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UNIVERSITE D'AIX-MARSEILLE
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Année universitaire 2016-2017
FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE
PERFORMANCE ET EVALUATION DU
COCONTRACTANT DE L'ADMINISTRATION
Approche managériale de la commande publique.
Mémoire pour l'obtention du Master II mention Droit
public des affaires et droit des contrats publics, parcours contrats
publics.
Arthur MALANDIN
Sous la direction de Monsieur le Professeur Florian LINDITCH
Année universitaire 2016-2017
UNIVERSITE D'AIX-MARSEILLE
FACULTE DE DROIT ET DE SCIENCE POLITIQUE
PERFORMANCE ET EVALUATION DU
COCONTRACTANT DE L'ADMINISTRATION
Approche managériale de la commande publique.
Mémoire pour l'obtention du Master II mention Droit public
des affaires et droit des contrats publics, parcours contrats publics.
Arthur MALANDIN
Sous la direction de Monsieur le Professeur Florian LINDITCH
« La faculté n'entend donner aucune approbation
ou improbation aux opinions contenues dans ce mémoire qui doivent
être considérées comme propres à leur auteur
»
A mes parents, mon frère, mes grands-parents, pour
leur soutien sans faille durant ses longues mais magnifiques années
d'études, votre étudiant reconnaissant.
Remerciements
REMERCIEMENTS
VII
À Monsieur le Professeur Florian LINDITCH, directeur de ce
présent mémoire, pour son écoute et ses conseils
avisés, sans qui ce mémoire aurait une toute autre allure
j'adresse l'expression de mes salutations les plus respectueuses.
À Monsieur LEFEBVRE, avec qui ces 5 ans de faculté
côte à côte ont été un réel plaisir.
Pour son amitié, son aide et sa patience il mérite mille fois
d'être mentionné dans ces remerciements.
À mes amis Messieurs BERNARDINI, LAMY, SEDAT et GARNERONE,
pour leur présence et leur soutien tout au long de cette belle aventure
que fut la seconde année de master. Puisse le sort leur être
favorable lors de leurs échéances futures.
A Madame DI COSTANZO GONZALEZ, sans qu'il soit besoin de le
justifier.
IX
Sommaire
SOMMAIRE
PREMIERE PARTIE - UNE EVALUATION ANTICIPEE DU FUTUR COCONTRACTANT
PREALABLE A LA CONCLUSION DU CONTRAT
CHAPITRE PREMIER - UNE EVALUATION PREMATUREE MAIS AVANTAGEUSE DES
OPERATEURS PRIVES EN AMONT DE LA PUBLICATION
CHAPITRE SECOND - UNE CONSTANTE EVALUATION DES CANDIDATS, DE LA
RECEPTION DES OFFRES A LA CONCLUSION DU CONTRAT
SECONDE PARTIE - UNE EVALUATION PERMANENTE DU COCONTRACTANT DES
LA CONCLUSION DU CONTRAT
CHAPITRE PREMIER - L'INTERET D'UNE EVALUATION DU
COCONTRACTANT LORS DE
L'EXECUTION DU CONTRAT : UN BENEFICE BRUT POUR
L'ADMINISTRATION
CHAPITRE SECOND - LES METHODES MODERNES D'EVALUATION DU
COCONTRACTANT : L'UTILISATION D'OUTILS DE MANAGEMENT PRIVE DANS LA COMMANDE
PUBLIQUE
XI
Table des abréviations
TABLE DES ABREVIATIONS
AJCT Actualité juridique - Collectivités
territoriales
BOAMP Bulletin officiel des annonces de marchés
publics
CAA Cour administrative d'appel
CADA Commission d'accès aux documents administratifs
CCI Chambre du commerce et de l'industrie
CP-ACCP Le Moniteur - Contrats publics
CE Conseil d'État
CJCE Cour de justice des Communautés
européennes
CJUE Cour de justice de l'Union européenne
Contrats-Marchés pub. Contrats et
marchés publics
DAJ Direction des affaires juridiques - Ministère de
l'économie
DGA Directeur général adjoint
DGS Directeur général des services
EPCI Établissement public de coopération
intercommunale
JCl. JurisClasseur
JCP A La Semaine juridique - Administration et
collectivités
territoriales
JOUE Journal officiel de l'Union européenne
JORF Journal officiel de la République
française
Ibid. Ibidem
MAPA Marché à procédure adaptée
OEAP Observatoire économique de l'achat public
op. cit. Opus citatum
Rec. Recueil Lebon
RFDA Revue française de droit administratif
RRJ Revue de la recherche juridique
« Il faut oser en tout genre ; mais la
difficulté, c'est d'oser avec sagesse »
Bernard LE BOUYER DE FONTENELLE
15
Introduction
INTRODUCTION
1. La performance est une notion assez largement
étudiée dans le droit de
la commande publique, notamment depuis la dernière
décennie. En effet, les études doctrinales et pratiques y
afférent sont nombreuses1. En outre, le
législateur s'est assez largement intéressé à la
nécessité de performance dans l'achat public et il est clair que
le mouvement est à l'accentuation de cette posture. Ainsi, depuis
l'ordonnance du 17 juin 20042 créant les contrats de
partenariat et mettant en place un système complexe d'évaluation
permanente du partenaire de l'Administration, il semble bien que la notion de
performance ait irrigué plus largement tout le droit de la commande
publique. Nous prendrons à titre d'exemple les récents
décrets « marchés
»3 et « concessions
»4 pris en application des
ordonnances du 23 juillet 20155 et du 29 janvier
20166, qui tous deux contiennent de nombreuses dispositions
relatives à l'incitation du cocontractant de l'Administration à
la performance. L'article 17 du décret « marchés »
prévoit ainsi en son alinéa 2 que des clauses incitatives de
performance peuvent être intégrées dans les marchés.
De plus, l'article 27 du décret « concessions » mentionne
quant à lui la possibilité pour l'autorité
concédante de relancer une procédure d'attribution d'une
concession face à une offre particulièrement performante dont
elle ne pouvait prévoir la teneur. Ces exemples démontrent bien
que la performance est aujourd'hui une donnée véritablement
importante du droit de la commande publique.
1 Voir par exemple ECKERT (Gabriel), « Précisions
sur le déroulement de la procédure d'appel d'offres sur
performances », Contrats-Marchés pub., 2001, n°10, p.
15 ; FREROT (Olivier), « La performance dans les contrats administratifs
», RRJ, 2005/4, p. 2359 ; RAYMUNDIE (Olivier) et PINTAT (Pierre),
« Clauses incitatives : les primes de performance dans les marchés
publics », CP-ACCP, 2010, n°97, p. 59 ; TONETI (Dominique),
« Le contrat de performance énergétique »,
CP-ACCP, 2010, n°96, p. 65 ; ROUVEYRAN (Thomas) et JEANNEAU
(Élisa), « La rédaction des clauses relatives à la
performance dans les marchés publics », CP-ACCP, 2015,
n°159, p. 70.
2 Ordonnance n°2004-559 du 1è juin 2004 sur les
contrats de partenariat, JORF du 19 juin 2004, p. 10994, texte
n°2.
3 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, JORF du 27 mars 2016
4 Décret n°2016-86 du 1et février 2016 relatif
aux contrats de concession, JORF du 2 février 2016, texte
n°20
5 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux
marchés publics, JORF du 24 février 2015, texte
n°38
6 Ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux
contrats de concession, JORF du 30 janvier 2016, texte n°66
16
Introduction
2. La définition de la performance.
La performance fait partie de ces concepts importés en droit
d'autres domaines d'étude et qui traduit une certaine tendance à
la « marchéisation » du droit. Partant, elle ne dispose pas de
définition juridique bien ancrée et ne peut, à notre sens,
se voir attribuer le qualificatif de concept juridique à part
entière. Si nous en revenons à l'étymologie du terme, nous
découvrons que le vocable actuel de performance semble issu de la
réception anglo-saxonne de la préposition latine per
associée au verbe formare, former. Ainsi, la performance
représente l'idée d'achèvement, d'accomplissement et le
mot était principalement utilisé, au
XIXème siècle en matière de sports
hippiques. Par une généralisation de son sens, il est tout
naturel que sur l'idée d'achèvement se soit greffée celle
d'efficacité.
La performance traduit donc l'idée d'une action
menée de manière efficace et selon des objectifs
préalablement fixés.
3. Performance et achat public. Il convient
de rappeler à juste titre que l'Administration lors de
l'exécution de ses processus de commande publique visant tant à
assouvir ses besoins internes que de poursuivre ses missions
d'intérêt général adopte dans une certaine mesure la
posture qu'un opérateur privé adopterait sur un marché
concurrentiel. En ce sens que la commande publique repose en grande partie sur
la dépense des deniers publics une performance doit sans cesse
être recherchée. A ce titre la performance se découvre
alors tant lors des phases de passation où elle s'exprime par la
recherche de la légalité et de la sélection de l'offre la
plus économiquement avantageuse que lors des phases d'exécution
du contrat où elle s'exprime sous un facteur d'efficacité et de
réponse à l'intérêt général.
De facto performance et achat public sont
intrinsèquement liés puisqu'au delà d'une simple
sécurisation juridique de l'acte d'achat un élément
politique entre en compte dans la recherche de la réduction des prix et
d'une exécution efficiente.
En outre, la performance dans l'achat public apparaît
comme protéiforme étant donné qu'elle touche à
différents éléments dont la commande publique est
l'instrument, comme la protection sociale ou encore la prise en compte des
exigences environnementales, au-delà de la stricte performance
économique dont l'importance en terme d'achat public se traduit aussi en
protection des deniers publics.
17
Introduction
4. Achat public et management. De par la
l'attitude similaire à un opérateur privé que
revêt l'Administration lors de ses actes relatifs à la commande
publique celle-ci adopte nécessairement et implicitement des
démarches et des reflexes propres au secteur privé. Si le
management se résume à un ensemble de tâches dissociables
ayant pour but d'atteindre les objectifs fixés alors l'acheteur, dans un
soucis de performance, doit à son tour adopter une posture
managériale, pourtant issue du domaine privé des affaires.
En cela achat public et management restent indissociables en
ce qu'un achat public performant -qui est une nécessité- ne peut
s'atteindre que par des actes de management et une approche managériale
globale.
L'acheteur doit donc conserver cette double vision qu'est la
recherche de la performance globale de ses achats et la démarche
managériale y afférent.
5. Intérêt de la recherche.
L'intérêt de la recherche et la volonté de
rédiger ce mémoire est tant né d'une expérience
professionnelle que de recherches personnelles antérieures. Il
s'avère qu'à la suite de ce que nous avons pu observer de la part
d'acheteurs le simple terme « performance » n'était pas
appréhendé explicitement ou de la bonne manière lors des
processus de décision, se résumant dans la plupart des cas
à la recherche d'une diminution du prix. Le contexte actuel que nous
connaissons est extrêmement particulier puisque crise économique
s'allie avec la réticence des contribuables français non
seulement vis à vis de l'Administration, mais également vis
à vis de l'impôt en lui même. De ces différents
constats est né l'intérêt de ce mémoire et
l'objectif d'apporter de nouvelles solutions aux acheteurs.
De même la performance globale de l'achat public peut
être non seulement un levier de relance économique, notamment vis
à vis des PME-TPE mais peut également permettre de renouer des
liens entre administration et administrés, ou tout du moins entre
paiement de l'impôt et dépense de celui-ci. Au regard de
l'apparence globale que peut revêtir la performance de la commande
publique notre choix s'est arbitrairement porté sur l'examen de
l'évaluation des cocontractants qui est, à notre sens, l'un des
éléments nécessitant la plus grande évolution.
18
Introduction
6. Difficultés de la recherche. La
première difficulté rencontrée lors de
la rédaction de ce mémoire porte sur le manque -à notre
sens- d'intérêt qu'ont porté les juristes à la
vision managériale de la commande publique. Face à ce
désintérêt trop peu d'ouvrages ou de
références font mention du triple alliage achat public,
performance et management. Ce désintérêt se couple
d'ailleurs avec les dernières réformes du droit des contrats
publics qui, bien qu'essayant d'instaurer un cadre favorable, restent
extrêmement timides vis à vis de la recherche de performance en
elle même. Sans que cela implique une totale absence de contenu, nos
recherches s'en sont trouvées grandement retardées, et il serait
justifié de nous reprocher par moment l'approche trop théorique
de notre mémoire, là où une approche pratico-pratique
aurait été souhaitable.
La seconde difficulté s'est rencontrée lorsque
nos recherches nous ont conduites à interroger des acteurs de l'achat
public en vue d'obtenir certaines réponses. S'ils s'avèrent que
trop peu de décideurs ont une vision pleinement performante de la
commande publique nous devons également admettre que nombre d'entres eux
n'a aucune réponse à la question de savoir comment
intégrer une démarche managériale en vue d'atteindre la
performance de l'achat public.
Ces difficultés rencontrées tendent à
que ce présent mémoire présente un aspect trop
théorique entaché d'un goût d'inachevé. Nous
espérons toutefois qu'il contribuera à apporter certaines
réponses ou pistes de réflexion aux acheteurs.
7. Plan de la recherche. Notre regard face
à ces constats s'est donc logiquement porté sur
l'évaluation des cocontractants de l'Administration. En effet sans
évaluation du cocontractant ou en tout cas sans évaluation
efficace du cocontractant, comment s'assurer que la mission
concédée a été réalisée ? De
même en cas de réalisation, comment déterminer la
qualité de l'exécution, le respect du cahier des charges, ou le
rapport qualité prix ? Cette approche nous semblait
particulièrement pertinente en ce qu'un contrat public qualifié
de « réussi » est uniquement dû à l'action du
cocontractant. Si on admet que ce n'est pas le cas et que l'Administration a eu
son rôle à jouer dans la réussite -totalement subjective-
d'un contrat, alors c'est qu'elle s'est livrée à un moment ou
à un autre à une évaluation du
19
Introduction
cocontractant avant d'agir. La performance d'un contrat repose
alors sur deux points de vue : soit le titulaire est seul responsable de cette
performance, ce qui implique qu'antérieurement à la passation de
ce contrat l'Administration a été performante dans le choix de
son cocontractant et s'est donc livrée à la bonne
évaluation des candidats, soit la performance du contrat est conjointe,
ce qui suppose non seulement une bonne évaluation des candidats mais
également une évaluation correcte du cocontractant lors de
l'exécution du contrat de sorte que l'Administration ait toutes les
clefs en main pour réagir.
Cette dualité de point de vue nous permettra de
réfléchir et de constater que, si l'évaluation efficace du
cocontractant peut être un facteur de performance de la commande
publique, l'évaluation des candidats et des opérateurs
privés est également source de performance. Ces deux
évaluations bien que distinctes ne peuvent aller l'une sans l'autre au
risque d'obtenir un résultat mitigé, incomplet et
décevant.
Cette réflexion nous permettra alors de comprendre
qu'avant de songer à toute évaluation du cocontractant de
l'Administration, il faut agir en amont et évaluer les candidats
à un contrat public, dont l'un d'entre eux au minimum deviendra le
titulaire. Il convient alors de considérer l'opérateur
privé ou le candidat comme un cocontractant par anticipation auquel
l'ensemble de ce mémoire s'adresse.
Dès lors, nous adopterons une démarche
temporelle pour analyser le management de la performance dans les contrats de
la commande publique, en analysant premièrement les techniques
d'évaluation par anticipation du futur cocontractant de l'administration
(PREMIERE PARTIE) et secondement celles qui portent sur
l'évaluation tout au long de la vie du contrat (SECONDE PARTIE).
21
Première partie - Une évaluation
anticipée du futur cocontractant préalable à la conclusion
du contrat
PREMIERE PARTIE - UNE EVALUATION ANTICIPEE DU FUTUR
COCONTRACTANT PREALABLE A LA CONCLUSION DU CONTRAT
8. Introduction. S'il est désormais
admis qu'une évaluation du cocontractant de l'administration peut
être un facteur de performance de la commande publique, il serait
déraisonnable de penser que seule l'évaluation à
posteriori de la conclusion du contrat public serait nécessaire. En
effet et comme les règles l'imposent,7 la
sélection du cocontractant ne peut se faire qu'à la suite d'une
procédure stricte, qui nécessite à un moment ou à
un autre l'évaluation des candidats.
Il est alors logique qu'en évaluant les candidats, et
de facto tous les candidats de la même façon, le service de
commande publique sera amené à évaluer son ou ses futur(s)
cocontractant(s). Cette évaluation s'inscrit donc dans une logique
d'évaluation constante du cocontractant, que ce soit
préalablement à la conclusion du contrat, durant
l'exécution du contrat, ainsi qu'au terme de celui-ci.
9. Plan. Cette évaluation
préalable doit intervenir à différentes
échéances de la conclusion du contrat public, non seulement en
amont de la publication (Chapitre premier), mais
également de la réception des offres à la conclusion dudit
contrat (Chapitre second).
7 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, op. cit, spéc. Chapitre IV :
règles de passation.
23
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
CHAPITRE PREMIER - UNE EVALUATION PREMATUREE
MAIS AVANTAGEUSE DES OPERATEURS PRIVES EN AMONT DE LA PUBLICATION
10. Introduction. L'évaluation des
candidats à un contrat public antérieure à la
conclusion du contrat n'est pas limitée à la simple
évaluation des candidats selon les critères de sélection
adoptés. En effet, et bien avant que le futur contrat ne soit
publié selon les règles de publicité requises en fonction
de son seuil, il est déjà possible pour les services de se doter
d'éléments d'évaluation.
Si la pratique du sourcing s'est largement
démocratisée ces dernières années, et bien que ce
ne soit pas sa fonction première, nous démontrerons par
l'application stricte de son régime juridique qu'elle peut devenir un
outil d'évaluation des candidats (I). Cette pratique qui intervient
initialement doit toutefois être conjuguée avec
l'élaboration de nouveaux critères de sélection dans une
optique d'évaluation performante des candidats (II).
I - La pratique du sourcing comme outil
d'évaluation des candidats
11. Si la pratique du sourcing n'est pas
récente et est utilisée depuis de nombreuses années,
les évolutions récentes du droit des contrats publics ont permis
sa réelle consécration (A.) et autorisent aujourd'hui sa pratique
en tant qu'outil d'évaluation sous condition de respect de règles
strictes, notamment celles relevant du droit pénal de la commande
publique (B.).
A. La consécration du sourcing en droit de la
commande publique
12. Le terme de « sourcing » est apparu
tardivement en droit de la commande publique (1.), mais ses avantages
indéniables ont conduit à une utilisation de plus en plus
courante dans la pratique contractuelle (2.).
24
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
1. L'apparition tardive du terme « sourcing
» dans les textes relatifs aux contrats publics
13. Les origines du sourcing. Le
sourcing, de l'anglais « to source », est
une étape préalable à tout achat ou recrutement lors de
laquelle un responsable va effectuer un travail de recherche et de comparaison
dans l'objectif de dégager l'issue la plus favorable, que ce soit en
terme de coût, d'avantages ou d'efficacité.
Initialement cet outil qu'est le sourcing provient,
comme la majorité des outils de gestion ou de management, du secteur
privé ; toutefois le secteur public a réussi le pari de se
l'approprier au cours des différentes étapes de modernisation de
la puissance publique dans un objectif toujours plus présent de
performance8.
14. Le sourcing dans l'achat public
: une consécration récente. Au sein des
services de la commande publique le sourcing est utilisé lors
de l'étape qui précède la phase de lancement de la
procédure de passation des contrats publics. Elle permet entre autre au
service d'entrer en contact avec ses fournisseurs potentiels afin d'avoir un
avis objectif et éclairé sur la réalité du
marché et de définir au mieux ses besoins.
Face au risque que peut représenter le sourcing,
comme fausser la mise en concurrence future ou vis à vis du
délit de favoritisme notamment9, un encadrement
juridique était plus que nécessaire10. Grand
oublié de l'ordonnance du 23 juillet 201511 relative
aux marchés publics, il a fallu attendre son décret d'application
du 25 mars 201612 pour voir le sourcing réellement
reconnu. Celui-ci dispose explicitement en son article 4 qu'en vue «
de préparer la passation d'un marché public, l'acheteur
peut
8 Voir à ce sujet Le développement du management
dan les services publics : évolution ou révolution ? Chapitre :
La place du management dans les réformes administratives
françaises. Par Annie Bartoli et Hervé Chomienne 2011.
Initialement publié dans Les Cahiers Français, n°339,
numéro sur les services publics face aux mutations économiques et
sociales, p 42 à 48.
9 La semaine Juridique Administrations et Collectivités
territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du sourçage et de
l'obligation de rétablissement de l'égalité lorsque
certains opérateurs disposent d'informations privilégiées.
Commentaire du projet de Code des marchés publics, Introduction, par
Florian Linditch.
10 Voir à ce sujet Réforme sur les
marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing
dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08
avril 2016.
http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html
11 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux
marchés publics, JORF n°0169 du 24 juillet 2015 page 12602 texte
n°28.
12 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, JORF n°0074 du 27 mars 2016 texte n°28.
25
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
effectuer des consultations ou réaliser des
études de marché, solliciter des avis ou informer les
opérateurs économiques de son projet et de ses exigences
»13.
Il ne faut toutefois pas comprendre que par là que le
sourcing est une pratique des plus récente, elle s'inscrit d'ailleurs
dans une tradition « centenaire », dont le décret a
eu le mérite de reconnaître l'existence. En effet, et sans
nécessairement être connue sous cette désignation, cette
pratique assimilable à une consultation préalable des
opérateurs privés était largement exercée,
notamment ces dernières années14.
Désormais cette pratique est reconnue et surtout
encadrée, non seulement par le fait que « les résultats
de ces études et échanges préalables peuvent être
utilisés par l'acheteur, à condition qu'ils n'aient pas pour
effet de fausser la concurrence et n'entraînent pas une violation des
principes de liberté d'accès à la commande publique,
d'égalité de traitement des candidats et de transparence des
procédures »15, mais également par le fait
que l'acheteur qui décide d'y recourir doit adopter « toutes
les mesures appropriées pour que la concurrence ne soit pas
faussée par la participation à la procédure de passation
du marché public d'un opérateur économique qui aurait eu
accès, du fait de sa participation préalable directe ou indirecte
à la préparation de cette procédure, à des
informations ignorées des autres candidats ou soumissionnaires
»16. Outre le fait que l'encadrement du sourcing a eu pour
effet de combler une certaine insécurité juridique relative
à sa pratique, il a également ouvert sa pratique aux acheteurs
les plus réticents -et les plus prudents- qui refusaient de s'y risquer,
faute de base légale suffisamment solide. En ce sens le décret
pourrait permettre une démocratisation de la pratique du sourcing, son
adoption étant relativement récente il est encore trop tôt
pour pouvoir se prononcer sur cet effet.
Cette reconnaissance, tardive, s'intègre parfaitement
dans la logique de modernisation de l'achat public que connaît l'Europe
ces dernières années au travers des différentes
réformes. Bien qu'outil initialement utilisé dans le
privé, nous allons voir que le sourcing, au delà de
présenter des avantages pour les acheteurs, doit désormais
devenir quasiment systématique.
13 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 4.
14 Voir à ce sujet La semaine Juridique Administrations
et Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du
sourçage et de l'obligation de rétablissement de
l'égalité lorsque certains opérateurs disposent
d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des
marchés publics, A- Verre à demi vide ou à demi plein ?
par Florian Linditch.
15 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 4.
16 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 5.
26
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
2. Les atouts et avantages d'une pratique de plus en plus
répandue.
15. Il est nécessaire ici de faire un point sur les
différentes pratiques de sourcing, qui peuvent prendre des
formes variées. Si certaines d'entres elles restent informelles et
discrètes comme de simples recherches internet sur des sites
spécialisés, la collecte d'informations sur catalogues, sur
revues17 etc. d'autres démarches en revanche
adoptent un caractère beaucoup plus explicite comme la participation
à des salons, la visite et la rencontre de fournisseurs et de
professionnels18É Ces différentes
techniques d'approche du sourcing -qui ne sont pas exhaustives- ont toutes
leurs avantages propres, néanmoins elles se rejoignent sur
l'intérêt qu'elles accordent aux acheteurs.
16. Le dialogue entre les pouvoirs adjudicateurs et
les opérateurs économiques. Le tout premier
intérêt du sourcing, et non des moindre, réside
dans le fait qu'à l'heure actuelle il reste l'un des seuls moyen
accordé aux acheteurs d'établir un dialogue avec les
opérateurs privés. Il faut retenir ici que le choix des personnes
sourcées n'est pas le fruit du hasard et qu'en
déterminant les opérateurs les plus notables l'acheteur aura la
possibilité de dialoguer, non seulement avec des sociétés
expertes dans leur domaine, mais également avec de potentiels candidats,
et dans une moindre mesure avec de futurs potentiels titulaires de
marchés. Cette étape de communication -plus ou moins informelle
donc- reste essentielle pour mettre en relation acheteurs et
réalité du terrain.
17. La connaissance du marché par les pouvoirs
adjudicateurs. Le deuxième intérêt à
relever est qu'en se rapprochant des fournisseurs -qu'il s'agisse d'un projet
de marché public de travaux, de services, de fournitures, ou de tout
autre contrat public- l'acheteur public aura la possibilité dans un
premier temps de
17 Contrats et Marchés publics n°2, février
2015, alerte 6. L'achat public durable, Guide pratique (Association des
acheteurs publics), focus par Florian Linditch. Paragraphe 3 « Sourcing
».
18 La semaine Juridique Administrations et
Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du
sourçage et de l'obligation de rétablissement de
l'égalité lorsque certains opérateurs disposent
d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des
marchés publics, A- Verre à demi vide ou à demi plein ?
par Florian Linditch. Paragraphe 6.
