La francophonie et la prévention des conflits post électoraux en Afrique:cas de la Côte -d'Ivoire( Télécharger le fichier original )par Stéphane Aloys MBONO Université de Lyon 3 - Master 2011 |
Paragraphe2 : Une implication véritable dans la préventionLa Francophonie a choisi elle-même de s'occuper de la prévention et de la gestion des conflits. Pour ce qui est des conflits postélectoraux, elle devrait s'impliquer véritablement dans leur prévention. Cette implication véritable peut passer par la nécessité de privilégier l'observation évaluation(A) mais également la nécessité d'une promotion dans les faits de la démocratie(B). A- La nécessité de privilégier l'observation évaluationLes missions d'observation de la Francophonie ont généralement cette particularité, comme d'autres de se terminer par la publication de rapports de fin de missions. Dans le cas de la Côte d'Ivoire, la mission d'information et de contact dépêchée a publié son rapport au lendemain de l'élection présidentielle. Dans ce rapport, la part belle est faite à la présentation des actions des différents acteurs sur le terrain ainsi que sur les conditions générales qui ont prévalu avant elles. La partie réservée aux recommandations ne représente pas une grande proportion dans le rapport. Cela peut faire penser comme l'affirme Monney Mouadjo que la Francophonie privilégie l'observation témoignage à l'observation évaluation116(*).Mais que non ! La Francophonie, dans le cas ivoirien, a effectivement agit dans le sens d'une observation évaluation. Car la différence qui peut être faite avec l'observation témoignage est que dans ce cas, le rapport a tendance à se focaliser uniquement sur les aspects de droit en vigueur dans le pays concerné sans s'employer à tirer des implications politiques . Pourtant, dans le cas de l'observation évaluation, il est fait un effort dans le sens de la critique quant à la pertinence des actions menées pour la réussite du scrutin d'une part, et de l'aboutissement du désir de paix durable à l'issue des élections d'autre part. Il est important pour la Francophonie de s'orienter résolument et sérieusement vers l'observation évaluation. Cela permet de prévenir à la longue des éventuels conflits non seulement dans le pays concerné, mais aussi dans d'autres pays, puisque l'élection apparait de nos jours comme le mode de dévolution du pouvoir le plus utilisé. En utilisant strictement cette méthode dans le cas ivoirien, il est évident de tirer des leçons pertinentes à même de faire sortir ce pays de l'impasse, et par ricochet de prévenir des situations similaires dans d'autres pays. B- La nécessité d'une promotion effective de la démocratiePour l'Organisation internationale de la Francophonie, la promotion de la démocratie est un mode sérieux et pertinent de gestion qui a pour avantage et corollaire d'aider à la domestication de la violence. La démocratie est donc un modèle, un idéal que la Francophonie promeut à travers ses textes de référence. Au nombre de ces textes, figure la Déclaration de Bamako de 2000.On peut voir par ce texte une volonté affichée de l'organisation d'atteindre cet objectif. Pourtant, point n'est besoin de rappeler que dans son application on est bien loin du compte. Dans nombre de pays francophones, la vie politique est loin d'être apaisée. L'alternance n'est pas la chose la mieux partagée et l'état de droit semble concerner d'autres. C'est pourquoi, il est important pour la Francophonie de s'investir véritablement dans la défense de la démocratie sans tenir compte des intérêts de quelques pays. Ceci est d'autant plus important que lorsqu'il y a rupture de démocratie, il est facile de retomber dans les travers du non droit, ou plutôt au droit du plus fort qui n'est pas différent de la jungle. En effet, la Francophonie devrait veiller à ce que cet esprit soit présent au sein de ses Etats et gouvernements membres. La Francophonie devrait faire des réformes institutionnelles pouvant éviter le recours aux conflits post électoraux. Ces réformes sont nécessaires afin d'encourager l'alternance au pouvoir et refuser les modifications constitutionnelles visant à faire sauter le verrou que constitue la limitation des mandats au sommet de l'Etat. Pour Owona Nguini, il s'agit là de techniques et de tactiques propres au « gouvernement perpétuel ». Pour lui, la crise ivoirienne est la résultante du long règne du premier Président de la république ivoirienne, Houphouët Boigny, soit trente trois ans. L'auteur continue en précisant que cette longévité « est précisément à l'origine des problèmes de stabilité que connait la Cote d'Ivoire en raison d'une gestion des affaires par le Président Houphouët dont le moteur était basé sur une conception, après lui le déluge . Celui-ci a bloqué la mise en place d'un jeu institutionnel consolidé autour de la succession qui soit un jeu basé sur la consistance temporelle, livrant ainsi son pays aux aléas du déluge des luttes déréglées de succession »117(*) . La Francophonie se doit donc de veiller à l'application de la démocratie qui a comme élément important l'alternance. Il est impérieux pour elle de s'investir véritablement dans ce sens car cela constitue bien une source de conflit du fait que la non alternance crée des frustrations inévitables qui finissent par éclater peu importe le terme. De plus, la Francophonie devrait s'occuper de l'effectivité de l'état de droit affiché dans la plupart des pays francophones. En effet, l'état de droit suppose la soumission de tous et de toutes les institutions au droit en vigueur dans un espace bien précis. Pourtant, cette soumission n'est pas toujours évidente. La Francophonie doit tout faire pour faire respecter ce principe dans ses différents Etats et gouvernements membres, car c'est un gage de stabilité et de prévention. * 116 Monney Mouandjo (Stéphane), op.cit P 370. * 117 Owona Nguini (Mathias Eric), « le gouvernement perpétuel en Afrique Centrale : le temps politique présidentialiste entre autoritarisme et parlementarisme dans la CEMAC »,Enjeux, no 19, avril-juin 2004 p11. |
|