FACULTÉ DES LETTRES, LANGUES ET SCIENCES HUMAINES
MAILLARD Sarah En vue de l'obtention d'un Master 2
Professionnel Didactique du FLE, Métier du FLE Sous la direction
de Mme Isabelle AUDRAS
2016-2017
Impact d'une sensibilisation à la communication
non-verbale,
la gestuelle et la gestion des agencements didactiques
dans la formation des enseignants débutants de
Français Langue Etrangère
Enquête exploratoire auprès du public
ciblé
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Remerciements
Les remerciements type s'adressent généralement
au tuteur de l'étudiant, à ses proches et aux personnes ayant
acceptés de répondre aux questions, si questions il y a eu. Cette
page ne prendra pas d'autres directions : le présent mémoire est
le fruit du travail conjoint de Mme Audras, ma tutrice, sans les
précieux conseils de qui ce travail n'aurait pu aboutir. Elle a su
trouver les mots justes pour répondre à mes questions.
A mes proches qui ont eu la patience de relire mes erreurs, de
me soutenir dans les périodes de difficultés, de stress, de
doute, de colère, de désespoir, je dis merci également.
C'est sur vos épaules que j'ai pu me reposer : sans votre confiance en
moi, rien n'aurait été possible. A Capucine, à Caroline,
à Emilie, Marine, Thomas, Nicolas... Et aux autres que cette page serait
beaucoup trop courte pour nommer, merci.
Aux étudiants qui ont pris part à cette
étude, qui ont répondu à mes longues questions et ont fait
le déplacement pour venir me voir, je dis merci également : la
curiosité et la bienveillance dont vous avez fait preuve sont des
qualités qui, je l'espère, vous suivrons tout au long de votre
vie. Je vous souhaite le meilleur !
A mon conjoint, enfin, qui a subit mes facéties, m'a
apporté une assistance technique plus que nécessaire dans les
moments de rage against the machine : faze up !
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Sommaire
Sommaire 2
Introduction 5
Raisonnement autour du sujet 5
Problématique du mémoire 7
Structure du dossier 9
Cadre Théorique 11
Le principe de la communication 12
Communication « primitive » : émetteur,
récepteur, canal, code 12
La communication non-verbale 15
Les axiomes de la communication non verbale 15
Les types de communication non verbale 17
Le paradoxe de la communication 19
Le non verbal dans l'enseignement 21
Conclusion 21
Les gestes dans l'enseignement 23
Catégorisation des gestes 23
L'analyse Kinétique 24
Typologie des gestes 25
La gestuelle comme pratique de transmission 28
Le geste, formateur du langage 28
Le geste comme renfort à l'enseignement 29
Conclusion 30
L'Espace et le corps 32
Le contexte de la salle de classe 32
La distance entre les corps 34
Les agencements didactiques 35
Conclusion 38
Représentations sociales et pratiques enseignantes 38
Les représentations sociales 39
Représentations en didactique des langues et formation
enseignante 40
Formation et évolution des pratiques professionnelles
42
Protocole de Recherche 45
Problématique et hypothèses 45
Méthodologie de recherche 46
Questionnaire 47
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Module de formation 47
Entretien semi-directif 47
Présentation du corpus 49
Public 49
Questionnaire 50
Réalisation de la grille 50
Collecte des données 50
Module de formation 51
Réalisation du module 51
Enjeu et retour critique 52
Entretiens 53
Réalisation de la grille 53
Conduite des entretiens 53
Analyse du corpus 55
Fiabilité des données 55
Formation suivie 55
Sur la communication 58
Sur la gestion de l'espace 63
Sur la cohérence 66
Vers une proposition d'interprétation d'autres
éléments verbaux 67
Interactions sociales 67
Formation par illustration 69
Discussion Finale 71
Discussion sur la méthode 71
Méthode de travail et rédaction 71
Menée de la recherche 72
Discussion sur les résultats 73
Présentation des résultats 73
Propositions 74
Bibliographie 76
Annexes 83
Grille des questionnaires 83
Fiche du module 87
Module de formation 87
Grille des entretiens semi-guidés 90
Transcription Entretien 1 91
Transcription Entretien 2 97
Transcription Entretien 3 100
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I. Introduction
A. Raisonnement autour du sujet
On ne part jamais de rien lorsque l'on s'investit dans un
travail comme celui demandé par la rédaction d'un mémoire
: on part de son expérience, de son vécu, de ses
affinités. On tend l'oreille, on fait preuve de curiosité. Le
présent travail est le fruit d'une réflexion issu de
l'expérience personnelle des rédacteurs : j'ai été
amenée à travailler beaucoup au contact d'adolescents, dans le
milieu scolaire ou dans le milieu associatif. Mon expérience
d'assistante d'éducation m'a permis d'avoir une relation
privilégiée avec ces jeunes. Ce rôle, qui demandait
d'être un intermédiaire entre l'équipe pédagogique
et les jeunes, se doublait d'une dimension éducative : les jeunes
manquent parfois de repère, d'adulte relai, et leurs questions sont
nombreuses. On peut facilement aborder avec eux et les faire parler sur des
sujets qu'ils vivent au quotidien : leur vie privée, l'école,
l'avenir... On peut discuter avec eux de leur point de vue (et ils sont heureux
qu'on leur demande de communiquer leur opinion), leur ressenti, leur
expérience....
En tant qu'étudiante en didactique, leur vécu
direct de la vie dans la salle de classe, et la facilité de
communication possible en raison de mon rôle, sont une occasion
inespérée d'obtenir des témoignages pertinents du public
auquel s'adresse, en partie, mon travail.
Lorsque l'on évoque la salle de classe, et les cours de
manière générale, de nombreux thèmes reviennent :
les devoirs, le contenu des programmes, les bons et les mauvais enseignants, la
motivation... Un sujet, en l'occurrence, faisait écho à ma propre
expérience
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d'élève et mes propres constatations
d'enseignante : l'agacement lié à l'immobilité en classe,
le fait de devoir rester assis sur sa chaise, réceptif, pendant huit
heures dans la journée. Il semblait important pour eux de conserver une
dimension mobile dans l'apprentissage, pour les stimuler, les garder
éveiller, conserver leur motivation. J'ai voulu me renseigner sur la
question du corps, de cet aspect avec lequel on semble parfois tant prendre
recul en didactique. Pour citer Jean Marc Carré (1999 : 48-49), «le
corps est souvent le grand absent de la pédagogie. L'enseignement est
décorporalisé».
La première partie de mon travail de recherche a
été de m'intéresser à la place du corps des
apprenants dans la salle de classe. Il me semblait évident que le corps
était relégué à un rôle figuratif, où
la place la plus importante était laissée à la voix et
à l'esprit. Je voulais trouver une manière de renouer les
activités de classe et le mouvement pour encourager la motivation et
l'investissement des apprenants, en conciliant les approches et les
méthodes d'enseignement-apprentissage et les travaux sur la
théâtralité que j'avais pu lire. Ces travaux
s'intéressaient principalement à la
théâtralité des enseignants, et le parallèle
possible entre la salle de classe et la scène (l'improvisation, gestion
de la parole et du corps...)
Mon goût pour l'ingénierie de formation, et un
changement d'axe de travail, m'ont encouragée à diriger ma
réflexion vers le haut au lieu de vers le bas : au lieu de me concentrer
sur la mise en place d'activités redonnant sa place au corps, j'ai
préféré sensibiliser les enseignants dans leur cursus,
dès leur formation, au corps, aux gestes... à tout ce domaine
non-palpable qu'est la communication non-verbale, la gestuelle et aux espaces,
afin de les laisser d'eux-même mettre en place des activités qui
prendraient en compte, dans une certaine mesure, les notions abordées,
mais également pour leur donner des clefs, si c'est possible, de gestion
de classe.
Les recherches théoriques menées m'ont permis de
me concentrer sur le contenu de la formation des enseignants de français
langue étrangère (FLE), et j'ai fait le constat d'un manque dans
ma formation. Ce manque, loin d'être un manque grave et astreignant,
était l'occasion de tester sur mes camarades de première
année de Master si une sensibilisation aux concepts découverts
pouvaient avoir une influence bénéfique sur leur pratique, et
mener, à
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terme peut-être, à la mise en place
d'activités qui prendraient en compte le corps des apprenants.
Cela avait du sens à mes yeux : cette sensibilisation
permet un travail de fond et une compréhension des mécanismes en
place, elle permettrait aux enseignants de travailler leurs propres
activités, poser un regard nouveau sur la richesse de la salle de
classe, une préparation qui se tiendrait en amont de l'expérience
acquise dans la salle de classe. Tout cela exige donc un travail sur les
représentations des enseignants.
On ne pourra nier qu'au delà de l'expérience
acquise sur le terrain, la formation des enseignants, qu'il s'agisse
d'enseignants de FLE ou d'autres matières, est un élément
fondamental : elle permet de sensibiliser les futurs praticiens à des
situations de classe, attirer leur attention sur des éléments
implicites importants à prendre en compte, opérer un changement
sur la manière de concevoir les pratiques...
De ce constat, l'idée d'un travail autour de la
formation des enseignants m'apparaît évidente : on peut aborder
tous les concepts et les théories du monde, mais
déconnectés de la réalité du corps, de la
réalité de la salle de classe, ces concepts sont difficiles
à mettre en place.
Or, parler du corps est délicat, nos tendances à
conceptualiser, à rendre abstrait... provoquent parfois un
éloignement de la réalité concrète. De plus,
obtenir des informations sur le contenu des cursus peut se réveler aussi
difficile : le fonctionnement particulier des universités va du bas vers
le haut, elles n'obéissent pas à des bulletins officiels
distribués par les Institutions, elles proposent leurs propres modules
et rendent compte de ce qu'elles font. Les objectifs fixés, bien qu'ils
semblent se rejoindre lorsque l'on communique avec des camarades
étudiant dans d'autres académies ou universités, ne sont
pas imposés par une instance de contrôle, ce qui rend les
recherches sur le contenu de la formation des enseignants de Français
Langue Etrangère plus délicate.
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B. Problématique du mémoire
Le contenu de ma formation proposait une exposition pertinente
des différentes méthodologies et approches d'enseignement du
Français Langue Etrangère. Cette exposition permet non seulement
de comprendre la lente évolution des techniques d'enseignement et par la
même la pertinence de la Recherche en Science de l'Éducation, mais
également de nous permettre de proposer et animer des cours modernes,
dynamiques, attractifs pour les apprenants : les apprenants ne sont plus
considérés, comme dans la méthodologie traditionnelle,
comme des «réceptacles» à «remplir de
savoir», passifs, sous l'autorité de l'enseignant.
Si cette description peut paraître très
caricaturale, elle n'en demeure pas moins mon expérience de
l'enseignement comme élève en France. Etudiante native
française en France, ayant eu une expérience de la
scolarité française, mon modèle d'enseignant, pour la
plupart des matières dont j'ai suivi la formation si ce n'est toutes,
ressemble de manière assez proche à l'enseignant sur son estrade
devant un parterre d'élève, c'est-à-dire une
méthode traditionnelle de l'enseignement. Mes souvenirs de
l'apprentissage de langues étrangères sont malheureusement flous,
mon manque d'intérêt ne m'ayant pas permis de fixer dans ma
mémoire des détails suffisants pour savoir si mes enseignants
suivaient telle ou telle méthodologie.
Aborder ces méthodologies permet de mettre en exergue
un certain décalage entre mon expérience d'élève,
plutôt sujette aux méthodologies traditionnelles dans la salle, et
ma formation d'enseignante de FLE et ses approches et perspectives
d'enseignement-apprentissage résolument modernes.
A partir du constat de cette expérience de la classe
hors du cadre universitaire, et en supposant que l'expérience de mes
camarades de classe ait été la même, comment est-il
possible de mettre en place des activités en classe obéissant aux
critères des approches d'enseignement-apprentissage nouvelles ? La
réponse est évidente : la formation que nous
avons reçue doit répondre à cette
problématique, et elle s'y emploie très bien en grande partie.
Deux semestres de formation peuvent-ils néanmoins effacer une quinzaine
d'années de «carrière» d'élève, bousculer
les préconçus développés autour de «la
pratique» à avoir en classe ? Cela n'est pas mon opinion.
Pourquoi ? Je reprendrai le constat fait
précédemment, celui qu'un «manque» dans la formation
des futurs enseignants de FLE, notamment vis à vis
d'éléments contenus dans les approches qui sont peu
abordés en cours. Si nous pouvons supposer que ses
éléments sont censés apparaître plus tard dans la
pratique des enseignants, au fur et à mesure que leur expérience
grandie, il semble qu'une sensibilisation dès la formation puisse
être d'un grand bénéfice.
Nous retrouvons ainsi trois éléments qui
semblent être un frein à la mise en place
d'activités centrées autour du corps et de l'espace
dans la classe de langue :
- l'expérience d'élève que
l'étudiant-futur enseignant a ;
- les possibles habitudes d'enseignement que l'enseignant a pris
;
- un manque possible dans la formation.
En prenant en compte ces éléments, ce
mémoire s'intéresse plutôt à un public d'enseignants
en formation, ayant peu d'expérience dans l'enseignement. Nous nous
intéressons également aux objets présents dans les
approches étudiées à l'Université, dont la
communication non-verbale, la gestuelle et la gestion de l'espace. Notre
problématique est donc la suivante : De quelle façon une
initiation au concept de la communication non-verbale, de la gestuelle et de la
gestion de l'espace influence-t-elle la pratique des enseignants
débutants de Français Langue Etrangère ?
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C. Structure du dossier
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Répondre à cette problématique implique
de poser de manière claire ce que nous entendons par «communication
non-verbale» et «gestuelle» et «espace». Etant
donné que nous travaillerons aussi sur les pratiques des enseignants, il
semble important d'aborder la question des représentations, et plus
précisément les représentations en didactique des langues
étrangères. Nous présenterons dans une première
partie l'ensemble des concepts et notions que nous estimons reliées au
sujet, ou suffisamment importantes, en les étayant d'exemples de travaux
et d'études réalisés qui illustrent notre propos. Nous
définirons également l'environnement dans lequel ces concepts
tiennent lieu.
Une fois le cadre théorique de cette étude
posée, nous aborderons la question de notre protocole de recherche, en y
ré-expliquant notre problématique et en présentant nos
hypothèses de travail. Nous présenterons ensuite notre corpus de
travail avant d'en proposer une analyse. Nous conclurons le présent
document par une discussion en deux parties, l'une effectuant un retour
critique sur notre méthode de travail ; l'autre abordant la question des
résultats.
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II. Cadre Théorique
S'intéresser au silence et au corps dans le contexte de
la classe de langue peut sembler un peu paradoxal : la classe est un lieu de
vie, d`échange, où les connaissances sont verbalisées, les
informations échangées, les savoirs transmis. C'est, semble-t-il
intuitivement, le lieu de la parole et de l'esprit. Jean Marc Carré
(1999 : 48-49) attire l'attention sur cette
«décorporalisation» dans la salle de classe : nous souhaitons
ici montrer le lien entre l'apprentissage et les silences, entre
l'éducation et le corps.
Le cadre théorique de ce mémoire s'articulera
pour cette raison autour de plusieurs axes principaux : la communication, la
gestuelle, l'espace didactique et les représentations. Cette
conceptualisation mènera à la formulation d'une hypothèse
de recherche.
Ce cadre théorique s'appuie en grande partie sur les
travaux de linguistes ou de chercheurs en communication, et plus
particulièrement sur la question de l'interaction, qui est un
élément important des échanges en salle de classe : les
interactions permettent la socialisation et permettent le développement
cognitif (Vygotsky, 1978). Nous nous concentrerons notamment sur les recherches
de Shannon (1948, 1949), Watzlawick (1967), Bateson (1980), mais
également d'anthropologues comme Hall (1966). Nous nous appuierons
également sur les travaux de chercheurs en didactique comme Fabre (2015)
et Forest (2005), qui abordent également la question de la gestion du
corps et de la communication non verbale dans la salle de classe, et tenterons
de proposer des définitions claires des termes que nous utilisons dans
notre problématique.
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A. Le principe de la communication
1. Communication « primitive
»: émetteur, récepteur, canal,
code
La classe - qui est le lieu de notre étude et sur
laquelle nous nous arrêterons plus loin -, en temps que lieu
d'interaction, induit un environnement social : nous supposons que toute
interaction réalisée dans un environnement social implique une
situation de communication dont plusieurs modèles de description
existent : nous nous efforcerons de décrire ici ces modèles et
retenir celui qui me paraît le plus pertinent avec notre sujet, mais
également le plus complet.
Le sujet de cette étude nous a permis de nous rappeler
nos études de linguistique, suivies au cours de notre formation, et de
la proposition faite dans les travaux de Benveniste (1966) sur la situation de
communication où celle-ci suppose trois éléments
(variables, en fonction du contexte, du type de communication...) : un
émetteur, un interlocuteur et un message. L'émetteur et le
récepteur, dans ce cas, sont des êtres vivants, acteurs dans un
environnement social et culturel.
Notre objectif ici n'est pas de définir la
communication comme sujet d'étude en science du langage : nous en
garderons la définition du Dictionnaire de Linguistique et des Sciences
du Langages de Dubois & Mathée (2001) qui la définissent en
« le fait qu'une information [soit] transmise d'un point à un autre
(lieu ou personne). Le transfert de cette information est fait au moyen d'un
message qui a reçu une certaine forme, qui a été
codé [...] la transformation de message sensible et concret en un
système de signes ou de code, dont la caractéristique essentielle
est d'être une convention préétablie, systématique
et catégorique. »
Afin de mieux appréhender ce concept de l'interaction,
il convient peut-être en premier lieu d'adopter une approche historique
de la communication comme sujet d'étude, et les premiers travaux (qui
nous intéressent car ils définissent de quelle manière
nous échangeons,
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interagissons avec « l'autre ») en la matière
remontent à la moitié du XXième siècle avec Claude
Shannon (1948, 1949) et Warren Weaver. Considéré comme le
père du binaire, Shannon met en lumière, dans ces travaux en
informatique, l'importance de la communication dans un système. Il tente
de théoriser le processus de communication lors de ses recherches en
informatique, ce qui induit la réduction du processus de communication
de la manière suivante :
Figure 1 : Modèle de Shannon et Weaver (1948). Ce
schéma propose une explication de la communication dans un
système
informatique (réalisé depuis le texte).
Ainsi, dans la situation proposée par Shannon (fig. 1),
la source émet un message qui est transmis à l'émetteur.
Celui-ci le code et le transmet au récepteur par un canal. Le canal peut
être codé. Le récepteur décode, interprète le
message, et le transmet au destinataire, phénomène
également observé dans la salle de classe entre les apprenants et
les enseignants. On peut néanmoins noter, hors du cadre de ce
mémoire, l'effort qu'a eu le chercheur, au long de sa vie, de
détacher la création de ce modèle de toute autre
volonté que celle de théoriser le renseignement militaire.
Pourtant, son analyse est juste, et peut être considérée,
dans l'entreprise qu'est la définition d'un processus aussi complexe que
la communication, comme une première pierre nécessaire aux
études menées par la suite, ou tout du moins comme une
étape importante pour notre compréhension dans le présent
document.
Des chercheurs tels que Jakobson (1963) ont repris le
même type de schéma en l'adaptant aux interactions humaines, ce
qui nous intéresse grandement dans le contexte de la salle de classe :
destinateur, destinataire, message, canal et code.
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Figure 2 : Modèle de Jakobson (1960), qui
représente le processus de communication.
Dans ce modèle, l'émetteur transmet un message
au récepteur, via un canal particulier. Ce message est, tout comme dans
le modèle de Shannon, codé. L'ensemble dépend d'un
référent qui permet une attache sémantique.
De fait, ce modèle bien que rudimentaire - ou primitif
dans le sens où il a été l'un des premiers modèles
- reste pertinent. On peut rebaptiser l'émetteur, ou le
récepteur, ou le
1
message, cette composante triple reste intuitivement
pertinente, et les éléments de codification ou de médium
de communication trouvent également leur place.
Pourtant, on ne peut nier une certaine approche
mécanique, rigide, de la communication, et une mise en avant partielle
de la composante linguistique. Or, nous concevons ici la communication comme un
processus qui n'est pas l'apanage exclusif du verbal. Pour revenir aux
définitions présentées, la facilité - ou
peut-être l'ignorance - nous feraient oublier que la communication entre
les deux « sujets » sociaux que sont l'émetteur et le
récepteur n'est pas toujours verbale, vocalisée : elle s'effectue
également par les gestes, la posture... éléments que nous
étudierons plus loin dans ce mémoire.
Outre le contrat didactique (Brousseau, 1990 ; Brousseau et
Warfield, 2001) parfois implicite, les gestes, les mouvements, les expressions
du visage... sont autant d'éléments de
1 Si Benveniste a une approche similaire, ces
travaux ne datent que des années 60. Ceux de Shannon datent des
années 50. Mais les travaux de Shannon n'ont été
démilitarisés que dans les années 80, les travaux de
Benveniste, abordés en ouverture de cette partie, bien que
postérieurs, ont été connu « du grand public »
plus tôt que ceux de Shannon.
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communication qui sont, pour le coup, non verbaux. Mais
qu'est-ce exactement que la communication non-verbale ? Nous tenterons de
présenter dans ce présent dossier des éléments qui
la composent et diverses définitions afin de permettre au lecteur une
vue d'ensemble cohérente.
2. La communication non-verbale
Jean-Marc Colletta (2005: 32) précise que « la
langue ne se présente jamais nue mais au contraire habillée du
costume de la voix du locuteur, et du pardessus de ses attitudes, gestes,
mimiques et regards » et les premiers travaux réalisés en ce
sens peuvent être liés à Paul Watzlawick (1967),
théoricien connu entre autres pour ses travaux sur la théorie de
la communication.
En collaboration avec d'autres chercheurs, Beavin et Jackson,
est publiée en 1967 Une logique de la communication qui
s'efforce alors de proposer une axiomatique de la communication, c'est à
dire un ensemble de règles pour la plupart indémontrables, en se
concentrant sur les relations interpersonnelles de la communication.
