De l'indemnisation des victimes des infractions amnistiées de la loi n?°09/003 du 7 mai 2009 portant amnistie pour faits de guerres et insurrectionnels commis dans les provinces du nord-kivu et du sud-kivu( Télécharger le fichier original )par Pascal Burume Cimanuka Université de Goma/RDC - Licence en Droit Public 2009 |
INTRODUCTION GENERALEI. PROBLEMATIQUEDes sociétés sortant de conflits armés ou de régimes autoritaires ont à faire face à des violations massives des droits de l'homme. Par ailleurs, le droit international impose aux Etats de poursuivre les crimes graves tels que le génocide, les crimes de guerre, et les crimes contre l'humanité. Cependant, il arrive que pour consolider la paix fragile ou la démocratie naissante, ces Etats décident de recourir à l'amnistie. Dans un tel contexte, l'amnistie est prise pour empêcher que les actes commis sous les contraintes de la guerre ou de tensions politiques ne soient poursuivis1(*). Une peine est normalement éteinte par son exécution, mais il est de cas où l'extinction de la peine intervient avant son terme. Le droit congolais connaît trois causes d'effacement des condamnations : l'amnistie, la réhabilitation et la révision2(*). Dans toutes ces situations, seule l'amnistie nous intéressera pour sa particularité qui a pour effet l'effacement de la condamnation et, en même temps l'extinction de la peine. L'amnistie est, à vrai dire, une mesure de clémence ayant pour effet d'enlever rétroactivement à certains faits leurs caractères délictueux3(*). Les faits ont bel et bien eu lieu, ils ne sont pas effacés, seul est effacé leur caractère infractionnel, leur dimension pénale4(*). Les clauses d'amnistie se retrouvent depuis l'antiquité dans tous les traités de paix qui concluent une guerre étrangère, et depuis le moyen âge, dans tous les édits de pacification qui terminent une guerre civile. Elles ont pour objet, une fois le règlement du conflit terminé, d'empêcher que la recherche des nouveaux griefs ne rallume les hostilités entre les belligérants, d'où une mesure d'apaisement à la fin d'un conflit5(*). En République Démocratique du Congo, le processus de paix annoncé par les accords de Goma de janvier 2008, qui avaient recommandé l'adoption d'une loi d'amnistie, ce qui avait été fait par l'Assemblée Nationale congolaise qui a adopté un projet de loi le 23 juillet 2008. Mais sur terrain les combats ont repris avant que le Sénat n'ait pu l'examine à son tour l'accord du 23 mars 2009 entre le gouvernement congolais et le CNDP a de nouveau appelé à l'adoption rapide d'une loi d'amnistie par le sénat. En effet, plusieurs sénateurs de l'opposition notamment l'ont rejeté, l'accusant d'être discriminatoire, tant sur le plan du contenu que sur le plan géographique. Finalement, le 5 mai 2009, à la suite d'une procédure quelque peu discutable, le parlement a adopté la loi d'amnistie sur base du rapport de la commission mixte paritaire, loi qui a été par la suite promulguée par le Président Kabila le 7 mai 2009. Notons que cette loi dite loi d'amnistie 2009 est accordée à tous les congolais résidant sur le territoire de la RDC ou à l'étranger pour faits de guerre et insurrectionnels commis dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu. Ainsi, la dite loi prévoit que tous les crimes, hormis les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre, commis pendant les différentes rebellions sont amnistiés ; et les bénéficiaires de cette mesure gracieuse échappaient, par conséquent à toute poursuite pénale. Aussi, en accordant l'amnistie, le législateur revient au concept de la réalité qui exclut du bénéfice de cette amnistie certains avantages tels que : les réparations civiles, sauf disposition expresse car il est de règle qu'elle ne préjudicie pas aux droits des tiers6(*). Concernant la loi précitée, elle n'a pas porté toute l'étendue de ses