L'identité et le spectacle vivant à La Réunion( Télécharger le fichier original )par Virginie Verbaere Université Aix-Marseille III - Administration des Institutions Culturelles 2004 |
III. Les vecteurs de l'identitéNous allons aborder ici les vecteurs de l'identité et nous concentrer sur la littérature et surtout sur certains secteurs du spectacle vivant tels que le théâtre et la musique que nous avons choisis comme étant les plus représentatifs. L'art plastique est également vecteur d'une culture mais il n'est pas suffisamment démocratisé ni représentatif à La Réunion pour qu'il soit abordé. A. La littérature créole1) Contexte(a) De l'oral à l'écritLe besoin d'adaptation du français, l'utilisation fréquente de patois régionaux et leur diffusion orale, s'ajoutant à l'isolement causé par l'éloignement de la métropole, expliquent à la fois la distance prise avec la langue française, et la variété des langues créoles d'origine française parlées aujourd'hui dans le monde. Bien qu'issues d'une base commune, ces langues créoles sont devenues en grande partie incompréhensibles entre elles71(*). Le créole s'utilise depuis plusieurs décennies dans la chanson, l'humour, le théâtre et la littérature. Bien qu'il soit très peu utilisé dans les relations de travail et pas du tout dans les actes officiels et les relations internationales, le créole est bien la langue maternelle des réunionnais. Il est couramment utilisé dans la vie quotidienne par la grande majorité des réunionnais. Pendant longtemps, le français est resté la seule langue digne d'être imprimée tandis que les contes s'oubliaient. La langue française avait le privilège de représenter la vie culturelle et les classes dominantes réunionnaises en avaient l'accès privilégié72(*). Tout au long de son histoire, et jusqu'à 1960, la population réunionnaise, dans sa grande majorité, a eu peu de contacts avec l'écrit. (b) Emergence de la littératureIl faut attendre le milieu du 19ème siècle pour que se développe une vie littéraire proprement réunionnaise. Le premier ouvrage imprimé à La Réunion (en 1828) est révélateur des contradictions à venir de la littérature réunionnaise. Il s'agit des « Fables créoles » de Louis Héry. L'auteur est un métropolitain installé à Bourbon depuis 1820 et, comme le titre l'indique, le volume propose des fables en créole, imitées de La Fontaine. Le livre révèle vite un esprit de supériorité vis-à-vis de la langue française : le créole n'y est utilisé que pour amuser la galerie. Le rôle de la presseTrès vite, le journalisme d'opinion sous le contrôle de l'élite devient le foyer de l'écriture et s'apparente à la littérature. En se multipliant et se diversifiant, les journaux s'ouvrent à la publication de textes au statut imprécis, mais ayant toujours trait à l'île : reportages, souvenirs, effusions lyriques, descriptions de paysages réunionnais ou de coutumes anciennes, réflexions sur la langue populaire, billets d'humeur, etc. Ces publications reflètent un imaginaire insulaire. Les journaux sont restés jusqu'à aujourd'hui le lieu d'expression d'une conscience réunionnaise. * 71 CELLIER P., 1985, Description syntaxique du créole réunionnais : essai de standardisation. Doctorat d'Etat, Université de Provence. * 72 AGERON C.R., 1994 , La décolonisation française, coll. Cursus, Armand Colin, Paris, 187p. |
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