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Les enjeux environnementaux, économiques, sociaux et politiques de l'accès à l'eau dans l'agglomération de Lima et plus spécialement dans les quartiers dits « asentamientos humanos », quel avenir pour une ville assoifée ?

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par Claire Gaillardou
UFR de Géographie Bordeaux III - DEA de géographie, mention développement, sociétés et cultures 2007
  

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LISTE DES ABREVIATIONS

APPJ : Proyecto de Alimentacion de Agua Potable para los Pueblos Jovenes de la Ciudad de Lima : Projet d'Alimentation en Eau Potable pour les Quartiers Spontanés de la ville de lima.

CIDAP : Centro de Investigaciòn, Documentaciòn y Asesoria Poblacional, ONG péruvienne établie à Lima.

CENCA : Instituto de Desarollo Urbano, ONG péruvienne établie à Lima.

CESAL : ONG espagnole de coopération au développement, travaille à Lima sur l'eau potable et l'assainissement avec les systèmes ECODESS et condominial.

DGS : Direccion General de Saneamiento : Direction Générale de l'Assainissement.

ECODESS : (Ecology and Development with Sustainable Sanitation): Système de gestion intégrale d'assainissement durable, développé par CENCA.

FMI : Fond Monétaire International.

IMP : Instituto Metropolitano de Planificacion : Institut métropolitain de planification de la ville de Lima. ING : Instituto Nacional de Geografia.

OMD : Objectifs du Millénaire pour le Développement.

OMS : Organisation Mondiale de la Santé.

ONU : Organisation des Nations Unies.

PIB : Produit Intérieur Brut.

PNUD : Programme des Nations Unies pour le Développement.

SEDAPAL : Servicio de Agua Potable y Alcantarillado de Lima (Service d'Eau Potable et d'Egout de Lima), Compagnie des eaux de la métropole de Lima.

SENAPA : Servicio Nacional de Agua Potable y Alcantarillado (Service National de l'Eau Potable et des Egouts).

SUNASS : Superintendencia Nacional de Servicios de Saneamiento (Direction Nationale des Services d'Assainissement).

INTRODUCTION

La gestion de l'eau s'annonce comme le problème géopolitique le plus important du 21ème siècle. Aujourd'hui, la moitié de la population mondiale vit dans les villes. Au cours de ces prochaines décennies, l'urbanisation devrait augmenter à un rythme élevé dans les pays en développement. A Lima, capitale du Pérou, qui concentre un tiers de la population du pays, dans un milieu aride où les ressources en eau sont limitées la question de l'accès à l'eau est plus qu'urgente. Faire face aux besoins croissants dans les domaines de l'approvisionnement en eau et de l'assainissement dans les villes est donc l'un des enjeux majeurs de ce nouveau siècle pour le gouvernement péruvien.

Deux grands objectifs internationaux liés à l'approvisionnement en eau et à l'assainissement ont été fixés, respectivement, en 2000 et 2002:

D'une part, les Objectifs de Développement pour le Millénaire (2000): "Réduire de moitié, d'ici 2015, le pourcentage de la population qui n'a pas accès à de l'eau potable."1 D'autre part, le Sommet mondial sur le développement durable, Plan d'action (2002) : "... nous convenons de réduire de moitié, d'ici à 2015, la proportion de personnes qui n'ont pas accès à l'eau potable ou qui n'ont pas les moyens de s'en procurer (comme énoncé dans la Déclaration du Millénaire) et la proportion de personnes qui n'ont pas accès à des services d'assainissement de base." 2

Pour que ces objectifs soient atteints dans les zones urbaines, plus d'un milliard de personnes supplémentaires devront accéder à des services d'approvisionnement et d'assainissement appropriés, d'ici à 2015.

Au Pérou, 33% de la population était privée de l'accès à l'eau en 1998.

Le problème de l'eau au Pérou réside en partie dans la géographie particulière du pays. Une grande partie de la côte Pacifique est établie sur un désert et plus de 70% de la population vit le long de la côte, où on trouve moins de 2% des ressources hydrauliques du pays.

