UNIVERSITE DE LIMOGES FACULTE DE DROIT ET DES
SCIENCES ECONOMIQUES
PROGRAMME UNIVERSITE PAR SATELLITE AGENCE
UNIVERSITAIRE DE LA FRANCOPHONIE (AUF)
MASTER DROIT INTERNATIONAL ET COMPARE DE
L'ENVIRONNEMENT Formation a distance, Campus Numerique g ENVIDROIT
p
L'APPLICATION EN AFRIQUE
CENTRALE DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION
Mémoire présenté par Romain Bertrand
DONGMO
Sous la direction de Monsieur Emile Derlin KEMFOUET
KENGNY Docteur en droit international de l'environnement de
l'Université de Limoges
AOUT / 2010
La FacuCte de Droit et des Sciences Economiques de
L'Universite de Limoges n'entend donner aucune approbation ni improbation aux
opinions emises dans ce memoire. CeCCes-ci doivent en consequence titre
consid~rees comme propres à Ceurs auteurs.
Dédicace
A
Jean-XeCy PA'ULICAN, Ce coordonnateur universeC des
causes d~sesperees
&
TSOBENG Jeanne « Ma'a Tang 0 mon inepuisabCe
source d'energie renouveCabCe.
Remerciements
« Une seule main ne peut pas faire un paquet
» nous enseigne l'adage camerounais, lequel a trouve un terrain fertile
d'application dans le cadre de ce travail, dans la mesure ou plusieurs
personnes ont contribue a la realisation de cette ceuvre dont je ne suis
finalement que le maitre de l'ouvrage ! Je tiens en consequence a exprimer la
sincere gratitude a :
- M. KEMFOUET KENGNY Emile Derlin, Docteur en droit
international de l'environnement de l'Universite de Limoges qui aurait presque
tout abandonne pour veiller au bon deroulement de ce travail ; il aurait aussi
su, sans reserve, etre patient, critique et conseil en repondant a toutes mes
sollicitations, meme celles qu'on aurait trouve saugrenues. Son expertise et sa
rigueur scientifique qui resteront un modele pour moi, ont permis de peaufiner
ce travail qu'il a accepte du fond du cceur de diriger ;
- MM. William KAMDEM et Alexis KWONTCHIE de la plateforme FOAD
de l'AUF Afrique centrale dont la disponibilite a ete un atout durant le
processus de preselection et d'inscription;
- MM. Jean-Marc LAVIEILLE et Francois PELISSON, respectivement
responsables pedagogique et de la gestion du Master, dont les messages
incessants et les relances promptes ont ete notre boussole ;
- Les responsables et enseignants de la FS JP de l'Universite
de Dschang, le Pr. Francois ANOUKAHA Doyen ; les Dr DOUNKENG ZELE Champlain,
METENBOU Mathias, NGUIHE KANTE Pascal, TIMTCHUENG Moise, BILONG Salomon,
NGUEKEU DONGMO Pierre, KEUTCHA T. Celestin, D JOUTSOP Faustin, SOH FOGNO Denis
Roger, BIPELE K. Jacques, NJEUFACK Rene, tous les enseignants de la Faculte,
dont la rigueur scientifique et l'ouverture me servent toujours d'exemple
depuis mon admission au sein de cette illustre institution universitaire ;
- Les responsables et enseignants de la FS JP de l'Universite
de Douala, Le Pr. MODI KOKO Bebey Doyen ; les Dr MOUANGUE KOBILA, NGATSI Jean,
MOMO Claude entre autres, qui m'ont inspire dans cette Faculte au sein de
laquelle le passage a ete un prealable obligatoire pour la continuite de mon
parcours universitaire ;
- Papa DONGMO Etienne (Revenant), Mmes DONGMO Marie, TSOBENG
Jeanne et toute la grande famille TEDONTEGHO dont les epreuves recentes m'ont
permis d'affronter avec plus de stoicisme et espoir, chaque seconde de cette
formation ;
- Papa KEMTSUGNING Nestor et famille, dont le coup d'ceil
vigilent a ameliore ce travail au plan grammatical, orthographique et du style
;
- Maman KENFACK Pauline, la mamelle nourriciere qui n'a eu de
cesse de produire de delicieux plats accompagne des encouragements et des
conseils divers ;
- Les familles DONMEZA, TSAMO, JAZET, BOUGO, DONGMO, KITIO,
TETOUOM, YAKO, NOUATAP, NGUEZONG, TSAYO, NGOUNI ;
- S.M. Victor KANA III, Chef Superieur Bafou et S.M. Fo'o
Nkong-Ni Dr Jean Pierre FOGUI dont le souci pour un environnement
ecologiquement viable est palpable a grande echelle ;
- M. le Delegue ASSONKEN Benoit, dont l'expertise et
l'experience au plan methodologique, ajoutee a l'esprit d'ouverture et
d'initiative a inspire l'orientation ulterieure de ce travail vers une etude
specifique de cas ;
- MM. Ben, Malcom, Ronny et Mme Annie ASSONKEN dont les rappels,
les encouragements et les demarches a Paris, bien que lointains transpirent de
chaque ligne de ce travail ;
- Lieutenant DONCHI N. Christophe, les Mes. LEKEUZEU Herve,
GNIMGBIE M. Gervaise, DMOTENG K. Erve, TIOMELA T. Serge A., KEMZANG T.
Ghislain, KONWO MELOU Clovis, membres actifs de l'attelage dont la contribution
pour la redaction de ce memoire a commence par le choix du theme ;
- M. KONLACK Raymond et famille, pour l'assurance qui se degage
de ses propos et dont je me suis tant bien que mal nourri pour surmonter
certaines difficultes de la vie et pendant ce travail ;
- MM. KAMGA, Celestin, Mmes KONLACK Marcelle ; KAMGA Rosine,
Carine et tous leurs collaborateurs de GIC PROBA pour les assistances diverses
;
- M. DIBEBE, administrateur provisoire de Royal Travel &
Services ltd. qui m'a laisse libre et total acces aux ressources de la societe
(unites informatiques, Internet, telephone), toutes choses sans lesquelles je
n'aurai jamais pu rendre ce travail dans les delais ;
- Tous les proches collaborateurs ; Mmes TCHOUANGUEP KONLACK
Marlene, D JOMATCHOUA Edwige, FOTIE Crescence ; MM. TAMOLA Michel (mon p"re) et
NGONGANG Eric pour leur harcelement de proximite en tout temps et en tout lieu,
a temps et a contre temps pour la finalisation a bonne date de ce travail ;
- Mlles. KANA Judith, NGUEFACK Judith, MAFFO Liliane, NEPEZI
T. Clemence, Djeinabou, D JEYA Guylene, DONFACK Phalonne, TIOBOU Godlive,
TCHINDA Sylviane, Sylviane de Denver, EKEM Julie, Audrey, Christelle, KUETE
Viviane, TSAMO Natacha, DONGMO Doris, NZETE Cyrille, TEMATIO Josiane, YAWAT T.
Milie dont les contributions ont ete benefiques ;
- Mmes KEMTSUGNING Marie-Claire, TSAMO Cecile, KONLACK Collette,
TETOUOM Yolande, TSAYO Hortense Mirabelle ;
- MM. GNINTEDEM LOWE P. J., DJEYA Yves, NGUEFACK Andre, NJOYA
Beaucaire, NOUATAP Paul, DEUGUI Vincent de Paul, TCHATAT Gaudin, JAZET Collins,
DONFACK J.C., Michel. NGNINTEDEM Dieudonne, TIOMEGUIM Francois (Chef service),
PANKA Paul ;
- MM. Franklin, Romuald, Patrick, Garcial, Rostant, Juslain,
Appolinaire et Jores DONGMO ; NGUEZONG Alain, NGUEZONG Honore, GUIMGO Eloge,
DONGMO Alain, DONGMO Paul, DTSAFACK Antoine Clovis ;
- Tous mes camarades de la promotion DICE 2010, en
particulier Mlle BEN TCHINDA N. Tahitie pour tout ce que j'ai partage avec eux,
aussi bien sur la plateforme « ENVIDROIT » que dans les diverses
bibliotheques, au telephone et sur les messageries instantanees ;
- Mention speciale est faite a l'endroit de Monsieur
Jean-Kely PAULHAN, mon ami venu d'ailleurs, et dont les sacrifices multiformes
m'accompagnent depuis toujours, depuis « EDUDROIT ». Tres cher ami,
trouvez en cette oeuvre scientifique un commencement qui pourrait, je l'espere,
attenuer quelques uns de « nos » echecs ;
Je me felicite moi-meme en invoquant le Seigneur Tout
Puissant qui m'a inspire et permis, grace a ma formation en Informatique
d'editer (saisie, mise en page et en forme et impression) ce document
scientifique ;
- Enfin (pas parce que c'est des moindres mais au
contraire), toutes les Ames de bonne volonte qui ont facilite mes
recherches a un quelconque niveau, et que je n'ai pas nommement mentionne ici,
qu'ils acceptent l'expression de ma profonde gratitude, Dieu leur revaudra tout
ce qu'ils ont fait.
Principales abréviations
§ : Paragraphe
A.E.F. : Afrique Equatoriale Française
AFDI : Annuaire francais de droit international
Aff. : Affaire
AUF : Agence Universitaire de la Francophonie
B.D.E.A. C. : Banque de Développement des Etats de
l'Afrique Centrale. B.E.A. C. : Banque des Etats de l'Afrique Centrale.
C.E.E.A. C.: Communauté Economique des Etats de l'Afrique
Centrale C.E.M.A. C.: Communauté Economique et Monétaire de
l'Afrique Centrale C.I.J. : Cour Internationale de Justice
C.O.B.A. C.: Commission Bancaire de l'Afrique Centrale. cf. :
Confere
CJ CE : Cours de Justice des Communautés
Européennes D.I.U. : Diplome Inter Universitaire
E.I.E.D. : Ecole Inter Etat des Douanes.
Ed. : Editions
EIE : Etudes d'impact environnementaux
Et alt. : Et autres
Et ss. : Et suivants
F.S.J.P. : Faculté des Sciences Juridiques et Politiques
FOAD : Formations Ouvertes et a Distance
HYSA CAM : Hygiene et Salubrité du Cameroun
I.S.S.E.A. : Institut Sous-régional de Statistique et
d'Economie Appliquée. I.S.T.A. : Institut Sous-régional
multisectoriel de Technologie Appliquée, de planification et
d'évaluation des projets.
Ibid. : Ici meme
L.G.D.J. : Librairie Générale de Droit et de
Jurisprudence
MINEP : Ministre de l'environnement et de la protection de la
nature
MINESUP : Ministere de l'Enseignement Supérieur
n° : Numéro
O.N.G. : Organisation Non Gouvernementales
OHODA : Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des
Affaires op. cit. : Cité plus haut, précité
p. : Page
P.M : Premier Ministre
P.U.A : Presses Universitaires d'Afrique
P.U.F. : Presses Universitaires de France
PNUE : Programme des Nations Unies pour l'Environnement pp. :
Pages
PUA : Presses Universitaires d'Afrique
RIO : Rio de Janeiro
RJE : Revue Juridique de l'Environnement
S.M. : Sa Majesté
SMIG : Salaire minimum interprofessionnel garanti
SOPE CAM : Société de Presse et d'Editions du
Cameroun U.D.E. : Union Douaniere Equatoriale
U.E.A. C. : Union Economique de l'Afrique Centrale U.M.A. C. :
Union Monétaire de l'Afrique Centrale UEMOA : Union Economique et
Monétaire Ouest Africain US : United States
Sommaire
INTRODUCTION GENERALE 1
PREMIERE PARTIE : L'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION PAR LES AUTORITES ADMINISTRATIVES DANS LES ETATS
D'AFRIQUE CENTRALE 13
CHAPITRE I : LE CHAMP D'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION 13
SECTION I : LE DOMAINE D'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION .. 13 SECTION II : MODALITES D'APPLICATION DES
PRINCIPES DE PREVENTION ET DE PRECAUTION.. 23
CHAPITRE II : LES AUTORITES EN CHARGE DE L'APPLICATION
DES PRINCIPES DE PREVENTION ET DE PRECAUTION 37
SECTION 1 : LES AUTORITES POLITIQUES ET CENTRALES
............................................................ 38
SECTION 2 : LES AUTORITES LOCALES 43
PREMIERE CONCLUSION PARTIELLE 56
DEUXIEME PARTIE : L'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION PAR LES AUTORITES JURIDICTIONNELLES D'AFRIQUE
CENTRALE 57
CHAPITRE 1 : L'EXISTENCE DES JURIDICTIONS COMME GAGE DE
L'APPLICATION DE CES PRINCIPES 60
SECTION 1 : LA NATURE DES JURIDICTIONS EN PRESENCE
........................................................... 60
SECTION 2 : LA COMPETENCE DES JURIDICTIONS D'AFRIQUE CENTRALE EN
MATIERE D'ENVIRONNEMENT 67
CHAPITRE 2 : LES ENTRAVES A L'APPLICATION EFFICACE DE CES
PRINCIPES EN AFRIQUE CENTRALE 75
SECTION 1 : LES ENTRAVES INTRINSEQUES 75
SECTION 2 : LES ENTRAVES EXTRINSEQUES 84
DEUXIEME CONCLUSION PARTIELLE 91
CONCLUSION GENERALE 9
Introduction générale
Il peut, a priori, paraitre surprenant de postuler une
relation conflictuelle entre le principe de prevention et le principe de
precaution tous deux accueillis puis reveles au monde entier par la Declaration
de Rio de Janeiro de 19921. En effet, par son objectif, «
marier environnement et developpement, la Conference de Rio a contribue a
stimuler la prise en compte des exigences ecologiques par l'ensemble des
politiques visant au progres socio-economique. En ce sens, Rio represente a la
fois la consolidation et la consecration de la double strategie suivie par la
communaute internationale pour proteger au mieux l'environnement
»2. A l'evidence, l'ideologie des droits de l'homme comme celle
des textes environnementaux, est fortement destinee a garantir les droits
fondamentaux des personnes physiques et notamment le droit a une vie saine et
productive en harmonie avec la nature3. Cheval de bataille des
protecteurs de l'environnement comme des associations et des citoyens, les
principes de prevention et de precaution sont d'actualite ; c'est que la
question environnementale est brfilante et interpelle au même titre aussi
bien les pays industrialises que ceux dits en developpement. Les pays de
l'Afrique centrale font malheureusement partie de cette deuxième
categorie. Surmediatises, repris par les politiques, le judiciaire et les
citoyens ordinaires, ces principes sont entres dans la rhetorique revendicative
de multiples domaines, du reglement de differends locaux a la recherche
scientifique. Le foisonnement des textes, l'abondance et la pertinence des
analyses et des publications qui leur sont reserves, pourraient faire croire
que tout a dejà ete dit, ecrit et compris sur ces outils d'analyse et de
gestion des risques incertains pour l'environnement ou la sante humaine et
animale.
1 La Conference des Nations Unies sur
l'Environnement et le Developpement aussi appelee sommet "Plan'te Terre''
reunie a Rio de Janeiro (Bresil) du 03 au 14 Juin 1992 a adopte une Declaration
qui a fait progresser le concept des droits et des responsabilites des pays
dans le domaine de l'environnement.
2 PAYE (O.); CORTEN (O.) ; DEL COURT (B.) ; HERMAN
(P.) ; KLEIN (P.); REMA CLE (E.); ROBERT (E.); SALOMON (J.): L'environnement,
nouvel enjeu mondial, in Le droit international a l'epreuve, tome 1, editions
Complexe, 1993, p. 192.
3 Principe 1 de la Declaration de Rio qui stipule
« Les titres humains sont au centre des preoccupations relatives au
developpement durable. Ils ont droit a une vie saine et productive en harmonie
avec la nature ».
Force est pourtant de constater que la clarification de ces
principes n'a été de pair ni avec leur popularisation ni avec
leur application surtout dans les pays en développement. On se trouve
ici au coeur du duo théorie-pratique ou mieux encore,
consécration-application.
Comment s'aménage le passage de ces principes, de leur
état de déclarations théoriques a une mise en oeuvre
concrete et efficace et notamment en Afrique Centrale ? Car comme dit EINSTEIN,
"rien n'est plus pratique qu'une bonne théorie''4. Cette
réflexion est davantage exprimée par l'adage « La
théorie sans la pratique est impuissante, mais la pratique sans
théorie est aveugle ». Au demeurant, elle révele une
préoccupation préalable, celle de dire si cette affirmation en
ses différentes facettes peut avoir, face aux principes de
prévention et précaution, un terrain fertile d'application. Plus
concretement, la mise en pratique de ces principes est-elle aussi fluide ou
compréhensible que leur proclamation, leur consécration
théorique ?
Pour tenter de démystifier ce duel, il convient de
relever la distinction essentielle entre la prévention et la
précaution, mais d'ores et déjà, il faudrait
préciser le contour du concept "Application'' (I). Ce qui nous permettra
en m'eme temps que nous délimiterons, de dégager
l'intér'et du sujet (II). Il nous sera ensuite loisible de
préciser la problématique et les choix méthodologiques
(III).
I- Precisions terminologiques
Nous préciserons tout d'abord le sens du concept
"Application'' (A), ensuite nous examinerons les principes de prévention
(B) et de précaution ( C) avant de délimiter la zone
géographique concernée par notre étude, a savoir l'Afrique
Centrale (D).
4 EINSTEIN (A.), cité par LAVIEILLE (J. M.) :
Droit international de l'environnement, 2eme édition mise a
jour, Ellipses, 2004, p. 6.
A- Qu'est ce que l'application ?
Nom feminin, le mot « application » derive du verbe
"appliquer''. Dans le sens qui nous interesse « appliquer » signifie
mettre en pratique, appliquer une loi, la faire executer5. Dans
cette perspective, il s'agit des hypotheses telles "application d'un
principe'', mettre une theorie en application6. Il ne s'agit pas de
l'application immediate des lois, encore appelee effet immediat qui est un
principe en vertu duquel « la loi nouvelle regit immediatement les
situations juridiques constituees apres sa publication... », ni de l'effet
direct qui est un principe de droit international public selon lequel «
une regle adoptee par une organisation internationale ou un traite
international s'applique directement dans le droit interne des Etats sans qu'il
soit besoin ni possible que cet Etat transpose prealablement cette regle dans
son droit interne par l'adoption d'une loi ou d'un vote reglementaire
»7. C'est dire en derniere analyse que dans le cadre de notre
travail, le terme "application'' renvoie a tout un processus avec ses
mecanismes, qui tend a "extraire'' le droit international de l'environnement,
ici les principes de prevention et de precaution de leur etat de simple
« code moral d'action » sans valeur juridique contraignante
pour ses destinataires8, a celui d'un veritable code de conduite
sociale susceptible de controle, de sanction et surtout d'opposabilite a
travers l'appropriation par les divers acteurs sociaux. Dans cette perspective,
qui doit donc appliquer les principes de prevention et de precaution en Afrique
Centrale ?
B- Le principe de prevention
"Mieux vaut prevenir que guerir » dit-on, c'est l'axe
politique de la prevention des dommages ecologiques. Un auteur affirme
d'ailleurs que « quand on gueri, on gueri toujours mal »9.
Le mot
5 Dictionnaire HACHETTE encyclopedie illustre, p.
94.
6 Ibidem.
7 Lexique des termes juridiques Dalloz,
136me edition, 2001, pp. 229 et 230.
8 LAVIEILLE (J. M.) : op. cit., p. 137.
9 DUPUY (P. M.) : « La responsabilite
internationale face aux dommages a l'environnement », cours
audio-visuel de Master 2 par satellite (ENVIDROIT) en Droit
international et compare de l'Environnement, Universite de Limoges, 2009 -
2010.
« prevention >> derive du verbe
prévenir qui est l'action de devancer10. Ce qui signifie
anticiper ou prendre des precautions pour empecher11, eviter ou au
moins limiter la realisation d'un risque. Au sens juridique, la prevention est
l'ensemble des mesures reglementaires ou techniques tendant a eviter les
accidents et les maladies12. De ce point de vue, la prevention
requiert des depenses et des investissements publics. Elle se manifeste
egalement sous la forme d'incitations et d'obligations adressees aux personnes
privees13. Une analyse avec Monsieur KEMFOUET permet de constater
que le concept de prevention revet au moins deux formes14, une fois
traduit en pratique.
La prevention peut ainsi etre offensive. A ce stade, elle
revet toute sa signification, celle que recherche le droit de l'environnement.
"Prevenir'', "devancer'', "aller au devant'' ou "preceder''. La prevention
implique l'adoption en amont de toutes les mesures possibles pour parer la
survenance d'un dommage15. De fa~on plus concrete, la prevention se
traduit par la surveillance de l'environnement pour « déceler
le plus tot possible toute dégradation ou menace, intervenir en temps
utile et évaluer plus facilement les politiques et techniques de
conservation >>16.
La prevention peut ensuite recouvrir une dimension passive.
Elle traduit de ce fait une position de defense et prend la forme d'un
avertissement. Cela suppose que les populations soient informees de la
survenance ou de l'imminence d'un danger
10 Gerard CORNU, Vocabulaire juridique, PUF,
6eme ed., 1987, cite par KOMBO MATIKI (A.) : L'application du
principe de prevention et l'etude d'impact sur l'environnement dans les projets
de developpement, Memoire de Master 2 en Droit international et compare de
l'environnement, Universite de Limoges, Aout 2008, Voir
http://www.memoireonline.com/11/08/1624/m_Le-principe-de-prevention-et-letude-dimpact-sur-lenvironnement-dans-le-projet-dexploitation-
mini0.html
11 Dictionnaire HACHETTE Encyclopedie illustree, 1996,
p. 1520.
12 Lexique des termes juridiques Dalloz 2001, op.
cit., p. 434.
13 GODARD (O.) HENRY ( C.) ; LAGADE C (P.) ; MI
CHEL-KERJAN (E.) : Traite de nouveaux risques, edition Gallimard, 2002, p.
34.
14 Non sans l'avoir releve, l'auteur fait
expressement fi d'une autre approche a trois volets, soutenue par Monsieur
Nicolas De SADELEER : Les principes du pollueur-payeur, de prevention et de
precaution : Essai de la genese sur la portee juridique de quelques principes
du droit de l'environnement, Bruxelles, Bruylant, 1998, 437 p.
15 KEMFOUET KENGNY (E. D.), Droit international de
l'environnement et fonction juridictionnelle, These de Doctorat en droit
international public, Universite de Limoges, 2008, p. 40.
16 Principe 19 de la Charte mondiale de la nature du
28 octobre 1982.
afin d'en contrer les risques. Cette forme de prevention
correspond a la deuxieme signification a laquelle le verbe prevenir renvoie,
c'est-à-dire "eviter'', "empecher'', "conjurer''. Envisagee de la sorte,
la prevention perd quelque peu sa valeur, car elle n'agit pas sur les causes du
probleme, mais essaie plutot de limiter les consequences
negatives17. Le droit de l'environnement prefere la premiere forme
qui s'est doublee d'une nouvelle approche dite de precaution18, meme
s'il est evident que le principe de precaution releve d'une demarche generale
de prevention19.
C- Le principe de precaution
La precaution est une disposition prise par prevoyance, pour
eviter un inconvenient, un risque20. Le terme « precaution
» puise son origine etymologique dans le verbe latin « pre
cavere » dans lequel le prefixe « pre » marque une
anteriorite dans le temps ou dans l'espace et indique une anticipation (pre =
avant)21. Le verbe « cavere », qui signifie
« mefier » se retrouve, lui, dans la locution latine « cave
canem » (attention au chien). Il s'agit donc, etymologiquement, de se
mefier avant l'occurrence d'un evenement et avant meme que le probleme ne soit
reellement connu et identifie22. Le principe de
precaution, de fa~on tres prosaïque, implique que l'on prenne les mesures
necessaires pour prevenir les risques23. C'est l'un des principes
phares issus de la Declaration de Rio de Janeiro de 1992 selon lequel
« En cas de risque de dommages
17 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op. cit., p.
40.
18 Ibidem
19 GODARD (O.) et alt., op. cit., p.
119
20 Dictionnaire Hachette encyclopedie illustree, p.
1510.
21 GRANET (M-B.) : Principe de precaution et
risques d'origine nucleaire: quelle protection pour l'environnement ? Journal
du Droit International, n°3-2001, Limoges, (p.758), cite par
GALIBERT (T.) : Le principe de precaution : Du droit de l'environnement au
droit de la securite des aliments, Memoire pour l' obtention du Diplome d'
etudes approfondies d'Etudes Juridiques, Universite de la Reunion, annee
universitaire 2001, note n° 2, p. 7.
22 GALIBERT (T.) : Le principe de precaution : Du
droit de l'environnement au droit de la securite des aliments, Memoire pour l'
obtention du Diplome d' etudes approfondies d' Etudes Juridiques, Universite de
la Reunion, annee universitaire 2001 - 2002, p. 7.
23 ROMI (R.) : Droit et administration de
l'environnement, 5eme edition, Montchretien, 2004, p. 97.
graves ou irréversibles, l'absence de certitude
scientifique absolue ne doit pas servir de prétexte pour remettre a plus
tard l'adoption de mesures effectives visant a prévenir la
dégradation de l'environnement »24. Ce principe est
au coeur de nombre d'autres textes internationaux traitant des questions
d'environnement. Des etudes precedentes ont mis en exergue quelques uns de ces
textes25. Avance pour proteger l'environnement ou se premunir de
mesures ou d'innovations jugees dangereuses, le principe de precaution est
generalement invoque pour conserver une situation en l'etat, ou a l'inverse
obtenir le retrait ou un dedommagement face a des activites ou des produits
dont les consequences, averees ou potentielles, sont jugees
negatives26. Le principe de precaution s'interprete alors a juste
titre comme le moyen privilegie de mettre concretement en oeuvre le droit des
generations futures27. L'autre interpretation semble plus en
harmonie avec le principe de prevention dont finalement la precaution semble
être une forme particulierement developpee28. Donc, comme la
prevention, le principe de precaution est egalement
24 Principe 15 de la Declaration de Rio de 1992 sur
l'environnement et le developpement..
25 Voir KEMFOUET KENGNY (E.D.) op. cit., p.
41 qui cite en exemple :
- Convention de Vienne du 22 Mars 1985 sur la protection de la
couche d'ozone. Preambule §6,
- Protocole de Montreal du 16 Septembre 1987 relatif aux
substances qui appauvrissent la couche d'ozone, Preambule,
- Convention de Bamako du 30 Septembre 1991 sur
l'interdiction d'importer en Afrique des dechets dangereux et sur le controle
des mouvements transfrontieres et la gestion des dechets Dangereux produits en
Afrique , article 4,
- Convention d'Helsinki du 17 Mars 1992 sur la protection et
l'utilisation des cours d'eau transfrontieres et des lacs internationaux,
article 5§, a)-Dispositions generales,
- Convention cadre sur les changements climatiques du 9 mai
1992, article 3 §3,
- Convention sur la diversite biologique du 5 juin 1992,
Preambule §8 et §9, Declaration de Rio sur l'environnement et le
developpement, Principe 15,
- Convention de Barcelone sur la protection du milieu marin et
du littoral de la Mediterranee amendee le 10 juin 1995 ; article 4
§3, a)
26 ALLES (D.) : Le principe de precaution et la
philosophie du droit - Evolution certaine, revolution en puissance, Memoire
realise dans le cadre du seminaire « Etat de droit - L'individu et le
droit en France, en Europe et dans le monde » le 4 juillet 2005, voir
http#//
www.memoireonline.com/12/O5/33/m_principe-de-precaution-philosophie-droitO.html
27 PRIEUR (M.), Droit de l'environnement, cite par
DMOTENG KOUAM (E.) : Agriculture et environnement en Afrique Centrale, Memoire
de Master 2 en Droit international et compare de l'environnement, Universite de
Limoges, Aout 2008, p. 53.
28 KISS (A.), BEURIER (J.-P.) : Droit international
de l'environnement, 3eme edition, Pedone 2004, p.137.
un principe d'application generale en tant qu'il est aisement
transposable dans d'autres domaines de l'environnement29.
Il faut cependant se garder de confondre radicalement la
precaution a la prevention et vice versa et se limiter ainsi a une assimilation
reductrice de la realite. En effet, alors que la prevention a un caractere de
generalite et doit dicter en permanence et pour toutes les circonstances le
comportement des acteurs, la precaution, quant a elle necessite un renforcement
de cette attitude face a un danger plus grave et preoccupant, et dont on ne
sait pas, compte tenu des connaissances scientifiques du moment, les
consequences qu'il pourrait entrainer s'il venait a se realiser30.
