Introduction :
Créée en avril 1952, la ville de Pikine est une
agglomération périphérique située au centre de la
région de Dakar. L'histoire de Pikine se confond à celle de la
restructuration de Dakar dans le cadre de projets d'aménagement urbain
avec la création de banlieues peuplées de déguerpis des
quartiers centraux et de migrants ruraux à la recherche d'un emploi.
Le département de Pikine fait parti des trois
circonscriptions administratives de la région de Dakar
créées par le décret 83.1128 du 29 octobre 1983. Il couvre
une superficie de 92,5 Km2 représentant 17 % du territoire
régional. Le poids démographique du Département est
estimé à 51 % de la région de Dakar. Pikine est devenue
une commune par le décret n° 83-1129 du 29 octobre 1983. Avec la
loi n° 96-06 du 22 mars 1996 et le décret n° 96-745 du 30
août 1996, elle a obtenu le statut de ville, dotée de 16 communes
d'arrondissement. C'est le chef-lieu du département de Pikine, dans la
région de Dakar. Gonflée par l'exode rural, la population
croît très rapidement et tend aujourd'hui vers le million
d'habitants : en 2007, selon les estimations officielles, Pikine compterait 874
062 personnes. Selon les données de la Direction de la Prévision
et de la Statistique1, il occupe, sur le plan national, la
première place du classement des départements par la taille
démographique en 1998. Pikine est construite essentiellement sur la zone
des Niayes qui, du point de vue hydrologique, est marécageuse avec un
relief de dunes fixées aux formes variées, parfois
groupées, parfois isolées souvent entourées de
bas-fonds.
Ainsi, il est confronté à d'énormes
problèmes liés à son environnement et à son cadre
de vie. Pikine est caractérisée par l'existence d'habitats
spontanés et irréguliers sous équipés dont la
restructuration se heurte à des contraintes d'ordre foncier, financier
et de relocalisation de populations et une absence quasi-totale de lotissement.
L'occupation par l'habitat de zones inondables pendant l'hivernage engendre des
difficultés d'assainissement qui constituent l'une des premières
préoccupations des autorités locales. De plus la gestion des eaux
usées (eaux vannes, eaux de cuisine, eaux de lessive, eaux de toilette)
constitue une préoccupation majeure aussi bien pour les populations que
pour les autorités centrales et municipales.
Le mode d'assainissement existant sur toute l'étendue du
Département porte sur deux types :
1 Direction de la Prévision et de la
Statistique : Population du Sénégal : Structures par sexe et par
âge en 1988 et Projection de 1989 à 2015. Septembre 1992.
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Un système collectif (réseau d'égout sur
une faible partie du territoire) et un système autonome, individuel avec
des latrines disposant de fosses plus ou moins étanches et des
puisards.
Le niveau d'équipement en égout est relativement
faible. En effet, seul Pikine régulier (structuré) dispose d'un
système de canalisation d'environ 29700 mètres linéaires
répartis entre les communes d'arrondissement de Pikine Ouest (11 500m),
Pikine Nord ( 15 700m) et une faible partie de Djidda Thiaroye Kao (2500m) sur
les 16 communes d'arrondissement que compte le département.
L'indice de raccordement à l'égout est de
l'ordre de 3,8 ml par hectare sur toute l'étendue du territoire
départemental ; ramené au niveau de la population, ce ratio est
de 0,04 ml par habitant et 0,8 ml par concession. Ces indicateurs traduisent de
façon très nette le degré de souséquipement en
matière d'assainissement dans le Département.
L'assainissement autonome reste le mode le plus usité
dans le département de Pikine et concerne plus de 90 % des habitations.
Ce mode d'assainissement consiste en des latrines avec des fosses d'aisance
maçonnées dont l'étanchéité fait
généralement défaut et des puisards initiés par des
programmes tels que le DSQY (Développement social des quartiers de
Yeumbeul) et le PAQPUD (Programme d'Assainissement des Quartiers Péri
Urbains de Dakar) .
Les particularités des systèmes d'assainissement
individuel sont leur installation dans des zones à sol perméable
avec des conséquences néfastes sur la nappe qui est alors
fortement polluée par les nitrates.
Ainsi, la problématique de l'assainissement se pose
avec acuité dans cette zone d'étude de Pikine où il
n'existe quasiment pas de système de gestion des eaux aussi bien
pluviales que domestiques.
La notion d'assainissement reste très large dans sa
définition, «On entend par assainissement l'ensemble des
travaux que doivent effectuer en se conformant aux différents codes
liés à l'assainissement, les particuliers, les
collectivités et les pouvoirs publics pour faire disparaître dans
les agglomérations toutes causes
d'insalubrité»2. Selon cette définition
reprise par le Comité d'experts de l'environnement (OMS) dans les
années 50 l'assainissement implique donc le contrôle et
l'approvisionnement public en eau, l'évacuation des excrétas et
des eaux usées, l'élimination des déchets et des vecteurs
de maladies, des conditions de logement, des aliments et
2 Guide de l'assainissement individuel, OMS, 1995
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de leur manipulation, des conditions atmosphériques et
des conditions de sécurité sur les lieux de travail. Cette
définition a le mérite de considérer les causes de
l'insalubrité pour un environnement organisé selon des
règles et des normes précises. Entre temps, les besoins, en
particulier des pays en voie de développement, en service
d'assainissement de base ont beaucoup augmenté, en raison principalement
de l'expansion démographique et de l'urbanisation croissante. Face
à cette dramatique situation, les Nations Unies ont instauré la
Décennie Internationale de l'Eau Potable et de
l'Assainissement3. Au cours de cette période, le terme
«assainissement» défini comme se rapportant uniquement
à l'élimination des excrétas et des eaux usées a
été approuvé par le monde entier.
