L'influence des attentats de Casablanca sur la politique antiterroriste au Maroc( Télécharger le fichier original )par el azzouzi el idrissi hicham Université de Perpignan - master II droit privé 2005 |
Section 2 : L'influence du contexte international sur la politique antiterroriste marocaine et la nécessité de reformesL'intervention Après le 11 septembre internationale dans les pays arabes devient très courante, la souveraineté (§I), est atteinte par l'ampleur des attaques terroristes qui prend une forme quasi planétaire et qui dépasse les frontières pour pousser les gouvernements nationaux de changer leur lois(§II) § I : l'antiterrorisme abolit les frontièresSi, traditionnellement, la guerre est une marque de la souveraineté, il en est de même pour la « guerre contre le terrorisme ». Elle est à la fois opération de police, gestion de la société par contrainte et acte de guerre. La lutte antiterroriste abolit la distinction entre ennemi et criminel. La guerre se réduit à une simple opération de police contre des Ëtats voyous. De même, tout mouvement social peut être criminalisé au nom de l'action contre le terrorisme. Les textes permettent de poursuivre toute action radicale d'un mouvement dont l'objectif est d'influencer la politique gouvernemental ou de faire pression sur une organisation internationale.25(*) A : Un acte constituantLa lutte antiterroriste est présentée comme une lutte de longue durée contre un ennemi virtuel, constamment redéfini. Elle a pour objectif de redessiner l'organisation de la société, à travers ce processus, le droit pénal acquiert un rôle constituant. Il est un acte d'autorité suprême. Les législations antiterroristes ont pour objet de mettre en place des procédures pénales dérogatoires à tous les du jugement. Elles consacrent la primauté de la procédure sur la loi. Ici il s'agit de la domination de la procédure d'exception. Quant aux mesures associées, elles mettent en place un contrôle de la vie privée par la rétention de données liées au trafic Internet et la violation du secret du courrier électronique. La mutation est si significative qu'elle conduit à un bouleversement de la norme, les dérogations du politique, la procédure d'exception se substitue à la constitution et à la loi. Les dernières lois antiterroristes ne résultent plus, comme les législations précédentes, d'initiatives nationales relativement indépendantes les unes des autres, mais elles sont de plus en plus dictées par des instances ou des Etats étrangers (exemple : G8, le Conseil de l'Europe ou l'Union européenne). Cela a pour effet de généraliser ce type de lois à l'ensemble des Etats, même à ceux d'entre eux qui n'ont jamais été confrontés à une menace terroriste. Les dernières législations sont une réponse des Etats nationaux à leurs obligations internationales, c'est-à-dire essentiellement aux demandes américaines. La place occupée par les Etats-Unis dans ce processus est d'ailleurs une spécificité de la situation actuelle. La lutte antiterroriste est constitutive de leur direction considérée comme hégémonique . En ce qui concerne l'interception légale des communications, les textes les plus récents répondent étroitement aux spécifications réclamées, depuis de nombreuses années par le FBI. En matière de criminalité informatique, cette police fédérale américaine a également la possibilité d'organiser directement les polices de la plupart des autres états. La capacité dont disposent les Etats-Unis d'influencer étroitement le contenu des textes légaux des autres Etats concernant la lutte antiterroriste confirme leur rôle d'avant-garde dans la modernisation du pouvoir au niveau mondial. Les dispositions prises à la suite du 11 septembre permettent à l'exécutif américain de pousser plus avant la subordination des appareils policiers et judiciaires européens et des autres nations - y compris le Maroc - à leurs système politique. Les accords d'extradition et de coopération judiciaire, récemment signés entre les Etats-Unis et l'Union européenne, font des tribunaux spéciaux américains la base sur laquelle se construit le `'nouvel ordre mondial''. Ces accords, dont la plus grande partie reste secrète, sont, pour ce qu'on en sait, construits de telle manière que les autorités américaines puissent en permanence poser et faire aboutir de nouvelles exigences. La coopération policière avec les Etats-Unis autorise également un échange et une utilisation incontrôlable de données personnelles. Les mesures antiterroristes dévoilent encore un autre aspect du rôle joué par les Etats-Unis, celui