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Le système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à  Yaoundé


par Jordan cedric MELI YIMDJI
Université de Yaoundé 1  - Master 2 2022
  

Disponible en mode multipage

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THE UNIVERSITY OF YAOUNDE I

UNIVERSITÉ DE YAOUNDÉ I

***********
CENTRE DE RECHERCHE ET DE
FORMATION DOCTORALE EN
SCIENCES HUMAINES,
SOCIALES ET ÉDUCATIVES
************
UNITÉ DE RECHERCHE ET DE
FORMATION DOCTORALE EN
SCIENCES HUMAINES ET
SOCIALES
**************
DÉPARTEMENT DE
SOCIOLOGIE

***********

POST GRADUATE SCHOOL FOR
THE HUMAN, SOCIAL AND
EDUCATIONAL SCIENCE
*********

DOCTORATE RESEARCH UNIT
FOR HUMAN AND SOCIAL
SCIENCES
*************

DEPARTMENT OF SOCIOLOGY

LE SYSTÈME TONTINIER DANS LE FINANCEMENT DE

L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL JEUNE À

YAOUNDÉ : CAS DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET

ADJAS.

Mémoire présenté en vue de l'obtention du diplôme de Master en sociologie Spécialité : Urbanité et ruralité

Par

Jordan Cédric MELI YIMDJI

Licence en Sociologie

MEMBRES DU JURY

PRESIDENT : Armand LEKA ESSOMBA (MC)

EXAMINATEUR : Achille PINGHANE YONTA (CC)

RAPPORTEUR : Henri TEDONGMO TEKO (CC)

Sous la direction de :

Henri TEDONGMO TEKO
Maître de conférences, Université de Yaoundé 1

Mai 2022

DÉDICACE

i

À ma mère KUETE Joseline, mon père YIMDJI David et mes frères. À la mémoire de mon oncle et homonyme MELI TCHINDA Bertrand.

ii

REMERCIEMENTS

Nous ne saurons achever ce travail sans toutefois manifester notre profonde gratitude à l'endroit de tous ceux, qui de près et de loin nous ont apporté leurs contributions tant matérielle, intellectuelle que morale à l'élaboration de ce travail de recherche scientifique. Ces remerciements vont en premier à l'endroit de notre encadreur académique le Pr Henri TEDONGMO TEKO dont la rigueur scientifique et l'exigence d'un travail bien fait nous a permis de mener cette recherche. Les critiques apportées, les remarques, la mise à notre disposition des ouvrages nécessaires à notre investigation scientifique ont été d'un apport très bénéfique, d'où la reconnaissance pour nous de lui exprimer notre profonde gratitude.

Nos remerciements vont également à l'endroit du chef de département de sociologie le Pr Armand LEKA ESSOMBA dont le cours sur la méthodologie de rédaction du mémoire a été d'un apport substantiel dans la rédaction de ce travail. Nous exprimons notre gratitude à l'endroit des professeurs Achille PINGHANE et Yves Bertrand DJOUDA, donc les enseignements dispensés depuis les années antérieures ont étés bénéfiques dans notre recherche.

Nous tenons également à exprimer notre profonde gratitude à l'endroit de madame Marie Perisser MBANGO qui a mis à notre disposition un capital financier, matériel et intellectuel tout au long de cette recherche. Un profond remerciement à nos promotionnaires avec qui nous avons fait chemin ensemble depuis la première année d'étude et dont les échanges ont marqué notre parcours. Entre autres Wilfried NGATCHA, Tobie MBANGA, Berline SIGNING, Cédrine EBWELE, Georgette BEKADA, Raïssa DJOMOUO et François NDAOU.

Nous sommes profondément reconnaissant envers nos ainés académiques qui ont contribué à enrichir ce travail à travers leurs conseils et leurs regards critiques notamment Arouna MFENJOU, Ghislaine LEKASSA et Cédric KENGMO. Nous sommes particulièrement reconnaissants envers nos proches qui n'ont cessé de nous encourager moralement, William FONKOU, Christian TCHINDA, Yvan KENNE, Kelinne DAGHA, Astride KEMEDJO Marguerite NTOLO, Perpétue NGAH, Alex ATETSOP, Dimitri OMBIONO, Paul BIKOP et Gaëtan MBIAKOP.

Par ailleurs nous remercions infiniment les associations EMERCOM et ADJAS qui sans la disponibilité de leurs membres ce travail n'aurait point vu le jour. La générosité des membres et leurs temps qu'ils nous ont accordé, leurs expériences a été une source d'inspiration.

iii

SOMMAIRE

DÉDICACE i

REMERCIEMENTS ii

SOMMAIRE iii

LISTES DES TABLEAUX ET DES IMAGES iv

LISTE DES ANNEXES v

LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES vi

RÉSUMÉ vii

ABSTRACT viii

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

PREMIÈRE PARTIE : SYSTÈME TONTINIER ET CRÉATION DES RICHESSES 31

CHAPITRE 1 : SOCIOGENÈSE ET ÉMERGENCE DU SYSTÈME TONTINIER 33

CHAPITRE 2 : LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX ACTIVITÉS

ÉCONOMIQUES 54

DEUXIÈME PARTIE : LA DYNAMIQUE FINANCIÈRE DU SYSTÈME TONTINIER ... 77

CHAPITRE 3 : LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES ACTIVITÉS

ENTREPRENEURIALES AU SEIN DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS 79

CHAPITRE 4 : ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS AU DÉVELOPPEMENT DE

L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL 99

CONCLUSION GÉNÉRALE 114

BIBLIOGRAPHIE 120

ANNEXES 129

TABLE DES MATIÈRES 134

iv

LISTES DES TABLEAUX ET DES IMAGES

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Les dimensions de la motivation entrepreneuriale 61

Tableau 2 : Les indicateurs des secteurs d'activités au Cameroun en 2021 64

Tableau 3 : Critère de classification des entreprises au Cameroun 68

Tableau 4 : Illustration des différents types contributions du système tontinier aux activités

économiques. 75

LISTE DES IMAGES

Image 1 : Livraison de provende à la nouvelle route Nkolbisson 93

Image 2 : Photo prise à Oyom-Abang au lieu-dit « quartier Abobo » lors de nos entretiens

de terrain 108

Image 3 : Photo prise à Nkolbisson au lieu-dit « derrière école publique » lors de notre

visite de terrain 110

V

LISTE DES ANNEXES

ANNEXE 1 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX ENTREPRENEURS DE

L'ASSOCIATION 130

ANNEXE 2 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX MEMBRES DU BUREAU 132

ANNEXE 3 : ATTESTATION DE RECHERCHE 133

LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES

vi

ADJAS : Association des jeunes amis solidaires

AREC : Association rotative d'épargne et de crédit

AERC : Association d'épargne rotative et de crédit

BIT : Bureau international du travail

BM : Banque mondiale

BC-PME : Banque camerounaise des petites et moyennes entreprises

CRDI : Centre de recherches pour le développement international

EESI : Enquête sur l'emploi et le secteur informel

ECAM : Enquête camerounaise auprès des ménages

EMERCOM : Émergence des communicateurs

FMI : Fond monétaire international

INS : Institut national de la statistique

MINADER : Ministère de l'agriculture et du développement rural

MINATD : Ministère de l'administration territoriale et de la décentralisation

MINEPIA : Ministère de l'élevage, des pêches et des industries animales

MINFOPRA : Ministère de la fonction publique et de la réforme administrative

MINJEC : Ministère de la jeunesse et de l'éducation civique

OCDE : Organisation de coopération et de développement économique

OIT : Organisation internationale du travail

PAJER-U : Programme d'appuis aux jeunes ruraux et urbains

PANEJ : Plan d'action national pour l'emploi des jeunes.

PED : Pays en développement

PIAASI : Programme intégré d'appuis aux acteurs du secteur informel

PIB : Produit intérieur brut

PME : Petites et moyennes entreprises

PTJ : Plan triennal spécial-jeune

SJC : Synergie de la jeunesse camerounaise

TPE : Très petites entreprises

vii

RÉSUMÉ

Dans la plupart des pays africains, les petits entrepreneurs à faibles revenus ont des difficultés d'accès au crédit bancaire officiel. De ce fait, la recherche présentée dans le cadre de ce mémoire porte sur l'apport du système tontinier au financement de l'entrepreneuriat au Cameroun. Comment les associations EMERCOM et ADJAS contribuent-elles au développement de l'entrepreneuriat pastoral à travers leur système tontinier ? Telle est la question qui guide cette recherche. L'objectif est d'identifier et d'apprécier la contribution du système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. Plusieurs procédés théoriques et méthodologiques ont été mobilisés pour analyser les modes de fonctionnement de ce système ainsi que son influence dans le développement des activités des jeunes entrepreneurs. Sur la base d'une enquête qualitative réalisée auprès des entrepreneurs pastoraux de deux associations à savoir EMERCOM et ADJAS, nous avons identifié et analyser les différents mécanismes mis sur pieds par ces associations pour favoriser le développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. Les résultats montrent à terme que les associations EMERCOM et ADJAS disposent de nombreux moyens financiers et techniques pour susciter l'esprit l'entrepreneuriale et stimuler la dynamique entrepreneuriale chez leurs membres. Malgré que ces ressources financières soient parfois insuffisantes dans certains cas, ces regroupements associatifs constituent de véritables leviers pour le financement de l'entrepreneuriat pastoral au Cameroun en général et dans la ville de Yaoundé en particulier.

Mots clés : Système tontinier, financement, entrepreneuriat pastoral, entrepreneuriat jeune, Yaoundé.

viii

ABSTRACT

In most African countries, low-income entrepreneurs have difficulties obtaining bank loan. The research presented in this thesis focuses on the contribution of the tontine system to the financing of entrepreneurship in Cameroon. How do EMERCOM and ADJAS association through the tontine system contribute to the development of pastoral entrepreneurship? This is the question that guides this research. The objective is to identify and appreciate the contribution of tontine system of EMERCOM and ADJAS association in the development of pastoral entrepreneurship in Yaoundé. Several theoretical and methodological processes have been mobilized to analyze the modes of operation of this system as well as its influence in the development of the activities of young entrepreneurs. On the basis of a qualitative survey carried out with the pastoral entrepreneurs of two associations, namely EMERCOM and ADJAS, we have identified and analyzed the various mechanisms set up by these associations to promote the development of pastoral entrepreneurship in Yaoundé. The results ultimately show that the EMERCOM and ADJAS associations have numerous financial and even technical means to stimulate entrepreneurial dynamics. Despite the fact that these financial resources are sometimes insufficient in certain cases, these associative groups constitute real levers for the financing of entrepreneurship in Cameroon in general and in the city of Yaounde in particular.

Keywords: Tontine system, financing, pastoral entrepreneurship, young entrepreneurship, Yaounde.

INTRODUCTION GÉNÉRALE

1

2

1- CONTEXTE ET JUSTIFICATION

L'organisation économique des sociétés traditionnelles d'autrefois était régie par un système de don/contre-don, il s'agissait d'un ensemble d'échanges à la fois réciproque et obligatoire caractérisé par l'absence de la monnaie. Ce principe consistait pour des communautés voisines à se partager mutuellement des biens de consommation et des biens de valeur (Mauss, 1923). En Afrique et au Cameroun en particulier, ce système a pris naissance dans les sociétés traditionnelles précoloniales où les paysans s'organisaient en force de travail. Ils s'entraidaient mutuellement dans le labourage des champs, dans les récoltes ou encore dans construction et la réparation des maisons (Nzemen, 1989).

Avec l'arrivée des colons dans les années 1900, les sociétés africaines passent du système de troc réciproque à l'utilisation de la monnaie. Dans le but de mieux réglementer ce nouveau système, de nombreuses institutions bancaires ont vu le jour dont la première est la banque de l'Afrique occidentale (1901-1942) (Kemayou & al, 2011). Après les indépendances, de nombreuses banques nationales verront le jour au Cameroun. Il s'agit notamment de la société camerounaise de banque (SCB), la banque PARIBAS Cameroun (BPC), la banque internationale pour l'Afrique occidentale-Cameroun (BIAO). Ces institutions formelles avaient pour but de sécuriser l'épargne des individus et d'accorder des crédits aux potentiels emprunteurs. Devenues élitistes, elles ne sont ouvertes qu'à une catégorie d'acteurs (fonctionnaires, agent de l'Etat, agent privé) considérés comme des individus fiables en termes de solvabilité, pour ce qui est de l'octroi des crédits. En effet, l'obtention d'un crédit est soumise au respect de nombreuses conditions imposées par ces structures financières (Owondi, 1992). Par exemple pour l'obtention d'un crédit immobilier à la banque société générale Cameroun, le demandeur doit fournir son compte bancaire, un compte chèque, remplir un plan de remboursement personnalisé avoir un titre de domiciliation bancaire (consulté sur : https://www.societegenerale.cm, le 02 janvier 2021).

Les exigences en termes d'octroi de crédit se présentent comme un facteur d'exclusion, voire de marginalisation pour les agents du secteur informel, qui sont généralement des populations à faible revenus. De ce fait, ils se trouvent dans l'incapacité de répondre à toutes les exigences imposées par ces structures financières (Bekolo-Ebe, 1989). Face à ces restrictions d'accès aux facilités bancaires, les populations urbaines et rurales camerounaises exclues de l'accès aux services bancaires développent des stratégies informelles afin de palier à cette difficulté. L'une de ces stratégies consiste au regroupement de ces populations en mouvement associatif dont le système tontinier (Kemayou et al, 2011,). Selon Djeudja

3

(2012 :105) la tontine peut se définir comme étant : « une association ou un réseau formé autour d'un noyau de participants qui mettent régulièrement en commun des biens pour en redistribuer la somme à tour de rôle à chacun des membres d'un groupe ou du réseau ». Ces regroupements à caractère associatif ont pour objectif l'épargne et le crédit (Lelart, 1990). Elles viennent ainsi se substituer aux contraintes des banques officielles à travers l'absence de formalisme, l'absence de contraintes lourdes dans les prêts et la confiance entre les membres (Hugon, 1996).

Une observation menée autour de notre environnement de recherche a permis de constater que la majorité des jeunes (92,0%), faute d'accès aux services formels exercent une activité dans le secteur informel dont 43,4% sont indépendants (BIT, 2015). Ces jeunes s'investissent principalement dans les activités agro-pastorales qui occupent 70% des individus et qui s'imposent comme une valeur sûre et considérable (Zakari, 2017).

De plus, une étude diagnostic du ministère des finances camerounais (2013) dans le cadre de l'élaboration d'une stratégie nationale de microfinance indiquait que les tontines gèrent et opèrent des transactions à hauteur de 190 milliards de FCFA. Concernant l'ampleur des tontines, le rapport ressort que 58% de la population camerounaise est membre d'une tontine (consulté sur : https://www.investiraucameroun.com, le 04 Janvier 2021).

De tels chiffres qui témoignent de l'ampleur de l'entrepreneuriat jeune et du phénomène des tontines en contexte camerounais ont conduit à la formulation du thème : Le système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé : cas des associations EMERCOM et ADJAS.

L'intérêt de cette recherche réside dans le souci de comprendre l'influence du système tontinier dans la pratique de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. De plus, le choix et les motivations de ce sujet partent de plusieurs faits.

Sur le plan personnel, tout commence par la proximité avec le phénomène étudié et par le constat selon lequel, dans la ville de Yaoundé la finance informelle fait vivre de nombreuses familles comparativement à la finance formelle à tel point que 90% de la population active au Cameroun sont insérés dans ce secteur (D'pola et Kakdeu, 2020). De plus, la question de l'entrepreneuriat a toujours suscité chez nous un intérêt particulier. Ainsi, Comprendre pourquoi les jeunes entrepreneurs dans la ville de Yaoundé font recourt au système tontinier constitue une des motivations de cette recherche.

Sur le plan scientifique, le choix porté sur ce sujet se veut une contribution à la thématique du financement de l'entrepreneuriat, dont l'une des variables est le système

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tontinier. Ce qui permettra de comprendre à termes les effets de l'apport de la finance informelle dans la gestion des activités entrepreneuriales.

Ensuite, l'actualité sur l'entrepreneuriat jeune a également motivé le choix de ce sujet. Les divers débats télévisés et organismes de financement notamment le plan triennal spécial-jeune a suscité l'attention. Les travaux réalisés autour de la problématique de la tontine en contexte africain en général et au Cameroun en particulier dans les spécialités telles que (la science économique et de gestion, la sociologie ...) relèvent à suffisance l'importance du système tontinier dans la société.

Ce travail se veut une contribution pour mieux comprendre et expliquer l'influence du système tontinier dans le développement de l'entrepreneuriat jeune au Cameroun en général et dans la ville de Yaoundé en particulier.

2- PROBLÈME DE RECHERCHE

Selon Kassogue (2019 : 1399) « Le problème décrit une situation dans laquelle il existe une anomalie, un obstacle qui empêche de progresser, d'avancer ou de réaliser ce que l'on cherche à résoudre. Cela suscite une question majeure ». La question du financement de l'entrepreneuriat jeune au Cameroun est depuis le début des années 2000 au centre des préoccupations. En effet, l'importance accordée à cette catégorie d'entrepreneurs s'illustre à travers la synergie de la jeunesse camerounaise (SJC) qui accorde un intérêt particulier à l'entrepreneuriat jeune. Une étude menée par l'institut national de la statistique (INS) en 2015 explique que le Cameroun abrite 5% de chômeur pour une population d'environ 20million d'habitants avec un taux de 10,3% chez les jeunes de 15-24ans et un taux de 8,9% chez les jeunes de 15-34ans (Mbilla, 2016). En 2018, une enquête menée par l'INS sur les obstacles à l'entrepreneuriat au Cameroun relevait que le premier obstacle à la création d'une entreprise est la fiscalité qui récolte 53,5% d'opinions. Ensuite les formalités administratives 34,2%, les problèmes d'accès au financement 30,7%, et la corruption avec une proportion de 18,1% (INS, 2018). Une autre étude sur l'offre des services financiers au Cameroun par le ministère des finances (MINFI) en 2018 fait état de ce qu'une tranche importante des camerounais de plus de 15ans gèrent leur argent en dehors du circuit bancaire. Ils représentent 37%, soit 5,25 millions qui sont exclus. En effet, toujours selon la même étude, 71% de camerounais connaissent des difficultés financières dont 36% utilisent des mécanismes non formels pour gérer leurs finances1. Une étude plus récente du plan d'action national pour l'emploi des jeunes (PANEJ)

1 Consulté sur : https://www.investiraucameroun.com/index.php/banque/1611-11727, le 12mars 2020.

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en 2020 fait ressortir que le taux de chômage en milieu jeunes a atteint des proportions de 12% (PANEJ, 2016-2020).

Pour pallier à cette situation afin de favoriser un climat économique favorable et une insertion pour tous, l'Etat camerounais a mis sur pied de nombreuses structures d'accompagnement financier. Notamment la création en 2004 du programme intégré d'appuis aux acteurs du secteur informel (PIASSI) du décret N°2011/26 du 23 mai 2011 portant « création et mise en oeuvre du PIAASI ». Ce programme Rattaché au ministère de l'emploi et de la formation professionnelle (MINFOPRA) a pour objectif de promouvoir l'entrepreneuriat en milieu jeune, en accompagnant financièrement les jeunes promoteurs camerounais. La création en 2007 du programme d'appuis aux jeunes ruraux et urbains (PAJER-U) par le décret N°2011/408 du 09 décembre 2011 portant « mise en oeuvre de l'éducation civique et élaboration des programmes ». Il s'agit d'un programme géré par le ministère de la jeunesse et de l'éducation civique (MINJEC) et financé par les fonds de l'initiative « Pays pauvre très endetté » dans le cadre de la coopération entre le Cameroun et la France qui accompagne financièrement et matériellement les jeunes désirant réaliser des projets aux finalités économiques et s'auto-employer. L'État camerounais a mis sur pieds en 2015 dans la ville de Yaoundé la banque camerounaise des petites et moyennes entreprises (BC-PME) à travers la loi N°2020/018 du 17 décembre 2020 portant « loi de financement de la république du Cameroun pour la banque camerounaise des petites et moyennes entreprises ». Elle a pour principal mission de fournir des capitaux aux potentiels individus désirant créer une affaire ou augmenter la rentabilité de leurs entreprises.

Par ailleurs, il a été mis sur pied en 2017 le plan triennal spécial jeunes (PTJ) par le décret N°2017/0467/PM 08 février 2017 portant création et mise en oeuvre du « plan triennal spécial jeunes » sous très haute instruction du président de la république. Un programme crée dans le but de booster l'insertion des jeunes sur toute l'étendue du territoire national dans les domaines tels que l'agro-industriel, l'élevage et l'économie numérique. Dès lors, malgré ces efforts en matière d'accompagnement financier mis sur pied par l'Etat, l'on constate que l'accès au financement pose toujours problème. Il faut dire que la présence de ces nombreux programmes ne facilite pas l'accès au crédit. Ces structures sont très réticentes dans les critères d'accès aux crédits et accordent des prêts à compte-gouttes. Par ailleurs, leurs systèmes de procédures formelles d'accès aux fonds ne correspondent pas avec le niveau de vie des populations à faibles revenus.

Ce travail pose le problème des difficultés d'accès au financement officiel par les jeunes entrepreneurs à faibles revenus. C'est dans l'optique de comprendre l'influence des mécanismes

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mis sur pieds par les couches sociales à faible revenus pour s'assurer l'inclusion financière que cette recherche s'enracine.

3- PROBLÉMATIQUE

Pour Karsenti et Savoie-zajc (2018, P.377), « l'élaboration d'une problématique de recherche consiste essentiellement à sélectionner et à mettre en ordre, selon une perspective déterminée, des éléments qui composeront la situation problématique et l'objet d'étude ». Voilà pourquoi N'da (2015) considère la revue de littérature comme « un texte ordonné, structuré qui fait l'état des lieux, l'état du niveau actuel des connaissances relatives au problème à l'étude dans un espace cognitif ».

La question de la monnaie, de la valeur, des associations de la société civile, du marché et de la place de l'Etat dans le financement ont longtemps fait un objet d'étude pour de nombreuses disciplines dont les premiers travaux s'inscrivent en science économique. À partir des années 1890, les premières réflexions sociologiques sur l'économie verront le jour sous le nom de « sociologie économique » (Levesque, 2006). Cette branche de la sociologie considère l'activité économique comme étant une dimension de l'activité sociale, en d'autres termes, le fait économique est une composante du fait social (Steiner et Vatin, 2013). C'est d'ailleurs bien ainsi que les fondateurs de la sociologie avaient considéré l'activité économique au moment où ils réfléchissaient à la constitution d'une science systémique du social. En effet, dans « les règles de la méthode sociologique » Durkheim (1893) étudiant le fait social montre explicitement que le fait économique est une dimension à part entière du fait social en vertu du caractère coercitif qu'il exerce sur l'individu. À cet effet, l'activité économique comme toute activité sociale prend donc des formes qui préexistent à l'action de l'individu, et suivant la formule consacrée s'impose à lui (Durkheim cité par Steiner et Vatin, 2013). C'est dans cette logique que s'inscrit notre réflexion sur « le système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune », qui se veut une contribution à la thématique du financement de l'entrepreneuriat.

Cette recherche ouvre de nouvelles perspectives à la compréhension et à l'explication des mécanismes informels d'accès aux ressources. Elle s'appuie sur les travaux qui ont contribué à poser les bases de cette branche de la sociologie. Ces travaux précurseurs seront présentés suivant une perspective disciplinaire dont la particularité est de faire le tour des différentes disciplines des sciences sociales ayant fait l'objet d'étude de la question. De même,

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elle permet de situer son thème dans une approche pluridisciplinaire pour mieux se positionner par rapport aux travaux antérieurs.

Deux principales disciplines ont été retenues pour la construction de cette problématique à savoir : la sociologie économique et la science économique.

Ø La sociologie économique

Les recherches menées par les précurseurs tels que Mauss (1924), Polanyi (1983), Caillé (2007), etc., se sont intéressées à la nature des échanges, leurs formes et leurs motivations au sein des sociétés traditionnelles et modernes. Mauss (1924), dans une étude comparative sur les modes de fonctionnement des sociétés archaïques, à partir des sociétés mélanésiennes, polynésiennes et amérindiennes, découvre dans ces sociétés une forme d'échange à la fois libre et obligatoire qu'il qualifie de don/contre-don. C'est-à-dire une prestation obligeant mutuellement donneur et receveur dans une logique économique et qui de fait les unit par une forme de contrat social, reposant à la fois sur trois obligations : donner, recevoir et rendre. L'auteur explique que le don/contre-don n'est pas totalement gratuit. En effet, ce système d'échange contraint la personne qui a reçu à rendre à son tour. Il précise également que ces systèmes du don échangés sont des faits sociaux totaux, c'est-à-dire qu'ils mettent en branle la totalité de la société et de ses institutions. Ce qui permet de renforcer les liens sociaux entre individus dans une économie non-monétaire.

À la suite des travaux de Mauss, Polanyi (1983) met en avant la réciprocité comme un véritable fondement possible de l'économie. À partir de la théorie de l'encastrement, il considère que les relations sociales sont préexistantes aux relations économiques. De ce fait, l'action économique est encastrée au sein des réseaux de relations qui mettent les individus en contact les uns avec les autres. Selon lui, une logique économique n'est pas seulement basée sur l'utilitarisme, elle peut aussi se fonder sur la réciprocité. Une réciprocité dans laquelle le contre-don est en même temps libre et obligatoire. Il est libre, car ce n'est pas une obligation contractuelle et obligatoire du fait qu'il y'a une incitation sociale à rendre à d'autres dans un système qui favorise les échanges réciproques. L'auteur précise en dernier lieu que le don/contre don met aussi en rapport les pouvoirs et les désirs de reconnaissances, et la liberté et la non-garantie de retour permettant de caractériser le don/contre-don des autres formes d'échanges.

Allant dans le même sens, Caillé (2007) s'intéresse à la permanence du don dans les sociétés contemporaines. À partir de la théorie anti-utilitariste, l'auteur explique que le don continu à jouer un rôle essentiel au sein des sociétés contemporaines. Il différencie ainsi le

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don/contre-don dans la sociabilité primaire qui renvoie aux relations avec les parents, amies, voisins et dans la sociabilité secondaire qui renvoie à l'équilibre dans les différentes sphères sociales. Il considère alors que les liens sociaux dans les sociétés contemporaines sont en fait moins basés sur l'utilitarisme que sur le don, lequel permet d'exister et d'appartenir à un monde. En guise de conclusion, l'auteur mentionne que le don/contre-don permet de créer et d'entretenir les liens sociaux entre les individus au sein de la micro société et de la société globale.

Le point commun de ces travaux était de rechercher dans la tradition sociologique de quoi alimenter un renouvellement de la théorie de l'échange marchand. Les auteurs de ce courant informel se classent volontiers parmi les hétérodoxes. Leur démarche se présente comme une tentative, pour contourner complètement la problématique de la coordination des actions interindividuelles par le marché.

Les recherches effectuées par (Alain, 2012 ; Kemayou, 2011 ; Henry, 1991) ont étudié l'aspect de la question dans les sociétés modernes caractérisées par la monétarisation des échanges.

Dans une approche anthropologique, à partir d'une relecture de Mauss, Alain (2012) propose une autre interprétation du phénomène du don comme modèle central de la circulation des biens et des richesses dans les sociétés de type communautaires. En effet, l'auteur explique que le don est un marché qui, unit de manière durable des partenaires par des liens de dettes à plus ou moins long terme. En ce sens, le don s'inscrit dans une logique de durée où créancier et débiteur s'échangent les rôles constamment. Ainsi, le don fait du donataire un obligé tenu de la reconnaissance qui est d'abord reconnaissance de dette, où dans certaines sociétés l'absence de retour est renforcée par un arsenal de sanctions sociales. À partir des recherches menées en Afrique de l'Ouest notamment en Côte d'ivoire et au Mali, il ressort que l'omniprésence du don s'explique par l'incapacité pour l'Etat d'assurer son rôle d'Etat-providence. En dernière analyse, Alain ressort que ce système de marché de don à la fois généreux, libre, contraignant témoigne des aspirations citoyennes à favoriser un système où chaque couche sociale ne se sente pas délaissé.

Dans une approche sociologique, Henry et al. (1991) ont abordé la question des associations dites de tontines en partant de leur origine, leur mode de fonctionnement et leur statut en contexte camerounais. Dans un premier temps, ils analysent les modes de fonctionnement de ces associations afin de comprendre les raisons de leur émergence au Cameroun. À partir d'une enquête de terrain menée auprès d'une quinzaine de tontines dans la ville de Yaoundé et de Douala, entre autres des fonctionnaires, des commerçants, et des chefs

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d'entreprises, ils aboutissent aux résultats selon lesquels la tontine africaine est un véritable moyen d'inclusion financière en période de difficulté. Ils relèvent également que ces associations représentent des outils d'épargne nécessaire et dont la disparition n'est pas une réalité envisageable.

Kemayou et al. (2011) quant à eux se sont intéressés au devenir de la pratique des tontines dans l'économie camerounaise. À partir de la théorie des jeux d'Olson, ils établissent une comparaison entre le système des tontines et le système des banques et ressortent plusieurs analyses. Dans le premier cas, ils relèvent que les acteurs agissent de manière collective parce que caractérisés par des intérêts collectifs, tandis que dans le système bancaire les acteurs agissent de manière individuelle et sont attirés uniquement par l'accumulation du gain. Par ailleurs, ils montrent que le système des tontines existe dans les sociétés camerounaises bien avant les indépendances et que ces systèmes de financement sont profondément ancrés dans les moeurs des camerounais qui se sentent mieux à l'intérieur par rapport aux banques. Ils mentionnent également que la vitalité du système tontinier au regard de la finance formelle nécessite une meilleure restructuration de ce secteur.

Bien que ces travaux ressortent les spécificités de la finance informelle à l'instar des tontines, ils se sont uniquement focalisés sur les l'importance de ces regroupements associatifs. Ils ont ainsi omis de présenter les différents types de capitaux mobilisés au sein de ses associations informelles. Or, les différents services offerts par ces regroupements constituent généralement le premier facteur motivationnel à l'adhésion des individus. Cette remarque permet d'aborder le second volet de notre revue de littérature qui porte sur les écrits sur la finance informelle et l'entrepreneuriat en science économique.

Ø La science économique

En science économique, de nombreux auteurs et experts de la finance informelle se sont appesantis sur les réseaux informels d'épargne et de crédit en Afrique. Leurs travaux ont relevé divers aspects de ces pratiques dans la vie économique, sociale et culturelle des différents acteurs qui y recourent.

Dans une recherche menée dans la région de l'Ouest-Cameroun, l'économiste et statisticien Nzeumen (1989) s'intéresse à la place de la pratique des tontines dans le financement du développement des sociétés traditionnelles. À partir d'une enquête de terrain menée dans des villages de l'ouest Cameroun auprès des populations traditionnelles, il relève que les mécanismes de fonctionnement des réseaux tontiniers stimulent les besoins d'épargne des paysans. En effet il explique que l'on ne saurait négliger le volume des épargnes qui

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transitent dans les tontines du fait de l'importance de leurs poids qui rend possible le développement dans ces sociétés. À l'issue de son enquête, il aboutit à la conclusion selon laquelle les tontines sont des formes d'organisations développées dans les sociétés traditionnelles dû au manque de structures de financement formel, permettant ainsi de mobiliser et réunir leurs ressources financières nécessaires au financement du développement de ces sociétés.

Dans un contexte géographique différent, Kamaya (2010) dans une recherche qui portait sur les mécanismes de financement en milieu rural, présente la tontine comme l'unique voir la seule voie pouvant conduire le peuple « Bas-Congo » vers le changement des conditions de misères totales. En effet, à travers des recherches menées auprès de quelques villageois qui pratiquent les tontines, il constate que la pratique des tontines par le peuple « Bas-Congo » leur permet de surmonter certaines difficultés de la vie quotidienne. Il émet ainsi l'idée selon laquelle elles sont des véritables moteurs de l'économie provinciale permettant aux populations de satisfaire leurs besoins vitaux, de se procurer les bons outils agricoles et d'améliorer les rendements de leurs plantations.

Dans une autre approche plus large, Edimo (1998) quant à lui s'intéresse à l'émergence et à la place qu'occupe la tontine dans le développement des pays en Afrique. A partir de la théorie du dualisme financier et l'unification financière, il met en relief les éléments explicatifs de la résistance de la finance informelle à côté de la finance formelle. Il explique de ce fait que ces pratiques financières viennent se substituer aux défaillances des banques grâce à leur souplesse et à l'absence des lourdeurs dans l'accord des crédits. En guise de conclusion de ses travaux, il relève que les plans d'ajustement et les politiques d'accompagnement financières initiés dans les pays en voie de développement ne permettent pas de promouvoir la dynamique entrepreneuriale des petites entreprises. Néanmoins, il précise que les tontines peuvent constituer des filons importants pour la définition de structures adaptées de financement de l'activité économique en Afrique.

Dans une approche différente, Bekolo-Ebe (1989) analyse le comportement d'épargne et de détention de liquidité dans les associations de tontines. Dans un premier temps, il analyse le caractère extraverti des tontines en Afrique et explique que ces regroupements sont répandus dans la plupart des économies africaines et particulièrement au Cameroun tant par les entreprises du secteur informel que du secteur formel. Dans un second temps, il fait une analyse du comportement des individus dans les groupes d'épargne afin de comprendre pourquoi la majeure partie des habitants du Cameroun se livre aux tontines. Pour ce faire, il procède à une analyse des typologies de tontines et leurs modes de fonctionnement afin de saisir le

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comportement des individus à chaque niveau. À l'issue de cette analyse, il aboutit aux résultats selon lesquelles le comportement d'épargne dans les tontines est un comportement rationnel déterminé par la tradition sociale c'est-à-dire les interactions et les expériences entre les membres. En guise de conclusion, il relève que la recherche effrénée du gain permet de comprendre la nature concurrentielle des rapports entre le système des tontines et le système financier officiel. Il ajoute également la préférence que les agents tendent à ressentir pour le premier par rapport au second s'explique par leurs souplesses et l'absence de conditions trop strictes dans les opérations de crédits.

La question de l'importance de la finance informelle sur la performance entrepreneuriale des petites entreprises au Cameroun est analysée par Rozos et Gauthier (2012). À travers des observations sur le secteur manufacturier dans la ville de Douala, ils constatent que le système tontinier permet de combler les défaillances du marché formel, d'avoir accès à des ressources financières et de combler le flux de trésoreries de certaines entreprises au Cameroun. Ils expliquent également que les réseaux de financement informel influencent positivement les performances entrepreneuriales en termes de productivité et d'investissement par employé du fait de leur simplicité dans l'accord des ressources financières.

Les recherches conduites par Lelart (1990) en Afrique de l'ouest et en Asie, par Hugon (1996) en Afrique subsaharienne et par Tombola (2010) en côte d'ivoire se sont par ailleurs, intéressées aux représentations sociales autour des tontines. Lelart (1990) s'intéresse au dysfonctionnement du système financier face aux exigences du développement et à la forte montée en puissance de l'informalisation des circuits financiers. À travers des études menées en Afrique en passant par le Bénin, le Niger, le Sénégal et en Asie à travers la Chine et Taiwan l'auteur analyse les mécanismes de fonctionnement de ces pratiques et leurs modalités d'accès au crédit. À l'issue de nombreux entretiens auprès des membres de tontines africaines et asiatiques, il constate que la dynamique de ces circuits financiers informels repose sur des formes très anciennes et semble avoir étés stimulés par les dysfonctionnements des circuits financiers officiels. En dernière analyse, l'auteur explique que la finance informelle pourrait être la voie d'accès à la modernité des pays sous-développés ou en voie de développement.