1 Les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD) sont huit objectifs que les États membres de l'ONU ont convenus d'atteindre d'ici à 2015. La déclaration fut signée en septembre 2000.

2 Sommet Mondial sur le développement durable, Johannesburg, 2002.

A cela s'ajoute un problème démographique énorme, doublé d'une incapacité politique de faire face aux crises économiques qui ont secouées le pays depuis plusieurs décennies.

La capitale, Lima, accueille aujourd'hui plus de huit millions d'habitants, et la croissance urbaine ne cesse d'augmenter dans une zone désertique où les ressources sont limitées (en 30 ans, Lima a vu son taux de croissance passer de 5,1 à 3,9 %1). Devant ce schéma d'évolution persistant, il n'est aujourd'hui plus possible de permettre un accès à l'eau pour tous.

Pour Jean-Marc FOURNIER, « le fonctionnement de l'eau dans la ville reflète finalement celui de la société qui lui correspond »2 . Il s'agit ainsi de rechercher constamment l'explication des paradoxes liés à l'eau en s'intéressant aux mécanismes sociaux qui produisent les inégalités de distribution.

Afin de répondre à ce problème trois acteurs principaux cohabitent à Lima à différentes échelles de pouvoir et d'action : l'Etat, la compagnie municipale de l'eau (La Sedapal) et les ONG. Le plus souvent sans communication entre leurs différentes actions et parfois même en concurrence technique ou organisationnelle sur certains projets locaux, ces différents acteurs mettent en place des projets extrêmement divers et avec des moyens variables pour résoudre la problématique de l'accès à l'eau.

Dans notre projet de recherche, dès le début, puis également pendant le travail de terrain face aux mécanismes de rétention d'information, nous avons été convaincus que ces rapports parfois conflictuels entre les différents acteurs étaient les clés du développement local. Ces différentes institutions, quelles soient privées ou publiques ne devraient pas s'exclure et évoluer dans une dynamique de concurrence, mais plutôt travailler main dans la main devant l'urgence des besoins.

C'est dans ce contexte de conflits, et parfois même de divisions, des politiques de développement que nous avons voulu savoir quelles étaient aujourd'hui les alternatives d'accès à l'eau dans les quartiers défavorisés de Lima, et en quoi elles pouvaient être améliorées.

1 Chiffres issu des données de l'INEI et du site de l'UNESCO sur la recherche urbaine en Amérique Latine (cf. : webographie).

2 FOURNIER, Jean-Marc, 2003, L'eau dans les villes d'Amérique Latine, Inégalités sociales et concurrences des usages, Paris : L'Harmattan, Collection géographie sociale, 203 pages.

Pour ce faire, nous nous sommes demandé quels étaient les enjeux politiques, environnementaux, sociaux et économiques de l'accès à l'eau à Lima, étendant ainsi nos recherches à différentes échelles : de l'étude des ressources aquifères, à l'intégration des projets locaux d'adduction à une politique de développement plus globale, et à la conciliation entre les différents acteurs.

Pour répondre à ces questions, il fallait avoir une connaissance préalable des différents projets existants et des situations diverses sur le terrain.

En travaillant avec des institutions aux valeurs et procédés différents, nous avons ainsi tenté de recueillir les points de vue de chacun dans le but de réaliser une analyse comparative des procédés techniques et des stratégies d'application.

Dans le cadre de l'instauration d'une nouvelle communication entre les différents acteurs locaux, nous voulions également, par l'observation et peut être la comparaison des modes d'opération de chaque projet, savoir lesquelles de ces solutions pouvaient être généralisées, et peut être ainsi plus tard être intégrées en partenariat dans la ligne politique de l'Etat.

Ainsi, notre hypothèse de départ a été de considérer que face à un problème dépendant d'un système géographique complexe, relevant à la fois de contextes physique, démographique et politique donnés, les solutions envisagées devraient prendre en compte l'ensemble des acteurs et de leurs relations. Notre enjeu principal étant de remettre à plat le problème et d'envisager non pas une solution globale mais un ensemble de solutions multiples prenant en compte la totalité du système qui serait capable de répondre le plus pertinemment aux obstacles d'exécution. Pour cela, nous avons envisagé ce rapport comme un moyen de lier les différentes politiques d'action actuelles pour réunir une base de données n'excluant aucun acteur, en retirer les grandes lignes directrices de conception de projet et les rendre plus efficaces notamment en imaginant comment elles pourraient être intégrées, à terme, à une politique étatique.

