REPUBLIC OF CAMEROON Peace - Work -
Fatherland
REPUBLIQUE DU CAMEROUN Paix - Travail -
Patrie
UNIVERSITÉ DE NGAOUNDÉRÉ
THE UNIVERSITY OF NGAOUNDÉRÉ
FACULTÉ DES ARTS, LETTRES ET SCIENCES
HUMAINES
FACULTY OF ARTS, LETTERS AND SOCIAL SCIENCES
Département de Géographie
Department of geography
Unité de Formation Doctorale de
Géographie
GESTION DURABLE DES RESSOURCES
HALIEUTIQUES DANS LA RETENUE D'EAU DE MAGA
(Mayo-Danay, Extrême-Nord-Cameroun)
Mémoire présenté en vue de l'obtention du
diplôme de Master recherche en géographie
Parcours : Géographie et Pratique de Développement
Durable (GEPRADD)
Par :
TOUSSOUMNA Eric
Titulaire d'une Licence en Géographie Matricule :
10A887LF
Sous la direction de : NDAMÈ
Joseph-Pierre
Maître de conférences Université de
Ngaoundéré
Année académique : 2015 - 2016
Dédicace
À
Mes parents chéris : Toussoumna et Fanta.
II
Remerciements
Deux sentiments m'animent au moment où je boucle ce
travail : celui d'un soulagement d'avoir pu le conduire à son terme mais
aussi, le souvenir qu'il est le produit d'un engagement collectif où les
uns et les autres ont su apporter leurs touches de natures diverses et
d'ampleurs variables. Ainsi, ce remerciement n'est pas seulement une
nécessité, c'est un devoir vis-à-vis de l'ensemble des
personnes que j'ai eu le privilège de côtoyer durant cette
aventure. Devoir chevaleresque, que j'exécute avec un authentique
plaisir.
Je suis particulièrement sensible à l'honneur
que m'a fait le Professeur NDAMÈ Joseph-Pierre, mon directeur de
mémoire, en acceptant de diriger cette recherche. Il a aiguisé
mon sens de l'initiative et a affermi en moi, le désir de me consacrer
à une recherche sur la pêche. J'ai pu bénéficier
également de sa connaissance encyclopédique, de son analyse
critique illuminante, de sa riche expérience, de sa rigueur scientifique
inclémente, de son soutien et de son optimisme infaillible, qui ont
été pour moi une source d'inspiration. Merci, Professeur
!
Que toute la communauté des enseignants du
département de géographie de l'Université de
Ngaoundéré (les Professeurs TCHOTSOUA Michel, WAKPONOU Anselme,
IYA Moussa, gonne Bernard ; Docteur AOUDOU DOUA sylvain, FOFIRI NZOSSIE Eric
Joël ; Messieurs BRILTEY BAKULAY, DOURKANGOU Yafet, ANABA BANIMB Robert
Christian, PETNGA NYAMEN Simon-Pierre etc.) trouve en ce travail, le fruit de
son labeur quotidien.
Aux autres scientifiques et spécialistes qui m'ont
accordé leur attention, je vous suis redevable pour l'honneur que vous
m'avez fait. Je pense aux Messieurs suivants : WAMALAMOU Charles
(DAEPIA/Yagoua), DALIWA (Chef CACP/Maga), MAMAT Léon (S.G de la
cogestion zone Maga) etc.
ALAO HAMAN S., ADRINKAYE E., TOULOUK B., PIDEM D., APAISSINKAI
M., AWALAPIDI F. etc., mes amis et compagnons de terrain, vous avez pris une
part très active dans ce travail notamment dans son volet collecte de
données halieutiques. Je vous dois par ailleurs d'avoir pu raffiner mes
connaissances dans le domaine de la pêche. Finalement, cette recherche a
eu ce côté magique d'avoir permis que le lien entre vous et moi se
noue. Merci pour tout ce sacrifice et notez que je vous tiens pour toujours, et
ne vous lâcherai pour rien au monde.
III
Aux populations des collectivités de Maga et
Kaï-Kaï, en particulier les pêcheurs : durant cette aventure,
j'ai appris à vous connaître et vous m'avez témoigné
de votre hospitalité. Puisse ce travail contribuer à apporter
quelques pistes de solution aux multiples contraintes auxquelles vous faites
face.
Que tous mes amis et promotionnaires qui ont eu, ne serait-ce
que l'intention de m'encourager, se reconnaissent dans ce travail. Hors du
commun les suivants : SAIDOU BOGNO D., DJAOUWE J., MIEDJIM R. A., KEMENI
NGOAYIMO. Y., TAIWE Janvier W.
Merci à mes parents pour la confiance qu'ils m'ont
toujours accordée, pour leurs encouragements et soutien
protéiforme de tous les instants. À mes frères (TOUSSOUMNA
P., BALDI T. D., FIRINA T.M.) mes fines petites et grand-soeurs (MINDA T.G.,
NGOLDA T.D., NGADA T.E., YALDA T.P., WIDA T.A., HALALDA T.N., FIMANOU T.C.,
BOLDA T.P., HARANGA T.J. et LISSIA T.H.) et, à ma tendre fiancée
(DAILOV NDARAYE), merci pour avoir tous su, supporter mes multiples absences et
mes sautes d'humeur. Votre amour m'a revigoré toujours à point
nommé pour aller jusqu'au bout de cette aventure.
Il ne nous est pas souvent donné, l'occasion de
remercier les personnes qui nous sont chères et qui ont une influence
sur nos pensées et plus généralement sur notre vie. Je
tiens donc à formuler ici, mes remerciements à tous ceux dont les
noms ne figurent pas dans la liste : sachez que mon silence est l'aveu
latent de ma gratitude à votre endroit.
Je rends grâce à l'éternel pour sa
présence dans ma vie chaque jour.
.
iv
Résumé
Cette recherche interroge les conditions de
développement d'une pêche responsable dans le lac de Maga,
particulièrement saturé aujourd'hui par un effectif
pléthorique de pêcheurs, résultat de la croissance
démographique de ces 30 dernières années. Dans ce
contexte, un état des lieux de la pression de pêche a
été fait afin de déterminer son impact sur les ressources
halieutiques et l'écosystème. Pour y parvenir, un certain nombre
d'indicateurs biologiques et socio-économiques ont été
définis puis examinés de manière systémique entre
1986 et 2015. Le diagnostic posé suivant la démarche
hypothético-déductive met en évidence, une hausse
inquiétante de l'effort de pêche et une baisse drastique des
rendements par pêcheurs nécessitant des mesures d'ajustement de la
quantité des prélèvements. Les ressources en
pâtissent déjà, l'écosystème aussi.
L'État est bien conscient du problème. Des mesures ont d'ailleurs
été prises à toutes les échelles. Mais, le
véritable problème subsiste : l'absence d'une stratégie
efficace pour réguler la pression des pêches et ajuster la
structure des prises aux standards réglementaires.
Mots-clés :
Pression démographique, pêche artisanale, effort
de pêche, ressources halieutiques, lac de Maga.
Abstract
This research, the results of which are presented in this
thesis, discusses the conditions for the development of responsible fishing in
Lake Maga, which is today saturated by a plethoric number of fishermen due to
population growth over the last 30 years. In this context, an assessment of the
fishing pressure was made in order to determine its impact on fisheries
resources and the ecosystem. To achieve this, a number of biological and
socio-economic indicators have been defined and examined in a systemic way
between 1986 and 2015. The diagnosis based on the hypothetico-deductive
approach reveals a worrying increase in the effort and a drastic drop in yields
per fisherman requiring adjustments in the amount of harvest. The resources are
already suffering, the ecosystem too. The state is well aware of the problem.
Steps have been taken at all scales. But the real problem remains: the lack of
an effective strategy to regulate fisheries pressure and adjust catch structure
to regulatory standards.
Keywords: Population pressure,
artisanal fishing, fishing effort, fishery resources, Lake Maga
V
Sommaire
Dédicace i
Remerciements ii
Résumé iv
Abstract iv
Sommaire v
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
PREMIÈRE PARTIE : 33
LE LAC DE MAGA : UN LIEU DE PÊCHE SOUS PRESSION
33
CHAPITRE 1 . FONDEMENTS DE LA PÊCHE LACUSTRE DE MAGA
35
CHAPITRE 2 . ÉTAT DES LIEUX DE LA PRESSION DES
PÊCHES DANS LA RETENUE
DE MAGA 67
DEUXIÈME PARTIE : 108
L'AVENIR DE LA PÊCHE ARTISANALE LACUSTRE DE MAGA
108
CHAPITRE 3 . IMPACTS DES ACTIVITÉS DE PÊCHE
SUR LES RESSOURCES
HALIEUTIQUES ET L'ÉCOSYSTÈME 110
CHAPITRE 4 . RÉACTIONS DES POUVOIRS PUBLICS ET
LEURS LIMITES 144
CONCLUSION GÉNÉRALE 162
BIBLIOGRAPHIE 165
ANNEXES i
TABLE DES MATIÈRES 178
vi
TABLE DES FIGURES
Figure 1: Localisation de la retenue d'eau de Maga 19
Figure 2 : Répartition des précipitations dans
la zone d'étude 44
Figure 3: Histogramme des précipitations moyennes
mensuelles de la zone de Maga en 2015.
45
Figure 4 : Caractéristiques hydrodynamiques du lac de
Maga 49
Figure 5 : Niveaux trophiques des différents groupes de
poissons du lac de Maga 56
Figure 6 : Évolution annuelle des captures
inspectées à Maga en 2015. 63
Figure 7 : Évolution des effectifs des pêcheurs
à Maga (2000-2015) 68
Figure 8 : Dynamique annuelle de la production de la
pêche à Maga (2015) 69
Figure 9 : Évolution des débarquements à
Maga (2000 à 2015). 71
Figure 10: Évolution des effectifs des pirogues
à Maga (2010-2015) 75
Figure 11 : Structure des pirogues utilisées sur le lac
de Maga. 76
Figure 12 : Évolution du nombre d'engins de pêche
utilités à Maga (2010-2015) 88
Figure 13 : Les engins utilisés dans le lac de Maga par
catégories en 2014. 90
Figure 14 : Proportion des types d'engins utilisés
principalement par les pêcheurs 91
Figure 15 : Organisation du marché des produits
halieutiques à Maga 92
Figure 16: Types de problèmes rencontrés par les
pêcheurs 97
Figure 17 : Types de problèmes rencontrés par
les transformateurs 98
Figure 18 : Temps mis par les pêcheurs sur la retenue
102
Figure 19 : Composition des pêcheurs et aides
pêcheurs du lac de Maga 103
Figure 20 : Proportion d'âges des pêcheurs
interrogés 105
Figure 21 : Ancienneté des pêcheurs par tranche
d'âge. 106
Figure 22: Structures des débarquements
enregistrés en 1986 à Maga 113
Figure 23 : Structures des débarquements
enregistrés en 2015 à Maga 113
Figure 24 : Évolution de la quantité des
Tilapias Sp. pesées au CACP de Maga 117
Figure 25 : Évolution de la quantité des Lates
niloticus pesés au CACP de Maga 118
Figure 26 : Évolution de la quantité des
Heterotis niloticus pesés au CACP de Maga 119
Figure 27 : Évolution de la quantité des Clarias
pesés au CACP de Maga 120
Figure 28 : Évolution de la quantité des Bagrus
pesée au CACP de Maga 121
Figure 29 : Synthèse de l'évaluation des stocks
122
Figure 30 : Évolution des rendements de la pêche
à Maga de 2001 à 2015. 123
vii
Figure 31 : Proportion des plantes aquatiques utilisées
pour couvrir les captures 127
Figure 32: Types de polluants identifiés dans les zones
de pêche du lac de Maga 130
Figure 33 : Évolutions synchroniques des
débarquements et des CPUE de 2000 à 2015. 136
Figure 34 : Proportions des activités secondaires
pratiquées par les pêcheurs. 137
Figure 35: Activités des pêcheurs autochtones
pendant le repos biologique 140
Figure 36 : Limites de la zone de frayère sur la
retenue d'eau de Maga 146
TABLE DES TABLEAUX
Tableau 1: Effectifs de pêcheurs enquêtés
dans les villages de Maga 1 25
Tableau 2 : Effectifs de pêcheurs enquêtés
dans les villages de Maga 2 26
Tableau 3 : Effectifs de pêcheurs enquêtés
dans les villages de Kaï-Kaï 26
Tableau 4 : Caractéristiques du système
Maga-Vrick-Logone 41
Tableau 5 : Caractéristiques de la main d'oeuvre
artisanale 103
Tableau 6 : Nombre de pêcheurs par nationalité
104
Tableau 7 : Types d'espèces
ciblées par engins et techniques de pêche utilisés 116
Tableau 8 : Taux d'utilisation du zagazaga en fonction des
mailles (2016) 134
Tableau 9 : Nombre de pêcheurs par techniques de
pêche en 2016 135
Tableau 10 : Moyenne des rendements journaliers par engins de
pêche au lac Maga 138
TABLE DES PHOTOGRAPHIES
Photo 1: Le réservoir de Maga-Kaï-kaï 36
Photo 2 : Vue de dessus de la digue barrage de Maga en
réhabilitation 37
Photo 3 : Vue partielle du canal d'alimentation du lac par le
Logone à Djafga 39
Photo 4 : Feuilles d'Aponogeton subconjugatus diffuses dans le
lac de Maga 46
Photo 5 : Dispersion des herbiers pérennes dans la zone
de frayère du lac de Maga 47
Photo 6 : Quelques plantes aquatiques récoltées
dans le lac de Maga 52
Photo 7 : Vue partielle de Malka forêt du haut de la
digue 58
Photo 8 : Campement temporaire des pêcheurs kotoko
à Pouss 59
Photo 9: Campements sur pilotis des pêcheurs kotoko
à Sokomaye 60
Photo 10 : Pêcheur de zagazaga à Maga 77
Photo 11 : Poids à la ralingue du fond des filets
zagazaga au lac Maga 78
Photo 12 : Filets à Taro d'usage quotidien au lac de
Maga 80
Photo 13 : Remontée d'un Taro à Maga 81
VIII
Photo 14 : Pêche à l'épervier dans le lac
de Maga 82
Photo 15 : Sac de son paddy d'un pêcheur à
épervier (Maga) 83
Photo 16 : Panier à palangre d'un pêcheur Kotoko
à Maga 84
Photo 17 : Amas d'Alestes mis au séchage
à Maga 94
Photo 18 : Espèces de clarias anguillaris
près à être fumées sur un four
amélioré 95
Photo 19 : Activité d'Engin Abandonné Perdu ou
Rejeté dans le lac vers Pidimier 125
Photo 20 : Feuilles d'Aponogeton subconjugatus
protégeant les captures 126
Photo 21: Extrémités inférieures d'un
filet épervier utilisé dans le lac de Maga 128
Photo 22 : Dispersion d'emballages plastiques au tour de la
digue à Maga 131
Photo 23 : Débarquement mixte d'un Taro au lieudit Pont
II (Maga). 133
Photo 24 : Pirogues saisies et barricadées au CACP de
Maga en mai 2015 142
Photo 25 : Pirogue ultra rapide des éléments du
BIR à Maga. 152
Photo 26 : Saisie d'une pirogue dans la zone de frayère
par le comité de vigilance de Maga
153
Photo 27 : Débarcadère de Maga construit par la
CBLT 154
Photo 28 : Un étang de pisciculture inusité au
centre de pêche de Maga 159
TABLE DES PLANCHES PHOTOGRAPHIQUES
Planche 1 : Pont sur le Mayo Vrick 38
Planche 2 : Les principales herbacées environnantes du
lac de Maga. 50
Planche 3 : Types de pirogues identifiées sur la
retenue d'eau de Maga 74
Planche 4 : Types de filets mono filaments identifiés
dans le lac de Maga 79
Planche 5 : Palangres appâtées à HOFF
(Maga) 85
Planche 6 : Types d'appâts utilisés dans la
pêche palangrière lacustre de Maga 86
Planche 7 : Nasses maliennes (Goura) à
Kéleo (Kaï-Kaï) 87
Planche 8 : Structures des tilapias et Heterotis
débarqués en janvier et juin 2016. 114
Planche 9 : Destruction de la digue barrage de Maga 129
Planche 10 : Filets mono et multi filaments à un doigt.
134
ix
SIGLES ET ABRÉVIATIONS
ADPAM : Appui au Développement de la
Pêche Artisanale Maritime
AEP : Approche Écosystémique
des Pêches
AFOAP : Appui à la Formation
Professionnelle dans les secteurs de l'agriculture de l'élevage
et de la pêche
BIR : Bataillon d'Intervention Rapide
CPUE : Capture Par Unité d'Effort
CFA : Communauté Financière
d'Afrique
CO2 : Dioxyde de Carbone
CBLT : Commission du Bassin du Lac Tchad
CACP : Centre d'Alevinage et de
Contrôle de Pêche
CCP : Centre de Contrôle de
Pêche
CTD : Collectivité Territoriale
Décentralisée
CDE : Camerounaise Des Eaux
CNUED : Conférence des Nations Unies
pour l'Environnement et le Développement
DAEPIA : Délégation
d'Arrondissement de l'Élevage Pêches et Industries Animales
DDEPIA : Délégation
Départementale de l'Élevage Pêches et Industries
Animales
FAO : Food and Agriculture Organisation
FAPR : Filets Abandonnés Perdus ou
Rejetés
FGAEPAM : Fédération des GIC
des Agroéleveurs et Pêcheurs de l'Arrondissement de
Maga
GIC : Groupement d'Initiatives Communes
IRD : Institut de Recherche pour le
Développement
MINEPIA : Ministère de
l'Élevage des Pêches et des Industries Animales
OCDE : Organisation pour la
Coopération et le Développement Économique
ONG : Organisation Non Gouvernementale
OMD : Objectifs du Millénaire pour le
Développement
ORSTOM : Office de la Recherche Scientifique
et Technique Outre-Mer
PIB : Produit Intérieur Brut
PCP : Post de Contrôle de
Pêche
PULCI : Plan d'Urgence de Lutte Contre les
Inondations
PRODEBALT : Projet de Développement
Durable du Bassin du Lac Tchad
X
PINDNR : Pêche Illégale Non
déclarée et Non Réglementée
PMEDP : Programme des Moyens d'Existence
Durables des Pêches
RMD : Rendement Maximum Durable
SEMRY : Société d'Expansion et
de Modernisation de la Riziculture de Yagoua
SG : Secrétaire
Général
TAC : Total Admissible de Captures
UE : Union Européenne
INTRODUCTION GÉNÉRALE
2
Le choix de ce sujet est fondé sur plusieurs raisons.
Le lac artificiel de Maga a été créé pour
développer la riziculture irriguée dans la plaine du Mayo-Danay
il y a de cela plus de 36 ans. Au fil des années, la pêche s'y est
greffée et depuis lors, son rôle n'a jamais cessé de
s'accroitre dans les collectivités de Maga et Kaï-kaï.
Cependant, son développement actuel est menacé
par plusieurs contraintes relatives à la surexploitation des ressources,
à la dégradation de l'écosystème, au
caractère destructif des outils de pêche, à
l'indélicatesse des engins utilisés, aux problèmes
d'hygiène et de salubrité des aires de débarquement et de
transformation. Outre ces contraintes, la croissance démographique
continue d'un côté, et de l'autre, la dégradation des
infrastructures du lac, son ensablement et différentes autres formes de
pollutions humaines, hypothèquent la vie des milliers d'habitants dont
l'existence est rendue possible grâce à la pêche.
Malheureusement, les recherches visant à accompagner
l'exploitation des ressources halieutiques dans ce plan d'eau sont quasiment
inexistantes.
Ainsi, toute recherche à l'image de celle-ci, ayant
pour but de faire le bilan de cette activité, mérite d'être
initiée pour comprendre comment la pêche a influencé le
statu quo du géosystème1 halieutique lacustre de
Maga.
1. PROBLÉMATIQUE
Dans la région de l'Extrême-Nord-Cameroun, le lac
artificiel de Maga, est très connu à travers ses multiples
activités au nombre desquelles, la pêche artisanale.
Créé en 1979 dans le cadre du projet rizicole SEMRY II, il a une
capacité maximale de 625 millions de m3 et s'étend sur
une superficie moyenne de 240 km2. Il s'agit d'une pêcherie
très poissonneuse en raison de la conjonction des facteurs
hydrodynamiques, climatiques et géomorphologiques favorables. En effet,
la température des eaux, la durée d'insolation adéquate et
les apports terrigènes en provenance des cours d'eau qui l'alimentent,
etc., explique sa très forte productivité (2000T/an) dotée
d'une grande diversité biologique (plus de 100 espèces).
La faible pente (0,2 %) des parties en amont de la retenue les
transforme en yaerés2 durant la saison de pluies. La
végétation de bordure est composée de multiples
graminées. Le
1Jean-Pierre CORLAY explique que « le
géosystème halieutique est une construction
socio-économique et socio-spatiale résultant de la rencontre d'un
potentiel de ressources biologiques marines exploitables
(l'écosystème) et d'une stratégie de valorisation de ce
potentiel (le socio-économique) ; l'ensemble de ces composantes
abiotiques, biotiques et sociales, en interaction, constitue le système
halieutique ».
2 Selon Seignobos(1986), du fulfuldé yaayre, le mot
désigne une vaste plaine d'inondation. Le « grand yayré
» correspond à la plaine de la rive gauche du Logone, en aval de
Pouss. Pendant l'inondation, en
3
phytoplancton abondant contribue à l'opacité des
eaux. Dans les parties libres, la turbidité donnée par les
sédiments du fond brassés par une houle légère
limite encore la transparence des eaux de 15 à 25 cm. L'existence de ces
milieux très favorables à la reproduction et à la
croissance des alevins de certaines espèces (Alestes),
protégées dans le lac des prédateurs par la multiplication
des herbiers, confère à la retenue un énorme potentiel
pour les activités piscicoles (Seignobos et Raugel, 1986).
La pêche y est pratiquée neuf mois sur douze. On
estime à 8000, les personnes qui vivent des revenus de cette
activité, dont environ 6500, relevant directement de la capture
quasiment toutes, de nationalités camerounaises (97 %)3.
Grâce à des engins et des embarcations très performants,
ces pêcheurs composites, installés dans et autour de la retenue
à travers 53 campements/villages, réalisent en moyenne par an,
des captures mixtes qui s'élèvent à 2000 tonnes,
transcendant alors le rendement maximum durable (RMD) fixé par la FAO
depuis 1986 à 1500T/an. À mesure que le temps passe, la
population croit et le système s'efforce à produire plus, pour
non seulement tenter de satisfaire la demande locale (plus de 200000
personnes), mais aussi pour être plus compétitif à
l'extérieur afin de gagner de nouveaux marchés
intéressés par l'offre des produits halieutiques.
Malheureusement, ces ressources sont aujourd'hui
confrontées à une surpêche4 et à la
dégradation des conditions du milieu (restes de filets, produits
chimiques, objets divers...). La pression des pêches exercée dans
lac a progressivement conduit à la surexploitation des ressources, voire
à l'extinction de plusieurs espèces de poissons (MINEPIA,
2015) ainsi qu'à la détérioration des
écosystèmes où elles sont capturées. En d'autres
termes, les prélèvements sur les ressources ont
dépassé les capacités de renouvellement des stocks. Avec
cette baisse de production, l'écart séparant l'offre et la
demande de poissons s'agrandit ce qui fait que, les communautés de Maga
et Kaï-kaï où les produits de la pêche participent
majoritairement à l'alimentation quotidienne, en souffrent tellement.
particulier au moment du retrait des eaux, les yayrés
appartiennent aux pêcheurs musgum, qui y ont aménagé des
réseaux de drains et placé nasses et enceintes de capture. C'est
ensuite le domaine, pendant la saison sèche, des éleveurs peuls
et arabes Showa. Ils occupent ces vastes pâturages selon des lignes de
partage qui varient avec la pression des éleveurs venant du Nigeria, les
stress hydriques et, aussi, en fonction de leurs stratégies de gestion
des bourgoutières et des vétiveraies. Depuis l'endiguement du
Logone et la présence du lac de Maga, les yayrés sont mal
alimentés en eau et ils ont perdu de leur potentiel agrostologique.
3 D'après les résultats de
l'enquête cadre sur la retenue de Maga en 2011.
4La surpêche désigne la pêche
excessive pratiquée par l'homme sur certains poissons ou
crustacés. On parle de surpêche lorsque l'augmentation des
capacités de capture entraine une diminution du nombre de prises,
c'est-à-dire que l'espèce est pêchée plus vite
qu'elle ne se reproduit.
4
Pourtant en 1981, la Mission d'étude piscicole du
barrage de Maga relevait que, le chiffre jugé optimal par la FAO (2
pêcheurs/km2) pour toute retenue d'eau a été
doublé sur ce barrage et que, même si en ce qui concerne le lac de
Maga spécifiquement, compte tenu de sa richesse en phyto - et
zooplancton, à quoi s'ajoute l'existence de nombreux herbiers
pérennes, le renouvellement rapide des populations piscicoles est
possible, selon le service des pêches, 800 pêcheurs est le chiffre
souhaitable pour un (RMD) de 1500 T/an. L'effectif des pêcheurs (1600
à 1650) en 1986 était le double de la normale. Ce constat devait
amener les autorités à concevoir une réglementation
d'accès au lac plus restrictive (Seignobos et Raugel, op. Cit).
Mais dix ans après (1996), le laxisme de la réglementation et les
abus des pêcheurs ont fait définitivement plafonner les prises
à près de 1800 tonnes/an.
Depuis l'an 2000, la pêche artisanale lacustre connait
une crise profonde marquée par une augmentation de l'effort de
pêche et une baisse drastique des Captures par Unité d'effort
(CPUE). Le lac de Maga qui produisait en 1981, 1500 tonnes de poissons frais
grâce à un effort de pêche constitué d'environ 1200
actifs seulement (soit 1250 kg/pêcheur), n'en produit plus qu'à
peine 2000, malgré les 61745 pêcheurs qui
l'assiègent chaque année (soit 323 kg / pêcheur). Cette
situation s'oppose à la croissance rapide de la population qui a
été multipliée par 3 à Maga entre 1980 et 2010
avant d'atteindre 180 000 âmes aujourd'hui.
Le MINEPIA et la FAO en 2011 avaient dénombré
2567 pirogues sur la retenue, équipées de près de 50000
engins par 6174 pêcheurs. Si on considère 240 km2 la
superficie moyenne de la retenue et une zone de frayère de
200×27000 ? 5400 m2, on se rend compte qu'il y a quasiment plus
de 27 pêcheurs, 11 pirogues et 214 engins/filets de pêche de 07
types différents, dans le lac au km2. Comparé à
l'effort de pêche optimal (2 pêcheurs/km2), c'est un
constat alarmant d'autant plus que, les pêcheurs artisans opérant
dans la bande côtière6 où se trouvent les
nourriceries et les zones de reproduction, sont difficiles à
contrôler.
De plus, la fréquence de pêche est
simplifiée par l'installation des pêcheurs dans des campements
situés à proximité, voire sur la retenue7 d'une
part et d'autre part, la dynamique hydrologique du lac facilite les captures
par la baisse du niveau des eaux (1 à 2 m en moyenne) de février
à juin et le rétrécissement du plan d'eau d'au moins 60 %
(SEMRY, 2015). Ces deux facteurs, corroborés par l'accès
libre à la zone de pêche, font que pendant la période de
décrue, les pêcheurs assiègent la retenue. Au bout de deux
décennies, la taille et le volume des prises ont profondément
diminué, conduisant les pêcheurs y compris l'État,
à
5Estimation de la commune de Maga en 2015
6 Moins de 200m de la digue c'est une zone de
frayère où la pêche est interdite.
7 En 2011, 53 villages/campements des
pêcheurs vivants sur la retenue d'eau de Maga furent
dénombrés (MINEPIA, 2014). Certains dans le lac, d'autres autour
de celui-ci.
5
investir pour tenter de produire plus, ce qui augmente la
pression de pêche et aggrave le phénomène.
Cette situation doit sa chronicité aux
améliorations techniques subies par les embarcations dont
l'efficacité et la capacité ont été
modifiées. Afin de maximiser les prises, les pirogues ont connu des
ajustements qualitatifs (renforcement de la technologie d'équipage) et
quantitatifs (agrandissement de la taille des pirogues pour une forte charge
massive). La pirogue en bois plus petite (2 à 3 m de long) a tendance
à disparaître (05 à 10% de taux de
représentativité) tandis que la part de celles en tôles
(allant parfois jusqu'à 10 m de long) est de plus en plus croissante et
représente environ 82 % (25672) dans les parcs piroguiers.
Certains engins de pêche prohibés en particulier
les palangres (16580 soit 33,45%), les éperviers (1042 soit 3%) pour ne
citer que ces deux, très prospères sur la retenue, sont
réputés destructeurs aussi bien pour les ressources halieutiques
que pour l'écosystème. Les filets autorisés à
grosses mailles (3 à 4 doigts) ont perdu leur efficacité et les
pêcheurs ont dû adapter la grosseur des mailles des engins à
la taille minimale des poissons. Les tendances actuelles d'évolution des
stocks montrent alors, des signatures médiocres
caractérisées par des débarquements pleins de captures
juvéniles. Les Lates par exemple, n'ont plus le temps de se
développer et n'arrivent guère à maturité.
Tout le système s'enfonce dans une spirale, avec sa
cascade de difficultés croissantes dont les effets se font sentir au
moins à quatre niveaux. D'abord biologique (l'effondrement des stocks),
ensuite économique (la baisse des débarquements d'un
côté et de l'autre, la raréfaction de certaines
espèces de poissons en particulier les espèces nobles
pénalisent le consommateur à travers le renchérissement
des prix sur les marchés) puis social (chômage,
inégalité devant l'offre des produits halieutiques) et enfin,
spatial (l'écart séparant l'offre et la demande de poisson
s'élargit de plus en plus, ce qui fait que les populations des villages
riverains où, les produits de pêche contribuent pour une large
part à la sécurité alimentaire, à l'emploi et
à l'économie locale, en souffrent). D'où, une
réaction de l'État8.
Mais, à l'heure actuelle, peu d'outils efficaces sont
disponibles pour réguler et gérer l'effort des pêches qui,
accentué par la croissance démographique, échappe à
la méthode synergétique de la cogestion.
8 Allant de la gestion administrative du lac
à sa gestion participative à travers la cogestion via
l'intervention des organismes privés, tout est mis en marche pour y
instaurer une pêche durable. Malheureusement comme par le passé,
le secteur de la pêche est toujours un milieu d'insécurité
se manifestant par des incompréhensions à plusieurs niveaux
(pêcheurs contre pêcheurs, pêcheurs contre personnel du
MINEPIA, pêcheurs contre cogestion -comité de vigilance-,
pêcheurs contre administration, membre du comité de vigilance
contre administration...).
6
En revanche, le lac de Maga ne faisant pas l'objet d'une
gestion rationnelle de ses stocks ichtyologiques, son avenir reste incertain,
surtout qu'il est lié à la riziculture et que la SEMRY
connaît depuis 1996 les insolubles problèmes de fonctionnement.
Quel avenir réserve-t-on à la pêche au regard d'une telle
exploitation ? La présente recherche entend apporter sa contribution
à travers successivement une estimation de la pression de pêche
actuelle sur la retenue, puis une identification des acteurs concernés
et de leurs moyens de production et enfin, les marques de leurs
prélèvements sur les ressources et l'écosystème.
2. QUESTIONS DE RECHERCHE 2.1. Question
principale
Quel est l'impact de la pêche, animée ces
dernières décennies par une démographie galopante, sur les
ressources halieutiques dans la retenue d'eau de Maga ?
2.2. Questions spécifiques
? Comment la pêche lacustre de Maga a-t-elle
évolué ces dernières décennies ? ? Comment les
différents acteurs de cette activité travaillent-ils ?
? Quel est son impact sur les ressources halieutiques et
l'écosystème ?
3. CONTEXTE SCIENTIFIQUE
Les inquiétudes sont nombreuses dans les milieux
scientifiques qui s'intéressent à la gestion des ressources
halieutiques et au développement durable, mais également au sein
des pouvoirs publics et des ONG qui sont à même d'apporter une
quelconque réponse à ce problème de la dégradation
des pêcheries. Il y eut des auteurs, géographes ou non qui se sont
penché sur cette question allant du développement de la
pêche de capture à la gestion durable des ressources halieutiques
en passant par la dynamique des territoires côtiers. Pour chacun de ces
aspects, les connaissances sont notoires.
3.1. L'IMPORTANCE DE LA PÊCHE DANS LE MONDE
La contribution de la pêche qu'elle soit artisanale ou
moderne dans l'alimentation et l'économie des habitants de la terre est
à ce jour connue. Bavoux et al., (1998) constataient que les
ressources halieutiques contribuent, incontestablement à nourrir les
hommes et fournissent au moins 20 % des protéines animales
consommées sur la planète. D'ailleurs, la
7
pêche tient une place primordiale dans l'économie
et la vie de quelques pays « spécialisés » en Islande
par exemple où elle représente les trois quarts des exportations,
17 % du PIB et, avec les industries liées, environ 17 % d'emplois.
Pour la FAQ (2010), elle est une source importante de
revenus, de moyens de subsistance et de création d'emplois pour des
centaines de millions de personnes de par le monde, et qui progresse à
un rythme plus rapide que dans les autres secteurs de l'agriculture.
Chaussade J. (2006), écrivait à cet
effet : « la quantité annuelle de produits pêchés
par habitant, qui avoisinait les 8,5 kg en 1950, s'éleva jusqu'à
18,8 kg en 1970 et plus encore aujourd'hui ». En 1998,
Carré et Bavoux, renchérissaient que même si la
production a tendance à stagner depuis le début des années
1990, on pêche plus de 90 millions de tonnes à la fin de la
décennie 90 soit 142 millions de tonnes de produits marins.
Dans le même sillage, la FAO révèle que,
désormais le commerce mondial des produits de la pêche compte
parmi les marchés d'échanges internationaux qui se
développent au rythme le plus rapide (FAQ, 2014). Scholz et al.
(2005) estiment que, ce secteur représente un volume deux fois
supérieur au volume global des échanges commerciaux
internationaux de thé, café et cacao. Mais, tous les pays du
monde ne s'y intègrent pas de la même façon.
3.1.1. Les grands pôles de production halieutique
À travers le monde, certains pays ou groupes de pays
sont réputés pour leur capacité de pêche et
plusieurs auteurs en ont traité.
La Chine selon Chaussade (1998) et FAQ (2010) est de
loin le plus grand producteur de poissons au monde suivit du Japon, de l'Inde,
de la Thaïlande, de l'Indonésie, des Philippines, de la
Corée du Sud et du Nord. La chine n'a cessé de progresser dans le
concert des grands pays pêcheurs depuis plusieurs années. Ses
efforts prodigieux se sont traduits par un véritable « boom »
de la production, laquelle est passée d'un niveau de 3 millions de
tonnes en 1970 à 6 millions en 1984, 10,3 millions en 1990, 15 millions
en 1992, 24,4 en 1995 et 47,5 millions de tonnes aujourd'hui, aquaculture y
comprise. À quoi cela est-il dû ?
3.1.2. Comment comprendre la dynamique de la pêche
dans ces grands pôles ?
Corlay J.P. (2004), pense que les facteurs
explicatifs de cette mutation doivent être recherchés dans
l'émergence d'une dynamique qui a permis à l'offre et à la
demande d'augmenter dans des proportions encore jamais atteintes.
8
Miossec (1998), déclare à ce sujet :
qu'« on ne peut comprendre l'essor des activités de pêche
sans le bond très important de la consommation du poisson ».
Car, à cette demande accrue des produits halieutiques s'ajoutent les
progrès techniques dans le transport, la conservation des produits et
surtout dans l'exploitation des ressources halieutiques.
À Bavoux et al. (1998) d'ajouter que, c'est
l'inégale répartition des ressources sous les latitudes qui
explique la dynamique sectorielle de la pêche. Cette répartition
des richesses s'observe à travers les prises dans les mers du globe, qui
permettent de définir trois catégories d'aires favorables (les
mers des hautes latitudes avec leurs eaux froides plus riches en oxygène
et en matières nutritives, ensuite les zones de brassage et en fin, les
zones littorales).
3.1.3. Les facteurs explicatifs du développement de
la pêche
En effet, dans le développement de l'exploitation des
ressources halieutiques, trois principaux facteurs sont reconnus favorables
:
Mc Goodwin (2003) et Minet J-P. (2002)
trouvent que, c'est l'abondance des ressources halieutiques dans l'eau qui
est à la base de tout développement de la pêche. En effet
expliquent-ils, la production primaire de matière vivante des
océans est à l'origine de l'abondance des ressources
halieutiques. Cette matière vivante est produite par des
végétaux microscopiques, uni-ou pluricellulaires, capables de
faire la synthèse de molécules organiques (glucides, lipides,
protides) à partir du gaz carbonique (CO2), de l'azote et du phosphore.
Ces derniers sont présents dans l'eau sous forme de nitrates et de
phosphates, que l'on désigne communément sous le nom de sels
nutritifs.
Bécet et Le Morvan (1999) ; Miossec (1998)
expliquent le développement de la pêche par l'augmentation de
la demande à travers le monde sous l'effet de la croissance
démographique.
Chaussade (1998) y ajoute, un autre facteur
clé lié aux avancées technologiques. Il trouve que
l'infinie diversité des conditions de captures et l'intarissable
ingéniosité des hommes ont abouti à un très riche
catalogue d'engins de pêche qui ont boosté la production
halieutique.
Ce sont malheureusement les écosystèmes
aquatiques qui en payent le lourd tribu au contact de ces engins parfois
inadaptés.
9
3.2. L'IMPACT DES PÊCHES SUR LES RESSOURCES ET LEURS
ÉCOSYSTÈMES
L'impact destructeur de la pêche sur les ressources et
le milieu marin est un problème avéré (Cury et
Miserey, 2008). Des scientifiques de tout bord s'y sont
intéressés. Certains ont indiqué les aspects de cet
impact, d'autres ont abordé la surexploitation des ressources
halieutiques comme tributaire des activités de pêche. Mais de plus
en plus, l'effondrement des stocks et la pêche illicite sont les plus en
vues au 21e siècle parce qu'affectant directement la
population.
3.2.1. La question de la vulnérabilité des
ressources halieutiques
Troadec (1989), dans son essai sur l'usage d'une
ressource commune renouvelable intitulé « L'HOMME ET LES
RESSOURCES HALIEUTIQUES » remarquait que, la pleine exploitation du
potentiel halieutique mondial a eu des répercussions profondes sur la
pêche. Le déclin des rendements, le rôle joué par la
grande pêche dans la mise en valeur des ressources lointaines et les
difficultés rencontrées dans la régulation du taux
d'exploitation au sein des pêcheries internationales ont contribué
à faire accepter le nouveau régime des océans et agrandi
l'enjeu des réflexions scientifiques à émettre dans ce
domaine.
Jennings S., Greenstreet S-P-R et Reynolds J-D
(1999) dans « Structural change in an exploited fish community :
a consequence of differential fishing effects on species with contrasting life
histories » pensent que la pêche a un impact direct sur les
populations ciblées, particulièrement les espèces à
durée de vie longue et à faible taux de reproduction.
Plus tôt, les travaux de Botsford en 1997 et
ceux Jennings et Kaiser (1998 ) in « The effects of
fishing on marine ecosystems », ont permis de comprendre que la
pêche a également des effets indirects pouvant être
très importants sur la structure des communautés, les
interactions trophiques, la faune benthique et l'habitat.
Cependant, Hall (1999) et Gislason (2003)
vont plus loin dans cette problématique et précisent que les
effets indirects de la pêche peuvent avoir des impacts plus importants
sur la structure et la dynamique des écosystèmes marins.
Le constat d'échec de la gestion des pêches au
niveau mondial est aujourd'hui connu par une grande partie de la
communauté scientifique (Botsford et al., 1997 ; Jackson et al.,
2001 ; Laubier, 2003) et repris par de nombreuses institutions, instances
gouvernementales, organisations non gouvernementales et intergouvernementales
(UE, 2001 ; FAO, 2002 ; OCDE, 2003).
10
L'impact global a été décrit par
Pauly et Christensen (1995) comme étant comparable, dans
les systèmes aquatiques, à celui de l'agriculture sur des
terrains en termes de proportion de la productivité primaire du
système récoltée par les humains. D'où, le
phénomène de surexploitation ou surpêche
(l'overfishing).
3.2.2. Impact biologique et écosystémique de
la surexploitation des ressources halieutiques
? L'overfishing
La surpêche ou overfishing a été largement
étudiée par Goñi, Moran et Stephenson.
D'après ces auteurs, certains types de pêche sont très
destructeurs pour les récifs (dynamite...), d'autant plus quand
l'activité est déplacée. Ils entrainent un report de
l'effort sur d'autres zones plus vulnérables. Un exemple bien
documenté d'impact direct sur les espèces benthiques, c'est que
des engins traînants modernes (chaluts et dragues) ont provoqué,
entre autres, à long terme des changements dans la composition de
l'abondance des espèces dans la mer des Wadden (Goñi, 1998)
et l'Australie (Moran et Stephenson, 2000).
? L'effondrement des stocks halieutiques
Selon Laubier (2003), 30 % des stocks halieutiques
mondiaux seraient en danger d'extinction et 60 % seraient surexploités.
Dans les eaux européennes, la plupart des stocks ichtyologiques sont en
effondrement.
Pour preuve, Dulvy N-K., Sadovy Y. et Reynolds
J-D., (2003) in « Extinction vulnerability in marine populations
» remarquaient sur un total de 133 populations et espèces
marines étudiées que, la pêche serait responsable de plus
de la moitié des extinctions observées au niveau local,
régional ou global.
Le thon a toujours fait partie des espèces les plus
importantes dans le monde de la pêche et c'est par conséquent une
des espèces les plus menacées (Cazeils en 2004).
Pour Clover C. (2008), la pêche moderne a
conduit en 50 ans, à la disparition de 90 % de la biomasse des grands
prédateurs océaniques (thons, baleines, requins). Cury et
Miserey (2008), dans « Une mer sans poissons »
démontrent qu'en pêchant toujours plus loin, toujours plus
profond, l'homme est en train de transformer les océans du globe en
désert liquide.
Ainsi, comme le disait Denhez F. (2008) dans
« Plus de poissons à la criée, menaces sur les
réserves mondiales », la situation de la pêche n'a
jamais été aussi difficile
11
qu'aujourd'hui et l'on peut raisonnablement s'interroger
à propos des menaces qui pèsent sur l'avenir de la pêche et
des pêcheurs.
C'est un message parfaitement compris raison pour laquelle, la
gabegie des ressources halieutiques est fustigée.
? Le gaspillage des ressources halieutiques
Il faut dire que le gaspillage est actuellement intense : une
partie des captures n'est pas commercialisée, pour cause de
fraîcheur douteuse ou de marché sans intérêt.