Dans le même sens, Hugon (1996) s'intéresse au dysfonctionnement du système financier officiel en analysant la relation entre les secteurs financiers institutionnels et informels. Il réaffirme l'importance des systèmes financiers informels comme complément des systèmes financiers officiels (les tontines, les banques des pauvres, les associations villageoises...) et leur rôle non négligeable dans les économies industrielles. À partir de la théorie de la répression financière, il explique l'idée selon laquelle le développement de la

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finance informelle s'explique par des blocages de la finance institutionnelle dont la crise économique des années 80 a favorisé la montée. En dernière analyse, il propose plusieurs pistes pour une meilleure régulation du marché financier, entre autres promouvoir les réseaux mutualistes d'épargne et de crédit et de favoriser l'investissement local de l'épargne à travers le développement des produits adaptés. Par ailleurs, il recommande d'établir des liens entre les pratiques informelles et les organisations afin de réduire l'exclusion des populations à faibles revenus des systèmes bancaires. Toutefois, les considérations selon lesquelles la fusion du secteur financier officiel et informel permettrait de stabiliser le marché financier ne semblent pas encore être une réalité, du fait de la distance socioculturelle qui existe entre les deux systèmes de financement.

En côte d'ivoire, Tombola (2010) dans une recherche qui portait sur la place des associations informelles d'épargne et de crédit en milieu urbain explique que dans la plupart des pays africains, une bonne partie des activités entrepreneuriales se déroule dans le secteur informel. Il souligne le rôle non négligeable des tontines tant en milieu rural qu'en milieu urbain, en effet à travers des entretiens auprès des habitants de la ville de GOMA, il explique que 71% des enquêtés ont estimés que la tontine est efficace du fait qu'elle est proche de ses membres qui se connaissent bien, ainsi la pression sociale les amènes à investir des fonds pour le développement. Il relève par ailleurs que ces structures apparaissent aujourd'hui indispensables eu égard à leur contribution dans la mobilisation de l'épargne et la distribution du crédit pour les couches à revenus modestes. En somme, il note que ces associations suscitent des espoirs réels dans une société où les structures financières modernes répondent encore imparfaitement aux besoins de la grande majorité de la population.

Abordant la question sous un angle différent, Nkakleu (2009) s'intéresse à l'influence de la tontine dans le développement du capital intra-organisationnel en Afrique en général et au Cameroun en particulier. Il commence par présenter le rôle de la tontine d'entreprise qui est une pratique informelle de solidarités financières et de lien social qui contribue à la création du capital-social intra-organisationnel en contexte social camerounais. Ensuite, à partir d'une enquête exploratoire par étude de cas, auprès de deux entreprises appartenant au secteur formel, il obtient ainsi les résultats selon lesquels la tontine d'entreprise constitue un levier d'organisation du travail, de gestion des équipes de travail et d'implication organisationnelle. Il note également que la tontine d'entreprise constitue un réseau social générant le capital-social, et se présente comme un cercle vertueux de réalisation des objectifs individuels et organisationnels.

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Par ailleurs, Kazadi et al. (2021) dans une recherche plus récente qui avait pour objectif d'analyser la place du système financier informel dans la ville de Mbujimayi au Congo, présentent la tontine comme un outil de financement nécessaire pour le développement économique. A partir d'une enquête quantitative par strate auprès de 178 personnes membres des tontines, ils aboutissent aux résultats généraux selon lesquels les fonds obtenus à l'issue d'une cotisation sont utilisés pour des petits investissements, pour payer la scolarité de leurs enfants ou pour augmenter leur capital d'affaire. Ils relèvent ainsi que ces pratiques sont d'une grande importance dans la vie socio-économique de la population. En effet, elles prennent en charge les agents économiques exclus des circuits financiers par le système bancaire en leur offrant des services à caractère bancaire, dont les agents économiques profitent pour développer leurs activités et mener à bout leurs projets. En dernier lieu, ils notent que les pratiques financières informelles sont un remède pour les personnes exclues du système financier classique dans la ville de Mbujimayi.

Ces travaux certes pertinents se sont limités à étudier le recours aux associations d'épargne et de crédit pour le financement des activités économiques sans toutefois mettre en exergue le rôle du réseau associatif dans l'accompagnement de l'entrepreneur. Il importe de se pencher sur la question de l'accompagnement en entrepreneuriat afin de mieux saisir le rôle du réseau ou du groupe dans la découverte des opportunités.

Par ailleurs les auteurs tels que (Sammut, 2015 ; Nkakleu, 2018 et Djoumessi, 2017) ont mis un intérêt particulier sur la place de l'accompagnement entrepreneurial par les réseaux associatifs dans les entreprises en cours d'existence ou en phase de démarrage. Sammut (2015) s'intéresse aux liens et relations externes que tisse l'entrepreneur dans le développement de son opportunité. De ce fait, elle appréhende l'accompagnement comme une pratique d'aide à la création d'entreprise fondée sur une relation qui s'étend dans la durée entre l'entrepreneur et une personne externe au projet. Elle relève que l'accompagnement permet au porteur de projet d'acquérir des connaissances, des savoirs faires et des expériences nécessaires à la concrétisation de son projet. Par ailleurs, elle souligne le rôle du réseau interpersonnel de l'entrepreneur (amis, voisins, collègues, réseaux associatifs) dans l'évolution du projet et qui se présente comme des personnes ayant des compétences dans le domaine entrepreneurial du porteur de projet. En dernière analyse, elle relève que la dimension interpersonnelle est un véritable moteur d'impulsion de dynamique entrepreneuriale.

À la suite de cette dernière, Djoumessi (2017) explore la problématique du financement des petites entreprises en phase de démarrage détenues par les femmes ainsi que les diverses structures d'accompagnement entrepreneuriales existantes au Cameroun. S'appuyant sur des

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entretiens auprès de 56 entrepreneures camerounaises, elle essaye de comprendre comment les entrepreneures font appel aux structures de financement informelles dans le contexte camerounais. Les résultats obtenus à l'issue des entretiens révèlent que les entrepreneures camerounaises n'ont pas recours aux structures formelles d'accompagnement à causes des garanties exigées. Les résultats révèlent également que les structures d'accompagnement informelles sont les plus privilégiées par les entrepreneures et jouent un rôle indispensable dans le développement des entreprises. Elle distingue ainsi comme structures d'accompagnement informelle la famille qui joue un premier rôle, suivie des amies, du réseau relationnel de proximité qui procurent un soutien financier et enfin les associations telles que les tontines qui permettent d'avoir des facilités d'emprunt. En dernière analyse, elle relève que les exigences du système économique en place ne favorisent pas une inclusion financière pour toutes les catégories sociales. De même, elle ajoute que le recours aux réseaux d'accompagnement informels par les petites entrepreneures leur permet de combler des difficultés liées à l'exercice de leur activité.

Par ailleurs, Nkakleu (2018) souligne l'importance des structures d'accompagnement pour les entrepreneurs potentiels dans la réalisation de leur projet d'entreprendre. Sur la base de quelques enquêtes de terrains menées dans les villes de Yaoundé et de Douala au Cameroun et de Saint-Louis et Dakar au Sénégal, auprès d'une dizaine de structures d'accompagnement et de responsable de petites entreprises, il essaye de comprendre le fonctionnement des structures d'accompagnement. Les résultats obtenus soulèvent que l'accompagnement souffre d'un problème de qualité de prestation d'accompagnement et d'insuffisance de structures d'accompagnement publiques et privées. Il explique également que certains porteurs de projets ont souvent recourt au financement informel telles que les tontines, les aides familiales, les groupes d'amies et les réseaux ethniques tels que les Bamilékés au Cameroun et les Mourides au Sénégal qui sont des véritables moteurs d'impulsion de la dynamique entrepreneuriale. En dernière analyse, il montre que l'accompagnement est un levier du développement des entreprises du fait qu'il met en relation d'aide l'accompagnant et l'accompagné.

Au regard de ce qui précède, le travail d'exploration laisse voir l'importance de l'investigation de ces auteurs dont l'objectif était de présenter l'influence du réseau associatif dans le développement des activités et dans la découverte des opportunités entrepreneuriales. Cependant, il convient de noter que ces recherches sur le système tontinier et l'entrepreneuriat ont été plus effectuées dans le domaine des sciences économiques à travers les questions d'accès au crédit de financement, de marché financier et d'exclusion financière. De plus, ces travaux soutiennent que la pauvreté et la recherche de gains financiers aisés sont les principaux facteurs

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qui favorisent le recours des entrepreneurs à faible revenus au système tontinier, sans toutefois interroger les différents mécanismes mobilisés par cette catégorie d'entrepreneurs pour le développement de leurs activités économiques. Par ailleurs, la plupart de ces recherches ont été effectuées dans un environnement socio-culturel et spatio-temporel différent du nôtre, d'où la nécessité d'effectuer une mise en contexte tant spatiale que culturelle. Il est également important de noter que, la majorité des écrits sur la finance informelle en rapport avec l'entrepreneuriat sont peu abordés en sociologie. Ce constat nous donne ainsi la possibilité d'apporter notre modeste contribution à la thématique du financement de l'entrepreneuriat à partir d'une approche sociologique.

À partir du moment où le système tontinier et l'accès aux finances sont appréhendés et vécus diversement d'une culture à une autre, il est question en s'appuyant sur les travaux antérieurs, d'orienter cette recherche sur le rapport entre le système tontinier et le développement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé. Par la suite, il sera question d'identifier et d'analyser les différents mécanismes financiers mobilisés par les entrepreneurs au sein des associations EMERCOM et ADJAS en vue de promouvoir leurs activités entrepreneuriales.

En orientant cette recherche vers le rapport entre le système tontinier et l'entrepreneuriat jeune, il s'agira d'abord de comprendre comment les mécanismes d'accès aux ressources financières sont organisés au sein de ces regroupements associatifs. Par la suite, il sera question de comprendre l'influence de ces mécanismes de financement au sein des activités des membres.

4- QUESTION DE RECHERCHE

Le présent travail s'articule autour d'une question de recherche principale déclinée en trois questions de recherches secondaires.

4-1- Question de recherche principale

Comment les associations EMERCOM et ADJAS contribuent-elles au développement de l'entrepreneuriat pastoral à travers leur système tontinier ?

4-2- Questions de recherche secondaires

QRS1- Quels sont les modes d'organisation des associations EMERCOM et ADJAS ?

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QRS2- Comment l'accès au crédit et l'accompagnement entrepreneurial sont-ils organisés au sein des associations EMERCOM et ADJAS ?

QRS3- Quels sont les effets de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans les activités entrepreneuriales des jeunes entrepreneurs ?

5- HYPOTHÈSE DE RECHERCHE

Selon Quivy et Campenhoudt, (2006 : 126) l'hypothèse est une « proposition provisoire, une présomption, qui demande à être vérifiée » elle met en relation le phénomène a étudié « système tontinier » et les concepts capables d'en rendre comptes « entrepreneuriat pastoral ». C'est elle qui oriente et qui guide le chercheur dans son travail. Ainsi une hypothèse principale a été formulée et démembrée en 3 hypothèses secondaires.

5-1- Hypothèse de recherche principale

Les associations EMERCOM et ADJAS contribuent au développement de l'entrepreneuriat pastoral en accordant des crédits et en accompagnant leurs membres dans la réalisation d'activités entrepreneuriales.

5-2- Hypothèses de recherche secondaires

HRS1- Les associations EMERCOM et ADJAS dans la ville de Yaoundé sont structurés autour d'une organisation hiérarchique régie par un ensemble de règles qui assure leur pérennité.

HRS2- L'accès au crédit et l'accompagnement entrepreneurial au sein des associations EMERCOM et ADJAS sont régis par un ensemble de dispositions statutaires et des mécanismes pédagogiques.

HRS3- La contribution des associations EMERCOM et ADJAS a pour effet de susciter l'esprit entrepreneurial et de stimuler la dynamique entrepreneuriale chez leurs membres.

D'après Kassogue et al (2017 : 139), « les objectifs sont un peu comme les nerfs dans la problématique ils doivent décliner clairement ce que l'on entend faire de façon précise, de plus

6- OBJECTIFS DE RECHERCHE

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ils doivent avoir une connexion étroite avec la question de recherche ». Les objectifs de recherche indiquent l'intention de l'étude, les objectifs, l'idée principale. Cette idée principale est issue d'un besoin « le problème de recherche » et affinée dans les questions spécifiques « les questions de recherche ». D'où le besoin de formuler clairement les questions de recherche pour pouvoir faire ressortir l'idée centrale de ces objectifs de recherche.

6-1- Objectif principal

Identifier et apprécier la contribution du système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.

6-2- Objectifs spécifiques

ORS1- Comprendre les modes de fonctionnement des associations EMERCOM et ADJAS.

ORS2- Identifier et analyser les différents mécanismes d'accès aux ressources financières et d'accompagnement entrepreneurial mis sur pied au sein des associations EMERCOM et ADJAS.

ORS3- Analyser et apprécier les effets de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans les activités entrepreneuriales des jeunes entrepreneurs membres.

7- CADRAGE THÉORIQUE

En science sociale tout comme en science de gestion, le chercheur ne choisit pas une théorie sur la base d'un simple hasard. Il est influencé par les courants de pensées dominants dans son domaine de recherche. Autrement dit, pour être pertinentes, les approches choisies doivent faire référence à ce qu'Avenier et Gavard-Perret (2008) appellent « des visions du monde partagée par une communauté scientifique ». En d'autres termes, il s'agit pour le chercheur d'identifier le paradigme dans lequel se réfèrent les choix théoriques et méthodologiques qu'il souhaite mobiliser pour expliquer son objet d'étude. Cette section présente le cadre épistémologique et théorique de notre recherche.

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7-1- Cadre épistémologique

Dans le cadre de cette recherche, nous avons fait recours au paradigme constructiviste qui est de plus en plus mobilisé dans les recherches en entrepreneuriat. Sur la base d'une analyse qualitative, il s'agissait pour nous de collecter auprès de notre population cible les perceptions, et les représentations socialement construites que ces derniers se font du système tontinier. Autrement dit il était question de se placer dans une logique de découverte afin d'identifier et d'apprécier le rapport qui existe entre le système tontinier et l'entrepreneuriat pastoral Jeune à Yaoundé. En effet, dans une épistémologie constructiviste, l'objectif n'est pas de présenter la réalité de manière iconique mais il est davantage question de comprendre comment les acteurs concernés interprètent la réalité. En somme, le paradigme constructiviste a permis de comprendre à terme la contribution du système tontinier dans la gestion des activités entrepreneuriales.

7-2- Cadre théorique

Le choix d'une théorie dépend du principe de pertinence et de motif stratégique. Selon Depelteau, (2000), la théorie choisie, modifiée ou construite doit être une construction intellectuelle servant à expliquer des phénomènes réels. Cette théorie doit pouvoir expliquer une partie de notre réalité et paraitre la meilleure ou la plus adéquate pour investiguer, expliquer et comprendre son objet d'étude. Dans le cadre de ce travail, trois théories ont été mobilisée, elles ont permis de comprendre, expliquer et interpréter le phénomène étudié à savoir le système tontinier. Il s'agit plus précisément de la théorie représentations sociales, la théorie des réseaux sociaux et la théorie du don/contre-don.

7-2-1- La théorie des représentations sociales

Le concept de représentations sociales apparait pour la première fois en sciences sociales dans les travaux du sociologue français Durkheim (1912) qui étudiait les mentalités archaïques, les mythes et les représentations religieuses et magiques des sociétés traditionnelles. Ce dernier faisait une distinction entre « représentations collectives » et « représentations individuelles ». Pour lui, la conscience individuelle n'existe qu'à travers la conscience collective.

À la suite de Durkheim, les représentations sociales vont être théorisées par les travaux du psychologue Moscovici (1961) à qui reviendra le mérite d'avoir élaboré cette théorie. En s'inspirant des travaux de Durkheim, il définissait les représentations sociales dans une approche constructiviste comme étant des formes de savoirs naïfs destinées à organiser les

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conduites et orienter les communications. Dans cette définition, il met en exergue trois dimensions des représentations sociales à savoir l'attitude, l'information et le champ de représentations. Obéissant à des processus de mutations et d'évolution dans le cadre des interactions sociales quotidiennes qui se situe au niveau de la société et des groupes sociaux. Pour Moscovici, la perception de la réalité sociale dépend ainsi donc des interprétations que les membres de la société en font.

Les représentations sociales sont d'après Jodelet (1984 : 361), « une forme de connaissance spécifique de savoir et de sens commun, dont les contenus manifestent l'opération de processus génératifs et fonctionnels socialement marqués ». Il s'agit donc d'une forme de connaissance socialement élaborée et partagée ayant une visée pratique à la construction d'une réalité commune à un ensemble social qui oriente et organise les conduites sociales. Il s'agit plus précisément d'un savoir naturel que l'individu reçoit par le biais de la communication, la culture, la religion, la tradition. Par ailleurs, Wagner (1994 : 199) définit les représentations sociales pour sa part comme : « un ensemble de croyances, d'images de métaphores et de symboles collectivement partagés par un groupe, une communauté, une société ou une culture ». Autrement-dit se sont des modalités de connaissances permettant à chaque groupe une appropriation du monde extérieur. En somme, la théorie des représentations sociales permet de mieux comprendre les individus et les groupes en analysant la façon dont ils se représentent eux-mêmes les autres et le monde.

Dans le cadre de cette recherche sur le système tontinier et l'entrepreneuriat pastoral, cette théorie a permis de mieux cerner l'image ou les perceptions que se font les entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS sur la finance informelle. Ensuite, à partir des entretiens de terrain, elle a permis de saisir le rapport qui existe entre le système tontinier et le développement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé.

7-2-2- La théorie des réseaux sociaux

La sociologie des réseaux s'est essentiellement affirmée dans le monde anglo-saxon sous l'influence de trois écoles. Notamment la sociométrie apparue dans les années 1930 sous l'influence du psychologue Moreno (1934) qui étudiait les relations au sein des groupes. Ensuite sous l'influence de l'école de Harvard dans les années 1950 avec White (1969) qui insistait sur la cohésion des groupes et sur le rôle intégrateur joué par les sous-groupes appelés cliques. Et enfin l'influence des anthropologues de l'école de Manchester avec Barnes (1954) qui combinait sociologie et sociométrie. Il fut le premier à introduire la notion de « réseaux » en science sociale et le définissait comme un ensemble de relation informelle entre individus

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(amitié, interconnaissances, parenté). Il fut à cet effet considéré comme le précurseur de cette théorie. La théorie des réseaux sociaux est une théorie de moyenne portée qui a fait l'objet de nombreux travaux.

Grannoveter (1973) va apporter des formalisations à cette théorie. En effet, il introduit la notion de « liens faibles » en insistant sur la force de ces liens pour saisir la dynamique des actions individuelles ou l'organisation des communautés. Il conçoit ainsi les interactions sociales en termes de noeuds et de liens dans lesquels les noeuds sont habituellement les acteurs sociaux dans le réseau, les liens quant à eux représentent les interactions ou les relations entre ces noeuds. Par la suite, il montre comment l'existence de plusieurs types de liens entre les noeuds peut former des structures et renforcer le capital social des acteurs. En somme avec Grannoveter, l'action individuelle est influencée par la structure des réseaux, la densité des liens et le cloisonnement des liens entre réseaux sociaux.

La théorie des réseaux va être théorisé par Burt (1992) à la suite de Grannoveter, dans l'optique d'établir une passerelle entre les réseaux complets et les réseaux personnels. Il introduit ainsi le concept de « trou structurel » en insistant sur la notion de « confiance ». Il explique que la performance d'un groupe est supérieure quand celui-ci est dense (forte coordination entre les membres du groupe) et lié à de nombreux trous structuraux à l'extérieur du groupe. Ainsi, l'individu est situé à l'intersection des trous structuraux, c'est-à-dire de réseaux de contacts qui font l'intermédiaire entre les différents réseaux, en construisant des ponts entre des trous structuraux pour davantage développer des opportunités d'affaires.

Dans le cadre du présent travail de recherche, la théorie des réseaux sociaux a permis d'identifier l'influence des AERC dans les activités entrepreneuriales des bénéficiaires. De plus, sur la base des données de terrains cette théorie a permis d'analyser la contribution du système tontinier aux initiatives entrepreneuriales jeune.

7-2-3- La théorie du Don/contre-don

La théorie du don/contre-don a fait l'objet de plusieurs travaux dont les premières analyses en sciences sociales furent ceux de Mauss (1924). Il appréhendait ainsi le don/contre-don comme une forme de contrat social inscrit dans une logique économique et basé sur la réciprocité pour appartenir à une société.

Dans une étude comparative sur l'organisation des sociétés mélanésiennes, il découvre le don/contre-don comme un contrat fondateur des liens sociaux : « une prestation obligeant mutuellement donneur et receveur et qui de fait les unis dans une forme de contrat social » (Mauss, 1924 : 21). Pour Mauss, le don/contre-don est une forme de partenariat qui regroupe

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en interaction et de manière durable des individus autour de trois objectifs (donner, recevoir et rendre). Il s'agit donc d'échanges réciproques et surtout symboliques autour de biens et de services et qui de fait renforcent la cohésion du groupe.

Polanyi (2007) quant à lui met en exergue la réciprocité comme véritable fondement de l'économie. Il considère que les relations sociales sont préexistantes aux relations économiques : l'action économique est de ce fait encastrée au sein des réseaux de relations qui placent en contact les individus les uns avec les autres. En effet, une logique économique n'est pas seulement basée sur l'utilitarisme, elle peut se fonder aussi sur la réciprocité. En somme, pour Polanyi, le don/contre-don met en exergue le rapport des pouvoirs et des désirs. Lesquels en constituent d'ailleurs une première contrepartie : le donneur est plus fort par le don qu'il a fait, à la fois sur le plan social et affectif.

Caillé (2007) pour sa part dans son analyse montre que le don/contre-don permet d'appartenir à une société. Il différencie le don/contre-don dans la sociabilité primaire (les relations avec les parents, amis, voisins) et dans la sociabilité secondaire (l'équilibre entre les différentes sphères sociales). On peut alors considérer que les liens sociaux dans les sociétés contemporaines sont en fait moins basés sur l'utilitarisme (satisfaction des besoins matériels) que sur le don, lequel permet d'exister et d'appartenir à un monde. Il définit le don/contre-don comme : toute action ou prestation effectuée sans attente, garantie ou certitude de retour, et comportant de ce seul fait une dimension de gratuité. Selon Alter (2010), le contre don est en même temps libre et obligatoire : libre parce que ce n'est pas une obligation contractuelle, et obligatoire parce qu'il y a une incitation sociale à rendre le don à d'autres dans un système qui favorise les échanges réciproques. En effet, si les uns et les autres acceptent de continuer à coopérer malgré tout dans les organisations, c'est parce qu'ils participent à une oeuvre commune et qu'ils souhaitent y contribuer. L'idée selon laquelle le cycle du don/contre-don engage un endettement mutuel explique bien la coopération qui existe entre la contrainte et le contrat. Ainsi, le donneur à de la valeur dans le fait de savoir donner et le receveur a le privilège de savoir recevoir et le devoir de savoir rendre également à son tour.

Dans le cadre du présent travail de recherche, la théorie du don/contre-don a permis d'étudier les modes d'organisation du système tontinier à Yaoundé à partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS. De plus à partir des interviews de terrains auprès des associations cibles, elle a permis d'analyser les différents mécanismes d'accès au crédit mis sur pied dans ces associations.

La mobilisation de ces trois théories a donc permis à terme d'identifier non seulement la nature des différents services financiers et techniques initiés au sein de ces deux associations.

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Mais également, de cerner l'influence de la pratique tontinière dans les activités entrepreneuriales des membres. Ce qui à aider par la suite à dégager le rapport qui existe entre le système tontinier et l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. C'est dans cette perspective que cette réflexion a été inscrite.

8- CADRE MÉTHODOLOGIQUE

Pour produire un travail véritablement scientifique et efficace, toute recherche exige une certaine méthodologie, une opération intellectuelle de traitement des données relatives à une réalité sociale étudiée en fonction d'un objectif précis.

8-1- Techniques et outils de collecte des données

La méthode qualitative s'avère particulièrement pertinente pour approcher les objets d'étude individuels ou sociaux dans leurs aspects temporels. Elle permet également de comprendre la réalité non seulement à travers des évènements historiques, des faits objectifs mais également par le vécu des individus ou des groupes, leurs représentations et leurs rationalités. Dans cette optique, une méthode qualitative est « une succession d'opérations et de manipulations techniques et intellectuelles qu'un chercheur fait subir à un objet ou un phénomène humain pour en faire surgir les significations pour lui-même et les autres hommes » (Muchielli, 1996 : 182). Sa particularité est qu'elle envisage les phénomènes humains comme des phénomènes de sens qui peuvent être compris par un effort spécifique, tenant à la fois à la nature humaine du chercheur et à la nature de ces phénomènes de sens.

Cette recherche s'inscrit donc dans une perspective qualitative, dans l'optique de comprendre les effets de la contribution du système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. Nous avons fait recours aux techniques telles que la recherche documentaire, l'entretien semi-directif et l'observation directe.

8-1-1- La recherche documentaire

La recherche documentaire permet de rassembler la documentation substantielle sur une question et de disposer du maximum d'informations utiles dans son domaine de recherche. Les documents consultés jusque-là, (ouvrages, articles, mémoires, notes de cours) qui avaient trait à notre thème, ont permis de recueillir des données et des informations sur la question du

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système tontinier et l'entrepreneuriat. Dans la suite de ce travail, elle a permis de collecter des informations importantes sur les modes d'organisation et de fonctionnement des tontines, à partir de manuels et divers articles physiques et numériques. Ainsi nous avons pu mettre à disposition les informations générales sur l'objet étudier et par ailleurs, de faire un tour d'horizon sur l'état des questions déjà acquises sur la question de la finance informelle et de l'entrepreneuriat.

8-1-2- L'entretien semi-directif

L'entretien semi-directif repose sur des échanges verbaux qui ne sont pas entièrement libres, ni entièrement dirigé par un grand nombre de questions précises (N'da, 2015). Le chercheur dispose d'un guide d'entretien relativement ouvert, qui permet de recueillir les informations nécessaires. Dans ce cas, il ne pose pas forcément toutes les questions dans la formulation et l'ordre prévus. Autant que faire se peut, il laisse l'enquêter parler librement dans les termes et l'ordre qui lui convient. De ce fait, le chercheur s'efforce juste de recentrer l'entretien sur les objectifs prévus chaque fois que le sujet s'en écarte. Cette technique a permis de collecter les données importantes sur le mode d'organisation du système tontinier, ainsi que sur les différents modes de financement leurs activités entrepreneuriales des membres.

8-1-3- L'observation directe

Etymologiquement, le verbe observer vient du latin « observare » qui signifie regarder devant soi, ne pas quitter des yeux une chose en vue de mieux la connaitre en profondeur. L'observation directe pour sa part est une technique qui donne la possibilité au chercheur d'aller directement voir les acteurs en situation et de saisir les pratiques sociales en temps réel. Selon Durant et Weil (2006 : 422), « l'observation est un préalable obligé pour construire une bonne enquête par entretien ou par questionnaire ». En effet, l'observation mobilise tous les organes de sens du chercheur. Pendant la phase d'observation, le chercheur est physiquement présent face à son objet, il le regarde se dérouler, se construire ou se déconstruire en temps réel. Ainsi, la mobilisation de l'observation directe dans l'étude sur le système tontinier a permis de voir et d'apprécier lors de nos enquêtes de terrain les effets de la pratique du système tontinier dans les entreprises pastorales des entrepreneurs bénéficiaires.

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8-1-4- Outil de collecte

Le guide d'entretien est un instrument important dans la collecte des données sur le terrain. En sciences sociales, il est quasiment incontournable dans le cadre d'une recherche qualitative. Dans cette recherche qui se veut qualitative, il se présente comme le principal instrument de collecte des données sur le terrain. Il a ainsi servi à collecter les données auprès de notre population cible dans le cadre de l'entretien semi-directif. La mobilisation des questions ouvertes et le regroupement des questions par thèmes a ainsi facilité l'administration du guide d'entretien.

8-2- L'échantillonnage

Dans l'impossibilité d'interroger toute la population d'étude, il convient très souvent dans la plupart des recherches en sociologie de constituer un échantillon. Ce dernier étant selon le dictionnaire de sociologie « un ensemble restreint d'individus provenant d'une population, qui servent de support à l'étude que l'on réalise » (Akoun et Ansart, 1999 : 165). C'est un nombre restreint d'individus minutieusement choisis pour apporter des informations pertinentes sur le sujet de l'enquête.

Nous avons opté dans le cadre de cette recherche pour un échantillonnage raisonné qui est très utilisé en recherche qualitative. C'est une procédure d'échantillonnage non probabiliste consistant à sélectionner des participants considérés comme typiques de la population cible. Encore appelé échantillonnage ciblé ou orienté, cette méthode permet au chercheur de choisir ses unités d'observations en fonction de certains acquis déterminés par des enquêtes exploratoires. Par ailleurs, elle exige une grande compétence du chercheur pour une meilleure diversification des informateurs recherchés. Il faut dire que dans une recherche qualitative, ce n'est pas la quantité des informateurs qui importe mais davantage leurs qualités.

Dans le cadre de ce travail, cette technique a permis d'aller directement auprès des associations EMERCOM et ADJAS, constituées des individus qui correspondent à la population d'étude et ainsi d'obtenir des informations pertinentes sur le sujet étudié.

9- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE

Toute recherche en science sociale nécessite une circonscription du champ d'analyse afin d'éviter que celui-ci soit trop large pouvant égarer le chercheur. Pour ce faire, « il ne suffit pas de savoir quel type de données devrons être rassemblé. Il faut encore circonscrire le champ

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des analyses empiriques dans l'espace géographique et social et dans le temps » (Quivy et Campenhout, 2011 : 147). C'est pourquoi le soin a été pris de circonscrire cette recherche dans l'espace géographique et dans l'espace social.

9-1- Délimitation dans l'espace géographique

Dans l'aspect géographique, la présente étude a été investiguée dans la ville de Yaoundé située dans la région du centre, plus précisément dans le département du Mfoundi. Étant donné que la ville de Yaoundé est extrêmement vaste, nous avons opté de mener notre recherche auprès de deux associations tontinières situées dans l'arrondissement de Yaoundé 7. Le choix porté sur cet arrondissement se justifie par l'observation d'une forte mobilisation des jeunes dans cette zone dans les mouvements associatifs, pour la plupart structurées autour de l'accès aux finances.

Par ailleurs, la possibilité d'accéder aux données a également motivé ce choix de par le caractère extraverti de ces populations. Voilà pourquoi le choix de la spatialité justifie l'étude du présent travail.

9-2- Délimitation dans l'espace social

Cette forme de délimitation du champ d'études consiste à circonscrire l'objet d'étude et à déterminer la population cible. Autrement dit, il est question de sélectionner les individus ou groupes d'individus sociologiquement représentatifs qu'il faut toucher au moment de l'enquête sur le terrain.

Pour cette recherche, la population cible a été constituée de deux (02) associations à l'instar de l'association EMERCOM et ADJAS. La première association est composée de (10) membres qui exercent dans l'entrepreneuriat pastoral notamment dans l'élevage des volailles dont (08) garçons et (02) filles. La seconde association est constituée de 12 membres essentiellement de sexe masculin qui exercent dans l'entrepreneuriat des porcins. Le choix de ces deux associations ne s'est pas fait de façon accidentelle. En effet, il a été fait à l'issue d'une enquête exploratoire auprès des éleveurs de ces associations. Les réponses formulées par ces jeunes entrepreneurs ont suscité une attention particulière qui cadrait avec l'objectif poursuivie. C'est ce qui justifie le choix de ces deux associations.

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10- CLARIFICATION CONCEPTUELLE

La définition des concepts est une étape indispensable dans toute investigation scientifique. Elle permet au chercheur d'opérer une rupture épistémologique avec les notions de sens communs, de délimiter son champ d'étude afin d'éviter toute confusion et de sombrer dans la sociologie spontanée du superficiel, en érigeant le langage vulgaire en raisonnement scientifique.

Dans le cadre de ce travail, ce principe n'a point été ignoré car il a permis de construire et de comprendre les concepts opératoires. Ainsi trois principaux concepts ont été mobilisés à savoir : le système tontinier, le financement et l'entrepreneuriat pastoral.

Ø Le système Tontinier

L'expression système tontinier est du latin « systema » qui signifie combinaison, assemblage, système, organisation et du latin « tont-ti-n'» qui signifie association, regroupement. Prononcer pour la première fois par le banquier italien Lorenzo Tonti au XVIIe siècle qui le proposait à Mazarin. Il décrivait le système tontinier comme des organisations dans lesquelles chaque souscripteur verse une somme dans un fond et touche les dividendes du capital investi. Quand un membre meurt, sa part est repartie entre les survivants et dont le dernier survivant récupère le capital (Gallais et al. 2018).

Dans les années 70, Bouman (1977) donnait au système tontinier une appellation plus scientifique : les associations rotatives d'épargnes et de crédits (AREC). Il s'agissait selon lui des associations regroupant des membres d'un clan, d'une famille, des voisins ou des particuliers, qui décident de mettre en commun des biens ou des services au bénéfice de tout un chacun et cela à tour de rôle.

Au tournant des années 1990, la question de la finance informelle fera l'objet de nombreuses études en Afrique, notamment au Cameroun où elles ont été documentées pour la première fois par Meyer (Gasse-Hellio, 2000). On les appelle « djanggis » en région anglophone et « tontine » en région francophone. Bekolo-Ebe (1991) définissait ces dernières comme étant un regroupement périodique d'épargnants fondé sur la recherche du gain financier qui constitue le centre d'intérêt des participants, et sur la tradition sociale fondé sur les interactions entre les membres. Dans un sens plus courant, le système tontinier renvoi à une association de personnes qui, unies par les liens familiaux, de profession ou de région se

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trouvent épisodiquement afin de mettre en commun leur épargne en vue de financer des projets particuliers ou collectifs (Hedi, 2016).

Partant de ce qui précède, le système tontinier peut être perçu comme étant : un ensemble organisé d'individus qui se retrouvent périodiquement pour coordonner leurs idées et mettre en commun accord leurs capitaux pour plus tard en récolter des quotes-parts afin de satisfaire des dessins individuels ou collectifs. Toutefois, il est important de préciser qu'au Cameroun, « les tontines ne sont ni un système de rente viagère, ni une association au sens pur du terme » (Kemayou et al., 2011 : 167). C'est une partie ou un aspect des associations. En effet, au départ nous avons d'abord une association à caractère culturelle ou professionnelle, dans laquelle les membres de ladite association créent un système où chaque participant bénéficie à tour de rôle de la mise. De ce fait, le présent travail s'intéresse ainsi aux opérations d'épargne et de crédit initiées au sein des regroupements associatifs qui constituent le centre d'intérêt de cette recherche.