de la domination directe d'une superpuissance sur les autres Etats. Le premier élément de ce rapport de pouvoir est inscrit dans la capacité légale de privilégier la nationalité américaine en accordant à celle-ci des droits particuliers. Il se manifeste notamment par le traitement différencié établi par les législations américaines entre les nationaux et les résidents de nationalité étrangère. En matière de terrorisme et de criminalité organisée, les tribunaux américains se donnent aussi une compétence universelle, ainsi que des droits extraterritoriaux. Les positions américaines vis-à-vis de l'Irak, c'est à dire le droit que se confèrent les Etats-Unis de renverser tout régime non aligné, constituent l'aspect militaire de ce rapport. Le développement de la coopération internationale dans le cadre de la lutte contre le terrorisme dévoile le caractère organique du droit pénal dans la formation de la structure `'impériale''. L'union européenne et les autres nations se placent sous l'hégémonie américaine en ce qui concerne l'organisation du contrôle des populations. Quant aux Etats-Unis, leurs exigences portent plutôt sur la capacité de leurs institutions policières ou judiciaires de contourner les structures formelles des pouvoirs exécutifs et judiciaires des pays dits partenaires dans la lutte contre le terrorisme . Il s'agit donc pour cet Etat de réclamer des droits particuliers, directement liés à son statut de puissance dominante. La guerre contre l'Irak et la lutte contre le terrorisme représentent deux aspects complémentaires de l'organisation du pouvoir au niveau mondial. La mise en place d'un commandement intégré, l'empire, est une question complexe. Les autres Etats nationaux subsistent, mais sous une forme transformée, ne contenant plus que les matières du maintien de l'ordre et du contrôle social. Ils sont intégrés, comme structures subalternes, à un certain ordre mondial. Cette articulation complexe va soulever quelques problèmes, notamment en ce qui concerne les guerres préventives devant assurer la pérennité du commandement intégré. C'est à ce niveau que se manifestent les divergences entre les nations. Par exemple, les intérêts pétroliers des Etats-Unis sont différents de ceux des compagnies françaises. Tous les Etats ne partagent pas non plus la volonté de l'administration Bush de déstabiliser l'ensemble du Moyen-Orient et de procéder à des politiques d'occupation directe des territoires conquis. La réussite de la politique interventionniste américaine suppose que, comme dans la guerre du Golfe de 1991, les Etats nationaux abandonnent leurs intérêts spécifiques au profit de ceux des Etats-Unis. Le développement du second aspect de la direction américaine, le contrôle des populations, pose moins de problèmes aux différents Etats et crée donc moins de tensions dans l'exercice d'un commandement globalisé. Bien que beaucoup moins médiatisé, ce processus est largement engagé. Au cours des dix dernières années, les Etats-Unis ont émis un ensemble de revendications en matière de lutte contre la criminalité organisée et le terrorisme. Ces exigences ont été progressivement prises en compte par les autres Etats et ont profondément transformé l'approche pénale de ces pays. B : Les effets du 11 MarsA l'occasion des attentats du 11 mars 2004 en Espagne, nous avons vu apparaître sur nos écrans de télévision un ensemble de « spécialistes » du terrorisme construire un amalgame entre Al-Quaeda, l'ETA et divers réfugiés politiques, faisant du `'terrorisme'' un terme générique devant se substituer à l'ensemble des situations concrètes. Une des mesures unanimement réclamée, pour conjurer ce péril multiforme, fut la mise en place immédiate du mandat d'arrêt européen. Le mandat d'arrêt européen permet une remise quasi automatique, par un état membre, d'une personne demandée par une autorité judiciaire d'un autre état membre. Par rapport aux procédures d'extraction, ce mandat supprime tous les contrôles politiques et judiciaires portant sur le fond et la légalité de la requête, ainsi que les recours possibles contre celle-ci. La demande est ainsi inconditionnellement satisfaite et légitimée par les autres pays, quelle que soit sa légalité ou sa conformité aux principes d'un état de droit. Le mandat devait entrer en vigueur le 1er janvier 2004. Adoptée au niveau de l'Union européenne et déjà intégrée dans la plupart des législations nationales, cette mesure peinait cependant à se mettre en place. Une des premières conséquences.. * 25 « La stratégie du terrorisme » o.p.cité |
|