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Mouvements de résistance et culture politique au Sud-Kivu. Mise en évidence des fondements idéologiques et des actions revendicatrices.

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par Philippe KAGANDA MULUME-ODERHWA
Université officielle de Bukavu - Diplôme d'études supérieures en sociologie politique 2009
  

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CHAPITRE DEUXIEME :

SOCIOGENESE, PHYSIONOMIE ET DISTRIBUTION
GEOGRAPHIQUE DES MOUVEMENTS DE RESISTANCE AU
SUD-KIVU.

INTRODUCTION

En plus du Sud-Kivu, le phénomène de mouvement de résistance est vécu dans les autres Provinces de la RDC, particulièrement au Nord- Kivu, au Maniema et dans le Katanga. Des études « approfondies »42à ce sujet ont été menées sur les Provinces du Nord Kivu et du Maniema 43. Mais il est épistémologiquement imprudent de faire fi aux singularités reconnues à chaque système social même lorsque les homologies sont évidentes. C'est pourquoi, sans se défaire du contexte historique global de ces mouvements de résistance, nous voulons mettre en évidence leur spécificité historique justiciable des structures socio- politique et économique ainsi que d'un espace géographique particulier. C'est bien là une perspective géopolitique, historique et écologique se trouvant sur les pas de AMURI dans un exercice scientifique similaire au nôtre. Il affine à ce sujet :

« (....) fort du constat que le phénomène Mai- Mai ne saurait se manifester de la même manière partout ni comporter les même motivation chez le différents acteurs, nous proposons d'examiner les caractéristiques des milices Mai- Mai du Maniema pour en dégager la spécificité et la singularité historique(sic).

Cette perspective géopolitique, voire écologique et
historique, est susceptible d'éclairer l'opinion tant sur
les enjeux de la violence milicienne dans les espèces

42 Cette appréciation relève de nous.

43 Il ya lieu de rappeler ici le mémoire inédit de DES réalisé par F.D. AMURI MISAKO ayant pour titre Les Milices Mai- Mai au Maniema (Août 1998-fuin 2003) : Un mode d'affirmation politique des masses rurales, FSSPA, UNIKIS, 2008.

étatiques (enclavés) que sur l'impact des idéologies politiques et religieuses qui ont marquée les peuples de cette partie du territoire nationale dans leur évolution »(44).

Ce chapitre va faire un retour historique du phénomène dans le contexte national et de l'ancienne Province du Kivu.

Il analyse également le contexte d'émergence des mouvements de résistance, les motivations et la répartition géographique.

Avant d'entrer dans le vif de cette section, il nous semble nécessaire de faire un profil sociodémographique des mouvements de résistance soumis à l'observation systématique. Ainsi, nous invoquerons les aspects liés à l'âge, au niveau d'instruction, à la vie matrimoniale et au sexe. En effet la moyenne d'âge est de 35 ans chez les chefs de groupes et 22 ans chez les hommes de troupe. Le niveau d'instruction est du cycle d'orientation tandis que 95% sont mariés. 11 femmes ont été contactées contre 113 hommes.

2.1 Héritage historique

Les mouvements de résistance voire la militarisation n'est pas un

phénomène récent en RD Congo. Le mouvement messianique en a été

l'une de formes avant l'indépendance. Il s'agit principalement de Simon

Kimbangu et Kitawala. A ce sujet, Isidore Ndaywel et Nziem précise : « Lorsqu'on note les premières indices des
désobéissance civile, le pouvoir colonial est un prétexte pour lancer contre Kimbangu le mandant d'arrêt que les Pères Rédemptoristes réclament depuis longtemps. Réfugié dans la clandestinité, il demeura pendent trois mois, au nez et à la barbe de l'administration, à un endroit certainement connu par

ses milliers de fidèles. C'est au cours de cet épisode que le mouvement se teinte de xénophobie et d'hostilité à la colonisation. Le prophète annonça la venue imminente du Christ qui renverserait le pouvoir des Blancs. En attendant, il

fallait refuser de payer l'impôt et de se soumettre aux cultures obligatoires. »45

Plus tard, il souligne ce qui suit à propos de Kitawala :

« Le Kitawala connut un cheminement semblable. C'est à l'autre extrémité du pays, au Katanga qu'il amorça son action politico-religieuse (...) le Kitawala fut compris non seulement comme une instance d'éveil (des Noirs) mais aussi comme synonyme de « règne », « avènement » (sous-entendu « de Dieu) ».46

Ces mouvements messianiques ont des influences notables dans le vécu des peuples d'autres provinces notamment en alimentant les conflits. Au lendemain de l'indépendance (1960), les sécessions Katangaise et du Sud-Kasai furent aussi l'expression d'une protestation contre l'ordre politique existant quoique fondées sur des motivations essentiellement politiques.