27
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
prendre connaissance du marché
actuel19 et de mener sa propre étude à ce
sujet20. En ce sens le sourcing reste
indispensable, notamment pour les petites collectivités qui n'auraient
pas un service de la commande publique extrêmement
développé. De cette prise d'information il est nécessaire
que l'acheteur puisse en déduire non seulement l'ensemble des modes
opératoires du secteur privé, mais également les
techniques disponibles et innovations afférentes21 qui lui
permettront de référencer et de classer selon ses objectifs
l'ensemble des prestataires 22 . Cet ensemble d'informations
synthétisées doit alors conduire l'acheteur à
réaliser le meilleur calibrage possible entre la réalité
du marché d'une part, et le prix23. Les résultats de
ce calibrage seront naturellement un outil quand à l'évaluation
des candidats, et donc de facto, du ou des futur(s) titulaires du
marché.
18. L'optimisation de la définition du besoin.
Enfin, le troisième et dernier intérêt du
sourcing réside dans le fait qu'un sourcing «
optimal » sera nécessairement un outil propice quand à
la définition des besoins de l'acheteur au regard de son projet de
contrat public. En effet la prise d'information et la rencontre avec les
professionnels permettront à l'acheteur dans un premier temps de
définir, si besoin est, l'ensemble de ses besoins ou tout du moins de
comparer les besoins prévisionnels avec ce que peut proposer le
prestataire24. Cette évaluation des besoins par rapport au
marché permet, en plus d'une meilleure évaluation des candidats
de réaliser un réel contrôle des différents «
coûts de revient » du projet de
marché25.
19. Toutefois, nous venons de le voir, le sourcing
n'est pas à première vue un outil ou une pratique qui puisse
permettre une évaluation directe des candidats et
19 Le champ d'application organique des nouvelles dispositions
par Marion Ubaud-Bergeron, RFDA 2016. 218. L'émergence d'une conception
économique de la commande publique, paragraphe 2.
20 AJ collectivités territoriales 2016 p.442
Définition préalable du besoin et sourcing, la responsabilisation
des acheteurs publics dans le nouveau droit des marchés publics au
lendemain de l'ordonnance du 23 juillet 2015 et du décret du 25 mars
2016 par Samuel Dyens. Un facteur d'efficacité de l'achat public,
paragraphe 3.
21 La semaine Juridique Administrations et
Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du
sourçage et de l'obligation de rétablissement de
l'égalité lorsque certains opérateurs disposent
d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des
marchés publics par Florian Linditch. Introduction, paragraphe 2.
22 Le champ d'application organique des nouvelles dispositions
par Marion Ubaud-Bergeron, RFDA 2016. 218. L'émergence d'une conception
économique de la commande publique, paragraphe 2
23 Cahiers de droit de l'entreprise n°6, novembre 2016,
dossier 50. La nouvelle commande publique des territoires par Fanny Ehrenfeld
et Bastien Marguerite, 2° La pratique du sourcing, paragraphe 3.
24 Idem.
25 Le champ d'application organique des nouvelles dispositions
par Marion Ubaud-Bergeron, RFDA 2016. 218. L'émergence d'une conception
économique de la commande publique, paragraphe 2
28
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
ce, d'autant plus que le sourcing intervient au stade
où les candidatures n'ont pas encore été reçues, et
le contrat public n'a pas été publié. Cependant, dans la
mesure où rien n'interdit aux entreprises qui ont participées
à la phase de sourcing d'être candidates au contrat
public, alors le sourcing pourrait être une première
étape dans l'évaluation des candidats. Il va sans dire
qu'à admettre cette hypothèse, les règles fondamentales de
la commande publique comme la transparence des procédures,
l'égalité de traitement des candidats ou bien les règles
relatives au droit pénal de la commande publique doivent être
respectées.
B - Pratiquer le
sourcing comme démarche initiale de l'évaluation des
candidats, entre innovation et respect intangible des règles
élémentaires de passation d'un contrat public.
20. Le sourcing sert clairement l'évaluation des
candidats (1.), mais le fait de l'user à outrance présente le
risque de contournement des règles de passation des contrats de la
commande publique (2.).
1. Le sourcing, détourné de sa fonction
initiale, au service de l'évaluation des candidats.
21. Nous avons déjà eu l'occasion de le
préciser mais il est nécessaire ici de rappeler que
malgré le fait que notre sujet de mémoire porte sur
l'évaluation du cocontractant de l'administration il reste essentiel
d'étudier les possibilités d'évaluation des candidats,
puisque l'un d'entre eux au moins aura le privilège de devenir le
titulaire du contrat et sera à son tour évalué en tant que
tel.
Or, bien que le sourcing soit désormais
encadré juridiquement, il s'avère que rien n'empêche
actuellement une société ou un particulier qui participe à
une opération de sourcing de se porter finalement
candidat26 à l'obtention du contrat.
26 Encyclopédie des collectivités locales,
Chapitre 2 (folio n°3012) Rédaction du marché Public par
Frédéric Allaire, mars 2017, introduction paragraphe 8.
29
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
22. L'influence du sourcing sur la phase
d'évaluation des candidatures. De ce fait le sourcing
va fatalement avoir une incidence plus ou moins forte sur
l'évaluation des candidats à un contrat public.
En effet, n'importe quel acheteur, partant du postulat que
l'opérateur privé qu'il soumissionne pour son opération
peut devenir candidat, va naturellement, sciemment ou pas, lui porter une
certaine évaluation puisque cet opérateur au même titre que
n'importe quel futur candidat est susceptible de répondre à ses
attentes. De la façon ou de la manière dont l'opérateur va
présenter sa réponse à l'acheteur va dépendre le
ressenti de l'acheteur qui, implicitement ou non, va adopter une attitude
propice à l'évaluation de l'opérateur.
La rentabilité du sourcing pour l'évaluation des
candidats est alors multiple. En favorisant une meilleure définition des
besoins le sourçage va permettre à l'acheteur d'opter pour les
critères de sélection les plus propices, qui serviront a
posteriori pour l'évaluation et la sélection des candidats. De
même en observant les différentes propositions des personnes
sourcées et le prix qui en dépend l'acheteur aura une certaine
attente concernant les futurs candidats, et cette attente entrera fatalement,
explicitement ou pas, dans l'évaluation de ces candidats. Enfin, dans
l'hypothèse où un opérateur apporte une réponse que
l'acheteur estime « parfaite », alors celui-ci pourra construire son
cahier des charges ou mettre en place certains critères de
sélection dans l'objectif de retrouver cette réponse
précise, ou tout du moins un candidat équivalent capable
d'apporter cette même réponse.
Le sourcing reste aujourd'hui une pratique assez
large et assez libre, pour peu que l'on respecte les règles
générales de passation des contrats publics. En effet, bien que
le décret27 restreigne le sourcing à
des consultations, des études de marché, des sollicitations
d'avis, ou à la possibilité d'informer les opérateurs
économiques d'un projet, ces notions restent suffisamment larges pour
imaginer une multitude de façons de l'exercer. Reste alors à
l'acheteur de décider de la manière dont il compte sourcer les
opérateurs économiques en fonction de son projet. Doit alors
nécessairement s'en suivre une évaluation et un retour sur
expérience du sourcing, car cela revient à
évaluer les résultats, les entreprises, et donc potentiellement
les futurs candidats et leurs futures réponses au projet de contrat
public.
27 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, op. cit., article 4.
30
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
23. La nécessaire adaptation du sourcing
aux situations particulières. Il faut néanmoins
garder un certaine distance avec tout ce qui vient d'être dit
précédemment. Les positions et les conseils
précités ne sont proposées que dans un cadre
théorique et utopique où toutes les collectivités
fonctionneraient de la même façon et auraient toutes un service de
commande publique digne de ce nom regroupant juristes
spécialisés, économistes expert de la pratique du
sourcing et techniciens agrémentés capables de donner un
avis sur toutes les spécifications techniques des projets de contrats
publics. De même chaque marché reste unique en son genre et il
serait candide de penser qu'une seule et même pratique du sourcing
serait valable pour l'ensemble des contrats.
Notre vision à ce sujet n'est pas d'imposer un
sourcing parfait à l'ensemble des acteurs qui aujourd'hui
exerce des prérogatives de commande publique, mais au contraire de
prouver que le sourcing peut être un outil de modernisation, de
performance, et qu'il peut s'adapter à plusieurs situations, quelles que
soient les particularité géographiques des services, les enjeux
politiques y afférent ou les moyens financiers et humains à
disposition.
Le sourcing aujourd'hui reste une pratique qui doit
se démocratiser au sein de la commande publique française et
reste une pratique qui peut -et qui doit- s'adapter à tout contexte pour
se pratiquer à toute échelle.
24. Une autre distance est à conserver vis à
vis de ce qui vient d'être dit, en ce sens que le sourcing ne
doit ni être une étape de pré-sélection, ni une
étape qui irait à l'encontre des règles
générales de passation des contrats publics. La pratique du
sourcing, en cela qu'elle reste assez peu encadrée, peu
représenter un risque accru pour les acheteurs. La lecture des lignes
qui vont suivre est indispensable quand à la pratique légale du
sourcing, qui viendra atténuer les propos tenus plus haut.
2. Une fonction détournée et des risques accrus
pour le décideur
25. La multiplicité des risques du
sourcing. Nous l'avons vu, la pratique du sourcing
est encadrée par l'article 4 du décret qui dispose que
« les résultats de ces
31
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
études et échanges préalables peuvent
être utilisés par l'acheteur, à condition qu'ils n'aient
pas pour effet de fausser la concurrence et n'entraînent pas une
violation des principes de liberté d'accès à la commande
publique, d'égalité de traitement des candidats et de
transparence des procédures »28. Il faut alors en
déduire que la pratique du sourcing est une pratique à
risque au regard de ces éléments, et que cette pratique -qui peut
s'apparenter à une pratique relativement libre- en entrainant une
nouvelle utilisation, présente alors un risque accrus pour les services
de commande publique. A ces risques se rajoute également le délit
de favoritisme qui pourrait, dans certains cas, être reconnu si des
précautions n'étaient pas minutieusement prises par
l'acheteur.
26. Sourcing et liberté
d'accès à la commande publique. La liberté
d'accès à la commande publique susmentionnée s'entend
comme l'obligation pour les acheteurs de faire connaître à toute
personne son projet et ses besoins. Cette liberté se garantie par la
publicité adoptée par le service de commande publique et la mise
en concurrence qui découle de cette
publicité29. Il est alors indispensable que la
pratique du sourcing ne conduise pas à une
pré-sélection du ou des candidats, qui limiterait l'obligation
d'information aux candidats sourcés.
27. Sourcing et égalité de
traitement des candidats. L'égalité de
traitement interdit quand à elle toute discrimination lors de
n'importe quelle phase de la procédure. Cela implique entre autre dans
notre cas que le cahier des charges reste suffisamment objectif pour ne pas
favoriser un candidat et que l'ensemble d'entres eux disposent des mêmes
informations30. De ce fait les échanges et dialogues
lors de la phase de sourcing doivent rester les plus neutres possibles
et ne doivent pas permettre au potentiel candidat sourcé d'obtenir
certaines informations qui le positionnerait dans une situation
privilégiée. Il s'avère que dans le respect de ce principe
l'acheteur doit être capable d'expliquer pourquoi tel ou tel candidat a
été
28 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 4
29
BOAMP.fr, Bulletin officiel des annonces
des marchés publics, Définition et principes d'un marché
public. Principes : Liberté d'accès paragraphe 1. 08 avril 2016.
http://www.boamp.fr/Espace-entreprises/Comment-repondre-a-un-marche-public/Questions-de-reglementation/Avant-de-repondre-a-un-marche-public/Definition-et-principes-d-un-marche-public#eztoc16662_0_2_0_4
30 Idem, Principes : Egalité de traitement paragraphe
1.
32
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
sourcé, ou pourquoi tel ou tel candidat ne l'a pas
été31. De même peu importe l'avis
subjectif de l'acheteur à l'issue du sourcing, celui-ci ne doit
pas au travers de l'élaboration de son cahier des charges ou du choix de
ses critères favoriser un candidat en particulier. Il doit au contraire
mettre en oeuvre de façon objective ses préférences dans
l'objectif de trouver une solution similaire à celle du candidat
sourcé qui pourrait être mise en oeuvre par l'ensemble des
candidats admis à déposer une offre.
28. Sourcing et transparence.
Enfin, la transparence est le principe qui permet à
l'ensemble des candidats, des intéressés, des supérieurs
hiérarchiques etc. de vérifier que les précédents
principes ont bien été respecté32. Il
est alors souhaitable pour l'acheteur qui initie une opération de
sourcing de rester dans un cadre déontologique strict et
impartial ainsi que d'agir dans la plus grande des transparences.
29. Sourcing et protection du secret des
affaires. Une autre problématique plus subtile est aussi
à relever lors de la pratique du sourcing. Il s'agit ici de la
délicate adéquation entre protection du secret des affaires et
égalité de traitement des candidats.
En effet lors d'une opération de sourcing
l'opérateur privé peut être amené à
apporter une réponse personnelle à la question de l'acheteur,
laquelle peut porter sur ses stratégies commerciales, ses
capacités et innovations techniques ou ses informations
économiques33. Comme précisées par la
CADA dans un avis de 200634 les mentions
protégées par le secret des procédés, par le secret
des informations économiques et financières et celles
protégées par le secret des stratégies
31 La semaine Juridique Administrations et
Collectivités territoriales n°1, 11 janvier 2016, 2001 : Du
sourçage et de l'obligation de rétablissement de
l'égalité lorsque certains opérateurs disposent
d'informations privilégiées. Commentaire du projet de Code des
marchés publics par Florian Linditch. 2. Du sourcing au sourçage,
les termes d'une évolution attendue, B) 1° paragraphe 2.
32
BOAMP.fr, Bulletin officiel des annonces
des marchés publics, Définition et principes d'un marché
public. Principes : Transparence paragraphe 1. 08 avril 2016.
http://www.boamp.fr/Espace-entreprises/Comment-repondre-a-un-marche-public/Questions-de-reglementation/Avant-de-repondre-a-un-marche-public/Definition-et-principes-d-un-marche-public#eztoc16662_0_2_0_4
33 Voir à ce sujet Réforme sur les
marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing
dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08
avril 2016. Focus sur deux problématiques induites par la mise en oeuvre
d'une opération de sourcing, paragraphe 1.
http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html
34 Avis de la CADA 20062458 -Séance du 15 juin 2006
33
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
commerciales35 ne doivent en aucun cas
être communiquées ou transmises aux autres candidats. Au
delà de ce principe il est également admis que la
définition et la formulation du besoin de l'acheteur par
l'élaboration de son cahier des charges ou de ses critères de
notation ne doivent en aucun cas trahir le secret relatif à ces
mentions36.
Néanmoins le principe de l'égalité de
traitement des candidats impose que soit fourni de manière égale
à l'ensemble des candidats tout document que l'un d'entre eux pourrait
détenir et qui le placerait dans une situation plus favorable.
Tout l'enjeu est donc de savoir que faire des documents,
pièces et résultats qu'un service de commande publique aurait
recueillis lors de la pratique du sourcing ? Si l'ordonnance permet
aux candidats sourcés de « consentir à ce que certaines
informations confidentielles qu'ils ont fournies, précisément
désignées, puissent être divulguées
»37, cela implique que l'acheteur ne peut en aucun passer
outre leur avis quand à la communication de ces informations. Mais
à admettre que le sourcing a permis à l'acheteur de
considérer une technique ou une solution stricte comme seule
réponse possible à son projet de marché, alors celui-ci
devra communiquer ses résultats à l'ensemble des candidats tout
en garantissant le respect du secret des affaires et donc de facto,
tout en ayant pris les précautions qui s'imposent afin de conserver
leur confidentialité38.
30. Sourcing et délit de favoritisme.
Un autre enjeu pour les acheteurs qui se livreraient à la
pratique du sourcing est de ne pas tomber dans le piège que
peut représenter le délit de favoritisme. Défini comme le
fait de procurer, ou de tenter de procurer à autrui « un
avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions
législatives ou règlementaires ayant pour objet de garantir la
liberté et l'égalité des candidats dans les
35 Idem, dernier paragraphe.
36 Voir à ce sujet Réforme sur les
marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing
dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08
avril 2016. Focus sur deux problématiques induites par la mise en oeuvre
d'une opération de sourcing, paragraphe 1.
http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html
37 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux
marchés publics, article 44.
38 Réforme sur les marchés publics -fiche
technique n°3 : L'encadrement du sourcing dans les marchés publics
par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08 avril 2016. Focus sur deux
problématiques induites par la mise en oeuvre d'une opération de
sourcing, paragraphe 3.
http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html
34
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
marchés publics et les délégations de
service public »39 le délit de favoritisme reste
l'une des épées de Damoclès suspendue au dessus des
acheteurs. Les services de commande publique devront donc sans cesse de
questionner et se remettre en question lors de toutes leurs phases de
sourcing -de même pour les phases postérieures- afin de
ne pas tomber sous le joug de cette condamnation pénale. Le
décret permet à ce titre d'exclure un candidat qui aurait eu
accès, du fait de sa participation préalable à la
procédure, à des informations ignorées des autres
candidats40.
31. Bilan et préconisations. Au regard
de l'ensemble de ces éléments qui encadrent la pratique du
sourcing comme élément d'évaluation des
candidats, nous pouvons donner quelques éclaircissements et conseils aux
futurs acheteurs.
Dans un premier temps il nous semble indispensable que chaque
service se dote de sa propre charte ou de son propre guide de
déontologie. Ces documents sont de plus en plus reconnus et
utilisés par les collectivités41 et peuvent servir de
repère aux employés territoriaux qui, quelques fois, n'ont pas de
formation juridique à proprement parlé et n'ont pas une vision
claire et précise du délit de favoritisme.
Dans un second temps les acheteurs doivent, lors de la
rédaction de leurs documents, prendre des précautions afin que
ceux-ci ne permettent pas d'identifier une solution précise relevant du
secret des affaires ou n'excluent de la procédure de potentiels
candidats. De même nous ne pouvons que conseiller aux acheteurs de
prévoir lors des documents qui leurs serviront lors de la phase de
sourcing une clause de confidentialité afin d'utiliser les
résultats obtenus42.
Dans un troisième temps nous conseillons aux acheteurs
de prendre du recul et de la hauteur vis à vis des résultats
obtenus lors du sourcing. Il est important de ne pas rester trop
« fidèle »43 aux propositions des
candidats sourcés et de permettre aux
39 Article 432-14 du code pénal, modifié par
l'ordonnance n°2000-916 du 19 septembre 2000 JORF 22 septembre 2000
40 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 5.
41 A titre d'exemple : le conseil général du Gard,
la commune de Rueil MalmaisonÉ
42 Voir pour ces propositions Réforme sur les
marchés publics -fiche technique n°3 : L'encadrement du sourcing
dans les marchés publics par Eve Derouesne et Virginie Lafargue le 08
avril 2016. Préconisations à destination des opérateurs
sourcés paragraphes 2 et 3.
http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html
43 AJ collectivités territoriales 2016 p.442
Définition préalable du besoin et sourcing, la responsabilisation
des acheteurs publics dans le nouveau droit des marchés publics au
lendemain de l'ordonnance du 23 juillet 2015 et du décret du 25 mars
2016 par Samuel Dyens. S'autonomiser des résultats du sourcing,
paragraphe 2.
35
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
autres candidats d'avoir une certaine marge de manoeuvre, le
tout pour la garantie de l'égalité de traitement des
candidats.
Enfin pour conclure ces quelques préconisations, nous
ne pouvons qu'encourager les acheteurs à la plus grande prudence et
à prendre le plus de précautions possibles lors de la phase de
sourçage et l'utilisation des résultats. Dans le cadre de
quelques collectivités au service de commande publique modeste, nous ne
pouvons que les inciter en cas de doute de se référer à un
juriste confirmé dans ce domaine, les risques étant trop grands
pour être négligés.
32. Nous venons donc de le démontrer dans cette partie
qu'il est possible sous conditions de pratiquer le sourcing comme
outil d'évaluation des candidats. Toutefois cette première
tentative d'évaluation ne peut rester qu'au stade embryonnaire et doit
s'adjoindre d'autres procédés. Si les critères de
sélection des offres sont les principaux outils d'évaluation des
candidats, encore faut il les déterminer de la manière la plus
efficace. Dans une optique de performance de l'évaluation des candidats
de nouvelles techniques peuvent être pratiquées pour non seulement
mieux définir les besoins de l'acheteur -le sourcing en faisant partie-
mais également pour sélectionner les critères les plus
efficients.
II - Une nouvelle définition des
critères de sélection dans un objectif d'évaluation
performante des candidats
33. Si les critères de sélection des offres et
des candidatures sont aujourd'hui au coeur de l'évaluation des
candidats (A.), il s'avère qu'ils ne connaissent qu'une évolution
relativement faible ces dernières années. Quand bien même
les critères « environnement » et « social
»44 ont récemment été reconnus,
force est de constater qu'en pratique les critères sont trop souvent
restreints au caractère « technique » ou pire encore, au
critère unique du « prix ». En ce sens il est urgent
aujourd'hui de créer une nouvelle dynamique de définition des
besoins et donc de facto des critères de sélection qui,
nous le démontrerons, n'impliquent pas forcément
44 Voir à ce titre CJCE 17 septembre 2002 Concordia Bus
Finland C-513/99 2002 I-07213 et CE 25 mars 2013 n°364950
Département Isère c/ Société PL Favier recueil
Lebon AJDA 2013.
36
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
des dépenses supplémentaires mais permettent une
évaluation moderne des candidats (B.).
A. Les critères de sélection : piliers
centraux de l'évaluation des candidats
34. Les textes encadrant le droit de la commande publique
laissent une marge de manoeuvre certaine aux pouvoirs adjudicateurs dans la
détermination des critères de sélection (1.), et nous
remarquons que c'est bien souvent le projet politique qui guide cette
détermination (2.).
1. Une base légale qui concède une certaine
liberté quant au choix des critères de sélection.
35. L'importance des critères de
sélection des offres dans l'évaluation des candidats. La
direction des affaires juridiques précise aux acheteurs que les
critères de sélection choisis « ainsi que leurs
modalités de mise en oeuvre, doivent (leur) permettre
d'apprécier la performance globale du marché public et porter une
attention particulière à la qualité des prestations
fournies, ainsi qu'au respect, tant par les fournisseurs que par les
utilisateurs, des modalités d'exécution du marché
»45.
En d'autres termes l'évaluation concrète et
objective des candidats se fait par rapport à ces critères de
sélection des offres. Il s'agit ici de la principale évaluation
des candidats puisqu'à l'inverse de ce qui a été
démontré précédemment concernant
l'évaluation, à ce stade on évalue concrètement les
candidats et leurs offres.
Nous passons volontairement outre l'évaluation des
candidatures qui intervient -sauf exception46-
antérieurement à l'évaluation des offres car, à
notre sens, il ne s'agit que d'une opération ayant pour unique objectif
d'évaluer et sélectionner les candidats vis-à-vis de leur
compétence à exécuter le marché, et non une
opération ayant pour objectif d'évaluer le ou les meilleurs
candidats. Il est tout
45 Direction des affaires juridiques des ministères
économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux
autorités concédantes, fiches techniques L'examen des offres du
09 décembre 2016. Page 1 paragraphe 5.
https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publics/conseil_acheteurs/fiches-techniques/mise-en-oeuvre-procedure/examen-des-offres-2016.pdf
46 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 68 : en cas d'appel d'offre ouvert «
L'acheteur peut décider d'examiner les offres avant les candidatures
».
37
Chapitre premier Ð Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
de même nécessaire de préciser ici qu'en
pratique, pour des contrats assez modestes, il se peut que l'acheteur lors de
l'examen des candidatures ait déjà un certain avis ou une
certaine préférence subjective pour un candidat. En ce sens nous
ne pouvons qu'encourager les acheteurs qui se trouveraient dans cette situation
de passer outre, et de respecter à la lettre les règles et
procédures relatives à la passation d'un contrat public. Comme
dit précédemment, les risques sont bien trop importants pour
être ignorés et pour laisser une conscience subjective guider les
choix.
36. Analyse de la mise en place des critères de
sélection des offres. Toutefois, s'il est désormais
admis que les critères de sélection des offres sont au coeur de
l'évaluation des candidats, encore faut il s'interroger sur leur mise en
place.
Le décret nous précise en son article 62 que
l'acheteur peut se fonder sur un critère unique qui peut alors
être le prix « à condition que le marché public
ait pour seul objet l'achat de services ou de fournitures standardisés
dont la qualité est insusceptible de variation d'un opérateur
à un autre »47 ou le cout, qui est
déterminé « selon une approche globale qui peut
être fondée sur le cout du cycle de vie »48.
Dans l'hypothèse où le contrat ne rentre pas dans un de ces cas
de figure, l'acheteur doit se fonder sur une pluralité de
critères « non-discriminatoires et liés à l'objet
du marché public ou à ses conditions d'exécution
(É) parmi lesquels figure le critère du prix ou du coût et
un ou plusieurs autres critères comprenant des aspects qualitatifs,
environnementaux ou sociaux »49.
Rappelons à ce titre que la sélection des
candidats par ces critères de sélection doit être des plus
objective et des plus concrète, une jurisprudence récente du
Conseil d'Etat progresse justement dans ce sens en précisant que les
pouvoirs adjudicateurs doivent exiger des candidats les justificatifs de leurs
offres pour pouvoir appliquer leurs critères de
sélection50.
Ces dispositions récentes du décret -dans la
continuité de la jurisprudence antérieure- laissent donc une
certaine liberté aux acheteurs quand à la détermination
des critères de sélection des offres. En ce sens nous ne pouvons
que féliciter cette démarche qui n'enferme pas les pouvoirs
adjudicateurs ou entités adjudicatrices
47 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62 II 1° a)
48 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62 II 1° b)
49 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62 II 2°
50 OE 22 juillet 2016 n°396597 Communauté
d'agglomérations du centre littoral et autres. Mentionné dans les
tables du recueil Lebon.