Ø Le financement

Dérivé du mot « finance » qui lui-même était un dérivé du mot latin « finis » qui signifiait le « terme »2. Le mot financement d'après le dictionnaire Émile Littré (1972) désigne donc une démarche qui permet à un projet ou une action d'obtenir l'argent nécessaire à sa réalisation, grâce à la réunion ou à la levée de fonds d'origines diverses.

D'un point de vue économique, la finance recouvre un domaine d'activité notamment celui du « financement » qui consiste à fournir l'argent nécessaire à la réalisation d'une opération économique. Il s'agit donc d'une action par laquelle un organisme ou une personne privée alloue des fonds à un tiers dans l'objectif de soutenir un projet. On peut parler de financement pour un projet d'achat de bien immobilier, pour une création d'entreprise, mais aussi pour tout projet associatif ou culturel nécessitant une levée de fonds.3 Le domaine du financement concerne aussi bien les individus, les ménages que les entreprises publiques ou privées, mais aussi les États. Il peut donc être défini dans trois dimensions.

Concernant les ressources, le financement désigne l'ensemble des moyens d'obtenir des fonds et de générer des richesses dans l'investissement tel que l'immobilier, l'exploitation, le commerce de bien et de services. Concernant la gestion, le financement désigne la prise de décision concernant les ressources. Par ailleurs, concernant le capital, le financement désigne l'action qui permet de réaliser un projet ou de subvenir aux besoins.

2Source : https://www.linternaute.fr/dictionaire/fr/definition/finance/, consulté le 24 Mai 2021.

3Source : https://www.journaldunet.fr/business/dictionnaire-comptable-et-fiscal/1198529-financement-definition-traduction-et-synonymes, consulté le 24 Mai 2021.

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Dans le domaine de la finance informelle, le financement peut donc se résumer comme étant, le fait pour une association de crédit de prêter une somme d'argent à quelqu'un (un particulier, une entreprise, une collectivité) afin de lui permettre de réaliser un projet. À ce niveau, le financement prend alors la forme d'un crédit ou d'un emprunt.

Ø L'entrepreneuriat pastoral

Dérivé du mot « entrepreneur » qui date du XIIIe siècle d'abord sous la forme « entreprendeur » (Académie française, 1635). Il avait pour sens d'origine (personne qui créer quelque chose, qui agit), qui lui-même était une dérivation du verbe « entreprendre » élaboré au XIIe siècle qui signifiât (attaquer et surtout surprendre). Dérivé du mot latin « pastoralis » (Littré, 1972) qui signifie «de berger » c'est-à-dire toute activité économique fondé sur l'exploitation de grand espaces (pâturages, espace clos...).

Le dictionnaire L'internaute (2021) définit l'entrepreneuriat pastoral comme étant une activité professionnelle en lien avec la pratique de l'élevage, qui consiste à produire et à vendre les produits obtenus à l'issue de son effort.

De ce qui précède, l'entrepreneuriat pastoral peut être appréhendé comme étant une activité économique de production animale (bovin, porcin, volaille...), en interaction avec un milieu donné et destiné à satisfaire un grand marché de consommation.

11- TECHNIQUE D'ANALYSE DES DONNÉES

Les données collectées sur le terrain lors de nos enquêtes ont été interprétés par la méthode de l'analyse de contenu. Il s'agit d'une technique de traitement des données existantes par recensement, classification et quantification des traits d'un corpus (Bardin, 1997). Elle offre la possibilité de traiter de manière méthodique les avis et les témoignages qui comportent un degré de complexité. Cette technique est très utilisée dans les entretiens semi-directifs pour extraire les informations en vue de les interpréter. L'usage de cette technique s'est effectué en trois temps :

Dans un premier temps, il était question de transcrire les entretiens semi-directifs effectués. Cette phase a consisté à reproduire en version numérique les entretiens enregistrés à l'aide du dictaphone.

Ensuite, les informations transcrites ont été regroupées par thèmes. Il était question de procéder à un découpage du contenu des différents entretiens en fonction de leur similitude, c'est-à-dire en fonction des données ayant le même sens.

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Enfin, ces informations ont été utilisées dans l'analyse des relations entre les variables de nos hypothèses, permettant de comparer les résultats observés avec les résultats attendus. Cette technique a également permis d'accéder à travers l'interprétation des discours des enquêtés à la signification du système tontinier chez les jeunes entrepreneurs pastoraux à Yaoundé. Par ailleurs, elle a permis de comprendre comment les entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS via leur système tontinier contribuent au développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé.

12- PLAN DU TRAVAIL

L'autonomisation socioéconomique des jeunes est fonction de plusieurs facteurs notamment le capital-financier qui est important dans la création ou la gestion d'une activité. C'est la raison pour laquelle cette recherche est centrée sur « Le système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé : cas des associations EMERCOM et ADJAS ».

La première partie porte sur le système tontinier communément appelé « tontine » qui constitue le centre de cette réflexion et son rapport à la création des richesses. Le premier chapitre vise à comprendre la sociogenèse et l'émergence du système tontinier, question de s'imprégner sur le parcours historique de ce concept, mais également les raisons de sa vulgarisation dans le monde et particulièrement en Afrique. Le deuxième chapitre présente la contribution du système tontinier aux activités économiques. Le but étant ici d'apprécier le rôle des tontines en contexte africain et camerounais en particulier.

La deuxième partie porte sur la dynamique financière du système tontinier à partir des cas des associations EMERCOM et ADJAS. Pour se faire elle a été divisée en deux chapitres, le troisième chapitre porte sur les mécanismes de financement des activités entrepreneuriales au sein des associations EMERCOM et ADJAS. Ce qui permet de voir comment l'inclusion financière est stimulée dans ces associations par rapport aux structures financières officielles que sont les banques et les microfinances. En fin, le dernier chapitre, présente une analyse et une évaluation de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans la promotion de l'entrepreneuriat pastoral. Le but étant ici d'apprécier les effets ou l'influence de ses réseaux de financement informels dans les activités économiques.

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SYSTÈME TONTINIER ET CRÉATION DES

PREMIÈRE PARTIE :

RICHESSES

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Le système tontinier est une pratique populaire d'épargne et de crédit particulièrement répandue en Afrique tant en milieu urbain que rural. Ce système de transaction financière qui s'est développé dans les sociétés traditionnelles d'antan se caractérise sous plusieurs formes aujourd'hui. Il s'agit entre autres des associations d'amies, les associations d'anciens camarades de classe, l'association de collègues... dont une partie des activités est dédié aux opérations de crédit. Ces pratiques puisent leur origine dans le passé des sociétés archaïques régis par la confiance réciproque entre les membres, la solidarité, l'entraide et le désir de faire valoir l'héritage reçu (Henry et al., 1991). Cette relation de forte solidarité entre membres qui repose aujourd'hui sur des transactions financières favorise la découverte de nouvelles opportunités entrepreneuriales et la création des richesses. C'est ainsi que la première partie du présent travail de recherche se propose de faire une présentation globale sur le système tontinier, en présentant dans le premier chapitre la sociogenèse et l'émergence du système tontinier. Il est question pour de retracer les parcours historiques de ces regroupements associatifs à travers leurs origines, leurs modes de fonctionnement et leurs statuts. Dans le deuxième chapitre, il sera question de ressortir la contribution du système tontinier aux activités économiques. Il est davantage question dans ce chapitre d'étudier la nature des apports que le système tontinier propose aux entrepreneurs.

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CHAPITRE 1 :

SOCIOGENÈSE ET ÉMERGENCE DU SYSTÈME TONTINIER

Le système tontinier existe depuis longtemps dans tous les continents. Il apparait partout sous une figure commune : mettre en commun les cotisations de chacun et redistribuer à tour de rôle le capital rassemblé à chaque membre (Lelart, 1991). Dans le but de mieux cerner le concept « de système tontinier » dans son ensemble, il serait judicieux de commencer par faire une présentation de l'origine du phénomène.

1- SOCIOGENÈSE ET ÉVOLUTION DU SYSTÈME TONTINIER

Le système tontiner existe dans le monde bien avant l'introduction de la monnaie. Pour Coppens (1987) leur naissance est liée à la genèse des sociétés humaines d'Afrique qui se situe autour de deux millions d'années. Il s'agissait plus précisément d'un système d'échange réciproque dans les sociétés archaïques africaines fondé sur un principe que l'on pouvait qualifier de « don/contre-don » en empruntant le concept de Mauss (1924).

1-1- La sociogenèse du système tontinier

Dans leur forme primitive, les tontines ont concouru à la mise en commun des denrées alimentaires d'origine agricole et animale. Selon Nzeumen (1999), le système tontinier dès sa naissance était régi par les échanges de travaux productifs nécessitant de la force physique. Autrefois, les paysans africains avaient instauré un système de travaux collectifs. Ces travaux étaient régis sur un principe rotatif dans des tâches telles que la réparation des maisons et le labourage des champs. Il s'agissait ainsi de regroupements de travail, et dont la force physique remplaçait la monnaie. Ce n'est que quand la monnaie a commencé à circuler qu'ils ont constitué des tontines de monnaie (Gasse-Hellio, 2000).

Des spécialistes de la tontine asiatique tels que Pairault (1990) et Lelart (1990) se sont penchés sur cette question et postulent que les premières formes de tontines ont vu le jour au 2ème siècle de notre époque. Ces premières formes de tontines constituées étaient en fait des sociétés d'entraides qui n'incluaient pas de notion d'argent, mais plutôt du service. Les

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influences bouddhistes et le rôle joué par les monastères seraient à l'origine de ces tontines avant l'inclusion de l'argent par les japonais aux alentours de l'an 12754.

1-2- L'émergence du système tontinier dans le monde

Selon Owondi (1992), l'apparition des premiers écris qui retrace l'émergence du système tontinier partent de l'Asie à l'Afrique en passant par l'Europe.

1-2-1- En Asie

Les regroupements tontiniers sont des pratiques très anciennes dans les sociétés asiatiques. Il y'a plusieurs siècles dans ces sociétés, les individus se mettait en groupe, en vue de rassembler des ressources en commun5. L'histoire remonte à Wang Anshi (1021-1086) un réformateur qui dans le désir d'alléger les charges des paysans et de lutter contre l'usure, instaura des prêts d'Etat à intérêt modique et des offices de prêts sur gages. Malgré cet effort, les paysans ne purent bénéficier de ces réformes et avait ainsi inventé les tontines (Lelart, 1990).

v Au japon

D'apparition très lointaine au Japon, les premières tontines avec argent datent de 1275 (Boutchang, 2019). On les retrouvait sous l'appellation de « Kou » vers le XIIème et le XIIIème siècle avec la même structure de base et des règles restées intacts au fil du temps. De même, on trouvait des « Kou » dans les régions urbaines et rurales, ils étaient également populaires dans la société samouraï (guerrière). Au début du XXème siècle, leur importance était considérable dans la société japonaise. En, effet jusqu'à 1910 on dénombrait 985« kous » dans la ville de Kyoto, 4000 à Fukushima et plus de 22300 à Hiroshima (Gasse-Hellio, 2000). Ces regroupements tontiniers avaient pour but non seulement d'apporter un soutien financier aux membres en fournissant des fonds pour les objectifs à long termes ; mais également des buts sociaux et religieux avec des fins de distractions. Néanmoins, les « Kous » ont lentement commencé à disparaitre vers le milieu du XXème et on ne trouvait que quelques-unes en milieu rural et dans les zones isolées (Morice, 1982). Les systèmes des tontines ont aujourd'hui disparu au japon mais ont dans le passé joué un rôle important dans ce pays qui possède désormais un système financier moderne.

4Ces informations ont été recueillies dans un article de 2012 du Groupe Atlas, portant sur le fonctionnement des tontines en Afrique, en Asie et dans les pays industrialisés. http://www.atlas-mag.net/article/les-tontines, 5Ces informations ont été fournies par un article consulté en ligne le 05 Juin 2021, portant sur l'histoire de la

tontine en Asie. http://www.tontine8.com/actualite/les-premieres-tontines-sont-asiatiques/.

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v En Chine

L'apparition du système tontinier en chine est liée au développement des activités économiques des monastères bouddhistes. Il s'agirait des activités basées autour des libéralités dont ils étaient bénéficiaires et ainsi, naquirent des systèmes de crédit et surtout des associations d'entraide financière. L'activité économique de ces monastères en Chine atteint leur apogée entre le Vème et le IXème siècle. En effet, selon Lelart (1990) l'expansion des tontines aurait suivi la pénétration du bouddhisme en Asie venu de l'Inde ainsi bouddhisme et tontines seraient passés en Chine dès la fin du 1er siècle de notre ère.

La légende raconte qu'au IXème siècle un jeune garçon au nom de Lai Maozhai originaire du canton de Xiaoshan aurait inventé la tontine. Ce garçon issu d'une famille extrêmement démunie, n'ayant pas d'argent pour poursuivre ses études supérieures à la capitale et rejeté de tous à cause de son incapacité à rembourser ses dettes, eu l'ingénieuse idée de créé une « Hui » (Pairault, 1990). Il rassembla ainsi parent et voisin afin de mettre en commun leur capitaux et leur redistribuer par la suite à tour de rôle à chaque participant.

La chine populaire condamne aujourd'hui encore cette forme traditionnelle d'entraide du fait qu'elle agit en dehors de toute réglementation et de tout contrôle. De par leurs caractéristiques, ces associations financières, encouragent des entreprises pouvant s'opposer aux objectifs gouvernementaux (Peo Yu, 1936). Toutefois, cette dernière continue à être pratiquée en Chine sous des formes réduites.

v En Inde

Les systèmes tontiniers en Inde sont nés d'une nécessité pour les villageois de stoker leur surplus de production et de mettre en lieu sûr l'argent provenant de leur vente. Ceci avant l'apparition des banques modernes et l'instauration de la tutelle britannique sur le pays (Rocheteau & Wu Chen, 2001). Ils sont présents partout en Inde et sont connus sous l'appellation de « Chit » et sont organisées par des sociétés, des partenariats et des entreprises individuelles.

Les « Chits » en Inde étaient principalement constituées de paysans. Ils se regroupaient de manière périodique et les contributions se fessaient en natures, dans un esprit d'entraide au membre qui était le plus dans le besoin. Dès l'apparition de la monnaie, les contributions en nature ont disparu et des changements ont été effectués. On notait ainsi la participation des négociants et des salariés à ces tontines, dans le but de se voir ouvrir des facilités de crédit. Aujourd'hui la majeure partie des « Chits » en Inde sont gérées par des sociétés et fonctionnent

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pratiquement tous avec un système d'enchère. La naissance et l'évolution du système tontinier indien s'est fait de manière progressive, partant d'un simple fond tournant en nature et passant par un système d'enchères plus sophistiqué. Le gouvernement indien est lui-même intervenu pour règlementer le fonctionnement des « Chits » et assurer la protection des souscripteurs (Anderson, 1966).

1-2-2- En Amérique

L'origine du système tontinier en Amérique pourrait se situer dans les sociétés traditionnelles de la côte nord-ouest américaine telles que la nouvelle Calédonie, le Trobriand et la Nouvelle-Guinée que Mauss qualifiait de société de don-échange (1924). Les tribus antiques indiennes qui y vivaient pratiquaient une forme archaïque de contrat appelé le Potlatch. Ce principe était une forme de contrat social entre deux individus ou un groupe d'individu fondé sur « la triple obligation de donner, rendre et recevoir » (Mauss, idem : 18). Les échanges transitaient autour des biens matériels et consommables tels que des maisons, des meubles et des denrées alimentaires. Par exemple, un agriculteur venait déposer ses produits devant la maison de son partenaire pêcheur, celui-ci à son tour après une grande pêche avait l'obligation de céder une partie de celle-ci à son ami agriculteur. Dans les sociétés Mélanésiennes pour leur part, un parent qui donnait sa fille en mariage, se voyait attribuer des richesses matérielles telles que des cauris, des perles, et autres objets de valeurs. Dans ce système, les biens et objets donnés n'étaient pas gratuits. En effet, Il s'agissait avant tout d'une prestation totale dans laquelle les individus en interactions avaient l'obligation de donner d'une part, de recevoir et de rendre d'autre part. En outre ces sociétés pratiquaient des échanges non marchands fondés sur la solidarité et la réciprocité. Il s'agissait d'un système de tontines qu'on pouvait qualifier de tontines de denrées, tontines immobilière, tontines d'entraide.

1-2-3- En Europe

D'après la thèse de Moulin (1903) le mot Tontine vient de son initiateur le banquier napolitain Lorenzo Tonti. Au XIIème siècle, en 1963, il proposa au cardinal Mazarin une combinaison d'emprunt fondée sur un principe nouveau. Il s'agissait d'un emprunt d'Etat en contrepartie de rentes viagères. À l'époque, Louis XIV roi de France demanda à Mazarin de réapprovisionner les caisses de l'Etat, c'est ainsi que le premier ministre sollicita le banquier napolitain afin de trouver une nouvelle méthode pour financer les caisses publiques. Lorenzo Tonti inventa un emprunt qui réunissait des épargnants pour recueillir et faire fructifier les

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cotisations des adhérents. Son procédé venait à point nommé à une époque où le royaume de France connaissait un véritable dépérissement du crédit de l'Etat. C'est ainsi qu'en novembre 1963, Mazarin fit paraitre un arrêt du conseil instaurant la première tontine royale, c'est dans ce sens qu'elle fut alors nommée. Cette année marqua pour ainsi dire, le début de l'histoire de la tontine6.

Après la défaite de Napoléon en Angleterre, la France dû verser un lourd tribut aux anglo-saxons. Ces indemnités de guerre se traduisaient par des titres de rente qui pesèrent lourd sur l'économie française. C'est alors que deux ingénieux français, Eugène Riffault, censeur de la banque de France et le général Fréderic Riffault, commandant de l'école polytechnique trouvèrent un moyen de racheter ces titres de créances, grâce à la tontine. Durant cette période, la tontine connue un véritable essor, et en 1844 sur ordonnance royale, les frères créaient « le conservateur de tontine ». Groupe vieux de près de 170 ans, le conservateur a su s'adapter pour affronter toutes les crises, et moderniser le produit pour le rendre intéressant au cours des décennies d'existence (La famille des 8, 2014). Ce principe a également existé en Angleterre où à partir de 1692, l'Angleterre fit de nombreuses applications du principe tontinier à ses emprunts publics. Mais, il a connu des dérives et fut interdit car, certains participants de tontines avaient décidé d'éliminer les autres associés de la tontine pour en récupérer une plus grande part7. Selon Pairault (1990), le terme semble avoir été utilisé pour la première fois par un juriste français en 1905, l'année même où une nouvelle loi sur les tontines fut promulguée en métropole. Les juristes ont fini par se rendre compte que dans les pays voisins, ces pratiques étaient les mêmes et donc une appellation commune serait beaucoup plus simple. Cette explication laisse cependant sans réponse à la question de savoir comment l'expression est passée du continent asiatique au continent africain.

1-2-4- En Afrique

Pour Semin (2007), le système tontinier en Afrique trouve son fondement dans les liens sociaux qui unissaient les membres. La pratique courante du système tontinier africain découle d'une monétarisation des habitudes de collectivisation dans les sociétés traditionnelles africaines. Il s'agissait dès lors de regroupements entre voisins ou entre personnes d'un même

6 Source : https://www.lafinancepourtous.com/?s=la+tontine consulté le 12 juin 2021.

7 Ce sujet fut abordé dans un roman de Robert Louis STEVENSON intitulé « un mort encombrant » et plus tard adapté au cinéma en 1966 dans le film « un mort en pleine forme ». Le scenario est simple deux jeunes gens se retrouvent les uniques survivants d'une tontine, s'ensuit des accidents de chemin de fer et autres péripéties. Plus récemment, la série à succès les Simpson y consacre un épisode, grand père Simpson et le trésor maudit.

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groupe d'âge, pour s'entraider mutuellement à tour de rôle lors des différents travaux (labour, récolte, restauration des toitures...).

Les systèmes tontiniers africains sont sans doute ceux qui ont étés le plus étudiés au cours de la décennie 80, ils sont présents dans la majeure partie des pays africains. C'est à partir de leur monétarisation que des écris mentionnant l'existence des réseaux tontiniers en Afrique sont apparus. C'est le cas en 1952 avec les travaux de Bascom sur « l'Esusu » au Nigéria qui serait apparu vers le milieu du XIXème siècle et dans les pays voisins où il est pratiqué couramment par les musulmans Yorubas. Puis au cours des années suivantes, de plus en plus d'informations sur ce type de pratique vont permettre de mieux connaitre les mécanismes tontiniers, et de s'apercevoir que les regroupements tontiniers existent en fait dans de très nombreux pays d'Afrique. Ce sont les pays d'Afrique de l'ouest qui feront d'abord l'objet d'études sur le système tontinier notamment le Benin, le Nigéria, le Sénégal, le Niger.

v Au Benin

Le Benin est probablement l'un des pays d'Afrique occidentale où le phénomène tontinier s'est particulièrement développé au XIXème siècle. Connu sous le nom de « Adjolou », pratiquement tous les hommes et toutes les femmes de plus de 18ans y participaient depuis des années (Gasse-Hellio, 2000). On y trouvait des tontines mutuelles ou tournantes qui sont des associations des personnes se connaissant bien et désireuse de se prêter et de s'emprunter un peu d'argent pendant un certain temps. Lorsque chacun percevait sa mise, le groupe se disloquait à moins que les participants décidèrent de recommencer une nouvelle fois (Lelart, 1989). Ces formes de tontines sont très pratiquées au bénin depuis leur apparition.

De même, une enquête réalisée par Gnansounou en 1989 sur les marchés de Cotonou à saint-michel faisait mention d'une autre forme de tontine : les tontines commerciales ou ambulantes. Dans cette forme, tout reposait sur un tontinier qui collectait périodiquement l'argent de ses clients et les remboursait à la date convenue. Cette forte pratique des tontines béninoise semblait provenir d'une réaction des populations aux programmes d'ajustement élaborés par le fond monétaire et la banque mondiale. Aujourd'hui plus de 60% de la population au Bénin recourent aux services du système tontinier pour financer des petits projets, acheter des biens et surtout régler des problèmes ponctuels (Hedi, 2016).

v Au Sénégal

Le système tontinier sénégalais tire ses origines des regroupements d'entraide basée sur le travail physique de groupe (labour, construction d'une maison...). Selon Nzeumen (1993), la monétarisation de ces derniers va se manifester en raison des difficultés d'accès des

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populations sénégalaises à faible revenus au crédit bancaire local calqué sur le model occident. L'influence de l'islam et l'importance des relations sociales auraient également influencé leur monétarisation (Dromain, 1989).

Une enquête réalisée en 1985 par le ministère sénégalais de l'habitait estimait à 89% le taux de participation aux AREC par les ménages sénégalais. De même, l'enquête ressort l'existence de trois types de tontines au Sénégal à savoir : la tontine financière pour la réalisation des projets à visé économique ; la tontine commerciale qui représente une caisse d'épargne utile aux vendeurs ; et la tontine mutuelle basé sur la distribution rotative de l'épargne entre les participants utile pour gérer les charges familiales.

Aujourd'hui, l'importance des AREC sénégalaise n'est plus à démontrer. L'existence et le succès du système tontinier au Sénégal doivent semble-t-il, être attribués à un phénomène d'exclusion relative d'une très large fraction des populations des circuits financiers modernes. Ainsi la force actuelle du système tontinier sénégalais réside dans leur mode d'organisation. Les caractéristiques du système culturel et économique environnant constituent également un point fort de ses regroupements (Lelart, 1990).

v Cameroun

Le Cameroun est incontestablement l'un des pays en Afrique centrale où la pratique des systèmes tontiniers est le plus répandu. Connu sur le non de « Djanguis », ils sont des pratiques extrêmement vielles et très âgées, un pur produit de la société camerounaise africaine. L'économiste camerounais Nzeumen (1988) situe leur origine au Cameroun dans les sociétés traditionnelles marquées par un esprit communautaire de solidarité et d'entraide réciproque. Le but de ces regroupements était la promotion de la sécurité sociale des membres, la recherche de la sécurité et de la promotion sociale des membres. Dans un contexte économique marqué par l'absence de structures de financements formels, il était question de réunir les ressources financières nécessaires au financement du développement de ces sociétés.

Dans leur forme primitive, ils ont tourné autour d'échange de travaux productifs et de denrées alimentaires. Les membres réunis sous le sceau de l'amitié se devaient mutuellement soutien et assistance. Leur monétarisation est apparue dans l'ouest-Cameroun avant la colonisation où les transactions se faisaient en cauris, en perle, en manilles ou en tringles de laiton (Henry et al. 1991). C'est au tournant des années 1980 avec la crise bancaire qui avait profondément affaibli le Cameroun que les systèmes tontiniers vont connaitre un essor considérable avec pour fondement la solidarité, le culte de l'effort, la réalisation de soi... qui ont contribué à leur pérennité. La tontine camerounaise tire aussi son origine de la période

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précédant la traite négrière, au cours de laquelle des formes de tontine ont pris naissance (Ngeubou et al. 2002).

Au Cameroun, c'est surtout dans la culture « Bamiléké » plus connu en langue vernaculaire sous le nom de « tchoua'ah » que la perception et l'importance du système tontinier est prépondérant. Comme le souligne Kemayou & al. (2011 : 169) « Leur importance est telle qu'il est presque difficile de voir cette communauté dans une région sans la pratique d'une tontine ». Cette pratique se transmet de père en fils et fait partie des richesses léguées en héritage. Ayant conservé leurs valeurs d'antan, elles se caractérisent aujourd'hui par une action de solidarité visant à aider un membre en difficulté ou financer les projets collectifs ou individuels. Ces regroupements sont désormais convoités par la majorité des hommes d'affaires et grands commerçants d'origine bamiléké qui y transitent des centaines de milles (Brillet, 2012).

Aujourd'hui le système tontinier est pratiqué en Afrique et au Cameroun par plusieurs catégories d'acteurs et sous diverses formes en fonction des besoins de ces derniers.

2- TYPOLOGIES ET FORMES DE SYSTÈMES TONTINIERS DANS LE MONDE

Dans le monde en général et en Afrique en particulier, il existe une grande multitude de forme de systèmes tontiniers qui regroupent divers types d'épargnants. Allant du domaine informel au domaine formel (commerçant, entrepreneur, responsable d'entreprise, homme d'affaire, transporteur), chacun y adhère en fonction de son désir (besoin de crédit, besoin d'appartenance sociale, d'accumulation des capitaux, de réalisation de soi...).

Dans l'univers camerounais en particulier, l'on rencontre une multitude de systèmes tontiniers ayant fait l'objet de plusieurs travaux scientifiques. Des auteurs tels qu'Owondi (1992) et Bekolo-Ebe (1989) présentent des classifications. Les typologies qu'ils ont ressorti dépeint des différents services financiers offerts par ces systèmes, fonctionnant à la fois avec un schéma hiérarchisé et flexible.

Dans une recherche effectuée en 1992 visant à expliquer le développement du système informel en Afrique, à partir des économies d'Afrique centrale (Cameroun, Tchad, Congo, Gabon, Centrafrique, Guinée Équatoriale). Owondi ressort trois principales typologies de tontines pratiquées dans ces pays entre autres : la tontine Mutuelle ou rotative, la tontine financière et la tontine commerciale.

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2-1- La tontine Mutuelle ou Tournante

Elle semble être la forme la plus rependue en Afrique et repose sur la solidarité entre les membres qui se connaissent bien, c'est le type classique, simple. On peut la définir comme :

Une association de personnes se connaissant bien et désireuse de s'emprunter et de se prêter de l'argent pendant un certain temps ; ceci en mettant en commun des fonds à chaque période d'un cycle et en remettant la cagnotte ainsi formée à chacun des membres, selon un ordre établit en début de cycle mais susceptible d'être modifier en cas de besoin. (Owondi, 1992 : 668)

Cette forme de tontine peut fonctionner avec une caisse dite d'épargne pouvant octroyer des prêts à titre onéreux, à des taux d'intérêts variant généralement entre 10 et 20% par mois. Elle peut également fonctionner avec une caisse dite de secours ou d'assistance, alimentée par des versements périodiques obligatoires des différents membres. Cette forme de tontine est administrée en règle générale sur la base d'un règlement interne édicté par un président. Il est toujours assisté d'un ou de plusieurs vice-présidents, un secrétaire, un trésorier, et des commissaires aux comptes.

2-2- La tontine commerciale

La tontine commerciale est administrée par un gérant qui recueille et conserve les cotisations des créanciers. Afin de placer leur argent en lieu sûr, les membres de la tontine rémunèrent un banquier ambulant par un taux de garde. Le banquier pour sa part collecte périodiquement les fonds de ses clients en leur remboursant à la date convenue. Dans cette forme de tontine, il peut arriver que le remboursement survienne avant la date prévue et peut être d'un montant plus élevé que le dépôt initial, auquel cas on est en présence d'un prêt. Cette pratique est très visible dans la plupart des marchés camerounais avec des agents des microfinances telles que Renaprov, Mupeci, Acep, qui écument les marchés à la recherche de potentiels clients8.

8 Cette note a été faite à l'issue d'une observation que nous avions effectuée dans certains marchés de Yaoundé où des banquiers ambulants en uniforme prélevaient les sommes de certains « Buy-and-Sellam » pour garder au sein de leur structure.

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2-3- Les tontines Financières

Dans cette forme de tontine, les dépôts effectués par l'ensemble des adhérents sont mis aux enchères de manière à ce que ce soit le plus offrant qui remporte la cagnotte. Ici, le montant des intérêts est prélevé avant la remise des fonds au bénéficiaire et ces intérêts peuvent faire l'objet de nouveaux prêts selon la même méthode d'enchères. La tontine financière a surtout été observée chez les Bamiléké du Cameroun, et plus précisément les commerçants, les hommes d'affaires, les responsables de petites PME.

Une présentation encore plus détaillée des typologies de tontines au sein des associations au Cameroun a été faite dans une recherche menée par Bekolo-Ebe (1989). Dans le cadre de cette recherche, il distingue cinq principales formes de tontines pratiquées dans les villes camerounaises.

v La tontine simple

C'est une forme de tontine relativement traditionnelle dans laquelle un nombre fixe d'individus versent une somme régulièrement et suivant un ordre prédéterminé. En effet, chacun des adhérents reçoit le produit de versement de l'ensemble des participantes séances tenantes, selon une périodicité constante (mensuelle ou hebdomadaire) et dont l'ordre des prises est négocié à l'avance ou fixé par tirage au sort. La tontine de ce point de vue apparait comme un système d'incitation à l'épargne. Ainsi, le comportement des participants dans cette forme de tontine peut être saisi comme un comportement de faible risque. En effet, les individus qui appartiennent à ces tontines sont en général des membres qui ne sont pas attiré par le gain financier, mais avant tout par la recherche du lien social.

v La tontine simple avec caisse de prêts

Dans cette forme de tontine chaque participant, en plus de sa cotisation fixe verse une seconde somme d'argent qui dépend de ses possibilités. Cette somme vient s'ajouter à celle des autres membres pour constituer la caisse des prêts. Les participants comme les non participants peuvent ainsi se voir accorder un prêt, dont les remboursements produiront des intérêts qui seront redistribués en fin de cycle à chacun des membres et cela au prorata de ce qu'ils auront verser au cours du cycle. Les individus qui adhèrent à ces tontines sont attirés par la recherche du gain financier. Puisqu'ils cherchent à réaliser une plus-value, c'est un système assez répandu au Cameroun chez les femmes, celles-ci jouant un rôle de prêteur sur le marché de l'argent à court terme.

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v La tontine avec caisse de prêt et de secours

Dans cette tontine très proche de la précédente, les membres pratiquent un troisième versement périodique qui alimente une caisse de secours destinée à aider les divers participants. En cas d'évènements heureux ou malheureux à l'instar d'un mariage, une naissance, un décès... Le membre concerné se voit attribuer une aide financière qui vient de la caisse de secours des membres. Cette forme de tontine est assimilable à une assurance dont les cotisations sont d'un niveau relativement modique. Cette d'assurance peut aussi dans certains cas être utilisée pour des prêts de courte durée avec intérêt, ceci au profit des adhérents. La caisse de prêt dans cette forme de tontine permet à chacun de déposer des montants de leur choix qui sont bloqués dans la caisse d'épargne. Cette caisse est ainsi généralement cassée en fin d'année ou en période de rentrée scolaire ainsi, chacun récupère l'intégralité de ses dépôts ainsi que les intérêts produits.

v La tontine avec enchères non capitalisées

Dans cette forme de tontine, les sommes collectées à l'issue des cotisations sont vendues aux enchères et cédées au plus offrant. En effet, l'enchère dans cette forme de tontine est ouverte sur une mise à prix fixé statutairement. Ainsi, seuls les participants n'ayant pas encore bénéficié du gros lot sont autorisés à participer aux enchères. Les individus qui adhèrent à ces tontines sont davantage motivé par la recherche du gros lot. Ces tontines sont composées essentiellement de commerçants, d'investisseurs ou de responsables de petites et moyennes entreprises.

v La tontine avec enchères capitalisées

Dans cette dernière forme de tontine, la prime d'enchère payée par le bénéficiaire du gros lot est divisée en petits lots qui seront revendus également aux enchères sur du court terme. Gros lots et petits lots constituent le marché principal et le marché secondaire, les marchés se terminent une fois que l'ensemble des montants apportés ont étés redistribués. Dans certains cas des personnes extérieures à la tontine peuvent avoir accès au marché secondaire par l'intermédiaire d'amis membres. Parfois, les sommes cumulées sur le marché sont suffisantes pour proposer un deuxième gros lot. Dans ce cas, le cycle de la tontine sera réduit d'une période.

Ces différentes formes de tontines pratiquées au sein des associations fonctionnent dans un cadre légal et sont caractérisées par une organisation hiérarchisée sur la base d'un règlement intérieur qui définit les rôles.

9Source : https://www.impots.cm, loi N°21/026 du 16 décembre 2021, portant loi de finances de la république du Cameroun pour l'exercice 2022, consulté le 18décembre 2021.

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3- LE FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME TONTINIER AU CAMEROUN

De nombreuses initiatives sont entreprises depuis quelques années pour encadrer le fonctionnement du système tontinier au Cameroun.

3-1- Cadre légal

Les associations au Cameroun fonctionnent dans le cadre de deux lois. La première se situe dans le cadre de la loi N°90/053 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association. Cette loi relève que « la liberté d'association est la faculté de créer une association, d'y adhérer ou de ne pas y adhérer ; La faculté de créer une association est reconnue à toutes personnes physiques ou morale résident sur l'ensemble du territoire national » (MINATD, 2011 : 1). Ainsi les associations obéissent à deux régimes à savoir le régime de l'autorisation et le régime de la déclaration. Le premier régime fait référence aux associations étrangères et aux associations religieuses, tandis que le second fait allusion à toutes autres formes d'associations dans laquelle se situe notre recherche.

La seconde loi et la plus récente se situe dans le cadre de la loi N° 2021/026 portant loi de finances de la République du Cameroun pour l'exercice 2022. Dont l'article 93 portant sur les organismes à but non lucratif stipule que « les personnes physiques ou morales sont imposables suivant les régimes ci-après, déterminé en fonction du chiffre d'affaire réalisé » (Loi N° 2021/026 du 16 décembre 2021 : 7). Toutes associations de nos jours, quelle que soit la nature, à but lucrative ou non lucrative, à caractère tontinière ou non et reconnues au sein d'une entité administrative sont désormais soumises à une obligation de déclaration mensuelles. Elles font désormais l'objet d'un prélèvement des impôts et taxes à hauteur de 15% sur le revenu majoré de 10% de centimes communaux9. La parole et l'honneur sont les points forts de ces regroupements régis par le statut et le règlement intérieur très stricts. Ils permettent ainsi de garantir le bon fonctionnement de ces systèmes depuis leur date de création.

