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Performance et evaluation du cocontractant de l'administration, approche managériale de la commande publique

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par Arthur MALANDIN
Université d'Aix-Marseille  - Master II Droit des contrats publics et droit public des affaires  2016
  

Disponible en mode multipage

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UNIVERSITE D'AIX-MARSEILLE

 

Année universitaire 2016-2017

FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE

PERFORMANCE ET EVALUATION DU

COCONTRACTANT DE L'ADMINISTRATION

Approche managériale de la commande publique.

Mémoire pour l'obtention du Master II mention Droit public des affaires et droit des
contrats publics, parcours contrats publics.

Arthur MALANDIN

Sous la direction de Monsieur le Professeur Florian LINDITCH

Année universitaire 2016-2017

UNIVERSITE D'AIX-MARSEILLE

FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE

PERFORMANCE ET EVALUATION DU

COCONTRACTANT DE L'ADMINISTRATION

Approche managériale de la commande publique.

Mémoire pour l'obtention du Master II mention Droit public des affaires et droit des contrats publics, parcours contrats publics.

Arthur MALANDIN

Sous la direction de Monsieur le Professeur Florian LINDITCH

« La faculté n'entend donner aucune approbation ou improbation aux opinions contenues dans ce mémoire qui doivent être considérées comme propres à leur auteur »

A mes parents, mon frère, mes grands-parents, pour leur soutien sans faille durant ses longues mais magnifiques années d'études, votre étudiant reconnaissant.

Remerciements

REMERCIEMENTS

VII

À Monsieur le Professeur Florian LINDITCH, directeur de ce présent mémoire, pour son écoute et ses conseils avisés, sans qui ce mémoire aurait une toute autre allure j'adresse l'expression de mes salutations les plus respectueuses.

À Monsieur LEFEBVRE, avec qui ces 5 ans de faculté côte à côte ont été un réel plaisir. Pour son amitié, son aide et sa patience il mérite mille fois d'être mentionné dans ces remerciements.

À mes amis Messieurs BERNARDINI, LAMY, SEDAT et GARNERONE, pour leur présence et leur soutien tout au long de cette belle aventure que fut la seconde année de master. Puisse le sort leur être favorable lors de leurs échéances futures.

A Madame DI COSTANZO GONZALEZ, sans qu'il soit besoin de le justifier.

IX

Sommaire

SOMMAIRE

PREMIERE PARTIE - UNE EVALUATION ANTICIPEE DU FUTUR COCONTRACTANT PREALABLE A LA CONCLUSION DU CONTRAT

CHAPITRE PREMIER - UNE EVALUATION PREMATUREE MAIS AVANTAGEUSE DES OPERATEURS PRIVES EN AMONT DE LA PUBLICATION

CHAPITRE SECOND - UNE CONSTANTE EVALUATION DES CANDIDATS, DE LA RECEPTION DES OFFRES A LA CONCLUSION DU CONTRAT

SECONDE PARTIE - UNE EVALUATION PERMANENTE DU COCONTRACTANT DES LA CONCLUSION DU CONTRAT

CHAPITRE PREMIER - L'INTERET D'UNE EVALUATION DU COCONTRACTANT LORS DE

L'EXECUTION DU CONTRAT : UN BENEFICE BRUT POUR L'ADMINISTRATION

CHAPITRE SECOND - LES METHODES MODERNES D'EVALUATION DU COCONTRACTANT : L'UTILISATION D'OUTILS DE MANAGEMENT PRIVE DANS LA COMMANDE PUBLIQUE

XI

Table des abréviations

TABLE DES ABREVIATIONS

AJCT Actualité juridique - Collectivités territoriales

BOAMP Bulletin officiel des annonces de marchés publics

CAA Cour administrative d'appel

CADA Commission d'accès aux documents administratifs

CCI Chambre du commerce et de l'industrie

CP-ACCP Le Moniteur - Contrats publics

CE Conseil d'État

CJCE Cour de justice des Communautés européennes

CJUE Cour de justice de l'Union européenne

Contrats-Marchés pub. Contrats et marchés publics

DAJ Direction des affaires juridiques - Ministère de

l'économie

DGA Directeur général adjoint

DGS Directeur général des services

EPCI Établissement public de coopération intercommunale

JCl. JurisClasseur

JCP A La Semaine juridique - Administration et collectivités

territoriales

JOUE Journal officiel de l'Union européenne

JORF Journal officiel de la République française

Ibid. Ibidem

MAPA Marché à procédure adaptée

OEAP Observatoire économique de l'achat public

op. cit. Opus citatum

Rec. Recueil Lebon

RFDA Revue française de droit administratif

RRJ Revue de la recherche juridique

« Il faut oser en tout genre ; mais la difficulté, c'est d'oser avec sagesse »

Bernard LE BOUYER DE FONTENELLE

15

Introduction

INTRODUCTION

1. La performance est une notion assez largement étudiée dans le droit de

la commande publique, notamment depuis la dernière décennie. En effet, les études doctrinales et pratiques y afférent sont nombreuses1. En outre, le législateur s'est assez largement intéressé à la nécessité de performance dans l'achat public et il est clair que le mouvement est à l'accentuation de cette posture. Ainsi, depuis l'ordonnance du 17 juin 20042 créant les contrats de partenariat et mettant en place un système complexe d'évaluation permanente du partenaire de l'Administration, il semble bien que la notion de performance ait irrigué plus largement tout le droit de la commande publique. Nous prendrons à titre d'exemple les récents décrets « marchés »3 et « concessions »4 pris en application des ordonnances du 23 juillet 20155 et du 29 janvier 20166, qui tous deux contiennent de nombreuses dispositions relatives à l'incitation du cocontractant de l'Administration à la performance. L'article 17 du décret « marchés » prévoit ainsi en son alinéa 2 que des clauses incitatives de performance peuvent être intégrées dans les marchés. De plus, l'article 27 du décret « concessions » mentionne quant à lui la possibilité pour l'autorité concédante de relancer une procédure d'attribution d'une concession face à une offre particulièrement performante dont elle ne pouvait prévoir la teneur. Ces exemples démontrent bien que la performance est aujourd'hui une donnée véritablement importante du droit de la commande publique.

1 Voir par exemple ECKERT (Gabriel), « Précisions sur le déroulement de la procédure d'appel d'offres sur performances », Contrats-Marchés pub., 2001, n°10, p. 15 ; FREROT (Olivier), « La performance dans les contrats administratifs », RRJ, 2005/4, p. 2359 ; RAYMUNDIE (Olivier) et PINTAT (Pierre), « Clauses incitatives : les primes de performance dans les marchés publics », CP-ACCP, 2010, n°97, p. 59 ; TONETI (Dominique), « Le contrat de performance énergétique », CP-ACCP, 2010, n°96, p. 65 ; ROUVEYRAN (Thomas) et JEANNEAU (Élisa), « La rédaction des clauses relatives à la performance dans les marchés publics », CP-ACCP, 2015, n°159, p. 70.

2 Ordonnance n°2004-559 du 1è juin 2004 sur les contrats de partenariat, JORF du 19 juin 2004, p. 10994, texte n°2.

3 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, JORF du 27 mars 2016

4 Décret n°2016-86 du 1et février 2016 relatif aux contrats de concession, JORF du 2 février 2016, texte n°20

5 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, JORF du 24 février 2015, texte n°38

6 Ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession, JORF du 30 janvier 2016, texte n°66

16

Introduction

2. La définition de la performance. La performance fait partie de ces
concepts importés en droit d'autres domaines d'étude et qui traduit une certaine tendance à la « marchéisation » du droit. Partant, elle ne dispose pas de définition juridique bien ancrée et ne peut, à notre sens, se voir attribuer le qualificatif de concept juridique à part entière. Si nous en revenons à l'étymologie du terme, nous découvrons que le vocable actuel de performance semble issu de la réception anglo-saxonne de la préposition latine per associée au verbe formare, former. Ainsi, la performance représente l'idée d'achèvement, d'accomplissement et le mot était principalement utilisé, au XIXème siècle en matière de sports hippiques. Par une généralisation de son sens, il est tout naturel que sur l'idée d'achèvement se soit greffée celle d'efficacité.

La performance traduit donc l'idée d'une action menée de manière efficace et selon des objectifs préalablement fixés.

3. Performance et achat public. Il convient de rappeler à juste titre que
l'Administration lors de l'exécution de ses processus de commande publique visant tant à assouvir ses besoins internes que de poursuivre ses missions d'intérêt général adopte dans une certaine mesure la posture qu'un opérateur privé adopterait sur un marché concurrentiel. En ce sens que la commande publique repose en grande partie sur la dépense des deniers publics une performance doit sans cesse être recherchée. A ce titre la performance se découvre alors tant lors des phases de passation où elle s'exprime par la recherche de la légalité et de la sélection de l'offre la plus économiquement avantageuse que lors des phases d'exécution du contrat où elle s'exprime sous un facteur d'efficacité et de réponse à l'intérêt général.

De facto performance et achat public sont intrinsèquement liés puisqu'au delà d'une simple sécurisation juridique de l'acte d'achat un élément politique entre en compte dans la recherche de la réduction des prix et d'une exécution efficiente.

En outre, la performance dans l'achat public apparaît comme protéiforme étant donné qu'elle touche à différents éléments dont la commande publique est l'instrument, comme la protection sociale ou encore la prise en compte des exigences environnementales, au-delà de la stricte performance économique dont l'importance en terme d'achat public se traduit aussi en protection des deniers publics.

17

Introduction

4. Achat public et management. De par la l'attitude similaire à un
opérateur privé que revêt l'Administration lors de ses actes relatifs à la commande publique celle-ci adopte nécessairement et implicitement des démarches et des reflexes propres au secteur privé. Si le management se résume à un ensemble de tâches dissociables ayant pour but d'atteindre les objectifs fixés alors l'acheteur, dans un soucis de performance, doit à son tour adopter une posture managériale, pourtant issue du domaine privé des affaires.

En cela achat public et management restent indissociables en ce qu'un achat public performant -qui est une nécessité- ne peut s'atteindre que par des actes de management et une approche managériale globale.

L'acheteur doit donc conserver cette double vision qu'est la recherche de la performance globale de ses achats et la démarche managériale y afférent.

5. Intérêt de la recherche. L'intérêt de la recherche et la volonté de rédiger
ce mémoire est tant né d'une expérience professionnelle que de recherches personnelles antérieures. Il s'avère qu'à la suite de ce que nous avons pu observer de la part d'acheteurs le simple terme « performance » n'était pas appréhendé explicitement ou de la bonne manière lors des processus de décision, se résumant dans la plupart des cas à la recherche d'une diminution du prix. Le contexte actuel que nous connaissons est extrêmement particulier puisque crise économique s'allie avec la réticence des contribuables français non seulement vis à vis de l'Administration, mais également vis à vis de l'impôt en lui même. De ces différents constats est né l'intérêt de ce mémoire et l'objectif d'apporter de nouvelles solutions aux acheteurs.

De même la performance globale de l'achat public peut être non seulement un levier de relance économique, notamment vis à vis des PME-TPE mais peut également permettre de renouer des liens entre administration et administrés, ou tout du moins entre paiement de l'impôt et dépense de celui-ci. Au regard de l'apparence globale que peut revêtir la performance de la commande publique notre choix s'est arbitrairement porté sur l'examen de l'évaluation des cocontractants qui est, à notre sens, l'un des éléments nécessitant la plus grande évolution.

18

Introduction

6. Difficultés de la recherche. La première difficulté rencontrée lors de la
rédaction de ce mémoire porte sur le manque -à notre sens- d'intérêt qu'ont porté les juristes à la vision managériale de la commande publique. Face à ce désintérêt trop peu d'ouvrages ou de références font mention du triple alliage achat public, performance et management. Ce désintérêt se couple d'ailleurs avec les dernières réformes du droit des contrats publics qui, bien qu'essayant d'instaurer un cadre favorable, restent extrêmement timides vis à vis de la recherche de performance en elle même. Sans que cela implique une totale absence de contenu, nos recherches s'en sont trouvées grandement retardées, et il serait justifié de nous reprocher par moment l'approche trop théorique de notre mémoire, là où une approche pratico-pratique aurait été souhaitable.

La seconde difficulté s'est rencontrée lorsque nos recherches nous ont conduites à interroger des acteurs de l'achat public en vue d'obtenir certaines réponses. S'ils s'avèrent que trop peu de décideurs ont une vision pleinement performante de la commande publique nous devons également admettre que nombre d'entres eux n'a aucune réponse à la question de savoir comment intégrer une démarche managériale en vue d'atteindre la performance de l'achat public.

Ces difficultés rencontrées tendent à que ce présent mémoire présente un aspect trop théorique entaché d'un goût d'inachevé. Nous espérons toutefois qu'il contribuera à apporter certaines réponses ou pistes de réflexion aux acheteurs.

7. Plan de la recherche. Notre regard face à ces constats s'est donc
logiquement porté sur l'évaluation des cocontractants de l'Administration. En effet sans évaluation du cocontractant ou en tout cas sans évaluation efficace du cocontractant, comment s'assurer que la mission concédée a été réalisée ? De même en cas de réalisation, comment déterminer la qualité de l'exécution, le respect du cahier des charges, ou le rapport qualité prix ? Cette approche nous semblait particulièrement pertinente en ce qu'un contrat public qualifié de « réussi » est uniquement dû à l'action du cocontractant. Si on admet que ce n'est pas le cas et que l'Administration a eu son rôle à jouer dans la réussite -totalement subjective- d'un contrat, alors c'est qu'elle s'est livrée à un moment ou à un autre à une évaluation du

19

Introduction

cocontractant avant d'agir. La performance d'un contrat repose alors sur deux points de vue : soit le titulaire est seul responsable de cette performance, ce qui implique qu'antérieurement à la passation de ce contrat l'Administration a été performante dans le choix de son cocontractant et s'est donc livrée à la bonne évaluation des candidats, soit la performance du contrat est conjointe, ce qui suppose non seulement une bonne évaluation des candidats mais également une évaluation correcte du cocontractant lors de l'exécution du contrat de sorte que l'Administration ait toutes les clefs en main pour réagir.

Cette dualité de point de vue nous permettra de réfléchir et de constater que, si l'évaluation efficace du cocontractant peut être un facteur de performance de la commande publique, l'évaluation des candidats et des opérateurs privés est également source de performance. Ces deux évaluations bien que distinctes ne peuvent aller l'une sans l'autre au risque d'obtenir un résultat mitigé, incomplet et décevant.

Cette réflexion nous permettra alors de comprendre qu'avant de songer à toute évaluation du cocontractant de l'Administration, il faut agir en amont et évaluer les candidats à un contrat public, dont l'un d'entre eux au minimum deviendra le titulaire. Il convient alors de considérer l'opérateur privé ou le candidat comme un cocontractant par anticipation auquel l'ensemble de ce mémoire s'adresse.

Dès lors, nous adopterons une démarche temporelle pour analyser le management de la performance dans les contrats de la commande publique, en analysant premièrement les techniques d'évaluation par anticipation du futur cocontractant de l'administration (PREMIERE PARTIE) et secondement celles qui portent sur l'évaluation tout au long de la vie du contrat (SECONDE PARTIE).

21

Première partie - Une évaluation anticipée du futur cocontractant préalable à la conclusion du contrat

PREMIERE PARTIE - UNE EVALUATION ANTICIPEE DU
FUTUR COCONTRACTANT PREALABLE A LA CONCLUSION
DU CONTRAT

8. Introduction. S'il est désormais admis qu'une évaluation du
cocontractant de l'administration peut être un facteur de performance de la commande publique, il serait déraisonnable de penser que seule l'évaluation à posteriori de la conclusion du contrat public serait nécessaire. En effet et comme les règles l'imposent,7 la sélection du cocontractant ne peut se faire qu'à la suite d'une procédure stricte, qui nécessite à un moment ou à un autre l'évaluation des candidats.

Il est alors logique qu'en évaluant les candidats, et de facto tous les candidats de la même façon, le service de commande publique sera amené à évaluer son ou ses futur(s) cocontractant(s). Cette évaluation s'inscrit donc dans une logique d'évaluation constante du cocontractant, que ce soit préalablement à la conclusion du contrat, durant l'exécution du contrat, ainsi qu'au terme de celui-ci.

9. Plan. Cette évaluation préalable doit intervenir à différentes échéances
de la conclusion du contrat public, non seulement en amont de la publication (Chapitre premier), mais également de la réception des offres à la conclusion dudit contrat (Chapitre second).

7 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, op. cit, spéc. Chapitre IV : règles de passation.

23

Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

CHAPITRE PREMIER - UNE EVALUATION PREMATUREE MAIS
AVANTAGEUSE DES OPERATEURS PRIVES EN AMONT DE LA
PUBLICATION

10. Introduction. L'évaluation des candidats à un contrat public antérieure
à la conclusion du contrat n'est pas limitée à la simple évaluation des candidats selon les critères de sélection adoptés. En effet, et bien avant que le futur contrat ne soit publié selon les règles de publicité requises en fonction de son seuil, il est déjà possible pour les services de se doter d'éléments d'évaluation.

Si la pratique du sourcing s'est largement démocratisée ces dernières années, et bien que ce ne soit pas sa fonction première, nous démontrerons par l'application stricte de son régime juridique qu'elle peut devenir un outil d'évaluation des candidats (I). Cette pratique qui intervient initialement doit toutefois être conjuguée avec l'élaboration de nouveaux critères de sélection dans une optique d'évaluation performante des candidats (II).

I - La pratique du sourcing comme outil d'évaluation des candidats

11. Si la pratique du sourcing n'est pas récente et est utilisée depuis de
nombreuses années, les évolutions récentes du droit des contrats publics ont permis sa réelle consécration (A.) et autorisent aujourd'hui sa pratique en tant qu'outil d'évaluation sous condition de respect de règles strictes, notamment celles relevant du droit pénal de la commande publique (B.).

A. La consécration du sourcing en droit de la commande publique

12. Le terme de « sourcing » est apparu tardivement en droit de la commande publique (1.), mais ses avantages indéniables ont conduit à une utilisation de plus en plus courante dans la pratique contractuelle (2.).

24

Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

1. L'apparition tardive du terme « sourcing » dans les textes relatifs aux contrats publics

13. Les origines du sourcing. Le sourcing, de l'anglais « to source », est une
étape préalable à tout achat ou recrutement lors de laquelle un responsable va effectuer un travail de recherche et de comparaison dans l'objectif de dégager l'issue la plus favorable, que ce soit en terme de coût, d'avantages ou d'efficacité.

Initialement cet outil qu'est le sourcing provient, comme la majorité des outils de gestion ou de management, du secteur privé ; toutefois le secteur public a réussi le pari de se l'approprier au cours des différentes étapes de modernisation de la puissance publique dans un objectif toujours plus présent de performance8.

14. Le sourcing dans l'achat public : une consécration récente. Au sein des services de la commande publique le sourcing est utilisé lors de l'étape qui précède la phase de lancement de la procédure de passation des contrats publics. Elle permet entre autre au service d'entrer en contact avec ses fournisseurs potentiels afin d'avoir un avis objectif et éclairé sur la réalité du marché et de définir au mieux ses besoins.

Face au risque que peut représenter le sourcing, comme fausser la mise en concurrence future ou vis à vis du délit de favoritisme notamment9, un encadrement juridique était plus que nécessaire10. Grand oublié de l'ordonnance du 23 juillet 201511 relative aux marchés publics, il a fallu attendre son décret d'application du 25 mars 201612 pour voir le sourcing réellement reconnu. Celui-ci dispose explicitement en son article 4 qu'en vue « de préparer la passation d'un marché public, l'acheteur peut

8 Voir à ce sujet Le développement du management dan les services publics : évolution ou révolution ? Chapitre : La place du management dans les réformes administratives françaises. Par Annie Bartoli et Hervé Chomienne 2011. Initialement publié dans Les Cahiers Français, n°339, numéro sur les services publics face aux mutations économiques et sociales, p 42 à 48.

9 La semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du sourçage et de l'obligation de rétablissement de l'égalité lorsque certains opérateurs disposent d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des marchés publics, Introduction, par Florian Linditch.

10 Voir à ce sujet Réforme sur les marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08 avril 2016. http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html

11 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, JORF n°0169 du 24 juillet 2015 page 12602 texte n°28.

12 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, JORF n°0074 du 27 mars 2016 texte n°28.

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

effectuer des consultations ou réaliser des études de marché, solliciter des avis ou informer les opérateurs économiques de son projet et de ses exigences »13.

Il ne faut toutefois pas comprendre que par là que le sourcing est une pratique des plus récente, elle s'inscrit d'ailleurs dans une tradition « centenaire », dont le décret a eu le mérite de reconnaître l'existence. En effet, et sans nécessairement être connue sous cette désignation, cette pratique assimilable à une consultation préalable des opérateurs privés était largement exercée, notamment ces dernières années14.

Désormais cette pratique est reconnue et surtout encadrée, non seulement par le fait que « les résultats de ces études et échanges préalables peuvent être utilisés par l'acheteur, à condition qu'ils n'aient pas pour effet de fausser la concurrence et n'entraînent pas une violation des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures »15, mais également par le fait que l'acheteur qui décide d'y recourir doit adopter « toutes les mesures appropriées pour que la concurrence ne soit pas faussée par la participation à la procédure de passation du marché public d'un opérateur économique qui aurait eu accès, du fait de sa participation préalable directe ou indirecte à la préparation de cette procédure, à des informations ignorées des autres candidats ou soumissionnaires »16. Outre le fait que l'encadrement du sourcing a eu pour effet de combler une certaine insécurité juridique relative à sa pratique, il a également ouvert sa pratique aux acheteurs les plus réticents -et les plus prudents- qui refusaient de s'y risquer, faute de base légale suffisamment solide. En ce sens le décret pourrait permettre une démocratisation de la pratique du sourcing, son adoption étant relativement récente il est encore trop tôt pour pouvoir se prononcer sur cet effet.

Cette reconnaissance, tardive, s'intègre parfaitement dans la logique de modernisation de l'achat public que connaît l'Europe ces dernières années au travers des différentes réformes. Bien qu'outil initialement utilisé dans le privé, nous allons voir que le sourcing, au delà de présenter des avantages pour les acheteurs, doit désormais devenir quasiment systématique.

13 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 4.

14 Voir à ce sujet La semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du sourçage et de l'obligation de rétablissement de l'égalité lorsque certains opérateurs disposent d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des marchés publics, A- Verre à demi vide ou à demi plein ? par Florian Linditch.

15 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 4.

16 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 5.

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

2. Les atouts et avantages d'une pratique de plus en plus répandue.

15. Il est nécessaire ici de faire un point sur les différentes pratiques de
sourcing, qui peuvent prendre des formes variées. Si certaines d'entres elles restent informelles et discrètes comme de simples recherches internet sur des sites spécialisés, la collecte d'informations sur catalogues, sur revues17 etc. d'autres démarches en revanche adoptent un caractère beaucoup plus explicite comme la participation à des salons, la visite et la rencontre de fournisseurs et de professionnels18É Ces différentes techniques d'approche du sourcing -qui ne sont pas exhaustives- ont toutes leurs avantages propres, néanmoins elles se rejoignent sur l'intérêt qu'elles accordent aux acheteurs.

16. Le dialogue entre les pouvoirs adjudicateurs et les opérateurs économiques. Le tout premier intérêt du sourcing, et non des moindre, réside dans le fait qu'à l'heure actuelle il reste l'un des seuls moyen accordé aux acheteurs d'établir un dialogue avec les opérateurs privés. Il faut retenir ici que le choix des personnes sourcées n'est pas le fruit du hasard et qu'en déterminant les opérateurs les plus notables l'acheteur aura la possibilité de dialoguer, non seulement avec des sociétés expertes dans leur domaine, mais également avec de potentiels candidats, et dans une moindre mesure avec de futurs potentiels titulaires de marchés. Cette étape de communication -plus ou moins informelle donc- reste essentielle pour mettre en relation acheteurs et réalité du terrain.

17. La connaissance du marché par les pouvoirs adjudicateurs. Le deuxième intérêt à relever est qu'en se rapprochant des fournisseurs -qu'il s'agisse d'un projet de marché public de travaux, de services, de fournitures, ou de tout autre contrat public- l'acheteur public aura la possibilité dans un premier temps de

17 Contrats et Marchés publics n°2, février 2015, alerte 6. L'achat public durable, Guide pratique (Association des acheteurs publics), focus par Florian Linditch. Paragraphe 3 « Sourcing ».

