UNIVERSITE Jean MOULIN LYON III
UNIVERSITE DE YAOUNDE II
UNIVERSITY OF YAOUNDE II
International Relations
Institute of Cameroon
P.O. Box: 1637 Yaoundé
Tel: 22 31 89 99
Francophonie et Mondialisation
Institut des Relations
Internationales du Cameroun
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Mail :
contact@iricuy2.net
Francophonie et Mondialisation
CHAIRE SENGHOR-FRANCOPHONIE ET MONDIALISATION
THEME
LA FRANCOPHONIE ET LA PREVENTION DES CONFLITS POST
ELECTORAUX EN AFRIQUE : CAS DE LA COTE D'IVOIRE
Mémoire présenté et soutenu
publiquement en vue de l'obtention du diplôme de Master en Science
Politique et Relations Internationales, option Francophonie et
Mondialisation
PAR :
Stéphane Aloys MBONO
Direction
Année académique
2011-2012
Pr. Jean-Louis ATANGANA AMOUGOU
Agrégé des facultés de Droit
Doyen de la Faculté des sciences juridiques et
politiques de l'Université de Ngaoundéré
AVERTISSEMENT
L'université Jean MOULIN de Lyon III et l'Institut des
Relations Internationales du Cameroun (IRIC) n'entendent donner aucune
approbation ni improbation aux opinions émises dans les mémoires.
Celles-ci doivent être considérées comme propres à
leurs auteurs.
DEDICACE
A ma très chère mère, Ndjanga Florence
et à mes oncles Toube Anaba, et Eyatta Ndjoa André, pour n'avoir
jamais cessé de m'encadrer, de me conseiller, de me guider, de me
motiver tout au long de ma formation, et tout au long de ma vie. Que votre foi
au sacrifice de l'éducation se trouve récompensée par le
biais de ce modeste chef- d'oeuvre.
REMERCIEMENTS
La réalisation de ce modeste chef -d'oeuvre a
bénéficié de l'apport d'un certain nombre de personnes
dont nous ne saurions passer sous silence leur contribution. A tous, autant
qu'ils soient, et de manière non exhaustive, qu'ils se sentent
remerciés.
- Professeur Jean-Louis Atangana Amougou, qui, malgré
ses innombrables occupations, a accepté d'encadrer ce travail. Qu'il
trouve en ces mots, l'expression de notre profonde gratitude.
-Docteur Guy Mvelle pour ses précieux conseils et
orientations.
-Docteur Mathias Eric Owona Nguini pour sa
disponibilité et ses conseils.
-Son excellence, Guillaume Nseke, Conseiller technique au
Minrex, pour sa disponibilité et ses conseils.
-Le titulaire de la Chaire Senghor ainsi que ses
collaborateurs pour leur encadrement tout au long de notre formation.
-A toute la famille Ndjoa Toubé, pour leur soutien et
réconfort tout au long de ma formation.
-A toute la famille Onguene Alana, pour les encouragements et
le soutien moral.
- A tous mes camarades de la première promotion de
Francophonie et Mondialisation(2010).
-A mes chers amis : Réné Meka, Rodrigue
Tasse, Pisso Ekwa, Serge Dzou, Gallus Ateba, Francine Leba, Héloise
Embolo, Alice Penda pour leurs sincères apports et multiples
encouragements.
-A tous les membres de l'Amicale des Etudiants de la
filière Francophonie et Mondialisation de l'IRIC(AEFRAMOND), pour
l'expérience enrichissante de la vie associative.
-A tous les membres du Club de Réflexion des Etudiants
de Science Politique(CRESPO), pour tout l'apport scientifique reçu.
-A toute l'équipe de la Commission du Protocole de
l'Institut des Relations Internationales pour l'enrichissante aventure.
RESUME
Le monde a retenu son souffle à l'annonce de la date
des élections présidentielles de 2010 en Cote d'Ivoire. C'est
que, ce pays francophone a connu une décennie de crise et entendait en
sortir à travers cette consultation électorale. Le présent
travail de recherche a donc pour objectif de savoir quel rôle a
joué la Francophonie pour prévenir le conflit post
électoral qui a eu lieu à l'issue des élections de 2010 en
Cote d'Ivoire. En effet, on a pu noter que cette Organisation a posé des
actions timides sur le terrain avant et pendant la période
électorale. Ce qui permet de constater qu'elle a joué un
rôle minimal en ce qui concerne la prévention. Son action
préventive présente alors des limites auxquelles il convient de
remédier afin que ce pays et l'Afrique en général puissent
être épargnés de ce type de conflit dans l'avenir.
Mots clé : La Francophonie,
prévention, conflit post électoral.
ABSTRACT
The world held its breath with the announcement of the out
come of the presidential elections in Côte d'Ivoire. This francophone
country has known about a decade of crisis and conflict, hoping to establish
peace through this electoral process. This research work has a main
objective, that is showing the role of Francophonie in preventing post
electoral conflict which occurred after the 2010 elections in Côte
d'Ivoire. More over, it was noted that the organization laid timid actions on
the field before and during the electoral period. This permits us to conclude
that la Francophonie played a minimal role as concerns conflict prevention. Its
preventive actions shows its limitations as regard to the resolution and
management of conflict in Côte d'Ivoire in particular and Africa in
general
Key words: La Francophonie, prevention, post
electoral conflict.
.
LISTE DES SIGLES ET
ABREVIATIONS
ACCT: Agence de coopération culturelle et technique.
ADO : Alassane Dramane Ouattara.
AIF : Agence intergouvernementale de la francophonie.
AIMF : Association internationale des maires
francophones.
APF : Assemblée parlementaire de la Francophonie.
ASEAN : Association des nations du sud-est asiatique.
AUF : Agence universitaire de la francophonie.
CCI : Centre de commandement intégré.
CEDEAO : Communauté économique des Etats de
l'Afrique de l'ouest.
CEI : Commission électorale indépendante.
CNCA : Conseil national de la communication
audiovisuelle.
CNO : Centre, nord, ouest.
CNP : Conseil national de la presse.
CONFEJES : Conférence des ministres francophones de
la jeunesse et des sports.
CONFEMEN : Conférence des ministres francophones de
l'éducation nationale.
CPF : Conseil permanent de la Francophonie.
CSCI : Convention de la société civile de Cote
d'Ivoire.
DDR : Désarmement, démobilisation et
réintégration.
DGCID : Direction générale de la
coopération internationale et du développement.
DGMDP : Direction générale de la
mondialisation, du développement et des partenariats.
FAFN : Forces armées des forces nouvelles.
FDS : Forces de défense et de
sécurité.
FN : Forces nouvelles.
FPI : Front populaire ivoirien.
FRCI : Forces républicaines de Cote d'Ivoire.
IEPF : Institut de l'énergie et de l'environnement de
la francophonie.
INS : Institut national de la statistique.
LMP : La majorité présidentielle.
MFA : Mouvement des forces d'avenir.
MJP : Mouvement pour la justice et la paix.
MPCI : Mouvement patriotique de Cote d'Ivoire.
MPIGO : Mouvement populaire ivoirien du grand ouest.
OEA : Organisation des Etats américains.
OIF : Organisation internationale de la francophonie.
OMP : Opérations de maintien de la paix.
ONG : Organisation non gouvernementale.
ONU : Organisation des nations unies.
ONUCI : Opération des nations unies en Côte
d'Ivoire.
OSCE : Organisation de la sécurité et de la
coopération économique.
PDCI : Parti démocratique de Côte d'Ivoire.
PIT : Parti ivoirien des travailleurs.
PNUD : Programme des nations unies pour le
développement.
RDR : Rassemblement des républicains.
RSF : Reporters sans frontières.
RSSG : Représentant spécial du
Secrétaire général des nations unies.
RTI : Radio télévision ivoirienne.
SAF : Service des affaires francophones.
TV5 : Télévision internationale
francophone.
UDCY : Union démocratique des citoyens.
UDPCI : Union pour la démocratie et le progrès
en Côte d'Ivoire.
UE : Union européenne.
UEMOA : Union économique et monétaire ouest
africain.
PHOTO ET TABLEAUX
Photo 1 : Gérard Latortue, chef de
la Mission d'information et de contacts déployée en Côte
d'Ivoire pour les deux tours de l'élection présidentielle en
Cote d'Ivoire..........53
Tableaux
Tableau 1 : Contribution de la France au
financement de la Francophonie
multilatérale............................................................................63
Tableau 2 : Evolution du budget de la
Francophonie de 1979 à 2009......................81
LISTE DES ANNEXES
Annexe 1 : Extrait des Accords d'Accra, notamment Accra
II....................................91
Annexe 2 : Accord de Linas
Marcoussis.............................................................94
Annexe 3 : Extrait de l'Accord politique de
Ouagadougou........................................97
Annexe 4 : Extrait de l'Accord politique de
Pretoria...............................................99
Carte 1 : Carte de la Côte
d'Ivoire...................................................................101
Carte 2 : Le partage de la Côte d'Ivoire et le
contrôle international par les forces
impartiales
..................................................................................102
Communiqué de la Mission d'information et de contacts
après le premier tour............103
Communiqué de la Mission d'information et de contacts
après le second tour.............104
Photo de Laurent Gbagbo et d'Alassane
Ouattara...............................................105
Résultats du second tour des élections selon la
CEI et le conseil constitutionnel.........106
SOMMAIRE
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : LES ACTIONS
PREVENTIVES DE LA FRANCOPHONIE
17
CHAPITRE1 : LES ACTIONS DE LA FRANCOPHONIE
AVANT LE PROCESSUS ELECTORAL
18
SECTION1 : Le parcours avant
l'élection
18
SECTION2 : Les enjeux de l'élection
présidentielle ivoirienne de 2010
26
CHAPITRE 2 : LES ACTIONS DE PREVENTION
DE LA FRANCOPHONIE PENDANT LE PROCESSUS ELECTORAL IVOIRIEN
33
SECTION1 : Les actions préventives
propres a la francophonie en cote
d'ivoire
33
SECTION 2 : L'accompagnement des actions
d'autres acteurs par la
francophonie
39
DEUXIEME PARTIE : EVALUATION DU MODELE
DE PREVENTION DES CONFLITS POST ELECTORAUX DE LA FRANCOPHONIE
47
CHAPITRE 3 : LES LIMITES DE L'ACTION
PREVENTIVE DE LA FRANCOPHONIE EN COTE D'IVOIRE
48
SECTION1 : Les limites structurelles de la
Francophonie en Cote d'Ivoire
48
SECTION 2 : Les limites opérationnelles de
la Francophonie en Cote
d'Ivoire
59
CHAPITRE4 : POUR L'AMELIORATION DU MODELE DE
PREVENTION DES CONFLITS POST ELECTORAUX EN FRANCOPHONIE
71
SECTION1 : Une amélioration du point de
vue structurel
71
SECTION2 : Une amélioration du point de
vue opérationnel
76
CONCLUSION GENERALE
83
BIBLIOGRAPHIE
86
ANNEXES
90
TABLE DES MATIERES
107
INTRODUCTION GENERALE
I- PRESENTATION DU SUJET
Depuis la fin de la guerre froide intervenue symboliquement
par la chute du mur de Berlin et l'implosion de l'URSS, les conflits sont
passés, pour la plupart, du caractère inter étatique
à celui intra étatique. Ce constat est posé par Kalyvas
Stathis lorsqu'il affirme : « a recent boom in civil war
(...)has been fuelled by the global shift from inter state to intra state
conflict :of the 118armed conflicts that have been taken place between
1989 and 2004, only 7 have been inter state wars »1(*).Depuis lors, on peut faire le
constat que l'Afrique connait une multitude de conflits intra étatiques
qui sont, pour une grande majorité, liés aux questions
d'identité, de contrôle des ressources, mais surtout du fait
politique. S'il faut rester sur le cas des conflits dont la cause est
politique, il faut dire que ces conflits sont très souvent le fait des
élections. En fait, jamais les élections n'ont été
aussi violemment contestées que dans les deux dernières
décennies. Les années 2010 et 2011 en constituent autant
d'illustrations avec les cas de la RDC, de la Guinée-Conakry, et de la
Cote d'ivoire. Dans le cas ivoirien, on est même arrivé à
une crise qui a débouché sur un affrontement armé entre
les deux camps revendiquant chacun la victoire après l'élection
présidentielle du 31 octobre et 28 novembre 2010.Cette crise a vu son
dénouement avec la victoire militaire des partisans de Alassane
Ouattara et surtout la neutralisation de Laurent Koudou Gbagbo, le
Président sortant. Tous les cas relevés et en particulier celui
de la Cote d'Ivoire sont suffisamment évocateurs, car ces pays sont
tous membres de la Francophonie. Cette institution à travers son
évolution s'est pourtant progressivement attribué des missions
en ce qui concerne la promotion de la démocratie et des droits de
l'Homme, la prévention et le règlement des conflits entre
autres2(*). En effet, le 20
mars 1970, à sa création il s'agissait bien d'une organisation
à caractère culturel. L'Agence de coopération Culturelle
et Technique nait grâce à l'impulsion de grandes figures telles
que Léopold Sédar Senghor, Hamani Diori, Habib Bourguiba ou
encore le Prince Norodom Sihanouk. Mais progressivement, l'institution s'est
muée en s'impliquant peu à peu dans le volet politique à
travers notamment l'organisation des Sommets des Chefs d'Etats et de
Gouvernements dès 1986.Cette vocation à devenir politique se
confirme avec la désignation par l'organisation d'un Secrétaire
général, en la personne de Boutros Boutros- Ghali afin de donner
à la Francophonie une stature politique internationale en 1997.Cette
évolution se poursuit avec l'adoption de sa charte de 2005 à
Antananarivo qui donne à la Francophonie une dimension plus
sérieuse car, disposant dorénavant d'une personnalité
juridique internationale incontestable. La Francophonie est même
allée plus loin en adoptant les Déclarations de Bamako et de
Saint -Boniface respectivement en 2000 et 2006.En effet, ces textes de
référence qui traitent de la démocratie et de la
prévention des conflits constituent le véritable fil d'Ariane de
l'action de la Francophonie. Il faut dire que pour cette Organisation, la
démocratie est le modèle qui doit être instauré dans
son espace car elle constitue un élément décisif de
prévention des conflits que la Déclaration de Saint-Boniface
vient tout simplement confirmer. Au total, ces deux textes permettent de savoir
la posture normative de la Francophonie en ce qui concerne la question de
savoir comment elle entend prévenir les conflits en
général, et ceux post électoraux en particulier. Par
conséquent, le conflit armé post électoral qui a
finalement eu lieu en Cote d'Ivoire donne une belle opportunité de voir
la Francophonie à l'oeuvre en ce qui concerne ses actions
préventives dans ce pays, mais aussi d'évaluer par ricochet son
dispositif global en la matière. Mais avant d'y arriver, il importe
d'être en phase en ce qui concerne la compréhension des concepts
qui vont être manipulés.
I- DEFINITION DES CONCEPTS
Pour les besoins de bonne compréhension de notre sujet,
un certain nombre de concepts méritent des clarifications. Il
s'agit :
A- LA FRANCOPHONIE
Le concept Francophonie est utilisé pour la
première fois en 1880 par le géographe Onésime RECLUS et
désigne alors« l'ensemble des populations,
à l'échelle du globe, parlant
français ».3(*) Mais de nos jours, ce terme a connu une
évolution sur les plans sémantique et grammatical. Il est de ce
fait important de faire la distinction entre la francophonie avec «
f »minuscule et la Francophonie avec « F »
majuscule4(*).
La francophonie avec « f »
minuscule : désigne l'ensemble des locuteurs, des groupes de
locuteurs et des peuples qui utilisent le français à des
degrés divers : le français est, selon le cas, langue maternelle,
langue seconde, langue de communication, langue de travail ou de culture.
Après le Sommet francophone de Beyrouth en 2002, la
« francophonie » désigne l'ensemble des individus et
des peuples partageant non seulement le français mais aussi les valeurs
humanistes de l'universalisme francophone.
La Francophonie avec « F »majuscule
: désigne le regroupement sur une base politique des États et
gouvernements membres de l'Organisation internationale de la Francophonie.
Il en résulte que par rapport au terme
« Francophonie » ayant une connotation géopolitique,
celui de « francophonie » est souvent utilisé dans
le cadre de la société civile (éducation, économie,
affichage, mass média...)
In fine, lorsqu'on parlera de Francophonie, il sera question
du regroupement sur une base politique des Etats et gouvernements membres de
l'Organisation Internationale de la Francophonie(OIF).
B- LA PREVENTION
Le dictionnaire Larousse5(*) de poche 2007, donne deux définitions
intéressantes qui peuvent être présentées. D'abord
prévenir, qui est le radical du concept prévention, qui signifie
aller au-devant de quelque chose, prendre des dispositions pour
l'empêcher de se produire. Ensuite, prévention qui renvoie
à l'ensemble des dispositions prises pour prévenir un danger. A
ces définitions littérales qu'offre le dictionnaire Larousse, il
convient de proposer une autre, celle-ci plus pointue. En effet, Gérard
Cornu définit la prévention comme « l'ensemble des
mesures et institutions destinées à empêcher, ou du moins
à limiter, la réalisation d'un risque, la production d'un
dommage, l'accomplissement d'actes nuisibles en s'efforçant d'en
supprimer les causes et les moyens » 6(*). Dans le cadre de ce
travail, la définition avancée par Gérard Cornu est celle
qui retient notre attention et qui sera utilisée.
C- LE CONFLIT
Le conflit peut être entendu comme une situation sociale
où des acteurs en interdépendance, soit poursuivent des buts
différents, défendent des valeurs contradictoires, ont des
intérêts divergents ou opposés, soit poursuivent
simultanément et compétitivement un même but. Ce terme
traduit donc une situation d'opposition, sous des formes très diverses,
des individus ou des groupes dont les intérêts sont
divergents.7(*)
Selon Pietro Verri, le conflit rend compte des affrontements
qui peuvent se produire entre deux ou plusieurs Etats, entre un Etat et un
acteur non étatique, entre un Etat et une faction dissidente, entre deux
ethnies diverses à l'intérieur d'une entité
étatique8(*).
Le dictionnaire Larousse de poche 2007 quant à lui se
limite à voir en le conflit une opposition d'opinion, ou
d'intérêt, entre deux parties.
Pour Freund, le conflit consiste
« en un affrontement ou heurt intentionnel entre individus ou
groupes qui manifestent les uns à l'égard des autres par une
intention hostile(...) éventuellement par le recours à la
violence, laquelle peut, le cas échéant, tendre à
l'anéantissement physique de l'autre »9(*).
Ainsi tout au long de notre travail, nous allons
appréhender le conflit au sens présenté par Freund.
Il serait aussi pertinent de convoquer quelques expressions
qui sont très souvent utilisées et qui sont à tout le
moins voisines. Il s'agit des concepts guerre et crise.
L'étude sur le phénomène que constitue
la guerre est l'apanage des polémologues. Pour le plus
célèbre d'entre eux, à savoir Carl Maria Von Clausewitz,
la guerre, conflit de grand intérêt qui se règle par le
sang, est un acte de violence destiné à contraindre l'adversaire
à exécuter notre volonté. La guerre est une
activité ordonnée, rationnelle car elle est menée avec en
perspective que l'utilité escomptée soit supérieure
à l'utilité attendue d'un non recours à la force
armée. C'est, in fine, « la poursuite de la
politique par d'autres moyens »10(*).Car, en fait, l'objectif n'est pas
nécessairement de détruire la vie de l'ennemi, mais
essentiellement de le contraindre à changer d'avis. Donc en fait, la
guerre découle d'une divergence d'opinion et(ou)
d'intérêt.
Quant au concept Crise, le dictionnaire
Larousse le définit comme une période tendue ou encore comme une
situation difficile. Mais pour Zartman, la crise peut s'entendre comme le
passage actif à des hostilités armées11(*).
Conflits post électoraux :
Il s'agit dans ce contexte, de conflits survenant à la
suite des élections. Ils peuvent prendre racine avant les
élections, mais déclencher après le vote ou, comme
très souvent, à la suite de la proclamation des résultats
des votes. Dans ce dernier cas, ils portent très souvent sur la
crédibilité des résultats proclamés, d'où la
contestation de ceux-ci.
II- INTERET DU SUJET
Ce sujet revêt plus d'un intérêt qui va du
scientifique au personnel, en passant par celui politique.
Concernant d'abord l'intérêt scientifique, le
conflit postélectoral ivoirien intervenu à la suite de
l'élection présidentielle organisée en octobre-novembre
2010 a été abondamment traité par les médias.
Pourtant, avant d'arriver à cette élection, plusieurs accords et
médiations ont eu lieu pour qu'on puisse aller à cette
consultation électorale qui devait permettre de sortir de la situation
qui prévalait. Cette élection était une élection
post conflit qui était censé ramener la normalité
politique dans ce pays fragile .Mais on a plutôt eu droit à un
conflit postélectoral. On est donc en présence d'un cas assez
particulier du fait qu'on part d'une élection qui doit sortir le pays
d'une décennie de conflit à une élection qui
génère plutôt un conflit. Cette étude
s'évertuera à revisiter l'ensemble de mesures préventives
prises qui ont été favorisées, accompagnées ou
soutenues par la Francophonie. Ce sujet pourrait donc modestement contribuer
à déceler les failles de l'ensemble du dispositif de
prévention enclenché et mis en place par la Francophonie dans le
cas de la Cote d'Ivoire.
En ce qui concerne l'intérêt pragmatique et
politique, ce sujet pourrait permettre de s'interroger sur le comportement des
acteurs politiques ivoiriens, mais aussi sur celui des acteurs de la
résolution en présence et notamment celui de la Francophonie.
Etant entendu que le conflit s'est déroulé dans son espace,
l'étude pourrait conduire à déterminer la véritable
influence de cette institution en ce qui concerne la prévention des
conflits qui se trouve être un de ses terrains d'investissement12(*).
Sur un plan strictement personnel, notre modeste ambition est
de contribuer à ce que l'Afrique ne connaisse plus ce type de conflit
qui a non seulement meurtri le continent , mais a surtout permis de jeter
une fois de plus l'opprobre sur un pays qui a pourtant donné -le temps
de l'entre deux tours-espoir quant à la consolidation de la
démocratie. Notre souhait serait donc de pouvoir contribuer à
faire cesser ou du moins à réduire conséquemment les
conflits postélectoraux sur le continent africain en proposant non
seulement à la Francophonie, mais aussi aux décideurs et acteurs
politiques des éléments scientifiques.
III- LA REVUE DE LA LITTERATURE.
Dans cette partie, il sera question pour nous de parcourir la
littérature existante que nous avons pu consulter. Il sera
également question de voir dans quelle mesure notre étude
converge d'avec celle de nos prédécesseurs et par la suite
montrer en quoi elle se démarque des travaux déjà
réalisés.
Parmi les auteurs qui se sont penchés sur la question
de l'action préventive de la Francophonie en matière de conflits,
figure en bonne place Jean-Louis ATANGANA AMOUGOU, avec notamment son article
intitulé : « Francophonie et résolution des
conflits en Afrique »13(*) .Dans cet article, l'auteur affirme
d'emblée que cette Organisation est bel et bien un acteur de la
prévention des conflits14(*). Il montre que la prévention et la gestion des
conflits ne sont pas l'apanage de la Francophonie, mais qu'elle s'inscrit dans
le même sillage que la plupart des Organisations Internationales à
l'instar de l'organisation des nations unies(ONU), l'union africaine(UA), de
l'Union Européenne(UE), l'Organisation de sécurité et de
coopération économique(OSCE), l'Association des nations du
Sud-est asiatique(ASEAN), l'Organisation des Etats
Américains(OEA)15(*).Ensuite , il s'attèle à définir
ce qu'il faut entendre par prévention. Il la définit comme
« l'ensemble des mesures et institutions destinées à
empêcher, ou du moins à limiter, la réalisation d'un
risque, la production d'un dommage, l'accomplissement d'actes nuisibles en
s'efforçant d'en supprimer les causes et les moyens16(*) » .Il continue
en montrant que pour cette Organisation, l'option de la prévention est
celle qui est la plus souhaitée et la plus à même d'aboutir
à la résolution des conflits en Afrique. En rappelant le
fondement de son action, qui se structure autour de la Charte, des
différentes déclarations de Bamako(2000) et de
Saint-Boniface(2006), l'auteur présente les aspects
préconisés par l'OIF pour aboutir à une prévention
efficace. C'est ainsi qu'il expose les deux dimensions de la prévention
qui sont la dimension normative et la dimension institutionnelle.
Concernant la dimension normative, l'auteur la décline
à travers la promotion de la paix qui peut être perçue par
les différentes rencontres de haut niveau entre dirigeants francophones
lors des sommets qui souhaitent renforcer les capacités des Etats
francophones en matière de maintien de la paix entre autres. L'auteur
fait aussi allusion aux séminaires organisés par la Francophonie
dans différentes sous - régions d'Afrique.
Toujours dans la dimension normative, il évoque la
question de la promotion de la démocratie et de l'Etat de droit .A son
avis, et surtout à la manière de penser de cette Organisation,
c'est la démocratie qui est le meilleur garant de la paix. Elle
emprunte de ce fait la logique d'Emmanuel Kant à travers sa
théorie de la paix démocratique.17(*)Ainsi pour cette organisation, démocratiser les
Etats est une quête, voire un leitmotiv affiché et
formalisé dans ses textes de référence que sont notamment
la charte ainsi que les différentes déclarations (Bamako et
Saint-Boniface).
Dans un second temps l'auteur montre que la prévention
au sein de cette organisation se fait aussi de façon institutionnelle.
En effet, il est question pour la Francophonie d'accompagner le processus de
démocratisation de l'Afrique à travers l'assistance
électorale et l'observation électorale18(*).
En ce qui concerne l'assistance électorale, il estime
que les missions électorales qu'il a déclinées en trois
aspects constituent une modalité de domestication des violences
pré et post électorales. Il s'agit des missions
électorales, qui peuvent prendre la forme des missions exploratoires ou
encore celle des missions d'observation électorales.
Ensuite on a des missions d'information qui tentent de
contribuer au bon fonctionnement et au bon déroulement des
élections présentes et futures. Enfin on a l'assistance
électorale qui se fonde sur la Déclaration de Bucarest de 2006,
confortée par la Déclaration de Bamako qui invite l'OIF
à « prendre des mesures appropriées pour assurer
des élections libres, fiables et transparentes »19(*).
Pour ce qui est de l'observation électorale, la
Francophonie met à disposition ses délégués pour
assister au déroulement des élections .Par la suite ceux-ci
établissent des rapports sur la qualité et la fiabilité de
ces élections conformément aux dispositions de la
Déclaration de Bamako.
En tout état de cause cet article a le mérite de
présenter les mécanismes par lesquels la Francophonie entend
contribuer à la prévention des conflits dans ses Etats
membres.
Seulement, il se contente de donner une contribution purement
juridique en ceci que tout ce qui y est dit est du domaine du droit,
c'est-à-dire, ce qui devrait être. Or, à l'observation du
cas ivoirien qui nous concerne, on devrait aller plus loin que la perspective
juridique qui se manifeste par une multitude de déclaration
d'intentions, mais qui n'ont pas suffit à empêcher la survenance
du conflit postélectoral qui a eu lieu. Notre étude entend donc
s'atteler à démonter un certain nombre d'aspects qui ont certes
été pris en compte, mais pas totalement, comme le comportement et
les intérêts des acteurs.
Un autre document que nous avons pu consulter c'est le
mémoire de Murielle Abenelang Abessolo dont le thème s'intitule
« le power sharing comme modalité de résolution des
conflits postélectoraux en Afrique : cas des expériences de
la Cote d'Ivoire et du Kenya »20(*).Bien que n'ayant pas un rapport d'emblée
évident avec notre sujet, nous avons pu noter un certain nombre
d'aspects pouvant intervenir dans notre travail. En effet la
problématique générale de son travail est celle de savoir
si le power-sharing21(*) , en tant que modalité de
résolution des conflits de plus en plus en vogue dans certains pays
d'Afrique, était la panacée pour résoudre durablement les
conflits post électoraux en Afrique. Elle s'est employée
à démonter cette modalité en montrant au finish que,
plutôt que de résoudre les conflits, il serait plutôt
générateur de ceux-ci, car c'est en fait une porte ouverte aux
contestations même fortuites et fantaisistes des résultats des
élections tout en sachant que finalement, on arriverait à rester
au pouvoir. Ce serait aussi, pense -t -elle, un moyen de légitimer la
force au détriment du droit, au détriment de la
démocratie .Elle préconise plutôt qu'une culture
démocratique soit installée dans les pays africains afin qu'on
puisse éviter les conflits comme celui qu'a connu la Côte-D'ivoire
récemment .Ce mémoire est intéressant, dans la mesure
où la Cote d'Ivoire a bel et bien expérimenté le
power-sharing car faut-il le rappeler, la dernière élection
présidentielle avait pour objectif de sortir le pays d'une
décennie de crise marquée par plusieurs rebondissements comme par
exemple la division du pays en deux parties, chacune contrôlée par
une armée différente. Le power-sharing était donc
utilisé pour permettre de calmer les ardeurs des différents
acteurs avant les élections qui devraient permettre de ramener la
sérénité et la normalité politique dans ce pays
rendu fragile .Au final, on peut aisément se rendre à
l'évidence du fait que cette modalité n'a pas pu ramener la paix
dans ce pays qui a plutôt sombré dans un conflit post
électoral au lendemain des élections présidentielles .Ce
travail s'inscrit bien dans notre logique, car nous nous interrogeons sur le
fait que, malgré toutes les mesures qui ont été prises, on
en soit tout de même arrivé à un conflit post
électoral ? Comment comprendre le rôle joué par
la Francophonie, et quelles actions a -t elle menées pour qu'on en
arrive pas là ?
Un autre document intéressant, c'est celui de Christian
Valantin dans son livre « Une histoire de la
Francophonie ». L'intérêt de cet ouvrage est
d'autant plus pertinent avec son chapitre intitulé : la
Francophonie et la paix. Dans cet article, l'auteur commence par montrer que
« sur les 118 conflits survenus en 80 points du globe depuis
1989, la plupart ont été des conflits internes frappant les pays
pauvres, notamment francophones. Environ 50% de ces pays ont rebasculé
dans la crise dans les cinq ans qui ont suivi la conclusion de ces
accords de paix»22(*).Il pense que c'est cette situation qui explique
les raisons pour les lesquelles la Francophonie s'est, depuis le
début des années 1990, impliquée dans la recherche de la
paix dans les pays en crise de l'espace francophone. Il estime qu'avec les
Déclaration de Bamako et de Saint -Boniface la Francophonie s'est
dotée d'instruments pertinents qui lui permettent d'intervenir
pacifiquement dans les cas de violation plus ou moins graves de la
démocratie et de non respect des droits de l'Homme. Il s'évertue
d'ailleurs à présenter quelques exemples d'actions qui ont
réussi, mais aussi celles qui ont échoué. L'auteur pense
que sur le long terme, dans son action, l'OIF se donne pour objectif d'affermir
la démocratie, de faire respecter les droits de l'Homme et de consolider
l'Etat de droit23(*) afin
de prévenir efficacement les conflits, notamment ceux post
électoraux. Il continue en avançant que le mode de sortie de
crise privilégié par l'OIF repose sur les accords de paix entre
les parties en conflit, car ils sont souvent assortis d'un dialogue
réunissant les acteurs concernés. Ainsi en a-t-il
été en 2007-2008 de l'Accord politique de Ouagadougou sur la
côte d'Ivoire, du dialogue inclusif en RCA et de l'Accord politique du
13aout 2007 au Tchad24(*)
. Cette économie de ses idées nous permet de voir qu'il se situe
bien dans notre sillage, puisqu'il indique par quelle voie la Francophonie
entend agir dans la prévention des conflits en général, et
ceux post électoraux en particulier. L'action de la Francophonie passe
donc par l'affermissement de la démocratie et le dialogue entre les
différentes parties qui doivent déboucher sur des Accords
politiques.
