Master Scolarisation et Besoins Educatifs
Particuliers
Spécialité « Accompagner la
scolarité des élèves à besoins éducatifs
particuliers »
Favoriser l'attention des
élèves
Le cas particulier des enfants hyperactifs
http://www.fundacioncadah.org
Danièle RUAUD
Directeurs de mémoire : Elvire GAIME,
Laetitia VANDE VONDER
Année universitaire 2014-2015
ÉSPÉ d'Auvergne, Université Blaise
Pascal
Avec tous mes remerciements aux enseignantes et enseignant
qui m'ont accueillie dans leur classe et qui m'ont accordé leur temps et
leur confiance.
Ma reconnaissance va également aux enseignants du
Master, particulièrement Elvire Gaime qui m'a accompagnée durant
les deux années de réflexion nécessaires à
l'élaboration de ce mémoire.
Je n'ai pas de mots pour te remercier, Pierre, pour ton aide
en informatique, en statistiques, et ton soutien de tous les instants.
Favoriser l'attention des
élèves
Le cas particulier des enfants hyperactifs
Promoting students attention
The special case of ADHD children
Ce mémoire étudie la fonction cognitive de
l'attention et les troubles qui y sont afférents, notamment le Trouble
du Déficit de l'Attention/Hyperactivité (TDA/H). Les moyens de
capter, développer, et maintenir l'attention des élèves,
les répercussions sur la scolarité des enfants victimes de
troubles de l'attention, les perturbations sur la vie de la classe, les
adaptations pédagogiques les plus pertinentes, sont les objets
d'étude principaux de la recherche. A travers six situations
d'élèves en école primaire et un stage au collège
dans une classe qui accueille des enfants à risque de décrochage
(classe Relais), ce travail témoigne des conséquences lourdes du
trouble sur la scolarité et l'avenir des enfants atteints et de l'impact
du comportement de ces élèves sur le travail des enseignants. Il
montre aussi la nécessité de renforcer le dépistage et les
prises en charge de ces enfants.
Mots clefs : attention, motivation, scolarité,
comportement, TDA/H, décrochage, enseignants.
The
dissertation explores the concept of attention and the connected troubles,
especially Attention Deficit Hyperactivity Disorder (ADHD). Capture, promote
and maintain student attention will be considered, as well as the impact of
ADHD children behavior on classrooms and teachers practices. Through six
situations of ADHD children in primary school, and an internship in a special
classroom for students at early school drop-out risks in secondary school, we
confirm the major impact of the trouble for the affected children regarding
their school curriculum and later, their professional future. We witness that
handling with student inattention and poor behavior is an everyday challenge
for teachers, and conclude the need to improve the screening and the care of
the concerned children.
Key words : attention, motivation, education, behavior,
ADHD, school drop-out, teachers.
Sommaire
Introduction
3
Première partie : La
problématique de recherche et le contexte théorique
8
1. L'attention
8
2. Motiver pour capter l'attention
13
3. Les troubles de l'attention
19
Deuxième partie : Présentation
du dispositif de recherche
33
1. Un appui sur l'expérience
professionnelle
33
2. Une recherche préliminaire en
classe relais
36
3. Nouvelle problématique de
recherche
40
Troisième partie : Recueil des
données
44
1. Classe n° 1 : Petite Section de
Maternelle (enseignante : R.)
44
2. Classe n° 2 : Cours Moyen
1 (enseignante : N.)
62
3. Classe n° 3 : Cours
Elémentaire 1 (enseignante : K)
74
Quatrième partie : Résultats
82
1. Présentation
82
2. Discussion
88
Conclusions
94
Bibliographie
95
Table des illustrations
Figure 1: Les trois blocs du modèle
neuropsychologique de Luria.
3
Figure 2: Le geste d'attention (Gagné et
al., op.cit. p. 16).
18
Figure 3: Les compétences cognitives de base
(Gagné et al., op. cit. p. 25)
19
Figure 4: Comparaison entre élèves de
la classe relais et les populations d'étalonnage.
38
Figure 5: Outil n°1 : l'apprentissage
coopératif (d'après Johnson & Johnson, 2009).
48
Figure 6: Outil n°2 :
l'autodétermination (d'après Deci & Ryan, Vallerand,
Wehmeyer, Wolfensberger op.cit.)
49
Figure 7: Outil n°3 : schéma
réalisé à la suite de l'entretien
50
Figure 8: Affichage des règles de vie dans
la classe
51
Figure 9: Outil n°4 : les degrés de la
motivation (d'après Deci & Ryan, op.cit.).
53
Figure 10: Outil n°5 : l'effet miroir
(d'après Servan-Schreiber, 2003, citant Gottman).
53
Figure 11: Outil n°6 : Le message en Je
(d'après d'Ansembourg, 2000).
54
Figure 12: Outil n°7 : Inciter l'autre
à changer son comportement (d'après Georges, 2000).
55
Figure 13: Outil n°8 : Devenir
élève (Guichard & Koch, 2015)
56
Figure 14: Outil n°9 : la pédagogie
Montessori (d'après Lubienska de Lenval, op.cit.).
56
Figure 15: Outil n°10 : les intelligences
multiples (d'après Gardner, 2008).
59
Figure 16: Outil n°11 : des enfants librement
consentants (d'après Freedman, cité par Joule & Beauvois,
2014)
67
Figure 17 : Outil n°12 : inciter à
changer 1 (d'après Miller et al., op.cit.).
68
Figure 18: Outil n°13 : inciter à
changer 2 (d'après Miller et al., op.cit.)
69
Figure 19: Outil n°14 : l'escalade
émotionnelle (d'après Servan-Schreiber, op.cit., citant
Gottman.
70
Table des tableaux
Tableau 1: Liste des items du questionnaire de
Conners (parents) selon cinq critères
3
Tableau 2: Liste des items du questionnaire de
Conners (enseignants) selon trois critères
25
Tableau 3: Liste des items du questionnaire de
Dupaul selon trois critères
26
Introduction
L'attention, « capacité de concentrer
volontairement son esprit sur un objet déterminé »
(Larousse, 2015) est une composante essentielle de l'apprentissage. En classe,
elle est recherchée par les enseignants qui considèrent que le
manque d'attention de leurs élèves est le défi majeur de
leur profession (Do, 2007). Certains auteurs soulignent que le problème
semble s'aggraver (Boujon & Poupet, 2011), ce qui correspond aux
observations de nombreux enseignants expérimentés. Comment
favoriser l'attention des élèves est donc une question
importante, qui mérite que l'on s'y attarde sur le plan de
l'élève, de l'enseignement, et de l'institution scolaire.
L'attention est une faculté mentale complexe, que de
nombreux chercheurs, philosophes, psychologues, pédagogues ou
neurologues, ont étudiée. Notre revue de littérature
portera sur l'étude de ce concept. Nous essaierons également de
mieux cerner les articulations entre les capacités d'attention, la
motivation, et la réussite scolaire. Les travaux des chercheurs
permettront de délimiter le cadre de notre travail, et de repérer
les modèles théoriques et les outils susceptibles de favoriser
l'attention des élèves en classe. Les différentes
théories motivationnelles, les concepts d'autodétermination,
d'interdépendance positive, et ceux relatifs aux besoins des
élèves, compétence, affiliation interpersonnelle, et
autonomie, étudiés lors du master, seront interrogés.
Les pathologies en lien avec l'attention seront
également abordées, ainsi que leurs conséquences sur la
scolarité des élèves concernés. Psychologue
scolaire oeuvrant au sein d'un RASED, le travail auprès de ces enfants
m'a fait découvrir le trouble du déficit de
l'attention/hyperactivité (TDA/H) et appréhender l'importance et
la gravité du sujet, pour l'élève concerné, sa
famille, les enseignants, les autres élèves et toute
l'institution scolaire. Cette importance a dicté le choix du
thème de ce mémoire, dont la préoccupation principale est
de rechercher ce qui peut favoriser la scolarisation de ces enfants
particuliers. Mieux comprendre l'hyperactivité, cerner les
différentes caractéristiques possibles des enfants hyperactifs et
leurs conséquences sur leur scolarité est un des objectifs de ce
travail. Pour cela nous utiliserons également les données
obtenues lors de notre stage en comparant l'attention des élèves
en situation de rupture scolaire accueillis en classe relais, et celle des
autres élèves du collège. Cette première
étude nous a permis de déterminer le rôle de l'attention
dans la performance et l'adaptation scolaires. Le travail réalisé
en classe relais a donné également des éléments sur
les facteurs, les pratiques et les dispositifs susceptibles d'optimiser cette
attention, en lien avec la littérature sur le problème du
décrochage scolaire.
Notre recherche concerne ensuite les problèmes
d'attention de leurs élèves rencontrés par trois
enseignantes en école primaire (PS, CE, CM). Dans chacune des classes
sont scolarisés un ou plusieurs élèves présentant,
à des degrés divers, des troubles de l'attention avec
hyperactivité. Des séances d'observation et d'enregistrement, des
entretiens réalisés avec chaque enseignante afin
d'appréhender leurs pratiques, leurs interrogations, leurs
réussites et leurs difficultés, permettront d'approfondir notre
problématique, ses manifestations et ses enjeux, et de repérer
les différents leviers activés par les enseignants pour favoriser
l'attention d'élèves inattentifs au sein de leur groupe classe,
tout en maintenant l'attention des autres enfants. Nous leur ferons part,
à la mesure de leur demande, des théories, pratiques, et outils
susceptibles de les aider dans la gestion de leur classe, et la
résolution de leurs problèmes quotidiens. L'utilisation ou non
des outils proposés, leurs remarques, les conclusions du travail
réalisé avec chacun de ces professionnels concernant l'impact
ressenti sur leurs pratiques, le vécu de la classe, et le comportement
de tous les élèves nous apportera des éléments
complémentaires.
Les résultats obtenus, ainsi que les interrogations qui
subsistent, alimenteront une réflexion sur les facteurs qui peuvent
favoriser la scolarisation des enfants présentant des difficultés
d'attention au sein du groupe classe, limiter leur impact sur la
disponibilité de celui-ci face aux apprentissages ainsi que sur le
climat de la classe et l'équilibre de l'enseignant. Ils permettront
également de mieux cerner ce qui, dans un système scolaire, peut
favoriser la scolarisation de ces élèves et, au-delà, leur
intégration dans la société et le monde professionnel.
Première
partie : La problématique de recherche et le contexte
théorique
1. L'attention
1.1. Historique
L'attention est un sujet de recherche étudié de
longue date, en premier lieu par les philosophes (Saint Augustin notamment,
dès le premier siècle de notre ère), puis par les
psychologues. Le père de la psychologie américaine William James
en 1890 la définit par un double mouvement de focalisation et de
sélection : « L'attention est la prise de possession
par l'esprit, sous une forme claire et vive, d'un objet ou d'une suite de
pensées parmi plusieurs qui semblent possibles [...] Elle implique le
retrait de certains objets afin de traiter plus efficacement les
autres » (Chap. 11, pp. 403-404). Le terme de
« prise de possession par l'esprit » introduit
à la fois la notion de contrôle (« prise de
possession »), et situe l'attention dans la sphère
cognitive (« esprit »). La définition
souligne également la double dimension d'intensité (attention
soutenue) et de sélectivité (attention sélective). Van
Zomeren et Brouwer (1994) complèteront cette différenciation en
décrivant trois états d'intensité de l'attention :
l'état d'alerte (état global et diffus de l'attention), celui de
vigilance (attente d'un signal avertisseur qui doit servir de
déclencheur à un comportement), et l'attention soutenue,
appelée également concentration. Concernant la
sélectivité, ils dissocient l'attention sélective et
l'attention divisée.
En 1977, Schneider et Shiffrin mettent en évidence
l'existence d'une forme d'attention qui échappe au contrôle
conscient et s'oppose aux processus contrôlés
étudiés par William James : les processus automatiques,
autonomes et irrépressibles et ne nécessitant pas de ressources
attentionnelles, contrairement aux précédents. Les recherches de
Posner et Rothbart (1998, 2000) confirment l'existence d'un processus
attentionnel qui ne relève pas d'un effort
délibéré. Cette forme d'attention, qu'ils qualifient
d'exogène, passive, automatique et dirigée par les
événements, est opposée à l'attention
endogène, qui est active, volontaire, et dirigée par le sujet.
Ces deux théories orientent sur la nécessité d'un effort
d'inhibition de l'attention exogène nécessaire pour
« faire attention ». Cette différenciation a
été associée à celle caractérisant les deux
démarches « bottom up » et
« top-down » appliquées actuellement au
fonctionnement du système nerveux (Lechevalier, Eustache & Viader,
2010).
L'effort d'inhibition peut également affecter
l'attention endogène lors du changement de focale de l'attention, dans
une démarche de flexibilité mentale indispensable à toute
opération intellectuelle un peu complexe. Les ressources attentionnelles
de l'attention endogène sont limitées : l'attention peut
être partagée (attention divisée), mais aux dépens
de la qualité de traitement des informations, à moins que
certaines tâches ne soient automatisées (la conduite automobile
notamment), permettant au sujet de réaliser en même temps
plusieurs tâches tout en réservant ses ressources attentionnelles
au contrôle de celle qui n'est pas automatisée.
1.2. Le développement de l'attention
Les facultés attentionnelles sont dépendantes de
l'âge du sujet, et varient selon les individus. Posner et Rothbart (op.
cités) ont découvert qu'elles se construisent précocement
lors des interactions, notamment conflictuelles, qui surviennent avec
l'entourage. Composantes du fonctionnement cognitif d'un sujet, elles
s'avèrent donc également liées à la sphère
émotionnelle.
Jumel (2014), reprend les travaux de Luria (1973) et de
Vigotsky (1985) qui portent sur le développement de l'attention,
processus qui part, chez le nouveau-né, de réponses involontaires
et non sélectives (l'attention exogène), pour arriver à
une activité volontaire (l'attention endogène). Il cite Luria
(1973, p. 263) : « La formation de l'attention volontaire a
une longue et dramatique histoire, et l'enfant n'acquiert une attention
efficiente et stable, organisée socialement que très peu avant de
commencer l'école (les apprentissages de l'école
primaire) ». Vygotsky et Luria observent que l'attention se
développe dans l'interaction de l'enfant avec sa mère (l'adulte
qui prend soin de lui), et notamment dans les interactions langagières,
qui parviennent progressivement à remplacer l'attention non volontaire
que l'enfant porte à ce qui l'entoure. C'est donc au cours de
l'acquisition du langage, dans un contexte d'attention conjointe (Bruner,
cité par Jumel) que se construit l'attention pour ces auteurs.
Parallèlement à l'apprentissage du langage, le langage
intérieur se met en place. Les auteurs y voient le préalable au
développement de l'attention volontaire, endogène et
sélective, associée à la faculté d'inhiber
l'attention exogène. La place du langage est primordiale, même si
certains auteurs insistent davantage sur l'interaction, verbale ou non verbale,
avec l'entourage : « Les adultes orientent l'attention d'un
jeune enfant vers des objets et des événements de l'environnement
par le geste, la médiation verbale et les interactions
réciproques » (Korkman, Kirk, & Kemp, 2003, p.13).
1.3. Attention et neuropsychologie
En tant que facteur de l'efficience cognitive en lien avec le
fonctionnement cérébral, les connaissances concernant l'attention
bénéficient de l'essor dû au développement des
nouvelles technologies d'investigation (Imagerie par Résonance
Magnétique) et de traitement de l'information. Le sujet, impliquant les
structures cérébrales et le fonctionnement chimique des
structures neuronales, s'est progressivement
médicalisé :
« Les avancées techniques dans le domaine
des neurosciences ont fourni de nombreuses données quant aux fondements
neurobiologiques des processus attentionnels. Vers la fin des années 80
et le début des années 90, des études ont montré
que des régions et des réseaux cérébraux distincts
étaient impliqués dans les différentes formes
d'attention. Posner et Peterson (1990), par exemple, ont découvert,
sur la base d'études de lésion ou d'imagerie fonctionnelle, que
l'on pouvait identifier au moins trois systèmes attentionnels à
l'intérieur du cerveau, pouvant être caractérisés
comme étant de l'attention sélective, de l'attention soutenue et
de l'attention spatiale ».
(Manly, Robertson, Anderson, & Nimmo-Smith, 2006, p.5).
L'attention est une composante des fonctions cognitives
multiforme. Le TEA-Ch, Test d'Evaluation de l'Attention Chez l'enfant, propose
des épreuves réparties selon quatre catégories :
l'attention sélective, l'attention soutenue, le contrôle
attentionnel et la flexibilité, et l'attention divisée. Korkman
et al.(op.cit.) auteurs de la NEPSY, test d'évaluation
du développement neuropsychologique de l'enfant, notent la
difficulté que pose la distinction entre les différentes
composantes de l'attention. Ils précisent que les chercheurs les
définissent de façon diverse, et retiennent les facteurs
suivants : « la régulation de l'éveil et
de la vigilance, l'attention sélective, l'attention soutenue, l'empan de
l'attention ou l'attention partagée, l'inhibition et le contrôle
du comportement (Barkley, 1988 ; Coolez et Morris, 1990 ;
Douglas, 1984 ; Mirsky, 1989) ». (Ibid., p.13).
L'attention sélective, l'attention soutenue et l'attention
divisée sont communes aux deux répartitions, ainsi que le
contrôle, affecté dans l'une d'entre elle à l'attention, et
au comportement dans la seconde. La vigilance, la flexibilité et
l'inhibition sont également des composantes de l'attention.
L'attention est au coeur du fonctionnement cognitif: Luria
(Kaufman & Kaufman, 2008, p.14), dans sa théorie des fonctions et
systèmes cérébraux, répartit les fonctions
cognitives en trois « blocs » (cf. figure 1).
Figure 1: Les trois blocs
du modèle neuropsychologique de Luria.
Le maintien de l'attention, la vigilance, constituent un des
blocs, ce qui témoigne de leur importance : « les
fonctions de vigilance du Bloc 1 sont la clé de la réussite
à tout test cognitif » (ibid., p. 15). Dans le
bloc 2 sont placées les fonctions d'analyse et de codage des
informations sensorielles, dont la mémorisation. Nous verrons, à
travers les travaux de La Garanderie, les liens étroits qui unissent,
par le biais des « évocations », le
« geste d'attention », les informations
sensorielles, et la mémorisation. Le bloc 3, Planification et
organisation des conduites, est en lien avec le développement du cortex
préfrontal. Il regroupe les fonctions exécutives, terme
défini par Brown et Deloache en 1978 (Korkman et al., op.cit.,
p. 13) : « Les composantes des fonctions exécutives
interagissent et dirigent les processus attentionnels par le maintien d'un
niveau optimal d'éveil et de vigilance et par la recherche et la
sélection d'informations pertinentes parmi l'ensemble des
stimuli » (ibid.). Les fonctions de l'attention sont
donc très impliquées dans ce troisième système
cérébral, en lien avec les fonctions cognitives, et le
comportement.
Parmi les composantes des fonctions exécutives, la
mémoire de travail « capacité à maintenir
consciente l'information pertinente pendant la tâche en cours
(Godman-Rakic, 1992) et à manipuler mentalement cette information, comme
cela est nécessaire pour répéter des séquences de
chiffres à l'envers, par exemple », a un rôle
majeur. Les liens entre la mémoire de travail et l'attention sont
étroits : la première est la condition instrumentale de la
seconde. Améliorer la mémoire de travail est une
problématique importante. Liée au développement du
langage, les orthophonistes s'emploient à cette tâche, mais les
résultats des rééducations sont souvent décevants.
De façon surprenante, certaines recherches récentes (Alloway
& Alloway, 2015) ont mis en évidence un lien entre les
activités motrices et le développement de la mémoire de
travail, ce qui ouvre sur de nouveaux horizons, et confirme la
complexité du fonctionnement neuronal.
La neuropsychologie offre des opportunités
exceptionnelles pour mieux comprendre les apprentissages. De nombreux
pédagogues commencent à utiliser les résultats de ces
recherches, et à les intégrer à leurs pratiques.
1.4. Cerveau et apprentissage
Daniel Favre (2010) cite une étude des chercheurs Stark
et al. mettant en évidence que le cerveau de l'homme et de
nombreux mammifères fournit des « récompenses
biologiques » (sécrétion de dopamine, qui
génère du plaisir), lorsque le sujet a réussi à
résoudre un problème, ou surmonter une difficulté. Il en
conclut que « le cerveau est né pour
apprendre ». A cet effet, il rapporte six grandes fonctions
cognitives et affectives jouant un rôle clé dans l'apprentissage,
en lien avec les lobes frontaux : la capacité de
représentation, qui permet d'évoquer ce qui n'est pas
présent, la flexibilité mentale, en lien avec la capacité
à changer de système de représentation, la planification,
capacité de se représenter l'avenir, la capacité
d'initiative, en lien avec l'autodétermination, l'attention endurante,
qui sélectionne les informations signifiantes, et la régulation
émotionnelle, en lien avec la conscience et le contrôle des
émotions. Il retient donc une forme combinée d'attention,
à la fois sélective et soutenue, à la base des
apprentissages.
Eric Jensen (2001) a regroupé les informations
concernant l'attention utiles à connaître pour un
pédagogue. Il confirme que le système attentionnel concerne
toutes les zones du cerveau, que les substances chimiques y jouent un
rôle essentiel, et que les gènes sont également
impliqués. Sur le plan fonctionnel, l'attention sert d'abord à
assurer la survie, et ensuite, à prolonger les états
agréables. Il précise par ailleurs que les contrastes, entre les
mouvements, les sons, et les émotions (comme la peur par exemple),
retiennent davantage l'attention, et qu'il importe donc, pour un enseignant, de
provoquer un important contraste avec ce qu'il est en train de faire s'il veut
obtenir l'attention de ses élèves. Il reprend la
différence entre l'attention endogène et l'attention
exogène, et l'applique à la situation d'apprentissage :
« Nous demandons aux élèves
d'être en mesure de reconnaître la bonne cible vers laquelle on
oriente leur attention, en général « le
professeur », de maintenir cette attention jusqu'à ce qu'ils
aient reçu toute l'information et ce, même si l'exposé dure
une heure. Pendant ce temps, nous leur demandons d'ignorer tous les stimuli
(souvent plus intéressants) émanant de l'environnement. Cette
demande est raisonnable, lorsque l'objet d'apprentissage est pertinent,
engageant et choisi par l'apprenant. Lorsque ces conditions ne sont pas
respectées, il est statistiquement peu probable que nous puissions
obtenir et conserver l'attention de toute la classe ».
(Jensen, op. cit. p. 44)
L'attention est dépendante du fonctionnement chimique
du cerveau. Neurotransmetteurs, hormones, et peptides interviennent sur son
fonctionnement. C'est ainsi que l'adrénaline et la noradrénaline
la favorisent et que l'acétylcholine (neurotransmetteur associé
à la somnolence) a un rôle inhibiteur. L'attention n'est pas
stable dans la journée : elle est sujette aux rythmes circadiens,
« l'un des cycles clé du cerveau qui dure environ de 90
à 110 minutes » (p.46), ce qui explique son
fonctionnement en « montagnes russes » et plaide
en faveur de pauses régulières. D'autres chercheurs ont
observé la nécessité de pauses fréquentes dans le
rythme des apprentissages. Tomatis, cité par Vianin (2009)
préconise de faire des pauses d'environ 10 à 20 minutes toutes
les 40 minutes (en variant les activités au cours de cette
période) pour optimiser les apprentissages. Jensen confirme (p.
47) : « En fait, une attention externe véritable ne
peut être maintenue à un niveau élevé et constant
que sur une brève période, généralement de dix
minutes ou moins ». Ces pauses facilitent la
compréhension, l'assimilation, et la mémorisation :
« Pour être en mesure de la traiter [l'information] ou de
comprendre ce dont il s'agit, un élève doit « se
retirer en lui-même » et délaisser son attention
externe » (p. 48). Sur le plan neurochimique, ces pauses
permettraient de recycler le CREB, protéine impliquée dans la
mémoire à long terme, ce qui explique qu'elles facilitent la
mémorisation. L'auteur insiste également sur la
nécessité de faire la sieste pour les plus jeunes, et sur
l'importance pour les enseignants aussi, de disposer de temps personnel et de
pauses de qualité entre les phases d'enseignement.
1.5. Attention et mémorisation
L'apprentissage, qui consiste à
« acquérir par l'étude, par la pratique, par
l'expérience une connaissance, un savoir-faire, quelque chose
d'utile » (Larousse, 2015) est étroitement lié,
via la mémorisation, à l'attention : « La
mémorisation a lieu dans la foulée de l'attention ; elle
permet la conservation des représentations mentales des données
codées et, par conséquent, leur possible
utilisation » (Chayer, 2001, p. VIII). Faire attention est donc
la porte de l'apprentissage, et son ouverture conditionne celui-ci. Barhrick et
Hall, cités par Jensen (op.cit.), ont montré
l'importance jouée par le contexte dans la mémorisation, ce qui
l'incite à conseiller de « graver l'apprentissage dans les
émotions » (p. 119). Apprentissage, mémorisation,
et attention, sont des démarches cognitives toutes trois
étroitement liées à la sphère affective, donc au
contexte qui leur est associé. Ce lien implique une double approche,
neuropsychologique, mais aussi sociocognitive, qui justifie que l'on s'attarde
sur les travaux des psychopédagogues sur la motivation en contexte
scolaire.
2. Motiver pour capter
l'attention
2.1. Les théories de la motivation
Les théories de la motivation sont nombreuses, plus
d'une centaine d'après les travaux de Fabien Fenouillet (2012), ce qui
nécessite de faire un choix. Il importe, notamment, de retenir celles
qui concernent plus spécifiquement le contexte scolaire, en particulier
les enfants d'âge primaire. Roland Viau (2009), propose un modèle
prenant en compte quatre facteurs : les facteurs personnels, relatifs
à la société, à l'école, et à la
classe. La dynamique motivationnelle de l'élève est
caractérisée par son engagement cognitif et sa
persévérance face aux apprentissages. Il retient trois conditions
déterminantes pour favoriser cette dynamique : qu'il
perçoive la valeur de l'activité (l'intérêt), sa
compétence pour la réaliser, et qu'il ait un sentiment de
contrôler le déroulement de cette activité. Sans entrer
dans les subtilités de la pensée de chaque auteur, ce
modèle permet d'introduire et d'organiser en trois points principaux
plusieurs courants importants des théories motivationnelles :
L'intérêt est relatif aux goûts et aux
besoins des élèves. C'est ainsi qu'on peut classer dans cette
catégorie le besoin de jeu, « comportement spontané qui
dure toute la vie ». L'auteur précise :
« Nous tenons ce besoin inné de nos
animaux familiers, le chat, le chien, et au zoo ou dans les documentaires, on
peut constater l'importance du jeu chez les singes, qui n'arrêtent pas de
se chamailler, de courir, et de découvrir les curiosités de la
vie. Le jeu reste fondamental chez l'adulte et les jeux télé sont
parmi les programmes les plus populaires, du foot aux jeux de
connaissance ».
(Lieury & Fenouillet, 2013 p.15)
Nous retenons ce besoin de jeu comme un besoin essentiel,
notamment pour des enfants. Le recours à l'humour, un climat de classe
agréable, des activités sous forme de jeux, sont en lien avec le
besoin de jeu.
Le besoin de curiosité (ibid.) est
également au premier plan : tout le monde connaît les
questions incessantes que posent nombre de jeunes enfants à leurs
parents. Ce besoin fondamental nous semble apparenté au besoin de
nouveauté signalé également par de nombreux auteurs
(Jensen, op.cit., Lieury & Fenouillet, op.cit.). Jensen
observe à ce sujet (p. 66) : « Les rats, tout comme les
humains, recherchent continuellement de nouvelles expériences et de
nouveaux comportements, apparemment sans égard à la
récompense ou à l'impulsion ». Ce besoin de
nouveauté interfère avec un autre besoin, essentiel notamment
pour les enfants, le besoin de sécurité. Jensen observe (p.
100) : « Trop de nouveauté crée de la
détresse tandis que pas assez cause de l'ennui ». Les
chercheurs soulignent également le besoin de sens des apprenants :
trouver du sens, de la pertinence aux activités proposées est un
besoin essentiel, y compris pour les enfants.
Le sentiment de compétence est lié au besoin
d'estime, mis en évidence par William James au XIXème
siècle, et baptisé « estime de soi » par le
psychosociologue. Bandura a développé une théorie
associant le sentiment de compétence du sujet dans un domaine, et la
motivation : une personne sera motivée dans la mesure où
elle a le sentiment qu'elle pourra réussir dans la tâche. Il
importe donc que celle-ci corresponde à ce qu'il a le sentiment de
pouvoir réussir (Lieury et Fenouillet, op.cit.). Cette
théorie se rapproche de la position de Vygotsky (1997),
caractérisant la zone proximale de développement. On peut ainsi
considérer que l'individu est davantage motivé par ce qu'il peut
parvenir à faire (zone proximale de développement) que par ce
qu'il sait faire (zone actuelle). Il est rebuté par ce qu'il pense ne
pas pouvoir faire (zone distale). Ces théories sont fondamentales pour
l'enseignant, puisqu'elles indiquent qu'il est important d'éviter de
placer l'enfant dans des situations d'échec à
répétition, donc qu'il faut adapter le niveau de l'enseignement
à ce que peut faire l'élève. Elle indique également
qu'il s'agit de dédramatiser l'erreur, afin que l'enfant accepte de se
tromper sans remettre en cause systématiquement son sentiment
d'efficacité personnelle.
Les recherches de Gardner, universitaire psychologue
cognitiviste (Gardner, 2008) concernant les intelligences multiples (figure 15)
orientent sur la possibilité, pour le professeur, d'adapter son
enseignement à la forme d'intelligence de ses élèves. En
la reliant à sa fonction sociale, l'intelligence est vue comme un
ensemble d'habiletés utiles pour la vie quotidienne, une capacité
à rechercher et soulever des problèmes permettant
d'acquérir de nouvelles connaissances, et une capacité à
créer un produit ou un service valorisé par le groupe social. En
replaçant la dimension sociale au centre de la conception de
l'intelligence, il met en valeur des facettes importantes et souvent
négligées par le système scolaire, davantage axé
sur les domaines linguistiques et mathématiques. Il met l'accent et
valorise des aspects importants de l'intelligence, utilisés dans la vie
courante, qui permettent aux personnes de trouver leur place dans la
société, et de contribuer à son fonctionnement. Ce
faisant, il réduit le fossé entre la formation dispensée
à l'école, restrictive, et la multiplicité des
compétences sur lesquelles peuvent reposer la réussite sociale et
professionnelle. Ces formes d'intelligence sont au nombre de sept (recherches
de 1983) auxquelles il en ajoute une huitième en 1996 :
linguistique, logico-mathématique, kinesthésique, spatiale,
musicale, interpersonnelle, intra personnelle et naturaliste. De nombreux
pédagogues (Armstrong, 1999, Campbell, 1999, Sirois et al.,
2015) se sont, rapidement, inspirés de ces concepts, et les ont
appliqués en classe : « réaliser des
apprentissages en utilisant son intelligence dominante permet à chacun
de prendre confiance en soi », « ...le profil de classe...
n'est plus le même : tous les élèves sont
désormais dans une dynamique de participation et de
progression », « Après un temps consacré aux
intelligences qu'il maîtrise le mieux, l'élève peut
être amené à aborder l'exercice par le biais d'autres
formes d'intelligences qui lui sont moins naturelles » (Sirois et
al., op.cit. p.58-59). Le principe consiste à proposer des
entrées dans les apprentissages basées sur les différentes
formes d'intelligence : l'enseignant se procure du matériel support
en lien avec chaque forme d'intelligence qu'il regroupe dans des
« coins » de la classe dédiés à
chacune, et présente les notions nouvelles en veillant à activer
les différentes approches. En élargissant le spectre des
activités proposées, il multiplie les possibilités de
réussite des élèves, leur permet de prendre confiance en
eux et de renforcer leur estime de soi.
Le sentiment de contrôler le déroulement de
l'activité est en lien avec le besoin d'autonomie, autre besoin
fondamental mis en évidence par Abraham Maslow (1943), repris sous
différentes formes dans les théories de la motivation,
développé par Deci et Ryan (1985) dans leur théorie de
l'autodétermination. Les résultats de ces chercheurs indiquent
que le sentiment d'être contraint démotive :
« ...le manque d'autodétermination et surtout la
contrainte dégradent la motivation ». (Lieury &
Fenouillet, op.cit., p. 102). C'est ainsi que les notes motivent les
élèves lorsqu'elles sont informatives (favorisant la connaissance
de soi), mais qu'elles démotivent lorsqu'elles sont à
visée contrôlante. Ils opposent motivation intrinsèque et
motivation extrinsèque et privilégient la première, qui
implique que l'élève apprécie la tâche pour
elle-même. A l'inverse, la motivation extrinsèque est
hétéro déterminée : l'élève
réalise la tâche pour ne pas se faire punir, pour faire plaisir,
ou pour avoir de bonnes notes. Le continuum de l'autodétermination a
été schématisé (figure 9) au cours du travail
réalisé avec les enseignantes du primaire. Dans le cadre
scolaire, Roland Viau (op.cit.) constate que peu
d'élèves manifestent une motivation autodéterminée
face aux apprentissages, et estime qu'il ne serait pas réaliste de
demander aux enseignants d'avoir pour objectif de développer une telle
motivation pour tous les élèves. Par contre, il retient de la
théorie de Deci et Ryan l'intérêt de développer
l'autorégulation des apprentissages pour les élèves,
notamment de les laisser faire des choix et jouer un rôle dans le
déroulement des activités.
La théorie de l'autodétermination est
basée sur les travaux de nombreux chercheurs (Deci & Ryan,
op.cit.,Vallerand & Thill, 1993, Wehmeyer, 2004, Wolfensberger,
2002). Présentée par Laetitia Vande Vander dans le cadre de
l'UE9, notre groupe de travail (Massy, Mayet-Noël, & Ruaud, 2014) a
élaboré à partir de cette théorie un schéma
en langage facile à lire (cf. figure 6), qui illustre bien les quatre
composantes de la théorie : l'autonomie, l'autorégulation,
l'autoréalisation, et l'empowerment, que nous avons traduit en
français par « responsabilisation ». Un
questionnaire à l'intention des enseignants afin de déterminer la
part de l'autodétermination laissée à leurs
élèves dans leurs pratiques avait également
été réalisé (annexes 11 et 12), et proposé
aux sept enseignants d'une même école, permettant un premier
étalonnage. Ce questionnaire a été réutilisé
dans le cadre de la présente étude.
Murray et Maslow, repris ensuite par Deci & Ryan, ont
dès le départ identifié le besoin d'affiliation (passer du
temps avec d'autres individus) et les besoins relationnels (sentiment
d'appartenance, besoin de reconnaissance) comme des besoins fondamentaux. En
classe, ces besoins passent par la relation avec l'enseignant, et la relation
avec les pairs.
· Avec l'enseignant
La qualité de la relation
maître-élève est un aspect important du contexte scolaire.
En 1968, Rosenthal et Jacobson ont identifié l'importance de l'effet
Pygmalion, qui appelle à une représentation évolutive,
optimiste, des compétences de chaque élève par les
enseignants. Ce premier point concerne les représentations des
performances des élèves de l'enseignant et leurs
répercussions sur la qualité de leurs apprentissages.
