Claire GAILLARDOU
Université Michel de Montaigne, Bordeaux III
DYNAMIQUES PERIURBAINES ET EVOLUTION
DES MOBILITES
MEDAVAKKAM : REGARD SUR LES MUTATIONS D'UNE
BANLIEUE INDIENNE AU TRAVERS DU DEVELOPPEMENT DE SES TRANSPORTS
Rapport de stage de recherche de Master 1 de
géographie, mention territoire, société et culture,
sous la direction de Kamala Marius-Gnanou
Année 2005-2006
REMERCIEMENTS
Je tiens tout d'abord à remercier l'Institut
Français de Pondichéry, son directeur Jean- Pierre Muller et
Laurent Pordié, directeur du département des sciences sociales,
pour leur accueil et leur confiance.
Je remercie également la Chennai Development Authority,
la Metropolitan Transport Corporation et le Pollution Board de Chennai pour
m'avoir reçu et avoir répondu à mes questions.
Il me faut saluer également la patience et l'attention
avec laquelle j 'ai été reçu dans les locaux de la South
Indian Surface Transport Employees Union à Chennai, et Monsieur Rajaram,
responsable du secteur des transports.
Je remercie aussi l'Association des Jeunes Etudes Indiennes et
tous ses membres pour leurs judicieux conseils dans l'élaboration de mon
travail de recherche.
Aucune de mes enquêtes n'aurait pu être
réalisée sans l'aide de mes traducteurs : Sri Lakshmi Devi,
Parvati et Parth Prakash et surtout Stephen Natyataya qui m'ont
été d'une aide inestimable.
Enfin je tiens à remercier le professeur Singaravelou
pour m'avoir donné la curiosité de l'Inde et pour ses conseils,
et Kamala Marius-Gnagnou, mon directeur de recherche pour m'avoir permis de
découvrir ce pays.
TABLE DES MATIERES
Première partie : Infrastructures et
superstructure de l'espace des transports à Chennai : le contexte
géographique et idéologique de l'étude
I-L'infrastructure urbaine et périurbaine
I-1 Chennai, une métropole en croissance
-Localisation géographique
-Bilan sur la croissance urbaine
-Evolution économique et sociale de la
ville
I-2 Communications nationales et transnationales de la ville
I-3 Chennai, une illustration de la problématique des
transports en Inde
II-Enjeux et perspectives de la vision des transports
sur la
gouvernance métropolitaine
II-1 Place de la ville au sein du réseau de communication
; des avantages structuraux mais des contraintes spatiales importantes
-Les infrastructures routières de la CMA -Les
infrastructures routières de la CMC
II-1 Les organismes liés aux transports à
Chennai
II-3 Les grand Projets de développement des transports
-Koyambedu Bus Stand Le terminus d'autobus de Chennai Mofussil -Le
National Highway Development Project
-L'IT Corridor
-Le Mass Rapid Transit System
Deuxième partie : Caractéristiques
du village périurbain de Medavakkam et étude des
stratégies locales de transport
I-Présentation de l'aire
d'étude
I-1 Localisation géographique
I-2 Facteurs de développement périurbains
I-3 Mutations socio-économiques introduites par la
périurbanisation
- La croissance démographique -Mutation
socio-économiques
II- Caractéristiques de l'espace social
à travers l'étude des
stratégies locales de transport
I-1 Une approche empirique ; observation et questionnaire
d'enquête sur
les mobilités villageoises
-Méthodologie de l'enquête de terrain
-Questionnaire d'enquête
II-2 Les résultats de l'enquête : des besoins et
une accessibilité à la
mobilité différenciés
-y'a-t-il une égalité de mobilité
selon le sexe ?
-Les raisons des déplacements
-L'activité comme moteur de
mobilité
-Les lieux fréquentés
-Les autres déterminants de la
mobilité
II-3 Catégorisation des besoins et choix des usagers ;
établissement de
sujet types et conclusion de l'enquête
-L'établissement de sujets-types
-Conclusions de l'enquête
Troisième partie : Dynamique de la
recomposition du territoire par les mutations privées et
publiques
I- La diversité de l'offre des transports
I-1 Estimation et observation du trafic entre Medavakkam et
la ville
métropolitaine
-Méthodologie et intérêt de
l'observation :
-Analyse caractéristique des différents
moyens de transports et signification idéologique :
-Estimation du trafic des transports de masse entre
Medavakkam et Chennai
II Gouvernance publique, victoires et
défaillances
II-1 Le système de transport vu par ses usagers
II-2 L'avis des employés de la compagnie de bus publics
-Description et organisation de la profession
-Des problèmes liés à la profession
révélateurs de la faiblesse des bus publics
III-Le marché des transporteurs
privés
III-1 Un fonctionnement basé sur des libertés
spatio-temporelles accrues III-2 Rapport d'une efficacité à court
terme...
-La multiplication des véhicules de transport
privés
-Le développement des métiers liés
à la manutention des véhicules de transport
privés
-Etude de la fréquentation des véhicules et
de la qualité de l'emploi
III-3 L'enlisement à long terme de la profession
-Les problèmes associés à la
profession
-les syndicats de chauffeurs
-Le questionnement de la place future des transports
publics
Résumé de l'étude
Cette étude à pour objectif de comprendre
l'organisation et le fonctionnement des modes de transports de toute sorte dans
un contexte de périurbanisation.
Le village de Medavakkam est aujourd'hui une
périphérie urbaine de Chennai et connaît des mutations
socio-économiques qui influent sur son système de transport.
La polarisation de Chennai entraine plus de mobilités vers
la ville qui sont majoritairement véhiculées par les bus
publics.
Tous les autres déplacements mobilisent des transports
différents, notamment des transports alternatifs privés. Il
existe des faiblesses à la fois dans le secteur des transports publics
et dans celui des transports privés. Mais ils se complètent de
manière assez efficiente sur le terrain au vu des mobilités.
Le cadre d'une dynamique de périurbanisation signifie
des changements rapides dans le temps qui sont à l'image de la
fragilité de l'organisation des transports publics et privés
à Medavakkam.
Mots clefs : Périurbanisation, mobilité,
transports publics, transports privés.
TABLES DES ILLUSTRATIONS
Cartes :
- Carte 1 : Chennai et le Tamil Nadu dans le sous continent
indien
-Carte 2 : Les districts du Tamil Nadu -Carte 3 : Carte des
transports de Chennai
-Carte 4 : Planning d'achèvement du National Highways
Development Project
-Carte 5 : Organisation spatiale du village
-Carte 6 : Fréquence des destinations villageoises hors de
Medavakkam
Tableaux, schémas et graphiques :
-Tableau 1 : Evolution de Chennai et de son aire
métropolitaine entre 1991 et 2001
-Tableau 2 : Evolution de la répartition de l'emploi de
1981 à 1991, entre la CMC et son aire métropolitaine ( en %)
- Tableau 3 : Emissions polluantes par catégories de
véhicules
- Tableau 4 : Augmentation des catégories de
véhicules de 1981 à 2001
- Schémas 5 & 6 : Fonctions des organismes liés
au transport dépendants du Gouvernement Central et du Gouvernement
d'Etat
- Tableau 7 : Répartition de l'emploi à Medavakkam
en 1991 & 2001 par sexe et % - Graphiques 8 & 9 : Motifs des
déplacements réguliers hors de Medavakkam
- Graphique 10 : Part des différentes catégories de
transport de masse
- Graphique 11 : Part des motifs d'utilisation des bus publics
- Graphique 12 : Estimation du service de bus public par les
usagers
- Tableau 13 : Désagréments rencontrés par
les employés des bus publics
Photos :
- Photo 1 : Vue de la rue principale de Medavakkam
-Photo 2 : Parking des deux-roues devant la station de bus de
Koyambedu
- Photo 3 : Un accident entre deux bus de liaison
Pondichéry/Chennai
- Photo 4 : Chennai Mofussil Bus Terminus
- Photo 5 & 6 : Panneaux de promotion du chantier de l'IT
Corridor
- Photo 7 : Une pancarte immobilière, témoin de la
forte croissance des nouvelles résidences - Photo 8 : Un bus de
raccompagnement d'une entreprise de peinture du village
- Photo 9 : Vente de motos à crédit au bord de la
route de Medavakkam
- Photo 10 : L'Ambassador ; voiture symbole de l'Inde
- Photo 11 : Auto rickshaw aux couleurs du Tamil Nadu
- Photo 12 : Un bus d'Etat arrive à la Koyambedu
station
- Photo 13 : Le receveur de bus
- Photo 14 : L'état des bus de ville
- Photo 15 : La station de rickshaw de Medavakkam sur la
Velachery Road
- Photo 16 : Deux maxi-cabs de la compagnie Magi
(Toutes les photographies ont été
réalisées par Claire Gaillardou)
LISTE DES ABREVIATIONS
CDA : Chennai Development Authority1
CITU: Center of Indian Trade Unions
CMA : Chennai Metropolitan Area ; aire métropolitaine de
Chennai CMUDA: Chennai Municipal Urban Development Authority2
CMBT : Chennai Mofussil Bus stand ; terminus d'autobus de
Koyambedu
CMC : Chennai Municipal Corporation ; agglomération de
Chennai
CTM : Chennai Transport Company ; compagnie publique de bus de
ville3 FMI : Fond Monétaire International
MRTS : Mass Rapid Transport System
MTC : Metropolitan Transport Corporation4
NHP : National Highways Project
NTIC : Nouvelles Technologies de l'information et de la
communication OMS : Organisation Mondiale de la santé
ONU : Organisation des Nations Unies
PIB : Produit Intérieur Brut
PNUD : Programme des Nation Unies pour le Développement
SISTEU: South Indian Surface Transport Employees Union
1 Seconde appellation de la CMUDA
2 Autre appellation de la CDA
3 Autres appellation de la MTC
4 Autre appellation de la CTM
INTRODUCTION
La prise en compte des transports et par extension le rapport
à la mobilité qu'ils offrent ou non aux populations d'un pays
sont indispensables dans une réflexion pour le développement.
La mesure du développement, telle qu'elle a pu
être définie par les institutions internationales (Fond
Monétaire International et Banque Mondiale), est basée sur des
indicateurs macroéconomiques de production et de richesse (en tête
desquels le fameux PIB par habitant). Aujourd'hui remise en cause, notamment
par une autre institution internationale (le PNUD), cette manière de
voir est remplacée par une approche plus large, basée sur des
indicateurs de développement humain. Ceux-ci prennent en compte des
aspects plus diversifiés et plus nombreux du développement, tels
que l'alphabétisation, l'espérance de vie, l'accès au
travail, aux services, etc1.
Pour un géographe, la prise en compte de ces marqueurs
passe naturellement par celle de leur spatialité, ce qui rend cruciale
l'étude des mobilités et des transports au sein du
développement d'un espace.
Selon Lévy et Lussault2, les transports
représentent l'ensemble des moyens de la mobilité, l'une des
trois modalités de gestion de la distance (avec la coprésence et
la télécommunication).
En fournissant par le développement des moyens de
transport, des vecteurs de polarisation du pays on contribue de manière
évidente à l'évolution des réseaux marchands,
financiers, sociaux et culturels d'un territoire, on permet par la même
à la fois une meilleure intégration des régions
marginalisées d'un pays, la spatialisation de l'économie, et
ainsi une valorisation rationnelle et géographique permettant la
préservation des particularité géographiques tout en
confortant l'unité.
Ainsi, d'après la Charte du Millénaire
établie par l'ONU3, la planification d'une politique
d'équipement en infrastructures et notamment dans le cadre des voies de
communication et des moyens de locomotion d'un Etat sont d'une importance
majeure à l'avenir des pays en voie de développement.
Si on remonte aux racines étymologiques des termes de
« transport » et de « mobilité » on constate
l'importance de ces problématiques dans l'étude du
développement d'un pays, défini comme l'accroissement des
richesses associé à l'amélioration des conditions de vie
d'une population sur un territoire. En effet, le transport vient du verbe
transporter défini comme une action de déplacement, de
circulation, associé étroitement à la communication, le
transport, les transports permettent de relier les gens, de créer du
lien, des opportunités. La
1 Cf. PNUD
2 Dictionnaire de la géographie et de
l'espace des sociétés, Levy & Lussault
3 Cf.
www.un.org
mobilité est crée elle par l'action de se mouvoir,
bien souvent le transport dès que celui-ci devient dépendant d'un
moyen de locomotion.
Selon le Dictionnaire de la Géographie et de l'Espace
des Sociétés1, la mobilité est un concept
englobant qui ne se limite pas au déplacement physique effectif et
à ses techniques (que l'on appellera le transport), mais embrasse les
idéologies et les technologies du mouvement en cours dans une
société.
Ainsi s'ouvrir à la question des mobilités c'est
s'interroger à la fois sur un ensemble de valeurs sociales liées
aux comportements individuels de choix, d'autorisation ou de valorisation des
transports, autant qu'aux conditions géographiques, économiques
et sociales, ainsi qu'au dispositifs technologiques grâce auxquels il est
possible de se mouvoir.
Les données dont nous disposons sur les transports et les
comportements qui leurs sont relatifs dans les pays en développement
comme l'Inde sont minimes.
Comme nous le rappelle Frédéric
Landy2, l'Inde se caractérise par une urbanisation paradoxale
: très limitée si l'on prend en compte l'ensemble de sa
population (seulement 28% de la population indienne était urbaine en
2001), très développée au contraire si l'on prend en
compte les chiffres absolus, le pays ayant dépassé le milliard
d'habitants en l'an 2000.
La ville apparaît alors comme un élément
fondamental de la civilisation indienne, avec des agglomérations
énormes, trois mégapoles atteignent ou dépassent 10
millions d'habitants, et une tradition urbaine ancienne.
Bien souvent, les paysages qu'offrent un pays en voie de
développement sont ceux de l'implantation des éléments
moteurs du développement : le moteur économique incarné
par les grands complexes industriels, les nouvelles entreprise, les centres
d'échanges de valeurs marchandes, l'implantation des services
d'éducation, de santé, les nouvelles résidences, avant
l'implantation et l'accès pour la population aux services d'alimentation
en eau, d'assainissement, de voierie.
Dans ce contexte, le projet « peri-urban dynamics in
India » mené par le professeur Philippe Cadène, (Paris VII,
UMR SEDET CNRS, Centre d'Etude de l'Inde et de l'Asie de Sud, IFP), et Kamala
Marius-Gnanou (BORDEAUX III, UMR ADES CNRS, IFP), fournit un cadre de recherche
pertinent à notre travail, afin de comprendre les processus de
développement des métropoles et villes indiennes dans le contexte
d'une dynamique de globalisation. Le but de ce projet étant
l'étude de l'extension d'espaces oscillant entre aires urbaines et
rurales dans la frange métropolitaine.
En effet, ce programme de recherche a pour objectif
l'appréhension des espaces périurbains grâce a
l'étude de leurs transformations physiques, morphologiques,
sociodémographiques, culturelles, économiques ou fonctionnelles.
En partenariat avec le département des sciences sociales de l'Institut
Français de Pondichéry, il est un des pendants du programme de
recherche dirigé par Véronique Dupont (IRD, CSH) et
financé par le ministère de la recherche, intitulé ;
Dynamiques périurbaines : population, habitat et environnement dans les
périphéries des grandes métropoles indiennes.
1 Dictionnaire de la géographie et de
l'espace des sociétés, Levy et Lussault
2 L'union indienne, Frédéric
Landy
Ce projet est mené actuellement sur cinq grandes
métropoles indiennes : New Delhi, Mumbai, Kolkata, Hyderabad et Chennai.
Ayant la chance d'être affiliée à l'IFP sous la tutelle de
notre maître de stage Kamala Marius-Gnanou, c'est à Chennai, cadre
de son programme et situé dans le même Etat que Pondichéry
que nous avons contribué au programme peri-urban dynamics.
