MINISTERE DE L'ENSEIGNEMENT SUPERIEUR ET DE LA
RECHERCHE SCIENTIFIQUE
UNIVERSITE FELIX HOUPHOUËT-BOIGNY
D'ABIDJAN-COCODY
Unité de Formation et de Recherche des Sciences
de l'Homme et de la Société Institut de Géographie
Tropicale (I.G.T)
Année académique 2018-2019
|
|
Cote attribuée par la bibliothèque
|
Thèse de Géographie
Pour l'obtention du Grade de Docteur Parcours :
Géographie Humaine et Économique
Sujet :
Exploitation aurifère et développement
local dans la
sous-préfecture de Hiré
|
Présentée et soutenue publiquement par
:
YOBO JUDITH épouse GNAHOUA
Président de Jury : Monsieur HAUHOUOT
ASSEYPO CELESTIN PAUL, Professeur Titulaire de
Géographie, Université Félix
Houphouët-Boigny, Abidjan
Directeur de thèse : Monsieur NASSA
DABIE DESIRE AXEL, Maître de Conférences de Géographie,
Université Félix Houphouët-Boigny Abidjan
Membre du jury : Monsieur TOH ALAIN,
Maître de Conférences de Sociologie, Université
Félix Houphouët-Boigny, Abidjan
Membre du jury : Monsieur KOUAMELAN ALAIN
NICAISE, Maître de Conférences de Géologie,
Université Félix Houphouët-Boigny, Abidjan
Membre du jury : Madame COURET DOMINIQUE,
Directrice de Recherches de Géographie, UMR 245, CESSMA, IRD, Paris
7
UNIVERSITE FELIX HOUPHOUËT-BOIGNY
D'ABIDJAN-COCODY
UFR DES SCIENCES DE L'HOMME ET DE LA
SOCIÉTÉ
DEPARTEMEMNT DE GÉOGRAPHIE
Année académique
2018-2019
THÈSE UNIQUE
Parcours : Géographie Humaine et
Économique
Sujet :
Exploitation aurifère et développement
local
dans la sous-préfecture de Hiré
Présentée et soutenue publiquement par :
YOBO JUDITH épouse GNAHOUA
Sous la direction de :
Monsieur NASSA DABIE DESIRE AXEL
Maître de Conférences
1
DÉDICACE
« Aussi Dieu seul fait la liaison et
la communication des substances, et c'est par lui que les
phénomènes des uns se rencontrent et s'accordent avec ceux
des autres, et par conséquent qu'il y a de la réalité
dans nos perceptions ».
Leibniz (1646-1716).
A mon père qui m'a inculqué le goût du
travail et m'a poussé à aller
toujours plus loin, A ma mère dont l'amour me
donne des ailes, A ma très chère Edwige, ma soeur, mon amie,
mon modèle et mon guide, A Pacôme et Eric, mes frères,
mes amis, Merci pour tout.
A mon époux et à ma Minerve dont l'amour et
le soutien ont allégé ces années d'études.
2
SOMMAIRE
DÉDICACE 1
SOMMAIRE 2
AVANT-PROPOS 4
REMERCIEMENTS 5
SIGLES ET ABRÉVIATIONS 7
LISTE DES TABLEAUX 10
LISTE DES FIGURES 12
LISTES DES PHOTOS 14
I.INTRODUCTION GENERALE 15
II. REVUE DE LITTERATURE 18
III. PROBLEMATIQUE 33
IV. OBJECTIFS DE RECHERCHE 35
V. METHODOLOGIE DE RECHERCHE 36
PREMIERE PARTIE : 62
LA DISTRIBUTION SPATIALE DES ACTIVITES AURIFERES DANS LA SOUS-
PREFECTURE DE HIRE 62
CHAPITRE 1 : DISTRIBUTION SPATIALE DES SITES MINIERS 63
DE HIRE 63
CHAPITRE 2 : LA PRATIQUE DE L'EXPLOITATION MINIERE DANS
L'ESPACE
LOCAL DE HIRE 85
CHAPITRE 3 : LA RECOMPOSITION DE L'ESPACE DE HIRÉ 102
DEUXIEME PARTIE : 121
UN ESPACE LOCAL EN PLEINE MUTATION SOCIO-ECONOMIQUE 121
CHAPITRE 4 : CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET DYNAMIQUE URBAINE
À
HIRÉ 122 CHAPITRE 5 : LES ACTIONS DE DEVELOPPEMENT DE
LA COMPAGNIE MINIÈRE
153 CHAPITRE 6 : LES MUTATIONS SOCIALES LIEES A
L'EXPLOITATION DE L'OR
189
TROISIEME PARTIE : 197
CONFLITS ET COOPERATIONS ENTRE COMMUNAUTES ET COMPAGNIE
MINIERE DANS LA LOCALITE DE HIRE 197
3
CHAPITRE 7 : LA DÉGRADATION DE L'ENVIRONNEMENT
PAR
L'EXPLOITATION MINIÈRE 198
CHAPITRE 8 : RÉCESSION AGRICOLE DANS LE CANTON WATTA
228
CHAPITRE 9 : LES CONFLITS FONCIERS EXACERBÉS PAR
L'EXPLOITATION DE
L'OR 249
CONCLUSION GÉNÉRALE 284
BIBLIOGRAPHIE 288
WEBOGRAPHIE 296
ANNEXES 299
TABLE DES MATIERES 300
4
AVANT-PROPOS
La vision présentée par l'État de
Côte d'Ivoire à travers le Plan National de Développement
(PND 2012-2015), fait du secteur minier un des éléments
stratégiques du développement du pays. Cette décision est
basée sur le potentiel minier ivoirien en la présence de
plusieurs gisements de fer, de diamant, d'or, etc. A travers le PND,
l'État réaffirme l'intérêt pour ce secteur qui,
depuis la décennie 2000, se traduit par la multiplication des permis
miniers. Cet intérêt pour les ressources minières
intervient pour soutenir les apports au développement de l'agriculture
pilier de l'économie ivoirienne depuis 1960 qui est en crise. Cette
économie de plantation est bouleversée par les aléas du
binôme café-cacao du fait de la chute des prix à
l'international et par le vieillissement du verger. De nombreuses
conséquences ont suivi ces difficultés dans l'agriculture ce qui
a conduit l'État à explorer le secteur minier pour impulser un
nouveau souffle au développement. Plus de vingt ans d'exploitation
minière interrogent sur les mutations spatiales,
socio-économiques et environnementales induites par l'exploitation
minière et leur capacité à favoriser le
développement. C'est ce que nous tentons d'observer dans la
région de Hiré où s'est mise en place une importante
activité d'exploitation de l'or.
5
REMERCIEMENTS
Pendant la réalisation de cette thèse, nous
avons bénéficié de l'inestimable soutien de diverses
personnes que nous voulons, à travers ces quelques lignes, remercier.
Nous remercions premièrement le docteur NASSA
Dabié Désiré Axel, Maître de Conférences,
notre Directeur de thèse. Nous lui sommes infiniment reconnaissant pour
nous avoir initié à la recherche et inculqué le goût
du travail bien fait, ce depuis l'année de maîtrise jusqu'à
ce jour.
Nous tenons à remercier également le docteur
DEMBELE Ousmane, Maître Assistant, qui a été au vrai sens
du terme, un co-encadrant de l'ombre tout au long de cette aventure. Nous avons
eu la chance de bénéficier de ses contributions diverses allant
de conseils précieux et avisés aux appuis techniques qui ont
permis d'aboutir à ce produit final.
Notre reconnaissance également à l'ensemble des
membres du jury pour avoir accepté de participer à
l'évaluation de cette thèse. De fait, nous remercions Monsieur
HAUHOUOT Asseypo, Professeur Titulaire de Géographie, qui a
accepté de présider ce jury de thèse. Nous avons eu la
chance de bénéficier de ses contributions diverses au cours de
notre formation académique. Nous remercions Madame Dominique COURET,
Directrice de Recherches en Géographie pour sa lecture et ses
commentaires enrichissants sur la thèse. Nous remercions Monsieur TOH
Alain, Maître de Conférences de Sociologie qui a accepté
d'instruire cette thèse pour la qualité de ses commentaires. Nous
disons merci à Monsieur KOUAMELAN Alain Nicaise, Maître de
Conférences de Géologie, pour sa lecture et pour avoir
accepté de siéger dans ce jury.
Nos arguments de géographe ont été
forgés auprès de grands maîtres de la géographie
à l'Institut de Géographie Tropicale (IGT) de l'Université
Félix Houphouët Boigny d'Abidjan. Nous profitons de cette
thèse qui marque la fin de nos études universitaires, pour
exprimer notre reconnaissance à tout le corps enseignant de l'Institut
de Géographie Tropicale qui d'une manière ou d'une autre a
contribué à nous donner ces arguments de géographes qui
nous ont permis de mener ce travail à son terme. Nous voudrions en
particulier dire un grand merci au Professeur BIKPO, Responsable de recherche
de l'institut de géographie tropicale qui dans le secret est un
modèle pour nous. Nous remercions également les Professeurs
ALOKO-N'GUESSAN, ANOH Kouassi et HAUHOUOT Asseypo pour la formation qu'ils nous
ont donné. Notre gratitude également aux docteurs ALLA Della,
KASSI-DJODJO, KABLAN N'guessan et SERHAN Nasser, tous Maîtres de
Conférences à l'IGT pour leurs conseils avisés. Merci au
docteur LOBA Akou Don, Maître de Conférences pour son engagement
personnel
depuis la licence jusqu'à ce jour dans notre formation.
Merci aux docteurs KOUADIO Marylise de l'ENS, TAGRO-NASSA Josée,
GUÉDÉ Marius, MEMEL Frédéric et TAMBOURA Awa pour
leurs soutiens et leurs encouragements.
Nous remercions également toutes les
personnalités rencontrées lors de nos enquêtes de terrain.
Merci à M. N'GUESSAN, sous-directeur de la direction des mines, ainsi
qu'à M. MÉGNONRON Silué de la même direction. Nous
remercions également M. YÉO Soumaïla, directeur
régional de l'agriculture de Divo, M. OKOU Agoh, directeur des mines
dans la région du Lôh-djiboua, le directeur régional de
l'urbanisme ainsi qu'à M. DJÉDJÉ Abou, chef de secteur
ANADER de Divo, pour leur disponibilité à répondre
à nos préoccupations. Nos remerciements s'adressent
également au sous-préfet de Hiré, M. AHUI Roger, qui nous
a reçus à chaque fois que nous en exprimions le besoin. Merci
commandant, pour l'intérêt que vous avez accordé à
notre sujet. Merci à M. GONÉDRÉ Bi Boh, chef de service
administratif et à M. TÉ Auguste, chef du service technique de la
mairie de Hiré. Merci aux responsables locaux des eaux et forêts,
de l'ANADER et de l'agriculture.
Merci au président de la MUDH, Dr DAGO Célestin
qui en dépit de ses nombreuses occupations professionnelles, trouvait du
temps à nous consacrer. Merci également au président de la
CSDPIB, M. GNAMINI Jérémie.
Nous remercions le docteur KOUASSI Kouadio Nicolas pour son
aide lors de nos enquêtes à Hiré. Merci à M.
BLÉ, président des orpailleurs de Hiré, aux
différents chefs des villages et campements qui nous ont bien
reçus, merci à toutes les populations qui ont accepté de
nous accorder de leur précieux temps en répondant à nos
questions et en nous accompagnant parfois dans leurs plantations. Merci
à M. YAO Hubert pour sa disponibilité et sa
générosité. Votre apport a été d'une grande
utilité. Merci à notre tuteur à Hiré, M. GNAKPA
Ahipo Hilaire et à sa petite famille qui nous a accueillis à bras
ouverts.
Nous ne saurons terminer cette série de remerciements
sans dire merci à nos amis étudiants. Merci à YEO Nahoua
du CURAT, à nos amis ASSI Lordia, BONI Alika, ADOU Yao Timothée,
KONAN Lydie, TONAN Sabine, ZUO Estelle, KONE Hobela et KOUASSI Apolinaire.
Merci à toutes ces personnes que nous ne pouvons citer
nommément mais qui par une action ou un geste nous ont permis de
réaliser ce travail. Merci infiniment.
6
.
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
AGR : Activités
Génératrices De Revenus
ANADER : Agence Nationale d'Appui au
Développement Rural
ANDE : Agence Nationale De l'Environnement
APDH BIAO BM BNETD
CDCI CDL
CDLM CECAF CEI CERAP
: Actions Pour les Droits De L'homme
: Banque Internationale pour l'Afrique Occidentale
: Banque Mondiale
: Bureau National d'Étude Technique et de
Développement
: Compagnie de Distribution de Côte d'Ivoire
: Comité de Développement Local
: Comité de Développement Local Minier
: Cabinet d`Études de Conseil d`Audit et de Formation
: Commission Électorale Indépendante
: Centre de Recherche et d'Action pour la Paix
CETIF : Cabinet d'Experts pour l'assistance
conseil en Topographie et Foncier
CGFR : Comité de Gestion Foncière
Rurale
CIAPOL : Centre Ivoirien Anti-Pollution
CIE : Compagnie Ivoirienne
d'Électricité
CMA COOPEC CSDPIB CSU CVGFR DMDG EIES
: Christian Missionary Alliance
: Coopérative d'Épargne et de Crédit
: Cellule Stratégique pour la Défense et la
Protection des Intérêts de Bouakako
: Centre de Santé Urbain
: Comité Villageois de Gestion Foncière Rurale
: Direction des Mines Direction de la Géologie
: Étude d'Impact Environnemental et Social
IEPP : Inspection de l'Enseignement Primaire et
Préscolaire
EPP FAO F CFA FHB GIZ GTZ
: École Primaire Publique
: Food & Agriculture Organisation
: Franc de la Communauté Financière Africaine
: Félix Houphouët Boigny
: Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit
: Deutsche Gesellschaft für Technische Zusammenarbeit
7
GPS : Global Positionnement System
ha : Hectare
H2O : l'eau
HCN : Cyanure d'Hydrogène
IDRM : Institute for Defence Resources
Management (Canada)
IF : Institut Français
IFEF : Institution de Formation et
d'Éducation Féminine
IGT : Institut de Géographie
Tropicale
INS : Institut National de la Statistique
IRD : Institut de Recherche pour le
Développement
IST ITIE Km LGL MUPES NE NaCN NaOH NML NSIA
NW
: Infections Sexuellement Transmissibles
: Initiative pour la Transparence dans l'Industrie Extractive
: Kilomètre
: Lihir Gold Limited
: Mutuelle pour la Promotion de l'Enseignement Secondaire
: Nord Est
: cyanure de sodium
: Hydroxyde de sodium
: Newcrest Mining Limited
: Nouvelle Société Interafricaine d'Assurance
: Nord West
8
MME : Ministère des Mines et de
l'Energie
MUDH : Mutuelle pour le Développement de
Hiré
OMS : Organisation Mondiale de la
Santé
PDL : Plan de Développement Local
PDR : Plan de Relocalisation
PE : Permis d'Exploitation
PH PND PNIA
|
: Potentiel Hydrogène.
: Plan National de Développement
: Plan National d'Investissement Agricole
|
PIB : Produit Intérieur Brut
PNUD : Programme des Nations Unies pour le
Développement
PS PSD
: Professionnelles du Sexe
: Plan Stratégique de Développement
RCI : République de Côte
d'Ivoire
RGPH : Recensement Général de la
Population et de l'Habitat
RSE : Responsabilité Sociale des
Entreprises
SAG SMIG SODECI SODEFEL SODEMI
: Semi Autogène
: Salaire Minimum Garanti
: Société de Distribution d'Eau de la Côte
d'Ivoire
: Société d'État pour le
Développement des Fruits et Légumes
: Société pour le Développement Minier de la
Côte d'Ivoire
TVA : Taxe sur la Valeur Ajoutée
UEMOA UICN
: Union Économique et Monétaire Ouest Africaine
9
: Union Internationale pour la Conservation de la Nature
10
LISTE DES TABLEAUX
Pages
Tableau 1 : tableau synoptique de l'étude 61
Tableau 2 : les différentes compagnies minières
exploitants l'or en Côte d'Ivoire 64
Tableau 3 : répartition des orpailleurs selon la
nationalité 93
Tableau 4 : origine socio professionnelle des orpailleurs 94
Tableau 5 : Matrice de confusion 2002 en pourcentage 107
Tableau 6 : Matrice de confusion 2016 en pourcentage 107
Tableau 7 : mode de calcul de l'indemnisation pour destruction de
biens immobiliers 119
Tableau 8 : répartition de la population par origine des
villages de Hiré 131
Tableau 9 : structure résumée de la population de
Hiré en 2014 133
Tableau 10 : répartition de la population agricole de
Hiré par culture selon le sexe en 2014 136 Tableau 11 :
répartition de la population de la sous-préfecture de Hiré
par localité en 1998 et
2014 141
Tableau 12 : Evolution de la population de la ville de
Hiré de 1965 à 2014 141
Tableau 13 : Caractéristiques de l'habitat à
Hiré 144
Tableau 14 : Classification des quartiers de la ville de
Hiré selon la position et le standing 146
Tableau 15 : répartition des établissements
primaires dans la ville de Hiré 148
Tableau 16 : quelques structures présentes dans la commune
de Hiré 152
.Tableau 17 : récapitulatif des investissements de LGL
à Hiré entre 2009 et 2010 154
Tableau 18 : récapitulatif de la réalisation des
requêtes de Gogobro par les différents gérants de
la mine de Bonikro. 161 Tableau 19 : investissements de LGL en
participation à la vie communautaire, entre 2009 et
2010 166
Tableau 20 : investissements de LGL en appui aux activités
génératrices de revenus 167
Tableau 21 : investissements de LGL en infrastructures socio
communautaires 167
Tableau 22 : les localités concernées par le CDLM
de Hiré 169
Tableau 23 : récapitulatif des investissements sociaux
majeurs réalisés par l'entreprise minière
NEWCREST 176 Tableau 24 : récapitulatif des projets
prioritaires réalisés du partenariat NEWCREST-PNUD
178
Tableau 25 : récapitulatif des projets prioritaires
exécutés sur la période 2012-2015 179
Tableau 26 : actions socio-économiques
réalisées par le CDLM 2016 - 2017 182
11
Tableau 27 : inventaire des projets réalisés en
2017 par le CDLM de HIRE 183
Tableau 28 : les activités génératrices
identifiées par les populations et le tandem NEWCREST-
PNUD 187
Tableau 29 : les causes des conflits entre parents et enfants
liés à l'activité minière 191
Tableau 30 : répartition des conflits selon leur nature
au sein de la population enquêtée 193
Tableau 31 : les quantités annuelles des produits
chimiques utilisés par la société NEWCREST
dans le traitement du minerai dans la sous-préfecture
de Hiré 201
Tableau 32 : superficies occupées par NEWCREST 229
Tableau 33 : origine socio professionnelle des orpailleurs
234
Tableau 34 : productions maraichères dans la
sous-préfecture de Hiré- campagne SODEFEL
année 1991-1992. 238 Tableau 35: Production de riz
et de maïs, dans la sous-préfecture de Hiré - campagne
SODEFEL
année 1991-1992 240
Tableau 36 : récapitulatif des blocages communautaires
en 2015 275
Tableau 37 : récapitulatif des engagements issus du
protocole d'accord NML-Bouakako 280
Tableau 38 : protocole d'accord NEWCREST-Gogobro 281
12
LISTE DES FIGURES
Pages
Figure 1 : modèle de production du développement
local 38
Figure 2 : position des localités dans l'espace local
45
Figure 3 : sites d'exploitation aurifère en Côte
d'Ivoire en 2016 66
Figure 4: répartition des sites d'orpaillage 70
Figure 5 : évolution des orpailleurs présents sur
le périmètre de NEWCREST à Hiré de 2010 à
2016 73 Figure 6 : évolution de l'occupation du
périmètre de Hiré Est par les orpailleurs de 2010 à
2014
74
Figure 7 : Localisation des permis d'exploitation de NEWCREST
Côte d'Ivoire 78
Figure 8 : Situation géographique des sites occupés
par la compagnie minière 80
Figure 9 : Occupation du sol par le complexe minier à
Bonikro 83
Figure 10 : Chaîne de production artisanale de l'or 87
Figure 11 : Occupation du sol de 2002 103
Figure 12 : Répartition dans l'occupation du sol en 2002,
avant la mise en place de l'exploitation
minière industrielle 104
Figure 13 : Occupation du sol de 2016. 105
Figure 14: Répartition de l'occupation du sol en 2016,
après la mise en place des sites
d'orpaillage et d'exploitation industrielle 105 Figure 15 :
évolution globale des superficies par type d'occupation du sol entre
2002 et 2016.
106
Figure 16 : anciens et nouveaux sites des campements
déplacés par la compagnie minière 110
Figure 17 : courbe d'évolution de la population de
Hiré sous-préfecture selon les RGPH 1975
à 2014 127
Figure 18 : orpailleurs immigrés selon l'année
d'arrivée 129
Figure 19 : répartition de la population de Hiré
selon l'ethnie et la nationalité 130
Figure 20: répartition de la population
étrangère enquêtée selon la nationalité
132
Figure 21 : pyramide des âges de la population de
Hiré en 2014 134
Figure 22 : répartition de la population de la
sous-préfecture de Hiré par branche d'activité135
Figure 23 : carte d'évolution de la population de
Hiré entre 1998 et 2014 140
Figure 24: Évolution de l'emprise spatiale de la ville de
Hiré 142
Figure 25: organisation spatiale de la ville de Hiré en
2016 145
13
Figure 26: répartition des types d'habitat dans la ville
de Hiré 147
Figure 27 : Carte de la zone d'influence du CDLM de Hiré
170
Figure 28: carte d'identification des chefs de village et autres
personnes influentes dans le watta
173
Figure 29 : carte NEWCREST synthétisant les zones
touchées par l'inondation 219
Figure 30 : courbe d'évolution de la production agricole
de 2006 à 2015 231
Figure 31: courbe d'évolution de la production en cultures
vivrières de 2006 à 2015 239
Figure 32 : les mutations observées au sein de la
population agricoleErreur ! Signet non défini.
Figure 33 : les fondamentaux de la sécurité
alimentaire 247
Figure 34: mode d'accès à la terre par les
allochtones 256
Figure 35 : évolution des périmètres du
projet minier de Hiré entre 2009 et 2015 265
Figure 36 : zones interdites aux populations en perspective de la
mise en exploitation minière
dites moratorium 1 et moratorium 2 267
Figure 37: les îlots urbains concernés par la mise
en exploitation minière à Hiré 269
14
LISTES DES PHOTOS
Photo 1 : site d'orpaillage d'Assayé 68
Photo 2 : site du bas fond de Bouakako 71
Photo 3 : Vue aérienne de la mine de Bonikro 81
Photo 4 : le lavage simple 89
Photo 5: Instrument de lavage appelé « le
wombiaré» 90
Photo 6 : Instrument de lavage appelé « pirogue
» 91
Photo 7 : Aménagement pour le raffinage au cyanure
92
Photo 8 : Vue de haut du nouveau site de Bonikro 112
Photo 9 : le modèle de maison construits à
Bonikro 112
Photo 10: Cuisine de fortune à Bonikro 113
Photo 11: Vue de haut du nouveau campement de Bandamakro
114
Photo 12: Modèle de maisons construites à
Bandamakro 114
photo 13: Vue aérienne de Koutouklou- Konankro 116
Photo 14: ancien site de Koutouklou-Konankro 116
Photo 15: Modèle de logement construit à
Koutouklou-Konankro 117
Photo 16: Hôtel de luxe de Hiré 149
Photo 17: La succursale bancaire BIAO-CI 150
Photo 18: station-service Essenci 150
Photo 19: un des super marchés de la ville de
Hiré 151
Photo 20: le bâtiment de trois classes construit par
NEWCREST 162
Photo 21: le logement de la sage-femme 162
Photo 22: le logement de la sage-femme 162
Photo 23: maternité de Gogobro 163
Photo 24: Marché de Gogobro 163
Photo 25: Site d'extraction aurifère industrielle de
Hiré-Est 203
Photo 26 : site d'orpaillage avec absence de
végétation 203
Photo 27: Le bois est coupé pour servir d'étaie
dans les fosses 209
Photo 28: dépôt de cyanure sur le sol. 214
Photo 29: végétation brulée par le
cyanure 214
Photo 30 : dégâts causés par les
explosions de dynamitage au quartier Baoulé 217
Photo 31: des constructions à moins de 300m de la mine
de Hiré 217
Photo 32: pancarte située près du lac à
cyanure 221
Photo 33: pancarte signalant la présence de cyanure
dans la zone 221
Photo 34 : les pieds malades du chef de Konankro 226
15
I.INTRODUCTION GENERALE
I.1. Justification du choix du sujet
La Côte d'Ivoire a choisi de faire de l'agriculture le
pilier de son économie au lendemain de l'indépendance en 1960.
Cette agriculture, composée de cultures pérennes et
vivrières, s'est développée dans l'ensemble du pays. Elle
contribue à elle seule à plus de 21% du PIB (plus de 11% pour
l'agriculture vivrière et environ 10% pour l'agriculture d'exportation)
et occupe désormais environs 2/3 de la population active (REEA, 2017).
Cette agriculture est tributaire du binôme café-cacao auquel
s'ajoutent la banane, l'ananas, le coton, l'huile de palme, le sucre,
l'hévéa, l'anacarde, l'igname, le manioc, la banane plantain, le
maïs, le riz, etc. Elle a pendant les trois premières
décennies de l'indépendance permis à la Côte
d'Ivoire de connaitre une forte croissance économique. Pendant ces
décennies, le surplus tiré des recettes d'exportation a permis de
financer les investissements dans les secteurs sociaux de base (santé,
éducation) et dans les infrastructures économiques (routes,
ports, aéroports, industries). Ces investissements ont lancé et
soutenu la croissance qui, au début des années 1980, a atteint
l'indice de 7%. Toutefois, la forte dépendance et la chute des prix des
principales cultures pérennes et d'exportation que sont le café,
le cacao, le palmier à huile vis-à-vis du marché
international a entrainé une crise économique profonde et
persistante. Dès lors, bien qu'accordant toujours un point d'honneur
à l'agriculture, le gouvernement ivoirien a décidé de
diversifier les bases économiques du pays en mettant en place
différentes stratégies pour sa relance qui connait jusqu'à
présent des balbutiements.
C'est dans ce contexte que le potentiel minier ivoirien
découvert depuis les années 1950 va être valorisé.
Les activités minières, à l'exception de l'exploitation
des hydrocarbures, ne jouaient pas un rôle prépondérant
dans l'économie de la Côte d'Ivoire. Ce n'est qu'à partir
de 1991, avec l'ouverture des mines d'Ity et de Tongon, que l'État a
véritablement commencé à afficher une volonté de le
mettre en valeur. Cette volonté de faire de l'activité
minière un maillon essentiel de l'économie ivoirienne a connu une
ascension depuis la première décennie des années 2000. Les
différents gouvernements qui se sont succédé depuis lors
mettent un accent particulier sur la politique de développement du
secteur minier afin de le redynamiser. On assiste alors à un
développement sans précédent des activités
d'exploration et d'exploitation menées par de nombreuses compagnies
minières en provenance de tous les continents.
16
Cette explosion de l'activité minière est tenue
par les compagnies minières étrangères, attirées
par la libéralisation du secteur à travers la mise en place de
réformes institutionnelles et règlementaires ( modification du
code minier de 1995) qui ont entre autres abouti à l'adoption du nouveau
code minier de 2014 qui comporte des exemptions fiscales, le rapatriement des
bénéfices, les faibles paiements de redevances, les
régimes de compensation médiocres, la protection des entreprises
étrangères en cas de litiges, des normes environnementales peu
rigoureuses (Morgan, 2002; Segbor, 2014, cités par Awovi A. K. (2017)
).
Ce sont 171 permis d'exploration qui ont été
octroyés et treize permis d'exploitation qui ont été
signés (MME ; 2016). Une politique et un contexte réglementaire
incitatifs ont été mis en place pour attirer les investisseurs
nationaux et étrangers. Le nouveau code minier de 2014, conjugué
aux efforts consentis par l'État pour répondre aux exigences de
l'ITIE, montre une volonté ferme de l'État de faire du secteur
minier un maillon essentiel dans la chaîne des ressources
économiques du pays. De tous les minerais dont regorge le sous-sol
ivoirien, l'or est le plus exploité. En effet, des douze permis
d'exploitation en cours, l'or concentre à lui seul huit permis dont deux
dans la seule sous-préfecture de Hiré.
L'ouverture des exploitations minières dans les
localités dominées par l'agriculture apparait comme un
élément nouveau dans leur paysage. Les localités et leurs
populations subissent donc diverses mutations entrainées par
l'activité minière. Cette étude doctorale intitulée
"Exploitation aurifère et développement local dans la
sous-préfecture de Hiré, au centre Sud de la Côte
d'Ivoire", pose la question de la contribution de l'activité
minière au développement local de Hiré.
I.2. Présentation de la zone
d'étude
La sous-préfecture de Hiré a été
créée par la loi n° 76-877 du 22 décembre 1976
portant création des sous-préfectures de Hiré-Watta et
Zikisso. Située au sud de la Côte d'Ivoire, elle appartient
à la région administrative du Lôh-Djiboua, avec pour
chef-lieu de région Divo. La circonscription administrative couvre une
superficie de 560 km2 et possède des frontières avec
plusieurs autres sous-préfectures notamment celle d'Oumé au Nord,
Didoko au Sud, Taabo et Zégo à l'Est et Zikisso à
l'Ouest.
La sous-préfecture de Hiré comprenait deux
cantons : le canton Watta et le canton Zégo ainsi que plus de 356
campements. Le canton Watta est composé de six villages : Zaroko,
Bouakako,
17
Gogobro, Kagbè, Douaville et Hiré village. Quant
au canton de Zégo, il est composé de quatre villages :
Zégo, Bokasso, Apparagra et Goudi. Notons cependant que le
découpage administratif de 2011 a érigé Zégo en une
sous-préfecture. Celle de Hiré comprend désormais au plan
administratif le seul canton Watta avec plus de 200 campements. Cependant, dans
le cadre de cette étude, nous nous intéressons qu'aux cinq
campements autour de l'usine minière de Bonikro que sont : Petit
Bouaké, Chantier Konankro, Bonikro, Bandamakro et Koutouklou-Konankro.
Hiré est aussi un chef-lieu de commune situé à 43 km de
Divo, à 27 km d'Oumé et à environ 243 km d'Abidjan. La
commune de Hiré existe depuis le 16 octobre 1985 et s'étend sur
une superficie de 134 km2. Elle est composée de dix quartiers
qui ont chacun des caractéristiques et une histoire particulière,
mais Hiré Dida en est le village noyau.
18
II. REVUE DE LITTERATURE
La revue de la littérature a consisté à
explorer l'essentiel de la littérature portant sur l'activité
minière dans le monde, en Afrique et singulièrement en Côte
d'Ivoire. Le constat est que l'exploitation minière est une
activité économique qui a intéressé les chercheurs
de plusieurs disciplines comme les géographes, les sociologues, les
géologues, les historiens, etc. Ces chercheurs ont, par ailleurs
abordé ce sujet sous divers angles. Avec cette pluralité
d'écrits sur l'activité minière, il est important de faire
un état des lieux sur la question dans les limites du thème de
recherche relatif au rapport entre exploitation minière et
développement local. Les éléments suivants ont nous guider
et nous ont permis de circonscrire la portée des termes charpentes de la
problématique et d'exposer la méthode d'approche adoptée.
En nous focalisant sur cette réflexion, nous regroupons les
connaissances sur la contribution de l'activité minière au
développement local en trois rubriques :
- la définition des concepts ;
- l'historique de l'activité minière, de son
importance ;
- l'impact de l'activité minière sur le
développement social, économique, environnemental et spatial des
localités hôtes.
II.1. La définition des concepts
II.1.1. Les principes du développement
local
Vers la fin des années 1950, Friedman et Stohr font
émerger la théorie du développement endogène. C'est
une approche volontariste axée sur un territoire restreint qui
conçoit le développement comme une démarche partant du bas
vers le haut se basant principalement sur les ressources propres
(endogènes).
Le concept de développement local est compris de la
même façon tant dans sa portée géographique que dans
ses domaines d'intervention. De ce fait, il convient de retenir que le
développement local se définit à partir d'une base
territoriale. Cette base territoriale est déterminée en
s'appuyant sur le constat qu'il existe presque toujours un niveau
d'organisation territoriale où s'établissent les relations entre
d'une part le tissu social constitué par les communautés rurales
et d'autre part les fonctions administratives primaires, les fonctions
économiques et les services de « base » dans les centres et
les villes d'encadrement de cette communauté. Le développement
local suppose une pluralité de niveau d'action qui constitue
19
l'une de ses caractéristiques essentielles ; et enfin
il se fonde sur des notions de participation, de partenariat et de
contractualisation.
C'est ainsi que Lazarev et Arab (2002) définissent le
concept de développement local. Pour ces deux auteurs, les partenaires
du développement local sont : le gouvernement local (partenaire
institutionnel local), les communautés rurales, les organisations de la
société civile (associations locales) et les entreprises
privées de types modernes.
Teissernc (2000) présente le développement local
comme un processus de changement capable de faire passer le territoire en tant
que réalité économique, sociale institutionnelle d'un
état à un autre ». Pour lui, le développement local
consiste à appréhender le territoire dans sa globalité,
à engager un processus de transformation qui touche à toutes ses
composantes.
Selon Decoster D.P (2000), bien que les principes du
développement local forment une méthodologie globale applicable
à tout territoire, sa mise en oeuvre variera d'un lieu à l'autre
et d'une période à l'autre en fonction des potentialités
et des vulnérabilités locales et du moment d'activation. Ces
principes sont : une approche globale, intégrée et
transversale.
L'approche globale tient compte du contexte territorial dans
lequel s'inscrit la zone en développement local. Chaque zone de
développement local appartient à un développement
territorial c'est-à-dire à un territoire élargi. Il
convient d'éviter les redondances d'activités, leur expansion.
Leur maintien nécessite un spectre de chalandise suffisant. Une
concurrence d'activités identiques entre zones de développement
voisines conduit à la faillite des concurrents. Il faut, au contraire,
pour des activités nécessitant un territoire plus large, pouvoir
compter sur la supra-communalité, dépasser les frontières
des communes ; la démarche de développement local est
intégrée car elle repose sur les potentialités et les
vulnérabilités locales et s'adapte en fonction de ces
éléments. Elle doit respecter les équilibres locaux entre
les volets du développement pour ne pas en déstabiliser
l'harmonie. L'approche est dite transversale car elle repose sur le principe
d'un décloisonnement des secteurs d'activités. Chaque secteur
public ou privé doit sortir de sa logique organisationnelle en colonne
hiérarchisée.
Le développement local peut être compris comme un
processus de création (production), de rétention (appropriation),
et de redistribution (partage équitable) des richesses sur un
territoire. Ce processus de développement s'articule autour de trois
dimensions : l'espace, le temps et les acteurs. Il permet à la
population du territoire concerné de résoudre progressivement ses
problèmes et de réaliser ses ambitions dans les domaines
économique, social, culturel, et
20
environnemental par la participation active, individuelle et
collective de l'ensemble des citoyens (MEDEV, 2006).
Le développement local est aussi l'ensemble des actions
et initiatives concourant à l'amélioration durable des conditions
de vie des populations organisées dans un espace géographique
déterminé (MEDEV, 2005).
Le développement local se définit comme un
processus dynamique dans lequel les acteurs organisés et
mobilisés initient et mettent en oeuvre des actions sur leur espace
donné en vue de l'amélioration de leurs conditions de vie.
Le développement local est une dynamique locale
fondée sur la mobilisation locale des ressources et du savoir-faire et
met l'accent sur le développement des initiatives, le renforcement des
solidarités intercommunautaires, la prise en compte des aspirations et
des besoins de la population dans les domaines économique, social et
culturel. Il permet un saut qualitatif des acteurs locaux dans l'exercice de
leur rôle politique, économique, social et culturel, une
capacité collective à définir une stratégie
cohérente d'actions de développement et une organisation de la
société civile.
Au total, le développement local implique une
démarche partenariale associant autour de la collectivité
territoriale, les différents acteurs locaux ainsi qu'un fort
développement de la démocratie locale participative à
côté de la démocratie représentative.
Le développement local dont il est question dans ce
travail est le développement local minier c'est-à-dire que
celui-ci est conçu et mis en oeuvre par la compagnie minière avec
l'implication pleine et entière des populations dans le cadre des
actions communautaires des sociétés minières.
II.1.2. L'exploitation minière
L'exploitation minière est une activité
très ancienne d'extraction de minerais. Elle est pratiquée de
façon artisanale depuis la nuit des temps et depuis le XIIIème
siècle. La forme industrielle est également pratiquée
(UICN/PACO, 2011) avec les progrès technologiques.
II.1.2.1. L'exploitation minière
artisanale
L'exploitation minière artisanale se définit
comme « toute opération qui consiste à extraire et
concentrer des substances minérales et à en
récupérer les produits marchands pour en disposer
21
en utilisant des méthodes et procédés
traditionnels ou manuels » (Nyembo, 2007). Cette définition se
rapproche de cette autre définition selon laquelle, l'exploitation
artisanale est synonyme de l'exploitation traditionnelle ou encore de
l'orpaillage dans le cas de l'or. Le code minier ivoirien en son article
premier définit l'exploitation traditionnelle ou artisanale comme toute
exploitation dont les activités consistent à extraire et
concentrer les substances minérales et à en
récupérer les produits marchands par les méthodes,
procédés manuels et traditionnels. L'exploitation artisanale,
c'est aussi l'utilisation directe de l'énergie humaine dans l'extraction
des minerais. Le terme orpaillage est souvent utilisé pour
désigner l'exploitation traditionnelle ou artisanale de l'or. Pour
certains, le terme orpaillage tire son origine étymologique du mot
« harpailler » qui signifie en ancien français, saisir,
attraper (Orru, 2004). Pour d'autre, il vient du mot paille, en
référence à la paille que les chercheurs d'or d'antan
plaçaient sous les riffles pour piéger l'or (Polidori ; 2001).
Cette forme d'exploitation très ancienne est beaucoup pratiquée
par de nombreuses personnes comme le montre Mazalto (2008). En effet, il donne
l'exemple de la RDC où la Banque mondiale estime à dix millions
le nombre de personnes, soit 16 % de la population, qui dépend de
l'activité minière artisanale pour leur survie quotidienne. Le
secteur artisanal générerait environ 90 % de la production
minière totale exportée par la RDC (World Bank et International
Développement, Association, 2007). Une bonne partie de l'activité
minière du Congo est le fait d'exploitants artisanaux, ou «
creuseurs », qui travaillent manuellement. En fait, le secteur minier
artisanal a aidé à réduire la pauvreté par la
création d'emplois pour une nombreuse main d'oeuvre inemployée ou
sous employée, par l'effet multiplicateur de sa croissance, par la
stabilité économique et sociale qui résulte de
l'accès à l'infrastructure et par les avantages résultant
de l'emploi des femmes. Cependant, les conditions de travail dans ce secteur
sont extrêmement dangereuses. Généralement les creuseurs
travaillent pieds nus, sans équipement de protection individuelle, dans
des puits non étayés et non ventilés, en
s'éclairant à la bougie.
II.1.2.2. L'exploitation minière
industrielle
L'exploitation minière industrielle est définie
comme l'exploitation minière par des moyens mécaniques qui
permettent l'extraction de grandes quantités de minerais. L'industrie
minière est l'ensemble des activités concernant la
découverte et l'extraction de minéraux qui se trouvent sous la
surface de la terre. Ces minéraux peuvent être métalliques
(tels que l'or et le cuivre) ou non métalliques (tels que le charbon,
l'amiante ou le gravier). Les métaux sont mélangés
à beaucoup d'autres éléments mais parfois on en retrouve
de grandes quantités concentrées dans une zone relativement
petite, « le gisement », d'où l'on peut extraire un ou
plusieurs métaux
22
avec des bénéfices économiques. Les
dimensions des mines peuvent être très variées, depuis les
petites opérations d'exploitation produisant moins de 100 tonnes par
jour jusqu'aux grandes mines qui déplacent des centaines de milliers de
tonnes de minerais. L'activité minière est composée de
deux étapes : la phase d'exploration et la phase d'exploitation.
La phase d'exploration consiste à rechercher les
indices d'existence d'un minerai et d'en déterminer le degré de
concentration afin d'évaluer la rentabilité de celui-ci en cas
d'extraction. C'est un programme long et couteux. Les dépenses
d'exploration sont engagées avant qu'il n'y ait le moindre revenu
disponible. C'est pourquoi les États ont adopté des dispositions
particulières régissant le traitement des dépenses
d'exploration avant production aux fins de l'imposition future des
bénéfices. Lorsque cette exploration donne des résultats
concluants au sujet de la rentabilité du gisement découvert alors
arrive la phase d'installation de la mine.
L'aménagement d'une mine demande beaucoup de capitaux
et l'importation de nombreux équipements très divers de
fournisseurs spécialisés. Plusieurs gouvernements tiennent compte
de l'intensité capitalistique de cette industrie et offrent divers
moyens d'accélérer le recouvrement des dépenses
d'établissement une fois que la production a commencé. Lorsque
les équipements doivent être importés, l'État offre
souvent un mécanisme de franchise de droits de douane pendant
l'établissement de la mine et la plupart des pays offre aussi un
allègement de la TVA sur les achats d'équipements, en particulier
si la production de la mine est destinée à l'exportation. Une
fois l'installation de la mine achevée commence l'extraction du minerai.
La phase d'exploitation ou phase de production est la phase au cours de
laquelle les sociétés minières procèdent à
l'extraction du minerai découvert. Cette extraction se fait selon divers
procédés en fonction de la nature du minerai et des profondeurs
d'enfouissement de celui-ci.
II.1.3 La méthode d'exploitation
minière
La méthode d'exploitation utilisée pour extraire
un minéral déterminé dépend de sa nature des
dimensions et de la profondeur du gisement et des aspects économiques et
financiers de l'opération en question.
La quête des placers a été un des aspects
essentiels sinon le principal des diverses ruées vers l'or que connut le
monde dans la seconde moitié du XIXème siècle. Les dragues
tirent les sables aurifères des cours d'eau. On extrait par cette
technique, le diamant, l'or et l'étain (Lerat, 1971).
Pour exploiter les charbons et les lignites enfouis sous
quelques mètres ou quelques dizaines de mètres de terrains
stériles, il est vite apparu très avantageux, dans le domaine
économique, de
23
procéder à une dénudation (strip-line) de
l'horizon exploité de façon à pouvoir entreprendre
l'attaque de la couche productrice avec des engins mécaniques (Gastou M,
2014). Dans ces types d'exploitation, des engins mécaniques d'allure
aérienne, surnommés « sauterelles » rejettent les
déblais à plusieurs dizaines de mètres du point
d'extraction. L'évacuation de la production est assurée par des
trains ou par des lourds camions ou par des convoyeurs roulants qui courent
dans la tranchée.
La carrière est un paysage minier bien plus
fréquent que le précédent. La quasi-totalité des
matériaux de construction autres que les sables et les graviers est
extraite dans les carrières. Sont aussi obtenus de cette façon
des tonnages croissants de bauxites, de minerais de fer et de métaux non
ferreux.
Pour atteindre les minerais solides enfouis
profondément, l'homme creuse des mines. L'exploitation des ressources
minières profondes marque moins sensiblement le paysage que l'extraction
des richesses superficielles. L'exploitation souterraine n'est pas toujours
totalement indépendante de l'extraction à ciel ouvert. Dans
nombre de gisements, l'exploitation commencée à ciel ouvert est
poursuivie sous terre. L'extraction en profondeur proprement dite est
menée différemment selon la topographie et la profondeur de
l'horizon producteur.
II.2. Historique et importance de l'exploitation
minière II.2.1. Historique de l'exploitation minière
L'histoire de l'exploitation minière se perd dans la
nuit des temps (Lerat, opc). Il y a des mines dans la plupart des pays et des
régions du monde. L'exploitation minière était
pratiquée sur tous les continents de façon traditionnelle et
s'est développée différemment d'un continent à un
autre selon les réalités de ceux-ci. Les activités
minières sont toutefois de taille différente d'un continent
à un autre et d'un pays à un autre.
L'Europe reste essentiellement productrice de combustibles
solides. Dans la moitié du XVIIIème siècle, le potentiel
charbonnier fut peu à peu valorisé. Le mouvement a
débuté aux Royaume-Uni où la production, bien plus
qu'ancienne, s'éleva de 2,5 millions de tonnes en 1700 à 10
millions de tonnes un siècle plus tard. Le développement
industriel suscita aussi l'expansion d'activités minières plus
anciennes et fut à l'origine de nouvelles créations. Au nombre de
ceux-ci, on a l'extraction de la potasse, qui débuta en 1850. Le
développement des mines de fer est contemporain à l'essor de la
sidérurgie ; (Lerat, opc).
24
Sans avoir connu une activité minière aussi
précoce que l'Europe moyenne, l'Amérique latine est l'une des
plus vieilles régions minières du monde. On y ouvre dès
1545 de grandes exploitations de minerai souvent polymétalliques mais
renfermant tous les métaux précieux. Au XIXème
siècle, les besoins des pays industriels ont stimulé la
prospection et la mise en valeur de nouvelles richesses utilisables par
l'industrie chimique puis par l'industrie métallurgique. Les nitrates de
l'Atacama, alors boliviens et péruviens, étaient connus
dès le XVIIIème siècle, mais leur exploitation ne fut
entreprise que vers 1830 pour atteindre son apogée dans les
dernières décennies du XIXème siècle et
pratiquement cesser devant la concurrence des nitrates de synthèse en
1928. Aujourd'hui, l'Amérique et singulièrement l'Amérique
Latine demeure une région minière essentielle.
Le Moyen Orient est une région riche en ressources
naturelles, particulièrement en pétrole dont elle est la plus
riche et sur laquelle elle a bâti sa fortune. Avec un pays comme l'Arabie
Saoudite, plus grand pays de la région dont le secteur minier est le
troisième pilier de l'économie.
Si l'Afrique est, à en croire l'anthropologie moderne,
le berceau de l'humanité, l'Afrique est aussi le berceau de
l'activité minière de l'homme. La plus ancienne mine jamais
découverte par les archéologues est africaine, elle date de 43000
ans avant Jésus-Christ, et se trouve au Swaziland, sur le site d'une
exploitation actuelle de minerai de fer (Yachir, 1987).
L'Afrique regorge de multiples ressources minières
allant des matières premières minérales aux
carrières. Les techniques d'extraction traditionnelles qui existaient
avant le développement de l'industrialisation ont permis l'extraction
des métaux précieux à des degrés très
faibles. Ce qui a permis à l'Afrique de conserver son potentiel minier
et d'être aujourd'hui courtisé par les sociétés
minières transnationales.
Les pierres précieuses dont l'or ont une grande
importance dans la société africaine. L'exploitation
aurifère en Afrique subsaharienne est antérieure à la
colonisation car à cette époque, l'or avait une valeur
économique, sociale et religieuse.
En Afrique, cinq à six millions de personnes (20
millions dans le monde) pratiquent la «petite mine», souvent en
complément de l'agriculture. Plusieurs substances s'y prêtent, des
matériaux de construction aux pierres précieuses (diamant) et
à l'or. Au Ghana, second producteur africain d'or, les revenus de
l'orpaillage, qui sont injectés dans l'économie du pays, sont
supérieurs à ceux générés par l'exploitation
industrielle. L'activité minière participe directement aux
économies locales rurales dans la mesure où elle constitue une
source de revenus importants.
25
L'exploitation minière industrielle est très
couteuse. Elle est assurée en Afrique par des multinationales qui
assurent l'essentiel de l'exploration et de l'exploitation. Les compagnies
minières étrangères apportent en plus des capitaux, les
technologies et les débouchés commerciaux.
II.2.2. Importance de l'exploitation minière dans
l'économie
Pour un pays en développement, disposer des ressources
naturelles abondantes peut être un avantage mais peut aussi compliquer la
tâche aux autorités en matière d'élaboration et de
mise en oeuvre de la politique de dépense et de la politique fiscale.
Les autorités des pays riches en ressources font donc face à
plusieurs problèmes au nombre desquelles figurent l'épuisement et
le non renouvèlement des ressources et des exportations qui en
dépendent. Selon Daniel et al (2013), les coûts des
matières premières exportées sont imprévisibles et
les autorités devraient évaluer le nombre d'années durant
lesquelles les ressources produiront des recettes. La situation actuelle des
ressources naturelles est proche de celle du XIXème siècle
abordée par W.S. Jevons (1845-1882). Selon lui, dans le cas des
ressources épuisables, la notion de rente peut renvoyer à deux
réalités distinctes. La première concerne la question de
l'épuisement physique absolue des ressources : un jour viendra où
les gisements seront totalement vides ou presque. La deuxième
réalité concerne le processus d'épuisement des ressources
sans considérer le moment où les ressources disparaitront
effectivement.
II.2.3. Comparaison mine-agriculture
Comme mentionné par Sachs et Warner (1995), le minerai
et le pétrole ont une haute rente alors que l'agriculture
génère, en général, une rente plus faible. À
cela Bulte et al. (2005) viennent apporter une nuance puisque, selon eux,
seules les ressources extractibles (mine, pétrole) en un seul point
seraient corrélées négativement à la qualité
des institutions. Les ressources dont la distribution sur le territoire est
diffuse (forêt, agriculture) ne seraient pas corrélées avec
la qualité des institutions. Cette dernière affirmation est
contredite par Lucas (2009) qui montre que l'agriculture a un impact
négatif sur la croissance, car les individus travaillant en agriculture
sont dispersés, ce qui nuit au transfert de connaissances.
Par ailleurs, un lien étroit est établi entre
les ressources naturelles et les différents conflits sociopolitiques que
connait la plupart des pays riches en la matière. Collier et Hoeffler
(2005) prétendent que la rente des ressources naturelles provoque une
augmentation des probabilités de conflits violents. Ces auteurs
étudient le lien entre ressources naturelles et guerre civile. Ils
26
estiment que la basse croissance offre un coût
d'opportunité bas aux rébellions contre les mauvaises
institutions et les régimes non démocratiques que l'abondance en
ressources naturelles favorise. Cette relation expliquerait donc le
désir de rébellion de la population.
En étudiant le lien entre démocratie et
ressources naturelles, Ross (2001) traite du cas des pays pétroliers et
réalise que le pétrole est plus dommageable économiquement
dans les pays pauvres que dans les pays riches. Collier et Hoeffler (opc),
ainsi que Auty (2000) corroborent cette relation négative entre
démocratie et ressources naturelles. En outre, ils affirment que la
combinaison de la présence de la démocratie et de la rente
associée aux ressources a significativement nuit à la croissance
des pays.
II.3. Les impacts de l'exploitation
minière
II.3.1. Les impacts économiques de l'exploitation
minière
L'installation d'une industrie extractive est un
évènement majeur avec des impacts locaux et régionaux
considérables sur l'économie, l'environnement et l'occupation
spatiale.
L'activité minière (IDRM, 2013) est un facteur
clé de la croissance économique mondiale, capable de
générer un impact positif à long terme sur les vies, les
sociétés et les nations. Les activités minières
sont réputées plus rémunératrices que
l'élevage et l'agriculture (Indring'i et Bamuhiga, 1997). C'est pourquoi
elles suscitent tant d'intérêt dans les localités où
elles sont pratiquées. Cet intérêt est manifesté
aussi bien par les populations que par les états.
Au niveau des populations, l'exploitation minière
(industrielle et artisanale) est créatrice d'emplois directs comme
indirects. En effet, l'ouverture d'une mine crée des possibilités
importantes d'emploi supplémentaire avec possibilité de revenus
plus élevés que la plupart sinon tous les autres emplois de la
région. Elle favorise également la formation de la main-d'oeuvre
locale avec un effet d'osmose sur l'ensemble de la population locale ; et des
investissements dans l'infrastructure, les biens et services publics de base
tels que l'eau, les transports et l'énergie (Kunanayagam, 2000). Les
exploitations industrielles selon Itard (2000), génèrent au
niveau national quelques milliers d'emplois salariés, ce qui est loin
d'être négligeable. Ces emplois, généralement
correctement rémunérés et en grande partie
localisés hors des principales agglomérations, ont un impact
social important. Il y a donc des retombées indirectes sur les
localités environnant les exploitations : développement du
commerce mais aussi augmentation de la population avec les effets induits
(cultures, bois de feu, chasse, etc.).
27
L'activité minière peut aussi stimuler le
développement des régions déprimées,
améliorer la qualification professionnelle et technique des autochtones,
et constituer un noyau de développement économique.
Selon Itard (2011), au niveau national, les revenus
créés par le gouvernement sont les impôts provenant des
exploitations minières qui représentent souvent une partie
substantielle du revenu fiscal du gouvernement. Une exploitation minière
réussie peut être un catalyseur pour un afflux subséquent
d'investissements privés dans un pays ou une région qui offre un
contexte encourageant caractérisé par un cadre de
réglementations fiables. De même, outre l'impact direct d'une
exploitation minière sur l'emploi, il y a un potentiel important
d'activités économiques secondaires et parallèles, en
particulier pour les petites et moyennes entreprises qui à leur tour
créent des possibilités d'emploi pour les non mineurs des zones
adjacentes. Bosson et Varon (1977) abordent dans le même sens quand ils
affirment qu'un pays peut tirer des gains substantiels d'une industrie
minière convenablement structurée et gérée. Le
secteur minier peut apporter une contribution très importante des pays
en développement en particulier comme c'est le cas pour quatre pays
africains où le secteur compte pour plus de 30% du PIB. Pour Devey
(1995), l'exploitation minière peut apporter une embellie
économique comme c'est le cas en Mauritanie dont il cite l'exemple.
L'activité minière nourrit aussi les
échanges extérieurs et procure un revenu supplémentaire
sous la forme d'impôts et de redevances. A côté des
redevances et des impôts que paient les sociétés
minières, il y a également le fait que l'état soit
généralement actionnaire dans les sociétés
minières comme c'est le cas pour Bonikro.
Cependant, selon Frankel (2010), les ressources naturelles
sont une manne pour le développement économique. En principe leur
exploitation produit des recettes qui peuvent permettre de surmonter des
obstacles auxquels se heurtent souvent les gouvernants des pays en
développement qui tentent de reformer l'économie, de doper la
croissance et de créer des emplois. Pourtant, au vue de
l'expérience des pays riches en ressources minières comme la
République Démocratie du Congo (RDC), il semble que cette
richesse ne soit pas toujours une bénédiction, mais plutôt
une malédiction. Car ceux-ci sont en proie à l'exode des
capitaux.
II.3.2. Les impacts de l'exploitation minière sur
l'environnement
L'exploitation minière, en dépit des
retombées économiques prônées par les États,
n'est pas sans conséquence sur l'environnement et son impact touche tous
les aspects de celui-ci
28
(Ricardo ; 2004). Les mines de minerais
métallifères, en particulier de cuivre et d'or, atteignent des
dimensions de nuisance particulièrement importantes en raison de la
faible teneur des minerais exploités. L'industrie minière
génère des quantités importantes de rejets solides et
liquides qui peuvent constituer une source majeure de pollution sur
l'environnement naturel mais aussi sur l'environnement humain Mengue (2011).
Les impacts de l'exploitation minière industrielle sont normalement
anticipés au travers des études d'impacts sur l'environnement
généralisés dans tous les codes miniers. Cependant, ils
peuvent avoir de graves atteintes sur l'environnement dans les cas suivants
:
- disfonctionnement dans l'attribution du permis (permis
attribué alors que l'étude d'impact aurait dû bloquer son
attribution) ;
- une étude d'impact non réaliste (effets non
minimisés) qui n'aurait pas dû recevoir son quitus environnemental
;
- non-respect par l'exploitation du plan de gestion
environnemental et/ou défaut de contrôle des activités
minières (Mazalto ; 2008).
L'exploitation minière implique souvent l'utilisation
ou la production de substances dangereuses du fait de l'exploitation des
déchets de la mine, du transport du matériel et du traitement de
ce dernier. L'activité minière constitue un facteur de
dégradation des forêts lorsqu'elle s'effectue dans les zones
boisées. Dans l'étude menée par Riccardo (opc) dans le
district de Wassa West au Ghana, il affirme que 60% des forêts humides
ont été détruites par des opérations
minières dans cette région. La mise en place d'une mine exige un
certain nombre de travaux de la mine à l'extraction du minerai qui
exigent l'élimination de la végétation et de la couche
arable (Holz, 1987 ; Deshaie, 2009). Les activités associées
à la préparation et au déblaiement des sites à
traiter avant même le minage, contribuent à la destruction de la
végétation et peuvent affecter la diversité biologique
s'il se trouve dans le voisinage des zones écologiquement sensibles
(Geffriaud et al ; 2006). Parlant du cas spécifique de la
prospection, il souligne qu'elle entraîne le nettoyage de vastes aires de
végétation pour faciliter la circulation de véhicules
lourds transportant les installations de forage. Aussi, la construction de
routes d'accès, soit pour amener les équipements lourds et les
approvisionnements au site minier ou bien pour expédier les
métaux et minerais traités peut-elle engendrer des impacts
environnementaux substantiels. Le défrichement des terres pour la
construction des sites et l'extraction des minéraux augmente le risque
d'une érosion des sols et d'une sédimentation importante (Hund
et al, 2013). Par l'élimination de la végétation
et de la couche arable, le défrichement des terres pour la construction
des sites et l'extraction des minéraux, les risques
29
d'érosion des sols sont accrus. Des recherches
entreprises dans le Kentucky ont montré que la production des
sédiments des régions de mines à ciel ouvert peut
atteindre 1000 fois celles de la forêt naturelle. Sur 4 ans,
l'érosion naturelle moyen de talus de déblaies dans le Kentucky a
été de 9500 tonnes par kilomètre carré alors qu'on
l'estimait égale seulement à 8,8 tonnes par kilomètre
carré sans forêt (Focus environnemental geology, 1976).
L'étude menée par la Communauté Européenne (2000)
montre que l'érosion peut provoquer le changement important de
sédiments et tout polluant chimique l'accompagnant vers des plans d'eau
proches surtout pendant des tempêtes sévères et de grandes
périodes de fonte de neige. L'exploitation minière entraîne
une dégradation des sols par le phénomène d'érosion
et de sédimentation (PNUE, 2001 ; Hund et al. opc). En outre
elle peut provoquer une contamination des sols. Cette analyse a
également révélé que les opérations
minières modifient régulièrement le paysage environnant en
exposant des sols qui étaient précédemment intacts. Les
déversements et fuites de matières dangereuses et les
dépôts de poussière contaminés, fouettés par
le vent peuvent conduire à la contamination des sols (Mineo Consortium,
2000). En plus du sol, elle impacte fortement le sous-sol et la nappe
phréatique (Deshaie, 2009 et Baudelle, 1995). Par le drainage des acides
et des contaminants de lixiviation, (Elaw, 2010) soutient que l'extraction des
minerais métalliques (or, cuivre, etc) contribue à la pollution
des eaux. En effet, lorsque des matériaux minés sont
excavés, exposés à l'eau et à l'oxygène, des
acides peuvent se former si les minéraux sulfurés de fer sont
abondants et s'il y a une quantité insuffisante de matériau
neutralisant pour contrebalancer la formation d'acide. L'acide à son
tour, lessivera ou dissoudra les métaux et autres contaminants dans les
matériaux minés et formera alors une solution acide à
forte teneur en sulfate et riche en métal. Le drainage d'acide minier
est considéré comme l'une des menaces les plus graves pour les
ressources en eau. Une mine avec drainage d'acide minier a un impact
dévastateur à long terme sur la vie aquatique, les cours d'eau et
les ruisseaux, renchérit Earth works Fact Sheet, (2000). Cet organisme
décrit cette situation comme étant irrémédiable. Il
parle donc de pollution perpétuelle et l'exprime en ces termes : «
même avec les technologies existantes, il est virtuellement
impossible d'arrêter le drainage d'acide de mine une fois que la
réaction a débuté ». Ainsi, Elaw (opc) souligne
que les grandes quantités d'eau nécessaire à
l'activité minière réduisent généralement
les potentialités de la nappe phréatique du lieu et arrivent
même à assécher des puits et des sources.
L'extraction minière du fait du
prélèvement des eaux souterraines peut réduire ou
même faire cesser l'écoulement des eaux de surface. Elle peut
également contribuer à la dégradation de la qualité
des eaux de surface, empêchant ainsi les usages bénéfices
qui y sont associés (FEPS,
30
2004). C'est le cas des mines dans le nord-est du Nevada qui
ont pompé plus de 580 milliards de gallons d'eau de 1986 en 2001. Les
produits chimiques dangereux tels le cyanure et l'acide sulfurique sont
utilisés pour séparer le minéral du minerai. Les eaux
chargées de ces produits peuvent par infiltration dans la
sédimentation détruire l'habitat et la faune aquatique
jusqu'à 90% (Jane et Bonner, 2009) entrainant ainsi un déclin des
espèces (Hund et al, 2013). Ils attestent que les produits chimiques
utilisés pendant l'exploitation du minerai affectent aussi
l'environnement aquatique. Au centre et Sud-Est de la République
Démocratique du Congo (RDC), des mineurs à petite échelle
déversent des déchets dangereux directement dans les
rivières et les lacs. A ces endroits des niveaux élevés de
mercure et d'uranium ont été mesuré dans les
résidus miniers. Les concentrations en métaux lourds toxiques
tels que le calcium, le zinc et le plomb se sont avérées de 2
à 10 fois plus supérieures aux normes internationales. Toujours
selon ces auteurs, dans la forêt d'Amazone, les petits mineurs utilisent
le mercure de manière moins efficace que les exploitations industrielles
relâchant environ 2,91 pound soit 1,32kg de mercure dans les cours d'eau
pour chaque 2,2 pound, soit 1kg d'or produit. Cette contamination ou pollution
des eaux rend invivable l'espace aquatique. Selon Jane et Bonner (opc), des
études gouvernementales menées à la Nouvelle
Orléans ont prouvé que des trainées des mines ont produit
des taux de cuivre et de sédiments si haut que presque tous les poissons
ont disparu des zones humides sur près de 144,9 km en aval de
l'exploitation. Exprimant la même pensée, Hund et al
(2013) affirment que les plus sérieux impacts directs de
l'exploitation minière à grande échelle sur
l'environnement concernent la diminution de la qualité de l'eau et la
perte potentielle de l'habitat et des espèces aquatiques. Toujours dans
l'ordre des impacts, Stella (2013) dans une étude réalisée
sur l'impact des activités minières sur l'environnement, souligne
que le Pérou qui regorge une grande partie des ressources mondiales en
eau douce, souffre pourtant de stress hydrique du fait de l'activité
minière. Pour lui, plus d'un tiers des habitants en milieu rural n'a pas
accès à l'eau potable. Il conclut que l'activité
d'extraction est très polluante avec l'usage du cyanure qui peut
s'infiltrer jusqu'à la nappe phréatique et se retrouver dans les
rivières. Pour terminer, il précise que très souvent, les
problèmes liés au manque d'eau ou à sa contamination
surgissent dans les zones où il y a une activité extractive.
II.3.3. La contribution de l'exploitation
minière à la reconfiguration spatiale
L'exploitation minière comme toute activité
économique a un effet structurant sur l'espace qui l'abrite. Comme dans
la logique de localisation, les activités économiques sont soit
poussées à l'agglomération, soit à la dispersion
(Diallo L, 2009). Ainsi, les modalités spatiales d'implantation
minière dans la zone d'exploitation et les relations avec
l'environnement
31
immédiat révèlent des
caractéristiques d'enclave (Ferguson, 2005 ; Magrin, 2011). Cette
configuration spatiale s'inscrit à la fois sur les territoires
villageois et dans une zone d'intérêt cynégétique.
Les mutations spatiales résultant des processus d'insertion
minière réduisent les possibilités de développement
des activités traditionnelles à l'échelle locale. De
grandes superficies de terres sont cédées aux
sociétés minières privant ainsi les populations locales
d'espaces pour l'exercice de leurs activités. Les terres
cédées sont généralement des terres laissées
en jachère ou destinées à la production de cultures
vivrières comme le riz, l'arachide, le fonio et les tubercules. Ces
terres servent également pour le pâturage ou l'exploitation
artisanale de l'or en particulier (COPAGEN, 2015). Les paysages subissent de
réelles transformations, passant de paysages agricoles à des
paysages miniers. Toutes choses qui sont à la base des grognements de
protestation au sein de la population (Diallo, 2011).
Selon Diallo (opc.), en Afrique, notamment dans les
régions marginalisées comme le Sénégal oriental,
l'exploitation minière est avant tout perçue comme un moteur de
développement économique. Les projets d'exploitation
minière apporteraient le développement à des
régions jusque-là mal intégrées à leurs
territoires nationaux. Ils sont appréhendés suivant deux
modèles spatiaux : « enclave » et « greffe ». La
première lecture identifie la mine à l'échelle du milieu
d'accueil comme un « corps étranger » entretenant des liens
très faibles avec ce dernier. Alors que dans le cadre de la «
greffe », les relations avec l'espace d'accueil sont fortes. Ces
modèles spatiaux ne sont pas figés ; ils peuvent évoluer
différemment en passant de l'enclave à la greffe et inversement
en fonction du cycle de vie proposé par Van Vliet (1998).
En outre, l'orpaillage, de toutes les méthodes
artisanales utilisées pour la récupération de minerais est
la plus ancienne et celle qui a le moins varié (Nations Unies, 1973). En
effet, les méthodes et les moyens utilisés dans l'orpaillage en
Afrique noire sont véritablement néfastes et laissent des traces
très marquées dans le paysage. Ce sont entre autres de grands
cratères à ciel ouvert qui ne sont pas tous refermés
après épuisement du minerai. En outre, les terres
utilisées et les monceaux de terres qu'on voit un peu partout dans la
commune participent à dégrader le paysage.
Conclusion de la revue de littérature
Au terme de cette revue de littérature, nous remarquons
que la question de l'impact de l'exploitation minière a
été beaucoup abordée notamment en ce qui concerne l'impact
environnemental dans les pays d'Amérique Latine, en Europe et en Afrique
précisément au Congo Kinshasa. Ces travaux ont pour la plupart
privilégié l'influence de l'activité sur la
32
destruction de la flore, de la faune et des équilibres
naturels. Plusieurs écrits ont également porté sur
l'aspect économique de l'activité minière
privilégiant ainsi la rentabilité pécuniaire que
génère cette activité. Quelques rares écrits ont
porté sur le caractère urbanisant de l'activité.
Concernant la Côte d'Ivoire en général,
nous constatons qu'il y a peu d'études sur la question. Les quelques
études sur le thème portent sur l'exploitation minière
artisanale, sur les manifestations des populations dans les villes d'extraction
minière et sur l'impact environnemental des activités des
industries extractives. A côté de ceux-ci, on trouve des documents
officiels sur la réglementation et la gestion du secteur minier
ivoirien.
Par ailleurs, la relation entre l'exploitation minière
et le développement local n'a pas suffisamment retenu l'attention des
chercheurs nationaux. Face à cette insuffisance d'écrits sur la
question, nous voulons à travers cette étude apporter notre
contribution à la connaissance des interrelations qui conduisent ou non
l'activité minière au développement des localités
hôtes.
L'importance de l'activité aurifère qui se
déroule à Hiré et l'importance des acteurs qui y exercent
en font un espace idéal de l'étude de la contribution de
l'exploitation minière au développement local. Il s'agira
à travers une étude des différentes incidences spatiales
économiques, sociales et environnementales de connaitre la contribution
de l'activité minière au développement de la
sous-préfecture de Hiré.
33
III. PROBLEMATIQUE
L'exploitation minière est une activité
très ancienne qui a été au centre du processus
d'industrialisation des pays du Nord. Aujourd'hui cette exploitation s'est
déplacée vers les pays du Sud où elle a acquis une
importance stratégique majeure. Dans ces pays notamment ceux de
l'Afrique subsaharienne, l'exploitation minière connait depuis la
décennie 2000 une expansion. En effet, l'épuisement des
réserves dans les pays du Nord, ainsi que la forte demande en ressources
minières des pays émergents a favorisé l'explosion de
l'exploitation des ressources minières dans les pays de l'Afrique de
l'Ouest. La mise en valeur des richesses minières de certains de ces
pays comme la Guinée a été encouragée par les
institutions de Breton Woods. De toutes les ressources minières dont
regorge le sous-sol des pays d'Afrique l'Ouest, l'or est le plus important. On
y trouve même des réserves d'importance mondiale. La production
d'or de l'UEMOA est passée de 57,6 tonnes en 2007 à 95,7 tonnes
en 2011, soit une augmentation de 66,1%. Sur la période 2007-2011, elle
représente en moyenne 3,1% de la production mondiale
évaluée à 2.400 tonnes (BCEAO, 2013). Cette production est
portée par les pays comme le Ghana et le Mali qui occupent
respectivement le deuxième et le troisième rang à
l'échelle continentale. Cependant, depuis 2008, la contribution de ces
pays a relativement baissé au profit du Burkina et dans une moindre
mesure, de la Côte d'Ivoire (Magrin and Perrier-Brusle ; 2009).
Le sous-sol ivoirien regorge d'importantes réserves de
fer, de diamant et surtout d'or. Fort de cela, l'Etat à travers le Plan
National de Développement (PND 2012-2015) fait du secteur minier un des
éléments stratégiques de sa vision de
développement. Cette décision vient accentuer
l'intérêt pour le secteur qui depuis la décennie 2000 se
traduit par la multiplication de permis miniers. Ce sont jusqu'en juin 2014,
108 permis de recherche dont 87 pour le minerai aurifère et 12 permis
d'exploitation dont 08 pour l'or (DGMI 2014). Afin de créer un cadre
institutionnel favorable à l'exploitation minière, plusieurs
mesures ont été prises parmi lesquelles la révision en
2014 du code minier de 1995, l'adhésion à l'ITIE, etc. Cela a
permis au chiffre d'affaires de l'exploitation minière de croitre de +24
% en 2015 à 479 milliards de F CFA (730 millions d'euros) en raison de
la hausse de la production aurifère.
La sous-préfecture de Hiré concentre à
elle seule deux permis d'exploitation minière industrielle et une
exploitation artisanale en pleine expansion depuis l'ouverture de l'usine
minière. La réalité de l'activité aurifère
dans la sous-préfecture de Hiré a comme toute activité
économique des répercutions sur l'organisation spatiale et les
habitudes socio-économiques
34
dans les espaces qui les accueillent. La promotion de
l'exploitation minière ainsi menée visait à stimuler le
développement aussi bien au niveau des collectivités hôtes
qu'au niveau national. Les espoirs portés par l'exploitation
minière sont considérables. Vingt ans de mise en place des
unités industrielles et artisanales d'exploitation de l'or dans la
sous-préfecture de Hiré apportent un contenu de temps et d'espace
pour y explorer leurs effets socio géographiques sur le
développement local attendu. Aussi les révoltes
répétées des populations à l'encontre de la
compagnie minière et des orpailleurs sont-elles les signes d'un malaise
de la population face aux acteurs miniers ou plus tôt les
éléments d'un ajustement structurel à des changements
profonds qui apportent le développement dans l'environnement local. Cela
nous conduit à une question centrale.
Question centrale
Comment l'exploitation aurifère contribue-t-elle au
développement de la sous-préfecture de Hiré ?
Questions secondaires
De cette question principale découlent les questions
secondaires suivantes :
1. Quelle est la distribution spatiale de l'activité
aurifère dans la sous-préfecture de Hiré ?
2. Quels sont les impacts de l'activité minière
sur le développement et l'environnement socio-économique de la
sous-préfecture de Hiré ?
3. Comment l'entreprise minière et les
communautés locales régulent-elles leurs rapports dans
l'exploitation de la ressource aurifère ?
35
IV. OBJECTIFS DE RECHERCHE
IV.1. Objectif général
Cette étude a pour objectif général de
montrer la contribution des activités d'exploitation de l'or dans le
développement local de la sous-préfecture de Hiré.
IV.2. Objectifs spécifiques
Nous avons décliné notre objectif principal en
trois objectifs spécifiques qui sont :
1. Décrire la distribution spatiale des formes
d'activité aurifère dans la sous-préfecture de
Hiré.
2. Identifier les changements introduits par l'exploitation de
l'or en rapport avec le cadre de vie.
3. Déterminer le mécanisme de régulation
des rapports entre l'entreprise minière et les communautés
locales dans l'exploitation aurifère.
Atteindre ces objectifs suppose l'élaboration de
méthodes de recherche.