18 La semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du sourçage et de l'obligation de rétablissement de l'égalité lorsque certains opérateurs disposent d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des marchés publics, A- Verre à demi vide ou à demi plein ? par Florian Linditch. Paragraphe 6.

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

prendre connaissance du marché actuel19 et de mener sa propre étude à ce sujet20. En ce sens le sourcing reste indispensable, notamment pour les petites collectivités qui n'auraient pas un service de la commande publique extrêmement développé. De cette prise d'information il est nécessaire que l'acheteur puisse en déduire non seulement l'ensemble des modes opératoires du secteur privé, mais également les techniques disponibles et innovations afférentes21 qui lui permettront de référencer et de classer selon ses objectifs l'ensemble des prestataires 22 . Cet ensemble d'informations synthétisées doit alors conduire l'acheteur à réaliser le meilleur calibrage possible entre la réalité du marché d'une part, et le prix23. Les résultats de ce calibrage seront naturellement un outil quand à l'évaluation des candidats, et donc de facto, du ou des futur(s) titulaires du marché.

18. L'optimisation de la définition du besoin. Enfin, le troisième et dernier
intérêt du sourcing réside dans le fait qu'un sourcing « optimal » sera nécessairement un outil propice quand à la définition des besoins de l'acheteur au regard de son projet de contrat public. En effet la prise d'information et la rencontre avec les professionnels permettront à l'acheteur dans un premier temps de définir, si besoin est, l'ensemble de ses besoins ou tout du moins de comparer les besoins prévisionnels avec ce que peut proposer le prestataire24. Cette évaluation des besoins par rapport au marché permet, en plus d'une meilleure évaluation des candidats de réaliser un réel contrôle des différents « coûts de revient » du projet de marché25.

19. Toutefois, nous venons de le voir, le sourcing n'est pas à première vue un outil ou une pratique qui puisse permettre une évaluation directe des candidats et

19 Le champ d'application organique des nouvelles dispositions par Marion Ubaud-Bergeron, RFDA 2016. 218. L'émergence d'une conception économique de la commande publique, paragraphe 2.

20 AJ collectivités territoriales 2016 p.442 Définition préalable du besoin et sourcing, la responsabilisation des acheteurs publics dans le nouveau droit des marchés publics au lendemain de l'ordonnance du 23 juillet 2015 et du décret du 25 mars 2016 par Samuel Dyens. Un facteur d'efficacité de l'achat public, paragraphe 3.

21 La semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du sourçage et de l'obligation de rétablissement de l'égalité lorsque certains opérateurs disposent d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des marchés publics par Florian Linditch. Introduction, paragraphe 2.

22 Le champ d'application organique des nouvelles dispositions par Marion Ubaud-Bergeron, RFDA 2016. 218. L'émergence d'une conception économique de la commande publique, paragraphe 2

23 Cahiers de droit de l'entreprise n°6, novembre 2016, dossier 50. La nouvelle commande publique des territoires par Fanny Ehrenfeld et Bastien Marguerite, 2° La pratique du sourcing, paragraphe 3.

24 Idem.

25 Le champ d'application organique des nouvelles dispositions par Marion Ubaud-Bergeron, RFDA 2016. 218. L'émergence d'une conception économique de la commande publique, paragraphe 2

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

ce, d'autant plus que le sourcing intervient au stade où les candidatures n'ont pas encore été reçues, et le contrat public n'a pas été publié. Cependant, dans la mesure où rien n'interdit aux entreprises qui ont participées à la phase de sourcing d'être candidates au contrat public, alors le sourcing pourrait être une première étape dans l'évaluation des candidats. Il va sans dire qu'à admettre cette hypothèse, les règles fondamentales de la commande publique comme la transparence des procédures, l'égalité de traitement des candidats ou bien les règles relatives au droit pénal de la commande publique doivent être respectées.

B - Pratiquer le sourcing comme démarche initiale de l'évaluation des candidats, entre innovation et respect intangible des règles élémentaires de passation d'un contrat public.

20. Le sourcing sert clairement l'évaluation des candidats (1.), mais le fait
de l'user à outrance présente le risque de contournement des règles de passation des contrats de la commande publique (2.).

1. Le sourcing, détourné de sa fonction initiale, au service de l'évaluation des candidats.

21. Nous avons déjà eu l'occasion de le préciser mais il est nécessaire ici de
rappeler que malgré le fait que notre sujet de mémoire porte sur l'évaluation du cocontractant de l'administration il reste essentiel d'étudier les possibilités d'évaluation des candidats, puisque l'un d'entre eux au moins aura le privilège de devenir le titulaire du contrat et sera à son tour évalué en tant que tel.

Or, bien que le sourcing soit désormais encadré juridiquement, il s'avère que rien n'empêche actuellement une société ou un particulier qui participe à une opération de sourcing de se porter finalement candidat26 à l'obtention du contrat.

26 Encyclopédie des collectivités locales, Chapitre 2 (folio n°3012) Rédaction du marché Public par Frédéric Allaire, mars 2017, introduction paragraphe 8.

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22. L'influence du sourcing sur la phase d'évaluation des candidatures. De ce fait le sourcing va fatalement avoir une incidence plus ou moins forte sur l'évaluation des candidats à un contrat public.

En effet, n'importe quel acheteur, partant du postulat que l'opérateur privé qu'il soumissionne pour son opération peut devenir candidat, va naturellement, sciemment ou pas, lui porter une certaine évaluation puisque cet opérateur au même titre que n'importe quel futur candidat est susceptible de répondre à ses attentes. De la façon ou de la manière dont l'opérateur va présenter sa réponse à l'acheteur va dépendre le ressenti de l'acheteur qui, implicitement ou non, va adopter une attitude propice à l'évaluation de l'opérateur.

La rentabilité du sourcing pour l'évaluation des candidats est alors multiple. En favorisant une meilleure définition des besoins le sourçage va permettre à l'acheteur d'opter pour les critères de sélection les plus propices, qui serviront a posteriori pour l'évaluation et la sélection des candidats. De même en observant les différentes propositions des personnes sourcées et le prix qui en dépend l'acheteur aura une certaine attente concernant les futurs candidats, et cette attente entrera fatalement, explicitement ou pas, dans l'évaluation de ces candidats. Enfin, dans l'hypothèse où un opérateur apporte une réponse que l'acheteur estime « parfaite », alors celui-ci pourra construire son cahier des charges ou mettre en place certains critères de sélection dans l'objectif de retrouver cette réponse précise, ou tout du moins un candidat équivalent capable d'apporter cette même réponse.

Le sourcing reste aujourd'hui une pratique assez large et assez libre, pour peu que l'on respecte les règles générales de passation des contrats publics. En effet, bien que le décret27 restreigne le sourcing à des consultations, des études de marché, des sollicitations d'avis, ou à la possibilité d'informer les opérateurs économiques d'un projet, ces notions restent suffisamment larges pour imaginer une multitude de façons de l'exercer. Reste alors à l'acheteur de décider de la manière dont il compte sourcer les opérateurs économiques en fonction de son projet. Doit alors nécessairement s'en suivre une évaluation et un retour sur expérience du sourcing, car cela revient à évaluer les résultats, les entreprises, et donc potentiellement les futurs candidats et leurs futures réponses au projet de contrat public.

27 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, op. cit., article 4.

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23. La nécessaire adaptation du sourcing aux situations particulières. Il
faut néanmoins garder un certaine distance avec tout ce qui vient d'être dit précédemment. Les positions et les conseils précités ne sont proposées que dans un cadre théorique et utopique où toutes les collectivités fonctionneraient de la même façon et auraient toutes un service de commande publique digne de ce nom regroupant juristes spécialisés, économistes expert de la pratique du sourcing et techniciens agrémentés capables de donner un avis sur toutes les spécifications techniques des projets de contrats publics. De même chaque marché reste unique en son genre et il serait candide de penser qu'une seule et même pratique du sourcing serait valable pour l'ensemble des contrats.

Notre vision à ce sujet n'est pas d'imposer un sourcing parfait à l'ensemble des acteurs qui aujourd'hui exerce des prérogatives de commande publique, mais au contraire de prouver que le sourcing peut être un outil de modernisation, de performance, et qu'il peut s'adapter à plusieurs situations, quelles que soient les particularité géographiques des services, les enjeux politiques y afférent ou les moyens financiers et humains à disposition.

Le sourcing aujourd'hui reste une pratique qui doit se démocratiser au sein de la commande publique française et reste une pratique qui peut -et qui doit- s'adapter à tout contexte pour se pratiquer à toute échelle.

24. Une autre distance est à conserver vis à vis de ce qui vient d'être dit, en
ce sens que le sourcing ne doit ni être une étape de pré-sélection, ni une étape qui irait à l'encontre des règles générales de passation des contrats publics. La pratique du sourcing, en cela qu'elle reste assez peu encadrée, peu représenter un risque accru pour les acheteurs. La lecture des lignes qui vont suivre est indispensable quand à la pratique légale du sourcing, qui viendra atténuer les propos tenus plus haut.

2. Une fonction détournée et des risques accrus pour le décideur

25. La multiplicité des risques du sourcing. Nous l'avons vu, la pratique du sourcing est encadrée par l'article 4 du décret qui dispose que « les résultats de ces

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études et échanges préalables peuvent être utilisés par l'acheteur, à condition qu'ils n'aient pas pour effet de fausser la concurrence et n'entraînent pas une violation des principes de liberté d'accès à la commande publique, d'égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures »28. Il faut alors en déduire que la pratique du sourcing est une pratique à risque au regard de ces éléments, et que cette pratique -qui peut s'apparenter à une pratique relativement libre- en entrainant une nouvelle utilisation, présente alors un risque accrus pour les services de commande publique. A ces risques se rajoute également le délit de favoritisme qui pourrait, dans certains cas, être reconnu si des précautions n'étaient pas minutieusement prises par l'acheteur.

26. Sourcing et liberté d'accès à la commande publique. La liberté d'accès à la commande publique susmentionnée s'entend comme l'obligation pour les acheteurs de faire connaître à toute personne son projet et ses besoins. Cette liberté se garantie par la publicité adoptée par le service de commande publique et la mise en concurrence qui découle de cette publicité29. Il est alors indispensable que la pratique du sourcing ne conduise pas à une pré-sélection du ou des candidats, qui limiterait l'obligation d'information aux candidats sourcés.

27. Sourcing et égalité de traitement des candidats. L'égalité de traitement
interdit quand à elle toute discrimination lors de n'importe quelle phase de la procédure. Cela implique entre autre dans notre cas que le cahier des charges reste suffisamment objectif pour ne pas favoriser un candidat et que l'ensemble d'entres eux disposent des mêmes informations30. De ce fait les échanges et dialogues lors de la phase de sourcing doivent rester les plus neutres possibles et ne doivent pas permettre au potentiel candidat sourcé d'obtenir certaines informations qui le positionnerait dans une situation privilégiée. Il s'avère que dans le respect de ce principe l'acheteur doit être capable d'expliquer pourquoi tel ou tel candidat a été

28 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 4

29 BOAMP.fr, Bulletin officiel des annonces des marchés publics, Définition et principes d'un marché public. Principes : Liberté d'accès paragraphe 1. 08 avril 2016. http://www.boamp.fr/Espace-entreprises/Comment-repondre-a-un-marche-public/Questions-de-reglementation/Avant-de-repondre-a-un-marche-public/Definition-et-principes-d-un-marche-public#eztoc16662_0_2_0_4

30 Idem, Principes : Egalité de traitement paragraphe 1.

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sourcé, ou pourquoi tel ou tel candidat ne l'a pas été31. De même peu importe l'avis subjectif de l'acheteur à l'issue du sourcing, celui-ci ne doit pas au travers de l'élaboration de son cahier des charges ou du choix de ses critères favoriser un candidat en particulier. Il doit au contraire mettre en oeuvre de façon objective ses préférences dans l'objectif de trouver une solution similaire à celle du candidat sourcé qui pourrait être mise en oeuvre par l'ensemble des candidats admis à déposer une offre.

28. Sourcing et transparence. Enfin, la transparence est le principe qui
permet à l'ensemble des candidats, des intéressés, des supérieurs hiérarchiques etc. de vérifier que les précédents principes ont bien été respecté32. Il est alors souhaitable pour l'acheteur qui initie une opération de sourcing de rester dans un cadre déontologique strict et impartial ainsi que d'agir dans la plus grande des transparences.

29. Sourcing et protection du secret des affaires. Une autre problématique plus subtile est aussi à relever lors de la pratique du sourcing. Il s'agit ici de la délicate adéquation entre protection du secret des affaires et égalité de traitement des candidats.

En effet lors d'une opération de sourcing l'opérateur privé peut être amené à apporter une réponse personnelle à la question de l'acheteur, laquelle peut porter sur ses stratégies commerciales, ses capacités et innovations techniques ou ses informations économiques33. Comme précisées par la CADA dans un avis de 200634 les mentions protégées par le secret des procédés, par le secret des informations économiques et financières et celles protégées par le secret des stratégies

31 La semaine Juridique Administrations et Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du sourçage et de l'obligation de rétablissement de l'égalité lorsque certains opérateurs disposent d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des marchés publics par Florian Linditch. 2. Du sourcing au sourçage, les termes d'une évolution attendue, B) 1° paragraphe 2.

32 BOAMP.fr, Bulletin officiel des annonces des marchés publics, Définition et principes d'un marché public. Principes : Transparence paragraphe 1. 08 avril 2016. http://www.boamp.fr/Espace-entreprises/Comment-repondre-a-un-marche-public/Questions-de-reglementation/Avant-de-repondre-a-un-marche-public/Definition-et-principes-d-un-marche-public#eztoc16662_0_2_0_4

33 Voir à ce sujet Réforme sur les marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08 avril 2016. Focus sur deux problématiques induites par la mise en oeuvre d'une opération de sourcing, paragraphe 1. http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html

34 Avis de la CADA 20062458 -Séance du 15 juin 2006

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commerciales35 ne doivent en aucun cas être communiquées ou transmises aux autres candidats. Au delà de ce principe il est également admis que la définition et la formulation du besoin de l'acheteur par l'élaboration de son cahier des charges ou de ses critères de notation ne doivent en aucun cas trahir le secret relatif à ces mentions36.

Néanmoins le principe de l'égalité de traitement des candidats impose que soit fourni de manière égale à l'ensemble des candidats tout document que l'un d'entre eux pourrait détenir et qui le placerait dans une situation plus favorable.

Tout l'enjeu est donc de savoir que faire des documents, pièces et résultats qu'un service de commande publique aurait recueillis lors de la pratique du sourcing ? Si l'ordonnance permet aux candidats sourcés de « consentir à ce que certaines informations confidentielles qu'ils ont fournies, précisément désignées, puissent être divulguées »37, cela implique que l'acheteur ne peut en aucun passer outre leur avis quand à la communication de ces informations. Mais à admettre que le sourcing a permis à l'acheteur de considérer une technique ou une solution stricte comme seule réponse possible à son projet de marché, alors celui-ci devra communiquer ses résultats à l'ensemble des candidats tout en garantissant le respect du secret des affaires et donc de facto, tout en ayant pris les précautions qui s'imposent afin de conserver leur confidentialité38.

30. Sourcing et délit de favoritisme. Un autre enjeu pour les acheteurs qui se livreraient à la pratique du sourcing est de ne pas tomber dans le piège que peut représenter le délit de favoritisme. Défini comme le fait de procurer, ou de tenter de procurer à autrui « un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives ou règlementaires ayant pour objet de garantir la liberté et l'égalité des candidats dans les

35 Idem, dernier paragraphe.

36 Voir à ce sujet Réforme sur les marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08 avril 2016. Focus sur deux problématiques induites par la mise en oeuvre d'une opération de sourcing, paragraphe 1. http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html

37 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, article 44.

38 Réforme sur les marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08 avril 2016. Focus sur deux problématiques induites par la mise en oeuvre d'une opération de sourcing, paragraphe 3. http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html

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marchés publics et les délégations de service public »39 le délit de favoritisme reste l'une des épées de Damoclès suspendue au dessus des acheteurs. Les services de commande publique devront donc sans cesse de questionner et se remettre en question lors de toutes leurs phases de sourcing -de même pour les phases postérieures- afin de ne pas tomber sous le joug de cette condamnation pénale. Le décret permet à ce titre d'exclure un candidat qui aurait eu accès, du fait de sa participation préalable à la procédure, à des informations ignorées des autres candidats40.

31. Bilan et préconisations. Au regard de l'ensemble de ces éléments qui encadrent la pratique du sourcing comme élément d'évaluation des candidats, nous pouvons donner quelques éclaircissements et conseils aux futurs acheteurs.

Dans un premier temps il nous semble indispensable que chaque service se dote de sa propre charte ou de son propre guide de déontologie. Ces documents sont de plus en plus reconnus et utilisés par les collectivités41 et peuvent servir de repère aux employés territoriaux qui, quelques fois, n'ont pas de formation juridique à proprement parlé et n'ont pas une vision claire et précise du délit de favoritisme.

Dans un second temps les acheteurs doivent, lors de la rédaction de leurs documents, prendre des précautions afin que ceux-ci ne permettent pas d'identifier une solution précise relevant du secret des affaires ou n'excluent de la procédure de potentiels candidats. De même nous ne pouvons que conseiller aux acheteurs de prévoir lors des documents qui leurs serviront lors de la phase de sourcing une clause de confidentialité afin d'utiliser les résultats obtenus42.

Dans un troisième temps nous conseillons aux acheteurs de prendre du recul et de la hauteur vis à vis des résultats obtenus lors du sourcing. Il est important de ne pas rester trop « fidèle »43 aux propositions des candidats sourcés et de permettre aux

39 Article 432-14 du code pénal, modifié par l'ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 JORF 22 septembre 2000

40 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 5.

41 A titre d'exemple : le conseil général du Gard, la commune de Rueil MalmaisonÉ

42 Voir pour ces propositions Réforme sur les marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08 avril 2016. Préconisations à destination des opérateurs sourcés paragraphes 2 et 3. http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html

43 AJ collectivités territoriales 2016 p.442 Définition préalable du besoin et sourcing, la responsabilisation des acheteurs publics dans le nouveau droit des marchés publics au lendemain de l'ordonnance du 23 juillet 2015 et du décret du 25 mars 2016 par Samuel Dyens. S'autonomiser des résultats du sourcing, paragraphe 2.

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

autres candidats d'avoir une certaine marge de manoeuvre, le tout pour la garantie de l'égalité de traitement des candidats.

Enfin pour conclure ces quelques préconisations, nous ne pouvons qu'encourager les acheteurs à la plus grande prudence et à prendre le plus de précautions possibles lors de la phase de sourçage et l'utilisation des résultats. Dans le cadre de quelques collectivités au service de commande publique modeste, nous ne pouvons que les inciter en cas de doute de se référer à un juriste confirmé dans ce domaine, les risques étant trop grands pour être négligés.

32. Nous venons donc de le démontrer dans cette partie qu'il est possible sous conditions de pratiquer le sourcing comme outil d'évaluation des candidats. Toutefois cette première tentative d'évaluation ne peut rester qu'au stade embryonnaire et doit s'adjoindre d'autres procédés. Si les critères de sélection des offres sont les principaux outils d'évaluation des candidats, encore faut il les déterminer de la manière la plus efficace. Dans une optique de performance de l'évaluation des candidats de nouvelles techniques peuvent être pratiquées pour non seulement mieux définir les besoins de l'acheteur -le sourcing en faisant partie- mais également pour sélectionner les critères les plus efficients.

II - Une nouvelle définition des critères de sélection dans un objectif d'évaluation performante des candidats

33. Si les critères de sélection des offres et des candidatures sont
aujourd'hui au coeur de l'évaluation des candidats (A.), il s'avère qu'ils ne connaissent qu'une évolution relativement faible ces dernières années. Quand bien même les critères « environnement » et « social »44 ont récemment été reconnus, force est de constater qu'en pratique les critères sont trop souvent restreints au caractère « technique » ou pire encore, au critère unique du « prix ». En ce sens il est urgent aujourd'hui de créer une nouvelle dynamique de définition des besoins et donc de facto des critères de sélection qui, nous le démontrerons, n'impliquent pas forcément

44 Voir à ce titre CJCE 17 septembre 2002 Concordia Bus Finland C-513/99 2002 I-07213 et CE 25 mars 2013 n°364950 Département Isère c/ Société PL Favier recueil Lebon AJDA 2013.

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

des dépenses supplémentaires mais permettent une évaluation moderne des candidats (B.).

A. Les critères de sélection : piliers centraux de l'évaluation des candidats

34. Les textes encadrant le droit de la commande publique laissent une marge de manoeuvre certaine aux pouvoirs adjudicateurs dans la détermination des critères de sélection (1.), et nous remarquons que c'est bien souvent le projet politique qui guide cette détermination (2.).

1. Une base légale qui concède une certaine liberté quant au choix des critères de sélection.

35. L'importance des critères de sélection des offres dans l'évaluation des candidats. La direction des affaires juridiques précise aux acheteurs que les critères de sélection choisis « ainsi que leurs modalités de mise en oeuvre, doivent (leur) permettre d'apprécier la performance globale du marché public et porter une attention particulière à la qualité des prestations fournies, ainsi qu'au respect, tant par les fournisseurs que par les utilisateurs, des modalités d'exécution du marché »45.

En d'autres termes l'évaluation concrète et objective des candidats se fait par rapport à ces critères de sélection des offres. Il s'agit ici de la principale évaluation des candidats puisqu'à l'inverse de ce qui a été démontré précédemment concernant l'évaluation, à ce stade on évalue concrètement les candidats et leurs offres.

Nous passons volontairement outre l'évaluation des candidatures qui intervient -sauf exception46- antérieurement à l'évaluation des offres car, à notre sens, il ne s'agit que d'une opération ayant pour unique objectif d'évaluer et sélectionner les candidats vis-à-vis de leur compétence à exécuter le marché, et non une opération ayant pour objectif d'évaluer le ou les meilleurs candidats. Il est tout

45 Direction des affaires juridiques des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux autorités concédantes, fiches techniques L'examen des offres du 09 décembre 2016. Page 1 paragraphe 5. https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publics/conseil_acheteurs/fiches-techniques/mise-en-oeuvre-procedure/examen-des-offres-2016.pdf

46 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 68 : en cas d'appel d'offre ouvert « L'acheteur peut décider d'examiner les offres avant les candidatures ».

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Chapitre premier Ð Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

de même nécessaire de préciser ici qu'en pratique, pour des contrats assez modestes, il se peut que l'acheteur lors de l'examen des candidatures ait déjà un certain avis ou une certaine préférence subjective pour un candidat. En ce sens nous ne pouvons qu'encourager les acheteurs qui se trouveraient dans cette situation de passer outre, et de respecter à la lettre les règles et procédures relatives à la passation d'un contrat public. Comme dit précédemment, les risques sont bien trop importants pour être ignorés et pour laisser une conscience subjective guider les choix.

36. Analyse de la mise en place des critères de sélection des offres. Toutefois, s'il est désormais admis que les critères de sélection des offres sont au coeur de l'évaluation des candidats, encore faut il s'interroger sur leur mise en place.

Le décret nous précise en son article 62 que l'acheteur peut se fonder sur un critère unique qui peut alors être le prix « à condition que le marché public ait pour seul objet l'achat de services ou de fournitures standardisés dont la qualité est insusceptible de variation d'un opérateur à un autre »47 ou le cout, qui est déterminé « selon une approche globale qui peut être fondée sur le cout du cycle de vie »48. Dans l'hypothèse où le contrat ne rentre pas dans un de ces cas de figure, l'acheteur doit se fonder sur une pluralité de critères « non-discriminatoires et liés à l'objet du marché public ou à ses conditions d'exécution (É) parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs, environnementaux ou sociaux »49.

Rappelons à ce titre que la sélection des candidats par ces critères de sélection doit être des plus objective et des plus concrète, une jurisprudence récente du Conseil d'Etat progresse justement dans ce sens en précisant que les pouvoirs adjudicateurs doivent exiger des candidats les justificatifs de leurs offres pour pouvoir appliquer leurs critères de sélection50.