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3-1-1- Création et adhésion au système tontinier

Au départ de toute association, il y'a naturellement un ou plusieurs fondateurs qui se connaissent bien. Ils s'associent de ce fait, pour mettre sur pieds l'association au sein de laquelle ils introduisent un système de cotisation. Dans ces regroupements, le critère principal qui assure la longévité est la connaissance (famille, amis, clan, quartier, collègues)10.Cette reconnaissance incite les membres à honorer les cotisations et les réunions sous peine de déshonneur et d'exclusion. La création de l'association nécessite aussi un nom approprié qui lui confère un statut et une image par rapport à l'extérieur. Le règlement intérieur écrit et oral est également de mise car il décrit la structure de l'association, les modalités de fonctionnement et la direction de la tontine.

L'aire géographique peut être très large et la taille peut varier énormément. De même, une association peut être mixte ou de genre composé soit essentiellement d'homme soit essentiellement de femmes. Cette particularité joue également un rôle fondamental vis-à-vis des critères de confiance et de sécurité.

En général, l'adhésion à un réseau tontinier se fait la plupart du temps par affinité. C'est à travers les relations qui existe entre les différents membres car bien que l'adhésion à une association soit libre, elle est le plus souvent sélective (amis, voisins, tribu, profession...). En effet, la connaissance des membres entre eux et donc la confiance constitue souvent un gage de sécurité, dans ce cas on parle de tontine fermée (Gasse-Hellio, 2000). Dans certains cas, les nouveaux désirant adhérer sont soumis à une enquête de moralité concernant les modes de vies, la profession, la vie familiale, et les activités financières pour s'assurer de la bonne compatibilité avec la tontine et garantir la sécurité. Il faut admettre que lorsqu'une personne décide d'adhérer à une association, c'est en raison de la bonne réputation et du climat qui y règne.

L'adhésion à un système tontinier peut également se faire de manière ouverte c'est à dire, les membres se font parrainer. À ce niveau, les fondateurs de la tontine ou les anciens membres décident de coopter de nouveaux membres qu'ils jugent responsables dans leur entourage et qui à leur tour en parraineront d'autres. Ici, les personnes membres n'ont pas de liens entre elles, c'est sur la taille du cercle tontinier et sur la nature de ses membres que repose la confiance et la sécurité (Djamfa, 2021).

10 Source : http://www.atlas-mag.net/article/les-tontines, consulté le 01 juillet 2021.

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3-2- L'organisation du système tontinier

Chaque association tontinière est animée par un bureau ou comité de coordination dont la composition est constituée d'un fondateur, un président, un secrétaire, un trésorier, un censeur et un commissaire aux comptes. Ces derniers assurent la gestion des réunions, règlent les transactions financières, gèrent les conflits entre membres, veillent à l'exécution de règles, proposent des mesures pour atteindre les objectifs et assurent le bon fonctionnement de l'association etc...ceci de manière bénévole et gratuite. Henri & al (1991) dans une recherche portant sur les associations tontinières en font une présentation détaillée.

3-2-1- Les acteurs

Il s'agit ici de décrire les différents postes que l'on peut rencontrer dans les tontines africaines en général et au Cameroun en particulier.

Ø Le fondateur

À la base, se trouve au départ les fondateurs de l'association. Ceux-ci peuvent dans certains cas avoir des droits particuliers les distinguant des autres membres. Par exemple là ou un candidat devrait, pour être accepté, obtenir le parrainage de deux anciens membres, il pourra lui suffire d'avoir un seul parrain si ce dernier est membre fondateur. De même, les fondateurs ont la possibilité de se partager les droits d'entrés qui sont demandés aux nouveaux arrivants.

Ø Le président

Le président dans une AREC est en principe élu et souvent considéré comme le fondateur de la tontine. Ce dernier a pour rôle d'assurer la direction générale de la tontine, présider au déroulement des séances, assurer l'exécution des décisions prises au cours d'une séance et veille de manière générale à la bonne marche de la tontine. Il assure également le rôle de garant moral de la tontine en ceci que l'adhésion des nouveaux membres est largement tributaire de la confiance qu'il inspire, et de son dynamisme dépeint celui de l'ensemble de la tontine. Dans certains cas il est assisté d'un ou plusieurs vice-présidents qui jouissent d'un capital de confiance de la part des membres et le remplace en cas d'empêchement.

Ø Le secrétaire

Généralement considéré comme le second de l'association, il se charge des formalités administrative et juridique de l'association. Par formalités juridique et administrative nous entendons, l'élaboration des comptes rendus, procès-verbaux et rapports, l'établissement des

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correspondances, la gestion des membres, l'émission des convocations. Il a également pour responsabilité de gérer les archives de l'association, veiller au respect des statuts, à la bonne organisation des réunions et par-dessus tout faire de la veille informationnelle en vue du bon fonctionnement de l'association.

Ø Le trésorier

Il s'occupe des aspects financiers de la tontine. Il est chargé de tenir les comptes de l'association et assurer la mise en oeuvre de la politique financière défini. Il assure également une gestion optimale des ressources financières notamment ceux des caisses d'épargnes, de prêts et ceux des caisses de secours ou d'assistances. Il conseille dans l'allocation des ressources en fonction des objectifs et de la capacité financière de l'association. Il est en outre tenu responsable en cas de malversations financières ou de mauvaise gestion.

Ø Le commissaire aux comptes

Il vérifie la comptabilité de la tontine. Son rôle prend une importance particulière en fin de cycle, lorsqu'il faut repartir les intérêts entre les différents membres de la tontine.

Ø Le censeur

Il veille à la discipline lors des séances de la tontine et fait respecter les règlements à caractères sociaux. C'est à lui qu'incombe la charge d'appliquer des amendes et pénalités en cas de retard de troubles et récupère les amendes. De même, il peut lui être demandé de présenter régulièrement un rapport disciplinaire auprès d'une commission qui sera chargé de statuer sur les cas de récidives. Toutes ces différentes attributions sont régies par un règlement intérieur auquel tous les membres de la tontine sont soumis.

3-2-2- Le règlement intérieur dans le système tontinier

Toute association fonctionne sur la base d'un règlement intérieur. Il s'agit d'un ensemble de règles écrites et orales auxquelles chaque adhérent doit se conformer sous peine de sanctions. En effet dans un réseau tontinier, les règles sont le plus souvent élaborées par l'ensemble des membres afin que nul ne se sente pas concerné. C'est le respect de ces règles qui permet la pérennité et la bonne cohésion au sein du groupe. Les règles et les sanctions s'appliquent à tous les membres allant des membres du bureau au plus simple membre. La plupart du temps, ces règles sont écrites et mises à la disposition de tous sous forme de statut afin que nul n'en ignore. Il est généralement constitué en articles partant du contexte de création aux dispositions finales.

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Les règles généralement connues sont édictées sous forme d'article. Les plus connues portent souvent sur des points tels que le but et les objectifs de l'association, la constitution du bureau allant du président au censeur. Ces membres du bureau sont en général élus de manière directe soit par proposition volontaire, soit par un vote. Le statut concerne aussi des points tels que les conditions d'adhésions qui peuvent se faire de manière libre, par parrainage, ou soumise à une caution. On retrouve aussi d'autres éléments tels que les fréquences de rencontre, les heures de séances, les montants des contributions et la nature des contributions (cotisations, épargnes, secours). Par ailleurs, les règles sur des éléments tels que la discipline et les sanctions à appliquer en cas de non-respect ne sont pas en reste11.

3-2-3- La réunion

La séance tontinale est pour Nzeumen (1988 : 34), « une réunion pendant laquelle les opérations de cotisations (placement et remboursements) et de cessions (vente des produits de cotisations) de la tontine ont lieu en même temps que les débats et décisions sur les problèmes d'intérêts communs ». La réunion est en fait l'assemblée de tous les membres de la tontine tenue par fréquence hebdomadaire ou mensuelle.

Les réunions ont lieu à chaque tour et se font de manière rotative. C'est au cours de ces réunions que sont prises les décisions, le plus souvent sous forme de consensus. La réunion est en général l'occasion de passer un agréable moment permettant d'échanger des informations, de parler de ses affaires et de ses projets. Parfois les réunions sont aussi l'occasion de résoudre les problèmes internes de la tontine, la présence à ces réunions est obligatoire, et la ponctualité est de mise. Dans le cas contraire, une sanction peut être appliquée soit en nature soit en numéraire. En effet la présence aux réunions est considérée comme un devoir moral, et le non-respect de celle-ci peut entrainer la perte de confiance au sein du groupe. De même, la discipline et de mise lors des réunions et en cas de non-respect de cette discipline, le censeur peut être amené a infligé des sanctions à l'auteur du désordre.

Par ailleurs, les réunions sont aussi des moments de grandes célébrations où après les opérations de crédits et d'épargnes, les membres se réunissent autour d'un bon repas final, très copieux et souvent arrosé de vin. Il règne alors une atmosphère de fête dans laquelle les membres s'ouvrent entre eux, communiquent, se découvrent, on échange des conseils pour

11Cette partie de notre travail a été inspirée à partir des statuts et règlements intérieurs des associations EMERCOM et ADJAS que nous avons pu consulter.

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mieux mener leurs affaires. Cette forte relation de convivialité contribue à renforcer les relations entre les membres et à développer la solidarité sociale (Brillet, 2012).

3-2-4- Les activités financières

Au sujet du financement du système tontinier en Afrique, seuls les apports des membres permettent de les financer. Ces derniers ne bénéficient d'aucun apport extérieur et sont presque détachées du système financier officiel (Ependa, 2002). Dans ces regroupements, il existe plusieurs services financiers auxquels participent les membres. Il s'agit entre autres des activités de collecte d'épargne et de redistribution de crédits (épargne, investissement, emprunt, remboursement) et les caisses populaires (secours, aide, assurance...). Les opérations d'épargne et de crédit qui sont au fondement de l'association concernent le financement pour l'investissement. Les caisses populaires de leur côté représentent la solidarité et l'entraide.

v Les opérations d'épargne

L'épargne sert de nerf dans le développement économique. Parmi les notions servant d'architecture aux opérations d'épargne, la tontine occupe une place résolument atypique. L'épargne assume en effet une promotion de l'individu en lui fournissant un cadre de financement de ses besoins individuels (Edimo, 1998). Véritable outil d'épargne et d'investissement, les caisses d'épargne regroupe les dépôts les plus importants. Elles permettent de faire face à des dépenses imprévues ou à des investissements grâce à leur système de prêt.

L'épargne est la clé des financements et des investissements, elle rend possible l'investissement qui permet de créer des revenus. L'épargne bien investie crée également un processus de renforcement du capital et de reproductibilité de l'épargne et donc un effet boule de neige qui entraine le financement et l'investissement. Les motivations à l'épargne sont diversifiées et nous retenons entre autres : les objectifs spécifiques (chômage, les risques sociaux divers...) et les objectifs précis (investissement, retraite, revenus supplémentaires réguliers) (Jacquemot, 1993).

En somme, l'épargne dans l'association est assurée par les versements constants des membres. Chaque membre a la possibilité d'épargner en fonction de ses revenus et ce n'est qu'en fin d'années que les montants totaux sont redistribués. Cette épargne est soumise à une caisse de prêt et bénéficie d'une bonne rémunération à travers les intérêts générés. Les sommes versées font partie intégrante des cotisations du jour de la réunion et sont enregistrées dans le cahier des cotisations devant les noms des membres épargnants. Les membres du bureau

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notamment le président, le trésorier et le commissaire aux comptes, procèdent aux vérifications afin de s'assurer de toutes conformités.

v Les opérations de crédit

Les AREC accordent des crédits aux membres sur le principe des enchères. Au cours des enchères, après que chaque membre ait versé ça contribution auprès du trésorier, le secrétaire procède à la lecture des noms des membres qui peuvent participer aux enchères. Ceux qui ont déjà bénéficié du gros lot sont exclus en vertu du principe de rotation. Le président ouvre alors la vente en partant de la mise à prix statutaire et après obtention du gain, le bénéficiaire désigne son avalise et ils signent ensemble le registre pour le remboursement. En effet, l'obtention de la cagnotte est soumise au paiement d'une prime d'enchère, assimilable aux frais financiers payés dans le cadre d'un emprunt bancaire. Réciproquement, les intérêts produits sont reversés aux cotisants, notamment au travers des primes de fin de cycle, constituant ainsi une rémunération de fin de l'épargne effectuée (Issoufou, 1992). La diversité des durées de crédits oblige à recourir aux méthodes classiques d'actualisation financière pour évaluer ces taux. Elles permettent en effet de calculer à partir des flux d'épargne ou d'emprunt, le taux d'intérêt correspondant aux frais financiers reçus ou versés.

Généralement ce sont des membres qui veulent saisir des opportunités d'affaires et ceux qui veulent financer leur affaire qui demandent des crédits. En cas de non remboursement, les responsables de la tontine convoquent l'intéressé et son avaliseur pour récupérer les fonds. Ils peuvent également saisir une autorité familiale ou villageoise pour régler ce problème dans le respect des coutumes (Soedjede, 1993).

v Les caisses populaires

Les caisses populaires sont des outils incontournables dans les opérations de crédits. Elles servent de caisses d'assurance sociale bien structurée. Elles sont encore appelées « caisse de prévoyance » ou « caisse de secours ». Comme l'explique Parrot (1998), elles sont destinées à protéger ou soutenir les membres de l'association ou des personnes de leur entourage lors de certaines circonstances bien définies à l'avance dans les règlements de l'association. Elles couvrent ainsi financièrement les évènements heureux (naissance, mariage, anniversaire, couronnement...) et les évènements malheureux (accident, décès, maladie, vol...). Les contributions sont annuelles et relativement faibles ainsi, chaque membre doté d'une caisse de prévoyance est tenu de participer à son financement. Dans le cadre d'un malheur par exemple tel que le décès d'un proche d'un membre, ce dernier pourra bénéficier d'une assistance matérielle et morale. L'aide matérielle provient de la caisse de secours de tous les membres.

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Elle porte sur des éléments tels que : le paiement des frais médicaux, le transport de la dépouille mortelle jusqu'au village, l'achat du cercueil ou plus généralement sur les frais d'obsèques. Lorsqu'il s'agit du décès d'un membre du groupe, une partie des sommes pourra être exceptionnellement être remise directement à la famille du défunt. L'aide morale pour sa part implique une visite au malade ou à la famille du défunt, une présence impérative aux funérailles. Cet appui moral est obligatoire sous peine de sanctions (Henri & al, 1991).

On retrouve également des caisses scolaires qui sont une sorte d'épargne permettant aux parents de faire face aux difficultés de la rentrée scolaire. Cette caisse est ouverte à une période précise et est consommée en début de rentrée scolaire. Tout comme une caisse d'épargne elle génère des intérêts, et chaque membre qui y souscrit reçoit sa mise de fonds.

3-3- La durée de la tontine

La durée de la tontine ou cycle tontinale selon Nzeumen (1988 : 36), « renvoie à la période pendant laquelle tous les membres bénéficient de la tontine ». Ce cycle s'étend de l'emprunteur simple à l'épargnant simple. Elle dépend du nombre de séances tontinales et de la période tontinale. En somme la durée de la tontine dépend des accords conclus lors de la création, elle peut être d'un cycle unique ou d'un cycle renouvelable par reconduction automatique. La reconduction automatique peut être illimitée.

Généralement, le système tontinier a une durée de vie comprise entre 10 et 25 ans, ils prévoient soit un versement unique lors de la souscription soit la possibilité de versements réguliers12. Au terme, les fonds sont reversés aux adhérents, déduction faite des frais de l'association. Les sociétés à forme tontinières ne peuvent pas s'engager sur un rendement minimal ou sur un capital garanti au terme, c'est donc seulement lors de la dissolution que les épargnants connaîtront le rendement final de leur investissement. Par ailleurs, il n'est pas possible de récupérer sa mise avant la dissolution de l'association. Il est donc essentiel de ne pas y investir une épargne dont on aurait besoin à moyen terme.

3-4- La finalité du système tontinier africain

La difficulté d'accès au système bancaire rend presque vital le système tontinier. Il agit entend que micro-crédit, ouvert pour les proches. Chacun des individus peut à son tour emprunter dans la tontine, à condition de rembourser. L'association rotative de l'épargne et du

12Source : https://www.lafinancepourtous.com/?s=la+tontine, consulté le 12 juillet 2021.

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crédit fait donc référence au système selon lequel les individus empruntent chacun à leur tour, pour ensuite rembourser.

Ø La finalité sociale

Définir le système tontinier sous le seul prisme financier serait réducteur, le rôle de l'association est avant tout social dans les pays africains. On y vient aussi pour échanger des idées, communiquer une information, voir du monde. C'est un élément important de la vie de quartier, de la vie sociale de chacun des membres. Ce n'est pas au hasard que chacun des membres arbore un boubou spécial en signe d'appartenance à leur tontine13. La confiance au sein de ces associations est un principe fondateur de la tontine, en effet refuser d'honorer sa dette c'est prendre le risque d'exclusion sociale. La tontine privilégie le groupe par rapport à l'individu, et peut dicter les comportements. Elle est souvent utilisée comme caisse de prévoyance, à laquelle chacun des membres adhère en prévision de risques qui peuvent survenir (maladie, décès, etc...). L'association est un moyen de mener un projet commun, et toujours une occasion de se rencontrer, par le biais de la tontine un individu recherche également la renommée sociale.

Ø La finalité économique

Le système tontinier permet d'utiliser les fonds pour des investissements à court terme, soit pour des évènements prévus ou imprévisibles, de manière collective ou individuelle. En cas d'usage individuel, l'individu qui souhaite emprunter doit d'abord présenter son projet, qui doit être accepté par le reste des participants. Ils doivent aussi parfois accepter que l'emploi des fonds collectés soit surveillé par un membre de l'association (Gasse-Hellio, 2000).

Ø La finalité financière

Selon le site officiel des tontines ( https://www.tontine8.com, consulté le 14 juillet 2021), le système tontinier peut mobiliser de l'épargne, dans ce cas il possède un rôle financier. Ce système possède la particularité d'impliquer une cotisation périodique. Ces cotisations périodiques peuvent être attribuées au membre qui en a le plus besoin, ou dans le cas d'un ordre préétabli, bien qu'il existe la possibilité d'échanger voire d'acheter un tour.

13 Source : https://www; leolagrange.org/la-societe-civile-sorganise-les-tontines-au-cameroun/, consulté le 14juillet 2021.

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3-5- Le statut du système tontinier au Cameroun

Il est couramment admis que les regroupements tontiniers sont des sortes de syndicats. Il s'agit plus précisément des groupes de solidarité visant à s'entraider et améliorer leurs conditions de vie dépréciées. Ils servent à faire prévaloir l'intérêt général ou les intérêts particuliers contre la puissance de la crise financière. C'est ainsi qu'ils luttent contre des décisions administratives et autre structures financières devenues trop compliquée (Tadjuidje, 1982).

Il faut dire que le système tontinier est non seulement un lieu pour garder l'argent, mais aussi un regroupement de divers acteurs. Il regroupe des acteurs tels que des commerçants, petit producteurs, artisans qui oeuvrent dans un rapport concurrentiel avec le système financier officiel au quotidien. C'est certainement en fonction des montants importants qui transitent dans ces circuits que l'Etat a décidé à un moment donné d'inclure un prélèvement de taxe au sein des réseaux associatifs.

L'expansion du système tontinier dans les pays en voie de développement est flagrante. Bien qu'ils opèrent différemment d'un pays à un autre, ils contribuent à combler sensiblement les mêmes besoins dans ces pays où les capitaux et les couvertures sociales sont quasi insuffisants (Boutchang, 2019). Ils sont déterminants pour les petits entrepreneurs à faibles revenus et revenus intermédiaires. Grâce à leurs particularités, ils permettent l'accès aux ressources financières, matérielles, et sociales nécessaires pour l'insertion socioéconomique des jeunes entrepreneurs. Le système tontinier apporte ainsi une contribution majeure aux activités économiques et à la création des richesses qui fera l'objet d'une réflexion dans le prochain chapitre.

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LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES

CHAPITRE 2 :

Les petits entrepreneurs à faibles revenus ont des difficultés d'accès au crédit bancaire officiel, le manque de garanties et de crédibilité dans les conditions de prêts ne joue pas en leur faveur (Owondi, 2009). La concentration de cette catégorie d'entrepreneurs vers les sources de financements informels est pratique courante. La banque des défavorisés, la banque ambulante ou tout simplement système de tontines qui regroupe une multitude de couches socioprofessionnelles semble être une pratique courante dans l'univers africain et camerounais (Hedi, 2016). L'absence des lourdeurs, des contraintes et le caractère inclusif envers toutes catégories d'acteurs sociaux constitue le point fort de ces regroupements associatifs. Ce qui conduit ainsi dans ce second chapitre à présenter la contribution du système tontinier aux activités économiques à partir des déterminants du recourt au système tontinier (section 3). Avant d'y parvenir, il serait nécessaire de faire un état des lieux sur l'inclusion financière en Afrique et particulièrement au Cameroun dans la première section. Ensuite présenter les motivations et les choix entrepreneuriaux de ces jeunes dans la deuxième section.

1- LA PROBLÉMATIQUE DE L'INCLUSION FINANCIÈRE EN AFRIQUE ET AU CAMEROUN

L'accès au financement est un enjeu majeur pour le développement d'une économie. Il permet aux individus de développer des projets et de s'insérer dans la société, aux entreprises de s'investir, d'innover et d'embaucher, et à l'économie dans son ensemble de fonctionner. Les pays africains sont particulièrement confrontés aux difficultés d'accès aux ressources financières pour entreprendre une activité économique. « En Afrique 70% de la population sont des individus à faibles revenus vivant en dessous du seuil de pauvreté » (Zins, 2017). Ce seuil de pauvreté dramatique constitue un frein pour ces derniers dans l'accès au crédit de financement formel en vue d'améliorer leurs conditions de vies déplorables. Cette difficulté explique l'insertion de cette couche de la population vers des circuits de financements parallèles

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qui témoignent ainsi de leur recherche du bien-être. De cette situation se dégage donc un des grands enjeux du continent qui est l'inclusion financière.

1-1- La notion d'inclusion financière

L'inclusion financière désigne pour la Banque mondiale (2014) la possibilité pour les individus et les entreprises d'accéder à moindre coût à toute une gamme de produits et de services financiers nécessaires et adaptés à leurs besoins de financement. Elle concerne les services tels que l'épargne, le crédit et les assurances proposés par des acteurs fiables et responsables. L'accès à un compte d'opérations courantes constitue généralement la première étape dans ce processus. Tadjudje (2016) va dans le même sens, en la désignant comme l'offre des services financiers et bancaires de base à faible coût pour des individus en difficultés. Pour Yong Kim, l'accès aux services financiers pourrait être une passerelle pour sortir de la pauvreté, d'où l'importance d'offrir ce service au plus grand nombre. On dit ainsi d'une personne qu'elle est incluse financièrement lorsqu'elle a un compte en banque, la capacité de souscrire à une épargne, de contracter un prêt et la possibilité de recourir à des services bancaires.

1-1-1- Quelques indicateurs de l'inclusion financière en Afrique

L'accès aux services financiers est avant tout déterminé par le niveau de développement économique. En Afrique subsaharienne, l'accès aux services financiers formels dans la zone Franc est de 4%. La part de la population de plus de 15ans disposant d'un compte bancaire dans une institution financière formelle s'élève à 24% en 2011 contre 90% pour les pays les plus avancés (Guerineau et Jacolin, 2014).

Les indicateurs de l'inclusion financière en Afrique sont tous inférieurs à la moyenne mondiale. D'après Zins (2017) 35% de la population dispose d'un compte en banque, 15,4% épargne dans une institution financière, 6,7% dispose d'un crédit auprès d'un institut de financement, concernant le recourt au crédit, 51,6% de la population africaine ont accès à un prêt bancaire. De tels chiffres démontrent la faiblesse de l'inclusion financière en Afrique et la préférence des acteurs pour le financement parallèle à travers l'épargne et le crédit. L'éducation et le revenu augmentent la probabilité d'être inclus financièrement, le genre et l'âge ont également une influence quelconque.

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1-1-2- Les enjeux de l'inclusion financière en Afrique.

Le financement constitue un enjeu majeur tant pour l'Etat que pour le secteur privé. En effet, il favorise l'épargne et l'accumulation du capital et assure une allocation optimale des capitaux. Le développement financier peut favoriser une accélération de la croissance et une réduction de la pauvreté. Ce développement passe par la réduction des contraintes d'accès au crédit formel, l'amélioration de l'investissement à long terme, et donc de la croissance économique (Maimbo & al, 2011).

La promotion de l'inclusion financière comporte donc deux défis complémentaires. D'une part, le développement du secteur financier formel afin de favoriser la croissance des crédits à long terme. Cela entrainerait ainsi la réallocation graduelle du crédit aux ménages et aux PME en favorisant l'investissement productif. D'autre part, la prise en compte des contraintes économiques spécifiques aux ménages et aux PME dans les pays en développement, ainsi que les solidarités financières traditionnelles (Guérineau & Jacolin, 2014).

Pour le fond monétaire international, l'inclusion financière permet à l'échelle microéconomique de financer des projets personnels ou professionnels (FMI, 2016). L'individu ayant un accès facile aux ressources peut ainsi investir dans des projets d'avenir, ce qui à terme, bénéficie à l'ensemble de l'économie. À l'échelle d'une entreprise, l'inclusion financière permet de faciliter les activités et les procédures, comme par exemple le versement des salaires ou le paiement des fournisseurs. À l'échelle de l'Etat, l'inclusion financière permet un meilleur contrôle et une réglementation des activités économiques, ce qui facilite le paiement des impôts ou le versement des subventions. Cependant, de nombreux individus en Afrique rencontrent des difficultés lorsqu'il s'agit de récolter des fonds, et tout particulièrement lorsqu'il s'agit de la levée des fonds formels. En effet, la part du système financier informel est encore importante (Bekolo-Ebe, 1996). L'inclusion financière se heurte souvent à la finance informelle, mêmes si les deux systèmes ne sont pas incompatibles dans une même économie.

1-1-3- Les barrières à l'inclusion financière en Afrique

Lorsqu'on parle de barrière à l'inclusion financière, il s'agit des difficultés auxquelles la population africaine est confrontée lorsqu'il s'agit de l'accès à la finance formelle. Il s'agit d'un ensemble de facteurs involontaires qui constituent un frein à l'accès aux ressources financières.

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Les barrières involontaires proviennent le plus souvent des facteurs subis qui excluent une population. L'exclusion se fait plutôt du côté de l'offre de services financiers. La barrière la plus importante en Afrique est la même qu'au niveau global. Il s'agit entre autres : du manque de moyens financiers (70,8%), la distance avec la banque trop importante (25,6%), le coût trop élevé (27, 7%) et le manque de garanties (21,5%) (Klapper et al, 2012). Ces éléments sont les principaux facteurs de l'exclusion financière involontaire auxquels font face les couches sociales à faible revenus.

Par ailleurs, d'autres facteurs très importants influençant l'exclusion financière en Afrique peuvent se situer au niveau microéconomique. À cet effet, Weil et Zins (2016) se sont penchés sur cet aspect de la question pour mieux saisir les facteurs de l'exclusion financière en Afrique. Ils ont pu dégager deux principaux facteurs que sont : l'éducation et le revenu.

v L'éducation

Concernant l'éducation, la probabilité qu'une personne ayant suivi un enseignement tertiaire ait un compte en bancaire augmente de 44%, qu'elle dispose d'une épargne formelle de 31,9% et qu'elle contracte un crédit dans une banque de 10,1%. Mais lorsqu'une personne n'a pas eu un enseignement poussé au cours de sa vie, sa probabilité d'avoir un compte bancaire est de 3%.

v Le revenu

Le manque de moyens financiers les coûts de transactions trop élevés, le manque de garanties sont des obstacles qui contribuent à exclusion des couches sociales défavorisées des services bancaires. L'accès au financement formel est donc un enjeu majeur pour le développement du continent. L'inclusion financière en Afrique subsaharienne comme en zone franc est caractérisée par un accès limité des ménages ou des TPE au secteur financier formel et par l'importance des réseaux informels dans l'accès au crédit (Guillaumont & al, 2013).

1-1-4- L'inclusion financière au Cameroun : bref état des lieux

Selon un rapport du Centre de recherche pour le développement international (CRDI, 2019) au Cameroun, moins de 20% des hommes et 10% des femmes disposent d'un compte auprès d'une institution financière formelle. L'institution de financement étant les banques traditionnelles, et les institutions de microfinances, ils ne facilitent pas l'accès aux crédits aux PME pour assurer suffisamment leur croissance. Au moins 8millions de camerounais vivent en dessous du seuil de pauvreté, avec moins de 931 FCFA par jour. Une enquête réalisée par l'INS

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(2014) faisait ressortir que 40% de la population sont pauvres, soit 8.088.876 de personnes vivent en dessous du seuil de pauvreté qui est de 339.715FCFA par équivalent-adulte et par an14. Il s'agit des personnes qui ne sont pas capable de satisfaire leurs besoins essentiels, à savoir se nourrir et subvenir aux besoins sociaux de base. Cette ampleur des choses permet donc de constater que les barrières à l'inclusion financière sont le plus souvent subies par les populations camerounaises.

L'exclusion involontaire des populations à faibles revenus fait apparaitre l'importance du secteur informel et des TPE au Cameroun. En effet les distributeurs de crédits informels les plus importants demeurent la famille, les proches et les réseaux associatifs avec 70% des emprunteurs. Le recours aux réseaux de relations personnelles est encore plus fréquent en Afrique subsaharienne et en zone franc avec 85% des emprunteurs (Guérineau et Jacolin, 2014). L'usage des réseaux de financements informels témoigne de la volonté des couches sociales à faible revenu à avoir accès aux ressources économiques pour le financement. L'accès aux ressources permet ainsi d'entreprendre une activité économique génératrice de revenus au quotidien, de satisfaire les besoins sociaux de base (nutrition, logement, santé, bien-être...) et par ailleurs, mieux s'insérer dans la société. Comme le souligne un répondant :

Tout le monde n'est pas le bienvenu dans le système des banques. Les tontines sont aussi pour nous des sortes de petites banques qui nous permettent aussi nous, qui avons des difficultés d'inclusion financière à avoir des petites ressources financières, pour aussi réaliser nos projets économiques (propos recueillis le 11 janvier 2022 avec Jean-Daniel d'EMERCOM à Nkolbisson derrière l'institut).

Cette volonté d'insertion dont fait preuve ces individus traduit leurs besoins d'autonomisation qui est influencé par de nombreuses sources de motivations nécessaire à toutes activités entrepreneuriales.

1-2- Les motivations à l'entrepreneuriat des couches sociales à faible revenus

La littérature dominante sur la motivation entrepreneuriale présente une conception mixte : la motivation fondée sur la volonté et la motivation fondée sur la nécessité. La première fondée sur la volonté s'inscrit dans la tradition de l'entrepreneur Schumpétérien (1934) pour qui les motivations sont fondées sur l'exploitation d'opportunités d'affaires. La seconde fondée la nécessité considère que la motivation se traduit par le développement des activités de subsistances (De Miras, 1982). Transposée dans le champ de l'entrepreneuriat, la motivation

14 Source : https://www.investiraucameroun.com/index.php/gouvernance/1212-11865-au-moins-8-millions-de-camerounais-vivent-en-dessous-du-seuil-de-pauvrete-avec-moins-de-931-fcfa-par-jour, consulté le 17septembre 2021.

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représente une force positive ou négative, qui pousse un individu à se lancer dans la création d'une organisation et en particulier d'une entreprise. Plusieurs travaux dans le domaine de la science de gestion et de la science économique se sont intéressés sur la nature des motivations entrepreneuriales.

Les premiers travaux sont ceux de Gilad et Levine (1986) qui considèrent que, les motivations d'un individu à la création d'une entreprise peuvent êtres au choix ou de contrainte. De ce fait, ils distinguent deux champs théoriques sur les motivations entrepreneuriales à savoir le model « PULL » fondé sur l'opportunité et le model « PUSH » fondé sur la nécessité. L'opportunité faisant référence à la découverte d'une occasion d'affaire et la nécessité quant à elle correspond à une absence d'alternatives.

1-2-1- Le model PULL et PUSH des motivations entrepreneuriales

v Le model Pull et l'entrepreneur opportuniste

Dans le model « Pull », Gilad et Levine considèrent que la création d'entreprise résulte d'un choix délibéré de personnes intéressés par l'activité entrepreneuriale ou d'une culture entrepreneuriale. Dans ce cas, l'individu qui prend l'initiative de créer une entreprise le fait de manière volontaire et délibérée, il peut donc être considéré comme un entrepreneur opportuniste qui recherche avant tout l'autonomie, l'indépendance. Il est également motivé par la recherche de gains économiques déterminé par sa capacité à identifier et à exploiter les opportunités d'affaires qui s'offrent à lui. L'opportunité se présente dans ce cas comme le principal facteur influençant l'entrepreneur « Pull ». Concernant l'opportunité, un entrepreneur de notre population d'étude nous avoue que :

Ce qui m'a motivé dans l'élevage c'est que, pendant des fins d'années j'ai beaucoup fait dans la vente des porcs pour des amis. Et au bout de deux ans trois ans j'ai vu que ça rapportait beaucoup d'argent et qu'ils s'en sortaient bien, voilà comment j'ai compris que pourquoi moi-même je ne peux pas aussi le faire c'est comme ça que je me suis vraiment lancé à mon niveau. (Entretien du 20 janvier 2022 avec Gérard de ADJAS à Abobo).

Elle fait référence à la faculté pour l'entrepreneur d'identifier un manque ou un besoin dans le marché et de combler ce besoin à travers de nouveaux produits ou services, de nouvelles marchandises, et de dégager des bénéfices supérieurs aux coûts de production de l'entrepreneur. En somme, l'entrepreneur opportuniste s'inscrit dans la logique de l'entrepreneur Schumpetérien motivé par la recherche de gains économiques et le désir d'indépendance.

v Le model Push et l'entrepreneur par nécessité

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Dans le model « Push », Gilad et Levine (1986) postulent que les individus qui se trouvent en situation de nécessité, voire de précarité sont contraints à créer leur entreprise par des facteurs externes et négatifs. Il peut s'agir entre autres : de la difficulté à trouver un emploi stable, le salaire médiocre, le travail non flexible ou encore l'insatisfaction au travail. Ces facteurs motivationnels se retrouvent chez les porteurs de projet en situation de discontinuité négative par rapport à la trajectoire de vie qu'ils se sont fixés. L'entrepreneur de type Push se présente comme un entrepreneur soumis à la contrainte, dans la mesure où l'ensemble des situations qui s'imposent à lui créée la nécessité de s'auto-employer (Gilad et Levine, cité par Nkakleu, 2016 : 8). Dans ces conditions, les individus motivés par les facteurs Push peuvent être considérés comme des exclus de la société, à cet effet ils cherchent à s'affirmer et à être reconnu de tous à travers la création d'entreprise. En somme les motivations des entrepreneurs contraints ou de nécessités résultent de deux dimensions : à savoir la motivation de nature économique qui résulte de la perte d'un emploi. Et la motivation de nature non économique qui provient de l'insatisfaction d'une vie professionnelle et du désir de s'auto-affirmer. En contexte camerounais, les entrepreneurs de nécessité se battent le plus au quotidien pour leur survie. Leur motivation principale à ce niveau provient de la nécessité de rechercher beaucoup d'argent pour prendre soin d'eux et assurer les charges familiales. Les propos d'un répondant en sont la parfaite illustration :

La situation économique déjà actuelle qui n'est pas du tout facile de joindre les deux bouts, parce que justement ce que tu peux avoir sur le plan professionnel parfois est insuffisant. Vue la conjoncture économique même déjà actuelle, et les charges qui ne sont pas du tout évident. (Entretien du 30 décembre 2021 avec Loïc d'EMERCOM à Oyom-Abang chapelle).

