THE UNIVERSITY OF YAOUNDE I
UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ I
*********** CENTRE DE RECHERCHE ET DE FORMATION
DOCTORALE EN SCIENCES HUMAINES, SOCIALES ET
ÉDUCATIVES ************ UNITÉ DE RECHERCHE ET
DE FORMATION DOCTORALE EN SCIENCES HUMAINES
ET SOCIALES ************** DÉPARTEMENT
DE SOCIOLOGIE
***********
POST GRADUATE SCHOOL FOR THE HUMAN, SOCIAL
AND EDUCATIONAL SCIENCE *********
DOCTORATE RESEARCH UNIT FOR HUMAN AND
SOCIAL SCIENCES *************
DEPARTMENT OF SOCIOLOGY
LE SYSTÈME TONTINIER DANS LE FINANCEMENT
DE
L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL JEUNE
À
YAOUNDÉ : CAS DES ASSOCIATIONS EMERCOM
ET
ADJAS.
Mémoire présenté en vue de
l'obtention du diplôme de Master en sociologie
Spécialité : Urbanité et
ruralité
Par
Jordan Cédric MELI YIMDJI
Licence en Sociologie
MEMBRES DU JURY
PRESIDENT : Armand LEKA ESSOMBA (MC)
EXAMINATEUR : Achille PINGHANE YONTA (CC)
RAPPORTEUR : Henri TEDONGMO TEKO (CC)
Sous la direction de :
Henri TEDONGMO TEKO Maître de
conférences, Université de Yaoundé 1
Mai 2022
DÉDICACE
i
À ma mère KUETE Joseline, mon père YIMDJI
David et mes frères. À la mémoire de mon oncle et homonyme
MELI TCHINDA Bertrand.
ii
REMERCIEMENTS
Nous ne saurons achever ce travail sans toutefois manifester
notre profonde gratitude à l'endroit de tous ceux, qui de près et
de loin nous ont apporté leurs contributions tant matérielle,
intellectuelle que morale à l'élaboration de ce travail de
recherche scientifique. Ces remerciements vont en premier à l'endroit de
notre encadreur académique le Pr Henri TEDONGMO TEKO dont la rigueur
scientifique et l'exigence d'un travail bien fait nous a permis de mener cette
recherche. Les critiques apportées, les remarques, la mise à
notre disposition des ouvrages nécessaires à notre investigation
scientifique ont été d'un apport très
bénéfique, d'où la reconnaissance pour nous de lui
exprimer notre profonde gratitude.
Nos remerciements vont également à l'endroit du
chef de département de sociologie le Pr Armand LEKA ESSOMBA dont le
cours sur la méthodologie de rédaction du mémoire a
été d'un apport substantiel dans la rédaction de ce
travail. Nous exprimons notre gratitude à l'endroit des professeurs
Achille PINGHANE et Yves Bertrand DJOUDA, donc les enseignements
dispensés depuis les années antérieures ont
étés bénéfiques dans notre recherche.
Nous tenons également à exprimer notre profonde
gratitude à l'endroit de madame Marie Perisser MBANGO qui a mis à
notre disposition un capital financier, matériel et intellectuel tout au
long de cette recherche. Un profond remerciement à nos promotionnaires
avec qui nous avons fait chemin ensemble depuis la première année
d'étude et dont les échanges ont marqué notre parcours.
Entre autres Wilfried NGATCHA, Tobie MBANGA, Berline SIGNING, Cédrine
EBWELE, Georgette BEKADA, Raïssa DJOMOUO et François NDAOU.
Nous sommes profondément reconnaissant envers nos
ainés académiques qui ont contribué à enrichir ce
travail à travers leurs conseils et leurs regards critiques notamment
Arouna MFENJOU, Ghislaine LEKASSA et Cédric KENGMO. Nous sommes
particulièrement reconnaissants envers nos proches qui n'ont
cessé de nous encourager moralement, William FONKOU, Christian TCHINDA,
Yvan KENNE, Kelinne DAGHA, Astride KEMEDJO Marguerite NTOLO, Perpétue
NGAH, Alex ATETSOP, Dimitri OMBIONO, Paul BIKOP et Gaëtan MBIAKOP.
Par ailleurs nous remercions infiniment les associations
EMERCOM et ADJAS qui sans la disponibilité de leurs membres ce travail
n'aurait point vu le jour. La générosité des membres et
leurs temps qu'ils nous ont accordé, leurs expériences a
été une source d'inspiration.
iii
SOMMAIRE
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
SOMMAIRE iii
LISTES DES TABLEAUX ET DES IMAGES iv
LISTE DES ANNEXES v
LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES vi
RÉSUMÉ vii
ABSTRACT viii
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
PREMIÈRE PARTIE : SYSTÈME TONTINIER ET
CRÉATION DES RICHESSES 31
CHAPITRE 1 : SOCIOGENÈSE ET ÉMERGENCE DU
SYSTÈME TONTINIER 33
CHAPITRE 2 : LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX
ACTIVITÉS
ÉCONOMIQUES 54
DEUXIÈME PARTIE : LA DYNAMIQUE FINANCIÈRE DU
SYSTÈME TONTINIER ... 77
CHAPITRE 3 : LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES
ACTIVITÉS
ENTREPRENEURIALES AU SEIN DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS 79
CHAPITRE 4 : ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DES
ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS AU DÉVELOPPEMENT DE
L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL 99
CONCLUSION GÉNÉRALE 114
BIBLIOGRAPHIE 120
ANNEXES 129
TABLE DES MATIÈRES 134
iv
LISTES DES TABLEAUX ET DES IMAGES
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Les dimensions de la motivation
entrepreneuriale 61
Tableau 2 : Les indicateurs des secteurs
d'activités au Cameroun en 2021 64
Tableau 3 : Critère de classification des
entreprises au Cameroun 68
Tableau 4 : Illustration des différents
types contributions du système tontinier aux activités
économiques. 75
LISTE DES IMAGES
Image 1 : Livraison de provende à la
nouvelle route Nkolbisson 93
Image 2 : Photo prise à Oyom-Abang au
lieu-dit « quartier Abobo » lors de nos entretiens
de terrain 108
Image 3 : Photo prise à Nkolbisson au
lieu-dit « derrière école publique » lors de
notre
visite de terrain 110
V
LISTE DES ANNEXES
ANNEXE 1 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX ENTREPRENEURS
DE
L'ASSOCIATION 130
ANNEXE 2 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX
MEMBRES DU BUREAU 132
ANNEXE 3 : ATTESTATION DE RECHERCHE 133
LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET
SIGLES
vi
ADJAS : Association des jeunes amis
solidaires
AREC : Association rotative d'épargne
et de crédit
AERC : Association d'épargne rotative
et de crédit
BIT : Bureau international du travail
BM : Banque mondiale
BC-PME : Banque camerounaise des petites et
moyennes entreprises
CRDI : Centre de recherches pour le
développement international
EESI : Enquête sur l'emploi et le
secteur informel
ECAM : Enquête camerounaise
auprès des ménages
EMERCOM : Émergence des
communicateurs
FMI : Fond monétaire international
INS : Institut national de la statistique
MINADER : Ministère de l'agriculture
et du développement rural
MINATD : Ministère de l'administration
territoriale et de la décentralisation
MINEPIA : Ministère de
l'élevage, des pêches et des industries animales
MINFOPRA : Ministère de la fonction
publique et de la réforme administrative
MINJEC : Ministère de la jeunesse et
de l'éducation civique
OCDE : Organisation de coopération et
de développement économique
OIT : Organisation internationale du
travail
PAJER-U : Programme d'appuis aux jeunes
ruraux et urbains
PANEJ : Plan d'action national pour l'emploi
des jeunes.
PED : Pays en développement
PIAASI : Programme intégré
d'appuis aux acteurs du secteur informel
PIB : Produit intérieur brut
PME : Petites et moyennes entreprises
PTJ : Plan triennal spécial-jeune
SJC : Synergie de la jeunesse camerounaise
TPE : Très petites entreprises
vii
RÉSUMÉ
Dans la plupart des pays africains, les petits entrepreneurs
à faibles revenus ont des difficultés d'accès au
crédit bancaire officiel. De ce fait, la recherche
présentée dans le cadre de ce mémoire porte sur l'apport
du système tontinier au financement de l'entrepreneuriat au Cameroun.
Comment les associations EMERCOM et ADJAS contribuent-elles au
développement de l'entrepreneuriat pastoral à travers leur
système tontinier ? Telle est la question qui guide cette recherche.
L'objectif est d'identifier et d'apprécier la contribution du
système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le
développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.
Plusieurs procédés théoriques et méthodologiques
ont été mobilisés pour analyser les modes de
fonctionnement de ce système ainsi que son influence dans le
développement des activités des jeunes entrepreneurs. Sur la base
d'une enquête qualitative réalisée auprès des
entrepreneurs pastoraux de deux associations à savoir EMERCOM et ADJAS,
nous avons identifié et analyser les différents mécanismes
mis sur pieds par ces associations pour favoriser le développement de
l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. Les résultats
montrent à terme que les associations EMERCOM et ADJAS disposent de
nombreux moyens financiers et techniques pour susciter l'esprit
l'entrepreneuriale et stimuler la dynamique entrepreneuriale chez leurs
membres. Malgré que ces ressources financières soient parfois
insuffisantes dans certains cas, ces regroupements associatifs constituent de
véritables leviers pour le financement de l'entrepreneuriat pastoral au
Cameroun en général et dans la ville de Yaoundé en
particulier.
Mots clés : Système tontinier,
financement, entrepreneuriat pastoral, entrepreneuriat jeune,
Yaoundé.
viii
ABSTRACT
In most African countries, low-income entrepreneurs have
difficulties obtaining bank loan. The research presented in this thesis focuses
on the contribution of the tontine system to the financing of entrepreneurship
in Cameroon. How do EMERCOM and ADJAS association through the tontine system
contribute to the development of pastoral entrepreneurship? This is the
question that guides this research. The objective is to identify and appreciate
the contribution of tontine system of EMERCOM and ADJAS association in the
development of pastoral entrepreneurship in Yaoundé. Several theoretical
and methodological processes have been mobilized to analyze the modes of
operation of this system as well as its influence in the development of the
activities of young entrepreneurs. On the basis of a qualitative survey carried
out with the pastoral entrepreneurs of two associations, namely EMERCOM and
ADJAS, we have identified and analyzed the various mechanisms set up by these
associations to promote the development of pastoral entrepreneurship in
Yaoundé. The results ultimately show that the EMERCOM and ADJAS
associations have numerous financial and even technical means to stimulate
entrepreneurial dynamics. Despite the fact that these financial resources are
sometimes insufficient in certain cases, these associative groups constitute
real levers for the financing of entrepreneurship in Cameroon in general and in
the city of Yaounde in particular.
Keywords: Tontine system, financing, pastoral
entrepreneurship, young entrepreneurship, Yaounde.
INTRODUCTION GÉNÉRALE
1
2
1- CONTEXTE ET JUSTIFICATION
L'organisation économique des sociétés
traditionnelles d'autrefois était régie par un système de
don/contre-don, il s'agissait d'un ensemble d'échanges à la fois
réciproque et obligatoire caractérisé par l'absence de la
monnaie. Ce principe consistait pour des communautés voisines à
se partager mutuellement des biens de consommation et des biens de valeur
(Mauss, 1923). En Afrique et au Cameroun en particulier, ce système a
pris naissance dans les sociétés traditionnelles
précoloniales où les paysans s'organisaient en force de travail.
Ils s'entraidaient mutuellement dans le labourage des champs, dans les
récoltes ou encore dans construction et la réparation des maisons
(Nzemen, 1989).
Avec l'arrivée des colons dans les années 1900,
les sociétés africaines passent du système de troc
réciproque à l'utilisation de la monnaie. Dans le but de mieux
réglementer ce nouveau système, de nombreuses institutions
bancaires ont vu le jour dont la première est la banque de l'Afrique
occidentale (1901-1942) (Kemayou & al, 2011). Après les
indépendances, de nombreuses banques nationales verront le jour au
Cameroun. Il s'agit notamment de la société camerounaise de
banque (SCB), la banque PARIBAS Cameroun (BPC), la banque internationale pour
l'Afrique occidentale-Cameroun (BIAO). Ces institutions formelles avaient pour
but de sécuriser l'épargne des individus et d'accorder des
crédits aux potentiels emprunteurs. Devenues élitistes, elles ne
sont ouvertes qu'à une catégorie d'acteurs (fonctionnaires, agent
de l'Etat, agent privé) considérés comme des individus
fiables en termes de solvabilité, pour ce qui est de l'octroi des
crédits. En effet, l'obtention d'un crédit est soumise au respect
de nombreuses conditions imposées par ces structures financières
(Owondi, 1992). Par exemple pour l'obtention d'un crédit immobilier
à la banque société générale Cameroun, le
demandeur doit fournir son compte bancaire, un compte chèque, remplir un
plan de remboursement personnalisé avoir un titre de domiciliation
bancaire (consulté sur :
https://www.societegenerale.cm,
le 02 janvier 2021).
Les exigences en termes d'octroi de crédit se
présentent comme un facteur d'exclusion, voire de marginalisation pour
les agents du secteur informel, qui sont généralement des
populations à faible revenus. De ce fait, ils se trouvent dans
l'incapacité de répondre à toutes les exigences
imposées par ces structures financières (Bekolo-Ebe, 1989). Face
à ces restrictions d'accès aux facilités bancaires, les
populations urbaines et rurales camerounaises exclues de l'accès aux
services bancaires développent des stratégies informelles afin de
palier à cette difficulté. L'une de ces stratégies
consiste au regroupement de ces populations en mouvement associatif dont le
système tontinier (Kemayou et al, 2011,). Selon Djeudja
3
(2012 :105) la tontine peut se définir comme
étant : « une association ou un réseau formé
autour d'un noyau de participants qui mettent régulièrement en
commun des biens pour en redistribuer la somme à tour de rôle
à chacun des membres d'un groupe ou du réseau ». Ces
regroupements à caractère associatif ont pour objectif
l'épargne et le crédit (Lelart, 1990). Elles viennent ainsi se
substituer aux contraintes des banques officielles à travers l'absence
de formalisme, l'absence de contraintes lourdes dans les prêts et la
confiance entre les membres (Hugon, 1996).
Une observation menée autour de notre environnement de
recherche a permis de constater que la majorité des jeunes (92,0%),
faute d'accès aux services formels exercent une activité dans le
secteur informel dont 43,4% sont indépendants (BIT, 2015). Ces jeunes
s'investissent principalement dans les activités agro-pastorales qui
occupent 70% des individus et qui s'imposent comme une valeur sûre et
considérable (Zakari, 2017).
De plus, une étude diagnostic du ministère des
finances camerounais (2013) dans le cadre de l'élaboration d'une
stratégie nationale de microfinance indiquait que les tontines
gèrent et opèrent des transactions à hauteur de 190
milliards de FCFA. Concernant l'ampleur des tontines, le rapport ressort que
58% de la population camerounaise est membre d'une tontine (consulté sur
:
https://www.investiraucameroun.com,
le 04 Janvier 2021).
De tels chiffres qui témoignent de l'ampleur de
l'entrepreneuriat jeune et du phénomène des tontines en contexte
camerounais ont conduit à la formulation du thème :
Le système tontinier dans le financement de
l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé : cas des associations
EMERCOM et ADJAS.
L'intérêt de cette recherche réside dans
le souci de comprendre l'influence du système tontinier dans la pratique
de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. De plus, le choix et les
motivations de ce sujet partent de plusieurs faits.
Sur le plan personnel, tout commence par la proximité
avec le phénomène étudié et par le constat selon
lequel, dans la ville de Yaoundé la finance informelle fait vivre de
nombreuses familles comparativement à la finance formelle à tel
point que 90% de la population active au Cameroun sont insérés
dans ce secteur (D'pola et Kakdeu, 2020). De plus, la question de
l'entrepreneuriat a toujours suscité chez nous un intérêt
particulier. Ainsi, Comprendre pourquoi les jeunes entrepreneurs dans la ville
de Yaoundé font recourt au système tontinier constitue une des
motivations de cette recherche.
Sur le plan scientifique, le choix porté sur ce sujet
se veut une contribution à la thématique du financement de
l'entrepreneuriat, dont l'une des variables est le système
4
tontinier. Ce qui permettra de comprendre à termes les
effets de l'apport de la finance informelle dans la gestion des
activités entrepreneuriales.
Ensuite, l'actualité sur l'entrepreneuriat jeune a
également motivé le choix de ce sujet. Les divers débats
télévisés et organismes de financement notamment le plan
triennal spécial-jeune a suscité l'attention. Les travaux
réalisés autour de la problématique de la tontine en
contexte africain en général et au Cameroun en particulier dans
les spécialités telles que (la science économique et de
gestion, la sociologie ...) relèvent à suffisance l'importance du
système tontinier dans la société.
Ce travail se veut une contribution pour mieux comprendre et
expliquer l'influence du système tontinier dans le développement
de l'entrepreneuriat jeune au Cameroun en général et dans la
ville de Yaoundé en particulier.
2- PROBLÈME DE RECHERCHE
Selon Kassogue (2019 : 1399) « Le problème
décrit une situation dans laquelle il existe une anomalie, un obstacle
qui empêche de progresser, d'avancer ou de réaliser ce que l'on
cherche à résoudre. Cela suscite une question majeure ».
La question du financement de l'entrepreneuriat jeune au Cameroun est
depuis le début des années 2000 au centre des
préoccupations. En effet, l'importance accordée à cette
catégorie d'entrepreneurs s'illustre à travers la synergie de la
jeunesse camerounaise (SJC) qui accorde un intérêt particulier
à l'entrepreneuriat jeune. Une étude menée par l'institut
national de la statistique (INS) en 2015 explique que le Cameroun abrite 5% de
chômeur pour une population d'environ 20million d'habitants avec un taux
de 10,3% chez les jeunes de 15-24ans et un taux de 8,9% chez les jeunes de
15-34ans (Mbilla, 2016). En 2018, une enquête menée par l'INS sur
les obstacles à l'entrepreneuriat au Cameroun relevait que le premier
obstacle à la création d'une entreprise est la fiscalité
qui récolte 53,5% d'opinions. Ensuite les formalités
administratives 34,2%, les problèmes d'accès au financement
30,7%, et la corruption avec une proportion de 18,1% (INS, 2018). Une autre
étude sur l'offre des services financiers au Cameroun par le
ministère des finances (MINFI) en 2018 fait état de ce qu'une
tranche importante des camerounais de plus de 15ans gèrent leur argent
en dehors du circuit bancaire. Ils représentent 37%, soit 5,25 millions
qui sont exclus. En effet, toujours selon la même étude, 71% de
camerounais connaissent des difficultés financières dont 36%
utilisent des mécanismes non formels pour gérer leurs
finances1. Une étude plus récente du plan d'action
national pour l'emploi des jeunes (PANEJ)
1 Consulté sur :
https://www.investiraucameroun.com/index.php/banque/1611-11727,
le 12mars 2020.
5
en 2020 fait ressortir que le taux de chômage en milieu
jeunes a atteint des proportions de 12% (PANEJ, 2016-2020).
Pour pallier à cette situation afin de favoriser un
climat économique favorable et une insertion pour tous, l'Etat
camerounais a mis sur pied de nombreuses structures d'accompagnement financier.
Notamment la création en 2004 du programme intégré
d'appuis aux acteurs du secteur informel (PIASSI) du décret
N°2011/26 du 23 mai 2011 portant « création et mise en oeuvre
du PIAASI ». Ce programme Rattaché au ministère de l'emploi
et de la formation professionnelle (MINFOPRA) a pour objectif de promouvoir
l'entrepreneuriat en milieu jeune, en accompagnant financièrement les
jeunes promoteurs camerounais. La création en 2007 du programme d'appuis
aux jeunes ruraux et urbains (PAJER-U) par le décret N°2011/408 du
09 décembre 2011 portant « mise en oeuvre de l'éducation
civique et élaboration des programmes ». Il s'agit d'un
programme géré par le ministère de la jeunesse et de
l'éducation civique (MINJEC) et financé par les fonds de
l'initiative « Pays pauvre très endetté » dans
le cadre de la coopération entre le Cameroun et la France qui accompagne
financièrement et matériellement les jeunes désirant
réaliser des projets aux finalités économiques et
s'auto-employer. L'État camerounais a mis sur pieds en 2015 dans la
ville de Yaoundé la banque camerounaise des petites et moyennes
entreprises (BC-PME) à travers la loi N°2020/018 du 17
décembre 2020 portant « loi de financement de la
république du Cameroun pour la banque camerounaise des petites et
moyennes entreprises ». Elle a pour principal mission de fournir des
capitaux aux potentiels individus désirant créer une affaire ou
augmenter la rentabilité de leurs entreprises.
Par ailleurs, il a été mis sur pied en 2017 le
plan triennal spécial jeunes (PTJ) par le décret
N°2017/0467/PM 08 février 2017 portant création et mise en
oeuvre du « plan triennal spécial jeunes » sous très
haute instruction du président de la république. Un programme
crée dans le but de booster l'insertion des jeunes sur toute
l'étendue du territoire national dans les domaines tels que
l'agro-industriel, l'élevage et l'économie numérique.
Dès lors, malgré ces efforts en matière d'accompagnement
financier mis sur pied par l'Etat, l'on constate que l'accès au
financement pose toujours problème. Il faut dire que la présence
de ces nombreux programmes ne facilite pas l'accès au crédit. Ces
structures sont très réticentes dans les critères
d'accès aux crédits et accordent des prêts à
compte-gouttes. Par ailleurs, leurs systèmes de procédures
formelles d'accès aux fonds ne correspondent pas avec le niveau de vie
des populations à faibles revenus.
Ce travail pose le problème des difficultés
d'accès au financement officiel par les jeunes entrepreneurs à
faibles revenus. C'est dans l'optique de comprendre l'influence des
mécanismes
6
mis sur pieds par les couches sociales à faible revenus
pour s'assurer l'inclusion financière que cette recherche s'enracine.
3- PROBLÉMATIQUE
Pour Karsenti et Savoie-zajc (2018, P.377), «
l'élaboration d'une problématique de recherche consiste
essentiellement à sélectionner et à mettre en ordre, selon
une perspective déterminée, des éléments qui
composeront la situation problématique et l'objet d'étude ».
Voilà pourquoi N'da (2015) considère la revue de
littérature comme « un texte ordonné, structuré
qui fait l'état des lieux, l'état du niveau actuel des
connaissances relatives au problème à l'étude dans un
espace cognitif ».
La question de la monnaie, de la valeur, des associations de
la société civile, du marché et de la place de l'Etat dans
le financement ont longtemps fait un objet d'étude pour de nombreuses
disciplines dont les premiers travaux s'inscrivent en science
économique. À partir des années 1890, les premières
réflexions sociologiques sur l'économie verront le jour sous le
nom de « sociologie économique » (Levesque, 2006).
Cette branche de la sociologie considère l'activité
économique comme étant une dimension de l'activité
sociale, en d'autres termes, le fait économique est une composante du
fait social (Steiner et Vatin, 2013). C'est d'ailleurs bien ainsi que les
fondateurs de la sociologie avaient considéré l'activité
économique au moment où ils réfléchissaient
à la constitution d'une science systémique du social. En effet,
dans « les règles de la méthode sociologique »
Durkheim (1893) étudiant le fait social montre explicitement que le
fait économique est une dimension à part entière du fait
social en vertu du caractère coercitif qu'il exerce sur l'individu.
À cet effet, l'activité économique comme toute
activité sociale prend donc des formes qui préexistent à
l'action de l'individu, et suivant la formule consacrée s'impose
à lui (Durkheim cité par Steiner et Vatin, 2013). C'est dans
cette logique que s'inscrit notre réflexion sur «
le système tontinier dans le financement de
l'entrepreneuriat pastoral jeune », qui se veut une
contribution à la thématique du financement de
l'entrepreneuriat.
Cette recherche ouvre de nouvelles perspectives à la
compréhension et à l'explication des mécanismes informels
d'accès aux ressources. Elle s'appuie sur les travaux qui ont
contribué à poser les bases de cette branche de la sociologie.
Ces travaux précurseurs seront présentés suivant une
perspective disciplinaire dont la particularité est de faire le tour des
différentes disciplines des sciences sociales ayant fait l'objet
d'étude de la question. De même,
7
elle permet de situer son thème dans une approche
pluridisciplinaire pour mieux se positionner par rapport aux travaux
antérieurs.
Deux principales disciplines ont été retenues
pour la construction de cette problématique à savoir : la
sociologie économique et la science économique.
Ø La sociologie économique
Les recherches menées par les précurseurs tels
que Mauss (1924), Polanyi (1983), Caillé (2007), etc., se sont
intéressées à la nature des échanges, leurs formes
et leurs motivations au sein des sociétés traditionnelles et
modernes. Mauss (1924), dans une étude comparative sur les modes de
fonctionnement des sociétés archaïques, à partir des
sociétés mélanésiennes, polynésiennes et
amérindiennes, découvre dans ces sociétés une forme
d'échange à la fois libre et obligatoire qu'il qualifie de
don/contre-don. C'est-à-dire une prestation obligeant mutuellement
donneur et receveur dans une logique économique et qui de fait les unit
par une forme de contrat social, reposant à la fois sur trois
obligations : donner, recevoir et rendre. L'auteur explique que le
don/contre-don n'est pas totalement gratuit. En effet, ce système
d'échange contraint la personne qui a reçu à rendre
à son tour. Il précise également que ces systèmes
du don échangés sont des faits sociaux totaux,
c'est-à-dire qu'ils mettent en branle la totalité de la
société et de ses institutions. Ce qui permet de renforcer les
liens sociaux entre individus dans une économie non-monétaire.
À la suite des travaux de Mauss, Polanyi (1983) met en
avant la réciprocité comme un véritable fondement possible
de l'économie. À partir de la théorie de l'encastrement,
il considère que les relations sociales sont préexistantes aux
relations économiques. De ce fait, l'action économique est
encastrée au sein des réseaux de relations qui mettent les
individus en contact les uns avec les autres. Selon lui, une logique
économique n'est pas seulement basée sur l'utilitarisme, elle
peut aussi se fonder sur la réciprocité. Une
réciprocité dans laquelle le contre-don est en même temps
libre et obligatoire. Il est libre, car ce n'est pas une obligation
contractuelle et obligatoire du fait qu'il y'a une incitation sociale à
rendre à d'autres dans un système qui favorise les
échanges réciproques. L'auteur précise en dernier lieu que
le don/contre don met aussi en rapport les pouvoirs et les désirs de
reconnaissances, et la liberté et la non-garantie de retour permettant
de caractériser le don/contre-don des autres formes
d'échanges.
Allant dans le même sens, Caillé (2007)
s'intéresse à la permanence du don dans les
sociétés contemporaines. À partir de la théorie
anti-utilitariste, l'auteur explique que le don continu à jouer un
rôle essentiel au sein des sociétés contemporaines. Il
différencie ainsi le
8
don/contre-don dans la sociabilité primaire qui
renvoie aux relations avec les parents, amies, voisins et dans la
sociabilité secondaire qui renvoie à l'équilibre dans les
différentes sphères sociales. Il considère alors que les
liens sociaux dans les sociétés contemporaines sont en fait moins
basés sur l'utilitarisme que sur le don, lequel permet d'exister et
d'appartenir à un monde. En guise de conclusion, l'auteur mentionne que
le don/contre-don permet de créer et d'entretenir les liens sociaux
entre les individus au sein de la micro société et de la
société globale.
Le point commun de ces travaux était de rechercher
dans la tradition sociologique de quoi alimenter un renouvellement de la
théorie de l'échange marchand. Les auteurs de ce courant informel
se classent volontiers parmi les hétérodoxes. Leur
démarche se présente comme une tentative, pour contourner
complètement la problématique de la coordination des actions
interindividuelles par le marché.
Les recherches effectuées par (Alain, 2012 ; Kemayou,
2011 ; Henry, 1991) ont étudié l'aspect de la question dans les
sociétés modernes caractérisées par la
monétarisation des échanges.
Dans une approche anthropologique, à partir d'une
relecture de Mauss, Alain (2012) propose une autre interprétation du
phénomène du don comme modèle central de la circulation
des biens et des richesses dans les sociétés de type
communautaires. En effet, l'auteur explique que le don est un marché
qui, unit de manière durable des partenaires par des liens de dettes
à plus ou moins long terme. En ce sens, le don s'inscrit dans une
logique de durée où créancier et débiteur
s'échangent les rôles constamment. Ainsi, le don fait du donataire
un obligé tenu de la reconnaissance qui est d'abord reconnaissance de
dette, où dans certaines sociétés l'absence de retour est
renforcée par un arsenal de sanctions sociales. À partir des
recherches menées en Afrique de l'Ouest notamment en Côte d'ivoire
et au Mali, il ressort que l'omniprésence du don s'explique par
l'incapacité pour l'Etat d'assurer son rôle d'Etat-providence. En
dernière analyse, Alain ressort que ce système de marché
de don à la fois généreux, libre, contraignant
témoigne des aspirations citoyennes à favoriser un système
où chaque couche sociale ne se sente pas délaissé.
Dans une approche sociologique, Henry et al. (1991) ont
abordé la question des associations dites de tontines en partant de leur
origine, leur mode de fonctionnement et leur statut en contexte camerounais.
Dans un premier temps, ils analysent les modes de fonctionnement de ces
associations afin de comprendre les raisons de leur émergence au
Cameroun. À partir d'une enquête de terrain menée
auprès d'une quinzaine de tontines dans la ville de Yaoundé et de
Douala, entre autres des fonctionnaires, des commerçants, et des
chefs
9
d'entreprises, ils aboutissent aux résultats selon
lesquels la tontine africaine est un véritable moyen d'inclusion
financière en période de difficulté. Ils relèvent
également que ces associations représentent des outils
d'épargne nécessaire et dont la disparition n'est pas une
réalité envisageable.
Kemayou et al. (2011) quant à eux se sont
intéressés au devenir de la pratique des tontines dans
l'économie camerounaise. À partir de la théorie des jeux
d'Olson, ils établissent une comparaison entre le système des
tontines et le système des banques et ressortent plusieurs analyses.
Dans le premier cas, ils relèvent que les acteurs agissent de
manière collective parce que caractérisés par des
intérêts collectifs, tandis que dans le système bancaire
les acteurs agissent de manière individuelle et sont attirés
uniquement par l'accumulation du gain. Par ailleurs, ils montrent que le
système des tontines existe dans les sociétés
camerounaises bien avant les indépendances et que ces systèmes de
financement sont profondément ancrés dans les moeurs des
camerounais qui se sentent mieux à l'intérieur par rapport aux
banques. Ils mentionnent également que la vitalité du
système tontinier au regard de la finance formelle nécessite une
meilleure restructuration de ce secteur.
Bien que ces travaux ressortent les
spécificités de la finance informelle à l'instar des
tontines, ils se sont uniquement focalisés sur les l'importance de ces
regroupements associatifs. Ils ont ainsi omis de présenter les
différents types de capitaux mobilisés au sein de ses
associations informelles. Or, les différents services offerts par ces
regroupements constituent généralement le premier facteur
motivationnel à l'adhésion des individus. Cette remarque permet
d'aborder le second volet de notre revue de littérature qui porte sur
les écrits sur la finance informelle et l'entrepreneuriat en science
économique.
Ø La science économique
En science économique, de nombreux auteurs et experts
de la finance informelle se sont appesantis sur les réseaux informels
d'épargne et de crédit en Afrique. Leurs travaux ont
relevé divers aspects de ces pratiques dans la vie économique,
sociale et culturelle des différents acteurs qui y recourent.
Dans une recherche menée dans la région de
l'Ouest-Cameroun, l'économiste et statisticien Nzeumen (1989)
s'intéresse à la place de la pratique des tontines dans le
financement du développement des sociétés traditionnelles.
À partir d'une enquête de terrain menée dans des villages
de l'ouest Cameroun auprès des populations traditionnelles, il
relève que les mécanismes de fonctionnement des réseaux
tontiniers stimulent les besoins d'épargne des paysans. En effet il
explique que l'on ne saurait négliger le volume des épargnes
qui
10
transitent dans les tontines du fait de l'importance de leurs
poids qui rend possible le développement dans ces
sociétés. À l'issue de son enquête, il aboutit
à la conclusion selon laquelle les tontines sont des formes
d'organisations développées dans les sociétés
traditionnelles dû au manque de structures de financement formel,
permettant ainsi de mobiliser et réunir leurs ressources
financières nécessaires au financement du développement de
ces sociétés.
Dans un contexte géographique différent, Kamaya
(2010) dans une recherche qui portait sur les mécanismes de financement
en milieu rural, présente la tontine comme l'unique voir la seule voie
pouvant conduire le peuple « Bas-Congo » vers le changement des
conditions de misères totales. En effet, à travers des recherches
menées auprès de quelques villageois qui pratiquent les tontines,
il constate que la pratique des tontines par le peuple « Bas-Congo »
leur permet de surmonter certaines difficultés de la vie quotidienne. Il
émet ainsi l'idée selon laquelle elles sont des véritables
moteurs de l'économie provinciale permettant aux populations de
satisfaire leurs besoins vitaux, de se procurer les bons outils agricoles et
d'améliorer les rendements de leurs plantations.
Dans une autre approche plus large, Edimo (1998) quant
à lui s'intéresse à l'émergence et à la
place qu'occupe la tontine dans le développement des pays en Afrique. A
partir de la théorie du dualisme financier et l'unification
financière, il met en relief les éléments explicatifs de
la résistance de la finance informelle à côté de la
finance formelle. Il explique de ce fait que ces pratiques financières
viennent se substituer aux défaillances des banques grâce à
leur souplesse et à l'absence des lourdeurs dans l'accord des
crédits. En guise de conclusion de ses travaux, il relève que les
plans d'ajustement et les politiques d'accompagnement financières
initiés dans les pays en voie de développement ne permettent pas
de promouvoir la dynamique entrepreneuriale des petites entreprises.
Néanmoins, il précise que les tontines peuvent constituer des
filons importants pour la définition de structures adaptées de
financement de l'activité économique en Afrique.
Dans une approche différente, Bekolo-Ebe (1989) analyse
le comportement d'épargne et de détention de liquidité
dans les associations de tontines. Dans un premier temps, il analyse le
caractère extraverti des tontines en Afrique et explique que ces
regroupements sont répandus dans la plupart des économies
africaines et particulièrement au Cameroun tant par les entreprises du
secteur informel que du secteur formel. Dans un second temps, il fait une
analyse du comportement des individus dans les groupes d'épargne afin de
comprendre pourquoi la majeure partie des habitants du Cameroun se livre aux
tontines. Pour ce faire, il procède à une analyse des typologies
de tontines et leurs modes de fonctionnement afin de saisir le
11
comportement des individus à chaque niveau. À
l'issue de cette analyse, il aboutit aux résultats selon lesquelles le
comportement d'épargne dans les tontines est un comportement rationnel
déterminé par la tradition sociale c'est-à-dire les
interactions et les expériences entre les membres. En guise de
conclusion, il relève que la recherche effrénée du gain
permet de comprendre la nature concurrentielle des rapports entre le
système des tontines et le système financier officiel. Il ajoute
également la préférence que les agents tendent à
ressentir pour le premier par rapport au second s'explique par leurs souplesses
et l'absence de conditions trop strictes dans les opérations de
crédits.
La question de l'importance de la finance informelle sur la
performance entrepreneuriale des petites entreprises au Cameroun est
analysée par Rozos et Gauthier (2012). À travers des observations
sur le secteur manufacturier dans la ville de Douala, ils constatent que le
système tontinier permet de combler les défaillances du
marché formel, d'avoir accès à des ressources
financières et de combler le flux de trésoreries de certaines
entreprises au Cameroun. Ils expliquent également que les réseaux
de financement informel influencent positivement les performances
entrepreneuriales en termes de productivité et d'investissement par
employé du fait de leur simplicité dans l'accord des ressources
financières.
Les recherches conduites par Lelart (1990) en Afrique de
l'ouest et en Asie, par Hugon (1996) en Afrique subsaharienne et par Tombola
(2010) en côte d'ivoire se sont par ailleurs, intéressées
aux représentations sociales autour des tontines. Lelart (1990)
s'intéresse au dysfonctionnement du système financier face aux
exigences du développement et à la forte montée en
puissance de l'informalisation des circuits financiers. À travers des
études menées en Afrique en passant par le Bénin, le
Niger, le Sénégal et en Asie à travers la Chine et Taiwan
l'auteur analyse les mécanismes de fonctionnement de ces pratiques et
leurs modalités d'accès au crédit. À l'issue de
nombreux entretiens auprès des membres de tontines africaines et
asiatiques, il constate que la dynamique de ces circuits financiers informels
repose sur des formes très anciennes et semble avoir étés
stimulés par les dysfonctionnements des circuits financiers officiels.