En 1986, un Groupe d'Etude de l'OMS a officiellement
donné la définition suivante: «...les moyens de collecte et
d'évacuation hygiénique des excréta et des déchets
liquides de la communauté pour protéger la santé des
individus et de cette communauté ».
Ainsi, l'évacuation hygiénique, ne comportant aucun
danger pour la santé, représente l'objectif fondamental de tous
les programmes d'assainissement4.
Il est cependant intéressant de souligner qu'à
cette époque ce sont les normes d'hygiène qui ont prévalus
et qu'il n'était nullement question de normes environnementales.
Or, actuellement, on s'oriente vers une approche
environnementale qui se soucie de toute la chaîne: collecte, transport,
épuration et rejet ou réutilisation des eaux
épurées5. D'où un retour à la
définition de 1956 qui semble être plus adapter à une
démarche environnementale. Dans celleci l'OMS considérait
l'assainissement comme « une action visant à améliorer et
à contrôler tous les facteurs qui dans les milieux physiques ou
évolue l'homme sont susceptible d'influer défavorablement sur son
développement physiologique sur sa santé et sa
longévité ».6
Dans le cadre de notre étude, l'accent sera mis sur
l'assainissement liquide qui, au regard du nouveau code de
l'assainissement, s'entend de la gestion des eaux usées, des
excrétas et des eaux pluviales en vue de prévenir les dommages
liés à la santé à la sécurité de
l'homme, ainsi qu'à l'environnement7.
3 DIEPA: 1981-1990
4 Rapport OMS, 1987
5 Rapport Stratégie Nationale de
l'Assainissement, Projet Sectoriel Eau, 1998
6 Rapport, OMS 1956
7 Loi n° 2009-24 du 08 juillet 2009 portant code
de l'assainissement
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Ainsi, le nouveau code de l'assainissement tant entendu
servira de pièce maîtresse pour l'analyse des problèmes
liés à l'assainissement car le secteur de l'assainissement au
Sénégal à toujours été marqué par la
présence de textes disparates tous traitant de l'eau. Ce texte vient
harmoniser la législation dans ce secteur tout en amenant un
élément décisif qui est la clarification de
l'assainissement eaux pluviales tributaire d'une gestion marquée par une
multitude d'intervenants.
L'assainissement est au coeur du droit de l'environnement sa
gestion se pose avec le développement des villes accentué par un
habitat sauvage et une croissance exponentielle de la population.
Le secteur de l'assainissement est défini par un
ensemble de politiques et stratégie avec des outils pour sa
planification et sa promotion, ainsi qu'un cadre juridique et
réglementaire, financier et enfin un cadre institutionnel. Ces
différents aspects caractérisent l'assainissement.
Malgré tant d'années de planification et
d'actions sur le terrain, le problème reste intact. Face à ce
sentiment d'impuissance des autorités devant cette catastrophe, un
diagnostic mérite d'être fait afin de déterminer les
obstacles qui freinent l'assainissement du département de Pikine
(Premier partie). Mais aussi, l'impact environnemental de
cette situation sur le cadre de vie des populations qui sont les plus
vulnérables face aux pathologies comme le paludisme qui reste la
principale cause de mortalité dans cette zone. En outre, la
problématique de l'assainissement nous permettra d'analyser toutes les
questions liées au foncier, à l'urbanisme et à
l'occupation des sols afin de proposer des solutions durables
(Deuxième partie), sur la base d'études qui
semblent préconisées la piste de la restructuration des quartiers
irréguliers. En perspective de nouveaux systèmes d'assainissement
doivent être mis en oeuvre avec parallèlement la promotion du tout
à l'égout pour une protection efficace de l'environnement.
PREMIERE PARTIE :
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DIAGNOSTIC DE L'ASSAINISSEMENT DANS LE DEPARTEMENT DE
PIKINE CHAPITRE PREMIER : LES INSTRUMENTS AU SERVICE DE
L'ASSAINISSEMENT
Au Sénégal, deux instruments importants
participent à la mise en oeuvre de l'assainissement notamment le cadre
juridique qui polarise un ensemble de textes de loi (section 1) et un cadre
institutionnel regroupant divers acteurs qui interviennent dans ce secteur de
l'assainissement (section 2).
Section 1 : le cadre légal de
l'assainissement
L'assainissement est régi par un cadre juridique
alimenté par un ensemble de textes législatifs (paragraphe I),
d'une part, et de diverses stratégies de gestion de ce secteur, d'autre
part (Paragraphe II).
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