Sur un plan plus affectif, la qualité des relations est
également importante, étudiée par de nombreux
psychopédagogues et psychologues (Carré, 1998, Chemouny, 2011,
Gordon, 2005, Rosenberg, 2006, etc.) afin d'aider les enseignants à
établir des relations agréables et fonctionnelles avec les
élèves et de concilier qualité des relations et
autorité, en évitant les pièges de l'autoritarisme.
· Avec les pairs
Les relations avec les autres élèves
présentent également deux volets, cognitifs et affectifs. Sur le
plan cognitif, les chercheurs ont mis en évidence, à travers le
conflit sociocognitif notamment (Darnon, Butera & Mugny, 2008), la richesse
de l'échange et du travail de groupe dans les apprentissages. Le courant
pédagogique axé sur la coopération est basé sur ce
principe et en tire son efficacité.
Sur le plan affectif, la qualité des relations
établies par un élève avec ses camarades est un
élément important de son bien être actuel. Il conditionne
également son avenir par le biais de ses habiletés sociales.
La qualité des relations établies avec
l'enseignant, comme avec les pairs, permet d'établir un climat
relationnel positif sécurisant. Les relations interpersonnelles sont
à l'origine d'émotions qui favorisent les apprentissages, selon
les conseils de Jenson (op.cit. p. 83) : « Pour
qu'il y ait un bon apprentissage, il ne faut pas éviter les
émotions, mais au contraire, il faut les susciter ».
La revue de littérature permet d'isoler ces quatre
composantes fondamentales (intérêt, compétence,
contrôle, et relation) pour susciter l'attention des élèves
en favorisant leur motivation. En activant ces composantes, il est possible de
capter l'attention, d'inciter les élèves à
« faire attention ».
2.2. Des courants pédagogiques particuliers
Un certain nombre de courants pédagogiques utilisent,
de façon plus ou moins empirique, à des degrés divers et
le plus souvent de façon panachée, ces différents
leviers :
La pédagogie Freinet, classée dans les
« pédagogies actives » est un courant qui
privilégie l'expression personnelle des élèves, les
projets, et le travail en groupe. Les supports motivationnels de
l'auto-détermination sont donc mis en oeuvre : autonomie,
autorégulation, autoréalisation et responsabilisation sont au
premier plan. L'engagement émotionnel, au travers de l'expression libre,
est fort. Parallèlement, le fonctionnement coopératif et
l'étude du milieu local préconisés par Freinet
répond aux besoins relationnels des élèves, facteur
motivationnel supplémentaire. La multiplicité des supports
pédagogiques, permettant à chacun de trouver son domaine de
réussite, est susceptible, par ailleurs, d'alimenter l'estime de soi de
chaque élève (d'après Peyronie, 1999).
La Pédagogie de Maîtrise à Effet
Vicariant, qui reprend de nombreux concepts de la pédagogie Freinet
(dont les plans de travail, programmes d'activités sur trois semaines,
que les élèves réalisent dans l'ordre qu'ils souhaitent),
propose également davantage de possibilités de contrôle de
son activité par l'élève. Par ailleurs, le système
vicariant (organisant l'aide entre les élèves : chaque
élève peut demander de l'aide à un autre
élève, ou proposer la sienne) permet une double réponse
aux besoins relationnels des élèves, mais aussi à ceux
relatifs à l'estime de soi (prendre conscience, à travers l'aide
apportée aux autres, de ses compétences) (d'après
Huberman, 1988).
La pédagogie Montessori, basée sur la
manipulation, le travail autonome, l'épanouissement de chaque enfant,
les stimulations sensorielles, et le retrait de l'adulte, applique
également les concepts clefs de l'auto-détermination
(d'après Lubienska de Lenval, 2001).
De nombreux autres courants pédagogiques, dans la
mouvance des pédagogies actives, pourraient être cités,
appliquant tous à des degrés divers, les concepts de
l'autodétermination, permettant à l'élève davantage
d'expression et de liberté, et offrant plus d'occasions de
développer ses habiletés sociales. Notons également
qu'elles préconisent toutes une approche plus individuelle du cadre
éducatif, ce qui est peut être inhérent au concept
d'autodétermination, mais n'est que très peu souligné dans
les travaux des théoriciens de la motivation présentés
plus haut.
Le problème des différences individuelles,
inclinations ou compétences, est au premier plan pour de nombreux
chercheurs et professionnels de l'enseignement, qui, au-delà du
« vouloir » faire attention, se mobilisent sur le
« pouvoir » faire attention » des
élèves.
2.3. Le geste d'attention
Premier des cinq gestes mentaux pédagogiques
fondamentaux définis par La Garanderie (1982), le geste d'attention est
celui « par lequel le message pédagogique est accueilli
par l'élève » (p. 8), les quatre autres
étant le geste de mémorisation, ceux de compréhension et
de réflexion, et l'imagination créatrice. Le chercheur relie
ensuite attention et perception, et constate « l'identification
abusive : attention égale intérêt. [...] Nous
connaissons des cas nombreux où, en dépit de
l'intérêt manifeste, l'attention ne suit pas » (p.
23), car l'élève ne sait pas comment faire attention. Le
pédagogue doit donc lui apprendre la structure du geste mental de
l'attention : « faire exister mentalement, sous forme
d'image, l'objet perçu » (p. 24). L'auteur précise
ensuite la différence entre l'acte d'attention et celui de
mémorisation, le premier se faisant en présence de l'objet
perçu, et le second en son absence. Ce faisant, il pose d'emblée
le lien entre l'attention et cette forme que l'on pourrait appeler de
perception prolongée qu'est la mémoire immédiate, et il
confirme également que le geste d'attention précède celui
de mémorisation, qui ne peut avoir lieu sans attention. La
compréhension intervient juste après l'attention : elle est
décrite comme étant le « fruit d'un geste mental
d'attention conduit à son terme et dont il ne faut sauter aucune
étape » (p.36).
Pour La Garanderie, l'enfant peut faire attention lorsqu'il en
a le projet : « l'attention naît d'une structure de
projet de sens en tant que direction (Je suis attentif à ...pour) et en
tant que signification (J'évoque pour donner du sens à ce que je
perçois) » (Pébrel, cité par Gagné,
Noreau, & Ainsley, 2001, p. 16). Gagné illustre ses propos par la
figure 2.
Objet
de perception
Figure 2: Le geste
d'attention (Gagné et al., op.cit. p. 16).
Le geste d'attention est défini de la façon
suivante :
" Etre attentif, c'est transformer en évocations ce
que l'on perçoit avec ses cinq sens. Savoir à l'avance que faire
attention c'est précisément procéder à un travail
mental de codage : voilà qui permet à l'apprenant d'orienter son
activité mentale. Faire attention, c'est selon les cas :
- voir pour re-voir dans sa tête,
- entendre pour ré-entendre dans sa
tête,
- voir pour se raconter dans sa tête,
- entendre pour s'illustrer mentalement ce qu'on
entend ».
(Chich, Jacquet-Montreuil, & Mériaux, 1991, p.65)
L'évocation est ainsi au coeur du geste d'attention. Le
double support, auditif et visuel, qui constitue une des bases de la gestion
mentale est posé, ainsi que la différenciation entre les
élèves, dont La Garanderie découvre qu'ils peuvent
utiliser de préférence des images, ou des verbalisations. Ce
faisant, La Garanderie souligne que la motivation est seconde pour beaucoup
d'élèves, contrastant avec les positions des auteurs
précédents : le « vouloir faire
attention » passe après le
« pouvoir » : « D'une façon
générale, on constate que la non-motivation découle du
sentiment d'incapacité. Combien de fois ai-je entendu des enfants,
auxquels j'enseignais les évocations pour maîtriser l'orthographe
d'usage, dire : "Ah! Si j'avais su que c'était ça ! ..." (La
Garanderie, 1991, p.57).
Les gestes mentaux de La Garanderie sont des concepts
pédagogiques qui ont posé les bases de la
métacognition : les récents ouvrages des pédagogues
canadiens (Chayer, op.cit., Gagné, 1999, Gagné, Noreau
& Ainsley, 2001, Ouellet, 1996, ...) utilisent et prolongent la
démarche du chercheur. Chich, Jacquet-Montreuil & Mériaux
(op.cit.) résument ainsi le travail d'explicitation
préconisé par le pédagogue : "Les
difficultés scolaires de nombre d'enfants proviennent du fait que les
messages qu'ils reçoivent sont truffés d'implicite qu'ils ne
savent pas décoder. En effet lorsque quelque chose nous semble
évident nous omettons souvent de le dire et ce qui est flagrant pour les
uns ne l'est pas toujours pour les autres" (p. 85). Suivant la
démarche de La Garanderie, ces psychopédagogues ont aidé
de nombreux enfants à progresser, développant pour certains des
programmes spécifiquement dédiés au développement
de l'attention (Caron, 2002, Programme PACE [Programme d'Action Communautaire
pour les Enfants], 2001,
www.learninginfo.com). La
figure 3 illustrant le programme PACE, résume les différents
facteurs en jeu lors des apprentissages, l'emprunt fait aux concepts de La
Garanderie, et la place du geste d'attention dans l'acte d'apprendre.
Figure 3: Les
compétences cognitives de base (Gagné et al., op. cit.
p. 25)
3. Les troubles de l'attention
La situation scolaire nécessite de la part des
élèves un contrôle moteur, attentionnel, et
émotionnel importants, que certains enfants ont beaucoup de mal à
mettre en place. Tom Manly et ses collaborateurs constatent :
« Les anomalies du développement de
l'attention sont relativement courantes dans les affections de l'enfant. Des
recherches ont décrit des problèmes d'attention associés
à une grande variété de troubles développementaux,
de troubles acquis ou de perturbations émotionnelles. Ces troubles
incluent le déficit de l'attention/hyperactivité (TDA/H),
l'autisme, le syndrome d'Asperger, les traumatismes crâniens, le syndrome
de Tourette, le diabète insulino-dépendant,
l'anxiété ou les manifestations du stress post-traumatique
(Anderson et Pentland, 1998 ; August et Garfinkel, 1990 ; Brouwers,
Riccardi, Fedio et Poplack, 1985 ; Catroppa, Anderson et Stargatt,
1999 ; Condor et Nursey, 1998 ; Klin, Sparrow, Volkmar, Cicchetti et
Rourke, 1995 ; Lang, Athanasopoulos et Anderson, 1988 ; Rovet et
Ehrlich, 1988). »
(Tom Manly et al., op. cit. p. 5)
Ces enfants « hyperkinétiques »
interpellent les enseignants, souvent dès le début de leur
scolarité, car ils présentent des difficultés
d'adaptation : ils ne parviennent pas à investir les
activités proposées de façon stable et durable, ont
souvent des relations difficiles avec les autres élèves, peuvent
adopter des comportements dangereux pour eux et pour les autres, et
compromettre le bon déroulement des activités. Alors que le
climat de sa classe se dégrade, l'enseignant se sent remis en cause
professionnellement et se fragilise. Les relations avec l'enfant, la famille,
se détériorent, ainsi que celles entretenues avec les autres
familles, affectant parfois l'école toute entière.
Il est important alors que l'enseignant, l'équipe
éducative, puissent trouver de l'aide auprès de leur
hiérarchie, inspecteur et conseillers pédagogiques, ainsi que de
la part des enseignants spécialisés, des psychologue et
médecin scolaires, et intervenants extérieurs
éventuels.
3.1. Le Trouble de l'Attention/Hyperactivité (TDA/H)
L'hyperactivité est une entité nosologique qui a
émergé lentement. Les travaux de Thomas & Willems, 1997,
Lecendreux, Konofal & Touzin, 2003, et Bange & Mouren, 2005, ont permis
la réalisation de cet historique :
Les premières observations d'enfants hyperactifs
remontent au 19ème siècle (1845 : description de
l'« instabilité » par l'Allemand Heinrich Hoffman).
En 1896, le Français Bourneville associe à la notion
d'instabilité celles de « suggestibilité » et
d'« agressivité ». Dès 1905, Philippe et Paul
Boncour envisagent l'instabilité comme un syndrome particulier, en
insistant particulièrement sur
l' « indiscipline » de ces enfants pour lesquels
ils conseillent déjà une approche pédagogique
spécifique. Ils envisagent aussi un substrat neurophysiologique du
trouble, tout comme le médecin anglais Still, qui décrit en 1903
le « Brain Damage Syndrome », hyperactivité
motrice exagérée à la suite de traumatisme crânien
ou de méningo-encéphalite aiguë. Le clinicien
français G. Heuyer associe en 1914 l'instabilité et la
« délinquance » et souligne les divers champs
d'inadaptation des sujets atteints (familial, scolaire, professionnel, et
social). En 1925, le terme d' « instabilité psychomotrice
constitutionnelle » est avancé par Dupré, qui insiste
également sur l' « incapacité
d'attention » et « l'étourderie », tandis
qu'en Amérique du nord, suite à une épidémie
d'encéphalite survenue à la fin de la Première Guerre
mondiale, un courant organiciste autour de l'hyperactivité se
développe (Hohman, 1922. Ebaugh et Strecker, 1923). En 1937, les travaux
de Bradley mettent en évidence l'effet bénéfique de la
Benzédrine sur les troubles du comportement et les résultats
scolaires d'enfants instables d'intelligence normale. L'hypothèse d'un
substrat neurophysiologique des troubles, causé probablement par une
lésion minime et amélioré par le traitement, lui
paraît alors vraisemblable. En 1947, les travaux de Strauss et Lehtinen,
étayés par des tests neuropsychologiques, présentent le
syndrome de « Minimal Brain injury » pour rendre compte des
désordres cognitifs et perceptivo-moteurs rencontrés chez les
enfants hyperkinétiques présentant des troubles de l'adaptation
scolaire et familiale. Une lésion cérébrale passée
inaperçue leur semble susceptible d'expliquer les troubles
présentés par ces enfants. En 63 et 66, les chercheurs
nord-américains Bax et Mackeith, puis Clements, remplaceront le terme
« Minimal Brain injury » par la notion de
« Minimal Cerebral Dysfonction » : une lésion,
même non visible, leur paraît pouvoir être à l'origine
d'un certain nombre de troubles comportementaux et attentionnels,
associés à des signes neurologiques mineurs. Le concept de
Dysfonctionnement Cérébral Minime (DCM) sera souvent repris en
neuropsychologie, associé notamment aux études concernant les
troubles des apprentissages, en particulier le langage, et les
différentes lésions cérébrales. En Europe, les
recherches de Wallon concernant l'enfant turbulent mettent également en
évidence un substratum organique, tout en reconnaissant le rôle
fondamental du milieu social et des affects dans la genèse de
l'hyperactivité. Face à ce courant organiciste de plus en plus
affirmé, des auteurs comme Segal (1969) et Winnicott (1975)
considèrent que l'instabilité psychomotrice ne ferait que
témoigner d'un conflit psychoaffectif contre lequel l'enfant est en
train de lutter, expression symptomatique d'une pathologie
réactionnelle, voire de perturbations plus graves pouvant affecter
l'organisation même de la personnalité du sujet. Bergès
(1985) et Flavigny (1988) complètent ce point de vue en insistant sur la
« pathologie du lien » présente dans l'histoire des
enfants instables, tandis que des auteurs plus systémiques mettent en
évidence le rôle potentiellement stabilisateur que pourrait avoir
l'enfant hyperkinétique dans le fonctionnement familial,
fréquemment affecté par des problèmes conjugaux. En
France, dans les années 70, les travaux d'Ajuriaguerra prolongeront la
démarche intégrative, préfigurée par Wallon,
associant les notions de substratum organique et de symptomatologie
réactionnelle affective et éducative, alors qu'aux Etats-Unis et
au Canada, suivis ensuite par la Grande Bretagne puis l'Europe du Nord, le
« syndrome hyperkinétique » puis le
« syndrome de l'enfant hyperactif » est pris en compte
dès les années 60, et introduit en 1968 dans le DSM II (American
Psychiatric Association's Diagnostic and Statistical Manual of Mental
Disorders) . Le trouble est bipolaire : sont isolées une composante
relative à l'hyperactivité/impulsivité d'une part, et une
autre qui concerne l'inattention. Il est repris dans les mises à jour
suivantes et se retrouve dans le DSM IV de 1994 sous le terme de
« Attention Deficit and Hyperactivity Disorder ». Le DSM V
(2015, en cours de traduction) reprend ce même terme et étend le
diagnostic aux adultes, car les recherches de ces dernières
années ont mis en évidence que ceux-ci pouvaient encore en
souffrir. Dès les années 70, le trouble est largement reconnu et
pris en charge aux USA en administrant des psychostimulants et en
élaborant des programmes destinés à améliorer et
faciliter les relations entre l'enfant et sa famille, son intégration et
ses résultats scolaires (travaux de Barkley de 1976 à 1988). En
1993, l'Organisation mondiale de la santé publie la CIM 10
(Classification Internationale des Maladies), qui reprend plusieurs rubriques
relatives à l'hyperactivité : les troubles
hyperkinétiques, les troubles des conduites, la perturbation de
l'activité et de l'attention. Le trouble n'est donc plus une
« invention américaine ». De surcroît, les
études épidémiologiques mettent en évidence la
forte probabilité d'un support génétique.
Actuellement, le TDA/H est la première cause de
consultation en psychopathologie de l'enfant dans nombre de pays
industrialisés. La fréquence du TDA/H est de 3 à 5 % (6 %
pour Manly et al., op.cit.) et diffère peu selon les
pays. Les garçons seraient trois fois plus concernés que les
filles (Lecendreux et al., op.cit.).
En France cependant, la spécificité du Trouble
reste controversée, notamment par toute une partie de professionnels de
la pédopsychiatrie attachés aux théories psycho dynamiques
de la personnalité. Des congrès médicaux sont
néanmoins organisés, des ouvrages sont édités, et
des rapports, publiés par l'INSERM en 2002 et 2005 concernant le
« Dépistage et la prévention des troubles mentaux
chez l'enfant et l'adolescent » et le « Trouble
des conduites », ont essayé d'informer et de promulguer
les recherches effectuées sur ces différents thèmes. Si
une évolution commence à se faire sentir, les réactions de
nombreux professionnels (Manifeste « Pas de zéro de
conduite » signé en 2006 suite au rapport INSERM par un
certain nombre d'entre eux à l'encontre des actions de prévention
préconisées), montrent à quel point le débat est
passionnel et dogmatique, entaché de préoccupations politiques,
comme l'ont confirmé par la suite les prises de position et commentaires
sur ces sujets observés lors de la campagne présidentielle de
2007. Les parents des enfants concernés, à l'image des parents
d'enfants autistes, se sont regroupés en associations afin de faire
reconnaître le trouble. L'une des plus représentatives,
HyperSupers, publie sur son site ce courrier du pédopsychiatre Michel
Graff (2006), qui souligne les différents enjeux et exprime ses
craintes :
« Si les psy. ont finalement abandonné la
culpabilisation des parents d'autistes, ils continuent trop souvent à
livrer des interprétations irrationnelles et culpabilisantes aux parents
d'enfants opposants, instables, inattentifs, etc... », « Je
crains que le mouvement « pas de zéro de conduite »
ne tente de défendre ces positions typiquement françaises d'une
certaine pédopsychiatrie qui ne marche pas, c. à d. qui n'aide
réellement ni les parents ni leurs enfants », « Je
m'étonne aussi que les auteurs du texte puissent mettre en doute ce
qu'il peut y avoir d'héréditaire dans les troubles
évoqués. Peut-être croient-ils que pour les chercheurs de
l'INSERM, l'hérédité du trouble hyperactif par exemple,
est la même que celle réglant la couleur des petits pois ? Il
y a maintenant un certain consensus pour estimer que plus l'autisme est
diagnostiqué précocement, et espérons-le traité en
conséquence, avec la collaboration des parents - et plus
l'évolution peut être amendée. Pourquoi n'en serait-il pas
de même pour les autres troubles ; ceux pour lesquels ce qu'on
appelait « la constitution » est déterminante dans
son interaction avec le contexte de vie de l'enfant ? ».
(Michel Graff, op. cit.)
3.2. Le diagnostic.
3.2.1. Les critères
Les trois classifications proposées par le DSM IV, la
CIM-10, et la Classification Française des Troubles Mentaux (cf. annexe
1), sont axées sur trois critères principaux : l'attention,
l'hyperactivité, et l'impulsivité.
· Le DSM IV regroupe les symptômes sous le terme
« trouble du déficit de
l'attention/hyperactivité », bien différencié du
trouble des conduites ou du trouble oppositionnel. Ils sont
présentés selon deux axes, inattention d'un côté (6
symptômes sur 9 sont nécessaires), et
hyperactivité/impulsivité de l'autre (6 symptômes sur 9,
dont 3 seulement qui concernent l'impulsivité). Il est mentionné
que certains des troubles étaient présents avant 7 ans (12 ans
dans le DSM V), qu'ils doivent être observés depuis plus de 6
mois, au moins dans deux types d'environnement différents, et être
invalidants. Trois types du même trouble sont possibles : TDA/H,
type mixte, TDA/H, type inattention prédominante (6 critères
concernant l'hyperactivité/impulsivité non remplis), et le TDA/H
type hyperactivité/impulsivité prédominante (6
critères concernant l'attention non remplis).
· La CIM-10 (annexe 2) regroupe les symptômes sous
le terme « troubles hyperkinétiques ». Les trois
mêmes facteurs sont pris en compte (inattention, hyperactivité et
impulsivité) mais isolément. Concernant l'attention, les
mêmes symptômes que le DSM IV sont retenus, dans le même
nombre. L'hyperactivité (3 symptômes sur 5 proposés sont
nécessaires) est séparée de l'impulsivité (1
symptôme sur 4 proposés est nécessaire). Les
symptômes retenus sont les mêmes (notons cependant que le fait de
parler trop est classé dans l'hyperactivité par le DSM IV, et
dans l'impulsivité par la CIM 10). Le trouble doit être
envahissant, persistant (plus de 6 mois), invalidant, et être
présent dans plus d'une situation. Il est d'ailleurs conseillé de
façon explicite de rechercher des informations auprès de
plusieurs sources. Il est indiqué que le trouble doit survenir avant
l'âge de 7 ans. Enfin, un commentaire précise que lorsque le
trouble ne concerne qu'un seul critère (l'attention seule par exemple),
il n'entre pas dans la classification des troubles hyperkinétiques mais
dans celle des troubles de l'attention. De même, des symptômes
d'hyperactivité sans trouble de l'attention ne relèvent pas d'un
trouble hyperkinétique, mais d'un trouble de l'activité. Par
ailleurs, lorsque les difficultés concernent une seule situation, on
parlera de « trouble ne survenant qu'à
l'école », ou de « trouble ne survenant qu'à
la maison ».
· La Classification Française (annexe 3) emploie
les termes de « hyperkinésie, instabilités
psychomotrices » pour qualifier un « ensemble de
symptômes ». Deux versants sont retenus : psychique (avec
les difficultés d'attention, le manque de constance et
l'impulsivité), et moteur (hyperactivité ou agitation motrice
incessante). Les symptômes ne sont pas développés
davantage. Les troubles sont plus importants dans les situations demandant de
l'application, et peuvent disparaître transitoirement. Les troubles de
l'attention sans hyperactivité motrice sont inclus. Il n'est pas
mentionné de possibilité d'hyperkinésie sans trouble de
l'attention, ni d'âge indiquant la précocité du trouble. Il
est mentionné que les troubles doivent être en net décalage
par rapport à l'âge et au niveau de développement mental de
l'enfant, et qu'ils sont plus importants dans les situations nécessitant
de l'application, en classe notamment. Ils peuvent disparaître
transitoirement dans certaines situations, par exemple en relation duelle ou
dans une situation nouvelle. Enfin, le diagnostic différentiel
nécessite une vigilance face à une éventuelle
manifestation d'excitation maniaque ou hypomaniaque.
Ces trois classifications montrent bien, au travers de leurs
différences, la reconnaissance décroissante (dans l'ordre de
présentation) faite à l'entité nosologique du Trouble de
l'Attention/Hyperactivité mise en valeur, principalement, par les
chercheurs américains. Les deux premières développent
explicitement les symptômes présentés par les sujets
atteints. Les facteurs à l'origine des troubles ne sont pas
mentionnés.
3.2.2. L'établissement du diagnostic
Le dépistage est effectué lors d'une
consultation spécialisée et le diagnostic posé par un
médecin connaissant bien ce trouble. Il veille à écarter
d'éventuelles pathologies pouvant générer des
symptômes similaires (formes d'épilepsie, dépression,
traumatisme, carences éducatives, etc....) et pratique à un
examen clinique complet afin de dépister des signes neurologiques
spécifiques. L'anamnèse est explorée au cours des
entretiens avec les parents et l'enfant. Des tests psychologiques,
neuropsychologiques et neurocognitifs doivent également être
proposés aux enfants. Des observations du sujet et de la relation
établie avec sa mère sont fréquemment
réalisées. Comme le précise la CIM-10, et comme l'impose
la présence du trouble dans au moins deux situations différentes,
une investigation auprès de plusieurs personnes (en
général les parents et les enseignants) est nécessaire
pour poser le diagnostic de TDA/H. Le recours à des échelles
d'évaluation est, dans ce cadre, particulièrement
intéressant. Trois domaines sont ainsi explorés : le milieu
familial, le milieu scolaire, et le milieu de consultation.
Les résultats de cette investigation pourront permettre
de valider le diagnostic, et, surtout, de cerner précisément les
troubles des apprentissages concomitants spécifiques du fonctionnement
de l'enfant afin de déterminer avec précision la nature des
prises en charge proposées.
Un tel travail ne peut s'effectuer que dans un service
spécialisé. A Clermont Ferrand, le Centre Régional
d'Evaluation des Troubles du langage et des Apprentissages est
compétent, depuis peu, pour les dépister, avec les
réserves structurelles dues au caractère restreint de cette
structure pour un secteur aussi vaste (trois ou quatre personnes seulement,
secrétariat compris). Beaucoup de professionnels, cependant, restent
hermétiques à l'évolution des connaissances concernant ce
trouble, et au remaniement conceptuel indispensable qu'il implique dans la
prise en charge des personnes qui en souffrent.
Le TDA/H affecterait, selon les études les plus
récentes, entre 3 et 6 % de la population, mais les chiffres concernant
les troubles déficitaires de l'attention sont plus alarmants : 10 %
de la population scolaire (Thomas & Willems, op.cit.) serait
affectée. Les auteurs insistent sur les répercussions importantes
de ces troubles, la plupart du temps ignorés : « La
méconnaissance de ce problème pourrait être à
l'origine de grandes difficultés d'insertion sociale pour des sujets
qui, après avoir connu l'échec scolaire ou l'échec
professionnel, présenteront bien souvent des troubles de la
personnalité secondaires à leurs échecs
répétés » (p. 122).
· Les questionnaires de Conners (Conners,1997)
Les questionnaires de Conners (cf. annexe 4a, 4b) sont parmi
les outils les plus utilisés en cas de suspicion de TDA/H.
Destinés à l'intention des tiers (une version pour les parents,
et une autre pour les enseignants), ils permettent au praticien d'avoir des
informations étalonnées sur le comportement de l'enfant dans deux
contextes différents : la maison, et la classe.
Le questionnaire pour les parents est composé de 48
items. Cinq critères sont pris en compte, et un index
d'hyperactivité global est obtenu. Les réponses des parents sont
cotées selon l'intensité observée (échelle de
Likert). Les résultats sont interprétés en fonction du
sexe et de l'âge de l'enfant.
Tableau 1: Liste des items du
questionnaire de Conners (parents) selon cinq critères
Troubles de la conduite
|
2 Insolent avec les grandes personnes
8 Se sent attaqué, est sur la défensive
14 Prend des choses qui ne lui appartiennent pas
19 Nie ses erreurs ou accuse les autres
20 Querelleur
27 Brutalise ou intimide ses camarades
35 Se bagarre constamment
39 Enfant foncièrement malheureux
|
Problèmes d'apprentissage
|
10 A des difficultés d'apprentissage
25 Ne termine pas ce qu'il (elle) a commencé
31 Problème de fixation de l'attention ou
distractibilité
37 Se décourage facilement lorsqu'un effort est
nécessaire
|
Psychosomatique
|
32 Maux de tête
41 Maux d'estomac
43 Autres plaintes physiques et douleurs
44 Vomissements, nausées
|
Impulsif-Hyperactif
|
4 Excitable, impulsif
5 Veut tout commander
11 Se « tortille », ne tient pas en
place
13 Agité, a toujours besoin de faire quelque chose
|
Anxiété
|
12 A peur (de nouvelles situations, endroits et personnes
nouvelles, d'aller à l'école).
16 Timide
24 S'inquiète plus que les autres (de la maladie, la
mort, la solitude).
47 Se laisse écraser, manipuler par les autres.
|
Index d'hyperactivité
|
4 Excitable, impulsif
7 Pleure facilement ou souvent
11 Se « tortille », ne tient pas en place
13 Agité, a toujours besoin de faire quelque chose
14 Destructeur
25 Ne termine pas ce qu'il (elle) a commencé
31 Problème de fixation de l'attention ou
distractibilité
33 Changements d'humeur rapides et marqués
37 Se décourage facilement lorsqu'un effort est
nécessaire
38 Dérange les autres enfants
|
Le questionnaire pour les enseignants est composé de 28
items. Trois critères sont pris en compte, et un index
d'hyperactivité global est obtenu. Les réponses sont
également cotées selon l'intensité, et
interprétées en fonction du sexe et de l'âge.
Tableau 2: Liste des items du
questionnaire de Conners (enseignants) selon trois critères
Troubles de la conduite
|
4 Fait le malin
5 Crises de colère et conduites
imprévisibles
6 Trop sensible à la critique
10 Fait la moue et boude
11 Humeur changeant rapidement et de façon
marquée
12 Bagarreur
23 Nie ses erreurs ou accuse les autres
27 Peu coopérant avec ses camarades de classe
|
Hyperactivité
|
1 Agité, se « tortille » sur sa
chaise
2 Fait des bruits incongrus quand il ne faut pas
3 On doit répondre immédiatement à sa
demande
8 Perturbe les autres enfants
14 Agité, toujours en train d'aller à droite
et à gauche
15 S'excite facilement, impulsif
16 Demande une attention excessive de l'enseignant
|
Inattention-Passivité
|
7 Distrait ou attention fluctuante
9 Rêveur
18 Se laisse mener par les autres enfants
20 Semble manquer de capacités à
entraîner ou mener les autres
21 Difficultés à terminer ce qu'il commence
22 Puérile et immature
26 S'énerve facilement quand il doit faire un
effort
28 Difficultés d'apprentissage
|
Index d'hyperactivité
|
1 Agité, se « tortille » sur sa
chaise
5 Crises de colère et conduites
imprévisibles
7 Distrait ou attention fluctuante
8 Perturbe les autres enfants
10 Fait la moue et boude
11 Humeur changeant rapidement et de façon
marquée
14 Agité, toujours en train d'aller à droite
et à gauche
15 S'excite facilement, impulsif
21 Difficultés à terminer ce qu'il commence
26 S'énerve facilement quand il doit faire un
effort
|
Keith Conners est un psychologue américain qui a
consacré sa carrière à l'étude des problèmes
d'attention et d'hyperactivité. Les questions et les critères
retenus témoignent de la complexité du TDA/H, et du malaise
profond de ces enfants, comme en témoignent l'échelle
psychosomatique et celle en lien avec l'anxiété. Les
difficultés relationnelles et l'hypersensibilité de la plupart de
ces enfants, qui « veulent tout commander » davantage par
impulsivité que par trouble des conduites, mais qui, dans la forme
passive, se laissent manipuler, est également perceptible au travers des
questions. Ces enfants peuvent se sentir profondément malheureux,
victimes de réactions mal contrôlées qui les font rejeter.
Notons la forme passive, qui peut occasionner de l'isolement, souvent mal
supporté par ces enfants qui sont rapidement démunis lorsqu'ils
sont seuls.
· Le questionnaire de Dupaul (non publié,
cité par Barkley, 1990, p. 311)
Tableau 3: Liste des items du
questionnaire de Dupaul selon trois critères
Hyperactivité
|
Rester assis
Rester assis sans trop bouger
S'occuper tranquillement
|
Attention-Organisation
|
Se concentrer sur une seule chose à la fois
Porter une attention suffisante à son travail
Finir une activité avant d'en commencer une autre
Ecouter les consignes
Avoir ses affaires pour travailler
Repérer et éviter les comportements dangereux
|
Adaptation sociale
|
Veiller à ne pas faire de bruit en classe ou dans les
couloirs
Attendre son tour dans le groupe
Ne pas interrompre les autres et ne pas les gêner dans
leurs activités
Parler à son tour
Parler modérément
Ecouter les autres lorsqu'ils parlent
|
Basé sur une échelle non publiée de
Dupaul, cet outil de dépistage (annexe 5) nous a été utile
pour repérer l'hyperactivité lors de notre stage en Classe
Relais. Utilisé en auto-questionnaire, il permet d'aborder le trouble et
ses conséquences avec l'élève concerné. Il comporte
quinze items, qui peuvent être classés selon trois
critères.
Trois items concernent l'instabilité psychomotrice,
tandis que six affectent directement l'attention et l'organisation. Six
affectent l'adaptation sociale : on voit les conséquences qu'un tel
trouble peut avoir sur l'intégration de ces élèves, en
difficulté scolaire, et rencontrant également des
problèmes relationnels. Contraints physiquement à rester assis,
la situation scolaire affecte les trois besoins fondamentaux définis par
Deci & Ryan (op.cit.) : les besoins d'autonomie, de
compétence, et d'affiliation.
3.3. Les troubles associés
3.3.1. Les Troubles des apprentissages
Le TDA/H est en lui-même source de difficultés
scolaires : « L'échec scolaire affecte près de
la moitié des enfants TDA/H. Ces derniers présentent, plus
souvent que les autres enfants, des difficultés d'apprentissage pouvant
concerner la lecture et son acquisition, l'écriture et en particulier le
graphisme, l'orthographe et les mathématiques (calcul,
abstraction) ». (Lecendreux et al. op.cit, p.
158). Les difficultés attentionnelles, à elles seules, notamment
dans les cas graves, suffisent à expliquer les problèmes
scolaires. Concernant le livret « Lire au CP » paru sous le
ministère de Luc Ferry, les auteurs constatent :
« Les recommandations faites pour l'ensemble des enfants ne sont pas
adaptées aux enfants TDA/H. On demande une fois de plus à ces
derniers d'aller à l'encontre de leurs possibilités. Suivre une
activité jusqu'à son terme est un défi pour l'enfant
hyperactif, du fait de ses difficultés attentionnelles ».
Le problème pour ces enfants est donc davantage un problème de
méthode et de guidage, qu'un problème d'apprentissage de la
lecture.
Si l'on reprend les six fonctions cognitives
développées par Favre (op.cit.), on constate qu'au moins
quatre d'entre elles sont atteintes par le TDA/H, l'attention endurante, mais
aussi la flexibilité mentale, la planification et la régulation
émotionnelle, ce qui constitue autant d'obstacles à leur bonne
adaptation scolaire.
Mais au-delà des seuls problèmes d'attention,
ces enfants cumulent très fréquemment d'autres troubles des
apprentissages. Le site TDA/H Ressources indique dans la rubrique concernant la
scolarité :
« Les troubles d'acquisition du langage
écrit (lecture, orthographe) sont fréquents chez ces enfants,
mais le TDA/H peut aussi être associé à un trouble du
langage oral (dysphasie), ou à des troubles du développement
moteur (dyspraxie, difficultés de coordination motrice). Les enfants
ayant un TDA/H et un trouble spécifique des apprentissages vivent de
grandes difficultés scolaires puisqu'on observe un effet cumulatif des
déficits liés aux deux troubles ».