Miossec a traité de la question en 1998. Les pêches
chalutières, industrielles ou artisanales, très largement
répandues, capturent d'importantes quantités de poissons dont
certains sont commercialement intéressants, d'autres moins, voire pas du
tout : c'est ce que l'on appelle le « faux poisson » (Corlay,
2004).
En effet, du fait des carences en infrastructures et
installations commerciales et des températures tropicales, le
pourcentage de pertes après capture et de détérioration de
la qualité des produits est élevé dans les pays en
développement, avec les risques que cela comporte pour la santé
du consommateur : en Afrique, on estime ces pertes entre 20 et 25 % selon la
FAO.
? Les impacts sur les écosystèmes marins et
côtiers
La pêche demeure aujourd'hui comme la première
activité humaine ayant eu un impact sur les écosystèmes
aquatiques et côtiers (Jackson et al., 2001). Ces impacts de la
pêche sur l'environnement ont été abondamment
décrits et examinés (Dayton et al., 1995 ; Goñi, 1998
; Kaiser et al., 2003 ; Gislason, 2003; Agardy, 2000).
Christensen et al. (1996) disaient que, les
écosystèmes qui soutiennent la pêche sont aujourd'hui,
soumis à un certain nombre de modifications d'une pertinence
significative. En raison de notre compréhension imparfaite de la
structure des écosystèmes marins, de leur fonctionnement, et de
la difficulté inhérente à distinguer entre les changements
naturels et anthropiques, ces derniers ne sont pas toujours parfaitement
prévisibles et/ou réversibles.
Bourgneuf et Mollo (2010) dans leur
publication intitulée : « L'enjeu du plancton :
l'écologie de l'invisible » ont décrit la composition
et le fonctionnement des écosystèmes marins. Ils expliquent que,
le plancton est à la base de la chaîne alimentaire marine. Sa
dégradation en quantité et en qualité telle que
constatée aujourd'hui, participe à la disparition
12
des espèces halieutiques. Préserver le plancton
aujourd'hui, c'est sauver pour demain la respiration des océans, c'est
préparer les ressources alimentaires pour l'humanité.
Les travaux de Goñi (1998) attirèrent
l'attention sur l'usage d'explosif en pêche. Il mentionnait qu'un
explosif relativement petit (à la taille des bouteilles de bière)
est capable de détruire une zone de trois mètres circulaire de
l'écosystème marin. Par ailleurs, Couliou (1998)
expliquait clairement que la pêche est également une
composante des activités littorales, puisqu'elle est un
élément du « géosystème halieutique ».
Corlay J-P. (1993) dans sa thèse : «
La pêche au Danemark, Essai de Géographie halieutique »
et dans des articles publiés préalablement (1979) a
défini et étudié les concepts théoriques sur les
notions de « système halieutique » et de «
géosystème halieutique »9.
Pour conclure cette partie, la pollution d'origine terrestre
est à l'origine de l'effondrement de la vie marine dans de nombreuses
zones où l'oxygène se raréfie ou disparaît (30 % de
la baltique).
3.2.3. L'impact socio-économique de la
surexploitation des ressources
Pour Cochrane (2000), l'échec de la gestion se
situe à quatre niveaux ; elle est non seulement une crise biologique,
écologique, économique et sociale. Cury et
Cayré (2001) ajoutent une cinquième dimension relative
à la perception négative de l'activité de pêche
pouvant exister aujourd'hui.
Ainsi, Corlay J.P (2004), analysant les enjeux de la
pêche à l'aube du troisième millénaire face à
la crise des pêcheries mondiales, mettait en évidence les
implications de cette crise sur la sécurité alimentaire mondiale
et démontra que, la surexploitation des ressources halieutiques est
à l'origine du chômage, des conflits spatiaux, de la faim et de la
pauvreté. Il est urgent de prendre la gestion de ce secteur au
sérieux.
Rey, Catanzano, Mesnil et Biais (1997)
posaient un « regard différent sur les pêches »
à travers les systèmes halieutiques. Ce concept regroupe le
système de production, de valorisation et de gestion des ressources
halieutiques dans un espace géographique donné. Grâce
à un schéma architectural, il est possible selon eux, de lire la
dynamique de
9 Le « système halieutique » est
défini comme la combinaison et les interactions des facteurs biologiques
(ressource), techniques (moyens mis en oeuvre pour capturer et travailler les
produits de la mer), économique (l'armement, les stratégies
d'exploitation, les entreprises de la filière.), sociaux (les rapports
entre les personnes, la dimension culturelle) dont la finalité est de
prélever les ressources vivantes de la mer à des fins
d'utilisation par l'homme, c'est-à-dire, pêcher.
13
l'exploitation halieutique dans une pêcherie, et prendre
des décisions anticipatives pour une bonne gestion économique de
ce secteur.
3.3. LA GESTION DURABLE DES RESSOURCES HALIEUTIQUES
Qu'est-ce qui fonde la gestion des ressources halieutiques
?
À cette interrogation, Faucheux et Noël (1995)
répondent qu'en tant que ressources renouvelables, le
véritable problème que pose la gestion des ressources
halieutiques est qu'il n'est pas exclu que leur capacité de
régénération soit remise en cause de façon
irréversible par un taux d'exploitation excessif ou une atteinte
à leur biotope. La problématique de gestion est donc de trouver
un équilibre intertemporel en respectant leurs contraintes
bioécologiques et en intervenant, si possible, pour améliorer
leur reproduction.
En effet, la plupart des ressources naturelles peuvent
être épuisables, si l'on admet qu'il est possible de trouver un
rythme d'utilisation provoquant une diminution de ses disponibilités
jusqu'à les annuler. Cette préoccupation d'une exploitation
compatible avec la pérennité des ressources halieutiques
constitue le fondement de base de leur gestion.
3.3.1. L'émergence du développement durable
dans la pêche
L'exploitation des ressources halieutiques de la
planète est inquiétante. Car aujourd'hui, la plupart des
principaux stocks de poissons des océans du monde ont été
exploités de manière irresponsable de sorte que plusieurs
populations sont maintenant en déclin et d'autres ont été
décimées. Cette situation de crise des pêcheries mondiales
a favorisé l'émergence du concept de pêche durable.
En effet, du fait de nombreux problèmes10,
la nécessité d'une pêche durable a été
reconnue par la FAO lors de sa conférence de 1995 à Rome
où elle a adopté le « Code de conduite pour une
pêche responsable ». Ce code s'appuie sur les principes du
développement durable. Déjà, le Chapitre 17 de l'agenda 21
issu du Sommet de la Terre de Rio de Janeiro en 1992 était
consacré aux ressources vivantes marines. Un des rares textes
signés à la Conférence de Johannesburg en 2002 a
été un accord sur la pêche en vue de lutter contre la
surexploitation. Ces textes attestent de la volonté d'une gestion
conventionnelle des ressources qui va donner corps à plusieurs
systèmes.
10Déséquilibre entre l'offre et la
demande, surexploitation généralisée des ressources,
gaspillages, difficultés économiques et sociales
14
3.3.2. Les systèmes de gestion durable des
ressources halieutiques
? La gestion conventionnelle des ressources halieutiques
à travers le Monde
Gordon, (1954) a longuement travaillé sur la
question. Il explique que les approches conventionnelles en gestion des
pêches se focalisent essentiellement sur les espèces
d'intérêt commercial, en considérant chaque stock de
manière indépendante. Ces approches monospécifiques se
sont très tôt intéressées à la dimension
économique de la pêche, et ont permis de mettre en évidence
certains processus économiques responsables de
surexploitation.
En particulier, Munro et Sumaila (2002)
indexent : le libre accès à la ressource, les subventions
des gouvernements au secteur des pêches, ainsi que la vision
à court terme des pêcheurs au regard des bénéfices
escomptés. Mais, les limites de telles approches n'ont pas tardé
à apparaitre.
? L'approche écosystémique des pêches
(AEP)
Depuis une dizaine d'années, un nombre croissant
d'articles (Botsford et al., 1997 ; Pitcher, 2000 ; Pauly et al., 2002 ;
Pikitch et al., 2004), d'ouvrages (Hall, 1999) et de
conférences (Hollingworth, 2000 ; Sinclair et Valdimarsson, 2003 ;
Daan et al., 2005) revendiquent la mise en place d'une gestion
écosystémique des pêches en réponse à
l'échec des approches conventionnelles, dont les interventions
n'intégraient pas les caractéristiques des systèmes
naturels (Freemuth et Mc Greggor Cawley, 1998 ; Kennedy et Quigley, 1998;
Knight, 1998; Szaro et al., 1998).
L'approche Écosystémique des Pêches (AEP)
englobe donc un vaste ensemble de principes et d'objectifs conceptuels, dont la
prise en compte doit permettre d'agrandir notre perception des relations entre
le bien-être de l'Homme et la santé des écosystèmes
(Sinclair et al., 2002 ; Garcia et al., 2003). Cette approche a
été critiquée par l'approche communautaire du fait du
monopole de l'État dans sa mise en application qui crée plusieurs
scénarios :
Cordell (1984), faisait observer donc que si la
responsabilité collective de la surpêche dans certaines eaux
côtières incombe conjointement à deux groupes de
pêcheurs (pêcheurs professionnels et petits groupes artisans), les
répercussions humaines les plus préjudiciables ont d'ordinaire
été observées au sein des communautés de petits
pêcheurs.
15
Mais, grâce aux travaux de Clark (1991) et
Karnjanakesom (1992), on sait désormais que ce système est
à l'origine des conflits à l'issue desquels les
communautés de petits pêcheurs sont souvent perdantes et la
dégradation des ressources toujours prospère. C'est ce
qui justifia la mise en place d'approches contemporaines modernes.
? La cogestion des ressources halieutiques : une
approche moderne
Selon Jentoft (2006), la cogestion pourrait
être initiée, et appliquée à court terme, alors que
la transformation des droits de propriété pourrait être un
projet à plus long terme. Elle offre à en croire Konan
et Zantou (2005), des opportunités pour une exploitation
durable des ressources aquatiques et l'amélioration des moyens
d'existence des communautés de pêche en Afrique.
Béné et al, (2007)
étayaient que cette approche semble la mieux adaptée aux
défis actuels de l'aménagement des pêcheries. Cependant,
elle nécessite non seulement la présence d'acteurs sérieux
au niveau local, mais aussi des arrangements préalables sur le pan
juridique et pratique, auxquels sont associées les communautés,
à l'appui de la gestion décentralisée et participative.
Les auteurs susmentionnés, de spécialités
variées, ont abordé le sujet de la gestion des ressources
halieutiques chacun à sa façon, en évoquant surtout les
retombées socio-économiques de leur exploitation sur
l'économie mondiale. Mais, peu d'entre eux ont pu l'étudier
à fond dans des circonstances actuelles où les questions
environnementales et démographiques, la faim en particulier, occupent le
devant de la scène à quelque échelle que ce soit.
Pourtant, comme l'indiquait Rodary E., (2001), la
géographie paraît bien placée pour intégrer dans son
corpus scientifique, cette problématique de protection des ressources
halieutiques, compte tenu de son histoire basée sur l'analyse des
rapports homme-nature. Il a fallu attendre les années 1990-2000, pour
voir émerger des études en géographie,
intéressées à de tels questionnements.
3.3.3. Gestion durable des ressources halieutiques en
géographie
Plusieurs productions scientifiques ont été
réalisées en géographie sur la pêche dans le monde
à partir de l'an 2000. Parmi les travaux consacrés à
l'Afrique, les thèses de doctorat de Ndeye Astou-Niang sur la
« Dynamique socio-environnementale et développement local des
régions côtières du Sénégal : l'exemple de la
pêche artisanale » et de Landry Ekouala sur la
16
« gestion durable des ressources halieutiques et leur
écosystème dans les provinces de l'Estuaire et de l'Ogooué
(Gabon) » constituent une référence mis à part,
l'article de CAMARA M.B. intitulé : « La gestion des
ressources halieutiques au Sénégal : une contribution à la
réalisation des Objectifs du Millénaire pour le
Développement ».
En effet, Camara M.B. (2005) partant d'un certain
nombre d'indicateurs biologiques et socio-économiques, soutient qu'une
bonne gestion des ressources halieutiques contribue à réaliser
les Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD). Car, un
effort de pêche non contrôlé entraîne une baisse de la
productivité de la pêche maritime sur le plan économique,
une précarisation sécurité alimentaire sur le plan social,
et une diminution des emplois ponctuée par une baisse de la consommation
locale.
Ndeye A-N. (2009) relevait pour sa part, le poids des
facteurs socio-environnementaux sur le développement local de la
pêche artisanale au Sénégal. Sa thèse a permis de
voir que, les politiques de développement mises en place par
l'État dans le secteur de la pêche sont souvent restées au
stade de projet ou bien, mal appliquées et suivies sur le terrain.
Plus récemment, Ekouala L. (2013) dans son
étude sur la « gestion durable des ressources halieutiques et
leur écosystème dans les provinces de l'Estuaire et de
l'Ogooué (Gabon) » a relevé que la surpêche
observée à l'échelle mondiale est facilitée par les
progrès techniques et par une demande de consommation en constante
augmentation, notamment dans les pays développés. Le diagnostic
établi au Gabon mettait en évidence une exploitation
désordonnée des ressources halieutiques et une
détérioration générale de l'état des
écosystèmes côtiers, nécessitant des mesures
d'ajustement de la pression de pêche.
Ces thèses ne sont pas passées inaperçues
! D'autres centres d'intérêt sont nés en considérant
les pêcheries continentales à l'instar des lacs et barrages.
? Les études sur les activités de
pêche dans les lacs et barrages
Elles ne sont pas certes nombreuses, mais sont très
riches et significatives :
Laë (1997) procédait à
l'estimation des rendements de pêche des lacs africains au moyen des
modèles empiriques. D'après cette étude, la gestion
halieutique des lacs exige une estimation réaliste du potentiel
exploitable. L'utilisation des données abiotiques de 65 lacs africains
(y compris le lac de Maga) montre que l'intensification des activités de
pêche n'entraine pas un effondrement des prises comme il est
généralement admis, mais une stabilisation des rendements
à leur niveau maximum pour un nombre de pêcheurs au km2
compris entre 2 et 30. Dans ce cas, pour un effort inférieur à
deux pêcheurs par km2, les rendements à l'hectare sont
directement tributaires de la pression de pêche. Car, au-dessus de
17
cette valeur, et dans la gamme des efforts qui ont
été observés, les captures totales dépendent
essentiellement des capacités biologiques de
l'écosystème.
Cette étude très significative, sera
corroborée par une autre, faite en l'an 2000 par Kabré et
Ille (200) qui avaient envisagé d'évaluer le poids des
facteurs géographiques propres à la latitude, la longitude et
l'altitude sur la rentabilité des pêcheries artisanales
continentales. Le scénario portait sur deux pêcheries artisanales
lacustres de Bagré au Burkina-Faso sous un titre fort évocateur :
« Rétrécissement saisonnier des superficies d'eau,
variation physico-chimique et production artisanale des pêcheries de
Bagré ». Grâce à un savoir géographique
articulé, l'étude démontre que le
rétrécissement des superficies d'eau engendre la fluctuation de
la profondeur. Mais les autres hypothèses relatives à l'influence
des coordonnées géographiques sur la rentabilité de la
pêche ne furent pas vérifiées et sont restées
obscures jusqu'à l'heure.
Dans tous les cas, la pêche artisanale dans les lacs
reste un champ scientifique peu exploré en géographie, et le lac
de Maga ne soustrait pas à cette donne.
? Les études sur la pêche artisanale
lacustre à Maga
Belal et al. (2003) constataient que dans le lac de
Maga, la pêche est pratiquée neuf mois sur douze en raison des
trois mois de son d'interruption - de juillet à septembre -
correspondant au repos biologique.
La même année, Tarla et Mvondo
cités par l'UICN et CBLT (2007), se sont
intéressés à la diversité biologique du lac de Maga
ainsi que les espèces les plus exploitées. D'après cette
recherche, plus de 56 espèces de poissons peuplent la retenue et 12
d'entre elles intéressent prioritairement les pêcheurs. Il s'agit
des : Clarias, Tilapia, Mormyrus, Gnatonemus, Heterotis, Synodontis,
Bagrus, Auchenoglanis, Lates, Hydrocynus et Chrysichthys. Ces travaux
s'inscrivent plutôt dans le domaine des sciences halieutiques et
aquicoles.
Seignobos C. et Raugel B. (1986), se sont
intéressés à l'exploitation des ressources halieutiques
à travers une étude descriptive : « LA PÊCHE DANS
LE LAC DE MAGA ». Même s'il faut leur reconnaître le
mérite d'avoir attiré l'attention du public sur le nombre de
pêcheurs sur la retenue, leurs origines, leurs techniques de pêche
et de préparation de poissons, quelques limites réelles sont
cependant à souligner. L'influence de la pression démographique
et des paramètres socio-économiques défavorables, sur la
l'aménagement durable de cette pêcherie a peu été
élaboré.
18
Trente ans après, la présente étude se
propose d'aborder cet aspect. Car, compte tenu de l'obsolescence ou de la
caducité de cette analyse d'une part, et d'autre part, du
caractère général des observations de Seignobos et Raugel,
un vide scientifique concret plane sur l'évolution de la pêche
artisanale lacustre de Maga. Donc il y a matière à creuser. Il
parait évident que, faire le point sur l'avenir de cette activité
est une issue adéquate à suivre, pour parvenir à une
gestion durable des ressources halieutiques dans ce plan d'eau sensible.
4. DÉLIMITATION SPATIO-TEMPORELLE DE LA
RECHERCHE
Crée en 1979, suite à l'endiguement d'un
marécage plat drainé par trois cours d'eau (Mayo Guerléo,
Mayo Boula et Tsanaga) qui se déversent dans la plaine d'inondation du
Logone, le lac de Maga (Figure 01), bien que dénommé
comme tel, s'intègre dans la partie septentrionale du bassin du lac
Tchad11 entre les latitudes : N 10°46'12'' - N 10°52'12''
et les longitudes : E 14°50'24'' - N 15°04'12''(CBLT et FEM, 2005
; UICN et CBLT, 2007). Il correspond aux 360 km2 d'eau
séparant de façon irrégulière12,
l'arrondissement de Maga (au Nord) et celui de Kaï-Kaï (au Sud) dans
le département du Mayo-Danay, région de
l'Extrême-Nord-Cameroun.
11 Le bassin du Lac Tchad est une cuvette de 1,5 millions de
km2 que couvre le Tchad, une partie du Niger, du Nigeria, de la R C
A et du Cameroun. La partie camerounaise couvre environ 1/12e de la surface du
« moyen Tchad » soit près de 1700 km2. Il est
situé entre le 12° 30''et 14° 30''de latitude Nord et entre le
13° et 15°30''de longitude Est. Dans le bassin camerounais du Lac
Tchad on distingue une partie septentrionale dans la région de
l'extrême Nord et une partie méridionale située dans
l'Adamaoua.
12Selon la CBLT la retenue de Maga s'étend
chaque année sur environ 12000 ha en juin et 36000 ha en octobre.
19
Figure 1: Localisation de la retenue d'eau de
Maga
20
La présente étude porte du point de vue
spatiale, sur cette retenue d'eau dans sa globalité. Dans le temps, elle
va de 1986 à 2015 soit 29 ans.
5. OBJECTIFS DE RECHERCHE 5.1. Objectif
principal
Faire le point sur l'avenir de l'activité de pêche
dans la retenue d'eau de Maga. 5.2. Objectifs
spécifiques
· Évaluer l'état de la pression
exercée par les activités de pêche dans le lac de Maga.
· Identifier les différents acteurs au coeur de
cette pression et leurs responsabilités.
· Montrer son impact sur les ressources halieutiques et
l'écosystème.
6. HYPOTHÈSES DE RECHERCHE 6.1. Hypothèse
principale
La croissance démographique de ces dernières
années est la principale cause de bien de menaces directes et indirectes
sur les ressources halieutiques et l'écosystème lacustre de
Maga.
6.2. Hypothèses spécifiques
· La pression exercée par la pêche dans le
lac de Maga a un impact négatif sur les ressources halieutiques et la
durabilité de l'écosystème.
· Le comportement de certains acteurs directs ou
indirects est responsable de nombreux dysfonctionnements qui plombent l'avenir
de cette activité.
· La gestion des ressources halieutiques dans la retenue
d'eau de Maga est particulièrement menacée par la croissance
démographique.
7. CADRE CONCEPTUEL ET THÉORIQUE
La réflexion thématique minutieusement
menée sur la nature du sujet a conduit à privilégier
l'usage de certains concepts pour mieux analyser les évolutions de la
pêche dans ce travail. Il s'agit de :
21
? Développement durable
Le développement durable est apparu dans les
années 1980. Il est considéré comme « le nouveau
paradigme de la gestion des rapports entre l'homme et la nature »
(Corlay J.P., 2004). Ce concept a été introduit
officiellement en 1992 lors du Sommet mondial de la Terre organisé par
la Conférence des Nations Unies pour l'Environnement et le
Développement (CNUED) à Rio de Janeiro. Ainsi, une
définition officielle a été retenue sur le concept : c'est
« un développement qui répond aux besoins des
générations du présent sans compromettre la
capacité des générations futures à répondre
aux leurs ». C'est cette définition, la toute première
qui est retenue dans cette recherche.
Dans son acception la plus large, le concept doit être
compris comme un développement à la fois supportable par les
écosystèmes dans lesquels nous vivons, donc économe en
ressources naturelles et aussi "propre" que possible ; viable, autosuffisant
à long terme, c'est-à-dire fondé sur des ressources
renouvelables et autorisant une croissance économique riche en emplois,
notamment là où les besoins essentiels ne sont pas couverts ;
vivable pour les individus et les collectivités, donc orienté
vers la cohésion sociale et l'accès pour tous à une haute
qualité de vie.
Le concept de gestion durable des pêcheries
rejoint celui de développement durable. Il est
perçu dans ce travail comme le veut la FAO : « le processus
comprenant la collecte d'informations, l'analyse, l'élaboration, la
consultation, la prise de décisions, l'attribution des ressources, la
formulation et la mise en place, avec application si nécessaire, des
règles ou des règlements qui régissent les
activités de pêche afin d'assurer une productivité continue
des ressources, et la réalisation d'autres objectifs en matière
de pêche » (FAO, 2000).
? Ressources halieutiques
Les ressources biologiques englobent les ressources
génétiques, les organismes ou parties d'organismes, les
populations ou toute autre composante biotique d'écosystèmes
ayant une valeur d'usage effective ou potentielle pour l'humanité. Les
ressources halieutiques sont les ressources qui ont une valeur pour la
pêche. Elles désignent tout stock d'animaux (allant des
crustacés les plus petits aux grosses baleines via les poissons divers)
aquatiques vivants (sauf ceux qui sont spécifiquement interdits par la
loi) qui peuvent être pris par la pêche, et leur habitat.
22
Dans cette recherche, l'expression « ressources
halieutiques » désigne exclusivement les poissons dans leur
diversité et n'est par conséquent pas applicable aux autres
espèces vivantes dans le lac comme les tortues, hippopotames, varans,
etc. qui peuvent faire l'objet de prise accidentelle en pêche
artisanale.
? La pêche responsable
Ce n'est rien d'autre que l'application des principes du
développement durable aux activités de pêche. En effet,
selon la FAO c'est la forme d'exploitation qui, tout en les prélevant,
maintient leur diversité biologique, leur productivité, leur
faculté de régénération et leur capacité
à assurer, de manière pérenne et sans préjudice
pour les écosystèmes établis, les fonctions
économiques, écologiques, sociales, culturelles et scientifiques
pertinentes ».
Dans ce travail, ce concept n'est pas dénoué de
l'exploitation durable des ressources halieutiques qui, d'après la
conférence internationale sur la pêche responsable tenue à
Cancun au Mexique en 1992, « englobe l'utilisation durable des
ressources halieutiques en harmonie avec l'environnement, et le recours
à des méthodes de capture sans effet nocif sur les
écosystèmes, les ressources ou leur qualité. Il fait
également place à la notion de valeur ajoutée au produit
par des procédés de transformation respectant les normes
sanitaires requises, et à l'adoption de pratiques commerciales
permettant d'assurer aux consommateurs l'accès à des produits de
qualité ».
? L'écosystème
Un écosystème est une entité très
complexe avec de nombreux éléments interactifs. Il peut
être défini comme « un système d'interactions
complexes de populations entre elles et avec leur environnement » ou comme
« le fonctionnement et l'interaction conjointe de ces deux compartiments
(les populations et l'environnement) dans une unité fonctionnelle de
taille. Les écosystèmes peuvent être
considérés à différentes échelles
géographiques, à partir d'un grain de sable avec sa microfaune
riche, à une plage entière, une zone côtière ou un
estuaire, une mer semi-fermée et, éventuellement, la Terre
entière.
Ce travail s'intéresse à
l'écosystème lacustre de Maga. C'est-à-dire au
système d'interaction complexe des ressources halieutiques (les poissons
notamment) entre elles et leurs lieux de vie (le lac). Concrètement, il
s'agit de voir la stabilité et l'équilibre systémique
entre les poissons et l'eau dans laquelle ils vivent.
23
Les écosystèmes qui soutiennent la pêche
sont, aujourd'hui, soumis à un certain nombre de modifications d'une
pertinence significative. En raison de notre compréhension imparfaite de
la structure des écosystèmes et leur fonctionnement, et de la
difficulté inhérente à distinguer entre les changements
naturels et anthropiques, ces derniers ne sont pas toujours parfaitement
prévisibles et/ou réversibles (Christensen et al. 1996).
La pêche demeure aujourd'hui comme la première activité
humaine ayant eu un impact sur les écosystèmes côtiers
(Jackson et al. 2001).
Ce travail cherche à identifier et analyser comment ces
concepts sont appliqués à la gestion des stocks ichtyologiques
lacustres de Maga.
8. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
La méthodologie appliquée dans cette recherche
repose sur une démarche systémique, nourrie de l'analyse des
données bibliographiques (statistiques de pêche, travaux de
biologie et de socio-géographie et économie des pêches),
d'entretiens auprès des services étatiques et auprès des
pêcheurs grâce à un questionnaire conçu puis
traité (voir annexe 2 et 3).
8.1. La collecte des données
Les données collectées sont de deux ordres :
secondaires et primaires. 8.1.1. Les données
secondaires
Les données des 15 dernières années
relatives aux débarquements des espèces cibles sont
collectées auprès du centre d'alevinage et de contrôle de
pêche de Maga, des DAEPIA-Maga et Kaï-kaï, et de la
DDEPIA-Yagoua. L'accent a été mis sur les 05 espèces les
plus capturées (Glarias, Tilapia, Heterotis, Bagrus et Lates).
Car, ces dernières fournissent plus de 60 % des
débarquements annuels enregistrés et approvisionnent le
marché intérieur ainsi que les organisations de transformation et
d'exportations des produits halieutiques frais, fumés et
séchés.
La période de référence (de 2000 à
201513 et 2011 à 201514) a été
dictée par la disponibilité des données y
afférentes. Les statistiques des débarquements ont
été collectées dans les DAEPIA-Maga et Kaï-kaï.
Les données relatives à l'effectif de pêcheurs sont celles
des rapports départementaux de la DAEPIA de Yagoua sur la pêche
dans le lac Maga. Les
13 Débarquements, nombre d'engins, de pirogues
et de pêcheurs.
14 Débarquements des 05 espèces les plus
exploitées.
24
données socio-économiques de la pêche sont
recueillies sur le terrain grâce à un questionnaire et
complétées par les résultats de l'enquête-cadre de
2011 menée conjointement par la FAO et le MINEPIA sur la retenue.
Pour en arriver là, un questionnaire a
été administré aux délégués des deux
centres et une fiche de collecte de données halieutiques dressée
dans laquelle ont été mentionnés les débarquements
mensuels et annuels de chaque espèce, suivant la déclaration du
gestionnaire ou alors, selon la mention du rapport consulté. Ces
données ne pouvaient à elles seules suffire pour se prononcer
objectivement sur les multiples aspects de la pêche. Il a fallu recourir
à des observations de terrains qui se sont avérées
précieuses dans ce travail.
8.1.2. Les informations de terrain
Les informations de terrain ont été
collectées à partir des questionnaires préparés
selon les objectifs en vue. Ce questionnaire dûment élaboré
sur l'organisation et la dynamique socio-économique de cette
activité (annexe 02) a été administré aux
pêcheurs aussi bien à Maga qu'à Kaï-Kaï.
Afin de rassembler le maximum d'information possible,
l'enquête a distingué les pêcheurs des aides-pêcheurs,
les mareyeurs (commerçants confondus) et transformateurs (friture et
fumage). Est dénommé « pêcheur » dans cette
enquête, toute personne (homme ou femme) disposant d'un équipement
de pêche (loué ou propre) pratiquant cette activité de
façon permanente. Ont été intégrés dans la
catégorie d'aides pêcheurs, les garçons qui, dès
l'âge de 15 ans, savent diriger une pirogue, préparer le poisson
et parfois même réparer les filets. Ceux-ci ne constituent pas la
cible principale de cette étude15, mais sont toutefois
comptés dans l'effort de pêche parce qu'ils sont des acteurs
à part entière de cette activité et sont susceptibles
d'accroitre la pression de pêche tant par leurs nombres que par leurs
manières d'agir.
Ainsi, auprès de 100 pêcheurs de la retenue d'eau
de Maga, les informations relatives aux points suivants ont été
recueillies :
- Caractéristiques socio-professionnelles du
pêcheur
- Les paramètres de l'exploitation halieutique -
Fréquence d'utilisation du lieu de pêche
15 Ils n'ont pas trop d'expérience dans le
domaine et ne pourraient parler ex professo de cette activité. Leurs
observations sont limités dans le temps et parfois moins
cohérentes. Toutefois, ils sont partie intégrante de cette
activité et identifiés comme acteurs directs.
25
- Impacts des facteurs anthropiques sur la pêche
- Stratégies de gestion des ressources halieutiques
Compte tenu de la vastitude du lac et de
l'hétérogénéité spatiale des pratiques de
pêche, l'enquête a touché trois zones
écogéographiques autour de la retenue ainsi qu'il suit :
? Zone Maga 1
La zone « Maga 1» correspond à la zone de
compétence du centre d'alevinage et de contrôle de pêche de
Maga. Elle s'étend sur 12 km de long. Suivant la digue-barrage, elle va
de Guirvidig jusqu'au lieudit P2 (pont II). Y ont été
interrogés 48 pêcheurs professionnels soit 48 % de l'effectif
total étudié, répartis comme suit (tableau 01), dans leurs
villages ou campements respectifs :
Tableau 1: Effectifs de pêcheurs
enquêtés dans les villages de Maga 1
Campements ou villages
|
Effectif des pêcheurs interrogé
|
Gamack
|
15
|
Yangah
|
05
|
Malka
|
07
|
Keleo
|
04
|
P2
|
17
|
Total
|
48
|
Source : Enquête de terrain,
Mars 2015.
? Zone Maga 2
De « P2 » à POUSS (12 km de long), se situe
la zone « Maga 2 ». Elle est sous le contrôle du Centre de
Contrôle de Pêche de Tékélé. L'enquête
s'est intéressée à 33 pêcheurs dans les campements
suivants (tableau 02) :
26
Tableau 2 : Effectifs de pêcheurs
enquêtés dans les villages de Maga 2
Campements ou villages
|
Effectifs des pêcheurs interrogés
|
Hoff
|
05
|
Gaya pouss
|
07
|
Balla
|
04
|
Wan groun
|
17
|
Total
|
33
|
Source : Enquête de
terrain, Mars 2015.
? Zone Kaï-Kaï
Moins accessible que les précédentes et
très difficile à délimiter, la zone Kaï-Kaï
couvre la partie sud de la retenue. Elle regroupe plusieurs villages et
campements inaccessibles où, la pêche n'est pratiquée que
pendant les crues. Quand les eaux se retirent, le lac s'assèche et les
pêcheurs migrent tous vers le Nord (zone Maga). L'enquête se
situant durant la haute saison, 19 pêcheurs ont pu être
interrogés dans 03 villages tel qu'indiqué dans le tableau
ci-dessous :
Tableau 3 : Effectifs de pêcheurs
enquêtés dans les villages de Kaï-Kaï
Campements ou villages
|
Effectifs des pêcheurs interrogés
|
Djafga
|
08
|
Kaï-kaï
|
09
|
Yabai
|
02
|
Total
|
19
|
Source : Enquête de terrain,
Mars 2015.
Des entretiens individuels ou enquêtes semi-directes
avec les « acteurs extérieurs » ont été
également faits auprès des personnes ressources (Chef du CACP de
Maga, Chefs des PCP de Kaï-Kaï et Tékélé ; S.G
de la cogestion de Maga et Kaï-Kaï), des structures administratives
(sous-préfectures de Maga et Kaï-Kaï) des collectivités
locales (communes d'arrondissement de Maga et Kaï-Kaï) pour mieux
analyser leurs implications dans le développement de la
27
pêche artisanale et l'amélioration de la
qualité de vie des populations concernées. Ces entretiens ont
été faits à partir d'un guide d'entretien
préparé à cette fin (annexes 03).
8.2. Traitement et analyse des données
Le traitement des données s'est fait suivant le plan
d'échantillonnage défini au départ. Il convient d'abord de
présenter le matériel utilisé.
8.2.1. Présentation du matériel
utilisé
Par matériel, il faut entendre l'ensemble des objets, des
éléments qui ont servi à la
réalisation d'un ouvrage. C'est aussi au sens informatique
du terme, l'ensemble des éléments
physiques employés pour le traitement des
données.
Ainsi, cette recherche a nécessité :
- Un appareil photo numérique pour les
prises de vue
- Un GPS pour les marquages géographiques
des points importants de
débarquements et des points de prise de vue.
- Une pirogue avec ou sans moteur et une moto
pour assurer la mobilité à travers la
retenue.
- Un thermomètre pour la prise des
températures d'eau
- Les logiciels utilisés sont : Microsoft
Office 2010 et 2013, Adobe Illustrator,
Inskap, QGIS 2.10, Adobe photo shop, et Google Earth.
- Un ordinateur pour traiter ces données
collectées.
8.2.2. Quelques formules retenues
Les données précédemment
collectées ont été introduites dans un tableur Excel. Leur
traitement s'est fait suivant les objectifs spécifiques poursuivis.
Ainsi, par rapport à la pression de pêche, des
courbes d'évolutions relatives à la quantité de poissons
débarqués au cours des 15 dernières années ont
été réalisées. Idem pour l'effectif des
pêcheurs sur la retenue, les embarcations utilisées par les
pêcheurs artisans et leurs engins. Le barème fixé par la
FAO (effectif des pêcheurs/ surface considérée) a
été retenu pour calculer l'intensité des pêches dans
la retenue. Puis, une comparaison entre l'effectif des pêcheurs au
Km2 sur la retenue en 1986 et celui de 2015 a été
faite pour apprécier la situation actuelle. En même temps, les
modifications qualitatives et quantitatives de la flottille et des engins de
pêche ont été prises en compte. Ainsi,
28
Pression de pêche = Effort de capture
+ Pression socio-économique
Effort de pêche = Effectif
total de pêcheurs sur le lac
???????????????????? ???????????? (????2) +
?????????? ?????? ?????? ???? ??????
Pression socio-économique = Main
d'oeuvre artisanale + Production
L'identification des catégories acteurs ainsi que leurs
moyens de production est fonction de la richesse du questionnaire (annexe
02) dûment dépouillé et classé par degré
de participation à la chaîne d'activité du secteur en
général. Ainsi, le premier point réservé à
l'identification du pêcheur, indique les caractéristiques
socio-professionnelles de ce dernier. Il renseigne sur les origines,
l'âge, le temps mis sur la retenue, etc. Le deuxième point
permettait d'associer au cas échéant, ce dernier à un
commerçant et/ou un transformateur à partir de la provenance du
matériel de pêche (pirogue ou filet) qu'il utilise. Ces
renseignements sur les pêcheurs et leurs moyens de production sont
complétés par d'autres par rapport à l'impact de la
pêche sur les ressources et l'écosystème.
L'impact de la pêche sur les ressources et
l'écosystème a été perçu à travers
une évaluation biologique des stocks, nourrie par des observations et
clichés photographiques. Aussi, directement par les déclarations
de pêcheurs professionnels par rapport aux variations constatées
sur les rendements par pêcheurs et les types de pollution
observées.
En ce qui concerne la réglementation de la pêche
ainsi que les contraintes à son application, les textes en vigueurs ont
été recensés et examinés grâce aux entretiens
avec le personnel des services déconcentrés du MINEPIA
(annexe 3).
Au total, on dira que le travail de terrain qui portait sur
l'examen des paramètres de l'exploitation halieutique lacustre de Maga,
a permis de suivre dans le temps, les indicateurs biologiques et
socio-économiques de la pression de pêche. On a pu voir en
même temps, la situation actuelle.
29
8.2.3. Interprétation des résultats
Pour apprécier la pression de pêche dans le lac,
le postulat de la FAO (2 pêcheurs/km2) a été
retenu comme référence et le rendement maximum
durable16 considéré est de 1500 tonnes de capture par
an depuis 1986. C'est-à-dire, lorsque :
Intensité de pêche > 2 <
30 pêcheurs/km2 = pression acceptable
Intensité de pêche > 30
pêcheurs/km2 = pression excessive, situation critique
En référence aux conclusions de Laë R.
(1997) qui a trouvé que lorsque l'effort de pêche est compris
entre 2 et 30 km2, la production est encore maîtrisable. Mais
passé ce stade, les stocks s'épuisent.
Ainsi, l'augmentation de la production renseigne sur
l'augmentation de l'effort de pêche y compris tous les autres
éléments qui la définissent. Lorsque les
prélèvements sont supérieurs à ce postulat, ils
sont jugés préjudiciables aux ressources en présence.
C'est ce qu'explique la formule suivante :
Prélèvements > RMD =
surexploitation
L'impact des pêches sur les ressources a
été interprété via la baisse des
débarquements relatifs aux captures enregistrées, l'apparition
massive des captures juvéniles dans les débarquements, la chute
des Captures par Unité d'effort et, le regret du passé de la
pêche lisible sur la situation socio-économique des acteurs de ce
secteur.
En ce qui concerne leur environnement, il a été
considéré que la substitution des appâts par les morceaux
de savon constitue une source de pollution aquatique. Aussi, les Engins
Abandonnés, Perdus ou Rejetés (EAPR) dans le lac sont dangereux
pour la mobilité des poissons et la pureté de leur environnement.
En fin, les engins prohibés ainsi que les déchets plastiques
divers sont source de dysfonctionnement des habitats sensibles. Pour finir, le
rétrécissement de la retenue et l'augmentation de la population
autour du lac paralysent les efforts de gestion durable entrepris par les
acteurs variés. Ceci a été observé à partir
du désordre qui prospère sur la retenue tant dans la pratique
qu'au niveau de l'organisation de cette activité.
16Poids de poissons présents dans un stock
qui peut être prélevé par la pêche tout en maintenant
la biomasse du stock à un niveau stable d'année en année,
les conditions environnementales étant supposées rester
identiques.
30
Bref, c'est grâce à la confrontation des
données bibliographiques, aux observations et aux enquêtes de
terrain qu'on a pu dégager les axes majeurs qui ont ensuite guidé
la construction finale de ce travail à certains points, difficiles.
8.3. Difficultés rencontrées
Pour terminer, il convient d'évoquer les
difficultés rencontrées dans cette recherche. Il s'agit de
l'absence d'une documentation fournie sur la problématique de la
pêche à Maga, contrairement à certaines pêcheries
continentales du pays comme le barrage de Lagdo dans le Nord ou Mbakaou dans
l'Adamaoua qui dispose d'une documentation bien plus garnie sur la gestion de
leurs stocks ichtyologiques.
Ces difficultés ont été
rencontrées aussi bien à Ngaoundéré qu'à
Maga. En effet, à Ngaoundéré, cela est dû en partie
au fait que ce secteur est resté longtemps inexploré surtout au
département de géographie. Aucun mémoire ou Thèse
de Doctorat ne s'est intéressé expressément à cette
activité. À Maga et à Kaï-Kaï, l'obtention des
informations relatives à l'évolution du secteur de pêche
(effectif des pêcheurs sur la retenue, débarquements annuels,
etc.) s'est avérée très difficile. Celles relatives au
suivi chronologique des espèces halieutiques quasiment absentes,
excipées pour les espèces les plus prisées 05.
Plus encore, à l'échelle de la retenue tout
entière, il n'existe pas de données statistiques pouvant rendre
compte de la dynamique de la production de manière satisfaisante, et
ceci pour au moins deux raisons. Il s'agit d'abord, de l'absence d'un suivi
méticuleux de la production halieutique lacustre entre 1979 et 1993, due
aux activités de la SEMRY encore intenses à l'époque. En
effet, seule la SEMRY procédait à des quantifications de la
production des pêches pour toute la retenue. Elle ne pouvait le faire que
lorsque besoin se pose c'est-à-dire pas régulièrement
chaque mois chaque année. De plus, celles-ci n'étaient que
partielles et partiales raison pour laquelle, les données
crédibles de cette période sont celles de 1985 pour la SEMRY
d'une part et celles de 1986 publiées par Seignobos.
Pourtant, à partir de 1994 jusqu'en 2015, deux
problèmes majeurs se posent. La gestion du lac devient de concert entre
l'État et la SEMRY. Les statistiques sont depuis lors produites par les
délégations d'arrondissements des services
déconcentrés du ministère en charge des pêches au
Cameroun présentes à Maga et à Kaï-Kaï. Aucune
transmission des données statistiques de base antérieures n'a
suivi le transfert des compétences. Exceptée à Maga
où, le CACP fournissait de gros efforts dans ce sens. Ce qui justifie la
quasi-inexistence des données par mois à cette période
indiquée.
31
Secondement, pareillement au CACP de Maga, le service de
pêche de Kaï-Kaï s'efforçait avec intermittence à
fournir une base statistique inusitée dans notre recherche. Car,
partiellement menée du moment où la pêche artisanale
lacustre n'y est pas permanente, mais plutôt jugulée par la
décrue du lac dès fin février. D'autre part, le faite que
les comptabilités statistiques relatives aux débarquements en
pêche y portent même sur la pêche en dehors du lac
discrédite ces données lorsqu'il faut procéder à
une évaluation de la production globale17. Les seules
statistiques fiables sont celles de la DAEPIA de Maga qui réunissent les
débarquements du CACP de Maga et ceux du CCP de
Tékélé, soit 70 % de la production halieutique globale du
lac en temps réel. C'est celles qui sont étudiées de
façon chronologique dans cette recherche et les données
récoltées sont fort éloquentes.