Ces dispositions récentes du décret -dans la continuité de la jurisprudence antérieure- laissent donc une certaine liberté aux acheteurs quand à la détermination des critères de sélection des offres. En ce sens nous ne pouvons que féliciter cette démarche qui n'enferme pas les pouvoirs adjudicateurs ou entités adjudicatrices

47 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62 II 1° a)

48 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62 II 1° b)

49 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62 II 2°

50 OE 22 juillet 2016 n°396597 Communauté d'agglomérations du centre littoral et autres. Mentionné dans les tables du recueil Lebon.

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dans un cadre trop stricte, et leur permet de prendre en compte pleinement les enjeux territoriaux, politiques ou financier. Cette liberté -sous réserve des conditions de l'article 68 II 2° du décret susmentionné- est d'autant plus considérable qu'elle permet non seulement aux acheteurs d'évoluer et de se moderniser dans la détermination de leur besoins et de leurs critères de sélection mais également de déterminer la ligne politique de leur projet de contrat public.

2. La définition de la ligne politique du projet de contrat public par les critères de sélection.

37. La diversité des critères de sélection des offres, témoin d'une

corrélation entre sélection des titulaires de contrats de commande publique et projet politique. Nous l'avons vu, il est désormais possible aux acheteurs de reconnaître comme critères de sélection des offres les critères environnementaux, sociaux, la caractéristique esthétique, les conditions de production et de commercialisation ou encore la garantie de la rémunération équitable des producteurs51.

Cette diversité de critères non exhaustive permet non seulement à l'acheteur de prendre pleinement en compte ses enjeux locaux, mais également de définir une certaine ligne politique. En effet de par l'importance que revêtent les contrats publics au sein de notre société, et du fait qu'il s'agisse là de l'utilisation de deniers publics, chaque contrat a définitivement une portée politique. Passé outre les obligations de certaines collectivités qui leurs sont inhérentes -comme le ramassage des ordures ménagères par exemple-, les autres contrats ont une dimension politique et leur passation n'est pas le fruit du hasard.

Au travers de cette liberté relative quand au choix des critères de sélection les acheteurs peuvent donc dans une certaine mesure illustrer leur ligne politique. A titre d'exemple favoriser un critère environnemental sur un contrat d'entretien de terrains incendiés aura une portée médiatique intéressante, en plus de répondre à un besoin primordial de respect de l'environnement. De même mettre l'accent sur le critère du prix ou du cout pour une collectivité qui connaitrait des difficultés

51 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62 II 2°

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

financière ou économique permettra en plus d'une sauvegarde des deniers publics d'avoir un retour positif auprès des contribuables qui féliciteront une dépense allégée. Selon la ligne politique que le pouvoir adjudicateur ou l'entité adjudicatrice voudra adopter, il lui sera possible d'opter pour certains critères qui, ne l'oublions pas, permettront d'évaluer et de sélectionner les candidats les plus performants.

Cette réalité est d'autant plus évidente qu'il est possible et indispensable pour les acheteurs de pondérer, ou à défaut de hiérarchiser, leurs critères de sélection. En effet le décret dispose que « les critères d'attribution font l'objet d'une pondération ou, lorsque la pondération n'est pas possible pour des raisons objectives, sont indiqués par ordre décroissant d'importance »52. Ajoutons à cela la possibilité pour les acheteurs de créer et pondérer des sous critères de sélection des offres qui permet une réelle définition des objectifs et des besoins ainsi qu'une orientation politique précise.

38. Critères de sélection des offres et performance. Il est donc tout à fait

possible d'envisager et d'adopter les critères de sélection dans une optique de performance. Non seulement dans une optique de performance globale du marché en permettant à celui-ci de prendre en compte des critères environnementaux ou sociaux, mais également dans une performance de l'évaluation des candidats. Par une détermination assez libre des critères des sélection et de leur pondération, et par la possibilité d'adoption et de pondération de sous-critères, il est tout à fait possible pour l'acheteur de définir une nouvelle ligne d'évaluation des candidats et donc de facto, de son futur cocontractant.

En ce sens il est indispensable aujourd'hui de repenser l'idée des critères de sélection et d'en créer une nouvelle dynamique, puisque ceux-ci sont au coeur de l'évaluation des candidats et de l'exécution des contrats publics.

Ce constat est d'autant plus avéré que des dérives -légales- ont souvent lieu quand à la détermination des critères de sélection. En effet une tendance actuelle visant à l'économie conduit les décideurs à laisser une place prépondérante au critère du prix. Malgré que cela s'inscrive dans une certaine logique ce choix de consécration du critère prix n'est pas irréprochable. Dans un premier temps par exemple à propos d'un marché de fournitures, ne prendre en compte que le critère prix ou lui donner

52 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62 IV.

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une place trop importante conduira les candidats à ne proposer que les fournitures au prix de revient le plus bas. Passant outre la qualité et la durabilité dans le temps de ces fournitures, l'acheteur aura certes fait des économies sur le court terme, mais se verra dans l'obligation de renouveler sans cesse son marché qui peut être source de dépenses.

Dans un autre registre nous pourrions imaginer un marché en vue de la création d'un site internet pour une collectivité par exemple. Dans l'hypothèse où le prix ait une place trop importante -imaginons un critère du prix pondéré à 80% et celui de la valeur technique à 20%- alors le constat est mathématiquement fatal. Il suffit qu'un candidat dont la candidature a été acceptée brade ses prix de sorte qu'aucun autre candidat ne puisse proposer un prix en dessous des 20% plus cher, et il n'est alors plus nécessaire de prendre en compte le mémoire technique ou les solutions proposées. Si tous les autres candidats proposent des prix 20% plus cher alors fatalement le candidat qui brade ses prix obtiendra le marché sans que l'on ait à évaluer ses propositions au regard de la valeur technique. Ne sera donc même pas pris en compte l'ergonomie ou l'esthétique du site internet par exemple, pas plus que la rapidité d'exécution. Sera donc sélectionné à titre d'exemple un simple informaticien débutant plutôt qu'une société d'informaticiens compétents, capables de travailler plus rapidement, d'être plus à l'écoute de l'acheteur et disposant d'une expérience dans le domaine que l'autre candidat ne possède pas. Même en admettant que l'offre du candidat retenu ne soit pas une offre anormalement basse, et même en admettant qu'il est tenu au respect du cahier des charges, il est fort à parier que le résultat final sera de bien moins bonne qualité et répondra peut être moins au besoin de l'acheteur que la solution proposée par l'équipe d'informaticiens. Comment alors, envisager ici une quelconque performance du contrat public ? Tout le défaut de cet exemple réside dans le fait que le cocontractant de l'administration n'a pas été évalué efficacement en amont et n'a pas été évalué de la façon la plus performante.

39. Face à ces problématiques il est donc urgent que les acheteurs prennent conscience du poids que revêtent chacun des critères et de leur pondération. Nous venons de le démontrer, les critères de sélections occupent une place des plus déterminantes dans la passation d'un contrat public. Leur rôle central dans

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

l'évaluation des candidats et la liberté quant à leur adoption en font un outil qu'il est primordial de moderniser. Toute la performance relative à l'évaluation des candidats passe inéluctablement par la modernisation de ceux-ci.

B. Vers une nouvelle dynamique de choix des critères de sélection des offres : une évaluation des candidats affinée et performante

40. Une évaluation performante des candidats passe nécessairement par une analyse et une définition fonctionnelle des besoins de l'acheteur (1.), débouchant sur l'adoption de critères de sélection fonctionnels (2.).

1. L'analyse fonctionnelle des besoins, première étape d'une nouvelle dynamique de choix des critères de sélection.

41. Définition de l'analyse fonctionnelle des besoins. L'analyse fonctionnelle s'entend comme un procédé substituable de définition des besoins pour l'acheteur public. A l'inverse d'autres procédés cette analyse se fonde sur la distinction entre la fonction du besoin d'une part, et le produit, le service, l'outil acheté de l'autre53. En d'autres termes lors de sa pratique on ne se fonde plus sur une solution particulière, d'outils adapté ou de service précis, on se fonde uniquement sur un (ou plusieurs) besoin clair. A titre d'exemple une collectivité qui souhaite agrandir sa visibilité ne va pas réfléchir en terme d'outil, comme un site internet, une application, mais va se réfléchir en terme de besoins, lesquels seront pour ce cas précis de se faire connaître du grand public, d'adopter une identité visuelle, d'être visible par tous, de communiquer sur ses actions etc.

L'analyse fonctionnelle peut aussi s'entendre dans le sens contraire. Dans cette hypothèse la collectivité possède déjà un outil qu'elle souhaite conserver -une application mobile à titre d'exemple- et va utiliser la méthode de l'analyse fonctionnelle pour l'améliorer, la faire évoluer en fonction des besoins.

53 Déterminer le juste besoin en s'appuyant sur une analyse fonctionnelle et une analyse de la valeur par Ludovic Vigreux, 02 février 2017 n°52 de la Lettre des Marchés Publics et de la commande publique, paragraphe 5.

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Chapitre premier Ð Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

Reste alors aux différents candidats puis au(x) cocontractant(s) de définir une méthode, une solution, pour remplir ces besoins.

Issue du domaine privé l'analyse fonctionnelle commence à s'imposer de plus en plus au sein de la commande publique. Le constat initial relevait que les acheteurs avaient tendance lors de la passation de leurs contrats à se focaliser non seulement sur un critère économique prépondérant mais également sur des produits ou solutions déjà testés et maitrisés par leurs services, sur leurs préférences. A défauts les acheteurs ne se concentraient plus suffisamment ni sur leurs besoins, ni sur la qualité, ni sur la quantité optimale, ni sur la fréquence d'utilisation ou de remplacement de ces produits ou méthodes. Ce constat amer pour les collectivités relevait également une source de surcout pour les services, alors que la volonté de leur démarche -faussée- visait à une réduction des couts54.

42. Les avantages de l'analyse fonctionnelle. Les avantages de l'analyse fonctionnelle sont multiples. Dans un premier temps elle permet de replacer l'acheteur au coeur même de la définition de ses besoins. Elle permet une remise en question constante de l'acheteur qui à chaque renouvellement de marché doit réfléchir à nouveau sur toute la nécessité de son marché, sur les besoins -qui évoluent- auxquels il faut apporter une réponse etcÉ En restreignant l'achat sur le juste besoin l'acheteur -en plus d'obtenir un résultat qui répond entièrement à ses attentes- limite également la « sur-qualité » 55 des solutions proposées qui ont fatalement un coût plus élevé. L'enjeu est de taille, en ne se bornant plus à une approche cent pour cent budgétaire de l'achat, des économies sont potentiellement réalisables, ainsi qu'une meilleure satisfaction non seulement de l'acheteur mais aussi de l'utilisateur final.

De même l'analyse fonctionnelle permet un contrôle des risques plus performant. En considérant un risque potentiel dans l'exécution du marché

54 Pour ce paragraphe voir l'article Déterminer le juste besoin en s'appuyant sur une analyse fonctionnelle et une analyse de la valeur par Ludovic Vigreux, 02 février 2017 n°52 de la Lettre des Marchés Publics et de la commande publique, paragraphe 1.

55 Retour d'expérience : l'analyse fonctionnelle dans les achats publics par Cédric Imache 02 décembre 2016, www.acheteurs-publics.com

http://www.acheteurs-publics.com/actualite-des-acheteurs-publics/retourdexperiencelanalysefonctionnelledanslesachatspublics

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

l'acheteur a la possibilité de le rattacher à un besoin. Les risques étant alors assimilables à des besoins le candidat devra y apporter une réponse au même titre que n'importe quel besoin, en cela cette pratique permet une meilleure gestion et une meilleure maitrise des risques56. Toutefois cela n'est valable que si l'acheteur, de la même façon qu'il doit définir de manière la plus efficace ses besoins, défini précisément l'ensemble des risques.

Enfin le dernier avantage notable à recourir à la pratique de l'analyse fonctionnelle est la consécration de l'innovation. En effet par cette démarche l'acheteur n'attend pas du candidat une solution, un outil ou un produit précis et défini. En ne bornant pas le futur cocontractant à quelque chose d'intangible celui-ci a un champ d'action et de réflexion bien plus vaste. Même si le candidat doit répondre parfaitement aux exigences et aux besoins fournis, celui-dispose d'une certaine liberté quand à la définition de sa réponse. Il aura alors tout le loisir de se consacrer à sa vision personnelle de la réponse au besoin, par ses propres moyens et ses propres techniques à l'inverse de l'approche basique où le candidat -s'il espère obtenir le contrat- doit se conformer à une demande expresse de l'acheteur qui n'est pas nécessairement optimale. Cet avantage réside dans le fait que les services de commande publique ne sont pas nécessairement au fait de l'actualité et des nouveautés « techniques » qui existent sur le marché. En faisant confiance au secteur privé l'acheteur obtient certaines garanties. A titre d'exemple le caractère « environnemental » est quelque chose d'assez peu maitrisé des services alors qu'ils doivent pourtant l'évaluer dans les offres En définissant parfaitement ce besoin ils s'assurent d'obtenir une réponse précise qui jusque là leur était inconnue, et qui peut s'apparenter à de l'innovation. Par des produits ou services de substitution l'analyse fonctionnelle garanti l'achat innovant et performant57.

43. Cette approche de la définition des besoins par l'analyse fonctionnelle

permet donc à l'acheteur de choisir des critères de sélection fonctionnels et innovants, et, en ce sens, garantie une évaluation plus performante des candidats.

56 Idem

57 Déterminer le juste besoin en s'appuyant sur une analyse fonctionnelle et une analyse de la valeur par Ludovic Vigreux, 02 février 2017 n°52 de la Lettre des Marchés Publics et de la commande publique, paragraphe 5.

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

2. De l'analyse fonctionnelle des besoins à l'adoption de critères fonctionnels de sélection, la consécration de l'innovation et de la performance lors de la passation de contrats publics

44. Pluralité des critères fonctionnels. Il est aujourd'hui possible de

concevoir les contrats publics comme vecteur du développement durable, de l'innovation et d'y intégrer des enjeux tant sociaux qu'environnementaux58. De par le taux que représentent les contrats publics dans le PIB européen (proche de 18%) et de par la volonté de la stratégie Europe 2020, la France -comme les autres états membres de l'UE- a bien intégré la nécessité de faire de ces contrats des acteurs à part entière de l'innovation, du respect de l'environnement et de la justice sociale59.

Dans cette optique progressiste, volontariste et humaniste, il est alors nécessaire que les cocontractants de l'administration aient leur part de responsabilité dans l'exécution des contrats publics. Tout l'enjeu pour les acheteurs est donc d'évaluer les candidats sur leur capacité à innover, à respecter l'environnement et les enjeux sociaux. Cette volonté forte passe donc logiquement par une évaluation préalable des futurs cocontractants de l'administration.

Les objectifs sont multiples, dans un premier temps il est primordial d'évaluer les candidats sur leur faculté à innover. L'acheteur va donc rechercher chez les candidats leur capacité à trouver de nouvelles solutions, de nouvelles réponses ou de nouvelles méthodes, le tout dans le but d'obtenir une meilleure satisfaction, un délai d'exécution plus rapide et -ou- un processus moins cher. Autrement dit, l'acheteur va évaluer les candidats sur leur capacité à être performant, la performance globale étant l'aboutissement recherché. Dans un second temps l'acheteur doit évaluer les candidats sur leur faculté à devenir des acteurs du respect de l'environnement et des enjeux sociaux. Cette aptitude peut s'apparenter à de l'innovation, et la démarche finale consiste à sélectionner le candidat ayant la réponse de performance énergétique, sociale ou environnementale la plus élevée60.

58 Pour un management performant de l'exécution des marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014, CCI de Paris page 6 http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf

59 Idem.

60 La performance et les contrats de la commande publique, mémoire par Niels Bernadini, 2014. Deuxième partie, chapitre 1 : La recherche de la performance environnementale dans les contrats de la commande publique : le contrat de performance énergétique P68

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

A ce titre nous pouvons affirmer que l'évaluation entre au service de la performance.

Cette évaluation ambitieuse repose à n'en pas douter sur des critères de sélection correctement déterminés. Outre le fait que ce genre de critères soit autorisé par le décret61 -nous l'avons vu précédemment- leur adoption par l'acheteur se fonde sur une base concrète correctement déterminée. Ainsi le sourcing et l'analyse fonctionnelle des besoins sont les points clefs préalable à la définition du besoin et de l'adoption des critères de sélection. Ces deux outils restent donc à n'en pas douter au service de l'évaluation des candidats, et donc à l'évaluation préalable du cocontractant de l'administration.

45. La pertinence des variantes. Dans l'hypothèse où un acheteur se retrouverait dans la situation actuelle et désirerait inclure de la performance -au sens large- au sein ses contrats publics par l'adoption de critères relatifs à l'innovation, le social ou la protection de l'environnement, nous ne pourrions conseiller à titre de complément que d'autoriser -ou d'imposer- des variantes. Telle est d'ailleurs la volonté de la directive62 marchés publics qui précise en son article 48 qu'il est nécessaire d'encourager les pouvoirs adjudicateurs à recourir aux variantes le plus souvent possible au regard de l'importance que revêt l'innovation63. En effet en autorisant la variante lors de la passation d'un contrat public l'acheteur permet au candidat de présenter en parallèle de son offre de base une seconde offre répondant aux mêmes exigences mais présentant une alternative. Précisées à l'article 58 du décret64 ces variantes sont un moyen supplémentaire de favoriser l'innovation et le savoir faire des candidats tout en assurant une évaluation performante de ceux-ci. Par ces différentes pratiques il est alors possible de remettre en relation les besoins des pouvoirs publics avec l'offre des start-up et des entreprises innovantes65.

61 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62.

62 Directive 2014/24/UE du parlement européen et du conseil en date du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics. Publiée au JOUE le 28 mars 2014.

63 Directive 2014/24/UE, article 48.

64 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 58.

65 Oui, les acheteurs publics ont le droit de rencontrer des fournisseurs !, article par Sébastien Taupiac en date du 10 mai 2016. http://www.weka.fr/actualite/achats/article/oui-les-acheteurs-publics-ont-le-droit-de-rencontrer-des-fournisseurs-37822/

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Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs privés en amont de la publication

46. Bilan chiffré du phénomène. Cette démarche que nous venons de décrire ne date pas d'hier et était une volonté forte de l'Administration66 visant à la modernisation de l'achat public. Les résultats à ce titre sont plutôt encourageant puisqu'en 2009 seul 1,9% des contrats supérieurs à 90.000€ comportaient une clause sociale, contre 6,1% en 2013. De même nous passons de 2,6% des contrats publics supérieurs à 90.000€ comportant une clause environnementale en 2009 à 6,7% en 201367.

Malgré ces chiffres qui peuvent sembler relativement faible il convient tout de même de souligner et de féliciter la progression de cette démarche ambitieuse qui, nous l'espérons, tendra à se démocratiser ces prochaines années.

47. Conclusion de chapitre. A titre de propos conclusifs de ce chapitre
nous souhaitons faire comprendre aux acheteurs que l'évaluation est un facteur de performance. A ce stade de la procédure il n'est pas encore question d'évaluer le cocontractant ou les candidats, mais de mettre en place un système, une dynamique d'évaluation qui sera la clef de la réussite. Nous venons d'étudier les possibilités d'évaluation avant la publication du marché, il nous faut désormais nous consacrer à l'évaluation des candidats post-publication (c.f. Chapitre second), qui nous permettra d'enchainer ultérieurement sur l'évaluation concrète du cocontractant de l'administration (c.f. Seconde partie).

66 Pour un management performant de l'exécution des marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014, CCI de Paris page 7 http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf

67 Direction des affaires juridiques, la lettre de l'OEAP avril 2015 n°32 V2, spéciale recensement 2013. https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publics/oeap/publications/lettre/ 2015/lettre32.pdf

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

CHAPITRE SECOND - UNE CONSTANTE EVALUATION DES
CANDIDATS, DE LA RECEPTION DES OFFRES A LA CONCLUSION DU

CONTRAT

48. Introduction. Si une évaluation des candidats en amont de la publication de l'offre a été démontrée comme un facteur de performance pour l'Administration, l'évaluation la plus importante et la plus encadrée intervient lors de la réception des candidatures et des offres. En effet tout l'enjeu pour l'acheteur à ce stade de la procédure va être de déterminer quel ce sera, au regard de son contrat, la meilleure offre proposée par le meilleur candidat.

Il sera donc nécessaire lors de ce chapitre d'examiner dans un premier temps l'évaluation qu'opérera l'administration en vue d'attribuer son contrat au meilleur candidat (I). Nous pourrons alors poursuivre notre devoir en étudiant sous un angle nouveau l'application de la négociation (II).

I - Une évaluation obligatoire en vue de l'attribution du contrat au candidat présentant l'offre la plus économiquement avantageuse

49. Cela nous permettra de déterminer non seulement l'évaluation objective des candidats au regard des exigences et du besoin de l'administration (A.), mais également l'enjeux de la négociation, puisque cette évaluation pourrait ne pas suffire à une adéquation optimale entre besoin de l'administration et offre du candidat (B.).

48

Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

A. L'évaluation objective des candidats au regard des exigences et du besoin de l'administration

50. Il sera logiquement nécessaire d'étudier ici non seulement l'évaluation
des candidatures que doit opérer l'acheteur (1.) mais également l'évaluation des offres, postérieure, qui déterminera le cocontractant de l'Administration (2.).

1. L'évaluation des candidatures : premier pas dans l'attribution du contrat

51. L'examen des candidatures. Rappelons, dans un premier temps, qu'hormis l'exception prévue à l'article 68 du décret68 l'examen des candidatures intervient en amont de l'évaluation des offres. Cette démarche, obligatoire, que nous pouvons qualifier de phase d'amorce, a pour but de vérifier non seulement que les différentes candidatures ont bien été reçues dans les délais impartis69, que les différents candidats satisfassent aux conditions de participation70, mais également qu'ils ne font l'objet d'aucune interdiction de soumissionner71.

Selon le type de marché, qu'il soit par exemple un marché public de défense ou de sécurité, ou selon si l'Administration n'a décidé de recevoir qu'un nombre restreint de candidats admis à participer à la candidature, ces différents types de contrôles peuvent s'effectuer de différentes façons, qu'il s'agisse des modalités de contrôle, ou du moment même où cette évaluation intervient72.

Concernant le respect des délais l'article 43 du décret de 2016 précise que les candidatures et offres reçues hors délais sont éliminées 73 . N'étant alors pas considérées comme des offres irrégulières les offres ou candidatures rendues hors délai, une régularisation est impossible. Pèse alors sur l'opérateur économique qui se porte candidat une réelle obligation de respect de ces délais qui, si dépassés,

68 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 68.

69 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 43.

70 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, article 51

71 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, articles 45 et 48.

72 Direction des affaires juridiques des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux autorités concédantes, fiche technique Examen des candidatures en date du 09/12/2016 Introduction paragraphe 5. https://www.economie.gouv.fr/daj/examen-candidatures-2016

73 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 43.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

entraineront une élimination et un rejet de son offre. Nous pourrions d'ailleurs nous questionner sur cette fatalité et cette irrégularisation de ces offres. Mais au regard de l'égalité de traitement des candidats74 et du manque de sérieux qui découlerait de ces offres tardives, il ne nous semble pas opportun de revenir sur cette réglementation. En effet, que penser d'une offre remise en retard qui, nécessairement, aura été mieux préparée qu'une autre ? L'égalité de traitement des candidats serait partiellement violée. De même, que penser d'un candidat à un marché public, qui doit prouver à l'acheteur son sérieux et son professionnalisme, incapable de respect le premier délai imparti ? Au regard de ces arguments cette élimination des candidatures et des offres semble tout à fait logique et se justifie pleinement. Ce respect du délai permet donc une première évaluation des candidats et du futur cocontractant, en éliminant d'office ceux incapables de respecter la première obligation posée par l'Administration.

Sont tout de même prévus deux cas de prolongation du délai de réception des offre, notamment lorsqu'un complément d'informations demandé par en temps et heure par un candidat n'a pas été fourni dans un certain délai, et lorsque des modifications importantes sont apportées aux différents documents de consultation75.