(Laurent et al., op. cit.)
Thomas & Willems (op.cit. p. 117), citant
l'étude de Rapin (1982), confirment l'association fréquente entre
trouble du langage oral, dont on sait qu'il précède souvent la
dyslexie, et le trouble de l'attention : « Environ 30 % des
enfants présentant des troubles déficitaires de l'attention vont
présenter un retard de développement du langage
oral ».
3.3.2. Des comorbidités très fortes
Le TDA/H ne doit pas être confondu avec d'autres
pathologies (dépression, trouble bipolaire notamment), qui peuvent
également provoquer des troubles de l'attention, ou de
l'hyperactivité. La différenciation est malaisée, le TDA/H
présentant des comorbidités particulièrement
élevées.
Indépendamment de l'association avec les troubles des
apprentissages (20 %), Lecendreux et al. (op.cit.) donnent,
pour la population adulte, les statistiques suivantes concernant les troubles
associés : anxiété (25 à 50 % des cas),
dépression (19 à 37 %), troubles de la personnalité (10
à 20 %,), conduites ou comportements antisociaux : abus de drogues,
délinquance, criminalité (18 à 20 %), abus d'alcool (32
à 53 %), abus de substances (8 à 32 %). Le site TDA/H Ressources
mentionne également les conduites à risques, et les risques
d'accidents de la voie publique et domestiques, encourus tout
particulièrement par les enfants atteints. (Bange, 2014) mentionne le
trouble comme facteur de risque de l'obésité. Les troubles de
sommeil sont également fréquents.
Enfin, et sans que cela puisse être
considéré comme une comorbidité, notons que
précocité et hyperactivité ne sont pas exclusifs l'une de
l'autre. L'hyperactivité de l'enfant précoce est un facteur
aggravant d'isolement et de difficulté d'adaptation.
3.4. Les prises en charge
Les auteurs s'accordent pour préconiser un
dépistage précoce, permettant une information de l'entourage
(famille et école) et de l'enfant. Cette information évite les
malentendus, et les dégâts sur l'estime de soi des enfants
provoqués par les réactions spontanées des adultes :
« Il se fait facilement réprimander par les professeurs du
fait qu'il n'écoute pas et il a tendance à se
décourager... Une intrication affective se crée avec les parents
et assez souvent ceux-ci vont adopter une attitude de
réprimande » (Thomas & Willems, op.cit. p.
126). En 2015, la Haute Autorité de Santé a publié des
recommandations à l'intention des médecins de famille afin qu'ils
contribuent au dépistage, et qu'ils aident à la mise en place de
prises en charge adaptées, notamment en recherchant les
comorbidités.
Les prises en charge conseillées sont, outre
l'orthophonie ou la psychomotricité selon d'éventuels troubles
des apprentissages associés, des thérapies comportementales et
neurocognitives : « une « thérapeutique
pédagogique » tenant compte des facteurs affectifs, des
facteurs comportementaux et de l'apprentissage » (ibid.
p. 192).
Des interventions auprès des familles sont
proposées, notamment dans les pays nord-américains. Certains
grands centres parisiens proposent des groupes, permettant aux parents de se
retrouver, loin du rejet et des accusations de mauvaise éducation dont
ils sont généralement victimes par les parents des autres
enfants. Ces groupes permettent de s'informer sur la nature des troubles, le
mode de fonctionnement de ces enfants, et les techniques éducatives les
plus adaptées.
Dans les cas les plus sérieux, des psychostimulants,
activant les fonctions attentionnelles, peuvent être prescrits aux
enfants (Ritaline ou Concerta). Thomas et Willems considèrent que la
médication peut être utile, surtout pour les enfants jeunes,
lorsque les troubles sont très invalidants, les plus grands et les
adolescents étant en général plus accessibles aux
thérapies comportementales et neurocognitives. Lecendreux et
al. (op.cit.) précisent (p. 283) :
« ... il est bon de se rappeler également que ce
traitement améliore de façon indiscutable, avec très peu
d'effets secondaires rapportés, les symptômes de près de 75
% des enfants présentant un diagnostic de TDA/H...Il suffit d'être
au contact des enfants TDA/H et de leurs familles pour comprendre que laisser
ces enfants sans traitement est impossible. Il n'est certainement ni
souhaitable, ni judicieux « d'attendre que ça
passe » ». La médication est prescrite en
général sur une période de deux à trois ans,
procurant à l'enfant une accalmie propice aux apprentissages et à
l'établissement de liens sereins avec l'entourage, et lui permettant de
se construire afin de pouvoir mettre en place, plus grand, des
mécanismes de compensation plus efficaces.
Certains médecins peuvent conseiller des
complémentations alimentaires (fer, oméga 3, zinc...) afin
d'améliorer les symptômes. D'autres préconisent des
régimes alimentaires écartant certains aliments (sodas, sucre,
certains additifs alimentaires...) et privilégiant la consommation de
fruits et de légumes non traités.
3.5. L'évolution
Dans 25 à 30 % des cas, il semblerait que le trouble
s'atténue à l'âge adulte. Le syndrome
d'hyperactivité, notamment, tend à disparaître. Lecendreux
et al. (op.cit.) estiment que le pourcentage des enfants
conservant des symptômes à l'âge adulte se situe entre 25
à 75 % des cas. La méconnaissance du trouble par les
professionnels de la psychiatrie adulte est à l'origine d'un important
déficit de dépistage : « ...de très
nombreuses personnes souffrent de TDA/H sans même en connaître
l'existence. Certaines sont soignées pour des complications de ce
trouble, par exemple des symptômes anxieux ou dépressifs, sans que
l'on ait identifié la cause initiale » (p. 209). De
nombreux auteurs soulignent les conséquences sur l'orientation
professionnelle des troubles : ces personnes ont une position
professionnelle qui ne correspond pas à leurs capacités
réelles, ne fonctionnent pas à un niveau académique qui
leur correspond, ont des difficultés à trouver et à garder
un travail, sont souvent tristes, d'humeur instable, et victimes d'un manque
d'estime de soi. Ils sont adeptes de conduites à risque (vitesse
notamment) et fréquemment victimes d'addictions (toxiques, alcool,
alimentation, jeux...). Dalsgaard, Ostergaard, Leckman, Mortensen &
Petersen (2015) ont mis en évidence des risques de mort
prématurée nettement supérieurs à la moyenne chez
les personnes victimes de TDA/H.
Peu d'études portent sur les orientations
professionnelles des adultes TDA/H. Certaines indiquent que leurs souhaits les
portent vers des métiers d'action (police, gendarmerie, pompier,
urgences,...) et que les études longues les rebutent (Fauvel, 2012).
Lecendreux et. al. (op. cit.) mentionnent que les hyperactifs sont
souvent très créatifs et très largement
représentés dans le secteur artistique.
On retrouve de nombreux hyperactifs parmi les personnes
célèbres, témoignage que
« l'hyperactivité peut, dans certains cas, être
transformée en avantage indéniable » (Lecendreux
et al., op.cit., p. 250).
La prévalence du trouble dans la population adulte
serait de 4 % (entre 2 à 6 %).
3.6. Etiologie
3.6.1. Des facteurs biologiques
Le TDA/H est « un trouble à
expression neurologique traduisant le dysfonctionnement de certains
neuromédiateurs, en particulier la dopamine »
(ibid. p. 52). Il est la traduction comportementale d'un
« dysfonctionnement de certaines parties du cerveau, qui font
appel à la régulation des fonctions exécutives, en
particulier en empêchant ou en inhibant certains comportements
indésirables » (ibid., p. 53).
Thomas et Willems (op.cit.) confirment le lien entre
de nombreux troubles pédiatriques et le trouble de l'attention. Ils
citent : les grossesses à risque, notamment la
prématurité, la consommation excessive de tabac ou d'alcool
pendant la grossesse, les troubles du sommeil (notamment les apnées
nocturnes), l'épilepsie et les convulsions hyperthermiques. Ils
mentionnent que les troubles attentionnels associés à ces
maladies pédiatriques sont persistants à l'âge adulte.
De nombreuses études incriminent des facteurs de
pollution : Wagner-Schuman et al., 2015, ont mis en
évidence un lien entre certains pesticides et l'hyperactivité.
Les produits de traitement des fruits, des légumes sont également
cités. En France, le rapport INSERM « Pesticides : effets
sur la santé » (2013) établit le lien, entre autres,
entre la maladie de Parkinson et certains produits. Or, une récente
étude (Hansen et al., 2014) associe la maladie de Parkinson et
le TDA/H, la première étant le degré aggravé du
second. Le déficit d'une protéine transporteur de la dopamine
serait le facteur commun. Un groupe de gènes est impliqué dans ce
déficit. Notons que les Etats Unis, pays où le trouble atteint,
d'après certaines études médicales (Froehlich, 2007),
près de 9 % des enfants, sont les premiers consommateurs au monde de
pesticides, la France étant le troisième. Des allergies
alimentaires ont pu également être évoquées, de
même que les allergies aux médicaments (Heilbrun et al.,
2015). D'autres études ont trouvé une corrélation entre
l'exposition de la mère à la pollution de l'air et le TDA/H,
(Perera et al., 2014).
Ces différents éléments confirment les
premières observations des médecins, et le concept de
« minimal brain injury » qui oriente sur l'idée
d'une altération du système nerveux.
Dans un autre ordre d'idée, néanmoins voisin,
certains chercheurs ont mis en évidence le lien entre le stress,
notamment le stress maternel pendant la grossesse du fait de
sécrétion de cortisol, et le risque d'hyperactivité
(Khalife et al., 2013).
Solovey (2014), constate que 25 % des enfants souffrant de
TDA/H ont un parent atteint du même trouble, et met en évidence de
meilleures habiletés parentales lorsque ces parents suivent un
traitement. De nombreuses études ont recherché des facteurs
génétiques sous-jacents, notamment sur des jumeaux,
adoptés et/ou séparés à la naissance, versus des
jumeaux élevés par leurs parents. Thomas & Willems
(op.cit.) citent ces études (pp. 64-66) et concluent :
« Il existe bien un déficit génétique
associé au syndrome TDA/H qui se présente à une
fréquence anormalement élevée ». La
récente étude de Hansen et al. citée plus haut
confirme cette affirmation.
Lecendreux et al. (op.cit.) considèrent que la
prévalence du trouble est stable depuis ces vingt dernières
années. Le trouble est cependant mieux reconnu, et davantage pris en
charge. Conrad & Bergey (2014) s'alarment de l'expansion du diagnostic dans
le monde : le prosélytisme des compagnies pharmaceutiques,
l'émergence de la psychiatrie biologique, la diffusion de la
nomenclature psychiatrique américaine, l'influence des associations de
parents et de patients, et la facilité d'accès aux informations
concernant le trouble du fait d'internet leur paraissent responsables de cette
poussée.
Thomas & Willems (op. cit.), Dupagne (2013),
Revol et Blanc Lapierre (2013) soulignent l'inadaptation de l'école
à ces enfants, créant un contexte de handicap (avec l'obligation
scolaire prolongée pour tous les élèves) là
où d'autres situations (le travail agricole notamment) offraient un
contexte de réussite.
3.6.2. Les facteurs socio-éducatifs
De nombreux médecins incitent à
différencier les enfants « tyrans » (Le Heuzey,
op. cit. p. 46) des enfants hyperactifs, le TDA/H d'une
« pseudo-hyperactivité d'origine
psycho-éducative » (Kochman, 2003, p. 15). Ces auteurs
mettent en avant la faiblesse des parents, qui « ne sont pas dans
une relation éducative, mais dans une relation de négociation
permanente ou plutôt de marchandage » (Le Heuzey, op.
cit. p. 47). On entre très vite dans la problématique de la
poule et de l'oeuf lorsqu'il faut déterminer les causes de
difficultés comportementales. Un des facteurs significatifs est
l'adaptation scolaire : « En dehors du milieu familial,
l'enfant tyran se fait rarement remarquer, gardant ses exigences au sein de la
famille » (ibid.). Mais cette dichotomie peut ne pas
être aussi claire, notamment dans les cas, fréquents, où la
surprotection parentale fait pression sur l'enseignant. L'auteur évoque
dans les facteurs aggravants, le fait que l'enfant ait été
longuement désiré, ou qu'il ait été malade :
« En un mot, un bébé
« précieux », pour qui rien n'a été
trop beau, trop cher, ou inaccessible ». Notons que l'attitude
des parents à l'égard des enfants a beaucoup évolué
ces dernières décennies, et que les enfants
« précieux » sont de moins en moins rares. Il reste
que des enfants livrés à leurs pulsions, qui n'ont pas
développé de contrôle moteur, verbal, et que les parents
ont renoncé à contrarier, sont peut être moins armés
que les autres pour s'adapter au contexte scolaire. Le modèle de
l'attention conjointe développé par les chercheurs peut expliquer
un déficit d'attention dans ce contexte.
Un autre facteur est évoqué par les
chercheurs : les écrans, qui capturent l'attention mais ne la
développent pas. Un enfant qui regarde la télévision est
attentif, mais cette attention est exogène. Le temps passé devant
les écrans ne participe donc pas à « la longue et
dramatique histoire de la formation de l'attention volontaire »
(Luria cité par Jumel, op.cit.). Il se substitue, par contre,
à de nombreuses occasions qui auraient pu y participer. Bien que
là encore, la vigilance s'impose dans l'interprétation des
causes : Dupagne (op. cit.) souligne que les jeux vidéo
sont particulièrement adaptés au mode de fonctionnement des
enfants souffrant de TDA/H, ce qui explique leur engouement pour ces jeux
d'action, au rythme effréné, qui leur correspondent. Il estime
que les jeux vidéo sont créés par des ex-enfants TDA/H
pour des enfants TDA/H.
La même difficulté dans la différenciation
entre facteurs environnementaux et facteurs socio-éducatifs se retrouve
lorsque les parents sont eux-mêmes hyperactifs, cas qui, nous l'avons vu,
est fréquent.
Le stress, enfin, est un facteur identifié comme cause
possible du TDA/H, soit qu'un événement traumatique soit survenu
pendant la grossesse, soit que cet événement ait affecté
l'enfant lui-même.
Chaque situation est unique et compose la multiplicité
de ces différents facteurs à sa façon. Au-delà de
l'analyse qui en est faite, il importe de repérer les difficultés
et les souffrances, et les modes de fonctionnement chroniques et persistants
qui seraient susceptibles d'hypothéquer l'avenir de l'enfant, en
proposant les explications, adaptations et prises en charge les plus
adaptées.
Deuxième
partie : Présentation du dispositif de recherche
1. Un appui sur
l'expérience professionnelle
Psychologue scolaire depuis une douzaine d'années, j'ai
souvent été sollicitée pour intervenir auprès
d'enfants et de leur famille qui, souvent dès la Petite Section de
maternelle, présentent un comportement très instable.
Malgré les efforts et les interventions diverses, ces enfants gardent un
comportement difficile tout au long de leur scolarité primaire. Les
trois cas suivants illustrent bien la complexité de ces
situations :
1.1. Cas n°1 : M
M. est un petit garçon pour lequel une aide du RASED
(Réseau d'Aides Spécialisées aux Elèves en
Difficultés) a été sollicitée dès la Petite
Section. Le petit garçon avait un comportement agité,
n'obéissait pas aux consignes de l'enseignante, et pouvait mordre ses
camarades. Une aide G, dispensée par le rééducateur du
Réseau, avait été mise en place. Le
rééducateur avait pu constater le grand désarroi de la
mère de l'enfant, qui ne comprenait pas le comportement de son fils, et
vivait mal les regards des autres parents, accusateurs à son
égard. Notons que le comportement à la maison était plus
facile, d'après la mère. Un léger mieux avait
été noté suite au travail réalisé avec le
rééducateur, l'enfant appréciant l'espace qui lui
était réservé une fois par semaine, dans un cadre riche et
ludique, lui permettant d'établir une relation bienveillante avec un
adulte disponible. Les années scolaires suivantes ont été
compliquées. Le suivi du rééducateur a perduré une
année, puis l'enfant s'est révélé plutôt
motivé par l'apprentissage de la lecture, au cours duquel il s'est
inscrit dans la réussite. Au CE2, devant les difficultés de
comportement, l'enseignant de la classe appelle à nouveau à
l'aide le Réseau. Il indique que M. parvient à se concentrer sur
le travail scolaire mais que, en revanche, il fait régulièrement
preuve de violence envers ses camarades : grossièretés,
insultes, coups. Le maître souligne qu'il supporte très
difficilement la contradiction et la frustration, et qu'il estime
fréquemment être une victime. Un bilan psychologique est
réalisé, et un suivi mis en place au sein de l'école
durant quelques séances afin que l'enfant apprenne à verbaliser
ses émotions et à mieux les gérer (cf. annexe 6). Le bilan
met en évidence les bonnes compétences cognitives du jeune
garçon, mais on note de très grandes disparités dans les
performances, dans certaines échelles, mais aussi à
l'intérieur d'une même échelle, pour des exercices faisant
appel à des compétences identiques, irrégularité
signant généralement des problèmes d'attention. Les
épreuves projectives montrent que les relations familiales
intériorisées sont plutôt positives, avec un attachement
sincère à la petite soeur (M. a une petite soeur
scolarisée dans l'école, qui ne pose aucun problème
d'adaptation scolaire). Le questionnaire de Conners est renseigné par
l'enseignant et les parents. Si les index d'hyperactivité n'atteignent
pas les critères significatifs, en revanche, les résultats
confirment les problèmes de conduites importants en milieu scolaire.
L'auto-questionnaire de Barkley est proposé à l'enfant, et les
réponses du jeune garçon témoignent des problèmes
d'attention qui l'affectent, déplorant de ne pas pouvoir se concentrer,
de parler trop sans pouvoir attendre son tour, et d'avoir des problèmes
pour écouter quand on lui parle. Au CM1, l'enseignante demande à
nouveau de l'aide. Un compte rendu du bilan et du travail réalisé
l'année précédente à l'attention d'un
pédopsychiatre est donné aux parents, afin de mettre en place un
suivi en ville. Des bilans orthophonique et orthoptique sont demandés
pour vérifier que l'enfant ne souffre d'aucune gêne dans ses
apprentissages (l'enseignante constate qu'à certains moments
« l'enfant accroche énormément en lecture »).
L'éventualité d'un traitement (Ritaline) pour pallier les
difficultés attentionnelles et comportementales est
évoquée lors d'un entretien avec les parents, mais ils ne sont
pas prêts à se résoudre à une telle
éventualité. L'année suivante se passe très
difficilement, puis l'enfant passe en 6ème dans le
collège public le plus proche, d'où il est rapidement
évincé pour intégrer un petit collège
privé.
Ce premier cas permet d'illustrer le caractère
chronique des problèmes d'adaptation scolaire. Dans cette situation, le
contexte familial apparaît plutôt favorable, confirmé par
l'absence de difficultés de la petite soeur, et la rigueur des suivis
mis en place par les parents. Les difficultés d'attention et les
problèmes relationnels sont au premier plan, et l'enfant ne semble pas
souffrir de problèmes d'apprentissage associés.
1.2. Cas n°2 : N
Le cas suivant est un petit garçon de 6 ans
scolarisé en GS (cf. annexe 7). Il vient d'arriver dans son école
à la suite d'un changement de garde : il a été
retiré à sa mère, qui ne le voit plus qu'une fois tous les
quinze jours et est gardé par son père. L'enfant suit
difficilement le fil des activités proposées, il est très
agité en classe, et peut faire preuve de violence envers ses camarades.
L'année précédente, le petit garçon avait
également un comportement très instable à l'école.
Ces difficultés comportementales ont été à
l'origine de problèmes relationnels entre les enseignants et la
mère de l'enfant, ce qui a contribué au retrait du petit
garçon du foyer maternel. N. termine sa GS de cette façon, puis
passe au CP, où il apprend à lire assez facilement. Durant les
activités structurées, il ne présente pas de
difficulté scolaire à proprement parler. Ses compétences
cognitives sont dans la moyenne, mais le petit garçon n'aime pas lire.
Son comportement difficile, son agitation, et ses difficultés
relationnelles, sont restées identiques quel que soit le milieu familial
d'accueil. Le questionnaire de Conners renseigné par la mère
atteint des scores de significativité relatifs à
l'hyperactivité très importants.
Ce deuxième cas illustre la remise en cause du milieu
familial fréquente dans de telles situations. La mère de N. est
une personne très investie dans son rôle maternel. Mais elle est
aussi une personne très vive qui reconnaît avoir posé
elle-même de nombreux problèmes de comportement dans son enfance.
Elle a été scolarisée en pension très jeune, ses
parents ne parvenant pas à gérer son humeur difficile. Comme
évoqué plus haut, le trouble, qui a une base constitutionnelle,
est souvent partagé par l'un des deux parents (ou les deux), ce qui est
un facteur aggravant la situation de l'enfant. Les difficultés
comportementales rencontrées par son fils à l'école l'ont
remise en cause personnellement, occasionnant des discussions avec les
enseignants que son caractère vif ont rendu trop houleuses. Après
enquête sociale, le juge s'est finalement prononcé en faveur du
retrait du petit garçon du foyer maternel, mais le comportement de N. ne
s'est pas amélioré pour autant. Il n'est pas certain, par contre,
que l'accueil réservé à son égard par son
père et sa belle-mère, aux dires de l'enfant (peut ne pas manger
à la même table que le reste de la famille, s'ennuie, reste
très souvent dans sa chambre tout seul, passe plus de temps avec sa
grand-mère paternelle qu'avec son propre père, etc.) soit aussi
chaleureux et investi que celui apporté par sa mère... De telles
situations sont fréquentes en cas d'enfant hyperactif, en raison des
interprétations négatives des professionnels du soin, de la
santé, et de l'éducation, qui voient dans les dysfonctionnements
familiaux l'origine des troubles présentés par l'enfant.
1.3. Cas n°3 : S
Le troisième cas est celui de S. signalé par son
enseignante en Moyenne Section. Le petit garçon est très
agité. Un suivi par le rééducateur (maître G) est
mis en place. Celui-ci rencontre la famille, et il émet un avis
réservé concernant le père du petit garçon, qu'il
ne « sent pas » à l'entretien (réflexe de
remise en cause du fonctionnement familial, justifié probablement par le
caractère du père, très probablement hyperactif
lui-même si l'on considère l'histoire familiale). Une
première tentative de bilan est tentée en fin de Moyenne Section,
mais l'agitation et les problèmes de concentration de l'enfant ne lui
permettent pas d'investir de façon satisfaisante la situation de test.
L'année suivante, il est à nouveau fait appel au Réseau et
le bilan peut être mené à son terme, mettant en
évidence des compétences dans la zone moyen faible. Devant
l'inadaptation scolaire du petit garçon, une consultation
pédopsychiatrique est conseillée à la famille. Les parents
décident alors de changer l'enfant d'école et de l'inscrire dans
un établissement privé. Mais au CE2, le jeune garçon
revient à nouveau dans son école de rattachement. Les
problèmes de comportement sont massifs, et surtout, l'enfant
présente des difficultés de lecture très importantes. Un
nouveau bilan est réalisé. Le niveau en mathématiques est
satisfaisant, mais celui en lecture est très insuffisant. Des
problèmes de repérage dans l'espace sont également
perceptibles, et des bilans orthophonique et orthoptique sont
conseillés, ainsi qu'une consultation au Centre
Médico-Psychologique. Les questionnaires de Conners, renseignés
par la famille et l'enseignante, obtiennent des résultats très
significatifs concernant l'hyperactivité et les troubles des
apprentissages. Un suivi orthophonique est mis en place, et un diagnostic de
dyslexie est posé. Le jeune garçon progresse lors de ce suivi et
le CM1 se passe sans difficulté excessive. Au CM2, le comportement de
l'enfant est tel qu'une observation en classe de la psychologue est
demandée par l'enseignante, afin de mieux expliquer aux parents le
comportement de leur enfant. Une équipe éducative en
présence de l'Inspecteur de l'école, du médecin et du
psychologue scolaires est organisée, afin d'évoquer les
problèmes comportementaux et les soins mis en place. A l'issue de cette
réunion, un rendez-vous est pris avec un pédopsychiatre et un
traitement est prescrit (Ritaline). S. termine son CM2 à l'école,
puis va en 6ème. Croisée dans un supermarché un
an après, la mère m'expliquera que l'enfant a quitté son
établissement et intégré un collège public dans
lequel il a été accueilli en tant que pensionnaire. Le traitement
a été arrêté car l'enfant ne le supportait pas bien.
Ce troisième cas a été choisi pour
illustrer la comorbidité fréquente du TDA/H avec d'autres
troubles des apprentissages (dyslexie, dysphasie, dyspraxie...). Il montre
également le nomadisme scolaire dont ces enfants sont souvent
victimes : les parents supposent que l'école rejette leur enfant et
souhaitent essayer un autre établissement, dans l'espoir qu'il ne soit
plus «stigmatisé ».
Ces trois cas regroupent les différentes
caractéristiques de la scolarité des enfants hyperactifs :
des troubles précoces, chroniques, importants dans ces trois situations
particulièrement aigües. On note également une
fréquence élevée de parents eux-mêmes victimes du
trouble, et des risques accrus de problèmes de communication avec les
personnels des écoles, les instances sociales et médicales,
allant jusqu'au retrait de l'enfant de la famille dans certaines situations
compliquées. On retrouve la présence de troubles associés,
et une scolarité souvent chaotique. Les souffrances de ces enfants et de
leur entourage, parents, enseignants et camarades de classe, sont, en
filigrane, omniprésentes.
2. Une recherche
préliminaire en classe relais
Accueillie pendant six mois en classe relais dans le cadre du
master dans le but d'étudier les processus de décrochage scolaire
précoce, il m'a été possible d'approcher une dizaine
d'élèves orientés dans cette structure. L'hypothèse
orientant cette recherche était que ces élèves avaient
été repérés et suivis par le RASED durant leurs
classes primaires, et qu'ils souffraient de troubles des apprentissages anciens
et sévères. La part d'entre eux victimes de TDA/H me paraissait
importante à déterminer.
2.1. Méthodologie
La recherche, de type mixte (Bonneville, Lagacé, &
Grosjean, 2006, Savoie Zajc & Karsenti, 2004) se composait d'un volet
quantitatif. Le dispositif mis en place afin de vérifier notre
hypothèse d'une plus grande proportion d'enfants hyperactifs, avec ou
sans troubles des apprentissages associés, dans la population des
élèves accueillis en Classe Relais consistait à proposer
aux élèves, à leur entrée dans la Classe Relais,
des épreuves étalonnées de lecture et d'orthographe (ROC,
Cogni-Sciences, 2009), et l'auto-questionnaire (cf. annexe 5) basé sur
les travaux de Dupaul (cité par Barkley, op.cit.) visant
à dépister le TDA/H. Les épreuves étaient
proposées en deux séances, lors d'entretiens destinés
à établir un contact, ainsi qu'à obtenir des informations
sur la scolarité antérieure des élèves, et
notamment les suivis éventuels (orthophonie, RASED, psychologues,
psychiatres, CMP...) dont ils auraient pu bénéficier. Ces
résultats ont été interprétés en fonction de
l'étalonnage du ROC. Concernant l'auto-questionnaire, un groupe
témoin, constitué de cinq autres classes du même
collège, a été invité à remplir le
questionnaire, complétant de cette façon le dispositif
expérimental.
Pour des raisons déontologiques, et afin de ne pas
interférer avec le fonctionnement de la classe relais (en ayant besoin
de demander une autorisation particulière aux parents par exemple), le
choix a été fait de ne pas utiliser d'outil réservé
aux psychologues. Ce choix s'est révélé judicieux, car
l'équipe a décidé, pour les années suivantes, de
reconduire l'évaluation en lecture et en orthographe, et de faire
également passer un test étalonné en mathématique,
ce que nous n'avons pas fait afin de ne pas trop alourdir le dispositif.
Le deuxième volet de la recherche était d'ordre
qualitatif. Suivant une démarche inductive rendue possible par
l'immersion autorisée par la longueur du stage (une demi-journée
par semaine pendant six mois), ce deuxième aspect de la recherche
était essentiellement basé sur l'observation, afin de recueillir
des informations sur l'organisation de l'enseignement choisie pour s'adapter
aux difficultés particulières des jeunes. De nombreux entretiens
informels avec les différents membres de l'équipe
pédagogique (l'enseignant coordonnateur et deux assistantes
d'éducation) ont complété le dispositif de recueil des
données.
2.2. Recueil et traitement des données
Les épreuves d'orthographe et de lecture ont permis de
comparer les résultats obtenus par les jeunes en classe relais avec la
moyenne de ceux obtenus par les jeunes du même âge. Cette
comparaison a été rendue possible du fait de l'étalonnage
du ROC du CM2 à la 5ème. Pour comparer les
résultats des plus grands, une extrapolation statistique a
été réalisée (cf. annexe 8).
Les résultats des élèves de la Classe
Relais à l'auto-questionnaire en lien avec le TDA/H ont
été comparés avec ceux obtenus par les autres
élèves du collège (élèves de 5 classes, 2
classes de chaque niveau, sauf en 5ème où une seule
classe est représentée, pour des raisons indépendantes de
notre volonté). Les notes obtenues à chacune des 15 questions ont
été sommées pour obtenir une moyenne, qui a
été utilisée ensuite pour la comparaison (cf. annexe
9).
Le recueil des données concernant les suivis RASED
et/ou orthophonique a permis de déterminer que la plupart des
élèves avaient bénéficié d'aide par un (ou
plusieurs) enseignants spécialisés durant leur scolarité
primaire. Le calcul des prises en charge RASED du groupe témoin est une
estimation obtenue en croisant des informations de plusieurs sources
différentes : le rapport RASED présenté au
sénat en 2013 qui évalue à 500 000
élèves pris en charge par les RASED en 2010/2011, et qui
précise qu'environ 25 % des prises en charge concernent des CP, classes
où elles sont majoritaires, et les plus significatives de
difficultés scolaires. En 2011/2012, le nombre d'élèves
scolarisés au CP étant d'environ 700 000 (DEPP, 2011), on
peut estimer le pourcentage d'enfants de CP pris en charge à 18 %
(125 000 prises en charge pour 700 000 élèves). En
croisant avec les observations et compte rendus d'activité des
personnels RASED du département, nous avons retenu le chiffre
approximatif de 20 %. Les résultats du volet quantitatif de la recherche
sont consignés dans la figure 4.
2.3. Analyse des résultats
Les histogrammes de la figure 4 confirment clairement les
difficultés scolaires et comportementales des élèves
accueillis en classe relais : si les résultats en lecture ne sont
pas trop décrochés de la moyenne (deux des élèves
de la classe relais sont de très bons lecteurs et font écran par
rapport aux scores des autres jeunes), les difficultés orthographiques
sont importantes pour presque tous les élèves.
Les difficultés de concentration et
l'hyperactivité apparaissent nettement au travers des réponses
à l'auto-questionnaire, et confirment les observations du terrain :
des élèves très réactifs, impulsifs, ayant du mal
à tenir assis et à écouter un cours en silence. Les
problèmes d'attention sont donc au premier plan.
Figure 4: Comparaison entre
élèves de la classe relais et les populations
d'étalonnage.
Une matrice de corrélations entre les questions a
permis de déterminer, par ailleurs, un lien élevé entre
une des questions et le résultat final : « Ne pas
interrompre les autres et ne pas les gêner dans leurs
activités » est noté comme le comportement le plus
compliqué pour les élèves les plus hyperactifs. Ce
résultat, confronté aux données qualitatives, semble
indiquer que ces jeunes ont conscience qu'ils dérangent les autres, et
laisse présager les difficultés relationnelles et les
réactions négatives qu'ils rencontrent au quotidien.
Certains jeunes, au contraire, qui présentent une
histoire scolaire compliquée, ont répondu la note maximale (10,
signifiant qu'il était très facile pour eux de ne pas
déranger les autres). Pour ces élèves dont les
résultats à l'auto-questionnaire sont aberrants compte tenu des
annotations des enseignants ou de leur histoire scolaire (par exemple, 8
à « N'interrompt pas les autres et ne les gêne pas dans
ses activités » alors que l'enfant a du changer
d'établissement pour des problèmes de comportement, ou 10
à « a ses affaires pour travailler » alors qu'il est
mentionné dans les bulletins que l'élève les oublie
constamment, etc. ), les limites de l'auto-questionnaire sont atteintes. Compte
tenu de ces éléments, les résultats à
l'auto-questionnaire minorent très certainement le TDA/H, au moins pour
certains élèves de la Classe Relais.
Un autre point surprenant mérite d'être
souligné : la classe dans laquelle le plus d'enfants hyperactifs
sont regroupés parmi les élèves des classes ordinaires
est une classe européenne, très agréable car
particulièrement vivante et réactive. L'association relativement
fréquente entre hyperactivité et précocité (Revol
et al., op. cit.) est peut être, également, un facteur
explicatif de cette concentration surprenante d'hyperactifs dans la classe
européenne. Cette information oriente sur l'hypothèse d'un TDA/H
qui jouerait un rôle de catalyseur, optimisant la
réactivité des élèves performants, et aggravant
celle des élèves en difficulté. L'hypersensibilité
notée plus haut est probablement à l'origine du fort rejet de
l'école par les élèves hyperactifs en difficulté
scolaire, les contrariétés accumulées du fait de la
médiocrité de leurs résultats étant ressenties
comme insupportables.
La part du milieu familial dans le parcours des jeunes vers la
Classe Relais a été abordée de façon qualitative.
Les facteurs familiaux jouent certainement un rôle majeur dans l'histoire
de ces élèves. Pour la plupart, on note des signes de
fragilité familiale : parents divorcés, malades, père
décédé, immigration, adoption... Le problème des
habiletés parentales est également sous-jacent, au travers
notamment de la dureté des punitions dont ces jeunes peuvent être
victimes face à leurs exactions.
L'absence de dépistage des troubles est nette : aucun
élève n'a connaissance du TDA/H, aucun membre de l'équipe
pédagogique de la Classe Relais non plus. Par contre, la plupart de ces
enfants ont bénéficié de consultations et de suivis
pédopsychiatriques ou psychologiques, et aucun diagnostic ni
questionnement au sujet d'un éventuel TDA/H n'est apparu au cours des
entretiens avec les élèves, ni dans les dossiers les concernant.
Cet absence de dépistage laisse parents, enfants, et enseignants
démunis, sans explication pertinente ni corpus théorique et
pratique d'attitudes et adaptations possibles face aux problématiques de
ces jeunes.
2.4. Conclusions
Les résultats de cette étude permettent de
constater que l'hyperactivité suffit rarement, à elle seule,
à provoquer le décrochage scolaire précoce : seule
une élève accueillie dans le dispositif présente une
hyperactivité sans difficulté scolaire. Ils montrent que la
plupart des élèves accueillis dans le dispositif sont
hyperactifs, et présentent des troubles des apprentissages
associés. Leur impatience et leur sensibilité aggravent ces
difficultés qui deviennent insupportables, augmentent leur
réactivité, et finissent par les mettre en opposition avec ce
milieu scolaire dans lequel ils sont en échec. L'observation de leurs
comportements durant le stage permet également de conclure à la
présence d'un trouble oppositionnel (cf. annexe 10) pour la plupart
d'entre eux. C'est le cas notamment de la jeune fille hyperactive citée
plus haut. Les élèves présentant un tel profil constituent
la population la plus à risque de décrochage scolaire
précoce.