38
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
dans un cadre trop stricte, et leur permet de prendre en
compte pleinement les enjeux territoriaux, politiques ou financier. Cette
liberté -sous réserve des conditions de l'article 68 II 2°
du décret susmentionné- est d'autant plus considérable
qu'elle permet non seulement aux acheteurs d'évoluer et de se moderniser
dans la détermination de leur besoins et de leurs critères de
sélection mais également de déterminer la ligne politique
de leur projet de contrat public.
2. La définition de la ligne politique du projet de
contrat public par les critères de sélection.
37. La diversité des critères de
sélection des offres, témoin d'une
corrélation entre sélection des
titulaires de contrats de commande publique et projet politique. Nous
l'avons vu, il est désormais possible aux acheteurs de reconnaître
comme critères de sélection des offres les critères
environnementaux, sociaux, la caractéristique esthétique, les
conditions de production et de commercialisation ou encore la garantie de la
rémunération équitable des
producteurs51.
Cette diversité de critères non exhaustive
permet non seulement à l'acheteur de prendre pleinement en compte ses
enjeux locaux, mais également de définir une certaine ligne
politique. En effet de par l'importance que revêtent les contrats publics
au sein de notre société, et du fait qu'il s'agisse là de
l'utilisation de deniers publics, chaque contrat a définitivement une
portée politique. Passé outre les obligations de certaines
collectivités qui leurs sont inhérentes -comme le ramassage des
ordures ménagères par exemple-, les autres contrats ont une
dimension politique et leur passation n'est pas le fruit du hasard.
Au travers de cette liberté relative quand au choix des
critères de sélection les acheteurs peuvent donc dans une
certaine mesure illustrer leur ligne politique. A titre d'exemple favoriser un
critère environnemental sur un contrat d'entretien de terrains
incendiés aura une portée médiatique intéressante,
en plus de répondre à un besoin primordial de respect de
l'environnement. De même mettre l'accent sur le critère du prix ou
du cout pour une collectivité qui connaitrait des difficultés
51 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62 II 2°
39
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
financière ou économique permettra en plus d'une
sauvegarde des deniers publics d'avoir un retour positif auprès des
contribuables qui féliciteront une dépense allégée.
Selon la ligne politique que le pouvoir adjudicateur ou l'entité
adjudicatrice voudra adopter, il lui sera possible d'opter pour certains
critères qui, ne l'oublions pas, permettront d'évaluer et de
sélectionner les candidats les plus performants.
Cette réalité est d'autant plus évidente
qu'il est possible et indispensable pour les acheteurs de pondérer, ou
à défaut de hiérarchiser, leurs critères de
sélection. En effet le décret dispose que « les
critères d'attribution font l'objet d'une pondération ou, lorsque
la pondération n'est pas possible pour des raisons objectives, sont
indiqués par ordre décroissant d'importance
»52. Ajoutons à cela la possibilité pour les
acheteurs de créer et pondérer des sous critères de
sélection des offres qui permet une réelle définition des
objectifs et des besoins ainsi qu'une orientation politique précise.
38. Critères de sélection des offres et
performance. Il est donc tout à fait
possible d'envisager et d'adopter les critères de
sélection dans une optique de performance. Non seulement dans une
optique de performance globale du marché en permettant à celui-ci
de prendre en compte des critères environnementaux ou sociaux, mais
également dans une performance de l'évaluation des candidats. Par
une détermination assez libre des critères des sélection
et de leur pondération, et par la possibilité d'adoption et de
pondération de sous-critères, il est tout à fait possible
pour l'acheteur de définir une nouvelle ligne d'évaluation des
candidats et donc de facto, de son futur cocontractant.
En ce sens il est indispensable aujourd'hui de repenser
l'idée des critères de sélection et d'en créer une
nouvelle dynamique, puisque ceux-ci sont au coeur de l'évaluation des
candidats et de l'exécution des contrats publics.
Ce constat est d'autant plus avéré que des
dérives -légales- ont souvent lieu quand à la
détermination des critères de sélection. En effet une
tendance actuelle visant à l'économie conduit les
décideurs à laisser une place prépondérante au
critère du prix. Malgré que cela s'inscrive dans une certaine
logique ce choix de consécration du critère prix n'est pas
irréprochable. Dans un premier temps par exemple à propos d'un
marché de fournitures, ne prendre en compte que le critère prix
ou lui donner
52 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62 IV.
40
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
une place trop importante conduira les candidats à ne
proposer que les fournitures au prix de revient le plus bas. Passant outre la
qualité et la durabilité dans le temps de ces fournitures,
l'acheteur aura certes fait des économies sur le court terme, mais se
verra dans l'obligation de renouveler sans cesse son marché qui peut
être source de dépenses.
Dans un autre registre nous pourrions imaginer un
marché en vue de la création d'un site internet pour une
collectivité par exemple. Dans l'hypothèse où le prix ait
une place trop importante -imaginons un critère du prix
pondéré à 80% et celui de la valeur technique à
20%- alors le constat est mathématiquement fatal. Il suffit qu'un
candidat dont la candidature a été acceptée brade ses prix
de sorte qu'aucun autre candidat ne puisse proposer un prix en dessous des 20%
plus cher, et il n'est alors plus nécessaire de prendre en compte le
mémoire technique ou les solutions proposées. Si tous les autres
candidats proposent des prix 20% plus cher alors fatalement le candidat qui
brade ses prix obtiendra le marché sans que l'on ait à
évaluer ses propositions au regard de la valeur technique. Ne sera donc
même pas pris en compte l'ergonomie ou l'esthétique du site
internet par exemple, pas plus que la rapidité d'exécution. Sera
donc sélectionné à titre d'exemple un simple informaticien
débutant plutôt qu'une société d'informaticiens
compétents, capables de travailler plus rapidement, d'être plus
à l'écoute de l'acheteur et disposant d'une expérience
dans le domaine que l'autre candidat ne possède pas. Même en
admettant que l'offre du candidat retenu ne soit pas une offre anormalement
basse, et même en admettant qu'il est tenu au respect du cahier des
charges, il est fort à parier que le résultat final sera de bien
moins bonne qualité et répondra peut être moins au besoin
de l'acheteur que la solution proposée par l'équipe
d'informaticiens. Comment alors, envisager ici une quelconque performance du
contrat public ? Tout le défaut de cet exemple réside dans le
fait que le cocontractant de l'administration n'a pas été
évalué efficacement en amont et n'a pas été
évalué de la façon la plus performante.
39. Face à ces problématiques
il est donc urgent que les acheteurs prennent conscience du poids que
revêtent chacun des critères et de leur pondération. Nous
venons de le démontrer, les critères de sélections
occupent une place des plus déterminantes dans la passation d'un contrat
public. Leur rôle central dans
41
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
l'évaluation des candidats et la liberté quant
à leur adoption en font un outil qu'il est primordial de moderniser.
Toute la performance relative à l'évaluation des candidats passe
inéluctablement par la modernisation de ceux-ci.
B. Vers une nouvelle dynamique de choix des
critères de sélection des offres : une évaluation des
candidats affinée et performante
40. Une évaluation performante des candidats passe
nécessairement par une analyse et une définition fonctionnelle
des besoins de l'acheteur (1.), débouchant sur l'adoption de
critères de sélection fonctionnels (2.).
1. L'analyse fonctionnelle des besoins, première
étape d'une nouvelle dynamique de choix des critères de
sélection.
41. Définition de l'analyse fonctionnelle des
besoins. L'analyse fonctionnelle s'entend comme un
procédé substituable de définition des besoins pour
l'acheteur public. A l'inverse d'autres procédés cette analyse se
fonde sur la distinction entre la fonction du besoin d'une part, et le produit,
le service, l'outil acheté de l'autre53. En d'autres
termes lors de sa pratique on ne se fonde plus sur une solution
particulière, d'outils adapté ou de service précis, on se
fonde uniquement sur un (ou plusieurs) besoin clair. A titre d'exemple une
collectivité qui souhaite agrandir sa visibilité ne va pas
réfléchir en terme d'outil, comme un site internet, une
application, mais va se réfléchir en terme de besoins, lesquels
seront pour ce cas précis de se faire connaître du grand public,
d'adopter une identité visuelle, d'être visible par tous, de
communiquer sur ses actions etc.
L'analyse fonctionnelle peut aussi s'entendre dans le sens
contraire. Dans cette hypothèse la collectivité possède
déjà un outil qu'elle souhaite conserver -une application mobile
à titre d'exemple- et va utiliser la méthode de l'analyse
fonctionnelle pour l'améliorer, la faire évoluer en fonction des
besoins.
53 Déterminer le juste besoin en s'appuyant sur une
analyse fonctionnelle et une analyse de la valeur par Ludovic Vigreux, 02
février 2017 n°52 de la Lettre des Marchés Publics et de la
commande publique, paragraphe 5.
42
Chapitre premier Ð Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
Reste alors aux différents candidats puis au(x)
cocontractant(s) de définir une méthode, une solution, pour
remplir ces besoins.
Issue du domaine privé l'analyse fonctionnelle commence
à s'imposer de plus en plus au sein de la commande publique. Le constat
initial relevait que les acheteurs avaient tendance lors de la passation de
leurs contrats à se focaliser non seulement sur un critère
économique prépondérant mais également sur des
produits ou solutions déjà testés et maitrisés par
leurs services, sur leurs préférences. A défauts les
acheteurs ne se concentraient plus suffisamment ni sur leurs besoins, ni sur la
qualité, ni sur la quantité optimale, ni sur la fréquence
d'utilisation ou de remplacement de ces produits ou méthodes. Ce constat
amer pour les collectivités relevait également une source de
surcout pour les services, alors que la volonté de leur démarche
-faussée- visait à une réduction des
couts54.
42. Les avantages de l'analyse fonctionnelle.
Les avantages de l'analyse fonctionnelle sont multiples. Dans un
premier temps elle permet de replacer l'acheteur au coeur même de la
définition de ses besoins. Elle permet une remise en
question constante de l'acheteur qui à chaque renouvellement de
marché doit réfléchir à nouveau sur toute la
nécessité de son marché, sur les besoins -qui
évoluent- auxquels il faut apporter une réponse etcÉ En
restreignant l'achat sur le juste besoin l'acheteur -en plus d'obtenir un
résultat qui répond entièrement à ses attentes-
limite également la « sur-qualité » 55 des
solutions proposées qui ont fatalement un coût plus
élevé. L'enjeu est de taille, en ne se bornant plus à une
approche cent pour cent budgétaire de l'achat, des économies sont
potentiellement réalisables, ainsi qu'une meilleure satisfaction non
seulement de l'acheteur mais aussi de l'utilisateur final.
De même l'analyse fonctionnelle permet un contrôle
des risques plus performant. En considérant un risque potentiel dans
l'exécution du marché
54 Pour ce paragraphe voir l'article Déterminer le
juste besoin en s'appuyant sur une analyse fonctionnelle et une analyse de la
valeur par Ludovic Vigreux, 02 février 2017 n°52 de la Lettre des
Marchés Publics et de la commande publique, paragraphe 1.
55 Retour d'expérience : l'analyse fonctionnelle dans
les achats publics par Cédric Imache 02 décembre 2016,
www.acheteurs-publics.com
http://www.acheteurs-publics.com/actualite-des-acheteurs-publics/retourdexperiencelanalysefonctionnelledanslesachatspublics
43
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
l'acheteur a la possibilité de le rattacher à un
besoin. Les risques étant alors assimilables à des besoins le
candidat devra y apporter une réponse au même titre que n'importe
quel besoin, en cela cette pratique permet une meilleure gestion et une
meilleure maitrise des risques56. Toutefois cela n'est
valable que si l'acheteur, de la même façon qu'il doit
définir de manière la plus efficace ses besoins, défini
précisément l'ensemble des risques.
Enfin le dernier avantage notable à recourir à
la pratique de l'analyse fonctionnelle est la consécration de
l'innovation. En effet par cette démarche l'acheteur n'attend pas du
candidat une solution, un outil ou un produit précis et défini.
En ne bornant pas le futur cocontractant à quelque chose d'intangible
celui-ci a un champ d'action et de réflexion bien plus vaste. Même
si le candidat doit répondre parfaitement aux exigences et aux besoins
fournis, celui-dispose d'une certaine liberté quand à la
définition de sa réponse. Il aura alors tout le loisir de se
consacrer à sa vision personnelle de la réponse au besoin, par
ses propres moyens et ses propres techniques à l'inverse de l'approche
basique où le candidat -s'il espère obtenir le contrat- doit se
conformer à une demande expresse de l'acheteur qui n'est pas
nécessairement optimale. Cet avantage réside dans le fait que les
services de commande publique ne sont pas nécessairement au fait de
l'actualité et des nouveautés « techniques » qui
existent sur le marché. En faisant confiance au secteur privé
l'acheteur obtient certaines garanties. A titre d'exemple le caractère
« environnemental » est quelque chose d'assez peu maitrisé des
services alors qu'ils doivent pourtant l'évaluer dans les offres En
définissant parfaitement ce besoin ils s'assurent d'obtenir une
réponse précise qui jusque là leur était inconnue,
et qui peut s'apparenter à de l'innovation. Par des produits ou services
de substitution l'analyse fonctionnelle garanti l'achat innovant et
performant57.
43. Cette approche de la définition
des besoins par l'analyse fonctionnelle
permet donc à l'acheteur de choisir des critères
de sélection fonctionnels et innovants, et, en ce sens, garantie une
évaluation plus performante des candidats.
56 Idem
57 Déterminer le juste besoin en s'appuyant sur une
analyse fonctionnelle et une analyse de la valeur par Ludovic Vigreux, 02
février 2017 n°52 de la Lettre des Marchés Publics et de la
commande publique, paragraphe 5.
44
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
2. De l'analyse fonctionnelle des besoins à
l'adoption de critères fonctionnels de sélection, la
consécration de l'innovation et de la performance lors de la passation
de contrats publics
44. Pluralité des critères fonctionnels.
Il est aujourd'hui possible de
concevoir les contrats publics comme vecteur du
développement durable, de l'innovation et d'y intégrer des enjeux
tant sociaux qu'environnementaux58. De par le taux que
représentent les contrats publics dans le PIB européen (proche de
18%) et de par la volonté de la stratégie Europe 2020, la France
-comme les autres états membres de l'UE- a bien intégré la
nécessité de faire de ces contrats des acteurs à part
entière de l'innovation, du respect de l'environnement et de la justice
sociale59.
Dans cette optique progressiste, volontariste et humaniste, il
est alors nécessaire que les cocontractants de l'administration aient
leur part de responsabilité dans l'exécution des contrats
publics. Tout l'enjeu pour les acheteurs est donc d'évaluer les
candidats sur leur capacité à innover, à respecter
l'environnement et les enjeux sociaux. Cette volonté forte passe donc
logiquement par une évaluation préalable des futurs
cocontractants de l'administration.
Les objectifs sont multiples, dans un premier temps il est
primordial d'évaluer les candidats sur leur faculté à
innover. L'acheteur va donc rechercher chez les candidats leur capacité
à trouver de nouvelles solutions, de nouvelles réponses ou de
nouvelles méthodes, le tout dans le but d'obtenir une meilleure
satisfaction, un délai d'exécution plus rapide et -ou- un
processus moins cher. Autrement dit, l'acheteur va évaluer les candidats
sur leur capacité à être performant, la performance globale
étant l'aboutissement recherché. Dans un second temps l'acheteur
doit évaluer les candidats sur leur faculté à devenir des
acteurs du respect de l'environnement et des enjeux sociaux. Cette aptitude
peut s'apparenter à de l'innovation, et la démarche finale
consiste à sélectionner le candidat ayant la réponse de
performance énergétique, sociale ou environnementale la plus
élevée60.
58 Pour un management performant de l'exécution des
marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014,
CCI de Paris page 6
http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf
59 Idem.
60 La performance et les contrats de la commande publique,
mémoire par Niels Bernadini, 2014. Deuxième partie, chapitre 1 :
La recherche de la performance environnementale dans les contrats de la
commande publique : le contrat de performance énergétique P68
45
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
A ce titre nous pouvons affirmer que l'évaluation entre
au service de la performance.
Cette évaluation ambitieuse repose à n'en pas
douter sur des critères de sélection correctement
déterminés. Outre le fait que ce genre de critères soit
autorisé par le décret61 -nous l'avons vu
précédemment- leur adoption par l'acheteur se fonde sur une base
concrète correctement déterminée. Ainsi le sourcing
et l'analyse fonctionnelle des besoins sont les points clefs
préalable à la définition du besoin et de l'adoption des
critères de sélection. Ces deux outils restent donc à n'en
pas douter au service de l'évaluation des candidats, et donc à
l'évaluation préalable du cocontractant de l'administration.
45. La pertinence des variantes. Dans
l'hypothèse où un acheteur se retrouverait dans la situation
actuelle et désirerait inclure de la performance -au sens large- au sein
ses contrats publics par l'adoption de critères relatifs à
l'innovation, le social ou la protection de l'environnement, nous ne pourrions
conseiller à titre de complément que d'autoriser -ou d'imposer-
des variantes. Telle est d'ailleurs la volonté de la
directive62 marchés publics qui précise en son article
48 qu'il est nécessaire d'encourager les pouvoirs adjudicateurs à
recourir aux variantes le plus souvent possible au regard de l'importance que
revêt l'innovation63. En effet en autorisant la variante lors
de la passation d'un contrat public l'acheteur permet au candidat de
présenter en parallèle de son offre de base une seconde offre
répondant aux mêmes exigences mais présentant une
alternative. Précisées à l'article 58 du
décret64 ces variantes sont un moyen supplémentaire de
favoriser l'innovation et le savoir faire des candidats tout en assurant une
évaluation performante de ceux-ci. Par ces différentes pratiques
il est alors possible de remettre en relation les besoins des pouvoirs publics
avec l'offre des start-up et des entreprises innovantes65.
61 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62.
62 Directive 2014/24/UE du parlement européen et du
conseil en date du 26 février 2014 sur la passation des marchés
publics. Publiée au JOUE le 28 mars 2014.
63 Directive 2014/24/UE, article 48.
64 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 58.
65 Oui, les acheteurs publics ont le droit de rencontrer des
fournisseurs !, article par Sébastien Taupiac en date du 10 mai 2016.
http://www.weka.fr/actualite/achats/article/oui-les-acheteurs-publics-ont-le-droit-de-rencontrer-des-fournisseurs-37822/
46
Chapitre premier - Une évaluation
prématurée mais avantageuse des opérateurs privés
en amont de la publication
46. Bilan chiffré du phénomène.
Cette démarche que nous venons de décrire ne date pas
d'hier et était une volonté forte de
l'Administration66 visant à la modernisation de l'achat
public. Les résultats à ce titre sont plutôt encourageant
puisqu'en 2009 seul 1,9% des contrats supérieurs à 90.000€
comportaient une clause sociale, contre 6,1% en 2013. De même nous
passons de 2,6% des contrats publics supérieurs à 90.000€
comportant une clause environnementale en 2009 à 6,7% en
201367.
Malgré ces chiffres qui peuvent sembler relativement
faible il convient tout de même de souligner et de féliciter la
progression de cette démarche ambitieuse qui, nous l'espérons,
tendra à se démocratiser ces prochaines années.
47. Conclusion de chapitre. A titre de
propos conclusifs de ce chapitre nous souhaitons faire comprendre aux
acheteurs que l'évaluation est un facteur de performance. A ce stade de
la procédure il n'est pas encore question d'évaluer le
cocontractant ou les candidats, mais de mettre en place un système, une
dynamique d'évaluation qui sera la clef de la réussite. Nous
venons d'étudier les possibilités d'évaluation avant la
publication du marché, il nous faut désormais nous consacrer
à l'évaluation des candidats post-publication (c.f. Chapitre
second), qui nous permettra d'enchainer ultérieurement sur
l'évaluation concrète du cocontractant de l'administration
(c.f. Seconde partie).
66 Pour un management performant de l'exécution des
marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014,
CCI de Paris page 7
http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf
67 Direction des affaires juridiques, la lettre de l'OEAP
avril 2015 n°32 V2, spéciale recensement 2013.
https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publics/oeap/publications/lettre/
2015/lettre32.pdf
47
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du
contrat
CHAPITRE SECOND - UNE CONSTANTE EVALUATION DES CANDIDATS, DE
LA RECEPTION DES OFFRES A LA CONCLUSION DU
CONTRAT
48. Introduction. Si une évaluation
des candidats en amont de la publication de l'offre a été
démontrée comme un facteur de performance pour l'Administration,
l'évaluation la plus importante et la plus encadrée intervient
lors de la réception des candidatures et des offres. En effet tout
l'enjeu pour l'acheteur à ce stade de la procédure va être
de déterminer quel ce sera, au regard de son contrat, la meilleure offre
proposée par le meilleur candidat.
Il sera donc nécessaire lors de ce chapitre d'examiner
dans un premier temps l'évaluation qu'opérera l'administration en
vue d'attribuer son contrat au meilleur candidat (I). Nous pourrons alors
poursuivre notre devoir en étudiant sous un angle nouveau l'application
de la négociation (II).
I - Une évaluation obligatoire en vue de
l'attribution du contrat au candidat présentant l'offre la plus
économiquement avantageuse
49. Cela nous permettra de déterminer non seulement
l'évaluation objective des candidats au regard des exigences et du
besoin de l'administration (A.), mais également l'enjeux de la
négociation, puisque cette évaluation pourrait ne pas suffire
à une adéquation optimale entre besoin de l'administration et
offre du candidat (B.).
48
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
A. L'évaluation objective des candidats au
regard des exigences et du besoin de l'administration
50. Il sera logiquement nécessaire d'étudier
ici non seulement l'évaluation des candidatures que doit
opérer l'acheteur (1.) mais également l'évaluation des
offres, postérieure, qui déterminera le cocontractant de
l'Administration (2.).
1. L'évaluation des candidatures : premier pas dans
l'attribution du contrat
51. L'examen des candidatures. Rappelons,
dans un premier temps, qu'hormis l'exception prévue à l'article
68 du décret68 l'examen des candidatures intervient en amont
de l'évaluation des offres. Cette démarche, obligatoire, que nous
pouvons qualifier de phase d'amorce, a pour but de vérifier non
seulement que les différentes candidatures ont bien été
reçues dans les délais impartis69, que les
différents candidats satisfassent aux conditions de
participation70, mais également qu'ils ne font l'objet
d'aucune interdiction de soumissionner71.
Selon le type de marché, qu'il soit par exemple un
marché public de défense ou de sécurité, ou selon
si l'Administration n'a décidé de recevoir qu'un nombre restreint
de candidats admis à participer à la candidature, ces
différents types de contrôles peuvent s'effectuer de
différentes façons, qu'il s'agisse des modalités de
contrôle, ou du moment même où cette évaluation
intervient72.
Concernant le respect des délais l'article 43 du
décret de 2016 précise que les candidatures et offres
reçues hors délais sont éliminées 73 .
N'étant alors pas considérées comme des offres
irrégulières les offres ou candidatures rendues hors
délai, une régularisation est impossible. Pèse alors sur
l'opérateur économique qui se porte candidat une réelle
obligation de respect de ces délais qui, si dépassés,
68 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 68.
69 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 43.
70 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux
marchés publics, article 51
71 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux
marchés publics, articles 45 et 48.
72 Direction des affaires juridiques des ministères
économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux
autorités concédantes, fiche technique Examen des candidatures en
date du 09/12/2016 Introduction paragraphe 5.
https://www.economie.gouv.fr/daj/examen-candidatures-2016
73 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 43.
49
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
entraineront une élimination et un rejet de son offre.
Nous pourrions d'ailleurs nous questionner sur cette fatalité et cette
irrégularisation de ces offres. Mais au regard de
l'égalité de traitement des candidats74 et du
manque de sérieux qui découlerait de ces offres tardives, il ne
nous semble pas opportun de revenir sur cette réglementation. En effet,
que penser d'une offre remise en retard qui, nécessairement, aura
été mieux préparée qu'une autre ?
L'égalité de traitement des candidats serait partiellement
violée. De même, que penser d'un candidat à un
marché public, qui doit prouver à l'acheteur son sérieux
et son professionnalisme, incapable de respect le premier délai imparti
? Au regard de ces arguments cette élimination des candidatures et des
offres semble tout à fait logique et se justifie pleinement. Ce respect
du délai permet donc une première évaluation des candidats
et du futur cocontractant, en éliminant d'office ceux incapables de
respecter la première obligation posée par l'Administration.
Sont tout de même prévus deux cas de prolongation
du délai de réception des offre, notamment lorsqu'un
complément d'informations demandé par en temps et heure par un
candidat n'a pas été fourni dans un certain délai, et
lorsque des modifications importantes sont apportées aux
différents documents de consultation75.
Est également à noter qu'il est fait mention
à chaque fois d'un délai de réception des candidatures et
des offres, cela implique qu'est pris en compte uniquement le jour et l'heure
à laquelle l'Administration a reçu les documents, et non le jour
ou l'heure d'envoi. Cette subtilité est à capter pour les
différents candidats, et justifie l'utilisation, autant que possible, de
la procédure dématérialisée qui permet un envoi et
une réception quasi-simultanés.
Concernant la vérification des conditions de
participation des candidats celle-ci diffère non seulement selon le type
de marché mais également en fonction du caractère ouvert
ou restreint de la procédure. Dans tous les cas doit être
vérifié que le dossier de candidature ne soit pas incomplet, que
les minimas de capacité sont bien
74 Direction des affaires juridiques des ministères
économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux
autorités concédantes, fiche technique Examen des candidatures en
date du 09/12/2016 page 1 note de bas de page 3.
