. IV-1-4-4.
Troc
Ce système d'acquisition de certains produits
consommables est de moins en moins pratiqué chez les
Nkola/Ngyéli. En effet, la rareté du gibier, du miel et leur
accès à l'argent permet leur permet de vendre leurs produits et
de s'acheter tout ce qu'ils ont besoin. Toutefois, le troc reste au niveau des
produits come l'alcool et la cigarette contre du gibier et du miel. Par
ailleurs quelques écorces d'arbres exploitées par les
Nkola/Ngyéli sont aussi brandies sous forme de troc en échange
des produits consommables.
LXXXIII. IV-1-5. Médecineavant la
déforestation
Selon NKE-NDIH (2006),La santé a été
toujours une préoccupation majeure dans la collectivité depuis
l'aube de l'humanité. L'utilisation des ressources environnantes par les
populations de cette époque peut être considérée
comme origine de la pharmacopée.
Par définition, nous pouvons dire que la
pharmacopée est l'ensemble des pratiques de santé propres
à une communauté et dont les savoirs se transmettent de
génération en génération. Pour les
Nkola/Ngyéli, l'usage d'une pharmacopée très riche
qu'offrait la forêt permettait de résoudreles problèmes de
santé auxquels ils faisaient face.
Le domaine végétal était la base des
produits de cette pharmacopée. Un grand nombre de recettes utilisaient
des écorces, racines, feuilles, des épines et autres parties des
plantes pour les soins. A partir de ces éléments, ils obtenaient
des décoctions, des tisanes, des macérations, des cornets, de la
poudre pour scarification, des onctions, des injections par voie nasale, des
pâtes, etc. pour leurs différents soins. Le domaine animal
contribuait de façon notable, à la fabrication des produits pour
les soins quotidiens.
NKE-NDIH (2006), affirme à ce sujet, qu'il
n'était pas rare de trouver un pendentif d'ossements de gorille tenu par
une lamelle de peau d'animal autour du cou d'un enfant. Le but était de
permettre à l'enfant en question d'avoir des os durs comme celui de
l'animal en question. Les Pygmées Bakola/Bagyéli utilisaient
aussi souvent des poils de certains animaux (genette servaline,
Genettaservalina) qu'ils posaient soigneusement sur des brûlures pour les
guérir. Les poils adhèrent à la peau pour reconstituer
l'épiderme sans laisser de cicatrices.
Ils utilisaient aussi des dents bien séchées
de vipère qu'ils appliquent comme des épines sur des
articulations atteintes de rhumatisme. Ces applications font diminuer
l'intensité des douleurs ou les font partir complètement. Les
coquilles d'escargot dures étaient utilisées notamment pour
soigner les enfants atteints d'oreillon. Les mandibules étaient
massées par le côté pointilleux de cette coquille pour
faire baisser le gonflement des joues qu'occasionnait cette affection.
Certains oiseaux comme les perroquets étaient
chassés, non pas pour leur chair, mais beaucoup plus pour leurs plumes
qui sont notamment utilisées pour des blindages ou autres
utilités du domaine cosmique. L'avifaune était aussi
présente dans leur pharmacopée par l'utilisation des oeufs pour
certains mets cuisinés pour les soins des enfants. Les oeufs de poule
étaient aussi utilisés pour des soins concernant certaines
maladies relevant du domaine cosmique. Il n'est pas ainsi rare de trouver des
oeufs cassés jetés à un passage public chez les
Nkola/Ngyéli.Les soins de blindage étaientadministrés avec
des poulets qu'on plongeait dans des marmites contenant nombreuses
espèces (végétales, minérales, animales, etc.)
trempées dans de l'eau. Ensuite le poulet était frappé
à différents endroits du corps de la personne, afin de lui
ôter de mauvais esprits qui ne pourraient plus l'atteindre.
Plusieurs espèces à cornes, sont prisées
par les guérisseurs Nkola/Ngyéli, qui les utilisaient
tantôt comme cornes pour invoquer les esprits, tantôt pour
appliquer à certains endroits endoloris des malades. Nombreux
était aussi des traitements qui demandaient des viandes
particulières (tortues, etc.), mélangées à beaucoup
d'autres espèces, tant végétales que micro-organiques.
Le domaine minéral n'était pas en reste. Les
pierres utilisées étaient très lisse, soit de couleur
blanchâtre, soit noirâtre. Ces pierres chauffées
légèrement étaient utilisées pour certains
massages.
LXXXIV. IV-1-6.
Médecineaprès la déforestation
De plus en plus, la pharmacopée Nkola/Ngyélifait
face à des sérieuses difficultés liées à la
déforestation. Le domaine végétal qui était la base
des produits de cette pharmacopée est devenu très pauvre parce
que la forêt est progressivement vidée de ses ressources. La
rareté des arbres médicinaux, la disparition et
l'éloignement de certains animaux et oiseaux causent d'énormes
problèmes à la médecine Nkola/Ngyéli. De nos jours,
les pratiques de cette médecine ont considérablement
changé à cause de la forêt devenue très pauvre. Cet
état de chose fait perdre les lettres de noblesse à cette
médecine. Certaines séances de traitement qui se
déroulaient exclusivement en plein forêt sont de plus en plus
déportées vers les résidences aux abords des routes.
De plus en plus, la médecine occidentale entrent
progressivement dans les moeurs des Nkola/Ngyéli pour certains cas de
maladie vue la perte de puissance de leur médecine.
LXXXV. IV-1-7. Maladie avant la
déforestation
Lorsqu'on aborde le phénomène de la santé
et de la maladie par le biais de l'ethnomédecine, en empruntant donc le
chemin de la culture, on s'attend à s'éloigner du biologique pour
entrer dans la sphère du symbolique. La santé, c'est la situation
dans laquelle l'organisme réagit par une adaptation tout en
préservant son intégrité individuelle. La santé est
un état physique et mental relativement exempt de gêne et de
souffrance qui permet à l'individu considéré de
fonctionner aussi efficacement que possible dans son milieu. La santé,
c'est un état qui permet à celui qui en jouit de se consacrer
pleinement à son ou à ses projets et qui met toujours enjeu des
forces socio-culturelles, non inscrites dans le code génétique.
L'absence de cet équilibre se traduit alors par la maladie.
Lamaladie est une construction culturelle qui détermine
la frontière entre le normal et le pathologique, et exemple de
réification objectivant universelle, elle devient relative à un
référentiel et s'analyse en ressenti pathologique, individuel et
groupal. LONTSI D, cité par MBONJI, E (2009) affirme : le mot
maladie, doit se lire «le mal a dit» c'est-à-dire ce que
le mal nous a dit, nous invite à écouter la maladie ; la
maladie est un langage à décrypter par le malade et l'entourage,
un discours faisant ses à l'intérieur et à
l'extérieur du patient, par rapport à son réseau de
relation.