Ces résultats sont en complète cohérence
avec le rapport INSERM de 2005 sur le trouble des conduites :
« Un trouble déficit de
l'attention/hyperactivité ou un trouble oppositionnel avec provocation
est souvent associé de façon comorbide au trouble des
conduites... Le trouble des conduites peut également être
associé à d'autres types de troubles mentaux : trouble
anxieux, trouble de l'humeur, trouble lié à la consommation
abusive de substances psycho-actives ou encore trouble des
apprentissages ».
(INSERM, op. cit. p.1).
Seul un élève de la classe, a priori, est
touché par un problème de toxicomanie. Par contre, la plupart
d'entre eux sont victimes d'une surconsommation de jeux vidéos
(jusqu'à 50 heures par semaine pour un des jeunes.
Les données qualitatives mettent en évidence
comment l'enseignement dispensé en classe relais est empiriquement
adapté à ces élèves en double ou triple
difficultés : une adaptation à leur niveau scolaire afin
d'éviter les déconvenues, un encadrement plus personnalisé
(consignes strictes et claires, règles de vie
régulièrement réaffirmées, explications et
mobilisation des adultes aussitôt que nécessaire...), une
concentration des temps scolaires les plus « statiques » le
matin, des activités physiques, actives et variées
l'après-midi (sport, sorties, jeux de société, ateliers
cuisine, bricolage, projets divers...), et un rythme soutenu qui correspond
à leur impatience constitutionnelle. L'appel à leurs
capacités attentionnelles est adapté à leurs
compétences dans ce domaine : limité.
Notons enfin que la plupart de ces élèves ont
été suivis par le RASED durant leur scolarité primaire.
Ces suivis n'ont pas résolu les problèmes, comme le prouvent
leurs parcours. Néanmoins, ils leur ont permis de se maintenir dans les
classes ordinaires, et, bon an mal an, de continuer à progresser.
L'absence d'enseignants spécialisés au collège ne permet
pas cette adaptation. Cette absence explique en grande partie les
décrochages précoces, et justifie la création des Classe
Relais, coordonnées par...des enseignants spécialisés du
premier degré. Cette observation met en valeur les mérites des
personnels RASED, mais aussi celui des enseignants du premier degré, qui
gèrent ces élèves au quotidien. Un des dossiers des
élèves met en évidence, à ce sujet, l'arrêt
maladie d'une de ses enseignantes, faute de pouvoir continuer à
gérer sa classe. Ces efforts méconnus ont un coût
supporté par les enseignants en termes de stress et d'épuisement
professionnel, que les psychologues scolaires sont bien placés pour
repérer.
3. Nouvelle problématique
de recherche
La revue de littérature nous a permis d'approfondir le
concept d'attention, de mettre en évidence son lien avec les
apprentissages, ainsi que les rapports étroits entre cette
faculté, la motivation, et la réussite scolaire. Nous avons aussi
exploré les problèmes attentionnels, et complété
nos connaissances concernant le trouble du déficit de
l'attention/hyperactivité, ainsi que ses répercussions sur la
scolarité des enfants concernés. En s'appuyant sur notre
expérience de terrain, nous avons exposé plusieurs cas d'enfants
hyperactifs à l'école primaire puis, lors d'une recherche
menée sur un lieu de stage choisi ad hoc, montré à quelles
extrémités certains de ces élèves se trouvaient
réduits au collège. Notre problématique de recherche
s'oriente à présent sur la scolarisation des enfants souffrant de
TDA/H à l'école primaire. Ces élèves, qui ne
parviennent pas à s'adapter au collège, ont pour la plupart suivi
une scolarité ordinaire au sein de leurs classes respectives. Quelles
modalités leurs enseignants ont-ils mis en place pour favoriser leur
adaptation ? Comment sont-ils parvenus à canaliser leur
attention ? Quelles pratiques pédagogiques sont les plus
efficaces ? Comment les enseignants des classes primaires, qui
gèrent ces enfants toute une année scolaire (voire plusieurs),
parviennent à faire classe à tous leurs élèves avec
de tels enfants ? Quelles sont les répercussions sur la classe des
comportements de ces enfants qualifiés par les enseignants du
collège d'ingérables ? Ces questions vont guider notre
nouvelle problématique de recherche qui s'oriente vers une étude
des pratiques enseignantes.
Ce travail s'organise en suivant les principes de la recherche
qualitative. Le recueil de données a été
réalisé selon différentes modalités, mais toujours
dans le respect de la complexité de la tâche des enseignants, et
dans la double optique de ne pas les gêner dans leur travail ni
occasionner de charge supplémentaire -(Bru, 2002). Les enseignantes qui
ont bien voulu participer à cette étude sont volontaires,
informées de son caractère exploratoire, dans une double
dynamique déductive et inductive : les observations et
données de terrain sont interrogées et passées au crible
d'outils et de connaissances issues de la recherche théorique,
permettant une élaboration progressive d'hypothèses
validées ou non par leur expérience. C'est ainsi que nous partons
de leurs pratiques et problématiques professionnelles, mais que
celles-ci peuvent évoluer au fur et à mesure du
déroulement de la recherche, et cette évolution aboutir à
de nouvelles pistes de réflexion. La recherche entre ainsi dans le cadre
défini par Dolbec et Clément (op. cit. p. 181) et
revêt « ... la nature cyclique et tridimensionnelle (recherche,
action et formation) de la recherche action qui s'apparente à un
processus de résolution de problèmes."
3.1. Terrain et population cible
Suite à notre stage en classe relais, nous avons pu
confirmer notre hypothèse concernant les risques accrus de
décrochage des enfants atteints de TDA/H. Il s'agit maintenant
d'étudier leur scolarité antérieure, en école
primaire. Les trois classes ont été choisies en fonction de leur
proximité et de la facilité que cela comportait pour se
rencontrer, des relations privilégiées entretenues avec les
enseignantes et de leur intérêt pour la problématique
étudiée, mais aussi du niveau considéré, puisqu'il
nous paraissait intéressant d'appréhender la gestion de la classe
en maternelle, au cours élémentaire, et au cours moyen. Dans
chaque classe était scolarisé au moins un enfant
présumé hyperactif, hypothèse validée par le
questionnaire de Conners renseigné par les enseignantes et par un bilan
psychologique pour deux d'entre eux, ainsi que par l'observation du
comportement de ces enfants en classe.
Le temps consacré à chaque classe a
été variable, en fonction de la nature du travail
réalisé avec chaque enseignante, de ses demandes et de ses
disponibilités, ou de la vie de la classe (sorties scolaires par
exemple). Les enseignantes ont participé volontiers, appréciant
de pouvoir parler en confiance de leurs pratiques pédagogiques,
sensibles à l'intérêt qui était accordé
à celles-ci, ouvertes à l'échange et dans l'enthousiasme
de pouvoir découvrir de nouveaux cadres d'analyse de leurs pratiques.
3.2. Mode de recueil et de traitement des données
L'entretien avec les enseignants a été le mode
privilégié adopté pour recueillir les données. Ces
entretiens ont eu lieu dans leurs classes, sur un mode non directif,
privilégiant le plaisir de l'échange et orienté sur leurs
préoccupations spontanées. Les thèmes abordés ont
été précisés et répertoriés par la
suite, en utilisant les notes consignées au fur et à mesure dans
un journal de bord.
Un questionnaire concernant les pratiques de chaque enseignant
en lien avec l'autodétermination (Massy et al, annexe 11),
réalisé en 2014 par notre groupe de travail dans le cadre de l'UE
9, a été proposé. Ce questionnaire est composé de
questions fermées, dont les réponses sont consignées sur
une échelle de Likert (jamais, parfois, souvent, toujours). Les
questions concernent les quatre composantes de
l'autodétermination : l'autonomie (7 questions),
l'autorégulation (10 questions), l'autoréalisation (5 questions),
et la responsabilisation (14 questions). L'annexe 12 détaille davantage
les informations recueillies par chaque question. Les réponses à
ces questionnaires ont été analysées en elles-mêmes,
compte tenu des informations recueillies sur les pratiques de chaque
enseignante. Elles ont aussi été interprétées en
référence aux résultats obtenus dans le cadre de l'UE9
(passation auprès de huit enseignants d'école
élémentaire ayant donné lieu à une analyse
approfondie). Les différences entre chaque enseignante ont
également pu donner quelques informations supplémentaires
à l'occasion de l'analyse des résultats.
Des enregistrements vidéo ont été
réalisés dans chaque classe, au début du travail, afin de
faciliter l'observation des pratiques enseignantes et des attitudes des
élèves et de déterminer les critères pertinents.
Ces enregistrements se sont révélés difficiles à
mettre en oeuvre. La nécessité de ne pas déranger,
notamment, en privilégiant une installation rapide et discrète et
en évitant tout déplacement dans la classe, a pu occasionner des
déconvenues (appareils mal mis en route, problèmes de
cadrage...). Le projet initial avait l'ambition d'enregistrer l'enseignante et
tous les élèves. Il s'est révélé
irréalisable compte tenu des difficultés techniques. Finalement,
nous avons privilégié un enregistrement de l'enseignante et d'un
groupe d'élève, choisi selon la qualité de
l'enregistrement réalisé. Si le comportement des enfants
hyperactifs ciblés a été observé dans tous les
cas, dans un des enregistrements, malencontreusement, l'enfant ne figure pas
dans le groupe filmé.
Pour les trois classes, nous avons fait le choix d'enregistrer
des séances de travail en groupe classe, donc des séquences
d'enseignement magistrales, de façon à avoir des situations
d'observation homogènes, et à cadrer notre champ d'étude
de façon réaliste.
Les enregistrements ont été soumis à
l'autorisation des parents. Un engagement a été pris
auprès des parents et des enseignantes de ne pas les diffuser.
L'élaboration de la grille d'analyse a
été progressive, mettant peu à peu en évidence la
richesse des informations recueillies. Pour chaque type d'activité
observée (lecture d'album, étude de son, lecture collective,
comptines et jeux de doigts, etc.), l'observation portait sur le comportement
de l'enseignante, et le comportement des élèves. Deux
critères principaux ont été définis : V (pour
manifestation verbale), et M (manifestation motrice). Le signe plus ou moins a
été affecté : + = manifestations dans le cadre de
l'activité proposée. - = manifestations hors du cadre, paroles ou
mouvements gênants, bruyants, etc. de la part des élèves
comme de celle de l'enseignante (en général manifestations pour
maintenir l'ordre ou reprendre un élève,
dérangement tel que téléphone ou autre). Les
interactions ont été particulièrement
étudiées, entre l'enseignant et le groupe, l'enseignant et un
élève en particulier. Les critères Coll. pour collectif
lorsque l'enseignant s'adresse au groupe, et Indiv., pour individuel lorsqu'il
s'adresse à un élève, ont été
différenciés. Par ailleurs, il nous a paru important de
repérer les interventions de l'enseignant qui donnaient la parole et
interpellaient les enfants. Le signe choisi a été le signe >.
C'est ainsi que le signe V+> veut dire que l'enseignante pose une question,
au groupe classe si le signe est dans la ligne « Maître
Coll.», à un élève en particulier si le signe est
dans la ligne « Maître Indiv.».
Chacune des trois vidéos a été
analysée par tranches de 30 secondes sur une période de 20
minutes. Le démarrage a été fixé à peu
près au début de l'activité pour chacune d'elle.
Chaque classe comportait au moins un enfant hyperactif, dont
les situations ont été approfondies. Deux des enfants ont
bénéficié d'un bilan dans le cadre de mon activité
de psychologue scolaire, pour l'un deux ans auparavant, et pour l'autre en
cours d'année. Un bilan cognitif, comprenant trois à quatre
séances individuelles avec les enfants, et un entretien avec les
parents, a permis de mieux cerner les points forts et les points faibles des
élèves, et d'avoir un aperçu de la problématique
psychologique de ces enfants. Pour le troisième, arrivé
l'année précédente dans l'école, aucun bilan n'a
été réalisé. Il ne semble pas que cet enfant ait
bénéficié d'un suivi par les membres du RASED dans son
école antérieure, mais il a été
présenté dès l'inscription par ses parents comme un enfant
agité demandant beaucoup d'attention de la part de ses enseignants, ce
qui a été confirmé par la suite. Le questionnaire de
Conners pour les enseignants évoqué plus haut (cf. annexe 4) a
été renseigné par leurs maîtresses pour chacun des
enfants.
Nous présenterons dans un premier temps la situation de
départ, puis le journal de bord du travail mené avec chaque
enseignante (augmenté de schémas réalisés avant,
pendant, ou après les entretiens), ainsi que les conclusions provisoires
du travail.
Dans un second temps, les informations recueillies lors des
différentes étapes de l'action seront indexées pour
déterminer les thèmes récurrents. Celles en lien avec les
objectifs de la recherche et les questions qui y sont afférentes seront
conservées, puis organisées afin de dégager une vue
d'ensemble des phénomènes observés, et de proposer un
modèle général relatif à l'attention de tous les
élèves, la scolarisation des élèves hyperactifs,
ses conséquences sur la gestion de classe, et les stratégies
éducatives les plus à même de faciliter l'apprentissage de
ces élèves tout en maintenant un climat de classe favorable pour
tous.
Troisième
partie : Recueil des données
1. Classe n° 1 : Petite
Section de Maternelle (enseignante : R.)
1.1. Situation de départ
L'enseignante est en demande de conseils et d'aide afin
d'améliorer le fonctionnement de la classe. Ses élèves
sont peu nombreux, majoritairement des garçons (16, 6 filles et 10
garçons), mais ils sont très agités. L'un d'entre eux, I.,
ne « tient pas en place ». Elle se sent démunie, d'autant plus
que le maître G, enseignant rééducateur, qui pouvait
prendre en charge cet élève, est absent pour l'année.
L'enseignante est également directrice de l'école. Elle est donc
remplacée une journée par semaine. L'enseignante
remplaçante trouve également que ce groupe classe, malgré
sa taille réduite, est très difficile à canaliser.
Le travail proposé est clairement indiqué comme
un travail de recherche sur la gestion de classe, l'attention et la motivation
des élèves. Mener une réflexion sur sa pratique de classe
intéresse l'enseignante qui accepte volontiers de participer. Avec cette
collègue comme avec les deux autres, la relation établie est une
relation de confiance. Nous nous côtoyons depuis plusieurs années,
au gré des interventions dues à ma fonction de psychologue
scolaire sur le secteur.
Par ailleurs, l'enseignante formule une demande d'intervention
concernant l'enfant qui pose les problèmes de comportement les plus
importants.
1.2. Fonctionnement de la classe
La problématique de la maîtresse concerne le
moyen de gérer ce groupe difficile, notamment l'accueil du matin.
Le déroulement de la journée commence par
l'accueil et une activité de regroupement. Viennent ensuite les
ateliers, puis la récréation. La deuxième partie de la
matinée est consacrée à une activité collective
(motricité deux fois par semaine notamment). L'après-midi, les
élèves font la sieste, puis se retrouvent pour un petit moment
collectif avant la fin des cours. Ils retrouvent ensuite leur famille (15 h 45)
ou font des activités péri-éducatives jusqu'à 16 h
45. La plupart des enfants assistent aux activités
péri-éducatives, et certains vont ensuite à la garderie.
Un jour par semaine, l'enseignante est remplacée par une collègue
du même âge environ (une trentaine d'années), ayant une
très bonne expérience des élèves de maternelle, et
beaucoup de savoir-faire.
Le travail des enfants est évalué, comme
fréquemment en maternelle, par des visages de bonhomme (souriant,
neutre, ou contrarié).
Avant la fin de l'année (durant le mois de mai
environ), l'enseignante réalise une évaluation globale des acquis
(une dizaine de petits exercices reprenant les différentes notions
étudiées : reconnaissance du prénom, reconnaissance
globale des lettres mettant en jeu des compétences de
découpage-collage, graphisme, connaissance des couleurs, des formes de
base, numération jusqu'à 3, connaissance des parties du corps,
dessin du bonhomme, écriture du prénom, repérage et
reconstitution de mots globaux...). Cette évaluation est remise aux
parents sous forme de petits livrets, assortie d'un commentaire de
l'enseignante.
1.3. L'enseignante
R. est âgée d'une trentaine d'année. Elle
est mère de famille de deux enfants très jeunes, dont une petite
fille à la santé fragile. Elle est directrice de l'école,
tâche dans laquelle elle est investie et montre des compétences
relationnelles et organisationnelles appréciées. Elle est d'un
bon contact, d'humeur égale, fait preuve de souplesse et de
compréhension face aux aléas rencontrés. Elle a une
volonté affirmée de bien faire et que ses élèves
soient épanouis dans sa classe. Il lui arrive de se fâcher et de
ressentir de l'énervement face à certains, ce qu'elle redoute et
parvient difficilement à concevoir. Elle sollicite dans ces cas
là l'aide du RASED, et notamment du rééducateur, ce qui
lui apporte stabilité et réconfort. Cette année est
particulièrement difficile, du fait de son groupe classe
compliqué. Elle ne parvient pas à gérer le comportement de
I. petit garçon qui « ne tient pas en place » et
entraîne les autres élèves dans son énervement, son
agitation, et ses difficultés de contrôle qui font modèle
de désobéissance.
1.4. Le questionnaire concernant l'autodétermination
(cf. annexe 11)
La moyenne à l'autodétermination est de 1,815
(cf. annexe 13). Ce résultat, comparé aux scores obtenus lors du
travail de groupe validant l'UE9 (Massy et al., op.cit.) est plus
élevé qu'attendu, compte tenu de l'âge des
élèves. Nous n'avons pas de comparaison du fait de notre manque
de référence en maternelle, mais nos résultats avaient mis
en évidence un score d'autodétermination proportionnel à
l'âge des enfants. On voit donc que la prise en compte de
l'autodétermination des élèves est importante dans la
gestion de cette classe.
Le score en autonomie est de 1,14, un peu élevé
puisque correspondant au score de la classe de CP de notre échantillon.
Les élèves exercent des choix dans leurs activités (place,
méthodes de travail, type d'activité, travail personnel).
Le score d'autoréalisation (1,40) correspond à
ceux obtenus au CP et CE : les élèves ont l'occasion de
travailler avec les autres, d'échanger et de confronter leur
savoir-faire, de se positionner par rapport aux autres et par rapport à
eux-mêmes.
Le score d'autorégulation est de 2,5. C'est un score
élevé : les enfants sont associés à
l'évaluation de leur travail. Des contrats et objectifs
individualisés leur sont proposés régulièrement.
Le score de responsabilisation est 2,22. C'est
également un score élevé puisqu'il correspond à
celui des classes de CE de notre échantillonnage : les
élèves participent à l'élaboration des
règles de vie, à l'organisation des récréations,
ils ont des responsabilités au sein de la classe, des conseils
d'élèves sont régulièrement organisés, et
ils participent aux décisions concernant la vie de la classe. Leur avis
est fréquemment sollicité et leurs efforts sont valorisés
régulièrement. Les relations avec les parents, les instances
municipales et hiérarchiques sont limitées mais
collaboratives.
En résumé, les résultats montrent une
place laissée à l''autodétermination des
élèves élevée. Compte tenu de l'absence de points
de comparaison en maternelle, il est difficile de situer les réponses
à ce questionnaire. Nos résultats en élémentaire
ayant montré une prise en compte de l'autodétermination
proportionnelle à l'âge des enfants, on peut se demander si ces
résultats ne sont pas un peu élevés compte tenu du jeune
âge des élèves.
1.5. L'enregistrement vidéo d'une séquence de
travail
Il a lieu au tout début de notre collaboration, a fait
l'objet d'une première analyse rapidement, puis d'une seconde
après les analyses des enregistrements des deux autres classes, pour
homogénéiser les critères d'observations.
La séquence est un travail de lecture d'album,
accompagné d'explications. Les élèves ont
déjà entendu l'histoire une fois. Cet album est adapté au
niveau de la classe, l'histoire est plaisante et met en jeu les couleurs :
Pop, le dinosaure, prend la couleur de l'aliment qu'il a mangé. A la fin
de l'histoire, il est multicolore. L'objectif de l'enseignante est de
vérifier que l'histoire a bien été comprise, et que les
élèves mémorisent les noms des couleurs, et,
éventuellement, certains éléments de son
déroulement. Afin de matérialiser celui-ci, elle a
réalisé des figurines, représentant le dinosaure de
différentes couleurs, et les aliments. Le tout est placé dans la
« boîte à trésors ». Elle montre un
aliment, et demande aux enfants de quelle couleur va devenir le dinosaure.
L'enfant qui a trouvé la bonne couleur vient piocher le dinosaure
correspondant. La séquence est codée et les résultats
consignés dans le tableau en annexe 14.
La séquence est une activité de lecture, devant
le groupe classe entier, ainsi que nous l'avions souhaité.
L'activité (cf. annexe 17) génère beaucoup de V+ de la
part de l'enseignante : 19 (la maîtresse lit, ou explique). Elle
pose 23 questions relatives à l'activité au groupe classe (23 V+
>Coll.) En tout, elle a 42 interventions verbales qui s'adressent au groupe,
éventuellement accompagnées de gestes (montre les images, ou
donne une figurine). Dans le cadre de l'activité, elle s'adresse 19 fois
à un élève en particulier, dont 14 fois pour lui poser une
question, et 5 fois pour lui donner une information. Le nombre de gestes
positifs, individuels et collectifs est de 69. Le nombre de gestes
négatifs (R. se lève fréquemment pour asseoir les
élèves [M-], elle leur dit « chut ! »
collectivement, ou leur demande de se calmer individuellement [V-]), est de 38.
Le rapport positif/négatif est de 1,82.
Du côté des élèves, on note une
moyenne de 1.7 mouvements en lien avec l'activité, et de 1,4
interventions verbales positives, donc une somme de 3,1 de gestes positifs. Il
y a en moyenne 11 gestes négatifs par enfant, essentiellement moteurs
(V- : 1,6, M- : 9,4). Le rapport positif/négatif est
très inférieur à 1 (0,28). Notons un moment où les
gestes négatifs disparaissent : l'enseignante propose à certains
enfants de piocher des personnages en papier dans une boîte. Il y a donc
du suspens sur deux registres : le choix de l'élève, et ce qui va
sortir de la boîte. On peut en conclure que l'attention des enfants est
captée lorsque l'activité génère de la surprise.
I., notre enfant hyperactif (en haut du tableau), obtient le
plus grand nombre de gestes, ce qui confirme le diagnostic et le dispositif
d'observation. Notons que beaucoup de ces gestes restent positifs (9), ce qui
correspond au plus grand nombre de manifestations positives de la classe. Le
rapport positif/négatif est de 0,43, ce qui est plus élevé
que le rapport moyen des élèves. Le nombre de gestes
négatifs (21 dont 17 M-) est cependant important. La maîtresse
précise que l'enfant a été plutôt attentif durant
cet enregistrement, par rapport à son comportement habituel.
1.6. I., l'enfant hyperactif
I. est signalé par R. car il présente des
difficultés de comportement importantes. La famille est suivie par une
éducatrice de l'Aide Sociale à l'Enfance depuis plusieurs
années. I. a deux frère et soeur plus âgés, dont
l'un est suivi par le SESSAD (Service d'Education Spéciale et de Soins
à Domicile) de l'ITEP (Institut Thérapeutique, Educatif et
Pédagogique) du département pour des troubles du comportement, et
l'autre est scolarisée en SEGPA (Section d'Enseignement
Général Professionnel Adapté) tous deux sont bien connus
des membres du RASED.
Le bilan cognitif est réalisé. Le petit
garçon investit bien les activités proposées, mais,
certaines séances, son comportement est très instable (notamment,
joue avec le matériel, déplace le mobilier de mon bureau...) et
il faut se fâcher pour qu'il arrête, ce qu'il fait. Les
résultats du bilan témoignent de fragilités, notamment en
maîtrise de la langue orale. I. présente un retard de dix mois
environ en compréhension, ce qui est important pour un enfant de cet
âge (pas encore 4 ans au moment du bilan). A la maison, le comportement
de l'enfant n'est pas aussi difficile qu'en classe, aux dires de sa mère
et de l'éducatrice. Notons que des perturbations familiales importantes
sont survenues récemment (séparation des parents,
éloignement du père, reprise d'une activité
professionnelle par la mère), et que, notamment, le petit garçon
va à la garderie tôt le matin et est récupéré
après la garderie du soir.
Un bilan orthophonique a été demandé afin
de confirmer les difficultés langagières, et d'envisager une
prise en charge.
Le questionnaire de Conners proposé à
l'enseignante témoigne de l'agitation importante de l'enfant en
classe : agité, fait des bruits incongrus, fait le malin, crises de
colère, perturbateur, bagarreur, impulsif, demande une attention
excessive et immédiate, et s'énerve lorsqu'il faut faire un
effort au degré maximal (énormément). R. coche beaucoup
pour : sensible à la critique, distrait, humeur changeante, mal
accepté par le groupe, difficultés à terminer ce qui est
commencé, immature, peu coopérant, et difficultés
d'apprentissage. Compte tenu de ces différents éléments,
l'échelle d'hyperactivité est significative.
1.7. Journal de bord (augmenté)
· Séance n ° 1 (17/10/2014)
Une première séance d'observation d'une
vingtaine de minutes durant le moment de regroupement collectif du matin, puis
un échange sur les difficultés d'écoute des
élèves et leur agitation, a permis d'isoler un premier objet de
réflexion : la mise en route de la journée de travail, notamment
le rituel de présentation de la journée (date et emploi du
temps), et le rituel d'appel (à l'aide de cartes sur lesquelles figurent
les photos des élèves).
Cette séance a permis de constater que les
élèves (en demi-groupe, garçons ou filles, le 2ème
demi-groupe passant aux toilettes), devant donner collectivement le nom de
l'étiquette photo choisie par l'enseignante, criaient tous ensemble le
prénom de l'enfant concerné et la couleur du panneau
(correspondant à la couleur de leur groupe de travail) sur lequel
l'étiquette devait être placée, ce qui
générait beaucoup de bruit. Engagés dans une tâche
collective sans rôle individuel, ils n'étaient pas
responsabilisés dans la tâche confiée. La notion
d'interdépendance positive, présentée par Céline
Darnon durant l'UE 8, de nature à élaborer des tâches
collectives qui suscitent l'engagement de chaque élève, est
transmise à l'enseignante (figure 5).
Figure 5: Outil n°1 :
l'apprentissage coopératif (d'après Johnson & Johnson,
2009).
La présentation de la notion d'autodétermination
et ses quatre composantes : autonomie, autoréalisation,
responsabilisation, autorégulation (figure 6, schéma en langage
facile à lire réalisé lors de l'UE9), donnent quelques
pistes à l'enseignante pour faire évoluer les activités
demandées.
Figure 6: Outil n°2 :
l'autodétermination (d'après Deci & Ryan, Vallerand,
Wehmeyer, Wolfensberger op.cit.)
La réflexion s'engage ensuite sur les activités
que les enfants peuvent gérer seuls au sein de la classe. Les
coins-jeux, et les colliers (système assez fréquent de
régulation de la fréquentation des coins-jeux dans les
écoles maternelles : un nombre limité (4 ou 5 en
général) de colliers particuliers à chaque coin est
accroché à l'entrée de chaque coin-jeux. Les
élèves doivent avoir le collier qui convient pour profiter du
coin-jeu. Lorsqu'ils changent d'activité, ils remettent le collier
à sa place, ou le donnent à un camarade qui souhaite à son
tour faire cette activité. R. appliquait ce système dans sa
classe jusqu'à présent, mais il ne fonctionne pas cette
année : les élèves ne font pas cas des colliers, et
entrent et sortent librement (et fréquemment, étant donné
que la plupart d'entre eux ne parvient pas à se fixer sur une
activité). Encouragée par le support théorique de
l'autodétermination, l'enseignante exprime, durant l'entretien,
l'intention de revenir sur son organisation habituelle en vérifiant les
colliers (état et nombre), et en renforçant la surveillance
concernant leur utilisation. Les élèves qui n'ont pas de collier
devront, momentanément, renoncer à l'activité
correspondante.
Elle va, par ailleurs, revoir les activités
proposées dans ces coins, faire l'inventaire du matériel (puzzles
par exemple), compléter les éléments manquants (coins
dînette, coins jeux de construction), enrichir les jeux proposés,
et organiser des rotations.
Il est prévu une première séance
d'observation (avec enregistrement vidéo) la semaine suivante, lors du
rituel d'accueil suivi d'une séance de travail collective.
· Séance n° 2 (7/11/2014)
Cette séance est composée de l'observation du
rituel d'accueil et de l'enregistrement vidéo de l'activité de
lecture d'album, puis d'un entretien durant la pause déjeuner.
L'enseignante a remanié son rituel d'accueil, notamment l'appel, en
confiant davantage de tâches individuelles aux élèves
(choix de la carte et lecture du prénom). Ils investissent plutôt
bien la tâche. On note cependant de nombreux déplacements : ils se
lèvent, changent de place. Durant l'activité de lecture, ils
parlent très souvent tous ensemble, et font donc beaucoup de bruit. Par
ailleurs, une fillette pleure encore, ce qu'elle fait souvent, notamment
lorsque les élèves font du bruit ou s'agitent (on est au mois de
novembre, mais cette enfant, pour de multiples raisons dont certaines
extérieures à l'école, présente encore des
difficultés d'adaptation).
L'entretien suivant l'enregistrement de la séquence a
porté sur les moyens de réduire l'agitation des
élèves, et notamment le fait qu'ils ne parviennent pas à
garder la même place. R. est très fatiguée à l'issue
de cet enchaînement de deux activités. Elle reconnaît que,
en l'absence de l'enregistrement, elle aurait arrêté le travail en
cours, ce qu'elle n'a pas osé faire en ma présence. Nous
constatons les capacités d'attention très limitées de ces
enfants, concluant que des activités plus courtes, mais en exigeant
qu'ils restent à la même place, afin de prendre des habitudes de
travail durables, sont préférables. Si l'on analyse cette
situation selon les lois du behaviorisme, on peut même considérer
que continuer l'activité dans un tel contexte est contre-productif, les
élèves associant le lieu du regroupement avec des habitudes de
changement de place soulageant leur besoin moteur, et obtenant même un
contact physique gratifiant avec leur enseignante.
Figure 7: Outil n°3 :
schéma réalisé à la suite de
l'entretien
Le besoin de mouvement des enfants apparaît nettement.
Ce besoin entre manifestement en conflit avec le projet de l'enseignante. La
nécessité de « négocier » entre les besoins des
élèves et les objectifs de R. amène à
schématiser l'élaboration du projet de la classe selon la figure
7, présentée ultérieurement à l'enseignante. En
tant qu'observatrice, je ne suis bien sûr pas intervenue. Le rôle
de l'Agent Territorial Spécialisé des Ecoles Maternelles est
évoqué : l'ATSEM de la classe vient d'arriver dans la
fonction, mais elle a déjà acquis ces petits gestes
professionnels discrets mais facilitateurs (présente physique à
côté de l'enfant) qui aident à recentrer le perturbateur
vers l'activité.
L'entretien porte ensuite sur ce que R. appelle la «
méchanceté gratuite » de certains élèves qui
tapent leurs camarades sans raison apparente, ce qu'elle a du mal à
comprendre et à accepter. L'échange porte alors sur les
règles de vie. L'enseignante a déjà abordé les
règles de conduite les plus élémentaires (figure 8) : Je
ne mords pas, je ne tape pas mes camarades, et je ne leur donne pas de coups de
pied.
Figure 8: Affichage des
règles de vie dans la classe
La nécessité d'éduquer les enfants
à gérer leurs émotions, et à entrer en contact avec
les autres, apparaît nettement. Le livre « 50 activités pour
apprendre à vivre ensemble », de Sylvia Dorance (2007), accessible
dans les mallettes regroupant des outils sur le bien vivre ensemble mises
à disposition des enseignants du secteur du RASED (cf. le blog
mieuxvivrealecole.blog.free.fr), est conseillé et prêté
à l'enseignante. Par la suite, elle s'emploiera avec
bénéfice, en exploitant des livres empruntés à la
médiathèque, à travailler sur le thème des
conflits, que les élèves investiront avec
intérêt.
· Séances n° 3 (14/11/2014)
Cette séance comprend une observation en classe portant
sur le rituel d'accueil, puis un entretien durant la pause déjeuner, qui
prolonge les points abordés, et reprend les difficultés
rencontrées par l'enseignante durant la semaine.
La maîtresse a complètement remanié le
rituel de l'appel : les tâches sont réalisées
individuellement (l'élève pioche une carte-photo, dit le
prénom de l'élève, la couleur de son groupe, et indique
à l'enseignante où placer la carte). L'enfant est
responsabilisé du fait de la tâche qui lui est personnellement
confiée. Il peut demander l'aide d'un camarade qu'il choisit
lui-même en cas de difficulté. En procédant de façon
individuelle, R. vérifie les connaissances des prénoms de chacun
de ses élèves. L'opportunité d'un tableau, à
l'attention de la maîtresse mais aussi des élèves afin
qu'ils visualisent leurs connaissances, est évoquée lors de
l'entretien.
L'enseignante a attribué une place fixe à chaque
élève lors des moments de regroupement : chaque banc a
plusieurs étiquettes avec le prénom des enfants concernés.
Ce dispositif a plu aux jeunes élèves lorsqu'ils l'ont
découvert. Le nombre de déplacements des enfants s'en est
trouvé réduit de façon notable.
La date, auparavant indiquée par une pince que R.
déplace sur le wagon représentant le jour de la semaine
(symbolisée par une locomotive tirant 7 wagons portant le nom des
jours), est à présent déplacée par
l'élève de service désigné au préalable par
l'enseignante selon une liste affichée, dans l'ordre de l'alphabet. Les
élèves peuvent donc prévoir quand ils seront de service,
et anticiper. L'élève de service peut indiquer à ses
camarades en se référant à la frise de l'emploi du temps,
le déroulement de la journée. A cet instant, les réactions
des enfants à l'égard des différentes activités de
la journée peuvent comporter des informations intéressantes pour
établir le projet de classe (Figure 7).
On constate donc que les principes de
l'autodétermination, présentés brièvement à
l'aide du schéma en langage facile à lire, aboutit très
rapidement à une modification des tâches proposées aux
élèves, le plus fréquemment dans le sens d'une
délégation individuelle. Plus actifs, incités à
faire des choix, le repérage de leurs connaissances est ainsi rendu
possible, ce qui permet de mettre en place une autorégulation de leurs
apprentissages. Par ailleurs, l'idée d'une élaboration du projet
de classe en introduisant une zone de négociation, aboutit à
modifier l'attitude de l'enseignante, en l'incitant à prêter
attention à tous les indices relatifs aux besoins, envies, et
intérêts de ses élèves, visant à
développer leur motivation intrinsèque. Les principes
théoriques de cette approche (continuum de l'autodétermination
abordé lors de l'UE 8, outil n°4) sont présentés
à l'enseignante lors de cet échange.
Figure 9: Outil n°4 :
les degrés de la motivation (d'après Deci & Ryan,
op.cit.).
· Séance n° 4 (21/11/2014)
Cette séance est constituée d'un entretien avec
l'enseignante. La semaine a été éprouvante car les
élèves sont toujours très agités, et l'enseignante
craint de ne pouvoir, à certains moments, contrôler son
énervement. Les pièges de l'effet « miroir » (Figure
10) sont alors présentés, pour illustrer ce qu'elle ressent et
mettre en évidence l'escalade émotionnelle qui en
découle.
