INTRODUCTION A LA PARTIE
A côté des apports de l'activité
minière qui peuvent être considérés comme favorisant
le développement de la sous-préfecture de Hiré, d'autres
incidences de cette activité apparaissent comme un frein à ce
développement. Cette troisième partie composée de trois
chapitres s'intéresse aux effets négatifs de l'exploitation de
l'or. Le premier chapitre porte sur les incidences environnementales de
l'activité minière. Cette analyse s'est faite sur l'ensemble des
composantes de l'environnement que sont le sol, l'eau et l'air. Ce chapitre
traite également des répercutions de ces incidences
environnementales sur la santé des populations. Le deuxième
chapitre traite de la récession agricole dans la sous-préfecture
de Hiré. Ce chapitre permet d'aborder la question de l'agriculture,
principale source de revenu des populations locales. Celle-ci est mise à
mal du fait de l'activité aurifère qui est la nouvelle attraction
des populations. Le troisième chapitre, quant à lui aborde la
question des problèmes fonciers exacerbés par l'activité
minière, les différents protagonistes et les mécanismes de
règlements de ces conflits.
198
CHAPITRE 7 : LA DÉGRADATION DE L'ENVIRONNEMENT
PAR L'EXPLOITATION MINIÈRE
INTRODUCTION AU CHAPITRE
L'exploitation minière a des impacts négatifs
sur l'environnement dus aussi bien aux techniques d'extractions qu'aux produits
utilisés pour le traitement du minerai. Ces impacts négatifs de
l'exploitation minière industrielle et/ou artisanale touchent les
différentes composantes de l'environnement que sont l'eau, le sol et
l'air et la biodiversité (Ouédraogo 2006). Ils peuvent constituer
des menaces sur la santé et la vie des populations.
La sous-préfecture de Hiré est ainsi soumise aux
fortes pressions de l'activité aurifère qui met à mal
toutes les composantes de l'environnement et influence le bien-être des
populations. Pour une meilleure évaluation de ces impacts
environnementaux, il est nécessaire de décrire comment
l'activité de la compagnie minière NEWCREST et des orpailleurs
aurifères agit sur les sols, l'eau, l'atmosphère et la
santé.
7.1. DES SOLS DE CULTURES DEGRADES PAR
L'ACTIVITE
7.1.1. Outils et techniques d'extraction
La compagnie minière installée dans la
sous-préfecture de Hiré y exerce une exploitation minière
conventionnelle à ciel ouvert utilisant des camions et des excavatrices.
L'exploitation à ciel ouvert est effectuée sur la base d'une
production tous les jours de la semaine. Des techniques standard de forage et
de tir à l'explosif sont utilisées dans les roches dures, avec le
creusage libre dans les endroits meubles.
Les outils utilisés dans l'exploitation minière
industrielle sont de grands véhicules et de grandes machines communes
à toutes les sociétés intervenantes dans ce secteur. Ce
sont généralement des véhicules à la pointe de la
technologie intervenant dans l'extraction et le transport de la roche. Cela
inclue des véhicules légers de type bâché 4x4 pour
le transport du personnel, des bulldozers, des scrapers, des graders, des
excavatrices, des pelleteuses. Les foreuses sont utilisées pour
l'échantillonnage géologique. L'équipement pour l'abattage
à l'explosif incluant des foreuses, des véhicules de transport,
et des accessoires connexes (détonateurs, etc.). A ceux-là
s'ajoutent les camions de transport du minerai, et les camions de services
utilisés pour la fourniture en carburant et en huile, pour la
maintenance et l'arrosage des routes pour la suppression de la
poussière. Tous ces véhicules sont maintenus en parfait
état de
fonctionnement selon les pratiques en la matière et la
réglementation nationale par les départements mobiles de
NEWCREST.
Les étapes de l'extraction minière à ciel
ouvert sont les suivantes :
- délimitation géographique et physique de la
zone de la fosse en laissant une zone tampon intacte ;
- décapage de la zone de la fosse par bulldozer,
scraper et grader, incluant le stockage de la terre végétale pour
une future réhabilitation du site ;
- décapage de la couche de terre oxydée
minéralisée (si disponible) par bulldozer et ; - excavatrice
incluant le triage de cette matière selon les critères suivants
;
o terre oxydée à haute teneur aurifère
stockée sur le ROM pad, la zone de stockage avant le transport et le
traitement direct du minerai à l'usine.
o terre oxydée à basse teneur
aurifère stockée sur le site de stockage de minerai à
basse teneur pour son transport et traitement direct à l'usine selon les
besoins de celle-ci.
o stériles stockés dans les versants
à stériles
Une fois la roche dure atteinte, le minerai est extrait selon la
méthodologie suivante :
- forage de confirmation de présence de minerai et
modélisation de la structure par l'équipe de géologues et
;
- dislocation de la roche par tirs d'explosifs.
Il convient de noter que l'abattage à l'explosif est
réalisé conformément aux réglementations
nationales.
L'enlèvement de la roche par excavatrices et pelleteuses
se fait selon les critères suivants :
- Minerai à haute teneur aurifère,
stockée sur le ROM pad, la zone de stockage du minerai avant son
transport et traitement direct à l'usine ;
- minerai à basse teneur aurifère stockée
sur le site de stockage de minerai à basse teneur pour son transport et
traitement direct à l'usine en fin de vie de la mine selon les besoins
de l'usine ;
- stériles stockés dans les verses à
stériles.
Du point de vue physique, les composantes requises par
l'opération purement minière incluent ainsi :
199
- les fosses d'extractions à ciel ouvert ;
200
- les zones de stockages à moyen terme de minerais
à haute teneur ; - les zones de stockages de minerai à basse
teneur ;
- les zones de stockage à moyen terme de roches
stériles et ;
- la flotte des véhicules pour l'extraction et le
transport de la roche.
7.1.2. Les méthodes et techniques de traitement
industriel du minerai
A partir des deux carrières, les bennes de 10 tonnes
transportent le minerai à l'usine de traitement. Selon le schéma
de fonctionnement de l'usine (ANDE, 2006), le minerai est classé dans
différentes piles de stockage selon la propriété physique
et la teneur aurifère. A partir des piles de stockage, le minerai est
accumulé et transféré dans une benne de concasseur
primaire couplé à un concasseur secondaire. Les concasseurs
réduisent le tout venant en fragment de 700 mm à moins de 50 mm
qui sont transportés par convoyeur vers une pile stockage du minerai
concassé puis vers le broyeur semi autogène (SAG). Afin d'enlever
le PH en prévision de la cyanuration, la chaux hydratée est
ajoutée à partir d'un silo directement sur le convoyeur
d'alimentation du broyeur SAG. La décharge du broyeur passe dans un
tamis cylindrique (trommel). Le matériel refusé au trommel est
reconduit par un convoyeur de recyclage vers le concasseur et/ou la
trémie d'alimentation du broyeur. Les pulpes à la sortie du
circuit de broyage sont collectées dans une cuve de distribution puis
pompées vers une batterie de cyclone. La surverse des cyclones forme le
produit final du circuit de broyage et contient 80% de particules
inférieures à 106 um. La pulpe rentre dans le circuit de
lixiviation au niveau de la première cuve où est ajoutée
une solution de cyanure de sodium. L'or va alors se dissoudre et former un
complexe avec le cyanure présent en solution. Du charbon actif,
régénéré ou frais, est évacué vers
l'amont d'une autre cuve à contre-courant du débit de la pulpe.
L'or est libéré du charbon actif chargé à l'aide
d'une solution chaude constituée d'hydroxyde de sodium et de cyanure de
sodium. Cet éluât chaud circule dans la colonne qui fonctionne
sous pression (350KPa) et à une température d'environ 100°C.
A la sortie de la colonne, la liqueur mère passe dans une cellule
d'électrolyse où l'or est déposé sur des cathodes
à laine d'acier. Au cours de l'année 2015, selon la direction
générale des mines et de la géologie (DGMG), la production
nationale d'or brut est de 23,5 tonnes. La part de NEWCREST est 1,6 Tonne, soit
6,80% de la production nationale.