Pour les Nkola/Ngyéli, la maladie était
perçue comme un problème physique et psychologique qui surgit
suite à la fatigue de l'organisme physique et surtout au non-respect de
certaines normes et interdit prescrits pas leur culture. Elle allait
au-delà des apparences biologiques et du psychique pour intégrer
l'aspect mystique. Chez eux, la maladie se vivait en différentes
catégories. Les simples cas de maladie pathologique, psychiques et les
maladies d'ordre mystique qui ont un statut particulier car liés
à la compréhension des sorciers et autres initiés. Les
maladies étaient plus considérées sous l'ordre mystique
que de dysfonctionnement de l'organisme dû à un problème.
Les guérisseurs sorciers étaient convoqués pour redonner
la santé au sujet malade. Aucun cas de maladie n'était
traité dans les hôpitaux qui d'ailleurs existaient moins.
LXXXVI. IV-1-8.
Maladie après la déforestation
De plus en plus la représentation de la maladie est
progressivement en train de changer chez les Nkola/Ngyéli. La
forêt ne pouvant plus donner une pharmacopée riche, son
efficacité de moins en moins crédible ne permet plus de
résoudre les problèmes de santé de tout ordre. Seules les
maladies d'ordre mystique continuent à être bien prises en charge
et traitées. Les autres cas de maladie sont pris en charge et
traités dans les hôpitaux. Et avec les multiples
fréquentations et rapports entretenus avec les Bantu, l'existence de
certaines maladies comme le VIH/SIDA sont de plus en plus présentes chez
les Nkola/Ngyéli.
LXXXVII. IV-1-9. Système de croyances avant la
déforestation
Les Nkola/Ngyéli fondent leur conception du monde et
son origine sur « Kombàmàmû»
créateur des choses. Cet être surnaturel créa le ciel, la
terre, les eaux, la forêt et enfin l'Homme pour que celui-ci vienne vivre
en abondance. Selon BAHUCHET et DE FOY (1991), pour les Pygmées, la
forêt est le monde des esprits, où errent les âmes des
défunts, sous la domination de l'esprit de la forêt, maitre des
ressources. Ce sont eux qui permettent aux humains de prélever ce dont
ils ont besoin pour survivre.
Le système de croyance des Nkola/Ngyéli reposait
sur un Dieu créateur partagé à plusieurs autres sous dieux
en fonction de chaque activité. Ainsi le Dieu esprit créateur qui
s'est éloigné des humains est secondé auprès d'eux
par Nkùgù. C'est le plus grand esprit de la forêt qui
gouverne et oriente la vie des communautés Nkola/Ngyéli. Il
était évoqué au travers des cérémonies
rituelles pour les parties de chasse, de pêche, les séances de
guérison. La cosmologie place monde invisible de mânes
indifférenciés en position de médiateurs entre les vivants
et un esprit de la forêt, « dieu actif »
diffèrent du dieu créateur qui s'éloigné des
humaines. Pour s'adresser aux esprits, il n'y a pas de caste responsable de
cultes, et tout homme initié étaitconsidéré apte
à cette action. Cependant, l'aîné du groupe était
responsable des grands rituels éventuellement avec le devin et le
maître chasseur. Les actes religieux se divisaient en deux types :
de larges cérémonies publiques qui concernent la
communauté dans son ensemble, ou bien des rites intimes de petite
envergure, pour des propos d'ordre privé. Somme toute, ce système
de croyance avait trois fonctions fondamentales :
Ø Se rendre propice avec l'aide des forces
surnaturelles, afin de s'approprier abondance et fécondité
(propitiation) ;
Ø Découvrir les causes des désordres ou
le déroulement probable d'une action future (divination)
Ø Apaiser les esprits irrités, les mânes
en période de pénurie ou de conflit social, ou les esprits
animaux après la mort d'un grand animal au cours d'une partie de chasse
(expiation)
LXXXVIII. IV-1-10. Système de
croyances après la déforestation
De nos jours le système de croyances des
Nkola/Ngyéli est progressivement en train de changer. Ce système
de croyance qui reposait essentiellement sur la tranquillité de la
forêt est considérablement et progressivement perturbé par
la déforestation et les multiples bruits qu'elle occasionne au travers
de sa technologie mobilisée. L'inefficacité de ce système
de croyance se traduit par les multiples problèmes auxquels les
Nkola/Ngyéli font face sur les plans socioculturels.
Face à cette situation, les croyances dites modernes
fondées sur l'existence d'un Dieu suprême prônée par
les églises sont de plus en plus encouragées chez les
Nkola/Ngyéli qui éprouvent tant bien que mal la réelle
volonté de leur appartenance à ces églises. On peut donc
voir certains Nkola/Ngyéli fréquenter ces lieux de cultes
malgré eux.Questionné sur cette question, un de nos informateurs
du campement de Mimbiti I nous répondu en ces
mots :« Nkola ti mérè bé
nlannàndàndhéwàbasondonàntambongàNzambèminlùbàdîindzànà
mo péésîgi. Bîimérébiising'linà
N'zambé à kigàponi » « Le Nkola
n'a rien avoir avec les histoires de messe ou de paroisse, ni la
fréquentation de ces lieux même pas une certaine appartenance
à ces églises dont les Bantu sont en train de nous imposer
à adhérer. Nous savons que Dieu vit »
Photo
N°15 : Plaque d'une église à
Ngomanguelé
Source : Nzie, 2013.
LXXXIX. IV-1-11.
Rapport à l'autre avant la déforestation
Les Nkola/Ngyéli ont longtemps mené une vie de
soumission envers les peuples Bantu. Chaque communauté
Bakola/Bagyéli donnée était la propriété
d'un clan Bantu et puis une famille influente d'un clan pouvait
également avoir sa famille Nkola/Ngyélidans le groupe appartenant
au clan. Le nom du clan Bantu était directement donné au groupe
Bakola/Bagyéli parrainé. Les noms de personnes respectaient
également la volonté de ce contrat. Ainsi, les rapports
étaient essentiellement basés sur les dons faits par les
Nkola/Ngyéli en gibier, miel, strophantus et en main d'oeuvre lors de
défrichage et d'abattage des espaces agricoles,et les soins de
guérison.En outre ils étaient utilisés lors des
cérémonies funéraires et festives avec la
célébration de leur danse traditionnelle. En retour ils
recevaient les vieux tissus d'étoffe, du sel, de l'alcool, du tabac, des
chiots, des vieux habits. Le moindre dérapage était
sanctionné par les bastonnades publiques et autre humiliations. En bref,
les Nkola/Ngyéli ont toujours été les sujets de leurs
grands maitres Bantu qui avaient tout pouvoir sur eux.
XC. IV-1-12. Rapport à l'autre
après la déforestation
De nos jours les rapports entre les Nkola/Ngyéli et les
Bantu ont considérablement changé. La relation Grand maître
et petit sujet est complètement en train de donner place à une
situation d'autonomie des Nkola/Ngyéli. La soumission qui a longtemps
animé ces rapports est totalement dépassée. La
sédentarisation de plus encouragée voire obligatoire des
Nkola/Ngyéli suite à la destruction et à la
pauvreté de leur environnement naturel fait de ces derniers les
maîtres de leur destin. Les dons d'animaux aux Bantus n'existent presque
plus. Tout travail d'un Nkola/Ngyéliauprès des Bantu est
rémunéré. Les mariages entre ces deux types d'ethnie
longtemps inexistants sont de plus en plus fréquents. Dans le campement
de Nkuongio, un Nkola est marié à deux femmes Bantu et plusieurs
jeunes hommes Bantu prennent pour épouses, des jeunes filles
Nkola/Ngyéli.