En dernière analyse, l'auteur explique que la finance informelle
pourrait être la voie d'accès à la modernité des
pays sous-développés ou en voie de développement.
Dans le même sens, Hugon (1996) s'intéresse au
dysfonctionnement du système financier officiel en analysant la relation
entre les secteurs financiers institutionnels et informels. Il réaffirme
l'importance des systèmes financiers informels comme complément
des systèmes financiers officiels (les tontines, les banques des
pauvres, les associations villageoises...) et leur rôle non
négligeable dans les économies industrielles. À partir de
la théorie de la répression financière, il explique
l'idée selon laquelle le développement de la
12
finance informelle s'explique par des blocages de la finance
institutionnelle dont la crise économique des années 80 a
favorisé la montée. En dernière analyse, il propose
plusieurs pistes pour une meilleure régulation du marché
financier, entre autres promouvoir les réseaux mutualistes
d'épargne et de crédit et de favoriser l'investissement local de
l'épargne à travers le développement des produits
adaptés. Par ailleurs, il recommande d'établir des liens entre
les pratiques informelles et les organisations afin de réduire
l'exclusion des populations à faibles revenus des systèmes
bancaires. Toutefois, les considérations selon lesquelles la fusion du
secteur financier officiel et informel permettrait de stabiliser le
marché financier ne semblent pas encore être une
réalité, du fait de la distance socioculturelle qui existe entre
les deux systèmes de financement.
En côte d'ivoire, Tombola (2010) dans une recherche qui
portait sur la place des associations informelles d'épargne et de
crédit en milieu urbain explique que dans la plupart des pays africains,
une bonne partie des activités entrepreneuriales se déroule dans
le secteur informel. Il souligne le rôle non négligeable des
tontines tant en milieu rural qu'en milieu urbain, en effet à travers
des entretiens auprès des habitants de la ville de GOMA, il explique que
71% des enquêtés ont estimés que la tontine est efficace du
fait qu'elle est proche de ses membres qui se connaissent bien, ainsi la
pression sociale les amènes à investir des fonds pour le
développement. Il relève par ailleurs que ces structures
apparaissent aujourd'hui indispensables eu égard à leur
contribution dans la mobilisation de l'épargne et la distribution du
crédit pour les couches à revenus modestes. En somme, il note que
ces associations suscitent des espoirs réels dans une
société où les structures financières modernes
répondent encore imparfaitement aux besoins de la grande majorité
de la population.
Abordant la question sous un angle différent, Nkakleu
(2009) s'intéresse à l'influence de la tontine dans le
développement du capital intra-organisationnel en Afrique en
général et au Cameroun en particulier. Il commence par
présenter le rôle de la tontine d'entreprise qui est une pratique
informelle de solidarités financières et de lien social qui
contribue à la création du capital-social intra-organisationnel
en contexte social camerounais. Ensuite, à partir d'une enquête
exploratoire par étude de cas, auprès de deux entreprises
appartenant au secteur formel, il obtient ainsi les résultats selon
lesquels la tontine d'entreprise constitue un levier d'organisation du travail,
de gestion des équipes de travail et d'implication organisationnelle. Il
note également que la tontine d'entreprise constitue un réseau
social générant le capital-social, et se présente comme un
cercle vertueux de réalisation des objectifs individuels et
organisationnels.
13
Par ailleurs, Kazadi et al. (2021) dans une recherche plus
récente qui avait pour objectif d'analyser la place du système
financier informel dans la ville de Mbujimayi au Congo, présentent la
tontine comme un outil de financement nécessaire pour le
développement économique. A partir d'une enquête
quantitative par strate auprès de 178 personnes membres des tontines,
ils aboutissent aux résultats généraux selon lesquels les
fonds obtenus à l'issue d'une cotisation sont utilisés pour des
petits investissements, pour payer la scolarité de leurs enfants ou pour
augmenter leur capital d'affaire. Ils relèvent ainsi que ces pratiques
sont d'une grande importance dans la vie socio-économique de la
population. En effet, elles prennent en charge les agents économiques
exclus des circuits financiers par le système bancaire en leur offrant
des services à caractère bancaire, dont les agents
économiques profitent pour développer leurs activités et
mener à bout leurs projets. En dernier lieu, ils notent que les
pratiques financières informelles sont un remède pour les
personnes exclues du système financier classique dans la ville de
Mbujimayi.
Ces travaux certes pertinents se sont limités à
étudier le recours aux associations d'épargne et de crédit
pour le financement des activités économiques sans toutefois
mettre en exergue le rôle du réseau associatif dans
l'accompagnement de l'entrepreneur. Il importe de se pencher sur la question de
l'accompagnement en entrepreneuriat afin de mieux saisir le rôle du
réseau ou du groupe dans la découverte des
opportunités.
Par ailleurs les auteurs tels que (Sammut, 2015 ; Nkakleu,
2018 et Djoumessi, 2017) ont mis un intérêt particulier sur la
place de l'accompagnement entrepreneurial par les réseaux associatifs
dans les entreprises en cours d'existence ou en phase de démarrage.
Sammut (2015) s'intéresse aux liens et relations externes que tisse
l'entrepreneur dans le développement de son opportunité. De ce
fait, elle appréhende l'accompagnement comme une pratique d'aide
à la création d'entreprise fondée sur une relation qui
s'étend dans la durée entre l'entrepreneur et une personne
externe au projet. Elle relève que l'accompagnement permet au porteur de
projet d'acquérir des connaissances, des savoirs faires et des
expériences nécessaires à la concrétisation de son
projet. Par ailleurs, elle souligne le rôle du réseau
interpersonnel de l'entrepreneur (amis, voisins, collègues,
réseaux associatifs) dans l'évolution du projet et qui se
présente comme des personnes ayant des compétences dans le
domaine entrepreneurial du porteur de projet. En dernière analyse, elle
relève que la dimension interpersonnelle est un véritable moteur
d'impulsion de dynamique entrepreneuriale.
À la suite de cette dernière, Djoumessi (2017)
explore la problématique du financement des petites entreprises en phase
de démarrage détenues par les femmes ainsi que les diverses
structures d'accompagnement entrepreneuriales existantes au Cameroun.
S'appuyant sur des
14
entretiens auprès de 56 entrepreneures camerounaises,
elle essaye de comprendre comment les entrepreneures font appel aux structures
de financement informelles dans le contexte camerounais. Les résultats
obtenus à l'issue des entretiens révèlent que les
entrepreneures camerounaises n'ont pas recours aux structures formelles
d'accompagnement à causes des garanties exigées. Les
résultats révèlent également que les structures
d'accompagnement informelles sont les plus privilégiées par les
entrepreneures et jouent un rôle indispensable dans le
développement des entreprises. Elle distingue ainsi comme structures
d'accompagnement informelle la famille qui joue un premier rôle, suivie
des amies, du réseau relationnel de proximité qui procurent un
soutien financier et enfin les associations telles que les tontines qui
permettent d'avoir des facilités d'emprunt. En dernière analyse,
elle relève que les exigences du système économique en
place ne favorisent pas une inclusion financière pour toutes les
catégories sociales. De même, elle ajoute que le recours aux
réseaux d'accompagnement informels par les petites entrepreneures leur
permet de combler des difficultés liées à l'exercice de
leur activité.
Par ailleurs, Nkakleu (2018) souligne l'importance des
structures d'accompagnement pour les entrepreneurs potentiels dans la
réalisation de leur projet d'entreprendre. Sur la base de quelques
enquêtes de terrains menées dans les villes de Yaoundé et
de Douala au Cameroun et de Saint-Louis et Dakar au Sénégal,
auprès d'une dizaine de structures d'accompagnement et de responsable de
petites entreprises, il essaye de comprendre le fonctionnement des structures
d'accompagnement. Les résultats obtenus soulèvent que
l'accompagnement souffre d'un problème de qualité de prestation
d'accompagnement et d'insuffisance de structures d'accompagnement publiques et
privées. Il explique également que certains porteurs de projets
ont souvent recourt au financement informel telles que les tontines, les aides
familiales, les groupes d'amies et les réseaux ethniques tels que les
Bamilékés au Cameroun et les Mourides au Sénégal
qui sont des véritables moteurs d'impulsion de la dynamique
entrepreneuriale. En dernière analyse, il montre que l'accompagnement
est un levier du développement des entreprises du fait qu'il met en
relation d'aide l'accompagnant et l'accompagné.
Au regard de ce qui précède, le travail
d'exploration laisse voir l'importance de l'investigation de ces auteurs dont
l'objectif était de présenter l'influence du réseau
associatif dans le développement des activités et dans la
découverte des opportunités entrepreneuriales. Cependant, il
convient de noter que ces recherches sur le système tontinier et
l'entrepreneuriat ont été plus effectuées dans le domaine
des sciences économiques à travers les questions d'accès
au crédit de financement, de marché financier et d'exclusion
financière. De plus, ces travaux soutiennent que la pauvreté et
la recherche de gains financiers aisés sont les principaux facteurs
15
qui favorisent le recours des entrepreneurs à faible
revenus au système tontinier, sans toutefois interroger les
différents mécanismes mobilisés par cette catégorie
d'entrepreneurs pour le développement de leurs activités
économiques. Par ailleurs, la plupart de ces recherches ont
été effectuées dans un environnement socio-culturel et
spatio-temporel différent du nôtre, d'où la
nécessité d'effectuer une mise en contexte tant spatiale que
culturelle. Il est également important de noter que, la majorité
des écrits sur la finance informelle en rapport avec l'entrepreneuriat
sont peu abordés en sociologie. Ce constat nous donne ainsi la
possibilité d'apporter notre modeste contribution à la
thématique du financement de l'entrepreneuriat à partir d'une
approche sociologique.
À partir du moment où le système
tontinier et l'accès aux finances sont appréhendés et
vécus diversement d'une culture à une autre, il est question en
s'appuyant sur les travaux antérieurs, d'orienter cette recherche sur le
rapport entre le système tontinier et le développement de
l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé. Par la suite, il sera
question d'identifier et d'analyser les différents mécanismes
financiers mobilisés par les entrepreneurs au sein des associations
EMERCOM et ADJAS en vue de promouvoir leurs activités
entrepreneuriales.
En orientant cette recherche vers le rapport entre le
système tontinier et l'entrepreneuriat jeune, il s'agira d'abord de
comprendre comment les mécanismes d'accès aux ressources
financières sont organisés au sein de ces regroupements
associatifs. Par la suite, il sera question de comprendre l'influence de ces
mécanismes de financement au sein des activités des membres.
4- QUESTION DE RECHERCHE
Le présent travail s'articule autour d'une question de
recherche principale déclinée en trois questions de recherches
secondaires.
4-1- Question de recherche principale
Comment les associations EMERCOM et ADJAS contribuent-elles au
développement de l'entrepreneuriat pastoral à travers leur
système tontinier ?
4-2- Questions de recherche secondaires
QRS1- Quels sont les modes d'organisation des
associations EMERCOM et ADJAS ?
16
QRS2- Comment l'accès au crédit et
l'accompagnement entrepreneurial sont-ils organisés au sein des
associations EMERCOM et ADJAS ?
QRS3- Quels sont les effets de la contribution des
associations EMERCOM et ADJAS dans les activités entrepreneuriales des
jeunes entrepreneurs ?
5- HYPOTHÈSE DE RECHERCHE
Selon Quivy et Campenhoudt, (2006 : 126) l'hypothèse
est une « proposition provisoire, une présomption, qui demande
à être vérifiée » elle met en relation le
phénomène a étudié « système
tontinier » et les concepts capables d'en rendre comptes «
entrepreneuriat pastoral ». C'est elle qui oriente et qui guide
le chercheur dans son travail. Ainsi une hypothèse principale a
été formulée et démembrée en 3
hypothèses secondaires.
5-1- Hypothèse de recherche principale
Les associations EMERCOM et ADJAS contribuent au
développement de l'entrepreneuriat pastoral en accordant des
crédits et en accompagnant leurs membres dans la réalisation
d'activités entrepreneuriales.
5-2- Hypothèses de recherche secondaires
HRS1- Les associations EMERCOM et ADJAS dans la ville de
Yaoundé sont structurés autour d'une organisation
hiérarchique régie par un ensemble de règles qui assure
leur pérennité.
HRS2- L'accès au crédit et l'accompagnement
entrepreneurial au sein des associations EMERCOM et ADJAS sont régis par
un ensemble de dispositions statutaires et des mécanismes
pédagogiques.
HRS3- La contribution des associations EMERCOM et ADJAS a
pour effet de susciter l'esprit entrepreneurial et de stimuler la dynamique
entrepreneuriale chez leurs membres.
D'après Kassogue et al (2017 : 139), « les
objectifs sont un peu comme les nerfs dans la problématique ils doivent
décliner clairement ce que l'on entend faire de façon
précise, de plus
6- OBJECTIFS DE RECHERCHE
17
ils doivent avoir une connexion étroite avec la
question de recherche ». Les objectifs de recherche indiquent
l'intention de l'étude, les objectifs, l'idée principale. Cette
idée principale est issue d'un besoin « le problème de
recherche » et affinée dans les questions spécifiques
« les questions de recherche ». D'où le besoin de
formuler clairement les questions de recherche pour pouvoir faire ressortir
l'idée centrale de ces objectifs de recherche.
6-1- Objectif principal
Identifier et apprécier la contribution du
système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le
développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.
6-2- Objectifs spécifiques
ORS1- Comprendre les modes de fonctionnement des associations
EMERCOM et ADJAS.
ORS2- Identifier et analyser les différents
mécanismes d'accès aux ressources financières et
d'accompagnement entrepreneurial mis sur pied au sein des associations EMERCOM
et ADJAS.
ORS3- Analyser et apprécier les effets de la
contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans les activités
entrepreneuriales des jeunes entrepreneurs membres.
7- CADRAGE THÉORIQUE
En science sociale tout comme en science de gestion, le
chercheur ne choisit pas une théorie sur la base d'un simple hasard. Il
est influencé par les courants de pensées dominants dans son
domaine de recherche. Autrement dit, pour être pertinentes, les approches
choisies doivent faire référence à ce qu'Avenier et
Gavard-Perret (2008) appellent « des visions du monde partagée
par une communauté scientifique ». En d'autres termes, il
s'agit pour le chercheur d'identifier le paradigme dans lequel se
réfèrent les choix théoriques et méthodologiques
qu'il souhaite mobiliser pour expliquer son objet d'étude. Cette section
présente le cadre épistémologique et théorique de
notre recherche.
18
7-1- Cadre épistémologique
Dans le cadre de cette recherche, nous avons fait recours au
paradigme constructiviste qui est de plus en plus mobilisé dans les
recherches en entrepreneuriat. Sur la base d'une analyse qualitative, il
s'agissait pour nous de collecter auprès de notre population cible les
perceptions, et les représentations socialement construites que ces
derniers se font du système tontinier. Autrement dit il était
question de se placer dans une logique de découverte afin d'identifier
et d'apprécier le rapport qui existe entre le système tontinier
et l'entrepreneuriat pastoral Jeune à Yaoundé. En effet, dans une
épistémologie constructiviste, l'objectif n'est pas de
présenter la réalité de manière iconique mais il
est davantage question de comprendre comment les acteurs concernés
interprètent la réalité. En somme, le paradigme
constructiviste a permis de comprendre à terme la contribution du
système tontinier dans la gestion des activités
entrepreneuriales.
7-2- Cadre théorique
Le choix d'une théorie dépend du principe de
pertinence et de motif stratégique. Selon Depelteau, (2000), la
théorie choisie, modifiée ou construite doit être une
construction intellectuelle servant à expliquer des
phénomènes réels. Cette théorie doit pouvoir
expliquer une partie de notre réalité et paraitre la meilleure ou
la plus adéquate pour investiguer, expliquer et comprendre son objet
d'étude. Dans le cadre de ce travail, trois théories ont
été mobilisée, elles ont permis de comprendre, expliquer
et interpréter le phénomène étudié à
savoir le système tontinier. Il s'agit plus précisément de
la théorie représentations sociales, la théorie des
réseaux sociaux et la théorie du don/contre-don.
7-2-1- La théorie des représentations
sociales
Le concept de représentations sociales apparait pour la
première fois en sciences sociales dans les travaux du sociologue
français Durkheim (1912) qui étudiait les mentalités
archaïques, les mythes et les représentations religieuses et
magiques des sociétés traditionnelles. Ce dernier faisait une
distinction entre « représentations collectives » et
« représentations individuelles ». Pour lui, la
conscience individuelle n'existe qu'à travers la conscience
collective.
À la suite de Durkheim, les représentations
sociales vont être théorisées par les travaux du
psychologue Moscovici (1961) à qui reviendra le mérite d'avoir
élaboré cette théorie. En s'inspirant des travaux de
Durkheim, il définissait les représentations sociales dans une
approche constructiviste comme étant des formes de savoirs naïfs
destinées à organiser les
19
conduites et orienter les communications. Dans cette
définition, il met en exergue trois dimensions des
représentations sociales à savoir l'attitude, l'information et le
champ de représentations. Obéissant à des processus de
mutations et d'évolution dans le cadre des interactions sociales
quotidiennes qui se situe au niveau de la société et des groupes
sociaux. Pour Moscovici, la perception de la réalité sociale
dépend ainsi donc des interprétations que les membres de la
société en font.
Les représentations sociales sont d'après
Jodelet (1984 : 361), « une forme de connaissance spécifique de
savoir et de sens commun, dont les contenus manifestent l'opération de
processus génératifs et fonctionnels socialement marqués
». Il s'agit donc d'une forme de connaissance socialement
élaborée et partagée ayant une visée pratique
à la construction d'une réalité commune à un
ensemble social qui oriente et organise les conduites sociales. Il s'agit plus
précisément d'un savoir naturel que l'individu reçoit par
le biais de la communication, la culture, la religion, la tradition. Par
ailleurs, Wagner (1994 : 199) définit les représentations
sociales pour sa part comme : « un ensemble de croyances, d'images de
métaphores et de symboles collectivement partagés par un groupe,
une communauté, une société ou une culture ».
Autrement-dit se sont des modalités de connaissances permettant à
chaque groupe une appropriation du monde extérieur. En somme, la
théorie des représentations sociales permet de mieux comprendre
les individus et les groupes en analysant la façon dont ils se
représentent eux-mêmes les autres et le monde.
Dans le cadre de cette recherche sur le système
tontinier et l'entrepreneuriat pastoral, cette théorie a permis de mieux
cerner l'image ou les perceptions que se font les entrepreneurs des
associations EMERCOM et ADJAS sur la finance informelle. Ensuite, à
partir des entretiens de terrain, elle a permis de saisir le rapport qui existe
entre le système tontinier et le développement de
l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé.
7-2-2- La théorie des réseaux sociaux
La sociologie des réseaux s'est essentiellement
affirmée dans le monde anglo-saxon sous l'influence de trois
écoles. Notamment la sociométrie apparue dans les années
1930 sous l'influence du psychologue Moreno (1934) qui étudiait les
relations au sein des groupes. Ensuite sous l'influence de l'école de
Harvard dans les années 1950 avec White (1969) qui insistait sur la
cohésion des groupes et sur le rôle intégrateur joué
par les sous-groupes appelés cliques. Et enfin l'influence des
anthropologues de l'école de Manchester avec Barnes (1954) qui combinait
sociologie et sociométrie. Il fut le premier à introduire la
notion de « réseaux » en science sociale et le
définissait comme un ensemble de relation informelle entre individus
20
(amitié, interconnaissances, parenté). Il fut
à cet effet considéré comme le précurseur de cette
théorie. La théorie des réseaux sociaux est une
théorie de moyenne portée qui a fait l'objet de nombreux
travaux.
Grannoveter (1973) va apporter des formalisations à
cette théorie. En effet, il introduit la notion de « liens
faibles » en insistant sur la force de ces liens pour saisir la
dynamique des actions individuelles ou l'organisation des communautés.
Il conçoit ainsi les interactions sociales en termes de noeuds et de
liens dans lesquels les noeuds sont habituellement les acteurs sociaux dans le
réseau, les liens quant à eux représentent les
interactions ou les relations entre ces noeuds. Par la suite, il montre comment
l'existence de plusieurs types de liens entre les noeuds peut former des
structures et renforcer le capital social des acteurs. En somme avec
Grannoveter, l'action individuelle est influencée par la structure des
réseaux, la densité des liens et le cloisonnement des liens entre
réseaux sociaux.
La théorie des réseaux va être
théorisé par Burt (1992) à la suite de Grannoveter, dans
l'optique d'établir une passerelle entre les réseaux complets et
les réseaux personnels. Il introduit ainsi le concept de « trou
structurel » en insistant sur la notion de « confiance ». Il
explique que la performance d'un groupe est supérieure quand celui-ci
est dense (forte coordination entre les membres du groupe) et lié
à de nombreux trous structuraux à l'extérieur du groupe.
Ainsi, l'individu est situé à l'intersection des trous
structuraux, c'est-à-dire de réseaux de contacts qui font
l'intermédiaire entre les différents réseaux, en
construisant des ponts entre des trous structuraux pour davantage
développer des opportunités d'affaires.
Dans le cadre du présent travail de recherche, la
théorie des réseaux sociaux a permis d'identifier l'influence des
AERC dans les activités entrepreneuriales des
bénéficiaires. De plus, sur la base des données de
terrains cette théorie a permis d'analyser la contribution du
système tontinier aux initiatives entrepreneuriales jeune.
7-2-3- La théorie du Don/contre-don
La théorie du don/contre-don a fait l'objet de
plusieurs travaux dont les premières analyses en sciences sociales
furent ceux de Mauss (1924). Il appréhendait ainsi le don/contre-don
comme une forme de contrat social inscrit dans une logique économique et
basé sur la réciprocité pour appartenir à une
société.
Dans une étude comparative sur l'organisation des
sociétés mélanésiennes, il découvre le
don/contre-don comme un contrat fondateur des liens sociaux : « une
prestation obligeant mutuellement donneur et receveur et qui de fait les unis
dans une forme de contrat social » (Mauss, 1924 : 21). Pour
Mauss, le don/contre-don est une forme de partenariat qui regroupe
21
en interaction et de manière durable des individus
autour de trois objectifs (donner, recevoir et rendre). Il s'agit donc
d'échanges réciproques et surtout symboliques autour de biens et
de services et qui de fait renforcent la cohésion du groupe.
Polanyi (2007) quant à lui met en exergue la
réciprocité comme véritable fondement de
l'économie. Il considère que les relations sociales sont
préexistantes aux relations économiques : l'action
économique est de ce fait encastrée au sein des réseaux de
relations qui placent en contact les individus les uns avec les autres. En
effet, une logique économique n'est pas seulement basée sur
l'utilitarisme, elle peut se fonder aussi sur la réciprocité. En
somme, pour Polanyi, le don/contre-don met en exergue le rapport des pouvoirs
et des désirs. Lesquels en constituent d'ailleurs une première
contrepartie : le donneur est plus fort par le don qu'il a fait, à la
fois sur le plan social et affectif.
Caillé (2007) pour sa part dans son analyse montre que
le don/contre-don permet d'appartenir à une société. Il
différencie le don/contre-don dans la sociabilité primaire (les
relations avec les parents, amis, voisins) et dans la sociabilité
secondaire (l'équilibre entre les différentes sphères
sociales). On peut alors considérer que les liens sociaux dans les
sociétés contemporaines sont en fait moins basés sur
l'utilitarisme (satisfaction des besoins matériels) que sur le don,
lequel permet d'exister et d'appartenir à un monde. Il définit le
don/contre-don comme : toute action ou prestation effectuée sans
attente, garantie ou certitude de retour, et comportant de ce seul fait une
dimension de gratuité. Selon Alter (2010), le contre don est en
même temps libre et obligatoire : libre parce que ce n'est pas une
obligation contractuelle, et obligatoire parce qu'il y a une incitation sociale
à rendre le don à d'autres dans un système qui favorise
les échanges réciproques. En effet, si les uns et les autres
acceptent de continuer à coopérer malgré tout dans les
organisations, c'est parce qu'ils participent à une oeuvre commune et
qu'ils souhaitent y contribuer. L'idée selon laquelle le cycle du
don/contre-don engage un endettement mutuel explique bien la coopération
qui existe entre la contrainte et le contrat. Ainsi, le donneur à de la
valeur dans le fait de savoir donner et le receveur a le privilège de
savoir recevoir et le devoir de savoir rendre également à son
tour.
Dans le cadre du présent travail de recherche, la
théorie du don/contre-don a permis d'étudier les modes
d'organisation du système tontinier à Yaoundé à
partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS. De plus à partir des
interviews de terrains auprès des associations cibles, elle a permis
d'analyser les différents mécanismes d'accès au
crédit mis sur pied dans ces associations.
La mobilisation de ces trois théories a donc permis
à terme d'identifier non seulement la nature des différents
services financiers et techniques initiés au sein de ces deux
associations.
22
Mais également, de cerner l'influence de la pratique
tontinière dans les activités entrepreneuriales des membres. Ce
qui à aider par la suite à dégager le rapport qui existe
entre le système tontinier et l'entrepreneuriat pastoral à
Yaoundé. C'est dans cette perspective que cette réflexion a
été inscrite.
8- CADRE MÉTHODOLOGIQUE
Pour produire un travail véritablement scientifique et
efficace, toute recherche exige une certaine méthodologie, une
opération intellectuelle de traitement des données relatives
à une réalité sociale étudiée en fonction
d'un objectif précis.
8-1- Techniques et outils de collecte des
données
La méthode qualitative s'avère
particulièrement pertinente pour approcher les objets d'étude
individuels ou sociaux dans leurs aspects temporels. Elle permet
également de comprendre la réalité non seulement à
travers des évènements historiques, des faits objectifs mais
également par le vécu des individus ou des groupes, leurs
représentations et leurs rationalités. Dans cette optique, une
méthode qualitative est « une succession d'opérations et
de manipulations techniques et intellectuelles qu'un chercheur fait subir
à un objet ou un phénomène humain pour en faire surgir les
significations pour lui-même et les autres hommes » (Muchielli,
1996 : 182). Sa particularité est qu'elle envisage les
phénomènes humains comme des phénomènes de sens qui
peuvent être compris par un effort spécifique, tenant à la
fois à la nature humaine du chercheur et à la nature de ces
phénomènes de sens.
Cette recherche s'inscrit donc dans une perspective
qualitative, dans l'optique de comprendre les effets de la contribution du
système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le
développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.
Nous avons fait recours aux techniques telles que la recherche documentaire,
l'entretien semi-directif et l'observation directe.
8-1-1- La recherche documentaire
La recherche documentaire permet de rassembler la
documentation substantielle sur une question et de disposer du maximum
d'informations utiles dans son domaine de recherche. Les documents
consultés jusque-là, (ouvrages, articles, mémoires, notes
de cours) qui avaient trait à notre thème, ont permis de
recueillir des données et des informations sur la question du
23
système tontinier et l'entrepreneuriat. Dans la suite
de ce travail, elle a permis de collecter des informations importantes sur les
modes d'organisation et de fonctionnement des tontines, à partir de
manuels et divers articles physiques et numériques. Ainsi nous avons pu
mettre à disposition les informations générales sur
l'objet étudier et par ailleurs, de faire un tour d'horizon sur
l'état des questions déjà acquises sur la question de la
finance informelle et de l'entrepreneuriat.
8-1-2- L'entretien semi-directif
L'entretien semi-directif repose sur des échanges
verbaux qui ne sont pas entièrement libres, ni entièrement
dirigé par un grand nombre de questions précises (N'da, 2015). Le
chercheur dispose d'un guide d'entretien relativement ouvert, qui permet de
recueillir les informations nécessaires. Dans ce cas, il ne pose pas
forcément toutes les questions dans la formulation et l'ordre
prévus. Autant que faire se peut, il laisse l'enquêter parler
librement dans les termes et l'ordre qui lui convient. De ce fait, le chercheur
s'efforce juste de recentrer l'entretien sur les objectifs prévus chaque
fois que le sujet s'en écarte. Cette technique a permis de collecter les
données importantes sur le mode d'organisation du système
tontinier, ainsi que sur les différents modes de financement leurs
activités entrepreneuriales des membres.
8-1-3- L'observation directe
Etymologiquement, le verbe observer vient du latin «
observare » qui signifie regarder devant soi, ne pas quitter des
yeux une chose en vue de mieux la connaitre en profondeur. L'observation
directe pour sa part est une technique qui donne la possibilité au
chercheur d'aller directement voir les acteurs en situation et de saisir les
pratiques sociales en temps réel. Selon Durant et Weil (2006 : 422),
« l'observation est un préalable obligé pour construire
une bonne enquête par entretien ou par questionnaire ». En
effet, l'observation mobilise tous les organes de sens du chercheur. Pendant la
phase d'observation, le chercheur est physiquement présent face à
son objet, il le regarde se dérouler, se construire ou se
déconstruire en temps réel. Ainsi, la mobilisation de
l'observation directe dans l'étude sur le système tontinier a
permis de voir et d'apprécier lors de nos enquêtes de terrain les
effets de la pratique du système tontinier dans les entreprises
pastorales des entrepreneurs bénéficiaires.
24
8-1-4- Outil de collecte
Le guide d'entretien est un instrument important dans la
collecte des données sur le terrain. En sciences sociales, il est
quasiment incontournable dans le cadre d'une recherche qualitative. Dans cette
recherche qui se veut qualitative, il se présente comme le principal
instrument de collecte des données sur le terrain. Il a ainsi servi
à collecter les données auprès de notre population cible
dans le cadre de l'entretien semi-directif. La mobilisation des questions
ouvertes et le regroupement des questions par thèmes a ainsi
facilité l'administration du guide d'entretien.
8-2- L'échantillonnage
Dans l'impossibilité d'interroger toute la population
d'étude, il convient très souvent dans la plupart des recherches
en sociologie de constituer un échantillon. Ce dernier étant
selon le dictionnaire de sociologie « un ensemble restreint
d'individus provenant d'une population, qui servent de support à
l'étude que l'on réalise » (Akoun et Ansart, 1999 :
165). C'est un nombre restreint d'individus minutieusement choisis pour
apporter des informations pertinentes sur le sujet de l'enquête.
Nous avons opté dans le cadre de cette recherche pour
un échantillonnage raisonné qui est très utilisé en
recherche qualitative. C'est une procédure d'échantillonnage non
probabiliste consistant à sélectionner des participants
considérés comme typiques de la population cible. Encore
appelé échantillonnage ciblé ou orienté, cette
méthode permet au chercheur de choisir ses unités d'observations
en fonction de certains acquis déterminés par des enquêtes
exploratoires. Par ailleurs, elle exige une grande compétence du
chercheur pour une meilleure diversification des informateurs
recherchés. Il faut dire que dans une recherche qualitative, ce n'est
pas la quantité des informateurs qui importe mais davantage leurs
qualités.
Dans le cadre de ce travail, cette technique a permis d'aller
directement auprès des associations EMERCOM et ADJAS, constituées
des individus qui correspondent à la population d'étude et ainsi
d'obtenir des informations pertinentes sur le sujet étudié.
9- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE
Toute recherche en science sociale nécessite une
circonscription du champ d'analyse afin d'éviter que celui-ci soit trop
large pouvant égarer le chercheur. Pour ce faire, « il ne
suffit pas de savoir quel type de données devrons être
rassemblé. Il faut encore circonscrire le champ
25
des analyses empiriques dans l'espace géographique
et social et dans le temps » (Quivy et Campenhout, 2011 : 147). C'est
pourquoi le soin a été pris de circonscrire cette recherche dans
l'espace géographique et dans l'espace social.
9-1- Délimitation dans l'espace
géographique
Dans l'aspect géographique, la présente
étude a été investiguée dans la ville de
Yaoundé située dans la région du centre, plus
précisément dans le département du Mfoundi. Étant
donné que la ville de Yaoundé est extrêmement vaste, nous
avons opté de mener notre recherche auprès de deux associations
tontinières situées dans l'arrondissement de Yaoundé 7. Le
choix porté sur cet arrondissement se justifie par l'observation d'une
forte mobilisation des jeunes dans cette zone dans les mouvements associatifs,
pour la plupart structurées autour de l'accès aux finances.
Par ailleurs, la possibilité d'accéder aux
données a également motivé ce choix de par le
caractère extraverti de ces populations. Voilà pourquoi le choix
de la spatialité justifie l'étude du présent travail.
9-2- Délimitation dans l'espace social
Cette forme de délimitation du champ d'études
consiste à circonscrire l'objet d'étude et à
déterminer la population cible. Autrement dit, il est question de
sélectionner les individus ou groupes d'individus sociologiquement
représentatifs qu'il faut toucher au moment de l'enquête sur le
terrain.
Pour cette recherche, la population cible a été
constituée de deux (02) associations à l'instar de l'association
EMERCOM et ADJAS. La première association est composée de (10)
membres qui exercent dans l'entrepreneuriat pastoral notamment dans
l'élevage des volailles dont (08) garçons et (02) filles. La
seconde association est constituée de 12 membres essentiellement de sexe
masculin qui exercent dans l'entrepreneuriat des porcins. Le choix de ces deux
associations ne s'est pas fait de façon accidentelle. En effet, il a
été fait à l'issue d'une enquête exploratoire
auprès des éleveurs de ces associations. Les réponses
formulées par ces jeunes entrepreneurs ont suscité une attention
particulière qui cadrait avec l'objectif poursuivie. C'est ce qui
justifie le choix de ces deux associations.
26
10- CLARIFICATION CONCEPTUELLE
La définition des concepts est une étape
indispensable dans toute investigation scientifique. Elle permet au chercheur
d'opérer une rupture épistémologique avec les notions de
sens communs, de délimiter son champ d'étude afin d'éviter
toute confusion et de sombrer dans la sociologie spontanée du
superficiel, en érigeant le langage vulgaire en raisonnement
scientifique.
Dans le cadre de ce travail, ce principe n'a point
été ignoré car il a permis de construire et de comprendre
les concepts opératoires. Ainsi trois principaux concepts ont
été mobilisés à savoir : le système
tontinier, le financement et l'entrepreneuriat pastoral.
Ø Le système Tontinier
L'expression système tontinier est du latin «
systema » qui signifie combinaison, assemblage, système,
organisation et du latin « tont-ti-n'» qui
signifie association, regroupement. Prononcer pour la première fois par
le banquier italien Lorenzo Tonti au XVIIe siècle qui le proposait
à Mazarin. Il décrivait le système tontinier comme des
organisations dans lesquelles chaque souscripteur verse une somme dans un fond
et touche les dividendes du capital investi. Quand un membre meurt, sa part est
repartie entre les survivants et dont le dernier survivant
récupère le capital (Gallais et al. 2018).
Dans les années 70, Bouman (1977) donnait au
système tontinier une appellation plus scientifique : les associations
rotatives d'épargnes et de crédits (AREC). Il s'agissait selon
lui des associations regroupant des membres d'un clan, d'une famille, des
voisins ou des particuliers, qui décident de mettre en commun des biens
ou des services au bénéfice de tout un chacun et cela à
tour de rôle.
Au tournant des années 1990, la question de la finance
informelle fera l'objet de nombreuses études en Afrique, notamment au
Cameroun où elles ont été documentées pour la
première fois par Meyer (Gasse-Hellio, 2000). On les appelle «
djanggis » en région anglophone et « tontine
» en région francophone. Bekolo-Ebe (1991) définissait
ces dernières comme étant un regroupement périodique
d'épargnants fondé sur la recherche du gain financier qui
constitue le centre d'intérêt des participants, et sur la
tradition sociale fondé sur les interactions entre les membres. Dans un
sens plus courant, le système tontinier renvoi à une association
de personnes qui, unies par les liens familiaux, de profession ou de
région se
27
trouvent épisodiquement afin de mettre en commun leur
épargne en vue de financer des projets particuliers ou collectifs (Hedi,
2016).
Partant de ce qui précède, le système
tontinier peut être perçu comme étant : un ensemble
organisé d'individus qui se retrouvent périodiquement pour
coordonner leurs idées et mettre en commun accord leurs capitaux pour
plus tard en récolter des quotes-parts afin de satisfaire des dessins
individuels ou collectifs. Toutefois, il est important de préciser qu'au
Cameroun, « les tontines ne sont ni un système de rente
viagère, ni une association au sens pur du terme » (Kemayou et
al., 2011 : 167). C'est une partie ou un aspect des associations. En effet, au
départ nous avons d'abord une association à caractère
culturelle ou professionnelle, dans laquelle les membres de ladite association
créent un système où chaque participant
bénéficie à tour de rôle de la mise. De ce fait, le
présent travail s'intéresse ainsi aux opérations
d'épargne et de crédit initiées au sein des regroupements
associatifs qui constituent le centre d'intérêt de cette
recherche.
