INTRODUCTION GENERALE
Au cours des deux dernières décennies, le
contexte économique de l'ensemble des pays pauvres très
endettés (PPTE), en général et du Togo en particulier, a
été marqué par un endettement sans
précédent. La crise de la dette dans les pays en
développement continue de faire la une des journaux à travers le
monde. Elle est considérée comme étant l'un des facteurs
retardant le développement économique des pays pauvres.
Le contexte économique international a joué un
rôle prépondérant dans l'aggravation de la crise :
fluctuation des taux de change, baisse du prix des matières
premières et détérioration des termes de l'échange,
hausse des taux d'intérêt et baisse des prêts assortis de
conditions concessionnelles. En outre, cette crise est imputable aux politiques
internes : mauvaise gestion de la dette publique, mauvaise allocation des
ressources et absence de discipline financière rigoureuse.
Après la deuxième guerre mondiale, l'Europe
s'est reconstruite grâce au «plan Marshall1».
S'inspirant de cet exemple, dans la décennie de 1970, les pays se sont
endettés pour faire face à un désir d'investissement
intensif destiné à réaliser des taux de croissances fortes
du PIB. Ceci dans l'espoir que la croissance économique amorcée
crée les ressources nécessaires au remboursement des prêts
contractés. Tel n'a pas été le cas car cela a plutôt
conduit à un cercle d'endettement. Cette situation a été
favorisée aussi bien par des facteurs internes (une mauvaise gestion de
la dette et allocation des ressources, une absence de discipline
financière rigoureuse) que par des facteurs externes (la fluctuation des
taux de changes, la baisse des cours des matières premières, la
détérioration des termes de l'échange, la
dévaluation...). Cet environnement a conduit le pays à
enregistrer des déficits insupportables et de faibles taux de
croissance.
En 1981, la récession mondiale survint et le prix du
pétrole diminua. Le 12 août 1982, le Mexique signifia à ses
créanciers que sa banque centrale avait épuisé ses
réserves et qu'elle ne pouvait plus honorer les paiements prévus
sur la dette étrangère. Ensuite, après le Mexique, des
pays comme l'Argentine et le Brésil ont suivi le pas. C'est le
début de la crise de la dette. Les solutions de sortie de la crise sont
: les prêts concertés, l'allègement de la dette, le
rééchelonnement de la dette, les Programmes d'Ajustement
Structurel (PAS) et le plan Brady. Les pays dont la dette était
rééchelonnée empruntaient souvent au FMI et donnaient leur
accord à des programmes de stabilisation inspirés par
celui-ci.
Un an plus tôt, la mise en oeuvre au cours des
années 80 des PAS s'est faite notamment avec l'appui de la Banque
Mondiale (BM) et du Fonds Monétaire International (FMI).
Au milieu des années 1990, les mécanismes
d'allègement de la dette (le plan Brady2 et les menus
d'options combinant réduction et refinancement de la dette), et
l'ensemble des mesures visant à réduire les besoins d'emprunt
n'étaient pas suffisants pour ramener l'endettement à un niveau
tolérable. En 1996, les institutions de Bretton Woods (FMI et BM) ont
lancé conjointement une initiative en faveur des PPTE afin de proposer
une solution durable aux problèmes d'endettement des pays pauvres.
Le Togo n'a pas échappé à cette crise de
l'endettement. Ainsi, au 31 décembre 1978, l'encours de sa dette
extérieure s'élevait à 179 milliards de FCFA dont 22
milliards d'arriérés de remboursement. L'encours de la dette a
évolué à la hausse malgré les remboursements
effectués, les remises et annulations obtenues. Il est passé de
213,4 milliards en 1980 à 349,4 milliards de FCFA en 1993 soit un
accroissement en valeur réelle de 61 % (Direction de la dette, 2008).
En 1994, suite à la dévaluation du FCFA
intervenue en janvier, l'encours passa du simple
1 Le plan Marshall est un vaste programme d'aide
financière proposé par les USA pour la reconstruction des pays
alliés. Ce programme se traduit par un apport substantiel de capitaux
sous forme de prêts à ces derniers.