7.1.3 Les produits chimiques dans le traitement
industriel du minerai
Les différents procédés de traitement de
l'or nécessitent l'usage de produits dangereux. Ceux utilisés par
la compagnie NEWCREST mining sont indiqués dans le tableau
ci-dessous.
201
L'étude d'impact environnementale et sociale
menée par l'entreprise avec l'appui du cabinet CECAF et l'ANDE en 2006,
atteste l'utilisation des produits chimiques dans l'exploitation des
carrières et le traitement des minerais. L'analyse du tableau montre que
la chaux est utilisée à hauteur de 1200 Tonnes. Le cyanure de
sodium est le deuxième en matière de quantité le plus
utilisé dans le traitement de minerai. 1100 tonnes de cyanure de sodium
sont utilisées chaque année par NEWCREST Hiré. Ce produit
est très efficace pour récupérer l'or à 95%. Le
charbon actif, la soude caustique, l'acide chlorécologique, sont
respectivement utilisés à 10,80 tonnes et 180 tonnes
annuellement. Quant à l'hypochlorite de calcium, la consommation est
infime. Il est utile pour la décontamination des sites en cas de
pollution accidentelle. En plus de ces produits chimiques, les explosifs de
fortes détonations sont utilisés tous les jours dans les
carrières à ciel pour fragmenter les granites.
L'ensemble de cette technologie a un impact
considérable sur le relief local et les autres composants de
l'environnement.
Tableau 31 : les quantités annuelles des
produits chimiques utilisés par la société
NEWCREST dans le traitement du minerai dans la sous-préfecture de
Hiré
Produits
|
Chaux
|
Cyanure de sodium
|
Acide chloré- écologique
|
Soude caustique
|
Charbon actif
|
Hypo- chlorite
|
Consommation annuelle (T)
|
1200
|
1100
|
180
|
80
|
10
|
Négligeable
|
Source : ANDE, 2006
7.1.4 La modification du relief local
La topographie de la sous-préfecture de Hiré
s'est vue modifiée depuis le démarrage des activités
d'extraction minière. En effet, Les minerais aurifères sont
enfouis sous une couche de sol ordinaire ou de roches (appelée `morts
terrains' ou `déchets de roche') qui sont déplacées ou
creusées afin de permettre l'accès au dépôt de
minerai. Pour l'extraction industrielle de l'or, la quantité de morts
terrains générés est énorme du fait de
l'étendue des superficies à traiter. Ces déchets
volumineux sont habituellement déposés sur place, soit en tas sur
la surface soit comme remblai dans les carrières. Le sable extrait des
profondeurs de la terre est généralement de couleur
rougeâtre et/ou noirâtre. Ce sont des terres stériles car
elles ne contiennent aucune substance pouvant permettre le développement
des cultures et n'enrichissent guère les sols qui les reçoivent.
Lorsque ces terres sont accumulées, elles forment des collines
artificielles qui modifient la topographie de la zone. Les transformations
apportées au paysage par l'exploitation minière à ciel
ouvert sont caractérisées par Gardner (2001) comme modifiant de
façon radicale le paysage et déréglant totalement
l'écosystème. Les dépressions créent par les
202
aires de lixiviation ou l'enlèvement des morts
terrains, deviennent de véritables pièges à eau. Sur les
anciens sites d'orpaillages, ces dépressions ne sont pas
refermées rendant dangereux le passage sur ceux-ci. Cette situation
entraine l'abandon par les propriétaires fonciers de ces espaces,
même après la fin de l'activité sur le site.
La modification de la topographie est sans aucun doute
l'impact le plus visible de l'exploitation minière. Ce sont de grandes
excavations aux versants raides dominées par des terrils tabulaires
(Calugaru, 2006), qui apparaissent, sur lesquels le vent soulève des
nuages de poussière. La formation de ces reliefs engendre des facteurs
de géo-risques sur les sites car les versants de ces collines sont
instables et susceptibles de s'ébouler. Les éboulements
pourraient être conditionnés par la précipitation, les
pentes des reliefs, la porosité et la faiblesse des roches. La
sous-préfecture de Hiré en compte plusieurs sur les deux sites
d'extraction de NEWCREST : Hiré et Bonikro. Ces collines viennent
augmenter le nombre de collines dans la sous-préfecture, lui donnant un
paysage d'exception.
7.1.5. Les atteintes au sol
Le sol se définit comme le support de la vie terrestre
et l'interface entre l'homme et la nature. Zone d'échange entre la
biosphère et la lithosphère, le sol est un milieu vivant,
complexe et sensible aux contraintes environnementales. Il est le support des
plantes cultivées ou non. Les activités humaines et
singulièrement l'exploitation minière en modifient la
structure.
Le sol se caractérise par sa structure et par sa
texture. L'étude pédologique de Hiré met en
évidence sept profils de sols appartenant à trois groupes
(plinthosol, ferralsol, Gley sol) qui ont été définis
suivant le système taxonomique de la FAO. La structure du sol correspond
à la façon dont les argiles, la matière organique et
l'humus sont enchevêtrés dans le sol. Elle peut être
modifiée par les actions anthropiques, contrairement à la
texture, qui elle ne peut être modifiée par les actions de
l'homme. En présence de sels minéraux et de matières
organiques, les argiles forment des complexes argilo-humiques. L'humus se
trouve quant à lui principalement dans la couche supérieure du
sol créée et entretenue par la décomposition de la
matière organique fraîche de la litière. Cette
décomposition s'effectue par des bactéries, des champignons, des
protozoaires (microfaune du sol). C'est l'ensemble de ces composantes qui
confère au sol sa fertilité et le rend propice à
l'agriculture. Lorsque le sol pour les activités extractives est
retourné, les couches souterraines sont mélangées aux
couches supérieures et rend cette partie du sol infertile. On constate,
comme dans la plupart des cas, que la végétation a du mal
à reprendre ses droits sur les anciens sites d'orpaillage, encore plus
difficile est d'y pratiquer une
agriculture (voir photo 24 et 25). La dégradation du
couvert végétal entraîne une forte érosion et,
à terme, une stérilisation irréversible des sols par
disparition de l'horizon humifère. Cette disparition de l'horizon
humifère agit directement sur la flore et indirectement sur les sols. Le
cumul de tous ces impacts accentue la gravité des dégâts
environnementaux causés par l'activité minière.
|
La fosse d'extraction de NEWCREST à Hiré-Est
avec absence totale de végétation sur les montagnes de terres
stériles
|
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 25: Site d'extraction aurifère industrielle
de Hiré-Est
|
Site d'orpaillage abandonné depuis 2014 avec
destruction de la végétation
|
203
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 26 : site d'orpaillage avec absence de
végétation
Les sols des sites d'extraction minière subissent les
effets pervers de cette activité. Ces effets sont la pollution et la
dégradation de la qualité des sols induits par les produits
utilisés pour l'extraction et le traitement du minerai des
activités minières. De bonnes terres agricoles en sont
retournées par grattage, creusage et par installation d'aires de
traitement du minerai pouvant augmenter la charge solide lors du ruissellement
sur le sous bassin versant.
204
L'utilisation des produits chimiques pendant l'exploitation de
l'or entraine l'appauvrissement du sol ce qui affecte également la
végétation. L'assèchement de certains herbacés est
constaté suite à l'utilisation des produits chimiques.
L'activité minière à Hiré
s'inscrit dans un environnement aux potentialités agricoles
prouvées. Cependant, l'impact de cette activité tant dans sa
forme aussi bien industrielle qu'artisanale, a un impact négatif sur les
terres cultivables dont la durée peut être qualifiée de
permanente. La perte de ces terres a un impact sur la production agropastorale.