Figure 10: Outil n°5 :
l'effet miroir (d'après Servan-Schreiber, 2003, citant
Gottman).
Le « message en je », base de la communication
humaniste, est également abordé afin d'aider au
dévoilement de soi, établir une communication authentique avec
les élèves, et leur donner l'information nécessaire
concernant les conséquences émotionnelles que leur comportement
provoque chez l'enseignante, en évitant, cependant, de les culpabiliser.
Figure 11: Outil n°6 :
Le message en Je (d'après d'Ansembourg, 2000).
L'enseignante aborde ensuite un problème
récurrent : certains élèves mettent beaucoup de temps pour
aller en récréation, ce qui mobilise longuement les adultes. Les
lois du renforcement, susceptibles d'expliquer pourquoi un enfant adopte un
comportement et de donner des pistes pour l'aider à abandonner ce
comportement indésirable, sont alors présentées à
l'enseignante (Figure 11). Une réflexion est ensuite engagée sur
les modifications à apporter dans l'environnement pour inciter les
élèves à sortir plus rapidement. Les élèves
qui « traînent » pour s'habiller bénéficient de
l'aide de l'ATSEM et de l'enseignante, ce qui peut renforcer leur comportement.
Il est donc décidé qu'aucune aide ne serait apportée
à l'habillage des élèves durant les dix minutes suivant la
sortie des premiers enfants, espérant que ces dix minutes d'attente sans
aide et sans attention particulière des adultes, finirait par dissuader
les retardataires. L'enseignante est prévenue qu'un « effet rebond
» pourrait être observé les premiers temps, jusqu'à ce
que les enfants aient assimilé le fonctionnement instauré.
L'entretien porte ensuite sur la façon de motiver les
élèves à adopter un comportement « pro-social ».
L'idée de fabriquer une « fleur du comportement »
composée de pinces à linge, où chaque enfant est
représenté par un pétale (sur lequel sa photo est
collée), et où l'objectif de la classe serait que tous les
pétales soient réunis sur cette fleur chaque soir, est
envisagée. La tâche, collective, prendrait en compte les principes
de l'interdépendance positive : un objectif commun, avec une
responsabilité particulière confiée à chaque enfant
: adopter un comportement qui correspond aux règles de vie de la classe.
Cette activité serait l'occasion de revenir sur le déroulement
de la journée en mettant l'accent sur les comportements positifs
plutôt que les comportements négatifs.
Figure 12: Outil n°7 :
Inciter l'autre à changer son comportement (d'après Georges,
2000).
· Séance n° 5 (28/11/2014)
L'enseignante apparaît fatiguée, très
contrariée par les difficultés occasionnées par le
comportement de I., qui ne s'améliore pas, bien au contraire. Une autre
élève adopte des comportements qui gênent le fonctionnement
de la classe, en « miroir » par rapport à I., ce qui
démultiplie les difficultés. Elle réitère sa
demande de bilan psychologique afin de mieux comprendre ce qui gêne I.,
au-delà des perturbations familiales importantes qu'elle constate
régulièrement.
L'entretien porte sur les modalités de gestion du
comportement de l'enfant afin qu'il dérange le moins possible le
fonctionnement de la classe. Les lois de renforcement impliquent que c'est en
limitant les conséquences de son comportement qu'il sera incité
à le modifier. Il est donc décidé que, tant que le
dérangement reste minime, l'enseignante n'y accorde pas d'attention. En
cas de comportement trop gênant, et après avertissement,
l'idée du « time out », où l'enfant serait
écarté sur une chaise au fond de la classe quelques minutes, en
lui accordant le minimum d'attention, est évoquée.
Parallèlement, les comportements adaptés sont
à souligner. L'idée de la fleur du comportement est encore
évoquée. Un livret de réussite (cf. l'exemple, avec des
cartes, proposé sur le site charivari.ektablog.com, figure 13) pourrait
être mis en place, assurant la liaison avec les parents, et permettant
aux enfants de visualiser leur parcours. Les objectifs en termes de
comportement, mais également en termes d'acquisitions scolaires,
seraient explicités. L'attention des élèves serait
mobilisée davantage sur les apprentissages, et moins sur les aspects
comportementaux.
Figure 13: Outil n°8 :
Devenir élève (Guichard & Koch, 2015)
Les travaux d'Hélène Lubienska
(op.cit.) sur l'entraînement à l'attention et le
contrôle moteur dans le cadre de la pédagogie Montessori sont
présentés à l'enseignante (figure 14).
Figure 14: Outil n°9 :
la pédagogie Montessori (d'après Lubienska de Lenval,
op.cit.).
Ces travaux orientent sur l'association du mouvement, du
chant, et des paroles, pour créer un espace collectif que les enfants
partagent. Nous appelons cet espace le « fil du collectif ». Le
besoin de bouger, comme besoin essentiel de ces enfants, est à nouveau
abordé. L'intégration de ce besoin de bouger tout en les incitant
à écouter et à regarder, à entendre et voir, et
à tenir compte de ce que l'enseignante, et les pairs, font, est un
vecteur qui peut être très porteur avec de tels enfants.
L'insistance de Maria Montessori pour que les enseignants donnent l'exemple en
restant silencieux en classe est évoquée, même si cette
enseignante parle de façon mesurée, et crie peu.
Le rythme des activités est également
abordé. Les enfants qui ont des problèmes d'attention ayant du
mal à attendre, il apparaît important que l'enchaînement des
activités proposées soit rapide. Or, l'enseignante,
également directrice, est souvent dérangée, ce qui
occasionne des retards. Par ailleurs, les enfants sont fréquemment
amenés à s'habiller, se déshabiller, à se chausser,
se déchausser. Ces activités peu attrayantes et
répétitives sont souvent mal vécues par les enfants peu
attentifs, et peuvent être l'occasion de comportements asociaux (coups de
pied, bousculades). Assorties de pauses souvent longues le temps que tous les
élèves soient prêts, elles sont susceptibles d'alourdir
l'emploi du temps et peuvent, si l'on n'y prend garde, réduire
l'intérêt des enfants pour l'école et dégrader le
climat scolaire.
· Séance n° 6 (12/12/2014)
L'entretien porte sur les différents moyens pour
l'enseignante d'expliciter les objectifs d'apprentissage des
élèves, et de les représenter, à l'attention des
élèves et de leurs parents.
L'enseignante organise, bien sûr, des réunions de
rentrée avec les parents, et elle utilise un livret de
compétences, mais ce livret n'est pas transmis aux parents en
début d'année, et n'est pas accessible aux
élèves.
Une réflexion s'engage avec R. afin d'imaginer
différents moyens pour les enfants de visualiser leurs objectifs
d'apprentissage, ainsi que leurs progrès, et les modalités de
transmission de ces informations aux parents (cahier de réussites...).
L'idée de visualiser l'acquisition de ces compétences pour chaque
élève est évoquée. Plusieurs systèmes sont
imaginées (médailles, puzzles, dessins à
compléter...). Il apparaît important que les enfants aient une
perception claire des objectifs atteints ou non, afin de favoriser les quatre
composantes de l'autodétermination.
Suivant le principe de l'autodétermination,
l'enseignante a fourni à chaque élève un petit cahier de
dessin (confectionné artisanalement). Lorsqu'il a fini ses
activités, l'élève peut prendre ce petit cahier et
réaliser un dessin libre, puis il le range à sa place. A la fin
de chaque période, il apporte son cahier à ses parents pour
montrer ses réalisations. Cette idée, transmise par une
collègue de PS dans une autre école, lui a paru simple à
appliquer et a reçu un accueil favorable de la part des
élèves.
· Séance n° 7 (10/01/2015)
R. apparaît sereine. Elle a renoué avec le
plaisir d'enseigner, qu'elle n'avait pas éprouvé depuis le
début de l'année scolaire. Elle a pu constater les progrès
réalisés par ses élèves et passer quelques
journées satisfaisantes qui l'ont rassérénée. I. a
été absent, malade : « Quand il n'est pas là,
ça change tout ». Elle continue à construire « le fil
du collectif » en prenant en compte le besoin de mouvement des
élèves, en proposant des jeux de doigts et en utilisant les
séances de motricité pour associer langage, musique, et
mouvement. Par ailleurs, elle valorise les temps d'attente où les
élèves sont regroupés sur un banc pour
répéter des comptines, ce qui permet de maintenir leur
attention.
L'utilité de la fleur du comportement lui
apparaît moins évidente dans un tel contexte, le comportement des
élèves se normalisant.
· Séance n° 8 (16/01/2015)
L'enseignante a continué à faire porter ses
efforts sur le « fil du collectif », en multipliant les
activités corporelles synchronisées, notamment durant les
séances de motricité, ainsi que les jeux de doigts.
Néanmoins, celui-ci reste encore trop fragile. Les écarts de
comportement de I., revenu en classe, gênent pour le maintenir.
L'entretien porte sur ce qui pourrait permettre d'aider l'enfant à mieux
suivre le rythme des activités. La nécessité d'un bilan
apparaît nettement et l'autorisation des parents va être
sollicitée. L'enseignante est en demande de moyens
supplémentaires pour aider I. Elle constate qu'il a besoin de davantage
d'attention de sa part, pour l'aider à se concentrer, à mener une
tâche à son terme. Elle va essayer de développer plus
d'activités autonomes en s'appuyant sur les élèves les
plus calmes, qui peuvent travailler de façon efficace avec peu
d'accompagnement. De cette façon, elle pourra dégager du temps
pour stimuler I., l'aider à entrer dans la tâche et à la
mener à bien. La mise en place de cette adaptation ne pourra être
possible qu'en approfondissant davantage encore les connaissances de chacun de
ses élèves (points forts, points faibles, centres
d'intérêt,...).
La possibilité de donner chaque soir un avis sur la
façon dont s'est passée la journée aux parents de l'enfant
(la mère en l'occurrence, puisqu'il s'agit d'une famille monoparentale)
sous forme de code couleur (rouge, orange, vert) est évoquée, en
demandant à la mère de féliciter et éventuellement
récompenser l'enfant lorsqu'il rapporte une carte verte. L'enseignante
émet des doutes sur l'efficacité d'un tel système. Elle ne
veut pas stigmatiser le petit garçon par rapport à ses camarades.
Par ailleurs, l'enfant est récupéré le soir par son
frère collégien, et la mère qui rentre tard ne portera
pas, lui semble-t-il en se basant sur sa connaissance du milieu familial,
attention à la carte ramenée par son fils. Elle conclut en
déplorant l'absence du rééducateur (maître G) qui,
jusqu'à présent, prenait en charge ces élèves une
fois par semaine, travaillant avec la famille, avec l'enfant et avec les
enseignants, parvenant la plupart du temps à faire évoluer les
situations, et, toujours, à améliorer le quotidien en offrant un
espace différent à l'élève, ludique, attentif et
sécurisant.
Le 19 janvier, une entrevue avec l'enseignante
remplaçante confirme les difficultés de gestion de ce groupe
classe : « A des moments, on se sent dépassés, un qui se met
à crier, tout part en vrac. La majorité des enfants de ce groupe
n'a pas assimilé les règles de fonctionnement, ils peuvent monter
sur les tables et les autres rigoler en les voyant faire... ». C'est donc
le fonctionnement collectif de la classe qui interpelle cette enseignante
à ce moment précis, indépendamment des difficultés
d'élèves particuliers.
· Séance n° 9 (13/03/2015)
Dans l'affectation des places sur le banc, I. est
positionné à côté de la maîtresse. Celle-ci
note qu'il essaie de devenir « l'assistant de la maîtresse »,
moyennant quoi elle observe ses bonnes intentions, mais constate les
difficultés générées auprès des autres
élèves. I. est très réactif, il peut taper ses
camarades. L'enseignante constate que « son comportement déteint
sur les autres, deux garçons notamment». Les parents se plaignent
car leurs enfants sont agressés. La maîtresse craint que la
confiance entre les différents interlocuteurs et le climat
général de l'école ne se dégradent.
De façon plus générale, l'enseignante
essaie de se constituer des fiches personnelles, où elle note les
centres d'intérêt, les réussites, les difficultés,
et tout autre élément lui permettant d'avoir une meilleure
connaissance de chaque élève.
Les principes théoriques des intelligences multiples
(figure 15) lui sont alors présentés. L'enseignante constate que
la plupart de ses activités correspondent à la diversité
des intelligences des élèves. Elle apprécie
l'explicitation des pratiques enseignantes en maternelle que permettent ces
outils théoriques et mesure les opportunités qu'ils apportent
pour mieux caractériser les points d'appui et centres
d'intérêt de chaque élève. Elle souligne que le
mouvement, si nécessaire aux hyperactifs, est intégré, par
le biais de l'intelligence kinesthésique, dans ces principes. Elle
déplore son peu d'intérêt spontané dans le domaine
musical, qu'elle ressent comme une limite dans ses pratiques d'enseignement
auprès d'élèves de Petite Section.
Figure 15: Outil n°10
: les intelligences multiples (d'après Gardner, 2008).
· Séance n° 10 (10/04/2015)
La classe a accueilli deux nouveaux élèves,
arrivés en même temps bien que de familles différentes. Ces
deux élèves motivés « donnent l'exemple » : leur
présence a amélioré le comportement des autres
élèves. Elle a peut être, également,
créé un effet de nouveauté qui a pu éveiller leur
intérêt. L'enseignante rappelle qu'elle a le sentiment de passer
une année très difficile et de « mener un combat
pratiquement tout le temps ». Pour l'instant, elle savoure ces
quelques moments de répit. Elle se rend compte qu'elle a établi
une alliance pédagogique positive avec une dizaine des
élèves, dont les deux nouveaux venus, et en éprouve de la
satisfaction. Le travail basé sur la lecture de livres concernant les
conflits et la façon de les résoudre, sur le contrôle de
leurs émotions, à partir de situations vraies
« parlantes pour les enfants », continue sur le
thème de la coopération. D'ores et déjà, les
élèves ont développé un intérêt pour
la lecture qui permet une réflexion sur les comportements pro-sociaux,
des échanges intéressants, et des moments collectifs
agréables.
L'enseignante a transmis aux parents un petit livret
d'évaluation de chaque élève. Ce petit livret regroupe les
différentes acquisitions des enfants. L'hypothèse que
l'association des parents aux progrès des enfants, par
l'intermédiaire de ce livret, puisse contribuer à
l'amélioration (relative) du climat de la classe et de leur implication
est évoquée.
I. est à présent plus calme. Le bilan
psychologique est en cours et deux séances ont déjà eu
lieu. L'enfant vient facilement et participe volontiers. Il est content de
bénéficier de l'attention d'un adulte disponible. Il se montre
très serviable, rangeant spontanément le matériel, ouvrant
la porte et la refermant à bon escient, etc. Une dernière
séance est prévue la semaine suivante. Néanmoins,
même en situation duelle, cet enfant est très difficile à
canaliser. Il peut refuser de faire certaines tâches, et se lasse
très rapidement. Les difficultés de compréhension de la
langue orale sont retransmises à l'enseignante, avec pour conseil
d'utiliser des phrases courtes, des mots simples, de faciliter l'entrée
dans la tâche par l'exemple, et d'utiliser des supports visuels en
complément des explications orales. Le bilan orthophonique
demandé est rapidement réalisé en raison de l'urgence. Une
double prise en charge hebdomadaire est préconisée par
l'orthophoniste. Les résultats au questionnaire de Conners orientent sur
une hyperactivité associée. Des informations sur la nature du
trouble sont diffusées auprès des enseignantes (Laurent
et al, op. cit.). Pour l'année prochaine, un dossier est
constitué afin de solliciter auprès de la MDPH l'aide d'une AVS
pour cet enfant.
· Séance d'observation (01/07/2015)
Une séance de bilan avait été
projetée dès le départ, comme aboutissement du travail
réalisé. Pour des raisons d'emploi du temps, elle a eu lieu la
dernière semaine de classe. L'enseignante a accepté de maintenir
cette séance d'observation, bien que des contraintes personnelles aient
affecté sa disponibilité.
On observe que les enfants restent très
« mobiles », notamment durant la phase de démarrage
de l'activité (lecture d'album), où on les voit sauter des bancs,
se lever, etc. R. commence, comme pour la première séance, par
des jeux de doigt (imitation) qui aident les élèves à se
concentrer et qu'ils exécutent avec plaisir. Durant la lecture, de
nombreux enfants sont intéressés, et silencieux. Certains se
lèvent encore, mais beaucoup moins : les élèves ont
développé leur capacité d'écoute depuis le
début de l'année. Après la lecture, des comptines et jeux
chantés rencontrent l'adhésion et l'enthousiasme des enfants.
La circulation de la parole n'est pas encore mise en
place : l'enseignante s'adresse peu aux élèves
individuellement. Ils ont encore tendance à répondre tous
ensemble, et à s'amuser du bruit que le groupe peut
générer. Les règles de vie sont assimilées, mais le
fonctionnement collectif et l'écoute des consignes de l'enseignante
restent fragiles. Il reste beaucoup de travail à ce groupe pour avoir un
comportement d'écoliers. La présence de I. a compliqué la
tâche tout au long de l'année, mais d'autres enfants ont un
comportement problématique, ce qui démultiplie la
difficulté.
1.8. Bilan avec l'enseignante du travail
réalisé
L'enseignante a apprécié de pouvoir
échanger sur les difficultés rencontrées.
Les outils présentés l'ont
intéressée. La méthode Montessori lui semble la plus
propice à une amélioration de sa pratique de classe : elle a
visité une école où cette pédagogie est mise en
pratique et va, progressivement, construire le matériel (exercices
manipulatoires, sensori-moteurs et logico-mathématiques, que les
élèves réalisent selon leur choix, en autonomie et
à leur rythme). Parallèlement, elle va multiplier les comptines
et jeux chantés.
La théorie de l'autodétermination l'a peu
aidée, mais l'interdépendance positive, avec l'idée d'une
responsabilité individuelle dans les tâches demandées, un
peu plus.
Le travail sur les règles de vie, la découverte
des albums avec les enfants, les échanges et discussions avec eux, ont
pu être gratifiants à certains moments (notamment lors des moments
proches de leurs préoccupations, où ils se sentaient
concernés).
Pour les enseignantes, cette année scolaire restera une
année difficile, fatigante, et souvent démoralisante.
1.9. Conclusions
Le travail avec cette enseignante s'est déroulé
sur une longue période, de nombreuses pistes ont été
explorées. C'est un travail de tâtonnement et de prise d'indices,
devant une situation préoccupante pour laquelle aucune solution
déterminante n'a été apportée. Le besoin de
mouvement apparaît un besoin fondamental pour les enfants de cet
âge, et le travail réalisé, durant les années de
maternelle, pour le canaliser, l'apprivoiser, est capital. C'est un objectif
d'enseignement en lui-même pour ces élèves et les moyens
d'y parvenir sont à explorer méthodiquement.
Les théories de la motivation présentées
n'ont pas été concluantes. Rétrospectivement, et compte
tenu des informations obtenues à l'issue du travail
réalisé dans les deux autres classes, il apparaît que les
pistes behavioristes auraient du être explorées davantage, afin de
proposer des leviers supplémentaires à l'enseignante pour asseoir
son autorité face à de très jeunes enfants. Au contraire,
les lois de l'autodétermination et les principes motivationnels ont
orienté sur trop de souplesse dans cette situation particulière.
Un travail sur le rythme des activités, et notamment l'engagement
attentionnel des enfants dans les tâches, la « mise en
projet », aurait du être mené, basé sur le geste
d'attention de La Garanderie (op.cit.). Malencontreusement,
l'étude bibliographique n'étant pas terminée, ces concepts
n'étaient pas encore en ma possession. De même, l'analyse de
l'enregistrement vidéo n'a été finalisée
qu'après la fin du travail mené dans les trois classes. Ses
conclusions n'ont donc pas encore pu être utilisées.
Concernant l'hyperactivité, cette expérience
montre combien la présence d'un enfant hyperactif dans une classe
où se construit le contrôle moteur et attentionnel des
élèves, est un contrexemple qui complique durablement le
fonctionnement de la classe entière. La situation de cet enfant
nécessite l'accompagnement d'une tierce personne (AVS), qui pourra
s'occuper de lui tandis que l'enseignante maintient le « fil du
collectif », quitte à ce que l'enfant soit
momentanément décroché lorsqu'il ne peut plus suivre ce
fil. Ce travail illustre aussi, en négatif, combien l'intervention d'un
rééducateur peut être déterminante dans une telle
situation : outre le travail avec l'enfant et la famille, ce professionnel
qui intervient sur le temps scolaire auprès de l'enfant, envoie le
message à celui-ci, et aux autres élèves, que son
comportement n'est pas conforme à ce qui est attendu. Par ailleurs, le
temps de « respiration » du reste du groupe classe lorsque
l'enfant est pris en charge est essentiel car il est utilisé par
l'enseignant pour retrouver (en PS : créer) un cadre scolaire
fonctionnel. Le présent travail n'a pu, bien évidemment, se
substituer à une prise en charge du rééducateur.
2. Classe n°
2 : Cours Moyen 1 (enseignante : N.)
2.1. Situation de départ
L'enseignante accepte avec enthousiasme de réaliser ce
travail de « recherche sur la gestion de classe, l'attention et la
motivation des élèves ». La réflexion
l'intéresse, même si, ayant prévu de partir à la
retraite à la fin de l'année, elle n'est pas
particulièrement en quête de nouvelles façons de
travailler.
Sa classe cette année est une classe difficile. Elle
est composée de 28 élèves, dont une majorité de
garçons (19). Un certain nombre d'enfants présentent des
difficultés d'apprentissage (deux ou trois ne pourront pas suivre en
6ème, et il faudra probablement envisager une orientation
SEGPA) ; beaucoup sont « immatures » (huit
garçons sont cités). Ils pensent à jouer surtout, aux
Legos, au foot... ». Pour beaucoup, on « laisse tomber les
notions qui ne sont pas indispensables, on simplifie », mais
« on va pas lâcher ». Peu d'enfants sont
« bons élèves », ceux-là font
« tourner leur petite hélice ». Un enfant est
particulièrement compliqué à cadrer ; il s'agit
de X., arrivé l'année précédente dans
l'école. X. est un bon élève, un garçon brillant et
intéressé par les apprentissages, mais cet enfant est
« seul au monde, ya que moi qui existe, je fais ce que je veux quand
je veux ». L'enseignante exprime avec ses mots le sentiment que ce
garçon a du mal à se positionner dans le groupe classe,
probablement dans son rapport à l'autre en général. Pour
le contenir au sein de la classe, elle « l'ignore ». Cette
attitude est la plus fonctionnelle qu'elle ait trouvée.
N, l'enseignante, est également la directrice de
l'école. Deux après-midis par semaine, elle est remplacée
par un enseignant expérimenté, avec lequel nous avons eu
plusieurs échanges, et qui exprime sa déception par rapport
à ce groupe : « ils sont souvent à la limite
du respect. Ils pensent à autre chose, les matches en
récré, leur groupe de copains, ils s'envoient des mots pendant
les cours, organisent leurs jeux. Ils ne prennent pas en compte les remarques,
notamment concernant l'écriture... ». Pour lui, la
démotivation du groupe d'une dizaine de garçons est aussi
difficile à gérer que le comportement de X.
2.2. Fonctionnement de la classe
Le français et les mathématiques sont appris par
plan de travail. Chaque élève a un
« calepin » qui regroupe les leçons de
l'année. Un plan de travail est proposé tous les quinze jours. Il
choisit le degré de difficulté de ses exercices (l'enseignante
propose trois degrés différents) et procède dans l'ordre
qu'il souhaite. L'enseignante peut ainsi avoir du temps pour chaque
élève individuellement. Par ailleurs, chaque matin, les
élèves font une dictée qu'ils préparent à la
maison la veille. Les après-midis, l'enseignante, lorsqu'elle assure les
cours, propose une lecture suivie (alternance de lecture individuelle et de
questions orales, collectives ou individuelles). L'enseignement d'anglais est
également assuré par N. Par ailleurs, lorsque les
élèves sont inattentifs, elle a pris l'habitude de leur parler en
anglais, système qui s'est révélé efficace. Sport
et musique sont enseignés par des intervenants municipaux. Le
maître remplaçant assure l'enseignement des autres matières
(sciences, histoire, géographie) les deux après-midis
restantes.
Deux élèves sont de service à tour de
rôle. L'enseignante relativise l'importance de ces tâches :
« rendre service, distribuer, tu n'es pas à l'école
pour ça ! ».
En fin d'année, toute la classe ira en classe de mer
passer une semaine. Ce projet, que l'enseignante a déjà
réalisé plusieurs années, mobilise la classe, par une
correspondance (électronique) notamment avec une classe
d'élèves du même âge dans la région d'accueil.
Les élèves sont associés à l'organisation et au
choix de certaines activités.
2.3. L'enseignante
N. est une femme expérimentée, affirmée,
énergique, qui a une très bonne présence verbale. Elle
part à la retraite à la fin de l'année, sans regret. Elle
a le goût de l'effort, pratique un sport artistique dans une association
où elle a des responsabilités. Directrice, elle est très
organisée et gère son école avec dynamisme.
Réactive, elle n'hésite pas à prendre position et à
argumenter ses points de vue.
2.4. Le questionnaire concernant l'autodétermination
(cf. annexe 12)
Le résultat global (2,65) est le plus
élevé de tous ceux obtenus jusqu'à présent. Les
scores concernant l'autonomie et l'autorégulation sont
particulièrement élevés (respectivement 2,86 et
2,6) : les élèves présentent leur cahier librement,
ils choisissent leurs activités, leurs méthodes de travail,
réalisent du travail personnel en classe. Concernant
l'autorégulation : ils analysent et expliquent leurs
stratégies de travail, des contrats sont mis en place, les
résultats aux évaluations sont symbolisés par des couleurs
qu'ils peuvent visualiser sur des grilles. A l'échelle
d'autoréalisation, le résultat est également
élevé (2,6) : les élèves font des choix en
fonction du degré de difficulté des exercices, et donc anticipent
sur leurs performances ainsi que sur les efforts qu'ils sont prêts
à fournir. Comme pour la classe de CM1 dont l'enseignant appliquait la
pédagogie de type Freinet dans notre échantillonnage (le profil
des réponses est d'ailleurs analogue), le score en responsabilisation
est particulièrement faible (1,44), ce qui montre que cette organisation
délègue à l'élève la responsabilité
de la gestion de ses apprentissages, mais l'autorise peu à participer
aux décisions concernant la vie et le fonctionnement de la classe.
2.5. L'enregistrement vidéo d'une séquence de
travail
La séquence a lieu lors de la deuxième
séance de travail, se déroule en début d'après-midi
et porte sur une lecture suivie. L'observation et l'analyse des données
permettent les constats suivants : l'activité est une lecture
collective et une explication de texte, avec le groupe classe entier. Les
élèves sont filmés et en ont conscience.
L'atmosphère générale est concentrée. Chaque
élève dispose d'un livre individuel. Nous n'avons pas
reporté de M+ lorsque l'enfant suit la lecture alors qu'un camarade lit
tout haut, mais cela aurait pu être envisagé. Les résultats
sont consignés sur le tableau en annexe 15.
L'enseignante (cf. annexe 17) adopte essentiellement des
gestes verbaux. Il n'y a pas de gestes négatifs (à aucun moment,
l'enseignante n'a besoin de « sortir » de l'activité
pour reprendre un élève ou émettre une réflexion
sur un comportement gênant le cours de la séquence). On compte 36
V+ et 1 M+, donc 37 gestes positifs adressés de façon collective,
et 25 V+ et 1 M+, donc 26 gestes positifs adressés individuellement. Le
rapport positif/négatif est très élevé (division
par zéro).
Du côté des élèves, on compte une
moyenne de 9,4 gestes moteurs positifs (ferment les yeux, tournent la page,
lèvent le doigt, lisent tout haut...) par enfant, et de 10,2 gestes
verbaux positifs (lisent tout haut, répondent aux questions
posées, ou terminent les phrases de l'enseignante), ce qui fait une
moyenne de 19,5. Il y a une moyenne de 0,9 gestes négatifs
(exclusivement moteurs [jeux avec la règle, enfant couché sur la
table, ne suivant plus la lecture, balancements importants...]). Le rapport
positif/négatif est de 20,8.
Les conclusions de cette analyse, finalisée
après la sortie des classes, n'ont pu être communiquées
à l'enseignante, ce qui est regrettable car il aurait été
un bon support pour souligner le savoir-faire et les réussites de cette
enseignante expérimentée, mais néanmoins
déçue par un groupe classe peu gratifiant.
X., notre élève hyperactif (ligne n°1),
obtient le deuxième plus grand nombre de gestes après une
élève particulièrement active dans ses réponses
verbales. Il présente le nombre de gestes moteurs positifs le plus
élevé à égalité avec cette
élève (18) car il lève très fréquemment le
doigt. Il a peu d'interactions négatives (2 M-, 0 V-). Notons qu'il est
placé tout seul, au premier rang, tout à côté de
l'enseignante qu'il voit de profil.
2.6. X, L'enfant hyperactif
X. est un jeune garçon dont la famille est originaire
d'Afrique du Nord, choyé et valorisé en tant que garçon
dans le cadre familial. Il est arrivé dans le groupe classe l'an
passé, ce qui peut être un facteur, encore maintenant,
d'intégration compliquée dans ce groupe de garçons qui se
connaissent très bien. Notons cependant que les difficultés
préexistaient, d'après les parents, dans l'école
précédente. Bon élève, très bon lecteur, il
ne relève pas d'un suivi par le RASED, mais son comportement est
problématique, comme le confirment les réponses au questionnaire
de Conners, concernant les points suivants : X. « fait le
malin », il perturbe les autres enfants, a du mal à
coopérer, semble mal accepté par le groupe et demande une
attention excessive de son enseignant. A un degré moindre, il est
agité, se « tortille » sur sa chaise, se montre trop
sensible à la critique, va à droite, à gauche, est
excitable et impulsif. Il a des difficultés à terminer ce qu'il
commence, et a tendance à nier ses erreurs et à accuser les
autres.
Les réponses au questionnaire, comparées
à celles d'un jeune de son âge (9 ans 6 mois), montrent que seul
l'indice d'hyperactivité approche la zone significative. Les
critères concernant la conduite et l'index global d'hyperactivité
sont hauts, mais non significatifs. Il n'y a pas d'inattention ni de
passivité. X. présente donc un profil de légère
hyperactivité sans trouble de l'attention. L'enseignante est
néanmoins inquiète pour la suite de sa scolarité, car il
apprend bien dans sa classe du fait d'un guidage étroit. Elle
s'interroge sur son comportement au collège, et appréhende la
réaction des enseignants face à celui-ci.
2.7. Journal de bord (augmenté)
· Séance n° 1 (20/01/2015)
Cette séance est consacrée à la
présentation du mode de fonctionnement de la classe (cf. informations
plus haut). N. explique que le niveau dans cette classe est très
hétérogène : certains élèves
réalisent plutôt des exercices de niveau CE2, la plupart des
exercices de niveau CM1, tandis que quelques-uns font du travail relevant
presque d'un CM2.
Les travaux sont évalués par des codes couleurs
au fur et à mesure de la réalisation des exercices. Les
dictées font l'objet d'un pourcentage de réussite et d'une
indication sur la nature des difficultés repérées, de
façon à ce que l'élève puisse retrouver dans son
calepin les informations nécessaires pour se corriger.
Le point noir du fonctionnement de la classe, cette
année, est le peu de discipline des élèves, qui font du
bruit, s'agitent, et ne sont pas concentrés : « Pour
l'instant, on perd beaucoup de temps en discipline ».
· Séance n° 2 (27/01/2015)
Cette séance comprend l'enregistrement analysé
plus haut, suivi d'un bref entretien. N. a présenté une
séquence frontale, comme il était prévu, mais elle
précise que les élèves ont changé :
« les enfants, maintenant, il faut qu'ils soient acteurs, il faut
qu'ils comprennent ce qu'on leur demande, il faut qu'ils bougent
beaucoup ». C'est la raison pour laquelle, il y a quatre ans, elle
est passée à une organisation sur plan de travail. L'année
précédente par exemple, cette organisation lui avait donné
beaucoup de satisfactions, avec des élèves
particulièrement investis et motivés : « tu
rentrais dans la classe, ils étaient tous en train d'bosser,
c'était dans les dernières fournées d'élèves
suffisamment élèves ». Elle explique qu'elle ne donne
pas de note, voulant passer le message « j'ai envie de travailler,
c'est pour moi que j'le fais ». Il y a une évaluation par
période, avec les critères « non acquis »,
« à confirmer », et
« acquis ».
· Séance n° 3 (03/02/2015)
Le schéma de l'autodétermination (figure 7) est
présenté à l'enseignante, afin d'illustrer le contenu de
l'entretien précédent. N. est particulièrement
intéressée par cette représentation qu'elle ressent comme
très vraie, et qu'elle applique à la surprotection parentale qui
lui paraît l'obstacle majeur à l'autonomie de beaucoup d'enfants.
L'immaturité des garçons de son groupe lui apparaît
nettement : « on peut plus du tout enseigner comme on enseignait
avant, pour 20 % de la classe, oui, mais pour les 80 % restant, non, surtout
les garçons, les filles, encore, ça irait ; mais les
garçons, ils sont obnubilés par le jeu. Heureusement qu'ils me craignent ! ». Le
fonctionnement par plans de travail lui paraît l'antidote à cette
évolution. On voit également qu'elle entend se faire respecter,
quitte à gronder, ou punir. Concernant le travail de groupe,
présenté comme un des moyens d'autoréalisation, elle
exprime qu'elle a constaté que « seuls les forts donnent sens,
les bons élèves prennent en charge, les autres, non ».
Elle a fait le choix de proposer du travail individuel la plupart du temps
« je veux savoir où tu bloques pour savoir comment tu peux
progresser ». Elle explique ensuite qu'elle a proposé aux
élèves qui se montraient peu motivés de se mettre au fond
de la classe : « si tu n'as pas envie de travailler, tu vas au
fond de la classe, mais tu ne déranges pas les autres ». Il
lui paraît important, également, d'accorder à l'enfant le
droit à l'erreur « j'ai le droit de ne pas savoir, je fais le
mieux possible, si je me trompe, c'est pas grave... ».
· Séance n° 4 (17/03/2005)
N. est particulièrement survoltée. Elle a
surpris, sur le carnet d'un des élèves, un mot d'insulte la
concernant, suite à une punition concernant un groupe de garçons
auquel il appartenait. L'entretien porte sur l'enfant concerné (qui
n'est pas X.), frère d'un enfant en situation de handicap qui a fait
l'objet d'un bilan psychologique les années précédentes.
La difficulté de la vie familiale est abordée, et notamment le
comportement des enfants face à la mère, dépassée
par les événements.
La suite de l'entretien est consacrée à
expliciter le fonctionnement d'un enfant hypersensible, et notamment la
contre-réaction lorsque l'on insiste trop, illustrée figure 16
(concept présenté par Céline Darnon durant l'UE 8).
· Séance n° 5 (24/03/2015)
N. est préoccupée par les difficultés
scolaires de plusieurs de ses élèves. Elle passe en revue
certains cas, et notamment celui d'un jeune qu'elle voit comme
complètement déresponsabilisé face à ses
apprentissages : « il est incapable d'écrire une phrase
sans faire une faute de copie, il ne dessine même pas ses
lettres ». L'hypothèse que cet enfant souffre d'un trouble des
apprentissages est émise, mais cette hypothèse est rejetée
par l'enseignante, qui considère que l'enfant n'a pas envie.
