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Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des
travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
la République Dominicaine, des États-Unis et du Chili de 2008
à 2018.
Dédicace 5
Remerciements 6
Sigles Abréviations 7
Introduction 9
Première Partie : 13
Méthodologie de la Recherche 13
Chapitre I : Cadre méthodologique et théorique de
la recherche 14
Section I : Indices méthodologiques de la recherche 14
1.1 Objectif général 15
1.2 Objectifs spécifiques 15
1.3 Justification du choix du thème 16
1.4 Problématique 20
1.5 Problèmes 21
1.6 Hypothèse 22
1.7 Cadre théorico-conceptuel 23
1.8 Méthodes utilisées 27
Section II : Cadres Théoriques ou la littérature
des auteurs 28
A) La migration selon la pensée de Frédéric
Boyer : Migrants, mémoire du
monde 29
B) La Migration d'après François Crépeau :
Le danger, c'est l'immobilité. 31
a) Le droit pourrait-il régler cette situation? 32
b) Comment en est-on arrivé là? 32
C) La migration selon L'archéologue Jean-Paul
Démoule : De tout temps, l'homme s'est
déplacé 33
a) De quand datent les premières migrations dans
l'Hexagone ? 33
Critique de la pensée de Frédéric Boyer
35
Critique la thèse de François Crépeau 35
Critique la pensée de Jean-Paul Démoule 36
Prises de positions 36
Chapitre II : Valeurs institutionnelles juridiques de la
recherche 37
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Section I : Cadres institutionnels de la recherche 37
1.1Impact des travailleurs migrant sur le plan social 38
1.2 Impact des travailleurs migrants sur le plan politique :
40
1.3 Impact des travailleurs migrants sur le plan
économique : 42
1.4 Impact des travailleurs migrants sur le plan culturel : 42
1.5 Impact des travailleurs migrants sur le plan juridique :
44
Critiques de la prise de position. 46
Section II : Cadre juridique 48
2.1 La Constitution Haïtienne 48
2.2 La réglementation internationale actuelle sur les
travailleurs migrants 49
2.3 Convention Européenne relative au statut juridique du
travailleur migrant 55
2.4 Droits de l'Homme relatifs aux migrants et aux travailleurs
migrants 55
2.5 Droits de l'Homme relatifs aux refugies, aux demandeurs
d'asile et aux personnes
déplacées internes 56
2.6 Le droit de demander et de recevoir l'Asile 58
b) Protection de l'État 59
Prise de position 60
Deuxième : 62
Cadres Opérationnelles 62
Chapitre I: Cadre Historique de la migration 63
Section I : Histoire de la migration 63
1.1 Antiquité et Moyen-Âge 64
1.2 Temps Modernes 66
1.3 Les migrations contemporaines au prisme des droits de l'homme
67
a) Historicité de la migration haïtienne 69
b) Aux origines de l'émigration haïtienne 69
c) L'impact de l'occupation Etats-Unienne (1915-1934) 70
Critiques et prise de position 72
Section II : Cadre international de la migration 74
2.1 Un regard sur la migration des États-Unis 76
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a) L'administration d'Obama et Trump : une alternance politique
pour un changement
de politique migratoire ? 77
b) L'effet des attentats terroristes sur les
représentations de l'immigration 79
c) La justice, la rue et les groupes d'intérêt
80
d) Changement de ton, continuité dans les faits 81
2.2 Migration en République Dominicaine 83
a) Le marché du travail 85
b) Relation avec le pays d'origine et intégration dans le
pays d'accueil 85
c) La République Dominicaine change de politique
migratoire 87
2.3 Migration au chili 89
a) Le Chili, pays d'accueil de migrants 90
a) Immigration au Chili : ce que dit le décret du
Président Sebastian Piñera 90
b) Le cas chilien 91
Chapitre II: Vers une politique publique internationale de la
migration 92
Section I: Politique publique et regard d'action 92
a) Les champs migratoires internationaux :
nécessité d'une vision globale du
phénomène migratoire 93
2.1 Essence d'une politique publique de la migration 95
2.2 Quid de la politique publique de la migration? 98
a) Regard migratoire sur la politique extérieure de
l'État 100
Section II : Les principes d'application de la politique
migratoire des travailleurs migrants
haïtiens. 101
a) Migration, droit et institution 101
b) Dialogue social 102
c) Coopération internationale 103
d) Importance de la coopération internationale dans le
domaine des
migrations .103
e) Inspection du travail et accès à la justice
104
f) Diaspora haïtienne et l'essence de son identité
105
g) La diaspora haïtienne au Chili, deuxième plus
grand fournisseur de transferts après
celle des États-Unis 107
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h) Diaspora haïtienne et développement territorial
109
i) Revue de la littérature sur les effets des transferts
sur le développement des
économies d'origine. 110
a) Effets seconds ou « négatifs » 110
b) Effets positifs 112
j) Migrations et l'exode des cerveaux 113
k) L'exportation des cerveaux dans la Caraïbe 114
Conclusion 117
Recommandation 121
Bibliographie 123
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Dédicace
Inmemorum : Mon Père Acserne RICHARD et Yvette
PAPILLON.