36
V. METHODOLOGIE DE RECHERCHE
La méthodologie de recherche adoptée est
évoquée sous deux angles. L'un est relatif aux moyens
d'exécution des enquêtes et l'autre porte sur la manière
dont les enquêtes ont été menées et les conditions
dans lesquelles elles se sont déroulées.
V.1. Cadre théorique : le développement
local et l'économie de l'or comme un système socio
spatial
Cette étude a été conduite selon la
théorie des systèmes qui a servi de cadre d'analyse. La
théorie des systèmes est née des travaux de Ludwig Von
Bertalanffy, qui en est le précurseur. Dans son ouvrage « General
system theory » de 1925, il définit le système comme un
complexe d'éléments en interaction. Cette théorie
générale des systèmes regroupe les principes
théoriques généraux qui permettent de décrire et
comprendre le fonctionnement des systèmes ou des sous-systèmes,
quels qu'ils soient. De cette définition de Von Bertalanffy, a
découlé l'approche de Rosnay qui décrit le système
comme un ensemble d'éléments en interaction dynamique,
organisés en fonction d'un but.
Le Moine (1977), quant à lui définit le
système comme un ensemble d'éléments en interaction tels
que la modification de l'un d'eux entraîne la modification de tous les
autres (cette modification porte bien sur les relations, et non pas sur les
éléments). Dans le cadre de cette étude sur l'espace local
comme système nous utilisons la définition de Rosnay qui
décrit le système comme un ensemble d'éléments en
interaction dynamique, organisé en fonction d'un but.
Il était donc question pour nous de savoir si
l'organisation systémique mise en place dans la sous-préfecture
de Hiré, autour de l'activité aurifère, est faite dans le
but d'aboutir à un développement local.
Comme nous l'avons écrit plus haut, le
développement local peut s'inscrire dans une approche d'analyse
systémique ayant pour point de référence l'activité
d'exploitation de l'or. Le concept de développement local a une
portée géographique. Le développement local se
définit à partir d'une base territoriale. Cette base territoriale
dans le cadre de cette étude peut être le champ
géographique des activités d'exploitation de l'or dans la
région de Hiré. Cet espace géographique comprend la ville
de Hiré, son espace rural et administratif commune et
sous-préfecture et les populations qui y habitent et qui sont plus ou
moins influencées par l'activité d'exploitation de l'or. Cet
espace est pris comme le niveau d'organisation territoriale où
37
s'établissent les relations entre d'une part le tissu
social constitué par les communautés rurales urbaines et d'autre
part les fonctions administratives primaires, les fonctions économiques
liées à l'or ou influencées par son activité et les
services de base et la qualité de la vie. L'analyse du
développement local qui demande une pluralité de niveau d'action
qui constitue l'une de ses caractéristiques essentielles se fonde sur
des notions de participation, de partenariat et de contractualisation, de
relation, d'impact, d'administration entre les activités d'exploitation
de l'or et les différents éléments de la région.
Nous voulons saisir alors la relation systémique entre les
activités d'exploitation de l'or dans le processus de changement capable
de faire passer le territoire de Hiré en tant que réalité
économique, sociale institutionnelle d'un état à un
autre.
Le développement local, est une approche
systémique spatiale qui prend en compte la population, un territoire
donné comme espace de vie de cette population et un ensemble
d'activités économiques, politiques et sociales. Les relations
complexes et encadrées dans cet espace sont faites de sorte que les
activités économiques se mettent en adéquation avec
l'amélioration de la qualité de la vie des populations dans le
respect de leur environnement (figure 1).
38
Figure 1 : modèle de production du
développement local
Développement local
Social
Environnemental
Humain
Économique
Agriculture
|
|
Classification sociale
|
|
Effectif de la population
|
|
Diversité de la biodiversité
|
|
|
|
|
|
Emploi à la mine
|
Brassage ethnique
|
Composante ethnique
|
Pollution atmosphérique
|
|
|
|
|
Orpaillage
|
Respect des us et coutumes
|
Dégradation de la qualité et de
la quantité de l'eau
|
|
|
|
Croissance des activités informelles
|
|
Cohésion sociale
|
Santé des populations
|
V. 2. Définition des variables de
recherche
Les variables de l'étude sont les informations
recherchées pour conduire ce travail. Elles ont été
collectées en des endroits précis qui déterminent nos
unités d'observations. Ces unités sont appréhendées
à différentes échelles d'analyse. Ce sont des informations
qualitatives et quantitatives collectées et qui permettent d'atteindre
nos objectifs. Elles ont été scindées en trois grands
groupes relativement aux objectifs de l'étude.
V.2.1. Variables descriptives de la structure spatiale
des formes d'activité aurifère
Ces variables sont relatives à l'objectif 1 qui est de
décrire la distribution spatiale des formes d'activité
aurifère dans la sous-préfecture de Hiré.
39
Il s'agit de faire ressortir les informations qui nous
permettent de localiser les sites d'exploitation aurifère. Elles
prennent en compte les données relatives à la géologie de
la localité et à l'historique de l'activité. En nous
servant des cartes géologiques au 1/50 000ème de la Côte
d'Ivoire et de la région, nous avons pu identifier les indices qui
favorisent la richesse en or de cette zone. De plus, une description des
différents types d'exploitation aurifère éclaire sur les
incidences de ceux-ci le cadre de vie des populations.
Dans cette partie, trois grandes distinctions ont
été faites ; il s'agit des variables relatives à la
description de la localisation des sites d'extraction et de traitement
aurifère, des variables descriptives de l'activité d'orpaillage
et de celles descriptives de l'activité minière industrielle.
V.2.1.1. Variables descriptives de la localisation des
sites d'extraction et de traitement aurifère
La description des sites d'extraction et d'exploitation
aurifère passe par la connaissance des caractéristiques
naturelles du milieu (topographie ; type de sol ; composition
géologique) qui déterminent la localisation des indices du
minerai et le choix des points de concentration. Le mode d'appropriation
foncière des acteurs pour les différents types d'exploitation
aurifère est déterminant pour la localisation des sites. On aura
donc des variables qualitatives comme : l'achat, le don, le leg, la location,
le gage, le planté-partagé, etc.
V.2.1.2. Variables descriptives de l'activité
d'orpaillage
Pour la description de l'activité d'orpaillage, la
localisation des sites est primordiale. Elles permettent d'identifier la
logique d'installation de ces sites. Les procédés d'extraction,
de traitement et de commercialisation sont également indispensables pour
une meilleure connaissance de l'activité. Les procédés de
stockage des débris et résidus issus de cette activité
permet de distinguer l'orpaillage de l'activité industrielle.
La description du produit de l'orpaillage et la description de
la contractualisation des sites d'orpaillage sont nécessaires pour mieux
apprécier cette activité.
V.2.1.3. Variables descriptives de l'activité
minière industrielle
Contrairement aux autres activités, les sites
d'extraction minière ne résultent pas du choix stratégique
d'une firme mais de la position du minerai. C'est la présence du minerai
qui impose la construction de l'usine de traitement. Au niveau de
l'exploitation minière industrielle les sites d'extraction sont contenus
dans les permis d'exploitation accordés aux sociétés
minières, les indicateurs se rapportant au site ont été
sélectionnés.
40
Il s'agit entre autres, des unités topographiques et
géologiques constituant l'assiette des dits sites, du
géo-référencement des sites d'extraction et des images
satellitales de la localité à différentes dates. Cela a
permis de localiser les zones d'exploitation industrielle. C'est dans ce sens
que le niveau d'altitude, la morphologie et la composition géologique
des sites ont été documentés.
Aussi, la description des caractéristiques des sites,
du mode d'extraction et des procédés de filtration, est-elle
nécessaire pour mieux décrire l'activité industrielle de
l'or.
V.2.2 Variables relatives aux changements apportés
par l'exploitation de l'or en rapport avec le cadre de vie
Les variables sont relatives aux changements apportés
par l'exploitation aurifère concernent les avantages
socio-économiques de l'exploitation minière ainsi que celles
relatives aux opportunités de développement. Elles ont permis
d'apprécier la dynamique impulsée par l'activité
minière et l'orpaillage au niveau socioéconomique du cadre de
vie, des infrastructures et des équipements.
V.2.2.1 Variables descriptives de l'apport de
l'activité de l'or en termes d'emplois et revenus
? Variables descriptives des emplois dans
l'activité minière industrielle
Le nombre de postes offerts aux populations locales et la
qualité de ceux-ci dans les mines industrielles permettent
d'apprécier la contribution de l'exploitation industrielle de l'or
à la réduction du taux de chômage des jeunes.
L'évolution des employés locaux de la mine et leur classification
selon l'âge et le sexe sont importants pour décrire la politique
de l'entreprise en matière d'emploi de la population locale et en
matière de la question de genre.
La masse salariale de ces employés est également
importante car elle permet de mieux apprécier le poids de ces emplois et
de leurs incidences sur le niveau de vie des populations. A l'intérieur
de ces employés locaux, une répartition par ethnie et par village
des employés a permis de connaitre l'incidence de la présence de
la compagnie minière sur la réduction du chômage dans la
sous-préfecture.
? Variables descriptives des emplois dans
l'orpaillage
Pour l'étude de l'apport de l'activité de l'or
en termes d'emplois et de revenus, les variables relatives à la
description des emplois dans l'orpaillage sont d'une importance capitale. Ces
variables portent sur le nombre de personnes employées par la section de
l'orpaillage. Une
41
répartition par nationalité, ethnie, sexe et
âge des orpailleurs permettra de connaitre le genre et la tranche
d'âge la plus concernée par l'orpaillage. La classification des
types d'emploi dans l'activité ainsi que les revenus qui en
découlent permettent également d'apprécier le poids
économique de cette activité. Il a été, en outre,
décidé de s'intéresser aux types d'investissement dans
l'orpaillage.
V.2.2.2. Revenus des coopérants agricoles provenant
des orpailleurs
L'effectif des agriculteurs en contrat avec les orpailleurs
ainsi que les revenus des agriculteurs tirés de l'orpaillage sont
importants dans l'appréciation des effets positifs induits de
l'exploitation de l'or.
V.2.2.3 Variables des investissements locaux des
employés miniers et des orpailleurs
Les différents investissements locaux des
employés miniers et des orpailleurs sont importants dans la
détermination et l'évaluation des effets positifs induits par
l'exploitation de l'or. Ainsi ont été retenus comme variables,
les types d'investissement selon le secteur (logement, commerce, les services,
etc.), le montant de l'investissement selon le secteur, l'année de
l'investissement selon le secteur, le nombre d'emploi induits par
l'investissement et les revenus induits par les investissements par les
employés.
V.2.2.4 Variables descriptives des activités
économiques indirectes générés par l'extraction de
l'or
L'activité minière et l'orpaillage sont des
activités économiques dont la présence
génère de nombreuses autres activités plus ou moins
liées à elle. Les variables permettant d'évaluer ces
activités sont difficiles à mesurer directement. Il est possible
de les apprécier par l'intermédiaire de données
sociodémographiques des activités comme l'évolution
annuelle de la population dans la ville et l'évolution annuelle des
types d'activités dans la ville.
V.2.2.5 Variables descriptives des équipements
locaux générés par l'extraction minière
Les équipements et infrastructures dans une
localité témoignent du niveau de développement de celle-ci
et sont un indicateur déterminant de l'évaluation de l'espace. A
ce propos, les indicateurs qu'il nous importe d'observer sont entre autres, les
services administratifs, les établissements sanitaires et scolaires. Il
s'agit de s'intéresser à leur typologie, leur fonction, leur
année de construction. Il nous a semblé intéressant
d'observé aussi les infrastructures routières,
42
les réseaux de téléphonie, d'adduction en
eau potable, d'électrification et d'assainissement. Nos enquêtes
à ce sujet ont porté sur leur typologie, leur qualité et
leurs caractéristiques. De même, la longueur de ces
réseaux, le nombre, le taux de couverture et le nombre de ménages
connectés ont été sélectionnés comme
indicateurs.
Les données d'ordre démographique sont
particulièrement importantes car elles permettent d'analyser les effets
de l'exploitation minière sur la population. Aussi, avons-nous eu
recours aux données des recensements de 1998 et de 2014. Les variables
sélectionnées portent sur les différentes
nationalités et ethnies présentent à Hiré, le
milieu d'habitat, les différentes catégories
socioprofessionnelles. A celles-ci s'ajoutent les effectifs de la population,
le taux d'accroissement moyen annuel, le nombre et la taille des
ménages, la répartition par âge, genre et
nationalité ainsi que la densité de la population.
Pour l'étude des équipements locaux
générés par l'extraction minière, les variables
relatives aux équipements locaux financés directement et
indirectement par l'activité de l'or, l'équipement local
financé par les apports de l'activité de l'or à la mairie,
l'équipement local financé par les apports de l'activité
de l'or au Conseil Général et l'équipement local
financé par les apports de l'activité de l'or à l'Etat ont
été retenues.
V.2.3 Variables descriptives des effets négatifs
de l'exploitation minière
Les variables relatives au non développement local
minier et aux enjeux qui en découlent ont été retenues.
Elles permettent d'apprécier les effets négatifs de
l'activité de l'or dans la sous-préfecture de Hiré. Ceci
à travers le niveau de dégradation environnemental de l'espace
sous-préfectoral (couvert végétal, sol, eau, air) et de
ses répercussions sur l'état de santé des populations de
Hiré.
V.2.3.1 Variables descriptives des effets
économiques négatifs des déguerpissements miniers sur les
populations
Pour déterminer les effets négatifs de
l'exploitation aurifère, ont été retenues les variables
portant sur les pertes de plantations, la délocalisation des
populations, la description de la sous-évaluation des indemnités
de perte de plantation, la description de la sous-évaluation des
indemnités de perte de sol, la description de la sous-évaluation
des relocalisations de l'habitat et la description des sinistres durables pour
les déguerpis des mines.
43
V.2.3.2 Effets économiques négatifs des
orpailleurs sur les sites
A travers l'évaluation et l'appréciation des
effets des destructions physiques des espaces de plantation par les
orpailleurs, il a été possible de déterminer les effets
négatifs de l'orpaillage sur les sites qui l'abritent. A cela s'ajoutent
les variables descriptives des effets négatifs de l'orpaillage sur les
cultures des sites et les populations d'agriculteurs et de cultivateurs.
V.2.3.3. Variables descriptives des effets
indésirables sur l'environnement
Les effets indésirables de l'exploitation de l'or
peuvent être appréciés à travers les variables de la
déstructuration des terroirs ruraux, les variables des conflits sociaux,
les variables de la pollution au cyanure et au mercure ainsi que les variables
des fuites financières hors zone.
V.3. Les unités d'observation
Les unités d'observation sont les endroits où
nous avons recueilli les informations. Ce sont les campements, les villages, la
ville, les quartiers de la ville, qui seront observés à
différentes échelles.
V.3.1 Les sites d'exploitation industrielle de
l'or
Il s'agit de la mine de Bonikro, du lac à cyanure et de
la fosse satellite de Hiré et leurs environs. Pour la mise en
exploitation, ces sites ont bénéficié d'un
aménagement avec déplacement de localités, destruction de
cultures, pose de barbelés pour dégager des passages
sécurisés.
V.3.2 Les sites d'exploitation artisanale de
l'or
Les lieux d'exercice de l'orpaillage clandestin sont
généralement situés dans les plantations, dans les
bas-fonds ou à la périphérie des sites d'exploitation
industrielle. Ils sont des lieux d'une activité économique
intense et subissent une réorganisation spatiale du fait de l'exercice
de cette activité.
V.3.3 Les exploitations agricoles
Ce sont les lieux où les agriculteurs exercent leurs
activités. Ils sont souvent situés à proximité des
sites d'exploitation de l'or. Ils peuvent aussi être les lieux même
de cette exploitation artisanale ou minière et par conséquent
partiellement ou entièrement détruits.
44
V.3.4 La ville de Hiré
La ville de Hiré abrite à la fois les
populations qui subissent l'exploitation de l'or mais aussi les acteurs de
nombreuses activités induites par cette production. La ville de
Hiré est surtout le lieu où l'on observe divers impacts de
l'activité aurifère. A cet effet les quartiers, les rues, les
logements, les commerces, les équipements et infrastructures sont des
éléments qui ont fait l'objet d'observation.
V.3.5 Les villages de la
sous-préfecture
Le développement local se définit par des
unités territoriales qui dans le cas de Hiré comprennent de
nombreux villages et campements directement sous l'influence des
activités d'exploitation de l'or. La figure 2 présente la
localisation de ces établissements humains. Il s'agit de six villages
fondés par les groupes autochtones des DIDAS WATTA : Gogobro ;
Kagbè ; Zaroko ; Douaville ; Bouakako et Hiré village.
Ces villages représentent l'essentiel des implantations
du groupe ethnique Dida qui se réclame comme les propriétaires
coutumiers et les gestionnaires de l'espace sur lequel est exercée
l'activité aurifère.
A côté de ces villages, des campements ont
été retenus comme unité d'observation car ils se situent
tous dans le périmètre de l'activité aurifère. Il
s'agit des campements de :
- Bonikro
- Koutouklou konankro
- Bandamakro
- Chantier Konankro
- Petit-Bouaké.
Ces localités sont en grande partie fondées par des
allogènes Baoulé le plus souvent agriculteurs
dont les sites habités et les plantations sont
sérieusement impactées par les activités liées
à
l'extraction de l'or.
A l'échelle la plus fine, l'unité d'observation
est la concession à travers le ménage. A ce niveau il s'est agi
d'observer les répercussions de l'activité minière sur la
qualité et le mode de vie des populations par l'entremise des
données relatives aux caractéristiques
sociodémographiques. Cela nous a permis de cerner les modes de vie des
acteurs de l'activité aurifère, les investissements et les
réalités sociales de ces populations.
45
Figure 2 : position des localités dans l'espace
local
Source : BNETD, 2015
46
V.4. Les acteurs cibles de l'étude
V.4.1 Les entreprises dans l'exploitation de
l'or
Dans la région, il existe des entreprises
minières et des orpailleurs. Nous avons focalisé notre attention
sur :
- l'entreprise industrielle de NEWCREST
- les entreprises informelles d'orpaillage autorisées
- les entreprises informelles d'orpaillage clandestines
V.4.2 Les agriculteurs
Deux catégories d'exploitants agricoles sont
présentes dans la région et subissent les effets de l'extraction
de l'or. Le parcours de l'espace nous a permis d'identifier : les exploitants
agricoles déguerpis des sites miniers, les exploitants agricoles
associés aux entreprises d'orpailleurs, les orpailleurs déguerpis
des sites miniers, les maraîchers et les cultivateurs
V.4.3. Les acteurs économiques urbains
Dans cette catégorie nous avons retenu comme cibles
d'étude : les commerçants informels urbains, les
commerçants formels, les artisans urbains et les commerçants de
produits vivriers.
V.4.4. Les administrations et les pouvoirs
institués de gestion du développement
Le développement local demande une administration et
des organes gestionnaires de coordination. Dans le cadre de la zone de
Hiré les organes existants sont les suivants : l'Administration sous
préfectorale de Hiré ; l'Administration de la préfecture
de Divo ; le conseil général de Divo ; la mairie de Hiré ;
les chefs de quartiers ; les chefs de villages ; la mutuelle de
développement de Hiré ; l'association des jeunes de Hiré ;
l'association des femmes de Hiré.
Ces organes ont des rôles, des actions et des fonctions
très importantes dans le monitoring des activités
minières.
Le développement des activités d'or dans la
sous-préfecture dépend des dispositions prises par nombre de
structures du gouvernement central. Ce sont : l'Agence Nationale d'Appui au
Développement Rural (ANADER), le Ministère de l'Agriculture, le
Ministère de l'économie et des Finances, le Ministère du
Plan, le Ministère de la Construction et de l'Urbanisme, le
47
Ministère de l'environnement et ses structures
notamment le Centre Ivoirien Antipollution (CIAPOL) et l'Agence Nationale de
l'Environnement (ANDE).
Dans le cas du développement de Hiré, en
relation avec l'activité minière, des organismes internationaux
ont joué un rôle important. Il s'agit : du Programme des Nations
Unies pour le Développement (PNUD) et de la Banque mondiale (BM).
Ces cibles d'étude ont fait l'objet de recherche de
variables soigneusement définies. V.5. Méthodes de
collecte des données
Dans le cadre de la réalisation de ce travail, et
conformément à la démarche scientifique deux principales
techniques ont été utilisées, à savoir la recherche
documentaire et les enquêtes de terrain.
V.5. 1. La recherche documentaire
La recherche documentaire a consisté à la
consultation d'ouvrages, de documents statistiques et cartographiques. Elle a
constitué la première entrée de notre sujet et a
été indispensable pour le cerner en faisant le point de toute la
littérature y afférant. A cet effet, plusieurs types de documents
ont été consultés dans les bibliothèques,
institutions et structures spécialisées comme l'Institut de
Géographie Tropical (IGT), l'Institut de Recherche pour le
Développement (IRD), l'Institut Français (IF), le Centre Ivoirien
de Recherches Économiques et Sociales (CIRES), le Centre de Recherche et
d'Actions pour la Paix (CERAP). Des documents ont également
été consultés à l'Institut National de la
Statistique (INS), à l'ANDE, à la Direction
Générale des Mines, au Bureau National d'Étude Technique
et de Développement (BNETD), à la Sous-préfecture et
à la Mairie de Hiré.
Dans l'ensemble, ces ouvrages, articles, rapports
d'activités, consultés ont aidé à faire un
état des connaissances sur le présent sujet. Ces connaissances
concernent particulièrement les domaines de la géographie
économique, de l'aménagement du territoire, du
développement et des activités minières. Elles ont aussi
aidé à connaitre les différentes théories qui se
rapportent au sujet dans le cadre des fondements théoriques et
conceptuels, indispensables à la géographie.
Les documents statistiques consultés comme, les
recensements généraux de la population et de l'habitat (de 1988,
1998 et 2014), les informations relatives à la population et à la
démographie, ont aidé à l'analyse
sociodémographique et socioéconomique. Par ailleurs, certaines
données statistiques obtenues à la direction des mines ont permis
d'avoir des informations générales sur
48
l'activité minière en Côte d'Ivoire. Ces
informations sont relatives au cadastre minier, aux permis miniers en cours,
aux sociétés minières qui exercent sur l'ensemble du
territoire, etc.
Quant aux documents cartographiques, nous avons
bénéficié d'une carte de localisation de la
sous-préfecture de Hiré au 1/50 000. Cette carte a
contribué à faciliter nos déplacements dans la
sous-préfecture de Hiré. Nous avons également
exploité la carte géologique de la Côte d'Ivoire au 1/1 000
000 dressée par la direction des mines et de la géologie et enfin
celle de la zone d'étude dénommée degré
carré de Gagnoa feuille 2. Ces cartes ont permis d'apprécier la
structure géologique de la région de Divo et sa richesse. Le plan
d'urbanisme directeur de Hiré établi en 1994 et consulté
auprès du service technique de la mairie nous a permis
d'apprécier la vitesse d'urbanisation de la ville et le niveau
d'équipement de celle-ci. Les images satellitaires prises sur Google
earth ont également fourni des informations relatives aux mutations
survenues dans le mode d'occupation de l'espace. Elles ont en outre à
travers une meilleure connaissance de la structure de la sous-préfecture
ainsi que des différents paysages qui la composent, permis d'avoir une
vue d'ensemble sur Hiré avec ses particularités. Ainsi l'on peut
apprécier l'évolution de la tache urbaine dans le temps et les
différents aménagements qui y ont lieu. Cette phase
terminée, les conditions de recherche sur le terrain étaient donc
réunies.
V.5.2. La pré-enquête
L'étude de terrain permettra d'apprécier la
véracité des informations recueillies dans les ouvrages et
services mais aussi de les compléter grâce aux données
collectées sur le terrain. Il s'avère nécessaire de
constituer des échantillons des populations avant de réaliser
l'étude. La réalisation de cette thèse a fait appel
à diverses méthodes de recherche au nombre desquelles,
l'observation directe, l'inventaire, l'entretien, les focus group et les
enquêtes par questionnaire.
De Juin à Aout 2010, une pré-enquête a eu
lieu afin de confronter les informations tirées de nos
différentes lectures aux réalités du terrain. Cette
étape a contribué à une meilleure connaissance de notre
espace d'étude. A cette occasion, nous avons visité les sites
d'orpaillages et sillonné les différentes localités de
notre zone d'étude. Les sites visités sont Chapelle, Assonguisso,
Akissi-so, Agbalé et Assayé, qui à cette période
étaient des sites d'orpaillage. En l'absence d'autorisation de la
compagnie minière, la pré-enquête a consisté en la
localisation des sites d'orpaillage, en la définition du mode
d'acquisition des terres et du fonctionnement de l'activité, puis en
l'identification et la classification des différents acteurs de ce
secteur. Il s'est également agit au cours de cette
pré-enquête d'observer les différents équipements et
infrastructures dans la sous-préfecture.
49
En somme, la pré-enquête a été
l'occasion de nouer des contacts, de clarifier nos objectifs et de jauger les
premières difficultés de terrain afin de prendre les dispositions
pour un meilleur déroulement de l'enquête proprement dite.
V.5.3. L'observation directe du terrain
Elle s'est effectuée à travers plusieurs visites
dans la sous-préfecture. A l'occasion de nombreux séjours
à Hiré, plusieurs méthodes ont été
utilisées pour collecter les informations. Ce sont entre autre :
l'observation directe, les interviews, les focus-groupe et l'enquête par
questionnaire auprès des populations.
L'observation directe constitue pour le géographe, une
source d'acquisition de données. C'est un processus dynamique mettant en
exergue une interaction entre la description et l'explication du fait spatial.
Elle a été l'occasion de parcourir la sous-préfecture afin
d'appréhender les réalités liées à
l'activité aurifère et au développement dans la
sous-préfecture de Hiré. Les entités observées sont
l'organisation spatiale, les réalités socio-économiques
des populations, les équipements et infrastructures dans la
sous-préfecture. Cette observation s'est faite en tenant compte de nos
différentes variables d'analyse.
Les différentes visites, de 2014 à 2017, ont
permis d'explorer le terrain d'investigation dans l'optique de confronter les
informations contenues dans la littérature et de poser les bases de
l'argumentaire de notre problématique. A l'aide d'un appareil
photographique numérique, des photos d'illustration ont
été prises lors de nos visites sur le terrain.
V.5.4. Les entretiens semi directifs
Au cours de la collecte d'informations pour la
rédaction de cette thèse, nous avons eu des interviews
réalisées avec certaines autorités impliquées dans
les mines et dans l'agriculture aussi bien au niveau de la
sous-préfecture de Hiré, qu'au niveau régional et
national. La maîtrise de tous les paramètres relatifs à
l'activité minière et aux différentes mutations qu'elle
entraîne, exige des échanges avec les responsables des services et
des entreprises intervenant dans notre thématique tant au niveau
national que local. Ces interviews ont été
réalisées suivant des guides d'entretien faits de questions
ouvertes spécifiques à chaque interlocuteur. Il s'agit des
responsables et chefs de services ci-dessous : le sous-directeur des mines,
avec qui nous avons échangé au sujet de l'activité
minière en Côte d'Ivoire, l'historique de l'activité, le
potentiel minier ivoirien et les conditions d'obtention d'un permis minier ; le
directeur de la géologie, nous a instruit sur la composition
géologique de la Côte d'Ivoire et particulièrement de la
région
50
du Lôh-djiboua à laquelle Hiré appartient.
Avec le sous-directeur de l'ANDE, l'entretien a consisté à
connaitre le rôle de l'agence, les dispositions prises par l'Etat pour
veiller à la sécurité environnementale des populations
locales, le directeur régional de l'agriculture avec qui nous avons
échangé sur l'évolution de la production agricole dans la
sous-préfecture de Hiré et sur la question des indemnisations.
L'entretien avec le directeur régional des mines a porté sur
l'activité minière à Hiré et dans la région.
Il nous a instruits sur l'historique de cette activité, son
évolution et l'importance des réserves aurifères de la
zone. Nous avons aussi eu un entretien à la Direction régionale
de la construction et de l'urbanisme qui a porté sur l'habitat,
l'assainissement, l'évolution de l'espace urbanisé, le niveau de
modernisation du chef-lieu de commune et de la sous-préfecture, les
zones d'extension de Hiré. Avec le sous-préfet, nous nous sommes
également entretenus sur les activités minières qui sont
menées à Hiré. Il nous a permis de connaitre le nombre de
jeunes employés ou en contrat à la mine et les actions
menées au niveau local pour réprimer l'orpaillage clandestin.
L'interview a aussi porté sur les rapports entre les populations et la
compagnie minière. Avec les responsables locaux de l'agriculture, de
l'ANADER et des eaux et forêts, les entretiens ont portés sur les
données de production agricole, d'indemnisation et d'évolution du
couvert forestier et de son rapport avec l'activité minière.
Notre rencontre avec le président des orpailleurs de Hiré nous a
instruits sur l'activité d'orpaillage. Avec lui, il a été
question de mieux connaitre l'activité à travers les
méthodes et techniques d'exploitation et de traitement du minerai, les
méthodes d'accès à la terre. Il a été
également question du caractère clandestin de l'activité
et de l'impact environnemental de leur activité.
V.5.5. Les focus group
Les entrevues de groupe ont concerné les Chefs de
village et leur notabilité, les membres des Comités villageois de
gestion des conflits, les membres des Associations des éleveurs lors de
la mission exploratoire dans les onze localités visitées. Ce sont
des groupes de huit à dix personnes qui nous ont permis de comprendre la
nature des relations que la mine entretient avec les populations. Cette
enquête a également permis de comprendre la perception qu'ont les
populations de l'activité minière, leurs attentes par rapport au
développement, leurs stratégies de sécurisation des moyens
d'existence et les raisons qui motivent certains propriétaires terriens
à céder leurs plantations aux orpailleurs.
51
V.5.6. Les relevés GPS
Lors de nos enquêtes de terrain, des relevés de
données GPS ont été effectuées. Ces relevés
ont permis de parcourir le trajet de piste de la sous-préfecture de
Hiré. Des points amers de différentes végétations
qui jonchent le sol ainsi que les types de cultures ont été pris
avec un GPS (Système de Localisation Mondial) de type GARMIN MAP 62. Des
photos ont été prises également pour montrer les
différentes végétations qui peuplent la zone
d'étude. Toutes ces données ont été utiles et
indispensables dans la réalisation de notre carte d'occupation du
sol.
Cette technique de relevés basée sur
l'observation des signaux émis par les satellites est actuellement l'un
des meilleurs moyens de levés topographiques. Il permet de
déterminer la position tridimensionnelle (longitude, latitude et
altitude) de tout point à la surface de la terre.
Sa simplicité d'utilisation, sa précision, son
exactitude et sa fiabilité ont permis d'améliorer la
qualité des levés topographiques et la mise en place d'un
système d'information géographique des espaces à
étudiés. Pour réaliser les levées, il s'est agi
d'actionner le GPS déjà mis en marche, attendre que la
précision minimale de plus ou moins 5 m s'affiche à
l'écran avant d'enregistrer les coordonnées du site. Les
données sont directement enregistrées dans la mémoire de
l'appareil en même temps que l'on effectue le travail.
Une mission vérité terrain a été
réalisée par la suite et a permis de reconnaitre et de
décrire visuellement sur la base des parcelles
sélectionnées sur l'image les éléments paysagers.
Nous avons effectué aussi des relevés GPS représentatifs
de chaque classe d'occupation du sol préalablement définies. Les
résultats ainsi obtenus nous ont permis de comprendre les données
satellitaires et les points de vérité terrain collectés
pour la validation de la classification la plus récente (KOFFI,
2013).
V.5.7. L'acquisition des données
satellitaires
La mobilisation de l'outil de
télédétection, de statistique et de SIG a
été importante pour la réalisation de cette thèse.
Pour cerner l'impact de l'activité minière sur la
végétation et les sols, les images de LANDSAT font l'objet de
traitement par classification, ce qui permet une cartographie
détaillée des changements d'occupation du sol. La mise en
relation de ces changements, par méthodes statistiques et par SIG avec
les données de statistiques agricoles, minières et de population,
permet de comprendre les relations entre ces activités anthropiques et
la nature des changements de l'état de surface.
52
VI. Techniques de traitement des
données
VI.1. Traitement et analyse des données
qualitatives et quantitatives
Au cours des différents entretiens effectués
dans cette étude, l'enregistrement a été proposé
aux enquêtés. Il consiste à consigner les discours produits
lors des entretiens sur un support audio. Plusieurs intérêts
justifient l'enregistrement des entretiens.
Le premier intérêt d'avoir un enregistrement de
l'entretien est lié au fait qu'il permet de dépasser les
«impressions» que l'on a à l'issue de l'entretien, qui peuvent
être fondées sur des détails qui ne correspondent pas
forcement à l'essentiel. L'enregistrement permet de remédier
à cette dimension émotionnelle des échanges. Ensuite,
l'enregistrement permet de faire ressortir la parole exacte de
l'enquêté ; contre l'interprétation immédiate
qu'implique la prise de note.
L'ensemble des informations recueillies au cours des
différents entretiens avec les cibles définies ont
été analysées et confrontées. Les résultats
sont présentés par des écrits. Aussi, des données
recueillies ont été consignées dans des tableaux qui
traduisent des réalités observées sur le terrain.
VI.2. Traitement et analyse des relevés
GPS
Les coordonnées GPS relevées ont
été transférées à l'aide du logiciel Arc Gis
10.21 afin d'en constituer une base de données sur Excel et de
créer des Shape files (fichiers de formes) qui ont servi à la
réalisation des cartes. Une fois les différents sites
localisés, il s'est agi de les décrire (végétation
rencontrée, plantation, types de cultures, types de sol).
À la fin de la collecte des données, ayant une
idée précise des différents types d'occupation du sol, les
informations obtenues ont été comparées aux descriptions
passées pour en retenir celles qui reflètent mieux la
réalité du terrain. En outre, des prises de vue photographiques
ont été faites dans les différentes localités.
VI.3. Traitement et analyse des images
satellites
La télédétection est aujourd'hui l'une
des principales disciplines permettant de faire un suivi en temps réel
de l'évolution du couvert végétal. Ce suivi permet de
rendre compte des dynamiques paysagères et peut aider à la
décision dans une perspective de gestion. Utiliser des données de
télédétection suppose la mise en place d'une
méthode appropriée qui permet d'avoir les résultats les
plus pertinents possibles pour répondre à l'objectif visé
(Tra bi, 2013). Le traitement des images satellites a consisté à
appliquer les compositions colorées qui ont permis
53
de discriminer les informations relatives au mode d'occupation
du sol. A la suite de cela, la classification a été faite.
Le choix des images Landsat est motivé par le fait que
de tous les satellites d'observation de la terre existant, seuls deux sont
gratuits et facilement accessibles. Il s'agit des images des satellites
français SPOT et américains Landsat. Pour cette étude,
nous avons choisi de prendre des images des satellites Landsat, pour deux
raisons. Le premier avantage est le libre accès des images Landsat. En
effet, ces images sont disponibles gratuitement sur internet. Les images
satellites sont téléchargées en format brut à
partir du site Earth Explorer (<http://earthexplorer.usgs.gov/>) en
téléchargement libre. Les images sont produites à partir
des bandes spectrales du visible et de l'infrarouge des satellites Landsat-5,
Landsat-7 (bandes 5-4-3) ou, depuis 2013, du Landsat-8 (bandes 6-5-4) qui ont
une résolution de 30 mètres (MFFP, 2015).
Le second atout que présentent les satellites Landsat,
c'est qu'ils utilisent jusqu'à 8 bandes spectrales pour Landsat 7 (sept
bandes multi spectrales et une bande pour le panchromatique), alors que les
satellites SPOT présentent au maximum 5 bandes spectrales (quatre bandes
multi spectrales et une bande pour le panchromatique). Ainsi, les images
données par Landsat ont apporté plus d'informations que celles
des satellites SPOT. Ces informations sont révélées par
l'utilisation de différentes combinaisons de canaux. À partir du
Landsat 4, il est obtenu une meilleure résolution spatiale, une
meilleure résolution radiométrique, des bandes spectrales plus
étroites. Il n'a pas non plus quatre mais sept bandes spectrales avec
plus de détecteurs par bandes. Tous les capteurs des différents
satellites Landsat ont une fauchée de 185 km. Chaque scène fait
185 km sur 185 km (Lecuyer, 2012 ; Tra Bi, 2013 ; MFFP, 2015).
54
? Prétraitement de l'image satellitaire
Landsat ETM+ et Landsat Oli 8/Tirs
Les images LANDSAT ETM+ et OLI8/Tirs ont été
déjà corrigées géométriquement, donc sont
superposables l'une à l'autre et également avec les couches
vectrices. Par conséquent, nous avons procédé directement
à la correction radiométrique. Elle est essentielle vu qu'elle
fait passer les valeurs de pixel de l'image en compte numérique en
valeur de réflectance. Pour la réaliser, il faut ouvrir le
logiciel de traitement ENVI. L'outil Radiometric calibration d'ENVI
5.1 permet de faire proprement la correction avec utilisation unique des bands
multispectrales. La méthode de correction atmosphérique que nous
avons utilisée est celle qui fait intervenir les paramètres du
capteur, lors de la prise de vue appelée la méthode
Flaash. Ainsi, l'outil FLAASH Athmospheric correction dans
ENVI 5.1 permet d'afficher l'onglet d'intégration des paramètres
d'entrer de la radiance de l'image (input radiance image) ; du ficher
de sortie de la réflectance (output reflectance file) ; des
fichiers de sortie directrices de la correction atmosphérique FLAASH
(output directory FLAASH files) ; Le nom d'origine des fichiers
FLAASH (rootname for flaash files,).
Ensuite, faire entrer les paramètres de date, de
l'heure de la prise de vue puis l'altitude du satellite et la taille du pixel
de l'image. Cette correction est importante dans la mesure où elle
permet une visibilité meilleure que celle de l'image brute. Par
ailleurs, cette étape permet de mieux enrichir la suite des
traitements.
L'extraction de la zone d'étude sur les deux images est
faite avec la même procédure pour les deux images. L'outil
region of interest dans ENVI 5.1 permet d'extraire notre zone
d'étude en forme rectangulaire. Ensuite, on extrait la zone
d'étude à partir du fichier Shape qui circonscrit la zone
étudiée. Pour ce qui nous concerne, il s'agit du fichier Shape
files de la sous-préfecture de Hiré.
Les traitements d'images satellitaires sont multiples, nous
avons fait appel à celles qui nous sont utiles pour obtenir
l'information recherchée. Dans notre étude nous avons
procédé à la composition colorée qui fait appelle
à trois canaux. Il s'agit des bandes spectrales d'une image
satellitaire. C'est une combinaison qui recherche l'information la mieux
disposée à être interprétée selon
l'information que l'on recherche. Selon Sarr, (2009), elle permet une meilleure
discrimination entre les objets géographiques.
55
Les sites d'entrainements de parcelle représentant tous
les types d'occupation du sol sur la composition colorée des bandes
5-7-4 pour l'image Oli8 et 4-7-3 pour l'image ETM. Ces sites sont choisis en
fonction de l'accessibilité et de leur répartition spatiale. Il
est question d'avoir des points de contrôle des différents types
d'occupation du sol.
- Pour la scène OLI8 :
En fonction des éléments qui constituent le
paysage actuel de la sous-préfecture, et des points de contrôles
qui nous ont permis de choisir les sites d'entrainement ainsi que les classes
pour la classification supervisée : forêt, cultures
pérennes, cultures vivrières, jachère sol nu, bâtis
et site d'activités minières.
- Pour la scène ETM+ :
Les mêmes classes ont été choisies pour
qu'une logique des classes soit respectée afin de faciliter la
détection des changements. Seule la classe « sites
d'activités minières » est absente vu qu'à cette date
de l'image aucun site n'était installé.
Nous avons parcouru le trajet de piste de la
sous-préfecture de Hiré au cours duquel on a pu prendre les
points avec le GPS de différentes végétations qui jonchent
le sol, ainsi que les types de cultures. Des photos ont été
prises également pour montrer les différentes
végétations qui peuplent la zone d'étude. Toutes ces
données sont utiles, voire indispensables dans la réalisation de
notre carte d'occupation du sol.
V' Classification, évaluation et
validation
- Matrice de transition
- Filtrage de l'image classifiée
- Vectorisation et rédaction cartographique
V' Analyse de la dynamique de l'occupation du
sol
Afin de caractériser au mieux la dynamique de
l'occupation du sol et les modalités de transitions entre les
différentes classes d'une année à l'autre, nous avons
effectué une analyse qualitative et quantitative.
56
A travers une comparaison post-classification, l'analyse
quantitative des changements issus de la comparaison entre les pixels des
classifications entre deux dates (Girard et Girade), 1999. Cette analyse s'est
faite par le calcul du taux de changement global (Tg) et le taux moyen annuel
d'expansion spatiale (Tc) couramment utilisé dans les études sur
le changement d'occupation du sol (Hadjadi, 2011).
Tc = [(S2/S1)1/t -1] x 100 Où
:
Tc = taux de changement (%)
S1 = superficie de la classe à la date
t1
S2 = superficie de a classe à la date
t1
S2 = superficie de la classe à la date t2 (t2 >
t1)
L'analyse des valeurs du taux de changement montre que les
valeurs positives indiquent une « progression » et les valeurs
négatives une « régression ». Les valeurs proches de
zéro indiquent que la classe est relativement « stable ».
VII. Les difficultés
rencontrées
Le sujet de recherche porte sur l'exploitation
aurifère, une activité très complexe qui tant dans sa
pratique artisanale qu'industrielle est maintenue secrète. Nous avons
dans le déroulement de nos enquêtes rencontrés plusieurs
difficultés.
VII.1. Les obstacles liés à l'accès aux
informations
La difficulté capitale est celle que nous avons eu
à accéder aux informations sur la compagnie minière et ses
activités. En effet, NEWCREST, compagnie minière exploitant les
gisements de Hiré pendant le déroulement de nos enquêtes
n'a pas accordé de suite favorable à nos courriers de demande
d'autorisation de recherche. Ce refus est resté inchangé
jusqu'à la fin de nos enquêtes. Pour contourner cet obstacle, nous
avons obtenu de nos contacts à la compagnie les données
exploitées dans ce travail ; la chose a toutefois ralenti notre
progression.
Par ailleurs, les données chiffrées de la
production agricole dans la sous-préfecture de Hiré ont
été difficiles à avoir car ni la représentation de
l'agriculture de Hiré ni la direction régionale de Divo n'ont
été à même de nous fournir ces informations. Ce
n'est que la direction de la zone de
57
Divo de l'ANADER qui après plusieurs passages, nous a
donné les chiffres utilisés dans cette thèse. Aussi
faut-il souligner les risques que nous encourions sur les sites d'orpaillage.
Ce sont entre autres les risques de tomber dans les fosses abandonnées ;
ajouté à cela que les visites sur les sites de traitement au
cyanure qui est un produit très toxique nous donnaient des sensations de
brûlures à la peau.
VII.2. Les obstacles liés à
l'administration du questionnaire aux acteurs
Il s'est agi, pour nous, de vaincre la réticence et
d'établir un climat de confiance avec les acteurs enquêtés.
Les enquêtes se sont déroulées dans un climat de
colère et de lassitude lié à l'intérêt
grandissant des étudiants et chercheurs pour la thématique de
l'activité minière. Les populations de Hiré ont
justifié leur réticence par le fait que plusieurs personnes
viennent les voir, promettant d'intervenir auprès de la mine en leur
faveur ou pour l'amélioration de leurs conditions de vie et rien n'est
fait. Elles se disent donc fatiguées de passer des heures à
répondre aux questions sans en voir les retombées. Seulement, une
circulaire de la sous-préfecture annonçant notre passage a permis
de préciser le caractère académique de nos enquêtes
et de dégager tout obstacle. Cela nous a permis de réaliser des
entretiens de groupes avec les différentes couches et composantes de la
population.
L'enquête auprès des orpailleurs a
été la plus difficile. Elle s'est déroulée
après une opération musclée des forces de l'ordre qui a vu
la destruction des sites d'orpaillage. Cette action a été
menée dans le cadre de la rationalisation de l'activité
d'orpaillage sur l'ensemble du territoire.
PLAN DE LA THESE
Cette thèse se compose de trois parties :
La première partie porte sur la
distribution spatiale des formes d'activités aurifères dans la
sous-préfecture de Hiré. Nous montrons le potentiel
aurifère national et local et les différents permis miniers qui
donnent droit à son exploitation. Nous mettons en évidence
l'exercice de deux formes d'exploitation aurifère et leurs
différents modes de mobilisation des terres. La forme industrielle de
l'exploitation aurifère détient ses parcelles des
différents permis miniers qui autorisent son exercice et la forme
artisanale qui est une pratique quasiment liée à l'histoire de la
région dont les acteurs accèdent à la terre par des
accords conclus directement avec les
58
propriétaires terriens. Cette partie se termine par la
démonstration de l'emprise spatiale de l'activité
aurifère.
La deuxième partie porte sur
l'identification des changements introduits par l'exploitation de l'or en
rapport avec le cadre de vie. Elle comprend trois chapitres. Le premier
chapitre, intitulé les mutations démographiques impulsées
par l'or, analyse la dynamique démographique et socio-économique
dans la sous-préfecture de Hiré depuis l'ouverture de
l'activité aurifère. Elle démontre les changements
observés au niveau de la population de Hiré tant dans son
effectif, sa localisation, que dans ses perceptions en matière de
catégorisation sociales. Le deuxième chapitre porte sur les
investissements socio-économiques de la compagnie minière dans la
sous-préfecture de Hiré. Il traite des actions posées par
la compagnie minière en faveur des communautés locales, tant du
point de vue des infrastructures et équipements que du point de vue du
développement du capital humain. Le troisième chapitre quant
à lui porte sur la contribution de l'exploitation minière aux
changements socio-économiques à Hiré. Il montre que
l'activité minière nuit gravement à l'environnement par
les méthodes d'extraction et les produits utilisés dans le
processus de traitement.
La troisième partie, à travers
le titre « conflits et coopérations entre les communautés et
la compagnie minière dans la localité de Hiré », la
troisième partie traite du mécanisme de régulation des
rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales
dans l'exploitation aurifère. Le premier chapitre traite de
l'exploitation minière en relation à la dégradation de
l'environnement. Dans ce chapitre, il est question de l'impact de
l'activité minière sur les différentes composantes de
l'environnement et sur la santé de la population. Le deuxième
chapitre est intitulé : la récession agricole dans le canton
Watta. Il traite des impacts de l'activité minière sur
l'agriculture, tant au niveau de la disponibilité des sols et de la main
d'oeuvre qu'au niveau de la quantité de production et de la
qualité de production. Le troisième chapitre porte sur les
conflits fonciers exacerbés par l'exploitation de l'or. Dans ce
chapitre, il est question des conflits fonciers liés à l'exercice
de l'activité minière, des acteurs de ces conflits et des
mécanismes de résorption de ces conflits.
61
Tableau 1 : tableau synoptique de
l'étude
Questions de recherche
|
Objectifs de l'étude
|
Variables
|
Méthodologie
|
Articulation de la thèse
|
Quelle est la distribution
spatiale de l'activité
aurifère dans la sous- préfecture de Hiré
?
|
Décrire la distribution spatiale des
formes d'activités aurifère dans la sous-préfecture
de Hiré.
|
Variables descriptives de la structure spatiale des formes
d'activité aurifère.
|
Revue de littérature Observation
directe Entretien
|
La première partie porte sur
la distribution spatiale des différentes formes d'exploitation
aurifères dans la sous-préfecture de Hiré.
|
Quels sont les impacts de
l'activité minière sur le
développement et
l'environnement socio-
économique de la sous- préfecture de Hiré
?
|
Identifier les changements introduits par
l'exploitation de l'or en rapport avec le cadre de vie.
|
Variables relatives aux changements apportés par
l'exploitation de l'or en rapport avec le cadre de vie.
|
Observation directe - Enquêtes - Entretien
|
La deuxième partie expose
les changements introduits par l'exploitation de l'or en rapport avec
le cadre de vie.
|
3. Comment l'entreprise
minière et les
communautés locales
régulent-elles leurs
rapports dans l'exploitation de la ressource aurifère ?
|
Déterminer le mécanisme de régulation des
rapports entre
l'entreprise minière et les
communautés locales dans l'exploitation
aurifère.
|
Variables des investissements locaux des employés miniers
et des orpailleurs :
|
Observation directe - Enquêtes - Entretien
|
La troisième partie, porte sur
les conflits et coopérations entre communautés et compagnie
minière dans la localité de Hiré
|
PREMIERE PARTIE :
LA DISTRIBUTION SPATIALE DES ACTIVITES
AURIFERES DANS LA SOUS-PREFECTURE DE HIRE
|
62
INTRODUCTION A LA PARTIE
Hiré est une sous-préfecture de la région
aurifère Dida définie par Sonnendrucker, 1969. Les conditions
géologiques de cette région y ont favorisé un potentiel
minier riche et diversifié. Exploité de façon artisanale
puis semi-industrielle avant l'indépendance, l'exploitation de l'or
depuis 2008 se fait aussi bien sous forme industrielle que sous forme
artisanale. L'activité minière dans sa pratique crée des
empreintes spatiales. Aussi la distribution cartographique des sites
d'exploitation et la description de la pratique de celle-ci sont-elles
essentielles dans cette étude. Cette première partie s'attelle
dans son chapitre 1 à exposer la distribution des sites d'exploitation.
Le deuxième chapitre porte sur la pratique de l'activité
minière. Il consiste à décrire les deux types
d'exploitation aurifère qui ont cours à Hiré. Le
troisième chapitre traite des modifications observables dans
l'organisation spatiale de la sous-préfecture de Hiré du fait de
l'activité aurifère.
63
CHAPITRE 1 : DISTRIBUTION SPATIALE DES SITES MINIERS
DE HIRE
INTRODUCTION AU CHAPITRE
L'exploitation aurifère qui avait été
mise en veilleuse depuis les années 1960 dans la région de
Hiré, connait une nouvelle dynamique. Depuis 2008 avec l'ouverture de la
mine de Bonikro, deux formes d'exploitation minière ont cours à
Hiré : l'exploitation artisanale ou orpaillage et l'exploitation
industrielle. Les sites occupés par ces activités minières
se localisent dans la sous-préfecture, le chef-lieu de
sous-préfecture, dans les villages et campements de la
sous-préfecture de Hiré.
1.1. HIRE : UNE RICHESSE GEOLOGIQUE ET HISTORIQUE 1.1.1.
Une géologie favorable à la formation de minerai
aurifère
Les données géologiques font état que
deux tiers du territoire ivoirien sont couverts par des formations
réputées riches en minerais. Cette minéralisation
diversifiée est estimée à 2,740 milliards de tonnes de
minerai de fer ; 298 millions de tonnes de minerai de nickel, 1,214 milliards
de tonnes de de bauxite, 7,5 millions de tonnes de manganèse, 145 tonnes
de colombo-tantalite, plus de 10 millions de carats de diamant et 600 tonnes
d'or.
Géologiquement, la Côte d'Ivoire se situe dans le
craton ouest africain, précisément dans la dorsale de Man
(Bessoles, 1977). Elle est formée à 2,5% par un bassin
sédimentaire côtier étroit d'âge Secondaire-Tertiaire
et à 97,5% par un socle précambrien structuré entre 3450
et 1026 Ma (Potin et al, 2000).
Les formations précambriennes de la Côte d'Ivoire
sont distribuées dans deux domaines d'âges différents,
séparés par la faille de Sassandra (Bessoles, opc) : un domaine
archéen à l'ouest ou domaine Kenema-Man structuré par les
orogénèses léonienne (3500-2900 Ma) et libérienne
(2900-2500Ma) et un domaine protézoïque à l'est ou domaine
Baoulé-Mossi auquel appartient notre zone d'étude. La
structuration de ce second domaine est encore sujette à discussion.
Toutefois, pour certains auteurs comme (Tagini, 1971 ; Yacé, 1993), la
structuration s'est faite au cours d'une unique orogénèse,
l'Eburnéen (2500-1600 Ma), d'autres par contre (Lemoine, 1988) proposent
une mise en place au cours de deux orogénèses, le Burkinien
(2400-2150Ma) et l'Eburnéen (2120-1800 Ma).
64
Le domaine protérozoïque de la Côte d'Ivoire
est caractérisé par une prédominance de roches felsiques
et par un métamorphisme épi à mésozonal. Il se
subdivise selon Papon (1973) en deux zones distinctes : la zone de type SASCA
situé dans le Sud-Ouest du pays où les formations
archéennes sont bien conservées et la zone de type
géosynclinal, qui occupe le reste du domaine. Les formations de la
seconde zone sont attribuées au biriméen (Arnould, 1961 ;
Bonhomme, 1962). Elles se présentent sous forme de sillons
sédimentaires et volcano-plutonique généralement
orienté NE-SW et séparés par des granitoïdes
orientés à équants. Les gisements aurifères
ivoiriens (Tongon, Agbaou, Bonikro, Angovia, Afema, etc.) sont
généralement situés dans le domaine
protérozoïque. Quant au gisement aurifère de Ity, il est
situé dans le sillon de Toulépleu-Ity d'âge Birimien
(Feybesse et Milési, 1994 ; Feybess et al, 1990) en plein domaine
archéen.
Les ressources aurifères de la Côte d'Ivoire sont
à ce jour exploitées de façon industrielle par cinq
différentes sociétés minières dispersées sur
l'ensemble du territoire (voir tableau 2).
Tableau 2 : les différentes compagnies
minières exploitants l'or en Côte d'Ivoire
N° Permis d'exploitati on
|
Société d'exploitation
|
Actionnaire principal
|
Localisation en Côte d'Ivoire
|
26
|
Société des Mines d'Ity (SMI)
|
La Mancha (France)
|
Ity- Zouan Hounien (Danané)
|
32 et 44
|
LGL Mines SA! NEWCREST-Hiré.CI
SA
|
NEWCREST Mining Limited (Australie)
|
Bonikro - Hiré (Divo)
|
37
|
Agbaou GoId Operations SA
|
Endeavour Mining Limited (Canada)
|
Agbaou-Hiré (Divo)
|
34
|
Tongon Mines SA
|
Randgold Ressources Limited (Afrique du Sud)
|
Tongon - M'Bengué (Korhogo)
|
43
|
Afema Gold
|
Sodium! Teranga
|
Afema (Aboisso)
|
Source : Direction générale des mines,
2016
La production aurifère nationale est de plus en plus
croissante et l'objectif de l'Etat est de faire passer son poids dans le PIB de
1% à 5% en 2020. Des cinq permis d'exploitation en cours en Côte
d'Ivoire (figure 3), la sous-préfecture de Hiré concentre
à elle seule deux permis d'exploitation.
Hiré est située dans une zone du
précambrien moyen birimien avec faciès géosynclinaux
éburnéens complexe volcano sédimentaires, schisteux,
tuffacés ou indifférenciés. Cette sous-préfecture
appartient à la région aurifère Dida ; située dans
la partie méridionale de la ceinture orogénique des roches vertes
de Fettékro encore appelée Oumé-Fettékro et compte
trois gisements d'or à savoir Bonikro, Hiré et Agbaou.
Les sols sont de type ferralitique moyennement ou faiblement
désaturés, remaniés, gravillonnais. Le Birimien de
Hiré est fait de formations sédimentaires et
volcano-sédimentaires intensément plissées et
métamorphisées dans le faciès schiste vert pouvant
localement atteindre la mésozone (Bonhomme, opc ; Sonnendrucker, opc).
Il se compose de volcanites acides, neutres et basiques, d'arkoses, de schistes
arkosiques, de conglomérats et de sédiments associés
(Sonnendrucker, opc). D'importantes masses de granodiorites, de diorites
quartziques et biotites instrument ces formations (Archambault, 1935 ;
Chermettes, 1935). Cette région est constituée d'une large bande
de roches vertes orientée NE et encadrée de granitoïdes
récents. A cet ensemble est associée une phase unique de
déformation progressive autour de 2100 Ma (Yacé, 1982)
contribuant ainsi à la mise en place de plis serrés à
tendance NNE et ayant subi un métamorphisme.
Les minéralisations aurifères dans cette
région se présentent sous deux aspects :
- à Agbaou, l'or est au contact entre volcanites magiques
et les volcano-sédiments (Houssou, opc) tandis qu'à ;
65
- Bonikro et Hiré, des plutons granitiques occupant ces
contacts qui contrôlent l'or.
66
Figure 3 : sites d'exploitation aurifère en
Côte d'Ivoire en 2016
Source : nos enquêtes, 2015
67
1.1.2. Historique de l'activité minière
dans la sous-préfecture d'Hiré
L'exploitation artisanale de l'or est une activité
très ancienne qui a été la première cause de
migration à Hiré. En effet, dès 1920, des migrants
originaires principalement du Centre et du Nord du pays (Baoulé et
Dioula) ont accouru vers Hiré qui n'était alors qu'un petit
village, à la recherche de l'or (Kouadio, 2008). Ces migrants venaient
principalement des autres localités du pays où les
réserves étaient épuisées, ainsi que des pays
voisins. L'or amassé à cette époque servait à la
fabrication de parures traditionnelles de valeur (les bagues en or, les
chaînes en or, les bracelets en or, les boucles d'oreilles) qui
étaient vendues sur le marché local et dans les localités
environnantes. Ces orpailleurs avaient aussi des qualités de grands
orfèvres. Les activités étaient structurées et
réparties selon les spécialités. Pendant que certains
cherchaient de l'or, d'autres restés au village s'occupaient de sa
transformation en parures et d'autres encore s'occupaient de sa
commercialisation.
Cependant, à la fin des années 1940, la
dynamique de cette activité attire l'attention des Français du
bureau minier colonial. Ceux-ci implantent donc à Hiré une
exploitation semi-industrielle et interdisent puis mettent fin à toute
activité d'exploitation artisanale de l'or. Les orpailleurs sont
désormais des ouvriers à la solde des colons dans les sites
d'exploitation. L'exploitation semi-industrielle réoriente
l'activité économique des populations vers le binôme de
cultures café-cacao qui faisaient son entrée dans la zone, la
richesse du sol ayant facilité cette reconversion. Puis, après la
fermeture de cette mine semi-industrielle, l'activité minière a
été mise en veilleuse quoique pratiquée de façon
clandestine par certains.
Cette exploitation aurifère connait toutefois depuis
2008 une nouvelle dynamique. En 1996, l'Etat de Côte d'Ivoire octroi un
permis de recherche de l'or selon le décret n° 96-668 du 28
août 1996 dans la région d'Oumé-Divo. Ce permis de
recherche a abouti à la découverte d'une mine
économiquement exploitable qu'est la mine de Bonikro. Ainsi, depuis
2008, avec l'ouverture de la mine de Bonikro, deux formes d'exploitation
minière ont cours à Hiré : l'exploitation artisanale ou
orpaillage et l'exploitation industrielle qui occupent chacune des sites qui
lui sont propres.
1.2. UN ESPACE LOCAL OCCUPE PAR LES
ORPAILLEURS
Les sites d'orpaillage sont dispersés à travers
la sous-préfecture (figure 4). Ce sont des sites qui sont
abandonnés après épuisement du minerai puis de nouveaux
sites sont conquis. Le caractère clandestin de l'activité ne
permet pas de connaitre tous les sites de l'orpaillage. Ainsi avons-
68
nous visité huit sites que nous pouvons regrouper en
deux catégories : les sites d'orpaillage disséminés dans
les plantations et les sites d'orpaillages sur le permis miniers
(Agbalé, Assonguisso, Akissi-so et Chapelle).
1.2.1. Des sites d'orpaillage dispersés dans des
plantations et des jachères 1.2.1.1. Le site d'orpaillage
d'Assayé ou Doum
Le site d'Assayé est situé à environ 400
m de la ville, dans l'extension Est (dans le sens Divo-Oumé) du quartier
Assayè dont il porte le nom. L'extension de ce site menace d'ailleurs
les dernières concessions qui se situent maintenant à environ 50
mètres des exploitations. Assayé est un site ou l'extraction de
l'or se fait par creusement. Ce sont des sortes de puits à bord large
allant à 30 mètres de profondeur (photo 1).
|
Il existe plusieurs fosses sur le site, le présent
fait environ 10 m de tranchée.
|
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 1 : site d'orpaillage d'Assayé
|
|
Il existe plusieurs fosses sur le site, le présent fait
environ 10 m de tranchée, au fond elle est inondée.
Les types d'exploitation sur ce site sont le lavage à
la batée, le lavage simple et la recherche de roches riches en or. Selon
les acteurs interrogés, cela s'explique par la disponibilité de
l'eau. Le site d'Assayé se situe dans sa grande partie dans un bas-fond.
Cette caractéristique lui permet de contenir de l'eau en abondance sur
une longue période d'environ neuf mois (d'avril à
décembre). Lorsque le volume d'eau diminue ou tarie, les orpailleurs
s'adonnent à la recherche de l'or à travers les roches.
69
1.2.1.2. Le site d'orpaillage de Djangobo
Il est situé à environ 02 km de la ville sur
l'axe Hiré-Taabo. Ce site est également caractérisé
par une exploitation à ciel ouvert. Les types d'exploitation en vigueur
sont : le lavage simple et la recherche de roche contenant de l'or. Ce site
d'orpaillage bien qu'en partie situé dans un bas-fond, ne contient pas
autant d'eau que celui d'Assayé. C'est ce qui explique le fait que le
lavage à la batée n'est pas pratiqué sur ce site. Car il
faut préciser que le lavage à la batée nécessite
beaucoup d'eau. En revanche, la recherche de roche est plus pratiquée
sur ce site. C'est donc sur ce site qu'exerce la grande majorité des
petits exploitants. Les petites mares construites par les exploitants leur
permettent de pratiquer le lavage simple. Mais celui-ci s'arrête
dès l'avancée de la sécheresse car ces petites mares
tarissent.
1.2.1.3. Le site d'orpaillage sur la zone 1 du terroir de
Bouakako
Il est situé à environ 7 km de la ville sur
l'axe Hiré-Divo. Ce site est caractérisé par une
exploitation souterraine. Les orpailleurs de ce site descendent dans des puits
antérieurement creusés lors des premières extractions
artisanales d'or à Hiré. La profondeur de ces puits peut
atteindre parfois 20 à 25 mètres. Il existe des tunnels qui
relient les puits entre eux de sorte que l'ensemble constitue un réseau
souterrain dense. L'une des particularités de ce site est sa richesse en
or. Mais s'il est possible d'avoir un rendement élevé d'or sur ce
site, sa fréquentation est redoutée par la plupart des
orpailleurs. Vu le risque énorme d'accident (éboulement) que
présente ce site, la majorité des orpailleurs refusent d'aller y
travailler ; ce qui explique le fait que le site de Bouakako est peu
peuplé. On peut estimer à environ 100 personnes, le nombre
d'orpailleurs.
2444x9
248000
246000
211000
Legende
Points ASM laves au GPS
Limite de le ville
Ouerieers
lbia pnncpale ahanai
Leeds de loi et d ill
Faret nuée - Cantate
Ses-Sonda
Edidle
102
0 210
1000
1400+0
1:12 SN
1
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1 {
/ · i
} N 4
KKB.GIS I GES-COJ
None. Punie ASM Vile de Hoe_et pate 20011.0011
8
I
70
Figure 4: répartition des sites
d'orpaillage
Ville de Fli ré
POINTS D'EXTRACTION ET DE TRAITEMENT DU
MINERAI PAR LES ARTISANTS MINIERS
24404'. 245000 2I7CtC 248000
Source : NEWCREST, 2017
71
1.2.1.4. Les orpailleurs dans la zone 2 du terroir de
Bouakako
Le site de Bouakako 2 est situé à environ 300 m
de l'axe Divo- Hiré. C'est une palmeraie affectée par son
propriétaire pour l'exercice de l'orpaillage. Ce site est exclusivement
tenu par des femmes et des fillettes dont l'âge varie entre 11 et 45 ans.
Elles creusent la terre déjà retournée pour la traiter par
lavage simple (photo 2). Bien que n'ayant pas eu de réponse à
cette question, nous pensons que ce site était anciennement tenu par des
hommes. Les femmes sur le site n'ont que de petites dabas qu'elles utilisent
pour retourner la terre, alors qu'on y voit de grands trous dans lesquelles
sont emprisonnés d'importantes quantités d'eau provenant des
pluies.
|
Site de Bouakako majoritairement exploité par les
femmes.
|
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 2 : site du bas fond de Bouakako
|
|
1.2.2. Les sites d'orpaillage sur les
périmètres de la société minière
Les moyens de prospection dont disposent les orpailleurs
étant peu performants, certaines prospections s'avèrent
infructueuses. Ils se laissent parfois guider par les industriels, en suivant
les points de forages réalisés par ces derniers. Les moyens dont
disposent les industriels étant plus performants, les orpailleurs ont
ainsi la certitude de l'existence de gisements importants sur ce site. Ce fut
le cas pour la fosse de Hiré dont les forages avaient été
réalisés depuis 2010. Le permis d'exploitation minière PE
44 accordé à la société minière NEWCREST a
particulièrement fait l'objet d'invasions fréquentes et massives
de la part des orpailleurs. La mine attendant la réalisation des
équipements nécessaires à l'exploitation de cette fosse et
du
72
fait de la crise post-électorale de 2010, n'a
commencé ses travaux sur ce site qu'en décembre 2014.
1.2.2.1. Les sites d'Akissi-so
Le site d'Akissi-so dont la potentialité
aurifère a été découvert depuis 1967 par
Sonnendrucker, était lors de notre pré-enquête de 2014,
essentiellement occupé par les orpailleurs. Aujourd'hui il est
majoritairement occupé par la société NEWCREST dont il
constitue l'une des fosses satellites. Situé à la lisière
du quartier Baoulé dans la commune de Hiré, ce site continue
d'abriter des orpailleurs. Toutefois, les espaces abandonnés par les
anciens orpailleurs sont aujourd'hui revisités par des pléiades
de femmes et des jeunes filles qui en poursuivent l'exploitation. Elles le font
certes à des degrés moins importants que l'activité
artisanale qui y était autrefois pratiquée par les hommes. Les
femmes sont dispersées sur ces sites en de petits groupes.
1.2.2.2. Le site d'Assonguisso secteur 21 sur l'axe
Hiré-Zégo
Ce site contrairement au site d'Akissi-so, est
différent de celui autrefois exploité par les orpailleurs. Il
n'est pas loin du périmètre de la mine mais se distingue
nettement de celui-ci. Couvrant une superficie de 80 m2, ce site se
trouve dans une plantation de cacao et de vivriers, il est détenu par le
président des orpailleurs de la sous-préfecture de Hiré.
C'est, le même président des orpailleurs qui exploitait une partie
du site d'Assayé.
Par jour, ce sont entre 03 et 12 sacs de roches qui sont
extraits du sous-sol qu'un total de 80 personnes fouillent dans les entrailles
de la terre. C'est une équipe bien organisée qui y travaille sous
le regard vigilant du chef de sécurité.
Le diagramme d'évolution de la présence des
orpailleurs sur le périmètre de Hiré Est que
présente la figure 4, montre qu'avant 2010, il y a une absence totale
d'orpailleurs sur ce site. A partir de 2010, ils apparaissent puis on voit une
nette évolution de leur présence entre 2010 et 2012. Entre 2012
et 2014, il y a une baisse drastique du nombre d'orpailleurs, qui continue
jusqu'à atteindre 300 orpailleurs en 2016.
73
Figure 5 : évolution des orpailleurs
présents sur le périmètre de NEWCREST à Hiré
de 2010 à
2016
3500
3000
2500
2000
1500
1000
500
0
Année 2010 Année 2012 Année 2014
Année 2016
Source : NEWCREST, 2016
NEWCREST a obtenu le permis d'extraction du secteur de
Hiré en 2010. La présence d'une réserve exploitable a donc
été confirmée ; ce qui explique l'apparition des
orpailleurs sur ce site à partir de cette date. Toutefois, la crainte
éprouvée à s'introduire sur un site minier explique le
nombre relativement faible des orpailleurs en 2010. En 2012, le nombre
d'orpailleurs passe du simple au triple, encouragé par le silence et
l'inertie presque totale des autorités minières et
administratives. Cependant, en 2014, la compagnie NEWCREST a entrepris de
libérer son périmètre de Hiré-Est de la
présence des orpailleurs. Cette campagne a consisté à un
dialogue menaçant les orpailleurs ; ce qui explique la baisse des
orpailleurs que nous constatons entre 2014 et 2016. Cette évolution des
orpailleurs sur le permis minier de Hiré-Est va de pair avec
l'évolution des superficies occupées par ceux-ci, telle que
décrite sur la carte ci-dessous. La figure 5 présente deux phases
dans l'occupation du site aurifère de Hiré-Est. De 2010 à
2013, on observe une occupation progressive de ces sites par des orpailleurs.
Cela commence timidement en 2010. Puis en 2011, on assiste à une
explosion de l'activité avec des superficies occupées passant de
5,76 ha à 25,15 ha. Cette extension de l'activité continue
jusqu'en 2013 où elle couvre 34,58 ha pour stagner en 2014 à
24,44 ha.
74
Figure 6 : évolution de l'occupation du
périmètre de Hiré Est par les orpailleurs de 2010 à
2014
Source : NEWCREST, 2016
75
1.3. LES SITES DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE L'OR
1.3.1 Les conditions d'obtention d'un titre minier en Côte
d'Ivoire
L'exploitation industrielle de l'or est conditionnée
par l'obtention de permis miniers qui en autorisent l'exercice. Ainsi, en
Côte d'Ivoire, l'Etat en tant que propriétaire exclusif des
ressources minières et minérales du pays est le seul
habilité à donner à un tiers l'autorisation d'exploration
et d'exploitation. De ce fait, le titulaire du titre minier portant sur le
gisement contenu dans le sous-sol ne pourra pas s'en revendiquer
propriétaire. Son titre obtenu auprès de l'Etat sous sa casquette
de propriétaire lui accordera cependant le droit d'effectuer ses
activités de recherche ou d'exploitation de manière exclusive sur
un périmètre donné et de mettre en oeuvre les
prérogatives qui y seront attachées jusqu'à
échéance. Le titre minier confère donc la
légitimité de la mise en oeuvre d'une activité
minière. La propriété des substances minières
extraites du gisement revient au titulaire du titre. L'obtention d'un titre
minier est soumise à un ensemble de conditions. Il y a deux
catégories de titres miniers : le permis de recherche et le permis
d'exploitation.
Le permis d'exploration ou de recherche est le premier titre
minier. C'est un document (Art 18 Code minier) que l'Etat donne à une
personne physique ou à une entreprise pour rechercher des produits du
sous-sol. La demande du permis de recherche est adressée à
l'administration des mines. Celle-ci analyse le dossier de demande aussi bien
dans la forme que dans le fond et après validation effectue une visite
de terrain pour la vérification de la conformité des plans
fournis avec la réalité du terrain. Lorsque la visite sur le
terrain est concluante, la demande de permis de recherche est transmise
à la commission inter ministérielle des mines (CIM) pour analyse.
En cas d'avis favorable, le dossier de demande de permis de recherche est
transmis au ministre chargé des mines pour autorisation
définitive. Le permis de recherche est valable pour trois ans à
compter de la date du Décret qui l'institut. Il est renouvelable deux
fois par périodes successives de deux ans.
Un renouvellement exceptionnel supplémentaire et unique
peut toutefois être accordé après sept ans et pour une
période n'excédant pas trois ans. Cela si l'intérêt
des résultats obtenus et si l'ampleur des travaux de recherche et des
investissements déjà engagés, ou à engager, sont
jugés d'importance particulière par l'administration des Mines
(code minier, 1995). C'est dans ces conditions que le permis de recherche
n°105 a été attribué par le décret n°
96-668 du 28
76
août 1996 dans la région d'Oumé à
la société EQUIGOLD Côte d'Ivoire SA pour la recherche de
minerais aurifères.
1.3.2 Les titres miniers dans la sous-préfecture
de Hiré
Trois titres miniers ont été signés pour
l'exploitation industrielle de l'or dans la sous-préfecture de
Hiré. Ce sont : un permis de recherche et deux permis d'exploitation
(voir figure 7). Le premier permis minier relatif à l'exploitation de
l'or à Hiré est le permis de recherche N°105 acquis par
EQUIGOLD en août 1996. Il autorise la compagnie minière à
entreprendre des travaux de recherches aurifères. Ceux-ci ont
été réalisés à partir d'indices, au moyen de
travaux de surface et en profondeur, à l'aide de techniques
géophysiques, géochimiques et géologiques avancées.
La technique de sondage utilisée par EQUIGOLD a consisté à
faire des layons sur plusieurs kilomètres sur toute l'étendue de
la surface du permis d'exploration. Ces layons étaient espacés de
20 mètres.