Figure 16: Outil n°11
: des enfants librement consentants (d'après Freedman, cité par
Joule & Beauvois, 2014)
Il est probable qu'un certain nombre d'élèves de
cette classe, en difficulté, auraient besoin du regard d'un enseignant
spécialisé, voire d'un bilan psychologique pour mieux comprendre
ce qui les gêne. Il y a quelques années, des enseignants
spécialisés (maîtres E) pouvaient intervenir auprès
de certains élèves du cycle 3. Le travail réalisé
permettait, progressivement, de changer le regard de l'enseignant sur la nature
des difficultés, et de lui donner des réflexes concernant le
dépistage. Avec la réduction des personnels, ces interventions ne
sont plus possibles. Seuls subsistent les bilans du psychologue pour les cas
les plus graves, les demandes à la Maison Départementale des
Personnes Handicapées (MDPH), et les orientations en SEGPA...
· Séance n° 6 (31/03/2015)
L'entretien porte sur la motivation des élèves,
de façon générale. Le parallèle est fait en
apportant les techniques de l'entretien motivationnel (Miller et al.,
2013), notamment sur les avantages d'une position de guidage par rapport au
« réflexe correcteur », directif,
spontanément adopté par les éducateurs, et dont les
chercheurs ont mis en évidence l'effet défensif et donc
contre productif qu'il produit sur les personnes que l'on aimerait voir
changer. Cette théorie est résumée à travers les
deux outils représentés figure 17 et 18.
La problématique des enfants hyperactifs est
abordée également de façon générale. Le
document (Laurent et al., op.cit.) édité par l'Education
Nationale pour sensibiliser enseignants et parents au trouble lui est
communiqué. Il est précisé notamment que ce type
d'enfants, lorsqu'on leur laisse le choix, préfèrent souvent
être à une table seuls car ils ressentent que leur concentration
en est facilitée.
Figure 17 : Outil n°12
: inciter à changer 1 (d'après Miller et al.,
op.cit.).
N. revient sur ce qui a été tenté dans la
classe pour favoriser l'attention des élèves. Dans un premier
temps, ils ont décidé de mélanger les plutôt
attentifs et les plutôt inattentifs, afin que ceux qui se concentrent
facilement aident les autres. Cette solution n'a pas donné les
résultats espérés. Dans un second temps, il a
été décidé, après discussion, que ceux qui
ne « voulaient pas » travailler iraient au fond de la
classe. Il a aussi été envisagé, pendant un temps, que
quelqu'un dans la classe, à tour de rôle, « fasse la
police » pour aider les autres à se concentrer. Toutes ces
idées n'ont pas modifié les dysfonctionnements observés
dans la classe. L'enseignante propose qu'une autre tentative soit faite en ma
présence afin de prolonger la réflexion collective, ce que
j'accepte volontiers.
La suite de l'entretien concerne le regard porté sur le
comportement des élèves. L'exemple est pris d'un
élève qui a du mal à écrire. J'émets
l'hypothèse d'une dysgraphie non dépistée, mais
l'enseignante rejette cette idée, car, me dit-elle, « il
peut » : « Il faut qu'il soit obligé à
faire les choses », généralisant : « ils
y arrivent quand ils mettent la volonté, ils n'ont pas la
volonté, la vie c'est ça, faire des efforts ».
L'enseignante revient sur son interprétation de surprotection,
déjà formulée : « cet enfant est tellement
cocooné, on lui trouve des excuses, il n'est pas
responsabilisé... ».
Figure 18: Outil n°13
: inciter à changer 2 (d'après Miller et al.,
op.cit.)
Les théories de la communication de la psychologie
humaniste incitant à rester sur les faits et non les
interprétations, généralisations ou personnalisations pour
éviter les pièges du jugement, qui comportent le risque
d'enfermer l'enfant sans lui donner une chance de pouvoir s'améliorer
est émise. Elle est illustrée par la figure 18.
Le « message en je » (figure 11) est
exposé ensuite à l'enseignante, mode d'emploi pour s'exprimer
sans juger, et insistant sur la différence entre demander et refuser,
essentielle pour respecter l'autodétermination de l'interlocuteur, avec
en l'occurrence, la possibilité d'une limitation personnelle dans la
capacité à répondre à la demande.
Les lois du renforcement, et notamment l'intérêt
de souligner les comportements souhaités (figure 12) sont
également abordées lors de cet entretien, liées à
l'idée de recentrer sur le positif en évitant
l' « escalade
émotionnelle » négative (contre-attaque de
Gottman, cité par Servan-Schreiber, op.cit.), en lien avec
l'effet miroir. La figure 19 reflète la teneur de la conversation.
L'entretien se termine sur le projet de discussion collective
concernant les problèmes d'attention des élèves dans la
classe. L'idée de l'organisation d'une
« autorégulation » (Allamand & Chosalland, 2005,
présentation à suivre) est évoquée, que je propose
à l'enseignante d'animer.
Figure 19: Outil n°14
: l'escalade émotionnelle (d'après Servan-Schreiber,
op.cit., citant Gottman.
· Séance n° 7 (06/04/2015)
N. a passé de mauvaises vacances. Elle a perdu un
proche et ce deuil la fragilise. Elle a exprimé sa difficulté
à ses élèves (« j'ai perdu mon
papa »). Les enfants ont su se mobiliser pour lui témoigner
son soutien en faisant un effort supplémentaire pour se concentrer sur
les tâches demandées.
L'organisation de la classe de mer se poursuit. Les
élèves sont chargés d'organiser la journée
passée avec les correspondants. En fin d'année, de nombreuses
activités porteront sur ce voyage (exposés oraux, écrits,
carnet de voyage...). Le sujet de l'organisation du séjour est
abordé, ainsi que l'inquiétude de l'enseignante concernant un
voyage avec ce groupe difficile. Si elle l'avait pu, elle aurait
organisé un premier petit séjour moins loin en guise de
préparation et de test en cours d'année. Les accompagnateurs sont
nombreux (un adulte pour 8 élèves alors que la norme est de 1
pour 12). Par souci d'équité, aucun parent n'accompagnera le
groupe. Des manifestations (loterie, goûter de Noël...) ont
été organisées pour améliorer le budget. Une
réunion par mois, environ, est organisée avec les parents pour
préparer ce voyage.
La régulation est prévue pour le lendemain. Elle
sera organisée selon les principes exposés dans
« Enseignants dans la tourmente » par Allamand et
Chosalland, deux enseignantes de collège qui ont écrit cet
ouvrage suite à un cycle de formation sur la gestion des conflits
proposé par la Mission Académique de Formation des Personnels de
l'Education Nationale (MAFPEN) et animé par Charly Cungi, psychiatre
spécialisé en Thérapie Comportementale et Cognitive (TCC),
et formateur. Les questions suivantes seront posées aux
élèves : Est-ce que je me sens bien dans cette classe ?
Pourquoi ? Qu'est-ce qui facilite mon travail ? Qu'est-ce qui me
gêne dans mon travail ? Autre ? (expression libre), (Allamand
& Chosalland, op.cit., p. 92).
· Séance n° 8
(07/04/02015)
Les élèves sont informés de cette
séance d'échange. Ils sont assis par terre devant le tableau. Les
questions sont posées à l'oral et j'écris les
réponses au tableau. L'enseignante est à son bureau et elle prend
les notes ci-dessous (les mots et expressions des enfants ont été
conservés, dans la mesure du possible).
Question : Est-ce que je me sens bien dans mon
travail ? Pourquoi ?
- Oui, les programmes sont sympas, les activités, les
arts visuels.
- La maîtresse est gentille.
- Il n'y a pas de moquerie, il y a une bonne ambiance dans la
classe.
- Il y a trop de bruit.
- (X répond) Je suis à fond sur mon travail
(rires de toute la classe), je n'entends pas le bruit (...) Je n'aime pas la
maîtresse parce qu'elle me crie dessus tout le temps, même pour des
petites erreurs. (rires collectifs)
- (Réponse d'une élève) Ce n'est pas
vrai parce que c'est lui qui cherche la maîtresse.
A ma question : « Comment ? », un
autre enfant répond :
- En faisant tomber des choses, en parlant.... ».
- Une autre élève : « On peut
dire à celui qui dérange de sortir ».
- J'aime cette classe parce qu'on va aller en classe de
mer.
- Sur le plan de travail, la maîtresse entoure les
erreurs et elle nous explique.
- K., il est au fond à côté des
« méchants » mais c'est parce qu'il bavarde quand il
est à côté de quelqu'un.
A ma question : « Travailler avec les plans de
travail, est-ce que cela vous convient ? »
- Oui, on peut faire dans l'ordre qu'on veut.
- La dictée, j'aime bien, la maîtresse elle
corrige et elle donne un pourcentage.
- Après on note le pourcentage sur le plan.
- C'est bien parce qu'on a des couleurs : vert, bleu,
jaune et rouge.
- J'aime pas les plans de travail, il y a trois groupes, je
préfère qu'on fasse tous la même chose et sur un cahier
(NB : c'est une bonne élève qui parle. Sept enfants
déclarent partager la même opinion).
- J'aimerais que la maîtresse elle explique plus au
tableau.
- J'aime bien le plan de travail parce qu'on fait ce qu'on
veut quand on veut.
- Avant la cantine la maîtresse elle nous lit un livre,
Hermès (mythologie) (NB : toute la classe aime sauf X.).
- Je préfère lire seul pour apprendre les mots
(orthographe. NB : apparemment, l'élève a besoin d'un
support visuel pour mémoriser l'orthographe).
A la question : « Qu'est-ce qui facilite mon
travail ? »
- On a deux livrets de leçons.
- Ça évite de copier les leçons.
- Quand on se trompe ou on ne comprend pas on va voir la
maîtresse et elle nous explique.
- Il y a des exercices plus faciles que d'autres et on
choisit.
- (réponse de X) On peut apprendre à la maison
en avance par rapport aux cahiers de leçons.
- On s'entraîne, et c'est pour les
évaluations.
- On peut faire les exercices à la maison.
- La maîtresse met une croix et on corrige.
- J'aimerais bien être dans le groupe 2.
- Le plan de travail à la fin des deux semaines la
maîtresse fait des commentaires, ça aide.
- On a un contrat, il faut au moins deux exercices de
chaque.
La discussion porte alors sur les changements de groupe, et le
désir de certains enfants de changer de groupe (apparemment, les
élèves sont dans un groupe plus ou moins fixe pour certains
exercices, et sont autorisés à changer de groupe selon leurs
résultats).
A la question : « Qu'est-ce qui me gêne dans
mon travail ? »
- Le bruit.
- (réponse de X) Le stress, trop de stress. Je fais
mon exercice et je pense à autre chose et je me déconcentre et je
fais des erreurs
- J'ai peur de ne pas y arriver.
- Pour les évaluations, je stresse. J'ai peur
d'oublier.
- Il y a trois façons d'apprendre. Moi, je ne sais pas
comment apprendre.
- J'ai peur que la journée se passe mal alors je
stresse.
- Que j'arrive pas à faire des exercices, qu'on me
juge.
A ma question « Avez-vous le sentiment que vous
êtes jugés ? »
- (réponse de X) J'aimerais qu'on arrête de
parler de moi, qu'on me prenne en exemple.
A ma question « Qui veut répondre à
la demande de X ? »
- Il provoque, il embête la clase, il arrête pas
de juger, il fait son intéressant, il se lève
- On ne le juge pas, on lui demande d'arrêter.
- Qu'il lève le doigt comme tout le monde.
- (réponse de X) Je ne me lève jamais, je les
appelle. Ils ont du confondre
- Tu te lèves tout le temps.
- Il les appelle sans lever la main.
- Tu te moques quand on t'explique, ou que tu as un meilleur
résultat en dictée.
A mon explication, incitant à différencier jugement
(interprétation, personnalisation, généralisation,
jugement) et critique (sur un fait précis) :
- J'aimerais que X. soit dans le groupe des
« gentils », si il veut, il peut le faire.
- On veut qu'il essaie de changer.
- On veut qu'il arrête de faire exprès, de
bouger.
- (réponse de X) Je suis
bien dans le groupe où je suis et je suis bien tout seul, c'est plus
fort que moi les bêtises.
A ma question « Comment on peut aider
X ? »
- S'asseoir à côté d'un
« gentil » qui pourrait l'aider.
- Le mettre à côté de la
maîtresse.
A la question : « Est-ce qu'il y a autre chose que
vous aimeriez dire ? »
- Les jeux de guerre et la bagarre, ça me gêne.
La guerre, c'est pas drôle.
- (réponse de X) Merci de m'avoir dit mes
défauts parce que je ne me rendais pas compte.
La classe est remerciée pour la qualité des
échanges, la franchise et la bonne qualité d'écoute. Les
élèves nous remercient en retour.
· Séance n° 9 (01/07/2015)
Il n'a pas été possible de se rencontrer
longuement après la séance de régulation. Il a juste
été abordé avec l'enseignante la tendance de X. à
devenir le centre des discussions collectives. L'enseignante a
déjà eu de nombreuses discussions au sujet du bruit et de
l'agitation dans cette classe, au cours desquelles elle avait noté cette
particularité de X. Ces discussions n'ont pas vraiment abouti à
des améliorations.
La classe de mer a bien eu lieu, et s'est plutôt bien
passée, avec de nombreuses déceptions et sources d'agacement,
tant dans le comportement des garçons agités, que l'enseignante a
gardés dans son groupe y compris la nuit, que dans les
préparatifs avant de partir. Notamment, les consignes, de ne pas
s'encombrer avec les produits de toilette (les accompagnateurs avaient
prévu des produits collectifs), de ne pas s'encombrer avec trop de
bouteilles d'eau car le nécessaire avait été prévu,
etc. n'ont pas été respectées par les parents, et ont
occasionné des complications (sacs trop lourds, lourdeurs de la gestion
du matériel personnel...). Par ailleurs, un des garçons s'est
blessé sans en parler aux enseignantes, ce qui a retardé et
compliqué les soins...
Le voyage ne s'est pas conclu comme prévu par un
goûter festif, étant donné les contrariétés
accumulées. L'enseignante note que les parents ont formulé peu de
reconnaissance face aux accompagnateurs, contrairement aux années
précédentes.
Compte tenu de la proximité de la fin de
l'année, il n'a pas été possible de faire un bilan du
travail réalisé. A ma question concernant des effets
éventuels de la régulation, l'enseignante a perçu que X.
se posait moins en victime. On peut donc en conclure que cet échange a
favorisé chez cet enfant une prise en conscience des effets de son
comportement sur les autres.
2.8. Conclusions
L'intervention n'a pas changé la nature des relations
entretenues entre l'enseignante et ce groupe classe difficile.
Régulièrement dans les écoles, certaines classes plus
compliquées à gérer sont redoutées par les
enseignants. La présence de plusieurs enfants au comportement difficile
est souvent associée à cette impression négative ; la
cohésion qui peut s'installer entre plusieurs jeunes en concurrence avec
les apprentissages, le manque de coopération et de bienveillance des
familles, sont également des facteurs explicatifs. Malgré tout,
la classe a bien fonctionné toute l'année, et les apprentissages
ont été réalisés. Certaines années, des
groupes plus agréables permettent aux maîtres de
« respirer » et de reprendre goût à leur
métier. Il est regrettable à mon sens que cette enseignante qui a
beaucoup investi d'énergie et d'enthousiasme dans l'exercice de sa
profession durant de nombreuses années, et dont on sent parfois la
tension proche de l'épuisement professionnel, n'ait pas pu terminer sa
carrière avec un groupe plus gratifiant.
La régulation a été un temps fort du
travail réalisé ensemble. Elle a donné, notamment, des
informations importantes concernant le ressenti de son trouble par X. dont on
aperçoit, au travers des informations qu'il livre, le malaise et le
sentiment de différence par rapport aux autres, la difficulté
à se positionner dans le groupe, caractéristique (il personnalise
tout de suite les questions et se montre dans l'incapacité de se fondre
dans le groupe au même titre que les autres). Il perçoit
également avec lucidité ses problèmes de concentration.
On peut constater également la gêne, l'agacement
et l'incompréhension des autres enfants face au comportement du jeune
garçon, ainsi que son isolement dans le groupe classe.
3. Classe n° 3 : Cours
Elémentaire 1 (enseignante : K)
3.1. Situation de départ
L'enseignante accepte avec plaisir et intérêt ma
proposition de travailler sur la gestion de la classe en lien avec la
concentration et la motivation de ses élèves. Nous entretenons de
bonnes relations depuis plusieurs années, et avons déjà
travaillé sur des projets antérieurs. Cette enseignante est
toujours à la recherche d'idées nouvelles :
« J'aime mon métier. Je ne veux pas être une instit.
traditionnelle. J'ai horreur des personnes rigides. »
La classe de CE1 comporte 26 élèves. Une
élève est en très grande difficulté cognitive. Un
dossier de demande d'Auxiliaire de Vie Scolaire a été
monté. Cette enfant est suivie à l'extérieur, en
orthophonie et en psychomotricité. Un autre élève montre
de sérieuses difficultés d'apprentissage. Deux
élèves présentent des problèmes de comportement,
une petite fille, et B., notre enfant hyperactif, qui a
bénéficié d'un bilan en Grande Section car il avait de
grandes difficultés à réaliser son travail écrit.
L'enfant est suivi à l'extérieur par une psychologue. La classe
comporte également « quatre ou cinq élèves qui
n'ont pas besoin de moi », donc des enfants très autonomes qui
ont des facilités d'apprentissage.
Le travail commence fin mai, il sera donc beaucoup plus court
que celui mené avec les deux classes précédentes.
3.2. Fonctionnement de la classe
L'enseignante exerce à temps complet. Le
français et les mathématiques sont enseignés le matin.
L'après-midi est consacré à des activités
« découvertes », de l'écriture, de la
géométrie, ou à réinvestir une notion
présentée le matin.
Dans la classe, on note la présence de nombreux
animaux, cages et aquariums : phasmes, têtards, orvet ... Chaque
année, des élevages, des sorties animalières, des
observations d'animaux, sont organisées et font l'objet
d'activités pédagogiques : « les enfants qui ont
des problèmes d'attention et des difficultés scolaires,
très souvent, les p'tites bêtes, ça les intéresse.
J'aime qu'ils observent, du coup, ils sont canalisés... ».
L'enseignante incite les enfants à apporter « des
bêtes » en classe : « Ils touchent, toucher des
bêtes, c'est passer un cap. Ça aide dans les apprentissages, de
vaincre sa peur ».
L'enseignante pratique le tutorat « depuis des
années. Je trouve que ça aide les deux ». Le tutorat
dure une semaine (plus court si, pour une raison ou une autre, cela ne se passe
pas bien). Les enfants sont volontaires. Cette année, la petite fille
qui présente des difficultés cognitives est aidée
régulièrement par un enfant tuteur.
L'enseignante travaille beaucoup avec l'enseignant
spécialisé dans la prise en charge des élèves en
difficulté. Leur collaboration est étroite. En début
d'année, elle consacre beaucoup de temps à observer ses
élèves pour mieux les connaître, et n'organise la
réunion de rentrée à l'intention des parents que tard par
rapport aux autres collègues (début octobre).
Les évaluations sont annotées par des codes
couleur (vert : parfait, bleu : bien, orange : en cours,
rouge : non acquis).
Chaque élève a à sa disposition
« une boîte » dans laquelle du travail personnel est
déposé par l'enseignante. Ce travail, sous forme de fiches
plutôt ludiques, coloriages magiques, jeux éducatifs, dessins
cachés... est gérée par l'élève. Ils le
réalisent à leur rythme et à leur façon.
3.3. L'enseignante
K. est âgée d'une quarantaine d'année.
Elle a un enfant d'une dizaine d'années. Très sportive, elle
nage, court, marche, fait du vélo... Sa formation initiale était
dans le secteur de l'animation sportive. Elle s'est découvert une
vocation d'enseignante un peu plus tard. Elle a une présentation
très colorée : bijoux, vêtements originaux, amusants,
créatifs, très esthétiques. Cette enseignante curieuse,
innovante, très ouverte, est très intéressée par
tout ce qui touche à la santé. Les médecines naturelles
(homéopathie, ostéopathie, acupuncture), l'attention
portée à l'énergie, à l'alimentation, au
bien-être, est omniprésente. Elle est passionnée de
psychologie. Concernant la gestion de sa classe, elle dit : « la
valeur numéro 1, c'est le bien-être à l'école.
J'aime les yeux qui pétillent quand ils viennent à
l'école. Pour être enseignant, il faut être relationnel en
numéro 1. J'essaie que les enfants n'aient pas peur de moi ».
Les compétences relationnelles de K. sont indéniables : elle
recherche le contact et entre facilement dans l'échange, qu'elle
alimente généreusement tout en sachant écouter.
3.4. Le questionnaire concernant l'autodétermination
(annexe 12)
Les résultats à l'échelle globale sont
conformes à la population d'échantillonnage (1,955). L'autonomie
accordée (1,29) correspond à l'âge des enfants. Les
élèves réalisent fréquemment du travail personnel.
Ils ont un « cahier d'autonomie » et leurs boîtes
avec du travail plus « ludique » à réaliser
comme ils le souhaitent. L'autoréalisation est plutôt
élevée (2,00), comme observé dans notre population, qui
montrait que ce score était plus élevé au CE qu'au
CM : le travail en groupes, le tutorat, l'enseignement mutuel, sont
favorisés par l'enseignante. L'autorégulation correspond
également au niveau de la classe (2,4) : les réponses sont
positives sur tous les points, mais avec une certaine mesure. La
responsabilisation (2,13) correspond également aux classes de même
niveau de notre échantillonnage : les élèves
participent toujours au fonctionnement de la classe. Pour le reste des
questions, les réponses sont également mesurées : les
élèves comme les parents sont associés parfois aux
décisions. Notons que l'enseignante incite toujours les parents à
l'informer dès que leur enfant rencontre une difficulté ou un
tracas particulier, ce qui correspond à des liens
particulièrement étroits, que l'enseignante a à coeur
d'établir avec les parents. En conclusion, les résultats au
questionnaire sont équilibrés. L'autodétermination des
élèves est mesurée, respectée dans tous les
domaines, en proportion avec le niveau de la classe.
3.5. L'enregistrement vidéo d'une séquence de
travail
K. réalise une séquence de repérage de
son. Compte tenu de la courte durée de notre collaboration,
l'enregistrement, qui a eu lieu après les échanges sur le
fonctionnement de la classe et les problématiques soulevées par
l'enseignante, a été réalisé l'avant-dernier jour
de classe, juste avant les grandes vacances. Notons que les
élèves, malgré la chaleur et l'énervement
compréhensible de la fin des cours, ont fait preuve d'un calme et d'une
participation exemplaires.
Les résultats sont consignés en annexe 16.
L'enseignante propose une séquence de repérage du son [j]. Les
élèves sont au CE1, c'est un approfondissement qui est
proposé et non une découverte. Le déroulement de la
séquence est habituel, l'enseignante ayant proposé plusieurs
séances de repérage de sons construites sur le même
modèle durant l'année. Du matériel (flèche
recouverte de papier plastique tenant lieu d'ardoise, et feutre
effaçable) a été constitué en début
d'année à cet effet.
Les résultats (annexe 17) sont
caractérisés par un rapport entre les interventions individuelles
et les interventions collectives très en faveur des premières (V+
+ M+ Indiv. = 198 ; V+ + M+ Coll. = 36). Par ailleurs, il y a un nombre
très important de gestes positifs, moteurs, et verbaux, de la part de
l'enseignante (234). On compte 17 interventions négatives. Le rapport
positif/négatif est de 13,8.
Du côté des élèves, le nombre de
réponses motrices positives est très important, en raison de
l'appel de l'enseignante, auprès de tous les enfants, d'une
réponse dans ce registre (écrire sur la flèche ardoise, la
lever, lever le doigt, fermer les yeux, chercher le feutre, distribuer les
ardoises [pour les élèves de services]...). Le nombre de M+ moyen
par élève est de 16,1, le nombre de V+ moyen est de 1,1, rapport
positif/négatif de 13,1. On constate donc qu'il est au même niveau
que celui de l'enseignante.
B. notre enfant hyperactif, n'était malencontreusement
pas dans le champ du film. Il n'a pas été possible d'analyser en
détails son comportement. Il a participé au même titre que
les autres. Il était en charge, cette semaine là, du tutorat de
la petite fille en difficulté. A part un échange de quelques mots
avec l'enseignante, qui note à un moment qu'il n'a pas levé le
doigt et lui demande pourquoi, son comportement sur le plan des interactions
avec l'enseignante, a été conforme à celui de ses
camarades.
3.6. B. l'enfant hyperactif
B. est l'aîné d'une famille de deux
garçons. C'est un petit garçon vif et de contact agréable,
dont la maman ne travaille pas et s'occupe attentivement. Elle sait
établir de bonnes relations avec les enseignantes de son fils, et
travailler en collaboration pour aider celui-ci à améliorer ses
difficultés d'attention et de comportement, dont elle est consciente. Le
petit garçon est suivi par une psychologue à l'extérieur
de façon régulière. La prise en charge, basée sur
la médiation animale (équine), convient particulièrement
bien à B. qui l'investit avec enthousiasme.
Les résultats au questionnaire de Conners
renseigné par l'enseignante indiquent une hyperactivité
très élevée et un indice général
d'hyperactivité très significatif : l'instabilité
psychomotrice est au premier plan : B. « se tortille »
énormément, fait des bruits incongrus, est trop sensible à
la critique, très distrait, il perturbe énormément les
autres enfants, est très rêveur, très agité,
très impulsif, et a de grandes difficultés à terminer ce
qu'il commence. Il a beaucoup de difficultés d'apprentissage. Les
difficultés relationnelles sont en arrière plan. Il n'y a pas de
trouble des conduites. L'inattention et la passivité atteignent le
degré de significativité sans le dépasser.
Le bilan réalisé alors que l'enfant était
en fin de Grande section montrait de bonnes compétences dans tous les
domaines cognitifs appréhendés, avec un point
particulièrement fort en mémorisation des nouvelles informations
langagières, et en maîtrise de la langue orale
(compréhension et vocabulaire). Les performances approchaient la zone
supérieure par rapport aux enfants du même âge. Notons que
le petit garçon est du mois de décembre, donc plus jeune que tous
les autres élèves de sa classe.
L'ensemble de ces éléments orientent sur une
hyperactivité qui gêne l'adaptation scolaire. L'investissement
cognitif et la disponibilité restent relativement
préservés cependant. L'écriture, et le maintien de
l'attention sur un travail écrit sont préoccupants.
3.7. Journal de bord (augmenté)
· Séance n° 1 (19/05/2015)
La première séance est une prise de
contact : présentation du projet, de la classe et de ses multiples
« p'tites bêtes », de la particularité des
enfants hyperactifs (l'enseignante est informée du trouble, de ses liens
avec les problèmes d'attention, et notamment, des difficultés
à écrire que peuvent rencontrer ces enfants, ce qui est le cas de
B.).
Compte tenu du fonctionnement de la classe, la théorie
des intelligences multiples de Gardner (figure 15) lui est
présentée : l'enseignante est très
intéressée par cette théorie qui correspond à ce
qu'elle met en place spontanément. L'intelligence naturaliste est une de
ses caractéristiques depuis toujours, reconnaît-elle. Concernant
le fonctionnement de sa classe, elle précise : «J'aime aussi
quand on m'amène des bêtes. Du coup je travaille dessus. Ça
crée un lien et ces enfants là sont attentifs. Ils ont moins peur
de moi ». « B. qui aime pas écrire, il a ouvert son
cahier de texte pour écrire : attraper des mouches... Du coup il y
a un lien affectif qui nous lie. Souvent, j'utilise ça avec ce genre de
gamins... B., quand il vient dans ma classe, il est content, et moi, c'est
c'que j'recherche»... « on fait des dessins (des
bêtes), ceux qui ont des troubles de l'attention, souvent, ne savent pas
dessiner... ». L'enseignante fait donc appel, dans ce cas
précis, à deux formes d'intelligence, naturaliste, et
visuo-spatiale.
K. souligne également qu'elle fonctionne
personnellement beaucoup sur le registre kinesthésique. La conversation
dérive sur le chi kong : elle aimerait pouvoir apprendre aux
enfants certains gestes, la danse du dragon, des mouvements qui stimulent telle
ou telle partie du corps. Il y a quelques années, nous avions mis en
place des séances de relaxation dans sa classe...
L'intelligence interpersonnelle lui paraît à
rapprocher d'une autre de ses valeurs : la prise en compte des
émotions des enfants : « Mon objectif est de
libérer l'émotionnel. J'essaie de capter les émotions des
enfants, je me laisse du temps pour mieux amener les
apprentissages ». Elle s'intéresse au yoga du rire, et
aimerait mieux connaître ce domaine. Elle utilise beaucoup
l'humour : « Y. (un élève passé au
collège, brillant mais souffrant également de TDA/H, et dont la
scolarité à l'école avait été très
compliquée) je le tenais comme ça, cette forme d'autorité
là...Quand il dérapait, je le fâchais, mais sur le ton de
l'humour, ça le calmait, il comprenait les
inférences ». En l'occurrence, cette façon de
procéder fait appel à l'intelligence verbale et linguistique.
Dans ce registre, elle utilise les blagues de Toto, les charades (dans la
classe, j'ai eu l'occasion d'observer brièvement à deux reprises
un travail de création de charade par groupes de deux
élèves). Elle précise également :
« j'aime le théâtre, j'aime m'amuser avec les
gamins ».
L'intelligence intra-personnelle est une forme d'intelligence
qu'elle cultive depuis toujours, constamment en recherche de nouvelles
connaissances dans ce domaine. Elle fait du développement personnel
régulièrement. Actuellement, elle est en lien
téléphonique avec la psychologue qui prend en charge B. Le
travail réalisé par la médiation animale la passionne.
Elle précise ce qui lui semble être de nature à aider cet
enfant à se dépasser : « avec le cheval, il y a
des règles de sécurité, il y a du soin... ». En
tant que psychologue du secteur, elle me sollicite souvent, et se montre
toujours très enthousiaste lorsque je suis à la recherche
d'informations concernant la gestion des élèves, ou pour
approfondir un sujet particulier.
Concernant l'intelligence musicale, elle
reconnaît : « j'aime chanter, j'aime le bruitage, je
m'intéresse aux sons ayurvédiques, j'aimerais en apprendre plus
dans ce domaine ». Effectivement, l'enseignante a l'habitude
d'utiliser divers instruments (cloches tibétaines, percussions diverses)
pour attirer l'attention des élèves. Lors de l'enregistrement,
elle cherchera la petite cloche qu'elle utilise habituellement, et ne la
trouvera pas. Elle tapera donc, à deux reprises, dans ses mains
positionnées au-dessus de la tête, pour attirer l'attention des
élèves.
L'entretien se termine sur l'enthousiasme d'avoir
trouvé un cadre conceptuel (la théorie des intelligences
multiples) qui l'aide à prendre de la distance et à mieux
comprendre son mode de fonctionnement personnel et pédagogique.
· Séance n° 2 (29/05/2015)
Cette séance est consacrée aux cinq
élèves en difficulté dans sa classe. Différencier
lui paraît évident, et ne lui pose pas de problème
particulier. Pour encadrer les élèves qui ont du mal à
apprendre, elle précise « Je me sers des enfants autonomes
pour dégager du temps » et « sur un dyslexique, je
ne m'acharne pas, je ne le prends pas, en plus, en Activité
Pédagogique Complémentaire (APC). L'APC, je m'en sers en
début d'année pour repérer les difficultés en
lecture, sinon, c'est pour des difficultés ponctuelles ».
Concernant B., le fait que son attitude soit différente de celle
qu'elle adopte vis-à vis des autres ne pose pas de problème :
« je parle des difficultés des élèves aux autres
élèves ».
Le problème des nouveaux rythmes est également
évoqué. L'enseignante trouve les élèves plus
fatigués et moins attentifs qu'avant : « il n'y a
rien de bon dans ces nouveaux rythmes ».
Elle explique le fonctionnement de sa classe, le tutorat, les
boîtes personnelles (cf. plus haut). La théorie de
l'autodétermination lui est présentée (figure 7) :
elle fait le lien avec les plans de travail, face auxquels elle réagit :
« je ne suis pas assez organisée pour travailler de cette
façon, il faut une rigueur que je n'ai pas ». Elle
explique : « Je ne prévois pas mes séquences longtemps
à l'avance. Je réajuste. Si ça ne passe pas, je change,
j'allège, j'adapte. Des fois, on fait même du coloriage. Quand je
vois que ça va bien, je fonce. Je travaille au feeling. Je
présente les notions quand je le sens... C'est souple... je ne suis pas
cartésienne ». Je lui transmets ensuite le questionnaire sur
l'autodétermination à remplir.
· Séance n° 3 (09/06/2015)
Les échanges portent davantage sur les relations avec
les élèves. L'enseignante, on l'a vu, souhaite que ses
élèves n'aient pas peur d'elle, et n'appréhendent pas de
venir en classe. « Je veux apporter de la belle énergie...
J'utilise des termes toujours valorisants, décontractés... De
nature, je suis plutôt d'humeur égale, et je suis très
patiente... ». Néanmoins, elle entend être
respectée. Il lui arrive de gronder : « Ceux qui disent
sans lever le doigt, je me fâche ». De la même
façon : « Quand ils embêtent les autres, ça
me met en colère... Ils n'ont pas l'habitude, ça les fait
pleurer ».
Le premier trimestre, l'enseignante « pose le
cadre ». Elle a trouvé un dispositif sur un site
pédagogique qui lui permet de travailler le comportement avec ses
élèves : toutes les fins de semaine, les prénoms des
enfants sont placés sur une affiche en fonction du respect des
règles de fonctionnement de la classe, dont on a vu qu'elles
étaient élaborées avec les élèves. Elle
abandonne cette activité en décembre en général,
lorsque les règles sont assimilées : « Moi, je
crois dans la relation que nous avons créée ».
Concernant la discipline elle complète : « Ils essayent,
mais je peux être ferme, et quand je suis ferme, ils
pleurent ».
Concernant B., elle dit : « J'adore ce gamin...
il bouge sans arrêt...s'il y a une excitation
générale dans la classe, tu le perds... Quand y disjoncte, je
n'peux pas l'ram'ner...la douceur, des fois ça marche... quand j'ai
aucune prise sur lui, la seule solution, je le sors, je le mets dans une autre
classe », je lui dis : « B. là, ça
suffit, il faut du calme. Je suis fatiguée, j'en peux plus, j'ai atteint
ma dose ». Je lui parle alors du « message en
je » (figure 11), qu'elle ne connaît pas, et nous
réalisons qu'elle l'adopte de façon spontanée. Elle
explique : « Pour moi, l'autoritarisme, c'est la fin de l'estime
de soi ».
Concernant les demandes qu'elle pourrait avoir
vis-à-vis du travail que nous réalisons ensemble, et les
difficultés qu'elle rencontre, elle répond qu'elle souhaiterait
davantage d'éléments concernant la gestion des conflits, et des
pistes pour mieux gérer le temps, pour mieux organiser l'espace, ranger.
Le placement des élèves dans la classe lui paraît
également un sujet d'étude intéressant, sur lequel elle
aimerait obtenir davantage d'informations. Les plus grandes difficultés
qu'elle rencontre sont en lien avec les effectifs : « toujours
le collectif, le collectif... le bruit... ». K. souhaiterait
évoluer vers une autre fonction, peut être l'enseignement
spécialisé. Cela fait déjà un an ou deux qu'elle
envisage ce projet.