75 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 43.
50
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
atteints dans l'hypothèse où l'acheteur les a
expressément publiés ainsi que les capacités suffisantes
du candidat pour exécuter le marché76.
Dans un second temps est permis la vérification de
toutes les informations que le candidat a précisées dans son
dossier de candidature77. L'acheteur a donc la possibilité de
vérifier par tout moyen les informations transmises, y compris en
exigeant au candidat certains renseignements ou documents prévus par
l'arrêté du 29 mars 201678.
Cette phase est donc primordiale dans l'évaluation des
candidats, il est ici question de vérifier que le candidat a le profil
requis. Néanmoins cette phase ne doit conduire qu'à une
élimination si nécessaire des candidats qui ne correspondent pas
aux exigences logiques en accord avec l'objet du marché de
l'Administration, et ne doit pas être une pré-phase de
sélection qui conduirait implicitement un acheteur à
dégager des candidats « favoris » et des candidats qui lui
plaisent subjectivement moins.
52. Les interdictions de soumissionner. Enfin
l'acheteur doit procéder à la
vérification des interdictions de soumissionner lors de
l'examen des candidatures. Le décret dispose d'ailleurs qu'un candidat
« ou un soumissionnaire se trouve dans un cas d'interdiction de
soumissionner, ne satisfait pas aux conditions de participation fixées
par l'acheteur, produit, à l'appui de sa candidature, de faux
renseignements ou documents, ou ne peut produire dans le délai imparti
les documents justificatifs, les moyens de preuve, les compléments ou
explications requis par l'acheteur, sa candidature est déclarée
irrecevable et le candidat est éliminé
»79.
L'article 45 de l'ordonnance dresse une liste des
différentes interdictions de soumissionner, dans laquelle on retrouve
tant des condamnations pour des infractions au code pénal, que des
infractions au code général des impôts. Est
également un cas d'interdiction l'absence de souscription des
obligations en matière fiscale ou sociale ou la mise en procédure
de liquidation judiciaire80. Conformément
76 Voir à ce titre Direction des affaires juridiques
des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs
et aux autorités concédantes, fiche technique Examen des
candidatures en date du 09/12/2016 page 3.
77 Idem.
78 Arrêté du 29 mars 2016 fixant la liste des
renseignements et des documents pouvant être demandés aux
candidats aux marchés publics JORF n°0076 du 31 mars 2016 texte
n°103.
79 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 55.
80 Ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux
marchés publics, article 45.
51
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
à l'article 51 du décret le candidat aura
à produire comme preuve soit une déclaration sur l'honneur, soit
des certificats délivrés par les administrations et organismes
compétents, soit des pièces prévues au code du travail, ou
encore un extrait du registre pertinent, tel qu'un extrait K
bis81.
L'acheteur doit donc procéder à une
vérification des ces interdictions ainsi qu'à une
vérification des pièces produites par le candidat. Sans parler
ici de réelle évaluation du candidat, cela permet en outre
d'évincer tout candidat n'ayant pas la qualité nécessaire
pour travailler de concert avec l'Administration.
53. Cette phase d'examen des candidatures est donc une
première étape dans l'attribution du contrat et doit être
opérée conjointement avec l'examen des offres puisque, bien que
distinctes temporellement parlant, ces deux phases oeuvrent pour un même
objectif final, à savoir l'attribution du contrat au candidat ayant le
mieux répondu.
2. L'examen des offres : socle de l'attribution du
contrat.
54. La phase d'examen des offres est donc la phase qui doit
permettre de dégager l'offre la plus économiquement avantageuse,
sur laquelle se fonde l'acheteur pour attribuer le
marché82. Toutefois avant même
d'évaluer et classer les différentes offres des candidats,
l'acheteur doit vérifier la compatibilité et la
recevabilité de celles-ci.
55. La validité des offres. L'article
59 du décret dispose d'ailleurs que l'acheteur doit vérifier
que ces offres doivent bien être régulières, acceptables et
appropriées83. Tout en détaillant le
caractère de ces différents adjectifs, cet article prévoit
également les différents cas concrets lors desquels ces offres
seront régularisables ou non. L'intérêt ici pour l'acheteur
n'est pas seulement de « valider » ou non certaines offres, mais
également de permettre aux candidats qui auraient potentiellement commis
certaines erreurs, comme une faute de frappe à titre
81 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 51.
82 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62.
83 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 59.
52
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
d'exemple, de ne pas être nécessairement
écarté de la procédure. La volonté exprimée
ici est de contribuer à la continuité de la procédure -car
le rejet d'une offre peut être une perte de temps conséquente-
ainsi qu'éviter de défavoriser de nouveaux candidats, encore peu
habitués à la passation de contrats publics. Toutefois ces cas de
régularisation restent exception, et ne peuvent avoir pour effet
« de modifier des caractéristiques substantielles des offres
»84.
56. L'examen des offres. Une fois cette
vérification opérée, qui peut
prendre plus ou moins de temps en fonction du nombre de
participants et de la complexité des offres et du marché, «
les offres régulières, acceptables et appropriées
(É) sont classées par ordre décroissant en appliquant les
critères d'attribution »85. Cela signifie que
l'acheteur va devoir évaluer les différentes offres au regard des
critères d'attribution qu'il a préalablement
déterminé. Cette détermination des critères renvoi
à notre première partie sur l'adoption de critères
fonctionnels, puisqu'il va falloir évaluer les candidats en fonction de
ces critères, il est tant nécessaire de définir son besoin
de manière optimale que de choisir les critères les plus
favorables.
Tout l'art, et tout l'enjeux de l'évaluation des
candidats s'opèrent lors de cette phase d'examen des offres. C'est
généralement lors de cette évaluation que l'acheteur se
rend compte de la mauvaise adéquation entre son besoin, ses
critères d'attribution et son cahier des charges. Nombreux sont les
acheteurs qui, à la lecture des différentes offres, comprennent
-trop tard- qu'ils ont échoué lors d'une des étapes de la
procédure. Face à ce constat plusieurs choix s'offrent à
l'Administration, mais dans tous les cas cela ne peut mener qu'à deux
conclusions : soit on conclu un marché qui au mieux ne sera pas optimal,
au pire sera désavantageux, soit la procédure est
relancée, au frais de l'acheteur, qui aura perdu du temps et de
l'argent. Cela démontre bien l'intérêt que l'acheteur doit
porter à la passation de ses contrats et aux différentes phases
préalables à la publication.
Nous ne détaillerons pas ici l'ensemble des
modalités de l'examen des offres - notre mémoire étant
justement à destination des acheteurs qui connaissent ses
différentes règles- mais nous mettons tout de même l'accent
sur la nécessité
84 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 59.
85 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 62.
53
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
d'impartialité et d'objectivité que doit
revêtir cette phase. L'acheteur doit se borner à évaluer
les offres uniquement en fonction de ses critères d'attribution. Si nous
pointons cette phrase en particulier, alors qu'elle semble tout à fait
cohérente et logique, c'est parce que trop souvent des sentiments
propres ou des éléments extérieurs viennent perturber
l'objectivité requise. Sans que l'acheteur ne s'en rende
nécessairement compte, et sans que cela s'apparente dans les fait
à un réel délit de favoritisme et donc à un
avantage octroyé à l'acheteur, les exemples restent nombreux dans
ce domaine. Combien de fois un acheteur, parce qu'il a déjà eu
l'occasion de voir à l'oeuvre telle ou telle entreprise, ne s'est dit
intérieurement qu'il souhaiterait que cette entreprise obtienne le
marché ? Combien de fois un acheteur, au regard d'une offre papier mieux
présentée qu'une autre n'y a pas passé plus de temps et
n'a eu de l'affect pour celles-ci ? Toutes ces petites imprécisions
peuvent parfois couter cher, d'autant plus que jurisprudence a ouverte ces
dernières années de nombreuses voies de recours à
l'encontre des contrats publics.
57. Examen des offres et évaluation plus
détaillée des candidats. Reste que l'examen des offres
est une aubaine pour l'acheteur qui va réellement pouvoir évaluer
l'ensemble des candidats. Cette phase lui permet tant d'évaluer
l'expérience professionnelle, que les moyens humains, les moyens
techniques et financiers que les prestations proposées. Cette phase
reste donc incontournable, non seulement au regard de la loi mais
également au regard de l'attribution du marché. Si nous avions
à donner un conseil aux acheteurs à ce sujet nous les inciterons
à passer autant de temps que nécessaire sur cette phase, et
à faire intervenir un maximum de personnes qui auront chacune un regard
particulier et individuel pour chaque offre. Il est indispensable d'avoir une
pluralité d'avis, notamment ceux émanant des futurs
bénéficiaires du contrat, afin d'examiner les offres de
façon performante.
58. Toutefois il se peut qu'à l'issue des phases
d'examen des candidatures et des offres l'acheteur n'ai pas en sa possession
tous les outils nécessaire pour l'attribution de son contrat. Qu'il
s'agisse de zones d'ombres à éclaircir, de doutes à
préciser, ou de questions financières ou techniques à
discuter, l'acheteur a la possibilité de rencontrer les candidats en vue
d'une négociation.
54
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
B. L'enjeu de la négociation lors de la
passation de contrats publics
59. La négociation, reconnue et précisée
depuis les récentes réformes (1.), reste un outil
incontournable pour l'acheteur, bien que sa pratique reste encadrée
(2.).
1. La reconnaissance actuelle de la négociation
60. Définition de la négociation dans
les marchés publics. Arnaud CABANES et Amaury GESTA
définissent la négociation comme « un processus de
formation contractuelle par lequel l'acheteur public et les entreprises
candidates, discutent et accordent leurs volontés
»86. En ce point nous ne pouvons que leur donner raison,
tant leur définition synthétique déduit que la conclusion
d'un marché ne saurait seulement résulter d'une simple signature
contractuelle restrictivement basée sur un besoin associé
à une offre, mais résulte bien d'un échange, d'un dialogue
lors duquel les parties pourrons accorder leur volonté dans un objectif
final gagnant-gagnant où chacun trouve son avantage.
61. L'accroissement de l'importance accordée
à la négociation dans l'achat public. Dans une
volonté d'accorder plus de souplesse aux procédures et plus de
capacités opérationnelles à l'Administration les
récentes réformes sont venues éclaircir le recours
à la négociation. Cette nouvelle réglementation
présente au moins l'avantage de lever un voile obscur qui entourait la
négociation. Faute de précisions et face aux risques -entres
autres pénaux- que peuvent encourir les acheteurs, nombreux
étaient ceux qui se passaient tout simplement de recourir à la
négociation, estimant que le jeu n'en valait pas la chandelle.
Reste que la négociation est aujourd'hui un outil qui,
une fois l'accord de volonté trouvé entre les parties, permet
d'entrapercevoir de nouvelles solutions, plus utiles, plus efficaces mais plus
innovantes également.
86 LexisNexis Négociation dans les marchés
publics, fascicule 63-10 du 15 octobre 2016 page 4 par Arnaud Cabanes et Amaury
Gesta.
55
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
La négociation se retrouve désormais tant dans
les procédures adaptées87, dans les marchés
présentant une particularité liée à leur
objet88, ou à d'autres raisons techniques ou
économiques89, que dans les procédures
formalisées90, notamment le dialogue compétitif et la
procédure concurrentielle avec négociation91. On la
retrouve également lors de la procédure de concours via un
dialogue entre le candidat et un jury réuni pour l'occasion. Pouvant
être autorisée par les textes sans être pour autant
visée, l'ouverture du recours à la négociation tend
à un accroissement des procédures permettant la discussion, que
celle-ci soit qualifiée de dialogue ou de
négociation92.
D'un avis extérieur nous ne pouvons que
féliciter cette démarche puisqu'à notre sens un accord de
volonté basé sur un dialogue et une entente mutuelle est un pas
supplémentaire dans la performance de l'achat public. A ce titre nous
conseillons évidemment aux acheteurs d'y recourir autant que possible,
tant que cela est autorisé.
Aux acheteurs qui désireraient se lancer dans la
négociation comme à ceux qui y ont déjà recours,
nous ne pouvons qu'encourager la plus grande discrétion, la plus grande
transparence et surtout de garder un cadre formel et une distance
appropriée avec le candidat. Le dialogue et la négociation ne
doivent pas aboutir à une discussion sans limites qui dépasserait
le cadre légal. L'obligation d'égalité de traitement des
candidats nécessite que la négociation soit quasi-identique avec
chaque candidat. Si cette égalité peut se respecter
aisément lors d'une procédure où chaque action est
encadrée, elle est plus ardue lors d'une négociation. La
frontière entre simple négociation et violation des règles
de mises en concurrence est mince.
62. L'encadrement de la négociation.
Pour autant cette pratique n'est pas libre de droit et reste
encadrée, tout n'étant pas discutable et négociable. La
négociation ne peut d'ailleurs porter sur les exigences minimales ni sur
les critères
87 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 27.
88 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 28.
89 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 30
90 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 25.
91 Voir pour ce paragraphe La négociation dans la
commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique
Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics
n°7, juillet 2016, étude 5, page 1.
92 Idem.
56
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
d'attribution par exemple93. Bien que
consacrée dans les dernières réformes, la
négociation reste en quelques sortes une exception.
2. Un cadre favorable à l'essor de la
négociation qui reste néanmoins une exception par
définition
63. La permanence de l'exclusion de la
négociation dans la procédure d'appel d'offres. Notre
premier constat se base sur l'exclusion de la négociation lors de la
procédure d'appel d'offres. L'article 66 du décret défini
d'ailleurs cette procédure comme étant « la
procédure par laquelle l'acheteur choisit l'offre économiquement
la plus avantageuse, sans négociation, sur la base de critères
objectifs préalablement portés à la connaissance des
candidats »94. Cette exclusion nous donne un détail
intéressant puisque l'appel d'offre reste la « procédure
de principe de passation »95 de tout marché public, cela
signifie que les autres procédures de passation sont en quelques sortes
des dérogations à l'appel d'offre. La négociation
n'étant donc autorisée que lors de procédures «
dérogatoires », nous pourrions considérer qu'elle est
à ce titre elle même dérogatoire et revêt alors un
caractère exceptionnel. Il convient néanmoins de nuancer ces
propos par le fait qu'elle est aujourd'hui de plus en plus répandue,
mais le caractère exceptionnel lui, est toujours d'actualité.
64. La limitation de la négociation dans la
procédure négociée avec mise en concurrence. Cet
aspect exceptionnel se confirme également par le fait que la
procédure négociée avec mise en concurrence
préalable par exemple, n'est applicable qu'aux entités
adjudicatrices. De même la procédure concurrentielle avec
négociation n'est réservée qu'aux pouvoirs adjudicateurs.
La négociation est toujours soumise à condition.
65. Le caractère facultatif de la
négociation dans l'attribution des concessions. De
même nous pourrions citer à titre d'exemple le nouveau
caractère
93 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 73.
94 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 66.
95 La négociation dans la commande publique : Quelle
place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine
Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016,
étude 5, page 1.
57
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
facultatif de la négociation lors de la passation de
délégation de service public ou de concession. Autrefois
étape cruciale et déterminante la négociation était
obligatoire lors de la passation de ces contrats. Cela se justifiait entre
autre par le fait que ces contrats s'écoulent sur plusieurs
années, parfois plus d'une dizaine, et que le délégataire
supporte un réel risque d'exploitation. De ce fait il semblait tout
à fait logique que chaque candidat puisse avoir la possibilité de
dialoguer et de négocier avec l'autorité délégante.
Aujourd'hui cette obligation n'est plus et se limite à une simple
possibilité pour les autorités concédantes, qui «
peuvent organiser librement une négociation avec un ou plusieurs
soumissionnaires »96. Outre le fait que cette nouvelle
disposition contribue à faire de la négociation une étape
exceptionnelle on pourrait toutefois s'interroger sur l'impact qu'aurait un
refus de négocier lors de la passation d'une concession. Cela
entrainerait-il un recul du nombre de postulants, un gonflement des prix de la
part des candidats par précaution, ou bien même les deux
?97
Aux autorités concédantes nous ne pouvons que
conseiller d'inclure systématiquement la négociation même
lorsqu'elle reste facultative. En effet ne pas inclure de négociation ne
permettra qu'un gain de temps, dérisoire au regard des avantages que
peut représenter une négociation bien faite.
L'intérêt de la négociation en contrats publics est qu'elle
ne fait pas le jeu d'une partie ou de l'autre, les deux cocontractants peuvent
sortir gagnant d'une telle démarche. De même si la
négociation permet un système gagnant-gagnant entre
l'Administration et l'opérateur privé, alors cela inclura les
usagers et administrés dans le cercle des gagnants, puisqu'ils
profiteront directement ou indirectement des avantages de ce contrat bien
négocié.
66. Toutefois la négociation
mérite d'être approfondie car elle est, et
restera, un élément clef d'évaluation des
candidats et de performance.
96 Ordonnance n°2016-65 du 29 janvier 2016 relative aux
contrats de concession JORF n°0025 du 30 janvier 2016 texte n°66,
article 46.
97 Voir à ce titre La négociation dans la
commande publique : Quelle place ? Quel enjeu ? par Frédérique
Olivier et Clémentine Liet-Veaux. Contrats et marchés publics
n°7, juillet 2016, étude 5, page 3 : 2° De l'obligation
à la simple faculté dans les concessions.
58
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
II - L'application de la négociation dans
l'évaluation des candidats à un contrat public
67. La négociation est un atout majeur dans
l'évaluation des candidats et dans la sélection de
l'attributaire. S'il est nécessaire de revenir sur le cadre, stricte,
qui défini le recours à la négociation (A.), nous
conclurons par la nécessité de professionnaliser cette
négociation (B.), cela nous permettra, entre autre, de donner nos
ultimes conseils aux acheteurs.
A. Un cadre de recours à la négociation
strictement défini
68. De son caractère exceptionnel la
négociation tire sa propre limitation. Il sera dans cette partie de
distinguer ce cadre strict selon que la négociation ait lieu lors d'une
procédure adaptée (1.) ou lors d'une procédure
formalisée (2.).
1. La négociation dans les procédures non
formalisées
69. Il convient dans cette sous partie de distinguer entre le
recours à la négociation lors de la procédure
adaptée et la procédure négociée sans
publicité ni mise en concurrence préalable.
70. La négociation dans la procédure
adaptée. La procédure adaptée est la
procédure par opposition aux procédures formalisées.
L'article 27 du décret dispose d'ailleurs « lorsque la valeur
estimée du besoin est inférieure aux seuils de procédure
formalisée, l'acheteur peut recourir à une procédure
adaptée dont il détermine librement les modalités en
fonction de la nature et des caractéristiques du besoin à
satisfaire, du nombre ou de la localisation des opérateurs
économiques susceptibles d'y répondre ainsi que des circonstances
de l'achat »98. Outre le fait que cette procédure
n'est utilisable qu'en dessous des seuils fixés elle se
caractérise par la certaine liberté qu'elle offre aux acheteurs
qui décident la mettre en place.
98 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 27.
59
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
La place de la négociation au sein de cette
procédure est facultative, ce même article précise «
lorsque l'acheteur a prévu de négocier
»99, ce qui induit que ce choix revient à
l'acheteur qui est libre ou non de l'appliquer. S'il décide toutefois
d'y recourir celui-ci a obligation de le mentionner expressément dans
l'avis de publicité ou dans les documents de la consultation. Cependant
même en l'ayant indiqué l'acheteur peut virer de bord et
décider finalement d'attribuer « le marché public sur la
base des offres initiales sans négociation, à condition d'avoir
indiqué dans les documents de la consultation qu'il se réserve la
possibilité de le faire »100. S'ouvre donc trois
hypothèses intéressantes : soit l'acheteur n'a pas indiqué
qu'il souhaitait recourir à la négociation et ne peut, de ce
fait, l'appliquer par la suite, soit il a indiqué qu'il allait recourir
à la négociation sans émettre de réserve et sera
alors tenu de négocier, soit il indique recourir à la
négociation en émettant une réserve de manière
à pouvoir passer outre si besoin101. Ces
hypothèses démontrent une fois de plus la liberté
laissée aux acheteurs lors de cette procédure. Cette
liberté se justifie entre autre par le fait que les montants
étant assez faibles, les risques d'écarts sont moins
importants.
De même cette faculté de l'acheteur de se
réserver la possibilité de négocier entraine deux autres
conséquences : s'il admet la négociation sans réserves,
celui-ci sera tenu de négocier avec l'ensemble des candidats ayant remis
une offre. S'il émet une réserve il a alors la possibilité
de préciser que la négociation ne s'établira qu'avec un
nombre restreint de candidats, sur une base de critères
objectifs102.
Sans discuter des caractéristiques substantielles du
contrat comme son objet ou ses critères de sélection, la
négociation permet en outre de négocier tant la qualité du
marché, que son délai, sa quantité ou son prix, sans pour
autant qu'elle ne devienne une offre anormalement
basse103.
Cela permet donc d'ouvrir un véritable dialogue entre
les deux potentiels futurs cocontractants qui peut aboutir, nous l'avons vu,
à une solution bénéfique aux deux parties. Encore une fois
tout l'enjeu va être d'évaluer le futur cocontractant et
99 Idem.
100 Idem.
101 Voir à ce titre Direction des affaires juridiques
des ministères économique et financier, le conseil aux acheteurs
et aux autorités concédantes, fiches techniques Les
marchés à procédure adaptée et autres
marchés publics de faible montant en date du 29/04/2016. Page 14
paragraphe 5.
102 Idem, page 15 paragraphe 1.
103 Idem page 16 paragraphe 5.
60
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
éventuellement de déterminer une nouvelle ligne
directrice qui, lorsqu'elle est bien tracée, est un facteur de
performance.
71. La négociation dans la procédure
négociée sans publicité ni mise en concurrence.
La procédure négociée sans publicité ni
mise en concurrence préalable est également une procédure
adaptée puisqu'elle ne figure pas dans la liste restreinte des
procédures formalisées des articles 25 et 26 du
décret104. A l'inverse de la procédure
précédemment étudiée celle-ci peut s'appliquer quel
que soit le montant du marché, pour autant qu'elle satisfasse aux
exigences lourdes imposées à l'article 30105.
Certains marchés négociés sans publicité ni mise en
concurrence peuvent être propres aux pouvoirs adjudicateurs ou, à
l'inverse, ne peuvent être passés que par les entités
adjudicatrices. Sans développer ici les dizaines de cas permettant de
recourir à cette procédure, nous pouvons mettre l'accent sur deux
cas précis qui, à notre sens, sont les plus importants.
Il s'agit dans un premier temps d'une urgence
impérieuse qui, résultant de circonstances imprévisibles
pour l'acheteur et n'étant pas de son fait empêche le respect des
délais exigés par une procédure
formalisée106. Ce qui est intéressant ici est
le rôle que va endosser le juge dans la recherche du caractère
impérieux de l'urgence et du caractère imprévisible des
circonstances. Nul doute que face à un recours à l'encontre de
cette procédure le juge administratif aura tendance à
évaluer fermement ces critères.
Dans un second temps la procédure est admise si
à l'issue d'une procédure aucune offre n'a été
remise dans les délais impartis, ou si chaque candidature a
été déclarée irrecevable ou si chaque offre a
été déclarée
inappropriée107.
Ces deux cas démontrent bien le caractère
exceptionnel de cette procédure, qui doit être en quelque sorte
utilisée en dernier recours ou dans un cas extrêmement
précis. A l'inverse de la procédure adaptée « basique
», celle-ci s'illustre par le peu de liberté laissée
à l'acheteur, la procédure négociée sans
publicité ni mise en
104 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, articles 25 et 26.
105 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 30.
106 Idem, I 1°
107 Idem I 2°
61
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
concurrence se distingue par les règles lourdes qui
pèsent sur l'acheteur qui décide de la mettre en place.
Le Conseil d'Etat a d'ailleurs souvent eu l'occasion de se
prononcer sur le recours à cette procédure. Ainsi la seule
complexité d'un projet par exemple n'est pas déterminante dans la
reconnaissance des difficultés techniques108, de
même la marque des voitures vendues par une société ne
justifie en rien le recours à un opérateur économique
unique et déterminé109. Le juge administratif
a, à cet égard une vision restrictive des conditions de recours
à la procédure110.
Concernant la négociation en elle même elle ne
diffère guère de celle mise en place lors de la procédure
adaptée. Ceci étant dit l'acheteur peut inviter des entreprises
à candidater et les admettre à la négociation, ce qui
implique que l'acheteur s'est livré préalablement à une
première évaluation des potentiels candidats. La démarche
de cette procédure va de paire avec le sourcing étudié
dans la première partie de notre mémoire.
Au travers de ces différentes procédures nous
avons voulu illustrer la nécessité pour l'acheteur de replacer la
négociation au coeur même de l'évaluation des candidats,
dans un objectif de performance certain.
2. La négociation dans les procédures
formalisées
72. Trois procédures formalisées
permettent le recours la négociation,
chacune ayant ses propres spécificités. Le
dialogue compétitif dans un premier temps est une procédure
pouvant être mise en oeuvre tant par les pouvoirs adjudicateurs que par
les entités adjudicatrices, suivent la procédure concurrentielle
avec négociation et la procédure négociée avec mise
en concurrence préalable, respectivement mise en place uniquement par
les pouvoirs adjudicateurs et par les entités adjudicatrices.
108 CE 15 avril 1996 n°154986 Ghiulamila : JurisData
n°1996-040908
109 CAA Paris 13 mars 2007 n°04PA02781,
société automobiles Peugeot.
110 Pour ce paragraphe voir LexisNexis Négociation
dans les marchés publics, fascicule 63-10 du 15 octobre 2016 point 62
par Arnaud Cabanes et Amaury Gesta.