2 Voir annexe 1
au double. Comparé aux recettes d'exportations, le
service avant rééchelonnement donne un ratio de 44,2 % tandis que
celui du service après rééchelonnement fait 27 % alors que
le seuil toléré est de 20 %. Dans cette proportion, le service de
la dette constitue une lourde charge pour l'économie togolaise.
A partir de 1984, d'importants efforts d'ajustement
budgétaire, résultats des Programmes d'Ajustement Structurel
(PAS) initiés par le FMI et la BM, ont permis de dégager des taux
de croissance positifs atteignant 4,1 % en 1989. Aussi, de 1979 à 2008,
le Togo a-t-il bénéficié de onze passages au Club de
Paris3. L'encours de la dette publique du Togo est
évalué à 1106,384 milliards de Francs CFA au 31
décembre 2008.
Malgré ses exportations, le pays va connaître une
conjoncture économique et financière difficile. Au cours de la
période 1994 à 2008, les ratios de la dette extérieure
rapportée au PIB et de la dette publique au PIB sont passés
respectivement de 116,38 % à 46,89 % et de 123,78 % à 79,19 %,
dépassant ainsi les seuils tolérables (50%). Ceci s'explique par
la naissance à côté de la dette extérieure, d'une
dette intérieure grandissante depuis 1990 due à l'environnement
socio-politique et économique.
Si l'on s'accorde sur le fait que la recherche d'une solution
appropriée à la question de l'endettement passe
nécessairement par la connaissance des facteurs qui l'influencent, il
est alors digne d'intérêt de s'interroger sur les causes
explicatives de l'endettement du Togo. Ceci suscite un certain nombre de
questions: Comment évoluent la dette publique du Togo et ses principaux
ratios ? Quelles sont les causes de l'accroissement de la dette publique au
Togo ? Y a-t-il une meilleure stratégie pour gérer la dette de
l'État ?
D'où l'intérêt du thème:
«La dette publique au Togo : une tentative d'identification des
facteurs explicatifs»
L'objectif général de cette recherche est
d'identifier les facteurs explicatifs de l'évolution de la dette
publique au Togo.
Plus spécifiquement, il s'agira de :
· décrire l'évolution de la dette publique du
Togo ;
· analyser des causes de cette évolution ;
· identifier les facteurs explicatifs qui permettent de
réduire ou d'encourager l'endettement public du Togo ;
· proposer des solutions pour une réduction de la
dette publique.
Afin d'atteindre l'objectif de notre étude, nous
partons de l'hypothèse qu'il existe une corrélation positive
entre le ratio d'endettement et les indicateurs de performance
économiques tels que le service de la dette extérieure, le ratio
des importations/PIB et la croissance démographique.
Ainsi, ce mémoire comportera deux (02) parties. La
première partie sera consacrée à l'endettement dans la
littérature puis nous procèderons à l'état des
lieux au Togo ; la seconde partie traitera des résultats d'analyses
empiriques de l'endettement public extérieur, de l'estimation et de
l'interprétation d'un modèle économétrique.
3 Source: Direction de la dette
PREMIERE PARTIE : L'ENDETTEMENT PUBLIC : DE LA
LITTERATURE A L'ETAT DES LIEUX AU TOGO
La première partie de notre recherche comporte deux
chapitres. Le premier chapitre s'intéresse à l'aspect
théorique de l'endettement. La deuxième partie est
consacrée à l'analyse descriptive du niveau d'endettement public
au Togo.
Le premier chapitre contient dans sa première section,
la notion de dette publique ; dans sa deuxième section, les causes, les
conséquences et les motifs de l'endettement public seront
exposés. Le deuxième chapitre est relatif à l'analyse
descriptive du niveau d'endettement du Togo. Ainsi la dette extérieure
est examinée dans la première section et la deuxième
section est relatif à l'analyse la dette intérieure.