L'étude des différents prospects a permis de
découvrir en 2000 la présence d'une large zone
minéralisée. Entre 2001 et 2004, les travaux d'exploration ont
une fois de plus confirmé la présence de gisements
économiquement exploitables et établi une ressource
indiquée et inférée de 25,1 millions de tonnes à
1,6 g par tonne d'or soit l'équivalent de 1 300 000 onces d'or. La
qualité et la quantité des réserves minières du
gisement découvert ainsi que les moyens techniques et commerciaux de son
exploitation ont permis d'aboutir en novembre 2005 à la première
étude de faisabilité.
A la suite de ces travaux de recherche et de l'étude de
faisabilité qui a été positive, EQUIGOLD a obtenu en
janvier 2007, le permis d'exploitation minière PE-32 qui dérive
du permis de recherche N°105. Sur la base de ce permis la mine d'or de
Bonikro a été développée. Parallèlement
à l'exploitation de la mine de Bonikro, la société LGL a
entrepris en 2008 des travaux d'exploration sur plusieurs cibles mineures
potentielles de Dougbafla-Est, Dougbafla-Nord, Dougbafla-Centre,
Hiré-Est, etc, situées dans un rayon de 20 kilomètres
autour de l'usine de Bonikro. Des résultats encourageants ont
été enregistrés entre 2009 et 2012 sur les prospections de
Hiré-Est et Dougbafla-Est. Les résultats satisfaisants obtenus de
la prospection sur sites satellites ont conduit la compagnie NEWCREST, qui
entre temps a succédé à LGL, à demander une
Étude d'Impact Environnemental et Social (EIES) portant sur le projet de
développement des fosses satellites aurifères.
77
L'approbation de cette EIES est une nécessité
pour obtenir le permis d'exploiter. Depuis la phase d'exploration
débutée en 1996 par EQUIGOLD CI jusqu'en 2015, ce sont au total
trois études d'impact environnementales et sociales (EIES) et une
révision qui ont été réalisées pour le
compte de NEWCREST dans la sous-préfecture de Hiré. Ces EIES ont
été réalisées par plusieurs cabinets privés
intervenant dans les domaines de l'environnement et des études
sociologiques. Ce sont entre autres : CECAF international, Channel research,
BURGEAP COTE D'IVOIRE, Arc Ingénierie, etc. Ces EIES ont porté
sur l'ouverture de la mine de Bonikro, l'extension du parc à cyanure
l'ouverture de la fosse de Hiré.
Figure 7 : Localisation des permis d'exploitation de
NEWCREST Côte d'Ivoire
78
Source : NEWCREST, 2015
79
Elles sont réalisées suivant l'orientation de
l'Agence Nationale De l'Environnement (ANDE) à travers des termes de
référence qui leur servent de guide. Les EIES sont
validées par l'ANDE à la suite d'un examen technique du rapport
final de celles-ci.
L'approbation de l'EIES a permis à la filiale
ivoirienne de la société minière NEWCREST d'obtenir par le
décret présidentiel N°2013-855 du 13 décembre 2013,
deux permis d'exploitation sur les sites satellites pour alimenter la mine de
Bonikro. Ainsi, le permis d'exploitation n°44 d'une superficie de 195
km2 (voir annexe 1) a été accordé pour le site
de Hiré-Est et le permis n°45 d'une superficie de 280,1
km2 pour le site satellite de Dougbafla-Est dans la
sous-préfecture d'Oumé. Dans la pratique, l'opération de
Hiré-Est s'effectue depuis janvier 2015 sur quatre fosses
(Agbalé, Akissi-so, Chapelle et Assondji-so) d'une capacité de
trois millions de tonnes de minerai aurifère, exploitable pendant une
durée d'environ 6 ans.
1.3.3. Les sites occupés par l'activité
aurifère industrielle
Dans la sous-préfecture de Hiré, l'exploitation
industrielle de l'or se déroule sur deux sites que sont : le site de
Bonikro et le site de Hiré-Est (figure 8).
L'exploitation industrielle s'étend dans l'ensemble sur
ces deux sites avec :
y' Bonikro: 1 062,38 hectares y' Gisement de Hiré: 832
hectares
Le site de Hiré est exclusivement un site d'extraction
dont le minerai extrait est transporté vers le site de Bonikro qui
abrite l'usine de traitement.
80
Figure 8 : Situation géographique des sites
occupés par la compagnie minière NEWCREST
Source : nos enquêtes, 2016
81
1.3.3.1 Le site de Bonikro
Le site de Bonikro est le premier site d'exploitation
industrielle de l'or dans la sous-préfecture de Hiré. Il
s'étend à son ouverture sur une superficie de 860 hectares que
les installations de la compagnie minière occupent. Ce site abrite les
différentes installations de l'usine de traitement de minerai (voir
photo 3). Les activités sur le site de Bonikro ont été des
activités d'extraction et de traitement ce qui fait qu'il comprend un
ensemble complexe et complet d'installations industrielles notamment : la fosse
de la mine à ciel ouvert ; l'équipement pour l'exhaure ; le site
de stockage provisoire du minerai brut ; l'aire de stockage des stériles
; l'aire de stockage de la terre végétale ; les bâtiments
administratifs et de service ; la station essence ; l'usine de filtration et le
bassin de boue. La figure 8 en montre le détail de l'occupation du
sol.
Un parc à résidu ou bassin de boue a
été construit en 2007. Il s'étendait à sa
construction sur 160 ha. Le parc à résidu est un lac artificiel
créé pour le déversement des eaux usées, des eaux
cyanurées provenant du traitement du minerai. Les dimensions du parc
à cyanure ont été agrandies de 70 ha. Ce qui porte la
dimension totale à 220 ha.
|
Cette photo présente les différentes
installations de la mine de Bonikro.
|
Auteur photo : NEWCREST, 2015
Photo 3 : Vue aérienne de la mine de
Bonikro
|
|
1.3.3.2 Le site de Hiré Est
La mine de Hiré-Est est une carrière sur
laquelle les activités se limitent à l'extraction, au concassage
et au stockage temporaire (à la carrière). La taille des aires de
stockage varie entre
82
20 et 30 mètres de haut. Le minerai extrait dans cette
carrière est transporté à la mine de Bonikro où les
installations de l'usine existent. Une voie de transport du minerai vers
l'usine de traitement de Bonikro a été aménagée
à cet effet. Le transport du minerai de Hiré vers l'usine de
Bonikro se fait par passage régulier de camion à intervalle de 10
minutes pendant la journée sauf aux heures de pointe (matin et soir).
L'empreinte du projet de fosses satellites de Hiré a connu diverses
variations au fil du processus et du temps.
Les quatre sites de la mine de Hiré sont Akissi-so (14
hectares), Agbalé (03 hectares), Chapelle (21 hectares) et Assondji-so
(15 hectares).
Hormis les sites d'extraction et de traitement du minerai
occupés pour l'exploitation industrielle de l'or, une cité des
travailleurs de la mine est construite dans la ville de Hiré. Cette
cité de 42 villas situées dans la ville de Hiré, est
construite en dehors des permis miniers. Elle abrite uniquement les cadres de
la compagnie minière. Il s'agit de luxueuses résidences
comportant toutes les commodités et parée contre toutes les
ruptures de services de la ville notamment en matière d'eau
d'électricité et de sécurité. L'approvisionnement
en nourriture de la cité est assuré directement d'Abidjan ou par
importation de denrées alimentaires.
1.3.3.3. Le site de Dougbafla en pays Gouro
Le périmètre d'exploitation de la compagnie
s'étend aussi hors des limites de la sous-préfecture dans la zone
de Dougbafla-Est en pays Gouro. Les calculs de rentabilité
économique réalisés par la compagnie lui ont permis de
définir comme exploitable tout gisement à une distance de moins
de 20 kilomètres de la base que représente l'usine se trouvant
dans la sous-préfecture de Hiré. Cela a conduit à explorer
et trouver un gisement à Dougbafla. L'ensemble des gisements à
exploiter dans la région par la compagnie est estimé à 3
000 000 de tonnes de minerai aurifère sur six ans.
83
Figure 9 : Occupation du sol par le complexe minier
à Bonikro
Source :NEWCREST, 2016
84
Conclusion du chapitre 1
Hiré est une sous-préfecture qui jouit d'une
richesse géologique marquée par la concentration dans son
sous-sol d'indices aurifères. Cela justifie l'intensité de
l'activité aurifère qui y a cours. Longtemps extrait de
façon artisanale, l'or de Hiré connait depuis 2008 une
exploitation industrielle qui a entrainé une explosion de l'orpaillage.
Ces deux types d'exploitation sont menés simultanément chacun sur
des périmètres différents et dispersés à
travers la sous-préfecture. L'installation des orpailleurs clandestins
se fait sans autorisation. Ceux-ci sont installés pêle-mêle
guidé par la présence du minerai tandis que les sites
occupés par les industriels sont définis par les permis miniers
officiels. Cette divergence dans la logique d'installation annonce
également une divergence dans la pratique de l'activité.
85
CHAPITRE 2 : LA PRATIQUE DE L'EXPLOITATION MINIERE DANS
L'ESPACE LOCAL DE HIRE
INTRODUCTION AU CHAPITRE
Depuis 2008, avec l'ouverture de la mine de Bonikro, deux
formes d'exploitation minière ont cours à Hiré :
l'exploitation artisanale ou orpaillage et l'exploitation industrielle. Ces
deux formes d'exploitation ont des modes d'exercice, des outils et des
techniques d'extraction et de traitement qui diffèrent les unes des
autres. Aussi l'étude du profil de ses différents acteurs
serait-elle intéressante.
2.1. LES FORMES DE L'EXPLOITATION ARTISANALE DE L'OR A
HIRE
2.1.1 Le processus d'identification et de
négociation des terres pour l'orpaillage 2.1.1.1 La recherche des sites
d'exploitation pour l'orpaillage
La recherche des sites est la première étape
dans l'exploitation artisanale de l'or. Les parcelles à exploiter sont
sélectionnées selon que le site présente une
végétation ou des roches familières à l'or. Il est
généralement admis que l'or évolue selon un axe
appelé filon. Lorsque l'or a été découvert en un
point A, il suit l'axe de progression de ce filon. C'est donc sur cet axe que
la végétation est observée ou sur d'anciens sites. Sur les
sites d'exploitation alluvionnaire, l'or se révèle d'un lieu lors
des grandes pluies. Certains orpailleurs professionnels utilisent des
détecteurs de métaux d'or pour faciliter la recherche. Une fois
le «gisement" trouvé, le propriétaire terrien est
contacté pour que les négociations sur les conditions
d'exploitation de son site soient conclues.
2.1.1.2. L'orpaillage et le contrat de concession avec
les propriétaires terriens
Les orpailleurs pour l'exercice de leur activité
concluent des accords avec les propriétaires terriens. Ces arrangements
autour de la terre entre les orpailleurs et les propriétaires terriens,
sont verbaux et se font dans la recherche des intérêts de chacune
des deux parties. Les orpailleurs y voient l'opportunité de
perpétrer leur activité tandis que les propriétaires
terriens y voient l'occasion de se faire de l'argent facilement et
rapidement.
Généralement, les terres occupées par les
orpailleurs ne sont pas vendues mais louées à des
propriétaires de ?trous?. Plusieurs types de contrats sont conclus entre
les propriétaires terriens ou les propriétaires d'exploitations
et les orpailleurs.
86
Certains orpailleurs paient des terres en tickets avec les
propriétaires. Ces tickets appelés tickets d'exploitation leur
donne le droit d'accès au site. Le coût du ticket est fixé
selon le type d'exploitation et selon le sexe de l'exploitant. Par
conséquent, pour le lavage simple, les femmes paient 500 F CFA et les
hommes 1000 F CFA par semaine. Ceux qui font le lavage à la batée
payent 7 000 F CFA par semaine. Cependant ces montants ne sont pas
homologués et peuvent varier d'un site à un autre. Sur l'un des
sites d'Assayé situé dans une plantation de cacao, le
propriétaire exige une somme de 5 000 F CFA par orpailleurs et par
semaine.
Il y a également des cas de location de terre mensuelle
de 30 000 à 50 000 F CFA et annuelle comprise entre 2 000 000 et 4 000
000 F CFA. Ces terres cédées sont généralement des
terres cultivables, soit en production, soit en jachère. Les terres
prisées par les orpailleurs sont généralement des
bas-fonds car disent-ils que l'or se trouve dans le fond des vallées. Ce
sont de grandes parcelles sur lesquelles l'extraction est faite soit à
ciel ouvert soit de façon souterraine. Les propriétaires font des
passages réguliers sur les sites pour s'assurer que tous ceux qui y
exercent ont effectivement payés leurs tickets. Lorsque le
propriétaire terrien surprend sur son terrain un contrevenant, celui-ci
est sommé de payer son droit sous peine d'expulsion. Ce type de
situation entraine souvent des conflits entre les propriétaires de terre
et les orpailleurs qui aboutissent parfois à la fermeture temporaire des
sites.
Le cas du site de Bouakako 2 est différent. Là,
les acheteurs d'or se sont regroupés pour acheter le site d'exploitation
aux autochtones. Le contrat d'achat monte à 3 millions de F CFA en
espèce, des chaises en plastique et des bâches, plus des animaux
à sacrifier. Dans tous les cas l'enjeu économique est tel que le
non-respect des termes du contrat entraîne des conflits. A Bouakako, les
Orpailleurs ne prennent pas le ticket d'exploitation. Cependant ils sont tenus
de vendre leur production aux acheteurs propriétaires du site sous peine
de se voir expulser. La différence est qu'à défaut de
payer des tickets les orpailleurs vendent leur or à un prix forfaitaire
de 7 500 F CFA le gramme au lieu de 8 500 ou 9.000 F CFA sur les autres
sites.
Les propriétaires terriens sont constitués par
les autochtones Dida et Baoulé. Ils sont les chefs et
propriétaires de terre dans la localité. Ce sont eux qui mettent
leur terre à la disposition des orpailleurs pour son exploitation.
Plusieurs propriétaires terriens sollicitent eux-mêmes les
orpailleurs afin que ceux-ci inspectent leur parcelle à la recherche
d'indices aurifères dans le but de le leur céder.
87
Sur certains sites d'orpaillage déjà
abandonnés dans la zone d'étude comme celui d'Assayé,
même après le passage des orpailleurs, les propriétaires
terriens continuent d'obtenir des gains en prélevant de l'argent
à tous ceux qui viennent l'exploiter à nouveau. Ces primes vont
de 500 F CFA à 1 500 F CFA par jour et de 3 000F CFA à 5 000F CFA
par semaine selon les voeux de l'exploitant (Kouadio, op.cit.). Selon le chef
du village de Djangobo ; « l'or ne finit jamais sur un site mais c'est la
baisse du rendement qui pousse les orpailleurs à abandonner le site. Il
y a également des propriétaires terriens qui vendent
définitivement leurs terres aux orpailleurs contre un
intéressement sur l'or récolté.
2.1.2 Les différentes étapes dans la
chaîne de production artisanale de l'or
L'exploitation artisanale de l'or se fait selon quatre
étapes majeures qui constituent une chaîne de production
établie par les orpailleurs (voir figure 10).
Figure 10 : Chaîne de production artisanale de
l'or
Source : YOBO, 2016
Déblaiement du site
Creusage ou extraction
Lavage
Raffinage
La chaîne de production artisanale de l'or comprend les
étapes suivantes : la phase de déblaiement, l'extraction, le
lavage et le raffinage.
2.1.2.1 Le déblaiement du site
C'est la première étape menée par les
orpailleurs sur le site à traiter. Elle intervient après que le
site a été testé positif et que l'accord avec le
propriétaire terrien a été scellé. Cette
étape permet de dégager le site, de l'aérer afin de
travailler sans être gêné par la végétation.
Les sites sont généralement recouverts de cultures ou de
végétation naturelle.
2.1.2.2. L'étape de l'extraction du
minerai
L'extraction de l'or se fait selon deux pratiques liées
à la nature du gisement. Il s'agit de l'exploitation alluvionnaire qui
se déroule à ciel ouvert et de l'exploitation de filon qui se
fait de façon souterraine.
88
Une alluvion est un dépôt graniteux à
sableux pouvant contenir des substances minérales laissées par un
cours d'eau. L'exploitation alluvionnaire est la plus ancienne et la plus
facile des méthodes d'extraction artisanale de l'or. Le minerai se
trouvant à faible profondeur, c'est généralement dans les
grandes vallées humides qu'elle se pratique. Elle occupe la
majorité des acteurs du secteur artisanal de Hiré et se pratique
sur les sites d'Assayé, Bouakako et sur l'axe Hiré-Taabo. Cet
alluvionnement est facilité par le relief de la zone de Hiré. En
effet, la région est composée de grands interfluves aux pentes
raides souvent en forme de collines. Ces pentes et le niveau de pluie qui est
élevé génèrent une forte érosion suivie d'un
fort dépôt d'alluvions où l'or est entassé.
2.1.2.3 L'exploitation des filons
Un filon est une masse rocheuse qui se met en place dans un
antre à la faveur d'une fracture (ou faille). Il peut représenter
un gisement de substances minérales exploitables de façon
souterraine dans les conditions économiques du moment. Son creusage
nécessite une main d'oeuvre importante. Deux à trois personnes
creusent la terre à l'aide d'outils comme les pioches, les pelles et les
dabas. La terre creusée est amoncelée puis transportée
jusqu'au point de lavage. Le minerai se trouve dans les roches plus profondes
appelées "roche mère?. La profondeur des puits peut atteindre
jusqu'à 20 à 25 mètres. Il existe des tunnels qui relient
les puits entre eux de sorte que l'ensemble constitue un réseau
souterrain dense. Sur ces sites, les acteurs creuseurs sont uniquement des
hommes parce que l'activité fait beaucoup appel à la force
physique. Toutefois, le transport des roches est assuré par les femmes
et les enfants. L'exploitation de ce type de gisement est redoutée par
la plupart des orpailleurs à cause des risques énormes
d'accidents par éboulement que présente ce mode d'extraction. Il
nécessite un savoir-faire et une certaine technicité de la part
des acteurs. Ce sont donc les orpailleurs de profession,
généralement les non nationaux, qui s'y adonnent. Ces roches sont
à la suite lavées et examinées minutieusement à
l'oeil nu en vue de détecter à la surface des paillettes d'or.
Les roches présentant les paillettes d'or sur leurs surfaces sont
accumulées puis réduites en poudre dans de grandes broyeuses. La
poudre ainsi obtenue est lavée selon les techniques ci-dessous
décrites.
Le traitement de l'or se fait selon trois formes : le lavage
simple, le lavage à la batée et le lavage au cyanure. Dans le cas
de l'exploitation des filons, les roches extraites sont transportées en
ville pour y être broyées dans les broyeurs.
? Le lavage à la batée
Le lavage à la batée consiste à
séparer le gravier du sable fin par le procédé de lavage
à l'aide d'une calebasse. Cette opération se fait dans un petit
barrage construit par les orpailleurs eux-mêmes. C'est une technique
utilisée dans l'exploitation alluvionnaire ou à ciel ouvert (voir
photo 4). Il est assuré par les femmes et les jeunes filles car ne
nécessitant pas beaucoup d'efforts physiques. C'est une méthode
que les femmes maîtrisent bien car elle est la même que celle
utilisée pour laver le riz et le séparer des grains de sables.
Elles ont une connaissance pratique de cette méthode et cette
activité leur est aisée. Les femmes travaillent soit
individuellement soit avec quelques membres de leur famille. Le rendement est
faible parce qu'elles ne peuvent pas traiter beaucoup de sable par cette
méthode. Au cours de cette méthode, le mercure est utilisé
pour retenir la poudre d'or au fond de la calebasse.
|
Le lavage simple est une activité
spécialement dédiée aux femmes car elle s'apparente au
lavage du riz.
|
89
Auteur cliché : YOBO, 2015 Photo 4 : le
lavage à la batée
90
? Le lavage simple
Le lavage simple se fait par jet d'eau à l'aide d'un
moteur (wombiaré en Moré) ou sur un instrument en bois en forme
de pirogue appelé `'pirogue ou kourou en Malinké». Sur le
« wombiaré », une moto pompe reliée à un puits
antérieurement creusé, refoule l'eau vers la caisse (voir photo
5). Les fines particules d'or qu'elle contient sont recueillies sur le tapis du
filtreur qui sera lavé à son tour, toutes les 30 à 60
minutes selon la richesse du sous-sol, dans une grande bassine d'eau. Par
contre, sur le « kourou », le lavage se fait par des mouvements
circulaires de la main de jet d'eau sur le sable (photo 6). Le gravier
séparé du sable fin est récupéré à
l'autre bout de la pirogue par deux personnes pour être jeté plus
loin afin de permettre la circulation de l'eau. Le sable fin retenu sur les
tamis de ces deux instruments sous forme de sédiment contenant les
pépites d'or est recueilli progressivement par le propriétaire de
l'unité de production pour le lavage final en fin de journée au
mercure. C'est une activité très complexe qui nécessite
l'intervention d'un minimum de trois personnes. La méthode de lavage
simple a un avantage par rapport au lavage à la batée car elle
permet de traiter beaucoup de sable et par conséquent de collecter plus
d'or.
|
Cet instrument est connecté à une motopompe
qui remonte l'eau vers la machine. Il est également équipé
d'un tapis qui permet de retenir les pépites.
|
Auteur cliché : YOBO, 2015
|
|
Photo 5: Instrument de lavage appelé « le
wombiaré»
|
La pirogue est un instrument traditionnel qui permet le
lavage rapide du minerai. Le tapis, retient les pépites d'or contenues
dans le sable.
|
91
Auteur cliché : YOBO, 2015
Photo 6 : Instrument de lavage appelé «
pirogue » 2.1.2.3 Le raffinage dans l'orpaillage
Le raffinage est l'étape définitive du
traitement de l'or. Une fois le lavage à la batée
terminée, les parties fines du minerai sont déposées dans
un bol en fer puis on y ajoute du mercure. Le mercure en contact avec l'or
réagit immédiatement pour former un amalgame. Cet amalgame est
récupéré puis chauffé dans un four pour en extraire
le mercure en évaporation ce qui laisse alors un résidu d'or.
Bien que ce procédé soit largement répandu, la
récupération de l'or par cette méthode n'excède pas
60% particulièrement pour les minerais à grains d'or très
fins ou quand le minerai contient d'autres métaux qui réagissent
avec le mercure.
Le sable supposé ne plus contenir de particules d'or
après le lavage à la batée est alors vendu à une
autre catégorie d'orpailleurs qui achète des monceaux de sable
d'une hauteur d'environ 1.5 m à 400.000 FCFA pour aller les traiter,
cette fois au cyanure. La photo 7 présente l'installation pour ce
traitement après lequel le sable ne contient plus d'or. La
récupération de l'or avec le cyanure semble plus efficace et est
estimé à 90 voire 100% d'efficacité.
92
|
Le lavage au cyanure est le lavage ultime du minerai pour en
extraire l'or. Il est pratiqué par des orpailleurs
spécialés et expérimentés car très
dangeureux à cause du cyanure.
|
Auteur photo : YOBO, 2015
|
|
Photo 7 : Aménagement pour le raffinage au
cyanure
2.1.3 Le profil sociodémographique des
orpailleurs
2.1.3.1 Un orpaillage dominé par les acteurs
masculins jeunes et de 30 ans
La répartition par sexe des orpailleurs de la zone
d'étude donne 74% d'hommes contre 24% de femmes. Au regard de ces
statistiques, on constate qu'il existe un déséquilibre important
entre le nombre d'hommes et de femmes. En effet, sur les différents
sites de la localité », l'essentiel des tâches est
réalisé par les hommes. C'est une activité qui demande
d'importants efforts physiques. Ce qui explique cette forte présence
masculine.
Du point de vue de la répartition des orpailleurs selon
l'âge, il faut signaler qu'on trouve en leur sein des personnes de tout
âge qu'on peut regrouper en trois classes d'âges. La
première classe est celle des 11-20 ans. Ils représentent 10% de
l'effectif des orpailleurs enquêtés. C'est dans la tranche
d'âge des 21-30 ans que l'on compte le plus grand nombre
d'enquêtés, soit 54,4% des orpailleurs. Ceux de plus de 30 ans
représentent 35,6%. On trouve dans cette tranche l'essentiel des chefs
de sites ou de groupes. Sur l'ensemble des sites on constate une frange
importante des moins de 21 ans. L'orpaillage étant une activité
beaucoup physique, les personnes de cette catégorie en supportent mieux
les difficultés.
93
2.1.3.2 Des orpailleurs composés en grande partie
d'étrangers
Les résultats des enquêtes montrent que 63% des
orpailleurs sont de nationalité étrangère contre seulement
34% d'ivoiriens. La proportion d'étranger est composée à
44% de Burkinabé, à 9% de malien.
Les Guinéens et les Ghanéens représentent
chacun 5% des enquêtés. La proportion importante des
ressortissants de ces pays est liée au fait que l'orpaillage est
également une activité en pleine expansion dans leurs pays
d'origine.
Tableau 3 : répartition des orpailleurs selon la
nationalité
Nationalité
|
Effectifs
|
Burkinabé
|
44%
|
Malienne
|
9%
|
Guinéenne
|
05%
|
Ghanéenne
|
05%
|
Ivoirienne
|
34%
|
Autres
|
3%
|
Source : nos enquêtes, 2015
La faible représentation des ivoiriens dans
l'activité d'orpaillage repose dans le fait qu'ils ne s'y connaissent
pas vraiment. Les plus nombreux sont les ressortissants du Nord car
l'orpaillage est également pratiqué dans les localités de
Korhogo et de Tortya, leur aire d'origine. On trouve également quelques
Baoulé puis des Dida qui pratiquent l'orpaillage.
2.1.3.3 Répartition des orpailleurs selon
l'origine socio-professionnelle
La ruée vers l'or suscitée par l'ouverture de la
mine de Bonikro, a eu pour effet d'attirer de nombreuses personnes vers
l'orpaillage. Nos entretiens avec les orpailleurs nous ont permis de
réaliser que ceux-ci sont d'origine socioprofessionnelle diverse. Il y a
des agriculteurs, des manoeuvres agricoles, des commerçants, des
artisans, des élèves et des sans-emplois (tableau 4).
94
Tableau 4 : origine socio professionnelle des
orpailleurs
Origines socio-professionnelles
|
Effectif
|
Taux (en %)
|
Paysans
|
22
|
27,5
|
Ouvriers agricoles
|
16
|
20
|
Orpailleurs
|
20
|
25
|
Petits métiers
|
4
|
5
|
Commerçants
|
8
|
10
|
Sans emploi
|
4
|
5
|
Elèves et étudiants
|
6
|
7,5
|
Total
|
80
|
100
|
Source : nos enquêtes, 2015
2.1.3.4. Répartition des orpailleurs selon leur
poids dans l'activité V' Les grands
exploitants
Ils sont appelés grands exploitants du fait des moyens
colossaux qu'ils injectent dans cette activité. Ce sont en effet des
orpailleurs qui possèdent des facteurs de production et un fond de
roulement plus ou moins élevé. Ce capital leur permet d'engager
dans leur unité de production de la main d'oeuvre journalière
comprise entre 10 et 12 personnes. Ces grands exploitants utilisent en
général la méthode du lavage à la batée dans
la recherche de l'or. La plupart sont des personnes ayant déjà
exercé l'activité d'orpaillage, soit en tant qu'ouvrier, soit
auprès de leurs parents. Cela leur vaut d'avoir un important fond de
roulement, des moyens de production et des connaissances pratiques dans les
différents processus de l'activité.
V' Les Petits exploitants
Leur effectif est difficile à estimer mais ils sont les
plus nombreux. Les femmes constituent une proportion importante de cette
catégorie d'orpailleurs. La quasi-totalité de ces exploitants n'a
pas d'autorisation d'exploitation. Ils exploitent tous dans la
clandestinité (illégalité). Dans l'incapacité de se
procurer les moyens de production de masse, ils se contentent de creuser la
terre à la recherche de pierres. Les "Petits" exploitants sont aussi
ceux qui font le lavage simple à l'aide de calebasse dans les petits
barrages qu'ils construisent.
V' Les ouvriers journaliers
Ce sont généralement des jeunes (filles et
garçons) sans emploi ou en quête d'emploi à la mine et
parfois des élèves. Ils s'adonnent à l'orpaillage pour
avoir une certaine autonomie financière. Leurs prestations sur les sites
d'orpaillage sont rémunérées à 1 500 F CFA/jour et
à 2 000 F CFA, soit qu'ils travaillent une demie journée ou une
journée entière. Leur travail consiste à
95
creuser, transporter la terre excavée jusqu'au bassin
où se fait le lavage et enfin à laver la terre. Les tâches
des ouvriers sont souvent classifiées en fonction du genre. Les hommes
sont affectés aux tâches qui nécessitent le plus de forces
physiques. Ainsi, ils s'occupent du creusage et du lavage. Les femmes quant
à elles s'occupent du transport de la terre creusée et du service
d'eau pour le lavage.
2.2. L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE L'OR
2.2.1. Une succession de concessionnaires à
l'oeuvre à Hiré
La mine de Bonikro a été administrée par
une série de propriétaire à travers des opérations
de fusions acquisitions telles que décrites ci-dessous.
EQUIGOLD CI, société minière de droit
ivoirien créée en 1996. C'est seulement en 2002 que
l'opérateur perçoit les prémices d'un gisement
potentiellement exploitable sur le site de Bonikro. Les travaux d'exploration
ont débuté en août 1996 avec un permis d'exploration
couvrant 471,38 km2. Ils aboutissent en Novembre 2005 à la
première étude de faisabilité concluant à
l'existence d'un gisement économiquement exploitable.
En septembre 2006, EQUIGOLD-CI se mue en EQUIGOLD MINE. La
structure de la nouvelle unité d'exploitation se met ainsi
progressivement en place. La société Lgl-Eguigold Mines CI SA a
donc signé une convention avec l'Etat de Côte d'Ivoire le 03 Mai
2007. Hormis le site de Bonikro, le groupe dispose de plusieurs permis de
recherche couvrant une superficie totale de 10 000 km2. Le 11
juillet 2008 une nouvelle étape est franchie, EQUIGOLD MINE et LGL
fusionnent pour générer la nouvelle structure juridique de
l'exploitation de la mine d'or de Bonikro. LGL EQUIGOLD MINE CI est née
avec un capital de 90 millions F CFA et la première mine ouvre en 2008
à Bonikro couvrant 107,9 km2.
LGL a créé 5 entités nationales en
Côte d'Ivoire. Il s'agit entre autres de la :
- LGL Développement Côte d'Ivoire (LMCI)
chargée de l'exploitation de la mine de
Bonikro ;
- LGL ressources CI (LRCI) chargée de l'exploitation ;
- LGL Holdings Côte d'Ivoire (LHCI) ;
- LGL Développement Côte d'Ivoire (LDCI) et ;
- LGL Exploration Côte d'Ivoire (LECI).
96
NEWCREST Mining Limited (NEWCREST) est l'une des plus grandes
sociétés minières d'or dans le monde en termes de
capitalisation avec une source humaine d'environ 10 000 employés et
sous-traitants. Son activité primaire est la production de l'or avec le
cuivre comme produit secondaire. De façon concise la stratégie de
NEWCREST est de développer des opérations de grande taille et de
longue vie avec des techniques d'extractions d'or moins coûteuses. En se
basant sur cette stratégie NEWCREST continue à étendre son
portefeuille d'opportunité dans l'or dans le but de les convertir en
mines opérationnelles. Les mines de NEWCREST sont situées en
Australie, en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Indonésie et en
Côte d'Ivoire dans la région de Hiré. Depuis 2010, NEWCREST
Mining Limited, compagnie d'or en Australie a fusionné avec LGL et a
ainsi repris la mine de Bonikro. NEWCREST cherche à développer
une entreprise en Afrique de l'Ouest avec des méthodes établies
et durables. Elle a conservé les entités nationales
établies par LGL en Côte d'Ivoire et listées ci-dessus tout
en ajoutant deux nouvelles entités pour les fosses satellites de
Hiré et Dougbafla Est. Il s'agit de :
- NEWCREST Hiré Côte d'Ivoire (NHCI)
- NEWCREST Dougbafla Côte d'Ivoire (NDCI)
NEWCREST possède 89% du capital de la
société et la part restante est détenue par l'Etat de
Côte d'Ivoire (10%) et par un actionnaire minoritaire (0,11%). Elle
détient trois permis d'exploitations dans la sous-préfecture de
Hiré dont les superficies cumulées font 522,72 km2.
2.2.2. Des terres d'exploitation concédées
par l'Etat
Les sociétés d'exploitation minière
établissent leur convention d'exploitation avec l'Etat qui est
l'interlocuteur principal en ce qui concerne l'affectation des terres
nécessaires à l'activité minière industrielle.
Cette convention fixe les conditions spécifiques d'exploitation
notamment les droits et obligations du titulaire de permis d'exploitation
singulièrement pour l'occupation foncière. Toutefois, la
propriété de droits coutumiers selon les décrets se
rapportant au code foncier rural est reconnue aux communautés locales.
De plus, le code minier de 2014 précise que « les mines constituent
une propriété distincte de la propriété du sol.
Elles appartiennent à l'État et constituent un domaine public
particulier ». Les zones à l'intérieur desquelles
l'exploitation artisanale est permise sont réservées ou
déclassées par décret pris en conseil des ministres sur
proposition du ministre chargé des mines.
Les terrains nécessaires à l'activité de
prospection et d'exploitation des minerais sont mis à la disposition des
personnes physiques et morales qui en détiennent les permis ou
l'autorisation
97
selon les modalités et les conditions établies
par le décret d'autorisation. L'occupation de ces terres donne droit
à l'occupant et au propriétaire foncier à une juste
indemnisation. Les modalités de cette indemnisation sont fixées
par décrets selon le cas. Cette indemnisation est faite à la
suite d'un accord signé entre l'occupant légitime du sol,
l'exploitant et l'administration des mines. Les terrains non
réquisitionnés ne sont pas concernés sauf ceux qui
subissent des dommages du fait de passages répétés
d'engins qui causent des dommages et des désagréments. Ces
passages à répétition donnent également droit
à une juste indemnité négociée en présence
des structures administratives compétentes.
2.2.3. Les différents cas de
compensation
Selon le code minier de 1995 révisé en 2014, la
compensation est payée dans les cas suivants :
- la compensation pour occupation de la parcelle (acquisition
en numéraires de la valeur de la terre pour les propriétaires
terriens) ;
- la compensation pour destruction de cultures (compensation
en numéraires pour perte de revenu des exploitants agricoles) ;
- la compensation pour destruction de biens immobiliers
(compensation en numéraires de la valeur des biens immeubles).
2.2.4. Les exigences de compensation de la Banque
mondiale
(i) Concevoir les activités de réinstallation
involontaire et de compensation en tant que programmes de développement
durable fournissant suffisamment de ressources d'investissement pour que les
personnes déplacées par le projet aient l'opportunité d'en
partager les bénéfices.
(ii) Les personnes déplacées et recevant une
compensation doivent être formellement consultées et avoir
l'opportunité de participer à la planification et à la
mise en oeuvre des programmes de réinstallation.
(iii) Les personnes déplacées doivent
être assistées dans leurs efforts pour améliorer leurs
moyens d'existence et leur niveau de vie, ou du moins les rétablir, en
termes réels, à leur niveau d'avant le déplacement.
98
2.2.5 La compensation pour occupation de
parcelles
Les terres occupées par la société
minière concernent aussi bien les terres du milieu urbain que celles du
milieu rural. Ces terres sont régies selon leur localisation soit par le
foncier rural soit par le foncier urbain.
L'activité minière industrielle à
Hiré a démarré par la mine de Bonikro où les
parcelles cédées sont des terres relevant exclusivement du
domaine foncier rural. Le paiement de la purge des droits coutumiers à
cette date était régi par le décret n°88-884 du 25
octobre 1996 portant réglementation de la purge des droits
coutumiers.
Au début de ses activités, la
société minière n'a pas voulu indemniser les
propriétaires fonciers pour l'occupation de leurs terres, s'appuyant sur
la loi du 20 Juillet 1990 qui stipule que «toutes les terres vacantes et
sans maître» sont propriété de l'Etat. Pour la
société minière, ce sont les cultures ou les installations
sur la terre qui appartiennent aux populations. Après plusieurs
négociations, la société minière a
accédé à la demande des populations en indemnisant que les
terres mises en valeur. Les parcelles non mises en valeur n'étant
toujours pas indemnisées. Le montant pratiqué par la
société minière était de 200 000 FCFA puis est
passé à ce jour à 250 000F CFA.
La mine de NEWCREST à Hiré, située
à la périphérie de la ville, comprend des terres qui
relèvent du foncier rural et des terres qui relèvent du foncier
urbain. Pour l'indemnisation de ces terres, la société a
appliqué deux types de paiement. Pour les terres dites du domaine rural,
elle a considéré les cultures dont ces terres étaient
revêtues et appliqué le paiement de l'hectare à 200 000F
CFA, soit 200 F CFA le mètre carré.
Les terres urbaines sont des terres villageoises qui ont
été loties. Le lotissement est une opération dont l'objet
est de diviser un terrain en lots. Il est effectué à l'initiative
soit de la puissance publique, soit du chef de la famille propriétaire
des terres. Une fois, qu'un chef de famille constate que ses terres sont en
train d'être gagnées par l'évolution de la ville, il
décide de faire la demande de lotissement à la mairie. La mairie
exige que lui soit présenté un document signé par
l'ensemble des membres de la famille, preuve du consentement de tous pour le
lotissement. Une fois ce document signé, la mairie transmet le dossier
à la sous-préfecture qui en prend acte et le retransmet à
la mairie. Celle-ci prend attache avec un géomètre
spécialiste qui procède au lotissement. Une fois le lotissement
effectué, la terre entre dans le domaine du foncier urbain et dans le
cadre d'une expropriation, elle est indemnisée en tant que telle. Le
prix d'un lot étant fonction de la qualité du quartier, le
dédommagement est fait en fonction des prix
99
pratiqués dans le quartier concerné. Pour le
quartier Baoulé, le prix du lot est de 150 000 F CFA.
2.2.6. La compensation pour destruction de
cultures
L'occupation des terres par les bénéficiaires de
titres miniers leur donne droit de couper le bois nécessaire à
leur activité et d'utiliser les chutes d'eau libres, le tout à
l'intérieur du périmètre défini dans le titre
minier ou l'autorisation, sous réserve d'indemnisation ou de paiement
des taxes ou redevances prévues par les lois ou règlements en
vigueur.
L'indemnisation est prescrite par le code minier et le
décret N°2014-397 du 25 juin 2014 déterminant les
modalités d'application de la loi N°2014-138 du 24 mars portant
code minier précise en son chapitre 2 les relations avec les occupants
du sol. Ainsi, l'article 134 énonce que « l'indemnité au
profit de l'occupant légitime du sol dont les terres sont devenues
impropres à la culture est déterminée par la formule
suivante :
[D=(R x 15) + (P x S) + r]N avec :
D = Dédommagement en francs CFA
R = Revenu annuel de la parcelle
N = Nombre d'année d'occupation
P = Prix moyen d'acquisition ou d'usufruit d'un hectare
S = Superficie en hectares
r = revenu obtenu des cultures associées payé en
pied.
Le code minier ivoirien ne précise pas le prix moyen
d'acquisition ou d'usufruit. Il est normalement fixé par
décret.
L'indemnisation pour destruction de cultures est
l'aboutissement d'un processus long et laborieux. Dans le cadre de ses
activités, la société NEWCREST a eu à mener cet
exercice pour les différents sites occupés. Ainsi l'indemnisation
est effectuée suivant un processus et est relative au barème
utilisé.
2.2.7. La compensation pour destruction de biens
immobiliers
L'installation de la mine de Bonikro a nécessité
le déplacement des populations des localités environnantes. Il
s'agit des campements de Bonikro, Bandamakro et Koutouklou-Konankro. La
relocalisation s'est effectuée par des procédés et des
techniques différents les uns des autres et
100
de façon progressive. Ainsi, ces localités
ont-été déplacées à différentes dates
par les différents concessionnaires de la mine de Bonikro.
L'identification des personnes à indemniser et
l'évaluation des montants à payer relèvent d'un long et
lent processus qui s'opère selon les étapes ci-dessous
présentées.
2.2.7.1. La délimitation globale de la zone
concernée par les compensations
Il s'agit de marquer physiquement la zone à compenser
par des bornes visibles. Les sommets de ces bornes doivent être
rattachés au système de projection géographique
utilisé en Côte d'Ivoire (UTM WGS 84) pour lui donner
référentiel géographique à la zone de travail.
2.2.7.2. Le recensement des communautés et des
personnes
Au vu de la délimitation de la zone du projet, toutes
les personnes physiques ou morales ayant des intérêts sur l'espace
délimité sont invitées à se faire recenser en tant
que propriétaires terriens ou exploitants. Chaque exploitant devra
être reconnu par son propriétaire terrien par la délivrance
d'une attestation d'occupation.
2.2.7.3. La Délimitation des
propriétés
Elle se fait avec l'ouverture des layons et levé GPS
autour de chaque parcelle de propriétaire terriens et doit se faire en
accord avec les voisins immédiats. Le résultat du levé GPS
est consigné sur la fiche de levé GPS, l'inventaire et le
comptage et la superficie est communiquée sur place au
propriétaire terrien pour validation. La fiche est signée par
l'agent de la structure qui exécute les travaux, par l'agent de
l'agriculture et par un agent de la structure commanditaire des travaux.
2.2.7.4. Inventaire et comptage des plants
Cette phase est réalisée sous le contrôle
du Ministère de l'Agriculture, en présence bien sûr de
l'exploitant (voir annexe 2). La fiche d'inventaire et de comptage des cultures
présentes est dûment renseignée et signée par
l'agent de la structure qui exécute les travaux, par l'agent de
l'agriculture et par un agent de la structure commanditaire des travaux, et
soumise à la validation. Ici, il faut noter que le comptage se fait
selon deux modes :
- par comptage de pieds des plants isolés sur la parcelle
;
- par densité (nombre de pieds par hectare). Ce mode
est assujetti à une norme selon laquelle, doit être
considéré en densité, tout champ ayant une superficie
supérieure ou
101
égale à 0.3 hectare et respectant les normes
agronomiques sur les spéculations emblavées.
Le traitement des données recueillies au GPS et des
fiches d'inventaires permet de créer une base de données
géographiques issue des données du levé GPS et une base de
données relative aux parcelles. Ces deux bases de données sont
reliées pour la réalisation d'un système d'information
géographique qui permet de produire les fiches de paie ou
évaluation. Aussi, le calcul des compensations se fait en
conformité avec le barème consensuel de compensation en vigueur
(annexe 3).
2.2.7.5. Le paiement des compensations
C'est la dernière étape. Le paiement se fait
à la sous-préfecture de la localité, moyennant la
photocopie de la pièce d'identité de l'exploitant ou du
propriétaire terrien, d'une fiche de désistement. La fiche de
paiement est ensuite signée par le propriétaire ou l'exploitant,
le représentant de la structure commanditaire, le représentant de
l'opérateur, le Sous-préfet de la localité. Notons
cependant, qu'un mécanisme de gestion des réclamations reste
à la portée des communautés.
Conclusion chapitre 2
L'exploitation de l'or dans la sous-préfecture de
Hiré se déroule de façon artisanale et industrielle. Ces
deux types d'exploitations ont des modes d'extraction et de traitement qui
diffèrent l'un de l'autre. L'exploitation industrielle se fait à
grande échelle avec des moyens importants et des engins performants qui
contrastent des techniques artisanales. L'exploitation industrielle est
assurée par une compagnie minière internationale d'origine
australienne qui occupe les terres couvertes par les permis miniers obtenus de
l'Etat en reversant à leurs propriétaires coutumiers des
indemnités calculées sur la base des textes en vigueur.
L'exploitation artisanale est quant à elle assurée par des
particuliers d'origines ethniques et professionnelles diverses, qui obtiennent
les terres exploitées par des arrangements directs avec les
propriétaires terriens.
102
CHAPITRE 3 : LA RECOMPOSITION DE L'ESPACE DE
HIRÉ
INTRODUCTION AU CHAPITRE
L'insertion de l'entreprise minière dans la
sous-préfecture de Hiré et la redynamisation de l'orpaillage
s'accompagnent de bouleversements majeurs. Il existe des différences
énormes entre l'exploitation aurifère telle que menée
depuis 2008 et celle qui se faisait précédemment et entre
l'exploitation minière et l'agriculture, activité principale de
la population jusqu'à un passé récent. En d'autres termes,
ces deux types d'exploitation n'ont ni les mêmes moyens, ni les
mêmes rapports à l'espace. Ceux déployés par les
entreprises leur ont permis d'imposer rapidement leur puissance, aussi bien
face à l'orpaillage que face à l'environnement d'accueil dans son
ensemble (espaces et sociétés).
Ce chapitre tente de décrire et d'analyser les
changements observés depuis l'insertion des mines dans la
sous-préfecture et leurs rapports à l'espace et au territoire.
3.1. LES MUTATIONS DANS L'OCCUPATION DU SOL DE LA
SOUS-PRÉFECTURE DE HIRÉ SUITE AUX ACTIVITÉS
AURIFÈRES
L'exploitation minière par son installation et sa
pratique quotidienne entraîne des mutations spatiales. Ces mutations
s'observent en divers points. La végétation naturelle de
Hiré bien qu'entamée par l'agriculture extensive qui y est
pratiquée fait également les frais de l'activité
minière. La dynamique de l'occupation du sol dans la
sous-préfecture de Hiré est appréciée par les
images satellites pour ce qui concerne la végétation et par
observation pour ce qui concerne la distribution spatiale des
localités.
3.1.1. Le suivi multi dates de l'occupation du
sol
Par des images satellites, nous avons observé la
sous-préfecture de Hiré à deux dates : 2002,
c'est-à-dire avant la mise en place de l'exploitation industrielle ; et
2016, après l'ouverture de la mine de Hiré-Est. La composition
colorée a été faite avec les images de LANDSAT ETM + et de
LANDSAT OLI8/Tirs (Operationnal Land Imager (OLI)). Elle a permis de
discriminer certains types d'occupation. Il s'agit de la forêt, de la
jachère, du sol nu et de l'habitat puis des zones soumises à
l'agriculture. Cette composition a permis de réaliser les cartes
d'occupation du sol (figures 11et 12).
103
Figure 11 : Occupation du sol de 2002
104
Figure 12 : Répartition dans l'occupation du sol
en 2002, avant la mise en place de l'exploitation minière
industrielle
Source : Graphique issu de la classification de l'image ETM+
2002
On observe que le sol de la sous-préfecture de
Hiré en 2002 est dominé par les forêts qui occupent 133,93
km2 soit 34% du territoire sous-préfectoral. Les cultures
vivrières occupent 83,18 km2, soit 21% de la superficie
totale de Hiré. Elles représentent la deuxième classe
d'occupation du sol dans la sous-préfecture. Les sols nus et les
jachères occupent respectivement 64,02 km2 et 63,46
km2. Les cultures pérennes occupent quant à elles,
32,34 km2 et le bâti 19,04 km2.
En 2016, on constate un changement radical dans le paysage de
Hiré (figures 13 et 14). On observe une forte perte de la
végétation au profit du bâti et des surfaces correspondant
à l'activité minière qui est une nouvelle forme
d'occupation du sol dans la sous-préfecture.
105
Figure 13 : Occupation du sol de 2016.
Source : Graphique issu de la classification de l'image ETM+
2016
Figure 14: Répartition de l'occupation du sol en
2016, après la mise en place des sites d'orpaillage et d'exploitation
industrielle
106
Le sol est occupé majoritairement par le bâti qui
couvre 142,84 km2, soit 36,07% du territoire. Puis, viennent les
cultures vivrières qui occupent 75,59 km2 soit 19,08%. On
constate donc une baisse de 7,59 km2 par rapport à 2002. Les
cultures pérennes quant à elles occupent 60,98 km2,
suivies par les jachères 46,42 km2. Les forêts occupent
désormais 36,46 km2, soit une baisse de 97,33 km2
entre 2002 et 2016. Les sites d'activité minière, inexistants en
2002, occupent 20,66 km2. Les sols nus connaissent également
une baisse importante passant de 63,46 km2 en 2002 à 13,5
km2 en 2016.
Figure 15 : évolution globale des superficies
par type d'occupation du sol entre 2002 et 2016.
Source : Graphique issu de la classification de l'image ETM+
2002-2016
L'analyse de cette figure indique une forte diminution des
superficies des forêts ; nous sommes passés de 33,89 % à
9,21% en 2016. Par contre, on note une baisse considérable de la
Jachère de 16,16 % à 11,72 %. La proportion de sol nu a
considérablement diminué en passant de 16,02% à 3,30%.
Cela tient au fait de la forte croissance urbaine et démographique.
L'analyse qualitative et quantitative des classifications
effectuées sur les images satellitaires de 2002 et 2016 a abouti
à des classifications. Les tableaux 5 et 6 sont les matrices de
confusion des classes issues des différentes classifications. Elles
présentent des résultats conséquents et ont une
corrélation nette avec les réalités spatio-temporelles de
Hiré.
107
Tableau 5 : Matrice de confusion 2002 en
pourcentage
Classes
|
Forêt
|
Culture P
|
CultureV
|
Jachère
|
Sol nu
|
Bâtis
|
Forêt
|
67,73
|
13,42
|
2,13
|
12,60
|
5,53
|
0,00
|
Culture P = Cultures pérennes
|
18,69
|
67,02
|
2,74
|
1,40
|
7,16
|
0,16
|
Culture V = Cultures vivrières
|
6,55
|
11,64
|
65,65
|
3,00
|
15,78
|
1,58
|
Jachère
|
4,04
|
6,38
|
18,24
|
75,80
|
21,09
|
1,49
|
Sol nu
|
2,92
|
1,46
|
11,25
|
5,80
|
40,41
|
7,54
|
Bâtis
|
0,07
|
0,07
|
0,00
|
1,40
|
10,04
|
89,23
|
Total
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
Précision Globale = (14895/21109) 70,5623% Kappa
Coefficient = 0,62
Le Coefficient est compris entre 0,80 ? Kappa ? 0.61 ; ce qui
montre un accord de forte précision.
La précision globale quant à elle est de 70,56%.
Elle est due au faite que l'ensemble des classes, présente une bonne
séparabilité des classes après la classification de
l'image de 2002.
Tableau 6 : Matrice de confusion 2016 en
pourcentage
Classes
|
Forêt
|
Culture p
|
Culture v
|
Jachère
|
Site d'act
|
Sol nu
|
Bâtis
|
Forêt
|
84,36
|
7,53
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
Culture p 1,32
|
40,29
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
Culture v
|
0,00
|
0,00
|
97,61
|
0,40
|
0,00
|
3,08
|
0,00
|
Jachère
|
0,00
|
0,76
|
0,00
|
99,60
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
Site d'act
|
0,34
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
81,41
|
0,69
|
0,00
|
Sol nu
|
0,48
|
1,00
|
2,39
|
0,00
|
0,80
|
96,23
|
0,60
|
Bâtis
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
0,00
|
99,40
|
Total
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
100,00
|
108
Abréviations des classes retenues : Culture p
= Cultures pérennes ; Culture v = Cultures
vivrières ; Sites d'act = Sites d'activités
minières.
Précision Globale = (25235/30369) 83,0946% Kappa
Coefficient = 0,80
La matrice de confusion donne une bonne classification de
l'image. La précision globale de 83,0946 % issue de
cette classification montre la bonne précision de
séparabilité des classes. De même le coefficient de Kappa
de 0,7957 voire 0,80. Car il est compris entre 0,80 ? Kappa ?
0,61 ? l'accord est donc fort.
Au final, l'étude de la dynamique de l'occupation du
sol de la sous-préfecture de Hiré à partir des images
satellitaires de 2002 et de 2016 montre une forte croissance urbaine et un
impact considérable de l'activité aurifère sur les sols.
Tous ces facteurs ont contribué à une forte perte de la
végétation et à des étalements nocifs issus de
l'activité d'extraction de l'or.
Les méthodes de la Télédétection
montrent que l'étude de dynamique des paysages nous explique clairement
l'existence des changements.
3.1.2 Les causes des mutations dans l'occupation du
sol
Les mutations observées dans l'occupation du sol
à Hiré sont liées à l'activité
minière. Le mode d'exploitation aurifère qui se déroule
à Hiré est l'exploitation à ciel ouvert qui est une
activité consommatrice de grands espaces (Thune, 2011). Son emprise
foncière a nécessité la destruction d'espaces agricoles
(plantations et jachères) et le déplacement de localités,
entrainant ainsi des mutations dans l'occupation du sol. Les espaces
utilisés pour l'exploitation des mines de Bonikro et Hiré
couvrent respectivement des superficies de 847,07 hectares (administration et
clôture de sécurité comprises) et 640 hectares. Cette
occupation du sol par l'exploitation industrielle de l'or donne à
observer une substitution des espaces miniers aux espaces agricoles. Cette
activité rimant avec croissance démographique, on observe
également un étalement des espaces habités accentué
par les déplacements des campements autour de la mine. A
côté de ces mutations liées à l'activité
industrielle, l'orpaillage artisanal entraine également des mutations
dans l'occupation du sol. Les bas-fonds préalablement utilisés
pour la riziculture et le maraîchage sont désormais des lieux
d'orpaillage. L'exploitation artisanale
109
occupe également d'anciens espaces agricoles,
contribuant ainsi à la régression dans l'occupation spatiale de
celle-ci. Les mutations observées sont principalement :
- le développement de l'espace minier ;
- la relocalisation des planteurs vers d'autres espaces
forestiers et des jachères ; - le planting de teck dans les
jachères pour contrer les miniers ;
- Migration de cultures vivrières pour supporter la
croissance démographique.
La croissance démographique rime avec l'augmentation
des besoins en produits alimentaires. L'afflux de population vers Hiré
observé depuis l'ouverture de l'activité aurifère entraine
une augmentation de la population et une augmentation des besoins alimentaires
de celle-ci. Cependant, cela contraste avec la production vivrière
locale dont la tendance est baissière. Cette situation crée un
problème d'approvisionnement alimentaire dans toute la
sous-préfecture de Hiré. La production locale étant
largement dépassée par la demande, on assiste à une
migration des produits des cultures vivrières réalisées
dans les localités environnantes vers Hiré. Cette migration
permet de couvrir la demande locale en produits frais.
Le marché local se tient tous les jours mais connait
une affluence particulière les mercredis et les dimanches. Les
commerçants viennent de Hiré et des localités voisines
pour vendre leurs produits composés essentiellement de vivres. Ce qui
fait de Hiré un marché important dans la zone.
3.1.3 La Destruction des sites de plantation et des
forêts par les orpailleurs
Les sites d'orpaillage se localisent pour la plupart dans les
plantations et les forêts à l'abri des regards. La nature de
l'activité est telle qu'elle se déroule en dégageant le
couvert végétal qui recouvre le sol afin de le décaper, le
creuser pour accéder aux minerais. Le fonçage est l'étape
d'extraction artisanale qui permet de le faire. Les trous sont rectangulaires
de dimensions variables 1,5x1 m et 3x2m, la profondeur varie entre 20 et 30 m,
en fonction de la richesse du puits. Les troncs d'arbres sont utilisés
pour les soutènements afin d'éviter des éboulements et
consolider les parois des trous. Le soutènement utilise en moyenne 20
bois pour un mètre de profondeur. Un puits nécessiterait environ
400 à 500 troncs d'arbres pour son soutènement. Ce qui fait qu'on
assiste à une déforestation de la zone immédiate des sites
d'orpaillage. La coupe des arbres pour le soutènement des puits se fait
sur place et sans contrôle, pourtant aucun orpailleur ne détient
d'autorisation de coupe. Cela contribue à la destruction
accélérée du couvert végétal. Lorsque les
sites d'orpaillage sont des plantations ou des champs, il y a une destruction
des cultures qui s'y trouvent.
110
3.2. LES AMÉLIORATIONS DE L'HABITAT DANS LE CADRE
DES OPÉRATIONS DE DÉPLACEMENT ORGANISÉES PAR L'ENTREPRISE
MINIÈRE
3.2.1 Les délocalisations des sites habités
par la compagnie minière
L'installation et l'exercice de l'exploitation minière
industrielle dans la sous-préfecture de Hiré et
particulièrement pour le site de Bonikro a nécessité le
déplacement des localités proches du site affecté par les
activités de la mine (voir figure 16). Au départ cette
opération concernait l'ensemble des cinq campements situés
à proximité du site de la mine de Bonikro. Finalement, seuls
trois d'entre eux ont bénéficié d'un recasement et cela
à des dates différentes et par des procédés et des
techniques à chaque fois différentes. Situés initialement
à moins de 500 mètres du site minier de Bonikro, ces campements
ont été déplacés pour occuper les sites actuels
tels que présentés sur la carte ci-dessous.
Figure 16 : anciens et nouveaux sites des campements
déplacés par la compagnie minière
Source : nos enquêtes, 2018
111
3.2.2. La relocalisation de Bonikro
Bonikro est le campement qui a donné son nom à
la mine. C'est sur l'ancien site de Bonikro que la mine a été
construite. La relocalisation de Bonikro a été effectuée
aux premières heures de l'installation de la mine par la première
société appelée EQUIGOLD. Créé en 1967 sur
les terres de Gogobro par feu le chef Boni, le campement de Bonikro est
peuplé de Baoulé originaire de Bouaké. Les populations du
campement ont été informées de la nécessité
de leur déplacement du fait des activités minières par
l'ex-directeur général de la mine. De nombreuses promesses leur
ont verbalement été faites par le directeur général
afin de les inciter à partir. Il leur garantit qu'il veillerait
personnellement à honorer ses engagements et à assurer leur
bien-être une fois sur le nouveau site.
Pour la relocalisation de Bonikro, EQUIGOLD a proposé
un site près du camp de la SODEFOR mais cela n'a pas été
approuvé par la population. Le soin a donc été
laissé à la population de Bonikro de choisir un site. C'est ainsi
que la population a choisi le site actuel du campement à cinq
kilomètres de l'ancien afin de se rapprocher de la voie bitumée
(photos 8 et 9).
Auteur photo : Image google earth, 2017
Photo 8 : Vue de haut du nouveau site de
Bonikro
Auteur photo : YOBO, 2016
Ce site est situé à 500 mètres de la
route nationale qui relie Hiré à Oumé.
Ces maisons en dépit de leur beauté
apparente ont été construites sans chainage et les murs sont
perméables.
112
Photo 9 : le modèle de maison construites à
Bonikro
113
|
Les maisons sur le nouveau site, ayant été
construites sans cuisines, les populations en construisent en banco ou avec des
matériaux de récupération comme sur la photo.
|
Auteur photo : YOBO, 2016
|
|
Photo 10: Cuisine de fortune à Bonikro
3.2.3 La relocalisation de Bandamakro
Le campement de Bandamakro a été
créé en 1965 et s'étendait sur une superficie de 2 ha. Il
a été le tout premier campement de la zone et c'est de là
que sont partis les fondateurs de Bonikro et de Koutouklou-Konankro.
Le choix de son site actuel a été proposé
par l'entreprise et accepté par la population ; ceci dans le souci de
maintenir les rapports de voisinage. Les maisons construites par l'entreprise
LGL nouvel exploitant de la mine l'ont été dans le strict respect
de l'existant. Le nombre de pièces ainsi que les commodités ont
été respectées. Contrairement à ce qui s'est fait
à Bonikro, LGL a construit exactement pour chaque concession le
même nombre de pièces que celui disponible sur l'ancien site.
Chaque chef de famille a reçu une carte du futur campement avec la
localisation précise de sa concession. Les populations n'ont donc pas
fait de difficultés car elles étaient satisfaites des maisons qui
leurs avaient été construites. Selon les populations, le seul
point d'ombre est que les mesures d'accompagnements qui devaient suivre n'ont
pas été menées. Ce sont au total 58 maisons qui ont
été construites sur une superficie de 05 Ha pour une population
totale de 300 habitants. (Voir les photos 11 et 12). On trouve également
sur ce site des cuisines, des toilettes, de l'électricité et de
l'eau à portée de main.
|
Le nouveau site de Bandamakro s'étend sur une
superficie de 05 ha à proximité de celui de Bonikro.
|
Un prototype des maisons construites par la compagnie
minière pour le relogement des
populations de Bandamakro.
Auteur photo : Image google earth, 2017
Photo 11: Vue de haut du nouveau campement de
Bandamakro
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 12: Modèle de maisons construites à
Bandamakro
114
Les plantations des populations de Bandamakro se trouvent
à proximité de l'ancien site. Certaines ont été
occupées par la compagnie minière et les propriétaires ont
été pour certains indemnisés et pour d'autres non. Les
populations continuent de cultiver les plantations encore existantes bien que
cela signifie désormais parcourir environ 4 km pour s'y rendre.
115
3.2.4 La relocalisation de
Koutouklou-Konankro
Le choix de l'entreprise était de relocaliser
Koutouklou-Konankro près des deux premiers campements déjà
reconstruits par elle. Cependant, cela n'a pas été
approuvé par la population qui a choisi le site actuel de la
relocalisation. Ce choix de se localiser à 6 km de l'ancien site,
s'explique par leur désir de s'éloigner au plus des effets
indésirables des activités minières et de s'offrir un
nouveau cadre de développement. Cette nouvelle position fait passer
Koutouklou-Konankro d'un campement purement rural en un village péri
urbain, ce qui lui permet de bénéficier de nombreux avantages
économiques et sociaux induits par sa localisation (voir photos 13, 14
et 15). La société qui exploite l'or (NEWCREST) s'est
engagée à assurer le relogement sur la nouvelle plateforme en
suivant les principes internationaux en la matière qui exigent que la
relocalisation et les compensations soient judicieuses, équitables et
sécurisent durablement les populations déplacées. NEWCREST
qui a succédé à LGL a élaboré dans cette
optique, avec l'appui des cabinets d'expertise dont la société
générale de surveillance (SGS), le cabinet BURGEAP, le cabinet
DJESSAN, un inventaire du campement de Koutouklou-Konankro. La méthode
de calcul des impenses, des compensations, des allocations des indemnisations
ainsi que la confection d'un plan d'aménagement physique du nouveau site
de résidence a été mise en place. Cette collaboration a
permis d'aboutir en février 2014 au Plan De Relocation (PDR) de
Koutouklou-Konankro déterminant les personnes éligibles et non
éligibles, les compensations individuelles nominatives et la
qualité des aménagements communautaires du nouveau campement.
Cependant, après son premier accord en avril 2014 à propos du
PDR, la population de Koutouklou-Konankro a régulièrement
suspendu le calendrier des signatures établies, toutes les fois qu'elle
a eu des doutes, ou des incompréhensions au sujet du PDR. Elle a ainsi
eu recours au sous-préfet, par trois fois pour présenter des
doléances et exprimer des griefs ou arrêter le processus.
116
|
Koutouklou-Konankro contrairement aux deux autres a
été reconstruit en bordure de la route nationale à
seulement 1 km de la ville de Hiré.
|
Auteur photo : Image google earth, 2017
|
|
Photo 13: Vue aérienne de Koutouklou-
Konankro
|
|
|
Les maisons de l'ancien campement étaient
essentiellement faites de Banco crépis au ciment.
|
Auteur photo : YOBO, 2016
|
|
Photo 14: ancien site de Koutouklou-Konankro
|
Les nouvelles maisons sont de type moderne dont la
construction a tenu compte des critiques faites sur les premières
relocalisations.
|
117
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 15: Modèle de logement construit à
Koutouklou-Konankro 3.2.5. Les critères de compensation et leurs
conséquences
La relocalisation des campements ayant été
réalisée par différents concessionnaires successifs de la
mine, les critères des compensations que nous abordons ici concernent
uniquement ceux de Konankro. Pour la relocalisation du campement de
Koutouklou-Konankro, la société minière NEWCREST en
collaboration avec ses partenaires en la matière, a
élaboré un certain nombre de critères. Ces critères
d'éligibilité ont servi aux différents traitements
à appliquer dans le cadre de la reconstruction et principalement
à faire la distinction entre les maisons à reconstruire et celles
qui ne seront pas reconstruites.
3.2.5.1. Eligibilité aux logements neufs de
compensations
A été déclaré éligible
à la compensation en un logement neuf toute personne disposant à
la date du moratoire, d'un patrimoine comme : une maison habitable non
occupée, une maison habitable et occupée ainsi que toutes les
structures annexes à cette maison habitable et occupée :
cuisines, toilettes, entrepôts, etc.).
3.2.5.2. Eligibilité aux compensations en
cash
A été déclarée éligible en
versement d'un cash toute personne disposant à la date du moratoire de
structures immobilières non habitables rattachées aux maisons
habitables (aires de séchage, entrepôts, abris de commerce,
étables, débit de boissons.). Ces personnes sont
indemnisées en cash pour perte d'un patrimoine non reproductible comme
tel sur le nouveau site.
118
3.2.5.3. Eligibilité pour compensation
d'activités économiques
Ont été déclarées éligibles
les activités économiques exercées au sein du campement
telles que commerce, élevage, service. Les personnes animant ses
activités sont destinataires d'un versement en cash pour perte
momentanée du revenu du fait du déplacement.
3.2.5.4. Eligibilité aux compensations : maison en
ruine et ossature
Ont été déclarées non
éligibles les constructions comme les ossatures faites de branchages
commencés après l'annonce officielle de la relocalisation soit le
15 mars 2012. Ces cas sont nombreux et ont été
interprétés comme des intentions frauduleuses
délibérées de personnes qui, pensant que la
société compenserait par une maison toutes formes de
construction, ont monté rapidement des amorces de construction afin
qu'elles soient prises en compte comme logement fini. Ont également
été écartées des compensations toutes les maisons
en ruine sans perspectives de mise en valeur qui, de ce fait, ne remplissent
aucune fonction ni de logement ni d'entrepôt.
3.3. EVALUATION DES COMPENSATIONS PAR LA VALEUR VENALE DU
PATRIMOINE ELIGIBLE
A partir de l'éligibilité établie,
l'expertise a procédé à la détermination d'un
critère qui permette l'évaluation objective et applicable
à tous, des investissements de l'ancien campement. La valeur
vénale des impenses a été retenue. Les experts ont pu
ainsi produire une information individualisée des investissements
précis réalisés par les populations. Par exemple pour une
maison habitable, une cuisine, une douche, etc. ont été
calculés : la surface bâtie en m2, le type, la
qualité, les coûts des matériaux constitutifs, la valeur
actuelle de la maison, de la cuisine, de l'aire de séchage voire des
ruines. Cette valeur vénale a été pondérée
par la valeur d'usage des locaux notamment la superficie et le nombre de
pièces.
3.3.1. Définition de l'algorithme d'allocation des
logements et des structures connexes
L'expertise a procédé à une
stratification des valeurs vénales des logements et des structures
connexes allant de la plus petite valeur à la plus grande. Il a
été décidé la distribution suivante des
compensations pour déterminer les ayants droit à un logement neuf
(tableau 7).
119
Tableau 7 : mode de calcul de l'indemnisation pour
destruction de biens immobiliers
Valeur vénale de l'ancien logement
|
Valeur de compensation du nouveau
logement
|
Coefficient multiplicateur
|
Qualité de la maison neuve
|
de 100 000 à 423 890 F CFA
|
3 700 000 F CFA
|
37
|
M1+1
|
de 423 890 à 847 780 F CFA
|
4 400 000 F CFA
|
10,3
|
M2
|
de 847 780 à 1 271 670 F CFA
|
7 000 000 F CFA
|
8,2
|
M3
|
de 1 271 670 à 1 695 560 FCFA
|
9 000 000 F CFA
|
7,0
|
M4
|
plus de 1 695 560 F CFA
|
11 640 000 F CFA
|
6,7
|
M5
|
Source : NEWCREST, 2016
3.3.2. Majoration du type de maison selon la
superficie
Les cases et les maisons du campement sont souvent
réalisées en mode extensif selon les besoins avec peu
d'investissement ce qui n'accroît pas la valeur vénale mais donne
une valeur d'usage au local notamment par la multiplication de petites
pièces de moins de 6m2. L'expertise a tenu compte de cette
valeur d'usage. Ainsi, pour toutes les maisons dont l'ancienne superficie est
supérieure à celle de la nouvelle maison attribuée selon
l'algorithme, les experts ont consenti à affecter au
bénéficiaire, le niveau immédiatement supérieur de
maison de compensation ce qui le fait passer par exemple d'une maison de deux
pièces (M2) à une maison de trois pièces (M3) alors que la
prise en compte de la seule valeur vénale ne le permettait pas à
priori.
Algorithme d'allocation de cash pour pertes de revenu
commerciaux : toutes les activités de ce type ont été
compensées en quadruple du nouveau régime de SMIG (4 x 60 000 F
CFA) par commerce répertorié.
Conclusion du chapitre 3
L'activité minière a entrainé des
modifications dans l'occupation du sol à Hiré. Le couvert
végétal représenté par les forêts et les
cultures vivrières et pérennes connaissent une régression
au profit du bâti et des sites d'activité minière. Pour les
besoins de son installation et de l'extension de ses activités, la
compagnie minière qui exploite l'or dans la sous-préfecture de
Hiré a déplacé des campements afin de les éloigner
de ses activités. Ce déplacement de localité a
modifié la configuration spatiale de la sous-préfecture tant du
point de vue de la localisation que du type de construction.
120
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
La richesse géologique dont jouit la
sous-préfecture de Hiré justifie l'intensité de
l'activité aurifère qui y a cours. Extrait de façon
artisanale depuis la période précoloniale, l'or de Hiré
connait depuis 2008 une exploitation industrielle. Ce mode d'extraction y a
entrainé une explosion de l'activité aurifère avec des
sites d'exploitation dispersés à travers la
sous-préfecture. Ces deux modes d'exploitation de l'or se distinguent
aussi bien par leurs techniques d'extractions et de traitement que par les
conditions d'accès à la terre. Tandis que les artisanaux conclus
des arrangements de gré à gré avec les
propriétaires terriens, les industriels accèdent à la
terre par les permis miniers de l'Etat et le paiement aux impactés
d'indemnités pour les dommages causés. L'activité
aurifère à Hiré entraine une recomposition de l'espace
modifiant l'occupation du sol à Hiré. On y constate une
régression du couvert végétal au profit du bâti qui
devient de plus en plus dense. Pour les besoins de son installation et de
l'extension de ses activités, la compagnie minière qui exploite
l'or dans la sous-préfecture de Hiré a déplacé des
campements afin de les éloigner de ses activités. Ce
déplacement de localité a modifié la configuration
spatiale de la sous-préfecture tant du point de vue de la localisation
que du type de construction.
121
DEUXIEME PARTIE :
UN ESPACE LOCAL EN PLEINE MUTATION
SOCIO-ECONOMIQUE
INTRODUCTON A LA PARTIE
L'exploitation de l'or dans la sous-préfecture de
Hiré entraine comme toute activité des mutations diverses. Aussi
est-il nécessaire de les connaitre. Le développement local est
mené par plusieurs acteurs dont les agents économiques.
L'entrée en jeu des exploitants aurifères apporte un dynamisme
nouveau aux actions de développement entreprises dans la
sous-préfecture. Les mutations socio-économiques liées
à l'activité aurifère nous ont permis de mieux en saisir
la portée. Cette deuxième partie se consacrera à les
identifier, les décrire et les comprendre. Elle s'articule autour de
trois chapitres.
Le premier chapitre traite de la dynamique
démographique induite par l'arrivée massive de populations
attirées par la manne que représente le minerai aurifère.
Cette dynamique démographique a également une incidence spatiale
qui se traduit par une concentration de la population dans le chef-lieu de
sous-préfecture qu'est la commune de Hiré. Cela entraine un
étalement de l'espace urbain en tout ce qui constitue la formation et la
spatialisation socio démographique et fonctionnelle de la
sous-préfecture de Hiré.
Le deuxième chapitre est consacré aux actions de
développement de la compagnie minière dans la
sous-préfecture de Hiré. Il montre l'évolution des actions
de la compagnie dans ses rapports avec les communautés. Il traite
également des mécanismes mis en place pour un
développement local minier à Hiré. Il décrit les
rôles des différents acteurs et les différents
modèles de croissance mis en oeuvre dans le cadre du
développement minier à Hiré.
Le troisième chapitre quant à lui porte sur les
mutations sociales induites par l'exploitation de l'or. Il traite du changement
des rapports sociaux au sein des familles et de la communauté.