62
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
73. La négociation dans le dialogue
compétitif. Le dialogue compétitif se défini
comme la procédure dans laquelle « l'acheteur dialogue avec les
candidats admis à participer à la procédure en vue de
définir ou développer une ou plusieurs solutions de nature
à répondre à ses besoins et sur la base de laquelle ou
desquelles les participants au dialogue sont invités à remettre
une offre »111.
Sans qu'il soit nécessaire ici de détailler les
conditions de recours à cette procédure nous nous attarderons sur
l'intérêt et l'utilité du dialogue compétitif,
notamment vis à vis de l'évaluation des candidats. Cette
procédure se décline en trois étapes fondamentales qui
nous serviront de fil conducteur.
Le dialogue s'ouvre donc par la publication de l'avis de
marché au sein duquel l'acheteur a défini ses besoins et
exigences, éventuellement complété par un programme
fonctionnel ou un projet partiellement défini 112 .
Ce programme fonctionnel renvoie aux critères fonctionnels que nous
avons étudiés plus tôt, ce qui va laisser une certaine
place à l'inventivité et l'innovation des candidats. Cet avis a
pour objectif d'alerter les différents opérateurs
économiques en vue de recevoir un maximum de
candidatures113. A ce titre le dialogue ne peut s'ouvrir
qu'avec trois candidats au minimum114.
Le dialogue commence réellement une fois les candidats
sélectionnés. Vont alors être discutés et
débattus l'ensemble des aspects du marché et des moyens propres
à satisfaire les besoins exprimés de
l'acheteur115. L'idée ici est donc de faire
confiance au secteur privé et de discuter un maximum en plusieurs phases
afin de déterminer une solution, née conjointement du travail
réalisé par l'Administration et le candidat.
Une fois l'ensemble des solutions identifiées pour
répondre au besoin, le dialogue se termine, les candidats remettent
alors leur offre finale et la sélection peut s'opérer.
Ce qu'il ressort de cette procédure c'est la place
relativement importante qui est laissée au candidat pour apporter une
réponse aux besoins de l'acheteur. Sans
111 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 75.
112 Idem.
113 Procédures de passation des marchés publics
JCI contrats et marchés publics fasc. 64-10 par Stéphane
Braconnier et Emmanuel Kalnins, C) Dialogue compétitif, point 47.
114 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 47.
115 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 76 II.
63
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
revenir sur l'impact du secteur privé dans la
détermination des solutions de l'Administration ou sur l'importance de
l'innovation dans les contrats publics, une porte est laissée ouverte
à l'acheteur pour évaluer pleinement son futur cocontractant. Au
delà des réponses apportées, une panoplie de
détails va surgir de ces dialogues et va permettre à
l'Administration d'évaluer individuellement, puis en les comparant, les
différents candidats. Bien que le recours à cette
procédure soit limité elle peut tout de même être
facteur de performance tant la solution adoptée sera apte à
répondre aux besoins de l'acheteur.
74. La négociation dans la procédure
concurrentielle avec négociation. La procédure
concurrentielle avec négociation est la procédure par laquelle
« un pouvoir adjudicateur négocie les conditions du
marché public avec un ou plusieurs opérateurs économiques
autorisés à participer aux négociations
»116, celui-ci pouvant indiquer dans les documents de la
consultation « les exigences minimales que doivent respecter les
offres »117.
Les conditions de recours à cette procédure sont
les mêmes que pour celle du dialogue compétitif et sont
énumérées à l'article 25 du
décret118, bien qu'elle soit réservée
aux seuls pouvoirs adjudicateurs. La distinction entre dialogue
compétitif et procédure concurrentielle avec négociation
tient en ce que lors de cette dernière, l'acheteur n'a pas la
nécessité de faire définir et développer par le
candidat des solutions en vue de répondre à ses besoins. En
d'autre terme, à l'inverse du dialogue compétitif, la
négociation et le dialogue ne porteront pas lors de cette
procédure sur une solution à déterminer mais sur la
solution en elle même, préalablement définie par
l'acheteur. La négociation va alors porter sur le contenu des offres et
des documents de consultation, à l'exception des exigences minimales
formulées et des critères de
sélection119. La négociation est donc
restreinte et ne laisse que peu de place à l'innovation ou à
l'analyse fonctionnelle des besoins. Globalement, cette procédure reste
une solution de secours pour les acheteurs, et ne permet pas une
116 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 71.
117 Idem.
118 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 25.
119 Direction des affaires juridiques des ministères
économique et financier, le conseil aux acheteurs et aux
autorités concédantes, fiches techniques La procédure
concurrentielle avec négociation du 30 mars 2016, page 10 paragraphe
1.
64
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
négociation des plus abouties. Cependant, elle permet
tout de même à l'acheteur d'évaluer son futur cocontractant
sur une base de critères objectifs.
75. La négociation dans la procédure
négociée avec mise en concurrence préalable. La
procédure négociée avec mise en concurrence
préalable est quant à elle « la procédure par
laquelle une entité adjudicatrice négocie les conditions du
marché public avec un ou plusieurs opérateurs économiques
autorisés à participer aux négociations
»120.
Réservée aux seules entités
adjudicatrices, cette procédure se distingue en ce que sa mise en oeuvre
reste assez libre. Alors que les pouvoirs adjudicateurs sont restreints aux
conditions de l'article 25121 pour mettre en place un dialogue
compétitif ou une procédure concurrentielle avec
négociation, l'article 26122 permet à ces
entités de choisir librement entre appel d'offre, dialogue
compétitif ou procédure négociée avec mise en
concurrence préalable, dès lors que les seuils européens
sont dépassés123. Cela se justifie notamment par la
complexité que revêtent les contrats publics passés par ces
entités.
Au delà de cette distinction la négociation au
sein de cette procédure reste relativement la même que la
négociation de la procédure concurrentielle. Sans être une
négociation extrêmement poussée elle reste toutefois une
négociation à part entière, bénéfique pour
l'acheteur comme l'opérateur.
76. Au delà de ces différents cas de
négociation, qu'il s'agisse de procédures formalisées
ou non, nous souhaitons attirer l'attention des acheteurs sur la
négociation en elle même, son contenu et les risques qui s'y
affèrent. Si notre position au regard de la négociation reste
positive et que nous ne pouvons qu'encourager la négociation dans tous
ses états, nous mettons l'accent sur la nécessaire
professionnalisation de la négociation, indispensable à notre
sens.
120 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 74.
121 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 25.
122 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 26.
123 LexisNexis Négociation dans les marchés
publics, fascicule 63-10 du 15 octobre 2016 page 24 par Arnaud Cabanes et
Amaury Gesta.
65
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
B. La professionnalisation de la
négociation, entre sécurité juridique et
bénéfice direct
77. La professionnalisation de la négociation s'entend
comme une négociation faite par un professionnel. Certes
vulgarisée cette phrase tend à faire comprendre que la
négociation poursuit des objectifs précis qui, s'ils sont
réalisés, seront bénéfiques tant à
l'acheteur qu'au titulaire du contrat. Au delà d'être un simple
facteur de performance la professionnalisation de la négociation a
également pour vocation de sécuriser juridiquement ce processus
lors duquel des écarts sont facilement constatables. Pour comprendre
l'enjeu et la tendance actuelle qui pèse sur la négociation il
nous est nécessaire d'apporter dans un premier temps quelques
éclaircissements sur la négociation dans la sphère
administrative française (1.), avant de réellement poursuivre et
de donner nos propres préconisations concernant la négociation en
tant qu'outil d'évaluation des candidats (2.).
1. La négociation au sein de la sphère
administrative française
78. La négociation est et restera, quelle qu'elle
soit, une forme de discussion en vue d'aboutir à une solution
convenant aux deux parties. Il s'agit alors d'un savant mélange entre
échange, discussion et manipulation qui bien souvent doit s'allier d'une
qualité oratoire, d'une préparation mentale et d'une
argumentation développée. En ces termes nous pouvons comprendre
qu'elle puisse revêtir une certaine difficulté pour les
acheteurs.
79. L'absence de formation des acheteurs. A
n'en pas douter l'un des premiers obstacles que l'Administration
française connaisse aujourd'hui réside dans le fait que ses
agents ainsi que ses élus ne sont globalement pas formés à
la pratique de la négociation. Pas plus qu'un juriste en sortie
d'université la négociation dans le sens des affaires reste
propriété des économistes, issus d'écoles de
commerce, trop peu souvent voués à une carrière
administrative. La première difficulté va donc être de
confronter lors d'une négociation un agent, qu'il soit titulaire ou
contractuel, qui n'a pas nécessairement reçu la formation requise
contre un candidat, potentiellement
66
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
chef d'entreprise, éventuellement issu d'une grande
école, qui maitrise de par la nature de sa profession et son bagage
scolaire les ficelles de la négociation.
A cela s'ajoute la culture professionnelle des fonctionnaires
qui restent entourés de statuts, de cadres légaux stricts, de
mesures unilatérales qui les empêchent dans leur activité
de tous les jours d'exercer une certaine négociation. Bien que des
représentants syndicaux ou même des agents ayant la fibre «
négociatrice » puissent êtres voués à avoir un
certain talent dans cette discipline, il reste que dans le contexte global,
l'Administration n'est pas préparée à
négocier124.
80. L'épée de Damoclès du
contentieux. Un deuxième obstacle tient en ce qu'il existe une
réelle peur du contentieux au sein des services. Cela se comprend, d'un
point de vue extérieur, puisque l'agent qui va s'adonner à la
négociation devra respecter l'égalité de traitement des
candidats, alors que l'ensemble des candidats a une vision différente du
contrat. La question qui doit se poser est de savoir comment lier
l'égalité de traitement avec des points de vue divergents des
candidats qui n'auront pas le même intérêt pour telle ou
telle clause du contrat et qui mettront l'accent lors de la négociation
sur des sujets diamétralement distincts125. A cela
s'ajoute les cas d'ouverture des contentieux ces dernières années
qui font peser une réelle épée de Damoclès sur la
tête des acheteurs.
De ce fait la négociation aujourd'hui reste
relativement réduite, bien souvent cantonnée à un simple
courrier demandant une réduction des coûts au
candidat126. Au contraire, il faudrait voir la
négociation comme un atout beaucoup plus large, beaucoup plus global et
donc bien plus bénéfique.
81. Les risques congénitaux de la
négociation. Un troisième obstacle réside dans la
nature même de la négociation. Négocier c'est accepter de
perdre quelque chose en vue de gagner ailleurs. Or, l'agent ou l'élu qui
négocie, n'oublie jamais que son rôle est et restera toujours la
poursuite de l'intérêt général. Cette conception
peut être facteur de restriction de la négociation pour un
acheteur :
124 Voir à ce propos LexisNexis fascicule 63-11 :
Modalités de la négociation des contrats publics par Philippe
Delelis en date du 31 décembre 2015, point 6.
125 Idem, point 9.
126 La négociation dans la commande publique : Quelle
place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine
Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, point
27
67
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
jusqu'où puis-je me permettre de perdre pour gagner ?
Ce gain compense t'il assez la perte que je vais réaliser ? Cette perte
en elle même n'est elle pas une atteinte à l'intérêt
général ?
Tout cet aspect -que nous ne critiquons d'ailleurs pas, nous
restons favorable à une poursuite de l'intérêt
général de la part de l'Administration et de ses agents-peut
être un frein à la
négociation127.
82. Ce que nous tentons de démontrer ici n'est pas une
faille ou une faiblesse de l'Administration, mais un contexte global peu
favorable à la mise en place d'une négociation en bonne et due
forme. Ce contexte justifie qu'une professionnalisation de la
négociation soit réellement et impérativement mise en
place par les services. A ce titre nous allons tenter d'apporter notre point de
vue et nos conseils sur ce sujet.
2. Pour une mise en place performante de la
négociation
83. Nous détaillerons ici les indices et conseils qui
nous semblent les plus pertinent à donner à un service de
commande publique. Sans que cela paraisse présomptueux et sans remettre
en cause les compétences des décideurs nous nous permettons tout
de même d'exprimer notre point de vue.
84. Assurer la formation des acheteurs.
Concernant le cadre général de la négociation,
plusieurs mesures pourraient permettre à notre sens de maintenir un
contexte favorable à la négociation. Dans un premier temps nous
ne pouvons que conseiller aux responsables des services d'assurer la formation
de leurs agents. La formation tout au long de la vie et la multiplication des
diplômes universitaires sont aujourd'hui une excellente alternative pour
former des agents compétents sur des sujets qu'ils ne maitrisaient pas
nécessairement. Cette formation revêt une double finalité :
une formation économique dans un premier temps où les agents
seraient formés à la négociation mais aussi au management
puis une formation juridique
127 Voir pour ces deux paragraphes LexisNexis fascicule 63-11
: Modalités de la négociation des contrats publics par Philippe
Delelis en date du 31 décembre 2015, point 7.
68
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
dans un second temps où les agents seraient enfin
formés au cadre stricte de la législation concernant, entre
autre, la transparence, l'égalité de traitement des candidats, le
délit de favoritisme...
Cette double formation doit cependant être
accompagnée de deux outils. Le premier est l'adoption au sein du service
d'une charte de déontologie qui permettrait à chaque agent de
parfaire sa connaissance juridique et de trouver un certain cadre sur lequel il
puisse compter. Le second outil est le recours aux réunions
d'informations le plus souvent possible. En effet c'est au responsable et au
supérieur du service de poser le cadre, les limites de la
négociation. Sans parler ici de limite ou cadre juridique il semble
néanmoins impératif qu'un dialogue s'ouvre au sujet de la
négociation entre agents et responsables.
Ces différentes mesures ont pour but de créer,
au sein du service, une atmosphère, un contexte favorable au
développement de la négociation. Il est nécessaire que les
agents prennent conscience du réel pouvoir qu'ils ont ainsi que de leur
faculté à négocier. La prise de confiance revêt une
part primordiale dans la négociation.
85. Anticiper la négociation. Notre
seconde série de mesures concerne l'avant-négociation, toutes les
phases en amont de la rencontre.
Avant de penser à la négociation en tant que tel
il est indispensable que les services se couvrent juridiquement, à ce
titre il est nécessaire de prendre toute mesure utile afin
d'éviter tout contentieux. Qu'il s'agisse de mesures
préliminaires ou de simples précisions dans les documents de
consultation, tout doit être fait pour éviter le risque de
contentieux.
Pour cela il sera nécessaire de prévoir tous les
cas de figure possible, et nous encourageons les acheteurs non seulement
à pratiquer le sourcing pour se renseigner mais également de
dialoguer avec d'autres services qui ont déjà eu recours à
la négociation. Toute information est bonne à prendre et peut
permettre une réalisation optimale de la négociation.
Enfin il est recommandé aux acheteurs de
préparer leur négociation en amont. Il faudra alors se mettre
à la place du candidat afin d'anticiper ses réactions. Il faudra
également faire un constat de ses forces, de ses faiblesses afin
d'orienter le débat et le
69
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
dialogue dans un sens favorable.
86. Maîtriser la négociation. Notre
troisième et dernière série de mesures
concerne la négociation en elle même.
Quand bien même nous réalisons que cela puisse
être une perte de temps nous ne pouvons que conseiller aux acheteurs de
favoriser les débats oratoires128. Une bonne
négociation, qu'elle soit favorable à l'administration, au
candidat, ou au deux, ne peut se faire par écrans opposés.
De même nous préconisons une formalisation de la
procédure129. Il faut comprendre par là que
la transparence et l'égalité de traitement des candidats restent
les principes phares de la commande publique, à ce titre l'acheteur doit
prendre toute mesure utile en vue d'une procédure formelle, propre et
incontestable.
Ainsi chaque négociation en présentiel doit
être prévue, actée sur un créneau
réservé à cette négociation130.
A l'issu de ces rendez vous l'agent devra tracer par
écrit131 l'ensemble de la discussion et
réaliser des fiches récapitulatives. Au delà de permettre
une traçabilité favorable à la transparence et à la
diminution du risque de contentieux ces mesures permettraient en chaque tour de
négociation de préparer la nouvelle réunion. Lorsqu'un
nombre important de candidats participe à la négociation et que
ces négociations durent dans le temps, il est nécessaire que
l'acheteur ait en sa possession des fiches techniques et
récapitulatives. Cela lui permettra au pire de ne pas perdre de temps,
au mieux de préparer et rétablir si besoins les rapports de
force.
L'acheteur doit également utiliser tous les atouts
qu'il a en sa possession. Ainsi nous conseillons également d'utiliser
les clauses incitatives de performance ou les pénalités de retard
au sein des négociations. Si la première est favorable au
candidat, elle permettra d'obtenir gain de cause sur un autre point, la seconde
quand à elle désavantage le candidat, et doit presque être
perçue comme une sorte de chantage si le candidat tente d'imposer une
mesure trop extrême au regard du
128 LexisNexis fascicule 63-11 : Modalités de la
négociation des contrats publics par Philippe Delelis en date du 31
décembre 2015, point 18.
129 La négociation dans la commande publique : Quelle
place ? Quel enjeu ? par Frédérique Olivier et Clémentine
Liet-Veaux. Contrats et marchés publics n°7, juillet 2016, point
28.
130 LexisNexis fascicule 63-11 : Modalités de la
négociation des contrats publics par Philippe Delelis en date du 31
décembre 2015, point 18
131 Idem point 19.
Chapitre second - Une constante évaluation des
offres, de la réception des offres à la conclusion du contrat
contrat132.
87. Ces modestes conseils basés tant sur
l'étude théorique de la négociation que sa pratique
nous semblent pertinents en vue de développer puis d'effectuer la
négociation dans le meilleur cadre possible.
88. Conclusion de chapitre. Ainsi nous
venons de voir que la négociation n'est pas qu'un simple outil
permettant une potentielle réduction des prix, elle permet de rechercher
et de trouver l'équilibre au sein du contrat. Au delà même
de cet équilibre la négociation est fondamentale lors de
l'évaluation des candidats et permet une sélection
éclairée du futur cocontractant.
Si nous venons d'étudier très largement
l'évaluation des candidats à un contrat public et la performance
qui peut s'y raccrocher il nous reste désormais à étudier
l'évaluation en tant que telle du cocontractant de l'Administration.
70
132 Idem point 24.
71
Seconde partie - Une évaluation permanente du
cocontractant dès la conclusion du contrat
SECONDE PARTIE - UNE EVALUATION PERMANENTE DU COCONTRACTANT
DES LA CONCLUSION DU CONTRAT
89. Introduction. Si nous avons pu
démontrer que l'évaluation des candidats à un contrat
public pouvait être un facteur de performance pour les services de
commande publique, l'évaluation du cocontractant en lui même
durant l'exécution du contrat reste primordiale. S'il est
nécessaire dans un premier chapitre d'évoquer
l'intérêt de cette évaluation (Chapitre premier),
non seulement au regard de l'exécution actuelle du contrat mais
également au regard d'une dimension pluriannuelle de l'achat public,
nous consacrerons notre second chapitre aux modalités de cette
évaluation et aux outils susceptibles d'être mis en place
(Chapitre second).
L'objectif de cette deuxième partie de notre
mémoire va être de faire prendre conscience aux acheteurs que non
seulement l'évaluation du cocontractant est vitale pour le service
qu'ils dirigent et les contrats qu'ils concluent mais également qu'ils
possèdent en leur sein un catalogue d'outils en apparence simples
d'utilisation qui les épauleront dans cette démarche
d'évaluation du cocontractant tout au long du contrat.
73
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
CHAPITRE PREMIER - L'INTERET D'UNE EVALUATION
DU COCONTRACTANT LORS DE L'EXECUTION DU CONTRAT PUBLIC, UN BENEFICE BRUT
POUR L'ADMINISTRATION
90. Introduction. Il sera question dans ce
chapitre de démontrer que l'Administration a tout intérêt
à s'inclure dans une logique d'évaluation du cocontractant, tant
au regard de l'exécution en elle même (I) , qu'au regard des
intérêts futurs (II).
I - L'intérêt immédiat de
l'évaluation du cocontractant lors de
l'exécution du marché
91. Si cette évaluation permet dans un premier temps
à l'administration d'utiliser efficacement ses prérogatives
propres de puissance publique (A.), elle est également un facteur
d'efficacité de l'achat public (B.).
A. L'évaluation au coeur du recours aux
prérogatives de puissance publique
92. Si les contrats publics s'illustrent par le fait
qu'existe un certain déséquilibre du fait des pouvoirs
exorbitants de l'administration, il faut tout de même admettre que
l'exercice de ces pouvoirs n'est pas tout à fait libre, et que leur
bonne utilisation est subordonnée à une évaluation du
cocontractant. Il faudra toutefois distinguer entre les pouvoirs de
modification et les pouvoirs de direction et de contrôle (1.) ainsi que
les pouvoirs de sanction et de résiliation (2.).
74
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
1. Une bonne utilisation des pouvoirs de modification, de
direction et de contrôle subordonnée à une bonne
évaluation du cocontractant
93. La diversité des modes de modification du
contrat administratif. La modification d'un contrat public, qui est
soumise à certaines limites, peut être soit d'origine
unilatérale, c'est alors un pouvoir propre à l'Administration,
soit d'origine contractuelle, elle s'illustre alors par la passation d'un
avenant.
La modification unilatérale d'un contrat public permet
à l'acheteur « d'adapter le contrat à des
préoccupations d'intérêt général apparues
dans le cours de son exécution »133. Cette
modification a donc pour objectif de garantir l'efficacité et
l'intérêt général d'un contrat public.
L'intérêt général est d'ailleurs la seule
justification possible au recours à cette modification, qui ne peut
d'ailleurs porter sur les clauses financières134 et qui ne
peut bouleverser l'économie ou l'objet du contrat135.
La modification contractuelle s'exerce par la passation d'un
avenant en vue « de modifier les conditions initiales du contrat et
d'apporter une réponse ponctuelle à un souci d'exécution
du marché »136. La passation d'un avenant est
également soumise à condition mais reste l'un des moyens par
lequel l'administration et son cocontractant peuvent rechercher
l'équilibre au sein du contrat. La négociation y joue d'ailleurs
un rôle d'une extrême importance.
94. L'utilité de l'évaluation du
cocontractant dans la modification du contrat. Ce qu'il ressort de ces
deux hypothèses de modification est qu'un contrat public n'est pas
voué à rester le même de sa passation à son terme,
nombreuses sont les occasions d'y apporter une modification pour peu que la
nature, l'objet et les clauses financières soient respectés.
Néanmoins ces possibilités de modification doivent rester
exception et ne peuvent être facteur d'efficacité du contrat
public que dans l'hypothèse où elles sont adoptées de
manière idéale. Or cela requiert nécessairement que
l'acheteur soit au fait du contrat en cours d'exécution et qu'il se soit
livré à une bonne évaluation de son cocontractant, tant du
travail accompli que
133 JurisClasseur Administratif fascicule 638 Exécution
du marché, pouvoirs de l'Administration en date du 12 novembre 2008 par
Catherine Presbissy-Schnall, point 31.
134 Idem point 35.
135 Idem point 37.
136 Idem point 45.
75
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
des tarifs qu'il pratique. On ne peut penser qu'une bonne
modification d'un contrat public interviendrait sans évaluation
préalable et constante.
95. L'adéquation entre évaluation et
pouvoir de direction et de contrôle. C'est également le
cas lorsque l'acheteur souhaite utiliser son pouvoir de direction et de
contrôle qui lui permet de contrôler ou de diriger les
opérations d'exécution137. Ce pouvoir
s'illustre par les échanges et la communication entre cocontractant et
acheteur et peut se matérialiser sous la forme d'ordre de
service138.
Sans qu'il soit nécessaire ici de détailler
l'ensemble de la réglementation en vigueur nous mettons l'accent sur
l'adéquation ultime entre direction, contrôle et
évaluation. En effet l'un ne va pas sans les autres et nous ne pourrions
envisager une situation dans laquelle un ordre de service interviendrait sans
aucune évaluation de l'acheteur ou à l'inverse, un situation dans
laquelle une excellente évaluation ne pourrait aboutir à aucun
pouvoir de l'administration si la situation le justifiait.
96. Ces deux catégories de pouvoir -modification et
contrôle, direction- ne peuvent donc être le fruit que d'une
bonne évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat,
et en ce sens l'évaluation permet donc dans un premier temps à
l'administration d'user de ses prérogatives. Mais ce constat s'illustre
également au travers des pouvoirs de sanction et de résiliation
de l'administration.
2. La résiliation et la sanction, apanage de
l'Administration, finalités potentielles d'une évaluation du
cocontractant.
97. Évaluation et résiliation du
contrat. Le pouvoir de résiliation de l'administration
s'exerce sous deux formes, la résiliation unilatérale pour motif
d'intérêt général et la résiliation à
titre de sanction.
Le premier type de résiliation permet de mettre fin au
contrat avant l'exécution complète des prestations pour motif
d'intérêt général139. Le
deuxième est prononcé comme une sanction dès lors que le
cocontractant à adopter un
137 Idem point 69.
138 Idem point 73.
139 Idem point 10.
76
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
comportement gênant pour la bonne exécution du
marché et conduit à la fin des rapports contractuels tout en
entrainant des incidences financières
particulières140.
Ces deux résiliations se rejoignent sur le fait
qu'aucune clause à un contrat public ne peut prévoir le
renoncement de l'administration à ce pouvoir.
La résiliation est la prérogative de puissance
publique ultime de l'administration et de ce fait, elle est soumise au respect
de conditions strictes. Il apparaitrait alors fantaisiste de la part de
l'acheteur de se livrer à une résiliation sans avoir pu
évaluer son cocontractant. Sans se livrer à une bonne
évaluation tout au long du contrat l'Administration n'aura aucunement la
possibilité d'exercer cette prérogative et si toutefois elle se
le permettait nul doute que le juge entacherait cette décision de
nullité puisque, par nature, elle serait sans fondement.
98. Évaluation et pouvoir de sanction.