Seulement, on peut très bien remarquer qu'en Cote
d'Ivoire qui est un pays francophone, on a abouti à un conflit post
électoral à l'issue des élections présidentielles
de 2010. Différents Accords ont été signés entre
les parties, mais cela n'a pas suffit à empêcher ce qui est
arrivé par la suite. Il est alors question d'analyser le rôle
joué par la Francophonie à la lumière de ses textes et de
ses actions afin d'en évaluer leur efficacité dans le cas
ivoirien qui nous concerne.
IV- LA DELIMITATION DU SUJET
Concernant cette délimitation, elle a deux dimensions
qui sont d'ordre temporel et spatial.
Concernant la dimension temporelle, il sera question de
traiter du conflit post électoral qui a secoué la Cote d'Ivoire
au sortir de l'élection de octobre-novembre 2010.Ainsi, il sera question
pour nous de traiter de la période allant de 2003 à 2010 avant
le déclenchement de l'affrontement armé mettant en place deux
camps qui revendiquaient chacun la victoire à cette consultation
électorale .Mais pour une meilleure observation, il sera tout de
même évoqué quelques éléments intervenus
avant cette période.
En ce qui concerne l'espace, notre sujet se délimite en
Cote d'Ivoire qui est un pays d'Afrique occidentale, membre de la Francophonie
depuis 1960.Ce pays est également membre de l'Union africaine(UA) et de
la communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest(CEDEAO).D'une
superficie de 322 462 KM2 , elle est limitée au Nord par le Mali et
le Burkina Faso, à l'Ouest par le Liberia et la Guinée, à
l'Est par le Ghana et au Sud par l' Océan Atlantique. La population
ivoirienne est estimée à 21 058 798 habitants en
2010.25(*)La Cote d'Ivoire
a pour capitale politique Yamoussoukro et pour capitale administrative et
économique Abidjan. La langue officielle est le français et la
monnaie le franc CFA.D'abord protectorat français en 1843 et devenue
colonie française en1893, le pays acquiert son indépendance le
7aout 1960 sous la houlette de Félix Houphouët-Boigny, premier
président de la République.
V- PROBLEMATIQUE
Toute recherche doit être fondée sur une
problématique. En d'autres termes, il faut soumettre le sujet
d'étude à un questionnement systématique car la
problématique est pour un travail de recherche ce que le système
nerveux est pour un être humain. 26(*)La Francophonie s'est dotée d'un arsenal de
textes et résolutions pour pouvoir préserver la paix et
régler les conflits post électoraux. A partir de ces remarques
préliminaires, on peut se poser une question globale, celle de savoir
quel rôle a joué la Francophonie pour prévenir le
conflit post électoral ivoirien ? Des questions
subsidiaires découlant de la question centrale peuvent aussi être
posées. Quelles sont les actions
entreprises par la Francophonie en Cote d'Ivoire visant à
prévenir un conflit post électoral ? Ces actions ont -elles
été efficaces ? Comment peut-on les
améliorer ?
VI- HYPOTHESES DE RECHERCHE
L'hypothèse peut être comprise comme une
réponse provisoire donnée à la question centrale de notre
travail. Madeleine GRAWITZ la définit comme « une
proposition de réponse à la question
posée »27(*).Dans notre cas, nous posons comme hypothèses
que :
§La Francophonie n'a pas joué un rôle
important pour prévenir le conflit post électoral ivoirien.
§ Mieux, la Francophonie a joué un rôle
minimal, ce qui n'a pas permis d'empêcher la survenance du conflit post
électoral ivoirien.
VII- OBJECTIFS DE L'ETUDE
L'objectif principal de cette étude est
d'évaluer l'action de prévention des conflits de la Francophonie
en général, et plus particulièrement dans le cas ivoirien
récent. Ainsi, pour y parvenir, il sera question de :
*Présenter les actions de la Francophonie en Cote
d'Ivoire avant et pendant le processus électoral ;
*Evaluer l'efficacité du dispositif francophone en
matière de prévention des conflits post électoraux, en
allant à priori avec l'idée que celui-ci est perfectible, et
logiquement finir par des pistes de solutions allant dans le sens de
l'amélioration de ses actions futures.
IX- EXPLICATION THEORIQUE ET
METHODOLOGIQUE
ASPECT THEORIQUE
Notre étude sur la Francophonie et la prévention
des conflits post électoraux en Afrique subsaharienne : cas de la
Cote d'Ivoire va s'appuyer sur les théories suivantes : le
Libéralisme et le néo institutionnalisme. Nous procèderons
d'abord par une explicitation des différents postulats de ces
théories avant de tenter une opérationnalisation de ceux -ci par
rapport à notre sujet.
1- LE LIBERALISME
Le libéralisme est le premier courant des relations
internationales. Ce courant insiste sur deux postulats bien précis que
sont la primauté de l'individu et le rôle minimum que devrait
jouer l'Etat. Les auteurs se revendiquant de cette théorie sont
nombreux, parmi lesquels nous pouvons citer John Locke, David Ricardo, Adam
Smith, Montesquieu entre autres. Ce courant a toutefois développé
deux théories parmi lesquelles nous utiliserons celle dite de
« la paix démocratique ».En effet, suivant Emmanuel
Kant qui est le principal concepteur de cette théorie, l'instauration de
la démocratie triomphera des passions guerrières et suscitera
l'avènement d'une paix universelle durable. Pour la « pax
democratica », c'est à travers la diffusion des valeurs de la
démocratie qu'on peut atteindre la paix internationale. Pour Kant,
interprété par Dario Battistela, la première proposition
de cette théorie signifie que la démocratie est favorable
à la paix.28(*)Cette proposition rejoint celle édictée
par la Francophonie à travers notamment les Déclarations de
Bamako(2000), Saint- Boniface(2006), la charte de la Francophonie(2005) et le
cadre stratégique décennal(2004), « entend apporter
une contribution significative à la promotion de la paix, de la
démocratie et au soutien à l'Etat de droit et aux droits de
l'Homme en mettant l'accent sur la prévention »29(*) des conflits dans ses
Etats membres en général, et en ce qui nous concerne, en Cote
d'Ivoire . De ce fait, on peut légitimement affirmer que la
démocratie est la quête, voire le cheval de bataille de cette
organisation.
2- L'INSTITUTIONNALISME
Depuis une quinzaine d'années, il y a un regain
d'intérêt pour les théories institutionnalistes dans les
sciences sociales. En particulier dans le monde anglo saxon, la parution de
plusieurs ouvrages mettant en exergue l'importance des institutions a
contribué à faire naître un débat dans les revues
scientifiques autour du rôle de la structure, de la culture et de
l'action dans l'explication des phénomènes sociaux ou encore
autour du rôle des idées, des normes et des valeurs par rapport
à celui des intérêts individuels. Pour parler de
l'institutionnalisme, il convient d'évoquer le débat bien connu
qui a eu lieu entre John Mearsheimer30(*) d'un coté, et Robert Kehoane et Lisa Martin de
l'autre.
Dans son article «The false promise of
international institutions »31(*), Mearsheimer affirme d'emblée que les
institutions internationales ne sont pas liées à la
stabilité politique, et n'ont pas une influence majeure sur les
questions de guerre et de paix. Dans cet essai, il essaye de montrer par des
preuves historiques, qu'en fait, les institutions internationales ne sont pas
devenues les stabilisateurs internationaux qu'elles ont été
conçues pour être. Par conséquent, elles ne peuvent pas
être placées au centre pour maintenir une paix durable et l'ordre
mondial. Mearsheimer définit les institutions comme «un ensemble de
règles qui stipulent les façons dont les États doivent
coopérer et rivaliser les uns avec les autres »32(*). Dans son essai, il se
réfère aux trois théories de l'institutionnalisme pour
illustrer son manque de confiance dans l'efficacité des institutions
internationales. La première, l'institutionnalisme libéral, met
l'accent sur la coopération économique et environnementale comme
un moyen d'éviter la guerre. La seconde, la sécurité
collective, traite de la prévention de la guerre en rejetant l'usage de
la force, par l'écrasement immédiat de toute menace de guerre, en
interdisant aux États d'agir par intérêt et en utilisant
les forces conjointes des Etats pour lutter contre les antagonistes. La
troisième, la théorie critique, adopte une approche
révolutionnaire, et s'efforce de changer la structure de la politique
afin de rendre la coopération inévitable et créer les
conditions d'une paix durable33(*). Mearsheimer est en désaccord avec la
compétence de l'institutionnalisme, car les Etats, lorsqu'il s'agit de
la politique internationale, ne peuvent pas être dissociés de
leurs tendances naturelles de suivre les concepts du réalisme.
Mearsheimer affirme que, bien que les conditions de stabilité et de
coopération ont eu lieu, la coopération entre les Etats a ses
limites, principalement parce qu'ils sont contraints par la logique dominante
de la concurrence de sécurité, qu'aucune somme de
coopération ne peut éliminer»34(*) .Il conclue en affirmant qu'en
théorie, le concept d'institutions internationales destinées
à régir les affaires internationales est une approche
idéale pour la politique mondiale et les conflits.
Robert Kehoane et Lisa Martin quant à eux prennent le
contre-pied de Mearsheimer à travers leur article intitulé
«The promise of institutionalist theories »35(*). Ils montrent que les
institutions internationales remplissent leurs
« promesses » notamment par un tour d'horizon des
recherches théoriques et empiriques sur les institutions
internationales. Pour eux, les institutions ont un grand rôle dans le
sens de la recherche d'une paix durable et de la prévention et
résolution des conflits, mais qu'il appartient aux sciences sociales de
découvrir comment et sous quelles conditions. En clair, les institutions
internationales à l'image de la Francophonie comptent, mais encore
faut-il trouver comment elles comptent.
A partir de ce postulat institutionnaliste, il est important
de voir comment la Francophonie qui est une institution internationale entend
agir pour prévenir les conflits post électoraux, mais aussi et
surtout quels sont les difficultés qu'elle rencontre dans la tentative
d'accomplissement de son objectif général.
B- CADRE METHODOLOGIQUE
Tout travail de recherche s'appuie sur une méthodologie
bien précise. Par là nous entendons l'ensemble de moyens et
techniques utilisés dans le cadre de ce travail.
1- LA METHODE UTILISEE
Selon Madeleine GRAWITZ, la méthodologie renvoie
à « l'ensemble des opérations intellectuelles par
lesquelles une discipline cherche à atteindre les vérités
qu'elle poursuit, les démontre, les vérifie »36(*).Dans le cadre de notre
étude il sera bel et bien question d'appliquer la méthodologie
.Notre travail s'inscrivant dans le champ des relations internationales, il
faut d'emblée dire que la méthodologie de la science politique
est assez particulière dans la mesure où c'est une discipline qui
se situe au carrefour de beaucoup d'autres sciences sociales telles que
l'histoire ,la Sociologie, et bien d'autres. Ceci rendant évidente la
compréhension du qualificatif généralement utilisé
suivant lequel ce serait une science carrefour, c'est-à-dire qu'elle se
situe au coeur de plusieurs autres sciences. Ainsi, sera t-il question pour
nous d'utiliser la méthode hypothético-inductive comme logique
méthodologique de notre travail. Ceci s'expliquant par le fait qu'il
sera question pour nous d'avancer des hypothèses qui seront
confrontées à l'épreuve des faits. A la suite de ce test,
nous retiendrons celle qui résiste à l'épreuve de
l'observation et de l'expérience comme modèle applicable non pas
seulement au seul cas que nous avons choisi, mais s'inscrivant dans une
dynamique globale de recherche de solutions aux problèmes eux même
globaux.
2- LES TECHNIQUES DE COLLECTE DES DONNEES
Comme technique d'investigation, nous allons retenir dans le
cadre de ce travail, les entretiens et la recherche documentaire.
En ce qui concerne les entretiens, il faut noter qu'il en
existe plusieurs types. Pour notre étude, nos entretiens se sont
portés vers des universitaires, chercheurs spécialisés et
experts dans le domaine de la prévention des conflits, qui ont pu nous
aider à améliorer notre connaissance du terrain en nous exposant
non seulement les résultats de leurs travaux mais aussi la
démarche entreprise, les problèmes rencontrés et les
écueils à éviter37(*).Nous avons consulté aussi des diplomates en
service dans les ministères, notamment au ministère des Relations
Extérieures pour pouvoir bénéficier
d'éléments importants à même de nous aider. Il a
été également question pour nous de nous entretenir avec
des responsables en service dans les missions diplomatiques
accréditées au Cameroun ayant une proximité avec la
question que nous étudions.
En ce qui concerne la recherche documentaire, il a
été question pour nous de rentrer en contact physique avec un
certain nombre de documents pouvant nous permettre d'être le mieux
outillé possible en éléments probants et autant que faire
se peut objectifs traitant de la question étudiée. Ainsi, pour
notre recherche, nous avons utilisé des ouvrages
spécialisés, des ouvrages généraux, des
thèses, mémoires, articles, journaux, sites internet, bref, tout
support dont nous avons jugé de sa pertinence et de sa
fiabilité.
VIII- L'ANNONCE DU PLAN
L'objectif général de ce travail est d'analyser
le rôle joué par la Francophonie pour prévenir le conflit
post électoral ivoirien. Quelles actions a-t-elle
menées en Cote d'Ivoire visant à prévenir un conflit post
électoral ? Ces actions ont -elles été
efficaces ? Comment peut-on améliorer son dispositif pour favoriser
à la longue une paix durable dans ses Etats membres qui contribuera par
ricochet à lui donner une « magistrature
d'influence »38(*) .
Ces questionnements nous amènent à orienter
notre travail autour de deux parties.
Une première partie intitulée :
Les actions préventives de la Francophonie. Cette
partie comporte deux chapitres : Les actions préventives de la
Francophonie avant le processus électoral ivoirien (chapitre1), et un
second chapitre intitulé : Les actions préventives de la
Francophonie pendant le processus électoral ivoirien (chapitre2).
Une seconde partie intitulée : Evaluation
du modèle de prévention de la Francophonie en Cote
d'Ivoire. Cette partie comporte également deux chapitres :
Les limites de l'action préventive de la Francophonie (chapitre3) et un
quatrième qui s'évertuera à donner les pistes pour
une amélioration du modèle de prévention des conflits
post électoraux en Francophonie (chapitre4).
PREMIERE PARTIE : LES
ACTIONS PREVENTIVES DE LA FRANCOPHONIE
L'élection présidentielle ivoirienne qui s'est
tenue le 31 octobre et le 28 novembre 2010 permet de voir la Francophonie
à l'oeuvre dans le cadre de ses actions préventives. Cette
situation est rendue possible du fait que cette Institution s'investit
aujourd'hui dans des problématiques politiques, voire
sécuritaires. Elle a donc une légitimité dans le domaine
de la prévention des conflits, notamment ceux post électoraux
puisque de par ses textes39(*), elle s'est attribuée cette compétence.
La suite de la réflexion s'attèlera alors à
présenter ses actions préventives dans ce pays d'Afrique. Ainsi
sera-t-il question d'envisager ces actions sous deux prismes
complémentaires. D'abord, les actions de la Francophonie avant le
processus électoral ivoirien (chapitre1). Il sera question de comprendre
son rôle bien avant que les élections ne se tiennent. Par la
suite, il sera question de voir son rôle pendant et après le
déroulement de la consultation électorale, d'où le second
temps de la réflexion qui s'intitule : les actions de la
Francophonie pendant le processus électoral (chapitre2).
CHAPITRE1 : LES
ACTIONS DE LA FRANCOPHONIE AVANT LE PROCESSUS ELECTORAL
La période avant les élections est en
général très délicate car, comme on le sait, c'est
le moment privilégié pendant lequel une élection peut
être préparée à réussir, ou alors elle peut
présager un échec qui, dans notre cas, est un conflit post
électoral. C'est ce qui explique la multitude d'observateurs, d'acteurs
et d'institutions qui se sont mobilisés pour cette élection.
Parmi ceux-ci, figure bien la Francophonie, pour des raisons évidentes
d'appartenance du pays à cette Organisation, mais aussi d'une
réponse favorable à la demande que lui a adressée les
autorités de Côte d'Ivoire. Il sera donc question
d'étudier les actions menées par la Francophonie avant le
scrutin, actions qui sont de nature à prévenir une situation de
conflit post électoral. Ce sera l'occasion de voir la mise en oeuvre des
textes réglementaires de cette institution dans une situation
précise. Ainsi sera-t-il question de traiter du parcours avant
l'élection (section 1), et par la suite, il sera question de traiter des
enjeux de l'élection de 2010 (section2).
SECTION1 : Le parcours
avant l'élection
Il est question dans cette partie de la réflexion de
voir comment l'évolution vers l'élection s'est faite. Comme on
peut très bien le présager, elle n'a pas été un
long fleuve tranquille. La Francophonie s'est retrouvée au cours de
cette évolution dans diverses postures qu'il conviendra d'examiner. Par
la suite, il est question de présenter l'environnement qui
prévaut avant que les différents acteurs ne rentrent dans
l'arène que constitue la compétition électorale. Ceci nous
permet d'envisager la réflexion sur deux prismes. Les différents
accords intervenus avant l'élection (paragraphe1), et le contexte
général avant l'élection (paragraphe2).
Paragraphe1 : Les
différents Accords intervenus avant l'élection
Pour parvenir à l'élection du 31octobre et du
28 novembre 2010, les acteurs politiques ivoiriens sont passés par
plusieurs Accords qu'il convient de revisiter afin d'y voir l'implication ou
non de la Francophonie. C'est pourquoi, il sera question d'examiner les Accords
de Linas Marcoussis et d'Accra(A), et ensuite d'analyser les Accords de
Prétoria et de Ouagadougou(B).
A- Les Accords de Linas
Marcoussis et d'Accra
Au lendemain du coup de force manqué du 19
septembre200240(*), la
situation qui prévaut en Cote d'ivoire est précaire. En effet, on
assiste tout simplement à une partition du pays. L'unité
nationale était donc déjà largement ébranlée
lorsqu'intervient une tentative de coup d'État le 19 septembre 2002 par
des forces rebelles du nord du pays opposés au régime de Laurent
Gbagbo. Regroupées au sein du Mouvement patriotique de Côte
d'Ivoire (MPCI), les forces rebelles parviennent à s'emparer de
certaines grandes villes du nord et du centre comme Korhogo ou Bouaké.
Elles réclament le départ de Laurent Gbagbo, la tenue de
nouvelles élections, et se posent en défenseur de la cause des
populations « nordistes », victimes de la politique d'«
ivoirité » du Président Gbagbo. Les rebelles du MPCI seront
rejoints par deux autres groupes d'insurgés de l'ouest du pays41(*) pour former une grande
coalition en décembre 2002 : les Forces nouvelles de Côte d'Ivoire
(FNCI) dont Guillaume Kigbafori Soro prendra la direction. C'est
considérant cet état de fait que la France décidera de
réunir les différentes parties sur son sol. Organisée
à l'initiative des autorités françaises, la table ronde de
Linas Marcoussis et la conférence des Chefs d'Etats africains de Paris,
dite aussi de Kleber ont eu lieu respectivement du 15 au 24 et du 25 au 26
janvier 2003.Le premier rendez-vous a pour mission de dégager un
consensus entre les différentes forces politiques ivoiriennes et les
rebelles qui défient le pouvoir institutionnel du Président
Gbagbo et de tracer le chemin à suivre pour la restauration de la paix.
Le second vise à avaliser les accords issus de la table ronde devant la
communauté internationale. En gros, les conclusions de Marcoussis
tournent autour de points prioritaires. Il s'agit notamment de la formation
d'un gouvernement d'union nationale avec dans celui-ci toutes les parties
présentes à la table, y compris les rebelles. Cet Accord modifie
également la distribution des pouvoirs organisée par la
Constitution ivoirienne du 23juillet 200042(*).Les Accords appellent aussi au regroupement des
différentes forces armées en présence, puis à leur
désarmement suivant le modèle bien connu du DDR43(*). Concernant
l'ivoirité44(*),
les Accords demandent une révision des textes constitutionnels sur la
nationalité ainsi que l'allègement des conditions
d'éligibilité à l'élection présidentielle
qui est un élément à l'origine des tensions politiques et
frustrations dans le pays. Prenaient part aux dits Accords trente deux
personnes invitées par les autorités françaises. Neuf
composent la délégation des rebelles Forces Nouvelles et les
autres places sont réservées aux partis politiques de
l'opposition représentés à l'Assemblée nationale
ivoirienne représentant les institutions républicaines. Les
travaux sont placés sous la direction de Pierre Mazeaud,
Président du Conseil constitutionnel français assisté de
huit modérateurs qui représentent la CEDEAO, l'UA et l'ONU. Il
faut tout de même noter que la Francophonie a été
désignée avec d'autres pour faire partie du comité de
suivi afin de garantir le respect de ces accords.
S'agissant des Accords d'Accra, il faut dire qu'ils sont une
série de trois.
D'abord l'Accord d'Accra I qui s'est tenu le 29 septembre 2002
à l'initiative du Président sénégalais Abdoulaye
Wade, Président en exercice de la CEDEAO45(*).Le contexte de cette rencontre est bien entendu la
situation qui prévaut en Côte d'Ivoire depuis le 19septembre2002
avec la tentative de coup d'état qui a échoué et qui a
entrainé par la suite une partition du pays en deux zones
contrôlées chacune par une faction armée. On a
assisté à un sommet extraordinaire des chefs d'Etats de la
CEDEAO, sommet qui avait des invités spéciaux à titre
d'observateurs qui sont : le Président sud africain Thabo Mbeki,
par ailleurs président en exercice de l'Union africaine, Amara Essi,
Président de la Commission de l'Union africaine, et Ahmedou Ould
Abdallah, Représentant spécial du Secrétaire
général des Nations unies pour l'Afrique de l'ouest. Il s'est
agit pour les différents participants à cette rencontre de
condamner fermement la tentative de remise en cause de la démocratie et
de la légalité constitutionnelle en Cote d'Ivoire, ainsi que les
nombreuses pertes en vies humaines et la destruction inutile des biens. Cette
rencontre d'Accra a donné l'occasion à la CEDEAO de se montrer
ferme avec le soutien de l'Union Africaine face aux situations de tentative de
rupture de la démocratie. Les participants ont demandé aux
rebelles de cesser les exactions sur les populations et d'oeuvrer pour un
dialogue avec les autorités légales de Cote d'Ivoire. Il a
également été décidé de la création
d'un Groupe de Contact de haut niveau composé des Chefs d'Etat du Mali,
Ghana, Guinée-Bissau, Togo, Niger et Nigéria pour établir
le contact avec les assaillants, les amener à cesser les
hostilités, ramener le calme dans les localités occupées
et négocier un cadre général de règlement de la
crise. A ces Chefs d'Etat, a été ajouté le
Représentant spécial du Président de l'Union africaine
pour faire partie du comité de Médiation. Les participants ont
enfin appelé à l'appui des actions de la CEDEAO par la
communauté internationale.
S'agissant de l'Accord d'Accra II, il faut dire qu'il
intervient dans un contexte de difficultés liées à
l'application de l'Accord de Linas Marcoussis, notamment la composition du
Gouvernement d'union nationale chapeauté par Seidou Elimane Diarra.
C'est considérant ce contexte que le Président ghanéen,
John Agyekum KUFUOR, par ailleurs Président en exercice de la CEDEAO, a
convoqué à une Table Ronde les forces politiques ivoiriennes
signataires de l'Accord de Linas- Marcoussis, à Accra les 6 et 7 mars
2003. Ont participé à cette Table Ronde les formations suivantes
: FPI, MFA, MJP, MPCI, MPIGO, PDCI-RDA, PIT, RDR, UDCY, UDPCI. Et comme
facilitateurs, le Président du Comité de Suivi de l'Accord de
Marcoussis, Professeur Albert TevoedJre, le Secrétaire Exécutif
de la CEDEAO, Docteur Mohamed Ibn Chambas, le Représentant
Spécial du Secrétaire Exécutif de la CEDEAO, Monsieur Raph
Uwechue - Fchiie, le Représentant Spécial de l'organisation
Internationale de la Francophonie, Monsieur Lansana Kouyate, le
Représentant Spécial de l'Union Africaine, Monsieur André
Salifou. La réunion a permis de mettre en évidence les
difficultés d'application de l'Accord de Marcoussis. C'est pourquoi la
Table Ronde réaffirme sa volonté d'adhésion à
l'Accord de Marcoussis considéré unanimement comme cadre de
résolution durable de la crise ivoirienne. A cette fin, les participants
ont pris l'engagement de collaborer avec le Président Laurent GBAGBO et
le Premier Ministre Seydou DIARRA en vue de mettre en place un gouvernement de
réconciliation nationale équilibré. Se
référant à l'accord de Marcoussis, la Table Ronde
réaffirme la nécessité de préserver
l'intégrité territoriale de la Cote d'Ivoire, le respect de ses
institutions et la restauration de l'autorité de l'Etat. Elle rappelle
son attachement au principe de l'accession au pouvoir et de son exercice de
façon démocratique. La Table Ronde réaffirme par ailleurs,
l'autorité du Président Laurent GBAGBO, en sa qualité de
Chef de l'État, Chef suprême des Armées, garant de la
Constitution et des institutions républicaines. Les participants ont
convenu de la nécessité de respecter un certain nombre de
recommandations. Parmi celles-ci, on a la création d'urgence d'un
Conseil National de Sécurité de quinze (15) membres comprenant,
le Président de la République, le Premier Ministre, un
représentant de chacune des forces politiques signataires de l'Accord de
Marcoussis, un représentant des FANCI, un représentant de la
Gendarmerie Nationale et un représentant de la Police Nationale pour
concourir à la bonne gestion des Ministères de la Défense
et de la Sécurité Intérieure. La Table Ronde rappelle la
nécessité pour toutes les forces en présence de faire
cesser Immédiatement les massacres et tueries ainsi que toutes les
exactions commises dans leurs zones d'opération. Par ailleurs, en vue de
promouvoir l'esprit de réconciliation nationale, la Table Ronde lance un
appel solennel aux acteurs socio - politiques et aux médias afin qu'ils
s'engagent résolument à soutenir le processus de mise en ouvre de
l'Accord de Marcoussis. Elle demande également la libération
immédiate de tous les prisonniers politiques et prisonniers de guerre.
Mais il faut dire que cet Accord n'aura pas tenu la promesse des fleurs, c'est
pourquoi un troisième Accord sera nécessaire.
L'Accord d'Accra III, a eu lieu suite à l'invitation
de son Excellence M. John Agyekum Kufuor, Président de la
République du Ghana et Président en exercice de la CEDEAO, et de
son excellence Kofi Annan, secrétaire général des Nations
Unies. Ont pris part à cette rencontre des 29et 30juillet 2004, certains
chefs d'Etat et de gouvernement africains, ainsi que leurs
représentants dûment accrédités, son Excellence M.
Laurent Gbagbo, Président de la République de Côte
d'Ivoire, son Excellence Seydou Elimane Diarra, Premier ministre du
Gouvernement de réconciliation nationale et les principales Forces
politiques ivoiriennes signataires de l'Accord de Linas Marcoussis, à
savoir le FPI, le MJP, le MPCI, le MPIGO, le PDCI-RDA, le PIT, le MFA, le RDR,
l'UDCY, et l'UDPCI. En sus de ces acteurs, les personnalités suivantes
ont été conviées : Alpha Oumar Konaré,
Président de la Commission de l'Union Africaine, et Dr Mohammed Ibn
Chambas, Secrétaire exécutif de la CEDEAO. Au cours de cette
rencontre, les Forces politiques ivoiriennes ont examiné les
différents obstacles qui s'opposent à la mise en oeuvre totale
des Accords de Linas Marcoussis et d'Accra II. Elles ont formulé des
propositions quant à la manière de surmonter ces obstacles et de
parvenir à un consensus sur les questions clés auxquelles le
processus de paix est confronté. Les forces politiques ivoiriennes ont
réitéré leur engagement aux principes et programme du
Gouvernement contenu dans les accords de Linas-Marcoussis et d'Accra II. Elles
ont aussi réaffirmé leur détermination à s'engager
résolument dans la voie d'une application intégrale et
inconditionnelle desdits accords. En vue de remettre le processus de paix sur
la bonne voie, et d'assurer une mise en oeuvre durable des dispositions de
l'Accord de Linas-Marcoussis, les forces politiques de Côte d'Ivoire ont
convenu des mesures importantes qui devront être appliquées. Ces
mesures tournent autour des questions telles que les critères
d'éligibilité à la présidence de la
république, de l'intégration des résolutions de Marcoussis
et d'Accra dans la constitution ivoirienne, de l'application du programme DDR,
de la nécessité de délégation de pouvoir du
Président au gouvernement afin de faciliter la reprise des
activités du gouvernement de réconciliation nationale.
Malgré cet Accord, la situation en Cote d'Ivoire ne va pas aller vers la
tenue d'une élection du fait que certaines zones d'ombre persistent
encore. C'est pourquoi d'autres Accords vont intervenir.
B- Les Accords de Pretoria et
de Ouagadougou
Après les différents accrochages et
affrontements entre acteurs politiques ivoiriens, il s'est tenu à
Pretoria, en Afrique du Sud une rencontre à l'initiative du
Président Thabo Mbeki, Médiateur de l'Union Africaine. Ainsi, les
différentes parties signataires de l'Accord de Pretoria du 06avril 2005
ont convenu d'un certain nombre de résolutions qui doivent
désormais régir la vie politique ivoirienne. Elles ont
commencé par réaffirmer leur engagement à respecter les
termes des Accords de Marcoussis et d'Accra II et III et de tous les autres
instruments qu'ils ont convenus de respecter. Les parties ont unanimement
déclaré la fin des hostilités militaires et donc,
l'arrêt de la guerre sur toute l'étendue du territoire ivoirien.
Elles ont également convenu du désarmement et du
démantèlement des milices sur l'ensemble du territoire. Les
parties ont aussi convenu de l'organisation et du fonctionnement de la
commission électorale indépendante(CEI). Les parties prenantes
à cette rencontre sont : le Président Laurent Gbagbo, le
Premier ministre Seydou Elimane Diarra représentant le gouvernement de
Réconciliation nationale, l'ancien Président Henri Konan
Bédié, représentant le PDCI, l'ancien Premier ministre
Alassane Dramane Ouattara, représentant le RDR, et le ministre
d'état Guillaume Kigbafori Soro, Secrétaire général
des Forces Nouvelles. Cette rencontre entre les acteurs politiques ivoiriens ne
sera pas le dernier, car n'étant pas satisfaits par l'avancée
timide sur le terrain, ceux-ci se résoudront à aller vers un
autre Accord majeur, celui de Ouagadougou.
Après toutes les tentatives de médiation et de
conciliation avec des acteurs étrangers comme on a pu le voir lors des
précédents Accords, et considérant la situation
délétère qui prévaut du fait du perpétuel
renvoie des élections, les acteurs politiques ivoiriens se sont
résolus à aller vers un Accord qui a été
qualifié d'inter-ivoirien. En effet, cette rencontre fait suite à
l'annonce le 19 décembre 2006, du plan de sortie de crise du
Président Laurent GBAGBO, qui a saisi, le 23 janvier 2007, le
Président en exercice de la CEDEAO pour faciliter le dialogue direct
entre les ex-belligérants du conflit armé en Côte d'Ivoire.