Contrairement au principe de precaution, le principe de prevention existe
explicitement de longue date dans tous les types d'ordre juridique. Le principe
de precaution a par definition un caractere preventif ; en revanche toutes les
mesures preventives ne constituent pas des mesures de precaution. Le President
francais, Monsieur Nicolas SARKOZY affirmait en 2007 que « ...le
principe de précaution n'est pas un principe d'inaction... », que
« c'est un principe "d'action'', un principe d'//expertise'', de
"vigilance'', de "transparence'' et de
,,responsabilité'' »31. Pour autant, le
champ d'application de la prevention est beaucoup plus large que celui de
precaution. Pour être plus precis, le principe de prevention, tout
d'abord, permet de prendre des mesures necessaires afin d'eviter qu' un dommage
previsible ne se produise. La previsibilite resulte principalement d'une
expertise scientifique permettant de mettre en lumiere une forte probabilite de
l'existence d'une relation causale entre une donnee scientifique et ces
eventuelles consequences dommageables. En d'autres termes, le principe de
prevention permet l'adoption des mesures visant a reduire un danger
identifie32. Un tel principe est prescriptif de normes de
comportement exprimant soit une obligation d'entourer l'operation a
entreprendre de garanties, soit une obligation de s'abstenir33. Le
principe de precaution quant a lui vise a offrir au politique des processus de
reponse lui permettant de prendre des decisions de gestion immediate qui
respectent les interets du futur sans compromettre les conditions de
29 KAMTO (M.) : Droit de l'environnement en Afrique,
EDI CEF, 1996, p. 75
30 LU CCHINI (L.), « Le principe de precaution
en droit international de l'environnement : ombres plus que lumieres ».
AFDI, volume 45, 1999. p. 715.
31 Ces propos ont ete tenus lors des conclusions du
Grenelle de l'environnement, cite par Pierre Le Hir, in « Le
Monde » du Mercredi 23 Juin 2010, p. 4.
32 DU CROQUETZ (M. A.-L) : Le principe de
precaution en matiere de securite alimentaire, Memoire de Diplome d'Etudes
Approfondies de Droit communautaire et international, Universite de Lille II,
annee universitaire 2000-2001, pp. 17 -18.
33 KAMTO (M.), op. cit., p. 75.
vie des generations actuelles34. La precaution
apparait ainsi faite de l'ensemble de moyens concrets a mettre en oeuvre au
service de ces fins35.
D- L'espace géographique cible : l'Afrique
Centrale
Quand on parle de l'Afrique Centrale, deux grands ensembles
sautent aux yeux : La Communaute Economique et Monetaire de l'Afrique Centrale
( CEMA C) dont le traite de creation a ete signe a N'djamena au Tchad le 16
Mars 1994 entre six pays limitrophes en l'occurrence le Cameroun, le Congo, le
Gabon, la Guinee Equatoriale, la Republique Centrafricaine et le Tchad. Ce
traite est entre en vigueur en Fevrier 1998. Ensuite, la Communaute Economique
des Etats de l'Afrique Centrale ( CEEA C) creee le 11 Decembre
198336. Cette communaute a sur son territoire, en plus des pays de
la CEMA C, ceux des grands lacs : Congo Democratique, Burundi, Rwanda, Sao Tome
et Principe, et l'Angola depuis le 06 Fevrier 199837.
Au niveau institutionnel, la CEMA C est constitue de deux
unions : l'Union Economique de l'Afrique Centrale (U.E.A. C.) et l'Union
Monetaire de l'Afrique Centrale (U.M.A. C.). L'U.M.A. C integre deux
institutions specialisees : la BEA C38 et la C.O.B.A. C39
tandis que l'U.E.A. C. en integre plusieurs dont l'I.E.D.40,
l'I.S.T.A.41, l'I.S.S.E.A.42, la B.D.E.A.
C.43. Ces deux institutions sont coiffees par deux institutions
traditionnelles a savoir, la Conference des Chefs d'Etats et le
34 GALIBERT (T.) : 0p. cit, p. 7.
35 LU CCHINI (L.), op, cit., p. 714.
36 SOH FOGNO (D.R.) : Developpement et protection de
l'environnement en Afrique Centrale, These de Doctorat de l'Universite de
Nantes, p. 27.
37 Ibidem, note de bas de page n°
104.
38 B.E.A. C. : Banque des Etats de l'Afrique
Centrale.
39 .O.B.A. C. : Commission Bancaire de l'Afrique Centrale.
40 E.I.E.D. : Ecole Inter Etat des Douanes.
41 I.S.T.A. : Institut Sous-regional multisectoriel
de Technologie Appliquee, de planification et d'evaluation des projets.
42 I.S.S.E.A. : Institut Sous-regional de Statistique
et d'Economie Appliquee.
43 B.D.E.A. C. : Banque de Developpement des Etats de
l'Afrique Centrale.
Conseil des Ministres de l'U.E.A. C44 et plusieurs
autres organes communautaires de decision45. Pour une delimitation
dans l'espace de notre travail, nous focaliserons notre attention sur le
premier ensemble, la C.E.M.A. C. qui est bâtie sur les ruines de
l'U.D.E.A. C. elle-même nee des cendres de l'Union Douaniere Equatoriale
(U.D.E.), fille heritiere de l'Afrique Equatoriale Française (A.E.F.)
qui fut creee par un Decret du 15 Janvier 191046.
II- Inter<t et problematique du sujet, methodologie et
plan
L'examen de l'interêt de notre sujet et de sa
problematique (A) precedera celui de la methodologie et du plan (B).
A- Intérit du sujet et problématique
Les principes de prevention et de precaution « principes
phares du droit de l'environnement », qui sont concernes dans notre
travail au même titre que la sous region Afrique Centrale constituent
dejà en eux-mêmes des elements dignes d'interêt. Si l'on y
ajoute l'abondance des textes consecrateurs de ces principes, l'interêt
de l'etude sera davantage exprime. En effet, bien avant la conference de Rio,
la Charte mondiale de la nature du 28 Octobre 1982 avait prepare les principes
de precaution et de prevention47. D'autre part, la Convention de
Bamako du 29 Janvier 1991 sur l'interdiction d'importer en Afrique des dechets
dangereux et sur le contrôle des mouvements transfrontieres et la gestion
des dechets dangereux produits en Afrique consacre egalement le principe de
precaution. En
44 DMOTENG KOUAM (E.), op. cit., p. 4.
45 Ces organes de decisions sont :
- Le comite ministeriel de l'U.M.A. C.
- Le secretariat executif de l'U.E.A. C. installe a Bangui
- La cour communautaire de justice (plus une chambre judiciaire
et une chambre des comptes) installee a N'Djamena et composee de 12
magistrats.
- La commission interministerielle mise en place en juin
2000.
- La Bourse regionale des valeurs mobilieres etablie a
Libreville.
46 SOH FOGNO (D.R.), op. cit., p. 114.
47 Les principes 11 et 19 de la Charte mondiale de la
nature concernent respectivement les principes de precaution et de
prevention.
effet en son article 4 alinea 3 f intitule « Adoption
de mesures de precaution : », ce texte regional dont la totalite des
pays de l'Afrique Centrale sont signataires, demande a chaque partie «
d'adopter et de mettre en oeuvre, pour faire face au probleme de la pollution,
des mesures de precaution... sans attendre d'avoir la preuve scientifique
» des risques encourus. L'article 1 quant a lui fait aussi allusion a la
prevention48.
D'autres textes regionaux et internationaux dont les pays de
l'Afrique Centrale sont parties, consacrent aussi ces principes. Il s'agit
notamment de la Convention africaine sur la conservation de la nature et des
ressources naturelles signee a Alger le 15 septembre 1968 et modifiee a Maputo
le 11 juillet 2003 ; de la Convention cadre de Nations Unies du 09 Mai 1992 a
New York sur les changements climatiques ou encore de la Convention de Rio du
05 Juin 1992 sur la diversite biologique. Neanmoins, pres de vingt ans apres la
signature de la Convention de Bamako, l'on peut encore s'interroger sur
l'effectivite et même sur le sens veritable de l'alinea 3 f de son
article 4 de même que sur le sens des principes 2 et 15 de la Declaration
finale issue du sommet de Rio49 tel que percu en Afrique Centrale.
L'on peut aussi s'interroger sur la pertinence des acteurs intervenant dans
l'application des mesures de prevention et de precaution des risques
environnementaux en Afrique Centrale, ainsi que sur la responsabilite qui est
leur dans cette manoeuvre. Sous cette acception, « l'Application en
Afrique Centrale des principes de prevention et de precaution » parait
davantage interessante eu egard d'ailleurs a la problematique qu'elle
comporte.
48L'article 1 de la Convention de Bamako intitule
« Article premiere. Definitions » en son point 3 dit ceci :
"Gestion", la prevention et la reduction de dechets dangereux ainsi que la
collecte, le transport, le stockage, le traitement, même en vue de
recyclage ou de reutilisation, et l'elimination des dechets dangereux, y
compris la surveillance des sites d'elimination;
49 - Le Principe 2 de la Declaration de Rio fait
indirectement allusion au principe de prevention quand il stipule : «
... les Etats ont le droit souverain d'exploiter leurs propres ressources selon
leur politique d'environnement et de developpement, et ils ont le devoir de
faire en sorte que les activites exercees dans les limites de leur juridiction
ou sous leur controle ne causent pas de dommages a l'environnement dans
d'autres Etats ou dans des zones ne relevant d'aucune juridiction
nationale »
- Le Principe 15 qui parle plus directement du principe de
precaution stipule a son tour : « Pour proteger l'environnement, des
mesures de precaution doivent etre largement appliquees par les Etats selon
leurs capacites. En cas de risque de dommages graves ou irreversibles,
l'absence de certitude scientifique absolue ne doit pas servir de pretexte pour
remettre a plus tard l'adoption de mesures effectives visant a prevenir la
degradation de l'environnement ».
Il sera question pour nous dans ce travail d'apprécier
la contribution des autorités administratives et juridictionnelles d'
Afrique Centrale et même de la société civile quant a
l'application efficace des principes de prévention et de
précaution, de nous interroger sur la réception de ces principes
ainsi que sur la valeur des mécanismes ou instruments qui permettent
leur intégration et leur mise en oeuvre dans les pays de cette
sous-région ; toutes choses qui conditionnent relativement leur novation
de « Code moral d'action » en comportement citoyen pouvant concourir
efficacement a la surveillance de l'environnement du sous-continent.
Il ne s'agira pas pour nous d'énumérer ces
principes pour les étudier séparément, mais d'en faire une
analyse groupée, mais pragmatique dans la sous région Afrique
centrale. En d'autres termes nous tenterons de répondre aux questions
suivantes :
- Comment ont été reçus les principes de
prévention et de précaution en Afrique centrale ?
- Quelle est la portée de ces principes dans les
législations des pays de l'Afrique Centrale en matiere de protection de
l'environnement ?
- Quelles sont les techniques utilisées pour
intégrer ces principes dans le droit positif des pays de la sous
région ?
- La seule ratification puis l'intégration de ces
instruments internationaux dans les lois sous-régionales et nationales
suffisent-elles a dégager un indicateur de leur application quotidienne
?
- La culture sociale est-elle favorable a cette application
ou mieux les principaux acteurs et garants de cette application se
consacrent-ils véritablement a la tache qui leur incombe ?
- Sinon, comment parer les potentielles résistances a
une mise en oeuvre effective de ces principes en Afrique Centrale et garantir
ainsi le bien être de l'Homme et son environnement, dont il est a la fois
créateur et créature ?5°
5° Voir point 1 du préambule de
Déclaration de Stockholm de Juin 1972 sur l'environnement.
B- Méthodologie et plan
Dans le cadre de ce travail, notre démarche
s'accommodera d'une approche comparative des evolutions juridiques que cachent
ces principes. En effet comme l'écrit le Professeur Maurice KAMTO,
« tout phénomène peut 'etre saisi par le droit
>>51. Des lors, il n'est pas surprenant que dans
l'impossibilité d'explorer dans leur plenitude tous les textes et
pratiques en vigueur dans la sous region, nous nous sommes inspires pour
beaucoup, des etudes théoriques antérieures.
ependant, la methodologie de cette etude montrera
certainement d'une part qu' une application effective par les administrations
d'Afrique Centrale des principes de prevention et precaution est le
préalable nécessaire a un controle juridictionnel efficient, et
d'autre part que le controle du juge est la condition d'une protection efficace
de l'environnement dans le sous-continent. Ainsi, fidele a notre
démarche, nous examinerons tour a tour :
Premiere partie : L'application des principes
de prevention et de precaution par les autorites administratives dans les Etats
d'Afrique Centrale.
Deuxieme partie : L'application des principes
de prevention et de precaution par les autorites juridictionnelles d'Afrique
Centrale.
51 KAMTO (M.), op. cit ., p. 55.
Premiere partie :
L'application des principes de prevention et de
precaution par les autorites administratives dans les Etats d'Afrique
Centrale.
Les pouvoirs de police reconnus aux administrations leurs
conferent d'importantes prérogatives. Ces pouvoirs visent notamment la
prévention du désordre et le maintien de l'ordre public
classique. Les administrations d'Afrique Centrale ne font aucune
économie de ces pouvoirs quand il s'agit d'appliquer les traités
et conventions internationaux auxquels appartient aussi le droit international
de l'environnement. En Afrique Centrale, les principes de prévention et
de précaution posent aux administrations la question de leur champ
d'application ( Chapitre I) et celle des autorités chargée de
cette application ( Chapitre II).
Chapitre 1 : Le champ d'application des principes de
prevention et de precaution
Ces principes ont un domaine d'application vaste (Section 1).
C'est sans doute pour cette raison que des instruments précis sont
consacrés a leur mise en oeuvre (Section 2).
Section I : Le domaine d'application des principes de
prevention et de precaution
L'application des principes de prévention et de
précaution ne s'est pas cantonnée a l'environnement mais a
étendu son domaine a d'autres secteurs (Paragraphe 1). Ceci a mis en
évidence des conditions précises (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Etendue du domaine d'application de ces
principes
Ces principes apparaissent comme le complement naturel d'une
exigence de développement durable qui commande particulierement dans les
domaines de l'environnement et de la sante publique (A) des precautions
particulieres. Les catastrophes naturelles et industrielles ne méritent
pas moins ces precautions (B).
A- Les risques environnementaux et la sante publique
Comme tout le droit international de l'environnement, les
principes de prevention et de precaution qui en sont d'ailleurs les principes
phares52 s'appliquent tout d'abord aux risques lies a
l'environnement(1), expression du nécessaire respect par l'homme de son
milieu de vie53. Mais l'Homme faisant partie de l'environnement et
appelé a être protégé au même titre que
l'environnement, sinon un peu plus, sa sante est également un terrain
fertile d'application des principes soumis a notre étude(2).
1) L'imergence des principes de prevention et de
precaution dans le domaine de l'environnement
Historiquement, c'est au debut des années soixante dix
a l'occasion de la critique du modele technico-économique en Allemagne
et aux Etats-Unis que le principe de precaution fut inscrit -sous l'appellation
de Vorsorgeprinzip (principe de prudence)- dans le droit positif de
l'environnement allemand avec la loi de 1974 sur les pluies
acides54. Ainsi affirmé, ce principe n'apparait dans le droit
international que vingt bonnes années plus tard. Il trouve dans la
protection de
52 MAZOUDOUX (O), Droit international public et droit
international de l'environnement, Presses Universitaires de Limoges (PULIM),
Collection « les cahiers du CRIDEAU », n° 16, 2008
53 GALIBERT (T.), op. cit., p. 10.
54 GUIBERT ( C.) ; LOUKAKOS (N.) Principe de
precaution et prevention, Lex Aero (
http://www.dossiersdunet.com/spip.php?article210)
l'environnement son terreau originel55. Sous des
formules qui sont loin d'être uniformes, et moins encore univoques, la
Convention européenne sur la protection des cours d'eau transfrontieres,
la Convention Cadre sur les Changements climatiques ou la Convention sur la
protection du milieu marin de l'Atlantique du Nord-Est lui ont notamment
donné, en 1992, une éclatante consécration56.
Depuis lors, d'autres textes se sont accumulés. Nonobstant la pertinence
de ces textes notamment la Convention sur la protection du Rhin (1998), le
Protocole a la Convention sur la diversité biologique relatif aux
risques biotechniques (2000), le Code de conduite pour une pêche
responsable adopté par la FAO (1995), il est intéressant de
remarquer que la Convention de Bamako du 30/01/1991 sur l'interdiction
d'importer en Afrique des déchets dangereux et sur le controle des
Mouvements transfrontieres et la gestion des déchets dangereux produits
en Afrique avait déjà consacré le principe de
précaution notamment a son article 4, alinéa 3,f.
Le principe de prévention figure également dans
cette Convention a laquelle tous les Etats d'Afrique Centrale sont parties. En
effet, ce texte régional, en son article 1er, alinéa 3
reconnait le principe de prévention en ces termes : « "Gestion'',
la prévention et la réduction des déchets dangereux ainsi
que la collecte, le transport, le stockage, le traitement, même en vue de
recyclage ou de réutilisation, et l'élimination des
déchets dangereux, y compris la surveillance des sites
d'élimination ». Interprété a l'extrême, ce
texte laisse croire que la prévention c'est la gestion en
elle-même. On ne pourrait qu'abonder dans ce sens, vu que
"Prévenir c'est guérir par anticipation''.
La Convention africaine sur la conservation de la nature et
des ressources naturelles signée a Alger le 15/09/1968 et
modifiée a Maputo (Mozambique) le 11/07/2003 consacre elle aussi les
principes de prévention et de précaution notamment en son article
4. Cette derniere s'étend un peu plus sur le principe de
55 VERHOEVEN (%.) : Principe de précaution,
droit international et relations internationales : quelques remarques,
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/FD001431.pdf.
56 Ibidem
prévention qu'elle cite plusieurs fois57.
Consacrés au plan africain, ces principes sont par la suite
intégrés dans le droit positif des Etats d'Afrique Centrale selon
les techniques propres a chaque Etat, et appelés des lors a s'appliquer
aussi bien a l'environnement qu'à la santé humaine et animale.
2) L'application des principes de prevention et de
precaution a la sante publique
Précisons d'emblée que la formulation des
principes de prévention et de précaution en droit de
l'environnement est explicitée, alors qu'en matiere de protection de la
santé, elle ne l'est pas. En effet, si l'on s'en tient aux textes
internationaux, communautaires ou internes, il est clair qu'en apparence, le
domaine du principe de précaution notamment est la protection de
l'environnement. Mais au-dela du domaine textuel, ne faut-il pas
considérer que le domaine de ces principes va bien au-dela de
l'environnement ? Il est évident que, dans la conscience collective,
dans celle des décideurs meme, le principe a investi le droit de la
santé et celui de la sécurité alimentaire58. Le
champ d'application du principe de précaution est vaste, puisqu'il est
pris en compte lorsque les effets potentiellement dangereux pour la
santé humaine, animale ou végétale, sont incompatibles
avec le niveau élevé de protection choisi par la
communauté59. Pour reprendre l'expression de Monsieur Gilles
Martin, Professeur a Nice, quand le dommage est imprévisible, ou non
« probabilisable », on applique le principe de précaution.
Le champ d'application du principe de prévention est
beaucoup plus large que celui de la précaution. En effet, la
prévention permet de prendre des mesures nécessaires afin
d'éviter qu'un dommage prévisible ne se produise. La
prévisibilité résulte principalement d'une expertise
scientifique permettant de mettre en lumiere une forte probabilité de
l'existence d'une relation causale entre une donnée scientifique et ses
éventuelles conséquences dommageables. Le principe
57 La Convention de Maputo cite le principe de
prévention a ses articles 4, 7 et 22. ce meme texte ne cite le principe
de précaution qu'une seule fois. Ce qui est quelque peu l'inverse de la
Convention de Bamako qui cite la précaution trois fois et la
prévention deux fois.
58 DU CROQUEZ (A. M-L.), op. cit., p. 10.
59 Ibid., p. 35
de prévention permet l'adaptation des mesures visant a
réduire un danger identifié. Ce principe est d'ailleurs reconnu
en droit communautaire de l'Union Européenne et trouve a s'appliquer de
plus en plus en matiere de protection de la santé. On le trouve par
exemple au sein de la Directive 89/397/ CEE du 14/06/1989 relative au
contrôle officiel des denrées alimentaires lorsqu'elle
définit ce contrôle comme permettant aux autorités
nationales compétentes d'examiner la conformité des objets
destinés a entrer en contact avec des denrées alimentaires, avec
les dispositions ayant pour objet de prévenir les risques pour la
santé publique60. S'il est plausible qu'un champ
d'application trop large accordé a ces principes pourrait favoriser une
certaine dérive de leur application, en revanche l'on doit noter que ces
principes ayant reçu une large consécration en droit de
l'environnement, sont toutefois conduits a reglementer d'autres domaines de la
vie sociale.
B- Gestion des catastrophes naturelles et
industrielles
L'incertitude scientifique constitue une donnée
fondamentale dans l'évaluation et la gestion adéquate des risques
environnementaux qui résultent de l'activité économique.
Dans bien des cas, on ne connait, ou connait mal les impacts négatifs
que peut produire sur l'environnement ou sur la santé humaine
l'utilisation des milliers de produits chimiques.
L'incertain se révele encore plus grand s'agissant de
l'effet cumulé dans le temps et dans l'espace, de ces diverses
substances. A bien d'égards, l'état des connaissances
scientifiques actuelles ne permet pas non plus de bien comprendre les nombreux
échanges et procédés vitaux qui ont cours dans ces
différents écosystemes de la planete. Ceci explique parallelement
une incapacité de la science a anticiper les dommages
irréversibles que peut subir la nature en raison des activités
industrielles et des produits issus des avancées technologiques. Ainsi
en
60 Article 1er § 2 de la Directive
89/397/ CEE du Conseil, du 14 juin 1989, relative au contrôle officiel
des denrées alimentaires (
http://reflex.raadvst-consetat.be/reflex/index.reflex?page=chrono&c=
detailget&d= detail&docid=8717&tab=euro
matiere environnementale, les variables s'additionnent,
rendant souvent impossible une evaluation adequate des risques crees par une
substance chimique ou un nouveau procede industriel ou meme
agricole61. En effet, l'attrait que le principe de precaution en
particulier exerce sur la population en general et dans certains cercles
scientifiques, universitaires ou environnementalistes provient sans doute
justement de ce qu'il semble operer un reversement de l'approche traditionnelle
qui consiste essentiellement a ignorer les risques non prouves. Les principes
de prevention et de precaution offrent au simple citoyen une meilleure garantie
que seront prises en compte les craintes que suscitent chez lui les prouesses
technologiques et industrielles auxquelles nous assistons actuellement.
C'est certainement ce qui justifie que dans la plupart des
pays d'Afrique Centrale, la conduite de prevention des risques et
d'intervention en cas de catastrophes est confiee a plusieurs departements
ministeriels. Au Cameroun par exemple ces operations reviennent tour a tour aux
Ministeres de l'Administration Territoriale, de la Sante Publique, des Mines et
de la Defense, et aux municipalites. Au niveau de ces Ministeres, il existe un
« plan intra sectoriel d'intervention », qui constitue un element du
plan national62. Les risques industriels et naturels changent
veritablement la nature des problemes de gestion de l'environnement du moment
oil ils y introduisent des elements d'incertitude et de precarite. Qu'il
s'agisse des pollutions accidentelles ou des emanations de gaz toxiques, les
risques de catastrophe constituent a l'heure actuelle une menace directe pour
l'existence de milliers de citoyens des pays d'Afrique Centrale qu'ils soient
citadins ou non.
Au Cameroun, pays situe en plein cceur de l'Afrique Centrale,
la gestion des risques d'origine industrielle est organisee par le Decret
n° 76/372 du 02/09/1976 portant reglementation des
etablissements dangereux, insalubres ou incommodes et celle des risques ou
catastrophes d'origine naturelle par la loi n° 86/16 du 06
61 TRUDEAU (H.) : Du droit international au droit interne :
l'emergence du principe de precaution en droit de l'environnement, p. 1 ;
Consulte sur
https://papyrus.bib.umontreal.ca/jspui/handle
/1866/1420.
62 BOMBA ( C. M.) ; PRIEUR (M.) -sous la direction
de- : « Environnement et developpement urbain au Cameroun », in Vers
un droit de l'environnement urbain : actes des 2emes journees
scientifiques du « reseau droit de l'environnement » de l'AUPELF-UREF
a l'Universite Cheikh Anta Diop Dakar, Senegal, 29-31 octobre 1996, p. 359.
décembre 1986 portant réorganisation
générale de la protection civile. Les textes de la sous
région Afrique centrale procedent a une classification des industries en
catégorie. La premiere catégorie qui comprend les
établissements qui doivent être éloignés des
habitations est réglementée en Guinée Equatoriale par
l'article 72 du Code de l'environnement qui confere au Ministre chargé
de l'industrie, des petites et moyennes entreprises et de l'environnement, des
pouvoirs de contrôle (autorisation par exemple). Au Cameroun, cette
prérogative est dévolue par l'article 3 du Décret
précité au Ministre chargé des établissements
dangereux, insalubres et incommodants63.
Nonobstant ces textes, rares sont les établissements
dont l'ouverture a été précédée d'une
enquête de commodité ou, a fortiori, d'une étude
préalable d'impact sur l'environnement. Apparait tout aussi important du
point de la prévention des risques industriels, la loi camerounaise
n° 89/027 du 29/12/1989 relative aux déchets toxiques,
qui interdit le stockage, la production, la détention, le transit et le
déversement sur le territoire national des déchets toxiques et/ou
dangereux sous toutes les formes. Au fond, la réorganisation de la
protection civile a été rendue nécessaire a la suite de la
catastrophe naturelle survenue au lac Nyos (Province du Sud-Ouest du Cameroun)
en Aotit 1986. Provoquée par une émanation de gaz toxique, cette
catastrophe a entrainé la mort de 1746 personnes et l'extermination de
la quasi-totalité du bétail de la localité64.
Pourtant, la mise en oeuvre efficiente du principe prévention aurait
sans doute permis de préserver tant de vies et de biens. Peut-être
le principe de précaution a-t-il été mis en mouvement a la
suite de ce malheur ?
On le voit bien, il convient a présent de questionner les
conditions d'application des principes de prévention et de
précaution.
63 Pour plus d'amples détails, lire KAMTO
(M.), op. cit., p. 339.
64 BOMBA ( C. M.), op. cit., p. 366
Paragraphe 2 : Conditions d'application des principes de
pr6vention et de pr6caution
De par leurs definitions respectives, les principes de
prevention et de precaution comportent implicitement chacun, des conditions de
sa mise en oeuvre. En effet, le principe de precaution appelle certes a la
prevention sans attendre l'acquisition de certitudes scientifiques quant a la
realite des risques, mais on a pu dire et certainement a juste titre que «
le domaine de validite du principe de precaution est borne par deux points
limites que sont la preuve du dommage et la preuve de l'absence de dommage
» (A)65. Le principe de prevention permet d'atteindre d'autres
objectifs : Agir avec plus d'efficacite et a moindre cotit, c'est-A-dire de
fa~on plus efficiente tant sur le risque lui-même que sur l'activite qui
le gen're. Plus simplement, la prevention permet d'agir sur les facteurs de
risques identifies(B).
A- L'incertitude scientifique dans l'application du
principe de precaution.
La mise en oeuvre du principe de precaution presuppose d'une
part une plus grande implication du public dans la prise des decisions et
d'autre part un recours plus systematique a l'expertise
scientifique66. Il s'agit de deux parametres importants dans
l'application du principe de precaution. L'apport des experts doit cependant
être envisage de fa~on un peu differente et sur une base plus soutenue
que dans le cadre de la methode traditionnelle d'evaluation des risques, pour
d'avantage tenir compte des facteurs d'incertitude scientifiques et de
l'evolution des connaissances.
Le recours au principe de precaution necessite ainsi un
difficile exercice d'arbitrage entre les craintes du public ou sa perception
du risque et les assertions des scientifiques fondees sur les resultats des
recherches empiriques ou des
65 GOGARD (O.) Le principe de precaution dans la
conduite des affaires humanitaires, INRA, Maison des sciences de l'homme,
Paris, 1997, p. 5 ; cite par GUIBERT ( C.) ; LOUKAKOS (N.), op.
cit.
66 TRUDEAU (H.), op. cit., p. 35.
hypotheses theoriques investies a ce jour. Tant le citoyen
que l'expert doivent trouver un forum approprie pour exprimer leurs vues. Selon
KOURILSKY et VINEY, l'analyse des risques doit etre effectuee par deux cercles
distincts, un compose exclusivement d'experts scientifiques, l'autre comprenant
quelques uns de ces experts, mais aussi des economistes, des acteurs sociaux et
des representants du public. Le premier cercle rend compte de ses conclusions
sur le plan scientifique, tandis que le second cercle procede a une analyse des
coilts, benefices a partir des conclusions du premier cercle. Les celebres
auteurs envisagent differentes options possibles. Les decideurs publics sont
saisis des conclusions des deux cercles, qui peuvent tendre vers le
consensualisme, mais ne l'atteignent pas necessairement67. Cette
solution n'est pas moins soutenable, puisqu'elle permet d'atteindre au moins
trois objectifs : d'abord l'acces a l'information, la participation du public
au processus decisionnel et l'acces a la justice en matiere d'environnement tel
que preconise la Convention d'Aarhus du 26/06/199868, ensuite elle
donne la possibilite aux decideurs de prendre des decisions eclairees. Enfin et
surtout elle permet de realiser la cooperation qui est l'un des objectifs du
droit international de l'environnement, « s'unir ou perir
>>69. D'ailleurs, « tout serait simple s'il appartenait
au savant d'evaluer le risque et au politique de prendre la decision qui permet
d'y faire face >>70.