· Séance n° 4 (18/06/2015)
L'entretien commence par porter sur le comportement de B.
durant la matinée. La fin de l'année approche et l'enfant est
sans arrêt en mouvement...
Puis les modalités d'évaluation sont
abordées. Les élèves ont chacun un livet de
compétences, transmis à la famille à chaque fin de
période avec une appréciation de l'enseignante. K. lit aux
élèves l'appréciation transmise aux parents avant de
remettre le livret et leur demande leur avis.
Le thème des relations avec les parents est ensuite
évoqué. K. entretient généralement de très
bonnes relations avec eux. Elle y consacre du temps. On la voit d'ailleurs
très souvent échanger avec l'un d'entre eux devant le portail.
Il lui paraît important, pour les élèves, que les liens
avec les parents soient les plus détendus possible. L'effet miroir
(figure 10) est évoqué au cours de la conversation. K. est
heureuse, une nouvelle fois, de prendre connaissance de ce concept qu'elle
ressent comme très vrai, et qu'elle applique spontanément.
L'entretien dérive ensuite sur la fatigue de la fin de
l'année, et des techniques de relaxation pour favoriser le sommeil...
Rendez-vous est pris pour l'enregistrement d'une
séquence, qui sera repoussé à deux reprises en raison de
perturbations de l'emploi du temps dues aux activités de fin
d'année, et qui aura finalement lieu le 2 juillet, avant-dernier jour de
classe.
3.8. Conclusions
Le travail mené avec cette enseignante a
été particulièrement riche en informations. La
séance d'enregistrement oriente sur des pistes inattendues en
matière d'autodétermination des élèves. Ce
troisième volet permet de remettre à leur place les
différents outils abordés, et d'établir une
hiérarchie entre eux. La gestion de classe, et notamment son aspect
dynamique, le positionnement adopté par l'enseignante, prennent un
éclairage différent devant le savoir-faire de cette
enseignante.
Quatrième
partie : Résultats
1. Présentation
1.1. Le besoin de bouger
Les séquences vidéo (annexe 17) ont mis en
évidence le besoin de bouger important des enfants, notamment en PS, et
les progrès du contrôle moteur mis en place progressivement par
les élèves, en lien avec la fréquentation scolaire,
lorsqu'ils arrivent au cours moyen. Ce besoin n'est pas du seul fait des
enfants hyperactifs. En PS, la plupart des élèves cette
année ont « la bougeotte ». La tâche la plus
difficile rencontrée par l'enseignante est de canaliser ce besoin de
mouvement, qui parasite les activités proposées. La classe de PS,
comme celle du CM et son groupe difficile de 11 élèves, comporte
une majorité de garçons. On sait que l'hyperactivité
touche 3 garçons pour une fille. Au-delà du trouble, on sait
aussi que le besoin de bouger, est, dès avant la naissance, plus
important pour les garçons que pour les filles (Almli, Ball, &
Wheeler, 2001). Les deux classes de PS et de CM, composées
majoritairement de garçons, témoignent des difficultés
accrues rencontrées par ces enfants lorsqu'ils sont confinés dans
une classe. La classe de CE, composée majoritairement de filles, (14
pour 12 garçons), est en revanche plus facile à gérer car
l'enseignante dispose d'une disponibilité plus importante de la part de
ses élèves. Cette enseignante, d'ailleurs, se souvient avoir eu
beaucoup de mal à gérer le groupe actuel des CM lorsque les
élèves étaient plus jeunes et qu'elle était leur
professeur, alors que X. n'était pas encore arrivé dans
l'école.
1.2. I. B. et K., les enfants hyperactifs
Les deux enregistrements montrent effectivement une
participation verbale et motrice plus importantes de ces élèves.
Il est intéressant de noter que cette participation n'est pas, en
l'état actuel, négative : les élèves suivent
et s'intéressent durant les séquences observées. Les
entretiens mettent en évidence les préoccupations accrues des
enseignantes à leur égard : comme pour « l'huile
sur le feu », leur attention est dirigée en permanence vers
ces élèves, nécessitant de développer des
stratégies et d'adapter leur enseignement à leurs
particularités. Les incidents sont néanmoins fréquents, et
obligent à des remises en cause, des changements de leur mode de
fonctionnement, ainsi qu'à des discussions fréquentes avec les
enfants et leurs parents. Les difficultés rencontrées sont
à l'origine, dans tous les cas, de réactions affectives fortes de
la part des enseignantes : R. est affectée par le malaise de I., N.
a du mal à comprendre et à accepter le comportement de X., K. est
émotionnellement mobilisée autour de B.
L'impact sur les autres élèves est très
visible : sur le plan comportemental pour les élèves de PS
(l'enseignante note à plusieurs reprises que le comportement de I.
« déteint » sur les autres enfants). Les plus
grands, à l'occasion de la régulation, sont à même
d'exprimer leur incompréhension, et leur gêne, face au
comportement de X. En CE, K. est consciente, lorsqu'elle éloigne
provisoirement B. en l'envoyant dans une autre classe, que tout le monde, les
autres élèves y compris, a besoin de
« respirer ». Le sujet n'a pas été
abordé avec les élèves dans la classe de K., mais que
peuvent ressentir ces enfants de l'attention et de l'investissement affectif
particuliers prodigués par leur maîtresse vis-à-vis de
B. ?
L'avenir scolaire de ces trois élèves reste
problématique : I. va être pris en charge pour des troubles
du langage, dans un premier temps. Une demande d'AVS a été
déposée auprès de la MDPH. En fonction de
l'évolution de la situation, l'appui du SESSAD spécialisé
dans les troubles du comportement pourra être sollicité. B. a,
depuis la GS, beaucoup de mal à réaliser son travail
écrit. Il est probable qu'un dossier auprès de la MDPH doive
être constitué pour que cet enfant bénéficie d'un
ordinateur, et de séances d'ergothérapie. X. est moins
touché par le trouble, il ne présente pas de difficultés
d'apprentissage, mais son malaise en classe est ancien, clairement perceptible,
et son enseignante est inquiète concernant son intégration en
sixième.
1.3. Les stratégies des enseignantes
1.3.1. La connaissance des élèves
K. place la connaissance individuelle de ses
élèves au coeur de son enseignement. Elle y consacre beaucoup de
temps en début d'année. Ce faisant, elle prend des repères
pour proposer aux élèves des activités qui correspondent
à leurs compétences, mais également à leurs centres
d'intérêt (les « p'tites bêtes »).
Durant les activités proposées, elle sollicite individuellement
ses élèves très fréquemment, en les appelant par
leur prénom. Très empathique, elle utilise sans les
connaître les intelligences multiples de Gardner, concept que nous avons
découvert durant le travail réalisé avec l'enseignante de
PS, et qui nous apparaît intéressant à bien des
égards : adossé au besoin de compétence, outil pour
mieux connaître les élèves, il permet également de
développer un aspect clef de la motivation : trouver du sens
à une activité.
1.3.2. Le repérage des difficultés
Le repérage et la découverte des
problématiques de chaque élève, notamment ceux qui
présentent des difficultés scolaires ou des problèmes
d'adaptation, apparaît important pour mettre en place les adaptations
nécessaires. Les enseignantes des cours des plus petits, R. et surtout
K, qui enseigne au CE1, ont la possibilité de faire appel aux
maîtres du RASED. L'action des maîtres spécialisés a
un effet direct auprès des enfants, et un effet indirect sur le
quotidien de la vie de la classe, par les informations sur les enfants
apportées aux enseignants, qu'ils utilisent dans leur travail de
préparation, en amont des activités proposées aux
élèves. Les APC sont également des temps
privilégiés pour mieux connaître ses élèves.
Les directeurs sont dispensés de ces temps individuels, à juste
titre ; mais il est regrettable que les élèves,
déjà privés de leur enseignant une partie du temps, ne
puissent pas bénéficier de ces moments privilégiés
avec leur maître.
1.3.3. Installer l'attention conjointe
L'enregistrement des séquences vidéo montre une
différence notable entre la séquence de PS et celles de CE1 et
CM1 : le crédit apporté à la parole de l'enseignante.
Or, c'est ce crédit qui autorise l'attention conjointe. Il s'agit donc
de trouver les moyens de créer et d'accroître ce crédit, en
analysant les pratiques enseignantes.
En comparant l'activité motrice des
élèves, on constate que la moyenne des manifestations motrices
est de 11,1 en PS, de 10,3 en CM, et de 25 au CE. Ce constat oriente sur
l'importance des sollicitations motrices pour mobiliser les
élèves.
L'enseignante de CM interpelle individuellement 26 fois ses
élèves en 20 minutes, et celle du CE 198 fois. L'enseignante de
PS les interpelle 19 fois. On peut supposer que ces interpellations
individuelles sont déterminantes pour que les élèves se
sentent personnellement impliqués.
L'analyse plus approfondie des séquences permet de
constater que l'enseignante du CM utilise un support d'interactions que les
autres enseignantes ne peuvent utiliser : la lecture. Ce support commun,
et les capacités d'attention plus développées de ses
élèves, ainsi qu'un fonctionnement un peu autoritaire
(« Heureusement qu'ils me craignent ! » p.
66) lui permettent d'obtenir l'attention conjointe
nécessaire au bon déroulement de sa séquence. Par
ailleurs, des questions de lecture suivent l'explication de texte : les
élèves auront donc une tâche à réaliser qui
implique une écoute préalable : ils sont
responsabilisés face à la tâche collective.
L'enseignante de CE a développé des outils
interactifs spécifiques (flèches-ardoises). Comme l'enseignante
de CM, elle fait appel au lever de doigt (participation motrice), elle demande
de fermer les yeux (idem), elle fait appel également aux
élèves de service (responsabilisation, participation motrice).
Par ailleurs, elle fait varier les activités (3 différentes en
l'espace de 20 minutes), et chaque élève a au moins une
tâche à réaliser, validée ou non par l'enseignante,
ce qui l'oblige à écouter (responsabilisation + engagement). Si
un élève porte atteinte au processus de l'attention conjointe,
elle le reprend sans hésiter, rapidement et sans négocier, pour
sauvegarder la dynamique de la séquence.
Ces différents résultats orientent notre travail
vers d'autres hypothèses : le fonctionnement de la classe est un
fonctionnement collectif. Afin d'établir une attention conjointe,
l'objectif prioritaire est de créer un collectif conjoint,
orchestré par l'enseignante. De ce fait, l'autodétermination des
élèves passe au second plan : si l'on reprend le
schéma (figure 8) illustrant le travail réalisé en PS lors
de la séance n ° 2, on s'aperçoit qu'il ne doit pas y avoir,
au cours d'une séquence magistrale, de zone de négociation.
L'autodétermination des élèves intervient dans le
deuxième temps, par le biais essentiellement de la participation et de
la responsabilisation devant la tâche. Cette sollicitation individuelle,
verbale et motrice de l'élève engagé dans un projet qui a
du sens pour lui, permet à l'enseignant d'orchestrer sans commander,
évitant ainsi l'autoritarisme. La difficulté réside dans
la construction de cet espace intermédiaire, entre
l'autodétermination des élèves et l'autorité de
l'enseignant, où l'attention conjointe peut s'établir avec le
consentement des élèves. Cette construction implique un
savoir-faire lors de l'élaboration de la séquence, notamment dans
le rythme des activités, le choix et l'utilisation de supports
d'interaction, ainsi qu'un travail en amont, basé sur l'observation et
la prise d'indices préalables de chaque élève par
l'enseignante. Ce double travail permet que le cours magistral puisse se
dérouler sans négociation.
1.3.4. Prendre la mesure attentionnelle du groupe
K. nous donne des indices concernant la décision de
présenter, ou non, la séquence d'enseignement collectif :
elle prend la mesure attentionnelle du groupe. Lorsque celui-ci n'est pas
disponible, elle propose des activités plutôt individuelles,
motrices (coloriage), plus faciles, moins gourmandes en attention.
Par ailleurs, elle s'adapte chaque année aux
particularités de son groupe. La présence d'enfants hyperactifs
ou instables est un facteur limitant. Elle détermine, en quelque sorte,
le Plus Grand Commun Diviseur attentionnel du groupe. Cette prise de mesure se
fait en début d'année, et nécessite l'adaptation du projet
d'enseignement. Elle se fait également au jour le jour, et
détermine le rythme de progression adopté par l'enseignante.
Hourst (2008), introduit le terme général de
« calibrage » pour qualifier ce travail de prise
d'indices du groupe par l'enseignant, nécessitant à la fois de
l'expérience, et de l'empathie.
1.3.5. Evaluer la charge attentionnelle des activités
proposées
Chaque activité proposée peut s'analyser en
termes de charge attentionnelle. Celle-ci dépend de la nature de
l'activité, du niveau des élèves dans le domaine
concerné, de la durée de la séquence, ainsi que de sa
construction. L'enchaînement de plusieurs séquences
« attentiophages » est également
réfléchi en fonction de la mesure attentionnelle du moment, ainsi
que de la charge attentionnelle de l'activité proposée. C'est
ainsi qu'une séquence dans laquelle beaucoup d'interactions sont
proposées, avec des activités variées introduisant des
gestes moteurs et des stimulations individuelles, sera
moins « attentiophage » qu'une autre basée
exclusivement sur l'écoute collective.
1.3.6. La construction des séquences
La construction des séquences comprend la subdivision
des tâches. Elle répond au besoin de nouveauté des
élèves, mais nécessite également une bonne
organisation. Les enseignantes donnent là encore des exemples riches
d'informations : les séquences sont complexes, actives, utilisent
des supports plaisants, mais elles sont répétées :
les élèves, comme les enseignantes, ont leurs repères. Par
le choix d'une répétition (mesurée) de séquences
structurées et variées, elles proposent aux élèves
des activités élaborées et attractives qui sollicitent
leur attention et leur participation. De ce fait, le temps passé
à construire une séquence complexe (fabrication des
flèches, choix, achat [ou emprunt] de 28 livres identiques...) est
« amorti », justifiant le
« coût » de la préparation.
La mise en projet de l'élève, conseillée
par La Garanderie, est particulièrement nette dans les séquences
proposées par les enseignants de l'élémentaire : les
élèves ont clairement compris qu'ils ont une tâche à
réaliser et se mobilisent pour la réussir. Cette mise en projet
est une composante de la responsabilisation de l'élève. Elle
détermine une pédagogie active, basée sur la
participation. Le fait de fermer les yeux, conseillé par La Garanderie,
« pédagogie des yeux
fermés » préconisée également par
Favre qui en développe les avantages :
« Chaque enseignant peut essayer de reprendre
à son compte, en classe, cette notion fondamentale concernant les lobes
frontaux : il s'agit de travailler sur la visualisation et l'imagination,
deux actes mentaux qui stimulent ces aires cérébrales et aident
à mieux aborder les concepts traités ».
(Favre, op. cit. p.55)
1.3.7. Motiver les élèves
Le besoin de compétences est validé, notamment
par K. qui passe beaucoup de temps et d'énergie à repérer
les compétences de ses élèves, afin de s'y ajuster, et qui
a développé, avec l'aide du maître E, des
compétences en matière de différenciation de son
enseignement. N., qui propose un triple niveau d'exercices, est
également dans cette démarche.
Le besoin de changement, de nouveauté, de surprise et
de curiosité, en respectant une certaine permanence, est
également pris en compte par les enseignantes, dans le rythme des
activités : K. propose des activités variées, la
découverte de « p'tites bêtes ». N. change de
méthode d'enseignement entre le matin, consacré à des
activités individuelles, et l'après-midi, où les
activités se font collectivement. Le livre choisi présente une
histoire exotique. R. introduit des figurines à piocher dans sa
boîte à trésor.
Le besoin de jeu, est également pris en compte par les
enseignantes : la boîte à trésor, la flèche
effaçable, les charades, les blagues de Toto, l'humour, sont des
supports ludiques.
Les besoins relationnels sont au premier plan pour K. :
le tutorat « c'est bien pour les deux », le travail par
groupe de deux élèves, la relation de confiance, affective,
créée entre elle et les enfants, montrent l'attention que
l'enseignante accorde au climat qui règne dans sa classe. La souplesse
et l'empathie sont les qualités qui lui paraissent être celles
d'un enseignant avant toute autre. R. qui refuse de stigmatiser les enfants, et
qui fait preuve d'une patience exemplaire, privilégie également
l'affectif, refusant d'adopter une attitude autoritaire pour établir
l'attention conjointe si compliquée à obtenir dans ce groupe
d'élève.
L'autodétermination se décline sous la
médiation de l'enseignante : par la participation individuelle, les
choix que celle-ci implique, la responsabilisation qui découle du
réinvestissement des connaissances présentées
(réponse orale, ou réponse à des questions
écrites), l'enfant fait jouer son autodétermination. Il est
cependant incité à évoluer dans l'univers éducatif
proposé par l'enseignante, et la participation à l'attention
conjointe n'est pas laissée à sa discrétion. La gestion de
la classe de PS, souple et attentive, incitée à laisser toute sa
place à l'autodétermination des élèves, n'a pas
abouti à un climat de classe satisfaisant et propice aux apprentissages.
Au contraire, c'est en réduisant l'autodétermination des
élèves en leur attribuant une place fixe avec une
étiquette, que l'enseignante a réussi à améliorer
la situation. Les plans de travail, et l'autonomie qu'ils autorisent, sont une
bonne illustration de la problématique : certains
élèves de CM1 s'en plaignent (cf. régulation p.
71) et souhaiteraient davantage de cours : le
travail en autonomie les prive d'un contact plus étroit avec
l'enseignante et les autres élèves, lors des cours et des
questions et discussions suscitées à cette occasion. Les besoins
d'autonomie entrent donc en compétition avec les besoins
relationnels.
Supports de l'autorité, la récompense est
utilisée, quelquefois, par R. sous forme de bonbons : elle associe
l'école et le plaisir d'une sucrerie, qui correspond à une
motivation de recherche de sensation agréable... Par contre, elle n'a
pas assorti les règles de vie de la classe de sanctions. Le travail,
portant sur les théories de la motivation et l'autodétermination
ne l'y a d'ailleurs pas incitée. N. utilise à l'occasion la
punition (à l'inverse de la sanction, la punition n'est pas
prévue dans un règlement), suscitant la frustration chez certains
de ses élèves et prenant le risque d'associer l'école, et
sa personne, à une émotion désagréable. K., qui
valorise la qualité des relations établies avec ses
élèves, est très exigeante concernant leur attitude en
classe. Elle peut avoir recours à la menace, n'hésitant pas
à les prévenir qu'elle leur fait confiance, mais que s'ils
exagèrent, ils peuvent perdre cette confiance. Il lui arrive de gronder
les enfants qui embêtent les autres, ou qui ne respectent pas les lois de
prise de parole : « ils n'ont pas l'habitude, ça les fait
pleurer ».
1.3.8. La gestion des particularités des comportements
de I., X. et B., les enfants hyperactifs.
K. parvient à mobiliser B. autour des apprentissages,
aidée par la communauté d'intérêt entre elle et le
petit garçon, passionné par le monde animalier. K. propose un
environnement rythmé et créatif qui maintient l'attention de
l'enfant comme des autres élèves. Par ailleurs, ses
compétences relationnelles et son savoir-faire lui permettent d'affirmer
en douceur et souplement son autorité. Lorsque l'enfant ne travaille
pas, elle considère qu'il ne peut pas. Elle s'efforce de le motiver, le
« prenant par les sentiments », mais elle renonce si elle
sent qu'il ne peut plus se concentrer. Lorsque le comportement de l'enfant est
trop perturbateur, elle le soustrait à la vie de la classe en l'envoyant
dans la classe voisine, presque d'un commun accord avec lui : elle ne
laisse pas la situation se dégrader, maintient leurs bonnes relations,
et propose un changement à cet enfant hyperactif dont les
capacités d'attention sont saturées. Par ailleurs, les relations
avec les parents sont bonnes. L'enseignante, comme les parents, sont
informés de la nature du trouble qui affecte l'enfant. Le climat
relationnel dans lequel évolue le petit garçon est serein, et les
difficultés ne sont pas aggravées.
N., en isolant X. et restreignant l'attention qu'elle lui
accorde, parvient également à maintenir dans les apprentissages
le jeune garçon. Elle a plus de difficultés à admettre ses
problèmes d'attention. Elle impute son comportement essentiellement
à des problèmes éducatifs, suivant en cela les tendances
de la plupart des enseignants : en 2006, le ministère de
l'Education Nationale a organisé une enquête sur les
représentations des causes de l'échec scolaire des
enseignants : les deux tiers d'entre eux les attribuaient à
l'environnement (Do, op. cit.). Comprendre le besoin de bouger et la
manière d'être de ces élèves peut permettre à
l'enseignant une meilleure tolérance au quotidien de cette
hyperactivité, sans la méjuger ni dévaloriser l'enfant ou
sa famille.
Intuitivement, N. a perçu que le placement de son
élève dans la classe est important : X. dit
lui-même : « ...je suis bien tout seul, c'est plus fort
que moi les bêtises » (p.
73). L'enfant a compris qu'il a besoin d'être
isolé s'il veut se concentrer : au Canada, il existe des parois que
l'on place autour de ces élèves pour les aider, ne laissant
dégagée que la partie vers l'enseignant et le tableau.
Dans le même registre, ces enfants sont facilement
« envahis » par le bruit. K. le souligne lors d'une des
séances : « S'il y a une excitation
générale dans la classe, tu le perds... » (p.
80). Paradoxalement, ces enfants démonstratifs
et bruyants, sont particulièrement dérangés lorsqu'il y a
du bruit et du mouvement autour d'eux. Ce facteur est parfois à
l'origine de difficultés de communication entre les parents et les
enseignants : à la maison, dans un endroit calme, l'enfant a un
comportement tout à fait différent de celui adopté en
classe, et moins de difficultés d'apprentissage.
Dans les trois cas, les liens avec les parents sont
renforcés : discussions plus fréquentes, plus
précises, permettant d'évoquer les difficultés,
d'éviter les malentendus, et d'établir une collaboration.
2. Discussion
2.1. Une vie scolaire statique difficile à supporter
pour de nombreux élèves
Les résultats ont permis de mettre en évidence
les problèmes de compatibilité entre la vie de la classe,
confinée et sédentaire, et le besoin de bouger des
élèves. Ces difficultés sont exacerbées pour les
enfants hyperactifs ; elles sont néanmoins présentes pour de
nombreux élèves, notamment les garçons. Carré
observe :
« Parmi les besoins vitaux, se trouve le besoin
de mouvement, de déplacement. Certains élèves ne sont pas
importunés par le fait de rester assis plusieurs heures par jour
derrière un bureau. D'autres en revanche le vivent comme une
véritable torture. Pour eux, bouger, faire des gestes, marcher, sont des
nécessités impérieuses. Ce besoin est, malheureusement,
rarement compatible avec le fonctionnement d'une classe ».
(Carré, op. cit. p. 111)
Le besoin de bouger des élèves, notamment dans
les petites classes, implique des séances de motricité plus
fréquentes, que les installations ne permettent pas dans la plupart des
écoles, ainsi que des séquences d' enseignement courtes et
variées, qui font appel au dynamisme, à la
créativité, et à une gestion rigoureuse du temps de la
part des enseignants. Suivant les conseils de Jenson :
« Les problèmes de discipline qui
sévissent dans une classe ont plusieurs causes. La toute première
est un problème d'attention. Il faut réduire le temps d'attention
requis ou le demander en se rappelant que le cerveau ne peut fournir une
attention soutenue de façon continue. Comme référence,
vous pouvez utiliser la règle des 5 à 7 minutes d'instructions
directes pour les jeunes de la maternelle à la 2ème
année, de 8 à 12 minutes pour les classes de la
3ème à la 6ème année et de 12
à 15 minutes pour les élèves du secondaire. Après
l'apprentissage, le cerveau a besoin d'un temps de traitement et de repos. Dans
une classe typique, cela signifie qu'il faut faire une rotation avec le travail
de réflexion, le travail individuel et en équipe, et le temps
consacré à un projet et les courtes présentations
théoriques ».
(Jenson, op. cit. p. 50)
Au-delà de l'hyperactivité pathologique, auquel
chaque enseignant est confronté régulièrement puisqu'elle
concerne un à deux élèves par classe, et dans
l'hypothèse d'un continuum (Dupagne, op.cit., Revol & Blanc
Lapierre, op.cit.), le besoin de bouger est un besoin essentiel, plus
important pour certains élèves que pour d'autres, qu'il est
nécessaire d'intégrer dans la pédagogie, notamment des
enfants jeunes. Les classes constituées en grand nombre de
garçons sont souvent des classes difficiles. Solidaires, les enfants
créent des « poches de résistance » devant
l'enseignement, et le professeur a l'impression de combattre au lieu
d'enseigner, ce qui affecte le climat de la classe et le plaisir d'apprendre au
détriment de tous. Oublié par les théoriciens de la
motivation, probablement parce que leurs recherches concernent le plus souvent
des étudiants adultes, qui ne sont pas atteints de TDA/H ou de
difficulté scolaire sévère (ceux-ci étant
déjà sortis du système scolaire), le besoin de bouger
apparaît, dans les petites classes, un facteur motivationnel majeur et
une difficulté, pour l'enseignant, à intégrer ce besoin
fondamental dans le déroulement des cours. Il est à l'origine,
tout au long de la scolarité des élèves, de
problèmes de discipline qui sont la source principale des
difficultés de la fonction enseignante.
2.2. Les motivations
Les enseignantes intègrent à des degrés
variés les principes motivationnels développés lors de la
partie théorique : besoin de changement, de surprise, de
curiosité, et de nouveauté. L'analyse des séquences
vidéos montre que la différence d'attention des
élèves est étroitement liée à
l'activité de chaque élève : lever le doigt,
répondre à une question, effacer une ardoise, fermer les yeux,
lire, tourner la page, etc. Les principes de l'autodétermination sont
validés en ce qui concerne la participation des élèves,
notamment la participation motrice. Les besoins de contrôle et
d'autonomie décisionnelle des enfants sont néanmoins au second
plan, derrière l'adhésion au projet de l'enseignant qui permet
l'installation de l'attention conjointe, nécessaire aux apprentissages.
Le principe d'autodétermination ne peut s'appliquer à un groupe
d'enfants aussi important que 25 ou 28 élèves, dans le respect de
l'adage du philosophe John Stuart Mill: « la liberté des
uns s'arrête là où commence celle des
autres ».
Un certain nombre de pédagogues ont bien compris les
limites de l'autodétermination, comme le témoigne le titre de
l'ouvrage de Y. Guégan « Les ruses
éducatives » (2010), et le texte de la quatrième de
couverture :
« ...l'éducateur...doit mobiliser ses
élèves sur des objectifs qui ne relèvent pas de leurs
intérêts immédiats[ ...], susciter chez eux un désir
d'apprendre parfois absent et les amener souvent à engager des efforts
dont ils aimeraient se dispenser. Pour cela, l'autoritarisme n'est guère
efficace : il peut permettre d'obtenir une soumission de façade,
mais sans vraiment d'implication authentique sur le long terme. La ruse, en
revanche, dès lors qu'elle est conçue sous le signe de la
bienveillance et pratiquée avec humour, peut déjouer en souplesse
les résistances à apprendre et faciliter ainsi la
coopération éducative au sein de la classe ».
(Guégan, op. cit.)
On peut s'interroger sur le terme de ruse, et
préférer celui de « savoir-faire », mais
l'analyse du rôle de l'enseignant va dans le sens de nos observations.
En conclusion, la théorie de l'autodétermination
ne s'applique pas directement aux élèves, elle ne convient pas
à des enfants très jeunes, a fortiori hyperactifs et donc
victimes d'eux-mêmes. Poussée à l'extrême, elle
aboutit au « laisser-faire », et ne répond plus
à la plupart des autres besoins des enfants. Cette théorie ne
peut se concevoir que sous la médiation de l'enseignant, qui suscite la
participation et la responsabilisation des élèves dans les
apprentissages proposés. Il prend en compte les besoins et facteurs
pouvant motiver les élèves, et la tâche difficile de
trouver un équilibre entre ces différents facteurs lui incombe.
Ce faisant, il exerce ce que Favre (2007), qualifie
d'autorité-autonomisation, basée sur la compétence
à organiser et optimiser le fonctionnement d'un groupe de sujets actifs,
par opposition à l'autorité-domination, basée sur une
différence statutaire exercée sur des sujets-objets. Conscient
que le système scolaire s'impose à l'élève, il
conseille néanmoins de laisser à celui-ci, lorsqu'il s'y oppose,
la possibilité de ne pas faire le travail demandé, sous condition
de ne pas déranger les autres. L'élève finit toujours par
se remettre au travail. Ce qui est régulièrement
vérifié par N., l'enseignante de CM, qui applique cette
méthode avec ses élèves.
2.3. Motivations intrinsèque et extrinsèque,
récompenses et sanctions.
Deci et Ryan (op. cit.) ont souligné
l'importance de valoriser la motivation intrinsèque. Les chercheurs ont
associé le système récompenses/punitions à la
motivation extrinsèque, la motivation intrinsèque étant le
plaisir de faire la tâche. Les enseignantes s'efforcent, par
l'intérêt des activités proposées et leur bonne
adaptation aux besoins des élèves, de susciter leur
adhésion. Les résultats montrent que chaque enseignant fait
preuve d'habiletés et de talents qui leur sont personnels. Ils montrent
également que susciter la motivation intrinsèque de tous les
élèves à tout moment n'est pas possible, validant les
propos d'Alain Lieury (2010, p. 50) : « Il est
évident qu'il faut bien, à un moment ou un autre, forcer un peu
l'enfant à s'engager dans de nouvelles activités ».
Il explique alors les moyens d'inciter l'enfant à lire, (en lui
donnant envie) en évitant de lui en intimer l'ordre. Concernant les
récompenses, il précise :
« Et parfois, un peu de motivation
extrinsèque peut être utile pour lancer le processus :
promettre une glace à un enfant pour qu'il fasse un quart d'heure
d'exercices de déchiffrage d'un livre, n'est pas contre-productif,
à condition que cette logique de récompense soit
abandonnée dès que l'enfant fait ses premiers pas autonomes dans
la lecture et ce avec plaisir ».
Cet avis est partagé par d'autres théoriciens de
la motivation qui notent :
« Les récompenses fournissant, par
définition, à l'élève des raisons d'ordre externe,
on peut se demander si l'utilisation pédagogique qui est faite des
récompenses à l'école, comme en famille, n'est pas, au
bout du compte, contreproductive. Est-ce à dire qu'il ne faille jamais
récompenser ? Evidemment non. L'essentiel est que l'enfant puisse
tisser un lien entre ce qu'il est et ce qu'il a fait de bien. Ce lien
étant tissé, on aurait tort de se priver de la récompense.
Une récompense, pour peu qu'elle soit donnée a posteriori,
devrait même contribuer à « renforcer » ce
lien. Le principe de renforcement de surcroît nous dicte à ne
récompenser qu'après coup, par surprise, et de façon
exceptionnelle ».
(Darnon et al., op. cit. p. 50)
L'auteur expose ensuite qu'il convient de sanctionner
positivement l'élève lorsque le comportement
réalisé correspond aux attentes de l'éducateur, et de
sanctionner négativement la production scolaire, et non
l'élève, lorsque le comportement réalisé n'y
correspond pas. La motivation intrinsèque est bien un idéal
à atteindre, mais la récompense et la sanction n'en sont pas pour
autant exclues des dispositifs pédagogiques préconisés par
les différents auteurs. Le système sanction récompense
utilisé avec les enfants recèle de nombreuses subtilités
qui pourraient faire l'objet d'études à part entière.
La position de R. Viau concernant l'autodétermination
et la motivation intrinsèque apparaît la plus réaliste
concernant les élèves en âge scolaire (école
obligatoire), lorsqu'il souligne que la plupart des élèves ne
sont pas en mesure de développer une attitude intrinsèque face
aux apprentissages. La société elle-même n'a, d'ailleurs,
pas prévu, dans le dispositif de l'école obligatoire, la
possibilité pour les élèves de faire jouer leur
autodétermination quant à leur participation scolaire.
L'autodétermination d'êtres immatures et en construction pose la
question de l'éducation elle-même. L'enfant reste sous
l'autorité souple de l'adulte, qui l'apprivoise plutôt qu'il ne le
commande, évitant ainsi le piège de l'autoritarisme, contre
lequel Debarbieux, (2008), spécialiste de la violence à
l'école, nous met en garde : « L'autoritarisme
renforce à l'évidence la délinquance et augmente la
violence" (p. 157).
2.4. La scolarisation des enfants hyperactifs
Barkley (1990), est un précurseur en matière
d'adaptation scolaire des enfants souffrant de TDA/H. On retrouve un certain
nombre de ses conseils dans les adaptations des enseignante : isoler
l'enfant, proposer des activités rythmées, courtes,
variées, lui renvoyer régulièrement un feed-back sur son
comportement, l'ignorer est également une pratique conseillée
lorsque son comportement n'est pas adéquat. Les récompenses sont
largement utilisées pour motiver ces enfants, sous forme de points ou de
relevés de comportement transmis aux parents, qui se chargent de
transformer les points en récompenses. Ce système de points est
également conseillé par Gisèle Georges (2000), psychiatre
pour enfants, et par de nombreux thérapeutes TCC : le
système est règlementé en accord avec l'enfant bien
à l'avance. Les récompenses sont accordées en fonction de
ce règlement et ne dépendent plus de l'arbitraire de l'adulte,
elles concernent des comportements bien précis, les enfants connaissent
le comportement attendu et comment y parvenir. Elles s'apparentent aux
conséquences « naturelles », concept employé
par Jensen (op . cit.) pour illustrer un des moyens de susciter
la motivation intrinsèque. Le système s'appuie sur un accord
préalable qui fait office de règlement. Il entre donc dans le
cadre de l'autorité-autonomisation de Daniel Favre et non celui de
l'autorité-domination.
Sur le plan neuropsychologique, les récompenses
permettent à l'enfant de maintenir ses efforts pour se contrôler,
remplaçant la dopamine qui leur fait défaut. Par ailleurs, elles
présentent l'avantage majeur d'éviter les sanctions trop
fréquentes qui dégradent le climat émotionnel dans lequel
évolue l'enfant, la qualité des relations entretenues avec les
adultes de son entourage, et qui finissent pas ne plus servir à rien.
L'engrenage des sanctions est probablement une des raisons majeures qui
poussent ces enfants vers le trouble des conduites. Seul le dépistage
précoce du trouble peut empêcher cette spirale infernale.
2.4.1. L'importance du repérage
La connaissance du trouble permet à l'enseignant, la
famille, et l'élève, de comprendre la situation, et de trouver
des recours : réactions adaptées ou inadaptées,
prises en charge. Dans les services spécialisés, la
« psychoéducation » est une partie intégrante
des soins proposés.