Un des quatre voies qu'il aborde est celle des
mobilités et du développement dans la frange urbaine de Chennai,
et nous avons choisi particulièrement de mener notre étude sur ce
point, en se concentrant sur l'organisation et l'accès aux transports
dans le village périurbain de Medavakkam.
Nous nous sommes donc penchés, dans un contexte de
périurbanisation, sur les implications géographiques, sociales et
économiques du développement des transports à
Medavakkam.
On considère la notion de périurbanisation comme
le déclin des activités agricoles, l'augmentation des
travailleurs non agricoles, l'arrivée de nouveaux résidents, le
statut administratif, le développement des services publics et
privés , la généralisation des transports individuels et
la plus grande mobilité résidentielle des ménages à
l'époque contemporaine, la nouvelle géographie locale des
implantations d'activités économiques, de production de gestion,
de commerce... intéressés par les prix moins élevés
du sol ou par les aménagement périurbains de circulation et de
zones équipées ; soit que joue l'attirance vers les bassins
d'habitat, soit que l'habitat soit attiré par les localisations
périurbaines où l'on peut garder des liens fonctionnels avec la
ville.
On peut alors soumettre comme hypothèse que les
transformations opérés à Medavakkam depuis quelques
années dans ce contexte de périurbanisation ont apporté de
nouvelles activités économiques, et de nouveaux comportements
spatiaux de migration entre la métropole (Madras) et ses
périphéries, ainsi que l'installation de nouvelles
catégories socio- professionnelles qui introduisent de nouveaux moyens
de locomotion.
De plus, la situation et le réseau de transport ont
joué un rôle dans cette démarcation de Medavakkam, village
de tradition rurale, en nouvelle périphérie de Chennai,
tourné de moins en moins vers le secteur primaire et surtout
idéalement situé, entre Tambaram et Sholinganallur, et sur la IT
Road, parc de développement des nouvelles technologies1.
Il est intéressant de voir aujourd'hui quelles sont les
pratiques de mobilité des habitants de Medavakkam, quels sont dans ce
contexte d'évolution socio-économique les nouveaux comportements
et comment les différents réseaux publics, privés et
informels se partagent l'espace.
Dans une approche de développement humain cette
fois-ci, définie comme une amélioration des conditions de vie, de
sécurité financière, médicale, éducative, ce
sujet a pour intérêt l'étude de l'accès aux
transports pour les plus basses classes, qui ne peuvent
bénéficier d'un transport personnel (automobile, taxi,
deux-roues, auto rickshaws), et ainsi s'intéresser d'avantage à
la question des transports en communs, de leurs coût, leur
efficacité, leur représentation culturelle (par exemple par
rapport aux femmes qui ne bénéficiant pas d'une condition
suffisante ou d'un empowerment2 , ne sont pas capable de se
déplacer seules).
1 L'IT Road sera définie dans notre
première partie
2 Action d'une personne, d'un groupe, d'une
équipe, permettant à ceux qui y participent de développer
leur autonomie et leur responsabilité sur eux-mêmes et sur leur
environnement.
Dans un village qui devenant périphérie active
aujourd'hui, s'organise en réseaux vers Madras et les autres pôles
d'emploi et de formation actuels (Tambaram et Sholinganallur), quel est le
pouvoir de mobilité actuel des plus basses castes ?
Les transports peuvent-ils contribuer au développement
ou sont-ils encore réservés aux seuls actifs, ayant un travail
fixe (ou même un bus affilié à leur entreprise ou leur
université à leur service) ?
Les rapports de mobilité engendrés par le
phénomène de périurbanisation sont-ils applicables
à tous ?
D'autre part, le développement des transports est-il
pourvoyeur d'emplois, et si oui, qui concerne t-il (localisation, niveau social
et culturel) ?
D'un point de vue cette fois plus géographique, qu'en
est-il de l'évolution des aménagements urbanistiques à
Medavakkam ? Les infrastructures routières et les réseaux de
connexion créés par les transports en commun du secteur public
sont-ils à l'épreuve de l'urbanisation en plein essor du village
? Enfin, qu'en est-il de l'accroissement sans frein des deux roues
présent dans les grandes mégalopoles indiennes, se retrouvent-ils
parmi les classes de populations étudiées, qu'en est il des
nouvelles conditions de transport initiées par ce
phénomène (traffic-jam1, pollution ...)
Existe-il des solutions ou projets de développements face à ces
impasses de la croissance ?
Afin de répondre à ces interrogations nous
organiserons notre rapport en trois parties : tout d'abord nous ferons un
état des lieux et un bilan des infrastructures et superstructures de
l'espace des transports à Chennai, puis nous nous intéresserons
plus spécialement aux spécificités du village
périurbain étudié et enfin nous ferons une analyse des
différents moyens de transports présents.
1 Embouteillages
14
Première partie : Infrastructures et
superstructure de l'espace des transports
à Chennai : le contexte géographique
et
idéologique de l'étude
I-L'infrastructure urbaine et périurbaine
I-1 Chennai, une métropole en croissance
-Localisation géographique
Chennai a été rebaptisé Madras en 1997, nous
n'utiliserons ici que cette appellation. Chennai est située sur la cote
est de l'inde face à la Baie du Bengale à une latitude de
13°4 Nord et une longitude de 80°17 Est1.
Ce grand port qui dessert tout le sud-est du pays a
été fondé en 1639 par les anglais de
l' « East India Company » elle compte aujourd'hui
plus de 5 millions d'habitants et fait figure notamment par l'importance de ses
activités portuaires historiques de ville stratégique dans le
développement économique du pays. Elle est devenue un centre
majeur d'industries, de commerce de transports et de communication.
Chennai est la capitale du Tamil Nadu ; Etat le plus
développé d'Inde après le Maharastra et le Kerala. En
effet, avec un produit intérieur brut de plus de 23 milliard de dollars,
son économie est la troisième plus prospère d'Inde.
On y observe un taux d'alphabétisation de 73,47 %, un
rapport homme femme de 986 femmes pour mille hommes, ce qui est
élevé, un taux de fécondité de 19,2 %, et un taux
de mortalité de 7,9 %. De 1991 à 1998 la croissance annuelle du
produit intérieur brut de l'Etat fut de 6,22 %.L'Etat est
précurseur dans l'industrialisation, les NTIC, les universités,
les « enabled services »2.
Le Tamil Nadu se caractérise aussi à
l'échelle nationale par sa forte urbanisation. Selon le Census of
India3, La population urbaine a considérablement
augmenté, composant 32,95 % et 34,20% de la population totale
respectivement en 1981 et 1991, elle représentait 43,86% en 2001, soit
une augmentation de presque 10 points en seulement dix ans. Le nombre de villes
depuis les années quatre-vingt a presque doublé en vingt ans : de
434 villes en 1981, il est passé à 469 en 1991 avant d'arriver
à 832 en 2001, soit une augmentation de 92
1 Cf. Cartes 1 & 2
2 Services aux entreprises comme les services de
télé opération par exemple.
3 Données issues des recensements indiens, le
dernier datant de 2001.
% de leur nombre. En résumé, entre 1991 et 2001, la
croissance urbaine a été forte avec un taux de variation de 44,06
%.
Chennai est exemplaire dans cette croissance urbaine.
Carte 1 : Chennai et le Tamil Nadu dans le
sous-continent Indien
Source :www.nationmaster.com
Carte 2 : Les District du Tamil Nadu
Source :
www.mapsofindia.com
-Bilan sur la croissance urbaine
On considère l'aire métropolitaine de
Chennai comme le rassemblement du centre urbain avec les
communes sur lesquels elle étend son influence.L'aire
métropolitaine de Chennai (CMA-
Chennai Metropolitan Area) couvre 1 177km2
La population y est estimée à plus de 7
millions d'individus en 2001. La CMA est classifiée en quatre
catégories :
-Une « corporation municipale »
avec Chennai City1.
-Huit « municipalités » qui
n'ont pas le même niveau d'infrastructure que le centre urbain
mais qui restent classifiée comme urbaines.
1 Chennai Municipal Corporation = CMC ; alors
que l'aire métropolitaine est appelée CMA
-Vingt-huit « towns panchayats » L'Inde est
une république fédérale divisée en Etats, eux-
mêmes subdivisés en districts qui comptent plusieurs taluks. Un
taluk comprend plusieurs panchayats. Le panchâyat était à
l'origine un conseil de caste, l'instance traditionnelle du village qui
organisait la vie politique. Le conseil élu porte aujourd'hui le
même nom. Il s'agit d'un échelon administratif, comme on parle de
commune en France.
-Enfin, deux cent quatorze « villages panchayats
» dont dix-huit sont considérés comme villes (« census
towns ») par la classification officielle du census.
Tableau 1 : Evolution de Chennai et de son aire
métropolitaine entre 1991 et 2001
Population en 1997
|
Population en 1998
|
Population en 1999
|
Population en 2000
|
Population en 2001
|
"Corporation municipale"
|
Centre de l'agglomération
|
172.00
|
3 795 028
|
4 343 645
|
"Municipalités"
|
Urbain
|
154.43
|
994 110
|
1 290 177
|
"Towns panchayats'
|
Périurbain
|
201.40
|
460 928
|
676 067
|
Census towns"
|
Périurbain
|
61.45
|
166 924
|
269 787
|
"Villages panchayats"
|
Rural en situation périurbaine
|
587.72
|
381 064
|
483 536
|
Total
|
|
1177.00
|
5 800 045
|
7 065 213
|
Source : Chennai Development Authorithy Chennai City
(« corporation municipale ») a donc subi une augmentation de sa
population de 14,46% entre 1991 et 2001. La périphérie (tout le
reste) a quant à elle connu une croissance bien plus importante avec
35,87% de population en plus durant la même période
-Evolution économique et sociale de la
ville
Les appuis économiques
La métropole de Chennai est un important centre de
commerce et d'industries, ainsi qu'un pôle financier et administratif
majeur.
Le graphique suivant nous permet à partir de
l'étude des Census de 1981 et 1991 (le Census 2001 n'est pas assez
précis à ce sujet), de constater les évolutions de ces
différents domaines de manière segmentée.
Tableau 2 : Evolution de la répartition de
l'emploi de 1981 à 1991, entre la CMC et son aire
métropolitaine ( en %)
Classification
|
1981
|
1991
|
CMC
|
CMA
|
CMC
|
CMA
|
Secteur Primaire
|
1.34
|
4.11
|
1.05
|
3.06
|
Industrie
|
30
|
32.19
|
24.20
|
27
|
Construction
|
5.65
|
5.29
|
6.39
|
6.70
|
Transports
|
11.58
|
11.07
|
10.74
|
10.24
|
Commerce
|
25.73
|
23.17
|
25.70
|
22.96
|
Services
|
25.70
|
24.17
|
31.92
|
30.14
|
|
100
|
100
|
100
|
100
|
Secteur primaire= agriculture, élevage, pêche,
Industrie= domestique (artisanat) et non domestique (industrie lourdes).
Source : Census of India, Dpu, Master Plan for CMA.
Il est intéressant pour notre travail de constater la
croissance de plusieurs points de la construction et surtout des services dans
l'aire métropolitaine. A l'inverse, entre 1981 et 1991, le primaire et
l'industrie montrent une notable diminution dans la CMA aussi bien que dans la
ville même.
De métropole rurale Chennai entame donc une réelle
dynamique pour se spécialiser dans de nouveaux secteurs.
I-2 Communications nationales et transnationales de la
ville
Populairement connue en tant que « passage vers l'Inde du
sud », Chennai est bien reliée internationalement et aux autres
régions de l'Inde. Cinq routes nationales principales rayonnent à
l'extérieur vers Kolkata (Calcutta), Bangalore, Trichy, Tiruvallur, et
Pondichéry. Le terminus d'autobus de Chennai Mofussil
(CMBT)1, qui sert de terminus à tous les autobus interurbains
de Chennai, est la plus grande gare routière en Asie du sud.
L'aéroport international de Chennai sert
d'aéroport pour les vols domestiques et internationaux et est le
troisième plus important de l'Inde. La ville est reliée aux
terminaux principaux d'Asie du sud, au Sud-est asiatique, au Moyen-Orient,
à l'Europe et à l'Amérique du Nord à travers plus
de trente porteurs nationaux et internationaux. L'aéroport est
également le deuxième terminus de cargaison marchande le plus
important du pays.
1 Cf. Chapitre sur les projets urbains.
Carte 3 : Carte des transports de
Chennai
Source : CDA
La ville est servie par deux ports principaux : le port de
Chennai qui est un des plus grands ports artificiels et le port d'Ennore. Le
port de Chennai est le second port d'Inde en termes de cargaison automobile et
industrielle. Le port d'Ennore est spécialisé dans les
cargaisons telles que le charbon, le minerai et d'autres produits
non-finis. Un plus petit port à Royapuram est employé par les
bateaux de pêche et les chalutiers locaux.
Le central de Chennai1, construit en 1873 et
transformé en 1900, a été la gare principale de la ville
depuis 1907, succédant à Royapuram. Il y a deux gares
ferroviaires principales, la station centrale de Chennai, qui est la plus
grande gare de la ville avec des trains pour toutes les villes principales
comme Mumbai, Bangalore, Delhi, Hyderabad, Coimbatore, et la gare de Chennai
Egmore, avec des trains pour des destinations à l'intérieur du
Tamil Nadu.
I-3 Chennai, une illustration de la problématique
des transports en Inde
Les problèmes de transport en Inde peuvent être
classés en plusieurs catégories qui sont bien souvent
corrélatives les unes des autres et que nous allons exposer
brièvement ici:
-La croissance urbaine et la nécessité de
multiplier les déplacements dans des villes de plus en plus
étalées :
C'est un problème crucial à Chennai puisque elle
est une des villes indiennes les plus larges, de par sa formation à
partir de plusieurs villages éloignés dont on peut encore
distinguer dans certains lieux les limites. Le Guindy national parc ou l'espace
interstitiel entre les quartiers d'Arumbakkam et de Vadapalani sont des
témoins de l'existence de zones très peu densément
peuplées dans la ville, qui étaient auparavant des terrains vides
d'habitation entre deux villages. Parcourir la ville de long en large demande
donc parfois plus d'une heure de trajet, quand le trafic est clément, et
peut s'avérer sur la route un voyage de plus de deux bonnes heures au
moment des heures de pointe.
-La multiplication des véhicules personnels :
C'est un second facteur de la problématique des
transports en Inde et qui est plus que jamais flagrant à Chennai. En
effet dans ce domaine la mégalopole atteint le record national puisque
d'après une étude sur la forte évolution des
véhicules privés sur une courte période de 1990 à
1995, Chennai atteint un taux de croissance de 60% contre 55% à
Ahmedabad, 50% à
1 Chennai Central Railway Station
Dehli et à Pune et 45% à Bangalore1. Les
véhicules concernés prioritairement sont les deux- roues
motorisés (motos et mobylettes), qui constituent la majorité du
flux routier urbain. Photo 2 : Parking des deux-roues devant la
station de bus de Koyambedu
- Le réseau routier inadéquat :
Ce facteur est lié directement à la
difficulté pour une ville entrainée dans un processus de
développement extrêmement rapide, de structurer les
infrastructures routières de manière globales ainsi que de
parvenir à leur entretien et à leur gestion. Nous reviendrons sur
ce point en ce qui concerne Chennai dans notre second chapitre sur les enjeux
et perspectives de la vision des transports sur la gouvernance
métropolitaine.