L'équipe avait à l'esprit également de mettre en
lumière les troubles pathologiques que peuvent impliquer des
problèmes dans cette communication interpersonnelle et parvient à
formuler cinq axiomes de la communication, que je tenterai d'expliquer ici.
a) Les axiomes de la communication non
verbale
- Tout comportement est communication :
Le comportement possède un principe fondamental : il ne
possède pas de contraire. Par conséquent, la non communication
n'existe pas, et donc tout comportement est communication. Le silence,
l'immobilisme, l'inactivité... tout cela a valeur de message. Ce message
peut certes avoir plus de valeur dans des situations particulières, mais
il reste un message pour autant.
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La communication n'est pas un phénomène toujours
conscient : un geste, un mot ou un regard non-intentionnel sont porteur de
sens, que le sens soit compris ou non par le récepteur. Cet axiome pose
très probablement le problème du malentendu, mais ce
problème n'eclipse en aucun cas la valeur de l'axiome proposé par
Watzlawick.
- Contenu et relation :
Le message, dans la communication humaine, transmet
également un contenu, dont l'ordre de présentation est important.
Nous pouvons ici prendre l'exemple d'une recette de cuisine afin de simplifier
notre explication : une étape d'une recette de cuisine repose
(généralement) sur l'étape précédente. Dans
une recette de type : mettez de la farine dans une jatte. Ajouter des oeufs
à votre farine, on ne peut pas ajouter les oeufs sans avoir au
préalable mis la farine dans la jatte. L'ordre est important. Une
nouvelle fois, nous écartons volontairement l'idée du malentendu,
qui n'empêche pas l'échange d'information. Ce type de
hiérarchie (ou « ordre ») se retrouve également en
informatique, où l'ordre des ordres donnés à la machine
est fondamental pour que la machine réalise la commande
exigée.
La relation, quant à elle, peut dépendre du
contexte, comme ce peut être le cas avec une phrase du type « cela
te convient-il » ou « ce n'est pas rouge ! », mais peut
également dépendre d'éléments de communication non
verbale, comme l'expression du visage ou l'accentuation de tel ou tel mot,
aussi appelés paraverbal.
- Ponctuation des séquences de fait :
Une autre des propriétés fondamentales de la
communication est l'interaction entre les partenaires. La communication est un
système circulaire où l'interlocuteur A va s'approprier,
reprendre, reformuler, le message de l'interlocuteur B, qui fera de même
de son côté. En reprenant l'expression de Whorf (1969),
Watzlawick, pour définir ces « moments » où les
interlocuteurs « empruntent » des éléments l'un
à l'autre, utilise le terme de « ponctuation des séquences
de fait » (p.50). Cette ponctuation, qu'elle soit verbale ou non verbale,
peut suivre, selon la psychologie comportementaliste , une séquence
« stimulus-réponse-renforcement » et
2
peut être source de nombreux conflits relationnels.
2 Notamment Watson et Skinner
17/109
- Analogique et digital
Il existe deux types de communication : analogique et
digitale.
La communication digitale passe par le langage verbal. Elle
possède une structure logique, complexe et précise. Dans la
communication verbale, les mots sont des signes abstraits qui obéissent
à la syntaxe et dont le sens est fruit d'une convention
sémantique. En dehors du contexte de communication, les signes ne sont
donc plus porteurs de sens. La communication digitale représente le
contenu du propos.
Par complémentarité, la communication analogique
comprend tous les éléments appartenant à la sphère
du non-verbal, parmi lesquels on recense alors : les mouvements, la voix ainsi
que les autres manifestations non verbales de la communication. C'est dans la
communication analogique que s'expriment les relations entre les individus.
- Symétrique ou complémentaire
Watzlawick donne également des précisions
concernant la nature des échanges communicatifs : la communication est
soit symétrique, soit complémentaire. La relation
symétrique présente une relation d'égalité entre
les participants à la communication. A l'inverse, une relation
complémentaire exprime une différence qui peut être de deux
types : une position haute ou une position basse.
b) Les types de communication non verbale
Lorsque l'on met de côté l'apparat de la voix
dans la communication, que reste-t-il ? Nous avons évoqué dans la
présentation des axiomes de la communication non verbale quelques
éléments de réponses à cette question. Nous pouvons
notamment commencer par évoquer la posture du corps : s'il existe des
informations accessibles pour une « bonne » posture, une posture
d'ouverture, de contact, d'échange, un enseignant assis derrière
son bureau semblera moins dans l'interaction qu'un enseignant debout, en
posture de travail.
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Par ailleurs, cette partie de notre mémoire se
contentera de présenter ce que Guy Barrier (2010 : 81) nomme « les
expressions émotionnelles et les gestes de contact », les deux
ensembles de classification des éléments de la communication non
verbale. Les gestes seront détaillés plus
préciséments dans notre seconde partie car leur richesse nous
intéresse tout particulièrement.
Ainsi, à la posture, nous pouvons ajouter les
expressions du visage, qui sont également des éléments de
la communication non verbale : s'il ne semble pas que les expressions du visage
soient universelles (par exemple les gestes de visage pour répondre oui
ou non diffèrent selon les cultures), Ekman (1971) évoque
quelques universaux, notamment en matière d'émotions
élémentaires (peur, joie, surprise, tristesse, colère et
dégoût).
Parmi les gestes de contact, parfois appelés gestes de
réconfort, on peut nommer le fait de se toucher les cheveux, de se
gratter, manipuler le même objet, les petits tics de nervosité de
certaines personnes... Ces gestes donnent des informations
générales sur l'état d'esprit de la personne et peuvent
être, dans le contexte de la salle de classe, autant
d'éléments à prendre en compte, que ce soit de la part de
l'enseignant ou des apprenants.
Notre précision sur les axiomes de la communication non
verbale nous a également permis d'affirmer que le ton est un
élément de la communication non-verbal : s'il accompagne
généralement un élément verbal, le ton peut rentrer
dans la catégorie du non verbal en cela qu'il ne traduit pas per se
un élément verbal, mais accompagne celui-ci et donne des
indications paraverbales. Son caractère sonore permet de le
repérer facilement.
Pourtant, tous les éléments de la communication
ne sont pas «aussi faciles» à repérer que le ton, ou
les expressions du visage, ou la posture. Des indices plus subtiles existent :
il y a les micro expressions (évoquées également par
Barrier et Ekman), mais leur discrétion ne les rend pas pertinentes pour
notre étude : notre objectif n'est pas de former nos enseignants
à repérer les micro expressions des apprenants, mais simplement
à prendre en compte le paraverbal et le non verbal dans une certaine
mesure, ou au moins avoir conscience de son importance.
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La facilité de repérage des autres
éléments de communication non verbale n'empêche pas pour
autant de possibles problèmes de communication. La partie suivante
veillera à expliquer ce paradoxe majeur.
3. Le paradoxe de la communication
Les travaux réalisés par l'équipe de
Watzlawick émergent en même temps que naissent des courants de
recherche interdisciplinaire qui permettent le développement des
sciences cognitives. Nous nous concentrerons ici sur l'oeuvre de Bateson,
Steps to an Ecology of Mind (1972), notamment en matière de
cybernétique.
La cybernétique, courant de recherche ayant
émergé peu à peu aux alentours des années 50, se
présente comme la théorie de la commande et de la communication,
chez les animaux et les machines. Mais Bateson, dans son ouvrage, applique la
théorie de la cybernétique à un ensemble de concepts,
liés à une problématique psychiatrique. La
cybernétique propose une approche systémique des
éléments en présence : les éléments font
partie d'un ensemble d'organes, regroupés en « types » ou
« fonction élémentaire », obéissant à des
règles d'arrangement particulier.
Elle permet, en outre, de se détacher de l'explication
causale, c'est à dire de l'explication qui suit un enchaînement
logique, linéaire, de cause-conséquence et dont le
résultat peut donc être complètement prédictible en
raison des indices en présence, pour préférer une
explication cybernétique, qui elle se concentre plutôt sur la
question du pourquoi quelque chose d'autre ne s'est pas produit, pourquoi
est-ce cela et pas autre chose. En cybernétique, les
éléments présents ne sont pas des indices mais des
restrictions.
La prise en compte de la cybernétique est
intéressante pour notre présent travail car elle propose une
approche systémique de l'objet d'étude, ce qui est l'un des
objectifs du présent document : en étudiant la salle de classe,
de nombreuses variables apparemment aléatoires doivent être prises
en compte pour le sujet de la communication non-verbale, éléments
que
20/109
nous détaillerons dans la présentation de notre
protocole. Par ailleurs, l'explication cybernétique - c'est à
dire, une explication non causale dans un système - couplée
à une approche stochastique - c'est à dire la quantification de
phénomènes aléatoires - peut être
intéressante et pertinente lorsque l'on étudie la communication
non-verbale dans la salle de classe, en permettant de se concentrer sur une
variable aléatoire (un geste par exemple, que nous détaillerons
plus loin dans notre cadre théorique) et en observer les effets, les
causes... dans la salle de classe, auprès des apprenants.
Au delà d'une aide à l'émergence de la
cybernétique, les travaux de Bateson ont également permis de
donner naissance aux chercheurs dit de l'Ecole de Palo Alto, dont la reprise
des fondements de la cybernétique a permis des études
complètes sur le comportement, et notamment la verbalisation du paradoxe
de la communication. Il obtient en 1952 des fonds pour la mise en place d'une
étude sur le paradoxe de l'abstraction dans la communication, en se
focalisant principalement sur des patients atteints de troubles psychiatriques,
notamment schizophréniques.
Si cette étude se concentre en effet sur des patients
atteints de pathologies psychologiques, les concepts qui y sont
révélés peuvent également s'appliquer à la
salle de classe. : l'école de Palo Alto, s'appuyant sur les travaux de
Watzlawick, sur les travaux d'étudiants en communication et sur la
cybernétique, s'oppose à l'approche trop rigide de la
définition de la communication telle qu'elle peut être
perçue par l'opposition verbal / non verbal (analogique et digitale).
Bateson, et les autres chercheurs, notent une dissonance entre l'expression
verbale des malades et leur « communication corporelle », mettant
ainsi en valeur la notion de « double contrainte » (pp.276-262).
Le principe de la double contrainte s'exprime notamment
lorsque le message verbal et le message non-verbal s'opposent ou ne sont pas
compatibles, ce qui peut arriver dans le contexte de la salle de classe. Cette
opposition peut être de plusieurs ordres différents, notamment par
message direct : « soyez spontanés ! ». Difficile d'être
spontané lorsqu'on nous le demande ! Mais également d'ordre
pictural (opposition message iconographique / message textuel : un panneau de
sens interdit qui précise qu'on peut avancer). Le point sur lequel la
double contrainte prend son intérêt en salle de classe est par le
mutisme qu'elle peut
21/109
être amenée à provoquer, qui clôt
alors la situation de communication. La double contrainte peut aussi s'exprimer
dans d'autres éléments du paraverbal, notamment le ton :
encourager d'une voix trop forte, ou crier des compliments... Elle peut
être également de l'ordre d'un geste utilisé dans un
contexte très différent que son usage habituel, ce qui peut
amener un trouble de compréhension pour l'apprenant.
4. Le non verbal dans l'enseignement
Dans la situation de la salle de classe la posture, les gestes
et le paraverbal sont autant d'éléments du non-verbal que
l'enseignant utilise pour communiquer une information, donner des indications,
exprimer sa satisfaction, transmettre concepts et idées... Être
conscient de la double contrainte, et être conscient de l'importance du
non-verbal dans la salle de classe, semblent être des
éléments importants pour la pratique enseignante.
La question que l'on peut alors se poser est quelle est
exactement l'importance de ce non-verbal dans la salle de classe ? L'article de
Jean-François Moulin (2004 : 33) propose une théorie
intéressante : « les comportements non verbaux du maître
participent à l'instauration de son autorité dans la classe et
correspondent à des compétences qui peuvent s'acquérir
». De prime abord, cette hypothèse me semble porter un fond de
vérité : un enseignant confiant, ouvert, conscient de son corps
et maîtrisant les éléments du paraverbal donnera une
impression générale de maîtrise de sa salle de classe et
laissera peu de latence à ses apprenants pour le perturber ou perturber
la classe.
L'hypothèse de Moulin s'appuie sur un constat des
comportements qui « font la différences » dans la «
réussite scolaire », notamment entre les enseignants
débutants et les enseignants expérimentés (qu'il nomme
« experts ») (p.33). Le présent mémoire s'accorde
à penser que cette hypothèse est véridique. Nous pouvons
également poser l'hypothèse que le comportement non verbal de
l'enseignant a une influence sur la qualité de la formation.
22/109
5. Conclusion
Il convient de faire le point sur les concepts ayant
été abordés précédemment et de revenir sur
les définitions établies de manière résumée.
Nous nous accordons ainsi ici à considérer la communication comme
le fait qu'un émetteur transmette à un récepteur un
message codé, par un canal précis. Cette communication se met en
place dans l'environnement de la salle de classe, que nous décrirons
plus précisément plus loin dans notre document.
Ensuite, tout comportement est communication, et cette
communication n'est pas uniquement verbale ; elle peut être non verbale
ou paraverbale. De plus, la communication non verbale obéit à des
lois, ou axiomes, au nombre de cinq. Les médiums de la communication non
verbale sont pluriels et seront détaillés dans la partie suivante
de ce mémoire, notamment la gestuelle : nous pouvons préciser ici
que le ton, les expressions du visage, la posture du corps, sont autant
d'éléments du paraverbal.
Néanmoins, même si tout comportement est
communication, il existe un paradoxe dans cette communication, mis en avant par
les chercheurs de l'Ecole de Palo Alto : il s'agit du principe de la double
contrainte où, pour schématiser, le message transmis peut en
plusieurs points de la « transmission » être mal
interprété (discordance signifiant/compris, ton/geste...)
En ce qui concerne l'importance de la communication non
verbale dans la pratique enseignante, nous garderons à l'esprit
l'hypothèse de Moulin concernant l'importance de la communication non
verbale, notamment concernant les « comportements faisant la
différence, concernant la réussite pédagogique, entre des
enseignants débutants et des enseignants experts » (p.33).
23/109
B. Les gestes dans l'enseignement
Ayant abordé les principes de la communication et leur
lien avec l'enseignement, il semble important, avant d'entrer dans le
détail de la gestuelle, de définir les termes enseigner,
transmettre, former... utilisés dans ce mémoire comme mot-valise.
Nous nous reposerons ici sur les théories du behaviorisme, du
constructivisme et du socioconstructivisme : enseigner, c'est à la fois
transmettre des connaissances et accompagner les apprenants durant le processus
d'acquisition et de construction de ces connaissances. Les actes «
enseignement » et « apprentissage » sont pensés
conjointement tout au long de ce mémoire.
Un accent plus important est mis sur la perception de
l'apprentissage tel que défini par Vygotski (1976) et Bruner (1996),
dans le sens où la culture a une grande place dans l'enseignement : la
culture forme l'esprit. Par ailleurs, le développement va du social
à l'individuel : l'interaction semble donc importante pour le
développement personnel. Dans cette perspective, la communication est
fondamentale, et le rôle de l'enseignant est changeant.
La communication dans la salle de classe ne passe pas
uniquement par le vecteur de la voix, comme nous l'avons évoqué
précédemment : les gestes de l'enseignant sont tout aussi
importants que ses mots. Et, tout comme les mots que l'on peut
catégoriser, selon des classes grammaticales, des fonctions... des
chercheurs (Birdwhistell (1952, 1970), Tellier & Stam (2002), Ekman (1971,
2004)) se sont efforcés de catégoriser ses gestes. La partie
suivante tentera de présenter ces catégorisations, et leur emploi
dans l'enseignement, dans le contexte de la salle de classe.
24/109
1. Catégorisation des gestes
a) L'analyse Kinétique
Dès les années 50, l'anthropologue
américain Birdwhistell est intéressé par l'étude de
la façon dont les gens communiquent par les gestes, la posture et les
mouvements. Dans son ouvrage de 1970, Kinesics and Context: Essays on Body
Motion Communication, reprenant les idées de ses premiers travaux
parus en 1952, Introduction to Kinesics: An Annotation System for Analysis
of Body Motion and Gesture, il avance ainsi l'idée que «
body motion is a learned form of communication, which is patterned within a
culture and which can be broken down into an ordered system of isolable
elements» (introduction, p. XI). Si le concept de communication par
le corps est un sujet connu du grand public dès la fin des années
60, il aura fallu pour y parvenir que Birdwhistell réalise un gros
travail d'analyse de vidéos et de photos de personnes en contexte social
- c'est à dire en situation d'interaction - et d'analyse de leurs
mouvements afin de mettre en avant des éléments de communication
habituellement peu clairs. Il avance ainsi l'idée que tous les
mouvements sont « porteurs de sens » et que le comportement
non-verbal peut s'analyser comme la grammaire.
Dans la décomposition des gestes proposée par
Birdwhistell, qui a pour but la création d'un système de gestes,
la plus petite unité possible est le kinème (qui
rappelle ainsi le morphème en linguistique). Les variations d'un
kinème sont appelées allokines et kines . Ces
variations sont de l'ordre de l'intensité, de la fréquence, de
l'étendue ou de la durée du geste. Mais ces structures plus
complexes existent : on retrouve ensuite, toujours en parallèle avec la
linguistique, le kinémorphème (qui rappelle ainsi le
morphème), puis les constructions kino-morphiques plus complexes. Les
kinèmes forment la classe d'analyse microkinésique, et les
secondes strates, la classe d'analyse macrokinésique. Je propose ainsi
le schéma ci-dessous afin de pouvoir visualiser cette classification.
Figure 3. Schéma de la classification des
kinèmes
Bien que Birdwhistell précise que les geste sont issus
de schéma culturel (« which is patterned within a culture
» p.XII), il est à noter que ce système de gestes ne
prend pas en compte des facteurs d'universalité dans le geste (geste qui
serait propre à toutes les cultures). Ce sont les travaux de Paul Ekman,
qui travaille sur le lien entre les émotions et les expressions du
visage, qui amènent l'idée de l'universalité du geste
(1971, 2004), notamment en se référant aux expressions du visage
(les froncements de sourcils...), mais ces travaux sont peu concluants.
De fait, le lien entre geste et milieu culturel
spécifique apparaît de nombreuses fois dans les travaux de
Birdwhistell. Il évoque ainsi le fait que les les gestes - ou morphes -
sont liés au contexte (nous reviendrons sur cette notion de contexte
avec Hall, 1966) : on les emploie rarement isolément. De plus, ils sont
caractérisés par leur facilité à être
mémorisé facilement, ce qui induit une transmission
facilitée dans un milieu donné. Ainsi, la configuration de ces
morphes semble être liée à un contexte spécifique,
culturellement chargés, où les liens entre les émetteurs /
récepteurs doivent être pris en compte.
b) Typologie des gestes
En 1992, McNeill propose une typologie de ces gestes,
où il statue que « gestures and language are one system
» (p.2) inspirée des travaux de Kendon (1972, 1980, 2000, 2004),
25/109
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dans lesquels il fait la découverte du lien essentiel
entre le discours parlé et les mouvements. L'intérêt de
McNeill est dans la classification, l'organisation, et non dans la
découverte.
Kendon définit le concept de gestes porteurs de sens
comme un continuum ou spectre, allant de la gesticulation («
gesticulations » en anglais) à la langue des signes
(« sign language »), puis de la gestuelle («
language like gesture »), de la pantomime (« pantomime
») et enfin de l'emblème (« emblem »).
Cette classification fera cas d'école (McNeill, 1992, 2000, 2005 ;
Singleton et all, 1995). Ces gestes peuvent s'analyser selon quatre axes de
continuum, apportés de la manière suivante (Kendon, 2004, Boutet,
2010) :
1) un axe de relation à la parole (présence
obligatoire ? absence obligatoire) où l'on voit décroître
la présence de la parole plus l'on se rapproche de la langue
signée ;
2) un axe de relation aux propriétés
linguistiques (absence ? présence) où l'on observe l'apparition
de propriétés linguistiques plus l'on se rapproche de la langue
signée, puisqu'elle est pourvue d'une structure définie de
manière conventionnelle ;
3) un axe de relation à la convention. Cette notion de
convention est plus présente dans la langue des signes ;
4) un axe de relation à la sémiose, c'est
à dire le sens. Les gestes de la langue signée étant
établie par convention sont fractionnés, là où les
gestes de la gesticulation peuvent être moins porteur de sens, ou porter
un sens plus global, général, clair uniquement pour
l'émetteur.
Nous reprendrons ici le schéma proposé par
Boutet et All. afin de permettre une meilleure compréhension de ces
continuums :
Figure 4 : Schéma des 4 continuums comme
proposé par Kendon, d'après Boutet (p.56)
Quant à la typologie des gestes à proprement
parlé, je souhaite retenir la version augmentée proposée
par Tellier et Stam (2010) car issue d'une étude de terrain axée
sur l'enseignement. Tellier travaille en effet à comprendre l'importance
de la gestuelle dans l'enseignement, notamment auprès des enfants
(2006), et son travail de catalogage, en collaboration avec Stam, permet une
cartographie plus exacte des gestes de l'enseignement. Les gesticulations,
gestuelles, pantomimes et emblèmes s'organisent donc, d'après
Tellier et Stam, de la manière suivante :
Gestes déictiques
|
gestes qui servent à pointer, montrer du doigt
|
Gestes iconiques
|
gestes qui servent à illustrer un concept concret
|
Gestes
métaphoriques
|
gestes illustratifs d'un concept abstrait
|
Battements
|
gestes rythmant la parole, sans contenir de sens
|
Emblèmes
|
gestes culturels, conventionnels
|
Butterworth
|
gestes de recherches lexicales
|
Geste interactifs
|
gestes adressés à un interlocuteur pour la gestion
de l'interaction
|
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28/109
Gestes avortés
|
gestes esquissés mais non terminés
|
Nous avons également évoqué dans notre
partie sur la communication non verbale les gestes de contact de l'enseignant
envers lui-même que nous citons ici pour signifier que nous avons
conscience de leur existence, mais leur intérêt dans la pratique
enseignante est plus limitée.