Le germe de la nature actuelle des mouvements de résistance se

trouve dans la conquête révolutionnaire connue sous l'appelation des

rebellions. Nous retenons toujours de Ndaywel le récit suivant appuyé par

les recherches de Bengila, Bénoit verhaegen,Monguya Mbenge et d'autres. « (.......) la révolution lacée connut deux
mouvements : l'un à l'ouest et l'autre à l'est. Le

premier fut lancé et dirigé par P. Mulele dans le Kwilu à partir du mois d'ao~t 1963. Après ce premier succès, les amis de Mulele à Brazzaville s'efforcèrent de créer une voie d'accès par la quelle ce maquis pourrait être ravitaillé de l'extérieur. C'est ainsi que fut ouvert un second front dans la région de Bolobo-Mushie (juillet 1964). Cette région, baignée par le fleuve, permettait

45 I.NDAYWEL et NZIEM, Histoire générale du Congo. De l'héritage ancien à la République Démocratique,

Paris et Bruxelles, De Boeck et Larcier, 1998, pp. 416-417.

46 Ibide11, p.421.

un contact avec le Congo- Brazzaville en même temps qu'elle autorisait une fonction avec le maquis du Kwilu, pour navigation sur le Kasai, entre Mushie et Mangai. Le second mouvement, plus important par son ampleur, partait de la région Uvira-Fizi qui fut conquise en avril 1964 ; de là, il gagne le Nord- Katanga par la conquête d'Albertville (19 juin 1964), puis le Maniema dont la capitale fut occupée par après (24 juillet) et en fin le Haut -Congo où stanleyville conquise (5ao~t) devint la capitale d'une « République Populaire du Congo ».

(....) dans la région de l'est, les combattants proclamaient volontiers leur invulnérabilité au cri de << Mai- Mulele »

(...) A l'ouest comme à l'est, on entendait combattre les << néo-colonialistes », les << valets de l'impérialiste », << ceux- là qui ont rendu le Congo aux américains » et qu'on appelait les PNP (traduit par << penepene » na mundele). Ce n'étaient plus les Belges et les Américains qui étaient visés, mais plutôt les nationaux à leur solde. On luttait pour instaurer la << révolution » qui était la << deuxième indépendance », le règne de la << prospérité économique », du << partage égal », << de la paix, » << de la liberté totale, de la démocratie ».

En effet, en deux ans s'était instauré un véritable dualisme entre deux univers sociaux : d'un côté, la classe politique née de la décolonisation, qui détenait le monopole de la puissance bureaucratique et qui partageait avec les Blancs le pouvoir économique et social ; d'autre part, il y avait la masse, emportée plus gravement qu'auparavant aux problèmes du chômage, de la misère sociale et de la faim. On réclamait ainsi une plus grande justice politique et dans le même temps, la libération de Gizenga (surtout au Kwilu), le

jugement des assassins de Lumumba (surtout à l'est) et la défense de l'unité du pays (retour à six provinces au lieu de 21), Vendue (disséquée) par le « gouvernement fantoche » d'Adoula la conquête révolutionnaire précédait de la même manière à quelques nuance près l'exploitation des conflits locaux (entre tribus et entre parties locaux), l'utilisation des armes traditionnelles et des recettes ferrières locales (immunisation contre les balles ennemies, technique pour rendre invincible et donc invisible aux yeux de l'ennemie. >>(47).

Une autre variante influente historique, c'est la formation des groupes guerriers tribaux qui prirent un essor considérable dans la province du Nord - Kivu autour des années 1993. Les populations rurales, principalement dans les zones de Masisi et de Rutchuru ont construit des idéologies de xénophobie les unes contre les autres. Ce qui a conduit à la formation des milices populaires utilisant les méthodes superstitieuses de protection, des armes blanches et à feu pour s'anéantir. Ce sont des groupes armés à tendance ethnique dénommés : Katuku à Walikale, Ngilima à Masisi ; Batiri à Rutshuru, Lubero et Beni .

En 1993, des conflit fonciers ont opposé les populations autochtones (Hunde, Nyanga) à celles d'origine Rwandaise (Hutu, Tutsi). Ces derniers étaient organisés en une association dénommée Mutuelle des agriculteurs de Virunga MAGRIVI en sigle. Les Hunde et Nyanga s'étaient organisés aussi en mouvement « Katuku >>. Des combats violents allant aux tueries, déplacements des populations, destruction de l'économie avaient caractérisé ce conflit.

Un effet de contagion sur les nouveaux mouvements de résistance naissant qui exprimaient au paravent de besoin de protection locale avant de nourrir des ambitions à portée régionale voire nationale. D'autres, à

l'issue des divisions internes vont profiter d'un contexte politique de recherche effrénée de la paix après les élections de 2006.

En conséquence, une occupation spatiale de ces mouvements s'est manifestée sur toute la Province du Sud-Kivu à l'exception du Territoire d'Idjwi. Certains ont assuré une domination politique et militaire et d'autres se sont occupés essentiellement de la dimension militariste. C'est pourquoi, nous voulons comprendre séparément la genèse de ces mouvements de résistance, leur physiologie sociale et leur occupation géopolitique de l'espace.

2.2.1. Sociogénèse, physionomie et Leadership des mouvements de résistance.

Les informations recueillies permettent une classification de mouvements de résistance du point de vue de leur genèse.

Il s'agit de types suivants :

- les mouvements de résistance à tendance nationaliste

- les mouvements de résistance nés du contexte de guerre.

- les mouvements de résistance nés de l'opportunisme politique - les mouvements de résistance de défense locale

- les mouvements de résistance à tendance ethniciste.

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984