Le Président burkinabé, Président en exercice de la
CEDEAO, et agissant sur mandat express de celle-ci, a invité et
reçu deux délégations de la Cote d'Ivoire. L'une
représentant le Président de la République, et l'autre les
Forces Nouvelles. Cette rencontre qui s'est tenue à Ouagadougou du 05
février au 03mars 2007 a permis au Président Blaise
Compaoré de s'entretenir avec les deux délégations qui
avaient chacune et respectivement à leur tête Désiré
Tagro, porte-parole de la Présidence de la République de Cote
d'Ivoire, et Louis-André Dacoury-Tabley, Secrétaire
général adjoint des Forces Nouvelles et ministre de la
solidarité et des victimes de guerre. Il ressort globalement de ces
discussions quelques points importants pour l'évolution de la situation
dans ce pays. Parmi ceux-ci, on peut noter celui de l'identification
générale des populations, et donc des électeurs qui pose
un problème sérieux aux entrepreneurs politiques ivoiriens. Les
différentes parties ont convenu de la relance des audiences foraines
visant à délivrer des titres d'identité, et de ce fait la
nationalité ivoirienne dans des conditions moins rigoureuses, ceci
visant à alléger le processus afin de se rendre à
l'élection dans les meilleurs délais. Un autre aspect
abordé, c'est bien celui des organes en charge d'effectuer le
recensement et la diligence des opérations de vote qui vont de
l'établissement des listes électorales à la
délivrance des cartes d'électeurs. Le présent Accord a
également permis aux acteurs ivoiriens de poser que les deux composantes
militaires du pays doivent fusionner pour pouvoir aboutir à la
sécurisation du processus électoral ainsi qu'à la
sécurité générale du pays. A cet effet, les deux
parties conviennent de la nécessité de créer un centre de
commandement intégré sous le commandement conjoint du Chef
d'état major général des FANCI et du Chef d'état
major des FAFN. Les parties ont enfin convenu de la nécessité
d'oeuvrer pour la restauration de l'autorité de l'Etat à travers
tout le territoire national. Il faut tout de même noter que cet accord
s'est accompagné d'accords complémentaires au cours des
années 2007 et 2008 qui visaient à préciser un certain
nombre d'aspects contenus dans l'accord principal.
Après ces différents Accords majeurs que nous
avons parcouru, force est de reconnaitre qu'ils ont structuré le
parcours de ce pays vers l'organisation de l'élection
présidentielle. Comme on peut le constater, la Francophonie n'a pas fait
partie de tous ces moments forts qui structurent l'évolution de ce pays
vers l'organisation de l'élection présidentielle. Il est question
de voir par la suite l'environnement qui prévaut avant l'organisation de
la consultation électorale.
Paragraphe 2 : le
contexte général avant l'élection
Il est question ici de montrer l'ambiance
générale qui prévaut avant la tenue de la consultation
électorale cruciale pour la Cote d'Ivoire. Cette ambiance ne saurait
être comprise sans un bref détour dans l'histoire récente
de ce pays. Pour cela, il sera question d'aborder ce contexte suivant deux
prismes. D'abord la situation politique(A), et par la suite, la conjoncture
socio politique en vigueur(B).
A- La situation politique avant
l'élection
Pour comprendre la situation politique de ce pays, il faut
parler des évènements majeurs l'ayant agité. Le pays a
connu un coup d'état en décembre 1999. En effet, Henri Konan
Bédié, successeur constitutionnel à la mort
d'Houphouët Boigny, a été renversé par une junte avec
à sa tête le général Robert Guei. Par la suite, un
référendum a été organisé après une
période transitoire et a permis d'adopter une nouvelle constitution
devant régir les élections de 2000.L'élection a
été remporté par Laurent Gbagbo qui a n'a eu finalement
gain de cause qu'après un soulèvement populaire face au refus du
général de reconnaitre sa défaite. Il faut noter que deux
candidats et principaux leaders politiques du pays ont été exclus
de la course électorale, à savoir Alassane Dramane Ouattara, et
Henri Konan Bédié. En 2002, une tentative de coup d'état a
échoué et a conduit par la suite à une partition du pays
en deux zones contrôlées chacune par une force armée
différente, les Forces nouvelles pour le nord du pays et l'armée
régulière contrôlant le sud. Entre 2003 et 2007 plusieurs
accords et médiations ont été menés avec tout de
même un accent mis sur celui de Marcoussis avec le maintien de Laurent
Gbagbo comme Président et de la formation d'un gouvernement d'union
nationale aux pouvoirs élargis, car délégués par le
premier cité. Au total ces accords, et notamment celui de Ouagadougou
ont jeté les bases d'une élection comprenant le plus de consensus
possible mais au demeurant une bonne dose de suspicion. En effet, une des
causes de la crise qui prévaut dans ce pays résulte des
revendications identitaires et la notion d'ivoirité. L'abrogation du
droit de vote des étrangers en 1994 a fait naitre un climat de suspicion
et d'exclusion car ces derniers sont pourtant autorisés à voter
depuis l'indépendance. L'établissement des listes
électorales depuis 1995 jusqu'à la période 2006-2010
souffre également de cette suspicion et constitue d'ailleurs un enjeu
pour la future élection. Ces listes électorales permettent de
mettre le doigt sur la question de nationalité qui agite le pays depuis
plus d'une décennie, ceci visant à dénier à
certains la capacité d'exercer le droit en tant qu'électeurs ou
encore d'empêcher à d'autres d'être candidats. Tous ces
éléments ont permis à la violence de s'exprimer à
travers le temps, pour malheureusement meurtrir les populations de ce pays.
B- La conjoncture
sociopolitique avant l'élection présidentielle de 2010
L'élection présidentielle qui va se tenir les 31
octobre et 28 novembre 2010 est l'aboutissement des démarches
accompagnées, suivies et menées par les acteurs politiques
ivoiriens, mais aussi par les partenaires étrangers et la
communauté internationale. Le tableau qui peut être dressé
sur le plan socio politique est un tableau clair obscur. Il est clair dans la
mesure où le pays connait une relative accalmie. Ce pays ne connait plus
des épisodes de violence d'une grande ampleur. Les différents
acteurs ont entrepris tempérer leurs ardeurs afin de permettre tout au
moins au processus électoral de se tenir dans l'objectif et le dessein
secret que cette compétition électorale connaisse un
dénouement allant dans leur intérêt. Il est obscur dans la
mesure où, bien qu'on assiste à une relative accalmie, on note de
temps en temps des cas de violence sporadique. Le cas le plus grave est le
Premier ministre Guillaume Kigbafori Soro qui a échappé à
un tir de roquette qui était dirigé contre l'avion qui le
transportait le 29 juin 2007 à Bouaké. Le coté obscur peut
également se voir à travers la non application de la disposition
concernant le désarmement des rebelles, ceci malgré les
cérémonies officielles et symboliques qui ont été
organisées. Il faut également parler de la dissolution par le
Président Gbagbo de la CEI et du gouvernement, intervenue le 12
février 2010 à la suite de rumeurs sur la falsification des
listes électorales. Après des manifestations en guise de
protestations qui se sont accompagnées dans certaines villes du pays
d'actes de violence, le Facilitateur qui n'est autre que le Président du
Burkina Faso Blaise Compaoré, a dû intervenir auprès du
Président afin qu'on arrive à mettre un terme aux
troubles46(*). Ce qui
permet de dire en toute sérénité qu'on est bien en
présence d'une situation où les acteurs ne se font pas
confiance.
SECTION2 : Les enjeux
de l'élection présidentielle ivoirienne de 2010
Dans toute élection, il existe toujours un ou plusieurs
enjeux. L'enjeu pouvant être entendu ici comme l'élément
qui conditionne le succès ou la réussite d'un projet. Mieux, on
peut dire que l'enjeu est ce qui structure la réussite d'un
évènement. Dans notre cas, un certain nombre d'enjeux structurent
le jeu électoral ivoirien. Ils peuvent être répartis en
deux formes. On a l'enjeu de participation (paragraphe1), mais aussi l'enjeu de
contrôle (paragraphe2).
Paragraphe1 : L'enjeu
de participation
Pour mieux comprendre cet enjeu qui est celui de la
participation, il convient de l'étudier sous deux prismes
complémentaires. La participation de tous les leaders politiques(A), et
la participation des électeurs(B).
A- La participation de tous les
leaders politiques
En ce qui concerne la participation de tous les leaders
politiques, il faut dire qu'elle constitue un enjeu dans la mesure où,
certains ont été exclus d'une manière ou d'une autre, lors
de la dernière consultation électorale, mais surtout que cette
exclusion est une des causes de la situation qui prévaut jusqu'ici dans
le pays. En effet, les deux principaux rivaux du Président ivoirien,
à savoir Alassane Dramane Ouattara et Henri Konan Bédié
avaient été mis hors course lors de l'élection
présidentielle de 2000 pour des raisons diverses47(*). Pour cette consultation
électorale, l'une des revendications des rebelles est bien la
participation de tous les acteurs aux élections, et donc la
révision du fameux concept d'ivoirité. Nombreux sont les
partisans de ces deux personnalités qui revendiquent, parfois de
façon violente, la prise en compte en terme de participation de ceux-ci.
Leur participation est une condition de réussite de cette
élection, à en témoigne le fait que tous les Accords
conclus48(*) pour arriver
à cette élection ont pris en compte cette
nécessité49(*). Que tous ces leaders participent à
l'élection constitue en plus une belle attraction car cela va permettre
non seulement de pouvoir juger du poids politique véritable des uns et
des autres, mais en plus cela donne une belle opportunité de jauger le
niveau d'avancée de la démocratie dans ce pays. Au de là
du poids supposé conféré par les propres propos de ces
leaders, on a là une belle opportunité de vérifier leur
poids réel conféré par les électeurs à
travers les urnes. Les électeurs constituant eux même un enjeu
indéniable.
B- La participation des
électeurs
La participation massive des électeurs au vote a
toujours constitué un enjeu très important pour toute
élection. En effet, elle constitue à plus d'un titre un point
très important pour la réussite ou non d'une élection. La
participation massive des électeurs renseigne sur le niveau de
participation politique des citoyens d'un pays. En clair, c'est un instrument
de mesure de l'adhésion des individus à la situation politique de
leur pays. C'est un élément permettant d'évaluer le niveau
d'intégration des citoyens dans la société. C'est
également un élément qui permet l'évaluation du
niveau d'intéressement des populations à la gestion de leur
cité, à la défense de leurs intérêts, au
suivi de leurs affaires, à la conscience de leur rôle dans le
façonnement de leur existence présente, mais aussi de leur
devenir. La participation des électeurs étant un facteur
démontrant le niveau de participation, c'est aussi et surtout un facteur
très important dans le fondement de la légitimité. En
effet, un dirigeant est d'autant plus légitime lorsqu'il tient son
pouvoir à la suite de la désignation par un grand nombre
d'électeurs ayant voté pour lui. Dans le cas ivoirien, il est
clair le pouvoir du Président Gbagbo a été dans le temps
contesté et querellé avec pour raison qu'il n'était pas
suffisamment légitime. Ce reproche lui était adressé
à cause non seulement du fait que tous les leaders n'avaient pas
participé, mais en plus que le taux de participation des
électeurs à cette élection était relativement
faible. D'où la réalité suivant laquelle la participation
massive des électeurs constitue un véritable enjeu pour cette
élection. Surtout encore que les lois permettent dorénavant de
faciliter la procédure et les pièces nécessaires pour se
faire inscrire sur les listes électorales. La participation massive des
électeurs peut aussi permettre de juger de la volonté des
ivoiriens de sortir de cette décennie de crise afin de se tourner
résolument vers les chemins de la tolérance, d'une paix durable
faite de cohésion de tout le tissu social.
A coté de cet enjeu que constitue la participation, il
faut y joindre l'enjeu de contrôle.
Paragraphe2 : L'enjeu
de contrôle
Il est question ici de montrer que le contrôle est un
enjeu important dans cette élection. Il apparait même vital pour
les différents acteurs en présence. Il est possible de l'examiner
suivant deux angles. D'abord l'enjeu de contrôle des institutions (A), et
ensuite l'enjeu de contrôle du fichier électoral(B).
A-L'enjeu de contrôle des
institutions
Lorsqu'il est évoqué le contrôle des
institutions, il s'agit ici des institutions qui régissent la vie
politique, des institutions qui réglementent le jeu politique, qui
organisent la compétition électorale. Ce sont des institutions
qui s'occupent de l'organisation et de l'arbitrage des élections en
général. Dans le cas de la Cote d'Ivoire, les institutions de ce
type que les différents acteurs entendent contrôler sont la CEI et
le Conseil constitutionnel.
La CEI, organe chargé de l'organisation des
élections, est une institution qui fait l'objet de convoitise de la part
des acteurs politiques qui voient en elle le lieu privilégié de
contrôle vis-à-vis des éventuelles velléités
de trucage . Car, faut-il le rappeler, l'avènement des organes
indépendants d'organisation des élections est concomitante avec
l'avènement du pluralisme en Afrique noire dans les
années1990.Ils émergent comme un effet de mode dans la plupart
des pays africains pour marquer un déficit de confiance vis-à-vis
de l'appareil administratif étatique ainsi que de ses
démembrements anciennement chargés de l'organisation des
élections. Ils constituent de ce fait des structures aptes à
garantir la transparence, la sincérité des opérations
électorales et à réduire les risques de fraudes et de
manipulations des résultats50(*).Même si cela ne se vérifie pas pour
autant, toujours est-il que ces organes constituent aux yeux des acteurs, un
moindre mal en ce qui concerne le risque de trucage. Ainsi, pour revenir
à notre cas, la question de l'organe en charge de l'organisation des
élections, à savoir la CEI, a fait l'objet de querelles entre
acteurs politiques ivoiriens. C'est pourquoi lors de l'Accord de Pretoria en
2005 il a été procédé à la modification
quant à l'organisation, à la composition et au fonctionnement de
la CEI. Les différents acteurs présents lors de cet accord se
sont donc entendus par rapport à leur représentation dans cet
organe qu'est la CEI. C'est ainsi que les signataires de l'Accord de Marcoussis
ont tous droit à leur présence au sein de la CEI, y compris les
rebelles qui ont tenté sans succès de fomenter un coup
d'état et qui ont par la suite envahi une partie du territoire ivoirien.
L'enjeu ici étant d'avoir pour toutes les sensibilités politiques
un ou plusieurs représentants dans l'organe central qui seraient
à même de préserver autant que faire se peut les
intérêts de ceux-ci. Il faut rappeler l'élection
étant une compétition électorale, chacun des acteurs
voudrait bien s'assurer d'un levier très important afin de ne pas se
faire doubler non seulement sur le terrain électoral en lui-même,
mais aussi et surtout sur un autre terrain, celui du trucage éventuel.
C'est ce qui explique que les acteurs aient tenu à se faire
représenter au sein de la CEI afin de ne pas être victimes de
quelque manoeuvre que ce soit visant à les mettre hors course en ce qui
concerne la course pour le pouvoir.
Autre organe qui retient l'attention des acteurs politiques
c'est bien le conseil constitutionnel. En effet, le conseil constitutionnel est
un organe très important en ceci qu'il constitue une sorte d'arbitre du
fait qu'il est celui qui est appelé à trancher les
éventuels litiges qui naitraient à la suite des élections.
Le conseil constitutionnel est donc le juge compétent en ce qui concerne
la validité des candidatures, de la campagne électorale et des
élections proprement dites. Le dit conseil est l'organe habileté
à proclamer les résultats définitifs et peut même
procéder en cas d'irrégularités graves de nature à
entacher le résultat d'ensemble, à l'annulation du scrutin. Il
est également détenteur suivant le code électoral d'un
pouvoir de régulation en cas de blocage du processus électoral.
Au vu de ce qui précède, il est clair que le conseil
constitutionnel constitue bien un véritable enjeu pour les acteurs
politiques puisqu'il pourrait être amené à jouer un
rôle plus ou moins important pour un ou plusieurs acteurs précis.
Seulement sa composition est très encadrée et suivie par la loi
qui donne compétence au Président de la République de
nommer le président ainsi que trois membres, et au président de
l'assemblée nationale le soin de nommer les trois autres membres. Le
président du conseil constitutionnel nommé étant Paul Yao
N'dré, qui est certes un éminent juriste, mais qui a
été accusé d'être un transfuge du FPI, le parti
politique du Président de la République, voire même un de
ses amis. On peut très bien comprendre si cela est encore besoin que le
contrôle de cet organe est pris au sérieux par les acteurs qui
mettent des garde-fous au cas où les choses évolueraient vers un
sens autre que celui prévu par eux. L'enjeu de contrôle des
institutions ne peut pas à lui seul suffire pour comprendre
l'environnement qui prévaut dans ce pays, il faudrait également
voire un autre enjeu, celui du contrôle du fichier électoral.
B- L'enjeu de contrôle du
fichier électoral
Toute élection a comme acteur principal
l'électeur qui, de par le bulletin dont il dispose dans l'isoloir, peut
faire et défaire un leader politique, un régime politique ou
même un système politique. C'est l'acteur que tous les
entrepreneurs politiques tiennent à avoir de leur coté car il
représente leur assurance vie politique en quelque sorte. C'est
d'ailleurs la raison pour laquelle très souvent le fichier
électoral fait l'objet d'une attention particulière de la part
des spécialistes ou encore des acteurs politiques. Le fichier
électoral constitue régulièrement un objet de fraude en
ceci qu'il peut être manipulé pour arranger les affaires du
régime en place. C'est certainement l'une des raisons qui explique le
fait que dans la plupart des pays d'Afrique subsaharienne l'on soit
passé des élections organisées par l'administration de
l'Etat au profit des commissions électorales dites indépendantes.
Le fichier électoral a très souvent été
manipulé avec par exemple des gonflements volontaires, des noms des
personnes décédées se retrouvant sur les listes ou
même des noms fictifs. Dans le cas ivoirien, avec la bonne dose de
suspicion qui règne avec le clivage existant entre ceux qui sont
qualifiés de non ivoiriens51(*) et les ivoiriens52(*). La suspicion tient ici du fait que dans les deux
cotés, on redoute que l'autre camp introduise massivement des noms
fictifs sur le fichier électoral qui peuvent faire pencher la balance
d'un coté comme de l'autre. Pour constituer le fichier électoral
devant servir aux élections de 2010, la question de l'identification
générale de la population a été traitée lors
de l'Accord politique intervenu à Ouagadougou le 04 mars 2007. En effet,
les différents participants qui représentaient les
sensibilités politiques ivoiriennes ont convenu d'un certain nombre de
mesures qui devront être prises afin de faciliter et
d'accélérer le processus d'identification des électeurs.
Ce sont des mesures qui tendent à conférer la capacité aux
citoyens en âge de voter la qualité d'électeur. Ce sont des
meures qui visent à mettre en place un fichier électoral qui soit
le moins contestable possible, ou plutôt qui soit le plus consensuel.
Mais malgré cet Accord qui instaure un minimum de consensus politique
entre acteurs ivoiriens, il faut tout de même reconnaitre que la
suspicion prévaut tout de même. La preuve étant le fait que
le Président Gbagbo, après des rumeurs circulant sur la
manipulation de la liste électorale, a décidé de la double
dissolution de la CEI et du gouvernement, ce qui a eu la conséquence de
provoquer des manipulations empreintes de violence de la part des partisans des
autres candidats53(*).
Cela nous permet de voir que cette question de fichier électoral
constitue un enjeu qui est très important car il structure
déjà la suite des élections.
En définitive, il a été question dans ce
moment de la réflexion de présenter les actions de la
Francophonie avant les élections proprement dite de 2010.Il s'est agit
de présenter au préalable la posture de la Francophonie face aux
différents Accords qui ont permis d'aller à l'élection
afin de sortir d'une décennie de crise politique. Il a pu être
montré que durant ces Accords, la Francophonie n'a pas toujours
brillé par sa présence, la preuve étant qu'elle n'a
participé qu'à un seul, celui d'Accra II. Il a aussi
été question de montrer l'environnement qui prévaut en
Côte d'Ivoire avant l'élection afin d'essayer de percevoir les
signaux qui se présenteraient déjà. Ceci a
été fait en montrant également les enjeux qui structurent
le jeu électoral dans ce pays. Il ne nous reste alors qu'à voir
comment va se comporter la Francophonie pendant le processus électoral
proprement dit, ce qui sera fait dans le deuxième moment de cette
réflexion.
CHAPITRE 2 : LES
ACTIONS DE PREVENTION DE LA FRANCOPHONIE PENDANT LE PROCESSUS ELECTORAL
IVOIRIEN
La cote d'Ivoire a pu donner, ne serait ce que pendant
l'entre deux tours, l'illusion d'un pays qui souhaitait laisser derrière
lui les vieux démons de la violence. La campagne pour le second tour,
avec notamment le débat télévisé entre les deux
candidats intervenu le 25 novembre 2010, avait fait rêver plus d'un sur
la capacité de ce pays à aller vers une élection
réussie, c'est-à-dire sans contestation, sans violence. Mais
hélas, tel ne fut pas le cas. Pourtant un certain nombre d'actions ont
été menées pour qu'on sorte d'une décennie de
crise, et qu'on se dirige vers un avenir plus radieux fait de stabilité,
de paix durable. On peut faire une distinction des actions qui ont
été menées dans ce pays et qui visaient somme toutes
à prévenir un éventuel conflit à la suite du
scrutin présidentiel qui se faisait en deux tours le 31 octobre et le 28
novembre2010. En effet, il faut dire que ce scrutin, en raison de son
caractère particulier, était suivi par l'ensemble de la
planète. Qu'il s'agisse de ses voisins immédiats ou des pays
africains, ou encore des Organisations internationales, tous avaient les yeux
rivés vers ce pays et souhaitaient plus ou moins54(*) qu'il retrouve les chemins de
la stabilité et de la normalité politique. C'est ce qui explique
la multitude d'observateurs et d'institutions qui se sont mobilisés pour
cette élection. Parmi ceux-ci, figure bien la Francophonie, pour des
raisons évidentes d'appartenance du pays à cette Organisation,
mais aussi d'une réponse favorable à la demande que lui a
adressée les autorités de Cote d'Ivoire. Il sera donc question
d'étudier les actions menées par la Francophonie avant, pendant
et après le scrutin, actions qui sont de nature à prévenir
une situation de conflit post électoral. D'où l'intitulé
les actions préventives propres à la Francophonie (Section1).Ce
sera l'occasion de voir la mise en oeuvre des textes réglementaires de
cette institution dans une situation précise. Par la suite, il sera
question de voir comment la Francophonie a accompagné les actions
d'autres acteurs en présence puisque n'évoluant pas en autarcie,
d'où l'accompagnement par la Francophonie des actions d'autres acteurs
(section2).
SECTION1 : Les actions
préventives propres a la francophonie en cote
d'Ivoire
Pour avoir une meilleure appréciation de la nature
des actions menées par la Francophonie, il sera question de les
envisager sous deux prismes. D'abord les actions avant et pendant les
élections (paragraphe1), et par la suite, étudier les actions
de cette organisation après les élections (paragraphe2).
Paragraphe1 : Les
actions de la francophonie avant et pendant les élections
La principale action de la Francophonie en ce qui concerne sa
mobilisation en Cote d'Ivoire pour les élections présidentielles
du 31 octobre et du 28 novembre 2010 réside dans l'envoi d'une
importante mission d'information et de contacts. Pour traiter des actions de la
Francophonie durant ces moments, il sera question de le faire suivant deux
modalités : Le mandat de la Mission et ses rencontres(A), et les
actions menées par la Francophonie au vu du cadre temporel(B).
A- Le mandat de la Mission et
ses rencontres
Pour la tenue de cette élection, les acteurs
politiques ivoiriens se sont focalisés sur les
questions de transparence et de crédibilité du
processus électoral. Afin de rompre avec les dysfonctionnements qui
avaient entaché les élections précédentes et pour
restaurer la confiance et l'unité nationale, les autorités
ivoiriennes ont souhaité que ce scrutin fasse l'objet d'une observation
la plus large possible. Le gouvernement ivoirien et la Commission
électorale indépendante (CEI) ont donc estimé
nécessaire de solliciter certaines organisations internationales et
régionales pour accompagner le pays à cette étape de son
évolution politique. Dans cette perspective, les autorités
ivoiriennes ont saisi le Secrétaire général de la
Francophonie, Monsieur Abdou Diouf, pour l'envoi d'une Mission
électorale francophone. La délégation de l'OIF, qui a
séjourné en Côte d'Ivoire du 27 octobre au 4 novembre2010
(1er tour), puis du 24 novembre au 2 décembre 2010 (2ème tour),
était une mission d'information et de contacts. Son mandat consistait
à prendre la mesure des efforts déployés par l'ensemble
des acteurs politiques ivoiriens en faveur de la tenue d'élections
libres, fiables et transparentes, ainsi qu'à rendre compte des
éventuelles difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre
du processus électoral dans ce pays. A cet effet, les membres de la
mission francophone, oeuvrant conformément aux engagements
consignés dans le Chapitre IV-B de la Déclaration de Bamako et
relatifs aux élections libres, fiables et transparentes, ont
rencontré les autorités politiques ivoiriennes, les acteurs
nationaux, les responsables d'institutions impliquées dans la
préparation, l'organisation, ainsi que le contrôle de
l'élection présidentielle, certains candidats en lice, les
représentants des organisations de la société civile,
ainsi que les partenaires bilatéraux et multilatéraux.55(*)C'est ainsi que la Mission a eu
plusieurs séances de travail avec de hauts responsables.
Pour ce qui est des autorités politiques par exemple,
la Mission a rencontré le Premier Ministre Guillaume Kigbafori Soro, et
le Ministre de la Communication et de l'Information Ibrahim SY Savane. Elle a
également rencontré les responsables d'administrations et
institutions impliqués dans le processus électoral comme le
Président de la commission Electorale Indépendante (CEI) Youssouf
Bakayoko ;le Président du conseil Constitutionnel, Paul Yao
N'Dré ;le Président du Conseil National de la
Presse(CNP),Eugène DiéKacou ; le Président du
Conseil National de la Communication Audiovisuel(CNCA),Franck Anderson
Kouassi ;et le Président du Conseil d'Administration de la Radio
Télévision Ivoirienne(RTI),Honoré Guié. On ne
saurait passer sous silence les rencontres que la Mission a eues avec les
candidats tels Laurent Koudou Gbagbo du Front Populaire Ivoirien(FPI),par
ailleurs Président sortant, Henri Konan Bédié du Parti
Démocratique de Cote d'Ivoire (PDCI) ou encore de Francis Wodié
du Parti Ivoirien des Travailleurs (PIT). A l'issue de toutes ces rencontres,
les membres de la Mission se sont fait une idée précise sur les
difficultés et les entraves qui émaillent le processus
électoral ainsi que des actions envisagées en vue d'y
remédier de la part des personnalités rencontrées. Elle
n'a pas manqué de dire ce qu'elle pense du processus et présenter
quelques éléments à améliorer pour parfaire le
processus électoral afin qu'il se déroule dans les meilleures
conditions possibles, afin que le pays retrouve la
sérénité une fois les élections passées.
B- Les actions menées
par la Francophonie au vu du cadre temporel
La délégation de l'OIF ne s'est pas
contentée de travailler dans les salons feutrés d'administrations
comme c'est le cas lors des entretiens qu'elle a eus, elle s'est aussi
déployée sur le terrain. C'est ainsi qu'elle a suivi les
opérations électorales dans quelques centres de vote
situés, pour l'essentiel, dans le district d'Abidjan et dans les
localités de Divo et d'Adzopé.
La mission de la Francophonie était conduite
pour les deux tours du scrutin, par
Monsieur Gérard Latortue, ancien Premier ministre
d'Haïti. La mission s'est déployée sur le terrain seulement
à partir de cette date par souci de conformité avec les textes en
vigueur en Cote d'Ivoire, car la date du premier tour a été
fixée par le décret n°2010-207 du 05 août 2010 portant
convocation du collège électoral de la République de
Côte d'Ivoire en vue de l'élection du Président de la
République, qui détermine les grandes dispositions du
scrutin : « Le collège électoral de la
République de Côte d'Ivoire est convoqué le dimanche 31
octobre 2010, en vue de procéder à l'élection du
Président de la République. Le scrutin sera ouvert à sept
heures et clos à dix sept heures. Si aucun candidat n'a obtenu la
majorité absolue au premier tour, un second tour de scrutin sera
organisé quinze (15) jours après la proclamation des
résultats définitifs du premier tour par le Conseil
Constitutionnel, entre les deux candidats ayant recueilli le plus grand nombre
de suffrages. L'élection du Président de la République au
second tour est acquise à la majorité simple des suffrages
exprimés. »
La date du second tour a été fixée au 28
novembre 2010 par le décret n°2010- 301 du
9 novembre 2010 portant convocation du collège
électoral de la République de Côte d'Ivoire en vue du
second tour de l'élection du Président de la République.
Ainsi, peut- on situer le cadre temporel, mais aussi réglementaire
interne auquel s'est alignée la Francophonie pour pouvoir articuler son
action dans ce pays.
Paragraphe 2 : les
actions de la francophonie après les élections
La Francophonie a agit pendant le processus électoral
ivoirien, notamment après que le vote ait eu lieu. Ces actions
sont : les rencontres de la Mission avec des acteurs politiques
ivoiriens(A), et la posture de la Francophonie après les proclamations
des résultats(B).
A- Les rencontres de la Mission
avec les acteurs politiques ivoiriens
La Francophonie, à travers sa Mission d'information et
de contacts lors des élections présidentielles en Côte
d'Ivoire du 31 octobre et du 28 novembre 2010 s'est déployée sur
le terrain avec pour mandat de prendre la mesure des efforts
déployés par l'ensemble des acteurs politiques ivoiriens en
faveur de la tenue d'élections libres, fiables et transparentes, ainsi
qu'à rendre compte des éventuelles difficultés
rencontrées dans la mise en oeuvre du processus électoral dans ce
pays. Forte de ce mandat hautement éminent, la Délégation
que conduisait l'ancien Premier Ministre haïtien Gérard Latortue
s'est aussi déployée une fois que l'élection pour le
second tour s'est achevée. C'est ainsi que la délégation a
pu avoir quelques rencontres avec des personnalités au sujet des dites
élections. En effet, la délégation a pu avoir des
séances de travail avec des acteurs du processus électoral. On
peut parler notamment de la rencontre avec la Secrétaire
Générale du Rassemblement Des Républicains(RDR), Madame
Henriette Diabaté qui était entourée de cinq autres
membres du Parti, mais qui représentait le candidat Ouattara
empêché. C'est aussi le cas avec la séance de travail que
la délégation a obtenue avec la Convention de la
Société Civile de Cote d'Ivoire(CSCI) représentée
par son Coordonnateur Patrick N'Gouan qu'accompagnait Paul Angaman. La Mission
a enfin eu un entretien avec le Conseil National de la Presse(CNP) qui
était représenté par son Président , Eugène
DiéKacou, le secrétaire général, Maître
René Bourgoin, et la responsable du département juridique,
Sidonie Amoakon. A l'issue de ces différentes rencontres ,la
Délégation s'est fait l'écho du climat qui régnait
quelques jours seulement après le vote et avant la proclamation des
résultats. Les échanges ont permis de relever un certain nombre
d'éléments à même de constituer des menaces pour la
paix après la publication des résultats. Les rencontres ont
également permis de noter un certain nombre d'aspects qui
méritent d'être corrigés à l'avenir pour que le
processus se déroule sans anicroche.
B- La posture de la
Francophonie après les proclamations des résultats
Un autre moment où on peut voir des actions
de la Francophonie après le vote c'est bien après la proclamation
des résultats des élections avec la prise de position de
l'Organisation. En effet, la publication des résultats s'est
accompagné de multiples soubresauts. Tout d'abord, la Commission
Electorale Indépendante n'a pas pu montrer une harmonie, un consensus
entre ses membres. La preuve a été servie en direct lorsque les
résultats provisoires ont été arrachés des mains
du porte -parole de la CEI qui tentait de les lire devant les caméras
des médias nationaux et internationaux. Cet acte a été
attribué à deux individus membres de la CEI, par ailleurs
représentants du camp présidentiel. Par la suite, c'est au
quatrième jour après le scrutin que la proclamation des
résultats s'est faite par Youssouf Bakayoko à l'Hôtel du
Golf, état-major du camp Ouattara, la CEI étant occupée
par des éléments de la Garde présidentielle56(*). Il proclame le candidat
Alassane Dramane Ouattara vainqueur avec 54,10% de suffrages exprimés
contre 45,90 % attribués au candidat Laurent Koudou Gbagbo. La
même journée du 02 décembre, le Conseil Constitutionnel,
à travers son Président, invalide ce résultat en arguant
que la CEI n'a pas respecté les délais de trois jours et qu'il
n'ya pas de consensus à l'intérieur, et que, de ce fait, ces
résultats ne sauraient être pris en compte. Le lendemain,
c'est-à-dire le 03décembre, le Conseil Constitutionnel statue et
annule le vote dans neuf départements CNO57(*), ce qui a la
conséquence de donner les résultats suivants. Laurent Gbagbo
obtient 51,45% tandis que Alassane Ouattara obtient48,55%.