Est également à noter qu'il est fait mention à chaque fois d'un délai de réception des candidatures et des offres, cela implique qu'est pris en compte uniquement le jour et l'heure à laquelle l'Administration a reçu les documents, et non le jour ou l'heure d'envoi. Cette subtilité est à capter pour les différents candidats, et justifie l'utilisation, autant que possible, de la procédure dématérialisée qui permet un envoi et une réception quasi-simultanés.

Concernant la vérification des conditions de participation des candidats celle-ci diffère non seulement selon le type de marché mais également en fonction du caractère ouvert ou restreint de la procédure. Dans tous les cas doit être vérifié que le dossier de candidature ne soit pas incomplet, que les minimas de capacité sont bien

74 Direction des affaires juridiques des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux autorités concédantes, fiche technique Examen des candidatures en date du 09/12/2016 page 1 note de bas de page 3.

75 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 43.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

atteints dans l'hypothèse où l'acheteur les a expressément publiés ainsi que les capacités suffisantes du candidat pour exécuter le marché76.

Dans un second temps est permis la vérification de toutes les informations que le candidat a précisées dans son dossier de candidature77. L'acheteur a donc la possibilité de vérifier par tout moyen les informations transmises, y compris en exigeant au candidat certains renseignements ou documents prévus par l'arrêté du 29 mars 201678.

Cette phase est donc primordiale dans l'évaluation des candidats, il est ici question de vérifier que le candidat a le profil requis. Néanmoins cette phase ne doit conduire qu'à une élimination si nécessaire des candidats qui ne correspondent pas aux exigences logiques en accord avec l'objet du marché de l'Administration, et ne doit pas être une pré-phase de sélection qui conduirait implicitement un acheteur à dégager des candidats « favoris » et des candidats qui lui plaisent subjectivement moins.

52. Les interdictions de soumissionner. Enfin l'acheteur doit procéder à la

vérification des interdictions de soumissionner lors de l'examen des candidatures. Le décret dispose d'ailleurs qu'un candidat « ou un soumissionnaire se trouve dans un cas d'interdiction de soumissionner, ne satisfait pas aux conditions de participation fixées par l'acheteur, produit, à l'appui de sa candidature, de faux renseignements ou documents, ou ne peut produire dans le délai imparti les documents justificatifs, les moyens de preuve, les compléments ou explications requis par l'acheteur, sa candidature est déclarée irrecevable et le candidat est éliminé »79.

L'article 45 de l'ordonnance dresse une liste des différentes interdictions de soumissionner, dans laquelle on retrouve tant des condamnations pour des infractions au code pénal, que des infractions au code général des impôts. Est également un cas d'interdiction l'absence de souscription des obligations en matière fiscale ou sociale ou la mise en procédure de liquidation judiciaire80. Conformément

76 Voir à ce titre Direction des affaires juridiques des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux autorités concédantes, fiche technique Examen des candidatures en date du 09/12/2016 page 3.

77 Idem.

78 Arrêté du 29 mars 2016 fixant la liste des renseignements et des documents pouvant être demandés aux candidats aux marchés publics JORF n°0076 du 31 mars 2016 texte n°103.

79 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 55.

80 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics, article 45.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

à l'article 51 du décret le candidat aura à produire comme preuve soit une déclaration sur l'honneur, soit des certificats délivrés par les administrations et organismes compétents, soit des pièces prévues au code du travail, ou encore un extrait du registre pertinent, tel qu'un extrait K bis81.

L'acheteur doit donc procéder à une vérification des ces interdictions ainsi qu'à une vérification des pièces produites par le candidat. Sans parler ici de réelle évaluation du candidat, cela permet en outre d'évincer tout candidat n'ayant pas la qualité nécessaire pour travailler de concert avec l'Administration.

53. Cette phase d'examen des candidatures est donc une première étape dans l'attribution du contrat et doit être opérée conjointement avec l'examen des offres puisque, bien que distinctes temporellement parlant, ces deux phases oeuvrent pour un même objectif final, à savoir l'attribution du contrat au candidat ayant le mieux répondu.

2. L'examen des offres : socle de l'attribution du contrat.

54. La phase d'examen des offres est donc la phase qui doit permettre de dégager l'offre la plus économiquement avantageuse, sur laquelle se fonde l'acheteur pour attribuer le marché82. Toutefois avant même d'évaluer et classer les différentes offres des candidats, l'acheteur doit vérifier la compatibilité et la recevabilité de celles-ci.

55. La validité des offres. L'article 59 du décret dispose d'ailleurs que
l'acheteur doit vérifier que ces offres doivent bien être régulières, acceptables et appropriées83. Tout en détaillant le caractère de ces différents adjectifs, cet article prévoit également les différents cas concrets lors desquels ces offres seront régularisables ou non. L'intérêt ici pour l'acheteur n'est pas seulement de « valider » ou non certaines offres, mais également de permettre aux candidats qui auraient potentiellement commis certaines erreurs, comme une faute de frappe à titre

81 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 51.

82 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62.

83 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 59.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

d'exemple, de ne pas être nécessairement écarté de la procédure. La volonté exprimée ici est de contribuer à la continuité de la procédure -car le rejet d'une offre peut être une perte de temps conséquente- ainsi qu'éviter de défavoriser de nouveaux candidats, encore peu habitués à la passation de contrats publics. Toutefois ces cas de régularisation restent exception, et ne peuvent avoir pour effet « de modifier des caractéristiques substantielles des offres »84.

56. L'examen des offres. Une fois cette vérification opérée, qui peut

prendre plus ou moins de temps en fonction du nombre de participants et de la complexité des offres et du marché, « les offres régulières, acceptables et appropriées (É) sont classées par ordre décroissant en appliquant les critères d'attribution »85. Cela signifie que l'acheteur va devoir évaluer les différentes offres au regard des critères d'attribution qu'il a préalablement déterminé. Cette détermination des critères renvoi à notre première partie sur l'adoption de critères fonctionnels, puisqu'il va falloir évaluer les candidats en fonction de ces critères, il est tant nécessaire de définir son besoin de manière optimale que de choisir les critères les plus favorables.

Tout l'art, et tout l'enjeux de l'évaluation des candidats s'opèrent lors de cette phase d'examen des offres. C'est généralement lors de cette évaluation que l'acheteur se rend compte de la mauvaise adéquation entre son besoin, ses critères d'attribution et son cahier des charges. Nombreux sont les acheteurs qui, à la lecture des différentes offres, comprennent -trop tard- qu'ils ont échoué lors d'une des étapes de la procédure. Face à ce constat plusieurs choix s'offrent à l'Administration, mais dans tous les cas cela ne peut mener qu'à deux conclusions : soit on conclu un marché qui au mieux ne sera pas optimal, au pire sera désavantageux, soit la procédure est relancée, au frais de l'acheteur, qui aura perdu du temps et de l'argent. Cela démontre bien l'intérêt que l'acheteur doit porter à la passation de ses contrats et aux différentes phases préalables à la publication.

Nous ne détaillerons pas ici l'ensemble des modalités de l'examen des offres - notre mémoire étant justement à destination des acheteurs qui connaissent ses différentes règles- mais nous mettons tout de même l'accent sur la nécessité

84 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 59.

85 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 62.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

d'impartialité et d'objectivité que doit revêtir cette phase. L'acheteur doit se borner à évaluer les offres uniquement en fonction de ses critères d'attribution. Si nous pointons cette phrase en particulier, alors qu'elle semble tout à fait cohérente et logique, c'est parce que trop souvent des sentiments propres ou des éléments extérieurs viennent perturber l'objectivité requise. Sans que l'acheteur ne s'en rende nécessairement compte, et sans que cela s'apparente dans les fait à un réel délit de favoritisme et donc à un avantage octroyé à l'acheteur, les exemples restent nombreux dans ce domaine. Combien de fois un acheteur, parce qu'il a déjà eu l'occasion de voir à l'oeuvre telle ou telle entreprise, ne s'est dit intérieurement qu'il souhaiterait que cette entreprise obtienne le marché ? Combien de fois un acheteur, au regard d'une offre papier mieux présentée qu'une autre n'y a pas passé plus de temps et n'a eu de l'affect pour celles-ci ? Toutes ces petites imprécisions peuvent parfois couter cher, d'autant plus que jurisprudence a ouverte ces dernières années de nombreuses voies de recours à l'encontre des contrats publics.

57. Examen des offres et évaluation plus détaillée des candidats. Reste que l'examen des offres est une aubaine pour l'acheteur qui va réellement pouvoir évaluer l'ensemble des candidats. Cette phase lui permet tant d'évaluer l'expérience professionnelle, que les moyens humains, les moyens techniques et financiers que les prestations proposées. Cette phase reste donc incontournable, non seulement au regard de la loi mais également au regard de l'attribution du marché. Si nous avions à donner un conseil aux acheteurs à ce sujet nous les inciterons à passer autant de temps que nécessaire sur cette phase, et à faire intervenir un maximum de personnes qui auront chacune un regard particulier et individuel pour chaque offre. Il est indispensable d'avoir une pluralité d'avis, notamment ceux émanant des futurs bénéficiaires du contrat, afin d'examiner les offres de façon performante.

58. Toutefois il se peut qu'à l'issue des phases d'examen des candidatures et des offres l'acheteur n'ai pas en sa possession tous les outils nécessaire pour l'attribution de son contrat. Qu'il s'agisse de zones d'ombres à éclaircir, de doutes à préciser, ou de questions financières ou techniques à discuter, l'acheteur a la possibilité de rencontrer les candidats en vue d'une négociation.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

B. L'enjeu de la négociation lors de la passation de contrats publics

59. La négociation, reconnue et précisée depuis les récentes réformes (1.),
reste un outil incontournable pour l'acheteur, bien que sa pratique reste encadrée (2.).

1. La reconnaissance actuelle de la négociation

60. Définition de la négociation dans les marchés publics. Arnaud CABANES et Amaury GESTA définissent la négociation comme « un processus de formation contractuelle par lequel l'acheteur public et les entreprises candidates, discutent et accordent leurs volontés »86. En ce point nous ne pouvons que leur donner raison, tant leur définition synthétique déduit que la conclusion d'un marché ne saurait seulement résulter d'une simple signature contractuelle restrictivement basée sur un besoin associé à une offre, mais résulte bien d'un échange, d'un dialogue lors duquel les parties pourrons accorder leur volonté dans un objectif final gagnant-gagnant où chacun trouve son avantage.

61. L'accroissement de l'importance accordée à la négociation dans l'achat public. Dans une volonté d'accorder plus de souplesse aux procédures et plus de capacités opérationnelles à l'Administration les récentes réformes sont venues éclaircir le recours à la négociation. Cette nouvelle réglementation présente au moins l'avantage de lever un voile obscur qui entourait la négociation. Faute de précisions et face aux risques -entres autres pénaux- que peuvent encourir les acheteurs, nombreux étaient ceux qui se passaient tout simplement de recourir à la négociation, estimant que le jeu n'en valait pas la chandelle.

Reste que la négociation est aujourd'hui un outil qui, une fois l'accord de volonté trouvé entre les parties, permet d'entrapercevoir de nouvelles solutions, plus utiles, plus efficaces mais plus innovantes également.

86 LexisNexis Négociation dans les marchés publics, fascicule 63-10 du 15 octobre 2016 page 4 par Arnaud Cabanes et Amaury Gesta.

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Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

La négociation se retrouve désormais tant dans les procédures adaptées87, dans les marchés présentant une particularité liée à leur objet88, ou à d'autres raisons techniques ou économiques89, que dans les procédures formalisées90, notamment le dialogue compétitif et la procédure concurrentielle avec négociation91. On la retrouve également lors de la procédure de concours via un dialogue entre le candidat et un jury réuni pour l'occasion. Pouvant être autorisée par les textes sans être pour autant visée, l'ouverture du recours à la négociation tend à un accroissement des procédures permettant la discussion, que celle-ci soit qualifiée de dialogue ou de négociation92.

D'un avis extérieur nous ne pouvons que féliciter cette démarche puisqu'à notre sens un accord de volonté basé sur un dialogue et une entente mutuelle est un pas supplémentaire dans la performance de l'achat public. A ce titre nous conseillons évidemment aux acheteurs d'y recourir autant que possible, tant que cela est autorisé.

Aux acheteurs qui désireraient se lancer dans la négociation comme à ceux qui y ont déjà recours, nous ne pouvons qu'encourager la plus grande discrétion, la plus grande transparence et surtout de garder un cadre formel et une distance appropriée avec le candidat. Le dialogue et la négociation ne doivent pas aboutir à une discussion sans limites qui dépasserait le cadre légal. L'obligation d'égalité de traitement des candidats nécessite que la négociation soit quasi-identique avec chaque candidat. Si cette égalité peut se respecter aisément lors d'une procédure où chaque action est encadrée, elle est plus ardue lors d'une négociation. La frontière entre simple négociation et violation des règles de mises en concurrence est mince.

62. L'encadrement de la négociation. Pour autant cette pratique n'est pas libre de droit et reste encadrée, tout n'étant pas discutable et négociable. La négociation ne peut d'ailleurs porter sur les exigences minimales ni sur les critères

87 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 27.

88 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 28.

89 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 30

90 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 25.

91 Voir pour ce paragraphe La négociation dans la commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, étude 5, page 1.

92 Idem.

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d'attribution par exemple93. Bien que consacrée dans les dernières réformes, la négociation reste en quelques sortes une exception.

2. Un cadre favorable à l'essor de la négociation qui reste néanmoins une exception par définition

63. La permanence de l'exclusion de la négociation dans la procédure d'appel d'offres. Notre premier constat se base sur l'exclusion de la négociation lors de la procédure d'appel d'offres. L'article 66 du décret défini d'ailleurs cette procédure comme étant « la procédure par laquelle l'acheteur choisit l'offre économiquement la plus avantageuse, sans négociation, sur la base de critères objectifs préalablement portés à la connaissance des candidats »94. Cette exclusion nous donne un détail intéressant puisque l'appel d'offre reste la « procédure de principe de passation »95 de tout marché public, cela signifie que les autres procédures de passation sont en quelques sortes des dérogations à l'appel d'offre. La négociation n'étant donc autorisée que lors de procédures « dérogatoires », nous pourrions considérer qu'elle est à ce titre elle même dérogatoire et revêt alors un caractère exceptionnel. Il convient néanmoins de nuancer ces propos par le fait qu'elle est aujourd'hui de plus en plus répandue, mais le caractère exceptionnel lui, est toujours d'actualité.

64. La limitation de la négociation dans la procédure négociée avec mise en concurrence. Cet aspect exceptionnel se confirme également par le fait que la procédure négociée avec mise en concurrence préalable par exemple, n'est applicable qu'aux entités adjudicatrices. De même la procédure concurrentielle avec négociation n'est réservée qu'aux pouvoirs adjudicateurs. La négociation est toujours soumise à condition.

65. Le caractère facultatif de la négociation dans l'attribution des
concessions.
De même nous pourrions citer à titre d'exemple le nouveau caractère

93 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 73.

94 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 66.

95 La négociation dans la commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, étude 5, page 1.

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facultatif de la négociation lors de la passation de délégation de service public ou de concession. Autrefois étape cruciale et déterminante la négociation était obligatoire lors de la passation de ces contrats. Cela se justifiait entre autre par le fait que ces contrats s'écoulent sur plusieurs années, parfois plus d'une dizaine, et que le délégataire supporte un réel risque d'exploitation. De ce fait il semblait tout à fait logique que chaque candidat puisse avoir la possibilité de dialoguer et de négocier avec l'autorité délégante. Aujourd'hui cette obligation n'est plus et se limite à une simple possibilité pour les autorités concédantes, qui « peuvent organiser librement une négociation avec un ou plusieurs soumissionnaires »96. Outre le fait que cette nouvelle disposition contribue à faire de la négociation une étape exceptionnelle on pourrait toutefois s'interroger sur l'impact qu'aurait un refus de négocier lors de la passation d'une concession. Cela entrainerait-il un recul du nombre de postulants, un gonflement des prix de la part des candidats par précaution, ou bien même les deux ?97

Aux autorités concédantes nous ne pouvons que conseiller d'inclure systématiquement la négociation même lorsqu'elle reste facultative. En effet ne pas inclure de négociation ne permettra qu'un gain de temps, dérisoire au regard des avantages que peut représenter une négociation bien faite. L'intérêt de la négociation en contrats publics est qu'elle ne fait pas le jeu d'une partie ou de l'autre, les deux cocontractants peuvent sortir gagnant d'une telle démarche. De même si la négociation permet un système gagnant-gagnant entre l'Administration et l'opérateur privé, alors cela inclura les usagers et administrés dans le cercle des gagnants, puisqu'ils profiteront directement ou indirectement des avantages de ce contrat bien négocié.

66. Toutefois la négociation mérite d'être approfondie car elle est, et

restera, un élément clef d'évaluation des candidats et de performance.

96 Ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux contrats de concession JORF n°0025 du 30 janvier 2016 texte n°66, article 46.

97 Voir à ce titre La négociation dans la commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, étude 5, page 3 : 2° De l'obligation à la simple faculté dans les concessions.

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II - L'application de la négociation dans l'évaluation des candidats à un contrat public

67. La négociation est un atout majeur dans l'évaluation des candidats et dans la sélection de l'attributaire. S'il est nécessaire de revenir sur le cadre, stricte, qui défini le recours à la négociation (A.), nous conclurons par la nécessité de professionnaliser cette négociation (B.), cela nous permettra, entre autre, de donner nos ultimes conseils aux acheteurs.

A. Un cadre de recours à la négociation strictement défini

68. De son caractère exceptionnel la négociation tire sa propre limitation. Il
sera dans cette partie de distinguer ce cadre strict selon que la négociation ait lieu lors d'une procédure adaptée (1.) ou lors d'une procédure formalisée (2.).

1. La négociation dans les procédures non formalisées

69. Il convient dans cette sous partie de distinguer entre le recours à la
négociation lors de la procédure adaptée et la procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence préalable.

70. La négociation dans la procédure adaptée. La procédure adaptée est la procédure par opposition aux procédures formalisées. L'article 27 du décret dispose d'ailleurs « lorsque la valeur estimée du besoin est inférieure aux seuils de procédure formalisée, l'acheteur peut recourir à une procédure adaptée dont il détermine librement les modalités en fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs économiques susceptibles d'y répondre ainsi que des circonstances de l'achat »98. Outre le fait que cette procédure n'est utilisable qu'en dessous des seuils fixés elle se caractérise par la certaine liberté qu'elle offre aux acheteurs qui décident la mettre en place.

98 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 27.

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La place de la négociation au sein de cette procédure est facultative, ce même article précise « lorsque l'acheteur a prévu de négocier »99, ce qui induit que ce choix revient à l'acheteur qui est libre ou non de l'appliquer. S'il décide toutefois d'y recourir celui-ci a obligation de le mentionner expressément dans l'avis de publicité ou dans les documents de la consultation. Cependant même en l'ayant indiqué l'acheteur peut virer de bord et décider finalement d'attribuer « le marché public sur la base des offres initiales sans négociation, à condition d'avoir indiqué dans les documents de la consultation qu'il se réserve la possibilité de le faire »100. S'ouvre donc trois hypothèses intéressantes : soit l'acheteur n'a pas indiqué qu'il souhaitait recourir à la négociation et ne peut, de ce fait, l'appliquer par la suite, soit il a indiqué qu'il allait recourir à la négociation sans émettre de réserve et sera alors tenu de négocier, soit il indique recourir à la négociation en émettant une réserve de manière à pouvoir passer outre si besoin101. Ces hypothèses démontrent une fois de plus la liberté laissée aux acheteurs lors de cette procédure. Cette liberté se justifie entre autre par le fait que les montants étant assez faibles, les risques d'écarts sont moins importants.

De même cette faculté de l'acheteur de se réserver la possibilité de négocier entraine deux autres conséquences : s'il admet la négociation sans réserves, celui-ci sera tenu de négocier avec l'ensemble des candidats ayant remis une offre. S'il émet une réserve il a alors la possibilité de préciser que la négociation ne s'établira qu'avec un nombre restreint de candidats, sur une base de critères objectifs102.

Sans discuter des caractéristiques substantielles du contrat comme son objet ou ses critères de sélection, la négociation permet en outre de négocier tant la qualité du marché, que son délai, sa quantité ou son prix, sans pour autant qu'elle ne devienne une offre anormalement basse103.

Cela permet donc d'ouvrir un véritable dialogue entre les deux potentiels futurs cocontractants qui peut aboutir, nous l'avons vu, à une solution bénéfique aux deux parties. Encore une fois tout l'enjeu va être d'évaluer le futur cocontractant et

99 Idem.

100 Idem.

101 Voir à ce titre Direction des affaires juridiques des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux autorités concédantes, fiches techniques Les marchés à procédure adaptée et autres marchés publics de faible montant en date du 29/04/2016. Page 14 paragraphe 5.

102 Idem, page 15 paragraphe 1.

103 Idem page 16 paragraphe 5.

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éventuellement de déterminer une nouvelle ligne directrice qui, lorsqu'elle est bien tracée, est un facteur de performance.

71. La négociation dans la procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence. La procédure négociée sans publicité ni mise en concurrence préalable est également une procédure adaptée puisqu'elle ne figure pas dans la liste restreinte des procédures formalisées des articles 25 et 26 du décret104. A l'inverse de la procédure précédemment étudiée celle-ci peut s'appliquer quel que soit le montant du marché, pour autant qu'elle satisfasse aux exigences lourdes imposées à l'article 30105. Certains marchés négociés sans publicité ni mise en concurrence peuvent être propres aux pouvoirs adjudicateurs ou, à l'inverse, ne peuvent être passés que par les entités adjudicatrices. Sans développer ici les dizaines de cas permettant de recourir à cette procédure, nous pouvons mettre l'accent sur deux cas précis qui, à notre sens, sont les plus importants.

Il s'agit dans un premier temps d'une urgence impérieuse qui, résultant de circonstances imprévisibles pour l'acheteur et n'étant pas de son fait empêche le respect des délais exigés par une procédure formalisée106. Ce qui est intéressant ici est le rôle que va endosser le juge dans la recherche du caractère impérieux de l'urgence et du caractère imprévisible des circonstances. Nul doute que face à un recours à l'encontre de cette procédure le juge administratif aura tendance à évaluer fermement ces critères.

Dans un second temps la procédure est admise si à l'issue d'une procédure aucune offre n'a été remise dans les délais impartis, ou si chaque candidature a été déclarée irrecevable ou si chaque offre a été déclarée inappropriée107.

Ces deux cas démontrent bien le caractère exceptionnel de cette procédure, qui doit être en quelque sorte utilisée en dernier recours ou dans un cas extrêmement précis. A l'inverse de la procédure adaptée « basique », celle-ci s'illustre par le peu de liberté laissée à l'acheteur, la procédure négociée sans publicité ni mise en

104 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, articles 25 et 26.

105 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 30.

106 Idem, I 1°

107 Idem I 2°

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concurrence se distingue par les règles lourdes qui pèsent sur l'acheteur qui décide de la mettre en place.

Le Conseil d'Etat a d'ailleurs souvent eu l'occasion de se prononcer sur le recours à cette procédure. Ainsi la seule complexité d'un projet par exemple n'est pas déterminante dans la reconnaissance des difficultés techniques108, de même la marque des voitures vendues par une société ne justifie en rien le recours à un opérateur économique unique et déterminé109. Le juge administratif a, à cet égard une vision restrictive des conditions de recours à la procédure110.

Concernant la négociation en elle même elle ne diffère guère de celle mise en place lors de la procédure adaptée. Ceci étant dit l'acheteur peut inviter des entreprises à candidater et les admettre à la négociation, ce qui implique que l'acheteur s'est livré préalablement à une première évaluation des potentiels candidats. La démarche de cette procédure va de paire avec le sourcing étudié dans la première partie de notre mémoire.

Au travers de ces différentes procédures nous avons voulu illustrer la nécessité pour l'acheteur de replacer la négociation au coeur même de l'évaluation des candidats, dans un objectif de performance certain.

