Quatrième Partie :
Les fondements socio-culturels
liés à la confrontation entre les villageois et le CNPN/WCS
Chapitre 7 : Les limites de
la politique du Parc National
des Monts de Cristal
1. Les causes
1.1 Marginalisation des villageois
Depuis la création du Parc en août
2002, il n'a jamais été demandé l'avis de la population
fang par rapport au projet de conservation. Les quelques fois qu'elle a
été consultée, ses doléances ne se sont jamais
prises en compte. Elle fait face aux fosses promesse. Les gestionnaires l'ont
promise qu'ils irons revoir les limites du Parc, jusqu' à ce jour aucune
activité n'a été faite. Les Fang sont marginalisés
dans ce projet de conservation. Leur consultation s'est limitée
uniquement à la confiscation de leurs campements, forêts
sacrées. Les gestionnaires estiment qu'ils ne connaissent rien de la
conservation de la nature. Cependant, ils oublient effectivement que cette
population a assuré pendant des décennies la conservation et la
protection de la faune et flore du massif forestier des Monts de Cristal.
Depuis la mise en place du Parc, aucune activité
relative au développement durable n'existe dans la région. On est
même tenté de dire que le projet d'éducation à
l'environnement mis en place au Gabon, et particulièrement dans les
Monts de Cristal ne s'inscrit pas dans le contexte d'aide régional,
mais international, d'autant plus qu'il n'émane pas d'une demande locale
et ne suscite pas l'adhésion de la population.
Aucun changement social et économique ne s'est produit
dans la zone des Monts de Cristal, si l'on s'en tient à la logique du
développement durable. La vie des villageois n'a connu aucun changement
depuis la mise en place du Parc. D'aucun disent que « le Parc est
encore dans sa phase initiative ». Ils ajoutent
que : « le tourisme communautaire visé n'est
pas mise en place pour des raisons de Fond ». Les villageois
subissent seulement des législations. Situation qui met le projet dans
une phase difficile.
Entretien 25 : BRYAN Curram,
Américain, 49 ans, Ex-Directeur des Projets WCS-Gabon.
Le rendez-vous de cet entretien a été pris le
mardi 11 avril 2006. L'entretien a eu lieu au WCS le 14 avril 2006 à 15h
après que la secrétaire nous ait introduite. Il a eu lieu dans
une ambiance détendue empreint de compréhension mutuelle.
L'entretien a démarré à 15h50mn. Il a souhaité
prolonger l'entretien du fait de la pertinence de notre sujet. Mais ses
obligations professionnelles ne le lui ont pas permis.
« Nous ne pouvons pas encore parler d'un apport
économique dans le Parc des Monts de Cristal, mais des services
écologiques car cette forêt est un fournisseur d'eau et
d'électricité. Il n'y a pas d'investissement au niveau de ce
Parc, aucun développement touristique comme c'est le cas dans la
lopé, loango. Ceci est dû au fait que le Parc n'existe que depuis
quatre ans. Le tourisme est difficile à développer dans ce site
parce que les touristes sont fascinés par les animaux. Ceux des Monts de
Cristal sont difficile à voir».
Si l'on s'en tient à ce récit, on peut prendre
le risque de dire que le Parc des Monts de Cristal n'est pas encore rentable
sur le plan National, International, encore moins local. Cette situation est
due au ralentissement des travaux. « Le Parc manque de
bailleurs de Fond », disaient t-il.
Si l'on se réfère au rôle de ce massif
forestier, en tant que réservoir d'eau et source
d'électricité, qui alimente Libreville et ses environs, est ce
que l'on ne peut pas parler de rentabilité économique ?
Cette forêt de par son rôle écologique, est rentable sur le
plan national et international, sauf sur le plan local. Malgré leur
proximité, certains villages proches du « puits d'eau et
d'électricité manquent toujours d'eau potable et
d'électricité. Les populations s'alimentent en eau de source et
se servent de lampes tempête ou des groupes électrogènes.
Elles conçoivent cela d'inégal. L'Etat doit tenir compte du
« principe 2 » (2003, 304) des principes et lignes mis en
place par l'UICN. D'après ce principe :
« Les Etats doivent améliorer les
qualités de vie des populations, ces derniers doivent
bénéficier directement et équitablement de la conservation
et de l`utilisation durable des ressources naturelles que leurs espaces
terrestres, côtiers ou marins et d'eau douce
contiennent »
Depuis la mise en place du Parc jusqu'à nos jours, les
populations vivent toujours dans la pauvreté, des conditions
précaires. Les villes de Medouneu et Cocobeach n'ont connu aucune
amélioration, elles manquent d'infrastructure d'accueil et
connaissent des problèmes à plusieurs niveaux.