Si Tellier et Stam proposent ainsi une catégorisation
des gestes de l'enseignement, la question de la pertinence de ces gestes se
posent : pourquoi sont-ils importants dans l'enseignement ? Quel est leur
rôle exact ? Ont-ils une véritable efficacité ? Afin de
répondre à ces questions, notre prochaine partie traitera de la
gestuelle comme pratique de transmission.
2. La gestuelle comme pratique de transmission
Le geste comme pratique de transmission est un
élément important de la pratique enseignante dans les approches
actionnelles et communicatives, comme peuvent le montrer les travaux
cités ci-dessus. Il semble évident que le geste seul n'est pas le
seul vecteur de transmission dans la salle de classe ; nous avons abordé
le concept de la communication, et bien que les études concernant la
prosodie dans l'enseignement ne soit pas nombreuses, il semble (Tellier, 2006)
que la répétition mécanique des mots ne permet pas un bon
apprentissage, la tonalité, le découpement et le rythme des mots
pourraient donc jouer un rôle clef. Nous nous accordons donc ici à
penser que si le geste est important dans l'enseignement, nous n'oublierons pas
de garder à l'esprit le caractère multimodal de cet enseignement
(Mondada, 2012 ; Jewitt and All, 2001). Afin de mieux comprendre le rôle
du geste dans la pratique de transmission, nous nous intéresserons tout
d'abord à son rôle dans la formation linguistique, puis à
son utilité dans la pratique enseignante.
29/109
a) Le geste, formateur du langage
Le lien entre le parler et la gestuelle a donné
naissance à des hypothèses dans les sciences du langage sur
lesquelles il peut être intéressant de s'arrêter un instant.
Le « Lexical Retrieval Hypothesis » (Alibali, 2000 : 594)
propose l'idée que le geste aide à accéder aux savoirs
lexicaux car il est lié à des connaissances encodées dans
l'espace (Krauss & Al, 2006 : 14). Le geste a donc un rôle clef dans
le processus de communication en donnant «forme» aux
énoncés. Les gestes aident ainsi à accéder aux
savoirs : ils font plus qu'aider à comprendre un message, ils ont un
rôle important pour l'émetteur. En effet, privé de la
possibilité d'utiliser des gestes, des locuteurs montrent parfois avoir
plus de difficultés à répondre à une question
(Frick-Horbury & Guttentag, 1998 : 10).
L'« Information Packaging Hypothesis » (McNeill,
1992) statue quant à elle que le geste aide à former la
pensée, il reflète une image mentale qui est activée au
moment où le geste est réalisé, geste ayant ainsi un
rôle important dans la planification conceptuelle du message à
verbaliser. Lorsque l'on demande à des participants de décrire un
chemin et un mouvement ( « a path and a motion » ) en un
geste et une phrase puis en deux gestes et une phrase, la richesse verbale des
participants augmente lorsqu'ils n'ont à utiliser qu'un seul geste (Kita
& Mol, 2012).
Par ailleurs, le lien entre geste et parler est
renforcé par l'étude de Marianne Gullberg (2008) où les
gestes utilisés par des apprenants d'une L2 changent de manière
systématique à mesure que s'enrichit le vocabulaire («
Overall, gestures change systematically with semantic development both in
children and adults » p.117), étude pertinente pour le sujet
de ce mémoire.
En établissant que le geste est important pour la
production verbale, et que les gestes changent au fur et à mesure
qu'augmente le « niveau » de langue parlé par un locuteur
apprenant une L2, nous ne déterminons pas pour autant que le geste est
un outil de transmission important dans la classe. Néanmoins, attester
de son importance dans la communication verbale est une première
étape.
30/109
b) Le geste comme renfort à
l'enseignement
Il ne sera pas question, dans cette sous-partie, de proposer
des idées d'utilisation du geste dans l'enseignement, mais seulement de
poser le constat de l'usage et de l'efficacité du geste dans
l'enseignement. En effet, les gestes permettent de lier le social et le
psychologique (Vygotsky, 1978), et peuvent être perçus comme des
outils efficaces en ce sens, notamment dans l`environnement de la salle de
classe.
De plus, ils peuvent être utilisés par
l'enseignant afin de s'assurer de la compréhension qu'un apprenant a
d'un sujet (Corts et Pollio, 1999). Mais leur usage ne se limite pas uniquement
aux enseignants : ils peuvent également être utilisés par
les apprenants comme des ressources supplémentaires pour comprendre
l'enseignant (Corts et Pollio, 1999).
En effet, il peut sembler important de noter que dans
l'enseignement, les gestes iconiques réalisés par l'enseignant
sont plus faciles à s'approprier pour les apprenants que la langue (Roth
& Lawless, 2002), car ils renvoient à des images et ne
nécessitent pas de traduction : ils sont encodés dans l'espace,
ce qui par ailleurs renvoie à la Lexical Retrieval Hypothesis
présentée dans ma partie précédente.
On peut également noter que des études
(Goldin-Meadow, Kim & Singer, 1999) tendent à montrer que les
enfants sont moins susceptibles de répéter un
énoncé s'il n'est pas accompagné de gestes, et sont encore
moins susceptibles de répéter cet énoncé s'il est
accompagné d'un geste semblant mal adapté. Cela ne se remarque
pas uniquement chez les enfants (LeBaron et Streeck, 2000 ; Roth, 2001 ;
Alibali, Kita & Young, 2000) : les étudiants tendent à
réutiliser les gestes utilisés par leurs enseignants.
Les gestes sont importants pour transmettre des idées
ou expliciter des concepts comme c'est le cas dans l'enseignement des sciences
(Roth, 2001 ; Goldin-Meadow, Nusbaum & Kelly, 2001), mais dans
l'enseignement des langues, les geste sont également un renfort bienvenu
pour le formateur ou l'enseignant (Goldin-Meadow & Alibali, 2013).
31/109
La thèse de Marion Tellier (2006 : 2), issue des
recherches de Cicurel (2005), « prend pour hypothèse centrale que
le geste pédagogique n'est pas un artifice superflu mais bien une
pratique de transmission », pratique d'autant importante pour
l'enseignement-apprentissage des langues étrangères. Par
ailleurs, la gestuelle varie au fur et à mesure de la progression de
l'apprentissage d'une LE (Özyürel, Kita & Allen, 2005 ; Gullberg,
2008)
3. Conclusion
Les geste semblent former un langage à part
entière qui, comme la langue verbale, peut être
catégorisé, découpé, classé,
étiqueté... Mais au delà de cette simple discrimination du
geste et de la définition qui en est faite, nous avons voulu ici
démontrer que le geste dans l'enseignement n'est pas qu'une pratique
accidentelle, issue des maniérismes ou des habitudes des formateurs,
mais peut-être un outil à part entière dans la formation
des apprenants, outil d'autant plus important que preuve est faite de son
importance sur l'apprentissage des apprenants : les apprenants
réutilisent les gestes de leur formateur, ils s'en servent comme d'une
ressource supplémentaire, ils leur permettent d'accéder au
sens....
Cette importance du geste dans la pratique de transmission est
l'un des point central de ce mémoire, mais nous verrons dans cette
dernière partie qu'un geste seul n'a pas de sens, même dans la
salle de classe, même en gardant à l'esprit la typologie des
gestes, hors de son contexte.
32/109
C. L'Espace et le corps
Ce cadre théorique a longuement donné des
précisions sur les éléments du non-verbal, tels que les
expressions du visage, la posture.. le paraverbal, tel que l'intonation, les
latences... Il a également permis de présenter une
catégorisation des gestes et leur utilisation dans l'enseignement. Les
précisions apportées lors de notre partie sur la double
contrainte ont permis d'apporter également des éléments
soulignant l'importance du contexte dans la mise en place de ces
éléments non verbaux. Cette partie veillera à
répéter l'importance du contexte et donner des
éléments de catégorisation d'autres éléments
non-verbaux présents dans la salle de classe, notamment en terme de
mobilier, et de porter un regard attentif sur la présence du corps et la
prise en compte du corps dans la salle de classe.
1. Le contexte de la salle de classe
Tout au long de ce mémoire, nous avons parlé de
« l'environnement particulier de la salle de classe » sans le
définir ni donner plus de précisions, or, dans le contexte de
l'apprentissage d'une langue étrangère, la salle de classe est un
environnement avec ses spécificités propres : c'est un espace que
l'on peut contrôler.
Il semble évident, dès lors que l'on envisage
les nombreux paramètres à prendre en compte dans l'étude
de la salle de classe dans le cadre de l'apprentissage d'une langue
étrangère, que la salle de classe soit un sujet
étudié dans le domaine de la recherche-action. C'est un lieu de
« pratique exemplaire » (Cicurel, 2002 : 3), dans lequel, dans les
années 60-70, on étudie l'efficacité des nouvelles
approches et méthodes d'enseignement. Portés par le souhait de
valider scientifiquement telle ou telle méthodologie d'enseignement, la
classe « devient alors le lieu d'actualisation de la méthode
dominante » (Cicurel, ibid.), on cherche à y trouver
« la méthode universelle » (Cicurel, ibid.). On peut
trouver des points positifs et des
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points négatifs à cette utilisation de la salle
de classe comme d'un laboratoire, et on pourrait également souligner le
fait que l'observation fausse, de fait, les résultats.
Mais la salle de classe n'est pas qu'un environnement de
pratique exemplaire : c'est aussi et avant tout un lieu de formation, dans
lequel le triptyque apprenant-enseignant-sujet d'étude se retrouve.
Là aussi, la formation comme composante de la salle de classe, c'est
à dire le fait de transmettre ou d'acquérir des connaissances,
des compétences ou des savoirs, a été longuement
étudiée, et on peut citer comme exemple l'utilisation de la
Grille de Flanders (1960), qui, dans la lignée de l'utilisation de la
salle de classe comme lieu de pratique exemplaire, souhaitait cartographier les
« moments de la classe ». Nous gardons de cette conception de la
salle de la classe la notion d'interaction, fondamentale dans l'environnement
que nous concevons ici comme la « salle de classe », et raison pour
laquelle nous avons longuement discuté du principe de la communication
et définit la pratique de formation du point de vue du
socio-constructivisme de Vygotski et Bruner.
La classe est un lieu socialisé (Cicurel, ibid). S'il y
a certes, sous ces interactions, des impératifs (institutionnel,
formatif, ...), et l'interaction sous sa forme collective est de plus en plus
prise en compte. On a notamment pu observer (Mondada, 2012) des
éléments comme les tours de parole, la participation des
apprenants (place, hésitations, marques diverses d'interaction...), la
présence de l'affect dans l'échange (la présence du moi
dans les interventions), des marques de l'activité langagière
(reprise, autocorrection voire correction d'un pair)... Ces interactions ne
font plus uniquement de la classe un lieu de formation ou d'apprentissage, mais
également un lieu de socialisation. Cette socialisation prend
peut-être place sous la direction du formateur, ou de l'enseignant, mais
elle évolue en fonction des individus formant le groupe.
La salle de classe comme lieu d'interaction, subit des
contraintes extérieures variées : Hall (1966) dans La
Dimension Cachée précise que la culture, pour nous, ici, la
culture des apprenants est un facteur important à prendre en
considération dans les interactions. Elle conditionne des
éléments tels que la distance entre les corps - sur laquelle nous
nous
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arrêterons plus tard - mais nous apporte
également des éléments intéressants de gestion de
l'espace. Nous veillerons à définir ces éléments
dans nos parties suivantes.
2. La distance entre les corps
L'enseignant a de nombreux rôles dans la salle de
classe, notamment auprès des apprenants. Ce contact constant avec les
apprenants peut être l'objet de moments de tension, notamment lorsque des
éléments méconnus, d'ordre culturel par exemple, existe :
nous nous pencherons ici sur la notion d'espace entre les corps.
La prise en compte du corps dans l'enseignement est un
élément important du présent mémoire. Hall
précise que les distances entre les corps varient selon les cultures :
des personnes issues de culture nordique, ou japonaise, se toucheront peu en
situation d'interaction, alors que des personnes d'origine arabe se toucheront
plus souvent. Il faut également noter que la prise en compte de la
culture des apprenants, ou des cultures des apprenants, doit veiller à
ne pas suivre les stéréotypes comme ceux présents dans les
travaux de Hall. SiLa Dimension Cachée de Hall met surtout en
avant les besoins architecturaux liés à la proxémie, il
est indéniable que cet élément de communication
interpersonnelle est un sujet d'étude intéressant dans le cas de
l'enseignement-apprentissage, et plus particulièrement des langues.
Appliquée à la sociologie, et plus particulièrement au
comportement organisationnel, la proximité physique est importante pour
les travaux en collaboration, et le concept a été repris dans des
études plus récentes attraits à la communication non
verbale en cours, c'est à dire la proxémie d'apprentissage (terme
issu des travaux de Sofiane Issaadi et Alain Jaillet, 2017).
Ces travaux mettent par exemple en lumière le lien
entre proximité entre l'enseignant et les apprenants et autonomie dans
le travail réalisé : « Plus il est loin de l'espace de
l'enseignant, et/ou moins la table est accessible, plus les étudiants
sont en situation d'échanges, d'élaboration, et d'autonomie par
rapport aux consignes. A l'inverse, plus on en est proche, moins on est
interactif avec les autres, et moins on est autonome, c'est à dire
que
35/109
l'on respecte davantage les consignes de l'enseignant. »
Les apprenants les plus proches semblent ainsi vouloir se protéger de
l'enseignant.
Au delà des déplacements, la proxémie
sous-tend aussi les contacts physiques. Quid du toucher direct dans le contexte
de la formation ? Nous avons abordé la question des gestes comme des
éléments de transmission, des éléments formateurs
du langage, mais le geste dans la formation peut également être
une source de réconfort pour les apprenants (Barrière Boizumault
et Cogérino, 2010). Le document source de l'affirmation
précédente est issue de travaux sur les enseignants d'EPS, dont
la pratique est centrée autour du corps : le tabou culturel autour du
toucher, ainsi que les croyances et les peurs des enseignants, en rendent
l'encouragement délicat et peu de littérature sur le toucher en
classe de langue existe.
Pourtant, il s'agit bien là d'un toucher relationnel de
réconfort, et non pas d'une intrusion dans l'espace intime des
apprenants : une main sur l'épaule, une tape sur le dos... Ce type de
gestes dans le milieu de la classe peut être un vecteur de
transmission... ou de blocage dans l'apprentissage. Cette remarque s'appuie sur
le constat de Felouzis qui statue que la réussite de
l'élève n'est pas uniquement raison de l'institution, mais
également une question de relations apprenants / enseignants, relation
qui peut bénéficier d'une certaine relation « physique
».
Par ailleurs, la proxémie que Hall définit comme
« l'ensemble des observations et
3
théories que l'Homme fait de l'espace en tant que
produit culturel spécifique » (Hall, 1966 : 13), prend sa valeur en
situation d'interaction (donc entre des personnes). Il existe, dans cet espace
personnel, plusieurs sous-espaces : intime, personnel, social et public. Nous
choisissons, en fonction des personnes, de partager ou non notre espace. Une
intrusion dans un sous-espace par une personne non-autorisée est une
source de malaise (d'où l'importance de la prise en compte de la culture
des apprenants et une attitude prudente vis à vis du toucher
3 A noter que n'ayant pas trouvé de
convention particulière quant à l'utilisation des termes
proxémie et proxémique, j'utiliserai dans tout le présent
document le mot «proxémie» comme un nom commun et
«proxémique» comme un adjectif.
36/109
en formation). Nous pouvons ajouter à ces sous-espace
verticaux un espace supplémentaire horizontal, qui transmet - de
manière simplifiée - l'idée de domination.
3. Les agencements didactiques
Foester (1990 : 81) précise que « toute
tâche pédagogique demande à l'enseignant une
réflexion préalable sur l'organisation spatiale adéquate
à l'interaction verbale recherchée et à la mise en place
de celle-ci ». En nous appuyant sur ses propos et sur l'organisation des
espaces de Hall, nous nous concentrerons tout d'abord sur l'importance de
l'organisation spatiale d'un lieu d'enseignement, puis nous aborderons
l'idée des déplacements aux seins de cet espace.
a) Organisation spatiale
Nous avons abordé précédemment de
manière très succincte l'influence des déplacements de
l'enseignant sur les interactions des apprenants en précisant que plus
l'enseignant est proche d'un groupe d'apprenants, moins les interactions sont
riches (les apprenants semblants ainsi se protéger de la présence
de l'enseignant en gardant le silence). En reprenant le concept de
proxémie de Hall, nous pouvons également préciser qu'il
existe trois catégories d'espace : les espaces à organisation
fixe (dans le cadre de la salle de classe, nous prendrons l'exemple des murs,
du sol, des fenêtres...), les espaces à organisation semi-fixe
(les tables, les chaises...) et enfin, à organisation dynamique ou
informelle, qui concerne ici la distance interpersonnelle.
Dans son analyse proxémique de classes mexicaines,
Anne-Catherine Didier (2014 : 111) met en avant l'importance de la gestion du
mobilier dans une salle de classe : en cas d'absence de variation dans
l'espace, le cours est figé. La mobilité encourage la prise de
parole.
37/109
Pour illustrer cette affirmation, Didier prend l'exemple des
organisations du mobilier et souligne la différence entre des formations
sociofuges, qui encouragent l'isolement des élève entre eux, et
les formations sociopètes, qui encouragent les interactions et les
échanges entre apprenants. Ces deux types de configuration prennent la
forme d'agencement des tables en îlot ou d'agencement en rangées :
les apprenants dans les agencements en îlot peuvent interagir plus
facilement car la configuration-même encourage les échanges,
tandis que les agencements en rangée ont pour objectif d'isoler
l'apprenant et de l'encourager à se concentrer sur l'enseignant.
Par ailleurs, Kozanitis (2005 : 1) précise que les
situations d'apprentissage (dans le cadre de l'approche communicationnelle et,
par extension, les approches « récentes/modernes ») devraient
être « propices au dialogue en vue de provoquer et résoudre
des conflits socio-cognitifs », situation dans laquelle les interactions
devraient être primordiales et où « l'aménagement
physique devrait permettre un apprentissage collectif » (Didier, 2014 :
110). Ces suppositions tendent à être affirmées par
l'analyse proxémique de Didier et permettent de mettre l'accent sur un
point fondamental de ce mémoire : les méthodologies et approches
nouvelles nécessitent une sensibilisation aux concepts
ci-évoqués.
Pourtant, l'organisation spatiale seule ne permet pas
d'encourager les interactions, même si elle est un facteur important.
b) Mobilité
La proxémie de Hall a, comme nous l'avons
montré, sa place dans de nombreux éléments conjoints
à l'action didactique, qui se définit comme « ce que les
individus font dans des lieux (ou institutions) où l'on enseigne et
où l'on apprend » (Sensevy, 2007 : 12-42). La description
proxémique va par conséquent de paire avec la notion de
transition didactique (Forest, 2008), et nous nous appuierons ici sur la
configuration de Forest pour décrire les types de déplacement de
l'enseignant dans la salle de classe.
Il existe tout d'abord les déplacements
pédagogiques, qui sont en relation étroite avec les
activités de cours. Ensuite, il existe les déplacements
non-pédagogiques, qui n'ont pas de
38/109
lien avec les activités et qui sont soit
spontanés, soit contrôlés par l'enseignant. Enfin, la
dernière catégorie de déplacement concerne les
déplacements dits « rituel », qui ont donc un rapport avec les
rituels et les habitudes de l'enseignant. On peut noter parmi ces
déplacements rituels un retour quasi systématique des enseignants
à leur zone de confort.
Si le terme « zone de confort » a surtout une valeur
psychologie, la zone de confort est également « un état
conductuel dans lequel une personne opère dans une relation
d'anxiété-neutre, utilisant une gamme limitée de conduites
afin de produire un niveau de performance steady, en général sans
un sens de risque » (White, 2009 : 3). La « zone de
4
confort » est une sorte de « base », un point
de départ et d'arrivée, par lequel l'enseignant passe. Il peut
s'agir de manière assez commune de la partie entre le bureau et le
tableau, mais les « zones de confort » changent en fonction de
l'organisation de l'espace et des habitudes des enseignants.
4. Conclusion
La catégorisation des espaces et des
déplacements n'a pas qu'un objectif sommatif : il s'agit
également d'étudier les effets des déplacements sur les
apprenants et sur la pratique. Dans notre partie précédente, nous
avons cité les travaux de Sofiane Issaadi et Alain Jaillet, et la
manière dont la proximité de l'enseignant influence la
fréquence des interactions des apprenants. Nous ne pouvons nier que tout
comportement de l'enseignant a une relation étroite avec la transmission
des savoirs aux apprenants. De fait, la sémiose didactique est à
la fois proxémique - dans la gestion de la distance - matérielle
- dans le type de matériel utilisé et dans les agencements
didactiques - mais également langagière. Nous nous sommes ici
concentrés sur les aspects non verbaux de cette sémiose, en
tentant de mettre en exergue le lien entre ces concepts et les approches
nouvelles. Notre partie suivante veillera à articuler toutes les notions
évoquées au cours de ce mémoire avec un
élément fondamental dans la formation et dans la pratique des
enseignants : les représentations.
4 « The comfort zone is a behavioural state within which
a person operates in an anxiety-neutral condition, using a limited set of
behaviours to deliver a steady level of performance, usually without a sense of
risk »
39/109
D. Représentations sociales et pratiques enseignantes
Nous avons longuement discuté de l'interaction, de la
gestuelle, de la culture (des apprenants, de l'enseignant, d'apprentissage ...)
dans ce cadre théorique, et nous avons également souhaité
mettre en relation pratiques enseignantes et approches d'enseignement modernes.