Ø Le financement
Dérivé du mot « finance »
qui lui-même était un dérivé du mot latin
« finis » qui signifiait le « terme
»2. Le mot financement d'après le dictionnaire
Émile Littré (1972) désigne donc une démarche qui
permet à un projet ou une action d'obtenir l'argent nécessaire
à sa réalisation, grâce à la réunion ou
à la levée de fonds d'origines diverses.
D'un point de vue économique, la finance recouvre un
domaine d'activité notamment celui du « financement »
qui consiste à fournir l'argent nécessaire à la
réalisation d'une opération économique. Il s'agit donc
d'une action par laquelle un organisme ou une personne privée alloue des
fonds à un tiers dans l'objectif de soutenir un projet. On peut parler
de financement pour un projet d'achat de bien immobilier, pour une
création d'entreprise, mais aussi pour tout projet associatif ou
culturel nécessitant une levée de fonds.3 Le domaine
du financement concerne aussi bien les individus, les ménages que les
entreprises publiques ou privées, mais aussi les États. Il peut
donc être défini dans trois dimensions.
Concernant les ressources, le financement désigne
l'ensemble des moyens d'obtenir des fonds et de générer des
richesses dans l'investissement tel que l'immobilier, l'exploitation, le
commerce de bien et de services. Concernant la gestion, le financement
désigne la prise de décision concernant les ressources. Par
ailleurs, concernant le capital, le financement désigne l'action qui
permet de réaliser un projet ou de subvenir aux besoins.
2Source :
https://www.linternaute.fr/dictionaire/fr/definition/finance/,
consulté le 24 Mai 2021.
3Source :
https://www.journaldunet.fr/business/dictionnaire-comptable-et-fiscal/1198529-financement-definition-traduction-et-synonymes,
consulté le 24 Mai 2021.
28
Dans le domaine de la finance informelle, le financement peut
donc se résumer comme étant, le fait pour une association de
crédit de prêter une somme d'argent à quelqu'un (un
particulier, une entreprise, une collectivité) afin de lui permettre de
réaliser un projet. À ce niveau, le financement prend alors la
forme d'un crédit ou d'un emprunt.
Ø L'entrepreneuriat pastoral
Dérivé du mot « entrepreneur »
qui date du XIIIe siècle d'abord sous la forme «
entreprendeur » (Académie française, 1635). Il avait
pour sens d'origine (personne qui créer quelque chose, qui agit), qui
lui-même était une dérivation du verbe «
entreprendre » élaboré au XIIe siècle qui
signifiât (attaquer et surtout surprendre). Dérivé du mot
latin « pastoralis » (Littré, 1972) qui signifie
«de berger » c'est-à-dire toute activité
économique fondé sur l'exploitation de grand espaces
(pâturages, espace clos...).
Le dictionnaire L'internaute (2021) définit
l'entrepreneuriat pastoral comme étant une activité
professionnelle en lien avec la pratique de l'élevage, qui consiste
à produire et à vendre les produits obtenus à l'issue de
son effort.
De ce qui précède, l'entrepreneuriat pastoral
peut être appréhendé comme étant une activité
économique de production animale (bovin, porcin, volaille...), en
interaction avec un milieu donné et destiné à satisfaire
un grand marché de consommation.
11- TECHNIQUE D'ANALYSE DES DONNÉES
Les données collectées sur le terrain lors de
nos enquêtes ont été interprétés par la
méthode de l'analyse de contenu. Il s'agit d'une technique de traitement
des données existantes par recensement, classification et quantification
des traits d'un corpus (Bardin, 1997). Elle offre la possibilité de
traiter de manière méthodique les avis et les témoignages
qui comportent un degré de complexité. Cette technique est
très utilisée dans les entretiens semi-directifs pour extraire
les informations en vue de les interpréter. L'usage de cette technique
s'est effectué en trois temps :
Dans un premier temps, il était question de transcrire
les entretiens semi-directifs effectués. Cette phase a consisté
à reproduire en version numérique les entretiens
enregistrés à l'aide du dictaphone.
Ensuite, les informations transcrites ont été
regroupées par thèmes. Il était question de
procéder à un découpage du contenu des différents
entretiens en fonction de leur similitude, c'est-à-dire en fonction des
données ayant le même sens.
29
Enfin, ces informations ont été utilisées
dans l'analyse des relations entre les variables de nos hypothèses,
permettant de comparer les résultats observés avec les
résultats attendus. Cette technique a également permis
d'accéder à travers l'interprétation des discours des
enquêtés à la signification du système tontinier
chez les jeunes entrepreneurs pastoraux à Yaoundé. Par ailleurs,
elle a permis de comprendre comment les entrepreneurs des associations EMERCOM
et ADJAS via leur système tontinier contribuent au développement
de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.
12- PLAN DU TRAVAIL
L'autonomisation socioéconomique des jeunes est
fonction de plusieurs facteurs notamment le capital-financier qui est important
dans la création ou la gestion d'une activité. C'est la raison
pour laquelle cette recherche est centrée sur « Le
système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral
jeune à Yaoundé : cas des associations EMERCOM et ADJAS
».
La première partie porte sur le système
tontinier communément appelé « tontine » qui constitue
le centre de cette réflexion et son rapport à la création
des richesses. Le premier chapitre vise à comprendre la
sociogenèse et l'émergence du système tontinier, question
de s'imprégner sur le parcours historique de ce concept, mais
également les raisons de sa vulgarisation dans le monde et
particulièrement en Afrique. Le deuxième chapitre présente
la contribution du système tontinier aux activités
économiques. Le but étant ici d'apprécier le rôle
des tontines en contexte africain et camerounais en particulier.
La deuxième partie porte sur la dynamique
financière du système tontinier à partir des cas des
associations EMERCOM et ADJAS. Pour se faire elle a été
divisée en deux chapitres, le troisième chapitre porte sur les
mécanismes de financement des activités entrepreneuriales au sein
des associations EMERCOM et ADJAS. Ce qui permet de voir comment l'inclusion
financière est stimulée dans ces associations par rapport aux
structures financières officielles que sont les banques et les
microfinances. En fin, le dernier chapitre, présente une analyse et une
évaluation de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans la
promotion de l'entrepreneuriat pastoral. Le but étant ici
d'apprécier les effets ou l'influence de ses réseaux de
financement informels dans les activités économiques.
30
SYSTÈME TONTINIER ET CRÉATION
DES
PREMIÈRE PARTIE :
RICHESSES
31
32
Le système tontinier est une pratique populaire
d'épargne et de crédit particulièrement répandue en
Afrique tant en milieu urbain que rural. Ce système de transaction
financière qui s'est développé dans les
sociétés traditionnelles d'antan se caractérise sous
plusieurs formes aujourd'hui. Il s'agit entre autres des associations d'amies,
les associations d'anciens camarades de classe, l'association de
collègues... dont une partie des activités est
dédié aux opérations de crédit. Ces pratiques
puisent leur origine dans le passé des sociétés
archaïques régis par la confiance réciproque entre les
membres, la solidarité, l'entraide et le désir de faire valoir
l'héritage reçu (Henry et al., 1991). Cette relation de forte
solidarité entre membres qui repose aujourd'hui sur des transactions
financières favorise la découverte de nouvelles
opportunités entrepreneuriales et la création des richesses.
C'est ainsi que la première partie du présent travail de
recherche se propose de faire une présentation globale sur le
système tontinier, en présentant dans le premier chapitre la
sociogenèse et l'émergence du système tontinier. Il est
question pour de retracer les parcours historiques de ces regroupements
associatifs à travers leurs origines, leurs modes de fonctionnement et
leurs statuts. Dans le deuxième chapitre, il sera question de ressortir
la contribution du système tontinier aux activités
économiques. Il est davantage question dans ce chapitre d'étudier
la nature des apports que le système tontinier propose aux
entrepreneurs.
33
CHAPITRE 1 :
SOCIOGENÈSE ET ÉMERGENCE DU SYSTÈME
TONTINIER
Le système tontinier existe depuis longtemps dans tous
les continents. Il apparait partout sous une figure commune : mettre en commun
les cotisations de chacun et redistribuer à tour de rôle le
capital rassemblé à chaque membre (Lelart, 1991). Dans le but de
mieux cerner le concept « de système tontinier » dans son
ensemble, il serait judicieux de commencer par faire une présentation de
l'origine du phénomène.
1- SOCIOGENÈSE ET ÉVOLUTION DU SYSTÈME
TONTINIER
Le système tontiner existe dans le monde bien avant
l'introduction de la monnaie. Pour Coppens (1987) leur naissance est
liée à la genèse des sociétés humaines
d'Afrique qui se situe autour de deux millions d'années. Il s'agissait
plus précisément d'un système d'échange
réciproque dans les sociétés archaïques africaines
fondé sur un principe que l'on pouvait qualifier de «
don/contre-don » en empruntant le concept de Mauss (1924).
1-1- La sociogenèse du système tontinier
Dans leur forme primitive, les tontines ont concouru à
la mise en commun des denrées alimentaires d'origine agricole et
animale. Selon Nzeumen (1999), le système tontinier dès sa
naissance était régi par les échanges de travaux
productifs nécessitant de la force physique. Autrefois, les paysans
africains avaient instauré un système de travaux collectifs. Ces
travaux étaient régis sur un principe rotatif dans des
tâches telles que la réparation des maisons et le labourage des
champs. Il s'agissait ainsi de regroupements de travail, et dont la force
physique remplaçait la monnaie. Ce n'est que quand la monnaie a
commencé à circuler qu'ils ont constitué des tontines de
monnaie (Gasse-Hellio, 2000).
Des spécialistes de la tontine asiatique tels que
Pairault (1990) et Lelart (1990) se sont penchés sur cette question et
postulent que les premières formes de tontines ont vu le jour au
2ème siècle de notre époque. Ces premières formes
de tontines constituées étaient en fait des
sociétés d'entraides qui n'incluaient pas de notion d'argent,
mais plutôt du service. Les
34
influences bouddhistes et le rôle joué par les
monastères seraient à l'origine de ces tontines avant l'inclusion
de l'argent par les japonais aux alentours de l'an 12754.
1-2- L'émergence du système tontinier dans le
monde
Selon Owondi (1992), l'apparition des premiers écris
qui retrace l'émergence du système tontinier partent de l'Asie
à l'Afrique en passant par l'Europe.
1-2-1- En Asie
Les regroupements tontiniers sont des pratiques très
anciennes dans les sociétés asiatiques. Il y'a plusieurs
siècles dans ces sociétés, les individus se mettait en
groupe, en vue de rassembler des ressources en commun5. L'histoire
remonte à Wang Anshi (1021-1086) un réformateur qui dans le
désir d'alléger les charges des paysans et de lutter contre
l'usure, instaura des prêts d'Etat à intérêt modique
et des offices de prêts sur gages. Malgré cet effort, les paysans
ne purent bénéficier de ces réformes et avait ainsi
inventé les tontines (Lelart, 1990).
v Au japon
D'apparition très lointaine au Japon, les
premières tontines avec argent datent de 1275 (Boutchang, 2019). On les
retrouvait sous l'appellation de « Kou » vers le XIIème et le
XIIIème siècle avec la même structure de base et des
règles restées intacts au fil du temps. De même, on
trouvait des « Kou » dans les régions urbaines et rurales, ils
étaient également populaires dans la société
samouraï (guerrière). Au début du XXème
siècle, leur importance était considérable dans la
société japonaise. En, effet jusqu'à 1910 on
dénombrait 985« kous » dans la ville de Kyoto, 4000 à
Fukushima et plus de 22300 à Hiroshima (Gasse-Hellio, 2000). Ces
regroupements tontiniers avaient pour but non seulement d'apporter un soutien
financier aux membres en fournissant des fonds pour les objectifs à long
termes ; mais également des buts sociaux et religieux avec des fins de
distractions. Néanmoins, les « Kous » ont lentement
commencé à disparaitre vers le milieu du XXème et on ne
trouvait que quelques-unes en milieu rural et dans les zones isolées
(Morice, 1982). Les systèmes des tontines ont aujourd'hui disparu au
japon mais ont dans le passé joué un rôle important dans ce
pays qui possède désormais un système financier
moderne.
4Ces informations ont été recueillies
dans un article de 2012 du Groupe Atlas, portant sur le fonctionnement des
tontines en Afrique, en Asie et dans les pays industrialisés.
http://www.atlas-mag.net/article/les-tontines,
5Ces informations ont été fournies par un article
consulté en ligne le 05 Juin 2021, portant sur l'histoire de la
tontine en Asie.
http://www.tontine8.com/actualite/les-premieres-tontines-sont-asiatiques/.
35
v En Chine
L'apparition du système tontinier en chine est
liée au développement des activités économiques des
monastères bouddhistes. Il s'agirait des activités basées
autour des libéralités dont ils étaient
bénéficiaires et ainsi, naquirent des systèmes de
crédit et surtout des associations d'entraide financière.
L'activité économique de ces monastères en Chine atteint
leur apogée entre le Vème et le IXème siècle. En
effet, selon Lelart (1990) l'expansion des tontines aurait suivi la
pénétration du bouddhisme en Asie venu de l'Inde ainsi bouddhisme
et tontines seraient passés en Chine dès la fin du 1er
siècle de notre ère.
La légende raconte qu'au IXème siècle un
jeune garçon au nom de Lai Maozhai originaire du canton de Xiaoshan
aurait inventé la tontine. Ce garçon issu d'une famille
extrêmement démunie, n'ayant pas d'argent pour poursuivre ses
études supérieures à la capitale et rejeté de tous
à cause de son incapacité à rembourser ses dettes, eu
l'ingénieuse idée de créé une « Hui »
(Pairault, 1990). Il rassembla ainsi parent et voisin afin de mettre en commun
leur capitaux et leur redistribuer par la suite à tour de rôle
à chaque participant.
La chine populaire condamne aujourd'hui encore cette forme
traditionnelle d'entraide du fait qu'elle agit en dehors de toute
réglementation et de tout contrôle. De par leurs
caractéristiques, ces associations financières, encouragent des
entreprises pouvant s'opposer aux objectifs gouvernementaux (Peo Yu, 1936).
Toutefois, cette dernière continue à être pratiquée
en Chine sous des formes réduites.
v En Inde
Les systèmes tontiniers en Inde sont nés d'une
nécessité pour les villageois de stoker leur surplus de
production et de mettre en lieu sûr l'argent provenant de leur vente.
Ceci avant l'apparition des banques modernes et l'instauration de la tutelle
britannique sur le pays (Rocheteau & Wu Chen, 2001). Ils sont
présents partout en Inde et sont connus sous l'appellation de «
Chit » et sont organisées par des sociétés, des
partenariats et des entreprises individuelles.
Les « Chits » en Inde étaient principalement
constituées de paysans. Ils se regroupaient de manière
périodique et les contributions se fessaient en natures, dans un esprit
d'entraide au membre qui était le plus dans le besoin. Dès
l'apparition de la monnaie, les contributions en nature ont disparu et des
changements ont été effectués. On notait ainsi la
participation des négociants et des salariés à ces
tontines, dans le but de se voir ouvrir des facilités de crédit.
Aujourd'hui la majeure partie des « Chits » en Inde sont
gérées par des sociétés et fonctionnent
36
pratiquement tous avec un système d'enchère. La
naissance et l'évolution du système tontinier indien s'est fait
de manière progressive, partant d'un simple fond tournant en nature et
passant par un système d'enchères plus sophistiqué. Le
gouvernement indien est lui-même intervenu pour règlementer le
fonctionnement des « Chits » et assurer la protection des
souscripteurs (Anderson, 1966).
1-2-2- En Amérique
L'origine du système tontinier en Amérique
pourrait se situer dans les sociétés traditionnelles de la
côte nord-ouest américaine telles que la nouvelle
Calédonie, le Trobriand et la Nouvelle-Guinée que Mauss
qualifiait de société de don-échange (1924). Les tribus
antiques indiennes qui y vivaient pratiquaient une forme archaïque de
contrat appelé le Potlatch. Ce principe était une forme de
contrat social entre deux individus ou un groupe d'individu fondé sur
« la triple obligation de donner, rendre et recevoir »
(Mauss, idem : 18). Les échanges transitaient autour des
biens matériels et consommables tels que des maisons, des meubles et des
denrées alimentaires. Par exemple, un agriculteur venait déposer
ses produits devant la maison de son partenaire pêcheur, celui-ci
à son tour après une grande pêche avait l'obligation de
céder une partie de celle-ci à son ami agriculteur. Dans les
sociétés Mélanésiennes pour leur part, un parent
qui donnait sa fille en mariage, se voyait attribuer des richesses
matérielles telles que des cauris, des perles, et autres objets de
valeurs. Dans ce système, les biens et objets donnés
n'étaient pas gratuits. En effet, Il s'agissait avant tout d'une
prestation totale dans laquelle les individus en interactions avaient
l'obligation de donner d'une part, de recevoir et de rendre d'autre part. En
outre ces sociétés pratiquaient des échanges non marchands
fondés sur la solidarité et la réciprocité. Il
s'agissait d'un système de tontines qu'on pouvait qualifier de tontines
de denrées, tontines immobilière, tontines d'entraide.
1-2-3- En Europe
D'après la thèse de Moulin (1903) le mot
Tontine vient de son initiateur le banquier napolitain Lorenzo Tonti. Au
XIIème siècle, en 1963, il proposa au cardinal Mazarin une
combinaison d'emprunt fondée sur un principe nouveau. Il s'agissait d'un
emprunt d'Etat en contrepartie de rentes viagères. À
l'époque, Louis XIV roi de France demanda à Mazarin de
réapprovisionner les caisses de l'Etat, c'est ainsi que le premier
ministre sollicita le banquier napolitain afin de trouver une nouvelle
méthode pour financer les caisses publiques. Lorenzo Tonti inventa un
emprunt qui réunissait des épargnants pour recueillir et faire
fructifier les
37
cotisations des adhérents. Son procédé
venait à point nommé à une époque où le
royaume de France connaissait un véritable dépérissement
du crédit de l'Etat. C'est ainsi qu'en novembre 1963, Mazarin fit
paraitre un arrêt du conseil instaurant la première tontine
royale, c'est dans ce sens qu'elle fut alors nommée. Cette année
marqua pour ainsi dire, le début de l'histoire de la
tontine6.
Après la défaite de Napoléon en
Angleterre, la France dû verser un lourd tribut aux anglo-saxons. Ces
indemnités de guerre se traduisaient par des titres de rente qui
pesèrent lourd sur l'économie française. C'est alors que
deux ingénieux français, Eugène Riffault, censeur de la
banque de France et le général Fréderic Riffault,
commandant de l'école polytechnique trouvèrent un moyen de
racheter ces titres de créances, grâce à la tontine. Durant
cette période, la tontine connue un véritable essor, et en 1844
sur ordonnance royale, les frères créaient « le conservateur
de tontine ». Groupe vieux de près de 170 ans, le conservateur a su
s'adapter pour affronter toutes les crises, et moderniser le produit pour le
rendre intéressant au cours des décennies d'existence (La famille
des 8, 2014). Ce principe a également existé en Angleterre
où à partir de 1692, l'Angleterre fit de nombreuses applications
du principe tontinier à ses emprunts publics. Mais, il a connu des
dérives et fut interdit car, certains participants de tontines avaient
décidé d'éliminer les autres associés de la tontine
pour en récupérer une plus grande part7. Selon
Pairault (1990), le terme semble avoir été utilisé pour la
première fois par un juriste français en 1905, l'année
même où une nouvelle loi sur les tontines fut promulguée en
métropole. Les juristes ont fini par se rendre compte que dans les pays
voisins, ces pratiques étaient les mêmes et donc une appellation
commune serait beaucoup plus simple. Cette explication laisse cependant sans
réponse à la question de savoir comment l'expression est
passée du continent asiatique au continent africain.
1-2-4- En Afrique
Pour Semin (2007), le système tontinier en Afrique
trouve son fondement dans les liens sociaux qui unissaient les membres. La
pratique courante du système tontinier africain découle d'une
monétarisation des habitudes de collectivisation dans les
sociétés traditionnelles africaines. Il s'agissait dès
lors de regroupements entre voisins ou entre personnes d'un même
6 Source :
https://www.lafinancepourtous.com/?s=la+tontine
consulté le 12 juin 2021.
7 Ce sujet fut abordé dans un roman de Robert
Louis STEVENSON intitulé « un mort encombrant » et
plus tard adapté au cinéma en 1966 dans le film « un
mort en pleine forme ». Le scenario est simple deux jeunes gens se
retrouvent les uniques survivants d'une tontine, s'ensuit des accidents de
chemin de fer et autres péripéties. Plus récemment, la
série à succès les Simpson y consacre un épisode,
grand père Simpson et le trésor maudit.
38
groupe d'âge, pour s'entraider mutuellement à
tour de rôle lors des différents travaux (labour, récolte,
restauration des toitures...).
Les systèmes tontiniers africains sont sans doute ceux
qui ont étés le plus étudiés au cours de la
décennie 80, ils sont présents dans la majeure partie des pays
africains. C'est à partir de leur monétarisation que des
écris mentionnant l'existence des réseaux tontiniers en Afrique
sont apparus. C'est le cas en 1952 avec les travaux de Bascom sur «
l'Esusu » au Nigéria qui serait apparu vers le milieu du
XIXème siècle et dans les pays voisins où il est
pratiqué couramment par les musulmans Yorubas. Puis au cours des
années suivantes, de plus en plus d'informations sur ce type de pratique
vont permettre de mieux connaitre les mécanismes tontiniers, et de
s'apercevoir que les regroupements tontiniers existent en fait dans de
très nombreux pays d'Afrique. Ce sont les pays d'Afrique de l'ouest qui
feront d'abord l'objet d'études sur le système tontinier
notamment le Benin, le Nigéria, le Sénégal, le Niger.
v Au Benin
Le Benin est probablement l'un des pays d'Afrique occidentale
où le phénomène tontinier s'est particulièrement
développé au XIXème siècle. Connu sous le nom de
« Adjolou », pratiquement tous les hommes et toutes les femmes de
plus de 18ans y participaient depuis des années (Gasse-Hellio, 2000). On
y trouvait des tontines mutuelles ou tournantes qui sont des associations des
personnes se connaissant bien et désireuse de se prêter et de
s'emprunter un peu d'argent pendant un certain temps. Lorsque chacun percevait
sa mise, le groupe se disloquait à moins que les participants
décidèrent de recommencer une nouvelle fois (Lelart, 1989). Ces
formes de tontines sont très pratiquées au bénin depuis
leur apparition.
De même, une enquête réalisée par
Gnansounou en 1989 sur les marchés de Cotonou à saint-michel
faisait mention d'une autre forme de tontine : les tontines commerciales ou
ambulantes. Dans cette forme, tout reposait sur un tontinier qui collectait
périodiquement l'argent de ses clients et les remboursait à la
date convenue. Cette forte pratique des tontines béninoise semblait
provenir d'une réaction des populations aux programmes d'ajustement
élaborés par le fond monétaire et la banque mondiale.
Aujourd'hui plus de 60% de la population au Bénin recourent aux services
du système tontinier pour financer des petits projets, acheter des biens
et surtout régler des problèmes ponctuels (Hedi, 2016).
v Au Sénégal
Le système tontinier sénégalais tire ses
origines des regroupements d'entraide basée sur le travail physique de
groupe (labour, construction d'une maison...). Selon Nzeumen (1993), la
monétarisation de ces derniers va se manifester en raison des
difficultés d'accès des
39
populations sénégalaises à faible
revenus au crédit bancaire local calqué sur le model occident.
L'influence de l'islam et l'importance des relations sociales auraient
également influencé leur monétarisation (Dromain,
1989).
Une enquête réalisée en 1985 par le
ministère sénégalais de l'habitait estimait à 89%
le taux de participation aux AREC par les ménages
sénégalais. De même, l'enquête ressort l'existence de
trois types de tontines au Sénégal à savoir : la tontine
financière pour la réalisation des projets à visé
économique ; la tontine commerciale qui représente une caisse
d'épargne utile aux vendeurs ; et la tontine mutuelle basé sur la
distribution rotative de l'épargne entre les participants utile pour
gérer les charges familiales.
Aujourd'hui, l'importance des AREC sénégalaise
n'est plus à démontrer. L'existence et le succès du
système tontinier au Sénégal doivent semble-t-il,
être attribués à un phénomène d'exclusion
relative d'une très large fraction des populations des circuits
financiers modernes. Ainsi la force actuelle du système tontinier
sénégalais réside dans leur mode d'organisation. Les
caractéristiques du système culturel et économique
environnant constituent également un point fort de ses regroupements
(Lelart, 1990).
v Cameroun
Le Cameroun est incontestablement l'un des pays en Afrique
centrale où la pratique des systèmes tontiniers est le plus
répandu. Connu sur le non de « Djanguis », ils sont des
pratiques extrêmement vielles et très âgées, un pur
produit de la société camerounaise africaine. L'économiste
camerounais Nzeumen (1988) situe leur origine au Cameroun dans les
sociétés traditionnelles marquées par un esprit
communautaire de solidarité et d'entraide réciproque. Le but de
ces regroupements était la promotion de la sécurité
sociale des membres, la recherche de la sécurité et de la
promotion sociale des membres. Dans un contexte économique marqué
par l'absence de structures de financements formels, il était question
de réunir les ressources financières nécessaires au
financement du développement de ces sociétés.
Dans leur forme primitive, ils ont tourné autour
d'échange de travaux productifs et de denrées alimentaires. Les
membres réunis sous le sceau de l'amitié se devaient mutuellement
soutien et assistance. Leur monétarisation est apparue dans
l'ouest-Cameroun avant la colonisation où les transactions se faisaient
en cauris, en perle, en manilles ou en tringles de laiton (Henry et al. 1991).
C'est au tournant des années 1980 avec la crise bancaire qui avait
profondément affaibli le Cameroun que les systèmes tontiniers
vont connaitre un essor considérable avec pour fondement la
solidarité, le culte de l'effort, la réalisation de soi... qui
ont contribué à leur pérennité. La tontine
camerounaise tire aussi son origine de la période
40
précédant la traite négrière, au
cours de laquelle des formes de tontine ont pris naissance (Ngeubou et al.
2002).
Au Cameroun, c'est surtout dans la culture «
Bamiléké » plus connu en langue vernaculaire sous le nom de
« tchoua'ah » que la perception et l'importance du
système tontinier est prépondérant. Comme le souligne
Kemayou & al. (2011 : 169) « Leur importance est telle qu'il est
presque difficile de voir cette communauté dans une région sans
la pratique d'une tontine ». Cette pratique se transmet de
père en fils et fait partie des richesses léguées en
héritage. Ayant conservé leurs valeurs d'antan, elles se
caractérisent aujourd'hui par une action de solidarité visant
à aider un membre en difficulté ou financer les projets
collectifs ou individuels. Ces regroupements sont désormais
convoités par la majorité des hommes d'affaires et grands
commerçants d'origine bamiléké qui y transitent des
centaines de milles (Brillet, 2012).
Aujourd'hui le système tontinier est pratiqué
en Afrique et au Cameroun par plusieurs catégories d'acteurs et sous
diverses formes en fonction des besoins de ces derniers.
2- TYPOLOGIES ET FORMES DE SYSTÈMES TONTINIERS DANS
LE MONDE
Dans le monde en général et en Afrique en
particulier, il existe une grande multitude de forme de systèmes
tontiniers qui regroupent divers types d'épargnants. Allant du domaine
informel au domaine formel (commerçant, entrepreneur, responsable
d'entreprise, homme d'affaire, transporteur), chacun y adhère en
fonction de son désir (besoin de crédit, besoin d'appartenance
sociale, d'accumulation des capitaux, de réalisation de soi...).
Dans l'univers camerounais en particulier, l'on rencontre une
multitude de systèmes tontiniers ayant fait l'objet de plusieurs travaux
scientifiques. Des auteurs tels qu'Owondi (1992) et Bekolo-Ebe (1989)
présentent des classifications. Les typologies qu'ils ont ressorti
dépeint des différents services financiers offerts par ces
systèmes, fonctionnant à la fois avec un schéma
hiérarchisé et flexible.
Dans une recherche effectuée en 1992 visant à
expliquer le développement du système informel en Afrique,
à partir des économies d'Afrique centrale (Cameroun, Tchad,
Congo, Gabon, Centrafrique, Guinée Équatoriale). Owondi ressort
trois principales typologies de tontines pratiquées dans ces pays entre
autres : la tontine Mutuelle ou rotative, la tontine financière et la
tontine commerciale.
41
2-1- La tontine Mutuelle ou Tournante
Elle semble être la forme la plus rependue en Afrique
et repose sur la solidarité entre les membres qui se connaissent bien,
c'est le type classique, simple. On peut la définir comme :
Une association de personnes se connaissant bien et
désireuse de s'emprunter et de se prêter de l'argent pendant un
certain temps ; ceci en mettant en commun des fonds à chaque
période d'un cycle et en remettant la cagnotte ainsi formée
à chacun des membres, selon un ordre établit en début de
cycle mais susceptible d'être modifier en cas de besoin. (Owondi,
1992 : 668)
Cette forme de tontine peut fonctionner avec une caisse dite
d'épargne pouvant octroyer des prêts à titre
onéreux, à des taux d'intérêts variant
généralement entre 10 et 20% par mois. Elle peut également
fonctionner avec une caisse dite de secours ou d'assistance,
alimentée par des versements périodiques obligatoires des
différents membres. Cette forme de tontine est administrée en
règle générale sur la base d'un règlement interne
édicté par un président. Il est toujours assisté
d'un ou de plusieurs vice-présidents, un secrétaire, un
trésorier, et des commissaires aux comptes.
2-2- La tontine commerciale
La tontine commerciale est administrée par un
gérant qui recueille et conserve les cotisations des créanciers.
Afin de placer leur argent en lieu sûr, les membres de la tontine
rémunèrent un banquier ambulant par un taux de garde. Le banquier
pour sa part collecte périodiquement les fonds de ses clients en leur
remboursant à la date convenue. Dans cette forme de tontine, il peut
arriver que le remboursement survienne avant la date prévue et peut
être d'un montant plus élevé que le dépôt
initial, auquel cas on est en présence d'un prêt. Cette pratique
est très visible dans la plupart des marchés camerounais avec des
agents des microfinances telles que Renaprov, Mupeci, Acep, qui écument
les marchés à la recherche de potentiels clients8.
8 Cette note a été faite à
l'issue d'une observation que nous avions effectuée dans certains
marchés de Yaoundé où des banquiers ambulants en uniforme
prélevaient les sommes de certains « Buy-and-Sellam »
pour garder au sein de leur structure.
42
2-3- Les tontines Financières
Dans cette forme de tontine, les dépôts
effectués par l'ensemble des adhérents sont mis aux
enchères de manière à ce que ce soit le plus offrant qui
remporte la cagnotte. Ici, le montant des intérêts est
prélevé avant la remise des fonds au bénéficiaire
et ces intérêts peuvent faire l'objet de nouveaux prêts
selon la même méthode d'enchères. La tontine
financière a surtout été observée chez les
Bamiléké du Cameroun, et plus précisément les
commerçants, les hommes d'affaires, les responsables de petites PME.
Une présentation encore plus détaillée
des typologies de tontines au sein des associations au Cameroun a
été faite dans une recherche menée par Bekolo-Ebe (1989).
Dans le cadre de cette recherche, il distingue cinq principales formes de
tontines pratiquées dans les villes camerounaises.
v La tontine simple
C'est une forme de tontine relativement traditionnelle dans
laquelle un nombre fixe d'individus versent une somme
régulièrement et suivant un ordre
prédéterminé. En effet, chacun des adhérents
reçoit le produit de versement de l'ensemble des participantes
séances tenantes, selon une périodicité constante
(mensuelle ou hebdomadaire) et dont l'ordre des prises est
négocié à l'avance ou fixé par tirage au sort. La
tontine de ce point de vue apparait comme un système d'incitation
à l'épargne. Ainsi, le comportement des participants dans cette
forme de tontine peut être saisi comme un comportement de faible risque.
En effet, les individus qui appartiennent à ces tontines sont en
général des membres qui ne sont pas attiré par le gain
financier, mais avant tout par la recherche du lien social.
v La tontine simple avec caisse de
prêts
Dans cette forme de tontine chaque participant, en plus de sa
cotisation fixe verse une seconde somme d'argent qui dépend de ses
possibilités. Cette somme vient s'ajouter à celle des autres
membres pour constituer la caisse des prêts. Les participants comme les
non participants peuvent ainsi se voir accorder un prêt, dont les
remboursements produiront des intérêts qui seront
redistribués en fin de cycle à chacun des membres et cela au
prorata de ce qu'ils auront verser au cours du cycle. Les individus qui
adhèrent à ces tontines sont attirés par la recherche du
gain financier. Puisqu'ils cherchent à réaliser une plus-value,
c'est un système assez répandu au Cameroun chez les femmes,
celles-ci jouant un rôle de prêteur sur le marché de
l'argent à court terme.
43
v La tontine avec caisse de prêt et de
secours
Dans cette tontine très proche de la
précédente, les membres pratiquent un troisième versement
périodique qui alimente une caisse de secours destinée à
aider les divers participants. En cas d'évènements heureux ou
malheureux à l'instar d'un mariage, une naissance, un
décès... Le membre concerné se voit attribuer une aide
financière qui vient de la caisse de secours des membres. Cette forme de
tontine est assimilable à une assurance dont les cotisations sont d'un
niveau relativement modique. Cette d'assurance peut aussi dans certains cas
être utilisée pour des prêts de courte durée avec
intérêt, ceci au profit des adhérents. La caisse de
prêt dans cette forme de tontine permet à chacun de déposer
des montants de leur choix qui sont bloqués dans la caisse
d'épargne. Cette caisse est ainsi généralement
cassée en fin d'année ou en période de rentrée
scolaire ainsi, chacun récupère l'intégralité de
ses dépôts ainsi que les intérêts produits.
v La tontine avec enchères non
capitalisées
Dans cette forme de tontine, les sommes collectées
à l'issue des cotisations sont vendues aux enchères et
cédées au plus offrant. En effet, l'enchère dans cette
forme de tontine est ouverte sur une mise à prix fixé
statutairement. Ainsi, seuls les participants n'ayant pas encore
bénéficié du gros lot sont autorisés à
participer aux enchères. Les individus qui adhèrent à ces
tontines sont davantage motivé par la recherche du gros lot. Ces
tontines sont composées essentiellement de commerçants,
d'investisseurs ou de responsables de petites et moyennes entreprises.
v La tontine avec enchères
capitalisées
Dans cette dernière forme de tontine, la prime
d'enchère payée par le bénéficiaire du gros lot est
divisée en petits lots qui seront revendus également aux
enchères sur du court terme. Gros lots et petits lots constituent le
marché principal et le marché secondaire, les marchés se
terminent une fois que l'ensemble des montants apportés ont
étés redistribués. Dans certains cas des personnes
extérieures à la tontine peuvent avoir accès au
marché secondaire par l'intermédiaire d'amis membres. Parfois,
les sommes cumulées sur le marché sont suffisantes pour proposer
un deuxième gros lot. Dans ce cas, le cycle de la tontine sera
réduit d'une période.
Ces différentes formes de tontines pratiquées au
sein des associations fonctionnent dans un cadre légal et sont
caractérisées par une organisation hiérarchisée sur
la base d'un règlement intérieur qui définit les
rôles.
9Source :
https://www.impots.cm, loi
N°21/026 du 16 décembre 2021, portant loi de finances de la
république du Cameroun pour l'exercice 2022, consulté le
18décembre 2021.
44
3- LE FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME TONTINIER AU
CAMEROUN
De nombreuses initiatives sont entreprises depuis quelques
années pour encadrer le fonctionnement du système tontinier au
Cameroun.
3-1- Cadre légal
Les associations au Cameroun fonctionnent dans le cadre de
deux lois. La première se situe dans le cadre de la loi N°90/053 du
19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association. Cette loi
relève que « la liberté d'association est la
faculté de créer une association, d'y adhérer ou de ne pas
y adhérer ; La faculté de créer une association est
reconnue à toutes personnes physiques ou morale résident sur
l'ensemble du territoire national » (MINATD, 2011 : 1). Ainsi les
associations obéissent à deux régimes à savoir le
régime de l'autorisation et le régime de la déclaration.
Le premier régime fait référence aux associations
étrangères et aux associations religieuses, tandis que le second
fait allusion à toutes autres formes d'associations dans laquelle se
situe notre recherche.