Entretien 26 : NKOGHE NIZELE Julien Alexis,
48 ans, Marié, Père de six enfants, ethnie fang, village
Andok-Foula, département Como-Kango, clan Opoè, sur les
rapports des villageois avec les gestionnaires. Notre entretien s'est
passé dans la journée du 4 avril 2007 dans le village du
pré-cité. Il avait eu lieu sous sa véranda, en
présence de sa nombreuse famille à savoir son épouse, ses
enfants, ses frères et ses soeurs. L'enquête a
démarré à 13h33mn et elle a duré 30mn. Nous avons
commencé par les rituels de politesse, nous présenter et
décrire les objectifs de notre étude.
Texte en fang
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Traduction française
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1 Édzame WCS ye CNPN angâ
dzo bia engueng angua dzou bi yén ése ke été akal
na'a bi tâ na'a Parc abele émame me ne abi edeng émame mene
vê. Bingua bwuine na'a Parc aka'a sô, éning dza'a éke
folane, bia ye deng bisè ane mbot abelane afan angua dzô bia, bi
ave bia via yen na'a bia bia dzimle. Bia yeng dia, bia deng ke dzo, kegue yen
dzame da folane. Bi tâna'a dzam dembobanedia.
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1 Contrairement à ce que nous disait la WC S et le
CNPN lors des campagnes de sensibilisation, on constate que le Parc a plus
d'inconvénients que d'avantages. Nous croyions qu'avec l'arrivée
de ce dernier, comme le disaient les gestionnaires, nos vies allaient changer,
nos enfants et nous mêmes allons trouver du travail, on se rend bien
compte que nous sommes des véritables perdants. On ne voit et on ne
gagne rien, pas de développement. on subit seulement les lois et nous
avons l'impression qu'il n'y aura aucune activité, ni de changement.
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2 Engueng bot ba bebia, bia belane bô ve bot
beté ba yiane ked dô. Ba bô na bia yébwan ba'a bi
dzime ning. Mengueng medzeng, ba lik bia bigong engueng ba lot akal na'a bevele
lore lelu menda ma'a. dzame été éke beme ye ke tcui
odén?
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2 Lorsque ces gens viennent ici, on les reçoit bien
parce que nous sommes sociables, mais en réalité, ils ne le
méritent pas. Ils nous font trop souffrir. On a nos enfants qui
souffrent ici. Parfois, ils nous laissent des boites de conserve lorsqu'ils
sont de passage et ils le font c'est parce qu'on les loge. Cette situation va
durer jusqu'à quand?
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Ce récit témoigne la
souffrance qu'endurent les populations riveraines au Parc National des Monts de
Cristal. En effet, ces populations sont très marginalisées dans
les projets de conservation. L'Etat ne tient pas compte d'elles. Contrairement
à ce que l'on pense de la politique des Parcs, celle mise en place aux
Monts de Cristal n'est pas rentable et les villageois sont impatients de voir
cette illusion se concrétiser. L'Etat se contente à juste titre
de son profit et non l'inverse. Notons également que certains craignent
que cela ne soit une perspective sans suite. Il incombe alors à l'Etat
Gabonais de revoir cette politique de conservation, afin de répondre aux
exigences des villageois. La politique de conservation instituée par
l'UICN applique la théorie du « don et du contre
don » de Marcel Mauss. Les villageois espèrent recevoir
les retombées du Parc.
Les Problèmes connus dans la ville de
Medouneu :
- Manque de structures hôtelières de
qualité pouvant répondre aux attentes des clients ;
notamment la propriété des bâtiments dûe au
manque d'eau (elle dispose néanmoins d'un seul motel, cependant, il ne
répond pas aux exigences des clients) ;
- Manque de pharmacie (Les populations se procurent des
médicaments auprès des soeurs de l'église catholique
à des prix pas très abordables) ;
- Manque d'eau potable malgré les nombreux
réservoirs d'eau de la SEEG ;
- Manque d'enseignants Gabonais dans le CES et dans
certaines écoles primaires des villages riverains au Parc (les enfants
font des semaines entières sans se rendre au cours) ;
- Manque de micro-projet pouvant permettre aux populations
d'améliorer leurs conditions de vie ;
- Manque de structures touristiques communautaires
envisagées dans les projets de conservation ;
- Manque de guides touristiques ;
- Manque de structures pour les gestionnaires du Parc et
autres acteurs de la conservation ;
- Manque d'écoles primaires dans certains
villages ;
- Chômage accentué.