À ma très chère Mère Marie Evelyne
ERILUS Que ce travail, fruit de votre combat et de vos sacrifices, soit pour
vous une fierté !
À ma famille : Malia VICTORE, Mon oncle Luc RICHARD,
Mon oncle Fritz RICHARD et sa femme Bernadette Delva RICHARD, Mon petit
frère Gregory RICHARD.
À la famille : M. et Mme Christiane Prophète
JEAN, Mme et M. Judnie JEAN. M. Leguenson JULES-SAINT et sa femme Mme Midline
Dragon JULES-SAINT, ma petite filleule Hannaelle JULES-SAINT. M.et Mme Kener
PIERRE et M. Raoul et sa femme Nathaelle Oriol , Adrien et Gladyse ERILUS.
À la famille: Mme Joceline Merat, Quemelie PINCHINAT,
Rose Kendy PINCHINAT, Joranime PINCHINAT, Marie Linda GABRIEL et Judicaelle
Cyril ANTOINE qui m'ont toujours soutenu
Mes cousin(e)s, Wilner, Vancliff, Sonia, Siliana, et les
membres de la famille RICHARD et ERILUS.
À mes conseillés : Père Attilus B. DESCA,
Père Guerlain CHANCY, Père Francky DESIR, Abbe Ernst Derosier,
Abbe Amazan Ricado, et Mme Kepline Placius .
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Remerciements
Au terme de notre cursus universitaire, nos sentiments de
gratitude et de reconnaissance s'élèvent vers toutes les
personnes physiques et morales qui ont porté une pierre à
l'édification de notre être individuel.
« Optimas gratias ago » à l'école de
Droit et des sciences économiques des Gonaïves, spécialement
à nos professeurs de la faculté des Sciences Juridiques et les
centres de Port-au-Prince tels que : ISIDOR et CERED qui ont pris le temps de
nous initier à la science juridique.
Notre regard est particulièrement tourné vers le
Professeur Wilguens REGIS, directeur du présent mémoire, et
l'encadreur qui, malgré leurs multitudes charges, a bien voulu conduire
ce travail.
Nos très sincères remerciements s'adressent
également à nos chers parents ainsi qu'à mon petit
frère et nos amis, l'infatigable Quemelie PINCHINAT, les
Néo-Penseurs du Droit. Judicaelle Cyril ANTOINE, Marie Marpha VILLIERE,
Marie Linda GABRIEL, Rachelle RAMEAU, Marcelle RAMEAU, la promotion d'ISIDOR et
de CERED, dont la tendresse, les conseils et le soutien nous ont permis de
mener à bon port la barque.
Que tous ceux qui nous ont accompagnée et soutenue
durant notre vie académique se sentent particulièrement
touchés par notre profonde gratitude. Nous pensons à nos
grands-parents.
Enfin, que tous les enseignants de la faculté de Droit
et des sciences économiques puissent semer en nous le goût de
l'excellence, tous ceux qui nous portent dans leurs coeurs, trouvent en ces
lignes l'expression de notre profonde reconnaissance !
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Sigles Abréviations
ADN : Acide DésoxyriboNucléique
CEACR : Commission d'experts pour l'application des conventions
et recommandations CICM : Commission internationale catholique pour les
migrations
CICR : Comité international de la Croix-Rouge
Convention internationale sur la protection des droits de tous
les travailleurs migrants et des membres de leur famille
CIPD : Conférence internationale sur la population et le
développement
DAES : Département des affaires économiques et
sociales des Nations Unies
ENHOGAR : Oficina Nacional de Estadística
FMMD : Forum mondial sur la migration et le
développement
HCDH : Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de
l'homme
HCR : Haut-Commissariat des Nations Unies pour les
réfugiés
IDM : Dialogue international sur la migration
IHSI : Institut Haïtien de Statistique et d'Informatique
Agenda de l'Initiative Nansen pour la protection des personnes
déplacées au-delà des frontières dans le cadre de
catastrophes et de changements climatiques.