Photo
N°16 : Couple mixte entre une fille Bantu et un Nkola de
Nséyéle, symbolisant le changement au niveau des relations entre
les Nkola/Ngyéli et les Bantu.
Source : Nzie, 2013.
IV-1-13. Economie avant la
déforestation
Par économie, il est question de l'ensemble des
activités de production, de distribution et de consommation mise sur
pieds par une communauté donnée. Chez les Nkola/Ngyéli, ce
processus des mécanismes de production, de distribution et de
consommation, reposait sur la chasse, la pêche, la collecte, le troc et
une petite agriculture. Les produits étaient acquis grâce à
ces méthodes. Au niveau de la production, la chasse, la pêche et
le ramassage étaient les techniques de base. A celles-ci s'ajoutaient
l'agriculture avec la réalisation de petits espaces agricoles, le troc
fait avec les voisin Bantu et l'ethnomédecine qui faisait entrer des
produits comme du poisson, de l'alcool, du tabac et les vieux habits. Au niveau
de la distribution des produits le principe obéissait à
l'appartenance clanique, familiale et aux classes d'âges. Par ailleurs,
la distribution des gros gibiers allait aussi auprès du clan Bantu
d'appartenance. Le système de consommation quant à lui reposait
sur des aspects claniques et familiaux. Généralement les produits
acquis étaient majoritairement destinées à la
consommation. Une fois les aliments préparés, les repas se
prenaient devant la cours et par classe d'âges, répartis comme
suit : Les ainés du clan dans un campement avaient leur repas servi
à part, les jeunes et les enfants. Le même principe était
aussi appliqué chez les femmes. Les produits de leur économie
étaient composés du gibier, du miel, du strophantus, et des
produits comme le sel, du riz, le tabac, l'alcool, des tissus de pagne, des
chiots acquis auprès des Bantu.
XCI. IV-1-14.
Economie après la déforestation
L'économie reste un processus de production, de
distribution et de consommation chez les Nkola/Ngyéli. Mais les
méthodes d'acquisition qui ont longtemps reposées sur la
déforestation ne sont plus les mêmes de nos jours suite à
la déforestation. En dehors de quelques rares animaux capturés
dans la forêt, l'agriculture est devenue une source principale de
production de produits alimentaires. En outre, les autres produits sont
achetés dans les boutiques. S'agissant de la distribution, plusieurs
produits comme le gibier, le miel les écorces des arbres, les
strophantus sont destinées de plus en plus à la
commercialisation. Au niveau de la consommation, le gibier chassé, le
miel cueilli sont de moins en moins destinés à la consommation.
XCII. IV-1-15. Parures avant la déforestation
Par définition, la parure est ce qui sert à
parer, à décorer à orner ou encore l'ensemble des bisous
utilisés par chaque socioculture afin de transmettre des messages et
significations particuliers. Pour les Nkola/Ngyéli, les
décorations utilisées étaient faites à plusieurs
niveaux du corps. Les dents étaient taillées en signe de
beauté chez les jeunes filles et jeunes garçons. Cette parure
avait deux significations. Une avait trait à la puberté et
l'autre à la capacité des dents à mieux consommer du
gibier. Pour les bébés, des colliers étaient autour du cou
et au tour des reins. Ces colliers en crocs d'animaux, des serpents et griffes
de certains oiseaux, étaient des armes de protection contre des attaques
des sorciers et des maladies infantiles. Au niveau du cou des jeunes
garçons et jeunes filles, les Nkola/Ngyéli utilisaient des
colliers en corde tirée de la forêt. Cette décoration
laissait apercevoir la beauté des jeunes en âge de puberté.
On pouvait aussi apercevoir ces cordes chez les Nkola/Ngyéli
âgées et de deux sexes. A ce niveau il était question des
tradipraticiens et autres femmes douées sur les soins des enfants et des
femmes. Sur les bras, Ils utilisaient des bracelets en peau des petits
félins et autres petits animaux comme les lièvres. Au niveau des
doigts, des os des grands animaux étaient taillées en forme de
bagues. Les dents des serpents étaient aussi entourées autour du
cou pour protéger contre des morsures de serpent et éviter
l'attaque des sorciers.
En ce qui est des plumes de certains oiseaux comme l'aigle, le
perroquet, les calaos, ils étaient utilisés pour l'embellissement
des outils de danse.
Somme toute, cette description de quelques
éléments de la culture Bakola/Bagyéli avant la
déforestation, laisse paraitre leur totale dépendance à
la forêt. Mais de plus en plus, il se produit des modifications et des
changements au sein de la culture des Nkola/Ngyéli suite à la
dégradation de leur environnement naturel.
Photo
N°17 : Enfant Nkola portant à son cou,un collierfait
à base d'une corde sauvage avec os de chat tigre.
Source : Nzie, 2013.
XCIII. IV-1-16. Parures après la
déforestation
La parure chez les Nkola/Ngyéli a longtemps
été basée sur les produits tirés de la forêt.
Mais de plus en plus avec le phénomène de la déforestation
et la rareté des essences et animaux utilisés dans le cadre des
décorations ce domaine est profonde mutation. De moins en moins l'on
trouve les peaux d'animaux comme les panthères, les antilopes, les gros
serpents car ceux-ci étant devenus rares suite aux multiples bruits
orchestrés dans la forêt, leur lieu de résidence. La
médecine moderne s'occupant des problèmes de santé des
bébés, il devient de plus en plus rare de trouver des enfants
avec des dents de serpents autour de leur cou ou des cordes spéciales
autour de leur taille. Les jeunes Nkola/Ngyéli quant à eux
arborent autour de leur cou des objets achetés dans les boutiques
frisant la modernité.
Photo
N°18 : Jeune Nkola de Nkuongio portant à son cou, un
collier en perle.
Source : Nzie, 2013.
Somme toute, cette partie nous a permis de revisiter quelques
éléments de la culture Nkola/Ngyéli avant et après
la déforestation. Il en ressort de celle-ci qu'un changement observable
se vit à plusieurs degrés. Pour mieux comprendre ce changement,
il est indiqué de le soumettre à l'écologie culturelle et
au fonctionnalisme que nous avons choisi comme grille théorique.
XCIV. IV-2.APPORT DE LA DEFORESTATION
DANS LE CHANGEMENT DES MODES DE VIE DES NKOLA/NGYELI
Il s'agit de soumettre le changement constaté à
la grille théorique anthropologique choisie dans le cadre de cette
étude. L'écologie culturelle et le fonctionnalisme vont donc nous
permettre de faire le constat de ce changement et ensuite de mener
uneinterprétation anthropologique de ce changement.