La seconde loi et la plus récente se situe dans le
cadre de la loi N° 2021/026 portant loi de finances de la
République du Cameroun pour l'exercice 2022. Dont l'article 93 portant
sur les organismes à but non lucratif stipule que « les
personnes physiques ou morales sont imposables suivant les régimes
ci-après, déterminé en fonction du chiffre d'affaire
réalisé » (Loi N° 2021/026 du 16 décembre
2021 : 7). Toutes associations de nos jours, quelle que soit la nature,
à but lucrative ou non lucrative, à caractère
tontinière ou non et reconnues au sein d'une entité
administrative sont désormais soumises à une obligation de
déclaration mensuelles. Elles font désormais l'objet d'un
prélèvement des impôts et taxes à hauteur de 15% sur
le revenu majoré de 10% de centimes communaux9. La parole et
l'honneur sont les points forts de ces regroupements régis par le statut
et le règlement intérieur très stricts. Ils permettent
ainsi de garantir le bon fonctionnement de ces systèmes depuis leur date
de création.
45
3-1-1- Création et adhésion au
système tontinier
Au départ de toute association, il y'a naturellement un
ou plusieurs fondateurs qui se connaissent bien. Ils s'associent de ce fait,
pour mettre sur pieds l'association au sein de laquelle ils introduisent un
système de cotisation. Dans ces regroupements, le critère
principal qui assure la longévité est la connaissance (famille,
amis, clan, quartier, collègues)10.Cette reconnaissance
incite les membres à honorer les cotisations et les réunions sous
peine de déshonneur et d'exclusion. La création de l'association
nécessite aussi un nom approprié qui lui confère un statut
et une image par rapport à l'extérieur. Le règlement
intérieur écrit et oral est également de mise car il
décrit la structure de l'association, les modalités de
fonctionnement et la direction de la tontine.
L'aire géographique peut être très large
et la taille peut varier énormément. De même, une
association peut être mixte ou de genre composé soit
essentiellement d'homme soit essentiellement de femmes. Cette
particularité joue également un rôle fondamental
vis-à-vis des critères de confiance et de
sécurité.
En général, l'adhésion à un
réseau tontinier se fait la plupart du temps par affinité. C'est
à travers les relations qui existe entre les différents membres
car bien que l'adhésion à une association soit libre, elle est le
plus souvent sélective (amis, voisins, tribu, profession...). En effet,
la connaissance des membres entre eux et donc la confiance constitue souvent un
gage de sécurité, dans ce cas on parle de tontine fermée
(Gasse-Hellio, 2000). Dans certains cas, les nouveaux désirant
adhérer sont soumis à une enquête de moralité
concernant les modes de vies, la profession, la vie familiale, et les
activités financières pour s'assurer de la bonne
compatibilité avec la tontine et garantir la sécurité. Il
faut admettre que lorsqu'une personne décide d'adhérer à
une association, c'est en raison de la bonne réputation et du climat qui
y règne.
L'adhésion à un système tontinier peut
également se faire de manière ouverte c'est à dire, les
membres se font parrainer. À ce niveau, les fondateurs de la tontine ou
les anciens membres décident de coopter de nouveaux membres qu'ils
jugent responsables dans leur entourage et qui à leur tour en
parraineront d'autres. Ici, les personnes membres n'ont pas de liens entre
elles, c'est sur la taille du cercle tontinier et sur la nature de ses membres
que repose la confiance et la sécurité (Djamfa, 2021).
10 Source :
http://www.atlas-mag.net/article/les-tontines,
consulté le 01 juillet 2021.
46
3-2- L'organisation du système
tontinier
Chaque association tontinière est animée par un
bureau ou comité de coordination dont la composition est
constituée d'un fondateur, un président, un secrétaire, un
trésorier, un censeur et un commissaire aux comptes. Ces derniers
assurent la gestion des réunions, règlent les transactions
financières, gèrent les conflits entre membres, veillent à
l'exécution de règles, proposent des mesures pour atteindre les
objectifs et assurent le bon fonctionnement de l'association etc...ceci de
manière bénévole et gratuite. Henri & al (1991) dans
une recherche portant sur les associations tontinières en font une
présentation détaillée.
3-2-1- Les acteurs
Il s'agit ici de décrire les différents postes
que l'on peut rencontrer dans les tontines africaines en général
et au Cameroun en particulier.
Ø Le fondateur
À la base, se trouve au départ les fondateurs
de l'association. Ceux-ci peuvent dans certains cas avoir des droits
particuliers les distinguant des autres membres. Par exemple là ou un
candidat devrait, pour être accepté, obtenir le parrainage de deux
anciens membres, il pourra lui suffire d'avoir un seul parrain si ce dernier
est membre fondateur. De même, les fondateurs ont la possibilité
de se partager les droits d'entrés qui sont demandés aux nouveaux
arrivants.
Ø Le président
Le président dans une AREC est en principe élu
et souvent considéré comme le fondateur de la tontine. Ce dernier
a pour rôle d'assurer la direction générale de la tontine,
présider au déroulement des séances, assurer
l'exécution des décisions prises au cours d'une séance et
veille de manière générale à la bonne marche de la
tontine. Il assure également le rôle de garant moral de la tontine
en ceci que l'adhésion des nouveaux membres est largement tributaire de
la confiance qu'il inspire, et de son dynamisme dépeint celui de
l'ensemble de la tontine. Dans certains cas il est assisté d'un ou
plusieurs vice-présidents qui jouissent d'un capital de confiance de la
part des membres et le remplace en cas d'empêchement.
Ø Le secrétaire
Généralement considéré comme le
second de l'association, il se charge des formalités administrative et
juridique de l'association. Par formalités juridique et administrative
nous entendons, l'élaboration des comptes rendus, procès-verbaux
et rapports, l'établissement des
47
correspondances, la gestion des membres, l'émission
des convocations. Il a également pour responsabilité de
gérer les archives de l'association, veiller au respect des statuts,
à la bonne organisation des réunions et par-dessus tout faire de
la veille informationnelle en vue du bon fonctionnement de l'association.
Ø Le trésorier
Il s'occupe des aspects financiers de la tontine. Il est
chargé de tenir les comptes de l'association et assurer la mise en
oeuvre de la politique financière défini. Il assure
également une gestion optimale des ressources financières
notamment ceux des caisses d'épargnes, de prêts et ceux des
caisses de secours ou d'assistances. Il conseille dans l'allocation des
ressources en fonction des objectifs et de la capacité financière
de l'association. Il est en outre tenu responsable en cas de malversations
financières ou de mauvaise gestion.
Ø Le commissaire aux comptes
Il vérifie la comptabilité de la tontine. Son
rôle prend une importance particulière en fin de cycle, lorsqu'il
faut repartir les intérêts entre les différents membres de
la tontine.
Ø Le censeur
Il veille à la discipline lors des séances de la
tontine et fait respecter les règlements à caractères
sociaux. C'est à lui qu'incombe la charge d'appliquer des amendes et
pénalités en cas de retard de troubles et récupère
les amendes. De même, il peut lui être demandé de
présenter régulièrement un rapport disciplinaire
auprès d'une commission qui sera chargé de statuer sur les cas de
récidives. Toutes ces différentes attributions sont régies
par un règlement intérieur auquel tous les membres de la tontine
sont soumis.
3-2-2- Le règlement intérieur dans le
système tontinier
Toute association fonctionne sur la base d'un règlement
intérieur. Il s'agit d'un ensemble de règles écrites et
orales auxquelles chaque adhérent doit se conformer sous peine de
sanctions. En effet dans un réseau tontinier, les règles sont le
plus souvent élaborées par l'ensemble des membres afin que nul ne
se sente pas concerné. C'est le respect de ces règles qui permet
la pérennité et la bonne cohésion au sein du groupe. Les
règles et les sanctions s'appliquent à tous les membres allant
des membres du bureau au plus simple membre. La plupart du temps, ces
règles sont écrites et mises à la disposition de tous sous
forme de statut afin que nul n'en ignore. Il est généralement
constitué en articles partant du contexte de création aux
dispositions finales.
48
Les règles généralement connues sont
édictées sous forme d'article. Les plus connues portent souvent
sur des points tels que le but et les objectifs de l'association, la
constitution du bureau allant du président au censeur. Ces membres du
bureau sont en général élus de manière directe soit
par proposition volontaire, soit par un vote. Le statut concerne aussi des
points tels que les conditions d'adhésions qui peuvent se faire de
manière libre, par parrainage, ou soumise à une caution. On
retrouve aussi d'autres éléments tels que les fréquences
de rencontre, les heures de séances, les montants des contributions et
la nature des contributions (cotisations, épargnes, secours). Par
ailleurs, les règles sur des éléments tels que la
discipline et les sanctions à appliquer en cas de non-respect ne sont
pas en reste11.
3-2-3- La réunion
La séance tontinale est pour Nzeumen (1988 : 34),
« une réunion pendant laquelle les opérations de
cotisations (placement et remboursements) et de cessions (vente des produits de
cotisations) de la tontine ont lieu en même temps que les débats
et décisions sur les problèmes d'intérêts communs
». La réunion est en fait l'assemblée de tous les
membres de la tontine tenue par fréquence hebdomadaire ou mensuelle.
Les réunions ont lieu à chaque tour et se font
de manière rotative. C'est au cours de ces réunions que sont
prises les décisions, le plus souvent sous forme de consensus. La
réunion est en général l'occasion de passer un
agréable moment permettant d'échanger des informations, de parler
de ses affaires et de ses projets. Parfois les réunions sont aussi
l'occasion de résoudre les problèmes internes de la tontine, la
présence à ces réunions est obligatoire, et la
ponctualité est de mise. Dans le cas contraire, une sanction peut
être appliquée soit en nature soit en numéraire. En effet
la présence aux réunions est considérée comme un
devoir moral, et le non-respect de celle-ci peut entrainer la perte de
confiance au sein du groupe. De même, la discipline et de mise lors des
réunions et en cas de non-respect de cette discipline, le censeur peut
être amené a infligé des sanctions à l'auteur du
désordre.
Par ailleurs, les réunions sont aussi des moments de
grandes célébrations où après les opérations
de crédits et d'épargnes, les membres se réunissent autour
d'un bon repas final, très copieux et souvent arrosé de vin. Il
règne alors une atmosphère de fête dans laquelle les
membres s'ouvrent entre eux, communiquent, se découvrent, on
échange des conseils pour
11Cette partie de notre travail a été
inspirée à partir des statuts et règlements
intérieurs des associations EMERCOM et ADJAS que nous avons pu
consulter.
49
mieux mener leurs affaires. Cette forte relation de
convivialité contribue à renforcer les relations entre les
membres et à développer la solidarité sociale (Brillet,
2012).
3-2-4- Les activités financières
Au sujet du financement du système tontinier en
Afrique, seuls les apports des membres permettent de les financer. Ces derniers
ne bénéficient d'aucun apport extérieur et sont presque
détachées du système financier officiel (Ependa, 2002).
Dans ces regroupements, il existe plusieurs services financiers auxquels
participent les membres. Il s'agit entre autres des activités de
collecte d'épargne et de redistribution de crédits
(épargne, investissement, emprunt, remboursement) et les caisses
populaires (secours, aide, assurance...). Les opérations
d'épargne et de crédit qui sont au fondement de l'association
concernent le financement pour l'investissement. Les caisses populaires de leur
côté représentent la solidarité et l'entraide.
v Les opérations d'épargne
L'épargne sert de nerf dans le développement
économique. Parmi les notions servant d'architecture aux
opérations d'épargne, la tontine occupe une place
résolument atypique. L'épargne assume en effet une promotion de
l'individu en lui fournissant un cadre de financement de ses besoins
individuels (Edimo, 1998). Véritable outil d'épargne et
d'investissement, les caisses d'épargne regroupe les dépôts
les plus importants. Elles permettent de faire face à des
dépenses imprévues ou à des investissements grâce
à leur système de prêt.
L'épargne est la clé des financements et des
investissements, elle rend possible l'investissement qui permet de créer
des revenus. L'épargne bien investie crée également un
processus de renforcement du capital et de reproductibilité de
l'épargne et donc un effet boule de neige qui entraine le financement et
l'investissement. Les motivations à l'épargne sont
diversifiées et nous retenons entre autres : les objectifs
spécifiques (chômage, les risques sociaux divers...) et les
objectifs précis (investissement, retraite, revenus
supplémentaires réguliers) (Jacquemot, 1993).
En somme, l'épargne dans l'association est
assurée par les versements constants des membres. Chaque membre a la
possibilité d'épargner en fonction de ses revenus et ce n'est
qu'en fin d'années que les montants totaux sont redistribués.
Cette épargne est soumise à une caisse de prêt et
bénéficie d'une bonne rémunération à travers
les intérêts générés. Les sommes
versées font partie intégrante des cotisations du jour de la
réunion et sont enregistrées dans le cahier des cotisations
devant les noms des membres épargnants. Les membres du bureau
50
notamment le président, le trésorier et le
commissaire aux comptes, procèdent aux vérifications afin de
s'assurer de toutes conformités.
v Les opérations de crédit
Les AREC accordent des crédits aux membres sur le
principe des enchères. Au cours des enchères, après que
chaque membre ait versé ça contribution auprès du
trésorier, le secrétaire procède à la lecture des
noms des membres qui peuvent participer aux enchères. Ceux qui ont
déjà bénéficié du gros lot sont exclus en
vertu du principe de rotation. Le président ouvre alors la vente en
partant de la mise à prix statutaire et après obtention du gain,
le bénéficiaire désigne son avalise et ils signent
ensemble le registre pour le remboursement. En effet, l'obtention de la
cagnotte est soumise au paiement d'une prime d'enchère, assimilable aux
frais financiers payés dans le cadre d'un emprunt bancaire.
Réciproquement, les intérêts produits sont reversés
aux cotisants, notamment au travers des primes de fin de cycle, constituant
ainsi une rémunération de fin de l'épargne
effectuée (Issoufou, 1992). La diversité des durées de
crédits oblige à recourir aux méthodes classiques
d'actualisation financière pour évaluer ces taux. Elles
permettent en effet de calculer à partir des flux d'épargne ou
d'emprunt, le taux d'intérêt correspondant aux frais financiers
reçus ou versés.
Généralement ce sont des membres qui veulent
saisir des opportunités d'affaires et ceux qui veulent financer leur
affaire qui demandent des crédits. En cas de non remboursement, les
responsables de la tontine convoquent l'intéressé et son
avaliseur pour récupérer les fonds. Ils peuvent également
saisir une autorité familiale ou villageoise pour régler ce
problème dans le respect des coutumes (Soedjede, 1993).
v Les caisses populaires
Les caisses populaires sont des outils incontournables dans
les opérations de crédits. Elles servent de caisses d'assurance
sociale bien structurée. Elles sont encore appelées «
caisse de prévoyance » ou « caisse de secours
». Comme l'explique Parrot (1998), elles sont destinées
à protéger ou soutenir les membres de l'association ou des
personnes de leur entourage lors de certaines circonstances bien
définies à l'avance dans les règlements de l'association.
Elles couvrent ainsi financièrement les évènements heureux
(naissance, mariage, anniversaire, couronnement...) et les
évènements malheureux (accident, décès, maladie,
vol...). Les contributions sont annuelles et relativement faibles ainsi, chaque
membre doté d'une caisse de prévoyance est tenu de participer
à son financement. Dans le cadre d'un malheur par exemple tel que le
décès d'un proche d'un membre, ce dernier pourra
bénéficier d'une assistance matérielle et morale. L'aide
matérielle provient de la caisse de secours de tous les membres.
51
Elle porte sur des éléments tels que : le
paiement des frais médicaux, le transport de la dépouille
mortelle jusqu'au village, l'achat du cercueil ou plus
généralement sur les frais d'obsèques. Lorsqu'il s'agit du
décès d'un membre du groupe, une partie des sommes pourra
être exceptionnellement être remise directement à la famille
du défunt. L'aide morale pour sa part implique une visite au malade ou
à la famille du défunt, une présence impérative aux
funérailles. Cet appui moral est obligatoire sous peine de sanctions
(Henri & al, 1991).
On retrouve également des caisses scolaires qui sont
une sorte d'épargne permettant aux parents de faire face aux
difficultés de la rentrée scolaire. Cette caisse est ouverte
à une période précise et est consommée en
début de rentrée scolaire. Tout comme une caisse d'épargne
elle génère des intérêts, et chaque membre qui y
souscrit reçoit sa mise de fonds.
3-3- La durée de la tontine
La durée de la tontine ou cycle tontinale selon Nzeumen
(1988 : 36), « renvoie à la période pendant laquelle
tous les membres bénéficient de la tontine ». Ce cycle
s'étend de l'emprunteur simple à l'épargnant simple. Elle
dépend du nombre de séances tontinales et de la période
tontinale. En somme la durée de la tontine dépend des accords
conclus lors de la création, elle peut être d'un cycle unique ou
d'un cycle renouvelable par reconduction automatique. La reconduction
automatique peut être illimitée.
Généralement, le système tontinier a une
durée de vie comprise entre 10 et 25 ans, ils prévoient soit un
versement unique lors de la souscription soit la possibilité de
versements réguliers12. Au terme, les fonds sont
reversés aux adhérents, déduction faite des frais de
l'association. Les sociétés à forme tontinières ne
peuvent pas s'engager sur un rendement minimal ou sur un capital garanti au
terme, c'est donc seulement lors de la dissolution que les épargnants
connaîtront le rendement final de leur investissement. Par ailleurs, il
n'est pas possible de récupérer sa mise avant la dissolution de
l'association. Il est donc essentiel de ne pas y investir une épargne
dont on aurait besoin à moyen terme.
3-4- La finalité du système tontinier
africain
La difficulté d'accès au système bancaire
rend presque vital le système tontinier. Il agit entend que
micro-crédit, ouvert pour les proches. Chacun des individus peut
à son tour emprunter dans la tontine, à condition de rembourser.
L'association rotative de l'épargne et du
12Source :
https://www.lafinancepourtous.com/?s=la+tontine,
consulté le 12 juillet 2021.
52
crédit fait donc référence au
système selon lequel les individus empruntent chacun à leur tour,
pour ensuite rembourser.
Ø La finalité sociale
Définir le système tontinier sous le seul
prisme financier serait réducteur, le rôle de l'association est
avant tout social dans les pays africains. On y vient aussi pour
échanger des idées, communiquer une information, voir du monde.
C'est un élément important de la vie de quartier, de la vie
sociale de chacun des membres. Ce n'est pas au hasard que chacun des membres
arbore un boubou spécial en signe d'appartenance à leur
tontine13. La confiance au sein de ces associations est un principe
fondateur de la tontine, en effet refuser d'honorer sa dette c'est prendre le
risque d'exclusion sociale. La tontine privilégie le groupe par rapport
à l'individu, et peut dicter les comportements. Elle est souvent
utilisée comme caisse de prévoyance, à laquelle chacun des
membres adhère en prévision de risques qui peuvent survenir
(maladie, décès, etc...). L'association est un moyen de mener un
projet commun, et toujours une occasion de se rencontrer, par le biais de la
tontine un individu recherche également la renommée sociale.
Ø La finalité
économique
Le système tontinier permet d'utiliser les fonds pour
des investissements à court terme, soit pour des
évènements prévus ou imprévisibles, de
manière collective ou individuelle. En cas d'usage individuel,
l'individu qui souhaite emprunter doit d'abord présenter son projet, qui
doit être accepté par le reste des participants. Ils doivent aussi
parfois accepter que l'emploi des fonds collectés soit surveillé
par un membre de l'association (Gasse-Hellio, 2000).
Ø La finalité
financière
Selon le site officiel des tontines (
https://www.tontine8.com,
consulté le 14 juillet 2021), le système tontinier peut mobiliser
de l'épargne, dans ce cas il possède un rôle financier. Ce
système possède la particularité d'impliquer une
cotisation périodique. Ces cotisations périodiques peuvent
être attribuées au membre qui en a le plus besoin, ou dans le cas
d'un ordre préétabli, bien qu'il existe la possibilité
d'échanger voire d'acheter un tour.
13 Source :
https://www;
leolagrange.org/la-societe-civile-sorganise-les-tontines-au-cameroun/,
consulté le 14juillet 2021.
53
3-5- Le statut du système tontinier au
Cameroun
Il est couramment admis que les regroupements tontiniers sont
des sortes de syndicats. Il s'agit plus précisément des groupes
de solidarité visant à s'entraider et améliorer leurs
conditions de vie dépréciées. Ils servent à faire
prévaloir l'intérêt général ou les
intérêts particuliers contre la puissance de la crise
financière. C'est ainsi qu'ils luttent contre des décisions
administratives et autre structures financières devenues trop
compliquée (Tadjuidje, 1982).
Il faut dire que le système tontinier est non seulement
un lieu pour garder l'argent, mais aussi un regroupement de divers acteurs. Il
regroupe des acteurs tels que des commerçants, petit producteurs,
artisans qui oeuvrent dans un rapport concurrentiel avec le système
financier officiel au quotidien. C'est certainement en fonction des montants
importants qui transitent dans ces circuits que l'Etat a décidé
à un moment donné d'inclure un prélèvement de taxe
au sein des réseaux associatifs.
L'expansion du système tontinier dans les pays en voie
de développement est flagrante. Bien qu'ils opèrent
différemment d'un pays à un autre, ils contribuent à
combler sensiblement les mêmes besoins dans ces pays où les
capitaux et les couvertures sociales sont quasi insuffisants (Boutchang, 2019).
Ils sont déterminants pour les petits entrepreneurs à faibles
revenus et revenus intermédiaires. Grâce à leurs
particularités, ils permettent l'accès aux ressources
financières, matérielles, et sociales nécessaires pour
l'insertion socioéconomique des jeunes entrepreneurs. Le système
tontinier apporte ainsi une contribution majeure aux activités
économiques et à la création des richesses qui fera
l'objet d'une réflexion dans le prochain chapitre.
54
LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX
ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES
CHAPITRE 2 :
Les petits entrepreneurs à faibles revenus ont des
difficultés d'accès au crédit bancaire officiel, le manque
de garanties et de crédibilité dans les conditions de prêts
ne joue pas en leur faveur (Owondi, 2009). La concentration de cette
catégorie d'entrepreneurs vers les sources de financements informels est
pratique courante. La banque des défavorisés, la banque ambulante
ou tout simplement système de tontines qui regroupe une multitude de
couches socioprofessionnelles semble être une pratique courante dans
l'univers africain et camerounais (Hedi, 2016). L'absence des lourdeurs, des
contraintes et le caractère inclusif envers toutes catégories
d'acteurs sociaux constitue le point fort de ces regroupements associatifs. Ce
qui conduit ainsi dans ce second chapitre à présenter la
contribution du système tontinier aux activités
économiques à partir des déterminants du recourt au
système tontinier (section 3). Avant d'y parvenir, il serait
nécessaire de faire un état des lieux sur l'inclusion
financière en Afrique et particulièrement au Cameroun dans la
première section. Ensuite présenter les motivations et les choix
entrepreneuriaux de ces jeunes dans la deuxième section.
1- LA PROBLÉMATIQUE DE L'INCLUSION FINANCIÈRE
EN AFRIQUE ET AU CAMEROUN
L'accès au financement est un enjeu majeur pour le
développement d'une économie. Il permet aux individus de
développer des projets et de s'insérer dans la
société, aux entreprises de s'investir, d'innover et d'embaucher,
et à l'économie dans son ensemble de fonctionner. Les pays
africains sont particulièrement confrontés aux difficultés
d'accès aux ressources financières pour entreprendre une
activité économique. « En Afrique 70% de la population
sont des individus à faibles revenus vivant en dessous du seuil de
pauvreté » (Zins, 2017). Ce seuil de pauvreté
dramatique constitue un frein pour ces derniers dans l'accès au
crédit de financement formel en vue d'améliorer leurs conditions
de vies déplorables. Cette difficulté explique l'insertion de
cette couche de la population vers des circuits de financements
parallèles
55
qui témoignent ainsi de leur recherche du
bien-être. De cette situation se dégage donc un des grands enjeux
du continent qui est l'inclusion financière.
1-1- La notion d'inclusion financière
L'inclusion financière désigne pour la Banque
mondiale (2014) la possibilité pour les individus et les entreprises
d'accéder à moindre coût à toute une gamme de
produits et de services financiers nécessaires et adaptés
à leurs besoins de financement. Elle concerne les services tels que
l'épargne, le crédit et les assurances proposés par des
acteurs fiables et responsables. L'accès à un compte
d'opérations courantes constitue généralement la
première étape dans ce processus. Tadjudje (2016) va dans le
même sens, en la désignant comme l'offre des services financiers
et bancaires de base à faible coût pour des individus en
difficultés. Pour Yong Kim, l'accès aux services financiers
pourrait être une passerelle pour sortir de la pauvreté,
d'où l'importance d'offrir ce service au plus grand nombre. On dit ainsi
d'une personne qu'elle est incluse financièrement lorsqu'elle a un
compte en banque, la capacité de souscrire à une épargne,
de contracter un prêt et la possibilité de recourir à des
services bancaires.
1-1-1- Quelques indicateurs de l'inclusion
financière en Afrique
L'accès aux services financiers est avant tout
déterminé par le niveau de développement
économique. En Afrique subsaharienne, l'accès aux services
financiers formels dans la zone Franc est de 4%. La part de la population de
plus de 15ans disposant d'un compte bancaire dans une institution
financière formelle s'élève à 24% en 2011 contre
90% pour les pays les plus avancés (Guerineau et Jacolin, 2014).
Les indicateurs de l'inclusion financière en Afrique
sont tous inférieurs à la moyenne mondiale. D'après Zins
(2017) 35% de la population dispose d'un compte en banque, 15,4% épargne
dans une institution financière, 6,7% dispose d'un crédit
auprès d'un institut de financement, concernant le recourt au
crédit, 51,6% de la population africaine ont accès à un
prêt bancaire. De tels chiffres démontrent la faiblesse de
l'inclusion financière en Afrique et la préférence des
acteurs pour le financement parallèle à travers l'épargne
et le crédit. L'éducation et le revenu augmentent la
probabilité d'être inclus financièrement, le genre et
l'âge ont également une influence quelconque.
56
1-1-2- Les enjeux de l'inclusion financière en
Afrique.
Le financement constitue un enjeu majeur tant pour l'Etat que
pour le secteur privé. En effet, il favorise l'épargne et
l'accumulation du capital et assure une allocation optimale des capitaux. Le
développement financier peut favoriser une accélération de
la croissance et une réduction de la pauvreté. Ce
développement passe par la réduction des contraintes
d'accès au crédit formel, l'amélioration de
l'investissement à long terme, et donc de la croissance
économique (Maimbo & al, 2011).
La promotion de l'inclusion financière comporte donc
deux défis complémentaires. D'une part, le développement
du secteur financier formel afin de favoriser la croissance des crédits
à long terme. Cela entrainerait ainsi la réallocation graduelle
du crédit aux ménages et aux PME en favorisant l'investissement
productif. D'autre part, la prise en compte des contraintes économiques
spécifiques aux ménages et aux PME dans les pays en
développement, ainsi que les solidarités financières
traditionnelles (Guérineau & Jacolin, 2014).
Pour le fond monétaire international, l'inclusion
financière permet à l'échelle microéconomique de
financer des projets personnels ou professionnels (FMI, 2016). L'individu ayant
un accès facile aux ressources peut ainsi investir dans des projets
d'avenir, ce qui à terme, bénéficie à l'ensemble de
l'économie. À l'échelle d'une entreprise, l'inclusion
financière permet de faciliter les activités et les
procédures, comme par exemple le versement des salaires ou le paiement
des fournisseurs. À l'échelle de l'Etat, l'inclusion
financière permet un meilleur contrôle et une
réglementation des activités économiques, ce qui facilite
le paiement des impôts ou le versement des subventions. Cependant, de
nombreux individus en Afrique rencontrent des difficultés lorsqu'il
s'agit de récolter des fonds, et tout particulièrement lorsqu'il
s'agit de la levée des fonds formels. En effet, la part du
système financier informel est encore importante (Bekolo-Ebe, 1996).
L'inclusion financière se heurte souvent à la finance informelle,
mêmes si les deux systèmes ne sont pas incompatibles dans une
même économie.
1-1-3- Les barrières à l'inclusion
financière en Afrique
Lorsqu'on parle de barrière à l'inclusion
financière, il s'agit des difficultés auxquelles la population
africaine est confrontée lorsqu'il s'agit de l'accès à la
finance formelle. Il s'agit d'un ensemble de facteurs involontaires qui
constituent un frein à l'accès aux ressources
financières.
57
Les barrières involontaires proviennent le plus souvent
des facteurs subis qui excluent une population. L'exclusion se fait
plutôt du côté de l'offre de services financiers. La
barrière la plus importante en Afrique est la même qu'au niveau
global. Il s'agit entre autres : du manque de moyens financiers (70,8%), la
distance avec la banque trop importante (25,6%), le coût trop
élevé (27, 7%) et le manque de garanties (21,5%) (Klapper et al,
2012). Ces éléments sont les principaux facteurs de l'exclusion
financière involontaire auxquels font face les couches sociales à
faible revenus.
Par ailleurs, d'autres facteurs très importants
influençant l'exclusion financière en Afrique peuvent se situer
au niveau microéconomique. À cet effet, Weil et Zins (2016) se
sont penchés sur cet aspect de la question pour mieux saisir les
facteurs de l'exclusion financière en Afrique. Ils ont pu dégager
deux principaux facteurs que sont : l'éducation et le revenu.
v L'éducation
Concernant l'éducation, la probabilité qu'une
personne ayant suivi un enseignement tertiaire ait un compte en bancaire
augmente de 44%, qu'elle dispose d'une épargne formelle de 31,9% et
qu'elle contracte un crédit dans une banque de 10,1%. Mais lorsqu'une
personne n'a pas eu un enseignement poussé au cours de sa vie, sa
probabilité d'avoir un compte bancaire est de 3%.
v Le revenu
Le manque de moyens financiers les coûts de
transactions trop élevés, le manque de garanties sont des
obstacles qui contribuent à exclusion des couches sociales
défavorisées des services bancaires. L'accès au
financement formel est donc un enjeu majeur pour le développement du
continent. L'inclusion financière en Afrique subsaharienne comme en zone
franc est caractérisée par un accès limité des
ménages ou des TPE au secteur financier formel et par l'importance des
réseaux informels dans l'accès au crédit (Guillaumont
& al, 2013).
1-1-4- L'inclusion financière au Cameroun : bref
état des lieux
Selon un rapport du Centre de recherche pour le
développement international (CRDI, 2019) au Cameroun, moins de 20% des
hommes et 10% des femmes disposent d'un compte auprès d'une institution
financière formelle. L'institution de financement étant les
banques traditionnelles, et les institutions de microfinances, ils ne
facilitent pas l'accès aux crédits aux PME pour assurer
suffisamment leur croissance. Au moins 8millions de camerounais vivent en
dessous du seuil de pauvreté, avec moins de 931 FCFA par jour. Une
enquête réalisée par l'INS
58
(2014) faisait ressortir que 40% de la population sont
pauvres, soit 8.088.876 de personnes vivent en dessous du seuil de
pauvreté qui est de 339.715FCFA par équivalent-adulte et par
an14. Il s'agit des personnes qui ne sont pas capable de satisfaire
leurs besoins essentiels, à savoir se nourrir et subvenir aux besoins
sociaux de base. Cette ampleur des choses permet donc de constater que les
barrières à l'inclusion financière sont le plus souvent
subies par les populations camerounaises.
L'exclusion involontaire des populations à faibles
revenus fait apparaitre l'importance du secteur informel et des TPE au
Cameroun. En effet les distributeurs de crédits informels les plus
importants demeurent la famille, les proches et les réseaux associatifs
avec 70% des emprunteurs. Le recours aux réseaux de relations
personnelles est encore plus fréquent en Afrique subsaharienne et en
zone franc avec 85% des emprunteurs (Guérineau et Jacolin, 2014).
L'usage des réseaux de financements informels témoigne de la
volonté des couches sociales à faible revenu à avoir
accès aux ressources économiques pour le financement.
L'accès aux ressources permet ainsi d'entreprendre une activité
économique génératrice de revenus au quotidien, de
satisfaire les besoins sociaux de base (nutrition, logement, santé,
bien-être...) et par ailleurs, mieux s'insérer dans la
société. Comme le souligne un répondant :
Tout le monde n'est pas le bienvenu dans le
système des banques. Les tontines sont aussi pour nous des sortes de
petites banques qui nous permettent aussi nous, qui avons des
difficultés d'inclusion financière à avoir des petites
ressources financières, pour aussi réaliser nos projets
économiques (propos recueillis le 11 janvier 2022 avec Jean-Daniel
d'EMERCOM à Nkolbisson derrière l'institut).
Cette volonté d'insertion dont fait preuve ces
individus traduit leurs besoins d'autonomisation qui est influencé par
de nombreuses sources de motivations nécessaire à toutes
activités entrepreneuriales.
1-2- Les motivations à l'entrepreneuriat des
couches sociales à faible revenus
La littérature dominante sur la motivation
entrepreneuriale présente une conception mixte : la motivation
fondée sur la volonté et la motivation fondée sur la
nécessité. La première fondée sur la volonté
s'inscrit dans la tradition de l'entrepreneur Schumpétérien
(1934) pour qui les motivations sont fondées sur l'exploitation
d'opportunités d'affaires. La seconde fondée la
nécessité considère que la motivation se traduit par le
développement des activités de subsistances (De Miras, 1982).
Transposée dans le champ de l'entrepreneuriat, la motivation
14 Source :
https://www.investiraucameroun.com/index.php/gouvernance/1212-11865-au-moins-8-millions-de-camerounais-vivent-en-dessous-du-seuil-de-pauvrete-avec-moins-de-931-fcfa-par-jour,
consulté le 17septembre 2021.
59
représente une force positive ou négative, qui
pousse un individu à se lancer dans la création d'une
organisation et en particulier d'une entreprise. Plusieurs travaux dans le
domaine de la science de gestion et de la science économique se sont
intéressés sur la nature des motivations entrepreneuriales.
Les premiers travaux sont ceux de Gilad et Levine (1986) qui
considèrent que, les motivations d'un individu à la
création d'une entreprise peuvent êtres au choix ou de contrainte.
De ce fait, ils distinguent deux champs théoriques sur les motivations
entrepreneuriales à savoir le model « PULL »
fondé sur l'opportunité et le model « PUSH »
fondé sur la nécessité. L'opportunité faisant
référence à la découverte d'une occasion d'affaire
et la nécessité quant à elle correspond à une
absence d'alternatives.
1-2-1- Le model PULL et PUSH des motivations
entrepreneuriales
v Le model Pull et l'entrepreneur
opportuniste
Dans le model « Pull », Gilad et Levine
considèrent que la création d'entreprise résulte d'un
choix délibéré de personnes intéressés par
l'activité entrepreneuriale ou d'une culture entrepreneuriale. Dans ce
cas, l'individu qui prend l'initiative de créer une entreprise le fait
de manière volontaire et délibérée, il peut donc
être considéré comme un entrepreneur opportuniste qui
recherche avant tout l'autonomie, l'indépendance. Il est
également motivé par la recherche de gains économiques
déterminé par sa capacité à identifier et à
exploiter les opportunités d'affaires qui s'offrent à lui.
L'opportunité se présente dans ce cas comme le principal facteur
influençant l'entrepreneur « Pull ». Concernant
l'opportunité, un entrepreneur de notre population d'étude nous
avoue que :
Ce qui m'a motivé dans l'élevage c'est que,
pendant des fins d'années j'ai beaucoup fait dans la vente des porcs
pour des amis. Et au bout de deux ans trois ans j'ai vu que ça
rapportait beaucoup d'argent et qu'ils s'en sortaient bien, voilà
comment j'ai compris que pourquoi moi-même je ne peux pas aussi le faire
c'est comme ça que je me suis vraiment lancé à mon niveau.
(Entretien du 20 janvier 2022 avec Gérard de ADJAS à
Abobo).