Le pouvoir de sanction de l'administration se distingue du pouvoir de
résiliation en ce qu'il concerne des manquements insuffisamment graves
pour justifier une résiliation. Ce pouvoir permet donc à
l'Administration d'infliger des sanctions de façon proportionnée
face à un manquement ou une faute du
cocontractant141. Certaines de ces sanctions ne peuvent
être prononcées en l'absence de clauses contractuelles, c'est par
exemple le cas des pénalités de
retard142.
Toujours est il que pour s'exercer ce pouvoir nécessite
une faute ou un manquement que l'Administration devra relever. Or, comment
relever une telle faute ou manquement si l'Administration n'use pas de son
droit de regard et d'évaluation sur le cocontractant ? Une fois de plus
l'utilisation de cette prérogative de puissance publique reste
subordonnée à une évaluation concrète du
cocontractant.
Nous venons de le démontrer l'Administration
possède en son sein un arsenal d'outils lui permettant d'exercer ces
prérogatives de puissance publique. Or l'évaluation du
cocontractant reste au coeur de l'utilisation de ces prérogatives
puisque, sans évaluation, soit l'Administration ne sera pas en mesure
des les utiliser, soit elle les utilisera de façon erronée,
risquant ainsi une condamnation par le juge.
140 Idem point 121.
141 Idem point 101.
142 Idem point 101.
77
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
Mais l'évaluation du cocontractant ne se limite pas
à l'utilisation de ces prérogatives, elle peut également
être un facteur d'efficacité de la commande publique.
B. Une exécution efficace du contrat par
l'évaluation du cocontractant
99. Il sera question ici de démontrer qu'une
évaluation du cocontractant tout au long de la vie du contrat public
peut être un facteur d'efficacité. Si cette évaluation peut
être un atout pour l'Administration (1.), elle l'est également
pour le cocontractant qui trouvera un intérêt à être
évalué par l'acheteur (2.).
1. L'évaluation du cocontractant au service de
l'Administration
100. Évaluation et efficacité de
l'achat. L'évaluation du cocontractant va être un
réel outil pour l'administration, qui va pouvoir s'assurer de
l'efficacité de son achat.
Si dans un premier temps l'évaluation peut conduire
à la vérification du service fait, le cocontractant qui est au
courant de cette évaluation ne peut qu'adopter une conduite plus
efficace, plus performante. En effet l'Administration devient de fait
l'employeur du cocontractant ce qui le contraint, comme n'importe quel
employé, à travailler bien, et travailler mieux.
L'évaluation en ce sens permet de faire prendre conscience aux
titulaires qu'ils sont réellement surveillés et que pèsent
sur eux des risques en cas de défaut d'exécution. Ce premier
constat est donc au service de l'Administration qui, en menant une politique
d'évaluation complète, s'assurera d'une exécution optimale
du contrat de la part de son cocontractant.
Toujours dans un objectif d'efficacité cette
évaluation couplée de clauses incitatives de performance, qui
permettent « d'améliorer les délais d'exécution,
de rechercher une meilleure qualité des prestations et de réduire
les coûts de production »143 permettra au cocontractant de
tenter par tout moyen de se distinguer et d'être plus performant. Cette
alliance récompense-évaluation est donc un facteur de performance
bien plus avantageux que l'alliance contrôle-sanction.
143 Décret n°2016-360 du 25 mars 2016 relatif aux
marchés publics, article 17.
78
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
101. Évaluation et gestion de
l'exécution. Dans un second temps l'évaluation va
permettre de rectifier et de corriger les écarts constatés. Dans
l'hypothèse où l'évaluation conclue à un constat
négatif, il sera toujours possible pour l'acheteur de faire pression sur
le titulaire par ses prérogatives de puissances publiques, ou tout du
moins corriger mécaniquement ces écarts. Nous l'avons
démontré, ces prérogatives ne sont possibles que par une
évaluation correcte du cocontractant.
Mais cette évaluation va également permettre de
gérer les accidents d'exécution144.
Effectivement en cas d'accident d'exécution deux choix s'offrent
à l'acheteur : soit il applique à la lettre les
pénalités qu'il a prévu et que le cocontractant a
accepté, soit il fait en sorte d'agir dans l'intérêt
général. Les pénalités, si elles sont trop lourdes
et trop importantes auront pour conséquences que le cocontractant
gonflera ses prix en fonction, pour s'assurer de ne pas se retrouver dans le
rouge. De même leur utilisation à tout va pourrait entrainer de
grave conséquences pour le titulaire qui, ne l'oublions pas, joue
également la survie de son entreprise par l'exécution d'un
contrat public.
Ce que permet une excellente évaluation tout au long du
contrat va être de prévenir et de gérer ces accidents, de
sorte qu'au lieu d'appliquer bêtement des pénalités
l'acheteur sera sans cesse dans l'anticipation, la recherche de solution, en
gardant à l'esprit la continuité du service public,
l'intérêt général, l'efficacité et la
performance de son achat145. En ce sens nous ne conseillons
évidemment pas aux acheteurs de supprimer les pénalités ou
de ne pas les appliquer, mais au contraire de jongler habilement entre tous ces
éléments pour trouver l'issue la plus favorable.
Enfin l'évaluation, lorsqu'elle aboutie à un
constat positif permet de mesurer l'étendue de la qualité de
l'achat. Cette qualité évaluée et réelle permet non
seulement de justifier cet achat, que ce soit au regard des supérieurs,
des politiques,
144 Pour un management performant de l'exécution des
marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014,
CCI de Paris page 18
http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf
145 Idem.
79
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
et aussi des contribuables, mais permet également une
valorisation du service commande publique dans son ensemble.
S'il est nécessaire de féliciter et
récompenser le titulaire lorsqu'il adopte une exécution
performante, il convient aussi de féliciter et récompenser le
service en charge du suivi de ce marché. Cette recherche de performance
par la récompense -et non par la sanction- ne peut se faire que par une
évaluation complète du cocontractant.
2. L'évaluation du cocontractant au service du
titulaire lui même
102. Il est nécessaire de comprendre ici que
l'évaluation du cocontractant n'est pas seulement un atout pour
l'Administration, mais également pour le cocontractant en lui
même.
103. Le dialogue entre l'Administration et
l'opérateur. Le premier bénéfice que tire le
cocontractant d'une bonne évaluation se matérialise autour de
l'ouverture d'un dialogue entre lui et l'acheteur. En effet si le titulaire est
mis au courant des modalités d'évaluation, et à admettre
que cette évaluation soit relativement bien faite, cela lui permettra de
faire remonter plus facilement ses intentions, ses problèmes ou ses
suggestions. Va donc s'ouvrir une phase de dialogue sur l'avancée de
l'exécution du contrat. Toute l'efficacité de l'exécution
va reposer sur ce dialogue puisque dans quelque situation de conflit que ce
soit, rien ne peut valoir une discussion en bonne et due forme, en vue de
dégager les solutions utiles qui s'imposent. Sans évaluation le
titulaire pourrait être amené à avancer dans un certain
flou, même si le cahier des charges lui dicte les prestations à
réaliser. Ce dialogue permet donc de construire une relation de
confiance et d'écoute mutuelle entre l'administration et son
cocontractant, dans un objectif d'efficacité et de performance.
104. La valorisation de l'opérateur.
Le deuxième atout d'une bonne évaluation du point de vue
du cocontractant se trouve dans la valorisation mise en place par les clauses
incitatives de performance. Nous l'avons démontré, le couplage
évaluation-valorisation l'incitera à trouver toute solution
performante. Or en
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
adoptant cette démarche le cocontractant s'assure deux
choses : premièrement un avantage financier prévu par les
clauses, et secondement une estimation positive de son travail par l'acheteur.
Ainsi en travaillant mieux et en étant mieux évalué le
cocontractant s'assure que l'Administration gardera une image positive de sa
prestation globale, ce qui pourrait le conduire à l'obtention de la
reconduction du marché ou de tout autre marché similaire.
105. Une meilleure gestion des risques. Le
troisième et dernier avantage d'une bonne évaluation pour le
cocontractant tient en la gestion des accidents d'exploitation expliquée
plus tôt. En effet si cette démarche d'évaluation peut
être bénéfique pour l'acheteur, elle le sera
également financièrement pour le titulaire qui n'aura pas
à subir systématiquement des pénalités de retard ou
des sanctions pécuniaires. Au-delà d'un simple avantage financier
cette conception lui permettra également de conserver de bonnes
relations avec l'acheteur, ce qui favorisera toujours un dialogue utile et
concluant.
106. Ainsi l'évaluation, lorsqu'elle se
révèle bien faite, constante et utile reste un facteur de
performance et d'efficacité qui profite à l'ensemble des acteurs
d'un contrat public. Toutefois si nous venons de démontrer son
utilité lors de l'exécution d'un contrat, elle revêt
également une importance cruciale pour l'avenir.
II - L'importance de l'évaluation du
cocontractant au terme du contrat public.
107. S'il nous semble nécessaire dans un premier de
revenir sur la tendance actuelle qu'il conviendrait de changer (A.), nous
démontrerons par la suite que l'évaluation du cocontractant reste
au coeur de la vision pluriannuelle de l'achat public (B.).
80
A. Une tendance actuelle néfaste à la vision
long terme de l'achat public
81
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
108. Cette partie nait du constat que les acheteurs dans leur
ensemble restent aujourd'hui trop figés sur la passation et
l'exécution du contrat et son intérêt économique
direct (1.), sans se rendre compte que l'évaluation du cocontractant est
un facteur de développement à moyen-long terme (2.).
1. Un constat simple : les acheteurs restent trop
centrés sur la vie de leur contrat et de son intérêt
économique direct, sans avoir la vision large qui s'impose
109. Ce constat, sans être une
généralité dépasse de loin la simple exception. La
tendance actuelle vise de la part des acheteurs à se focaliser sur une
vision à trop court terme. En effet les acheteurs consacrent la grande
majorité de leur temps autour de trois axes principaux.
110. Le « complexe de la
légalité ». Le premier concerne la passation des
contrats et la vérification de leur conformité au regard de la
loi. Cette attention particulière se justifie au regard des risques
encourus et de la peur que représente le risque de contentieux chez
certains acheteurs.
111. Le « complexe du
financement ». Le deuxième axe est la recherche du prix le
plus bas. Non pas du meilleur rapport/qualité prix mais
réellement du prix le plus bas. Cette conception erronée de
l'achat public ne reflète pas nécessairement la volonté
des acheteurs mais plutôt de leurs supérieurs, des
décideurs qui, au regard de la préservation des deniers publics,
s'emploient à mettre en place le critère de sélection du
prix aux environs de 80%, sans que cela ne concerne un simple marché de
fourniture. Cette volonté politique de toujours vouloir rabaisser les
prix impose aux agents d'y consacrer une part de leur temps non
négligeable, voir trop importante et surtout inadaptée au regard
de la performance recherchée.
112. Le « complexe de la saine exécution
». Le troisième et dernier axe concerne l'exécution
en elle même du contrat. Après avoir passé du temps sur
la
82
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
passation du contrat, sa conclusion et la recherche du prix le
plus bas l'agent doit encore vérifier, tout au long de la durée
de vie du contrat, son exécution.
113. L'oubli de l'après contrat. Ces
trois axes autours desquels se cristallise le volume horaire de chaque agent ne
permettent donc pas au service de se projeter. L'après contrat et
l'avenir sont clairement oubliés.
Cet oubli est dû à de multiples facteurs. Dans un
premier temps nous pourrions tenter de l'expliquer au regard des délais
extrêmement stricts à respecter pour chaque agent. Au nom de la
rentabilité et du rendement chaque agent doit sans cesse travailler plus
vite et une réelle obligation de célérité se met en
place dans les services. Cela implique que l'agent n'a pas
matériellement pas le temps de se consacrer à une vision
pluriannuelle de l'achat, et c'est également le cas de ses
supérieurs.
Ce manque de temps s'explique très facilement par le
manque d'effectifs au sein des services. Ces dernières années ont
connues une explosion de l'apparition des EPCI, des métropoles, des
communautés d'agglomération ou des communautés de
communes, chacune de ces entités reprenant peu à peu le flambeau
de la commande publique. Cette centralisation de l'achat public au profit de
structures plus grosses a potentiellement pu être un facteur de
réduction des couts, notamment par la mutualisation des achats, mais
s'est également accompagnée d'une diminution drastique des
effectifs. A cela s'ajoute le fait que les contrats publics eux, n'ont
absolument pas diminué et on assiste au contraire à une
augmentation de ceux-ci. Face à ce constat il est clair que les services
n'ont pas le temps nécessaire à se consacrer sur une vision futur
de la commande publique. Cependant il convient de nuancer ces propos par le
fait que les collectivités embauchent actuellement de plus en plus
d'agents spécialisés dans le droit des contrats publics, mais
force est de constater que les services n'avancent pas assez vite au regard des
exigences formulées.
Le dernier facteur qui explique l'absence de vision à
moyen-long terme de l'agent public est le renouvellement systématique
des agents. En effet dans la grande majorité des services de commande
publique les agents ne sont pas nécessairement titularisés et
conservent leur statut contractuel. De cette situation né un
turn-over
83
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
conséquent où les services achats et les
services commande publique se retrouvent totalement renouvelés en moins
de 10 ans. Cette réalité impacte nécessairement le fait
que les services, en général, n'accordent qu'une place
relativement limitée à l'avenir.
114. En cela la vision de la commande publique future reste
aujourd'hui restreinte dans une grande majorité de service. Faute de
temps, faute de moyen ou volonté politique divergente sont autant de
moyens que peuvent invoquer les agents des collectivités. Cependant,
l'évaluation des cocontractants reste un moyen de développement
valant pour l'avenir.
2. L'évaluation des cocontractants, facteur de
développement à moyen-long terme des services de commande
publique
115. Lorsqu'une évaluation est bien faite, elle permet
de tirer un ensemble d'enseignements et de conclusions qui sera toujours utile
pour l'Administration. En appréciant la valeur technique du
cocontractant, sa vitesse de réalisation, les failles qu'il a su
utiliser ou les erreurs qu'il a pu commettre, l'Administration s'évalue
elle-même.
116. L'évaluation : une quête de
perfectibilité. En effet une mauvaise valeur technique d'un
titulaire fera prendre conscience à l'acheteur que ses critères
de sélection n'étaient pas appropriés, une mauvaise
vitesse de réalisation par rapport aux estimations initiales lui fera
prendre conscience qu'il a sous-évalué la charge de travail, ou
qu'il a mal utilisé le système de pénalités de
retard. Les failles que le titulaire a pu utiliser contre l'acheteur illustre
la nécessité de la professionnalisation juridique des agents et
enfin les erreurs commises par le cocontractant relèvent bien souvent
d'un cahier des charges mal adapté.
En cela l'évaluation permet à l'Administration
de se remettre en permanence en question.
84
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
En effet une évaluation du cocontractant aboutissant
à un résultat positif permettra à l'acheteur de conserver
et d'améliorer les éléments qui ont su fonder cette
réussite. Il aura ainsi la possibilité pour l'avenir de se baser
sur une base solide qu'il pourra même transmettre aux futurs agents ou
aux autres services de commande publique. Ce traçage à
l'écrit de chaque réussite et de chaque élément des
évaluations positives ne pourra tendre qu'à faire progresser le
service dans son ensemble.
De même une évaluation aboutissant à un
résultat négatif fera ressortir les lacunes, les manquements et
les erreurs à ne plus commettre. Une fois encore il faudra alors tracer
par écrit l'ensemble de ces conclusions qui serviront de base pour le
travail futur des acheteurs. Tout est perfectible, tout peut être
corrigé et les services de commande publique, à l'instar de tout
autre service public ou privé peuvent prétendre à
évoluer et s'améliorer, pour peu qu'ils jouent le jeu
d'évaluer leurs cocontractants et l'ensemble de leurs oeuvres pour s'en
servir à l'avenir.
Voici la vision que nous avons souhaité mettre en
lumière dans cette partie alors que le contexte actuel n'y est
guère favorable. Il est désormais nécessaire
d'étudier en quoi l'évaluation du cocontractant est
réellement un outil propice pour le développement des services de
commande publique.
B. L'évaluation du cocontractant au coeur de
la vision pluriannuelle de l'achat public
117. Tout en revenant ici sur la nécessité plus
que l'utilité de la vision pluriannuelle de l'achat public, nous y
préciserons le rôle et l'impact de l'évaluation du
cocontractant, que ce soit lors de la programmation des achats (1.), ou lors de
la création de base de données statistiques à créer
et exploiter (2.).
1. La programmation des achats, outil de prévisions
pluriannuelles
118. Évaluation et programmation. La
pluriannualité de l'achat public s'entend comme la vision, à
moyen-long terme, de l'ensemble des opérations qu'il conviendra de
réaliser dans un futur plus ou moins proche. Avoir cette vision est
85
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
essentielle pour un service de commande publique puisqu'au
regard des échéances et des délais de passation des
contrats publics, certains actes d'achat ne peuvent attendre.
Considérons à titre d'exemple un marché de fournitures de
ramettes de papiers pour imprimantes, si aucune vision pluriannuelle de l'achat
public n'est adoptée, que ce passera t'il au terme de ce marché ?
Le service sera tout simplement dans l'incapacité de se fournir en
papier et les impressions en seront grandement affectées. Ne restera au
service comme seule solution de jouer avec la légalité et de
passer des avenants, ou d'invoquer inutilement l'urgence pour conclure un
nouveau marché plus rapidemment. Ce type d'exemple peut également
s'appliquer aux opérations de travaux, aux marchés de service de
nettoyage des locaux etc.
En ce sens la vision pluriannuelle de l'achat public est
indispensable, mais ne peut se limiter à une prévision d'achat
sans transmission d'expérience, ce que permet une bonne
évaluation du cocontractant. Une vision pluriannuelle permet donc
d'anticiper chaque acte d'achat, tout en transmettant le savoir
nécessaire aux générations futures d'agents.
119. L'intérêt de la programmation.
La programmation des achat se définie quand à elle comme
un outil qui repose sur « l'anticipation, la valorisation et
l'anticipation des besoins regroupés au sein de programmes
stratégiques d'acquisitions de fournitures, de services ou de travaux
»146, elle permet de « donner une
visibilité sur les actions qui devront être entreprises à
court ou moyen terme en fonction d'une part de la prévision des
ressources disponibles et d'autre part des besoins à satisfaire
»147.
La programmation permet donc de recenser l'ensemble des achats
qu'il conviendra de réaliser, en fonction des échéances
des marchés actuels, dans une optique pluriannuelle. Toutes les
procédures à lancer sont donc prévues, computées
par une nomenclature dans un objectif de stratégie, de performance et de
mutualisation des achats lorsqu'elle s'avère possible. Une fois les
achats planifiés, cette prévision doit être
respectée, en vue de s'aligner sur la stratégie globale.
Matériellement cette programmation prend souvent la
forme d'un tableau type Excel qui recense l'ensemble des points vus
précédemment. Outre le gain de
146
Acheteurs-publics.com
Programmer ses achats, définition ligne 1.
http://www.acheteurs-publics.com/mthodes-et-techniques-de-lacheteur-public/1---gouvernance-achats/programmer-ses-achats
147 Idem.
86
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
temps assuré par un fichier unique la programmation est
clairement un outil à portée pluriannuelle, puisque le fichier en
question n'a de valeur que pour l'avenir.
Or, une programmation efficace ne se limite pas à
prévoir les dates butoirs auxquelles il faudra relancer les
marchés récurrents. Elle devra comporter en son sein l'ensemble
des informations utiles à la relance d'un marché, comme les
erreurs à ne pas commettre, l'identification des besoins, les points
clefs à ne pas rater etc.
En cela l'évaluation du cocontractant prend tout son
sens pour les raisons vues plus haut. En intégrant cette
évaluation complète à la programmation des achats
l'acheteur s'assure une transmission efficace des informations relatives au
contrat. L'évaluation des titulaires est donc un point
névralgique de la programmation ; sans évaluation la
programmation des achats ne peut rester qu'à son stade embryonnaire au
risque de perdre bon nombre d'informations utiles.
120. Il reste donc indispensable que les acheteurs prennent
conscience de la réelle plus-value de la programmation et l'adopte au
plus vite, tout en y intégrant les résultats issus des
mécanismes d'évaluation des cocontractants.
Mais la programmation n'est pas le seul outil capable de
donner une vision pluriannuelle et de transmettre l'expérience acquise
à chaque marché, d'autres outils peuvent être mis en
place.
2. L'évaluation du cocontractant comme base de
création de documents
statistiques à exploiter
121. Évaluation et anticipation. La
programmation est donc un outil qui permettra à l'acheteur d'anticiper
ses futurs achats et de récupérer l'ensemble des données
relatives chaque marché de sorte à ne pas reproduire les
mêmes erreurs ou d'en améliorer les points positifs et
négatifs. Or cet outil se borne donc à une vision pluriannuelle
certes, mais casuistique, marché par marché, sans permettre
véritablement l'adoption d'une stratégie globale d'achat public
performant.
C'est de ce constat que nous avons réfléchi
à la création d'un nouvel outil fondé sur
l'évaluation de l'ensemble des cocontractants.
87
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
122. L'intérêt de l'outil statistique.
L'idée est donc de créer un outil statistique, valant
pour l'avenir, fondé sur le retour d'expérience de l'ensemble des
marchés par l'évaluation des cocontractants, en vue de
définir une stratégie globale d'amélioration et de
performance.
Par une évaluation totale des titulaires, du premier
jour d'exécution du contrat jusqu'au terme de celui-ci, bon nombre
d'informations peut être regroupé, analysé et
utilisé.
En définissant des questions claires
l'évaluation permettra d'apporter une réponse statistique qui
servira de base à la définition de la nouvelle
stratégie.
A titre d'exemple une première question pourrait
être « sur l'ensemble des contrats conclus et achevés ces
trois dernières années, combien d'entres eux ont respecté
les délais initialement prévus ? ». Par l'évaluation
constante un premier chiffre, exprimé en pourcentage se
révélera. D'autres questions sur le même thème
suivront alors : « même question mais pour l'ensemble de mes
marchés de travaux uniquement », « quelle durée moyenne
de prolongation exprimée en jours ou en mois » etc... A l'issue
d'une série de questions sur les délais l'Administration aura une
série de réponses claires lui permettant d'établir le
constat qui s'impose et de trouver de nouvelles solutions.
Ce type de questions pourrait s'appliquer également au
nombre d'avenants moyen passés par marché, ou par type de
marché. De même le nombre de pénalités
appliquées, le nombre de résiliation de contrats, la
différence moyenne entre le budget prévisionnel initialement
prévu et le budget réel final...
Par la détermination de questions simples un constat,
précis puis global, s'imposera et donnera tant aux acheteurs qu'à
leurs supérieurs et aux élus l'ensemble des réponses
utiles. A cela doit alors s'ajouter une phase d'analyse des résultats et
éventuellement une mise en commun avec d'autres services du même
type pour aboutir finalement à la détermination de nouveaux
objectifs chiffrés pour les années suivantes et d'une nouvelle
stratégie.
Toutefois cela ne peut être fait que par une
évaluation complète de l'ensemble des cocontractants de
l'Administration, et l'archivage constant de l'ensemble des réponses.
88
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de l'exécution du contrat
public, un bénéfice brut pour
l'Administration
Cet outil peut également permettre de créer et
de développer une réelle politique de suivi des cocontractants,
idée qui fait actuellement très largement défaut au sein
des services de commande publique. Le constat actuel tient à ce qu'il
est impossible de savoir ce que sont devenus les anciens titulaires des
différents contrats publics. Or cela est une donnée
extrêmement précieuse dans une idée de développement
à moyen long terme. Par une évaluation au terme du contrat
adjointe d'une bonne programmation des achats des réponses utiles se
dégageront.
A titre d'exemple : « sur l'ensemble des contrats que
j'ai relancé, combien d'anciens titulaires ont de nouveau
candidaté ? ». Si une majorité de réponses
négatives se dégage, quelles conclusions faut il en tirer ? Les
titulaires ne sont ils pas assez bien payés ? Les conditions de travail
et le rythme imposé sont-ils satisfaisant de leur point de vue ?
De même, si une majorité de réponses
positives se dégagent, que cela signifie t'il ? L'Administration paye
t'elle trop les titulaires au point que ceux-ci préfèrent
travailler avec la sphère publique plutôt que la sphère
privée ? Si une majorité de sociétés se porte de
nouveau candidate et obtient le contrat, n'y a t'il pas un risque vis à
vis de la libre concurrence ou de la dépendance à la
collectivité de ces sociétés ?
Tout autant de conclusions peuvent se révéler et
permettre l'adoption d'une nouvelle stratégie.
123. Conclusion du chapitre. En propos
conclusifs nous pouvons donc admette que l'évaluation des
cocontractants, dans son ensemble est tant utile lors de l'exécution du
contrat lui même, qu'à son terme et qu'elle permet une
réelle performance de l'achat public, tant lors de l'exécution
que pour l'avenir.
Même si nous avons eu l'occasion de déterminer
quelques outils propres à l'évaluation, il est désormais
nécessaire de s'intéresser sur les méthodes
concrètes d'évaluation des cocontractants.
89
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
CHAPITRE SECOND - LES METHODES MODERNES D'EVALUATION
DU COCONTRACTANT : L'INSERTION D'OUTILS DE MANAGEMENT PRIVE DANS LA
COMMANDE PUBLIQUE
124. Introduction. Il sera question dans
cette partie d'examiner en profondeur les différents outils utilisables
par les acheteurs pour procéder à une évaluation
performante de ses cocontractants.
Sans que cette liste ne soit exhaustive il sera
nécessaire de distinguer entre les outils qui permettent à
l'heure actuelle de procéder à une évaluation du prix
proposé par le cocontractant (I) de ceux qui permettent une
évaluation de la valeur du cocontractant (II), tout en gardant à
l'esprit les avantages que procurent cette évaluation et son
importance.
