L'évolution de la position française en
matière d'opérations de maintien de la paix :
Malgré l'attachement français au droit
international facteur de paix, les opérations de maintien de la paix de
l'ONU ne furent pas un terrain d'action immédiatement
privilégié par la diplomatie française : elles virent
le jour dans un contexte de guerre froide et d'affirmation des nationalismes
menaçant les positions coloniales françaises. Non seulement la
Force d'urgence des Nations Unies lancée pendant la crise de Suez en
1956 avait pour but de freiner les réactions françaises et
britanniques, elle fut de plus décidée via un contournement du
Conseil de sécurité au profit de l'Assemblée
générale, exposant la politique française en Afrique du
Nord au risque d'une ingérence de l'ONU.
Pour les mêmes raisons, la première
opération de paix multidimensionnelle de grande ampleur, l'ONUC au Congo
ex-belge, première expérimentation de l'imposition de la paix,
fut vécue par la France du général de Gaulle comme une
dérive des pouvoirs du Secrétaire général, Dag
Hammarskjöld, cautionnée par les États-Unis, dans un
contexte d'affirmation de l'indépendance française sur la
scène internationale. La fronde française visa à limiter
les pouvoirs du Secrétariat dans la conduite des opérations de
paix, en replaçant le Conseil de sécurité au coeur du
processus et en obtenant la création d'un budget spécial
consacré aux opérations de paix distinct du budget ordinaire de
l'Organisation.
Le premier engagement significatif de la France a lieu au
Liban en 1978, avec l'envoi de 1380 soldats français placés sous
la bannière bleue de la FINUL. À la mi-1993, 9000 Casques bleus
sont français, ce qui place la France au premier rang des contributeurs
de troupes. La politique africaine de la France porte également la
marque de cette évolution, avec la participation de plus de 2000 soldats
au sein de la force multinationale sous mandat de l'ONU en Somalie, et la
recherche d'un relais de l'ONU dans le conflit au Rwanda dès mars 1993,
après deux ans et demi de présence militaire dans ce pays.
Cependant, la France peine à se faire reconnaître
les positions privilégiées auxquelles elle aspirait dans la
gestion politique des processus de paix en ex-Yougoslavie et au Cambodge, et la
situation d'impuissance dans laquelle se trouvent ses soldats participant
à la FORPRONU en Bosnie génère de vives critiques et une
grande amertume au sein des Armées françaises. Quant aux deux
opérations en Afrique citées, leurs issues catastrophiques ont
marqué pour longtemps les gestionnaires internationaux des conflits,
conduisant notamment aux lourdes critiques adressées à la France
pendant et après le génocide rwandais.
Le Livre blanc sur la Défense française paru en
1994 demande ainsi la clarification du rôle et des mandats des
opérations de l'ONU, l'amélioration des capacités
d'expertise au sein du Conseil et le recentrage de l'engagement français
sur les priorités militaires et les intérêts nationaux de
la France. En 1995, le président Jacques Chirac court-circuite les
structures de commandement de l'ONU pour répondre aux prises d'otages de
Casques bleus français par des forces serbes. Après les accords
de Dayton, l'OTAN agissant sous mandat du Conseil de sécurité
devient l'option privilégiée dans les Balkans, ce qui se traduit
par une forte participation à l'IFOR (7500 hommes) puis à la SFOR
(2650 hommes), relayée par l'opération de l'Union
européenne EUFOR-Althéa. C'est également le cas de la KFOR
au Kosovo (jusqu'à 4600 hommes), puis de l'ISAF en Afghanistan
après la chute du régime taliban (600 hommes). La France est
aujourd'hui le second contributeur de troupes de l'OTAN.
Après une période de réduction des
opérations de l'ONU et de retrait français vis-à-vis de
son rôle de `gendarme' en Afrique francophone, la Mission permanente de
la France à l'ONU prend l'initiative d'une mobilisation diplomatique
française face au conflit en RDC, qui aboutit à la
création d'une mission de paix en 1999 (la MONUC) puis à
l'opération Artémis en 2003. Bien que constituée
à 80% de soldats français et commandée depuis Paris, la
France étant la nation-cadre de l'opération, l'opération
Artémis est placée sous la direction du Comité
politique et de sécurité de l'Union européen.
L'expérience se déclinera en trois nouvelles missions
européennes en RDC, dans la réforme du secteur de la
sécurité (EUSEC-Kinshasa, dirigée par la France), dans le
soutien à la police civile (EUPOL-Kinshasa) et dans la
sécurisation de l'élection présidentielle de 2006
(EUFOR-RDC), sous commandement opérationnel allemand et commandement de
théâtre français.
Au 31 mai 2006, la participation française aux
opérations de maintien de la paix atteint le 22e rang des contributeurs
de troupes, avec 779 personnels déployés dans onze des seize
opérations en cours, surtout en Côte-d'Ivoire et au Liban, mais
aussi en Haïti, au Kosovo, au Sahara occidental ou encore en RDC. Avec son
engagement au sein de la FINUL en septembre 2006, la France devrait compter
2379 personnels des opérations de l'ONU et se placer au dixième
rang des contributeurs de troupes. Ce déploiement important sous
commandement de l'ONU dessine d'ailleurs une inflexion au regard des pratiques
françaises depuis 1995.
Ainsi, depuis la création de l'ONU et du DOMP, la
France s'est fortement engagée dans la protection et la
préservation de la paix. Elle est présente et impliquée
dans ces missions un peu partout dans le monde et tente d'imposer sa vision de
la diplomatie dans la protection de ses intérêts. C'est en vertu
de cette idée qu'elle a cherché à autant s'investir dans
la Force Intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).
|