XCV. IV-2-1.
Constat du changement
Comme nous l'avons pu expliquer en détail, le massif
forestier de Lolodorf a longtemps présenté une richesse
énorme au niveau de sa biodiversité. Cet état physique a
fait de cette zone, un milieu de prédilection pour les activités
de déforestation. Dans ce même massif, vivent depuis des
décennies, les Nkola/Ngyéli auxquels la vie est fortement
dépendante. De façon progressive, la déforestation a
grandement dépouillé les forêts de ses richesses. De plus
en plus, elle devient pauvre et ne permet plus aux Nkola/Ngyélide
satisfaire leurs besoins de survie. De l'occupation de l'espace vers les autres
aspects socioculturels rien n'obéit plus aux modes de vie originels. De
plus en plus en tout est en train de changer parce que la forêt n'est
plus totalement cette mamelle nourricière qui offrait tout aux
Nkola/Ngyéli. La structure de l'occupation de l'espace a
cédé place aux formes et constructions modernes inspirées
des Bantu voisins.
Les lieux de résidence ce sont multipliés pour
faire face aux récurrentes difficultés de survie. Les nouveaux
campements sur les abords de route matérialisent cette volonté
de recherche des espaces de bien-être. L'alimentation longtemps
basée sur la consommation des ignames, du gibier, du poisson et du miel
est menacée suite à leur rareté liée à la
déforestation. Aujourd'hui, les échoppes et autres petits
boutiques sont fréquentées par les Nkola/Ngyéli pour
l'achat des produits alimentaires comme du riz, du poisson, de l'huile
raffinée, de l'alcool frelaté et des cigarettes modernes. La
médecine moderne est en train de ravir la médaille à
l'ethnomédecine Bakola/Bagyéli parce que l'efficacité de
cette dernière est remise en jeu suite au manque des essences de leur
pharmacopée.Il va sans dire que la pharmacopée
Bakola/Bagyéli se trouve dans une situation très délicate
face au mode d'exploitation anarchique de l'écosystème forestier
à Lolodorf. Il n'y a pas qu'un mode de soins qui soit en péril,
c'est aussi un mode de vie et tout ce qui est lié autour.Au niveau de la
maladie, sa perception a considérablement changé. De plus en plus
les sorts des maladies ne sont plus le seul aspect mystique mais font
intervenir l'existence des maladies pathologiques pouvant influencer la
santé du corps. Aussi les rapports sexuels entretenus avec les Bantu
sont sujet aux transmissions des maladies.
Le système de croyance a fortement
changé à cause de la fréquentation des
Nkola/Ngyéliauprès des Bantu. Cette fréquentation est due
à la recherche de bien-être hors des forêts suite à
sa dégradation. Le volet relatif aux rapports avec les autres a
grandement changé. Les Nkola/Ngyéli très fréquents
aux cotés des Bantu à cause de la recherche du
développement, commencent à désocialiser les relations
anciennes. Le fait de voir comment la vie se passe dans la
société Bantu les pousse à redéfinir ces relations
jadis basées sur la domination du grand maître Bantu.
Sur le plan économique, les
Nkola/Ngyéli sont pleinement entrés dans l'économie
monétarisée. Le besoin d'argent est devenu une
préoccupation importante. Tuer du gibier pour vendre, extraire les
écorces d'un arbre pour vendre, administrer les soins de
santépour se procurer de l'argent, défricher un champ pour avoir
de l'argent chez les Nkola/Ngyélisemblent être de nos jours un des
moyens efficaces pour se procurer des revenus. Partant dufait qui
établit que l'environnement façonne et influence les modes de vie
de chaque communauté, il en ressort que l'état actuel de la
forêt liée à sa dégradation ne répond plus
suffisamment, aux besoins des Nkola/Ngyéli. Par conséquent, les
nouveaux modes de vie apparaissent afin de faire face à cenouvel
environnement hostile. De nos jours, ces changements progressifs
observés à plusieurs niveaux de leur vie, attestent le
caractère dynamique de chaque société humaine. Autant
d'illustrations qui prouvent combien de fois les modes de vie des
Nkola/Ngyéli de Lolodorf sont inhérentes à leur
environnement naturel. Cependant,cet environnement devenu dégradé
suite la déforestation, subit un changement et par conséquent
crée une influence sur la cultureBakola/Bagyéli qui en
dépendent. De ce changement sont tributaires, les dynamiques
socioculturelles observées de nos jours chez les Nkola/Ngyéli.
XCVI. IV-2-2. Lecture du changement
L'écologie culturelle et le fonctionnalisme sont les
deux approches théoriques que nous avons mobilisées pour
favoriser la compréhension de la déforestation sur la culture des
Nkola/Ngyéli de Lolodorf. Cette grille de lecture nous permet de
dévoiler la responsabilité de la déforestation sur les
changements socioculturels observés chez sur leurs modes de vie.
En effet, l'anthropologie écologique ou
l'écologie culture est une science qui s'attèle à
étudier et à comprendre les interrelations entre une
communauté donnée, ses mécanismes de production, de
reproduction, ses valeurs, ses coutumes, ses rites, sa religion ses modes de
vie bref sa culture dans sa globalité et le milieu environnemental dans
lequel elle vit et dépend.
Notre recherche établit une corrélation entre la
dégradation de l'écosystème forestier, milieu naturel de
vie des Nkola/Ngyéli et les dynamiques socioculturelles qui y
surgissent. L'écologie culturelle telle qu'énoncée, permet
de lire cette réalité à travers le principe d'adaptation
et de l'influence réciproque entre un cadre de vie naturel et la culture
d'une communauté donnée. En effet, le phénomène de
la déforestation n'est pas anodin à Lolodorf. Il se fait dans une
volonté de recherche de l'amélioration des conditions de vie des
communautés qui y vivent. Mais, comment les Nkola/Ngyéli qui sont
les victimes directes de ce phénomène le
conçoivent-ils ?
Le terme utilisé par les Nkola/Ngyéli pour
désigner la forêt est « Siiguii »
ou « Siiguiipùhmu » pour exprimer les
profondeurs de la forêt. Pour eux, la forêt est
représentée comme un corps humain composé de la tête
du tronc et de quatre membres. Pour les Nkola/Ngyéli, ces composants
s'assimilent aux esprits, aux arbres, aux eaux, à l'air, aux
animaux, aux oiseaux, aux poissons, et enfin à l'Homme comme
étant le maître absolu de tous ces éléments. Ce
corps a un fonctionnement harmonisé et organisé qui
définit la survie des humains et tout ce qui y est. Son
dysfonctionnement impacterait sur la vie de ces derniers.
Voici ce que nous a révéléà
propos de leur conception de la forêt, MATSIE Apollinaire, un vieillard
Nkola de Ngomanguelé : « Siiguii lii
nànyôlôngàmôrô lii
buériimîhpâhgànàhboù.
Miipâhgàtéh mii
ndtàhnààhbiibuéri : Mih Nkùgù,
biiléh, sùhlù, li mpèhpé,
bàtsîrù, biinôhnii,bàsuèh,
nàbôhrobàhbàhpàhgôbiisàhbiitéhbiissépèhnà
à kigàmbpàh. »La forêt est un
comme le corps de l'homme qui a beaucoup de parties. Ces parties-là
sont que nous avons : les esprits, les arbres, les fleuves, les
rivières, l'air, les animaux, les oiseaux, les poissons et l'Homme qui
est le commandeur de toutes ces choses pour qu'il vive bien.