On ne manquera pas de souligner les difficultés
spécifiques de terrain dont quelques-unes ont été
mentionnées précédemment. Il s'agit entre autres des
difficultés d'accès à certains villages ou campements de
pêche souvent très éloignés des centres urbains et
de la méfiance des pêcheurs vis-à-vis des étrangers
qui ont parfois refusé de communiquer les informations sur leurs
activités. Mais aussi et surtout du calendrier de pêche qui a
profondément influencé cette recherche. Car, la période de
repos biologique limitait toute observation scientifique du 1er
juillet 2015 au 31 septembre 2015.
Toutefois, ces nombreuses difficultés n'ont pas
empêché d'élaborer, à partir des informations
recueillies, un argumentaire assez intéressant sur la question du
sujet.
9. INTÉRÊT DE LA RECHERCHE
L'intérêt de cette étude résulte
essentiellement dans le fait qu'elle interpelle les pouvoirs publics
concernés sur les dangers qui menacent l'avenir d'une pêche
précieuse pour la survie de leurs populations. Elle est à ce
titre appliquée et applicable en ce sens qu'elle indique après
une évaluation bien que partielle des stocks des ressources
exploitées, les espèces de poissons dont l'exploitation peut
faire l'objet d'une interdiction formelle, celles qui sont le moins
touchées ou encore, pas du tout touchées.
Aussi, cette étude est originale tant parce qu'elle
enrichit le champ scientifique des problématiques jusqu'ici
étudiées au département de géographie à
l'université de Ngaoundéré d'un nouvel axe de recherche
que parce qu'elle s'attaque à un problème d'actualité. Il
s'agit
17 C'est l'un des défis sérieux qui
se posent aux gestionnaires pour l'aménagement durable de cette
pêcherie. Les estimations faites par ceux-ci à nos jours sont
restées en marge de la réalité pour les mêmes
raisons.
32
d'une recherche transversale qui se met au service du
développement durable à travers la pêche responsable en
alignant systématiquement dans un même contenu, des
théories variées à savoir : l'aménagement du
territoire, la géographie économique et la géographie de
la population. Elle pose les fondations scientifiques de l'aménagement
durable du lac de Maga.
L'approche géographique de cette étude se
révèle à travers l'importance de la pêche dans la
dynamique spatiale et dans la recomposition territoriale des communes de Maga
et Kaï-Kaï. Elle se révèle aussi dans la
mobilité spatiale à l'intérieur de la plaine du Logone et
la dynamique des relations entre cet espace et le reste du pays. Elle tient
compte également des contraintes et atouts tant techniques, sociaux que
financiers de cette activité.
Outre les contraintes, parmi les facteurs stimulateurs de
cette recherche, figure en grande partie la croissance démographique. Si
par définition, elle est l'augmentation générale de
l'effectif d'une population donnée, la géographie elle, qui peut
se définir comme la science de la dimension spatiale des
sociétés, intègre l'homme comme un élément
de l'organisation de l'espace à travers ses activités au nombre
desquelles, la pêche. Cette relation entre les ressources halieutiques et
la population suscite bien l'intérêt de cette étude. Dans
cette présente démarche, la gestion durable des pêcheries
est au coeur de l'analyse géographique de la pêche artisanale.
10. PLAN DE RÉDACTION
Les résultats de ce travail se présentent en
deux parties structurées en deux chapitres chacune. L'introduction
générale pose les enjeux du sujet ainsi que le cheminement
scientifique et méthodologique de la recherche.
La première partie (le lac de Maga : un lieu de
pêche sous pression) apprécie la pression exercée sur le
plan d'eau de Maga par les activités de pêche (chapitre 2). Mais
avant d'en arriver là, le chapitre premier (chapitre 1) évoque
les fondements physiques et humains de cette activité.
La deuxième partie (l'avenir de la pêche
artisanale lacustre de Maga) évalue d'abord l'ampleur de la
dégradation biologique, écosystémique et
socio-économique due à la surpêche (chapitre 3) puis teste
l'efficacité de la réaction des pouvoirs publics (chapitre 4).
La conclusion générale essaie de voir si les
hypothèses formulées au départ ont été
toutes vérifiées. Elle ouvre bien évidemment des pistes de
réflexion pour des nouvelles expériences scientifiques.
PREMIÈRE PARTIE :
LE LAC DE MAGA : UN LIEU DE PÊCHE SOUS
PRESSION
34
Introduction partielle
La pêche contribue depuis des temps immémoriaux
à la survie des communautés qui la pratiquent en leur apportant
un complément alimentaire et des revenus monétaires substantiels
pour satisfaire leurs besoins. Ainsi en est-il du lac de Maga dans
l'Extrême-Nord Cameroun, particulièrement poissonneux et
bordé des villages et campements Musgum, Massa, kotoko etc. dont
l'intérêt notoire pour la pêche est légendaire. Ces
groupes ethniques ont été rejoints dans cette activité par
des allogènes en provenance du Tchad, du Nigeria ou du Mali. Ces
nouveaux venus, avec une longue tradition halieutique, pratiquent en
exclusivité la pêche artisanale lacustre. Experts et
détenteurs d'outils et de techniques de pêche hyper performants,
ils réalisent d'énormes prises dont les produits, sont non
seulement vendus sur les marchés locaux, mais aussi exportés au
Nigeria, au Tchad voisin ou alors transformés. Aujourd'hui, la pression
démographique y a porté l'effort des pêches à sa
pointe en violant expressément toutes les recommandations scientifiques.
Dans ces conditions, comment s'organise alors l'exploitation des ressources
halieutiques dans cette pêcherie artificielle ? La pression de
pêche exercée sur la retenue ne constitue-t-elle pas une menace
les stocks ichtyologiques et l'écosystème ? Il convient dans
cette première partie, d'analyser d'abord les fondements de la
pêche artisanale lacustre de Maga (Chapitre 1) puis d'estimer la
pression exercée sur la retenue par le développement de la
pêche et ses corollaires (Chapitre 2).
35
CHAPITRE 1 : FONDEMENTS DE LA PÊCHE LACUSTRE DE
MAGA
Introduction
À l'image des grands écosystèmes
aquatiques marins ou océaniques particulièrement riches, le lac
de Maga présente d'énormes atouts favorables au
développement de la pêche. Quels sont-ils ? Quel rôle joue
chacun d'eux dans la stabilité et le maintien de l'équilibre
écosystémique de la retenue, facteur indispensable au
développement et à la multiplication des poissons ? Afin de
révéler les potentialités halieutiques de cette
pêcherie, ce chapitre détaille qu'elles reposent tout d'abord sur
son cadre physique puis sur sa richesse interne. Aussi, conviendra-t-il
d'ajouter qu'il s'agit, d'une retenue située dans un milieu humain de
tradition halieutique séculaire.
1.1. LES ATOUTS PHYSIQUES DE LA RETENUE
La pêche lacustre de Maga se fonde d'abord sur les
atouts physiques de la retenue. Ceux-ci sont constitués par les
artefacts techniques mis en places par l'homme pour permettre le fonctionnement
du plan d'eau, et les données géographiques naturelles opportunes
aux activités piscicoles.
1.1.1. Une retenue aux capacités physiques
considérables
Les capacités physiques de la retenue de Maga sont a
priori, le premier facteur à même d'expliquer l'abondance relative
des ressources. Par ordre d'importance relative décroissante, on retient
les ouvrages géotechniques de la retenue et les données
climatiques.
1.1.1.1. Les ouvrages géotechniques de la
retenue
Ces ouvrages sont suffisamment nombreux et importants à
telle enseigne que la création du réservoir de Maga n'a pas
laissé l'environnement indemne. On peut noter :
? Le réservoir de
Maga-Kaï-kaï
Avec une profondeur moyenne de 3 m, le réservoir de
Maga-Kaï-Kaï (image 1) s'étend sur une superficie
variante entre 240 et 360 km2 selon les saisons (Le
Competing-Bet, 2006) et peut contenir jusqu'à 625 millions de
m3 d'eau. La cote la plus basse du système se trouve au
niveau de l'évacuateur de Vrick, constitué par 10 vannes
(planche 1). Le volume prélevé pour l'irrigation des 700
hectares de rizières de l'unité II de la SEMRY est estimé
à 200 millions de
36
m3 d'eau par an. Une bonne partie de cette eau est
drainée par le Mayo Vrick et P2 pour alimenter les Casiers rizicoles.
Photo 1: Le réservoir de
Maga-Kaï-kaï
La démarcation en rouge illustre la zone d'impact
du lac de Maga. Le miroir d'eau couvre habituellement cette surface.
Selon les rapports des bureaux d'études, « Le
Competing-Bet » (2006) et « ERE-Développement »
(2012), les cours d'eaux qui alimentent le lac, transportent des
quantités importantes de sédiments et débris organiques
qui se déposent à l'entrée et dans les dépressions
de la retenue. Il n'y a pas des données permettant une quantification de
l'envasement, la réduction de la profondeur du réservoir et du
volume d'emmagasinement d'eau, mais il est certain que la capacité du
réservoir s'est réduite. Et la pêche y pratiquée, a
à y voir pour beaucoup. Le miroir d'eau aurait aujourd'hui une
superficie de 109 Km2 en période de décrue.
C'est dans ce plan d'eau que s'effectuent les captures, et
c'est dans et autour de celui-ci que se trouvent les villages des
pêcheurs.
37
? La digue-barrage Guirvidig-Maga-Pouss
La retenue est soutenue au Nord par le barrage en terre
compactée de Maga long de 27 km qui va de Pouss à Guirvidig via
Maga orienté d'Est en Ouest (voir figure 02). Construit en 1979
il a eu une hauteur originelle d'environ 4 à 5 m et une largeur en
crête de 3,5m. Ladite digue est formée de sable argileux et
limoneux peu compressible et compactée en couches d'environ 15 cm
d'épaisseur. Quatre ouvrages de prise d'eau aménagés sur
la digue servent à irriguer par gravité les
périmètres rizicoles de la SEMRY.
Au stade de son fonctionnement optimum, les eaux du
réservoir doivent être vidées avant les apports de la
prochaine saison de pluies. Elle peut être une solution durable,
écologique et économique au problème d'inondation dans la
plaine, à condition d'assurer pleinement sa fonction d'irrigation et que
les apports des sédiments qui comblent progressivement le lac soient
maîtrisés. Car, jusqu'en 2012, elle était dans un
état de dégradation avancée à cause d'un entretien
insuffisant et de certains défauts originels aussi bien de conception
que de construction.
Heureusement qu'aujourd'hui les travaux de
réhabilitation entrepris dans le cadre du projet dénommé
PULCI18 semblent transformer celle-ci en un véritable
boulevard utilisable à la fois par les piétons, les cyclistes et
les engins à moteurs (photo 2) vont lui redonner fonctions.
Coordonnées de prise de vue : x=10° 49'
58» y - 14° 57' 10» E Photo 2 : Vue de
dessus de la digue barrage de Maga en réhabilitation
18 Le Plan d'Urgence de Lutte Contre les
Inondations est un projet en cours actuellement dans la localité.
Financé à la fois par l'État et la banque mondiale.
En plus du soutien de la Digue-barrage, pour fonctionner, ce
plan d'eau a aussi besoin d'autres infrastructures annexes au nombre
desquelles, la prise d'eau sur le Logone, le déversoir de Pouss et
l'évacuateur de Vrick.
? Le pont sur le Mayo Vrick
L'ouvrage assure la vidange partielle de la retenue en cas de
montée rapide et menaçante du niveau d'eau. Il est situé
sur la digue-barrage au point PK 15+864, entre Maga et Guirvidig. Cet ouvrage
est constitué d'une batterie de dix dalots au niveau de la
digue-barrage. Dix vannes à glissement NEYRTEC 1400 x 1400 mm
contrôlent le débit de l'ouvrage (planche 01, a). Le
bassin de dissipation d'énergie à l'aval de l'ouvrage se prolonge
par un revêtement en enrochements du chenal d'évacuation,
constitué de gros moellons et qui débouche dans le Mayo Vrick,
principal axe de drainage de l'aménagement (b, planche 01).
Les talus de berges situés à l'amont de la digue
barrage, de part et d'autre de l'ouvrage de Vrick ont fait l'objet
d'enrochements jointoyés au mortier de ciment sur une faible pente, afin
d'assurer leur protection contre l'érosion et le batillage.
a
b
Coordonnées des prises de vues :
X= 10°50'14» - y=14°55'24»
X=10°50'14» -y=E 14°55'24»
38
Planche 1 : Pont sur le Mayo Vrick
39
Seulement 6 vannes peuvent être
opérées pour réduire le niveau du réservoir. Les
autres ne le sont pas à cause du manque d'entretien et du vandalisme.
Les enrochements à l'aval des bassins de dissipation ont aussi fait
l'objet de vandalisme et par conséquent, des symptômes de sape et
d'érosion apparaissent un peu partout, même si les vannes
opèrent seulement à environ 60% de la capacité totale de
l'évacuateur.
? La prise d'eau de Djafga
Quand les volumes d'eau apportés par les cours d'eau ne
peuvent satisfaire à eux seuls les besoins de la retenue, un volume
d'eau complémentaire est prélevé du Logone par un canal
aménagé au niveau de la localité de Djafga (Photo
03). Le canal de conduite des eaux évacuées est mal
entretenu et se trouve obstrué par des dépôts de
sédiments sur lesquels s'est développée une dense
végétation herbacée (UICN et CBLT, 2007).
Coordonnées de prise de vue : x= 10° 47' 02 `'-
y= 14° 55' 53»
Photo 3 : Vue partielle du canal
d'alimentation du lac par le Logone à Djafga
Ce canal d'alimentation tel que présenté
dans la photo, est un haut lieu de pêche comme d'ailleurs toutes les
infrastructures annexes de la retenue ou les canaux d'irrigation de la SEMRY.
Avant d'arriver dans le lac, les poissons contenus dans les eaux
d'écoulement du canal sont prélevés majoritairement par
les pêcheurs à nasses et ceux à éperviers.
40
? Le déversoir de Logone-Pouss
Cet ouvrage à une longueur de 750 m (tableau 04).
Il est situé à quelques centaines de mètres au sud de
Pouss. Il met en communication la retenue et le fleuve Logone, lorsque le plan
d'eau de la première atteint la cote de calage du seuil de l'ouvrage ou
vice-versa. Il est constitué d'un mur en béton de 0,60 m de large
enterré sur une profondeur de 2,50 m, avec une crête à la
cote 312,19 m. Des talus en terre compactée étaient
disposés de part et d'autre. Pour limiter les effets de
l'érosion, des enrochements ont été mis en place à
l'amont et à l'aval du seuil du déversoir. L'ouvrage est à
présent submergé et a subi des dégâts dans les
enrochements et la piste Pouss-Yagoua. Le PULCI travaille actuellement de
façon à le réhabiliter avant la prochaine sortie des eaux
propres aux inondations des yaerés.
41
Tableau 4 : Caractéristiques du
système Maga-Vrick-Logone
OEuvres
|
Caractéristiques
|
Réservoir de Maga
|
Création en 1979
|
Capacité maximale
|
Environ 620 millions de m3
|
Profondeur moyenne
|
Comprise entre 3 et 4 m
|
Extension en étiage
|
36.000 Ha
|
Côte d'alerte en inondation
|
Côte d'alerte contre les inondations : 312.5 m
|
Entrées d'eau
|
Par apports naturels et artificiels
|
Digue / barrage
|
Création en 1978 ; 38 ans
|
Matériel
|
Terre compactée
|
Longitude
|
27 km (de Pouss à Guirvidig)
|
Largeur de la crête
|
3,5 m
|
Hauteur moyenne
|
4,0 m
|
Côte à la crête
|
314,5 m
|
Ouvrages d'évacuation Vrick
|
Dix vannes avec capacité de 100 m3/s (dont seulement
6 fonctionnelles)
|
Déversoir Logone-Pouss
|
Déversoir Logone-Pouss
|
Côte d'échange-calage
|
312,19 m
|
Mur en béton
|
0,60 m largeur, 750 m longueur profondeur 2,5 m
|
Canal d'alimentation artificiel de
Djafga
|
voir figure 01 plus haut
|
Longueur
|
11 km
|
Apport
|
De 19 à 30 m3/s
|
Digue de Logone
|
Digue en terre compactée de 45 km de longueur, de
Djogoide (Yagoua) à Bégué Palam largeur de crête de
1 à 1,5 m
Digue Logone en terre non compactée 27 km, de
Bégué Palam à Pouss
|
Source : Données du bureau
d'études Le-competing-Bet, 2006
Bref, les capacités physiques de la retenue sont
considérables. Raison pour laquelle, sa création va non
seulement bouleverser l'équilibre écologique de la plaine du
Logone, mais aussi, dégrader son tissu socio-économique au profit
de la pêche artisanale lacustre.
42
En effet, les études antérieures (Naah, 1990
; Sighomnou et al., 1997) ont montré que l'absence des inondations
enregistrée dans le Yaéré résulte des effets
conjugués de la péjoration climatique des trente dernières
années et des aménagements de la SEMRY dans le cadre du barrage
de Maga. La présence des digues limite les débordements du Logone
vers la plaine, alors que la rétention des eaux chargées en
limons des Mayo Tsanaga et Boula dans le barrage de Maga prive la plaine des
limons et autres minéraux dissous qui jouent un rôle important sur
sa fertilité.
De plus une analyse du fonctionnement hydraulique du barrage
montre que le volume moyen des eaux déviées vers le Logone chaque
année est relativement important. Avec une moyenne supérieure
à 0,5 milliard de m3, il dépasse de loin certaines
années, le volume total des eaux que les Mayo Tsanaga et Boula
drainaient vers la plaine par le passé. L'analyse des hydrogrammes
enregistrés à diverses stations du fleuve avant et après
les aménagements de 1979 le confirme (Molinier et al.,
2000).
Ainsi, il s'en est résulté, un dysfonctionnement
écologique et socio-économique dans la plaine du Logone. Cette
tendance, qui a été accentuée par une baisse
généralisée de la pluviosité dans la zone
soudano-sahélienne (UICN et CBLT, 2007), a provoqué de
nombreux phénomènes entre autres :
- La diminution des surfaces inondées d'environ 60 % ;
Le déplacement d'environ 10 000 personnes (Sighomnou et al., 2002)
;
- Le déplacement d'environ 10 000 personnes (Sighomnou
et al., 2002) ;
- La perte de pâturage de bonne qualité ;
- divagation des animaux sauvages, en dehors du Parc National de
Waza,
- entraînant des dégâts matériels et
même humains ;
- La baisse des rendements de pêche de plus de 90 % avec
pour conséquence le
détournement des pêcheurs vers d'autres
activités comme le braconnage (Noordji, 1988) ;
- La prolifération des canaux de pêche et la
baisse de la biodiversité végétale (Saleh et al.,
1997) etc.
Pour beaucoup d'experts, les objectifs de la construction de
ce barrage ne sont pas atteints. Car, le barrage devait par exemple assurer
initialement l'irrigation de 7000 ha de rizière, en
réalité il alimente moins de la moitié de cette surface de
nos jours en raison des difficultés financières de la SEMRY et
des problèmes que rencontrent les populations locales pour la
maîtrise des nouvelles techniques culturales.
43
L'attention de la communauté internationale a
été attirée sur la gravité de la situation, et des
études ont été entreprises au début des
années 1990 avec pour objectif la réhabilitation des inondations
dans le Yaéré, sans perturber les installations mises en place
par la SEMRY. Les premiers résultats des études, qui ont
coûté deux fois plus chers que les aménagements mis en
place, ont montré que la réouverture de l'un des principaux
défluents du Logone fermé en 1979, conduit à un
rétablissement de la dynamique de submersion de la plaine et à la
restauration des inondations dans une partie très importante de la
plaine (Sighomnou et al., 1997). En effet, l'environnement change dans
le temps sous l'influence des processus d'origine naturelle ou anthropique.
Toutefois ces grandes mutations ont contribué à
transformer le lac de Maga, un « bled perdu19 »
en une pêcherie connue de tous dans la Région de
l'extrême-Nord Cameroun qui doit son abondance en ressources halieutiques
à la conjonction de plusieurs facteurs géographiques au nombre
desquels, son appartenance climatique.
1.1.1.2. Les faveurs climatiques
La situation climatique dans le lac de Maga et ses environs
répond à deux forces motrices climatiques différentes
(CBLT, 2007). Un vent sec (harmattan) du Nord et un vent humide du Sud
(de la mousson ouest-africaine) conduisant à un climat soudanien au Sud
et un climat sahélo-soudanien dans le Nord (figure 02).
Globalement, la zone caractérisée par une longue
saison sèche qui commence au début du mois d'octobre et se
termine à la fin du mois d'avril, voire début mai (6 à 7
mois) et, une courte saison de pluie (4 mois) de juin à septembre
teintée par des épisodes pluvieux violents. La
pluviométrie varie entre 530 à 630 mm/an avec des maxima en
août (250 mm) et septembre. La moyenne annuelle des précipitations
est égale à 400 mm.
19 Un bled perdu est une localité
isolée à l'intérieur des terres, inaccessible et
déconnectée du reste du territoire.
44
Figure 2 : Répartition des
précipitations dans la zone d'étude
Les lignes vertes sont des isohyètes à long
terme pour la période 1973-2015. À travers elles, on comprend que
les deux côtés de la retenue (Nord/Sud) n'ont pas les mêmes
caractéristiques climatiques. Du fait de la forte pluviosité
relative à Kaï-kaï (800mm/an) par rapport à Maga
(700mm/an).
45
Les températures moyennes annuelles y varient entre
26°C et 28°C. Les mois les plus chauds sont Mars, avril et Mai avec
une valeur de maxima de 32°C. La moyenne mensuelle pour avril peut
atteindre jusqu'à 34°C (Ngounou Ngatcha et al., 2007).
L'évapotranspiration annuelle est de 1800 mm. L'évaporation
mensuelle augmente d'octobre à Mars et est à son minima en
août lorsque la pluviométrie est la plus forte (Figure 03). Ces
paramètres extérieurs influencent la température de l'eau
du réservoir. Toutefois, les températures de fond du
réservoir connaissent certaines exceptions.
Quantités de pluies
|
250 200 150 100
50
0
|
|
Source : Base de données
de la CBLT, 2016.
Figure 3: Histogramme des précipitations
moyennes mensuelles de la zone de Maga en 2015.
Les températures de fond sont optimisées par les
ombrages diffus que provoquent certaines plantes aquatiques et leurs feuillages
(photo 4). Elles influencent la vie des poissons et de facto, les
activités de pêche en général. En freinant la
pénétration des rayons solaires, ces feuilles de plantes
réduisent la chaleur et permettent aux poissons dans l'eau de se mouvoir
et même de remonter en surface.
46
Coordonnées de prise de vue : x= 10°49'38»
- y= 14°57'27»
Photo 4 : Feuilles d'Aponogeton subconjugatus
diffuses dans le lac de Maga
Ces feuilles d'Aponogeton subconjugatus jouent au moins
triple rôle dans l'eau : pour les poissons, elles régulent la
température du fond du lac, en limitant la chaleur induite par les
rayons du soleil. Car, lorsque le soleil est intense et que le volume d'eau
baisse dans la retenue, la quantité d'oxygène dissoute dans l'eau
diminue et les poissons en souffrent tellement. Aussi, certains poissons les
mangent (Lates, Gymnarchus, Heterotis...) ou y fixent leurs oeufs à la
ponte avant de les éclore (Clarias surtout, Tilapia). Les pêcheurs
enfin les prélèvent pour couvrir les prises avant
débarquement.
La dispersion des graminées (photo 05) dans
l'eau constitue un milieu très favorable à la reproduction et
à la croissance des alevins de certaines espèces comme les
Alestes. Elles les protègent des prédateurs (V. Nigritana),
conditionnent les températures en limitant la transparence des
fonds du lac de 15 à 25 cm (A. subconjugatus) et fixent les
oeufs des certains poissons permettant ainsi, leur multiplication.
47
Coordonnées de prise de vue : x= 10.831938 - y=
14976362
Photo 5 : Dispersion des herbiers
pérennes dans la zone de frayère du lac de Maga
Ces herbes, majoritairement composés d'Andropogon
gayanus et Vetiveria nigritana sont toutes aussi importantes que les
précédentes. Mais, à côté du rôle
protecteur qu'elles peuvent jouer, on leur accorde d'autres vertus
traditionnelles : elles sont prélevées pour tisser les sekko sur
lesquels on sèche le poisson.
1.1.2. Significations halieutiques des facteurs
géomorphologiques, pédologiques et floristiques lacustres de
Maga
Qu'il s'agisse du relief, des sols ou de la luxuriante
composition floristique dont fait montre la retenue, ces agrégats ont
chacun une signification halieutique importante. Cette recherche s'est
intéressée point par point à chacun d'entre eux.
1.1.2.1. Des facteurs pédologiques et
hydrodynamiques favorables à la multiplication des espèces
benthiques
Les vertisols occupent près de 50 % de la surface
couverte par le lac de Maga et ses environs (Ngounou Ngatcha et al.,
2007). Ils sont peu poreux et compacts en profondeur, à texture
argileuse à limono-sablo-argileuse et à structure grumeleuse en
profondeur. Ces sols basiques et très peu humifères ont un taux
d'humidité très élevé. Leur texture est
marquée par les minéraux sableux (51,47 %) en surface et une
fraction argileuse qui atteint 39,13 % en
48
profondeur. Ce qui explique la présence
d'espèces benthiques enfouies de manière temporaire ou permanente
dans ces sols. Les premières pluies saturent les sols argileux
dès le mois de mai qui en gonflant, ferment les fentes de dessiccation
et deviennent imperméables. Les espèces benthiques telles que les
silures et les protoptères enfouis dans les Yaerés, remontent en
surface, pondent leurs oeufs, les fixent grâce aux herbes qui poussent et
les écorent.
D'après les études antérieures
menées dans les plaines inondables du grand
Yaéré20 et ses environs, la dynamique hydrologique du
barrage de Maga n'est pas dissociable de celle des Yaerés en
général. Elle s'effectue en trois temps et la retenue ne
déroge pas à cette donne.
À partir du mois d'août, les apports des Mayos
(0,5 à 1 milliard de m3) provoquent les premiers écoulements sous
forme de minces filets, suivant les fines dépressions dans la plaine.
Les alevins suivent alors ces eaux de ruissèlement qui du fait de la
morphologie du bassin, s'entassent au fond du réservoir. Aux mois de
septembre et octobre, les débordements du Logone apportent une
importante masse d'eau chargée d'alevins qui se déverse dans le
réservoir via la prise d'eau de Djafga et le déversoir de Pouss
(Supra, 1.1.1.1). Si les eaux de pluies sont abondantes, elles
remplissent le réservoir d'environ 625 millions de m3 d'eau.
Puis, il se crée une lame d'eau de 3 à 4 m qui s'étalera
sur 360 km2 durant trois à quatre mois
(septembre-janvier) avant de se rétrécir à
seulement environ 109 km2 en période de décrue
(figure 04).
20 Jl s'agit des auteurs suivants : Rodier, 1964 ;
Bouchardeau, 1968 ; Benech, 1982 ; Naah, 1990 ; Bauvilain, 1990.
49
Figure 4 : Caractéristiques
hydrodynamiques du lac de Maga
Le développement des activités de pêche
dans ce lac n'est donc pas un fait du hasard. Il trouve son explication dans la
stabilité de cet écosystème rendue possible par des
facteurs climatiques, pédologiques et hydrodynamiques favorables. Mais
aussi dans la riche composition floristique qui distingue ladite retenue.
50
1.1.2.2. Signification halieutique de la flore lacustre
La végétation qu'elles soient en bordure ou dans
la retenue est d'un avantage très important pour le développement
des stocks ichtyologiques. Elle protège certaines espèces de
poissons contre les prédateurs, constitue des supports essentiels pour
le fixage des oeufs d'autres tandis que majoritairement, elle entre dans leurs
nourritures quotidiennes.
? Le rôle protecteur de la végétation
de bordure
La retenue de Maga est localisée dans la zone des
Yaerés correspondants à l'abondance des graminées de
divers types. Selon Letouzey (1968) cité par l'UICN et CBLT (2007), le
tapis graminéen caractéristique des abords du plan d'eau de Maga
est composé d'abord des : Echinochloa pyramidalis et Vetiveria
nigritana (planche 02). Ces herbiers sont disposés de façon
hétérogène à l'entrée de la retenue et
jouent chacun un rôle spécifique. Ils peuvent protéger les
berges de la retenue contre l'érosion, limiter l'ensablement (Beal
et al., op.cit.), ou constituer des gîtes de reproduction dans l'eau
(a sur la planche 2).
a
b
Coordonnées des prises de vues : x= 10.843479- y=
14.95024 Planche 2 : Les principales herbacées
environnantes du lac de Maga.
51
Vetiveria nigritana (a) et Echinochloa pyramidalis (b)
sont très rependues autour du lac. Faisant de cet espace, un endroit
à végétation composite qui attire les animaux.
D'où, l'afflux des pasteurs migrants en saison sèche où
elles sont particulièrement luxuriantes.
En seconde position, on retrouve Oryza barthii et
Hyparrhenia rufa. Les autres espèces sont entre autres :
Acroceras amplectens, Andropogon gayanus, Brachiaria deflexa, Chloris
lamproparia, Chloris pilosa, Cyperus spp, Echinochloa colona, Echinochloa sp.,
Digitaria spp., etc. Ces plantes jouent comme signalé plus haut
(supra. I.1.1.1.) un rôle à n'en point douter. Certaines
d'entre elles fixent les oeufs de poissons. Dans ce cas, elles sont une
condition sine qua non à la reproduction, à l'alevinage de la
zone de frayère et à la protection des phyto et zooplanctophages
dans la retenue.
? Le rôle alimentaire de la flore aquatique
immergée ou quasi immergée
La hauteur des eaux dans le lac au plus fort de ses crues
n'est pas très considérable, ce qui favorise le
développement d'une abondante végétation de
graminées (Vetiveria, Oryza, Echinochloa etc.) qui se modifie
suivant la profondeur des eaux et la nature des sols. Sur des endroits qui
gardent l'eau pendant un certain temps (mares, chenaux d'écoulement), il
se développe une flore éphémère
caractéristique des plantes aquatiques émergentes
(Aeschynomene crassicaulis, Eichhornia natans, Nymphaea lotus,
Nymphaea rufescens) ou immergées (Ammania sp., Hygrophila sp.,
Aponogeton subconjugatus,).
Dans les parties à végétation
clairsemée donc plus profondes, se développent des hydrophytes
fixés ou flottants à l'instar de Utricularia, Nymphea, Pistia
stratiotes, Azolla, etc. Les zones très peu submergées sont
surtout marquées des Andropogon, des Alismatacées
et des Polygonacées. Les fonds sont couverts d'hydrophytes
benthiques (Ceratophyllum, Utricularia, Nymphea dominants) au milieu
desquels évolue une faune piscicole d'une extraordinaire densité
: c'est le domaine des phytoplactons. L'image ci-dessous (Photo 06)
présente quelques-unes des espèces récoltées
dans le lac lors des investigations de terrain en janvier 2016.
Ammania sp
Hygrophila sp.
Andropogon
Nymphaea lotus
52
Coordonnées de prise de vue : x= 10° 49' 10 -
y= 14° 57' 56» Photo 6 : Quelques plantes
aquatiques récoltées dans le lac de Maga
Ces espèces végétales sont la nourriture
privilégiée des poissons herbivores21 et
phytoplanctophages tels Tilapia, Citharinus, Oreochromis, Labeo,
Heterotis...
1.2. L'IMPORTANCE DES PLANCTONS DANS LA RETENUE
Le plancton est l'ensemble des organismes de petite
taille22 en suspension dans l'eau, vivant à la surface ou
près de la surface de l'eau. Ces organismes microscopiques ont
été observés dans la retenue depuis 1998 lors de la
mission d'étude piscicole sur le barrage de Maga financée par la
FAO. Ladite mission conclut son rapport en observant l'abondance
particulière d'une extrême diversité planctonique.
1.2.1. Les types de planctons observés dans lac de
Maga
Ils sont de deux ordres et tous figurent dans le lac de Maga
à profusion (FAO,1998). On y distingue les planctons
végétaux des planctons animaux. Tous deux ayant de fortes
significations halieutiques.
21 Heterotis, Tilapia Aurea, Lates, Gymnarchus etc.
22 Le plancton est souvent classé selon sa taille,
liée au type de filtre utilisé pour le recueillir. On distingue
le mégaplancton (20-200 cm ex : grosses méduses, colonies de
salpes), le macroplancton(2-20 cm), le mésoplancton (0,2 mm-2 cm visible
à l'oeil nu), le microplancton (20-200 ìm filtre en toile), le
nanoplancton(2-20 ìm (filtre à café), le
picoplancton(0,2-2 ìm bactéries et eucaryotes)et le
femtoplancton( : <0,2 ìm, essentiellement des virus)
53
1.2.1.1. Les phytoplanctons : unités fondamentales
de la chaîne trophique lacustre
Le plancton végétal ou phytoplancton, est
l'ensemble des algues microscopiques formées d'une seule cellule
(microalgues). Bien qu'elles soient unicellulaires, les microalgues
présentent une grande diversité de tailles, de couleurs et de
formes qui peuvent être très élaborées. Le
phytoplancton comprend des milliers d'espèces se répartissant en
plusieurs groupes :
? Les algues bleues ou cyanobactéries
Nées il y a 3,5 milliards d'années pendant la
période de volcanisme à outrance affectant l'ensemble de la
planète, ce sont des algues primitives se présentant
généralement sous forme de fins filaments. Elles contiennent un
pigment qui leur confère une couleur bleue (du grec cyano, «
cyan»), et peuvent modifier la couleur des eaux où elles
prolifèrent.
? Les diatomées
Les diatomées (encore appelées
bacillariophycées ou diatomophycées) sont des « organismes
microscopiques de nature végétale, vivant dans l'eau, soit en
suspension, soit sur le fond, libre ou fixée à des supports
divers. Ce sont des algues jaunes et brunes unicellulaires dont la taille varie
entre deux micromètres (micron, soit un millième de
millimètre) et un millimètre » (Loir et al., 2004).
Même s'elles sont invisibles à l'oeil nu, comme tout le
phytoplancton, il est cependant possible de les repérer lorsqu'elles
sont en grande concentration.23 Riches de plus de 6000
espèces, les diatomées peuvent représenter jusqu'à
80% du phytoplancton. Elles seraient le groupe végétal
planctonique le plus répandu dans la retenue de Maga. Elles vivent
partout, à toutes les températures, même extrêmes.
? Les dinoflagellés
Les dinoflagellés sont des microalgues unicellulaires
de couleur rouge-orangé et de taille moyenne ou petite, entre 3 et 50
microns. On distingue les dinoflagellés « nus » et les
dinoflagellés « cuirassés » possédant une
thèque de cellulose (enveloppe servant de protection). Aussi connus sous
le nom de dinophycées, ils appartiennent à la famille des
phytoflagellés et sont apparus il y a plus de 400 millions
d'années. Environ 3 000 espèces sont actuellement connues et de
nouvelles sont régulièrement découvertes. Comme toutes
les
23 Par exemple, le dépôt
végétal couleur moutarde que l'on remarque parfois sur les vases
et les sables lorsque la mer se retire est en fait un amas de
diatomées.
54
microalgues, ils se reproduisent par division cellulaire : une
cellule mère donne deux cellules filles toutes les douze à
trente-six heures. Les dinoflagellés occupent une place importante
(après les diatomées) dans la contribution à la production
primaire. Elles entrent dans l'alimentation de base de la chaîne
alimentaire lacustre qui va jusqu'aux gros poissons.
Au sein du phytoplancton, les deux groupes les plus nombreux
et les plus représentés en termes d'espèces dans la
retenue sont les diatomées et les dinoflagellés.
Elles se concentrent dans la zone de frayère et au large des
côtes du lac (IRD, 2002).
1.2.1.2. Les planctons animaux ou zooplanctons
Le plancton animal, ou zooplancton, est composé de deux
groupes : l'holoplancton et le méroplancton. D'après le cycle
biologique des organismes, l'holoplancton (plancton permanent) se reproduit par
accouplement et se multiplie. Le méroplancton (plancton temporaire)
concerne de très nombreuses espèces aquatiques qui, à un
moment donné de leur existence, passent par des stades larvaires
très complexes.
Selon la FAO, les crustacés
copépodes24 composent plus de 80 % du zooplancton dans le lac
de Maga. Ils sont constitués de : Dytiscide, Hydrophylide, Corixides,
larves, éphémère, Sialide, odonates et une microfaune
piscicole dense : Micralestes, Petersius, Nannaethiops, Barbus, Epiplatys,
Aplocheilichthys divers. Ils remontent la nuit vers la surface pour se nourrir
de phytoplancton et redescendent pendant la journée vers le fond de la
retenue. Ils échappent ainsi aux prédateurs et économisent
de l'énergie, car la température est moins élevée.
Ce mouvement du zooplancton, qui contribue au brassage des eaux et des couches
de températures variées ou diversement oxygénées
est appelé migration verticale ou
nycthémérale25. Certains prédateurs du plancton
suivent ces mouvements.
De nos jours, l'équilibre de chaque espèce de
plancton est déterminant pour la santé des
écosystèmes aquatiques et de la planète. Si, par le
comportement de l'homme, les milieux se modifient et se
dérèglent, le plancton continuera à exister, mais seules
certaines espèces survivront, ce qui créera un déficit
préjudiciable à la vie végétale, animale, puis
humaine. Le processus a déjà commencé, mais reste
invisible à l'oeil nu. L'« état des lieux» de la
diversité planctonique est un indicateur implacable de la santé
des écosystèmes. Son étude peut aider à anticiper
la menace qui pèse sur le cycle de la vie et donc sur l'homme.
Malheureusement, à l'échelle de la retenue, c'est une recherche
partialement et partiellement menée.
24 Ordre de petits crustacés marins
25 Le mot vient du grec « nycthémère »,
désignant une durée de 24 heures.
55
Bref, une goutte d'eau du lac est peuplée d'une foule
d'animaux et de végétaux invisibles à l'oeil nu. En
découvrant cette multitude d'êtres minuscules grouillant dans
l'optique d'un microscope, on se prend à imaginer l'ampleur du monde
planctonique foisonnant dans l'immensité de la retenue. Cette vie dense
et éphémère (quelques heures, jours ou semaines) se
renouvelle en permanence grâce au rôle joué non seulement
par chacun des éléments en lice, mais aussi par celui de leurs
prédateurs.
1.2.2. L'extrême diversité halieutique du
lac
Les espèces de poissons qui peuplent la retenue d'eau
de Maga appartiennent à des familles et à des niveaux trophiques
différents.
1.2.2.1. Répertoire des espèces de poissons
exploitées
Les espèces de poissons qui abondent dans le lac sont
quasiment identiques à celles qui pullulent dans le logone ou encore
dans toutes les eaux du bassin du lac Tchad. Elles se répartissent en
trois sous-classes (actinopterygii, brachiopterygii et dipneusti) et
25 familles pour plus de 100 espèces. C'est particulièrement le
lieu de prédilection des espèces de poissons des familles des
Characidae (sardines, brochet), Citharinidae (raie), Cyprinidae et
Schilbeidae (Annexe 7).
Ainsi, deux caractéristiques frappent d'emblée
les espèces présentes dans la retenue :
1) Elle comprend surtout de petites espèces
(Gnathonemus, Marcusenius isidori, Synodontis, Mochocus niloticus, M.
brevis, innombrables petits Cyprinidae et petits Characinidae, très
nombreux Epiplatys et Aplocheilichthys). L'abondance des Cichlidae
(Hemichromis bimaculatus, H. fasciatus, Haplochromis wingati, Tilapia
nilotica et surtout T. galilaea, T. zilli, T. melanopleura) est telle
qu'il y a surpopulation évidente conduisant à des
phénomènes comparables à ceux présentés par
les étangs de pisciculture, phénomènes dus à
l'action conjuguée d'un recrutement maximum non compensé par la
pêche encore inadaptée, aggravée par une certaine
rareté en grands prédateurs (FAO, 2000). Le reste comprend
surtout des Gymnarchus, des Clarias, des Heterobranchus, des Synodontis,
des Lates, quelques Polypteres et Hydrocyon.
2) Le rythme biologique spécial : alors que dans le
logone, la période de reproduction est limitée à la
durée de la crue (de juillet à octobre), elle n'est
limitée dans le Lac que par le froid. Les annuli d'arrêts de
croissance sur les écailles sont peu marqués, confus, souvent
impossibles à interpréter.
56
1.2.1.2. Les principaux niveaux trophiques lacustres de
Maga
Les espèces telles que classées plus haut
appartiennent à des niveaux trophiques différents qu'on peut
regrouper en quatre (figure 5). Au premier niveau, se trouvent les
producteurs : domaine des phytoplanctons. Ils utilisent
l'énergie solaire pour fabriquer de la matière organique. Hormis
pour le nanoplancton et le picoplancton, il est essentiellement présent
dans les couches superficielles du lac (de 0 à 1 mètre de
profondeur). Premier maillon de la chaîne alimentaire, il est
mangé par le zooplancton et par une multitude d'organismes
(consommateurs primaires du niveau 2) qui seront à leur tour,
la proie de petits prédateurs (consommateurs secondaires du niveau
3) eux-mêmes chassés par de grands prédateurs.
Certains gros poissons (Gymnarchus, Lates, Heterotis etc.) se
nourrissent directement de zooplanctons, des consommateurs primaires et
secondaires.
Source : L'auteur avec l'appui du
CACP de Maga, juin 2016.
Figure 5 : Niveaux trophiques des
différents groupes de poissons du lac de Maga
57
L'examen de la figure 05 permet de constater que les
phytoplanctons sont à la base de la chaîne alimentaire aquatique
et constituent ipso facto, le point de départ de toute l'activité
biologique de la retenue. Ces producteurs (Niveau 1) sont absorbés par
les zooplanctons et les consommateurs primaires (Niveau 2). Ceux-ci constituent
eux-mêmes la nourriture des consommateurs secondaires plus grands (Niveau
3) qui à leur tour, sont mangés par les consommateurs terminaux,
au sommet de la chaîne alimentaire. Se nourrissant à tous les
étages de la pyramide, y compris au rez-de-chaussée, l'homme
consomme également du phytoplancton (spiruline, chlorelle...) parfois
sans le savoir.
1.3. UN MILIEU HUMAIN COSMOPOLITE DE LONGUE TRADITION DE
PÊCHE
La pêche lacustre a joué un rôle
très important dans le peuplement des collectivités de Maga et
Kaï-kaï. Pour s'en convaincre, il suffit juste d'examiner la
composition ethnique des différents villages des pêcheurs autour
de la retenue ainsi que leur mise en place.
1.3.1. Les villages des pêcheurs autochtones,
allogènes et aborigènes
L'environnement humain du lac de Maga est cosmopolite. Les
principales ethnies représentées sont les Sirata, les Massa, les
Mousgoum, les Tupuri, les Peuls, les Moundang, les Arabes Shoas, les Haoussa.