L'objectif de ce mémoire n'est pas atteignable sans un cadrage final
attrait aux représentations et à la formation enseignante. Afin
de présenter de la manière la plus claire possible le concept des
représentations sociales et les éléments importants de la
formation enseignante, nous nous appuierons entre autres sur les travaux de
Moscovici (1961), Jodelet (1985, 1991), Charlier (1989) et Baillauquès
(2001). Nous terminerons enfin par parler de l'évolution des savoirs et
des pratiques professionnelles en nous appuyant sur les travaux de Perrenoud
(2001, 1994), Schön (1983) et Elbaz (1983).
1. Les représentations sociales
Le principe des représentations est introduit à
la fin du XIXème siècle par Emile Durkheim (1912 : 22), qui
donnera alors naissance à la psychologie sociale, discipline capable de
lier le social à l'affectif et au symbolique. Cette idée de
symbolique et d'affectif se retrouve dans notre exposition du sens et à
l'importance de la gestuelle. Durkheim propose une organisation
possédant deux types de représentations : les
représentations collectives et les représentations individuelles
: « La société est une réalité sui generis ;
elle a ses caractères propres qu'on ne retrouve pas, ou qu'on ne
retrouve pas sous la même forme, dans le reste de l'univers. Les
représentations qui l'expriment ont donc un tout autre contenu que les
représentations purement individuelles et l'on peut être
assuré par avance que les premières ajoutent quelque chose aux
secondes ».
40/109
Afin de définir plus précisément ce
qu'est une représentation sociale, je m'arrêterai un instant sur
la définition de Jodelet (1984 : 257) : « Le concept de
représentation sociale désigne une forme de connaissance
spécifique, le savoir de sens commun, dont les contenus manifestent
l'opération de processus génératifs et fonctionnels
socialement marqués. » La représentation est donc « une
forme de pensée sociale », ainsi qu'une « modalité de
pensée pratique orienté vers la communication, la
compréhension et la maîtrise de l'environnement social,
matériel et idéal ». En tant que pratique orientée
vers la communication, les représentations sociales «
présentent des caractères spécifiques sur le plan de
l'organisation des contenus, des opérations mentales et de la logique
».
Pourtant, les représentations sociales ne sont pas
inertes : elles sont, d'après Fischer (1987 : 118) « [...] un
processus, un statut cognitif, permettant d'appréhender les aspects de
la vie ordinaire par un recadrage de nos propres conduites à
l'intérieur des interactions sociales.» De fait, les
représentations sociales ont deux composantes : l'une, centrale, est
potentiellement inerte, et est entourée d'un tampon, négociable,
qui sert de barrière avec la réalité (Abric, 1984). En
périphérie de cet ensemble noyau/tampon se trouvent des
éléments de classification qui permettent un rattachement de
l'objet social à la représentation sociale.
Par ailleurs, Searle (1983) met en lumière un lien
entre représentation et communication : analyser les conditions de la
compréhension et de l'échange linguistique nécessite
l'existence d'un arrière plan culturel, la présence d'un savoir
tacite... éléments qui, dans les représentations, sont
sociaux. En effet, les représentations sont caractérisées
par trois aspects interdépendants : leur élaboration se fait par
et dans la communication, la (re)construction du réel, et la
maîtrise de l'environnement par son organisation.
Les représentations, d'après Moscovici (1961,
1984) reposent également sur deux processus, qui agissent dans la
formation des représentations sociales et dans leur fonctionnement :
Tout d'abord, un processus d'objectivation, qui définit la façon
dont un sujet sélectionne certaines informations pour les transformer en
images significatives, qui sont généralement moins riches en
informations mais plus importante pour une compréhension
41/109
générale de l'objet-cible. Ensuite, le processus
d'ancrage « permet d'accrocher quelque chose qui est nouveau à
quelque chose qui est ancien, et donc qui est partagé par les individus
appartenant à un même groupe » (Guimelli 1994 : 14). Le
processus d'ancrage permet une actualisation ou un enrichissement de la zone
tampon et de la zone périphérique au noyau des
représentations.
2. Représentations en didactique des langues et formation
enseignante
Les représentations sont un concept fondamental pour
les spécialistes de l'apprentissage, et cette notion a été
approfondie dans une perspective didactique par des chercheurs tels que Giordan
et De Vecchi (1987) : en didactique des langues, l'apprentissage est un concept
spécifique qui ne s'articule pas uniquement autour de la notion
d'assimilation de savoirs, mais également l'acquisition d'usages,
notamment en relation avec l'interaction. Dans notre partie sur les gestes,
nous avions déjà spécifiés qu'enseigner ne se
limitait pas à transmettre un savoir : c'est un processus
d'accompagnement des apprenants, cela est donc bien évidemment le cas
aussi en classe de langue. Cette importance de l'interaction en didactique des
langues rend les facteurs sociaux, économiques, idéologiques et
affectifs fondamentaux (Castellotti & Moore, 2002). Les
représentations sont un éléments structurant du processus
d'appropriation langagière : les représentations sur la langue
maternelle, la langue cible... conditionnent les stratégies
d'apprentissage mises en place par les apprenants.
Dans la classe, des études montrent l'existence de
culture de communication spécifique (Beacco, 2001 : 58-80),
organisées par des habitus scolaires, des routines et construits
partiellement sur les représentations partagées entre les
apprenants et les enseignants sur les rôles supposés de chacun
(Castellotti & Moore, 2002). Les études réalisées sur
les représentations des enseignants et leurs pratiques effectives
(Brunel, 1990) soulignent par ailleurs que les étudiantes choisissent,
dans le cadre de leur cours, des modèles libéraux, mais que leurs
pratiques en cours restent traditionnelles : Cette présupposition des
rôles supposés de chacun peut par ailleurs être une
explication du constat de Brunel sur les différences entre
42/109
théories de classe et pratiques effectives des
enseignants en matière de méthodologie, ce qui souligne
l'importance des représentations des enseignants.
Castellotti & Moore, dans leur conclusion, en soulignent
le caractère fondamental:
« Les représentations sont constitutives de la
construction identitaire, du rapport entre soi et les autres et de la
construction des connaissances. Les représentations ne sont ni justes ni
fausses, ni définitives, dans le sens où elles permettent aux
individus et aux groupes de s'auto-catégoriser et de déterminer
les traits qu'ils jugent pertinents pour construire leur identité par
rapport à d'autres. Elles sont ainsi à considérer comme
une donnée intrinsèque de l'apprentissage, qu'il convient
d'intégrer dans les politiques linguistiques et les démarches
éducatives. Ces démarches doivent pouvoir réconcilier des
tensions a priori contradictoires entre un besoin d'auto-centration et de
rattachement au connu, et l'indispensable ouverture que nécessite
l'appropriation des langues. » (p.21)
Les représentations sont donc importantes pour les
apprenants, dans le cadre de leur apprentissage des langues, mais qu'en est-il
de ces représentations pour les enseignants ? Pour les enseignants, les
représentations sociales sont des « instruments cognitifs
d'appréhension de la réalité et d'orientation des
conduites » (Charlier, 1989, p.46), et « peuvent être
considérés comme des moyens à partir desquels ils
structurent leurs comportements d'enseignement et d'apprentissage » (
ibid). Nous considérons ici les enseignants comme des
professionnels, capable d'évaluation et d'auto-évaluation,
d'attitude critique et de prise de décision (Baillauquès, 2001),
mais également capables d'apprendre tout au long de leur carrière
(Donnay et Charlier, 1990).
Mais quelles qualités (ou défauts, ou traits
particuliers) font d'un enseignant un enseignant ? Les rares sondages
réalisés (Singly, enquête pour MEN-DEP, 1993) montrent que
pour la plupart des sondés, il suffit de connaître la
matière pour pouvoir l'enseigner or, nous savons parfaitement que cela
n'est pas le cas : la conception de l'enseignant s'élabore à
partir de la culture des sujets : on se repose sur des positions culturelles
(statut de l'enseignant, attirance du métier, ...), on projette son
expérience (l'enseignant qu'on a aimé, qu'on a
détesté...) Ces spécificités sont liés
à des fonctions particulières des représentations :
43/109
cognito- idéologiques et cognitives, que Gilly (1980)
s'est efforcé de rendre quantifiables et qualitatives.
3. Formation et évolution des pratiques
professionnelles
Paquay ((dir.) 2001 : 13), en se reposant sur des modèles
dont celui de Donnay &
Charlier définit qu'un professionnel - comme un
enseignant, est capable de :
- analyser des situations complexes, en référence
à plusieurs grilles de lecture ;
- de faire de façon à la fois rapide et
réfléchie le choix de stratégies adaptées aux
objectifs et aux exigences éthiques ;
- de puiser, dans un large éventail de savoirs, de
techniques et d'outils, les moyens les
plus adéquats, de les structurer en dispositif ;
- d'adapter rapidement ses projets en fonction de
l'expérience ;
- d'analyser de façon critique ses actions et leurs
résultats ;
- enfin, de par cette évaluation continue, d'apprendre
tout au long de sa carrière.
La formation des maîtres tent de mieux articuler
théorie et pratique en soulevant l'idée peut-être
idéaliste de transformer l'école en transformant les
maîtres. Perrenoud (1994 : 15) encourage, dans la formation des
enseignants, à travailler sur ce qui est réellement mis en place
en classe : « La personne, la culture, l'habitus, l'inconscient, la
séduction, le pouvoir, la négociation et non seulement des
savoirs didactiques désincarnés ». Pour Ferry (1983), cela
passe avant tout par un travail sur soi, idée étayée par
les théories de Schön (1983) traitant du paradigme de l'enseignant
réflexif. Pour Schön, la pensée professionnelle est
conçue comme une réflexion dans l'action basée sur des
cognitions en situation.
Cette approche réflexive de la pratique professionnelle
est déterminante pour l'évolution de ces pratiques. Pour citer
Baillauquès (2001 : 32) « La réflexion du praticien sur son
travail qui implique une réflexion sur lui-même est un engagement
critique dans une auto-estimation. L'une et l'autre de ces réflexions
définissent une démarche de retour sur des représentations
de la pratique et de soi-même en sa pratique. Elles en
réfèrent à des normes comme à des idéaux et
à des attentes chez l'individu et en sa communauté culturelle.
Elles en
44/109
interrogent le vis-à-vis ; elles suscitent,
relativement à une connaissance plus précise des
réalités (personnelles, professionnelles), des remaniements, des
renoncements à des images, à des valeurs, à des croyances,
à des convictions de savoir. »
La pratique réflexive permet d'articuler les savoirs
professionnels (d'après le modèle de Malglaive, 1990 : savoirs
théoriques, pratiques, procéduraux et savoir-faire) et les
compétences professionnelles qui, pour Schön (1983) se construisent
sur l'expérience. En andragogie, partir de ces expériences, de
ces pratiques plutôt que des savoirs savants, permet de résoudre
le problème de la transposition didactique (Perrenoud, 1996 : 59-76). En
effet, les savoirs acquis en pratique professionnelle semblent axés
action et décision, et ne sont pas ainsi constitués uniquement de
savoirs opératoires, mais également de savoirs discursifs et
positifs (Elbaz, 1983).
Cet ensemble de savoir ne définit pas pour autant tout
ce qui englobe l'agir de l'enseignant, ou l'agir professoral (Cicurel, 2011 :
52) : « L'agir professoral est une pratique qui met en oeuvre des
compétences diverses portant sur la langue, l'interaction,
l'appropriation langagière, les savoirs d'expertise, mais on
découvre qu'il fait émerger la capacité d'un professeur
à distinguer des types d'action, l'aptitude à nommer ce que l'on
fait, à ranger les actions dans une catégorie existante et
à opérer des généralisations (normalement je ne
fais pas cela) à la fois sur son propre agir, mais aussi sur le
groupe (les Chinois adorent la grammaire). »
Cet agir professoral et les savoirs évoluent au fur et
à mesure de la carrière des enseignants, et au fur et à
mesure du suivi de potentielles formations. Dans son étude de cas, Elbaz
met en avant les évolutions professionnelles des enseignants et souligne
des changements principaux dans quatres domaines. En premier lieu, elle
souligne une évolution de la conception de l'objet savoir non plus comme
un produit fini mais comme un processus ; en second lieu, un changement de la
perception du temps : le temps n'est plus une ressource rare mais quelque chose
de propice à la réflexion ; ensuite, Elbaz note une
évolution dans la tension nerveuse des enseignants. Enfin, la perception
de l'espace a changé : d'abord défensifs, les enseignants
deviennent plus ouvert à autrui.
45/109
III. Protocole de Recherche
La définition de la problématique, des
hypothèses de travail, de l'élaboration des outils et de
l'exploitation des données de cette recherche s'appuient sur les travaux
de Dumont et Calvet (1999), Blanchet et Gotman (2007), Singly (2008) et
Berthier (2002), ainsi que des cours de méthodologie de la recherche
universitaire et de la rédaction du mémoire proposés
à l'Université du Mans par Bretegnier et Bourdet.
A. Problématique et hypothèses
Avant de définir notre problématique, il semble
important de rappeler que notre travail a pour objet la mise à jour
d'une influence entre formation à la communication non-verbale, à
la gestuelle et à la gestion de l'espace, et pratiques professionnelles
enseignantes. Notre recherche est donc une recherche exploratoire.
Ce projet de recherche avait pour ambition première de
mesurer les bénéfices ou les inconvénients d'une formation
aux notions pré-citées dans la formation initiale des enseignants
de FLE, en se basant sur le constat d'un manque potentiel dans leur formation,
mais nous avons dû nous rendre rapidement à l'évidence : ce
projet était beaucoup trop ambitieux.
En effet, les recherches menées en méthodologie
de la recherche universitaire, ainsi que les nombreuses lectures
réalisées pour l'élaboration de ce mémoire, nous
ont rapidement fait prendre conscience de l'envergure d'une telle recherche.
Les impératifs extérieurs à la réalisation du
présent document ne nous permettaient pas de mener la recherche dans
des
conditions optimales nécessaires à l'obtention
de résultats de qualités. Nous avons donc dû repenser notre
recherche et, à défaut de nous concentrer sur tous les
bénéfices ou les inconvénients possibles résultants
d'une formation inclue dans la formation initiale, nous avons fait le choix de
nous concentrer sur l'idée de changement dans les pratiques.
Il semble plus naturel de travailler sur les aspects positifs
d'un travail réalisé que ses aspects négatifs. De plus, la
littérature que nous avons consultée sur le sujet, au fur et
à mesure de nos recherches, ne nous a pas montré l'existence
d'une recherche similaire : nous avons pu vérifier au cours de nos
lectures pour la création de ce cadre théorique, l'importance des
éléments proposés dans notre cadre théorique vis
à vis de la pratique enseignante. Ainsi, cette opportunité de
travail (absence d'études relatives) et de possibilité de
réalisation de cette recherche, et afin de ne pas terminer avec une
problématique à la formulation trop longue, nous avons
décidé de formuler notre problématique de la façon
suivante : de quelle façon une initiation au concept de la
communication non-verbale, de la gestuelle et de la gestion de l'espace
influence-t-elle la pratique des enseignants débutants de
Français Langue Etrangère ?
Cette problématique, au caractère exploratoire,
s'accompagne du souhait de faire émerger quelques tendances, et ce afin
d'ouvrir la voie à des études de plus grandes ampleurs dans le
futur. Ainsi, nous avons travaillé autour de l'hypothèse
selon laquelle une initiation aux concepts pré-cités impact sur
la pratique des enseignants. Pour vérifier cette
hypothèse, nous avons souhaité mettre en place un protocole de
recherche en trois parties dont nous détaillerons le contenu. Il est
important de noter que cette hypothèse est basée sur une
affirmation, à savoir une telle initiation est manquante dans la
formation des futurs enseignants de FLE. Notre travail visera également
à vérifier cette hypothèse.
46/109
B. Méthodologie de recherche
47/109
Afin de répondre à notre problématique,
et en nous basant sur des travaux de méthodologies cités dans
l'introduction de cette partie, nous avons élaboré une recherche
en trois parties en nous basant sur une approche socio-constructiviste de la
recherche.
1. Questionnaire
Pour citer Vilatte (2007 : 3) « Le questionnaire est
l'une des trois grandes méthodes pour étudier des faits
psychosociologiques ». Afin d'obtenir des résultats pertinents pour
notre recherche, nous avons souhaité suivre une approche quantitative,
en diffusant en accord avec les principes de Boukhous (1999) une questionnaire
standard, c'est à dire comprenant les mêmes questions,
diffusés dans les mêmes conditions pour tous les
enquêtés.
L'objectif de ce questionnaire est également de
fournir une description : « il s'agit de retirer des informations qui
décrivent les phénomènes subjectifs qui sous-tendent les
phénomènes objectifs et d'expliquer ainsi les
phénomènes objectifs, comme les motivations, les
représentations, les opinions et attentes qui orientent nos choix
rationnels (nos comportements objectifs). On aborde ici le système de
représentations de l'enquêté » (Vilatte, 2007 : 5).
2. Module de formation
Notre problématique comprenant l'idée d'une
formation dispensée aux enseignants, la présence d'un
«module de formation» fait sens dans le cadre de cette recherche pour
laquelle nous nous sommes appuyés sur les documents et études
réalisées dans le domaine de l'andragogie, c'est à dire la
formation des adultes, notamment par des chercheurs tels que Knowles (1990) et
Carré (2011). Le choix de la présence de ce module dans la
recherche du présent mémoire posera certainement des questions
vis à vis de la posture et de la légitimité de
l'enquêteur, questions auxquelles nous tenterons de répondre plus
loin dans ce document.
48/109
3. Entretien semi-directif
Afin de conclure cette recherche et d'obtenir un panel de
données avant/après, nous avons fait le choix de terminer cette
étude par la mise en place d'entretiens semi-directifs. Les entretiens
sont une techniques très utilisées dans la collecte de
données en sciences sociales. Par ailleurs, ils permettent ici une
approche qualitative en donnant la possibilité de réaliser une
analyse du sens donné aux pratiques par les sondés (Blanchet
& Gotman, 2007), et ce en mettant en place une situation d'interaction,
dans laquelle il est possible de relancer le sondé si nécessaire,
afin de lui permettre de réfléchir à son expérience
(Pineau et Legrand, 2002).
Nous avons fait le choix d'un entretien semi-directif afin de
laisser l'impression d`établir une conversation tout en suivant un fil
directif, et en laissant la possibilité aux enquêtés de
s'exprimer. En effet, nos questionnaires ont pour objectif de laisser aux
enquêtés la possibilité d'exprimer leur point de vue sur
les aspects de leur pratique que la formation proposée a pu impacter.
Nous envisageons donc de chercher dans le corpus des éléments
verbaux relatifs à des items particuliers des concepts
abordés.
49/109
IV. Présentation du corpus
A. Public
Le public cible de cette recherche était, dès le
début, très limité : il s'agissait avant tout
d'enseignants de FLE débutants, ou en cours de formation. L'idée
du caractère néophyte de ces sondés résidaient dans
l'idée d'une absence relative d'habitus de pratique trop fermement
ancrés dans la pratique des enseignants. Nous nous sommes donc
adressés aux alentours du mois de Mars aux étudiants de M1
Didactique du Français Langue étrangère de
l'Université du Mans en prenant contact avec une enseignante afin
d'intervenir directement dans son cours. Cela représentait (après
participations aux questionnaires) dix-neuf personnes. Suite à la
demande de participation au module de formation, nécessaire à la
suite de cette recherche, seulement trois personnes sur les dix-neuf
participants au questionnaire se sont présentées. Elles ont
toutes accepté de réaliser l'entretien de fin d'étude. Si
nous limitons notre échantillons uniquement aux personnes ayant suivi
l'étude dans sa totalité, notre échantillon concerne donc
des étudiants de M1 Didactique des langues, de 20 à 25 ans, et de
nationalité française. Les informations les concernant ont
été regroupées dans le tableau ci-dessous et
anonymisées dans la transcription. Les références seront
ré-utilisées.
Référence
|
Âge
|
Nationalité
|
Expérience dans l'enseignement
|
E1
|
25 ans
|
Française
|
150h
|
E2
|
21 ans
|
Française
|
20h
|
E3
|
22 ans
|
Française
|
20h
|
50/109
B. Questionnaire
1. Réalisation de la grille
Lors de la création de nos questionnaires, nous avons
fait le choix de répondre à notre problématique en nous
concentrant sur trois items : déplacement, gestuelle et
proxémie . Ces questionnaires ont pour objectif une estimation
subjective de la part des participants à leurs actions dans le cadre de
la salle de classe. Nous envisagions de les utiliser comme
référence pour nos entretiens afin de contrôler les
réponses des enquêtés, et les avions alors
conçu comme une sorte de «diagnostic de pratique» : les
questions posées et les réponses apportées ont
été réutilisées lors des entretiens afin
d'approfondir non seulement la réponse apportée en l'état,
mais également fournir des éléments de réponses
à une comparaison avant/après.
Les questionnaires contiennent dix-neuf questions, alternant
questions ouvertes et questions fermées à annoter sur une
échelle de Likert de 1 (pas du tout) à 5 (beaucoup). Le
questionnaire se termine par un encadré «démographie»
qui propose aux participants de fournir des données
démographiques (âge, sexe, origine...). La grille des
questionnaires se trouve en annexe A1 de notre mémoire.
2. Collecte des données
Pour la collecte des données, nous avons fait le choix
d'intervenir dans la classe des M1 FLE en en faisant la demande auprès
de l'enseignante concernée. Nous nous sommes donc rendu sur place et
avons très rapidement présenté les raisons de notre
présence sans trop nous attarder sur la problématique et les
enjeux du mémoire afin de ne pas influencer les réponses des
sondés. Il a été fermement précisé lors de
la présentation du questionnaire et des raisons de notre présence
dans la salle que la participation à ce questionnaire n'était pas
obligatoire car elle nécessitait un engagement sur la durée : un
engagement à se présenter au module proposé, et un
engagement à répondre à un questionnaire final - choix
de
51/109
méthodologie qui sera modifié plus tard au
profit d'un entretien. Sous les encouragements de l'enseignante, de nombreux
étudiants ont souhaité participer.