CHAPITRE I : L'ENDETTEMENT PUBLIC ET SES EFFETS
DANS LA LITTÉRATURE Section 1 : Notions de dette publique, de
soutenabilité ou de viabilité de la dette A - Notions de dette et
de soutenabilité de la dette
1 - Notions de dette
Par dette, on entend tout engagement
représenté par un instrument financier ou tout autre
équivalent juridique4.
La dette publique est la dette
contractée par un Etat auprès de particuliers, des banques, des
entreprises, des Etats. L'ensemble dette publique extérieure et dette
publique intérieure constituent la dette publique.
La dette extérieure d'un Etat
représente l'ensemble des emprunts contractés par les pouvoirs
publics d'un pays auprès de créanciers (privés ou publics,
bilatéraux ou multilatéraux) extérieurs et non
résidents. Elle peut être publique ou privée,
bilatérale ou multilatérale; elle peut être aussi
commerciale.
La dette extérieure brute est
égale au montant, à une date donnée, de l'encours des
engagements courants effectifs non conditionnels qui comportent l'obligation
pour le débiteur d'effectuer un ou plusieurs paiements pour rembourser
le principal et /ou verser des intérêts à un ou plusieurs
moments futurs et qui sont dus à des non-résidents par des
résidents d'une économie5.
Selon la Banque Mondiale, la dette extérieure
publique est toute dette remboursable en devises à des
créanciers extérieurs dont l'échéance initiale ou
prorogée dépasse un an et est soit contractée directement
par un organisme public du pays emprunteur, soit garantie par l'Etat.
La dette intérieure d'un pays est
l'ensemble des engagements contractés par l'Etat auprès d'acteurs
résidents dans le pays et exprimés en monnaie locale.
L'expression ''dette intérieure
publique" désigne les instruments de la dette émis par
les pouvoirs publics (Gouvernement central, Autorités régionales
et locales et entreprises publiques)6.
Le service de la dette est l'ensemble des
paiements effectivement opérés en règlement d'une
obligation notamment au titre du principal, des intérêts et des
pénalités de retard.
En outre,le remboursement de la dette dépend des niveaux
de taux d'intérêt et des taux de change, puisqu'une partie
importante de l'encours de la dette est libellée en dollars, et
à
4 DEBLOCK C. et al, Dette extérieure des pays en
développement : La renégociation sans fin, 2001, p.9.
5 FMI, Guide ses statistiques de la dette extérieure,
2003, p.20.
6 KAMARA Mame Pierre et N'DIAYE Pierre, Cours de gestion de la
dette, COFEB, 2009
taux variables.
Les prêts concertés sont des
prêts qui sont faits contre la volonté du prêteur.
L'encours de la dette est la partie d'un emprunt
en cours qui a été effectivement versée.
Le stock de la dette fournit une mesure rapide
utile de la charge future du service de la dette liée à la dette
existante.
On entend par intérêt de la
dette, la charge principale d'un prêt, calculée
sur la partie décaissée et non remboursée de capital pour
pénalité évidemment.
L`élément-don (ou
élément de concessionnalité) est la composante
"subvention" des prêts accordés par des organismes d'aide au
développement. D'après la classification du FMI et de la Banque
Mondiale, un prêt est dit concessionnel s'il est assorti d'un
élément don d'au moins 35 %.
On entend par endettement public l'ensemble
des concours demandés par un Gouvernement auprès des partenaires
(bilatéraux, multilatéraux, institutions financières,
marchés financiers, etc) pour financer les actions de
développement qui n'ont pu être prises en charge par le budget
national.
2- Notion de soutenabilité ou de viabilité
de la dette
La dette extérieure d'un pays est viable ou soutenable
à moyen et à long terme si ce pays est en mesure de s'acquitter
de toutes ses obligations courantes et futures sur la dette extérieure
sans recourir à un financement exceptionnel (FMI, 2001).