Elle fait référence à la faculté
pour l'entrepreneur d'identifier un manque ou un besoin dans le marché
et de combler ce besoin à travers de nouveaux produits ou services, de
nouvelles marchandises, et de dégager des bénéfices
supérieurs aux coûts de production de l'entrepreneur. En somme,
l'entrepreneur opportuniste s'inscrit dans la logique de l'entrepreneur
Schumpetérien motivé par la recherche de gains économiques
et le désir d'indépendance.
v Le model Push et l'entrepreneur par
nécessité
60
Dans le model « Push », Gilad et Levine (1986)
postulent que les individus qui se trouvent en situation de
nécessité, voire de précarité sont contraints
à créer leur entreprise par des facteurs externes et
négatifs. Il peut s'agir entre autres : de la difficulté à
trouver un emploi stable, le salaire médiocre, le travail non flexible
ou encore l'insatisfaction au travail. Ces facteurs motivationnels se
retrouvent chez les porteurs de projet en situation de discontinuité
négative par rapport à la trajectoire de vie qu'ils se sont
fixés. L'entrepreneur de type Push se présente comme un
entrepreneur soumis à la contrainte, dans la mesure où l'ensemble
des situations qui s'imposent à lui créée la
nécessité de s'auto-employer (Gilad et Levine, cité par
Nkakleu, 2016 : 8). Dans ces conditions, les individus motivés par les
facteurs Push peuvent être considérés comme des exclus de
la société, à cet effet ils cherchent à s'affirmer
et à être reconnu de tous à travers la création
d'entreprise. En somme les motivations des entrepreneurs contraints ou de
nécessités résultent de deux dimensions : à savoir
la motivation de nature économique qui résulte de la perte d'un
emploi. Et la motivation de nature non économique qui provient de
l'insatisfaction d'une vie professionnelle et du désir de
s'auto-affirmer. En contexte camerounais, les entrepreneurs de
nécessité se battent le plus au quotidien pour leur survie. Leur
motivation principale à ce niveau provient de la nécessité
de rechercher beaucoup d'argent pour prendre soin d'eux et assurer les charges
familiales. Les propos d'un répondant en sont la parfaite illustration
:
La situation économique déjà
actuelle qui n'est pas du tout facile de joindre les deux bouts, parce que
justement ce que tu peux avoir sur le plan professionnel parfois est
insuffisant. Vue la conjoncture économique même déjà
actuelle, et les charges qui ne sont pas du tout évident.
(Entretien du 30 décembre 2021 avec Loïc d'EMERCOM à
Oyom-Abang chapelle).
Les propos de cet enquêté traduisent tout
simplement le désir des populations à faible revenu à
faire face aux contraintes économiques. Le coût de vie et les
contraintes familiales leurs amènent ainsi à trouver d'autres
sources de revenus afin de s'en sortir au quotidien.
Au-delà des facteurs motivationnels de nature (Pull)
et (Push) présentés comme agissant de façon exclusive sur
les entrepreneurs volontaires et contraints. Les économistes tels que
Gabarret et Vedel (2015) mettent en exergue une approche mixte des motivations
entrepreneuriales constituées d'une part des facteurs motivationnels
positifs et des facteurs négatifs, et d'autre part les facteurs
motivationnels économiques et non économiques.
Gabaret et Vedel (2015) constatent que ce sont les facteurs
négatifs en général (chômage, manque d'argent) qui
déclenchent chez les individus la décision de création
des
1-2-2- Les facteurs motivationnels négatifs et
positifs/économiques et non économiques
61
entreprises. Mais la combinaison de ces facteurs
négatifs aux facteurs positifs (désir de travailler, désir
d'augmenter son revenu) est à la base de la création
d'entreprise. Les facteurs négatifs et positifs se situent sur un
continuum qui associés aux motivations économiques et non
économiques, aboutissent à plusieurs combinaisons qu'on peut
qualifier de motivations mixtes.
Tableau 1 : Les dimensions de la motivation
entrepreneuriale
Facteurs motivationnels
|
Négatifs
|
Positifs
|
Non-économiques
|
Manque de satisfaction
|
Désir de satisfaction
|
|
Désir d'indépendance
|
Économiques
|
Manque d'emploi
|
Désir de travailler
|
|
Désir d'augmentation de
revenu
|
|
Source : Gabarret et Vedel (2015 : 15).
Nkakleu (2016) s'inscrit dans cette logique dans une
recherche portant sur les motivations des entrepreneurs aux pieds nus au
Cameroun. Il ressort que les facteurs motivationnels des entrepreneurs sont
à la fois économiques et non économiques,
influencées par des facteurs positifs et négatifs.
v Les motivations économiques
Il s'agit entre autres de la perte d'emploi qui provoque le
manque de ressources financières, le désir de gagner de l'argent,
le désir d'épargner, le salaire insuffisant dans l'emploi
occupé ou encore l'opportunité d'affaires. Les entrepreneurs aux
pieds nus qui renvoient aux entrepreneurs informels ou de
nécessités sont la plupart du temps confrontés à
l'insatisfaction des besoins vitaux de bases. Ces besoins concernent
généralement l'alimentation, la santé, le logement,
l'éducation des enfants, le déplacement... en effet comme
l'explique Nkalkleu, (2016 : 14), « c'est la recherche du
bien-être qui favorise chez ces derniers la création de diverses
activités de survie ». De même, ces motivations à
entreprendre sont influencées par de nombreuses dimensions telles que
:
Ø Le désir de faire quelque chose : il faut
dire que l'exercice d'un métier est un impératif pour pouvoir
vivre au quotidien.
Ø Sortir de la situation de sans emploi : entreprendre
une activité permet non seulement de passer du statut de chômeur
à travailleur, mais également de pouvoir s'occuper de son temps.
Les affirmations d'un répondant en sont la preuve :
62
Ce qui m'a motivé à développer mon
activité, c'était le désir de s'occuper il fallait que
j'aie une profession. Vous savez ce n'est pas facile de s'insérer dans
la fonction publique donc il me fallait avoir une occupation, et il fallait
également que je participe au développement à mon niveau
(entretien du 27décembre 2021 avec Aristide à Tsinga).
Ø Devenir son propre patron :
généralement, le fait pour un individu de créer sa propre
affaire dans le but de sortir du statut de sans emploi fait de ce dernier son
propre patron qui s'auto fixera des règles et des principes de
fonctionnement.
v Les motivations non économiques
Les motivations non économiques sont pour Nkakleu
(idem) essentiellement des motivations sociales qui peuvent être
représentées en quatre (4) catégories. Il s'agit entre
autres :
Ø L'aide de la famille, la satisfaction des besoins
alimentaires des enfants, la scolarisation des enfants, la satisfaction des
besoins personnels. Généralement, ces facteurs motivationnels
sont communs aux hommes et aux femmes micro entrepreneurs dans l'univers
camerounais qui recherche avant tout à satisfaire les besoins
essentiels.
Ø La recherche d'indépendance et d'autonomie,
la poursuite des études supérieures, la réalisation d'une
passion, la poursuite d'un entrepreneur ayant réussi. En allant dans ce
sens, un enquêté affirme :
Ce qui m'a réellement motivé a
démarré mon activité entrepreneuriale je suis jeune
étudiant avec mes différents diplômes, j'ai eu à
faire les concours mainte fois et je n'ai pas réussi, et avec
l'âge et avec le temps qui passe. J'ai voulu exercer quelque chose qui
puisse me donner de quoi manger pour ne plus dépendre des parents »
(entretien du 04 janvier 2022 avec Gérôme d'EMERCOM au
camp-Sonel).
Tout comme les facteurs précédents, ils sont
également communs aux hommes et aux femmes. Il est courant de voir dans
les marchés et les villes camerounaises, des jeunes très jeunes
micro entrepreneur de nécessité qui se lancent dans des petits
commerces dans le but d'accumuler des bénéfices afin de pouvoir
se payer la scolarité en période de rentrée scolaire.
Certains encore le font dans le but de s'autonomiser dû à la
faible offre d'emploi du secteur public.
Ø La troisième catégorie concerne des
facteurs exclusivement liés aux femmes. Il s'agit notamment : la prise
en charge de la grossesse par la femme, la souffrance dans le foyer conjugal,
disposé de temps pour effectuer les tâches
ménagères.
63
La difficulté liée à la vie conjugale
amène certaines femmes à s'autonomiser pour mieux prendre soin
d'elles et du foyer dans un contexte ou l'époux ne joue pas toujours son
rôle. Une jeune entrepreneure expliquait à cet effet que :
Ce qui m'a motivé c'est le fait déjà
d'être une femme au foyer. Tu as la charge des enfants, tu as ton mari
qui sort chaque jour pour travailler avec son travail son salaire et les
enfants on ne parvenait pas toujours à joindre les deux bouts. Compte
tenu de mon dynamisme, voilà pourquoi j'ai décidé de
mettre sur pied de démarrer mon petit élevage (entretien du
28 décembre 2021 avec Simone d'EMERCOM à Nkolbisson-chapelle).
Ø La dernière catégorie concerne des
facteurs liés essentiellement aux hommes qui sont motivé par le
désir de quitter leur famille ou de quitter le pays.
Dans les sociétés patriarcales africaines et
camerounaise, le garçon est généralement appelé
à quitter la famille parentale pour s'autonomiser et fonder sa propre
famille. L'absence d'emploi constitue la plupart du temps un frein à
leur départ. Les pressions familiales, sociales et le poids de
l'âge leur contraint souvent et à s'auto employer à travers
des micros et petites entreprises dans divers secteurs d'activités, ceci
dans le but de s'autonomiser et de fonder une famille.
2- LES SECTEURS D'ACTIVITÉS DES ENTREPRENEURS AU
CAMEROUN15
Les secteurs d'activités sont
généralement regroupés par secteur économique
caractérisé par les différentes activités qu'on
peut insérer dans le secteur informel. Au Cameroun, l'on distingue ainsi
le secteur primaire, le secteur secondaire et le secteur tertiaire.
Le secteur primaire pour sa part comprend plusieurs domaines
d'activités. Il s'agit entre autres de l'agriculture qui est le
principal moteur économique du pays, l'élevage et la pêche
qui sont des activités importantes du pays, l'exploitation
minière et l'exploitation forestière.
Le secteur secondaire regroupe les activités
liées à la transformation des matières premières
issues du secteur primaire. Il s'agit entre autres des industries
agroalimentaires, les scieries, les métallurgies, la fabrication des
biens de consommation légère et les textiles.
15Cette sous partie de notre travail a
été inspirée à partir d'un article de 2021du groupe
objectif-import-export :
https://www.objectif-import-export.fr/fr/marches-internationaux/fiche-pays/cameroun/marche-principaux-secteurs,
le 18 octobre 2021.
64
Le secteur tertiaire quant à lui regroupe toutes les
activités économiques qui appartiennent au secteur primaire, au
secteur secondaire et divers types de services. Il s'agit notamment du
transport, du commerce, de l'artisanat, la restauration.
Tableau 2 : Les indicateurs des secteurs
d'activités au Cameroun en 2021
Répartition de
l'activité
économique par secteur
|
Agriculture
|
Industrie
|
Services
|
Emploi par secteur (en % de l'emploi total
|
43,5
|
14,4
|
42,1
|
Valeur ajoutée (en % du PIB
|
15,2
|
25,0
|
51,6
|
Valeur ajoutée
(croissance annuelle en %)
|
1,1
|
3,4
|
-0,8
|
|
Source : consulté sur :
http://www.objectif-import-export.fr,
le 18 octobre 2021.
Au Cameroun, 90% des jeunes entrepreneurs se convertissent
dans les activités du secteur tertiaire à vocation
libérale (Kouete, 2020). On retrouve généralement des
commerçants dépendants et indépendants, des artisans...
ils exercent généralement ces activités dans un cadre
informel. Certains encore exercent des activités du secteur primaire
dans un cadre informel afin de pouvoir maintenir au quotidien. Le secteur
informel représente le principal pourvoyeur d'emploi au Cameroun, de
plus il comprend plusieurs particularités qui font sa force.
2-1- Le secteur informel
Le terme « secteur informel » a
été employé pour la première fois dans le rapport
d'une mission générale sur l'emploi menée par le bureau
international du travail (BIT) en 1972 au Kenya. Il désignait alors un
secteur non structuré en dehors des règlementations
administratives.
Selon un rapport de l'UNESCO (2000), le secteur informel
renvoie à des unités de production qui opèrent typiquement
à petite échelle, avec un faible niveau d'organisation, avec une
absence de division entre le travail et le capital entant que facteurs de
production. En effet,
65
l'objectif premier de ce secteur est de créer des
emplois et d'engendrer des revenus pour les personnes concernées.
Au Cameroun, le secteur informel occupe une place
prépondérante dans la création des richesses et des
emplois. En effet, une étude de l'EESI (enquête sur l'emploi et le
secteur informel) relève que le secteur informel génère
50% du PIB et contribuait à 29% des richesses nationales en 2005 (INS,
2005). En 2010, 89% des populations actives en font partie, soit 9,2millions de
personnes essentiellement dans les métiers de l'agriculture et de
l'artisanat (INS, 2010). Une étude plus récente de l'OIT (2017)
fait état de ce que depuis une décennie, le secteur informel
emplois 90% de la force active et assure la survie de nombreux travailleurs. En
effet, depuis la crise économique des années 80, le secteur
informel à durablement gagné de l'ampleur au point de devenir le
principal pourvoyeur d'emploi urbain. Il serait passé de 88,2% en 1993
à 96,1% en 2001 avant de se stabiliser autour de 90% et 88% entre 2005
et 2014 (OIT, 2017). Le secteur informel promeut l'entrepreneuriat de
subsistance et renforce les capacités d'adaptions des populations jeunes
et adultes à faible revenus dans le tissu économique.
Le secteur informel est une économie issue des
productions locales et vouer à satisfaire un marché restreint
d'individus. Il permet à ceux qui l'exercent de satisfaire leurs besoins
vitaux de base (nutrition, logement, santé) et ceux de leur famille.
Kouete (2020), dans une recherche qui portait sur la place du secteur informel
en contexte camerounais ressort 7 principales caractéristiques de ce
secteur d'activité :
Ø Le non enregistrement administratif ;
Ø L'absence ou la faible réglementation de
l'activité ;
Ø L'échelle relativement faible des
activités et des capitaux mobilisés ;
Ø L'absence de local professionnel fixe ;
Ø L'évolution en marge des circuits
organisés ;
Ø Le recours privilégier à la main d'oeuvre
famille ;
Ø L'absence de dispositif de sécurité et de
protection sociale.
L'institut national de la statistique (INS, 2010) au Cameroun
pour sa part dégage trois principales caractéristiques du secteur
informel : l'indépendance du promoteur c'est-à-dire, l'individu
exerçant son activité est son propre patron et travaille à
son propre compte ; l'absence d'enregistrement administratif, ici
l'activité n'est pas enregistrée dans le cadre des
fiscalités ; et enfin l'absence de comptabilité formelle.
66
Le secteur informel camerounais est relativement ouvert
à tout individu désirant entreprendre une activité
génératrice de revenus. Le statut social et le niveau scolaire
importe peu dans ce domaine. Seule la capacité à s'adapter et
à écouler ses produits sont déterminants. Un rapport de
l'OIT (2014 : 21) mentionne à ce sujet que « n'importe qui peut
entamer une activité du secteur informel, parce qu'il s'agit
d'activités qui ne requiert pas une formation élevée ni un
capital important ». Concernant les secteurs d'activités, les
rapports de l'INS (2005 & 2010) relèvent que le secteur informel est
présent dans tous les secteurs d'activités notamment dans le
secteur primaire et le secteur tertiaire. Pour ce qui est du secteur tertiaire,
l'artisanat et le commerce semblent être en tête. On retrouve ici
de diverses activités telles que la coiffure, la soudure, la menuiserie,
le tissage, la couture fortement répandu le long des allées dans
les villes camerounaises. Pour ce qui est du domaine du commerce, il apparait
comme celui dans lequel on retrouve à la fois une multitude de
catégories sociales à savoir : jeunes, adultes, hommes, femmes.
Ils sont regroupés autour de petit commerce de gros et de détails
tel que la vente des produits agro-alimentaire (vivre frais, produit de
première nécessité) la friperie, les objets
ménagers. Il concerne également l'offre des services notamment la
restauration, les buvettes. Il arrive parfois que les populations du fait de la
conjoncture économique exercent plusieurs activités à la
fois tant dans le secteur primaire que tertiaire a la quête de ressources
financières dans une dynamique de débrouillardise.
Concernant le secteur informel primaire, l'agriculture est le
secteur dans lequel la grande majorité des jeunes exercent un emploi
92,0% (BIT, 2015). En milieu rural, les activités agricoles constituent
la principale source de survie vouée d'une part à la consommation
et d'autre part à la commercialisation. On y retrouve des cultures
telles que le maïs, l'arachide, les pommes, les légumes, le
plantain. À côté de ceux-ci il y'a d'autres cultures
uniquement destinées à la vente tel que le cacao, et le
café.
Par ailleurs, l'élevage s'impose actuellement dans
l'économie camerounaise il participe ainsi à prêt de
165millions du PIB et procure des revenus autour de 30% aux populations rurales
(Zakari, 2021). L'élevage connait aujourd'hui une nouvelle
catégorie d'acteur en quête de revenus il s'agit entre autres des
jeunes diplômés chômeurs qui n'ayant pas souvent
accès aux services financiers formel se lancent dans l'entrepreneuriat
pastoral. Il s'agit précisément des bovins, des caprins, des
ovins, des porcins et des volailles. Le secteur des volailles et des porcins
est très pratiqué par les entrepreneurs du fait de la forte
demande dans le marché de consommation. Ces différentes
activités varient selon la taille en fonction des ressources dont
disposent les individus qui les exercent.
67
2-2- Les différentes formes
d'entreprises
Dans le monde du travail, il existe une multitude
d'entreprises qui diffèrent le plus souvent selon leurs formes et leurs
tailles. On retrouve généralement des entreprises individuelles
ou micros entreprises, des très petites entreprises, des petites
entreprises, les petites et moyennes entreprises et les grandes entreprises.
La classification des entreprises n'obéit pas qu'au
seul critère de la taille et de l'effectif. D'autres facteurs tels que
le secteur d'activité, le chiffre d'affaire, le statut juridique peuvent
intervenir. L'entrepreneuriat informel se situe dans ces
caractéristiques, bien qu'elle évolue dans la stricte
illégalité, elle constitue au même titre que les autres un
secteur visant la promotion de l'activité économique. Selon
Baheke (2016), les petites entreprises ont une place considérable dans
les pays en développement en matière de création d'emplois
et de contribution à la création des revenus. De ce fait elles
contribuent à la réduction du chômage et de la
pauvreté.
La notion d'entrepreneuriat informel dans les pays en
développement (PED) met en exergue deux types d'entrepreneurs du secteur
informel (Berrou, 2014).
Ø Le premier groupe d'entrepreneur qui est très
répandu est principalement constitué d'individus travaillant
à leur propre compte dans des activités à faible niveau de
capital. Il s'agit plus précisément de jeunes disposants de
faibles savoirs faires et compétences entrepreneuriales (peu ou pas
diplômé, peu qualifié), ils sont généralement
motivés par la recherche de gain financier en contexte de
pauvreté économique.
Ø Le second groupe d'entrepreneur qui est minoritaire
est constitué d'entrepreneurs indépendants, il s'agit surtout des
petits patrons de micro et petites entreprises. Les revenus des entrepreneurs
de ces groupes sont largement supérieurs aux salaires minimums en
vigueur dans les pays concernés. Dans ce cas, ils sont motivés
par la saisie des opportunités de l'informalité qui se
présentent à eux.
Au Cameroun, la question de l'informalité des petites
entreprises est de plus en plus récurrente. Le choix est porté
par la majorité des entrepreneurs sur les micros et les petites
entreprises opérant essentiellement dans le secteur informel. Parmi les
critères retenus pour définir les entreprises informelles, les
plus couramment utilisés sont la taille de l'activité de
l'entreprise, l'enregistrement auprès d'une organisation étatique
et la tenue d'une comptabilité régulière (Baheke, 2016).
On y retrouve des individus qui exercent de manière indépendante
et à leur propre compte, ils produisent des biens et des services
très proches des entreprises formelles à la seule
différence que ces activités ne sont pas inscrites dans le
système de fiscalité.
68
Parmi ces entrepreneurs on distingue entre autres les
commerçants, les artisans, les agriculteurs, les éleveurs
(Bravo-Bouyssy, 2012). D'après la loi n° 2010/001 du 13 avril 2010
portant promotion des petites et moyennes entreprises (PME) au Cameroun, les
entreprises sont classées sur le critère quantitatif à
savoir le nombre de personnes employés, et les chiffres d'affaires que
nous pouvons résumer sous forme de tableau
Tableau 3 : Critère de classification des
entreprises au Cameroun
Type d'entreprise
|
Nombre d'employés
|
Chiffre d'affaire (hors taxe)
|
TPE
|
5 personnes maximum
|
= (15 000 000) quinze
millions de francs
|
PE
|
Entre (06) six et (20) vingt personnes
|
Entre (15) quinze et (100) cent millions de francs
|
Source : inspiré de Baheke (2016).
Le choix des entrepreneurs pour les micros et petites
entreprises individuelles est plus contraint que volontaire. Ce choix est
dû à l'existence de nombreuses barrières dans
l'accès au crédit notamment formel (banques, microfinances). Dans
les pays en développement, les barrières à l'accès
au financement des activités entrepreneuriales font appels à
d'autres sources de financement telles que l'épargne personnelle et les
réseaux associatifs. Ils constituent généralement le
principal moyen de démarrage des activités économiques
(Zuin, 2004).
69
2-3- L'accès au financement
entrepreneurial
L'accès au crédit financier est indispensable
pour tout individu désirant entreprendre une activité
économique génératrice de bénéfices. Dans le
but de booster l'insertion des jeunes et favoriser l'inclusion
financière pour tous, l'Etat camerounais a fait de l'emploi depuis le
début des années 2000 un axe majeur dans sa stratégie de
développement et de lutte contre la pauvreté. Ceci s'est
illustré à travers la mise sur pied d'une batterie d'acteurs
institutionnels tels que le MINPMESSA, le MINJEC, le MINEPIA, le MINADER. Ces
structures ayant pour but de former, d'encadrer et d'accorder des
crédits aux potentiels entrepreneurs. Toutefois, ces initiatives n'ont
pas réussi à promouvoir l'inclusion financière en faveurs
de ces jeunes. Selon le PANEJ (2015) les difficultés d'accès au
financement sont dues au manque général de produits financiers
adaptés aux besoins des jeunes entrepreneurs, les taux
d'intérêts, les coûts de transactions et les garanties
exigées qui ne correspondent pas aux réalités sociales.
Pour Edimo (1998) la recherche d'opportunité de financement par les
entrepreneurs se concrétise à travers les réseaux sociaux
(associations informelles de crédits, liens familiaux et amicaux) et les
communautés d'appartenances. Ces réseaux constituent un
déterminant essentiel du dynamisme des entrepreneurs informels tant dans
les pays du nord que dans les pays du sud.
Au Cameroun, entrepreneurs informels s'orientent vers les
réseaux associatifs de relations interpersonnelles fondés sous le
prisme de l'économie sociale et solidaire. Il s'agit le plus souvent des
systèmes de tontines qui permettent l'accès aux ressources
financières (épargne, cotisation, emprunt) nécessaires
à la mise en oeuvre des activités entrepreneuriales (Warnier,
1991). En guise d'illustration, un entrepreneur nous explique : « ce
n'est pas facile de monter un dossier de financement pour aller voir l'Etat
pour qu'on finance un projet. Non seulement ça met long alors
qu'à la tontine c'est très facile vraiment ça booste nos
activités, ça nous aide à nous réaliser
nous-même et sa nous donne l'emploi » (entretien du
27décembre 2021 avec Aristide d'EMERCOM à Oyom-abang). Les propos
de ce répondant témoignent donc l'importance des réseaux
associatifs pour le financement des activités entrepreneuriales qui sont
d'un apport non négligeable.
70
3- LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX
ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES
Dans cette dernière section de notre chapitre, il est
question pour nous de présenter l'apport du système tontinier
dans les activités économiques des entrepreneurs. Pour se faire,
il serait judicieux de commencer par une présentation des
déterminants qui favorisent l'adhésion des entrepreneurs au
système tontinier.
3-1-Les déterminants du recourt au système
tontinier
De par la nature contraignante des structures formelles
(banques, microfinances...) Dans l'accord des ressources financières,
les entrepreneurs lors du démarrage ou de l'exercice de leur
activité ont souvent recourt aux structures d'accompagnement informelles
(Colleman, 2000). Pour Nkakleu (2001), l'accès difficile au financement
formel et l'insuffisance des fonds propres poussent le plus souvent les
entrepreneurs à recourir aux associations d'épargnes rotatives et
de crédits (AERC). Basé sur la confiance, et l'entraide mutuelle,
ces associations semblent donc plus appropriées pour l'accompagnement de
la jeune entreprise. Bekolo-Ebe (1989) identifie les déterminants du
recourt aux associations d'épargnes et de crédits informels
à deux niveaux. D'une part, à travers le difficile accès
aux sources de financement formel, notamment les lourdeurs dans les conditions
de prêts qui tendent à marginaliser les couches sociales à
faible revenus. L'exigence des garanties qui contribue considérablement
à évincer les jeunes entrepreneurs et crée ainsi un
complexe d'infériorité vis-à-vis des banques officielles.
D'autre part, les facilités d'accès au crédit, l'absence
de lourdeurs comme autres facteurs favorise le drainage des individus vers les
associations rotatives d'épargne et de crédit qui promeut
l'inclusion financière. Ce système est pour un de nos
répondants un outil de financement simple et pratique :
Moi personnellement je pense que le système
tontinier est encouragé, il joue un grand rôle surtout pour nous
les jeunes qui nous cherchons qui nous battons. Le financement est de
gré à gré il n'y a pas de longues procédures pour
avoir de l'argent tout est basé sur la confiance (entretien du 04
janvier 2022 avec Gérôme d'EMERCOM au camp-Sonel).
Au-delà des facilités d'accès aux
ressources financières, Brillet (2012) relève que la recherche du
lien social, de la solidarité et du sentiment d'appartenance
réciproque constituent également des facteurs qui poussent les
individus dans l'adhésion aux réseaux tontiniers.
71
3-1-1- L'apport du système tontinier aux
activités économiques
Parmi les réseaux d'accompagnement informels (aide
familiale, réseaux associatifs, prêt amical...) le
phénomène tontinier apparait comme le système de
financement le plus étudié depuis le début des
années 90. Ce système a atteint aujourd'hui dans plusieurs pays
du tiers-monde et plus particulièrement en Afrique des proportions
exceptionnelles. Son importance est telle que la Banque mondiale (1989) s'est
intéressée à ce phénomène dans un rapport
portant sur le développement dans le monde. L'abondante
littérature sur les tontines dans le monde s'accorde à justifier
leur développement par l'existence de nombreuses barrières
à l'accès au crédit formel. Cette situation a pour effet
d'encourager certains acteurs informels à s'organiser par
eux-mêmes, à travers la création des cercles de
solidarité financière fondé sur l'incitation à
l'épargne et la certitude d'obtenir un prêt.
Au Cameroun, le secteur informel occupe une place importante
dans la création des richesses et des emplois, il regroupe près
de 90% des camerounais. Certains entrepreneurs par manque de ressources
financières nécessaires au développement de leur
activité économique font souvent recours au système
tontinier. Ils bénéficient ainsi d'un accompagnement aussi bien
tangible (financier, matériel, humain) qu'intangible (savoir-faire,
expérience, compétences) pour mieux gérer leur affaire
(Djoumessi & al, 2017). En matière de promotion d'entrepreneuriat,
ces associations sont d'une contribution non négligeable qui peut
être analysé sur le plan financier et sur le plan relationnel.
v L'apport financier
En règle générale, le système
tontinier offre des services financiers aux individus tels que
l'épargne, les cotisations avec redistribution, les emprunts. Ces
prestations financières leurs permettent ainsi de faire face à
leur besoin de financement dans des activités qu'ils jugent rentables.
À cet effet, Tello Rozas et Gauthier (2012 : 6) souligne que «
les AECR constituent l'une des formes d'organisations les plus populaires pour
financer les projets dans les pays où l'accès au crédit
est restreint ».
v L'épargne
Les problèmes de financement sont l'une des
principales difficultés des jeunes entrepreneurs en Afrique et au
Cameroun. La tontine est un outil d'accumulation des capitaux à court ou
à long terme. Elle oblige d'une certaine manière les individus
à verser une somme à une date fixe dans le mois nécessaire
au développement des activités économiques (CRDI, 2019).
En effet, l'épargne et la possibilité d'obtenir un emprunt
constituent généralement la
72
première motivation d'adhésion aux associations
tontinières. L'épargne permet aux individus membre de faire
fructifier leurs revenus à travers des versements constants. Dans
certaines associations, l'épargne génère des
bénéfices non négligeables de par les
intérêts qu'elle impose aux emprunteurs. Henri & al (1991)
parlent de ce fait d'une épargne récupérable avec
anticipation c'est-à-dire une épargne dont le membre peut entrer
en possession à n'importe quel moment, lorsqu'une situation inattendue
ou favorable se présente à lui. Dans le même sens,
Djoumessi & al (2017) considèrent que le premier apport de
l'association pour le financement est l'épargne. En effet,
l'épargne avec bénéfice permet d'augmenter le capital
d'investissement et le fonds de commerce de l'individu.
L'argent obtenu à l'issue de l'épargne permet
donc très souvent aux individus concernés de faire des
investissements productifs dans des activités diverses telles que le
petit commerce, l'artisanat, l'agriculture, l'élevage... (Tombola,
2010). Ces capitaux permettent ainsi aux entrepreneurs de palier aux
difficultés quotidiennes et de faire face aux imprévus au sein de
leur activité génératrice de revenus (achat de
matériel de travail, achat de biens productifs, achat des produits de
vente...) (Kazadi et al, 2021). Elles favorisent ainsi pour Kamdem (2011) la
rapidité d'intervention nécessaire au développement
d'activités économiques des entreprises en phase de
démarrage ou en cour de développement.
Le système tontinier se présente dès
lors comme un outil d'accumulation des fonds via l'épargne
nécessaire à l'investissement d'activités
économiques rentables (Issoufou, 1992). Cela traduit ainsi toute
l'importance et la nécessité de l'épargne tontinale comme
roue de secours dans la gestion des petites entreprises. Comme l'explique
(Besley & al, 1993 cités par Tello Rozas & Gauthier, 2012) les
tontines sont des micro-banques qui contribuent à la survie et à
la croissance des économies qui ont des restrictions d'accès aux
sources bancaires formelles.
v L'emprunt
Pour Owondi (1992 : 670), « l'emprunt apparait comme
l'élément nodal aux seins des regroupements tontiniers
». Il s'agit d'une prestation financière dont
bénéficient les membres au sein d'un réseau financier.
L'emprunt tout comme l'épargne constitue l'une des raisons
d'adhésion des individus au système tontinier. Dans la tontine,
l'emprunt est lié à l'épargne et l'obtention d'une
cagnotte est soumise à une prime d'enchère dont le prêteur
a l'obligation de fructifier. Ce système de prêt est l'apanage des
tontines à enchère, ou l'ensemble des gains collectés sont
soumis aux enchères et céder au plus offrant qui dispose du gros
lot qui pourra lui permettre de résoudre des difficultés
professionnelles. Nkakleu (2001) évoque de ce fait
73
l'utilisation des services tontiniers tels que l'emprunt pour
financer la création voire le développement de l'entreprise. De
même Bekolo-Ebe (1989) explique que la tontine simple avec caisse de
prêt permet à chaque membre de bénéficier d'un
emprunt en situation de nécessité, remboursable avec des
intérêts. Contrairement au système bancaire officiel les
emprunts cédés aux individus dans les tontines n'imposent pas de
coûts de transactions élevés ni des mises en gages. Ils
sont surtout régis par la parole et l'honneur.
Pour Boutchang (2019), les tontines ont pour but principal
d'octroyer des crédits à leurs membres. Le système
tontinier apparait ainsi comme une sorte de banque de crédit permettant
l'allocation de ressources financières aux individus. Il permet ainsi
d'apporter des solutions aux problèmes de financement dont font faces
les entrepreneurs en phase de démarrage. Grâce à son
système de prêt, la tontine favorise l'inclusion
financière, qui à son tour favorise le financement des
activités économiques et booste la dynamique entrepreneuriale. De
plus grâce à l'absence de formalisme et de conditions strictes
dans l'octroi des crédits, les entrepreneurs peuvent emprunter pour
financer le démarrage ou le fonctionnement de leurs entreprises.
Djoumessi & al (2017 : 32) soutiennent à cet effet que « le
premier apport de l'association pour le financement est l'épargne,
l'augmentation du capital et du fonds de commerce, ensuite il s'agit des
facilités d'emprunt ». Dans certaines tontines, un membre de
l'association peut présenter son projet à financer à
l'association. L'association le discute et si elle accepte, une caisse
spéciale pour le projet de la personne en question est
créée et un prêt lui est accordé (Creusot, 1999).
La contribution du système tontinier dans le
développement des activités économiques va au-delà
de la valeur financière. Ce système favorise également une
forme d'entraide basée sur le partage des savoirs faires et des
compétences nécessaires au développement des performances
entrepreneuriales (aider, former, enseigner, conseiller...) (Paul, 2009).
v L'apport relationnel
Au-delà de leurs valeurs principalement
financières, les systèmes tontiniers sont également des
cercles d'apprentissages. Il s'agit plus explicitement des associations
où les membres peuvent changer des connaissances sur leurs affaires,
partager des idées, transmettre des conseils bénéfiques
à tous. Cette forme de solidarité permet aux uns et aux autres
d'améliorer les rendements ou la croissance de leur activité. Ils
sont pour ainsi dire des réseaux d'accompagnement symbolique ou chacun
peut bénéficier des savoirs faires des autres.
74
3-1-2- Le concept d'accompagnement en
entrepreneuriat
Parmi les pratiques d'aide à la création des
entreprises, l'accompagnement est souvent présenté comme quelque
chose de singulier à travers les idées qu'il véhicule et
des représentations qui en découlent (Sammut, 2015). Le terme
accompagnement est l'apanage des structures et programmes d'aide à la
création d'entreprise. Pourtant ce concept ne se limite pas seulement au
niveau administratif, il regroupe une multitude d'acteurs et d'organisations
qui interviennent dans le processus entrepreneurial. La notion d'accompagnement
renvoie donc à un ensemble d'appuis à la création ou
à la gestion de l'entreprise, de façon symbolique ou pas, de
façon ponctuelle ou tout au long du processus entrepreneurial (Moskolai
et Myede, 2017).
L'accompagnement est aussi spécifique à la
jeunesse de l'entreprise (création et/ou démarrage).
L'accompagnement se présente ainsi comme une
pratique d'aide à la création d'entreprise fondée sur une
relation qui s'établit dans la durée et qui n'est pas ponctuelle,
entre un entrepreneur et un individu externe au projet de création. A
travers cette relation, l'entrepreneur va réaliser des apprentissages
multiples et va pouvoir accéder à des ressources ou
développer des compétences utiles à la
concrétisation de son projet (Cuzin et Fayolle, 2004 : 3).
Au cours du processus d'accompagnement, les expériences
partagées, les connaissances acquises permettent au créateur de
s'engager dans un cheminement plus ou moins repensé par rapport à
la trajectoire originelle. Pour Shane et Venkataraman (2000), l'accompagnement
provient de l'ensemble des liens externes que l'entrepreneur tisse pour
identifier et développer son opportunité d'affaire. Ainsi,
être accompagné ce n'est pas seulement faire appel à un
spécialiste de l'accompagnement mais aussi avoir recourt à un
réseau d'individus et d'organisations qui place en premier plan l'aspect
interpersonnel dans la relation sociale qui les unis. Ici le réseau de
l'individu joue un premier rôle en termes de découverte
d'opportunité et d'accès aux ressources (financières,
matérielles) nécessaire au développement de son
entreprise. L'accompagnement consiste le plus souvent à former,
conseiller, aider le nouvel entrepreneur afin de lui faire acquérir des
compétences et le rendre autonome (Sammut, 2015)
Dans le cadre des AERC, un membre qui détient des
connaissances ou une expérience pratique dans un domaine
d'investissement particulier peut servir de coach aux novices. Ainsi ceux qui
désirent se lancer peuvent solliciter son expertise afin
d'acquérir des compétences et des savoir-faire nécessaires
au démarrage ou à la gestion de leurs activités
entrepreneuriales. Il s'agit le plus souvent d'un soutient physique et
technique concernant la gestion de l'activité. Les connaissances
transmises par les uns et les autres permettent aux entrepreneurs
d'acquérir
75
de l'expertise utile dans l'impulsion de leurs dynamiques
entrepreneuriales. Comme le soulignent Djoumessi et al, (2017), les structures
d'accompagnement informelles offrent à l'entrepreneur un accompagnement
à la fois financier, matériel et technique pour l'aider à
réussir.
En somme, ces regroupements sont également des cercles
d'entraide relationnelle. Ils sont fondés sur le partage des
expériences, de savoir-faire, de conseils, et d'enseignement, entre
membres. Cette forme d'accompagnement ne nécessite pas de moyens
financiers ni une très grande expertise en entrepreneuriat, mais
davantage un esprit de solidarité et de confiance entre les membres. Il
faut dire que, l'expertise et les connaissances acquises par les membres
à travers leurs anciennetés dans leur secteur d'activité
peuvent être mises au service de l'intérêt
général. Un membre ayant réussi en entrepreneuriat peut
servir de mentor ou de coach pour les nouveaux entrepreneurs. Ils pourront
ainsi bénéficier de ses conseils, de son expérience pour
mieux développer leurs activités entrepreneuriales.