Les propos de cet enquêté traduisent tout simplement le désir des populations à faible revenu à faire face aux contraintes économiques. Le coût de vie et les contraintes familiales leurs amènent ainsi à trouver d'autres sources de revenus afin de s'en sortir au quotidien.

Au-delà des facteurs motivationnels de nature (Pull) et (Push) présentés comme agissant de façon exclusive sur les entrepreneurs volontaires et contraints. Les économistes tels que Gabarret et Vedel (2015) mettent en exergue une approche mixte des motivations entrepreneuriales constituées d'une part des facteurs motivationnels positifs et des facteurs négatifs, et d'autre part les facteurs motivationnels économiques et non économiques.

Gabaret et Vedel (2015) constatent que ce sont les facteurs négatifs en général (chômage, manque d'argent) qui déclenchent chez les individus la décision de création des

1-2-2- Les facteurs motivationnels négatifs et positifs/économiques et non économiques

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entreprises. Mais la combinaison de ces facteurs négatifs aux facteurs positifs (désir de travailler, désir d'augmenter son revenu) est à la base de la création d'entreprise. Les facteurs négatifs et positifs se situent sur un continuum qui associés aux motivations économiques et non économiques, aboutissent à plusieurs combinaisons qu'on peut qualifier de motivations mixtes.

Tableau 1 : Les dimensions de la motivation entrepreneuriale

Facteurs motivationnels

Négatifs

Positifs

Non-économiques

Manque de satisfaction

Désir de satisfaction

 

Désir d'indépendance

Économiques

Manque d'emploi

Désir de travailler

 

Désir d'augmentation de

revenu

 

Source : Gabarret et Vedel (2015 : 15).

Nkakleu (2016) s'inscrit dans cette logique dans une recherche portant sur les motivations des entrepreneurs aux pieds nus au Cameroun. Il ressort que les facteurs motivationnels des entrepreneurs sont à la fois économiques et non économiques, influencées par des facteurs positifs et négatifs.

v Les motivations économiques

Il s'agit entre autres de la perte d'emploi qui provoque le manque de ressources financières, le désir de gagner de l'argent, le désir d'épargner, le salaire insuffisant dans l'emploi occupé ou encore l'opportunité d'affaires. Les entrepreneurs aux pieds nus qui renvoient aux entrepreneurs informels ou de nécessités sont la plupart du temps confrontés à l'insatisfaction des besoins vitaux de bases. Ces besoins concernent généralement l'alimentation, la santé, le logement, l'éducation des enfants, le déplacement... en effet comme l'explique Nkalkleu, (2016 : 14), « c'est la recherche du bien-être qui favorise chez ces derniers la création de diverses activités de survie ». De même, ces motivations à entreprendre sont influencées par de nombreuses dimensions telles que :

Ø Le désir de faire quelque chose : il faut dire que l'exercice d'un métier est un impératif pour pouvoir vivre au quotidien.

Ø Sortir de la situation de sans emploi : entreprendre une activité permet non seulement de passer du statut de chômeur à travailleur, mais également de pouvoir s'occuper de son temps. Les affirmations d'un répondant en sont la preuve :

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Ce qui m'a motivé à développer mon activité, c'était le désir de s'occuper il fallait que j'aie une profession. Vous savez ce n'est pas facile de s'insérer dans la fonction publique donc il me fallait avoir une occupation, et il fallait également que je participe au développement à mon niveau (entretien du 27décembre 2021 avec Aristide à Tsinga).

Ø Devenir son propre patron : généralement, le fait pour un individu de créer sa propre affaire dans le but de sortir du statut de sans emploi fait de ce dernier son propre patron qui s'auto fixera des règles et des principes de fonctionnement.

v Les motivations non économiques

Les motivations non économiques sont pour Nkakleu (idem) essentiellement des motivations sociales qui peuvent être représentées en quatre (4) catégories. Il s'agit entre autres :

Ø L'aide de la famille, la satisfaction des besoins alimentaires des enfants, la scolarisation des enfants, la satisfaction des besoins personnels. Généralement, ces facteurs motivationnels sont communs aux hommes et aux femmes micro entrepreneurs dans l'univers camerounais qui recherche avant tout à satisfaire les besoins essentiels.

Ø La recherche d'indépendance et d'autonomie, la poursuite des études supérieures, la réalisation d'une passion, la poursuite d'un entrepreneur ayant réussi. En allant dans ce sens, un enquêté affirme :

Ce qui m'a réellement motivé a démarré mon activité entrepreneuriale je suis jeune étudiant avec mes différents diplômes, j'ai eu à faire les concours mainte fois et je n'ai pas réussi, et avec l'âge et avec le temps qui passe. J'ai voulu exercer quelque chose qui puisse me donner de quoi manger pour ne plus dépendre des parents » (entretien du 04 janvier 2022 avec Gérôme d'EMERCOM au camp-Sonel).

Tout comme les facteurs précédents, ils sont également communs aux hommes et aux femmes. Il est courant de voir dans les marchés et les villes camerounaises, des jeunes très jeunes micro entrepreneur de nécessité qui se lancent dans des petits commerces dans le but d'accumuler des bénéfices afin de pouvoir se payer la scolarité en période de rentrée scolaire. Certains encore le font dans le but de s'autonomiser dû à la faible offre d'emploi du secteur public.

Ø La troisième catégorie concerne des facteurs exclusivement liés aux femmes. Il s'agit notamment : la prise en charge de la grossesse par la femme, la souffrance dans le foyer conjugal, disposé de temps pour effectuer les tâches ménagères.

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La difficulté liée à la vie conjugale amène certaines femmes à s'autonomiser pour mieux prendre soin d'elles et du foyer dans un contexte ou l'époux ne joue pas toujours son rôle. Une jeune entrepreneure expliquait à cet effet que :

Ce qui m'a motivé c'est le fait déjà d'être une femme au foyer. Tu as la charge des enfants, tu as ton mari qui sort chaque jour pour travailler avec son travail son salaire et les enfants on ne parvenait pas toujours à joindre les deux bouts. Compte tenu de mon dynamisme, voilà pourquoi j'ai décidé de mettre sur pied de démarrer mon petit élevage (entretien du 28 décembre 2021 avec Simone d'EMERCOM à Nkolbisson-chapelle).

Ø La dernière catégorie concerne des facteurs liés essentiellement aux hommes qui sont motivé par le désir de quitter leur famille ou de quitter le pays.

Dans les sociétés patriarcales africaines et camerounaise, le garçon est généralement appelé à quitter la famille parentale pour s'autonomiser et fonder sa propre famille. L'absence d'emploi constitue la plupart du temps un frein à leur départ. Les pressions familiales, sociales et le poids de l'âge leur contraint souvent et à s'auto employer à travers des micros et petites entreprises dans divers secteurs d'activités, ceci dans le but de s'autonomiser et de fonder une famille.

2- LES SECTEURS D'ACTIVITÉS DES ENTREPRENEURS AU CAMEROUN15

Les secteurs d'activités sont généralement regroupés par secteur économique caractérisé par les différentes activités qu'on peut insérer dans le secteur informel. Au Cameroun, l'on distingue ainsi le secteur primaire, le secteur secondaire et le secteur tertiaire.

Le secteur primaire pour sa part comprend plusieurs domaines d'activités. Il s'agit entre autres de l'agriculture qui est le principal moteur économique du pays, l'élevage et la pêche qui sont des activités importantes du pays, l'exploitation minière et l'exploitation forestière.

Le secteur secondaire regroupe les activités liées à la transformation des matières premières issues du secteur primaire. Il s'agit entre autres des industries agroalimentaires, les scieries, les métallurgies, la fabrication des biens de consommation légère et les textiles.

15Cette sous partie de notre travail a été inspirée à partir d'un article de 2021du groupe objectif-import-export : https://www.objectif-import-export.fr/fr/marches-internationaux/fiche-pays/cameroun/marche-principaux-secteurs, le 18 octobre 2021.

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Le secteur tertiaire quant à lui regroupe toutes les activités économiques qui appartiennent au secteur primaire, au secteur secondaire et divers types de services. Il s'agit notamment du transport, du commerce, de l'artisanat, la restauration.

Tableau 2 : Les indicateurs des secteurs d'activités au Cameroun en 2021

Répartition de

l'activité

économique par
secteur

Agriculture

Industrie

Services

Emploi par secteur (en % de l'emploi total

43,5

14,4

42,1

Valeur ajoutée (en % du PIB

15,2

25,0

51,6

Valeur ajoutée

(croissance annuelle en %)

1,1

3,4

-0,8

 

Source : consulté sur : http://www.objectif-import-export.fr, le 18 octobre 2021.

Au Cameroun, 90% des jeunes entrepreneurs se convertissent dans les activités du secteur tertiaire à vocation libérale (Kouete, 2020). On retrouve généralement des commerçants dépendants et indépendants, des artisans... ils exercent généralement ces activités dans un cadre informel. Certains encore exercent des activités du secteur primaire dans un cadre informel afin de pouvoir maintenir au quotidien. Le secteur informel représente le principal pourvoyeur d'emploi au Cameroun, de plus il comprend plusieurs particularités qui font sa force.

2-1- Le secteur informel

Le terme « secteur informel » a été employé pour la première fois dans le rapport d'une mission générale sur l'emploi menée par le bureau international du travail (BIT) en 1972 au Kenya. Il désignait alors un secteur non structuré en dehors des règlementations administratives.

Selon un rapport de l'UNESCO (2000), le secteur informel renvoie à des unités de production qui opèrent typiquement à petite échelle, avec un faible niveau d'organisation, avec une absence de division entre le travail et le capital entant que facteurs de production. En effet,

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l'objectif premier de ce secteur est de créer des emplois et d'engendrer des revenus pour les personnes concernées.

Au Cameroun, le secteur informel occupe une place prépondérante dans la création des richesses et des emplois. En effet, une étude de l'EESI (enquête sur l'emploi et le secteur informel) relève que le secteur informel génère 50% du PIB et contribuait à 29% des richesses nationales en 2005 (INS, 2005). En 2010, 89% des populations actives en font partie, soit 9,2millions de personnes essentiellement dans les métiers de l'agriculture et de l'artisanat (INS, 2010). Une étude plus récente de l'OIT (2017) fait état de ce que depuis une décennie, le secteur informel emplois 90% de la force active et assure la survie de nombreux travailleurs. En effet, depuis la crise économique des années 80, le secteur informel à durablement gagné de l'ampleur au point de devenir le principal pourvoyeur d'emploi urbain. Il serait passé de 88,2% en 1993 à 96,1% en 2001 avant de se stabiliser autour de 90% et 88% entre 2005 et 2014 (OIT, 2017). Le secteur informel promeut l'entrepreneuriat de subsistance et renforce les capacités d'adaptions des populations jeunes et adultes à faible revenus dans le tissu économique.

Le secteur informel est une économie issue des productions locales et vouer à satisfaire un marché restreint d'individus. Il permet à ceux qui l'exercent de satisfaire leurs besoins vitaux de base (nutrition, logement, santé) et ceux de leur famille. Kouete (2020), dans une recherche qui portait sur la place du secteur informel en contexte camerounais ressort 7 principales caractéristiques de ce secteur d'activité :

Ø Le non enregistrement administratif ;

Ø L'absence ou la faible réglementation de l'activité ;

Ø L'échelle relativement faible des activités et des capitaux mobilisés ;

Ø L'absence de local professionnel fixe ;

Ø L'évolution en marge des circuits organisés ;

Ø Le recours privilégier à la main d'oeuvre famille ;

Ø L'absence de dispositif de sécurité et de protection sociale.

L'institut national de la statistique (INS, 2010) au Cameroun pour sa part dégage trois principales caractéristiques du secteur informel : l'indépendance du promoteur c'est-à-dire, l'individu exerçant son activité est son propre patron et travaille à son propre compte ; l'absence d'enregistrement administratif, ici l'activité n'est pas enregistrée dans le cadre des fiscalités ; et enfin l'absence de comptabilité formelle.

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Le secteur informel camerounais est relativement ouvert à tout individu désirant entreprendre une activité génératrice de revenus. Le statut social et le niveau scolaire importe peu dans ce domaine. Seule la capacité à s'adapter et à écouler ses produits sont déterminants. Un rapport de l'OIT (2014 : 21) mentionne à ce sujet que « n'importe qui peut entamer une activité du secteur informel, parce qu'il s'agit d'activités qui ne requiert pas une formation élevée ni un capital important ». Concernant les secteurs d'activités, les rapports de l'INS (2005 & 2010) relèvent que le secteur informel est présent dans tous les secteurs d'activités notamment dans le secteur primaire et le secteur tertiaire. Pour ce qui est du secteur tertiaire, l'artisanat et le commerce semblent être en tête. On retrouve ici de diverses activités telles que la coiffure, la soudure, la menuiserie, le tissage, la couture fortement répandu le long des allées dans les villes camerounaises. Pour ce qui est du domaine du commerce, il apparait comme celui dans lequel on retrouve à la fois une multitude de catégories sociales à savoir : jeunes, adultes, hommes, femmes. Ils sont regroupés autour de petit commerce de gros et de détails tel que la vente des produits agro-alimentaire (vivre frais, produit de première nécessité) la friperie, les objets ménagers. Il concerne également l'offre des services notamment la restauration, les buvettes. Il arrive parfois que les populations du fait de la conjoncture économique exercent plusieurs activités à la fois tant dans le secteur primaire que tertiaire a la quête de ressources financières dans une dynamique de débrouillardise.

Concernant le secteur informel primaire, l'agriculture est le secteur dans lequel la grande majorité des jeunes exercent un emploi 92,0% (BIT, 2015). En milieu rural, les activités agricoles constituent la principale source de survie vouée d'une part à la consommation et d'autre part à la commercialisation. On y retrouve des cultures telles que le maïs, l'arachide, les pommes, les légumes, le plantain. À côté de ceux-ci il y'a d'autres cultures uniquement destinées à la vente tel que le cacao, et le café.

Par ailleurs, l'élevage s'impose actuellement dans l'économie camerounaise il participe ainsi à prêt de 165millions du PIB et procure des revenus autour de 30% aux populations rurales (Zakari, 2021). L'élevage connait aujourd'hui une nouvelle catégorie d'acteur en quête de revenus il s'agit entre autres des jeunes diplômés chômeurs qui n'ayant pas souvent accès aux services financiers formel se lancent dans l'entrepreneuriat pastoral. Il s'agit précisément des bovins, des caprins, des ovins, des porcins et des volailles. Le secteur des volailles et des porcins est très pratiqué par les entrepreneurs du fait de la forte demande dans le marché de consommation. Ces différentes activités varient selon la taille en fonction des ressources dont disposent les individus qui les exercent.

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2-2- Les différentes formes d'entreprises

Dans le monde du travail, il existe une multitude d'entreprises qui diffèrent le plus souvent selon leurs formes et leurs tailles. On retrouve généralement des entreprises individuelles ou micros entreprises, des très petites entreprises, des petites entreprises, les petites et moyennes entreprises et les grandes entreprises.

La classification des entreprises n'obéit pas qu'au seul critère de la taille et de l'effectif. D'autres facteurs tels que le secteur d'activité, le chiffre d'affaire, le statut juridique peuvent intervenir. L'entrepreneuriat informel se situe dans ces caractéristiques, bien qu'elle évolue dans la stricte illégalité, elle constitue au même titre que les autres un secteur visant la promotion de l'activité économique. Selon Baheke (2016), les petites entreprises ont une place considérable dans les pays en développement en matière de création d'emplois et de contribution à la création des revenus. De ce fait elles contribuent à la réduction du chômage et de la pauvreté.

La notion d'entrepreneuriat informel dans les pays en développement (PED) met en exergue deux types d'entrepreneurs du secteur informel (Berrou, 2014).

Ø Le premier groupe d'entrepreneur qui est très répandu est principalement constitué d'individus travaillant à leur propre compte dans des activités à faible niveau de capital. Il s'agit plus précisément de jeunes disposants de faibles savoirs faires et compétences entrepreneuriales (peu ou pas diplômé, peu qualifié), ils sont généralement motivés par la recherche de gain financier en contexte de pauvreté économique.

Ø Le second groupe d'entrepreneur qui est minoritaire est constitué d'entrepreneurs indépendants, il s'agit surtout des petits patrons de micro et petites entreprises. Les revenus des entrepreneurs de ces groupes sont largement supérieurs aux salaires minimums en vigueur dans les pays concernés. Dans ce cas, ils sont motivés par la saisie des opportunités de l'informalité qui se présentent à eux.

Au Cameroun, la question de l'informalité des petites entreprises est de plus en plus récurrente. Le choix est porté par la majorité des entrepreneurs sur les micros et les petites entreprises opérant essentiellement dans le secteur informel. Parmi les critères retenus pour définir les entreprises informelles, les plus couramment utilisés sont la taille de l'activité de l'entreprise, l'enregistrement auprès d'une organisation étatique et la tenue d'une comptabilité régulière (Baheke, 2016). On y retrouve des individus qui exercent de manière indépendante et à leur propre compte, ils produisent des biens et des services très proches des entreprises formelles à la seule différence que ces activités ne sont pas inscrites dans le système de fiscalité.

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Parmi ces entrepreneurs on distingue entre autres les commerçants, les artisans, les agriculteurs, les éleveurs (Bravo-Bouyssy, 2012). D'après la loi n° 2010/001 du 13 avril 2010 portant promotion des petites et moyennes entreprises (PME) au Cameroun, les entreprises sont classées sur le critère quantitatif à savoir le nombre de personnes employés, et les chiffres d'affaires que nous pouvons résumer sous forme de tableau

Tableau 3 : Critère de classification des entreprises au Cameroun

Type d'entreprise

Nombre d'employés

Chiffre d'affaire (hors taxe)

TPE

5 personnes maximum

= (15 000 000) quinze

millions de francs

PE

Entre (06) six et (20) vingt personnes

Entre (15) quinze et (100) cent millions de francs

Source : inspiré de Baheke (2016).

Le choix des entrepreneurs pour les micros et petites entreprises individuelles est plus contraint que volontaire. Ce choix est dû à l'existence de nombreuses barrières dans l'accès au crédit notamment formel (banques, microfinances). Dans les pays en développement, les barrières à l'accès au financement des activités entrepreneuriales font appels à d'autres sources de financement telles que l'épargne personnelle et les réseaux associatifs. Ils constituent généralement le principal moyen de démarrage des activités économiques (Zuin, 2004).

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2-3- L'accès au financement entrepreneurial

L'accès au crédit financier est indispensable pour tout individu désirant entreprendre une activité économique génératrice de bénéfices. Dans le but de booster l'insertion des jeunes et favoriser l'inclusion financière pour tous, l'Etat camerounais a fait de l'emploi depuis le début des années 2000 un axe majeur dans sa stratégie de développement et de lutte contre la pauvreté. Ceci s'est illustré à travers la mise sur pied d'une batterie d'acteurs institutionnels tels que le MINPMESSA, le MINJEC, le MINEPIA, le MINADER. Ces structures ayant pour but de former, d'encadrer et d'accorder des crédits aux potentiels entrepreneurs. Toutefois, ces initiatives n'ont pas réussi à promouvoir l'inclusion financière en faveurs de ces jeunes. Selon le PANEJ (2015) les difficultés d'accès au financement sont dues au manque général de produits financiers adaptés aux besoins des jeunes entrepreneurs, les taux d'intérêts, les coûts de transactions et les garanties exigées qui ne correspondent pas aux réalités sociales. Pour Edimo (1998) la recherche d'opportunité de financement par les entrepreneurs se concrétise à travers les réseaux sociaux (associations informelles de crédits, liens familiaux et amicaux) et les communautés d'appartenances. Ces réseaux constituent un déterminant essentiel du dynamisme des entrepreneurs informels tant dans les pays du nord que dans les pays du sud.

Au Cameroun, entrepreneurs informels s'orientent vers les réseaux associatifs de relations interpersonnelles fondés sous le prisme de l'économie sociale et solidaire. Il s'agit le plus souvent des systèmes de tontines qui permettent l'accès aux ressources financières (épargne, cotisation, emprunt) nécessaires à la mise en oeuvre des activités entrepreneuriales (Warnier, 1991). En guise d'illustration, un entrepreneur nous explique : « ce n'est pas facile de monter un dossier de financement pour aller voir l'Etat pour qu'on finance un projet. Non seulement ça met long alors qu'à la tontine c'est très facile vraiment ça booste nos activités, ça nous aide à nous réaliser nous-même et sa nous donne l'emploi » (entretien du 27décembre 2021 avec Aristide d'EMERCOM à Oyom-abang). Les propos de ce répondant témoignent donc l'importance des réseaux associatifs pour le financement des activités entrepreneuriales qui sont d'un apport non négligeable.

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3- LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES

Dans cette dernière section de notre chapitre, il est question pour nous de présenter l'apport du système tontinier dans les activités économiques des entrepreneurs. Pour se faire, il serait judicieux de commencer par une présentation des déterminants qui favorisent l'adhésion des entrepreneurs au système tontinier.

3-1-Les déterminants du recourt au système tontinier

De par la nature contraignante des structures formelles (banques, microfinances...) Dans l'accord des ressources financières, les entrepreneurs lors du démarrage ou de l'exercice de leur activité ont souvent recourt aux structures d'accompagnement informelles (Colleman, 2000). Pour Nkakleu (2001), l'accès difficile au financement formel et l'insuffisance des fonds propres poussent le plus souvent les entrepreneurs à recourir aux associations d'épargnes rotatives et de crédits (AERC). Basé sur la confiance, et l'entraide mutuelle, ces associations semblent donc plus appropriées pour l'accompagnement de la jeune entreprise. Bekolo-Ebe (1989) identifie les déterminants du recourt aux associations d'épargnes et de crédits informels à deux niveaux. D'une part, à travers le difficile accès aux sources de financement formel, notamment les lourdeurs dans les conditions de prêts qui tendent à marginaliser les couches sociales à faible revenus. L'exigence des garanties qui contribue considérablement à évincer les jeunes entrepreneurs et crée ainsi un complexe d'infériorité vis-à-vis des banques officielles. D'autre part, les facilités d'accès au crédit, l'absence de lourdeurs comme autres facteurs favorise le drainage des individus vers les associations rotatives d'épargne et de crédit qui promeut l'inclusion financière. Ce système est pour un de nos répondants un outil de financement simple et pratique :

Moi personnellement je pense que le système tontinier est encouragé, il joue un grand rôle surtout pour nous les jeunes qui nous cherchons qui nous battons. Le financement est de gré à gré il n'y a pas de longues procédures pour avoir de l'argent tout est basé sur la confiance (entretien du 04 janvier 2022 avec Gérôme d'EMERCOM au camp-Sonel).

Au-delà des facilités d'accès aux ressources financières, Brillet (2012) relève que la recherche du lien social, de la solidarité et du sentiment d'appartenance réciproque constituent également des facteurs qui poussent les individus dans l'adhésion aux réseaux tontiniers.

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3-1-1- L'apport du système tontinier aux activités économiques

Parmi les réseaux d'accompagnement informels (aide familiale, réseaux associatifs, prêt amical...) le phénomène tontinier apparait comme le système de financement le plus étudié depuis le début des années 90. Ce système a atteint aujourd'hui dans plusieurs pays du tiers-monde et plus particulièrement en Afrique des proportions exceptionnelles. Son importance est telle que la Banque mondiale (1989) s'est intéressée à ce phénomène dans un rapport portant sur le développement dans le monde. L'abondante littérature sur les tontines dans le monde s'accorde à justifier leur développement par l'existence de nombreuses barrières à l'accès au crédit formel. Cette situation a pour effet d'encourager certains acteurs informels à s'organiser par eux-mêmes, à travers la création des cercles de solidarité financière fondé sur l'incitation à l'épargne et la certitude d'obtenir un prêt.

Au Cameroun, le secteur informel occupe une place importante dans la création des richesses et des emplois, il regroupe près de 90% des camerounais. Certains entrepreneurs par manque de ressources financières nécessaires au développement de leur activité économique font souvent recours au système tontinier. Ils bénéficient ainsi d'un accompagnement aussi bien tangible (financier, matériel, humain) qu'intangible (savoir-faire, expérience, compétences) pour mieux gérer leur affaire (Djoumessi & al, 2017). En matière de promotion d'entrepreneuriat, ces associations sont d'une contribution non négligeable qui peut être analysé sur le plan financier et sur le plan relationnel.

v L'apport financier

En règle générale, le système tontinier offre des services financiers aux individus tels que l'épargne, les cotisations avec redistribution, les emprunts. Ces prestations financières leurs permettent ainsi de faire face à leur besoin de financement dans des activités qu'ils jugent rentables. À cet effet, Tello Rozas et Gauthier (2012 : 6) souligne que « les AECR constituent l'une des formes d'organisations les plus populaires pour financer les projets dans les pays où l'accès au crédit est restreint ».

v L'épargne

Les problèmes de financement sont l'une des principales difficultés des jeunes entrepreneurs en Afrique et au Cameroun. La tontine est un outil d'accumulation des capitaux à court ou à long terme. Elle oblige d'une certaine manière les individus à verser une somme à une date fixe dans le mois nécessaire au développement des activités économiques (CRDI, 2019). En effet, l'épargne et la possibilité d'obtenir un emprunt constituent généralement la

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première motivation d'adhésion aux associations tontinières. L'épargne permet aux individus membre de faire fructifier leurs revenus à travers des versements constants. Dans certaines associations, l'épargne génère des bénéfices non négligeables de par les intérêts qu'elle impose aux emprunteurs. Henri & al (1991) parlent de ce fait d'une épargne récupérable avec anticipation c'est-à-dire une épargne dont le membre peut entrer en possession à n'importe quel moment, lorsqu'une situation inattendue ou favorable se présente à lui. Dans le même sens, Djoumessi & al (2017) considèrent que le premier apport de l'association pour le financement est l'épargne. En effet, l'épargne avec bénéfice permet d'augmenter le capital d'investissement et le fonds de commerce de l'individu.

L'argent obtenu à l'issue de l'épargne permet donc très souvent aux individus concernés de faire des investissements productifs dans des activités diverses telles que le petit commerce, l'artisanat, l'agriculture, l'élevage... (Tombola, 2010). Ces capitaux permettent ainsi aux entrepreneurs de palier aux difficultés quotidiennes et de faire face aux imprévus au sein de leur activité génératrice de revenus (achat de matériel de travail, achat de biens productifs, achat des produits de vente...) (Kazadi et al, 2021). Elles favorisent ainsi pour Kamdem (2011) la rapidité d'intervention nécessaire au développement d'activités économiques des entreprises en phase de démarrage ou en cour de développement.

Le système tontinier se présente dès lors comme un outil d'accumulation des fonds via l'épargne nécessaire à l'investissement d'activités économiques rentables (Issoufou, 1992). Cela traduit ainsi toute l'importance et la nécessité de l'épargne tontinale comme roue de secours dans la gestion des petites entreprises. Comme l'explique (Besley & al, 1993 cités par Tello Rozas & Gauthier, 2012) les tontines sont des micro-banques qui contribuent à la survie et à la croissance des économies qui ont des restrictions d'accès aux sources bancaires formelles.

v L'emprunt

Pour Owondi (1992 : 670), « l'emprunt apparait comme l'élément nodal aux seins des regroupements tontiniers ». Il s'agit d'une prestation financière dont bénéficient les membres au sein d'un réseau financier. L'emprunt tout comme l'épargne constitue l'une des raisons d'adhésion des individus au système tontinier. Dans la tontine, l'emprunt est lié à l'épargne et l'obtention d'une cagnotte est soumise à une prime d'enchère dont le prêteur a l'obligation de fructifier. Ce système de prêt est l'apanage des tontines à enchère, ou l'ensemble des gains collectés sont soumis aux enchères et céder au plus offrant qui dispose du gros lot qui pourra lui permettre de résoudre des difficultés professionnelles. Nkakleu (2001) évoque de ce fait

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l'utilisation des services tontiniers tels que l'emprunt pour financer la création voire le développement de l'entreprise. De même Bekolo-Ebe (1989) explique que la tontine simple avec caisse de prêt permet à chaque membre de bénéficier d'un emprunt en situation de nécessité, remboursable avec des intérêts. Contrairement au système bancaire officiel les emprunts cédés aux individus dans les tontines n'imposent pas de coûts de transactions élevés ni des mises en gages. Ils sont surtout régis par la parole et l'honneur.

Pour Boutchang (2019), les tontines ont pour but principal d'octroyer des crédits à leurs membres. Le système tontinier apparait ainsi comme une sorte de banque de crédit permettant l'allocation de ressources financières aux individus. Il permet ainsi d'apporter des solutions aux problèmes de financement dont font faces les entrepreneurs en phase de démarrage. Grâce à son système de prêt, la tontine favorise l'inclusion financière, qui à son tour favorise le financement des activités économiques et booste la dynamique entrepreneuriale. De plus grâce à l'absence de formalisme et de conditions strictes dans l'octroi des crédits, les entrepreneurs peuvent emprunter pour financer le démarrage ou le fonctionnement de leurs entreprises. Djoumessi & al (2017 : 32) soutiennent à cet effet que « le premier apport de l'association pour le financement est l'épargne, l'augmentation du capital et du fonds de commerce, ensuite il s'agit des facilités d'emprunt ». Dans certaines tontines, un membre de l'association peut présenter son projet à financer à l'association. L'association le discute et si elle accepte, une caisse spéciale pour le projet de la personne en question est créée et un prêt lui est accordé (Creusot, 1999).

La contribution du système tontinier dans le développement des activités économiques va au-delà de la valeur financière. Ce système favorise également une forme d'entraide basée sur le partage des savoirs faires et des compétences nécessaires au développement des performances entrepreneuriales (aider, former, enseigner, conseiller...) (Paul, 2009).

v L'apport relationnel

Au-delà de leurs valeurs principalement financières, les systèmes tontiniers sont également des cercles d'apprentissages. Il s'agit plus explicitement des associations où les membres peuvent changer des connaissances sur leurs affaires, partager des idées, transmettre des conseils bénéfiques à tous. Cette forme de solidarité permet aux uns et aux autres d'améliorer les rendements ou la croissance de leur activité. Ils sont pour ainsi dire des réseaux d'accompagnement symbolique ou chacun peut bénéficier des savoirs faires des autres.

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3-1-2- Le concept d'accompagnement en entrepreneuriat

Parmi les pratiques d'aide à la création des entreprises, l'accompagnement est souvent présenté comme quelque chose de singulier à travers les idées qu'il véhicule et des représentations qui en découlent (Sammut, 2015). Le terme accompagnement est l'apanage des structures et programmes d'aide à la création d'entreprise. Pourtant ce concept ne se limite pas seulement au niveau administratif, il regroupe une multitude d'acteurs et d'organisations qui interviennent dans le processus entrepreneurial. La notion d'accompagnement renvoie donc à un ensemble d'appuis à la création ou à la gestion de l'entreprise, de façon symbolique ou pas, de façon ponctuelle ou tout au long du processus entrepreneurial (Moskolai et Myede, 2017).

L'accompagnement est aussi spécifique à la jeunesse de l'entreprise (création et/ou démarrage).

L'accompagnement se présente ainsi comme une pratique d'aide à la création d'entreprise fondée sur une relation qui s'établit dans la durée et qui n'est pas ponctuelle, entre un entrepreneur et un individu externe au projet de création. A travers cette relation, l'entrepreneur va réaliser des apprentissages multiples et va pouvoir accéder à des ressources ou développer des compétences utiles à la concrétisation de son projet (Cuzin et Fayolle, 2004 : 3).

Au cours du processus d'accompagnement, les expériences partagées, les connaissances acquises permettent au créateur de s'engager dans un cheminement plus ou moins repensé par rapport à la trajectoire originelle. Pour Shane et Venkataraman (2000), l'accompagnement provient de l'ensemble des liens externes que l'entrepreneur tisse pour identifier et développer son opportunité d'affaire. Ainsi, être accompagné ce n'est pas seulement faire appel à un spécialiste de l'accompagnement mais aussi avoir recourt à un réseau d'individus et d'organisations qui place en premier plan l'aspect interpersonnel dans la relation sociale qui les unis. Ici le réseau de l'individu joue un premier rôle en termes de découverte d'opportunité et d'accès aux ressources (financières, matérielles) nécessaire au développement de son entreprise. L'accompagnement consiste le plus souvent à former, conseiller, aider le nouvel entrepreneur afin de lui faire acquérir des compétences et le rendre autonome (Sammut, 2015)

Dans le cadre des AERC, un membre qui détient des connaissances ou une expérience pratique dans un domaine d'investissement particulier peut servir de coach aux novices. Ainsi ceux qui désirent se lancer peuvent solliciter son expertise afin d'acquérir des compétences et des savoir-faire nécessaires au démarrage ou à la gestion de leurs activités entrepreneuriales. Il s'agit le plus souvent d'un soutient physique et technique concernant la gestion de l'activité. Les connaissances transmises par les uns et les autres permettent aux entrepreneurs d'acquérir

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de l'expertise utile dans l'impulsion de leurs dynamiques entrepreneuriales. Comme le soulignent Djoumessi et al, (2017), les structures d'accompagnement informelles offrent à l'entrepreneur un accompagnement à la fois financier, matériel et technique pour l'aider à réussir.

En somme, ces regroupements sont également des cercles d'entraide relationnelle. Ils sont fondés sur le partage des expériences, de savoir-faire, de conseils, et d'enseignement, entre membres. Cette forme d'accompagnement ne nécessite pas de moyens financiers ni une très grande expertise en entrepreneuriat, mais davantage un esprit de solidarité et de confiance entre les membres. Il faut dire que, l'expertise et les connaissances acquises par les membres à travers leurs anciennetés dans leur secteur d'activité peuvent être mises au service de l'intérêt général. Un membre ayant réussi en entrepreneuriat peut servir de mentor ou de coach pour les nouveaux entrepreneurs. Ils pourront ainsi bénéficier de ses conseils, de son expérience pour mieux développer leurs activités entrepreneuriales.

De tout ce qui précède, il ressort que la contribution du système tontinier aux activités économiques est de nature financière (épargne, les cotisations, emprunt), à laquelle on retrouve une aide relationnelle (coaching, conseil, aide, formation). Nous pouvons donc résumer ces contributions dans le tableau suivant :

Tableau 4 : Illustration des différents types contributions du système tontinier aux activités économiques.