L'analyse de viabilité de la dette extérieure se
fait à travers : la dette rapportée aux exportations, le ratio de
la dette au PIB, le ratio de la VAN de la dette aux Recettes budgétaires
et le ratio du service de la dette aux exportations.
Lorsque la dette s'accumule à un rythme plus rapide que
la capacité à rembourser, impliquant qu'à un moment
donné le pays ne pourra plus faire face au service de la
dette7, le fardeau de la dette extérieure publique peut
être qualifiée de non viable.
La soutenabilité de la dette c'est l'aptitude du pays
débiteur à satisfaire entièrement à ses obligations
extérieures actuelles et futures sans devoir recourir au
rééchelonnement ou à l'accumulation
d'arriérés.
D'après RAFFINOT (1998), si les conditions suivantes ne
sont pas respectées, des difficultés à honorer la dette
deviennent très probables :
- encours de la dette/PIB ; ce ratio doit être
inférieur à 50 %. C'est un indicateur de liquidité ;
- le rapport (service de la dette/exportations de biens et
services non facteurs de production) doit être inférieur à
20 % et
- le ratio (encours de la dette/exportations) doit être
inférieur à 150 %. C'est un indicateur de solvabilité.
B- Les différentes conceptions sur l'endettement
public
Les différents arguments théoriques de
l'endettement seront regroupés en deux groupes de conceptions, puis
seront présentés les mobiles de l'endettement.
7 Bureau de financement du développement,
département des affaires économiques et sociales des Nations
Unies, considérations stratégiques en gestion de la dette
publique pour le développement durable/ document d'orientations pour le
dialogue multi-parties prenantes, Octobre 2004, p. 3.
1 - Les conceptions classique et keynésienne 1-1
La conception classique
Les classiques assimilent l'endettement à l'impôt
futur et imputent à l'Etat une connotation négative. Selon
Ricardo (1817)8, les citoyens voient dans l'emprunt un impôt
différé dans le temps. Ils se comportent comme s'ils sont
contraints de payer un impôt ultérieurement pour rembourser cet
emprunt, quelque soit le décalage intergénérationnel.
En d'autres termes, le comportement des agents
économiques est guidé par une anticipation à la hausse des
impôts. Toutefois, une réserve peut être introduite selon la
nature ou la qualité des dépenses (dépenses de transfert
ou d'investissement) financées par l'emprunt.
1-2 La conception keynésienne
Pour les keynésiens, l'endettement n'occasionne pas de
charges ni pour les générations futures ni pour des
générations actuelles du fait des investissements qu'il
génère. Dans cette approche, l'endettement entraînant la
relance de la demande provoque par l'effet accélérateur une
hausse plus que proportionnelle de l'investissement, qui à son tour
incite une hausse de la production.
Le déficit budgétaire, qui conduit par ses flux
successifs à augmenter le stock de la dette, produit l'expansion du
cycle économique par la demande et l'investissement autonome. Le
déficit auquel correspond l'emprunt stimule la demande et permet
d'alléger le coût de son remboursement. Cet argument reste
plausible tant que le sous-emploi des ressources productives existent, selon la
thèse keynésienne9.
2 - Les autres conceptions
2-1 Les approches alternatives à la théorie
keynésienne
Pour les tenants de cette hypothèse10, si
dans un pays l'on a deux partis qui sont potentiellement en position
d'accéder fréquemment au pouvoir, ces partis ont des
préférences différentes quant à la nature des
dépenses publiques. Le parti au pouvoir peut décider d'augmenter
aujourd'hui les dépenses publiques en s'endettant, satisfaisant son
électorat, au mieux de se maintenir au pouvoir et au pire de ne pas
faciliter la vie de son adversaire. Ainsi, il crée des conditions de
manière à gêner ultérieurement son adversaire
politique du point de vue de la gestion du budget, si ce dernier venait
à conquérir le pouvoir. Il engage aujourd'hui des recettes
fiscales futures et donc diminue les possibilités futures de
dépense de son adversaire surtout si la dette venait a être
importante.