La pression foncière exercée dans la zone par les compagnies
minières et les orpailleurs est forte et il sera par conséquent
difficile de remplacer ces terres. Le décapage des terres
végétales par fonçage des puits et par grattage a un
impact très important, car il augmentera le compactage et se soldera par
la perte de nutriments et de structure des sols. En raison des
différents aménagements réalisés sur la terre
végétale, comme la construction d'usines, d'habitat et
l'occupation des aires de traitement, le sol n'est pas disponible pour
l'agriculture
. Aussi, les terres encore dédiées à
l'agriculture perdent-elles leur fertilité comme le témoigne un
planteur :
« Quand vous voyez les banderoles rouges qui
indiquent le passage des équipes exploratrices de NEWCREST dans votre
champ, vous êtes sûr de voir votre production baisser et
finalement, vous perdez votre plantation ».
Cela nuit grandement aux activités agricoles de la
population locale. Le site qui abrite la fosse satellite de Hiré Est
aujourd'hui exploité par NEWCREST, était
précédemment des sites d'orpaillage intense. Une analyse des
échantillons de sols a été réalisée dans le
cadre des études d'impact pour l'obtention des permis d'exploitation des
fosses satellites de la mine. Elle indique que les sols de la ville de
Hiré contiennent des quantités importantes d'arsenic, de mercure,
de plomb, de cyanure, etc. Ces quantités sont suffisantes pour polluer
le sol et les eaux souterraines de la région.
7.2 UNE BIODIVERSITE MENACEE
La sous-préfecture de Hiré par sa position
géographique bénéficie d'une végétation de
forêt dense humide. Cette végétation se regroupe en
plusieurs types.
205
7.2.1 Les forêts
Les forêts denses semi décidues sur terre ferme
: ce sont des formations forestières dont les deux
strates arborées supérieures (dominante et dominée)
assurent un taux de couverture du sol supérieur à 75%.
L'étage dominant atteint généralement 35-40 m de hauteur
tandis que l'étage dominé atteint 25-30m de hauteur. Ces deux
étages formant une voute forestière fermée faisant
obstacle au rayonnement solaire en saison pluvieuse. Le sous-bois est
très clair et permet une circulation aisée à
l'intérieur de ce type de peuplement. Dans les zones concernées
par l'exploitation de l'or, on retrouve trois variantes de ces forêts
denses. Ce sont : les forêts denses semi décidues senso stricto,
les forêts denses de montagnes et les forêts galeries. Chacune de
ces variantes de forêt dense semi décidues sur terre ferme a des
espèces caractéristiques qui lui sont propres.
Les forêts marécageuses regroupent les
végétaux qui poussent sur des sols permanemment ou temporairement
inondés. Ce sont des forêts dont les sols sont peu
perméables du fait de la forte quantité d'argile. Dans ces sols
hydromorphes, on rencontre des espèces caractéristiques telles
que : les alstonia boonei, les raphias hookerie, les homalium letestui, etc.
Les végétaux aquatiques : ce
sont des espèces végétales vivant dans les milieux
aquatiques des zones humides du site du projet. Dans la zone d'étude,
ces milieux sont constitués par les marres, les cours d'eau, les
rivières et les bas-fonds inondés. Les espèces les plus
présentes dans ces milieux à Hiré sont : les crinum jagus
(amaryllidiceaea), les lemna paucicosta, etc.
Les forêts dégradées : ce
sont des forêts qui résultent de la dégradation des
écosystèmes forestiers provoqués par les activités
humaines (exploitation forestière, coupe de bois et d'arbustes pour
usage traditionnel, allumage de feux, etc...). Ce sont des forêts avec
des trouées plus importantes qui s'avèrent être un espace
favorable au développement des espèces héliophiles.
Les savanes guinéennes : ce sont des
formations savanicoles caractérisées par une
végétation herbacée constituée d'un tapis
graminéen continu et dominé par la présence des
palmiers-rôniers sur le site. Elles sont constituées d'une strate
formée essentiellement de hautes graminées. Elles atteignent plus
de 2 mètres et recouvrent totalement le sol. En arrière-plan on
rencontre des arbres et des arbustes surtout les palmiers rôniers. En
saison sèche cette végétation herbacée se
dessèche. Elle est brûlée et il ne reste plus que quelques
rejets de petits ligneux.
206
7.2.3 Les zones de cultures
Les espaces occupés aujourd'hui par l'exploitation
minière étaient majoritairement mis en culture. Dans ces zones,
plusieurs faciès de végétation ont été
rencontrées selon la densité de cultures, il est possible de
distinguer des zones occupées par des cultures pérennes
(café et cacao). On y trouve également des cultures
vivrières. Les cacaoyères et les caféières occupent
des superficies importantes tandis que les cultures vivrières, bien que
répandues, sont de dimensions réduites. On rencontre tout de
même quelques espèces de ligneux dans ces parcelles de cultures.
Il s'agit, entre autres, de ceiba pentandra, de bombax buonopozense, de
spondias mombin et de ricinodendron heudeulotii. La présence d'orangers,
de manguiers, de papayers est aussi observée dans les plantations
pérennes.
Les populations qui ont dû être
déplacées, dans le cadre de l'exploitation de la mine de
Hiré, possèdent toujours leurs exploitations agricoles dans les
environs de la mine et particulièrement des espaces contaminés au
cyanure. Il est fort à craindre que les sols des plantations d'où
proviennent les denrées produites et commercialisées ne soient
contaminés. (APDH, 2015).
Ces sols peuvent aussi être affectés en aval par
des transports de sédiments contaminés en métaux
générés par l'activité minière et ainsi,
affecter des cultures (Liu et al, 2005) qui peuvent in fine, affecter
l'alimentation de l'homme.
7.2.4 La menace de l'exploitation
minière
La construction des diverses installations et infrastructures
pour l'exploitation de l'or à Hiré entraine la transformation du
milieu environnant. L'exercice de l'extraction minière passe par le
dégagement des emprises, c'est-à-dire de tout ce qui se trouve
sur la superficie à exploiter ou couverte par le permis minier ou la
surface à traiter. Le dégagement des emprises passe donc par le
débroussaillage, l'abattage, le dessouchage et l'évacuation des
arbres du périmètre, puis le décapage des terres en
végétation est réalisé. L'étendue des
superficies consacrées à l'activité minière accroit
l'importance de la destruction du couvert végétal qui a pour
rôle d'assurer la protection et l'enrichissement du sol. Le couvert
végétal contribue aussi au développement des
micro-organismes du sol. Ainsi, une perte et un morcèlement des habitats
disponibles pour la flore et la faune sont induits par ce dégagement du
couvert végétal. Cela entraîne à terme, une
souffrance des milieux biologiques et une diminution de leur
diversité.
Les milieux biologiques peuvent également souffrir
d'une variation de leur environnement physique (Genivar, 2008). Dans cette
situation, la vulnérabilité du sol est plus accrue face aux
207
érosions (éoliennes et hydriques) et autres
désagréments qu'ils pourraient subir. L'érosion hydrique
est la plus probable dans la sous-préfecture de Hiré. Pendant les
saisons de pluies, ce sont des quantités de pluie importantes qui
tombent. Ce qui accroit les risques d'érosion hydrique. Cette forme
d'érosion conduit au ravinement des sols et les rend très
vulnérables. Une transformation du milieu écologique d'origine se
fait observer, la végétation est détruite avec la perte de
diverses espèces végétales, certaines terres agricoles
adjacentes deviennent arides. Ces différentes pertes amenuisent les
ressources des populations locales affectées avec pour
conséquence notable la baisse de la production agricole, la
précarisation des conditions de vie et les difficultés de
satisfaction des besoins essentiels des familles.
La dégradation du couvert végétal
entraine naturellement la perte de la diversité floristique et faunique.
Puisqu'elle constitue l'espace de vie de plusieurs espèces.