Types de contributions

Composantes

Effets

Apport financier

Épargne, emprunt,

cotisation (mensuelle,

hebdomadaire),

Accès aux ressources

financières, Financement des
activités, création des richesses

Apport relationnel

Conseils, formations, aides, enseignement, suivie

Amélioration des performances

entrepreneuriales, découvertes

d'opportunités d'affaires,

création des réseaux de
partenariat

Source : Enquêtes du terrain.

Il est indéniable de constater que le système tontinier joue un rôle important dans le développement des activités économiques. Il permet d'apporter un début de solution aux problèmes de financement dont font faces les entrepreneurs à faible revenu. Mais également il

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contribue à garantir la survie et la croissance des petites entreprises au quotidien. Par ailleurs, il favorise l'apprentissage et l'entraide mutuelle nécessaire au développement de la dynamique entrepreneuriale des micros entreprises. Ces différentes contributions du système tontinier dans le développement des activités entrepreneuriales feront l'objet d'une analyse dans la seconde partie de ce travail à partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS.

DEUXIÈME PARTIE :

LA DYNAMIQUE FINANCIÈRE DU

SYSTÈME TONTINIER

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La première partie du travail, s'est attelée à présenter la sociogenèse et l'émergence du système tontinier, une présentation qui retraçait les parcours historiques et la propagation des tontines dans le monde. Elle a également essayé de ressortir la contribution de ce phénomène dans le développement des activités économique des entrepreneurs en contexte camerounais. La seconde partie du travail se propose donc d'entrer au coeur du fonctionnement de ces associations afin de mieux saisir la dynamique financière qui s'y opère, à partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS. Pour ce faire, elle se structure autour de deux chapitres, le chapitre 3 porte sur les mécanismes de financement des activités entrepreneuriales au sein des associations EMERCOM et ADJAS. Le chapitre 4 pour sa part propose une analyse et une évaluation de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS au développement de l'entrepreneuriat pastoral

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CHAPITRE 3 :

LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES
ACTIVITÉS ENTREPRENEURIALES AU SEIN
DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS

Le système tontinier a pris de l'ampleur dans le monde et particulièrement en Afrique depuis le début des années 50 (Bascom, 1952). Son importance dans le développement des petites économies informelles n'est plus à démonter, ceci s'illustre à travers la nombreuse littérature qui existe sur le phénomène des tontines dans le monde. Partant de l'Asie à l'Afrique en passant par l'Europe, la littérature révèle qu'il existe une pluralité de formes de tontines (Lelart, 1990). Particulièrement en Afrique, les populations de plus en plus conscientes de l'importance de ces systèmes, en ont fait un centre d'intérêt à travers des regroupements associatifs pour résoudre certains problèmes de la vie quotidienne. En effet, à travers ces cercles de solidarité financière, ils s'entraident, s'assistent et partagent un certain nombre de connaissances et d'expériences nécessaires au développement de leurs activités économiques.

Dans la ville de Yaoundé, il existe une pluralité de formes d'associations (religieuses, professionnelles, tribales, familiales, amicales) au sein desquelles on retrouve des jeunes en situation d'exercice d'une activité économique. Dans le cadre de ce travail de recherche, l'intérêt a été porté sur le cas de deux associations. Il s'agit de l'association EMERCOM qui est composée d'anciens camarades de lycée et l'association ADJAS qui est un regroupement de jeunes amis et voisins de quartiers proches.

Ce chapitre se propose donc à partir de ces deux associations et à partir de la théorie du don/contre-don, d'étudier leur mode de fonctionnement et les mécanismes de financement des activités pastorales par les jeunes entrepreneurs. Pour ce faire, il est question dans la section I de faire une présentation respective de ces associations. Ensuite dans la section II il sera question d'analyser les mécanismes de financement et enfin, d'étudier les actions mises sur pieds par ces associations pour encourager la dynamique entrepreneuriale des membres.

16 Confère Marcel MAUSS dans son ouvrage publié en 1923 dans lequel il remonte aux origines, aux formes et aux raisons des échanges dans les sociétés traditionnelles d'autres fois.

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1. PRÉSENTATION ET MODE DE FONCTIONNEMENT DES

ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS

Le fonctionnement du système tontinier aujourd'hui est régit sur le principe du don/contre-don réciproque16. En effet, dans une association, l'argent attribué à un membre à l'issue d'une cotisation n'est pas gratuit, il s'agit d'une dette que ce dernier devra rembourser en cotisant à son tour pour qu'un autre membre puisse en bénéficier. C'est la notion de dette obligatoire, vecteur de lien social, qui relie entre eux les membres de la tontine. L'obligation de payer sa cotisation dans une tontine l'emporte sur toutes les autres obligations. C'est surtout l'obligation de donner, recevoir et rendre, souligné par Mauss qui est à l'oeuvre dans les tontines. Ainsi chaque cotisation est perçue comme un don/contre-don. Lorsqu'un membre fait défaut à cette obligation, il peut être exclu des échanges économiques et symboliques.

1-1- L'association EMERCOM

EMERCOM est une association de solidarité constituée de jeunes communicateurs d'où le nom EMERCOM qui désigne « émergence des communicateurs », elle a pour devise : « discipline, dynamisme, détermination ». Cette association a vu le jour en 2012, elle a été mise sur pied par un groupe de jeunes lauréats au Baccalauréat du lycée d'Essos et de Nkolbisson à Yaoundé, qui soucieux de préserver leurs liens ont décidé de se mettre en Association. Comme le dit le président d'EMERCOM : « Étant donné qu'après le Bacc chacun prend sa route, certains partent à l'université, d'autres partent dans les écoles de formation parfois d'autres se perdent » (entretien du 30 décembre 2021 à Oyom-abang), ils ont jugé nécessaire de garder les contacts après le lycée, question de ne pas se perdre de vue. Mais il était également question pour eux d'entreprendre quelque chose afin de progresser ensemble. Avec les années, l'association s'est agrandie et au fur et à mesure elle s'est ouverte à d'autres catégories de jeunes individus.

1-1-1- Objectif de l'association EMERCOM

EMERCOM est une association qui a pour objectif global de rassembler les jeunes de sexe masculin comme féminin autour d'un idéal commun à savoir le partage, la solidarité, l'entraide et le vivre ensemble. Le statut de l'association stipule « EMERCOM est une

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association apolitique à but non lucrative » (article 2). Elle a plusieurs objectifs spécifiques à savoir :

Ø Préserver et consolider les valeurs de l'association ;

Ø Préserver et consolider l'amitié et l'entraide de tous les membres ;

Ø Susciter un esprit de développement et d'entrepreneuriat chez les jeunes en général et communicateurs en particulier ;

Ø Susciter l'idée l'initiative des jeunes ;

Ø Renforcer l'esprit de charité et cohésion du groupe ;

Ø Assister tous les membres physiquement, moralement et financièrement.

Tous ces objectifs énumérés ci-haut témoignent de la volonté du groupe EMERCOM de consolider le lien social, mais également de cultiver un esprit solidarité et d'assistance collective entre membres.

1-1-2- Le cadre légal

Comme nous l'avons vu dans le premier chapitre du travail, les associations au Cameroun sont régies dans le cadre de deux lois qui fixent leur statut et leur mode de fonctionnement. La première qui est la plus ancienne fait référence à la loi N°90/053 du 19 décembre 1990 portant sur la liberté d'association. Dans ce sens, l'association EMERCOM obéit au régime de la déclaration faisant référence à la liberté pour toute personne physique de créer une association apolitique à toutes fins utiles.

L'association EMERCOM est ainsi légalisée et reconnu par les autorités administratives à travers le récépissé N°167/RDA/JO6/SAAJP/BAPP du 07 septembre 2019.

Elle est également régie par la nouvelle loi N°2021/026 portant loi de finances de la république du Cameroun pour l'exercice 2022. Dans le cadre de cette loi, l'association EMERCOM est appelé à verser une certaine somme trimestriellement représentant les frais de taxe auprès de l'institution au sein de laquelle elle a été légalisée. À cet effet le président de l'association déclare que : « nous sommes une association légalisée nous sommes reconnus et avec la nouvelle loi des finances là, nous allons faire l'effort de payer nos taxes » (entretien du 30 décembre 2021 à Oyom-abang).

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1-1-3- L'organisation structurelle

L'organisation du groupe EMERCOM est inspirée du modèle classique des associations

à buts non lucratifs. Elle est structurée de manière verticale c'est-à-dire au-dessus nous avons le comité de direction ou bureau exécutif et en bas les membres constitutifs ou assemblée générale. Le bureau est constitué de 8 membres dont chacun a une tache précise, régi par le statut de l'association allant de l'article 14 à l'article 22.

Ø Le président : il est considéré comme le symbole de l'association qui dispose d'un droit de regard sur la conduite et la gestion de l'association. Il a pour tâche d'assurer la coordination du bureau, d'ordonner les dépenses, veiller à l'exécution des décisions de l'AG et des dispositifs du règlement, veiller à l'exécution des projets et programmes, présider les travaux en assemblée générale.

Ø Le vice-président : il assiste le président et le supplée de plein droit en cas d'empêchement dument constaté. Il a pour rôle de veiller à la promotion de l'image et de la notoriété tant sur le plan interne qu'externe de l'association, il s'occupe de la coordination des activités et réunions de l'assemblée générale.

Ø Le secrétaire général : il est le responsable des documents de l'association (statut, registre, règlement intérieur). Il a pour rôle d'assurer la rédaction des rapports, communiqués, des comptes rendus des réunions, des convocations et invitations adressées aux membres et observateurs, veille à l'exécution des décisions adoptées par le bureau, assure de manière générale les autres fonctions qui peuvent lui être déléguée par le président.

Ø Le secrétaire générale adjoint : il est le collaborateur du secrétaire général qu'il assiste dans ses fonctions. Il peut de manière générale assurer les autres fonctions qui pourraient lui être déléguée par ce dernier.

Ø Le trésorier : il est le garant des finances de l'association il a pour mission de garder les documents financiers. Par ailleurs, il arrête les comptes financiers et dresse le bilan financier annuel de l'association, il reçoit les fonds collectés à la réunion, les aides, le financement, il met les documents financiers et comptables à disposition du commissaire au compte.

Ø Le commissaire aux comptes : il veille à la transparence financière de l'association. Il a pour mission de gérer la gestion des fonds de l'association, il approuve et certifie la régularité de la gestion du compte.

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Ø Le censeur : il assure le respect du règlement de l'association lors des séances. Il a pour tâche de sanctionner les irrégularités à travers les amendes.

Ø Le chargé de la communication : il est chargé des annonces et des communiqués. C'est pourquoi il est tenu d'informer les membres de l'association sur tous évènements à venir engageant un membre de l'association ou toute l'association proprement dite. Les communications peuvent aussi se faire via les groupes WhatsApp.

Par ailleurs, tous les membres du bureau ont un mandat de 02ans rééligible par toute l'assemblée nationale en fin de mandat. Pour être membre du bureau, le statut précise que « seul les membres régulièrement inscrit et ayant leur caisse de secours à jours peuvent participer à ces élections » (article 24).

1-1-4- Les activités entrepreneuriales des membres

L'association EMERCOM est constituée de 20membres des jeunes hommes et femmes venant de divers groupes ethniques et religieux. Ils sont âgés entre 25 et 35 ans, avec un niveau scolaire relativement élevé. On y retrouve diverses couches sociales notamment des jeunes qui exercent dans la fonction publique, elle comprend également des individus qui travaillent à leurs propres comptes dans les domaines tels que la vente d'accessoires, la vente des produits de consommation), et une bonne partie dans l'élevage principalement l'élevage des volailles. De plus, certains salariés exercent des activités informelles parallèles en vue de combler les insatisfactions de la vie quotidienne. C'est le cas du président général qui travaille dans une entreprise privée en qualité de téléconseiller et qui pratique également une activité entrepreneuriale à l'instar de l'élevage.

1-1-5- Les réunions

Le siège de l'association se trouve à Yaoundé. Les membres se réunissent en assemblée générale ordinaire tous les 1ers dimanches de chaque mois dans une tenue uniforme. Les réunions se font de manière rotative allant du président aux simples membres, ainsi chacun reçoit l'assemblée sauf en cas d'empêchement d'un membre qui cède son tour au prochain. Pour ce qui est des réunions extraordinaires, les membres du bureau se réunissent chaque fois qu'elle est convoquée par son président, ou sur la décision de la moitié de ses membres en vue de résoudre un problème particulier.

Les réunions sont également des moments où avant le début de la séance, les membres discutent entre eux, ils exposent leurs problèmes d'ordres familiaux, ou professionnels pour

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obtenir les conseils des autres. De même, c'est l'occasion pour les membres d'exposer les soucis qu'ils rencontrent dans la gestion de leur affaire pour obtenir le soutien de l'association. Ils partagent des informations qui peuvent être utiles aux membres, ils discutent des débats sur l'actualité du pays, se font des intrigues entre membres question de détendre l'atmosphère et provoquer la bonne humeur générale.

1-1-6- Les opérations financières

Tous les membres de l'association sont d'office membres de la tontine à EMERCOM. Les opérations et transactions financières de l'association (cotisation, épargne, emprunt) se font lors des séances de réunions ordinaires. Le statut prévoit que : « les ressources d'EMERCOM proviennent essentiellement des cotisations de ses membres et de toutes ressources autorisées par la loi » (article 9). Les cotisations des membres se font mensuellement lors des assemblées, elles sont d'un montant de 5000Fcfa par membre. Concernant les opérations d'épargnes, elles se déroulent également lors des séances et commence à partir de 500Fcfa, elles sont remises aux souscripteurs avec intérêt en fin d'année. Toutefois si le membre rencontre une difficulté, l'association peut lui rembourser le capital épargné et soustraire les bénéfices cumulés. Mais il est à noter que cette épargne est essentiellement facultative.

Les opérations d'emprunt quant à elles concernent uniquement les membres régulièrement inscrits et à jour dans leur cotisation. Les emprunts s'étendent sur une période de 03 à 06 mois, le souscripteur lors du remboursement de sa dette a l'obligation de payer un intérêt de 10%, en fonction du taux d'argent emprunté. Comme autre activité financière, l'association dispose des caisses de secours vouées à l'assistance des membres. Elle est fixée à un montant de 12 milles francs/ an pour tous les membres. Enfin, la dernière activité financière concerne les inscriptions dont « les frais d'inscription à EMERCOM s'élève à 1000Fcfa pour les anciens et 2000Fcfa pour les nouveaux » (article 8 du règlement intérieur de l'association).

1-1-7- Les autres activités de l'association

En dehors des réunions mensuelles et des activités financières, l'association exerce d'autres activités bénéfiques à l'ensemble des membres. Il s'agit entre autres :

Ø Des activités de formations entre membres. Dans l'optique de satisfaire un de ses objectifs portant sur la nécessité de susciter un esprit de développement et d'entrepreneuriat chez les jeunes, l'association participe à de nombreux petits séminaires de formation. Il s'agit notamment des séminaires dans l'agro-pastoral, dans

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l'artisanat et dans les métiers de l'art ne nécessitant pas de gros moyens financiers pour démarrer son activité. À juste titre, un éleveur de volaille de l'association soutient que : « nous bénéficions régulièrement des séminaires de formation, ou lorsqu'un membre a appris, il ne manque pas de venir nous exposer cela en association afin que nous puissions bénéficier de cela » (entretien du 27decembre 2021 avec Christophe à Ekorezock). Ainsi, chacun peut bénéficier de l'expertise et des connaissances des uns et des autres.

Ø Des activités à vocation sociale. L'association organise chaque année des remises de dons dans les orphelinats de la place à Yaoundé, dans le but de participer au développement à leur modeste manière.

Ø Des activités sportives et des ballades d'excursion, pour davantage rapprocher les membres et renforcer la cohésion du groupe.

1-1-8- L'assistance

Selon l'article 3 du règlement intérieur d'EMERCOM, tous les membres inscrits et réguliers aux cotisations exigibles jouissent de tous les avantages prévus en matière d'aide et d'assistance. Lors des évènements heureux (mariage, baptême, promotion) et malheureux (décès, accident, maladie), ils bénéficient des aides de nature financière et physique de l'association.

1-2- L'association ADJAS

ADJAS est une association constituée de jeunes amis, voisins, camarades et connaissances de quartiers proches. Elle désigne : « Association des jeunes amis solidaires ». Cette association a vu le jour en 2018, par un groupe de jeunes amis et voisins éleveurs proches résidant Yaoundé. Afin de préserver leurs liens d'amitié et promouvoir leurs activités ils ont décidé de se regrouper en association afin de mieux s'entraider les uns les autres au quotidien.

1-2-1- L'objectif de l'association ADJAS

Au vu de la réalité sociale et du contexte économique peut favorable, « l'association est chargée de promouvoir l'entraide et le développement des membres » (article 4). Il s'agit plus précisément :

Ø S'assister financièrement et matériellement dans développement des activités des membres ;

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Ø Favoriser le développement collectif du groupe ;

Ø Encourager l'esprit d'entraide et de création entre membres ;

Ø Se soutenir financièrement et moralement lors des évènements heureux comme malheureux.

1-2-2- Le cadre légal

ADJAS est une association apolitique et à but non lucratif complètement coupé de tout lien avec le système administratif. Les membres ont jugé nécessaire de légaliser l'association quand elle sera plus grande. À ce sujet, le vice-président de l'association explique que : « nous sommes encore une petite association et on n'a pas encore suffisamment les ressources. Mais avec le temps quand l'association va s'agrandir on va la légaliser » (entretien du 31janvier 2022 avec Luc à Mvog-beti).

1-2-3- L'organisation structurelle

L'association est composée d'un bureau exécutif constitué de 05membres élus pour un mandat de deux ans. Le bureau représente l'instance dirigeante de l'association, l'association comprend ainsi :

Ø Un président : selon l'article 11 du règlement, il est chargé de présider les réunions du bureau et les assemblées générales, il convoque les séances de réunion ordinaire et extraordinaire et peut nommer un président de séance. Par ailleurs, il s'assure du bon fonctionnement de l'association dans son ensemble.

Ø Le vice-président : selon l'article 12 du règlement intérieur est chargé d'épauler le président dans ses tâches. Il peut également présider une séance en cas d'empêchement du président.

Ø Le secrétaire général : selon l'article 13 du règlement intérieur, il a pour rôle d'établir l'ordre du jour de réunion sur instruction du président, il ordonne sur instruction du président les recettes et les dépenses et enfin garde les documents de l'association.

Ø Le trésorier : selon l'article 14, il est le dépositaire des fonds de l'association et est chargé de dresser le bilan des mouvements des fonds de l'association chaque fin d'années.

Ø Le censeur : selon l'article 15, il a pour rôle de veiller à la discipline conformément aux dispositions prévues par le règlement.

Par ailleurs, l'assemblée générale est constituée de tous les autres membres de l'association.

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1-2-4- Les activités entrepreneuriales des membres

ADJAS est une association de douze membres constituée essentiellement d'individus qui exercent dans le domaine pastoral. Il s'agit plus précisément de jeunes âgés entre 27 et 33 ans qui pratiquent l'élevage des porcins dans une dynamique entrepreneuriale. Pour ce qui est de la taille des entreprises, ils sont en majorité de petites et moyennes tailles dont la famille constitue parfois la main d'oeuvre dans la gestion quotidienne. Olivier un éleveur de l'association avoue se faire aider de temps en temps par sa famille en cas de déplacement ou d'occupation : « j'ai l'avantage de compter sur l'aide de ma femme et de mon garçon pour prendre soin de mes porcs lorsque parfois je dois m'absenter » (entretien du 04 février 2022 à Vietnam). Pour d'autres éleveurs encore, le choix porté sur les petites entreprises se justifie par l'insuffisance des ressources nécessaires à la gestion de l'activité. Un entrepreneur de l'association explique cela lorsqu'il affirme que :

Je fais plus dans un élevage moyen, on ne peut pas dire grand parce qu'on dit moyens, faire à son niveau oh. Ce qui est à son niveau ce que tu peux te battre pour pouvoir gérer parce que l'élevage vraiment je vois il faut aussi avoir beaucoup de moyens. Bien sûr on commence un peu pour devenir grand (propos recueillis le 25 janvier 2022 avec Mitterrand à Manga).

1-2-5- Les réunions

L'assemblée générale se réunie tous les premiers samedis de chaque mois à partir de 15h 00 au domicile du président au quartier Camps Sonel (Yaoundé). Les réunions se font en tenu uniforme obligatoire pour tous les membres. Le statut de l'association prévoit que : « l'absence non justifié a une réunion de l'assemblée générale est puni par 500F (sauf en cas de maladie, voyage) » (article 21, alinéa 1). Avant le début de la séance, les membres ont une heure de temps pour discuter parler de leurs activités, exposer leurs problèmes, donner les nouvelles du mois et ainsi solliciter l'aide ou les conseils des autres. Les réunions sont présidées par les membres du bureau, elles concernent les activités de l'association et des opérations de crédits.

1-2-6- Les opérations financières

Toutes les opérations de collecte et de redistribution des fonds au sein de l'association ADJAS se font lors des assemblées générales. De ce fait « La tontine est obligatoire pour tous les membres de l'association » (article 4 alinéa 1). Les cotisations sont d'un montant de 4000F obligatoire pour tous les membres et dont le montant final est attribué aux membres

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bénéficiaires par un procédé de tirage au sort. Il existe également au sein de l'association une autre cotisation facultative qui est d'un montant de 10milles francs. Pour les nouveaux adhérents, les frais d'inscriptions s'élèvent à 1000F plus une somme de 15milles francs représentant les frais de secours. En dehors des cotisations mensuelles, l'association comprend d'autres activités financières telles que :

Ø L'épargne : l'association dispose d'une caisse d'épargne facultative, chaque membre peut effectuer un dépôt en fonction de ses revenus. Le montant minimal du dépôt est fixé à la somme 500Fcfa. Ces caisses sont redistribuées aux membres ayant souscrit en fin d'année au mois de décembre lors de la cassation, avec le total des intérêts accumulés qui représente les bénéfices.

Ø La caisse de prêts : elle fonctionne à partir des épargnes des membres, en effet l'association dispose d'une caisse d'épargne dans laquelle les membres empruntent de l'argent. Pour la durée de remboursement, elle varie de 1 à 3 mois avec des intérêts qui varient en fonction du nombre de mois souhaité. Comme l'explique le trésorier :

Le taux d'intérêt est de 5% ça veut dire que si par exemple tu prêtes 10milles ça fait 10500F.Maintenant si tu prêtes ces même 10milles pour 2mois ça fait 11milles francs donc l'intérêt double en fonction du nombre de mois mais ça ne dépasse pas 3mois » (Entretien du 07 février avec pierre à Eloumdem)

1-2-7- L'assistance

L'assistance au sein de l'association ADJAS est couverte par la caisse de secours imposée à tous les membres dès leur adhésion. Elle s'élève à 15milles francs par membre et peut être modifiée par l'assemblée générale sous proposition du bureau exécutif. Ces sommes sont ainsi allouées à tout membre pour les épaulés lors d'un évènement heureux comme malheureux. Comme l'indique le règlement intérieur de l'association : « si un membre de l'association perd un proche direct parent ou frère, l'association soustrait un montant dans le secours de tout le monde et on donne au membre endeuillé pour l'aider dans l'organisation des obsèques » (entretien du 10 février avec le secrétaire général Joël à Mongoname).

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2- LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES ACTIVITÉS PASTORALES PAR LES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS

Les opérations de crédits au sein des associations à caractères tontinières sont centrées autour de plusieurs points dont les principaux points sont : les cotisations mensuelles, les opérations d'épargne et les opérations d'emprunt. Ces opérations financières reposent donc sur une triple obligation (donner, recevoir et rendre), il s'agit d'un processus dans lequel la somme octroyée au donataire fait de celui-ci un obligé tenu de rembourser sa dette avec un minimum de plus-value en retour aux donateurs (Servet, 1990). En effet, l'argent obtenu à l'issue d'une collecte ou d'un emprunt n'est pas gratuit, il s'agit d'un argent remboursable dans des délais précis. Dans ce sens, on peut donc entendre des phrases telle que : « quand tu as une difficulté, tu viens, tu expliques ton problème l'association te donne un peu d'argent et à une période déterminée il doit maintenant rembourser son don » (propos recueillis le 13fevrier 2022 avec la trésorière d'Emercom à Komkana) ; ou encore : « comme tu as pris l'argent ça ta aider il faut aussi remettre pour que ça continue le travail. Donc c'est un peu ça la chose » (entretien du 16 février 2022 avec le secrétaire général d'ADJAS à la montée Irad). Les propos de ces deux répondants témoignent tout simplement du principe fondamental du système tontinier qui est celui du donnant-donné. Autrement dit, l'individu qui emprunte sait à l'avance qu'il devra rembourser afin que ça puisse aider les autres en retour au sein du groupe.

2-1- Les mécanismes de financement des activités pastorales à EMERCOM

L'association EMERCOM est constituée de 10 membres qui exercent dans l'entrepreneuriat pastoral donc 8 garçons et 2 filles. Il s'agit de l'élevage de la volaille notamment les poules de fermes dont certains exercent sur de petits espaces et d'autres à grande échelle. Certains membres de l'association l'exercent comme principale activité économique et vivent de cette pratique au quotidien. C'est le cas de Faustin un éleveur qui soutient : « je fais dans l'élevage depuis 4ans et grâce à ma manière de gérer, je ne me prends pas pour un grand spécialiste hein ! Mais je vis grâce à ça au quotidien » (entretien du 28 janvier 2022 avec Faustin au marché Mokolo). D'autres le font dans le but de combler les insatisfactions professionnelles et les charges de famille à l'instar du président de l'association qui soutient :

Qu'avec la situation économique déjà actuelle qui n'est pas du tout facile
de joindre les deux bouts. Parce que justement ce que tu peux avoir sur le

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plan professionnel parfois est insuffisant vu la conjoncture économique même déjà actuelle, et les charges qui ne sont pas du tout évident » (propos

recueillis le 30 décembre 2021 à Oyom-abang).

Dans le but de mieux gérer leurs activités, les interviewés affirment avoir recourt à plusieurs moyens de financement au sein de l'association. Les résultats de nos entretiens font ressortir plusieurs modes de financement qu'on peut regrouper en quatre principaux points.

2-1-1- La cotisation mensuelle

Les cotisations à EMERCOM se déroulent mensuellement à hauteur de 5000F par membre. Les modes d'attributions des gains sont fixés à l'avance selon le calendrier annuel et les montants sont divisés en 2 ou 3. Les bénéficiaires de la séance ont l'obligation lors de la prochaine assemblée de rendre leur don en cotisant pour que les prochains membres puissent aussi bénéficier à leur tour. Les montants obtenus permettent aux entrepreneurs bénéficiaires d'anticiper la gestion leur activité. Les propos d'un enquêté en sont la preuve : « parfois quand je bouffe mon tour comme ça, j'achète encore les poussins en fonction du nombre qui reste dans le poulailler. Là ça me permet aussi d'éviter la rupture » (propos recueillis le 30 janvier 2022avec Christophe à Ekorezock). D'autres l'utilisent pour rembourser les dettes liées à la gestion de leur entreprise. Ce faisant, Jules un entrepreneur révèle que : « la dernière fois que j'ai bouffé la tontine, j'ai remboursé ma dette chez mon livreur de provende » (entretien du 22 janvier avec au Carrefour Mecc.). Les cotisations mensuelles sont donc le premier mécanisme de financement des éleveurs à EMERCOM, elles permettent comme le soutient les enquêtés, d'avoir de manière périodique une somme considérable pour pouvoir résoudre certains problèmes liés à la gestion de leur activité.

2-1-2- L'épargne

Tout comme la cotisation, l'épargne tontinale constitue un capital financier nécessaire dans le financement des entrepreneurs. En regroupant des agents économiques dont l'épargne individuelle est modeste, la tontine collecte d'importantes encaisses au bénéfice de ses membres (Edimo, 1998).

L'association EMERCOM dispose d'une caisse d'épargne qui est constituée des dépôts des épargnants. Il n'y a pas de montant fixe chacun dépose en fonction de sa capacité financière toutefois le montant minimal est fixé à 500F. Lors des assemblées pendant les opérations financières, la trésorière ouvre le cahier des épargnes et chaque membre qui désire épargner une quelconque somme se désigne et la trésorière pointe le nom et le montant épargné dans le

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registre. Les totaux des montants obtenus à l'issue d'une période d'épargne constituent des moyens de financement auxquels ont recours certains entrepreneurs de l'association. Un éleveur explique de ce fait avoir démarré son activité grâce à l'épargne cumulée dans la tontine :

J'avais en tête d'ouvrir mon petit élevage alors j'ai épargné sur une longue période dans la tontine oui. Ce que ça m'a donné plus les bénéfices m'a permis d'acheter les poussins et la provende et quelques petits autres trucs nécessaires pour commencer » (entretien du 04 janvier 2022 au Camps-sonel).

D'autres adhérents utilisent leur épargne pour fructifier leur activité. Aristide un entrepreneur éleveur affirme : « la tontine a augmenté mon budget ce qui m'a permis d'agrandir ma volaille. Avec les bénéfices rencontrés, j'ai multiplié les épargnes dans la tontine et j'ai pu avoir ce que vous voyez aujourd'hui » (entretien du 27 décembre 2021 avec à Oyom-abang).

Les propos de ces deux entrepreneurs témoignent du rôle de l'épargne dans une activité entrepreneuriale. Non seulement elle permet l'accumulation des capitaux utiles au démarrage d'une activité, mais également elle permet de booster la croissance de par les montants et les bénéfices cumulés.

2-1-3-L'emprunt

Afin de favoriser l'accès aux ressources financières de manière permanente, l'association EMERCOM dispose d'une caisse de prêt qui provient des épargnes des membres. Les entrepreneurs du secteur pastoral expliquent avoir recourt à l'emprunt dans la caisse d'épargne pour le financement de leur affaire. Le prêt est accordé à condition bien sûr de savoir rendre le don emprunté avec un intérêt de 10% sur une période pouvant aller de 3mois à 6 mois. À propos de la place du prêt dans l'entrepreneuriat, le président de l'association explique que :

Une tontine, si tu lance dans un entrepreneuriat tu ne peux justement pas

t'en sortir sans toutes fois bénéficier d'un prêt. Parce que quand tu fais

face à une situation qu'il faut résoudre à l'instant T, tu n'as pas de moyens

la tontine a une caisse pour pouvoir résoudre le cas précis à l'instant.

C'est le moyen illustrateur même accompagnateur de la tontine » (propos

recueillis le 30 décembre 2021 à Oyom-Abang).

Les propos de cet entrepreneur relèvent tout simplement le bien fondé du prêt en association. Cette forme de financement constitue un élément important dont bénéficient tous les éleveurs de l'association EMERCOM en période de difficulté pour faire face à des imprévus.

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2-1-4-La caisse d'investissement

Dans le but de favoriser l'initiative entrepreneuriale, l'association a mis sur pied au sein de la tontine une autre cotisation appelée caisse investissement. Il s'agit comme l'explique le secrétaire : « d'une caisse qui permet d'aider chaque membre qui vient avec un projet propre, ou encore un membre qui fait faillite et qui a besoin d'être épauler financièrement pour relever son affaire. Une fois que les membres ont étudiés le projet, le demandeur reçoit une aide financière » (entretien du 14 janvier 2022 au carrefour Carrière). Cette caisse constitue un outil de financement dont les jeunes entrepreneurs bénéficient dans l'association. Bescherelle une entrepreneure témoigne avoir été soutenu par cette caisse lors du démarrage de sa ferme avec son conjoint. Elle explique que : « avec le soutien de l'association, j'ai pu avoir un montant de 75milles francs lors du lancement de notre ferme » (entretien du 1er février à Ayene).

Au regard de ce qui précède, il ressort que les mécanismes de financement mis sur pied par l'association EMERCOM permet aux entrepreneurs pastoraux bénéficiaires de mobiliser des ressources économiques nécessaires à leurs activités. Grâce à la souplesse de l'association et au climat de confiance qui y règne, les membres peuvent ainsi en temps réel avoir accès à des sommes non négligeables pour le financement. En effet, les montants octroyés aux membres leur permettent de faire face à certaines charges telles que : l'achat de la provende, le ravitaillement des bêtes ou encore d'agrandir l'espace d'élevage. Toutes ces aides financières permettent à certains de financer le démarrage de l'activité, à d'autres d'accroître l'entreprise et la production.

2-2-Les mécanismes de financement à ADJAS

L'association ADJAS est constituée de douze (12) membres qui exercent uniquement dans le domaine pastoral. Il s'agit principalement des jeunes de sexe masculin qui exercent dans l'élevage des porcins à petites et moyennes échelles. Quelques-uns exercent leur élevage en complément à d'autres activités afin de subvenir aux charges de la vie quotidienne. À ce propos, un éleveur affirme « je fais dans la maçonnerie et je fais aussi dans l'élevage, dans l'élevage ça me permet de jongler comme ça pour m'en sortir avec les enfants et tout le reste » (entretien du 5 février avec Olivier au Vietnam).

Dans le but de mieux s'entraider et de mieux prendre soin de leurs affaires, ils se sont regroupés en association afin d'épargner un peu d'argent question de se soutenir dans la gestion de leurs activités. Les enquêtes de terrains permettent de ressortir trois (3) principaux moyens de financement auxquels ont recours ces jeunes éleveurs.

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2-2-1- Les cotisations mensuelles

Les cotisations mensuelles à ADJAS s'élèvent à hauteur de 4000F par membre et dont le montant total est divisé en deux parts. Ainsi deux membres bouffent lors des assemblés afin que chacun puisse bénéficier deux fois au cours de l'année. Les entrepreneurs peuvent ainsi avec les sommes obtenues financer la gestion de leur élevage, c'est le cas de Yannick qui affirme que : « la tontine quand je cotise jusqu'à peut-être je veux payer la nourriture des porcs, parfois quand je prends ma tontine je peux dire que je paye 3 sacs à la fois. Or quand je ne suis pas dans la tontine c'est difficile de payer même 1 sacs » (propos recueillis le 24 janvier 2022 à nouvelle route Nkolbisson).

Image 1 : Livraison de provende à la nouvelle route Nkolbisson

Source : enquête de terrain du 24 janvier 2022

L'obtention d'une cotisation mensuelle est très souvent encouragée par des mots de bénédiction de l'assemblée en guise d'illustration, le trésorier explique que : « pour nous quand tu prends même ça la cotisation, nous-mêmes on se lève nous tous ont béni avec un bon coeur pour que si tu as pris cet argent pour aller faire tel chose comme tu le dis là, il faut que tu le réalise dans des bon termes » (entretien du 07fevrier à Eloumdem). Ces quelques mots symboliques traduisent la volonté de l'association de voir l'argent octroyer au bénéficiaire participer au développement de son affaire et se multiplié par la suite. Au-delà des cotisations mensuelles, l'association dispose d'autres moyens d'accompagnement financier à l'instar de la caisse d'épargne.

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2-2-2- La caisse d'épargne

Pour Henry & al (1991) la force du système tontinier repose sur la volonté d'épargne motivée au sein du groupe. À chaque réunion, les membres peuvent à côté de la cotisation ordinaire, décider de mettre de côté une somme montant libre pour se constituer une épargne. Les sommes versées par chaque membre sont consignées dans le cahier et l'argent est confié au trésorier. La caisse d'épargne de l'association ADJAS est constituée des versements des épargnants à laquelle tous les 12 membres effectuent des dépôts. Cette épargne permet à certains entrepreneurs de faire face à certaines difficultés. Les propos d'un enquêté illustre cet état de chose lorsqu'il soutient : « il y'a l'épargne, ça veut dire qu'à un moment donné quand tu épargnes et en cas que tu es vraiment coincé tu peux appeler la réunion. On part en banque on te fait un retrait qui te permet de gérer ton activité » (entretien du 05 février2022 avec Jordao à Etetak). Cette épargne assure ainsi la promotion des entreprises de ces éleveurs en leur fournissant une caisse de financement de leurs besoins immédiats. À cette caisse d'épargne s'ajoute une caisse de prêt avec intérêts.