I - L'évaluation du cocontractant au regard du
prix pratiqué
125. L'évaluation du prix pratiqué par le
cocontractant est essentielle, puisqu'elle permet de vérifier la juste
utilisation des deniers publics. Etant prévues des clauses de
révision des prix dans la grande majorité des contrats publics
cette évaluation prend tout son sens puisqu'elle permet le paiement
juste du cocontractant.
Il conviendra dans cette partie de s'attarder dans un premier
temps sur deux outils permettant cette évaluation (A.), qui, même
si limités car non prévus explicitement par les réformes,
permettent une réelle évolution de l'achat public performant
(B.)
A. Des outils d'évaluation des prix
pratiqués d'origine privée,
148 Citation de David Kearns, ex directeur général
de Xeorx Corporation, initiateur du Benchmark.
https://www.performance-publique.budget.gouv.fr/sites/performance_publique/files/files/documents/performance/controle_gestion/an
alyse_comparative/concepts_et_methodologie/Guide_methodologique_benchmarking_Nevaoconseil_2005.pdf
149 Tribune Clause de Benchmark, peu connue et si efficace,
par Olivier Wajnsztok le 21/11/2016 pour
décision-achat.fr point 6
http://www.decision-achats.fr/Thematique/process-outils-1037/breves/tribune-clause-benchmark-peu-connue-efficace-310858.htm#6hKH5w3krHcKEoBA.97
150 Idem point 2.
90
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
intégrables à la commande
publique
126. Deux outils principaux seront
étudiés lors de cette partie, il s'agira dans un premier temps du
Benchmark (1.) puis dans un second temps du Market Testing
(2.).
1. Le Benchmark et la recherche du prix le plus
juste
127. Définition du Benchmark. Le
Benchmark, également appelé Benchmarking ou
parangonnage est un « processus continu d'évaluation des
produits, des services et des méthodes par rapport à ceux des
concurrents ou des partenaires les plus sérieux ou des organisations
reconnues comme leaders ou chefs de files »148.
Initialement outil du domaine privé, le benchmark a réussi le
pari de s'intégrer petit à petit dans la commande publique.
128. L'intérêt du Benchmarking
dans la commande publique. En commande publique le
Benchmark-prix permet, durant toute la durée du contrat, de
rechercher via une étude comparable au sourcing les prix
pratiqués par d'autres opérateurs économiques concurrents
pour un même type de marché. Cette étude est menée
par une société extérieure aux cocontractants et
indépendante, choisie lors de la conclusion du contrat.
Chaque cocontractant du contrat public peut être
à l'initiative du Benchmark mais devra pour cela en assurer le
coût149 dès lors qu'elle estime qu'il existe
un déséquilibre entre le prix payé et la
réalité du marché. S'en suit l'étude et le rapport
d'étude par la société tierce qui révèlera
les écarts constatés150.
A l'issu de cette étude acheteur et cocontractant
identifient l'origine ou la fonction à l'origine de la différence
des prix observable et procèdent à l'alignement
151 Idem point 3.
91
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
des prix en fonction des tarifs pratiqués par la
concurrence sur un marché de même
type151.
L'idée lors de cette procédure est
évidemment d'évaluer le cocontractant, non pas au regard de
critères objectifs prédéterminés mais au regard de
la concurrence, au regard d'opérateurs privés qui, de par leur
activité et leur secteur géographique auraient pu être
cocontractants de l'Administration. Ceci étant dit il est vrai que
certains candidats sont prêts à brader leurs prix en vue d'obtenir
le contrat, cela nécessite donc que la recherche de l'offre anormalement
basse ait été correctement réalisé. De même
le benchmark ne permet une rectification des prix qu'au delà d'un
certain seuil déterminé en amont, et ne saurait se
réaliser pour quelques euros prêts. Au regard du coût que
peut représenter cette procédure la partie initiatrice doit alors
être certaine que l'alignement des prix qu'elle demande soit rentable au
regard des frais avancés.
Toutefois cette procédure permet la recherche du juste
prix et de l'équilibre entre les parties. Quand bien même des
clauses de révisions des prix aient été prévues au
regard de certains indices, le benchmark permet tout de même une
analyse plus précise, plus juste pour la partie se sentant
lésée.
129. Les risques du Benchmarking.
Cette pratique représente tout de même certains
risques pour l'Administration qui peut se voir contrainte à
rémunérer plus favorablement son cocontractant, y compris
lorsqu'elle en est à l'initiative. Nous ne pouvons d'ailleurs que
conseiller aux acheteurs de pratiquer une étape préalable de
sourcing personnel avant de se lancer dans la longue procédure de
Benchmark, de sorte de ne pas se retrouver surpris lors de l'analyse
des résultats.
130. Une autre procédure, bien plus drastique existe
également pour évaluer le cocontractant et les prix qu'il
propose, il s'agit de la procédure de Market testing.
2. Le Market Testing et l'impact d'un prix
excessif
152 Circulaire du 09 mai 2012 relative aux contrats de
partenariat à l'attention des collectivités territoriales NOR :
EFIT1206010C, point 4.1.5.
92
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
131. Définition du Market Testing.
Le market testing, ou « test par le marché
», est également une procédure visant à
évaluer les prix pratiqués par le cocontractant, mais se
distingue du benchmark tant par sa procédure, que son
initiative que par ses conséquences. Egalement issue du management
privé, le market testing reste aujourd'hui une procédure
trop peu utilisée par les acheteurs.
132. L'intérêt du Market Testing
dans la commande publique. Initialement prévue dans le
cadre des contrats de partenariats publics-privés, cette
procédure impose au partenaire privé, lorsqu'elle est
amorcée par l'Administration uniquement, de relancer un réel
appel d'offre sur une prestation isolée que l'Administration estime trop
couteuse152. Au regard des offres reçues et des prix
proposés soit l'Administration considère que les prix sont
relativement équilibrés et le partenariat suit son cours comme
initialement prévu, soit elle considère les prix pratiqués
par le partenaire sont trop élevés. Dans cette hypothèse
deux choix s'offrent à l'Administration : soit elle impose au titulaire
de sous-traiter la prestation en question au candidat ayant
présenté la meilleure offre lors de ce second appel d'offre, soit
si la prestation est déjà sous-traitée, elle peut imposer
le changement de sous-traitant et le candidat ayant présenté la
meilleure offre obtient le contrat de sous-traitance.
Alors que le benchmark ne prévoit qu'un
alignement des tarifs sur la réalité du marché
concurrentiel, le market testing est davantage utilisé pour
contrôler l'honnêteté du titulaire au regard des prix qu'il
pratique. Les conséquences sont alors logiquement plus lourdes dans ce
cas précis.
Il s'agit une fois de plus d'évaluer le cocontractant
et d'éventuellement le mettre face à ses responsabilités
en l'obligeant soit à sous-traiter une partie de ses compétences,
soit à changer de sous-traitant.
Même en étant initialement prévu pour les
contrats de partenariat la démarche du market testing pourrait
constituer un outil d'une grande utilité pour les acheteurs pour
l'ensemble de leurs contrats. Pour autant cette procédure n'aurait de
réel intérêt qu'au regard de certains contrats en raison de
leur importance, de leur complexité ou
93
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
de leur durée. Le market testing ne pourrait
d'ailleurs pas s'utiliser à l'encontre d'un simple marché de
fournitures où la sous-traitance n'est pas admise.
133. Toutefois ces deux procédure
étudiées n'ont pas été reprises dans les
récentes réformes et directives, ce qui constitue aujourd'hui un
frein à leur mise en place. Pourtant, nous allons voir que Benchmark
et Market Testing peuvent rester des outils à destination
de l'ensemble des acheteurs.
B. Une utilisation limitée par la
législation mais une utilité certaine
134. Si les récentes réformes n'ont pas pris la
peine de prendre en compte ces deux outils (1.), leur utilisation reste
aujourd'hui possible (2.).
1. Benchmark et Market Testing, les grands
oubliés de la directive marchés publics
135. La marginalité du Benchmarking et du
Market Testing dans les textes et la pratique de la commande publique.
Nous avons eu l'occasion de le mentionner, le benchmark et le
market testing étaient autorisés par le code des
marchés publics pour les contrats de partenariats publics-privés
avant son abrogation en 2015.
Sans être expressément mentionnés comme
tels l'utilisation de ces deux procédures était donc possible,
sans toutefois être généralisée à l'ensemble
des contrats de partenariats. Il faut comprendre par là
qu'antérieurement à 2015 la pratique du benchmark, du
market testing ou même du sourcing étudié
précédemment n'était qu'exception au sein des services de
commande publique, apanage des services les plus conséquents.
Il faut rappeler à ce titre qu'une majorité de
services d'achat public en France reste des structures relativement modestes,
cantonnées à un ou deux agents directement placés sous
l'autorité du DGA ou du DGS des communes par exemple. Rien à voir
alors avec les services plus conséquents observables dans les
métropoles ou les communautés de communes rassemblant plusieurs
dizaines d'acheteurs spécialisés. Cet écart de ressources
humaines entre les services est à l'origine
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
de la fracture qui s'est créée au niveau de la
performance de la commande publique entre services restreint aux MAPA et
services se permettant d'évoluer et de tester de nouvelles approches,
comme le sourcing ou le parangonnage. En cela antérieurement
à 2015 benchmarking et market testing restaient des
procédures exceptionnellement mises en place, réservées
aux services les plus complets.
Eric BOMPAR disait d'ailleurs « si le benchmarking et
le sourcing sont mentionnés dans le Code des marchés publics, ils
ne sont pas inscrits dans la culture de l'achat public
»153, ce qui traduit les difficultés de mise en
place de ces outils innovants et performants de la commande publique.
136. Les raisons de cette marginalité.
Leur mise en place n'était donc pas une évidence pour la
plupart des acheteurs, mais leur absence dans les récentes
réformes de la commande publique n'a fait qu'entériner leur
quasi-disparation.
Ce qu'il faut admettre, c'est que les pratiques issues du
secteur privé connaissent toujours une période relativement
longue de mise en place, en cela qu'elles restent éloignées de la
vision des agents publics qui ne les maitrisent pas. Outre le fait que les
agents ne soient pas formés en la matière, notamment sur les
processus innovants de gestion ou de management, il existe une réelle
peur du contentieux. Les processus et démarches innovantes convergent
sur le fait que, comme non prévus ni détaillés
explicitement par les textes, leur encadrement et leur pratique ne sont pas
clairement définis et peuvent constituer un certain risque si l'acheteur
n'a pas pris l'ensemble des précautions qui s'imposent. Ce constat
contribue au fait que les services, dans leur ensemble, restent relativement
mitigés quand à l'utilisation de ces nouveaux outils.
Un autre argument invocable reste que ces procédures
nécessitent certains délais et s'illustre par une perte de temps
pour les acheteurs. Cette perte de temps, qui reste relative au regard des
avantages qu'elle procure, contribue au fait qu'à l'heure actuelle trop
peu d'acheteurs fassent la démarche de les mettre en place. En cela nous
restons une fois de plus convaincu qu'une augmentation générale
du
153 Eric Bompar, directeur d'Achatitude, pour le dossier Bonnes
pratiques : quand le secteur public s'insprire du privé,
3-développer la culture du sourcing en date du 15/01/2014.
http://www.decision-achats.fr/thematique/decideurs-achats-1035/dossiers/bonnes-pratiques-quand-le-secteur-public-s-inspire-du-prive-407/developper-culture-sourcing-232581.htm#hdAFXVVUSZ1cJqH8.97
94
95
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
nombre d'agents dans ce secteur reste une
nécessité, si nous ne voulons pas assister à une
privatisation toujours plus forte de nos services publics.
137. Toutefois reste qu'aujourd'hui ces processus restent
utilisables par les acheteurs et permettent de nombreux avantages dont les
services ne devraient pas se passer.
2. L'utilisation avantageuse mais risquée de ces
procédures visionnaires
138. Ces procédures sont visionnaires en ce qu'elles
restent relativement peu utilisées et surtout, qu'elles ne s'appliquent
essentiellement que dans le secteur privé. En cela les services qui les
mettraient en place seraient à l'origine d'une véritable
révolution dans la performance de la commande publique et pourraient
constituer un élément déclencheur de modernisation globale
de la commande publique.
139. Les contraintes de l'utilisation du
Benchmarking et du Market Testing. Ces deux outils
restent applicables bien que non prévus par les textes
puisqu'actuellement rien ne s'oppose directement à leur utilisation,
aucune disposition contraire ne les interdisant.
Il convient de nuancer ces propos puisque le recours à
ces procédures reste contraint au respect des grands principes
fondamentaux de la commande publique. Le risque principal du recours au
benchmark ou au market testing serait de bouleverser
l'économie générale du contrat, ce qui doit constituer la
première préoccupation et précaution à prendre pour
les acheteurs désireux de les mettre en place.
De plus ces outils restent des procédures sous forme de
clauses, il convient donc nécessairement de les prévoir
dès la procédure de passation de sorte qu'elles soient
intégrées à la formulation des offres des candidats. De
même ces clauses doivent être directement prévues dans le
contrat et acceptées par les candidats.
Dans l'optique où ces mesures restent respectées
il semble qu'aucune disposition ne pourrait venir à l'encontre de
l'utilisation du benchmart et du market testing comme
prévus initialement.
Toutefois pour les acheteurs encore réticents à
prévoir ce genre de
154
Acheteurs-publics.com,
réaliser un benchmark (parangonnage), définition.
http://www.acheteurs-publics.com/mthodes-et-techniques-de-lacheteur-public/strategie-d-achats-publics/techniques-de-management-
du-besoin/realiser-un-benchmark-parangonnage
96
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
clauses dans leurs contrats, le benchmarking reste un
outil adaptable à plusieurs situations extracontractuelles qui ne
demande qu'à être utilisé par les agents.
En effet si le parangonnage reste une procédure visant
à « analyser les pratiques, les prix, l'approche,
l'organisation ou les résultats d'une entité publique ou
privée ayant un contexte similaire au sien »154,
rien n'impose qu'il soit contractuel.
Les services pourraient très largement se limiter
à benchmarker les coûts des opérateurs
privés dans une zone géographique prédéfinie de
sorte à mieux évaluer leur budget prévisionnel, ou
à benchmarker les pratiques et l'organisation interne des
autres collectivités afin d'évoluer en ce sens. Le
benchmarking peut également être la comparaison des
achats réalisés par d'autres services ou la comparaison de la
gestion de travail dans des organismes privés en vue de s'en
inspirer.
Sans nécessairement que le Benchmark ne se
restreigne à une évaluation du cocontractant, il peut
s'avérer plus qu'utile dans l'évaluation des opérateurs
privés, des candidats, des services semblables ou des opérateurs
différents. Le Benchmarking reste un outil qu'il convient
d'adapter au cas par cas, objectif par objectif et collectivité par
collectivité.
En ce sens que le parangonnage reste un outil aux multiples
facettes et relativement simple d'utilisation, il constitue un réel axe
de développement et de performance pour l'ensemble des
collectivités et des acheteurs.
Nous ne pouvons d'ailleurs que conseiller aux services d'y
avoir recours autant que possible, à leur propre échelle, mais de
le faire dans les règles de l'art et de conserver une trace
écrite de toute pratique de Benchmarking, même
informelle. Ce traçage reste une nécessité au regard de la
transmission de connaissances, d'expériences et de compétences
aux générations futures d'acheteurs.
140. Si nous venons d'étudier
l'évaluation du cocontractant au regard du prix qu'il pratique, il est
désormais nécessaire d'étudier sa valeur technique.
II - L'évaluation du cocontractant au regard de
sa valeur technique
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
141. La valeur technique du cocontractant s'entend comme la
plus-value qu'il apporte à l'intérêt général,
sa fonction, son rôle. Il s'agit donc de la valeur qu'il apporte lors de
l'exécution du contrat public. Cette valeur technique reste une
donnée qu'il convient d'évaluer dans un objectif de performance,
comme nous avons pu le démontrer précédemment.
Nous nous attarderons alors dans un premier temps sur
l'évaluation de l'efficacité du cocontractant (A.), avant
d'étudier son évaluation globale (B.).
A. L'évaluation de l'efficacité du
cocontractant au regard de ses missions
142. L'évaluation de l'efficacité d'un candidat
se mesure en fonction du travail qu'il accompli au regard de ses missions et de
ses attributions. Sans revenir sur l'utilité d'une telle
évaluation que nous avons démontré plus tôt, nous
mettrons en perspective cette évaluation au regard d'un outil,
également initialement issu du secteur privé, qu'est le
reporting (1.), et de la manière de l'appréhender par
les services de commande publique (2.).
1. La place du reporting dans l'évaluation
de l'efficacité du cocontractant
143. Définition du reporting. Le
groupe AFG conseil, spécialisé dans l'accompagnement de clients,
l'amélioration et la performance de leurs sociétés
défini le reporting -ou communication de données en
français- comme l'outil permettant « d'avoir un regard global
sur une activité (É) une photographie d'une situation à un
instant précis, une image qui aurait pour objectif de présenter
de manière régulière une information brute ou
l'évolution de cette même information (É) il s'agit de la
production de chiffres et d'indicateurs bruts, laissant la transposition et
l'analyse aux décideurs »155.
Il s'agit donc d'une méthode utilisée dans la
sphère privée des affaires ayant pour but d'évaluer
constamment une activité précise d'une société. Cet
ensemble d'évaluations conduit nécessairement à une
synthèse et une analyse poussée, en vue
155 Groupe AFG conseil, actualités, Le pilotage, entre
Reporting et Tableaux de bord.
http://www.groupeafg.com/le-pilotage-entre-reporting-et-tableaux-de-bord-2/
97
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
d'évaluer l'ensemble du travail accompli et sa
qualité afin de le comparer aux objectifs initiaux et de
redéfinir une stratégie si nécessaire.
144. L'intérêt du reporting dans
la commande publique. On comprend alors implicitement
l'intérêt que pourrait revêtir l'utilisation de cet outil
par les services de commande publique. Un reporting bien
réalisé conduirait l'Administration à connaître
constamment, ou tout du moins à échéances
régulières, l'avancée de l'exécution de ses
contrats et la qualité de cette exécution.
Il semble donc que l'utilisation de cet outil soit
indispensable dans l'évaluation du cocontractant. Rappelons à ce
titre qu'il n'existe pas un seul type de reporting, et qu'à
l'instar du benchmarking cette pratique s'adopte et s'adapte selon
chaque service de commande publique et selon le type de contrat conclu. Ainsi
le reporting aura une place prépondérante lors de
l'exécution d'un marché de travaux, là où il aura
une place plus relative dans un marché de fourniture.
De même il faut reconnaître que le reporting
étant une pratique théorique globale qui s'effectue de
façon différente au cas par cas, les services de commande
publique l'effectuent déjà sans parfois le savoir, à leur
propre échelle. Ainsi, une simple réunion avec un titulaire sur
l'avancée d'un contrat constitue déjà une première
étape de reporting.
Au delà de faire comprendre l'intérêt
réel du reporting nous souhaitons faire prendre conscience aux
acheteurs que le reporting est un outil qu'ils connaissent et
utilisent déjà. Cependant en restant une pratique et un outil le
reporting peut être amélioré, modernisé et
démocratisé par les services.
145. Tout l'enjeu pour l'Administration va être de
déterminer la façon dont
elle souhaite mettre en place son reporting et l'importance
qu'elle va lui conférer. En ce sens nous allons tenter de transmettre
notre propre expertise à ce sujet.
98
2. La mise en place du reporting et ses
acteurs
99
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
146. Il sera ici question de déterminer à notre
sens la façon dont le reporting devrait être mis en place
pour être le plus efficace possible, tout en gardant à l'esprit
que chaque situation étant unique il conviendra aux acheteurs d'adapter
ces conseils et de réaliser un travail qui leur sera propre et
personnel.
a) Déterminer des objectifs précis
147. Il est évident que l'Administration ne sera jamais
en mesure d'évaluer l'ensemble du travail accompli par son cocontractant
à tout moment. S'oppose ici la contrainte de temps -on ne peut pas
connaître l'avancée de l'exécution toute les heures, tous
les jours etc- et une contrainte par l'objet -on ne peut pas connaître et
évaluer l'ensemble des petites actions faites par le cocontractant dans
l'exercice de ses missions.
Le premier travail à accomplir pour l'acheteur va donc
être de déterminer en amont ses objectifs de reporting,
et de s'y tenir. Il pourra alors à ce titre adopter un
reporting par l'objet, c'est à dire l'évaluation de
l'exécution en fonction de telle ou telle action du cocontractant (je
veux évaluer cette prestation, puis celle-ci, puis
celle-làÉ), ou un reporting par le temps, en fonction de
certaines échéances ou étapes accomplies. Peut
également être adopté un reporting par le temps et
par l'objet selon la complexité du contrat, sa durée et son
objet.
Toujours est il que cette première étape de
détermination des objectifs est indispensable et déterminante
puisqu'elle sera la base même du reporting et sera une sorte de
fil conducteur de l'évaluation.
b) Formaliser le reporting
148. Il est indispensable que le reporting soit
porté à la connaissance du titulaire et qu'il soit accepté
par celui-ci. En ce sens le reporting doit être inscrit dans le
contrat et dans le cahier des charges.
Non seulement cela permet au titulaire d'être au courant
de l'existence du reporting et des actions qu'il aura à mener
en ce sens, mais surtout cela
100
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
permettra de faire du reporting une clause opposable
au titulaire en cas de manquement. Cette inscription au contrat doit d'ailleurs
s'adjoindre de clauses de pénalités en cas de non respect, et
permettra la mise en place des clauses incitatives de performance.
Cette formalisation est donc nécessaire dans un
objectif de réalisation concrète du reporting et
favorisera la transparence de la procédure d'évaluation.
c) Un premier type de reporting : le reporting par
réunion.
149. Il s'agit dans cette hypothèse de prévoir,
par échéances régulières ou lors d'étape
névralgiques de l'exécution, des réunions où seront
présents le ou les titulaires ainsi que l'Administration.
Lors de ces réunions le cocontractant aura à
présenter l'avancée, la qualité, les délais et les
difficultés rencontrées lors de l'exécution. En fonction
des objectifs déterminés du reporting le titulaire aura
à répondre de ses actions lors de ces réunions auxquelles
sa présence doit être obligatoire.
L'avantage que présente le reporting par
réunion est la célérité par laquelle
l'Administration va pouvoir lui répondre. N'oublions pas que par
l'exercice de ses pouvoirs de direction et de modification l'Administration
peut réellement influer sur l'exécution du contrat. Un
échange oral sera alors bien plus rapide et permettra une
réaction imminente en cas de problèmes.
d) Un second type de reporting : le reporting par rapports
écrits.
150. Il sera demandé au cocontractant dans cette
hypothèse de produire et de transmettre, à
échéances régulières ou lors d'étapes
névralgiques de l'exécution, par écrit, l'ensemble des
informations vues précédemment. L'Administration recevra donc
-éventuellement par voie dématérialisée- les
conclusions de son cocontractant vis à vis de l'exécution de son
contrat et sera en mesure de l'évaluer pleinement.
L'avantage de ce type de reporting est qu'il peut
être fait plus souvent. Là où les réunions
mobilisent un ensemble d'acteurs pour une durée
indéterminée les rapports écrits sont réalisables
plus facilement. De même le traçage écrit de
156 Groupe AFG conseil, actualités, Le pilotage, entre
Reporting et Tableaux de bord.
http://www.groupeafg.com/le-pilotage-entre-reporting-et-tableaux-de-bord-2/
157 Idem.
101
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
la procédure est facilité. Cependant cette
pratique est nécessairement moins rapide que la précédente
puisque l'Administration à l'issue de l'évaluation doit
nécessairement répondre par l'écrit à son
cocontractant. L'échange d'informations, de questions et la
compréhension mutuelle s'en retrouvent donc impactés.
e) Le reporting mixte
151. Il s'agit ici de mélanger les
deux procédures vues précédemment. Le titulaire aura donc
à réaliser des rapports écrits selon les modalités
déterminées en amont, et s'en suivra une réunion de
debriefing et d'orientation.
L'avantage de cette procédure est qu'elle permet
à l'Administration de préparer correctement sa future
réunion par l'obtention des pièces écrites et de
répondre tant par voie écrite qu'orale lors de la réunion.
De même cette procédure inclue tant le dialogue et
l'échange oral que la traçabilité des échanges.
En ces sens cette mise en pratique du reporting nous
semble plus efficace.
f) L'utilisation de tableaux de bord
152. « Le but d'un tableau de bord
est d'aider le décideur à la prise de décision pendant
l'activité »156. Il s'agit d'un outil sous forme de
tableau où seront retranscrites les informations qui permettront de
suivre l'évolution de l'activité et de l'exécution du
titulaire157.
En pratique cet outil est donc un tableau qui recensera tant
les objectifs en terme de qualité, que les délais à
respecter, que les budgets prévus et qui mettra ces objectifs en
relation avec l'évaluation du cocontractant. Autrement dit ce tableau,
qui sera rempli au fur et à mesure de l'exécution du contrat et
de l'évaluation du titulaire permettra de connaître, en temps
réel, si l'exécution respecte les objectifs initiaux. Dans le cas
où ces objectifs sont en voies de ne pas être respectés, il
sera encore temps pour l'Administration de prendre toutes les mesures qui
s'imposent.
102
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
Ce tableau de bord est donc un outil dont
l'intérêt s'illustre sur des contrats particulièrement
long, et permet de ne pas se retrouver lors la moitié de la durée
du contrat avec seulement 25% des objectifs réalisés à
titre d'exemple.
Cet outil est donc complémentaire de l'activité
de reporting, il s'intègre parfaitement dans la démarche
d'évaluation du cocontractant et permet, outre de garder une trace
écrite de l'évaluation, d'apport un réel support à
l'acheteur.