MHAVE : Ministère des Haïtiens Vivant à
l'Étranger
OCDE : Organisation de coopération et de
développement économiques
ODD : Objectif de développement durable
OIM : Organisation internationale pour les migrations
OIT : Organisation internationale du Travail
OMS : Organisation mondiale de la Santé
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ONG : Organisation non gouvernementale
ONU : Organisation des Nations unies
ONM : Office National de la Migration
OEA : Organisation des États Américains
PDI : Principe directeurs sur le Déplacement Interne
PEA : Population Économiquement Active
PNUD : Programme des Nations unies pour le
développement
UNICEF : Fonds des Nations Unies pour l'enfance
Ibidem ou Ibid. : Dans le même ouvrage, dans le même
passage
Idem ou Id. : Le même auteur, la même oeuvre
Op. cit. : Pour « Opus citatum » (renvoie à
l'oeuvre déjà citée)
A. : Article
Al. : Alinéa
CFr : Code Français
Ed : Edition
Idem : Même référence
In : Dans
N° : Numéro
P : Page
PUF : Presses Universitaires de France
Svts : Suivants
T : Tome
Vol : Volume
C.C : Code Civil
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Introduction
L'homme étant naturellement libre, dispose de la
faculté de se déplacer selon ses convenances. Il s'agit en
quelque sorte d'une « constante de civilisation». Mais cette
liberté d'aller et de venir qui ne rencontrait pas de
difficultés s'est trouvait limitée,
conditionnée avec la naissance des États1.
C'est ainsi qu'à travers des siècles on est passé d'un
déplacement forcé à un déplacement volontaire
à des fins bien déterminées2. Et du fait du
grand écart qui existe entre les pays du nord et de ceux du sud, ces
derniers voient leurs populations de plus en plus attirées par les
richesses des pays du nord. Ces mouvements de populations qui se sont
développés à travers le monde ont notamment pris des
proportions considérables entre les pays en
développement3 notamment dans l'espace Africain4.
Face à cette escalade exponentielle des flux migratoires les
États ont employé ou plus proprement ont adopté un
certains nombres de voies et moyens pour gérer la situation avec tous
les enjeux qu'elle englobe, même s'il est difficile d'en mesurer
l'ampleur avec précision, du fait soit de l'absence de données
dans certains pays, soit de l'absence de fiabilité de données
existantes dans d'autres pays5.
Au plan multilatéral, les instruments de protection des
Nations Unies notamment la Convention internationale sur la protection
des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille
du 18 décembre 1990 comme ceux de l'OIT sur les travailleurs
migrants (conventions n*97,143 etc.), peinent à obtenir le
résultat escompté. Seuls quelques pays en développement,
exportateurs de travailleurs migrants, ont adhéré à de
1 MARIE, (Jean Bernard) cité par LEVINET
(M.). Théorie générale des droits et libertés. -
Bruxelles : BRUYLANT, 2006, p. 207
2 Il s'agit de l'époque du commerce
triangulaire, mais aussi durant la deuxième guerre mondiale.
3 FALL (ABDOU SALAM) ET CISSÉ (ROKHAYA)
« Migrations internationales et pauvreté en Afrique de l'ouest
» SOCIOLOGUES INSTITUT FONDAMENTAL D'AFRIQUE NOIRE, UNIVERSITÉ DE
DAKAR janvier 2007, p 10.
4 L'Afrique accueille 8% des migrants. Près
de la moitié des migrants dans le monde se déplacent d'un pays en
développement vers un autre pays en développement. Pour ce qui
concerne les travailleurs, environ 35% des 80 millions de travailleurs migrants
(soit 28 millions) vivent dans une région en développement. LE
MONDE SYNDICAL | DOSSIER | MAI 2004 | N°3.
5 L'ONU estime or qu'il y a environ 175 millions de
migrants (y compris les réfugiés) dans le monde, les migrants
étant définis comme des personnes qui vivent en dehors de leur
pays d'origine. Parmi ces 175 millions de migrants, 86 millions sont des
travailleurs (y compris 6 millions de réfugiés),
c'est-à-dire économiquement actifs avec les familles, le chiffre
est porté à 120 millions (de travailleurs migrants et leurs
familles), selon l'OIT.
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telles conventions, les pays industrialisés, grands
pays d'accueil des travailleurs migrants, n'ont manifesté aucun
intérêt à les ratifier, préférant, soit le
cadre national, soit le cadre bilatéral, soit le cadre régional
ou sous régional.