Pour NZIE Simon chef du campement de Mimbiti I,
siiguiibuérikigui Bakola
bèhzétahrèpilibàmbpàmbànàpànintébiibuàndzàhnàbiikigàmpbàndhideinBilùnàPàhnbàbuàtahrénàbàsilibôlàsiigii.
Mbéhbàtéh bi buèrideinnà bi
sibénàgulikigàmbpàpèhsiigii. La
forêt contrôle toute la vie des Nkola depuis le temps de nos
ancêtres jusqu'aujourd'hui nous vivions bien mais de nos jours, les
Ngoumba et les Ewondo sont en train de couper tous les arbres de la forêt
et depuis cet instant nous commençons à ne plus vivre bien ici en
forêt.
Ces points de vue nous permettent de voir comment les
Nkola/Ngyéli conçoivent et perçoivent la forêt. Pour
eux, la forêt est un corps aux fonctions biologiques et anatomiques bien
définies et composé de plusieurs éléments. L'homme
est considéré comme le composantsuprême régnant sur
les autres de cet ensemble dans le souci de son bien-être, son
développement. En plus, elle a longtemps été une mamelle
nourricière qui toujours assurer leur bien-être. Mais depuis
l'avènement de la déforestation, les difficultés de survie
commencent à se faire ressentir.
En se rapprochant de l'hypothèse Gaia
développée par James LOVELOCK(1969) dans laquelle il stipule que
l'ensemble des êtres vivants sur la terre seraient comme un vaste
organisme vivant appelé Gaia, d'après le nom de la déesse
de la mythologie grecque personnifiant la terre et réalisant l'auto
régularisation de ses composants pour favoriser la vie.Pour lui, la
composition de l'atmosphère, aurait été
régulée au cours du temps de manière à permettre le
développement et le maintien de la vie.
Pour LOVELOCK (2001),Gaïa est le nom de la Terre vue
comme une entité vivante, un système physiologique unique qui,
à l'instar des autres organismes vivants, autorégule sa chimie et
sa température en vue d'un état favorable pour ses habitants.
L'une des espèces habitantes, l'homme, par sa démographie
galopante et son mode de vie polluant, semble perturber gravement l'état
de santé de son hôte.Gaïa est-elle en train de couver des
maladies graves dont les premiers symptômes seraient notamment les
accidents climatiques dont nous sommes les témoins ?
A partir de ce modèle développé par James
LOVELOCK, la forêt apparaît comme l'élément
fondamentalqui a longtemps assuré ces mêmes fonctions
auprès de la culture Bakola/Bagyéli. De nos jours, la
déforestation dans toutes ses formes cause des graves torts à ce
vaste organisme et crée par conséquent un effet sur cette
culture.
En langue Nkola/Ngyéli, le terme ou l'expression qui
puisse définir le mot déforestation nous a paru difficile
à trouver. Mais plusieurs explications nous ont été
données afin de mieux l'appréhender et aussi dans le but de le
contextualiser. Généralement les termes suivant sont
utilisés pour désigner la déforestation.
« Kwélé biiléhbiisiiguii »
« couper les arbres de la forêt » cette conception
est synonyme de déboisement. Nous avons encore
« Bôhlàhsiiguii » « casser
la forêt », « Boul'ssisiigii »
« bouleverser la forêt », « semer des
troubles dans la forêt » ;
«gnàm'siisiiguii » « gâter la
forêt » ; « Siilisiiguii »
« finir la
forêt » ; « Yôhlàsiiguii »
« tuer la forêt »
A travers ces explications et les considérations faites
de la déforestation par les Nkola/Ngyéli, il apparaît que
ce phénomène est une source de bouleversement de fonctionnement
du corps humain qu'est la forêt. La déforestation est
perçue comme l'abattage des arbres, les casses sur la forêt, une
désorganisation de cet ensemble, une fin de la forêt et sa mort.
Les relations et les interactions entre les
Nkola/Ngyéli et la forêt sont profondes. Ils ont un attachement
ontologique à la forêt comme cadre et moyen de vie. Leur
vieéconomique, sociale et culturelle reste dominée et
rythmée par les liens existentiels avec la forêt. Elle constitue
et représente tout dans leur vie. Cette relation est plus dense, intense
et intime. La forêt est leur mamelle nourricière, leur gardienne
et leur protectrice, l'école de formation à la vie, la
pourvoyeuse de médicaments, le lieu par excellence de recueillement, de
recréation, de repos et de réalisation des activités
rituelles. Comme l'a relevé le « Pygmée » Mbuti de
Colin TURNBULL, « si nous quittons la forêt ou que laforêt
meurt, nous mourrons aussi; car nous sommes le peuple de la forêt
». Les traditions sociales construites, entretenues et maintenues
autour de la forêt, d'une génération à l'autre, sont
valorisées et respectées en tant que symboles et fondements du
maintien et de la reproduction de l'ordre social.
Au demeurant, l'écologie culturelle nous permet
d'établir un rapport de dépendance entre la culture
Nkola/Ngyéli et leur environnement dans la mesure où la culture
dépend de cet environnement. En effet, l'environnement offre à la
culture Bakola/Bagyéli les ressources globales pour sa survie. Que ce
soit au niveau de l'occupation de l'espace avec la construction des sites
d'habitat, l'alimentation, l'organisation sociale, les croyances, la
médecine, la santé, la maladie, l'économie, l'art, des
parures, les relations avec autrui bref dans la globalité culturelle,
l'environnement fournit à la culture Bakola/Bagyéli tout ce
qu'elle a besoin pour vivre. Cette dépendance s'exprime donc par le fait
auquel l'expression de la culture est inhérente à
l'environnement. Il revient dont de réaliser que l'écologie
culturelle contribue à comprendre comment les Nkola/Ngyéli
organise leurs activités de production et leur mode de vie en fonction
de leur environnement qui en retour façonne leur identité
socioculturelle.
Cependant, le gibier n'étant plus abondant, les
produits forestiers de ramassage devenus progressivement rares, les essences
utilisées pour la pharmacopée disparaissant à un rythme
effroyable, il revient de constater la réaction de la culture face
à son environnement devenu pauvre.
Le fonctionnalisme à travers ces trois postulats permet
d'interpréter la réaction de la culture Nkola/Ngyéli suite
à la modification de son environnement vital.
Le postulat de l'unité fonctionnelle permet donc
d'affirmer que les éléments d'une culture et d'une
société sont fonctionnels pour le système social entier,
ils constituent une totalité indissociable : pour les Nkola/Ngyeli,
l'érosion de la biodiversité entrainant irréversiblement
un changement des modes de vie a un impact sur leur totalité
socioculturelle. Ce qui aboutit inévitablement à une nouvelle
culture.