122
CHAPITRE 4 : CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET
DYNAMIQUE URBAINE À HIRÉ
INTRODUCTION AU CHAPITRE
Ce chapitre est consacré à l'étude de la
population et des réalités socio-économiques de
Hiré, à ses différentes évolutions depuis le petit
village de Hiré jusqu'au recensement de 2014. L'accent sera mis sur les
différentes mutations observées au niveau de la population depuis
l'ouverture de l'usine minière. Ces observations porteront aussi bien
sur la démographie qualitative que quantitative de Hiré. Elles
porteront sur les caractéristiques de cette population, sa
répartition dans la sous-préfecture.
4.1 HISTORIQUE DE PEUPLEMENT DE LA SOUS-PREFECTURE DE
HIRE
4.1.1 Les villages Watta, une géographie
motivée par les conflits
La sous-préfecture de Hiré est originellement
peuplée de Dida du canton Watta. L'histoire des Dida en Côte
d'Ivoire indique qu'ils font partie du groupe ethnique Krou. Ils sont
répartis dans les départements de Divo, Lakota et Guitry.
Cependant, selon certaines autorités villageoises, les ancêtres
des Dida Mamini qu'on retrouve sur le petit massif montagneux entre Divo et
Oumé seraient d'origine Akan. Ils seraient venus de l'Est et auraient
participé au début du XVIIIème siècle
à la migration baoulé et à la traversée miraculeuse
de la Comoé.
Watta est le nom du canton qui regroupe cinq villages de Dida
Mamini. C'est une déformation du mot dida « Watto » qui
signifie « qui aime la guerre ». Les Dida Watta étaient des
peuples guerriers et auraient occupés le petit massif montagneux afin de
se mettre à l'abri des attaques surprises. L'histoire des Dida du canton
Watta est parsemée de guerres qui auraient dicté leurs
différents déplacements et leurs positions actuelles. La
sous-préfecture de Hiré compte six villages Watta dont l'histoire
de peuplement est quelque peu difficile à retracer. On trouve des
imperfections dans le récit et des similitudes entre certains villages.
Ceci à cause de la transformation des micros histoires sociales mais
surtout à cause des rivalités autour de la chefferie de terre qui
existent entre certains villages.
4.1.1.1. Hiré dida
Les Dida de Hiré se sont retrouvés dans la zone
actuelle par des déplacements successifs suites à des guerres de
voisinages. A leur arrivée dans la zone, ils se sont d'abord
installés dans la région de Gbadi, localisée dans les
montagnes, au-dessus de la cité de la mine de Bonikro actuel. Ils
étaient conduits par le chef Gbadjè. Selon le chef et ses
notables : « leur premier nom est «
123
gbadjèdou » qui signifie le village de
Gbadjè, fondateur de Hiré-Dida. Le village de Gbadjèdou a
été créé entre le 15 ème et le 16 ème
siècle ». C'est en les nommant par leur situation
géographique que progressivement Gbadjédou a été
oublié au profit de Hiré. En effet, ils étaient
installés près d'un jeune arbre appelé « yi » en
dida et dont le pluriel est « yirè ». C'est l'administrateur
qui a écrit Hiré. Cependant, ils ont dû partir de là
pour cause de guerre et ont trouvé refuge à Bouakako avec les
ressortissants duquel ils ont des liens de famille. Ils y sont restés
pendant plus de trois ans. Puis, pour des difficultés de cohabitations,
ils sont retournés sur leur ancien site. Sakpè, neveu des
habitants de Bouakako, refusa d'y retourner et une nouvelle terre leur fut
offerte sur le site actuel de la Mairie. Dès lors, les descendants de
Sakpè devinrent les fils de la terre (maître de terre). Le chef
actuel de Hiré est un descendant direct de Gbadjè, premier
occupant de Hiré (côté quartier Baoulé),
propriété de Bouakako. Il existe 4 grandes familles à
Hiré : la famille Koua, la famille Zriga, la famille Gbohouri et la
famille Sakpè (neveu de Hiré). Hiré est à cheval
entre deux villages (Kagbé et Bouakako).
4.1.1.2. Bouakako
L'histoire de Bouakako est difficile à retracer. La
difficulté réside dans la divergence des points de vue relatifs
aux différents sites occupés par la famille fondatrice du village
et à l'histoire de l'installation des baoulé dans le village.
Cependant, ils sont unanimes sur le fait que la première famille
installée sur le site de Bouakako est la famille Douzoua. Ils
occupaient par le passé le site qui abrite l'école du village.
Ils sont donc les fondateurs du village et par conséquent ils sont les
chefs de terre.
Avec les guerres de voisinage, une partie de la famille se
détacha pour fonder deux autres familles que sont la famille
Agbalé et la famille Zabregouan. Ceux de Hirégouan sont
allés vers Hiré actuel. Ils n'ont donc pas une autonomie
vis-à-vis des gens de Bouakako. Ces familles ont été
rejointes plus tard par une famille Baoulé qui est
représentée par la famille Akan.
Les personnes interrogées à Bouakako au sujet de
l'histoire de la création du village commencent par préciser que
les terres cultivables sont éloignées du village et nombreuses
sont celles qui sont touchées par la mine et l'exploration actuelle. Les
terres de Bouakako selon nos différents interlocuteurs, vont très
loin jusqu'à la limite de Taabo, Oumé et Zégo.
4.1.1.3. Gogobro et Kagbé : deux villages, une
histoire
Gogobro et Kagbé ne formaient à l'origine qu'un
seul village. Le premier site des villages unis de Gogobro et Kagbè a
été découvert par des chasseurs. Les Dida, vaillant peuple
chasseur,
124
sous la conduite du vieux Gogo, partirent de
Pépéhiri et repassèrent le fleuve Bandama, fonçant
vers les grandes forêts vierges, côté Oumé, où
ils se perdirent dans une zone très reculée. Les guides du groupe
disent en patois : "Amono" qui veut dire ; « nous sommes perdus ». De
commun accord, ils bâtirent là une nouvelle résidence qui
porte le nom du vieux Gogo (Gogobré) qui veut dire ; « chez Gogo
» qui devient Gogobro par le système colonial ». Cependant,
des querelles incessantes de voisinage vont amener les populations actuelles de
Kagbé à partir à la recherche de nouvelles terres
cultivables et retrouver la paix sociale. Dans le cas spécifique de
Gogobro et Kagbè, le conflit opposait deux frères à propos
d'une femme, un problème d'adultère. Suite à ces
querelles, une fraction du village est partie. Cette frange de la population
s'est installée sur un « point le plus élevé » ;
« pente » appelé en dida : « wakagb ». La colline
s'appelle « kagbèwatta ». D'où le nom Kagbé qui
veut dire « village situé sur la colline ». Cependant, le
village a dû se déplacer sur son site actuel qui est moins
élevé. Selon nos interlocuteurs, ce site a été
découvert avant la colonisation par un chasseur. Il a découvert
à cet endroit un cours d'eau qui pouvait alimenter les villageois. C'est
ainsi que du haut de leur colline, les habitants de Kagbè sont descendus
pour vivre auprès de ce cours d'eau, sachant que depuis bien longtemps
l'accès à l'eau est très difficile dans la région.
Kagbè proclame son autonomie vis-à-vis de Gogobro. Le village de
Kagbè affirme faire limite avec Gabia, Bouakako, Hiré et
Diégonéfla et compte une vingtaine de campements.
4.1.1.4. Zaroko
Zaroko est un village démographiquement très
important. Son histoire est difficile à retracer du fait que deux
familles y revendiquent la chefferie de terre. Pourtant, c'est le chef de terre
qui en tant que descendant du fondateur détient l'histoire du village.
Cependant, cette rivalité autour de la chefferie des terres est
récente. Elle est née de la compétition pour le
bénéfice du dédommagement de la compagnie minière
pour l'exploitation de l'or
4.1.1.5. Douaville
Douaville était un campement créé par un
détachement de la population de Zaroko. Ces populations fuyaient les
guerres de voisinage à Zaroko et ont trouvés refuge sur le site
actuel de Douaville. Anciennement connu sous le nom de 9 km, ce campement est
devenu un village avec l'installation d'importantes populations migrantes. Le
fondateur de ce village est « Doua Félix » dont le village
porte le nom. Sur le plan politique, ce village dépendrait de Zaroko.
125
4.1.2. La migration Baoulé à
Hiré
Les Baoulés font partie du grand groupe Akan.
Installés dans le centre de la Côte d'Ivoire, ils sont repartis en
plusieurs sous-groupes. Toutefois, avec l'introduction des produits
d'exportations, les Baoulés ont migré vers les zones
forestières. Contrairement à cette raison générale
de la migration des Baoulés vers les zones forestières, les
Baoulés de Hiré, y ont accouru pour chercher l'or. Ils ont donc
été les premiers orpailleurs de la zone de Hiré. Les
premiers Baoulés venus à Hiré provenaient des cités
où l'on extrayait anciennement l'or comme Toumodi, Sakassou et Kokumbo.
Ils ont été installés sur les terres de Bouakako. La
proximité d'avec les Baoulé a beaucoup influencé
culturellement les Dida watta. Ils ont adopté le tambour parleur (drum)
qui serait d'origine Baoulé. Aussi, leur langue, le dida tel que
parlé par les Watta serait-il le produit d'un brassage entre le dida et
le baoulé. C'est de là qu'est née le brassage et les
nombreux noms akan que portent les Dida de Hiré. Peu de temps
après, un conflit éclata entre Baoulé autour du vin de
palme. La violence de ce conflit fit peur aux autochtones Dida qui
décidèrent de leur trouver un espace où ils pourraient
habiter afin de retrouver leur quiétude. C'est ainsi qu'ils furent
installés sur le site actuel de Hiré-Baoulé (quartier
Baoulé) pour créer leur campement. Là, ils ont
continué à exploiter le métal jaune. L'or amassé
par ces derniers servait à la fabrication de parures traditionnelles de
valeur (bagues, chaînes, bracelets, boucles d'oreilles). Aussi ces
orpailleurs avaient-ils des qualités d'orfèvres. Les
activités étaient structurées tandis que certains
cherchaient l'or, d'autres au village s'occupaient de le transformer en parures
et d'autres encore s'occupaient de sa commercialisation sur le marché
local et dans les localités environnantes. Chaque année, ils
venaient voir leur tuteur pour leur témoigner leur reconnaissance avec
des cadeaux.
Cependant, les colons du bureau minier s'étant
aperçus de la richesse en or de la localité, s'y sont
installés en 1940 pour mener une exploitation de type semi-industrielle,
et interdirent ainsi l'orpaillage. Cette interdiction de l'orpaillage,
combiné à la rareté de l'or et aux risques d'accidents
liés à cette activité, entraine la réorientation
des populations vers l'agriculture et particulièrement vers le
café et le cacao.
Aux Baoulé, s'ajoutent les Maliens et les
Burkinabés venus avec le bureau minier. Ils se sont tous reconvertis en
agriculteurs incités par la richesse et la fertilité du sol
(Kouassi ; 2009), tout en faisant de l'orpaillage une activité de
soudure. Cette ruée massive vers l'agriculture va contribuer à
faire de Hiré une zone de grande production cacaoyère
(Léonard et Vimard ; 2005). La croissance économique que vont
connaitre les nouveaux agriculteurs va provoquer
126
l'intensification des flux migratoires et la mutation des
rapports autour de la terre et du statut de celle-ci. Suite au slogan du
premier président de la république Félix
Houphouët-Boigny qui a pris `force de loi' : la terre appartient
à celui qui la met en valeur, (Chauveau 2000), des colonies
importantes de Baoulé se sont déportées à
Hiré.
Vers la fin des années 1960, un autre groupe de
Baoulé s'est installé sur une partie de la forêt
classée de la Sangoué et a créé plusieurs
campements dont Bandamakro, Bonikro, Chantier konankro, Koutouklou-Konankro et
Petit Bouaké. Selon le chef de village de Gogobro, cette partie de leur
terre était dans le périmètre de la forêt
classée, et leur était interdit. Tout contrevenant à cette
interdiction était amandé et passible de poursuites judiciaires.
Cependant, en 1968, des chasseurs s'y sont aventurés et ont
découverts qu'il y avait de nouvelles plantations. C'est ainsi qu'ils
ont approchés les Gouro de Gabia, leurs voisins immédiats, pour
leur demander si les plantations leur appartenaient ou s'ils avaient
installé des gens dans la forêt classée, et ceux-ci ont
répondu que non. Selon les Baoulés, ils auraient
été installés par un Dida de Gogobro nommé
Dabié qui ne leur auraient exigé aucun montant et n'avait pas
précisé les termes du contrat vu que c'était une
forêt classée. Pour les Dida par contre, tandis que cette
forêt est considérée comme classée,
propriété exclusive de l'Etat, et que les autochtones Dida sont
interdit de cultiver et de chasser dans cette forêt sous peine d'amende
ou de poursuites judiciaires, les Baoulé sont autorisés à
y travailler. Les revendications de la propriété de la zone par
les villageois Dida de Gogobro occasionnèrent vers la moitié des
années 1970 un conflit entre les habitants de Gogobro et les
Baoulé installés dans la forêt classée. Ce conflit
selon le chef de Gogobro provoqua l'arrestation d'une trentaine d'autochtones
et la bastonnade de plusieurs d'entre eux.
127
4.2. EVOLUTION DE LA POPULATION DE LA SOUS-PREFECTURE DE
HIRE
4.2.1 Une croissance démographique
accélérée par la redécouverte de l'or et
l'arrivée massive d'orpailleurs
60000
Nombre d'habitants
|
50000 40000 30000 20000
|
|
Populations
|
10000
0
1975 1988 1998 2014
Année de recensement
Source : INS, 2016
Figure 17 : courbe d'évolution de la population de
Hiré sous-préfecture selon les RGPH 1975 à
2014
La sous-préfecture de Hiré connait depuis le
premier recensement de 1975 jusqu'au recensement de 2014 une croissance
démographique avec un taux d'accroissement positif.
L'allure générale de la courbe montre une
population en croissance continue. Cette croissance peut être
subdivisée en trois phases : la phase de 1975-1988, la phase de 1988
à 1998 puis la phase de 1998 à 2014. Ces trois phases
correspondent à trois étapes de peuplement de la
sous-préfecture de Hiré. La croissance démographique
étant liée à une forte natalité ou à une
forte migration, la croissance démographique observée à
Hiré est de tout temps liée à l'importance des mouvements
migratoires.
La première phase de 1975-1988 s'explique par la
migration du groupe de Baoulé arrivé dans la
sous-préfecture à la recherche de terres fertiles pour la
création de plantations de cacao et de café. Cette importante
migration Baoulé dans la zone a été déterminante
dans le flux migratoire qu'a connu le petit village d'Hiré Watta,
à l'instar de toutes les zones pionnières de la culture
128
du cacao (RUF, 1995). En effet, l'essor de la culture de cacao
que Ruf a appelé « booms du cacao », a contribué
fortement à la dynamique démographique des zones
forestières de la Côte d'Ivoire. Ces différents modes de
migration ont permis au petit village de Hiré-watta de s'agrandir et de
connaître une dynamique démographique remarquable. Ce
phénomène est à l'origine de son érection en
circonscription administrative (sous-préfecture) en 1977, puis en
commune rurale en 1985.
La phase de 1988-1998 s'inscrit dans la même dynamique
de migration agricole. Toutefois l'explosion démographique
observée entre 1998 et 2014 s'explique par l'ouverture de l'exploitation
aurifère industrielle de Bonikro. Depuis 2007, avec la construction de
la mine d'or de Bonikro, la commune de Hiré fait face à une
nouvelle vague de flux migratoire (Kouadio, 2016). Il s'agit d'une part,
d'employés de la mine, venus d'autres régions du pays et aussi de
pays étrangers notamment le Ghana; et d'autre part, d'orpailleurs venus
d'autres régions du pays et surtout des pays voisins (du Burkina Faso
notamment). La croissance de la population s'explique par un taux de migration
assez important dont le flux varie. La densité de la population de
Hiré selon le RGPH 2014 est de 127 habitants/km2. La
sous-préfecture de Hiré compte 9 376 ménages dont la
taille moyenne est de 5,4 personnes.
Cet excédent des estimations s'explique par l'ouverture
de l'exploitation aurifère qui a attiré à Hiré de
nombreuses populations venues profiter des opportunités
économiques offertes par l'activité aurifère.
L'orpaillage, bien qu'intimement lié à
l'histoire de Hiré, connait depuis l'ouverture de l'usine
aurifère de Bonikro une nouvelle dynamique. L'intensité de
l'activité s'accroit, favorisée par les importantes vagues de
migrants venus majoritairement pour l'orpaillage comme le témoigne le
graphique ci-dessous (Figure 18).
129
Figure 18 : orpailleurs immigrés selon
l'année d'arrivée
Source : NEWCREST, 2015
Cette figure est le résultat d'une enquête sur
les orpailleurs menés par NEWCREST en partenariat avec le cabinet
Channel. Elle présente la courbe des orpailleurs immigrés selon
l'année d'arrivée à Hiré. Les orpailleurs
interrogés sont tous arrivés à partir de 2005. Cependant,
le flux d'arrivée a évolué dans le temps. La figure
présente un graphique en courbe ascendante qui montre une croissance
continue du nombre d'orpailleurs immigrés au fil du temps. Cette courbe
peut être analysée en trois phases. De 2005 à 2007, faible
arrivée d'orpailleurs à Hiré, allant de 8 à 21
orpailleurs sur les deux années. De 2007 à 2011, ce sont entre 21
et 219 orpailleurs qui sont arrivés chaque année. Puis en 2012,
les chiffres explosent avec 1037 orpailleurs arrivés dans la
sous-préfecture. Cette explosion est corrélée à la
découverte des nouveaux gisements de la zone de Hiré.
L'exercice de l'orpaillage nécessitant une grande
maitrise des techniques d'extraction et de traitement, ce sont
généralement ceux qui ont déjà exercé cette
activité qui s'y adonnent. Ceux qui se sont rués vers Hiré
du fait de l'opportunité que représente l'exploitation
aurifère sont de nationalités diverses.
4.2.2. Une population diversifiée
La sous-préfecture de Hiré dispose d'un fond de
peuplement dont l'hétérogénéité est
très ancienne. Elle s'explique par les différents flux
migratoires. Selon le RGPH 2014, la population
130
totale de Hiré est de 50 357 habitants composés
d'autochtones Dida et d'allochtones (ivoiriens et non-ivoiriens). Les
autochtones représentent seulement 23,70% de la population de
Hiré. Les Dida sont en minorité dans la sous-préfecture de
Hiré et vivent majoritairement dans les villages.
La population allochtone à Hiré est
dominée par les Baoulé qui représentent à eux seuls
20,21% de la population totale de Hiré. La population
enquêtée est composée à 23,70% de Dida, à
22,09% de Baoulé, à 20,21% des autres ivoiriens et à 34%
d'étrangers (Figure 19).
Figure 19 : répartition de la population de
Hiré selon l'ethnie et la nationalité
Source : RGPH, 2014
35%
10%
11%
24%
20%
Dida
Baoulé
Ivoiriens du Nord Autres ivoiriens Etrangers
La répartition de la population de Hiré selon
l'ethnie et la nationalité, sur la base du recensement
général de la population (RGPH, 2014), est une population
diversifiée composée d'autochtones Dida et d'allochtones.
4.2.2.1. Les Dida Watta, une population autochtone
minoritaire sur ses propres terres
Les autochtones Dida représentent seulement 23,70%,
soit un quart de la population de Hiré. Ils sont en minorité dans
la sous-préfecture de Hiré et vivent majoritairement dans les
villages. Une étude détaillée de la population des six
villages de la sous-préfecture par origine montre une ascension des
allochtones sur les autochtones. Cette ascendance des allochtones se ressent
plus au niveau de la ville qu'au niveau des villages. Dans la ville de
Hiré dont un des quartiers
131
Hiré-dida est un village, la population autochtone n'y
représente que 7,87% de la population totale (tableau 8).
Tableau 8 : répartition de la population par
origine des villages de Hiré
Localités
|
Nombre d'habitants
|
Populations autochtones
|
Populations allogènes
|
Bouakako
|
1 233
|
642
|
591
|
Douaville
|
2 780
|
831
|
1 949
|
Gogobro
|
4 355
|
2 280
|
2 075
|
Hiré
|
31 960
|
2 514
|
29 446
|
Kagbè
|
8 560
|
4 876
|
3 684
|
Zaroko
|
1 469
|
792
|
677
|
Total
|
50 357
|
11 935
|
38 322
|
Source : INS, 2014
4.2.2.2. Une population allochtone majoritaire et
diversifiée
La population allochtone à Hiré est
composée des allochtones ivoiriens et des allochtones étrangers.
Les allochtones ivoiriens sont composés majoritairement de
Baoulé. Ils représentent à eux seuls 20,21% de la
population totale de Hiré, suivis des ivoiriens du Nord 11,35 %. Ils
peuvent être pratiquement considérés comme la
deuxième ethnie de Hiré. Les allochtones non ivoiriens
représentent quant à eux 34,60 % de la population totale de
Hiré. C'est le plus grand poids démographique de Hiré.
C'est un groupe hétérogène composé de
nationalités différentes La population allochtone constitue une
frange importante de la population de Hiré.
La diversité ethnique et de nationalité est
liée à l'historique de peuplement de la sous-préfecture de
Hiré. En effet, Hiré s'est peuplée par l'arrivée
successive de populations. D'abord, les Dida, peuple autochtone ont
été les premiers à s'installer puis, à leur suite,
il y a eu les Baoulé arrivés depuis 1920. La dynamique agricole
de cette zone dans les années 1960-1970 a attiré à
Hiré des populations venant des autres régions de la Côte
d'Ivoire et des pays voisins. La diversité démographique est
très ancienne à Hiré mais la proportion d'étrangers
y était faible (RGPH 1988). L'importante présence
d'étrangers à Hiré que nous constatons aujourd'hui (34%)
s'explique par l'ouverture de l'exploitation industrielle de l'or et le
redémarrage de l'orpaillage clandestin. En effet, à cette
occasion, des vagues de populations sont venues s'installer à
Hiré. Ces installations sont motivées soit par la recherche d'un
emploi à la mine industrielle soit par l'orpaillage ou les autres
opportunités économiques liées à l'activité
aurifère. Cet afflux de population est marqué par la croissance
de la population étrangère avec une prédominance de trois
nationalités que sont les burkinabés, les maliens et les
guinéens (Figure 20). Ils représentent 84% de la population
étrangère de Hiré.
132
Figure 20: répartition de la population
étrangère enquêtée selon la
nationalité
Source : enquête de terrain, 2015
Les étrangers enquêtés se sont
installés à Hiré à des dates très diverses.
Cependant, plus de 60% sont là depuis 2007-2008, année
d'ouverture de l'exploitation minière industrielle. Ces personnes
viennent à 80% d'autres localités aurifères ivoiriennes
où les gisements sont épuisés. Leur arrivée
à Hiré a été motivée par l'information de la
découverte de l'or dans ladite localité. Seulement 20% ont eu
l'information depuis leur pays d'origine. La population étrangère
à Hiré est composée à 58% d'hommes contre 36% de
femmes. Orpailleurs clandestins pour la plupart, ils sont engagés dans
un parcours de la sous-région ouest africaine à la recherche de
riches zones aurifères. L'orpaillage est une activité très
ancienne dans les pays voisins comme le Burkina, la Guinée et le Mali.
Ce qui explique la présence d'une importante colonie de ressortissants
de ces pays dans la sous-préfecture de Hiré. On les retrouve
également à la mine industrielle et dans les petits
métiers et commerce de la ville.
4.2.3 Une population majoritairement jeune
La structure démographique de Hiré en 2014
présente une pyramide dont l'allure générale est
triangulaire, la base large et le sommet effilé. Cette forme de la
pyramide est caractéristique des populations à forte proportion
de jeunes. La pyramide des âges présente la répartition de
la population d'un espace selon l'âge et le sexe. Cette
répartition est à la fois le résultat et le moteur
133
des dynamismes démographiques découlant du jeu
subtil de la natalité, de la mortalité et du solde migratoire
(Loba, 2008).
La structure par âge de la population présente
l'allure classique de celle d'une population jeune, en croissance rapide, avec
une base large, une diminution rapide des effectifs dans les classes
immédiatement supérieures, liée à une
mortalité encore élevée. L'étude de la structure
par âge de la population de la sous-préfecture de Hiré est
caractérisée par une proportion importante de jeunes dont
l'âge est inférieur ou égale à dix-neuf ans. Ils
représentent 58,9% de la population totale de Hiré. C'est une
population très jeune due à un taux de natalité
relativement élevé. On note également une proportion
importante d'adultes dont l'âge varie entre 20 et 59 ans qui
représente 39,5% de la population totale. La frange des personnes
âgées de plus de 60 ans représente seulement 1,6% de la
population. Le nombre important de la jeunesse représente un atout non
négligeable dans le rayonnement économique que connait cette
localité. En effet, la jeunesse constitue une main d'oeuvre assez
importante dans l'agriculture et l'orpaillage qui sont les activités
traditionnelles des populations de Hiré.
Tableau 9 : structure résumée de la
population de Hiré en 2014
Tranche d'âge
|
Population
|
Pourcentage (%)
|
Moins de 15 ans
|
22 068
|
43,82
|
15-64 ans
|
27 057
|
53,73
|
65 ans et +
|
1 232
|
2,45
|
Total
|
50 357
|
100
|
Source : INS, 2016
La structure résumée de la population de
Hiré permet de la classer en trois grands groupes. La frange des moins
de 15 ans qui représente 43%, la frange des 15-64 ans et celle des plus
de 65 ans. La tranche la plus importante de la population est celle dont
l'âge varie entre 15 et 64 ans. Cette tranche d'âge regroupe les
adolescents et les adultes. Elle comprend la totalité de la population
active et son importance est en partie liée à l'arrivée
des migrants actifs qui se situent dans cette tranche d'âge.
4.2.4. Une population à dominante
masculine
La répartition de la population de Hiré selon le
sexe (voir pyramide) montre qu'il y a 54,8% d'hommes et 46,2% de femmes soit un
ratio de 107,5 hommes pour 100 femmes (RGPH, 2014).
134
Il y a donc plus d'hommes que de femmes dans la
sous-préfecture de Hiré. Cette dominance masculine s'explique par
l'arrivée massive d'hommes à la recherche d'emploi ou venus pour
l'orpaillage. Les migrants viennent généralement à la
recherche de ressources financières seuls sans femmes et sans enfants.
L'étude de la répartition de la population masculine dans les
villages de la sous-préfecture de Hiré présente un taux de
masculinité inférieur à 100. Soit 96,7 à Bouakako
et 95,7% à Gogobro. La prédominance des femmes dans les
entités villageoises s'explique par le fait que les hommes en âge
de travailler ont généralement tendance à migrer vers les
villes de Hiré et/ou d'Abidjan à la recherche d'un emploi,
d'où l'importance du nombre de femmes dans les villages contrairement
à la ville.
Figure 21 : pyramide des âges de la population de
Hiré en 2014
Source : RGPH, 2014
135
4.3 LA STRUCTURE DE LA POPULATION DE HIRE
Sur une population de 50 357 habitants que compte Hiré,
seulement 17 158 personnes ont déclaré leur activité.
Soit, 34,07% de la population totale dont l'activité est
précisée.
4.3.1 La répartition de la population selon
l'activité
Ces activités sont diverses et concernent
l'agriculture, les mines, l'industrie, le commerce, les bâtiments et les
travaux publics, etc. 45,46% de cette population exerce dans le secteur
agricole, soit près de la moitié de la population ayant
déclaré son activité. Ensuite, viennent les services, le
commerce et l'industrie qui occupent respectivement 31%, 13% et 8% de la
population déclarée (Figure 22).
Figure 22 : répartition de la population de la
sous-préfecture de Hiré par branche d'activité
Source : INS, 2014
Selon le diagramme ci-dessus, l'agriculture est
l'activité principale de la population de Hiré. Cette agriculture
est diversifiée et repartie en sous-branche d'activité (voir
tableau ci-dessous).
136
Tableau 10 : répartition de la population
agricole de Hiré par culture selon le sexe en 2014
Branches d'activité
|
Sexe
|
Total
|
Masculin
|
Féminin
|
Cultures de céréales
|
150
|
10
|
160
|
Cultures de féculents
|
78
|
13
|
91
|
Culture fruitière
|
22
|
5
|
27
|
Culture des légumes
|
19
|
10
|
29
|
Cultures des condiments
|
33
|
6
|
39
|
Productions agricoles diverses
|
2 484
|
502
|
2 986
|
Production de café, cacao et autres
|
2 952
|
539
|
3 491
|
Production de bananes d'exportation et d'ananas
|
24
|
5
|
29
|
Production d'oléagineux
|
2
|
2
|
4
|
Total
|
5 764
|
1 092
|
6 856
|
Source : INS, 2014
Ce tableau montre la répartition de la population
agricole de Hiré par culture selon le sexe en 2014. Plus de la
moitié de la population agricole, soit 3 491 s'adonnent à la
production de café, cacao, et autres. Ce sont les hommes qui s'adonnent
le plus à ces cultures. La proportion de femmes pratiquant le
café, le cacao, et autres cultures pérennes représente 1/7
des acteurs de cette branche d'activité. De façon
générale les hommes sont plus nombreux dans le secteur agricole.
Ils représentent 84,7% de la population agricole pour seulement 15,3% de
femme.
Cependant, le nombre élevé de réponses en
"activité non spécifiée" traduit l'existence d'une
activité difficilement descriptible et donc certainement en partie
clandestine.
4.3.2. Une population en pleine reconversion
professionnelle
L'agriculture a été de tout temps
l'activité économique dominante à Hiré. Elle est
à la base du peuplement de toute la sous-préfecture. A
côté de cette activité économique
prédominante, il existe d'autres activités dont le dynamisme est
resté longtemps dépendant de l'agriculture. Il s'agit de
l'artisanat, du commerce et d'autres activités non agricoles. Les petits
métiers de l'artisanat sont aussi pratiqués à Hiré.
Il s'agit de la couture, la coiffure, la mécanique auto, vélo,
moto etc. Le commerce de vivriers, de vêtements et autres produits
cosmétiques se pratique dans l'unique marché de la ville.
Cependant, depuis l'ouverture de la mine les
137
populations agricoles de Hiré sont confrontées
à d'énormes difficultés qui les contraignent à se
détourner de leur activité de base. L'exploitation minière
à ciel ouvert est une activité consommatrice de grands espaces
(Thune, 2011). Son emprise foncière à Hiré avec la mine de
Bonikro et la fosse satellite de Hiré-Est, est une
réalité. Ce sont 847,07 hectares qu'occupe la mine de Bonikro et
640 hectares que couvre la fosse de Hiré-est. Ces surfaces abritaient
initialement des activités économiques des populations
riveraines, en majorité des plantations agricoles. Ce sont environ 150
propriétaires terriens à Bonikro et plus de 1 000 exploitants qui
ont été expropriés et indemnisés. Cette occupation
du sol par les activités minières, crée des contraintes
économiques énormes pour ces paysans. Ils se retrouvent dans
l'obligation de trouver de nouvelles terres pour continuer d'exercer
l'agriculture, alors que cette ressource est rare. Avec l'expropriation, les
paysans sont obligés de trouver de nouveaux moyens de subsistances,
aussi cherchent-ils à se reconvertir dans des activités diverses.
Ne répondant pas aux critères de recrutement à la mine, du
fait de leur manque de qualification ou de l'inadéquation de leur
formation aux métiers de la mine, l'artisanat minier se présente
comme la meilleure alternative de reconversion.
En effet, l'orpaillage offre de meilleures possibilités
pour la création d'emplois par rapport à la mine industrielle. Ce
choix se justifie également par son avantage économique par
rapport à l'agriculture en termes de revenu plus élevé et
plus immédiat. La pratique de l'orpaillage permet à certains
anciens ouvriers agricoles de s'installer à leur propre compte en tant
qu'orpailleur. Le salaire journalier d'un ouvrier orpailleur (2 000-3 000 F
CFA) est de loin plus avantageux que le salaire d'un ouvrier agricole (1 000-1
500 F CFA). L'orpaillage se présente comme une opportunité
économique que la morosité de leur activité initiale,
pousse les paysans à pratiquer, soit temporairement, soit de
façon indéterminée. Son attraction est telle qu'on trouve
dans le rang des orpailleurs, des paysans, des commerçants, des hommes
de métiers d'origines diverses. Cependant, les commerçants et les
paysans sont les plus nombreux avec respectivement 22,5% et 20,7%. Ils sont
suivis par les artisans ou «hommes de métiers» avec 15,1% et
les élèves 10,9%. Au début de l'orpaillage, c'était
surtout les allogènes qui se consacraient à cette activité
car ils étaient les seuls à connaitre ce métier. Mais
progressivement les populations locales Dida, Baoulé et Malinké
s'y sont mis. Aujourd'hui 50% d'orpailleurs sont des nationaux et même
originaires de Hiré (Dida et Baoulé). La présidence des
orpailleurs de Hiré est assurée par un Dida de Hiré. Les
revenus tirés de cette activité au vue du niveau de vie de ses
acteurs, attire de nombreux jeunes. D'autant plus que les sommes perçues
par les orpailleurs ne sont en rien comparables aux revenus tirés de
l'agriculture et des autres activités locales. Il ressort de
138
nos enquêtes de terrain que 75% des ouvriers sont
payés par les chefs de site ou de groupes de façon
journalière en fonction des tâches à eux confiées.
Les ressources tirées de cette activité sont en majorité
directement investies dans la sous-préfecture, même si certains
rapatrient leur gain dans leurs localités d'origines. Nombreux sont les
orpailleurs qui investissent dans l'immobilier à Hiré. Avec la
présence des travailleurs de la mine et la nécessité pour
eux de se loger, la demande de logement est de plus en plus forte à
Hiré.
A côté de ceux qui exercent l'orpaillage comme
activité, il y a les paysans qui mettent leurs parcelles en location aux
orpailleurs. Cela soit du fait de la baisse de leurs productions soit du fait
du vieillissement du verger ou de sa proximité à un site
d'extraction aurifère. Ces paysans dédient ainsi les terres
agricoles à l'orpaillage.
La diversité des emplois dans les mines et le
caractère clandestin de l'orpaillage expliquent le fait que les
populations aient eu du mal à nommer la branche d'activité dans
laquelle ils tentent de se reconvertir. L'importance des revenus tirés
de l'exploitation de l'or conjugué aux difficultés du secteur
agricole à Hiré provoque une grande mutation sociale.
4.4. HIRE, UNE URBANISATION BOOSTEE PAR L'EXPLOITATION
MINIERE
4.4.1. Une concentration démographique dans la
ville de Hiré
Le rythme d'urbanisation de la ville de Hiré dans les
années 1990 a connu quelques problèmes liés à
l'approvisionnement en eau. Cependant, l'occupation des zones loties se faisait
de manière régulière avec un taux d'urbanisation de 1,2%.
La densité de l'espace était d'environ 102 habitants/ha pour une
consommation d'espace de 150 m2 par habitant. La qualité de
l'habitat était relativement bonne. Dans les quartiers anciens comme les
quartiers Dioula, Baoulé, Dida et Gnakankro, les constructions sont en
grande partie en Banco crépis de ciment. Par contre, dans les nouveaux
quartiers résidentiels Assayé et Plateau, elles sont de
meilleures qualités.
L'ouverture de la mine de Bonikro en 2007 a entrainé
des vagues de populations venant de tout le pays et même des pays
voisins. Cet afflux de population se dirige pour la plupart vers la ville de
Hiré. L'estimation en 2010 de la population totale de la
sous-préfecture de Hiré, sur la base des données du
recensement de 1998 et d'une croissance démographique annuelle moyenne
de 3%, permet de chiffrer celle-ci à 48 231 habitants, dont 25 580
habitants pour la ville de Hiré. Soit, un peu plus de la moitié
de la population de la sous-préfecture en 2010, vivait en ville. A
partir des recensements de 1998 et 2014, la croissance démographique est
plus accentuée dans
139
la ville de Hiré. Cette population a pratiquement
doublé entre les deux recensements (voir tableau 11).
La figure 23 montre la dynamique démographique entre les
recensements de 1998 et 2014. A vue d'oeil, l'importance de la croissance
démographique dans la ville de Hiré est perceptible.
Derruau (1998) nous rappelle que la population citadine varie par
accroissement naturel et par migration. Cependant, c'est surtout par
excédent d'immigration que la population d'une ville augmente car la
croissance industrielle et commerciale y multiplie la création
d'emplois.
140
Figure 23 : carte d'évolution
de la population de Hiré entre 1998 et 2014
Source : nos enquêtes, 2016
141
L'afflux de population dans la ville de Hiré se
justifie par les opportunités d'emploi et d'affaires qu'elle offre
à la mine dans l'orpaillage et dans les activités connexes. En
effet, Hiré ville est le lieu de résidence de la plupart des
travailleurs de NEWCREST car elle offre des possibilités de logement
plus importantes que les villages. C'est dans la ville de Hiré que la
cité dortoir des cadres de la mine a été
édifiée. Les sites d'orpaillages se concentrent à la
périphérie de la ville de Hiré. On observe un mouvement
pendulaire journalier des orpailleurs de la ville de Hiré vers les
différents sites comme c'est le cas des femmes du site de Bouakako.
Tableau 11 : répartition de la population de la
sous-préfecture de Hiré par localité en 1998
et
2014
|
Nombre d'habitants selon l'année
|
Localités
|
1998
|
2014
|
Bouakako
|
1272
|
1233
|
Douaville
|
1811
|
2780
|
Gogobro
|
3452
|
4355
|
Hiré
|
17941
|
31960
|
Kagbè
|
7945
|
8560
|
Zaroko
|
1407
|
1469
|
Source : INS, 2014
Le tableau montre l'évolution de la population de la
sous-préfecture de Hiré selon la localité. On observe une
concentration de la population dans la ville de Hiré depuis 1998. La
ville de Hiré abrite près de deux tiers de la population
sous-préfectorale de Hiré. A la suite de la ville, les villages
démographiquement importants sont Kagbè et Gogobro. Le tableau
ci-dessous présente l'évolution de la population de la ville de
Hiré depuis le recensement de 1965 jusqu'à celui de 2014.
Tableau 12 : Evolution de la population de la ville de
Hiré de 1965 à 2014
Années
|
1965
|
1975
|
1980
|
1988
|
1993
|
2010
|
2014
|
Effectifs
|
4 500
|
10 000
|
13 700
|
14 551
|
16 704
|
25 580
|
31 960
|
(Source : INS, 2014, RGPH et
estimations)
Ce tableau présente l'effectif de la population urbaine
de Hiré à différentes dates. Il ressort de son analyse que
cette population connait de façon globale une croissance. Toutefois,
trois phases sont à distinguer dans cette croissance. De 1965 à
1975, la population urbaine de Hiré double, passant de 4 500 habitants
à 10 000 habitants. Cette croissance se justifie par l'arrivée
massive d'allogènes venus pour la pratique de l'économie de
plantation. Entre 1975 et 1993, la
142
population croit timidement passant en 18 ans de 10 000
habitants à 16 704 habitants. Puis entre 1993 et 2014, la population
passe de 16 704 à 31 960 habitants. Cette croissance est stimulée
par l'exploitation aurifère qui a attiré dans la ville de
Hiré de nombreuses personnes venues aussi bien des localités de
la sous-préfecture que d'ailleurs.
4.4.2 La dynamique spatiale de la ville de
Hiré
La croissance démographique observée dans la
ville de Hiré s'accompagne d'une croissance spatiale de celle-ci (voir
figure 24). Le besoin de logements de ces populations a entrainé
l'étalement de la ville. Selon Pages (1980), la
généralisation de la maison individuelle sur des parcelles de
quelques centaines de mètres carrés aboutit à une
extension en surface considérable de l'espace urbanisé. Cette
dynamique spatiale de la ville de Hiré traduit surtout
l'étalement des zones périphériques, avec une
multiplication et une concentration du bâti dans les quartiers
enclavés. Cependant, l'extension du quartier Baoulé est quelque
peu freiné par la fosse satellite de Hiré située à
quelques encablures de celui-ci.
Figure 24: Évolution de l'emprise spatiale de
la ville de Hiré
1854
2000
1800
1420
1600
Superficies (ha)
1400
1165
1200
820
1000
800
600
400
200
0
1983 1990 2000 2017
Années
Superficies...
Source : service technique de la mairie de Hiré
2017
L'emprise spatiale de la ville de Hiré connait une
évolution générale de 1983 à 2017. La superficie de
la ville de Hiré est passée de 820 ha à 1 165 ha entre
1983 et 1990. De 1990 à 2000, la superficie de Hiré passe de 1
165 ha à 1 420 et de 1 420 à 1 854 ha entre 2000 et 2017.
La faible extension de la ville dans la décennie
1990-2000 se justifie par les problèmes liés à
l'approvisionnement en eau de celle-ci. Jusqu'en 1992, la ville de Hiré
ne disposait pas d'un système d'approvisionnement en eau potable.
Cependant, l'occupation des zones loties s'est fait de manière
régulière avec un taux d'urbanisation de 1,2%. Avec l'ouverture
de la mine,
143
cette croissance urbaine s'est vue booster par l'installation
dans la ville de Hiré de l'essentiel des migrants et des paysans en
exode rural.
La dynamique spatiale à Hiré s'observe
également au niveau des constructions de logement pour les populations
des hameaux déplacés par la mine. Ce sont en effet, des
habitations de type moderne totalement différentes de celles qui
étaient sur les anciens sites. Les hameaux de Bonikro, Bandamakro et
Koutouklou-Konankro sont les localités qui ont
bénéficié de ces habitats. Même si les populations
se plaignent de certaines incorrections, elles reconnaissent pour beaucoup que
ces constructions sont de type moderne et de qualité. Le nouveau site de
Koutouklou-Konankro est situé à environ 100 mètre de la
ville de Hiré, cela en fait un presque village urbain ce qui contribue
à son attractivité.
La loi de l'offre et de la demande aidant, l'immobilier est
devenue le principal secteur d'investissement des populations. La croissance
démographique observée à Hiré a fortement
contribué à l'extension de la ville avec des constructions de
plus en plus modernes.
Le quartier d'habitat résidentiel (haut et moyen
standing) est situé dans le secteur Sud-Est de la ville. Il est en
quelque sorte la cité administrative de la ville car il abrite
l'essentiel des services administratifs publics comme : le trésor, la
Compagnie Ivoirienne d'Électricité (CIE), l'Institution de
Formation et d'Education Féminine (IFEF), la mairie, la
sous-préfecture. Les quartiers d'habitat évolutif et les
quartiers d'habitat péri-urbain sont dispersés dans le reste de
l'agglomération urbaine.
4.4.3 Des constructions de plus en plus
améliorées
Outre l'étalement de la ville, la croissance urbaine de
Hiré se traduit également par la modernisation des constructions.
L'augmentation des demandes en logement du personnel de la mine, des
orpailleurs et des autres migrants à Hiré, a entrainé une
prolifération des constructions. Les exigences des nouveaux demandeurs
ont également contribué à l'amélioration des
constructions.
Tandis que dans les quartiers anciens comme Djoulabougou,
Baoulé, Dida et Gnakankro, les constructions sont en grande partie en
Banco crépis de ciment, dans les nouveaux quartiers résidentiels,
Assayé et Plateau, elles sont de meilleure qualité et
généralement en parpaing et bâties sur des parcelles de 300
à 600 m2.
144
Tableau 13 : Caractéristiques de l'habitat
à Hiré
Matériaux de couverture
|
Proportions (%)
|
Parpaing
|
42
|
Banco amélioré
|
10
|
Banco simple
|
7
|
Couverture tôle
|
39
|
Couverture papaux
|
2
|
Source : nos enquêtes de terrain, 2017
On trouve de plus en plus de maisons qui offrent toutes les
commodités. Les nouvelles maisons ont des sols revêtus de
carreaux, avec des cours et des toilettes individuelles. Les anciennes
constructions ont également été remises au goût du
jour. Les cours communes sont plus spacieuses avec des toits plus hauts. Cela a
une incidence sur les prix pratiqués qui ont connu une véritable
explosion. Les maisons d'une pièce communément appelée
« entrer-coucher », étaient louées à 10 000-12
000 F CFA. Aujourd'hui, la tendance est plus à la construction de
studios dont les prix varient entre 20 000 et 25 000 F CFA. Les deux
pièces sont passées de 20 000-25 000 F CFA à 30 000-35 000
F CFA voire même 40 000 F CFA. La modernisation de l'habitat s'est
accompagnée de l'installation de plusieurs équipements
collectifs.
4.4.4. Typologie des espaces habités
La typologie des espaces habités permet
d'établir une différenciation des quartiers (figure 25). La ville
de Hiré compte dix quartiers comme présenté sur la figure
26 : le résidentiel, Hiré Dida, Hiré Baoulé,
Gnankankro, Dioulabougou, Plateau, Assayé 1 et Assayé 2.
145
Figure 25: organisation spatiale de la ville de
Hiré en 2016
Le quartier d'habitat résidentiel (haut et moyen
standing) est situé dans le secteur Sud-Est de la ville. Il est en
quelque sorte la cité administrative de la ville car il abrite
l'essentiel des services administratifs publics comme : le trésor, la
Compagnie d'Electricité Ivoirienne (CEI), l'Institution de Formation et
d'Education Féminine (IFEF), la mairie, la sous-préfecture. Les
quartiers d'habitat évolutif et les quartiers d'habitat
péri-urbain sont dispersés dans le reste de
l'agglomération urbaine.
146
Tableau 14 : Classification des quartiers de la ville
de Hiré selon la position et le standing
Quartiers
|
Standing
|
Position dans la ville
|
Centrale Plateau
|
Evolutif
|
Périphérique
|
Djoulabougou
|
Economique
|
Centrique
|
Hiré Baoulé
|
Evolutif
|
Périphérique
|
Commerce
|
Economique
|
Centrique
|
Gnakankro
|
Economique
|
Centrique
|
Gnakankro extension
|
Evolutif
|
Périphérique
|
Assayè 1
|
Evolutif
|
Périphérique
|
Assayè 2
|
Evolutif
|
Périphérique
|
Hiré Dida
|
Evolutif
|
Périphérique
|
Résidentiel
|
Haut standing
|
Périphérique
|
Source : nos enquêtes, 2016
La population de la ville de Hiré est
inégalement répartie suivant l'espace et la typologie des
quartiers. Le quartier Hiré-dida était un village Dida
créé par les populations de Gogobro fuyant les guerres de
voisinage. Le quartier Baoulé est celui qui a abrité les premiers
migrants Baoulé à Hiré, installés ici par les
populations de Bouakako. Au fur et à mesure des flux migratoires
à cause de l'importance économique de la ville, les autres
quartiers ont été créés jusqu'à obtenir la
configuration actuelle.
La densité de l'espace est de 127
habitants/km2 pour une consommation d'espace de 150
m2/habitants.
En effet, du point de vue de la localisation, 53,04% de la
population se concentrent au niveau de la couronne centrale contre 46,96%
à la périphérie.
Cette situation s'explique par le fait que le centre
étant le noyau de la ville, il a bénéficié des
premiers équipements et constructions. Cela a favorisé une forte
concentration humaine en ce lieu. La périphérie étant une
zone d'extension, elle abrite les nouvelles constructions occupées
généralement par les allogènes nouvellement
installés à Hiré.
147
Figure 26: répartition des types d'habitat dans la
ville de Hiré
Source : INS, 2014
Selon le RGPH de 2014, à Hiré plus deux
logements sur cinq sont une concession (47%) connue sous le vocable de
"cour commune". La villa moderne n'occupe que la troisième
place, avec 10%, après les maisons simples 32%.
Il nous a été donné de constater au cours
de nos enquêtes de terrain de constater que quel que soit la typologie de
quartiers, la concession et la maison simple demeurent les deux types de
construction prédominants. Nous avons trois ménages sur six dans
les concessions et deux ménages sur six dans les maisons simples. Les
maisons en bande et les cases traditionnelles accueillent très peu de
ménages. Les villas modernes sont plus présentes dans le quartier
résidentiel et dans certains quartiers péri-urbains.
4.4.5. Le niveau de services et d'équipement de la
ville de Hiré
Depuis l'ouverture de l'activité minière
industrielle à Hiré, on observe un déploiement des
services administratifs publics et privés. Avant l'arrivée de la
mine, la sous-préfecture de Hiré jouissait d'une faible
représentation des structures administratives. Depuis lors, divers
services administratifs s'y sont installés. La dynamique
économique que connait la ville de Hiré depuis l'ouverture de la
mine a attiré les structures financières comme la BIAO. On trouve
également à Hiré un bureau de la COOPEC. Les
équipements se définissent comme des espaces
réservés
148
ou concédés à des fonctions
d'intérêt public. Ces équipements et infrastructures qui
contribuent au bon fonctionnement de la ville Hiré sont de nature
diverse.
4.4.5.1 Les Infrastructures de base
Hiré est traversée par la route nationale qui
part d'Abidjan, traverse Divo et Hiré puis se prolonge vers Oumé
et Gagnoa. Les voies à l'intérieur de la ville ne sont pas
bitumées. Hiré est doté de l'éclairage public qui
éclaire la ville et ses quartiers. Les six villages de la
sous-préfecture sont aussi fournis en électricité. Du
point de vue de l'eau courante, la SODECI de Hiré éprouve
d'énormes difficultés à approvisionner les ménages
de la ville si bien qu'il y a des coupures intempestives d'eau qui peuvent
durer des mois. Cette situation explique d'ailleurs le recours des populations
à l'eau de puits dans la plupart des ménages de la ville.
4.4.5.2. Les équipements scolaires et
éducatifs
La ville de Hiré abrite une inspection de
l'enseignement primaire et préscolaire (IEPP) créées pour
surveiller l'appareillage éducatif composé d'écoles
publiques et privées reparties dans différents quartiers.
Tableau 15 : répartition des
établissements primaires dans la ville de Hiré
Quartiers
|
Dénominations des écoles
|
Statut
|
Nombres d'écoles
|
Nombre de classes
|
Dida
|
Groupe scolaire Dida
|
Public
|
4
|
24
|
Commerce
|
EPV Catholique
|
Privé
|
1
|
7
|
Gnakankro
|
Groupe scolaire Gnakankro
|
Public
|
6
|
31
|
Assayé
|
Groupe scolaire Assayé
|
Privé
|
4
|
18
|
Groupe scolaire Stade
|
Public
|
4
|
19
|
Plateau
|
Groupe scolaire centrale
|
Public
|
4
|
24
|
Résidentiel
|
Ecole Méthodiste
|
Privé
|
1
|
6
|
Total
|
24
|
129
|
Source : Inspection de l'enseignement primaire, 2015
Le collège municipal a été agrandi puis
transformé en lycée municipal du fait de l'importance de
l'effectif et de la nécessité d'un lycée dans la ville.
Les collèges privés Amitié et MUPES permettent à la
ville de compter trois établissements secondaires.
4.4.5.3. Les équipements
socio-culturels
Au niveau des équipements socio-culturels, Hiré
dispose d'un espace communautaire construit par la compagnie minière,
d'un terrain municipal, d'un institut de formation et d'éducation
féminine et d'une salle des fêtes à l'intérieur de
la mairie.
149
Au niveau des équipements religieux, Hiré
dispose d'une grande mosquée située au marché de la ville
et de plusieurs petites mosquées dissimulées dans la ville. On
trouve aussi à Hiré, une mission Catholique, une mission
Protestante Méthodiste et deux temples des Assemblées de Dieu.
Plusieurs temples aux appellations diverses sont répandus à
travers la ville (Baptiste oeuvre et missions, Christianisme céleste,
Eglise Unie de Pentecôtes, CMA, etc...).
4.4.5.4. Les équipements
hôteliers
En matière d'équipement hôtelier, la ville
de Hiré n'est pas très nantie. Cependant, on y trouve quelques
hôtels de standing acceptable dont le plus prestigieux est l'hôtel
« Gold Hotel » que présente la photo ci-dessous. Ces
établissements satisfont la demande qui n'est pas très
élevée en la matière du fait de la distance pas trop
importante (45 km) qui sépare Hiré de Divo. Les potentiels
clients préfèrent souvent passer la nuit à Divo qui offre
des possibilités plus commodes.
|
GOLD HOTEL, un des prestigieux hôtels de
Hiré.
|
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 16: Hôtel de luxe de Hiré
|
|
4.4.5.5. Les équipements
économiques
Hiré dispose d'un équipement économique
public, le trésor, et de deux équipements économiques
privés que sont la NSIA Banque et la
COOPEC. LA BIAO devenue la NSIA Banque.
Depuis 2016, une agence remplace le guichet automatique d'autrefois (photo
17).
|
Une agence de la BIAO nouvellement (NSIA) ouverte en
2015.
|
150
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 17: La succursale bancaire BIAO-CI
Du fait de la dynamique économique que connait le secteur
du transport, des stations-services ont ouvert dans la sous-préfecture
de Hiré. Sur les quatre stations existantes, deux sont encore en service
(voir photo 18).
|
Le supermarché CDCI est situé dans le quartier
résidentiel de la ville de Hiré, zone de grande consommation de
ce type de produit.
|
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 18: station-service Essenci
|
|
151
Les besoins des produits manufacturés des travailleurs
et agents des services publics et privés sont satisfaits par les grandes
boutiques, mini-market et supermarchés de la ville. Le plus important
d'entre eux est le supermarché CDCI que présente la photo
ci-dessous.
|
La station ESSENCI située sur la route nationale
reliant Hiré à Oumé.
|
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 19: un des super marchés de la ville de
Hiré
|
|
4.4.5.6. Les équipements de
sécurité
Hiré est dotée d'une brigade de gendarmerie et
d'un commissariat de police. Ces services sont chargés de la
sécurité des personnes et des biens dans toute la
sous-préfecture. Avec la croissance démographique et
l'activité de l'or notamment de l'orpaillage, Hiré connait une
ascendance de l'insécurité et des infractions diverses comme les
vols, les viols, les assassinats, etc. Aussi la présence de ces services
est-elle d'une utilité capitale afin d'assurer aux populations un cadre
de vie paisible. Des renforts viennent parfois de Divo, chef-lieu de
département et de région quand le besoin se fait sentir.
4.4.5.7. Les équipements
administratifs
La ville de Hiré dispose de plusieurs services publics.
On y trouve la sous-préfecture, la mairie, un bureau de la direction
régionale de l'agriculture, un bureau de L'ANADER, un bureau des eaux et
forêts en raison de la forêt classée de la Sangoué.
On trouve également à Hiré un bureau de la CET.
152
L'administration publique est très bien
représentée dans la ville de Hiré. Ce sont des services
dont la présence est antérieure à l'exploitation
industrielle de l'or. Toutefois, la dynamique économique que connait
Hiré depuis le début de cette activité y a favorisé
l'accroissement des capacités des services existants et l'ouverture de
nouveaux services (tableau 16).
Tableau 16 : quelques structures présentes dans
la commune de Hiré
Structures
|
Quartiers
|
Services
|
Responsables
|
Date
d'installation
|
Economie et des finances
|
Résidentiel
|
Trésor public
|
Directeur
|
2004
|
Sécurité intérieure et
décentralisation
|
Sous-préfecture
|
Sous-préfet
|
1977
|
Mairie
|
Maire
|
1985
|
Commissariat de police
|
Commissaire
|
2005
|
Dida
|
Brigade de gendarmerie
|
Commandant de brigade
|
|
Education nationale
|
Assayé 1
|
IEPP
|
Inspecteur
|
1998
|
Agriculture et développement durable
|
Dida
|
Antenne de l'agriculture
|
Directeur
|
1992
|
Eaux et forêt
|
Dida
|
Compagnie
|
Chef de compagnie
|
1953
|
Source : IEPP, 2016
Conclusion du chapitre 4
La générosité de l'espace naturel de
Hiré et le déplacement de la boucle du binôme
café-cacao de l'Est vers le Sud-ouest (région de Divo) a
été la raison de la deuxième vague de migration vers
Hiré dans les années 1970. Cependant, le profil
démographique de la sous-préfecture de Hiré subit une
nouvelle mutation avec la redécouverte de l'or qui a abouti à
l'ouverture de la mine d'or de Bonikro. L'exploitation minière a
accéléré la croissance démographique de
Hiré. Cette croissance se caractérise par la jeunesse et la
diversité d'origine des populations. Cela s'explique par l'afflux des
jeunes attirés par la perspective des emplois ouverts à la mine
et des revenus issus de l'orpaillage
153
CHAPITRE 5 : LES ACTIONS DE DEVELOPPEMENT DE
LA COMPAGNIE MINIÈRE
L'activité minière et particulièrement
l'exploitation industrielle de l'or, à travers les investissements
miniers, conduit à des actions visant à contribuer au
développement communautaire. Les investissements menés par les
compagnies minières dans la sous-préfecture de Hiré ont
porté sur la réalisation d'infrastructures, d'équipements
et sur des actions sociales.
Dans ce chapitre, il s'agit de connaitre les fondements
fonctionnels et institutionnels des actions des compagnies minières en
faveur des communautés locales. Il s'agit également de faire
l'état des lieux des réalisations des compagnies minières
dans la sous-préfecture de Hiré.
5.1. LES ACTIONS SANS PLAN DE DEVELOPPEMENT
5.1.1. La responsabilité sociale et les fonds
destinés aux populations par EQUIGOL et LGL
Les différentes compagnies minières qui se sont
succédées à l'exploitation des mines d'or de Hiré,
ont, en l'absence d'un cadre légal prédéfini de l'aide au
développement local, mené leur action vis à vis des
populations sur la base de la Responsabilité Sociale des Entreprises
(RSE). La RSE est le cadre de précaution sociale imposé par la
Banque mondiale aux États dans le cadre des prêts qu'ils
contractent avec les fonds internationaux et qui s'imposent donc aussi à
ces États dans le cadre des contrats de concessions d'exploitation
qu'ils passent avec des entreprises internationales pour la mise en valeur des
ressources du territoire national dont ils assurent la gestion "au profit des
peuples qu'ils abritent". La RSE recommande ainsi aux États et aux
entreprises minières de réinvestir une partie de leurs profits
dans des projets de développement durable ayant un fort impact social et
environnemental de façon à pallier les préjudices faits
aux populations locales. Pour cela, elle préconise aux États
d'inclure dans le code minier la réalisation d'une Enquête
d'Impact Environnemental et Social (EIES) et la livraison des différents
rapports et documents qui l'accompagnent parmi les critères
nécessaires pour l'obtention de la concession d'exploitation, au
même titre que la présentation d'un plan de réhabilitation
environnemental du site après son exploitation. En Côte d'ivoire,
cette recommandation a été incluse dans le code minier. Ces EIES
sont à réaliser suivant l'orientation de l'Agence Nationale de
l'environnement (ANDE) à travers des termes de référence
qui leur servent de guide. Elles sont validées par l'ANDE à la
suite d'un examen technique du rapport final de celles-ci. La
Société minière de droit australien EQUIGOLD
déclare ainsi "avoir investi
50 milliards de francs CFA avant la sortie de son premier
lingot d'or de la mine de Bonikro". Elle avait aussi mis sur pied un fonds
de développement communautaire en 2005, estimé à 100
millions de francs CFA (152 440 euros) par an. C'est dans ce contexte qu'un
certain nombre d'actions en faveur des populations de Hiré ont
été menées.
Depuis la phase d'exploration débutée en 1996
par EQUIGOLD CI jusqu'en 2015, ce sont au total trois études d'impact
environnementales et sociales (EIES) et une révision d'EIES qui ont
été réalisées pour le compte de NEWCREST dans la
sous-préfecture de Hiré. Elles ont été
réalisées par plusieurs cabinets privés intervenant dans
les domaines de l'environnement et des études sociologiques. Ce sont
entre autres : CECAF international, Channel research, BURGEAP COTE D'IVOIRE et
Arc Ingénierie. Ces EIES ont porté successivement sur l'ouverture
de la mine de Bonikro, l'extension du bassin à cyanure, l'ouverture de
la fosse de Hiré.
5.1.2 Méthode d'intervention de la compagnie par
l'approche du jeu des doléances et des promesses
Au début, au-delà de la réalisation de
l'EIES, la compagnie n'avait aucun plan cohérent d'actions
concrètes. L'État ivoirien n'avait pas non plus de
stratégie rationnelle pour le développement local. Il a donc
laissé le soin à l'entreprise concessionnaire d'aborder les
populations "pour que celles-ci disent ce qu'elles voudraient que la mine
fasse pour elles". EQUIGOLD et LGL ont débuté par une
démarche d'actions philanthropiques au profit des populations. La
construction d'infrastructures à usage communautaire a été
menée de manière sporadique et selon le bon vouloir de la
compagnie minière ainsi que les pressions et colères des
populations. La compagnie minière a entrepris de tenir des rencontres
avec les populations au cours desquelles les doléances étaient
formulées. Cela a entrainé la réalisation de projets non
hiérarchisés et non prioritaires, ne répondant pas aux
besoins communs les plus essentiels pour les populations. Par la suite,
EQUIGOLD et LGL ont organisé des réunions où les
communautés ont mieux exprimé leurs besoins collectifs. Les
actions réalisées par LGL entre 2009 et 2010 résultent de
cette nouvelle démarche (voir tableau 17)
154
.
155
Tableau 17 : récapitulatif des investissements de
LGL à Hiré entre 2009 et 2010 I/ Investissements de LGL en
participation à la vie communautaire
Zone
|
Localités
|
Nature de l'investissement
|
Montant FCFA)
|
Hiré
|
Bouakako/Gogobro/Douaville/ Kagbè/Zaroko/Hiré
village
|
12 bâches de 64m28m et 1200 chaises malaga
|
18.822.000
|
Gogobro
|
Appui matériel et financier aux
obsèques du patriarche
|
1.000.000
|
Communauté musulmane/Hiré
|
Don de sucre
|
200.000
|
Collège municipal
|
Don de 80 tables bancs
|
700.000
|
Hiré FC
|
Appui financier au club de football pour la saison
2009-2010
|
27.000.000
|
5 campements autour de la mine
|
Organisation d'un arbre de noël en
décembre 2008+ autres petites activités
|
1.831.350
|
Jeunesse communale de Hiré
|
Don d'équipements sportifs (ballons, poteaux de but)
|
269.000
|
Centre de santé urbain de Hiré
|
Don de médicaments
|
337.840
|
Total Hiré
|
50.160.190
|
Oumé
|
Gnanoufla/Gabia/Doka/Gotta Baoulé
|
7 bâches de 64 m2 et 1200 chaises malaga
|
10.979.500
|
Communauté musulmane
|
Don de sacs de sucre
|
100.000
|
Dougbafla
|
Don de médicaments de première
nécessité et don d'équipements sportif
|
2.800.000
|
Centre de production de la petite enfance
|
Don de jouets participation à leur arbre de noël
2008-2009
|
376.000
|
Hôpital général
|
Don de moustiquaires imprégnés + 4.000.000 offert
par LGL pour autres besoins de ces structures
|
6.300.000
|
Total Oumé
|
20.555.500
|
Hiré et Oumé
|
15 villages (Hiré-Oumé +
campements)
|
Don (vivres) pour les enfants des villages en vue l'organisation
de la fête de Noel 2009
|
1.275.000
|
15 villages
|
Etudes Marp Financées par la
compagnie pour l'identification des besoins des populations
|
45.000.000
|
Total Hiré et Oumé
|
46.275.000
|
TOTAL I
|
116.990.690
|
156
II/ Investissements de LGL en appui aux activités
génératrices de revenus
Région
|
Localités
|
Nature de l'appui
|
Cout (F CFA)
|
Hiré
|
Bonikro/Bandamakro/ Konankro/chantier Konankro/Petit
Bouaké
|
1 broyeuse multifonctionnelle et un abri + formation des
bénéficiaires
|
27.777.500
|
Total II
|
27.777.500
|
III/ Investissements de LGL en infrastructures socio
communautaires
Région
|
Localités
|
Nature de l'appui
|
Coût (F CFA)
|
Hiré
|
Gogobro
|
Construction de Maternité,
maison de la sage-femme, foyer des jeunes, 4 classes et 1
marché ouvert
|
138.000.000
|
Gogobro
|
Installation de l'automatisme du château d'eau
|
2.500.000
|
Hiré ville
|
Construction de la grille de
protection du stade et des vestiaires (appui au Hiré
FC)
|
30.350.000
|
Hiré ville
|
Reprofilage voirie
|
7.000.000
|
Bonikro
|
Construction et équipement
d'une cantine scolaire à l'école primaire
|
9.120.000
|
Bandamakro/Konankro/Chanti er-konankro/Petit Bouaké
|
Entretien voie d'accès aux
campements (trois fois/an)
|
10.454.400
|
Petit Bouaké/Konankro-
chantier
|
Construction de pompe
hydraulique villageoise
|
25.823.000
|
Total III
|
223.247.400
|
TOTAL GENERAL
|
368.015.590
|
Source : NEWCREST, 2016
157
5.2. PRESENTATION DU PROJET MINIER AUX DIFFENTES
COMMUNAUTES
5.2.1. La prise de connaissance par
l'entreprise de l'architecture socio-spatiale autour de l'exploitation de
l'or
A leur arrivée à Hiré, les
premières actions des sociétés minières, EQUIGOL
puis LGL ont été consacrées à la prise de contact
avec les autorités administratives. Celles-ci déjà
informées de leur arrivée par voie de circulaire les ont
accueillis et introduits auprès des populations. C'est avec le
préfet et le sous-préfet que les sociétés
minières ont pu identifier et connaitre les différentes
populations avec qui elles avaient à échanger.
A son arrivée, la compagnie minière EQUIGOL a
pris attache avec les populations qui étaient les premières
touchées par les effets de leur activité. Différentes
rencontres ont eu lieu à cet effet entre les responsables traditionnels
(chef de village, chef de campements, chefs des communautés ethnique) et
les responsables de la mine. Les informations sur l'opportunité de leur
présence et les avantages pour la population ont été mises
en avant. Le quitus de la population étant indispensable à
l'activité minière aurifère, la compagnie minière a
convenu avec elle des conditions de l'extraction. L'or est
désigné comme un métal au caractère mystique dont
l'extraction nécessite des cérémonies de libations et
autres pratiques cultuelles, primordiales à son exploitation. Les
conditions de ces libations exprimées, EQUIGOLD s'est empressé de
faire face aux charges y afférant.
Les différentes rencontres se sont multipliées
entre la société minière et les populations avec des
promesses diverses soutenues par les autorités administratives
présentes. Ces rencontres se sont multipliées et la mine a
demandé aux populations de lui adresser leurs doléances.
L'adresse de ces doléances a donné lieu à des rencontres
à l'intérieur des communautés.
Cette approche de la compagnie minière s'est faite dans
le souci d'établir une proximité avec les communautés.
Cependant, la compagnie minière présente ses actions en faveur
des communautés locales non pas comme des droits pour les populations
mais comme des actions de charité et de
générosité.
Les actions en faveur des communautés ne sont pas
présentées comme une obligation pour la compagnie minière
car le code minier de 1995 en vigueur jusqu'en 2014, ne comportait aucune
prescription formelle en la matière.
158
5.2.2. Les rencontres intracommunautaires sur le projet
minier
La nécessité pour les communautés de
soumettre à la mine leurs doléances a donné lieu à
des rencontres au sein des localités afin de la formulation de leurs
doléances. Ainsi, les différents villages et campements ont-ils
organisé des rencontres qui ont été des tribunes pour
débattre des besoins de ces communautés et de leur
hiérarchisation par priorité.
5.2.3. Une question de préséance autour des
investissements de la compagnie minière
L'identification des villages propriétaires terriens
des sites occupés par la mine, a fait naître des conflits
inter-villages qui ont opposé pour le site de Bonikro, les villages de
Hiré, Bouakako, Gogobro, Kagbè et Gabia, un village de la
sous-préfecture d'Oumé. Ces villages revendiquent tous la
propriété des terres de la mine de Bonikro. Cependant
après des pourparlers, le village de Gogobro a été reconnu
comme village hôte de la mine de Bonikro. Pourtant, les actions sociales
menées par la mine, ont donné lieu à une autre forme de
litige : celle de la préséance. Au nom de son titre de
propriétaire coutumier des terres qui accueillent l'usine de la mine de
Bonikro, Gogobro estime que la société minière devrait
entreprendre plus d'actions sociales pour elle. Gogobro se positionne donc
comme devant être le premier bénéficiaire de ces avantages
contrairement aux autres villages Watta. La question de préséance
intervient également au sujet des campements autour de la mine. Les
Watta sont tous unanimes sur le fait que les campements autour de la mine ne
devraient pas bénéficier des actions de développement.
Bonikro, Bouakako, Koutouklou-konankro, Petit Bouaké et Chantier
Konankro sont des campements d'allogènes Baoulés. Ceux-ci
n'étant pas dans leur aire géographique, les populations de
Gogobro estiment qu'elles ne devraient recevoir de la mine les avantages
liés à leur déplacement et rien d'autres. Cette approche
déplu aux populations des campements et cela a créé des
tensions entre les Dida et les Baoulé de ces campements. Les Dida,
peuple autochtone, estiment que ce sont eux qui perdent leur terre et que les
Baoulé pourront retourner chez eux retrouver leur terre alors qu'eux
l'auront perdus définitivement. Cependant, les populations des
campements estiment que Gogobro en tant propriétaire terrien devrait les
réunir pour parler d'une même voix plutôt que de vouloir
canaliser seule l'ensemble des investissements.
159
5.3. LES DOLEANCES SOUMISES A LA COMPAGNIE
MINIERE
5.3.1. Un exemple du processus de formulation de
doléances : Gogobro
Les premières rencontres entre la mine et les
populations de Hiré ont lieu en 2004. La compagnie venait de
détecter les prémices d'un gisement potentiellement exploitable.
Le directeur général de la compagnie EQUIGOLD a organisé
en présence des autorités administratives, des réunions
avec les communautés locales afin de les préparer à
l'exploitation prochaine des richesses de leur sous-sol. La compagnie a alors
approché les six villages et les groupes locaux à qui elle a
demandé ce qu'ils souhaitent pour le développement en
échange de leur autorisation d'exploiter l'or dans la zone. C'est
à cette occasion que, face aux doléances des populations, le
président directeur général a pris l'engagement verbal de
veiller à la réalisation de toutes ces demandes une fois les
travaux de construction terminés et les travaux d'exploitation
démarrés. Ces doléances portaient pour l'essentiel sur la
question de l'emploi des jeunes et les équipements pour
l'amélioration des conditions de vie des populations. Cependant,
ignorants tous des activités minières industrielles et des
dégâts qu'elles pourraient causées, les premières
doléances des populations ont portées sur des choses de petites
valeurs aux répercussions sociales faibles et non durable comme des
chaises et des bâches.
Gogobro, est le village hôte car propriétaire
coutumier des terres occupées par la mine de Bonikro. Des
négociations ont par la suite été menées
exclusivement avec celui-ci. La première rencontre avec le
président directeur général de la mine a eu lieu le 08
Septembre 2004 à 11 h à la salle de mariage de la mairie de
Hiré. Cette rencontre entre la notabilité de Gogobro et le
directeur général d'EQUIGOLD s'est tenue en présence du
sous-préfet et du premier adjoint au maire de Hiré. L'ordre du
jour de la réunion était l'appréciation des
doléances posées par les villageois de Gogobro. La
notabilité à l'occasion de cette rencontre, a formulé les
doléances suivantes :
Construction d'un marché ; Dotation en 300 chaises +2
bâches ; Construction du logement de la sage-femme ; Extension du
lotissement du village ; Construction d'un château d'eau ; Dotation d'une
broyeuse de manioc ; Equipement en matériel agricole ; Construction d'un
foyer des jeunes ; Réhabilitation de la route
Douaville-Gogobro-Hiré et enfin la réhabilitation des
bâtiments de l'école. Toutes ces doléances ont eu un
écho favorable à l'exception du projet d'extension du lotissement
du village que le directeur général a cependant promis de
soumettre au conseil d'administration.