Dans le continent Américain, la Déclaration
Américaine des Droits et des Devoirs de l'Homme a été
signée en avril 19486. Elle devint le premier document
international énumérant les droits de l'homme universels et
proclamant la nécessité de protéger ces droits. Puis, La
Convention américaine sur les droits de l'homme est entrée en
vigueur en 1978 et a été ratifiée par 21 des
31 États membres de l'OEA (à part le Brésil et
les États-Unis, les principaux pays de la région font partie de
la Convention). Comme traité, ce document oblige uniquement les nations
qui l'ont signé. En Amérique latine, le Marché commun
du Sud (MERCOSUR) a adopté en 1995 un pacte qui vise
à règlementer les migrations inter-régionales. De leur
côté, les pays membres de l'Accord de Cartagena ou
Pacte andin depuis 1996, ont mis en place un Instrument andin sur les
migrations aux fins d'emploi et une carte andine de migration.
Les migrations de main-d'oeuvre se produisent entre pays en
développement et développés, comme entre pays en
développement, mais avec des problématiques
différentes.
Le terme «développement» est ici
employé dans un sens beaucoup plus large que le seul
développement économique, englobant les aspects
économique, social, culturel, politique et humain. S'agissant des
migrations, ce terme recouvre à la fois le développement dans les
pays d'origine et de destination, ainsi que le bien-être et le plein
développement des capacités des travailleurs migrants et de leur
famille.
Aujourd'hui comme hier, les phénomènes
migratoires participent de la quête immémoriale des êtres
humains pour l'amélioration de leur existence. «Depuis la nuit des
temps, les migrations sont pour l'homme une manière courageuse de
manifester sa volonté de surmonter l'adversité et d'avoir une vie
meilleure»7. Comme cela a toujours été le cas, et
selon des modalités très variées, les travailleurs
migrants recherchent du travail pour subvenir à leurs besoins et
à ceux de leur famille. On estimait en 2005 qu'environ 94
6 Lors de la Neuvième Conférence
Internationale des Etats Américains à Bogotá en
Colombie
7 Nations Unies (2006). Migrations internationales
et développement: Rapport du Secrétaire général.
New York, A/60/871, juin 2006.
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millions des quelque 191 millions de migrants
exerçaient une activité économique; avec leur famille, ces
travailleurs migrants représentaient presque 90 pour cent du nombre
total de migrants au niveau international8. Selon des estimations
plus récentes, ce nombre aurait franchi la barre des 200 millions, dont
presque la moitié sont des femmes qui, de plus en plus, émigrent
seules à la recherche d'un travail9.
En premier lieu, la circulation internationale des personnes
augmente logiquement en valeur absolue, étant donné que la
population mondiale a plus que doublé entre 1960 et 2005.
Deuxièmement, le phénomène migratoire, quoique plus
frappant dans les régions développées, est
également devenu une affaire politique très importante pour
beaucoup de pays ou régions en développement, à la suite
de réformes intérieures et grâce à
l'évolution des moyens de communication10.
Troisièmement, enfin, les migrations prennent des formes très
diverses (par exemple légale et illégale) et affectent
différents aspects (par exemple formel et informel) du marché de
l'emploi ; il est donc devenu essentiel de déterminer les avantages et
les coûts inhérents au phénomène migratoire.
Ces raisons expliquent sans doute pourquoi les flux
migratoires sont actuellement au coeur de vives controverses. Alors que les
milieux politiques et les médias soulignent fréquemment ce que
coûte la migration en termes de sécurité ou
d'intégration des étrangers, on ignore souvent l'impact qu'elle
peut avoir sur le développement. En particulier, les familles
d'émigrants restées au pays comme le pays lui-même peuvent
voir leur niveau de vie changer complètement grâce à la
migration internationale, et profiteraient d'une gestion plus efficace de ces
mouvements11.
8 Nations Unies, Division de la population (2006).
Trends in total migrant stock: The 2005 revision, New York 2006. International
labour migration and development: The ILO perspective, mémoire sur les
migrations internationales, 2007.
9 OSCE, OIM, BIT (2006). Handbook on establishing
effective labour migration policies in countries of origin and destination, p.
19.
10 Les gouvernements marocain et philippin,
notamment, font de leur politique migratoire un outil de développement
toujours plus efficace. Un bon exemple d'effort
internationalconcerté concernant les migrations est la
Commission mondiale sur les migrations internationales (CMMI) (
http://www.gcim.org) et les
conférences du Forum mondial sur la migration et le développement
(FMMD) qui s'en sont suivies à Bruxelles en 2007 et à Manille en
2008).
11 Ruth Haug, « Forced Migration, Processes of
Return and Livelihood Construction among Pastoralists in Northern Sudan »,
Disasters, vol. 26, n° 1, 2002, pp. 70-84.