2-2-3- La caisse de prêt

Dans le but de renforcer la solidarité entre les éleveurs, l'association a instauré une caisse de prêt à partir de la caisse d'épargne, ainsi les montants des sommes épargnées sont soumis à un système de prêt avec intérêt. Il s'agit d'un intérêt qui varie entre de 5 et 10% par mois renouvelable sur 2 mois. Le prêt représente donc une aide financière dont bénéficient tous les membres de l'association pour démarrer leur activité. À titre d'illustration un éleveur affirme : « cette activité j'ai eu a commencé le financement par un prêt dans l'association. J'ai eu à prendre un peu d'argent dans la tontine, c'est là où je me suis lancé dans l'élevage. J'ai commencé d'abord par deux petits porcelets, et les deux petits porcelets m'ont lancé » (entretien du 20 janvier 2021 avec Martial à Abobo). Lorsqu'un membre désire un prêt, il se rapproche des membres du bureau auxquels il soumet son problème, après avoir étudié la demande, le bureau l'accorde un prêt en fonction de ce qu'il souhaite réaliser. À ce sujet, Joël soutient : « j'ai déjà eu à plusieurs fois même de faire des prêts du genre que je suis coincé je suis obligé de prêter pour la nutrition d'abord de mes bêtes. Sachant que c'est les mêmes bêtes, le même élevage qui à la fin comble tous ces genres de prêts » (entretien du 10 février 2022 à Mongonam).

Les différentes formes de financements des activités au sein de ces deux associations permettent d'apprécier la façon dont la dynamique entrepreneuriale est encouragée dans ces

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réseaux. Ils sont en effet dotés d'un capital financier immense dont les bénéficiaires mettent au profit de leur activité d'élevage. Les différents propos recueillis nous ont permis de comprendre que l'aspect financier constitue le point fort de ces associations en termes de création des richesses durables. En dépit des aides financières, les associations EMERCOM et ADJAS fonctionnent sur la base d'un suivi entre entrepreneur. Ce suivi est fait dans le but d'encourager les membres dans la gestion de leur activité afin de booster leur production. Il s'agit donc d'un système d'accompagnement non pas fondé sur un capital financier mais davantage sur un capital relationnel.

3- LES AUTRES FORMES D'ACCOMPAGNEMENTS AU SEIN

DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS

Définir le système tontinier sous le seul prisme financier est très réducteur17. Les adhérents viennent aussi pour échanger des idées, communiquer des informations et des conseils entre membre utile au développement des activités au sein du groupe. Les membres de ces associations manifestent une solidarité sociale qui va de la création de l'entreprise jusqu'à son développement, ce de façon gratuite et volontaire. Les relations entre les membres de ces associations sont avant tout basées sur le partage de la solidarité qui constitue leurs points forts. L'association EMERCOM et ADJAS déploient plusieurs moyens d'accompagnement non-financier en vue de promouvoir la dynamique entrepreneuriale des éleveurs. Allant du conseil à la formation en passant par les ventes, ils s'entraident mutuellement et promeuvent la réussite collective.

3-1- L'accompagnement relationnel à EMERCOM

Au regard du nombre important des jeunes individus qui exercent des activités entrepreneuriales dans le secteur informel, l'association a mis sur pied une forme d'entraide davantage centrée sur l'écoute et partage des expériences entre les membres. Les propos du président à ce sujet sont assez illustratifs :

Les moyens sont de plusieurs ordres hormis les moyens d'abord qui sont physique nous avons également les moyens matériels et nous avons également les moyens psychotechniques. Ça veut dire se rapprocher par exemple des personnes qui ont une certaine connaissance, une certaine

17Source : https://www; leolagrange.org/la-societe-civile-sorganise-les-tontines-au-cameroun/, consulté le 24 février 2022.

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formation parce que dans notre association justement je parlais de cas par exemple dans notre tontine, il y a des personnes qui ont étés formés qui

ont fait des stages » (entretien du 30 décembre 2021 à Oyom-Abang).

Les membres de l'association peuvent ainsi bénéficier à chaque fois lors des réunions mensuelles, de petites séances de coaching. Il s'agit des échanges où les anciens du domaine pastoral ou encore ceux qui ont reçu une formation dans le domaine donnent aux novices des astuces dans la gestion de leur activité. C'est l'occasion ainsi pour eux d'exposer les difficultés rencontrées dans leur entreprise d'élevage et d'obtenir les conseils des membres les plus aguerri dans le domaine. Ces séances de coaching visent à outiller les membres de savoir-faire utile pour mieux gérer leur production. Les propos d'un répondant en sont la preuve : « avec les aides je me suis davantage capacité, ils ont considérablement aidé beaucoup plus les aides en termes de formations de conseil. Parce que vous pouvez avoir les finances, si vous n'êtes pas conseiller, si vous n'êtes pas formé ça ne va servir à rien (propos recueillis le 27 décembre 2021à Tsinga)

De plus, les éleveurs du domaine pastoral bénéficient d'un soutient psychotechnique des membres collègues du domaine en cas de difficulté majeure. Les propos de Gérôme un jeune éleveur en sont le témoignage :

Moi par exemple à un moment donné j'avais des réels problèmes dans mon élevage. Et j'ai fait appel à un membre de la réunion qui avec les connaissances dans le domaine et grâce à ses conseils, il est venu à la maison il a observé ce qui n'allait pas et il m'a prescrit certains médicaments que je devais accompagner dans la nourriture des poulets et depuis dès lors je constate un grand changement. Et j'espère que grâce à ses conseils ça va aller de mieux en mieux (entretien du 04Janvier 2022 au Camp-sonel Oyom-Abang).

Les membres de l'association ont l'avantage de pouvoir compter sur le soutien technique de l'association pour mieux se faire accompagner dans le développement de leur entreprise. Par ailleurs, comme autres moyens d'accompagnement non financier, les entrepreneurs pastoraux de l'association peuvent compter sur le soutien des autres membres pour leur faire des petits achats lors de certains évènements. Il s'agit donc d'un soutien moral qui vise à encourager les entrepreneurs du domaine pastoral au sein de l'association achetant leurs produits en cas de besoins. En guise d'illustration la trésorière affirme : « nous on encourage ces éleveurs chaque fois en faisant leur publicité et aussi on leurs fait des recettes quand peut-être on a des évènements ou des fêtes. Donc c'est aussi une manière pour nous de les soutenir » (propos recueillis le 13 Février 2022 avec Diane à Nkomkana).

Toutes ces mesures d'accompagnements mises sur pied par EMERCOM ont surtout pour but de satisfaire un des objectifs de l'association qui est celui de booster l'esprit d'entrepreneuriat au sein de l'association. Ils s'entraident autant que faire se peut à tous les

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niveaux, du démarrage à la gestion de l'entreprise, en passant par les circuits d'écoulement. Grâce à ces différentes aides, chaque membre essaye de s'en sortir au quotidien dans la gestion de son activité économique.

3-2- L'accompagnement relationnel à ADJAS

Etant donné que l'association ADJAS est constituée uniquement d'entrepreneurs pastoraux, les membres bénéficient des mêmes faveurs dans l'exercice de leur activité. Dans le but de se rassurer de l'évolution des activités de tous, les membres de l'association ont instauré à chaque assemblée, une séance de débriefing des activités. Dans ce sens, chacun des membres expose les difficultés qu'il rencontre dans la gestion de son activité et ensemble ils essayent de trouver des astuces afin de résoudre le problème. Le président de l'association illustre bien cet état de chose lorsqu'il dit :

C'est l'aide morale bon concernant l'aide morale dans la réunion même quand on siège, on a 1heure avant la réunion pour les gens qui ont eu les problèmes dans le mois les difficultés dans ton élevage dont tu poses ton problème. On essaye de t'expliquer comment faire si peut-être c'est l'aliment qui dérange on t'explique, si c'est le problème des remèdes, si tu as perdu un porcelet tu parles tu dis pourquoi tu as perdu et on te dit comment faire pour que ça n'arrive plus prochainement (entretien du 19 février 2022 avec Eric à Mbankolo).

Ces propos du président traduisent la volonté de l'association de consolider la solidarité à travers le partage des connaissances et des et des expériences entre membres du groupe.

De plus, les membres peuvent en dehors de l'association solliciter l'aide de leurs amis en cas de situation urgente. Certains se font ainsi épauler par des prêts en espèce ou en matériel, il peut s'agir du prêt d'un sac de provende ou encore le prêt d'une somme d'argent avec la garantie de rembourser le jour de la cotisation. Grâce au capital relationnel de certains membres, l'association assiste souvent à des petits séminaires de renforcement des capacités dans le domaine agro-pastoral. Afin de s'assurer du respect de l'usage des prêts accordés, l'association a instauré un système de suivi entre membres. De fait, une personne est déléguée pour faire des descentes sur le terrain, afin de vérifier que l'argent emprunté par X membre a effectivement été mis au profit de son activité.

Par ailleurs, les membres de l'association peuvent compter sur leur esprit de solidarité et sur leur entourage entrepreneurial pour pouvoir écouler leurs (bêtes) sur le marché. Ainsi lorsqu'un membre tombe sur une « grosse affaire », il ne manque pas de partager cela avec ses confrères de l'association. On peut ainsi entendre des propos tels que : « parfois tu peux tomber sur des gros clients, qui veulent les porcs pour la dotes ou pour des fêtes. Si la quantité en fonction de la grosseur qu'ils veulent ne suffit pas, j'appelle directement mon ami de

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l'association le plus proche pour qu'on complète le reste chez lui » (entretien du 21 janvier 2022 à Oyom-abang riviere).

Au regard des mécanismes de financement mis sur pied par les associations EMERCOM et ADJAS, fort est de constater que l'esprit d'entrepreneuriat et la solidarité collective priment dans ces associations. En effet, les différents moyens de financement déployés pour encourager les initiatives des membres vont de l'épargne à l'emprunt en passant par la cotisation. De plus à côté des moyens financiers, les membres bénéficient d'un soutien relationnel (conseil, assistance). Ces différents appuis permettent à certains d'accroitre leur entreprise, d'écouler leurs produits et à d'autres de financer le démarrage dans un contexte où l'accès aux services bancaires formels est limité.

Il est maintenant question d'étudier la place qu'occupent ces réseaux de financement dans le quotidien de ces jeunes entrepreneurs. Cette préoccupation conduit ainsi au prochain chapitre où il est question d'analyser d'une part sur la base des différents entretiens et observations menées, les perceptions de ces entrepreneurs sur le système tontinier. Par la suite, cela permettra d'évaluer la contribution de ce système dans les activités des entrepreneurs membres. À terme, cette évaluation aidera à dégager la nature du rapport qui existe entre le système tontinier et le développement de l'entrepreneuriat jeune.

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CHAPITRE 4 :

CONTRIBUTION DES ASSOCIATIONS EMERCOM

ET ADJAS DANS LA PROMOTION DE

L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL

ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA

À côté des structures d'accompagnement formel telles que les banques, les micros finances, les projets et programmes officiels, une part de la population active exclue de ces structures officielles a recours à des moyens de financements informels. Il s'agit le plus souvent des regroupements associatifs à caractère tontinier, couramment appelés tontines qui regroupent en moyenne 56% des camerounais actifs (MINFI, 2014). Ces circuits de financement qui aujourd'hui font l'objet d'un prélèvement d'impôts, sont d'une place importante pour de nombreuses catégories d'acteurs sociaux (hommes, femmes, adultes et jeunes) à la recherche de gains financiers. Il s'agit d'un système financier qui offre des prestations similaires aux services bancaires officiels (prêt, épargne, cotisations), dans une logique de solidarité fondée sur l'entraide réciproque. Ce système de don/contre-don représente de nos jours un outil incontournable pour de nombreuses catégories d'entrepreneurs, dans un contexte économique national peu propice au développement des initiatives jeunes.

Après avoir présenté dans le chapitre précèdent les mécanismes d'accès au crédit par les entrepreneurs pastoraux des associations EMERCOM et ADJAS, il est maintenant question dans ce dernier chapitre, de faire une analyse et une évaluation de la contribution de ces associations dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. Pour ce faire, il sera judicieux de commencerons par une analyse des représentations sociales du système tontinier chez ces entrepreneurs, afin de comprendre le rôle et la place de ces associations dans leurs activités (section 1). Par la suite, il sera question de faire une évaluation proprement dite de la contribution système tontinier dans les activités pastorales des entrepreneurs de ces deux associations. Cette évaluation nous permettra de comprendre les effets de la contribution de ces associations dans la promotion de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. Deux principales théories seront ainsi mobilisées dans cette partie à savoir la théorie des représentations sociales et la théorie des réseaux afin de comprendre à terme l'influence que peut avoir le groupe ou le réseau associatif dans la pratique entrepreneuriale.

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1- LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES DU SYSTÈME TONTINIER CHEZ LES JEUNES ENTREPRENEURS PASTORAUX À YAOUNDÉ

La représentation sociale est un mode spécifique de connaissance dans un groupe social donné. Dans toutes les sociétés, chaque phénomène, évènement qui influence le quotidien humain nécessite une explication (Adam et Herzlich, 2017). Le système tontinier, réalité sociale n'échappe pas à cette exigence. Abordé le système tontinier, sous le prisme des représentations sociales permet d'appréhender les perceptions, le sens et les interprétations que les individus, plus précisément les entrepreneurs du secteur pastoral, lui attribue. Ces images se fondent généralement sur le vécu et les expériences des individus en situation. D'autant plus que les représentations sociales se fondent sur les manières d'interpréter et de penser la réalité quotidienne, une forme de connaissance sociale au sens de Jodelet (1989).

Les représentations socialement construites par les jeunes entrepreneurs pastoraux sur le phénomène tontinier, sont fonction des besoins individuels et varient d'un individu à un autre. En effet, comme l'explique Henry & al (1991), chaque individu à une perception individuelle de la tontine. Certaines personnes sont motivées par des objectifs économiques, d'autres par des objectifs relationnels. Pour ce qui est des objectifs économiques, les adhérents sont attirés par la recherche des capitaux financiers et la multiplication des épargnes nécessaires au développement d'une activité économique. Concernant les objectifs relationnels, les adhérents sont attirés par la recherche du lien social, le besoin de voir du monde, s'unir aux autres, discuter, voir les problèmes ensemble et trouver des solutions pour tous. Par ailleurs, ces représentations sont aussi fonction de certains déterminants sociaux, il s'agit entre autres : du niveau de vie des individus qui y adhèrent et des conditions d'obtention de ces différents services.

Les perceptions des jeunes entrepreneurs pastoraux sur le système tontinier n'échappent pas à ce principe. Les entretiens effectués montrent que ces regroupements ont plusieurs significations qui peuvent être interprétées sous divers angles. Ces différentes représentations de nos répondants ont pu être regroupées sur 6 principaux points à savoir :

v Le système tontinier, un outil de financement des jeunes et petits entrepreneurs ;

v Le système tontinier, une caisse d'accumulation d'épargne pour les projets ;

v Le système tontinier, un moyen de création des emplois et des richesses ;

v Le système tontinier, un outil d'inclusion financière pour les défavorisés ;

v Le système tontinier, une caisse de secours.

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v Le système tontinier, un outil de financement limité.

1-1- Le système tontinier : un outil de financement des jeunes et petits entrepreneurs

Au cours de nos enquêtes de terrains, certains de nos enquêtés ont affirmé que le système des tontines est un moyen de financement pour les jeunes entrepreneurs. Pour certains, après avoir traversé en vain de longues procédures pour l'obtention d'un crédit de financement auprès d'une structure de financement formelle, ils ont décidé de s'orienter vers d'autres moyens de financement à l'instar des tontines. Ces regroupements caractérisés par la souplesse et la confiance dans l'accord des ressources financières sont le principal instrument de financement de ces entrepreneurs. Emmanuel un jeune entrepreneur précise à ce sujet que :

Les tontines sont vraiment des euh... des outils pour financer les petits jeunes entrepreneurs que nous sommes. C'est vraiment indispensable parce que dans ton activité, quand tu fais face à des difficultés, c'est la tontine qui t'aide donc euh c'est un bon moyen de financement » (entretien du 26 février 2022 à Emombo).

Une autre dira :

Moi personnellement je pense que le système tontinier est encouragé, il joue un très grand rôle surtout pour nous les jeunes qui nous battons qui nous cherchons qui avons des petites start-ups des petits projets. Les tontines jouent un grand rôle parce que, le financement est de gré à gré il n'y a pas de longues procédures pour avoir de l'argent tout est basé sur la confiance (propos recueillis le 28 décembre 2021avec Simone d'EMERCOM à Chapelle-Nkolbisson).

Pour ces enquêtés, le système tontinier s'identifie davantage à un réseau pour tout individu désirant entreprendre une activité génératrice de revenus. À travers le financement, il permet aux jeunes entrepreneurs de se réaliser et d'accomplir une vie professionnelle, dans un contexte ou le système bancaire formel répond encore imparfaitement aux besoins de tous. En effet, tous les agents économiques ont besoin d'un financement, qu'il soit interne ou externe, pour réaliser leur objectif. Le système des tontines en offrant des services à caractère bancaire (épargne, prêt, emprunt) profitent aux individus en leur fournissant des ressources financières pour développer leurs activités et mener à bout leur projet (Kazadi & al, 2021).

Présenter le système tontinier sur le prisme d'une caisse d'épargne n'est pas une thématique actuelle. Il a déjà fait l'objet de nombreux développement (Lelart, 1990 ; Henri &

1-2- Le système tontinier : une caisse d'accumulation des épargnes pour les projets

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al, 1991 ; Bekolo-Ebe, 1989...). Lelart (1990) pour sa part présente dans son étude les tontines comme des mécanismes de financement innovant et original, qui permettent d'accumuler et de faire circuler de la monnaie, entre des intermédiaires financiers informel. Elles fonctionnent ainsi à partir d'un système de cotisation fondé sur le drainage de l'épargne et l'octroi du crédit pour réaliser les projets à visée économique.

Les enquêtes de terrains menées auprès des jeunes petits entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS nous ont permis de récolter quelques données à ce sujet. L'analyse de ces données montre qu'ils appréhendent le système tontinier comme une caisse d'accumulation des capitaux dans laquelle ils peuvent emprunter des sommes pour ensuite réaliser des projets. Un répondant déclare justement à ce sujet que :

En bref on a compris que c'est quelque chose que quand tu penses réaliser quelque chose, et tu vois avec autant de problèmes on envisage tu vois que en épargnant cet argent sur place tu ne peux pas la gardée jusqu'à tu puisses réaliser un projet tu vois. En la cotisant comme ça là tu es sûr de toi que bon le jour opportun ou tu as besoin de cela, sa peut t'aider à gérer tes problèmes. Donc c'est une manière d'épargner de garder un peu de sous (entretien du 31 décembre avec Luc d'ADJAS à Mvog-Beti).

Il faut dire que, la majorité des jeunes éleveurs qui ont cette perception du système tontinier ont eu à démarrer leur activité d'élevage à partir d'une épargne ou d'un prêt obtenu grâce à l'aide de l'association. En effet, certains ont pu réaliser leur projet d'élevage à partir de l'épargne cumulée dans la tontine sur une certaine période à l'instar de Jean-Daniel de l'association EMERCOM. D'autres ont pu démarrer grâce un prêt obtenu dans l'association, à l'instar de Martial d'ADJAS. Un enquêté confirme cela lorsqu'il précise : « j'ai remarqué que les tontines jouent un grand rôle. Parce que vous allez voir la majorité des éleveurs de nos jours ont pour capital l'argent qu'ils ont prêté dans les tontines, ou alors l'argent qu'ils ont épargné dans les tontines » (propos recueillis le 30 janvier avec Christophe à Ekorezok).

On constate dès lors avec Tello-Rozas et Gauthier (2012) que les associations d'épargne et de crédit rotatif connu sous le nom de « tontine » au Cameroun constituent une des formes d'organisation les plus populaires pour financer les projets dans les pays ou l'accès au crédit est restreint.

1-3- Le système tontinier : un outil d'inclusion financière pour les couches défavorisées

Pour de nombreux jeunes entrepreneurs, particulièrement les entrepreneurs du secteur informel, le système tontinier s'apparente à une banque d'épargne et de crédit au secours des couches à faible revenus. En effet, comme le souligne Hedi (2016) la tontine ou « banque des défavorisés » est une forme de banque informelle qui permet aux individus membre de cumuler

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les épargnes et de financer les projets communs ou individuels. Au cours de nos entretiens de nombreux répondants ont affirmé que le système des tontines est un moyen pour eux d'avoir des ressources financières de manière simple et sereine.

Il faut dire que l'image que les uns et les autres ont du système tontinier sont toujours en opposition avec le système bancaire officiel (banques, microfinances...). Aristide, un éleveur de l'association EMERCOM déclare à ce sujet que :

Ce n'est pas facile d'avoir un financement, ce n'est pas facile de monter un dossier de financement pour aller à l'Etat voir l'Etat pour qu'on finance un projet. Non seulement ça met long alors qu'à la tontine c'est très facile et vraiment sa booste nos activités. Ça nous aide à nous réaliser nous-même et ça nous donne l'emploi. Et sa développe également le secteur des éleveurs qui est un secteur tant négligé même (entretien du 27 décembre 2021 à Tsinga).

Comme le souligne Bekolo-Ebe (1996), ce sont les lourdeurs administratives et les taux élevés d'intérêts dans l'octroi des crédits qui sont à l'origine de la préférence des agents vers les circuits de financement informel à l'instar du système des tontines.

Au plan social, les entretiens réalisés nous ont permis de comprendre qu'une part des jeunes entrepreneurs à faibles revenus vivent des associations informelles d'épargne et de crédit. Ces associations constituent « la matière première » dans l'accès aux ressources financières et même dans les autres problèmes de la vie sociale, surtout lorsqu'ils ne sont pas les bienvenus dans le système financier formel. C'est ce qui justifie les propos d'un répondant d'ADJAS lorsqu'il déclare : « comme j'ai dit depuis il n'y a que la tontine-là qui nous aide beaucoup. C'est comme notre support, notre point d'appuis, quand tu es dans le choc tu rentres que vers là. Nous avons notre compte épargne c'est ça notre banque, c'est avec ça que nous on vie » (entretien réalisé le 10 février avec Joël à Mongonam). De ces propos il ressort ainsi que, le système tontinier est un outil de financement pour de nombreux individus à faibles revenus. Grâce aux ressources financières dont ils bénéficient dans ces associations, ces jeunes peuvent entreprendre une activité génératrice de revenus et assurer le financement.

1-4- Le système tontinier : une caisse d'assurance

Le système tontinier au-delà d'une caisse de financement, est aussi pour une part de nos enquêtés, un programme d'aménagement d'une vie. Il s'agit d'une caisse de prévoyance sociale dans la mesure où, les individus en situation de difficulté professionnelle ou familiale peuvent recourir à n'importe quel moment pour obtenir de l'aide. Plus clairement, il s'agit d'une caisse qui permet d'anticiper sur les difficultés futures dans la vie d'un individu. Dans ce sens, Seumo (2008) précise que le système des tontines sont des sources de financements permettant aux

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individus à faible revenus monétaires, de satisfaire une vie professionnelle et de combler les difficultés rencontrées dans la vie quotidienne. Le vice-président d'ADJAS confirme cet état de chose lorsqu'il relève que : « c'est vraiment une roue de secours, où lorsque tu es bloqué ça te permet d'avoir un peu d'argent pour résoudre tes problèmes dans ta petite activité que tu fais. Bon vraiment ça a une place importante, pour n'importe qui qui exerce une activité » (entretien du 31 janvier 2022 à Mvog-beti). Un autre dira : « parfois la tontine comme ça quand je bouffe, et que je sais que je n'ai rien d'urgent à faire avec l'argent là, je garde ça dans ma caisse d'épargne. Je sais que quand je serais vraiment coincé ou quand je ferai face à un imprévu je viendrai retirer pour résoudre le problème là » (entretien du 28 janvier 2022 avec Faustin à Mokolo).

Pour ces enquêtés, le système tontinier s'identifie alors à une caisse de secours anticipé. Cette caisse leur permet donc de résoudre les potentiels problèmes qu'ils rencontrent dans la gestion de leurs activités entrepreneuriale ou d'une difficulté quelconque. À l'instar de Charles de l'association ADJAS qui en dehors de son activité d'élevage emprunte souvent dans la tontine pour payer la pension scolaire de l'enfant.

1-5- Le système tontinier : un outil de création des emplois et des richesses pour les populations à faibles revenus

Il faut dire de manière générale que les longues conditions dans l'octroi des crédits de financement amènent les acteurs sociaux à faible revenus à rechercher d'autres pistes d'accès au crédit pour le financement ou le démarrage de leurs activités (Kazadi & al, 2021). Les associations d'épargne et de crédit rotatif sont des leviers de l'économie informelle. À travers le principe de don/contre-don réciproque régis sur l'épargne, la cotisation et l'emprunt, elles se présentent comme un remède pour les individus exclus de l'accès au service bancaire formel.

Lors de nos descentes de terrains, une part de nos enquêtés nous ont avoué avoir pu démarrer leur entreprise grâce à leur tontine. Elle a été leur point de départ pour sortir de la situation de chômage et de sans emploi. Simone une éleveuse de l'association EMERCOIM nous confie à ce sujet que :

C'est au sein de la tontine que j'ai pu démarrer mon activité. Donc étant à la réunion j'ai demandé à avoir un prêt et une fois que j'ai eu l'autorisation, il me fallait avoir les avalistes comme je vous l'ai dit pour avoir le prêt, il te faut être à jour dans ton fond de caisse. Une fois que j'ai eu mes avalistes qui avaient un fond de caisse le montant que j'ai demandé m'a été alloué afin de lancer mon activité. J'ai commencé avec quelques poules et petit à petit j'ai évolué à mon niveau » (propos recueillis le 28 décembre 2021).

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Les propos de cette enquêtée témoigne ainsi de la volonté du système tontinier a encouragé l'esprit d'initiative chez les adhérents et à lutter contre le chômage. Un autre déclare à cet effet :

Nous les jeunes surtout les petits entrepreneurs les petits débrouillards, ça nous permet d'avoir les petites facilités pour avoir de quoi vivre de quoi se battre de quoi se auto-employer. Vu le système auquel nous faisons face nous les petits jeunes, avec le non emploi car pour trouver l'emploi est tellement difficile et le taux de chômage ne fais qu'augmenter (entretien du 04 janvier avec Gérome 2021 au camp-Sonel).

Pour cet enquêté, le système tontinier est un pourvoyeur d'emploi dans un contexte économique marqué par l'incapacité pour l'Etat d'employer tous ses citoyens. Ainsi face à cette insuffisance, cette tranche de la population se reconvertie ainsi vers des circuits de financements propices au développement de l'entrepreneuriat à l'instar du système des tontines.

1-6- Le système tontinier : un outil de financement limité

Pour une part de nos répondants, le système tontinier s'avère un cercle de financement limité dans le sens où les montants octroyés aux membres peuvent parfois s'avérer insuffisant pour financer des activités entrepreneuriales nécessitant de grands moyens financiers. Creusot (1999) souligne à cet effet que le principal point faible de ces associations est la limite dans les fonds mobilisés. Autrement dit, les fonds levés ne permettent pas toujours de financer des activités économiques importantes nécessitant des montants un peu plus élevés.

Une jeune entrepreneure fait comprendre à ce sujet que :

Les tontines on ne peut pas dire que ça n'aide pas. C'est vrai ça aide à son niveau, mais pour nous qui avons les grandes entreprises quand tu as par exemple une ferme de 400 à 600 poules et que quand tu prêtes on te donne peut-être 20milles ce n'est pas suffisant pour payer la nourriture et les médicaments des poulets. Donc on est obligé mon mari et moi de demander ailleurs pour compléter parce que quand tu investi dans un grand truc il te faut aussi beaucoup de moyen pour vous en sortir et parfois tu peux être coincé financièrement (entretien du 01fevrier 2022 avec Bescherelle d'EMERCOM à Ayene).

Il ressort ainsi des propos de cette enquêtée que malgré la forte solidarité financière dont font preuve le système des tontines, ceux-ci restent parfois limité. Cette insuffisance est généralement liée au manque de ressources économiques nécessaires pour financer les activités entrepreneuriales de grandes tailles. Un autre dira à ce sujet que :

Non nous sommes limités parce que vu la situation tu ne peux pas chercher à aller très loin. Parce que si on avait peut-être les appuis financiers les ONG, là on pouvait bien s'en sortir. Mais à partir du moment que tu n'as pas trop de moyens tu ne dois pas risquer parce qu'avoir beaucoup

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d'animaux tu vas perdre on joue avec les moyens de bord que la tontine nous donne (entretien du 16février avec Rodrigue d'ADJAS à la montée

Irad)

Ainsi présentées, les différentes représentions que se font les jeunes entrepreneurs pastoraux sur le système tontiniers sont déterminées par leurs conditions de vie, le contexte économique et les différents services offerts par leurs associations de crédits. L'analyse de ces représentations permet de comprendre que ces systèmes de crédit se présente comme une opportunité voire une solution pour eux. À travers les nombreux services financiers proposés, cette forme de financement informel permet de faire face à l'épineux problème de financement de l'entrepreneuriat dans un environnement où l'accès aux ressources économiques n'est pas une chose aisée pour tous. De plus, ces différentes perceptions permettent de comprendre que la tontine occupe une place de premier rang dans l'accès aux ressources financières et dans le financement de leur activité entrepreneuriale. Non seulement l'association constitue leur point d'appuis, pour gérer leur activité, mais également elle représente leur caisse de secours en cas de difficulté majeure.

Dans la section suivante, il est maintenant question d'évaluer les effets du système tontinier dans la dynamique entrepreneuriale de ces jeunes éleveurs. La mobilisation de la théorie des réseaux permettra de mieux apprécier l'influence du réseau tontinier sur la propension à entreprendre des jeunes individus.

2- ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER DANS LA PROMOTION DE L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL À YAOUNDÉ

L'évaluation concerne la démarche, la méthode et le système de preuve. Elle porte également sur la pertinence sociale du sujet ou du thème proposé et la performance sociale des éclairages fournis. Dans les sciences sociales, l'évaluation est fondée sur la description et l'interprétation des données de terrain (Gaudin et Livet, 2008). Selon l'OCDE (2010), l'évaluation est une opération qui consiste à porter une appréciation systématique et objective sur une étude ou un projet, en prenant en compte les différents points de vue qui émanent des acteurs ou des experts du phénomène étudié. Elle permet de faire une synthèse des résultats pour produire une appréciation globale du phénomène ou de la réalité étudiée.

L'évaluation va servir de ce fait d'examiner, d'apprécier, de tirer des synthèses et des conclusions globales du phénomène étudié. Elle permettra à terme de mieux comprendre les effets ou influences des associations EMERCOM et ADJAS dans la dynamique

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entrepreneuriale des jeunes entrepreneurs pastoraux qui y recourent dans la ville de Yaoundé. De même, à travers des indicateurs tels que : l'efficacité, la pertinence et la durabilité, elle permettra de saisir le rapport qui existe entre le système tontinier et l'entrepreneuriat pastoral.

2-1- Évaluation de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral

Après avoir analysé les représentations que se font les jeunes entrepreneurs autour des associations rotatives d'épargne et de crédit, il est maintenant question de faire une évaluation de la contribution du système tontinier dans les activités économiques des membres à partir des résultats de terrains. Il est important de préciser que le système tontinier constitue un réseau de solidarité professionnel, ethnique ou amical et donc la variable « tontine » est une partie ou un moment de l'association. C'est donc cette variable tontine qui nous permet de mieux mesurer l'effet de ces regroupements associatifs dans la dynamique entrepreneuriale.

La théorie des réseaux issue notamment des travaux de Burt et Granovetter permet de souligner le rôle des réseaux sociaux dans la détection des opportunités entrepreneuriales et dans l'évaluation de l'influence du groupe dans la dynamique entrepreneuriale. Le champ de l'entrepreneuriat fait l'objet de nombreux Tavaux qui insistent sur le rôle des réseaux dans le processus entrepreneurial (Hoang & Antonic, 2003). L'entrée de l'entrepreneur dans les réseaux sociaux influence son accès aux ressources et aux opportunités, c'est ce que Lin (2001) appelle le capital social de l'entrepreneur. En effet, les contraintes d'accès aux ressources financières expliquent largement la décision d'adhérer à un réseau de financement informel. L'adhésion au réseau favorise ainsi l'accès aux ressources à la fois financières, matérielles et relationnelles.

Évaluer la contribution du système tontinier dans les activités des entrepreneurs bénéficiaires revient à présenter l'influence du réseau associatif dans la dynamique entrepreneuriale des bénéficiaires. Cette influence est fonction de la nature des capitaux mobilisés par ces éleveurs dans leur entreprise.

Il faut dire que la participation aux réseaux de financements informels, à l'instar du système tontinier a influencé positivement sur les motivations à entreprendre des membres des associations EMERCOM et ADJAS. En effet, au cours des enquêtes de terrains, la majorité de nos répondants nous ont confié que c'est la recherche de gains financiers pour entreprendre ou gérer une activité qui a le plus influencé leur adhésion à l'association. De par le système financier formel peu propice aux couches sociales à faibles revenus, et à travers le faible niveau d'employabilité au niveau de l'Etat, ces jeunes entrepreneurs étaient surtout motivés par le désir d'exercer un métier. Au-delà d'exercer un métier il était aussi surtout question pour eux de

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quitter de la situation de sans emploi, de contribuer aux charges familiales dans le foyer pour les femmes, de combler les insuffisances d'une vie professionnelle pour les hommes et de participer à leur développement personnel.

À travers les services financiers offerts par les associations EMERCOM et ADJAS à savoir : l'épargne, l'emprunt et les cotisations mensuelles, ces éleveurs ont pu avoir des ressources financières pour gérer leurs activités ou financer le démarrage de leurs entreprises. À la question de savoir si les aides obtenus de l'association par les jeunes éleveurs ont contribué aux l'objectifs désirés la majorité de ces éleveurs ont répondu positivement quant à l'atteinte des objectifs. Un éleveur de l'association ADJAS nous avoue que :

Cette tontine m'a vraiment aidé dans le développement de mon élevage depuis le départ parce que, c'est grâce à cela que j'ai pu lancer mon élevage j'ai commencé par deux petits porcelets et aujourd'hui voilà que j'ai en moyenne une vingtaine de bêtes donc son importance est vraiment considérable » (entretien du 20 janvier 2022 à Abobo).

Lors de l'enquête de terrain avec cet enquêté, il a offert la possibilité d'apprécier par nous même les effets des différentes aides de l'association sur la performance de son activité entrepreneuriale. Au regard de l'observation menée, force est de constater que cette aide lui a non seulement permis d'agrandir son activité considérablement, mais également de s'outiller techniquement et matériellement.