Des garanties d'impartialite et de competence dans
l'appreciation des preuves soumises doivent entourer le travail de l'autorite
publique appelee a decider si elle aura ou non recours a la prevention devant
un risque apprehende. Ces memes garanties apparaissent aussi essentielles
devant le choix et l'eventail possible des mesures de precaution, pour tenir
compte notamment des interets economiques, sociaux ou autres, qui seront
affectes.
67 Cite par TRUDEAU (H.), op. cit., note de
bas de page n° 95, p. 35.
68 Voir notamment les articles 6 a 8 de la
Convention d'Aarhus du 25/06/1998 sur l'acces a l'information, la participation
du public au processus decisionnel et l'acces a la justice en matiere
d'environnement.
69 L'expression est de Monsieur Albert EINSTEIN, cite
par LAVIEILLE (%. M.), op. cit., p. 12.
70 GUIBERT ( C.) ; LOUKAKOS (N.), op. cit.,
p. 3.
B- La preuve du dommage connu et le principe de
prevention
Ainsi que nous l'avons évoqué plus haut,
l'adhésion au principe de prévention implique la prise en compte
par le droit des risques potentiels de fa~on a éviter que ceux-ci
n'entrainent éventuellement des dommages graves ou irréversibles
pour l'environnement ou la santé humaine. Le risque potentiel est ici
compris comme un risque qui n'est pas encore avéré, c'est-A-dire
que son existence ou sa réalité peut etre prouvée a
l'issue d'une expertise scientifique. La preuve scientifique de l'existence du
risque peut a l'inverse conduire l'autorité publique a décider de
la poursuite du projet envisagé. Le principe de prévention est
fondé ici sur une réalité completement différente.
Il s'agit des « mesures de gestion d'un risque connu »71.
Trop souvent en effet, quand on prévoit, on ne prévoit jamais le
pire, c'est-A-dire le risque le plus dommageable, celui que l'homme a jamais ne
devrait affronter parce qu'il ne s'en sortira certainement pas. Il est vrai que
l'homme justement a transcendé une certaine dimension de la prise de
risque que, aujourd'hui, nos fusées atteignent Vénus, meme si
l'on ne sait pas guérir un rhume du cerveau72. Plus
largement, des lors que l'on parle de « prévention » des
risques, la question doit etre posée sur le cadre plus
général de la gestion des risques, ou plut:t de la vie de l'homme
dans son écosysteme.
On peut rappeler ici que dans des traités
internationaux relatifs a l'information et la consultation préalable, il
est prévu des techniques tendant a informer l'Etat dans lequel est
projetée toute activité susceptible d'avoir des effets sensibles
sur l'environnement. C'est le cas par exemple de la Convention d'Espoo du
25/02/1991 dont les alinéas 2 et 3 de l'article 3 en parlent
suffisamment.
Nous dirons avec le regretté Professeur KISS et le
Professeur BEURRIER que le principe de prévention s'applique a des
situations oil des réponses claires au plan scientifique existent,
démontrant qu'une activité a, ou risque d'avoir des effets
71 LAVIEILLE (J. M.), op. cit., p. 89.
72 CESBRON (G.) cite par FOGUI (J. P.), « Demain
» Editions SOPECAM, 1991, p. 40.
nuisibles. Grace a cette certitude, la dégradation de
l'environnement peut etre empechée ou mitigée par une
intervention a la source des nuisances73.
Section II : Modalites d'application des principes de
prevention et de precaution
L'action préventive est une action anticipatrice
et a priori, qui est préférée aux mesures a
posteriori du type réparation, restauration ou répression
intervenant apres une atteinte avérée a l'environnement. On a
parfois opposé les deux types de mesures. En réalité,
elles ne sont pas exclusives mais complémentaires car il n'est pas
toujours possible de tout prévoir74. Dans certains cas
d'ailleurs, la prévision des effets néfastes d'un projet peut
etre tres délicate, car certaines modifications de l'équilibre
écologique ne peuvent apparaitre que tres tard, meme si
l'irréversibilité des dommages peut parfois etre
démontrée notamment en ce qui concerne la disparition d'especes
vivantes. Mais dans d'autres cas, cette notion n'est pas claire et peut etre
envisagée a différentes échelles de temps.
Néanmoins, l'ignorance ou l'incertitude quant aux conséquences
exactes a court ou a long terme de certaines actions ne doit pas servir de
prétexte pour remettre a plus tard l'adoption de mesures visant a
prévenir la dégradation de l'environnement. Autrement dit, face a
l'incertitude ou a la controverse scientifique actuelle, il vaut mieux prendre
des mesures de protection séveres a titre de précaution que de ne
rien faire. C'est en réalité « mettre concretement en oeuvre
le droit a l'environnement des générations futures
»75.
Ainsi pour « concrétiser » ce droit a un
environnement écologiquement viable des générations
présentes et futures, des instruments existent pour mettre en
oeuvre les principes de prévention et de précaution
(Paragraphe 1). Ces instruments
73 KISS (A.) et BEURIER (J. P.), op. cit.,
p. 136.
74 Ibidem,
75 Ibidem, p. 98.
permettent en meme temps de mesurer les effets d'une telle mise
en ceuvre(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Instruments de mise en oeuvre des
principes de prevention et de precaution
Pour prévenir, il faut connaitre et étudier a
l'avance l'impact, c'est-à-dire les effets d'une action, c'est une regle
de bon sens qui exige une étude scientifique. Précaution et
prévention sont deux aspects de la prudence qui s'impose dans une
situation susceptible de créer un dommage. La mise en ceuvre de ces
principes signifie soit ne pas agir, c'est-à-dire respecter une
obligation de s'abstenir, renoncer a une action non maitrisée, soit
prendre des mesures juridiques (techniques...) pour limiter les futurs effets
sur l'environnement et la santé76. Ces mesures techniques
notamment sont mises en ceuvre a travers la procédure d'études
d'impact environnemental (A) dont l'écho dans les textes et les
pratiques sous-régionaux CEMA C de l'environnement est
avéré(B).
A- Les etudes d'impact environnemental ( EI E)
L'étude d'impact est assurément l'institution
la plus spécifique et sans doute la plus originale du droit de
l'environnement. Elle est au cceur du développement durable. Dans une
perspective environnementaliste conséquente, l'étude d'impact
s'entend automatiquement d'une évaluation a priori, et sa fonction est
d'aider les décideurs publics ou privés a intégrer
l'environnement dans leurs stratégies d'action afin d'éviter que
des travaux ou ouvrages ne dégradent irrémédiablement
l'environnement77. On en vient donc a définir l'étude
d'impact comme étant « l'étude a laquelle il doit etre
procédé avant d'entreprendre certains projets
76 LAVIEILLE (j. M.) : Les principes
généraux du droit international de l'environnement et un exemple
: le principe de précaution, cours polycopié de tronc commun
n° 4 de Master 2 en Droit international et comparé de
l'environnement, Université de Limoges, 2009 - 2010, p. 14.
77 KAMTO (M.), op. cit, p. 95.
d'ouvrages ou d'amenagements, publics ou prives dans le but
d'apprecier l'incidence de ces derniers sur l'environnement78.
La procedure d'etude d'impact est recente et presque
concomitante a l'emergence du droit de l'environnement. Elle apparait a la fin
des annees 60 aux Etats-Unis d'Amerique. En droit francais duquel est inspire
l'essentiel du droit d'Afrique Centrale, la procedure d'evaluation prealable
d'impact, ebauchee par un projet de loi d'Avril 1976, sera adoptee par
l'article 2 de la loi du 10 Juillet 1976 qui entrera en vigueur le
1er Janvier 197879. Bien qu'elle soit rassurante en
raison de son caractere preventif, l'etude d'impact est couteuse et ne saurait
donc etre engagee de maniere fantaisiste. En effet, comme l'affirme le
commissaire du gouvernement BRAIBANT « Ce n'est pas seulement le cout
financier de l'operation qui doit etre pris en consideration, mais aussi ce que
l'on pourrait appeler d'une fa~on generale son cout social. A un moment oil il
est beaucoup question et a juste titre d'environnement et de cadre de vie, il
faut eviter que des projets par ailleurs utiles viennent aggraver la pollution
ou detruire une partie du patrimoine naturel ou culturel du
pays80.
Apres son apparition en Amerique du Nord sous l'appellation
« d'impact assesment », l'etude d'impact s'est ensuite
integree peu a peu dans le droit de l'environnement des pays developpes avant
de se generaliser progressivement a partir des annees 80 en s'inserant dans les
legislations des pays en developpement, mais aussi dans les instruments du
droit international. Cette consecration internationale, aussi bien par de
nombreux textes contraignants que par diverses conventions internationales a
sans doute favorise sa reception explicite par les droits nationaux africains.
Cette procedure d'evaluation des activites pouvant avoir des effets nocifs sur
l'environnement a fait l'objet d'une convention specifique en ce qui concerne
la pollution transfrontiere81. Mais l'article 14 de la
78 Cite par KAMTO (M.), ibidem.
79 DMOTENG KOUAM (E.), op. cit., p. 32.
80 Conseil d'Etat, 28/05/1971, Rec. p. 409, cite par DMOTENG,
Ibidem.
81 Point 4 du preambule de la Convention d'Espoo du 25/02/1991
sur l'etude d'impact transfrontière
Convention de Kuala-Lumpur du 09/07/1985 etend l'obligation
d'evaluation prealable a tous les projets d'activites qui peuvent avoir des
effets sensibles sur l'environnement naturel pour prendre en compte les
resultats dans la procedure de decision. La Declaration de Rio a generalise
l'obligation d'etude prealable dans le cas des activites envisagees qui
risquent d'avoir des effets nocifs importants sur l'environnement et dependent
de la decision dRune autorite nationale competente82.
Bien d'autres textes internationaux en font aussi allusion, a l'exemple de La
Declaration de Stockholm qui faisait plutot implicitement allusion a l'etude
d'impact83.
Au plan africain, la Convention africaine sur la conservation
de la nature et des ressources naturelles signee a Alger le 15 septembre
1968 et modifiee a Maputo (Mozambique) le 11 juillet 2003 consacre la
procedure d'impact en son article XIV,
1, b. Mais c'est la gamme des textes d'Abidjan issus de la
conference des plenipotentiaires sur la cooperation en matiere de protection et
de mise en valeur du milieu marin et des zones cotieres de l'Afrique de l'Ouest
et du Centre convoquee a Abidjan par le Directeur executif du PNUE, du 16 au
23/03/1981 (plan d'action) qui adopta plusieurs instruments relatifs a la
procedure d'impact du moins en ce qui concerne le milieu marin. Il s'agit d'une
part de la Convention d'Abidjan relative a la cooperation en matiere de
protection et de mise en valeur du milieu marin et des zones cotieres, et le
protocole relatif a la cooperation en matiere de lutte contre la pollution en
cas de situation critique. Certains pays de l'Afrique Central sont parties a
cette convention et a son protocole qui sont entres en vigueur le 05/08/1984.
Il s'agit du Cameroun, du Congo, de la Guinee Equatoriale et du Gabon. Ces deux
textes mettent l'accent sur la cooperation regionale dans la protection et la
mise en valeur de l'environnement marin et cotier, et de leurs ressources. La
Convention d'Abidjan du 23/03/1981, de maniere specifique consacre l'etude
d'impact en son article 13, paragraphe 1 en ces termes « Dans le cadre
de leurs politiques de gestion de l'environnement, les parties contractantes
élaborent des directives techniques ou autres en vue de faciliter la
planification de leurs
82 Principe 17 de la Declaration de Rio de Janeiro
sur l'environnement et le developpement.
83 Voir les articles 14 et 15 de la Convention de
Stockholm qui fait appel a une planification rationnelle evitant les atteintes
a l'environnement.
projets de developpement, de maniere a reduire au maximum
l'impact n aste que ces projets pourraient avoir sur la zone d'application de
la convention >>. Commentant cette disposition, on a pu estimer
qu'elle est vague, imprecise et manque de clarte84.
En somme, la Convention et le protocole d'Abidjan constituent
la composante juridique du plan d'action d'Abidjan (Plan d'action WA CAF), et
expriment l'engagement des gouvernements de la region, leur volonté
politique d'envisager, soit individuellement, soit conjointement leur probleme
commun, concernant l'environnement cotier et marin85.
B- Portee des etudes d'impact dans le droit
sous-regional de l'environnement
« La pratique des etudes d'impact est encore a ses
balbutiements en Afrique. Pourtant, des legislations nationales de plus en plus
nombreuses integrent le principe de telles etudes qui sont le principal moyen
par lequel peut se réaliser le principe, si important de prevention en
matiere environnementale >>86. Nombre de textes
environnementaux de l'Afrique Centrale consacrent explicitement ce principe.
En Guinée, le Code sur la protection et la mise en
valeur de l'environnement institue par l'Ordonnance n° 045 du
28 Mai 1987 prévoit une procedure d'étude d'impact en ses
articles 82 et 83, et est complétée sur ce point par le
Décret n° 199 du 08 Novembre 1989. Il resulte de ces
textes que seuls les travaux figurant sur une liste sont soumis a etude
d'impact dans la mesure oil ils seraient susceptibles de porter atteinte a
l'équilibre ecologique de la Guinée, au cadre et a la
qualité de la vie ainsi qu'aux exigences de protection en general. Une
liste revele les travaux
84 ASSEMBONI-OGUNJI (A), « La protection et
la mise en valeur de l'environnement marin et cotier en Afrique de l'ouest et
du centre a travers le systeme juridique d'Abidjan » in Aspects
contemporains du droit de l'environnement en Afrique de l'ouest et
centrale, L. Ganier, coord., UICN, Gland, 2008, p.131.
85 Ibid., p. 132.
86 KAMTO (M.), op, cit., p. 99.
concernés. Il s'agit du défrichement des bois et
forêts de plus de 10 ha, des installations d'aquaculture, des travaux
d'adduction d'eau, des programmes d'irrigation. La procédure s'applique
aussi aux projets d'urbanisme et de planification.
Au Gabon, l'article 23 du code de
l'environnement87 permet au Ministre de l'environnement de soumettre
a un processus d'autorisation préalable, « ...les activités
susceptibles de porter atteinte a la faune et a la flore ou d'entrainer la
destruction de leur milieu naturel... ». En vertu de ce texte le Ministre
contrôle « l'introduction d'especes animales ou
végétales exotiques (...) susceptibles de porter atteinte aux
especes animales ou végétales locales... »88.
L'article 27 du même code permet l'interdiction « ...d'entreprendre
les activités qui peuvent mener a la dégradation ou la
modification de l'aspect initial du paysage, de la structure de la faune et de
la flore, ou de l'équilibre écologique ». C'est surtout le
Décret du 15 juillet 2005 réglementant l'étude de l'impact
sur l'environnement89 qui oblige les promoteurs de certains projets
comportant des incidences directes ou indirectes sur l'équilibre
écologique, la qualité et le cadre de vie des populations vivant
dans sa zone d'implantation ou dans des zones adjacentes a réaliser une
étude d'impact.
Au Cameroun, la législation forestiere institue
désormais une procédure d'étude d'impact a travers
l'article 22 du Décret n° 95/531/PM du 23 Aoftt 1995
fixant les modalités d'application de la loi n° 94/01 du
20 Janvier 1994 portant régime des forêts, de la chasse et de la
pêche. Cet article dispose en substance que le déclassement d'une
forêt domaniale a l'intérieur du domaine privé de l'Etat ne
peut intervenir que pour cause d'utilité publique « et apres une
étude d'impact sur l'environnement effectué a la diligence de
l'Administration chargée de l'environnement ». Le champ
d'application des études d'impact est ici tout a fait limité dans
la mesure oil il est circonscrit a certaines activités menées
dans le domaine forestier nationale. Le Professeur Maurice KAMTO affirme a
cet
87 Loi n° 16/93 du 26 aoftt 1993
portant code de l'environnement.
88 Article 26 de la loi n° 16/93 du
26 aoftt 1993 portant code de l'environnement.
89 Décret 00539 du 15 juillet 2005 abrogeant
celui N° 405 du 15 mai 2002.
égard qu'il s'agit néanmoins des toutes
premières dispositions prescrivant explicitement l'étude d'impact
en droit camerounais90.
Dans ce même pays, c'est la loi de 199691qui
traite de l'étude d'impact. Elle soumet a cet examen tout projet dont la
réalisation peut avoir des conséquences nuisibles sur
l'environnement92. Mais le Décret n°
2005/0577/PM du 23/02/2005 fixant les modalités de réalisation
des études d'impact environnemental et son Arrêté
d'application n° 0070/MINEP du 22 avril 2005 fixant les
différentes catégories d'opérations dont la
réalisation est soumise a une étude d'impact environnemental
définissent les bases juridiques de toute procédure d'impact. Il
faut dire que ces deux textes ont été pris en application des
dispositions des articles 17 et suivants de la loi n° 96/12 du
05/08/1996 portant loi-cadre relative a l'environnement. Traitant des
études d'impact ou de l'audit environnemental, les articles 17 et 19 de
cette loi précisent entre autre que « Le promoteur ou le maitre
d'ouvrage de tout projet d'aménagement, d'ouvrage, d'équipement
ou d'installation qui risque, en raison de sa dimension, de sa nature ou des
incidences des activités qui y sont exercées sur le milieu
naturel, de porter atteinte a l'environnement est tenu de réaliser,
selon les prescriptions du cahier des charges, une études d'impact
permettant d'évaluer les incidences directes ou indirectes dudit projet
sur l'équilibre écologique de la zone d'implantation ou de toute
autre région, le cadre et la qualité de vie des populations et
des incidences sur l'environnement en général
»93. Cette loi indique aussi que l'étude d'impact est
insérée dans les dossiers soumis a enquête publique
lorsqu'une procédure est prévue94 et que
l'étude d'impact est a la charge du promoteur95. L'article 19
quant a lui énumère les indications que doit comporter «
obligatoirement » l'étude d'impact96.
90 KAMTO (M.), op., cit., p. 102
91 Il s'agit du chapitre II du titre III de la loi
n° 96/12 du 5 aout 1996 portant loi-cadre relative a la gestion
de l'environnement au Cameroun
92 Article 17 de la loi n° 96/12 du 5
aout 1996 portant loi-cadre relative a la gestion de l'environnement.
93 Article 17 alinéa 1 de la loi
n° 96/12 du 5 aout 1996.
94 Article 17 alinéa 2 de la loi
n° 96/12 du 5 aout 1996.
95 Article 17 alinéa 3 de la loi
n° 96/12 du 5 aout 1996.
96 Il s'agit de :
- L'analyse de l'état initial du site et son
environnement - Les raisons du choix du site
En application de ces dispositions, deux textes reglementaires
ont ete signes et publies par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement et le
Ministre de l'environnement et de la protection de la nature. Le premier est le
Decret n° 2005/0577/PM du 23/02/2005 fixant les modalites de
realisation des etudes d'impact environnemental qui prescrit diverses
dispositions relatives :
- au contenu de l'etude d'impact environnemental97
- a la procedure d'elaboration et d'approbation des etudes
d'impact environnemental98 ainsi que des termes de reference y
relatifs99
- a la surveillance et au suivi environnemental du projet,
etc.
L'arrête n° 0070/MINEP du 22 avril 2005
pris dans le sillage des dispositions visees par le Decret n°
2005/0577/PM du 23/02/2005 fixe les differentes categories d'operations dont la
realisation est soumise a une etude d'impact environnementall00. Le
Decret 2005/0577 quant a lui dit ceci : « (1) La liste des activites
soumises a l'une ou l'autre categorie d'etudes d'impact environnemental vise
aux articles 4 et 5 ci-dessus est fixee par le Ministre charge de
l'environnement ; (2) En outre, le Ministre arrête le canevas type des
termes de reference desdites etudes en fonction des activites et apres avis du
Comite
- L'evaluation des consequences previsibles de la mise en oeuvre
du projet sur le site et son environnement naturel et humain
- L'enonce des mesures envisagees par le promoteur ou maitre
d'ouvrage pour supprimer, reduire et, si possible, compenser les consequences
dommageables du projet sur l'environnement et l'estimation des depenses
correspondantes
- La presentation des autres solutions possibles et des raisons
pour lesquelles, du point de vue de la protection de l'environnement le projet
presente a ete retenu.
97 Chapitre II du Decret de 2005
98 Chapitre III du Decret de 2005
99 Les chapitres II et III du Decret de 2005 font
allusion aux termes de reference, mais c'est l'Arrête n°
00001/MINEP du 03 Fevrier 2007 de Monsieur le Ministre de l'environnement et de
la protection de la nature parle plus en detail le contenu general des termes
de reference des etudes d'impact environnemental.
100 Voir notamment les articles : 3 qui indique les
operations ou activites soumises a une etude d'impact environnemental sommaire
; 4 qui indique les operations ou activites soumises a une etude d'impact
environnemental detaillee ; 5 qui indique que les operations ou activites
visees aux articles 3 et 4 ci-dessus et qui sont deja en fonctionnement ou en
exploitation sont soumises a un Audit Environnemental, enfin 6 qui indique le
contenu du rapport d'un Audit Environnemental.
Interministériel de l'environnement ; (3) Les frais
relatifs a l'étude d'impact environnemental sont a la charge du
promoteur »101.
De tout ce qui précede, il se dégage que la
procédure d'études d'impact dans les législations
nationales des Etats d'Afrique Centrale a une portée certaine, en
concordance avec les effets de mise en oeuvre des principes de
prévention et de précaution.
Paragraphe 2 : Effets de la mise en oeuvre des
principes
Indépendamment de la question du statut juridique des
principes de prévention et de précaution et du fait que ceux-ci
soient ou non consacrés en droit interne et sous-régional CEMA C
par des dispositions législatives explicites, c'est donc bien davantage
les effets de leur mise en oeuvre qui retiennent l'attention des pouvoirs
publics, mais surtout du consommateur. En effet, la réalisation
d'instruments aussi importants en appelle a l'application du poids de la preuve
du dommage ou de son absence (A), garantie d'une protection adéquate de
l'environnement (B).
A- L'application du poids de la preuve
Selon les termes de l'article 76.1 de la loi canadienne de
1999 sur la protection de l'environnement, les Ministres de la santé et
de l'environnement doivent appliquer la « méthode du poids de la
preuve » (weight of evidence approach pour la version anglaise de la loi)
en conjonction avec le principe de prudence lorsqu'ils procedent a l'une ou
l'autre des trois opérations destinées a déterminer si une
substance est toxique ou potentiellement toxique. Cette expression
renvoi-t-elle au fardeau de la preuve qui doit être retenu dans la
démonstration de la toxicité d'une substance ? signifie-t-elle
plutot qu'il convient d'opérer un reversement du fardeau de la preuve et
qu'il appartiendra dorénavant a celui qui utilise ou qui fabrique une
substance visée par l'évaluation et les examens prévus a
l'article 76.1
101 Voir article 6 notamment du Décret
n° 2005/0577/PM du 23/02/2005
de démontrer que l'utilisation de la substance
n'entrainera pas un risque significatif pour l'environnement ou la santé
humaine102.
Le poids de la preuve est un point focal qui intervient pour
éloigner des principes de prévention et de précaution. En
effet, le principe de prévention s'applique a des situations ou des
réponses claires au plan scientifique existent démontrant qu'une
activité ou un produit a, ou risque d'avoir des effets nuisibles sur
l'environnement ou la santé publique. L'étude d'impact qui est
l'instrument phare de mise en oeuvre des principes de prévention et de
précaution met, aux termes de l'article 17 alinéa 3 de la loi
camerounaise n° 96/12 du 05/08/1996 portant loi cadre relative
a la gestion de l'environnement son financement a la charge du promoteur ; des
problemes particuliers n'existent pas pour ce qui est de la charge de la
certitude scientifique de l'innocuité du projet pour l'environnement et
la santé humaine. La question s'est plutôt posée de savoir
si une telle certitude existe toujours et quel est le comportement a adopter
lorsqu'elle fait défaut. Heureusement, le principe de précaution
répond a cette interrogation, sans avoir vocation a remplacer la
prévention103.
Le principe de précaution exprime en effet la crainte
de voir se commettre l'irréparable et a pour portée essentielle
la nécessaire anticipation du risque collectif potentiel. De fait,
l'article 4 alinéa 3 f de la Convention de Bamako qui consacre le
principe de précaution en Afrique et notamment en Afrique Centrale
stipule « chaque partie s'efforce d'adopter et mettre en oeuvre, pour
faire face au probleme de la pollution, des mesures de précaution qui
comportent... des substances qui pourraient présenter des risques pour
la santé de l'homme et pour l'environnement sans attendre d'avoir la
preuve scientifique de ces risques... >>104. Certes peut-on
véritablement parler de certitude scientifique absolue, alors que la
science, en constante évolution, ne cesse de remettre en cause des
résultats considérés hier comme acquis. Ainsi finalement,
le principe de précaution allege la charge des scientifiques dont on
n'attend pas de certitudes, et aggrave la responsabilité des
102 TRUDEAU (H.), op. cit., p. 26.
103 GALIBERT (T.), op. cit., p. 22.
104 Article 4, alinéa 3 f de la Convention de
Bamako précitée.
décideurs habituels qui doivent prendre des mesures
effectives mais aussi réalistes en choisissant eux-memes parmi les
hypotheses qui leur sont soumises. On peut toutefois se demander si
l'administration ou le politique ne va pas devoir apporter la preuve chaque
fois qu'un doute subsiste, qu'il n'était pas nécessaire d'aller
au dela de ce qu'elle a prescrit ou en deca de ce qu'elle a
autorisé105. On a souvent affirmé a ce propos que le
principe de précaution implique un renversement de la charge de la
preuve, c'est-a-dire que c'est a celui qui entreprend une activité qu'il
revient d'établir qu'elle est conforme au principe de précaution
et non point a celui qui cherche a l'interdire d'établir qu'elle ne
l'est pas106. On voit mal ce qui permet d'établir en droit
une telle inversion de la regle du principe en dehors des rares secteurs ou
certains Etats semblent la sanctionner explicitement. On peut juger
l'idée satisfaisante. Il ne faut cependant pas se tromper. Cette
distribution nouvelle de la charge de la preuve trouve sa pleine signification
dans les contentieux judiciaires, oil elle déroge a la regle
traditionnelle qu'exprime l'adage « actori incombit probatio
»107. La Cour Internationale de Justice a également
adopté une attitude réservée par rapport au principe de
précaution. Dans l'affaire des essais nucléaires
II108, la Nouvelle-Zélande invoquait le principe de
précaution, pour sommer la France de faire la preuve de
l'innocuité totale des essais pour l'environnement. Face a cette
argumentation, la France soutenait que le statut du principe de
précaution en droit positif est « tout a fait incertain », et
que de toute fa~on il n'entraine pas un renversement total de la charge de la
preuve. La Cour a rejeté la demande de la Nouvelle-Zélande en ne
répondant pas aux arguments de la
Nouvelle-Zélande109.
105 GALIBERT (T.), op.cit., p. 42.
106 Pour plus de détail sur la question, lire
VERHOEVEN (J.), op. cit., p. 256
107 Ibidem.
108 CIJ, 22/9/1995, Affaire des essais
nucléaires II, Rec 1995 p. 342-344, cité par DESSINGES (F.) :
« Le principe de précaution et la libre circulation des
marchandises » ; Mémoire de DEA Droit des Communautés
européennes Université Robert Schuman de Strasbourg, Septembre
2000 note n° 112, p. 43.
109 Par DESSINGES (F.), ibidem.
La solution la meilleure est peut-être que la societe
dans son ensemble assume en pareil cas l'obligation de reparer les dommages
subis dans la perspective d'une prise en compte adequate de l'environnement.
B- La garantie d'une protection adequate de
l'environnement
Le principe de precaution exprime la crainte de l'Homme de
voir se commettre l'irreparable et a pour portee essentielle la necessaire
anticipation. Les mesures resultant du recours au principe de precaution
peuvent prendre la forme d'une decision d'agir ou de ne pas agir. Lorsque agir
sans attendre plus d'informations scientifiques semble la reponse appropriee,
cette action peut prendre diverses formes : Adoption d'actes juridiques
susceptibles d'un contrôle juridictionnel, information du public quant
aux effets nefastes d'un produit ou d'un procede. Cinq principes specifiques
devraient guider le recours au principe de precaution et conduire a une
protection maximale de l'environnement :
- - la proportionnalite entre les mesures prises et le niveau de
protection recherche
- la non discrimination dans l'application des mesures
- la coherence des mesures avec celles dejà prises dans
des situations similaires
- l'examen des charges et des avantages resultant de l'action ou
de l'absence d'action
- le reexamen des mesures a la lumiere de l'evolution
scientifiquell0.
A ce titre, la precaution ne signifie pas, même en
matiere environnementale, l'abstention, il convient en fait de prevenir deux
dangers : le premier est de prendre des mesures trop tardivement via une
attitude attentiste. Le second de prendre des mesures trop tot ou trop
systematiquement, inhibant ainsi tout progres de notre societe. L'application
du principe suppose uniquement que la
n0 Pour plus de details sur ces principes, voir :
http://wikipedia.org/wiki/principe_de_precaution,
consulte le 09/04/2010.
decision puisse preceder la connaissance scientifique complete
du phenomene en cause. Il conduit a agir avant de savoir et non attendre de
savoir avant d'agir. C'est le contraire du dogme : « dans le doute,
abstiens-toi »111.
Certaines positions bien affirmees corroborent celle-ci,
estimant que une interpretation differente des effets de l'incertitude
scientifique du risque est l'inobservation quant au plus significative du
principe de precaution. Pour nier le risque, ou pour affirmer l'inexistante de
danger pour la sante humaine ou a l'environnement, il n'est pas exige que tous
les experts soient d'accord. Le doute sur l'existence du risque appreciable
doit conduire le decideur a faire immediatement preuve de prudence et prendre
des mesures d'action ou d'omission112. En effet, même «
les Etats doivent être plus prudents lorsque l'information est
incertaine, precaire ou inadequate. L'absence d'une information scientifique
adequate ne doit pas être utilisee comme raison pour ajourner ou faillir
dans la prise de mesure d'amenagement ou de conservation113.
D'autres hypotheses peuvent être envisagees avec le Professeur Maurice
KAMTO concernant les etudes d'impact environnemental : suivant une premiere
hypothese, lorsque le contrôle de l'administration de l'environnement
peut conduire a un veto, il y a lieu de dire que l'effet est radical et
automatique. Dans les autres hypotheses, l'etude d'impact ne sert qu'à
eclairer les decideurs, etant entendu que les medications ou limitations aux
atteintes portees a l'environnement peuvent ensuite être transformees en
des prescriptions techniques obligatoires imposees a l'exploitant par
l'administration114.
A ce stade de la demonstration, on ne saurait que trop
comprendre, les principes de prevention et de precaution contribuent bel et
bien a dicter le comportement habituel de tous les acteurs sociaux quand ils
ont en face les questions d'environnement et de sante publique. Comment ne pas
donc, de ce point de vu,
111 GALIBERT (T.), op. cit., p. 24.
112 LEME MACHADO (P.A.): Commerce international
environnement et biodiversite. In vers un nouveau droit de l'environnement ?
Centre International de Droit Compare de l'Environnement, Limoges, 2003, p.
65.
113 1995, UN Fish Stoks Agreement, cite par LEME
MACHADO (P.A.), op. cit., ibidem.
114 PRIEUR (M.), cite par KAMTO
(M.), op. cit., p. 98.
avouer qu'ils garantissent la protection de ce patrimoine
indivis, toutes choses dont l'effectivité ou l'application en Afrique
Centrale comme partout ailleurs est a la charge des autorités
identifiées.
Chapitre 2 : Les autorites en charge de l'application des
principes de prevention et de precaution.
Pour l'administration de l'environnement comme pour toutes les
autres administrations, la décentralisation aurait du ou pu entrainer un
partage rationnel des compétences entre toutes les collectivités
qui les exerceraient en harmonie et en collaboration. Les choses sont
évidemment moins simples. Les compétences respectives des
diverses collectivités ne sont pas toujours clairement
réparties115. En France, l'administration locale de
l'environnement présente quelques particularités significatives :
la décentralisation, malgré les dernieres avancées y est
encore plus limitée qu'ailleurs, a quelques exceptions
pres116. Il ne saurait en être autrement en Afrique Centrale
oil par le jeu de la colonisation, la plupart des législations et
notamment de l'environnement sont inspirées du droit francais, quand ce
n'est pas un copier/coller. En effet, écrit le Professeur Maurice KAMTO,
« Ce droit colonial dont les normes directrices étaient
édictées en métropole et les mesures d'application dans
chaque territoire s'appuie en la matiere sur des reglementations sectorielles.
Ainsi en est-il en Afrique noire sous administration francaise par exemple. Le
droit colonial assure une protection indirecte et essentiellement utilitariste
de l'environnement, d'une part parce qu'il ne pourvoit pas en normes
spécifiques de protection de l'environnement, d'autre part parce que, en
fait de protection de l'environnement, il organise l'appropriation publique ou
privée et une exploitation absolument libérale des ressources
naturelles. En bien d'aspects, ce droit colonial est resté en vigueur
dans la plupart des pays africains, même apres leur accession a la
souveraineté internationale et fait encore souvent partie du droit
positif >>117.
En tout état de cause, dans ces pays les
compétences des autorités politiques et centrales sont
préservées et définies par la constitution et la loi
(Section 1). Cet état de choses, malgré ce qu'on peut penser,
n'est pas pour renforcer les prérogatives ou pouvoirs des autres
autorités notamment locales (Section 2).
115 ROMI (R.), Droit et administration de
l'environnement, op. cit., p. 151.
116 Ibidem, cite par ROMI (R.): "Les
compétences particulieres de la région Corse en matiere
d'environnement : Mythe ou réalité ?'' RJE, 1-1998, pp. 5 et
ss.
117 KAMTO (M.), op. cit., p.
66.
Section 1 : Les autorités politiques et
centrales
Nous envisagerons ici la position des autorités
constitutionnelles vis-a-vis de l'environnement (Paragraphe 1) avant
d'étudier la charge de l'administration active (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les autorités
constitutionnelles
Nous verrons ici que les chefs d'Etats d'Afrique Centrale ont
un role important et constitutionnellement reconnu en ce qui concerne la
ratification des traités et convention internationaux relatifs a
l'environnement (A), et que les pouvoirs d'autres autorités
constitutionnelles telles que le législateur et le conseil
constitutionnel ne sont pas méconnus (B).
A- Le role constitutionnel des chefs d' Etats d'Afrique
Centrale
Ce pouvoir des Chef d'Etats en matiere d'environnement
découle de leurs prérogatives a négocier et a ratifier les
traités et accords internationaux. A l'origine et par le
mimétisme institutionnel et législatif, ce pouvoir découle
des constitutions francaises successives dont l'article 52 stipule « Le
Président de la République négocie et ratifie les
traités, il est informé de toute négociation tendant a la
conclusion d'un accord international non soumis a ratification
>>118.
Prenant a leur compte cette disposition constitutionnelle
francaise, la plupart des constitutions d'Afrique Centrale l'amplifient en
conférant ainsi des pouvoirs suprêmes aux Présidents des
Républiques. C'est notamment le cas du Tchad oil la Constitution du
31/03/1996, révisée en Mai 2004 reprend mutantis
mutandis a son l'Article 219 les dispositions de la Constitution
française119.
118 Article 52 de la Constitution de la
République francaise du 04/10/1958,
119 En effet comme l'article 52 de la Constitution
francaise, l'article 219 de la Constitution du Tchad dispose « Le
President de la Republique negocie et ratifie les traites. Il est informe de
toute negociation
Au Congo, la Constitution du 20/01/2002 reprend presque les
mêmes stipulations en ses articles 178 et 179. Evidemment, la derniere
modification de la Constitution du Gabon survenue le 19/08/2003 par la loi
n° 13/2003 et de la Constitution de Guinée voisine issue
du vote du 28 septembre 1958120, ne sont pas loin de cette mouvance.
La Constitution de la République centrafricaine, adoptée a
l'issue du référendum du 05/12/2004 est en plein dans cette
logique sous-régionale, et parle plus ouvertement de «
l'environnement et des ressources naturelles »121. La situation
n'est pas différente au Cameroun oil l'article 43 de la Constitution du
02/06/1972 modifié par la loi n° 96/06/ du 18/01/1996
confere les mêmes pouvoirs au Président de la
République.
On le voit bien, les Présidents des Républiques
d'Afrique Centrale peuvent, a tout moment décider du sort de
l'environnement en ratifiant ou pas un traité international y relatif,
en concordance avec leurs intérêts. Certes des soubresauts
textuels indiquent de part et d'autre l'intervention du législateur et
du conseil constitutionnel. Mais ces autorités exercent-elles
effectivement leurs pouvoirs ?
B- Les pouvoirs du législateur et du conseil
constitutionnel
Dans la quasi-totalité des constitutions des pays
d'Afrique Centrale, des pouvoirs certains sont reconnus au législateur
et au Conseil constitutionnel en ce qui concerne la ratification des
traités et conventions dont l'un d'eux peut intéresser les
principes du droit de l'environnement. La Constitution gabonaise par exemple,
stipule a ce effet que « Le Président de la République
négocie les traités et accords internationaux et les ratifie
apres le vote d'une loi d'autorisation par le Parlement et la
vérification de leur constitutionnalité par le Conseil
constitutionnel. Le Président et les présidents des chambres du
Parlement sont informés de toutes négociation tendant a la
conclusion d'un accord international non soumis a
tendant a la conclusion d'un accord international nous soumis
a ratification ». Il en est pratiquement de même pour les
Constitution des autres pays de l'Afrique Centrale.
120 Voir les articles 113 et 114 de la Constitution
gabonaise et 77 de la Constitution de Guinée Equatoriale du
28/09/1958.
121 Voir article 69 de la Constitution de la
République Centrafricaine du 05/12/2004.
ratification >>122. Au Tchad, la Constitution
stipule fort opportunément que « Les traités de paix, les
traités de défense, les traités de commerce, les
traités relatifs a l'usage du territoire national ou a l'exploitation
des ressources naturelles, les accords relatifs a l'organisation
internationale, ceux qui engagent les finances de l'Etat ou ceux qui sont
relatifs a l'Etat des personnes, ne peuvent être approuvés ou
ratifiés qu'apres autorisation du Parlement >>123.
Cette derniere phrase laisse croire que le Parlement pourrait
constituer dans ce sens un bouclier ou contrepoids pour le Président de
la République qui voudra ratifier un traité nuisible pour
l'environnement. Or l'on sait tous dans quelles conditions sont élus les
membres des parlements dans les pays d'Afrique Centrale. On sait
également qui est le vrai maitre d'orchestre.
Au Cameroun, l'article 44 de la Constitution dispose : «
Si le Conseil Constitutionnel a déclaré qu'un traité ou
accord international comporte une clause contraire a la Constitution,
l'approbation en forme législative ou la ratification de ce
traité ou de cet accord ne peut intervenir qu'apres la révision
de la Constitution >>. Les constitutions d'autres pays d'Afrique sont
dans le même ordre d'idées124. Certaines Constitutions
parlent plutot de la Cour Suprême125. La Constitution du Tchad
attribue l'initiative de la saisine du Conseil constitutionnel concurremment au
Président de la République, au Président de
l'Assemblée Nationale ou au Président du
sénat126.
122 Article 113 de la Constitution gabonaise issue
de la loi n° 1/94 du 18/03/1994 modifiée successivement
par la loi 18/95 du 29/09/1995, la loi n° 1/97 du 22/04/1994,
les lois n° 14/2000 du 11/10/2000 et 13/2003 du 19/08/2003.
123 Voir article 220 de la Constitution
modifiée en Mai 2004.
124 C'est le cas par exemple des articles 78 de la
constitution de Guinée, 221 Constitution du Tchad et 183 de la
Constitution du Congo.
125 C'est le cas de l'article 78 de la Constitution de
Guinnée, mais il faut noter qu'au Cameroun, le conseil constitutionnel
n'est pas encore effectif, et que d'ailleurs c'est la Cour Suprême qui
statue en ses lieux et place, comme la plupart des institutions issues de la
constitution du 02/06/1972 modifiée le 18/01/2006. Voir article 67(1)
qui dit que les nouvelles institutions de la République prévues
par la présente Constitution seront progressivement mises en place. (2)
Pendant leur mise en place et jusqu'a cette mise en place, les institutions de
la République actuelles demeurent et continuent de fonctionner.
126 Article 221 de la Constitution du Tchad
31/03/1996, révisée en Mai 2004.
Paragraphe 2 : L'administration active
La manifestation la plus évidente des principes du
droit de l'environnement dans les législations d'Afrique Centrale est
celle qui résulte de l'adoption par les pouvoirs publics
compétents de dispositions législatives ou reglementaires pour
transposer en droit interne des normes internationales souscrites par les pays.
Dans son role qui est celui de mettre en application la politique de la nation
telle que définie par le Président de la
République127, le Gouvernement est chargé de ce fait
d'appliquer les conventions et traités internationaux de protection de
l'environnement. Il s'agit généralement des Ministres en charge
de l'environnement (A), des Ministres de la santé et assimilés
(B).
A- Les Ministres en charge de l'environnement
Le mouvement des indépendances n'a pas mis fin a cette
situation qu'il a au contraire amplifié. De fait, depuis la
conférence de Rio de Janeiro ouvert du 03 au 14 Juin 1992, les Etats
d'Afrique centrale font bon étalage de leur bonne intention
écologique. Tous ou presque ont créé des Ministeres de
l'environnement128 aux compétences résiduelles.
Lorsqu'ils sont ainsi reconnus en droit interne selon une technique
appropriée, les principes de prévention et de précaution
ont des effets précis. Le principe de précaution par exemple est
appelé a jouer un role fondamental dans le processus de prise de
décisions des autorités publiques. Quant au principe de
prévention et grace a la certitude qui est démontrée, la
dégradation de l'environnement peut être empêchée ou
mitigée par une intervention a la source des nuisances. En effet, les
Ministeres de l'environnement ou assimilés exercent des pouvoirs de
réglementation, d'autorisation et de contrôle a l'endroit des
activités susceptibles de générer des risques potentiels
pour l'environnement ou la santé humaine. L'adhésion au principe
de précaution oriente le processus décisionnel des pouvoirs
publics vers une démarche
127 Il s'agit d'une disposition constitutionnelle.
Voir notamment les articles 11(1) de la Constitution du Cameroun; 37 de la
Constitution de Guinée et 8(2) de la Constitution du Gabon.
128 Pour plus de détail, voir DMOTENG KOUAM
(E.), op. cit., p. 46.
d'anticipation des risques qui nécessite que soit prise
en compte l'incertitude scientifique et que soient évalués les
risques incertains qu'elle recouvre. Cette démarche devrait conduire
l'administration publique a adopter l'une des trois options possibles :
autoriser l'activité malgré les risques éventuels qu'elle
comporte pour l'environnement ou la santé humaine, autoriser
l'activité en l'assortissant de modalités d'exercice de fa~on a
limiter et a circonscrire ces risques ou encore interdire l'activité
lorsque les risques potentiels impliqués apparaissent inacceptables,
étant entendu dans tous les cas que la décision prise reste
révisable pour tenir compte de l'évolution des connaissances
scientifiques129.
Si donc le Ministere en charge de l'environnement applique
cette démarche, il ne saurait en être autrement pour le Ministere
de la santé et bien d'autres, qui n'en font pas moins partie de
l'administration active.
B- Le Ministre de la sante et les autres Ministres
Les préoccupations relatives a la protection de
l'environnement et a la préservation de la santé des populations
sont au centre du dispositif et communes a chacun de ces domaines. Un seul
élément, a lui seul ne constitue pas l'environnement urbain, mais
tous y participent. Il est nécessaire de situer l'ensemble au regard des
enjeux réels qui sont planétaires et locaux130. Les
administrations coloniales étaient critiquées pour leur
concentration, leur arrogance, leur priorité pour les produits de rente,
leur exploitation anarchique des ressources. L'apparition d'une administration
d'Etat spécialisé dans la protection de l'environnement est
récente et mal adaptée. On a pu dire que « ses moyens sont a
tout prendre, plus proche de la fronde de David que de la force de Goliath
>>131. Le Ministere de la santé dispose d'un
comité d'évaluation des effets des catastrophes sur la
santé ainsi que des besoins rendus nécessaires a cet effet.
129 TRUDEAU (H.), op. cit., p.9
130 DROBENKO (B) : Environnement urbain et union
Européenne, in vers un droit de l'environnement urbain, p.
51.
131 ROMI (R.), L'administration et les acteurs du
droit de l'environnement : l'exemple francais, cours polycopié de tronc
commun n° 3 en Master 2, op. cit., p. 5.
Le Ministre de la défense, s'est vu confier quant a
lui, la gestion du corps des sapeurs pompiers, détaché des
municipalités pour des raisons d'efficacité. Au sein de
l'armée de l'air existe par ailleurs une unité anti-incendie et a
la police nationale plusieurs brigades anti-émeute132. C'est
certainement pour cela que des prérogatives sont dévolues a
d'autres ministeres.
Au Cameroun par exemple, le Décret n°
95-232 du 06/11/1995 de ce pays situé au coeur de l'Afrique Centrale et
portant organisation du Ministere de l'Administration territoriale,
créé au sein de ce dernier une direction de la protection civile,
chargée entre autres de l'organisation de la protection civile sur
l'ensemble du territoire national. Par précaution et pour
prévenir toute déconvenue préjudiciable a l'environnement
et a la santé publique, le Ministere des Mines a effectué a ce
jour un recensement des zones a risques sur l'ensemble du territoire et a
participé aux expérimentations sur le dégazage du Lac Nyos
et du Lac Monoun. La cartographie des risques élaborée permet de
localiser les zones susceptibles d'être affectées par les
catastrophes aux fins de prévention et d'intervention.
Section 2 : Les autorités locales
La question ici est celle de savoir si, en dehors de la grande
machine étatique centrale de puissance publique ayant les missions
régaliennes et dotée de gigantesques moyens, d'autres
entités peuvent jouer le role qui est le leur quant a l'application des
principes de prévention et de précaution. Car l'Etat demeure le
garant - et la derniere garantie - du respect de l'environnement en liaison
avec le juge133. Cette préoccupation semble avoir
été soupesée par le législateur camerounais. En
effet, la loi camerounaise dispose « Le Président de la
République définit la politique nationale de l'environnement. Sa
mise en oeuvre incombe au gouvernement qui l'applique de concert avec les
collectivités territoriales
132 BOMBA ( C-M), op. cit., p. 367
133 ROMI (R.), Droit et administration de
l'environnement, op. cit., p. 240.
decentralisees, les communautes de base et les associations de
defense de l'environnement »134. Faut-il se cacher derriere
cette belle affirmation legislative et anesthesier le role essentiel que
peuvent jouer les autres composantes de la societe ? La reponse a cet enigme ne
saurait être positive s'il fallait automatiquement en produire une, eu
egard notamment aux interets en presence. Ainsi, nous envisagerons d'abord les
autorites decentralisees et les autorites deconcentrees (Paragraphe 1) ;
ensuite les autres acteurs qui participent a l'application des principes de
prevention et de precaution (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les autorités
décentralisées et les autorités
déconcentrées
Il convient pour la bonne forme, d'etudier les pouvoirs des
collectivites locales decentralisees (A) avant d'envisager les pouvoirs de
police du Prefet (B).
A- L'application du droit international de
l'environnement par les Maires et Delegues du gouvernement
Dans les pays africains, le cadre classique de
l'administration de l'environnement etait marque par une inflation
institutionnelle. A l'eclatement normatif correspondait, dans presque tous les
pays, une fragmentation institutionnelle qui soulevait et souleve encore, entre
autres problemes, celui des conflits de competence dus aux chevauchement des
missions, et celui de la coordination sectorielle135. Au niveau
local, les collectivites locales avaient et ont toujours une responsabilite
importante dans la gestion de l'environnement notamment en milieu urbain oil
elles s'occupent en particulier de la gestion des dechets
134 Article 3 de la loi n° 96/12 du 5
aout 1996 portant loi-cadre relative a la gestion de l'environnement au
Cameroun.
135 DOUMBE-BILLE (S.): « Evaluation des
institutions et des moyens de mise en oeuvre du droit de l'environnement et du
developpement » RJE, 1993-1 ; cite par KAMTO (M.), op. cit., p.
105.
menagers, du probleme des nuisances de toutes sortes et de
l'esthetique generale des centres urbains136.
Ainsi, dans la sous region Afrique Centrale, la societe de
droit camerounais denommee Hygiene et Salubrite du Cameroun (HYSA CAM),
specialisee dans la gestion des dechets menagers, et qui fetait en 2009 ses
quarante ans de bons et loyaux services aux collectivites locales, est la
reference en son domaine au
Cameroun et, desormais, au-dela. En effet « Nous
recuperons 3 000 tonnes d'ordures par jour dans une dizaine de villes, dont
1 200 tonnes a Douala et 1 100 a
Yaounde » indique Madame Suzanne Kala-Lobe, porte-parole
d'Hysacam. Depuis un an, l'entreprise exporte son savoir-faire. Elle a decroche
le marche du ramassage et du traitement des ordures de Niamey, la capitale
nigerienne beneficie desormais d'un systeme de collecte moderne, avec des
bennes a compaction qui recuperent 500 tonnes de dechets par jour. Depuis aofit
2009, Hysacam soulage aussi quotidiennement la capitale tchadienne, N'Djamena,
du meme volume d'ordures137. Les chiffres de cette structure en
disent d'ailleurs long sur ses objectifs en ce qui concerne l'assainissement de
l'environnement urbain en Afrique Centrale. En effet, avec plus de quarante ans
d'experience, HYSA CAM desert au Cameroun les villes de Douala, Yaounde,
Bafoussam, Limbe, Kribi, Maroua, Garoua, Ngaoundere, Edea, Bangante, Bangou. En
Afrique Subsaharienne, elle opere dans deux villes de deux pays dont Niamey au
Niger et Ndjamena, la capitale Tchadienne. Ses effectifs sont estimes en 2009 a
4000 employes avec une trentaine de cadres nationaux et internationaux
(ingenieurs, specialistes d'horizon divers). Le materiel de travail est
constitue de 400 camions, 30 engins, 04 balayeuses mecaniques et plus de 5 000
recipients de collecte138.
136 KAMTO (M.), op. cit., p. 106.
137 Pour plus de detail, voir
http://www.jeuneafrique.com/Articles/Dossier/ARTJAJA2551p086
.xml1/
environnement-ville-dechet-hysacamhysacam-un-modele-pour-la-proprete-urbaine.html,
consulte le 29/07/2010.
138
http://www.hysacam-proprete.com/index.php?mod=entreprise&vg=4,
consulte le
29/07/2010.
L'amélioration du cadre de vie en zone urbaine et
rurale passe nécessairement par des opérations d'assainissement
du milieu notamment, l'évacuation et le traitement des eaux
usées. Pour ce qui est de la lutte antivectorielle, l'hygiene de
l'habitat, l'hygiene industrielle, les municipalités doivent prendre
conscience de l'importance de la défense de l'environnement et se doter
des moyens indispensables pour y apporter des solutions idoines139
et proposer ainsi des mesures d'amont en aval a toute dégradation du
milieu. Les missions de police municipale couvraient un champ tres vaste. Or
les moyens dont dispose la Commune pour assurer la protection des citoyens sont
déficients. Dans la pratique, l'action municipale en matiere de police
est beaucoup plus préventive, et persuasive que répressive. En
effet le Maire détient personnellement, le pouvoir de police municipale
et l'exerce « sous surveillance » de l'autorité
administrative. Le pouvoir reglementaire s'exerce par la voie d'arrêts
municipaux qui doivent être compatibles avec les reglements d'ordre
supérieur140.
Le service public de l'assainissement par exemple est
assuré partiellement par les Communes. On entend
généralement par assainissement, la collecte et le traitement des
eaux de pluies et des eaux usées. On distinguera toutefois le drainage
qui consiste a collecter les eaux de pluies par l'intermédiaire d'un
systeme collectif et l'assainissement qui concerne l'évacuation des eaux
usées (Eaux ménageres) et des eaux vannes (excréta) par
des systemes collectifs ou individuels, avec ou sans traitement avant rejet
dans le milieu naturel141.
C'est dire a l'éclairage de ce qui précede que,
si les autorités décentralisées en l'occurrence le Maire
et le Délégué du gouvernement ont la faculté
d'appliquer le droit de l'environnement, ils ne peuvent le faire qu'en
cohérence de la politique générale du gouvernement
qu'incarne vis-à-vis du Maire notamment, le Préfet qui, en la
matiere, a un pouvoir central dans la circonscription.
139 KOM T CHUENTE (B.): Développement communal
et gestion urbaine au Cameroun, les enjeux de la gestion municipale dans un
systeme décentralisé, éditions CLE, Yaoundé, 1996,
p. 137.
140 Ibid., p. 67.
141 Ibid., p. 142.
B- Le role central du Préfet en matiere de
protection de l'environnement
D'une maniere générale, les problemes
d'environnement rencontrés en milieu urbain et en milieu rural sont, la
gestion des déchets, l'eau, les nuisances, la pollution, la gestion de
la valorisation des for4ts et de la biodiversité, la protection des
écosystemes marins et cotiers. Il est a cet effet intéressant de
mesurer combien le Préfet, malgré la décentralisation
détient un grand nombre de pouvoirs en matiere de protection et
d'administration de l'environnement, que ne remettent que peu en cause les
récentes évolutions. Soit il se voit reconnaitre -ou plut(t
l'Etat possede, mais il « personnifie » l'Etat- le monopole de mise
en oeuvre effective de ces procédures, soit il intervient a un titre ou
a un autre dans ces procédures, qu'elles soient entamées a
l'initiative des personnes privées ou de collectivités locales.
Il a également des pouvoirs importants en matiere de police, qui font de
lui une piece importante du dispositif francais d'administration de
l'environnement142.
En France justement d'oil est calquée la
quasi-totalité des législations d'environnement des pays de
l'Afrique Centrale, la loi d'orientation agricole du 07/07/1999 conforte entre
autres les pouvoirs de l'autorité administrative et notamment du
Préfet et des vétérinaires inspecteurs en matiere de suite
a donner en cas de constatation d'un manquement a la réglementation en
permettant au premier de mettre en oeuvre des fermetures administratives de
tout ou partie des établissements ; au second d'ordonner, sur une base
législative des opérations diverses destinées a
améliorer la sécurité sanitaire des
aliments143.
A propos du role du Préfet en matiere d'environnement
en Afrique, la loi n° 96/12 du 5 aotit 1996 portant loi-cadre
relative a la gestion de l'environnement au Cameroun dispose : « En vue de
limiter ou de prévenir un accroissement prévisible de la
pollution atmosphérique a la suite notamment de développements
industriels et humains, d'assurer une protection particuliere de
l'environnement, ainsi que de préserver la santé de l'homme, des
zones sensibles
142 Voir ROMI (R.), op. cit., p. 173.
143 GALIBERT (T.), op. cit., 68
peuvent etre créées et délimitées
sur proposition du Préfet territorialement compétent par
arreté conjoint des Ministres chargés de l'environnement, de la
santé publique, de l'administration territoriale et des mines. Le
Préfet peut instituer des procédures d'alerte a la pollution
atmosphérique, apres avis des services techniques locaux
compétents »144.
La position du Préfet est la conséquence logique
de la conjonction entre l'augmentation de ses pouvoirs en 1982 en France (la
décentralisation est allée de pair, on le sait, avec une
clarification et une augmentation des pouvoirs de ces «
Délégués du gouvernement », représentant(s)
direct(s) du Premier Ministre et de chacun des Ministres, «
dépositaire(s) de l'autorité de l'Etat »145 et de
la traditionnelle méfiance envers les collectivités locales en
matiere d'environnement. Autant dire donc qu'ils sont incontournables : tant en
matiere de protection de la nature, qu'en matiere de la gestion de la faune...,
quand ils interviennent en tant qu' autorités de police. Pour le reste,
ils servent le plus souvent de relais, mais n'en perdent pas pour cela leur
place centrale, meme s'ils ne sont pas titulaires de pouvoirs de
décision.
De fa~on générale dans les Etats d'Afrique
Centrale et pour ce qui est des installations classées, les
établissements de premiere et deuxieme classe sont soumis a
autorisation. L'autorité habilitée a délivrer cette
autorisation varie suivant les pays, Ministre chargé des
établissements dangereux, insalubres et incommodants au Cameroun depuis
l'article 3 du Décret de 1976 ; Ministre chargé de l'industrie,
des petites et moyenne entreprises et de l'environnement en Guinée
(article 72 et 70)146. Ainsi érigé en «
délégué du gouvernement » et par conséquent de
chacun des Ministres, le Préfet est l'autorité locale centrale
chargée d'appliquer le droit de l'environnement dans la circonscription.
Il incarne ce role essentiel de l'Etat qui est de planifier et de coordonner ;
il n'est la qu'un relais, soit en vertu
144 Article 22 alinéas 3 et 4 de la loi
n° 96/12 du 5 aoftt 1996 portant loi-cadre relative a la
gestion de l'environnement au Cameroun
145 Cité par ROMI (R.) : Droit et
administration de l'environnement, op. cit., p. 173.
146 KAMTO (M.), op. cit., p.
339.
des textes, soit en vertu des pratiques
administratives147. En effet, en fin de compte, le pouvoir
hiérarchique central, soit qu'il est saisi par le Préfet, soit
parce qu'il est seul compétent en vertu des textes existants, a souvent
le dernier mot.
Paragraphe 2 : Les autres acteurs
Les administrations publiques et les autres institutions
concernées par la conservation de la nature ont pendant longtemps
considéré que la délimitation de sites
protégés a l'intérieur desquels toutes les formes
d'exploitation seraient interdites, suffirait a garantir une bonne conservation
des ressources naturelles. Cette fa~on de procéder reste certainement le
seul moyen véritablement efficace pour assurer la protection de certains
sites en situation critique ou d'importance fondamentale. La
réalité cependant nous conduit aujourd'hui a penser que la
conservation de la nature ainsi que l'exploitation durable des ressources
renouvelables ne sont possibles qu'avec la participation responsable du plus
grand nombre. De cette conviction est née la notion de gestion
participative, laquelle peut être définie comme un processus
dynamique permettant aux populations locales de contribuer a la conception et a
la mise en application des programmes d'action visant la conservation de la
biodiversité148.
La mise en oeuvre de cette approche de conservation doit tenir
compte des caractéristiques propres a chaque région ou groupe de
population. Elle passe avant tout par la connaissance et donc par un
régime d'information, postérieure ou concomitante, mais aussi et
surtout préalable a la prise de décision ; elle passe ensuite par
la mise en place de mécanismes de participation authentique aux choix.
On a de ce point de vue estimé que les associations et les ONG sont
les
147 ROMI (R.), Droit et administration de
l'environnement, op. cit., pp. 176 et s.
148 FOTSO (R. C.); COMPAGNON (D.) et CONSTANTIN
(F.) - Sous la direction de- : Risques écologiques, projets
intégrés et préoccupations locales, in Administrer
l'environnement en Afrique, Karthala - IFRA, 2000, p. 241.
institutions idoines pour répercuter a qui de droit,
les opinions des citoyens149. Sur ces derniers points, en matiere de
gestion et de protection de l'environnement, le role des associations et
l'appel ou le recours a des personnes privées y est peut'étre
plus frequent et en tout cas plus divers que dans d'autres domaines
(A)150. Mais celui des Organisations Non Gouvernementales (ONG)
l'est certainement encore plus (B).
A- Les associations et les personnes privées
C'est l'Agenda 21151 dont les dimensions sociales
se concrétisent surtout par un appel a la mobilisation et a
l'implication du plus grand nombre possible d'acteurs sociaux (des femmes aux
syndicats en passant par les jeunes et les associations), qui reconnait leur
place a cette categorie d'acteurs de la protection de l'environnement. Comme
l'écrit opportunément un auteur : « L'opinion publique joue
egalement un role de surveillance dans l'application des regles
établies. Le role des associations environnementales dans l'application
du droit de l'environnement ne fait pas de doute que ce soit au plan national
et m'éme au plan international : il s'agit au minimum d'un travail de
sensibilisation et d'information du public, servant souvent a mettre en cause
les pouvoirs publics face a une carence d'information, de prevention ou
m'éme d'action suite a une catastrophe »152.
Cependant continue cet auteur plus loin, Une exclusion formelle
de cette categorie serait percue par beaucoup comme "une raison majeure
de l'ineffectivité de ce droit''. En effet, conclut-il, si
nombre d'instruments consacrent la protection de
149 GN'NTEDEM LOWE (P. J.): "Les ONG et la
protection de l'environnement en Afrique Centrale, Memoire de Master 2 en Droit
international et compare de l'environnement, Universite de Limoges, Juillet
2003, p. 8.
150 ROM' (R.) : L'administration et les acteurs du droit de
l'environnement: l'exemple francais, cours polycopie de Master 2 en Droit
international et compare de l'environnement, Universite de Limoges, 2009-2010,
p. 5.
151 Le plan d'action "Agenda 21" (Action 21) adopte
par les Chefs d'Etats lors du Sommet de Rio de Janeiro ouvert du 03 au 14 Juin
1992 consacra ses chapitres 24 a 27 a la participation des jeunes, des femmes,
des associations et des ONG a un developpement durable et equitable.
152 MAZAUDOUX (O.), op. cit., p. 30.
l'environnement comme un intérêt supérieur
de l'humanité, il faut bien se résoudre a accorder une place aux
Etats bien stir, mais également aux populations, individus et personnes
morales153. Quoi qu'on dise, l'environnement ou sa protection
intéresse au premier chef, tout d'abord l'individu qui de ce fait
devrait également être le premier et le meilleur protecteur de
l'environnement. Ce n'est donc pas incongru quand la Déclaration de Rio
stipule que « La meilleure fa~on de traiter les questions d'environnement
est d'assurer la participation de tous les citoyens concernés, au niveau
qui convient. Au niveau naturel, chaque individu doit avoir dument acces aux
informations relatives a l'environnement que détiennent les
autorités publiques, y compris aux informations relatives aux substances
et activités dangereuses dans leurs collectivités, et avoir la
possibilité de participer aux processus de prise de décision. Les
Etats doivent faciliter et encourager la sensibilisation et la participation du
public en mettant les informations a la disposition de celui-ci...
»154. L'information et la participation des citoyens et des ONG
en matiere d'environnementale se sont tellement
généralisées ces dernieres années que le principe
10 de la Déclaration de Rio est en voie d'être codifié
puisque les Etats ont décidé d'en faire, au moins a
l'échelle européenne une véritable convention
internationale155
La Convention africaine sur la conservation de la nature et
des ressources naturelles de Juillet 2003 reconnait quant a elle des droits
procéduraux notamment le role du public dans son article XVI en ces
termes : « 1. Les parties contractantes adoptent les mesures
législatives et reglementaires nécessaires pour assurer a temps
et de maniere précise :
a) La diffusion d'informations sur l'environnement
b) L'acces du public aux informations sur l'environnement
c) La participation du public a la prise de décisions
pouvant avoir un impact important sur l'environnement... ».
153 Ibidem, p. 59.
154 Principe 10 de la Déclaration de Rio
précitée.
155 PRIEUR (M.) et alt., « L'information, la
participation et l'évaluation environnementale », cours
audio-visuel de tronc commun de Master 2 en Droit international et
comparé, Université de Limoges, 2009 - 2010.
Ces dispositions sont pour l'essentiel reprises en droit
national en Afrique Centrale156. On imagine bien comme d'ailleurs
l'indiquent ces diverses dispositions, que ce droit d'acces a l'information,
permet a chaque citoyen de demander des informations en matiere
environnementale sans avoir a justifier d'un intérêt
particulier157. Etant ainsi nantis des informations de derniere
minute sur l'état de l'environnement, le public qui est touché,
ou risque de l'être par les décisions, dispose de tous les atouts
pour déclencher des processus de prévention ou de
précaution selon le cas.
B- Les Organisations Non Gouvernementales (ONG)158
Les Organisations Non Gouvernementales (ONG) peuvent
être entendues comme tout groupement, mouvement ou association
constituée de fa~on durable par des individus ou des personnes morales
appartenant a un même Etat ou a des Etats différents en vue de la
poursuite de buts non lucratifs159. Ces organisations constituent la
forme collective, la sensibilité collective, l'émanation
collective de la société civile internationale160. Au
dela de leur dénominateur commun qui est la défense de
l'environnement, les ONG se caractérisent par une grande
hétérogénéité161. Si ces
organisations sont des acteurs relativement récents de la vie
internationale, les premieres ONG de l'environnement sont des organisations
militantes, tres actives et tres présentes sur le terrain. A l'origine
elles sont intransigeantes et refusent toute collaboration avec l'Etat.
Aujourd'hui, les ONG vertes oeuvrent dans bien des cas de concert avec les
pouvoirs publics dont elles
156 Voir par exemple l'article 9 al. e de la loi
camerounaise n° 96/12 du 05/08 1996 précitée.
157 MAZAUDOUX (O.), op. cit., p. 50.
158 Pour plus en details du role des ONG
d'environnement en Afrique Centrale, lire GNINTEDEM LOWE (P. J.), op. cit.
159 KAMTO (M.), op, cit., p. 381
160 DOUMBE BILLE (S.) et alt.., «
Les acteurs du Droit International de l'Environnement », cours
vidéo de tronc commun en Master 2 par satellite (ENVIDROIT) en Droit
International et Comparé de l'Environnement de l'Université de
Limoges, 2009-2010.
161 MOHAMED (A.M.) et alt.., «
Les acteurs du Droit International de l'Environnement », cours
vidéo de tronc commun en Master 2 par satellite (ENVIDROIT) en Droit
International et Comparé de l'Environnement de l'Université de
Limoges, 2009-2010
prolongent ou completent l'action sur le
terrain162. Une fois encore, Agenda 21 consacre tout un chapitre au
phénomene ONG163. Depuis lors jusqu'a nos jours, l'influence
des ONG s'est faite progressivement et dans l'application d'instruments
internationaux protégeant l'environnement. De plus en plus souvent, les
ONG participent activement a l'élaboration des textes internationaux,
soit en soumettant aux réunions officielles des projets et des
propositions, soit en assistant aux négociations a titre d'observateurs
ou même parfois en tant que membres de délégations
nationales, soit enfin, en surveillant l'exécution par les Etats des
engagements qu'ils ont pris164. Face a cette avancée
remarquable des ONG dans l'arene internationale, on a pu parler de «
révolution participative » en droit international de
l'environnement165.
En tout état de cause les ONG jouent plusieurs roles en
ce qui concerne la protection de l'environnement, notamment un role effectif de
prévention des risques environnementaux. Cette prévention se
concrétise par l'alerte dont les ONG n'en font pas l'économie
pour sensibiliser aussi bien les décideurs (1) que le grand public
(2).
1) L'alerte vis-à-vis des
décideurs
Pour que le droit de l'environnement soit « un droit de
conciliation, un droit consenti plut(t qu'imposé »166,
les décideurs doivent être constamment informés des besoins
réels des populations en la matiere. Les ONG disposent ainsi de diverses
techniques pour alerter les décideurs. Elles ont de ce point de vue
développé aussi bien une capacité d'influence
exceptionnelle que des milliers de données et informations primordiales
sur l'état de l'environnement et sur les enjeux écologiques
majeurs susceptibles d'éclairer les pouvoirs publics. Ces
162 KAMTO (M.), op. cit., p. 381
;
163 Agenda 21 consacra tout le chapitre 27 au
« renforcement du role des 0rganisations Non Gouvernementales :
Partenaires pour un développement durable ».
164 KISS (A.) ; BEURIER (J.P.), op. cit., p.
100.
165 MEKOUAR (M.A.) et alt.., op. cit.
166 KAMTO (M.) , op. cit., p. 76.
informations sont communiquées aux autorités,
selon la notoriété et les moyens de l'ONG par des voies diverses,
comptes rendu, etc. Ce role d'alerte met également a la charge des ONG
le devoir moral de dévoiler des atteintes a l'environnement ou de
dénoncer des risques de dommages écologiques a savoir la
disparition des especes sauvages menacées d'extinction. L'alerte peut
aussi prendre la forme d'une revendication contentieuse a l'occasion d'action
en justice que les ONG peuvent intenter au titre de la défense de
l'environnement sans avoir nécessairement a établir l'existence
d'un intérêt direct et personnel a agir167. Les ONG
travaillent par ailleurs pour beaucoup d'entre elles sur le terrain et donc
plus proches des populations. Elles sont de ce fait bien placées pour
faire remonter des informations recueillies au niveau des décideurs sur
le territoire de chaque Etat dans lequel elles interviennent.
2) L'alerte vis-à-vis du
public
Le fait pour les ONG de posséder et diffuser des
informations crédibles fiables et vérifiables sur l'état
de l'environnement est le moyen le plus sir pour elles de faire souscrire un
plus grand nombre d'adhérents possible a la cause environnementale. Ceci
parce que en droit de l'environnement comme ailleurs, la démocratie
participative n'a d'autre base objective que la majorité. Les ONG
disposent de tous les moyens de diffusion possibles a savoir les publications
d'importants documents a travers divers créneaux et surtout l'emploi
judicieux des masses médias modernes168. Elles initient aussi
des séminaires sur les questions d'environnement ainsi que les ateliers
de formation. En outre, elles organisent de grandes campagnes de
sensibilisation et de dénonciation d'atteintes portées a
l'environnement. Dans l'ensemble l'on doit dire que le pouvoir d'information et
de sensibilisation du public par les ONG répond a l'obligation qui
pése sur les Etats de mettre a la disposition des citoyens des
informations qu'ils détiennent relatives a l'environnement. Cet
accés du public a l'information sur l'environnement est posé sur
le plan général par l'article 10 de la Déclaration de Rio
puis repris, amélioré et amplifié par
167 MEKOUAR (M. A.) et al., op cit.
168 Voir par exemple
http://decouverte.wwf.fr
d'autres textes ultérieurs du Droit International de
l'Environnement169. Les ONG apparaissent alors comme « le
relais privilégiés »170 pour collecter les
informations auprés des pouvoirs publics et pour faire remonter vers eux
les renseignements recueillis auprés des administrés.
169 Voir par exemple article 2, mais surtout article 4
de la Convention d'Aarhus du 25/06/1998 precite.
170 MORAND-DEVILLER a.), Le droit de l'environnement, PUF,
5e edition, 2002, p. 24, cite par GNINTEDEM, op. cit., p.
16.
Premiere conclusion partielle
Aux termes de cette étude sur l'application par les
autorités administratives dans les Etats d'Afrique Centrale des
principes de prévention et de précaution, nous faisons le constat
d'au moins deux choses essentielles : la Première tient a ce que la
protection de l'environnement est le leitmotiv qui commande la mise en place
des mesures de prévention et de précaution.
La deuxième est que l'application de ces principes
constitue la chasse gardée des autorités administratives
centrales qui ont la latitude de transférer certaines de leurs
compétences aux autorités déconcentrées et locales,
en étant en même temps arbitres de l'utilisation de ces nouveaux
pouvoirs. Heureusement qu'on peut compter sur le role non négligeable
des acteurs de la société civile tels que les associations, les
personnes privées et les ONG. Ceux-ci servent valablement de relais
entre les pouvoirs publics et les administrés et vice versa, role
véritablement actif, tant et si bien qu'il permet parfois d'en appeler
l'application par les autorités juridictionnelles.
Deuxième partie :
L'application des principes de prevention et de
precaution par les autorités juridictionnelles d'Afrique
Centrale
Si les premieres organisations d'integration africaines, dites
de premiere generation171, se sont caracterisees par l'inter
gouvernementalisme et la predominance du reglement politique des differends,
les organisations les plus recentes se caracterisent par la
supranationalite172 et la predominance du droit dans le traitement
des questions relevant de la competence des Unions. Cette part de plus en plus
prise par le droit dans le traitement des differends communautaires s'est
accompagnee par l'institution d'organes juridictionnels communautaires charges
de dire le droit grace a diverses regles d'organisation et de procedure.
L'integration ne pouvant être realisee que si le droit
communautaire est respecte par ses principaux destinataires, les Etats membres
de la CEMA C, creee a la suite de l'UDEA C, ont decide d'adapter la nouvelle
organisation au nouvel environnement international en consacrant l'idee de
limite a la souverainete
171 Au lendemain des independances, les pays
africains en general et ceux de l'Afrique centrale en particulier ont tres vite
manifeste leur volonte de se regrouper. Le Professeur NARCISSE MOUELLE KOMBI
estime que « L'Union Douaniere Equatoriale creee le 23 juin 1959 entre
les pays de l'ancienne AEF, l'Union Douaniere et Economique de l'Afrique
Centrale creee par le Traite du 8 decembre 1964 revise en 1966 et 1974, la
CEEAC, la Communaute Economique des pays des Grands Lacs (CEPGL), sont autant
de configuration de cette realite », cf. NARCISSZE MOUELLE KOMBI,
« L'integration regionale en Afrique centrale: entre interetatisme et
supranationalisme », in: L'integration regionale en Afrique
centrale: bilan et perspective, HAKIM BEN HAMMOUDA, BRUNO BEKOLO EBE,
TOUNA MAMA, (dir.), prefaces de AMOAKO, MARTIN ARISTIDE OKOUDA, JEAN KUETE et
SYLVAIN GOMA, Paris, Karthala, 2003, pp 205 et 206., cite par Gabriel Marie
CHAMEGUEU : « Le controle juridictionnel des activites de la
CEMAC », Memoire de DEA, Universite de Douala, -consulte sur
http://www.memoireonline.com/08/09/2487/m_Le-contrle-juridictionnel-des-activites-de-laCEMA
C7.html.
172 La supranationalite signifie que les Organes ou
Institutions communautaires sont independants des Etats membres. Dans le cadre
de la CEMA C, la Cour de Justice est l'une des institutions qui marquent sa
supranationalite. Cf. JAMES MOUANGUE KOBILA, Cours polycopie de droit
institutionnel de la CEMAC, cours de premiere annee de doctorat, 2005,
FSJP des universites de Dschang et de Douala, disponible a la bibliotheque de
recherche de l'Universite de Douala, p. 3.
étatique et d'un controle juridictionnel sur les
activités communautaires des Etats membres et des Organes et
Institutions de la CEMA C.
Puisque la logique de l'intégration est associée
a l'idée de transfert de souveraineté a des institutions
supranationales, on ne doit pas pour autant oublier qu'elle comporte d'autres
aspects tout aussi importants: La soumission des décisions
étatiques (individuelles ou collectives) a l'empire du droit, l'octroi
des pouvoirs de controle a des organes judiciaires, la possibilité pour
les personnes privées de s'immiscer dans les rapports inter
étatiques en soumettant a ces organes les litiges qui affectent leurs
intérêts. Ces éléments constituent le terreau
politico institutionnel dans lequel a pu se développer
l'intégration européenne173. Il s'agit en
réalité non seulement d'assigner certaines limites a la
liberté des Etats, mais aussi de prévoir la possibilité de
controle destiné a assurer l'effectivité de ces principes.
L'intégration ne consistant pas a fondre les Etats dans
une structure étatique commune, mais a les regrouper au sein d'une
organisation dotée de la personnalité juridique internationale et
bénéficiant d'un transfert de compétences de la part des
Etats174, chaque organe ou institution communautaire ne
reçoit qu'une compétence d'attribution. La remise en cause du
primat de la souveraineté étatique étant la clé de
vofite du systeme européen d'intégration régionale, la
soumission des Etats au droit communautaire a pour corollaire la
création des « juridictions internationales »175
chargées de veiller a la mise en oeuvre des principes supérieurs
définis par les textes de base. En instituant un controle juridictionnel
sur les activités de la CEMA C, son Traité institutif a
jeté les bases
173 Cf. RENAUD DEHOUSSE, « Naissance d'un
constitutionnalisme transnational », in: Les Cours
europeennes de Luxembourg et Strasbourg, Pouvoirs
n° 96, 2001, p. 19., cité par Gabriel Marie
CHAMEGUEU, op. cit., ibidem.
174 Cf. JEAN CHARPENTIER, Institutions
internationales, Mémentos Dalloz, 1999, 14eme
édition, pp. 64 et 65., cité par Marie CHAMEGUEU, op.
cit., ibidem.
175 Les juridictions communautaires, bien que
pouvant etre qualifiées de juridictions internationales dans un sens
large, se distinguent de ces dernieres et se rapprochent de plus en plus des
juridictions étatiques. Cf. BENJAMIN BOUMAKANI, « Les juridictions
communautaires en Afrique noire francophone: La Cour de Justice et d'arbitrage
de l'OHODA, les Cours de Justice de l'UEMOA et de la CEMA C », Annales
de la faculte des sciences juridiques et politiques(FSJP) de l'LIniversite de
Dschang, Tome 3, PUA, 1999, p. 70.
d'une société nouvelle dans laquelle ce qui se
passe a l'intérieur des Etats peut être controlé par des
organes juridictionnels supranationaux, et oil des voies de recours sont
prévues pour permettre a l'individu de se protéger contre
l'arbitraire.
En effet, la finalité de toute norme juridique est de
satisfaire les fins supérieures du droit via la possibilité de
recourir a une institution ou mieux a une autorité chargée de
controler et de sanctionner les faits sociaux. Comme les normes des autres
branches du droit, celles du droit de l'environnement ne sauraient
échapper A cette logique. C'est d'ailleurs dans cette mouvance qu'il
existe des juridictions au niveau de la sous-région Afrique Centrale
pour garantir le controle des principes du droit de l'environnement ( Chapitre
1) même si ce controle juridictionnel ne va pas sans entraves ( Chapitre
2).
Chapitre 1 : L'existence des juridictions comme gage de
l'application de ces principes
Le modele référentiel de justice communautaire
européenne a servi de source d'inspiration pour la mise en place des
systemes juridictionnels communautaires africains176. Les traits
essentiels du modele européen ont été
intégrés au modele CEMA C non sans être accompagnés
des adaptations locales. Si les juridictions nationales sont dans le cadre
européen comme dans le cadre de la CEMA C les juridictions
communautaires de droit commun, la singularité de la CEMA C se trouve au
niveau de l'organisation de son Institution juridictionnelle qu'est la Cour de
Justice.
Apres plusieurs décennies, l'heureuse formule de Jaan
Pierre RIVERO reste difficilement réfutable. D'apres l'auteur, « la
crainte du juge est un commencement de la sagesse ». Le
célèbre auteur voulait certainement dire que l'existence des
juridictions ou la seule présence du juge suscite la crainte. La nature
des juridictions (Section 1) dotées de compétences
spécifiques en matiere de protection de l'environnement (Section 2)
conforte d'ailleurs cette idée.
Section 1 : La nature des juridictions en presence
Dans la sous région Afrique Centrale, il existe les
juridictions internes ou nationales et une juridiction supranationale ou
sous-régionale.
La juridiction sous-régionale est l'outil idéal
de mise en oeuvre du principe de primauté qui signifie que la norme
communautaire prévaut sur le droit national et implique qu'en cas de
conflit interne entre une norme communautaire et une norme interne,
l'application de la seconde soit écartée au profit de la
premiere.
176 Les Cours de Justice de la CEMA C, de l'UEMOA
et du COMESA sont inspirées de la CJ CE. Cette filiation au modele
européen apparait tant au niveau de leur organisation interne, leurs
compétences et leurs regles de procédure. Cf. Conventions et
Actes additionnels régissant et organisant la Cour de justice de la CEMA
C.
L'application immédiate et directe resterait lettre morte
si un Etat pouvait s'y soustraire par un acte législatif opposable aux
textes communautaires.
C'est la Cour de justice des Communautés
Européennes qui a posé solennellement ce principe pour la
premiere fois dans l'arrêt Costa en affirmant, par une formule
synthétique et dense, qu' « issu d'une source autonome, le droit
né d'un traité ne pourrait, en raison de sa nature
spécifique originale, se voir judiciairement opposer un texte interne
quel qu'il soit, sans perdre son caractere communautaire et sans que soit mise
en cause la base juridique de la Communauté elle-même ».
C'est donc la logique propre au droit communautaire qui
commande de consacrer sa primauté sur les droits des Etats membres : la
primauté est « une condition existentielle » du droit
communautaire qui ne saurait exister en tant que droit qu'à la condition
de ne pas pouvoir être mis en échec par le droit des Etats
membres177; elle ne vient pas d'une hiérarchie entre les
autorités nationales et communautaires mais se fonde sur ce que la regle
communautaire doit prévaloir sous peine de cesser d'être commune ;
or a défaut d'être commune, elle cesse d'exister et il n'y a plus
de communauté. Ainsi pour les besoins de la clarté de ce travail,
nous examinerons les juridictions nationales des Etats (Paragraphe 1) ensuite
la juridiction communautaire (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les juridictions nationales
Si nous nous référons au cadre camerounais, nous
distinguerons deux types de juridictions susceptibles de garantir l'application
des principes du droit international de l'environnement a savoir l'instance
administrative et l'instance judiciaire. Cet état de chose tire sa
légitimité dans le fait que la plupart des pays francophones
d'Afrique Centrale ont hérité de la tradition francaise du
dualisme juridictionnel, comme indiqué précédemment. Etant
parties a diverses conventions et déclarations sur l'environnement, ces
pays sont par la suite appelés
177 CJ CE, 15 juillet 1964. Aff. COSTA C/ ENEL aff.
6/64. Rec. 1141.
a mettre en application ces textes. De fait « une fois
que ces valeurs déclaratoires et symboliques pénetrent dans
l'ordre juridique communautaire, elles acquierent une force juridique
incontestable et bénéficient non seulement de la primauté
sur le droit interne mais jouissent aussi de l'effet direct ; les
autorités nationales y compris le juge étant des principaux
garants de l'application de ce droit communautaire >>178. Pour
se convaincre de la réalité de l'application de ces textes par
les autorités juridictionnelles, il est tout a fait indiqué,
d'une part, d'analyser les conditions de recevabilité de la demande en
justice (A) et d'autre part les regles de fonctionnement des juridictions
nationales d'Afrique Centrale (B).
A- Conditions de recevabilite de la demande en justice en
matiere environnementale
Comme pour toute demande en justice, certaines conditions de
recevabilité tiennent a la personne du requérant, on parle de
recevabilité subjective (1) tandis que d'autres tiennent a la
requête et on dira alors qu'elles sont objectives (2).
1) La recevabilite subjective
La condition de recevabilité subjective renvoie a un
certain nombre d'éléments tenant a la personne du
requérant désireux de porter la cause environnementale devant un
juge. L'usage qu'en font les juges internes n'est pas toujours propice et
profitable au droit de l'environnement. La condition de capacité
n'appelle pas de remarques particulieres. L'intérêt et la
capacité sont cependant problématiques au vu de la rigueur que
les juges y attachent. C'est fort de cela que Monsieur Emile Derlin KEMFOUET,
analysant la question, plaide pour une relativité de ces deux notions en
ces termes : « concevoir de fa~on restrictive ces deux notions exposent au
risque de ne pas servir la cause de la protection de l'environnement. En effet,
une des questions auxquelles les juridictions doivent répondre
lorsqu'elles sont
178 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op. cit., p.
173
sollicitées est la nécessité, voire
l'urgence de prendre en considération la nature spécifique des
intérêts violés. Or la vérité est que ce ne
sont pas toujours les intérêts propres qui sont violés,
mais des intérêts communs peu divisibles et touchent un nombre
indéterminé de personnes. La prise en compte de cette
spécificité devrait donc se traduire dans la pratique
contentieuse par une large acception des notions de l'intérêt et
de qualité pour agir >>179. Par ailleurs, devant les
juridictions d'Afrique Centrale, les demandes collectives comme celles des
groupements et associations ayant pour objectif la protection de
l'environnement ne sont pas recevables parce qu'on ne leur reconnait pas la
qualité pour agir. Sont illustratives de cette tendance subjectiviste,
les traditions juridiques nationales du Cameroun (confere affaire BOUENDEU) et
du Gabon.
S'il est constant que la recevabilité subjective constitue
un serpent de mer, la recevabilité objective en revanche pose moins de
problemes.
2) La recevabilite objective
La recevabilité objective renvoie a l'ensemble des
regles concernant la requête a l'instar des délais, des regles
relatives a la présentation matérielle et formelle de la
requête, etc. Ces exigences légales ne créent pas toujours
un rapport favorable a la cause de l'environnement. Ainsi en est-il de la
notion de délai pour agir qui n'est pas toujours précis a cause
du flou autour de sa computation et de ses hypotheses de prorogation. Les
questions d'environnement sont une affaire de temps, celui-ci pouvant
être compris dans un double sens comme « un tres long terme ou une
tres breve échéance >>180. Il est donc attendu
de l'autorité judiciaire l'adaptation des regles traditionnelles en
matiere de recevabilité pour répondre aux exigences d'une
protection efficace de l'environnement. Malheureusement, il n'en est pas
toujours le cas. Les juges procédant tres souvent d'une
interprétation stricte des prescriptions légales même en
cas d'urgence. Du moment oil le droit international
179 Ibid., p. 175.
180 Ibid., p. 176.
de l'environnement repose sur une logique preventive et de
precaution, une place de choix devrait être accordée aux
procedures qui doivent surseoir a l'exécution des decisions susceptibles
d'affecter l'environnement.
La lumiere sur les conditions de recevabilité de la
demande en justice en matiere environnementale ayant été faite,
celle sur les regles de fonctionnement des juridictions d'environnement ne sera
pas en reste.
