3.2.2 Le manque d'organisation et de
structure du secteur est un frein à la synergie
écotouristique
La salarisation des emplois touristiques présente
certes l'avantage des revenus plus conséquents et plus stables, mais est
loin d'intégrer les populations locales dans la gestion des enjeux.
Economiquement parlant, les revenus redistribués sont dorénavant
devenus un complément nécessaire, réduisant au moins
partiellement la situation de pauvreté des populations. Ces emplois
aident à lutter contre le fort chômage rural, créant une
alternative aux activités traditionnelles de survie, comme
l'agriculture. Ils sont aussi un moyen de sédentariser les villageois,
réduisant ainsi les flux migratoires internes et surtout l'exode rural.
Si le tourisme paternaliste n'apporte pas autant que le pourrait
l'écotourisme aux communautés, cet aspect économique et
social, par l'emploi, est un pis-aller dans un contexte d'extrême
pauvreté, où le développement de l'écotourisme
semble souffrir d'un manque de support.
Si la demande et la volonté de faire de Madagascar une
destination écotouristique de premier rang existent, le
développement de cette niche est ralenti par une structure et une
organisation du secteur qui font défaut. La retombée sur les
emplois et la redistribution de revenus s'en fait directement ressentir. Ces
établissements, de taille souvent modeste (10 à 15 chambres), se
situent majoritairement dans les zones enclavées, mal desservies.
L'accès à ces villages est difficile, d'une part par la faible
fréquence et fiabilité des moyens de transports, et d'autre part
par le mauvais état des infrastructures de communications reliant ces
zones. Le transport est long et cher, non seulement pour les personnes, mais
aussi pour les marchandises. De même, la qualité des services
proposés est inférieure aux établissements hôteliers
traditionnels, excepté les rares écolodges haut de gamme. Les
normes internationales d'hébergement ne se rencontrent que peu de fois
en réalité. Aucune norme n'existant d'ailleurs en termes
d'écotourisme, la qualité des prestations varie très
largement. Institutionnellement, le manque de transparence de
établissements écotouristiques, ne jouissant d'aucune
certification reconnue et reconnaissable, peut laisser le consommateur dans une
certaine confusion dans ses choix. La conséquence directe pour les
établissements est une faiblesse de fréquentation, impliquant une
adaptation des ressources humaines à cette situation, celle-ci
étant due à un défaut d'infrastructures correctes et un
défaut de lisibilité.
De plus, la coopération entre les acteurs est une
condition essentielle au tourisme pour en faire un vecteur de
développement régional. Or, ce pouvoir de négociation
semble parfois faire défaut aux communautés à
Madagascar : ne valorisant pas elles-mêmes les ressources
naturelles, le montant des revenus perçus va être le fruit de
négociations entre ces protagonistes. L'association Madagascar National
Parks, gestionnaires des parcs naturels, reverse par exemple 50% de ses
recettes aux communautés. Des partenariats
communautés-privés peuvent exister pour soutenir le
développement local. C'est le cas de certains opérateurs
privés de la région d'Ifaty, qui font appel aux services locaux
de transports (pirogues). Mais ces accords ne sont porteurs qu'à la
condition où chacune des parties respecte ses engagements, ce qui,
malheureusement, n'est pas toujours le cas [Chaboud, Méral et
Andrianambinina, 2004].
L'Etat malgache semble aussi répondre à cette
nécessité de structuration du secteur en créant des
programmes d'appui et de professionnalisation du tourisme. Cette
démarche fait partie des priorités établies dans le
Défi 8, Engagement 6 du Madagascar Action Plan,
« promouvoir et développer intensivement le secteur du
tourisme » [MAP, 2006]. La création de l'Institut
National de Tourisme et d'Hôtellerie (INTH) à eu pour vocation
d'assurer la formation aux métiers du tourisme, en proposant des
filières de formation initiale et continue, pour faire de ce secteur une
véritable activité professionnelle. Selon l'INTH, son objectif
est de « former au métier de demain et au besoin des
entreprises ». Cette formation, d'une durée de deux ans,
sanctionne d'un Diplôme d'Etudes Supérieures en Tourisme et
Hôtellerie (DESTH), et incluse douze semaines de stages. La
professionnalisation des métiers du tourisme et de l'hôtellerie
permet d'améliorer la qualité générale des
prestations touristiques de l'île, dynamisant ce secteur, créant
une opportunité aux acteurs locaux de mieux maitriser les enjeux de
cette activité et de profiter à un degré plus
poussé des vertus de l'écotourisme.
Cependant, une meilleure intégration des
activités touristiques dans le tissu local peut aussi répondre
à d'autres attentes. Si les enjeux économiques et sociaux sont
surtout profitables aux communautés, le touriste n'est pas non plus
laissé pour compte en décidant de pratiquer
l'écotourisme.
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