Image 2 : Photo prise à Oyom-Abang au lieu-dit « quartier Abobo » lors de nos entretiens de terrain

Source : enquête de terrain du 20 janvier 2022

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Ces aides offertes par l'association ne permettent pas toujours dans tous les cas à atteindre les objectifs escomptés. Un éleveur de l'association ADJAS nous confie à ce sujet que : « je ne peux pas dire oui parce que ce n'est pas encore ça ce n'est pas encore l'objectif désiré même. J'ai envie d'agrandir encore mon site, et augmenter le nombre de porcs comme les moyens sont encore limité pour le moment on fait d'abord avec ce qu'il y'a » (entretien du 05janvier avec Jordao à Etetak). Les propos de cet enquêté témoignent le caractère parfois limité des systèmes tontiniers en termes de ressources financières pour satisfaire tout le monde de manière continue. Ce manque est dû au fait que les cotisations provenant essentiellement des membres ne sont parfois pas assez élevées pour prêter des montants colossaux à tout le monde.

Concernant l'usage des fonds empruntés dans la tontine, les membres de l'association ADJAS procèdent à des descentes de terrains afin de se rassurer que l'argent emprunté par un membre a effectivement été mis au profit de son activité. En effet, la mise sur pied de cette stratégie de suivi par l'association a été faite dans l'optique d'encourager l'évolution des activités des membres, mais surtout d'éviter l'utilisation des gains à des fins inutiles. Étant donné que l'association et essentiellement constituée d'éleveurs, « il est impératifs pour nous nous, de faire cette vérification pour avoir la certitude que tout le monde puisse évoluer dans son affaire. Et surtout que l'association continue à aider et à s'agrandir » dit le président de l'association.

Dans l'association EMERCOM par contre, tout est davantage basé sur la confiance et sur la responsabilité des membres. Contrairement à l'association ADJAS, les membres du bureau ne procèdent pas à une descente sur le terrain, tout est régi sur la responsabilité des membres dans la gestion de leur entreprise. La confiance réciproque est de mise dans cette association, les descentes de terrains concernent beaucoup plus l'aide psychotechnique en ce sens où, lorsqu'un éleveur rencontre une difficulté majeure dans son activité, il fait appel à un ami de l'association qui s'y connait mieux pour lui apporter une aide technique. En effet, les résultats de terrain ont révélé que la nature des aides au sein de ces deux associations va au-delà de la valeur financière. Grâce à leur forte solidarité, ces entrepreneurs bénéficient d'un apport supplémentaire dans le développement de leur activité pastorale, il s'agit d'un accompagnement en termes de conseils et de formations. Cette aide non financière leurs ont ainsi permis d'acquérir des connaissances utiles pour davantage améliorer la performance de leur entreprise en termes de rendement.

Au niveau des indicateurs de performances, lorsque nous évaluons la question de la performance en lien avec la croissance de l'activité de ces entrepreneurs, les résultats de terrain ont permis de constater un effet positif. En effet, l'accès à une source de financement informel

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a eu un effet positif sur la survie, la croissance et la productivité des entreprises de ces petits et moyens entrepreneurs pastoraux des associations EMERCOM et ADJAS. Ces éleveurs qui avaient des restrictions d'accès à des sources bancaires formelles ce sont vus avoir des facilités grâce à leur association.

Grâce aux différentes aides financières ils ont pu accroitre la production de leurs entreprises. Un entrepreneur déclare à propos :

Ça a eu importance assez considérable parce que, je suis parti de 40 poulets à aujourd'hui 200 poulets. J'ai agrandi ma superficie d'élevage j'ai agrandi, ma production aujourd'hui mon espace d'élevage s'est agrandi et maintenant je lance les poulets régulièrement chaque mois, vraiment sa m'a été largement bénéfique (propos recueillis le 11 janvier 2022 avec Jean-Daniel d'EMERCOM à Nkolbisson).

Une visite guidée en compagnie d'un de ces entrepreneurs dans son poulailler nous a permis de confirmer notre 3ème hypothèse de recherche qui portait sur les effets du système tontinier dans la dynamique entrepreneuriale.

Image 3 : Photo prise à Nkolbisson au lieu-dit « derrière école publique » lors de notre visite de terrain

Source : enquête de terrain du 11 janvier 2022

Il faut dire que la particularité de ces associations repose sur leurs solidarités dans l'accord des crédits. En effet, il y'a la possibilité de cumuler deux prêts simultanément dans le cas où aucun autre membre ne sollicite un prêt. De plus, lorsqu'un membre fait face à un imprévu et qu'il n'est pas totalement à jour dans ses cotisations, il peut toujours passer par

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derrière et obtenir la clémence des membres du bureau pour l'obtention d'un prêt depuis la caisse de secours et rembourser plus tard. Toutes ces différentes stratégies d'aides montrent ainsi de la forte solidarité financière et le sentiment d'entraide qui prime au sein de ces associations. Comme l'explique la trésorière d'EMERCOM, lorsqu'un individu va à la réunion et soumet son problème, avant de rentrer il a déjà la réponse à son problème.

Ces associations sont dès lors d'un apport considérable dans la gestion des activités de jeunes entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS de par leurs particularités. L'évaluation de l'apport du système tontinier dans les activités entrepreneuriales de ces entrepreneurs permet de constater les effets positifs de ces associations dans les activités des membres. De nombreux enquêtés ont répondu favorables quant à l'apport de l'association dans leur entreprise pastorale. Comme le souligne un répondant :

La tontine c'est la matière première, je dis bien c'est la matière première parce qu'il y'a les moments où je suis vraiment bloqué je n'ai rien et je compte à 100% sur ma tontine pour lancer les choses et rembourser doucement doucement. Donc la tontine on ne peut pas dire que c'est une mauvaise chose, c'est une matière première, ça a permis d'accroître l'entreprise ça avance un peu un peu et dans le bon système par la grâce de Dieu (entretien du 20 janvier 2022 avec Gérard à Abobo).

Néanmoins, certains membres de ces associations ne sont pas véritablement satisfaits car, en demande toujours plus de leur tontine pour davantage augmenter leurs ressources et accroître leur activité entrepreneuriale.

De plus, l'évaluation des données de terrains montre que les mesures d'accompagnement initiées par ces associations ont une influence qui ne se limite pas seulement sur leur dynamique entrepreneuriale mais également dans leur vie sociale. Les différents témoignages de nos répondants ont permis de constater un effet positif de ces différentes mesures d'accompagnement sur d'autres aspects de leur vie que celle économique. À cet effet, un enquêté nous confie avoir acheté un terrain grâce aux bénéfices cumulés de ses différentes ventes de porcs : « je peux dire que ça m'a poussé même à faire beaucoup de choses. Donc à partir de l'élevage en fin d'année j'ai eu un peut l'argent, jusqu'à peut-être je me suis fait acheter un terrain donc c'est déjà beaucoup moi je vois ça déjà beaucoup » (entretien du 04 février 2022 avec olivier d'ADJAS à Vietnam). Un autre répondant explique que grâce à l'aide financière et physique de l'association, il a pu se marier et fondé une famille « moi je n'étais pas marié je n'avais pas encore des enfants. Mais aujourd'hui, grâce au soutien financier et même physique de ma tontine, j'ai réussi à réaliser mon mariage donc, je suis là et sa m'accompagne sur tous les plans » (entretien du 30décembre 2021 avec Loïc d'EMERCOM à la chapelle Oyom-abang).

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En outre, il ressort que les contributions des associations EMERCOM et ADJAS ont eu un effet positif dans la performance des activités pastorales de ses membres. Allant principalement du capital financier (prêt, épargne, cotisation mensuelle) au capital social (conseil, formation, écoute...), la majorité des éleveurs de ces associations témoignent leurs sentiments de gratitude envers le groupe pour l'aide apportée dans le développement de leur activité. À travers leurs souplesses et les nombreux services financiers mis à la disposition des membres, nombreux sont ceux qui ont pu accroitre leur entreprise, résister à la faillite ou encore financer le démarrage de leur activité d'élevage. Au regard de l'analyse des différentes perceptions recueillies auprès des entrepreneurs pastoraux de ces deux associations et de l'évaluation des mécanismes d'aides, il ressort que le système tontinier est un outil de financement pour de nombreux jeunes entrepreneurs. Pour ces individus exerçant leurs activités à petites, et moyennes échelles dans une dynamique informelle, chacun y trouve son compte. Même si pour certains l'aide est parfois insuffisante pour assurer une gestion totale de leur activité d'élevage, pour d'autres elle constitue la matière première dans le financement de leur activité pastorale au quotidien. Nombreux sont ceux qui ont avoué vivre grâce au financement de leur association au quotidien :

Si nous vivons c'est grâce aux tontines donc vraiment les tontines ont un rôle très important. Parce que grâce à la solidarité, grâce aux échanges grâce au partage, nous les éleveurs particulièrement ceux de mon domaine, nous bénéficions de sagesse de beaucoup d'intelligence, de beaucoup d'expérience qui nous permettent de booster notre activité (entretien du 07 fevrier avec Pierre d'ADJAS à Eloumdem).

L'objectif de cette évaluation était d'apprécier d'une part les effets du système tontinier dans la pratique de l'entrepreneuriat jeune à partir du cas des associations EMERCOM et ADJAS. En effet, sur la base de nombreux indicateurs de mesure de la performance entrepreneuriale tels que : la productivité de l'activité, le taux de croissance de l'entreprise, l'augmentation du capital des entrepreneurs, les résultats montrent que les mécanismes de financement initiés par ces deux associations influencent positivement la dynamique entrepreneuriale des bénéficiaires. De plus, ces réseaux tontiniers ont un effet positif sur la croissance des activités de ces entrepreneurs, notamment sur la production et la croissance de l'entreprise. D'autre part, l'évaluation des différentes mesures d'accompagnements initiées par ces associations avait pour but de dégager la nature du rapport qui existe entre le système tontinier et la pratique de l'entrepreneuriat pastoral jeune. De l'évaluation faite nous aboutissons à la conclusion selon laquelle le système tontinier est un levier de financement pour de nombreux jeunes entrepreneurs. À travers la mobilisation des théories des représentations

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sociales et des réseaux, et sur la base des entretiens menés auprès des entrepreneurs et des responsables de ces associations, il ressort clairement que le système tontinier est un outil de financement indispensable dans la gestion des entreprises des entrepreneurs des associations EMERCOM et ADJAS. À travers les ressources économiques dont ils bénéficient dans l'association, les entrepreneurs parviennent à financer la gestion, et le démarrage de leur entreprise. Ces réseaux de financement informel permettent ainsi de palier effectivement aux problèmes de financement dont font face les jeunes entrepreneurs en difficultés. Ce qui nous permet ainsi de répondre à notre question de recherche principale et de confirmer notre hypothèse de recherche relative.

En somme le système tontinier se présente comme une réponse voire un tremplin pour certains entrepreneurs ayant des restrictions d'accès, voir exclus du système bancaire formel. En effet, il permet aux entrepreneurs d'avoir des facilités d'emprunts pour financer leur activité génératrice de revenus malgré que les ressources soient parfois limitées ou insuffisantes pour certains. Grâce à leur système de solidarité fondé sur une conscience collective (financier, relationnel, social), leurs influences est-elle qu'elles vont au-delà de la vie économique, et touche à presque tous les plans de la vie sociale de ces jeunes entrepreneurs.

CONCLUSION GÉNÉRALE

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En mettant au centre de cette réflexion la problématique du financement de l'entrepreneuriat, le présent travail s'est consacré à étudier le système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé à partir des cas des associations EMERCOM et ADJAS. L'objectif de cette recherche était d'identifier et d'apprécier la contribution du système tontinier des associations EMERCOM et ADJAS dans le développement de l'entrepreneuriat pastoral à Yaoundé. En effet, la question du financement de l'entrepreneuriat, plus précisément l'entrepreneuriat jeune au Cameroun reste d'actualité. Le nombre de jeunes en situation de chômage et ceux en quête de ressources financières pour démarrer une activité économique connait des proportions inquiétantes. Malgré les différentes mesures mises sur pied par l'Etat camerounais afin de lutter contre le chômage des jeunes et favoriser l'inclusion financière pour tous, le problème du développement de l'entrepreneuriat se pose toujours. En effet, les formalités administratives et les conditions dans l'octroi des crédits de financement ne sied pas aux réalités de ces jeunes à faibles revenus. Face à la difficulté des institutions de crédit formel à accorder des ressources aux entrepreneurs du secteur informel, particulièrement les jeunes se tournent vers les circuits de financements informels à l'instar du système des tontines. Il s'agit d'un regroupement d'amis, de voisins, de collègues ou de ressortissants d'une même tribu réunis autour d'un même idéal, à côté duquel ils décident de mettre de côté un peu d'argent à travers un système de cotisation pour s'entraider les uns les autres.

Cette observation faite a permis de formuler comme question centrale : Comment les associations EMERCOM et ADJAS contribuent-elles au développement de l'entrepreneuriat pastoral à travers leur système tontinier ? À cette interrogation qui était au coeur de cette réflexion, l'hypothèse retenue soutenait que les associations EMERCOM et ADJAS contribuent au développement de l'entrepreneuriat pastoral en accordant des crédits et en accompagnant leurs membres dans la réalisation d'activités entrepreneuriales

Le travail de vérification de l'hypothèse s'est déroulé sur le terrain grâce au cadre théorique et méthodologique. Comme modèle théorique, trois principales théories ont été mobilisée à savoir une théorie de petite portée (la théorie du don/contre-don), une théorie de moyenne portée (la théorie des réseaux) et une théorie de grande portée (la théorie des représentations sociales). L'usage de ces trois théories a non seulement permis de confronter nos hypothèses à l'épreuve des faits, mais également d'analyser et d'interpréter nos données de terrain. L'opérationnalisation de la théorie du don/contre-don a révélé que le système tontinier à Yaoundé fonctionne sur un triple principe : « donner-recevoir-rendre ». Lorsqu'un membre bénéficie de la somme du jour, il a l'obligation de cotiser au prochain tour afin que les autres

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bénéficient à leur tour, dans un système d'échange rotatif. La théorie des représentations sociales pour sa part a permis de comprendre les images, les perceptions et la place qu'occupe le système tontinier dans leur entreprise. Par ailleurs, la théorie des réseaux quant à elle a servi à dégager et d'apprécier l'influence du réseau associatif dans la dynamique entrepreneuriale des membres.

La collecte des données s'est faite à travers l'usage des techniques et outils de collectes de données non probabilistes. Sur la base d'une enquête qualitative réalisée auprès de deux associations tontinières constituée d'éleveurs, entre autres le comité de direction et les membres entrepreneurs, trois techniques de collecte des données ont étés mobilisées dans le cadre de la production des données. C'est dans ce sens que l'entretien semi directif et l'observation directe ont permis de faire des descentes sur le terrain pour collecter des données. L'observation documentaire a permis de collecter toutes sortes de documents et divers rapports permettant ainsi de rendre compte de la question du système tontinier et de l'entrepreneuriat.

L'analyse des données collectées via ces différentes techniques s'est faite grâce à la méthode de l'analyse de contenu. Des lors, les résultats obtenus à la suite de ces analyses ont conduit aux constats selon lesquels : les populations à faibles revenus entre autres les jeunes exclus du système financier formel ont plus de facilités dans la finance informelle à l'instar du système tontinier. Ces ressources financières leurs permettent ainsi de financer des activités entrepreneuriales à l'instar de l'élevage des volailles et des porcins afin de s'en sortir au quotidien. Cet état de chose renseigne suffisamment sur le fait que le secteur de la finance informelle est un pourvoyeur d'emploi pour les jeunes entrepreneurs à faibles revenus exclus des services bancaires formels.

Le travail a été divisé en deux principales articulations. La première partie qui s'articulait autour du système tontinier et la création des richesses a été structurée en deux chapitres. Dans le premier chapitre nous a fait un tour d'horizon sur la sociogenèse et l'émergence du système tontinier dans le monde. Il était question pour nous de retracer les différents parcours historiques du phénomène tontinier dans le monde, à travers l'origine du concept, les modes de fonctionnement et la nature des échanges. Cette réflexion a permis de comprendre que le système tontinier existe depuis longtemps dans les sociétés traditionnelles régis autour d'échanges de services (donner-recevoir-rendre) et dont l'apparition de la monnaie aurait modernisée cette pratique du tout au tout. En effet, le système tontinier aujourd'hui est régi par un ensemble de règles formalisées et de divers services financiers allant de la cotisation au prêt en passant par l'épargne.

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Le deuxième chapitre du travail, s'est attelé à présenter la contribution du système tontinier aux activités économiques. Il était question à ce niveau de présenter la problématique de l'inclusion financière en Afrique et au Cameroun, la nature des motivations des individus, la question de l'accès aux ressources financières, les motivations du recourt au système des tontines et l'apport de ce système dans les activités entrepreneuriales des adhérents. La réflexion menée dans ce chapitre a permis de comprendre que la conjoncture économique qui est au centre des motivations des entrepreneurs et la rigueur du système bancaire les orientent vers d'autres sources de financement parmi lesquelles le système des tontines. En effet les lourdeurs du système bancaire officiel les auraient ouverts la voie à d'autres opportunités de financement pour s'épauler afin d'entreprendre une activité génératrice de revenu au quotidien. C'est ce qui a aidé à saisir la contribution du système tontinier aux activités économiques en termes de services financiers tels que l'épargne et l'emprunt. Elle a également permis de comprendre que cet apport ne se réduit pas seulement au plan financier, elle concerne également l'aspect relationnel fondé sur les conseils et la formation.

La deuxième partie du travail, s'intéressé à la dynamique financière du système tontinier à Yaoundé à partir de deux associations cibles à savoir EMERCOM et ADJAS. Elle était divisée en deux chapitres également, le troisième chapitre portait sur les mécanismes de financement des activités entrepreneuriales au sein des associations EMERCOM et ADJAS. La mobilisation de la théorie du Don/contre-don dans ce chapitre a servi à présenter et analyser le mode de fonctionnent de ces associations. Cette présentation a permis de nous rendre compte que ces regroupements fonctionnent sur la base d'un règlement intérieur allant des membres du bureau à l'assemblée générale. De plus, il a été ressorti trois principaux modes d'accès au financement auxquels recourent ces entrepreneurs pastoraux. Il s'agit entre autres de la cotisation mensuelle, de la caisse d'épargne et de la caisse de prêt, qui sont les principaux moyens mobilisés par ces entrepreneurs pour financer leurs activités.

Dans le quatrième et dernier chapitre du travail, il a été mené une réflexion qui s'articulait autour de l'analyse et de l'évaluation de la contribution du système tontinier au développement de l'entrepreneuriat pastoral. À partir de la théorie des représentations sociales et la théorie des réseaux, il était question d'analyser les perceptions de ces éleveurs sur la tontine afin de mieux évaluer l'apport de ces associations dans les activités des membres. L'analyse des représentations des entrepreneurs pastoraux sur le système tontinier à enrichir cette recherche. En effet, elle a permis de comprendre que la tontine est le principal moyen de financement de ces jeunes exclus dans l'accès aux services bancaires. Non seulement elle représente leur banque, mais également elle constitue le principal socle sur lequel s'appuie ces

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jeunes entrepreneurs au quotidien. Malgré le fait que les montants octroyés sont parfois insuffisants pour financer des activités de grande envergure, elle constitue pour ces derniers un outil de financement non négligeable dans la vie économique.

Grâce à l'évaluation faite à partir de la théorie des réseaux, et des données de terrains, nous avons pu interpréter l'influence des associations EMERCOM et ADJAS dans les activités de leurs membres. L'interprétation de ces données nous a donné l'occasion d'apprécier la contribution de ces deux associations dans les activités des entrepreneurs. En effet ces associations de par leurs mécanismes d'abord financiers boostent la dynamique entrepreneuriale de leurs membres. Pour certains, elle a permis d'accroitre leur activité, pour d'autres, de financer le démarrage. De plus de par leur capital relationnel, elles ont permis aux membres de se soutenir à travers des conseils et des formations utiles dans la gestion de leur entreprise. Toutefois, l'interprétation des données suggère aussi que ces organisations en tant que moyens de financement privilégié par les petits et moyens entrepreneurs ne peuvent assumer le rôle de système formel. Les systèmes tontiniers sont des associations qui donnent des montants parfois insuffisants pour répondre aux besoins des entreprises de grandes tailles.

Somme toute, notre analyse relève l'importance et l'utilité du système informel de crédit, particulièrement le système tontinier en contexte camerounais. La participation aux réseaux tontiniers permet aux entreprises qui ont été étudiées d'émerger au quotidien. Cependant au regard du contexte financier actuel, certains de nos enquêtés ont émis des suggestions en faveur de l'amélioration du financement des activités entrepreneuriales jeunes. Ces suggestions ont été évoquées à l'endroit des pouvoirs publics on peut ainsi noter :

Ø Encourager les jeunes porteurs de projets inscrits dans les associations, en les aidant, les finançant afin que ces derniers puissent jouer un rôle ;

Ø Accompagner les tontines pour fructifier l'activité au lieu d'imposer des taux qui ont un impact négatif par rapport à la tontine ;

Ø Mettre sur pied des meilleurs moyens pour favoriser l'inclusion financière de tous ;

Ø Mettre la jeunesse au centre des préoccupations.

Cette recherche constitue donc une contribution à la littérature existante, notamment en ce qui concerne l'utilisation des AERC par les jeunes entrepreneurs informels pour financer la gestion et le démarrage de leurs activités. Dans la littérature qui existe sur les associations informelles d'épargnes et de crédits, l'ensemble des études a conclu sur la place de ces regroupements dans le financement. En abordant dans le détail la question des motivations au recourt à ces associations et surtout la manière dont les ressources y sont mobilisées, nous avons

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pu comprendre la nature des rapports qui existe entre le phénomène tontinier et le phénomène entrepreneurial informel. La contribution de cette recherche réside donc dans l'identification des pratiques liées au système tontinier chez les jeunes entrepreneurs en contexte camerounais, contexte caractérisé par les difficultés d'accès aux services financiers formels.

Nous n'avons pas la prétention d'avoir parcouru tous les contours de notre Object de recherche. À la suite de cette recherche, nous souhaitons réaliser une étude plus vaste en explorant les entreprises formelles de grandes tailles au Cameroun. Cela pourrait permettre une saisie en profondeur de la contribution de ce secteur dans le système financier camerounais afin de mieux enrichir notre objet de recherche.

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7-Rapports

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8-Textes juridiques et documents administratifs

Décret N°2017/0467/PM 08 février 2017 portant création et mise en oeuvre du « plan triennal spécial jeunes ».

Décret N°2011/26 du 23 mai 2011 portant création du « PIAASI ».

Décret N°2011/408 du 09 décembre 2011 portant « mise en oeuvre de l'éducation civique et élaboration des programmes ».

Loi N°2020/018 du 17 décembre 2020 portant loi de financement de la république du Cameroun pour la banque camerounaise des petites et moyennes entreprises.

Loi N°21/026 du 16décembre 2021 portant loi de finances de la république du Cameroun pour l'exercice 2022, consulté le 18décembre 2021.

9-Sources internet et webographie

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ANNEXES

129

130

ANNEXE 1 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX ENTREPRENEURS DE

L'ASSOCIATION

Bonjour/Bonsoir Monsieur/Madame, je m'appelle MELI YIMDJI Jordan Cédric étudiant à l'université de Yaoundé 1 en Master 2 sociologie. Dans le cadre d'une recherche purement académique portant sur le système tontinier dans le financement de l'entrepreneuriat pastoral jeune à Yaoundé, le présent guide d'entretien construit à cet effet vise à recueillir les informations utiles dans le cadre de mon travail de recherche académique. Je désire ainsi m'entretenir avec vous dans un intervalle de 10 à 15 min tout en vous garantissant de l'anonymat et de la confidentialité de vos réponses. Je vous prie de répondre précisément et sincèrement aux questions ci-dessous.

Section 0 : identification de l'enquêté

· Noms et Prénoms

· Sexe

· Lieu de résidence

· Age

· Profession ou activité professionnelle

· Statut matrimonial

Section 1 : Généralité sur les tontines et mode d'organisation

- Etes-vous membre d'une association ? si oui comment s'appelle-t-elle ?

- Depuis quand êtes-vous membre de cette association ?

- Comment avez-vous connu cette association ?

- Pourquoi avez-vous décidé d'y adhérer ?

- Existe-il une tontine au sein de cette association ?

- D'après-vous en quoi consiste la tontine ?

- En êtes-vous membre ? si oui pourquoi ?

- Quelles sont les conditions à remplir pour être membre de votre tontine ?

- Selon vous comment fonctionne cette tontine ?

Section 2 : système tontinier et mécanisme d'accès au financement

- Qu'est-ce qui vous a motivé à démarrer votre activité entrepreneuriale ?

- Par quels moyens avez-vous financé votre activité depuis le départ jusqu'à présent ?

131

- Quels sont les moyens initiés par l'association pour soutenir les membres dans leur activité ?

- Avez-vous bénéficié d'un prêt de votre tontine ? si oui, sous quelles conditions (taux d'intérêt, durée de remboursement, avaliste, garanties) ?

- En dehors des apports financiers, l'association dispose-t-elle d'autres moyens d'accompagnements ?

- Ces aides ont-elles réellement contribuées à l'objectif désiré ?

- Quelle est l'importance de cet accompagnement dans la performance de votre activité ?

SECTION 3 : contribution du système tontinier dans les activités entrepreneuriales

- Que pensez-vous du système tontinier dans le financement des activités entrepreneuriales ?

- Quel est l'apport du système tontinier dans votre activité entrepreneuriale ?

- Quelles propositions pouvez-vous faire en vue de l'amélioration du financement des activités entrepreneuriales des jeunes ?

132

ANNEXE 2 : GUIDE D'ENTRETIEN DESTINE AUX MEMBRES DU BUREAU

SECTION 0 : identification de l'enquêté

· Noms et Prénoms

· Sexe

· Lieu de résidence

· Age

· Profession ou activité professionnelle

· Statut matrimonial

Section 1 : Généralité sur les tontines et mode d'organisation

- Comment s'appelle votre association ?

- En quelle année et dans quel contexte a-t-elle vue le jour ?

- Quel est le but de votre association ?

- Quel poste occupez-vous au sein de cette association ?

- Combien de membre compte votre association ?

- L'association est-elle légalisée ?

- Existe-il une tontine au sein de cette association ? si oui pourquoi ?

- Tous les membres de l'association font-ils partir de l'association ? si oui pourquoi ?

- Quelles sont les conditions à remplir pour être membre de l'association ?

- Pouvez-vous nous expliquer comment fonctionne la tontine dans cette association ?

(Cotisation, épargne, fréquences de rencontres, prêt...)

Section 2 : système tontinier et mécanisme d'accès au financement

- Dans quel secteur d'activité exercent les membres de l'association ?

- Quelles sont les différents points sur lesquels porte la tontine lors des séances ?

- Comment l'association procède-t-elle pour encourager le développement des activités

des membres ?

- L'association accorde-t-elle des prêts ? si oui sous quelles conditions ?

- Selon vous ces prêts permettent-ils de financer les activités membres bénéficiaires ?

Section 3 : influence de la contribution du système tontinier aux activités économiques

- Comment l'association procède-t-elle pour s'assurer de l'usage des montants empruntés par les membres dans le développement de leur activité entrepreneuriale ?

- Selon vous ces aides permettent-ils véritablement à ces jeunes entrepreneurs de mieux gérer leur activité ?

- Que pensez-vous de la contribution de votre association dans le développement des activités des entrepreneurs membres ?

133

ANNEXE 3 : ATTESTATION DE RECHERCHE

134

TABLE DES MATIÈRES

DÉDICACE i

REMERCIEMENTS ii

SOMMAIRE iii

LISTES DES TABLEAUX ET DES IMAGES iv

LISTE DES ANNEXES v

LISTE DES ABRÉVIATIONS, ACRONYMES ET SIGLES vi

RÉSUMÉ vii

ABSTRACT viii

INTRODUCTION GÉNÉRALE 1

1- CONTEXTE ET JUSTIFICATION 2

2- PROBLÈME DE RECHERCHE 4

3- PROBLÉMATIQUE 6

4- QUESTION DE RECHERCHE 15

4-1- Question de recherche principale 15

4-2- Questions de recherche secondaires 15

5- HYPOTHÈSE DE RECHERCHE 16

5-1- Hypothèse de recherche principale 16

5-2- Hypothèses de recherche secondaires 16

6- OBJECTIFS DE RECHERCHE 16

6-1- Objectif principal 17

6-2- Objectifs spécifiques 17

7- CADRE ÉPISTÉMOLOGIQUE ET THÉORIQUE 17

7-1- Cadre épistémologique 18

7-2- Cadre théorique 18

7-2-1- La théorie des représentations sociales 18

7-2-2- La théorie des réseaux sociaux 19

7-2-3- La théorie du Don/contre-don 20

8- CADRE MÉTHODOLOGIQUE 22

8-1- Techniques et outils de collecte des données 22

8-1-1- La recherche documentaire 22

135

8-1-2- L'entretien semi-directif 23

8-1-3- L'observation directe 23

8-1-4- Outil de collecte 24

8-2- L'échantillonnage 24

9- DÉLIMITATION DE L'ÉTUDE 24

9-1- Délimitation dans l'espace géographique 25

9-2- Délimitation dans l'espace social 25

10- CLARIFICATION CONCEPTUELLE 26

11- TECHNIQUE D'ANALYSE DES DONNÉES 28

12- PLAN DU TRAVAIL 29

PREMIÈRE PARTIE : SYSTÈME TONTINIER ET CRÉATION DES RICHESSES 31

CHAPITRE 1 : SOCIOGENÈSE ET ÉMERGENCE DU SYSTÈME TONTINIER 33

1- SOCIOGENÈSE ET ÉVOLUTION DU SYSTÈME TONTINIER 33

1-1- La sociogenèse du système tontinier 33

1-2- L'émergence du système tontinier dans le monde 34

1-2-1- En Asie 34

1-2-2- En Amérique 36

1-2-3- En Europe 36

1-2-4- En Afrique 37

2- TYPOLOGIES ET FORMES DE SYSTÈMES TONTINIERS DANS LE MONDE 40

2-1- La tontine Mutuelle ou Tournante 41

2-2- La tontine commerciale 41

2-3- Les tontines Financières 42

3- LE FONCTIONNEMENT DU SYSTÈME TONTINIER AU CAMEROUN 44

3-1- Cadre légal 44

3-1-1- Création et adhésion au système tontinier 45

3-2- L'organisation du système tontinier 46

3-2-1- Les acteurs 46

3-2-2- Le règlement intérieur dans le système tontinier 47

3-2-3- La réunion 48

3-2-4- Les activités financières 49

3-3- La durée de la tontine 51

3-4- La finalité du système tontinier africain 51

3-5- Le statut du système tontinier au Cameroun 53

136

CHAPITRE 2 : LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX ACTIVITÉS

ÉCONOMIQUES 54

1- LA PROBLÉMATIQUE DE L'INCLUSION FINANCIÈRE EN AFRIQUE ET AU

CAMEROUN 54

1-1- La notion d'inclusion financière 55

1-1-1- Quelques indicateurs de l'inclusion financière en Afrique 55

1-1-2- Les enjeux de l'inclusion financière en Afrique. 56

1-1-3- Les barrières à l'inclusion financière en Afrique 56

1-1-4- L'inclusion financière au Cameroun : bref état des lieux 57

1-2- Les motivations à l'entrepreneuriat des couches sociales à faible revenus 58

1-2-1- Le model PULL et PUSH des motivations entrepreneuriales 59

1-2-2- Les facteurs motivationnels négatifs et positifs/économiques et non économiques 60

2- LES SECTEURS D'ACTIVITÉS DES ENTREPRENEURS AU CAMEROUN 63

2-1- Le secteur informel 64

2-2- Les différentes formes d'entreprises 67

2-3- L'accès au financement entrepreneurial 69

3- LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER AUX ACTIVITÉS ÉCONOMIQUES

70

3-1-Les déterminants du recourt au système tontinier 70

3-1-1- L'apport du système tontinier aux activités économiques 71

3-1-2- Le concept d'accompagnement en entrepreneuriat 74

DEUXIÈME PARTIE : LA DYNAMIQUE FINANCIÈRE DU SYSTÈME TONTINIER

77
CHAPITRE 3 : LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES ACTIVITÉS ENTREPRENEURIALES AU SEIN DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS . 79
1. PRÉSENTATION ET MODE DE FONCTIONNEMENT DES ASSOCIATIONS

EMERCOM ET ADJAS 80

1-1- L'association EMERCOM 80

1-1-1- Objectif de l'association EMERCOM 80

1-1-2- Le cadre légal 81

1-1-3- L'organisation structurelle 82

1-1-4- Les activités entrepreneuriales des membres 83

1-1-5- Les réunions 83

1-1-6- Les opérations financières 84

137

1-1-7- Les autres activités de l'association 84

1-1-8- L'assistance 85

1-2- L'association ADJAS 85

1-2-1- L'objectif de l'association ADJAS 85

1-2-2- Le cadre légal 86

1-2-3- L'organisation structurelle 86

1-2-4- Les activités entrepreneuriales des membres 87

1-2-5- Les réunions 87

1-2-6- Les opérations financières 87

1-2-7- L'assistance 88

2- LES MÉCANISMES DE FINANCEMENT DES ACTIVITÉS PASTORALES PAR LES

ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS 89

2-1- Les mécanismes de financement des activités pastorales à EMERCOM 89

2-1-1- La cotisation mensuelle 90

2-1-2- L'épargne 90

2-1-3-L'emprunt 91

2-1-4-La caisse d'investissement 92

2-2-Les mécanismes de financement à ADJAS 92

2-2-1- Les cotisations mensuelles 93

2-2-2- La caisse d'épargne 94

2-2-3- La caisse de prêt 94

3- LES AUTRES FORMES D'ACCOMPAGNEMENTS AU SEIN DES ASSOCIATIONS

EMERCOM ET ADJAS 95

3-1- L'accompagnement relationnel à EMERCOM 95

3-2- L'accompagnement relationnel à ADJAS 97

CHAPITRE 4 : ANALYSE ET ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DES ASSOCIATIONS EMERCOM ET ADJAS AU DÉVELOPPEMENT DE

L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL 99
1- LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES DU SYSTÈME TONTINIER CHEZ LES

JEUNES ENTREPRENEURS PASTORAUX À YAOUNDÉ 100

1-1- Le système tontinier : un outil de financement des jeunes et petits entrepreneurs 101

1-2- Le système tontinier : une caisse d'accumulation des épargnes pour les projets 101

1-3- Le système tontinier : un outil d'inclusion financière pour les couches défavorisées 102

1-4- Le système tontinier : une caisse d'assurance 103

138

1-5- Le système tontinier : un outil de création des emplois et des richesses pour les

populations à faibles revenus 104

1-6- Le système tontinier : un outil de financement limité 105

2- ÉVALUATION DE LA CONTRIBUTION DU SYSTÈME TONTINIER DANS LE

DÉVELOPPEMENT DE L'ENTREPRENEURIAT PASTORAL À YAOUNDÉ 106
2-1- Évaluation de la contribution des associations EMERCOM et ADJAS dans le

développement de l'entrepreneuriat pastoral 107

CONCLUSION GÉNÉRALE 114

BIBLIOGRAPHIE 120

ANNEXES 129

TABLE DES MATIÈRES 134






La Quadrature du Net

Ligue des droits de l'homme