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Notre travail s'inscrit dans ce contexte et s'intéresse au
contenu et à la mise en oeuvre de ce document qui doit devenir
l'instrument de contrôle et de gestion des courants migratoires. Ce
travail sera structuré en deux grandes parties :
I. Théorie, généralités et
méthodologies de la recherche
La première permettra de cerner le cadre de
référence dont les points saillants sont l'Objectif
général, la justification, la problématique,
l'hypothèse, le cadre conceptuel, méthode utilisée, la
revue critique de littérature, cadres institutionnels et cadres
juridiques.
II. Cadres Opérationnelles
La deuxième partie englobe : le cadre historique, le cadre
international, la politique publique internationale des migrations et Les
principes d'application de la politique migratoire des travailleurs migrants
haïtiens.
Viennent enfin les conclusions et les recommandations en termes
d'éléments clés pour le renforcement du projet de la
politique nationale de la migration.
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Méthodologie de la Recherche
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Chapitre I : Cadre méthodologique et
théorique de la recherche
Section I : Indices méthodologiques de la
recherche
La protection des travailleurs migrants est au coeur de
l'actualité internationale. La mondialisation a relativisé la
notion d'espace et, malgré la réticence des États à
ouvrir leurs frontières à la circulation des personnes, surtout
concernant les migrations économiques, les migrants représentent
aujourd'hui 3% de la population mondiale, et les travailleurs migrants et les
membres de leur famille 90% d'entre eux. Cette étude s'interroge sur la
manière dont le droit international protège le travailleur
migrant, et sur l'émergence d'un statut international à son
profit.
Or, la circulation des migrants ne fait l'objet que d'une
faible concertation interétatique car le traitement des travailleurs
étrangers reste une question politiquement sensible, comme l'atteste le
faible succès de la Convention des Nations Unies sur la protection des
travailleurs migrants et des membres de leur famille de 1990. Pourtant, les
droits des travailleurs migrants, traditionnellement définis à
partir de l'obligation internationale de traitement, vont
considérablement s'étoffer grâce à une
complémentarité des normes de droit international du travail et
du droit international des droits de l'homme, lesquelles protègent
respectivement le "travailleur" et "l'individu". La
complémentarité de ces matières offre également un
nombre croissant de voies de recours juridictionnels et quasi-juridictionnel
dans l'ordre juridique international. Mais l'effectivité des droits des
travailleurs migrants passe aussi par une concertation internationale dynamique
entre les différentes parties prenantes12.
12 Camille Papinot. La
protection internationale du travailleur migrant. Droit. UNIVERSITE PARIS
OUEST NANTERRE LA DEFENSE, 2014. Français
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1.1 Objectif général
Protéger les droits des travailleurs migrants
haïtiens surtout ceux qui sont en situation irrégulière, qui
sont des refugies ou demande d'asile dans des pays d'accueils à travers
une coopération multilatérales pour le bien-être de nos
compatriotes.
1.2 Objectifs spécifiques
I. Montrer l'applicabilité d'une proposition de loi en
faveur des travailleurs migrants haïtiens et migrantes haïtiennes.
II. Faire un état des lieux de la problématique
des travailleurs migrants haïtiens.
III. Analyser la situation désastreuse et des traitements
inhumains qu'on donne aux travailleurs migrants haïtiens sur
l'échelle internationale
IV. Décrire leur impact sur la vie familiale.
V. Déconstruire les discours stéréotypes
sur les travailleurs migrant (e)s.
VI. Montrer l'applicabilité du projet de politique
migratoire de l'ONM au regard de la législation haïtienne.
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1.3 Justification du choix du thème
L'émergence d'une concertation internationale autour du
besoin de protéger les travailleurs migrants vient du fait que les
États ont rapidement réalisé qu'ils ne pouvaient traiter
unilatéralement de la question migratoire. Ils ont par ailleurs pris
conscience de la vulnérabilité dans laquelle se trouvent certains
travailleurs migrants. Les États tentent alors de concilier leurs
intérêts qui sont souvent contradictoires. La
vulnérabilité des travailleurs migrants peut s'apprécier
au cours du voyage ainsi que dans le cadre du séjour dans le pays
d'accueil. Malgré un discours récent sur les contributions de la
migration au développement des pays d'origine et de
destination13.