-La congestion du trafic :
Même si la situation en ce qui concerne les
embouteillages est en cours d'amélioration à Chennai depuis
quelques années, notamment grâce aux projets d'urbanismes mis en
place2, elle n'en reste pas moins importante et
problématique. Ainsi un usager de la compagnie des bus public peut
perdre jusqu'à trois heures sur un trajet normal, sur une distance
importante à travers la ville. Cette estimation est basée sur les
témoignages de plusieurs usagers, des chauffeurs de la CTM3,
ainsi que sur mon expérience personnelle. La congestion des voies par
une trop forte affluence ne ralentit pas tous les usagers au même
degré. Ce sont les véhicules à fort encombrement pour
lesquels il est plus difficile de manoeuvrer qui en pâtissent le plus,
à
1 D'après les Motor Transport Statistics of
India
2 Cf. chapitre 2, Première partie.
3 Compagnie des transports publics de Chennai.
l'image des bus, camions de transport marchands, camions
citernes ou de construction. A l'inverse, les véhicules légers ;
auto rickshaws, deux-roues, perdent moins de temps car ils ont la
possibilité de louvoyer entre les voiture et les véhicules
fortement encombrants.
- La mixité des usagers sur la voie publique :
Ce problème est typique de la circulation dans les
villes indiennes. En effet on rencontre sur les chaussées tant du centre
urbain, que de la périphérie, une multitude de véhicules
différents, de la charrette à boeuf au water-tanker1,
qui ne se déplacent pas à la même allure. Il est
très dangereux et difficile de se partager une chaussée en
mélangeant véhicules lents et véhicules
motorisés.
-Les impacts du trafic en termes de pollution et
d'énergie :
Le trafic est identifié comme la source majeure de
pollution aérienne, sonore et visuelle. Plus de 50% de la pollution de
l'air est causée par les émissions des véhicules. Le
tableau suivant présente les taux d'émission de monoxyde de
carbone selon les catégories de véhicules.
Tableau 3 : Emissions polluantes par catégories
de véhicules
Catégorie de véhicule
|
kg. D'émissions pour 1000kms
|
dont monoxyde de carbone (en %)
|
Bus
|
38.05
|
12.7
|
Camion
|
38.05
|
12.7
|
Voiture (essence)
|
49.61
|
40.0
|
Voiture (diésel)
|
3.21
|
1.1
|
3 roues
|
35.79
|
25.5
|
2 roues
|
27.29
|
17.0
|
Source: Urban Transports Wanting
Redemption2
Ce tableau permet de constater que ce sont bien
majoritairement les véhicules personnels motorises qui sont le plus
responsables des émissions nocives, les bus de transport public quant
à eux ne sont responsables que de 5% de la pollution totale
causée par les véhicules.
En ce qui concerne la pollution sonore, celle-ci ne devrait
pas dépasser la limite de sécurité de 45 décibels
fixée par l'Organisation Mondiale de la Santé. Or un bus standard
indien a un niveau sonore de 90 décibels.
La pollution visuelle est aujourd'hui un facteur qui reste
bien subjectif, cependant nous avons décidé de relever sur les
projets officiels d'urbanisme de la ville, ce facteur qui
1 Camion citerne d'approvisionnement en eau
2 Chapitre issu de l'ouvrage « Urban Planning
and Development: Issues and imperatives », Singh Shamser, 1992.
importune certains dirigeants : « For visual
pollution the congested, mixed and indisciplined traffic is main responsable
factor. Present buses, too, look ugly. »K.Jeganathan,
secrétaire de la CMDA1.
En termes d'énergie un calcul simple permet d'associer la
hausse des véhicules motorisés ainsi que le poids des
encombrements avec une dépense accrue en carburant.
Il faut également signaler que Chennai est en termes de
pollution de l'air, la ville la plus polluée d'Inde d'après les
données du Central Pollution Control Board2 de 2003.
-Les accidents de la route :
Le nombre d'accidents de la route a augmenté, de 161
000 en 1981 à 400 000 en 2001 (India infrastructure report 2006). Le
nombre de décès est lui passé de 28 400 à 81 000
durant cette période. Ces chiffres dénoncent cruellement le
problème de la sécurité routière en Inde. A
Chennai, une grande campagne d'information a été lancée
depuis 1998 afin de limiter ce fléau. Photo 3 : Un accident
entre deux bus de liaison Pondichéry/Chennai
-Le déclin de la présence des transports
publics :
Dans cette augmentation galopante des véhicules
motorisés de tout genre manquent les transports publics. Si l'on fait
une comparaison avec l'augmentation des voitures et deux- roues, on remarque
très facilement que les bus publics trainent à se
développer (cf. : tableau 4).
Tableau 4 : Augmentation des catégories de
véhicules de 1981 à 2001 en Inde
|
1981
|
2001
|
Voiture/deux-roues pour 1000 individus:
|
81.4
|
245.4
|
Bus pour 1000 individus
|
1.4
|
3.24
|
Source: Transport Department, Government of the NCT of
Delhi
1 Cf. Liste des abréviations.
2 Cf. chapitre sur les organismes liés au
transport à Chennai.
On peut tenter d'expliquer ces chiffres par une
difficulté pour les autorités qui gèrent le
développement de la ville, à coordonner un tel accroissement
urbain avec les infrastructures qui lui serait nécessaire. Nous
reviendrons sur ces problèmes de gouvernance dans le second chapitre.
II-Enjeux et perspectives de la vision des
transports
sur la gouvernance métropolitaine
II-1 Place de la ville au sein du réseau de
communication ; des
avantages structuraux mais des contraintes spatiales
importantes
Le développement économique de Chennai a
été étroitement attaché à son port et
à ses infrastructures de transport. Nous allons voir maintenant en quoi
ces infrastructures économiques peuvent être ou non des atouts
pour le réseau de communication de la CMA.
- Les infrastructures routières de la
CMA
La ville et la zone métropolitaine sont servies par les
grandes routes principales qui fonctionnent dans une direction est-ouest ou
nord-sud. Anna Salai est la route la plus célèbre de la ville.
Elle traverse la majeure partie de Chennai central et du sud et aboutie ensuite
à la grande route principale méridionale (route nationale 45)
à Tiruchirapalli. La route fonctionne dans un sens nord-est/sud-ouest.
D'autres artères majeures sont la Kamaraj Salai (au nord- sud), la route
de Poonamalee (est-ouest), Broadway (est-ouest), la Radhakrishnan Salai (est-
ouest), la route de Sardar Patel (est-ouest) etc1. Chennai est
également servies par deux ceintures routières entourant la zone
métropolitaine. La plupart des grandes routes mènent aux routes
nationales et aux routes d'Etat.
Cinq routes nationales principales rayonnent à
l'extérieur de Chennai :
· Haute route d'Erukancheri, route nationale du nord-ouest
ralliant Calcutta;
· Haute route de Poonamallee (Periyar Salai),
route nationale occidentale, joignant Bangalore ;
1 Cf. . Carte 3.
· Route de bâti (Anna Salai), route
nationale du sud-ouest reliant Tiruchirapalli et le Tamil intérieur ;
· Haute route de Madras-Tiruvallur (route de MTH),
parallèle construit à la NH41, menant à
Tiruvallur ;
· Route de la cote est reliant
Pondichéry2.
-Les infrastructures routières de la
CMC3
Dans la ville, les routes radiales importantes sont
reliées entre elles par les deux routes ceinturant la ville. Les
revêtements routiers sont à Chennai un problème important
car beaucoup de route de traverses urbaines sont quasi à l'abandon.
Quand la route intérieure de ceinture a été construite au
début des années 80, elle déviait efficacement la ville et
était suffisante pour supporter le mouvement rapide de fret entre le
sud-ouest et le nord-ouest. La ville s'est développée plus tard
et a englobée la route. La route externe de ceinture a alors
été construite dans les années 90 pour fournir une
meilleure déviation. Elle lie actuellement la NH 454 avec la
NH 4, et une deuxième étape liant la NH 4 avec la NH 5 est
projetée. Des chaussées élevées sont
également construites le long de plusieurs sections de voie existante
afin de créer des couloirs de circulation rapide et réduire ainsi
les temps de voyage.
II-1 Les organismes liés aux transports à
Chennai
Différentes agences, dépendant du gouvernement
central ou de celui du Tamil Nadu, coordonnent les différents aspects
des transports urbains.
Le schéma suivant permet d'en faire une description
exhaustive et de les situer hiérarchiquement au niveau de l'Etat ou du
gouvernement central.
Le schéma 6 représente tout les organismes avec
lesquels nous nous sommes mis en relation, dépendant soit du
Gouvernement d'Etat, soit de l'autorité de la ville.
1 Phase 4 du National Highways Project, dont nous
allons détailler la teneur dans le chapitre sur les plans
d'urbanisation.
2 Aussi appelée « Est Coast Road »
3 Cf. Carte 3 .
4 Cf. Carte du NHDP
Schémas 5 & 6 :Fonctions des organismes
liés au transport dépendants du Gouvernement Central et du
Gouvernement d'Etat
Gouvernement Central
Ministry of Railway : Planification des systèmes
ferroviaires urbains
Ministry of Surface Transport: Administre le Motor Vehicle Act
Ministry of Urban Development: Planifie le
transport urbain
Ministry of Environment: Recomande les
norms d'émissions
Ministry of Industries & Finance
Ministry of Petroleum : Contrôle les
compagnies pétrolières
Planning Comission : Trouve les investisseurs et le
capital
Gouvernement d'Etat + Autorités de la ville
Department of Transport
Chennai Municipal Urban Development Autorithy
Municipal Corporation Of Chennai
Metropolitan Transport Corporation
Highways Department
Pollution Board Control
Source :Auteur, d'après : Indian Infrastructure
Report 2006
Nous avons choisi de nous mettre en rapport avec les
organismes relatif aux transports routiers puisque notre aire d'étude en
périphérie de Chennai n'a pour le moment que cet accès.
Il s'agit du Department of Transport, de la Chennai Municipal
Urban Development Authorithy, de la Municipal Corporation of Chennai, de la
Metropolitan Transport Corporation, du Highways Department et du Pollution
Board Control.
-Le Department of Transport est une autorité du
gouvernement d'Etat, il a pour fonction de contrôler l'ensemble des
véhicules routiers. C'est cet organe qui gère l'inspection des
véhicules, l'attribution des différentes licences, et la taxation
des véhicules motorisés.
- La Chennai Municipal Urban Development Authorithy
dépend elle-aussi du gouvernement du Tamil Nadu. Elle gère les
plans d'aménagement et de régulation de la croissance urbaine.
C'est de la CMUDA que dépendent les contrats de développement
urbain, conjointement avec la Municipal Corporation of Chennai.
-La Municipal Corporation of Chennai représente
l'autorité suprême décisionnelle de la ville. Ses fonctions
sont multiples, reflet de l'ensemble des activités d'une ville. La MCC
est organisée en 12 départements et nous avons ciblé nos
recherches sur celui de l'urbanisme et celui des ponts et des routes qui se
rapportent à l'organisation des transports.
-la Metropolitan Transport Corporation est la
société d'exploitation du système de bus de ville. Elle
dépend de la MCC.
-Le Highways Department est sous contrôle du
gouvernement d'Etat et gère l'ensemble des ponts et routes. Une de ses
délégations principale est le Tamil Nadu Road Sector Project,
chargé du développement et de la réalisation des grands
projets routiers.
- Enfin, le Pollution Board n'est pas directement
lié aux transports mais permet par ses relevés au sein de la
ville, d'avoir une appréciation quotidienne des taux d'émission
des véhicules et ainsi de repérer les encombrements de
circulation qui les provoque et les voies les plus empruntées, ce qui
est très pertinent pour notre recherche.
II-3 Les grands projets de développement des
transports
Les organismes que nous venons de référencer
sont à l'origine de grand projets de développement pour les
transports chennaites, qui contribuent à la modification de
l'organisation du territoire et à une meilleure mise en réseaux,
notamment pour les périphéries urbaines de Chennai.
-Koyambedu Bus Stand Le terminus d'autobus de Chennai
Mofussil ou le CMBT est un terminus de bus pour les
personnes voyageant en dehors de Chennai. Il doit son nom à sa situation
près du marché de légume de Koyambedu. C'est le plus grand
terminus d'autobus en Asie du sud et il est accrédité avec la
certification de qualité d'OIN 9001.
Photo 3 : Chennai Mofussil Bus Terminus
Le CMBT inclut des couloirs classés par
catégorie de stationnement d'autobus, un complexe de manutention des
véhicules, un bon nombre d'agréments pour les achats, les
télécommunications et l'Internet sont également disponible
dans les lieux. Tous les autobus sont garés dans les compartiments
spécifiques à une destination particulière et
également selon l'ordre dans lequel ils quittent le stand d'autobus ce
qui peut paraître être une information anecdotique mais qui est
rare dans le système de transport indien.
Le nouveau CMBT a ouvert le 18 novembre 2002. Il a
été construit à un coût de 1.030.000.000 roupies et
peut accueillir plus de 2.000 autobus et 200.000 passagers par jour. Il a
été construit par la CMUDA, et permet de réduire les
congestions du trafic dans les quartiers du centre-ville ou l'ancienne gare
routière était auparavant établie. Il accueille
également trois hôtels et trois restaurants et 10 filiales de
voyage. Il a un service d' attente de
18.000 pieds carrés pour des passagers, un espace de
stationnement de 25.000 pieds carrés pour les auto rickshaws, les
maxi-cabs et les voitures privées, et 16.000 pieds carrés
d'espace de stationnement pour les deux-roues.
-Le National Highway Development Project : Ce
grand projet routier national a été crée par le
gouvernement indien afin de relier les grandes métropoles du
sous-continent par des autoroutes à quatre ou six voies.
Carte 4 : Planning d'achèvement du National
Highways Development Project
Source : NHDP Proj ect
C'est un projet majeur de communication pour le pays qui a
débuté au Tamil Nadu en 1995. Il va permettre de relier les
quatre villes millionnaires du quadrilatère d'or : Delhi, Calcutta,
Bombay et Chennai. Les derniers tronçons de voie de la phase 3 du projet
seront terminés au Tamil Nadu courant 2006, reliant ainsi dans des
conditions exemplaires Chennai à Calcutta et Bombay 1.
-L'IT Corridor :
Les derniers développements économiques à
Chennai vont vers la valorisation des Hautes Technologies2 . Dans
cette optique, le gouvernement du Tamil Nadu souhaite faire de la Old
Mahabalipuram Road un espace d'implantation pour ces entreprises, appelé
IT Corridor3 . Ce projet a permis l'élargissement de la route
à deux-fois quatre voies, et il joue aussi un rôle moteur dans les
phénomènes de périurbanisation.
Photos 5 & 6 : Panneaux de promotion du chantier
du IT Corridor
-Le Mass Rapid Transit System :
Ce projet est basé sur la création d'un train
aérien urbain qui permettrait de décongestionner la ville tout en
desservant ses périphéries proches. Un train aérien existe
déjà à Chennai, reliant Thiruvanmiyur à Egmore,
avec pour projet une extension vers Velachery, la CMBT et Thiruvotiyur. Cette
extension constituera la phase 2 du projet de MRTS, qui est dite
1 Cf. Carte 4.
2 Par « Hautes Technologies on entend les
Technologies de l'informatique, de la communication, de l'électronique
etc.
3 Nous reparlerons en détail de l'influence de
cet IT Corridor sur la périurbanisation dans notre deuxième
partie.
imminente, est qui créeras un train urbain rapide
d'environ 20km complétant le système ferroviaire de banlieue
existant1 .
Nous venons ainsi de voir dans cette première partie en
quoi consistait le statut de ville en forte croissance urbaine de Chennai et en
quoi cela posait de nouveaux problèmes aux organismes de gestion des
transports. Nous allons maintenant aborder plus précisément
notre cadre d'étude, Medavakkam, dans la seconde
partie.
1 Cf. Carte 3.
Deuxième partie :
Caractéristiques du village périurbain
de
Medavakkam et étude des stratégies
locales de transport
Notre étude repose sur un travail de terrain de quatre
mois en grande partie dans le village périurbain de Medavakkam. Nous
allons ici en faire la présentation et caractériser les
stratégies de mobilité de ses habitants.