Le dépistage est facilité par la connaissance et
l'acceptation du trouble par les professionnels. Les enfants hyperactifs sont
toujours repérés dans les écoles comme des
élèves posant des problèmes de comportement, des
bizarreries ou des difficultés inexpliquées. Leurs relations avec
les autres sont souvent difficiles, en raison de leur impulsivité et de
leurs difficultés à gérer leurs émotions. Les
programmes de Barkley comportent des sessions pour les aider à
gérer leurs émotions, à verbaliser leurs ressentis,
à se repérer dans leurs relations et à développer
de l'empathie avec les autres. Ils proposent également une formation aux
parents pour qu'ils accompagnent leur enfant dans ce travail. En France
actuellement, de telles formations sont rares ou inexistantes, et seuls les cas
très sévères sont dépistés. Le retard de
dépistage est important, justifiant le titre de l'étude
menée par en 2014 par l'Institut Montaigne et la Fondation
FondaMental : Prévention des maladies psychiatriques :
pour en finir avec le retard français. Enseignants, parents, et
enfants, font face aux difficultés tous seuls. Aucun des
élèves, en Classe Relais, ni les trois enfants potentiellement
hyperactifs des classes qui composent notre terrain d'étude, ne font
l'objet d'un suivi pour hyperactivité : X., ne sera probablement
jamais diagnostiqué, B. suit une psychothérapie qui cherche
à le faire « régresser » pour retrouver un
traumatisme subi durant sa petite enfance, I. va être pris en charge pour
des troubles du langage, dans un premier temps. Comme son frère, il
fréquentera peut être un ITEP sans jamais avoir essayé de
traitement médicamenteux (Ritaline ou Concerta). Or, de nombreux enfants
sont « répondants » au traitement de façon
spectaculaire : du jour au lendemain, ils passent d'un état
où ils sont incapables d'apprendre, à un état où
ils sont à même de profiter de l'enseignement dispensé par
l'enseignant au même titre que les autres élèves. Beaucoup
d'élèves de familles averties sont traités, les parents
ayant fait les démarches par eux-mêmes. Les compétences
parentales rééquilibrent le manque de dépistage, ce qui
joue en défaveur, une nouvelle fois, des enfants des familles les plus
démunies.
Au sein des écoles, les RASED peuvent, après
repérage des troubles, conseiller les enseignants, informer les parents,
orienter vers les spécialistes (orthophonistes, ergothérapeutes,
psychomotriciens, psychologues, psychiatres...) compétents. M ais le
retard, au sein de ces structures, est, là aussi
conséquent : la présidente de l'Association Française
des Psychologues de l'Education Nationale est une militante du mouvement Pas de
zéro de conduite, évoqué plus haut dans la partie
théorique.
2.4.2. L'avenir scolaire des élèves
hyperactifs
Bange et Mouren-Siméoni (2005), après
étude des recherches (américaines) concernant la scolarité
des adultes hyperactifs concluent (p. 115) : « ...les
hyperactifs mènent une scolarité plus brève, parviennent
plus rarement à des diplômes de l'enseignement supérieur,
ce qui écarte bon nombre d'entre eux des professions où ceux-ci
sont exigés, et atteignent ainsi un niveau socio-économique plus
faible ». En France, il est difficile de mener des études sur
une population qui n'est pas diagnostiquée. Mon stage en classe relais
et mon expérience professionnelle me permettent de faire les constats
suivants :
Dans les cas les moins sévères, et lorsque les
enfants ne sont pas victimes de troubles des apprentissages associés et
n'ont pas développé une aversion de l'école du fait des
tensions de leur scolarité à l'école
élémentaire, ils pourront se réconcilier avec
l'école. La pratique intensive de sports, très souvent, aide ces
enfants à canaliser leur énergie.
Les élèves rencontrant des difficultés
d'apprentissage très importantes pourront être orientés en
SEGPA, et s'épanouir dans ce contexte : la pression scolaire est
moindre. Les devoirs, notamment, sont réduits. Les cours sont à
visée pratique, rapidement orientés vers l'activité
professionnelle. Ils correspondent au désir de ces jeunes de grandir
vite, et de se débarrasser de la dépendance et des contraintes
associées au statut étudiant. Beaucoup de familles et
d'élèves expriment leur soulagement peu après
l'entrée en SEGPA.
2.4.3. Des risques élevés de décrochage
scolaire
Les élèves qui parviennent à masquer
leurs difficultés d'apprentissage, souvent par des problèmes de
comportement et un désengagement des activités scolaires
(Régner & Loose, 2006), passent en 6ème. Ce sont
ces enfants qui sont à haut risque de décrochage scolaire
précoce. La scolarisation au collège est très
compliquée. Ils peuvent être réorientés en SEGPA par
le collège. Certains, lorsqu'ils auront quinze ans, pourront
bénéficier d'un Projet Individuel de Formation et partir en stage
(circulaire du 30 avril 2009). L'allongement de la scolarité
jusqu'à 16 ans depuis la réforme Berthoin de 1959, la disparition
des Collèges d'Enseignement Technique en 1975, la fin de l'Education
Manuelle et Technique, ont aggravé les conditions de scolarisation de
ces élèves, et les ont poussés vers la sortie
prématurée du système scolaire sans diplôme ni
qualification, aboutissant à la situation actuelle (Robert, 1993, p.
147) : « L'exemple japonais est souvent invoqué
à titre de modèle, avec ses 94 % de jeunes scolarisés
à 17 ans et ses ouvriers de l'automobile "bacheliers" ; or la France est
aussi largement devancée par l'Allemagne (90 %) et les Etats-Unis (87 %)
avec seulement 69 % de jeunes scolarisés à 18 ans". Les
réformes successives depuis 1964 ont abouti à l'effet inverse de
celui recherché, du fait du diktat de théoriciens
déconnectés du monde de l'éducation, de
décisions d'hommes politiques voulant des réussites à leur
image, et de considérations économiques (l'enseignement
professionnel a un coût plus élevé que l'enseignement
général) :
« Si l'on considère que la réforme
Berthoin est une mutation entrainant de profondes évolutions,
probablement l'évolution majeure est-elle le renforcement de la
scolarisation de la formation professionnelle entrainant une
déprofessionnalisation des diplômes : un CAP de moins en
moins valorisé, un BEP sans réelle valeur sur le marché du
travail, un baccalauréat professionnel de plus en plus orienté
vers la poursuite d'études ».
(Belhadjin & Lopez, 2014, p.93)
Les difficultés de ces jeunes fragiles à
accéder rapidement à des formations professionnelles de
qualité qui leur conviennent multiplient les risques d'accident,
d'errance, d'addiction, et de délinquance, auxquels leur trouble les
expose tout particulièrement.
Les chercheurs qui ont étudié la population des
victimes de décrochage scolaire (Janosz, Le Blanc, Boulerice, &
Tremblay, 2000, Blaya , 2010), ont noté la prédominance de
troubles des apprentissages et de difficultés comportementales dans
cette population. Ils s'accordent sur une conception multifactorielle du
phénomène de décrochage. Les jeunes victimes de TDA/H
présentent de nombreuses particularités communes avec la
population des décrocheurs décrite par ces auteurs. La prise en
compte de cette pathologie donne un éclairage déterminant au
processus, permet de mieux le comprendre et le prévenir, et de
réfléchir à des solutions plus adaptées.
Conclusions
La scolarisation des enfants hyperactifs est une
problématique dont nous avons vu qu'elle affecte la scolarisation de
tous les élèves dès la PS. Chaque année, ou
presque, elle détermine le rythme et la nature des activités
proposées par les enseignants. L'attention des élèves,
indépendamment de troubles spécifiques, est une denrée
rare et précieuse, qui demande du talent et du travail de la part des
enseignants pour apprendre à la capter. La formation professionnelle
doit mieux les préparer à assurer cette tâche. Le travail
réalisé a pu montrer que des réflexes professionnels
autour de la captation et de l'engagement de l'attention de tous les
élèves peuvent être mis en place, non par l'application de
théories, mais par des gestes précis, et des détails
pratiques. L'étude est incomplète : l'organisation d'une
journée de classe, le travail en groupe, la coopération, tous ces
aspects mériteraient d'être davantage développés. Le
travail avec l'enseignante de PS n'a pas donné les résultats
escomptés. Il gagnerait à être prolongé et
approfondi. Il a néanmoins montré que la priorité doit
être mise sur la construction de l'attention conjointe, condition pour
instaurer un climat propice aux apprentissages. La théorie de
l'autodétermination a montré ses limites dans un tel contexte,
témoignage des risques d'une recherche théorique trop
éloignée des problématiques des professionnels.
Au-delà des pratiques enseignantes, les deux
études réalisées ont montré la difficile adaptation
des élèves hyperactifs au sein de l'institution scolaire.
L'ambition politique d'une scolarité longue et uniforme pour l'ensemble
des enfants du pays est à l'origine de décisions dont les
conséquences, plusieurs dizaines d'années après, sont
encore lourdes pour l'avenir de nombreux jeunes.
Par ailleurs, le dépistage du trouble et les prises en
charge proposées sont insuffisants, justifiant la récente
recommandation de bonne pratique publiée en 2014 par la Haute
Autorité de santé.
Ce travail est également le témoignage de
l'intérêt de croiser différentes disciplines, d'utiliser
les apports de la neuroscience, notamment, pour mieux comprendre les
apprentissages. Multiplier les points de vue pour enrichir les regards et
avancer en suivant les conseils d'un « pédagogue
d'exception » : « Il faut savoir [...] assouplir ce
qui existe, développer ce qui peut se différencier, en rapport
avec des individus tous différents et dont les différences
peuvent devenir complémentaires ou harmoniques. Pour un tel projet, il
n'est pas de baguette magique. Mais, comme le prince épris de
Cendrillon, il faut patiemment chercher l'ajustement, pas à pas,
pied à pied. Il faut, à cet effet, se débarrasser des
fantasmes tristes et identitaires, adhérer aux chances de notre
système d'enseignement dans sa progressive diversification et
accroître la confiance dans notre jeunesse et nos enseignants»
(Peretti, 1993, p. 380).
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Annexe 1 : Troubles du déficit de
l'attention et comportement perturbateur : trouble du déficit
de l'attention/hyperactivité (Mini DSM IV, op.cit. p.
63).
Ø Présence soit de (1), soit de (2) :
(1) six des symptômes suivants d'inattention (ou plus)
ont persisté pendant au moins 6 mois, à un degré qui est
inadapté et ne correspond pas au niveau de développement de
l'enfant :
Inattention
(a) souvent, ne parvient pas à prêter attention
aux détails, ou fait des fautes d'étourderie dans les devoirs
scolaires, le travail ou d'autres activités
(b) a souvent du mal à soutenir son attention au
travail ou dans les jeux
(c) semble souvent ne pas écouter quand on lui parle
personnellement
(d) souvent, ne se conforme pas aux consignes et ne parvient
pas à mener à terme ses devoirs scolaires, ses tâches
domestiques ou ses obligations professionnelles (cela n'est pas dû
à un comportement d'opposition, ni à une incapacité
à comprendre les consignes)
(e) a souvent du mal à organiser ses travaux ou ses
activités
(f) souvent, évite, a en aversion, ou fait à
contrecoeur les tâches qui nécessitent un effort mental soutenu
(comme le travail scolaire ou les devoirs à la maison)
(g) perd souvent les objets nécessaires à son
travail ou à ses activités (p. ex. jouets, cahiers de devoirs,
crayons, livres ou outils)
(h) souvent, se laisse distraire par des stimuli externes
(i) a des oublis fréquents dans la vie quotidienne
(2) six des symptômes suivants
d'hyperactivité-impulsivité (ou plus) ont
persisté pendant au moins 6 mois, à un degré qui est
inadapté et ne correspond pas au niveau de développement de
l'enfant :
Hyperactivité
(a) remue souvent les mains ou les pieds, ou se tortille sur
son siège
(b) se lève souvent en classe ou dans d'autres
situations où il est supposé rester assis
(c) souvent, court ou grimpe partout, dans des situations
où cela est inapproprié (chez les adolescents ou les adultes, ce
symptôme peut se limiter à un sentiment subjectif d'impatience
motrice)
(d) a souvent du mal à se tenir tranquille dans les
jeux ou les activités de loisir
(e) est souvent « sur la brèche »
ou agit souvent comme s'il était « monté sur
ressorts »
(f) parle souvent trop
Impulsivité
(g) laisse souvent échapper la réponse à
une question qui n'est pas encore entièrement posée
(h) a souvent du mal à attendre son tour
(i) interrompt souvent les autres ou impose sa présence
(p. ex. fait irruption dans les conversations ou dans les jeux)
Ø Certains des symptômes
d'hyperactivité-impulsivité ou d'inattention ayant
provoqué une gêne fonctionnelle étaient présents
avant l'âge de 7 ans.
Ø Présence d'un certain degré de
gêne fonctionnelle liée aux symptômes dans deux, ou plus de
deux types d'environnement différents (p. ex. à l'école -
ou au travail - et à la maison).
Ø On doit mettre clairement en évidence une
altération cliniquement significative du fonctionnement social, scolaire
ou professionnel.
Ø Les symptômes ne surviennent pas exclusivement
au cours d'un Trouble envahissant du développement, d'une
Schizophrénie ou d'un autre Trouble psychotique, et ils ne sont pas
mieux expliqués par un autre trouble mental (p. ex. Trouble thymique
Trouble anxieux, Trouble dissociatif ou Trouble de la personnalité).
Différents types :
Déficit de l'attention /hyperactivité, type
mixte : si à la fois les Critères A1 et A2 sont remplis pour
les 6 derniers mois
Déficit de l'attention /hyperactivité, type
inattention prédominante : si, pour les 6 derniers mois, le
Critère A1 est rempli mais pas le Critère A2
Déficit de l'attention /hyperactivité, type
hyperactivité-impulsivité prédominante : si, pour les
6 derniers mois, le Critère A2 est rempli mais pas le Critère
A1.
Annexe 2 : Troubles hyperkinétiques (CIM -
10, Classification internationale des troubles mentaux et des troubles
comportementaux).
N.B. : Les critères diagnostiques pour la
recherche du trouble hyperkinétique exigent la présence d'une
inattention, d'une hyperactivité, et d'une impulsivité qui sont
envahissantes, persistantes, et présentes dans plusieurs situations, et
qui ne sont pas dues à un autre trouble (par exemple un autisme ou un
trouble de l'humeur).
G1. Inattention. Au moins six des symptômes
suivants d'inattention ont persisté pendant au moins six mois, à
un degré qui est mal adapté et qui ne correspond pas au niveau de
développement de l'enfant :
(1) ne parvient souvent pas à prêter attention
aux détails, ou fait des « fautes d'inattention »,
dans les devoirs scolaires, le travail, ou d'autres activités ;
(2) ne parvient souvent pas à soutenir son attention
dans des tâches ou des activités de jeu ;
(3) ne parvient souvent pas à écouter ce qu'on
lui dit ;
(4) ne parvient souvent pas à se conformer aux
directives venant d'autrui ou à finir ses devoirs, ses corvées,
ou des obligations sur le lieu de travail (non dû à un
comportement oppositionnel ou à un manque de compréhension des
instructions) ;
(5) a souvent du mal à organiser des tâches ou
des activités ;
(6) évite souvent ou fait très à
contrecoeur les tâches qui nécessitent un effort mental soutenu,
telles que les devoirs à faire à domicile ;
(7) perd souvent des objets nécessaires à son
travail ou à certaines activités à l'école ou
à la maison (par exemple crayons, livres, jouets, outils) ;
(8) est souvent facilement distrait par des stimuli
externes ;
(9) fait des oublis fréquents au cours des
activités quotidiennes ;
G2. Hyperactivité. Au moins trois des
symptômes suivants d'hyperactivité ont persisté pendant au
moins six mois, à un degré qui est mal adapté et qui ne
correspond pas au niveau de développement de l'enfant :
(1) agite souvent ses mains ou ses pieds ou se tortille sur sa
chaise ;
(2) se lève en classe ou dans d'autres situations alors
qu'il devrait rester assis ;
(3) court partout ou grimpe souvent, de façon
excessive, dans des situations où cela est inapproprié (chez les
adolescents ou les adultes, ce symptôme peut se limiter à un
sentiment subjectif d'agitation) ;
(4) est souvent exagérément bruyant dans les
jeux ou a du mal à participer en silence à des activités
de loisir ;
(5) fait preuve d'une activité motrice excessive, non
influencée par le contexte social ou les consignes.
G3. Impulsivité. Au moins un des
symptômes suivants d'impulsivité a persisté pendant au
moins six mois, à un degré qui est mal adapté et qui ne
correspond pas au niveau de développement de l'enfant :
(1) se précipite souvent pour répondre aux
questions sans attendre qu'on ait terminé de les poser ;
(2) ne parvient souvent pas à rester dans la queue ou
à attendre son tour dans les jeux ou dans d'autres situations de
groupe ;
(3) interrompt souvent autrui ou impose sa présence
(par exemple fait irruption dans les conversations ou les jeux des
autres) ;
(4) parle souvent trop sans tenir compte des conventions
sociales.
G4. Le trouble survient avant l'âge de 7 ans.
G5. Caractère envahissant du trouble. Les
critères doivent être remplis dans plus d'une situation, par
exemple l'association d'une inattention et d'une hyperactivité doit
être présente à la fois à la maison et à
l'école, ou à la fois à l'école et dans une autre
situation où les enfants font l'objet d'une observation, par exemple un
centre de soins. « Pour mettre en évidence la présence
des critères dans plusieurs situations on doit habituellement disposer
d'informations provenant de plusieurs sources ; il est peu probable, par
exemple, que les parents puissent fournir des renseignements suffisants sur le
comportement de leur enfant à l'école.)
G6. Les symptômes cités en G1-G3 sont à
l'origine d'une souffrance ou d'une altération du fonctionnement social,
scolaire ou professionnel, cliniquement significative.
G7. Ne répond pas aux critères d'un trouble
envahissant du développement, d'un épisode maniaque, d'un
épisode dépressif ou d'un trouble anxieux.
Commentaires
De nombreux experts décrivent des affections qui ne
répondent que partiellement aux critères du trouble
hyperkinétique. Chez les enfants qui répondent aux
critères de ce trouble, mais qui ne présentent ni
hyperactivité ni impulsivité, certains experts font un diagnostic
de trouble de l'attention. Chez les enfants qui répondent aux
critères de ce trouble, mais qui ne présentent pas de
perturbation de l'attention, ils font un diagnostic de trouble de
l'activité. Enfin, chez les enfants qui répondent aux
critères de ce trouble, mais uniquement dans une situation donnée
(par exemple seulement à la maison ou seulement à
l'école), ils font un diagnostic de trouble ne survenant qu'à
la maison ou de trouble ne survenant qu'à l'école.
Pour l'instant, ces affections n'ont pas été incluses dans la
classification, car on ne dispose pas encore de données empiriques
suffisantes concernant leur validité prédictive.
Annexe 3 : Hyperkinésie,
instabilités psychomotrices (Classification française des
troubles mentaux de l'enfant et de l'adolescent, d'après Misès et
coll.)
Classer ici les troubles décrits en France par
l'expression « instabilité psychomotrice » et aux
Etats-Unis par l'expression « trouble déficitaire de
l'attention avec hyperactivité » (ou
hyperkinésie) ». Cet ensemble du point de vue symptomatique
est caractérisé par :
- sur le versant psychique : des difficultés
à fixer l'attention, un manque de constance dans les activités,
et un certain degré d'impulsivité ;
- sur le plan moteur : une hyperactivité ou une
agitation motrice incessante.
Ces troubles, en décalage net par rapport à
l'âge et au niveau de développement mental de l'enfant, sont plus
importants dans les situations nécessitant de l'application, en classe
par exemple, ils peuvent disparaître transitoirement dans certaines
situations, par exemple, en relation duelle ou dans une situation nouvelle.
Inclure :
- les troubles de l'attention sans hyperactivité
motrice proprement dite.
Exclure :
- l'activité excessive adaptée à
l'âge (chez les petits enfants notamment) ;
- l'instabilité psychomotrice liée à un
déficit mental ou à des troubles de la
personnalité ;
- les manifestations à type d'hypomanie et bien entendu
d'excitation maniaque.
Annexe 4 : Questionnaire de Conners pour les
enseignants (à 28 items)
Annexe 4 bis : Questionnaire de Conners pour les
parents
Annexe 5 : Auto-questionnaire adapté de
Dupaul et Barkley
Evaluer de 0 à 10 les comportements ci-dessous (0 :
très difficile -> 10 : très facile). Indiquer à
gauche son évaluation plus jeune, et à droite son
évaluation maintenant.
AVANT (Primaire)
|
CRITERES DE COMPORTEMENT
|
MAINTENANT
(Collège)
|
|
1. RESTER ASSIS
|
|
|
2. RESTER ASSIS SANS TROP BOUGER
|
|
|
3. VEILLER A NE PAS FAIRE DE BRUIT EN CLASSE OU DANS LES
COULOIRS
|
|
|
4. SE CONCENTRER SUR UNE SEULE CHOSE A LA FOIS
|
|
|
5. PORTER UNE ATTENTION SUFFISANTE A SON TRAVAIL
|
|
|
6. FINIR UNE ACTIVITE AVANT D'EN COMMENCER UNE AUTRE
|
|
|
7. ATTENDRE SON TOUR DANS LE GROUPE
|
|
|
8. NE PAS INTERROMPRE LES AUTRES ET NE PAS LES GENER DANS LEURS
ACTIVITES
|
|
|
9. PARLER A SON TOUR
|
|
|
10. PARLER MODEREMENT
|
|
|
11. ECOUTER LES AUTRES LORSQU'ILS PARLENT
|
|
|
12. ECOUTER LES CONSIGNES
|
|
|
13. AVOIR SES AFFAIRES POUR TRAVAILLER
|
|
|
14. S'OCCUPER TRANQUILLEMENT
|
|
|
15. REPERER ET EVITER LES COMPORTEMENTS DANGEREUX
|
|
Annexe 6 : Compte rendu d'examen psychologique de
M.
Danièle Ruaud
Psychologue scolaire
XXXXX
COMPTE RENDU D'EXAMEN PSYCHOLOGIQUE
A l'attention du pédopsychiatre
Enfant : XXXX M.
Né XXXX
Scolarisé au CM1
Ecole XXXX
NATURE DES EXAMENS
|
Date : XXXX
(CE2)
Age : 8 a 5 m
|
K.ABC
|
Dessin de famille
|
T.A.T.
|
Entretiens avec les enseignants
|
Entretiens avec la mère
|
L'intervention du psychologue scolaire a été
demandée par l'enseignant et la famille en raison des difficultés
de comportement de l'enfant. A l'école, ce sont des problèmes
relationnels que le maître évoque avant tout : si M arrive
à se concentrer sur le travail scolaire, en revanche, il fait
régulièrement preuve de violence envers ses camarades :
grossièretés, insultes, coups. Le maître souligne qu'il
supporte très difficilement la contradiction et la frustration, et
qu'il estime fréquemment être une victime. Le bilan a
été suivi d'une prise en charge de quelques mois à
l'école, visant à aider l'enfant à repérer et
verbaliser ses émotions, à développer ses
compétences sociales, et à l'aider à se maîtriser.
Cette prise en charge hebdomadaire a servi d'exutoire à cet enfant qui
supporte mal la vie en collectivité, dont l'extrême
sensibilité est heurtée sans arrêt, et qui accumule ainsi
des griefs et des expériences relationnelles qui l'insupportent. Elle
n'est plus possible cette année en raison des suppressions de postes au
sein du RASED, qui augmentent la charge de travail du psychologue.
Notons que M a été signalé à
l'école dès la Petite Section au RASED pour des problèmes
de comportement importants. Il avait alors bénéficié d'un
suivi par le rééducateur. Le bilan cognitif met en
évidence des performances hétérogènes. Les
résultats détaillés sont les suivants :
Processus séquentiels
|
Processus simultanés
|
Mouvements de main : 9
|
Reconnaissance de formes : 10
|
Mémoire immédiate de chiffres : 7
|
Triangles : 9
|
Suites de mots : 12
|
Matrices analogiques : 19
|
|
Mémoire spatiale : 7
|
|
Séries de photos : 16
|
Les résultats à l'échelle
séquentielle sont dans la zone moyenne. Notons la dispersion
intra-subtests des résultats. A l'échelle simultanée, la
dispersion inter-subtests est particulièrement forte. Les
résultats à Triangles et Mémoire spatiale pourraient
indiquer des problèmes de repérage visuo-spatial. M, durant ces
épreuves, manifeste beaucoup d'anxiété, de stress et
d'inquiétudes. Il a besoin d'être rassuré et
encouragé. A Matrices analogiques et Séries de Photos, les scores
sont très élevés. M travaille rapidement et avec davantage
de facilité.
La compréhension des informations orales donne un
âge de développement de 12 a 0 m. Les entretiens confirment
l'excellente expression et compréhension orales de cet enfant et sa
maturité dans ce domaine. En compréhension de lecture (textes
courts), le niveau obtenu correspond à celui d'un enfant de 12 a 6 m.
Par contre, Lecture et Déchiffrement donne un âge de
développement correspondant à l'âge réel.
Précisons que le maître observe que l'enfant
« accroche énormément » en lecture
à certains moments. M dira d'ailleurs : « en lecture, j'suis
nul ». Un bilan orthophonique et un bilan orthoptique ont
été conseillés à la famille pour vérifier
que l'enfant ne compense pas des difficultés électives
coûteuses en énergie.
Le dessin de famille est noir et anguleux. Les réponses
aux questions témoignent de l'investissement positif de cet enfant
à l'égard de sa petite soeur. Les relations
intériorisées sont positives. A aucun moment l'enfant ne
manifeste de culpabilité quant à d'éventuelles
difficultés de comportement. Au TAT, les histoires sont descriptives.
Curieusement, cet enfant qui manifeste une très bonne expression orale
ne laisse pas son imagination s'emparer des thématiques
proposées.
Les questionnaires de Conners renseignés par la famille
comme par l'enseignant ne sont pas significatifs d'un éventuel trouble
de l'attention/hyperactivité. Par contre, le résultat concernant
le trouble des conduites est très significatif en milieu scolaire (83).
L'échelle d'auto-évaluation du TDAH de Barkley renseignée
par l'enfant contredit les résultats des adultes : l'enfant
déplore de ne pas pouvoir se concentrer, de parler trop sans pouvoir
attendre son tour, et d'avoir des problèmes pour écouter quand on
lui parle. A un degré moindre (« assez »), il dit
avoir du mal à rester assis, à se concentrer sur son travail,
à jouer tranquillement, et reconnaît qu'il fait souvent des choses
dangereuses sans le vouloir. M se plaint également d'avoir des
difficultés à trouver le sommeil.
Actuellement, le comportement de l'enfant à
l'école est particulièrement problématique (violences
à l'égard des camarades, altercations fréquentes avec les
adultes, principalement à la cantine). Ce jeune garçon qui
présente des difficultés d'adaptation scolaire récurrentes
et un profil psychologique instable et très anxieux a besoin d'aide et
d'aménagements pour l'aider à supporter la situation scolaire et
améliorer son comportement social.
XXX, le XXX,
Annexe 7 : Compte rendu d'examen psychologique de
N.
Danièle Ruaud
Psychologue clinicienne
Psychothérapeute
COMPTE RENDU D'EXAMEN PSYCHOLOGIQUE
XXXX N
Né le XXXXX
Scolarisé en GS
Age (au moment de l'examen) : 6 a 0 m
Le suivi psychologique est demandé par la mère
de l'enfant en XXX. Celle-ci souffre de ne pas voir son fils davantage,
après une décision de justice restreignant ses droits de garde.
Elle se rend compte, par ailleurs, que N a des difficultés, et souhaite
l'aider à les surmonter. C'est un enfant agité depuis tout petit.
Il peut avoir des gestes violents, dire des grossièretés. Il a du
mal à obéir, et des problèmes pour se concentrer et finir
ce qu'il commence. Le geste graphique lui est également difficile.
Une batterie cognitive est proposée à l'enfant,
qui montre des compétences dans la bonne moyenne, à peu
près homogènes entre les différentes échelles
(IPM : 112, IFC : 114). La mémoire immédiate des
informations auditives, le repérage dans l'espace, la logique, et la
compréhension des informations orales correspondent bien au niveau
attendu d'un enfant du même âge. Un des subtests de
l'échelle Apprentissages est raté (Apprentissage de codes :
6, note à l'échelle : 93), l'enfant n'étant pas assez
disponible pour se concentrer sur la tâche. D'une façon
générale, passé l'attrait de la nouveauté, N se
montre difficile à mobiliser. Il se concentre le temps de comprendre ce
que l'on attend de lui, puis se lasse rapidement. Notons également qu'il
supporte très mal d'être mis en échec, et qu'il a tendance
alors à abandonner la tâche.
Les épreuves de Connaissances du K.ABC I montrent les
bonnes acquisitions scolaires de N.
Les épreuves projectives intéressent peu le
petit garçon (refus au dessin de famille). Au Patte Noire, rapidement
investi, les identifications choisies par l'enfant sont masculines, actives et
valorisées. On perçoit un fort besoin d'exclusivité, et
des difficultés à partager. Puis N se désintéresse
rapidement du matériel.
Le questionnaire de Conners renseigné par la
mère de l'enfant donne des résultats significatifs concernant
l'hyperactivité (87) et le trouble des conduites (94). On ne note pas de
somatisations (55), ni de manifestations d'anxiété
particulières (60). Les difficultés de concentration et les
problèmes pour finir la tâche transparaissent (indice à
Problèmes d'apprentissage : 75). Le même questionnaire
renseigné par le père et celui adressé à
l'enseignant permettraient de compléter cette analyse.
Un suivi s'est mis en place afin de faciliter la relation
mère-fils dans le contexte actuel, de favoriser un cadrage en douceur de
cet enfant difficile, stimuler sa concentration, et lui donner quelques bases
de relaxation. Actuellement, l'enfant supportant très mal d'être
séparé de sa mère, le travail est mené en
présence de l'un et l'autre. Le suivi est régulier et la maman
très motivée pour accompagner au mieux son fils.
En conclusion, N est un enfant qui présente de bonnes
compétences, mais une instabilité psycho-motrice importante, et
un trouble des conduites préoccupant. La nécessité de
développer des stratégies éducatives adaptées
s'impose (système de jetons, renforcement positif, recours aux sanctions
limité pour préserver la confiance en l'adulte et l'estime de soi
du petit garçon, cohérence éducative, calme, patience et
persévérance plus importantes encore que pour un enfant
ordinaire, etc.). Compte tenu du tempérament de N, une forte alliance
entre les différents acteurs (parents, beaux-parents, enseignants,
soignants, etc...), apparaît indispensable afin d'éviter les
découragements et accusations mutuelles qui fragiliseraient les
instances éducatives, et gêneraient le processus de
responsabilisation progressive de cet enfant. N est intéressé par
l'école et a de bonnes aptitudes pour entrer dans la lecture. On peut
espérer qu'il investisse le cours du CP suffisamment pour réussir
et évoluer favorablement.
XXXX, le XXXX
Annexe 8 : Extrapolation résultats du ROC
(lecture et orthographe) aux classes de 4ème et de
3ème.
L'échelle du ROC Lecture a été
extrapolée en suivant la tendance de l'échelle du test Alouette
(rapport de 1,46 entre les 2 tests)
L'échelle du ROC Orthographe a été
extrapolée par régression linéaire.
Annexe 9 : Statistiques générales sur
l'auto-questionnaire de Barkley
tableau 1 : statistiques générales par item
concernant le comportement au collège
tableau 2 : matrice de corrélations entre les items.
Annexe 10 : Trouble oppositionnel avec provocation
(Mini DSM-IV op.cit. p. 68).
A. Ensemble de comportements négativistes, hostiles ou
provocateurs, persistant pendant au moins 6 mois durant lesquels sont
présentes quatre des manifestations suivantes (ou plus) :
(1) se met souvent en colère
(2) conteste souvent ce que disent les adultes
(3) s'oppose souvent activement ou refuse de se plier aux
demandes ou aux règles des adultes
(4) embête souvent les autres
délibérément
(5) fait souvent porter à autrui la responsabilité
de ses erreurs ou de sa mauvaise conduite
(6) est souvent susceptible ou facilement agacé par les
autres
(7) est souvent fâché et plein de ressentiment
(8) se montre souvent méchant ou vindicatif
NB. On ne considère qu'un critère est rempli que si
le comportement survient plus fréquemment qu'on ne l'observe
habituellement chez des sujets d'âge et de niveau de développement
comparables.
B. La perturbation des conduites entraîne une
altération cliniquement significative du fonctionnement social, scolaire
ou professionnel.
C. Les comportements décrits en A ne surviennent pas
exclusivement au cours d'un Trouble psychotique ou d'un Trouble de l'humeur.
D. Le trouble ne répond pas aux critères du Trouble
des conduites ni, si le sujet est âgé de 18 ans ou plus, à
ceux de la Personnalité antisociale.
Annexe 11 : Questionnaire sur les pratiques
d'autodétermination en classe (Massy et al.,
2014).
Annexe 12 : Composantes de
l'autodétermination dans le questionnaire (Massy et
al., 2014).
Annexe 13 : Autodétermination : position
des classes par rapport à la population d'échantillonnage
(Massy et al., 2014)
Les réponses à chaque question ont
été cotées de 0 à 4.
Ces cotations ont permis d'obtenir des moyennes par niveau de
classe et par composante de l'autodétermination. Les quatre
dernières lignes du tableau concernent l'étude actuelle.
Annexe 14 : Tableau de notation de la vidéo
de la classe de PS
Annexe 15 : Tableau de notation de la vidéo
de la classe de CM
Annexe 16 : Tableau de notation de la vidéo
de la classe de CE
Annexe 17 : synthèse des notations
filmées en classe
Annexe 18 :Engagement de non-plagiat
Annexe 19 : 4ème de
couverture
Master Scolarisation et Besoins Educatifs Particuliers
Spécialité « Accompagner la
scolarité des élèves à besoins éducatifs
particuliers »
Année Scolaire 2014-2015
Nom de l'étudiant : Danièle RUAUD-GILLETTE
Titre du mémoire : Favoriser l'attention des
élèves, le cas particulier des enfants hyperactifs
Résumé du mémoire :
Ce mémoire étudie la fonction cognitive de
l'attention et les troubles qui y sont afférents, notamment le Trouble
du Déficit de l'Attention/Hyperactivité (TDA/H). Les moyens de
capter, développer, et maintenir l'attention des élèves,
les répercussions sur la scolarité des enfants victimes de
troubles de l'attention, les perturbations sur la vie de la classe, les
adaptations pédagogiques les plus pertinentes, sont les objets
d'étude principaux de la recherche. A travers six situations
d'élèves en école primaire et un stage au collège
dans une classe qui accueille des enfants à risque de décrochage,
ce travail témoigne des conséquences lourdes du trouble sur la
scolarité et l'avenir des enfants atteints et de l'impact du
comportement de ces élèves sur le travail des enseignants. Il
montre aussi la nécessité de renforcer le dépistage et les
prises en charge de ces enfants.
Mots clefs : attention, motivation, scolarité,
comportement, TDA/H, décrochage, enseignants.
Title : Promoting students attention, the special case of
ADHD children
Summary :
The dissertation explores the concept of attention and the
connected troubles, especially Attention Deficit Hyperactivity Disorder (ADHD).
Capture, promote and maintain student attention will be considered, as well as
the impact of ADHD children behavior on classrooms and teachers practices.
Through six situations of ADHD children in primary school, and an internship in
a special classroom for students at early school drop-out risks in secondary
school, we confirm the major impact of the trouble for the affected children
regarding their school curriculum and later, their professional future. We
witness that handling with student inattention and poor behavior is an everyday
challenge for teachers, and we conclude the need to improve the screening and
the care of the concerned children.
Key words : attention, motivation, education, behavior,
ADHD, school drop-out, teachers.
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