7.2.5 Destruction des ressources fauniques et
floristiques
D'une manière générale, la zone de
Hiré a une diversité floristique considérée comme
riche. L'accès à la terre à traiter nécessite que
tout le couvert végétal soit dégagé. Pour des
exploitations industrielles qui s'étendent sur des superficies
importantes comme c'est le cas dans l'exploitation de l'or à
Hiré, on assiste à la destruction de l'habitat naturel des
plantes, des animaux et à la perturbation de l'écosystème
air, sol et eau. Le cadre de vie naturel des espèces
végétales et animales qui constitue le milieu biologique de
Hiré étant partiellement détruit, cela renforce
également la perte de cette diversité biologique
déjà entamée par les activités anthropiques
composées de jachères et de cultures (pérennes et
vivrières).
Les périmètres occupés par l'exploitation
minière sont des unités d'occupation du sol comprises entre
forêt, cultures/jachères, sols nus/habitats et eau. Avec
l'ouverture des pistes pour la prospection, l'explosion des montagnes, la mise
en place de la galerie et les différentes installations de la mine, ce
sont, outre les terres agricoles, des surfaces forestières qui sont
réduites.
De par sa proximité à Hiré, soit 10 km
des derniers campements de la sous-préfecture, la forêt
classée de la Sangoué fait l'objet d'une invasion des
orpailleurs. Leur présence dans cette forêt classée date du
début des années 2000 mais connaît une plus grande
importance depuis 2014. Cette affluence des orpailleurs dans la Sangoué
depuis 2014, se justifie par le fait qu'ailleurs, notamment à
Hiré et à Oumé, ils subissent des pressions
énormes, alors que là ils sont installés clandestinement,
à l'abri de tracaceseries quelconques. Avec la décision de
rationalisation de l'orpaillage, les forces de l'ordre ont mené des
opérations de répressions dans le but de fermer
208
les sites d'orpaillage clandestin. L'orpaillage
représente aujourd'hui, une réelle menace pour cette
forêt.
L'activité d'orpaillage a également des
répercussions sur le couvert végétal. Les sites
d'orpaillage sont généralement des plantations ou des
jachères qui sont détruits pour l'exercice de cette
activité. Aussi, la coupe des arbres intervient-elle pour le
soutènement des puits, la fabrication d'échelles permettant de
descendre dans les puits, la mise en place des comptoirs et des habitations sur
certains sites. Cette coupe se fait sur place et sans contrôle. Selon le
chef du bureau des Eaux et Forêts de Hiré, aucun orpailleur ne
détient d'autorisation de coupe. Le soutènement utilise en
moyenne 15 bois (tronc d'arbre) pour un mètre. Un puits
nécessiterait environ un chargement, soit environ 400 à 500
troncs d'arbres pour son soutènement (voir photo 26). Ce qui fait qu'on
assiste à la destruction de la forêt dégradée ou
savane arborée qui a fait place à la forêt dense ombrophile
naturelle de la zone fortement dégradée par les activités
agricoles et les aménagements urbains de la zone. Par ailleurs, cette
destruction du couvert végétal favorise l'érosion et le
lessivage du sol. L'installation des orpailleurs nécessite le
défrichage, la coupe de bois et de pailles pour la construction de
maisons ou d'hangars de fortune à usage d'habitation ou commercial. Cela
entraine la raréfaction de certaines espèces et la disparition
d'autres. La destruction de l'aire de nidification et des ressources
alimentaires des oiseaux entraine un déplacement de ces populations. Le
rejet dans la nature des eaux usées après lavage du minerai
entraine la turbidité des cours d'eau puis la raréfaction, voire,
la disparition des espèces aquatiques.
209
|
Le bois sert de cale pour éviter les
éboulements de terrain.
|
Auteur photo : YOBO, 2016
|
|
Photo 27: Le bois est coupé pour servir
d'étaie dans les fosses
L'exploitation artisanale de l'or laisse un impact physique
important dans la sous-préfecture de Hiré : fosses et trous
creusés à ciel ouvert, galeries souterraines, tas de sables et
déboisement. Cet impact physique influence négativement la
qualité du sol et contribuent à la diminution de la
densité et de la diversité biologique de Hiré.
7.3 LES RESSOURCES EN EAU MENACEES
L'exploitation des ressources minérales a un impact
négatif sur la ressource en eau (de surface et souterraine) tant au
niveau de la quantité qu'au niveau de la qualité. Ainsi, on note
entre autres, la perturbation des réseaux hydrographiques et la perte de
la biodiversité des milieux aquatiques. Cette exploitation
entraîne également la dégradation de la qualité des
eaux par les différents produits qui entrent dans le traitement du
minerai.
7.3.1 La réduction de la disponibilité en
eau du fait de l'exploitation minière
La région de Hiré est située dans le
bassin du fleuve Bandama, fleuve stratégique dans la région du
centre de la Côte d'Ivoire. Il fournit de l'eau indispensable pour divers
usages économiques ou environnementaux comme l'approvisionnement de
barrages hydro-électriques. Il est également utile pour les
ménages, pour l'agriculture et pour l'aquaculture. Le Bandama par ses
210
affluents que sont le Tiéné, le Gogobro, le Gbro
et le Vero traverse Hiré. La pluviométrie annuelle moyenne
légèrement inférieure à 1200 mm alimente de
nombreux petits cours d'eau qui se déversent dans le fleuve Bandama. Les
eaux souterraines contribuent également à l'approvisionnement en
eau du bassin hydrologique à travers les sources et les bas-fonds qui
augmentent le volume d'eau et fournissent de l'humidité pour
l'agriculture. Les plans d'eau encaissés dans les vallées sont
importants malgré le réseau hydrographique peu dense de la
région. On trouve à plusieurs endroits des vallées et des
chaînes étroites qui serpentent le long du sol. Les
rivières et les plans d'eau sont aussi abondants du fait de la
fréquence et de l'importance des précipitations dans la zone
(1200 mm/an). Des cours d'eau et bassins apparaissent également de
manière intermittente dans la localité, avec des tailles qui
varient selon les saisons. Elles augmentent de volume en saison des pluies et
pendant les saisons sèches, se transforment en de petites poches d'eau.
L'eau est souvent contaminée par les petites particules de métaux
lourds qui, avec le temps, se détachent des résidus, se
disséminent avec le vent, se déposent sur le sol et sur les lits
des cours d'eau, et s'intègrent lentement aux tissus des organismes
vivants dans les cours d'eaux. Aussi, l'exploitation à ciel ouvert
majoritairement pratiquée à Hiré a-t-elle
nécessité des déplacements de mottes de terres
appelés mort terrain. L'enlèvement et la superposition de ceux-ci
a modifié la topographie du sol formant par endroits des bassins
versants qui ont modifié la répartition des eaux de surfaces et
des eaux souterraines. On trouve des sources en nombre d'endroit dans chaque
vallée, entretenant continuellement des sols humides tels que les
bas-fonds. Ceux-ci, du fait de l'abondance d'eau et d'humidité qu'on
leur connaît, sont souvent utilisés pour la riziculture, la
maïsiculture et les cultures maraichères.
L'exploitation minière est une activité qui
nécessite des quantités d'eaux importantes. NEWCREST a construit
des barrages hydrauliques pour satisfaire le besoin en eau de la mine. La
sous-préfecture est drainée par quatre bassins dont trois, le
Gnouzalé, le Gnénessi et le Zéssié, sont des
affluents du fleuve du Bandaman et le Lélébiaba qui est un
affluent du Boubo. Ces quatre sous bassins constituent les principales sources
d'alimentation en eau de surface du site minier. Les digues de fortune
construites sur certains de ces sous bassins (Gnénessi) permettent
l'approvisionnement en eaux brutes de l'usine de traitement et l'arrosage des
voies d'accès à la mine d'or et des pistes à l'aide de
camion-citerne. Deux barrages de retenue d'eau sont construits sur le sous
bassin de Gnénessi (en amont et au centre) et couvrent respectivement
les superficies de 1 172 464 m2 et 786 401 m2. Le
troisième barrage est construit en amont du sous bassin de
Lélébiaba et couvre une superficie de 1377 000 m2. Ces
différents barrages
211
facilitent l'utilisation de l'eau pour les diverses
activités liées à l'exploitation de l'or (Bamba, 2012).