2. La négociation dans les procédures formalisées

72. Trois procédures formalisées permettent le recours la négociation,

chacune ayant ses propres spécificités. Le dialogue compétitif dans un premier temps est une procédure pouvant être mise en oeuvre tant par les pouvoirs adjudicateurs que par les entités adjudicatrices, suivent la procédure concurrentielle avec négociation et la procédure négociée avec mise en concurrence préalable, respectivement mise en place uniquement par les pouvoirs adjudicateurs et par les entités adjudicatrices.

108 CE 15 avril 1996 n°154986 Ghiulamila : JurisData n°1996-040908

109 CAA Paris 13 mars 2007 n°04PA02781, société automobiles Peugeot.

110 Pour ce paragraphe voir LexisNexis Négociation dans les marchés publics, fascicule 63-10 du 15 octobre 2016 point 62 par Arnaud Cabanes et Amaury Gesta.

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73. La négociation dans le dialogue compétitif. Le dialogue compétitif se défini comme la procédure dans laquelle « l'acheteur dialogue avec les candidats admis à participer à la procédure en vue de définir ou développer une ou plusieurs solutions de nature à répondre à ses besoins et sur la base de laquelle ou desquelles les participants au dialogue sont invités à remettre une offre »111.

Sans qu'il soit nécessaire ici de détailler les conditions de recours à cette procédure nous nous attarderons sur l'intérêt et l'utilité du dialogue compétitif, notamment vis à vis de l'évaluation des candidats. Cette procédure se décline en trois étapes fondamentales qui nous serviront de fil conducteur.

Le dialogue s'ouvre donc par la publication de l'avis de marché au sein duquel l'acheteur a défini ses besoins et exigences, éventuellement complété par un programme fonctionnel ou un projet partiellement défini 112 . Ce programme fonctionnel renvoie aux critères fonctionnels que nous avons étudiés plus tôt, ce qui va laisser une certaine place à l'inventivité et l'innovation des candidats. Cet avis a pour objectif d'alerter les différents opérateurs économiques en vue de recevoir un maximum de candidatures113. A ce titre le dialogue ne peut s'ouvrir qu'avec trois candidats au minimum114.

Le dialogue commence réellement une fois les candidats sélectionnés. Vont alors être discutés et débattus l'ensemble des aspects du marché et des moyens propres à satisfaire les besoins exprimés de l'acheteur115. L'idée ici est donc de faire confiance au secteur privé et de discuter un maximum en plusieurs phases afin de déterminer une solution, née conjointement du travail réalisé par l'Administration et le candidat.

Une fois l'ensemble des solutions identifiées pour répondre au besoin, le dialogue se termine, les candidats remettent alors leur offre finale et la sélection peut s'opérer.

Ce qu'il ressort de cette procédure c'est la place relativement importante qui est laissée au candidat pour apporter une réponse aux besoins de l'acheteur. Sans

111 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 75.

112 Idem.

113 Procédures de passation des marchés publics JCI contrats et marchés publics fasc. 64-10 par Stéphane Braconnier et Emmanuel Kalnins, C) Dialogue compétitif, point 47.

114 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 47.

115 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 76 II.

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revenir sur l'impact du secteur privé dans la détermination des solutions de l'Administration ou sur l'importance de l'innovation dans les contrats publics, une porte est laissée ouverte à l'acheteur pour évaluer pleinement son futur cocontractant. Au delà des réponses apportées, une panoplie de détails va surgir de ces dialogues et va permettre à l'Administration d'évaluer individuellement, puis en les comparant, les différents candidats. Bien que le recours à cette procédure soit limité elle peut tout de même être facteur de performance tant la solution adoptée sera apte à répondre aux besoins de l'acheteur.

74. La négociation dans la procédure concurrentielle avec négociation. La procédure concurrentielle avec négociation est la procédure par laquelle « un pouvoir adjudicateur négocie les conditions du marché public avec un ou plusieurs opérateurs économiques autorisés à participer aux négociations »116, celui-ci pouvant indiquer dans les documents de la consultation « les exigences minimales que doivent respecter les offres »117.

Les conditions de recours à cette procédure sont les mêmes que pour celle du dialogue compétitif et sont énumérées à l'article 25 du décret118, bien qu'elle soit réservée aux seuls pouvoirs adjudicateurs. La distinction entre dialogue compétitif et procédure concurrentielle avec négociation tient en ce que lors de cette dernière, l'acheteur n'a pas la nécessité de faire définir et développer par le candidat des solutions en vue de répondre à ses besoins. En d'autre terme, à l'inverse du dialogue compétitif, la négociation et le dialogue ne porteront pas lors de cette procédure sur une solution à déterminer mais sur la solution en elle même, préalablement définie par l'acheteur. La négociation va alors porter sur le contenu des offres et des documents de consultation, à l'exception des exigences minimales formulées et des critères de sélection119. La négociation est donc restreinte et ne laisse que peu de place à l'innovation ou à l'analyse fonctionnelle des besoins. Globalement, cette procédure reste une solution de secours pour les acheteurs, et ne permet pas une

116 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 71.

117 Idem.

118 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 25.

119 Direction des affaires juridiques des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux autorités concédantes, fiches techniques La procédure concurrentielle avec négociation du 30 mars 2016, page 10 paragraphe 1.

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négociation des plus abouties. Cependant, elle permet tout de même à l'acheteur d'évaluer son futur cocontractant sur une base de critères objectifs.

75. La négociation dans la procédure négociée avec mise en concurrence préalable. La procédure négociée avec mise en concurrence préalable est quant à elle « la procédure par laquelle une entité adjudicatrice négocie les conditions du marché public avec un ou plusieurs opérateurs économiques autorisés à participer aux négociations »120.

Réservée aux seules entités adjudicatrices, cette procédure se distingue en ce que sa mise en oeuvre reste assez libre. Alors que les pouvoirs adjudicateurs sont restreints aux conditions de l'article 25121 pour mettre en place un dialogue compétitif ou une procédure concurrentielle avec négociation, l'article 26122 permet à ces entités de choisir librement entre appel d'offre, dialogue compétitif ou procédure négociée avec mise en concurrence préalable, dès lors que les seuils européens sont dépassés123. Cela se justifie notamment par la complexité que revêtent les contrats publics passés par ces entités.

Au delà de cette distinction la négociation au sein de cette procédure reste relativement la même que la négociation de la procédure concurrentielle. Sans être une négociation extrêmement poussée elle reste toutefois une négociation à part entière, bénéfique pour l'acheteur comme l'opérateur.

76. Au delà de ces différents cas de négociation, qu'il s'agisse de
procédures formalisées ou non, nous souhaitons attirer l'attention des acheteurs sur la négociation en elle même, son contenu et les risques qui s'y affèrent. Si notre position au regard de la négociation reste positive et que nous ne pouvons qu'encourager la négociation dans tous ses états, nous mettons l'accent sur la nécessaire professionnalisation de la négociation, indispensable à notre sens.

120 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 74.

121 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 25.

122 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 26.

123 LexisNexis Négociation dans les marchés publics, fascicule 63-10 du 15 octobre 2016 page 24 par Arnaud Cabanes et Amaury Gesta.

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B. La professionnalisation de la négociation, entre sécurité juridique et bénéfice direct

77. La professionnalisation de la négociation s'entend comme une négociation faite par un professionnel. Certes vulgarisée cette phrase tend à faire comprendre que la négociation poursuit des objectifs précis qui, s'ils sont réalisés, seront bénéfiques tant à l'acheteur qu'au titulaire du contrat. Au delà d'être un simple facteur de performance la professionnalisation de la négociation a également pour vocation de sécuriser juridiquement ce processus lors duquel des écarts sont facilement constatables. Pour comprendre l'enjeu et la tendance actuelle qui pèse sur la négociation il nous est nécessaire d'apporter dans un premier temps quelques éclaircissements sur la négociation dans la sphère administrative française (1.), avant de réellement poursuivre et de donner nos propres préconisations concernant la négociation en tant qu'outil d'évaluation des candidats (2.).

1. La négociation au sein de la sphère administrative française

78. La négociation est et restera, quelle qu'elle soit, une forme de discussion
en vue d'aboutir à une solution convenant aux deux parties. Il s'agit alors d'un savant mélange entre échange, discussion et manipulation qui bien souvent doit s'allier d'une qualité oratoire, d'une préparation mentale et d'une argumentation développée. En ces termes nous pouvons comprendre qu'elle puisse revêtir une certaine difficulté pour les acheteurs.

79. L'absence de formation des acheteurs. A n'en pas douter l'un des premiers obstacles que l'Administration française connaisse aujourd'hui réside dans le fait que ses agents ainsi que ses élus ne sont globalement pas formés à la pratique de la négociation. Pas plus qu'un juriste en sortie d'université la négociation dans le sens des affaires reste propriété des économistes, issus d'écoles de commerce, trop peu souvent voués à une carrière administrative. La première difficulté va donc être de confronter lors d'une négociation un agent, qu'il soit titulaire ou contractuel, qui n'a pas nécessairement reçu la formation requise contre un candidat, potentiellement

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chef d'entreprise, éventuellement issu d'une grande école, qui maitrise de par la nature de sa profession et son bagage scolaire les ficelles de la négociation.

A cela s'ajoute la culture professionnelle des fonctionnaires qui restent entourés de statuts, de cadres légaux stricts, de mesures unilatérales qui les empêchent dans leur activité de tous les jours d'exercer une certaine négociation. Bien que des représentants syndicaux ou même des agents ayant la fibre « négociatrice » puissent êtres voués à avoir un certain talent dans cette discipline, il reste que dans le contexte global, l'Administration n'est pas préparée à négocier124.

80. L'épée de Damoclès du contentieux. Un deuxième obstacle tient en ce qu'il existe une réelle peur du contentieux au sein des services. Cela se comprend, d'un point de vue extérieur, puisque l'agent qui va s'adonner à la négociation devra respecter l'égalité de traitement des candidats, alors que l'ensemble des candidats a une vision différente du contrat. La question qui doit se poser est de savoir comment lier l'égalité de traitement avec des points de vue divergents des candidats qui n'auront pas le même intérêt pour telle ou telle clause du contrat et qui mettront l'accent lors de la négociation sur des sujets diamétralement distincts125. A cela s'ajoute les cas d'ouverture des contentieux ces dernières années qui font peser une réelle épée de Damoclès sur la tête des acheteurs.

De ce fait la négociation aujourd'hui reste relativement réduite, bien souvent cantonnée à un simple courrier demandant une réduction des coûts au candidat126. Au contraire, il faudrait voir la négociation comme un atout beaucoup plus large, beaucoup plus global et donc bien plus bénéfique.

81. Les risques congénitaux de la négociation. Un troisième obstacle réside dans la nature même de la négociation. Négocier c'est accepter de perdre quelque chose en vue de gagner ailleurs. Or, l'agent ou l'élu qui négocie, n'oublie jamais que son rôle est et restera toujours la poursuite de l'intérêt général. Cette conception peut être facteur de restriction de la négociation pour un acheteur :

124 Voir à ce propos LexisNexis fascicule 63-11 : Modalités de la négociation des contrats publics par Philippe Delelis en date du 31 décembre 2015, point 6.

125 Idem, point 9.

126 La négociation dans la commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, point 27

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jusqu'où puis-je me permettre de perdre pour gagner ? Ce gain compense t'il assez la perte que je vais réaliser ? Cette perte en elle même n'est elle pas une atteinte à l'intérêt général ?

Tout cet aspect -que nous ne critiquons d'ailleurs pas, nous restons favorable à une poursuite de l'intérêt général de la part de l'Administration et de ses agents-peut être un frein à la négociation127.

82. Ce que nous tentons de démontrer ici n'est pas une faille ou une faiblesse de l'Administration, mais un contexte global peu favorable à la mise en place d'une négociation en bonne et due forme. Ce contexte justifie qu'une professionnalisation de la négociation soit réellement et impérativement mise en place par les services. A ce titre nous allons tenter d'apporter notre point de vue et nos conseils sur ce sujet.

2. Pour une mise en place performante de la négociation

83. Nous détaillerons ici les indices et conseils qui nous semblent les plus
pertinent à donner à un service de commande publique. Sans que cela paraisse présomptueux et sans remettre en cause les compétences des décideurs nous nous permettons tout de même d'exprimer notre point de vue.

84. Assurer la formation des acheteurs. Concernant le cadre général de la négociation, plusieurs mesures pourraient permettre à notre sens de maintenir un contexte favorable à la négociation. Dans un premier temps nous ne pouvons que conseiller aux responsables des services d'assurer la formation de leurs agents. La formation tout au long de la vie et la multiplication des diplômes universitaires sont aujourd'hui une excellente alternative pour former des agents compétents sur des sujets qu'ils ne maitrisaient pas nécessairement. Cette formation revêt une double finalité : une formation économique dans un premier temps où les agents seraient formés à la négociation mais aussi au management puis une formation juridique

127 Voir pour ces deux paragraphes LexisNexis fascicule 63-11 : Modalités de la négociation des contrats publics par Philippe Delelis en date du 31 décembre 2015, point 7.

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dans un second temps où les agents seraient enfin formés au cadre stricte de la législation concernant, entre autre, la transparence, l'égalité de traitement des candidats, le délit de favoritisme...

Cette double formation doit cependant être accompagnée de deux outils. Le premier est l'adoption au sein du service d'une charte de déontologie qui permettrait à chaque agent de parfaire sa connaissance juridique et de trouver un certain cadre sur lequel il puisse compter. Le second outil est le recours aux réunions d'informations le plus souvent possible. En effet c'est au responsable et au supérieur du service de poser le cadre, les limites de la négociation. Sans parler ici de limite ou cadre juridique il semble néanmoins impératif qu'un dialogue s'ouvre au sujet de la négociation entre agents et responsables.

Ces différentes mesures ont pour but de créer, au sein du service, une atmosphère, un contexte favorable au développement de la négociation. Il est nécessaire que les agents prennent conscience du réel pouvoir qu'ils ont ainsi que de leur faculté à négocier. La prise de confiance revêt une part primordiale dans la négociation.

85. Anticiper la négociation. Notre seconde série de mesures concerne l'avant-négociation, toutes les phases en amont de la rencontre.

Avant de penser à la négociation en tant que tel il est indispensable que les services se couvrent juridiquement, à ce titre il est nécessaire de prendre toute mesure utile afin d'éviter tout contentieux. Qu'il s'agisse de mesures préliminaires ou de simples précisions dans les documents de consultation, tout doit être fait pour éviter le risque de contentieux.

Pour cela il sera nécessaire de prévoir tous les cas de figure possible, et nous encourageons les acheteurs non seulement à pratiquer le sourcing pour se renseigner mais également de dialoguer avec d'autres services qui ont déjà eu recours à la négociation. Toute information est bonne à prendre et peut permettre une réalisation optimale de la négociation.

Enfin il est recommandé aux acheteurs de préparer leur négociation en amont. Il faudra alors se mettre à la place du candidat afin d'anticiper ses réactions. Il faudra également faire un constat de ses forces, de ses faiblesses afin d'orienter le débat et le

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dialogue dans un sens favorable.

86. Maîtriser la négociation. Notre troisième et dernière série de mesures

concerne la négociation en elle même.

Quand bien même nous réalisons que cela puisse être une perte de temps nous ne pouvons que conseiller aux acheteurs de favoriser les débats oratoires128. Une bonne négociation, qu'elle soit favorable à l'administration, au candidat, ou au deux, ne peut se faire par écrans opposés.

De même nous préconisons une formalisation de la procédure129. Il faut comprendre par là que la transparence et l'égalité de traitement des candidats restent les principes phares de la commande publique, à ce titre l'acheteur doit prendre toute mesure utile en vue d'une procédure formelle, propre et incontestable.

Ainsi chaque négociation en présentiel doit être prévue, actée sur un créneau réservé à cette négociation130. A l'issu de ces rendez vous l'agent devra tracer par écrit131 l'ensemble de la discussion et réaliser des fiches récapitulatives. Au delà de permettre une traçabilité favorable à la transparence et à la diminution du risque de contentieux ces mesures permettraient en chaque tour de négociation de préparer la nouvelle réunion. Lorsqu'un nombre important de candidats participe à la négociation et que ces négociations durent dans le temps, il est nécessaire que l'acheteur ait en sa possession des fiches techniques et récapitulatives. Cela lui permettra au pire de ne pas perdre de temps, au mieux de préparer et rétablir si besoins les rapports de force.

L'acheteur doit également utiliser tous les atouts qu'il a en sa possession. Ainsi nous conseillons également d'utiliser les clauses incitatives de performance ou les pénalités de retard au sein des négociations. Si la première est favorable au candidat, elle permettra d'obtenir gain de cause sur un autre point, la seconde quand à elle désavantage le candidat, et doit presque être perçue comme une sorte de chantage si le candidat tente d'imposer une mesure trop extrême au regard du

128 LexisNexis fascicule 63-11 : Modalités de la négociation des contrats publics par Philippe Delelis en date du 31 décembre 2015, point 18.

129 La négociation dans la commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, point 28.

130 LexisNexis fascicule 63-11 : Modalités de la négociation des contrats publics par Philippe Delelis en date du 31 décembre 2015, point 18

131 Idem point 19.

Chapitre second - Une constante évaluation des offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat

contrat132.

87. Ces modestes conseils basés tant sur l'étude théorique de la négociation
que sa pratique nous semblent pertinents en vue de développer puis d'effectuer la négociation dans le meilleur cadre possible.

88. Conclusion de chapitre. Ainsi nous venons de voir que la négociation n'est pas qu'un simple outil permettant une potentielle réduction des prix, elle permet de rechercher et de trouver l'équilibre au sein du contrat. Au delà même de cet équilibre la négociation est fondamentale lors de l'évaluation des candidats et permet une sélection éclairée du futur cocontractant.

Si nous venons d'étudier très largement l'évaluation des candidats à un contrat public et la performance qui peut s'y raccrocher il nous reste désormais à étudier l'évaluation en tant que telle du cocontractant de l'Administration.

70

132 Idem point 24.

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Seconde partie - Une évaluation permanente du cocontractant dès la conclusion du contrat

SECONDE PARTIE - UNE EVALUATION PERMANENTE DU
COCONTRACTANT DES LA CONCLUSION DU CONTRAT

89. Introduction. Si nous avons pu démontrer que l'évaluation des candidats à un contrat public pouvait être un facteur de performance pour les services de commande publique, l'évaluation du cocontractant en lui même durant l'exécution du contrat reste primordiale. S'il est nécessaire dans un premier chapitre d'évoquer l'intérêt de cette évaluation (Chapitre premier), non seulement au regard de l'exécution actuelle du contrat mais également au regard d'une dimension pluriannuelle de l'achat public, nous consacrerons notre second chapitre aux modalités de cette évaluation et aux outils susceptibles d'être mis en place (Chapitre second).

L'objectif de cette deuxième partie de notre mémoire va être de faire prendre conscience aux acheteurs que non seulement l'évaluation du cocontractant est vitale pour le service qu'ils dirigent et les contrats qu'ils concluent mais également qu'ils possèdent en leur sein un catalogue d'outils en apparence simples d'utilisation qui les épauleront dans cette démarche d'évaluation du cocontractant tout au long du contrat.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

CHAPITRE PREMIER - L'INTERET D'UNE EVALUATION DU
COCONTRACTANT LORS DE L'EXECUTION DU CONTRAT PUBLIC, UN
BENEFICE BRUT POUR L'ADMINISTRATION

90. Introduction. Il sera question dans ce chapitre de démontrer que l'Administration a tout intérêt à s'inclure dans une logique d'évaluation du cocontractant, tant au regard de l'exécution en elle même (I) , qu'au regard des intérêts futurs (II).

I - L'intérêt immédiat de l'évaluation du cocontractant lors de

l'exécution du marché

91. Si cette évaluation permet dans un premier temps à l'administration d'utiliser efficacement ses prérogatives propres de puissance publique (A.), elle est également un facteur d'efficacité de l'achat public (B.).

A. L'évaluation au coeur du recours aux prérogatives de puissance publique

92. Si les contrats publics s'illustrent par le fait qu'existe un certain
déséquilibre du fait des pouvoirs exorbitants de l'administration, il faut tout de même admettre que l'exercice de ces pouvoirs n'est pas tout à fait libre, et que leur bonne utilisation est subordonnée à une évaluation du cocontractant. Il faudra toutefois distinguer entre les pouvoirs de modification et les pouvoirs de direction et de contrôle (1.) ainsi que les pouvoirs de sanction et de résiliation (2.).

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

1. Une bonne utilisation des pouvoirs de modification, de direction et de contrôle subordonnée à une bonne évaluation du cocontractant

93. La diversité des modes de modification du contrat administratif. La modification d'un contrat public, qui est soumise à certaines limites, peut être soit d'origine unilatérale, c'est alors un pouvoir propre à l'Administration, soit d'origine contractuelle, elle s'illustre alors par la passation d'un avenant.

La modification unilatérale d'un contrat public permet à l'acheteur « d'adapter le contrat à des préoccupations d'intérêt général apparues dans le cours de son exécution »133. Cette modification a donc pour objectif de garantir l'efficacité et l'intérêt général d'un contrat public. L'intérêt général est d'ailleurs la seule justification possible au recours à cette modification, qui ne peut d'ailleurs porter sur les clauses financières134 et qui ne peut bouleverser l'économie ou l'objet du contrat135.

La modification contractuelle s'exerce par la passation d'un avenant en vue « de modifier les conditions initiales du contrat et d'apporter une réponse ponctuelle à un souci d'exécution du marché »136. La passation d'un avenant est également soumise à condition mais reste l'un des moyens par lequel l'administration et son cocontractant peuvent rechercher l'équilibre au sein du contrat. La négociation y joue d'ailleurs un rôle d'une extrême importance.

94. L'utilité de l'évaluation du cocontractant dans la modification du contrat. Ce qu'il ressort de ces deux hypothèses de modification est qu'un contrat public n'est pas voué à rester le même de sa passation à son terme, nombreuses sont les occasions d'y apporter une modification pour peu que la nature, l'objet et les clauses financières soient respectés. Néanmoins ces possibilités de modification doivent rester exception et ne peuvent être facteur d'efficacité du contrat public que dans l'hypothèse où elles sont adoptées de manière idéale. Or cela requiert nécessairement que l'acheteur soit au fait du contrat en cours d'exécution et qu'il se soit livré à une bonne évaluation de son cocontractant, tant du travail accompli que

133 JurisClasseur Administratif fascicule 638 Exécution du marché, pouvoirs de l'Administration en date du 12 novembre 2008 par Catherine Presbissy-Schnall, point 31.

134 Idem point 35.

135 Idem point 37.

136 Idem point 45.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

des tarifs qu'il pratique. On ne peut penser qu'une bonne modification d'un contrat public interviendrait sans évaluation préalable et constante.

95. L'adéquation entre évaluation et pouvoir de direction et de contrôle. C'est également le cas lorsque l'acheteur souhaite utiliser son pouvoir de direction et de contrôle qui lui permet de contrôler ou de diriger les opérations d'exécution137. Ce pouvoir s'illustre par les échanges et la communication entre cocontractant et acheteur et peut se matérialiser sous la forme d'ordre de service138.

Sans qu'il soit nécessaire ici de détailler l'ensemble de la réglementation en vigueur nous mettons l'accent sur l'adéquation ultime entre direction, contrôle et évaluation. En effet l'un ne va pas sans les autres et nous ne pourrions envisager une situation dans laquelle un ordre de service interviendrait sans aucune évaluation de l'acheteur ou à l'inverse, un situation dans laquelle une excellente évaluation ne pourrait aboutir à aucun pouvoir de l'administration si la situation le justifiait.

96. Ces deux catégories de pouvoir -modification et contrôle, direction- ne
peuvent donc être le fruit que d'une bonne évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat, et en ce sens l'évaluation permet donc dans un premier temps à l'administration d'user de ses prérogatives. Mais ce constat s'illustre également au travers des pouvoirs de sanction et de résiliation de l'administration.

2. La résiliation et la sanction, apanage de l'Administration, finalités potentielles d'une évaluation du cocontractant.

97. Évaluation et résiliation du contrat. Le pouvoir de résiliation de
l'administration s'exerce sous deux formes, la résiliation unilatérale pour motif d'intérêt général et la résiliation à titre de sanction.