Le postulat de la nécessité
fonctionnelle qui explique que tous les éléments d'une
culture tels qu'ils coexistent sont indispensables et le caractère
obligatoire de leur présence peut être vérifié dans
la mesure où tous les fragments de la culture Nkola/Ngyéli
coexistent et produisent un mode de vie donné.
Le postulat de l'universalité fonctionnelle ou du
fonctionnalisme universel affirmant que tous les éléments
d'une société remplissent des fonctions sociales effectives peut
nous aider àvoir le rôle joué et la fonction que remplit
chaque élément dans le domaine de la déforestation. La
déforestation se présente ici comme un corps composé de
plusieurs éléments et ou chaque élément a une
fonction bien déterminée pour la bonne marche de ce composite.
Les fonctions remplies par chaque élément crée une
complémentarité et peuvent être adaptés au postulat
de l'unité fonctionnelle stipulant que les éléments d'une
culture et d'une société sont fonctionnels pour le système
social entier ; ils constituent une totalité indissociable.
Somme toute, le fonctionnalisme explique au mieux le
rôle et la fonction qu'achaque élément dans le processus de
la déforestation. Il suppose donc que tout élément ait
pour fonction de répondre aux besoins de la déforestation. Mais
en même temps, c'est toujours la totalité
deséléments, et non ses éléments
séparés, qui répondent aux besoins de la
déforestation.
La déforestation dans ce massif forestier a donc
insufflé les nouveaux modes de vie chez les Nkola/Ngyéli.
Partant de l'organisation sociale aux activités quotidiennes de survie,
ils doivent tenir compte de l'état actuel de cette forêt devenue
hostile.
Conscient de l'état actuel de la forêt, un Nkola
de Yom nommé MBPILE Pierre nous a confié
ceci :Muànàwàhnbôrohbànàaniibàbuàhmàsiilibulsiinàbôlàsiiguiinà
li
ndàndhéwàmàmôhniinàyézéh
li kiguiyàmbpà.
NtéhpilibàmbpàmbàNkolandzàhkigà
vé nàmàmûmâhsiigii. Ndih
ndènbilùbàsilmàyôhlàsiigiiéhnà
Nkola pfàngkigà ?
Pèhvindàwàpèhsiigiipùhmulowébuàtahrégnéh
Bakola
ntéhwémpàgubugûbàkéyessékigàmpbà.
Mon fils les grandes personnes ont déjà fini
de bouleverser et de casser la forêt à cause de la chose qu'on
appelle argent et la quête de la bonne vie. Depuis l'époque de nos
ancêtres, le Nkola vivait confortement avec les choses issues de la
forêt. Mais aujourd'hui les Bantu ont déjà fini de tuer la
forêt et comment le Nkola va-t-il vivre ? Afin d'éviter la
mort ici en brousse, le Nkola se voit contraint d'aller en route chercher les
palliatifs à sa survie chez les Bantu.
Ce propos exprime au mieux comment un environnement en tant
que milieu de vie naturel, a longtemps garanti la survie des
Nkola/Ngyéli tout en étant déterminant pour leur
développement. Cependant les effets responsables de son état
actuel ayant entraîné son changement, ont directement
entrainé des répercussions sur leur culture. Cette lecture nous
permet donc d'affirmer que la culture écologique des Nkola/Ngyéli
liée à l'utilisation et à l'exploitation de la forêt
était basée sur les méthodes de durabilité. Mais la
déforestation est progressivement en train de céder place
à une nouvelle culture chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf.
Le présent travail de rechercheportait sur
déforestation et dynamiques socioculturelles chez les
Nkola/Ngyéli de Lolodorf : contribution à une anthropologie
du développement.Le problème de fond qu'il
tentait de résoudre était celui de la réaction
différentielle de deux peuples (Bantu et Nkola/Ngyéli) face
à un stimulus identique qui est la déforestation. La
déforestation se faisant dans une volonté de développement
ou de recherche de bien-être, impacte sur les cultures des
communautés qui y vivent tout autour. Cependant, les causes de la
déforestation sur le massif forestier de Lolodorf ne produisent pas les
mêmes effets sur ces sociocultures.
La problématique qui a meublé ce travail
a été soumise à une série d'interrogations qui
tentait au mieux d'élucider cette recherche. La question centrale de
recherche était formulée comme suit : Pourquoi la
déforestation entraine-t-elle la dynamique de la culture chez les
Nkola/Ngyéli de Lolodorf ?
Cette question principale était subdivisée en
deux questions secondaires suivantes :
Ø Quels sont les modes d'expression de la
déforestation dans le massif forestier de Lolodorf ?
Ø Quels sont les éléments de la culture
Nkola/Ngyéli qui sont affectés par la déforestation ?
A ces questions de recherche ont été
émises des hypothèses.
L'hypothèse principale était formulée
comme suit :La déforestation est responsable de la dynamique
culturelle chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf parce qu'elle
détruit l'environnement physique qui leur sert de cadre de vie
naturelle.
Deux hypothèses secondaires complètent
laprincipale :
Ø La surexploitation, la réalisation des champs
agricoles, les champs industriels, la construction des routes, des
infrastructures de recherche au développement sont autant des modes
d'expression qui permettent de matérialiser la déforestation
à Lolodorf.
Ø Les croyances, les habitudes alimentaires, la
médecine, la santé, les relations avec autrui, les parures, bref
plusieurs fragments de la culture Bakola/Bagyéli sont affectés
par la déforestation.
Pour réaliser nos hypothèses, nous nous sommes
fixé des objectifs. L'objectif principal était d'analyser les
dynamiques socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli de Lolodorf face
à la réalité du changement de leur milieu environnemental
entrainée par le phénomène de la déforestation dans
son massif forestier. Cet objectif central était subdivisé en
deux objectifs secondaires:
Ø Identifier, présenter et décrire les
modes d'expression de la déforestation dans le massif forestier de
Lolodorf.
Ø Présenter et décrire les
éléments de la culture Nkola/Ngyéli qui sont
affectés par la déforestation.
Pour atteindre ces objectifs, nous avons fait recours
à la procédure méthodologique recommandée dans les
sciences sociales. Il s'agissait pour cela d'organiser cette recherche sur deux
aspects : la recherche documentaire et la recherche de terrain.
S'agissant de la recherche documentaire, elle a
été faite dans plusieurs bibliothèques en vue de la
collecte des données écrites inhérentes aux
éléments physiques et humains de la zone dans laquelle notre
étude était focalisée. La consultation des travaux
réalisés par nos prédécesseurs sur la
déforestation et ses risques pour les peuples autochtonesdans le bassin
du Congo en général et sur les Nkola/Ngyéli de Lolodorf en
particulier, a été faite afin de savoir ce qui a
déjà été énoncé d'avance et dans
l'optique d'apporter une nouvelle orientation. Au sortir, cet exercice a
contribué à la réalisation de notre fiche
bibliographique.
Les données collectées sur le terrain ont
été analysées et interprétées sous le prisme
de l'écologie culturelle et du fonctionnalisme à travers les
concepts d'adaptation, d'influence, de changement et de fonction. Nous avons
montré avec ces deux approches comment les Nkola/Ngyéli ont
développé certains modes de vie depuis les temps anciens
jusqu'à l'accentuation du phénomène de la
déforestation et ses conséquences sur la culture des
Nkola/Ngyéli de Lolodorf.