La compagnie minière a également
réalisé plus d'une vingtaine de forages autour de Bonikro. Au
moment des crues, les barrages déversent leurs eaux qui inondent les
plantations voisines de la mine. Les eaux utilisées dans le traitement
du minerai sont par la suite traitées et rejetées. Cette eau
vient généralement de forages réalisés par la mine
elle-même. En effet, les grandes quantités d'eau
nécessaires à l'activité minière réduisent
généralement la nappe phréatique du lieu et arrivent
même à assécher les puits et les sources. Les
activités de pompage de NEWCREST autour des fosses à ciel ouvert
entrainent un affaissement localisé de l'eau contenu dans la nappe
phréatique. Cet état de fait est avancé comme facteur
explicatif des difficultés que connaît la population en
matière d'approvisionnement en eau potable par les services de la
SODECI. Les populations de Hiré connaissent de véritables
difficultés d'approvisionnement en eau potable. Le service
d'approvisionnement en eau potable assuré par la SODECI dans la commune
de Hiré laisse à désirer, car celle-ci semble desservir
les quartiers de façon alternée. C'est-à-dire que les
ménages ont de l'eau courante à intervalle de deux à trois
semaines. Pour les populations, le manque d'eau dans les forages de la SODECI
est créé sinon aggravé par la présence des mines.
La capacité d'approvisionnement en eau potable de la ville de
Hiré par la SODECI est très limitée. Installé
à Douaville un village de la sous-préfecture de Hiré
situé à 8 km de la ville, les forages et l'usine de traitement de
la SODECI sont en baisse de production. L'un des deux forages existants est
complètement asséché et l'autre a vu sa production baisser
de 30% avec un débit passant de 11m3/heure à
8m3/heure.
Les populations, pour pallier cette situation, se sont donc
tournées en grande partie vers l'utilisation de l'eau souterraine
à travers les puits. Cependant, l'eau dans ces puits baisse au fur et
à mesure et s'assèchent par la suite, entretenant ce lien
qu'établit la population entre l'activité minière et le
manque d'eau. Cette assertion des populations est soutenue par Elaw (op. cit)
quand il souligne que l'activité minière du fait des grandes
quantités d'eau utilisées dans sa pratique, contribue
généralement à la réduction des
potentialités de la nappe phréatique du lieu et arrivent
même à assécher des puits et des sources.
Les enquêtes auprès des orpailleurs nous ont
permis de nous rendre compte des quantités d'eau importantes qu'ils
utilisent dans leur activité, surtout pendant le lavage à la
batée. A l'aide des motos pompes, l'eau est acheminée des puits
de fortunes creusés par les orpailleurs vers le site de lavage. Pour le
lavage à la batée de 50 kg de poudre de minerai, les orpailleurs
utilisent
212
environ deux barriques d'eau qui représentent environ
400 litres d'eau. Lors du fonçage, les orpailleurs atteignent la nappe
phréatique qui se situe en moyenne à 14-15 mètres de
profondeur. Ils ont recours à des motopompes pour évacuer des
quantités impressionnantes d'eau. Ces motopompes sur le site
évacuent chacune plusieurs litres d'eau par jour, contribuant ainsi
à diminuer le niveau de la nappe d'eau souterraine. Après le
broyage du minerai dans les moulins de la ville, les laveuses extraient
d'importantes quantités d'eau des puits pour assurer le lavage du
minerai. Les activités lors des étapes de lavage et d'extraction
de l'or par le mercure sont les plus consommatrices d'eaux. A titre d'exemple,
il faut environ 200 litres d'eau pour le lavage d'une quantité de
minerais contenue dans un sac de farine de 50 kg. Ce sont donc des
quantités d'eau importantes qui sont utilisées au quotidien sur
les différents sites d'orpaillage.
7.3.2 Détérioration de la qualité
des eaux de surface et des eaux souterraines
Le risque que les produits chimiques, nuisibles pour la
santé humaine utilisés (acide) pour casser la roche et extraire
les minerais, s'infiltrent dans la nappe phréatique et infectent les
sources d'eau potable et les rivières est devenu une
réalité (CEDAC, 2009).
Les produits chimiques dangereux utilisés au cours des
diverses étapes de traitement des métaux, tels que le cyanure,
les acides concentrés et les composés alcalins, quoique
censément contrôlés, se retrouvent souvent, d'une
manière ou d'une autre, dans le système hydrologique. La
modification et la contamination du cycle hydrologique ont des effets
collatéraux très graves qui portent atteinte aux
écosystèmes environnants et aux personnes. Ces atteintes sont
particulièrement graves dans le cas des zones forestières, car
elles abritent des espèces terrestres et aquatiques parfois
exclusives.
Les activités des sociétés
minières dans la sous-préfecture de Hiré contribuent comme
dans la plupart des activités anthropiques, à la
dégradation de la qualité des eaux de surface et des eaux
souterraines. Cette dégradation intervient par deux principaux
mécanismes que sont : le rejet des produits issus de l'étape de
purification (au niveau du complexe industriel ou du parc à
résidu) et le lessivage des surfaces exploitées (possible
acidification des eaux et enrichissement en matières en suspension,
sulfate et métaux lourds) aussi appelé drainage minier acide. Les
eaux chargées de ces produits se retrouvent dans les plantations
voisines comme le décrit un de nos interlocuteurs :
213
« Mon champ est situé à 100
mètres de l'usine de la société NEWCREST. Les eaux
polluées provenant du traitement des minerais stagnent durant plusieurs
mois dans mon champ et ne me permettent pas de faire mes cultures
».
Aussi, les produits utilisés pour le traitement du
minerai que sont les différents acides, le mercure et le cyanure,
modifient-ils la composition de l'eau avec laquelle ils entrent en contact. Ils
la rendent impropre à tout autre usage direct. Lorsque le cyanure de
sodium (NaCN) réagit avec l'eau (H2O), il se décompose en donnant
un gaz très inflammable et très toxique : l'acide cyanhydrique,
également connu sous le nom de cyanure d'hydrogène (HCN), ainsi
que de la soude caustique (NaOH) corrosive. Cette toxicité est telle que
NEWCREST interdit de manger, de boire et de fumer à proximité de
son lac à cyanure.
Il est vrai que de nombreuses dispositions sont prises par les
sociétés minières en matière de respect des
règles environnementales. Cependant, il ressort de nos entretiens avec
les populations et particulièrement celles dont les plantations sont
situées à proximité des sites occupés par la
société minière, que la compagnie minière NEWCREST
leur avait demandé de ne pas boire les eaux de source dans leurs
champs.
Les éléments chimiques produits par l'orpaillage
ont un effet très nocif sur les eaux (Carmouze, 2001). Cette
nocivité est due aux techniques et aux produits utilisés pour
l'extraction et le traitement du minerai. L'eau est polluée lorsqu'elle
contient des substances susceptibles d'être nuisibles et dangereuses pour
la santé ou désagréables ou lorsqu'elle a subi une
altération dans sa couleur et/ou dans son odeur. Nous n'avons certes pas
réalisé d'analyse de prélèvement pour savoir le
degré de pollution causé par cette activité. Cependant,
d'autres dégâts causés à l'eau sont visibles. L'eau
utilisée pour le lavage de l'or est à la suite de son usage
déversée directement dans la rivière qui passe tout juste
à côté. Le drame, c'est que ce geste
inconsidéré met en danger la vie des ressources halieutiques et
même des vies humaines, car l'eau de cette rivière polluée
par le fait de l'orpaillage, est souvent consommée par des paysans dans
leurs champs.