Le premier type de résiliation permet de mettre fin au contrat avant l'exécution complète des prestations pour motif d'intérêt général139. Le deuxième est prononcé comme une sanction dès lors que le cocontractant à adopter un

137 Idem point 69.

138 Idem point 73.

139 Idem point 10.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

comportement gênant pour la bonne exécution du marché et conduit à la fin des rapports contractuels tout en entrainant des incidences financières particulières140.

Ces deux résiliations se rejoignent sur le fait qu'aucune clause à un contrat public ne peut prévoir le renoncement de l'administration à ce pouvoir.

La résiliation est la prérogative de puissance publique ultime de l'administration et de ce fait, elle est soumise au respect de conditions strictes. Il apparaitrait alors fantaisiste de la part de l'acheteur de se livrer à une résiliation sans avoir pu évaluer son cocontractant. Sans se livrer à une bonne évaluation tout au long du contrat l'Administration n'aura aucunement la possibilité d'exercer cette prérogative et si toutefois elle se le permettait nul doute que le juge entacherait cette décision de nullité puisque, par nature, elle serait sans fondement.

98. Évaluation et pouvoir de sanction. Le pouvoir de sanction de l'administration se distingue du pouvoir de résiliation en ce qu'il concerne des manquements insuffisamment graves pour justifier une résiliation. Ce pouvoir permet donc à l'Administration d'infliger des sanctions de façon proportionnée face à un manquement ou une faute du cocontractant141. Certaines de ces sanctions ne peuvent être prononcées en l'absence de clauses contractuelles, c'est par exemple le cas des pénalités de retard142.

Toujours est il que pour s'exercer ce pouvoir nécessite une faute ou un manquement que l'Administration devra relever. Or, comment relever une telle faute ou manquement si l'Administration n'use pas de son droit de regard et d'évaluation sur le cocontractant ? Une fois de plus l'utilisation de cette prérogative de puissance publique reste subordonnée à une évaluation concrète du cocontractant.

Nous venons de le démontrer l'Administration possède en son sein un arsenal d'outils lui permettant d'exercer ces prérogatives de puissance publique. Or l'évaluation du cocontractant reste au coeur de l'utilisation de ces prérogatives puisque, sans évaluation, soit l'Administration ne sera pas en mesure des les utiliser, soit elle les utilisera de façon erronée, risquant ainsi une condamnation par le juge.

140 Idem point 121.

141 Idem point 101.

142 Idem point 101.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

Mais l'évaluation du cocontractant ne se limite pas à l'utilisation de ces prérogatives, elle peut également être un facteur d'efficacité de la commande publique.

B. Une exécution efficace du contrat par l'évaluation du cocontractant

99. Il sera question ici de démontrer qu'une évaluation du cocontractant tout au long de la vie du contrat public peut être un facteur d'efficacité. Si cette évaluation peut être un atout pour l'Administration (1.), elle l'est également pour le cocontractant qui trouvera un intérêt à être évalué par l'acheteur (2.).

1. L'évaluation du cocontractant au service de l'Administration

100. Évaluation et efficacité de l'achat. L'évaluation du cocontractant va être un réel outil pour l'administration, qui va pouvoir s'assurer de l'efficacité de son achat.

Si dans un premier temps l'évaluation peut conduire à la vérification du service fait, le cocontractant qui est au courant de cette évaluation ne peut qu'adopter une conduite plus efficace, plus performante. En effet l'Administration devient de fait l'employeur du cocontractant ce qui le contraint, comme n'importe quel employé, à travailler bien, et travailler mieux. L'évaluation en ce sens permet de faire prendre conscience aux titulaires qu'ils sont réellement surveillés et que pèsent sur eux des risques en cas de défaut d'exécution. Ce premier constat est donc au service de l'Administration qui, en menant une politique d'évaluation complète, s'assurera d'une exécution optimale du contrat de la part de son cocontractant.

Toujours dans un objectif d'efficacité cette évaluation couplée de clauses incitatives de performance, qui permettent « d'améliorer les délais d'exécution, de rechercher une meilleure qualité des prestations et de réduire les coûts de production »143 permettra au cocontractant de tenter par tout moyen de se distinguer et d'être plus performant. Cette alliance récompense-évaluation est donc un facteur de performance bien plus avantageux que l'alliance contrôle-sanction.

143 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, article 17.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

101. Évaluation et gestion de l'exécution. Dans un second temps l'évaluation va permettre de rectifier et de corriger les écarts constatés. Dans l'hypothèse où l'évaluation conclue à un constat négatif, il sera toujours possible pour l'acheteur de faire pression sur le titulaire par ses prérogatives de puissances publiques, ou tout du moins corriger mécaniquement ces écarts. Nous l'avons démontré, ces prérogatives ne sont possibles que par une évaluation correcte du cocontractant.

Mais cette évaluation va également permettre de gérer les accidents d'exécution144. Effectivement en cas d'accident d'exécution deux choix s'offrent à l'acheteur : soit il applique à la lettre les pénalités qu'il a prévu et que le cocontractant a accepté, soit il fait en sorte d'agir dans l'intérêt général. Les pénalités, si elles sont trop lourdes et trop importantes auront pour conséquences que le cocontractant gonflera ses prix en fonction, pour s'assurer de ne pas se retrouver dans le rouge. De même leur utilisation à tout va pourrait entrainer de grave conséquences pour le titulaire qui, ne l'oublions pas, joue également la survie de son entreprise par l'exécution d'un contrat public.

Ce que permet une excellente évaluation tout au long du contrat va être de prévenir et de gérer ces accidents, de sorte qu'au lieu d'appliquer bêtement des pénalités l'acheteur sera sans cesse dans l'anticipation, la recherche de solution, en gardant à l'esprit la continuité du service public, l'intérêt général, l'efficacité et la performance de son achat145. En ce sens nous ne conseillons évidemment pas aux acheteurs de supprimer les pénalités ou de ne pas les appliquer, mais au contraire de jongler habilement entre tous ces éléments pour trouver l'issue la plus favorable.

Enfin l'évaluation, lorsqu'elle aboutie à un constat positif permet de mesurer l'étendue de la qualité de l'achat. Cette qualité évaluée et réelle permet non seulement de justifier cet achat, que ce soit au regard des supérieurs, des politiques,

144 Pour un management performant de l'exécution des marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014, CCI de Paris page 18 http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf

145 Idem.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

et aussi des contribuables, mais permet également une valorisation du service commande publique dans son ensemble.

S'il est nécessaire de féliciter et récompenser le titulaire lorsqu'il adopte une exécution performante, il convient aussi de féliciter et récompenser le service en charge du suivi de ce marché. Cette recherche de performance par la récompense -et non par la sanction- ne peut se faire que par une évaluation complète du cocontractant.

2. L'évaluation du cocontractant au service du titulaire lui même

102. Il est nécessaire de comprendre ici que l'évaluation du cocontractant n'est pas seulement un atout pour l'Administration, mais également pour le cocontractant en lui même.

103. Le dialogue entre l'Administration et l'opérateur. Le premier bénéfice que tire le cocontractant d'une bonne évaluation se matérialise autour de l'ouverture d'un dialogue entre lui et l'acheteur. En effet si le titulaire est mis au courant des modalités d'évaluation, et à admettre que cette évaluation soit relativement bien faite, cela lui permettra de faire remonter plus facilement ses intentions, ses problèmes ou ses suggestions. Va donc s'ouvrir une phase de dialogue sur l'avancée de l'exécution du contrat. Toute l'efficacité de l'exécution va reposer sur ce dialogue puisque dans quelque situation de conflit que ce soit, rien ne peut valoir une discussion en bonne et due forme, en vue de dégager les solutions utiles qui s'imposent. Sans évaluation le titulaire pourrait être amené à avancer dans un certain flou, même si le cahier des charges lui dicte les prestations à réaliser. Ce dialogue permet donc de construire une relation de confiance et d'écoute mutuelle entre l'administration et son cocontractant, dans un objectif d'efficacité et de performance.

104. La valorisation de l'opérateur. Le deuxième atout d'une bonne évaluation du point de vue du cocontractant se trouve dans la valorisation mise en place par les clauses incitatives de performance. Nous l'avons démontré, le couplage évaluation-valorisation l'incitera à trouver toute solution performante. Or en

Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

adoptant cette démarche le cocontractant s'assure deux choses : premièrement un avantage financier prévu par les clauses, et secondement une estimation positive de son travail par l'acheteur. Ainsi en travaillant mieux et en étant mieux évalué le cocontractant s'assure que l'Administration gardera une image positive de sa prestation globale, ce qui pourrait le conduire à l'obtention de la reconduction du marché ou de tout autre marché similaire.

105. Une meilleure gestion des risques. Le troisième et dernier avantage d'une bonne évaluation pour le cocontractant tient en la gestion des accidents d'exploitation expliquée plus tôt. En effet si cette démarche d'évaluation peut être bénéfique pour l'acheteur, elle le sera également financièrement pour le titulaire qui n'aura pas à subir systématiquement des pénalités de retard ou des sanctions pécuniaires. Au-delà d'un simple avantage financier cette conception lui permettra également de conserver de bonnes relations avec l'acheteur, ce qui favorisera toujours un dialogue utile et concluant.

106. Ainsi l'évaluation, lorsqu'elle se révèle bien faite, constante et utile reste un facteur de performance et d'efficacité qui profite à l'ensemble des acteurs d'un contrat public. Toutefois si nous venons de démontrer son utilité lors de l'exécution d'un contrat, elle revêt également une importance cruciale pour l'avenir.

II - L'importance de l'évaluation du cocontractant au terme du contrat public.

107. S'il nous semble nécessaire dans un premier de revenir sur la tendance actuelle qu'il conviendrait de changer (A.), nous démontrerons par la suite que l'évaluation du cocontractant reste au coeur de la vision pluriannuelle de l'achat public (B.).

80

A. Une tendance actuelle néfaste à la vision long terme de l'achat public

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

108. Cette partie nait du constat que les acheteurs dans leur ensemble restent aujourd'hui trop figés sur la passation et l'exécution du contrat et son intérêt économique direct (1.), sans se rendre compte que l'évaluation du cocontractant est un facteur de développement à moyen-long terme (2.).

1. Un constat simple : les acheteurs restent trop centrés sur la vie de leur contrat et de son intérêt économique direct, sans avoir la vision large qui s'impose

109. Ce constat, sans être une généralité dépasse de loin la simple exception. La tendance actuelle vise de la part des acheteurs à se focaliser sur une vision à trop court terme. En effet les acheteurs consacrent la grande majorité de leur temps autour de trois axes principaux.

110. Le « complexe de la légalité ». Le premier concerne la passation des contrats et la vérification de leur conformité au regard de la loi. Cette attention particulière se justifie au regard des risques encourus et de la peur que représente le risque de contentieux chez certains acheteurs.

111. Le « complexe du financement ». Le deuxième axe est la recherche du prix le plus bas. Non pas du meilleur rapport/qualité prix mais réellement du prix le plus bas. Cette conception erronée de l'achat public ne reflète pas nécessairement la volonté des acheteurs mais plutôt de leurs supérieurs, des décideurs qui, au regard de la préservation des deniers publics, s'emploient à mettre en place le critère de sélection du prix aux environs de 80%, sans que cela ne concerne un simple marché de fourniture. Cette volonté politique de toujours vouloir rabaisser les prix impose aux agents d'y consacrer une part de leur temps non négligeable, voir trop importante et surtout inadaptée au regard de la performance recherchée.

112. Le « complexe de la saine exécution ». Le troisième et dernier axe concerne l'exécution en elle même du contrat. Après avoir passé du temps sur la

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

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passation du contrat, sa conclusion et la recherche du prix le plus bas l'agent doit encore vérifier, tout au long de la durée de vie du contrat, son exécution.

113. L'oubli de l'après contrat. Ces trois axes autours desquels se cristallise le volume horaire de chaque agent ne permettent donc pas au service de se projeter. L'après contrat et l'avenir sont clairement oubliés.

Cet oubli est dû à de multiples facteurs. Dans un premier temps nous pourrions tenter de l'expliquer au regard des délais extrêmement stricts à respecter pour chaque agent. Au nom de la rentabilité et du rendement chaque agent doit sans cesse travailler plus vite et une réelle obligation de célérité se met en place dans les services. Cela implique que l'agent n'a pas matériellement pas le temps de se consacrer à une vision pluriannuelle de l'achat, et c'est également le cas de ses supérieurs.

Ce manque de temps s'explique très facilement par le manque d'effectifs au sein des services. Ces dernières années ont connues une explosion de l'apparition des EPCI, des métropoles, des communautés d'agglomération ou des communautés de communes, chacune de ces entités reprenant peu à peu le flambeau de la commande publique. Cette centralisation de l'achat public au profit de structures plus grosses a potentiellement pu être un facteur de réduction des couts, notamment par la mutualisation des achats, mais s'est également accompagnée d'une diminution drastique des effectifs. A cela s'ajoute le fait que les contrats publics eux, n'ont absolument pas diminué et on assiste au contraire à une augmentation de ceux-ci. Face à ce constat il est clair que les services n'ont pas le temps nécessaire à se consacrer sur une vision futur de la commande publique. Cependant il convient de nuancer ces propos par le fait que les collectivités embauchent actuellement de plus en plus d'agents spécialisés dans le droit des contrats publics, mais force est de constater que les services n'avancent pas assez vite au regard des exigences formulées.

Le dernier facteur qui explique l'absence de vision à moyen-long terme de l'agent public est le renouvellement systématique des agents. En effet dans la grande majorité des services de commande publique les agents ne sont pas nécessairement titularisés et conservent leur statut contractuel. De cette situation né un turn-over

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

conséquent où les services achats et les services commande publique se retrouvent totalement renouvelés en moins de 10 ans. Cette réalité impacte nécessairement le fait que les services, en général, n'accordent qu'une place relativement limitée à l'avenir.

114. En cela la vision de la commande publique future reste aujourd'hui restreinte dans une grande majorité de service. Faute de temps, faute de moyen ou volonté politique divergente sont autant de moyens que peuvent invoquer les agents des collectivités. Cependant, l'évaluation des cocontractants reste un moyen de développement valant pour l'avenir.

2. L'évaluation des cocontractants, facteur de développement à moyen-long terme des services de commande publique

115. Lorsqu'une évaluation est bien faite, elle permet de tirer un ensemble d'enseignements et de conclusions qui sera toujours utile pour l'Administration. En appréciant la valeur technique du cocontractant, sa vitesse de réalisation, les failles qu'il a su utiliser ou les erreurs qu'il a pu commettre, l'Administration s'évalue elle-même.

116. L'évaluation : une quête de perfectibilité. En effet une mauvaise valeur technique d'un titulaire fera prendre conscience à l'acheteur que ses critères de sélection n'étaient pas appropriés, une mauvaise vitesse de réalisation par rapport aux estimations initiales lui fera prendre conscience qu'il a sous-évalué la charge de travail, ou qu'il a mal utilisé le système de pénalités de retard. Les failles que le titulaire a pu utiliser contre l'acheteur illustre la nécessité de la professionnalisation juridique des agents et enfin les erreurs commises par le cocontractant relèvent bien souvent d'un cahier des charges mal adapté.

En cela l'évaluation permet à l'Administration de se remettre en permanence en question.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

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En effet une évaluation du cocontractant aboutissant à un résultat positif permettra à l'acheteur de conserver et d'améliorer les éléments qui ont su fonder cette réussite. Il aura ainsi la possibilité pour l'avenir de se baser sur une base solide qu'il pourra même transmettre aux futurs agents ou aux autres services de commande publique. Ce traçage à l'écrit de chaque réussite et de chaque élément des évaluations positives ne pourra tendre qu'à faire progresser le service dans son ensemble.

De même une évaluation aboutissant à un résultat négatif fera ressortir les lacunes, les manquements et les erreurs à ne plus commettre. Une fois encore il faudra alors tracer par écrit l'ensemble de ces conclusions qui serviront de base pour le travail futur des acheteurs. Tout est perfectible, tout peut être corrigé et les services de commande publique, à l'instar de tout autre service public ou privé peuvent prétendre à évoluer et s'améliorer, pour peu qu'ils jouent le jeu d'évaluer leurs cocontractants et l'ensemble de leurs oeuvres pour s'en servir à l'avenir.

Voici la vision que nous avons souhaité mettre en lumière dans cette partie alors que le contexte actuel n'y est guère favorable. Il est désormais nécessaire d'étudier en quoi l'évaluation du cocontractant est réellement un outil propice pour le développement des services de commande publique.

B. L'évaluation du cocontractant au coeur de la vision pluriannuelle de l'achat public

117. Tout en revenant ici sur la nécessité plus que l'utilité de la vision pluriannuelle de l'achat public, nous y préciserons le rôle et l'impact de l'évaluation du cocontractant, que ce soit lors de la programmation des achats (1.), ou lors de la création de base de données statistiques à créer et exploiter (2.).

1. La programmation des achats, outil de prévisions pluriannuelles

118. Évaluation et programmation. La pluriannualité de l'achat public s'entend comme la vision, à moyen-long terme, de l'ensemble des opérations qu'il conviendra de réaliser dans un futur plus ou moins proche. Avoir cette vision est

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

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essentielle pour un service de commande publique puisqu'au regard des échéances et des délais de passation des contrats publics, certains actes d'achat ne peuvent attendre. Considérons à titre d'exemple un marché de fournitures de ramettes de papiers pour imprimantes, si aucune vision pluriannuelle de l'achat public n'est adoptée, que ce passera t'il au terme de ce marché ? Le service sera tout simplement dans l'incapacité de se fournir en papier et les impressions en seront grandement affectées. Ne restera au service comme seule solution de jouer avec la légalité et de passer des avenants, ou d'invoquer inutilement l'urgence pour conclure un nouveau marché plus rapidemment. Ce type d'exemple peut également s'appliquer aux opérations de travaux, aux marchés de service de nettoyage des locaux etc.

En ce sens la vision pluriannuelle de l'achat public est indispensable, mais ne peut se limiter à une prévision d'achat sans transmission d'expérience, ce que permet une bonne évaluation du cocontractant. Une vision pluriannuelle permet donc d'anticiper chaque acte d'achat, tout en transmettant le savoir nécessaire aux générations futures d'agents.

119. L'intérêt de la programmation. La programmation des achat se définie quand à elle comme un outil qui repose sur « l'anticipation, la valorisation et l'anticipation des besoins regroupés au sein de programmes stratégiques d'acquisitions de fournitures, de services ou de travaux »146, elle permet de « donner une visibilité sur les actions qui devront être entreprises à court ou moyen terme en fonction d'une part de la prévision des ressources disponibles et d'autre part des besoins à satisfaire »147.

La programmation permet donc de recenser l'ensemble des achats qu'il conviendra de réaliser, en fonction des échéances des marchés actuels, dans une optique pluriannuelle. Toutes les procédures à lancer sont donc prévues, computées par une nomenclature dans un objectif de stratégie, de performance et de mutualisation des achats lorsqu'elle s'avère possible. Une fois les achats planifiés, cette prévision doit être respectée, en vue de s'aligner sur la stratégie globale.

Matériellement cette programmation prend souvent la forme d'un tableau type Excel qui recense l'ensemble des points vus précédemment. Outre le gain de

146 Acheteurs-publics.com Programmer ses achats, définition ligne 1. http://www.acheteurs-publics.com/mthodes-et-techniques-de-lacheteur-public/1---gouvernance-achats/programmer-ses-achats

147 Idem.

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temps assuré par un fichier unique la programmation est clairement un outil à portée pluriannuelle, puisque le fichier en question n'a de valeur que pour l'avenir.

Or, une programmation efficace ne se limite pas à prévoir les dates butoirs auxquelles il faudra relancer les marchés récurrents. Elle devra comporter en son sein l'ensemble des informations utiles à la relance d'un marché, comme les erreurs à ne pas commettre, l'identification des besoins, les points clefs à ne pas rater etc.

En cela l'évaluation du cocontractant prend tout son sens pour les raisons vues plus haut. En intégrant cette évaluation complète à la programmation des achats l'acheteur s'assure une transmission efficace des informations relatives au contrat. L'évaluation des titulaires est donc un point névralgique de la programmation ; sans évaluation la programmation des achats ne peut rester qu'à son stade embryonnaire au risque de perdre bon nombre d'informations utiles.

120. Il reste donc indispensable que les acheteurs prennent conscience de la réelle plus-value de la programmation et l'adopte au plus vite, tout en y intégrant les résultats issus des mécanismes d'évaluation des cocontractants.

Mais la programmation n'est pas le seul outil capable de donner une vision pluriannuelle et de transmettre l'expérience acquise à chaque marché, d'autres outils peuvent être mis en place.

2. L'évaluation du cocontractant comme base de création de documents

statistiques à exploiter

121. Évaluation et anticipation. La programmation est donc un outil qui permettra à l'acheteur d'anticiper ses futurs achats et de récupérer l'ensemble des données relatives chaque marché de sorte à ne pas reproduire les mêmes erreurs ou d'en améliorer les points positifs et négatifs. Or cet outil se borne donc à une vision pluriannuelle certes, mais casuistique, marché par marché, sans permettre véritablement l'adoption d'une stratégie globale d'achat public performant.

C'est de ce constat que nous avons réfléchi à la création d'un nouvel outil fondé sur l'évaluation de l'ensemble des cocontractants.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

122. L'intérêt de l'outil statistique. L'idée est donc de créer un outil statistique, valant pour l'avenir, fondé sur le retour d'expérience de l'ensemble des marchés par l'évaluation des cocontractants, en vue de définir une stratégie globale d'amélioration et de performance.

Par une évaluation totale des titulaires, du premier jour d'exécution du contrat jusqu'au terme de celui-ci, bon nombre d'informations peut être regroupé, analysé et utilisé.

En définissant des questions claires l'évaluation permettra d'apporter une réponse statistique qui servira de base à la définition de la nouvelle stratégie.

A titre d'exemple une première question pourrait être « sur l'ensemble des contrats conclus et achevés ces trois dernières années, combien d'entres eux ont respecté les délais initialement prévus ? ». Par l'évaluation constante un premier chiffre, exprimé en pourcentage se révélera. D'autres questions sur le même thème suivront alors : « même question mais pour l'ensemble de mes marchés de travaux uniquement », « quelle durée moyenne de prolongation exprimée en jours ou en mois » etc... A l'issue d'une série de questions sur les délais l'Administration aura une série de réponses claires lui permettant d'établir le constat qui s'impose et de trouver de nouvelles solutions.

Ce type de questions pourrait s'appliquer également au nombre d'avenants moyen passés par marché, ou par type de marché. De même le nombre de pénalités appliquées, le nombre de résiliation de contrats, la différence moyenne entre le budget prévisionnel initialement prévu et le budget réel final...

Par la détermination de questions simples un constat, précis puis global, s'imposera et donnera tant aux acheteurs qu'à leurs supérieurs et aux élus l'ensemble des réponses utiles. A cela doit alors s'ajouter une phase d'analyse des résultats et éventuellement une mise en commun avec d'autres services du même type pour aboutir finalement à la détermination de nouveaux objectifs chiffrés pour les années suivantes et d'une nouvelle stratégie.

Toutefois cela ne peut être fait que par une évaluation complète de l'ensemble des cocontractants de l'Administration, et l'archivage constant de l'ensemble des réponses.

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Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour

l'Administration

Cet outil peut également permettre de créer et de développer une réelle politique de suivi des cocontractants, idée qui fait actuellement très largement défaut au sein des services de commande publique. Le constat actuel tient à ce qu'il est impossible de savoir ce que sont devenus les anciens titulaires des différents contrats publics. Or cela est une donnée extrêmement précieuse dans une idée de développement à moyen long terme. Par une évaluation au terme du contrat adjointe d'une bonne programmation des achats des réponses utiles se dégageront.

A titre d'exemple : « sur l'ensemble des contrats que j'ai relancé, combien d'anciens titulaires ont de nouveau candidaté ? ». Si une majorité de réponses négatives se dégage, quelles conclusions faut il en tirer ? Les titulaires ne sont ils pas assez bien payés ? Les conditions de travail et le rythme imposé sont-ils satisfaisant de leur point de vue ?

De même, si une majorité de réponses positives se dégagent, que cela signifie t'il ? L'Administration paye t'elle trop les titulaires au point que ceux-ci préfèrent travailler avec la sphère publique plutôt que la sphère privée ? Si une majorité de sociétés se porte de nouveau candidate et obtient le contrat, n'y a t'il pas un risque vis à vis de la libre concurrence ou de la dépendance à la collectivité de ces sociétés ?