2-2 La conception de l'école des anticipations
rationnelles
Selon R. BARRO (1974), une politique de déficit
budgétaire financée par l'emprunt reste sans effet stimulant sur
l'économie, dans la mesure où les agents ne sont pas victimes de
l'illusion fiscale. Ces agents anticipent alors une hausse des impôts
destinée à rembourser l'emprunt en constituant une épargne
d'un montant équivalent à l'endettement public
(Théorème d'équivalence ou de Barro-Ricardo)11.
Ainsi, quelles que soient les modalités de financement des
déficits, les effets à long terme sont équivalents. Cette
proposition générale signifie donc la neutralité de la
dette publique à long terme (multiplicateur fiscal et
8 David RICARDO, Principes de l'économie politique et de
l'impôt, 1817.
9 Cité par Léonce YAPO (2001)
10 Cité par Gervasio SEMEDO (2001)
11 Cité par Gervasio SEMEDO (2001)
budgétaire tendant vers zéro).
Selon Robert Lucas (1972), l'idée sur les anticipations
rationnelles est que les agents sont capables de tirer parti de toute
l'information disponible pour former leurs anticipations, de sorte qu'en
moyenne stochastique, ils ne se trompent pas. Il soutien que les gens peuvent
changer leur comportement quand la politique économique change.
SECTION 2 : CAUSES, CONSÉQUENCES ET MOTIFS
DE L'ENDETTEMENT PUBLIC A- Causes de l'endettement public
La faiblesse de l'épargne nationale et l'importance des
besoins de financement justifient bien souvent le recours au financement
extérieur. Mais la dette apparaît parfois aussi comme la
résultante d'un choix politique délibéré.
L'endettement public peut provenir de causes exogènes ou
endogènes.
1- Les causes exogènes
1-1 La détérioration des termes de
l'échange
Suite au ralentissement économique à la fin des
années 70 dans les pays industrialisés, les revenus des pays en
développement déclinèrent non seulement parce que leur
taux de croissance se ralentit mais aussi parce que les prix de leurs
matières premières exportées diminuèrent par
rapport aux prix de leurs exportations. Ce qui a conduit les pays en
développement à recourir à l'emprunt extérieur pour
combler ce déficit en ressources.
1-2 L'offre abondante de liquidités
internationales
Avec le choc pétrolier de 1973-1974, les énormes
surplus des pays exportateurs de pétrole résultant de la hausse
des prix pétroliers devaient être «recyclés» pour
financer les déficits courants du reste du monde. Les pays
pétroliers plaçaient leurs fonds dans les pays
développés et les banques commerciales de ceux-ci trouvaient
profitables de les prêter à leur tour aux pays en
développement. Le recours aux crédits accordés par les
banques commerciales présentent deux avantages :
Premièrement : les crédits
accordés par les banques commerciales ne lient pas le transfert des
capitaux à la mise en place de politiques d'ajustement structurel.
Deuxièmement : la liberté
d'affectation des fonds reçus. 1-3 Les conditions d'emprunt
très favorables
Les conditions étaient telles que même si on
ajoute une prime d'emprunt, les pays en développement étaient
confrontés à des taux d'intérêt historiquement bas
pour les emprunts extérieurs : cela les encouragea à emprunter
à l'étranger.
2 - Les causes endogènes
Les déficits courants des pays en développement
non pétroliers augmentèrent rapidement entre 1974 et 1978. Ces
pays adoptèrent et poursuivirent des politiques expansionnistes : elles
y encouragèrent les projets d'investissements ambitieux et y maintinrent
des taux de croissance élevés. Ils développèrent
ces mesures par des déficits considérables et persistants : ils
empruntèrent fortement à l'étranger pour maintenir leurs
dépenses au
dessus de leurs revenus. Parmi les causes internes du recours
à l'endettement extérieur, après la corruption, il y a
:
2-1 Les modèles de
développement
Le choix d'un modèle de croissance tirée par
l'extérieur pouvait conduire à un endettement croissant car
celui-ci constituait l'une des conditions de sa fiabilité.