A ce titre nous conseillons d'ailleurs vivement au service
désirant pratiquer le reporting de se doter d'un outil
semblable.
g) Les acteurs du reporting
153. Nous l'avons vu cette pratique requiert
une phase d'analyse critique Ðet contradictoire- des résultats de
l'évaluation. Si l'acheteur doit déterminer ses objectifs et la
façon dont il entend mettre en place le reporting, reste
à savoir qui sera en charge de l'analyse des résultats. Ce qui
est sous entendu par cette partie est de savoir comment un agent
spécialisé en contrat public va, à titre d'exemple,
évaluer l'avancée d'un contrat ayant pour but la création
d'un site internet et d'une application mobile ?
Si le service en lui même s'estime compétent pour
juger et analyser l'évaluation, il est également possible eu
égard à la complexité du projet qu'il n'ait pas le bagage
suffisant pour le faire. Se pose donc la question de savoir qui faire
intervenir lors de la phase d'analyse du reporting.
Nous conseillons aux acheteurs, dans un premier temps, et
s'ils s'en estiment incapables, de faire intervenir les autres services de la
collectivité. Pour reprendre l'exemple du site internet et de
l'application mobile, nombreuses sont les collectivités territoriales
dotées d'une Direction des Systèmes Informatiques,
composée en grande majorité d'informaticiens. Il serait alors
utile et peu onéreux de faire intervenir ces personnes
spécialisées dans l'analyse des résultats.
Dans un second temps nous pouvons également conseiller
aux acheteurs de faire intervenir un opérateur privé, expert dans
le domaine. A l'instar de l'assistance à maitrise d'oeuvre nous
pourrions imaginer un système où la collectivité passe un
marché public de service en vue d'analyser les résultats issus
de
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
l'évaluation. Bien que cette démarche
représente nécessairement un cout supplémentaire elle peut
totalement se justifier en fonction de l'importance du contrat public
principal.
154. Si le reporting reste l'outil phare de
l'évaluation de la valeur technique du cocontractant, il est
également intéressant de l'intégrer à un processus
d'évaluation globale du cocontractant.
B. L'évaluation globale du cocontractant au
regard de la performance du contrat public
155. Il sera ici question de revenir sur l'assemblage des
deux processus d'évaluation (1.), avant de développer deux points
concrets et expérimentés qui ont portés leurs fruits
(2.).
1. L'analyse et l'évaluation conjointe du prix et de
la valeur technique
156. La première chose qu'il convient de rappeler ici
c'est qu'évaluation du prix et évaluation de la valeur ne se
confondent pas, et surtout, ne s'opposent pas l'une à l'autre. En ce
sens, et quel que soit le degré de difficulté de mise en place de
ces procédures il est tout à fait possible de les mener
conjointement.
157. L'intérêt d'une analyse conjointe.
En effet allier évaluation du cocontractant au regard du prix
pratiqué et évaluation du cocontractant au regard de sa valeur
technique permettra à l'acheteur d'avoir un regard global sur l'ensemble
de l'oeuvre du titulaire au regard du contrat. Nous pourrions même
affirmer que l'une ne va pas sans l'autre, et qu'évaluer le prix sans
connaître les prestations qui y sont réellement affectées
serait tout aussi inefficace que d'évaluer un ensemble de prestations
sans en connaître le prix réel ou, tout du moins, le prix
pratiqué sur le marché concurrentiel.
103
En ce sens il serait clairement dommageable et regrettable pour
un
158 A propos de la loyauté contractuelle, voir CE
assemblée Commune de Béziers I, n°304802 en date du 28
décembre 2009, considérants 2, 3 et 4.
104
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
acheteur de se priver de l'une ou l'autre de ces
évaluations, d'autant qu'elles restent toutes les deux
réalisables pour peu que l'on se soumette aux règles applicables
en la matière.
Ces deux évaluations restent liées dans une
volonté de performance globale de l'achat public.
Au de là même de la simple question de
performance, la mise en place de ces deux évaluations comme nous
l'imaginons serait un message fort envoyé aux futurs cocontractants.
L'intérêt sera de faire comprendre à l'ensemble des
candidats que l'Administration est prête à travailler avec eux,
prête à rechercher l'équilibre dans le contrat, prête
à gratifier leur performance par la mise en place de clauses
incitatrices mais qu'au delà de toutes ces concessions l'Administration
ne laissera rien passer, aucun écart, aucune mauvaise foi, aucun
manquement à la loyauté contractuelle158,
que cela concerne les prix ou l'exécution en elle même. En
d'autres termes, que l'Administration agira sur certains points comme le ferai
un partenaire privé avec son cocontractant. Fini la volonté de
vouloir tromper l'Administration au motif que celle-ci est moins attentive
à la dépense de ses fonds qu'un opérateur privé.
158. La nécessité d'une réforme.
Toutefois pour permettre la mise en place de tels dispositifs une
réelle réforme s'impose. Législativement d'abord,
où ces pratiques si on désire qu'elles soient mises en places par
les acheteurs doivent être encadrées, ne serait-ce que pour
rassurer les agents face au risque contentieux. Deuxièmement il faut
faire comprendre aux services de commande publique que ces mesures sont
possibles, qu'elles sont légales et pour cela il faut en quelque sorte
changer les mentalités, impulser une nouvelle dynamique dans l'ensemble
des services. Une formation continue des agents et de leurs responsables doit
également se mettre en place pour garantir que l'Administration
évoluera en même temps et de la même manière que ses
cocontractants privés.
Enfin il apparaît indispensable que des fonds se
débloquent pour permettre à l'Administration de mettre en place
l'ensemble de ses prérogatives concernant la commande publique. Qu'il
s'agisse de moyens pour la formation, de moyens pour la
159 Pour un management performant de l'exécution des
marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014,
CCI de Paris page 9
http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-
management-performant.pdf
105
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
mise en place d'achats innovants et les procédures
d'évaluation ou encore des moyens en vue d'un recrutement
supplémentaire d'agents, nous envisageons -entre autre- une commande
publique performante par l'obtention de fonds supplémentaires.
159. S'il apparaît à la lecture de ce
mémoire que nous avons théorisé un nombre important de
points de vue, il est également nécessaire de préciser que
certaines démarches ont été entreprises pour favoriser un
achat public performant.
2. Deux exemples concrets expérimentés en
faveur d'une commande publique performante
160. Deux exemples nous ont particulièrement
marqué lors de nos recherches. L'un est américain, l'autre est
français. Ces deux cas que nous allons développer tendent
à prouver que l'approche managériale de la commande publique
n'est pas nécessairement en contradiction avec la commande publique.
a) L'exemple américain : le système des score
card.
161. L'évaluation de la performance des cocontractants
de l'Administration américaine tient une place
prépondérante dans l'équivalent du droit de la commande
publique américain.
La performance en elle est même revêt une
importance particulière en cela que les « contribuables doivent
bénéficier de la garantie de « best value ».
»159. Cette volonté de placer la performance de
l'achat public sur un piédestal s'explique par l'idéologie
très libérale des foyers américains et de leur
réticence à payer l'impôt. De ce fait, les contribuables
ont donc un droit de regard sur les contrats passés par leurs
administrations.
Cette évaluation de la performance prend donc la forme
des « score card », ou fiches d'évaluation, qui vont
recenser un ensemble d'évaluations qui vont porter tant
160
Acheteurs-publics.com
L'évaluation fournisseurs dans les marchés : l'exemple
américain par Ludovic Myhié en date du 27 décembre 2013.
http://www.acheteurs-publics.com/actualite-des-acheteurs-publics/levaluationfournisseursdanslesmarcheslexempleamericain
161 Idem.
162 Idem.
106
Chapitre second Ð Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
sur la performance technique, que le contrôle des
coûts, que la gestion du planning ou encore les relations
commerciales160. Notés de non satisfaisant à
exceptionnel ces quatre facteurs vont être intégrés
à chaque fiche d'évaluation qui seront par la suite
centralisées au sein d'une même plateforme en
ligne161 consultable.
Le Federal Acquisition Streamlining Act de 1994
prévoit également que la performance des cocontractants
évaluée dans les score card est l'un des
éléments pris en compte dans l'attribution d'un
marché162.
L'idée intéressante dans ce processus est dans
un premier temps le droit de regard qu'ont les contribuables sur les contrats
conclus. En effet, sans que nous soyons favorables à un système
où les concitoyens auraient à se prononcer sur
l'opportunité de chaque contrat public -ce n'est pas le cas aux USA-,
force est d'admettre que ce droit de regard aurait un intérêt
légitime en France, ne serait-ce que pour renouer de bonnes relations
entre administrations et administrés.
Le deuxième intérêt est la place que
revêt l'évaluation de la performance dans l'attribution de
contrats publics qui pourrait être une piste à confirmer en
France.
Enfin, le troisième et dernier intérêt de
ce modèle réside dans la plateforme unique où est
recensé l'ensemble des évaluations des cocontractants. Dans une
optique de progression mutuelle des services de commande publique il est
nécessaire que les acheteurs puissent compter les uns sur les autres et
collaborer par l'échange d'informations. En ce sens l'idée d'une
plateforme commune à l'ensemble de nos services de commande publique
français où serait partagée l'expérience acquise
années par années serait une piste de réflexion
intéressante de notre point de vue.
b) L'exemple français : l'initiative
félicitée de la ville de Saint-Ouen
162. En 2013 la ville de Saint-Ouen a
utilement décidé de créer une Direction de la Commande
Publique dont les mission sont la veille juridique des contrats
Chapitre second - Les méthodes modernes
d'évaluation du cocontractant : l'insertion d'outils de management
privé dans la
commande publique
passés, la sécurisation de l'ensemble des
procédures et l'adoption d'une politique d'achat structurée et
économiquement justifiée163.
Ce service s'est a par la suite adopté une «
démarche qualimétrique de ses achats »164,
qui associe le quantitatif au qualitatif. Cette démarche s'articule
autour de quatre consignes qui sont l'évaluation de la qualité de
l'exécution (le reporting donc), la vigilance quant au strict respect
des clauses règlementaires, l'évaluation préalable des
opérateurs économiques (le sourcing donc) et le recours
systématique à la négociation lors de marchés
à procédure adaptée165.
Cette démarche s'est également
accompagnée de la formation de l'ensemble de leurs agents directement
assurée par les responsables de la nouvelle direction166.
Qu'il s'agisse de la mise en place de processus novateurs, de
la sécurité juridique ou de la formation des agents nous ne
pouvons que féliciter cette démarche et espérons qu'elle
aura tendance à se démocratiser au sein de l'ensemble des
collectivités françaises !
Notre mémoire s'inscrit donc totalement dans la
volonté de ce qu'a mis en place la ville de Saint-Ouen. Si cet exemple
nous a grandement inspiré lors de notre mémoire nous n'avons pas
été les seuls à le gratifier puisque cette démarche
a été récompensée lors des Trophées de la
commande publique167.
En cela la ville de Saint-Ouen illustre parfaitement
l'évaluation globale du cocontractant au regard de la performance de
l'achat public. S'achève ainsi notre mémoire sur ce pari
réussi de la ville de Saint-Ouen, dont nous ne pouvons que conseiller
aux acheteurs de s'inspirer.
163 Pour un management performant de l'exécution des
marchés, rapport présenté par Alain Buat le 06 mars 2014,
CCI de Paris page 17
http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-
management-performant.pdf
164 Idem.
165 Idem page 18.
166 Idem.
167 Idem.
107
109
Conclusion
CONCLUSION
163. Un éclaircissement de la performance
lato sensu grâce au truchement de l'analyse managériale.
La performance au sein de la commande publique peut prendre plusieurs
formes, et peut s'atteindre de différentes manières. Si le choix
n'a pas été fait de traiter de certaines performances restreintes
comme la performance sociale ou environnementale mais au contraire de la
performance globale c'est qu'à juste titre, il nous semble opportun de
ne pas s'attarder sur quelques éléments disparates mais bien
d'étudier la performance sous sa forme unitaire. La poursuite de la
performance dans l'achat public ne peut se résoudre à la
tentative d'obtention de performances individuelles mises bout à bout
mais bien d'aller au delà et de considérer la performance comme
un objectif global dont il convient de se rapprocher le plus possible. En ce
sens, et même si nous avons eu à traiter de la performance
environnementale ou sociale brièvement notre mémoire se consacre
en tout point à la recherche de la performance dans son ensemble.
De même la performance dans la commande publique peut
s'atteindre de bien des façons. Nous rappelons d'ailleurs que si le
choix a été fait de se limiter à l'évaluation des
cocontractants c'est qu'en cela réside l'un des plus grands défis
du XXIème siècle pour les acheteurs et l'une des plus grandes
marges de progression dans l'objectif de performance. En ce sens nous
espérons que notre mémoire a répondu aux objectifs
fixés et qu'à sa lecture l'acheteur aura, à défaut
d'acquérir de nouvelles connaissances, pris conscience qu'il
possède un éventail de compétences qu'il peut mettre en
place pour atteindre la performance de son achat.
Cet éventail de compétences et les outils que
nous avons présentés s'intègrent d'ailleurs dans la
conception large qu'est le management. Celui-ci se doit aujourd'hui
d'être connu, utilisé et maitrisé par les services qui ne
peuvent plus méconnaitre leur rôle dans la boucle
macro-économique française tant ils sont à l'origine d'un
levier de relance de la croissance formidable qu'est la commande publique.
110
Conclusion
Si à ce titre nous avons pris le pari risqué
d'examiner en profondeur les possibilités qui s'offrent à
l'acheteur en matière d'évaluation des futurs cocontractants
c'est qu'à notre sens cette partie est tout simplement primordiale dans
une optique de performance. Cette étude préalable à
l'évaluation en lui même du cocontractant reste le point central
de départ de la procédure. Si cette étape, autant que la
définition du besoin à titre de comparaison est manquée le
futur contrat ne peut qu'être voué à l'échec, ou
à défaut ne remplira en rien ses exigences de performance. Libre
dans cette hypothèse à l'acheteur d'assumer les
conséquences de ses négligences plus que de ses erreurs.
164. L'intérêt de l'évaluation
préalable à la conclusion du contrat dans l'objectif de
performance. Cette partie s'articule donc autour de deux axes
principaux que sont la prise globale d'information par la pratique du
sourcing et la détermination des critères de
sélection les plus aptes à évaluer le candidat de
façon performante.
S'ensuit logiquement l'évaluation concrète des
candidats au regard de leur candidature et de leur offre, de par leur
proposition de projet, leur adéquation avec les critères de
sélection et leur offre de prix. Il s'agit ici d'une évaluation
qui se veut nécessairement performante puisqu'en dépendra
l'attributaire et l'exécution même du marché. Les
modalités de cette exécution pouvant faire l'objet de
négociations c'est en toute logique que nous continuons d'affirmer que
la négociation en elle même reste un outil d'évaluation des
candidats et que sa pratique devrait être vivement conseillée
à tout acheteur dès que les conditions normatives le
permettent.
165. L'intérêt de l'évaluation de
l'exécution du contrat dans l'objectif de performance. Si
l'attribution conclue l'évaluation des candidats au contrat elle ouvre
cependant la voie à l'évaluation du cocontractant, qu'elle
intervienne lors de l'exécution ou au terme du contrat. Cette
dernière évaluation est primordiale en ce qu'elle permet de clore
définitivement l'exécution du contrat, il s'agit à titre
d'exemple de la réception des travaux lors d'un marché de ce
type.
L'évaluation du cocontractant prend alors
différentes formes et s'axe autour de l'évaluation au regard du
prix pratiqué et de l'évaluation au regard de la
qualité
111
Conclusion
de l'exécution. A ce titre différents outils
initialement patrimoine exclusif du domaine privé peuvent
désormais s'utiliser en droit de la commande publique. Benchmarking,
Market Testing et Reporting constituent une panoplie
d'accessoires dont on regrettera la si faible maitrise par les services. On
comprend à ce titre que la tendance actuelle favorise de plus en plus
l'embauche d'économistes au détriment de juristes.
166. Sans qu'il soit nécessaire de
revenir sur l'utilité d'une telle évaluation du cocontractant que
nous avons démontrée, nous pouvons toutefois conclure qu'à
l'heure actuelle innover dans l'évaluation des cocontractants est signe
de modernisme et catalyseur de performance de la commande publique. Francis
BACON nous rappelle d'ailleurs à ce titre que « Celui qui
n'appliquera pas de nouveaux remèdes doit s'attendre à de
nouveaux maux », comprenons que le secteur concurrentiel privé
n'attendra pas la réaction de l'Administration pour évoluer et
innover. Si nous désirons lutter contre le constant décalage et
retard qu'existent entre secteur public et secteur privé, nous ne devons
que solliciter l'innovation, le modernisme et surtout, la Performance.
113
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
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Chronique de droit des contrats publics. Décisions de janvier à
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territoriales 2017 n°5
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Bibliographie
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· VIGREUX (Ludovic), « Déterminer le juste
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2017 n°52.
III - Table des jurisprudences
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2002 I-07213.
· CE 14 avril 1996 Ghiulamila : JurisData
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n°304802.
· CE 25 mars 2013 Département Isère c/
Société PL Favier n°364950.
· CE 22 juillet 2016 Communauté
d'agglomérations du centre littoral et autres
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Bibliographie
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http://www.acheteurs-publics.com/mthodes-et-techniques-de-lacheteur-public/strategie-d-achats-publics/techniques-de-management-du-besoin/realiser-un-benchmark-parangonnage
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http://www.acheteurs-publics.com/actualite-des-acheteurs-publics/retourdexperiencelanalysefonctionnelledanslesachatspublics
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http://www.boamp.fr/Espace-entreprises/Comment-repondre-a-un-marche-public/Questions-de-reglementation/Avant-de-repondre-a-un-marche-public/Definition-et-principes-d-un-marche-public#eztoc16662_0_2_0_4
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http://www.cci-paris-idf.fr/sites/default/files/etudes/pdf/documents/marches-publics-management-performant.pdf
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http://www.decision-achats.fr/Thematique/process-outils-1037/breves/tribune-clause-benchmark-peu-connue-efficace-310858.htm#6hKH5w3krHcKEoBA.97
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http://www.decision-achats.fr/thematique/decideurs-achats-1035/dossiers/bonnes-pratiques-quand-le-secteur-public-s-inspire-du-prive-407/developper-culture-sourcing-232581.htm#hdAFXVVUSZ1cJqH8.97
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https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publi
cs/conseil_acheteurs/fiches-techniques/mise-en-oeuvre-procedure/examen-des-offres-2016.pdf
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https://www.economie.gouv.fr/files/files/directions_services/daj/marches_publi
cs/oeap/publications/lettre/2015/lettre32.pdf
Bibliographie
https://www.economie.gouv.fr/daj/examen-candidatures-2016
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http://www.groupeafg.com/le-pilotage-entre-reporting-et-tableaux-de-bord-2/
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http://www.kpratique.fr/Reforme-sur-les-marches-publics-fiche-technique-n-3-L-encadrement-du-sourcing-dans-les-marches-publics_a418.html
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http://www.lalettredesmarchespublics.com/article-determiner-le-juste-besoin-en-s-appuyant-sur-une-analyse-fonctionnelle-et-une-analyse-de-la-valeur-154565.html?edition=10243
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https://www.performance-
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·
http://www.weka.fr/actualite/achats/article/oui-les-acheteurs-publics-ont-le-droit-de-rencontrer-des-fournisseurs-37822/
V - Avis
·
117
Avis de la CADA 20062458 -Séance du 15 juin 2006.
119
Table des matières
TABLE DES MATIERES
Remerciements VII
Sommaire IX
Table des abréviations XI
Introduction 15
Première partie - Une
évaluation anticipée du futur cocontractant préalable
à la
conclusion du contrat 21 Chapitre premier - Une
évaluation prématurée mais avantageuse des
opérateurs
privés en amont de la publication 23
I - La pratique du sourcing comme outil
d'évaluation des candidats 23
A. La consécration du sourcing en droit de la
commande publique 23
1. L'apparition tardive du terme « sourcing »
dans les textes relatifs aux
contrats publics 24
2. Les atouts et avantages d'une pratique de plus en plus
répandue. 26 B - Pratiquer le sourcing comme démarche
initiale de l'évaluation des candidats, entre innovation et respect
intangible des règles élémentaires de
passation d'un contrat public. 28
1. Le sourcing, détourné de sa fonction initiale,
au service de l'évaluation
des candidats. 28
2. Une fonction détournée et des risques accrus
pour le décideur 30
II - Une nouvelle définition des critères de
sélection dans un objectif
d'évaluation performante des candidats 35
A. Les critères de sélection : piliers centraux de
l'évaluation des candidats 36
1. Une base légale qui concède une certaine
liberté quant au choix des
critères de sélection. 36
2. La définition de la ligne politique du projet de
contrat public par les
critères de sélection. 38
120
Table des matières
B. Vers une nouvelle dynamique de choix des critères de
sélection des offres :
une évaluation des candidats affinée et performante
41
1. L'analyse fonctionnelle des besoins, première
étape d'une nouvelle
dynamique de choix des critères de sélection.
41
2. De l'analyse fonctionnelle des besoins à l'adoption de
critères fonctionnels de sélection, la consécration de
l'innovation et de la
performance lors de la passation de contrats publics 44
Chapitre second - Une constante évaluation des
candidats, de la réception des
offres à la conclusion du contrat 47
I - Une évaluation obligatoire en vue
de l'attribution du contrat au candidat
présentant l'offre la plus économiquement
avantageuse 47
A. L'évaluation objective des candidats au regard des
exigences et du besoin
de l'administration 48
1. L'évaluation des candidatures : premier pas dans
l'attribution du contrat
48
2. L'examen des offres : socle de l'attribution du contrat.
51
B. L'enjeu de la négociation lors de la passation de
contrats publics 54
1. La reconnaissance actuelle de la négociation 54
2. Un cadre favorable à l'essor de la négociation
qui reste néanmoins une
exception par définition 56
II - L'application de la négociation dans
l'évaluation des candidats à un contrat
public 58
A. Un cadre de recours à la négociation strictement
défini 58
1. La négociation dans les procédures non
formalisées 58
2. La négociation dans les procédures
formalisées 61
B. La professionnalisation de la négociation, entre
sécurité juridique et
bénéfice direct 65
1. La négociation au sein de la sphère
administrative française 65
2. Pour une mise en place performante de la négociation
67
Seconde partie - Une évaluation permanente du
cocontractant dès la conclusion du
contrat 71
121
Table des matières
Chapitre premier - L'intérêt d'une
évaluation du cocontractant lors de
l'exécution du contrat public, un
bénéfice brut pour l'Administration 73
I Ð L'intérêt immédiat de
l'évaluation du cocontractant lors de l'exécution du
marché 73
A. L'évaluation au coeur du recours aux
prérogatives de puissance publique 73
1. Une bonne utilisation des pouvoirs de modification, de
direction et de
contrôle subordonnée à une bonne
évaluation du cocontractant 74
2. La résiliation et la sanction, apanage de
l'Administration, finalités
potentielles d'une évaluation du cocontractant. 75
B. Une exécution efficace du contrat par
l'évaluation du cocontractant 77
1. L'évaluation du cocontractant au service de
l'Administration 77
2. L'évaluation du cocontractant au service du titulaire
lui même 79
II Ð L'importance de l'évaluation du cocontractant au
terme du contrat public 80
A. Une tendance actuelle néfaste à la vision long
terme de l'achat public 80
1. Un constat simple : les acheteurs restent trop
centrés sur la vie de leur contrat et de son intérêt
économique direct, sans avoir la vision large qui
s'impose 81
2. L'évaluation des cocontractants, facteur de
développement à moyen-long
terme des services de commande publique 83
B. L'évaluation du cocontractant au coeur de la vision
pluriannuelle de l'achat
public 84
1. La programmation des achats, outil de prévisions
pluriannuelles 84
2. L'évaluation du cocontractant comme base de
création de documents
statistiques à exploiter 86 Chapitre second
- Les méthodes modernes d'évaluation du
cocontractant :
l'insertion d'outils de management privé dans la
commande publique 89
I Ð L'évaluation du cocontractant au
regard du prix pratiqué 89
A. Des outils d'évaluation des prix pratiqués
d'origine privée, intégrables à la
commande publique 89
1. Le Benchmark et la recherche du prix le plus juste
90
2. Le Market Testing et l'impact d'un prix excessif
91
B. Une utilisation limitée par la législation mais
une utilité certaine 93
122
Table des matières
1. Benchmark et Market Testing, les grands
oubliés de la directive marchés
publics 93
2. L'utilisation avantageuse mais risquée de ces
procédures visionnaires 95
II Ð L'évaluation du cocontractant au regard de sa
valeur technique 96
A. L'évaluation de l'efficacité du cocontractant au
regard de ses missions 97
1. La place du reporting dans l'évaluation de
l'efficacité du cocontractant 97
2. La mise en place du reporting et ses acteurs 98
a) Déterminer des objectifs précis 99
b) Formaliser le reporting 99
c) Un premier type de reporting : le reporting par
réunion. 100
d) Un second type de reporting : le reporting par rapports
écrits. 100
e) Le reporting mixte 101
f) L'utilisation de tableaux de bord 101
g) Les acteurs du reporting 102
B. L'évaluation globale du cocontractant au regard de la
performance du
contrat public 103
1. L'analyse et l'évaluation conjointe du prix et de la
valeur technique 103
2. Deux exemples concrets expérimentés en faveur
d'une commande
publique performante 105
a) L'exemple américain : le système des score
card. 105
b) L'exemple français : l'initiative
félicitée de la ville de Saint Ouen 106
Conclusion 109
Bibliographie 113
I Ð Ouvrages et thèses 113
II Ð Articles de doctrine 113
III Ð Table des jurisprudences 115
IV Ð Sites internet 115
V - Avis 117
Table des matières 119
|