B- Les regles de fonctionnement des juridictions
d'Afrique Centrale en matiere de protection de l'environnement
En general, le fonctionnement des institutions
juridictionnelles d'Afrique Centrale repose sur un ensemble de regles dont
l'inobservation expose le contrevenant a des surprises peu agreables. Cela
etant le justiciable soucieux de voir sa cause tranchée devra observer
une certaine démarche. En effet, il ne suffit pas simplement a ce
dernier d'être bien fondé dans sa demande pour attendre du juge
qu'il prononce et exige le respect de ses droits. Il lui faut en outre avant de
soumettre sa prétention a l'examen du tribunal, accomplir un ensemble de
formalités et observer une procedure en l'absence desquelles il serait
irrecevable a agir. Cette exigence fait dire par exemple en droit interne que
les regles de fonctionnement des juridictions sont d'ordre public et explique
que le mecanisme de leur reconnaissance puisse être soulevé
d'office par le juge qui, rappelons-le demeure un tiers au litige. On exige a
l'appui de cette position, la necessite d'une bonne administration de la
justice. Ainsi, il faut eviter d'encombrer les prétoires des recours
inutiles, ce qui permettra au juge de faire l'économie du temps et de se
consacrer aux affaires beaucoup plus pertinentes181. Les
juridictions internationales en raison de leur caractere purement conventionnel
repondent
181 Ibid.
difficilement aux memes criteres que les juridictions
internes182, pareil pour les juridictions communautaires ou meme
sous régionales.
Paragraphe 2 : Les juridictions sous-regionales ou
supra nationales
Il est créée une Cour de justice
sous-régionale dans l'espace de la Communauté Economique et
Monétaire de l'Afrique Centrale ( CEMA C) chargée de
résoudre les litiges communautaires. Cette juridiction vient combler le
vide qui existait dans la sous région Afrique Centrale. Une telle
juridiction s'exprime déjà par sa nature politique (A) et la
possibilité de nomination des membres non magistrats (B).
A- La nature politique des autorites de nomination des
membres de la Cour de Justice de la C EMAC
Les autorités en charge de désigner les membres
de la Cour de justice de la CEMA C sont des autorités élues
appartenant au pouvoir exécutif des Etats membres. En effet, les treize
membres de la Cour sont « présentés par les Etats et
nommés par la Conférence des Chefs d'Etat >>183.
Il en ressort qu'il appartient a l'autorité nationale investie qu'est le
Président de la République de présenter les candidats au
poste de membres de la Cour a la Conférence des Chefs d'Etats de la CEMA
C, organe investi du pouvoir de nomination des membres de ladite cour. La
nature politique de la Conférence des Chef d'Etats ne peut que confirmer
l'aspect politique de la Cour de Justice de la CEMA C.
S'il appartient a ladite Conférence de nommer les juges
de la Cour présentés par les Etats, l'on peut se demander si
l'organe de nomination peut refuser de nommer un candidat
présenté par son pays ? La regle de l'unanimité pour la
prise de décision en vigueur au sein de la Conférence ne semble
pas admettre une telle
182 SANTULLI ( C.) : Les juridictions de l'ordre
international : Essai d'identification. In : Annuaire francais de droit
international, volume 47, 2001. pp. 45-61.
183 Confere les articles 12 et 27 de la Convention de
Libreville du 05/07/1996 régissant l'UMA C.
hypothese. Le chef de l'Etat dont le candidat n'est pas
nommé exprimerait sans doute un vote défavorable pour la
nomination des candidats présentés par l'Etat qui s'oppose a la
nomination de son candidat. Cette situation exprime un souci fondamental, a
savoir si cette composition du reste politique de la Cour de Justice de la CEMA
C est de nature a favoriser un réel contrôle de l'application
efficace des principes du droit de l'environnement dans les pays d'Afrique
Centrale oil l'on dénonce par ailleurs la soumission fidele du pouvoir
judiciaire au pouvoir politique. Or l'Etat étant l'un des
prédateurs de l'environnement, ne serait-ce que parce que
possédant de gigantesques entreprises agricoles dont les pratiques
mettent a mal l'environnement doit-il encore être poursuivi
judiciairement lorsque ses activités violent les regles protectrices de
l'environnement ?184 La faculté de nomination des membres non
magistrats a la Cour ne constitue-t-elle pas la goutte d'eau qui fait
déborder le vase et ruine toutes les chances d'une protection de
l'environnement contre les Etats ?
B- La faculté de nomination a la Cour des membres
non magistrats
Une approche de droit comparé permet d'observer que le
choix des membres des Cours de Justice communautaire, met en avant le plus
souvent la qualité de juriste doublée des conditions de
« bonne moralité » et de « grande
probité », « d'expérience ou de
réputation professionnelle établie »185.
Treize membres de la Cour de Justice de la CEMA C sont choisis parmi les
personnalités de bonne moralité présentant des garanties
d'indépendance, d'intégrité et possédant une
compétence notoire en droit ou en économie. Ces
personnalités peuvent appartenir au corps de la magistrature, auquel cas
elles devront remplir les conditions requises pour l'exercice dans leurs pays
respectifs des plus hautes fonctions judiciaires. Elles peuvent aussi
être issues des professions d'avocat, de professeur d'université
de
184 DMOTENG KOUAM (E.), op. cit., p. 51.
185 CHAMEGUEU (G. M.) : op. cit. ibidem.
droit ou d'économie, de notaire et de conseil juridique,
auquel cas elles devront avoir exercé avec compétence, pendant au
moins quinze ans186.
Puisqu'il appartient aux Etats de choisir
discrétionnairement les membres de la Cour, on pourrait aussi se
demander si un Etat pourrait se desservir lui-meme en mettant en avant, pour
des raisons de convenance politique ou administrative, des personnalités
autres qu'irréprochables dont la partialité ou
l'incompétence réduirait a néant toute chance
d'autorité ? Un accident occasionnel ne peut etre exclu, mais la
possibilité que la rationalité prévale est
écrasante. Cela n'exclut pas que des considérations d'ordre
politique pourraient, dans certains pays membres, etre des données
pertinentes pour le choix des membres de la Cour. Cela ne présente pour
la Cour aucun inconvénient des lors que ces considérations ne se
substituent pas au mérite des personnes. Afin d'éviter des
erreurs de jugement de la qualité des membres de la Cour, l'Organe
politique compétent pour nommer les membres (la Conférence des
Chefs d'Etats de la CEMA C) pourrait a l'avenir, déléguer la
vérification des mérites intrinseques des candidats
présentés a un organe technique composé par exemple des
juristes hautement qualifiés et indépendants.
En l'état actuel des choses, la composition de la Cour
de Justice de la CEMA C peut soulever aux yeux de certains, quelques
interrogations quant a sa véritable nature
juridictionnelle187, moins encore que des interrogations sur sa
compétence.
Section 2 : La competence des juridictions d'Afrique
Centrale en matiere d'environnement
La compétence est l'aptitude d'une autorité a
accomplir certains actes, a prendre certaines décisions ou a
prononcer des jugements dans un domaine
déterminé188. Le lexique des termes juridiques
Dalloz quant a lui la conçoit comme une aptitude
186 Confrere article 12 et 27 de la Convention
régissant le Cour de justice CEMA
187 CHAMEGUEU (G. M.), op. cit., ibidem.
188 Confere Dictionnaire Encarta sur Microsoft Encarta
2008.
legale a accomplir un acte ou a instruire et juger un
proces189. La competence peut prendre plusieurs variantes a savoir
materielle190, territoriale191, personnelle192
ou même temporelle193. Mais en realite, si nous
commençons l'analyse de la competence des juridictions d'Afrique
Centrale par l'etude de la competence des juridictions nationales (Paragraphe
1), c'est pour mieux evaluer celle de la juridiction supra nationale de
l'espace CEMA C en matiere de controle de l'application des principes de
prevention et de precaution (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : La competence des juridictions
nationales
L'etude de la competence de la juridiction administrative (A)
precedera celle de la competence de la juridiction judiciaire (B).
A- La competence de la juridiction administrative en
matiere de protection des principes du droit de l'environnement
En Afrique Centrale notamment au Cameroun et au Gabon, la
juridiction administrative fonctionne suivant des regles derogatoires au droit
commun. Ces juridictions administratives ont reçu les principes du droit
international de l'environnement qu'elles appliquent d'ailleurs même en
l'absence de textes de loi ou en presence des textes opaques ou de portee
limitee. C'est un peu par le biais de la jurisprudence que le principe de
precaution par exemple a acquis une portee effective dans ces pays comme en
France. Si nous prenons le cas camerounais, nous y verrons que le juge
administratif s'est en effet montre tres receptif a l'esprit porte par le
principe de precaution et l'a applique dans sa jurisprudence même en
189 Lexique des termes juridiques op. cit.,
p. 122.
198 La competence materielle ou competence rationne
materiae est aussi appelee competence d'attribution.
191 Competence territoriale ou rationne loci.
192 Competence personnelle ou rationne personae.
193 Competence temporelle ou rationne temporis.
l'absence de fondement écrit précis. Il s'est
montré relativement prudent en se limitant autant que possible au
contrôle de la légalité externe des actes.
Le contrôle juridictionnel de l'application des
principes de précaution et de prévention trouve un terrain
fertile dans des procédures d'urgence notamment dans le
référé et sursis a exécution oil le juge
administratif est appelé a prendre des mesures urgentes et
conservatoires194 pour sauvegarder une situation susceptible de
nuire a l'environnement. Et le juge administratif ne tarde pas a mettre en
évidence le principe de précaution ou de prévention dans
sa jurisprudence chaque fois que subsiste un doute sur la survenance
éventuelle d'un fait susceptible de troubler l'équilibre de
l'environnement ou la santé et la sécurité publique,
répondant ainsi aux exigences de l'adage « prévenir vaut
mieux que guérir », car comme nous le disions supra avec la voix
autorisée du Doyen Michel PRIEUR, « l'action préventive est
une action anticipatrice et a priori qui depuis fort longtemps est
préférée aux mesures a posteriori du type
réparation, restauration ou répression qui interviennent apres
une atteinte avérée a l'environnement »195.
D'ailleurs, la responsabilité d'appliquer le principe
de précaution incombe essentiellement aux juridictions administratives.
En effet, l'influence du principe de précaution est nettement plus
diffuse et malaisée a définir dans le droit de la
responsabilité civile, enfermé dans l'idée de
réparation a posteriori d'un dommage déjà survenu que dans
le droit administratif oil il s'agit de poser des regles d'action a priori. Par
ailleurs, la jurisprudence administrative nationale tend a faire du principe de
précaution une véritable regle de droit dotée d'une
portée propre, en dépit de l'absence des textes accordant a ce
principe une portée juridique autonome et directe. Ce qui permet a ce
principe d'acquérir une dimension beaucoup plus contraignante et de
démontrer que bien que formellement reconnu dans le seul domaine du
droit de l'environnement, il pourrait être appliqué a des
situations beaucoup plus larges.
194 Lire a cet effet ROMI (R.), Droit et
administration de l'environnement, op. cit., pp. 348 et s.
195 PRIEUR (M.), « Les principes
généraux du droit de l'environnement », Cours
polycopié n° 5 de tronc commun de Master 2 par Satellite
en Droit international et comparé de l'environnement, Université
de Limoges, année universitaire 2009-2010, p. 21.
Enfin, l'adhésion du juge administratif national dans
l'espace CEMA C au principe de précaution implique la prise en compte
des risques potentiels dans le jugement des litiges de fa~on a éviter
que ceux-ci n'entrainent éventuellement des dommages graves ou
irréversibles pour l'environnement ou la santé humaine « le
risque potentiel est ici compris comme un risque qui n'est pas
avéré, c'est-à-dire que son existence ou sa
réalité ne peut etre prouvé compte tenu de l'état
actuel des connaissances scientifiques »196. En postulant ainsi
que le droit doit s'intéresser au risque incertain, le principe de
précaution se présente comme un prolongement naturel de la
philosophie juridique qui prédomine jusqu'ici dans les rapports entre le
droit et les avancées scientifiques.
A coté de la compétence des juridictions
administratives d'Afrique Centrale pour ce qui est du contrôle de
l'application des principes de précaution et de prévention, se
peaufine celle des juridictions judiciaires nationales.
B- La competence des juridictions judiciaires nationales
d'Afrique Centrale en matiere de contrôle de l'application des principes
de prevention et de precaution
La juridiction judiciaire se subdivise en deux poles : Il
s'agit d'une part de la juridiction civile qui ne condamne qu'à des
réparations matérielles du dommage et d'autre part de la
juridiction pénale qui en plus des réparations matérielles
et pécuniaires, prononce des condamnations a des peines privatives de
libertés. Mais pour des besoins de la synthese de notre travail, nous ne
ferons pas de développements séparés.
196 En vertu cependant de l'interprétation
doctrinale majoritaire, le principe de précaution ne devrait pas trouver
application a l'endroit des risques potentiels qui ne font pas au moins l'objet
d'un début de preuve scientifique. Sur la distinction entre d'une part
les risques certains (ou avérés) et les risques incertains (ou
potentiels) et d'autre part les risques incertains et les risques
résiduels (ceux qui ne font pas a tout le moins l'objet d'un
début de preuve scientifique), voir DE SADELEER (N.) : « Les
principes du pollueur-payeur, de prévention et de précaution
», cité par TRUDEAU (H.), op. cit., note de bas de page
n° 108, p. 39.
Notons que tout comme la juridiction administrative,
l'adhesion au principe de precaution donne competence aux juridictions civiles
d'ordonner la cessation d'une activite generant les risques potentiels de
dommages graves ou irreversibles a l'environnement ou a la sante humaine, alors
meme que le dommage n'est en quelque sorte, qu'une vue de l'esprit. Ainsi,
d'apres le Professeur MAZEAUD, il serait question des lors d'une «
responsabilite nouvelle, une responsabilite en quelque sorte sans victime, sans
prejudice et sans indemnisation »197
Par application des principes de prevention et de precaution,
le juge judiciaire camerounais sanctionne tout producteur ou importateur des
dechets dangereux, se conformant aux prescriptions de la loi camerounaise en la
matiere198. Cette loi considere comme telles « les matieres
contenant des substances inflammables, explosives, toxiques presentant un
danger pour la vie des personnes, des animaux, des plantes et pour
l'environnement »199. Elle interdit de meme sans aucune
derogation possible, « l'introduction, la production, le stockage, la
detention, le transport, le transit et le deversement sur le territoire
national des dechets toxiques et/ou dangereux sous toutes les formes
»200. Dans le meme sens, la loi congolaise « interdit a
toute personne physique ou morale, publique ou privee, d'importer ou de faire
importer, de faciliter ou de tenter de faciliter l'importation des dechets
nucleaires et des dechets industriels dangereux ou autres dechets de meme
nature ». Il en est de meme du code de l'environnement de la Guinee
notamment l'article 75.
Dans les differentes lois des pays de l'Afrique Centrale,
obligation est faite au juge de sevir avec la derniere energie. On en voudra
pour exemple le cas du Cameroun oil le juge saisi doit imperativement ordonner
a toute personne coupable de l'une de ces infractions « de les eliminer
immediatement et de restituer les lieux en leur etat anterieur ». Le cas
echeant, le juge pourra ordonner la fermeture de
197 Sur la question, lire MAZEAUD (D.) : «
Responsabilite civile et precaution dans la responsabilite a l'aube du XXleme
siècle », bilan prospectif, responsabilite assurances, cite par
TRUDEAU (H.), op. cit., p. 59.
198 Loi camerounaise n° 89/027 du 29
Decembre 1989 portant sur les dechets toxiques
199 Article 2 de la loi camerounaise de 1989
precitee.
200 Article 1 de la loi camerounaise de 1989 precitee.
l'établissement. Au Congo par contre, la
loi201 prescrit au juge saisi de demander a tout producteur de ce
type de déchets de mettre tout eu oeuvre pour assurer ou
améliorer la gestion écologiquement rationnelle de ceux-ci,
appliquer de nouvelles techniques produisant peu de déchets, veiller au
stockage et a l'élimination séparée desdits
déchets202.
Les juges ne lésinent pas sur les moyens quant a
l'application exemplaire des dispositions légales, ils appliquent
vigoureusement des sanctions prévues par le législateur. Par
exemple, par application des prescriptions légales du Code de
l'environnement guinéen, le juge de ce pays punit d'une amende de cent
mille a un million de francs guinéens et d'une peine d'emprisonnement de
deux a cinq ans ou l'une des deux peines, toute personne qui contrevient a la
loi203.
Au Congo, toute personne coupable d'une telle infraction est
punie d'une amende de 10.000.000 francs cfa a 50.000.000 francs cfa et d'une
peine de 10 a 20 ans de réclusion meme si l'importateur en cause a
été suspendue.
La loi camerounaise précitée donne
compétence au juge de frapper encore plus fort, elle punit « de la
peine de mort, toute personne non autorisée qui procede a
l'introduction, a la production, au stockage, a la détention, au
transit, au déversement sur le territoire camerounais des déchets
toxiques et ou dangereux sous toutes leurs formes >>204.
Le juge judiciaire national est aussi compétent dans la
lutte contre les nuisances. De fa~on générale, on entend par
nuisance, toute agression d'origine humaine contre le milieu physique, ou
biologique, naturel ou artificiel entourant l'homme205 et causant un
simple désagrément ou un véritable dommage a ce dernier.
La jurisprudence camerounaise inspirée de celle francaise integre dans
cette notion entre autre, les activités d'une société de
travaux publics qui entraine la stagnation
201 Il s'agit notamment de la loi congolaise de
1991.
202 Voir article 54 de la loi congolaise
précitée.
203 Article 11 du Code de l'environnement de la
Guinée Equatoriale.
204 Article 4, alinéa 2 de la loi camerounaise
précitée.
205 CABALLERO (F), cité par KAMTO
(M.), op., cit., p. 339
des eaux de pluie a l'entrée de la concession d'un
particulier. Il s'agit généralement de troubles de voisinage,
notion résultant d'une construction prétorienne.
Quelques décisions ne serait-ce que dans le cadre du
Cameroun méritent qu'on s'y attarde. Le Tribunal de Grande Instance de
Yaoundé, 12 octobre 1983, NKUENDJI YONTDA contre Société
EXAR COS a propos des travaux d'aménagement effectués sur son
terrain par un propriétaire et qui causent un « trouble de fait
» a un voisin. Une agression matérielle entre la possession ; Cour
d'Appel de Yaoundé, 03 Juin 1987, NGUEMA MBO Samuel contre ANOUKAHA
François, l'évacuation par deux entreprises industrielles vers la
propriété d'un voisin de toutes les eaux recueillies sur leurs
terrains et qui accroissent le volume initial des eaux et leur nocivité
; Tribunal de Grande Instance de Douala, jugement du 03 Octobre 1983, DIMITE
Thomas contre CI CAM et Guinness-Cameroun.
La question du contrôle de l'application des principes
de prévention et de précaution revêt-elle la même
pertinence au niveau de la juridiction supra nationale de l'espace
géographique Afrique Centrale qu'elle l'est devant les juridictions
nationales objet des développements précédents ?
Paragraphe 2 : La competence de la juridiction supra
nationale dans l'espace Afrique Centrale en matière d'application des
principes de prevention et de precaution
La particularité d'une juridiction communautaire est de
rompre avec les solutions prévalant habituellement en droit
international pour s'affirmer en de véritables pouvoirs judiciaires.
Répugnant le tout étatique, leur prétoire est donc ouvert
aux particuliers, ce qui est intéressant pour la protection de
l'environnement, les particuliers pouvant saisir le juge communautaire afin
qu'il sanctionne tout fauteur de trouble écologique206. Mais
une telle affirmation ne saurait être accueillie comme une parole
d'évangile car la réalité est que, a défaut
d'être
206 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op. cit., p.
106.
selectif, l'acces a la justice communautaire tant vantee se fait
souvent par une porte d'une exiguIte etonnante.
La competence de la Cour de justice de la CEMA C comme
juridiction communautaire est mitigee. D'abord elle est une juridiction non
permanente puisqu'elle ne se reunit que sur convocation de son President qui du
reste fixe en fonction du role de la Cour, les dates et durees des sessions.
Ensuite, elle ne peut etre saisie que par les Etats et les Institutions de la
communaute. Enfin, cette Cour comporte des lacunes majeures quant au droit des
juges. Ceux-ci sont designes directement par les Etats membres, sans que les
organes de l'union n'interviennent a aucun moment dans la procedure. Cela fait
bien emettre des doutes sur l'aptitude a l'impartialite de ces juges presumes
de droit communautaire.
Neanmoins, cette juridiction est competente pour sanctionner
les comportements desagreables des Etats membres de la communaute et empecher
que l'Etat initialement promoteur du droit de l'environnement n'en devienne par
la suite predateur numero 1. Tout comme le contrôle effectue par le juge
administratif207, le contrôle du juge communautaire porte sur
l'examen de la legalite des etudes d'impact uniquement a l'occasion des recours
contre les actes de la communaute soumis a etude ou notice d'impact.
Cependant, l'existence des juridictions comme gage de controle de
l'application de ces principes se trouve limitee par certains goulots
d'etranglement.
207 HEBRARD (S.) : Les etudes d'impact sur
l'environnement et le juge administratif, RJE, 2 p. 129, « Les etudes
d'impact dans la jurisprudence administrative », CJE, 1982, p. 421 ;
Chapitre 2 : Les entraves a l'application efficace de ces
principes en Afrique Centrale
Le controle de l'application des principes de
prévention et de précaution que garantit tant bien que mal le
juge dans l'espace Afrique Centrale n'est pas parfait, avons-nous dit, a cause
des goulots d'étranglement au rang desquels les entraves intrinseques
(Section 1) et extrinseques (Section 2).
Section 1 : Les entraves intrinseques
Nous examinerons ici successivement, puisqu'elles sont
évidentes, les entraves inhérentes aux autorités de
controle (Paragraphe 1) ensuite les entraves structurelles et fonctionnelles
(Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les entraves inhérentes aux
autorités de controle
Elles concernent l'approximation de la formation des
autorités juridictionnelles de controle sur les questions
d'environnement (A) et la dépendance du juge des autorités
politiques (B).
A- L'approximation de la formation des autorites
juridictionnelles sur les questions d'environnement
La question de la faible formation desdites autorités
est soulevée suite au constat de la frilosité du juge dans le
reglement des litiges (1). Cette attitude conduit a penser une
irresponsabilité virtuelle de l'administration publique dont certains
actes échappent parfois au controle du juge (2).
1) La frilosite constatee des juges dans le reglement
des litiges.
En Afrique Centrale la question de la spécialisation
des magistrats a fait couler beaucoup d'encre. Les justiciables l'ont subi et
les spécialistes du droit n'ont pas manqué de le décrier.
Telles furent les critiques avancées par la doctrine camerounaise
dominante, incarnée par certains orfevres du droit tels les Professeurs
Joseph OWONA et Jean Marie BIPOUM WOUM.
Dans ce pays notamment, au sein des formations
juridictionnelles administratives, siegent les juges de l'ordre judiciaire. On
comprend aisément quelle pourrait être la nature des
décisions qu'ils prennent. Or le droit de l'environnement est un droit
qui fait essentiellement appel aux notions de droit public qui plus est
international, entouré de notions d'une tres forte technicité
pour les non initiés. La formation essentiellement privatiste de ces
derniers est-elle de nature a leur permettre de rendre une décision
dénuée de toute critique ? Que non !
Même dans les pays oil il existe un dualisme
juridictionnel caractérisé par l'existence des tribunaux de
l'ordre judiciaire et de l'ordre administratif comme le Cameroun, le Gabon, on
ne trouve pas dans la structure desdits tribunaux des chambres ou section qui
soient exclusivement réservées a l'examen des litiges
environnementaux.
Bien plus, la difficile adaptation du juge a des
phénomenes nouveaux comme celui de l'environnement s'explique par
l'évolution des conflits d'environnement présentant de plus en
plus souvent un caractere international208. Qui plus est, dans un
litige impliquant l'administration publique, on observe une certaine
partialité du juge qui est tres souvent hésitant quant a
condamner l'administration publique. On peut a partir de la, militer pour une
condamnation progressive de l'administration publique dans le proces des
atteintes a l'environnement.
208 HUGLO ( Ch.) : « Le juge et l'environnement,
un défi ».
2) L'irresponsabilité virtuelle de
l'Administration publique
L'administration disposant ou étant maitre de nombreux
ouvrages dont l'étude d'impact préalable n'a pas
été faite ou encore disposant de gigantesques entreprises
agricoles et industrielles, doit être poursuivie judiciairement lorsque
ses activités violent les regles protectrices de l'environnement.
L'administration doit aussi pouvoir obtenir des autorisations
nécessaires pour entreprendre des activités agricoles dans
certains secteurs et se livrer a une étude d'impact
minutieuse209. Les activités industrielles devraient
être soumises a ces mêmes conditions. Mais ce n'est pas toujours le
cas, l'administration étant tres souvent juge et partie. Il est
regrettable actuellement en Afrique Centrale que l'exigence de l'autorisation
n'atteigne pas les organismes publics ou parapublics alors même qu'ils
sont, dans la plupart des pays, de grands « défricheurs de
l'agriculture industrielle >>210. La locution latine juridique
« patere legem quam ipse fecisti >> qui signifie
littéralement « Tu dois souffrir de la loi que tu as faites
toi-même >>211 n'est donc que tres peu
exploitée en droit de l'environnement de l'Afrique centrale.
Peut-être est-ce l'une des manifestations de la dépendance des
autorités de controle au pouvoir politique.
B- La dépendance des autorités de controle
vis-à-vis du pouvoir politique
La dépendance des autorités de controle a
l'instance politique souleve ou du moins relance le débat sur la
problématique de l'indépendance des juges (1) et se
caractérise par ailleurs par la faculté offerte aux
autorités politiques de choisir les personnalités non magistrats
comme juges (2) a la cour CEMA C.
209 DMOTENG KOUAM (E.), op. cit., p. 51
210 KAMTO (M.), op. cit., p.
197
211 BILONG (S.) : Droit Administratif
Général, cours polycopié de 3eme année
de Licence en droit et science politiques, FSJP de l'Université de
Dschang année académique 2004 - 2005.
1)
La problematique de l'independance des
juges
En Afrique Centrale et plus précisément au
Cameroun, la question de l'indépendance du juge est une épineuse
préoccupation majeure. L'indépendance du juge y est fortement
discutée pour des motifs évidents.
D'abord au niveau du parquet, l'indépendance du
magistrat demeure une gageure a cause du principe de la subordination
hiérarchique des membres du parquet. Ensuite au niveau des juges du
siege, l'indépendance tant vantée est un leurre et l'adage selon
lequel « la parole est libre et la plume serve » demeure un simple
slogan. Enfin, les magistrats d'Afrique Centrale a l'instar de ceux du Cameroun
sont nommés par Décret du Président de la
République qui est la plus haute autorité politique du pays et
par ailleurs Président du Conseil Supérieur de la
Magistrature.
On mesure par la combien les décisions des
différents juges peuvent etre fortement influencées, ou a tout le
moins sont influençables, surtout dans une cause oil l'administration et
a plus forte raison le Président de la République est partie. Le
juge ne pouvant abonder que dans le sens de la préservation des
intérets de l'administration meme si les agissements fautifs de ce
dernier crevent l'ceil. Cette dépendance du juge se matérialise
davantage lorsque le pouvoir politique dispose de la faculté de choisir
des personnalités non magistrats comme juges notamment au niveau de la
Cour communautaire de la CEMA C.
2) Le choix politique des juges non
magistrats
La faculté est généralement reconnue
au pouvoir politique de choisir les juges des juridictions supra nationales.
Pour ce qui est de la Cour de Justice de la CEMA C, les juges peuvent etre
choisis parmi les personnalités de bonne moralité
présentant des garanties d'indépendance,
d'intégrité et possédant une compétence notoire en
droit ou en économie. Un tel procédé est de nature a
entraver l'intégrité du vote qu' un membre peut émettre
vis-à-vis de son pays. Car en l'état actuel des mentalités
africaines oil la personne nommée « doit » allégeance
et fidélité a
l'autorité de nomination, l'on voit mal un membre de la
cour voter forcément contre l'Etat de qui il tient le mandat pour
siéger a la cour.
Cette situation peut par ailleurs susciter une interrogation,
celle de savoir si ces personnalités désignées pour
remplir la fonction de magistrat seraient en mesure de rendre des
décisions juridiquement exemptes de reproches sur un domaine aussi
sensible qu'est l'environnement ?
La somme de ces entraves est impressionnante et se
décompte davantage au niveau des structures et du fonctionnement des
institutions de controle.
Paragraphe 2 : Les entraves structurelles et
fonctionnelles
L'examen des entraves structurelles (A) précédera
celui des entraves fonctionnelles (B).
A- Les entraves structurelles
Si la question de l'extrême centralité des
institutions de controle constitue le premier rempart de ces entraves
structurelles (1), le cotit élevé des proces et leur lenteur
n'occupent pas le dernier banc (2).