Les règles environnementales étant parfois
méconnues des orpailleurs, certains déversent directement l'eau
chargée des produits toxiques utilisés pour le traitement de l'or
tels que le mercure et le cyanure dans la nature (photos 27 et 28). Cette eau
se retrouve par érosion dans
les eaux de surfaces et par infiltration dans les eaux
souterraines.
|
On voit sur cette photo que le cyanure se retrouve dans la
nature (traces jaunâtre dans le sable).
|
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 28: dépôt de cyanure sur le
sol.
|
L'herbe est morte du faite de la présence du
cyanure
|
214
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 29: végétation brulée par le
cyanure
7.4 NUISANCES ATMOSPHERIQUES ET SONORES
L'activité minière produit de la pollution
atmosphérique et sonore. Des enquêtes menées dans la
région de Hiré, il ressort que les activités des usines
minières qui y sont installées, produisent des nuisances sur les
populations riveraines. Ces nuisances sont les substances chimiques volatiles,
particules solides en suspension dans l'air (poussières) et nuisances
sonores (explosions) parfois accompagnées de fortes vibrations.
215
7.4.1 Pollution atmosphérique
On distingue différents types de nuisance visible
à l'oeil nu selon la nature de la substance libérée dans
l'air. Les plus fréquentes rencontrées sont :
- les produits chimiques qui s'évaporent dans l'air :
le cyanure de sodium, le gasoil, l'essence, l'acide chlorhydrique et l'arsenic
;
- le ciment vrac utilisé en plein air à la
préparation mécanique du minerai ;
- les poussières émises pendant les travaux
d'extraction de la mine et le roulage des engins ;
- les fumées émises par les engins en circulation
sur le chantier.
La poussière est la plus importante des nuisances sur
les sites d'extraction. Le creusage du sol jusqu'à atteindre la roche
mère nécessite le déplacement de morts terrain pendant
lequel d'importantes quantités de poussières sont émises.
Les immenses nuages de poussière qui en émanent le
démontrent bien. La poussière provient également des
pistes de roulage, lors des nombreux passages des camions du personnel et des
camions transportant le minerai de la fosse de Hiré à la mine de
Bonikro. Selon les populations, ces poussières sont plus importantes
pendant la saison sèche et entre 17 et 18 heures.
Les populations dont les cultures se trouvent à
proximité des sites d'extraction ou des pistes de roulage,
déclarent que les amas de poussières sur les plantes ont pour
conséquence de détruire les cultures. En effet, les
poussières peuvent endommager les composantes du milieu naturel. Du
point de vue climatique, les particules solides en suspension dans l'air
peuvent disperser les rayons solaires et réduire la quantité de
lumière solaire supposé arriver au sol. Cette réduction de
la lumière solaire provoque en conséquence une baisse de la
température dont les plantes ont également besoin pour la
photosynthèse.
La fréquence des émissions de fumées par
les engins en circulation sur le chantier ainsi que les machines
utilisées, impactent également la qualité de l'air. Cela
est dû par exemple à une augmentation des émissions de gaz
à effet de serre entraînée par l'utilisation de machinerie
et de véhicules à moteur thermique ainsi que par la diminution de
la couverture végétale. Cette dernière cause est
également en partie responsable de l'augmentation des émissions
de poussière. Le fait de dénuder un terrain favorise
l'érosion éolienne, phénomène qui peut être
très important étant donné les surfaces des terrains
concernés. Le vent transporte des poussières issues de la halde
à stérile, du parc à résidu et de la pile
temporaire de minerai. En plus de
216
l'action éolienne, il existe deux autres causes
essentielles qui ont pour effet l'émission de poussière :
- les opérations sur le minerai ou les stériles
(forage, dynamitage, concassage) et ; - le transport et la manipulation de
minerai, de stériles et de résidus.
Ces quantités de poussière peuvent être
nuisibles pour les êtres vivants que sont : l'homme, les animaux et les
plantes.
Pour réduire un tant soit peu les émissions de
poussières, la compagnie minière après plusieurs plaintes
des populations avait entrepris l'arrosage des voies de passage des camions
notamment celle qui relie la mine de Bonikro à la voie nationale en
passant par les hameaux de Bonikro et Bandamakro. Mais cette mesure n'a pas
été maintenue au-delà d'une période de courte
durée.
L'importance présence de poussière est aussi
remarquable sur les sites d'orpaillage. Plusieurs activités sont source
de pollution de l'air particulièrement le broyage du minerai. La
quantité de poussière produite par le fonçage étant
moindre du fait de l'atteinte de la nappe phréatique par les engins
fonceurs. On note également l'émission d'importants gaz, de
fumées mais aussi de bruits (moulins, motopompes et moteurs). Les
vapeurs de mercure pendant le brûlage de l'amalgame polluent
également l'air. Quant aux odeurs, elles sont dues à la
décomposition des déchets solides et liquides
générés par les orpailleurs. Ces déchets sont
rejetés dans la nature sans aucune mesure d'assainissement. La nuisance
sonore résulte du pompage des eaux souterraines et des outils de
fonçage des orpailleurs.
7.4.2. Les nuisances sonores et vibrations
Dans l'installation industrielle de la mine, les principales
sources de nuisances sonores sont les engins lourds, les machines de l'atelier
de concassage et le dynamitage des roches mères. Ces bruits
assourdissants sont aussi causés par le trafic routier effectué
le long des voies de communication pour le transport. Certains bruits dont ceux
de l'atelier de concassage et des engins ont une faible nuisance par contre
ceux liés au dynamitage des roches sont les plus intenses. Les
explosions de roches sont aussi accompagnées de fortes vibrations de
terrains et peuvent être entendues jusqu'à plusieurs
kilomètres. Ces bruits s'amplifient les nuits et troublent le sommeil
des populations riveraines qui disent ne pas s'accommoder à cette
situation. Les vibrations induites par les explosions de roches sont tellement
intenses qu'elles fissurent les murs des maisons dans les campements voisins
comme Koutouklou-konankro et mettent ainsi en danger les personnes qui y
vivent. Au quartier Baoulé, les explosions de dynamitage ont
également fissurées les logements proches du site (voir photos 29
et 30). La
217
proximité des logements du site d'extraction en accroit
les répercussions sur les populations et les constructions. Selon les
autorités de la mine les premières maisons sont situées
à 500 mètres du site d'extraction tandis que la population dit
être à moins de 100 mètres des installations de NEWCREST.
Une visite sur les lieux nous permet de réaliser que la distance entre
les premières habitations et la fosse de Hiré Est, est loin de
valoir les 500 mètres avancés par la compagnie minière.
|
Un mur de concession fissuré du fait des vibrations du
sol lors des dynamitages.
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Auteur photo : YOBO, 2017
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Photo 30 : dégâts causés par les
explosions de dynamitage au quartier Baoulé
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Fosses satellite de la mine de Hiré Est situées
à moins de 200m des d'habitations
|
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 31: des constructions à moins de 300m de la
mine de Hiré
|
|
218
7.5 LES DIFFERENTS ACCIDENTS ENVIRONNEMENTAUX A
HIRE
L'opérationnalisation du projet aurifère de
Bonikro a contribué à la transformation du milieu environnant. A
l'instar de toutes les activités minières, celle de Bonikro a
entrainé le défrichage total du sol, la modification radicale du
paysage et le dérèglement total de l'écosystème, la
destruction des nappes phréatiques ainsi que le déplacement des
populations, etc. Cependant, à côté des incidences
ordinaires qu'on connaît à l'activité, deux importants
accidents dont les conséquences menacent gravement l'environnement sont
survenus dans le cadre des activités de la compagnie minière.
7.5.1. La rupture des digues du cours d'eau
Dans le cadre de l'aménagement des terres du permis
minier PE 032-2007, la compagnie minière exploitant la mine de Bonikro a
interrompu l'écoulement naturel d'un cours d'eau situé au Sud de
la fosse d'extraction de Bonikro et à l'Ouest de la verse à
stérile. Cependant, en juillet 2008, cette interruption
d'écoulement a occasionné une élévation du niveau
d'eau en amont entrainant l'inondation progressive des terres alentours. Cette
inondation a également entrainé le débordement du lac
à cyanure dont les eaux se sont répandues dans les plantations et
friches voisines. Cette inondation a entrainé la substitution des terres
fermes en un lac (voir figure 29), dépossédant de façon
brutale les populations de leurs plantations et de leurs parcelles. Bien que se
situant sur l'étendue du permis minier, les terres touchées
n'avaient pas été indemnisées par la compagnie
minière. Suite à cet accident, la compagnie minière
NEWCREST s'est résolue à compenser les populations
touchées par l'inondation. Les négociations ont abouti au
paiement de 227 523 103F CFA d'indemnité payé par NEWCREST
à l'ensemble des personnes impactées.