A son tour, le Représentant Spécial du
Secrétaire général des Nations Unies a de son
côté, dans une déclaration du 03 décembre,
certifié les résultats annoncés par la Commission
électorale indépendante, confirmant la victoire de M. Ouattara.
Il a certes déploré le retard de cette annonce, lié
à des divisions internes de la CEI, mais estimé que la
proclamation des résultats définitifs par le Président du
Conseil Constitutionnel ne pouvait être interprétée que
comme une décision ne correspondant pas aux faits.
Au milieu de tout ce cafouillage, le Secrétaire
Général de la Francophonie, dans un communiqué du 5
décembre 2010, a appelé toutes les parties à
reconnaître les résultats proclamés par la CEI et
certifiés par l'ONUCI. Par la suite, la Francophonie s'est
mobilisée pour faire reconnaitre le verdict des urnes tel que
proclamé par la CEI et certifié par l'ONUCI à travers le
Représentant Spécial du Secrétaire Général
des Nations Unies, Young Jin Choi. Cela peut être attesté par ce
témoignage de Gerard Latortue : « à
l'issue du second tour de l'élection présidentielle, la mission
électorale francophone, la Francophonie et la mission que j'ai conduite
se sont immédiatement mobilisées pour défendre les
résultats du scrutin et demander la reconnaissance de la validité
de l'élection de m. Ouattara, y compris auprès du
président sortant ».58(*)Cette reconnaissance de l'élection de Ouattara
ne souffre d'aucune hésitation de la part de la Francophonie qui serait
même disposée à ce que tous les moyens soient mis pour
faire respecter la vérité des urnes .On le voit, la Francophonie
est déterminée à faire prévaloir la volonté
des urnes contre vents et marées. On peut juger cette
détermination à travers les propos tenus par son
délégué à la Paix, à la Démocratie
et aux Droits de l'Homme Hugo Sada qui, dans une interview accordée
à un média appelle « le Conseil de
Sécurité de l'ONU à prendre ses responsabilités
pour faire partir Laurent Gbagbo afin de respecter le verdict des
urnes »59(*).Cet
appel a visiblement été entendu car le Conseil de
Sécurité par sa résolution1975 exigeant le retrait de
Laurent Gbagbo. Ce qui a permis le lancement le 28 mars 2011 de l'offensive
militaire dénommée « restaurer la paix et la
démocratie en Côte d'Ivoire » par les forces
républicaines de Cote d'Ivoire(FRCI) avec le soutien décisif de
la Force Licorne60(*) et
de l'ONUCI.61(*)
SECTION 2 :
L'accompagnement des actions d'autres acteurs par la
Francophonie
Le scrutin présidentiel des 31octobre et du 28
novembre2010 a marqué un tournant dans la vie politique ivoirienne. Il
devait permettre au pays de sortir enfin d'une décennie de crise. C'est
ce qui explique le fait que bon nombre d'observateurs avaient focalisé
leur attention sur cette consultation électorale. Les principaux
acteurs politiques ivoiriens semblaient avoir entendu raison quant à la
nécessité de s'affronter politiquement à travers les
élections plutôt que militairement ou par la terreur. Etant
entendu qu'ils ne se font pas mutuellement confiance quant à leur
capacité à assurer eux même le processus électoral,
ils vont faire appel aux étrangers par le truchement des Organisations
internationales et organes d'observation pour, non seulement observer le
processus, mais aussi le crédibiliser. Parmi ces Organisations, figure
la Francophonie qui travaille en étroite collaboration avec les autres
acteurs. Il sera alors question d'établir comment l'OIF accompagne les
autres acteurs dans cette mission commune. Pour ce faire, il sera question de
traiter de l'accompagnement des actions des Nations Unies (paragraphe1) d'une
part, et de l'accompagnement des actions des autres acteurs d'autre part
(paragraphe2).
Paragraphe 1 :
L'accompagnement des actions de l'ONU par la Francophonie
Tout d'abord, il faut dire que l'Opération des Nations
Unies en Côte d'Ivoire(ONUCI) a travaillé de concert avec toutes
les organisations et observateurs présents sur le terrain .C'est dans ce
cadre que la mission d'information et de contacts de la Francophonie a
bénéficié de l'appui logistique de l'Opération des
Nations Unies en Côte d'Ivoire (ONUCI).Mais l'accompagnement de ces
actions peut se vérifier à travers les rencontres avec les
responsables de l'ONUCI(A) et l'explicitation du mandat de
certification(B).
A- Les rencontres avec les
responsables de l'ONUCI
L'ONUCI a mis en place une plate-forme de partenariat avec les
observateurs Internationaux, facilitant à la fois les aspects
logistiques et sécuritaires et les échanges entre les
délégations. Son travail a assurément
bénéficié à la mission de la Francophonie. La
mission s'est également entretenue à différentes reprises
avec le Représentant Spécial du Secrétaire
général des Nations Unies(RSSG), M. Young Jin Choi, et certains
de ses collaborateurs. M. Choi a exposé l'appui logistique que l'ONUCI a
apporté aux autorités ivoiriennes, et particulièrement
à la Commission électorale indépendante, tout au long du
processus électoral. Déjà intense pour le premier tour,
cette assistance, notamment axée sur le transport du matériel
électoral et des procès-verbaux de dépouillement, a
été encore renforcée pour le second tour. Le RSSG a par
ailleurs insisté sur les impératifs de transparence des
opérations électorales, qui sont, pour lui, des garanties de leur
crédibilité - un impératif d'autant plus important pour M.
Choi qu'il est détenteur d'un mandat de certification du processus
électoral. Lors des entretiens, celui-ci a explicité son mandat
de certification du processus électoral ainsi que la méthode
utilisée pour y arriver. Il a explicité sa méthode de
certification, fondée pour cette étape des résultats, sur
trois éléments : l'utilisation de 700 bureaux témoins pour
les observations de tendance ; l'analyse des résultats de la CEI par
région ; l'analyse de tous les procès-verbaux de
dépouillement reçus par l'ONUCI. L'acceptation des
résultats est, pour M. Choi, un élément clé du
processus électoral.
Avant le premier tour, les participants avaient noté
que les confusions planant sur les modalités de décompte des voix
ainsi que les délais de publication des résultats pouvaient nuire
à la transparence du processus électoral. A cet égard,
Choi Young a indiqué que la transparence pouvait être
confortée par un affichage des PV dans les bureaux de vote. Le RSSG a
également insisté sur la médiation que la
communauté internationale pourrait avoir à mener auprès
des candidats déçus. Cette médiation aura plus de poids et
d'efficacité, dit-il, si la Francophonie y est associée.
B- L'explicitation du mandat de
certification par l'ONUCI
Toujours dans le cadre des entretiens, la
délégation a pu rencontrer Madame Henriette Houndekandji, chef
de la cellule de certification de l'ONUCI qui a exposé l'origine du
mandat de certification : une formule adoptée après les accords
de Pretoria de 2005. Selon la définition donnée par la
résolution 1765 du Conseil de Sécurité des Nations Unies
du 16 juillet 2007, ce mandat est dévolu au Représentant
Spécial du Secrétaire général des Nations Unies
(RSSG) qui doit « certifier que tous les stades du processus
électoral fourniront toutes les garanties nécessaires pour la
tenue d'élections présidentielle et législatives ouvertes,
libres, justes et transparentes, conformément aux normes internationales
». La démarche de certification adoptée par le RSSG
vise le respect de cinq critères cadres, acceptés par les acteurs
politiques ivoiriens et la communauté internationale :
· La paix (le processus doit se dérouler dans
un climat apaisé).
· L'inclusion (le processus électoral doit
inclure tous les citoyens qui remplissent les conditions pour être
électeurs, et pour la candidature, toute personne éligible).
· Les médias d'Etat (problématiques
d'accès et d'impartialité).
· La liste électorale.
· Les résultats.
L'équipe d'experts dirigée par Mme Houndekandji
assiste le RSSG dans sa mission de
certification, en partenariat avec toutes les directions de
l'ONUCI et les acteurs ivoiriens et internationaux impliqués dans le
processus électoral. Sa méthode de travail repose sur un
monitoring de tous les éléments concourant à l'observation
de ces cinq critères et du respect des procédures. Le RSSG est
copié des procès verbaux de dépouillement et
requêtes devant le Conseil Constitutionnel. Le rôle de la
certification a été interpellé après le premier
tour à propos des réclamations formulées par les partis de
deux candidats au scrutin, le PDCI et l'UPDCI. Ces deux partis demandaient un
recomptage des voix, arguant d'écarts entre que le
nombre de votants et de bureaux de vote annoncés et
effectifs. La cellule de certification a analysé les explications
fournies par la CEI à ces écarts, les jugeant plausibles : dans
le cas de l'écart du nombre de votants, la CEI a rajouté à
la listeaux décomptes finaux de participation, le nombre de votants
dotés d'un ordre de mission en omettant de les retrancher du nombre
initial (double comptage d'électeurs mais non de voix - certains
électeurs, comme les militaires ou les agents des bureaux
électoraux, avaient la possibilité de voter sur leur lieu
d'affectation et non sur leur lieu d'inscription). Dans le cas des
écarts dans le nombre de bureaux de vote prévus et effectifs,
certains n'ont pu fonctionner normalement ou être ouverts, comme à
Paris ou en Chine. On le voit, la délégation conduite par
Gérard Latortue a pu être édifiée sur le travail de
fond que mène l'ONUCI et son représentant en Côte d'Ivoire.
C'est un travail qui se fait en parfaite inclusion de tous les partenaires
internationaux, mais aussi avec tous les acteurs du processus à
l'intérieur du pays. Le fait pour les membres de l'ONUCI de
dévoiler leur stratégie et méthode de travail à la
délégation est un signe de confiance indéniable quant
à la capacité de la Francophonie d'oeuvrer au bon
déroulement du processus électoral. D'ailleurs, lors des
entretiens avec le Représentant spécial du Secrétaire
Général, Youg Jin Choi, il a été plusieurs fois
rappelé le rôle éminent que pouvait et devait jouer la
Francophonie, notamment en ce qui concerne l'acceptation des résultats
définitifs par l'ensemble des acteurs. Celui ci a précisé
que la Francophonie devait, dans le souci de donner plus de poids,
participer à la médiation internationale qui devra être
faite à l'issue de la proclamation des résultats. Dans son
rapport, la Mission d'information et de contacts précise
que « le RSSG a également insisté sur la
médiation que la communauté internationale pourrait avoir
à mener auprès des candidats déçus. Cette
médiation aura plus de poids et d'efficacité dit-il, si la
Francophonie y est associée ».La Francophonie, forte de
la confiance à elle faite et exprimée par les
représentants de l'ONUCI, a accompagné les actions de celle-ci
dans le but de rendre le processus électoral plus efficace et contribuer
par ricochet à la manifestation de la sincérité des votes
qui sortiront et qui seront proclamés. La preuve a d'ailleurs
été donnée par la Francophonie en ce qui concerne cet
accompagnement par la reconnaissance des résultats proclamés par
la CEI et certifiés par le Représentant Spécial du
Secrétaire Général des Nations Unies, Young Jin Choi. Il
n'y a qu'à voir la déclaration qui a été faite par
le Secrétaire Général de la Francophonie, le
Président Abdou Diouf, qui, dans une formule claire, a, dans un
communiqué du 5 décembre 2010 « appelé
toutes les parties à reconnaître les résultats
proclamés par la CEI et certifiés par l'ONUCI ».La
Francophonie a donc joué ce rôle d'accompagnement des actions de
l'ONUCI. Mais on ne saurait limiter cet accompagnement de la Francophonie
à cette seule Organisation, puisqu`elle l'a fait aussi à
d'autres.
Paragraphe 2 :
L'accompagnement des actions des autres acteurs
Concernant l'accompagnement de la Francophonie aux actions des
autres acteurs présents sur le terrain il faut dire qu'il s'agit d'une
entente et d'une coordination avec des acteurs présents, qu'ils soient
institutionnels ou individuels. Parmi ces acteurs, figurent le Bureau de
liaison de l'Union Africaine à Abidjan, du représentant du
Facilitateur, du Chef de la Délégation de l'Union
Européenne, des Délégations de la CEDEAO et de L'UEMOA,
des Ambassadeurs francophones, ainsi que de la Mission de monitoring des
médias de l'ONG Journalistes sans frontières. Ainsi, sera-t il
question de traiter des rencontres avec le représentant du Facilitateur
, de l'Union africaine, et de la CEDEAO(A), mais aussi des rencontres avec
l'Union européenne, les ambassadeurs francophones et RSA(B).
A- Les rencontres avec le
représentant du Facilitateur, de l'Union Africaine, et de la CEDEAO
Lors de la rencontre avec Boureima Badini,
Représentant Spécial du Facilitateur, qui est le
Président burkinabé Blaise Compaoré, celui ci a
affirmé, avant le premier tour, sa confiance dans le processus et
dressé le bilan de trois années de Facilitation. Rappelant les
origines de la crise, liées notamment aux questions identitaires et
électorales, M. Badini s'est félicité de l'acceptation en
septembre 2010 de la liste électorale par les partis et candidats, liste
établie selon un processus qui a permis de contenir les risques de
fraude à un minimum. A la veille du second tour, M. Badini a
affirmé son espoir que les mesures correctives apportées par la
CEI améliorent les conditions du déroulement du scrutin. Il a
noté, avec satisfaction, le déploiement croisé des forces
de défense et de sécurité (FDS) et celles des forces
armées des Forces nouvelles (FAFN). Rassuré par la
cordialité du ton du débat entre les deux candidats, il a
néanmoins appelé à rester vigilant, jusqu'au terme du
processus électoral. Concernant le couvre-feu, annoncé pendant le
débat par Laurent Gbagbo, Badini a engagé des actions afin de
faire surseoir à cette décision, vecteur de suspicions et
d'inquiétudes. Une visite du Facilitateur à Abidjan le 27
novembre devait permettre de détendre la situation et de rechercher
(sans succès) les voies et moyens de suspendre cette mesure.62(*)La mission a par ailleurs
rencontré à plusieurs reprises, de façon formelle ou
informelle, les responsables des groupes d'observateurs internationaux
présents en Côte d'Ivoire. Elle a ainsi échangé avec
les représentants de différentes missions d'observation
électorale. C'est notamment le cas avec, Ambroise
Nyonsaba, Représentant Résidant de l'Union Africaine à
Abidjan qui avait affiché un réel optimisme quant au premier
tour, notant que les discussions entre Laurent Gbagbo avec ses adversaires
politiques Henri Konan Bédié et Alassane Ouattara début
mai 2010 avaient été un élément déclencheur
du retour à un climat de confiance pour la tenue du scrutin.
B- Les rencontres avec la
CEDEAO, l'Union européenne, RSA, et les
ambassadeurs
francophones
En ce qui concerne la mission de la CEDEAO,
conduite par Théodore Holo, membre de la Cour constitutionnelle
et président de la Haute Cour de Justice du Bénin, il a
été exprimé, avant le premier tour, des craintes quant
à la gestion des résultats et à la formation des agents.
Au second tour, il fait part de son inquiétude quant aux
dérapages de ton et aux éventuelles violences physiques. Il a
aussi rappelé qu'une détérioration de la situation en
Côte d'Ivoire porterait de graves risques de déstabilisation pour
la sous-région.
Pour le chef de la délégation de l'Union
européenne, M. Christian Preda, il a souligné, avant le premier
tour, une certaine faiblesse dans la formation des agents électoraux,
notant également que le recrutement des agents n'avait pas
été formalisé. Il s'est inquiété de la
décision de la CEI de ne pas faire afficher les résultats dans
les bureaux de vote ainsi que des éventuelles difficultés
à remplir, de façon uniforme, les multiples procès
verbaux.
Pour ce qui est de l'ONG Reporters Sans Frontières(RSF)
elle a dépêché une mission de monitoring des médias
ivoiriens, chargée d'observer et de mesurer l'accès
réservé aux candidats et forces politiques. Le chef de la mission
de RSF en Côte d'Ivoire a dressé un bilan
globalement satisfaisant du comportement des médias
d'Etat dans les strictes périodes de campagne, notant une
amélioration de l'égalité de traitement à la RTI
pour le second tour. Ce satisfecit ne concerne pas la presse privée, qui
n'a pas respecté les principes d'équité et surtout a fait
monter le ton, particulièrement entre les deux tours. Les journaux ont
en outre repris sans distance les propos haineux tenus par les hommes
politiques.
Pour ce qui est des Ambassadeurs francophones, la mission a
rencontré ceux ci à deux reprises. Elle a voulu, d'une part,
informer les diplomates de l'action menée par la Francophonie en faveur
de la paix, de la démocratie et des droits de l'homme dans l'espace
francophone, et d'autre part, recueillir leurs points de vue respectifs sur le
déroulement de l'élection, ainsi que sur les chances d'un second
tour qui se tienne dans un climat aussi pacifié que le premier. Tous ont
salué la qualité et l'apaisement de la campagne du premier tour,
la mobilisation exceptionnelle des Ivoiriens et noté que le pluralisme
démontré par ce scrutin est un témoin fort de
l'avancée démocratique de la Côte d'Ivoire et de la
maturité politique de la population. Ils se sont également
félicités de la très bonne tenue du débat
télévisé entre les deux candidats. Les ambassadeurs ont
cependant appelé l'attention de la mission sur la
nécessité d'une vigilance continue, notant les crispations de la
période de l'entre-deux tours. S'affirmant confiants dans la
sécurisation du scrutin par le Centre de Commandement
Intégré (CCI), ils ont déploré l'instauration d'un
couvre-feu.63(*)
A l'issue de toutes ces rencontres, la Francophonie au
travers de la Mission d'information et de contacts déployée sur
le terrain a pu s'enquérir des différents points de vue et
actions des autres partenaires .Elle a pris note de leurs attentes et de
leurs actions envisagées. Ce qui lui permet de comprendre que ceux-ci
agissent de concert avec les objectifs généraux que s'est
fixée la Francophonie, notamment avec la Déclaration de Bamako et
celle de Saint Boniface quant à la volonté de rendre soluble la
pratique de la démocratie et partant, de contribuer à
l'instauration d'une Afrique de paix, non pas précaire, mais durable. La
présence de tous ces partenaires témoignent de leur
volonté d'accompagner ce pays vers une nouvelle voie, celle de la
stabilité des institutions, celle d'une paix durable. C'est tout logique
que la Francophonie accompagne ces actions car il y va de son
intérêt que la situation soit normalisée dans ce pays qui
est, rappelons le, l'un des fondateurs de la Francophonie que l'on connait
aujourd'hui avec son Président d'alors, Félix Houphouët-
Boigny.
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
En guise de conclusion de cette partie, il est fort judicieux
de rappeler le fil conducteur des idées développées. En
effet, il était question de traiter des actions préventives de la
Francophonie en Cote d'Ivoire. Cela a permis tout d'abord de revisiter
l'histoire de ce pays au moins depuis 2002 à travers les
différents Accords politiques qui ont été conclus par les
acteurs politiques ivoiriens avec l'apport d'acteurs extérieurs. Ces
différents Accords qui ont structuré le jeu politique dans ce
pays en ceci qu'ils ont constitué un moyen d'aboutir à un minimum
de consensus entre acteurs politiques n'ont pas été
accompagnés par la Francophonie en dehors de celui d'Accra II. Ce moment
était pourtant très important, voire même décisif
car il aurait permis à cette Organisation de se montrer plus utile avant
même que les élections ne soient organisées. En effet, au
vu des différents enjeux qui ont été
présentés et qui permettaient de comprendre la délicatesse
de la situation de ce pays, on aurait pu s'attendre à ce que la
Francophonie se bouge un peu plus. Dans la suite des développements, il
a été montré que la Francophonie s'est
déployée sur le terrain lors du processus électoral des
élections de 2010 à travers une Mission d'information et de
contacts que dirigeait Gérard Latortue. Cette Mission avait pour
objectif de prendre la mesure des efforts des acteurs politiques ivoiriens en
faveur des élections libres, fiables et transparentes. Aussi a -t on pu
présenter ses actions qui se résument en des rencontres de
concertation avec les autres partenaires, mais aussi avec les acteurs
politiques et administratifs ivoiriens. La mission a également couvert
quelques bureaux de vote afin de voir comment se déroule effectivement
le processus sur le terrain. Enfin, la Francophonie a pris clairement position
quant à la publication des résultats par la CEI, que l'ONUCI a
certifiés. Sauf que cette prise de position n'a pas été
écoutée par le Président Laurent Gbagbo qui n'est parti du
pouvoir qu'après avoir été neutralisé militairement
le 11 avril 2011. Ainsi, de par son objectif à la base limité,
elle a pu jouer également un rôle minimal, se circonscrivant plus
sur l'accompagnement des actions des autres acteurs en présence. C'est
donc le moment d'envisager ce qu'on peut qualifier de « ventre
mou » dans l'action de la Francophonie afin de pouvoir
améliorer ses actions futures.
DEUXIEME PARTIE :
EVALUATION DU MODELE DE PREVENTION DES CONFLITS POST ELECTORAUX DE LA
FRANCOPHONIE
L'élection présidentielle ivoirienne des 31
octobre et du 28 novembre 2010 a permis de mettre en lumière le
rôle qu'a joué la Francophonie pour prévenir le conflit
armé post électoral qui a finalement eu lieu. Il ressort qu'elle
a joué un rôle limité. Ceci s'expliquant en gros par le
fait qu'elle n'a pas eu une réelle prise sur les
évènements en Cote d'Ivoire. Puisqu'on a finalement
assisté à un conflit à la suite des élections, il
est clair qu'on fait face à un échec de sa part, et par ricochet
à l'inefficacité de son modèle de prévention. Cela
nous permet de présenter dans un premier temps les limites de l'action
préventive de la Francophonie en Cote d'Ivoire (chapitre3). En clair,
il sera question de présenter les failles et défaillances de la
Francophonie ayant pu être à l'origine de cet échec. Dans
un second temps de la réflexion, il s'agira d'envisager des pistes
possibles afin d'améliorer son action préventive. Il est
indéniable que cette action mérite d'être
améliorée. C'est pourquoi, il sera question de faire des
propositions, pour une amélioration du modèle de
prévention des conflits post électoraux en Francophonie
(chapitre4). L'objectif à terme étant de limiter au strict
minimum les conflits de ce type dans l'espace francophone en
général, et en Afrique en particulier.
CHAPITRE 3 : LES
LIMITES DE L'ACTION PREVENTIVE DE LA FRANCOPHONIE EN COTE D'IVOIRE
L'action de la Francophonie, comme cela a déjà
pu être montré dans les développements
précédents, est très limitée dans le cas des
élections présidentielles du 31 octobre et du 28 novembre2010.
Les actions menées par cette Organisation se structurent essentiellement
autour d'une Mission d'information et de contacts déployée sur le
terrain et envoyée par son Secrétaire Général.
Comme on peut le voir, cette seule action, conjuguée à celle des
autres acteurs partenaires n'aura pas suffit à empêcher la
survenue du conflit armé post électoral qui a
éclaté au lendemain des proclamations des résultats par
les différentes institutions64(*). Ce serait donc un secret de polichinelle que de dire
que la Francophonie, par rapport aux objectifs généraux qu'elle
s'est fixée, à savoir la prévention et la
résolution des conflits entre autres, a lamentablement
échoué en ce qui concerne la prévention du conflit post
électoral ivoirien. Cela est certainement dû à un certain
nombre d'éléments bien précis qu'il convient de
déterminer dans les développements suivants. En clair, il sera
question de traiter des limites structurelles de la Francophonie(SECTION1)
à prévenir le conflit post électoral ivoirien. Il s'agira
alors de déceler les failles au niveau de la structure
générale de prévention des conflits post électoraux
de cette Organisation en Cote d'Ivoire. Etant entendu qu'on ne saurait
percevoir ces limites que sur le seul prisme structurel, il sera question dans
un second temps d'envisager ces limites sur un point de vue
opérationnel(SECTION2) pour comprendre pratiquement ce qui est à
l'origine de cet échec de la Francophonie dans sa volonté de
prévention.
SECTION1 : Les limites
structurelles de la Francophonie en Côte d'Ivoire
Le volet structurel dans lequel la Francophonie a
étalé ses limites est pourtant le volet sur lequel elle semble
mettre plus d'emphase en ce qui concerne la prévention des conflits post
électoraux. Ses textes de référence que constituent la
Déclaration de Saint Boniface de 2006, et surtout celle de Bamako de
2000 sont pourtant très évocatrices pour pouvoir envisager une
prévention quelconque, et notamment celle des conflits post
électoraux. Pour mieux expliciter ces limites structurelles, les
développements suivants s'attèleront à montrer la
flexibilité de la Francophonie au sujet du suivi du processus
électoral (paragraphe1).Car comme on le sait, tout processus
électoral comprend la phase pré -électorale, la phase
électorale proprement dite et la phase post électorale. Par la
suite, il sera question de traiter de la Francophonie comme un acteur
subsidiaire dans la prévention du conflit post électoral ivoirien
(paragraphe2).
PARAGRAPHE 1 : La
flexibilité de la Francophonie quant au suivi du processus
électoral ivoirien
Lorsqu'il est évoqué la flexibilité de la
Francophonie, il est question de montrer qu'elle n'a pas fait montre de
rigidité en ce qui concerne sa participation au processus
électoral ivoirien. En effet, elle ne s'est pas illustrée en ce
qui concerne son omniprésence, au contraire, on a pu noter sa non
participation à la phase pré électorale de
l'élection présidentielle ivoirienne (A). Enfin, on peut rendre
compte de sa flexibilité à travers le rôle limité
qu'a joué la Mission d'information et de contacts (B), toutes choses qui
témoignent d'un encrage insuffisant de l'Organisation dans
l'évolution de la crise antérieure aux élections.
A- La non participation de la
Francophonie à la phase pré électorale de
l'élection présidentielle ivoirienne
Le système électoral dans une élection
comprend en général trois phases bien identifiables. Il s'agit de
la phase pré électorale, de la phase électorale proprement
dite et enfin de la phase post électorale. En ce qui concerne la phase
pré- électorale, on peut noter que la Francophonie ne s'est pas
véritablement impliquée. Ceci peut se voir notamment par la date
d'arrivée de la délégation de la Mission d'information et
de contacts. En effet, la délégation de l'OIF a
séjourné en Côte d'Ivoire du 27 octobre au 04 novembre
2010, en ce qui concerne le premier tour, puis, du 24 novembre au 02
décembre 2010 pour ce qui est du second tour. On peut aisément
faire le décompte et se rendre à l'évidence que la Mission
ne disposait que de quatre jours au maximum avant la phase électorale
proprement dite. Dans ces conditions, il est clair que la Francophonie ne peut
pas être apte à gérer véritablement le processus
électoral, du moins, en ce qui concerne sa première phase qui est
très importante. Elle est particulièrement sensible dans la
mesure où elle conditionne grandement tout le reste. Elle concerne tout
d'abord le droit électoral qui doit briller par son caractère
consensuel, par sa stabilité, notamment à l'approche du scrutin,
et donc par la prévisibilité de son contenu. La manipulation du
droit électoral est le premier vecteur du dévoiement des
élections et de la conflictualité subséquente aux
élections. Les procédures doivent briller par leur clarté,
notamment la ventilation des compétences institutionnelles, source de
confiance et de légitimité, le calendrier électoral doit
être prévisible pour tous les protagonistes. Dans le cas ivoirien
un consensus a semblé être trouvé avec les
différents accords qui ont permis d'aller aux élections. En
particulier lors de l'Accord de Pretoria du 06 avril 2005 où les
différents participants ont convenu de la composition consensuelle de
la Commission Electorale Indépendante(CEI) ainsi que des
modalités concernant l'élaboration des listes électorales.
En effet, en ce qui concerne la composition de la CEI, les parties signataires
de l'Accord se sont entendues pour réaffirmer les résolutions
prises lors des Accords de Linas Marcoussis du 23 janvier 2003, d'Accra
I ,II et III, des 29septembre2002, du 07 septembre2003, et du 30 juillet
2004 respectivement65(*) .Elles ont convenu que la CEI devra être
constituée de deux représentants nommément
désignés par chaque partie signataire de l'Accord de
Linas-Marcoussis66(*) dont
six pour les Forces Nouvelles67(*) .Cette disposition fait à la
réalité apparaitre un début de consensus en ce qui
concerne l'organe qui est chargé d'organiser les élections .
C'est une chose qui est très importante dans la mesure où on voit
bien que les parties qui ne se faisaient pas totalement confiance commencent
à donner des gages de sérieux mutuels.
A coté de l'organe en charge de l'organisation des
élections que constitue la CEI, les différents acteurs ont
convenu de s'entendre en ce qui concerne les listes électorales. En
effet, entre autre problème de fond se trouvant comme point
d'achoppement entre les différentes parties qui s'opposent, c'est bien
celui de l'identification des électeurs potentiels. Il faut noter que
cette question constitue un enjeu majeur dans la crise car c'est à
travers l'élection présidentielle attendue que le pays compte
retrouver sa normalité politique. C'est la raison pour laquelle le
problème d'identification des ivoiriens s'est toujours posé .On
se souvient bien du point de départ direct de la crise dans ce pays qui
est la mise systématique à l'écart d'un acteur et d'une
partie de la population accusés de ne pas être des ivoiriens de
souche. Tout est parti du fait que la nationalité ivoirienne d'un
acteur, Alassane Dramane Ouattara (ADO68(*)), était remise en question. En fait, le
Président Henry Konan Bédié69(*), suivi dans cette voie par le
Général Robert Guei70(*) après son coup d'état, et Laurent
Gbagbo, ont toujours mis en doute la nationalité de Ouattara.
Différentes lois71(*) ont même été votées pour
faire ressusciter la question pourtant tombée dans l'oubli qui est
« l'ivoirité72(*) ». Certains spécialistes s'accordent
sur le fait que le concept d' « ivoirité » a
été instrumentalisé par les trois Présidents pour
délégitimer « ADO » qui constituait un
adversaire politique trop dangereux et mobiliser un électorat bien
précis afin de s'assurer la conquête du pouvoir. Par les
différents Accords signés entre les parties en conflit de ce
pays, cette question a pu être réglée avec la
résolution suivant laquelle toutes les parties signataires devaient
pouvoir participer à l'élection présidentielle en vue.
Autre élément important de la phase pré
électorale, c'est la gestion du fichier électoral qui doit
être consensuelle. Partant du fait que certains acteurs estimaient que la
nationalité ivoirienne était bradée, il y avait donc
contestation des listes électorales qui étaient
déjà en vigueur. C'est la raison pour laquelle les parties ont
convenu dans les différents accords qu'ils ont passé, des
modalités qui devront être suivies pour pouvoir obtenir un
fichier électoral fiable et crédible. Ainsi, les parties ont
convenu à l'issue de l'Accord de Ouagadougou de 2007 de relancer les
audiences foraines visant en gros à délivrer des jugements
supplétifs tenant lieu d'actes de naissance ; la reconstitution des
registres de naissance perdus ou détruits, l'organisation d'une
opération d'établissement de nouveaux titres
d'identité73(*) .Le
processus électoral quant à lui a également
été aménagé par les différentes Parties lors
de l'Accord de Ouagadougou .Ainsi les participants ont convenu que
l'inscription sur les listes électorales sera le fait de l'Institut
National de la Statistique(INS), accompagnée en cela par
l'Opérateur technique désigné par le Gouvernement pour
l'identification. Elles ont convenu que tous les ivoiriens en âge de
voter pourront le faire avec la seule exigence de disposer de pièces
d'identité et de carte électorale. C'est à la CEI de
valider et de confirmer la sincérité des listes
électorales définitives. Les parties ont décidé
que, dans un souci de transparence et d'efficacité, la CEI, l'INS et
l'opérateur technique désigné par le Gouvernement, se
devront de collaborer pour l'établissement des listes
d'électeurs.
Comme on peut le constater, la Francophonie n'est pas du tout
présente dans la phase pré électorale de façon
significative. Car comme on peut le voir, divers aspects qui ont
été touchés afin d'aller à l'élection ne
l'ont pas été avec comme acteur la Francophonie. Il faut dire que
de tous les Accords qui ont été passés par les acteurs de
la crise ivoirienne, la Francophonie n'a participé qu'à celui
qui s'est tenu à Accra le 07 mars 2003, c'est-à-dire Accra II.
Elle y était représentée par Lansana Kouyaté.
C'est certainement un élément probant de la non implication
véritable de l'OIF, notamment en ce qui concerne la phase sensible que
constitue la phase avant le processus électoral. Il est évident
que la situation particulière de la Cote d'Ivoire qui traverse une crise
depuis plus d'une décennie commande que pour pouvoir en sortir à
travers l'élection, un certain nombre de mesures doivent être
prises. C'est ce qui peut expliquer l'opportunité des Accords de paix
qui ont été signés. Le fait pour la Francophonie de ne pas
participer à ces Accords la disqualifie d'office en ce qui concerne son
aptitude et sa bonne volonté à prévenir tout conflit issu
d'une élection qu'elle n'aura pas contribué sérieusement
à préparer. Cela a déjà été dit plus
haut, c'est cette phase qui détermine l'issue du vote. Des
éléments tels que le financement doivent être
maitrisés et prévisibles, la campagne, notamment l'accès
aux médias de service public doit être organisé de
manière équitable. L'exemple dans ce sens a pourtant
été donné par le PNUD à travers des appuis au
processus électoral ivoirien. Pour illustration, on peut noter le
programme de formation et de sensibilisation de la jeunesse communale dans les
zones Centre, Nord, Ouest(CNO)74(*) à la résolution des conflits à
une campagne dite « Elections Fair Play :tout le monde y
gagne »,à la diffusion de messages de paix sur des radios de
proximité .A la question de savoir en quoi la formation des jeunes
à la prévention des conflits en période électorale
peut contribuer à la réduction des violences, une militante des
droits humains a déclaré : « elle nous aidera à
sensibiliser nos militants et membres à adopter des comportements
responsables et à respecter les droits de nos adversaires
politiques» ; selon un représentant de parti politique
«cette formation m'a permis de m'informer sur des questions que
j'ignorais concernant la citoyenneté et les élections
». Ces propos sont ceux de responsables d'organisations de jeunesses
conviés aux ateliers de formation des associations de jeunesse communale
sur la prévention des conflits liés aux élections tenues
du 27 septembre au 13 octobre 2010 à Bouaké, Korhogo, Man,
Séguéla et Bondoukou75(*).
Evidemment, l'accès à l'électorat et
à l'éligibilité doit être aménagé de
manière libérale et égalitaire. Le découpage
électoral, la création et la ventilation territoriale des bureaux
de vote doivent refléter le souci d'équité, et non la
volonté politique de défavoriser les adversaires. Ils doivent
pouvoir faire l'objet d'un contrôle contentieux sur la base notamment du
principe d'égalité des citoyens devant la loi. Pendant cette
phase, la dynamique de l'observation électorale, notamment
l'observation locale est déjà à l'oeuvre. Si la
Francophonie s'est faite discrète lors de la phase pré
électorale et bien avant même le processus électoral, cela
veut certainement dire qu'elle n'a pas d'encrage suffisant quant à
l'évolution de la crise et donc, le rôle de la Mission
d'Information et de contact sera limité.
B- Le rôle limité
de la Mission d'Information et de contacts en Côte d`Ivoire
La Francophonie s'est déployée en Côte
d'Ivoire à travers une Mission qui était conduite par
Gérard Latortue.
e Gérard Latortue, ancien Premier ministre
d'Haïti, chef des missions électorales en Côte d'Ivoire (2O1O
-2011).
Au terme du Rapport rendu par cette mission, on peut prendre
connaissance de la nature de cette délégation ainsi que de son
mandat. En effet, la délégation de l'OIF, qui a
séjourné en Côte d'Ivoire du 27octobre au 04 novembre2010
en ce qui concerne le premier tour, et du 24 novembre au 02 décembre
2010 pour le second tour, était une Mission d'information et de
contacts76(*)
.Déjà à travers sa dénomination, on peut se rendre
compte du caractère limité de son action qui ne se structure pas
véritablement autour d'une volonté d'impacter sur le processus
électoral ivoirien. Lorsqu'on prend connaissance du rapport qu'elle a
rendue, on se rend compte que « son mandat consistait
à prendre la mesure des efforts déployés par l'ensemble
des acteurs politiques ivoiriens en faveur de la tenue des élections
libres, fiables et transparentes ainsi qu'à rendre compte des
éventuelles difficultés rencontrées dans la mise en oeuvre
du processus électoral dans ce pays »77(*).De par cette disposition qui
est en quelque sorte la feuille de route de la délégation de la
Francophonie, il est clair que cette organisation n'était pas vraiment
partie prenante du processus électoral. Son mandat précise bien
que son objectif est de « prendre la mesure des efforts
déployés par l'ensemble des acteurs politiques
ivoiriens »78(*).Nulle part dans le rapport de la
délégation, il n'est fait état de la volonté de
l'OIF de participer à des actions visant à impacter dans le
processus.
Autre élément qui peut témoigner du
rôle limité de cette mission d'information et de contacts, c'est
l'effectif de la délégation. En effet, pour les deux tours, la
délégation était composée de seize personnes
seulement. Il est à préciser que toutes les personnes composant
la délégation ne se sont pas retrouvées au même
moment dans le pays .Une partie, c'est - à dire douze, étaient
présents, en ce qui concerne le premier tour, et dix pour le second
tour. Mais en ce qui concerne le chef de la délégation, en
l'occurrence Gérard Latortue, il était présent et
dirigeait celle-ci lors des deux tours. Pour une élection aussi sensible
et particulière comme l'a elle-même reconnue la mission dans son
rapport, il est quand même à reconnaitre que l'effectif qui
était en Côte d'ivoire pour cette élection, était
vraiment insuffisant.
Au terme du rapport produit par la délégation,
la mission de l'OIF entendait veiller à ce que le processus
électoral ivoirien respecte certains paramètres, parmi lesquels
:
- L'efficacité et la crédibilité de
l'ensemble des acteurs et des structures impliqués dans le processus
électoral.
- La pleine participation des citoyens aux scrutins et le
traitement égal des candidats.
- Le respect effectif de la liberté de la presse et de
l'accès équitable des différentes forces
politiques aux médias publics et privés.
- La soumission aux résultats d'élections
libres, fiables et transparentes79(*).L'ambition de la mission est certes louable, mais
elle souffre de manquements qui rendent finalement l'action de la
délégation limitée. Si l'on prend la dernière
articulation qui concerne la soumission aux résultats d'élections
libres, fiables et transparentes, on peut dire qu'à ce niveau, les
actions effectives ne sont pas à la hauteur de l'ambition
affichée de la mission. Ceci se justifie par le fait qu'on se serait
attendu à ce que la Francophonie agisse véritablement dans le
sens de favoriser l'acceptation des résultats en participant à
l'élaboration de l'élection à la base. La Francophonie ne
s'est pas occupée des éléments qui constituaient des
éventuelles sources de réclamations post électorales.
Comment comprendre que la Francophonie ne se soit pas impliquée pour
qu'on ait une élection qui ne souffre d'aucune contestation afin que les
acteurs se soumettent aux résultats des urnes. En effet, une des sources
du conflit ayant opposé le camp d' « ADO »
à celui de Gbagbo est bien que le second camp a estimé -à
tort ou à raison-que les urnes ont été bourrées et
que des militants ont été empêchés d'effectuer leur
devoir civique dans des zones CNO, qui sont des zones contrôlées
par les FN, qui étaient favorables au candidat Ouattara. Pourtant, les
parties avant d'aller aux élections, avaient convenu que cette zone soit
démantelée militairement, que les armes soient restituées.
Or, ceci n'ayant pas été fait, cela a fourni un excellent alibi
pour contester les résultats issus des urnes proclamés par la
CEI et certifiés par l'ONUCI.
Au total, la Francophonie a joué un rôle
limité en Côte d'Ivoire. Son mandat est bien circonscrit, ce qui
ne lui permet pas d'impacter véritablement dans le processus
électoral ivoirien. On peut trouver comme explication son encrage
insuffisant dans l'évolution de la crise qui perdure dans ce pays, ce
qui la place dans une posture d'acteur subsidiaire de prévention des
conflits post électoraux.
Paragraphe 2 : La
Francophonie, un acteur subsidiaire de prévention des conflits post
électoraux
La Francophonie, a joué un rôle minimal ou
minimum dans la prévention du conflit armé post électoral
ivoirien de 2010. De par sa prestation dans ce pays, on peut convenir qu'elle
n'était pas au coeur de la situation qui a prévalu, qu'elle
était en retrait. C'est ce qui peut être retenu du
caractère subsidiaire de son action en tant qu'acteur de
prévention des conflits que lui reconnait pourtant sa charte. Cette
subsidiarité peut se voir à travers son rôle d'appui(A),
mais aussi par rapport au rôle de relais joué par elle(B).
A- Le rôle d'appui
joué par la Francophonie
Quels que soient les objectifs poursuivis : la paix, la
coopération multilatérale ou le développement
justifiés par le partage de la langue française, la Francophonie
ne conçoit son action que sur le mode de l'aide et tous ses synonymes
(assistance, collaboration, concours, coopération, secours, soutien).
Eux tous laissent entrevoir son rôle d'appui, de renfort, de
réserve80(*) . La
spécificité de la Francophonie se marque dans le rôle
« subsidiaire »81(*) qu'elle accepte de jouer : «
L'humilité et le réalisme nous obligent à admettre que la
Francophonie ne peut être sur tous les fronts, et qu'elle est d'abord
là pour faire ce que d'autres ne feront jamais à sa
place »82(*). Son rôle demeure donc « accessoire
». Lorsque surgissent des situations de crise - comme celle qu'a connue
la Côte d'Ivoire - il appartient à la Francophonie, selon les mots
de son Secrétaire général, d'apporter son concours
à toute initiative politique83(*): «D'une façon générale,
la Francophonie joue toujours un rôle dans la mesure où
il n'y a pas de médiateur. Il s'agit d'éviter que, en plus d'un
conflit entre protagonistes, il n'en existe un entre
médiateurs »84(*). Dès lors, lorsque d'autres médiateurs
sont présents, soit la Francophonie collabore avec eux, soit elle se
retire car elle a pour principe, afin d'éviter les incohérences,
de laisser agir l'Organisation régionale compétente comme cela a
été le cas en Côte d'Ivoire avec la CEDEAO, l'UA ,
voire même l'ONU qui ont toutes reçues l' appui
nécessaire de la Mission d'information et de contacts
dépêchée par Abdou Diouf. Ce rôle d'appui ne se
limite pas qu'aux initiatives des Organisations, elle s'étend aussi aux
actions étatiques, comme on a pu l'observer avec les rencontres visant
à soutenir et appuyer les actions d'acteurs étatiques qui se sont
investis dans la crise ivoirienne. Il est question ici de parler de la
rencontre qui a eu lieu entre la délégation de la Francophonie et
le Représentant spécial du Facilitateur qui est le
Président du Burkina, Faso Blaise Compaoré85(*) le 26 novembre 2010. Il est
aussi important de souligner l'appui aux actions entreprises par la France
à travers son unité militaire(la Force Licorne) présente
sur le sol ivoirien qui a participé à la mise en place de la
résolution du Conseil de sécurité appelant à une
opération visant le départ du candidat reconnu perdant à
l'élection. La Francophonie, par rapport à la faible mobilisation
qu'on a pu noter de sa part, était condamnée à ne jouer
qu'un rôle d'appui. Ceci étant rendu nécessaire par le
fait que la plupart des Organisations présentes se sont fait voir tout
au long de l'évolution de la crise ivoirienne jusqu'à
l'aboutissement que constituait l'organisation des élections
présidentielles qui nous concerne. Que ce soient l'ONU, l'UA, la CEDEAO,
le Burkina Faso, l'Afrique du Sud, le Ghana, la France, tous ont
été présents de manière significative dans
l'évolution de la crise déclenchée au lendemain du
décès du Président Félix Houphouët-Boigny en
199386(*). Celle-ci prend
naissance après le décès du
« vieux »87(*) et connait un regain de tension avec la notion
d' « ivoirité »,puis se cristallise avec la
division du pays en deux zones contrôlée par deux forces
militaires88(*) à
l'issue du coup d'état manqué du 19 septembre2002.La Francophonie
a certes intervenu lors de la signature des accords d'ACCRA II le 07 mars
2003 ,mais il n'en demeure pas moins qu'elle n'a pas brillé par sa
participation à toutes les négociations au sujet de ce pays,
même la dernière89(*) ayant permis de mettre en place les
éléments nécessaires pour que l'on puisse aboutir à
cette élection de sortie de crise90(*).In fine ,la Francophonie s'est résolue
à jouer un rôle d'appui en ceci qu'elle s'est contentée de
soutenir les actions des autres acteurs en présence qui oeuvraient pour
un bon déroulement du processus électoral, gage d'une
période post électorale dépourvue de conflit
éventuel.
B- Le rôle de relais
joué par la Francophonie
Le rôle de relais joué par la Francophonie
renvoie à la poursuite ou à l'appropriation par elle, puis
à sa disposition à mener les mêmes combats à la
suite d'acteurs bien précis. Puisque cette Organisation ne vit pas en
autarcie et s'inscrit dans une logique d'ensemble, il est plus
qu'évident pour elle de se retrouver dans un rôle de relais
d'autant plus qu'elle n'est pas pionnière dans ce domaine de
prévention des conflits post électoraux91(*).On comprend mieux-même
si cela est discutable- le fait que la Francophonie se retrouve à jouer
un rôle limité dans le cas ivoirien car d'autres acteurs se sont
suffisamment mobilisés en amont. En effet, en ce qui concerne le
rôle de relais joué par la Francophonie, il faut dire que ce
rôle peut être historiquement compris avec les liens
institutionnels92(*) qui
existent entre elle et l'ONU par exemple. Le Secrétaire
général de l'ONU est invité à chaque Sommet des
Chefs d'État et de gouvernement des pays ayant le français en
partage afin d'y prononcer un discours, ce qui est une manière de
rappeler solennellement le lien existant entre les deux Organisations. Depuis
le 18 décembre 1998, la Francophonie assiste en qualité
d'observateur aux sessions et aux travaux de l'Assemblée
générale et de ses organes subsidiaires. Elle participe aussi aux
réunions programmées entre les Organisations régionales et
l'ONU. Elle s'est engagée à coordonner les efforts entre cette
dernière et les Organisations régionales. Aussi, le 20 mars 1998,
les Secrétaires généraux et les représentants des
Organisations internationales et régionales se sont réunis pour
la première fois à Paris à l'invitation du
Secrétaire général Boutros Boutros-Ghali. L'objectif
était d'aborder ensemble avec plus de cohérence et
d'efficacité, les grands problèmes internationaux : la paix, la
sécurité, le développement. Cette volonté de
coopération a pris la forme d'accords grâce auxquels la
Francophonie agit en tant que sujet de droit international93(*).
Le rôle de relais peut se voir intrinsèquement
à travers le fait que la Francophonie se construit comme un vaste
réseau de carrefours nombreux et multiformes. Elle s'affirme avant tout,
par le rôle de «liaison » qu'elle cherche à
opérer entre eux tous; elle entend nouer le dialogue avec l'ensemble des
grandes aires linguistiques et culturelles94(*) . La Francophonie utilise le rôle de «
relais » que ses Membres sont appelés à jouer entre eux, les
« mondes » et les Organisations internationales auxquelles ils
participent pour construire ses relations extérieures. Selon Jean-Louis
Roy, « elle n'est ni un vide ni un plein, elle est un
lieu de rassemblement »95(*) . Son poids résulte sans aucun doute des ponts
nombreux qu'elle jette entre les denses réseaux sociaux, culturels et
institutionnels sur lesquels elle peut s'appuyer. Ils sont la principale
ressource dont elle dispose pour forger l'esprit de communauté dont elle
rêve et retrouver l'universalité à laquelle elle aspire.
La Francophonie s'inscrit de ce fait dans une logique claire,
celle de l'accompagnement, du suivi, du relais. Le processus électoral
ivoirien récent de 2010 nous administre la preuve s'il en était
encore besoin de la nature de cette Organisation à la base et qui s'est
concrétisé par l'action limitée qu'elle a jouée
ici. Les élections dans ce pays d'Afrique a permis de se rendre compte
que la Francophonie a plus joué un rôle d'accompagnateur, de
suiveur, de relais dans l'ensemble du processus. La Francophonie s'est beaucoup
plus attelée à accompagner les actions des autres partenaires au
processus. Cela s'est vu à travers les différentes rencontres
qu'elle a eues avec les acteurs politiques et intervenants internes et externes
en Côte d'Ivoire pour leur expliquer l'objet de sa mission, mais aussi et
surtout s'enquérir des missions de ceux-ci. Au terme de ces rencontres,
elle a pu se montrer satisfaite des compte rendu qui lui ont été
faits et a martelé son appui à toutes les actions de ces
partenaires dans la mesure où ces actions vont dans le même sens
que l'objectif fixé par la Déclaration de Bamako, à savoir
assurer des élections libres, fiables et transparentes. Seulement, ce
qu'on peut reprocher à l'OIF, c'est sa quasi subordination aux actions
des autres partenaires présents lors du processus électoral,
chose qu'on peut expliquer par sa non participation véritable à
la totalité des opérations électorales.
SECTION 2 : Les
limites opérationnelles de la Francophonie en Côte
d'Ivoire
La prévention des conflits et notamment ceux issus des
élections est au coeur de l'action de la Francophonie. Cette
Organisation entend, à coté de la promotion de la langue
française, promouvoir un espace de paix durable propice à un
éventuel développement sur le continent africain et
singulièrement au sein de son espace. Confrontée à une
situation précise-celle de Côte d'Ivoire- l'OIF n'a pas pu,
malgré certainement sa bonne volonté, empêcher qu'à
l'issue des élections dans ce pays, que la force soit utilisée
pour mettre un terme à un conflit qui a déclenché
à la suite des différentes proclamations des résultats.
Cet échec n'est pas seulement perceptible au niveau structurel comme
cela a déjà été montré, mais aussi au niveau
opérationnel qui est une composante essentielle de la prévention.
Ainsi, l'inefficacité au plan opérationnel peut s'analyser
suivant deux paramètres. Il s'agit dans les prochains
développements de traiter dans une première perspective de la
subordination de la Francophonie à certains acteurs (paragraphe1)
présents dans le processus électoral ivoirien, et par la suite de
parler du manque d'autorité de l'OIF pour prévenir le conflit
post électoral ivoirien (paragraphe2).
Paragraphe 1 : La
subordination de la Francophonie à certains acteurs présents en
Côte
d'Ivoire
La Francophonie a joué un rôle minimal dans le
processus électoral ivoirien. Au lieu d'être un acteur de premier
plan, elle s'est plutôt comportée en acteur de soutien, d'appui,
de relais aux actions engagées et pensées par d'autres acteurs en
présence. Elle s'est davantage comportée comme un acteur qui
était pratiquement subordonné à d'autres. Cette
subordination peut se voir à travers son alignement quasi
systématique aux actions de l'ONU (A) mais aussi par la confusion entre
la position de la France et la sienne(B).
A-L'alignement quasi
systématique aux actions de l'ONU
Tout au long du déroulement du processus
électoral ivoirien, la Francophonie s'est faite toute petite .A en
témoigne le rôle limité qu'elle a dû jouer par elle
même. S'il est un acteur qui s'est affirmé par sa présence
et son impact, c'est bien l'ONU. L'ensemble des acteurs ivoiriens, lors des
différentes négociations ayant abouti aux accords de
paix96(*), ont
souhaité associer leur engagement à l'information et à
l'approbation de l'ONU par le truchement du Conseil de Sécurité
qui a entériné ces différents Accords de paix. A ce
sujet, et en accord avec les mesures arrêtées, le Conseil de
sécurité a eu à prendre plusieurs résolutions au
sujet de la Côte d'Ivoire. Cette activité de l'ONU fait en sorte
qu'elle occupe une place de choix dans le processus électoral ivoirien
où elle est détentrice d'un pouvoir non moins important qui est
celui de veiller au bon déroulement dudit processus et la certification
de celui ci. Elle fait son entrée dans le processus ivoirien de
manière pertinente à partir de 2005. Lors de la signature de
l'Accord de Pretoria, les parties ont convenu
qu' « » en vue d'assurer l'organisation
d'élections libres, justes et transparentes, elles ont admis que les
Nations Unies soient invitées à prendre part aux travaux de la
Commission Electorale Indépendante. A cet effet, elles ont donné
mandat au Médiateur, Son Excellence Monsieur Thabo Mbeki, d'adresser
une requête aux Nations Unies, au nom du peuple ivoirien, en vue de leur
participation dans l'organisation des élections générales.
Les parties demandent que la même requête soit adressée aux
Nations Unies en ce qui concerne le Conseil Constitutionnel. Les Nations Unies
doivent s'assurer à ce que leur mission d'intervention sollicitée
soit appuyée par un mandat et des pouvoirs appropriés à
l'accomplissement de leur mission »97(*). Ce qui lui donne une
bonne longueur d'avance sur la Francophonie qui a certes eu à intervenir
durant tout le processus de sortie de crise qui avait comme point culminant
l'organisation de l'élection présidentielle. La Francophonie est
arrivée pour couvrir le processus électoral ivoirien et a
séjourné du 27 octobre au 4 novembre2010 (1er tour), puis du 24
novembre au 2 décembre 2010 (2ème tour).Elle y adonc
trouvé déjà en place la mission des Nations Unies(ONUCI).
On peu noter que la délégation que conduisait Gérard
Latortue a organisé trois rencontres avec les responsables de la dite
mission. D'abord le 29 octobre 2010, la délégation a eu à
rencontrer le Représentant spécial du Secrétaire
Général des Nations Unies(RSSG) Choi Jin Young. Ensuite, la
Mission a rencontré à nouveau le Représentant
Spécial du Secrétaire Général des Nations Unies et
les délégations des missions d'observation internationale
présentes le 25 novembre 2010. La mission a enfin rencontré le
Chef de la cellule de Certification des élections de l'ONUCI, Bernadette
Houndekandji, le 25 novembre 2010.Toutes ces rencontres étaient
organisées dans le but de présenter la mission de la
délégation, mais aussi et surtout pour s'enquérir des
actions envisagées par l'ONU à travers sa mission présente
en Côte d'Ivoire. La délégation de la Francophonie a fait
sienne tout ce qui lui a été dit et a accompagné ce
partenaire dans la poursuite de ses actions. D'ailleurs pouvait- il en
être autrement, quand on sait que la Francophonie a
bénéficié de l'appui logistique de l'ONUCI tout au long
de son séjour en Côte d'Ivoire ? La subordination de la
Francophonie à l'ONU s'est donc manifestée par l'acceptation par
elle de tous les mécanismes mis en place par celle là. Il en a
été ainsi au moment de l'attente des résultats .Le soir
du vote, du fait de l'instauration par le Président Laurent Gbagbo d'un
couvre-feu, « de nombreux commissaires des commissions
électorales locales sont rentrés chez eux après le
dépouillement avec les procès verbaux au lieu de les porter
à la commission locale pour centralisation et transmission des
données. Le Représentant Spécial du Secrétaire
Général des Nations Unies, avec une partie du corps diplomatique
accrédité en Côte d'Ivoire, a dû intervenir en
rencontrant au cours de la soirée du 28 novembre les responsables
politiques et les deux candidats afin que des garanties de
sécurité soient données aux commissaires. Ceux-ci sont
finalement retournés au siège des commissions dans la
nuit »98(*). En ce qui concerne les différentes
proclamations des résultats99(*), la Francophonie a pris fait et cause pour la version
de l'ONU. La preuve peut être donnée par la déclaration
forte, péremptoire et sans ambages de son Secrétaire
Général, le Président Abdou Diouf. « Le
Secrétaire Général de la Francophonie, dans un
communiqué du 5 décembre 2010, a appelé toutes les parties
à reconnaître les résultats proclamés par la CEI et
certifiés par l'ONUCI »100(*). La Francophonie s'est aussi trouvé entrain
de soutenir l'initiative du Conseil de sécurité par rapport
à la résolution visant à employer la force pour faire
partir le Président sortant accusé de s'accrocher au pouvoir. De
par toutes ces positions et actions que l'on a pu relever de la part de la
Francophonie, il est clair que sa subordination à l'ONU peut souffrir de
très peu de contestations. Les développements qui vont suivre
présenteront également celle à l'égard d'un autre
acteur.
B- La confusion entre la
position de la France et celle de la Francophonie
Un des reproches qui a toujours été fait
à la Francophonie, c'est sa présumée proximité
avec la France qui, au demeurant, est le principal acteur qui permet de
financer l'Organisation. Certains esprits critiques estiment à tort ou
à raison que cette proximité nuit à la raison d'être
de l'OIF qui est perçue parfois comme un paravent de la France.
L'observation du financement de l'Organisation qui est supporté en
grande partie par ce pays en fait un élément incontournable pour
comprendre les griefs qui sont portés contre la Francophonie et sa
supposée proximité avec la France. En effet, il est connu que la
contribution de la France au fonctionnement de la Francophonie est très
importante comparée aux autres contributions d'Etats et gouvernements
membres de l'Organisation. L'analyse du tableau qui va suivre nous donnera une
idée plus claire de la participation de la France au budget de l'OIF de
2008 en 2010.
Tableau 1 : Contribution de la France au
financement de la Francophonie multilatérale
(En millions d'euros)
|
Montant versé en 2008
|
Montant PLF 2009 (alloué)
|
Montant PLF 2010 (alloué)
|
1. SAF
|
|
|
|
OIF- Contribution statutaire
|
12,4
|
12,7
|
12,7
|
OIF- Contribution volontaire
|
19,6
|
20,9
|
18,1
|
AUF
|
19,4
|
20,6
|
21,5
|
AIMF
|
1,8
|
1,9
|
1,9
|
Université Senghor d'Alexandrie
|
1,6
|
1,75
|
1,6
|
Confemen
|
0,17
|
0,18
|
0,42
|
APF
|
0,13
|
0,13
|
0,13
|
Loyer de la Maison de la Francophonie
|
-
|
-
|
4,01
|
Sous-total
|
55,1
|
58,2
|
60,3
|
Jeux de la Francophonie
|
-
|
1,6
|
-
|
Total SAF
|
55,1
|
59,8
|
60,3
|
2. DGMDP (ex-DGCID)
|
|
|
|
AUF
|
8,5
|
8
|
7,9
|
Confejes
|
0,36
|
0,2
|
1,05
|
Subvention à l'IEPF (Institut de l'énergie et de
l'environnement de la Francophonie)
|
0,2
|
0,17
|
0,17
|
Total DGMDP (ex-DGCID)
|
9,1
|
8,4
|
9,1
|
Total ministère des affaires
étrangères
|
64,2
|
68,2
|
69,4
|
3. TV5 Monde (ensemble de la dotation de l'Etat)
|
70
|
70,2
|
72,4
|
TOTAL
|
134,2
|
138,4
|
141,8
|
Source : Ministère des affaires
étrangères et européennes101(*).
La seule observation du financement ne saurait être
pertinente pour montrer qu'il existe une confusion entre la position de la
France et celle de la Francophonie.
Il est possible de rechercher cette confusion au niveau de
la diversité des réseaux dont bénéficie la
Francophonie du fait de la présence de certains de ses membres à
des sphères décisionnelles importantes. En effet, la Francophonie
a souvent tôt fait de s'approprier les positions de certains membres
comme la France pour envisager un quelconque poids à l'international.
Ainsi en est -il de la position de la France quant à la réforme
de la gouvernance mondiale. Si on se réfère au discours du
Président français Nicolas Sarkozy lors du sommet de Montreux en
2010, on pourrait être davantage édifié notamment lorsqu'il
affirme : « le troisième chantier que la France
souhaite faire progresser et je ne me lasserai pas de plaider en faveur de ce
chantier, c'est celui de la gouvernance mondiale, dont nous avons
déjà parlé au sommet de Québec(...)est-il normal
qu'il n'y ait aucun membre permanent du conseil de sécurité
émanant de l'Afrique ? » 102(*) . Mais pour mieux
percevoir ce qui a été avancé plus haut, il convient de
compléter avec cette affirmation de Dominique Trinquand103(*) qui avance
qu' « en effet, la Francophonie dispose d'un certain nombre
d'atouts(...) elle est représentée au Conseil de
sécurité, par un membre permanent, la France »
104(*).On peut voir
là comme un dédoublement entre France et Francophonie, qui est de
nature à créer la confusion entre les deux.
En ce qui concerne sa position en Côte d'Ivoire, la
Francophonie s'est alignée à la position française. La
question n'est pas de savoir si elle a eu raison ou pas, car à ce
niveau, au vu de l'évolution de la crise et des perceptions
imposées par les acteurs105(*), la Francophonie se trouve en difficulté avec
sa position. Ceci s'explique dans la mesure où du point de vue de
certains acteurs directs ou indirects de la crise, la décision qui a
été prise de reconnaitre les résultats tels que
proclamés par la CEI et certifiés par le RSSG ne répondait
à aucune volonté de prévenir un éventuel conflit
post électoral. La Francophonie n'a pas par elle-même et par ses
propres canaux obtenus les procès verbaux des résultats afin de
prendre « sa » propre position, elle s'est contentée
de reprendre celle de la CEI et celle de L'ONU, corroborée par la
France. De plus, elle a soutenu la position de la France quant à sa
volonté poussée de faire respecter le verdict des urnes,
même s'il faille arriver à l'extrême, c'est-à-dire
à l'utilisation de la force, car comme on le sait, la France dispose de
troupes positionnées en Cote d'Ivoire depuis au moins 2002106(*). De plus, une analyse
poussée et sérieuse doit conduire à l'évidence
suivant laquelle la Francophonie peut difficilement prendre une position qui
aille à l'encontre des intérêts directs de la France en
Côte d'Ivoire ou encore au sein de la Francophonie. Cela relève
tout simplement du réalisme, étant entendu que c'est bien la
France qui est la locomotive de la Francophonie du point de vue non seulement
de son financement, mais aussi de son poids politique indéniable par
rapport aux autres membres. Le rapport de force convoqué ici peut
permettre de constater que la balance penche plus du coté de la
France.
Paragraphe 2 : Le
manque d'autorité de la Francophonie dans la prévention du
conflit post électoral ivoirien
La Francophonie n'a pas fait preuve d'autorité en ce
qui concerne le cas ivoirien. Elle s'est mise en retrait et a agit de
manière minimale, de façon limitée. Elle ne s'est pas
suffisamment impliquée, alors même qu'elle avait des atouts non
négligeables pour le faire de façon plus impériale et de
manière à marquer sa présence. Ce qui n'a pas
été fait. D'où il est loisible de parler d'un retrait
coupable de la Francophonie en Côte d'Ivoire(A). Ce retrait coupable
permet aussi de mettre en lumière son incapacité à mener
une diplomatie préventive(B) qui aurait permis d'empêcher le
recours à un conflit armé post électoral comme il a
été malheureusement question dans ce pays.