Dans ces groupes ethniques, les Musgum et les Massa apparaissent comme les
principaux aborigènes de la retenue et colonisent ainsi les abords
immédiats de la retenue. Les autres peuples se distinguent par leurs
statuts. C'est ainsi qu'on aura à établir un distinguo entre
autochtones et allogènes selon leurs villages et campements
hétérogènes et selon qu'ils soient investis
épisodiquement, exclusivement, partialement ou partiellement dans la
pêche.
1.3.1.1. Les différents types des campements de
pêcheurs
Les aires de pêche peuvent être classées
selon leur situation, leur composition ethnique et le matériel
employé (Seignobos, op. cit). Certains sont constitués
de pêcheurs à palangre, d'autres à l'épervier, au
taro ou encore au zagazaga. Aujourd'hui, cette distinction n'est plus possible
: les techniques de pêche sont devenues quasiment « universelles
» et les pêcheries, visiblement cosmopolites. Seuls les types de
bâtis correspondant à leur temporalité gardent encore les
stigmates d'un pareil stéréotype séculaire.
Considérés comme principaux sites de débarquements, on en
distingue trois types :
58
? Les villages des autochtones
sédentaires
Les villages des autochtones sédentaires (photo 07)
pratiquants la riziculture et s'adonnant périodiquement à la
pêche se trouvent le long de la digue barrage Guirvidig-Maga-Pouss et sur
le versant est de la retenue (axe Pouss-Yagoua).
Coordonnées de prise de vue : x=
10°47'25» - y= 15°02'03» Photo 7 :
Vue partielle de Malka forêt du haut de la digue
? Les campements temporaires des pêcheurs
étrangers
Les campements temporaires comme ceux des communautés
arabes, Tupuri et autres tribus non autochtones qui migrent en saisons mortes
des travaux agricoles pour la pêche sont construits en matériaux
provisoires (pailles) sur un terrain ouvert le long de la digue (Malka, Abouna,
Gamack, P2 etc.) ou sur un talus issu du retrait des eaux dans la retenue. Les
mêmes communautés reviennent cependant sur les mêmes sites
chaque année reconstruire leurs camps. Ce qui illustre à souhait,
la forte territorialité de ces espaces. Certains ont d'ailleurs
commencé à se sédentariser (photo 8).
Campement temporaire
59
Coordonnées de prise de vue : x= 10°15'14'' -
y= 15°03'19''
Photo 8 : Campement temporaire des
pêcheurs kotoko à Pouss ? Des campements sur
pilotis
Les campements sur pilotis sont bâtis dans la retenue
par des groupes de personnes qui construisent des tentes sur pilotis (Photo
9) et qui se livrent aux activités de pêche. Ils concernent
toutes les ethnies et toutes les nationalités. Les produits de
pêche sont séchés, fris ou fumés surplace puis,
transférés uniquement dans les marchés hebdomadaires par
les femmes. Ces groupes reviennent aussi chaque année sur les
mêmes sites qui sont par conséquent inviolables.
60
Coordonnées de prise de vue : x=
10°50'14»- y= 15°03'19» Photo 9:
Campements sur pilotis des pêcheurs kotoko à Sokomaye
En 2011, 53 villages/campements confondus de pêcheurs
avaient déjà été identifiés lors de
l'enquête-cadre financée par la FAO et répartis comme suit
dans les collectivités de Maga et Kaï-kaï (tableau
5).
61
Tableau 5 : Répartition des campements
par arrondissement
N°
|
Arrondissements de KAÏ-KAÏ
|
N°
|
Arrondissements de MAGA
|
01
|
Kalaou
|
29
|
Abouna 1
|
02
|
Malawai
|
30
|
Gamack 1
|
03
|
Massouang
|
31
|
Kalang 1
|
04
|
Sokomaye
|
32
|
Gamack 2
|
05
|
Yangha sud
|
33
|
Pidimier
|
06
|
Dandalang lac
|
34
|
Yangah
|
07
|
Grong
|
35
|
Keleo
|
08
|
Mourla
|
36
|
Malawe 1
|
09
|
Bourmi 1
|
37
|
Malawe 2
|
10
|
Bourmi 2
|
38
|
Makwoudi
|
11
|
Bourmi 3
|
39
|
Guizi Mouzgoum
|
12
|
Bourmi 4
|
40
|
Guizi Arabe
|
13
|
Bassawa Mouzgoum
|
41
|
Pidimier Lac
|
14
|
Bassawa (Arabe)
|
42
|
Dandalang Maga
|
15
|
Vreng
|
43
|
Miliao Maga
|
16
|
Bisigui
|
44
|
Canal Maga
|
17
|
Keleo Sud
|
45
|
Malka Foret
|
18
|
Djafga
|
46
|
Malka
|
19
|
Doreissou
|
47
|
P2
|
20
|
Varia
|
48
|
Bakassarre
|
21
|
Houlmi
|
49
|
Gaya Pouss
|
22
|
Madagam
|
50
|
Balla 1
|
23
|
Yabai
|
51
|
Mballa Massa
|
24
|
Doulam
|
52
|
Wan Groun
|
25
|
Mohouna
|
53
|
Hoff
|
26
|
Malia
|
|
|
27
|
Tchomo
|
|
|
28
|
Mangal
|
|
|
Source : Enquête-cadre sur
la retenue de Maga, MINEPIA 2011.
62
Sur les 53 campements de pêcheurs
dénombrés, 25 (47 %) se trouvent dans l'arrondissement de Maga et
28 (53%) dans celui de Kaï-Kaï. Mais, pour le MINEPIA, les campements
les plus dynamiques sont ceux de Maga du fait de leur localisation sur la digue
qui sert d'espace marchant. Aussi, plus de 10 000 acteurs socioprofessionnels
de pêche vivent dans ces villages et sont à 98 %
intéressés par la retenue.
1.3.1.2. Le calendrier de la pêche artisanale
lacustre
Le calendrier de pêche tel que décrit par
Seignobos en 1986 n'a pas trop changé dans le temps. Mais en termes
d'effectifs, ils sont carrément opposables. Les premiers venants
apparaissent dès février dans les différents campements
suivants : Guizi, P2 et Gamack-II. D'autres, deux fois plus nombreux
débarquent à Hoff, Managa, Gadjara, Keleo ou encore à
Pidimier, Woulouki, Bourmi... Ceux déjà en place en
février ont, parfois, comme dans les villages qui jouxtent la digue,
participé à la petite pêche d'octobre quand l'eau, pas
encore refroidie, est propice à la prise de Tilapia et de Lates.
Ensuite, durant la saison froide, le poisson se raréfie sur la retenue.
Il ne réapparaîtra qu'à partir d'un certain
réchauffement de l'eau. Entre novembre début février, les
pêcheurs sont occupés ailleurs sur des biefs de décrue,
particulièrement poissonneux dans les zones de déversement du
Logone.
L'accès à la retenue est juste soumis à
l'obtention d'un permis de pêche qui n'est pourtant pas l'apanage de tous
les acteurs26. La pêche dure 09 Mois. Elle est ouverte le
01er octobre et celle utilisant des sennes (Taro)
généralement en Mars. Avant Mars, seulement 23,2 % des
pêcheurs sont en place sur la retenue (Seignobos et Raugel, op. Cit).
Les arrivées s'échelonnent de janvier à avril,
indépendamment, semble-t-il, des techniques de pêche
employées. En mai se situe une période stable, sans
départs ni arrivées. Les départs ont lieu, de façon
plus groupée, au cours du mois de juin, en particulier pendant la
deuxième partie. Près de 70 % des pêcheurs restent encore
près du lac en juillet, notamment des Musgum possédant des champs
à proximité et quelques Kotoko. En août et septembre, la
retenue est quasiment déserte. La saison des pêches se concentre
sur trois mois et demi, entre le début du mois de mars et le 15 juin
(figure 6).
26 En 2015, moins de 50 permis de pêche ont
été délivrés alors que près de 7000
pêcheurs opèrent dans le lac. Actuellement, le projet AFOAP
financé par la coopération Franco-camerounaise d'une part et
d'autre part le PRODEBALT, sont en cours de réalisation à Maga
pour au moins former les pêcheurs sur les bonnes pratiques de
pêches. Ils ont déjà à ce jour formé plus de
500 pêcheurs et transformateurs dans le secteur des pêches.
45
40
50
35
30
25
20
15
10
5
0
Tilapia Lates Heterotis Clarias Bagrus
63
Source : Données de la
DAEPIA- MAGA
Figure 6 : Évolution annuelle des
captures inspectées à Maga en 2015.
L'examen de la figure ci-dessus permet de déduire qu'il
y a deux importantes périodes de pêche durant l'année. La
première qui va de l'ouverture de la pêche en octobre
jusqu'à la fin de la saison froide en février/Mars soit 5
à 6 mois avec (43,6%) des débarquements contre plus de 56% en
seulement 3 mois (Avril-Juin) : c'est la saison de haute pêche pendant
laquelle, toutes autres activités économiques locales entrent en
hibernation. Cela s'explique par la dynamique hydrologique de la retenue qui
retire les eaux et expose les ressources sur cette période.
1.3.2. Organisation traditionnelle et infrastructures de
base
La retenue de Maga s'insère entre deux arrondissements
ayant des niveaux de développement très contrastés. Au
Nord du lac se trouve l'arrondissement de Maga, un arrondissement de plus de
180 000 âmes. Le sud de la retenue concerne l'arrondissement de
Kaï-kaï, l'une des communes les plus pauvres du Cameroun
bénéficiant d'ailleurs du « projet filet sociaux »
financé par la banque mondiale depuis juin 2016.
64
1.3.2.1. Organisation traditionnelle
L'administration traditionnelle du territoire est
stratifiée. Les deux cantons, Guirvidig et Pouss, sont placés
respectivement sous l'autorité d'un Lamido et d'un Sultan. Ils sont des
chefs supérieurs à la tête de tous les villages du canton.
Les chefs de village sont les Lawans. Ils se font aider dans l'administration
du territoire par des chefs de quartiers : les Djaoros. Toutes ces
autorités traditionnelles jouissent d'un immense respect auprès
de la population. Les cas de refus de l'autorité traditionnelle sont
extrêmement rares. Le reste des habitants obéissent
scrupuleusement à leurs ordres. Cependant, d'autres personnes tirent une
certaine considération populaire de leurs professions, de leur statut
politique ou de leur réussite dans les affaires. C'est le cas des Imams,
des hauts cadres de la fonction publique à la retraite ou en
activité ou encore des grands commerçants.
En général, autant dans les villages que les
centres urbains, les femmes ne jouissent pas des mêmes droits que les
hommes. Elles ont un accès limité à l'éducation et
sont très vite mariées, souvent avant leur majorité. Elles
sont confinées aux tâches ménagères et au petit
commerce. Elles acquièrent une considération sociale au fil des
ans, généralement dans le troisième âge. Elles
peuvent alors parler dans les assemblées avec l'assurance d'être
écoutées et de ne pas faire l'objet d'une réprimande.
1.3.2.2. Les infrastructures socio-économiques de
base
En 2011, le MINEPIA de concert avec la FAO a mené une
enquête dans l'environnement de la retenue d'eau de Maga. Celle-ci
réalisée auprès des pêcheurs, portait entre autres
sur l'existence dans leurs villages, d'infrastructures socio-économiques
de base (écoles, cases de santé, marchés, adduction en eau
potable, églises et mosquées) d'une part et d'autre part, la
connexion au réseau électrique, téléphonique, ainsi
que l'accessibilité de leur village part la route. Les résultats
sont portés dans le tableau ci-dessous (tableau 06).
65
Tableau 6 : Nombre et proportion
d'infrastructures par arrondissement
Communes
|
École
|
Case de santé
|
Route
|
Marché
|
Électr icité
|
Eau potable
|
Mosquée
|
Église
|
Téléph one
|
Village
|
Maga
|
9
|
5
|
19
|
5
|
8
|
5
|
12
|
12
|
24
|
25
|
Pourcentage
|
36
|
20
|
76
|
20
|
32
|
20
|
48
|
48
|
96
|
100
|
Kaï-kaï
|
9
|
2
|
8
|
2
|
1
|
0
|
9
|
9
|
26
|
28
|
Pourcentage
|
32,14
|
7,14
|
28,87
|
7,14
|
3,57
|
0
|
32,14
|
32,14
|
92,85
|
100
|
Total
|
18
|
7
|
27
|
7
|
9
|
5
|
21
|
21
|
50
|
53
|
Pourcentage moyen
|
16,98
|
13,21
|
50,94
|
13,20
|
16,98
|
9,43
|
39,62
|
39,62
|
94,33
|
100
|
Source : Enquête-cadre sur
la retenue d'eau de Maga 2011, MINEPIA
On constate que 17% des villages des pêcheurs sont
nantis d'établissements scolaires. Cependant, les villages de Maga
disposent de plus d'écoles que ceux de Kaï-kaï avec 36 % soit
9 écoles pour 25 villages contre le même effectif pour 28
campements. S'agissant des cases de santé, les deux arrondissements
disposent en moyenne de 13,21% structures sanitaires dont 20% reviennent
à Maga avec 5 cases contre seulement deux à Kaï-kaï.
Les lieux de prières se rencontrent à 79,24% dans les campements
avec chacun (églises et mosquées) 39,62% de distribution dans les
deux arrondissements.
Seulement 50,94% des campements sont accessibles par des
routes qui en saison pluvieuse sont en piteux état. Les campements
situés le long de la digue sont accessibles par la route
Pouss-Guirvidig. Ceci explique le fort taux d'accessibilité
détenu par Maga (76%) ou quasiment tous les campements sont
situés le long de la digue. Les campements de Kaï-kaï, ce bled
perdu ne sont malheureusement accessibles (28%) que temporairement après
le retrait des eaux.
Les marchés y sont hebdomadaires et plus de 13% des
campements sont animés par des marchés de ce genre. Mardi
à Pouss, mercredi à Kaï-kaï, dimanche à Maga
etc., ils sont destinés à la commercialisation des produits
halieutiques et à l'achat des denrées de première
nécessité. Toutefois, sur les quatre grands marchés qui
animent la vie de ces communautés (Maga, Guirvidig, Pouss,
Kaï-kaï) l'arrondissement de Maga tient encore les brides avec 20%
des marchés existants.
66
La distribution de l'énergie électrique y est
fonction de la distance séparant le lac du centre-ville. Pour une
couverture totale de 16,98%, les campements de Maga sont couverts en moyenne
à 32% contre 3,57 à Kaï-kaï. Ceci s'explique par
l'absence de campements temporaires. La disponibilité en eau potable
suit à peu près le même schéma. En moyenne dans les
deux arrondissements, l'eau potable de consommation est disponible à
9,48% grâce à la CDE et aux forages manuels. Au moins un des
opérateurs téléphoniques opérationnels au Cameroun
couvre quasiment tous les campements de la retenue. Ainsi, 94,34% des
campements sont en moyenne couverts alors même qu'une fois de plus, Maga
s'en sort avec le plus grand taux de 96% contre 92% du côté de
Kaï-kaï.
Certes de 2011 à 2016, la situation a beaucoup
évolué dans les deux arrondissements. Mais, celle des campements
est presque restée pareille27 sinon devenue pire28
et les asymétries de développements locaux restent tangibles et
creuses autour de la retenue avec au nord, un arrondissement fort peuplé
(180000 âmes à Maga) et au Sud, une commune pauvre encore en
retard sur plusieurs plans.
Conclusion
Par sa situation géographique, sa taille (360
km2) et sa position, la retenue d'eau de Maga offre une
éminente hétérogénéité dans sa faune
et sa flore. Cette ultime diversité biologique se traduit par des
ressources halieutiques abondantes et un tapis graminéen composite
conformément aux différents niveaux trophiques qu'elle abrite.
Toute la gamme des espèces de poissons du bassin du lac Tchad s'y trouve
; allant des osteoglossidae jusqu'aux Protopteridae en
passant par les phyto et zooplanctophages. C'est compte tenu de ces riches
potentialités halieutiques que les populations environnantes s'y
régalent en pratiquant la pêche artisanale. Cependant, comment
cette activité a-t-elle évolué au fil des ans pour arriver
à sa situation actuelle ? Le chapitre suivant analysera cette question
en insistant sur l'évolution de la pression des pêches dans le
lac.
27 À part quelques modifications concernant certains
CES/CETIC qui ont été érigés en lycées, le
rapport de 2015 sur la situation socioéconomique de la Région de
l'extrême-Nord ne fait pas de mention spéciale
supplémentaire.
28 Car, les installations électriques ont vieilli au
point que même dans le principal centre-urbain de la Ville Maga, 90 jours
de délestage peuvent se succéder. Les autres infrastructures qui
dépendent de l'alimentation électrique sont oubliées,
négligées et parfois inusité ce qui leur a donné un
coup de vieux notoire.
67
CHAPITRE 2 : ÉTAT DES LIEUX DE LA PRESSION DES
PÊCHES DANS LA RETENUE DE MAGA
Introduction
De 1979 à ce jour, les hommes n'ont jamais cessé
ne serait-ce que pour une année, d'exploiter les stocks ichtyologiques
du lac de Maga. Chaque année qui passe, ce sont d'énormes
quantités qui y sont prélevées pour être
mangées et le reste vendu sur des marchés différents. Tout
ceci, au prix d'une forte pression que subit cette pêcherie. Après
plus de trois décennies, où en est-on, avec cette pression qui
grandit à l'aune de la croissance démographique ? Ne
constitue-t-elle pas aujourd'hui, une menace pour les ressources halieutiques
et l'écosystème ? Afin d'apprécier l'ampleur de cette
situation, il convient d'estimer dans un premier temps l'effort des
pêches qui y règne à partir de l'effectif des
pêcheurs sur la retenue, l'intensité des pêches et la
quantité des prélèvements annuels enregistrés, etc.
D'autre part, on verra que l'accroissement du nombre d'engins et de leurs
efficacités participe aussi de cette pression sur les ressources. C'est
alors qu'on pourra aborder la menace socio-économique.
2.1. ÉVOLUTION ET ANALYSE DES INDICATEURS DE LA
PRESSION DE PÊCHE
Il s'agit de décrire les composantes humaines et
économiques de la pêche en insistant, sur les moyens de production
engagés dans cette activité. Cette analyse permettra
d'appréhender l'effort de pêche, la production et
l'efficacité de pêche.
2.1.1. L'effort de pêche et la
production
D'après Faucheux et Noël (1995), tandis
que l'effort de pêche est le nombre de bateaux par unité de temps
ou toute information plus détaillée du type nombre de filets, de
lignes ou d'hameçons par unité de temps, le nombre de
pêcheurs/km2 désigne plutôt l'intensité de
pêche. Connaissant le nombre total des pêcheurs opérant sur
la retenue, la quantité d'embarcation et d'engins de pêche
utilisés, on est à même de calculer l'intensité des
pêches et d'apprécier l'efficacité des engins
utilisés.
2.1.1.1. Un effectif de pêcheurs en hausse
constante
Les communautés de Maga et Kaï-Kaï, ont
toujours associé la pêche à la riziculture pour assurer
leur autosuffisance alimentaire. La dynamique économique du secteur
agricole
68
surtout rizicole durant les années 80 par rapport
à la pêche et à l'élevage, poussait même les
populations des zones environnantes du lac, à migrer vers la
localité de Maga à la recherche d'emploi. Mais, depuis la
décennie 1990, les revenus tirés de la riziculture ont fortement
baissé de 50 %. Les causes principales sont liées au
déficit pluviométrique des années 19801990, à
l'appauvrissement des sols, et surtout à la déstructuration de la
SEMRY qui a désorganisé la collecte, et découragé
les producteurs (SEMRY, 1995). La baisse des revenus agricoles a
engendré la ruée des populations agricoles vers la
localité de Maga et ses environs, pour améliorer leur situation
économique et leurs conditions de vie. Ceci a été
favorisé par l'augmentation des revenus tirés de la pêche
artisanale.
On y ajoute une importante croissance démographique en
milieu pêcheur avec un taux de natalité de 5 % /an (MINEPIA,
2011). Les sources indiquent que la commune de Maga est passée de 30 000
habitants en 1970 à 80 000 habitants en 2005 puis à 101451
âmes en 2010. Depuis 2013, l'arrondissement en compte 180 000 avec un
accroissement annuel de 4 %. En même temps, entre 1990 et 2010, la
population de Kaï-Kaï a augmenté significativement pour
atteindre 66 004 habitants en 201429. Cette croissance de la
population combinée à la migration a comme conséquence une
augmentation graduelle des effectifs de la main d'oeuvre artisanale a priori
les pêcheurs (figure 7).
4000
6000
5000
3000
2000
1000
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
2013 2014 2015
Années
1012
1300 1230 1400 1540
2013 2036 2240
3022
2601 2750
4016
3507
4500
5325
Source : Données de la
DDEPIA de Yagoua
Figure 7 : Évolution des effectifs des
pêcheurs à Maga (2000-2015)
29 Les chiffres viennent de la commune de Maga et
Kaï-kaï.
Il ressort de cette figure que de 1200 en 1985, le nombre de
pêcheurs est passé à 6977 en 2011 (ECRM, 2011)
soit presque 6 fois l'effectif de départ. À partir de 2000,
les effectifs de pêcheurs n'ont cessé d'augmenter, avec une hausse
de 131 pêcheurs par an pendant 15 ans c'est-à-dire jusqu'en 2015.
Ainsi, si entre 1985 et 1990, pour un effectif compris entre 1200 - 1500
pêcheurs au total, l'intensité de pêche était
d'environ 4 pêcheurs/km2 sur la retenue (ce qui est
déjà le double de la recommandation de la FAO : 800
pêcheurs) en 2011, elle avait déjà été
multipliée par 4 (soit 18 pêcheurs/km2) et aujourd'hui
elle est de 20 pêcheurs par km2. Ceci, en moyenne et de
façon permanente c'est-à-dire sans tenir compte des changements
importants de la donne durant la saison de haute pêche.
Car entre Mars et juin, la retenue perd les 3/5e de
sa superficie et plus du tiers de son volume d'eau (figure 2). Le
miroir d'eau ne s'étale alors que sur 109 km2 et la
profondeur moyenne n'est plus que d'à peine 1,5m. Cependant, sur cette
surface restante, il faut considérer une zone de frayère de 5,4
Km2 où toute activité de pêche est interdite. Il
n'en reste plus que 103,6 Km2 pour accueillir les pêcheurs.
Durant cette période de 3 à 4 mois dite de haute pêche, la
production atteint un record absolu (figure 8) et l'intensité
de pêche est à son comble.
120
100
40
80
60
20
0
Frais Fumés Séchés
Source : Données du CACP de
MAGA.
69
Figure 8 : Dynamique annuelle de la production
de la pêche à Maga (2015)
70
En mars 2011, elle était de 60 pêcheurs au
km2 ce qui n'est en rien comparable au record encore jamais
enregistré dans l'histoire de la pêche artisanale lacustre
à Maga depuis 37 années d'existence : 67
pêcheurs/km2 en 2014 selon les indications de la CBLT.
Actuellement, on frôle 70 pêcheurs/Km2. L'effectif
jugé optimal pour toute retenue par la FAO (2
pêcheurs/km2) est à ce jour, multiplié par
près de 33 sur le lac de Maga soit 64 pêcheurs/km2
pendant la haute pêche et 20 pêcheurs en moyenne au km2
en plein temps. Cette, pression a déjà durée plus de 25
ans et s'est presque toujours accompagnée par des débarquements
de plus en plus importants.
2.1.1.2. L'accroissement des prélèvements au
fil des ans
Il faut d'emblée noter qu'il n'existe pas actuellement
à Maga, de limites de captures globales ou individuelles. Mais, des
limites quant à la taille minimale des espèces
pêchées. Aucun Total Admissible de Captures (TAC) n'a
été défini. Si la législation désigne les
hippopotames comme espèces protégées, la
réglementation de l'exercice de la pêche ne prévoit pas
l'utilisation de dispositifs de réduction des captures accidentelles.
C'est le cas des « faux poissons »30 qui ne sont
ni commercialisables ni comestibles sinon que faire l'objet de rejets
méprisables.
Tout comme l'effectif de pêcheurs, les
débarquements ont connu un développement rapide au fil des ans.
Trois tendances caractérisent leur accroissement pendant les 15
dernières années, dont une croissance lente entre 2000 et 2004
passant de 34 tonnes en 2000 à 80 tonnes en 2004 (figure 9).
Cette lente reprise de la croissance fait suite à « une
surexploitation de croissance dénoncée par la mission
d'étude piscicole du barrage de Maga en 2018 »31.
Puis, une évolution notable au cours de la période 2005-2009 qui
s'explique par la reprise de la croissance des juvéniles dans le
lac.
30 Expression vulgarisée par J.P. Corlay pour
désigner les captures effectuées accidentellement par les filets
perdus, abandonnés ou rejetés dans l'eau.
31 Rapport du chef du CACP de Maga, octobre 2003.
Quantités en tonnes
1000
400
900
800
700
600
500
300
200
100
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
2013 2014 2015
34 42 49 75 80
203
Années
357
430 461 453 420 425
529
695
860
813
71
Source : Données de la
DAEPIA- MAGA.
Figure 9 : Évolution des
débarquements à Maga (2000 à 2015).
En espace de 05 ans, les débarquements
enregistrés à Maga ont plus que quintuplé passant de 34
tonnes en 2000, à 203 tonnes en 2005. En 2011, ils sont
inférieurs à ceux de 2007, c'est-à-dire à 430
tonnes. Cela s'explique par le fait que les statistiques de l'année 2011
ne sont pas réelles. Elles ont été mal enregistrées
par le responsable du CACP de Maga en raison de certains bouleversements
administratifs survenus au cours de l'année. À partir de 2010, la
croissance est en récession jusqu'en 2012 où, elle s'achemine sur
une reprise brutale tirée par l'augmentation étonnante du nombre
de pêcheurs.
Néanmoins, la chute des captures en 2015 pourrait
signifier que « le lac a atteint son maximum à cause du
désordre et de la pression qu'il a toujours subie » comme
l'indique le quatrième rapport trimestriel de la DAEPIA/Maga
déposé en octobre 2015. Les débarquements estimés
de concert par la SEMRY, la FAO et le MINEPIA au début de la
décennie 2010 font état de plus de 2000 tonnes de captures chaque
année. Une telle quantité de prélèvement viole
expressément les prescriptions de la FAO par rapport au Rendement
maximum durable (RMD)32 de la retenue fixé à 1500
tonnes/ans depuis les années 1970-1980.
32Le rendement maximal durable correspond à
la quantité maximum d'un stock de poisson que l'on peut
théoriquement prélever sans porter atteinte à sa
capacité de reproduction. Au-delà du seuil fixé par le
RMD32, il y a surexploitation et la capacité de
renouvellement est mise en danger ainsi en est-on à Maga
72
Au regard de ce qui précède, il convient de
retenir que si pendant plus de trois décennies, la production
halieutique fut tirée par l'effectif des pêcheurs sur la retenue,
aujourd'hui, tel n'est plus le cas. Le lac a atteint son maximum et les
tentatives d'adaptation des acteurs portent des signatures diverses au nombre
desquelles, le renforcement de la technologie d'équipage et de
capture.
2.1.2. Des engins et techniques de pêche très
performants
Les techniques de pêche sont très
diversifiées sur le lac. Mais, la majorité est associée
à l'utilisation de la pirogue33 et d'engins. L'examen de ces
matériels va extérioriser les capacités d'équipage
en la pêche artisanale lacustre ainsi que l'efficacité des engins
et techniques de pêche usités.
2.1.2.1. Les capacités d'équipage des
pêcheurs sur la retenue
Les capacités d'une activité de pêche sont
données par les caractéristiques d'équipages. On
s'intéresse ici à deux détails à savoir : la taille
des pirogues et leur nombre. Cette distinction est faite suivant leurs tailles
et la nature de la matière avec laquelle elles ont été
conçues. Grâce à la FAO, on a toutes les mesures
spécifiques de ces embarcations et une estimation approximative de leurs
taux de représentativités respectives. Elles sont de quatre types
(planche 3) :
? La pirogue monoxyle
C'est une embarcation caractérisée par son
profil rectiligne, taillée d'une seule pièce à partir d'un
tronc d'arbre. Elle s'étire sur 2 à 3 m de long pour une largeur
comprise entre 30 et 50 cm au milieu. Elles sont moins nombreuses sur la
retenue (5 %) et ne peuvent embarquer qu'une seule personne à bord. Leur
propulsion est assurée par la pagaie. C'est une pirogue bien
adaptée à la navigation dans le Lac et les canaux de pêche,
justifiant leur trivialité à Kaï-Kaï. La durée
de vie des pareilles pirogues (a, planche 3) peut s'élever à 10
ans, de même que celles des pirogues en planche (b, planche 3) avec des
coûts d'entretiens respectifs de 45 000 FCFA pour la première et 1
215 000 FCFA pour la seconde.
où, depuis 1985 déjà, les captures (1800
tonnes) ont toujours dépassé le RMD c'est-à-dire, 1500
tonnes par an (Seignobos, 1986).
33 Encore appelée flottille de pêche, une pirogue
est une embarcation capable de supporter au moins une personne.
73
? La pirogue en planche
Elle est construite à partir d'un assemblage de
planches dont la coque a été élaborée sans membrure
intérieure et mesure entre 08 et 13 m de long sur 1,5m à 1,8 m de
large. La quasi-totalité de celles équipées d'un moteur
est destinée au transport à travers le lac. Sur les 326
dénombrées en 2011 lors de l'enquête-cadre sur la retenue,
moins de 10 % seulement étaient destinées à la pêche
à cause de son poids (plus de 50 kg) qui nécessite de gros
efforts de propulsion et de son prix relativement élevé
(128462F). Le coût d'entretien très élevé des
pirogues en planche s'explique par le fait qu'elles font plus dans le transport
des biens et de personne via le lac et desservent les deux arrondissements.
? La pirogue en tôle
C'est une construction mixte qui rassemble une vieille pirogue
monoxyle protégée de l'extérieur par de vieilles
tôles qui empêchent l'infiltration de l'eau. Elle a une longueur de
5 à 8 m et une largeur de 90 à 95 cm. Très
représentatives dans les parcs piroguiers de la retenue (80%), elle peut
comme à Kaï-Kaï représenter 85% du total des pirogues
dénombrables. C'est la flottille par excellence des pêcheurs
interrogés sur la retenue à cause de sa capacité
d'embarcation (5 à 10 personnes) et sa facilité à manier.
Les pirogues en tôle (c, planche 3) et celles en contre-plaqué ne
dépassent guère 3 ans et leur entretien nécessite
jusqu'à 128462 FCFA. La moyenne d'embarcations par pêcheurs est de
3,5 pour les pirogues en tôle contre 1 pour ce qui est des pirogues
monoxyles.
? Les Hors-bords
Il existe également de grandes pirogues de transport
fabriquées en planche de 12 à 15 m sur lesquelles on peut fixer
des moteurs de 25 à 40 CV (d, planche 3). Elles sont moins
représentatives dans les parcs piroguiers (01%) et sont destinées
au transport des personnes et marchandises entre les villages de la retenue
coté Maga (Nord du lac) et Kaï-Kaï (Sud du lac). Les trois
premiers types de pirogues identifiées interviennent dans la capture de
façon variable. Mais jusqu'ici, aucune pirogue à moteur n'est
utilisée pour autre chose sur la retenue que pour le transport. La
pirogue en cousue34, identifiée par Seignobos et Raugel en
1986 a disparu.
34 Pirogue constituée de pièces
assemblées par des liens végétaux. Presque toutes les
embarcations qui circulent sur le Logone, le bas Chari et le lac de Maga sont
des pirogues de ce type. Les troncs de cailcédrat
généralement utilisés dans la région sont souvent
insuffisamment calibrés pour former une pirogue complète.
a
b
74
Coordonnées des prises de vues :
X= 10° 47' 02» -Y= 014° 55' 53» X=
10°49'57» - Y= 14°57'12»
c
d
Coordonnées des prises de vues :
X= 10°49'56» - Y= 14°57'06»
X=10°15'14» -Y=15° 03'
19» Planche 3 : Types de pirogues
identifiées sur la retenue d'eau de Maga
L'effectif des pirogues sur la retenue semble avoir suivi le
même train que celui des pêcheurs. Les données
collectées à la DAEPIA de Maga par rapport à la
période 2010-2015 le confirment. En 05 ans, elles ont connu une hausse
de 33% passant de 1000 pirogues en
75
moyenne en 2010 à plus de 1500 en 2015 (figure 10).
On les estime entre 3000 et 4000 aujourd'hui, ce qui pousserait un peu
à la hausse ce calcul à 7 fois l'effectif de 1985. Ainsi, on
aurait 8 pirogues au km2 en moyenne sur le lac pendant la
période de faible activité de pêche et plus de 27
pirogues/km2 entre Mars et juin.
1600 1400 1200 1000
800
600
400
200
0
|
|
2010 2011 2012 2013 2014 2015
|
Source : Données de la
DAEPIA de Maga
Figure 10: Évolution des effectifs des
pirogues à Maga (2010-2015)
D'autre part, le souci de rentabilité a poussé
les pêcheurs à privilégier les pirogues les plus grandes et
faciles à déplacer (en tôle) aux dépens de celles
qui sont lourdes (en planche) ou trop petites (monoxyle) selon
qu'illustré par la figure 11 ci-dessous.
pirogues en toles 81%
Pirogues en contre-plaqué sans moteurs
1%
Pirogues à moteurs
0%
Autres
0%
Pirogues en planches sans
moteurs
Pirogues
13%
monoxyles
5%
76
Source : Données de la
DDEPIA-YAGOUA, 2015.
Figure 11 : Structure des pirogues
utilisées sur le lac de Maga.
Dans ces conditions, l'augmentation du nombre des pirogues de
grandes capacités illustre l'augmentation de la capacité de
pêche. Car, s'il est de notoriété publique que, les
pirogues ont connu un développement au cours de la période
1985-2015, il faut admettre que la capacité de pêche actuelle
répond à l'efficacité des engins de capture.
Au regard des types de pirogues utilisées, de leurs
effectifs et de leurs capacités d'embarcation, on comprend que la forte
capacité de la pêche artisanale est source d'une pression de plus
en plus importante.
2.1.2.2. L'efficacité des engins et techniques de
pêche utilisés
Les engins de pêche sont des outils d'exploitation et
d'exploration (hameçons et lignes, chaluts, filets maillants, etc.) pour
le repérage et la capture des poissons. L'efficacité du
pêcheur dépend de la nature de l'engin utilisé, de son
état, du nombre engins en activité, de leur maniement expert et
leur adaptation. Sur la retenue, la kyrielle de ces engins peut
être regroupée en trois :
77
? Les filets :
On en distingue trois marques : les filets maillants (dormant
ou encerclant), les sennes (sennes tournantes, sennes de plage) et
l'épervier.
- Les filets maillants calés
(zagazaga)
Les zagazaga sont des engins passifs qui capturent les
poissons pendant leurs déplacements. Ils sont composés
d'unités de 200 mailles de chute disposées bout à bout en
longueur. Ils sont calés à l'aide de perches. Le filet mesure 50
à 250 m de longueur, rarement plus, pour une profondeur maximale de 3 m.
Mais, pour des raisons pratiques, les pêcheurs ne montent que des filets
de 50 m (photo 10).
Coordonnées de prise de vue : x=10°49'38»
- y=14°57'12»
Photo 10 : Pêcheur de zagazaga à
Maga
Sur la ralingue supérieure, les flotteurs,
disposés tous les 50 cm, sont constitués par des semelles de
sandales en plastique. Les poids accrochés à la ralingue du fond
sont plus traditionnels, disques ou croissants de terre cuite (photo
11).
78
Coordonnées de prise de vue : x=10°49'56»-
y= 14°57'06»
Photo 11 : Poids à la ralingue du fond
des filets zagazaga au lac Maga
Les mailles les plus fréquentes sont de 3 et 2 doigts
(planche 04) et leur efficacité évolue en fonction des
saisons. Les principales espèces ciblées sont : Tilapia sp.,
Alestes, les Schilbes mystus etc. lorsqu'ils sont en surface. Les filets
dormants de fond sont les plus utilisés par les
pêcheurs35. Ils sont plus favorables en saison chaude, mais
les risques de putréfaction des poissons capturés sont plus
élevés. Car, durant cette période les températures
de surface peuvent dépasser 39°C (CBLT, 1997).
35 On distingue deux types de filets zagazaga : les filets
maillant de fond (FMF) et les filets maillants de surface (FMS). Les noms filet
dormant ou filets encerclant doivent être considérés comme
des techniques de pêche.
a
b
c
79
Coordonnées de prise de vue : x=10°49'57» -
y= 14°57'12»
Planche 4 : Types de filets mono filaments
identifiés dans le lac de Maga
De la gauche vers la droite, on distingue respectivement :
les filets monofilament à 2(a), 3(b) et 4(c) doigts. La
probabilité de rencontrer un de ce type de filet dans l'un des
campements des deux arrondissements est de 17,63 %. Cette probabilité
est plus grande à Kaï-Kaï ou elle est de 54%. Ces engins
excluent la sélectivité et la notion d'évitement qui
voudraient que le poisson ait la possibilité d'éviter certains
pièges dans l'eau. Très fins, ils sont invisibles aux yeux des
poissons dans l'eau qui finissent par s'y emballer résolument grands et
petits.
- Les sennes tournantes (Taro)
Les taros36 ou taru (hausa) sont des
sortes de grandes sennes de 100 à 300 m de longueur et de 10 m de chute.
Leurs mailles dépendent de l'espèce ciblée
(Synodontus, tilapia, Tetraodon fahaka etc.). Elles
s'échelonnent de 1 à 5 doigts et les filets les plus
utilisés dans la retenue sont de mailles réduites (photo 12).
Toutes les espèces peuvent être prises par ces types de
pêche. Le taro est ici accroché par une extrémité
à la berge, tandis qu'une pirogue, porteuse de l'autre
extrémité, décrit un grand arc de cercle pour revenir
près du point initial
36Cette technique a été
vulgarisée par les Nupe du Nigeria sur la Bénoué et s'est
diffusée par Garoua, le Mayo Kebbi (Léré au Tchad) et
enfin le Logone (Seignobos, 1986). Ce n'est qu'à la suite de
cette séquence que cette technique est arrivée à Maga.
80
(d'où le nom senne tournante). Un petit filet tendu
contre les herbiers borde la berge pour empêcher les poissons d'y trouver
refuge.
Coordonnées de prise de vue : x=10°49'57» -
y= 14°57'12»
Photo 12 : Filets à Taro d'usage
quotidien au lac de Maga - Les filets encerclants
Cette technique est une variante du taro. Les
bancs37 sont représentés par des séquences
d'herbes de 20 à 30 m2 en moyenne qu'on encercle dans le lac.
La sortie est caractérisée par une phase de repérage et
d'approche des bancs. Ensuite le filet est déployé en cercle
autour des bancs et le cercle est refermé. En effet, une pirogue
accompagne la poche à mesure qu'elle se rétrécit, pour
éventuellement soulever la ralingue afin de la dégager de souches
et paquets de vase gisant sur le fond, jusqu'à ce que la poche se
referme.
37Grande troupe de poissons de la même
espèce
81
- Les sennes de plage
Elles mesurent habituellement 300 à 400 m de longueur,
mais peuvent atteindre 1 km, avec une chute de 10 à 20 m dans la partie
centrale. Cette chute constitue une poche qui doit supporter le poids de la
capture. Le maillage est entre 20 et 40 mm avec un fil résistant. Les
sennes de plage ne sont pas des engins individuels, elles appartiennent
à une communauté de pêcheurs (15 à 50) et sont
utilisées en fonction des besoins et des disponibilités de main
d'oeuvre. La senne de plage est transportée par une pirogue pour son
déploiement, mais elle est halée depuis la plage (supra
planche 05). Leur zone de pêche est constituée par la frange
côtière où agissent les vagues (photo 13). Les
poissons capturés sont en grande partie des juvéniles (5 à
15 cm).
Coordonnées de prise de vue : X=10°59'55»-
Y= 14°47'10»
Photo 13 : Remontée d'un Taro à
Maga
Naïvement contant, ces pêcheurs Massa utilisent
des filets de 2 et 3 doits non réglementaires. Sous le regard
enlacé parfois des gestionnaires -comme c'est le cas ici- qui laissent
passer au prix d'une entente.
82
Les équipes mobiles de Taro sont
subordonnées à la hauteur des eaux dans le lac (1,5 m au
maximum). On ne les retrouve que pendant la période de décrue
correspondant au retrait des eaux entre mars et juin. Dans leur
diversité, elles ne représentent qu'à peine 3 % du total
des engins rencontrés dans le lac en 2015. Toutefois, elles sont
réputées pour leur efficacité et leur capacité de
prélèvement. Elles ont réalisé 40% des
débarquements enregistrés au CACP de Maga la même
année.
- Les éperviers (Birgui)
L'épervier est un filet conique lancé dans
l'eau. Il s'agit d'un engin actif dont la capture nécessite que le bout
du filet soit plombé aux extrémités afin de permettre
l'immersion du filet (photo 14).
Coordonnées de prise de vue : x=10° 50'
14» - j= 14° 55' 24»
Photo 14 : Pêche à
l'épervier dans le lac de Maga
Deux pêcheurs sont embarqués à bord d'une
pirogue en tôle pour au moins 6 heures si non toute la nuit. Afin de
maximiser les prises, les pêcheurs utilisent du son de paddy qu'ils
déversent dans une surface de 10 m2 en moyenne pour attirer
les poissons. Une à deux heures plus tard, l'activité commence et
ainsi de suite. Un sac (photo 15) acheté à 1000F ne peut
servir que pour une sortie de pêche.
83
Coordonnées de prise de vue : x=10° 49'
58» - y=14° 56' 55» Photo 15 : Sac de
son paddy d'un pêcheur à épervier (Maga)
Les techniques de pêche actives très rentables
nécessitent de gros efforts physiques et disqualifient les personnes
âgées qui n'ont autre recours que les zagazaga et la
pêche palangrière. Les éperviers représentent 2,5 %
de l'ensemble des engins utilisés par les pêcheurs. Ils sont plus
utilisés à Maga (52,30 %) où le plan d'eau est
permanent.
? Les lignes
Les lignes comprennent un fil principal, un ou plusieurs
engins accrocheurs (hameçons, leurre, turlutte), des avançons, un
ou plusieurs lests (plomb, pierre), des flotteurs et un système
d'arrimage (photo 16). Elles peuvent être montées ou
démontées en fonction des besoins. La ligne est maintenue en
pêche à une profondeur donnée à l'aide de flotteurs.
C'est ainsi qu'on peut avoir également les palangres de fond qui visent
les espèces benthiques38 à l'instar de clarias
anguillaris ou Protopterus annectens (photo 5 et 9, annexe 01), et les
palangres de surface qui ciblent les espèces de surface telles Lates
niloticus, Tilapia Sp., Heterotis etc. (photo 2,1 et 12 annexe 01).
