CONCLUSION
Le sound design musical est donc une notion complexe nourrie
de domaines trés variés allant de la psychoacoustique à
l'architecture, en passant par la musicologie et l'étude du comportement
humain.
Nous avons également vu qu'à partir de sa
définition pure et simple, le sound design musical engendrait bien
d'autres explications, faits, arguments que le «sound design»
conventionnel. Aussi, j'espére avoir réussit à faire
comprendre quels étaient les enjeux d'une telle préoccupation, et
à fiorci dans les lieux haut de gamme. L'objet de ce mémoire est
donc bien d'ouvrir les personnes plus ou directement concernées,
à prendre cette particularité essentielle qu'est la musique. Trop
souvent encore aujourd'hui, j'entend dire à propos de la musique dans ce
genre d'endroit que «ce n'est pas l'urgence», ou que «on le fait
nous-même»É et ce dans des endroits parfois prestigieux - je
pense notamment à un certain restaurant de la place du carrousel du
Louvre - je ne crois vraiment pas que ce soit l'attitude à avoir
vis-à-vis de ce que représente la musique, et de son pouvoir sur
les âmes.
Une contradiction majeure régne dans l'univers de la
programmation musicale des lieux haut de gamme, dans le sens ou les
responsables de ces endroits savent pertinemment que la musique est un
élément capital pour leur établissement, mais ils sont si
désarmés dans la concrétisation de leurs idées
qu'ils font ca à la «va-vite». Le fait est que les relations
jouent beaucoup de ce genre d'endroit, donc trés souvent, la personne
qui «s'occupe» de la musique est plus ou moins une connaissance d'un
des dirigeants. En effet, comment faire confiance pour une telle tâche
à une personne que l'on ne conna»t pas ? Ils se disent
peut-être que c'est trop risqué, quà l'heure actuelle tout
le monde s'improvise «DJ» ou «sélecteur musical»,
dans un contexte phonographique oü l'on trouve tout et n'importe quoi en
rien de temps. Je pense que leur peur est justifiée.
De nos jour, il faut revenir à une
réalité de la musique. Une réalité des personnes.
Une réalité de l'esprit musical. Arrêtons de laisser faire
des imposteurs qui négligent la matiére première qui leur
permet de gagner parfois beaucoup d'argent. Comme tout commerce, la musique
doit être un marché de l'honnêteté, surtout lorsque
l'on a le pouvoir de jouer avec les sentiments des gens à qui l'on
s'adresse.
L'étude de la musicologie et de la sociologie nous aura
au moins définit et apprit le rTMle que «joue» la musique dans
notre société moderne. Tout le monde a saisit l'enjeu qu'il y
avait derrière chaque titre sélectionné, chaque
orientation musicale. Chacun de ces choix conditionne un univers sonore que
l'on peut appliquer avec un peu d'expérience et de talent - aussi humble
qu'il soit - à un lieu, un environnement, un espace.
Dans tout ca, la psychoacoustique n'était qu'un
élément de compréhension à l'échelle
microscopique afin d'éclairer un peu comment est-ce que l'on percoit
toutes les information liées au son et plus particulièrement,
à la musique. On se rend alors compte là aussi que la
faculté de nos oreilles combinée au vécu musical et
expérientiel de chaque individu est infini. Cela prouve donc que les
recherches en la matière sont en développement constant et
surtout que l'on veut savoir ce qui nous rend aussi sensibles à
la musique.
«La raison pour laquelle on attache tant
d'importance à la musique, surtout quand le monde qui nous entoure
para»t si fermé et les utopies perdues, c'est parce qu'elle est
«intérieurement si utopique et ainsi dépasse tout ce qui est
au-delà de ce qu'on peut fonder empiriquement» ; « le son nous
accompagne et finit, en fin de parcours, par se retirer allégoriquement
dans la patrie, lointaine ou défendue»50
Les quelques pages à propos de ma confrontation direct
avec différents auditeurs, renforcent cette valorisation de la musique.
Ces expériences concrètes montrent à quel point une
sélection musicale cohérente peut crééer une
réelle atmosphère, suceptible de toucher les gens.
La partie «sur le terrain» nous a fourni
quantité d'informations nourrissant une réflexion et des
interrogations à propos de ce qui se fait aujourd'hui Ð et aussi ce
qui, à mon sens, ne devrait plus se faire ! Ð Mes visites candides
suivies de mes rencontres m'ont énormément éclairci sur le
milieu et le métier. J'ai pu ainsi me convaincre de certaines pratiques
dérisoires qui pouvaient se justifier par un manque de coordination et
de communication entre les différents corps de métiers
réunis autour d'un projet commun. J'ai alors conscience de l'importance
du travail à valider en amont avec chacune des personnes pour qu'un
projet aille là ou veut qu'il aille et de ne surtout pas le laisser
dériver par certains qui ne prendraient pas en compte l'importance du
choix des matériaux dans l'élaboration d'une acoustique, ou bien
qui ne poseraient pas la question du choix du sonorisateur. Ce genre
d'éléments sont pourtant déterminants dans la facon dont
j'aborde la musique pour un lieu.
Le dernier chapitre propose un «outil» de sound
design musical. Sur la base d'une conjuguaison de talents et d'univers,
Plat du Jour est un atelier de création sensoriel
disposé à travailler la musique avec des marques, des lieux, des
personnes. J'en ai profité pour décrire ma «valeur
ajoutée» personnelle au sein de ce pTMle. Ma pensée globale
rejoint celle des autres artistes réunis autour de Plat du
Jour, mais il est aussi important que je me démarque par mon
approche plus esthétique, théorique et technique du son.
Ainsi, à l'issue d'un tel projet de rédaction,
j'ai désormais une idée trés précise de ce que je
veux faire pour le sound design musical des lieux haut de gamme. Je souhaite
moins participer en «fin de parcours» juste pour sélectionner
des morceaux, mais plus pour concevoir tout ce qui se rapporte à la
musique de maniére globale dans un espace, de A à Z. Je
travaillerai en amont avec les architectes et designers afin de cerner, des le
dessin, l'univers musical à retranscrire. Je rencontrerai alors un
acousticien avec qui je concevrai la sonorité propre du lieu. Enfin,
j'étudierai le meilleur compromis en terme de sonorisation pour parrer
au mieux, le lieu d'un systéme de diffusion sonore digne de ce nom. A ce
propos, j'ai l'intention utopique de faire sortir du secteur des particuliers,
la société Divatech et leur systéme unique
Biosonic. (cf. annexe)
Nous finirons par une ultime citation de Pascal Quignard à
propos du chant des Sirénes :
«Ce que dit Ulysse après que les
Sirènes ont chanté et après qu'il a hurlé pour
qu'on lui défasse, par pitié, les liens qui le retiennent au m%ot
d'emplanture, afin qu'il puisse rejoindre sur-le-champ la musique bouleversante
qui le fascine : - Autar emon kèr èthel akouemenai. Ulysse n'a
jamais dit que le chant des sirènes était beau. Ulysse - qui est
le seul humain qui ait entendu le chant qui fait mourir sans l'avoir fait
mourir - dit, pour caractériser le chant des Sirènes, que ce
chant «remplit le coeur du désir
d'écouter.»51
|