La collecte des données aura duré environ 25
minutes, au terme desquelles nous avons relevé les informations de
contact des participants afin de les informer de la tenue du module de la suite
de la recherche par mail. L'objectif d'une participation dans leur classe, en
cours d'année et de la prise d'information de notre part soulignait un
besoin de pénaliser le moins possible les participants et ne pas leur
faire subir des contraintes quelconques.
C. Module de formation
1. Réalisation du module
Le module de formation proposé est un
élément clef de notre recherche : c'est lui qui conditionne
l'impact sur la pratique des enseignants. Afin de le réaliser, nous nous
sommes informés sur les tenants et les particularités de
l'andragogie, sous les conseils avisés de notre directrice de
mémoire, et ce dans le but de proposer aux étudiants de
l'université une formation qui réponde au plus près
à leurs besoins. Nous avons ainsi décidé de suivre une
approche interrogative avec les étudiants, et ce afin de nous appuyer
sur leur connaissance et leur expérience, et également leur
permettre d'eux-mêmes de développer une réflexion autour de
l'exercice proposé.
Nous avons élaboré notre module autour de
l'étude d'une vidéo en salle de classe, en faisant le choix de
sélectionner un enseignement non-allophone afin d'induire - même
de manière très superficielle - un retournement de situation pour
les étudiants (le français étant leur langue maternelle,
nous avons sélectionné un cours en anglais afin de leur permettre
de se «mettre dans la peau» de leurs apprenants).
Nous avons ensuite proposé le remplissage d'un tableau
comme exercice central de discussion : en regardant la vidéo, les
étudiants devaient remplir le tableau. Une fois le
52/109
visionnage terminé, nous proposions un regroupement des
idées et des échanges afin de comparer la pratique
observée et leur pratique, tout en faisant des parallèles avec la
pratique de leurs enseignants. Le cadre du module est disponible en annexe
2.
2. Enjeu et retour critique
La réalisation de ce module a été, pour
nous, une très bonne expérience d'enseignement que nous avons
filmé afin de permettre une observation ultérieure. Les
échanges réalisés avec les étudiants ont
été très riches et très intéressants, leur
participation était au rendez-vous et, bien que sur l'heure et demie
pensée à la réalisation de ce module, la présence
de seulement trois participants sur les dix-neuf originels a fortement
réduit la durée de cette formation.
Lors de la création de ce module, nous avons
essayé d'être tout particulièrement vigilant à notre
propre pratique paraverbale, non verbale et proxémique : nous avons tout
d'abord changé la disposition des meubles afin de créer des
îlots et ce, afin de permettre des échanges sociofuges entre les
étudiants. Nous avons ensuite essayé d'être attentif
à notre propre posture, notre ton et notre manière de nous
déplacer : une étude ultérieure de la vidéo montre
de notre part trois points steady. La zone située devant le
tableau est une zone de passage qui semble incontournable (pour écrire,
montrer des choses de la projection...). A la droite des apprenants, nous avons
également noté un point steady où nous nous asseyons sur
les tables, et enfin un dernier point, derrière les étudiants.
Nous avons tenté d'illustrer le concept de la
proxémie en nous plaçant très près d'un
étudiant afin de créer un certain inconfort de sa part. Nous
avons également tenté d'utiliser des gestes de manière
plus consciente : de façon personnelle, cet exercice s`est
révélé très significatif. Nous sommes donc
satisfaits de la «prestation» d'enseignement réalisée,
des bénéfices scientifiques qui en découlent et de la
réception de la formation proposée auprès des
étudiants.
53/109
D. Entretiens
1. Réalisation de la grille
Pour la collecte de ces données et étant
donné le faible nombre de participants au module, nous avons fait le
choix de modifier notre protocole de recherche originel - un second
questionnaire - pour privilégier des entretiens afin d'obtenir le plus
d'informations possibles et de pouvoir les détailler, les approfondir si
nécessaire. Nous avons fait le choix également de réaliser
une grille pour des entretiens semi-directifs afin de pouvoir s'adapter
à la conversation mise en place avec les enquêtes.
Pour ce faire, nous avons réalisé notre grille
autour des trois thèmes choisis comme angle de recherche pour la
réponse à notre problématique : communication, geste de
l'espace et cohérence approche réalisée/approche
pensée. A noter que ces éléments ne sont pas fixent :
comme précisé dans notre partie Protocole de recherche,
l'objectif des entretiens était de faire émerger des
éléments verbaux relatifs à des items particuliers. Nous
avons conçu notre grille autour de 3 items principaux, mais le cadre
semi-directif des entretiens encourageait à aborder des
éléments autres, voir à les ignorer.
2. Conduite des entretiens
Les entretiens se sont déroulées du 31 juillet
au 6 août. Un délai entre suivi du module et entretiens nous
apparaissait nécessaire afin de laisser le temps aux étudiants de
mettre en place, développer d'eux-mêmes les concepts
abordés. Afin de fixer les rendez-vous pour les entretiens, nous avons
contacté les trois étudiants par sms et leur avons proposé
de réaliser les entretiens via skype - nous étions à
l'étranger à cette période de l'année. Nous avons
voulu enregistrer les entretiens pour plusieurs raisons : tout d'abord, pouvoir
en garder une trace, afin de pouvoir les réécouter entre deux
entretiens afin de pouvoir changer les questions,
54/109
l'approche à prendre... en somme, améliorer la
performance «enquêteur». Nous avons donc utilisé le
logiciel MP3 Skype Recorder pour cela.
Pour illustrer les changements apportés à la
tenue des entretiens, il nous semble important de nous arrêter un instant
sur l'E1 ; Au cours de celui-ci, la première question posée
à l'enquêté a été celle-ci :
m : donc pendant la présentation que tu as suivi
dans le cadre de la recherche de mon master/de mon mémoire pardon nous
avons abordé différents concepts notamment celui de la
communication non verbale de la gestuelle et de la gestion de l'espace si tu te
rappelles bien est-ce que c'est quelque chose que tu as vu en cours
auparavant
Il s'est avéré, à la suite de
l'entretien, que l'enquêté de se rappelait pas du contenu et du
déroulé du module, ce qui rendait les questions suivantes
caduques. Nous avons donc souhaité commencé les entretiens
suivants par une remise en contexte, afin non seulement de nous assurer que
l'enquêté avait en effet été
«sérieux» dans le suivi du protocole de recherche, mais
également pour mettre en place un climat détendu. En effet, il
nous semblait important pendant ces entretiens de garder une ambiance sereine
pour ne pas mettre les enquêtés mal à l'aise.
Pour l'intégralité de nos échanges, nous
avons choisi le français comme langue de communication. Au cours des
entretiens, nous avons fait attention à rester le plus neutre possible,
à ne pas être dans une posture de jugement. Nous avons fait un
effort particulier de reformuler les propos des enquêtés de
manière régulière pour nous assurer de notre
compréhension ou susciter une réaction.
En ce qui concerne la transcription des entretiens, nous avons
choisi de ne pas mettre en place de ponctuation et n'avons utilisé que
très peu de marques paraverbales : nous avons fait le choix d'utiliser
un tiret (-) pour marquer une pause, une suspension. Nous utilisons les
étoiles entre crochets [***] pour marquer un moment
d'incompréhension de l'enregistrement. Nous utilisons enfin le slash (/)
pour marquer une coupure de parole ou un ton saccadé. Nous avons
également anonymisé les questionnaires par des xxxxxx en cas de
citation de nom.
55/109
Cette étude n'étant pas concentrée sur
les spécificités de l'oral, ces choix semblent raisonnables.
V. Analyse du corpus
A. Fiabilité des données
Avant de discuter de l'analyse des données
collectées, il semble important de nous arrêter un instant sur la
fiabilité des informations relevées. Dans notre partie Discussion
sur la méthode, nous approfondirons la question des méthodes
utilisées pour la réalisation de cette recherche, nous
reviendrons sur les erreurs commises, les choses apprises, les
éléments satisfaisants de notre étude. Comme nous l'avons
précisé dans notre partie sur les questionnaires, le nombre de
participants entre le début de cette étude et la fin de celle-ci
a grandement diminué, or, un facteur quantitatif semble pertinent pour
rendre valide les données collectées, ce qui, avec seulement
trois entretiens, ne semble pas le cas.
Pourtant, les informations relevées ont un certain
intérêt, et pourront peut-être paver la voie à de
futures recherches en proxémie didactique. Nous avons donc fait le choix
de les présenter tout de même, en nous attardant essentiellement
sur les éléments verbaux présents dans les entretiens
réalisés, tout en croisant les données recueillies dans
les entretiens (le «après») avec les données objectives
recueillies dans les questionnaires (le «avant»).
B. Formation suivie
Cette étude a été en partie fondée
sur l'assertion suivante : une initiation aux concepts de la communication non
verbale, de la gestuelle et de la gestion de l'espace est manquante dans la
formation des enseignants de FLE. Cette assertion s'est basée
intégralement sur notre
56/109
propre expérience d'étudiant de FLE à
l'Université du Maine et pouvait, à raison, ne pas être
avérée pour des étudiants d'autres villes. Il convenait
alors en premier lieu de nous assurer que ce «manque» était
également vrai pour les étudiants enquêtés. Nous
n'avons pas réalisé cette vérification dans les
questionnaires : ceux-ci ont été peu introduit afin de ne pas
influencer les réponses des enquêtés. Nous n'avons donc pu
aborder cette question qu'au cours des entretiens.
m : donc pendant la présentation que tu as suivi
dans le cadre de la recherche de mon master/de mon mémoire pardon nous
avons abordé différents concepts notamment celui de la
communication non verbale de la gestuelle et de la gestion de l'espace si tu te
rappelles bien est-ce que c'est quelque chose que tu as vu en cours
auparavant
e1: mhhh- j'pense pas non
Au cours de cet entretien, la question a été
posé un peu fermement et la réponse donnée est très
fermée. Nous avons déjà abordé les petits
problèmes survenus lors de l'entretien 1, problèmes qui nous ont
encouragé à repenser le déroulement de nos entretiens. Au
cours des entretiens suivants, la même réponse est apparue :
m : voilà tout à fait ça donc ces
concepts là ça a attrait à la communication non verbale
à la gestuelle et à quelque chose qui s'appelle les agencements
didactiques mais en gros c'est pour parler de la gestion de l'espace est-ce que
ce sont des choses que tu as vu en cours auparavant
e2 : euh-j'en ai pas le souvenir
m : pas du tout dans ta formation
e2 : je m'en j'en ai pas le souvenir d'avoir vu
ça avant après comme moi j'avais fait un campus
international avant on m'avait montré quelque trucs pour éviter
que ça fasse trop formel donc je savais quelques choses mais
après est-ce que après on me la redit en cours je suis pas
sûre quoi
L'E3 apporte une certaine nuance et un recul sur les concepts
abordés en précisant que ces notions n'ont peut-être pas
été le sujet in sine d'un cours, d'une UE, mais qu'elles
ont été abordées par les enseignants de la formation au
cours d'anecdotes. La question de l'anecdote
57/109
comme pratique de formation/de transmission est très
intéressante, surtout lorsqu'on parle de représentation ou de
pratique professionnelle, mais n'étant pas le sujet de notre
mémoire et ne connaissant que très peu de choses à ce
sujet, nous n'aborderons pas ce point trop longuement ici.
e3 : euh- très très vaguement c'est
très succinct on va dire
m : est-ce que tu peux me dire dans quel contexte ça a
été vu
e3 : c'était juste je crois des anecdotes que
les enseignants nous donnaient par
rapport à leur profession des choses comme
ça
m : d'accord donc ce n'était pas le sujet d'un
cours
e3 : non
m : c'est c'était vraiment dans le cadre du cours
l'enseignant ou les enseignants ont
raconté des petites anecdotes c'est ça
e3 : oui oui
Mais il semble important de souligner que notre
hypothèse de départ est vérifiée dans ces trois
entretiens, et ouvre la porte à une autre question : ce manque est-il
important pour les étudiants ? A cette question, les réponses
sont mitigées, et dépendent de la personnalité ou de
l'expérience des sondés. L'enquêté 1, un homme avec
une expérience relative de l'enseignement, ne semble par exemple pas
penser que cette formation serait importante pour lui : le reste de l'entretien
montre une personne relativement extravertie, qui parle beaucoup avec ses
mains, très joviale (il a beaucoup ri pendant les échanges). Il
est possible que sa personnalité plutôt extravertie lui permette
de prendre en charge les échanges en classe, ne pas avoir peur
d'être proche des apprenants et ne pas hésiter à
«chambouler» les espaces pour se les approprier. De la même
façon, l'E3, qui semble assez affirmée, aborde l'idée
d'avoir travailler cela toute seule de son côté :
e3 : je sais pas si c'est grave mais c'est quelque chose
enfin que je pense avoir travaillé toute seule de mon côté
en fait
58/109
A partir de ces suppositions, nous pouvons donc penser qu'en
effet, une initiation à de tels concepts ne soit pas pertinente pour les
étudiants. Pourtant, quand nous posons la question à des
étudiants moins extravertis, moins expérimentés, la
réponse est plus tranchée :
m : est-ce que `après toi c'est quelque chose qu'il
aurait été bien de voir dans ta formation initiale
e2 : définitivement je pense que ça
aurait été intéressant dans notamment le cours du
premier semestre où on doit donner un cours à des
élèves DELF je trouve que ça aurait été
intéressant car ça nous aurait permis de d'aller beaucoup
plus loin dans notre séquence et notamment de voir bah
qu'est-ce qu'on pourrait faire pour pour déplacer les
tables etc faire des groupes et tout et je trouve que
ça aurait été plus intéressant pour nous
plutôt que de rester au niveau du tableau et d'attendre quoi
Nous pouvons donc poser la question de la
légitimité d'une telle formation, surtout si elle semble
n'affecter positivement qu'un tiers des étudiants qui pourraient
potentiellement la suivre. Il convient donc de poursuivre notre analyse.
C. Sur la communication
Nous avons voulu vérifier si la prise de parole, suite
à une initiation aux concepts de la communication, semblait
facilitée pour les étudiants. Pour étudier cela dans les
propos des étudiants, et pour conserver de la cohérence avec
notre cadre théorique, nous avons relevé dans le discours la
présence d'éléments relatifs à trois aspects de la
communication :
1- le paraverbal
2- le verbal
3- le geste
Nous avons noté, au cours de notre étude des
propos rapportés, la présence de tels indicateurs :
59/109
m : donc t'essayes de moins rester au tableau d'accord
est-ce que donc on a parlé également de la distance avec les
apprenants est-ce que tu te rends compte que t'es beaucoup plus proche d'eux
que tu tu tu te permets peut-être pas de les toucher mais y'a une
distance moins importante avec eux
e3 : bah oui du coup je vois [qu'on peut mieux les aider?]
je me mets à côté d'eux enfin comment dire j'ai
j'ai baissé un peu la hiérarchie qu'on va avoir comment
dire dans une salle de classe traditionnelle mais c'est plus enfin je sais pas
plutôt camarade de classe
Dans cet extrait, il est ici question du paraverbal, et plus
particulièrement l'idée de la posture, mais nous trouvons
également des facteurs proxémiques (de distance avec les
apprenants). L'idée de hiérarchie est avancée : la place
de l'enseignant comme étant au sommet du triangle didactique est
questionnée par l'enquêté, qui change volontairement de
place pour briser ce schéma classique et encourager les interactions
avec les apprenants.
A la suite de cet échange l'enquêté 3 nous
a raconté son expérience de l'enseignante où il a
commencé par former des apprenants arabophones, très
réactifs (bavards), puis s'est retrouvé face à un public
coréen. Le changement a été assez difficile.
e3 : mais euh- c'est eux qui me posaient des questions et
tout ça alors que que avec les étudiants coréens
j'étais obligée de toujours faire le premier pas
en fait pour vraiment y'avait pas d'initiatives de leur
côté en fait c'était compliqué
m : d'accord là j'ai une question qui va donner
peut-être un peu l'impression de juger mais en fait c'est pas ton
rôle en temps qu'enseignant justement de faire ce premier
pas
e3 : bah du coup je me l'étais jamais je
m'étais jamais posée la question parce qu'en fait les premiers
étudiants que j'ai eu faisait ce premier pas
d'eux-mêmes
m : d'accord
e3 : ou alors je l'ai fait un tout petit pas et ils se
sont tout de suite ouvert alors que là avec ces étudiants
là il fallait que je fasse beaucoup plus d'effort en fait
Si la question que nous avons posé concernant son
«rôle» en temps qu'enseignant semble porteuse de jugement, ce
choix était conscient pour faire émerger les
représentations du métier d'enseignant de cet étudiant.
Ici, il semble que l'étudiant-enseignant n'a pas eu à
60/109
être dans une attitude proactive avec ses apprenants
pour encourager les échanges et susciter l'interaction : il lui aura
fallu une expérience secondaire avec un public à la culture
éducative très différente pour mettre en question cette
posture.
Nous avons ensuite voulu vérifier si ce changement de
posture n'était uniquement le fruit que de la pratique :
m : d'accord et ces choses là tu t'en rends compte
par la pratique en fait c'est pas ta formation qui te permet de voir
ça
e3 : non non non alors après enfin un petit
peu quand même on nous fait voir des études de cas sur les
différentes cultures éducatives et tout ça mais c'est trop
théorique pour notre activité
L'enquêté nous a ainsi confirmé que si la
pratique professionnelle est importante pour la création des
représentations, une étude au préalable au cours de la
formation est aussi très importante. Il critique le caractère
trop théorique de la formation en question.
Nous avons ensuite croisé cette information fournie par
l'E3 avec les questionnaires fournis : il s'avère que
l'enquêté 3 a répondu à la question 13 «j'ai
peur d'interrompre mes élèves quand ils travaillent» un 2/5.
Sa confiance semble avoir un peu évolué en ce sens. Il y a eu peu
d'évolution sur cet aspect pour l'E1. L'E2 semble quant à lui
avoir fait des efforts sur l'aspect communication :
m : d'accord est-ce que du coup tu as remarqué des
changements dans la manière dont tu t'adresses à tes
apprenants
e2 : --- un peu plus ouais je- je fais beaucoup
plus attention je faisais déjà très attention à
commencer je parlais etc mais beaucoup plus après je me suis dit faut
vraiment faire très gaffe au niveau de l'oral quoi donc euh- j'essayais
de parler de manière beaucoup plus posée de reformer de
reformuler beaucoup plus mes phrases des choses comme
ça
m : tu es beaucoup plus attentive à la
qualité de ta langue
e2 : exactement
61/109
Pour cet enquêté, la posture a également
changé :
m : d'accord et ta posture aussi ton ton ces
choses-là jouent
e2 : euh- j'pense que oui parce qu'après
j'étais euh- je pense que si t'en parles à mes
élèves DUARD ils te diront que j'étais pas une prof
très stricte *rires* mais au- au campus d'été ai
j'ai essayé d'être vraiment de de m'asseoir au même niveau
qu'eux beaucoup plus souvent DUARD comme j'écrivais beaucoup au
tableau je restais debout euh- j'ai fait donc de m'asseoir beaucoup euh- j'ai-
là avec le campus international euh- j'ai pas
hésité à m'accroupir pour pour regarder ce qu'ils
faisaient eux ils étaient un petit peu au dessus de moi comme ça
pour pour essayer de mettre une autre relation dans la classe que prof
élève quoi
m : et du coup pour toi ce changement de posture il fait
que tu es pas très sévère
e2 : en fait j'ai jamais été une prof
sévère en fait au final donc voilà mais ça
évite de surtout qu'en fait j'ai surtout j'ai tendance un petit peu moi
personnellement dans ma tête m'énerver alors Mr xxxxxx s'en
aperçoit pas il dit que je suis très calme avec mes
élèves donc c'est bien mais en fait moi dans ma tête je le
ressens là par exemple au travail là toute l'après-midi
y'a des moments où dans ma tête je vais être en train de
crier quoi en gros et euh- et le fait de changer de position assez
régulièrement ça m'aide moi aussi à m'éviter
de trop m'énerver quoi et de de de de par exemple donner une
réponse alors que je l'attends quoi
m : d'accord ça te permet de passer à autre
chose
e2 : exactement de pas euh- de pas dire bah la
réponse c'est ça et puis on passe à autre chose parce que
je commence à m'énerver moi intérieurement donc comme
ça j'attends un petit peu plus en changeant de position tout
simplement
m : d'accord euh- est-ce que tu as l'impression
d'être beaucoup plus détendue du coup dans ta pratique
e2 : oui
m : le fait de te déplacer et de changer ce
rapport avec les apprenants ça te détend beaucoup plus
d'accord
e2 : oui oui
définitivement
62/109
De même, quant à la question de la gestuelle,
elle semble n'avoir pas évolué au cours de tous les entretiens
:
m : t'utilises beaucoup les gestes de quelle
manière est-ce que tu choisis un sens particulier pour un geste
e1 : euh- ouais je enfin j'ai pas compris que que tu as dit
répète
m : d'accord est-ce que tu utilises des gestes
spécifiques dans des situations précises dans le sens où
tu vas utiliser un même geste pour dire une même idée de
manière continuelle e1 : //tu veux dire que c'est
cohérent et que ça change pas tout le temps et que j'utilise pas
le même geste pour exprimer plusieurs choses
m : voilà
e1 : euh ouais ouais c'est plutôt
ça
m : et d'autres type de gestes que tu utilises t'es est-ce
que tu es quelqu'un qui parle beaucoup avec ses mains de manière
générale ou qui parle beaucoup avec ses mains dans le cadre des
cours de fle
e1 : c'est une bonne question il faut que je m'en serve
*rires* mais je sais que quand j'explique des mots euh- je là
j'utilise beaucoup les gestes
m : t'utilises beaucoup les gestes d'accord est-ce que
c'est inconscient ou est-ce que c'est fait de manière consciente
e1 : ---- c'est spontanée
m : donc c'est pas fait de manière conscience
e1 : je je vois je me vois le faire mais je me dis pas
tiens maintenant je vais faire ce geste là ce / ça vient
naturellement
Pour l'E1, la question de la gestuelle n'a pas bougé :
l'étudiant confie lui-même qu'il utilise beaucoup ses mains pour
exprimer ses idées, et peu d'effort conscient semble avoir
été fait pour essayer de mettre en place une pattern pour la
gestuelle, ou choisir tel ou tel geste pour exprimer telles ou telles
idées de manière consciente. Pour l'E3, l'angle de travail ne
semble pas être le même : l'étudiant confie avoir
l'impression d'avoir déjà mis en place les concepts
abordés :
m : euh- d'accord pareil au niveau des gestes est-ce que
tu fais un peu plus attention à
ça
63/109
e3 : euh- bah non pas trop non enfin en
fait j'ai pas enfin j'avais l'impression de déjà
appliquer les conseils que tu nous avais donnés avant de faire
le module
Nous pouvons ainsi conclure que si notre module d'initiation
n'a pas apporté de grands changements pour nos sondés dans le
domaine de la gestuelle, il semble relativement avoir impacté les autres
traits de communication : niveau de langue et confiance pour aller vers les
apprenants (verbal et paraverbal), et l'espace mis entre les apprenants et les
enseignants. Les représentations en terme de posture semblent avoir un
peu évoluées.