Tout autant de conclusions peuvent se révéler et permettre l'adoption d'une nouvelle stratégie.

123. Conclusion du chapitre. En propos conclusifs nous pouvons donc admette que l'évaluation des cocontractants, dans son ensemble est tant utile lors de l'exécution du contrat lui même, qu'à son terme et qu'elle permet une réelle performance de l'achat public, tant lors de l'exécution que pour l'avenir.

Même si nous avons eu l'occasion de déterminer quelques outils propres à l'évaluation, il est désormais nécessaire de s'intéresser sur les méthodes concrètes d'évaluation des cocontractants.

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

CHAPITRE SECOND - LES METHODES MODERNES D'EVALUATION DU
COCONTRACTANT : L'INSERTION D'OUTILS DE MANAGEMENT PRIVE
DANS LA COMMANDE PUBLIQUE

124. Introduction. Il sera question dans cette partie d'examiner en profondeur les différents outils utilisables par les acheteurs pour procéder à une évaluation performante de ses cocontractants.

Sans que cette liste ne soit exhaustive il sera nécessaire de distinguer entre les outils qui permettent à l'heure actuelle de procéder à une évaluation du prix proposé par le cocontractant (I) de ceux qui permettent une évaluation de la valeur du cocontractant (II), tout en gardant à l'esprit les avantages que procurent cette évaluation et son importance.

I - L'évaluation du cocontractant au regard du prix pratiqué

125. L'évaluation du prix pratiqué par le cocontractant est essentielle, puisqu'elle permet de vérifier la juste utilisation des deniers publics. Etant prévues des clauses de révision des prix dans la grande majorité des contrats publics cette évaluation prend tout son sens puisqu'elle permet le paiement juste du cocontractant.

Il conviendra dans cette partie de s'attarder dans un premier temps sur deux outils permettant cette évaluation (A.), qui, même si limités car non prévus explicitement par les réformes, permettent une réelle évolution de l'achat public performant (B.)

A. Des outils d'évaluation des prix pratiqués d'origine privée,

148 Citation de David Kearns, ex directeur général de Xeorx Corporation, initiateur du Benchmark. https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/sites/performance_publique/files/files/documents/performance/controle_gestion/an alyse_comparative/concepts_et_methodologie/Guide_methodologique_benchmarking_Nevaoconseil_2005.pdf

149 Tribune Clause de Benchmark, peu connue et si efficace, par Olivier Wajnsztok le 21/11/2016 pour décision-achat.fr point 6 http://www.decision-achats.fr/Thematique/process-outils-1037/breves/tribune-clause-benchmark-peu-connue-efficace-310858.htm#6hKH5w3krHcKEoBA.97

150 Idem point 2.

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

intégrables à la commande publique

126. Deux outils principaux seront étudiés lors de cette partie, il s'agira dans un premier temps du Benchmark (1.) puis dans un second temps du Market Testing (2.).

1. Le Benchmark et la recherche du prix le plus juste

127. Définition du Benchmark. Le Benchmark, également appelé Benchmarking ou parangonnage est un « processus continu d'évaluation des produits, des services et des méthodes par rapport à ceux des concurrents ou des partenaires les plus sérieux ou des organisations reconnues comme leaders ou chefs de files »148. Initialement outil du domaine privé, le benchmark a réussi le pari de s'intégrer petit à petit dans la commande publique.

128. L'intérêt du Benchmarking dans la commande publique. En commande publique le Benchmark-prix permet, durant toute la durée du contrat, de rechercher via une étude comparable au sourcing les prix pratiqués par d'autres opérateurs économiques concurrents pour un même type de marché. Cette étude est menée par une société extérieure aux cocontractants et indépendante, choisie lors de la conclusion du contrat.

Chaque cocontractant du contrat public peut être à l'initiative du Benchmark mais devra pour cela en assurer le coût149 dès lors qu'elle estime qu'il existe un déséquilibre entre le prix payé et la réalité du marché. S'en suit l'étude et le rapport d'étude par la société tierce qui révèlera les écarts constatés150.

A l'issu de cette étude acheteur et cocontractant identifient l'origine ou la fonction à l'origine de la différence des prix observable et procèdent à l'alignement

151 Idem point 3.

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

des prix en fonction des tarifs pratiqués par la concurrence sur un marché de même type151.

L'idée lors de cette procédure est évidemment d'évaluer le cocontractant, non pas au regard de critères objectifs prédéterminés mais au regard de la concurrence, au regard d'opérateurs privés qui, de par leur activité et leur secteur géographique auraient pu être cocontractants de l'Administration. Ceci étant dit il est vrai que certains candidats sont prêts à brader leurs prix en vue d'obtenir le contrat, cela nécessite donc que la recherche de l'offre anormalement basse ait été correctement réalisé. De même le benchmark ne permet une rectification des prix qu'au delà d'un certain seuil déterminé en amont, et ne saurait se réaliser pour quelques euros prêts. Au regard du coût que peut représenter cette procédure la partie initiatrice doit alors être certaine que l'alignement des prix qu'elle demande soit rentable au regard des frais avancés.

Toutefois cette procédure permet la recherche du juste prix et de l'équilibre entre les parties. Quand bien même des clauses de révisions des prix aient été prévues au regard de certains indices, le benchmark permet tout de même une analyse plus précise, plus juste pour la partie se sentant lésée.

129. Les risques du Benchmarking. Cette pratique représente tout de même certains risques pour l'Administration qui peut se voir contrainte à rémunérer plus favorablement son cocontractant, y compris lorsqu'elle en est à l'initiative. Nous ne pouvons d'ailleurs que conseiller aux acheteurs de pratiquer une étape préalable de sourcing personnel avant de se lancer dans la longue procédure de Benchmark, de sorte de ne pas se retrouver surpris lors de l'analyse des résultats.

130. Une autre procédure, bien plus drastique existe également pour évaluer le cocontractant et les prix qu'il propose, il s'agit de la procédure de Market testing.

2. Le Market Testing et l'impact d'un prix excessif

152 Circulaire du 09 mai 2012 relative aux contrats de partenariat à l'attention des collectivités territoriales NOR :

EFIT1206010C, point 4.1.5.

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

131. Définition du Market Testing. Le market testing, ou « test par le marché », est également une procédure visant à évaluer les prix pratiqués par le cocontractant, mais se distingue du benchmark tant par sa procédure, que son initiative que par ses conséquences. Egalement issue du management privé, le market testing reste aujourd'hui une procédure trop peu utilisée par les acheteurs.

132. L'intérêt du Market Testing dans la commande publique. Initialement prévue dans le cadre des contrats de partenariats publics-privés, cette procédure impose au partenaire privé, lorsqu'elle est amorcée par l'Administration uniquement, de relancer un réel appel d'offre sur une prestation isolée que l'Administration estime trop couteuse152. Au regard des offres reçues et des prix proposés soit l'Administration considère que les prix sont relativement équilibrés et le partenariat suit son cours comme initialement prévu, soit elle considère les prix pratiqués par le partenaire sont trop élevés. Dans cette hypothèse deux choix s'offrent à l'Administration : soit elle impose au titulaire de sous-traiter la prestation en question au candidat ayant présenté la meilleure offre lors de ce second appel d'offre, soit si la prestation est déjà sous-traitée, elle peut imposer le changement de sous-traitant et le candidat ayant présenté la meilleure offre obtient le contrat de sous-traitance.

Alors que le benchmark ne prévoit qu'un alignement des tarifs sur la réalité du marché concurrentiel, le market testing est davantage utilisé pour contrôler l'honnêteté du titulaire au regard des prix qu'il pratique. Les conséquences sont alors logiquement plus lourdes dans ce cas précis.

Il s'agit une fois de plus d'évaluer le cocontractant et d'éventuellement le mettre face à ses responsabilités en l'obligeant soit à sous-traiter une partie de ses compétences, soit à changer de sous-traitant.

Même en étant initialement prévu pour les contrats de partenariat la démarche du market testing pourrait constituer un outil d'une grande utilité pour les acheteurs pour l'ensemble de leurs contrats. Pour autant cette procédure n'aurait de réel intérêt qu'au regard de certains contrats en raison de leur importance, de leur complexité ou

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

de leur durée. Le market testing ne pourrait d'ailleurs pas s'utiliser à l'encontre d'un simple marché de fournitures où la sous-traitance n'est pas admise.

133. Toutefois ces deux procédure étudiées n'ont pas été reprises dans les récentes réformes et directives, ce qui constitue aujourd'hui un frein à leur mise en place. Pourtant, nous allons voir que Benchmark et Market Testing peuvent rester des outils à destination de l'ensemble des acheteurs.

B. Une utilisation limitée par la législation mais une utilité certaine

134. Si les récentes réformes n'ont pas pris la peine de prendre en compte ces deux outils (1.), leur utilisation reste aujourd'hui possible (2.).

1. Benchmark et Market Testing, les grands oubliés de la directive marchés publics

135. La marginalité du Benchmarking et du Market Testing dans les textes et la pratique de la commande publique. Nous avons eu l'occasion de le mentionner, le benchmark et le market testing étaient autorisés par le code des marchés publics pour les contrats de partenariats publics-privés avant son abrogation en 2015.

Sans être expressément mentionnés comme tels l'utilisation de ces deux procédures était donc possible, sans toutefois être généralisée à l'ensemble des contrats de partenariats. Il faut comprendre par là qu'antérieurement à 2015 la pratique du benchmark, du market testing ou même du sourcing étudié précédemment n'était qu'exception au sein des services de commande publique, apanage des services les plus conséquents.

Il faut rappeler à ce titre qu'une majorité de services d'achat public en France reste des structures relativement modestes, cantonnées à un ou deux agents directement placés sous l'autorité du DGA ou du DGS des communes par exemple. Rien à voir alors avec les services plus conséquents observables dans les métropoles ou les communautés de communes rassemblant plusieurs dizaines d'acheteurs spécialisés. Cet écart de ressources humaines entre les services est à l'origine

Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

de la fracture qui s'est créée au niveau de la performance de la commande publique entre services restreint aux MAPA et services se permettant d'évoluer et de tester de nouvelles approches, comme le sourcing ou le parangonnage. En cela antérieurement à 2015 benchmarking et market testing restaient des procédures exceptionnellement mises en place, réservées aux services les plus complets.

Eric BOMPAR disait d'ailleurs « si le benchmarking et le sourcing sont mentionnés dans le Code des marchés publics, ils ne sont pas inscrits dans la culture de l'achat public »153, ce qui traduit les difficultés de mise en place de ces outils innovants et performants de la commande publique.

136. Les raisons de cette marginalité. Leur mise en place n'était donc pas une évidence pour la plupart des acheteurs, mais leur absence dans les récentes réformes de la commande publique n'a fait qu'entériner leur quasi-disparation.

Ce qu'il faut admettre, c'est que les pratiques issues du secteur privé connaissent toujours une période relativement longue de mise en place, en cela qu'elles restent éloignées de la vision des agents publics qui ne les maitrisent pas. Outre le fait que les agents ne soient pas formés en la matière, notamment sur les processus innovants de gestion ou de management, il existe une réelle peur du contentieux. Les processus et démarches innovantes convergent sur le fait que, comme non prévus ni détaillés explicitement par les textes, leur encadrement et leur pratique ne sont pas clairement définis et peuvent constituer un certain risque si l'acheteur n'a pas pris l'ensemble des précautions qui s'imposent. Ce constat contribue au fait que les services, dans leur ensemble, restent relativement mitigés quand à l'utilisation de ces nouveaux outils.

Un autre argument invocable reste que ces procédures nécessitent certains délais et s'illustre par une perte de temps pour les acheteurs. Cette perte de temps, qui reste relative au regard des avantages qu'elle procure, contribue au fait qu'à l'heure actuelle trop peu d'acheteurs fassent la démarche de les mettre en place. En cela nous restons une fois de plus convaincu qu'une augmentation générale du

153 Eric Bompar, directeur d'Achatitude, pour le dossier Bonnes pratiques : quand le secteur public s'insprire du privé, 3-développer la culture du sourcing en date du 15/01/2014. http://www.decision-achats.fr/thematique/decideurs-achats-1035/dossiers/bonnes-pratiques-quand-le-secteur-public-s-inspire-du-prive-407/developper-culture-sourcing-232581.htm#hdAFXVVUSZ1cJqH8.97

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

nombre d'agents dans ce secteur reste une nécessité, si nous ne voulons pas assister à une privatisation toujours plus forte de nos services publics.

137. Toutefois reste qu'aujourd'hui ces processus restent utilisables par les acheteurs et permettent de nombreux avantages dont les services ne devraient pas se passer.

2. L'utilisation avantageuse mais risquée de ces procédures visionnaires

138. Ces procédures sont visionnaires en ce qu'elles restent relativement peu utilisées et surtout, qu'elles ne s'appliquent essentiellement que dans le secteur privé. En cela les services qui les mettraient en place seraient à l'origine d'une véritable révolution dans la performance de la commande publique et pourraient constituer un élément déclencheur de modernisation globale de la commande publique.

139. Les contraintes de l'utilisation du Benchmarking et du Market Testing. Ces deux outils restent applicables bien que non prévus par les textes puisqu'actuellement rien ne s'oppose directement à leur utilisation, aucune disposition contraire ne les interdisant.

Il convient de nuancer ces propos puisque le recours à ces procédures reste contraint au respect des grands principes fondamentaux de la commande publique. Le risque principal du recours au benchmark ou au market testing serait de bouleverser l'économie générale du contrat, ce qui doit constituer la première préoccupation et précaution à prendre pour les acheteurs désireux de les mettre en place.

De plus ces outils restent des procédures sous forme de clauses, il convient donc nécessairement de les prévoir dès la procédure de passation de sorte qu'elles soient intégrées à la formulation des offres des candidats. De même ces clauses doivent être directement prévues dans le contrat et acceptées par les candidats.

Dans l'optique où ces mesures restent respectées il semble qu'aucune disposition ne pourrait venir à l'encontre de l'utilisation du benchmart et du market testing comme prévus initialement.

Toutefois pour les acheteurs encore réticents à prévoir ce genre de

154 Acheteurs-publics.com, réaliser un benchmark (parangonnage), définition. http://www.acheteurs-publics.com/mthodes-et-techniques-de-lacheteur-public/strategie-d-achats-publics/techniques-de-management-

du-besoin/realiser-un-benchmark-parangonnage

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

clauses dans leurs contrats, le benchmarking reste un outil adaptable à plusieurs situations extracontractuelles qui ne demande qu'à être utilisé par les agents.

En effet si le parangonnage reste une procédure visant à « analyser les pratiques, les prix, l'approche, l'organisation ou les résultats d'une entité publique ou privée ayant un contexte similaire au sien »154, rien n'impose qu'il soit contractuel.

Les services pourraient très largement se limiter à benchmarker les coûts des opérateurs privés dans une zone géographique prédéfinie de sorte à mieux évaluer leur budget prévisionnel, ou à benchmarker les pratiques et l'organisation interne des autres collectivités afin d'évoluer en ce sens. Le benchmarking peut également être la comparaison des achats réalisés par d'autres services ou la comparaison de la gestion de travail dans des organismes privés en vue de s'en inspirer.

Sans nécessairement que le Benchmark ne se restreigne à une évaluation du cocontractant, il peut s'avérer plus qu'utile dans l'évaluation des opérateurs privés, des candidats, des services semblables ou des opérateurs différents. Le Benchmarking reste un outil qu'il convient d'adapter au cas par cas, objectif par objectif et collectivité par collectivité.

En ce sens que le parangonnage reste un outil aux multiples facettes et relativement simple d'utilisation, il constitue un réel axe de développement et de performance pour l'ensemble des collectivités et des acheteurs.

Nous ne pouvons d'ailleurs que conseiller aux services d'y avoir recours autant que possible, à leur propre échelle, mais de le faire dans les règles de l'art et de conserver une trace écrite de toute pratique de Benchmarking, même informelle. Ce traçage reste une nécessité au regard de la transmission de connaissances, d'expériences et de compétences aux générations futures d'acheteurs.

140. Si nous venons d'étudier l'évaluation du cocontractant au regard du prix qu'il pratique, il est désormais nécessaire d'étudier sa valeur technique.

II - L'évaluation du cocontractant au regard de sa valeur technique

Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

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141. La valeur technique du cocontractant s'entend comme la plus-value qu'il apporte à l'intérêt général, sa fonction, son rôle. Il s'agit donc de la valeur qu'il apporte lors de l'exécution du contrat public. Cette valeur technique reste une donnée qu'il convient d'évaluer dans un objectif de performance, comme nous avons pu le démontrer précédemment.

Nous nous attarderons alors dans un premier temps sur l'évaluation de l'efficacité du cocontractant (A.), avant d'étudier son évaluation globale (B.).

A. L'évaluation de l'efficacité du cocontractant au regard de ses missions

142. L'évaluation de l'efficacité d'un candidat se mesure en fonction du travail qu'il accompli au regard de ses missions et de ses attributions. Sans revenir sur l'utilité d'une telle évaluation que nous avons démontré plus tôt, nous mettrons en perspective cette évaluation au regard d'un outil, également initialement issu du secteur privé, qu'est le reporting (1.), et de la manière de l'appréhender par les services de commande publique (2.).

1. La place du reporting dans l'évaluation de l'efficacité du cocontractant

143. Définition du reporting. Le groupe AFG conseil, spécialisé dans l'accompagnement de clients, l'amélioration et la performance de leurs sociétés défini le reporting -ou communication de données en français- comme l'outil permettant « d'avoir un regard global sur une activité (É) une photographie d'une situation à un instant précis, une image qui aurait pour objectif de présenter de manière régulière une information brute ou l'évolution de cette même information (É) il s'agit de la production de chiffres et d'indicateurs bruts, laissant la transposition et l'analyse aux décideurs »155.

Il s'agit donc d'une méthode utilisée dans la sphère privée des affaires ayant pour but d'évaluer constamment une activité précise d'une société. Cet ensemble d'évaluations conduit nécessairement à une synthèse et une analyse poussée, en vue

155 Groupe AFG conseil, actualités, Le pilotage, entre Reporting et Tableaux de bord. http://www.groupeafg.com/le-pilotage-entre-reporting-et-tableaux-de-bord-2/

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

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d'évaluer l'ensemble du travail accompli et sa qualité afin de le comparer aux objectifs initiaux et de redéfinir une stratégie si nécessaire.

144. L'intérêt du reporting dans la commande publique. On comprend alors implicitement l'intérêt que pourrait revêtir l'utilisation de cet outil par les services de commande publique. Un reporting bien réalisé conduirait l'Administration à connaître constamment, ou tout du moins à échéances régulières, l'avancée de l'exécution de ses contrats et la qualité de cette exécution.

Il semble donc que l'utilisation de cet outil soit indispensable dans l'évaluation du cocontractant. Rappelons à ce titre qu'il n'existe pas un seul type de reporting, et qu'à l'instar du benchmarking cette pratique s'adopte et s'adapte selon chaque service de commande publique et selon le type de contrat conclu. Ainsi le reporting aura une place prépondérante lors de l'exécution d'un marché de travaux, là où il aura une place plus relative dans un marché de fourniture.

De même il faut reconnaître que le reporting étant une pratique théorique globale qui s'effectue de façon différente au cas par cas, les services de commande publique l'effectuent déjà sans parfois le savoir, à leur propre échelle. Ainsi, une simple réunion avec un titulaire sur l'avancée d'un contrat constitue déjà une première étape de reporting.

Au delà de faire comprendre l'intérêt réel du reporting nous souhaitons faire prendre conscience aux acheteurs que le reporting est un outil qu'ils connaissent et utilisent déjà. Cependant en restant une pratique et un outil le reporting peut être amélioré, modernisé et démocratisé par les services.

145. Tout l'enjeu pour l'Administration va être de déterminer la façon dont

elle souhaite mettre en place son reporting et l'importance qu'elle va lui conférer. En ce sens nous allons tenter de transmettre notre propre expertise à ce sujet.

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2. La mise en place du reporting et ses acteurs

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

146. Il sera ici question de déterminer à notre sens la façon dont le reporting devrait être mis en place pour être le plus efficace possible, tout en gardant à l'esprit que chaque situation étant unique il conviendra aux acheteurs d'adapter ces conseils et de réaliser un travail qui leur sera propre et personnel.

a) Déterminer des objectifs précis

147. Il est évident que l'Administration ne sera jamais en mesure d'évaluer l'ensemble du travail accompli par son cocontractant à tout moment. S'oppose ici la contrainte de temps -on ne peut pas connaître l'avancée de l'exécution toute les heures, tous les jours etc- et une contrainte par l'objet -on ne peut pas connaître et évaluer l'ensemble des petites actions faites par le cocontractant dans l'exercice de ses missions.

Le premier travail à accomplir pour l'acheteur va donc être de déterminer en amont ses objectifs de reporting, et de s'y tenir. Il pourra alors à ce titre adopter un reporting par l'objet, c'est à dire l'évaluation de l'exécution en fonction de telle ou telle action du cocontractant (je veux évaluer cette prestation, puis celle-ci, puis celle-làÉ), ou un reporting par le temps, en fonction de certaines échéances ou étapes accomplies. Peut également être adopté un reporting par le temps et par l'objet selon la complexité du contrat, sa durée et son objet.

Toujours est il que cette première étape de détermination des objectifs est indispensable et déterminante puisqu'elle sera la base même du reporting et sera une sorte de fil conducteur de l'évaluation.

b) Formaliser le reporting

148. Il est indispensable que le reporting soit porté à la connaissance du titulaire et qu'il soit accepté par celui-ci. En ce sens le reporting doit être inscrit dans le contrat et dans le cahier des charges.

Non seulement cela permet au titulaire d'être au courant de l'existence du reporting et des actions qu'il aura à mener en ce sens, mais surtout cela

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

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permettra de faire du reporting une clause opposable au titulaire en cas de manquement. Cette inscription au contrat doit d'ailleurs s'adjoindre de clauses de pénalités en cas de non respect, et permettra la mise en place des clauses incitatives de performance.

Cette formalisation est donc nécessaire dans un objectif de réalisation concrète du reporting et favorisera la transparence de la procédure d'évaluation.

c) Un premier type de reporting : le reporting par réunion.

149. Il s'agit dans cette hypothèse de prévoir, par échéances régulières ou lors d'étape névralgiques de l'exécution, des réunions où seront présents le ou les titulaires ainsi que l'Administration.

Lors de ces réunions le cocontractant aura à présenter l'avancée, la qualité, les délais et les difficultés rencontrées lors de l'exécution. En fonction des objectifs déterminés du reporting le titulaire aura à répondre de ses actions lors de ces réunions auxquelles sa présence doit être obligatoire.

L'avantage que présente le reporting par réunion est la célérité par laquelle l'Administration va pouvoir lui répondre. N'oublions pas que par l'exercice de ses pouvoirs de direction et de modification l'Administration peut réellement influer sur l'exécution du contrat. Un échange oral sera alors bien plus rapide et permettra une réaction imminente en cas de problèmes.

d) Un second type de reporting : le reporting par rapports écrits.

150. Il sera demandé au cocontractant dans cette hypothèse de produire et de transmettre, à échéances régulières ou lors d'étapes névralgiques de l'exécution, par écrit, l'ensemble des informations vues précédemment. L'Administration recevra donc -éventuellement par voie dématérialisée- les conclusions de son cocontractant vis à vis de l'exécution de son contrat et sera en mesure de l'évaluer pleinement.

L'avantage de ce type de reporting est qu'il peut être fait plus souvent. Là où les réunions mobilisent un ensemble d'acteurs pour une durée indéterminée les rapports écrits sont réalisables plus facilement. De même le traçage écrit de

156 Groupe AFG conseil, actualités, Le pilotage, entre Reporting et Tableaux de bord. http://www.groupeafg.com/le-pilotage-entre-reporting-et-tableaux-de-bord-2/

157 Idem.

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la procédure est facilité. Cependant cette pratique est nécessairement moins rapide que la précédente puisque l'Administration à l'issue de l'évaluation doit nécessairement répondre par l'écrit à son cocontractant. L'échange d'informations, de questions et la compréhension mutuelle s'en retrouvent donc impactés.

e) Le reporting mixte

151. Il s'agit ici de mélanger les deux procédures vues précédemment. Le titulaire aura donc à réaliser des rapports écrits selon les modalités déterminées en amont, et s'en suivra une réunion de debriefing et d'orientation.