219
Figure 29 : carte NEWCREST synthétisant les
zones touchées par l'inondation
220
7.5.2 La rupture des tuyaux d'acheminement des eaux
cyanurées
Le 18 mai 2016, suite à un feu de brousse les tuyaux
d'évacuation des eaux usées issues du traitement du minerai, vers
le bassin sédimentaire, ont brulé et se sont rompus, ce qui a
entrainé le déversement des eaux cyanurées dans les
plantations environnantes. Des poissons et des reptiles ont été
trouvés morts près de certains cours d'eaux. Les populations de
Koutouklou-Konankro, situées à moins de 500 mètres du lac
à cyanure de NEWCREST, ont été les plus touchées.
Ces populations ont vu leurs plantations envahies par les eaux
cyanurées. L'infiltration des produits chimiques dans le sol et dans la
nappe phréatique a pollué l'eau et l'a rendue impropre à
l'agriculture et à la boisson. Or, l'indisponibilité du
château d'eau conduit les populations à utiliser l'eau des sources
et des rivières pour leurs besoins quotidiens. Les produits chimiques
utilisés pour le traitement de l'or s'infiltrent dans la nappe
phréatique et polluent ainsi l'eau utilisée par les cultures
à proximité. Pourtant, le creusage et/ou l'utilisation des eaux
de puits ou eaux souterraines dans ce campement est interdit. Les populations
de ces campements ont au début des activités d'extension du lac
à cyanure été approvisionné en eau par les citernes
de la société NEWCREST. Puis la société
minière a par la suite construit deux pompes hydrauliques villageoises.
Hormis cette zone, l'eau est généralement propre à la
consommation. Avec cet accident, les populations de Koutouklou-Konankro
craignent la contamination de leur sol du cyanure contenu dans les eaux de
traitement du minerai. Cette suspicion est confirmée par l'APDH, une ONG
qui s'est donné pour vocation de protéger les droits de l'homme.
L'APDH a effectué un test physico-chimique sur un
prélèvement d'eau de surface effectué dans les plantations
du chef de Koutouklou-Konankro, situé à moins de 500
mètres du lac à cyanure. Les résultats de ce test montrent
que la valeur du cyanure de l'échantillon est supérieure aux
spécifications de la norme ivoirienne NI 385 (voir annexe 4). Cet
accident montre que le danger reste permanent pour ces populations, qui peuvent
à tout moment être exposées aux eaux chargées de
cyanure.
7.5.3 Les conflits dus aux accidents et problèmes
environnementaux
Les conflits dus aux problèmes environnementaux
opposant les communautés locales aux sociétés
minières se sont multipliés et amplifiés à la suite
de ces différents accidents. En effet, l'extraction et le traitement
industriel de l'or posaient déjà de nombreux
désagréments aux populations dont elles n'avaient de cesse de se
plaindre. Quand arrive en 2008 l'accident de la rupture des digues du cours
d'eau, avec le débordement du lac à cyanure dont les eaux se sont
répandues dans les plantations et friches voisines, les populations
crient leurs ras-le-bol. Ayant
connaissance de la toxicité des produits contenus dans
l'eau du lac à cyanure du fait des pancartes situées à
proximité (photos 31 et 32), et voir cette eau se retrouver dans les
plantations desquelles elles tirent leurs subsistances, les populations se sont
vues comme exposées à la mort. Dans cette situation, elles ont
exigé de la compagnie minière qu'elle les dédommage
toutes. La compagnie minière n'entendant pas les choses de cette oreille
a voulu prendre en compte que les parcelles inondées sans tenir compte
de la zone de rayonnement. Les victimes se distinguant par la gravité ou
le degré d'invasion de leur terre. Les réactions qui s'en sont
suivies ont été très vives.
|
Pancarte signalant le danger encouru dans cette zone.
|
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 32: pancarte située près du lac
à cyanure
|
Pancarte portant différentes interdictions, signe de
la toxicité du cyanure.
|
221
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 33: pancarte signalant la présence de
cyanure dans la zone
222
7.6 L'ACTIVITE MINIERE ET LES FAIBLESSES DANS
L'OBSERVATION DES MESURES DE PROTECTION
Les différents effets pervers de l'activité
minière sur l'environnement observés à Hiré le sont
en dépit des règles environnementales établies par
l'État en matière de protection de l'environnement. Ces
règles en matière de protection de l'environnement concernent les
textes législatifs et règlementaires ainsi que des textes
internationaux en matière environnementale que l'État a
ratifiée.
7.6.1 Les structures étatiques chargées de
l'environnement
La constitution ivoirienne du 1er Août 2000 consacre, en
son article 19, le droit de l'homme à un environnement sain. D'autres
textes législatifs et réglementaires tels que le code minier, le
code de l'environnement, le code de l'eau, etc. donnent des dispositions
précises en la matière. Cependant, du point de vue
règlementaire, le gouvernement ivoirien accorde des permis
d'exploitation veille-t-il à travers des entités
régulatrices notamment l'ANDE, le CIAPOL et la direction locale du
Ministère de l'Industrie et des Mines à faire appliquer et
respecter la loi minière et la protection de l'environnement ?
L'ANDE est un Établissement Public National (EPN)
créé par le décret n°97-393 du 09 juillet 1997 et a
pour mission l'exécution des projets et programmes environnementaux en
Côte d'Ivoire. Le rôle de l'ANDE dans le cadre de l'exploitation
minière est de mener les EIES qui permettent d'évaluer la
faisabilité des projets miniers du point de vue environnemental.
Crée le 09 Octobre 1991, par décret N°
91-662 du 9 octobre 1991, le CIAPOL « Centre Ivoirien Antipollution »
a pour rôle l'analyse systématique des eaux naturelles (marines,
lagunaires, fluviales, souterraines et météoriques), des
déchets (solides, liquides et gazeux) et des résidus. Il
évalue également les pollutions et les nuisances puis est
chargé de l'établissement d'un système de surveillance
continue des milieux dénommés. Le CIAPOL assure également
l'évaluation des pollutions et nuisances ainsi que la protection des
milieux récepteurs.
7.6.2. Le débat autour de la présence de
cyanure dans la nature à Hiré
Les différents accidents environnementaux qui ont eu
lieu à Hiré relativement aux activités de NEWCREST, ainsi
qu'à l'infertilité des terres non occupées par la mine,
ont fait naitre chez les populations, la conviction de la présence de
cyanure dans la nature. Cette suspicion confirmée par les
résultats des analyses menées sur le prélèvement de
la plantation du chef de Koutouklou-Konankro est cependant contestée par
la compagnie minière. En effet, pour étayer ses propos,
223
NEWCREST a fait recours au CIAPOL (Centre Ivoirien
Anti-pollution) pour des analyses de prélèvement. Selon, les
résultats de ces analyses, le prélèvement effectué
ne contient pas de cyanure. Cette assertion est rejetée par les
populations qui expliquent que le lac à cyanure est construit sur une
source d'eau naturelle qui communique avec la nappe phréatique et les
autres sources d'eau. Les aménagements qui permettent d'éviter
cette infiltration n'ayant pas été réalisés, la
population estime que l'eau dans un certain rayon du périmètre de
sécurité de la zone minière est contaminée par les
produits chimiques miniers.