160
Les doléances de Gogobro ainsi exprimées
concernent les chaises et les bâches. Cependant, avant même le
début de l'exploitation du gisement, EQUIGOLD fusionne avec LGL et
change de directeur général. Les promesses faites par l'ancien
directeur général restent en suspens. A l'installation de la
nouvelle direction, les populations de Gogobro ont par courrier informé
la nouvelle direction de la mine des promesses qui leur ont été
faites par l'ancien directeur général. Cependant, du fait du
caractère non formel de ces engagements, la direction de LGL a
refusé de les satisfaire. Ce refus a provoqué chez les
populations un véritable mécontentement qui s'est traduit par des
mouvements de blocus et de sit-in sur les voies d'accès à la
mine. Cette situation a perduré jusqu'à ce que LGL accepte de
relancer le débat avec les populations. Le 26 janvier 2010, une
réunion a donc lieu avec les populations de Gogobro. Cette
réunion a porté sur l'état d'avancement de
l'exécution du protocole d'accord de 2004 entre la société
minière et le dit village. Il en est ressorti que certaines
doléances ont été entièrement
réalisées tandis que d'autres étaient en cours de
réalisation. Cette rencontre, a été l'occasion pour
Gogobro d'exprimer de nouvelles doléances en insistant sur
l'exécution des premières dont la réalisation tarde
à se faire. Après cette rencontre, dans la même
année, la mine est reprise par NEWCREST une société
minière australienne. Les populations sont encore dans l'attente de la
réalisation de ces promesses tout en menant quelques actions pour ne pas
se faire oublier de la société minière. Suite aux
différents mouvements de protestations (les sit-in, les blocus et les
barrages des voies d'accès à la mine) dont l'intensité
s'est de plus en plus accrue, les nouvelles autorités de la mine ont
décidé de rencontrer les autorités traditionnelles de
Gogobro. Ainsi, le 12 Septembre 2015, à l'hôtel GOLD de
Hiré, s'est tenu une rencontre entre les autorités de Gogobro et
le cabinet Guessan, consultant de NEWCREST. Cette rencontre a porté sur
la révision et la mise à jour des accords consensuels de 2004 et
sur les dispositions consensuelles. Ainsi les doléances exprimées
depuis 2004, ont été progressivement exécutées
jusqu'en 2015, où avec les populations de Bouakako propriétaire
foncier de la mine de Hiré, un accord a été signé
pour que le reste des doléances de Gogobro soit réalisées
(voir tableau 18).
161
Tableau 18 : récapitulatif de la
réalisation des requêtes de Gogobro par les différents
gérants de la mine de Bonikro.
DOLEANCES
|
REPONSES DES SOCIETES MINIERES
|
Equigold
|
LGL
|
NEWCREST
|
Dotation en 300 chaises +2 bâches
|
Démarrée
|
|
Achevée
|
Construction d'un marché
|
|
|
Achevée
|
Construction du logement de la sage-femme
|
|
|
Achevée
|
Extension du lotissement du village
|
|
|
Achevée
|
Construction d'un château d'eau
|
|
|
|
Dotation d'une broyeuse de manioc
|
Achevée
|
|
|
Équipement en matériel agricole
|
|
|
|
Construction d'un foyer des jeunes
|
|
|
Achevée
|
Réhabilitation de la route
Douaville-Gogobro-Hiré
|
|
|
|
Réhabilitation des bâtiments de l'école
|
|
|
Achevée
|
Source : nos enquêtes, 2016
Le tableau ci-dessus traduit l'évolution des rapports
entre la compagnie minière et le village propriétaire terrien de
la mine de Bonikro. Les doléances du village de Gogobro exprimées
depuis 2004 ont connu un début d'exécution puis une fois
installée la compagnie minière n'a plus accordé
d'intérêt à ces doléances. Celles-ci sont
restées sans suite jusqu'à la révolte des villageois.
A l'arrivée de NEWCREST à la tête de la
mine, les choses ont connu une nette amélioration qui a permis la
réalisation des équipements demandés (voir photos 20 et
21).
|
Newcrest avec la
construction de ce bâtiment accroit la capacité
de cet établissement.
|
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 20: le bâtiment de trois classes construit
par NEWCREST
|
Le logement de la sage-femme de Gogobro
construit par la
compagnie minière NEWCREST.
|
162
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 22: le logement de la sage-femme
|
Maternité du village de Gogobro, construit par
NEWCREST.
|
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 23: maternité de Gogobro
|
Hangar construit par NEWCREST, servant de
marché à Gogobro.
|
163
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 24: Marché de Gogobro
164
5.3.2 Les doléances des villages Watta :
surenchère ou prise de conscience !
Les doléances des villages Watta ont au fil du temps
connu des évolutions. Au départ, ignorants tous des
capacités financières de la compagnie minière, les
demandes des populations ont porté sur des choses minimes telles que des
chaises et des bâches. Cependant, au fil du temps, avec les informations
qu'elles ont eu par leurs cadres, les populations ont commencé à
être de plus en plus exigeantes avec la compagnie minière. Les
demandes ne portaient plus sur des choses courantes et peu coûteuses mais
sur des équipements réels à effet durable comme des
écoles ou des salles de classe pour augmenter les capacités des
écoles existantes, des centres de santé, des systèmes
hydrauliques villageoises, etc.
5.3.3 Les doléances des campements autour de la
mine
Les cinq campements autour de la mine que sont Bandamakro,
Bonikro, Petit Bouaké, Chantier Konankro et Koutouklou-Konankro, selon
l'EIES de la mine de Bonikro devaient être relocalisés. Pourtant
depuis lors, Petit bouaké et Chantier konankro sont dans l'attente d'une
relocalisation qui semble ne plus être à l'ordre du jour. Cette
demande est la requête première de ces localités. Outre la
demande de relocalisation, les campements autour de la mine ont adressé
un certain nombre de doléances à la mine. Du fait de leur statut
de populations directement impactées par les activités de la mine
ou sa proximité, ces habitants de campements estiment être en
droit de recevoir de la part de la mine des investissements. Leurs
doléances portent sur l'amélioration des conditions de vie et des
indemnisations. Concernant l'amélioration de leurs conditions de vie,
les populations de ces campements demandent que le dispensaire construit
à Bonikro soit équipé de sorte qu'elles ne soient plus
obligées de se rendre en ville pour les soins de première
nécessité. Elles demandent également que la mine
réalise pour elles des projets de développement social.
Les populations des campements déplacés
demandent aussi que la mine leur paie des indemnités car elles ont
été déplacées sans mesure d'accompagnement. Elles
estiment que la compagnie minière a profité de leur ignorance de
l'époque et elles demandent réparation de ce fait.
5.3.4 Les doléances de l'administration publique
locale
La mairie de Hiré revendique son droit de
première autorité décentralisée. De ce fait, elle
estime que les autorités de la mine l'ont outrepassé en demandant
directement aux communautés leur besoin sans passer par elle. Toutefois,
la mairie a sollicité le soutien de la compagnie minière
165
pour l'aider dans les actions de développement local.
De par son statut d'administration décentralisée, la mairie doit
mener des actions d'intérêt local, promouvoir l'initiative
privée, encourager les acteurs locaux à la prise de
responsabilité et faciliter la participation des populations. C'est dans
ce cadre que la mairie accompagne désormais la compagnie dans ses
actions de développement local. Les doléances de la mairie
à la compagnie minière portent sur des projets de
développement tels que l'équipement de l'hôpital ; la
transformation du collège en lycée ; le financement du budget de
la mairie ainsi que du matériel de bureau.
La préfecture de Divo et la sous-préfecture de
Hiré en tant qu'administration déconcentrée sont le relais
de l'État auprès de la compagnie minière. Dans ce
contexte, ces structures de l'administration accompagnent les responsables de
la compagnie minière dans leurs rapports avec les populations. Les
quelques doléances qu'elles ont adressées à la mine ont
porté sur des équipements en matériels de bureau (chaises,
tables, ordinateurs, etc.).
5.4. CONTRIBUTION DE LA COMPAGNIE MINIERE A LA
REALISATION D'INFRASTRUCTURES ET D'EQUIPEMENTS
Les tableaux 19, 20 et 21, ci-dessous retracent les
réalisations de la société minière sur l'ensemble
des localités impactées par ses activités sur la
période 2009-2010. On constate que les investissements à
Hiré sont plus importants que ceux d'Oumé. Cela s'explique par le
fait que la sous-préfecture de Hiré est plus impactée par
l'activité aurifère et que les infrastructures de la mine sont
sur son territoire. Les investissements de la société
minière s'organisent en trois points essentiels : la participation
à la vie communautaire, l'appui aux activités
génératrices de revenus et les infrastructures
sociocommunautaires. Les investissements les plus colossaux s'observent au
niveau des infrastructures communautaires et s'élèvent à
223 247 400 F CFA. A ce niveau, on observe que le village de Gogobro,
propriétaire coutumier des terres qui abritent la mine de Bonikro
concentre à lui seul 140 500 000 F CFA d'investissement. Soit un peu
plus de la moitié des investissements globaux réalisés
dans ce secteur.
166
Tableau 19 : investissements de LGL en participation
à la vie communautaire, entre 2009 et
2010
Zone
|
Localités
|
Nature de l'investissement
|
Montant FCFA)
|
Hiré
|
Bouakako/Gogobro/Douaville/ Kagbè/Zaroko/Hiré
village
|
12 bâches de 64m28m et 1200 chaises malaga
|
18 822 000
|
Gogobro
|
Appui matériel et financier aux obsèques du
patriarche
|
1 000 000
|
Communauté musulmane/Hiré
|
Don de sucre
|
200 000
|
Collège municipal
|
Don de 80 tables bancs
|
700 000
|
Hiré FC
|
Appui financier au club de football pour la saison
2009-2010
|
27 000 000
|
5 campements autour de la mine
|
Organisation d'un arbre de noël en décembre 2008+
autres petites activités
|
1 831 350
|
Jeunesse communale de Hiré
|
Don d'équipements sportifs (ballons,
poteaux de but)
|
269 000
|
Centre de santé urbain de Hiré
|
Don de médicaments
|
337 840
|
Total Hiré
|
50 160 190
|
Oumé
|
Gnanoufla/Gabia/Doka/Gotta Baoulé
|
7 bâches de 64 m2 et 1200 chaises malaga
|
10 979 500
|
Communauté musulmane
|
Don de sacs de sucre
|
100 000
|
Dougbafla
|
Don de médicaments de première
nécessité et don d'équipements sportif
|
2 800 000
|
Centre de production de la petite enfance
|
Don de jouets participation à leur arbre de noël
2008-2009
|
376 000
|
Hôpital général
|
Don de moustiquaires imprégnés + 4 000 000 offert
par LGL pour autres besoins de ces structures
|
6 300 000
|
Total Oumé
|
20 555 500
|
Hiré et
Oumé
|
15 villages
(Hiré-Oumé + campements)
|
Don (vivres) pour les enfants des villages en vue
l'organisation de la fête de Noel 2009
|
1 275 000
|
15 villages
(Hiré-Oumé + campements)
|
Etudes Marp Financées par la compagnie
pour l'identification des besoins des populations
|
45 000 000
|
Total Hiré et Oumé
|
46 275 000
|
TOTAL I
|
116 990 690
|
Source : NEWCREST, 2016
167
Tableau 20 : investissements de LGL en appui aux
activités génératrices de revenus
Région
|
Localités
|
Nature de l'appui
|
Cout (F CFA)
|
Hiré
|
Bonikro/Bandamakro/ Konankro/chantier konankro/Petit
Bouaké
|
1 broyeuse multifonctionnelle et
un abri + formation des bénéficiaires
|
27 777 500
|
Total II
|
27 777 500
|
Source : NEWCREST, 2016
Tableau 21 : investissements de LGL en infrastructures
socio communautaires
Région
|
Localités
|
Nature de l'appui
|
Coût (F CFA)
|
Hiré
|
Gogobro
|
Construction de Maternité,
maison de la sage-femme, foyer
des jeunes, 4 classes et 1 marché ouvert
|
138 000 000
|
Gogobro
|
Installation de l'automatisme
du château d'eau
|
2 500 000
|
Hiré ville
|
Construction de la grille de
protection du stade et des vestiaires (appui au Hiré
FC)
|
30 350 000
|
Hiré ville
|
Reprofilage voirie
|
7 000 000
|
Bonikro
|
Construction et équipement
d'une cantine scolaire à l'école primaire
|
9 120 000
|
Bandamakro/Konankro/ Chantier-konankro/Petit Bouaké
|
Entretien voie d'accès aux
campements (trois fois/an)
|
10 454 400
|
Petit Bouaké/Konankro- chantier
|
Construction de pompe
hydraulique villageoise
|
25 823 000
|
Total III
|
223 247 400
|
TOTAL GENERAL I et II et III
|
368 015 590
|
Source : NEWCREST, 2016
Le moins que l'on puisse dire, c'est que ces investissements
sont très faibles. Les populations les considèrent ainsi et
expriment leur mécontentement en ce qui concerne l'approche de la mine.
Elles font valoir qu'il s'agit d'une approche coloniale de "petits cadeaux
faits aux noirs incultes pour mieux les exploiter". Il en résulte
une crispation des rapports avec la mine. Tous les villageois sont d'accord
pour dire que l'or rapporte gros sans qu'elles en soient les
168
bénéficiaires locaux "quand même se
sont leurs terres qui le produit". Ces faibles retombés en
développement se conjuguent avec les impacts négatifs des
dépossessions foncières. Des rivalités existent entre les
différents villages à propos de la propriété
foncière coutumière des terres qui abritent l'exploitation
industrielle de l'or. Tous ces mécontentements ne rendent pas le climat
social paisible. Certains villages estiment que la mine leur doit beaucoup et
fait peu, d'autres s'opposent aux arguments des premiers. En somme le mode
opératoire par cadeau n'est satisfaisant pour personne et les
populations se sentent peu à peu de plus en plus abusées par la
société minière Au bout de trois ans, le gouvernement
prend la décision de proposer le cadre organique d'un plan de
Développement Local Minier.
5.5. LA PLANIFICATION DU DEVELOPPEMENT LOCAL SUR FONDS
MINIERS
Il est prescrit par l'article 125 du code minier la mise en
place par l'Administration pour chaque unité locale d'exploitation
minière, d'un comité de développement local. Ce
comité est chargé de la mise en oeuvre des projets de
développement économique et social pour les communautés
locales. Ce comité est l'organe par lequel une utilisation efficace des
fonds et des mesures d'assistance technique et de renforcement des
capacités peuvent être mise en oeuvre par le titulaire du permis
d'exploitation.
5.5.1 La création d'un Comité de
Développement minier de Hiré
L'arrêté interministériel
n°640/MIM/MEMIS du 22 décembre 2015 crée le Comité de
Développement Local Minier (CDLM) de la mine d'or de Hiré dans le
département de Divo et précise ses attributions, son organisation
et son fonctionnement conformément à l'article n°131 du
décret n°2014-397 du 25 juin 2014.
Le CDLM de Hiré a pour mission de gérer le plan
de développement local minier élaboré par la compagnie
minière NEWCREST en concertation avec les communautés riveraines
et les autorités administratives territoriales et locales. Ce plan est
destiné aux communautés des villages identifiés comme
« localités affectées » par l'activité
minière de la sous-préfecture de Hiré tel que conclue par
les différentes Études d'Impact Environnemental et Social. Il
couvre les domaines suivants :
- le développement d'infrastructures et
d'équipement de base ;
- le développement des services sociaux de base et du
cadre de vie ; - la promotion de l'emploi ;
- le développement de l'économie locale ;
169
- le développement du capital humain.
Les missions dévolues au CDLM de Hiré concernent
également la mise en oeuvre, le suivi de l'exécution des projets,
la gestion du fonds de développement local, l'exécution et le
suivi des dépenses.
Installé officiellement le 25 Janvier 2016 en
présence des autorités locales, le CDLM de Hiré est
dédié aux communautés des 16 localités
identifiées comme impactées (voir tableau 22).
Tableau 22 : les localités concernées par
le CDLM de Hiré
1. La commune de Hiré
|
9. Petit Bouaké
|
2. Hiré village
|
10. Bandamakro
|
3. Bouakako
|
11. Chantier-Konankro
|
4. Gogobro
|
12. Koutouklou-Konankro
|
5. Zaroko
|
13. Carrière
|
6. Kagbè
|
14. N'driyaokro
|
7. Douaville
|
15. N'guessankro
|
8. Bonikro
|
16. Yaokouassikro
|
Source : CDLM de Hiré, 2015
La zone d'influence du CDLM de Hiré va au-delà
de la sous-préfecture de Hiré comme le montre la figure 27. Il
est composé des représentants suivants : le préfet du
département de Divo, président ; le président du conseil
régional du LOH-DJIBOUA, vice-président ; le directeur
régional de l'industrie et des mines de DIVO ou son représentant,
secrétaire ; le sous-préfet d'Oumé ; le
député d'Oumé sous-préfecture ; le
député de Divo sous-préfecture ; le maire de Hiré ;
le chef de chaque village ou son représentant ; une représentante
des femmes de chaque village ; un représentant des jeunes de chaque
village ; un représentant de la compagnie minière exploitante.
Figure 27 : Carte de la zone d'influence du CDLM de
Hiré
Conception : YOBO, 2016
170
171
La composition du CDLM telle que constituée enregistre
des modifications par rapport au Comité de Développement Local
(CDL) précédemment constitué qui ne comprenait pas les
localités de la sous-préfecture de Oumé impactées
par l'activité minière à Hiré. Aux localités
existantes dans la version précédente s'ajoutent donc les
localités de Carrière, N'driyaokro, N'guessankro et Yaokouassikro
qui sont considérées comme impactées par la route
d'acheminent du minerai de la commune de Hiré à la mine de
Bonikro.
5.5.2 L'implication des mutuelles et associations dans la
gestion du développement local
Deux associations mènent des actions en faveur des
populations auprès de la société minière : la
Mutuelle pour le Développement de Hiré (MUDH) et la Cellule
Stratégique pour la Défense et la Protection des
Intérêts de Bouakako (CSDPIB). La succession de différends
entre la société minière et les populations a
changé l'image que celles-ci avaient de la mine.
Appréhendée au début de ses activités comme une
aubaine, une opportunité, la mine est désormais
considérée comme une mafia financière. Celle d'une
société capitaliste venue essentiellement pour amasser les
richesses et non comme un partenaire du développement local. Le
président de la CSDPIB l'exprime clairement quand il dit :
« Les sociétés minières, c'est
une sorte de mafia financière, vorace, qui dans les rapports avec les
novices n'a pas de pitié. Elles viennent faire miroiter des choses aux
populations et au moment où elles sont dans leur position attentive,
elles ont déjà fini et vous n'avez qu'à constater
».
Ainsi, voyant leurs parents subir le dictat de ces
sociétés minières, certains cadres originaires de ces
localités directement touchées par les activités
minières se sentent-ils interpellés et poussés à
intervenir en tant que "fils" de la communauté. Ils s'érigent
alors en éveilleurs de conscience soit à titre individuel soit en
créant un collectif.
5.5.2.1 Les revendications de la MUDH
La MUDH est une association des cadres pour mener des actions
en faveur du développement de Hiré. Née depuis 2010, les
actions de la mutuelle ont généralement été dans ce
sens. Cependant, selon le président de la mutuelle, il serait
inconcevable que les cadres restent silencieux face aux injustices faites par
la société minière aux populations. C'est dans ce contexte
que la MUDH a commencé à intervenir et à mener des actions
à l'encontre de la mine. Aussi la MUDH estime-t-elle que les populations
qui jouissent des droits fonciers coutumiers
172
et celles qui vivent sur les terres où l'exploitation
minière se déroule, sont exclues du partage des
bénéfices de la répartition ou la redistribution juste et
équitable des retombées de cette exploitation minière.
Ainsi, la MUDH s'est depuis 2015, engagée dans la lutte pour
préparer l'avenir des populations locales après l'exploitation
minière. Elle envoie des courriers de protestations à la
société et accompagne les populations dans leurs actions sur le
terrain.
5.5.2.2 La reconnaissance par la société
minière des représentants des communautés
villageoises
La MUDH et la CSDPIB apparaissent ainsi reconnues comme des
représentants influents des communautés villageoises. La carte
dénommée "Carte d'identification des chefs de village et
autres personnes influentes dans le Watta" fait partie de
la documentation fournit par le cabinet d'expertise KKB-GIS SD en
décembre 2014 (Figure 28). On y voit représenté la MUDH et
la CSDPIB et les ministres originaires de la région.
Cette reconnaissance se traduit par l'association de ces
groupements et personnalités à l'identification des besoins des
populations et à la mise en oeuvre des actions communautaires de la
compagnie minière. Cette association permet à la compagnie
minière d'avoir en face des personnes ressources capables de prendre des
décisions et de servir d'interlocuteurs avisés auprès des
populations.
Les différents villages de la sous-préfecture et
particulièrement les villages propriétaires terriens sont
représentés sur cette carte. Pour le village de Gogobro, en plus
du chef du village YAO Kodjo Wréga Guillaume, on trouve le
président de la MUDH, le Dr DAGO, puis le ministre Paul Yao N'DRE. Pour
Bouakako, village hôte de la mine de Hiré, on trouve en plus du
chef N'GUESSAN Koffi Emmanuel, le ministre Joseph DJABLE et GNAMINI
Jérémie, président du CSDPIB.
173
Figure 28: carte d'identification des chefs de village et
autres personnes influentes dans le watta
Source : NEWCREST, 2017
174
5.6. LE ROLE DES AUTORITES DECENTRALISEES DE LA
SOUS-PREFECTURE DE HIRE
L'administration décentralisée est
assurée dans le cadre des collectivités territoriales que sont
les régions et les communes.
5.6.1. Le Conseil Régional de Divo
Le conseil régional a été institué
par l'article 36 de l'ordonnance n°2011-262 du 28 septembre 2011
d'orientation sur l'organisation générale de l'administration
territoriale de l'État par la région et la commune. C'est une
collectivité territoriale ou une entité administrative
dotée de la personnalité morale et de l'autonomie
financière. Il a pour mission, dans la limite des compétences qui
lui sont expressément dévolues, d'organiser la vie collective et
la participation des populations à la gestion des affaires locales, de
promouvoir et réaliser le développement local, de moderniser le
monde rural, d'améliorer le cadre de vie, de gérer les terroirs
et l'environnement.
Le conseil régional du Lôh-djiboua couvre toute
la région de Lôh-djiboua composée des départements
de Divo, Guitry et Lakota et couvre les communes de Hiré et Didoko. Il
est administré par le président du conseil régional,
assisté par 5 vice-présidents. Il a pour mission d'organiser et
réaliser le développement de la région qu'il couvre. Le
conseil régional du Lôh-djiboua dont le siège est à
Divo, chef-lieu de région s'étend sur une superficie de 10 650
km2 avec une population de 729 169 habitants.
5.6.2. Le conseil municipal de Hiré
La commune de Hiré qui s'étend sur une
superficie de 1854 ha, compte au RGPH 2014 une population de 31 960 habitants.
Elle est administrée par un conseil municipal, à la tête se
trouve le maire qui en est l'administrateur principal. Le maire est aidé
dans ses tâches par des adjoints. Le conseil municipal émane de la
population communale. Il est élu pour un mandat de cinq ans. C'est une
structure technique de gestion communautaire décentralisée de
l'Etat qui finance la réalisation de certaines infrastructures sociales
et économiques (centre de santé, marché, foyer de jeunes,
voirie, etc.) dans la commune de Hiré.
5.6.3 La compagnie minière installée
à Hiré
Depuis 2010, NEWCREST est la compagnie minière qui
exploite les gisements aurifères de la sous-préfecture de
Hiré. Newcrest Mining Limited (NEWCREST), société
d'origine
175
australienne est l'une des plus grandes sociétés
minières d'or dans le monde en termes de capitalisation, avec environ 10
000 employés et sous-traitants. Son activité primaire est la
production de l'or avec le cuivre comme produit secondaire. De façon
concise la stratégie de NEWCREST consiste à développer des
opérations de grandes tailles et de longue vie avec des techniques
d'extractions d'or moins coûteuses. En se basant sur cette
stratégie NEWCREST continue à étendre son portefeuille
d'opportunité dans l'or dans le but de les convertir en mines
opérationnelles. Les mines de NEWCREST sont situées en Australie,
en Papouasie-Nouvelle-Guinée, en Indonésie et en Côte
d'Ivoire dans la région de Hiré.
Les activités de NEWCREST en Côte d'Ivoire sont
axées autour de trois points que sont :
- l'exploration qui représente l'étape la plus
importante. Elle consiste en la recherche et la découverte de substance
utile en quantité suffisante et économiquement exploitable avec
profit pour la compagnie minière ;
- l'exploitation qui consiste à l'extraction du minerai
du sous-sol en utilisant des excavatrices et des camions bennes pour le
transport du minerai. Cette opération est précédée
du dynamitage des roches, lorsque l'on atteint les roches les plus dures ;
- le traitement du minerai qui consiste à concasser les
roches pour ensuite récupérer l'or à l'aide de la
technique de lixiviation en cuves, qui nécessite l'usage du cyanure et
du charbon actif pour capter l'or.
5.6.4. La création d'un fonds de
développement local minier
Pour faire opérer ce comité minier, un fonds de
développement lui a été affecté. Les ressources du
CDLM de la mine d'or de Hiré proviennent du « Fonds de
Développement Local » constitué par la société
conformément à l'article 129 du décret n°2014-397 du
25 Juin 2014. Ce fonds est alimenté, chaque année, par un
prélèvement de 0,5% sur le chiffre d'affaires de la
société d'exploitation NEWCREST. Ces ressources doivent
être logées dans un compte ouvert au nom du CDLM de la mine d'or
de Hiré dans les livres d'un établissement bancaire en Côte
d'Ivoire. Ce compte est alimenté par la société
minière par virement bancaire à la fin du mois suivant chaque
trimestre.
Malgré la disponibilité de neuf cent
quatre-vingt-quatre million sept cent cinquante-neuf mille cent quatre francs
(984 759 104 FCFA), cumul des fonds (2015-2017), il faut noter que le CDLM de
Hiré n'avait pas commencé la mise en oeuvre des projets avant la
deuxième moitié de 2018 en dépit de la rencontre du 20
avril 2018 portant adoption du projet de budget
176
prévisionnel de l'exercice 2018. Désormais
aplani, ce retard s'explique par des divergences de vue entre les potentiels
bénéficiaires dans la mise en place du bureau exécutif.
Des appels d'offre sont en cours d'élaboration pour l'exécution
des projets retenus dans l'ensemble des 16 localités impactées
dont la ville de Hiré.
Tableau 23 : récapitulatif des investissements
sociaux majeurs réalisés par l'entreprise
minière
NEWCREST
Unité : F CFA
|
Années
|
Total
|
2015
|
2016
|
2017
|
Contribution de la mine au CDLM
|
148.534.778
|
334.393.664
|
501.830.662
|
984.759.104
|
Source : NEWCREST, 2018
5.6.5 La mise en place d'un document de Plan de
Développement local
La compagnie minière embarrassée par ses propres
tâtonnements et ceux des populations a décidé de prendre
les devants des choses et de produire une action rationnelle afin d'organiser
ses actions en faveur du développement de la sous-préfecture de
Hiré. Ainsi, l'entreprise minière NEWCREST en partenariat avec le
PNUD, a de concert avec les populations locales, décidé
d'élaborer un plan de développement local (PDL).
L'élaboration du PDL de Hiré s'est inscrite dans une approche
participative fondée sur des principes directeurs du diagnostic
participatif et de l'approche de planification et de gestion axée sur
des résultats. Elle a vu la participation des acteurs institutionnels
comme les autorités administratives, les élus locaux (le maire,
les conseillers municipaux, les services techniques de l'agriculture, des
mines, de l'ANADER, les ONG locales, etc.) ; puis celle de la population
locale.
Ce plan de développement local a été
synthétisé autour de trois axes d'interventions que sont :
- axe1 : développement des infrastructures sociales de
base et du cadre de vie ;
- axe2 : développement de l'économie locale et;
- axe3 : développement du capital humain incluant le
genre, le VIH/SIDA, les droits de l'homme.
Le coût total de la mise en oeuvre du PDL sur les trois
années est estimé à 2 521 587 000 F CFA. Ce montant couvre
aussi bien la mise en oeuvre des différents axes d'intervention que les
charges liées à la coordination générale de ses
actions. Le PDL élaboré et mis en oeuvre par
177
NEWCREST selon le programme triennal 2012-2015 résulte
de la seule initiative de la compagnie minière. Cette initiative est
formalisée par le code minier de 2014 en son article 124.
Un dispositif institutionnel a été mis sur pied
pour assurer la mise en oeuvre du PDL. Il comprend deux comités : le
comité de pilotage qui est l'instance de décision et le
comité de développement local qui est chargé de la
coordination et du suivi de la mise en oeuvre des actions de
développement sur le terrain. D'abord prévu pour être un
programme triennal (20122015), le PDL a été formalisé dans
le code minier de 2014.
5.7. LA COOPERATION NEWCREST PNUD POUR LE PLAN
STRATEGIQUE DE DEVELOPPEMENT ET LE PDL DE HIRE DE 2012 A 2015
Le milieu local manque d'organes véritables de
coordination du développement local. La nouvelle institution du CDLM en
2012 étant loin d'être opérationnelle. Toutefois, devant
l'urgence de faire face de manière rationnelle aux demandes des
populations, la compagnie a pris les devants en sollicitant le Programme des
Nations Unies pour le développement (PNUD) pour lui produire deux outils
importants que sont : le Plan Stratégique de Développement Local
(PSDL) et le PDL
Le PDL pour la période 2012-2015 comprend 91 projets
pour un montant de 2,5 milliards de FCFA. Seulement 16 projets ont
été jugés prioritaires et 11 d'entre eux sont en
réalisation pour un montant de 1 854.206 USD (834392.7 F CFA). Le
tableau ci-dessous présente l'ensemble des projets prioritaires retenus
dans le cadre du CDLM de Hiré pour la période 2013-2014. Ces
projets d'un coût total de 455 820 303 F CFA portent sur des
activités en faveur des différents groupes cibles (jeunes,
femmes, élèves) d'une part et au bénéfice de
l'ensemble de la population d'autre part. Ils portent essentiellement sur des
activités agricoles (culture et élevage) et sur des
équipements éducatifs et sanitaires dans la
sous-préfecture.
178
Tableau 24 : récapitulatif des projets
prioritaires réalisés du partenariat NEWCREST-PNUD
N°
|
Projet/action
|
Année
|
Coût (F
CFA)
|
Bénéficiaires directs
|
Résultats obtenus
|
1
|
Ferme porcine (1 porc) pour les jeunes de Hiré village
|
2013
|
33.125.000
|
140 jeunes
des 6 villages Watta
|
Maitrise des
techniques d'élevage
|
2
|
Ferme porcine (1 porc) pour les jeunes de Kagbè
|
2013
|
33.125.001
|
Maitrise des
techniques d'élevage
|
3
|
Ferme avicole (2000 poules
pondeuses) pour les jeunes de Douaville
|
2013
|
18.876.800
|
Maitrise des
techniques d'élevage
|
4
|
Ferme avicole (2000 poules
pondeuses) pour les jeunes de Bouakako
|
2013
|
18.876.800
|
Maitrise des
techniques d'élevage
|
5
|
Ferme avicole (2000 poules
pondeuses) pour les jeunes de Zaroko
|
2014
|
18.876.800
|
Maitrise des
techniques d'élevage
|
6
|
Ferme avicole (2000 poules
pondeuses) pour les jeunes de Gogobro
|
2013
|
18.876.800
|
Maitrise des
techniques d'élevage
|
7
|
Création de 50 ha de plantation d'hévéa pour
50 jeunes de Hiré
|
2014
|
10.000.000
|
50 jeunes de Hiré
|
38 jeunes installés
|
8
|
Mise en place de 3 ha de pépinière
d'hévéa pour 45 jeunes
|
2014
|
9.000.000
|
45 jeunes de Hiré
|
15 jeunes de Kagbè installés
|
9
|
Aménagement de bas-fond pour les
populations de Bandamakro et Bonikro
|
2015
|
25.000.000
|
Bandamakro et Bonikro
|
Moyen de
subsistances crées
|
10
|
Micro-crédit pour 54 personnes de Hiré
|
2015
|
15.000.000
|
54 personnes
|
54 emplois crées
|
11
|
Insertion socioéconomique des
femmes ex-orpailleurs de Hiré
|
2015
|
26.892.000
|
97 femmes
|
97 ex-orpailleurs
installés
|
12
|
Centre de santé pour la population de la
sous-préfecture de Hiré
|
2015
|
53.873.718
|
sous-
préfecture
|
Centre de santé
construit
|
13
|
Réhabilitation et équipement de
l'IFEF pour 65 apprenants de Hiré
|
2015
|
35.500.000
|
65
apprenants
|
IFEF réhabilité et
équipé
|
14
|
Construction d'un bâtiment de trois classes pour le
lycée Municipal
|
2014
|
31.894.885
|
élèves
|
Collège érigé en lycée
|
15
|
Radio communautaire pour la sous- préfecture de
Hiré
|
2014
|
31.830.000
|
sous-
préfecture
|
6 emplois créés
|
16
|
Plantation de 5000 arbres d'ombrage dans la
sous-préfecture
|
2015
|
5.600.000
|
populations
|
Plants distribués et
plantés
|
17
|
Appui à la réparation de la benne de ramassage
d'ordure
|
2015
|
825.000
|
mairie
|
Dispositif de la mairie amélioré
|
18
|
Collecte des ordures ménagères pour la commune
de Hiré
|
2014
|
68.647.500
|
populations
|
31 emplois
temporaires créés
|
Source : NEWCREST, 2017
179
5.7.1 Les réalisations de NEWCREST sur la base du
PDL
Les projets exécutés dans le cadre du PDL sur la
période 2013-2015 sont récapitulés dans le tableau
ci-après :
Tableau 25 : récapitulatif des projets
prioritaires exécutés sur la période 2012-2015
Types de projets
|
Natures des activités
|
Infrastructures
|
Construction d'un bâtiment pour les classes de
première du Lycée municipal
|
Construction d'un Centre de Santé urbain
|
Projet d'équipement de l'IFEF de Hiré
|
Environnement
|
Lutte contre l'orpaillage, les feux de brousse et les
dégâts des animaux
|
Plantation d'arbres d'ombrage dans les
villages délocalisés
|
Assainissement de la ville de Hiré
|
Informatique et communication
|
Installation d'une radio communale
|
Source : NEWCREST, 2017
Ces projets portent sur les trois axes d'actions retenus dans
le cadre du PDL. Les projets d'infrastructures socio-éducatives et de
formation concernent :
- la construction d'un bâtiment de 3 classes du
lycée municipal de Hiré ;
- la réhabilitation et l'équipement de
l'Institution de Formation et d'Éducation Féminine (IFEF) de
Hiré et ;
- le projet de construction et d'équipement d'un centre
de formation professionnelle à Hiré.
La construction d'un bâtiment de 3 classes du
lycée municipal de Hiré, augmentant ainsi la capacité
d'accueil à 180 élèves supplémentaires. En plus de
la construction du bâtiment de 3 salles de classes, le laboratoire de
sciences a été réhabilité (ce qui facilite les
travaux pratiques pour environ 455 élèves), et le Comité
de gestion de l'établissement a bénéficié d'un
renforcement de ses capacités de gestion et d'entretien du patrimoine de
l'établissement.
La réhabilitation et l'équipement de
l'Institution de Formation et d'Éducation Féminine (IFEF) de
Hiré. Les travaux de construction étaient certes très
avancés mais ils étaient encore loin
180
d'être achevés. A terme, ce projet contribuera
à accroitre la capacité d'accueil des auditrices et à
améliorer les conditions matérielles de leur formation. Selon le
chef du chantier, la livraison du bâtiment était prévue
pour la fin de l'année 2016.
Le projet de construction et d'équipement d'un centre
de formation professionnelle à Hiré n'était qu'au stade de
l'évaluation du coût estimé à 330 millions. Jusqu'en
2016, aucune décision de construction du centre n'avait
été prise de façon définitive.
Concernant la question environnementale, deux projets
"à forte composante environnementale" avaient été
retenus au titre des projets prioritaires. Il s'agit : du projet de protection
de l'environnement par la plantation de 5 000 arbres d'ombrage dans les
villages délocalisés autour de la Mine et du projet de gestion
des ordures ménagères de la ville de Hiré.
5.7.1.1. Le projet de protection de l'environnement par
la plantation de 5 000 arbres d'ombrage dans les villages
délocalisés autour de la Mine.
Bien que les plants aient été livrés
tardivement, les arbres ont été plantés dans les sites
indiqués et selon le plan convenu avec la mairie. Cependant, faute
d'entretien, plusieurs arbres plantés n'ont pas survécu aux
intempéries et n'ont pas été remplacés.
Passé au CDL, ce projet doit être repris et renforcé en
raison du rôle important qu'il peut jouer dans la qualité de vie
des populations dans la sous-préfecture.
5.7.1.2. Le projet de gestion des ordures
ménagères de la ville de Hiré.
Ce projet est avec le centre de santé urbain l'un des
projets qui devraient impacter positivement la qualité de vie des
populations de la ville de Hiré en dépit des menaces
environnementales que fait peser l'exploitation minière sur la ville. Ce
projet, au-delà de la sensibilisation s'appuie sur quatre
activités techniques, à savoir : le nettoyage
général de la ville et le curage des caniveaux ; la construction
et l'exploitation de centres de pré-collecte des ordures ; la
construction de centre de groupage des ordures et la construction d'une
décharge publique pour l'enfouissement et le traitement des ordures.
Pour la réalisation de ce projet d'assainissement de la
ville, un accord a été conclu entre NEWCREST et la Mairie de
Hiré pour la collecte régulière des ordures. A cet effet,
les services techniques de la Mairie ont été dotés d'un
tracteur multifonction et d'une brigade de salubrité de 30 jeunes (dont
12 filles) a été installée en octobre 2013. Ce dispositif
a permis de porter la capacité d'enlèvement d'ordures de 4
à plus de 10 tonnes par jour et de curer plus de 12 km de caniveaux.
Après deux années de fonctionnement satisfaisant du dispositif
d'enlèvement des
181
ordures ménagères qui a permis de donner une
fière allure à la ville, la gestion du système a
été transférée à la Mairie. Cependant,
depuis la fin du partenariat avec NEWCREST, les difficultés s'accumulent
dans le système de collecte, essentiellement du fait de
fréquentes pannes enregistrées sur le tracteur pour causes
d'utilisations inappropriées et de manque de moyens financiers pour
payer les primes d'intéressement des équipes engagées dans
la collecte d'ordures.
Du point de vue de l'informatique et de la communication, le
projet retenu dans le cadre du PDL était la mise en place d'une radio
communale.
A l'instar des villes et communes de Côte d'Ivoire, la
ville de Hiré s'est vue dotée, depuis le 25 avril 2014, d'une
radio communale dite radio WATTA FM, émettant sur 95.8Mhz. La radio
s'autofinance grâce aux ressources collectées pour les annonces,
reportages et autres partenariats conclus pour des actions de
sensibilisation. A la fin des actions de l'exercice 2014, les organes
statutaires de la radio ont été mis en place. Il s'agit du
conseil d'administration et de la direction exécutive permettant
d'assurer une meilleure gestion de la Radio.
5.7.2. Les réalisations pilotées par le
CDLM
Depuis sa mise en place en Janvier 2016, le CDLM de
Hiré a permis la réalisation d'un certain nombre de projets. Le
CDLM a permis d'achever les projets du PDL en cours de réalisation lors
de son installation. Il a en outre permis au niveau des infrastructures
routières la fermeture des nids de poule sur la route nationale dont le
bitumage est très dégradé. Dans la même année
2017, le CDLM a permis le reprofilage de 17 km de route. Pour 2017, le tableau
25 récapitule les actions socio-économiques
réalisées par le CDLM entre 2016 et 2017 et le tableau 26 fait
l'inventaire de tous les projets réalisés.
182
Tableau 26 : actions socio-économiques
réalisées par le CDLM 2016 - 2017
Actions socio-économiques
|
Bénéficiaires
|
Montant en F CFA
|
Appui aux associations
|
Femmes et IFEF
|
1
|
000
|
000
|
Appui à l'insertion des orpailleurs
vulnérables
|
Mairie
|
26
|
003
|
600
|
Appui aux obsèques du défunt maire
|
Mairie
|
1
|
000
|
000
|
Appui à l'organisation des
compétitions sportives
|
Mairie
|
1
|
990
|
000
|
dons de matériels de salubrités
|
Mairie
|
4
|
353
|
000
|
Embauche de Jeunes
|
Jeunesse communale
|
1
|
000
|
000
|
Don d'un ordinateur de bureau
|
Jeunesse communale
|
22
|
000
|
000
|
Appui aux activités pour la
promotion de la cohésion sociale
|
les différentes communautés de la ville
|
38
|
846
|
600
|
Source : NEWCREST, 2016
Le tableau ci-dessus présente les actions
socio-économiques du CDLM de Hiré entre 2016 et 2017. Ces actions
d'un montant total de 96 193 200 F CFA, portent sur des actions en faveur des
différentes couches de la société (femmes, jeunes, etc.).
Ces actions visent majoritairement à favoriser l'autonomisation
économique des populations dans la quête d'un mieux-être de
celles-ci.
Le tableau ci-dessous est quant à lui un
récapitulatif des projets réalisés en 2017 par le CDLM de
Hiré. Ce sont 711 557 240 F CFA qui ont été investis dans
différentes rubriques en faveur des différentes
communautés de la sous-préfecture de Hiré. Les montants
les plus importants ont été investis à Hiré ville
371 833 737 F CFA, à Gogobro 90 280 425 F CFA et à Bouakako 87
530 591 F CFA.
183
Tableau 27 : inventaire des projets
réalisés en 2017 par le CDLM de HIRE
N°
|
Rubrique
|
Activités/Actions de la mine
|
Montant
|
1
|
Financement d'activités socio- culturelles
|
Contribution à la journée d'excellence au
sous-préfet d'Oumé
|
200.000
|
2
|
Organisation de l'arbre de Noel 2017 au profit de 1200
élèves - EPP Hiré stade
|
2.610.000
|
3
|
Contribution aux activités socio-culturelles de fin
d'années des 5 campements riverains
|
1.000.000
|
4
|
Contribution à la finale du tournoi de la cohésion
sociale dans les 5 campements riverains
|
200.000
|
5
|
Contribution à l'organisation des activités
socio-
|
500.000
|
6
|
Contribution à l'organisation de la fête
nationale de l'indépendance (Hiré, Divo et Oumé
|
1.500.000
|
7
|
Appui à la mairie de Hiré pour l'organisation de
l'arbre de Noel des enfants de Hiré
|
500.000
|
8
|
Appui à la Radio Téné pour l'organisation de
l'arbre de noël des enfants handicapés (centre social
d'Oumé)
|
500.000
|
9
|
Organisation du tournoi de football pour la cohésion
sociale à Hiré
|
3.563.000
|
Sous total en CFA
|
10.573.300
|
1
|
donation communautaire
|
Don d'ordinateurs portables aux jeunes promoteurs à
l'inspection primaire de Hiré
|
2.150.000
|
2
|
Don de pneus à la police nationale de Hiré
|
1.008.831
|
3
|
Remise de 4 véhicules 4x4 à la gendarmerie et
à la police nationale de Hiré et Oumé
|
66.615.125
|
4
|
Don de 150 chaises à la jeunesse communale de
Hiré
|
1.800.000
|
Sous total en CFA
|
71.573.956
|
1
|
Projets du protocole avec Gogobro
|
Projet de l'eau à Gogobro phase 1, réhabilitation
du forage et des installations
|
41.122.000
|
2
|
Réhabilitation de l'EPP Gogobro (04 bâtiments, 01
cantine et 01 bloc de toilette)
|
39.594.025
|
3
|
Livraison 200 chaises à Gogobro
|
2.520.000
|
4
|
Fourniture d'une machine broyeuse de manioc, 1 bâche et un
abri pour broyeuse
|
7.044.400
|
Sous total en CFA
|
90.280.425
|
1
|
Projets du protocole avec Bouakako
|
Construction de trois logements pour enseignants à
Bouakako
|
39.779.300
|
2
|
Réhabilitation d'un bâtiment de trois classes
à l'EPP Bouakako
|
13.959.046
|
3
|
Ferme porcine à Bouakako
|
33.792.245
|
Sous total en CFA
|
87.530.591
|
1
|
Projets réalisés à Hiré
ville
|
Extension du réseau électrique dans le quartier
Gnakankro à Hiré
|
14.659.750
|
2
|
Renforcement de la production d'eau à Hiré (phase
1)
|
192.885.287
|
3
|
Réalisation des travaux complémentaires au centre
de santé de Hiré
|
30.690.009
|
4
|
Réhabilitation du lycée Municipal de Hiré
|
11.821.939
|
5
|
Etude de faisabilité du programme de formation pour les
jeunes de Hiré
|
22.125.000
|
6
|
ofilage de voies communautaires
|
78.451.271
|
7
|
Projet de ferme porcine pour huit jeunes de Hiré
|
21.200.481
|
Sous total en CFA
|
371.833.737
|
1
|
Autres projets et appui communautaire
|
Réhabilitation de l'EPP N'guessankankro
|
20.889.540
|
2
|
projet pilote de production de riz dans le bas-fond de Bonikro et
Bandamakro
|
11.503.491
|
3
|
Appui pour l'installation d'Akaffou Gédéon pour le
commerce de poissons congelés
|
8.975.000
|
4
|
Projet de cultures maraichères au profit de 30 femmes
à Dougbafla Est
|
38.397.200
|
Sous total en CFA
|
79.765.231
|
TOTAL GENERAL (en CFA)
|
711.557.240
|
184
5.8. LES OPPORTUNITES D'EMPLOI OFFERTES PAR LA COMPAGNIE
MINIERE
Les emplois offerts par la compagnie minière sont
majoritairement des emplois qualifiés qui requièrent des profils
précis dans les emplois industriels et techniques que la plupart des
demandeurs locaux d'emplois n'ont pas. Les recrutements pour ces emplois se
font par appel d'offre national ou international. Les emplois non
qualifiés sont offerts en contrat de un à six mois. La contrainte
qui existe pour la compagnie minière d'employer prioritairement les
populations locales est traduite par les communautés de Hiré
comme une obligation d'employer des ressortissants de Hiré. Cependant,
selon les autorités de la mine, cette appellation de "population
locale" correspond l'ensemble des ivoiriens.
Le nombre de jeunes locaux employés à la mine
est insignifiant comparé au nombre de demandes qu'ils lui ont
adressées. Ce qui explique que les jeunes de Hiré font de la
question de l'emploi dans les mines locales leurs revendications prioritaires.
Pour remédier au problème de qualification, les jeunes souhaitent
que les formations proposées par la compagnie minière portent sur
les métiers spécifiques de la mine afin que les
opportunités d'emplois dans les activités minières de
"chez eux" leur soient profitables en priorité. Leur
focalisation sur ce fait est motivée par leur perception du potentiel
minier ivoirien en général et sur les perspectives de son
développement en Côte d'Ivoire et dans le Löh-Djiboua. En
effet, les jeunes de Hiré disent avec assurance qu'au cours des
prochaines décennies, l'avenir de la Côte d'Ivoire ne reposera pas
seulement sur l'agriculture mais également sur l'exploitation
minière. L'on murmure avec insistance que toute la région de
Hiré est riche de plusieurs gisements aurifères, aussi bien dans
le périmètre de recherche concédé à NEWCREST
qu'en dehors du périmètre, comme c'est le cas avec l'exploitation
de la mine d'or d'Agbaou par Andeavour, dans la sous-préfecture de
Didoko.
La présence de la compagnie minière dans la
sous-préfecture de Hiré est une opportunité pour la
localité car même si elle ne parvient pas à employer
massivement des personnes issues du local, elle parvient tout de même
à employer quelques jeunes locaux. Ces emplois offerts par la mine
permettent aux bénéficiaires d'avoir une autonomie
financière et de pouvoir subvenir à leurs besoins et à
ceux de leurs familles. Aussi de par sa présence, la compagnie
minière investie-t-elle dans les actions de développement en
faveur des communautés locales.
185
5.8.1. Les emplois à la compagnie
minière
L'installation de la compagnie minière contrairement
aux attentes des populations et aux annonces des autorités
administratives n'a pas été un réel facteur de
création d'emplois directs à la mine. Les arguments
avancés sont que les emplois qualifiés dans le secteur minier,
comme dans toute autre activité à grande échelle, sont
pourvus par appel à candidature à l'échelle nationale ou
même internationale. Les populations locales ayant un profil qui ne
correspond pas à celui demandé, ne parviennent donc que
très rarement à y avoir accès. A cet effet, dans l'optique
d'assurer une transparence dans la création d'emplois locaux dit emploi
«local-local», NEWCREST met en place en 2016, un comité local
d'emploi en vue d'établir une transparence dans la question de l'emploi
des jeunes. Dans le souci de créer un cadre participatif et inclusif, le
comité est composé des parties prenantes du secteur minier que
sont : les riverains, les élus locaux, les ONG, les services
d'État et l'opérateur minier. Ce mécanisme s'applique
à NEWCREST et à ses sous-traitants (pour l'ensemble des travaux
d'exploitation et exploration) aussi bien pour les embauches de main d'oeuvre
qualifiée et non qualifiée que pour les journaliers
communément appelés «casuals».
Ces emplois sont offerts suivant les catégories
ci-après :
- emploi permanent ;
- contrat à durée déterminée (de 3
à 24 mois maximum) pour un projet particulier ; - emploi temporaire
(durée maximale d'emploi 3 mois);
- stage de perfectionnement.
Pour faciliter leur accès équitable, les offres
d'emplois sont affichées sur les panneaux d'affichage dans les
différentes localités impactées par le projet minier. Les
différentes candidatures sont étudiées par le
sous-préfet et les chefs de village afin de vérifier leur
provenance ensuite, les dossiers suivent leur circuit normal à la mine
avant de revenir après validation aux mains du sous-préfet et des
responsables communautaires.
La mise en place d'une stratégie de l'information sur
l'emploi local a permis une transparence au niveau des recrutements
réalisés à la mine et de connaitre les ressortissants de
la localité qui postulent et qui sont recrutés à la mine.
Cependant, le nombre pléthorique des demandes et l'incapacité
pour la mine de toutes leur accorder une suite favorable a poussé
NEWCREST et le comité de rédaction du PDL à
réfléchir à d'autres possibilités
d'activités génératrices de revenus afin d'aider la
jeunesse de Hiré à se prendre en charge.
186
5.8.2 Les formations qualifiantes financées par la
compagnie minière
Dans le cadre du développement du capital humain, la
compagnie minière NEWCREST a financé des formations qualifiantes
en faveur des jeunes afin de leur permettre d'acquérir un savoir-faire
qui leur permettrait d'embrasser une profession. Pour ce faire, des
filières porteuses d'emplois ont été identifiées.
De ces filières, des métiers à fort taux
d'employabilité ont été sélectionnés par
ordre de priorité afin d'offrir de nouvelles opportunités
d'insertion aux jeunes (filles et garçons de 18 à 35 ans)
susceptibles de contribuer à améliorer durablement leurs
conditions de vie.
Les formations qualifiantes pour environ 1500 jeunes ont une
visée professionnelle plus immédiate et ne débouchent pas
sur un diplôme ou un titre. Elles permettent d'obtenir une attestation de
stage en fin de formation ou un « certificat d'aptitude » lié
au milieu professionnel. Il s'agit de lui faire acquérir les
compétences nécessaires à la pratique du métier par
l'utilisation des équipements techniques, des ressources
matérielles et des outils de communication. La compagnie minière
à travers ce programme de formation qualifiante offre aux jeunes de la
sous-préfecture de Hiré l'opportunité d'avoir un profil
professionnel afin d'être compétitif sur le marché de
l'emploi.
Les formations sont souvent de courte durée. Elles
excèdent rarement un an et sont suivies d'un stage. Les stages de fin de
formation sont sanctionnés d'une attestation de fin de formation ou d'un
« certificat d'aptitude ».
5.8.3 Les activités génératrices de
revenus financées par NEWCREST
La deuxième phase de solution proposée par
NEWCREST est celle des activités génératrices de revenus
(AGR). Cette option des AGR est une convention de partenariat NEWCREST-PNUD
dont la mise en oeuvre a débuté en 2011. La compagnie
minière ne pouvant satisfaire les attentes de la jeunesse de Hiré
en les employant tous, a opté pour cette solution afin de
répondre un tant soit peu aux attentes de la jeunesse locale. Les
projets d'activités génératrices de revenus sont toutefois
des réponses locales aux attentes des jeunes car hormis les projets
d'élevage, tous les autres résultent du Plan Stratégique
de Développement (PSD) et du Plan de développement local (PDL).
Ce sont des projets qui ont été identifiés par les
populations comme étant faciles à mettre en oeuvre pour une
jeunesse non qualifiée, d'autant plus que ce sont des activités
rurales. Ces projets ont également été identifiés
comme des activités très rentables et/ou bénéfiques
pour la communauté (voir tableau 28).
187
Les activités identifiées portent sur les
activités agricoles, d'élevage et de commerce qui sont des
activités auxquelles les populations sont habituées car faisant
partir de leur quotidien. Elles ont été identifiées comme
activités à financer car la maitrise de ces activités
amoindries les risques d'échecs. La réalisation de ces projets
permettrait également de satisfaire la demande locale en matière
de protéine animale et de relancer la production agricole. De
façon spécifique, ce sont :
- 4 fermes d'élevages avicoles (2000 poules pondeuses
chacune),
- 2 élevages de porcs charcutiers dotés de 12
truies et 1 verrat chacun, - 1 exploitation rizicole de 15 ha,
- 1 hectare de pépinière d'hévéa et
de 38 ha de plantation d'hévéa.
Tableau 28 : les activités
génératrices identifiées par les populations et le tandem
NEWCREST-
PNUD
Secteurs d'activités
|
Activités
|
Cultures non vivrières
|
Création de plantations villageoises
d'hévéa et de palmier à huile
|
Cultures vivrières
|
Exploitation de 17 ha de bas-fond en riziculture
irriguée
|
Élevages
|
Élevages de poules pondeuses
|
Élevages de porcs charcutiers
|
Commerce
|
Développement du petit commerce (vivriers, articles
manufacturés, etc.)
|
Source : NEWCREST, 2016
188
Ces projets ont été élaborés dans
le cadre du renforcement des capacités de productions agricoles des
jeunes en leur apportant un appui à l'accès aux marchés
pour une meilleure valorisation des produits agricoles, animaux et/ou
transformés. A termes, ces projets devaient constituer des
réponses locales fortes aux préoccupations des jeunes de la
sous-préfecture en matière d'emplois et d'autonomisation
économique de la jeunesse.
Conclusion du chapitre 5
Les actions de la compagnie minière en faveur des
populations de Hiré ont connu des mutations diverses depuis le
démarrage de l'exploitation industrielle de l'or. En l'absence d'un
cadre institutionnel formel, ces actions ont été faites au coup
par coup, guidées par la RSE commune à toutes les compagnies
minières. Elles ont connu plusieurs mutations au fil du temps puis avec
l'initiative du plan triennal de développement local 2012-2015, ces
actions ont connu un début de formalisation. Élaboré en
partenariat avec le PNUD, ce plan de développement a permis la
réalisation de plusieurs projets en faveur des communautés
locales, puis est intervenu la formalisation des actions communautaires par le
code minier de 2014.
Les actions en faveur des populations portent sur la
création d'emploi, la contribution à l'amélioration des
conditions de vie et la réalisation d'équipements et
d'infrastructures.
189
CHAPITRE 6 : LES MUTATIONS SOCIALES LIEES
A L'EXPLOITATION DE L'OR
INTRODUCTION AU CHAPITRE
L'exploitation minière, outre ses répercussions
démographiques et économiques, a également des incidences
sociales dans la sous-préfecture de Hiré. Ces incidences sont
diverses et feront l'objet de ce chapitre. Ce sixième chapitre tente
d'abord de décrire les nouveaux comportements observés au sein de
la cellule familiale puis ceux observés au sein de la communauté.
Il analysera les problèmes sociaux liés aux rapports entre les
acteurs de l'exploitation minière et les populations.
6.1. L'AGGRAVATION DES INEGALITES SOCIALES 6.1.1. La
classe paysanne dans l'indigence
L'agriculture, facteur des premières vagues de
migrations vers Hiré, qui a permis aux producteurs de connaitre un
prestige économique ainsi que toutes les activités qui se
greffaient à elle, connaît depuis l'arrivée de la mine une
période de stagnation. Le pouvoir économique avant l'ouverture de
la mine industrielle était tenu par les grands producteurs de
café et de cacao. Le poids de la production était un
critère capital dans la classification sociale des paysans. Celui qui
fait régulièrement un bon tonnage de ces cultures phares
était considéré comme riche. La superficie de
l'exploitation agricole, la qualité de la culture, le volume de la main
d'oeuvre mobilisée et le volume de production sont autant de
critères de classification sociale des paysans. Cependant, l'ouverture
de la mine industrielle a bouleversé cette stratification sociale. Les
paysans ayant perdus du fait de l'exploitation minière leur terre, leur
production, leur pouvoir économique, le critère de classement
social a changé.
6.1.2 L'émergence d'une nouvelle élite
sociale à Hiré
Avec l'ouverture de l'exploitation minière, deux
nouveaux facteurs de catégorisation sociale valorisante sont apparus
dans la sous-préfecture. Ce sont : l'indemnisation et les revenus issus
du travail de mineur.
6.1.2.1 Les indemnisés de NEWCREST
La société minière NEWCREST pour
l'exercice de ses activités occupe des terres pour lesquelles elles
payent des indemnités aux populations. Si les ressources minières
appartiennent à l'État qui en autorise l'exploitation, les terres
appartiennent aux populations. Les indemnités sont versées en
dédommagement soit de l'occupation de parcelles, la destruction de
cultures
190
et/ou pour la destruction de l'habitat. Le montant des
indemnités perçues par certaines personnes en a atteint des
centaines de millions et fonde l'image très valorisante que la
population se fait des personnes bénéficiaires de ces
indemnités.
En effet, la perte de sa parcelle ou de sa plantation n'est
plus perçue par les populations comme un malheur mais comme une chance.
Toutes les populations aspirent à voir leurs parcelles touchées
par les activités de l'entreprise minière à tel enseigne
que lorsque NEWCREST occupe juste une portion de la parcelle qu'elle
dédommage, les populations préfèrent qu'elle
récupère toute la parcelle afin de bénéficier d'une
meilleure indemnité.
6.1.2.2. Les mineurs de Hiré
? Les employés de NEWCREST.
L'appropriation populaire de métiers de la mine
s'observe autour de la construction d'un imaginaire populaire des
métiers qui découle de l'activité minière.
L'embauche par NEWCREST crée un nouveau type de travailleurs plus
qualifiés qui cristallise les nouvelles perceptions car ces ouvriers
s'inscrivent dans des rapports sociaux en termes de « classe bourgeoise
», par opposition à la « classe prolétaire ». Les
investissements miniers favorisent l'apparition d'une nouvelle classe moyenne,
relativement aisée, principalement composée de cadres du secteur
privé et de fournisseurs, sous-traitants, consultants, etc.
Diplômés de l'enseignement supérieur, ces derniers
développent un style de vie marqué par la construction des villas
et autres grandes concessions de prestiges. La classe prolétaire des
employés de la mine est composée des employés non
qualifiés qui exercent les petits métiers. Issus
généralement de la localité ils résident
majoritairement dans la ville. Leur niveau de vie est décrit comme
étant supérieur à celui des autres habitants. En outre, le
niveau de gratification des salaires de ces travailleurs est perçu comme
intéressant. Dans les maquis, bistrots ou restaurants locaux et autres
lieux de détente de la ville, leur niveau de consommation est des plus
élevés. Ils possèdent des engins de locomotion et cela
contribue à entretenir cette image de prestige et de réussite.
Cependant, la compagnie minière ne pouvant employer tout le monde, une
autre activité aussi financièrement intéressante et qui
attire un plus grand nombre est l'orpaillage.
191
? Les orpailleurs
Les orpailleurs sont aussi présents dans la ville de
Hiré. L'orpaillage est une activité très ancienne à
Hiré dont la pratique avait cessé depuis un siècle pour
refaire surface en 2007 à l'occasion de l'installation de l'usine
minière de Bonikro. L'orpaillage est aujourd'hui de loin
l'activité économique phare dans la sous-préfecture de
Hiré. Perçue comme une activité lucrative, l'orpaillage
draine du monde. Selon le recensement des orpailleurs effectué en 2010
par NEWCREST, ce sont environ 3 000 personnes qui exercent cette
activité sur les sites dispersés à travers la
sous-préfecture. Les sites les plus prisés sont ceux de la
compagnie minière, notamment le périmètre de la fosse
satellite de Hiré avant son exploitation par la compagnie
minière.
6.2 LES PERTURBATIONS AU SEIN DE LA CELLULE FAMILIALE
6.2.1 Les conflits entre parents et enfants
Des conflits éclatent entre parents et enfants dans la
sous-préfecture de Hiré au sujet de l'exploitation
minière. Ces conflits sont essentiellement dus au refus des parents de
laisser leur progéniture s'adonner à l'exploitation artisanale de
l'or. Ce refus est motivé selon Kouadio (2008) par plusieurs raisons qui
nous ont servi de base pour l'enquête auprès des populations (voir
tableau 29).
Tableau 29 : les causes des conflits entre parents et
enfants liés à l'activité minière
Causes de conflits
|
Proportion (en %)
|
Insoumission
|
19
|
Déscolarisation
|
26
|
Les dangers de l'orpaillage
|
40
|
Raisons religieuses
|
12
|
Autres
|
3
|
Source : Nos enquêtes, 2016
Selon les données collectées, 40% des
enquêtés pensent que le refus des parents de laisser leurs enfants
s'adonner à l'orpaillage est motivé par les dangers que
présentent cette activité. Le second motif avancé est
celui de la déscolarisation. La plupart des enfants qui exercent
l'orpaillage comme activité de vacances manquent les cours pour aller
pratiquer l'orpaillage ou abandonnent totalement l'école. Cela
s'explique par l'habitude qu'ils prennent d'avoir de
192
l'argent. L'insoumission des enfants avec 19%
représente la troisième raison des conflits entre parents et
enfants. L'insoumission est une situation à la laquelle tout parent est
confronté vis à vis de ses enfants surtout lorsque ceux-ci
atteignent l'âge de l'adolescence. Cependant, la situation dans la
sous-préfecture de Hiré est exacerbée par l'exploitation
minière. Les enfants généralement utilisés dans le
groupe domestique pour exercer des activités agricoles du fait du manque
de main d'oeuvre extérieure refusent désormais de le faire. Ils
s'adonnent plutôt à l'orpaillage soit à titre personnel
soit en tant qu'ouvrier journalier pour le compte d'un particulier ce qui
provoque des conflits entre eux et leurs parents. Ils sont ainsi
détournés, du fait de l'activité d'exploitation
artisanale, du contrôle parental. Ces derniers ne vont plus aider les
parents dans les champs et ne participent plus aux activités
économiques de la famille. Ils préfèrent exercer
l'orpaillage où les travaux bien que plus difficiles, sont
rémunérés. L'opinion cultuelle de l'or lui confère
un caractère sacré qui est perçu par certains comme une
malédiction rattachée à ce métal. Sur la base de
cette perception, certains parents interdisent à leurs enfants de
s'adonner à l'exploitation artisanale de l'or. D'autres raisons non
explicites sont également avancées. Ces conflits se manifestent
par des querelles. Les enfants sont parfois victimes de sévices et
certains vont jusqu'à quitter le domicile familial.
6.2.2 Les conflits d'autorité entre mari et
femme
Les conflits entre mari et femme au sujet de l'activité
minière surviennent lorsque la femme s'intéresse au travail de
l'or. Les femmes constituent 18% des orpailleurs enquêtés.
Initialement la femme s'occupe des travaux domestiques (repas,
ménage...) mais dans le milieu rural, elle est devenue une main d'oeuvre
nécessaire pour le chef de ménage du fait de la
raréfaction de la main d'oeuvre extérieure. Dans ce contexte, son
nouveau statut lui confère en plus des activités domestiques,
l'entretien des cultures vivrières et pérennes. Elle aide ainsi
son mari à l'entretien des plantations et à l'entretien de la
famille à travers les cultures vivrières utilisées pour la
consommation et pour la commercialisation. Avec la crise dans l'agriculture qui
s'accentue de plus en plus, les chefs de familles n'arrivent plus à
pourvoir aux besoins de leurs femmes. Celles-ci se tournent donc vers
l'orpaillage qui se présente comme une opportunité
économique et un palliatif dans la sous-préfecture. Les femmes
dans l'orpaillage s'adonnent au lavage et sont rémunérées
de façon journalière. Elles se détournent ainsi de
l'autorité de leurs époux en allant plus les aider dans les
champs et exercent l'orpaillage à leur propre compte. Leurs tâches
domestiques ne sont plus bien assurées. Cette attitude des femmes est
perçue par les maris comme une défiance de leur autorité
de chef de famille. Cela génère des conflits de natures diverses
(voir tableau ci-dessous).
193
Tableau 30 : répartition des conflits selon leur
nature au sein de la population enquêtée
Nature des conflits
|
Proportion (en %)
|
Privations
|
12,82
|
Interdiction à la pratique
|
38,46
|
Répudiation ou séparation de la famille
|
12,82
|
Reproches
|
32,05
|
Autres
|
3,84
|
Source : Donnée d'enquête, 2008
La chute du pouvoir d'achat des paysans et l'augmentation de
celui des mineurs perturbe également les relations entre mari et femme.
En effet, avec le prestige économique dont ils
bénéficient, certains mineurs courtisent les femmes des paysans
en les couvrant de présents et de gestes auxquels leurs maris ne peuvent
prétendent. Ces derniers ne peuvent pas rester indifférents et
cela crée des conflits qui débouchent parfois sur des
séparations.
6.3. L'EMERGENCE DE NOUVEAUX COMPORTEMENTS
SOCIAUX
A la faveur de l'expansion de l'activité minière
dans la sous-préfecture de Hiré, de nouveaux comportements
sociaux ont fait surface tels que la consommation abusive d'alcool et la
propagation du VIH/SIDA.
6.3.1. La consommation abusive de l'alcool
Les acteurs de l'activité minière ou du moins
les mineurs résidents dans la ville de Hiré sont pour la plupart
des jeunes vivants seuls ou loin de leurs ménages. Dans une ville comme
Hiré, longtemps ville agricole, les seuls espaces de loisirs de la
population sont les bars, buvettes et bistrots de la place. Des espaces de
loisirs plus prestigieux se trouvent dans les chefs-lieux de
départements voisins que sont Divo et Oumé. Les niveaux de
revenus tirés de l'activité aurifère procurent à
ses acteurs un pouvoir d'achat qu'ils expriment souvent à travers de
fortes consommations d'alcool qui crée en eux une addiction. La
consommation abusive d'alcool est perçue par ces personnes comme signe
de jeunesse, de modernisme et d'aisance financière. Cette tendance donne
souvent lieu à des dérives. Il est fréquent de voir des
jeunes orpailleurs dont l'activité n'est régie par aucun code
d'éthique, déambuler ivres dans les rues. Ils s'adonnent à
des compétitions dans la consommation de l'alcool qui se terminent
parfois par des bagarres. Ce sont des comportements nouveaux dans cet espace
habituellement paisible ou les populations sont habituées à vivre
en convivialité.
194
6.3.2 La dépravation des moeurs
Une autre menace et non des moindres se signale à
Hiré. A l'exemple des villes minières, la ville de Hiré a
attiré de nombreuses professionnelles du sexe. En effet, la
présence d'une activité minière dans une localité
est généralement interprétée comme la
présence et la circulation d'une manne financière à
gagner. Ce qui augmente les risques liés aux infections sexuellement
transmissibles (IST) et au sida. A Hiré, nous n'avons pas
réalisé un recensement de celles-ci mais selon les populations,
il y en a dans tous les quartiers. A ces professionnelles du sexe (PS) s'ajoute
la vulnérabilité des jeunes filles de la localité. Issues
généralement de familles démunies, les jeunes filles de la
ville de Hiré sont vulnérables face à l'argent et au
pouvoir de certains mineurs. Par ailleurs, les filles commerçantes le
jour se transforment en prostituées de luxe la nuit. Lorsque la
production est bonne, les orpailleurs peuvent donner facilement de grosses
sommes et avec l'alcool et la drogue, celles-ci peuvent avoir des rapports
sexuels non protégés avec ces derniers. Aussi, ces rapports
sexuels se déroulent parfois dans les champs et sur les sites
d'orpaillage, ce qui est formellement interdit dans la culture locale et
signifié aux orpailleurs par les propriétaires des terres qu'ils
occupent.
6.3.3 L'apport de croyances nouvelles
Depuis le début de l'exploitation minière
à Hiré, sur les sites d'orpaillage ou à proximité,
les populations disent constater l'apparition et la multiplication de nouveaux
fétiches venus d'ailleurs. Ces nouvelles croyances sont
singulièrement le fait des orpailleurs et se traduisent par
l'exécution de certains rites et sacrifices. En effet, ces nouvelles
pratiques constatées dans la sous-préfecture de Hiré sont
le fait d'orpailleurs allogènes d'origine malienne, guinéenne et
burkinabé. Ces pratiques nouvelles dans la sous-préfecture de
Hiré, vont jusqu'au sacrifice humain qui, aux dires des populations,
rendraient les sites d'orpaillage plus productifs. Ainsi, les
décès tragiques constatés dans la localité depuis
le début de l'orpaillage leur est-il imputé.
195
Conclusion du chapitre 6
L'activité minière à Hiré induit
différentes mutations socio-économiques dans la
sous-préfecture. Du fait de cette activité, les populations
locales dont les activités sont perturbées mettent en place un
ensemble de stratégies pour s'adapter à cette nouvelle
réalité. Les cultivateurs optent pour de nouvelles cultures
agricoles et tentent de se repositionner économiquement en voulant tirer
un meilleur profit de l'exploitation aurifère. D'autres par contre, les
jeunes en particulier optent pour des emplois à la mine ou à
défaut pour l'orpaillage. Toutes ces choses fragilisent le tissu social
car les nombreux déséquilibres sociaux liés à
l'exploitation minière se ressentent aussi bien au sein des familles
qu'au sein des communautés. Toutefois, de nouvelles opportunités
économiques liées à l'activité aurifère
s'offrent à la population locale car l'exploitation de l'or non
seulement procure un revenu relativement consistant mais aussi occasionne une
rentabilité rapide Cette atmosphère de l'activité
minière donne également libre cours à des vices de tous
genres (alcoolisme, prostitution, etc.)
196
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
L'activité minière dans la
sous-préfecture de Hiré a fait d'elle un pôle d'attraction
des populations de divers horizons et d'origines variées. Cette
ruée de population est dominée par des jeunes venus pour saisir
l'opportunité économique que représente cette
activité soit en travaillant pour la compagnie minière soit en
s'adonnant à l'orpaillage qui fait appel à une main d'oeuvre
importante. L'étude du profil démographique de la
sous-préfecture de Hiré donne de constater la forte proportion de
jeune. On constate aussi que cette population majoritairement agricole se
tourne de plus en plus vers l'activité aurifère notamment vers
l'orpaillage. La concentration démographique dans la ville de
Hiré entraine un étalement de celle-ci avec une concentration du
bâtit dont la qualité s'améliore de plus en plus. Les
services et les commerces dans la ville connaissent également une
croissance. La compagnie minière dans le cadre de ses activités
entreprend dans la sous-préfecture des activités en faveur des
communautés locales. Ce sont généralement des
équipements sanitaires, éducatifs, sportifs etc. Elle contribue
aussi par le financement de projet et de formation au développement du
capital humain. Aussi assiste-t-on à une recomposition sociale.
L'élite sociale agricole est remplacée par l'élite sociale
issue soit des acteurs de l'activité minière, soit des
indemnisés de la compagnie minière. Vu le montant important que
perçoivent certains paysans au titre du dédommagement, ceux-ci
sont perçus comme des riches car ils accèdent ainsi à des
sommes jamais espérées. A cela s'ajoutent de nouveaux
comportements sociaux à Hiré. On assiste à des
problèmes familiaux entre conjoints et entre parents et enfants du fait
de l'activité minière.
A travers cette deuxième partie, l'objectif qui
consiste à identifier les changements introduits par l'exploitation de
l'or en rapport avec le cadre de vie à Hiré est atteint.
TROISIEME PARTIE :
CONFLITS ET COOPERATIONS ENTRE COMMUNAUTES ET
COMPAGNIE MINIERE DANS LA LOCALITE DE HIRE
|
197
INTRODUCTION A LA PARTIE
A côté des apports de l'activité
minière qui peuvent être considérés comme favorisant
le développement de la sous-préfecture de Hiré, d'autres
incidences de cette activité apparaissent comme un frein à ce
développement. Cette troisième partie composée de trois
chapitres s'intéresse aux effets négatifs de l'exploitation de
l'or. Le premier chapitre porte sur les incidences environnementales de
l'activité minière. Cette analyse s'est faite sur l'ensemble des
composantes de l'environnement que sont le sol, l'eau et l'air. Ce chapitre
traite également des répercutions de ces incidences
environnementales sur la santé des populations. Le deuxième
chapitre traite de la récession agricole dans la sous-préfecture
de Hiré. Ce chapitre permet d'aborder la question de l'agriculture,
principale source de revenu des populations locales. Celle-ci est mise à
mal du fait de l'activité aurifère qui est la nouvelle attraction
des populations. Le troisième chapitre, quant à lui aborde la
question des problèmes fonciers exacerbés par l'activité
minière, les différents protagonistes et les mécanismes de
règlements de ces conflits.