Elles peuvent être appâtées (Wari) ou non
appâtées (kadra).
38 Les espèces benthiques sont des espèces de
fond par opposition aux espèces de surfaces qui peuvent êtres
capturées par les filets maillants de surface.
84
Coordonnées de prise de vue : x=14°57' 10» -
y= 10° 49' 58»
Photo 16 : Panier à palangre d'un
pêcheur Kotoko à Maga
Les kadra sont des lignes de 500, 750, 1000, parfois 15 00
hameçons non appâtés, de 3 à 4 cm en
général, espacés de 10 cm et montés sur un
avançon d'une dizaine de centimètres. Les flotteurs
constitués d'Aeschynomene elaphroxylon ou de petites
cucurbitacées39 prélevées sur le site
même des campements sont placés aux extrémités. Ces
lignes sont accrochées à des souches ou à des perches
(planche 05) et sont destinées à capturer surtout des
poissons fouisseurs comme les Synodontis, Mormyres, silures (voir annexe
1). Les pêcheurs estiment leur rendement à 2 silures par jour
pour 10 hameçons, au cas où le protoptère ou autre
prédateur ne passe pas avant le relevé des lignes. Les
hameçons doivent absolument briller pour attirer les poissons, ce qui
contraint les pêcheurs à les renouveler tous les trois mois.
39 Famille de plantes dicotylédones à tige
rampantes et à fruits parfois volumineux
a
b
85
Coordonnées des prises de vues : x=10° 46'
50»- y= 14° 55' 56» Planche 5 :
Palangres appâtées à HOFF (Maga)
À gauche (a), des souches prélevées
sur les lieux auxquelles sont attachés à droite (b) 10 à
50cm de filet hameçonné. Plongés dans l'eau suivant une
ligne, les Wari sont d'une utilisation quotidienne sur la retenue.
Les Wari diffèrent des kadra par leur structure
appâtée et la nature même des appâts utilisés
(planche 6). Ces appâts majoritairement constitués des
juvéniles (petits poissons), ou des zooplanctons (Alestes dentex
par exemple) attirent les poissons de grandes tailles à l'instar de
Lates niloticus, Gymnarchus, Bagrus etc. préférés
par les mareyeurs. En l'absence d'appâts naturels, des petits morceaux de
savons de ménage les substituent.
a
b
86
Cliché : Toussoumna, juin
2016.
Planche 6 : Types d'appâts
utilisés dans la pêche palangrière lacustre de Maga
En effet, un morceau de savons de 200 g (b) est divisé
en 100 petits morceaux, lesquels morceaux sont accrochés aux palangres
et immergés dans l'eau. Le rendement est si satisfaisant que les
pêcheurs préfèrent acheter ce morceau de savon qui ne
coûte que 125F à 150F comparé aux appâts naturels
(a), quasiment 7 fois plus onéreux40.
On retient que la pêche palangrière
pratiquée de deux façons sur la retenue de Maga est une technique
passive. Lorsque la palangre n'est pas appâtée, on l'appelle
Kadra ou palangre de fond et cible les espèces benthiques (au
fond du lac). À l'opposé, les Wari s'occupent de celles de
surface d'où, la nécessité de les appâter. Environ
22274 palangres sont en circulation dans la retenue et les kadra
représentent 44,90 %. Le Wari est le plus utilisé
avec 74,43 % de chance d'être rencontré et surtout à Maga
où il est de 80 %.
- Les lignes à main
Elles mesurent entre 100 et 200 m avec des hameçons
plus ou moins gros suivant l'espèce recherchée. Cette technique
de pêche est active et nécessite la présence du
pêcheur qui peut en manipuler deux ou trois à la fois. Durant la
pêche la pirogue est généralement au mouillage pour un bon
équilibre par rapport au fond. Avec 2,34 % d'engins, la ligne à
main, peu productive, est rencontrée dans l'arrondissement de
Kaï-Kaï qui en déteint le plus grand nombre soit 81 % de ces
engins.
40 Un appât coûte 10 F alors qu'un
morceau de savon de 150 F en produit 100 soit 1,5 F l' « appât
».
87
? Les nasses (Goura)
On distingue les nasses dites maliennes et celles
traditionnelles en rotin qui sont très rares. Ce sont des enceintes de
capture, ou plutôt ces abris-pièges (a, planche 07), dont
on ne voit sortir de l'eau que le haut des branchages mis à
l'intérieur, sont formés d'un sekko circulaire de 3 à 3,5
m de diamètre. À la périphérie du cercle, deux
tores maintiennent une claie verticale de l m de branchettes, où sera
ménagée une ouverture d'environ 1m. Sept à huit tresses
régulièrement espacées permettront de déplacer ce
sekko sur le fond sableux et de le hisser sur la rive.
Cet engin est généralement placé à
quelques distances du bord ou immergé au niveau d'un banc de sable, zone
calme peu profonde, l'ouverture tournée vers la rive (b, planche
07). Le poisson, attiré par ce havre ombreux, sera capturé.
Lorsque l'engin sera hissé sur la berge, le poisson essayera en vain de
fuir en direction du fleuve. Les protoptères
représentent souvent plus de 80 % des prises. Ces enceintes de
captures sont rarement isolées, elles peuvent aussi être
reliées à un montage de parois de claies immergées qui
guident le poisson vers elles. Elles sont actuellement aux mains des vieux
adultes. Les nasses représentent 32,21 % de l'ensemble des
engins en circulation et sont fréquemment utilisées (99,96 %)
à Kaï-Kaï.
a
b
Coordonnées des prises de vues :
x=10°47'26» - y= 15°02'05» Planche 7 :
Nasses maliennes (Goura) à Kéleo
(Kaï-Kaï)
À gauche (a) une image parfaite du goura, engin
célèbre pour sa capacité à capture les
protoptères. Au premier plan de cette image, l'orifice d'entrée
des poissons et à l'arrière-plan, la fenêtre par laquelle,
les poissons sont retirés. À droite (b), il s'agit du même
engin installé dans l'eau, en activité.
Il faut observer que la myriade d'engins de pêche
à ce jour dans le lac a connu une évolution graduelle sous
l'effet conjugué de l'effort de pêche et la dynamique des stocks.
Leur nombre a été multiplié par 19 en moins de 25 ans. De
2626 engins au total en 1986, ils sont passés à 49562 en 2011
soit une hausse totale de 470 % en 25 et une hausse annuelle de 19 %. Depuis
2013 on estime que le cap de 50000 engins de pêche y a été
atteint et les calculs de la CBLT se situent plutôt à la hausse
pour l'année 2015 (57072 engins au total). D'ici 2020, on en sera
à presque 60000 ce qui laisse croire que la progression va se maintenir
encore pendant longtemps à la verticale. Le diagnostic posé
à Maga où, en espace de 5 ans ils ont connu une augmentation de
près de 90% confirme cette hypothèse (figure 12).
Années
Effectifs d'engins
14000 12000 10000 8000 6000 4000 2000
0
|
|
2010 2011 2012 2013 2014 2015
|
Source : Données de la
DAEPIA de Maga.
88
Figure 12 : Évolution du nombre
d'engins de pêche utilités à Maga (2010-2015)
89
En 1981, la mission d'étude piscicole du barrage de
Maga avait dénombré 1285 lignes (kadra), 121
éperviers dont 67 avec des mailles de deux doigts, 46 avec trois doigts
et 8 à un doigt ; 1090 zagazaga dont le plus courant, était celui
à maille de 4 doigts ; 76 taro ; 8 sennes à bâton et 46
nasses maliennes. En examinant le tableau ci-dessous (tableau 7), ces
chiffres ne sont en rien comparables à ceux de l'année 2011. Le
moins qu'on puisse dire est que, leurs effectifs respectifs ont
été multipliés par 5 pour ce qui est des kadra, par 8.6
pour les Éperviers, par 8 en ce qui concerne les zagazaga, 16 fois pour
les taros et 8 fois les nasses maliennes.
Tableau 7 : Dynamique des engins
utilisés dans le lac de Maga
Années
|
kadra
|
éperviers
|
zagazaga
|
Taro
|
Nasses
|
Total
|
Nombre en 1986
|
1285
|
121
|
1090
|
76
|
46
|
2626
|
Nombre en 2011
|
5696
|
1042
|
8738
|
128
|
15960
|
31564
|
Source : Données de MEPBM
(1986) et ECREM (2011)
Si en 1986 on avait seulement 7 filets au km2, nous
en sommes à plus de 156 aujourd'hui. Ce qui sous-entend une forte
pression sur les ressources. Quoique nombreux, ces engins n'ont pas des
caractéristiques homogènes (tableau 8). Cette
variété constitue d'ailleurs le piment de leur efficacité.
Car, quoiqu'interdits, les engins actifs, très performants
prospèrent sur le lac.
Tableau 8 : Pourcentages des types d'engins
dénombrés dans le lac de Maga en 2015
Arrondissem ents
|
Filets dormants
|
Kadra
|
Wari
|
Birgui
|
Ligne
|
Taro
|
Filets
encerclant
|
Goura
|
Nasses
|
Maga
|
4048
|
3432
|
15267
|
545
|
222
|
53
|
169
|
2510
|
6
|
Pourcentage
|
46
|
60
|
92
|
52.30
|
19.10
|
41.40
|
0
|
16
|
100
|
Kaï-Kaï
|
4690
|
2262
|
1313
|
497
|
940
|
75
|
83
|
13450
|
0
|
Pourcentage
|
54
|
40
|
8
|
47.69
|
80.89
|
58.59
|
32.93
|
84
|
0
|
Total
|
8738
|
5694
|
16580
|
1042
|
1162
|
128
|
252
|
15960
|
6
|
Pourcentage
|
17.63
|
11.48
|
33.45
|
2.1
|
2.34
|
0.25
|
0.5
|
32.2
|
0.012
|
Source : Données de la
DDEPIA-YAGOUA, 2015.
90
Ce tableau montre que sur les 8 types d'engins en cours
dans la retenue, les plus utilisés (Wari, Kadra, Goura, Zagazaga) sont
des engins passifs qui excluent l'évitement. Ils sont relayés par
les engins actifs Taro, épervier, etc. très destructeur.
En examinant la structure des engins utilisés
(figure 13), on comprend qu'elle n'est qu'une expression latente de la
diminution de la taille des poissons. Autant les ressources s'amenuisent, les
pêcheurs s'adaptent via des astuces spécifiques qui d'une
manière ou d'une autre décuplent l'efficacité de
pêche. La figure ci-dessous en dit plus.
Lignes à main
2%
Sennes tournantes (Taro)
0%
Filets encerclants
1%
Goura (nasses maliennes)
32%
Éperviers (Birgui)
2%
Nasses traditionnelles
Filets dormants
18%
Palangres appâtées (Wari)
33%
Palangres non appâtées (Kadra)
12%
Source : DDEPIA-YAGOUA,
Décembre 2015.
Figure 13 : Les engins utilisés dans le
lac de Maga par catégories en 2014.
On constate que les engins utilisés par les
pêcheurs tel qu'indiqué plus bas (figure 14) sur la
retenue sont nombreux, performants et de plus en plus efficaces.
Zagazaga Taro Éperviers Kadra Wari Ligne à
main
Ngura
100
80
60
40
20
0
91
Source : Enquête de terrain,
Mars 2016.
Figure 14 : Proportion des types d'engins
utilisés principalement par les pêcheurs
Il faut noter qu'après la capture, les ressources sont
valorisées. Cette opération suscite plusieurs autres
activités qui dépendent étroitement de la capture.
2.2. VALORISATION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES ISSUES DE LA
PÊCHE ARTISANALE LACUSTRE DE MAGA
La mise en valeur des ressources halieutiques
prélevées dans la retenue a donné naissance à
d'autres activités génératrices de revenus, mais enclines
à plusieurs difficultés qui limitent leurs rayonnements. Leur
portée n'est pas moindre dans la pression que subissent certaines
espèces spécifiques ainsi que leur environnement.
2.2.1. Les activités corollaires de la pêche
artisanale lacustre
Deux d'entre elles sont particulièrement dynamiques et
méritent d'être étudiées à savoir : le
mareyage et la transformation des poissons.
2.2.1.1. Le mareyage en pêche artisanale lacustre
Les mareyeurs sont essentiellement des commerçants de
poissons qui acquièrent leurs produits auprès des pêcheurs
et le rétrocède aux consommateurs ou à d'autres
revendeurs. À cet effet, ils ont leurs modes de vente, des moyens de
transport et font face à plusieurs difficultés.
La vente de poisson se fait à 60 % au comptant tandis
que la vente à crédit est fonction des relations et du
degré de confiance du vendeur envers son client. Cinq modes de
transport
92
ont été identifiés par l'enquête.
La marche et les motos taxis sont les plus courants des moyens utilisés
avec respectivement 28.5 et 38 % des cas. La voiture et la bicyclette arrivent
en troisième position avec 14.2 % suivi de la brouette 4,2 %. Le nombre
des voyages par mois et par saison est estimé en moyenne à trois.
Les mareyeurs achètent approximativement 90 kg par de poissons par
voyage pendant la bonne saison alors que durant la saison de basse production,
les quantités sont inférieures à 50 kg et les voyages
réduits à deux tours. Globalement le système de
marché de produits halieutiques de la retenue de Maga se présente
comme suit :
Figure 15 : Organisation du marché des
produits halieutiques à Maga
Il faut reconnaitre que la concurrence est rude entre les
femmes mareyeuses et les grands propriétaires de Taro qui liquident
leurs butins à des clients venus de loin. Face à la dictature de
grands mareyeurs, les organisations féminines jouent un rôle
régulateur permettant ainsi aux consommateurs locaux de se trouver un
peu de quoi manger.
En fait, la forte demande en produits halieutiques des
marchés extérieurs stimule les acteurs du secteur de la
pêche. Depuis 2012, la FGAEPAM fabrique de la glace aux
commerçants de poissons. Cette fédération des GIC des agro
éleveurs et pêcheurs de
93
l'arrondissement de Maga (FGAEPAM) est née surtout de
la volonté de faire de la pêche, un secteur économique
clé dans la localité. Avec plus de 7000 membres, ils agissent
dans tous les segments de l'économie de la pêche.
Grâce à eux, les produits de pêche
traversent les marchés locaux (Maga, Pouss, Kaï-Kaï...) et
arrivent au Nigeria voisin. En 2011, 60 % de la production totale du lac
était destinée à leurs activités (MINEPIA, 2012) et
toute cette quantité fut orienté vers Amchidé, banki,
Maroua et kousseri. Malheureusement, le contexte social actuel de
l'Extrême-Nord Cameroun marqué par les attentats kamikazes de la
secte islamiste BOKO HARAM limite la dynamique du secteur à travers la
fermeture des frontières entre le Cameroun et le Nigeria.
2.2.1.2. Transformations artisanales des produits
halieutiques
Les produits halieutiques débarqués sont
transformés de deux manières prioritaires. S'ils ne sont pas
fumés, ils sont séchés. Sachant qu'une partie est
consommée l'autre commercialisée fraiche.
? Les techniques de séchage du poisson
Le séchage est la plus ancienne des techniques de
transformation du poisson à Maga. Les poissons sont lavés,
parfois non et souvent éviscérés et séchés
au soleil pendant trois à cinq jours sur des claies, des nattes ou des
herbes (photo 17). Généralement, les tas sont
protégés des oiseaux et autres prédateurs par des morceaux
de filets plus ou moins dégradés. Les gros poissons sont
éviscérés, ouverts et mis au soleil tel quel, ou souvent
légèrement salés pour ajuster le goût au
séchage.
Les espèces les plus utilisées sont du type
Tilapias, Alestes, Mormyrus, Citharinus. D'autres espèces
notamment Lates, Bagrus, Clarias, Heterotis quoique très
exploitées, ne font quasiment pas l'objet de séchage et sont
consommées fraiches. Ils n'apparaissent pas dans la comptabilité
habituelle du MENEPIA dont les rapports ont été consultés
dans cette recherche.
94
Coordonnées de prise de vue : x= 10.832810 - y=
14.950110 Photo 17 : Amas d'Alestes mis au
séchage à Maga
Le séchage exerce selon qu'illustré par
cette image, une pression sur les sardines(Alestes) spécifiquement, mais
aussi, les carpes(Tilapia).
En effet, la durée du séchage est tributaire de
l'intensité du soleil et de la grosseur du poisson concerné. Si
en temps normal, c'est-à-dire quand le soleil est ardent, le
séchage n'excède guère 36 heures. L'opération peut
cependant s'étirer sur 96 heures lorsque les conditions sont
relativement médiocres. Après séchage, le poisson est
conditionné dans les sacs ou des cartons et stocké avant la
commercialisation. Qu'en est-il du fumage ?
? Les techniques de fumage du poisson
Les techniques sont les mêmes que celles qui ont cours
sur le bas Chari et le Logone, avec séchage pour la production de
salanga41 et fumage pour celle de banda (Seignobos,
ibidem). Depuis l'introduction des lignes dormantes sur les rives du Chari
et du Logone par les Bornouans et les Hausa, la technique du banda leur est
associée. Le fumage aurait été introduit et
intensifié sous l'influence du commerce avec le Nigeria (Blache et
Miton, 1962).
41 Poisson sec, Alestes dentex et Alestes baremose, fendus en
deux dans le sens de la longueur. Ces poissons, appelés aussi «
sardines » sont pêchées à l'étiage, le plus
souvent à la senne à bâtons, et mis à sécher
sur des fils. Le mot salanga est devenu synonyme de « poisson
séché au soleil » par rapport au poisson fumé, le
banda.
95
Traditionnellement, le poisson est fumé
entièrement au feu de bois pendant un à deux jours.
Quand il est de taille moyenne, il est enroulé sur lui-même
et maintenu par une tige de bois. Le poisson ainsi traité est vendu
surtout sur plusieurs lieux. Les Arabes et les Maliens par contre
procèdent à un fumage spécifique
préféré par les Nigérians. Le fumoir traditionnel
est assimilable au foyer de cuisine et est non seulement de faible rendement,
mais est également consommateur d'une grande quantité de bois. De
plus, le produit fini est de mauvaise qualité. Malheureusement c'est le
plus utilisé, car 60% des fumeurs de poissons
l'utilisent42.
Le four amélioré ou chorkor est surtout
destiné au fumage, mais peut toutefois servir pour le séchage ou
le stockage de poissons séchés ou fumés (photo
18). Il peut être réalisé avec des briques en terre
cuite, en argile ou en terre battue. En raison de sa capacité de
production importante, de la diminution significative de la consommation de
bois se traduisant par une réduction des couts de production, de
l'amélioration des conditions de travail et finalement de l'augmentation
des revenus.
Coordonnées de prise de vue : x=10° 50'59»
- y=14° 56' 12»
Photo 18 : Espèces de clarias
anguillaris près à être fumées sur un four
amélioré
42 D'après la DAEPIA/MAGA.
96
Au regard de cette image, on peut déduire que le
fumage du poisson est une menace réelle pour la plupart des
espèces benthiques (Protopterus annectens, Bagrus docmac, etc.). Mais,
l'espèce dominante dans cette pratique demeure Glarias
anguillaris.
Un seul four amélioré peut fournir une
quantité de poissons fumés équivalente à celle
produite par trois fours traditionnels. Les produits fumés obtenus
répondent aux standards de qualité et de goût des
consommateurs. Aussi, les opérateurs sont moins exposés à
la fumée et à la chaleur, ce qui leur procure un avantage au
niveau de la santé et des conditions de travail. On estime à 30 %
les acteurs qui utilisent ce type de fumoir. Les quantités
transformées varient en fonction des saisons. Pendant la haute
pêche, la quantité moyenne est de 40 kg alors que celle-ci n'est
que de moins de 20 kg43 lorsque la pêche ne bas plus son
plein.
2.2.2. Des contraintes au décollage des
activités de pêche
Toute activité économique passe par une
série de contraintes que les acteurs doivent intelligemment surmonter
pour réussir. Ainsi en est-il de la pêche artisanale lacustre dont
le problème touche tous les segments de l'activité, allant de la
capture à la transformation via le mareyage.
2.2.2.1. Les difficultés spécifiques
rencontrées par les acteurs
La recherche a analysé ces difficultés à
trois niveaux à savoir dans la capture, le mareyage et au niveau des
transformateurs.
? Les problèmes rencontrés par les
pêcheurs
La première difficulté des pêcheurs est
l'accès aux matériels de pêche. Les fonds permettant
d'acquérir le matériel de pêche sont d'origines diverses.
Il ressort du tableau ci-dessous (tableau 9) que dans l'ensemble, au
moins 63% du matériel a été acquis sous fonds propres,
26,66 % sont loués alors que le crédit obtenu n'a permis
d'acheter que 10,09 % de ces derniers.
43 Les chiffres viennent de la DAEPIA de Maga.
97
Tableau 9 : Origines du matériel
usité dans la pêche
Matériels
|
Fonds propres
|
Location
|
Crédit
|
Total
|
Pirogues
|
86
|
70
|
18
|
174
|
Engins
|
245
|
70
|
35
|
350
|
pourcentage
|
63.04
|
26.66
|
10.09
|
525
|
Source : Enquête de terrain,
Février 2016.
En même temps, la plupart d'engins utilisés par
les pêcheurs leur appartiennent (70%) contre seulement 49 % des pirogues.
La part des pirogues empruntée auprès des mareyeurs est
significative (plus de 50 %). Raison pour laquelle, pour comprendre
l'organisation et la dynamique des sous-filières de la pêche
artisanale, il est nécessaire de stabiliser les relations entre les
pêcheurs et les mareyeurs. D'autres parts, l'enquête en a
identifié 6 (figure16) problèmes spécifiques
liés à la pratique de la pêche dans le lac. La menace des
hippopotames est récurrente (51%), le manque de moyen pour l'achat
d'équipements vient en second lieu (22 %) suivi des piqures des
moustiques. Toutefois, les abus des gestionnaires, des cas de vol ou encore
l'envahissement du lac par les herbes complètent la liste de ces
difficultés.
Attaques des hippopotames
51%
Envahissement des herbes 8%
Moustiques et vagues 8% vol 5%
Manque de moyens 22%
Abus des gestionnairs 6%
Source : Enquête de
terrain, Février 2016.
Figure 16: Types de problèmes
rencontrés par les pêcheurs
Ces difficultés limitent dans le temps et dans
l'espace, les sorties en pêche et amènent les pêcheurs
à définir des stratégies pour les défier.
? Les problèmes rencontrés par les
mareyeurs
Les problèmes rencontrés par les mareyeurs sont
aussi de taille. Par ordre de degré d'ampleur, ces acteurs sont
confrontés à la difficulté de conservation de leur produit
(46 %) puis aux difficultés financières (31%) en fin il s'agit
aussi des problèmes de transport (23 %).
? Les problèmes de la transformation artisanale
des produits halieutiques
Comme toutes les autres activités, la transformation
est une opération à risque. Les problèmes sont nombreux
à se dresser contre les actifs de cette filière (figure 17).
Il s'agit à 53 % des blessures enregistrées lors des
entailles par les couteaux et des piqures des arrêts des poissons. La
conserverie (25 %) apparait comme une véritable contrainte au
développement de la pêche artisanale lacustre. Cette proportion
illustre à souhait le problème de délestage continu et le
manque de débarcadère fonctionnel pour les mareyeurs.
D'où, le rôle régulateur joué par les
transformateurs. L'instabilité du marché, l'évacuation de
la production, etc., ne les gêne pas de moins que les autres
difficultés.
Conserverie
23%
Blessures
53%
Fluctuation des prix
8%
Transport de produits
8%
Pollution d'objet
8%
Source : Enquête de
terrain, Avril 2016.
98
Figure 17 : Types de problèmes
rencontrés par les transformateurs
99
Trois solutions sont préconisées par les
pêcheurs aux multiples difficultés qu'ils rencontrent. Elles
concernent à 74 % des cas, la luttent contre les hippopotames par des
moyens traditionnels (tapages d'eau, solidarité de nombre,
contournements, etc.). Trois des pêcheurs sur les 100 interrogés
ont déclaré avoir reçu un crédit allant dans ce
sens alors que les aides et les appuis multiformes ne représentent que
20 % des solutions administrées aux menaces.
Les solutions souhaitées par les mareyeurs concernent
à 60 % un appui financier, 19 % sont relatives à la construction
des hangars pour la vente du poisson alors que 21 % trouvent que l'absence d'un
débarcadère est un véritable handicap au
développement de la pêche et sont par conséquent favorables
à la construction d'une chambre froide. Heureusement que la CBLT
s'escrime à y apporter un remède (infra 4.2.2.2.)
Les transformateurs souhaitent pour leur part, être
aidés (34 %), d'autres voudraient recevoir une formation sur les
techniques de transformation (21 %) alors que pour certains, les doter des
fumoirs (12 %) et des moyens financiers (14 %) est à valeur de
panacée. Par ailleurs, 13 % des déclarations portent sur la
découverte de nouveaux circuits de commercialisation et 7 % l'octroi de
crédit.
La pêche artisanale lacustre est dans l'ensemble bien
organisée et structurée. Cependant elle est confrontée
à des contraintes socio-économiques liées à
l'instabilité du marché, à l'insuffisance des
infrastructures, etc., qui entravent son développement. Les
communautés de pêcheurs se sont adaptées à ces
contraintes et trouvent souvent des stratégies pour les contourner. Ces
stratégies vont du renforcement de la technologie d'équipage et
à la recherche absolue de la performance des engins.
2.2.2.2. De la taille des recettes publiques
générées par la pêche
Du point de vue économique, la pêche artisanale
lacustre contribue pour une large part à la création des
richesses à travers la commercialisation du matériel et des
équipements de pêche et des produits halieutiques. En 2015, le
rapport annuel départemental de la DDEPIA/Yagoua indique que
l'activité de pêche (hors-mis les services connexes) a
généré une valeur ajoutée de 1,2 milliard de FCFA
à Maga, soit 859500000 FCFA dans le Frais, pour 859,5 tonnes de captures
et 393560000 FCFA dans le fumé pour 1351,45 tonnes de produits.
À Kaï-Kaï, il y eut 36197000 FCFA pour le
Frais et 6617600 FCFA de fumé. Les produits de la pêche artisanale
lacustre ont servi de matières premières aux artisanats de
fabrication d'huile de poisson à Maga. On a estimé à
environ 2000 litres d'huile de sardine par trimestre. Le prix du litre
étant de 2000 FCFA, on aura eu 16000000 FCFA. Au total, la pêche
artisanale lacustre à Maga aura généré à
l'État camerounais, 1,3 milliard de FCFA en
100
2015, bien que ces chiffres cachent de sérieux
déséquilibres socio-économiques qui biaisent l'exactitude
des données. Les estimations de l'année en cours sont à la
baisse du fait de la production qui a chuté.
Cette importance de la pêche justifie les interventions
de l'État et des acteurs du privé dans ce secteur afin de pallier
certaines difficultés. Mais, cette incitation à la production et
à l'emploi est à l'origine d'une pression
socio-économique.
2.3. L'INCITATION SOCIO-ÉCONOMIQUE DU SECTEUR DES
PÊCHES
L'accroissement des pirogues, d'engins de pêche ainsi
que l'évolution technique des pêches peut aggraver la pression de
pêche sur les ressources d'une pêcherie. Cependant, le temps mis
sur la retenue par les pêcheurs, la fréquence d'utilisation des
zones de pêche et en fin les incitations socioéconomiques de ce
secteur en constituent d'autres facteurs non négligeables qu'il faut
prendre en compte pour procéder à une analyse complète.
2.3.1. La pression économique
Les avantages économiques à travers les
coûts d'accès aux ressources halieutiques (les autorisations et
accords de pêche) et la demande des ressources halieutiques sont les deux
catégories d'indicateurs identifiées pour qualifier la pression
économique des pêcheries.
2.3.1.1. Les facilités d'accès aux ressources
halieutiques
Conscient de la portée socio-économique de la
pêche, l'État Camerounais procède à des formes
d'encouragement variées pour augmenter la production dans ce secteur. En
2004, les accords de gestion de la retenue de Maga (infra, chap. IV.2.)
signés par la quasi-totalité d'acteurs de la pêche
artisanale lacustre ont libéralisé l'accès à la
retenue. Il n'est depuis lors soumis qu'à l'obtention d'un permis de
pêche qui n'est pourtant pas l'apanage de tous. Puisque quand bien
même, cette structure facilite la délivrance de ce document, moins
de 50 permis de pêche ont été délivrés en
2015 pour près de 7000 pêcheurs opérationnels.
D'autre part, dans le cadre du projet dénommé
ADPAM44 en 2012 qui visait d'augmenter la production halieutique
locale, 11 GIC des pêcheurs de la retenue de Maga ont reçu de la
part de l'État, des appuis sous forme de subvention dont le coût
est évalué à plus de 23 millions de francs CFA. Cette
subvention sous forme de matériel de pêche et de
sécurité se compose de la manière suivante : 22 pirogues
en bois de 7 m de long ; 55 nappes de filet de
44 Projet d'Appui au Développement de la
Pêche Artisanale
101
pêche en multi filament de 400 mailles par 100 yards ;
660 bobines de fil à ramender de différents diamètres ; 55
palettes de plombs ; 550 paquets de 100 pièces d'hameçons chacun,
soit 55 000 hameçons de différents calibres ; 11 sacs de
flotteurs ; 33 gilets de sauvetage, etc.
Actuellement, le projet AFOAP financé par la
coopération franco-camerounaise dans le cadre du D est en cours de
réalisation à Maga. Ils ont déjà à ce jour
formé plus de 500 acteurs regroupés en plus de 300 GIC. Ces GIC
ont formé depuis 2012, la FUGAEPAM. Cette fédération des
GIC des agroéleveurs et pêcheurs de l'arrondissement de Maga
(FUGAEPAM) est née surtout de la volonté de faire de la
pêche, un secteur économique clé dans la
localité.
Ces trois exemples sont porteurs d'un message important.
Tandis que le matériel de pêche opérationnel sur la retenue
est surnuméraire, on en vient à rajouter. Non seulement ceci ne
répond pas aux attentes des pêcheurs artisans dont la moindre
envie serait de solliciter de l'État des engins de pêche (des
engins inefficaces) mais, à travers ce geste, on se retrouve en train
d'inoculer chez les pêcheurs, la hargne d'aller encore plus loin dans
leur capacité à produire.
2.3.1.2. La forte demande des produits halieutiques par les
consommateurs
Le poisson est la source de protéines la plus
accessible aux populations, surtout les plus défavorisées. Les
produits de pêche contribuent pour 67 % environ des apports en
protéines dans l'alimentation des populations à Maga et pour
près de 70 % à Kaï-Kaï. La consommation moyenne de
poisson par tête et par an y est de 47 kg contre 11 kg/habitant pour la
viande (MINEPIA, 2011). Soit une demande annuelle globale de 9400
tonnes pour les deux arrondissements. Cette situation pousse les pêcheurs
à aller jusqu'au bout de leurs efforts et par conséquent,
à parfois séjourner pendant de longues durées sur la
retenue dans l'optique de récolter plus de ressources (figure
18).
0h-5h 6h-11h 12h-17h 18h-23h 24h-29h 30h-35h
Effectifs
30
25
20
15
10
5
0
Durée
102
Source : Enquête de
terrain, Mars 2016.
Figure 18 : Temps mis par les pêcheurs
sur la retenue
Pour cela, le temps moyen mis par les pêcheurs en
activité sur la retenue est de 20 h alors que 68% d'actifs
interrogés mettent plus d'une demi-journée sur la retenue soit
14,5h. La forte demande de produits de pêche dans ces localités
est donc, un stimulant de pression de pêche. Mais, d'autres facteurs
peuvent également entrer en jeu pour donner naissance à une
pression sociale.
2.3.2. La pression sociale
L'analyse de la pression sociale est axée sur les
pêcheurs artisans. Il s'agit d'abord du nombre de pêcheurs pour
lequel une série de données de 2000 à 2015 a
été constituée. En ce qui concerne les
caractéristiques sociodémographiques, l'analyse se focalise sur
la nationalité, l'âge et la situation familiale des
pêcheurs. Les données relatives à ces variables sont une
synthèse faite à partir d'une enquête de terrain
combinée avec l'enquête socio-économique de 2011.
2.3.2.1. Les caractéristiques de la main d'oeuvre
artisanale
Les catégories d'acteurs intervenant dans
l'économie de la pêche sont les pêcheurs, les
propriétaires d'unités de pêche, les commerçants de
poissons, les transformateurs, les commerçants de matériel de
pêche et les autres opérateurs qui interviennent dans le sous-
secteur de pêche. Le tableau 10 ci-dessous
détaille la composition des acteurs de ce secteur pour toute la retenue
en 2015.
Tableau 50 : Caractéristiques de la
main d'oeuvre artisanale
Arrondissements
|
Pêcheurs
|
Aides pêcheurs
|
Mareyeurs
|
Transformateurs
|
Fabricants de
pirogues
|
Effectifs
|
Maga
|
31%
|
55%
|
8.28%
|
3.93%
|
1.66%
|
4211
|
Kaï-Kaï
|
35.68%
|
49.57%
|
9.16%
|
4.44%
|
1.14%
|
3901
|
Total
|
33.40%
|
52.29%
|
8.72%
|
4.19%
|
1.40%
|
8112
|
Source : Enquête-cadre sur
la retenue de Maga 2011, MINEPIA 2015.
Les pêcheurs sont pourtant les plus nombreux aussi bien
à Maga qu'à Kaï-kaï (figure 19) et leurs
effectifs n'ont jamais cessé d'augmenter au fil des ans pour avoisiner
les 7000 aujourd'hui Ce qui veut dire que la main d'oeuvre artisanale est
majoritairement investie dans la capture.
Maga Kaï-Kaï
Pêcheurs Aides-pêcheurs
Proportion en pourcentage
40
60
50
30
20
10
0
Source : Données de la
DDEPIA-YAGOUA (2011).
103
Figure 19 : Composition des pêcheurs et
aides pêcheurs du lac de Maga
104
Ces deux groupes forment plus de 86 % du total des acteurs du
secteur estimé à 8112 personnes. Sur les 6977 pêcheurs
dénombrables sur la retenue, 97% soit 5373 pêcheurs sont de
nationalité camerounaise. Plus nombreux à Maga qu'à
Kaï-Kaï (figure 11), les acteurs directs nationaux du
secteur des pêches sont à 52 % composés d'aides
pêcheurs. Ces deux groupes forment plus de 86 % du total des acteurs du
secteur estimés à 8112 personnes.
2.3.2.2. La situation socioprofessionnelle des
pêcheurs
La pêche réunit au moins trois
nationalités sur la retenue. On distingue les Camerounais (84%), les
Tchadiens (11%) et en fin les Maliens (5%). Les étrangers
dénombrés se retrouvent majoritairement (80%) dans
l'arrondissement de Maga où, il est facile d'écouler les produits
(tableau 11).
Tableau 61 : Nombre de pêcheurs par
nationalité
Arrondissements
|
Nationalités
|
Camerounais
|
Maliens
|
Tchadiens
|
Total
|
Maga
|
69
|
4
|
8
|
81
|
Kaï-kaï
|
15
|
1
|
3
|
19
|
Total
|
84
|
5
|
11
|
100
|
Source : Enquête de
terrain, Mars 2016.
L'âge moyen des pêcheurs est de 39 ans (figure
20) et 42 % d'entre eux ont entre 31 et 40 ans. La capture
nécessite assez d'effort physique et disqualifie les vieillards 30. Car,
au total 70 % des pêcheurs ont moins de 40 ans tous de sexes masculins
(100%).
25 20 15 10
5
0
|
|
|
21-30 31-40 41-50 50 et plus
|
Tranches d'âges des pêcheurs
105
Source : Enquête de
terrain, Mars 2016.
Figure 20 : Proportion d'âges des
pêcheurs interrogés.
Les musulmans représentent 84% des pêcheurs
interrogés. D'où, l'importance des polygames (47 %) pour un taux
de nuptialité de 72%. On compte en moyenne 18 personnes par
ménage. Les ménages sont composés du chef de
ménage, des conjointes, des enfants et des autres adultes. Afin
d'éviter toutes tentatives d'erreurs, trois variables ont
été retenues à savoir le chef de ménage, sa
conjointe et les autres personnes à charge. Le moins qu'on puisse dire
est que, indépendamment des appartenances religieuses, la pêche
est une activité d'un enjeu très important sur l'échiquier
social des collectivités de Maga et Kaï-kaï. Plusieurs
familles ont bâti leur économie sur cette activité qui
semble se transmettre de père en fils.
L'ancienneté moyenne de l'échantillon
étudié est de 21 ans. Elle varie en fonction des tranches
d'âges (figure 21). Elle est de 06 ans pour les pêcheurs
ayant entre 21 et 30 ans d'expérience, 25 ans pour ceux qui se situent
entre 31 et 40 ans, et 30 ans pour la tranche d'âge de 41 à 50
ans. Au-delà se situent les personnes ayant en moyenne 36 années
d'exercices.
|
|
|
40
|
|
35
|
|
30
|
|
25
|
|
20
|
|
15
|
|
10
|
|
5
0
|
|
|
21-30 31-40 41-50 50 et plus
|
|
Années d'exercice
106
Source : Enquête de
terrain, Mars 2016.
Figure 21 : Ancienneté des
pêcheurs par tranche d'âge.
Sur les 100 pêcheurs interrogés, 70 d'entre eux
soit 70 % ne savent ni lire ni écrire. Seulement 17 % ont le niveau du
primaire, et 13 % ont au moins fait la 6ème. Aucun
étudiant n'a été dégoté parmi eux. C'est
donc un secteur dominé par des analphabètes où, le message
des gestionnaires a du mal à passer.
On comprend que les pêcheurs, qu'ils soient Camerounais
ou non, sont initiés dès leurs bas âges à la
pêche par leurs parents et sont tous, des professionnels avant
l'âge de 20 ans. Ils pratiquent cette activité en
exclusivité pas seulement pour satisfaire les besoins alimentaires
à la taille de leurs ménages, mais aussi, pour en bâtir une
économie digne de ce nom. C'est pourquoi ils sont regardants sur la
nature des engins et techniques de pêche à utiliser.
107
Conclusion partielle
La pêche artisanale lacustre de Maga, repose sur de
solides fondements physiques et humains. Elle s'inscrit dans une dynamique
spécifique liée à l'introduction de la riziculture
irriguée dans les plaines du Mayo-Danay. Mais, elle a significativement
évolué depuis ses débuts en 1980 tant par ses effectifs en
hommes45, en matériels que par les moyens techniques et
socio-économiques mis en oeuvre. D'une économie d'exploitation
familière, le secteur a connu des changements importants liés
à la panoplie des transformations techniques, d'une demande accrue du
marché puis de nouvelles finalités dans l'exercice du
métier. Ces changements se sont traduits dans la retenue par une
augmentation de la dynamique de peuplement, une recomposition territoriale,
bref un accroissement du rôle de la pêche dans l'économie
locale. D'où, la pression sur les ressources et
l'écosystème. Malheureusement, de plus en plus, les effets
pervers abondent et la recherche ne les a pas inconsidérés.
45 Elle emploie plus de 8000 personnes dans des
villages/campements (Kéleo, Gamack, Malka, Pouss, Djafga, etc.)
très dynamiques et y contribue à l'essentiel des apports en
protéines animales des habitants.
DEUXIÈME PARTIE :
L'AVENIR DE LA PÊCHE ARTISANALE LACUSTRE DE
MAGA
109
Introduction partielle
La pêche artisanale dans le lac de Maga comporte des
enjeux socio-économiques et environnementaux très importants. Une
grande majorité de la population des arrondissements de Maga et
Kaï-Kaï (8000) en dépend pour leurs moyens d'existence.
Cependant, face à la dégradation constante des ressources
halieutiques dans cette pêcherie et la crise socio-économique qui
affecte ce secteur, il est primordial de s'interroger sur l'avenir de cette
activité devenu problématique. Que reste-t-il des ressources
halieutiques dans le lac de Maga pour pérenniser cette activité ?
Il faut donc d'abord évaluer les dommages biologiques et
environnementaux causés par les trois décennies de
prélèvements irrationnels subis par cette pêcherie
(Chapitre 3) puis présenter le dispositif juridique mis en
place par l'État et les acteurs variés afin de juguler ce
phénomène (Chapitre 4) qui intègre
déjà l'idée de chronicité.
110
CHAPITRE 3 : IMPACTS DES ACTIVITÉS DE
PÊCHE SUR LES RESSOURCES HALIEUTIQUES ET
L'ÉCOSYSTÈME
Introduction
Les chapitres précédents ont pu établir
que la retenue d'eau de Maga est une immense pêcherie,
particulièrement riche, mais sous pression sans cesse grandissante. Le
RMD a été dépassé depuis plus de 30 ans
déjà dans ce plan d'eau, et les ressources halieutiques en sont
visiblement touchées. Si tant est-il que toute surpêche constitue
une offense à la pêcherie, on est en droit de s'interroger en ces
termes : pendant trois décennies, quels dommages, la pêche
a-t-elle causé dans le lac de Maga ? Une telle question implique une
« évaluation des stocks »46 de la
pêcherie. Ce chapitre analyse d'abord les renseignements biologiques et
statistiques des ressources halieutiques exploitées afin
d'établir les variations de l'abondance des stocks halieutiques sous
l'effet de la pêche et, dans la mesure du possible, de prédire les
tendances futures de l'abondance des ressources. Ensuite, on s'insistera sur la
situation de leur environnement avant d'aborder l'impact socioéconomique
de cette surexploitation.
3.1. IMPACTS DES PÊCHES SUR LES RESSOURCES
HALIEUTIQUES
Le lac de Maga n'est pas, à ce jour, parvenu à
se doter des instruments techniques et d'une expertise nécessaire
à une évaluation de son stock biologique. Car, s'agissant de
l'évaluation de l'abondance des stocks par méthodes
indirectes47 employées dans cette recherche (ces
dernières reposent sur l'analyse de séries temporelles de
captures et des paramètres de l'exploitation), les données
disponibles sont limitées à des espèces dans le temps et
dans l'espace.
3.1.1. La structure des ressources exploitées
Cette partie rassemble, les niveaux de connaissances de
l'habitat, du cycle biologique, du comportement des espèces et les
mutations de leur écosystème pour déterminer les impacts
sur les structures des captures.
46 Cette opération se fonde sur des prospections des
ressources, la connaissance de l'habitat, du cycle biologique et du
comportement de l'espèce, l'emploi d'indices environnementaux pour
déterminer les impacts sur les stocks et les statistiques des captures
puis définir les conditions présentes d'une pêcherie et son
avenir probable.
47 Un cas particulier de méthode directe est
l'estimation de l'abondance des géniteurs à partir de la
quantité d'oeufs pondus, (estimée par échantillonnage de
l'ichtyoplancton), et la fécondité des femelles.