Haïti depuis 1915,14 est un pays
d'émigrés ou plus de trois millions15
d'haïtiens dans des pays d'accueil où le racisme et la
xénophobie sont très marqués et se traduisent par des
actes d'abus de violences ; des stéréotypes de tout genre, de
cruautés et de discrimination. Donc, face à ce vide juridique ou
les travailleurs migrants haïtiens ne bénéficient pas d'une
loi de protection et d'une politique migratoire établie par l`Etat en
vue de protéger le citoyen haïtien partout au regard de cette
convention signée par l'Etat haïtien qui n'a jamais
été ratifiée par le pouvoir le législatif. Les
haïtiens et haïtiennes migrent pour différentes raisons. Leur
déplacement peut être forcé, pour cause de
conflit16, de politique migratoire17,
13 Dans ce sens voir le rapport du
Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD), Rapport
mondial sur le développement humain. Lever les barrières :
mobilité et développement humain, 2009, 237p. ; Organisation de
Coopération et de développement économique (OCDE),
Perspectives des Migrations Internationales, 2010, 381p. ; ou encore
Organisation internationale pour les Migrations (OIM), Etat de la Migration
dans le monde - Bien communiquer sur la migration, Genève, 2011, 161p.
Ces deux rapports mettent en évidence les contributions positives des
migrations sur le développement des pays d'origine et de destination,
à moyen et long terme. Tout d'abord, les migrations s'inscrivent dans le
cadre d'un déséquilibre démographique à
l'échelle du globe. Pour les pays d'origine, les migrants constituent
une ressource économique grâce aux transferts de fonds et
allègent la pression sur l'emploi. Pour les pays de destination, les
migrants occupent les emplois « boudés » par les nationaux,
comme le service à la personne, notamment auprès des personnes
âgées, la population des pays développés
étant vieillissante. On peut aussi mentionner le fait que la migration
attire les investissements directs étrangers (IDE) qui conduisent
à la création d'emplois dans les entreprises
bénéficiaires.
14
http://books.openedition.org/pur/docannexe/image/26973/img-1.jpg
15
http://www.collectif-haiti.fr/migration-haitienne.php
16 Ruth Haug, « Forced Migration, Processes of
Return and Livelihood Construction among Pastoralists in Northern Sudan »,
Disasters, vol. 26, n° 1, 2002, pp. 70-84.
17 Jorgen Carling, « Migration Control and
Migrant Fatalities at the Spanish-African Border », International
Migration Review, vol. 41, n° 2, 2007, pp. 316-343.
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de dangers environnementaux ou technologiques18, de
maladie19 ou de déportation politique20. Mais
l'émigration est dans la majorité des cas une décision
personnelle ou familiale prise pour un motif économique. Si l'on prend
comme point de départ le modèle d'Arthur Lewis, les
marchés de l'emploi intérieurs et transnationaux fonctionnent de
manière imparfaite21. La migration résulte ainsi de
l'espoir de gagner davantage ailleurs, grâce à de meilleurs
salaires ou à une rémunération plus appropriée ;
l'individu cherche un marché où il pourra travailler dans son
domaine de compétences ou de préférence22. Les
décisions d'émigrer se prennent dans le cadre de la famille, en
tant que moyen de faire face à des aléas financiers et de
diversifier les sources de revenu23 ; elles se multiplient peu
à peu avec l'établissement de réseaux
sociaux24.
Selon les estimations du BIT de la fin des années
9025, « plus de 90 millions de travailleurs migrants, y compris
les membres de leur famille résident actuellement, légalement ou
non, dans un pays autre que le leur. Alors qu'au moment de l'adoption des
instruments de protection de l'OIT de 1949 les migrations internationales
étaient soit des migrations de peuplement, soit des migrations
temporaires. Après la crise pétrolière de 1973 dont
avaient souffert les pays d'accueil européens, les travailleurs migrants
temporaires ont mué en travailleurs migrants permanents avec la pratique
parfois abusive des regroupements
18 Lori Hunter, « Migration and Environmental
Hazards », Population and Environment, vol. 26, n° 4, 2005, pp.
273-302.
19 Samuel Clark et al., « Returning Home to
Die: Circular Labour Migration and Mortality in South Africa »,
Scandinavian Journal of Public Health, vol. 35, n° 3, 2007, pp. 35-44.
20 John Salt and J. Stein, « Migration as a
Business: The Case of Trafficking », International Migration, vol. 35,
n° 4, 1997, pp. 467-494. Ruth Haug, op. cit.
21 Arthur Lewis, « Economic Development with
Unlimited Supplies of Labour », Manchester School of Economic and Social
Sciences, vol. 22, n° 2, 1954, pp. 139-191.
22 Larry A. Sjaastad, « The Costs and Returns
of Human Migration », The Journal of Political Economy, vol. 70, 1962, pp.
80-93. John Harris and M. Todaro, « Migration, Unemployment and
Development: A Two-Sector Analysis », American Economic Review, vol. 5,
n° 1, 1970, pp. 23-42.
23 Jacob Mincer, « Family Migration Decisions
», Journal of Political Economy, vol. 86, n° 5, 1978, pp. 749773.