Contrairement aux deux (2) relocalisations involontaires
(Bonikro et Bandamakro), la relocalisation de Koutouklou-Konankro ou Konankro
est dite volontaire, c'est-à-dire faite à la demande de la
communauté. À la base, les populations de Konankro ont
adressé plusieurs plaintes de relocalisation à la mine, portant
sur des impacts sonores émanant nuitamment du site minier, la
qualité de leur eau jugée polluée par le cyanure du parc
à résidus de la mine. Plusieurs études ont ainsi
été menées par la mine et les régulateurs, lesquels
avaient jugé ces plaintes irrecevables au regard des résultats
techniques récoltés dans le campement. Cependant, la
décision de relocaliser Konankro a été prise par
anticipation à un projet d'extension de la mine ce, après la
décision d'opérer les gisements satellitaires de Hiré et
Dougbafla. En effet, l'étude de faisabilité de ces projets
avaient conduit l'industrie à réfléchir au transport du
minerai de ces sites vers l'usine de Bonikro pour y être traité.
Cet accroissement de la production aurait nécessité une
augmentation de l'espace de traitement et amplifié les bruits des engins
et des concasseurs ; ce qui viendrait rallonger la liste des revendications de
Konankro.
7.7. LA SANTE DES POPULATIONS, FRAGILISEE PAR L'ACTIVITE
MINIERE La santé est définie par l'Organisation Mondiale
de la Santé (OMS) comme : «un état de bien-être
physique, mental et social et pas seulement comme l'absence de maladie ou
d'infirmité». Aussi, les substances dangereuses et les
déchets dans l'eau, dans l'air et dans le ciel peuvent-elles avoir des
répercussions graves, négatives sur la santé publique.
7.7.1. Impact des nuisances sur la santé des
mineurs
Les sociétés minières prennent de
nombreuses dispositions sécuritaires pour préserver la
santé de leurs employés. Celles-ci concernent les
équipements de sécurité (les chaussures de
sécurité, les casques, les gants, etc.), les mesures de
sécurité aux quelles tout le personnel et même les
visiteurs doivent se soumettre. De ce fait, les travailleurs dans le domaine
aurifère sont protégés et peu exposés. Les quelques
accidents qui peuvent survenir dans leur milieu sont des accidents
mécaniques.
224
Les orpailleurs sont particulièrement plus
exposés aux effets néfastes de leur activité, vu qu'ils
n'utilisent pas de matériels de protection. C'est sans casques ni
chaussures de sécurité et sans gants de protection qu'ils
creusent et manipulent la terre et les produits toxiques utilisés pour
le traitement du minerai. L'inhalation de poussières à longueur
de journée les expose aux maladies respiratoires comme les bronchites,
la tuberculose, etc. Le risque existe aussi d'ingestion d'eau et d'aliments
contaminés, car préparés et vendus à
proximité des sites d'orpaillage ou par les mains souillées, car
portées à la bouche sans un bon lavage des mains.
Les orpailleurs utilisent généralement les
produits comme le mercure élémentaire et le cyanure
d'hydrogène pour amalgamer l'or. La toxicité des produits
utilisés pour le traitement du minerai, les exposent à des
intoxications sévères. Un orpailleur interrogé nous disait
qu'il y a beaucoup de décès dans les rangs des ouvriers qui
s'occupent de cette tâche.
7.7.2. Impact des nuisances sur la santé des
populations riveraines
Le déséquilibre environnemental dû
à la dégradation des sols, à la perte de la
diversité biologique, à la dégradation de la
qualité et de la quantité de l'eau ainsi que les
différentes nuisances sonores et atmosphériques peuvent avoir des
répercussions sur la santé des populations.
Une présence régulière et à long
terme dans un environnement pollué par les poussières modifient
la composition la composition de l'air. Aux dires des agents de santé de
la commune de Hiré, les maladies respiratoires et les problèmes
cutanées font parties des causes de consultations les plus importantes
aux côtés du paludisme. Les particules qui aspirées,
pénètrent les poumons, peuvent provoquer des maladies
respiratoires telles que l'asthme, les bronchites et la pneumonie (Gowan,
1992). Un endroit poussiéreux et fermé peut-être dangereux
aussi bien pour les agents mineurs que pour les populations riveraines. La
circulation intense des véhicules entre la mine de Bonikro et la fosse
de Hiré entraine une densification de la poussière surtout que la
voie n'est pas bitumée. Il en résulte, d'après les
différents interlocuteurs, des maladies respiratoires et une gêne
pour les riverains. Ces nuages de poussières sont également
présents au-dessus de la zone d'extraction. On aperçoit depuis la
montagne qui abrite le village de Zaroko d'immenses nuages de poussière
sur cette zone. L'impact des nuisances atmosphériques varie d'un
individu à un autre selon plusieurs facteurs parmi lesquels l'âge
est important. Les effets des poussières aspirées par les
populations sur leur santé peuvent inclure le développement des
maladies telles que la tuberculose, l'asthme, la bronchite chronique et les
maladies gastro-intestinales.
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La compagnie minière pour amalgamer l'or fait usage de
plusieurs produits dont le plus connu est le cyanure, un produit très
dangereux pour l'homme et son environnement. Son usage par les
sociétés minières se fait dans une prudence extrême
et dans le respect strict des règles établies en la
matière. Cependant, les populations craignent que ces eaux toxiques
évacuées dans le lac à cyanure ou parc à
résidu ne s'infiltrent à travers les eaux souterraines pour
contaminer et altérer la qualité des sources d'eaux souterraines.
Aussi, certains accidents comme la rupture des digues surviennent et le cyanure
et les autres substances contenues dans le parc à résidu se
retrouvent dans la nature. Les êtres vivants entrent ainsi en contact
direct ou indirect avec le cyanure. Cela s'avère dangereux quand on sait
que chez les êtres vivants, l'intoxication soit par inhalation, par
ingestion ou par contact avec la peau peut entrainer un arrêt
respiratoire suivi d'un collapsus cardio-vasculaire. Il est pourtant impossible
de mesurer la teneur de cyanure dans l'air ou de connaître exactement le
degré d'exposition des populations, car il n'y pas d'appareil pour cela.
Toutefois, certaines personnes pourraient avoir des problèmes de
santé si elles sont longuement et régulièrement
exposées, car pour avoir visité un site de traitement au cyanure,
nous avons-nous même ressentis des brûlures sur la peau. Les chefs
des campements de Koutouklou-Konankro et de Bandamakro disent avoir vu une
maladie dont ils ignorent le nom attaquer leurs pieds quand ils se sont rendus
dans leurs champs envahis par les eaux cyanurées. C'est une sorte
d'éruption cutanée avec changement de la coloration de la peau
(photo 33), qui s'apparente aux lésions dues à l'empoisonnement
à l'arsenic comme présente sur la photo. Ces deux pathologies ont
une similitude dans la mesure où elles sont dues à des substances
utilisées dans l'exploitation minière.
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Cette maladie est due, selon le chef, à la
présence du cyanure dans leurs plantations.
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Auteur photo : YOBO 2016
Photo 34 : les pieds malades du chef de
Konankro
Le mercure est une des substances utilisées pour
amalgamer le minerai aurifère. Il est généralement
utilisé sous forme élémentaire ou métallique et
provoque principalement des effets sur la santé lorsqu'il est
inhalé sous forme de vapeur ou absorbé par les poumons. Les
symptômes comprennent des tremblements, des changements d'émotions
(sautes d'humeur, irritabilité, nervosité, timidité
excessive), des changements neuro musculaires, des insomnies, des modifications
neuromusculaires (des atrophies musculaires, spasmes), des maux de tête,
des troubles des sensations, des modifications au niveau des réponses
nerveuses et de mauvaises performances lors des tests de la fonction cognitive
des niveaux d'exposition qu'il peut avoir des effets rénaux
indésirables et entrainé une insuffisance respiratoire et des
décès.
Les détonations qui ont lieu sur les sites miniers,
mettent les populations riveraines dans une situation d'inconfort. Elles
conduisent à des ébranlements instantanés du sol qui
perturbent également les populations. Des études menées
ont montré que des personnes exposées longuement à ce type
de bruit peuvent contracter l'hypertension artérielle et l'ulcère
(GOWAN, 1992). Les détonations effrayent et chassent les animaux de
leurs habitats en les éloignant de la zone d'émission.
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