111
3.1.1.1. La carence des renseignements biologiques
Le fonctionnement des écosystèmes aquatiques
reste encore faiblement connu (FAQ, 2015) et celui du lac de Maga
n'est pas en marge de ces observations. L' étude la plus connue, faite
à ce sujet est celle dont les résultats sont d'ailleurs
classés secrets au CACP de Maga. Elle date de 1998 et a
été réalisée de concert par la FAO et la SEMRY. Les
bribes de connaissances rendues publiques à ce sujet attestent que, la
création du barrage a provoqué de grands changements dans
l'éventail des ressources alimentaires présentes dans le lac
avant sa construction. Pour les producteurs, il a entrainé
l'établissement d'un phytoplancton abondant, la colonisation progressive
des yaerés par les plantes aquatiques fixées ou flottantes, mais
surtout l'établissement d'un abondant périphyton qui se
développe sur les troncs d'arbres immergés.
En ce qui concerne les invertébrés consommateurs
primaires, les changements les plus importants se sont traduits par
l'établissement d'une communauté zooplanctonique, mais surtout
par le développement explosif de certains insectes, dont les larves qui
vivent aux dépens du périphyton des troncs immergés. Il
s'agit surtout de l'Ephémeroptère Povilla adusta dont
les larves, nymphes et imagos (insectes) fournissent une nourriture très
abondante. La faune d'invertébrés proprement benthiques a subi
dans un premier temps une décroissance spectaculaire due sans doute aux
mauvaises conditions d'oxygénation. Devant ces ressources alimentaires
nouvelles, peu variées, mais extrêmement abondantes, les poissons
ont dû s'adapter. Les microphages et macrophages mangeurs de
végétaux comme Sarotherodon, Tilapia, Citharinus ont
trouvé de bonnes conditions d'alimentation. Les espèces à
très large spectre alimentaire déjà signalées
Alestes, Schilbeidae, Clupeidae, Hetorotis, vont exploiter la source
de nourriture qui leur convient le mieux. Ces espèces à large
spectre alimentaire sont les plus aptes à s'adapter à de
nouvelles conditions d'alimentation dans la retenue et sont aussi les plus
exploitées.
Connaissant les caractéristiques biologiques et
écosystémiques des ressources de la retenue, il est possible
d'estimer l'impact opéré par les prélèvements sur
leurs structures.
3.1.1.2. L'amenuisement des espèces
exploitées et l'appauvrissement de leur diversité biologique
Par structure des captures, on entend la taille des poissons,
la composition par espèces leur nombre, ainsi que le niveau trophique de
chaque espèce. Des variations dans la structure
112
des captures sont d'importants signaux d'une
non-durabilité de la pêcherie. La diminution de la taille des
espèces capturées est un indicateur de la baisse de l'abondance
relative du stock.
La retenue de Maga ne dispose pas de capacités
nationales en matière de recherche halieutique. La recherche dans ce lac
est de la responsabilité du CACP de Maga. Suivant les indications
reçues, il n'y aurait au sein de cette structure, aucun cadre
possédant des compétences en matière
d'océanographie, mais deux techniciens d'aquaculture davantage moins
spécialisés sur les questions relatives aux espèces
exploitées. Ainsi, dans cette pêcherie, les tâches
scientifiques de base du suivi de l'exploitation halieutique ne sont pas
remplies. L'administration en charge de la collecte des données sur les
captures se livre à une estimation grossière de l'effort de
pêche, sans semble-t-il, effectuer de tentatives d'extrapolation des
données collectées à l'ensemble des flottilles
utilisées.
Il n'existe aucune information sur la structure par taille ou
par âge des espèces capturées alors que cette donnée
permettrait de situer le niveau d'exploitation courant par rapport au potentiel
maximal. Seules quelques informations sur les prises accessoires des
différents métiers sont disponibles. On note en particulier que
les débarquements enregistrés n'intègrent que les
espèces cibles, et pas les prises d'autres poissons d'accompagnement. De
plus, les tonnages réels peuvent être de 5 à 10 fois
prééminentes à la quantité pesée à
bord.
Cependant, comme le soulignaient Laurec et Le Guen (1981),
aucune gestion ne peut se faire sans une connaissance aussi précise
que possible de l'état de la ressource et des possibilités
d'exploitation des différents stocks. Aussi, l'évaluation des
ressources halieutiques dans la retenue d'eau de Maga pose le problème
de la sincérité et la fiabilité de ces résultats,
tant en ce qui concerne la taille du stock, la composition des espèces
que leur localisation.
En se fiant à Heincke (1913) : « la
réduction du nombre de poissons de grande taille et l'augmentation de
ceux de petite taille dans les débarquements et la baisse correspondante
de la taille moyenne des ressources résultent directement de
l'intensification de la pêche ». Partant de là, cette
recherche a fait un rapprochement entre la composition par espèce des
débarquements annuels enregistrés à Maga par les agents de
la SEMRY II en 1986 (figure 22) et ceux réalisés, par le
CACP de Maga en 2015 (figure 23). L'examen de ces deux figures
confirme au moins deux hypothèses péjoratives.
Sarotherodon
10%
Heterotis
2%
Lates
1%
Clarias
3%
Bagrus
0%
Hydrocynus
0%
Tetraodon
0%
Gymnarchus
0%
Petites espèces
9%
Protopterus
0%
Mélange
84%
Synodontis
1%
Source : Données du
service des pêches SEMRY-II
Figure 22: Structures des débarquements
enregistrés en 1986 à Maga
Les petites espèces (3549 tonnes) sont
constituées par les Mormyrus, les alestes, les
Schilbe mystus etc. Quant aux mélanges de 29134 tonnes, au
moins 60% sont des tilapias nilotica. Certaines espèces comme le
protoptère, l'Hydrocynus ou les Bagrus (voir annexe 01)
n'apparaissent que faiblement.
Heterotis 14%
Clarias
Lates
25%
Bagrus 6%
Tilapia
48%
Source : Données du CACP
de Maga
113
Figure 23 : Structures des
débarquements enregistrés en 2015 à Maga
114
Les deux figures laissent des disparités
spécifiques notoires au niveau de leur composition biologique passant de
12 espèces à seulement 05 en espace 29 ans. Cet appauvrissement
de la structure biologique des ressources est consécutif à la
raréfaction des espèces les plus prisées. Les
espèces de petite taille, moins sollicitées sur le marché
sont laissées pour compte, négligées et n'apparaissent
plus dans les statistiques mensuelles des gestionnaires. D'autre part, il faut
ajouter qu'en plus de la raréfaction de certaines espèces ou
même de leur disparition systématique, la pêche conduit
aujourd'hui à la capture beaucoup trop importante des juvéniles.
Les débarquements sont majoritairement composés des poissons
immatures et parfois d'alevins (planche 08).
a
b
Coordonnées des prises de vues :
X=10° 49' 58» - y= 14° 57' 10» x=10°
49' 58»- y= 14° 57' 10»
Planche 8 : Structure des tilapias et Heterotis
débarqués en janvier et juin 2016.
À gauche (a) la structure des Tilapia Nilotica, une
espèce très présente dans la retenue, mais, toutes ces
dernières années capturées jeunes. Idem pour Heterotis
à droite (b) qui peut à l'âge adulte, excéder 20 kg.
Ces deux images montrent bien que les engins utilisés à ce jour
sur le lac excluent la notion de tailles minimales à respecter.
115
Malheureusement, cette pression exercée sur les
captures nobles ou alors préférées sur le marché
entraine en plus de la raréfaction de certaines espèces et la
diminution de la taille des captures, une baisse quantitative de leur abondance
générale.
3.1.2. L'effondrement des stocks des ressources
exploitées
Le diagnostic posé dans le cadre de cette recherche
permet d'appréhender l'effondrement des stocks à partir de deux
scénarios l'un, spécifique aux espèces les plus
prisées et l'autre plus large et général.
3.1.2.1. Évolutions des stocks des espèces
les plus prisées
L'appréciation de la situation d'un stock est
généralement exprimée en tant que stock
protégé, sous-exploité, intensivement exploité,
pleinement exploité, surexploité, appauvri, éteint ou
commercialement éteint (FAQ, 2015). Elle passe par un suivi
statistique des ressources prélevées et permet d'évaluer
le poids des prélèvements sur l'abondance relative de la
ressource dans une pêcherie. En fonction des statistiques disponibles et
des enquêtes menées dans le cadre de cette recherche, 05
espèces peuvent faire l'objet d'une analyse biologique prospective. Il
s'agit par ordre de degré d'importance relative, de Tilapia Sp.,
Lates niloticus, Heterotis niloticus, Glarias anguillaris et des Bagrus (annexe
01). Ces espèces représentent 80% des débarquements
déclarés quotidiennement à Maga et constituent pour leur
trivialité, leur abondance et leur valeur commerciale, la
prédilection des pêcheurs (tableau 12).
116
Tableau 72 : Types d'espèces
ciblées par engins et techniques de pêche utilisés
ENGINS ET TECHNIQUES DE PÊCHE
UTILISÉS
|
LES 05 PREMIÈRES ESPÈCES RECHERCHÉES
PAR ORDRE D'IMPORTANCE RELATIVE
|
Espèces de surface
|
Espèces benthiques
|
FILETS
|
Zagazaga
|
Tilapia, Alestes, Tetraodon, Petrocephalus, Labeo,
Hyperopisus, Mormyrus, Cilharinus, Schilbe, etc.
|
Malapterurus electricus,
Heterotis,
|
Taro
|
Toutes les espèces notamment Gymnarchus, Lates
niloticus, Tilapia, Heterotis niloticus, Gnathonemus, etc.
|
Protopterus annectens, Clarias anguillaris, etc.
|
Éperviers
|
Heterotis, Alestes, Bagrus,
Synodontis, Lates niloticus, Tilapia, Sarotherodon,
Polypterus, etc.
|
RAS
|
LIGNES
|
Kadra
|
Lates niloticus, Heterotis niloticus, Bagrus, Gymnarchus
niloticus, Hydrocyon forskalii, Tilapia etc.
|
Protopterus annectens, clarias
anguillaris et toutes autres espèces
benthiques
|
Wari
|
Lates niloticus, Hydrocyon, Heterotis, Bagrus, Gymnarchus,
Tilapia, etc.
|
Peut prendre accidentellement Clarias et Protopterus
annectens.
|
Ligne à main
|
Tilapia, Alestes, Hyperopisus, Hydrocyon, Citharinus,
chariensis, Mormyrus hasselquisti, etc.
|
Clarias anguillaris, Heterotis niloticus, Protopterus
annectens
|
NASSES
|
Ngura
|
Aucune espèce de surface n'est ciblée par ce type
d'engin
|
Protopterus annectens et Clarias anguillaris.
|
Source : Investigation de
terrain, Mars 2016.
Pour ces 05 espèces, la tendance générale
est à la baisse comme l'attestent ces données. La période
de référence prise en compte pour ces données par
espèce et par volume se situe entre 2011 et 2015.
117
? Le stock de Tilapias (carpes)
L'exploitation de Tilapias Sp. dans la retenue est
très ancienne puisque les premières captures substantielles
remontent à 1981. Les stocks sont en augmentation constante (figure
24) même si un signe de surexploitation a été
observé en 2015. Elles sont les seules espèces
considérées comme modérément exploitées,
mais dans une phase délicate. Les stocks semblent être
restés modérément exploités, grâce en
particulier à la diversité du régime alimentaire de cette
espèce et à un potentiel exploitable relativement important.
Aucune action immédiate n'est nécessaire pour les
préserver. Cependant, compte tenu de la baisse tendancielle
annoncée depuis 2014 (2092 à 229), il sera nécessaire de
mettre en place un suivi des ressources à l'avenir. Car, les stocks
pourraient être rapidement en déclin à cause de la pression
de pêche excessive dans le lac.
Quantités en tonnes
350
300
250
200
150
100
50
0
2011 2012 2013 2014 2015
Tilapia
Années
Source : Données du CACP de
Maga.
Figure 24 : Évolution de la
quantité des Tilapias Sp. pesées au CACP de Maga ? Le
stock de Lates niloticus (capitaines)
Les captures annuelles de Lates ont augmenté
régulièrement jusqu'en 2014, soutenues par une exploitation
relativement intense. Jusqu'à cette date, l'état des stocks a
été considéré comme satisfaisant et l'exploitation
est restée acceptable. Cependant, les stocks ont déjà
118
commencé à diminuer en 2015 (156 à 121
tonnes) alors que des pêches très importantes ont eu lieu pendant
quatre ans passés et possiblement durant les années
antérieures (figure 25).
Quantités en tonnes
180
160
140
120
100
40
80
60
20
0
2011 2012 2013 2014 2015
130
142
Lates niloticus
Années
156
151
121
Source : Données du CACP
de Maga.
Figure 25 : Évolution de la
quantité des Lates niloticus pesés au CACP de Maga
Il est donc probable que la tendance à la baisse des
débarquements se maintienne si la pression de pêche ne connait pas
des ajustements mélioratifs. C'est la preuve qu'ils ont atteint leurs
maximums et ne supportent plus l'intensité de pêche qui leur est
administrée actuellement. Une réduction des captures dans les
prochaines années est donc hautement souhaitable. Cette recommandation
est valable pour Heterotis.
? Le stock de Heterotis niloticus
(Kanga)
Les stocks des Kanga qui a augmenté jusqu'en 2012 ont
diminué de façon brutale sur la période 2012-2015
(figure 26). Les résultats montrent un épuisement
général des stocks après leur introduction dans le lac en
1980. Ils sont considérés comme lourdement exploités et
dans une phase critique. Ils sont capturés aujourd'hui très
jeunes et souffrent d'une
119
surexploitation de croissance48. Une nouvelle
diminution des stocks est à prévoir si la pêche est
poursuivie dans les mêmes conditions encore qu'aucun signe
d'amélioration n'a été observé durant ces 5
dernières années.
Quantités en tonnes
160
140
120
100
40
80
60
20
0
2011 2012 2013 2014 2015
123
138
Heterotis niloticus
Années
107
96
64
Source : Données du CACP
de Maga.
Figure 26 : Évolution de la
quantité des Heterotis niloticus pesés au CACP de
Maga
La réduction de l'intensité de pêche est
donc hautement recommandée. Les mesures à prendre doivent
être immédiates pour éviter un épuisement total des
stocks. Elles peuvent inclure une interdiction totale de la pêche de
cette espèce sur une certaine période indépendamment du
repos biologique traditionnellement observé pendant trois mois. Compte
tenu en particulier de leur régime alimentaire varié et peu
complexe (Heterotis est un omnivore), ils pourront facilement se
régénérer.
? Le stock de Clarias anguillaris
(silure)
L' « or noir de Maga » ou clarias anguillaris, fait
partie des espèces benthiques les moins rares à trouver dans les
débarquements. Le stock de cette espèce est resté constant
pendant des décennies (MINEPIA, 2014) à cause de leur
modus vivendi et de leur capacité
48 Jl y a surexploitation de croissance lorsque la pêche
exerce une pression trop forte sur les juvéniles. Dans le cas inverse
(la pêche exerce une pression trop forte sur les reproducteurs), c'est
une surexploitation de recrutement.
120
d'adaptation aux aléas confondus. Leur stock est en
décrépitude depuis 3 ans déjà (figure 27)
et fait suite à de longues années de
prélèvement durant lesquelles, l'effort des pêches
était considérable. La chute actuelle des débarquements
est inquiétante dans la mesure où, les tentatives de recrutement
sont vouées à l'échec par une pression excessive la
pêche palangrière très prospère sur la retenue.
Quantités en tonnes
40
60
50
30
20
10
0
2011 2012 2013 2014 2015
Années
51 52
49
Clarias anguillaris
46
35
Source : Données du CACP
de Maga.
Figure 27 : Évolution de la
quantité des Clarias pesés au CACP de Maga
Il faut signaler que les quantités enregistrées
auprès des gestionnaires sont erronées et ne représentent
qu'à peine 40% de la taille réelle des débarquements
d'après les déclarations du délégué en
charge de ce secteur à Maga. Quoi qu'on en dise, le stock de silure est
en effondrement et si on veut les protéger, on pourrait jouer sur
certains engins spécifiquement la palangre et les nasses maliennes en
réduisant leur utilisation régulière.
? Le stock de Bagrus (Machoiron)
Les stocks de Bagrus ont diminué de façon
drastique en 2015 (de 45 tonnes en 2014, on est descendu à 30 seulement
en 2015) après avoir connu une hausse rapide et croissante quatre ans
plus tôt (figure 28). Il semble que les stocks aient
été déjà diminués par des captures
importantes réalisées entre 1986 et 2010. Les années
suivantes pourraient être
121
marquées par une baisse substantielle, provoquant une
nouvelle diminution des ressources, en particulier chez les géniteurs.
C'est donc encore, une espèce menacée par le contexte actuel de
la pression de pêche. Les recommandations immédiates faites plus
haut par rapport au stock d'Heterotis tiennent encore ici.
Malgré tout, un suivi détaillé sera nécessaire
à l'avenir
Quantités en tonnes
45
40
50
35
30
25
20
15
10
5
0
2011 2012 2013 2014 2015
13
23
Bagrus
Années
34
45
30
Source : Données du CACP
de Maga.
Figure 28 : Évolution de la
quantité des Bagrus pesée au CACP de Maga
Cette évaluation des ressources basée sur leurs
structures et la dynamique des captures montre que les cinq espèces
concernées par l'étude sont toutes, à des degrés
variables, en effondrement à cause d'une augmentation turbulente de la
pression de pêche (figure 29).
Débarquements en tonnes
300
250
200
150
100
50
0
2011 2012 2013 2014 2015
Tilapia
|
190
|
209
|
235
|
292
|
229
|
Lates
|
130
|
142
|
151
|
156
|
121
|
Bagrus
|
13
|
23
|
34
|
45
|
30
|
Clarias
|
51
|
52
|
49
|
46
|
35
|
Heterotis
|
123
|
138
|
107
|
96
|
64
|
Matrice des données
122
Source : Données du CACP
de Maga.
Figure 29 : Synthèse de
l'évaluation des stocks
On peut en déduire que la pêche a conduit
progressivement à l'effondrement de la plupart des stocks des ressources
exploitées dans le lac et le diagnostic posé à partir des
05 espèces les plus capturées à Maga le confirme. La plus
menacée est l'Heterotis niloticus, viennent ensuite les Clarias et les
Bagrus, qui sont dans des situations critiques. Les Tilapia sont
également en danger du point de vue biologique, mais se portent
nettement mieux que les espèces précédentes.
Bien que l'absence de données par rapport à la
structure par âge et par taille des captures ne permette pas de
procéder à une évaluation biologique complète des
ressources, l'évolution de la quantité des rendements par
pêcheur est assez éloquente pour s'en convaincre visiblement.
L'hypothèse d'effondrement des stocks est donc vérifiée si
les CPUE s'avèrent en étiolement.
123
3.1.2.2. La baisse drastique des CPUE
Le CPUE est un indicateur de rendement de l'activité
pêche qui informe notamment sur la densité du stock
exploité. Il est défini par la capture mesurée en nombre
ou en poids de poissons pêchés par un engin particulier en un
temps donné (FAQ, 2014). En pêche artisanale où,
les unités de pêche sont rarement descriptibles, les captures par
engins quasiment absentes et le temps de pêche médiocrement connu,
une possibilité s'offre à cette recherche : les rendements par
pêcheur en kg/an.
Suivant cette formule, cette recherche a analysé
l'évolution de cet indicateur sur les 14 dernières années
en compilant les données du CACP et celles de la DAEPIA de Maga. Le
résultat de cette analyse présenté dans la figure
ci-dessous (figure 30) est très éloquent.
Quantités en Kg
400
800
700
600
500
300
200
100
0
2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015
731
428
290
430
Années
324
177 154 152
Source : Données de la
DAEPIA de Maga
Figure 30 : Évolution des rendements de
la pêche à Maga de 2001 à 2015.
L'analyse de l'évolution des indices d'abondance des
ressources exploitées indique la forte diminution des captures par
unité de pêche consécutive à un effondrement des
stocks disponibles. En 1986, il était de 1225 kg/pêcheur. Entre
2001 et 2015, le rendement par pêcheur chuté de 86 % quittant de
727 kg/pêcheur à 152 kg/pêcheur en 2015. D'autre part, elle
indique la situation actuelle de la pêche en crise dont la tentative de
réorganisation des pêcheurs pour la surmonter plombe encore
l'avenir de cette activité.
124
Donc, en l'espace de 3,5 décennies, des ressources
qu'on pensait inépuisables ont été poussées au bord
de l'effondrement par une surpêche qui prélève plus de 2000
tonnes de poissons par an dans une retenue où on ne devait guère
excéder 1500T/an. L'effondrement brutal et irréversible des
ressources halieutiques n'est plus une hypothèse fantaisiste d'autant
plus que l'écosystème altéré porte au
désespoir.
3.2. IMPACTS DE LA PÊCHE SUR
L'ÉCOSYSTÈME LACUSTRE
Toute réflexion sur ce que peut être un
développement durable pose inévitablement la problématique
de l'avenir de la retenue, où converge l'essentiel des enjeux
écologiques liés au développement de la pêche. Cette
problématique devient particulièrement cruciale dans le contexte
actuel où la paupérisation galopante des populations locales
majoritairement composées des pêcheurs peut les induire à
entretenir des comportements néfastes pour l'environnement, ou
empêcher des pratiques favorables à l'écologie au
détriment des intérêts économiques immédiats.
Étant donné que l'équilibre interne de la retenue est
lié à son environnement par le biais d'une pléthore
d'éléments qui fonctionnent tel un système, la recherche a
analysé les conséquences écosystémiques de la
pêche artisanale lacustre à deux niveaux : interne et externe.
3.2.1. Le dysfonctionnement de l'écosystème
interne de la retenue
Les écosystèmes aquatiques sont très
fragiles et leur fonctionnement moins étudié. La moindre
agression extérieure à l'instar de l'accumulation des engins dans
la retenue ou la dégradation de la végétation et à
l'origine de sérieux dommages parfois irréversibles. Il peut
s'agir le plus souvent d'une pollution aquatique ou d'une destruction
floristique qui met à rude épreuve l'habitat benthique.
3.2.1.1. La pollution aquatique
L'augmentation substantielle du nombre d'engins de pêche
s'accompagne d'une saturation de la pêcherie par les engins
abandonnés, oubliés, perdus ou rejetés. Ceux-ci
peuvent pendant longtemps, continuer de capturer des poissons sans que personne
ne les ramasse surtout si l'EAPR était encore efficace lors de son
abandon. Ces captures, Corlay les appelle « captures fantômes
» (photo 19). Selon la cogestion, la principale contrainte en ce qui
concerne ces techniques de pêche est en effet l'utilisation des filets
mono filaments. Ces filets sont souvent perdus dans l'eau, et continuent de
pêcher (pêche fantôme), entraînant la
putréfaction des poissons. Cette odeur pestilentielle
pollue les zones de pêche, et fait fuir les poissons vers des zones plus
propices à leur reproduction et développement. De ce fait, les
zones de pêche autour ne sont plus fonctionnelles.
|
|
Capture fantôme de Tilapia Aurea
|
|
125
Coordonnées de prise de vue : x= 10° 46' 50»
- y= 14° 55' 56»
Photo 19 : Activité d'Engin
Abandonné Perdu ou Rejeté dans le lac vers Pidimier
À ce jour, jamais une opération visant
à limiter ou extraire ces engins de la retenue n'a eu lieu. Pour la
CBLT, il y aurait plus de 20 engins du genre dans le lac par km2. Ce
qui pourrait réaliser près de 10% des captures actuelles. Ces
captures pourrissent dans la retenue est putréfient les zones de
pêche concernées. D'où, la migration des poissons vers
d'autres lieux indemnes, sains, propres et vivifiants.
Malheureusement, ces endroits sains deviennent de moins en
moins rares à l'échelle du lac. Car, l'usage de certains produits
chimiques à l'instar du tramadol, ou d'autres pesticides,
génère des situations encore plus complexes. Ils paralysent
pendant de longues heures les poissons et toutes autres espèces qui se
noient puis meurent dans la zone d'impact
126
du produit. Les pêcheurs font recours de plus en plus
à ces polluants associables aux engins actifs.
3.2.2.2. La destruction de la flore lacustre et de
l'habitat benthique
Le danger dont il est question ici concerne d'abord la
végétation lacustre. En fait, afin de protéger leurs
captures pendant les longues durées d'activités contre un soleil
particulièrement agressif sinon caniculaire à compter du mois de
mars jusqu'en mai, les pêcheurs artisans cueillent ou arrachent les
plantes aquatiques dans l'eau, et recouvrent leurs captures avant
débarquement (photo 20).
Feuilles d'Aponogeton subconjugatus
Coordonnées de prise de vue : x=10° 49' 57»-
y=14° 57'09»
Photo 20 : Feuilles d'Aponogeton
subconjugatus protégeant les captures
Cette opération qu'ils jugent moins couteuse est une
tradition aussi vieille que la pratique de la pêche. Elle évolue
à l'aune des activités de pêche et croit aussi vite que le
nombre de pêcheurs. On estime que la quasi-totalité des
pêcheurs dans le lac ont recours à ces plantes pour conserver leur
butin. Sur les 100 pêcheurs interrogés, 90 sont mêlés
à cette pratique. Les plantes qui souffrent le plus sont malheureusement
les espèces d'Aponogeton subconjugatus et Hygrophila
sp. dont, l'importance est connue (conf. Chapitre 01). Ces
deux
127
espèces subissent à elles seules 98 % des
actions néfastes et les Aponogetons sont de loin les plus
utilisées à 71 % des cas (figure 31).
Hygrophila Sp.
16%
Autres
10%
RAS
10%
Aponogeton subconjugatus
64%
Source : Enquête de terrain,
Mars 2015.
Figure 31 : Proportion des plantes aquatiques
utilisées pour couvrir les captures
D'autre part, à côté des plantes
aquatiques qui se dégradent sous l'effet de la pression des
pêcheurs, figurent aussi les zones de pêche. D'après la
position des lieux de pêche, les pêcheurs opèrent au centre
du lac. Ils fréquentent en général les mêmes
endroits, ce qui peut endommager le fond du lac et mettre en péril la
vie des poissons phytoplanctophages. Une telle situation rompt carrément
l'équilibre écosystémique du lac et introduit de
sérieux déséquilibres dans la chaîne alimentaire
lacustre en général. Le passage répétitif de filets
éperviers aux bords desquels sont accrochées des plombs de 10
à 200 g (photo 21) gratte le fond de la retenue et arrache
algues et planctons dont l'importance est avérée.
128
Coordonnées de prise de vue : x= 10° 49'
58» - y= 14° 57' 10»
Photo 21: Extrémités
inférieures d'un filet épervier utilisé dans le lac de
Maga
Une réglementation sur les lieux de pêche
s'avère nécessaire pour réduire les dommages
écosystémiques de cette pratique.
3.2.2. Les conséquences sur l'environnement externe
de la retenue
Les activités de pêche sont responsables de la
rupture des ouvrages géotechniques qui soutiennent la retenue, les
établissements des pêcheurs se développent aux
dépens de la végétation côtière et les
emballages plastiques rejetés envahissent les zones de
débarquements.
3.2.2.1. La dégradation de l'environnement du lac et
de la végétation côtière
La pression que subissent les zones d'usage de pêche,
mieux les sites de débarquements des pêcheurs se traduit par une
rupture des infrastructures annexes de la retenue. Parmi celles-ci, la
digue-barrage de Pouss-Maga-Guirvidig est la plus menacée. Elle sert
d'espace marchand pour les produits halieutiques capturés de part et
d'autre dans le Lac. Les mareyeurs et transformateurs se tiennent là,
chaque jour debout ou assis pendant de
129
longues heures pour attendre l'arrivée des
pêcheurs (planche 9 à gauche). Dans leur va-et-vient, ils
font détacher en bloc les morceaux de terre qui soutiennent le barrage
(planche 11 à droite).
a
b
Coordonnées des prises de vues :
X=10.832842 - y= 14.950482 date : le 18/10/15 à 09 :
51 : 39 Planche 9 : Destruction de la digue barrage de
Maga
Les détachements en blocs des morceaux de terre qui
constituent la digue (b) sont une conséquence directe du stationnement
inadéquat des marchands le long de ce barrage (a) qui, fatigué
par le poids de l'âge, cède facilement. Aucun aménagement
de bord n'a été fait pour permettre aux mareyeurs d'attendre dans
la plus grande quiétude, les pêcheurs une fois sortis de l'eau.
C'est aujourd'hui un sérieux handicap pour l'organisation et la gestion
de l'activité de pêche à Maga.
3.2.2.2. La pollution des zones de débarquements par
les emballages plastiques et les objets divers
L'enquête réalisée auprès de 100
pêcheurs a mené au constat selon lequel, les zones
fréquentées par les pêcheurs dans la retenue sont
infestées par plusieurs polluants qui vont des emballages plastiques (10
%) aux objets divers (18%) en passant par les pirogues usées (3%),
130
mais surtout, par les engins rejetés (69%) dont les
conséquences sur l'écosystème sont de
notoriété publique (figure 32).
Autres
18%
Emballages plastiques
10% Pirogues usées
3%
Rejets des filets
69%
Source : Enquête de
terrain, Mars 2016.
Figure 32: Types de polluants
identifiés dans les zones de pêche du lac de Maga
D'autre part, les emballages plastiques non
biodégradables rejetés tout autour des nourriceries (photo
22) ont pour conséquences de saturer et de défaire la
fixation des oeufs de poisson. Ce qui contribue à accroitre la carence
en alevin et justifie la baisse de la production. En fait, ceux-ci ne
permettent pas cette opération à cause de leur texture poreuse et
artificielle. Ils sont rejetés après usage dans le lac par les
pêcheurs, mais aussi dans tous les sites de débarquement autour de
la digue.
131
Coordonnées de prise de vue : x=10° 47'
35» - y= 14° 55' 52»
Photo 22 : Dispersion d'emballages plastiques
au tour de la digue à Maga
Aucun bac à ordure ne s'y trouve et aucune mesure n'a
été prise pour pallier à ce problème. Ces
emballages se retrouvent partout dans les zones de débarquements proches
de la digue. Cependant, la zone de frayère s'étend de la digue
jusqu'à 200 m vers l'intérieur. Ces zones qui constituent les
nourriceries et les réserves biologiques accueillent de ce fait une
quantité importante de ces polluants qui ne leur permettent plus de
jouer leur rôle efficacement.
S'il est admis que l'échec de la gestion des
pêches se traduit par des conséquences à quatre niveaux :
biologique, écologique, économique et sociale (Cochrane,
2000), Cury et Cayré (2001) ajoutent une cinquième dimension
relative à la perception négative de l'activité de
pêche pouvant exister aujourd'hui. Ces aspects constituent les centres
d'intérêts de la troisième partie qui suit.
3.3. LES CONSÉQUENCES SOCIO-ÉCONOMIQUES DE LA
SURPÊCHE
Les ressources ayant été amenuisées par
des prélèvements indélicats, les pêcheurs doivent de
temps en temps modifier leurs techniques de pêche afin de garder leur
efficacité.
132
Malheureusement, à cette incertitude technique s'ajoute
la chute des rendements par tête qui dégrade l'emploi et
génère des conflits.
3.3.1. Les incertitudes techniques et économiques
professionnelles
À l'échelle mondiale, la pêche artisanale
est de plus en plus reconnue comme faisant partie intégrante de la
croissance (FAQ, 2014)49. Mais, la pêche est
aujourd'hui à un tournant de son histoire et celle pratiquée dans
le lac de Maga n'est pas en reste. Les évolutions incessantes des
techniques de pêche d'une part et de l'autre, la baisse des rendements
par tête, participent de ce mauvais tournant de la pêche qui
inquiète pas moins d'une personne.
3.3.1.1. La précarisation des techniques de
pêche
Les techniques de pêche ont beaucoup
évolué sur la retenue d'eau de Maga. Depuis ces trois
dernières décennies, on a constaté l'introduction et le
développement de nouvelles techniques plus performantes à cause
de la raréfaction des ressources. Ces nouvelles techniques de
pêche à l'image de la senne tournante (128), le filet dormant en
nylon (8738) et la palangre appâtée ou Wari (16580) ont
relégué d'autres instruments de pêche comme les sennes de
plage (sennes à bâton) et les nasses qui ne sont plus
utilisées que temporairement dans l'arrondissement de Maga (sennes
à bâton) et à Kaï-Kaï (nasses traditionnelles).
Les Goura, quasi absents en 1986 sont devenus omniprésents dans le lac
avec un total de 15960 engins soit un taux de représentativité
général de 32,2 %.
Certaines techniques de pêche existantes ont
été transformées ou bonifiées parce que
l'espèce ciblée a fortement diminué ou changée de
taille. Les filets dormants de surface à plusieurs filaments ne sont
pratiquement plus utilisés à Maga, à cause de leur
inefficacité devant l'espèce cible (Tilapia nilotica, Alestes
dentex, Labeo sp., etc.). Ils ont changé de formes pour donner
naissance aux filets maillants de fonds visant plutôt les espèces
benthiques (Synodontis, Glarias, Protopterus annectens). Il y a aussi
la stratégie et la technique concernant les lignes diurnes
pratiquées en majorité par les pêcheurs migrants vers les
années 1980 à Maga où ils venaient en campagne. Ils
partaient dans le lac très tôt et ne revenaient que tard dans la
nuit avec comme espèces ciblées : Alestes dentex,
tilapia sp., etc. Maintenant les stratégies de pêche ont
beaucoup changé, on part le matin pour y passer la nuit.
49 Ce secteur constitue pour plusieurs pays tels la
Norvège, l'Islande, le Pérou, etc., une source très
importante d'entrée des devises. En Islande, par exemple, c'est elle qui
a permis au pays de passer de la pauvreté à la richesse au cours
du XXe siècle (Bogason, 2007).
133
Parmi les techniques qui ont perdu de leur importance avec la
rareté de la ressource, on peut citer les sennes de plage, le zagazaga
alors qu'autrefois la côte était très poissonneuse et
idéale pour leur pratique. Avec les sennes tournantes ou Taro, on
constate une surexploitation de beaucoup d'espèces capturées et
ce sont surtout les espèces nobles (Lates niloticus, Gymnarchus,
etc.) qui ont tendance à régresser (photo 23).
Coordonnées de prise de vue : x= 10° 49'
58» y=14°57' 10» Photo 23 :
Débarquement mixte d'un Taro au lieudit Pont II (Maga).
On peut quantifier la pêche artisanale à partir
des unités de pêche. Dans ce cas, on peut dire que la ressource a
diminué, mais le constat le plus important est la réduction du
maillage des filets (planche 10) qui excluent désormais la
notion de sélectivité et peuvent prendre jusqu'aux
juvéniles d'une part et d'autre part, les mono filaments invisibles qui
suppriment toute possibilité d'évitement50 des
ressources.
50 L'évitement est le principe des sciences
halieutiques au nom duquel, il faut utiliser les engins visibles par les
poissons pour leurs permettre d'éviter certains pièges dans
l'eau.
a b
134
Cliché : Toussoumna,
Février 2016.
Planche 10 : Filets mono et multi filaments
à un doigt.
On peut voir que, les engins de mailles comprises entre 4 et 5
doigts (grosses mailles) représentaient 60 à 70 % du total des
engins utilisés sur le lac en 1986 (Seignobos, 1986) alors
qu'aujourd'hui, ils n'en sont plus qu'à 34,7 % (tableau 13). Ce
constat est malheureusement valable pour tout type d'engin, même les
taros. Ceux des pêcheurs ayant gardé cette proportion
recommandée (3 à 4 doigts), préfèrent utiliser les
mono filaments qui soustraient aux ressources l'évitement et sont par
conséquent plus performants.
Tableau 83 : Taux d'utilisation du zagazaga en
fonction des mailles (2016)
Mailles
|
1 doigt
|
2 doigts
|
3 doigts
|
4 doigts
|
5 doigts
|
10doigts
|
Autres
|
pourcentage
|
13,40%
|
49,80%
|
24,70%
|
10%
|
0,2%
|
0%
|
1,9%
|
Source : Enquête de terrain,
juin 2016.
Cette situation a inoculé une reconversion des
pêcheurs vers d'autres techniques. Si en 1986, la plupart des
pêcheurs pratiquaient le zagazaga, aujourd'hui, cette technique est
à la traine et presque aucune autre pratique n'est
négligée (tableau 14). Par ailleurs, afin de maximiser
le rendement, les pêcheurs associent plusieurs techniques
concomitamment.
135
Tableau 94 : Nombre de pêcheurs par
techniques de pêche en 2016
filets
|
zagazaga
|
Wari
|
kadra
|
éperviers
|
Goura
|
taro
|
Nombre
|
32
|
89
|
73
|
77
|
69
|
96
|
Source : Enquête de terrain,
juin 2016.
La multiplication des filets, la diminution de la grosseur de
leurs mailles et l'apparition d'autres techniques plus performantes permettent
aux pêcheurs de réaliser d'importantes quantités de prises,
quelles que soient leurs structures ou leurs tailles. La structure actuelle de
la totalité des engins utilisés dans le lac de Maga obéit
à cette logique (Supra 2.1.2.2.).
Tout ceci, traduit une nette évolution dans les
méthodes de captures à la recherche de performance. Cette
condition cause un grand tort aux pêcheurs d'autant plus que les
matériels utilisés sont onéreux et le rendement,
faible.
3.3.1.2. La baisse des revenus des pêcheurs
Au cours des trois dernières décennies, un
énorme fossé s'est creusé entre les avantages
économiques potentiels de la pêche lacustre et leurs avantages
économiques réels. La production est en hausse constante soutenue
par l'effort de pêche et l'efficacité des engins. Cependant, le
rendement par pêcheur ne suit pas la même allure. Par rapport au
rendement de 1986, un déficit de production de 75000 tonnes de
débarquement est à envisager. En d'autres termes, chaque
année passée, les rendements chutaient d'au moins 30% pour
n'être que de moins de 300 kg/pêcheur/an en 2015(figure
33).
Quantités
400
900
800
700
600
500
300
200
100
0
2000 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012
2013 2014 2015
Captures (T) CPUE(kg)
136
Source : Données du
CACP/Maga, Février 2015.
Figure 33 : Évolutions synchroniques
des débarquements et des CPUE de 2000 à 2015.
Dans un rapport spécial déposé à
la DDEPIA/Yagoua en décembre 2014 par Gnenone Dari
(DAEPIA/Tékélé) sur le développement actuel de la
pêche dans sa zone de compétence, on peut lire ceci : «
la situation économique des pêcheurs varie d'une année
à une autre selon la situation des captures. Toutefois, elle est
précaire. Les pêcheurs sont obligés d'ajouter l'agriculture
à leur activité » pour s'en sortir.
L'agriculture est la plus importante de ces activités
complémentaires avec un taux de représentativité de 39 %.
Quatre-vingt-quinze pour cent (95 %) des pêcheurs la pratiquent. La part
des autres activités n'en est pas moindre (voir figure 34) :
maçonnerie 22%, commerce 17%, conducteur de pirogue 9%, construction de
pirogue 6%. Cependant, la pêche semble incompatible avec l'élevage
qui ne représente 3% de cette liste. Le lien entre l'agriculture et la
pêche est très étroit. L'élevage n'apparait que
faiblement alors que la part des activités liées au lac est sans
cesse grandissante. L'importance de la maçonnerie est liée
à la juvénilité des pêcheurs.
Construction de pirogues
6%
Couture
4%
Conducteur de pirogues
9%
Maçonnerie
22%
Elevage
3%
Commerce
17%
Agriculture
39%
137
Source : Enquête de terrain,
Février 2016.
Figure 34 : Proportions des activités
secondaires pratiquées par les pêcheurs.
C'est dire que la baisse des rendements fait en sorte
qu'aujourd'hui, les rendements issus de la pêche artisanale lacustre
soient des « avoirs non productifs »51. Du fait
que le même rapport indique que le revenu annuel d'un pêcheur est
de 900 000 FCFA alors que les dépenses s'élèvent à
700 000 FCFA soit un rendement de 200 000 FCFA après 9 mois de travail
ardu pour gérer une famille d'au moins 10 personnes : c'est une
véritable gageure. Car même pendant les mois d'intenses
activités, les rendements ne sont pas satisfaisants (tableau
15).
51 Selon le rapport rédigé conjointement par la
Banque mondiale et la FAO, sous le titre The Sunken Billions, les ressources
mondiales exploitées par les pêches de capture sont des avoirs non
productifs, dont le rendement est nul et qui, selon les estimations,
coûteraient même à l'économie mondiale 50 milliards
de dollars EU par an comme manque à gagner
138
Tableau 105 : Moyenne des rendements
journaliers par engins de pêche au lac Maga
|
Zagazaga
|
Kadra
|
Wari
|
Nasses
|
Taro
|
Ligne à main
|
Nombre de poissons
|
9
|
5
|
7
|
5
|
700
|
3
|
Quantité en kg
|
0,9
|
0,5
|
0,7
|
0,5
|
70
|
0,3
|
Valeur en FCFA
|
720
|
400
|
560
|
400
|
56000
|
240
|
Source : Enquête de
terrain, Juin 2016.
Cette situation ne s'est jamais améliorée
pendant les 5 dernières années et le rythme est plutôt
inquiétant. Les pêcheurs interrogés regrettent le
passé glorieux de la pêche et peu d'entre eux (11 %) sont
disposés à voir leurs enfants suivre leur trace. D'ailleurs 53 %
des pêcheurs interrogés trouvent ce métier pénible,
40 % le trouvent non rentable alors que 37 % d'entre eux voudraient changer de
métier. Ils souhaitent que leurs progénitures deviennent des
fonctionnaires (85 %), des médecins (3%), des commerçants (3%),
des agriculteurs (5%) ou tout autre métier plus
rémunérateur (5%).
Ceci sous-entend que la pérennité de ce secteur
est mise en jeu et les pêcheurs, très frustrés.
D'où, le développement d'une forme de pêche non
organisée et par conséquent difficile à être
enregistrée par les gestionnaires.
3.3.2. Des difficultés sociales dues à la
surpêche
Les ressources devenues rares, le rendement insignifiant
malgré l'usage d'engins performants, les pêcheurs,
décontenancés, s'emparent des ressources de la retenue aussi bien
par voie légale que par l'inverse. Deux scénarios s'observent
à savoir : déploiement insaisissable de la pêche illicite
et la naissance des conflits variés.