1) La question de l'extreme centralite des
institutions de controle
Les pays de l'Afrique Centrale sont
caractérisés, du moins sur l'aspect juridictionnel par une
extreme centralité des Institutions. Cette situation est due
principalement au manque de moyens et politiques pouvant permettre a ces Etats
de multiplier les institutions juridictionnelles de fa~on a rapprocher le juge
environnemental des justiciables et faciliter ainsi l'acces de tous a cette
justice. Il y a la effectivement échec a l'application de certaines
Conventions internationales212.
212 Il s'agit de la Convention d'Aarhus du 25/06/1998
sur l'acces a l'information, la participation du public au processus
décisionnel et l'acces a la justice en matiere d'environnement.
L'on se demande si l'egal acces de tous a la justice a encore
un sens213. Cet eloignement de la justice du justiciable ne va pas
toujours sans inconvenients majeurs puisqu'il a pour effet de reserver la
justice uniquement aux personnes disposant des moyens suffisants pour y
acceder. C'est n'est rien d'autre qu'une justice taillee sur mesures. Dans
cette foulee, le justiciable indigent, et Dieu sait combien ils sont nombreux
en Afrique Centrale, se trouve purement et simplement ecarte du pretoire.
Pour s'en convaincre davantage, notons que dans la majorite
des pays de l'Afrique Centrale comme le Cameroun, le Tchad, le Gabon et la
Republique centre africaine, la juridiction judiciaire chargee de regler les
differends entre les particuliers est rarement creee dans tous les departements
car on note dans ces pays que deux ou plusieurs departements partagent une meme
juridiction. La goutte d'eau fait deborder le vase lorsqu'on a affaire a la
juridiction administrative oil la centralite est enervante pour ne pas dire
revoltante. Dans ces pays, il n'existe qu' une seule juridiction administrative
generalement situee a la capitale politique, comme c'est le cas au Cameroun.
Heureusement, une loi de 2006214 est venue apporter une bouffee
d'oxygene aux justiciables dans ce pays en creant un tribunal administratif
pour chaque region215. La oil le bat peut blesser, c'est
l'ineffectivite constitutionnelle et expresse desdits tribunaux. En effet, un
article constitutionnel place en pole position consacre la mise en place
progressive de ces institutions216.
213 L'acces de tous a la justice est un principe de
valeur constitutionnelle consacre de longues dates dans la majorite des pays
d'Afrique Centrale. C'est le cas de la Constitution du Cameroun du 18/01/1996
dont le preambule dispose « La loi assure a tous les hommes le droit de se
faire rendre justice ».
214 Il s'agit de la loi camerounaise
n° 2006/022 du 29 Decembre 2006 portant creation des tribunaux
administratifs par region dont une juridiction dans chacune des dix regions du
pays.
215 L'on a tout de meme un gout de cendre dans la bouche quand on
remarque que meme la loi de 2006 prise dix ans apres cette reforme
constitutionnelle n'a encore rien pu faire. « Wait and see » !
216 Notons que la loi constitutionnelle du 18
Janvier 1996 portant revision de la Constitution du 02 Juin 1972 avait
dejà annonce la creation de ces tribunaux dans les regions mais
l'article 67 en tous ses alineas precisait for opportunement que (1) les
nouvelles institutions de la Republique prevues par la presente Constitution
seront progressivement mises en place. Et que (2) Pendant leur mise en place et
jusqu'a cette mise en place, les institutions de la Republique actuelles
demeurent et continuent de fonctionner. Voila pres de 15 ans que le justiciable
camerounais attend la mise en place de cette juridiction.
Face a cette situation, le juge est-il encore en mesure de
controler efficacement l'application des principes du droit de l'environnement
? Dans cette foulée, les justiciables qui parviennent quand meme a
atteindre le juge se trouvent encore confrontés a deux autres problemes
: le cout élevé et la lenteur du proces.
2) Les corts ~leyes des proces et leur
lenteur
Suffisamment abattu par la centralité
exagérée des institutions juridictionnelles, le justiciable se
trouve encore pris dans le marteau pilon du cout des proces qui n'est pas de
moindre importance ainsi que de celui de leur lenteur
désespérante. Notons pour le déplorer que dans les pays de
l'Afrique Centrale, le principe de la gratuité de la justice demeure un
vain mot eu égard a la réalité quotidienne.
Pour voir sa cause tranchée, le justiciable se doit de
mobiliser d'importantes sommes. La moyenne du cout d'un proces dans ces pays
est estimée a 1.000.000 francs cfa pour un pays dont le SMIG mensuel
s'éleve a moins de 30.000 francs cfa217. Certes, l'assistance
judiciaire est consacrée dans les textes, mais encore fautil remplir
toutes les conditions requises pour en bénéficier. A coté
des sommes faramineuses qu'il faut débourser pour accéder a la
justice, se trouve greffé l'épineux probleme de la lenteur des
proces. En Afrique Centrale notamment au Cameroun et au Tchad, on assiste aux
proces qui mettent en moyenne un an et demi pour que le juge vide le fond du
litige. Or dans une matiere comme l'environnement oil l'urgence est parfois de
mise, une telle lenteur n'est-elle pas de nature a compromettre
l'équilibre écologique ? Vu sous cet angle déplorable, la
décision du juge arrivera tard, trop tard pour rendre un quelconque
service a l'environnement et a la santé de l'homme.
Que dire des autres entraves purement percues sous l'angle
fonctionnel ?
217 Pour d'amples détail sur la question,
consulter le site
http://www.camerounonline.com/actualite,actu-5204.html,
dans lequel on peut lire que le Premier ministre camerounais, Ephraim Inoni, a
signé en fin Juin 2008 un Décret portant sur le Salaire minimum
interprofessionnel garanti (SMIG) a 28.000 F CFA, en remplacement des 23.000 F
CFA qui étaient en vigueur depuis mi-février 1995.
B- Les entraves fonctionnelles
Ces entraves sont de deux ordres : d'une part on note la
possibilité de recourir a l'expertise (1) et d'autre part la transaction
(2).
1) La possibilite de recourir a
l'expertise
Le recours du juge a l'expertise s'inscrit dans la logique de
la relativité du mode juridictionnel de reglement de conflit.
L'expertise tout comme la transaction paralyse l'action des juges. En plus,
même lorsqu'il est saisi, le juge hésite a trancher parce que,
comme nous l'avons noté plus haut, sa formation de base ne lui donne pas
des aptitudes particulieres dans la connaissance des problemes environnementaux
« souffrant de l'éparpillement et de la technicité
>>218. Le droit pénal de l'environnement
nécessite la consultation des experts.
Par ailleurs, la mise en oeuvre du principe de
précaution présuppose d'une part un recours plus
systématique a l'expertise scientifique. L'apport des experts doit
cependant être envisagé de fa~on un peu différente et sur
une base plus soutenue que dans le cadre de la méthode traditionnelle
d'évaluation des risques, pour davantage tenir compte des facteurs
d'incertitude scientifique et de l'évolution des connaissances. Des
garanties d'impartialité et de compétence dans
l'appréciation des preuves soumises doivent entourer le travail de
l'expert appelé a donner son point de vue sur le recours ou non a la
prévention devant un risque appréhendé. Ces mêmes
garanties doivent apparaitre aussi essentiellement devant le choix et
l'éventail possible des mesures de précaution, pour notamment
tenir compte des intérêts économiques, sociaux ou autres
qui seront affectés. Pour cela, l'expert doit trouver un forum
approprié pour exprimer ses vues219.
218 MORAND DEVILLER (%.) : Droit de l'environnement,
édition ESTEM, Universités francophones, 1996, p. 72.
219 Voir les auteurs Kourilsky et Viney qui
proposent que l'analyse des risques soit effectuée par deux cercles
distincts, un composé exclusivement d'experts scientifiques, l'autre
comprenant quelques-uns de ces experts, mais aussi des économistes, des
acteurs sociaux et des représentants du public. Le premier cercle rend
compte de ses conclusions sur le plan scientifique, tandis que le
L'intervention de la transaction ou de l'arbitrage constitue un
autre moyen d'effritement des pouvoirs des juges formes.
2) L'intervention de la transaction ou de
l'arbitrage
Notons a toutes fins utiles que l'institution des modes de
reglement extra pretorien des litiges en droit de l'environnement tels que la
transaction et l'arbitrage220 amenuisent egalement l'action des
juges, puisque d'ailleurs le legislateur camerounais du 05 Aotit 1996 pose
cette procedure non juridictionnelle comme la procedure par defaut en ces
termes : « Dans le cas contraire, et a defaut de transaction ou
d'arbitrage definitifs, l'Administration competente procede a des poursuites
judiciaires conformement a la legislation en vigueur >>221.
Cette competence des arbitres est consacree a l'origine par la Convention de
Bamako qui stipule : « Si un differend surgit entre les Parties a propos
de l'interpretation, de l'application ou du respect de la presente Convention
ou de tout protocole y relatif, ces Parties s'efforcent de le regler par voie
de negociation ou par tout autre moyen pacifique de leur choix222...
Si les Parties en cause ne peuvent regler leur differend par les moyens
mentionnes au paragraphe 1 du present article, ce differend est soumis soit a
l'arbitrage d'un organe ad hoc mis sur pied par la Conference a cette fin, soit
a la Cour Internationale de Justice223... L'arbitrage des differends
entre Parties par l'organe ad hoc prevu au paragraphe 2 du present article
s'effectue conformement aux dispositions de l'annexe V de la presente
second cercle procede a une analyse des coots/benefices a
partir des conclusions du premier cercle, et envisage differentes options
possibles. Les decideurs publics sont saisis des conclusions des deux cercles,
qui peuvent tendre vers le consensualisme, mais ne l'atteignent pas
necessairement : P. KOURILSKY et G. VINEY, note 3, pp. 69 a 72., cite par
TRUDEAU (H.), op. cit., p. 35.
220 Voir les articles 91 et 92 de la loi camerounaise
n° 96/12 du 05 Aout 1996 precitee.
221 Article 90 alinea 2 de la loi camerounaise n°
96/12 du 05 Aout 1996 precitee.
222 Article 20 alinea 1 de la Convention de Bamako
du 30/01.1991 sur l'interdiction d'importer en Afrique Des dechets dangereux et
sur le controle des Mouvements transfrontieres et la gestion des dechets
Dangereux produits en Afrique.
223 Article 20 alinea 2 de la Convention de Bamako
precitee.
Convention »224. De maniere complete, c'est
l'annexe 4 a la Convention de Bamako qui detaille le recours a
l'arbitrage225.
Cette eviction des juges peut tirer sa
légitimité de la lenteur des procedures, du cout
élevé des proces et des balbutiements des juges face aux
questions environnementales sur lesquels ils n'ont qu'une connaissance sommaire
et m'éme approximative. Surtout lorsqu'il s'agit de veiller a
l'application des principes du droit de l'environnement oil ils ne comprennent
certainement pas grand-chose.
Section 2 : Les entraves extrinseques
Si nous parlons des entraves extrinseques en commençant
par l'aspect socioculturel (Paragraphe 1), c'est pour mieux évaluer
l'impact des entraves socioeconomiques (Paragraphe 2).
Paragraphe 1 : Les entraves socioculturelles
Nous noterons d'emblée, d'une part la crainte du juge
de la part des justiciables (A) et d'autre part le faible echo des questions
environnementales chez ces derniers (B).
A- La crainte negative du juge
Dans les Etats d'Afrique Centrale, on note une certaine
frilosite ou du moins une certaine mefiance traduisant la crainte des
justiciables face au juge. Or cette crainte n'arrange pas les affaires du
droit de l'environnement car les justiciables preferent
224 Article 20 alinea 3 de la Convention de Bamako.
225 L'article premier de cet annexe 4 stipule que
« Sauf dispositions contraires de l'accord prevu a l'article 20 de la
presente Convention (Convention de Bamako), la procedure d'arbitrage est
conduite conformement aux dispositions des articles 2 a 10 ci-apres ».
eviter les sentiers du juge pour se constituer victimes resignees
meme pour des causes dans lesquelles leurs droits sont foules au pied.
A cet effet, on peut valablement questionner les propos de
Jann RIVERO selon lesquels « la crainte du juge est le commencement de la
sagesse ». L'auteur ne voulait-il pas exprimer que la simple presence du
juge entraine une bonne conduite des sujets sociaux sous peine de condamnation
? Il s'agit ici plutot d'une crainte negative pouvant entrainer la paralysie de
toute action juridictionnelle : Le justiciable craintif se rendrait des lors
coupable pour delit de complicite avec les predateurs ou delinquants de
l'environnement.
Les pesanteurs socioculturelles s'observent davantage au niveau
de la meconnaissance du droit de l'environnement de la part des populations.
B- Le faible echo des questions environnementales chez les
justiciables
En Afrique en general et en Afrique Centrale en particulier,
les principes de prevention et de precaution tout comme le droit de
l'environnement lui-meme sont meconnus de la majeure partie de la population
qui n'y voit qu'un simple slogan politique de trop ; pour ceux qui en ont
entendus parler, c'est-à-dire les etudiants de deuxieme cycle des
facultes de droit et les chercheurs. La consequence de cet etat de choses est
que le droit de l'environnement et ses principes ne peuvent qu'etre ranges aux
accessoires.
En guise d'etude comparee, le droit de l'environnement
beneficie en Europe par exemple a la fois d'une forte couverture mediatique et
d'un large appui populaire, d'une part en raison des debats et des passions qui
ont entoure certains scandales, d'autre part depuis l'emergence de nouvelles
problematiques liees a la protection de la sante humaine et de l'environnement.
On se rappellera que les reactions suscitees par les affaires de la vache
folle, du sang contamine, du poulet a la dioxine, et par l'utilisation
d'organismes genetiquement modifies dans les semences et les produits agricoles
ont entraine dans certains pays europeens et au
niveau de la Communaute europeenne plusieurs mesures
d'interdiction et de reglementation, le plus souvent dans un contexte
d'incertitude scientifique quant aux risques potentiels
impliques226.
En Afrique Centrale, l'ignorance des populations sur les
questions environnementales s'illustre aisement par la destruction anarchique
des for4ts, la destruction de la faune aquatique et forestiere, la pollution de
l'environnement n'etant pas en reste. Ceci est caracteristique du fait que
cette population n'est pas suffisamment eduquee sur les questions de
l'environnement et du danger que court l'humanite si tout le monde ne se leve
pas comme un seul homme pour la defense de la nature.
Le cote socioculturel de ces entraves etant elucide, force serait
de s'appesantir a present sur l'aspect socioeconomique.
Paragraphe 2 : Les entraves socioeconomiques
Deux axes gouverneront notre reflexion ici a savoir d'une part la
corruption (A) et la pauvrete ou la situation d'indigence des justiciables,
d'autre part (B).
A- La corruption
Definie comme un comportement penalement incrimine par lequel
sont sollicites, agrees ou revues des offres, promesses, dons ou presents, a
des fins d'accomplissement ou d'abstention d'un acte, d'obtention de faveurs
ou
226 Voir en particulier : C. NOIVILLE et P.-H.
GOUYON, « Annexe 2 - Principe de precaution et organismes genetiquement
modifies. Le cas du maïs transgenique » dans P. KOURILSKY et G.
VINEY, note 3, p. 277; M.-A. HERMITTE et D. DORMONT, « Annexe 3 -
Propositions pour le principe de precaution a la lumière de l'affaire de
la vache folle », dans P. KOURILSKY et G. VINEY, op. cit., note
3, p. 341; M. SETBON, « Annexe 4 - Le cas du sang contamine confronte au
principe de precaution », dans P. KOURILSKY et G. VINEY, op.
cit., note 3, p. 387., cite par TRUDEAU (H.), op. cit., p. 12.
d'avantages particuliers227, la corruption peut
revetir deux formes : active ou passive. Dans le premier cas, elle est le fait
du corrupteur, c'est-A-dire celui qui prend l'initiative tandis que dans le
second cas elle est le fait du corrompu c'est-Adire celui qui reçoit ou
agréé. Une vue plus globale de la notion de corruption est
donnée ainsi : La corruption est la perversion ou le détournement
d'un processus ou d'une interaction entre une ou plusieurs personnes dans le
dessein, pour le corrupteur, d'obtenir des avantages ou des prérogatives
particulieres ou, pour le corrompu, d'obtenir une rétribution en
échange de sa bienveillance. Elle conduit en général a
l'enrichissement personnel du corrompu ou a l'enrichissement de l'organisation
corruptrice (groupe mafieux, entreprise, club, etc.). C'est une pratique qui
peut-etre tenue pour illicite selon le domaine considéré
(commerce, affaires, politique...). Elle peut concerner toute personne
bénéficiant d'un pouvoir de décision, que ce soit une
personnalité politique, un fonctionnaire, un cadre d'une entreprise
privée, un médecin, un arbitre ou un sportif, un syndicaliste ou
l'organisation a laquelle ils appartiennent. La corruption active consiste a
proposer de l'argent ou un service a une personne qui détient un pouvoir
en échange d'un avantage indu. La corruption passive consiste a accepter
cet argent. Un exemple classique est celui d'un homme politique qui
reçoit de l'argent a titre personnel ou pour son parti de la part d'une
entreprise de travaux publics et en retour lui attribue un marché
public. L'homme politique pourrait etre accusé de corruption passive :
il a reçu de l'argent, alors que l'entreprise peut, elle, etre
accusée de corruption active228.
Ce fléau constitue un véritable serpent de mer
dans la société africaine et plus précisément en
Afrique Centrale. Elle touche toutes les couches de la société.
Les institutions juridictionnelles n'échappent pas a ses tentacules.
D'ailleurs, les juridictions des pays d'Afrique Centrale sont
considérées comme de véritables foyers de cette gangrene.
En guise d'illustration, les rapports de l'ONG Transparency
international229 de 2007 et 2008 au Cameroun classaient les
227 Lexique des termes juridiques Dalloz, op.
cit., p. 164
228 Voir
http://fr.wikipedia.org/wiki/
Corruption#cite_note-0
229 Transparency international est une ONG allemande
qui lutte en dénonçant la corruption galopante et qui a
classé le Cameroun, pays situé au cceur de l'Afrique Centrale au
premier rang
institutions juridictionnelles camerounaises en tete des
institutions les plus corrompues du pays. « La corruption affecte meme le
systeme judiciaire, un secteur "qui est cense mettre fin a la
corruption'', mais qui n'en est pas capable >> expliquait en 2008,
Mme Baster de l'ONG Transparency international, qui a precise auparavant que
« les plus démunis sont les plus penalises...
>>230
Dans ces pays, les juges véreux ont la propension a
sacrifier les causes aussi nobles soient-elles comme l'environnement a l'autel
de quelques francs symboliques que présentent les bourreaux de
l'environnement. L'accentuation de la corruption dans cette partie du continent
africain ne trouve-t-elle pas son origine dans la pauvreté ambiante dans
laquelle est plongée la population depuis l'annonce de la crise
economique en 1982 ? Il est vrai, les Etats africains dans leur
quasi-totalité se mobilisent contre la corruption, a travers divers
moyens. C'est l'exemple de « SOS corruption >> au Benin qui au sein
de l'administration, doit recueillir les doléances des
citoyens231. C'est egalement le cas des observatoires de la
corruption dans l'administration camerounaise232. Dans ce continent,
plusieurs bailleurs de fonds menent une croisade sans merci contre cette
gangrene qui est l'un des obstacles de la lutte contre la
pauvreté233.
B- La pauvreté ou l'indigence des justiciables
La pauvrete, notion aux « innombrables visages
>>234, a longtemps ete considers dans les pays de l'Afrique
Centrale comme etant un pretexte pour justifier les assauts
des pays les plus corrompus de la planete dans ses rapports
pendant plusieurs annees successives. Voir
http://www1.voanews.com/french/news/a-46-2007-12-06-voa9-91955539.html.
230 A consulter sur
http://www1.voanews.com/french/news/a-46-2007-12-06-voa9-
91955539.html.
231 ANOUKAHA (F.) ; POKAM (H. De P.) ; FOLEFACK (E.);
NKENFACK (H.) : « La lutte contre la pauvrete et les exclusions par les
institutions et les pouvoirs publics en Afrique a travers le concept de
"gouvernance partagee'', Annales de la faculte des sciences juridiques et
politiques (FSJP) de l'Universite de Dschang, Tome 7, PUA, 2003, p. 15.
232 C'est l'exemple de l'Arrete n°
0056/MINESUP/CAB du 21/06/2001 portant creation d'une cellule centrale de lutte
contre la corruption et de promotion de l'ethique dans l'Enseignement Superieur
du Cameroun.
233 ANOUKAHA (F.) et alt., op. cit.,
p. 14.
234 WINTER (G.) : L'impatience des pauvres, Paris,
PUF, 2002, pp. 72 et s.
portes contre l'environnement235. Les pays de
l'Afrique Centrale sont en effet caracterises par leur situation d'extreme
pauvrete, car la moyenne de la population y vit en dessous du seuil de
pauvrete236. Le dictionnaire Encarta237 definit la
pauvrete de diverses manieres. En premier lieu, il la concoit comme la
situation dans laquelle se trouve une personne qui a tres peu d'argent pour
subsister et vivre decemment. Deuxiemement, elle l'analyse comme un manque de
valeurs, d'interet ou de qualite (de quelque chose sur le plan moral ou
intellectuel). Troisiemement, elle constitue un manque d'abondance ou de
diversite. Quatriemement et enfin, elle s'apparente a l'apparence miserable de
quelque chose qui revele le manque d'argent. De l'examen approfondi de ce qui
precede, il ressort que la pauvrete peut se presenter sous deux principales
formes : la forme materielle et la forme morale ou
psychologique238.
La pauvrete est un frein a l'epanouissement du juge dans son
action de controle. Elle place a la fois le justiciable et le juge dans une
situation de dependance et est generatrice de la corruption. L'adage «
ventre affame n'a point d'oreille >> ne revetil pas son sens le plus
complet ici ?
La pauvrete fragilise l'action du juge et influence le
comportement du consommateur (justiciable). A cause d'elle, le consommateur
africain se contentera de « soupirer devant une boite de conserve avariee
plutot que de faire valoir ses droits a des produits de bonne qualite et par
suite, son droit a la sante >>239. Devant une telle situation,
le juge est passif car c'est en vain qu'on cherche dans les pays africains une
jurisprudence sur le droit essentiel du consommateur alors
235 SOH FOGNO (D. R.), op. cit., p . 220.
236 La Banque Mondiale par exemple met en avant une
de ces methodes d'estimation du seuil de pauvrete, avec comme critere un seuil
normatif de 1 dollar US, (soit pres de 480fcfa) par personne et par jour. Pour
plus de details sur le calcul du seuil de pauvrete : consulter :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Seuil_de_pauvret%
C3%A9
237 Dictionnaire Encarta 2008, op. cit.
238 Pour plus d'amples details sur les diverses
facettes de la pauvrete, lire SOH FOGNO (D. R.), op. cit., pp. 221 et
s.
239 KAMTO (M.), op. cit., p. 349.
meme que les cas d'intoxication alimentaire pour cause de
consommation des produits avariés sont légion240.
En effet, « L'Afrique est le réservoir des rebuts
et autres produits périmés ou impropres a la consommation
>>241. Qui ne se souvient en effet pas de la viande
irradiée a la suite de l'accident de Tchernobyl et exportée du
marché européen vers certains pays africains (au Ghana par
exemple), du lait, des conserves de toutes sortes, des cigarettes et de
nombreux autres produits avariés et destinés a la destruction,
mais que l'on retrouve sur le marché africain ? Qui ignore le
phénomene de l'envahissement des marchés des pays de l'Afrique
centrale a l'instar du Cameroun par les produits impropres a la consommation
comme le poulet congelé et le lait frelaté pour ne citer que ceux
la, et qui font l'objet de beaucoup de débats ? Mais curieusement,
personne ne leve le petit doigt. Le contrôle sanitaire de ces
denrées alimentaires semble inexistant, nonobstant la gamme
variée des réformes des autorités en charge des questions
d'environnement et de santé publique.
240 Ibidem.
241 Ibid., p. 345.
Deuxième conclusion partielle
En se placant dans une perspective chronologique, on remarque
que les hesitations liees au developpement de l'application par les juges des
principes du DIE en general et des principes de prevention et de precaution en
particulier sont cristallisees sur plusieurs axes :
D'une part, et cela ressort de notre demonstration, les textes
de la sous region Afrique Centrale ne reconnaissent le juge qu'imparfaitement
comme autorite devant connaitre des differends d'environnement, ce qui n'a pas
facilite l'emergence d'une jurisprudence sous regionale en matiere
d'environnement. C'est donc à juste raison qu'on a pu noter « une
mefiance caracteristique vis-à-vis de la procedure juridictionnelle
>>242 ; d'autre part, et nous ne l'avons pas cache,
l'approximation de la formation des juges sur les questions d'environnement, ce
qui n'empêche pas les justiciables de se constituer victimes resignees,
motif pris tres souvent de leur indigence, de leur ignorance ou tout simplement
du faible echo des questions environnementales, mais surtout de la corruption
rampante que ne facilite pas la pauvrete ambiante ici et la.
242 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op., cit., p. 77.
Conclusion générale
« Line des di icultes les plus cruciales en sciences
sociales est de conclure. Et ce serait meme une erreur que de vouloir conclure
si on ne prend pas au prealable un certain nombre de precautions
>>243. Cela suppose pour un sujet comme le nitre, qu'on ait
toujours a l'esprit le point oil l'on est parti : Il etait question pour nous
de demontrer qu'apres avoir acquis leurs lettres de noblesse en droit
international de l'environnement, les principes de prevention et de precaution
ont connu progressivement une valeur normative et une application effective en
Afrique centrale. En effet, cette normativite est dejà etablie lorsque
les principes sont expressement formules dans une loi, et qu'ils encadrent
l'exercice d'un pouvoir decisionnel de l'administration a l'endroit d'une
activite, d'une substance ou d'un produit susceptible de comporter des risques
de dommage graves ou irreversibles pour l'environnement ou la sante
humaine244. De cette normativite decouleront de nouvelles
obligations tant pour les autorites publiques que pour les particuliers.
L'exemple le plus accompli a cet egard resulte de l'integration des traites ou
des conventions du droit international de l'environnement dans les textes de la
sous-region. De fait, une fois que ces valeurs declaratoires et symboliques
penetrent dans l'ordre juridique communautaire, elles acquierent une force
juridique incontestable et beneficient non seulement de la primaute sur les
droits internes, mais jouissent aussi de l'effet direct ; les autorites
nationales y compris le juge etant les principaux garants de l'application de
ce droit communautaire245.
S'il etait indique de degager au prealable notre problematique
axee essentiellement sur les acteurs de l'application des principes du DIE en
Afrique Centrale, il etait tout aussi important d'envisager le domaine et les
modalites (techniques) d'application de ces instruments. Ceci devrait
permettre, et nous n'en sommes pas arrives tres loin, de constater que le
controle par le juge de ladite
243. KEMFOUET KENGNY (E. D.), op ; cit, p.
409.
244 TRUDEAU (H.), op., cit., p. 60.
245 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op ; cit, p.
173.
application serait d'une contribution inestimable pour la
protection efficace de l'environnement. A cet egard, nous avons note que,
contrairement a ce que l'on peut penser concernant le reglement des differends,
les textes sous-regionaux d'environnement consacrent pour l'essentiel
l'arbitrage d'un organe ad hoc246, le reglement amiable entre les
parties247, et la negociation248. C'est en dernier
ressort249 et notamment en cas d'echec des autres procedures
reputees plus douces25° que les parties « peuvent >>
recourir a la procedure juridictionnelle, notamment a la Cour de l'Union
Africaine251 ou la Cour Internationale de Justice
( C.I.J.)252 ;
Quoi qu'il en soit et nous l'avons egalement releve, les
principes de prevention et de precaution ont un domaine vaste et sont mis en
oeuvre par des instruments connus indiques plus haut. Certes, precaution et
prevention ont en commun de situer l'action a entreprendre avant la
materialisation du risque253, mais la confusion ne pourrait se
radicaliser a l'extreme et confondre les deux principes. Tout au plus, nous
avons releve au dela de notre analyse, que le principe de prevention implique
la prise en compte par le droit des risques potentiels de fa~on a eviter que
ceux-ci n'entrainent eventuellement des dommages graves ou irreversibles pour
l'environnement ou la sante humaine. Pour emprunter l'heureuse expression de
Monsieur Jean Marc LAVIEILLE, il s'agit des « mesures de gestion d'un
risque connu >>254. Nous aurons aussi demontre que la
singularite du principe de precaution reside dans l'insuffisance des
connaissances qui conduit parfois a l'incertitude scientifique255.
Au demeurant et il convient de le relever, si la
246 C'est le cas des articles 20 alinea 3 de la
Convention de Bamako et 24 alinea 2 de la Convention d'Abidjan.