D. Sur la gestion de l'espace
Nous avons abordé dans notre partie
précédente l'idée d'une évolution ressentie dans la
proxémie apprenant-enseignant pour les étudiants
enquêtés dans le cadre de cette recherche. En cela qu'elle
contient des éléments de déplacement dans l'espace
«salle de classe», nous pouvons considérer l'évolution
de cette posture comme une évolution de la gestion de l'espace. Nous
nous intéresserons à trois autres éléments de
gestion de classe qui sont apparus au fur et à mesure des entretiens
:
1- Déplacement dans l'espace didactique
2- Aménagement du mobilier
3- Décoration
Nous commencerons par les aménagements dans les espaces
didactiques en cela qu'ils font échos à la proxémie : le
changement de posture exprimé par les étudiants
enquêtés dénote d'une évolution des
déplacements dans l'espace didactique. Cette évolution est
fortement marquée dans l'entretien 2 :
e2 : [...] moi je me suis assise beaucoup plus sur
le bureau des choses comme ça pour euh- mais c'était
aussi dans un cadre différent c'est à dire que autant le DUARD
toi être très sérieux le campus d'été
international on peut se lâcher un peu plus
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m : d'accord et du coup au niveau de la manière de
présenter tes cours maintenant que tu peux euh- que tu as un peu plus de
libertés est-ce que tu te rends compte que tu te déplaces un peu
plus dans la salle de classe par exemple
e2 : euh- là définitivement je pense
que je me suis beaucoup plus déplacée qu'avec le DUARD notamment
parce que et puis ce qui a beaucoup aidé le fait qu'on a j'avais pas une
classe moi avec des rangs perpendiculaires euh- voilà j'avais
fait des îlots alors en fait pour moi c'était beaucoup plus simple
même de travailler de traverser d'aller voir les élèves etc
plutôt que d'avoir de devoir limite pousser les élèves pour
aller voir quelqu'un qu'était au bout quoi
Cette évolution semble également
dépendante de facteurs extérieurs, à savoir les
impératifs de l'institution et les contraintes des locaux. Cela semble
également être le cas dans l'E3 :
m : d'accord est-ce que depuis qu'on a
réalisé le module tu as remarqué des changements dans les
activités que tu proposes euh- dans ton stage dans ta dans ta pratique
enseignante
e3 : euh- pas vraiment j'ai peut-être
essayé de bouger un peu plus euh- dans la salle euh- mais sans plus
enfin c'est un peu compliqué en même temps quand on peut pas
bouger le mobilier les choses comme ça
Pour l'E2, cette idée de déplacement joue aussi
sur les interactions avec les apprenants : comme nous l'avons cité dans
notre partie précédente, se déplacer semble affecter sa
psyché, son état d'esprit. Au cours de l'E3,
l'enquêté a mis en avant le fait que les apprenants semblent plus
à l'aise pour faire appel à lui si il est en déplacement
que si il est immobile :
e3 : et du coup enfin les apprenants étaient plus
enfin avaient plus envie de de d`apprendre enfin je sais pas comment expliquer
c'est juste j'allais les voir quand assez souvent pour voir s'ils
avaient des problèmes ou pas et que je les assistais un à un ils
étaient plus euh- ils nous demandaient plus de venir des choses comme
ça j'avais moins à j'étais moins loin pour
eux
65/109
m : d'accord comme tu es déjà en
déplacement ça leur pose moins de problème de te demander
de te déplacer
e3 : oui
L'aménagement de l'espace est un aspect qui a bien
évolué dans les entretiens : les enquêtés ont
tendance à déplacer les meubles, principalement pour faciliter
leur déplacement :
e1 : mh- euh- c'est vrai que je préfère
quand les tables sont disposées en U ça permet de
circuler plus facilement et- je sais pas y'a un/y'a un sentiment que la/que la
classe est plus unie en fait alors que quand c'est en rangée normale je
sais pas c'est/c'est un peu plus divisé et euh-- ouais à
part ça non je vois pas
m : la formation en U elle te permet non seulement de
passer plus facilement d'un apprenant à l'autre mais également
d'encourager les interactions entre les apprenants
e1 : ouais c'est vrai ouais y'a ça aussi ouais
ils/ils sont pas obligés de se retourner pour euh- ouais ouais et puis
c'est mieux en en îlot ouais ça je le fais quand je fais des trucs
en groupe bah c'est plus pratique de--
m : / c'est plus facile pour les observer pour les
surveiller et les aider même
e1 : oui
Ceci est également le cas pour l'E2 :
m : d'accord et du coup au niveau de la manière de
présenter tes cours maintenant que tu peux euh- que tu as un peu plus de
libertés est-ce que tu te rends compte que tu te déplaces un peu
plus dans la salle de classe par exemple
e2 : euh- là définitivement je pense que je
me suis beaucoup plus déplacée qu'avec le DUARD notamment parce
que et puis ce qui a beaucoup aidé le fait qu'on a j'avais pas
une classe moi avec des rangs perpendiculaires euh- voilà j'avais fait
des îlots alors en fait pour moi c'était beaucoup plus simple
même de travailler de traverser d'aller voir les élèves etc
plutôt que d'avoir de devoir limite pousser les élèves pour
aller voir quelqu'un qu'était au bout quoi
Les éléments concernant la décoration
sont apparus essentiellement dans l'E1 où l'enquêté
précise :
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m : est-ce que tu envisages dans le futur maintenant qu'on
a eu cet entretien et que je t'ai remis un peu tout à l'esprit de faire
euh- je ne sais pas de de mettre en place des des des décorations dans
ta salle de classe uh- faire des
e1 : *rires* moi qui ai zéro
décoration dans ma chambre *rires* je ne crois pas
Pour les autres enquêtés, cet aspect de la
gestion de l'espace a été laissé de côté en
raison d'élément hors-propos : ils ont tout d'abord
pratiqué dans un cadre n'offrant pas cette liberté, puis dans un
cadre où ils n'ont pas pris cette liberté pour des raisons
temporelles (le campus international d'été se déroule sur
une période limitée). Cet élément n'est pas non
plus apparu dans les échanges de l'entretien, auquel cas nous aurions
tenté de l'approfondir. L'item décoration n'a donc pas
évolué, ce qui est cohérent avec la question 17 des
questionnaires.
Nous pouvons donc conclure que l'évolution des items
«gestion de l'espace» est mitigée dans les entretiens. Son
évolution semble fortement liée aux facteurs extérieurs,
notamment institutionnels.
E. Sur la cohérence
Nous nous sommes ensuite concentrés sur la
cohérence entre l'approche souhaitée à mettre en place et
l'approche actuellement mise en place, items pouvant s'exprimer au travers de
facteurs comme la gestion de l'espace et le type d'activités mises en
place. Les résultats de notre recherche semble plutôt concluant en
terme de gestion de l'espace, de distance avec les apprenants... mais analyser
la pratique effective semble difficile sans observation in situ, ce
dont nous discuterons dans notre Discussion sur la Méthode en partie
finale. Pour cette raison, notre partie sur la cohérence n'a
relevé, au cours des entretiens, aucun élément exprimant
une évolution des représentations, si ce n'est lorsque nous avons
abordé ce point de manière directe au cours de l'entretien
n°2 :
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m : d'accord donc euh- euh- tu as répondu à
toutes mes questions donc si tu prépares une activité avec une
approche communicative tu vas pas euh- tu vas pas la présenter avec une
comme juste un cours traditionnel où tu donnes l'activité
à faire aux apprenants e2 : non
m : tu es beaucoup plus dans la gestion de classe tu te
déplaces tu communiques e2 : exactement
La réponse à cette question se base uniquement
sur les a priori de l'enquêté, ce qui la rend non-fiable.
F. Vers une proposition d'interprétation d'autres
éléments
verbaux
L'analyse proposée précédemment tient
compte d'items que nous avions prévu d'observer et de faire
émerger dans les entretiens. Pourtant, il semble intéressant de
se pencher également sur des éléments qui n'auraient pas
été prévus dans ces entretiens. Pour cette raison, cette
partie a pour ambition de repérer dans les données verbales du
corpus des éléments de changements dans d'autres
représentations des enquêtés.
1. Interactions sociales
Nous avons noté en premier lieu un glissement dans la
compréhension de l'impact de l'agencement didactique de la salle de
classe sur deux facteurs : premièrement, l'encouragement aux
interactions sociofuges. Secondement, une facilité de déplacement
qui engendre une impression de disponibilité. Nous notons ces
éléments dans les extraits suivants
:
e1 : mh- euh- c'est vrai que je préfère
quand les tables sont disposées en U ça permet de
circuler plus facilement et- je sais pas y'a un/y'a un
sentiment que la/que la classe est
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plus unie en fait alors que
quand c'est en rangée normale je sais pas c'est/c'est un peu plus
divisé et euh-- ouais à part ça non je vois pas
m : la formation en U elle te permet non seulement de
passer plus facilement d'un apprenant à l'autre mais également
d'encourager les interactions entre les apprenants
1e : ouais c'est vrai ouais y'a ça aussi ouais
ils/ils sont pas obligés de se retourner pour euh- ouais ouais et puis
c'est mieux en en îlot ouais ça je le fais quand je fais des trucs
en groupe bah c'est plus pratique de--
m : / c'est plus facile pour les observer pour les surveiller
et les aider même e1 : oui
Ici, l'enquêté fait de lui-même le lien
entre l'organisation de l'espace et la facilité de déplacement.
Il évoque également l'idée d'une «unification»
de la classe. Nous supposons que cette idée d'unification induit une
facilité des échanges entre les apprenants. Dans le même
entretien, le lien entre organisation et échanges est fait de nouveau
:
e1 : bah j'essaye de pas euh-- soit pour équilibrer
les niveaux quand on fait des groupes pour pas que tous les bancs se
ressemblent [***J sur la même table et sinon et bah j'essaye euh- de
mélanger les groupes pour pas que- que ce qui se connaissent restent
tout le temps ensemble
Dans cet extrait, l'enquêté met en avant le fait
que l'organisation spatiale est une opportunité double :
opportunité pour l'enseignement de créer des groupes de niveau,
et opportunité d'effectuer un brassage des apprenants pour encourager
les interactions sociales.
Dans cette idée d'interactions sociales, on souligne un
dépassement de l'enseignement/formation/éducation comme pratique
de transmission des savoirs et accompagnement à la conceptualisation de
ces connaissances : les apprenants sont des êtres sociaux, dont les
interactions se poursuivent en dehors de la classe. Cet élément
s'avère très intéressant pour notre partie sur la
cohérence en cela que les approches modernes sont censées
encourager la création et la résolution de conflits
socio-cognitifs, mais n'ayant pas été approfondi, nous ne l'avons
pas inclu dans notre partie précédente.
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Nous avons également noté que ces interactions
entre apprenants peuvent être dérangeantes si elles excluent
l'enseignant :
m : d'accord donc les déplacements que tu fais
semble encourager les interactions entre toi et les élèves est-ce
que tu penses qu'est-ce que tu pourrais faire d'après toi pour
encourager les interactions entre les élèves entre eux
e3 : euh bah j'ai pas eu besoin de le faire parce qu'ils
le faisaient d'eux-mêmes un peu trop facilement *rires*
m : *rires* d'accord je vois ce que tu veux dire
e3 : euh c'est un peu pour rappeler un peu les
étudiants que j'avais c'était surtout des réfugiés
tous ou pour la plupart arabophone et et du coup ils se donnaient les
réponses entre eux enfin ils se faisaient des blagues entre eux et
j'étais un peu toute seule à pas rigoler parce que je comprenais
pas tu vois
2. Formation par illustration
Nos entretiens semblent avoir également mis en avant un
besoin ou une envie de la part des enseignants en formation, notamment en
matière de formation. Nous avons précisé dans notre
première partie qu'une initiation aux concepts de ce présent
travail était manquante à leur formation, mais nous n'avons pas
précisé quelle forme cette initiation était censée
avoir : dans le cadre de notre module, nous en avons fait le sujet principal.
Or, ces éléments peuvent être travaillé
autrement.
L'enquêté 3 nous a par exemple expliqué
que son stage avait débuté par 20 heures
d'observation :
e3 : oui euh- pour mon premier semestre j'avais
fait vingt vingt heures d'observation à peu près
m : d'accord c'est pas mal du coup euh- tu as pu voir un
enseignant très expérimenté ou moyennement
expérimenté d'après toi
e3 : euh je dirai très expérimenté et en
plus c'était pas un enseignant natif
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m : un enseignant quoi pardon
e3 : c'était pas un enseignant c'était un
enseignant non natif
m : ah d'accord
e3 : donc ça rendait encore plus
intéressant l'observation parce qu'on répondait
à
des problèmes que j'aurais pas
forcément vu en temps que native
m : d'accord ça t'a permis de remettre un petit peu en
question ta position
e3 : oui oui oui oui
Il conclut que cette observation, réalisée avec
un enseignant non-natif (ce qui soulève la question des
représentations du natif), lui a permis d'évoluer et de changer
ses perceptions. A cette idée d'évolution des perceptions via
l'observation, nous souhaitons ajouter cet extrait issu de l'entretien n°2
:
m : d'accord est-ce que vous avez eu l'occasion de voir
beaucoup de vidéo de pratique de classe dans le cadre de votre formation
pour voir comment les gens enseignent justement
e2 : euh je me souviens en sociolinguistique Mme xxxxxx
nous avait fait voir une vidéo d'un enseignant d'un enseignant dans le
sud je crois et c'était et qui avait des élèves
russophones arabophones et du coup ils travaillent sur le français et il
demandait comment ça se disait en arabe comment ça se disait en
russe et il faisait répéter à tout le monde en
fait
Nous souhaitons croiser cette réflexion à notre
propre expérience pour la création du module de formation en nous
concentrant particulièrement sur la difficulté à trouver
des vidéos de pratique de classe. Il nous semble que l'utilisation de
vidéos de pratique de classe comme support pédagogique dans la
formation des enseignants de FLE pourrait être intéressante, et
que les enquêtés partagent cette supposition avec nous.
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VI. Discussion Finale
A. Discussion sur la méthode
1. Méthode de travail et rédaction
Avant de nous attarder en détail sur les
résultats globaux de cette étude, il nous semblait important de
revenir sur la méthode utilisée et afficher une posture critique
face au travail réalisé au cours de ce mémoire.
La rédaction de ce mémoire s'est
accompagnée de recherche en méthodologie du mémoire
universitaire et du mémoire de recherche, mais d'évidentes
discordances sont présentes entre les méthodologies
proposées et les habitus de travail des rédacteurs. Nous voulions
finir de rédiger intégralement notre cadre théorique et le
faire corriger avant de débuter la phase de recherche afin d'avoir la
certitude de la cohérence générale de notre travail, mais
également de notre connaissance du sujet.
Or, les impératifs méthodologiques et des
impératifs extérieurs ont chamboulé grandement nos
souhaits de rédaction, ayant engendré la création d'une
partie supplémentaire à une période bien trop proche de la
date de rendu du présent document pour notre confort.
Parmi les impératifs méthodologiques, nous
noterons la difficultés à comprendre la différence entre
hypothèses de recherches et items, mais également les
différents types de recherches possibles qui ont engendrés un
soucis de cohérence entre les différentes étapes de notre
protocole, rendant notamment l'utilisation des questionnaires (rendus
inadéquats) délicate.
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Parmi les impératifs extérieurs, nous pouvons
noter en premier lieu la discordance entre l'emploi du temps des sondés
(étudiants de M1) et l'emploi du temps du chercheur, ainsi que les
obligations institutionnelles (mémoire à faire en un an, voire
moins).
En conséquence, la présente recherche souffre de
soucis d'articulation des différents éléments du protocole
de recherche, mais également de la précipitation du chercheur
à la réalisation de certaines étapes.
Nous avons également éprouvé des
difficultés à trouver le «juste milieu» en terme de
présentation de données pour le cadre théorique : est-il
trop descriptif ? Pas assez critique ? Ne présentent-ils pas assez de
travaux réalisés dans les domaines présentés ?
Force nous a été de constater que nous ne possédions pas
nécessairement les outils pour lire des documents de recherche et y
poser un oeil critique concernant la validité des données
proposées ou des conclusions faites. L'une des plus grosses
difficultés de ce mémoire a été de savoir quand
s'arrêter de lire : quelle quantité de lecture, de savoir,
est-elle suffisante ? En luttant toujours contre la peur de «manquer»
le document important ou le nom d'auteur fondamental. Il s'avère que
c'est également un piège dans lequel nous sommes
tombés.
2. Menée de la recherche
Nous nous sommes également rendus compte en fin de
recherche de la possibilité d'inclure un autre type de public, notamment
des étudiants en didactique de l'anglais ou de l'allemand, pour lesquels
nous pensons que cette étude aurait également pu être
pertinente. Nos habitus de conceptualisation et d'articulation de nos
recherches autour du public «étudiants de FLE» ne nous a pas
permi de réaliser cela plus tôt. Ce mémoire aura donc
également été l'occasion pour nous de faire évoluer
nos représentations.
En ce qui concerne la recherche en elle-même, nous avons
noté une grande disparité entre les étudiants ayant
débutés la recherche et les étudiants l'ayant menés
jusqu'au bout. Ce facteur est lié à la discordance d'emploi du
temps dont nous faisions état dans la partie
74/109
précédente : une grande partie des
étudiants de didactique du FLE de l'université ne sont pas
français. A la date de présentation du module, la plupart
était rentré chez eux.
Nous souhaitons également évoquer notre
inexpérience dans la menée des entretiens comme facteur pouvant
nuir aux résultats de la présente recherche : il nous est apparu
clair lors de la retranscription et de l'analyse verbale que nous étions
passés à côté d'éléments importants et
très intéressants pour notre étude. Il nous est
également apparu clair que notre formulation de certaines questions
était maladroite ou trop directe. Un soin plus poussé aurait
dû être accordé aux entretiens et à leur
menée.
Enfin, nous avons abordé la difficulté à
vérifier l'un de nos items de recherche, à savoir la
cohérence, sans observation in situ des étudiants en situation
d'enseignement. Il nous semble évident, avec du recul, que notre
recherche aurait dû posséder une étape observation.
B. Discussion sur les résultats 1.
Présentation des résultats
Suite aux éléments mis en avant dans notre
partie «discussion sur la méthode», il semble évident
que les résultats de la présente recherche doivent être
interprétés avec prudence. Pourtant, à la question :
de quelle façon une initiation au concept de la communication
non-verbale, de la gestuelle et de la gestion de l'espace influence-t-elle la
pratique des enseignants débutants de Français Langue
Etrangère ? Nous pouvons tout d'abord de noter que cette
initiation a bel et bien un impact dans la représentation des
étudiants. Notre étude ne nous a pas permis de mesurer un impact
sur la pratique.
Nous avons également pu vérifier notre
hypothèse nécessaire de travail, c'est à dire : est-ce
qu'une telle formation est manquante à la formation initiale des futurs
enseignants. A partir de là, nous avons pu, au travers une analyse
textuelle du corpus des entretiens, mettre en avant quatre catégories
générales d'évolution.
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En premier lieu, nous avons mis en avant des modifications
dans le domaine de la communication : suite à la formation, les
étudiants semblent plus attentif à la distance qu'ils prennent
avec les apprenants. Ils comprennent que cette distance est importante pour la
transmission et l'efficacité des méthodes d'enseignement. Ils
accordent généralement un soin renouvelé aux gestes de
transmission. Au niveau de la communication verbale, ils font visiblement plus
attention aux éléments paraverbaux (posture, ton, qualité
de la langue).
En second lieu, nous avons mis en avant des changements dans
les éléments de gestion de l'espace : les étudiants font
plus attention à se déplacer dans l'environnement de travail. Ils
comprennent que les agencements didactiques dictent les déplacements, et
que ceux-ci sont fondamentaux pour interagir avec les apprenants et encourager
les échanges entre apprenants.
Enfin, nous avons également noté deux domaines
d'évolution que nous n'avions pas prévu : tout d'abord, un
changement dans la perception des interactions entre les apprenants. Les
apprenants sont considérés comme des êtres sociaux dont les
interactions dépassent uniquement le contexte de la salle de classe.
Enfin, nous avons cru souligner un besoin, ou une envie d'illustration des
pratiques dans la formation, qu'elle passe par une observation obligatoire en
classe de langue ou par l'utilisation de vidéos de pratique comme
support pédagogique au cours de la formation.
Comme précisé plus tôt dans le
présent document, la présente étude ne nous a pas permis
de mesurer une évolution dans les pratiques effectives, faute
d'observation en salle.