198
CHAPITRE 7 : LA DÉGRADATION DE L'ENVIRONNEMENT
PAR L'EXPLOITATION MINIÈRE
INTRODUCTION AU CHAPITRE
L'exploitation minière a des impacts négatifs
sur l'environnement dus aussi bien aux techniques d'extractions qu'aux produits
utilisés pour le traitement du minerai. Ces impacts négatifs de
l'exploitation minière industrielle et/ou artisanale touchent les
différentes composantes de l'environnement que sont l'eau, le sol et
l'air et la biodiversité (Ouédraogo 2006). Ils peuvent constituer
des menaces sur la santé et la vie des populations.
La sous-préfecture de Hiré est ainsi soumise aux
fortes pressions de l'activité aurifère qui met à mal
toutes les composantes de l'environnement et influence le bien-être des
populations. Pour une meilleure évaluation de ces impacts
environnementaux, il est nécessaire de décrire comment
l'activité de la compagnie minière NEWCREST et des orpailleurs
aurifères agit sur les sols, l'eau, l'atmosphère et la
santé.
7.1. DES SOLS DE CULTURES DEGRADES PAR
L'ACTIVITE
7.1.1. Outils et techniques d'extraction
La compagnie minière installée dans la
sous-préfecture de Hiré y exerce une exploitation minière
conventionnelle à ciel ouvert utilisant des camions et des excavatrices.
L'exploitation à ciel ouvert est effectuée sur la base d'une
production tous les jours de la semaine. Des techniques standard de forage et
de tir à l'explosif sont utilisées dans les roches dures, avec le
creusage libre dans les endroits meubles.
Les outils utilisés dans l'exploitation minière
industrielle sont de grands véhicules et de grandes machines communes
à toutes les sociétés intervenantes dans ce secteur. Ce
sont généralement des véhicules à la pointe de la
technologie intervenant dans l'extraction et le transport de la roche. Cela
inclue des véhicules légers de type bâché 4x4 pour
le transport du personnel, des bulldozers, des scrapers, des graders, des
excavatrices, des pelleteuses. Les foreuses sont utilisées pour
l'échantillonnage géologique. L'équipement pour l'abattage
à l'explosif incluant des foreuses, des véhicules de transport,
et des accessoires connexes (détonateurs, etc.). A ceux-là
s'ajoutent les camions de transport du minerai, et les camions de services
utilisés pour la fourniture en carburant et en huile, pour la
maintenance et l'arrosage des routes pour la suppression de la
poussière. Tous ces véhicules sont maintenus en parfait
état de
fonctionnement selon les pratiques en la matière et la
réglementation nationale par les départements mobiles de
NEWCREST.
Les étapes de l'extraction minière à ciel
ouvert sont les suivantes :
- délimitation géographique et physique de la
zone de la fosse en laissant une zone tampon intacte ;
- décapage de la zone de la fosse par bulldozer,
scraper et grader, incluant le stockage de la terre végétale pour
une future réhabilitation du site ;
- décapage de la couche de terre oxydée
minéralisée (si disponible) par bulldozer et ; - excavatrice
incluant le triage de cette matière selon les critères suivants
;
o terre oxydée à haute teneur aurifère
stockée sur le ROM pad, la zone de stockage avant le transport et le
traitement direct du minerai à l'usine.
o terre oxydée à basse teneur
aurifère stockée sur le site de stockage de minerai à
basse teneur pour son transport et traitement direct à l'usine selon les
besoins de celle-ci.
o stériles stockés dans les versants
à stériles
Une fois la roche dure atteinte, le minerai est extrait selon la
méthodologie suivante :
- forage de confirmation de présence de minerai et
modélisation de la structure par l'équipe de géologues et
;
- dislocation de la roche par tirs d'explosifs.
Il convient de noter que l'abattage à l'explosif est
réalisé conformément aux réglementations
nationales.
L'enlèvement de la roche par excavatrices et pelleteuses
se fait selon les critères suivants :
- Minerai à haute teneur aurifère,
stockée sur le ROM pad, la zone de stockage du minerai avant son
transport et traitement direct à l'usine ;
- minerai à basse teneur aurifère stockée
sur le site de stockage de minerai à basse teneur pour son transport et
traitement direct à l'usine en fin de vie de la mine selon les besoins
de l'usine ;
- stériles stockés dans les verses à
stériles.
Du point de vue physique, les composantes requises par
l'opération purement minière incluent ainsi :
199
- les fosses d'extractions à ciel ouvert ;
200
- les zones de stockages à moyen terme de minerais
à haute teneur ; - les zones de stockages de minerai à basse
teneur ;
- les zones de stockage à moyen terme de roches
stériles et ;
- la flotte des véhicules pour l'extraction et le
transport de la roche.
7.1.2. Les méthodes et techniques de traitement
industriel du minerai
A partir des deux carrières, les bennes de 10 tonnes
transportent le minerai à l'usine de traitement. Selon le schéma
de fonctionnement de l'usine (ANDE, 2006), le minerai est classé dans
différentes piles de stockage selon la propriété physique
et la teneur aurifère. A partir des piles de stockage, le minerai est
accumulé et transféré dans une benne de concasseur
primaire couplé à un concasseur secondaire. Les concasseurs
réduisent le tout venant en fragment de 700 mm à moins de 50 mm
qui sont transportés par convoyeur vers une pile stockage du minerai
concassé puis vers le broyeur semi autogène (SAG). Afin d'enlever
le PH en prévision de la cyanuration, la chaux hydratée est
ajoutée à partir d'un silo directement sur le convoyeur
d'alimentation du broyeur SAG. La décharge du broyeur passe dans un
tamis cylindrique (trommel). Le matériel refusé au trommel est
reconduit par un convoyeur de recyclage vers le concasseur et/ou la
trémie d'alimentation du broyeur. Les pulpes à la sortie du
circuit de broyage sont collectées dans une cuve de distribution puis
pompées vers une batterie de cyclone. La surverse des cyclones forme le
produit final du circuit de broyage et contient 80% de particules
inférieures à 106 um. La pulpe rentre dans le circuit de
lixiviation au niveau de la première cuve où est ajoutée
une solution de cyanure de sodium. L'or va alors se dissoudre et former un
complexe avec le cyanure présent en solution. Du charbon actif,
régénéré ou frais, est évacué vers
l'amont d'une autre cuve à contre-courant du débit de la pulpe.
L'or est libéré du charbon actif chargé à l'aide
d'une solution chaude constituée d'hydroxyde de sodium et de cyanure de
sodium. Cet éluât chaud circule dans la colonne qui fonctionne
sous pression (350KPa) et à une température d'environ 100°C.
A la sortie de la colonne, la liqueur mère passe dans une cellule
d'électrolyse où l'or est déposé sur des cathodes
à laine d'acier. Au cours de l'année 2015, selon la direction
générale des mines et de la géologie (DGMG), la production
nationale d'or brut est de 23,5 tonnes. La part de NEWCREST est 1,6 Tonne, soit
6,80% de la production nationale.
7.1.3 Les produits chimiques dans le traitement
industriel du minerai
Les différents procédés de traitement de
l'or nécessitent l'usage de produits dangereux. Ceux utilisés par
la compagnie NEWCREST mining sont indiqués dans le tableau
ci-dessous.
201
L'étude d'impact environnementale et sociale
menée par l'entreprise avec l'appui du cabinet CECAF et l'ANDE en 2006,
atteste l'utilisation des produits chimiques dans l'exploitation des
carrières et le traitement des minerais. L'analyse du tableau montre que
la chaux est utilisée à hauteur de 1200 Tonnes. Le cyanure de
sodium est le deuxième en matière de quantité le plus
utilisé dans le traitement de minerai. 1100 tonnes de cyanure de sodium
sont utilisées chaque année par NEWCREST Hiré. Ce produit
est très efficace pour récupérer l'or à 95%. Le
charbon actif, la soude caustique, l'acide chlorécologique, sont
respectivement utilisés à 10,80 tonnes et 180 tonnes
annuellement. Quant à l'hypochlorite de calcium, la consommation est
infime. Il est utile pour la décontamination des sites en cas de
pollution accidentelle. En plus de ces produits chimiques, les explosifs de
fortes détonations sont utilisés tous les jours dans les
carrières à ciel pour fragmenter les granites.
L'ensemble de cette technologie a un impact
considérable sur le relief local et les autres composants de
l'environnement.
Tableau 31 : les quantités annuelles des
produits chimiques utilisés par la société
NEWCREST dans le traitement du minerai dans la sous-préfecture de
Hiré
Produits
|
Chaux
|
Cyanure de sodium
|
Acide chloré- écologique
|
Soude caustique
|
Charbon actif
|
Hypo- chlorite
|
Consommation annuelle (T)
|
1200
|
1100
|
180
|
80
|
10
|
Négligeable
|
Source : ANDE, 2006
7.1.4 La modification du relief local
La topographie de la sous-préfecture de Hiré
s'est vue modifiée depuis le démarrage des activités
d'extraction minière. En effet, Les minerais aurifères sont
enfouis sous une couche de sol ordinaire ou de roches (appelée `morts
terrains' ou `déchets de roche') qui sont déplacées ou
creusées afin de permettre l'accès au dépôt de
minerai. Pour l'extraction industrielle de l'or, la quantité de morts
terrains générés est énorme du fait de
l'étendue des superficies à traiter. Ces déchets
volumineux sont habituellement déposés sur place, soit en tas sur
la surface soit comme remblai dans les carrières. Le sable extrait des
profondeurs de la terre est généralement de couleur
rougeâtre et/ou noirâtre. Ce sont des terres stériles car
elles ne contiennent aucune substance pouvant permettre le développement
des cultures et n'enrichissent guère les sols qui les reçoivent.
Lorsque ces terres sont accumulées, elles forment des collines
artificielles qui modifient la topographie de la zone. Les transformations
apportées au paysage par l'exploitation minière à ciel
ouvert sont caractérisées par Gardner (2001) comme modifiant de
façon radicale le paysage et déréglant totalement
l'écosystème. Les dépressions créent par les
202
aires de lixiviation ou l'enlèvement des morts
terrains, deviennent de véritables pièges à eau. Sur les
anciens sites d'orpaillages, ces dépressions ne sont pas
refermées rendant dangereux le passage sur ceux-ci. Cette situation
entraine l'abandon par les propriétaires fonciers de ces espaces,
même après la fin de l'activité sur le site.
La modification de la topographie est sans aucun doute
l'impact le plus visible de l'exploitation minière. Ce sont de grandes
excavations aux versants raides dominées par des terrils tabulaires
(Calugaru, 2006), qui apparaissent, sur lesquels le vent soulève des
nuages de poussière. La formation de ces reliefs engendre des facteurs
de géo-risques sur les sites car les versants de ces collines sont
instables et susceptibles de s'ébouler. Les éboulements
pourraient être conditionnés par la précipitation, les
pentes des reliefs, la porosité et la faiblesse des roches. La
sous-préfecture de Hiré en compte plusieurs sur les deux sites
d'extraction de NEWCREST : Hiré et Bonikro. Ces collines viennent
augmenter le nombre de collines dans la sous-préfecture, lui donnant un
paysage d'exception.
7.1.5. Les atteintes au sol
Le sol se définit comme le support de la vie terrestre
et l'interface entre l'homme et la nature. Zone d'échange entre la
biosphère et la lithosphère, le sol est un milieu vivant,
complexe et sensible aux contraintes environnementales. Il est le support des
plantes cultivées ou non. Les activités humaines et
singulièrement l'exploitation minière en modifient la
structure.
Le sol se caractérise par sa structure et par sa
texture. L'étude pédologique de Hiré met en
évidence sept profils de sols appartenant à trois groupes
(plinthosol, ferralsol, Gley sol) qui ont été définis
suivant le système taxonomique de la FAO. La structure du sol correspond
à la façon dont les argiles, la matière organique et
l'humus sont enchevêtrés dans le sol. Elle peut être
modifiée par les actions anthropiques, contrairement à la
texture, qui elle ne peut être modifiée par les actions de
l'homme. En présence de sels minéraux et de matières
organiques, les argiles forment des complexes argilo-humiques. L'humus se
trouve quant à lui principalement dans la couche supérieure du
sol créée et entretenue par la décomposition de la
matière organique fraîche de la litière. Cette
décomposition s'effectue par des bactéries, des champignons, des
protozoaires (microfaune du sol). C'est l'ensemble de ces composantes qui
confère au sol sa fertilité et le rend propice à
l'agriculture. Lorsque le sol pour les activités extractives est
retourné, les couches souterraines sont mélangées aux
couches supérieures et rend cette partie du sol infertile. On constate,
comme dans la plupart des cas, que la végétation a du mal
à reprendre ses droits sur les anciens sites d'orpaillage, encore plus
difficile est d'y pratiquer une
agriculture (voir photo 24 et 25). La dégradation du
couvert végétal entraîne une forte érosion et,
à terme, une stérilisation irréversible des sols par
disparition de l'horizon humifère. Cette disparition de l'horizon
humifère agit directement sur la flore et indirectement sur les sols. Le
cumul de tous ces impacts accentue la gravité des dégâts
environnementaux causés par l'activité minière.
|
La fosse d'extraction de NEWCREST à Hiré-Est
avec absence totale de végétation sur les montagnes de terres
stériles
|
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 25: Site d'extraction aurifère industrielle
de Hiré-Est
|
Site d'orpaillage abandonné depuis 2014 avec
destruction de la végétation
|
203
Auteur photo : YOBO, 2016
Photo 26 : site d'orpaillage avec absence de
végétation
Les sols des sites d'extraction minière subissent les
effets pervers de cette activité. Ces effets sont la pollution et la
dégradation de la qualité des sols induits par les produits
utilisés pour l'extraction et le traitement du minerai des
activités minières. De bonnes terres agricoles en sont
retournées par grattage, creusage et par installation d'aires de
traitement du minerai pouvant augmenter la charge solide lors du ruissellement
sur le sous bassin versant.
204
L'utilisation des produits chimiques pendant l'exploitation de
l'or entraine l'appauvrissement du sol ce qui affecte également la
végétation. L'assèchement de certains herbacés est
constaté suite à l'utilisation des produits chimiques.
L'activité minière à Hiré
s'inscrit dans un environnement aux potentialités agricoles
prouvées. Cependant, l'impact de cette activité tant dans sa
forme aussi bien industrielle qu'artisanale, a un impact négatif sur les
terres cultivables dont la durée peut être qualifiée de
permanente. La perte de ces terres a un impact sur la production agropastorale.
La pression foncière exercée dans la zone par les compagnies
minières et les orpailleurs est forte et il sera par conséquent
difficile de remplacer ces terres. Le décapage des terres
végétales par fonçage des puits et par grattage a un
impact très important, car il augmentera le compactage et se soldera par
la perte de nutriments et de structure des sols. En raison des
différents aménagements réalisés sur la terre
végétale, comme la construction d'usines, d'habitat et
l'occupation des aires de traitement, le sol n'est pas disponible pour
l'agriculture
. Aussi, les terres encore dédiées à
l'agriculture perdent-elles leur fertilité comme le témoigne un
planteur :
« Quand vous voyez les banderoles rouges qui
indiquent le passage des équipes exploratrices de NEWCREST dans votre
champ, vous êtes sûr de voir votre production baisser et
finalement, vous perdez votre plantation ».
Cela nuit grandement aux activités agricoles de la
population locale. Le site qui abrite la fosse satellite de Hiré Est
aujourd'hui exploité par NEWCREST, était
précédemment des sites d'orpaillage intense. Une analyse des
échantillons de sols a été réalisée dans le
cadre des études d'impact pour l'obtention des permis d'exploitation des
fosses satellites de la mine. Elle indique que les sols de la ville de
Hiré contiennent des quantités importantes d'arsenic, de mercure,
de plomb, de cyanure, etc. Ces quantités sont suffisantes pour polluer
le sol et les eaux souterraines de la région.
7.2 UNE BIODIVERSITE MENACEE
La sous-préfecture de Hiré par sa position
géographique bénéficie d'une végétation de
forêt dense humide. Cette végétation se regroupe en
plusieurs types.
205
7.2.1 Les forêts
Les forêts denses semi décidues sur terre ferme
: ce sont des formations forestières dont les deux
strates arborées supérieures (dominante et dominée)
assurent un taux de couverture du sol supérieur à 75%.
L'étage dominant atteint généralement 35-40 m de hauteur
tandis que l'étage dominé atteint 25-30m de hauteur. Ces deux
étages formant une voute forestière fermée faisant
obstacle au rayonnement solaire en saison pluvieuse. Le sous-bois est
très clair et permet une circulation aisée à
l'intérieur de ce type de peuplement. Dans les zones concernées
par l'exploitation de l'or, on retrouve trois variantes de ces forêts
denses. Ce sont : les forêts denses semi décidues senso stricto,
les forêts denses de montagnes et les forêts galeries. Chacune de
ces variantes de forêt dense semi décidues sur terre ferme a des
espèces caractéristiques qui lui sont propres.
Les forêts marécageuses regroupent les
végétaux qui poussent sur des sols permanemment ou temporairement
inondés. Ce sont des forêts dont les sols sont peu
perméables du fait de la forte quantité d'argile. Dans ces sols
hydromorphes, on rencontre des espèces caractéristiques telles
que : les alstonia boonei, les raphias hookerie, les homalium letestui, etc.
Les végétaux aquatiques : ce
sont des espèces végétales vivant dans les milieux
aquatiques des zones humides du site du projet. Dans la zone d'étude,
ces milieux sont constitués par les marres, les cours d'eau, les
rivières et les bas-fonds inondés. Les espèces les plus
présentes dans ces milieux à Hiré sont : les crinum jagus
(amaryllidiceaea), les lemna paucicosta, etc.
Les forêts dégradées : ce
sont des forêts qui résultent de la dégradation des
écosystèmes forestiers provoqués par les activités
humaines (exploitation forestière, coupe de bois et d'arbustes pour
usage traditionnel, allumage de feux, etc...). Ce sont des forêts avec
des trouées plus importantes qui s'avèrent être un espace
favorable au développement des espèces héliophiles.
Les savanes guinéennes : ce sont des
formations savanicoles caractérisées par une
végétation herbacée constituée d'un tapis
graminéen continu et dominé par la présence des
palmiers-rôniers sur le site. Elles sont constituées d'une strate
formée essentiellement de hautes graminées. Elles atteignent plus
de 2 mètres et recouvrent totalement le sol. En arrière-plan on
rencontre des arbres et des arbustes surtout les palmiers rôniers. En
saison sèche cette végétation herbacée se
dessèche. Elle est brûlée et il ne reste plus que quelques
rejets de petits ligneux.
206
7.2.3 Les zones de cultures
Les espaces occupés aujourd'hui par l'exploitation
minière étaient majoritairement mis en culture. Dans ces zones,
plusieurs faciès de végétation ont été
rencontrées selon la densité de cultures, il est possible de
distinguer des zones occupées par des cultures pérennes
(café et cacao). On y trouve également des cultures
vivrières. Les cacaoyères et les caféières occupent
des superficies importantes tandis que les cultures vivrières, bien que
répandues, sont de dimensions réduites. On rencontre tout de
même quelques espèces de ligneux dans ces parcelles de cultures.
Il s'agit, entre autres, de ceiba pentandra, de bombax buonopozense, de
spondias mombin et de ricinodendron heudeulotii. La présence d'orangers,
de manguiers, de papayers est aussi observée dans les plantations
pérennes.
Les populations qui ont dû être
déplacées, dans le cadre de l'exploitation de la mine de
Hiré, possèdent toujours leurs exploitations agricoles dans les
environs de la mine et particulièrement des espaces contaminés au
cyanure. Il est fort à craindre que les sols des plantations d'où
proviennent les denrées produites et commercialisées ne soient
contaminés. (APDH, 2015).
Ces sols peuvent aussi être affectés en aval par
des transports de sédiments contaminés en métaux
générés par l'activité minière et ainsi,
affecter des cultures (Liu et al, 2005) qui peuvent in fine, affecter
l'alimentation de l'homme.
7.2.4 La menace de l'exploitation
minière
La construction des diverses installations et infrastructures
pour l'exploitation de l'or à Hiré entraine la transformation du
milieu environnant. L'exercice de l'extraction minière passe par le
dégagement des emprises, c'est-à-dire de tout ce qui se trouve
sur la superficie à exploiter ou couverte par le permis minier ou la
surface à traiter. Le dégagement des emprises passe donc par le
débroussaillage, l'abattage, le dessouchage et l'évacuation des
arbres du périmètre, puis le décapage des terres en
végétation est réalisé. L'étendue des
superficies consacrées à l'activité minière accroit
l'importance de la destruction du couvert végétal qui a pour
rôle d'assurer la protection et l'enrichissement du sol. Le couvert
végétal contribue aussi au développement des
micro-organismes du sol. Ainsi, une perte et un morcèlement des habitats
disponibles pour la flore et la faune sont induits par ce dégagement du
couvert végétal. Cela entraîne à terme, une
souffrance des milieux biologiques et une diminution de leur
diversité.
Les milieux biologiques peuvent également souffrir
d'une variation de leur environnement physique (Genivar, 2008). Dans cette
situation, la vulnérabilité du sol est plus accrue face aux
207
érosions (éoliennes et hydriques) et autres
désagréments qu'ils pourraient subir. L'érosion hydrique
est la plus probable dans la sous-préfecture de Hiré. Pendant les
saisons de pluies, ce sont des quantités de pluie importantes qui
tombent. Ce qui accroit les risques d'érosion hydrique. Cette forme
d'érosion conduit au ravinement des sols et les rend très
vulnérables. Une transformation du milieu écologique d'origine se
fait observer, la végétation est détruite avec la perte de
diverses espèces végétales, certaines terres agricoles
adjacentes deviennent arides. Ces différentes pertes amenuisent les
ressources des populations locales affectées avec pour
conséquence notable la baisse de la production agricole, la
précarisation des conditions de vie et les difficultés de
satisfaction des besoins essentiels des familles.
La dégradation du couvert végétal
entraine naturellement la perte de la diversité floristique et faunique.
Puisqu'elle constitue l'espace de vie de plusieurs espèces.
7.2.5 Destruction des ressources fauniques et
floristiques
D'une manière générale, la zone de
Hiré a une diversité floristique considérée comme
riche. L'accès à la terre à traiter nécessite que
tout le couvert végétal soit dégagé. Pour des
exploitations industrielles qui s'étendent sur des superficies
importantes comme c'est le cas dans l'exploitation de l'or à
Hiré, on assiste à la destruction de l'habitat naturel des
plantes, des animaux et à la perturbation de l'écosystème
air, sol et eau. Le cadre de vie naturel des espèces
végétales et animales qui constitue le milieu biologique de
Hiré étant partiellement détruit, cela renforce
également la perte de cette diversité biologique
déjà entamée par les activités anthropiques
composées de jachères et de cultures (pérennes et
vivrières).
Les périmètres occupés par l'exploitation
minière sont des unités d'occupation du sol comprises entre
forêt, cultures/jachères, sols nus/habitats et eau. Avec
l'ouverture des pistes pour la prospection, l'explosion des montagnes, la mise
en place de la galerie et les différentes installations de la mine, ce
sont, outre les terres agricoles, des surfaces forestières qui sont
réduites.
De par sa proximité à Hiré, soit 10 km
des derniers campements de la sous-préfecture, la forêt
classée de la Sangoué fait l'objet d'une invasion des
orpailleurs. Leur présence dans cette forêt classée date du
début des années 2000 mais connaît une plus grande
importance depuis 2014. Cette affluence des orpailleurs dans la Sangoué
depuis 2014, se justifie par le fait qu'ailleurs, notamment à
Hiré et à Oumé, ils subissent des pressions
énormes, alors que là ils sont installés clandestinement,
à l'abri de tracaceseries quelconques. Avec la décision de
rationalisation de l'orpaillage, les forces de l'ordre ont mené des
opérations de répressions dans le but de fermer
208
les sites d'orpaillage clandestin. L'orpaillage
représente aujourd'hui, une réelle menace pour cette
forêt.
L'activité d'orpaillage a également des
répercussions sur le couvert végétal. Les sites
d'orpaillage sont généralement des plantations ou des
jachères qui sont détruits pour l'exercice de cette
activité. Aussi, la coupe des arbres intervient-elle pour le
soutènement des puits, la fabrication d'échelles permettant de
descendre dans les puits, la mise en place des comptoirs et des habitations sur
certains sites. Cette coupe se fait sur place et sans contrôle. Selon le
chef du bureau des Eaux et Forêts de Hiré, aucun orpailleur ne
détient d'autorisation de coupe. Le soutènement utilise en
moyenne 15 bois (tronc d'arbre) pour un mètre. Un puits
nécessiterait environ un chargement, soit environ 400 à 500
troncs d'arbres pour son soutènement (voir photo 26). Ce qui fait qu'on
assiste à la destruction de la forêt dégradée ou
savane arborée qui a fait place à la forêt dense ombrophile
naturelle de la zone fortement dégradée par les activités
agricoles et les aménagements urbains de la zone. Par ailleurs, cette
destruction du couvert végétal favorise l'érosion et le
lessivage du sol. L'installation des orpailleurs nécessite le
défrichage, la coupe de bois et de pailles pour la construction de
maisons ou d'hangars de fortune à usage d'habitation ou commercial. Cela
entraine la raréfaction de certaines espèces et la disparition
d'autres. La destruction de l'aire de nidification et des ressources
alimentaires des oiseaux entraine un déplacement de ces populations. Le
rejet dans la nature des eaux usées après lavage du minerai
entraine la turbidité des cours d'eau puis la raréfaction, voire,
la disparition des espèces aquatiques.
209
|
Le bois sert de cale pour éviter les
éboulements de terrain.
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Auteur photo : YOBO, 2016
|
|
Photo 27: Le bois est coupé pour servir
d'étaie dans les fosses
L'exploitation artisanale de l'or laisse un impact physique
important dans la sous-préfecture de Hiré : fosses et trous
creusés à ciel ouvert, galeries souterraines, tas de sables et
déboisement. Cet impact physique influence négativement la
qualité du sol et contribuent à la diminution de la
densité et de la diversité biologique de Hiré.
7.3 LES RESSOURCES EN EAU MENACEES
L'exploitation des ressources minérales a un impact
négatif sur la ressource en eau (de surface et souterraine) tant au
niveau de la quantité qu'au niveau de la qualité. Ainsi, on note
entre autres, la perturbation des réseaux hydrographiques et la perte de
la biodiversité des milieux aquatiques. Cette exploitation
entraîne également la dégradation de la qualité des
eaux par les différents produits qui entrent dans le traitement du
minerai.
7.3.1 La réduction de la disponibilité en
eau du fait de l'exploitation minière
La région de Hiré est située dans le
bassin du fleuve Bandama, fleuve stratégique dans la région du
centre de la Côte d'Ivoire. Il fournit de l'eau indispensable pour divers
usages économiques ou environnementaux comme l'approvisionnement de
barrages hydro-électriques. Il est également utile pour les
ménages, pour l'agriculture et pour l'aquaculture. Le Bandama par ses
210
affluents que sont le Tiéné, le Gogobro, le Gbro
et le Vero traverse Hiré. La pluviométrie annuelle moyenne
légèrement inférieure à 1200 mm alimente de
nombreux petits cours d'eau qui se déversent dans le fleuve Bandama. Les
eaux souterraines contribuent également à l'approvisionnement en
eau du bassin hydrologique à travers les sources et les bas-fonds qui
augmentent le volume d'eau et fournissent de l'humidité pour
l'agriculture. Les plans d'eau encaissés dans les vallées sont
importants malgré le réseau hydrographique peu dense de la
région. On trouve à plusieurs endroits des vallées et des
chaînes étroites qui serpentent le long du sol. Les
rivières et les plans d'eau sont aussi abondants du fait de la
fréquence et de l'importance des précipitations dans la zone
(1200 mm/an). Des cours d'eau et bassins apparaissent également de
manière intermittente dans la localité, avec des tailles qui
varient selon les saisons. Elles augmentent de volume en saison des pluies et
pendant les saisons sèches, se transforment en de petites poches d'eau.
L'eau est souvent contaminée par les petites particules de métaux
lourds qui, avec le temps, se détachent des résidus, se
disséminent avec le vent, se déposent sur le sol et sur les lits
des cours d'eau, et s'intègrent lentement aux tissus des organismes
vivants dans les cours d'eaux. Aussi, l'exploitation à ciel ouvert
majoritairement pratiquée à Hiré a-t-elle
nécessité des déplacements de mottes de terres
appelés mort terrain. L'enlèvement et la superposition de ceux-ci
a modifié la topographie du sol formant par endroits des bassins
versants qui ont modifié la répartition des eaux de surfaces et
des eaux souterraines. On trouve des sources en nombre d'endroit dans chaque
vallée, entretenant continuellement des sols humides tels que les
bas-fonds. Ceux-ci, du fait de l'abondance d'eau et d'humidité qu'on
leur connaît, sont souvent utilisés pour la riziculture, la
maïsiculture et les cultures maraichères.
L'exploitation minière est une activité qui
nécessite des quantités d'eaux importantes. NEWCREST a construit
des barrages hydrauliques pour satisfaire le besoin en eau de la mine. La
sous-préfecture est drainée par quatre bassins dont trois, le
Gnouzalé, le Gnénessi et le Zéssié, sont des
affluents du fleuve du Bandaman et le Lélébiaba qui est un
affluent du Boubo. Ces quatre sous bassins constituent les principales sources
d'alimentation en eau de surface du site minier. Les digues de fortune
construites sur certains de ces sous bassins (Gnénessi) permettent
l'approvisionnement en eaux brutes de l'usine de traitement et l'arrosage des
voies d'accès à la mine d'or et des pistes à l'aide de
camion-citerne. Deux barrages de retenue d'eau sont construits sur le sous
bassin de Gnénessi (en amont et au centre) et couvrent respectivement
les superficies de 1 172 464 m2 et 786 401 m2. Le
troisième barrage est construit en amont du sous bassin de
Lélébiaba et couvre une superficie de 1377 000 m2. Ces
différents barrages
211
facilitent l'utilisation de l'eau pour les diverses
activités liées à l'exploitation de l'or (Bamba, 2012).
La compagnie minière a également
réalisé plus d'une vingtaine de forages autour de Bonikro. Au
moment des crues, les barrages déversent leurs eaux qui inondent les
plantations voisines de la mine. Les eaux utilisées dans le traitement
du minerai sont par la suite traitées et rejetées. Cette eau
vient généralement de forages réalisés par la mine
elle-même. En effet, les grandes quantités d'eau
nécessaires à l'activité minière réduisent
généralement la nappe phréatique du lieu et arrivent
même à assécher les puits et les sources. Les
activités de pompage de NEWCREST autour des fosses à ciel ouvert
entrainent un affaissement localisé de l'eau contenu dans la nappe
phréatique. Cet état de fait est avancé comme facteur
explicatif des difficultés que connaît la population en
matière d'approvisionnement en eau potable par les services de la
SODECI. Les populations de Hiré connaissent de véritables
difficultés d'approvisionnement en eau potable. Le service
d'approvisionnement en eau potable assuré par la SODECI dans la commune
de Hiré laisse à désirer, car celle-ci semble desservir
les quartiers de façon alternée. C'est-à-dire que les
ménages ont de l'eau courante à intervalle de deux à trois
semaines. Pour les populations, le manque d'eau dans les forages de la SODECI
est créé sinon aggravé par la présence des mines.
La capacité d'approvisionnement en eau potable de la ville de
Hiré par la SODECI est très limitée. Installé
à Douaville un village de la sous-préfecture de Hiré
situé à 8 km de la ville, les forages et l'usine de traitement de
la SODECI sont en baisse de production. L'un des deux forages existants est
complètement asséché et l'autre a vu sa production baisser
de 30% avec un débit passant de 11m3/heure à
8m3/heure.
Les populations, pour pallier cette situation, se sont donc
tournées en grande partie vers l'utilisation de l'eau souterraine
à travers les puits. Cependant, l'eau dans ces puits baisse au fur et
à mesure et s'assèchent par la suite, entretenant ce lien
qu'établit la population entre l'activité minière et le
manque d'eau. Cette assertion des populations est soutenue par Elaw (op. cit)
quand il souligne que l'activité minière du fait des grandes
quantités d'eau utilisées dans sa pratique, contribue
généralement à la réduction des
potentialités de la nappe phréatique du lieu et arrivent
même à assécher des puits et des sources.
Les enquêtes auprès des orpailleurs nous ont
permis de nous rendre compte des quantités d'eau importantes qu'ils
utilisent dans leur activité, surtout pendant le lavage à la
batée. A l'aide des motos pompes, l'eau est acheminée des puits
de fortunes creusés par les orpailleurs vers le site de lavage. Pour le
lavage à la batée de 50 kg de poudre de minerai, les orpailleurs
utilisent
212
environ deux barriques d'eau qui représentent environ
400 litres d'eau. Lors du fonçage, les orpailleurs atteignent la nappe
phréatique qui se situe en moyenne à 14-15 mètres de
profondeur. Ils ont recours à des motopompes pour évacuer des
quantités impressionnantes d'eau. Ces motopompes sur le site
évacuent chacune plusieurs litres d'eau par jour, contribuant ainsi
à diminuer le niveau de la nappe d'eau souterraine. Après le
broyage du minerai dans les moulins de la ville, les laveuses extraient
d'importantes quantités d'eau des puits pour assurer le lavage du
minerai. Les activités lors des étapes de lavage et d'extraction
de l'or par le mercure sont les plus consommatrices d'eaux. A titre d'exemple,
il faut environ 200 litres d'eau pour le lavage d'une quantité de
minerais contenue dans un sac de farine de 50 kg. Ce sont donc des
quantités d'eau importantes qui sont utilisées au quotidien sur
les différents sites d'orpaillage.
7.3.2 Détérioration de la qualité
des eaux de surface et des eaux souterraines
Le risque que les produits chimiques, nuisibles pour la
santé humaine utilisés (acide) pour casser la roche et extraire
les minerais, s'infiltrent dans la nappe phréatique et infectent les
sources d'eau potable et les rivières est devenu une
réalité (CEDAC, 2009).
Les produits chimiques dangereux utilisés au cours des
diverses étapes de traitement des métaux, tels que le cyanure,
les acides concentrés et les composés alcalins, quoique
censément contrôlés, se retrouvent souvent, d'une
manière ou d'une autre, dans le système hydrologique. La
modification et la contamination du cycle hydrologique ont des effets
collatéraux très graves qui portent atteinte aux
écosystèmes environnants et aux personnes. Ces atteintes sont
particulièrement graves dans le cas des zones forestières, car
elles abritent des espèces terrestres et aquatiques parfois
exclusives.
Les activités des sociétés
minières dans la sous-préfecture de Hiré contribuent comme
dans la plupart des activités anthropiques, à la
dégradation de la qualité des eaux de surface et des eaux
souterraines. Cette dégradation intervient par deux principaux
mécanismes que sont : le rejet des produits issus de l'étape de
purification (au niveau du complexe industriel ou du parc à
résidu) et le lessivage des surfaces exploitées (possible
acidification des eaux et enrichissement en matières en suspension,
sulfate et métaux lourds) aussi appelé drainage minier acide. Les
eaux chargées de ces produits se retrouvent dans les plantations
voisines comme le décrit un de nos interlocuteurs :
213
« Mon champ est situé à 100
mètres de l'usine de la société NEWCREST. Les eaux
polluées provenant du traitement des minerais stagnent durant plusieurs
mois dans mon champ et ne me permettent pas de faire mes cultures
».
Aussi, les produits utilisés pour le traitement du
minerai que sont les différents acides, le mercure et le cyanure,
modifient-ils la composition de l'eau avec laquelle ils entrent en contact. Ils
la rendent impropre à tout autre usage direct. Lorsque le cyanure de
sodium (NaCN) réagit avec l'eau (H2O), il se décompose en donnant
un gaz très inflammable et très toxique : l'acide cyanhydrique,
également connu sous le nom de cyanure d'hydrogène (HCN), ainsi
que de la soude caustique (NaOH) corrosive. Cette toxicité est telle que
NEWCREST interdit de manger, de boire et de fumer à proximité de
son lac à cyanure.
Il est vrai que de nombreuses dispositions sont prises par les
sociétés minières en matière de respect des
règles environnementales. Cependant, il ressort de nos entretiens avec
les populations et particulièrement celles dont les plantations sont
situées à proximité des sites occupés par la
société minière, que la compagnie minière NEWCREST
leur avait demandé de ne pas boire les eaux de source dans leurs
champs.
Les éléments chimiques produits par l'orpaillage
ont un effet très nocif sur les eaux (Carmouze, 2001). Cette
nocivité est due aux techniques et aux produits utilisés pour
l'extraction et le traitement du minerai. L'eau est polluée lorsqu'elle
contient des substances susceptibles d'être nuisibles et dangereuses pour
la santé ou désagréables ou lorsqu'elle a subi une
altération dans sa couleur et/ou dans son odeur. Nous n'avons certes pas
réalisé d'analyse de prélèvement pour savoir le
degré de pollution causé par cette activité. Cependant,
d'autres dégâts causés à l'eau sont visibles. L'eau
utilisée pour le lavage de l'or est à la suite de son usage
déversée directement dans la rivière qui passe tout juste
à côté. Le drame, c'est que ce geste
inconsidéré met en danger la vie des ressources halieutiques et
même des vies humaines, car l'eau de cette rivière polluée
par le fait de l'orpaillage, est souvent consommée par des paysans dans
leurs champs.
Les règles environnementales étant parfois
méconnues des orpailleurs, certains déversent directement l'eau
chargée des produits toxiques utilisés pour le traitement de l'or
tels que le mercure et le cyanure dans la nature (photos 27 et 28). Cette eau
se retrouve par érosion dans
les eaux de surfaces et par infiltration dans les eaux
souterraines.
|
On voit sur cette photo que le cyanure se retrouve dans la
nature (traces jaunâtre dans le sable).
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Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 28: dépôt de cyanure sur le
sol.
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L'herbe est morte du faite de la présence du
cyanure
|
214
Auteur photo : YOBO, 2015
Photo 29: végétation brulée par le
cyanure
7.4 NUISANCES ATMOSPHERIQUES ET SONORES
L'activité minière produit de la pollution
atmosphérique et sonore. Des enquêtes menées dans la
région de Hiré, il ressort que les activités des usines
minières qui y sont installées, produisent des nuisances sur les
populations riveraines. Ces nuisances sont les substances chimiques volatiles,
particules solides en suspension dans l'air (poussières) et nuisances
sonores (explosions) parfois accompagnées de fortes vibrations.
215
7.4.1 Pollution atmosphérique
On distingue différents types de nuisance visible
à l'oeil nu selon la nature de la substance libérée dans
l'air. Les plus fréquentes rencontrées sont :
- les produits chimiques qui s'évaporent dans l'air :
le cyanure de sodium, le gasoil, l'essence, l'acide chlorhydrique et l'arsenic
;
- le ciment vrac utilisé en plein air à la
préparation mécanique du minerai ;
- les poussières émises pendant les travaux
d'extraction de la mine et le roulage des engins ;
- les fumées émises par les engins en circulation
sur le chantier.
La poussière est la plus importante des nuisances sur
les sites d'extraction. Le creusage du sol jusqu'à atteindre la roche
mère nécessite le déplacement de morts terrain pendant
lequel d'importantes quantités de poussières sont émises.
Les immenses nuages de poussière qui en émanent le
démontrent bien. La poussière provient également des
pistes de roulage, lors des nombreux passages des camions du personnel et des
camions transportant le minerai de la fosse de Hiré à la mine de
Bonikro. Selon les populations, ces poussières sont plus importantes
pendant la saison sèche et entre 17 et 18 heures.
Les populations dont les cultures se trouvent à
proximité des sites d'extraction ou des pistes de roulage,
déclarent que les amas de poussières sur les plantes ont pour
conséquence de détruire les cultures. En effet, les
poussières peuvent endommager les composantes du milieu naturel. Du
point de vue climatique, les particules solides en suspension dans l'air
peuvent disperser les rayons solaires et réduire la quantité de
lumière solaire supposé arriver au sol. Cette réduction de
la lumière solaire provoque en conséquence une baisse de la
température dont les plantes ont également besoin pour la
photosynthèse.
La fréquence des émissions de fumées par
les engins en circulation sur le chantier ainsi que les machines
utilisées, impactent également la qualité de l'air. Cela
est dû par exemple à une augmentation des émissions de gaz
à effet de serre entraînée par l'utilisation de machinerie
et de véhicules à moteur thermique ainsi que par la diminution de
la couverture végétale. Cette dernière cause est
également en partie responsable de l'augmentation des émissions
de poussière. Le fait de dénuder un terrain favorise
l'érosion éolienne, phénomène qui peut être
très important étant donné les surfaces des terrains
concernés. Le vent transporte des poussières issues de la halde
à stérile, du parc à résidu et de la pile
temporaire de minerai. En plus de
216
l'action éolienne, il existe deux autres causes
essentielles qui ont pour effet l'émission de poussière :
- les opérations sur le minerai ou les stériles
(forage, dynamitage, concassage) et ; - le transport et la manipulation de
minerai, de stériles et de résidus.
Ces quantités de poussière peuvent être
nuisibles pour les êtres vivants que sont : l'homme, les animaux et les
plantes.
Pour réduire un tant soit peu les émissions de
poussières, la compagnie minière après plusieurs plaintes
des populations avait entrepris l'arrosage des voies de passage des camions
notamment celle qui relie la mine de Bonikro à la voie nationale en
passant par les hameaux de Bonikro et Bandamakro. Mais cette mesure n'a pas
été maintenue au-delà d'une période de courte
durée.
L'importance présence de poussière est aussi
remarquable sur les sites d'orpaillage. Plusieurs activités sont source
de pollution de l'air particulièrement le broyage du minerai. La
quantité de poussière produite par le fonçage étant
moindre du fait de l'atteinte de la nappe phréatique par les engins
fonceurs. On note également l'émission d'importants gaz, de
fumées mais aussi de bruits (moulins, motopompes et moteurs). Les
vapeurs de mercure pendant le brûlage de l'amalgame polluent
également l'air. Quant aux odeurs, elles sont dues à la
décomposition des déchets solides et liquides
générés par les orpailleurs. Ces déchets sont
rejetés dans la nature sans aucune mesure d'assainissement. La nuisance
sonore résulte du pompage des eaux souterraines et des outils de
fonçage des orpailleurs.
7.4.2. Les nuisances sonores et vibrations
Dans l'installation industrielle de la mine, les principales
sources de nuisances sonores sont les engins lourds, les machines de l'atelier
de concassage et le dynamitage des roches mères. Ces bruits
assourdissants sont aussi causés par le trafic routier effectué
le long des voies de communication pour le transport. Certains bruits dont ceux
de l'atelier de concassage et des engins ont une faible nuisance par contre
ceux liés au dynamitage des roches sont les plus intenses. Les
explosions de roches sont aussi accompagnées de fortes vibrations de
terrains et peuvent être entendues jusqu'à plusieurs
kilomètres. Ces bruits s'amplifient les nuits et troublent le sommeil
des populations riveraines qui disent ne pas s'accommoder à cette
situation. Les vibrations induites par les explosions de roches sont tellement
intenses qu'elles fissurent les murs des maisons dans les campements voisins
comme Koutouklou-konankro et mettent ainsi en danger les personnes qui y
vivent. Au quartier Baoulé, les explosions de dynamitage ont
également fissurées les logements proches du site (voir photos 29
et 30). La
217
proximité des logements du site d'extraction en accroit
les répercussions sur les populations et les constructions. Selon les
autorités de la mine les premières maisons sont situées
à 500 mètres du site d'extraction tandis que la population dit
être à moins de 100 mètres des installations de NEWCREST.
Une visite sur les lieux nous permet de réaliser que la distance entre
les premières habitations et la fosse de Hiré Est, est loin de
valoir les 500 mètres avancés par la compagnie minière.
|
Un mur de concession fissuré du fait des vibrations du
sol lors des dynamitages.
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Auteur photo : YOBO, 2017
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Photo 30 : dégâts causés par les
explosions de dynamitage au quartier Baoulé
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Fosses satellite de la mine de Hiré Est situées
à moins de 200m des d'habitations
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Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 31: des constructions à moins de 300m de la
mine de Hiré
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218
7.5 LES DIFFERENTS ACCIDENTS ENVIRONNEMENTAUX A
HIRE
L'opérationnalisation du projet aurifère de
Bonikro a contribué à la transformation du milieu environnant. A
l'instar de toutes les activités minières, celle de Bonikro a
entrainé le défrichage total du sol, la modification radicale du
paysage et le dérèglement total de l'écosystème, la
destruction des nappes phréatiques ainsi que le déplacement des
populations, etc. Cependant, à côté des incidences
ordinaires qu'on connaît à l'activité, deux importants
accidents dont les conséquences menacent gravement l'environnement sont
survenus dans le cadre des activités de la compagnie minière.
7.5.1. La rupture des digues du cours d'eau
Dans le cadre de l'aménagement des terres du permis
minier PE 032-2007, la compagnie minière exploitant la mine de Bonikro a
interrompu l'écoulement naturel d'un cours d'eau situé au Sud de
la fosse d'extraction de Bonikro et à l'Ouest de la verse à
stérile. Cependant, en juillet 2008, cette interruption
d'écoulement a occasionné une élévation du niveau
d'eau en amont entrainant l'inondation progressive des terres alentours. Cette
inondation a également entrainé le débordement du lac
à cyanure dont les eaux se sont répandues dans les plantations et
friches voisines. Cette inondation a entrainé la substitution des terres
fermes en un lac (voir figure 29), dépossédant de façon
brutale les populations de leurs plantations et de leurs parcelles. Bien que se
situant sur l'étendue du permis minier, les terres touchées
n'avaient pas été indemnisées par la compagnie
minière. Suite à cet accident, la compagnie minière
NEWCREST s'est résolue à compenser les populations
touchées par l'inondation. Les négociations ont abouti au
paiement de 227 523 103F CFA d'indemnité payé par NEWCREST
à l'ensemble des personnes impactées.
219
Figure 29 : carte NEWCREST synthétisant les
zones touchées par l'inondation
220
7.5.2 La rupture des tuyaux d'acheminement des eaux
cyanurées
Le 18 mai 2016, suite à un feu de brousse les tuyaux
d'évacuation des eaux usées issues du traitement du minerai, vers
le bassin sédimentaire, ont brulé et se sont rompus, ce qui a
entrainé le déversement des eaux cyanurées dans les
plantations environnantes. Des poissons et des reptiles ont été
trouvés morts près de certains cours d'eaux. Les populations de
Koutouklou-Konankro, situées à moins de 500 mètres du lac
à cyanure de NEWCREST, ont été les plus touchées.
Ces populations ont vu leurs plantations envahies par les eaux
cyanurées. L'infiltration des produits chimiques dans le sol et dans la
nappe phréatique a pollué l'eau et l'a rendue impropre à
l'agriculture et à la boisson. Or, l'indisponibilité du
château d'eau conduit les populations à utiliser l'eau des sources
et des rivières pour leurs besoins quotidiens. Les produits chimiques
utilisés pour le traitement de l'or s'infiltrent dans la nappe
phréatique et polluent ainsi l'eau utilisée par les cultures
à proximité. Pourtant, le creusage et/ou l'utilisation des eaux
de puits ou eaux souterraines dans ce campement est interdit. Les populations
de ces campements ont au début des activités d'extension du lac
à cyanure été approvisionné en eau par les citernes
de la société NEWCREST. Puis la société
minière a par la suite construit deux pompes hydrauliques villageoises.
Hormis cette zone, l'eau est généralement propre à la
consommation. Avec cet accident, les populations de Koutouklou-Konankro
craignent la contamination de leur sol du cyanure contenu dans les eaux de
traitement du minerai. Cette suspicion est confirmée par l'APDH, une ONG
qui s'est donné pour vocation de protéger les droits de l'homme.
L'APDH a effectué un test physico-chimique sur un
prélèvement d'eau de surface effectué dans les plantations
du chef de Koutouklou-Konankro, situé à moins de 500
mètres du lac à cyanure. Les résultats de ce test montrent
que la valeur du cyanure de l'échantillon est supérieure aux
spécifications de la norme ivoirienne NI 385 (voir annexe 4). Cet
accident montre que le danger reste permanent pour ces populations, qui peuvent
à tout moment être exposées aux eaux chargées de
cyanure.
7.5.3 Les conflits dus aux accidents et problèmes
environnementaux
Les conflits dus aux problèmes environnementaux
opposant les communautés locales aux sociétés
minières se sont multipliés et amplifiés à la suite
de ces différents accidents. En effet, l'extraction et le traitement
industriel de l'or posaient déjà de nombreux
désagréments aux populations dont elles n'avaient de cesse de se
plaindre. Quand arrive en 2008 l'accident de la rupture des digues du cours
d'eau, avec le débordement du lac à cyanure dont les eaux se sont
répandues dans les plantations et friches voisines, les populations
crient leurs ras-le-bol. Ayant
connaissance de la toxicité des produits contenus dans
l'eau du lac à cyanure du fait des pancartes situées à
proximité (photos 31 et 32), et voir cette eau se retrouver dans les
plantations desquelles elles tirent leurs subsistances, les populations se sont
vues comme exposées à la mort. Dans cette situation, elles ont
exigé de la compagnie minière qu'elle les dédommage
toutes. La compagnie minière n'entendant pas les choses de cette oreille
a voulu prendre en compte que les parcelles inondées sans tenir compte
de la zone de rayonnement. Les victimes se distinguant par la gravité ou
le degré d'invasion de leur terre. Les réactions qui s'en sont
suivies ont été très vives.
|
Pancarte signalant le danger encouru dans cette zone.
|
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 32: pancarte située près du lac
à cyanure
|
Pancarte portant différentes interdictions, signe de
la toxicité du cyanure.
|
221
Auteur photo : YOBO, 2017
Photo 33: pancarte signalant la présence de
cyanure dans la zone
222
7.6 L'ACTIVITE MINIERE ET LES FAIBLESSES DANS
L'OBSERVATION DES MESURES DE PROTECTION
Les différents effets pervers de l'activité
minière sur l'environnement observés à Hiré le sont
en dépit des règles environnementales établies par
l'État en matière de protection de l'environnement. Ces
règles en matière de protection de l'environnement concernent les
textes législatifs et règlementaires ainsi que des textes
internationaux en matière environnementale que l'État a
ratifiée.
7.6.1 Les structures étatiques chargées de
l'environnement
La constitution ivoirienne du 1er Août 2000 consacre, en
son article 19, le droit de l'homme à un environnement sain. D'autres
textes législatifs et réglementaires tels que le code minier, le
code de l'environnement, le code de l'eau, etc. donnent des dispositions
précises en la matière. Cependant, du point de vue
règlementaire, le gouvernement ivoirien accorde des permis
d'exploitation veille-t-il à travers des entités
régulatrices notamment l'ANDE, le CIAPOL et la direction locale du
Ministère de l'Industrie et des Mines à faire appliquer et
respecter la loi minière et la protection de l'environnement ?
L'ANDE est un Établissement Public National (EPN)
créé par le décret n°97-393 du 09 juillet 1997 et a
pour mission l'exécution des projets et programmes environnementaux en
Côte d'Ivoire. Le rôle de l'ANDE dans le cadre de l'exploitation
minière est de mener les EIES qui permettent d'évaluer la
faisabilité des projets miniers du point de vue environnemental.
Crée le 09 Octobre 1991, par décret N°
91-662 du 9 octobre 1991, le CIAPOL « Centre Ivoirien Antipollution »
a pour rôle l'analyse systématique des eaux naturelles (marines,
lagunaires, fluviales, souterraines et météoriques), des
déchets (solides, liquides et gazeux) et des résidus. Il
évalue également les pollutions et les nuisances puis est
chargé de l'établissement d'un système de surveillance
continue des milieux dénommés. Le CIAPOL assure également
l'évaluation des pollutions et nuisances ainsi que la protection des
milieux récepteurs.
7.6.2. Le débat autour de la présence de
cyanure dans la nature à Hiré
Les différents accidents environnementaux qui ont eu
lieu à Hiré relativement aux activités de NEWCREST, ainsi
qu'à l'infertilité des terres non occupées par la mine,
ont fait naitre chez les populations, la conviction de la présence de
cyanure dans la nature. Cette suspicion confirmée par les
résultats des analyses menées sur le prélèvement de
la plantation du chef de Koutouklou-Konankro est cependant contestée par
la compagnie minière. En effet, pour étayer ses propos,
223
NEWCREST a fait recours au CIAPOL (Centre Ivoirien
Anti-pollution) pour des analyses de prélèvement. Selon, les
résultats de ces analyses, le prélèvement effectué
ne contient pas de cyanure. Cette assertion est rejetée par les
populations qui expliquent que le lac à cyanure est construit sur une
source d'eau naturelle qui communique avec la nappe phréatique et les
autres sources d'eau. Les aménagements qui permettent d'éviter
cette infiltration n'ayant pas été réalisés, la
population estime que l'eau dans un certain rayon du périmètre de
sécurité de la zone minière est contaminée par les
produits chimiques miniers.
Contrairement aux deux (2) relocalisations involontaires
(Bonikro et Bandamakro), la relocalisation de Koutouklou-Konankro ou Konankro
est dite volontaire, c'est-à-dire faite à la demande de la
communauté. À la base, les populations de Konankro ont
adressé plusieurs plaintes de relocalisation à la mine, portant
sur des impacts sonores émanant nuitamment du site minier, la
qualité de leur eau jugée polluée par le cyanure du parc
à résidus de la mine. Plusieurs études ont ainsi
été menées par la mine et les régulateurs, lesquels
avaient jugé ces plaintes irrecevables au regard des résultats
techniques récoltés dans le campement. Cependant, la
décision de relocaliser Konankro a été prise par
anticipation à un projet d'extension de la mine ce, après la
décision d'opérer les gisements satellitaires de Hiré et
Dougbafla. En effet, l'étude de faisabilité de ces projets
avaient conduit l'industrie à réfléchir au transport du
minerai de ces sites vers l'usine de Bonikro pour y être traité.
Cet accroissement de la production aurait nécessité une
augmentation de l'espace de traitement et amplifié les bruits des engins
et des concasseurs ; ce qui viendrait rallonger la liste des revendications de
Konankro.
7.7. LA SANTE DES POPULATIONS, FRAGILISEE PAR L'ACTIVITE
MINIERE La santé est définie par l'Organisation Mondiale
de la Santé (OMS) comme : «un état de bien-être
physique, mental et social et pas seulement comme l'absence de maladie ou
d'infirmité». Aussi, les substances dangereuses et les
déchets dans l'eau, dans l'air et dans le ciel peuvent-elles avoir des
répercussions graves, négatives sur la santé publique.
7.7.1. Impact des nuisances sur la santé des
mineurs
Les sociétés minières prennent de
nombreuses dispositions sécuritaires pour préserver la
santé de leurs employés. Celles-ci concernent les
équipements de sécurité (les chaussures de
sécurité, les casques, les gants, etc.), les mesures de
sécurité aux quelles tout le personnel et même les
visiteurs doivent se soumettre. De ce fait, les travailleurs dans le domaine
aurifère sont protégés et peu exposés. Les quelques
accidents qui peuvent survenir dans leur milieu sont des accidents
mécaniques.
224
Les orpailleurs sont particulièrement plus
exposés aux effets néfastes de leur activité, vu qu'ils
n'utilisent pas de matériels de protection. C'est sans casques ni
chaussures de sécurité et sans gants de protection qu'ils
creusent et manipulent la terre et les produits toxiques utilisés pour
le traitement du minerai. L'inhalation de poussières à longueur
de journée les expose aux maladies respiratoires comme les bronchites,
la tuberculose, etc. Le risque existe aussi d'ingestion d'eau et d'aliments
contaminés, car préparés et vendus à
proximité des sites d'orpaillage ou par les mains souillées, car
portées à la bouche sans un bon lavage des mains.
Les orpailleurs utilisent généralement les
produits comme le mercure élémentaire et le cyanure
d'hydrogène pour amalgamer l'or. La toxicité des produits
utilisés pour le traitement du minerai, les exposent à des
intoxications sévères. Un orpailleur interrogé nous disait
qu'il y a beaucoup de décès dans les rangs des ouvriers qui
s'occupent de cette tâche.
7.7.2. Impact des nuisances sur la santé des
populations riveraines
Le déséquilibre environnemental dû
à la dégradation des sols, à la perte de la
diversité biologique, à la dégradation de la
qualité et de la quantité de l'eau ainsi que les
différentes nuisances sonores et atmosphériques peuvent avoir des
répercussions sur la santé des populations.
Une présence régulière et à long
terme dans un environnement pollué par les poussières modifient
la composition la composition de l'air. Aux dires des agents de santé de
la commune de Hiré, les maladies respiratoires et les problèmes
cutanées font parties des causes de consultations les plus importantes
aux côtés du paludisme. Les particules qui aspirées,
pénètrent les poumons, peuvent provoquer des maladies
respiratoires telles que l'asthme, les bronchites et la pneumonie (Gowan,
1992). Un endroit poussiéreux et fermé peut-être dangereux
aussi bien pour les agents mineurs que pour les populations riveraines. La
circulation intense des véhicules entre la mine de Bonikro et la fosse
de Hiré entraine une densification de la poussière surtout que la
voie n'est pas bitumée. Il en résulte, d'après les
différents interlocuteurs, des maladies respiratoires et une gêne
pour les riverains. Ces nuages de poussières sont également
présents au-dessus de la zone d'extraction. On aperçoit depuis la
montagne qui abrite le village de Zaroko d'immenses nuages de poussière
sur cette zone. L'impact des nuisances atmosphériques varie d'un
individu à un autre selon plusieurs facteurs parmi lesquels l'âge
est important. Les effets des poussières aspirées par les
populations sur leur santé peuvent inclure le développement des
maladies telles que la tuberculose, l'asthme, la bronchite chronique et les
maladies gastro-intestinales.
225
La compagnie minière pour amalgamer l'or fait usage de
plusieurs produits dont le plus connu est le cyanure, un produit très
dangereux pour l'homme et son environnement. Son usage par les
sociétés minières se fait dans une prudence extrême
et dans le respect strict des règles établies en la
matière. Cependant, les populations craignent que ces eaux toxiques
évacuées dans le lac à cyanure ou parc à
résidu ne s'infiltrent à travers les eaux souterraines pour
contaminer et altérer la qualité des sources d'eaux souterraines.
Aussi, certains accidents comme la rupture des digues surviennent et le cyanure
et les autres substances contenues dans le parc à résidu se
retrouvent dans la nature. Les êtres vivants entrent ainsi en contact
direct ou indirect avec le cyanure. Cela s'avère dangereux quand on sait
que chez les êtres vivants, l'intoxication soit par inhalation, par
ingestion ou par contact avec la peau peut entrainer un arrêt
respiratoire suivi d'un collapsus cardio-vasculaire. Il est pourtant impossible
de mesurer la teneur de cyanure dans l'air ou de connaître exactement le
degré d'exposition des populations, car il n'y pas d'appareil pour cela.
Toutefois, certaines personnes pourraient avoir des problèmes de
santé si elles sont longuement et régulièrement
exposées, car pour avoir visité un site de traitement au cyanure,
nous avons-nous même ressentis des brûlures sur la peau. Les chefs
des campements de Koutouklou-Konankro et de Bandamakro disent avoir vu une
maladie dont ils ignorent le nom attaquer leurs pieds quand ils se sont rendus
dans leurs champs envahis par les eaux cyanurées. C'est une sorte
d'éruption cutanée avec changement de la coloration de la peau
(photo 33), qui s'apparente aux lésions dues à l'empoisonnement
à l'arsenic comme présente sur la photo. Ces deux pathologies ont
une similitude dans la mesure où elles sont dues à des substances
utilisées dans l'exploitation minière.
|
Cette maladie est due, selon le chef, à la
présence du cyanure dans leurs plantations.
|
226
Auteur photo : YOBO 2016
Photo 34 : les pieds malades du chef de
Konankro
Le mercure est une des substances utilisées pour
amalgamer le minerai aurifère. Il est généralement
utilisé sous forme élémentaire ou métallique et
provoque principalement des effets sur la santé lorsqu'il est
inhalé sous forme de vapeur ou absorbé par les poumons. Les
symptômes comprennent des tremblements, des changements d'émotions
(sautes d'humeur, irritabilité, nervosité, timidité
excessive), des changements neuro musculaires, des insomnies, des modifications
neuromusculaires (des atrophies musculaires, spasmes), des maux de tête,
des troubles des sensations, des modifications au niveau des réponses
nerveuses et de mauvaises performances lors des tests de la fonction cognitive
des niveaux d'exposition qu'il peut avoir des effets rénaux
indésirables et entrainé une insuffisance respiratoire et des
décès.
Les détonations qui ont lieu sur les sites miniers,
mettent les populations riveraines dans une situation d'inconfort. Elles
conduisent à des ébranlements instantanés du sol qui
perturbent également les populations. Des études menées
ont montré que des personnes exposées longuement à ce type
de bruit peuvent contracter l'hypertension artérielle et l'ulcère
(GOWAN, 1992). Les détonations effrayent et chassent les animaux de
leurs habitats en les éloignant de la zone d'émission.
227
Conclusion du chapitre 7
L'exploitation minière aurifère industrielle et
artisanale qui se déroule à Hiré contribue fortement
à la modification de l'environnement et du cadre de vie des populations.
Les stériles liés à la méthode d'extraction
à ciel ouvert s'accumulent et forment des montagnes artificielles qui
perturbent l'écoulement naturel des eaux de pluies. L'importance des
quantités d'eau utilisées ainsi que leur rejet dans la nature
entraine une baisse de la quantité et de la qualité des eaux de
souterraines et de surfaces. L'exercice de l'exploitation minière
nécessite la destruction du couvert végétal qui recouvre
la terre à traiter et ainsi le cadre de vie de la faune et de la flore
qu'elle abrite. Les différentes nuisances sonores et
atmosphériques troublent la quiétude des populations et leur
bien.
L'activité aurifère industrielle et artisanale
agit négativement sur les différents éléments de
l'environnement et affecte ainsi les populations de Hiré par des
maladies diverses.
228
CHAPITRE 8 : RÉCESSION AGRICOLE DANS LE CANTON
WATTA
INTRODUCTION AU CHAPITRE
Depuis l'introduction des cultures du café et du cacao
dans sa région, Hiré est devenue une zone de forte production
agricole. Cette production agricole concerne aussi bien les cultures
pérennes que les cultures vivrières et maraichères avec en
pointe les cultures du café-cacao. L'agriculture était alors
l'activité principale de la population de Hiré. L'exploitation
minière dans sa mise en oeuvre occupe majoritairement des espaces
dédiés à l'agriculture. Elle perturbe ainsi
l'activité agricole tant dans sa forme industrielle que dans sa forme
artisanale. L'attraction de l'activité aurifère sur les
populations locales entraine la ruée des populations vers ce nouveau
secteur réputé plus rémunérateur que
l'agriculture.
Notre objectif dans le présent chapitre est de montrer
les différentes incidences de l'exploitation minière sur
l'agriculture, activité principale des populations locales.
8.1 UNE ACTIVITE AGRICOLE CONTRARIEE PAR L'EXPLOITATION
DE L'OR
8.1.1 Des terres agricoles prises par la mine
Avant l'arrivée de la société
minière, l'agriculture occupait la grande majorité des habitants
de la sous-préfecture de Hiré. L'agriculture, à l'instar
de toutes les localités de la Côte d'Ivoire, est la
première source de devises des populations de Hiré. Cependant,
avec l'ouverture de l'exploitation minière industrielle, celle-ci
connait une régression. En effet, avec la mise en oeuvre du permis de
recherche, premier titre minier accordé à la
société EQUIGOLD, ce sont de nombreux forages qui ont
été réalisés par la société
minière.
La réalisation de ces forages s'est faite par le
creusement des bandes de largeur maximum de 10 mètres, avec des trous
verticaux. Ces forages sont effectués dans des champs, sur des terrains
qui peuvent être en friche, en culture mais tout cela dans les zones,
dans les périmètres couverts par le permis de recherche.
Cela ne détruit certes pas d'un trait des plantations,
mais la destruction par endroits de plusieurs plantations entraîne la
réduction des surfaces cultivables et de la production agricole.
L'exploitation industrielle de l'or à Hiré est
réalisée selon deux permis d'exploitation. Un permis
d'exploitation dans le chef-lieu et un autre dans la localité de
Bonikro. Les permis d'exploitation minière PE 032 et PE 044
attribués à la société minière NEWCREST
s'étendent respectivement sur 860 ha et 772 ha. Le total des terres
occupées selon les permis miniers par
229
la mine est de 1632ha. Les terres concernées par ces
permis se trouvent dans des zones très fertiles, autrefois couvertes par
de grandes plantations. En 2002, il n'y avait pas encore d'exploitation
industrielle de l'or à Hiré mais seulement l'exploitation
artisanale. La phase d'exploitation de la mine de Bonikro a commencé en
2008 et couvrait 860 ha. Aujourd'hui, en plus de la fosse de Bonikro, NEWCREST
exploite depuis 2014, la fosse de Hiré qui s'étend sur une
superficie de 772 ha (voir tableau 30). Ces terres étaient avant
l'exploitation minière couvertes par des plantations de cacao et de
café. Ces plantations ont été rasées pour la
construction des installations de la mine. Il y a les périmètres
cédés pour les installations de la mine qui sont en dehors du
permis minier. L'ouverture des différentes voies entre la fosse
satellite de Hiré et l'usine minière de Bonikro a
occasionné la destruction de plantations et le déplacement des
activités économiques qui se déroulaient sur ce
périmètre.
A côté des terres effectivement occupées
par l'exploitation minière industrielle, il y a les terres autour des
périmètres miniers. Ces terres sont interdites à toute
activité tout au long de la durée de vie de la mine. La
présence de la mine d'or de Bonikro, a donc entrainé la
délocalisation de certains campements et la destruction ou l'abandon de
plusieurs dizaines d'hectares de plantations de café et de cacao. Autre
effet, avec la délocalisation de ces campements, certaines plantations
sont désormais d'accès difficile du fait de la distance et les
agriculteurs ont tendance à les abandonner. Les produits agricoles qui
faisaient jadis la fierté de cette région, sont en baisse de
production. Plusieurs plantations sont détruites ou abandonnées,
au profit de l'extraction de l'or. Les quelques plantations qui ont eu la
chance de survivre, connaissent une baisse de la productivité.
Tableau 32 : superficies occupées par
NEWCREST
Permis d'exploitation
|
Superficie en ha
|
Zone concernée
|
PE032
|
860
|
Bonikro
|
PE044
|
772
|
Hiré
|
PE045
|
006
|
Dougbafla
|
Source : NEWCREST, 2015
L'occupation des territoires par les sociétés
minières va croissant. La phase d'exploitation de la mine de Bonikro a
commencé en 2008 et couvrait 860 ha. Aujourd'hui, en plus de la fosse de
Bonikro, NEWCREST exploite depuis 2014 la fosse de Hiré qui
s'étend sur une superficie de 772 ha. Cette occupation massive des
terres contribue à réduire les superficies autrefois
consacrées à l'agriculture. Ces terres désormais
dédiées à l'exploitation minière sont ainsi
230
déduites des terres agricoles. Les espaces qui
autrefois servaient pour les activités agricoles sont interdits
d'accès aux populations. Pourtant, l'activité agricole
pratiquée dans la sous-préfecture de Hiré est une
agriculture itinérante sur brûlis avec la pratique de
jachère. Pour les populations, cela entraîne la réduction
des terres cultivables, et de ce fait, la diminution drastique des revenus de
subsistance.
8.1.2 L'éloignement des sites de relocalisation
des champs
La proximité des campements de Bonikro, Bandamakro et
de Koutouklou-Konankro de la mine de Bonikro, a nécessité leur
relocalisation sur de nouveaux sites. Les sites de relocalisation ont
été choisis par les populations elles même. Cependant, la
relocalisation portant seulement sur les habitations, les populations ont
été éloignés de leurs plantations. Les distances
séparant leurs habitations de leurs plantations vont désormais
jusqu'à 10 km. La société minière a commis un mini
car « Massa » pour les accompagner quotidiennement au champ mais cela
n'est pas de leur goût et ne leur permet pas de rallier toutes leurs
plantations. Cela a entrainé le fait que plusieurs personnes
délaissent leur plantation ou ne les entretiennent plus
convenablement.
Une autre difficulté d'accès aux exploitations
agricoles, est l'ouverture des voies de liaison entre la mine de Bonikro et la
fosse satellite de Hiré. Le tracé de ces voies a enclavé
les zones de cultures situées dans cette zone. En effet, ces voies sont
bordées par des grilles qui ont pour but de sécuriser le passage
sur ces voies du fait de la vitesse et de la fréquence de passage des
véhicules de la société minière. Cela, certes, avec
quelques ouvertures et des vigiles afin de permettre et de faciliter la
traversée des populations. Cependant, le tracé de ces voies a
entrainé la destruction de plantations et d'autres activités qui
s'exerçaient sur ces terres. La société minière a
retenu certaines parcelles pour le dédommagement et en a rejeté
d'autres. Pourtant, les populations dont les portions de terres n'ont pu
être retenu pour le dédommagement ne peuvent plus avoir
accès à leurs plantations. Ces dernières sont
infranchissables compte tenu des barbelés de fer installés par
l'entreprise ou encore parce que ces espaces font l'objet d'une quelconque
appropriation par l'entreprise.
8.1.3 L'exploitation de l'or : une menace grave sur
l'activité agricole à Hiré.
Selon 80% des personnes enquêtées, il y a une
baisse de la production agricole. Cette opinion est démontrée par
les données recueillies auprès de l'ANADER (figure 30). Cette
figure montre que la production agricole de Hiré est en baisse depuis
2006, année du démarrage des travaux de construction de l'usine
minière de Bonikro. L'allure générale de cette courbe
montre une
231
baisse globale de la production agricole. Cette courbe
d'évolution de la production agricole peut être analysée
selon trois phases. De 2006 à 2010, il y a une chute de la production
due à l'ouverture de la mine industrielle. Cette baisse semble se
stabiliser entre 2010 et 2011 pour reprendre sa chute jusqu'en 2015. La
relative stabilité de la production agricole entre 2010 et 2011
s'explique par la non conquête de nouvelles terres par les industriels
miniers. Quant à la baisse de production observée entre 2011 et
2015, elle est liée à la zone de moratoire qui a finalement
donné naissance à l'ouverture de la fosse satellite de
Hiré.
Figure 30 : courbe d'évolution de la production
agricole de 2006 à 2015
8000
7000
6000
Productions(T)
5000
4000
3000
9000
2000
1000
0
2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015
Années
Source : ANADER, 2016
La baisse de la production agricole est d'autant plus
importante qu'elle concerne non seulement les pertes de production des
plantations détruites pour l'exploitation minière, mais aussi les
plantations qui existent dans les périmètres autour des sites
miniers.
8.1.4. La destruction des plantations et des champs par
les orpailleurs
Aux terres agricoles occupées par la
société minière, s'ajoutent les superficies
occupées par les orpailleurs. L'orpaillage est certes une
activité liée à l'histoire de Hiré, mais avec
l'ouverture de la mine de Bonikro, elle connait une ascension véritable.
Les superficies occupées par l'orpaillage sont difficiles à
évaluer. Toutefois, le nombre des sites nous permet de dire que les
superficies occupées par les orpailleurs ne sont pas insignifiantes. Le
choix des sites à exploiter se fait à la suite des prospections
qui consistent au creusage de petites galeries disséminées par
232
endroit. Ces prospections se font généralement
dans les bas-fonds et dans les plantations. Lorsque la prospection est
concluante, durant la phase de fonçage, des puits sont creusés
pour extraire le minerai. La terre arable est retournée et les granites
et l'argile sont ressortis et entassés près des puits, formant de
petites collines. Après épuisement d'un site, les orpailleurs ne
reconstituent pas le sol et laissent les plantations parsemées de grands
trous béants, qui la rendent difficilement parcourable.
Les minerais aurifères sont enfouis sous une couche de
sol ordinaire ou de roches appelée `morts terrains' ou `déchets
de roche' qui sont déplacées afin de permettre l'accès au
dépôt de minerai. Sur les sites d'orpaillages occupés par
les hommes, la profondeur des trous atteint au moins 30 mètres. La
quantité de `morts terrains' générée est
importante. Les `morts terrains' sont souvent entassés non loin des
trous à traiter. Ils modifient ainsi avec la topographie sur les
terrains qu'ils occupent et rendent ainsi l'accès difficile à ces
plantations. Ces sables issus des profondeurs de la terre sont
généralement de couleur rougeâtre et/ou noirâtre. Ce
sont des terres stériles qui ne contiennent aucune substance pouvant
permettre le développement des plants et des cultures. Ces terres
stériles n'engraissent guère les sols qui les reçoivent.
