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La conception française des opérations de paix

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par Antoine Sauvagnargues
ILERI - Master 2008
  

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L'évolution de la position française en matière d'opérations de maintien de la paix :

Malgré l'attachement français au droit international facteur de paix, les opérations de maintien de la paix de l'ONU ne furent pas un terrain d'action immédiatement privilégié par la diplomatie française : elles virent le jour dans un contexte de guerre froide et d'affirmation des nationalismes menaçant les positions coloniales françaises. Non seulement la Force d'urgence des Nations Unies lancée pendant la crise de Suez en 1956 avait pour but de freiner les réactions françaises et britanniques, elle fut de plus décidée via un contournement du Conseil de sécurité au profit de l'Assemblée générale, exposant la politique française en Afrique du Nord au risque d'une ingérence de l'ONU.

Pour les mêmes raisons, la première opération de paix multidimensionnelle de grande ampleur, l'ONUC au Congo ex-belge, première expérimentation de l'imposition de la paix, fut vécue par la France du général de Gaulle comme une dérive des pouvoirs du Secrétaire général, Dag Hammarskjöld, cautionnée par les États-Unis, dans un contexte d'affirmation de l'indépendance française sur la scène internationale. La fronde française visa à limiter les pouvoirs du Secrétariat dans la conduite des opérations de paix, en replaçant le Conseil de sécurité au coeur du processus et en obtenant la création d'un budget spécial consacré aux opérations de paix distinct du budget ordinaire de l'Organisation.

Le premier engagement significatif de la France a lieu au Liban en 1978, avec l'envoi de 1380 soldats français placés sous la bannière bleue de la FINUL. À la mi-1993, 9000 Casques bleus sont français, ce qui place la France au premier rang des contributeurs de troupes. La politique africaine de la France porte également la marque de cette évolution, avec la participation de plus de 2000 soldats au sein de la force multinationale sous mandat de l'ONU en Somalie, et la recherche d'un relais de l'ONU dans le conflit au Rwanda dès mars 1993, après deux ans et demi de présence militaire dans ce pays.

Cependant, la France peine à se faire reconnaître les positions privilégiées auxquelles elle aspirait dans la gestion politique des processus de paix en ex-Yougoslavie et au Cambodge, et la situation d'impuissance dans laquelle se trouvent ses soldats participant à la FORPRONU en Bosnie génère de vives critiques et une grande amertume au sein des Armées françaises. Quant aux deux opérations en Afrique citées, leurs issues catastrophiques ont marqué pour longtemps les gestionnaires internationaux des conflits, conduisant notamment aux lourdes critiques adressées à la France pendant et après le génocide rwandais.

Le Livre blanc sur la Défense française paru en 1994 demande ainsi la clarification du rôle et des mandats des opérations de l'ONU, l'amélioration des capacités d'expertise au sein du Conseil et le recentrage de l'engagement français sur les priorités militaires et les intérêts nationaux de la France. En 1995, le président Jacques Chirac court-circuite les structures de commandement de l'ONU pour répondre aux prises d'otages de Casques bleus français par des forces serbes. Après les accords de Dayton, l'OTAN agissant sous mandat du Conseil de sécurité devient l'option privilégiée dans les Balkans, ce qui se traduit par une forte participation à l'IFOR (7500 hommes) puis à la SFOR (2650 hommes), relayée par l'opération de l'Union européenne EUFOR-Althéa. C'est également le cas de la KFOR au Kosovo (jusqu'à 4600 hommes), puis de l'ISAF en Afghanistan après la chute du régime taliban (600 hommes). La France est aujourd'hui le second contributeur de troupes de l'OTAN.

Après une période de réduction des opérations de l'ONU et de retrait français vis-à-vis de son rôle de `gendarme' en Afrique francophone, la Mission permanente de la France à l'ONU prend l'initiative d'une mobilisation diplomatique française face au conflit en RDC, qui aboutit à la création d'une mission de paix en 1999 (la MONUC) puis à l'opération Artémis en 2003. Bien que constituée à 80% de soldats français et commandée depuis Paris, la France étant la nation-cadre de l'opération, l'opération Artémis est placée sous la direction du Comité politique et de sécurité de l'Union européen. L'expérience se déclinera en trois nouvelles missions européennes en RDC, dans la réforme du secteur de la sécurité (EUSEC-Kinshasa, dirigée par la France), dans le soutien à la police civile (EUPOL-Kinshasa) et dans la sécurisation de l'élection présidentielle de 2006 (EUFOR-RDC), sous commandement opérationnel allemand et commandement de théâtre français.

Au 31 mai 2006, la participation française aux opérations de maintien de la paix atteint le 22e rang des contributeurs de troupes, avec 779 personnels déployés dans onze des seize opérations en cours, surtout en Côte-d'Ivoire et au Liban, mais aussi en Haïti, au Kosovo, au Sahara occidental ou encore en RDC. Avec son engagement au sein de la FINUL en septembre 2006, la France devrait compter 2379 personnels des opérations de l'ONU et se placer au dixième rang des contributeurs de troupes. Ce déploiement important sous commandement de l'ONU dessine d'ailleurs une inflexion au regard des pratiques françaises depuis 1995.

Ainsi, depuis la création de l'ONU et du DOMP, la France s'est fortement engagée dans la protection et la préservation de la paix. Elle est présente et impliquée dans ces missions un peu partout dans le monde et tente d'imposer sa vision de la diplomatie dans la protection de ses intérêts. C'est en vertu de cette idée qu'elle a cherché à autant s'investir dans la Force Intérimaire des Nations Unies au Liban (FINUL).

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