- Manque de dispensaires dans certains villages ;
Photo 10 : La prise de l'eau dans la ville de
Medouneu
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Source :
source : Cliché Aimée Prisca Mekemeza
Engo
Sur cette photographie, nous voyons une femme et ses deux fils
qui reviennent d'une source d'eau avec les récipients sur la tête.
A côté, nous avons des plantes. Cette image prouve effectivement
que la ville de Medouneu et ses environs connaîssent des problèmes
notamment en eau potable. Malgré la présence du Parc, ces
régions vivent toujours dans la précarité.
Les problèmes connus dans la ville de .Kango :
- Manque d'infrastructures ;
- Manque de médias (Radio, Télévision,
il faut nécessairement avoir une parabolique);
- Manque de moyen de transport ;
- Manque de médecin ;
- Manque de pharmacie, on compte seulement un
dépôt.
- Eaux et Forêt ;
- Manque de micro-projet ;
- Manque d'eau potable dans les villages proches du puits
d'eau, seulement en ville ;
- Manque d'écoles primaires dans certains
villages ;
- Manque de guide pour le tourisme communautaire ;
- Route non praticable (Kougouleu-Song) ;
- Manque de structures touristiques communautaires
envisagées dans le projet de conservation ;
- Manque d'écoles primaires dans certains villages.
- Chômage accentué.
- Manque de dispensaire dans certains villages
Photo 11: Une voiture de la
WCS et deux « routiers » dans un bourbier sur le
tronçon Kougouleu-Song
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Source : WCS, 2006
Cette photo présente au premier plan une voiture de la
WCS et plus loin, deux voitures qui font le transport routier. Sur le
côté gauche de la photo, nous avons de tronc d'arbres et des deux
côtés de la forêt, nous avons un paysage. La photo illustre
l'état de la route. La région de Kougouleu jusqu'à Song
manque de route praticable. Les populations ont du mal à se
déplacer surtout en saison de pluies d`autant plus que les voitures se
font rare. Les populations ne peuvent non plus faire l'activité
commerciale. Elles sont obligées de vendre dans leurs villages
respectifs.
A travers ces problèmes, on peut dire qu'il n'existe
encore aucune trace relative au Parc. Le Parc n'a pas encore de réelles
retombées auxquelles s'attendent les populations. Le souhait de ces
dernières, c'est de voir un développement durable effectif
prendre essor dans les zones périphériques.
Entretien 27 : ANDEME OBAME Georgette, 50
ans, ethnie fang, clan Yégun, Mariée, village
Mbé-Akélayong, département Haut-Komo, sur La
conception du Parc. Nous avons passé notre entretien le 9 avril
2007. Ce dernier a eu lieu dans sa cuisine. Il a commencé à
8h24mn et s'était achevé à 8h50mn.
Texte en fang
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Traduction française
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abale émame be tare benga lik biè.
ébo'o bâ bene yéne abime betsit ye bilé bia ning be.
éne fe vena'a bi somane édzom be tare bân lik bia. be yeng
bene sô oyap ne ba zu yén mbeba be mame ma'a. ve bia kum na'a
édjuè ésimane na'a ékom bia si ye ve bia
bisen.biâ vine dzam parc, bia gneguegnegue akal Parc
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Nous ne sommes pas contre le Parc, au contraire nous
apprécions énormément. A travers le Parc, nous pouvons
conserver notre patrimoine naturel. Nos enfants pourront voir certains animaux,
plantes que nous utilisons maintenant. Nous pourrons valoriser notre patrimoine
culturel. A travers le tourisme, de nombreuses personnes pourront venir
découvrir nos merveilles. Cependant, nous souhaiterons que l'Etat
gabonais pense à nous, développe notre région et diminue
le taux de chômage.
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A travers ce récit, on peut noter que la politique du
Parc est bien appréciée des populations. Les populations pensent
que le Parc est une bonne chose et il a la raison d'y être. Ils croient
que si les choses se mettent bien en place, cela pourra également
être à leur avantage. Pour ces derniers, ils pourront trouver du
travail et diminuer le taux de chômage. A travers le tourisme, ils
pourront développer des micros projets dans lesquels elles vont
valoriser leur savoirs-faire. En dehors de cet aspect, elles souhaitent que
dans le futur, l'Etat trouve un terrain d'entente et qu'il leur prête
beaucoup d'attention.
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