A- Le retrait coupable de la
Francophonie en Côte d'Ivoire
Le retrait de la Francophonie est qualifié de coupable
dans la mesure où elle disposait d'atouts non négligeables qui
méritent d'être relevés. Cette Organisation disposait de
plus de crédibilité que la plupart des acteurs externes
présents sur le terrain, et notamment les plus en vue et les plus
actifs. C'est le cas de L'ONU qui, malgré la reconnaissance universelle
de son rôle premier dans la prévention des conflits, a
été accusée tout au long du processus électoral, et
même tout au long de l'évolution de la crise, d'être
partiale, ou du moins de faire le jeu de certaines grandes puissances. En
clair, étant entendu que l'ONU est tenue par un ensemble de pays
disposant du droit de veto, qui disposent de ce fait de prérogatives
notables, elle est accusée de n'être qu'un instrument au service
d'acteurs étatiques qui ne font prévaloir que leurs
intérêts. On se souvient bien du scepticisme de Laurent Gbagbo
quant à l'implication importante de l'ONU et de la communauté
internationale dans le processus électoral ivoirien. En appelant pour
des négociations directes avec ses compatriotes au Burkina Faso, il
était bien dans une logique, celle de minimiser l'impact de l'ONU dans
le processus, même si certains pensent qu'il ne s'agissait que d'une
manoeuvre de diversion de plus à mettre à son actif. Mais,
toujours est-il que finalement, on peut noter une suspicion des acteurs quant
à la capacité de neutralité de l'ONU qui a fait l'objet
d'un rejet-quoi que provoqué par le régime en place- d'une frange
de la population.
En ce qui concerne la France, elle est
considérée comme faisant partie du problème ivoirien en
ceci qu'elle est accusée par le camp du Président Gbagbo de
soutenir le candidat Ouattara, et ceci de longue date. Elle est d'ailleurs
soupçonnée d'avoir soutenu la rébellion ivoirienne. Cette
situation s'explique par le fait qu'au lendemain de la tentative de coup
d'état107(*) du
19 septembre2002, le Président ivoirien a demandé à la
France d'intervenir conformément aux accords de défense du 24
avril 1961108(*). Dans
un premier temps, les autorités françaises ont invoqué la
non ingérence dans les affaires intérieures de la Côte
d'Ivoire, ce qui a eu le mérite de jeter de graves soupçons sur
la France. Par la suite, le fait pour le Président français
Nicolas Sarkozy de s'investir personnellement dans la crise post
électorale en s'activant pour permettre au candidat Ouattara d'exister
en tant que Chef de l'Etat a laissé pantois bon nombre d'observateurs.
On peut prendre pour illustration le fait que ce pays ait accepté
d'accréditer un Ambassadeur nommé par celui là. Ce qui
lui vaudra la reconnaissance de ce dernier qui est à présent le
seul chef d'Etat à avoir rendu visite officiellement au
Président Sarkozy lors de sa visite de novembre 2012, bien que celui-ci
ait été battu aux dernières élections
présidentielles françaises ayant porté François
Hollande au pouvoir en mai 2012.
Pour ce qui est du Burkina Faso, ce pays voisin de la
Côte d'Ivoire, il est reproché à son Président de
faire la part belle aux rebelles .Ce pays a été accusé
d'abriter des bases arrières de la rébellion ivoirienne. Le fait
pour la Côte d'Ivoire d'abriter un bon nombre de ressortissants
burkinabé109(*)
sur son sol fait de ce dernier un acteur incontournable dans la crise
ivoirienne. Les ressortissants burkinabés faisant rentrer des devises au
Burkina contribuent de ce fait au développement de leur pays. Cela peut
expliquer le fait que Blaise Compaoré ait intérêt à
ce que la situation se stabilise durablement avec un homme à la
tête du pays qui ne mettrait pas cet équilibre à mal.
Jusqu'ici pourtant, la politique de
l' « ivoirité » ne peut pas être
perçue comme bénéfique pour le Burkina Faso, d'où
le fait que certains analystes estiment que ADO est le cheval de coeur du
Président du Burkina Faso qui le soutient tout logiquement. Au
lendemain du second tour, le Premier ministre Guillaume Kigbafori Soro a
démissionné et a pris fait et cause pour le candidat Ouattara.
Or, il est connu de tous que ce dernier est soutenu par le Président
burkinabé, qui est aussi le Facilitateur dans la crise. D'ailleurs,
certaines de ses déclarations peuvent prêter à confusion.
Par exemple, on se souvient bien de son fameux « je ne me
cache pas, c'est mon mentor », ou encore
« c'est un grand frère, un homme doté de
qualités exceptionnelles110(*) ».
En ce qui concerne l'Union Africaine et la CEDEAO, ces deux
Organisations ont montré leurs limites à travers les
différents courants et lignes de fracture qui existent au sein d'elles.
Il est possible de dire que l'unanimité n'est pas la chose la mieux
partagée par les différents membres de ces Organisations. On a pu
noter des visions différentes à l'issue des différentes
proclamations des résultats .Certains pays comme l'Afrique du Sud et
l'Angola étaient les chefs de file des soutiens de Laurent Gbagbo, qui
étaient même prêts à aller à l'affrontement
militaire pour que les résultats du Conseil constitutionnel soient
respectés. D'autres pays estimaient que le candidat LMP 111(*) a perdu les élections
et par conséquent doit céder son fauteuil. Il y avait une
divergence sur la manière de procéder pour aboutir à cette
volonté. Certains pays à l'instar du Nigéria
étaient partisans de l'usage de la force pour faire partir le
Président sortant. D'un autre coté, il y avait ceux qui ne
souhaitaient nullement l'usage de la force, mais plutôt la force de la
persuasion, autrement dit la négociation avec Laurent Gbagbo.
A coté de tous ces profils présentés,
qui montrent bien le peu de crédibilité de ces différents
acteurs suivant un regard interne ou même international, il n'est pas
inutile de dire que la Francophonie présentait un avantage
sérieux parmi les autres, et ceci à plus d'un égard.
D'abord du point de vue de son unicité, la Francophonie n'a fait
entendre qu'une seule voix, celle de son Secrétaire
général qui a donné sa position, engageant de ce fait
l'Organisation tout entière. Il n'existe donc pas de sons discordants au
sein de l'institution. Du point de vue de sa crédibilité, la
Francophonie jouit pourtant d'une crédibilité suffisante du fait
qu'elle a participé au processus électoral sans montrer de signe
d'appui à un candidat ou à un autre. En plus, elle n'a jamais
fait transparaitre un certain engouement à soutenir un candidat,
à en témoignent les communiqués qu'elle a produit à
la suite des deux tours de l'élection.
B- L'incapacité de la
Francophonie à mener une diplomatie préventive
La Francophonie n'a pas joué un rôle important
dans la prévention du conflit qui a eu lieu en Côte d'Ivoire,
mieux, elle a joué un rôle minimum. Ce rôle minimum peut se
vérifier aussi au niveau de sa diplomatie préventive. Pourtant la
diplomatie préventive s'inscrit dans le cadre d'une culture de la paix
en ceci qu'elle a pour finalité ultime de préserver le monde du
fléau de la guerre et des souffrances éventuelles dues à
celle-ci. Ainsi, du fameux « qui veut la paix prépare la
guerre », la culture de la paix a épousé cette
nouvelle ligne de conduite pour se confondre avec la célèbre
formule de Gaston Bouthoul, selon laquelle « qui veut la
paix connait la guerre112(*) ». C'est que, au vu du
caractère inéluctable de l'évolution de la crise en
conflit armé, il est plus que nécessaire d'opter pour une
diplomatie préventive. En général, celle ci cherche
à atteindre au moins trois objectifs
principaux. « Elle cherche d'abord à prévenir
les disputes naissant entre acteurs, ensuite, elle vise à
empêcher un différend en passe d'évoluer en conflit
ouvert ; et enfin, si un conflit éclate, elle veille à ce
qu'il s'étende le moins possible » 113(*). Ainsi, la diplomatie
préventive s'attèle à identifier les éventuelles
zones d'ombre qui méritent d'être éclairées afin
d'éviter des potentielles disputes au cours ou à l'issue du
processus électoral. Dans le cas de la Côte d'Ivoire, la
Francophonie aurait pu faire tout pour que les différentes parties
prenantes au processus électoral donnent des gages par rapport au
respect du verdict des urnes, ceci avant même que les élections
aient lieu. Ensuite, il aurait été question pour la Francophonie
d'agir dans le sens d'empêcher une évolution du différend
en conflit ouvert, c'est-à-dire ici armé. En clair, le simple
fait de proclamer qu'elle reconnait comme Président le candidat
proclamé par la CEI et certifié par le RSSG, apparait insuffisant
pour dissuader les acteurs en présence d'aller vers un affrontement
armé. Enfin, étant donné l'inéluctabilité de
l'affrontement armé, le fait que la confrontation ait
débuté le 28mars et ce soit symboliquement achevé le 11
avril 2011, soit 14 jours, on ne peut pas dire que cela soit un délai
raisonnable. Cela peut se justifier par les nombreuses populations qui ont
souffert de cet affrontement, mais aussi de l'importance des morts qu'on n'a
pas encore pu décompter jusqu'alors114(*).
La diplomatie préventive ne saurait être
comprise que sur le seul prisme normatif, prescriptif ou mieux, diplomatique,
elle a également comme modalité d'action l'interposition. En
effet, il est possible d'avoir recours à la force pour montrer la
détermination. L'élément dissuasif est donc important, car
une force opérationnelle militaire permet aussi de montrer qu'il y a
cette capacité de nuisance. C'est pourtant un domaine dans lequel la
Francophonie a encore beaucoup du chemin à faire pour pouvoir avoir un
peu plus d'autorité et de consistance dans le domaine de la
prévention des conflits post électoraux. On peut donc conclure
que dans le domaine de la diplomatie préventive, tout au mois dans le
volet diplomatique, la Francophonie n'a pas brillé par sa
présence. Même s'il faut reconnaitre qu'il ne s'agit pas
d'affaires qui sont très souvent mises sur la place publique, car ne
font pas toujours l'objet de communiqué ou d'interview, il est tout au
moins possible d'analyser le résultat. Cela permet de dire : soit
la Francophonie n'a pas agit dans ce sens, soit alors elle l'a fait, mais avec
un résultat similaire, à savoir un échec, puisque nous
avons bel et bien assisté à un conflit armé à la
suite des élections en Côte d'Ivoire.
Cette réalité peut se comprendre par le fait
que le principal porte-voix de l'OIF qui est son Secrétaire
Général ne dispose pas de suffisamment de poids pour pouvoir
agir dans ce sens. Il est certes à la tête de la Francophonie,
mais il est lié par les Chefs d'Etats et de Gouvernements qui ne veulent
visiblement pas faire de lui un homme tout puissant disposant de pouvoirs
poussés lui permettant d'agir véritablement pour faire respecter
et écouter la position de l'organisation. Il est donc nécessaire
pour la Francophonie de palier à cette insuffisante autorité de
son Secrétaire général afin qu'elle puisse jouer son
rôle de véritable acteur de prévention des conflits post
électoraux.
CONCLUSION DU CHAPITRE
Au total, force est de reconnaitre que l'action de la
Francophonie souffre d'un certain nombre de limites qui rendent son action
inefficace dans la prévention des conflits en général et
en particulier celui post électoral ivoirien. Cette
réalité peut se voir au travers de ses limites sur le plan
structurel qui mettent en lumière la flexibilité de
l'Organisation quant au suivi de tout le processus électoral ivoirien.
Cette flexibilité s'est aussi manifestée par le rôle
limité qu'a joué la Mission d'information et de contact qui met
en exergue le faible encrage dans l'évolution de la crise qui
débute depuis plus d'une décennie. Les limites structurelles se
voient aussi par le caractère subsidiaire que joue la Francophonie
à travers son rôle d'appui et de relais à d'autres acteurs
partenaires présents dans le pays. A l'inefficacité structurelle
s'ajoute une inefficacité opérationnelle qui peut se voir
à travers la quasi subordination de l'Organisation aux partenaires
présents en Côte d'Ivoire à l'instar de l'ONU et de la
France dont les positions se confondent. De plus, la Francophonie fait montre
d'un déficit d'autorité à même de lui permettre de
prévenir efficacement ce type de conflit. En effet, on a pu observer de
la part de la Francophonie un retrait dans le processus électoral
ivoirien et dans la crise en général, retrait qualifié de
coupable quand bien même elle disposait de plus d'avantages et de
crédibilité par rapport aux autres acteurs en présence.
Enfin, elle n'a pas joué un rôle véritable dans le domaine
de la diplomatie préventive de par une absence coupable dans la
diplomatie à proprement parlé. Cette situation vient du fait que
son Secrétaire Général ne dispose pas de coudées
franches pour mener à bien et surtout efficacement cette mission. Il est
cantonné dans un simple rôle d'exécutant des
décisions et volontés des Chefs d'Etats et de Gouvernements. A
cela doit s'ajouter la non disposition par elle d'une capacité
militaire opérationnelle montrant qu'elle a une capacité de
dissuasion, mais aussi de nuisance quant aux acteurs qui ne veulent pas
entendre raison. Il est donc plus que nécessaire d'envisager des
mesures à prendre pour l'amélioration du modèle de
prévention des conflits post électoraux en Francophonie, ce qui
fera l'objet du prochain moment de cette réflexion (chapitre 4).
CHAPITRE 4 : POUR
L'AMELIORATION DU MODELE DE PREVENTION DES CONFLITS POST ELECTORAUX EN
FRANCOPHONIE
L'action de la Francophonie en Côte d'Ivoire se
relève être une action limitée, qui n'a pas permis de
prévenir efficacement le conflit armé post électoral qui a
eu lieu en Côte d'Ivoire. Cette situation est le produit d'un certain
nombre de manquements tout à la fois intrinsèque à la
Francophonie, mais également extrinsèque du fait de contingences
propres à l'évolution du pays. L'action de la Francophonie dans
ce pays a montré des failles et défaillances qui ont
été présentées dans les développements
précédents et qui méritent d'être colmatées
pour éviter de retomber à l'avenir dans les mêmes travers.
Cela induit une réflexion sur les possibilités
d'amélioration de l'action de la Francophonie dans la prévention
des conflits post électoraux. Ainsi doit-on envisager dans un premier
moment de la réflexion une amélioration du point de vue
structurel (section 1). La Francophonie présente certes des
mérites dans ce sens, mais il apparait nécessaire
d'améliorer davantage cet aspect si précieux à
l'Organisation. Par la suite, il sera question d'envisager des pistes pour une
amélioration du point de vue opérationnel (section2) pour rendre
plus complète et plus efficiente son action dans le sens de la
prévention des conflits post électoraux. A travers ces deux
prismes, le voeux qui est formulé est, à terme, d'éviter
une résurgence de ce type de conflit dans l'espace francophone,
notamment en Afrique.
SECTION1 : Une
amélioration du point de vue structurel
Le volet structurel est celui dans lequel la Francophonie a
assurément le plus de valeur ajoutée, du fait que c'est à
partir de lui qu'on peut examiner son soucis d'installer une culture de la
paix, à travers l'importance qu'elle attache aux valeurs et normes
qu'elle prône dans ses textes de référence en la
matière que constituent les déclarations de Bamako et de Saint
Boniface, mais aussi la Charte de la Francophonie. Mais au vu du fiasco qu'on a
observé en Côte d'Ivoire, il n'est pas inutile de trouver quelques
manquements auxquels il est important d'apporter quelques propositions afin
d'améliorer ce volet. Ainsi, sera-t-il question d'envisager cette
amélioration à travers deux dimensions précises. La
nécessité d'une rigidité dans le suivi des processus
électoraux (paragraphe1), et la nécessité d'une
implication véritable dans la prévention (paragraphe2).
Paragraphe1 : La
nécessité d'une rigidité dans le suivi des processus
électoraux
La Francophonie a la réputation, par rapport à
d'autres acteurs, de faire preuve de flexibilité pragmatique115(*) en ce qui concerne ses
missions d'observation. Cette situation se manifeste par le caractère
non régulier de ses missions dans ses pays membres, et par l'aspect de
ses rapports finaux au sujet des dites élections. En ce qui concerne le
cas de la Côte d'Ivoire, les points sur lesquels on pourrait mettre
l'accent sont ceux qui tiennent à la participation à tout le
processus électoral( A), et à l'importance d'une plus forte
présence de l'OIF (B).
B- La participation à
tout le processus électoral
La Francophonie ne s'est pas impliquée dans tout le
processus électoral ivoirien, notamment en ce qui concerne la phase
pré électorale. Il faut d'emblée dire que, lorsqu'il est
évoqué cette phase, il s'agit bien des mesures prises dans le
sens de la préparation des élections qui se sont tenues le 31
octobre et le 28novembre 2010. La Francophonie gagnerait à s'impliquer
au plus tôt dans les pays qui doivent aller à l'élection.
Dans le cas ivoirien, la situation est encore plus urgente, puisque ce pays
traverse une zone de turbulence marquée par d'incessants troubles qui
rendent la paix sinon impossible, du moins improbable. Il est pourtant
indéniable que la participation à la phase pré
électorale est un gage fiable de l'appropriation de la part de
l'Organisation de la situation qui prévaut en Côte d'Ivoire, et
pourrait à coup sûr permettre une meilleure maitrise des
évènements pouvant subvenir par la suite. Dans les cas comme
celui de la Côte d'Ivoire, où l'élection est censée
mettre un terme à plus d'une décennie de blocage politique, la
Francophonie devrait tout faire pour inciter tous les acteurs politiques
ivoiriens à respecter les règles du jeu qu'ils ont convenu lors
des différents Accords de paix d'une part, mais aussi respecter les
textes de la Francophonie auxquels ils ont librement souscrits .Une action
de ce type serait un bon point dans la mesure où cela marquerait la
présence de cette institution et lui permettrait d'avoir plus d'emprise
sur la suite des évènements. Il est clair que, le fait pour la
Francophonie de s'impliquer en amont et longtemps avant les élections
pour des situations similaires à celle de la Côte d'Ivoire, peut
permettre d'avoir une certaine influence sur les acteurs, au lieu de ne le
faire que pendant le processus où les acteurs ont déjà
développé des tactiques pour soit se maintenir au pouvoir, soit
tout faire pour y accéder
En ce qui concerne la phase électorale proprement dite,
il faut reconnaitre que la Francophonie ne fait pas assez en ce qui concerne
son déploiement sur le terrain. Or, dans le cas ivoirien, avec le climat
général qui prévalait dans le pays avant l'élection
il aurait été utile pour l'organisation de se déployer
véritablement sur le terrain. La Francophonie devrait réellement
couvrir les opérations électorales dans ses Etats membres et non
faire du saupoudrage qui ne grandit pas l'organisation. L'objectif
étant de pouvoir couvrir plusieurs régions, notamment les plus
retirées de la capitale d'où les fraudes et les
réclamations proviennent le plus souvent. Ceci est d'autant plus vrai
que dans le cas ivoirien, les partisans du camp Gbagbo ont
allégué que d'importantes fraudes ont été
enregistrées dans les zones contrôlées par l'autre camp qui
sont dans des zones rurales, ou du moins dans les villes moins peuplées.
La Francophonie dans ce cas ne pouvait que se référer aux dires
des différents camps et à ceux des autres missions sur le
terrain. Dans ce sens, la Francophonie ne peut prendre objectivement position
puisqu'elle ne se trouvait pas dans les zones concernées.
Pour ce qui est de la phase post électorale, il faut
dire que l'impact ici dépend des marques qui sont placées
dès la phase pré électorale et dans la phase
électorale proprement dite. La Francophonie devrait avoir un peu
plus de poids dans cette phase, car, c'est la phase la plus délicate
puisque c'est le moment où les acteurs montrent leur fair -play ou pas.
Elle doit pouvoir être vigilante pour contrôler le ton des acteurs.
C'est le moment pendant lequel l'Organisation doit faire montre de beaucoup de
tact en ce qui concerne le dialogue entre les parties, mais c'est
également le moment où elle doit se montrer ferme.
B-L'importance d'une plus forte
présence de la Francophonie
La forte présence dont il est fait allusion ici renvoie
aux différentes missions dont la Francophonie peut disposer et qui
doivent être mobilisées dans le cas des élections. En
effet, la Francophonie devrait pouvoir combiner les différents
éléments à sa disposition pour être plus apte
à prévenir les conflits post électoraux. En clair, la
Francophonie devrait associer les missions exploratoires, les missions
d'information et les missions d'observation afin d'optimiser son rendement
effectif sur le terrain et aboutir à terme à une domestication
des conflits post électoraux. L'importance est d'autant plus
marquée par le fait qu'il s'agissait d'un pays particulier, un pays
fragile. Chacune de ces différentes missions est d'une importance
capitale pour un rôle plus actif et plus efficient de la Francophonie.
Des missions exploratoires envoyées à l'avance à la
manière des missions avancées dans le jargon militaire sont
importantes dans la mesure où, elles permettent de prendre la
température du pays, et avec cette prise du pouls, des mesures
adéquates peuvent être entreprises. S'agissant des missions
d'observation, elles ont ceci d'utile qu'elles permettent de couvrir le
territoire du pays concerné et d'être au coeur de l'action,
nécessaire pour une meilleure appropriation des réalités
locales. Ces missions donneraient un peu plus d'éléments à
la Francophonie pour mieux identifier les signaux à même de
compromettre la sérénité à l'issue de la
proclamation des résultats. Il est important au total que la
Francophonie s'implique dans tout le processus électoral par l'envoi de
missions exploratoire, d'assistance, d'observation et d'information, missions
qui doivent être composées de personnel en quantité
suffisante, mais surtout en qualité appréciable.
Cela nécessite pour ce faire des moyens. En effet, la
Francophonie doit se donner les moyens pour pouvoir relever ce défi.
L'envoie de ces missions à l'avance et sur l'ensemble du territoire
nécessite des moyens financiers que l'organisation doit assumer. Il
importe donc que la Francophonie mette des moyens pour pouvoir avoir de
l'influence nécessaire pour prévenir tout éventuel conflit
lié aux élections. La Francophonie doit être à la
hauteur de ses ambitions et pour cela les différents Etats et
Gouvernements membres se doivent de doter l'Organisation en moyens
conséquents. Car, il ne sert à rien de proclamer du bout des
lèvres, ou encore dans les textes une volonté qui ne se
concrétise pas sur le terrain par des actions concrètes. La
Francophonie se doit d'agir dans ce sens, et ceci avec
célérité dans la mesure où elle a
décidé d'être plus politique et utile pour les peuples.
Paragraphe2 : Une
implication véritable dans la prévention
La Francophonie a choisi elle-même de s'occuper de la
prévention et de la gestion des conflits. Pour ce qui est des conflits
postélectoraux, elle devrait s'impliquer véritablement dans leur
prévention. Cette implication véritable peut passer par la
nécessité de privilégier l'observation
évaluation(A) mais également la nécessité d'une
promotion dans les faits de la démocratie(B).
A- La nécessité
de privilégier l'observation évaluation
Les missions d'observation de la Francophonie ont
généralement cette particularité, comme d'autres de se
terminer par la publication de rapports de fin de missions. Dans le cas de la
Côte d'Ivoire, la mission d'information et de contact
dépêchée a publié son rapport au lendemain de
l'élection présidentielle. Dans ce rapport, la part belle est
faite à la présentation des actions des différents acteurs
sur le terrain ainsi que sur les conditions générales qui ont
prévalu avant elles. La partie réservée aux
recommandations ne représente pas une grande proportion dans le rapport.
Cela peut faire penser comme l'affirme Monney Mouadjo que la Francophonie
privilégie l'observation témoignage à l'observation
évaluation116(*).Mais que non ! La Francophonie, dans le cas
ivoirien, a effectivement agit dans le sens d'une observation
évaluation. Car la différence qui peut être faite avec
l'observation témoignage est que dans ce cas, le rapport a tendance
à se focaliser uniquement sur les aspects de droit en vigueur dans le
pays concerné sans s'employer à tirer des implications politiques
. Pourtant, dans le cas de l'observation évaluation, il est fait un
effort dans le sens de la critique quant à la pertinence des actions
menées pour la réussite du scrutin d'une part, et de
l'aboutissement du désir de paix durable à l'issue des
élections d'autre part. Il est important pour la Francophonie de
s'orienter résolument et sérieusement vers l'observation
évaluation. Cela permet de prévenir à la longue des
éventuels conflits non seulement dans le pays concerné, mais
aussi dans d'autres pays, puisque l'élection apparait de nos jours comme
le mode de dévolution du pouvoir le plus utilisé. En utilisant
strictement cette méthode dans le cas ivoirien, il est évident
de tirer des leçons pertinentes à même de faire sortir ce
pays de l'impasse, et par ricochet de prévenir des situations similaires
dans d'autres pays.
B- La nécessité
d'une promotion effective de la démocratie
Pour l'Organisation internationale de la Francophonie, la
promotion de la démocratie est un mode sérieux et pertinent de
gestion qui a pour avantage et corollaire d'aider à la domestication de
la violence. La démocratie est donc un modèle, un idéal
que la Francophonie promeut à travers ses textes de
référence. Au nombre de ces textes, figure la Déclaration
de Bamako de 2000.On peut voir par ce texte une volonté affichée
de l'organisation d'atteindre cet objectif. Pourtant, point n'est besoin de
rappeler que dans son application on est bien loin du compte. Dans nombre de
pays francophones, la vie politique est loin d'être apaisée.
L'alternance n'est pas la chose la mieux partagée et l'état de
droit semble concerner d'autres. C'est pourquoi, il est important pour la
Francophonie de s'investir véritablement dans la défense de la
démocratie sans tenir compte des intérêts de quelques pays.
Ceci est d'autant plus important que lorsqu'il y a rupture de
démocratie, il est facile de retomber dans les travers du non droit, ou
plutôt au droit du plus fort qui n'est pas différent de la jungle.
En effet, la Francophonie devrait veiller à ce que cet esprit soit
présent au sein de ses Etats et gouvernements membres. La Francophonie
devrait faire des réformes institutionnelles pouvant éviter le
recours aux conflits post électoraux. Ces réformes sont
nécessaires afin d'encourager l'alternance au pouvoir et refuser les
modifications constitutionnelles visant à faire sauter le verrou que
constitue la limitation des mandats au sommet de l'Etat. Pour Owona Nguini, il
s'agit là de techniques et de tactiques propres
au « gouvernement perpétuel ». Pour
lui, la crise ivoirienne est la résultante du long règne du
premier Président de la république ivoirienne, Houphouët
Boigny, soit trente trois ans. L'auteur continue en précisant que cette
longévité « est précisément
à l'origine des problèmes de stabilité que connait la Cote
d'Ivoire en raison d'une gestion des affaires par le Président
Houphouët dont le moteur était basé sur une conception,
après lui le déluge . Celui-ci a bloqué la mise
en place d'un jeu institutionnel consolidé autour de la succession qui
soit un jeu basé sur la consistance temporelle, livrant ainsi son pays
aux aléas du déluge des luttes déréglées de
succession »117(*) . La Francophonie se doit donc de veiller
à l'application de la démocratie qui a comme
élément important l'alternance. Il est impérieux pour elle
de s'investir véritablement dans ce sens car cela constitue bien une
source de conflit du fait que la non alternance crée des frustrations
inévitables qui finissent par éclater peu importe le terme. De
plus, la Francophonie devrait s'occuper de l'effectivité de
l'état de droit affiché dans la plupart des pays francophones.
En effet, l'état de droit suppose la soumission de tous et de toutes les
institutions au droit en vigueur dans un espace bien précis. Pourtant,
cette soumission n'est pas toujours évidente. La Francophonie doit tout
faire pour faire respecter ce principe dans ses différents Etats et
gouvernements membres, car c'est un gage de stabilité et de
prévention.
SECTION 2 : Une
amélioration du point de vue opérationnel
Il a été décrié dans les
développements précédents, le fait que la Francophonie
soit pratiquement subordonnée aux actions des autres partenaires tels
que la France et l'ONU. Ce qui a rendu son action limitée et minimale,
compte tenu de son manque d'autorité. Pour beaucoup, le volet
opérationnel reste le ventre mou de la Francophonie. Elle-même le
reconnait volontiers dans son programme 2010-2013 où il lui est
demandé de jouer « un rôle plus actif en
matière de prévention opérationnelle tout en continuant
son action en matière de prévention
structurelle 118(*)».Ainsi, pour la rendre un peu plus
crédible et un peu plus autoritaire dans le domaine de la
prévention opérationnelle, un certain nombre de mesures devraient
être prises. Celles-ci vont d'un aménagement substantiel de la
Francophonie (paragraphe1), nécessaire pour une plus grande
autorité de sa part dans le domaine de la prévention
(paragraphe2).
Paragraphe1 :
L'aménagement substantiel de la Francophonie
Par aménagement substantiel ici, il est question de
traiter des éléments qui sont nécessaires et
incontournables pour améliorer l'action opérationnelle de la
Francophonie. Puisque l'Organisation n'a pas pour vocation première la
prévention des conflits, elle s'appuie sur d'autres acteurs pour le
faire. Mais au vu de son potentiel, il est nécessaire qu'elle soit dans
une logique de collaboration avec d'autres acteurs(A). D'un autre coté
il est important qu'elle atteigne une plus grande autonomie (B) lui permettant
de se départir de la confusion qui est entretenue avec la France.
A- La nécessaire
collaboration de la Francophonie avec ses partenaires
Lors de l'élection qui s'est tenue en Côte
d'Ivoire, la Francophonie a joué un rôle limité du fait de
sa faible représentation sur le terrain. Elle s'est contentée de
se rapprocher des partenaires déjà présents avec lesquels
elle a travaillé. Seulement, on ne peut pas dire qu'il s'agissait d'un
véritable partenariat, d'une véritable collaboration. D'aucuns
ont estimé qu'on a assisté à une subordination de la
Francophonie vis-à-vis des acteurs comme l'ONU, ou encore la France. Il
est donc important pour la Francophonie de traiter avec ceux-ci en partenaire,
mieux en collaborateur. Le souci ici est de faire de la Francophonie, un acteur
qui s'impose par ses idées et actions qui se veulent novatrices et
propres à permettre d'instaurer une paix durable. Dans ce sens, bien que
l'ONU soit le principal acteur chargé de la préservation de la
planète du fléau de la guerre, la Francophonie devrait être
un peu plus incisive. Elle devrait le faire d'autant plus qu'il s'agit d'un de
ses membres. Cela permettrait certainement d'arriver à terme à
réduire les conflits de ce type. Durant l'élection, la
délégation que conduisait Gérard Latortue a
rencontré plusieurs missions présentes en Côte d'Ivoire.
Parmi celles-ci se trouvait bien la mission de l'ONUCI. Le RSSG a
explicité sa méthodologie en ce qui concerne la certification des
résultats et sa couverture de l'élection. La
délégation de la Francophonie n'a émis aucune
réserve quant à cette méthodologie et a d'ailleurs
appelé de tous ses voeux à son respect et son application
après l'ambiance qui a prévalu autour des différentes
publications des résultats. La Francophonie a agit de la sorte du fait
de la non disposition par elle d'éléments propres pouvant lui
permettre d'avoir sa propre vérité des faits. Il est difficile
pour elle d'affirmer qui de Alassane Ouattara ou de Laurent Gbagbo a vraiment
gagné les élections. Elle ne peut le faire que sur la base des
autres acteurs en présence en espérant que ceux-ci soient du bon
coté de la vérité. L'appel est donc lancé pour que
cette Organisation s'implique véritablement dans le souci de ne plus
subir ou encaisser les positions des autres. Elle devrait pouvoir traiter avec
eux dans le souci de la complémentarité partagée. En
clair, il lui est demandé de tout mettre en oeuvre pour qu'elle soit un
véritable partenaire capable d'apporter sa pierre à
l'édifice pour prévenir efficacement les conflits post
électoraux.