De tout ce qui précède, il ressort que la
contribution du système tontinier aux activités
économiques est de nature financière (épargne, les
cotisations, emprunt), à laquelle on retrouve une aide relationnelle
(coaching, conseil, aide, formation). Nous pouvons donc résumer ces
contributions dans le tableau suivant :
Tableau 4 : Illustration des différents types
contributions du système tontinier aux activités
économiques.
Types de contributions
|
Composantes
|
Effets
|
Apport financier
|
Épargne, emprunt,
cotisation (mensuelle,
hebdomadaire),
|
Accès aux ressources
financières, Financement des activités,
création des richesses
|
Apport relationnel
|
Conseils, formations, aides, enseignement, suivie
|
Amélioration des performances
entrepreneuriales, découvertes
d'opportunités d'affaires,
création des réseaux de partenariat
|
Source : Enquêtes du terrain.
Il est indéniable de constater que le système
tontinier joue un rôle important dans le développement des
activités économiques. Il permet d'apporter un début de
solution aux problèmes de financement dont font faces les entrepreneurs
à faible revenu. Mais également il
76
contribue à garantir la survie et la croissance des
petites entreprises au quotidien. Par ailleurs, il favorise l'apprentissage et
l'entraide mutuelle nécessaire au développement de la dynamique
entrepreneuriale des micros entreprises. Ces différentes contributions
du système tontinier dans le développement des activités
entrepreneuriales feront l'objet d'une analyse dans la seconde partie de ce
travail à partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS.
DEUXIÈME PARTIE :
LA DYNAMIQUE FINANCIÈRE DU
SYSTÈME TONTINIER
77
78
La première partie du travail, s'est attelée
à présenter la sociogenèse et l'émergence du
système tontinier, une présentation qui retraçait les
parcours historiques et la propagation des tontines dans le monde. Elle a
également essayé de ressortir la contribution de ce
phénomène dans le développement des activités
économique des entrepreneurs en contexte camerounais. La seconde partie
du travail se propose donc d'entrer au coeur du fonctionnement de ces
associations afin de mieux saisir la dynamique financière qui s'y
opère, à partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS. Pour ce
faire, elle se structure autour de deux chapitres, le chapitre 3 porte sur les
mécanismes de financement des activités entrepreneuriales au sein
des associations EMERCOM et ADJAS. Le chapitre 4 pour sa part propose une
analyse et une évaluation de la contribution des associations EMERCOM et
ADJAS au développement de l'entrepreneuriat pastoral
79
CHAPITRE 3 :
LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT
DES ACTIVITÉS ENTREPRENEURIALES AU SEIN DES ASSOCIATIONS EMERCOM
ET ADJAS
Le système tontinier a pris de l'ampleur dans le monde
et particulièrement en Afrique depuis le début des années
50 (Bascom, 1952). Son importance dans le développement des petites
économies informelles n'est plus à démonter, ceci
s'illustre à travers la nombreuse littérature qui existe sur le
phénomène des tontines dans le monde. Partant de l'Asie à
l'Afrique en passant par l'Europe, la littérature révèle
qu'il existe une pluralité de formes de tontines (Lelart, 1990).
Particulièrement en Afrique, les populations de plus en plus conscientes
de l'importance de ces systèmes, en ont fait un centre
d'intérêt à travers des regroupements associatifs pour
résoudre certains problèmes de la vie quotidienne. En effet,
à travers ces cercles de solidarité financière, ils
s'entraident, s'assistent et partagent un certain nombre de connaissances et
d'expériences nécessaires au développement de leurs
activités économiques.
Dans la ville de Yaoundé, il existe une
pluralité de formes d'associations (religieuses, professionnelles,
tribales, familiales, amicales) au sein desquelles on retrouve des jeunes en
situation d'exercice d'une activité économique. Dans le cadre de
ce travail de recherche, l'intérêt a été
porté sur le cas de deux associations. Il s'agit de l'association
EMERCOM qui est composée d'anciens camarades de lycée et
l'association ADJAS qui est un regroupement de jeunes amis et voisins de
quartiers proches.
Ce chapitre se propose donc à partir de ces deux
associations et à partir de la théorie du don/contre-don,
d'étudier leur mode de fonctionnement et les mécanismes de
financement des activités pastorales par les jeunes entrepreneurs. Pour
ce faire, il est question dans la section I de faire une présentation
respective de ces associations. Ensuite dans la section II il sera question
d'analyser les mécanismes de financement et enfin, d'étudier les
actions mises sur pieds par ces associations pour encourager la dynamique
entrepreneuriale des membres.
16 Confère Marcel MAUSS dans son ouvrage
publié en 1923 dans lequel il remonte aux origines, aux formes et aux
raisons des échanges dans les sociétés traditionnelles
d'autres fois.
80
1. PRÉSENTATION ET MODE DE FONCTIONNEMENT DES
ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS
Le fonctionnement du système tontinier aujourd'hui est
régit sur le principe du don/contre-don réciproque16.
En effet, dans une association, l'argent attribué à un membre
à l'issue d'une cotisation n'est pas gratuit, il s'agit d'une dette que
ce dernier devra rembourser en cotisant à son tour pour qu'un autre
membre puisse en bénéficier. C'est la notion de dette
obligatoire, vecteur de lien social, qui relie entre eux les membres de la
tontine. L'obligation de payer sa cotisation dans une tontine l'emporte sur
toutes les autres obligations. C'est surtout l'obligation de donner, recevoir
et rendre, souligné par Mauss qui est à l'oeuvre dans les
tontines. Ainsi chaque cotisation est perçue comme un don/contre-don.
Lorsqu'un membre fait défaut à cette obligation, il peut
être exclu des échanges économiques et symboliques.
1-1- L'association EMERCOM
EMERCOM est une association de solidarité
constituée de jeunes communicateurs d'où le nom EMERCOM qui
désigne « émergence des communicateurs », elle
a pour devise : « discipline, dynamisme, détermination
». Cette association a vu le jour en 2012, elle a été
mise sur pied par un groupe de jeunes lauréats au Baccalauréat du
lycée d'Essos et de Nkolbisson à Yaoundé, qui soucieux de
préserver leurs liens ont décidé de se mettre en
Association. Comme le dit le président d'EMERCOM : «
Étant donné qu'après le Bacc chacun prend sa route,
certains partent à l'université, d'autres partent dans les
écoles de formation parfois d'autres se perdent » (entretien
du 30 décembre 2021 à Oyom-abang), ils ont jugé
nécessaire de garder les contacts après le lycée, question
de ne pas se perdre de vue. Mais il était également question pour
eux d'entreprendre quelque chose afin de progresser ensemble. Avec les
années, l'association s'est agrandie et au fur et à mesure elle
s'est ouverte à d'autres catégories de jeunes individus.
1-1-1- Objectif de l'association EMERCOM
EMERCOM est une association qui a pour objectif global de
rassembler les jeunes de sexe masculin comme féminin autour d'un
idéal commun à savoir le partage, la solidarité,
l'entraide et le vivre ensemble. Le statut de l'association stipule «
EMERCOM est une
81
association apolitique à but non lucrative »
(article 2). Elle a plusieurs objectifs spécifiques à savoir
:
Ø Préserver et consolider les valeurs de
l'association ;
Ø Préserver et consolider l'amitié et
l'entraide de tous les membres ;
Ø Susciter un esprit de développement et
d'entrepreneuriat chez les jeunes en général et communicateurs en
particulier ;
Ø Susciter l'idée l'initiative des jeunes ;
Ø Renforcer l'esprit de charité et
cohésion du groupe ;
Ø Assister tous les membres physiquement, moralement
et financièrement.
Tous ces objectifs énumérés ci-haut
témoignent de la volonté du groupe EMERCOM de consolider le lien
social, mais également de cultiver un esprit solidarité et
d'assistance collective entre membres.
1-1-2- Le cadre légal
Comme nous l'avons vu dans le premier chapitre du travail,
les associations au Cameroun sont régies dans le cadre de deux lois qui
fixent leur statut et leur mode de fonctionnement. La première qui est
la plus ancienne fait référence à la loi N°90/053 du
19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association. Dans ce
sens, l'association EMERCOM obéit au régime de la
déclaration faisant référence à la liberté
pour toute personne physique de créer une association apolitique
à toutes fins utiles.
L'association EMERCOM est ainsi légalisée et
reconnu par les autorités administratives à travers le
récépissé N°167/RDA/JO6/SAAJP/BAPP du 07 septembre
2019.
Elle est également régie par la nouvelle loi
N°2021/026 portant loi de finances de la république du Cameroun
pour l'exercice 2022. Dans le cadre de cette loi, l'association EMERCOM est
appelé à verser une certaine somme trimestriellement
représentant les frais de taxe auprès de l'institution au sein de
laquelle elle a été légalisée. À cet effet
le président de l'association déclare que : « nous
sommes une association légalisée nous sommes reconnus et avec la
nouvelle loi des finances là, nous allons faire l'effort de payer nos
taxes » (entretien du 30 décembre 2021 à
Oyom-abang).
82
1-1-3- L'organisation structurelle
L'organisation du groupe EMERCOM est inspirée du
modèle classique des associations
à buts non lucratifs. Elle est structurée de
manière verticale c'est-à-dire au-dessus nous avons le
comité de direction ou bureau exécutif et en bas les membres
constitutifs ou assemblée générale. Le bureau est
constitué de 8 membres dont chacun a une tache précise,
régi par le statut de l'association allant de l'article 14 à
l'article 22.
Ø Le président : il est considéré
comme le symbole de l'association qui dispose d'un droit de regard sur la
conduite et la gestion de l'association. Il a pour tâche d'assurer la
coordination du bureau, d'ordonner les dépenses, veiller à
l'exécution des décisions de l'AG et des dispositifs du
règlement, veiller à l'exécution des projets et
programmes, présider les travaux en assemblée
générale.
Ø Le vice-président : il assiste le
président et le supplée de plein droit en cas d'empêchement
dument constaté. Il a pour rôle de veiller à la promotion
de l'image et de la notoriété tant sur le plan interne qu'externe
de l'association, il s'occupe de la coordination des activités et
réunions de l'assemblée générale.
Ø Le secrétaire général : il est
le responsable des documents de l'association (statut, registre,
règlement intérieur). Il a pour rôle d'assurer la
rédaction des rapports, communiqués, des comptes rendus des
réunions, des convocations et invitations adressées aux membres
et observateurs, veille à l'exécution des décisions
adoptées par le bureau, assure de manière générale
les autres fonctions qui peuvent lui être déléguée
par le président.
Ø Le secrétaire générale adjoint
: il est le collaborateur du secrétaire général qu'il
assiste dans ses fonctions. Il peut de manière générale
assurer les autres fonctions qui pourraient lui être
déléguée par ce dernier.
Ø Le trésorier : il est le garant des finances
de l'association il a pour mission de garder les documents financiers. Par
ailleurs, il arrête les comptes financiers et dresse le bilan financier
annuel de l'association, il reçoit les fonds collectés à
la réunion, les aides, le financement, il met les documents financiers
et comptables à disposition du commissaire au compte.
Ø Le commissaire aux comptes : il veille à la
transparence financière de l'association. Il a pour mission de
gérer la gestion des fonds de l'association, il approuve et certifie la
régularité de la gestion du compte.
83
Ø Le censeur : il assure le respect du
règlement de l'association lors des séances. Il a pour
tâche de sanctionner les irrégularités à travers les
amendes.
Ø Le chargé de la communication : il est
chargé des annonces et des communiqués. C'est pourquoi il est
tenu d'informer les membres de l'association sur tous évènements
à venir engageant un membre de l'association ou toute l'association
proprement dite. Les communications peuvent aussi se faire via les groupes
WhatsApp.
Par ailleurs, tous les membres du bureau ont un mandat de
02ans rééligible par toute l'assemblée nationale en fin de
mandat. Pour être membre du bureau, le statut précise que
« seul les membres régulièrement inscrit et ayant leur
caisse de secours à jours peuvent participer à ces
élections » (article 24).
1-1-4- Les activités entrepreneuriales des
membres
L'association EMERCOM est constituée de 20membres des
jeunes hommes et femmes venant de divers groupes ethniques et religieux. Ils
sont âgés entre 25 et 35 ans, avec un niveau scolaire relativement
élevé. On y retrouve diverses couches sociales notamment des
jeunes qui exercent dans la fonction publique, elle comprend également
des individus qui travaillent à leurs propres comptes dans les domaines
tels que la vente d'accessoires, la vente des produits de consommation), et une
bonne partie dans l'élevage principalement l'élevage des
volailles. De plus, certains salariés exercent des activités
informelles parallèles en vue de combler les insatisfactions de la vie
quotidienne. C'est le cas du président général qui
travaille dans une entreprise privée en qualité de
téléconseiller et qui pratique également une
activité entrepreneuriale à l'instar de l'élevage.
1-1-5- Les réunions
Le siège de l'association se trouve à
Yaoundé. Les membres se réunissent en assemblée
générale ordinaire tous les 1ers dimanches de chaque
mois dans une tenue uniforme. Les réunions se font de manière
rotative allant du président aux simples membres, ainsi chacun
reçoit l'assemblée sauf en cas d'empêchement d'un membre
qui cède son tour au prochain. Pour ce qui est des réunions
extraordinaires, les membres du bureau se réunissent chaque fois qu'elle
est convoquée par son président, ou sur la décision de la
moitié de ses membres en vue de résoudre un problème
particulier.
Les réunions sont également des moments
où avant le début de la séance, les membres discutent
entre eux, ils exposent leurs problèmes d'ordres familiaux, ou
professionnels pour
84
obtenir les conseils des autres. De même, c'est
l'occasion pour les membres d'exposer les soucis qu'ils rencontrent dans la
gestion de leur affaire pour obtenir le soutien de l'association. Ils partagent
des informations qui peuvent être utiles aux membres, ils discutent des
débats sur l'actualité du pays, se font des intrigues entre
membres question de détendre l'atmosphère et provoquer la bonne
humeur générale.
1-1-6- Les opérations financières
Tous les membres de l'association sont d'office membres de la
tontine à EMERCOM. Les opérations et transactions
financières de l'association (cotisation, épargne, emprunt) se
font lors des séances de réunions ordinaires. Le statut
prévoit que : « les ressources d'EMERCOM proviennent
essentiellement des cotisations de ses membres et de toutes ressources
autorisées par la loi » (article 9). Les cotisations des
membres se font mensuellement lors des assemblées, elles sont d'un
montant de 5000Fcfa par membre. Concernant les opérations
d'épargnes, elles se déroulent également lors des
séances et commence à partir de 500Fcfa, elles sont remises aux
souscripteurs avec intérêt en fin d'année. Toutefois si le
membre rencontre une difficulté, l'association peut lui rembourser le
capital épargné et soustraire les bénéfices
cumulés. Mais il est à noter que cette épargne est
essentiellement facultative.
Les opérations d'emprunt quant à elles
concernent uniquement les membres régulièrement inscrits et
à jour dans leur cotisation. Les emprunts s'étendent sur une
période de 03 à 06 mois, le souscripteur lors du remboursement de
sa dette a l'obligation de payer un intérêt de 10%, en fonction du
taux d'argent emprunté. Comme autre activité financière,
l'association dispose des caisses de secours vouées à
l'assistance des membres. Elle est fixée à un montant de 12
milles francs/ an pour tous les membres. Enfin, la dernière
activité financière concerne les inscriptions dont « les
frais d'inscription à EMERCOM s'élève à 1000Fcfa
pour les anciens et 2000Fcfa pour les nouveaux » (article 8 du
règlement intérieur de l'association).
1-1-7- Les autres activités de l'association
En dehors des réunions mensuelles et des
activités financières, l'association exerce d'autres
activités bénéfiques à l'ensemble des membres. Il
s'agit entre autres :
Ø Des activités de formations entre membres.
Dans l'optique de satisfaire un de ses objectifs portant sur la
nécessité de susciter un esprit de développement et
d'entrepreneuriat chez les jeunes, l'association participe à de nombreux
petits séminaires de formation. Il s'agit notamment des
séminaires dans l'agro-pastoral, dans
85
l'artisanat et dans les métiers de l'art ne
nécessitant pas de gros moyens financiers pour démarrer son
activité. À juste titre, un éleveur de volaille de
l'association soutient que : « nous bénéficions
régulièrement des séminaires de formation, ou lorsqu'un
membre a appris, il ne manque pas de venir nous exposer cela en association
afin que nous puissions bénéficier de cela » (entretien
du 27decembre 2021 avec Christophe à Ekorezock). Ainsi, chacun peut
bénéficier de l'expertise et des connaissances des uns et des
autres.
Ø Des activités à vocation sociale.
L'association organise chaque année des remises de dons dans les
orphelinats de la place à Yaoundé, dans le but de participer au
développement à leur modeste manière.
Ø Des activités sportives et des ballades
d'excursion, pour davantage rapprocher les membres et renforcer la
cohésion du groupe.
1-1-8- L'assistance
Selon l'article 3 du règlement intérieur
d'EMERCOM, tous les membres inscrits et réguliers aux cotisations
exigibles jouissent de tous les avantages prévus en matière
d'aide et d'assistance. Lors des évènements heureux (mariage,
baptême, promotion) et malheureux (décès, accident,
maladie), ils bénéficient des aides de nature financière
et physique de l'association.
1-2- L'association ADJAS
ADJAS est une association constituée de jeunes amis,
voisins, camarades et connaissances de quartiers proches. Elle désigne :
« Association des jeunes amis solidaires ». Cette
association a vu le jour en 2018, par un groupe de jeunes amis et voisins
éleveurs proches résidant Yaoundé. Afin de
préserver leurs liens d'amitié et promouvoir leurs
activités ils ont décidé de se regrouper en association
afin de mieux s'entraider les uns les autres au quotidien.
1-2-1- L'objectif de l'association ADJAS
Au vu de la réalité sociale et du contexte
économique peut favorable, « l'association est chargée
de promouvoir l'entraide et le développement des membres »
(article 4). Il s'agit plus précisément :
Ø S'assister financièrement et
matériellement dans développement des activités des
membres ;
86
Ø Favoriser le développement collectif du groupe
;
Ø Encourager l'esprit d'entraide et de création
entre membres ;
Ø Se soutenir financièrement et moralement lors
des évènements heureux comme malheureux.
1-2-2- Le cadre légal
ADJAS est une association apolitique et à but non
lucratif complètement coupé de tout lien avec le système
administratif. Les membres ont jugé nécessaire de
légaliser l'association quand elle sera plus grande. À ce sujet,
le vice-président de l'association explique que : « nous sommes
encore une petite association et on n'a pas encore suffisamment les ressources.
Mais avec le temps quand l'association va s'agrandir on va la légaliser
» (entretien du 31janvier 2022 avec Luc à Mvog-beti).
1-2-3- L'organisation structurelle
L'association est composée d'un bureau exécutif
constitué de 05membres élus pour un mandat de deux ans. Le bureau
représente l'instance dirigeante de l'association, l'association
comprend ainsi :
Ø Un président : selon l'article 11 du
règlement, il est chargé de présider les réunions
du bureau et les assemblées générales, il convoque les
séances de réunion ordinaire et extraordinaire et peut nommer un
président de séance. Par ailleurs, il s'assure du bon
fonctionnement de l'association dans son ensemble.
Ø Le vice-président : selon l'article 12 du
règlement intérieur est chargé d'épauler le
président dans ses tâches. Il peut également
présider une séance en cas d'empêchement du
président.
Ø Le secrétaire général : selon
l'article 13 du règlement intérieur, il a pour rôle
d'établir l'ordre du jour de réunion sur instruction du
président, il ordonne sur instruction du président les recettes
et les dépenses et enfin garde les documents de l'association.
Ø Le trésorier : selon l'article 14, il est le
dépositaire des fonds de l'association et est chargé de dresser
le bilan des mouvements des fonds de l'association chaque fin
d'années.
Ø Le censeur : selon l'article 15, il a pour
rôle de veiller à la discipline conformément aux
dispositions prévues par le règlement.
Par ailleurs, l'assemblée générale est
constituée de tous les autres membres de l'association.
87
1-2-4- Les activités entrepreneuriales des
membres
ADJAS est une association de douze membres constituée
essentiellement d'individus qui exercent dans le domaine pastoral. Il s'agit
plus précisément de jeunes âgés entre 27 et 33 ans
qui pratiquent l'élevage des porcins dans une dynamique
entrepreneuriale. Pour ce qui est de la taille des entreprises, ils sont en
majorité de petites et moyennes tailles dont la famille constitue
parfois la main d'oeuvre dans la gestion quotidienne. Olivier un éleveur
de l'association avoue se faire aider de temps en temps par sa famille en cas
de déplacement ou d'occupation : « j'ai l'avantage de compter
sur l'aide de ma femme et de mon garçon pour prendre soin de mes porcs
lorsque parfois je dois m'absenter » (entretien du 04 février
2022 à Vietnam). Pour d'autres éleveurs encore, le choix
porté sur les petites entreprises se justifie par l'insuffisance des
ressources nécessaires à la gestion de l'activité. Un
entrepreneur de l'association explique cela lorsqu'il affirme que :
Je fais plus dans un élevage moyen, on ne peut pas
dire grand parce qu'on dit moyens, faire à son niveau oh. Ce qui est
à son niveau ce que tu peux te battre pour pouvoir gérer parce
que l'élevage vraiment je vois il faut aussi avoir beaucoup de moyens.
Bien sûr on commence un peu pour devenir grand (propos recueillis le
25 janvier 2022 avec Mitterrand à Manga).
1-2-5- Les réunions
L'assemblée générale se réunie
tous les premiers samedis de chaque mois à partir de 15h 00 au domicile
du président au quartier Camps Sonel (Yaoundé). Les
réunions se font en tenu uniforme obligatoire pour tous les membres. Le
statut de l'association prévoit que : « l'absence non
justifié a une réunion de l'assemblée
générale est puni par 500F (sauf en cas de maladie, voyage)
» (article 21, alinéa 1). Avant le début de la
séance, les membres ont une heure de temps pour discuter parler de leurs
activités, exposer leurs problèmes, donner les nouvelles du mois
et ainsi solliciter l'aide ou les conseils des autres. Les réunions sont
présidées par les membres du bureau, elles concernent les
activités de l'association et des opérations de
crédits.
1-2-6- Les opérations financières
Toutes les opérations de collecte et de redistribution
des fonds au sein de l'association ADJAS se font lors des assemblées
générales. De ce fait « La tontine est obligatoire pour
tous les membres de l'association » (article 4 alinéa 1). Les
cotisations sont d'un montant de 4000F obligatoire pour tous les membres et
dont le montant final est attribué aux membres
88
bénéficiaires par un procédé de
tirage au sort. Il existe également au sein de l'association une autre
cotisation facultative qui est d'un montant de 10milles francs. Pour les
nouveaux adhérents, les frais d'inscriptions s'élèvent
à 1000F plus une somme de 15milles francs représentant les frais
de secours. En dehors des cotisations mensuelles, l'association comprend
d'autres activités financières telles que :
Ø L'épargne : l'association dispose d'une
caisse d'épargne facultative, chaque membre peut effectuer un
dépôt en fonction de ses revenus. Le montant minimal du
dépôt est fixé à la somme 500Fcfa. Ces caisses sont
redistribuées aux membres ayant souscrit en fin d'année au mois
de décembre lors de la cassation, avec le total des
intérêts accumulés qui représente les
bénéfices.
Ø La caisse de prêts : elle fonctionne à
partir des épargnes des membres, en effet l'association dispose d'une
caisse d'épargne dans laquelle les membres empruntent de l'argent. Pour
la durée de remboursement, elle varie de 1 à 3 mois avec des
intérêts qui varient en fonction du nombre de mois
souhaité. Comme l'explique le trésorier :
Le taux d'intérêt est de 5% ça veut
dire que si par exemple tu prêtes 10milles ça fait
10500F.Maintenant si tu prêtes ces même 10milles pour 2mois
ça fait 11milles francs donc l'intérêt double en fonction
du nombre de mois mais ça ne dépasse pas 3mois »
(Entretien du 07 février avec pierre à Eloumdem)
1-2-7- L'assistance
L'assistance au sein de l'association ADJAS est couverte par
la caisse de secours imposée à tous les membres dès leur
adhésion. Elle s'élève à 15milles francs par membre
et peut être modifiée par l'assemblée
générale sous proposition du bureau exécutif. Ces sommes
sont ainsi allouées à tout membre pour les épaulés
lors d'un évènement heureux comme malheureux. Comme l'indique le
règlement intérieur de l'association : « si un membre de
l'association perd un proche direct parent ou frère, l'association
soustrait un montant dans le secours de tout le monde et on donne au membre
endeuillé pour l'aider dans l'organisation des obsèques
» (entretien du 10 février avec le secrétaire
général Joël à Mongoname).
89
2- LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES
ACTIVITÉS PASTORALES PAR LES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS
Les opérations de crédits au sein des
associations à caractères tontinières sont centrées
autour de plusieurs points dont les principaux points sont : les cotisations
mensuelles, les opérations d'épargne et les opérations
d'emprunt. Ces opérations financières reposent donc sur une
triple obligation (donner, recevoir et rendre), il s'agit d'un processus dans
lequel la somme octroyée au donataire fait de celui-ci un obligé
tenu de rembourser sa dette avec un minimum de plus-value en retour aux
donateurs (Servet, 1990). En effet, l'argent obtenu à l'issue d'une
collecte ou d'un emprunt n'est pas gratuit, il s'agit d'un argent remboursable
dans des délais précis. Dans ce sens, on peut donc entendre des
phrases telle que : « quand tu as une difficulté, tu viens, tu
expliques ton problème l'association te donne un peu d'argent et
à une période déterminée il doit maintenant
rembourser son don » (propos recueillis le 13fevrier 2022 avec la
trésorière d'Emercom à Komkana) ; ou encore : «
comme tu as pris l'argent ça ta aider il faut aussi remettre pour que
ça continue le travail. Donc c'est un peu ça la chose »
(entretien du 16 février 2022 avec le secrétaire
général d'ADJAS à la montée Irad). Les propos de
ces deux répondants témoignent tout simplement du principe
fondamental du système tontinier qui est celui du donnant-donné.
Autrement dit, l'individu qui emprunte sait à l'avance qu'il devra
rembourser afin que ça puisse aider les autres en retour au sein du
groupe.
2-1- Les mécanismes de financement des
activités pastorales à EMERCOM
L'association EMERCOM est constituée de 10 membres qui
exercent dans l'entrepreneuriat pastoral donc 8 garçons et 2 filles. Il
s'agit de l'élevage de la volaille notamment les poules de fermes dont
certains exercent sur de petits espaces et d'autres à grande
échelle. Certains membres de l'association l'exercent comme principale
activité économique et vivent de cette pratique au quotidien.
C'est le cas de Faustin un éleveur qui soutient : « je fais
dans l'élevage depuis 4ans et grâce à ma manière de
gérer, je ne me prends pas pour un grand spécialiste hein ! Mais
je vis grâce à ça au quotidien » (entretien du 28
janvier 2022 avec Faustin au marché Mokolo). D'autres le font dans le
but de combler les insatisfactions professionnelles et les charges de famille
à l'instar du président de l'association qui soutient :
Qu'avec la situation économique déjà
actuelle qui n'est pas du tout facile de joindre les deux bouts. Parce que
justement ce que tu peux avoir sur le
90
plan professionnel parfois est insuffisant vu la
conjoncture économique même déjà actuelle, et les
charges qui ne sont pas du tout évident » (propos
recueillis le 30 décembre 2021 à Oyom-abang).
Dans le but de mieux gérer leurs activités, les
interviewés affirment avoir recourt à plusieurs moyens de
financement au sein de l'association. Les résultats de nos entretiens
font ressortir plusieurs modes de financement qu'on peut regrouper en quatre
principaux points.
2-1-1- La cotisation mensuelle
Les cotisations à EMERCOM se déroulent
mensuellement à hauteur de 5000F par membre. Les modes d'attributions
des gains sont fixés à l'avance selon le calendrier annuel et les
montants sont divisés en 2 ou 3. Les bénéficiaires de la
séance ont l'obligation lors de la prochaine assemblée de rendre
leur don en cotisant pour que les prochains membres puissent aussi
bénéficier à leur tour. Les montants obtenus permettent
aux entrepreneurs bénéficiaires d'anticiper la gestion leur
activité. Les propos d'un enquêté en sont la preuve :
« parfois quand je bouffe mon tour comme ça, j'achète
encore les poussins en fonction du nombre qui reste dans le poulailler.
Là ça me permet aussi d'éviter la rupture »
(propos recueillis le 30 janvier 2022avec Christophe à Ekorezock).
D'autres l'utilisent pour rembourser les dettes liées à la
gestion de leur entreprise. Ce faisant, Jules un entrepreneur
révèle que : « la dernière fois que j'ai
bouffé la tontine, j'ai remboursé ma dette chez mon livreur de
provende » (entretien du 22 janvier avec au Carrefour Mecc.). Les
cotisations mensuelles sont donc le premier mécanisme de financement des
éleveurs à EMERCOM, elles permettent comme le soutient les
enquêtés, d'avoir de manière périodique une somme
considérable pour pouvoir résoudre certains problèmes
liés à la gestion de leur activité.
2-1-2- L'épargne
Tout comme la cotisation, l'épargne tontinale constitue
un capital financier nécessaire dans le financement des entrepreneurs.
En regroupant des agents économiques dont l'épargne individuelle
est modeste, la tontine collecte d'importantes encaisses au
bénéfice de ses membres (Edimo, 1998).
L'association EMERCOM dispose d'une caisse d'épargne
qui est constituée des dépôts des épargnants. Il n'y
a pas de montant fixe chacun dépose en fonction de sa capacité
financière toutefois le montant minimal est fixé à 500F.
Lors des assemblées pendant les opérations financières, la
trésorière ouvre le cahier des épargnes et chaque membre
qui désire épargner une quelconque somme se désigne et la
trésorière pointe le nom et le montant épargné dans
le
91
registre. Les totaux des montants obtenus à l'issue
d'une période d'épargne constituent des moyens de financement
auxquels ont recours certains entrepreneurs de l'association. Un éleveur
explique de ce fait avoir démarré son activité grâce
à l'épargne cumulée dans la tontine :
J'avais en tête d'ouvrir mon petit élevage
alors j'ai épargné sur une longue période dans la tontine
oui. Ce que ça m'a donné plus les bénéfices m'a
permis d'acheter les poussins et la provende et quelques petits autres trucs
nécessaires pour commencer » (entretien du 04 janvier 2022 au
Camps-sonel).
D'autres adhérents utilisent leur épargne pour
fructifier leur activité. Aristide un entrepreneur éleveur
affirme : « la tontine a augmenté mon budget ce qui m'a permis
d'agrandir ma volaille. Avec les bénéfices rencontrés,
j'ai multiplié les épargnes dans la tontine et j'ai pu avoir ce
que vous voyez aujourd'hui » (entretien du 27 décembre 2021
avec à Oyom-abang).
Les propos de ces deux entrepreneurs témoignent du
rôle de l'épargne dans une activité entrepreneuriale. Non
seulement elle permet l'accumulation des capitaux utiles au démarrage
d'une activité, mais également elle permet de booster la
croissance de par les montants et les bénéfices
cumulés.
2-1-3-L'emprunt
Afin de favoriser l'accès aux ressources
financières de manière permanente, l'association EMERCOM dispose
d'une caisse de prêt qui provient des épargnes des membres. Les
entrepreneurs du secteur pastoral expliquent avoir recourt à l'emprunt
dans la caisse d'épargne pour le financement de leur affaire. Le
prêt est accordé à condition bien sûr de savoir
rendre le don emprunté avec un intérêt de 10% sur une
période pouvant aller de 3mois à 6 mois. À propos de la
place du prêt dans l'entrepreneuriat, le président de
l'association explique que :
Une tontine, si tu lance dans un entrepreneuriat tu ne
peux justement pas
t'en sortir sans toutes fois bénéficier d'un
prêt. Parce que quand tu fais
face à une situation qu'il faut résoudre
à l'instant T, tu n'as pas de moyens
la tontine a une caisse pour pouvoir résoudre le
cas précis à l'instant.
C'est le moyen illustrateur même accompagnateur de
la tontine » (propos
recueillis le 30 décembre 2021 à Oyom-Abang).
Les propos de cet entrepreneur relèvent tout simplement
le bien fondé du prêt en association. Cette forme de financement
constitue un élément important dont bénéficient
tous les éleveurs de l'association EMERCOM en période de
difficulté pour faire face à des imprévus.
92
2-1-4-La caisse d'investissement
Dans le but de favoriser l'initiative entrepreneuriale,
l'association a mis sur pied au sein de la tontine une autre cotisation
appelée caisse investissement. Il s'agit comme l'explique le
secrétaire : « d'une caisse qui permet d'aider chaque membre
qui vient avec un projet propre, ou encore un membre qui fait faillite et qui a
besoin d'être épauler financièrement pour relever son
affaire. Une fois que les membres ont étudiés le projet, le
demandeur reçoit une aide financière » (entretien du 14
janvier 2022 au carrefour Carrière). Cette caisse constitue un outil de
financement dont les jeunes entrepreneurs bénéficient dans
l'association. Bescherelle une entrepreneure témoigne avoir
été soutenu par cette caisse lors du démarrage de sa ferme
avec son conjoint. Elle explique que : « avec le soutien de
l'association, j'ai pu avoir un montant de 75milles francs lors du lancement de
notre ferme » (entretien du 1er février à
Ayene).
Au regard de ce qui précède, il ressort que les
mécanismes de financement mis sur pied par l'association EMERCOM permet
aux entrepreneurs pastoraux bénéficiaires de mobiliser des
ressources économiques nécessaires à leurs
activités. Grâce à la souplesse de l'association et au
climat de confiance qui y règne, les membres peuvent ainsi en temps
réel avoir accès à des sommes non négligeables pour
le financement. En effet, les montants octroyés aux membres leur
permettent de faire face à certaines charges telles que : l'achat de la
provende, le ravitaillement des bêtes ou encore d'agrandir l'espace
d'élevage. Toutes ces aides financières permettent à
certains de financer le démarrage de l'activité, à
d'autres d'accroître l'entreprise et la production.
2-2-Les mécanismes de financement à ADJAS
L'association ADJAS est constituée de douze (12)
membres qui exercent uniquement dans le domaine pastoral. Il s'agit
principalement des jeunes de sexe masculin qui exercent dans l'élevage
des porcins à petites et moyennes échelles. Quelques-uns exercent
leur élevage en complément à d'autres activités
afin de subvenir aux charges de la vie quotidienne. À ce propos, un
éleveur affirme « je fais dans la maçonnerie et je fais
aussi dans l'élevage, dans l'élevage ça me permet de
jongler comme ça pour m'en sortir avec les enfants et tout le reste
» (entretien du 5 février avec Olivier au Vietnam).
Dans le but de mieux s'entraider et de mieux prendre soin de
leurs affaires, ils se sont regroupés en association afin
d'épargner un peu d'argent question de se soutenir dans la gestion de
leurs activités. Les enquêtes de terrains permettent de ressortir
trois (3) principaux moyens de financement auxquels ont recours ces jeunes
éleveurs.
93
2-2-1- Les cotisations mensuelles
Les cotisations mensuelles à ADJAS
s'élèvent à hauteur de 4000F par membre et dont le montant
total est divisé en deux parts. Ainsi deux membres bouffent lors des
assemblés afin que chacun puisse bénéficier deux fois au
cours de l'année. Les entrepreneurs peuvent ainsi avec les sommes
obtenues financer la gestion de leur élevage, c'est le cas de Yannick
qui affirme que : « la tontine quand je cotise jusqu'à
peut-être je veux payer la nourriture des porcs, parfois quand je prends
ma tontine je peux dire que je paye 3 sacs à la fois. Or quand je ne
suis pas dans la tontine c'est difficile de payer même 1 sacs »
(propos recueillis le 24 janvier 2022 à nouvelle route
Nkolbisson).
Image 1 : Livraison de provende à la
nouvelle route Nkolbisson
Source : enquête de terrain du 24
janvier 2022
L'obtention d'une cotisation mensuelle est très souvent
encouragée par des mots de bénédiction de
l'assemblée en guise d'illustration, le trésorier explique que :
« pour nous quand tu prends même ça la cotisation,
nous-mêmes on se lève nous tous ont béni avec un bon coeur
pour que si tu as pris cet argent pour aller faire tel chose comme tu le dis
là, il faut que tu le réalise dans des bon termes »
(entretien du 07fevrier à Eloumdem). Ces quelques mots symboliques
traduisent la volonté de l'association de voir l'argent octroyer au
bénéficiaire participer au développement de son affaire et
se multiplié par la suite. Au-delà des cotisations mensuelles,
l'association dispose d'autres moyens d'accompagnement financier à
l'instar de la caisse d'épargne.