Cette recherche de terrains'est appuyée sur les
techniques usuelles de la recherche qualitative et des outils de collecte:
recherche documentaire, observation directe, entretiens approfondis et les
focus group discussion, le guide d'entretien, le dictaphone, l'appareil photo
numérique et l'ordinateur portable.
La structuration de ce travail s'est
matérialisée sur un ensemble de quatre chapitres outre
l'introduction et la conclusion.
Le premier chapitre consistait à la présentation
des cadres physique et humain de notre site de recherche. Dans son contenu il
était question de Lolodorf dans sa globalité physique et humaine.
Les aspects développés ici ont eu trait à sa
géolocalisation. Le volet humain présentait l'ethnographie de ce
site et l'ethnogenèse de ses communautés. Ensuite étaient
rappelés, les rapports entre le milieu physique et notre
thématique d'une part et entre le cadre humain d'autre part, le sujet,
les interactions avec les communautés citées et la
forêt.
Le deuxième portait sur l'état de la question.
Il faisait intégrer les notions d'écologie, d'environnement, des
Pygmées et de développement. Ilétait question de
présenter les approches écologiques de l'environnement et ses
théories. Les généralités sur les Pygmées
étaient aussi évoquées. En outre, ce chapitre s'attelait
à présenter le développement comme une notion
polysémique et le définissait dans ses multiples facettes. Bref,
ce chapitre faisait un rappel sur la revue documentaire mobilisée
à ce sujet.
Le troisième chapitre s'articulait autour de
l'ethnographie de la déforestation chez les Nkola/Ngyéli. Il
présentaitl'avènement de la reforme forestière au
Cameroun, l'histoire de la déforestation à Lolodorf, ses acteurs,
les technologies utilisées, les essences exploitées, les usages
faits à partir de ces essences, les quantités exploitées
et les activités développées autour de la
déforestation.
Quant au dernier chapitre intitulé ethno-anthropologie
de la déforestation chez les Nkola/Ngyéli, il était
question de décriresous le prisme de l'écologie culturelle et du
fonctionnalisme, quelques fragments de la culture Nkola/Ngyéli avant la
déforestation, après la déforestation et ensuite de
montrer à quel niveau le changement est intervenu. Il revenaitd'affirmer
et d'attester à travers quelques éléments, l'impact de la
déforestation sur les modes de vie des Nkola/Ngyéli. Par
conséquent ce chapitre nous livrait l'influence de la forêt comme
environnement naturel de vie sur la socioculture des Nkola/Ngyéli de
Lolodorf. Cette influence à travers l'érosion de la
biodiversité s'extériorise par des changements et des dynamiques
socioculturelles chez les Nkola/Ngyéli.
Au moyen de cette démarche scientifique, nous sommes
parvenu aux résultats suivants :
La recherche d'amélioration des conditions de
vie des communautés s'effectue à travers l'exploitation
forestière au Cameroun. Ce processus de développement repose sur
la forêt dans la réalisation des infrastructures telles que :
les ponts, les routes, les ports en eaux profondes, les centrales
hydroélectriques, les aires de jeux, les maisons d'habitation, les
champs agricoles, et les plantations industrielles. Elle se fait dans un
contexte de grand gaspillage. Les arbres abattus à cette occasion
pourrissent dans la forêt. Les routes sont souvent
aménagées de manière peu judicieuse. Parfois, des
tronçons très long sont réalisés (et de grandes
parties de forêt ainsi détruites) pour l'exploitation d'un seul
arbre.Une grande partie de l'arbre abattu (houppier, branches latérales,
contreforts) reste abandonnée dans la forêt. Les exploitants ne
s'intéressent qu'à la meilleure partie du tronc. L'abattage
irréfléchi et le débardage des arbres abîment ou
détruisent d'autres arbres et arbustes de la forêt. Certains
troncs abattus n'arrivent jamais jusqu'à la scierie, notamment quand
l'arbre a été abattu par erreur (pas de valeur commerciale). Lors
du transport, de nombreux troncs se perdent parce qu'ils ont été
chargés trop hâtivement sur les grumiers. Le plus souvent, il
n'est pas rentable de récupérer les troncs perdus en cours de
route : il suffit d'abattre quelques arbres de plus par la suite.
Pour le cas d'espèce, il en ressort que la couverture
physique et humain de Lolodorf fait de ce site une zone de prédilection
pour les activités liées à la déforestation qui se
pratiquent tant légalement que illégalement. Aussi, dans ce site
vivent des communautés Nkola/Ngyéli aux réalités
socioculturelles dépendant de ces forêts. La culture des
Nkola/Ngyéli demeure très fragile face à la
déforestation.
Il en ressort donc de cette analyse que les
Nkola/Ngyéli sont un peuple de forêt comme l'avait
mentionné plusieurs auteurs. Leur vie est étroitement liée
et la dépendance à la forêt marque leur appartenance
socioculturelle.
Mais de plus en plus,les activitésde
déforestation atteignent la forêt dans ses profondeurs les plus
absolues. Ses mécanismes d'exploitation seraient une résultante
de la dégradation du tissu socioculturel et économique faisant
foi à Lolodorf. Ainsi, incapables de se nourrir convenablement,
incapables de se soigner raisonnablement, incapables d'assurer la scolarisation
de leurs enfants, inacceptable les conditions de vie, la misère et le
sous-développement qui lessivent les populations locales, la forêt
apparaît pour elles comme une solution idoine face à leurs
multiples problèmes de bien-être.
Cependant, compte tenu de la totale dépendance des
Nkola/Ngyéli à cette forêt, sa dégradation impacte
directement sur leur mode de vie et les pousse aux changements observables
à plusieurs niveaux.Progressivement,ce phénomène les
conduit à la recherche du bien-être vers les villages Bantu et par
conséquent, entraineune sédentarisation forcée et
observée chez plusieurs d'entre eux.
Des aspects culturels liés au mode d'occupation de
l'espace, à l'alimentation, à la médecine, à la
maladie, au système de croyance, au rapport à l'autre, à
l'économie et aux parures ont changé. Face donc à ce
constat, il apparait clairement que la culture Nkola/Ngyéli repose
depuis des siècles sur la forêt et ce peuple a été
façonné en fonction de cet environnement naturel longtemps
resté leur mamelle nourricière. Mais de nos jours où la
forêt ne remplit plus leurs besoins vitaux suite à
l'érosion de la biodiversité, plusieurs de fragments
socioculturels se voient affectés et par conséquent donnent place
à des nouveaux modesde vie dans une forêt devenue de moins en
moins productrice.