I-Présentation de l'aire d'étude
I-1 Localisation géographique
Medavakkam est situé à une trentaine de
kilomètres au sud de Chennai dans le district de Kanchipuram et plus
précisément dans le taluk (sous district) de Tambaram, la
municipalité plus à l'ouest. Administrativement, le
panchâyat appartient au block de St Thomas Mount.
Medavakkam est traversé par la Velachery Main Road, qui
relie le village vers l'ouest à Tambaram et vers le nord-est vers
Chennai. De cette voie principale, se détache la Perumbakkam Main Road
qui rejoint Sholinganallur. A plus grande échelle le village est donc au
croisé de la National Highway qui passe par Tambaram, ainsi que de l'Old
Mahabalipuram Road proche du centre de Sholinganallur. Deux arrêts de bus
principaux desservent Chennai et Tambaram, tandis qu'une ligne se rend à
Sholinganallur et une dernière à Manbakkam1. Nous
aborderont plus en détail ces parcours dans la troisième partie
de ce rapport. La NH comme nous l'avons vu dans notre première partie
ouvre Chennai à Hyderabad et Bangalore, et dans un futur proche, par
extension, à Delhi et Kolkata. Mais ce qui nous intéresse plus
particulièrement ici c'est la proximité du futur IT corridor qui
se trouve dans le prolongement de la Velachery Main Road et qui participe
à l'évolution périurbaine de Medavakkam.
I-2 Facteurs de développement périurbains
Medavakkam est voisin de Sholinganallur, un village ouvert sur
l'IT corridor. Ce facteur rend donc ce « spécial village
panchâyat »de 15 557 habitants en 2001 très attractif. Ces
changements exacerbés par une planification étatique ont
affecté les villages voisins, notamment Medavakkam qui profite de ce
nouveau centre d'emploi.
1 Cf. Carte de l'organisation spatiale du village
En effet, situé à 2km de Sholinganallur, juste
après Perumbakkam, Medavakkam est également entrainé dans
un processus de croissance démographique et économique. La
polarisation de Chennai et le processus de périurbanisation à
l'oeuvre provoquent de nombreuses mutations dans cet ancien village rural.
La plus rapide et qu'on peut facilement observer dans le
paysage du village c'est la construction en forte croissance depuis quelques
années, de logements pour les nouveaux arrivants.
Photo 7 : Une pancarte immobilière
témoin de la forte croissance des nouvelles résidences :
« Soyez propriétaires du terrain de vos rêves à
Medavakkam ».
D'après le président du panchâyat, c'est
30% de nouveaux arrivants qui viennent s'installer tous les ans depuis 5 ans.
Cela permet de penser que le census 2001 est déjà bien
dépassé. En effet, il y dénombre officiellement 8 444
habitants mais pour le président, il y aurait au moins 30 000 habitants
qui vivraient à Medavakkam en 2006. Ces nouveaux habitants viennent pour
la majorité du Tamil Nadu, avec une forte migration depuis Chennai, plus
importante que celle issue de villages aux caractères plus ruraux du
même district. On assiste donc plutôt à une croissance
démographique de cet espace rural grâce à un
phénomène de périurbanisation que par un
phénomène de migration des ruraux vers la ville et qui
s'implanteraient dans cette frange urbaine.
Ces migrants sont principalement attirés par l'emploi
et le cadre de vie du village périurbain. En effet, la qualité de
l'eau y est meilleure qu'à Chennai et les prix des terrains et de
l'immobilier beaucoup plus faibles. L'observateur occidental est frappé
par les lotissements, destinés à une partie des nouveaux
arrivants qualifiés et aisés, lui rappelant les immeubles de
banlieues pavillonnaires françaises. Un témoin flagrant de
l'évolution du paysage rural en paysage urbain est la présence
d'une résidence fermés, sorte de
gated-community1 gardé par un employés qui
comporte plusieurs bâtiment et loge principalement les nouveaux cadres
des Hautes Technologies.
L'agriculture est en baisse, les agriculteurs profitent de
l'intérêt financier porté à leurs terrains et
n'hésitent plus à vendre, quitte à aller continuer leur
activité agricole plus loin où quitte à se recycler dans
une autre activité comme la vente d'eau2.
Le phénomène de baisse de l'agriculture est
très présent: au nord du village, à cinq minutes du
bruyant axe routier, se trouvaient il y a encore très récemment
des surfaces agricoles qui ont laissées place aujourd'hui à des
espaces en friches parsemés de quelques champs cultivés,
attendant d'être recouverts par la progression des espaces urbains. Sur
certaines de ces friches débutent déjà de constructions
annoncées par les campagnes publicitaires des promoteurs immobiliers.
D'autres facteurs permettent de noter la
périurbanisation du village de manière spatiale, il s'agit par
exemple de l'implantation de nouveaux commerces liés à
l'arrivés de migrants a plus forts pouvoir d'achat, comme le
supermarché moderne qui côtoie la résidence fermé de
l'ouest du village3.
La carte 5 montre l'organisation spatiale de Medavakkam. Elle
prend en compte les quartiers d'habitat les plus anciens tel que Medavakkam
village, Vimala Nagar ou Ramala Nagar, et les nouvelles zones construites comme
Medavakkam Extention, Periyar Nagar ou Pushpa Nagar. Cependant il est difficile
de cerner toutes les nouvelles zones en constructions, celles-ci
s'étendent à l'ouest et au sud de Sivakami Nagar, ainsi qu'au
nord et à l'ouest de Neela Nagar, Periyar Nagar et Medavakkam extension.
Elles sont en perpétuelle évolution4.
1 Quartier résidentiel enclos et
sécurisé
2 Se référer à ce sujet au
mémoire de Rémi de Bercegol, Périurbanisation et eau
potable dans l'aire métropolitaine de Chennai.
3 Cf. Carte 5 ; la résidence fermée
présente tout les attributs d'une « gated community »
américaine.
4 Cf. Photo 4
Carte 5
I-3 Mutations socio-économiques introduites par la
périurbanisation
- La croissance démographique :
Les mutations démographiques dues au processus de
périurbanisation sont importantes. Selon le recensement de 2001, la
population de Medavakkam a augmenté d'un tiers en dix ans avec un taux
de croissance de 31,28 %.
Toute porte à croire que la croissance
démographique s'est accélérée depuis 2001 et que
ces chiffres sont déjà obsolètes. Le propre de l'espace
périurbain est d'être en constant changement, on ne peut donc
saisir qu'un instant du processus à l'oeuvre.
-Mutation socio-économiques :
Medavakkam présente les particularités d'un espace
périurbain. La composition de l'emploi y est en changement. Le tableau 7
démontre ces mutations dans l'activité économiques entre
1991 et 2001.1
Tableau 7:
Nous avons ici préféré omettre le
détail du census de 1991 avec l'objectif d'une comparaison de
l'évolution de la répartition de l'emploi entre 2001 et
1991.2 Alors que le secteur agricole représentait 40,73% des
actifs en 1991, il ne représentait plus que 9,5% des actifs en 2001,
soient une baisse de 31,23 points. Il est intéressant de noter qu'en
2001, la part relative des agriculteurs (les propriétaires) est
supérieure à celle des travailleurs agricoles (respectivement
6,8% et 2,7%) En valeur absolue, le census 2001 dénombre 292
1 Idem
2 Les catégories détaillées du
Census 91 ont été rassemblées dans la catégorie
« autres ».
agriculteurs pour 75 travailleurs agricoles. Cela signifie que
les agriculteurs ne cultivent plus en majorité, et laissent leur terrain
en friche dans l'attente d'une vente .On peut aussi remarquer la baisse
beaucoup plus importante de la part d'agriculteurs (-13,45 points) que celle
des agricultrices (-1,33 points), ce que l'on pourrait expliquer comme une
prudence féminine à l'arrêt de leur activité
traditionnelle à long terme, voire un attachement à la tradition,
alors que les propriétaires masculins verraient d'abord
l'intérêt économique à court terme.
Par un processus de « déversement », cette
baisse du secteur agricole a contribué à la hausse de la
catégorie « autres ».En effet, alors qu'en 1991, seuls 59% des
actifs travaillaient dans une catégorie autre que celle agricole ou
artisanale, ils sont 88,1% en 2001, soit une augmentation de 29,1 points .Le
census de 2001 ne nous donne pas les détails de cette catégorie,
cependant, l'observation de terrain nous permet d'émettre des
suppositions dans la composition de l'emploi.
Tout d'abord, il semble légitime d'émettre
l'hypothèse que les travailleurs non qualifiés, les
ex-travailleurs agricoles se soient tournés vers le secteur de la
construction qui est en plein essor du fait du processus d'urbanisation actuel.
Ensuite, il semble aussi qu'une part importante de ces emplois dans la
catégorie « autre » soit détenue par les nouveaux
arrivants instruits et qualifiés et travaillant dans le secteur des
services avec des emplois aussi divers que l'alimentaire avec la
prolifération de petits restaurants, la santé, ou encore les
emplois dans les entreprises de hautes technologies de Sholinganallur. En
résumé, la catégorie « autre » semble
correspondre à la catégorie du secteur secondaire et tertiaire
propre au développement d'un village en pleine expansion.
La baisse de l'illettrisme de 20 points entre1991 et 2001 nous
conforte dans cette supposition. Alors, qu`une personne sur deux ne savait pas
lire en 1991, c'est « seulement » trois personnes sur dix en 2001 qui
sont encore illettrées. Ce recul de l'illettrisme, d'une part dû
au progrès de la scolarisation dans ces zones périurbaines, doit
d'autre part être surtout imputable au changement de la composition
sociologique du village avec l'installation de nouveaux habitants instruits
dont les enfants intègrent les nouvelles écoles
privées1.
1 Au sujet des progrès de la scolarisation en
zone périurbaine, on pourra consulter le mémoire de Philippe
Timoner sur L'accès aux services de santé et
d'éducation à Medavakkam, sous la direction de Kamala
MariusGnanou en collaboration avec l'Institut Français de
Pondichéry.
Medavakkam est donc un village en situation
périurbaine, connaissant actuellement d'importantes mutations
démographiques, sociologiques et économiques qui participent au
remodelage de son paysage. Nous allons maintenant tenter de comprendre si ces
mutations influent sur les stratégies locales de transport.
II- Caractéristiques de l'espace social à
travers
l'étude des stratégies locales de
transport
I-1 Une approche empirique ; observation et questionnaire
d'enquête sur les mobilités villageoises
-Méthodologie de l'enquête de
terrain
L'échantillon de population sur lequel nous avons
travaillé se compose de 76 individus. Afin de mieux les
caractériser et d'améliorer l'interprétation de leurs
mobilités, nous leur avons préalablement posé un certain
nombre de questions concernant leur identité, leur localisation spatiale
et leurs caractéristiques socio-économiques.
Nous étions alors accompagnés sur le terrain par
des traducteurs du tamoul à l'anglais, afin d'interroger et de restituer
les témoignages des habitants, qui la majorité du temps
s'exprimaient en tamoul. Nous avons été amenés à
changer deux fois de traducteurs en raison d'incompatibilité dans notre
recherche. Une personne refusait de travailler avec des hors castes et un autre
abrégeait les questionnaires et ne s'accordait pas avec la
méthode choisie, qui était d'en faire plutôt des
enquêtes que des sondages à simple réponses sans
discussion.
Caractéristiques de l'échantillon
d'enquête et choix des questions
-Le Sexe : La proportion hommes/femme est de
41 hommes pour 35 femmes, ce qui permet de ne pas fausser les
interprétations par une surreprésentation exagérée
d'un des deux sexes, et qui va plutôt dans le sens de la tendance du sexe
ratio du panchâyat.
- L'âge : Les personnes interrogées ont de 8
à 80 ans. 11 individus ont moins de 20 ans, 17 individus ont entre 20 et
30 ans, 15 individus ont entre 30 et 40 ans, 12 individus ont entre 40 et 50
ans, 10 individus ont entre 50 et 60 ans, 9 individus ont entre 60 et 70 ans,
et seulement deux individus ont plus de 70 ans.
- La localisation spatiale : La sélection des individus
s'est faite spatialement dans le village, afin de piocher un
échantillonnage de personnes à la fois dans les quartiers
résidentiels nouvellement construits, et dans le centre historique tant
du coté hindou que musulman ou chrétien, souvent regroupés
autour des temples, des mosquées ou des églises. Nous sommes
ainsi intervenu dans des proportions similaires dans Vimala Nagar, autour de
Moovendhar street, dans Santhanam Nagar, dans Pushpa Nagar, dans Vashnavi Nagar
et dans Neela Nagar1.
- Les caractéristiques socio-économiques : Ces
caractéristiques nous ont été nécessaires
puisqu'elles font partie de notre hypothèse de départ selon
laquelle la religion, l'emploi, la possession d'un véhicule influent sur
la mobilité.
La religion : les individus interrogés sont
majoritairement hindous, à 81,5%, suivent les musulmans (12%) puis les
chrétiens (6,5%). Ces proportions sont assez représentatives de
l'ensemble de la ville, malgré une légère sous
représentation des populations musulmanes qui s'explique par leur
concentration dans certains quartiers que nous n'avons pas visité.
L'emploi : plus de 51% de l'échantillon
interrogé a un emploi fixe, le reste des individus se divise entre les
femmes au foyer (22%), les écoliers ou les étudiants (
près de 20%), les personnes âgées (près de 7%),
La possession d'un véhicule : cette question
intéresse avant tout notre étude car c'est un facteur primordial
dans la mobilité, au coeur de « la crise des transports »,
mais c'est aussi un bon indicateur des revenus d'un foyer. 80% des voitures
sont regroupés dans des foyers dont le « chef de famille »
occupe un poste à hautes qualifications. Les deux-roues sont plus
accessibles et donc plus présents chez les employés des
professions intermédiaires (ils possèdent 43,3% du parc). D'une
manière générale, l'usage d'un véhicule personnel
est rare dans les métiers à faible revenus, chez les inactifs et
chez les scolarisés. La plupart des foyers ne possèdent qu'un
véhicule, et c'est le mari qui l'utilise.
1 Cf. Carte 5, organisation spatiale du village
-Questionnaire d'enquête1
Les questions posées ensuite aux habitant concernaient
leurs déplacements. Afin de replacer notre étude dans le contexte
de la périurbanisation, nous avons seulement considéré les
sorties hors du village de Medavakkam. Ce choix a pour double effet de nier les
déplacements des habitants qui effectuent leur marché, qui
travaillent, qui vont prier, ou qui font d'autres déplacements dans le
village, mais néanmoins de recadrer l'étude en considérant
essentiellement les mobilités qui permettent la connectivité du
village avec l'extérieur.
II-2 Les résultats de l'enquête : des besoins
et une accessibilité à la mobilité
différenciés
Les réponses obtenues grâce à l'enquête
nous ont permis ensuite de dresser quelques conclusions.
-y'a-t-il une égalité de mobilité
selon le sexe ?
Nous avons pu constater rapidement, dès les
premières enquêtes, qu'il existait une inégalité
marquante entre les mobilités féminines et masculines. En dehors
du village, les hommes se déplacent plus que les femmes ; seulement 20%
des femmes effectuent un trajet régulier hors de Medavakkam, contre 73%
des hommes. On peut expliquer ce résultat par le facteur de l'emploi, un
nombre important de femmes étant inactives. Il faut rappeler que
traditionnellement en Inde, la femme même si elle a suivi des
études supérieures, ne travaille souvent pas, une fois
mariée. Elle est chargée de s'occuper de la maison et de ses
enfants si ily-en a, un statut qui limite les déplacements. Même
si de plus en plus de jeunes femmes actives s'implantent à Medavakkam,
la mobilité des femmes en général reste néanmoins
relativement faible2. Une deuxième raison importante de cette
mobilité plus faible des femmes est que le moyen de locomotion du
ménage, le plus souvent un deux roues, appartient à l'homme, et
que bon nombre des déplacements qu'elles effectuent hors de la ville le
sont accompagnée de leurs époux.