Elles contribuent plutôt à appauvrir ces sols et à les
rendent impropres à l'agriculture. L'impact de l'orpaillage sur les
terres cultivables est un impact négatif direct dont la durée
peut être qualifiée de permanente (Bamba O. et al 2013).
Après l'extraction, les fosses ne sont pas systématiquement
recouvertes et lorsque la végétation commence à les
recouvrir il devient difficile voire, impossible de les distinguer. La
profondeur de ces fosses allant jusqu'à 30 mètres, ils
constituent en cas de pluies de véritables pièges, à eau.
Ces dépressions rendent dangereux le passage sur ces sites et
contraignent parfois les propriétaires de ces parcelles à les
abandonner après le départ des orpailleurs.
8.2 LA BAISSE DE LA POPULATION AGRICOLE 8.2.1 Des paysans
à la recherche de terre d'accueil
L'occupation massive des terres agricoles par les
activités minières, pousse certains planteurs au départ,
à la recherche de nouvelles terres agricoles. Hiré qui
était une région à forte production agricole est devenue
une région à fort potentiel minier. Ce changement qui se
matérialise par une occupation massive des terres agricoles par
l'activité minière, pousse certains planteurs à la
migration. Les départs massifs sont surtout constatés dans les
campements impactés par l'exploitation minière. Les populations
de ces campements sont généralement des allochtones
Baoulés qui, n'étant pas dans leur aire géographique, ont
la
233
facilité de partir. Elles ne se sentent pas
obligées de subir les désagréments liés à
cette situation. En réalité, la situation est telle qu'il est
désormais difficile d'avoir des terres pour l'exercice de l'agriculture
pérenne. L'offre étant inférieure à la demande, les
propriétaires terriens encore disposés à céder
leurs terres pour l'agriculture pérenne, le font à des
coûts très élevés. Toute chose qui pousse certains
agriculteurs à aller vers des zones aux réserves foncières
importantes.
Des enquêtes auprès des populations, il ressort
qu'un grand nombre des planteurs partis de Hiré se sont installés
dans les départements d'Oumé et de Gagnoa. Le choix de ces
départements se justifie par le fait qu'ils ont les mêmes
potentialités agricoles que Hiré.
8.2.2 Des agriculteurs convertis en exploitants
d'or
L'ouverture des usines minières était
considérée comme une aubaine pour les populations locales qui ont
fondé en elle beaucoup d'espoir. La réputation de
l'activité minière au sujet de sa grande rentabilité a
poussé de nombreux jeunes agriculteurs à postuler pour des
emplois dans ces sociétés. C'est ainsi que les jeunes dont le
niveau d'étude correspondait aux exigences de ces sociétés
ont pu y trouver des emplois permanents et/ou temporaires. Cependant, ce sont
généralement des emplois temporaires dont les chiffres varient
constamment. Une chose demeure, c'est que les populations autochtones se
plaignent de ne pas être suffisamment employées dans les mines.
Elles disent que la question de qualification est un prétexte pour
justifier le fait que la compagnie minière n'emploie pas les populations
locales et que même pour les emplois non qualifiés, les agents de
la compagnie minière préfèrent faire appel à leurs
parents et connaissances. Tout ceci au mépris des accords signés
avec les autorités villageoises avant l'installation de la mine. Ce
mécontentement, les populations locales l'ont plusieurs fois
exprimé verbalement, mais également par des actions. Elles ont
barré à plus de cinq reprises les accès des sites miniers
aux travailleurs.
La ruée vers l'or s'est présentée comme
une solution face au problème de l'emploi des jeunes exacerbé par
la décennie de crise qu'a connu la Côte d'Ivoire. Il y a eu un
certain laisser faire qui a favorisé la prolifération des sites
d'orpaillage en l'absence de toute règlementation en la
matière.
L'orpaillage qui est une activité ancienne à
Hiré a connu une explosion en parallèle de la mise en
exploitation industrielle en 2006. La ruée vers l'or, suscitée
par l'ouverture de la mine de Bonikro, a eu pour effet d'attirer de nombreuses
personnes vers l'orpaillage. Nos entretiens avec les orpailleurs nous ont
permis de réaliser que ceux-ci sont d'origines
234
socioprofessionnelles diverses. Il y a des agriculteurs, des
manoeuvres agricoles, des commerçants, des artisans, des
élèves et des sans-emplois.
Le tableau 33 montre que 27,5% des orpailleurs
rencontrés sont des anciens orpailleurs. Les ouvriers agricoles
représentent 17,5% des orpailleurs interrogés. 28,75% d'entre eux
sont des anciens paysans, 3,75% d'entre eux sont d'anciens commerçants.
Les hommes de métiers et les sans-emplois représentent chacun
8,75% des orpailleurs. Les élèves et étudiants qui
exercent l'orpaillage représentent 5% des orpailleurs.
Tableau 33 : origine socio professionnelle des
orpailleurs
Origine socioprofessionnelle
|
Effectif
|
Taux (%)
|
Orpailleurs
|
22
|
27,5
|
Ouvriers agricole
|
14
|
17,5
|
Paysans
|
23
|
28,75
|
Commerçants
|
03
|
3,75
|
Homme de métiers
|
07
|
8,75
|
Elève/Etudiants
|
04
|
5
|
Sans emplois
|
07
|
8,75
|
Total
|
80
|
100
|
Source : Nos enquêtes, 2015
L'analyse de ce tableau montre que l'orpaillage à
Hiré est majoritairement mené par d'anciens paysans. Ils
représentent 28,75% de la population d'orpailleurs
enquêtés. Les ouvriers agricoles représentent
également 17,5% des orpailleurs. Ces deux composantes (paysans et
ouvriers agricoles) sont des acteurs clés de l'agriculture. La
proportion d'orpailleurs qu'ils représentent (46,25%) montre que de
nombreux paysans se détournent de l'agriculture pour s'adonner à
l'orpaillage. Cela se ressent dans les chiffres du RGPH 2014 qui montrent une
baisse importante de la population agricole entre 1998 et 2014. En 1998, la
population agricole représentait 45,6% de la population de Hiré
tandis qu'en 2014, elle ne représente que 13,61% de la population
totale. Ce sont en réalité de nombreux agriculteurs qui ont
abandonné leurs plantations pour des raisons diverses liées
à l'activité aurifère.
Plusieurs raisons sont à l'origine de
l'intérêt des populations pour l'orpaillage. Au niveau culturel,
l'orpaillage est une activité liée à l'histoire de
Hiré. Jadis pratiquée par les baoulés puis par les
allogènes, l'orpaillage à Hiré est aujourd'hui
majoritairement aux mains des ivoiriens. Au niveau social, il faut noter que le
chômage de la jeunesse est un grand facteur de l'intérêt
de
235
cette frange de la population pour cette activité. Elle
permet en outre aux personnes démunies qui n'ont pas de terre pour
pratiquer l'agriculture de trouver en elle une source de revenu.
Attirés par la renommée selon laquelle
l'orpaillage est plus rentable que l'agriculture, de nombreux planteurs ont
abandonné les plantations pour se tourner vers l'orpaillage. Cette
activité renommée pour être plus rentable que
l'agriculture, a attiré une frange importante de la population agricole.
Ils disent que la rentabilité de l'orpaillage n'est pas une fable mais
une réalité. Là où au niveau de l'agriculture il
fallait attendre au moins trois mois pour pouvoir avoir un revenu, dans
l'orpaillage, la rentabilité est rapide. Sur tous les sites de la
localité, les orpailleurs obtiennent ou vendent l'or après deux
à trois jours d'exercice. C'est ce qui attire les populations à
s'adonner à cette activité. Selon un chef de groupe
rencontré sur le site de « djangobo », le fait d'avoir en un
temps record de l'or, de le vendre, et par conséquent avoir de l'argent,
est une raison de leur choix pour cette activité. Pour lui, l'orpaillage
est une activité à rentabilité rapide. C'est la principale
raison qui a poussé les populations et particulièrement, celles
de Hiré, à s'adonner à cette activité.
Cette désertion des bras valides du secteur agricole,
entraîne avec les superficies massives dédiées à
l'exploitation de l'or, la baisse des terres agricoles. Les superficies
qu'occupaient les plantations ont baissées à Hiré au fil
du temps. Cette baisse se traduit aussi bien par la baisse du nombre
d'exploitation, que par la baisse des superficies par exploitation.
8.3. DES PERTES DE PRODUCTIONS AGRICOLES 8.3.1 Baisse de
la production des cultures pérennes
L'occupation massive des terres agricoles par les
activités minières contribue énormément à la
perte des terres agricoles. Cela entraîne des pertes de productions
importantes, surtout qu'à Hiré comme partout ailleurs en
Côte d'Ivoire, l'agriculture est plutôt extensive. Dans l'histoire
économique de Hiré, il n'y a jamais eu de compétition
entre activités minières et agriculture. Les deux ont toujours
fonctionné en binôme complémentaire : l'orpaillage
n'était pratiqué qu'en saison sèche, la saison des pluies
était réservée à l'agriculture. Cependant
aujourd'hui, avec l'exploitation industrielle, l'activité de l'or est
devenue une activité permanente.
Un jeune planteur qui obtient par exemple un contrat de six
mois dans les mines est sûr de gagner plus que ce que pourrait lui
rapporter la vente des produits agricoles. De plus, il a la certitude d'obtenir
son salaire à la fin du mois, alors que les activités agricoles
sont soumises à de nombreux aléas (climat, attaques des
parasites, etc.), qui ne permettent pas de garantir la
236
production. Ainsi, un fort taux d'abandon de l'agriculture a
été constaté. Cet abandon est plus perceptible dans
certains villages et campements proches des centres miniers. En effet, ils ont
cédés de nombreuses parcelles pour l'exploitation minière
et les nuisances environnementales y sont plus prononcées. Cette perte
de main d'oeuvre agricole a également des répercutions sur la
production agricole. Elle contribue à la baisse de production sur les
parcelles encore exploitables. Les pertes de production agricole se constatent
aussi bien au niveau des cultures pérennes que des cultures
vivrières.
Les cultures pérennes à Hiré
étaient dominées par les cultures du café et du cacao. Les
cultures de palmier à huile et de l'hévéa, sont
également présentent à Hiré mais dans des
proportions moindres. Cependant, il ressort de nos entretiens avec les
populations riveraines impactées que la majorité des terres
cédées pour l'exploitation minière industrielle
était occupée par les plantations de cacao avec un peu de
café.
8.3.2.1 Du cacaoyer vieillissant à moins de 450 kg
par ha
Introduite en Côte d'Ivoire au début des
années 1888 par les colonisateurs français Verdier et
Bretignierds, le cacao occupe une place de choix dans l'économie
ivoirienne. En effet, le cacao représente près de 10% du PIB et
40% des exportations, soit 789 milliards de FCFA de recette en 1998. La
Côte d'Ivoire en est le premier producteur depuis des décennies.
Le café, lui a fait son entrée en Côte d'Ivoire, vingt ans
après son binôme et a entrainé une migration importante
dans le pays.
Hiré, à l'instar des localités du
sud-ouest ivoirien, est une zone de grande production de café-cacao.
Hiré a même été avec toute la région de Divo,
la deuxième boucle du cacao. Cette spéculation a fait la
renommée de la zone et est à la base de l'aise économique
qu'y ont connue de nombreux agriculteurs. Le café et le cacao occupaient
l'essentiel des plantations de cultures pérennes. Cependant, le gisement
aurifère exploitable découvert par EQUIGOLD se trouve sous des
terres essentiellement couvertes par des plantations de café-cacao. Du
fait de l'activité des orpailleurs et de la société
minière et du manque d'intérêt des paysans pour les
plantations, celles-ci ne sont plus entretenues. Leur rendement atteint par
l'âge ont considérablement baissé au point d'atteindre la
moyenne de 450 kg par ha voire moins.
237
8.3.2.2 Le palmier à huile et
l'hévéa au secours des paysans
Introduite à Hiré en 2006, la culture du palmier
à huile est devenue la troisième culture pérenne de la
zone. C'est à partir de 2008 que les premières palmerais à
Hiré entrent en production. De 2009 à 2011, la production connait
une relative croissance puis un boom entre 2011 et 2012. Cette explosion de
croissance se stabilise et atteint en 2015 une production estimée
à 2 351 tonnes. La périodicité mensuelle de la
récolte des graines a été la raison majeure de son
adoption par les populations car elle leur permet d'avoir des ressources en
attendant les périodes de traites cacaoyères et
caféières. On remarque, cependant, une légère
baisse des superficies consacrée à cette culture. Cette baisse
est en partie liée à la destruction de certaines palmeraies se
trouvant sur les périmètres cédés aux
sociétés minières.
Le palmier à huile a connu un tel succès du fait
qu'il requiert peu de travail par rapport à la main d'oeuvre qui se fait
de plus en plus rare dans la région. Cela a donc constitué un
avantage pour cette culture contrairement à d'autres plantes qui
demandent un renouvèlement annuel de la plantation. De plus, la
précocité de son entrée en production (3 ans) et
l'étalement de celle-ci sur toute l'année justifie la croissance
rapide des superficies à elle destinée. Il y a également
le multi-usage de cette culture dont les fruits (régimes de graines) qui
servent pour le repas (en sauce), pour faire de l'huile de palme, puis quand il
ne produit plus, le palmier est abattu pour en extrait du vin de palme
localement appelé « bandji » dont une autre boisson
dérivée est le « koutoukou ».
Hiré connait une expansion de
l'hévéaculture. La durée de croissance entre le plantage
et la saignée variant entre cinq et six ans, les premières
saignées sont effectuées en 2011 où nous avons les
premiers chiffres de production. Cette culture connaît une
véritable explosion à Hiré à partir de 2006
où elle apparait dans les statistiques de l'ANADER. L'adoption de
l'hévéa est en quelque sorte un palliatif pour les planteurs. La
culture de l'hévéa est une sorte de réponse à la
crise des prix des cultures du café et du cacao sur le marché
international. En effet, entre 1978 et 1986, les cours du cacao chutent de 40%
sur le marché international. En 1986, les cours du café et du
cacao rechutent à nouveau spectaculairement, plongeant ainsi le pays
dans la récession et les planteurs dans le dénuement total. Face
à cette situation les paysans perdent petit à petit foi dans la
production du café, et à un degré moindre dans celle du
cacao. Pour ce qui est de la production de latex, alors que les prix
croissaient de façon continue de 2001 à 2010,
238
ils sont en chute libre depuis 2011 : de 1300 F CFA le kg en
2010 on est aujourd'hui tombé à 300 F CFA.
8.3.2 Une production vivrière en perte de
vitesse
Les planteurs de Hiré s'étaient autrefois
tournés vers les cultures vivrières et maraichères pour
faire face à une première crise agricole qui a secoué le
pays tout entier dans les années 1980. Cette crise économique
faisait suite à la baisse des prix sur le marché international
des cultures d'exportations que sont le café et le cacao. Le choix des
cultures vivrières était nourrie par la volonté de
produire pour satisfaire, non seulement les besoins alimentaires de la
population locale, mais aussi pour vendre le surplus afin d'avoir de l'argent
liquide pour assouvir d'autres besoins. Ceci a permis d'atteindre des niveaux
de production importants qui ont value à Hiré d'être
appelé le grenier de la région de Divo.
L'option de la production vivrière s'explique par le
temps de production qui est relativement court et par la présence de
nombreux bas-fonds humides propices à la culture du maraicher et du riz.
Le maïs met entre 2 et 4 mois pour entrer en production ; le riz a une
durée de maturation qui varie entre 3 et 6 mois. La durée de
production des légumes varie selon la spéculation entre deux et
douze mois. Comme le montre le tableau 34, Hiré est une zone favorable
à la production de diverses spéculations.
Tableau 34 : productions maraichères dans la
sous-préfecture de Hiré- campagne SODEFEL
année 1991-1992.
Culture
|
Nombre de paysans
|
Production (en tonnes)
|
Tomate
|
1
|
5
|
N'diowa
|
2
|
10.5
|
Gombo
|
21
|
57.7
|
Choux
|
55
|
327
|
Échalote
|
97
|
305.5
|
Concombre
|
2
|
15
|
Courgette
|
8
|
22.5
|
Poivron
|
4
|
4.2
|
Aubergine
|
6
|
26.2
|
Total
|
196
|
773.4
|
Source : GTZ ; Novembre 1995
239
Cependant, depuis l'ouverture de l'exploitation industrielle
de l'or, il y a une baisse de la production vivrière (voir figure 31).
Contrairement à la baisse de la production des cultures pérennes,
celle de la production vivrière est due principalement à la perte
de la main d'oeuvre agricole. L'exploitation minière et en particulier
l'orpaillage attire la main d'oeuvre agricole du fait de l'importance des
ressources économiques qu'elle génère. De nombreux
agriculteurs (exploitants et aide agricole) se sont
désintéressés de l'activité. Il prétexte la
rapidité de gain dans l'orpaillage. En effet, tandis que pour les
cultures vivrières il faut attendre au moins trois mois après de
grands efforts physiques avant de vendre la production et avoir de l'argent,
dans l'orpaillage, le gain est quotidien et important.
Cet état de fait explique la baisse du nombre
d'exploitation des différentes cultures vivrières de 2006
à 2015 pour les différentes cultures vivrières.
Figure 31: courbe d'évolution de la production en
cultures vivrières de 2006 à 2015
Source : ANADER, 2015
En général, les Dida destinent de petites
parcelles à la production de vivriers qui suffisent à peine pour
l'alimentation familiale. Ce sont donc les allogènes ivoiriens et non
ivoiriens à qui les Dida ont alloué leurs terres, qui produisent
du vivrier destiné à la commercialisation. Les cultures
vivrières étaient dominées par le riz et le maïs dont
les productions pour la campagne 1991-1992 sont présentées dans
le tableau ci-dessous. Les cultures vivrières sont
généralement cultivées en intercalation aux cultures
pérennes et en association sur la même parcelle. Les combinaisons
fréquemment rencontrées dans les champs sont le maïs
combiné au riz ou le maïs
240
combiné au manioc. L'association du riz au maïs se
fait sur des parcelles situées dans les bas-fonds.
Tableau 35: Production de riz et de maïs, dans la
sous-préfecture de Hiré - campagne SODEFEL année
1991-1992
|
Riz pluvial
|
Riz irrigué
|
Maïs
|
Nombre de plantations
|
132
|
50
|
67
|
Superficie (en Ha)
|
212
|
28
|
78
|
Production (Kg)
|
147 132
|
19 250
|
66 350
|
Source : GTZ Novembre, 1995
La riziculture se fait selon deux techniques : la riziculture
pluviale et la riziculture irriguée. Selon le tableau ci-dessus, c'est
la riziculture pluviale qui est plus pratiquée par rapport à la
riziculture irriguée. Le nombre de champs de riz pluvial est de 132,
alors que le nombre de champs de riz irrigué est de 50. Les plantations
de maïs sont au nombre de 67.
Les 132 plantations de riz pluvial s'étendent sur une
superficie de 212 ha et ont produit pour la campagne 1991-1992, 147 132 Kg.
Tandis que les champs de riz irrigués s'étendent sur une
superficie de 28 ha seulement et ont donné une production de 19 250 Kg.
Quant à la production de maïs, elle a atteint 66 350 Kg sur une
superficie totale de 78 ha.
La région produisait donc fortement du riz dans les
années 1990. Actuellement seules les cultures de maïs, de bananes
plantains, de manioc, de piment, de taro et les légumes et condiments
tels que l'aubergine, le gombo, la tomate, le piment, etc., sont encore
présentes à Hiré. Ces légumes ont un cycle de
germination qui va de 25 jours à 3 mois. Ils sont cultivés sur de
petites superficies et sont souvent destinés à alimenter le
marché de la ville Hiré. Les quantités de production
autrefois importantes sont en baisse. Avec la croissance démographique
exponentielle que connait Hiré, la production vivrière locale
déjà en perte de vitesse du fait de la baisse des superficies et
de la main d'oeuvre, est insuffisante pour couvrir les besoins en produits
vivriers de la population.
Le vivrier est majoritairement produit par les femmes. Selon
le rapport de l'UNESCO sur la participation des femmes à la vie publique
(version 2002), 60 à 80% de la production alimentaire en Côte
d'Ivoire est assurée par des femmes. Elles occupent donc une place
prépondérante dans l'agriculture vivrière. Elles font la
collecte, le stockage, le transport, la conservation, la transformation, la
distribution et la commercialisation de ces produits vivriers. Cependant,
à Hiré, depuis l'ouverture des mines et l'orpaillage massif, il y
a une forte
241
colonisation des bas-fonds par les orpailleurs. Anciennement
utilisés pour la culture du riz et du maraicher, ceux-ci sont
aujourd'hui prisés par les orpailleurs. Aussi une frange importante de
femme s'est-elle tournée vers l'orpaillage et les autres
activités commerciales qui se sont greffées au travail de
l'or.
De nos entretiens, il est ressorti de façon
régulière de la part des femmes qui exercent dans le vivrier que
l'exploitation de l'or est plus rentable que la production de maïs, de riz
ou de légumes. Cela dit, à défaut d'abandonner totalement
la culture du vivrier, qui par la force du temps et des circonstances est
devenue une habitude et une nécessité, 40 % de ces femmes
consacrent désormais plus de temps aux autres activités
(commerces et orpaillage). Par conséquent, elles diminuent leur
activité de production vivrière. Cela se constate par la
diminution considérable des surfaces cultivées. Les bas-fonds et
les terres qui se situent au bord des voies reliant les différents
villages à la sous-préfecture qui autrefois étaient
exploitées pour la culture de vivriers sont abandonnés.
L'exploitation artisanale de l'or demande beaucoup de temps et
d'attention au niveau de toutes ses étapes. C'est ainsi que la recherche
du métal jaune, par exemple, demande que les artisans miniers creusent
minutieusement afin d'atteindre le minerai ou la roche mère. C'est
pourquoi, plusieurs artisans miniers se sentent contraints d'abandonner
l'agriculture pour ne se consacrer qu'à l'orpaillage, car ne trouvant
plus du temps pour les activités agricoles (32 % des
enquêtés adoptent cette attitude). Pour ceux qui n'ont pas
abandonné totalement les champs, ils y vont une ou deux fois dans la
semaine. Le reste des jours de la semaine sont consacrés à la
recherche de l'or.
8.4 LA BAISSE DE LA PRODUCTION AGRICOLE, ENTRE AVANTAGES
ET INCONVENIENTS
8.4.1 La paupérisation de la population
agricole
L'exploitation minière à grande échelle
comme pratiquée à Hiré, entraîne la
raréfaction des terres cultivables pour les populations riveraines et le
surpeuplement de ladite sous-préfecture. Ce sont des afflux d'artisans
miniers et le retour des populations locales à la recherche d'emplois
à la mine. Cette forte démographie contribue à la
réduction des moyens de subsistance des communautés locales
agricoles. La réforme du secteur agricole ivoirien, grâce à
la mise en place du Programme National d'Investissement Agricole (PNIA), a
réussi à augmenter de façon significative, entre 2011 et
2014, la production de cultures vivrières et de riz, respectivement de
12 à 16 millions de tonnes, soit une hausse de 33%, et de 550.000
tonnes
242
à 1.343.000 tonnes. Cependant, le besoin en production
d'aliments de base et d'exportation actuelle en Côte d'Ivoire ne suit
toujours pas le rythme de l'accroissement démographique qui est de
l'ordre de 9% par an depuis 2012.
La population agricole constituait plus de 88,37% de la
population générale de Hiré (RGPH, 1998). L'agriculture
était donc l'activité principale et la source de revenu de
l'essentiel de la population de Hiré. Cette activité, aujourd'hui
mise à mal par l'exploitation aurifère à travers ses
différentes incidences sur elle, entraine la baisse, voir même la
perte des sources de revenu des populations. Les agriculteurs longtemps
considérés comme les plus nantis de la sous-préfecture de
Hiré ont de ce fait perdu leur pouvoir financier. L'embellie
économique connue par les agriculteurs de Hiré n'est plus qu'un
vieux souvenir, ceux qui détenaient le pouvoir économique ont
aujourd'hui beaucoup perdu de leur pouvoir d'achat. La terre, ressource
essentielle à leur travail est aujourd'hui largement aux mains de la
société minière NEWCREST. Celle-ci a soustrait de grandes
parcelles agricoles en les occupant pour l'exercice de ses activités.
L'installation de la mine a créé trois catégories
d'agriculteurs à Hiré. On distingue d'une part ceux dont les
plantations ont été occupées puis indemnisées par
la mine, ceux dont les plantations se trouvent à proximité des
sites miniers et qui ne sont pas indemnisés tandis que leurs productions
connaissent du fait de l'exploitation minière une baisse drastique.
Enfin, ceux dont les plantations ne sont pas menacées par
l'activité minière aurifère. Les deux premières
catégories de planteurs sont les plus touchées par
l'activité minière. Cependant, certains agriculteurs de la
troisième catégorie sont aussi en difficulté par ce que
les accès à leurs plantations sont devenus difficiles. Pour la
sécurisation de l'acheminement du minerai, la société
minière a posé des barbelés tout le long du passage de ses
véhicules entre les sites de Hiré et de Bonikro.
Les paysans dont les plantations ont été
détruites et les parcelles occupées par la mine perçoivent
des indemnités pour les dommages subis. Toutefois, l'indemnisation n'est
pas toujours synonyme d'un débouché pérenne. Les personnes
indemnisées ne sont pas accompagnées dans la gestion des
indemnisations qu'elles perçoivent. Il est donc fréquent de voir
des planteurs après avoir dilapidé leurs indemnités, se
retrouver sans source de revenus, ayant dès lors abandonné toute
activité rémunératrice. Les populations agricoles
réagissent différemment face aux différents impacts de
l'exploitation minière (voir figure 32).
243
Figure 32 : les mutations observées au sein de la
population agricole
Situation des paysans vis-à-vis des installations de la
mine
Plantations situées près des
installations de la mine
Plantations détruites
pour l'exploitation industrielle de l'or
Achat de matériels d'apport d'intrants
Exploitation de terres nouvelles
Abandon de l'agriculture
Réaction des paysans face à la présence de
la mine
Reconversion en d'autres activités
Emigration
Source : Inspiré de THUNE 2011 et adapté selon nos
enquêtes de terrain de 2015
244
Selon la figure 32, les planteurs les plus touchés par
l'exploitation minière réagissent de la même
manière. Soit ils vont à la recherche de nouvelles terres
agricoles à Hiré, soit ils abandonnent l'agriculture en se
convertissant en d'autres activités ou en migrant vers d'autres
localités. Puis, il y a les agriculteurs dont les plantations sont en
baisse de production, qui optent pour l'achat de nouveaux outils et l'apport
d'intrants sur les mêmes parcelles.
8.4.2 La baisse de la production vivrière locale,
un prétexte pour la surenchère des prix sur le marché
urbain
La destruction de cultures au profit de l'exploitation de l'or
a dépossédé bon nombre de paysans de leur source de
revenu. Parmi eux, certains ont choisi de partir sous d'autres cieux, d'autres
par contre sont restés à Hiré. Au nombre de ceux-ci, il y
en a qui ont décidé de poursuivre dans l'agriculture en louant
des parcelles. Cependant, du fait du nombre croissant de demandeurs, les
coûts de location de parcelles ont grimpé. La location d'un
hectare de terre pour les cultures vivrières et maraichères
s'élève à 100 000 F CFA. La forte demande de parcelles
à louer pour l'agriculture incite les propriétaires fonciers
à monter les enchères. Pourtant, avant l'exploitation
industrielle de l'or, la location de parcelles concernait plus les terres de
bas-fond et les jachères et pour servir à la production du
vivrier : riz, maïs, tomate, chou, carotte, etc. L'arrangement portait sur
le don d'une partie de la récolte au propriétaire terrien ;
environ 2 à 3 sacs pour le riz ou des volumes équivalents pour
les autres cultures. Il en était de même pour le café et le
cacao. Puis le paiement en numéraire est intervenu au niveau des
cultures pérennes et s'est généralisé. Au
départ les prix de location variaient selon l'importance de la culture.
Pour les cultures vivrières les prix variaient
généralement entre 20 000 et 30 000 F CFA l'hectare.
L'augmentation des coûts de location ajoutée aux
autres charges inhérentes à l'agriculture, contribue à
augmenter les coûts de productions. Cela a entrainé une baisse
significative de la production locale qui a influencé les coûts
des denrées alimentaires. Les coûts de productions
rehaussés combinés à une production raréfiée
font que les prix des denrées sur le marché connaissent une
hausse ressentie par les populations consommatrices.
Cette situation semble être une aubaine pour les paysans
des localités voisines qui accourent commercialiser leurs productions
à Hiré. En effet, la croissance démographique
observée à Hiré constitue un marché de consommation
très important. Même s'il est vrai que les travailleurs
expatriés achètent leurs produits de consommation à
l'extérieur du pays ou dans les grandes surfaces (super et hyper
marchés), les petits travailleurs qui sont les plus nombreux
245
s'approvisionnent sur le marché local. En plus d'eux,
il y a les orpailleurs et ceux qui ont été attirés par
l'or qui constituent un marché important avec un supposé pouvoir
d'achat consistant.
8.4.3 La menace de l'insécurité
alimentaire
Les potentialités physiques (climat, sol) dont
bénéficie la sous-préfecture de Hiré, y favorise la
production agricole. Elle était avant l'ouverture de l'exploitation
minière industrielle, une zone de grande production agricole et un
centre de négoce des produits agricoles. Cette agriculture extensive est
cependant mise à mal depuis l'ouverture de l'exploitation industrielle
de l'or. En effet, d'importantes superficies occupées autrefois par
l'agriculture sont aujourd'hui occupées pour l'exploitation de l'or. Par
exemple, les bas-fonds autrefois réservés à la culture des
céréales comme le riz, le maïs, etc., sont aujourd'hui
occupés pour l'orpaillage. L'activité minière constitue
une entrave à l'agriculture, du fait de la réduction des terres
agricoles qu'elle entraine. Cela, conjugué à la baisse de la main
d'oeuvre agricole, entraîne une baisse de la production agricole. En
plus, l'agriculture telle que pratiquée à Hiré n'est pas
mécanisée donc fortement dépendante de la main d'oeuvre.
Les nombreux abandons (reconversion et émigration) d'agriculteurs ont
vidés le secteur de ses principaux acteurs. Parmi les personnes qui
s'adonnent encore à l'agriculture, il y a celles qui en font une
activité secondaire et qui y consacrent peu de temps. Tout cela entraine
une baisse de la production agricole tant au niveau des cultures
pérennes que des cultures vivrières.
La baisse de la production agricole expose les populations de
Hiré au risque de l'insécurité alimentaire. Selon la FAO
(2011), la sécurité alimentaire est assurée «
(...) quand toutes les personnes, en tout temps, ont économiquement,
socialement et physiquement accès à une alimentation suffisante,
sûre et nutritive qui satisfait leurs besoins nutritionnels et leurs
préférences alimentaires, pour leur permettre de mener une vie
active et saine »
Aussi, la menace qui guette les populations de Hiré
est-elle réelle dans la mesure où la baisse de la production se
traduit aussi bien en baisse de quantité que de qualité des
vivres produits à Hiré.
En effet, de nombreuses parcelles à proximité
des sites aurifères continuent d'être exploitées pour la
production du vivrier. Quand on sait que des produits chimiques toxiques sont
utilisés sur ces sites et pourraient, par infiltration dans le sol ou
par érosion, contaminer les cultures qui y sont produites.
246
L'occupation des terres par l'exploitation minière
entraine la réduction des espaces ou des terres cultivables, et par
ricochet, la diminution drastique des revenus de subsistance. Cette mutation a
provoqué une transformation bouleversante des modes de vie des
ménages qui, depuis des années, dépendent de
l'agriculture. La baisse de la quantité de production entraine d'une
part la paupérisation de la population agricole donc le manque de
ressources financières pour acheter la quantité et la
qualité nécessaire à l'alimentation. D'autre part, elle
entraine un problème de disponibilité des cultures
vivrières. La quantité de production dans le vivrier est surtout
liée à la baisse de la main d'oeuvre, notamment, à la
baisse de la main d'oeuvre féminine. De nombreuses femmes qui
s'adonnaient autrefois à la culture de maraichers et de vivriers se sont
orientées vers l'activité minière (l'orpaillage). La femme
paysanne étant considérée en milieu rural comme
intervenant principal dans l'agriculture. L'accès à la nourriture
dans ces conditions devient de plus en plus difficile pour les familles rurales
n'ayant pas d'autres sources de revenus. La menace de la faim est réelle
car les familles doivent acheter tout ce qu'elles veulent consommer.
Aujourd'hui la production vivrière et maraichère
est en baisse. Produites principalement pour l'autoconsommation, les cultures
vivrières et maraichères constituent la base alimentaire des
ménages ruraux. Les quantités produites suffisent à peine
pour les familles. Les produits vivriers locaux ou venants d'ailleurs sont
commercialisés à des prix jugés élevés par
les populations rurales, financièrement faibles. L'accès aux
vivres par achat devient aussi difficile. L'on comprend dès lors que
leur effondrement constitue une menace permanente pour les fondamentaux de la
sécurité alimentaire dans la sous-préfecture et même
de la région de Hiré (figure 33).
Aussi, les produits agricoles constituaient la principale
source de revenu de la population de Hiré. Les ressources tirées
de l'agriculture permettaient aux ménages de faire face
économiquement aux besoins alimentaires des familles. La perte de
ressource entraine la paupérisation des agriculteurs qui elle entraine
inévitablement l'insécurité alimentaire. Pour les familles
modestes, une fois les dépenses de premières
nécessités déduites (énergie, habits et autres), il
ne reste pas suffisamment de ressources pour satisfaire les autres besoins de
la famille.
247
Figure 32 : les fondamentaux de la
sécurité alimentaire
Aliments issus de
la cueillette et de la chasse d'animaux sauvages
La production familiale
Achats dans les marchés et les magasins
Accès Disponibilité Qualité
Les aliments acheminés dans la zone au moyen
de mécanismes de marché
Les vivres stockés par les
commerçants dans
Sécurité alimentaire
Les aliments produits dans la zone
La composition des aliments
L'utilisation qui en est faite
Source : GTZ, Novembre 1995
La sécurité alimentaire est définie par
trois facteurs essentiels que sont : la disponibilité de la nourriture ;
l'accessibilité de la nourriture et la qualité de la
nourriture.
La disponibilité de la nourriture au niveau local
signifie que la nourriture est physiquement disponible parce qu'elle a
été produite, traitée, importée ou
transportée. Par exemple la nourriture dans la sous-préfecture ou
la région, est disponible car elle peut être trouvée sur
des marchés, parce qu'elle est produite dans des champs.
L'accessibilité de la nourriture est la façon dont les gens
peuvent obtenir la nourriture disponible. En ville, cette accessibilité
est garantie lorsque les ménages disposent des ressources
financières. La façon dont chaque individu se procure les
aliments nécessaires à un régime équilibré
dépend des revenus du ménage où il se trouve, de la
répartition de ces revenus au sein de la famille et du prix des
denrées. L'utilisation de la nourriture dépend de la
qualité des aliments, de leur stockage et de leur préparation.
248
Conclusion du chapitre 8
Les parcelles occupées pour l'exploitation
minière sont des terres de cultures ou des jachères. Du fait de
l'importance de l'emprise de l'industrie minière sur ces parcelles, il y
a une réduction des terres agricoles. Dans le cadre de l'exploitation
industrielle, les terres agricoles sont totalement décapées et
définitivement acquises avec de vastes superficies. L'orpaillage, bien
que se déroulant sur des parcelles dont les superficies varient entre 2
et 5 ha, leur nombre et leur progression à chaque épuisement de
site en multiplie les incidences sur l'agriculture. L'activité
minière influence diversement l'agriculture. Certes, l'occupation des
terres agricoles entraine une baisse des superficies cultivées, mais
également la baisse de la production agricole tant au niveau des
cultures pérennes que des cultures vivrières. La main d'oeuvre
agricole est aussi affectée par l'activité minière. De
nombreux agriculteurs ont perdu leurs terres cédées à la
société minière et du fait de la baisse de productions
liées à l'activité, les autres se sont résolus
à se reconvertir ou ont opté pour le départ vers d'autres
localités. L'exploitation aurifère constitue également une
menace sur la sécurité alimentaire des populations de
Hiré, tant du point de vue de sa qualité qu'en termes de
quantité. On constate aussi une perte des moyens de subsistances en
provenance de l'agriculture pour les populations.
249
CHAPITRE 9 : LES CONFLITS FONCIERS EXACERBÉS
PAR L'EXPLOITATION DE L'OR
INTRODUCTION AU CHAPITRE
Au nombre des problèmes que posent la
redécouverte de l'or dans la sous-préfecture de Hiré,
figurent ceux de l'accès aux terres cultivables et d'habitation, les
tensions entre villages autour de limites de terroir, entrainant ainsi la
résurgence de la récession foncière due à la
rareté des terres ressentis depuis les années 1980.
En effet, la situation géographique de la
sous-préfecture est d'abord une contrainte pour les paysans. La ville
est entourée de collines et de montagnes qui ne favorisent pas assez son
expansion et l'activité agricole. Avant la nouvelle vague de
l'exploitation de l'or, la rareté des terres communautaires et
familiales était au coeur des conflits fonciers locaux. L'exploitation
de l'or s'est donc superposée aux tensions foncières existantes
tout en les complexifiant.
9.1 LES DESACCORDS SUR LES INDEMNITES 9.1.1 Les
indemnisations selon l'Etat
L'Etat autorise les détenteurs d'une concession
minière à payer des indemnités aux personnes
sinistrées par des déplacements, des destructions pour raison
d'utilité publique. L'indemnisation est prescrite par
le code minier et le décret N°2014-397 du 25 juin 2014
déterminant les modalités d'application de la loi N°2014-138
du 24 mars portant code minier précise en son chapitre 2 les relations
avec les occupants du sol. Ainsi, l'article 134 énonce
que « l'indemnité au profit de l'occupant légitime du sol
dont les terres sont devenues impropres à la culture est
déterminée par la formule suivante :
[D=(R x 15) + (P x S) + r]N
Avec
D=Dédommagement en francs CFA
R=Revenu annuel de la parcelle
N=Nombre d'années d'occupation
P=Prix moyen d'acquisition ou d'usufruit d'un hectare
S=Superficie en hectare
r=revenu obtenu des cultures associées payé en
pied.
15=le nombre d'années d'exploitation que va durer la
mine.
250
Le code minier ivoirien ne précise pas le prix moyen
d'acquisition ou d'usufruit. Il est normalement fixé par
décret.
La puissance publique précise également ce point
: « les mines constituent une propriété distincte de la
propriété du sol. Elles appartiennent à l'Etat et
constituent un domaine public particulier...». Cela veut dire en
clair que les populations présentent sur les terroirs villageois peuvent
être soit propriétaires coutumiers du sol, soit
propriétaire de l'usage du sol et de ce qu'elles y ont planté
mais elles ne sont en aucun cas propriétaires du sous-sol.
La gestion des droits de propriété et d'usage
des terres en Côte d'Ivoire relève du droit coutumier et de la Loi
98-750 du 23 décembre 1998. La sous-préfecture de Hiré
n'échappe pas à cette réalité et les deux modes de
gestion y ont cours. Les terres en Côte d'Ivoire sont divisées en
deux grandes catégories : celles qui appartiennent aux particuliers
détenant un titre de propriété, et celles qui
appartiennent à l'Etat de façon déclarée auxquelles
il faut ajouter toutes les terres vacantes et sans maître. Pour la
gestion de son domaine, l'Etat a mis en place un ensemble de dispositions
juridiques contenues dans le régime domanial. Ce régime divise le
domaine de l'Etat en deux parties : le domaine public de l'Etat, et le domaine
privé de l'Etat. On distingue donc le domaine privé de
l'État en zone rurale gérée par le Ministre chargé
de l'Agriculture ; le domaine privé de l'État en zone urbaine
gérée par le Ministre chargé de la Construction et de
l'Urbanisme.
Jusqu'au 7 mars 2006, son emprise était estimée
à 25 millions d'hectares sur lesquels seulement 1 à 2 % faisaient
l'objet d'un titre d'occupation ou d'un titre de propriété
délivré par l'Administration. Il s'agit de l'arrêté
de concession provisoire sous réserve des droits des tiers,
l'arrêté de concession pure et simple, l'arrêté de
concession définitive et le bail emphytéotique. Tous ces titres
étaient délivrés traditionnellement par le ministre en
charge de l'agriculture.
Le point de friction entre les populations dont les terres
sont occupées par la mine vient des divergences de points de vue entre
les propriétaires coutumiers, les occupants locaux et la mine agissant
sous le couvert de l'État.
9.1.2 Les indemnités selon les
populations
Les désaccords exprimés portent sur les
barèmes appliqués pour les cultures aussi bien vivrières
que pérennes. La non prise en compte des propriétaires fonciers a
également été motif de conflits.
251
9.1.2.1 Le refus des barèmes des indemnités
portant sur les cultures vivrières.
Chaque culture selon sa nature est concernée : manioc,
maïs, igname, riz, banane. Les populations jugent que les taux
fixés par le ministère de l'agriculture en ce qui concerne chacun
de ces plants sont dérisoires. Elles font part de leur indignation et
interprète cela comme un profond manque de respect des fonctionnaires de
l'État qui fixent ces taux dont ils ne peuvent que savoir qu'ils vont
provoquer la famine et le découragement dans le monde paysan. Elles
demandent à ce sujet le relèvement des taux aux conditions
réelles du marché local du vivrier.
9.1.2.2 Le refus des taux d'indemnisation des plantations
de café et de cacao.
Le café et le cacao sont les cultures pérennes
qui faisaient jadis la fierté de la région agricole de
Hiré. Tout le périmètre exploité par la
société, était jusqu'à un passé
récent, occupé par de grandes plantations de cacao et de
café. C'est à partir de 2006, avec l'installation de la mine qui
a nécessité l'accaparement des terres de cultures et la
destruction des plantations, que de nombreux planteurs ont perdus leurs sources
de revenus. Les planteurs de café et de cacao considérés
comme les hommes forts de cette cité, sont les plus grandes victimes.
La base du dédommagement à eux proposé
par la compagnie minière n'a pas été approuvée. En
effet, les cultures de café et de cacao sont des cultures
pérennes dont la production dure selon la variété entre 15
et 30 ans. Le niveau de l'indemnisation de la compagnie minière est
basé sur le barème d'indemnisation des cultures d 1972
actualisé en 1995. Les populations ont bruyamment protesté contre
ces agissements de la compagnie minière. Toutes les voies conduisant
à la mine d'or ont été bloquées par les planteurs
en colère qui exigeaient que le calcul de l'indemnisation soit revu
à la hausse.
9.1.2.3 La non prise en compte de l'indemnisation du
sol
Les populations constatent avec stupeur que la compagnie
n'indemnise pas le sol. Les actes d'indemnisation qu'elle pose concernent des
personnes disposant d'un titre foncier, ou d'une concession provisoire. Toutes
les autres terres sont censées être sans maître. Les
populations font valoir que cette interprétation n'est pas valable car
elles sont les propriétaires coutumiers de la terre et à ce titre
elles ont droit à une indemnisation conséquente pour la perte de
leur patrimoine d'espace ou de territoire.
252
9.1.2.4 Le scandale des jachères
En Côte d'Ivoire, il est dit par l'Administration que
les terres vacantes appartiennent à l'État. Dans le cadre des
indemnisations lorsque la compagnie minière rencontre des
jachères, elle ne les compte pas dans ses calculs. À vouloir le
faire, elle ne saurait même pas par rapport à quelle
catégorie décrite dans les textes elle devrait les compter. Pour
elle, les jachères sont des espaces vides. Comme la loi foncière
précise que le sol n'est pas indemnisé, la compagnie ne tient ni
compte des jachères, ni du sol. Dans les cas de Bonikro, la compagnie
n'a pas indemnisé les jachères. Alors quand les populations ont
pressenti l'arrivée de la compagnie sur les 1 000 ha de la zone
Hiré, elles ont tenté de négocier la prise en compte de
l'indemnisation des jachères. Cependant, cela s'est avéré
vain. Alors, elles se sont résolues à une tactique qui consiste
à planter rapidement n'importe quoi qui peut avoir de la valeur sur leur
terre. Cela a conduit au choix du teck.
Le teck est une culture arborescente, un bois à forte
valeur ajoutée. Il convient aux climats tropicaux et présente une
résistance remarquable dans les conditions extrêmes
d'exploitation. Il résiste même aux feux de brousse. En
très peu de temps, la périphérie de Hiré s'est
couverte de teck, des arbres plantés de nuit et de jour par les
propriétaires fonciers au grand dam de la compagnie et des usagers
courants du sol. Le teck est ainsi appelé à Hiré "culture
opportuniste". Maintenant que ces tecks remplacent les jachères, les
populations ont exigé que la mine indemnise les jachères au prix
le plus fort de sa valeur soit 20 000 FCFA par plant.
9.2 LA CLARIFICATION DES AYANTS DROITS : PROPRIETAIRES
COUTUMIERS, ALLOGENES ET USAGERS DU SOL
9.2.1 La géographie des maîtres coutumiers
du sol dans la région de Hiré
9.2.1.1 Bouakako et Hiré, deux villages
autochtones en conflit autour de la propriété coutumière
du sol des gisements dans la ville de Hiré
La première famille à s'installer sur les terres
de Bouakako est la famille Douzoua. Elle occupait par le passé
le site qui abrite l'école du village. Les membres de la famille Douzoua
sont donc les fondateurs du village et par conséquent, ils sont les
chefs de terre. Avec les guerres de voisinage, une partie de la famille se
détacha pour fonder deux autres familles que sont la famille
Agbalé et la famille Zabregouan. Ceux de Hirégouan sont
allés vers Hiré actuel. Ils n'ont donc pas une autonomie
vis-à-vis des gens de Bouakako. Ces familles ont été
rejointes plus tard par une famille Baoulé qui est
représentée par la famille Akan.
253
Les personnes interrogées à Bouakako au sujet de
l'histoire de la création du village commencent par préciser que
les terres cultivables sont éloignées du village et nombreuses
sont celles qui sont touchées par la mine et l'exploration actuelle. Les
terres de Bouakako vont très loin, jusqu'à la limite de Taabo,
Oumé et Zégo, disent-elles.
Le conflit entre Bouakako et Hiré village, porte sur la
propriété de la partie de Hiré qui abrite la mairie. Bien
que situé dans la ville de Hiré, tout le côté
à droite de la voie bitumée est à Bouakako et le
côté gauche est à Hiré. Cependant, bien que le
sachant, le chef de village de Hiré est celui qui reçoit de
l'argent lors des immatriculations de lots dans la zone.
La Cellule Stratégique pour la Défense et la
Protection des Intérêts de Bouakako (CSDPIB) a été
créée en 2014 avec la collaboration des jeunes cadres et
intellectuels dudit village pour assoir des échanges équitables
avec la société minière. Cette cellule a entrepris en six
mois la formation de la jeunesse et de la notabilité pour les instruire
sur comment gérer les relations avec la société
minière. La CSDPIB se positionne désormais comme le porte-voix du
village de Bouakako dans ses rapports avec la compagnie minière. En tant
propriétaire du site de la mine de Hiré Est, la communauté
de Bouakako par la CSDPIB, s'octroie le droit de définir les conditions
et les modalités d'exploitation des ressources aurifères de leur
terre.
Les premières incompréhensions entre Bouakako et
NEWCREST portaient sur la question de la libation qui traduit la reconnaissance
des autorités villageoises comme autorité morale établie
sur l'ensemble des terres du dit-village. Il est vrai que les parcelles
occupées appartiennent à des individus, à des familles
mais leur propriété est liée à leur appartenance au
village. Les autorités minières ne l'entendant pas de cette
oreille ont au début de leur activité sur le site de Hiré
composé exclusivement avec les propriétaires terriens en faisant
fi de la tradition et donc des autorités villageoises. Cet état
de fait a eu pour conséquence d'irriter la population dudit village qui
s'est vue ignorée. La population de Bouakako a donc à travers la
CSDPIB, manifesté son mécontentement par des actions.
La CSDPIB a compilé l'ensemble de ses revendications
dans un document appelé « livre blanc de Bouakako » afin de
donner selon le responsable, une orientation aux actions de
développement que doit mener la société minière
à Bouakako village hôte de la mine de Hiré.
9.2.1.2 Gogobro et Kagbè : propriétaires
coutumiers du sol de Bonikro
Gogobro et Kagbè n'étaient à l'origine
qu'un seul village. Cependant, des querelles incessantes de voisinage vont
amener les populations actuelles de Kagbè à partir à la
recherche de nouvelles
254
terres cultivables et retrouver la paix sociale. Ceux qui sont
venus à Kagbè étaient moins nombreux que ceux qui sont
restés à Gogobro. D'après le chef de Gogobro, après
cette scission, il n'y avait jamais eu de problème de terre entre les
deux villages. Il affirme que les gens de Gogobro venaient demander la terre
à ceux de Kagbè parce qu'ils n'en avaient pas assez chez eux et
ils la leur donnaient parce qu'ils se considèrent comme des
frères. Kagbè proclame toujours son autonomie vis-à-vis de
Gogobro. Il affirme qu'ils font limite avec Gabia, Bouakako, Hiré et
Diégonéfla et compterait une vingtaine de campements.
Depuis l'ouverture de la mine de Bonikro, un litige foncier
oppose Kagbè à Gogobro au sujet de la propriété des
terres de Bonikro. Selon les populations de Kagbè, les terres de Bonikro
leur appartiennent et ils réclament d'être reconnu en tant que
propriétaire terrien et de recevoir les privilèges liés
à ce rang.
9.2.1.3 Zaroko : une communauté Dida
réclamant sa part des retombées minières
Zaroko est un village démographiquement très
important. Son histoire est difficile à retracer du fait que deux
familles y revendiquent la chefferie de terre. Pourtant, c'est le chef de terre
qui, en tant que descendant du fondateur, détient l'histoire du village.
Cependant, cette rivalité autour de la chefferie des terres est
récente. Elle est née de la compétition pour le
bénéfice du dédommagement de LGL pour l'exploitation de la
mine.
En définitive, les Dida de Hiré ont
accédé à la terre par trois modes : l'installation,
l'occupation, les guerres de conquête. Depuis lors, la terre est
considérée comme une propriété ancestrale dont les
générations actuelles héritent de l'usufruit. La
découverte de l'or dans le terroir ainsi que l'économie de
plantation, ont attiré dans la région de nombreuses populations
allogènes. Pour les installer, les populations autochtones ont
été poussées à quelque peu transgresser les droits
coutumiers locaux.
9.2.1.5 Douaville, un village Watta en marge de
l'exploitation aurifère
Les terres de Douaville ne sont pas touchées par
l'exploitation aurifère qui a lieu dans la sous-préfecture de
Hiré. Ce village est donc en marge des conflits de
propriété territoriale bien qu'étant installé sur
les terres de Zaroko.
9.2.2 Les allogènes exploitants non
propriétaires de sol
Chez les Dida de Hiré, la terre est
considérée comme l'âme qui leur permettrait
d'exister socialement et économiquement. Elle est un outil de
production, une source d'enrichissement,
255
une identité sociale, une valeur culturelle
léguée par les ancêtres. La terre appartient à la
famille, au clan et a une forte représentation sociale de par la
richesse qu'elle constitue. Les premiers responsables terriens au sein de la
communauté sont les chefs de terres. Ils sont les garants des bonnes
relations entre les populations et leurs ancêtres et réalisent les
divers rites et rituels en la matière. Les terres du terroir sont
reparties entre les familles des différents villages. Elles sont
administrées pour le compte de chaque famille par le chef de famille.
Les délimitations entre les terres familiales sont
généralement des éléments naturels tels que les
arbres, les rivières etc. Autrefois, la famille entière
créait une plantation que gérait le chef de famille. Lorsqu'un
membre d'une famille voulait créer son propre champ ou sa propre
plantation, il devait avoir l'autorisation du chef de famille et lui seul
pouvait octroyer une portion de terre à un quelconque étranger
à la famille. Cependant, la vente anarchique et illicite de terre
occasionnée par l'exploitation minière (industrielle et
artisanale) a mis un terme à cette façon de gérer les
terres.
Les terres sont cédées par tous et à tous
sans recours aux chefs de terre et de familles. Ces contrats de location sont
verbaux ou écrits avec beaucoup de flou au point qu'il arrive même
que le cédant et l'acquéreur ne s'accordent pas sur l'objet
cédé. Alors que le cédant se défend de n'avoir
transféré qu'un simple droit d'usage du sol et non le sol
lui-même, l'acquéreur estime avoir acquis la
propriété.
Les allochtones de la sous-préfecture de Hiré
pour leur installation accèdent à la terre par divers moyens
comme le don, le troc, l'échange, l'héritage, l'achat (contre vin
et récolte) et autres arrangements. Ainsi, les statistiques ci-dessous
indiquent la proportion des différents modes d'accès à la
terre ou l'installation des allochtones.
256
Figure 33: mode d'accès à la terre par
les allochtones
19%
7%
3%
10%
32%
29%
Achat Don Echange Héritage Troc Autres
Source : nos enquêtes, 2017
La figure ci-dessus présente la proportion des
différents modes d'accès à la terre dans la
sous-préfecture de Hiré. Le mode d'accès le plus courant
est le don car 32% des personnes enquêtées ont ainsi obtenues
leurs terres. L'achat et l'héritage constitue respectivement 29% et 19%
des modes d'accès à la terre. Les allochtones accèdent
également à la terre par troc, par échanges et par
d'autres moyens.
La plupart des terres occupées par les allogènes
dans la sous-préfecture de Hiré leur ont été
cédées par don moyennant des vins et récoltes dont la
quantité reste au choix de l'exploitant. Selon la tradition, les Dida
offraient aux immigrants des portions de terres pour leur permettre de
s'installer et lesquels en échange offraient des cadeaux et dons aux
tuteurs Dida. Cependant avec l'augmentation du nombre de migrants Baoulé
et Dioula à la recherche de terre cultivable associé à
l'essor des plantations de café et cacao dans les années 1970, la
terre a eu une double valeur aux yeux des Dida notamment comme un
héritage sacré légué de génération en
génération et un facteur déterminant de richesse. Ainsi,
la configuration de l'usage des terres s'est considérablement
modifiée chez les Dida qui ont ainsi cessé de céder
gratuitement la terre pour réclamer des redevances de la part des
migrants. C'est de la sorte que d'autres modes d'accès se sont
développés notamment l'achat sans preuve tangible ou avec des
écrits non notariés, par troc très souvent avec les dettes
funéraires ou scolaires, par échange soit avec un matériel
roulant et sous d'autres formes, soit verbalement soit par des écrits
transactionnels.
257
Le conflit des conceptions équivoque entre acteurs
locaux sur le terrain des parcelles à indemniser au sujet de qui est
propriétaire et qui est locataire s'atténue avec la clarification
de certaines notions. Après plus de trois années de confusions,
les éclairages suivants sont apparus. Il existe à Hiré
l'ensemble suivant des types d'acteurs susceptibles de se réclamer
propriétaires:
- les propriétaires coutumiers du sol, autochtones Dida de
Bouakako pour les sites de
gisement de Hiré,
- les propriétaires coutumiers du sol, autochtones Dida de
Gogobro pour les gisements de
Bonikro,
- les propriétaires coutumiers du sol autochtones de
Kagbé pour les gisements de Bonikro
en litige de souveraineté avec les villageois de
Gogobro,
- les propriétaires coutumiers du sol autochtone de
Hiré village ayant procuration du
village de Bouakako sur les terres du site de la ville de
Hiré,
- les propriétaires coutumiers du sol, autochtones Dida du
terroir de Zaroko,
- les propriétaires coutumiers du sol, autochtones Dida du
terroir de Douaville,
- Les allogènes Baoulé et autres ivoiriens
propriétaires de leurs impenses et locataires sur
les terres des Dida quels que soit leurs arguments à se
déclarer propriétaire foncier par
achat ou par omission,
- Les non ivoiriens propriétaires de leurs impenses et
locataires sur les terres des Dida
quels que soit leurs arguments à se déclarer
propriétaire foncier par achat ou par
omission,
- Les étrangers ayant un titre de
propriété,
- Les ivoiriens non Dida ayant un titre de
propriété,
- Les attributaires de lots urbains dans la ville de
Hiré.
- 109 propriétés coutumières,
- 115 parcelles de propriété coutumières,
- 2 467 parcelles d'exploitants,
- 99 propriétaires coutumiers de la terre,
- 1 352 exploitants cultivant 2 467 parcelles.
9.2.2.1 La difficulté d'identification des
propriétaires terriens et des exploitants
La difficulté majeure au niveau des indemnisations est
liée à l'identification des propriétés des terres
et des exploitants. Cette difficulté vient principalement de la
compréhension des droits coutumiers de propriété et
d'usage à plusieurs niveaux qui affectent Hiré comme c'est
258
généralement le cas en milieu rural. Les droits
coutumiers à Hiré sont cédés sous diverses formes.
La société Dida est patrilinéaire et l'héritage au
sein de cette société se transmet de père en fils. Surtout
la cession des terres, car, elle est considérée comme un bien
familial qui ne doit pas sortir de ce cercle. C'est ce qui explique le fait que
la cession se fait parfois d'oncle à neveu. Quand l'oncle n'a pas eu de
fils ou estime que ses fils ne peuvent user de sa terre, il la cède
à ses neveux. Les femmes étant appelées à partir
fonder des familles ailleurs, n'ont généralement pas droit
à la terre. Elle la transmettrait sinon à ses enfants donc
à une autre famille. Cependant, la réalité est tout autre.
On trouve des femmes qui possèdent des terres et même qui en
héritent. Les Dida Watta considèrent la terre comme «
l'essence » de sa société. Au-delà d'être un
instrument de production, la terre est pour les populations autochtones de
Hiré, l'expression de leur existence sociale et économique.
Les chefs de terre sont responsables, au sein de la
communauté, de l'attribution des terres et de la réalisation des
diverses cérémonies qui aident à maintenir de bonnes
relations entre la population et leurs ancêtres. Toutefois, du fait de
l'économie de plantation puis de l'orpaillage aujourd'hui, les droits
coutumiers ont été diversement cédés à des
tiers en contrepartie d'un arrangement précis. Ces cessions se sont
faites parfois à l'insu des chefs de familles ou des autres membres de
la famille, soit verbalement, soit par écrits non notariés. Avec
la question des indemnisations, certaines cessions sont remises en cause et
posent un véritable problème quant à l'identification des
propriétaires des terres et des propriétaires des cultures. Ce
problème oppose généralement les communautés
autochtones aux communautés allogènes et est motivé par la
logique de contrôle et de sécurisation des droits sur le foncier
(Babo, 2008 ; Dozon, 1997).
Les terres déjà vendues aux autres ethnies sont
désormais réclamées par d'autres Dida de la même
famille. Leur argument est que la terre appartenant à une famille, elle
ne peut être vendue qu'avec l'accord de toute la famille. Cet état
de fait engrange une série de tensions entre les différentes
communautés à Hiré. Dans certains cas, les transferts de
terres aux migrants étaient conditionnés par la seule production
des cultures de subsistance. Ces arrangements n'étaient pas toujours
respectés par les migrants qui profitaient pour planter le cacao et le
café. Pour les migrants planter les cultures pérennes leur
donnerait une certaine garantie aux droits sur les terres exploitées en
référence au discours de feu le Président de la
République FHB « la terre appartient à celui qui la met
en valeur » (Chauveau ; opc). Cette déclaration a
occasionné chez les migrants une multitude de comportements
opportunistes dans leur course à l'appropriation foncière en zone
forestière ivoirienne.
Dans d'autres cas, les contrats de cession sont conclus soit
verbalement soit par écrits non
259
notariés. Cependant, il arrive que le cédant et
l'acquéreur ne s'accordent pas sur l'objet cédé. Parfois,
les clauses des contrats sont mal comprises par un des acteurs. Il arrive par
exemple que le propriétaire estime n'avoir cédé que le
droit d'usage tandis que l'acquéreur estime avoir acquis la
propriété foncière.
Cette difficulté à bien identifier et distinguer
les propriétaires des parcelles et des cultures, oppose la
communauté à la société minière. Cela se
traduit par les plaintes des populations à propos des erreurs
récurrentes à ce sujet. Des personnes se plaignent de ce que
leurs plantations ne sont pas indemnisées alors que pour NEWCREST elles
le sont. Le paiement des indemnités étant conditionné par
la présentation de documents prouvant soit la propriété de
la parcelle, soit la propriété des cultures, lorsqu'une personne
présente tous ces papiers, la mine ne peut que la reconnaitre. En
réalité certaines personnes se revendiquent propriétaire
d'un bien alors qu'elles ne le sont pas. Dans ce cas la mine ne pouvant payer
deux personnes pour la même parcelle, le vrai propriétaire se
retrouve perdant. Ces situations se produisent généralement entre
personnes d'une même famille, entre vendeurs et acquéreurs ou
entre voisins de parcelles. Pour ce qui concerne les litiges entre voisins de
parcelles ils opposent généralement les autochtones entre eux.
Toutefois, les limites entres les terres des différentes familles comme
les limites entre villages ne sont matérialisées que par des
éléments de la nature tels que les cours d'eau, les arbres, etc.
Certains éléments physiques qui servent de limites arrivent
à disparaitre et il devient difficile surtout pour les jeunes
héritiers de connaitre les limites de leurs parcelles. Cependant, il
n'est pas à écarter que ce type d'erreur est parfois volontaire.
Certaines personnes pour bénéficier des indemnités,
profitent de l'ignorance de leurs voisins et empiètent sur les parcelles
des autres.
Pour mettre fin aux conflits portant sur qui a droit à
être indemnisé ou non, la compagnie minière s'est
proposée d'adopter les conclusions de la classification des populations.
Les propriétaires coutumiers du sol prétendent à une
indemnisation sur le sol comme si le sol était vendu
indépendamment de tout ce qu'il porte. Ils interdisent le versement de
cette indemnisation pour perte de sol à tous les non autochtones y
compris à ceux des autochtones Dida dont le sol concerné n'est
pas une partie de leur terroir. Ainsi sont seulement
bénéficiaires des indemnités attendues de la zone de
Hiré Est les Dida de Bouakako. Il en est de même pour la zone de
la mine de Bonikro dont les Dida de Gogobro se réclament
propriétaires.
260
Pour ce qui relève des indemnités compensatoires
des cultures, les non Dida les perçoivent quand ils sont locataires de
la terre avec ou sans contrat. Les Dida les perçoivent aussi quand ils
exploitent directement les parcelles dont ils sont propriétaires.
Au début de l'exploration et de l'exploitation de la
mine de Bonikro la société EQUIGOLD s'était appuyée
sur les textes de l'État pour ne pas payer les propriétaires
coutumiers du sol. Les Dida de Gogobro propriétaires en avaient
été particulièrement mécontentés au point
d'en vouloir à la mine. Ceux-ci exigeaient réparation. Lors de
nouvelles extensions de la surface à exploiter les villageois de Gogobro
ont fait savoir à la mine que rien ne se feraient sans la prise en
compte de leur statut de propriétaires fonciers. Ce fut l'occasion de
faire un inventaire du périmètre à l'effet que les
propriétaires soient identifiés ainsi que les locataires. Pour
faire la police de cet inventaire, les jeunes de Gogobro en appui à leur
chef du village sont intervenus afin d'éviter toute reconnaissance de
propriété foncière coutumière à des
Baoulés et des Burkinabés qui présentaient des
attestations d'achat de terres payées aux Dida. Après bien des
réunions au village sous la férule des jeunes, les
allogènes qui font valoir leur statut de propriétaire ont
consenti à verser 20% de leur indemnité de compensation, soit 250
000 F CFA à l'hectare à la chefferie du village pour être
reconnus comme propriétaires coutumiers.
Par la voix du chef du village, les Dida ont qualifié
cette proposition d'injure grave à leur dignité et à leur
bon sens en déclarant qu'il appartient au propriétaire coutumier
de faire le partage et non le contraire. Les négociations ont
trainé près de six mois sans solution avant que le
sous-préfet soit saisi par la compagnie minière très lasse
des atermoiements préjudiciables des villageois. Le 31 mai 2016,
l'administrateur après avoir réécouter les parties en
conflit tranche : il suit les arguments de la chefferie de Gogobro en affectant
75% des indemnités aux Dida, 25 % aux allogènes
propriétaires-locataires. Ainsi, sur 5 651 450 F CFA d'indemnités
pour cause de perte du sol, les villageois de Gogobro ont perçu 4 238
588 F CFA et les allogènes 1 412 862 FCFA. Une fois ce partage fait, il
est apparu une nouvelle cause de dissension au sein du village. Les jeunes se
posant en sauveurs de la chefferie réclament une bonne part des
compensations allouée au village. Le sous-préfet y répond
en leur affectant un quart de la part de la somme dédiée au
village mais les jeunes exigent les trois quarts. Là apparaissent sur le
champ des négociations, les conflits d'intérêt et de
posture entre jeunes et adultes.
9.2.3. Les problèmes
intergénérationnels
Les problèmes intergénérationnels se
posent aussi bien au sein des familles qu'au sein de la communauté.
261
Au sein des familles, ils opposent les ainés, chefs de
famille aux plus jeunes. Les jeunes se plaignent de la gestion de
l'héritage par les ainés après le décès du
père. Les jeunes estiment que la gestion familiale des terres n'est pas
la bonne. Ils justifient leur position par le fait que les plantations qui
appartiennent à toute une famille sont vendues à l'insu de
certains membres de la famille. Ils estiment qu'il y a une gestion opaque des
terres par les ainés qui ne contribue pas à assurer leur
lendemain. Cela les emmène à vendre à leur tour des
parcelles. Lorsque des plantations familiales sont indemnisées par la
mine, les jeunes se plaignent de la répartition de l'indemnité
qui est faite par leurs ainés. Ils estiment devoir recevoir plus et ces
questions sont à la base de plusieurs conflits au sein d'une même
famille.
L'autre forme de conflits inter générationnels
est ceux qui opposent les jeunes aux leaders communautaires ou aux cadres. Les
conflits qui les opposent portent sur la divergence de point de vue dans la
gestion des conflits entre villages et les villages et la compagnie
minière. Pour ce qui concerne les conflits entre villages, les jeunes
rejettent parfois les solutions préconisées par les
autorités coutumières. C'est le cas pour le conflit foncier entre
Bouakako et Hiré pour lequel l'ensemble des chefs du canton, venu
aidé au règlement du litige avaient proposés et acquis que
les terres de la commune soient considérées désormais
comme appartenant à Hiré. Cependant, la jeunesse de Bouakako
remit en cause cet acquis et s'est opposé à son application car
disent-ils, leur village a cédé trop de terres à
Hiré.
Pour ce qui concerne les conflits avec la
société minière, les jeunes estiment qu'il ne faut pas
utiliser la délicatesse. Pour eux, seuls aboutissent les méthodes
drastiques comme les blocages des routes et des travaux de la compagnie ainsi
que le saccage des biens de la société minière.
9.2.4. La manifestation des conflits entre les
communautés locales
Les conflits entre les communautés portent
généralement sur les questions de limites de territoires. Ces
conflits opposent les villages de Hiré et au village de Bouakako, le
village de Gogobro à celui de Kagbè. Ces litiges se manifestent
par des bagarres, des pratiques mystiques, des malédictions, de
fétichisme etc.
Les privilèges accordés aux villages
propriétaires terriens des sites occupés par la mine a fait
renaitre la question des limites entre les villages de la
sous-préfecture de Hiré. Des six villages que compte la
sous-préfecture de Hiré, les conflits inter-villages en opposent
quatre. Il s'agit de Hiré village, Bouakako, Gogobro et Kagbè,
mais aussi Gabia, un village de la sous-préfecture d'Oumé. Ces
villages revendiquent tous la propriété sur les terres qui
accueillent les
262
installations de la mine d'or de Bonikro. Les terres sont
délimitées par des éléments naturels
représentés par des arbres, des rivières etc. Le canton
Watta fait frontière au Nord avec le village Gabia et sur l'axe
Hiré-Oumé des campements de Hiré et de Gabia sont voisins.
Ces quatre villages partagent tous une limite avec Gabia.
Selon l'histoire de l'installation des Dida Watta, les
villages Bouakako, Douaville, Gogobro, Hiré, Kagbè et Zaroko,
étaient tous situés sur les collines. Cependant, pour des raisons
diverses, Hiré et Kagbè sont descendus pour occuper les sites sur
lesquels ils sont aujourd'hui. Les populations du village de Hiré
avaient voulu partir plus loin, mais les habitants de Bouakako leur ont
céder les terres qu'elles occupent. Le côté Est de la
commune de Hiré est donc bâti sur les terres de Bouakako, et le
côté Ouest après la mairie appartient à Hiré
village. L'ouverture par NEWCREST de la fosse satellite de Hiré, donne
lieu à des litiges entre les deux villages.
Les villages de Gogobro et de Kagbè partagent
également une limite dont l'emplacement est sujet de disputes. Les
limites entre les terroirs sont des limites naturelles dont la connaissance est
transmise de génération en génération.
Ces conflits de limites de territoires se manifestent par des
bagarres, des pratiques mystiques, des malédictions, de
fétichisme etc. Cependant, ces villages suivant le conseil de la MUDH,
ont entrepris la délimitation par le Cabinet d'Experts pour l'assistance
conseil en Topographie et Foncier (CETIF) des différents terroirs
villageois de Hiré.
9.3. LES SITES IMPACTES ET NON IMPACTES : LE DIALOGUE
DE MAUVAISE FOI A PROPOS DES INDEMNISATIONS
Les mésententes entre la compagnie minière et
les populations proviennent d'une autre source qui est le statut
d'impactés ou de non impactés par les activités
minières. C'est un sujet d'une extrême intensité. Au
début les agents de la mine confortés par l'autorité de
l'État font irruption dans les terroirs des villageois et dans leur
cadre de vie quotidienne. C'est lors de ces rencontres que les agents de la
compagnie minière informent la population de ce qu'ils vont occuper les
terres, les champs et les plantations appartenant aux villageois. Cette
décision est mal vécue par les populations qui finissent par s'en
tenir à la force dont dispose la mine pour s'établir. En retour,
les injonctions faites par la mine aux populations de ne plus utiliser les
zones impactées sont accompagnées de promesses de versement
d'indemnités. Dans le cours des rapports entre population et mines, il
arrive que la compagnie ne veuille plus payer des indemnités pour des
sites occupés, ou que les villageois considèrent comme
occupé du fait de leur lecture des impacts de l'activité
minière. Les parties rentrent alors dans une confusion conflictuelle.
263
9.3.1 Le cas du campement de Konankro
Bien que l'EIES qui a précédé les travaux
d'exploitation de la mine de Bonikro ait relevé la
nécessité de déplacer les cinq campements autour de la
mine, la société minière n'avait pas prévu le
déplacement de Koutouklou-Konankro. Ce campement est habité par
des Baoulés installés près de la mine de Bonikro.
Situé à 1,17 km de l'usine de traitement, le campement de
Koutouklou-Konankro subissait les effets négatifs de sa proximité
à la mine. Les populations font état des bruits, des tremblements
de terres, des poussières qui dérangent leur vie au quotidien. Le
campement était envahi par la poussière excessive
mélangée à des produits très toxiques. Les eaux
usées issues du traitement et celles du service du lavage automobile
envahissaient les plantations des habitants de ce village. Elles font cas du
manque d'eau dans les puits, des maladies diverses (diarrhées, boutons,
d'enflure de membres, de vomissement), ainsi que des décès
fréquents et incompréhensibles. La Compagnie, quant à
elle, déclare et prouve par ses experts que chez les populations de ce
campement il y a surtout la recherche de faits justificatifs dans le but de se
faire prendre en compte comme impactées. S'engage alors une longue
campagne d'information et de désinformation mutuelle qui dure quatre
ans. Les villageois ont mené une lutte contre la compagnie pour que le
dommage qu'ils subissent leur soit compensé par une relocalisation. Cela
a fini par ce faire avec le déplacement du campement sur la route de
Hiré à l'entrée de la ville.
9.3.2 Absence de conflit dans le cas du campement de
Bandamakro
C'est près de ce campement que l'entreprise
minière a construit son lac à résidu. Les populations ont
vécu trois années durant près de ce lac avant d'être
déplacées. C'est donc en 2009 que la mine a effectué
l'évaluation des maisons de Bandamakro et le déplacement s'est
finalement effectué en 2010. Pour ce déplacement, il n'y a pas eu
de conflit avec la compagnie minière. La proximité de l'ancien
site de Bandamakro du bassin de boue exposait les populations de ce campement
en danger. Les inscriptions qu'on lit sur les pancartes apposées par la
compagnie mine autour de ce lac artificiel montrent que les responsables de la
compagnie minière sont bien conscients de la menace qu'il
représente.