Il en ressort donc de cette analyse que leur vie est
étroitement liée à la forêt et sa modification
entraine irréversiblement des transformations sur ces modes de vie. Ces
dynamiques s'extériorisent sur plusieurs aspects notamment :
Ø Au niveau de l'occupation des espaces avec
l'apparition des nouvelles résidences dans les villages Bantu
d'appartenance ;
Ø Une sédentarisation forcée et
l'intensification des conflits avec les Bantu ;
Ø Une alimentation basée de plus en plus sur la
pratique de l'agriculture d'autoconsommation et l'approvisionnement des
produits de consommation dans les échoppes;
Ø Une transformation progressive de la conception et de
la représentation de la maladie et la médecine avec de plus en
plus recours à la médecine dite moderne vue la récurrence
des maladies auxquelles l'ethnomédecine Pygmée a du mal à
trouver des solutions;
Ø La transformation progressive du système de
croyance avec l'adhésion de quelques Nkola/Ngyéli dans les
églises dites classiques;
Ø Une mutation au niveau des rapports avec autrui
symbolisée par une intensification des mariages entre les
Nkola/Ngyéli et les Bantu d'une part et entre les Bantu et les
Nkola/Ngyéli d'autre part ;
Ø Une monétarisation économique qui a
pris la place du troc longtemps pratiqué;
Ø Une adoption des habitudes vestimentaires et des
parures à l'occidental;
Ø Une alphabétisation en légère
augmentation.
L'esprit des déforestations normative et légale
que nous avons évoqué était d'arrimer l'objectif du
bien-être des populations, les Nkola/Ngyéli en l'occurrence
(construction des routes, des écoles, des centres de santé, des
aires de jeux, les forages, l'installation du réseau électrique
et téléphonique, etc.) à celui de la protection de
l'environnement (création des forêts communautaires, des
unités d'aménagements forestières, des forêts
protégées, sélection des espèces à
exploiter, et surtout intensification des contrôles rigoureux dans le
domaine de la foresterie) Il rejoignait de ce point de vue l'une des
préoccupations majeures de l'écologie environnementaliste qui
consiste à réconcilier les exigences du développement
à celle de la préservation de la nature.
En conséquence de ce qui précède, il en
ressort que la culture qui est l'objet d'étude de l'anthropologie est
redevable à l'environnement physique. C'est cet environnement qui offre
l'infrastructure nécessaire à l'édification de sa base
matérielle. Ainsi, lorsque l'environnement physique change, la culture
change elle aussi. Les modes de vie des Nkola/Ngyéli étant
essentiellement assujettis au matériau sylvestre se trouvent
substantiellement modifié lorsque ce dernier s'altère ou
s'érode sous la bannière de la déforestation.
Au regard des objectifs fixés par cette recherche, le
diagnostic réalisé, reste loin d'être bouclé. Autant
la préoccupation d'aller au-delà de ce que nous venions
d'élaborer comme investigation est forte, autant la
nécessité de promouvoir et de financer des recherches
multidisciplinaires ultérieures basées sur cette question se fait
de plus en plus pressante.
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155 Pages.
Noms et Prénoms
|
Fonctions
|
Lieux
|
Ages
|
Dates
|
ADA Joseph
|
Grand chasseur Nkola
|
Mimbiti
|
42
|
07/11/2013
08/11/2013
09/11/2013
|
ANGOUAH Marie
|
Artisane
|
Mimbiti
|
50
|
09/11/2013
13/11/2013
|
AWUM Lucas
|
Exploitant forestier
|
Oding Otoh
|
42
|
09/11/2013
14/11.2013
|
BEH Samuel
|
Chef du campement
|
Yom
|
45
|
10/11/2013
|
BIDZANG Paul
|
Chef de campement
|
Ngomanguelé
|
40
|
10/11/2013
15/11/2013
16/11/2013
|
BINZOULIJean.J
|
Médecin
|
Hôpital de Ngovayang
|
45
|
06/01/2014
|
BISSEH Auguste
|
Notable
|
Nséyéle
|
55
|
10 /11/2013
|
BOULBE Mathurin
|
Trafiquant forestier
|
Nkouambpoer I
|
50
|
11/11/2013
|
BOTSIMBO Jacques
|
Abatteur forestier
|
Samal
|
32
|
17/11/2013
|
DOUDAM José
|
Guérisseur
|
Yom
|
60
|
10/11/2013
|
KOH Ernest
|
Ancien Chauffeur de la SFOC
|
Lolodorf
|
50
|
20/11/2013
|
LAMBO Justin
|
Technicien eaux et forêts
|
Lolodorf
|
35
|
06/01/2014
|
MABANG Rufine
|
Sous-traitant forestier
|
Ngoyang
|
33
|
21/11/2013
|
MABALLI Louis
|
Assistant d'affaires sociales
|
Lolodorf
|
50
|
24/01/2014
|
MABARI Calvin
|
Chasseur
|
Nkuonguio
|
45
|
02/12/2013
|
MAPFOUNDOUR
|
Chasseur
|
Nkuonguio
|
30
|
02/12/2013
|
MASSABA
|
Guérisseur
|
Nabozouendi
|
41
|
04/12/2013
|
MASHUER Pierre
|
Notable Ngyéli
|
Mbango Pinda
|
42
|
06/12/2013
|
MATSIE MATSIE
|
Notable Nkola
|
Ngomanguelé
|
80
|
16/11/2013
|
MAYO Elie
|
Notable Bantu
|
Ngoyang
|
70
|
14/01/2014
|
MBEZELE Marie
|
Sage-femme
|
Mbango Pinda
|
35
|
06/12/2013
|
MBPILE Moise
|
Notable Bantu
|
Samal
|
45
|
13/01/2014
|
MBPILE Christelle
|
Gérant d'une boutique
|
Samal
|
31
|
1 3/01/2014
|
MBPILE Pierre
|
Menuisier Nkola
|
Nséyéle
|
50
|
10/11/2013
|
MIMBOH
|
Chercheur GEIFFEC
|
Mbango
|
50
|
15/01/2014
|
NDIG Robert
|
Guérisseur
|
Nabozouendi
|
60
|
04/12/2013
|
NGOUN Mesmin
|
Technicien d'agriculture
|
Mill
|
50
|
15/01/2014
|
NGOUE Jeanne
|
Tradipraticienne
|
Oding Otoh
|
60
|
09/11/2013
|
NKOUELI SONG
|
Chasseur
|
Ngomanguelé
|
45
|
16/11/2013
|
NTOCKE René
|
Adjoint d'Arrondissement
|
Lolodorf
|
60
|
05/01/2014
|
NZANG Jeanne
|
Chasseuse-collectrice
|
Nkuonguio
|
45
|
02/12/2013
|
VAL Olivier
|
Chef agence de voyage
|
Lolodorf
|
35
|
24/01/2014
|
http://www.gipta.org/Les
pygmées du Cameroun; consulté le 02 Juillet 2013
http://www.persée.org;
BAHUCHET, Serge Les Pygmées aujourd'hui en Afrique centrale.[en
ligne] In : journal les Africanistes ; visité le 22 Aout
2013
http://www.google.fr; les
Pygmées du Cameroun, consulté le 17 juillet 2013
http://www.deforestation.org;
consulté le 14 janvier 2014
http://www.anthropolinks.org/les
Bakola/Bagyéli de Lolodorf, consulté le 20 décembre
2013
|