1 Cf. au questionnaire d'enquête sur les
mobilités présenté en annexe
2 Voir à ce sujet le travail d'Adeline Legros
sur les évolutions des femmes cadres à Medavakkam.
Ainsi nous nous sommes rendu compte que les femmes se
déplacent moins loin que les hommes, et n'utilisent pas les même
moyens de transports, étant dépendantes le plus souvent des bus
publics, auto rickshaws ou taxis selon leurs moyens financiers, pour quitter le
village.
-Les raisons des déplacements
C'est le travail qui génère à
Medavakkam le plus de déplacements, et de loin, puisqu'il concerne
généralement un trajet quotidien en semaine, aller et retour. Sur
notre échantillon d'individus, huit personnes travaillent à
Chennai même, principalement dans le quartier de T-Nagar, quatre
étudiants au-dessus de la 10th (équivalent du niveau lycée
en France) se rendent aussi à Chennai pour leurs études, et
encore sept personnes vont travailler sur la Velachery Road en direction de
Chennai.
Viennent ensuite par ordre d'importance les
déplacements liés à l'achat de fournitures ou de
courses spécifiques autre qu'alimentaires (celles-ci sont
majoritairement effectuées dans les marchés de plein air, les
petites boutiques de proximité et le supermarché de Medavakkam).
Les achats concernant l'habillement, le mobilier, les livres,
l'électronique et l'électroménager sont principalement
réalisés à Chennai dans les deux pôles commerciaux
majeurs de la ville : T-Nagar et Spencer Plazza.
Les loisirs quant à eux suivent de près
en termes de part relative des déplacements. Ils concernent
majoritairement les sorties à la plage, les espaces de loisirs de la Old
Mahabalipuram Road, et de manière plus infime les théâtres
et lieux de récréation du centre- ville de Chennai.
En ce qui concerne la religion, il est assez rare pour
un habitant de Medavakkam de sortir de son village quel que soit son
obédience religieuse. Les lieux de culte sont en effet très
présents à Medavakkam, un quartier se regroupant en
général autour de son temple, sa mosquée ou son
église, spatialisant religieusement les quartiers comme nous l'avons vu
plus haut dans l'organisation du village. Néanmoins, plusieurs
interrogés se rendent une à deux fois par ans à des
pèlerinages hindous, ce qui explique la présence de ce facteur
dans l'histogramme des motifs de déplacements réguliers hors de
Medavakkam.
Tableaux 8 et 9 :
40
20
70
60
50
30
10
0
Motifs des déplacements réguliers hors
de Medavakkam
hommes:
travail/école courses loisirs
religion visites
Source : auteur
40
20
70
60
50
30
10
0
femmes:
travail/école courses loisirs
religion visites
Source : auteur
-L'activité comme moteur de
mobilité
Les inactifs : 49% des femmes sont des femmes aux
foyers, 26% sont étudiantes ou écolières et 11% sont
âgées, elles sont donc à 86% inactives. Ce facteur est
déterminant dans la compréhension de la mobilité, les
inactifs bougent moins ; leurs déplacements concernent principalement
les courses, les enfants et les loisirs (visites à des amies,
promenades..). Les déplacements effectués sont donc
principalement internes, et quand ces femmes sortent de Medavakkam, c'est
majoritairement accompagné du mari.
Les actifs : D'une manière générale,
les actifs se déplacent à près de 60% pour des raisons
liées à leur travail.
On distingue alors souvent une différence dans les
distances au lieu de travail selon les professions. Ainsi les métiers
regroupés sous l'appellation « petits business », qui
regroupent tout les commerces de rue, les artisans et les vendeurs, ne sortent
du village pour se rendre à leur travail uniquement dans 14% des cas. Et
restent le plus souvent dans un périmètre de moins de 10kms de
Medavakkam.
En ce qui concerne les chauffeurs de bus, auto rickshaws
où voiture de maître interrogé dans cet échantillon,
et qui forment la catégorie des métiers des transports, 50% de
leurs déplacements concernent leur profession. Ce résultat peut
sembler faible pour une profession basée sur le déplacement mais
il est faussé par deux individus qui sont chauffeur de maître chez
de riches propriétaires de Medavakkam et qui ne se déplacent donc
pas beaucoup pour se rendre à leur travail.
Les salariés voient quant à eux 44% de leurs
déplacements réservés à leur travail.
Cette catégorie est assez éclatée
puisqu'elle concerne des employés allants de l'officier de police au
personnel hospitalier en passant par l'hôtelier. Excepté leurs
collègues des métiers des transports ce sont donc eux qui se
déplacent le plus pour accéder à leurs lieux de travail,
qui est majoritairement situé dans l'agglomération de Chennai.
Enfin, les métiers des High Technologies qui concernent
12% de notre échantillon sont très intéressants à
étudier dans le cadre des mobilités puisqu'ils font partie bien
souvent des nouveaux arrivants de Medavakkam. Ils regroupent des professions
allant de l'employé dans les softwares technologies aux
ingénieurs des compagnies de pharmacie et d'électronique
appliqués. La part de leurs déplacements due au travail est
faible (33%) ce qui peut expliquer leur implantation à Medavakkam dans
le but de se rapprocher de leurs entreprises.
-Les lieux fréquentés :
Carte 6 :
Fréquences des destinations villageoises hors de
Medavakkam
Source :Auteur & Sri Mangadu Kamatchiman map
Complément de légende
: Importance des déplacements en part des résultats
obtenus pour chaque destination. Du plus foncé au plus clair : 37% des
parts de déplacement, 10%, 6%, 5%, 4%, 3%, 2%, 1% ou moins. Source :
Auteur
C'est l'agglomération chenaite qui est le principal
vecteur de mobilités depuis Medavakkam. Les principaux lieux attractifs
de la mégapole sont les centres d'affaires comme Saidapet, Guindy ou
ceux situés sur l'artère commerciale d'Anna Salai. Comme nous
l'avons vu c'est d'abord l'activité qui motive ces choix. Les
déplacements réservés au travail concernent après
le centre-ville les villes voisines comme Sholinganallur ou Tambaram.
Viennent ensuite les quartiers d'achats ou l'on se rend pour
le ravitaillement en fournitures non-alimentaires pour la maison, comme les
vêtements ou le mobilier. La destination favorite des habitants de
Medavakkam pour ce motif de déplacement est T-Nagar, qui
représente aussi la destination la plus populaire, tous motifs de
déplacement confondus. TNagar est en effet extrêmement bien
relié par un itinéraire de bus et c'est un quartier très
apprécié pour les achats car il compte un nombre important de
grands magasins comme Chennai Silk Emporium par exemple qui reste un des
préférés des femmes chennaites en matière de saree.
Spencer Plaza est aussi un quartier commerçant bien que d'apparence plus
occidentale et présentant des enseignes de marques européennes,
il est pour les habitant de Medavakkam beaucoup plus marginalement
fréquenté.
Les loisirs se séparent en deux principales tendances :
la plage et les parcs de loisirs et de restauration du bord de mer, et les
cinémas et théâtres de la ville. Plus rarement ces temps de
loisirs habituellement échelonnés sur un jour ou un week-end se
transforment en cours séjour comme c'est le cas pour deux couples
aisés interrogés qui se déplacent jusqu'à
Mahabalipuram pendant les vacances de saison. Sur l'Old Mahabalipuram Road,
nouvelle IT Road, se sont installé une série de parcs
d'attraction, d'hôtels et de fast-food comme MCM Dissie World ou VGP
Golden Beach qui attirent la classe moyenne émergente et les publics
aisés. Plus modestement, se promener sur les plages de Besant Nagar,
Thiruvanmiyur ou Marina Beach à la nuit tombé, pour profiter de
la fraicheur nocturne et des stand de restauration et d'attraction
disséminés le long de la mer, est une sortie agréable et
à moindre cout.
En ce qui concerne les déplacements motivés par
la religion, ceux-ci sont rares hors de Medavakkam, cependant plusieurs foyers
se rendent mensuellement ou de manière plus
espacée dans l'année au Mylapore Temple dans
Chennai lors des festivals ou des fêtes religieuses hindoues
importantes.
Enfin, les plus longues distances qui ne concernent plus
Chennai mais d'autre villes du Tamil Nadu comme Trichy, Madurai, Kanchipuram ou
Tiruvannâmalai, ainsi que des déplacements à faible
fréquences dans des lieux sortant des critères
énoncés ci-dessus, concernent majoritairement des visites
à des amis ou de la famille.
-Les autres déterminants de la
mobilité
-L'âge et la mobilité : Les moins de vingt
et un an et les 40/56 ans apparaissent comme les plus nombreux à se
déplacer. Ces déplacements se font cependant pour les premiers
dans un périmètre assez proche du village, jusqu'à Chennai
et vers les plages. D'une manière générale les individus
semblent aller de plus en plus loin avec l'âge (jusqu'à 56 ans),
on peut supposer qu'avec l'expérience ces individus sont prêt
à chercher un emploi plus loin, de plus avec l'âge, la
qualification augmente, et ce type d'emploi emmène les gens plus loin,
le salaire compensant souvent les mouvements pendulaires provoqués par
les trajets.
Apres 57 ans les individus ne se déplacent que
très peu excepté annuellement lors de visites à la famille
ou de pèlerinage qui peuvent alors les amener à plusieurs
centaines de kilomètres de leur domicile.
-le moyen de locomotion influe t-il la mobilité ?
Les gens ne se déplacent à pied que sur de
faibles distances, souvent lors de trajets internes à Medavakkam. Seuls
deux individus sont contraints de se déplacer à pied au village
voisin de Sholinganallur. L'un étant maçon et le second
travaillant sur le chantier de la route qui relie Medavakkam à la Old
Mabhalipuram Road via Sholinganallur, ils ne gagnent que des revenus
modérés et m'ont confié préférer ce mode de
locomotion gratuit.
Il semble que l'utilisation des deux roues se cantonne aux
sorties hors du village ou dans des quartiers éloignés, mais dans
des distances restant inferieures à 50kms.
A l'image du problème de la forte croissance des moyens
de locomotions personnels que nous avons approfondi dans la première
partie, le recours aux véhicules individuels motorisés est
croissant et important à Medavakkam. Les deux-roues sont majoritairement
utilisés mais on note aussi dans les milieux les plus aisés la
possession de plus en plus forte d'automobiles. Il existe même chez les
notables de la ville des voitures avec chauffeur puisque deux individus
interrogés sont chauffeurs de maître à Medavakkam
même.
Pour sortir de la ville c'est le bus public qui reste le plus
usité et à peu près par toute les classes sociales sauf
par les villageois possédants un moyen de locomotion personnel.
L'auto rickshaws arrive ensuite, le plus souvent selon les
témoignages, utilisés lorsque le bus n'arrive pas, que des objets
volumineux doivent être transportés ou qu'on se déplace en
groupe.
Les bus privés sont utilisés en semaine par les
écoliers scolarisés hors de la ville, les écoles
privées organisant leur propre ramassage. Ils sont aussi présents
dans certaines entreprises locales comme Celebrity Fashion ou Chemical Ltd.
Photo 8 : Bus de raccompagnement d'une entreprise
chimique de Medavakkam
Dans le cas des déplacements plus lointains, à
partir d'une centaine de km, c'est toujours le bus public (mais cette fois ci
les lignes d'état) qui reste en tête, suivi par le train puis la
voiture personnelle, de moindre proportion (13%).
II-3 Catégorisation des besoins et choix des usagers
; établissement de
sujet types et conclusion de l'enquête
-L'établissement de sujets-types
La réalisation de cette enquête m'a permis de
réaliser des sujets-types pour illustrer les principales façons
de se déplacer hors de Medavakkam. Il ne s'agit pas ici d'affirmer une
homogénéité des déplacements entre les individus
d'un même groupe, mais de faire sortir une tendance, une logique,
permettant de les regrouper selon leurs pratiques spatiales. Nous avons
ici retenu le critère de l'activité qui parait le
plus judicieux après les analyses que nous venons de réaliser sur
l'ensemble de l'enquête.
-l'écolier scolarisé à Medavakkam.
Il existe près d'une dizaine d'écoles à Medavakkam ce qui
réduit les sorties hors de la ville1 . Le plus souvent les
enfants se rendent à pied à l'école ou lorsqu'ils habitent
dans des quartiers éloignés et que les revenus de leurs familles
le permettent, ils empruntent à plusieurs une auto rickshaw
financé par l'ensemble des habitant d'une rue dont les enfants sont
scolarisés au même endroit. Dans certains cas il rentre manger
à la pause du midi. Enfin hors de l'école il reste chez lui, ou
joue dans la rue ou sur les terrains non lotis de son quartier
aménagé fréquemment en terrains de criquet.
-L'ecolier scolarisé hors de Medavakkam : Ce
sont des établissements privés peu éloigné du
village, qui organisent leur propre ramassage scolaire avec un bus aux couleurs
de l'école. Bien souvent l'écolier y est de ce fait,
demi-pensionnaire.
-L'étudiant :
Plus âgés les étudiants quittent souvent
leur village pendant la journée, pour atteindre les collèges
d'enseignement personnalisé. Cependant à Medavakkam se trouve une
branche de l'université de Chennai, ce qui explique que beaucoup
d'enquêtés ne quittent pas le village pendant la journée.
Les déplacements autres que scolaires sont plus nombreux, notamment en
ce qui concerne les loisirs (théâtre, cinéma, visite d'amis
ou promenade dans les centres- commerciaux ou sur la plage), mais ne concernent
souvent que la fin de semaine.
-la femme au foyer :
Comme nous l'avons vu précédemment la plupart du
temps le déplacement se déroule dans le village. Ils ont trait au
ravitaillement de la maison, à l'accompagnement des enfants à
l'école. Cependant ce sont souvent les femmes qui effectuent le plus de
déplacements vers TNagar, pour les courses de fournitures,
régulièrement accompagnées par leur mari.
-Les retraités :
En général, la cellule familiale indienne s'occupe
de ses aïeux en les accueillant dans l'habitat familial. Cependant, la
majorité des retraités que nous avons interrogés
à
1 Cf. au mémoire de Philippe Timoner sur
l'accès aux services de santé et d'éducation à
Medavakkam, ainsi que le paragraphe se référant aux bus
scolaires dans notre troisième partie.
Medavakkam s'est avérée faire partie des
nouveaux arrivants, des couples aisée venant vivre leurs retraite dans
ce village périurbain dont nous avons montré les multiples
convenances dans les chapitres antérieur. Cela peut s'expliquer par le
fait qu'ils ont été interrogés dans un quartier de maisons
individuelles d'apparence cossues.
-Conclusions de l'enquête
Cette enquête nous permet de tirer quelques conclusions
sur les mobilités qui ne vont pas systématiquement dans le sens
premier des hypothèses que nous nous étions fixé au
début de ce travail de recherche.
Tout d'abord il apparaît que le bus public reste le mode
de locomotion le plus employé vers la ville de Chennai, ce qui prouve
que la mise en réseau de Medavakkam avec Chennai existe
réellement. En effet, comme nous l'avons vu, un nombre important
d'habitants du village se rendent à Chennai et principalement pour le
travail.
Cela nous permet aussi de conclure que la périurbanisation
de Medavakkam est aussi visible par ces mouvements pendulaires motivés
par le travail.
Cependant il apparaît que ces trajets plus importants
sont moins privilégiés par les classes plus aisées de
population qui ont d'avantage le choix de leur lieu de résidence et
parfois de leur emploi. Celles-ci préfèrent consacrer moins de
temps à leurs trajets en choisissant un lieu de résidence plus
proche de leur travail ou un moyen de locomotion personnel.