effets, dans le sens où les victimes des infractions amnistiées sont restées traumatisées et souffrant psychologiquement, ce qui se traduit par une atteinte à l'intégrité morale, suite au fait qu'elles ont été abandonnées à leur triste sort, n'ayant pas été dirigées vers d'autres voies de poursuite pour obtenir réparation. Par ailleurs, toutes les victimes de la criminalité, d'abus de pouvoir ou de violation des droits de l'homme doivent être traitées avec compassion et respect ; doivent avoir accès aux instances judiciaires et à une réparation rapide. Les procédures permettant d'obtenir réparation doivent être rapides, équitables, peu couteuses et accessibles, les victimes doivent être informées des droits qui leur sont reconnus pour chercher à obtenir réparation et protection, ...7(*) Dans la loi précitée, nous constatons qu'aucune disposition spécifique ne fait mention de la situation des victimes. C'est dans le but de restaurer les victimes dans leurs droits, il est universellement admis que si un homme porte atteinte à l'intégrité physique de son semblable, il faut réparer le dommage subi. Cette atteinte n'est pas le résultat de la seule intégrité corporelle, et en effet, elle peut aussi porter sur l'intégrité morale (l'atteinte aux droits et intérêts d'ordre primordial et économique de la victime)8(*). Ce droit, consacre essentiellement la responsabilité pour le fait personnel, les autres cas prévus ne constituent pas des exceptions9(*). La victime doit donc fournir une preuve, se rapportant aux faits, aux dommages tout en établissent leur lien de causalité pour que soit établie la responsabilité civile pour les infractions commises par les belligérants ayant bénéficié de la mesure d'amnistie. La situation des victimes de la criminalité et d'abus de pouvoir suscite un intérêt considérable aux niveaux national, régional et international10(*). Ce qui est nécessaire pour aider les victimes et de ce que cela signifie pour les différents éléments du système de la justice pénale. Il est évident que le meilleur moyen de venir en aide aux victimes est de prévenir la criminalité et les abus de pouvoir de façon à limiter au maximum les cas de victimisation par la violation des droits de l'homme et même de revictimisation. Mais en cas d'amnistie, une fois l'effet de fond étant déconsidéré, l'accessoire (le dédommagement) reste en suspens ou par fois écarté. Le législateur n'a pas prévu des dispositions pouvant aider les victimes à obtenir réparation. Ce dernier n'a pas tenu compte que si la loi en question étendait ses effets, non seulement sur l'action publique, mais aussi sur l'action civile. Pour trouver une solution à ce problème, il faut nécessairement des dispositions adéquates qui permettent un dédommagement efficace. A l'heure actuelle, le nécessaire serait de répondre à ces questions : · Y-a-il lieu d'établir la responsabilité afin d'indemniser des victimes des infractions amnistiées ? · Quelle est la procédure à suivre par les victimes pour obtenir des réparations civiles ? * 1 Justice transitionnaire, www.ictj.org. Consulté le 10 février 2010. * 2 MAKAYA Ngoma C., MUNENE YAMBA YAMBA, Eléments de Droit pénal général et de Droit pénal Spécial. * 3 DESPORTES (F), GUFENE, Droit pénal général, 2ème éd., ECONOMICA, Paris, 2003, p 1039. * 4 NYABIRUNGU Mwene SONGA, Droit pénal général Zaïrois ; DES, Kinshasa, 1989, p 354. * 5 GALLO, Blandine Koudou, Amnistie et impunité des victimes, HAMATTAN, Paris, 1998, p 19. * 6 KALONGO MBIKAY, Cours de Droit civil : Les obligations, Goma, ULPGL, Cours inédit, 1995-1996, p 132. * 7 HCDH/Centre pour les droits de l'homme, Droits de l'homme et application des lois, New York et Genèse, 1997, p 115. * 8 KALONGO Mbikay, Op. Cit., p 133. * 9 Idem, p 134. * 10 HCDH/Centre pour les droits de l'homme, Op. Cit, p 156. |
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