139
3.3.2.1. L'implacable déploiement de la pêche
illicite
La pêche illégale, non déclarée et
non réglementée (PINDNR) est considérée comme l'un
des principaux facteurs mettant la durabilité des pêcheries
à rude épreuve (Ekouala, 2013). À en croire un
rapport publié en fin mars 2014 par la DAEPIA/Maga, le lac de Maga est
devenu, ces dernières années, une cible privilégiée
des « braconniers de mer » du fait des pêcheurs qui
ont maille à partir avec la réglementation des pêches en
vigueur. La pêche illicite est différente de la violation des
textes de base sur la pêche. Elle va de l'infraction à la
réglementation (pêche en dehors de la saison ou de la zone
autorisée, utilisation de techniques de pêche destructrices...) au
pillage pur et simple pratiqué par les pêcheurs sans permis. Le
butin est souvent transbordé sur des pirogues, mélangé
à des prises légales puis débarqué et vendu dans
des lieux légaux comme Gamack, Pont II, Pont Vrick.
Selon les chefs des services de contrôle des
pêches, les hors-la-loi ciblent essentiellement des espèces
à forte valeur ajoutée (Lates, Gymnarchus, Bagrus etc. voir
annexe 1) et emploient des techniques particulièrement
destructrices, comme les palangres de fond, la pêche à
l'épervier, les taros. La pêche pirate prive de ce fait, les
pêcheurs locaux de leurs ressources en raclant tout sur leur passage et
compromet le renouvellement des ressources. La pêche illégale est
une menace pour la biodiversité lacustre, surtout à Maga
où se trouve la totalité de la zone de frayère dont
l'accès est interdit aux pêcheurs. Dans les deux arrondissements
qui jouxtent le lac, cette pêche illégale concerne aussi bien les
autochtones que les étrangers. Pendant la période de repos
biologique (juillet-septembre), 74 % des pêcheurs autochtones
résidants au tour du lac continuent aisément de pêcher dans
la nuit (70%) au centre du lac (90%) et parfois même proche de la digue
(03%) comme l'indique la figue 35.
pêcheurs non actifs
24%
non declaré
2%
pêcheurs actifs
74%
140
Source : Enquête de terrain,
Mars 2016.
Figure 35: Activités des pêcheurs
autochtones pendant le repos biologique
Ainsi, si la pêche illicite, inhérente à
la pression démographique participe d'une manière ou d'une autre
non seulement à accroitre la pression de pêche mais, elle tend
déjà à faire de la retenue, un environnement
crisogène où des personnes s'affrontent quotidiennement.
3.3.2.2. Les conflits multiformes occasionnés par la
pêche
Les conflits générés par la pêche
artisanale lacustre à Maga sont nombreux et variés. Mais ils
prennent tous racine dans cette sorte de sous-emploi qui affecte les actifs de
ce secteur. On peut cependant les classer en trois types, suivant leur objet
:
? Les conflits de types 1 : pêcheurs -
pêcheurs
Les zones de pêche ainsi que le vol des captures ou de
filets sont la cause directe de la plupart des conflits qui divisent les
pêcheurs sur la retenue. La probabilité d'avoir accès
à une zone de pêche sur le lac est de 0,3. Dans cette chasse
effrénée du gain quotidien, les pêcheurs les moins chanceux
perdent l'équilibre. Ils arrivent parfois en retard (10%) quand les
premiers ont déjà fixé leurs filets (67%) ou
délimité leur zone de pêche (19%). Au moins 78 % des
pêcheurs interrogés sur cette question ont répondu avoir
déjà été victimes de pareilles déconvenues.
Pour ne pas rentrer bredouille, certains pêcheurs véreux
assiègent la zone de frayère (200 m de la digue) où la
pêche est interdite, d'autres par contre volent les poissons
141
capturés par les engins d'autres pêcheurs absents
ou alors déplacent la position des filets antérieurs pour se
frayer une pêcherie si petite soit-elle. En 2014, 17 cas ont
été déclarés auprès du Lawane de Maga, 11
à Pouss et 13 à Kaï-kaï. Ils concernent à 73 %
les zones de pêche. D'autres conflits opposent les pêcheurs
migrants et les pêcheurs autochtones.
En effet, les populations riveraines (Muzgum, Massa), qui
étaient traditionnellement pêcheuses, accusent une disparition de
leur vocation halieutique, due à la communauté des venants qui,
selon eux, ne respectent aucunement les normes réglementaires en rapport
aux techniques de pêche et au maillage de filets. D'où,
l'altération latente des relations entre autochtones et
allogènes.
? Les conflits de types 2 : pêcheurs -
gestionnaires
Les conflits qui opposent les gestionnaires aux pêcheurs
tirent leurs sources de la pêche illicite et des abus des gestionnaires
vis-à-vis des pêcheurs. Les infractions concernent principalement
l'usage d'engins prohibés et la violation du repos biologique. Le
problème est exacerbé par les pêcheurs qui
pénètrent dans les zones de frayères
délimitées pour protéger les alevins, les espèces
menacées ou pour assurer leur croissance. Ces infractions sont
très fréquentes et la plupart du temps ne font pas l'objet de
poursuites, du fait de la rareté des moyens d'intervention. Face
à des pêcheurs quasiment analphabètes (70%), le message des
gestionnaires a du mal à passer.
Il arrive cependant que des contrevenants soient
arraisonnés, mais les pressions ou la complicité de certaines
hautes personnalités, gestionnaires ou cogestionnaires ne permettent pas
toujours de faire appliquer la loi. En 2014, 10 procès-verbaux ont
été établis à Maga. En fin d'exercice 2015,
seulement 52 permis de pêche ont été établis sur
plus de 6500 pêcheurs enregistrables. Plus de 751 engins ont
été saisis et parfois brulés, 650 pirogues ont
été barricadées au CACP de Maga (photo 24) et 22
pêcheurs ont reçu de procès-verbaux. Mais, la suite de ces
procès verbaux n'a pas été rendue publique.
142
Coordonnées de prise de vue :
x=10.837321-y=14.939440
Photo 24 : Pirogues saisies et
barricadées au CACP de Maga en mai 2015.
Par ailleurs, une analyse géopolitique du lac de Maga
permet de réaliser qu'il est une énorme pièce de
l'échiquier politique contemporain où il faut savoir situer le
dernier élément du puzzle afin de tirer le maximum de
bénéfice possible. Pêcheurs, mareyeurs, État, SEMRY,
autorités traditionnelles, les communes et ONG sont autant d'acteurs
géopolitiques lacustres qui s'affrontent à Maga.
- Le pêcheur voudrait à tout
prix maximiser ses prises sur des surfaces illimitées,
- Les mareyeurs veulent fidéliser les
pêcheurs qui leur livrent leurs captures,
- Les autorités traditionnelles tirent
leurs plats quotidiens des collectes effectuées auprès des
pêcheurs,
- Les communes de Maga et Kaï-kaï
prélèvent des taxes (1000Fcfa/pirogues) toutes les deux semaines
sur les pirogues en activité par pêcheurs,
- Une autre catégorie de taxes
très complexe est celle collectée aux militaires selon que besoin
se pose. Elle est de 1000FCFA/m sur chaque pirogue.
- La SEMRY doit son existence à la
vitalité du lac,
- L'État procède mensuellement
à des prélèvements d'impôts sur le revenu des
pêcheurs et veut en même temps y instaurer une pêche durable
et accroitre la production.
143
Certains d'entre ces acteurs abusent de ces taxes
auprès des pêcheurs et les conflits n'en finissent de naître
au point d'en générer qui puissent mettre deux gestionnaires
à couteaux tirés.
? Les conflits de type 3 : gestionnaires -
gestionnaires
Une autre forme de conflits encore amphigouriques est celle
qui oppose les gestionnaires entre eux. Ces conflits concernent surtout le
personnel du MINEPIA aux responsables de la cogestion. Un problème de
subordination se pose à ce niveau malgré le fait que la cogestion
soit sous tutelle des DAEPIA. La cogestion est accusée de laxisme et
parfois de complicité avec les pêcheurs alors même que
ceux-ci sont pointés du doigt pour leur austérité
belliqueuse à l'égard des pêcheurs. Il devient difficile de
séparer le bon grain de l'ivraie au sein de ces acteurs aux idées
très souvent asymétriques. Le moins qu'on puisse dire est que, le
comité de vigilance de la cogestion, essentiellement composé de
pêcheurs professionnels plus ou moins formés est une raison
suffisante pour que l'hypothèse d'une cogestion plus coupable soit
plausible.
L'exploitation artisanale des ressources halieutiques est un
facteur conflictogène dans la retenue d'eau de Maga. Elle a
dégradé les ressources halieutiques, altéré les
relations entre acteurs. Ces crises biologiques et écosystémiques
sont complétées par des problèmes économiques et
sociaux, dont la surcapacité de production, identifiée comme un
facteur clé des limites de la gestion actuelle des pêches.
Conclusion
L'impact des activités de pêche est bien
réel aussi bien sur les ressources que sur l'écosystème
dans la retenue de Maga. Malgré l'absence d'une réelle
étude d'évaluation de ces impacts, l'analyse des données
recueillies montre de profondes diminutions de l'abondance des ressources
halieutiques, a fortiori pour les 05 espèces étudiées,
très prisées pour leur valeur commerciale. Aussi, l'impact sur
les autres espèces et sur l'environnement est également à
relever : pollution aquatique, destruction des habitats benthiques, mort du
plancton, etc. Dus à l'usage des engins et techniques souvent peu
adaptés à une pêche responsable, ils se traduisent par de
nombreux phénomènes socio-économiques
désagréables qui vont de la pêche illicite aux conflits
divers via les incertitudes techniques multiples. Justifiant alors une
réaction de l'État.
144
CHAPITRE 4 : RÉACTIONS DES POUVOIRS PUBLICS ET
LEURS LIMITES
Introduction
Le chapitre précédent a montré que les
ressources naturelles renouvelables à l'instar des stocks de poissons
disparaissaient faute de gouvernance raisonnable dès que, la demande
effective pour un poisson particulier transcende la capacité biologique
du stock concerné. La plupart des ressources exploitées dans la
retenue sont en situation critique. En admettant qu'il soit possible de trouver
un rythme d'utilisation provoquant une diminution de leurs
disponibilités jusqu'à les annuler, la problématique de
gestion est donc de trouver un équilibre intertemporel en respectant
leurs contraintes bioécologiques et en intervenant, à l'aune du
possible, pour améliorer leurs reproductions (Faucheux et Noël,
1995). Cette préoccupation d'une pêche responsable constitue
le fondement de leur gouvernance. On est donc en droit de se demander : quelles
sont les mesures prises par l'État pour lutter contre la
dégradation des ressources halieutiques en cours dans le lac de Maga ?
Leur mise en oeuvre ne se heurte-t-elle pas à des sérieux
obstacles qui la rendent velléitaire ? Une réponse à ces
différentes interrogations implique qu'on s'attarde d'abord sur
l'élaboration des mesures au niveau national puis, qu'on insiste sur
l'importance des accords de cogestion signés en 2004. C'est alors qu'on
pourra analyser les limites de ces mesures.
4.1. L'ÉLABORATION DES MESURES AU NIVEAU
NATIONAL
Au point de vue institutionnel, le Ministère de
l'élevage, des pêches et des industries animales (MINEPIA) est
l'agence gouvernementale chargée des pêches au Cameroun. La
retenue d'eau de Maga fait partie des eaux continentales nationales sous
juridiction camerounaise. La stratégie gouvernementale de gestion des
ressources halieutiques comporte des restrictions géographiques et
saisonnières d'une part, et d'autre part, le contrôle du maillage
et de la production.
4.1.1. Les restrictions géographiques et
saisonnières
Elles visent la protection des ressources halieutiques et
comprennent la délimitation des zones de pêche, le repos
biologique et la protection des habitats sensibles.
145
4.1.1.1. La création d'une zone de
frayère
Elle va de Guirvidig à Pouss (30 km) et est
placée sous la responsabilité de deux postes de contrôle de
pêche à savoir : le CACP de Maga chargé du suivi de la zone
qui s'étend de Guirvidig à Maga au lieudit P2 (12 km) et le PCP
de Tékélé qui se charge de surveiller la partie qui va de
P2 à Pouss soit, un peu plus de 14 km. Sa largeur est de 200 m à
compter de la digue vers l'intérieur pour une superficie de 5,4
km2. Dans cette zone, la profondeur moyenne est de 5 m et peut par
endroit s'étendre à 8 m. Le plan d'eau y est permanent et les
crues régulières (figure 36). Elle est
considérée aujourd'hui comme une nourricerie préalablement
destinée à accueillir des alevins issus des
expérimentations scientifiques du CACP de Maga qui n'a jamais
fonctionné. Malgré tout, il est interdit d'y pêcher un
poisson, quel qu'il soit, toute l'année durant, sauf dérogation
spéciale faite par les autorités compétentes de Maga.
146
Figure 36 : Limites de la zone de
frayère sur la retenue d'eau de Maga
On déduit que les enjeux de la création d'une
zone frayère dans le lac de Maga sont multiples : environnemental
(protéger les habitats sensibles des poissons notamment les nurseries),
économique (réserver une quantité de ressource pour des
utilisations futures) et scientifique (aleviner le lac à travers les
expériences du CACP de Maga).
4.1.1.2. L'instauration d'une période de repos
biologique
En dehors de la zone de frayère s'étend la zone
de capture réglementaire. Cette zone est peu profonde (3 m en moyenne)
et s'assèche totalement ou par endroit selon les pentes en saison
d'extrême chaleur (dès le mois de février). Si la zone de
frayère est totalement sous l'administration de la DAEPIA/Maga du fait
de sa localisation, tel n'est pas le cas pour ce qui
147
est de la zone où la pêche est autorisée.
Car, la DAEPIA/Kaï-kaï contrôle la partie sud vouée
à une pêche qui ne s'effectue que temporairement. Un
contrôleur en charge de l'inspection des pêches s'occupe de la
question au PCP de Kaï-kaï.
Aucune restriction n'est faite aux pêcheurs en
règle. L'accès y est normalement conditionné par
l'acquisition d'un permis de pêche qui n'est cependant pas l'apanage de
tous. Ces derniers doivent quand même s'acquitter de leurs
taxes.52 Quoique mal appréhendé par les
pêcheurs, ceux-ci doivent observer par an, trois mois de repos biologique
pendant lesquels, on procède systématiquement à un
arrête total de toute activité de pêche sur la retenue.
Chaque année, un arrêté préfectoral fixe cette
période coutumière allant du 01er juillet au 30 septembre.
Donc, deux types de repos biologiques sont observés :
un repos biologique partial permanent (dans la zone de frayère) et
l'arrêt partiel de la pêche sur toute la retenue pendant 3 Mois.
4.1.2. Le contrôle du maillage et de la
production
Tout pêcheur doit utiliser les engins
réglementaires. Il s'agit des filets des grosses mailles de 3 à 5
doigts, des palangres avec hameçons de N°7 au N°13 ». Les
autres indications sont explicites dans le chapitre 4 de l'arrêté
du 01 août sur les modalités de protection des ressources
halieutiques (voir en annexe 5).
4.1.2.1. L'interdiction de certains engins et techniques de
pêche
Le contrôle du maillage des engins de pêche est un
axe d'approche prioritaire pour l'État dans le plan d'eau de Maga pour
juguler la dégradation de ses ressources. Cette volonté est
expressément formulée par arrêté
N°0002/MINEPIA du 01 août 2001 fixant les modalités de
protection des ressources halieutiques (annexe 5). Le chapitre 3 (de
l'interdiction de certains engins de pêche et méthodes de
pêche) y indique clairement les engins et techniques
autorisés. Au nom de cette disposition, les engins suivants sont
prohibés :
- Les sennes de plage
- Les éperviers
52 Taxes sur les pirogues : elle est fixée en fonction
de la longueur de la pirogue (1000f/m). Les pêcheurs et ou
détenteurs des pirogues (mareyeurs) s'acquittent de ce devoir presque
toutes les deux semaines auprès de la base navale en présence
à Maga. Une taxe est également à payer à la commune
par rapport à leur activité chaque mois. La détermination
du montant exacte de celle-ci reste encore floue. Toutefois, elle oscille
autour de 6 et 14 milles FCFA. D'autres taxes existent, mais de façon
irrégulière et parfois indescriptibles.
148
- Les nasses appâtées et
produits chimiques
- Les filets maillants dont la maille est
inférieure à 40 mm
- Tous les filets mono filaments
- Les filets encerclant, etc.
- La coupe des plantes aquatiques
En fait, l'usage de tous les engins « ACTIFS » est
interdit et l'arrêté
N°0026/MINEPIA/DIRPEC/DPIA/SPA du 11 avril 2000 portant
interdiction de certains
engins de pêche (annexe 06) s'attaque dans son
article 1er à quelques spécificités en cours
dans le lac de Maga. Entre autres :
- Les sennes de plage (taros)
- Les Éperviers
- Les nasses dites maliennes(Goura),
paniers, filets maillants et senne dont la maille
est inférieure à 30 mm (maille
étirée) ou 15mm (noeud à noeud).
- Les hameçons dont les
numéros sont supérieurs à 16.
Dans son article deux, le même arrêté indique
clairement que les contrevenants aux
dispositions de cet arrêté s'exposent aux sanctions
prévues par la réglementation en vigueur.
4.2.2.2. De la taille minimale des ressources
prélevées
Le contrôle de la production a lieu dans tous les sites
de débarquement de la retenue (supra chapitre 01, Carte 02). La
taille des principales espèces cibles a été fixée
par arrêté et inscrite dans le plan d'action gouvernemental
à travers la loi en vigueur afin de protéger les juvéniles
des prises dégradantes et lutter contre la surexploitation de
recrutement. Toutes les captures dont la taille est inférieure ou
égale à la grosseur des mailles réglementaires est
passible de punition et les responsables n'en risquent pas moins gros. En temps
normal, tout contrevenant est verbalisé par le contrôleur et
l'affaire, portée devant le juge en temps utile. Son matériel ou
son butin est saisi puis, le cas échéant restitué ou
détruit selon la décision. Les trois contrôleurs de
pêche s'en chargent, chacun dans sa zone de compétence à
examiner les captures. Cependant, parfois les pêcheurs sont
arraisonnés, mais le laxisme des gestionnaires laisse passer au prix
d'une négociation difficile à décortiquer.
Ces derniers temps, les mesures de gestion de la pêche
dans le lac de Maga ont connu une double évolution grâce à
la participation des pêcheurs à la définition desdites
mesures et à la signature de nouveaux textes relatifs à la
cogestion.
149
4.2. L'IMPORTANCE D'UNE COGESTION, BIEN QU'IMMATURE
L'importance de la gestion communautaire du lac de Maga se
révèle à travers la spécificité du contenue
des accords de cogestion et son mode opératoire.
4.2.1. La spécificité des clauses et
signataires de l'accord de gestion
La cogestion est spécifique tant par les acteurs
qu'elle a réunis lors des négociations que son organisation
efficace.
4.2.1.1. Les tractations d'un accord historique aux
objectifs ambitieux
Le constat fait au niveau de la baisse des captures et la
diminution de la taille de celles-ci ainsi que l'existence de nombreux conflits
entre les pêcheurs a amené l'administration des pêches, avec
l'appui du PMEDP53, à organiser un diagnostic participatif au
niveau de ce plan d'eau en 2001. C'est les résultats de cet exercice qui
ont conduit à l'identification de la cogestion comme une approche
appropriée pour une gestion durable et bénéfique des
ressources halieutiques de cette retenue. Celle-ci, financée par le
PMEDP, a démarré en décembre 2003. Jamais un engagement
n'avait réuni autant des participants au sujet de la pêche
à Maga.
Les pourparlers qui vont achoppés depuis 12 mois entre
les parties prenantes suivantes à Maga, vont aboutir les 8 et 9
décembre 2004 à la conclusion d'un accord historique en 10 points
afin de communautariser la retenue. Il s'agit entre autres de l'administration
des pêches, des autorités administratives (Sous-préfets de
Maga et de Kaï-Kaï), des Forces de Maintien de l'Ordre, des
représentants des services déconcentrés des autres
ministères (agriculture, forêts, faune, environnement), des CTD de
Maga et de Kaï-Kaï, des autorités traditionnelles, de la
SEMRY, des acteurs primaires et secondaires (pêcheurs, transformateurs,
transformatrices, transporteurs, commerçants, etc.) et les autres
utilisateurs des eaux et des ressources du lac.
Sans se détacher de la stratégie globale
décrite plus haut propre au gouvernement, les mesures communautaires
relatives à la gestion durable de la retenue soulignent que :
- L'accès à la retenue est
libre à tout pêcheur camerounais en règle avec la
réglementation en vigueur.
53 Programme pour des Moyens d'Existence Durables dans
la pêche
150
- L'exercice du droit de pêche est
conditionné par l'acquisition des autorisations délivrées
par les services compétents. Ces autorisations sont individuelles et non
collectives.
- Tout pêcheur doit utiliser le
matériel réglementaire (annexe 4). L'usage des engins
actifs (sennes, éperviers, filet encerclant, nasses
appâtées et produits chimiques) est interdit ainsi que la coupe
des plantes aquatiques.
- Le comité de gestion doit en
collaboration avec les services de pêche, délimiter la zone de
frayère.
- Les pêcheurs doivent respecter une
période de repos biologique allant du 1er juillet au 30
septembre de chaque année.
- Les pêcheurs doivent prendre les
mesures de sécurité contre les hippopotames. Toutefois, le
comité de gestion pourra saisir l'administration compétente avant
de prendre une décision concernant la lutte contre les hippopotames.
- Le comité de gestion appuie la
création des structures telles que les associations, les GIC, les
coopératives, etc. Puis, favorise la création d'une structure de
micro finance pour faciliter l'épargne et encourager les actions
communautaires (scolarisation, acquisition des matériels de pêche,
soins sanitaires ...). Cependant, une partie des revenus des pêcheurs
doit être mobilisée pour assurer le fonctionnement du
comité de gestion.
- Deux types d'infractions sont relevés
:
a) Les infractions de droits communs : vol, coup et
blessures
b) Les infractions spécifiques : violation des
dispositions réglementaires tels le règlement intérieur,
les accords de gestion...
- La gestion du niveau d'eau se fait en
concertation entre la SEMRY et le MINEPIA qui doit informer et sensibiliser les
pêcheurs sur les impacts potentiels.
151
L'objectif à terme est d'impliquer les acteurs dans le
processus de prise de décision, l'exécution et le suivi des
mesures de gestion et de conservation des ressources halieutiques.
Concrètement, il s'agit de sensibiliser les populations pour une
activité de pêche responsable, contrôler la zone de
frayère, faire respecter le repos biologique, faciliter la
délivrance du permis de pêche aux concernés.
4.2.1.2. Organisation et moyens la cogestion
La cogestion dispose de moyens financiers, des ressources
humaines et des partenaires qui l'assistent dans le domaine logistique et
infrastructurel. Elle est financée à hauteur de 16 millions de
FCFA chaque année, soit 8000000 FCFA à Maga et le reste à
Kaï-kaï par l'État. Ses bureaux comprennent deux organes
fonctionnels exécutant chacun, des tâches /rôles bien
définis.
Le comité de gestion est chargé de l'application
et du suivi des accords. Il coordonne les activités des comités
de pêche et des comités de vigilance et rend compte des
activités aux administrations concernées à savoir les
DAEPIA et les sous-préfets de deux arrondissements. Le comité de
pêche est l'organe chargé du suivi des directives du Comité
de gestion au niveau des groupements des campements de pêche. Il met en
place les comités de vigilance et supervise leurs activités,
représente les campements des pêcheurs au niveau du Comité
de Gestion, rend compte de ses activités au comité de gestion et
dresse la liste des pêcheurs de ces campements.
Placé sous l'autorité du Comité de
pêche, le comité de vigilance est l'organe chargé de la
sécurité dans un campement de pêche. Ses attributions sont
la lutte contre le vol des engins et les mauvaises pratiques de pêche, la
dénonciation aux autorités compétentes de tout fait
illégitime. Il comprend 18 membres à Maga et 22 à
Kaï-kaï tous, délégués parmi les pêcheurs
après formation au CACP de Maga.
4.2.2. Mode opératoire de la cogestion
Son mode opératoire est basé sur des actions
synergétiques qui allient acteurs publics et ONG internationales.
152
4.2.2.1. Des actions cachotières très
efficaces
En catimini, les pêcheurs désignés pour le
comité de vigilance surveillent chaque jour la retenue, conseillent les
autres pêcheurs et dénoncent les contrevenants. Les
récalcitrants sont alors traqués par les éléments
du BIR de la base navale présente à Maga, à l'aide des
pirogues ultra rapides sophistiquées (photo 25). La cogestion
de Maga contrôle le nord de la retenue et, l'inverse est
géré par le bureau de Kaï-kaï suivant le modèle
administratif précédemment décrit.
Mais visiblement, il n'existe pas de limites de
compétence des comités de vigilance. Car, les agents doivent
couvrir toute la retenue en dépit de la décrue du lac qui
soustrait le cadre prioritaire d'exercice du bureau de Kaï-kaï.
À ce moment, les cogestionnaires de Kaï-kaï viennent en appui
à ceux de Maga et mettent leurs talents en synergie.
Coordonnées de prise de vue :
x=10° 46'57» - y=14° 57' 08»
Photo 25 : Pirogue ultra rapide des
éléments du BIR à Maga.
Au cours des patrouilles syncrétiques, plusieurs
pirogues sont saisies (photo 26), des filets brulés, des
pêcheurs verbalisés parfois même assommés selon les
témoins sur scène dont la promesse d'anonymat oblige qu'on se
réserve de les nommer.
153
Coordonnées de prise de vue :
x=10.832842-y=14.950582
Photo 26 : Saisie d'une pirogue dans la zone
de frayère par le comité de vigilance de Maga
Les impacts du processus de cogestion sont d'ores et
déjà visibles54. Mais, force est de constater que
plusieurs défis restent à relever. Justifiant alors
l'intervention des ONG internationales.
4.2.2.2. Le secours des ONG internationales
Au niveau international, d'autres organisations interviennent
dans la gouvernance des ressources halieutiques à Maga de manière
directe ou indirecte en fonction de leurs prérogatives. Parmi toutes ces
instances, il est important de mettre un accent particulier sur la FAO.
Très sensible au rôle social et économique fondamental du
secteur des pêches (sécurité alimentaire, emplois, lutte
contre la pauvreté, commerce intérieur et extérieur,
revenu national, etc.), elle occupe une place très importante dans la
gouvernance des ressources halieutiques. Sa mission consiste à favoriser
et garantir le développement et l'utilisation durables des ressources
halieutiques. Ainsi, à travers son département chargé des
pêches, elle
54 une cohésion sociale renforcée, la
réglementation des pêches mieux respectée quoique
problématique, des capacités des parties prenantes en
matière de cogestion renforcées, des captures contenant de moins
en moins de poissons immatures, un dialogue entre les différentes
parties prenantes établi, des communautés plus impliquées
dans la gestion et le développement local et collaborant avec
l'administration des pêches et un partenariat établi entre les
CTD, la SEMRY et le comité de gestion.
154
fournit à la demande des pays membres, une assistance
technique sur tous les aspects de la gestion et de la mise en valeur des
pêches et de l'aquaculture à Maga.
En dehors de cet organisme qui a organisé plusieurs
missions d'études piscicoles, financé l'inventaire de la
biodiversité aquatique lacustre de la retenue en 1998, favorisé
depuis 2003 dans le cadre du PMEDP la signature des accords de cogestion,
exécutée l'enquête-cadre de référence
couplée d'une enquête socio-économique en 2011 sur le lac,
figure la CBLT dont les réalisations matérielles sont tangibles.
Dans le cadre du projet dénommé PRODEBALT, la CBLT a construit
deux débarcadères autour de la retenue. L'un au nord de la
retenue à Maga (Photo 27) et l'autre au Sud du lac dans
l'arrondissement de Kaï-kaï.
Coordonnées de prise de vue : x=10°50'35»
-y= 14°56'56»
Photo 27 : Débarcadère de Maga
construit par la CBLT
Ces deux débarcadères équipés
d'unités de fabrique de glace doivent à long terme,
résoudre le problème de l'insuffisance des données
statistiques. Le suivi des espèces halieutiques pourra permettre une
évaluation exacte des stocks biologiques. Actuellement, seul le
débarcadère de Kaï-kaï est opérationnel, mais
celui-ci souffre déjà d'un sérieux
155
problème énergétique. Aussi, dans
l'optique de suppléer les gestionnaires et cogestionnaires de la
retenue, la CBLT a mis sur pied dans l'arrondissement de Maga au niveau du
village Pouss, une antenne de surveillance des activités de pêche.
Celle-ci, équipée des pirogues hors-bords de grande puissance,
devra renforcer le contrôle de la zone de frayère à travers
la capacité d'intervention.
4.3. LES FACTEURS LIMITANT LA MISE EN OEUVRE ET
L'EFFICACITÉ DES POLITIQUES DE GESTION DURABLE DES RESSOURCES
HALIEUTIQUES DANS LA RETENUE
Les politiques de l'État qui visaient un
développement de la pêche ainsi que la conservation des ressources
halieutiques se sont traduites par des réglementations qui datent de
longtemps et qui ont été modifiées à plusieurs
reprises. Les accords de la cogestion se sont avérés poreux et
leurs résultats, improbables. Ceci est dû à certains
facteurs que cette recherche a identifiés et analysés.
4.3.1. Des situations démographique et
socio-économique défavorables
Sont analysées ici, la poussée
démographique de l'Arrondissement de Maga qui a accru la demande et les
besoins en poissons et l'indigence socio-économique qui a assourdi les
pêcheurs à Kaï-kaï.
4.3.1.1. Les contraintes démographiques :
une menace permanente pour la survie de la retenue
Le poids démographique constitue aujourd'hui un
gigantesque défi que les gestionnaires de la retenue d'eau de Maga
doivent essayer de relever au nord de celle-ci. Avec sa superficie de 110 000
km2 et une population s'élevant à 180 000 personnes,
l'arrondissement de Maga est le plus peuplé du département auquel
il appartient après Yagoua. Sa population dépasse de très
loin celle de Kaï-kaï : 63 000 âmes. Le croit naturel
pourrait-il à lui seul justifier une telle concentration de la
population ?
En effet, certains villages existaient depuis plus de 400 ans.
Mais, près du tiers des villages ont été
créés à la fin des années 1970 avec la
création de la SEMRY. Elle a déplacé 11 000 familles de
cultivateurs qui ont laissé leurs villages d'origines pour venir
s'installer dans la Commune de Maga afin de pratiquer la riziculture. Depuis
lors, la population s'agrandit et les zones de culture deviennent même
progressivement insuffisantes. Les sources
156
indiquent que la commune de Maga est passée de 30 000
habitants en 1970 à 80 000 habitants en 201055. En 2005, elle
était estimée à environ 85100 âmes. Pourtant,
l'arrondissement en compte aujourd'hui environ 180 000. Bref, on peut tout
simplement souligner que la population de Maga reste sur une allure croissante
et deux problèmes se posent.
D'abord, une concentration des habitants autour du lac qui
rendent difficile le contrôle de l'accès à la retenue, du
moment où, toute la population riveraine est employée dans la
pêche. Dans certains campements riverains du lac, les densités
sont supérieures à 100 habitants/km2 (112 à
Gamack, 120 à Malka, 110 à Kéleo). Suite à ces
fortes densités, les populations ne pouvant s'installer dans les
rizières de la SEMRY se sont rapprochées de la pêcherie. En
2011, 53 villages/campements confondus de pêcheurs avaient
déjà été identifiés (Supra, chap.1 ;
I.3.2.2.). Sur les 53 campements de pêcheurs dénombrés, les
campements les plus peuplés sont ceux de Maga qui concentrent 10 000
acteurs socioprofessionnels de pêche à 98 %
intéressés par la retenue.
D'autre part, à ces espaces densément
peuplés qui côtoient ce haut lieu de pêche, s'ajoute
l'extrême demande en produits halieutiques générée
par la structure de la population. Selon le dernier recensement
général de la population (2005), la population de
l'arrondissement de Maga alors estimée à 85 100 âmes
était composée de 41 371 hommes et 43 729 femmes. Le chef-lieu
à lui seul comptait 15 701 âmes, dont 7862 hommes et 7839 femmes.
Le reste de l'espace physique communal est suffisamment peuplé (69399
habitants, dont 33509 hommes et 35890 femmes). Au regard de ces statistiques,
on observe que les femmes sont plus nombreuses que les hommes. Les hommes
constituent 48,61 % de la population totale et les femmes 51,39 %. Les jeunes
de moins de 18 ans en constituent la frange la plus importante soit 60 % de la
population totale.
Le poisson étant la source de protéines la plus
accessible aux populations, surtout les plus défavorisées, les
produits de pêche contribuent pour 67 % environ des apports en
protéines dans l'alimentation des populations à Maga et pour
près de 70 % à Kaï-Kaï. La consommation moyenne par
tête et par an y est de 47 kg contre 11 kg/habitant pour la viande
(MINEPIA, 2011). Soit, une demande annuelle globale de 9400 tonnes
pour les deux arrondissements. Cette situation pousse ces derniers à
considérer le lac comme la source de leur richesse éventuelle et
par conséquent à, parfois, y séjourner pendant de longues
durées
55 Chiffres du recensement général de la
population et de l'habitat au Cameroun, 2010.
157
dans l'optique de récolter plus de ressources.
Puisqu'il en faut assez pour nourrir leurs familles et assez pour faire
fortune.
En concluant ce point, on peut dire que l'explosion
démographique à laquelle on assiste depuis les années 2000
à Maga constitue un énorme défi pour la gestion des
ressources. Dans une localité où, 56 % de la population totale
vit de la pêche, la généralisation de fortes
densités dans et autour de la retenue impose la surexploitation des
ressources dont elle dispose, et ce, afin de subvenir aux besoins de
subsistance. Dans ce contexte, cette pression démographique laisse des
signatures majeures à l'instar de la dégradation de certaines
ressources que la pauvreté va aggraver.
4.3.1.2. Les contraintes socio-économiques : la
pauvreté des populations comme un réel défi pour la
gestion durable des ressources halieutiques
La pauvreté est avant tout, un concept difficile
à définir. Jusqu'à présent, seule la
définition donnée par la Banque Mondiale est prise comme une
référence dans le monde entier. Elle considère comme
« pauvre » toute personne dont le revenu journalier est
inférieur à un dollar. À vrai dire, ce chiffre
représente le minimum pour que cette personne puisse satisfaire ses
besoins fondamentaux. C'est juste un indicateur approximatif, mais qui ne
reflète pas toujours la réalité des choses. La
définition de la pauvreté dépend toujours « de
l'idée que s'en fait la population d'une société
donnée à un moment précis » (Roe D.,
Elliot
J., 2005). Pour le cas du Cameroun par exemple,
l'Institut National de la Statistique a trouvé qu'à un niveau
individuel, un homme ou une femme est considéré (e) comme pauvre
s'il/elle : « est confronté à une complexité de
problèmes inter-reliés qu'il ne peut pas résoudre ; n'a
pas assez de terres, de revenus ou d'autres ressources pour satisfaire ses
besoins fondamentaux et en conséquence vit dans des conditions
précaires ; est incapable de se prendre en charge ».
Ainsi, les communautés de Maga et Kaï-kaï
sont confrontées à un déséquilibre entre la
croissance démographique, et les revenus par tête par
pêcheurs en deçà du niveau de 1986. Car, même si
l'incidence de la pauvreté a commencé à reculer, les
indicateurs de développement humain se sont considérablement
dégradés au cours des années de crise (1980-1990) dans le
secteur de l'éducation et de la santé, mais avec un scoop
donné à Kaï-kaï. La cause latente en est que la carence
en infrastructures sociales de base a généré des besoins
onéreux que ne peuvent couvrir que la pêche (supra, chapitre
1, 1.3.2.2.) : emploi, eau potable, éducation, soins de
santé, alimentation, Mobilité, etc.
158
Certes, de 2011 à 2016, les carences en infrastructures
de base dans les deux arrondissements sont mitigées, mais elles stagnent
dans les campements56 sinon, s'enveniment d'ailleurs57 et
les asymétries de développements locaux restent visibles avec au
nord du lac, un arrondissement fort peuplé (180000 âmes à
Maga) et au Sud, une commune pauvre, encore en retard sur plusieurs plans qui
vient de bénéficier du « projet filets sociaux
»58 de la banque mondiale afin de se tirer de l'impasse de
la pauvreté. Comment dès lors, être attentifs aux discours
des gestionnaires quand on a faim ou lorsqu'on ne sait pas lire et/ou
écrire ? Dans l'un ou l'autre des cas, c'est un véritable
challenge. Car, ne dit-on pas souvent : « ventre affamé n'a pas
d'oreilles » ?
L'hypothèse selon laquelle, la pression
démographique exacerbée par des paramètres
socio-économiques défavorables, est la cause majeure de bien de
menaces directes et indirectes sur les ressources et l'écosystème
au niveau de la retenue d'eau de Maga n'est donc pas fantaisiste quand bien
même, d'autres facteurs peuvent compléter l'origine des
menaces.
4.3.2. Les limites des politiques publiques
L'impéritie de l'État à aleviner la
retenue a entrainé la péjoration du repos biologique par certains
pêcheurs d'où, l'implacable déploiement de la
dégradation des ressources.
4.3.2.1. La péjoration du repos biologique par
certains pêcheurs
Après 36 ans, le repos biologique ne fait pas
l'unanimité chez les pêcheurs. On se rappelle, le MINEPIA dans le
cadre de la coopération avec le Japon a construit un centre de
pêche à Maga doté d'une unité de fabrique de glace,
une chambre froide, des ateliers de réparation des moteurs hors-bords,
de montage et réparation des filets, un laboratoire, et une station
d'alevinage (photo 28) pour le repeuplement du lac à quatre
étangs aquicoles.
56 À part quelques modifications concernant certains
CES/CETIC qui ont été érigés en lycées, le
rapport de 2015 sur la situation socioéconomique de la Région de
l'extrême-Nord ne fait pas de mention spéciale
supplémentaire.
57 Car, les installations électriques ont vieilli au
point que même dans le principal centre-urbain de la Ville Maga, 90 jours
de délestage peuvent se succéder. Les autres infrastructures qui
dépendent de l'alimentation électrique sont oubliées,
négligées et parfois inusité ce qui leur a donné un
coup de vieux notoire.
58 La commune de Kaï-Kaï est la seule commune du
département du Mayo-Danay qui a été identifiée
comme très pauvre. Par conséquent, à même de
bénéficier du projet filet sociaux qui visait une
évaluation rapide de conditions de vie des différents
ménages parmi lesquels, les plus gros en termes de pauvreté
recevront une assistance financière inconditionnelle limitée sur
deux ans dès Juin 2016.
159
Coordonnées de prise de vue :
x=10°50'13»-y=14°55'39»
Photo 28 : Étang de pisciculture
inusité au centre de pêche de Maga
Mais, depuis l'inauguration de ce centre le 21/11/2011 par S.E
Mr. TSUTOMU ARAI alors ambassadeur du Japon au Cameroun, lesdits étangs
de piscicultures n'ont jamais fonctionné. Aucun alevin n'a
été produit là, pour être jeté dans le lac.
L'incapacité de l'État à tenir ses promesses relatives
à l'alevinage de la zone de frayère est aujourd'hui, source de
frustrations pour les populations qui pensent que « c'est une zone
où, ne pêchent que les personnalités, c'est-à-dire,
celles qui détiennent la loi » et les critiques abondent.
Car, d'après les leçons tirées de leurs
expériences empiriques, 34,3% des pêcheurs interrogés
pensent que la période est mal choisie et ne correspond pas à la
période de reproduction de certaines espèces de poissons.
D'autres estiment que c'est une stratégie inefficace (11%) en raison de
ses résultats mitigés (9%) tant dis que bon nombre d'entre eux ne
s'y soumettent pas du tout (31%) et procèdent juste à un
ralentissement de leur activité compte tenu des travaux
champêtres. Ainsi, le contrôle de l'effort total n'étant pas
encore mis en oeuvre, l'accès à la retenue reste libre à
tout pêcheur détenteur d'un « permis de pêche ».
L'application des différentes mesures et leur mise en oeuvre se heurtent
progressivement à l'absence notamment de structures de contrôle de
suivi et de surveillance.
160
4.3.2.2. L'implacable dégradation des stocks
ichtyologiques
Les ressources halieutiques, notamment les espèces les
plus exploitées, sont, on l'a vu, dans un état de surexploitation
ou de pleine exploitation (MINEPIA, 2015) et menacées
d'effondrement total. Aujourd'hui, les débarquements des poissons de
haute valeur commerciale (Lates, Bagrus, Heterotis, Gymnarchus etc.)
évoluent fortement à la baisse. La situation n'est pas
meilleure pour le reste des stocks, composés des Petrocephalus,
Hydrocyon, Mormyrus, Labeo, Clarias, Tilapia Sp., etc. dont les
captures sont constituées essentiellement d'individus de petite taille,
ce qui constitue un signe de surexploitation (Heincke,
191359).
De plus, les types d'engins de pêche prohibés
sont toujours utilisés massivement par les pêcheurs. Partout sur
la retenue, les filets monofilament sont les engins de pêche les plus
utilisés (Zagazaga). Malgré l'interdiction de la
palangre appâtée (Wari), des sennes de plage (Taro) ou
encore des célèbres éperviers (Birgui), certains
pêcheurs artisans persistent dans l'usage de ce mode de pêche dont
les effets sont de taille pour les habitats benthiques et les ressources
elles-mêmes.
Malgré la signature des textes relatifs à la
cogestion, les ressources ne cessent de se dégrader. Ce
phénomène se traduit par une sérieuse baisse de la
productivité des pirogues qui font diminuer rapidement les ressources
qui leur sont accessibles et se trouvent contrainte d'utiliser du savon ou du
son pour booster leurs rendements. Les gros sites de débarquement tels
Pont 2, Malka, Gamack etc. ainsi que certains sites qui jouxtent la digue
barrage de Guirvidig-Maga-Pouss, offrent des conditions insalubres : le poisson
est débarqué à même le sol où s'entassent des
déchets de toute sorte. Aussi, la masse des emballages plastiques
déversés le long de la digue menace sérieusement la
stabilité de la zone de frayère.
L'État est pourtant conscient de ce problème,
puisque les textes sur la gestion des pêches ont été
révisés à plusieurs reprises afin de protéger
davantage les ressources halieutiques contre une exploitation anarchique,
préjudiciable au développement d'une économie des
pêches. Le MINEPIA s'occupe à la fois de l'élevage, des
pêches des industries animales et les textes réglementaires n'en
finissent guère d'être révisés. Cette
multiplicité des tâches, corroborée par cette
instabilité du dispositif juridique en vigueur, traduit les
hésitations
59 F. Heincke (1913) a démontré que la
réduction du nombre de plies de grande taille et l'augmentation de
celles de petite taille dans les débarquements et la baisse
correspondante de la taille moyenne des plies résultent directement de
l'intensification de la pêche. C'est le premier signe de surexploitation
d'une ressource marine faisant l'objet de pêche par les hommes.
161
et les incertitudes politiques. La situation de la pêche
perdure et le véritable problème demeure : l'absence d'une
gestion durable de la ressource.