94
2-2-2- La caisse d'épargne
Pour Henry & al (1991) la force du système
tontinier repose sur la volonté d'épargne motivée au sein
du groupe. À chaque réunion, les membres peuvent à
côté de la cotisation ordinaire, décider de mettre de
côté une somme montant libre pour se constituer une
épargne. Les sommes versées par chaque membre sont
consignées dans le cahier et l'argent est confié au
trésorier. La caisse d'épargne de l'association ADJAS est
constituée des versements des épargnants à laquelle tous
les 12 membres effectuent des dépôts. Cette épargne permet
à certains entrepreneurs de faire face à certaines
difficultés. Les propos d'un enquêté illustre cet
état de chose lorsqu'il soutient : « il y'a l'épargne,
ça veut dire qu'à un moment donné quand tu épargnes
et en cas que tu es vraiment coincé tu peux appeler la réunion.
On part en banque on te fait un retrait qui te permet de gérer ton
activité » (entretien du 05 février2022 avec Jordao
à Etetak). Cette épargne assure ainsi la promotion des
entreprises de ces éleveurs en leur fournissant une caisse de
financement de leurs besoins immédiats. À cette caisse
d'épargne s'ajoute une caisse de prêt avec
intérêts.
2-2-3- La caisse de prêt
Dans le but de renforcer la solidarité entre les
éleveurs, l'association a instauré une caisse de prêt
à partir de la caisse d'épargne, ainsi les montants des sommes
épargnées sont soumis à un système de prêt
avec intérêt. Il s'agit d'un intérêt qui varie entre
de 5 et 10% par mois renouvelable sur 2 mois. Le prêt représente
donc une aide financière dont bénéficient tous les membres
de l'association pour démarrer leur activité. À titre
d'illustration un éleveur affirme : « cette activité
j'ai eu a commencé le financement par un prêt dans l'association.
J'ai eu à prendre un peu d'argent dans la tontine, c'est là
où je me suis lancé dans l'élevage. J'ai commencé
d'abord par deux petits porcelets, et les deux petits porcelets m'ont
lancé » (entretien du 20 janvier 2021 avec Martial à
Abobo). Lorsqu'un membre désire un prêt, il se rapproche des
membres du bureau auxquels il soumet son problème, après avoir
étudié la demande, le bureau l'accorde un prêt en fonction
de ce qu'il souhaite réaliser. À ce sujet, Joël soutient :
« j'ai déjà eu à plusieurs fois même de
faire des prêts du genre que je suis coincé je suis obligé
de prêter pour la nutrition d'abord de mes bêtes. Sachant que c'est
les mêmes bêtes, le même élevage qui à la fin
comble tous ces genres de prêts » (entretien du 10
février 2022 à Mongonam).
Les différentes formes de financements des
activités au sein de ces deux associations permettent d'apprécier
la façon dont la dynamique entrepreneuriale est encouragée dans
ces
95
réseaux. Ils sont en effet dotés d'un capital
financier immense dont les bénéficiaires mettent au profit de
leur activité d'élevage. Les différents propos recueillis
nous ont permis de comprendre que l'aspect financier constitue le point fort de
ces associations en termes de création des richesses durables. En
dépit des aides financières, les associations EMERCOM et ADJAS
fonctionnent sur la base d'un suivi entre entrepreneur. Ce suivi est fait dans
le but d'encourager les membres dans la gestion de leur activité afin de
booster leur production. Il s'agit donc d'un système d'accompagnement
non pas fondé sur un capital financier mais davantage sur un capital
relationnel.
3- LES AUTRES FORMES D'ACCOMPAGNEMENTS AU
SEIN
DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS
Définir le système tontinier sous le seul prisme
financier est très réducteur17. Les adhérents
viennent aussi pour échanger des idées, communiquer des
informations et des conseils entre membre utile au développement des
activités au sein du groupe. Les membres de ces associations manifestent
une solidarité sociale qui va de la création de l'entreprise
jusqu'à son développement, ce de façon gratuite et
volontaire. Les relations entre les membres de ces associations sont avant tout
basées sur le partage de la solidarité qui constitue leurs points
forts. L'association EMERCOM et ADJAS déploient plusieurs moyens
d'accompagnement non-financier en vue de promouvoir la dynamique
entrepreneuriale des éleveurs. Allant du conseil à la formation
en passant par les ventes, ils s'entraident mutuellement et promeuvent la
réussite collective.
3-1- L'accompagnement relationnel à EMERCOM
Au regard du nombre important des jeunes individus qui
exercent des activités entrepreneuriales dans le secteur informel,
l'association a mis sur pied une forme d'entraide davantage centrée sur
l'écoute et partage des expériences entre les membres. Les propos
du président à ce sujet sont assez illustratifs :
Les moyens sont de plusieurs ordres hormis les moyens
d'abord qui sont physique nous avons également les moyens
matériels et nous avons également les moyens psychotechniques.
Ça veut dire se rapprocher par exemple des personnes qui ont une
certaine connaissance, une certaine
17Source :
https://www;
leolagrange.org/la-societe-civile-sorganise-les-tontines-au-cameroun/,
consulté le 24 février 2022.
96
formation parce que dans notre association justement je
parlais de cas par exemple dans notre tontine, il y a des personnes qui ont
étés formés qui
ont fait des stages » (entretien du 30
décembre 2021 à Oyom-Abang).
Les membres de l'association peuvent ainsi
bénéficier à chaque fois lors des réunions
mensuelles, de petites séances de coaching. Il s'agit des
échanges où les anciens du domaine pastoral ou encore ceux qui
ont reçu une formation dans le domaine donnent aux novices des astuces
dans la gestion de leur activité. C'est l'occasion ainsi pour eux
d'exposer les difficultés rencontrées dans leur entreprise
d'élevage et d'obtenir les conseils des membres les plus aguerri dans le
domaine. Ces séances de coaching visent à outiller les membres de
savoir-faire utile pour mieux gérer leur production. Les propos d'un
répondant en sont la preuve : « avec les aides je me suis
davantage capacité, ils ont considérablement aidé beaucoup
plus les aides en termes de formations de conseil. Parce que vous pouvez avoir
les finances, si vous n'êtes pas conseiller, si vous n'êtes pas
formé ça ne va servir à rien (propos recueillis le 27
décembre 2021à Tsinga)
De plus, les éleveurs du domaine pastoral
bénéficient d'un soutient psychotechnique des membres
collègues du domaine en cas de difficulté majeure. Les propos de
Gérôme un jeune éleveur en sont le témoignage :
Moi par exemple à un moment donné j'avais
des réels problèmes dans mon élevage. Et j'ai fait appel
à un membre de la réunion qui avec les connaissances dans le
domaine et grâce à ses conseils, il est venu à la maison il
a observé ce qui n'allait pas et il m'a prescrit certains
médicaments que je devais accompagner dans la nourriture des poulets et
depuis dès lors je constate un grand changement. Et j'espère que
grâce à ses conseils ça va aller de mieux en mieux
(entretien du 04Janvier 2022 au Camp-sonel Oyom-Abang).
Les membres de l'association ont l'avantage de pouvoir compter
sur le soutien technique de l'association pour mieux se faire accompagner dans
le développement de leur entreprise. Par ailleurs, comme autres moyens
d'accompagnement non financier, les entrepreneurs pastoraux de l'association
peuvent compter sur le soutien des autres membres pour leur faire des petits
achats lors de certains évènements. Il s'agit donc d'un soutien
moral qui vise à encourager les entrepreneurs du domaine pastoral au
sein de l'association achetant leurs produits en cas de besoins. En guise
d'illustration la trésorière affirme : « nous on
encourage ces éleveurs chaque fois en faisant leur publicité et
aussi on leurs fait des recettes quand peut-être on a des
évènements ou des fêtes. Donc c'est aussi une
manière pour nous de les soutenir » (propos recueillis le 13
Février 2022 avec Diane à Nkomkana).
Toutes ces mesures d'accompagnements mises sur pied par
EMERCOM ont surtout pour but de satisfaire un des objectifs de l'association
qui est celui de booster l'esprit d'entrepreneuriat au sein de l'association.
Ils s'entraident autant que faire se peut à tous les
97
niveaux, du démarrage à la gestion de
l'entreprise, en passant par les circuits d'écoulement. Grâce
à ces différentes aides, chaque membre essaye de s'en sortir au
quotidien dans la gestion de son activité économique.
3-2- L'accompagnement relationnel à ADJAS
Etant donné que l'association ADJAS est
constituée uniquement d'entrepreneurs pastoraux, les membres
bénéficient des mêmes faveurs dans l'exercice de leur
activité. Dans le but de se rassurer de l'évolution des
activités de tous, les membres de l'association ont instauré
à chaque assemblée, une séance de débriefing des
activités. Dans ce sens, chacun des membres expose les
difficultés qu'il rencontre dans la gestion de son activité et
ensemble ils essayent de trouver des astuces afin de résoudre le
problème. Le président de l'association illustre bien cet
état de chose lorsqu'il dit :
C'est l'aide morale bon concernant l'aide morale dans la
réunion même quand on siège, on a 1heure avant la
réunion pour les gens qui ont eu les problèmes dans le mois les
difficultés dans ton élevage dont tu poses ton problème.
On essaye de t'expliquer comment faire si peut-être c'est l'aliment qui
dérange on t'explique, si c'est le problème des remèdes,
si tu as perdu un porcelet tu parles tu dis pourquoi tu as perdu et on te dit
comment faire pour que ça n'arrive plus prochainement (entretien du
19 février 2022 avec Eric à Mbankolo).
Ces propos du président traduisent la volonté de
l'association de consolider la solidarité à travers le partage
des connaissances et des et des expériences entre membres du groupe.
De plus, les membres peuvent en dehors de l'association
solliciter l'aide de leurs amis en cas de situation urgente. Certains se font
ainsi épauler par des prêts en espèce ou en
matériel, il peut s'agir du prêt d'un sac de provende ou encore le
prêt d'une somme d'argent avec la garantie de rembourser le jour de la
cotisation. Grâce au capital relationnel de certains membres,
l'association assiste souvent à des petits séminaires de
renforcement des capacités dans le domaine agro-pastoral. Afin de
s'assurer du respect de l'usage des prêts accordés, l'association
a instauré un système de suivi entre membres. De fait, une
personne est déléguée pour faire des descentes sur le
terrain, afin de vérifier que l'argent emprunté par X membre a
effectivement été mis au profit de son activité.
Par ailleurs, les membres de l'association peuvent compter sur
leur esprit de solidarité et sur leur entourage entrepreneurial pour
pouvoir écouler leurs (bêtes) sur le marché. Ainsi
lorsqu'un membre tombe sur une « grosse affaire », il ne
manque pas de partager cela avec ses confrères de l'association. On peut
ainsi entendre des propos tels que : « parfois tu peux tomber sur des
gros clients, qui veulent les porcs pour la dotes ou pour des fêtes. Si
la quantité en fonction de la grosseur qu'ils veulent ne suffit pas,
j'appelle directement mon ami de
98
l'association le plus proche pour qu'on complète le
reste chez lui » (entretien du 21 janvier 2022 à Oyom-abang
riviere).
Au regard des mécanismes de financement mis sur pied
par les associations EMERCOM et ADJAS, fort est de constater que l'esprit
d'entrepreneuriat et la solidarité collective priment dans ces
associations. En effet, les différents moyens de financement
déployés pour encourager les initiatives des membres vont de
l'épargne à l'emprunt en passant par la cotisation. De plus
à côté des moyens financiers, les membres
bénéficient d'un soutien relationnel (conseil, assistance). Ces
différents appuis permettent à certains d'accroitre leur
entreprise, d'écouler leurs produits et à d'autres de financer le
démarrage dans un contexte où l'accès aux services
bancaires formels est limité.
Il est maintenant question d'étudier la place
qu'occupent ces réseaux de financement dans le quotidien de ces jeunes
entrepreneurs. Cette préoccupation conduit ainsi au prochain chapitre
où il est question d'analyser d'une part sur la base des
différents entretiens et observations menées, les perceptions de
ces entrepreneurs sur le système tontinier. Par la suite, cela permettra
d'évaluer la contribution de ce système dans les activités
des entrepreneurs membres. À terme, cette évaluation aidera
à dégager la nature du rapport qui existe entre le système
tontinier et le développement de l'entrepreneuriat jeune.
99
CHAPITRE 4 :
CONTRIBUTION DES ASSOCIATIONS EMERCOM
ET ADJAS DANS LA PROMOTION DE
L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL
ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA
À côté des structures d'accompagnement
formel telles que les banques, les micros finances, les projets et programmes
officiels, une part de la population active exclue de ces structures
officielles a recours à des moyens de financements informels. Il s'agit
le plus souvent des regroupements associatifs à caractère
tontinier, couramment appelés tontines qui regroupent en moyenne 56% des
camerounais actifs (MINFI, 2014). Ces circuits de financement qui aujourd'hui
font l'objet d'un prélèvement d'impôts, sont d'une place
importante pour de nombreuses catégories d'acteurs sociaux (hommes,
femmes, adultes et jeunes) à la recherche de gains financiers. Il s'agit
d'un système financier qui offre des prestations similaires aux services
bancaires officiels (prêt, épargne, cotisations), dans une logique
de solidarité fondée sur l'entraide réciproque. Ce
système de don/contre-don représente de nos jours un outil
incontournable pour de nombreuses catégories d'entrepreneurs, dans un
contexte économique national peu propice au développement des
initiatives jeunes.
Après avoir présenté dans le chapitre
précèdent les mécanismes d'accès au crédit
par les entrepreneurs pastoraux des associations EMERCOM et ADJAS, il est
maintenant question dans ce dernier chapitre, de faire une analyse et une
évaluation de la contribution de ces associations dans le
développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.
Pour ce faire, il sera judicieux de commencerons par une analyse des
représentations sociales du système tontinier chez ces
entrepreneurs, afin de comprendre le rôle et la place de ces associations
dans leurs activités (section 1). Par la suite, il sera question de
faire une évaluation proprement dite de la contribution système
tontinier dans les activités pastorales des entrepreneurs de ces deux
associations. Cette évaluation nous permettra de comprendre les effets
de la contribution de ces associations dans la promotion de l'entrepreneuriat
pastoral à Yaoundé. Deux principales théories seront ainsi
mobilisées dans cette partie à savoir la théorie des
représentations sociales et la théorie des réseaux afin de
comprendre à terme l'influence que peut avoir le groupe ou le
réseau associatif dans la pratique entrepreneuriale.
100
1- LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES DU
SYSTÈME TONTINIER CHEZ LES JEUNES ENTREPRENEURS PASTORAUX À
YAOUNDÉ
La représentation sociale est un mode spécifique
de connaissance dans un groupe social donné. Dans toutes les
sociétés, chaque phénomène, évènement
qui influence le quotidien humain nécessite une explication (Adam et
Herzlich, 2017). Le système tontinier, réalité sociale
n'échappe pas à cette exigence. Abordé le système
tontinier, sous le prisme des représentations sociales permet
d'appréhender les perceptions, le sens et les interprétations que
les individus, plus précisément les entrepreneurs du secteur
pastoral, lui attribue. Ces images se fondent généralement sur le
vécu et les expériences des individus en situation. D'autant plus
que les représentations sociales se fondent sur les manières
d'interpréter et de penser la réalité quotidienne, une
forme de connaissance sociale au sens de Jodelet (1989).
Les représentations socialement construites par les
jeunes entrepreneurs pastoraux sur le phénomène tontinier, sont
fonction des besoins individuels et varient d'un individu à un autre. En
effet, comme l'explique Henry & al (1991), chaque individu à une
perception individuelle de la tontine. Certaines personnes sont motivées
par des objectifs économiques, d'autres par des objectifs relationnels.
Pour ce qui est des objectifs économiques, les adhérents sont
attirés par la recherche des capitaux financiers et la multiplication
des épargnes nécessaires au développement d'une
activité économique. Concernant les objectifs relationnels, les
adhérents sont attirés par la recherche du lien social, le besoin
de voir du monde, s'unir aux autres, discuter, voir les problèmes
ensemble et trouver des solutions pour tous. Par ailleurs, ces
représentations sont aussi fonction de certains déterminants
sociaux, il s'agit entre autres : du niveau de vie des individus qui y
adhèrent et des conditions d'obtention de ces différents
services.
Les perceptions des jeunes entrepreneurs pastoraux sur le
système tontinier n'échappent pas à ce principe. Les
entretiens effectués montrent que ces regroupements ont plusieurs
significations qui peuvent être interprétées sous divers
angles. Ces différentes représentations de nos répondants
ont pu être regroupées sur 6 principaux points à savoir
:
v Le système tontinier, un outil de financement des
jeunes et petits entrepreneurs ;
v Le système tontinier, une caisse d'accumulation
d'épargne pour les projets ;
v Le système tontinier, un moyen de création des
emplois et des richesses ;
v Le système tontinier, un outil d'inclusion
financière pour les défavorisés ;
v Le système tontinier, une caisse de secours.
101
v Le système tontinier, un outil de financement
limité.
1-1- Le système tontinier : un outil de
financement des jeunes et petits entrepreneurs
Au cours de nos enquêtes de terrains, certains de nos
enquêtés ont affirmé que le système des tontines est
un moyen de financement pour les jeunes entrepreneurs. Pour certains,
après avoir traversé en vain de longues procédures pour
l'obtention d'un crédit de financement auprès d'une structure de
financement formelle, ils ont décidé de s'orienter vers d'autres
moyens de financement à l'instar des tontines. Ces regroupements
caractérisés par la souplesse et la confiance dans l'accord des
ressources financières sont le principal instrument de financement de
ces entrepreneurs. Emmanuel un jeune entrepreneur précise à ce
sujet que :
Les tontines sont vraiment des euh... des outils pour
financer les petits jeunes entrepreneurs que nous sommes. C'est vraiment
indispensable parce que dans ton activité, quand tu fais face à
des difficultés, c'est la tontine qui t'aide donc euh c'est un bon moyen
de financement » (entretien du 26 février 2022 à
Emombo).
Une autre dira :
Moi personnellement je pense que le système
tontinier est encouragé, il joue un très grand rôle surtout
pour nous les jeunes qui nous battons qui nous cherchons qui avons des petites
start-ups des petits projets. Les tontines jouent un grand rôle parce
que, le financement est de gré à gré il n'y a pas de
longues procédures pour avoir de l'argent tout est basé sur la
confiance (propos recueillis le 28 décembre 2021avec Simone
d'EMERCOM à Chapelle-Nkolbisson).
Pour ces enquêtés, le système tontinier
s'identifie davantage à un réseau pour tout individu
désirant entreprendre une activité génératrice de
revenus. À travers le financement, il permet aux jeunes entrepreneurs de
se réaliser et d'accomplir une vie professionnelle, dans un contexte ou
le système bancaire formel répond encore imparfaitement aux
besoins de tous. En effet, tous les agents économiques ont besoin d'un
financement, qu'il soit interne ou externe, pour réaliser leur objectif.
Le système des tontines en offrant des services à
caractère bancaire (épargne, prêt, emprunt) profitent aux
individus en leur fournissant des ressources financières pour
développer leurs activités et mener à bout leur projet
(Kazadi & al, 2021).
Présenter le système tontinier sur le prisme
d'une caisse d'épargne n'est pas une thématique actuelle. Il a
déjà fait l'objet de nombreux développement (Lelart, 1990
; Henri &
1-2- Le système tontinier : une caisse
d'accumulation des épargnes pour les projets
102
al, 1991 ; Bekolo-Ebe, 1989...). Lelart (1990) pour sa part
présente dans son étude les tontines comme des mécanismes
de financement innovant et original, qui permettent d'accumuler et de faire
circuler de la monnaie, entre des intermédiaires financiers informel.
Elles fonctionnent ainsi à partir d'un système de cotisation
fondé sur le drainage de l'épargne et l'octroi du crédit
pour réaliser les projets à visée économique.
Les enquêtes de terrains menées auprès des
jeunes petits entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS nous ont permis
de récolter quelques données à ce sujet. L'analyse de ces
données montre qu'ils appréhendent le système tontinier
comme une caisse d'accumulation des capitaux dans laquelle ils peuvent
emprunter des sommes pour ensuite réaliser des projets. Un
répondant déclare justement à ce sujet que :
En bref on a compris que c'est quelque chose que quand tu
penses réaliser quelque chose, et tu vois avec autant de
problèmes on envisage tu vois que en épargnant cet argent sur
place tu ne peux pas la gardée jusqu'à tu puisses réaliser
un projet tu vois. En la cotisant comme ça là tu es sûr de
toi que bon le jour opportun ou tu as besoin de cela, sa peut t'aider à
gérer tes problèmes. Donc c'est une manière
d'épargner de garder un peu de sous (entretien du 31
décembre avec Luc d'ADJAS à Mvog-Beti).
Il faut dire que, la majorité des jeunes
éleveurs qui ont cette perception du système tontinier ont eu
à démarrer leur activité d'élevage à partir
d'une épargne ou d'un prêt obtenu grâce à l'aide de
l'association. En effet, certains ont pu réaliser leur projet
d'élevage à partir de l'épargne cumulée dans la
tontine sur une certaine période à l'instar de Jean-Daniel de
l'association EMERCOM. D'autres ont pu démarrer grâce un
prêt obtenu dans l'association, à l'instar de Martial d'ADJAS. Un
enquêté confirme cela lorsqu'il précise : « j'ai
remarqué que les tontines jouent un grand rôle. Parce que vous
allez voir la majorité des éleveurs de nos jours ont pour capital
l'argent qu'ils ont prêté dans les tontines, ou alors l'argent
qu'ils ont épargné dans les tontines » (propos
recueillis le 30 janvier avec Christophe à Ekorezok).
On constate dès lors avec Tello-Rozas et Gauthier
(2012) que les associations d'épargne et de crédit rotatif connu
sous le nom de « tontine » au Cameroun constituent une des
formes d'organisation les plus populaires pour financer les projets dans les
pays ou l'accès au crédit est restreint.
1-3- Le système tontinier : un outil d'inclusion
financière pour les couches défavorisées
Pour de nombreux jeunes entrepreneurs, particulièrement
les entrepreneurs du secteur informel, le système tontinier s'apparente
à une banque d'épargne et de crédit au secours des couches
à faible revenus. En effet, comme le souligne Hedi (2016) la tontine ou
« banque des défavorisés » est une forme de
banque informelle qui permet aux individus membre de cumuler
103
les épargnes et de financer les projets communs ou
individuels. Au cours de nos entretiens de nombreux répondants ont
affirmé que le système des tontines est un moyen pour eux d'avoir
des ressources financières de manière simple et sereine.
Il faut dire que l'image que les uns et les autres ont du
système tontinier sont toujours en opposition avec le système
bancaire officiel (banques, microfinances...). Aristide, un éleveur de
l'association EMERCOM déclare à ce sujet que :
Ce n'est pas facile d'avoir un financement, ce n'est pas
facile de monter un dossier de financement pour aller à l'Etat voir
l'Etat pour qu'on finance un projet. Non seulement ça met long alors
qu'à la tontine c'est très facile et vraiment sa booste nos
activités. Ça nous aide à nous réaliser
nous-même et ça nous donne l'emploi. Et sa développe
également le secteur des éleveurs qui est un secteur tant
négligé même (entretien du 27 décembre 2021
à Tsinga).
Comme le souligne Bekolo-Ebe (1996), ce sont les lourdeurs
administratives et les taux élevés d'intérêts dans
l'octroi des crédits qui sont à l'origine de la
préférence des agents vers les circuits de financement informel
à l'instar du système des tontines.
Au plan social, les entretiens réalisés nous ont
permis de comprendre qu'une part des jeunes entrepreneurs à faibles
revenus vivent des associations informelles d'épargne et de
crédit. Ces associations constituent « la matière
première » dans l'accès aux ressources
financières et même dans les autres problèmes de la vie
sociale, surtout lorsqu'ils ne sont pas les bienvenus dans le système
financier formel. C'est ce qui justifie les propos d'un répondant
d'ADJAS lorsqu'il déclare : « comme j'ai dit depuis il n'y a
que la tontine-là qui nous aide beaucoup. C'est comme notre support,
notre point d'appuis, quand tu es dans le choc tu rentres que vers là.
Nous avons notre compte épargne c'est ça notre banque, c'est avec
ça que nous on vie » (entretien réalisé le 10
février avec Joël à Mongonam). De ces propos il ressort
ainsi que, le système tontinier est un outil de financement pour de
nombreux individus à faibles revenus. Grâce aux ressources
financières dont ils bénéficient dans ces associations,
ces jeunes peuvent entreprendre une activité génératrice
de revenus et assurer le financement.
1-4- Le système tontinier : une caisse
d'assurance
Le système tontinier au-delà d'une caisse de
financement, est aussi pour une part de nos enquêtés, un programme
d'aménagement d'une vie. Il s'agit d'une caisse de prévoyance
sociale dans la mesure où, les individus en situation de
difficulté professionnelle ou familiale peuvent recourir à
n'importe quel moment pour obtenir de l'aide. Plus clairement, il s'agit d'une
caisse qui permet d'anticiper sur les difficultés futures dans la vie
d'un individu. Dans ce sens, Seumo (2008) précise que le système
des tontines sont des sources de financements permettant aux
104
individus à faible revenus monétaires, de
satisfaire une vie professionnelle et de combler les difficultés
rencontrées dans la vie quotidienne. Le vice-président d'ADJAS
confirme cet état de chose lorsqu'il relève que : «
c'est vraiment une roue de secours, où lorsque tu es bloqué
ça te permet d'avoir un peu d'argent pour résoudre tes
problèmes dans ta petite activité que tu fais. Bon vraiment
ça a une place importante, pour n'importe qui qui exerce une
activité » (entretien du 31 janvier 2022 à Mvog-beti).
Un autre dira : « parfois la tontine comme ça quand je bouffe,
et que je sais que je n'ai rien d'urgent à faire avec l'argent
là, je garde ça dans ma caisse d'épargne. Je sais que
quand je serais vraiment coincé ou quand je ferai face à un
imprévu je viendrai retirer pour résoudre le problème
là » (entretien du 28 janvier 2022 avec Faustin à
Mokolo).
Pour ces enquêtés, le système tontinier
s'identifie alors à une caisse de secours anticipé. Cette caisse
leur permet donc de résoudre les potentiels problèmes qu'ils
rencontrent dans la gestion de leurs activités entrepreneuriale ou d'une
difficulté quelconque. À l'instar de Charles de l'association
ADJAS qui en dehors de son activité d'élevage emprunte souvent
dans la tontine pour payer la pension scolaire de l'enfant.
1-5- Le système tontinier : un outil de
création des emplois et des richesses pour les populations à
faibles revenus
Il faut dire de manière générale que les
longues conditions dans l'octroi des crédits de financement
amènent les acteurs sociaux à faible revenus à rechercher
d'autres pistes d'accès au crédit pour le financement ou le
démarrage de leurs activités (Kazadi & al, 2021). Les
associations d'épargne et de crédit rotatif sont des leviers de
l'économie informelle. À travers le principe de don/contre-don
réciproque régis sur l'épargne, la cotisation et
l'emprunt, elles se présentent comme un remède pour les individus
exclus de l'accès au service bancaire formel.
Lors de nos descentes de terrains, une part de nos
enquêtés nous ont avoué avoir pu démarrer leur
entreprise grâce à leur tontine. Elle a été leur
point de départ pour sortir de la situation de chômage et de sans
emploi. Simone une éleveuse de l'association EMERCOIM nous confie
à ce sujet que :
C'est au sein de la tontine que j'ai pu démarrer
mon activité. Donc étant à la réunion j'ai
demandé à avoir un prêt et une fois que j'ai eu
l'autorisation, il me fallait avoir les avalistes comme je vous l'ai dit pour
avoir le prêt, il te faut être à jour dans ton fond de
caisse. Une fois que j'ai eu mes avalistes qui avaient un fond de caisse le
montant que j'ai demandé m'a été alloué afin de
lancer mon activité. J'ai commencé avec quelques poules et petit
à petit j'ai évolué à mon niveau »
(propos recueillis le 28 décembre 2021).
105
Les propos de cette enquêtée témoigne
ainsi de la volonté du système tontinier a encouragé
l'esprit d'initiative chez les adhérents et à lutter contre le
chômage. Un autre déclare à cet effet :
Nous les jeunes surtout les petits entrepreneurs les
petits débrouillards, ça nous permet d'avoir les petites
facilités pour avoir de quoi vivre de quoi se battre de quoi se
auto-employer. Vu le système auquel nous faisons face nous les petits
jeunes, avec le non emploi car pour trouver l'emploi est tellement difficile et
le taux de chômage ne fais qu'augmenter (entretien du 04 janvier
avec Gérome 2021 au camp-Sonel).
Pour cet enquêté, le système tontinier est
un pourvoyeur d'emploi dans un contexte économique marqué par
l'incapacité pour l'Etat d'employer tous ses citoyens. Ainsi face
à cette insuffisance, cette tranche de la population se reconvertie
ainsi vers des circuits de financements propices au développement de
l'entrepreneuriat à l'instar du système des tontines.
1-6- Le système tontinier : un outil de financement
limité
Pour une part de nos répondants, le système
tontinier s'avère un cercle de financement limité dans le sens
où les montants octroyés aux membres peuvent parfois
s'avérer insuffisant pour financer des activités
entrepreneuriales nécessitant de grands moyens financiers. Creusot
(1999) souligne à cet effet que le principal point faible de ces
associations est la limite dans les fonds mobilisés. Autrement dit, les
fonds levés ne permettent pas toujours de financer des activités
économiques importantes nécessitant des montants un peu plus
élevés.
Une jeune entrepreneure fait comprendre à ce sujet que
:
Les tontines on ne peut pas dire que ça n'aide pas.
C'est vrai ça aide à son niveau, mais pour nous qui avons les
grandes entreprises quand tu as par exemple une ferme de 400 à 600
poules et que quand tu prêtes on te donne peut-être 20milles ce
n'est pas suffisant pour payer la nourriture et les médicaments des
poulets. Donc on est obligé mon mari et moi de demander ailleurs pour
compléter parce que quand tu investi dans un grand truc il te faut aussi
beaucoup de moyen pour vous en sortir et parfois tu peux être
coincé financièrement (entretien du 01fevrier 2022 avec
Bescherelle d'EMERCOM à Ayene).
Il ressort ainsi des propos de cette enquêtée que
malgré la forte solidarité financière dont font preuve le
système des tontines, ceux-ci restent parfois limité. Cette
insuffisance est généralement liée au manque de ressources
économiques nécessaires pour financer les activités
entrepreneuriales de grandes tailles. Un autre dira à ce sujet que :
Non nous sommes limités parce que vu la situation
tu ne peux pas chercher à aller très loin. Parce que si on avait
peut-être les appuis financiers les ONG, là on pouvait bien s'en
sortir. Mais à partir du moment que tu n'as pas trop de moyens tu ne
dois pas risquer parce qu'avoir beaucoup
106
d'animaux tu vas perdre on joue avec les moyens de bord
que la tontine nous donne (entretien du 16février avec Rodrigue
d'ADJAS à la montée
Irad)
Ainsi présentées, les différentes
représentions que se font les jeunes entrepreneurs pastoraux sur le
système tontiniers sont déterminées par leurs conditions
de vie, le contexte économique et les différents services offerts
par leurs associations de crédits. L'analyse de ces
représentations permet de comprendre que ces systèmes de
crédit se présente comme une opportunité voire une
solution pour eux. À travers les nombreux services financiers
proposés, cette forme de financement informel permet de faire face
à l'épineux problème de financement de l'entrepreneuriat
dans un environnement où l'accès aux ressources
économiques n'est pas une chose aisée pour tous. De plus, ces
différentes perceptions permettent de comprendre que la tontine occupe
une place de premier rang dans l'accès aux ressources financières
et dans le financement de leur activité entrepreneuriale. Non seulement
l'association constitue leur point d'appuis, pour gérer leur
activité, mais également elle représente leur caisse de
secours en cas de difficulté majeure.
Dans la section suivante, il est maintenant question
d'évaluer les effets du système tontinier dans la dynamique
entrepreneuriale de ces jeunes éleveurs. La mobilisation de la
théorie des réseaux permettra de mieux apprécier
l'influence du réseau tontinier sur la propension à entreprendre
des jeunes individus.
2- ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME
TONTINIER DANS LA PROMOTION DE L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL À
YAOUNDÉ
L'évaluation concerne la démarche, la
méthode et le système de preuve. Elle porte également sur
la pertinence sociale du sujet ou du thème proposé et la
performance sociale des éclairages fournis. Dans les sciences sociales,
l'évaluation est fondée sur la description et
l'interprétation des données de terrain (Gaudin et Livet, 2008).
Selon l'OCDE (2010), l'évaluation est une opération qui consiste
à porter une appréciation systématique et objective sur
une étude ou un projet, en prenant en compte les différents
points de vue qui émanent des acteurs ou des experts du
phénomène étudié. Elle permet de faire une
synthèse des résultats pour produire une appréciation
globale du phénomène ou de la réalité
étudiée.
L'évaluation va servir de ce fait d'examiner,
d'apprécier, de tirer des synthèses et des conclusions globales
du phénomène étudié. Elle permettra à terme
de mieux comprendre les effets ou influences des associations EMERCOM et ADJAS
dans la dynamique
107
entrepreneuriale des jeunes entrepreneurs pastoraux qui y
recourent dans la ville de Yaoundé. De même, à travers des
indicateurs tels que : l'efficacité, la pertinence et la
durabilité, elle permettra de saisir le rapport qui existe entre le
système tontinier et l'entrepreneuriat pastoral.
2-1- Évaluation de la contribution des
associations EMERCOM et ADJAS dans le développement de l'entrepreneuriat
pastoral
Après avoir analysé les représentations
que se font les jeunes entrepreneurs autour des associations rotatives
d'épargne et de crédit, il est maintenant question de faire une
évaluation de la contribution du système tontinier dans les
activités économiques des membres à partir des
résultats de terrains. Il est important de préciser que le
système tontinier constitue un réseau de solidarité
professionnel, ethnique ou amical et donc la variable « tontine »
est une partie ou un moment de l'association. C'est donc cette variable
tontine qui nous permet de mieux mesurer l'effet de ces regroupements
associatifs dans la dynamique entrepreneuriale.
La théorie des réseaux issue notamment des
travaux de Burt et Granovetter permet de souligner le rôle des
réseaux sociaux dans la détection des opportunités
entrepreneuriales et dans l'évaluation de l'influence du groupe dans la
dynamique entrepreneuriale. Le champ de l'entrepreneuriat fait l'objet de
nombreux Tavaux qui insistent sur le rôle des réseaux dans le
processus entrepreneurial (Hoang & Antonic, 2003). L'entrée de
l'entrepreneur dans les réseaux sociaux influence son accès aux
ressources et aux opportunités, c'est ce que Lin (2001) appelle le
capital social de l'entrepreneur. En effet, les contraintes d'accès aux
ressources financières expliquent largement la décision
d'adhérer à un réseau de financement informel.
L'adhésion au réseau favorise ainsi l'accès aux ressources
à la fois financières, matérielles et relationnelles.
Évaluer la contribution du système tontinier
dans les activités des entrepreneurs bénéficiaires revient
à présenter l'influence du réseau associatif dans la
dynamique entrepreneuriale des bénéficiaires. Cette influence est
fonction de la nature des capitaux mobilisés par ces éleveurs
dans leur entreprise.
Il faut dire que la participation aux réseaux de
financements informels, à l'instar du système tontinier a
influencé positivement sur les motivations à entreprendre des
membres des associations EMERCOM et ADJAS. En effet, au cours des
enquêtes de terrains, la majorité de nos répondants nous
ont confié que c'est la recherche de gains financiers pour entreprendre
ou gérer une activité qui a le plus influencé leur
adhésion à l'association. De par le système financier
formel peu propice aux couches sociales à faibles revenus, et à
travers le faible niveau d'employabilité au niveau de l'Etat, ces jeunes
entrepreneurs étaient surtout motivés par le désir
d'exercer un métier. Au-delà d'exercer un métier il
était aussi surtout question pour eux de
108
quitter de la situation de sans emploi, de contribuer aux
charges familiales dans le foyer pour les femmes, de combler les insuffisances
d'une vie professionnelle pour les hommes et de participer à leur
développement personnel.