2. Propositions
L'une des ambitions premières du présent travail
résidant dans une proposition de module de formation pour les
étudiants de FLE de l'Université du Mans. Suite au présent
travail, notre ambition s'est vue grandement réduite. Pourtant, nous
estimons que les concepts abordés et les études citées
sont d'une certaine importance et font écho aux souhaits et
76/109
besoins des apprenants. Pour la plupart, le stage de formation
en M1 est la première expérience de l'enseignement, et pour peu
que ce stage soit mal ou pas encadré, cette première
expérience ne laisse pas forcément l'occasion de fleurir ou
évoluer positivement.
Nous ferons ainsi deux propositions dans cette partie.
En premier lieu, nous proposons d'encourager l'utilisation de
vidéos de pratique de classe au cours de la formation des futurs
enseignant de français Langue Etrangère, afin de leur permettre
une illustration de la pratique enseignante du FLE. Ces vidéos
permettent également d'illustrer des nombreux publics que les
étudiants ne connaissent pas forcément : leur formation semble
les prédisposer à la pédagogie, or nombreux sont ceux qui
enseignerons à des adultes. De plus, l'utilisation de vidéos
comme supports pédagogiques permettraient d'offrir des premières
bases d'analyse pour l'observation effective en classe réalisée
au cours de leur formation, et fournir des éléments d'analyse de
pratique réflexive..
Enfin, nous proposons également la mise en place d'un
module de formation, qui pourrait être articulé autour de
l'analyse de vidéo de pratique de classe. Il n'est pas question ici
d'établir «les bons gestes» ou «les mauvais gestes»,
mais de s'appuyer sur la recherche-action en science de l'éducation pour
former au mieu les futurs enseignants en langue, notamment en leur exposant des
travaux réalisés articulant enseignement et organisation
spatiale, communication non verbale, interactions....
77/109
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84/109
VIII. Annexes
A. Grille des questionnaires
Introduction
Ce questionnaire s'inscrit au sein d'une étude en trois
étapes menée dans le cadre de la rédaction d'un
mémoire de Master II, Métier du FLE, réalisé
à l'Université du Mans. Les réponses apportées
à ce questionnaire seront anonymes, et ne serviront qu'à
l'étude réalisée. Cette étude a pour but de
vérifier les hypothèses apportées par l'étudiante
dans le cadre de son mémoire et d'effectuer un premier état des
lieux de la pratique des enseignants débutants avant de mettre en place
le module (étape 2), et faire un état des lieux final de la
pratique des enseignants via un dernier questionnaire par mail (étape
3).
L'étudiante tient à remercier chaleureusement
les volontaires à cette étude.
Légende
1. Tout à fait d'accord
2. Plutôt d'accord
3. Ni en désaccord ni d'accord
4. Pas vraiment d'accord
5. Pas du tout d'accord
Questionnaire
Début du cours :
Merci de raconter de manière courte les
éléments de votre «rituel» quand vous vous installez en
classe. Notez-y toutes les choses que vous faites (s'installer au bureau,
écrire la date au tableau, passer dans les rangs, vérifier le
travail de la veille, ouvrir / fermer les volets...). Les petits détails
sont importants ! Si vous n'avez pas de rituel particulier, laissez cette
partie vierge.
De manière générale :
1.
|
Mon «rituel» est fixe.
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|
|
2.
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Au cours du «rituel», je laisse la parole aux
élèves.
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3.
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Je suis mobile, je me déplace dans ma salle.
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4.
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Je reste au bureau
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|
|
J'explique une consigne :
Vous expliquez une consigne, le déroulement d'un
exercice, ou un point de grammaire. Visualisez la scène et
répondez aux questions.
5.
|
Je me sers beaucoup des outils à ma disposition
(tableau, crayons, image, outils informatiques...)
|
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6.
|
Je fais des gestes, j'utilise mes mains pendant les
explications.
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7.
|
Je reformule, je change des mots, j'interroge les apprenants.
|
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8.
|
Je suis debout, je me déplace.
|
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|
Pendant une activité :
Vous avez expliqué les consignes. Vos apprenants sont
maintenant au travail.
9.
|
J'exige le silence.
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|
|
|
10.
|
Je me penche au dessus de mes élèves pendant les
activités pour les aider.
|
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11.
|
Je privilégie les activités de groupe aux
activités individuelles.
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12.
|
Je me déplace dans les rangs.
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|
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|
13.
|
J'ai peur d'interrompre les élèves quand ils
travaillent.
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14.
|
Je n'hésite pas à participer aux activités
avec les élèves.
|
|
|
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85/109
|
15.
|
L'essentiel de mon cours se déroule :
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15.1
|
Assis à mon bureau
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15.2
|
Debout devant le tableau
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|
|
|
15.3
|
Debout dans les rangs
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|
|
|
15.4
|
Autre (merci de le préciser en dessous)
|
|
|
|
|
|
Dans ma salle de classe :
16.
17.
Je déplace les meubles (tables, chaises...)
Ma salle est personnalisée (affiches, posters...)
Divers : (le titre sera à reformuler)
18.
20.
J'utilise des gestes spécifiques dans des situations
précises (doigts qui marchent pour le verbe aller, gestes
répétitifs porteurs d'un sens précis....)
Je respecte une distance physique avec les apprenants.
86/109
Démographie
Cette partie a pour but de mettre en avant des
caractéristiques démographiques de l'échantillon de
population interrogé. Merci de répondre aux questions le plus
précisément possible.
Age
|
|
Sexe
|
|
Pays d'origine, langues parlées
|
|
Parcours scolaire
Préciser l'année d'étude en
cours
|
|
87/109
Expériences d'enseignement Préciser toutes les
expériences (stage, expériences professionnelles,
expériences dans le cadre de la formation... heure, public, niveau
idéalement, lieu)
88/109
B. Fiche du module
Module de formation
Approche interrogative se basant sur les connaissances et les
expériences des participants
Rappel de la problématique du mémoire : De
quelle façon une initiation au concept de la communication non-verbale,
de la gestuelle et de la gestion de l'espace influence-t-elle la pratique des
enseignants débutants de Français Langue Etrangère
?
Objectifs et problématique du
Module
Les éléments de gestion de l'espace et
du corps sont fondamentaux dans les approches nouvelles. Quoi d'autre
peuvent-ils influencer ? Les enseignants fondent leur pratique sur leur
formation et leur expérience d'élèves, leur
expériences d'élèves n'ayant pas toujours eu des cours
menés par des enseignants formés aux approches nouvelles, et leur
formation ne laissant pas toujours la place à la pratique ou à
l'étude des concepts proposés.
Le module proposé a pour but de faire s'interroger les
participants sur des éléments de gestion de l'espace et du corps
et leur lien avec les approches nouvelles d'enseignement et leur propre
pratique, telles que vues dans leur formation d'enseignant de FLE.
Choix du support
https://www.reseau-canope.fr/BSD/sequence.aspx?bloc=885614
Le module s'articule autour de la diffusion d'une vidéo
de pratique de classe trouvée sur la banque de ressources du site
Canopé. A noter que ce site ne propose pas de vidéos de pratique
de l'enseignement du français comme langue étrangère, et
moins encore qui ne soient pas directement commentées (il y a peu de
vidéos sans commentaires). Pour cette raison, mon choix s'est
porté sur une vidéo de l'enseignement de l'anglais langue
étrangère. Le cours se déroule en langue cible, ce qui est
cohérent avec les standards de formation actuelle. Le niveau n'est pas
trop élevé afin que les participants à l'étude ne
se perdent pas à essayer de comprendre ce qui se dit au lieu de se
concentrer sur ce qui se fait.
Le découpement des phases de cette vidéo est
clair et permet d'aborder les questions posées en début de
séance au cours de divers moments de formation : phase d'exposition de
nouveaux concepts, phases d'explication des consignes, phase de
réinvestissement des concepts abordés.
Si la vidéo n'est pas très «riche» en
terme d'illustration des éléments proposés, elle a pour
objectif secondaire d'engager la réflexion sur les
éléments proposés et n'a pour cette raison pas besoin
d'être l'exemple parfait de tous les concepts que je souhaite aborder.
89/109
Déroulement du cours
I. Mise en place, présentation des
consignes
Après avoir laissé le temps aux participants
à l'étude de s'installer dans la salle de classe, on notera au
tableau le «titre» du module : Gestion de l'espace et du corps
dans la pratique enseignante. On présentera ensuite le
déroulement du module. On distribuera un tableau à remplir en
visionnant la vidéo :
La vidéo présentée à la classe
montre une séance d'enseignement de l'anglais LE à une classe de
CE2-CM1. Observez-la attentivement et tentez de définir la
méthode d'enseignement de LE utilisée. Essayez de repérer
dans cette vidéo les éléments de gestion de l'espace, de
gestion du corps et de gestuelle présents et remplissez le tableau.
II.
Gestion de l'espace
Corps
Gestes
Autres
Visionnage de la vidéo et travail en
groupe
On diffusera ensuite la vidéo en laissant aux
participants le soin de remplir le tableau distribué. On ne fera pas de
commentaires afin de ne pas orienter le visionnage et la réflexion
(à ce stade du module). Une fois le visionnage terminé, on
invitera les participants à travailler en groupe pour comparer les
éléments relevés en passant parmi eux pour répondre
à d'éventuelles questions.
III. Mise en commun
Le travail de mise en commun a pour but de pousser la
réflexion hors de la vidéo. On fera donc le point sur ce que les
participants peuvent dire de ce qu'ils ont relevés de la vidéo,
en ajoutant des éléments qu'ils n'auraient pu ne pas voir si
nécessaire. Une fois cette mise en commun réalisée, on
pourra alors poser des questions orientées afin d'amener la
réflexion.
Notamment : à quoi tel geste, telle posture, peut-il
servir ? Quel peut être l'impact d'un geste utilisé ? Pourquoi
l'enseignant se déplace dans la classe ? Quelle différence
y'a-t-il entre dire non de la tête en silence et dire non de la
tête en verbalisant le non ? Retrouvez-vous ces gestes dans votre
90/109
pratique ? Avez-vous vu ces gestes dans votre formation en
langue ? Que pouvez-vous dire de la gestion des meubles, de la
décoration ? Auriez-vous fait les choses différemment ? Comment ?
D'après-vous, comment ces éléments varient-ils d'une
méthode d'enseignement à une autre ? [...]
On invitera les participants à ajouter des
éléments dans ce tableau, même s'ils n'apparaissent pas
dans la vidéo, en se basant notamment sur leur propre
expérience.
IV. Bilan
La partie bilan permettra de faire le point sur ce qui a
été vu, et les différences qu'il peut y avoir entre les
différentes méthodes d'enseignement du point de vue de la gestion
du corps/de l'espace dans la classe. Afin d'offrir des pistes de
réflexion au delà des éléments abordés
pendant le cours, et surtout de réflexion après le cours, on
posera quelques questions finales sur les thèmes suivants si elles n'ont
pas été abordées dans la partie précédente
:
- Utilisation de la LSF en classe comme geste de
«renfort» (petite explication des différents types de geste si
nécessaire / pertinent)
- Déplacement du mobilier : pourquoi faire des ilôts
?
- Toucher les apprenants : intrusion ou réconfort ?
91/109
C. Grille des entretiens semi-guidés
Retour sur expérience :
détailler ce qui a été fait pendant le module
pour voir si l'enquêté s'en rappelle et par conséquent s'il
a pu modifier sa pratique ou ses représentations.
Vérification hypothèse : Ces
notions ont-elles été abordées dans sa formation ?
Si oui : Ca en a été l'intitulé ? Ca en a
été un sujet «sous-entendu» ? De quel cours
s'agissait-il ? Quel travail as-tu réalisé ? Comment cela a-t-il
été présenté ? Supports utilisés par
l'enseignant ? D'après toi, quel était l'objectif de travail de
tels sujets dans ce cours ?
Si non : Est-ce que pour toi, ces concepts auraient du sens
dans la formation d'enseignant de FLE ? Est-ce un manque «grave» ?
Comment serait-il possible de les aborder ? Pour quelle raison les aborder ?
Quels impacts positifs cela pourrait-il avoir sur ta pratique d'enseignante
?
Dans ta formation, tu as du avoir un cours de création
de séquences/séances pédagogiques, est-ce bien le cas ?
As-tu remarqué des changements dans les activités que tu
proposes, dans la manière de les présenter, de les construire, de
les envisager, dans le choix de tes supports, tes documents, la manière
de les introduire, de les travailler depuis le cours que nous avons eu ? Est-ce
que tu essayes de prévoir des activités qui, tu le sais, vont
nécessiter des changements dans l'espace (travail en groupe...) ?
Est-ce que tu déplaces plus les meubles maintenant ? Tu
préfères quels arrangements ? Pourquoi ? Qu'en est-il de la
décoration ? Pédagogie de projet ?
Est-ce que, depuis ce cours, tu as remarqué des
changements dans la manière dont tu t'adresses à tes apprenants ?
Notamment au niveau de la distance que tu peux prendre, du ton ? Tu penses
être un peu plus sensible à ça ?
92/109
D. Transcription Entretien 1
Entretien n°1 - E1 Durée : 13
minutes
M : Moi, la personne qui pose des questions.
E : Enquêté
m : J'aimerai savoir si c'était possible si tu pouvais
commencer par te présenter dire ton nom ton prénom ton âge
et- ce que tu fais dans la vie très rapidement
e : *rires* t'as pas la même voix que d'habitude *rires*
euh- j'm'appelle xxxxx euh-xxxxxx, je suis en Master 1 de- didactique de
français euh- l'année prochaine je passe en master 2, j'ai
vingt-cinq ans et puis voilà
m : félicitations pour ton passage dans une autre classe
j'ai
e : //c'est pas encore officiel
m: //j'ai une deuxième question- qui est purement pour
la forme, est-ce que tu m'autorises à utiliser la vidéo que j'ai
réalisée pendant la présentation et l'enregistrement de
cette conversation à des fins de recherche
e : ouais
m : voilà comme ça tu n'as pas besoin de signer
de papier, j'ai ton accord verbal et pour moi c'est suffisant
e : *rires* okay
m : d'accord donc je vais passer aux questions des
entretiens/enfin de l'entretien si ça/si ça te va
e : /vas-ty vas-y
m : donc pendant la présentation que tu as suivi dans
le cadre de la recherche de mon master/de mon mémoire pardon nous avons
abordé différents concepts notamment celui de la communication
non verbale de la gestuelle et de la gestion de l'espace si tu te rappelles
bien est-ce que c'est quelque chose que tu as vu en cours auparavant
e: mhhh- j'pense pas non
93/109
m : euh- est-ce que pour toi c'est des concepts qui auraient du
sens est-ce ça aurait du
sens de les aborder dans ta formation d'enseignant
e : ---- mh- je sais pas
m : d'accord *rires* du coup c'est pas quelque chose qui manque
pour toi
e : non j'veux pas savoir/je sais pas ce que/ce que /ce que
ça m'apporterait en fait du
coup je sais/j'vais pas me prononcer/sur l'utilité ou pas
du/du/je sais pas ce que ça fait de plus
en fait
m : d'accord tu ne sais pas ce que ça fait de plus/est-ce
que tu te rappelles ce qu'on a vu
pendant pendant la présentation
e : un peu
m : est-ce que tu peux m'en faire un petit récapitulatif
voir si tu te rappelles de tout ça
*rires*
e : --long silence-- pp pp pp y'a une histoire de gestes je
pense
m : oui
e : euh- la/ en fait non
m: non tu t'en rappelles pas trop
e : j'ai j'ai j'ai des images mais je peux pas les mettre en
concept
m : d'accord je vais te refaire un résumé alors ne
t'en fais pas je suis là pour ça
e : *rires*
m : alors je vous ai proposé une euh- d'observer une
vidéo et de relever dans cette vidéo
des indices de ce que j'ap/de ce qu'on appelle la
communication non verbale de la gestuelle et de la gestion de l'espace donc en
communication non verbale et en gestuelle je vais mettre ça un petit peu
ensemble il y a tout ce qui est mouvement du corps gestion de la voix gestion
du ton gestion de la posture où est-ce que tu vas te placer dans ta
salle de classe par exemple quel espace tu vas mettre entre toi et tes
apprenants et au niveau de la gestion de l'espace ça va être
l'organisation de l'espace de ta salle de classe c'est à dire dire
est-ce que tu déplaces le mobilier est-ce que ta salle de classe est
décorée est-ce que tu places les apprenants ou est-ce que les
apprenants se placent eux-même il y avait cette histoire de /
d'organisation en îlots ou en rangs
e : /mh- ouais ouais ouais
m : /pour les meubles je ne sais pas si tu te rappelles on
avait également abordé l'idée d'utiliser des signes de la
langue des signes pour euh- pour euh- appuyer certaines idées ou
94/109
certains mots en langue française pour aider les
apprenants à s'en rappeler tout ça ce sont des
éléments de communication non verbale que j'avais souhaité
vous présenter et- la question qui du coup se posait était est-ce
que c'est quelque chose qui est présent dans votre formation et tu m'as
donc répondu que non est-ce que maintenant que tu /que je t'ai un peu
ré-expliqué tout ça tu as- une opinion concernant l'impact
ou l'importance que pourrait avoir une telle formation dans ta formation
d'enseignant de FLE
e : mh- euh- c'est vrai que je préfère quand les
tables sont disposées en U ça permet de circuler plus facilement
et- je sais pas y'a un/y'a un sentiment que la/que la classe est plus unie en
fait alors que quand c'est en rangée normale je sais pas c'est/c'est un
peu plus divisé et euh-- ouais à part ça non je vois
pas
m : la formation en U elle te permet non seulement de passer
plus facilement d'un apprenant à l'autre mais également
d'encourager les interactions entre les apprenants
e : ouais c'est vrai ouais y'a ça aussi ouais ils/ils
sont pas obligés de se retourner pour euh- ouais ouais et puis c'est
mieux en en îlot ouais ça je le fais quand je fais des trucs en
groupe bah c'est plus pratique de--
m : / c'est plus facile pour les observer pour les surveiller et
les aider même e : oui
m : d'accord dans ta formation donc en M1 tu as dû
recevoir des cours de création de séquences et de séances
pédagogiques c'est bien le cas
e : oui
m : d'accord est-ce que tu as remarqué des changements
dans les activités que tu proposes dans la manière de les
présenter de les construire de les envisager dans le choix de tes
supports de tes documents etc depuis la présentation que nous avons
eue
e : euh- avec le DEF(sic)
m : euh-
e : tu parles du/de/de la phase pratique mh- appliquée
devant--
m : alors de la manière dont tu prépares tes cours
depuis qu'on a eu la présentation
est-ce que y'a quelque chose qui a changé
e : euh- ah tu parles de la présentation que toi tu as
faite okay m : oui
e : euh---- non
95/109
m : d'accord ni dans la manière de présenter tes
cours donc ça n'a pas changé la manière dont tu les
construits mais est-ce que ça a changé un petit peu la
manière dont tu les présentes
e : tu parles par rapport à la gestion de l'espace et
à la communication non verbale m : voilà
e : euh mh mh mh non non
m : d'accord mh- est-ce que depuis cette présentation tu
as remarqué un soin différent
accordé à la façon dont tu te
déplaces dans ta salle de classe ou ça a vraiment rien
changé du
tout pour toi et je dois passer à l'autre partie de mes
questions *rires*
e : *rires* euh--- je non non
m : est-ce que au moins ça a un petit changé au
niveau de la/de la manière dont tu
envisages ta salle de classe en temps qu'espace de travail est-ce
que tu aperçois un peu plus
le potentiel des mobiliers le fait que tu peux déplacer
les tables déplacer le bureau déplacer les
meubles si tu veux
e : euh--- j'ai peut-être euh- mis plus d'espace entre euh
on dit rang ou rangée je
confonds les deux
m : // c'est la même chose
e : voilà okay je mets plus d'espace pour pouvoir circuler
plus facilement et ça aère un
peu la classe je trouve et puis voilà
m : pour toi circuler plus facilement c'est important dans une
salle de classe
e : ouais ouais ouais si je peux voir ce que certains
élèves font et pas ce que font les
autres euh- ça crée je sais pas / avec un /
ça met de la distance --- et ça met pas tout le monde
à également
m : est ce que c'est pour les surveiller et pouvoir aller les
aider si y'en / si y'a besoin
e : pour aller les aider
m : donc t'es pas vraiment dans cette attitude où tu
surveilles les élèves
e : ----
m : enfin la raison pour laquelle tu augmentes l'espace
e : //je fais je fais les deux en même temps
m : d'accord est-ce que tu essayes d'encourager les
déplacements de tes élèves parce
que toi tu te déplaces c'est bien mais est-ce que eux le
font
e : euh-- ouais
96/109
m : est-ce que tu peux me donner un exemple
e : bah j'essaye de pas euh-- soit pour équilibrer les
niveaux quand on fait des groupes
pour pas que tous les bancs se ressemblent [***] sur la
même table et sinon et bah j'essaye
euh- de mélanger les groupes pour pas que- que ce qui
se connaissent restent tout le temps
ensemble
m : d'accord t'essayes de brasser un peu les gens
e : voilà
m : est-ce que c'est quelque chose que tu faisais
également avant la présentation
e : ouais
m : d'accord donc au final elle n'a pas changé grand
chose pour toi
e : ouais
m : tu en as peut-être maintenant un peu plus conscience
maintenant que tu fais ces
choses là
e : ouais un peu plus