B- La nécessité
d'un amenuisement de la prépondérance de la France
L'un des reproches le plus souvent adressé à la
Francophonie, c'est sa trop grande proximité et sa très grande
dépendance vis-à-vis de la France. En effet, la France est le
pays qui porte résolument à bout de bras la Francophonie .La
question qui se pose alors est celle du financement de l'Organisation. La plus
grande part du budget de la Francophonie est assumé par ce pays. En
20008, environ 50% du budget était financé par l'hexagone, le
reste étant à la charge des autres membres. Ce qui les met
d'office hors jeu quand il s'agit de la détermination de la prise des
décisions. Ce qui est tout simplement logique puisque très
souvent, c'est celui qui paye qui décide. Ainsi est- il difficile pour
l'Organisation de prendre des mesures qui vont à l'encontre des
intérêts directs de ce pays en Côte d'Ivoire, mais aussi ses
intérêts au sein même de la Francophonie. La France a
été taxée de soutenir un candidat qu'elle voulait à
tout prix et certainement à tous les prix installer au pouvoir. Pour
beaucoup d'observateurs, cette prise de position de la France en Côte
d'Ivoire ne pouvait que rejoindre la position du Secrétaire
général Abdou Diouf qui lui aussi, au nom de l'Organisation, a
pris fait et cause pour Alassane Ouattara, donné vainqueur par la CEI et
certifié par le RSSG. Pour faire cesser cette confusion entretenue, il
importe que les autres membres apportent leur participation financière
au fonctionnement de la Francophonie. Certains pays pourraient même
augmenter leur participation du fait de leur bonne santé
économique à l'instar de la Guinée Equatoriale ou
encore du Gabon. Il est plus que nécessaire de réduire la
prépondérance de la France qui nuit à certains
égards à la crédibilité de la Francophonie quant
à son non assujettissement. Car, comme on le sait, la confiance
accordée à un acteur est primordiale quant à la pertinence
et à l'efficacité de ses actions sur le terrain.
Paragraphe 2 : La
nécessité d'une plus grande autorité de la Francophonie
dans le
domaine de la prévention des conflits post
électoraux
Dans la pratique de l'élection ivoirienne, la
Francophonie n'a pas fait preuve d'une grande autorité. Elle s'est
contentée de jouer un rôle minimal qui n'était que logique
puisqu'elle n'avait pas une prise sur les évènements. Mais pour
améliorer ce manquement, elle pourrait procéder au renforcement
de l'alerte précoce(A) d'une part, ce qui permet de voir
l'utilité d'une composante armée en Francophonie(B) d'autre
part.
A- Le renforcement de l'alerte
précoce
L'alerte précoce est un mécanisme de
prévention basé sur la connaissance des risques. Son objectif est
de pouvoir disposer de données fiables qui signalent la
nécessité d'une intervention préventive. Il est question
d'analyser patiemment les signes qui peuvent entrainer à un moment ou
à un autre une rupture de la paix. C'est une pratique très
importante dans la prévention des conflits post électoraux. Dans
un cas comme celui de la Côte d'Ivoire, différents signaux
conflictogènes auraient pu être décelés et pris en
compte dans le sens de la domestication de la violence. Mais il faut
reconnaitre que très souvent, les facteurs de crise s'entremêlent,
du fait de la complexité de celles-ci, ce qui rend difficile le
décèlement des indicateurs directs de l'imminence d'un conflit.
Toutefois, étant donné que l'objectif poursuivi est la
prévention des conflits, des mesures devraient être prises afin de
se perfectionner véritablement dans ce sens en francophonie. Car bien
que figurant dans certains discours et certains rapports francophones, cette
modalité de prévention n'est pas toujours prise en compte. A en
témoignent les situations même actuelles où la gestion du
pouvoir est faite avec exclusion, brutalité, manque d'alternance, qui
sont souvent des éléments qui provoquent la colère et
l'affrontement de la part des uns et des autres. On peut très bien
parler aussi des situations où l'exercice du pouvoir dure dans le
temps de manière indéterminée, voire même de
façon atemporelle, toutes choses qui sont de nature à plonger les
sociétés à terme dans des cycles de violence ou de
contestations perpétuelles comme on peut le voir avec l'Egypte. En
clair, prévenir un conflit « suppose une certaine prise
sur les évènements, une capacité à projeter
l'avenir, une capacité à recueillir et analyser les signaux
crisogènes, à les exploiter et à les
contenir »119(*) . Pour le moment la Francophonie, reconnaissant
son retard, oeuvre plus dans le renforcement des capacités de ses
partenaires que sont notamment l'ONU, l'UA, l'UE, la Ligue arabe, des
instituts de recherche. Ces partenariats doivent être poussés afin
d'aboutir à une synergie d'actions utile pour une éventuelle
coopération opérationnelle dans les situations de crise dans les
pays francophones.
B -L'utilité d'une
composante armée en Francophonie
Le domaine dans lequel la Francophonie a plus de
visibilité et de plus-value, c'est bien sur le plan structurel. Elle
promeut une prévention durable des conflits post électoraux par
l'application de la démocratie dans ses Etats membres. Son ventre mou
étant bien entendu le volet opérationnel. Pourtant, si la
Francophonie veut être plus efficace dans le domaine, il lui sera
très difficile d'atteindre son objectif avec les seuls arguments dont
elle dispose aujourd'hui. Il serait bien naïf de croire que seule la force
des textes et déclarations peuvent suffire à amener les acteurs
à se conformer à une certaine éthique ou une certaine
logique. La Francophonie, avec son désir d'installer une culture de
paix, a besoin d'instruments opérationnels et d'une prise de conscience
des réalités stratégiques et des différents
rapports de force en présence. Très souvent la seule discussion
ou médiation n'est pas suffisante pour pouvoir faire entendre raison
à une partie réfractaire. Il est donc important que la
Francophonie se munisse de capacités opérationnelles,
c'est-à-dire des forces militaires qui sont des forces de dissuasion. La
dissuasion à laquelle il est fait allusion ici n'est pas que nominale,
au contraire, elle suppose d'abord une capacité de nuisance. Cette
capacité doit s'inscrire dans le cadre de la puissance qui peut avoir
comme acception la capacité qu'a un acteur de faire faire à un
autre acteur ce dont celui-ci n'aurait pas fait de son propre chef. C'est donc
un argument d'autorité à même d'apporter un peu plus de
poids à la Francophonie. C'est sans doute un élément
capital qui détermine l'autorité de l'ONU avec ses fameux
« casques bleus »qui sont en mesure de s'interposer et
d'imposer une conduite aux différents acteurs en conflit à un
moment donné. Or, pour l'instant en Francophonie, ce ne sont que des
textes et des paroles qui sont opposés aux différents
protagonistes en attendant une éventuelle intervention d'une autre
entité à l'instar de l'ONU, ou encore la France comme cela a
été le cas en Côte d'Ivoire récemment. Mais il faut
rester lucide ! Pour l'instant, la Francophonie ne dispose pas encore de
suffisamment de moyens à même de lui permettre de se doter en
équipements militaires conséquents et en troupes suffisantes, car
tout ceci requiert des financements. Or, lorsqu'on observe le tableau
d'évolution du budget de la Francophonie, il est difficile de le
concilier avec les exigences d'une force armée.
Tableau2 : Evolution du budget de 1979 à
2009(en millions d'euros courants)120(*)
A défaut de pouvoir disposer d'une composante
armée en Francophonie, une alternative serait d'encourager les pays
francophones à participer aux Opérations de maintien de la paix
(OMP). En effet, suivant le nombre de membres dont dispose cette
Organisation(77), il devrait avoir le plus possible de troupes francophones
dans les OMP. Mais tel n'est pas toujours le cas. C'est pourquoi, il faudrait
inciter les membres à mettre leurs troupes à la disposition des
OMP pour assurer la stabilité et la paix dans les pays francophones.
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
Au terme des développements qui ont été
faits dans cette partie, il est possible d'en faire une économie .Il
s'agit d'abord de commencer par rappeler que l'objectif était
d'évaluer le modèle de prévention des conflits post
électoraux en Francophonie. Il a été question de montrer
les limites de son action dans ce pays dans un premier moment. Ces limites
sont de natures structurelle et opérationnelle. En ce qui concerne le
volet structurel, la Francophonie a fait preuve d'une flexibilité quant
au suivi du processus électoral. Cette flexibilité tient au fait
qu'elle n'a pas participé à tout le processus et que la mission
qu'elle a déployée avait un rôle limité,
témoignant de l'encrage insuffisant qu'elle a eu dans l'évolution
de la crise. La Francophonie a aussi tenu dans son rôle d'acteur
subsidiaire puisqu'elle a joué un rôle d'appui et de relais tout
au long du processus. Du point de vue opérationnel, elle a fait l'objet
d'une subordination vis-à-vis d'autres acteurs en place, ce qui permet
de voir qu'elle souffre d'un manque d'autorité nécessaire pour
prévenir le conflit ivoirien. Dans un deuxième moment de cette
partie, il a été question de présenter des
aménagements possibles afin d'améliorer l'action de
prévention des conflits post électoraux en Francophonie. Ainsi
a-t-il été question de présenter des aménagements
possibles sur les plans structurel et opérationnel. Pour ce qui est du
plan structurel, il a été proposé à la Francophonie
une rigidité dans le suivi des processus électoraux qui passe par
la participation à tout le processus électoral d'une part, et de
l'importance d'une plus forte présence de l'OIF par ses
différentes missions. En ce qui concerne les possibilités
d'amélioration sur le plan opérationnel, il a été
question de parler d'une nécessaire collaboration avec les autres
acteurs en présence, mais il a aussi été plaidé une
plus grande autonomie afin de se départir de la confusion entretenue
entre elle et certains de ses membres. Enfin, il s'est agit d'appeler à
une plus grande autorité de l'Organisation dans le domaine de la
prévention des conflits post électoraux par le renforcement de la
question de l'alerte précoce et de l'utilité d'une composante
armée en Francophonie.
CONCLUSION GENERALE
Au total, il était question de répondre
à la question de savoir quel rôle a joué la Francophonie
pour prévenir le conflit post électoral qui a eu lieu en
Côte d'Ivoire à la suite des élections
présidentielles des 31octobre et du 28 novembre 2010. Notre
hypothèse de départ était que la Francophonie a
joué un rôle, mais que ce rôle était minimal pour
prévenir ce conflit post électoral. Tout au long des
développements, il s'est agit tout d'abord de montrer les actions
préventives de la Francophonie en Côte d'Ivoire. Ces actions ont
été qualifiées de timides en général. La
raison c'est que, durant la période avant l'élection,
c'est-à dire à partir au moins de 2002, la Francophonie ne s'est
pas beaucoup fait sentir puisqu'elle n'a fait que participer aux travaux ayant
débouché sur l'Accord d'Accra II et en partie sur ceux
s'étant achevé avec la conclusion de l'Accord de Linas Marcoussis
de 2003. Ce qui ne peut lui permettre d'avoir une prise suffisante sur les
évènements. Or, cette élection comportait des enjeux
importants qui déterminaient l'issue de cette élection. Parmi ces
enjeux, figurent l'enjeu de participation en référence à
la participation de tous les acteurs politiques, mais aussi des
électeurs ; et l'enjeu de contrôle, faisant allusion au
contrôle des institutions clé par les acteurs politiques, mais
également contrôle du fichier électoral. Cette
timidité au niveau de ses actions avant la période
électorale s'est aussi fait voir pendant le processus électoral
lui-même. En effet, la Francophonie s'est fait ressentir uniquement
à travers sa Mission d'information et de contacts que dirigeait
Gérard Latortue, ancien Premier ministre d'Haïti. La Mission a fait
des rencontres et a effectué des discussions avec les autres acteurs en
présence sur le terrain à la fois pour leur expliquer le but de
leur présence en Côte d'Ivoire, mais également pour savoir
ce que ceux-ci entreprennent dans le pays dans le cadre de leur
présence. Le but de la Mission était de prendre la mesure des
efforts déployés par les acteurs politiques ivoiriens pour
aboutir à des élections libres, fiables, et transparentes. C'est
certainement ce qui explique la faible représentativité
numérique des membres qui forment la délégation. La
Mission a rencontré les acteurs politiques et administratifs ivoiriens
ainsi que les autres partenaires extérieurs. Elle a également
couvert quelques bureaux de vote dans la capitale ivoirienne et a pris position
au moment des proclamations des résultats pour le candidat Ouattara qui
a été déclaré vainqueur par la CEI et
certifié par le RSSG. La suite, on la connait, la Côte d'Ivoire a
sombré dans un conflit armé postélectoral résultant
du fait que les deux candidats au second tour revendiquaient chacun la
victoire. A ce niveau, il est clair que le fait qu'on soit arrivé
à cette situation malheureuse démontre à loisir que la
Francophonie a échoué dans sa volonté de prévenir
le conflit post électoral dans ce pays d'Afrique. Les limites qu'on peut
déceler dans l'action préventive de la Francophonie sont de deux
ordres. D'un coté, des limites sur un plan structurel qui tournent
autour de la flexibilité pragmatique de la Francophonie en termes de
gestion électorale, mais aussi de ce que la Francophonie ne soit pas un
acteur principal, mais plutôt subsidiaire de prévention des
conflits. D'un autre coté, on a pu noter des limites sur le plan
opérationnel qui tiennent au fait que la Francophonie a joué plus
un rôle de relais, d'accompagnement des actions d'autres acteurs
présents sur le terrain, ce qui l'a placée dans une position de
second plan. De plus, elle a fait montre d'un retrait coupable alors qu'elle
disposait d'avantages comparatifs par rapport à d'autres acteurs en
présence dans le processus électoral, ce qui a permis
d'étaler son manque d'autorité suffisante pour pouvoir parvenir
à prévenir le conflit postélectoral qui est survenu par la
suite. Il lui a été proposé quelques solutions afin
d'améliorer à l'avenir son modèle de prévention des
conflits post électoraux afin que dans son espace et notamment celui
africain, ce type de situation ne se produise plus. Les propositions qui ont
été faites tournent autour du renforcement du volet structurel de
son action préventive qui semble être le point sur lequel elle met
le plus d'emphase. Puisque la Francophonie tient à la
démocratie, au respect de l'état de droit, ainsi qu'à la
prévention des conflits comme le témoignent ses textes de
référence que sont la Charte de 2005, la Déclaration de
Bamako et celle de Saint Boniface, il serait important qu'elle améliore
ce domaine. Ceci passe par une rigidité dans le suivi du processus
électoral. En ce qui concerne le domaine opérationnel, il faut
dire que la Francophonie gagnerait à collaborer avec les autres acteurs
plutôt que de se soumettre, ce qui a le mérite de pouvoir lui
conférer plus de moyens et plus d'autonomie dans l'appréciation
et la couverture des évènements durant les processus
électoraux. De plus, elle gagnerait à avoir plus
d'autorité, ce qui passe par un suivi des situations et donc au
renforcement de l'alerte précoce dans ses Etats membres afin de pouvoir
déterminer les éventuels signaux crisogènes. Enfin, il a
été proposé dans le même sens de l'autorité,
d'avoir une composante militaire qui constituerait un élément de
dissuasion montrant sa capacité de nuisance, ou du moins en attendant
d'avoir cette composante dans un avenir médiat, encourager les Etats
francophones à participer aux OMP. Tous ces moments de la
réflexion qui a été menée nous permettent d'arriver
à la réponse à la question qui a été
posée au départ .Il est clair que la Francophonie a joué
un rôle minimal pour prévenir le conflit post électoral qui
a eu lieu en Côte d'Ivoire. D'où notre hypothèse de
départ est confirmée. Ce qui peut donc être attendu c'est
que la Francophonie réajuste son dispositif de prévention des
conflits post électoraux afin que pareille situation ne soit plus
à l'ordre du jour dans son espace en Afrique en général,
et en Côte d'Ivoire en particulier. Cela ne serait que
mérité car c'est de l'Afrique que naît la Francophonie, et
en retour de son action historique, il est logique qu'elle ait une attente
particulière en cette organisation pour ce qui est de son
développement, notamment en ce qui concerne un rôle dans
l'élimination ou du moins à la réduction
conséquente des conflits postélectoraux sur le continent.
Car « l'amitié ne se nourrit pas que de souvenirs,
fussent-ils les meilleurs possibles, nous enseigne un proverbe africain. Elle
exige aussi cette pensée forte de Hegel qui relève : la
principale catégorie historique ce n'est pas le souvenir, le
passé, mais l'attente, la promesse, l'avenir »121(*) .
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Kenya, mémoire de master professionnel en Relations Internationales,
option Diplomatie, IRIC, 2010
§ OIF, Rapport de la Mission d'information et de
contacts déployée en Côte d'Ivoire.
§ OIF, Rapport du Secrétaire
général 2004-2006.
§ OIF, Rapport du Secrétaire
général 2006-2008.
§ OIF, Rapport du Secrétaire
général 2010-2012.
§ OIF, Programme 2010-2013.
§ Rapports d'International crisis group :
§ Côte d'Ivoire : faut-il croire à
l'accord de Ouagadougou ? Rapport Afrique no158 du O5mai 2010
§ Côte d'Ivoire : garantir un processus
électoral crédible, Rapport Afrique No139, 22avril 2008
§ Côte d'Ivoire : les impératifs de
sortie de crise, Briefing Afrique No62, 2 juillet2009
§ Côte d'Ivoire : sécuriser le
processus électoral, Rapport Afrique No158, 5 mai 2010
Ø Articles
§ ATANGANA AMOUGOU
(Jean-Louis), « Francophonie et résolution des conflits
en Afrique », Revue internationale des mondes francophones, No 2
Printemps-été, 2010.
§ Badjo DJEKOURI -DAGBO (J-H), «La gestion des
conflits liés aux élections (L'expérience de la Côte
d'Ivoire) », conférence du
réseau africain de droit
constitutionnel
§ DOBRY Michel, « mobilisations
multisectorielles et dynamiques des crises politiques : un point de vue
heuristique » Revue française de sociologie, 1983
§ LECOURS André, « L'approche néo
institutionnelle en sciences politiques : unité ou
diversité ? » Université de Concordia, Politique
et sociétés, vol21, No 03, 2002
§ MAÏLA Joseph, « la notion de crise en
Francophonie : entre dispositif normatif et traitement
politique », Revue internationale des mondes francophones,
No.2 , Printemps-été2010
§ Massart- Pierard Françoise
« La Francophonie, un nouvel intervenant sur la scène
internationale » revue internationale de politique comparée
vol 14 numéro1
§ Olinga(Alain Didier) Temps de crise,
crise du temps ? De la variable temporelle dans l'analyse des
conflits en Afrique en Afrique centrale, « Enjeux »
no19 avril-juin 2004 ,5è année, Yaoundé, FPAE
§ Owona Nguini (Mathias Eric), « le
gouvernement perpétuel en Afrique Centrale : le temps politique
présidentialiste entre autoritarisme et parlementarisme dans la
CEMAC », Enjeux, no 19, avril-juin 2004
§ RAMEL Frédéric et PHAN Trang,
« La Francophonie au prisme des théories : états
des lieux et perspectives »dans GUILLOU Michel et PHAN THI HOAI TRANG
(dir), Actes des sixièmes entretiens de la Francophonie. La Francophonie
sous l'angle des théories des relations internationales, Iframond,
Université Jean Moulin-Lyon3, Lyon, 2007
§ SADA Hugo, « Un dispositif en faveur de
la gestion et de la prévention des conflits en plein
développement », Revue internationale et stratégique,
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§ Trinquand (Dominique), « La
contribution de la Francophonie aux opérations de maintien de la
paix », La Revue internationale des mondes francophones,
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Ø Webographie
§ BOUTROS-GHALI B., « Boutros Ghali »,
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consulté le 10octobre 2012.
§ Boutros Ghali(B), Agenda pour la paix, 17 juin 1992,
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consulté le 14 novembre2012.
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de la Francophonie multilatérale »disponible sur le lien
www.senat.fr/rap/a08-100-2/a08-100-212.htlmL.
Consulté le 29 novembre 2012.
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Francophonie, Ouagadougou, 26 -27 novembre2004, disponible sur
http://www.OIF.org
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conflits, alerte précoce, Paris, juin2011, disponible sur
http://www.irenees.net
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§ Mearsheimer(John), « The false promise of
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Bruxelles disponible sur
http://www.grip.org
consulté le 12 octobre 2012.
Ø DICTIONNAIRES
§ Dictionnaire Larousse de poche2007, édition
mise à jour.
§ Pascal BONIFACE (dir), Dictionnaire des relations
internationales, Paris, Hatier, 1996
§ SMOUTS Marie-Claude, BATTISTELA Dario, VENNESSON
Pascal, Dictionnaire des relations internationales, 2è édition,
2006.
§ TEXTES DE REFERENCES
§ Charte de la Francophonie de 2005
§ Déclaration de Bamako de 2000
§ Déclaration de Saint-Boniface de 2006
§ Cadre stratégique décennal 2004
ANNEXES
ANNEXE 1 : LES ACCORDS D'ACCRA
II
A l'invitation de Son Excellence Monsieur John Agyekum KUFUOR,
Président de la république du Ghana, Président en exercice
de la CEDEAO, une Table Ronde des forces politiques ivoiriennes signataires de
l'Accord de Linas- Marcoussis, s'est réunie à Accra les 6 et 7
mars 2003. Ont participé à cette Table Ronde les formations
suivantes : FPI, MFA, MJP, MPCI, MPIGO, PDCI-RDA, PIT, RDR, UDCY, UDPCI. Et
comme facilitateurs, le Président du Comité de Suivi de l'Accord
de Marcoussis, Professeur Albert TEVOEDJRE, le Secrétaire
Exécutif de la CEDEAO, Docteur Mohamed Ibn CHAMBAS, le
Représentant Spécial du Secrétaire Exécutif de la
CEDEAO, Monsieur Raph UWECHUE - FCHIIE, le Représentant Spécial
de l'organisation Internationale de la Francophonie, Monsieur Lansana KOUVATE,
le Représentant Spécial de l'Union Africaine, Monsieur
André SALIFOU.
La réunion s'est tenue sous la haute Présidence
du Président KUFUOR, assisté de Son Excellence Monsieur Hackman
OWUSU AGYEMANG, Ministre des Affaires Etrangères du Ghana. Suite
à la présentation faite par le Premier Ministre de consensus, Son
Excellence Seydou Elimane DIARRA, sur l'état de mise en oeuvre de
l'Accord de Marcoussis, les représentants des différentes forces
politiques ont procédé à un large échange de vues
sur les difficultés auxquelles se heurtent les efforts
déployés par le Premier Ministre pour la formation du
gouvernement. La Table Ronde réaffirme sa volonté
d'adhésion à l'Accord de Marcoussis considéré
unanimement comme cadre de résolution durable de la crise ivoirienne. A
cette fin, les participants ont pris l'engagement de collaborer avec le
Président Laurent GBAGBO et le Premier Ministre Seydou DIARRA en vue de
mettre en place un gouvernement de réconciliation nationale
équilibré. Se référant à l'accord de
Marcoussis, la Table Ronde réaffirme la nécessité de
préserver l'intégrité territoriale de la Cote d'Ivoire, le
respect de ses institutions et la restauration de l'autorité de I'Etat.
Elle rappelle son attachement ou principe de l'accession ou pouvoir et de son
exercice de façon démocratique. La Table Ronde réaffirme
par ailleurs, l'autorité du Président Laurent GBAGBO, en sa
qualité de Chef de l'État, Chef suprême des Armées,
garant de la Constitution et des institutions républicaines. Elle salue
la volonté du Chef de l'état d'appliquer l'Accord de Marcoussis,
notamment par la mise en oeuvre, avant le 14 mars 2003, des dispositions
pertinentes relatives à:
a) la délégation des pouvoirs ou Gouvernement
b) la formation d'un Gouvernement de Réconciliation
Nationale.
Concernant la formation du gouvernement de
réconciliation nationale et en vue de sortir de l'impasse actuelle, la
Table Ronde recommande:
La création d'urgence d'un Conseil National de
Sécurité de quinze (15) members comprenant, le Président
de la République, le Premier Ministre, un représentant de chacune
des forces politiques signataires de l'Accord de Marcoussis, un
représentant des FANCI, un représentant de la Gendarmerie
Nationale et un représentant de la Police Nationale pour concourir
à la bonne gestion des Ministères de la Défense et de la
Sécurité Intérieure. Sur proposition de ce Conseil, le
Premier Ministre soumettra, dans les plus brefs délais, au
Président de la République, en vue de leur nomination aux postes
de Ministre de la Défense et de Ministre de la Sécurité,
des personnalités choisies sur une base consensuelle. L'attribution au
MPCI de deux Ministères d'État : le Ministère de
l'Administration du Territoire et le Ministère de la Communication.
Le respect des choix faits par les forces politiques de leurs
représentants au gouvernement. La Table Ronde invite le gouvernement
ivoirien, de concert avec les troupes françaises et celles de la CEDEAO
à, prendre immédiatement toutes les mesures nécessaires
pour assurer la protection et la sécurité des participants
à la Table Ronde de Marcoussis, des membres du Gouvernement en
particulier et de la population en général.
La Table Ronde rappelle la nécessité pour toutes
les forces en présence de faire cesser Immédiatement les
massacres et tueries ainsi que toutes les exactions commises dans leurs zones
d'opération. Par ailleurs, en vue de promouvoir l'esprit de
réconciliation nationale, la Table Ronde lance un appel solennel aux
acteurs socio - politiques et aux médias afin qu'ils s'engagent
résolument à soutenir le processus de mise en ouvre de l'Accord
de Marcoussis. Elle demande également la libération
immédiate de tous les prisonniers politiques. Et prisonniers de
guerre.
La Table ronde rend un hommage appuyé au
Président John Agyekum KUFUOR pour avoir initié cette rencontre
et pour les sages conseils prodigués aux participants en vue de les
engager à placer l'intérêt supérieur de la Nation
ivoirienne au-dessus des intérêts individuels.
Les participants à la Table Ronde expriment leurs
sincères remerciements au Secrétaire Exécutif de la CEDEAO
pour sa détermination et son implication personnelle dans la
résolution de la crise ivoirienne. La Table Ronde exprime sa profonde
gratitude au Président et aux membres du Comité de Suivi pour le
rôle essentiel qu'ils jouent dans la résolution du conflit. Elle
les appelle à veiller scrupuleusement au respect des termes de l'Accord
de Marcoussis, et demande à toutes les parties de leur apporter une
pleine coopération. Elle adresse ses vifs remerciements et sa profonde
gratitude au Président KUFUOR, au gouvernement et au peuple
Ghanéens pour leur accueil chaleureux et leur fraternelle
hospitalité.
Pour le FPI / Pascal AFFI NGUESSAN
Pour le MFA / Innocent KOBENA ANAKY
Pour le MJP / Gaspard DELI
Pour le MPCI / Guillaume SORO
Pour le MPIGO / Roger BANCHI
Pour le PDCI-RDA / Alphonse DJEDJE MADY
Pour le PIT / Francis WODIE
Pour le RDR / Alassane Dramane OUATTARA
Pour le UDCY / Théodore MEL EG
Pour le UDPCI / Paul AKOTO YAO
Honorable Hackman OWUSU-AGYEMANG
Président Conseil Ministériel de
Médiation et de Sécurité de la CEDEAO
Fait à Accra, le 07 mars 2003
ANNEXE 2 : EXTRAIT ACCORD DE LINAS
MARCOUSSIS
1 - A l'invitation du Président de la République
française, une Table Ronde des forces politiques ivoiriennes s'est
réunie à Linas-Marcoussis du 15 au 23 janvier 2003. Elle a
rassemblé les parties suivantes FPI, MFA, MJP, MPCI, MPIGO, PDCI-RDA,
PIT, RDR, UDCY, UDPCI. Les travaux ont été présidés
par M. Pierre Mazeaud, assisté du juge Keba Mbaye et de l'ancien Premier
ministre Seydou Diarra et de facilitateurs désignés par l'ONU,
l'Union Africaine et la CEDEAO.
Chaque délégation a analysé la situation
de la Côte d'Ivoire et fait des propositions de nature à
rétablir la confiance et à sortir de la crise. Les
délégations ont fait preuve de hauteur de vue pour permettre
à la Table Ronde de rapprocher les positions et d'aboutir au consensus
suivant dont les éléments - principes et annexes - ont valeur
égale :
2 - La Table Ronde se félicite de la cessation des
hostilités rendue possible et garantie par le déploiement des
forces de la CEDEAO, soutenues par les forces françaises et elle en
exige le strict respect. Elle appelle toutes les parties à faire
immédiatement cesser toute exaction et consacrer la paix. Elle demande
la libération immédiate de tous les prisonniers politiques.
3 - La Table Ronde réaffirme la nécessité
de préserver l'intégrité territoriale de la Côte
d'Ivoire, le respect de ses institutions et de restaurer l'autorité de
l'Etat. Elle rappelle son attachement au principe de l'accession au pouvoir et
de son existence de façon démocratique. Elle convient à
cet effet des dispositions suivantes :
a. - Un gouvernement de réconciliation nationale sera
mis en place dès après la clôture de la Conférence
de Paris pour assurer le retour à la paix et à la
stabilité. Il sera chargé du renforcement de
l'indépendance de la justice, de la restauration de l'administration et
des services publics, et du redressement du pays. Il appliquera le programme de
la Table Ronde qui figure en annexe et qui comporte notamment des dispositions
dans les domaines constitutionnel, législatif et
réglementaire.
b. c. - Il préparera les échéances
électorales aux fins d'avoir des élections crédibles et
transparentes et en fixera les dates.
d. - Le gouvernement de réconciliation nationale sera
dirigé par un Premier ministre de consensus qui restera en place
jusqu'à la prochaine élection présidentielle à
laquelle il ne pourra se présenter.
e. - Ce gouvernement sera composé de
représentants désignés par chacune des
délégations ivoiriennes ayant participé à la Table
Ronde. L'attribution des ministères sera faite de manière
équilibrée entre les parties pendant toute la durée du
gouvernement.
f. - Il disposera, pour l'accomplissement de sa mission, des
prérogatives de l'exécutif en application des
délégations prévues par la Constitution. Les partis
politiques représentés à l'Assemblée nationale et
qui ont participé à la Table Ronde s'engagent à garantir
le soutien de leurs députés à la mise en oeuvre du
programme gouvernemental.
g. - Le gouvernement de réconciliation nationale
s'attachera dès sa prise de fonctions à refonder une armée
attachée aux valeurs d'intégrité et de moralité
républicaine. Il procédera à la restructuration des forces
de défense et de sécurité et pourra
bénéficier, à cet effet, de l'avis de conseillers
extérieurs et en particulier de l'assistance offerte par la France.
h. - Afin de contribuer à rétablir la
sécurité des personnes et des biens sur l'ensemble du territoire
national, le gouvernement de réconciliation nationale organisera le
regroupement des forces en présence puis leur désarmement. Il
assurera qu'aucun mercenaire ne séjourne plus sur le territoire
national.
i. - Le gouvernement de réconciliation nationale
recherchera le concours de la CEDEAO, de la France et des Nations Unies pour
convenir de la garantie de ces opérations par leurs propres forces.
j. - Le gouvernement de réconciliation nationale
prendra les mesures nécessaires pour la libération et l'amnistie
de tous les militaires détenus pour atteinte à la
sûreté de l'Etat et fera bénéficier de la même
mesure les soldats exilés.
4 - La Table Ronde décide de la mise en place d'un
comité de suivi de l'application des accords de Paris sur la Côte
d'Ivoire chargé d'assurer le respect des engagements ris. Ce
comité saisira les instances nationales, régionales et
internationales de tous les cas d'obstruction ou de défaillance dans la
mise en oeuvre des accords afin que les mesures de redressement
appropriées soient prises.