2-2 Déficit des balances des paiements
Le déficit permanent des balances des paiements des PVD
a été financé en partie par l'endettement
extérieur. Avec le temps, les intérêts payés par ces
pays deviennent la cause essentielle des déficits structurels de leurs
comptes courants. Ces pays sont alors entrés dans un cercle vicieux, en
ce sens que l'endettement extérieur accroît le déficit du
compte courant et partant la balance des paiements, alors que le déficit
du compte courant demande davantage d'endettement extérieur.
2-3 Les investissements improductifs
Les emprunts ont servi à la construction
d'infrastructures (routes, barrages etc.) dont la vocation n'est pas
forcément de générer des ressources ; il y a aussi les
éléphants blancs tels que la raffinerie, la sidérurgie
etc. Les emprunts ont été parfois mobilisés non en
fonction des exigences du développement national mais en fonction des
besoins du pays prêteur. L'aide a ainsi servi à créer un
débouché pour des produits du pays prêteur ou un
marché pour ses entreprises (aide liée).
B- Les conséquences, motifs et efficacité
de l'endettement public 1- Conséquences de l'endettement
public
1-1 Conséquences économiques
1-1-1 Problèmes de finances publiques
Une dette importante s'accompagne généralement de
coûts de financement plus élevés, qui se traduisent
à leur tour par un service de la dette plus élevé.
Nonobstant les risques entourant les conditions
économiques futures, l'importance du service de la dette limite la marge
de manoeuvre du gouvernement. Il accapare une part importante des recettes
budgétaires et limite ainsi le gouvernement dans ses choix de
dépenses.
1-1-2 Problèmes
macroéconomiques
Dans une petite économie ouverte les déficits
publics et le service de la dette réduisent l'épargne publique,
ce qui nécessite un recours accru à l'épargne
étrangère ou aux investissements directs étrangers. Il en
résulte une réduction de l'excédent commercial ou,
symétriquement, une augmentation du déficit commercial. C'est
pourquoi les économistes font souvent référence aux
déficits public et commercial comme étant des «
déficits jumeaux ». Les effets réels de la dette publique
sont toutefois moins importants dans une petite économie ouverte que
dans une grande économie ouverte ou dans une économie
fermée, où la réduction de l'épargne publique
entraîne une hausse du taux d'intérêt réel et une
réduction des investissements privés (effet d'éviction),
qui affecte à son tour la
croissance du stock de capital et, à terme, la production
potentielle.
D'après l'équivalence ricardienne, l'endettement
public s'accompagne d'une hausse de l'épargne privée qui compense
la réduction de l'épargne publique, les ménages anticipant
les hausses d'impôt futures et épargnant en conséquence.
Tant l'équivalence ricardienne que la parité des taux
d'intérêt en petite économie ouverte viennent limiter
l'ampleur des impacts macroéconomiques réels de la dette
publique.
1-1-3 Problèmes d'efficacité
économique
Une dette publique élevée a pour
conséquence un fardeau fiscal élevé. Ce fardeau fiscal
élevé agit comme un frein et provoque le ralentissement de
l'activité économique. Un autre effet est l'affaiblissement
potentiel du rendement de l'assiette fiscale pour le gouvernement
(évitement, évasion fiscale) et l'incertitude quant aux
conditions fiscales futures et à l'étendue des services publics
qui seront disponibles dans l'avenir. Cette incertitude peut affecter
négativement la capacité de rétention et d'attraction de
la main d'oeuvre et des capitaux.
1-1-4 Problèmes d'équité
intergénérationelle
Lorsqu'il est utilisé de façon
appropriée, l'endettement public comme mode de financement pour les
investissements publics est un facteur d'équité. Il peut
toutefois devenir un facteur d'iniquité lorsqu'il sert à reporter
le fardeau de dépenses courantes sur les générations
futures de contribuables12. L'endettement public a aussi des impacts
distributifs potentiellement importants non seulement entre les
générations mais également entre les membres d'une
même génération (Osberg, 2004).