m : --- je prends des notes en même temps c'est pour
ça que je prends du temps
e : *rires*
m : est-ce que tu envisages dans le futur maintenant qu'on a
eu cet entretien et que je
t'ai remis un peu tout à l'esprit de faire euh- je ne
sais pas de de mettre en place des des des
décorations dans ta salle de classe uh- faire des
e : *rires* moi qui ai zéro décoration dans ma
chambre *rires* je ne crois pas
m : tu es un monsieur très pragmatique c'est
ça
e : ouais mais très minimaliste
m : d'accord c'est très bien le minimalisme
écoute ça te force à utiliser ce que tu as à ta
disposition au lieu de désirer plus
e : *rires*
m : bon bah ça aura été extrêmement
rapide avec toi je as-tu
e : c'est tout
m : non y'a un peu plus de questions mais comme tu m'as dit
que ça n'avait rien
apporté pour toi j'vais pas te refaire poser / te
reposer les mêmes questions qui qui ne
mèneraient à rien euh- si est-ce que tu as des
remarques à faire de / quelque chose que d'après
toi j'aurai pu oublier avant que j'arrête
l'enregistrement de cette conversation
e : euh---- à part en fait que j'utilise beaucoup les
gestes
97/109
m : t'utilises beaucoup les gestes de quelle manière
est-ce que tu choisis un sens
particulier pour un geste
e: euh- ouais je enfin j'ai pas compris que que tu as dit
répète
m : d'accord est-ce que tu utilises des gestes
spécifiques dans des situations précises
dans le sens où tu vas utiliser un même geste
pour dire une même idée de manière continuelle
e : //tu veux dire que c'est cohérent et que ça
change pas tout le temps et que j'utilise
pas le même geste pour exprimer plusieurs choses
m : voilà
e : euh ouais ouais c'est plutôt ça
m : et d'autres type de gestes que tu utilises t'es est-ce que
tu es quelqu'un qui parle
beaucoup avec ses mains de manière
générale ou qui parle beaucoup avec ses mains dans le
cadre des cours de fle
e : c'est une bonne question il faut que je m'en serve *rires*
mais je sais que quand
j'explique des mots euh- je là j'utilise beaucoup les
gestes
m : t'utilises beaucoup les gestes d'accord est-ce que c'est
inconscient ou est-ce que
c'est fait de manière consciente
e : ---- c'est spontanée
m : donc c'est pas fait de manière conscience
e : je je vois je me vois le faire mais je me dis pas tiens
maintenant je vais faire ce geste
là ce / ça vient naturellement
m : d'accord et bien écoute merci je ne vois pas trop
quoi rajouter, je vais donc arrêter
l'enregistrement et je te remercie beaucoup pour ta
participation
e : euh et bah écoute de rien
98/109
E. Transcription Entretien 2
Entretien n°2 - E2 Durée : 10
minutes
m : alors avant de commencer j'aimerais que tu certifies que
tu acceptes que cet enregistrement soit utilisé à des fins de
recherches juste au cas où
e : oui aucun soucis
m : et dans le même sens la vidéo qu'on a
réalisé pour le module pareil pas de soucis pour l'utiliser pour
toi c'est bon
e : pas de soucis
m : mh d'accord je vais donc commencer avec la première
question qui- concerne le module est-ce que tu rappelles ce qu'on a vu
commencer ça s'est passé c'est juste pour qu'on puisse se
remettre un peu dans le bain
e : okay euh- on s'est retrouvé à- une
matinée il me semble avec on était donc quatre plus toi on a
parlé on a regardé une vidéo et on a parlé des
différences euh- des différents mouvements que pouvait faire le
professeur euh- que ça soit au niveau des ses élèves mais
aussi pour la décoration de la classe par exemple
m : voilà tout à fait ça donc ces
concepts là ça a attrait à la communication non verbale
à la gestuelle et à quelque chose qui s'appelle les agencements
didactiques mais en gros c'est pour parler de la gestion de l'espace est-ce que
ce sont des choses que tu as vu en cours auparavant
e : euh- j'en ai pas le souvenir
m : pas du tout dans ta formation
e : je m'en j'en ai pas le souvenir d'avoir vu ça avant
après comme moi j'avais fait un campus international avant on m'avait
montré quelque trucs pour éviter que ça fasse trop formel
donc je savais quelques choses mais après est-ce que après on me
la redit en cours je suis pas sûre quoi
99/109
m : est-ce que `après toi c'est quelque chose qu'il
aurait été bien de voir dans ta formation initiale
e : définitivement je pense que ça aurait
été intéressant dans notamment le cours du premier
semestre où on doit donner un cours à des élèves
DELF je trouve que ça aurait été intéressant car
ça nous aurait permis de d'aller beaucoup plus loin dans notre
séquence et notamment de voir bah qu'est-ce qu'on pourrait faire pour
pour déplacer les tables etc faire des groupes et tout et je trouve que
ça aurait été plus intéressant pour nous
plutôt que de rester au niveau du tableau et d'attendre quoi
m : d'accord du coup dans les activités que tu proposes
est-ce que tu as remarqué des changements- quelconque après je
vais approfondir si tu veux
e : alors un petit peu plus après moi j'ai
changé de stage après euh- j'étais avec le DUARD et je
suis passée au campus d'été international et une des
choses qu'on a fait très rapidement avec xxxxxxx qui était aussi
qui a fait aussi la formation on a changé les tables de place moi je me
suis assise beaucoup plus sur le bureau des choses comme ça pour euh-
mais c'était aussi dans un cadre différent c'est à dire
que autant le DUARD toi être très sérieux le campus
d'été international on peut se lâcher un peu plus
m : c'est un peu plus détendu
e : c'est un campus d'été c'est ça
m : et au niveau des supports et des documents que tu utilises
est-ce que tu as noté des différences
e : euh- alors j'ai pas beaucoup utilisé de documents
après donc je pourrai pas te dire là tout de suite euh moi
j'avais utilisé pour après j'avais utilisé beaucoup plus
de musique notamment un un petit moins de choses écrites et un petit
moins de texte et un petit peu plus de on va dire un peu plus d'écrits
formellement
m : est-ce que ces activités ce sont des
activités qui se font en groupe donc les apprenants doivent se rejoindre
ou c'est quelque chose qui se fait en classe de de manière
générale
e : alors j'ai tenté de les faire en- en individuel et
je me suis rendue compte au au campus d'été on s'est
retrouvé avec des élèves niveau A1
m : d'accord
e : donc on était obligé de faire en groupe
là en catastrophe le premier cours j'ai tout fait en groupe au final
mais là l'origine moi je voulais faire ça individuel pour que moi
je puisse
100/109
aller les voir tous un par un après euh- au fur et
à mesure on a fini par faire ça en groupe c'est plus simple
m : d'accord et du coup au niveau de la manière de
présenter tes cours maintenant que tu peux euh- que tu as un peu plus de
libertés est-ce que tu te rends compte que tu te déplaces un peu
plus dans la salle de classe par exemple
e : euh- là définitivement je pense que je me
suis beaucoup plus déplacée qu'avec le DUARD notamment parce que
et puis ce qui a beaucoup aidé le fait qu'on a j'avais pas une classe
moi avec des rangs perpendiculaires euh- voilà j'avais fait des
îlots alors en fait pour moi c'était beaucoup plus simple
même de travailler de traverser d'aller voir les élèves etc
plutôt que d'avoir de devoir limite pousser les élèves pour
aller voir quelqu'un qu'était au bout quoi
m : d'accord est-ce que du coup tu as remarqué des
changements dans la manière dont tu t'adresses à tes
apprenants
e : --- un peu plus ouais je- je fais beaucoup plus attention
je faisais déjà très attention à commencer je
parlais etc mais beaucoup plus après je me suis dit faut vraiment faire
très gaffe au niveau de l'oral quoi donc euh- j'essayais de parler de
manière beaucoup plus posée de reformer de reformuler beaucoup
plus mes phrases des choses comme ça
m : tu es beaucoup plus attentive à la qualité de
ta langue
e : exactement
m : d'accord et ta posture aussi ton ton ces choses-là
jouent
e : euh- j'pense que oui parce qu'après j'étais
euh- je pense que si t'en parles à mes
élèves DUARD ils te diront que j'étais
pas une prof très stricte *rires* mais au- au campus d'été
ai j'ai essayé d'être vraiment de de m'asseoir au même
niveau qu'eux beaucoup plus souvent DUARD comme j'écrivais beaucoup au
tableau je restais debout euh- j'ai fait donc de m'asseoir beaucoup euh- j'ai-
là avec le campus international euh- j'ai pas hésité
à m'accroupir pour pour regarder ce qu'ils faisaient eux ils
étaient un petit peu au dessus de moi comme ça pour pour essayer
de mettre une autre relation dans la classe que prof élève
quoi
m : et du coup pour toi ce changement de posture il fait que
tu es pas très sévère
e : en fait j'ai jamais été une prof
sévère en fait au final donc voilà mais ça
évite de surtout qu'en fait j'ai surtout j'ai tendance un petit peu moi
personnellement dans ma tête m'énerver alors Mr xxxxxxxxx s'en
aperçoit pas il dit que je suis très calme avec mes
élèves
101/109
donc c'est bien mais en fait moi dans ma tête je le
ressens là par exemple au travail là toute l'après-midi
y'a des moments où dans ma tête je vais être en train de
crier quoi en gros et euh- et le fait de changer de position assez
régulièrement ça m'aide moi aussi à m'éviter
de trop m'énerver quoi et de de de de par exemple donner une
réponse alors que je l'attends quoi
m : d'accord ça te permet de passer à autre
chose
e : exactement de pas euh- de pas dire bah la réponse
c'est ça et puis on passe à autre
chose parce que je commence à m'énerver moi
intérieurement donc comme ça j'attends un
petit peu plus en changeant de position tout simplement
m : d'accord euh- est-ce que tu as l'impression d'être
beaucoup plus détendue du coup
dans ta pratique
e : oui
m : le fait de te déplacer et de changer ce rapport avec
les apprenants ça te détend
beaucoup plus d'accord
e : oui oui définitivement
m : d'accord donc euh- euh- tu as répondu à toutes
mes questions donc si tu prépares
une activité avec une approche communicative tu vas pas
euh- tu vas pas la présenter avec
une comme juste un cours traditionnel où tu donnes
l'activité à faire aux apprenants
e : non
m : tu es beaucoup plus dans la gestion de classe tu te
déplaces tu communiques
e : exactement
m : bon et bien écoute je te remercie
F. Transcription Entretien 3
Entretien n°3 : E3 Durée : 13
minutes
102/109
m : alors euh- pour commencer du coup l'enregistrement de
l'entretien j'aimerais avoir
ton accord verbal que tu es d'accord pour que ce soit
enregistré
e : oui oui je suis d'accord
m : d'accord et j'aimerais également savoir si tu es
d'accord pour que la vidéo que j'ai
réalisée pendant le module soit utilisée
à des fins de recherche
e : oui
m : d'accord merci beaucoup c'est sympathique
e : [***]
m : euh- ma première question c'est pas vraiment une
question par rapport à ce qu'on a
fait c'est plutôt une remise en contexte est-ce que tu
te rappelles un peu de du module
e : oui
m : comment ça s'est passé qu'est-ce qu'on a
vu
e : euh- oui du coup on avait enfin vaguement quoi parce que
c'était y'a deux mois à
peu près euh- tu nous avais lancé enfin tu nous
avais expliqué pourquoi tu faisais ce module
et du coup tu nous avais montré une vidéo d'une
enseignante enfin d'une institutrice qui
faisait un cours d'anglais je crois
m : oui
e : et donc du coup euh- fallait qu'on note son
déplacement dans les salles ou euh- euh-
l'agencement de la salle des choses comme ça je
crois
m : oui
e : voilà et c'est tout ce dont je me souviens
m : voilà c'est ce qu'on a fait c'est ce qu'on a fait
est-ce que c'est quelque chose que tu
as vu auparavant en cours les déplacements dans la
classe la gestion de l'espace
e : euh- très très vaguement c'est très
succinct on va dire
m : est-ce que tu peux me dire dans quel contexte ça a
été vu
e : c'était juste je crois des anecdotes que les
enseignants nous donnaient par rapport à
leur profession des choses comme ça
m : d'accord donc ce n'était pas le sujet d'un cours
e : non
m : c'est c'était vraiment dans le cadre du cours
l'enseignant ou les enseignants ont
raconté des petites anecdotes c'est ça
e : oui oui
103/109
m : euh- du coup d'après toi est-ce que ce sont des
concepts donc la communication non verbale la gestuelle et la gestion de
l'espace qui auraient qu'il faudrait voir dans la formation d'enseignant de
FLE
e : euh- je pense oui
m : du coup dans ta formation à toi ça n'a pas
été vu est-ce que tu penses que c'est un manque grave
e : je sais pas si c'est grave mais c'est quelque chose enfin
que je pense avoir travaillé toute seule de mon côté en
fait
m : d'accord dans le cadre de ta formation on a eu la
même je fais des suppositions mais normalement ça devrait
être bon tu as eu des cours où tu devais créer des
séquences pédagogiques
e : oui
m : donc c'est bien le cas
e : oui
m : d'accord est-ce que depuis qu'on a réalisé
le module tu as remarqué des changements dans les activités que
tu proposes euh- dans ton stage dans ta dans ta pratique enseignante
e : euh- pas vraiment j'ai peut-être essayé de
bouger un peu plus euh- dans la salle euh-mais sans plus enfin c'est un peu
compliqué en même temps quand on peut pas bouger le mobilier les
choses comme ça
m : d'accord donc au niveau de la création des
activités y'a pas de différences par contre toi tu te rends
compte que tu fais un peu plus attention à la manière dont tu te
déplaces c'est ça
e : oui oui
m : d'accord est-ce que- tu- donc t'essayes pas de
prévoir des activités en de de manière un peu plus
précise tu fais attention à la manière dont dont tu te
déplaces est-ce que tu fais attention à la manière dont tu
t'exprimes à la posture que tu prends
e : euh- j'ai pas l'impression d'avoir changé avant le
module et après
m : euh- d'accord pareil au niveau des gestes est-ce que tu
fais un peu plus attention à ça
e : euh- bah non pas trop non enfin en fait j'ai pas enfin
j'avais l'impression de déjà appliquer les conseils que tu nous
avais donnés avant de faire le module
104/109
m : d'accord d'accord pas de soucis euh- les réponses que
je vois du questionnaire que
tu m'as données elles sont en accord avec ce que tu dis
sauf au niveau de la mobilité en fait
tu
e : oui
m : tu disais que avant tu n'étais pas du tout mobile
t'avais tendance à rester à ton
bureau
e : ouais enfin au tableau du coup pas forcément au bureau
en fait
m : dans une espèce de zone de confort face aux
élèves c'est ça
e : ouais ouais
m : d'accord est-ce que tu es y'as des choses qu'est-ce que
ça change pour toi de
changer tes déplacements comme ça est-ce que tu te
sens plus à l'aise c'est juste pour être
plus proche des élèves
e : et du coup enfin les apprenants étaient plus enfin
avaient plus envie de de
d`apprendre enfin je sais pas comment expliquer c'est juste
j'allais les voir quand assez souvent pour voir s'ils avaient des
problèmes ou pas et que je les assistais un à un ils
étaient plus euh- ils nous demandaient plus de venir des choses comme
ça j'avais moins à j'étais moins loin pour eux
m : d'accord comme tu es déjà en déplacement
ça leur pose moins de problème de te
demander de te déplacer
e : oui
m : que lorsque tu es immobile face au tableau et pour toi c'est
bénéfique d'encourager
les interactions avec les apprenants comme ça
e : bah carrément
m : oui oui c'est une question un peu bête mais euh-
*rires*
e : non non mais je vais répondre enfin carrément
il ils sont enfin ils sont plus motivés
ils ils voyent (sic) que je fais plus attention alors
forcément ils vont faire plus attention de leur
côté aussi et mettre plus d'effort dans ce qu'ils
font
m : bah c'est très encourageant tout ça j'ai envie
de dire
e : *rires*
m : donc t'essayes de moins rester au tableau d'accord est-ce que
donc on a parlé
également de la distance avec les apprenants est-ce que tu
te rends compte que t'es beaucoup
105/109
plus proche d'eux que tu tu tu te permets peut-être pas
de les toucher mais y'a une distance moins importante avec eux
e : bah oui du coup je vois [qu'on peut mieux les aider?] je
me mets à côté d'eux enfin comment dire j'ai j'ai
baissé un peu la hiérarchie qu'on va avoir comment dire dans une
salle de classe traditionnelle mais c'est plus enfin je sais pas plutôt
camarade de classe
m : d'accord donc les déplacements que tu fais semble
encourager les interactions entre toi et les élèves est-ce que tu
penses qu'est-ce que tu pourrais faire d'après toi pour encourager les
interactions entre les élèves entre eux
e : euh bah j'ai pas eu besoin de le faire parce qu'ils le
faisaient d'eux-mêmes un peu trop facilement *rires*
m : *rires* d'accord je vois ce que tu veux dire
e : euh c'est un peu pour rappeler un peu les étudiants
que j'avais c'était surtout des réfugiés tous ou pour la
plupart arabophone et et du coup ils se donnaient les réponses entre eux
enfin ils se faisaient des blagues entre eux et j'étais un peu toute
seule à pas rigoler parce que je comprenais pas tu vois
m : d'accord la culture éducative est différente
du coup
e : oui oui
m : est-ce que tu as des techniques particulières que
tu mets en place quand tu te rends compte que tu fais face à une culture
éducative qui est vraiment différente de la tienne
e : euh bah- là du coup vu que je devais les aider
à avancer j'ai rien essayé mais euh là par exemple au mois
de juillet j'ai eu des- des coréens donc c'est plus un peu comme tu sais
on a vu des cas comme les chinois ou les japonais c'est un peu pareil où
ils sont assez bah ils parlent très peu et euh- vu que j'ai
été confrontée aux arabophones qui parlent beaucoup et aux
tout de suite après je suis passée aux coréens qui
parlaient pas du tout ça a été très très
frustrant au niveau de la mise en place des activités que j'avais une
idée très particulières du public que j'avais que j'ai eu
et euh- et qui du coup m'avait formé on va dire c'est très dur de
me remettre en cause et de recommencer des nouvelles des nouvelles choses
m : et qu'est-ce que tu as mis en place comme moyen pour euh-
justement te remettre en question les encourager à participer
e : euh- du coup vraiment plus aller chercher dans leur
culture plutôt ouais plutôt que parler de la mienne tout le temps
enfin même je le faisais avec mes élèves arabophones mes
106/109
étudiants arabophones mais- ça se faisait
beaucoup plus facilement parce que du coup ils parlaient
m : d'accord
e: mais euh- c'est eux qui me posaient des questions et tout
ça alors que que avec les étudiants coréens j'étais
obligée de toujours faire le premier pas en fait pour vraiment y'avait
pas d'initiatives de leur côté en fait c'était
compliqué
m : d'accord là j'ai une question qui va donner
peut-être un peu l'impression de juger
mais en fait c'est pas ton rôle en temps qu'enseignant
justement de faire ce premier pas e : bah du coup je me l'étais jamais
je m'étais jamais posée la question parce qu'en fait
les premiers étudiants que j'ai eu faisait ce premier pas
d'eux-mêmes m : d'accord
e : ou alors je l'ai fait un tout petit pas et ils se sont
tout de suite ouvert alors que là avec ces étudiants là il
fallait que je fasse beaucoup plus d'effort en fait
m : d'accord et ces choses là tu t'en rends compte par
la pratique en fait c'est pas ta formation qui te permet de voir ça
e : non non non alors après enfin un petit peu quand
même on nous fait voir des études de cas sur les
différentes cultures éducatives et tout ça mais c'est trop
théorique pour notre activité
m : d'accord est-ce que vous avez eu l'occasion de voir
beaucoup de vidéo de pratique de classe dans le cadre de votre formation
pour voir comment les gens enseignent justement
e : euh je me souviens en sociolinguistique mme Bretegnier
nous avait fait voir une vidéo d'un enseignant d'un enseignant dans le
sud je crois et c'était et qui avait des élèves
russophones arabophones et du coup ils travaillent sur le français et il
demandait comment ça se disait en arabe comment ça se disait en
russe et il faisait répéter à tout le monde en fait
m : d'accord il jouait sur l'interculturalité
e : ouais c'est ça
m : d'accord euh- alors du coup beaucoup beaucoup de
théorie dans ta formation peu de pratique et peu d'étude de
pratique
e : ouais
m : ce qui fait que que ton stage ça doit être un
moment de de réalisation de choses importantes quand même
107/109
e : c'est ça ça a été beaucoup de
euh- en même temps ce qui a été intéressant c'est
que
les premiers sont on été vraiment un public
motivé donc au final peu importe les erreurs que
je faisais ça passait toujours
m : d'accord tu as une bonne première expérience de
l'enseignement du coup
e : c'est ça *rires*
m : et au niveau de l'encadrement que tu as reçu
c'était plutôt positif aussi
e : plus positif enfin ça me convenait dans le sens
où j'avais beaucoup de liberté sur ce
que je pouvais faire en classe et euh- et du coup chaque fois
que j'avais des idées on me disait toujours oui donc euh- ça me
permettait de faire plusieurs choses [***] de retours négatifs on m'a
dit enfin on m'a dit que ce serait pas toujours comme ça donc il faut
aussi que j'apprenne à à [***]
m : ton stage a-t-il eu un période d'observation où
on te demandait simplement
d'observer comment les gens enseignaient
e : oui euh- pour mon premier semestre j'avais fait vingt vingt
heures d'observation à
peu près
m : d'accord c'est pas mal du coup euh- tu as pu voir un
enseignant très expérimenté ou
moyennement expérimenté d'après toi
e : euh je dirai très expérimenté et en plus
c'était pas un enseignant natif
m : un enseignant quoi pardon
e : c'était pas un enseignant c'était un enseignant
non natif
m : ah d'accord
e : donc ça rendait encore plus intéressant
l'observation parce qu'on répondait à des
problèmes que j'aurais pas forcément vu en temps
que native
m : d'accord ça t'a permis de remettre un petit peu en
question ta position
e : oui oui oui oui
m : d'accord bah écoute c'est vraiment
bénéfique pour toi que tu aies eu une phase
d'observation dans ton stage c'est pas le cas pour tout le monde
généralement on se rend
compte de ses erreurs bien plus tard
e : *rires*
m : euh- j'ai fait le tour de mes questions je vérifie
mais je pense qu'on a répondu à des
choses sans que je les pose merci beaucoup je vais arrêter
l'enregistrement ici
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