Oded Stark, The Migration of Labor, Oxford, Basil Blackwell, 1991, 406 p.
24 Paul Winters et al., « Family and Community
Networks in Mexico-US Migration », Journal of Human Resources, vol. 36,
n° 1, 2001, pp. 159-184. Kaivan Munshi, « Networks in the Modern
Economy: Mexican Migrants in the US Labor Market », Quarterly Journal of
Economics, vol. 118, n° 2, 2003, pp. 549-597.
25 ILO WORLD EMPLOYMENT 1995 An ILO report
Genève 1995. 2o pages.
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familiaux. Sur ce chapitre aussi, les migrations de familles
entières ont tout au long de l'histoire occasionnées la migration
simultanée de nombreuses femmes et enfants26.
Ce dernier phénomène désigné par
l'expression « féminisation de la migration » et
«'mineurs non accompagnés» ou `'mineurs
séparés", où s'ajoutent, le trafic et la
traite27 surtout de ces dernières, tend à prendre de
l'ampleur depuis quelques années. En outre, le profil des travailleurs
migrants engagés a changé. Alors qu'auparavant les travailleurs
migrants temporaires étaient essentiellement des travailleurs
semi-qualifiés qui occupaient des emplois dont les nationaux ne
voulaient pas, aujourd'hui les travailleurs migrants hautement
qualifiés28 sont préférés par les pays
d'accueil. Ce qui ne change pas véritablement la donne, puisque dans la
pratique, la majorité des travailleurs migrants occupent des emplois non
qualifiés ou semi-qualifiés, souvent dans des conditions
irrégulières. Mais ces migrations n'ont pas seulement
gagné en intensité. Elles ont également connu une
évolution qualitative29. Ainsi, certains pays qui
étaient jadis considérés comme des pays
d'émigration sont aujourd'hui devenus des pays dits d'immigration.
On assiste à un bouleversement rapide des motifs
traditionnels de migration ; celle-ci évolue globalement en fonction de
facteurs tels que les contraintes, la démographie, la politique, les
structures économiques et les conditions familiales. Le
phénomène migratoire restera sans doute une
caractéristique fondamentale de notre époque, due notamment
à des facteurs démographiques : la population des pays
développés tend à baisser tandis que celle des pays en
développement augmente, ce qui se traduit par un afflux de main-d'oeuvre
qui accroît la pression migratoire. Les contraintes évoluent avec
les progrès technologiques et la circulation des informations tandis que
certains pays éprouvent des difficultés à
légitimer
26 LANSDOWN (Gerison) « COMBATTRE LA
DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES ENFANTS AU SEIN DE L'UE »
Proposition de politique d'Evronet, rapport du réseau européen
des enfants Novembre 2000 68 pages
27 317 millions d'enfants travaillent dans le
monde, 218 millions dans les pires formes de travail, selon un rapport de l'OIT
en 2008. Et 8,4 millions d'enfants impliques dans les pires formes de travail
et soit 2,1 victimes de traite en Afrique .Rapport de l'OIT en 2005.
28 LE MONDE SYNDICAL ; Confédération
internationale des syndicats libres, DOSSIER « Migrations: «fuite des
cerveaux» et inégalités de développement, N°3
CISL | mai 2004, p.10-40.
http://www.icftu.org
29 DOCUMENT ; « l'OIM et la Migration de main
d'oeuvre », www.iom.int p.1-.11
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leurs flux migratoires. Ils se sont mis à multiplier
les formalités administratives, ce qui a contribué à
compliquer les itinéraires des migrants et à intensifier la
migration interne30.
On observe en outre bien d'autres changements, et en premier
lieu une féminisation très marquée de la migration
librement choisie : les femmes représentent aujourd'hui 49,6 % des
migrants internationaux31. Nous savons par ailleurs peut-être
en raison d'une meilleure collecte de données que la migration Sud-Sud
(surtout entre pays voisins) présente un volume presque égal
à celui de la migration Sud-Nord32. La réglementation
accrue aux frontières a également entraîné des
changements : les migrants donnent souvent la préférence à
des schémas circulaires, comprenant des déplacements
réguliers entre leur patrie et la région d'accueil. Mais une
politique plus restrictive peut inciter certains à rester dans la
région où ils ont trouvé du travail, dans la crainte de ne
plus pouvoir y revenir s'ils rentrent chez eux. Une politique draconienne tend
aussi à provoquer des flux migratoires illicites et, par
conséquent, à favoriser le secteur informel33.