C'est cette question du choix qui est cruciale dans
l'étude des mobilités car il est difficile de mesurer là
ou commence et s'arrête la possibilité de choix. Il est certain
que les personnes les moins aisées ou disposant d'une mobilité
réduite du fait de leur sexe ou de leur âge, n'auront pas les
même possibilités de mobilité que les autres.
Apres avoir étudiée les mobilités
villageoises, c'est en continuant à se concentrer sur les
différents choix de locomotion disponibles pour les habitant de
Medavakkam, que nous aborderons notre dernière partie sur les dynamiques
de la recomposition du territoire par les mutations privés et
publiques.
Troisième partie : Dynamique de la
recomposition du territoire par les
mutations privées et publiques
Apres avoir analysé le phénomène de
périurbanisation dans sa globalité puis à l'échelle
de Medavakkam, et avoir étudié la mobilité des habitants
de ce village, nous allons à présent nous pencher sur
l'identification propre de ces transports, leurs fonctionnements, leurs
défauts comme leurs qualités afin de mettre un doigt sur les
disfonctionnements et les évolutions des transports dans l'aire
périurbaine de Chennai.
I- La diversité de l'offre des transports
I-1 Estimation et observation du trafic entre Medavakkam et
la ville
métropolitaine
-Méthodologie et intérêt de
l'observation :
Afin de replacer l'étude des transports dans le cadre
de la croissance galopante de la périurbanisation, nous avons choisi de
nous pencher préalablement sur l'observation de la Velachery Road,
reliant Medavakkam à Chennai.
Quoi de plus naturel pour une nouvelle arrivante,
étrangère tant au village qu'au pays, de débuter son
étude par une observation empirique du fonctionnement des transports
?
C'est en menant cette réflexion que j'ai
été amenée à m'installer deux jours durant au bord
de la Velachery Road, dans le quartier de Palikkaranai situé juste
à la sortie de Medavakkam, afin de recenser tout simplement les divers
moyens de transports qui s'entrecroisaient sur la chaussée. Ces
observation ont été effectuées de 6h30 du matin à
20heure, prenant ainsi en compte les deux plages d'heures de pointes de la
journée : de 7h30 à 9h30 le matin et de 5h à 20 heure
l'après-midi1. En prenant compte de l'importance de la
circulation sur ce tronçon de voie j'ai très vite restreint mon
calcul à l'unique prise en compte des transports de masse : bus publics,
maxi-cab et bus privés, sur les deux voies donc sur le sens
Velachery/Medavakkam autant que sur le sens Medavakkam/Velachery. Devant les
nombre impressionnants des deux-roues ainsi que des rickshaws et share
rickshaws, j'ai renoncé à en faire le compte. Quant aux taxis ou
au voitures personnelles c'est leurs rareté et le poids du recensement
sur les bus et maxi-cab qui m'y a fait renoncer. Cependant, observer
1 Déterminée d'après les
questionnaires d'enquêtes adressés aux employés du secteur
des transports
le flux de la circulation pendant une journée m'a tout
de même permis quelques considérations étrangères
aux transports de masse qui seront exposée brièvement dans les
résultats de cet exercice. Cet exercice concluant à des
résultats dont la valeur scientifique pourrait être
discutée, nous avons décidé postérieurement de les
appuyer sur des vérifications auprès des différents
acteurs concernés, qui seront exposées tout au long de cette
partie.
-Analyse caractéristique des différents
moyens de transports et signification idéologique :
Un larges choix de moyens de locomotion se distingue sur les
routes indiennes en général, du véhicule tracté par
des animaux aux voitures individuelles puissantes. Nous allons ici
détailler les véhicules rencontrés à Medavakkam et
Chennai au cours de notre recherche et en aborder les principales
caractéristiques.
Les véhicules individuels :
La bicyclette et les deux roues motorisées : Selon
la « Motor Transport Statistic »,
établies par le gouvernement, les deux- roues
représentent 39% des véhicules total présents sur le
territoire indien. Ces chiffres sont forts en raison de la forte croissance des
deux-roues motorisés dont nous avons fait part dans notre
première partie. A Medavakkam, sur la Velachery Road, un stand de
financement des banques Bajaj pour encourager les crédits à
l'achat de motos de plus de 125 cm3 a attiré notre attention. Ces
crédits sont facilement abordables pour la classe moyenne
émergente avec des taux de remboursement ne
dépassant pas les 2.5% et s'étalant sur Photo 8 :
vente de motos à crédit dans Medavakkam
plusieurs années. Grace à ces facilités et
à la forte croissance du pouvoir d'achat, les indiens sont de plus en
plus à accéder à ces moyens de locomotion qui au vue des
problèmes de trafic et d'attente évoqués dans la
première partie, deviennent synonyme de liberté de
mobilité
accrue. Une grande majorité des individus
interrogés lors du questionnaire de mobilité les
préfèrent aux voitures pour leur prix raisonnables, leur
consommation moins gourmande en essence, leur manoeuvrabilité et leur
facilité de parcage.
Photo 10 : L'Ambassador ; voiture symbole de
l'Inde
La voiture :
Les possesseurs d'une voiture personnelle sont encore
très largement minoritaires à Medavakkam, à l'image de la
situation à Chennai. Selon les statistiques nationales, nos travaux
personnels sur les mobilités et l'observation du trafic, ils
représenteraient grossièrement 5% de l'ensemble des
véhicules. Ils sont souvent la propriété des emplois
à revenus élevés, à l'image des cadres des IT
Technologies résidents à Medavakkam.
Cependant les voitures font aussi usage de taxi, à
l'image des Ambassador qui parcourent Chennai. Cependant ces taxi ne
s'aventurent que très rarement hors de la ville et il ne m'a pas
été donné d'en apercevoir à Medavakkam.
Le chariot à boeufs : Traditionnellement
utilisé pour les marchandises agricoles, le chariot à boeufs,
quasiment inchangé depuis l'antiquité en Inde, reste un moyen
courant de transport de marchandises de toutes sortes. Il est loin d'être
rare, notamment en périphérie urbaine de compter des chariots
à boeuf dans le paysage routier. Ses fonctions ont muté notamment
dans le transport de marchandises industrielles ou de construction, à
l'image de l'espace périurbain en mutation entre sa vocation rurale
initiale et ses nouvelles perspectives
économique dans le secondaire et le tertiaire. Etant un
véhicule lent, le chariot à boeuf fait parti des facteurs de
ralentissement du trafic routier et de la dangerosité des routes.
Les véhicules collectifs :
-L'auto rickshaw :
L'auto rickshaw est aussi appelé pousse-pousse
automatique ou automobile-wallah du nom de la carlingue protégeant le
conducteur. C'est un triporteur qui peut transporter trois passagers. Il est
équipé d'un moteur à deux-temps dans sa version classique
et a trois temps dans sa version moderne1.
Photo 11 : Auto rickshaw aux couleurs du Tamil
Nadu
Le share rickshaw2 : Aussi appelé «
polaamboo vans » à Chennai, les share rickshaws fonctionnent
quasiment sur le même principe que les autos rickshaws, à la
différence de leur taille, de leur clientèle et de la longueur de
leu trajets. Plus long que les simple rickshaws, ils peuvent transporter
jusqu'à huit personnes, en effectuant des distance allant de 10 à
15 kilomètres pour récupérer l'ensemble de ses passagers,
qui se rendent vers unes direction quasi similaire pour éviter des
déplacements à moitiés charge. Les share rickshaws
effectuent en général de plus grandes distances que les autos
rickshaws, et se déplacent plus fréquemment en milieu rural ou en
liaison périphérie/ centre urbain. En compétition avec les
rickshaws, ils sont néanmoins beaucoup moins nombreux que ces derniers
et il est rare d'en croiser à Medavakkam. En revanche, à
Velachery se trouve une station se share rickshaws qui fait souvent le relais
à la descente du bus entre Medavakkam et Chennai.
1 Nous reparlerons du fonctionnement de ce moyen de
transport dans le dernier chapitre de cette partie.
2 Voir photo en annexe
Le bus de ville1 : Le bus de ville est un
véhicule de 30 sièges. A Chennai il appartient à une
compagnie publique de transport, la CTM. Les bus public circulent à
Chennai ainsi que dans son aire métropolitaine.
Le maxi-cab ou mini van2 : Les maxi-cabs
sont des véhicules de huit passagers qui circulent quasiment à la
manière d'un système de bus public. Leur principale
différence c'est leur appartenance au secteur des transporteurs
privés. Ils sont surtout implantés en zone périurbaine,
là ou ils trouvent plus facilement des passagers non desservies par les
réseaux de bus public de la ville.
Le bus d'Etat: Les bus d'Etats se distinguent des pus
publics par leurs carrosseries qui n'arborent pas les couleurs bleues de la
CMT. Ils servent uniquement aux transports de longues distances à
travers l'Etat et aux transports transrégionaux à travers le
pays. Leur terminus à Chennai est principalement implanté dans la
Koyambedu Bus Station3.
Photo 12 : Un bus d'Etat arrive à la
Koyambedu Station
-Estimation du trafic des transports de masse entre
Medavakkam et Chennai :
Par transport de masse, on figure ici des engins capables de
transporter plus de huit personnes, excluant ainsi les autos rickshaws et les
share-rickshaws qui en théorie sont limités à ce nombre.
Pourtant il est important de noter qu'en excluant les modes de locomotion
personnels (majoritairement les deux-roues, et quelques automobiles), ce sont
les rickshaws qui sont les plus nombreux sur le paysage routier de
Palikkaranai. Nous reviendrons sur leur
1 Voir photo en annexe
2 Idem
3 Cf. Première partie, chapitre sur les plans
d'urbanismes.
nombre et les raisons de cette fréquence dans le trafic
dans le sous-chapitre qui leur sera consacré.
Les transports de plus de huit personnes se scindent en deux
catégories principales : les transports publics, bus dépendant du
réseau de la MTC, et les transporteurs privés. Cette
dernière catégorie regroupe sur notre étude les maxi-cabs,
les bus de tourisme, les bus scolaire et enfin les bus d'entreprise. Le tableau
10 nous permet de voir en une journée la part des fréquences de
passage sur la Velachery Road de ces différentes catégories de
transport de personnes.
Tableau 10 :
Part des différentes catégories de
transport de masse (dans le total des transports de plus de
8 personnes)
Public bus MTC Maxi-cabs College bus Tourist bus Staff bus
Source : Auteur
Les bus publics sont de loin les plus fréquents puisque
ils représentent 61% de l'ensemble des autres transports de masse.
Viennent ensuite les maxi-cabs avec 19%, puis les bus
scolaires (12%), les bus d'entreprise (76%) et enfin les bus de tourisme (2%).
Tout les bus publics appartiennent à la MTC, aucun bus de ligne d'Etat
n'empruntant cette route pour sortir de la ville. Les maxi- cabs
observés appartiennent à 10 compagnies différentes. Nous
reviendrons sur leur organisation et leur fonctionnement dans notre
troisième chapitre sur le marché des transporteurs
privés.
Les bus scolaire observés dépendent de 24
écoles ou université (collège) différentes. Il
s'agi de : SRM Institute of Science & Technologies, SRR engineering
College, Assam Memorial College of Art and Science, Jerusalem engineering
College, Prince College, SREC engineering College, KC Technologies' College,
GKM College, SRM Deemed University College, Saliyamabada University, Anamalai
University, Tagore engineering College, Chennai Bowivakkam College, Dimi
College, Chidambaram College of Nursing, Jeepiar
engineering College, Santhamaria School, Magdalene School,
Christ the King School, Saint Antony Matric School, Baynes Baptist Church
School, Zion School, Vidhya Matric School, Barathy Vydyalaya School, Bethel
School, et enfin, Institute for specials child.
Les écoles recensés se trouvent toutes à
Medavakkam ou dans des villages proches ou encore jusqu'à Chennai. Les
universités sont elles localisées dans l'aire
métropolitaine ou les villages voisins de Medavakkam, et il en existe
plusieurs vers Sholinganallur spécialisée dans les hautes
technologies et participant à la structuration du IT Corridor.
De même à Medavakkam se trouve une branche de
l'Université de Chennai spécialisée dans les sciences. Ces
spécialisations fournissent des témoins supplémentaires de
l'importance de l'IT Road dans le processus de développement de
Medavakkam. Quasiment tout les bus scolaires sont de la taille d'un bus
standard excepté ceux situé plus loin du village qui se divisent
souvent grâce à de petits minibus ou vans pour effectuer le
ramassage scolaire, celui-ci concernant du fait de l'éloignement de
l'établissement de moins en moins d'enfants. Les couleurs des
écoles ou collèges sont inscrites sur ces véhicules ce qui
a facilité leur identification.
Les bus d'entreprise sont majoritairement de la taille de bus
de ville et dans une plus petite mesure similaire à des minibus ou des
vans de huit places. Ils sont bien souvent dans un état neuf, spacieux
et confortable et plus encore quand ils appartiennent à des entreprises
importantes dont ils servent aussi de vitrine pour la marque, apposée
sur le flanc et l'arrière du véhicule. En une journée de
semaine, nous avons pu dénombrer 29 passages de ces véhicules,
appartenant à des compagnies multiples et aux occupations
différenciées. Il s'agit notamment d'Asian Paint, Celebrity
Fashion, Alsec Techno Ltd, Sankara hospital medium, Roverco group, ACL staff,
Magnum Clothing Ltd, Ashok Material et Ratha Overseas staff bus. Certaines
compagnies comme Roverco ou Ratha Overseas sont basées à Chennai.
Les autres sont localisé dans les alentours de Medavakkam comme Asian
Paint Ltd à Madipakkam, sur la Medavakkam main Road ou Celebrity Fashion
sur la Medavakkam Tank Road. Beaucoup de ces entreprises notamment celles
liées à l'industrie chimique (peinture, ciment..) ou à
celle de la confection (comme Magnum Clothing Ltd ou Celebrity Fashion) font
partie des moteurs de spécialisation industrielle de Medavakkam.
En ce qui concerne les bus de tourismes, ils ne
représentent que 2% du total des passages. On a regroupé sous le
terme bus de tourisme tout les vans, minibus ou autocars, appartenant à
des agences de voyage régionales ou nationales.
Parmi eux on compte Sri Vermurgai Tourist et Senthmara Guest
house qui sont respectivement une compagnie de visite de places
d'intérêt régional implantée à Chennai, et un
bus appartenant à une maison d'hôte des abords de
Mahabalipuram.
II- Gouvernance publique, victoires et
défaillances
Apres avoir étudié les mobilités des
habitants de Medavakkam et avoir observé au ras du macadam le trafic des
bus publics, nous avions déjà une idée du retard de leur
système de fonctionnement malgré leur fréquentation
relative.
Cependant, des entretiens plus poussés avec certains
usagers et surtout avec les employés de la compagnie des bus de ville,
nous ont permis de confirmer ces impressions et même de découvrir
d'autres défaillances du fonctionnement des bus publics.
II-1 Le système de transport public vu par ses
usagers
Tout d'abord, et même si ces témoignages ne
relèvent pas de la recherche scientifique pure et n'ont peut être
pas de réelle valeur, ce sont les récits des usagers qui nous ont
aiguillés vers les problèmes structuraux.
Schéma 11 :
Parts des motifs d'utilisation des bus
publics
2%
7%
4%
42%
41%
4%
Pas d'autres moyens de locomotion
Sécuritaire Bon marché
Permet de se déplacer en groupes nombreux
Confortable
Lors de longues distances
Source : Auteur
C'est ainsi que ce graphique nous montre que majoritairement
l'acte de prendre le bus public est plus entraîné par
défaut que par choix. Ce qui est un point important de notre recherche
sur lequel nous reviendrons.