Bref, l'exploitation des ressources halieutiques ne peut
être optimale à long terme que si les intervenants garantissent
une gouvernance raisonnable. L'établissement de restrictions à
l'accès libre aux ressources est une condition, mais pas suffisante pour
garantir une pêche responsable. Les institutions y afférentes
doivent définir un ensemble de mesures incitatives favorisant la
limitation de la pression de pêche à un niveau correspondant. Mais
il ne suffit pas que ces mesures soient définies, il faut
également les faire respecter.
CONCLUSION GÉNÉRALE
163
L'objectif de ce mémoire était de faire le point
sur l'avenir de l'activité de pêche dans la retenue d'eau de Maga.
L'hypothèse émise au départ était que la croissance
démographique ces dernières années a un impact très
important sur l'organisation et la gestion des ressources halieutiques dans ce
plan d'eau. La première partie du travail a montré que cette
pêcherie dispose d'énormes atouts susceptibles de contribuer au
développement durable des communautés de Maga et
Kaï-kaï. Cependant, ce haut lieu de pêche est soumis à
une pression extrême.
Car, pour une retenue de 220 km2, 4000 pirogues
à bord embarquées par plus de 6500 pêcheurs
équipés disposant 60000 engins performants avec une production
annuelle d'au moins 2000 tonnes/an est désastreux pour une
pêcherie dont le RMD est de 15000 T/an. La pression monte sur la retenue.
Elle a été lue à travers les paramètres de
l'exploitation halieutique et les aspects socio-économiques de cette
activité qui indiquent un nombre de pêcheurs au km2 (64
pêcheurs/km2) supérieur à la normale, des zones
de captures intempestivement fréquentées par de nombreuses
pirogues (plus de 27 pirogues au km2) allant parfois à 12 m
de long et a fortiori, une saturation de celle-ci par des engins de pêche
(156 engins/km2) devenus non seulement très efficaces, mais
hautement performants au point de tout balayer après leur passage.
Justifiant ainsi, l'augmentation régulière de la quantité
des débarquements observés pendant les 36 années
étudiées.
D'autre part, les différentes formes d'incitations
économiques dont font montre l'État et les ONG à
l'égard des acteurs de ce secteur, l'accroissement de la demande en
produits halieutiques sur les marchés, à quoi s'ajoutent la
pauvreté ambiante des acteurs et la taille des ménages en milieu
pêcheur, sont autant des paramètres qui amplifient ce
problème d'où, sa chronicité.
Les pêcheurs qui ont activé avec la
complicité des mareyeurs un arsenal de captures illégales, mais
aussi et surtout à même d'effectuer des prises juvéniles
sont les principaux responsables des menaces qui planent sur l'avenir de la
pêche. Malgré l'interdiction des engins actifs, les pêcheurs
artisans ne s'en débarrassent pas toujours. Ils ont beau se justifier
que c'est pour satisfaire la demande sans cesse croissante de leur alimentation
quotidienne, celle des marchés locaux et extérieurs en produits
frais ou transformés. Mais, une chose est claire : les effets pervers
abondent.
L'État est certes conscient du danger, mais son
intervention via les services de pêche s'avère vaine. Les pouvoirs
publics font face à une double exigence : concilier les objectifs de
164
développement économique et financier à
court terme et exploiter de façon durable les ressources halieutiques.
Mais, il faut reconnaître que c'est comme pour tous les aspects en
développement durable, une tâche difficile de concilier ces deux
impératifs.
Il est regrettable que l'aménagement d'une
pêcherie soit axée sur le renforcement de l'arsenal
réglementaire et le raffermissement des interdictions - au point de
penser que les pêcheurs au sens strict du terme pourraient occasionner la
perte de la retenue - alors même que l'inventaire des ressources
halieutiques est encore partiel et partial, et l'effort de pêche
médiocrement connu. Car, là n'est pas le problème. Au
contraire, de telles façons sont conflictogènes et heurtent la
sensibilité d'aucuns. Le vrai problème se trouve dans la
poussée démographique, et le pêcheur toujours indexé
n'est que la partie visible de l'iceberg. Il est tout autant soucieux de la
pérennité de son activité que quiconque.
Tant qu'on n'aura pas pris en compte cet aspect dans la
gouvernance des pêches, la dégradation va continuer d'ailleurs en
s'accélérant. Une urgence s'impose, celle d'un repositionnement
stratégique des marques d'une pêche scientifique. La preuve, si
pour Seignobos il y a plus de 30 ans, le lac n'était pas encore
entré dans une gestion rationnelle de ses stocks ichtyologiques,
jusqu'à l'heure actuelle, il subsiste encore les relents d'une telle
mésaventure. Les portes d'une pêche responsable resteront
fermées autant que la politique de gestion ciblera plutôt les faux
problèmes de la dégradation qui s'ignorent. L'ampleur des
dommages est telle que les menaces qui planent sur l'avenir de la pêche
artisanale sont tangibles et si l'on néglige de séparer le bon
grain de l'ivraie pour attribuer les responsabilités à assumer,
alors on peut commencer à compter les jours de cette activité
très précieuse dont l'avenir est sujet à caution.
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Sénégal : les civilisations agraires du Cayor à la
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Pinchemel P. et Pinchemel G.,
1988. La face de la Terre. Éléments de
Géographie, Col. A. Colin, Paris, 519 p.
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Exemple de la plaine d'inondation du Logone Nord Cameroun. Poster
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174
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Regional Study of Policy Options and Policy Formation Mechanisms for the Lake
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2001. Systematic distortions in world fisheries catch trends.
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Unité de recherche Gerdat-Green, Cirad, 21 p.
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développement durable. Séminaire Science et Citoyens du
CNRS, Poitiers, Futuroscope, 01 novembre 1996, 9 p.
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dans les yaérés au Nord du Cameroun. Série
Environnement et développement au Nord-Cameroun, 24 p.
Sites Internet
www.fao.org de la FAO
www.gouv.sn du Gouvernement Camerounais
www.un.org des Nations
Unies. www.bondy.ird.fr de
l'IRD.
ANNEXES
LAC DE MAGA.
1. Tilapia nilotica (Carpe) 2. Lates niloticus
(Capitaine)
3. Synodontus Clarias (Kouroungou) 4.Hydrocyon
forskalii
5. Clarias anguillaris (Silure) 6. Hyperopisus bebe
chariensis
II
ANNEXE 01. PLAGE DES ESPÈCES DE POISSONS LES
PLUS EXPLOITÉES DANS LE
7. Alestes dentex (sardine) 8. Labeo senegalensis
9. Protopterus annectens (Anguille) 10. Schilbe
mystus
11. Tetraodon fahaka strigosus 12. Heterotis niloticus
(Kanga)
III
13. Gymnarchus niloticus 14. Malapterurus electricus
15. Gnathonemus tamandua 16. Mormyrus rume
17. Citharinus latus
iv
REPUBLIC OF CAMEROON
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Peace - Work - Fatherland
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Ngaoundéré Tel./Fax: (237) 22 25 27 67 E-mail :
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FACULTÉ DES ARTS, LETTRES ET SCIENCES HUMAINES
Département de Géographie
V
ANNEXE 02. QUESTIONNAIRE ADMINISTRÉ AUX
PÊCHEURS ARTISANS
Bonjour Monsieur, qu'il me soit d'avance permis de vous
rassurer que le présent questionnaire s'inscrit dans le cadre d'une
recherche en vue de l'obtention du diplôme de MASTER recherche en
Géographie à l'Université de Ngaoundéré. A
l'issue de cette enquête, les résultats seront uniquement
traités à des fins scientifiques ; aucun usage de nature à
vous nuire ne sera envisagé. Merci d'avance pour vos réponses les
plus sincères.
I- IDENTIFICATION ET CARACTÉRISATION DU
PÊCHEUR
1. Lieu et date de l'enquête :
2. Sexe :...
3. Nom :...
4. Âge....
5. Village d'origine :...
6. Appartenance ethnique...
|__| 1. Musgum |__| 2. Massa |__| 3. Tupuri |__| 4. Kotoko |__|
5. Autres
préciser...
7. Statut matrimonial : |__| 1. Marié |__|2.
Célibataire |__|3. Veuf
8. Activités du pêcheur durant l'année
écoulée : (vous pouvez cocher plusieurs cases)
|__| 1. Pêche seulement |__| 2. Commerce |__| 3.
Agriculture |__| 4. Élevage
|__| 5. Autres (transports, etc.)...
9. vi
Depuis combien de temps exercez-vous la pêche ?
|__|1. Entre 1 et 5 ans |__|2. Entre 6 et 11ans |__|3. Entre 12
et 16 ans
|__|4. Entre 17 et 21 ans |__|5. 22 ans et plus
II-LES PARAMÈTRES DE L'EXPLOITATION HALIEUTIQUE ?
Puissance de la pêche artisanale
10. Quels sont les engins que vous utilisez fréquemment
(vous pouvez cocher plusieurs cases) ?
|___| 1. Filets encerclant |___| 2. Filets dormant |___| 3.
Sennes de plage |___| 4. Nasses
|___| 5.Palanges |___| 6. Pêche à la ligne |___| 7.
Épervier (Birgui)
Pourquoi cette technique/engins parmi tant d'autres ? .
11. Quelles sont les espèces que vous ciblez ?
.
12. Quelle quantité pouvez-vous capturer par
jour ?
13. Avez-vous abandonné des techniques de
pêche ?
14. Quelles sont les principales
causes ?
? Capacité de la pêche
artisanale
15. Quel type de pirogue utilisez-vous ?
|___| 1. 1 pirogue en planche |___| 2. Pirogue monoxyle |___| 3.
Pirogue en tôle
16. Dimension des pirogues utilisées : |__| 1. Moins de 6
m |__| 2. 6 m |__| 3. Plus de 6 m
17. modes de propulsion : |___| 1. Moteurs |___| 2. Pagaies
18. Quelle est sa provenance ? |___|1. Personnelle |___|2.
Louée |___|3. Empruntée
19. À quels types d'obstacle faites-vous face dans
l'exercice de votre activité ?
20. Comment les surmontez-vous ?
III- FRÉQUENCE D'UTILISATION DU LIEU DE
PÊCHE
21. Dans quelle partie du la allez-vous pêcher ? |__|1.
Nord du lac |__|2. Sud du lac |__|3. Est du lac
|__|4. Ouest |__| 5. Centre du lac
22. À quel moment allez-vous pêcher ?
vii
|__| 1. En Journée |__|2. La nuit |__|3. Les deux
23. Combien d'heures mettez-vous sur la retenue ?
|__| 1. 6 h |__| 2. 12h|__| 3. 18h |__| 4. 1jour |__|5. 1,5 jour
|__|6. 2 jours et plus
24. Pêchez-vous sur le Logone ? |__| 1. Oui |__| 2. Non
Si oui quant et pourquoi ?
IV- IMPACTS DES PÊCHES SUR LES RESSOURCES ET
L'ÉCOSYSTÈME
25. Avez-vous remarqué des types de pollution dans la
zone où vous allez pêcher ? |__|1. Oui |__|2. Non
26. Si oui, quelles sont ses origines ?
|__| 1. Emballages plastiques |__| 3. Pirogues usées |__|
2. Rejets des filets |__| 4. Autres Si 'autres', précisez :
27. À quels endroits l'observez-vous ? |__| 1. Dans l'eau
|__| 2. Sur la digue |__| 3. Autres
28. Quelles sont les conséquences sur la pêche ?
|__| 1. Débarquements faibles ou nulles |__| 2. Morts des
poissons
|__| 3. Risque de maladie pour les pêcheurs |__| 4.
Autres
Si 'autres', précisez :
29. En l'absence des appâts, utilisez-vous souvent des
carreaux de savons à cette fin ?
|__|1. Oui |__|2. Non
30. Quel autre type de produits chimiques utilisez-vous pour
maximiser vos prises ?
|__|1. Son du Riz paddy |__|2. Soude |__|3. Si autre,
préciser....
31. Quelles sont les actions menées pour lutter contre
cette pollution ?
|__| 1. Camions de ramassage des ordures
|__| 2. Utilisation de charrettes pour le ramassage des
ordures
|__| 3. Sensibilisation
|__| 4. Autres
Si « autres », précisez :
32. Quels sont les facteurs anthropiques favorables à la
pêche artisanale dans cette zone ?
|__| 1. Ressources abondantes |__| 2. Marché favorable
|__| 5. Autres
Si 'autres', précisez :
33. Quels sont les facteurs anthropiques défavorables
à la pêche artisanale dans cette zone ?
|__| 1. Pollution humaine |__| 2. Marché
défavorable |__| Autres
VIII
Si « autres », précisez :
V- STRATÉGIES DE GESTION DES RESSOURCES
HALIEUTIQUES
34. Quelles sont les mesures réglementaires de la
pêche artisanale dans cette zone ?
|__| 1. Interdiction des palangres |__| 4. Interdiction des
filets dormants |__| 2. Interdiction filets mono filaments |__| 5. Sorties
limitées
|__| 3. Interdiction sennes tournantes |__| 6. RAS
35. Par qui sont- elles établies ?
|__| 1. L'État |__| 2. La commune |__| 3. Les
organisations locales de pêche |__| 4. ONG de développement |__|
5. Autres
36. Existe- t- il des espaces réservés ?
|__| 1. Oui |__| 2. Non Si oui lesquels
?
37. Quelle est la durée d'interdiction ?
|__| 1. En permanence (zone de frayère) |__| 2. Par
moment (saison chaude ou saison froide, etc.)
38. Par qui sont-ils établis ?
|__| 1. L'État |__| 2. La commune |__| 3. Les
organisations locales de pêche |__| 4. ONG de développement
39. Observez-vous des périodes de repos biologique ?
|__| 1. Oui |__| 2. Non
Si oui à quel moment ?
40. Avez-vous remarqué des impacts sur les ressources
halieutiques et les débarquements ? |__| 1. Amélioration de la
taille des espèces pêchées |__| 3. RAS
|__| 2. Débarquements importants |__| 4. Autres
41. Êtes-vous favorable au repos biologique ?
|__|1. Oui |__|2. Non
Pourquoi ? ...
42. Avec quoi protégez-vous vos captures pendant que vous
êtes dans le Lac ?
|__|1. Aponogeton subconjugatus |__|2. Hygrophila Sp. |__|3.
Autres |__|4. RAS
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ix
Département de Géographie
ANNEXE 3. QUESTIONNAIRE ADMINISTRÉ
AUX GESTIONNAIRES DE LA PÊCHE
1. Comment se présente l'évolution de la
pêche artisanale lacustre actuellement ?
2. Quel est au plan économique et social, la
contribution de la pêche artisanale lacustre dans l'économie
locale ?
3. Qu'en est-il de la production (la tendance) dans le lac ?
4. Quel est le niveau local de consommation des produits
halieutiques ?
5. Quelles sont les espèces les plus exploitées et
les plus demandées par les consommateurs ?
6. Combien de GIC de pêche (concernés par le Lac)
existent-ils ?
7. Combien de pêcheurs artisans sont-ils sur la retenue
cette année et combien il y en avait les 10 dernières
années ?
8.
X
Combien de sites de débarquement existent-ils au tour du
lac ?
9. Quelle appréciation peut-on faire des
différentes destinations que prennent des produits de la pêche
artisanale lacustre ?
10. Le secteur de la pêche artisanale reste
dominé par des politiques visant à inciter les nationaux et les
locaux à s'intéresser davantage. Existe-il des politiques de
subvention de ces acteurs mises en place par l'État ?
12. Existe-t-il des industries de transformation des produits de
pêche à Maga ?
? DÉVELOPPEMENT DURABLE ET PÊCHE ARTISANALE
LACUSTRE
13. Sachant que l'essentiel de l'économie locale est
axé sur la riziculture et la pêche, quel est le niveau de
développement durable actuel du secteur des pêches ?
14. Actuellement le secteur des pêches connaît
une crise mondiale qui se traduit par la stagnation de la production mondiale,
l'épuisement des stocks des ressources halieutiques dans certaines
régions et la dégradation de l'environnement marin et
côtier, qu'en est-il du lac de Maga ?
15. Si comme l'ensemble de la planète le lac de Maga
n'est pas en marge de la crise du secteur pêche, alors quelle est la
politique de l'État (MINEPIA) et les moyens mis en oeuvre pour sortir ce
secteur de cette situation ?
16. Aujourd'hui les organisations internationales
prônent pour la mise en place des politiques de développement
durable dans le secteur des pêches (gestion durable des ressources et de
l'environnement), quelles sont au plan local les mesures que vous avez
initiées à cette fin ?
17.
xi
Quels sont les projets de développement durable de la
pêche artisanale lacustre mise en place par l'État et autres
acteurs à Maga ?
18. Existe-t-il des politiques de surveillance et de
contrôle des activités de pêche dans la retenue ? Si oui,
comment s'organisent celles-ci ?
19. Quelles sont les mesures prises au niveau local pour
mieux suivre les activités du secteur de pêche ?
20. Existe-il des politiques de régulation des
activités de pêche telles que les périodes de pêche,
les quotas, etc. ?
21. Concernant les politiques environnementales, existe-il
une politique de gestion intégrée du lac ?
22. Les moyens matériels et techniques des
pêcheurs artisans sont-ils respectueux de l'environnement lacustre ?
23. Quelles sont, actuellement, les actions au plan social
menées par les GIC de pêche à Maga ?
24. Budget investie par l'État Camerounais dans le
secteur des pêches à Maga/Kaï-Kaï depuis une
décennie et les réalisations :
Investissement des organismes internationaux et de
coopération
XII
Investissement dans la formation des agents pêcheurs
Investissement dans la protection de l'environnement lacustre et
côtier
Investissement dans l'évaluation des ressources
halieutiques et l'écosystème lacustre
ANNEXE 04. ACCORDS DE GESTION DE LA RETENUE D'EAU DE
MAGA
Accord de gestion de la retenue d'eau dc N1.iga
ACCORD DE GESTION DE LA RETENUE NEGOCIE ET SIGNE A LA
REUNION DE CONCERTATION DES PARTIES PRENANTES DES 8 - 9 DECEMBRE 2004 A
MAGA
Nous, représentants des parties prenantes è la
gestion de la retenue d'eau de Maga, réunis à Maga les 08 et 09
Décembre 2004, soit après douze mois de préparation de
cette entente,
Considérant l'impérieuse nécessité
de gérer et de conserver durablement les ressources de la retenue d'eau
de Maga ;
Considérant que la gestion durable des ressources de la
retenue d'eau de Maga peut contribuer de manière significative â
l'amélioration des moyens d'existence des communautés de
pêche locales et au développement de la
région ;
I,
Convaincus que la gestion durable et bénéfique
de la retenue ne peut être assurée que si les problèmes
majeurs que nous avons identifiés et analysés au cours de la
campagne d'information, de sensibilisation et de communication sociale sont
résolus, en l'occurence entre autres : l'accès
à-la-_retenue ; l'exercice du droit de pèche; les engins de
pêche dans la retenue ; la délimitation des zones de
frayères ; la période de repos biologique ; l'utilisation des
bénéfices de l'exploitation des ressources de la retenue ; les
infractions, sanctions et procédures ; la gestion du niveau d'eau et le
partenariat avec la SEMRY. .
2
xiv
71 de ,arr ~. ,I J CIL' de Maaa
/Conscients du manque à gagner causé par la
mauvaise gestion des ressources et du fait qu'une vision commune de toutes les
n ; ti <. orenantes à la gestion de la retenue est plus que
nécessu e 'c''r parvenir ensemble aux solutions appropriées
ConfIrr or~~f' ~s ' . t notre attachement aux principes
de in coge -t; , ., elenue our l'ensemble des
parties prenantes c.nrnn On ;ycbe adequate susceptible de garantir une
gestion du;n obi- et bénéfique des ressources de la retenue;
Convenons de prendre les mesures qui vont suivre pour garantir
la geti- u.:xd;,able et bénéfique de la retenue ;
Décidons de mettre en place un Comité de Gestion
de la retenue qui, en collaboration avec les communautés de pêche,
les autorités administratives et techniques locales, les
autorités traditionnelles et municipales, les ONGs et les partenaires au
développement, sera chargé de la mise en oeuvre de toutes ces
mesures.
Les mesures relatives à la gestion durable de la
retenue portent sur les points suivants
1. L'accès à ia retenue ;
2. L'exercice du droit de pêche ;
3. Les types d'engins utilisés pour la pêche dans
la retenue ;
4. La délimitation des zones de frayères ;
5. La période de repos biologique ;
xV
A ccnrr ~. nfon dc 'k rc!cct,c ,I'c:n:
6. Les agressions des hippopotames ;
7. L'utilisation des bénéfices de
l'exploitation des ressources de la retenue
8. Les infractions, sanctions et procédures
9. La gestion du niveau d'eau et le partenariat avec la
SEMRY:
10. Les institutions responsables du contrôle et du
suivi de la mise en oeuvre des dispositions de l'accord.
1. L'accès à la retenue
L'accès à la retenue d'eau de Maga est libre
à tout pécheur Camerounais en règle avec fa
réglementation en vigueur.
2. L'exercice du droit de pêche
exercice du droit de pêche est conditionné par
l'acquisition f des autorisations délivrées par les services
compétents. Ces autorisations sont individuelles et non collectives.
3. Les engins/matériels de pêche
appropriés pour la pêche dans la retenue
Tout pêcheur doit utiliser le matériel
réglementaire. il s'agit des filets de grosse maille de 3 à 5
doigts, des palangres avec hameçons du n° 7 au
n°13. L'utilisation des.. engins actifs (senne,
épervier, filet encerclant, nasse appâtée et produits
chimiques) est interdite, ainsi que la coupe des plantes aquatiques.
4
xvi
Accord de gestion de is retell d' Cil u dc Maga
4. La délimitation des zones de
frayères
Le Comité de gestion doit délimiter les zones
de frayères sur le plan d'eau en collaboration avec l'administration des
pêches.
5. La période de repos biologique
Les pêcheurs doivent observer une période de
repos biologique allant du 1- juillet au 30 septembre de chaque
année.
6. Les agressions des hippopotames
Les pêcheurs doivent prendre les mesures de
sécurité contre les hippopotames. Toutefois, le Comité de
Gestion pourra saisir l'Administration compétente, notamment, le
ministère des forêts et de la faune, avant de prendre une
décision concernant la lutte contre les hippopotames.
7. L'utilisation des bénéfices de
l'exploitation des ressources de la retenue
Le Comité de gestion va appuyer la création des
structures telles que les associations, les GIC, les coopératives, etc.
Puis, favoriser la création d'une structure de micro finance pour
faciliter l'épargne et encourager les actions communautaires
(scolarisation, acquisition des matériels de pêche, soins
sanitaires etc.). Cependant, une partie des revenus des pêcheurs doit
être mobilisée pour assurer le fonctionnement du Comité
dé Gestion.
5
xvii
A.co rti rc gtsti lu rch:mnir
8. les infractions, sanctions et procédures
Deux types d'infractions ont été relevés
a Les infractions de droit commun vol, coups et blessures.
b. Les infractions spécifiques : violation des
dispositions réglementaires (règlement intérieur. accord
de gestion, violation de la réglementation des pèches, etc.),
t.Les contrevenants seront sanctionnés
conformément à la 1 réglementation en vigueur.
Ils seront arrêtés, présentés au Comité de
Gestion qui les mettra à la disposition de I l'Administration
compétente,
9. La gestion du niveau d'eau et le partenariat avec la
SEMRY
Il sera mis en place un cadre de concertation
SEMRY-MINEPIA-Comité de Gestion pour la programmation des lâchages
d'eau, l'information et la sensibilisation des pêcheurs sur les
périodes de lâchages.
xviii
ANNEXE 5. ARRÊTÉ
N°0002/MINEPIA du 1er Août 2001 FIXANT LES
MODALITÉS DE PROTECTION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES
Article 7.- (I) Les expéditions s faites sous
couverture convenable
glace de manière à assurer aux denrées
meilleur état de fraîcheur à leur
arrivé
destination.
(2) La glace utilisée doit être safub
convenablement divisée et placée couches
alternées avec les produits de pêche, les couches
inférieure et supérie re étant constituées de
glace.
(4) Le poids de glace à utiliser vari
selon la saison, la distance à parcourir e
le moyen de transport employé.
température varie entre --1 °C et +1°C
sent chapitre, notamment celles conter-
ont nant la qualité des produits, les embal-
de lages et l'étiquetage, sont applicables aux
le produits de la pêche destinés au commer-
e à ce intérieur, à l'exportation ainsi
qu'aux
produits importés.
re, CHAPITRE III
en
DU TRANSPORT DES PRODUITS DE
la LA PECHE.
u- Article 13.-(1) Le transport des pro-
duits de la pêche ne s'effectue qu'à bord de
véhicule disposant d'une attestation
e de conformité délivrée par les agents
t compétents du Ministère chargé des
pêches.
Article 8.- En tout état de cause
seuls peuvent être expédiés des colis contenant des
poissons ou autres animaux aquatiques reconnus de première
fraîcheur et protégés par une quantité de
glace dont le poids est égal au poids du poisson.
CHAPITRE Il
DU CONDITIONNEMENT DES PRO- DUITS DE PECHE CONGELES
Article 9.- (1) Le poisson congelé doit être
entreposé, manutentionné et expédié dans de
conditions propres à éviter la rupture de la
chaîne de froid.
(2) En conséquence, la température des '
dépôts frigorifiques pour le stockage du poisson congelé
doit etre égale ou inférieure à --20°C.
Article 10.- Toute boîte ou tout paquet contenant du
poisson congelé porte d'une façon bien lisible en
caractère indélébile des indications fixées par
arrêté du Ministre chargé des pêches.
Article II.- (1) Les produits congelés ne sont
extraits des entrepôts frigorifiques que pour être chargés
à bord des véhicules et expédiés sans
délai.
(2) A la décongélation, les denrées
expédiées doivent présenter au moins la fraîcheur
exigible pour les produits réfrigé-
rés.
Article 12.- Les dispositions du pré-
Article 15.- (1) Le transport des produits de la pêche ne
s'effectue qu'à bord
(2) Cette attestation, dont la validité n'excède
pas six mois, est délivrée ou
renouvelée à la demande du propriétaire
du véhicule.
Article I4: Le transport des produits de la pêche
s'effectue dans les conditions d'hygiène propres à
préserver les denrées de toute contamination et altération
sus-
ceptible de les rendre impropres à la consommatioh.
des véhicules spécialement destinés
à cet usage.
(2) Ces véhicules doivent comporter des parois
intérieures construites en matériaux résistants à
la corrosion, lisses, faciles à nettoyer et à
désinfecter.
(3) En outre, ils doivent être aménagés
de
manière à assurer une
étanchéité suffisante.
Article 16.- Les denrées ne doivent avoir aucun contact
avec les planches, les parois ou toute autre surface, partie ou pièce du
véhicule ; le chargement est constitué exclusivement de produits
de la pêche, et les unités de conditionnement sont
disposées en fils rapprochés afin de
réduire au minimum la surface de pénétration
de la chaleur.
Article 17.- (1) Les accessoires d'arrimage, de protection et
de conditionnement doivent être faciles à laver et tenus
r
xix
I46
xx
xxi
ANNEXE 6. ARRETE N°0026/MINEPIA/DIRPEC/DPIA/SPA
DU 11 AVRIL 2000
PORTANT INTERDICTION DE CERTAINS ENGINS DE PÊCHE
xxii
ANNEXE 7 : REPERTOIRE DES ESPECES DE POISSONS PEUPLANT
LE LAC DE
MAGA
FAMILLES
|
Genre
|
NOMS LOCAUX
|
OSTEOGLOSSIDAE
|
Heterotis niloticus
|
Kafka/Kanga
|
MOROMYRIDAE
|
Hyperopisus bebe chariensis
|
|
Hyperopisus accidentalis tenuicauda
|
Hamour
|
Mormyrus hasselquisti
|
|
Mormyrus rume
|
|
Mormyrus caschive
|
|
Mormyrus delicious
|
|
Petrocephalus simus
|
Soudda moukka
|
Petrocephalus bovei bovei
|
|
Petrocephalus bane tchadensis
|
|
Marcusenius isidori isidori
|
|
Marcusenius ihuysi
|
|
Marcusenius senegalensis
|
|
Brienomyrus niger
|
|
GYMNARCHIDAE
|
Gymnarchus niloticus
|
Mounhou
|
TETRAODONTIDAE
|
Tetraodon fahaka strigosus
|
korkoto
|
HEPSETIDAE
|
Hepsetus odoe
|
|
CHARACIDAE
|
Hydrocyon forskalii
|
goyo
|
Hydrocyon linectus
|
goyo
|
Hydrocyon brevis
|
goyo
|
Hydrocynus somonorum
|
goyo
|
Alestes dentex
|
Hégney / djona
|
Alestes nurse
|
|
Alestes macrolepidotus
|
|
Alestes dageti
|
|
Alestes leuciscus
|
|
Brycinus macrolepidotus
|
|
CITHARINIDAE
|
Cilharinus citharus
|
Biski
|
Citharinus latus
|
|
Citharinus distichodoides
|
|
Distichodus rostratus
|
|
Distichodus niloticus
|
|
Distichodus brevipinnis
|
|
Distichodus engycephalus
|
|
|
Barbus occidentalis
|
|
Barbus pleuropholis
|
|
Barbus callipterus
|
|
Barbus baudonis
|
|
Barbus pumilus
|
|
xxiii
CYPRINIDAE
|
Barbus werneri
|
|
Barbus leonensis
|
|
Barbus lepidus
|
|
Barbus perince
|
|
Barbus macinensis
|
|
Barbus chlorotaenia
|
|
Labeo senegalensis
|
Glarga
|
Labeo coubie
|
|
Labeo lereensis
|
|
Labeo tibestis
|
|
Labeo pseudocoubie
|
|
Raiamas senegalensis
|
|
BAGRIDAE
|
Bagrus docmac
|
Malaou
|
Bagrus bayad
|
|
Chrysichthys nogrodigitatus
|
|
Chrysichthys auratus
|
|
Auchenoglanis biscutatus
|
|
Auchenoglanis accidentalis
|
|
ARIIDAE
|
Arius heudelotii
|
|
Arius gigas
|
|
CLARIIDAE
|
Clarias anguillaris
|
Dogolo
|
Clarias gariepinus
|
Dogolo
|
Clarias camerunensis
|
|
Heterobranchus bidorsali
|
|
SCHILBEIDAE
|
Schilbe mystus
|
Bildey
|
Eutropius niloticus
|
|
Siluranodon auritus
|
|
Physailia pellucida
|
|
MOCHOCIDAE
|
Synodontis batensoda
|
Kouroungou
|
Synodontis sorex
|
Koy koy
|
Synodontis schall
|
Gongyang
|
Synodontis membranaceus
|
Gogo
|
Synodontis nigrita
|
Muguguri
|
Synodontis clarias
|
|
Synodontus filamentosus
|
|
Synodontus eupterus
|
|
Synodontus gambiensis
|
|
MALAPTERURIDAE
|
Malapterurus electricus
|
A mournini
|
CENTROPOMIDAE
|
Lates niloticus
|
Manslang
|
|
Hemichromis fasciatus
|
|
Tilapia zillii
|
Azgong
|
Tilapia nilotica
|
Azgong
|
xxiv
CICHLIDAE
|
Tilapia multiradiata
|
Azgong
|
Tilapia galilaea
|
Azgong
|
Oreochromis niloticus
|
|
Sarotherodon galilaeus
|
|
ANABANTIDAE
|
Ctenopoma petherici
|
|
POLYPTERIDAE
|
Polypterus senegalus
|
|
Polypterus bichir
|
|
Polypterus endlicheri
|
|
PROTOPTERIDAE
|
Protopterus annectens
|
Mougoudoum
|
CICHLIDAE
|
Haplochromis wingati
|
|
ANABANTIDAE
|
Ctenopoma muriei
|
|
ANABANTIDAE
|
Ctenopoma petherici
|
|
MASTACEMBELIDAE
|
Mastacembelus loenbergi
|
|
Ophicephalus obscurus
|
|
Source : Investigations de terrain
au CACP de Maga, février 2015.
178
Table des matières
Dédicace i
Remerciements ii
Résumé iv
Abstract iv
Sommaire v
Table des figures vi
Table des tableaux vii
Table des photographies vii
Table des planches photographiques viii
Sigles et abréviations ix
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
1. PROBLÉMATIQUE 2
2. QUESTIONS DE RECHERCHE 6
2.1. Question principale 6
2.2. Questions spécifiques 6
3. CONTEXTE SCIENTIFIQUE 6
3.1. L'IMPORTANCE DE LA PÊCHE DANS LE MONDE 6
3.1.1. Les grands pôles de production halieutique
7
3.1.2. Comment comprendre la dynamique de la pêche
dans ces grands pôles ? 7
3.1.3. Les facteurs explicatifs du développement
de la pêche 8
3.2. L'IMPACT DES PÊCHES SUR LES RESSOURCES ET LEURS
ÉCOSYSTÈMES 9
3.2.1. La question de la vulnérabilité des
ressources halieutiques 9
3.2.2. Impact biologique et écosystèmique
de la surexploitation des ressources halieutiques 10
3.2.3. L'impact socio-économique de la
surexploitation des ressources 12
3.3. LA GESTION DURABLE DES RESSOURCES HALIEUTIQUES 13
3.3.1. L'émergence du développement durable
dans la pêche 13
3.3.2. Les systèmes de gestion durable des
ressources halieutiques 14
3.3.3. Gestion durable des ressources halieutiques en
géographie 15
4. DÉLIMITATION SPATIO-TEMPORELLE DE LA RECHERCHE
18
5. OBJECTIFS DE RECHERCHE 20
5.1. Objectif principal 20
5.2. Objectifs spécifiques 20
6.
179
HYPOTHÈSES DE RECHERCHE 20
6.1. Hypothèse principale 20
6.2. Hypothèses spécifiques 20
7. CADRE CONCEPTUEL ET THÉORIQUE 20
8. MÉTHODOLOGIE DE RECHERCHE 23
8.1. La collecte des données 23
8.1.1. Les données secondaires 23
8.1.2. Les informations de terrain 24
8.2. Traitement et analyse des données 27
8.2.1. Présentation du matériel utilisé
27
8.2.2. Quelques formules retenues 27
8.2.3. Interprétation des résultats 29
8.3. Difficultés rencontrées 30
9. INTÉRÊT DE LA RECHERCHE 31
10. PLAN DE RÉDACTION 32 PREMIÈRE
PARTIE : LE LAC DE MAGA : UN LIEU DE PÊCHE SOUS PRESSION
33
CHAPITRE 1 : FONDEMENTS DE LA PÊCHE LACUSTRE DE
MAGA 35
1.1. LES ATOUTS PHYSIQUES DE LA RETENUE 35
1.1.1. Une retenue aux capacités physiques
considérables 35
1.1.1.1. Les ouvrages géotechniques de la retenue
35
1.1.1.2. Les faveurs climatiques 43
1.1.2. Significations halieutiques des facteurs
géomorphologiques, pédologiques et
floristiques lacustres de Maga
47 1.1.2.1. Des facteurs pédologiques et
hydrodynamiques favorables à la multiplication des
espèces benthiques 47
1.1.2.2. Signification halieutique de la flore lacustre
50
1.2. L'IMPORTANCE DES PLANCTONS DANS LA RETENUE 52
1.2.1. Les types de planctons observés dans
lac de Maga 52
1.2.1.1. Les phytoplanctons : unités fondamentales
de la chaîne trophique lacustre 53
1.2.1.2. Les planctons animaux ou zooplanctons 54
1.2.2. L'extrême diversité
halieutique du lac 55
1.2.2.1. Répertoire des espèces de poissons
exploitées 55
1.2.1.2. Les principaux niveaux trophiques lacustres de
Maga 56
180
1.3. UN MILIEU HUMAIN COSMOPOLITE DE LONGUE TRADITION DE
PÊCHE 57
1.3.1. Les villages des pêcheurs
autochtones, allogènes et aborigènes 57
1.3.1.1. Les différents types des campements de
pêcheurs 57
1.3.1.2. Le calendrier de la pêche artisanale
lacustre 62
1.3.2. Organisation traditionnelle et
infrastructures de base 63
1.3.2.1. Organisation traditionnelle 64
1.3.2.2. Les infrastructures socio-économiques de
base 64
CHAPITRE 2 : ÉTAT DES LIEUX DE LA PRESSION DES
PÊCHES DANS LA
RETENUE DE MAGA 67 2.1. ÉVOLUTION ET ANALYSE
DES INDICATEURS DE LA PRESSION DE PÊCHE
67
2.1.1. L'effort de pêche et la production
67
2.1.1.1. Un effectif de pêcheurs en hausse constante
67
2.1.1.2. L'accroissement des prélèvements au
fil des ans 70
2.1.2. Des engins et techniques de pêche
très performants 72
2.1.2.1. Les capacités d'équipage des
pêcheurs sur la retenue 72
2.1.2.2. L'efficacité des engins et techniques de
pêche utilisés 76
2.2. VALORISATION DES RESSOURCES HALIEUTIQUES ISSUES DE LA
PÊCHE
ARTISANALE LACUSTRE DE MAGA 91
2.2.1. Les activités corollaires de la
pêche artisanale lacustre 91
2.2.1.1. Le mareyage en pêche artisanale lacustre
91
2.2.1.2. Transformations artisanales des produits halieutiques
93
2.2.2. Des contraintes au décollage des
activités de pêche 96
2.2.2.1. Les difficultés spécifiques
rencontrées par les acteurs 96
2.2.2.2. De la taille des recettes publiques
générées par la pêche 99
2.3. L'INCITATION SOCIO-ÉCONOMIQUE DU SECTEUR DES
PÊCHES 100
2.3.1. La pression économique
100
2.3.1.1. Les facilités d'accès aux
ressources halieutiques 100
2.3.1.2. La forte demande des produits halieutiques par
les consommateurs 101
2.3.2. La pression sociale 102
2.3.2.1. Les caractéristiques de la main d'oeuvre
artisanale 102
2.3.2.2. La situation socio-professionnelle des
pêcheurs 104
DEUXIÈME PARTIE : L'AVENIR DE LA PÊCHE
ARTISANALE LACUSTRE DE
MAGA 108
181
CHAPITRE 3 : IMPACTS DES ACTIVITÉS DE
PÊCHE SUR LES RESSOURCES
HALIEUTIQUES ET L'ÉCOSYSTÈME
110
3.1. IMPACTS DES PÊCHES SUR LES RESSOURCES HALIEUTIQUES
110
3.1.1. La structure des ressources
exploitées 110
3.1.1.1. La carence des renseignements biologiques
111
3.1.1.2. L'amenuisement des espèces
exploitées et l'appauvrissement de leur diversité
biologique 111
3.1.2. L'effondrement des stocks des ressources
exploitées 115
3.1.2.1. Évolutions des stocks des espèces
les plus prisées 115
3.1.2.2. La baisse drastique des CPUE 123
3.2. IMPACTS DE LA PÊCHE SUR L'ÉCOSYSTÈME
LACUSTRE 124
3.2.1. Le dysfonctionnement de
l'écosystème interne de la retenue 124
3.2.1.1. La pollution aquatique 124
3.2.2.2. La destruction de la flore lacustre et de
l'habitat benthique 126
3.2.2. Les conséquences sur l'environnement
externe de la retenue 128
3.2.2.1. La dégradation de l'environnement du lac
et de la végétation côtière 128
3.2.2.2. La pollution des zones de débarquements
par les emballages plastiques et les objets
divers
|
129
|
3.3. LES CONSÉQUENCES SOCIO-ÉCONOMIQUES DE LA
SURPÊCHE
|
131
|
3.3.1. Les incertitudes techniques et
économiques professionnelles ..
|
.123
|
3.3.1.1. La précarisation des techniques de
pêche
|
132
|
3.3.1.2. La baisse des revenus des pêcheurs
|
135
|
3.3.2. Des difficultés sociales dues à
la surpêche
|
138
|
3.3.2.1. L'implacable déploiement de la pêche
illicite
|
139
|
3.3.2.2. Les conflits multiformes occasionnés par la
pêche
|
140
|
CHAPITRE 4 : RÉACTIONS DES POUVOIRS PUBLICS ET
LEURS LIMITES
|
144
|
4.1. L'ÉLABORATION DES MESURES AU NIVEAU NATIONAL
|
144
|
4.1.1. Les restrictions géographiques et
saisonnières
|
144
|
4.1.1.1. La création d'une zone de frayère
|
145
|
4.1.1.2. L'instauration d'une période de repos
biologique
|
146
|
4.1.2. Le contrôle du maillage et de la
production
|
147
|
4.1.2.1. L'interdiction de certains engins et techniques de
pêche
|
147
|
4.2.2.2. De la taille minimale des ressources
prélevées
|
148
|
182
4.2. L'IMPORTANCE D'UNE COGESTION BIEN QU'IMMATURE 149
4.2.1. La spécificité des clauses et
signataires de l'accord de gestion 149
4.2.1.1. Les tractations d'un accord historique aux objectifs
ambitieux 149
4.2.1.2. Organisation et moyens la cogestion 151
4.2.2. Mode opératoire de la cogestion
151
4.2.2.1. Des actions cachotières très efficaces
152
4.2.2.2. Le secours des ONG internationales 153
4.3. LES FACTEURS LIMITANT LA MISE EN OEUVRE ET
L'EFFICACITÉ DES POLITIQUES DE GESTION DURABLE DES RESSOURCES
HALIEUTIQUES DANS LA
RETENUE 155
4.3.1. Des situations démographique et
socio-économique défavorables 155
4.3.1.1. Les contraintes démographiques : une menace
permanente pour la survie de la
retenue 155 4.3.1.2. Les contraintes
socio-économiques : la pauvreté des populations comme un
réel défi
. ..146
pour la gestion durable des ressources halieutiques
157 4.3.2. Les limites des politiques publiques
4.3.2.1. La péjoration du repos biologique par
certains pêcheurs 158
4.3.2.2. L'implacable dégradation des stocks
ichtyologiques 160
CONCLUSION GÉNÉRALE 162
BIBLIOGRAPHIE 165
ANNEXES j
Annexe 1. Plage des espèces de poissons les plus
exploitées dans le lac de Maga. ii
Annexe 2. Questionnaire administré aux
pêcheurs artisans v
Annexe 3. Questionnaire administré aux
gestionnaires de la pêche ix
Annexe 4. Accords de gestion de la retenue d'eau de Maga
xiii
Annexe 5. Arrêté N°0002/MINEPIA du
1er Août 2001 fixant les modalités de protection
des
ressources halieutiques xviii Annexe 6.
Arrêté N°0026/MINEPIA/DIRPEC/DPIA/SPA du 11 Avril 2000
portant
interdiction de certains engins de pêche xxi
Annexe 7. Repertoire des espèces de poissons
peuplant le lac de Maga xxii
|