À travers les services financiers offerts par les
associations EMERCOM et ADJAS à savoir : l'épargne, l'emprunt et
les cotisations mensuelles, ces éleveurs ont pu avoir des ressources
financières pour gérer leurs activités ou financer le
démarrage de leurs entreprises. À la question de savoir si les
aides obtenus de l'association par les jeunes éleveurs ont
contribué aux l'objectifs désirés la majorité de
ces éleveurs ont répondu positivement quant à l'atteinte
des objectifs. Un éleveur de l'association ADJAS nous avoue que :
Cette tontine m'a vraiment aidé dans le
développement de mon élevage depuis le départ parce que,
c'est grâce à cela que j'ai pu lancer mon élevage j'ai
commencé par deux petits porcelets et aujourd'hui voilà que j'ai
en moyenne une vingtaine de bêtes donc son importance est vraiment
considérable » (entretien du 20 janvier 2022 à
Abobo).
Lors de l'enquête de terrain avec cet
enquêté, il a offert la possibilité d'apprécier par
nous même les effets des différentes aides de l'association sur la
performance de son activité entrepreneuriale. Au regard de l'observation
menée, force est de constater que cette aide lui a non seulement permis
d'agrandir son activité considérablement, mais également
de s'outiller techniquement et matériellement.
Image 2 : Photo prise à Oyom-Abang au
lieu-dit « quartier Abobo » lors de nos entretiens de
terrain
Source : enquête de terrain
du 20 janvier 2022
109
Ces aides offertes par l'association ne permettent pas
toujours dans tous les cas à atteindre les objectifs escomptés.
Un éleveur de l'association ADJAS nous confie à ce sujet que :
« je ne peux pas dire oui parce que ce n'est pas encore ça ce
n'est pas encore l'objectif désiré même. J'ai envie
d'agrandir encore mon site, et augmenter le nombre de porcs comme les moyens
sont encore limité pour le moment on fait d'abord avec ce qu'il y'a
» (entretien du 05janvier avec Jordao à Etetak). Les propos de
cet enquêté témoignent le caractère parfois
limité des systèmes tontiniers en termes de ressources
financières pour satisfaire tout le monde de manière continue. Ce
manque est dû au fait que les cotisations provenant essentiellement des
membres ne sont parfois pas assez élevées pour prêter des
montants colossaux à tout le monde.
Concernant l'usage des fonds empruntés dans la tontine,
les membres de l'association ADJAS procèdent à des descentes de
terrains afin de se rassurer que l'argent emprunté par un membre a
effectivement été mis au profit de son activité. En effet,
la mise sur pied de cette stratégie de suivi par l'association a
été faite dans l'optique d'encourager l'évolution des
activités des membres, mais surtout d'éviter l'utilisation des
gains à des fins inutiles. Étant donné que l'association
et essentiellement constituée d'éleveurs, « il est
impératifs pour nous nous, de faire cette vérification pour avoir
la certitude que tout le monde puisse évoluer dans son affaire. Et
surtout que l'association continue à aider et à s'agrandir
» dit le président de l'association.
Dans l'association EMERCOM par contre, tout est davantage
basé sur la confiance et sur la responsabilité des membres.
Contrairement à l'association ADJAS, les membres du bureau ne
procèdent pas à une descente sur le terrain, tout est régi
sur la responsabilité des membres dans la gestion de leur entreprise. La
confiance réciproque est de mise dans cette association, les descentes
de terrains concernent beaucoup plus l'aide psychotechnique en ce sens
où, lorsqu'un éleveur rencontre une difficulté majeure
dans son activité, il fait appel à un ami de l'association qui
s'y connait mieux pour lui apporter une aide technique. En effet, les
résultats de terrain ont révélé que la nature des
aides au sein de ces deux associations va au-delà de la valeur
financière. Grâce à leur forte solidarité, ces
entrepreneurs bénéficient d'un apport supplémentaire dans
le développement de leur activité pastorale, il s'agit d'un
accompagnement en termes de conseils et de formations. Cette aide non
financière leurs ont ainsi permis d'acquérir des connaissances
utiles pour davantage améliorer la performance de leur entreprise en
termes de rendement.
Au niveau des indicateurs de performances, lorsque nous
évaluons la question de la performance en lien avec la croissance de
l'activité de ces entrepreneurs, les résultats de terrain ont
permis de constater un effet positif. En effet, l'accès à une
source de financement informel
110
a eu un effet positif sur la survie, la croissance et la
productivité des entreprises de ces petits et moyens entrepreneurs
pastoraux des associations EMERCOM et ADJAS. Ces éleveurs qui avaient
des restrictions d'accès à des sources bancaires formelles ce
sont vus avoir des facilités grâce à leur association.
Grâce aux différentes aides financières
ils ont pu accroitre la production de leurs entreprises. Un entrepreneur
déclare à propos :
Ça a eu importance assez considérable parce
que, je suis parti de 40 poulets à aujourd'hui 200 poulets. J'ai agrandi
ma superficie d'élevage j'ai agrandi, ma production aujourd'hui mon
espace d'élevage s'est agrandi et maintenant je lance les poulets
régulièrement chaque mois, vraiment sa m'a été
largement bénéfique (propos recueillis le 11 janvier 2022
avec Jean-Daniel d'EMERCOM à Nkolbisson).
Une visite guidée en compagnie d'un de ces
entrepreneurs dans son poulailler nous a permis de confirmer notre 3ème
hypothèse de recherche qui portait sur les effets du système
tontinier dans la dynamique entrepreneuriale.
Image 3 : Photo prise à Nkolbisson au
lieu-dit « derrière école publique » lors de
notre visite de terrain
Source : enquête de terrain du 11
janvier 2022
Il faut dire que la particularité de ces associations
repose sur leurs solidarités dans l'accord des crédits. En effet,
il y'a la possibilité de cumuler deux prêts simultanément
dans le cas où aucun autre membre ne sollicite un prêt. De plus,
lorsqu'un membre fait face à un imprévu et qu'il n'est pas
totalement à jour dans ses cotisations, il peut toujours passer par
111
derrière et obtenir la clémence des membres du
bureau pour l'obtention d'un prêt depuis la caisse de secours et
rembourser plus tard. Toutes ces différentes stratégies d'aides
montrent ainsi de la forte solidarité financière et le sentiment
d'entraide qui prime au sein de ces associations. Comme l'explique la
trésorière d'EMERCOM, lorsqu'un individu va à la
réunion et soumet son problème, avant de rentrer il a
déjà la réponse à son problème.
Ces associations sont dès lors d'un apport
considérable dans la gestion des activités de jeunes
entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS de par leurs
particularités. L'évaluation de l'apport du système
tontinier dans les activités entrepreneuriales de ces entrepreneurs
permet de constater les effets positifs de ces associations dans les
activités des membres. De nombreux enquêtés ont
répondu favorables quant à l'apport de l'association dans leur
entreprise pastorale. Comme le souligne un répondant :
La tontine c'est la matière première, je dis
bien c'est la matière première parce qu'il y'a les moments
où je suis vraiment bloqué je n'ai rien et je compte à
100% sur ma tontine pour lancer les choses et rembourser doucement doucement.
Donc la tontine on ne peut pas dire que c'est une mauvaise chose, c'est une
matière première, ça a permis d'accroître
l'entreprise ça avance un peu un peu et dans le bon système par
la grâce de Dieu (entretien du 20 janvier 2022 avec Gérard
à Abobo).
Néanmoins, certains membres de ces associations ne sont
pas véritablement satisfaits car, en demande toujours plus de leur
tontine pour davantage augmenter leurs ressources et accroître leur
activité entrepreneuriale.
De plus, l'évaluation des données de terrains
montre que les mesures d'accompagnement initiées par ces associations
ont une influence qui ne se limite pas seulement sur leur dynamique
entrepreneuriale mais également dans leur vie sociale. Les
différents témoignages de nos répondants ont permis de
constater un effet positif de ces différentes mesures d'accompagnement
sur d'autres aspects de leur vie que celle économique. À cet
effet, un enquêté nous confie avoir acheté un terrain
grâce aux bénéfices cumulés de ses
différentes ventes de porcs : « je peux dire que ça m'a
poussé même à faire beaucoup de choses. Donc à
partir de l'élevage en fin d'année j'ai eu un peut l'argent,
jusqu'à peut-être je me suis fait acheter un terrain donc c'est
déjà beaucoup moi je vois ça déjà beaucoup
» (entretien du 04 février 2022 avec olivier d'ADJAS à
Vietnam). Un autre répondant explique que grâce à l'aide
financière et physique de l'association, il a pu se marier et
fondé une famille « moi je n'étais pas marié je
n'avais pas encore des enfants. Mais aujourd'hui, grâce au soutien
financier et même physique de ma tontine, j'ai réussi à
réaliser mon mariage donc, je suis là et sa m'accompagne sur tous
les plans » (entretien du 30décembre 2021 avec Loïc
d'EMERCOM à la chapelle Oyom-abang).
112
En outre, il ressort que les contributions des associations
EMERCOM et ADJAS ont eu un effet positif dans la performance des
activités pastorales de ses membres. Allant principalement du capital
financier (prêt, épargne, cotisation mensuelle) au capital social
(conseil, formation, écoute...), la majorité des éleveurs
de ces associations témoignent leurs sentiments de gratitude envers le
groupe pour l'aide apportée dans le développement de leur
activité. À travers leurs souplesses et les nombreux services
financiers mis à la disposition des membres, nombreux sont ceux qui ont
pu accroitre leur entreprise, résister à la faillite ou encore
financer le démarrage de leur activité d'élevage. Au
regard de l'analyse des différentes perceptions recueillies
auprès des entrepreneurs pastoraux de ces deux associations et de
l'évaluation des mécanismes d'aides, il ressort que le
système tontinier est un outil de financement pour de nombreux jeunes
entrepreneurs. Pour ces individus exerçant leurs activités
à petites, et moyennes échelles dans une dynamique informelle,
chacun y trouve son compte. Même si pour certains l'aide est parfois
insuffisante pour assurer une gestion totale de leur activité
d'élevage, pour d'autres elle constitue la matière
première dans le financement de leur activité pastorale au
quotidien. Nombreux sont ceux qui ont avoué vivre grâce au
financement de leur association au quotidien :
Si nous vivons c'est grâce aux tontines donc
vraiment les tontines ont un rôle très important. Parce que
grâce à la solidarité, grâce aux échanges
grâce au partage, nous les éleveurs particulièrement ceux
de mon domaine, nous bénéficions de sagesse de beaucoup
d'intelligence, de beaucoup d'expérience qui nous permettent de booster
notre activité (entretien du 07 fevrier avec Pierre d'ADJAS
à Eloumdem).
L'objectif de cette évaluation était
d'apprécier d'une part les effets du système tontinier dans la
pratique de l'entrepreneuriat jeune à partir du cas des associations
EMERCOM et ADJAS. En effet, sur la base de nombreux indicateurs de mesure de la
performance entrepreneuriale tels que : la productivité de
l'activité, le taux de croissance de l'entreprise, l'augmentation du
capital des entrepreneurs, les résultats montrent que les
mécanismes de financement initiés par ces deux associations
influencent positivement la dynamique entrepreneuriale des
bénéficiaires. De plus, ces réseaux tontiniers ont un
effet positif sur la croissance des activités de ces entrepreneurs,
notamment sur la production et la croissance de l'entreprise. D'autre part,
l'évaluation des différentes mesures d'accompagnements
initiées par ces associations avait pour but de dégager la nature
du rapport qui existe entre le système tontinier et la pratique de
l'entrepreneuriat pastoral jeune. De l'évaluation faite nous aboutissons
à la conclusion selon laquelle le système tontinier est un levier
de financement pour de nombreux jeunes entrepreneurs. À travers la
mobilisation des théories des représentations
113
sociales et des réseaux, et sur la base des entretiens
menés auprès des entrepreneurs et des responsables de ces
associations, il ressort clairement que le système tontinier est un
outil de financement indispensable dans la gestion des entreprises des
entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS. À travers les
ressources économiques dont ils bénéficient dans
l'association, les entrepreneurs parviennent à financer la gestion, et
le démarrage de leur entreprise. Ces réseaux de financement
informel permettent ainsi de palier effectivement aux problèmes de
financement dont font face les jeunes entrepreneurs en difficultés. Ce
qui nous permet ainsi de répondre à notre question de recherche
principale et de confirmer notre hypothèse de recherche relative.
En somme le système tontinier se présente comme
une réponse voire un tremplin pour certains entrepreneurs ayant des
restrictions d'accès, voir exclus du système bancaire formel. En
effet, il permet aux entrepreneurs d'avoir des facilités d'emprunts pour
financer leur activité génératrice de revenus
malgré que les ressources soient parfois limitées ou
insuffisantes pour certains. Grâce à leur système de
solidarité fondé sur une conscience collective (financier,
relationnel, social), leurs influences est-elle qu'elles vont au-delà de
la vie économique, et touche à presque tous les plans de la vie
sociale de ces jeunes entrepreneurs.
CONCLUSION GÉNÉRALE
114
115
En mettant au centre de cette réflexion la
problématique du financement de l'entrepreneuriat, le présent
travail s'est consacré à étudier le système
tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à
Yaoundé à partir des cas des associations EMERCOM et ADJAS.
L'objectif de cette recherche était d'identifier et d'apprécier
la contribution du système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS
dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral à
Yaoundé. En effet, la question du financement de l'entrepreneuriat, plus
précisément l'entrepreneuriat jeune au Cameroun reste
d'actualité. Le nombre de jeunes en situation de chômage et ceux
en quête de ressources financières pour démarrer une
activité économique connait des proportions inquiétantes.
Malgré les différentes mesures mises sur pied par l'Etat
camerounais afin de lutter contre le chômage des jeunes et favoriser
l'inclusion financière pour tous, le problème du
développement de l'entrepreneuriat se pose toujours. En effet, les
formalités administratives et les conditions dans l'octroi des
crédits de financement ne sied pas aux réalités de ces
jeunes à faibles revenus. Face à la difficulté des
institutions de crédit formel à accorder des ressources aux
entrepreneurs du secteur informel, particulièrement les jeunes se
tournent vers les circuits de financements informels à l'instar du
système des tontines. Il s'agit d'un regroupement d'amis, de voisins, de
collègues ou de ressortissants d'une même tribu réunis
autour d'un même idéal, à côté duquel ils
décident de mettre de côté un peu d'argent à travers
un système de cotisation pour s'entraider les uns les autres.
Cette observation faite a permis de formuler comme question
centrale : Comment les associations EMERCOM et ADJAS contribuent-elles au
développement de l'entrepreneuriat pastoral à travers leur
système tontinier ? À cette interrogation qui était
au coeur de cette réflexion, l'hypothèse retenue soutenait que
les associations EMERCOM et ADJAS contribuent au développement de
l'entrepreneuriat pastoral en accordant des crédits et en accompagnant
leurs membres dans la réalisation d'activités
entrepreneuriales
Le travail de vérification de l'hypothèse s'est
déroulé sur le terrain grâce au cadre théorique et
méthodologique. Comme modèle théorique, trois principales
théories ont été mobilisée à savoir une
théorie de petite portée (la théorie du don/contre-don),
une théorie de moyenne portée (la théorie des
réseaux) et une théorie de grande portée (la
théorie des représentations sociales). L'usage de ces trois
théories a non seulement permis de confronter nos hypothèses
à l'épreuve des faits, mais également d'analyser et
d'interpréter nos données de terrain.
L'opérationnalisation de la théorie du don/contre-don a
révélé que le système tontinier à
Yaoundé fonctionne sur un triple principe : «
donner-recevoir-rendre ». Lorsqu'un membre bénéficie de
la somme du jour, il a l'obligation de cotiser au prochain tour afin que les
autres
116
bénéficient à leur tour, dans un
système d'échange rotatif. La théorie des
représentations sociales pour sa part a permis de comprendre les images,
les perceptions et la place qu'occupe le système tontinier dans leur
entreprise. Par ailleurs, la théorie des réseaux quant à
elle a servi à dégager et d'apprécier l'influence du
réseau associatif dans la dynamique entrepreneuriale des membres.
La collecte des données s'est faite à travers
l'usage des techniques et outils de collectes de données non
probabilistes. Sur la base d'une enquête qualitative
réalisée auprès de deux associations tontinières
constituée d'éleveurs, entre autres le comité de direction
et les membres entrepreneurs, trois techniques de collecte des données
ont étés mobilisées dans le cadre de la production des
données. C'est dans ce sens que l'entretien semi directif et
l'observation directe ont permis de faire des descentes sur le terrain pour
collecter des données. L'observation documentaire a permis de collecter
toutes sortes de documents et divers rapports permettant ainsi de rendre compte
de la question du système tontinier et de l'entrepreneuriat.
L'analyse des données collectées via ces
différentes techniques s'est faite grâce à la
méthode de l'analyse de contenu. Des lors, les résultats obtenus
à la suite de ces analyses ont conduit aux constats selon lesquels : les
populations à faibles revenus entre autres les jeunes exclus du
système financier formel ont plus de facilités dans la finance
informelle à l'instar du système tontinier. Ces ressources
financières leurs permettent ainsi de financer des activités
entrepreneuriales à l'instar de l'élevage des volailles et des
porcins afin de s'en sortir au quotidien. Cet état de chose renseigne
suffisamment sur le fait que le secteur de la finance informelle est un
pourvoyeur d'emploi pour les jeunes entrepreneurs à faibles revenus
exclus des services bancaires formels.
Le travail a été divisé en deux
principales articulations. La première partie qui s'articulait autour du
système tontinier et la création des richesses a
été structurée en deux chapitres. Dans le premier chapitre
nous a fait un tour d'horizon sur la sociogenèse et l'émergence
du système tontinier dans le monde. Il était question pour nous
de retracer les différents parcours historiques du
phénomène tontinier dans le monde, à travers l'origine du
concept, les modes de fonctionnement et la nature des échanges. Cette
réflexion a permis de comprendre que le système tontinier existe
depuis longtemps dans les sociétés traditionnelles régis
autour d'échanges de services (donner-recevoir-rendre) et dont
l'apparition de la monnaie aurait modernisée cette pratique du tout au
tout. En effet, le système tontinier aujourd'hui est régi par un
ensemble de règles formalisées et de divers services financiers
allant de la cotisation au prêt en passant par l'épargne.
117
Le deuxième chapitre du travail, s'est attelé
à présenter la contribution du système tontinier aux
activités économiques. Il était question à ce
niveau de présenter la problématique de l'inclusion
financière en Afrique et au Cameroun, la nature des motivations des
individus, la question de l'accès aux ressources financières, les
motivations du recourt au système des tontines et l'apport de ce
système dans les activités entrepreneuriales des
adhérents. La réflexion menée dans ce chapitre a permis de
comprendre que la conjoncture économique qui est au centre des
motivations des entrepreneurs et la rigueur du système bancaire les
orientent vers d'autres sources de financement parmi lesquelles le
système des tontines. En effet les lourdeurs du système bancaire
officiel les auraient ouverts la voie à d'autres opportunités de
financement pour s'épauler afin d'entreprendre une activité
génératrice de revenu au quotidien. C'est ce qui a aidé
à saisir la contribution du système tontinier aux
activités économiques en termes de services financiers tels que
l'épargne et l'emprunt. Elle a également permis de comprendre que
cet apport ne se réduit pas seulement au plan financier, elle concerne
également l'aspect relationnel fondé sur les conseils et la
formation.
La deuxième partie du travail,
s'intéressé à la dynamique financière du
système tontinier à Yaoundé à partir de deux
associations cibles à savoir EMERCOM et ADJAS. Elle était
divisée en deux chapitres également, le troisième chapitre
portait sur les mécanismes de financement des activités
entrepreneuriales au sein des associations EMERCOM et ADJAS. La mobilisation de
la théorie du Don/contre-don dans ce chapitre a servi à
présenter et analyser le mode de fonctionnent de ces associations. Cette
présentation a permis de nous rendre compte que ces regroupements
fonctionnent sur la base d'un règlement intérieur allant des
membres du bureau à l'assemblée générale. De plus,
il a été ressorti trois principaux modes d'accès au
financement auxquels recourent ces entrepreneurs pastoraux. Il s'agit entre
autres de la cotisation mensuelle, de la caisse d'épargne et de la
caisse de prêt, qui sont les principaux moyens mobilisés par ces
entrepreneurs pour financer leurs activités.
Dans le quatrième et dernier chapitre du travail, il a
été mené une réflexion qui s'articulait autour de
l'analyse et de l'évaluation de la contribution du système
tontinier au développement de l'entrepreneuriat pastoral. À
partir de la théorie des représentations sociales et la
théorie des réseaux, il était question d'analyser les
perceptions de ces éleveurs sur la tontine afin de mieux évaluer
l'apport de ces associations dans les activités des membres. L'analyse
des représentations des entrepreneurs pastoraux sur le système
tontinier à enrichir cette recherche. En effet, elle a permis de
comprendre que la tontine est le principal moyen de financement de ces jeunes
exclus dans l'accès aux services bancaires. Non seulement elle
représente leur banque, mais également elle constitue le
principal socle sur lequel s'appuie ces
118
jeunes entrepreneurs au quotidien. Malgré le fait que
les montants octroyés sont parfois insuffisants pour financer des
activités de grande envergure, elle constitue pour ces derniers un outil
de financement non négligeable dans la vie économique.
Grâce à l'évaluation faite à partir
de la théorie des réseaux, et des données de terrains,
nous avons pu interpréter l'influence des associations EMERCOM et ADJAS
dans les activités de leurs membres. L'interprétation de ces
données nous a donné l'occasion d'apprécier la
contribution de ces deux associations dans les activités des
entrepreneurs. En effet ces associations de par leurs mécanismes d'abord
financiers boostent la dynamique entrepreneuriale de leurs membres. Pour
certains, elle a permis d'accroitre leur activité, pour d'autres, de
financer le démarrage. De plus de par leur capital relationnel, elles
ont permis aux membres de se soutenir à travers des conseils et des
formations utiles dans la gestion de leur entreprise. Toutefois,
l'interprétation des données suggère aussi que ces
organisations en tant que moyens de financement privilégié par
les petits et moyens entrepreneurs ne peuvent assumer le rôle de
système formel. Les systèmes tontiniers sont des associations qui
donnent des montants parfois insuffisants pour répondre aux besoins des
entreprises de grandes tailles.
Somme toute, notre analyse relève l'importance et
l'utilité du système informel de crédit,
particulièrement le système tontinier en contexte camerounais. La
participation aux réseaux tontiniers permet aux entreprises qui ont
été étudiées d'émerger au quotidien.
Cependant au regard du contexte financier actuel, certains de nos
enquêtés ont émis des suggestions en faveur de
l'amélioration du financement des activités entrepreneuriales
jeunes. Ces suggestions ont été évoquées à
l'endroit des pouvoirs publics on peut ainsi noter :
Ø Encourager les jeunes porteurs de projets inscrits
dans les associations, en les aidant, les finançant afin que ces
derniers puissent jouer un rôle ;
Ø Accompagner les tontines pour fructifier
l'activité au lieu d'imposer des taux qui ont un impact négatif
par rapport à la tontine ;
Ø Mettre sur pied des meilleurs moyens pour favoriser
l'inclusion financière de tous ;
Ø Mettre la jeunesse au centre des
préoccupations.
Cette recherche constitue donc une contribution à la
littérature existante, notamment en ce qui concerne l'utilisation des
AERC par les jeunes entrepreneurs informels pour financer la gestion et le
démarrage de leurs activités. Dans la littérature qui
existe sur les associations informelles d'épargnes et de crédits,
l'ensemble des études a conclu sur la place de ces regroupements dans le
financement. En abordant dans le détail la question des motivations au
recourt à ces associations et surtout la manière dont les
ressources y sont mobilisées, nous avons
119
pu comprendre la nature des rapports qui existe entre le
phénomène tontinier et le phénomène entrepreneurial
informel. La contribution de cette recherche réside donc dans
l'identification des pratiques liées au système tontinier chez
les jeunes entrepreneurs en contexte camerounais, contexte
caractérisé par les difficultés d'accès aux
services financiers formels.
Nous n'avons pas la prétention d'avoir parcouru tous
les contours de notre Object de recherche. À la suite de cette
recherche, nous souhaitons réaliser une étude plus vaste en
explorant les entreprises formelles de grandes tailles au Cameroun. Cela
pourrait permettre une saisie en profondeur de la contribution de ce secteur
dans le système financier camerounais afin de mieux enrichir notre objet
de recherche.
120
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8-Textes juridiques et documents administratifs
Décret N°2017/0467/PM 08 février 2017 portant
création et mise en oeuvre du « plan triennal spécial jeunes
».
Décret N°2011/26 du 23 mai 2011 portant
création du « PIAASI ».
Décret N°2011/408 du 09 décembre 2011 portant
« mise en oeuvre de l'éducation civique et élaboration des
programmes ».
Loi N°2020/018 du 17 décembre 2020 portant loi de
financement de la république du Cameroun pour la banque camerounaise des
petites et moyennes entreprises.
Loi N°21/026 du 16décembre 2021 portant loi de
finances de la république du Cameroun pour l'exercice 2022,
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consulté le 05juin 2021.
ANNEXES
129
130
ANNEXE 1 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX ENTREPRENEURS
DE
L'ASSOCIATION
Bonjour/Bonsoir Monsieur/Madame, je m'appelle MELI YIMDJI
Jordan Cédric étudiant à l'université de
Yaoundé 1 en Master 2 sociologie. Dans le cadre d'une recherche purement
académique portant sur le système tontinier dans le financement
de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé, le présent
guide d'entretien construit à cet effet vise à recueillir les
informations utiles dans le cadre de mon travail de recherche
académique. Je désire ainsi m'entretenir avec vous dans un
intervalle de 10 à 15 min tout en vous garantissant de l'anonymat et de
la confidentialité de vos réponses. Je vous prie de
répondre précisément et sincèrement aux questions
ci-dessous.
Section 0 : identification de
l'enquêté
· Noms et Prénoms
· Sexe
· Lieu de résidence
· Age
· Profession ou activité professionnelle
· Statut matrimonial
Section 1 : Généralité sur les
tontines et mode d'organisation
- Etes-vous membre d'une association ? si oui comment
s'appelle-t-elle ?
- Depuis quand êtes-vous membre de cette association ?
- Comment avez-vous connu cette association ?
- Pourquoi avez-vous décidé d'y adhérer
?
- Existe-il une tontine au sein de cette association ?
- D'après-vous en quoi consiste la tontine ?
- En êtes-vous membre ? si oui pourquoi ?
- Quelles sont les conditions à remplir pour être
membre de votre tontine ?
- Selon vous comment fonctionne cette tontine ?
Section 2 : système tontinier et
mécanisme d'accès au financement
- Qu'est-ce qui vous a motivé à démarrer
votre activité entrepreneuriale ?
- Par quels moyens avez-vous financé votre
activité depuis le départ jusqu'à présent ?
131
- Quels sont les moyens initiés par l'association pour
soutenir les membres dans leur activité ?
- Avez-vous bénéficié d'un prêt de
votre tontine ? si oui, sous quelles conditions (taux d'intérêt,
durée de remboursement, avaliste, garanties) ?
- En dehors des apports financiers, l'association dispose-t-elle
d'autres moyens d'accompagnements ?
- Ces aides ont-elles réellement contribuées
à l'objectif désiré ?
- Quelle est l'importance de cet accompagnement dans la
performance de votre activité ?
SECTION 3 : contribution du système tontinier
dans les activités entrepreneuriales
- Que pensez-vous du système tontinier dans le
financement des activités entrepreneuriales ?
- Quel est l'apport du système tontinier dans votre
activité entrepreneuriale ?
- Quelles propositions pouvez-vous faire en vue de
l'amélioration du financement des activités entrepreneuriales des
jeunes ?
132
ANNEXE 2 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX MEMBRES DU
BUREAU
SECTION 0 : identification de
l'enquêté
· Noms et Prénoms
· Sexe
· Lieu de résidence
· Age
· Profession ou activité professionnelle
· Statut matrimonial
Section 1 : Généralité sur les
tontines et mode d'organisation
- Comment s'appelle votre association ?
- En quelle année et dans quel contexte a-t-elle vue le
jour ?
- Quel est le but de votre association ?
- Quel poste occupez-vous au sein de cette association ?
- Combien de membre compte votre association ?
- L'association est-elle légalisée ?
- Existe-il une tontine au sein de cette association ? si oui
pourquoi ?
- Tous les membres de l'association font-ils partir de
l'association ? si oui pourquoi ?
- Quelles sont les conditions à remplir pour être
membre de l'association ?
- Pouvez-vous nous expliquer comment fonctionne la tontine dans
cette association ?
(Cotisation, épargne, fréquences de rencontres,
prêt...)
Section 2 : système tontinier et
mécanisme d'accès au financement
- Dans quel secteur d'activité exercent les membres de
l'association ?
- Quelles sont les différents points sur lesquels porte la
tontine lors des séances ?
- Comment l'association procède-t-elle pour encourager le
développement des activités
des membres ?
- L'association accorde-t-elle des prêts ? si oui sous
quelles conditions ?
- Selon vous ces prêts permettent-ils de financer les
activités membres bénéficiaires ?
Section 3 : influence de la contribution du
système tontinier aux activités économiques
- Comment l'association procède-t-elle pour s'assurer de
l'usage des montants empruntés par les membres dans le
développement de leur activité entrepreneuriale ?
- Selon vous ces aides permettent-ils véritablement
à ces jeunes entrepreneurs de mieux gérer leur activité
?
- Que pensez-vous de la contribution de votre association dans le
développement des activités des entrepreneurs membres ?
133
ANNEXE 3 : ATTESTATION DE RECHERCHE
134
TABLE DES MATIÈRES
DÉDICACE i
REMERCIEMENTS ii
SOMMAIRE iii
LISTES DES TABLEAUX ET DES IMAGES iv
LISTE DES ANNEXES v
LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES
vi
RÉSUMÉ vii
ABSTRACT viii
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
1- CONTEXTE ET JUSTIFICATION 2
2- PROBLÈME DE RECHERCHE 4
3- PROBLÉMATIQUE 6
4- QUESTION DE RECHERCHE 15
4-1- Question de recherche principale 15
4-2- Questions de recherche secondaires 15
5- HYPOTHÈSE DE RECHERCHE 16
5-1- Hypothèse de recherche principale 16
5-2- Hypothèses de recherche secondaires 16
6- OBJECTIFS DE RECHERCHE 16
6-1- Objectif principal 17
6-2- Objectifs spécifiques 17
7- CADRE ÉPISTÉMOLOGIQUE ET THÉORIQUE
17
7-1- Cadre épistémologique 18
7-2- Cadre théorique 18
7-2-1- La théorie des représentations sociales
18
7-2-2- La théorie des réseaux sociaux 19
7-2-3- La théorie du Don/contre-don 20
8- CADRE MÉTHODOLOGIQUE 22
8-1- Techniques et outils de collecte des données 22
8-1-1- La recherche documentaire 22
135
8-1-2- L'entretien semi-directif 23
8-1-3- L'observation directe 23
8-1-4- Outil de collecte 24
8-2- L'échantillonnage 24
9- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE 24
9-1- Délimitation dans l'espace géographique
25
9-2- Délimitation dans l'espace social 25
10- CLARIFICATION CONCEPTUELLE 26
11- TECHNIQUE D'ANALYSE DES DONNÉES 28
12- PLAN DU TRAVAIL 29
PREMIÈRE PARTIE : SYSTÈME TONTINIER ET
CRÉATION DES RICHESSES 31
CHAPITRE 1 : SOCIOGENÈSE ET ÉMERGENCE DU
SYSTÈME TONTINIER 33
1- SOCIOGENÈSE ET ÉVOLUTION DU SYSTÈME
TONTINIER 33
1-1- La sociogenèse du système tontinier 33
1-2- L'émergence du système tontinier dans le
monde 34
1-2-1- En Asie 34
1-2-2- En Amérique 36
1-2-3- En Europe 36
1-2-4- En Afrique 37
2- TYPOLOGIES ET FORMES DE SYSTÈMES TONTINIERS DANS LE
MONDE 40
2-1- La tontine Mutuelle ou Tournante 41
2-2- La tontine commerciale 41
2-3- Les tontines Financières 42
3- LE FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME TONTINIER AU CAMEROUN
44
3-1- Cadre légal 44
3-1-1- Création et adhésion au système
tontinier 45
3-2- L'organisation du système tontinier 46
3-2-1- Les acteurs 46
3-2-2- Le règlement intérieur dans le
système tontinier 47
3-2-3- La réunion 48
3-2-4- Les activités financières 49
3-3- La durée de la tontine 51
3-4- La finalité du système tontinier africain
51
3-5- Le statut du système tontinier au Cameroun 53
136
CHAPITRE 2 : LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME
TONTINIER AUX ACTIVITÉS
ÉCONOMIQUES 54
1- LA PROBLÉMATIQUE DE L'INCLUSION FINANCIÈRE EN
AFRIQUE ET AU
CAMEROUN 54
1-1- La notion d'inclusion financière 55
1-1-1- Quelques indicateurs de l'inclusion financière en
Afrique 55
1-1-2- Les enjeux de l'inclusion financière en Afrique.
56
1-1-3- Les barrières à l'inclusion
financière en Afrique 56
1-1-4- L'inclusion financière au Cameroun : bref
état des lieux 57
1-2- Les motivations à l'entrepreneuriat des couches
sociales à faible revenus 58
1-2-1- Le model PULL et PUSH des motivations
entrepreneuriales 59
1-2-2- Les facteurs motivationnels négatifs et
positifs/économiques et non économiques 60
2- LES SECTEURS D'ACTIVITÉS DES ENTREPRENEURS AU CAMEROUN
63
2-1- Le secteur informel 64
2-2- Les différentes formes d'entreprises 67
2-3- L'accès au financement entrepreneurial 69
3- LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX
ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES
70
3-1-Les déterminants du recourt au système
tontinier 70
3-1-1- L'apport du système tontinier aux activités
économiques 71
3-1-2- Le concept d'accompagnement en entrepreneuriat 74
DEUXIÈME PARTIE : LA DYNAMIQUE FINANCIÈRE
DU SYSTÈME TONTINIER
77 CHAPITRE 3 : LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT
DES ACTIVITÉS ENTREPRENEURIALES AU SEIN DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET
ADJAS . 79 1. PRÉSENTATION ET MODE DE FONCTIONNEMENT DES
ASSOCIATIONS
EMERCOM ET ADJAS 80
1-1- L'association EMERCOM 80
1-1-1- Objectif de l'association EMERCOM 80
1-1-2- Le cadre légal 81
1-1-3- L'organisation structurelle 82
1-1-4- Les activités entrepreneuriales des membres 83
1-1-5- Les réunions 83
1-1-6- Les opérations financières 84
137
1-1-7- Les autres activités de l'association 84
1-1-8- L'assistance 85
1-2- L'association ADJAS 85
1-2-1- L'objectif de l'association ADJAS 85
1-2-2- Le cadre légal 86
1-2-3- L'organisation structurelle 86
1-2-4- Les activités entrepreneuriales des membres 87
1-2-5- Les réunions 87
1-2-6- Les opérations financières 87
1-2-7- L'assistance 88
2- LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES ACTIVITÉS
PASTORALES PAR LES
ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS 89
2-1- Les mécanismes de financement des activités
pastorales à EMERCOM 89
2-1-1- La cotisation mensuelle 90
2-1-2- L'épargne 90
2-1-3-L'emprunt 91
2-1-4-La caisse d'investissement 92
2-2-Les mécanismes de financement à ADJAS 92
2-2-1- Les cotisations mensuelles 93
2-2-2- La caisse d'épargne 94
2-2-3- La caisse de prêt 94
3- LES AUTRES FORMES D'ACCOMPAGNEMENTS AU SEIN DES
ASSOCIATIONS
EMERCOM ET ADJAS 95
3-1- L'accompagnement relationnel à EMERCOM 95
3-2- L'accompagnement relationnel à ADJAS 97
CHAPITRE 4 : ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA
CONTRIBUTION DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS AU DÉVELOPPEMENT
DE
L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL 99 1- LES
REPRÉSENTATIONS SOCIALES DU SYSTÈME TONTINIER CHEZ LES
JEUNES ENTREPRENEURS PASTORAUX À YAOUNDÉ 100
1-1- Le système tontinier : un outil de financement des
jeunes et petits entrepreneurs 101
1-2- Le système tontinier : une caisse d'accumulation des
épargnes pour les projets 101
1-3- Le système tontinier : un outil d'inclusion
financière pour les couches défavorisées 102
1-4- Le système tontinier : une caisse d'assurance 103
138
1-5- Le système tontinier : un outil de création
des emplois et des richesses pour les
populations à faibles revenus 104
1-6- Le système tontinier : un outil de financement
limité 105
2- ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME
TONTINIER DANS LE
DÉVELOPPEMENT DE L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL À
YAOUNDÉ 106 2-1- Évaluation de la contribution des
associations EMERCOM et ADJAS dans le
développement de l'entrepreneuriat pastoral 107
CONCLUSION GÉNÉRALE 114
BIBLIOGRAPHIE 120
ANNEXES 129
TABLE DES MATIÈRES 134
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