La problématique directrice de ce rapport est en continuité avec ce travail comparatif: quelles sont dans le contexte des « asentamientos humanos »1 de Lima, les meilleures solutions de développement en termes d'accès à l'eau?

Pour y répondre nous avons organisé ce rapport en trois parties:

1 Ce terme fera l'objet d'une définition au cours de notre première partie.

Nous développerons tout d'abord la problématique environnementale de la hausse de consommation en eau à Lima. Apres une étude des données hydrogéologiques et morphologiques, nous aborderons les problèmes liés à la croissance démographique exponentielle de la capitale, en les recadrant dans le cadre national des politiques de développement en matière d'accès à l'eau et de préservation des ressources.

Puis nous verrons quelles sont les réponses apportées aujourd'hui au problème de l'eau à Lima, et en quoi elles ne permettent actuellement pas de subvenir de manière adéquate aux demandes.

Enfin, nous essaierons d'envisager les meilleures propositions actuelles de conception de projet en matière d'eau potable et d'assainissement, grâce à l'étude comparative de trois projets dans les cônes d'urbanisation de Lima.

Méthodologie et démarche entreprise :

Afin de répondre à notre problématique et vérifier les hypothèses de départ, il convient d'articuler la démonstration autour d'une démarche scientifique dotée d'outils et de méthodes (entretiens, observations, documents bibliographiques, cartes...).

L'investigation s'est appuyée sur une approche qualitative destinée à une compréhension plus détaillée et globale du terrain étudié.

Cette démarche s'est déroulée en trois temps :

1. Dans un premier temps, nous avons réalisé une recherche bibliographique sur le Pérou, Lima, les « asentamientos humanos », ainsi que sur les projets de développement, les politiques de développement... Cette étape visait une compréhension globale du contexte du projet étudié. Les outils étaient principalement des livres, cartes, d'autres projets entrepris... Une recherche bibliographique a été également entreprise après l'investigation et visait plus l'interprétation et l'analyse des données récoltées.

2. Dans un deuxième temps, nous avons réalisé, pour l'étude empirique, de
nombreuses visites de terrain, des observations et entretiens informels des habitants des « asentamientos humanos », et des acteurs du projet. Cette démarche consistait à passer du temps avec les bénéficiaires du projet afin de se familiariser avec ce contexte, et pour que les habitants s'habituent à notre présence. La position de chercheuse et d'étrangère peut empêcher l'accès à certaines informations ou nous confronter à la déformation de ces données.

Il est donc nécessaire de créer un climat de confiance réciproque entre les personnes investiguées et les investigateurs.

3. Suite à cette première approche, nous avons pu réaliser, dans un troisième

temps, des entretiens de type semi-directif, basés sur une série de questions, de thèmes généraux servant de guide à la conversation. C'est un outil plus flexible que les questions fermées et plus facile à mettre en place lorsque la langue parlée n'est pas la sienne. Ces entretiens s'articulaient autour de thèmes comme l'environnement, les relations sociales, les conflits, l'organisation... Ils ont été réalisés auprès d'un échantillon d'une trentaine de personnes, dont les rôles dans le projet, les milieux et institutions différents.

Cet échantillon se compose:

- d'un ingénieur en systémique et cartographie de l'entreprise SEDAPAL;

-d'un conseiller municipal de la ville de Lima, travaillant sur le projet « Agua para todos » ; -de 4 chargés de projet dans des ONG (CIDAP, CESAL);

- de 12 habitants des asentamientos humanos de Huachipa, Carabayllo et Villa Maria del

Triunfo;

-des discussions issues des comités de quartier de Lomas de Carabayllo, à Carabayllo et San Francisco et Los Jardines à Huachipa.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera