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La radiodiffusion au Cameroun de 1941 à  1990

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par Louis Marie ENAMA ATEBA
Université de Yaoundé I (Cameroun) - Master II en Histoire des Relations Internationales 2011
  

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II- L'ÉVOLUTION DE LA RADIODIFFUSION AU CAMEROUN

Animée par l'ambition d'avoir le monopole sur l'ensemble du territoire, et d'accomplir la mission que lui avait assignée l'O.N.U., à savoir favoriser l'indépendance du pays, la France avait décidé de créer des stations de radio provinciales, respectivement à Yaoundé et à Garoua.

II.1. RADIO-DOUALA, RADIO-YAOUNDÉ, RADIO-GAROUA

Nous rappelons que la première station de radio à émettre depuis le territoire du Cameroun vit le jour au plus fort de la Deuxième Guerre mondiale. Jacqueline Gras affirme à ce propos : « C'est en effet en 1941 que les autorités françaises, alors tutrices du Cameroun oriental, estimant qu'il était intéressant de rediffuser les bulletins d'informations et communiqués de guerre de la France libre, firent appel au service radioélectrique du Cameroun, indépendant des postes et télécommunications ». Radio-Douala, « enfant de guerre »24(*), fut ainsi créée.

II.1.1. Radio-Douala

A l'instar des autres stations de radiodiffusion coloniales, Radio-Douala se caractérisait par une intense activité et un système de gestion destinés à satisfaire les besoins de la métropole.

En août 1947, la station radioélectrique de Douala-New-Bell commença la diffusion d'émissions radiophoniques. Elle utilisait alors un émetteur du type Temco - 250 W, auquel avait été adjoint un étage supplémentaire, construit sur place. Depuis la mise en place de l'émetteur, le poste de Radio-Douala était imprécis. Organisé et fonctionnant grâce au service radioélectrique, installé dans ses locaux, et contrôlé, techniquement, par ce service, le poste a été temporairement rattaché à la D.A.C.S., en vue de l'organisation des programmes. Mais il dépendait du service de l'information. Malgré l'imprécision de son statut, le poste continuait d'exister. Cette existence était reconnue et approuvée par les organismes internationaux, comme nous pouvons le lire dans le rapport de la délégation des territoires français d'Outre-Mer, sur la conférence internationale de radiodiffusion à hautes fréquences, réunie à Mexico, du 22 octobre 1948 au 10 avril 1949 :

Le Cameroun, qui disposera d'un émetteur d'un kW, a obtenu l'allocation d'une fréquence de 6 Mc / sec toute la journée de 6h à 9h, 11h 30 à 15h, 17h 30 à 24h locale et d'une fréquence de 9Mc / sec de 11h 30 à 15h, fréquences qui permettront la diffusion d'un programme local dans un rayon de 600 à 1000 kms autour de l'émetteur25(*).

Les programmes de la radio coloniale du Cameroun étaient réalisés en fonction des horaires précis et des langues dominantes des différentes régions sur lesquelles s'étendait sa diffusion. Radio-Douala émettait tous les jours, durant 2 h 45 min, de 18 h 30 min à 21 h 15 min, au niveau local. Chaque dimanche, le poste diffusait une émission supplémentaire d'une durée de 2 h, de 11 h à 13 h. Au total, le poste diffusait 21 h 15 min, chaque semaine. Les projets en étude assuraient au poste de Radio-Douala 5 h d'émissions par jour, de 18 h à 23 h. Une émission supplémentaire devait être diffusée pendant 4 h, le dimanche, de 10 h à 14 h. En perspective, Radio-Douala devait diffuser 39 h par semaine.

L'équipement du Cameroun devait répondre aux exigences du « Trusteeship », tel qu'il est défini dans l'article 76 de la Charte des Nations-Unies qui, parmi les fins essentielles du régime de tutelle, énonce la nécessité de « favoriser le progrès politique, économique et social des populations des territoires sous tutelle ainsi que le développement de leur instruction »26(*). De tous les moyens d'information et de diffusion des idées, de l'instruction et de la culture chez les masses, la radiodiffusion était l'organe le plus efficace du monde moderne, notamment dans les territoires d'Outre-Mer, où les communications terrestres ne permettaient encore qu'une diffusion incomplète de la presse et des livres27(*). D'où les dispositions prises par le gouverneur Soucadeaux, qui affirme :

Je voudrais faire de l'antenne de Radio-Douala un véritable poste camerounais. Parallèlement, nous cherchons à donner à l'écoute une audience beaucoup plus large, en installant des diffuseurs publics et en mettant à la disposition de l'élément africain de petits récepteurs à prix modiques28(*).

À sa naissance, le poste de radiodiffusion de Douala dépendait de deux services locaux. Du point de vue technique, il dépendait du service radioélectrique, rattaché à la D.P.T.C., qui assurait l'entretien du matériel, le fonctionnement de l'émetteur, et abritait, dans les locaux de la station radio de Douala-New-Bell, un émetteur et un studio étroit. Du point de vue de l'administration du poste, de la confection de ses programmes et du contrôle général de ses émissions, Radio-Douala dépendait du service de l'information, rattaché directement à la D.C.H. Mais ce service n'était installé qu'à Yaoundé et ne pouvait exercer qu'un contrôle approximatif sur les émissions de Radio-Douala, d'autant plus que le faible rayon de ses émetteurs ne permettait pas une meilleure audition de ses émissions à Yaoundé. Le contrôle était en effet exercé par l'administrateur-maire de Douala, délégué du Haut-Commissaire de cette ville. Pendant longtemps, la proximité de Radio-Brazzaville et la diffusion de ses émissions sur tout le Cameroun avaient donné au poste de radiodiffusion du pays un intérêt local. D'après les autorités, son importance ne devait exiger une organisation autonome, ni dans le domaine technique, ni dans celui des émissions et de l'Administration. Sous réserve du recrutement d'un personnel spécialisé et de la construction des bâtiments adaptés, le poste de radiodiffusion du Cameroun dépendait du service radioélectrique, pour ce qui était de l'entretien du matériel et du fonctionnement de l'émetteur.

II.1.2. Radio-Yaoundé

L'importance de Radio-Yaoundé s'expliquait par le fait que Yaoundé était le siège des institutions politiques de la France au Cameroun et abritait ainsi un nombre important de Français. Voilà pourquoi l'administration coloniale avait élargi la portée de ses émissions, en améliorant la qualité de son émetteur et en intensifiant son activité.

En 1954, le Cameroun sous tutelle française est frappé de plein fouet par les manifestations nationalistes de l'U.P.C. Ainsi, en 1955, la gestion de la station de Radio-Douala, de même que les programmes de développement d'une radiodiffusion camerounaise, sont confiés à la SO.RA.FOM. À Yaoundé, la SO.RA.FOM. installe deux émetteurs, respectivement celui d'un kW en ondes moyennes, et celui de 4 kW en ondes courtes.

Animée par l'ambition de préserver les intérêts de la France, l'administration coloniale avait décidé de coordonner l'information de la radiodiffusion au Cameroun. Mais cette coordination était impossible, tant que la radiodiffusion était installée à Douala. Il convenait donc d'en prévoir la transmission à Yaoundé, dans des délais brefs. La fusion effective entre la radio et l'information aidant, il avait été créé un poste émetteur, en contact direct avec le Haut-Commissaire, et les organes du gouvernement. Le gouvernement assurait le contrôle des émissions et la réalisation des programmes plus complets. L'installation du poste de radiodiffusion à Yaoundé permit de couvrir les diverses régions du Cameroun29(*), avec un émetteur d'un kW.

II.1.3. Radio-Garoua

La création de Radio-Garoua devait assurer le rayonnement de la radiodiffusion camerounaise à travers le Nord du pays, en se conformant au traditionalisme de son auditoire, attaché à l'Islam, et aux systèmes des lamidats30(*).

Radio-Garoua était considérée comme une radio régionale. La mission des radios régionales était de rapprocher les populations de la radio coloniale, et leur inculquer des savoir-faire dans leurs activités respectives. Les émissions de Radio-Garoua étaient ainsi destinées à donner aux autochtones des conseils d'hygiène, de santé, et sur l'économie pratique. Elles s'adressaient notamment aux agriculteurs et aux éleveurs. Le but majeur étant de soutenir le développement économique. Il avait été prévu la diffusion des conseils agricoles en fulfulde ou foulani, et en haoussa. Radio-Garoua était de ce fait utilisée comme palliatif de l'insuffisance des services d'encadrement31(*). La radio devait donner à la population paysanne des informations brèves et rapides appelées « microprogrammes », afin d'assurer une amélioration quantitative et qualitative de leur productivité agricole. Elle était également destinée à amorcer la structuration des groupements coopératifs. L'une des caractéristiques fondamentales de Radio-Garoua était son rôle dans la démocratisation de la communication par une large participation des hommes et des femmes de la localité à ses différentes utilisations. Cette démocratisation se manifestait aussi par la forme que devait prendre la radio. Par exemple, la radio diffusait des émissions éducatives et intégrait des valeurs et du savoir-faire locaux, pour maximiser l'auditoire.

Dans le souci de confirmer la radio comme moyen de consolidation de l'efficacité du système tutélaire, l'administration coloniale avait manifesté le désir d'en assurer le contrôle. Ainsi, Radio-Garoua n'avait pas de personnalité juridique propre, tout comme les autres stations de radio provinciales du pays, avec lesquelles elles constituaient la R.D.C. Sa gestion était directement assurée par le gouvernement national32(*). Cet hégémonisme du gouvernement sur Radio-Garoua avait été justifié plus tard par la thèse selon laquelle les médias étaient appelés à participer à l'émergence des états-nations, mais aussi à jouer un rôle de premier plan dans leur consolidation33(*). À sa création, Radio-Garoua était unique à la région du Nord-Cameroun34(*).

* 24 M. Delettre, Ancien Directeur de Radio-Douala, in J.P. Biyiti Bi Essam, « Une Radio Régionale Africaine et son Public, Analyse d'un Divorce », Thèse de Doctorat de 3è cycle en Sciences et Techniques de l'Information et de la Communication, Université de Paris 7, 1984, p. 8.

* 25 ANY, 3.AC1465, relations entre la radiodiffusion française avec les territoires d'Outre-Mer, 1948-1953, pp.4-7.

* 26Accord de Tutelle, in Daniel Abwa, Commissaires et Hauts-Commissaires français au Cameroun (1916-1960), Yaoundé, Presses de l'Université Catholique d'Afrique Centrale, 1998, p.15-16.

* 27 Les Camerounais, à l'instar des populations africaines en général, s'étaient longtemps accoutumés à la transmission d'informations et d'idées par l'oralité, et la radiodiffusion semblait être le moyen de communication le plus adapté à ce contexte à l'époque coloniale.

* 28 Soucadeaux, Gouverneur du Cameroun, Déclaration devant l'A.R.CAM., in A. Kwa Mbanga, La Radiodiffusion dans le Processus de Développement, Bry-sur-Marne, I.N.A., Polycopié, 1980, p.40.

* 29 A N Y., 1.AC. 7548, Radiodiffusion de Commandement, Extension, 1955, p.3-6.

* 30 Nom donné à l'organisation politique et sociale des peuples du Nord-Cameroun, organisation axée sur un pouvoir et une autorité absolus du Chef sur ses sujets.

* 31 Programme des radios régionales au Cameroun.

* 32 Le premier gouvernement camerounais avait été formé avant la fin du système de tutelle, suite à la mise en oeuvre de la Loi-Cadre de Gaston Défferre en 1957, donnant au pays une autonomie interne et la possibilité de créer ses institutions politiques.

* 33 Deni, B., P., et Lecomte, Sociologie du Politique, Tome II, Grenoble, P.U.G. 1999, p. 106.

* 34 Francis A., Fogue Kuate, « La situation de la Radiodiffusion de service public dans la partie septentrionale du Cameroun avant l'inauguration de l'émetteur de la B.B.C. à Garoua », in Le Messager, n° 2633, 16 juin 2008, p. 9.

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