L'avantage de cette procédure est qu'elle permet à l'Administration de préparer correctement sa future réunion par l'obtention des pièces écrites et de répondre tant par voie écrite qu'orale lors de la réunion. De même cette procédure inclue tant le dialogue et l'échange oral que la traçabilité des échanges.

En ces sens cette mise en pratique du reporting nous semble plus efficace.

f) L'utilisation de tableaux de bord

152. « Le but d'un tableau de bord est d'aider le décideur à la prise de décision pendant l'activité »156. Il s'agit d'un outil sous forme de tableau où seront retranscrites les informations qui permettront de suivre l'évolution de l'activité et de l'exécution du titulaire157.

En pratique cet outil est donc un tableau qui recensera tant les objectifs en terme de qualité, que les délais à respecter, que les budgets prévus et qui mettra ces objectifs en relation avec l'évaluation du cocontractant. Autrement dit ce tableau, qui sera rempli au fur et à mesure de l'exécution du contrat et de l'évaluation du titulaire permettra de connaître, en temps réel, si l'exécution respecte les objectifs initiaux. Dans le cas où ces objectifs sont en voies de ne pas être respectés, il sera encore temps pour l'Administration de prendre toutes les mesures qui s'imposent.

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Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

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Ce tableau de bord est donc un outil dont l'intérêt s'illustre sur des contrats particulièrement long, et permet de ne pas se retrouver lors la moitié de la durée du contrat avec seulement 25% des objectifs réalisés à titre d'exemple.

Cet outil est donc complémentaire de l'activité de reporting, il s'intègre parfaitement dans la démarche d'évaluation du cocontractant et permet, outre de garder une trace écrite de l'évaluation, d'apport un réel support à l'acheteur.

A ce titre nous conseillons d'ailleurs vivement au service désirant pratiquer le reporting de se doter d'un outil semblable.

g) Les acteurs du reporting

153. Nous l'avons vu cette pratique requiert une phase d'analyse critique Ðet contradictoire- des résultats de l'évaluation. Si l'acheteur doit déterminer ses objectifs et la façon dont il entend mettre en place le reporting, reste à savoir qui sera en charge de l'analyse des résultats. Ce qui est sous entendu par cette partie est de savoir comment un agent spécialisé en contrat public va, à titre d'exemple, évaluer l'avancée d'un contrat ayant pour but la création d'un site internet et d'une application mobile ?

Si le service en lui même s'estime compétent pour juger et analyser l'évaluation, il est également possible eu égard à la complexité du projet qu'il n'ait pas le bagage suffisant pour le faire. Se pose donc la question de savoir qui faire intervenir lors de la phase d'analyse du reporting.

Nous conseillons aux acheteurs, dans un premier temps, et s'ils s'en estiment incapables, de faire intervenir les autres services de la collectivité. Pour reprendre l'exemple du site internet et de l'application mobile, nombreuses sont les collectivités territoriales dotées d'une Direction des Systèmes Informatiques, composée en grande majorité d'informaticiens. Il serait alors utile et peu onéreux de faire intervenir ces personnes spécialisées dans l'analyse des résultats.

Dans un second temps nous pouvons également conseiller aux acheteurs de faire intervenir un opérateur privé, expert dans le domaine. A l'instar de l'assistance à maitrise d'oeuvre nous pourrions imaginer un système où la collectivité passe un marché public de service en vue d'analyser les résultats issus de

Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

l'évaluation. Bien que cette démarche représente nécessairement un cout supplémentaire elle peut totalement se justifier en fonction de l'importance du contrat public principal.

154. Si le reporting reste l'outil phare de l'évaluation de la valeur technique du cocontractant, il est également intéressant de l'intégrer à un processus d'évaluation globale du cocontractant.

B. L'évaluation globale du cocontractant au regard de la performance du contrat public

155. Il sera ici question de revenir sur l'assemblage des deux processus d'évaluation (1.), avant de développer deux points concrets et expérimentés qui ont portés leurs fruits (2.).

1. L'analyse et l'évaluation conjointe du prix et de la valeur technique

156. La première chose qu'il convient de rappeler ici c'est qu'évaluation du prix et évaluation de la valeur ne se confondent pas, et surtout, ne s'opposent pas l'une à l'autre. En ce sens, et quel que soit le degré de difficulté de mise en place de ces procédures il est tout à fait possible de les mener conjointement.

157. L'intérêt d'une analyse conjointe. En effet allier évaluation du cocontractant au regard du prix pratiqué et évaluation du cocontractant au regard de sa valeur technique permettra à l'acheteur d'avoir un regard global sur l'ensemble de l'oeuvre du titulaire au regard du contrat. Nous pourrions même affirmer que l'une ne va pas sans l'autre, et qu'évaluer le prix sans connaître les prestations qui y sont réellement affectées serait tout aussi inefficace que d'évaluer un ensemble de prestations sans en connaître le prix réel ou, tout du moins, le prix pratiqué sur le marché concurrentiel.

103

En ce sens il serait clairement dommageable et regrettable pour un

158 A propos de la loyauté contractuelle, voir CE assemblée Commune de Béziers I, n°304802 en date du 28

décembre 2009, considérants 2, 3 et 4.

104

Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

acheteur de se priver de l'une ou l'autre de ces évaluations, d'autant qu'elles restent toutes les deux réalisables pour peu que l'on se soumette aux règles applicables en la matière.

Ces deux évaluations restent liées dans une volonté de performance globale de l'achat public.

Au de là même de la simple question de performance, la mise en place de ces deux évaluations comme nous l'imaginons serait un message fort envoyé aux futurs cocontractants. L'intérêt sera de faire comprendre à l'ensemble des candidats que l'Administration est prête à travailler avec eux, prête à rechercher l'équilibre dans le contrat, prête à gratifier leur performance par la mise en place de clauses incitatrices mais qu'au delà de toutes ces concessions l'Administration ne laissera rien passer, aucun écart, aucune mauvaise foi, aucun manquement à la loyauté contractuelle158, que cela concerne les prix ou l'exécution en elle même. En d'autres termes, que l'Administration agira sur certains points comme le ferai un partenaire privé avec son cocontractant. Fini la volonté de vouloir tromper l'Administration au motif que celle-ci est moins attentive à la dépense de ses fonds qu'un opérateur privé.

158. La nécessité d'une réforme. Toutefois pour permettre la mise en place de tels dispositifs une réelle réforme s'impose. Législativement d'abord, où ces pratiques si on désire qu'elles soient mises en places par les acheteurs doivent être encadrées, ne serait-ce que pour rassurer les agents face au risque contentieux. Deuxièmement il faut faire comprendre aux services de commande publique que ces mesures sont possibles, qu'elles sont légales et pour cela il faut en quelque sorte changer les mentalités, impulser une nouvelle dynamique dans l'ensemble des services. Une formation continue des agents et de leurs responsables doit également se mettre en place pour garantir que l'Administration évoluera en même temps et de la même manière que ses cocontractants privés.

Enfin il apparaît indispensable que des fonds se débloquent pour permettre à l'Administration de mettre en place l'ensemble de ses prérogatives concernant la commande publique. Qu'il s'agisse de moyens pour la formation, de moyens pour la

159 Pour un management performant de l'exécution des marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014, CCI de Paris page 9 http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-

management-performant.pdf

105

Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

mise en place d'achats innovants et les procédures d'évaluation ou encore des moyens en vue d'un recrutement supplémentaire d'agents, nous envisageons -entre autre- une commande publique performante par l'obtention de fonds supplémentaires.

159. S'il apparaît à la lecture de ce mémoire que nous avons théorisé un nombre important de points de vue, il est également nécessaire de préciser que certaines démarches ont été entreprises pour favoriser un achat public performant.

2. Deux exemples concrets expérimentés en faveur d'une commande publique performante

160. Deux exemples nous ont particulièrement marqué lors de nos recherches. L'un est américain, l'autre est français. Ces deux cas que nous allons développer tendent à prouver que l'approche managériale de la commande publique n'est pas nécessairement en contradiction avec la commande publique.

a) L'exemple américain : le système des score card.

161. L'évaluation de la performance des cocontractants de l'Administration américaine tient une place prépondérante dans l'équivalent du droit de la commande publique américain.

La performance en elle est même revêt une importance particulière en cela que les « contribuables doivent bénéficier de la garantie de « best value ». »159. Cette volonté de placer la performance de l'achat public sur un piédestal s'explique par l'idéologie très libérale des foyers américains et de leur réticence à payer l'impôt. De ce fait, les contribuables ont donc un droit de regard sur les contrats passés par leurs administrations.

Cette évaluation de la performance prend donc la forme des « score card », ou fiches d'évaluation, qui vont recenser un ensemble d'évaluations qui vont porter tant

160 Acheteurs-publics.com L'évaluation fournisseurs dans les marchés : l'exemple américain par Ludovic Myhié en date du 27 décembre 2013. http://www.acheteurs-publics.com/actualite-des-acheteurs-publics/levaluationfournisseursdanslesmarcheslexempleamericain

161 Idem.

162 Idem.

106

Chapitre second Ð Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

sur la performance technique, que le contrôle des coûts, que la gestion du planning ou encore les relations commerciales160. Notés de non satisfaisant à exceptionnel ces quatre facteurs vont être intégrés à chaque fiche d'évaluation qui seront par la suite centralisées au sein d'une même plateforme en ligne161 consultable.

Le Federal Acquisition Streamlining Act de 1994 prévoit également que la performance des cocontractants évaluée dans les score card est l'un des éléments pris en compte dans l'attribution d'un marché162.

L'idée intéressante dans ce processus est dans un premier temps le droit de regard qu'ont les contribuables sur les contrats conclus. En effet, sans que nous soyons favorables à un système où les concitoyens auraient à se prononcer sur l'opportunité de chaque contrat public -ce n'est pas le cas aux USA-, force est d'admettre que ce droit de regard aurait un intérêt légitime en France, ne serait-ce que pour renouer de bonnes relations entre administrations et administrés.

Le deuxième intérêt est la place que revêt l'évaluation de la performance dans l'attribution de contrats publics qui pourrait être une piste à confirmer en France.

Enfin, le troisième et dernier intérêt de ce modèle réside dans la plateforme unique où est recensé l'ensemble des évaluations des cocontractants. Dans une optique de progression mutuelle des services de commande publique il est nécessaire que les acheteurs puissent compter les uns sur les autres et collaborer par l'échange d'informations. En ce sens l'idée d'une plateforme commune à l'ensemble de nos services de commande publique français où serait partagée l'expérience acquise années par années serait une piste de réflexion intéressante de notre point de vue.

b) L'exemple français : l'initiative félicitée de la ville de Saint-Ouen

162. En 2013 la ville de Saint-Ouen a utilement décidé de créer une Direction de la Commande Publique dont les mission sont la veille juridique des contrats

Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management privé dans la

commande publique

passés, la sécurisation de l'ensemble des procédures et l'adoption d'une politique d'achat structurée et économiquement justifiée163.

Ce service s'est a par la suite adopté une « démarche qualimétrique de ses achats »164, qui associe le quantitatif au qualitatif. Cette démarche s'articule autour de quatre consignes qui sont l'évaluation de la qualité de l'exécution (le reporting donc), la vigilance quant au strict respect des clauses règlementaires, l'évaluation préalable des opérateurs économiques (le sourcing donc) et le recours systématique à la négociation lors de marchés à procédure adaptée165.

Cette démarche s'est également accompagnée de la formation de l'ensemble de leurs agents directement assurée par les responsables de la nouvelle direction166.

Qu'il s'agisse de la mise en place de processus novateurs, de la sécurité juridique ou de la formation des agents nous ne pouvons que féliciter cette démarche et espérons qu'elle aura tendance à se démocratiser au sein de l'ensemble des collectivités françaises !

Notre mémoire s'inscrit donc totalement dans la volonté de ce qu'a mis en place la ville de Saint-Ouen. Si cet exemple nous a grandement inspiré lors de notre mémoire nous n'avons pas été les seuls à le gratifier puisque cette démarche a été récompensée lors des Trophées de la commande publique167.

En cela la ville de Saint-Ouen illustre parfaitement l'évaluation globale du cocontractant au regard de la performance de l'achat public. S'achève ainsi notre mémoire sur ce pari réussi de la ville de Saint-Ouen, dont nous ne pouvons que conseiller aux acheteurs de s'inspirer.

163 Pour un management performant de l'exécution des marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014, CCI de Paris page 17 http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-

management-performant.pdf

164 Idem.

165 Idem page 18.

166 Idem.

167 Idem.

107

109

Conclusion

CONCLUSION

163. Un éclaircissement de la performance lato sensu grâce au truchement de l'analyse managériale. La performance au sein de la commande publique peut prendre plusieurs formes, et peut s'atteindre de différentes manières. Si le choix n'a pas été fait de traiter de certaines performances restreintes comme la performance sociale ou environnementale mais au contraire de la performance globale c'est qu'à juste titre, il nous semble opportun de ne pas s'attarder sur quelques éléments disparates mais bien d'étudier la performance sous sa forme unitaire. La poursuite de la performance dans l'achat public ne peut se résoudre à la tentative d'obtention de performances individuelles mises bout à bout mais bien d'aller au delà et de considérer la performance comme un objectif global dont il convient de se rapprocher le plus possible. En ce sens, et même si nous avons eu à traiter de la performance environnementale ou sociale brièvement notre mémoire se consacre en tout point à la recherche de la performance dans son ensemble.

De même la performance dans la commande publique peut s'atteindre de bien des façons. Nous rappelons d'ailleurs que si le choix a été fait de se limiter à l'évaluation des cocontractants c'est qu'en cela réside l'un des plus grands défis du XXIème siècle pour les acheteurs et l'une des plus grandes marges de progression dans l'objectif de performance. En ce sens nous espérons que notre mémoire a répondu aux objectifs fixés et qu'à sa lecture l'acheteur aura, à défaut d'acquérir de nouvelles connaissances, pris conscience qu'il possède un éventail de compétences qu'il peut mettre en place pour atteindre la performance de son achat.

Cet éventail de compétences et les outils que nous avons présentés s'intègrent d'ailleurs dans la conception large qu'est le management. Celui-ci se doit aujourd'hui d'être connu, utilisé et maitrisé par les services qui ne peuvent plus méconnaitre leur rôle dans la boucle macro-économique française tant ils sont à l'origine d'un levier de relance de la croissance formidable qu'est la commande publique.

110

Conclusion

Si à ce titre nous avons pris le pari risqué d'examiner en profondeur les possibilités qui s'offrent à l'acheteur en matière d'évaluation des futurs cocontractants c'est qu'à notre sens cette partie est tout simplement primordiale dans une optique de performance. Cette étude préalable à l'évaluation en lui même du cocontractant reste le point central de départ de la procédure. Si cette étape, autant que la définition du besoin à titre de comparaison est manquée le futur contrat ne peut qu'être voué à l'échec, ou à défaut ne remplira en rien ses exigences de performance. Libre dans cette hypothèse à l'acheteur d'assumer les conséquences de ses négligences plus que de ses erreurs.

164. L'intérêt de l'évaluation préalable à la conclusion du contrat dans l'objectif de performance. Cette partie s'articule donc autour de deux axes principaux que sont la prise globale d'information par la pratique du sourcing et la détermination des critères de sélection les plus aptes à évaluer le candidat de façon performante.

S'ensuit logiquement l'évaluation concrète des candidats au regard de leur candidature et de leur offre, de par leur proposition de projet, leur adéquation avec les critères de sélection et leur offre de prix. Il s'agit ici d'une évaluation qui se veut nécessairement performante puisqu'en dépendra l'attributaire et l'exécution même du marché. Les modalités de cette exécution pouvant faire l'objet de négociations c'est en toute logique que nous continuons d'affirmer que la négociation en elle même reste un outil d'évaluation des candidats et que sa pratique devrait être vivement conseillée à tout acheteur dès que les conditions normatives le permettent.

165. L'intérêt de l'évaluation de l'exécution du contrat dans l'objectif de performance. Si l'attribution conclue l'évaluation des candidats au contrat elle ouvre cependant la voie à l'évaluation du cocontractant, qu'elle intervienne lors de l'exécution ou au terme du contrat. Cette dernière évaluation est primordiale en ce qu'elle permet de clore définitivement l'exécution du contrat, il s'agit à titre d'exemple de la réception des travaux lors d'un marché de ce type.

L'évaluation du cocontractant prend alors différentes formes et s'axe autour de l'évaluation au regard du prix pratiqué et de l'évaluation au regard de la qualité

111

Conclusion

de l'exécution. A ce titre différents outils initialement patrimoine exclusif du domaine privé peuvent désormais s'utiliser en droit de la commande publique. Benchmarking, Market Testing et Reporting constituent une panoplie d'accessoires dont on regrettera la si faible maitrise par les services. On comprend à ce titre que la tendance actuelle favorise de plus en plus l'embauche d'économistes au détriment de juristes.

166. Sans qu'il soit nécessaire de revenir sur l'utilité d'une telle évaluation du cocontractant que nous avons démontrée, nous pouvons toutefois conclure qu'à l'heure actuelle innover dans l'évaluation des cocontractants est signe de modernisme et catalyseur de performance de la commande publique. Francis BACON nous rappelle d'ailleurs à ce titre que « Celui qui n'appliquera pas de nouveaux remèdes doit s'attendre à de nouveaux maux », comprenons que le secteur concurrentiel privé n'attendra pas la réaction de l'Administration pour évoluer et innover. Si nous désirons lutter contre le constant décalage et retard qu'existent entre secteur public et secteur privé, nous ne devons que solliciter l'innovation, le modernisme et surtout, la Performance.

113

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· http://www.weka.fr/actualite/achats/article/oui-les-acheteurs-publics-ont-le-droit-de-rencontrer-des-fournisseurs-37822/

V - Avis

·

117

Avis de la CADA 20062458 -Séance du 15 juin 2006.

119

Table des matières

TABLE DES MATIERES

Remerciements VII

Sommaire IX

Table des abréviations XI

Introduction 15

Première partie - Une évaluation anticipée du futur cocontractant préalable à la

conclusion du contrat 21
Chapitre premier - Une évaluation prématurée mais avantageuse des opérateurs

privés en amont de la publication 23

I - La pratique du sourcing comme outil d'évaluation des candidats 23

A. La consécration du sourcing en droit de la commande publique 23

1. L'apparition tardive du terme « sourcing » dans les textes relatifs aux

contrats publics 24

2. Les atouts et avantages d'une pratique de plus en plus répandue. 26
B - Pratiquer le sourcing comme démarche initiale de l'évaluation des candidats, entre innovation et respect intangible des règles élémentaires de

passation d'un contrat public. 28

1. Le sourcing, détourné de sa fonction initiale, au service de l'évaluation

des candidats. 28

2. Une fonction détournée et des risques accrus pour le décideur 30

II - Une nouvelle définition des critères de sélection dans un objectif

d'évaluation performante des candidats 35

A. Les critères de sélection : piliers centraux de l'évaluation des candidats 36

1. Une base légale qui concède une certaine liberté quant au choix des

critères de sélection. 36

2. La définition de la ligne politique du projet de contrat public par les

critères de sélection. 38

120

Table des matières

B. Vers une nouvelle dynamique de choix des critères de sélection des offres :

une évaluation des candidats affinée et performante 41

1. L'analyse fonctionnelle des besoins, première étape d'une nouvelle

dynamique de choix des critères de sélection. 41

2. De l'analyse fonctionnelle des besoins à l'adoption de critères
fonctionnels de sélection, la consécration de l'innovation et de la

performance lors de la passation de contrats publics 44

Chapitre second - Une constante évaluation des candidats, de la réception des

offres à la conclusion du contrat 47

I - Une évaluation obligatoire en vue de l'attribution du contrat au candidat

présentant l'offre la plus économiquement avantageuse 47

A. L'évaluation objective des candidats au regard des exigences et du besoin

de l'administration 48

1. L'évaluation des candidatures : premier pas dans l'attribution du contrat

48

2. L'examen des offres : socle de l'attribution du contrat. 51

B. L'enjeu de la négociation lors de la passation de contrats publics 54

1. La reconnaissance actuelle de la négociation 54

2. Un cadre favorable à l'essor de la négociation qui reste néanmoins une

exception par définition 56

II - L'application de la négociation dans l'évaluation des candidats à un contrat

public 58

A. Un cadre de recours à la négociation strictement défini 58

1. La négociation dans les procédures non formalisées 58

2. La négociation dans les procédures formalisées 61

B. La professionnalisation de la négociation, entre sécurité juridique et

bénéfice direct 65

1. La négociation au sein de la sphère administrative française 65

2. Pour une mise en place performante de la négociation 67

Seconde partie - Une évaluation permanente du cocontractant dès la conclusion du

contrat 71

121

Table des matières

Chapitre premier - L'intérêt d'une évaluation du cocontractant lors de

l'exécution du contrat public, un bénéfice brut pour l'Administration 73

I Ð L'intérêt immédiat de l'évaluation du cocontractant lors de l'exécution du

marché 73

A. L'évaluation au coeur du recours aux prérogatives de puissance publique 73

1. Une bonne utilisation des pouvoirs de modification, de direction et de

contrôle subordonnée à une bonne évaluation du cocontractant 74

2. La résiliation et la sanction, apanage de l'Administration, finalités

potentielles d'une évaluation du cocontractant. 75

B. Une exécution efficace du contrat par l'évaluation du cocontractant 77

1. L'évaluation du cocontractant au service de l'Administration 77

2. L'évaluation du cocontractant au service du titulaire lui même 79

II Ð L'importance de l'évaluation du cocontractant au terme du contrat public 80

A. Une tendance actuelle néfaste à la vision long terme de l'achat public 80

1. Un constat simple : les acheteurs restent trop centrés sur la vie de leur contrat et de son intérêt économique direct, sans avoir la vision large qui

s'impose 81

2. L'évaluation des cocontractants, facteur de développement à moyen-long

terme des services de commande publique 83

B. L'évaluation du cocontractant au coeur de la vision pluriannuelle de l'achat

public 84

1. La programmation des achats, outil de prévisions pluriannuelles 84

2. L'évaluation du cocontractant comme base de création de documents

statistiques à exploiter 86
Chapitre second - Les méthodes modernes d'évaluation du cocontractant :

l'insertion d'outils de management privé dans la commande publique 89

I Ð L'évaluation du cocontractant au regard du prix pratiqué 89

A. Des outils d'évaluation des prix pratiqués d'origine privée, intégrables à la

commande publique 89

1. Le Benchmark et la recherche du prix le plus juste 90

2. Le Market Testing et l'impact d'un prix excessif 91

B. Une utilisation limitée par la législation mais une utilité certaine 93

122

Table des matières

1. Benchmark et Market Testing, les grands oubliés de la directive marchés

publics 93

2. L'utilisation avantageuse mais risquée de ces procédures visionnaires 95

II Ð L'évaluation du cocontractant au regard de sa valeur technique 96

A. L'évaluation de l'efficacité du cocontractant au regard de ses missions 97

1. La place du reporting dans l'évaluation de l'efficacité du cocontractant 97

2. La mise en place du reporting et ses acteurs 98

a) Déterminer des objectifs précis 99

b) Formaliser le reporting 99

c) Un premier type de reporting : le reporting par réunion. 100

d) Un second type de reporting : le reporting par rapports écrits. 100

e) Le reporting mixte 101

f) L'utilisation de tableaux de bord 101

g) Les acteurs du reporting 102

B. L'évaluation globale du cocontractant au regard de la performance du

contrat public 103

1. L'analyse et l'évaluation conjointe du prix et de la valeur technique 103

2. Deux exemples concrets expérimentés en faveur d'une commande

publique performante 105

a) L'exemple américain : le système des score card. 105

b) L'exemple français : l'initiative félicitée de la ville de Saint Ouen 106

Conclusion 109

Bibliographie 113

I Ð Ouvrages et thèses 113

II Ð Articles de doctrine 113

III Ð Table des jurisprudences 115

IV Ð Sites internet 115

V - Avis 117

Table des matières 119






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"Enrichissons-nous de nos différences mutuelles "   Paul Valery