247 Article XXX alinea 1 de la Convention africaine
sur la conservation de la nature et des ressources naturelles.
248 Article 24 alinea 1 de la Convention d'Abidjan et article 20
alinea 1 de la Convention de Bamako
249 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op., cit., p. 77.
250 Ibidem
251 Article XXX alinea 1 de la Convention africaine
sur la conservation de la nature et des ressources naturelles.
252 Article 20 alinea 2 de la Convention de Bamako
253 - ·- ·,.-
LUCCHIN1 (L.), op., cit., p. 714.
254 LAVIEILLE (J. M.), op. cit., p. 89.
255 -
LUCCHina (L.), op., cit., p. 715.
prévention, forme de gestion des risques, vise un
objectif imparfait certes mais rationnellement fondé et économe,
la précaution, basée sur l'absence de certitudes scientifiques
sur la peur, promet peu ou prou un idéal de « risque zéro
>>256.
Cependant que l'application des principes objet de notre
travail incombe a plusieurs types d'acteurs : des autorités
administratives centrales et déconcentrées en passant par les
collectivités locales, les personnes privées, les associations et
les ONGs.
Nous sommes donc convenus sur la base des études
récentes, que le probleme de l'application de la norme internationale en
droit interne est une question classique du droit des gens257. Car
depuis sa reconnaissance internationale, le principe de précaution
confere de nouveaux pouvoirs aux autorités publiques pour suspendre
l'effet des regles économiques et commerciales ordinaires258.
Il n'en va pas autrement pour ce qui est de son corollaire, le principe de
prévention. Ainsi, l'application de ces principes est tout d'abord
l'apanage des pouvoirs publics. Il est en effet certain que dans le domaine de
l'environnement il existe des reglements de police visant a interdire et a
controler certaines activités humaines perturbatrices du milieu naturel.
Les autorités publiques appliquent ces principes en correspondance
légale avec la nécessité d'assurer les objectifs d'ordre
public que sont traditionnellement la sécurité, la
tranquillité et la salubrité publique259 pour mettre
en oeuvre la politique diplomatique courante des Etats qui consiste a
"réagir et corriger'', laquelle semble devoir être
remplacée par une politique du "prévoir et
prévenir''260.
Cette application est ensuite pour les citoyens « a la
fois un droit a exercer et un devoir a respecter
>>261. Ceux-ci l'exercent comme droit quand ils
dénoncent devant
256 GUIBERT ( C.) ; LOUKAKOS (N.), op.,
cit.,
257 KEMFOUET KENGNY (E. D.), op. cit., p.
178.
258 GODARD (O.) ; et alt., op. cit.,
p. 170.
259 PRIEUR (M.), « Les principes
généraux du droit de l'environnement >>, op. cit.,
p. 7 ; Voir aussi BILONG (S.) : op. cit.
268 Environment security, International Peace Research
Institute-United Nations Environnement Programme, p. 9 ; cité par PAYE
(O.) et alt., op. cit., p.211.
261 LAVIEILLE (J.M.), op. cit., p. 99.
l'administration ou la juridiction compétente, les
atteintes qu'un projet peut causer a l'environnement. En revanche, ils se
doivent aussi de respecter les décisions administratives ou
juridictionnelles prises pour la poursuite d'un projet dont la nocivité
sur l'environnement n'est pas avérée. Il s'agit au sens large
d'un instrument d'action pour controler la conformité de textes
postérieurs et pour contester des décisions publiques ou
privées qui y seraient contraires. De maniere synthétique, c'est
« un devoir a respecter par les autorités politiques,
administratives qui, dans leurs compétences respectives, vont ou non,
autoriser la mise en oeuvre de projets, devoir a respecter également par
les créateurs de risques ainsi des scientifiques, des industriels ;
devoir a respecter par les générations présentes qui
devraient titre "gardiennes'' des générations futures
>>262. C'est ainsi que nous sommes parvenus, dans les
conditions de travail qui étaient les nitres, a une conclusion a
laquelle tout apprenant qui s'essaye dans la recherche n'aurait pu que
adhérer, a savoir que l'application des principes de prévention
et de précaution est certainement partout ailleurs et davantage en
Afrique centrale, l'affaire de tous.
Cependant, d'autres recherches ultérieures plus
pointues, axées par exemple sur une étude de cas
spécifique nous permettraient sans doute de fixer définitivement
les esprits sur la réalité de l'application de ces principes
phares du droit international de l'environnement dans l'un des Etats de
l'Afrique Centrale. Nous aurons peut-titre commencé a remplir notre
obligation fut-elle morale ; celle de restituer a qui de droit une
société écologiquement viable ; car le dommage
écologique s'étalant souvent dans le temps, il faut comprendre
des lors que nous sommes tous responsables vis-à-vis des
générations futures. Finalement, comme le disait Antoine De Saint
EXUPERY, « Nous ne léguons pas la nature a nos enfants, nous la
leur empruntons >>263
262 Ibidem.
263 DUPUY (P.M.), op. cit.
Bibliographie
A- Ouvrages
1. CABALLERO (F.) : Essai sur la notion
juridique de nuisance, Paris, LGDJ, 1981, 361 p.
2. CORNU (G.) : Vocabulaire juridique, Paris,
PUF, 6eme ed., 1987, 839 p.
3. FOGU I (J.P.) : « Demain »,
Editions SOPECAM, 1991, 85 p.
4. FOTSO (R.C.); COMPAGNON (D.) et CONSTANTIN
(F.) -Sous la direction de- : Risques ecologiques, projets integres et
preoccupations locales. in Administrer l'environnement en Afrique, Karthala -
IFRA, 2000, 241-258 p.
5. GODARD (O.) : HENRY (C.) : LAGADEC (P.) ; M
ICHEL-KERJAN (E.) : Traite de nouveaux risques, edition Gallimard,
2002, 620 p.
6. HEBRARD (S.) : Les etudes d'impact sur
l'environnement et le juge administratif, RJE, 2 p. 129, « Les etudes
d'impact dans la jurisprudence administrative », CJE, 1982, 421 p.
7. KAMTO (M.) : Droit de l'environnement en
Afrique, EDI CEF, 1996, 416 p.
8. KISS (A.) et BEUR IER (J.-P.) : Droit
international de l'environnement, 3eme edition, Pedone, 2004, 303
p.
9. KOM TCHUENTE (B.) : Developpement
communal et gestion urbaine au Cameroun, les enjeux de la gestion municipale
dans un systeme decentralise, editions CLE, Yaounde, 1996, 219 p.
10. KOUR ILSKY (P.) et V INEY (G.) : Le
principe de precaution, Paris, Editions Odile Jacob, 2000.
11. LAV IE ILLE (J. M.) : Droit international
de l'environnement, Paris, Ellipses, 2e ed., 2004, 191 p.
12. MAZAUDOUX (O.) ; LAV IE ILLE
(J.-M.) (sous la direction de) : Droit international
public et droit international de l'environnement, Memoire de DEA en Droit de
l'Environnement et de l'Urbanisme, Universite de Limoges, 2004, 137 p.
13. MORAND-DEV ILLER (J.) : Le droit de
l'environnement, Paris, PUF, (Que sais-je ?) 2003, 127 p.
14. PAYE (O.); CORTEN (O.) ; DELCOURT (B.) ; HERMAN
(P.) ; KLEIN (P.); REMACLE (E.); ROBERT (E.); SALOMON (J.) :
L'environnement, nouvel enjeu mondial, in Le droit international a
l'epreuve, tome 1, editions Complexe, 1993, 261 p.
15. PR IEUR (M.) : Droit de l'environnement,
Paris, Dalloz, 5eme edition, 2004, 1001 p.
16.
ROM I (R.) : Droit et administration de
l'environnement, 5eme edition, Montchrestien, 2004, 595 p.
17. SADELEER (N. De) : Les principes du
pollueur-payeur, de prevention et de precaution : essai sur la genese et la
portee juridique de quelques principes du droit de l'environnement, Bruxelles,
Bruylant, 1999, 437 p.
18. WINTER (G.) : L'impatience des pauvres,
Paris, PUF, 2002, 296 p. B- Articles de doctrine
19. ANOUKAHA (F.) ; POKAM (H. De P.) ; FOLEFACK (E.);
NKENFACK (H.) : « La lutte contre la pauvrete et les exclusions
par les institutions et les pouvoirs publics en Afrique a travers le concept de
"gouvernance partagee'', Annales de la faculte des sciences juridiques et
politiques (FSJP) de l'Universite de Dschang, Tome 7, PUA, 2003, pp.
5-24.
20. ASSEMBON I-OGUNJ I (A.) : « La
protection et la mise en valeur de l'environnement marin et cotier en Afrique
de l'ouest et du centre a travers le systeme juridique d'Abidjan », in
Aspects contemporains du droit de l'environnement en Afrique de l'ouest et
centrale, L. Ganier, coord., UI CN, Gland, 2008, pp. 131-154 p.
21. BOMBA (C. M.) ; PR IEUR (M.) -sous la
direction de- : « Environnement et developpement urbain au Cameroun
», in Vers un droit de l'environnement urbain : actes des 2emes
journees scientifiques du « reseau droit de l'environnement » de
l'AUPELF-UREF a l'Universite Cheikh Anta Diop Dakar, Senegal, Octobre 1996, 321
- 398 p.
22. BOUMAKAN I (B.) : « Les
juridictions communautaires en Afrique noire francophone: La Cour de justice et
d'arbitrage de l'OHODA, les Cours de Justice de l'UEMOA et de la CEMA C
», Annales de la faculte des sciences juridiques et politiques de
l'Universite de Dschang, Tome 3, PUA, 1999, p. 67-86.
23. DEHOUSSE (R.) : « Naissance d'un
constitutionnalisme transnational », in: Les Cours
europeennes de Luxembourg et Strasbourg, Pouvoirs
n° 96, 2001.
24. DOUMBE-B ILLE (St.) : « Evaluation des
institutions et des moyens de mise en oeuvre du droit de l'environnement et du
developpement » R.J.E., vol. 1, 1993, 31-44 p.
25. DROBENKO (B.) : Environnement urbain et
union Europeenne, in vers un droit de l'environnement urbain, p. 44-93
p.
26. GRANET (M-B.) : Principe de precaution
et risques d'origine nucleaire: quelle protection pour l'environnement ?
Journal du Droit International, n°3-2001, Limoges, 758 p.
27. GU IBERT (C.) ; LOUKAKOS (N.) : Principe de
precaution et prevention, Lex Aero, 12 p.
http://www.dossiersdunet.com/spip.php?article210
28. HUGLO (Ch.) : « Le juge et
l'environnement, un defi »,
http://www.unige.ch/sebes/
textes/ 1996/96_CH.html
29.
LEME MACHADO (P.A.) : Commerce international
environnement et biodiversite. In vers un nouveau droit de l'environnement
? Centre International de Droit Compare de l'Environnement, Limoges, 2003,
62-68 p.
30. LUCCH IN I (L.) : « Le principe de
precaution en droit international de l'environnement : ombres plus que lumieres
». In: Annuaire francais de droit international, 1999, pp.
710-731.
31. NO IV ILLE (C.) et GOUYON (P.-H.) : «
Annexe 2 - Principe de precaution et organismes genetiquement modifies. Le cas
du mais transgenique »
32. SANTULLI (C.) : Les juridictions de l'ordre
international : Essai d'identification. In : Annuaire frangais de droit
international, 2001. pp. 45-61.
33. TRUDEAU (H.) : Du droit international au
droit interne : l'emergence du principe de precaution en droit de
l'environnement, 64 p.
https://papyrus.bib.umontreal.ca/jspui/handle
/1866/1420
34. VERHOEVEN (J.) : Principe de precaution,
droit international et relations internationales : quelques remarques,
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/FD001431.pdf.
C- Mémoires et Theses
35. ALLES (D.) : Le principe de precaution
et la philosophie du droit - Evolution certaine, revolution en puissance,
Memoire realise dans le cadre du seminaire « Etat de droit - L'individu
et le droit en France, en Europe et dans le monde » juillet 2005,
http://www.memoireonline.com/12/05/33/m_principe-de-precaution-philosophie-droit0.html
36. CHAMEGUEU (G. M.) : « Le controle
juridictionnel des activites de la CEMA C », Memoire de DEA, Universite de
Douala, consulte sur
http://www.memoireonline.com/08/09/2487/m_Le-contrle-juridictionnel-des-activites-de-laCEMAC7.html
37. DESS INGES (F.) : « Le principe de
precaution et la libre circulation des marchandises » ; Memoire de DEA
Droit des Communautes europeennes, Universite Robert Schuman de Strasbourg,
Septembre 2000, 80 p.
38. DUCROQUETZ (M. A.-L) : Le principe de
precaution en matiere de securite alimentaire, Memoire de Diplome d'Etudes
Approfondies de Droit communautaire et international, Universite de Lille II,
annee universitaire 2001, 128 p.
39. GALIBERT (T.) : Le principe de
precaution : Du droit de l'environnement au droit de la securite des aliments,
Memoire pour l' obtention du Diplome d' etudes approfondies d'Etudes
Juridiques, Universite de la Reunion, 2002, 153 p.
40. GN INTEDEM LOWE (P. J.) : Les ONG et la
protection de l'environnement en Afrique Centrale, Memoire de Master 2 en Droit
international et compare de l'environnement, Universite de Limoges, Juillet
2003, 45 p.
41. KEMFOUET KENGNY (E. D.) : Droit
international de l'environnement et fonction juridictionnelle, These de
Doctorat en droit international public, Universite de Limoges, 2008, 482 p.
42.
KEMFOUET KENGNY (E. D.) : La protection des
ecosystemes forestiers d'Afrique centrale, Memoire de D.U. de droit
international de l'environnement, Limoges, 2000, 55 p.
43. KOMBO MATIK I (A.) : L'application du
principe de prevention et l'etude d'impact sur l'environnement dans les projets
de developpement, Memoire de Master 2 en Droit international et compare de
l'environnement, Universite de Limoges, 2008.
http://www.memoireonline.com/11/O8/1624/m_Le-principe-de-prevention-et-letude-dimpactsur-lenvironnement-dans-le-projet-dexploitation-miniO.html
44. SOH FOGNO (D. R.) : La protection de la
faune sauvage d'Afrique Centrale, Memoire de DIU de 3eme cycle en
droit international de l'environnement, Universite de Limoges, 2001, 60 p.
45. SOH FOGNO (D.R.) : Developpement et
protection de l'environnement en Afrique Centrale, These de Doctorat en droit
publique de l'Universite de Nantes, 361 p.
D- Cours
46. B ILONG (S.) : « Droit Administratif
General », Cours polycopie de 3eme annee de Licence en droit et science
politique a la FSJP de l'Universite de Dschang, 2004 - 2005.
47. DOUMBE B ILLE (S.) et alt., :
« Les acteurs du Droit International de l'Environnement »,
cours audio-visuel de tronc commun en Master 2 par satellite (ENVIDROIT) en
Droit International et Compare de l'Environnement, Universite de Limoges,
2009-2010.
48. LAV IE ILLE (J. M.) : Les principes
generaux du droit international de l'environnement et un exemple : le principe
de precaution, cours polycopie de tronc commun n° 4 de Master 2
par satellite en Droit international et compare de l'environnement, Universite
de Limoges, 2009 - 2010, 15 p.
49. MOHAMED (A.M.) et alt., :
« Les acteurs du Droit International de l'Environnement »,
cours audio visuel de tronc commun en Master 2 par satellite (ENVIDROIT) en
Droit International et Compare de l'Environnement, Universite de Limoges,
2009-2010
50. PR IEUR (M.) et alt., : «
L'information, la participation et l'evaluation environnementale », cours
audio-visuel de tronc commun de Master 2 par satellite (ENVIDROIT) en Droit
international et compare de l'Environnement, Universite de Limoges, 2009 -
2010.
51. PR IEUR (M.) : « Les principes
generaux du droit de l'environnement », Cours polycopie n°
5 de tronc commun de Master 2 par Satellite en Droit international et compare
de l'environnement, Universite de Limoges, 2009-2010, 99 p.
52. ROM I (R.) : L'administration et les
acteurs du droit de l'environnement : l'exemple francais, cours polycopie de
Master 2 par satellite en Droit international et compare de l'environnement,
Universite de Limoges, 2009-2010, 135 p.
E- Autres sources
53. Agenda 21 (Action 21) de Juin 1992
54. Arrete n° 00001/MINEP du 03 Fevrier 2007 sur
le contenu general des termes de reference des etudes d'impact environnemental
au Cameroun.
55. Arrete n° 0056/MINESUP/ CAB du 21/06/2001
portant creation d'une cellule centrale de lutte contre la corruption et de
promotion de l'ethique dans l'Enseignement Superieur du Cameroun.
56. Charte mondiale de la nature du 28 octobre 1982.
57. CJ CE, 15 juillet 1964. Aff. COSTA C/ ENEL aff. 6/64.
Rec. 1141.
58. Constitution de Guinee Equatoriale du 28/09/1958
59. Constitution de la Republique Centrafricaine du
05/12/2004
60. Constitution de la Republique du Cameroun du
18/01/1996
61. Constitution de la Republique du Congo
62. Constitution de la Republique du Gabon issue de la loi
n° 1/94 du 18/03/1994 modifiee le 19/08/2003
63. Constitution de la Republique du Tchad du 31/03/1996,
revisee en Mai 2004
64. Constitution de la Republique francaise du 04/10/1958
65. Convention cadre sur les changements climatiques du 9 mai
1992.
66. Convention d'Aarhus du 25/06/1998 sur l'acces a
l'information, la participation du public au processus decisionnel et l'acces a
la justice en matiere d'environnement.
67. Convention d'Espoo du 25/02/1991 sur l'etude d'impact
transfrontiere
68. Convention d'Helsinki du 17 Mars 1992 sur la protection et
l'utilisation des cours d'eau transfrontieres et des lacs internationaux.
69. Convention de Bamako du 30 Septembre 1991 sur l'interdiction
d'importer en Afrique des dechets dangereux et sur le controle des mouvements
transfrontieres et la gestion des dechets dangereux produits en Afrique
70. Convention de Barcelone sur la protection du milieu marin et
du littoral de la Mediterranee amendee le 10 juin 1995.
71. Convention de Libreville du 05/07/1996 regissant l'UMA C.
72. Convention de Rio du 5 juin 1992 sur la diversite
biologique.
73. Convention de Vienne du 22 Mars 1985 sur la protection de la
couche d'ozone.
74. Declaration de Rio de juin 1992 sur l'environnement et le
developpement.
75. Declaration de Stockholm de Juin 1972 sur
l'environnement.
76. Decret 00539 du 15 juillet 2005 abrogeant celui
N° 405 du 15 mai 2002.
77. Decret N° 2005/0577/PM du 23 fevrier 2005
fixant les modalites de realisation des
etudes d'impacts environnementaux au Cameroun
78. Dictionnaire Encarta sur Microsoft Encarta 2008.
79. Dictionnaire HACHETTE encyclopedie illustre, 1996, 2028
p.
80. Directive 89/397/ CEE du Conseil, du 14 juin 1989 relative
au controle officiel des denrees alimentaires.
81. « Le Monde », du Mercredi 23 Juin
2010,
82. Lexique des termes juridiques Dalloz, 13eme
edition, 2001, 592 p.
83. Loi camerounaise n° 2006/022 du 29 Decembre
2006 portant creation des tribunaux administratifs dans chaque region
84. Loi n° 16/93 du 26 aoilt 1993 portant code
de l'environnement au Gabon.
85. Loi n° 96/12 du 5 aoilt 1996 portant
loi-cadre relative a la gestion de l'environnement au Cameroun
86. Protocole de Montreal du 16 Septembre 1987 relatif aux
substances qui appauvrissent la couche d'ozone.
F- Sites Internet
87.
http://connetoitoimeme.blogspot.com/2010/02/theorie-et-pratique.html
88.
http://decouverte.wwf.fr
89.
http://fr.wilipedia.org/wili/
Corruption#cite_note-0
90.
http://fr.wilipedia.org/wili/Seuil_de_pauvret%
C3%A9
91.
http://reflex.raadvstconsetat.be/reflex/index.reflex?page=chrono&c=detail_get&d=detail&docid=8717&ta
b=euro
92.
http://reflex.raadvst-consetat.be/reflex/index.reflex?page=chrono&c=detail_get&d=
detail&docid=8717&tab=euro
93.
http://www.cameroun-online.com/actualite,actu-5204.html
94.
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/IMG/pdf/FD001431.pdf
95.
http://www.dossiersdunet.com/spip.php?article210
96.
http://www.hysacam-proprete.com/index.php?mod=entreprise&vg=4,
consulte le 29/07/2010.
97.
http://www.jeuneafrique.com/Articles/Dossier/ARTJAJA2551p086
.xml1/ environnement-ville-dechet-hysacamhysacam-un-modele-pour-la-propreteurbaine.html,
consulte le 29/07/2010.
98.
http://www.memoireonline.com/08/09/2487/m_Le-contrle-juridictionnel-desactiyites-de-la-
CEMA C7.html.
99.
http://www.memoireonline.com/11/08/1624/m_Le-principe-de-preyention-etletude-dimpact-sur-lenyironnement-dans-le-projet-dexploitation-mini0.html
100.
http://www.memoireonline.com/12/05/33/m_principe-de-precaution-philosophiedroit0.html
101.
http://www.oboulo.com/cjce-costa-c-enel-15-juillet-1964-24723.html.
102.
http://www.persee.fr/web/reyues/home/prescript/article/afdi_0066-
3085_2001_num_47_1_3654,
103.
http://www.persee.fr/web/reyues/home/prescript/article/afdi_00663085_1999_nu
m_ 45_1_3586
104.
http://www1.yoanews.com/french/news/a-46-2007-12-06-yoa9-91955539.html.
105.
https://papyrus.bib.umontreal.ca/jspui/handle
/1866/1420
Table des matières
DEDICACE.....................................................................................................................................................
II
REMERCIEMENTS....................................................................................................................................
III PRINCIPALES ABREVIATIONS
................................................................................................................
V
SOMMAIRE................................................................................................................................................
VII INTRODUCTIONGENERALE
....................................................................................................................
1
I- PRECISIONS TERMINOLOGIQUES
.....................................................................................................
A- QU'EST CE QUE L'APPLICATION 9
.............................................................................................................
3
B- LE PRINCIPE DE PREVENTION
.....................................................................................................................
3
C- LE PRINCIPE DE PRECAUTION
....................................................................................................................
5
D- L'ESPACE GEOGRAPHIQUE CIBLE : L'AFRIQUE CENTRALE
........................................................................
8
II- INTERET ET PROBLEMATIQUE DU SUJET, METHODOLOGIE ET PLAN
............................... 9
A- INTERET DU SUJET ET PROBLEMATIQUE
....................................................................................................
9
B- METHODOLOGIE ET PLAN
........................................................................................................................
12
PREMIERE PARTIE : L'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION PAR LES AUTORITES ADMINISTRATIVES DANS LES ETATS
D'AFRIQUE
CENTRALE.
..................................................................................................................................................
13
CHAPITRE 1 : LE CHAMP D'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE
PRECAUTION..............................................................................................................................................
13
SECTION I : LE DOMAINE D'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION .................... 13
Paragraphe 1 : Etendue du domaine d'application de ces
principes 14
A- Les risques environnementaux et la sante publique 14
1) L'emergence des principes de prevention et de precaution dans
le domaine de l'environnement 14
2) L'application des principes de prevention et de precaution a
la sante publique 16
B- Gestion des catastrophes naturelles et industrielles 17
Paragraphe 2 : Conditions d'application des principes de
prevention et de precaution 20
A- L'incertitude scientifique dans l'application du principe de
precaution. 20
B- La preuve du dommage connu et le principe de prevention
22
SECTION II : MODALITES D'APPLICATION DES PRINCIPES DE PREVENTION
ET DE PRECAUTION .................... 23
Paragraphe 1 : Instruments de mise en oeuvre des principes de
prevention et de precaution 24
A- Les etudes d'impact environnemental (EIE) 24
B- Portée des etudes d'impact dans le droit sous-regional
de l'environnement 27
Paragraphe 2 : Effets de la mise en oeuvre des principes
31
A- L'application du poids de la preuve 31
B- La garantie d'une protection adequate de l'environnement
34
CHAPITRE 2 : LES AUTORITES EN CHARGE DE L'APPLICATION
DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION.
.....................................................................................................
37 SECTION 1 : LES AUTORITES POLITIQUES ET CENTRALES
.............................................................................
38
Paragraphe 1 : Les autorites constitutionnelles 38
A- Le role constitutionnel des chefs d'Etats d'Afrique Centrale
38
B- Les pouvoirs du legislateur et du conseil constitutionnel
39
Paragraphe 2 : L'administration active 41
A- Les Ministres en charge de l'environnement 41
B- Le Ministre de la sante et les autres Ministres 42
SECTION 2 : LES AUTORITES LOCALES
.........................................................................................................
43
Paragraphe 1 : Les autorités
décentralisées et les autorités
déconcentrées 44
A- L'application du droit international de l'environnement par
les Maires et Délégués du gouvernement 44
B- Le role central du Préfet en matiere de protection de
l'environnement 47
Paragraphe 2 : Les autres acteurs 49
A- Les associations et les personnes privées 50
B- Les Organisations Non Gouvernementales (ONG) 52
1) L'alerte vis-a-vis des décideurs 53
2) L'alerte vis-a-vis du public 54
PREMIERE CONCLUSION PARTIELLE
................................................................................................
56
DEUXIEME PARTIE : L'APPLICATION DES PRINCIPES DE
PREVENTION ET DE PRECAUTION PAR LES AUTORITES JURIDICTIONNELLES D'AFRIQUE
CENTRALE ........... 57
CHAPITRE 1 : L'EXISTENCE DES JURIDICTIONS COMME GAGE DE
L'APPLICATION DE
CESPRINCIPES
...........................................................................................................................................
60
SECTION 1 : LA NATURE DES JURIDICTIONS EN PRESENCE
............................................................................
60
Paragraphe 1 : Les juridictions nationales 61
A- Conditions de recevabilite de la demande en justice en matiere
environnementale 62
1) La recevabilite subjective 62
2) La recevabilite objective 63
B- Les regles de fonctionnement des juridictions d'Afrique
Centrale en matiere de protection de l'environnement 64
Paragraphe 2 : Les juridictions sous-regionales ou supra
nationales 65
A- La nature politique des autorites de nomination des membres
de la Cour de Justice de la CEMAC 65
B- La faculte de nomination a la Cour des membres non magistrats
66
SECTION 2 : LA COMPETENCE DES JURIDICTIONS D'AFRIQUE CENTRALE EN
MATIERE D'ENVIRONNEMENT 67
Paragraphe 1 : La competence des juridictions nationales
68
A- La competence de la juridiction administrative en matiere de
protection des principes du droit de l'environnement 68
B- La competence des juridictions judiciaires nationales
d'Afrique Centrale en matiere de controle de l'application des principes de
prevention et de precaution
.................................................................................
70
Paragraphe 2 : La competence de la juridiction supra
nationale dans l'espace Afrique Centrale en matiere d'application des principes
de prevention et de precaution 73
CHAPITRE 2 : LES ENTRAVES A L'APPLICATION EFFICACE DE CES
PRINCIPES EN AFRIQUE CENTRALE 75
SECTION 1 : LES ENTRAVES INTRINSEQUES 75
Paragraphe 1 : Les entraves inherentes aux autorites de
controle 75
A- L'approximation de la formation des autorites
juridictionnelles sur les questions d'environnement 75
1) La frilosite constatee des juges dans le reglement des
litiges. 76
2) L'irresponsabilite virtuelle de l'Administration publique
77
B- La dependance des autorites de controle vis-à-vis du
pouvoir politique 77
1) La problematique de l'independance des juges 78
2) Le choix politique des juges non magistrats 78
Paragraphe 2 : Les entraves structurelles et fonctionnelles
79
A- Les entraves structurelles 79
1) La question de l'extreme centralite des institutions de
controle 79
2) Les coots eleves des proces et leur lenteur 81
B- Les entraves fonctionnelles 82
1) La possibilite de recourir a l'expertise 82
2) L'intervention de la transaction ou de l'arbitrage 83
SECTION 2 : LES ENTRAVES EXTRINSEQUES 84
Paragraphe 1 : Les entraves socioculturelles 84
A- La crainte negative du juge 84
B- Le faible echo des questions environnementales chez les
justiciables 85
Paragraphe 2 : Les entraves socioéconomiques
86
A- La corruption 86
B- La pauvreté ou l'indigence des justiciables 88
DEUXIEME CONCLUSION PARTIELLE 91
CONCLUSION GENERALE 9
BIBLIOGRAPHIE 96
A- OUVRAGES 96
B- ARTICLES DE DOCTRINE 97
C- MEMOIRES ET THESES 98
D- COURS 99
E- AUTRES SOURCES 100
F- SITES INTERNET 101
TABLE DES MATIERES 103
|