Les "forces de l'invisible" dans la vie sociopolitique au Cameroun : le cas de la localité de Boumnyebel( Télécharger le fichier original )par Alain Thierry NWAHA Université Yaoundé 2 (Soa) - D.E.A Science Politique 2008 |
IV PREMIÈRE PARTIEV POUVOIRS ET FORCES DE L'INVISIBLE DANS LA LOCALITÉ DE BOUMNYEBEL À L'ÉPOQUE COLONIALELa compréhension du présent et la projection dans l'avenir passent nécessairement par une analyse attentive du passé. En effet, comme l'affirmait déjà QUOHÉLETH ou L'ECCLÉSIASTE (1. 9-10), quel que soit l'évènement qui survient de nos jours comme une nouveauté pour nous, il n'en est rien en réalité, puisque cela s'est déjà produit dans le passé et se produira certainement encore donc : « rien de nouveau sous le soleil ! »40(*). C'est à partir de cette remarque pertinente que nous avons subdivisé cette Première Partie en deux (2) mouvements essentiels afin de démontrer la permanence du recours à l'Invisible (même la période coloniale n'a pas réussi à enrayer le phénomène, mais semble plutôt l'avoir tonifié). Dans un premier mouvement, nous avons donc commencé par souligner que les Basaa en général, ceux de la localité de Boumnyebel en l'occurrence, avaient une perception assez particulière de la colonisation (Chapitre 1) et, dans le deuxième mouvement, nous avons essayé de démontrer que c'est de cette « perception » de l'arrivée conquérante des Européens sur la « Terre ancestrale », que découlera le souci majeur de défendre, coûte que coûte, cette dernière (Chapitre 2). CHAPITRE ILA PERCEPTION DES BASAA DE BOUMNYEBEL DE LA COLONISATION EUROPÉENNE COMME ACTE HISTORIQUE « SUBVERSIF » ET « ALIÉNANT »Tout de go, il semble important de souligner que les Basaa de Boumnyebel, comme les autres peuples bantus en général, sont des Noirs Africains très attachés à la terre. En fait, « le milieu favori de la vision béatifique » du Noir étant la terre (D. ZAHAN, 1970 : 33), nous pouvons affirmer que les Basaa de Boumnyebel en l'occurrence, sont avant tout des terriens obstinés. Ce qui justifiera sans doute leur obsession, leur obstination à défendre celle-ci contre celui qui sera considéré comme « un envahisseur » (le Colonisateur). Par ailleurs, nous pouvons mentionner que cette capacité de résistance découle également du fait que : « L'Afrique bantu est un monde traditionnellement rural qui doit l'essentiel de son originalité aux civilisations paysannes. Ainsi, à chaque société correspond une culture particulière faite d'objets naturels, de comportements institutionnalisés, d'organisations sociales, de connaissances techniques, de conceptions philosophiques et religieuses de créations esthétiques. Cet ensemble propre à chaque groupe constitue un héritage collectif que chaque génération reçoit de la précédents et transmet à la suivante » (OBENGA T., 1989 : 174). À partir de-là, quand nous parlons de la perception des Basaa de Boumnyebel de la colonisation européenne, nous voulons souligner que : eu égard à leur « civilisation paysanne » et à leur « héritage collectif transmis de génération en génération », les Basaa ne virent pas d'un bon oeil l'arrivée conquérante des Européens sur leur terre. Une question mérite d'être posée ici : concrètement, comment la colonisation européenne avait-elle été perçue et vécue par les Basaa, un peuple fier à l'instar des autres peuples bantus ? Pour répondre à cette interrogation, nous avons essayé de démontrer d'une part que : pour les Basaa en général et ceux de Boumnyebel en particulier, la colonisation européenne fut perçue comme un « acte subversif » en ce sens qu'il s'agissait non seulement d'une invasion étrangère, mais également d'une profanation de la « terre ancestrale » (I). D'autre part, nous nous sommes attelés à démontrer que : les Basaa de Boumnyebel vécurent également cette colonisation comme un « évènement aliénant » voire un « crime de lèse-majesté » vis-à-vis des descendants et des ascendants (II). * 40 Extrait de La Bible (1988 : 1016). |
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