De plus, en posant la question ouverte « que pensez-vous
de la qualité des transports ? » on obtient certes des
réponses désordonnés, simplement qualitatives ou bien
argumentatives, mais qui nous donnent une bonne idée des
défaillances à stigmatiser par la suite. Les réponses
à cette question ont été retranscrites sous forme
d'histogramme, en tenant compte de la part relative des avis des usagers
puisque étant une question ouverte, nous avons pu rencontrer quelquefois
des réponses multiples. Il faut donc considérer que les
pourcentages notés ici représentent bien le nombre total
d'émission d'un avis par rapport à toutes les réponses
émises.
Schéma 12 : Estimation du service de bus
publics par les usagers :
Que pensez- vous de la qualitées des bus
publics?
0% 10% 20% 30%
part des avis des usagers
En progrès
Meilleure que les autres Etats
Dangereuse
Carrosserie et moteurs vétustes
Trop bondé
Inconfortable Pas à l'heure Tres mauvaise Mauvaise
Bonne
Assez bonne
Source : Auteur
Il saute immédiatement aux yeux que les usagers
interrogés ne sont majoritairement pas satisfaits de leurs transports
publics. En effet, 49% des avis émis considèrent la
qualité des bus publics comme mauvaise ou très mauvaise. On
relève aussi par ordre d'importance, les critères de la
vétusté, de la trop forte fréquentation, de l'inconfort,
du retard, et de la dangerosité (accidents trop fréquents).
Cependant 2% des avis émis notent des progrès dans le
fonctionnement des bus public et considère que sa qualité est
meilleure que dans d'autres Etats.
II-2 L'avis des employés de la compagnie de bus
publics :
-Description et organisation de la profession
:
Photo 13 : Le receveur de bus
Interroger des chauffeurs de pus public est difficile,
dès leur arrivé le matin au dépôt de bus, pas une
minutes n'est perdue pour prendre son service, et le soir après avoir
effectué leur journée il est difficile d'obtenir un moment pour
un entretien. C'est donc pendant les trajets même, tout en roulant, que
nous avons questionné les employés de la compagnie des bus
publics. Pas de crainte à avoir sur une quelconque dispersion du
chauffeur dans sa conduite puisque c'est le receveur, son binôme dans le
bus, qui nous répondait la plupart du temps. Les chauffeurs effectuent
en effet toujours leur service en paire avec un autre employé dont le
rôle est de
rabattre les usagers en leur signalant la destination du bus,
de valider et de vendre les titres de
transports, et de superviser les arrêts du bus.
Le receveur est indispensable à la bonne marche du
véhicule puisque la signalisation des destinations des bus n'est pas
toujours claire, à cause de la vétusté du cadran frontal,
de plus sa place à l'arrière du bus près d'une des sorties
lui permet d'avoir une vue idéale des passagers et ainsi de signaler
idéalement les arrêts et les redémarrages au chauffeur.
Pour se faire une petite sonnette est située à coté de son
siège, bien souvent remplacé par une tape sur la carrosserie
lorsque l'installation n'est plus en état de marche.
Nous avons interrogé 3 couples chauffeur/receveur, qui
ont répondus à un questionnaire rapide, bien vite
transformé en entretien, dès que le bus était rempli et
les billets payés, les enquêtés étant bien souvent
ravis d'avoir l'occasion de s'exprimer sur les défaillances de leur
profession et peut être aussi assurément de s'accorder une pause
dans la journée.
Ces enquêtes ont été réalisées
sur les lignes 5A (Tambaram est/T-Nagar), M2 (Saidapet/Medavakkam) et M 15
(Saidapet/Medavakkam).
Il est possible de décrire sommairement une
journée-type des binômes : ceux-ci ont une heure fixe de
début de service ou ils se rendent au dépôt de Saidapet,
qui est celui ou se trouvent majoritairement les bus desservants Medavakkam.
Il n'existe pas d'horaires réguliers de présence
aux différents arrêts jalonnant le parcours mais une fourchette
horaire des arrivées aux terminus.
Les chauffeurs tiennent en fait essentiellement en compte le
fait qu'ils se doivent d'effectuer huit allers-retours en une journée,
dont la durée est contractuellement de huit heures mais où les
heures supplémentaires n'existent pas en cas de retard sur les 16
trajets quotidiens.
Ces huit heures quotidiennes avec une journée de
congé par semaine sont rémunérées 4440 rp pour le
chauffeur et 4410 pour le receveur par mois.
Auparavant ce salaire était de 3650 rp pour le
chauffeur et 3620 pour le receveur, néanmoins après des
revendications syndicales importantes depuis une dizaine d'années,
ceux-ci ont pu augmenter. Les neufs enquêtés appartiennent
à la South Indian Surface Transport Employees Union1 ,
affiliée à la CITU , un syndicat puissant qui compte 30 000
membres dans toutes les branches de métiers. Ce syndicat permet aux
employés une protection en ce qui concerne le remboursement des
assurances en cas d'accident. De plus, comme nous venons de le voir, il met en
place des lobbies afin d'influer sur la régulation des salaires. Il faut
signaler qu'en ce qui concerne les chauffeurs de bus, celui-ci est inferieur au
Gouvernment Basic Salary2. L'affiliation à la SISTEU est donc
très suivie du côté des chauffeurs3.
-Des problèmes liés à la profession
révélateurs de la faiblesse des bus publics :
Dans un second temps, après avoir questionnés
les employés sur les désagréments perçues dans leur
métier, nous leurs avons demandé de fournir un ordre d'importance
aux différentes situations rapportées.
Celui-ci est rapporté dans le tableau 13.
1 SISTEU
2 Salaire minimum Indien
3 Nous allons voir par la suite que l'affiliation
à ce syndicat concerne aussi les autres catégories de chauffeurs
dans notre chapitre sur le secteur privé
Tableau 13 : Désagréments
rencontrés par les employés des bus publics, par
ordre d'importance :
3
Mauvais état
des chaussées
4
Confrontations avec
les usagers
5
État de marche
|
|
Confrontations
|
|
|
|
|
|
|
du moteur
|
|
|
avec la police
|
|
|
|
|
1
Trafic
2
(De 1 à 5, 1 étant le désagrément
le plus important)
Source : Auteur
D'après le tableau, le problème majeur que
rencontrent les employés lors de l'exercice de leur profession est
l'état de marche du moteur. Il apparaît que l'apparence de
décrépitude
Photo 13 : L'état des bus de ville
extérieure des engins utilisés est en accord avec
leur santé mécanique. Tous les employés interrogés
ont mentionné la forte fréquence des problèmes de moteurs.
Ces problèmes sont fortement handicapants lorsqu'ils surviennent au
milieu du service car ils contraignent les
binômes à faire appel aux mécaniciens de la
compagnie et à attendre leur venue et la réparation tout en
prenant un retard croissant sur les huit allers-retours obligatoires. Pour
parer à ces soucis qui sont fréquents, les employés,
connaissant mieux leur engin de pannes en pannes, réparent même
parfois eux-mêmes lorsque ils en sont capables.
Le principal problème de ces défaillances
mécanique est donc l'allongement pénible des journées de
travail.
Le rallongement des journées de travail est aussi
crée par le second facteur de désagréments pour les
employés : le trafic.
Comme nous l'avons montré dans la première
partie de notre rapport, le trafic est encore un fléau à Chennai,
et les chauffeurs de bus sont parmi les premiers à en pâtir du
fait de leur incapacité à se faufiler dans la circulation comme
les deux-roues et les rickshaws.
Le troisième facteur mérite quant à lui une
explication, il s'agit des confrontations avec la police.
Un problème récurent en Inde est le fléau
de la corruption, et en ce qui nous intéresse, comment les
fonctionnaires de police profitent de leur autorité sur les citoyens
pour leur soutirer de l'argent.
Unanimement, tout les binômes ont fait part de la forte
propension de la police à leur soutirer des bakchichs pour de multiples
raisons, qui dans le cadre de la législation ne font souvent même
pas l'objet de contraventions.
C'est le cas des arrêts au stations signalée par des
panneaux de la compagnie, mais pour lesquels s'ils veulent repartir les
employés doivent parfois payer.
Ces abus se produisent cependant majoritairement devant de
réels manquements au code de la route comme effectuer un demi-tour sur
la chaussée. Il n'est toutefois pas concevable de régler ces
situations de la sorte, d'autant plus que bien souvent les bus à leurs
terminus ne disposent pas d'aménagements de chaussée permettant
le demi-tour sans traverser la voie.
Vient ensuite le mauvais état de chaussées
abordées dans la première partie du rapport traitant des
infrastructures.
Encore une fois ce facteur est important pour les chauffeurs
et les receveurs, un bus pouvant difficilement manoeuvrer entre des
ornières. Cependant, pour tous, ce facteur est en voie
d'amélioration avec l'accomplissement de travaux sur la Velachery
Road.
Enfin viennent les confrontations avec les usagers même des
bus, dus à l'ivresse de certains, à la fraude et aux autres
diverses incivilités.
III-Le marché des transporteurs
privés
III-1 Un fonctionnement basé sur des libertés
spatio-temporelles accrues
Ce qui fait un des atouts majeurs des transporteurs
privés présents à Medavakkam c'est leur forte
mobilité. Celle-ci peut être imputée à deux facteurs
principaux : le faible encombrement de ces engins, qui ne dépassent pas
huit places au maximum pour les maxi- cabs (bien que ce nombre de passagers
soit bien souvent dépassé dans la pratique), et leur aptitude
à pouvoir occuper n'importe quel bas-côté de la
chaussé à loisir, et ainsi de pouvoir s'établir presque n'
importe où.
Néanmoins, en allant enquêter auprès des
chauffeurs, receveur et responsable de ces véhicules, nous avons appris
qu'ils se partageaient l'espace de manière bien précise.
En ce qui concerne les autos rickshaws, deux grandes
catégories scindent les chauffeurs : les possesseurs du permis
ville1 et les autres. Ce permis permet au rickshaw men de se rendre
à Chennai pour exercer leur profession. Dans les autres cas, la
législation en vigueur dans l'Etat autorise les chauffeurs à
exercer dans un périmètre de 25kms autour de leur lieu
d'habitation. Ainsi les chauffeurs de rickshaw de Medavakkam ont
institué une sorte de terminus au centre du village, sur la Velachery
Road, à l'angle de la Manbakkam Main Road. Photo 15 : La
station de rickshaws de Medavakkam sur la Velachery Road
Ce lieu est stratégique, compte tenu du fait qu'il est
situé à coté d'un arrêt de bus et qu'il fait face
à un autre, tout deux desservant les principales lignes de bus
usitée à
1 Cf. Photographie des permis et licences d'auto
rickshaws et de leur signalement sur le véhicule en annexe
Medavakkam, de plus, un arrêt intermédiaire est lui
aussi situé à proximité, desservant Manbakkam et les
quartiers d'habitation intermédiaires.
Les maxi-cabs quant à eux ne disposent pas de cette
liberté au même degré. En effet, leurs destinations sont
préétablies à la base, ainsi qu'une dizaines
d'arrêts jalonnant le parcours. Cependant ils ont, contrairement aux bus
publics, la faculté de pouvoir s'arrêter à la demande hors
des arrêts lorsqu'ils n'ont pas fait le plein de passagers, de plus leurs
faible encombrement leur permet aussi de louvoyer dans la circulation
jusqu'à un certain point. De plus, ils se postent à chaque
nouveaux départ dans des endroits stratégiques du village ; en
face du bus stand et du terminus des rickshaws que nous venons de localiser.
III-2 Rapport d'une efficacité à court
terme...
Pour faire part de l'efficacité des transporteurs
privés nous avons choisi de souligner plusieurs aspects : le
phénomène de multiplication des véhicules de transport
privés, l'observation de la croissance des métiers de manutention
des véhicules privés et l'étude de la fréquentation
de ces véhicules et des revenus des propriétaires et
chauffeurs.
Pour ce faire nous avons réalisé des
questionnaires d'enquête quasi-similaire à ceux proposés
aux employés de la MTC, s'adressant à 3 compagnies de maxi-cabs,
15 chauffeurs d'auto rickshaws et 2 chauffeurs de share rickshaws. Ces deux
derniers sont établis à Velachery contrairement à tous les
autres enquêtés travaillant à partir de Medavakkam, et dans
la majorité des cas, y résidant.
- La multiplication des véhicules de transport
privés :
Sur la route dans le centre urbain de Chennai, les rickshaws
sont partout. Leur omniprésence dans le paysage urbain posant des
problèmes tant de trafic que de pollution, et une concurrence accrues.
Ces raisons ont poussé le gouvernement à interdire la
délivrance de nouvelles licences pour les rickshaws afin de limiter leur
expansion, cependant nous verrons plus loin que cette directive pose de
nombreux problèmes dans l'exercice de la profession des
rickshaws-mens.
Du coté des maxi-cabs, ceux-ci s'organisent en
compagnies. Il y a 15 agences de maxi-cabs basées à Medavakkam.
Nous avons rencontré les deux plus importantes en ce qui
concerne le nombre de véhicules : Mythili Travel et
Magi companies qui comptent respectivement 5 et 6 véhicules. Mythili
Travel a été crée en 1989 et elle est la plus ancienne
dans le village, dans les deux compagnies les responsables ont
étés très véhéments sur la multiplication
des différentes agences de maxi-cabs depuis une dizaine d'année
et sur une ouverture à la concurrence dans les transports privés
de plus en plus grande.
Photo 16 : Deux maxi-cabs de la compagnie Magi
Des deux cotés, tant celui des autos rickshaws que des
maxi-cabs, on peut donc parler d'une multiplication importante des
véhicules, qu'on peut expliquer par le fort développement du
village évoqué dans notre seconde partie.
-Le développement des métiers liés
à la manutention des véhicules de transport privés
:
Ce phénomène est un puissant marqueur de la
croissance des transports privés puisque les transports publics
bénéficient de leurs propres garages de réparation.
Cependant la multitude d'échoppes de réparation que l'on retrouve
au bord des routes principales de Medavakkam comme du reste de l'aire
métropolitaine, profitent aussi aux deux-roues ainsi qu'au voitures.
C'est donc de l'ensemble des transports excepté des transports publics
qu'elles sont une preuve de croissance.
-Etude de la fréquentation des véhicules et
de la qualité de l'emploi :
4 Les rickshaws et share rickshaws:
Tous les chauffeurs interrogés se déclarent
satisfait de leur emploi en termes de revenu. Dans un pays ou le salaire moyen
d'un fonctionnaire est de 6000 roupies par mois et ou près de 400 000
indiens vivent avec moins de 1500 roupies par mois, la place de rickshaw men
est à envier. En effet, avec un revenu quotidien de 150 roupies et
pouvant aller jusqu'à 200 roupies, après le paiement de la
location du véhicule s'il y en a et du pétrole, les chauffeurs
gagnent un salaire plus qu'honnête pour les personnes qui
possèdent leur véhicule. Cependant il reste modeste pour ceux qui
doivent déduire chaque jour le prix de la location du véhicule,
qui peut aller jusqu'à 150 roupies par jours. Beaucoup de rickshaw men
ont fait appel au « money landers »1et ne sont
réellement satisfait de leurs salaires qu'après le crédit
payé. Les propriétaires de rickshaws interrogés sont tous
très satisfait de leurs revenus. Comme mode de transport, le
pousse-pousse automatique s'avère être un employeur important en
Inde. Beaucoup de jeunes gradués conduisent les pousse-pousse
automatiques. Toutes les banques nationalisées principales de l'Inde
offrent des prêts pour acheter des arrangements de dessous d'un
auto-emploi. Le nombre de courses par jour varie entre 10 et 20, avec un cout
moyen de 15 roupies par courses. 53% des rickshaw men interrogés ont
déclarés souffrir de la concurrence en raison du fort nombre de
rickshaws. C'est le problème principal de la profession.