La Table Ronde recommande à la Conférence des
Chefs d'Etat que le comité de suivi soit établi à Abidjan
et composé des représentants des pays et des organisations
appelés à garantir l'exécution des accords de Paris,
notamment :
- le représentant de l'Union Européenne, - le
représentant de la Commission de l'Union Africaine, - le
représentant du Secrétariat Exécutif de la CEDEAO, - le
représentant spécial du Secrétaire Général
qui coordonnera les organes de la famille des Nations Unies, - le
représentant de l'Organisation Internationale de la Francophonie, -
les représentants du FMI et de la Banque Mondiale, - un
représentant des pays du G8, - le représentant de la
France.
5 - La Table Ronde invite le Gouvernement français, la
CEDEAO et la communauté internationale à veiller à la
sécurité des personnalités ayant participé à
ces travaux et si nécessaire à celle des membres du gouvernement
de réconciliation nationale tant ce dernier ne sera pas à
même d'assurer pleinement cette mission.
6 - La Table Ronde rend hommage à la médiation
exercée par la CEDEAO et aux efforts de l'Union Africaine et de l'ONU,
et remercie la France pour son rôle dans l'organisation de cette
réunion et l'aboutissement du présent consensus.
A Linas-Marcoussis, le 24 janvier 2003
Pour le FPI : Pascal AFFI N'GUESSAN Pour le MFA : Innocent
KOBENA ANAKY Pour le MJP : Gaspard DELI Pour le MPCI : Guillaume
SORO Pour le MPIGO : Félix DOH Pour le PCI-RDA : Henri KONIA
BEDIE Pour le PIT : François WODIE Pour le RDR : Alassane Dramane
OUATTARA Pour l'UDCY : Théodore MEL EG Pour l'UDPCI : Paul
AKO Le Président : Pierre MAZEAUD
ANNEXE 3 : EXTRAIT DE L'ACCORD POLITIQUE DE
OUAGADOUGOU
ANNEXE 4 : EXTRAIT DE L'ACCORD POLITIQUE DE
PRETORIA
6 avril 2005 1. A l'invitation du Médiateur de l'Union
Africaine, Son Excellence Monsieur Thabo Mbeki, Président de la
République Sud-africaine, une rencontre des leaders politiques ivoiriens
a eu lieu à Pretoria du 3 au 6 avril 2005. Ont pris part à cette
rencontre. Son Excellence Monsieur Laurent Gbagbo, Président de la
République de Côte d'Ivoire, le Premier Ministre Seydou Elimane
Diarra représentant le Gouvernement de Réconciliation Nationale,
l'ancien Président Henri Konan Bédié, représentant
le Parti Démocratique de Côte d'Ivoire (PDCI), l'ancien Premier
Ministre Alassane Dramane Ouattara représentant le Rassemblement Des
Républicains (RDR), et le Ministre d'Etat Guillaume Soro,
Secrétaire Général des Forces Nouvelles- La rencontre
était présidée par le Président Thabo
Mbeki.
2. Les leaders ont passé en revue la situation actuelle de
la Côte d'Ivoire et ont pris des décisions relativement aux
problèmes rencontrés dans la mise en oeuvre des Accords de
Linas-Marcoussis, Accra II et III. Les leaders ivoiriens ont
réaffirmé :
a.. leur attachement aux Accords de
Linas-Marcoussis, d'Accra II et III ; b.. leur attachement à la
feuille de route élaborée par le Médiateur de l'Union
Africaine ; c.. leur attachement à toutes les résolutions des
Nations Unies sur la Côte d'Ivoire ; d.. leur attachement au respect
de la souveraineté, de l'indépendance, de
l'intégrité et de l'unité de la Côte d'Ivoire ;
e.. leur volonté quant à la nécessité
d'organiser l'élection présidentielle en octobre 2005 et les
élections législatives qui suivront ; f.. leur volonté
commune et sincère de créer un climat politique propice à
l'instauration rapide d'une paix durable ; g.. l'importance qu'ils
accordent à la résolution de la crise ivoirienne dans
l'intérêt du peuple ivoirien, de la sous région Ouest
Africaine et de l'Afrique dans son ensemble, Déclaration commune de
fin de Guerre
3. Les parties ivoiriennes signataires de l'Accord de
Pretoria, par le présent accord déclarent la cessation
immédiate et définitive de toutes les hostilités et la fin
de la guerre sur tout le territoire national, A cet effet, elles rejettent,
sans équivoque, l'usage de la force comme moyen de résolution des
divergences, Elles ont également reconnu que la guerre a
entraîné une souffrance et une misère indescriptibles au
peuple ivoirien. La guerre a aussi conduit à une
détérioration de l'économie de la Côte d'Ivoire avec
des conséquences négatives pour la sous région Ouest
africaine. Les leaders ivoiriens, par le présent accord,
réaffirment le droit sacré du peuple ivoirien à la paix et
au développement. Le Médiateur réitère sa
désapprobation et sa condamnation quant aux violations du cessez-le-feu
des 4 au 6 novembre 2004 et du 28 février 2005 ainsi que des violences
Motion de remerciement 17. Les parties ivoiriennes signataires
de l'Accord de Pretoria expriment leur profonde gratitude à Son
Excellence Monsieur Thabo Mbeki, Président de la République Sud-
africaine, Médiateur de l'Union Africaine, pour son engagement personnel
dans la résolution de la crise ivoirienne, au Gouvernement et au peuple
Sud africains, pour le dévouement, l'accueil chaleureux et
l'hospitalité qu'ils leur ont réservés et qui ont
contribué au rapprochement des leaders politiques ivoiriens en vue de la
consolidation de la paix et la poursuite du processus de réconciliation
nationale en Côte d'Ivoire. 18. Le Médiateur exprime sa
sincère appréciation pour l'engagement des leaders ivoiriens pour
une résolution rapide de la crise ivoirienne. S.E.M. Laurent
GBAGBO Président de la République de Côte
d'Ivoire Pour le PDCI M. Henri Konan BEDIE Pour le RDR M. Alassane
Dramane OUATTARA Pour les FN M. Guillaume SORO S.E.M. Seydou Elimane
DIARRA Premier Ministre du Gouvernement de Réconciliation
Nationale S.E.M. Thabo MBEKI Président de la République
Sud-africaine, @Médiateur de l'Union Africaine Fait à Pretoria
le 6 avril 2005
CARTE 1 : CARTE DE LA COTE D'IVOIRE
Source: Division
Géographique du Ministère des Affaires
Étrangères
http://www.izf.net/upload/Documentation/Cartes/Pays/supercartes/cotedivoire.htm
CARTE 2 : LE PARTAGE DE LA COTE D'IVOIRE ET LE
CONTROLE INTERNATIONAL PAR LES FORCES IMPARTIALES
I- Carte 2 : Le partage de la Côte d'Ivoire et le
contrôle international par les « forces impartiales»122(*)
COMMUNIQUE DE LA MISSION D'INFORMATION ET DE CONTACTS
APRES LE PREMIER TOUR
COMMUNIQUE DE LA MISSION D'INFORMATION ET DE CONTACTS
APRES LE SECOND TOUR
PHOTO DE LAURENT GBAGBO ET D'ALASSANE
OUATTARA
PHOTO : Laurent Koudou Gbagbo et Alassane Dramane
Ouattara
RESULTATS DU SECOND TOUR DES ELECTIONS SELON LA CEI ET
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL
TABLE DES MATIERES
AVERTISSEMENT
i
DEDICACE
ii
REMERCIEMENTS
iii
RESUME
iv
ABSTRACT
v
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
vi
PHOTO ET TABLEAUX
ix
LISTE DES ANNEXES
x
INTRODUCTION GENERALE
1
PREMIERE PARTIE : LES ACTIONS
PREVENTIVES DE LA FRANCOPHONIE
17
CHAPITRE1 : LES ACTIONS DE LA FRANCOPHONIE
AVANT LE PROCESSUS ELECTORAL
18
SECTION1 : Le parcours avant
l'élection
18
Paragraphe1 : Les différents Accords
intervenus avant l'élection
18
A- Les Accords de Linas Marcoussis et d'Accra
19
B- Les Accords de Pretoria et de Ouagadougou
23
Paragraphe 2 : le contexte
général avant l'élection
24
A- La situation politique avant
l'élection
25
B- La conjoncture sociopolitique avant
l'élection présidentielle de 2010
26
SECTION2 : Les enjeux de l'élection
présidentielle ivoirienne de 2010
26
Paragraphe1 : L'enjeu de participation
27
A- La participation de tous les leaders
politiques
27
B- La participation des électeurs
28
Paragraphe2 : L'enjeu de contrôle
28
A-L'enjeu de contrôle des institutions
29
B- L'enjeu de contrôle du fichier
électoral
30
CHAPITRE 2 : LES ACTIONS DE PREVENTION
DE LA FRANCOPHONIE PENDANT LE PROCESSUS ELECTORAL IVOIRIEN
33
SECTION1 : Les actions préventives
propres a la francophonie en Côte
d'ivoire
33
Paragraphe1 : Les actions de la francophonie
avant et pendant les élections
34
A- Le mandat de la Mission et ses rencontres
34
B- Les actions menées par la Francophonie au
vu du cadre temporel
35
Paragraphe 2 : les actions de la francophonie
après les élections
36
A- Les rencontres de la Mission avec les acteurs
politiques ivoiriens
36
B- La posture de la Francophonie après les
proclamations des résultats
37
SECTION 2 : L'accompagnement des actions
d'autres acteurs par la
francophonie
39
Paragraphe 1 : L'accompagnement des actions
de l'ONU par la francophonie
39
A- Les rencontres avec les responsables de
l'ONUCI
39
B- L'explicitation du mandat de certification par
l'ONUCI
40
Paragraphe 2 : L'accompagnement des actions
des autres acteurs
42
A- Les rencontres avec le représentant du
Facilitateur, de l'Union Africaine, et de la CEDEAO
42
B- Les rencontres avec la CEDEAO, l'Union
européenne, RSA, et les
ambassadeurs francophones
43
DEUXIEME PARTIE : EVALUATION DU MODELE
DE PREVENTION DES CONFLITS POST ELECTORAUX DE LA FRANCOPHONIE
47
CHAPITRE 3 : LES LIMITES DE L'ACTION
PREVENTIVE DE LA FRANCOPHONIE EN COTE D'IVOIRE
48
SECTION1 : Les limites structurelles de la
Francophonie en Côte d'Ivoire
48
PARAGRAPHE 1 : La flexibilité de la
Francophonie quant au suivi du processus
électoral ivoirien
49
A- La non participation de la Francophonie à
la phase pré électorale de l'élection
présidentielle ivoirienne
49
B- Le rôle limité de la Mission
d'Information et de contacts en Côte d`Ivoire
53
Paragraphe 2 : La Francophonie, un acteur
subsidiaire de prévention des conflits post électoraux
55
A- Le rôle d'appui joué par la
Francophonie
56
B- Le rôle de relais joué par la
Francophonie
57
SECTION 2 : Les limites opérationnelles
de la Francophonie en Côte
d'Ivoire
59
Paragraphe 1 : La subordination de la
Francophonie à certains acteurs présents en Côte
d'Ivoire
60
A-L'alignement quasi systématique aux
actions de l'ONU
60
B- La confusion entre la position de la France et
celle de la Francophonie
62
Paragraphe 2 : Le manque d'autorité de
la Francophonie dans la prévention du
conflit post électoral ivoirien
65
A- Le retrait coupable de la Francophonie en
Côte d'Ivoire
65
B- L'incapacité de la Francophonie à
mener une diplomatie préventive
68
CHAPITRE4 : POUR L'AMELIORATION DU MODELE DE
PREVENTION DES CONFLITS POST ELECTORAUX EN FRANCOPHONIE
71
SECTION1 : Une amélioration du point de
vue structurel
71
Paragraphe1 : La nécessité d'une
rigidité dans le suivi des processus électoraux
72
B- La participation à tout le processus
électoral
72
B-L'importance d'une plus forte présence de
la Francophonie
73
Paragraphe2 : Une implication véritable
dans la prévention
74
A- La nécessité de privilégier
l'observation évaluation
74
B- La nécessité d'une promotion
effective de la démocratie
75
SECTION2 : Une amélioration du point de
vue opérationnel
76
Paragraphe1 : L'aménagement substantiel
de la Francophonie
77
A- La nécessaire collaboration de la
Francophonie avec ses partenaires
77
B- La nécessité d'un amenuisement de
la prépondérance de la France
78
Paragraphe 2 : La nécessité
d'une plus grande autorité de la Francophonie dans le
78
domaine de la prévention des conflits post
électoraux
78
A- Le renforcement de l'alerte précoce
79
B -L'utilité d'une composante armée
en Francophonie
80
CONCLUSION GENERALE
83
BIBLIOGRAPHIE
86
ANNEXES
90
TABLE DES MATIERES
107
* 1 N.KALYVAS STATHIS, The
logic of violence in civil war, Cambridge University Press, New
York,2006,p16
* 2Voir la déclaration de
Saint-Boniface sur la prévention des conflits et Sécurité
humaine adoptée le 14mai 2006
* 3 TABI MANGA (Jean),
Francophonie Lieu de mémoire, projet d'espoir, YAOUNDE, AFREDIT,
2010, p33
* 4 DENIAU (Xavier),
Editions : PUF, coll. « Que sais-je ? »,
2003,p 16
* 5 Définition contenue
dans le dictionnaire Larousse de poche 2007, édition mise à
jour.
* 6 Cornu Gérard,
vocabulaire juridique, 4ème édition, Paris,
PUF, 2003, P.688
* 7.FERREOL(G) et al,
Dictionnaire de Sociologie, Paris, Armand Colin, 1991, p..32.
* 8VERRI (P), Dictionnaire
du droit international des conflits armés, CICR,
Genève,1988,p.36-37
* 9 FREUND(J), Sociologie du
conflit, Paris, Puf, 1983, p.63
* 10 Pascal BONIFACE
(dir), Dictionnaire des relations internationales, Paris, Hatier,
1996, p.171
* 11 ZARTMAN(W), la
résolution des conflits en Afrique, Paris, l'Harmattan, 2009,
p.12
* 12 Voir la déclaration
de Saint-Boniface sur la prévention des conflits et
sécurité humaine adoptée le 14mai2006
* 13 ATANGANA AMOUGOU
(Jean-Louis), « Francophonie et résolution des conflits
en Afrique »,in La revue internationale des mondes francophones, No
2 ,2010 ,pp37-55.
* 14 ATANGANA AMOUGOU
Jean-Louis, op.cit p41
* 15 ATANGANA AMOUGOU
Jean-Louis, op.cit, p39.
* 16 CORNU (Gérard),
vocabulaire juridique, 4ème édition, Paris, PUF, 2003, P688,
(cité par ATANGANA AMOUGOU, op.cit. P41. )
* 17 KANT (Emmanuel), Vers la
paix perpétuelle publié en 1795
* 18 ATANGANA AMOUGOU
(Jean-Louis), op.cit. P45
* 19 Voir le chapitre 4B de la
Déclaration de Bamako
* 20 Abenelang Abessolo
(Murielle), Le power sharing comme modalité de résolution des
conflits post électoraux en Afrique : cas des expériences de
la Cote d'Ivoire et du Kenya, mémoire de master professionnel en
Relations Internationales, option Diplomatie, IRIC, 2010.
* 21 Entendez par cette
expression le partage du pouvoir
* 22 Source PNUD, citée
dans le Rapport 2006-2008 du Secrétaire général de la
Francophonie, cité par Valantin (Christian) , Une histoire de la
Francophonie(1970-2010), de l'Agence de coopération culturelle et
technique à l'OIF, édition Belin, Paris 2010 P.147.
* 23 Valantin (Christian),
op.cit p.152.
* 24 ibid
* 25 www.ins.ci site officiel
de l'Institut National ivoirien, consulté le 22 SEPTEMBRE 2012.
* 26 Madeleine GRAWITZ,
Méthodes des Sciences Sociales, Paris, Dalloz, 1986, p.4
* 27 Madeleine GRAWITZ,
Op.cit,P.256
* 28 BATTISTELA Dario,
Théories des relations internationales, 2è édition,
2004,p 250 et suite
* 29 Cadre Stratégique
Décennal de la Francophonie, Ouagadougou, 26-27 novembre 2004, p.9
* 30
Mearsheimer(John), « The false promise of international
institutions », international Security, winter, vol.19, no2,
1994-1995,P.8 accessible sur
http://www.jstor.org/stable/2539078
consulté le 10 décembre2012.
* 31 La traduction
étant « La fausse promesse des institutions
internationales »
* 32 Mearsheimer(John),op.cit,
P.8
* 33 Mearsheimer(John), op.cit
P.14
* 34 Mearsheimer(John), op.cit
P.9
* 35 La traduction
étant «La promesse des théories
institutionnalistes».
* 36 Madeleine GRAWITZ,
Méthodes des Sciences Sociales, Paris, Dalloz, 1986, p.351
* 37 Raymond QUIVY et Luc Van
CAMPENHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Paris, DUNOD,
2e édition entièrement revue et augmentée,
1995, p.65
* 38 Tabi Manga(Jean),
Francophonie, lieu de mémoire, projet d'espoir, Yaoundé,
Afredit, 2010 P.70
* 39 Allusion est faite ici
à la Charte de la Francophonie de 2005, à la déclaration
de Bamako de 2000, et à la Déclaration de Saint Boniface de
2006.
* 40 Le 19 septembre2002, alors
que le Président Laurent Gbagbo se trouve en visite officielle au
Vatican, un coup d'état a lieu à Abidjan, coup de force qui se
solde par un échec.
* 41 Le Mouvement populaire
ivoirien du Grand Ouest (MPIGO) et le Mouvement pour la justice et la paix
(MJP).
* 42 Trois séries de
dispositions restreignent le pouvoir du Président de la
République : il perd sa liberté de désigner le
Premier ministre qui lui sera proposé à Kleber, il lui est
imposé une large délégation d'une partie de ses
prérogatives de l'exécutif au profit du gouvernement, enfin il
voit ses attributions militaires amputées au profit du Gouvernement
chargé de fonder et de restructurer les forces de défense et de
sécurité. Il perd ainsi sa qualité de chef suprême
des armées et son pouvoir de nommer aux emplois militaires.
* 43
Désarmement-démobilisation-réinsertion.
* 44 Néologisme
utilisé en 1974 et tombé en désuétude. C'est le
Président Bédié qui l'a fait ressortir le 26aout 1995 lors
d'un discours délivré lors d'un congrès de son parti le
PDCI .Pour lui, l'ivoirité est un concept fédérateur,
socle sur lequel doit reposer la nation ivoirienne, l'ivoirité constitue
d'abord un cadre d'identification mettant l'accent sur les valeurs
spécifiques de la société ivoirienne mais est
également un cadre d'intégration des premières composantes
ethniques qui ont donné naissance à la Cote d'Ivoire et
intègre tous les apports extérieurs qui sont venus se fondre dans
le moule du destin partagé.
* 45 Communauté des
Etats d'Afrique de l'ouest.
* 46 Rapport de la mission
d'information et de contact, P.7.
* 47 Alassane Dramane Ouattara
avait vu sa nationalité contestée tandis qu'Henri Konan
Bédié faisait l'objet d'une interdiction de territoire national
et n'avait donc pu produire un certificat de santé dûment rempli
par des autorités médicales ivoiriennes.
* 48 On se souvient bien des
éléments avancés par les rebelles pour justifier la prise
des armes, à savoir le rejet de l'ivoirité qui serait un moyen
d'exclure les « nordistes », ceci faisant
référence à Alassane Ouattara qui est ressortissant de
cette zone du pays.
* 49 En effet, on peut
constater que les deux principaux leaders politiques ivoiriens que sont Henri
Konan Bédié et Alassane Ouattara qui ont été mis
hors course lors de la présidentielle de 2000 ont été
associés lors des débats qui ont précédé la
signature des Accords de Marcoussis, d'Accra, Pretoria notamment.
* 50 Badjo DJEKOURI -DAGBO
(J-H), « LA GESTION DES CONFLITS LIES AUX ELECTIONS (L'EXPERIENCE
DE LA COTE D'IVOIRE) », conférence du
réseau africain de droit
constitutionnel.
* 51 Il s'agit des partisans
d'Alassane Ouattara qui voit régulièrement, que ce soit de
façon manifeste ou alors de manière latente sa nationalité
remise en cause. Etant ressortissant du nord du pays où la plupart des
populations sont d'obédience musulmane et pour une grande part
favorables à Ouattara, ce qui constitue un prétexte pour
prétexter qu'il s'agit des non ivoiriens comme leur champion qu'ils
veulent imposer au pouvoir.
* 52 Suivant la
rhétorique très souvent entendue, les partisans du
Président Gbagbo et bien avant lui Bédié ou même
Guei, se considèrent ivoiriens de souche, vrais ivoiriens.
* 53 Rapport Mission, op.cit,
P.6
* 54 Une vision réaliste
pourrait faire comprendre que la stabilité d'un pays n'est pas toujours
la chose la mieux partagée dans la mesure où certains acteurs
tirent profit du désordre, tandis que d'autres trouvent leur
intérêt dans le désordre.
* 55 Rapport de la Mission
d'information et de contacts op.cit P.15
* 56Rapport de la Mission
d'information et de contacts op.cit P27.
* 57 Ces sigles renvoient aux
zones centre nord et ouest qui sont des zones occupées par les forces
favorables à Alassane Dramane Ouattara
* 58 Témoignage
disponible dans le rapport 2010-2012 du Secrétaire Général
de la Francophonie en page 73
* 59 Interview accordée
à la radio ONUCI FM disponible sur http://www.ONU.org.
* 60 La force Licorne est une
unité militaire française basée en Cote d'Ivoire sur la
base des accords de défense signés entre les deux pays
* 61 Les deux forces ont
apporté leur appui à l'offensive militaire, notamment dans la
ville d'Abidjan
* 62Rapport Mission
d'information et de contacts, op.cit P.19
* 63Rapport Mission op.cit
P.20.
* 64 Il s'agit ici de la CEI,
du Conseil constitutionnel et de l'ONU.
* 65 Globalement les
résolutions de ces Accords tournaient autour de la
nécessité d'aboutir à un climat de paix à travers
une élection en bonne et due forme qui verrait la participation de tous
les acteurs, ceci passant par le respect du cessez-le feu imposé
à celles ci
* 66 Cette disposition est
contenue dans l'Accord de Pretoria du 05 avril 2005 en son article 9a
* 67 C'est le nom de la force
armée qui occupe une partie du territoire ivoirien après le
coup-d'état manqué du 19 septembre2002 et dont le
Secrétaire général est Guillaume Kigbafori Soro
* 68 L'appellation
« ADO » renvoie au leader du Parti RDR (Rassemblement des
Républicains) Alassane Dramane Ouattara qui est en fait le diminutif
* 69 Successeur constitutionnel
de Félix Houphouët Boigny à sa mort, il a été
Président de la République de 1993 à 1999, victime du coup
d'état du 24 décembre 1999.
* 70 Robert Guei est un ancien
chef d'état major de l'Armée ivoirienne qui a pris les reines du
pouvoir à la suite du coup d'état renversant le Président
Bédié, disant venir pour « balayer la
maison ».Après avoir tenté de se maintenir au pouvoir
au grand dam du résultat des urnes, il a été
qualifié par l'artiste musicien Tiken Jah Fakoli dans une de ses
chansons de « balayeur balayé ».
* 71 On peut tout d'abord
parler de la loi de novembre 1994 à l'initiative de Henry Konan
Bédié qui stipulait que « pour être
éligible aux élections présidentielles, il faut être
ivoirien né en Cote d'Ivoire de père et de mère
ivoiriens, eux même de parents ivoiriens ».La seconde loi est
celle d'aout 2000 à l'initiative de Robert Guei, qui en plus de celle de
1994, stipule que le candidat doit désormais justifier d'une
part « d'une présence continue sur le territoire ivoirien
les 5années qui précèdent l'élection »,
et d'autre part, « ne s'être jamais prévalu d'une
autre nationalité.
* 72 En fait le
concept « ivoirité »a été
utilisé pour la première fois par Dieudonné Niangoran
Porquet dans un article intitulé « ivoirité et
authenticité » paru dans le quotidien proche du PDCI
« Fraternité Matin » en 1974.Le concept est
tombé dans l'oubli jusqu'à ce que Henry Konan Bédié
le ressorte lors d'un discours pendant un congrès de son Parti le PDCI
en 1995.
* 73 Article 1 et suite de
l'Accord de Ouagadougou du 04mars 2007
* 74 Ce sont des zones
contrôlées par les Forces Nouvelles
* 75 Focus sur les appuis du
PNUD au processus électoral ivoirien, disponible sur http/
www.UN.ORG
* 76 Rapport mission
d'information et de contacts op.cit P.3.
* 77 Rapport mission
d'information et de contacts P.3.
* 78 ibid
* 79 ibid
* 80 Voir l'article 1 de la
Charte de la Francophonie adoptée le 23novembre2005 à
Antananarivo.
* 81 Massart-
Pierard (Françoise) « La Francophonie, un nouvel
intervenant sur la scène internationale » revue
internationale de politique comparée vol 14 numéro1 PP63-94.
* 82 OIF, Rapport du
Secrétaire Général de la Francophonie 2004-2006
* 83 ibid
* 84 BOUTROS-GHALI B., «
Boutros Ghali », Interview, Le Vif/L'Express, 18 octobre 2002, p.
73.
* 85 Rapport Mission
d'information et de contacts op.cit P.27.
* 86 Bon nombre de
spécialistes s'accordent à dire que la vraie source du conflit
ivoirien provient de la longévité d'Houphouët Boigny
(1961-1993) au pouvoir qui n'a pas pu léguer un héritage de paix
durable à ses successeurs qui ont plutôt prospéré
dans la haine et l'exclusion.
* 87 Ainsi était
appelé de façon affectueuse le Président Félix
Houphouët-Boigny.
* 88 Il s'agit notamment des
Forces Armées Nationales de Cote d'Ivoire (FANCI) loyales au pouvoir en
place, et des Forces Nouvelles(FN) qui contrôlent les zones du nord, de
l'ouest et du centre.
* 89 Allusion est faite ici
à l'Accord de Ouagadougou de 2007 ainsi qu'aux accords
complémentaires jetant les bases d'une élection avec un minimum
de consensus entre les acteurs.
* 90 En effet, les
différents protagonistes du conflit ivoirien ont convenu que les
élections constituaient la meilleure manière de sortir de la
crise qui perdure dans ce pays depuis près d'une décennie, ceci
passant bien entendu par un ensemble d'autres mesures viables comme le
désarmement des rebelles entre autres afin de revenir à la
normalité politique.
* 91 C'est à l'ONU
qu'est reconnue la mission de préservation des générations
actuelles et futures des fléaux de la guerre et ceci dès sa
création en 1946, bien avant même la naissance de la Francophonie
politique qu'on connait aujourd'hui.
* 92 Massart-Pierard
(Françoise), op.cit. P 89.
* 93 Massart-Pierard
(Françoise), op.cit. P 89.
* 94 Le partenariat avec
d'autres aires linguistiques et culturelles est considéré, depuis
l'an 2000, comme un axe majeur de l'action de l'OIF en faveur de la
diversité culturelle. Les espaces hispanophone, lusophone et francophone
ont institutionnalisé une coopération sous le titre de TEL
(direction de Trois Espaces linguistiques). Le rapprochement à
opérer avec d'autres organisations linguistiques et culturelles s'est
traduit par une Déclaration intitulée «Coopération,
diversité, paix », signée à Mexico en 2003 par les
Secrétaires généraux des TEL.
* 95 . ROY J.-L., La
Francophonie, l'émergence d'une alliance, Montréal,
Hurtubise, H.M.H., 1989.
* 96 Il s'agit des Accords de
Linas Marcoussis, Accra, Pretoria et surtout Ouagadougou où les acteurs
politiques ivoiriens ont posé les bases devant régir
l'élection présidentielle qui aura finalement lieu en 2010.
* 97 Cette disposition est
contenue dans l'article10 de l'Accord de Pretoria signé le 05 avril
2005
* 98 Rapport de la mission
d'information et de contacts op.cit P.33
* 99 Il est fait allusion ici
aux proclamations successives de la CEI, du Conseil constitutionnel et de la
certification du RSSG.
* 100 Rapport de la Mission
d'information et de contacts, op.cit P.29
* 101 « Contribution
de la France au financement de la Francophonie
multilatérale »disponible sur le lien
www.senat.fr/rap/a08-100-2/a08-100-212.htlmL.
Consulté le 29 novembre 2012.
* 102 Discours prononcé
par le Président français Nicolas Sarkozy à l'occasion du
XIIIe Sommet de la Francophonie à Montreux le 23.10.2010.
* 103 Général,
(2S), consultant, chargé de mission auprès de l'OIF
* 104 Trinquand
(Dominique), « La contribution de la Francophonie aux
opérations de maintien de la paix », La Revue
internationale des mondes francophones, no2.printemps-été
2010.
* 105 Pour le candidat
Ouattara, ce qui se joue c'est bien sa légitimité qui est
confisquée, or pour Gbagbo, il ne s'agit plus d'une question
électorale, mais d'une question de souveraineté de la Cote
d'Ivoire.
* 106 La Force Licorne est un
détachement de militaires français en Cote d'Ivoire
arrivés en 2002 dans le cadre de l'application des accords de
défense liant les deux pays depuis le 24 avril 1961.
* 107 Le 19 septembre 2002,
alors que le Président Laurent Gbagbo se trouvait à Rome en
visite officielle, une tentative de coup d'état a échoué
en Côte d'Ivoire.
* 108 Bien que le contenu de
ces accords de défense soient généralement tenu secrets,
ils prévoient une intervention automatique de la France en cas d'attaque
contre le régime ivoirien.
* 109 Plus de trois millions,
ce qui représente environ 20% de la population burkinabé.
* 110 Soro
(Guillaume),Pourquoi je suis devenu rebelle ?, cité par
Hofnung(Thomas), La crise en Côte d'Ivoire, dix clés pour
comprendre, Paris, La découverte 2006 p 82
* 111 La Majorité
Présidentielle, regroupement d'un certain nombre de partis politiques
acquis à la cause de Laurent Gbagbo.
* 112 Ango Ela (Paul), La
prévention des conflits en Afrique centrale, prospective pour une
culture de la paix, Paris, éditions Belin, 2001,p 30
* 113 Boutros ghali(B), Agenda
pour la paix, 17 juin 1992, UN Document A/47277-S/24111, cité par Cahill
(Kevin), La diplomatie préventive, Paris, NiL édition,
novembre 2005,P56.
* 114 A ce jour, il n'est pas
possible d'avoir un bilan exhaustif des personnes tuées, mais on peut
quand même se référer au charnier découvert à
Duékoué pour comprendre l'apprêté des violences.
* 115 MONNEY
MOUANDJO(Stéphane), La démocratie au Sud et les
Organisations Internationales : analyse comparée des missions
internationales d'observation des élections des pays membres du
Commonwealth et des pays membres de l'organisation Internationale de la
Francophonie, thèse doctorale en Droit public soutenue à
l'Université de Reims, 2007-2008.P 438
* 116 Monney Mouandjo
(Stéphane), op.cit P 370.
* 117 Owona Nguini (Mathias
Eric), « le gouvernement perpétuel en Afrique Centrale :
le temps politique présidentialiste entre autoritarisme et
parlementarisme dans la CEMAC »,Enjeux, no 19, avril-juin 2004
p11.
* 118 Organisation
internationale de la Francophonie, Programme 2010- 2013
* 119 Olinga Alain
Didier) « Temps de crise, crise du temps ? de la
variable temporelle dans l'analyse des conflits en Afrique en Afrique
centrale » , Enjeux no19 avril-juin
2004 ,5è année, Yaoundé, FPAE.P.7.
* 120 Budget OIF sur le site
web :
http://francophonie.org/Le-
budget.html consulté le 29novembre2012
* 121 Ze Nguema
(Fidèle), La Francophonie entre fable et séduction. Pour une
Sociologie de l'inter culturalité, les éditions
Udégiennes, Libreville, CERGEP P .31.
* 122Mémier (Marc),
note d'analyse du GRIP, 31janvier 2012,
Bruxelles .URL :http://www.grip.org
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