1-2 Conséquences sociales et
politiques
La dette publique et les nombreux problèmes qu'elle
peut entraîner sont susceptibles d'influencer le paysage politique. Par
exemple, un problème qui peut se poser est l'écart entre les
taxes payées par les individus et les services qu'ils reçoivent
en retour. Lorsqu'il y a équilibre budgétaire, le service de la
dette introduit un écart entre les taxes payées et les services
publics reçus par les contribuables. Cet écart alimente, dans la
population, l'impression que les contribuables « n'en ont pas pour leur
argent »13. Par conséquent, la rentabilité de
l'assiette fiscale peut s'en trouver affectée, de même que le
soutien dont bénéficient les programmes gouvernementaux.
2- Motifs de l'endettement
2-1 Les motifs de l'endettement
Des emprunts contractés pour financer des
investissements non profitables ou l'importation des biens de consommation,
peuvent conduire à des dettes que les emprunteurs ne pourront rembourser
(KRUGMAN, 1996). Plusieurs motifs peuvent justifier l'endettement.
2-1-1 Les motifs de l'emprunt
extérieur
Dans la littérature, l'endettement est lié à
un déséquilibre. Trois motifs probables peuvent amener un pays
à s'endetter :
12 Rapport Bourbogne 2005RB-06 Septembre 2005 publié par
la CIRANO, p. 20.
13 Idem
- pour financer un haut niveau d'investissement : un pays
renfermant un potentiel d'investissement productif et qui n'a pas un niveau
très suffisant d'épargne intérieure pour financer cet
investissement peut s'endetter ;
- pour lisser les fluctuations de la consommation en cas de
baisse de revenu : théoriquement un déficit du compte courant
peut résulter des chocs exogènes négatifs tels qu'une
dégradation des termes de l'échange, une récession ou une
catastrophe naturelle. Ces chocs exogènes donnent lieu à une
baisse du revenu. Ainsi, pour remédier à ces problèmes, un
pays peut contracter une dette extérieure pour maintenir le niveau
d'absorption ;
- se soustraire à un ajustement face aux
déséquilibres intérieurs ou extérieurs : le
déficit du compte courant insoutenable doit faire l'objet d'un
ajustement par des changements des politiques économiques.
2-1-2 Les motifs de l'emprunt
intérieur
L'emprunt intérieur répond à trois motifs
essentiels :
- le financement du déficit budgétaire, les
dépenses publiques de l'Etat étant supérieures aux
recettes publiques ;
- la mise en oeuvre de la politique monétaire
(opérations sur le marché libre : ventes ou achats de bons pour
absorber ou réinjecter des liquidités) ;
- le développement du marché financier qui
nécessite qu'une offre et une gamme constantes d'instruments financiers
soient échangées.
3- Efficacité de la dette
extérieure
Contrairement aux idées développées
supra, certains économistes s'interrogent plutôt sur la
capacité du financement extérieur à développer un
pays (puisque si un pays s'endette, c'est nécessairement pour
concrétiser ses projets de développement).
Particulièrement pour les radicaux, le financement
extérieur ne peut être qu'appauvrissant pour l'économie
réceptrice puisqu'il n'est rien d'autre qu'une manifestation nouvelle de
l'impérialisme au stade suprême du capitalisme en
développement dans un état de perpétuel asservissement.
Pour les libéraux, le financement extérieur est
la manifestation de l'esprit de solidarité des pays dits
développés qui mettent généreusement à la
disposition des pays en développement des capitaux pouvant leur
permettre de combler à la fois leur déficit d'épargne et
de développement, et de les hisser ainsi sur la voie royale de la
croissance économique et du développement.
CHAPITRE II : ANALYSE DESCRIPTIVE DU NIVEAU DE
L'ENDETTEMENT PUBLIC AU TOGO
SECTION 1 : STRUCTURE DE LA DETTE ET ETUDE
DESCRIPTIVE DE LA DETTE EXTERIEURE DU TOGO
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