4 Les compagnies de maxi-cabs :
Ce fonctionnement est différent dans les compagnies de
maxi-cabs qui fonctionnent un peu à l'image de la compagnie de bus
publics en termes de salaire. Il existe un salaire fixe quotidien de 125
roupies pour le chauffeur et de 75 roupies pour le contrôleur. Ce salaire
est inférieur à celui offert par les compagnies de bus
d'Etat2cependant les employés interrogés ne s'en
plaignent pas en raison du meilleur état général de leur
véhicule et de leur temps de travail plus restreint puisque dans
l'ensemble des compagnies on n'exige de la part de chaque binômes
d'employés que 6 aller-retour par jour vers leurs destination.
Les maxi-cabs ne partent pour leur destination que lorsqu'ils
sont complets, et âpres avoir discuté avec les employés,
remplir un véhicule ne semble pas poser de problème. La
fréquentation des maxi-cabs est donc très bonne, ce qui explique
leur multiplication.
1 Crédit accordé avec le même
principe que les Grahmins Bank, ou on rembourse avec un très petit
intérêt ou pas du tout, mais à une fréquence plus
grande.
2 Cf. chapitre sur les transports publics.
III-3 L'enlisement à long terme de la profession
-Les problèmes liés à la
législation
-La restriction de l'attribution des licences et la
limitation des véhicules : Chaque auto rickshaws doit
être équipé d'une licence, représenté sur le
véhicule par un rond rouge barré et numéroté, ces
licence sont très chères, souvent inaccessibles en début
de carrière ce qui explique que bien souvent les rickshaws men loue un
véhicule possédant une licence à des propriétaires
à la retraite ou reconvertis. De plus devant la croissance
considérable des rickshaws, le gouvernement central a interdit il y a
quelque année l'attribution de nouvelles licences. Les véhicules
équipés d'une licence se revendent donc aujourd'hui très
cher ce qui explique que prés de 87% des rickshaw men interrogés
à Medavakkam détiennent un rickshaws loué, étant
incapable de le payer en une fois.
-Le décalage entre les tarifs imposés
par la loi et les tarifs réels : Le gouvernement central,
devant les abus relevés par les usagers des autos rickshaws et taxis, a
fixé un prix moyen par course de 8 roupies, ce prix étant
basé sur un prix fixe par kilomètre. Pour appliquer cette lois,
il est aujourd'hui obligatoire pour tout les rickshaws d'avoir un compteur
kilométrique en état sur leur véhicule. Or en rencontrant
les rickshaw men, ceux-ci m'ont éclairé sur
l'impossibilité d'utiliser ce compteur kilométrique depuis
quelques années. En effet le prix de l'essence à l'échelle
planétaire a considérablement augmenté depuis quelque
année, ce qui se ressent en Inde, et les taux qui avaient
été fixé par le gouvernement il y a quelque année
ne sont aujourd'hui plus applicable. Le prix du carburant étant en mars
2006 à 47 roupies du litre, les chauffeurs ont augmenté leurs
tarifs par nécessité. Le prix moyen actuel d'une course est donc
de 15 roupies environ et les compteurs ne sont plus utilisés à
Chennai en ca qui concerne les rickshaws.
-La réglementation concernant la pollution
: Comme nous l'avons détaillé dans notre première
partie, les problèmes de pollution sont majeurs à Chennai. Dans
ce contexte depuis deux ans, la CDA pousse les propriétaires de
rickshaws à changer leurs moteurs à deux-temps pour des versions
à quatre-temps moins polluants. Ce qui n'est pas encore devenu
obligatoire inquiète néanmoins les chauffeurs qui vont devoir
très prochainement investir pour l'équipement de leur
véhicule. Cependant cette directive ne concerne que les possesseurs du
permis ville.
-Les autres problèmes rencontrés
Problèmes majeurs rencontrés par les
rickshawmen
7%
65%
20%
8%
abus policiers
problèmes propres aux clients
embouteillage manque de client
Source : Auteur
Le graphique suivant a été réalisé
en demandant aux chauffeurs de rickshaw quel était pour eux le
problème majeur rencontré dans l'exercice de leur profession. Les
résultats nous montrent qu'à 65% le principal problème
vient des abus policiers, suivi par les problèmes de clientèle,
et les embouteillages dans une moindre mesure.
Nous allons ici expliquer ces termes. Les abus policiers sont
décris par les chauffeurs comme des témoins flagrants de la
corruption qui ronge le pays. Il s'agit pour les fonctionnaires de police, sous
prétexte d'infractions réelles ou bien souvent hasardeuses,
d'extorquer des sommes importantes aux rickshaw men en l'échange de
l'annulation de la contravention. C'est le même phénomène
que celui relevé auprès des chauffeurs de bus.
Les embouteillages représentent 20% des
problèmes. Paradoxalement, en ce qui concerne la circulation au centre
ville, c'est bien souvent les couloirs spéciaux de circulation
réservés aux rickshaws qui semblent retarder ces derniers. Ces
couloirs sont en effet en place pour fluidifier le trafic et empêcher les
incessants louvoiements des petits véhicules de transport privé
ce qui fait rager certains rickshaw men qui sont connu à Chennai pour
être parmi les plus intrépides confrontés à la
circulation.
Les problèmes propres aux clients concernent les passagers
ivres ou indécis.
Enfin, le manque de client est caractéristique des
rickshaw mens qui ont le permis ville ou exercent leur profession sans clients
réguliers. A l'image de ceux qui attendent les passagers à la
CMBT, et sont prêt à en venir aux mains pour empêcher un
conçurent de leur voler leur client potentiel.
-Conclusion du fonctionnement des petits transporteurs
privés
En conclusion on peut dire que les principaux problèmes
affectent les plus petits transporteurs privés, c'est-à-dire les
autos rickshaws. Leur présence à Medavakkam était
auparavant très lucrative mais elle est de plus en plus
concurrencée par les maxi-cabs et les bus publics. En effet le
changement intervenus dans ce village urbain ont contribué à
densifier le réseau de bus public et à étendre l'influence
des maxi-cabs et des share rickshaws qui par leur plus faible cout sont
d'avantage sollicité par les usagers. Les auto rickshaws sont
désormais trop nombreux sur l'agglomération et rencontrent des
difficultés à percer dans ce milieu.
Le rapport de force entre secteur privé et secteur
public dans le milieu du transport est très difficile à jauger.
Chacun des transporteurs sont utilisés par les usagers pour des trajets
différents et dans ce système toutes les catégories de
transporteur ne s'y retrouvent pas. Les bus public sont très
sollicités pour les liaisons vers la ville, les maxi-cabs
appréciés pour les liaisons inter-villages, et les rickshaws
jonglent entre ces deux alternatives avec une
multitude de problèmes. Les transports sont à
l'image du village, en pleine mutation.
CONCLUSION
Notre travail de recherche sur le terrain nous a fait cheminer
sur la double problématique de la mobilité et des transports dans
le contexte de la périurbanisation, et les éléments de
conclusion que nous avons obtenus sont les produits d'une étude
multimodale. Plus simplement, en débutant mon travail de recherche je me
suis intéressé à des problématiques très
variés autour du thème général des transports, qui
étaient difficiles à lier entre elles, mais qui replacées
dans le contexte d'une étude dynamique à l'échelle d'une
périphérie urbaine et de son pole urbain, ont permis
d'intéressantes constatations.
Lorsqu'on parle de villes engagées dans des processus
de croissance important comme dans ce rapport, on doit toujours se
préserver de segmenter l'étude de phénomène trop
isolés et tenter plutôt d'établir une vision a plus grande
échelle.
Nous avons ainsi travaillé conjointement sur la
croissance urbaine de Chennai et de Medavakkam, sur les modes de transports
existants, leur positon face au cadre de gouvernance de la ville et les
mobilités du village périurbain. Tout ces facteurs et ces tenants
du système global des transports sont constamment corrélés
et c'est l'étude de ces liens qui nous a semblée la plus
pertinente.
Nous avons ainsi vu dans la première partie en quoi
consistait le statut de ville en forte croissance urbaine de Chennai et en quoi
cela posait de nouveaux problèmes aux organismes de gestion des
transports.
La fonction, la taille et la nature particulière de
Chennai est déterminée par son système de transport et
vice-versa. Il existe un haut degré d'interdépendance entre le
développement du système de transport et Les motifs
géographiques de la croissance
économique urbaine. Dans la périphérie de
Chennai, les infrastructures et superstructures liés aux transports ont
du mal à suivre une croissance galopante. Cependant, quand des projets
important sont lancé comme le IT Corridor, ils sont clairement moteurs
du développement des zones qu'ils touchent.
L'étude des mobilités villageoises a quand a
elle permis de comprendre plus pertinemment la problématique même
de mobilité qui réside d'avantage dans le pourquoi que dans le
comment. Les comportements des habitants de Medavakkam sont majoritairement
influencés par des contraintes spatiales, économiques,
culturelles et fonctionnelles.
La question du choix est cruciale dans l'étude des
mobilités car il est difficile de mesurer là ou commence et
s'arrête la possibilité de choix. Il est certain que les personnes
les moins aisées ou disposant d'une mobilité réduite du
fait de leur sexe ou de leur âge, n'auront pas les même
possibilités de mobilité que les autres.
Du coté des modes de locomotions, leur
développement plus ou moins important selon les catégories de
véhicule sont influencés par les mobilités des gens mais
leur organisation et leur fonctionnement propres influencent aussi les modes de
déplacement de ces même individus. Chacun des transporteurs sont
utilisés par les usagers pour des trajets différents et dans ce
système toutes les catégories de transporteur ne s'y retrouvent
pas. Les bus public sont très sollicités pour les liaisons vers
la ville, les maxi-cabs appréciés pour les liaisons
inter-villages, et les rickshaws jonglent entre ces deux alternatives avec une
multitude de problèmes.
Les transports sont à l'image du village, en pleine
mutations privés et publiques.
La disparité forte entre les objets d'étude de
ce rapport qui faisait sa faiblesse puisque il nous a été
difficile d'approfondir de manière exhaustives autant de piste de
recherche différentes, fait aussi sa force, car elle permet une
corrélation de tous les facteurs.
Notre étude a aussi été
réalisée sur une période relativement courte et il serait
intéressant de continuer à étudier les évolutions
du système de transport en place à Medavakkam qui est très
fragile a cause de sa dépendance aux multiples facteurs
déjà évoqués découlant de la mutation
périurbaine.
La géographie me semble réellement l'outil
idéal pour l'étude de ces enjeux urbains à la
croisé de nombreux domaine de recherche, et ce stage de recherche m'a
permis d'en prendre entière conscience.
BIBLIOGRAPHIE
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restitution des données dans la recherche en sciences sociales.
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Map of India
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ONU - Charte du millénaire
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Banque mondiale http://www.banquemondiale.org/
visité le 08/04/06
PNUD - Programme des Nations-Unies pour le développement
http://www.undp.org/french/
visité le 12/04/06
NHDP - National Highway Development Project
http://www.nhai.org/
visité le 12/04/06
CMDA - Chennai Metropolitan Development Authority
http://www.cmdachennai.org/english/index.htm
visité le 10/02/06
ANNEXES
Annexe 1: part du budget 2006 réservée au
secteur des transports publié dans The Hindu.
Annexe 2: Questionnaire d'enquête sur les
mobilités villageoises : SURVEY TRANSPORT AND MOBILITY IN
MEDAVAKKAM
Nom du quartier, de la rue, localisation, remarques:
Identity :
- Age
- Religion
- Caste
- If you are a migrant, place of origin :
Work:
- Do you have a job?
- What kind of job? (indicate the activity)
- Is it a home job?
- If not (answer the following questions):
-Where is it? (name of the place)
- How far is it from your house?
- How do you go to your work?
Bus of the firm/Public bus/Auto rickshaw/Share rickshaw/
Maxi-cab/Car/Motorized two-wheeler/Bicycle/Walk/Other
Weekly or monthly outings:
- Do you go to the temple, the church or mosque?
- Where is it? How far from your house?
- How do you go?
Bus of the firm/Public bus/Auto rickshaw/Share rickshaw/
Maxi-cab/Car/Motorized two-wheeler/Bicycle/Walk/Other - How often do you go?
- Do you go on pilgrimage? How? Where? How often?
- Do you go to the market?
- Where is it?
- How often do you go?
- How do go?
Bus of the firm/Public bus/Auto rickshaw/Share rickshaw/
Maxi-cab/Car/Motorized two-wheeler/Bicycle/Walk/Other
- Where do you go to purchase occasional goods? - How far from
your house?
- How often do you go?
- How do you go?
Bus of the firm/Public bus/Auto rickshaw/Share rickshaw/
Maxi-cab/Car/Motorized two-wheeler/Bicycle/Walk/Other
- Do you usually go to any other place weekly or monthly (leave
Medavakkam)?
- Where is it?
- How often do you go?
- How do you go?
Bus of the firm/Public bus/Auto rickshaw/Share rickshaw/
Maxi-cab/Car/Motorized two-wheeler/Bicycle/Walk/Other
Opinion:
- Why do you use mass transport (public bus) (only if the people
use mass transport)?
- What do you think about the quality of mass transport? - Do you
want to change your way of transport?
Annexe 3:
QUESTIONNAIRE D'ENQUETE AUPRES DES CHAUFFEURS DE
RICKSHAWS
Identité :
- Age :
- Religion :
- Caste :
- Si vous n'êtes pas originaire de Medavakkam, dans quelle
ville êtes vous né ?
- Ou vivez-vous actuellement ?
Profession :
- Êtes-vous propriétaire de votre rickshaw ?
- Si non, a qui appartient t-il ?
- Travaillez-vous seul sur ce rickshaw ?
- Si non, combien de personnes travaillent sur ce rickshaw ? - Si
oui, comment l'avez-vous acheté (crédit, emprunt, fond
personnel...) ?
- Quels sont vos horaires de travail ?
Distance et mobilité :
- Avez-vous un secteur donné pour travailler, si ou lequel
?
- Combien de kilomètres parcourez-vous en moyenne dans la
journée ?
- Quelles sont vos principales destinations ?
- Combien de courses effectuez-vous par jour en moyenne ?
Gains, rentabilité :
- Quelle est votre consommation hebdomadaire moyenne d'essence
(en litre et en roupies) ?
- Quel est le prix moyen d'une course ?
- Quel est votre salaire moyen journalier ?
- Fournissez-vous le salaire principal de votre foyer ?
Habitudes liées à la profession :
- Qui s'occupe de l'entretien du véhicule ?
- Souhaiteriez-vous améliorer votre véhicule ou en
changer ?
Opinion sur les conditions de travail :
- Êtes-vous satisfait de votre travail ? Pourquoi ?
Aimeriez-vous en changer ?
- Pensez vous que le nombre de rickshaws soit trop important, en
général et à Medavakkam ?
- Que pensez-vous de l'état des routes ?
- Que pensez-vous de l'état de la circulation dans Chennai
et ici ? - Quels problèmes rencontrez-vous dans l'exercice de votre
profession ?
- Avez-vous déjà eu un accident ? Pensez vous que
le rickshaws soit un véhicule sur ?
Lien avec Chennai :
- Voudriez-vous travailler au centre de l'agglomération de
Chennai ? Pourquoi ?
- Vous rendez vous à Chennai ? Si oui, combien de trajets
jusqu'à
Chennai réalisez vous chaque jours ?
- Considérez vous que Medavakkam fasse partie de la ville
de Chennai ?
- Quelles sont les heures d'affluence maximum sur la route qui
relie Medavakkam à Chennai ?
Annexes photographiques :
L'arrêt de bus principal de Medavakkam sur la Velachery
Road qui mène à Chennai
Medavakkam Junction, au carrefour de la Perumbakkam Main Road
et de la Velachery Road.
83
Le macaron de contrôle de pollution, le numéro de
licence et le compteur d'un rickshaw
Un private-rickshaw en réparation
Dans les archives de la SISTEU, un article sur les piquets
de grèves lancés par les syndicats des chauffeurs
Un agent de police réprimandant un rickshaw men mal
stationné
Une preuve de la maniabilité du rickshaw !
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