9.3.3 Conflit autour de la zone dite du moratoire, de
Hiré Est et des zones impactées
En 2009, la compagnie constate la fin prochaine de
l'exploitation du gisement situé sur le terroir de Gogobro dans la zone
de Bonikro. Elle engage des activités d'exploration fructueuses en
trouvant trois gisements d'or dans la périphérie urbaine de
Hiré Est. Par mesure de précaution
264
elle émet une déclaration de servitude visant
à créer un statut de zone interdite aux populations en
perspective d'une exploitation minière. Toutes les autorités
administratives de la ville sont mobilisées pour dire aux populations
usagers de la périphérie, qu'il leur est désormais
interdit d'activité pérennes de lotissement, de construction dans
la zone. La compagnie dispose ainsi d'un moratoire le 31 juillet 2009. En un
trait de plume sur la carte de Hiré une frontière est
tracée au-delà de laquelle une surface de 1 069 ha est interdite
à tout usage. La compagnie entend faire sur cet espace une EIES à
l'effet de déterminer la conduite à tenir. Le temps passe. La
mise à défend qui devait durer un an (2010) s'enlise dans la
période électorale hautement dangereuse où
l'administration fonctionne peu dans un climat de peur pour l'entreprise
minière installée en zone politiquement sensible.
9.3.3 Les incertitudes dans la définition des
périmètres miniers
En 2012, après la crise postélectorale, la
société réduit l'emprise de son projet de 1069 à
882 hectares. En affinant d'avantage sa zone d'intervention potentielle, la
compagnie parvient en 2013, à estimer qu'elle n'a plus besoin que de 546
hectares, puis de 440 hectares en 2014, pour finalement retenir en 2015 une
emprise estimée à environ 640 hectares (figure 35).
265
Figure 34 : évolution des
périmètres du projet minier de Hiré entre 2009 et
2015
Source : NEWCREST, 2016
Le projet d'exploitation du gisement d'or de Hiré
intervient dans un environnement très particulier. En effet les
populations comprennent que la venue de la mine sur l'espace de Hiré
préfigure tous les événements qui ont eu lieu dans la zone
de Bonikro. Elles se sont préparées au fait que l'entreprise va
leur causer des dommages mais qu'elles pourront tirer un profit de sa
capacité à les indemniser. Les populations savent que la
compagnie a obligation à le faire mais qu'elle résistera et
cherchera à minimiser les montants. En plus la mise en défend
préventive dans la zone de Hiré a pris du temps. Au lieu de
l'année prévue pour mettre en place l'emprise de la mine, quatre
ans sont passés. Les populations ont attendu, mais aussi longuement
réfléchi sur l'impact du moratoire et ce que cela leur
crée comme désagrément d'attente de l'indemnisation.
La zone du moratoire qu'avait dégagée la mine
est à l'origine de nombreux désaccords entre les populations et
la mine. Les révisions constantes des superficies prises en compte et
réellement occupées par la mine (voir figure 36) a
entrainé des mécontentements chez les populations. Alors que
toutes formes de mises en valeur étaient interdites sur les parcelles
concernées, la mine après des années d'attente a retenu
certaines parcelles et en a rejeté d'autres.
266
Pourtant, les populations dont les portions de terre n'ont pu
être retenues, ont pour certaines perdu leurs cultures pour avoir
cessé leur entretien, ou parce qu'elles ne peuvent plus avoir
accès à leurs parcelles compte tenu des barbelés
installés par l'entreprise. Les communautés profitent pour mettre
sur la table de nombreuses revendications qui résument leur
confrontation avec la mine.
267
Figure 35 : zones interdites aux populations en
perspective de la mise en exploitation minière dites moratorium 1 et
moratorium 2
Source : NEWCREST, 2016
268
Ainsi pour elles, si la compagnie a défini une zone de
servitude de 1 069 ha obligeant les populations à subir des dommages, il
faut qu'elle la respecte en dédommageant tous ceux qui sont dans ce
périmètre. Il n'est pas question de dire comme la compagnie le
présente que seulement ceux concernés par les 640 ha finalement
occupés seront pris en compte.
Une mobilisation générale s'est faite dans le
cadre d'une confrontation entre les communautés pour déterminer
qui est propriétaire de l'emprise et qui en est locataire.
La question du dédommagement de la
propriété du sol a été sévèrement
posée par les autochtones Dida notamment par le village de Bouakako. Des
querelles fratricides ont opposé les communautés autochtones
quant à déterminer qui sont les propriétaires coutumiers
du sol qui prétendent aux indemnisations. Les questions d'identification
et de reconnaissance des non Dida comme propriétaires coutumiers sont
aussi revenues en permanence sur le devant de la scène. Tout le
problème de la redéfinition des indemnités de purge
à la hausse est revenu en surface, attisé par toutes les
communautés qui accusent la mine de ne pas payer, de payer moins et de
payer tard. La proximité de la ville fait que l'emprise du projet
s'étend sur des lotissements, sur des maisons construites et en
construction, sur des projets de vie. Tous les acteurs réclament des
indemnités de réinstallation, exigent des relogements juteux et
demandent la prise en compte de la surface du moratoire de 2009 qui est de 1
069 ha laquelle s'étend sur plusieurs lots (figure 37), soit 2 615 lots
qu'ils comptent contre 2 251 lots comptés par la compagnie qui ne veut
pas les prendre tous en compte.
Le temps du moratoire ayant été trop long, les
populations exigent en 2014 la prise en compte de tous leurs investissements
survenus depuis sur le terrain. A cela la compagnie, munie de documents, de
photos géo-référencées, oppose que les populations
n'ont pas respecté le moratoire ou qu'elles ne disposent ni de lettres
d'attribution, ni de permis de construire les cases dont elles réclament
indemnisation.
269
Figure 36: les îlots urbains concernés par
la mise en exploitation minière à Hiré
Source : NEWCREST, 2016
270
Il est survenu l'épineuse question des terres vacantes,
notamment des jachères. Tirant la leçon du passé
récent des cultures seulement indemnisées dans
l'opération, de Bonikro, les populations se mettent en alerte. Elles
posent la question du pourquoi la mine se refuse à indemniser les
jachères alors que ce qui lui est très utile est la terre,
support des jachères qui représente près de 50% des terres
à occuper. Voyant que la mine éviterait le sujet ou se
défendrait très bien sur la question, les populations ont
décidé de mettre en valeur au sens des indemnités toutes
les jachères. Pour ce faire, elles ont réfléchi à
la méthode la plus efficace pour le faire. Les actions ont porté
sur le planting de teck, produit à haute valeur d'indemnités
pouvant être planté sur tous les sols le plus rapidement possible.
Les acteurs de cette opération ont été très servis
par le temps d'enlisement du moratoire, ce qui leur a permis de planter
près de 200 ha de teck en plantations sauvages qui a rendu indirectement
ces jachères éligibles à l'indemnisation.
La question des retombées financières et
sociales positives de la mine de Hiré a été posée
aussi bien par les résidents de Hiré que par les
propriétaires coutumiers du sol et tout l'ensemble des autres
communautés vivant dans l'environnement local. Le nouveau gisement de
Hiré à exploiter repose, sur le fond et sur la forme, toute la
question de l'évaluation des impacts et des indemnités
posées par le précédent de Bonikro. Un facteur est venu
aggraver ces revendications : la compagnie certainement contrainte par le temps
et les échéances de la concession d'exploitation s'est mise en
situation de quasi exploitation du site en pleine tourmente dans la
négociation des indemnités. Ceci a généré
beaucoup d'incompréhension et des résistances individuelles
multiples qu'il a fallu ensuite résoudre au cas par cas pour
régler l'ensemble des problèmes posés.
Face à ces agissements de la société et
à son refus de réagir favorablement aux revendications
socio-économiques des agriculteurs et des personnes qui exercent un
droit coutumier sur ces parcelles de terre, les populations ont eu de vives
réactions. Par exemple, les femmes du quartier baoulé ont
initié un blocus du site d'exploitation minière de la ville de
Hiré afin de contraindre la mine à prendre en compte leurs
revendications.
9.4. LES MECONTENTEMENTS ISSUS DES RELOCALISATIONS 9.4.1
Les mécontents des relogements de Bonikro
Pendant la construction, le chantier étant interdit
à toute personne étrangère, il n'a pas été
possible pour les populations de visiter les maisons qui allaient bientôt
les accueillir. Les
271
populations ont découvert les maisons le jour de leur
installation en mars 2008. Les mesures d'accompagnement qui devaient suivre et
qui étaient essentiellement constituées de compensation
financière n'ont pas été apporté jusqu'à la
fin de l'installation de la mine et ce jusqu'au départ D'EQUIGOLD. Les
populations de Bonikro ont donc informé la compagnie minière LGL
qui a repris les actifs d'EQUIGOLD de ce fait, mais le repreneur n'a pas
accordé de suite à cela jusqu'à aujourd'hui.
En outre les populations de Bonikro n'ont reçu aucun
document relatif à la propriété des maisons et des terres
sur lesquelles est bâti le nouveau campement de Bonikro. Les maisons
construites par EQUIGOLD pour les populations de Bonikro présentent
plusieurs imperfections. D'abord, le campement a été construit
sans cuisines, ce qui a emmené chaque ménage à se
bâtir une cuisine de fortune. Les murs des maisons construites sont sans
chaînage, c'est-à-dire sans poteaux en béton pour cadrer et
soutenir les murs, au point qu'elles sont déjà toutes
fissurées. Elles présentent également des problèmes
d'étanchéité quand il pleut, l'eau s'y infiltre et passe
d'une pièce à une autre causant des désagréments.
Il est courant que les populations se retrouvent dans l'eau pendant leur
sommeil. Surtout, le nombre de pièces par maison a été
réduit par rapport aux maisons démolies, dans le cadre du projet.
Le nouveau campement a été organisé sans ménager
une réserve foncière par famille autorisant la construction
ultérieure d'extensions. De ce fait, les populations ne peuvent pas
construire de nouveaux bâtiments et sont obligées de dormir
à plusieurs dans les chambres comme le décrit le chef de Bonikro
:
« Ils nous ont délocalisés ici, sans
nous accorder un centimètre d'espace de plus. Conséquence, nous
ne pouvons pas construire d'autres bâtiments. Nous sommes obligés
de dormir à plusieurs dans chaque pièce. Nous n'avons plus
d'intimité dans nos foyers ».
Au sujet des infrastructures, les maisons du campement de
Bonikro bénéficient de l'adduction à l'eau potable et du
branchement au réseau électrique. Par ailleurs l'éclairage
public du nouveau village est en place. L'ancien site était lui
doté d'une école de trois classes et trois logements
d'instituteurs, d'une église, d'un foyer de jeunes. Sur le nouveau site,
la mine a construit les mêmes choses à l'exception de
l'école, qui y compte désormais six classes. Un dispensaire est
également construit, mais il demeure à ce jour non fonctionnel
puisque non équipé.
272
Avant la relocalisation, l'un des accords était que la
société EQUIGOLD dédommage toutes les plantations.
Cependant, elle a incité les populations à partir en leur
assurant que les plantations seraient indemnisées progressivement.
Toutefois, après trois ans, il s'est avéré que sur les 33
familles que comptait le campement, les terres de 09 familles n'ont pu
être indemnisées par la société alors que les
paysans ne peuvent plus les exploiter. Face à cette
réalité, les populations ont posé le problème de
l'accessibilité de leurs plantations, puisqu'elles sont désormais
à environ 07 à 09 km du campement. Suite à cette demande,
la société a mis à la disposition de la population un bus
qui a assuré pendant une année leur transport, de Bonikro
à leurs plantations. Puis après, cette première
année, un véhicule loué en ville par la compagnie
minière assure jusqu'à présent ce déplacement.
9.4.2 Les points de revendication des populations de
Koutouklou- Konankro
Les principaux points de critique des populations portent sur
le nombre de pièces et sur la reconstruction de toutes les maisons.
Cette question du nombre de pièces a été la plus
soulevée par les populations. Celles-ci ont constaté la
différence dans le nombre de pièces entre la maison neuve et
l'ancienne maison. Selon leur calcul, il manque en moyenne une pièce
à chacune des maisons de compensation. Dans la logique des populations,
l'entreprise minière devrait construire le même nombre de
pièces recensés par maison sur l'ancien site. L'ensemble de la
communauté a exigé que le PDR reproduise intégralement
toutes les constructions telles que figurant sur l'inventaire photographique de
2012. Le chef de Konankro a insisté sur cela au point d'en faire un
motif de blocage et de boycott des signatures en mai 2014. Suite à cette
plainte des populations et dans un souci de transparence, un comité de
suivi et d'évaluation des travaux de construction du nouveau campement,
composé des jeunes dudit campement a été installé.
Toutefois, la société minière explique les constats des
populations par le fait que le relogement ne se fait pas par le remplacement
d'une pièce par une autre pièce. Selon NEWCREST, l'attribution
d'une maison se fait selon la valeur vénale de la maison
détruite. Elle relève que le standard de relogement le plus
proche admis par le ministère de la construction et de l'urbanisme est
une maison urbaine valant dix fois la valeur vénale de la case initiale.
Concernant les revendications sur la reconstruction intégrale de toutes
les constructions de l'ancien site, NEWCREST, déclare qu'il y a eu une
équivoque dans le message d'annonce des compensations. Les populations
disent avoir entendu que la société reproduirait toutes les
constructions. Ces incompréhensions ont persisté au point que ce
comité démissionne. Malgré les échanges entre la
mine et la population, des insatisfactions ont toujours subsisté au
point que le déménagement sur le nouveau site prévu pour
le 1er mai 2017 s'est effectué que pour une
273
fraction des familles. Une partie de la population a
aménagé avec le chef dans le nouveau quartier désormais
urbain et l'autre partie est restée sur l'ancien site. Cette
dernière était celle qui réclamait des mesures
d'accompagnement pour le déplacement et se plaignait le plus des
défauts de qualité des maisons qui leur étaient
attribuées. Cependant, du fait de l'indifférence de NEWCREST face
à leur requête, ces populations se sont résolues en
août 2017 à rejoindre le nouveau campement de Bonikro.
9.5. LES RECOURS A LA VIOLENCE PAR LES DIFFERENTES
PARTIES PRENANTES
Les différends qui opposent les communautés
locales à la compagnie minière ont provoqués au fil du
temps diverses manifestations de contestation. D'abord, les premiers
mécontentements des populations étaient exprimés à
la compagnie minière à travers des courriers. Les chefs de
villages ou de communautés adressaient directement ou par le biais
d'autorités administratives comme le sous-préfet, le maire, etc.,
des courriers aux autorités de la mine afin de leur exprimer leurs
mécontentements ou leurs requêtes. Les réponses à
ces courriers leurs étaient transmises par le même moyen ou
faisaient l'objet de rencontres, quand cela le nécessitait. Puis au fil
du temps, les populations ont trouvé qu'elles n'avaient pas de suites
favorables à leurs demandes ou que la compagnie minière les
évitait. Elles ont donc opté pour des mesures plus drastiques qui
contraindraient la compagnie minière à considérer leurs
plaintes. Ces mesures sont les blocages de routes et de travaux de la
compagnie, le saccage des biens de l'industrie minière, les poursuites
judiciaires, des menaces de mort à l'encontre du personnel minier
etc.
La compagnie minière, pour faire face à ces
différents agissements qui troublent ses activités, utilise
également la force en recourant aux agents de l'ordre et de
sécurité publique (police et gendarmerie). Ceux-ci interviennent
pour libérer les routes entre carrières et usine, l'accès
aux sites et ainsi, restaurer l'ordre.
Les personnes qui bloquent les accès à la mine
et qui recourent à la violence sont souvent les jeunes en tant que
porte-étendards de leurs communautés villageoise respectives et
ayant en arrière-plan le soutien de leurs chefferies, ce sont
principalement :
- les groupes communautaires impactés migrants
allogènes et étrangers, et ;
- les groupes réclamant des bénéfices en
investissements locaux d'infrastructure et de formation de ressources humaines
pour leur village ou pour la ville.
274
Ils sont soutenus par l'expression démocratique des
libertés d'action officiellement instituées, tels que les avocats
et les huissiers, les discours des organisations internationales sur le respect
des populations, la presse locale d'opposition. Le tableau suivant fait
l'inventaire des blocages communautaires entre août 2014 et
décembre 2015 et de leur traitement. On observe ainsi que sur cette
période, ce sont 30 mouvements de protestations qui ont
été menés par les populations. Les raisons de ces blocages
varient mais tournent généralement autour de la question des
indemnisations. Pour les disperser, les autorités minières et
administratives sollicitent les interventions répétées de
la police, voire de la force armée. Cependant, elles ne sont pas la
règle. Ces différends se soldent majoritairement par la
médiation entre les communautés et la compagnie pour traiter des
problèmes qui les opposent.
275
Tableau 36 : récapitulatif des blocages
communautaires en 2015
N°
|
DATE DE BLOCAGE
|
ZONE DE BLOCAGE
|
PROTESTATAIRES
|
RAISONS DE BLOCAGE
|
DUREE ET LEVEE DU BLOCAGE
|
1
|
16-janv-15
|
Site de chapelle à Hiré
|
un groupe de jeunes de Bouakako
|
Demande d'emplois pour les jeunes
|
Une demi-journée, intervention de la police
|
2
|
19-janv-15
|
Site de chapelle à Hiré
|
un groupe de jeunes se réclamant des impactés
|
Allégation de destruction de parcelles non reconnues
|
Une demi-journée, intervention de la police
|
3
|
26-janv-15
|
Site de chapelle à Hiré
|
un groupe de jeunes se réclamant des impactés
|
Allégation de destruction de parcelles non reconnues
|
Une demi-journée, intervention de la police
|
4
|
27-janv-15
|
Site de chapelle à Hiré
|
un groupe de jeunes se réclamant des impactés
|
Demande d'emploi et non satisfaction des compensations
|
Une journée, négociation avec et
représentants et NEWCREST
|
5
|
14 au 18 février
2015
|
Site de chapelle à Hiré
|
un groupe de jeunes se réclamant des impactés
|
Non satisfaction des compensations et paiement des hectares
|
5 jours et nuits, 17 février 2015, visite de NEWCREST au
ministre des mines
|
6
|
19-févr-15
|
Camp du personnel à Hiré
|
un groupe de jeunes se réclamant des impactés
|
Non satisfaction des compensations et paiement des hectares
|
Réunion publique avec le préfet, la direction
des Mines et les autorités
|
7
|
17-mars-15
|
Piste du camp du personnel à Hiré
|
Un plaignant
|
Allégation de non-paiement de compensation de 100°000
F CFA
|
Une demi-journée, reconnaissance d'avoir reçu le
montant la semaine
|
8
|
24-mars-15
|
Route de chapelle à Hiré
|
Famille Anga
|
Non satisfaction des montants de paiement
|
Une journée, négociation avec les
représentants et NEWCREST
|
9
|
27-mars-15
|
Route de chapelle à Hiré
|
un groupe de jeunes se réclamant des impactés
|
Non satisfaction des compensations, paiement des parcelles non
retenues
|
Une journée, négociation avec les
autorités
|
10
|
31-mai-15
|
Ligne électrique Akissi-so
|
Jeunesse de Gnankakro
|
Demande de compensation ou emploi à la mine
|
Une journée négociation avec les plaignants
|
11
|
04-juin-15
|
Route de convoyage
|
Famille Koffi
|
Demande de compensation d'une parcelle familiale
|
Une demi-soirée, reconnaissance de compensation à
un membre de la famille
|
12
|
05-juin-15
|
Site d'Akissi-so
|
Un groupe de jeunes de Bouakako
|
Demande de la réalisation de la cérémonie de
libation
|
Une journée, négociation avec les
autorités
|
13
|
11-juin-15
|
Ligne électrique Akissi-so
|
Jeunesse de Gnankakro
|
Demande de compensation d'une parcelle ou emploi à la
mine
|
Une journée, négociation avec les plaignants
|
14
|
29-juin-15
|
Site de construction du centre de santé de Hiré
|
Un groupe de jeunes
|
Protestation contre la construction d'un CSU dans une ville
minière
|
Manifestation suspendue pour des échanges avec les
parties
|
15
|
30-juin-15
|
Ligne électrique Akissi-so
|
Un plaignant
|
Allégation de non-paiement de compensation de parcelle
|
Une demi-journée, reconnaissance d'avoir perçu la
compensation dans la semaine
|
16
|
03-juil-15
|
Tous les accès au site de Bonikro
|
La jeunesse de Konankro
|
Récusation de l'entreprise SUISSE construction par
Konankro
|
Une journée, négociation avec les
autorités
|
17
|
07-juil-15
|
Site d'Assondji-so
|
Un plaignant
|
Réclamation de la
compensation de sa parcelle
|
Une demi-journée, visite de constats avec levé de
points GPS
|
18
|
08 au 11 août 2015
|
Tous les sites du projet de Hiré
|
La jeunesse de Bouakako
|
Tentative de contournement de la cérémonie de
libation
|
4 jours et nuits, échec des négociations,
intervention de la gendarmerie de Divo
|
19
|
01 septembre au 21 octobre 2015
|
Tous les sites du projet de Hiré
|
Une centaine de femmes âgées et de jeunes
|
Non satisfaction des compensations, emploi jeune et paiement des
772
|
52 jours et nuits, négociation avec le gouvernement et les
plaignants
|
20
|
05-oct-15
|
Route de convoyage
|
La jeunesse de Gogobro
|
Emploi jeune, arrêt des travaux du TSF, réalisation
des engagements
|
Une demi-journée, négociation sur le site de la
gendarmerie
|
21
|
14 au 17 décembre
2015
|
Tous les sites du projet de Hiré
|
La jeunesse de Bouakako
|
Emploi des jeunes à la mine et prise en compte du livre
Blanc de Bouakako
|
4 jours et nuits, échec de négociation,
intervention de la police et gendarmerie
|
Source : nos enquêtes, 2016
276
9.6. LA GESTION DES CONFLITS PAR LA
NEGOCIATION
Les conflits fonciers liés à l'activité
minière sont réglés soit par les organes traditionnels
soit par les organes modernes. Les organes traditionnels de règlements
de conflits concernent tout le système coutumier, à savoir la
chefferie familiale et le tribunal villageois. Pour ce qui concerne les organes
de règlement moderne de conflits, il comprend les autorités
administratives locales, le tribunal moderne, le comité de gestion des
doléances foncières et agraires, et le mécanisme de
gestion des doléances communautaires de la compagnie NEWCREST.
9.6.1. L'arbitrage des organes coutumiers de
règlement des conflits
Le règlement des conflits selon l'organisation
coutumière est à trois échelles. Quand il s'agit d'un
conflit au sein de la famille, le premier recours est le chef de famille.
Celui-ci réunit toute la famille et avec elle, entend les
belligérants et essaie de trouver un accord afin d'apaiser leur
différend.
Lorsque la famille n'a pas pu régler le litige ou pour
les litiges qui opposent des membres de plusieurs familles d'un même
groupe ethnique, le règlement se fait par les sous-comités
ethniques. La plupart des groupes ethniques présents à
Hiré ont des sous-comités ethniques (Baoulé,
Malinké, Burkinabè, etc.). Ces sous-comités ethniques
fonctionnent comme des tribunaux coutumiers pour le règlement des
conflits.
Les comités de chef de village interviennent, quant
à eux, pour le règlement des conflits intercommunautaires ou
inter-villages. Pour le canton Watta, il s'agit du comité des six chefs
des six villages Watta (Bouakako, Douaville, Gogobro, Hiré,
Kagbè, Zaroko).
9.6.1.1. Le Comité de Gestion Foncière
Rurale (CGFR)
Créé par Arrêté préfectoral,
le Comité de Gestion Foncière Rurale (CGFR) est
présidé par le Sous-préfet et comprend douze (12) membres
: six (6) chefs de service en rapport avec le foncier et six (6)
représentants des communautés rurales des villages et des
autorités coutumières désignées sur proposition des
populations pour une durée de trois ans. Il est l'organe de Gestion
foncière rurale et valide à cet effet les enquêtes
officielles de constats des droits fonciers coutumiers après approbation
des comités villageois et est obligatoirement informé de
l'établissement des certificats fonciers et des actes de gestion.
277
9.6.1.2. Le Comité Villageois de Gestion
Foncière Rurale (CVGFR)
Le Comité Villageois de Gestion Foncière Rurale
est créé par décision du Sous-préfet, sur
proposition de dix (10) à vingt (20) membres des populations
villageoises. Renouvelable tous les trois ans, il est l'organe de
reconnaissance des droits du demandeur et chargé aussi d'aplanir les
divergences survenues durant les enquêtes foncières. Enfin, il
supervise l'enquête officielle, délivre l'attestation
d'approbation de l'enquête et le constat d'existence continue et paisible
des droits coutumiers. Cependant, le faible pourcentage des terres
détenues avec les titres de propriétés légaux fait
que les terres rurales sont presque entièrement gérées en
marge de la loi officielle. La sous-préfecture de Hiré
n'échappe à la sombre réalité de
l'inapplicabilité de la loi foncière.
Cela créé des problèmes aux
administrateurs et aux tribunaux pour résoudre les conflits de
propriété de terres, car de nombreuses transactions ont
été faites sans document ayant valeur juridique.
9.6.2. La gestion assurée par l'administration
publique
Les organes modernes de règlement de conflits sont :
les autorités administratives locales, la préfecture de Divo), le
tribunal de justice (Divo, Abidjan), le comité de gestion des
doléances foncières et agraires et le mécanisme de gestion
des doléances de NEWCREST.
Les autorités administratives locales que sont la
mairie et la sous-préfecture jouent un rôle capital dans le
règlement des conflits entre les communautés locales et la
compagnie minière. Elles interviennent régulièrement dans
la recherche de solution aux tensions entre les parties notamment dans la
gestion des réclamations sur la compensation des terres et cultures.
Pour le règlement des conflits entre les populations et
la mine, le recours au tribunal (de Divo ou d'Abidjan) est récurrent.
Parfois comme premier recours, parfois après avoir épuisé
sans suite favorable les autres voies de recours. Les raisons principales pour
lesquelles les populations ont recours au tribunal sont les cas de
réclamation sur les modes de compensation de bien ou tout autre dommage
résultant des activités de la compagnie minière. La
compagnie minière a également recouru au tribunal de Divo pour
une plainte contre le président de la MUDH pour avoir mené avec
les jeunes de Gogobro des actions destructrices sur leurs installations en
janvier 2017.
278
9.6.3. La gestion mise en place à l'initiative
de la compagnie minière privée
Un comité de gestion de doléances agraires et
foncières a été mis en place au niveau de la mine. La
récurrence des conflits entre les communautés et la
société minière a amené les autorités de la
mine à prendre un certain nombre de disposition pour son
règlement. Depuis le début de la phase d'exploitation de la fosse
satellite de Hiré, la question des droits à l'indemnisation est
source de conflits. Les réclamations et oppositions sur le paiement des
indemnités perturbent le processus de compensation des cultures et des
terres. C'est dans ce cadre que malgré l'existence de toutes les
structures mentionnées plus haut, le préfet de région
d'alors a proposé et obtenu la mise en place en Février 2015 du
Comité de gestion des doléances agraires et foncières. Ce
comité a été mis en place pour traiter les
réclamations sur les compensations du projet minier de NEWCREST à
Hiré. Il est composé comme suit :
- sous-préfet de Hiré, (président du
comité);
- directeur régional de l'Industrie et des Mines de Divo
(secrétaire du comité);
- directeur régional de la Construction et de l'Urbanisme
(spécialiste foncière);
- directeur régional de l'Agriculture (membre et
spécialiste agraire);
- 1er Adjoint au maire de Hiré (membre et
représentant communal);
- chef de Hiré village (membre et représentant de
la chefferie Watta);
- quatre représentants des impactés
(propriétaires terriens et exploitants);
- trois représentants du département des affaires
sociales de la compagnie minière et ;
- consultant de la compagnie minière chargée de
l'expertise foncière et agraire.
Le comité siège une fois par semaine à la
sous-préfecture pour traiter les réclamations sur les
compensations du projet minier de Hiré et relayer aux parties prenantes
(les propriétaires terriens et exploitants impactés) les
informations sur l'évolution dans le traitement de leurs plaintes pour
éviter tout blocage des travaux de la compagnie sur le terrain. Ce
comité a traité à ce jour 944 réclamations sur un
millier de doléances reçues.
9.6.4. Nouveaux protocoles et nouvelles promesses de la
mine
9.6.4.1. Pour le village de Bouakako propriétaire
du sol sur le site du gisement de Hiré
Pour apaiser les tensions dans le secteur de la mine de
Hiré, la compagnie a décidé de prendre en compte toutes
les nouvelles donnes de sa situation dans les rapports communautaires. Elle
reconnaît la propriété foncière du village de
Bouakako sur sa zone d'installation à Hiré Est. Elle prend aussi
en compte toutes les nouvelles forces sociales configurées par ce
village pour venir
279
en discussion, notamment la Cellule Stratégique de
Défense et Protection des intérêts de Bouakako (CSDPIB).
Elle a été créée à l'initiative des
intellectuels, des cadres et des hommes politiques originaires du village, et
constitue la faîtière de toutes les organisations communautaires
de base des Dida de Bouakako. Elle se présente comme très
critique des retombées déplorables de l'activité
minière mais se montre coopérative avec la mine sur la base d'un
protocole d'accord de permis d'exploiter contre obligation à investir
dans le développement de la localité, signé le 3 juin 2016
à Bouakako. Le tableau 37 fait un récapitulatif des engagements
issus du protocole d'accord NML-Bouakako.
280
Tableau 37 : récapitulatif des engagements issus
du protocole d'accord NML-Bouakako
N°
|
Points discutés
|
Engagements pris
|
1
|
Emplois jeunes
|
Renforcement des capacités des jeunes de Hiré
par la formation à différents métiers afin de leur donner
des qualifications.
|
2
|
Activités
agropastorales
|
NEWCREST s'engage à financer entièrement et hors
CDLM des projets agricoles porteurs et viables sur les terres.
|
Bouakako prendra l'initiative de proposer des projets
agricoles viables sur ses propres terres en vue de leur financement par la
mine.
|
3
|
Constructions d'infrastructures
|
Lotissement du
village
|
Bouakako soumettra une requête de projet de lotissement
dont la faisabilité sera évaluée par la mine.
|
NEWCREST ne prendra de décision finale qu'au regard du
projet final soumis par Bouakako
|
Construction de 9
logements d'enseignants
|
NEWCREST ne peut satisfaire entièrement à la
requête de 9 logements d'enseignant. En revanche, elle s'engage à
construire quelques logements dont le nombre sera communiqué
après une évaluation financière
|
Dotation en aire de jeux
|
Bouakako proposera un espace propice pour la
réalisation de l'aire de jeux à l'appréciation des deux
parties.
|
NEWCREST réalisera l'aire de jeu à la seule
condition que l'espace désigné par le village y soit propice.
|
Reprofilage des
deux (02) voies d'accès du village
|
NEWCREST assurera le reprofilage deux fois par an de la voie
principale qui mène à Bouakako à partir de la voie
nationale (Divo - Hiré), avec des rigoles pour l'écoulement des
eaux de pluie.
|
4
|
Étapes vers la
reprise de
l'Exploration à
Miré Est
|
Barème de
compensation des
cultures
|
NEWCREST et Bouakako solliciteront concurremment par
écrit l'avis formel des ministères concernés (agriculture
et eaux et forêts) pour requérir respectivement arbitrage et
clarification.
|
Plaintes résiduelles
sur la compensation de Hiré
|
Bouakako transmettra à NEWCREST une liste exhaustive
des cas de contestations non encore satisfaites dans le cadre des
compensations. NEWCREST fournira à Bouakako, un tableau du statut de
chacun des cas
|
Récusation du
Cabinet Djessan
|
Pour les évaluations et compensations agraires,
NEWCREST désignera un nouveau géomètre responsable des
travaux, en collaboration avec les agents du ministère de
l'agriculture.
|
Comité de suivi
|
Un comité conjoint composé des
représentants de la communauté et des membres de l'équipe
d'exploration de NEWCREST sera désigné pour le suivi des travaux
relatifs aux compensations à Hiré-Est.
|
Traitement des
réclamations
communautaires à Hiré Est
|
A la demande écrite de Bouakako, NEWCREST s'engage
à saisir le préfet et le sous-préfet pour que la chefferie
de Bouakako puisse arbitrer et trancher les réclamations ou arbitrage
éventuels sur les terres de Hiré-Est
|
Fiche d'inventaire
des impactés
|
NEWCREST délivrera les fiches de comptage de cultures
à tous les impactés avant la phase de paiement.
|
Emplois spéciaux
|
Création de 30 positions permanentes d'emplois non
qualifiés chez NEWCREST et 5 autres postes auprès des
sous-traitants au profit de Bouakako et Gogobro, et priorisation des emplois
aux propriétaires de terre
|
Travaux
d'exploration à Hiré
|
Démarrage des travaux préliminaires de
l'exploration le 7 Juin 2016 par l'inventaire des cultures
|
5
|
Voie de déviation communautaire
Chapelle/ Akissi-so
|
NEWCREST envisagera des mesures d'atténuation d'impact
au profit des communautés impactées par la modification de la
voie d'accès aux plantations (traitement des points d'eau,
aménagement de la voie, etc.)
|
Source : NEWCREST, 2016
281
9.6.4.2. Pour les propriétaires du sol du village
de Gogobro
Le village de Gogobro n'a pas du tout été
content de l'ignorance faite par les différentes sociétés
minières (EQUIGOLD LDL puis NEWCREST) de son statut de
propriétaire du territoire de la mine de Bonikro. Il a observé
plusieurs points de non prise en compte par les compagnies en
conséquence de cette ignorance coupable. Les cadres de ce village ont
dénoncé l'exploitation sans limite de leur terre et
décrié la présence de la mine tout en l'acceptant de peur
des représailles du gouvernement central d'Abidjan. Les blocages
répétés par leurs jeunes leur ont permis d'obtenir raison
et d'amener la mine à la discussion et à un protocole d'accord.
Ce protocole signé le 9 mai 2017 (tableau 38), impose à la
société de régler le passif envers le village depuis la
création de la mine et d'entreprendre des actions de
développement.
Tableau 38 : protocole d'accord
NEWCREST-Gogobro
N°
|
Points discutés
|
Engagements pris
|
1
2
|
Emplois spéciaux
|
Création de 30 positions permanentes d'emplois non
qualifiés au sein de NEWCREST et 5 autres postes auprès de ses
sous-traitants au profit de Bouakako et Gogobro
|
Adduction en eau dans les ménages
|
NEWCREST s'engage à réparer ou remplacer la pompe
du forage actuel qui alimente le village de Gogobro pour améliorer
le remplissage du château d'eau du village.
|
3
|
Extension du lotissement du village
|
NEWCREST s'engage à étendre le lotissement du
village de Gogobro. Le nouveau lotissement portera sur 300 lots.
|
Mettre en place un comité technique pour le projet qui
sera composé de NEWCREST, Gogobro et le cabinet Djessan
|
4
|
Autres infrastructures
et équipements
|
NEWCREST s'engage à fournir une bâche (8 m x 6 m) et
200 chaises à la communauté de Gogobro
|
NEWCREST s'engage à fournir une broyeuse aux femmes de
la communauté de Gogobro
|
NEWCREST s'engage à faire le reprofilage deux (2) fois
par an de l'axe Hiré - Gogobro - Douaville
|
Évaluation et réhabilitation des quatre (4)
bâtiments de l'école primaire au standard du bâtiment
construit par LGL Mines en 2010.
|
Source : NEWCREST, 2017
282
9.6.4.3. Nouveau protocole et nouvelles promesses de la
mine pour la communauté de Hiré
Le 3 octobre 2017, la communauté de Hiré a
signé un protocole d'accord avec la compagnie dans lequel celle-ci
s'engage à :
- la construction de six (6) bornes fontaines dans les zones
d'influences du projet ; - la réhabilitation d'un bâtiment au sein
de l'école primaire publique d'Akissi-so ; - le reprofilage de dix (10)
kilomètres de voies à Hiré, priorisant les routes
d'Akissi-so; - et l'électrification de 600 à 1000 mètres
dans la zone du projet d'expansion.
Ces protocoles montrent l'entente autour des projets dont
l'objectif est d'améliorer les conditions de vie et de revenus des
populations locales et sont en cela l'expression des besoins de ces
populations. Ces projets dont la durée de vie se prolonge dans le temps
montrent l'apprentissage et le degré de maturité finale de la
population dans la formulation de ces besoins au fur et à mesure des
échanges avec la compagnie minière.
Conclusion du chapitre 9
L'acquisition massive des terres pour l'exploitation
minière et singulièrement pour l'exploitation industrielle de
l'or dans la sous-préfecture de Hiré, y a exacerbé les
conflits fonciers. Les causes de ces conflits sont multiples et portent, entre
autres, sur les désaccords sur les indemnités, la
difficulté de clarification des ayants droit, (propriétaires
coutumiers, allogènes et usagers du sol). Ils portent également
sur la distinction des sites impactés et non impactés qui donne
lieu à un dialogue de mauvaise foi à propos des
indemnités
L'activité minière industrielle a
nécessité de déplacer les campements autour de la mine de
Bonikro. Toutefois, les conditions de relocalisation de ces campements ont
créé des discordes entre les populations et les exploitants
miniers notamment avec la société minière. Ces points de
discorde donnent lieu à des frictions. Aussi différents organes
ont-ils été mis en place pour le règlement de ces
conflits. Parallèlement, les conflits entre la population et la
société minière ont donné naissance à des
initiatives locales à travers la formation de groupes de défense
des droits de la population locale.
283
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE
L'agriculture constitue le principal pilier de
l'économie ivoirienne. C'est un secteur qui emploie et nourrit la grande
partie de la population notamment celle se trouvant dans la
sous-préfecture de Hiré. Les populations tirent l'essentiel de
leurs sources de revenus du travail de la terre, qui du fait du vieillissement
du verger connait déjà une baisse. Cependant, l'ouverture de
l'exploitation minière aggrave cette situation. De nombreux jeunes
exerçant dans l'agriculture se détournent de cette
activité pour se tourner vers les métiers de l'or. Cela entraine
une baisse de la production. Les terres agricoles se font de plus en plus rares
car elles sont cédées pour l'activité aurifère.
Cela contribue à une paupérisation des populations agricoles qui
optent pour une reconversion sur place ou la migration à la recherche de
terres favorables à l'agriculture. L'exploitation minière
entraine également une dégradation de toutes les composantes de
l'environnement (l'eau, le sol et l'air), ce qui affecte non seulement la
production agricole mais également la santé des populations.
L'importance des superficies dédiées à l'exploitation de
l'or et la question du dédommagement des propriétaires et
exploitants de la terre fait ressurgir la question liée au foncier. Des
litiges intra et inter familiaux, inter villages et inter communautaires
explosent autour de la question. Les enjeux liés à leur
contrôle témoignent du caractère extrêmement sensible
de la question foncière dans l'organisation de la société
paysanne. C'est pourquoi, des mécanismes coutumiers et légaux de
gestion de ces conflits sont mis en place.
Cette troisième partie permet ainsi d'atteindre le
troisième objectif de cette thèse à savoir :
déterminer le mécanisme de régulation des rapports entre
l'entreprise minière et les communautés locales dans
l'exploitation aurifère.
284
CONCLUSION GÉNÉRALE
Cette thèse a consisté à
déterminer à travers ses différentes incidences, la
contribution de l'activité aurifère au développement dans
la sous-préfecture de Hiré. Son but était de contribuer
à l'apport de connaissances géographiques sur l'activité
minière en général, ainsi que sur les incidences
spatiales, démographiques, socio-économiques et environnementales
de l'exploitation minière de type aurifère qui se déroule
à Hiré et sa capacité à y impulser le
développement. L'enjeu de cette thèse s'inscrit dans la
particularité du contexte de l'exploitation aurifère dans la
sous-préfecture de Hiré, car elle intervient dans une importante
zone de production agricole où l'importance à la fois culturelle,
sociale et économique de la terre lui accorde un caractère
sacré.
Il s'est agi pour nous de voir si l'exploitation
minière à travers ses différentes incidences permet
à la sous-préfecture de Hiré de connaître un
développement local ou si, au contraire, cette nouvelle activité
implique une fragilisation des acquis, une aggravation des problèmes du
système de production agricole et une dégradation du tissu social
local. Cette conclusion revient sur les différents apports de la
thèse, par rapport aux trois questions spécifiques
déclinant le questionnement général qui vient d'être
rappelé.
Quelle est la reconfiguration spatiale induite par
l'activité minière dans la sous-préfecture de Hiré?
L'ouverture de l'exploitation aurifère dans la sous-préfecture de
Hiré a entrainé un réaménagement dans son
organisation spatiale. Bien que sous forme artisanale l'activité ne soit
pas nouvelle à Hiré, elle connaît depuis l'ouverture de
l'exploitation industrielle, une nouvelle dynamique. Cela se traduit par une
prolifération des sites d'orpaillage dispersés à travers
la sous-préfecture. En effet, la délivrance des permis miniers et
la distribution spatiale de ceux-ci, couplés aux sites d'orpaillage
à profusion, on est face à un premier niveau de changement
spatial. Le deuxième niveau de changement est que ces sites
d'exploitation aurifère se substituent à des activités
préexistantes qui pour la plupart sont des activités agricoles.
Aussi, le relief a-t-il été modifié du fait de l'exercice
même de cette activité aurifère. Par les pratiques de
creusage et d'entreposage, de nouvelles formes de relief apparaissent
composées de cuvettes et de collines artificielles. Il y a
également la délocalisation de trois campements autour de la mine
sur de nouveaux sites entièrement construits par la compagnie
minière. Cette relocalisation a également entrainé une
reconfiguration spatiale avec transformation du type d'habitat.
285
Quels sont les différents changements introduits par
l'exploitation de l'or en rapport avec le cadre de vie à Hiré
?
Dans la sous-préfecture de Hiré,
l'activité aurifère est un facteur de croissance
démographique née de l'attractivité qu'elle
entraîne. Les mouvements migratoires orientés majoritairement vers
la ville de Hiré contribuent à agrandir le marché de
consommation local. On assiste à une multiplication de logements
modernes avec extension de la ville. L'activité minière entraine
en outre, l'essor des activités commerciales et la diversité des
services dans la sous-préfecture. Elle favorise l'émergence d'une
nouvelle élite sociale et contribue, à défaut d'employer
toute la jeunesse en quête d'emploi, au développement humain
à travers le financement des projets et des formations qualifiantes. De
ce point de vue, le projet minier doit être perçu comme un
catalyseur de croissance des activités économiques dans les
localités hôtes.
Quels sont les mécanismes de régulation des
rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales
dans l'exploitation aurifère ?
L'étude des mécanismes de régulation des
rapports entre l'entreprise minière et les communautés locales
dans l'exploitation aurifère à Hiré revient à
montrer la nature des rapports qui se développent entre les acteurs de
l'activité aurifère et les communautés locales. D'une
part, elle contribue à l'aggravation de la fragilisation des
systèmes agricoles. Car, dans un contexte où la population
essentiellement agricole, connaît une baisse de ressource due
principalement au vieillissement du verger, l'activité minière se
présente comme une opportunité. Les jeunes se détournent
de l'agriculture dans l'espoir de trouver des emplois, qui offrent la garantie
de gains financiers plus rapides et plus importants. Ce
désintérêt pour l'agriculture se traduit par l'augmentation
des cas d'abandon du travail de la terre. Les activités minières
exercent également une influence négative sur l'agriculture
à l'échelle locale, à travers la
récupération d'une partie des terres des paysans, comme l'exigent
les besoins des opérations minières. Cela contribue à
réduire les superficies cultivées. La pollution concourt aussi
à cette diminution des quantités de production tout en
influençant les différentes composantes de l'environnement que
sont l'air, l'eau et le sol qui sont essentielles pour l'activité. A
travers la pression foncière qu'elle contribue à accentuer,
l'exploitation minière ravive les conflits fonciers préexistants
et en crée d'autres. Ces conflits sont de tous ordres. Au sein de la
communauté on assiste à des conflits intra familiaux, inter
villages et intercommunautaires. Outre ces conflits, il y a ceux qui opposent
les populations à la compagnie minière. Ce sont des conflits qui
portent généralement sur le dédommagement. Ces conflits
ont donné naissance à
286
des groupes qui s'apparentent à des syndicats et qui
prennent position en faveur des populations. Ces conflits vont jusqu'à
entrainer des procédures judiciaires. Cependant, des mécanismes
de règlement de ces conflits ont été mis en place pour une
meilleure gestion de ceux-ci.
Nous pensons que les ressources minières comme toutes
les activités économiques apportent des mutations diverses
positives et négatives aussi bien à l'échelle nationale
qu'à l'échelle locale. Quant à la capacité de cette
activité à produire le développement minier local, elle
réside dans la somme de ses incidences sur ses différentes
composantes que sont : l'économique, le social, l'environnement et
l'humain. La croissance démographique, l'augmentation du pouvoir
d'achat, le développement des activités commerciales et celui des
services, sont les effets positifs de l'activité minière. Ces
avantages qu'apporte l'activité aurifère à la
sous-préfecture de Hiré, lui permettent de connaître un
rayonnement dans la région du Lôh-djiboua et au-delà.
Toutefois, ces effets positifs sont entravés par la contribution de
l'exploitation minière à l'aggravation de la fragilisation des
systèmes agricoles. Dans un contexte de baisse de la production agricole
due au vieillissement du verger, les paysans ont tendance à
négliger leurs campagnes agricoles dans l'espoir de trouver des emplois
qui offrent la garantie de gains financiers plus rapides et plus importants. Le
constat est que le travail agricole est délaissé par de nombreux
bras valides à la recherche de revenus réguliers plus
consistants. L'importance des superficies autrefois utilisées pour
l'agriculture et désormais dédiées à l'exploitation
aurifère réduit de façon drastique les terres agricoles et
par ricochet, les productions agricoles. A travers la pollution du sol et des
eaux entrainées par l'activité aurifère, les terres
épargnées dans l'occupation sont impropres à l'agriculture
ou les produits qui en sont tirés nuisent à la santé des
populations.
Une autre influence négative est celle de la pression
foncière exercée par l'activité minière. Elle fait
ressurgir les conflits fonciers à travers la remise en cause des accords
passés antérieurement entre communautés, entre villages et
entre individus du fait de la question des indemnisations.
Les emplois dans la compagnie minière et chez ses
sous-traitants sont pourvus à l'échelle nationale et
internationale. La présence de NEWCREST ne permet donc pas de
résoudre durablement le problème de l'emploi des populations de
Hiré. Les formations qualifiantes offertes et financées par la
compagnie minière ne rencontrent pas vraiment l'adhésion des
populations car celles-ci sont focalisées sur les emplois
salariés. Ainsi, les avantages qu'apportent l'exploitation de l'or dans
la sous-préfecture de Hiré sont moindres comparés aux
287
effets pervers qu'elle engendre. Les efforts de
développement local entrepris par la compagnie minière à
travers l'élaboration et la mise en oeuvre du PDL s'en trouvent
annulés.
Cette thèse permet de mettre en lumière le poids
des différents impacts de l'exploitation minière sur la
sous-préfecture de Hiré. Elle permet de comprendre que le non
développement local minier de Hiré n'est pas que le fait de
l'insuffisance ou de l'impertinence des actions communautaires. Mais il est
aussi lié aux influences négatives de l'activité sur
l'agriculture, l'environnement et le foncier. Ces effets pervers étant
indissociables de cette activité, toutes les actions de
développement communautaires ne peuvent permettre d'atteindre le
développement local tant espéré.
Le développement local minier à Hiré est
contrarié parce qu'il n'y a pas de cohérence entre les
différents objectifs des acteurs (dans leur quête de
développement). Il y a une sorte de confrontation entre les objectifs de
développement et les actions posées par les acteurs en
présence. Les différents éléments du système
inter agissent les uns avec les autres.
Aussi pensons-nous que les effets pervers de l'activité
minière pourraient être atténués afin de permettre
aux communautés locales de tirer parti de la richesse de leur sous-sol.
C'est le lieu de s'interroger sur les études d'impact environnementales
menées avant la signature des permis d'exploitation. Sont-elles
menées de façon transparente ? Ne permettent-elles pas de
déterminer au préalable ces incidences sur les communautés
locales et notamment, dans les zones agricoles ? L'exploitation minière
dans les localités agricoles est-elle opportune ? Comment
intégrer les de façon efficace les communautés locales
dans l'élaboration et la mise en oeuvre des programmes de
développement local ?
288
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299
ANNEXES
300
TABLE DES MATIERES
SOMMAIRE 2
AVANT-PROPOS 4
REMERCIEMENTS 5
SIGLES ET ABRÉVIATIONS 7
LISTE DES TABLEAUX 10
LISTE DES FIGURES 12
LISTES DES PHOTOS 14
I.INTRODUCTION GENERALE 15
I.1. Justification du choix du sujet 15
I.2. Présentation de la zone d'étude 16
II. REVUE DE LITTERATURE 18
II.1. La définition des concepts 18
II.1.1. Les principes du développement local 18
II.1.2. L'exploitation minière 20
II.1.2.1. L'exploitation minière artisanale 20
II.1.2.2. L'exploitation minière industrielle 21
II.1.3 La méthode d'exploitation minière 22
II.2. Historique et importance de l'exploitation
minière 23
II.2.1. Historique de l'exploitation minière 23
II.2.2. Importance de l'exploitation minière dans
l'économie 25
II.2.3. Comparaison mine-agriculture 25
II.3. Les impacts de l'exploitation minière 26
II.3.1. Les impacts économiques de l'exploitation
minière 26
II.3.2. Les impacts de l'exploitation minière sur
l'environnement 27
II.3.3. La contribution de l'exploitation minière
à la reconfiguration spatiale 30
Conclusion de la revue de littérature 31
III. PROBLEMATIQUE 33
IV. OBJECTIFS DE RECHERCHE 35
IV.1. Objectif général 35
IV.2. Objectifs spécifiques 35
V. METHODOLOGIE DE RECHERCHE 36
301
V.1. Cadre théorique : le développement local et
l'économie de l'or comme un système socio
spatial 36
V. 2. Définition des variables de recherche 38
V.2.1. Variables descriptives de la structure spatiale des formes
d'activité aurifère 38
V.2.1.1. Variables descriptives de la localisation des sites
d'extraction et de traitement
aurifère 39
V.2.1.2. Variables descriptives de l'activité d'orpaillage
39
V.2.1.3. Variables descriptives de l'activité
minière industrielle 39
V.2.2 Variables relatives aux changements apportés par
l'exploitation de l'or en rapport avec
le cadre de vie 40 V.2.2.1 Variables descriptives de l'apport
de l'activité de l'or en termes d'emplois et revenus
40
V.2.2.2. Revenus des coopérants agricoles provenant des
orpailleurs 41
V.2.2.3 Variables des investissements locaux des employés
miniers et des orpailleurs 41
V.2.2.4 Variables descriptives des activités
économiques indirectes générés par l'extraction
de
l'or 41
V.2.2.5 Variables descriptives des équipements locaux
générés par l'extraction minière 41
V.2.3 Variables descriptives des effets négatifs de
l'exploitation minière 42
V.2.3.1 Variables descriptives des effets économiques
négatifs des déguerpissements miniers
sur les populations 42
V.2.3.2 Effets économiques négatifs des orpailleurs
sur les sites 43
V.2.3.3. Variables descriptives des effets indésirables
sur l'environnement 43
V.3. Les unités d'observation 43
V.3.1 Les sites d'exploitation industrielle de l'or 43
V.3.2 Les sites d'exploitation artisanale de l'or 43
V.3.3 Les exploitations agricoles 43
V.3.4 La ville de Hiré 44
V.3.5 Les villages de la sous-préfecture 44
V.4. Les acteurs cibles de l'étude 46
V.4.1 Les entreprises dans l'exploitation de l'or 46
V.4.2 Les agriculteurs 46
V.4.3. Les acteurs économiques urbains 46
V.4.4. Les administrations et les pouvoirs institués de
gestion du développement 46
V.5. Méthodes de collecte des données 47
302
V.5. 1. La recherche documentaire 47
V.5.2. La préenquête 48
V.5.3. L'observation directe du terrain 49
V.5.4. Les entretiens semi directifs 49
V.5.5. Les focus group 50
V.5.6. Les relevés GPS 51
V.5.7. L'acquisition des données satellitaires 51
VI. Techniques de traitement des données 52
VI.1. Traitement et analyse des données qualitatives
et quantitatives 52
VI.2. Traitement et analyse des relevés GPS 52
VI.3. Traitement et analyse des images satellites 52
VII. Les difficultés rencontrées 56
VII.1. Les obstacles liés à l'accès aux
informations 56
VII.2. Les obstacles liés à l'administration du
questionnaire aux acteurs 57
PREMIERE PARTIE : LA DISTRIBUTION SPATIALE DES
ACTIVITES
AURIFERES DANS LA SOUS-PREFECTURE DE HIRE
62
INTRODUCTION A LA PARTIE 62
CHAPITRE 1 : DISTRIBUTION SPATIALE DES SITES MINIERS DE HIRE
63
INTRODUCTION AU CHAPITRE 63
1.1. HIRE : UNE RICHESSE GEOLOGIQUE ET HISTORIQUE 63
1.1.1. Une géologie favorable à la formation de
minerai aurifère 63
1.1.2. Historique de l'activité minière dans la
sous-préfecture d'Hiré 67
1.2. UN ESPACE LOCAL OCCUPE PAR LES ORPAILLEURS 67
1.2.1. Des sites d'orpaillage dispersés dans des
plantations et des jachères 68
1.2.1.1. Le site d'orpaillage d'Assayé ou Doum 68
1.2.1.2. Le site d'orpaillage de Djangobo 69
1.2.1.3. Le site d'orpaillage sur la zone 1 du terroir de
Bouakako 69
1.2.1.4. Les orpailleurs dans la zone 2 du terroir de Bouakako
71
1.2.2. Les sites d'orpaillage sur les périmètres
de la société minière 71
1.2.2.1. Les sites d'Akissi-so 72
1.2.2.2. Le site d'Assonguisso secteur 21 sur l'axe
Hiré-Zégo 72
1.3. LES SITES DE L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE L'OR 75
1.3.1 Les conditions d'obtention d'un titre minier en
Côte d'Ivoire 75
1.3.2 Les titres miniers dans la sous-préfecture de
Hiré 76
303
1.3.3. Les sites occupés par l'activité
aurifère industrielle 79
1.3.3.1 Le site de Bonikro 81
1.3.3.2 Le site de Hiré Est 81
1.3.3.3. Le site de Dougbafla en pays Gouro 82
Conclusion du chapitre 1 84
CHAPITRE 2 : LA PRATIQUE DE L'EXPLOITATION MINIERE DANS
L'ESPACE
LOCAL DE HIRE 85
INTRODUCTION AU CHAPITRE 85
2.1. LES FORMES DE L'EXPLOITATION ARTISANALE DE L'OR A HIRE
85
2.1.1 Le processus d'identification et de négociation
des terres pour l'orpaillage 85
2.1.1.1 La recherche des sites d'exploitation pour
l'orpaillage 85
2.1.1.2. L'orpaillage et le contrat de concession avec les
propriétaires terriens 85
2.1.2 Les différentes étapes dans la
chaîne de production artisanale de l'or 87
2.1.2.1 Le déblaiement du site 87
2.1.2.2. L'étape de l'extraction du minerai 87
2.1.2.3 L'exploitation des filons 88
2.1.2.3 Le raffinage dans l'orpaillage 91
2.1.3 Le profil sociodémographique des orpailleurs
92
2.1.3.1 Un orpaillage dominé par les acteurs masculins
jeunes et de 30 ans 92
2.1.3.2 Des orpailleurs composés en grande partie
d'étrangers 93
2.1.3.3 Répartition des orpailleurs selon l'origine
socio-professionnelle 93
2.1.3.4. Répartition des orpailleurs selon leur poids
dans l'activité 94
2.2. L'EXPLOITATION INDUSTRIELLE DE L'OR 95
2.2.1. Une succession de concessionnaires à l'oeuvre
à Hiré 95
2.2.2. Des terres d'exploitation concédées par
l'Etat 96
2.2.3. Les différents cas de compensation 97
2.2.4. Les exigences de compensation de la Banque mondiale
97
2.2.5 La compensation pour occupation de parcelles 98
2.2.6. La compensation pour destruction de cultures 99
2.2.7. La compensation pour destruction de biens immobiliers
99
2.2.7.1. La délimitation globale de la zone
concernée par les compensations 100
2.2.7.2. Le recensement des communautés et des
personnes 100
2.2.7.3. La Délimitation des propriétés
100
2.2.7.4. Inventaire et comptage des plants 100
304
2.2.7.5. Le paiement des compensations 101
Conclusion chapitre 2 101
CHAPITRE 3 : LA RECOMPOSITION DE L'ESPACE DE
HIRÉ 102
INTRODUCTION AU CHAPITRE 102
3.1. LES MUTATIONS DANS L'OCCUPATION DU SOL DE LA
SOUS-PRÉFECTURE
DE HIRÉ SUITE AUX ACTIVITÉS AURIFÈRES
102
3.1.1. Le suivi multi dates de l'occupation du sol 102
3.1.2 Les causes des mutations dans l'occupation du sol 108
3.1.3 La Destruction des sites de plantation et des
forêts par les orpailleurs 109
3.2. LES AMÉLIORATIONS DE L'HABITAT DANS LE CADRE DES
OPÉRATIONS DE
DÉPLACEMENT ORGANISÉES PAR L'ENTREPRISE
MINIÈRE 110
3.2.1 Les délocalisations des sites habités par
la compagnie minière 110
3.2.2. La relocalisation de Bonikro 111
3.2.3 La relocalisation de Bandamakro 113
3.2.4 La relocalisation de Koutouklou-Konankro 115
3.2.5. Les critères de compensation et leurs
conséquences 117
3.2.5.1. Eligibilité aux logements neufs de
compensations 117
3.2.5.2. Eligibilité aux compensations en cash 117
3.2.5.3. Eligibilité pour compensation
d'activités économiques 118
3.2.5.4. Eligibilité aux compensations : maison en
ruine et ossature 118
3.3. EVALUATION DES COMPENSATIONS PAR LA VALEUR VENALE DU
PATRIMOINE ELIGIBLE 118
3.3.1. Définition de l'algorithme d'allocation des
logements et des structures connexes 118
3.3.2. Majoration du type de maison selon la superficie
119
Conclusion du chapitre 3 119
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE 120
DEUXIEME PARTIE : UN ESPACE LOCAL EN PLEINE MUTATION
SOCIO
ECONOMIQUE 121
INTRODUCTON A LA PARTIE 121
CHAPITRE 4 : CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET
DYNAMIQUE URBAINE À
HIRÉ 122
INTRODUCTION AU CHAPITRE 122
4.1 HISTORIQUE DE PEUPLEMENT DE LA SOUS-PREFECTURE DE HIRE
122
4.1.1 Les villages Watta, une géographie motivée
par les conflits 122
305
4.1.1.1. Hiré dida 122
4.1.1.2. Bouakako 123
4.1.1.3. Gogobro et Kagbé : deux villages, une histoire
123
4.1.1.4. Zaroko 124
4.1.1.5. Douaville 124
4.1.2. La migration Baoulé à Hiré 125
4.2. EVOLUTION DE LA POPULATION DE LA SOUS-PREFECTURE DE HIRE
127
4.2.1 Une croissance démographique
accélérée par la redécouverte de l'or et
l'arrivée massive
d'orpailleurs 127
4.2.2. Une population diversifiée 129
4.2.2.1. Les Dida Watta, une population autochtone minoritaire
sur ses propres terres 130
4.2.2.2. Une population allochtone majoritaire et
diversifiée 131
4.2.3 Une population majoritairement jeune 132
4.2.4. Une population à dominante masculine 133
4.3 LA STRUCTURE DE LA POPULATION DE HIRE 135
4.3.1 La répartition de la population selon
l'activité 135
4.3.2. Une population en pleine reconversion professionnelle
136
4.4. HIRE, UNE URBANISATION BOOSTEE PAR L'EXPLOITATION MINIERE
138
4.4.1. Une concentration démographique dans la ville de
Hiré 138
4.4.2 La dynamique spatiale de la ville de Hiré 142
4.4.3 Des constructions de plus en plus
améliorées 143
4.4.4. Typologie des espaces habités 144
4.4.5. Le niveau de services et d'équipement de la
ville de Hiré 147
4.4.5.1 Les Infrastructures de base 148
4.4.5.2. Les équipements scolaires et éducatifs
148
4.4.5.3. Les équipements socio-culturels 148
4.4.5.4. Les équipements hôteliers 149
4.4.5.5. Les équipements économiques 150
4.4.5.6. Les équipements de sécurité
151
4.4.5.7. Les équipements administratifs 151
Conclusion du chapitre 4 152
CHAPITRE 5 : LES ACTIONS DE DEVELOPPEMENT DE LA
OMPAGNIE
MINIÈRE 153
5.1. LES ACTIONS SANS PLAN DE DEVELOPPEMENT 153
306
5.1.1. La responsabilité sociale et les fonds
destinés aux populations par EQUIGOL et LGL
153 5.1.2 Méthode d'intervention de la compagnie par
l'approche du jeu des doléances et des
promesses 154
5.2. PRESENTATION DU PROJET MINIER AUX DIFFENTES COMMUNAUTES
157
5.2.1. La prise de connaissance par l'entreprise de
l'architecture socio-spatiale autour de
l'exploitation de l'or 157
5.2.2. Les rencontres intracommunautaires sur le projet minier
158
5.2.3. Une question de préséance autour des
investissements de la compagnie minière 158
5.3. LES DOLEANCES SOUMISES A LA COMPAGNIE MINIERE 159
5.3.1. Un exemple du processus de formulation de doléances
: Gogobro 159
5.3.2 Les doléances des villages Watta : surenchère
ou prise de conscience ! 164
5.3.3 Les doléances des campements autour de la mine
164
5.3.4 Les doléances de l'administration publique locale
164
5.4. CONTRIBUTION DE LA COMPAGNIE MINIERE A LA REALISATION
D'INFRASTRUCTURES ET D'EQUIPEMENTS 165
5.5. LA PLANIFICATION DU DEVELOPPEMENT LOCAL SUR FONDS MINIERS
168
5.5.1 La création d'un Comité de
Développement minier de Hiré 168
5.5.2 L'implication des mutuelles et associations dans la gestion
du développement local 171
5.5.2.1 Les revendications de la MUDH 171
5.5.2.2 La reconnaissance par la société
minière des représentants des communautés
villageoises 172 5.6. LE ROLE DES AUTORITES DECENTRALISEES DE
LA SOUS-PREFECTURE DE
HIRE 174
5.6.1. Le Conseil Régional de Divo 174
5.6.2. Le conseil municipal de Hiré 174
5.6.3 La compagnie minière installée à
Hiré 174
5.6.4. La création d'un fonds de développement
local minier 175
5.6.5 La mise en place d'un document de Plan de
Développement local 176
5.7. LA COOPERATION NEWCREST PNUD POUR LE PLAN STRATEGIQUE DE
DEVELOPPEMENT ET LE PDL DE HIRE DE 2012 A 2015 177
5.7.1 Les réalisations de NEWCREST sur la base du PDL
179
5.7.1.1. Le projet de protection de l'environnement par la
plantation de 5 000 arbres
d'ombrage dans les villages délocalisés autour de
la Mine 180
307
5.7.1.2. Le projet de gestion des ordures
ménagères de la ville de Hiré. 180
5.7.2. Les réalisations pilotées par le CDLM
181
5.8. LES OPPORTUNITES D'EMPLOI OFFERTES PAR LA COMPAGNIE
MINIERE 184
5.8.1. Les emplois à la compagnie minière 185
5.8.2 Les formations qualifiantes financées par la
compagnie minière 186
5.8.3 Les activités génératrices de
revenus financées par NEWCREST 186
Conclusion du chapitre 5 188
CHAPITRE 6 : LES MUTATIONS SOCIALES LIEES A
L'EXPLOITATION DE L'OR
189
INTRODUCTION AU CHAPITRE 189
6.1. L'AGGRAVATION DES INEGALITES SOCIALES 189
6.1.1. La classe paysanne dans l'indigence 189
6.1.2 L'émergence d'une nouvelle élite sociale
à Hiré 189
6.1.2.1 Les indemnisés de NEWCREST 189
6.1.2.2. Les mineurs de Hiré 190
6.2 LES PERTURBATIONS AU SEIN DE LA CELLULE FAMILIALE 191
6.2.1 Les conflits entre parents et enfants 191
6.2.2 Les conflits d'autorité entre mari et femme
192
6.3. L'EMERGENCE DE NOUVEAUX COMPORTEMENTS SOCIAUX 193
6.3.1. La consommation abusive de l'alcool 193
6.3.2 La dépravation des moeurs 194
6.3.3 L'apport de croyances nouvelles 194
Conclusion du chapitre 6 195
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE 195
TROISIEME PARTIE : CONFLITS ET COOPERATIONS
ENTRE
COMMUNAUTES ET COMPAGNIE MINIERE DANS LA LOCALITE DE
HIRE 197
INTRODUCTION A LA PARTIE 197
CHAPITRE 7 : LA DÉGRADATION DE L'ENVIRONNEMENT
PAR
L'EXPLOITATION MINIÈRE 198
INTRODUCTION AU CHAPITRE 198
7.1. DES SOLS DE CULTURES DEGRADES PAR L'ACTIVITE 198
7.1.1. Outils et techniques d'extraction 198
7.1.2. Les méthodes et techniques de traitement
industriel du minerai 200
7.1.3 Les produits chimiques dans le traitement industriel du
minerai 200
308
7.1.4 La modification du relief local 201
7.1.5. Les atteintes au sol 202
7.2 UNE BIODIVERSITE MENACEE 204
7.2.1 Les forêts 205
7.2.3 Les zones de cultures 206
7.2.4 La menace de l'exploitation minière 206
7.2.5 Destruction des ressources fauniques et floristiques
207
7.3 LES RESSOURCES EN EAU MENACEES 209
7.3.1 La réduction de la disponibilité en eau du
fait de l'exploitation minière 209
7.3.2 Détérioration de la qualité des
eaux de surface et des eaux souterraines 212
7.4 NUISANCES ATMOSPHERIQUES ET SONORES 214
7.4.1 Pollution atmosphérique 215
7.4.2. Les nuisances sonores et vibrations 216
7.5 LES DIFFERENTS ACCIDENTS ENVIRONNEMENTAUX A HIRE 218
7.5.1. La rupture des digues du cours d'eau 218
7.5.2 La rupture des tuyaux d'acheminement des eaux
cyanurées 220
7.5.3 Les conflits dus aux accidents et problèmes
environnementaux 220
7.6 L'ACTIVITE MINIERE ET LES FAIBLESSES DANS L'OBSERVATION
DES
MESURES DE PROTECTION 222
7.6.1 Les structures étatiques chargées de
l'environnement 222
7.6.2. Le débat autour de la présence de cyanure
dans la nature à Hiré 222
7.7. LA SANTE DES POPULATIONS, FRAGILISEE PAR L'ACTIVITE
MINIERE 223
7.7.1. Impact des nuisances sur la santé des mineurs
223
7.7.2. Impact des nuisances sur la santé des
populations riveraines 224
Conclusion du chapitre 7 227
CHAPITRE 8 : RÉCESSION AGRICOLE DANS LE CANTON
WATTA 228
INTRODUCTION AU CHAPITRE 228
8.1 UNE ACTIVITE AGRICOLE CONTRARIEE PAR L'EXPLOITATION DE
L'OR 228
8.1.1 Des terres agricoles prises par la mine 228
8.1.2 L'éloignement des sites de relocalisation des
champs 230
8.1.3 L'exploitation de l'or : une menace grave sur
l'activité agricole à Hiré. 230
8.1.4. La destruction des plantations et des champs par les
orpailleurs 231
8.2 LA BAISSE DE LA POPULATION AGRICOLE 232
8.2.1 Des paysans à la recherche de terre d'accueil
232
309
8.2.2 Des agriculteurs convertis en exploitants d'or 233
8.3. DES PERTES DE PRODUCTIONS AGRICOLES 235
8.3.1 Baisse de la production des cultures pérennes
235
8.3.2.1 Du cacaoyer vieillissant à moins de 450 kg par
ha 236
8.3.2.2 Le palmier à huile et l'hévéa au
secours des paysans 237
8.3.2 Une production vivrière en perte de vitesse
238
8.4 LA BAISSE DE LA PRODUCTION AGRICOLE, ENTRE AVANTAGES ET
INCONVENIENTS 241
8.4.1 La paupérisation de la population agricole 241
8.4.2 La baisse de la production vivrière locale, un
prétexte pour la surenchère des prix sur le
marché urbain 244
8.4.3 La menace de l'insécurité alimentaire
245
Conclusion du chapitre 8 248
CHAPITRE 9 : LES CONFLITS FONCIERS EXACERBÉS PAR
L'EXPLOITATION
DE L'OR 249
INTRODUCTION AU CHAPITRE 249
9.1 LES DESACCORDS SUR LES INDEMNITES 249
9.1.1 Les indemnisations selon l'Etat 249
9.1.2 Les indemnités selon les populations 250
9.1.2.1 Le refus des barèmes des indemnités
portant sur les cultures vivrières. 251
9.1.2.2 Le refus des taux d'indemnisation des plantations de
café et de cacao. 251
9.1.2.3 La non prise en compte de l'indemnisation du sol
251
9.1.2.4 Le scandale des jachères 252
9.2 LA CLARIFICATION DES AYANTS DROITS : PROPRIETAIRES
COUTUMIERS,
ALLOGENES ET USAGERS DU SOL 252
9.2.1 La géographie des maîtres coutumiers du sol
dans la région de Hiré 252
9.2.1.1 Bouakako et Hiré, deux villages autochtones en
conflit autour de la propriété
coutumière du sol des gisements dans la ville de
Hiré 252
9.2.1.2 Gogobro et Kagbè : propriétaires
coutumiers du sol de Bonikro 253
9.2.1.3 Zaroko : une communauté Dida réclamant
sa part des retombées minières 254
9.2.1.5 Douaville, un village Watta en marge de l'exploitation
aurifère 254
9.2.2 Les allogènes exploitants non
propriétaires de sol 254
9.2.2.1 La difficulté d'identification des
propriétaires terriens et des exploitants 257
9.2.3. Les problèmes intergénérationnels
260
310
9.2.4. La manifestation des conflits entre les
communautés locales 261
9.3. LES SITES IMPACTES ET NON IMPACTES : LE DIALOGUE DE
MAUVAISE FOI
A PROPOS DES INDEMNISATIONS 262
9.3.1 Le cas du campement de Konankro 263
9.3.2 Absence de conflit dans le cas du campement de
Bandamakro 263
9.3.3 Conflit autour de la zone dite du moratoire, de
Hiré Est et des zones impactées 263
9.3.3 Les incertitudes dans la définition des
périmètres miniers 264
9.4. LES MECONTENTEMENTS ISSUS DES RELOCALISATIONS 270
9.4.1 Les mécontents des relogements de Bonikro 270
9.4.2 Les points de revendication des populations de
Koutouklou- Konankro 272
9.5. LES RECOURS A LA VIOLENCE PAR LES DIFFERENTES PARTIES
PRENANTES
273
9.6. LA GESTION DES CONFLITS PAR LA NEGOCIATION 276
9.6.1. L'arbitrage des organes coutumiers de règlement
des conflits 276
9.6.1.1. Le Comité de Gestion Foncière Rurale
(CGFR) 276
9.6.1.2. Le Comité Villageois de Gestion
Foncière Rurale (CVGFR) 277
9.6.2. La gestion assurée par l'administration publique
277
9.6.3. La gestion mise en place à l'initiative de la
compagnie minière privée 278
9.6.4. Nouveaux protocoles et nouvelles promesses de la mine
278
9.6.4.1. Pour le village de Bouakako propriétaire du
sol sur le site du gisement de Hiré 278
9.6.4.2. Pour les propriétaires du sol du village de
Gogobro 281
9.6.4.3. Nouveau protocole et nouvelles promesses de la mine
pour la communauté de Hiré
282
Conclusion du chapitre 9 282
CONCLUSION DE LA TROISIÈME PARTIE 283
CONCLUSION GÉNÉRALE 284
BIBLIOGRAPHIE Erreur ! Signet non
défini.
WEBOGRAPHIE Erreur ! Signet non
défini.
ANNEXES 299
TABLE DES MATIERES 300
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