Tous ces éléments d'appréciation
contribuent à indiquer que la migration restera une
caractéristique de la mondialisation et qu'elle aura des effets
puissants sur les pays en développement. Pour en exploiter au mieux le
potentiel, il est donc essentiel de comprendre comment la migration peut
contribuer au développement et de saisir les enjeux économiques
liés aux flux migratoires34.
D'où le choix du terme : Plaidoyer
pour un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants
haïtiens et haïtiennes: Cas des Etats-Unis, la République
Dominicaine, et le Chili de 2008 à 2018.
30 John Salt and J. Stein, « Migration as a
Business: The Case of Trafficking », International Migration, vol. 35,
n° 4, 1997, pp. 467-494. Ruth Haug, op. cit.
31 Dilip Ratha and Zhimei Xu, op. cit.
32 Arthur Lewis, « Economic Development with
Unlimited Supplies of Labour », Manchester School of Economic and Social
Sciences, vol. 22, n° 2, 1954, pp. 139-191.
33 Larry A. Sjaastad, « The Costs and Returns
of Human Migration », The Journal of Political Economy, vol. 70, 1962, pp.
80-93. John Harris and M. Todaro, « Migration, Unemployment and
Development: A Two-Sector Analysis », American Economic Review, vol. 5,
n° 1, 1970, pp. 23-42.
34 Jacob Mincer, « Family Migration Decisions
», Journal of Political Economy, vol. 86, n° 5, 1978, pp. 749773.
Oded Stark, The Migration of Labor, Oxford, Basil Blackwell, 1991, 406 p.
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1.4 Problématique
Le développement d'une protection catégorielle
au profit du travailleur étranger et l'englobement progressif du droit
des étrangers par le droit international des droits de l'homme nous
conduit à nous interroger sur l'existence d'un statut juridique
international du travailleur migrant.
Le statut juridique désigne un ensemble de
règles internationales applicables à une catégorie de
personnes et qui en déterminent la condition et le régime
juridique35. Les règles internationales, quelle que soit leur
source, vont venir compléter, et non se substituer aux règles
internes. Mais ces différentes normes internationales protectrices se
limitent-elles à reconnaître aux travailleurs étrangers des
droits a minima (capacité de jouissance), les États faisant
toujours écran ? Robert Chiroux écrivait, en 1979, qu'un tel
statut n'existait pas, en se référant aux analyses du Professeur
Charles Rousseau sur la place de l'individu en droit international; ce dernier
considérait que, sauf exception, « les individus ne [pouvaient] se
prévaloir de façon directe et immédiate des règles
de droit international ; celles-ci leur [étant] appliquées par
des procédures internes c'est-à-dire étatiques
»36. Selon Robert Chiroux, cette réflexion est
pertinente à propos des travailleurs étrangers qui « ont
seulement profité de la protection des ambassadeurs et surtout des
consuls de leurs pays d'origine »37.
Près de 258 millions de personnes vivent hors de leur
pays d'origine, parmi lesquels 60 à 65 millions occuperaient un emploi
à titre de travailleur migrant. Près d'une personne sur dix
habitants dans une région développée est un travailleur
migrant. Les régions au niveau de développement le plus
élevé accueillent chaque année près de 2,3 millions
de migrants venant de régions moins
développées38.
35 G. CORNU, op.cit., p.886
36 C. ROUSSEAU, Traité de droit international
public, Sirey, 1974, tome II, p.697.
37 R. CHIROUX, « Les travailleurs
étrangers et le développement des relations internationales
», op.cit., p.17
38 Adapté de l'Organisation des Nations
unies, « Une personne sur dix dans les régions
développées est un travailleur migrant, révèle le
rapport sur les migrations internationales 2002 », 2003,
consulté le 25-072010)
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vit à l'étranger. On estime que c'était
le cas de 1,2 million d'Haïtiens en 2015, soit plus de 11 % de la
population. Les principales destinations d'émigration sont les
États-Unis, qui accueillent près de la moitié des
émigrés haïtiens, la République dominicaine, le
Canada et la France39.
Les travailleurs migrants peuvent être encore
divisés en trois sous-catégories, selon qu'ils sont :
1ere sous-catégorie les migrants résidents :
immigrants qui ont obtenu le statut légal de travailleur du pays
d'accueil. 2eme sous-catégorie, les migrants temporaires :
admis pour une période déterminée dans un pays d'accueil,
par exemple : les médecins et les scientifiques.
3eme sous-catégorie, les migrants illégaux :
immigrants qui n'ont pas obtenu du pays d'accueil l'autorisation légale
d'y travailler40.
1.5 Problèmes
I. La législation haïtienne ne souffre-t-elle pas
d'une carence de loi et de structures de protection pour faire valoir le
respect des droits des travailleurs migrants?
II. Comment peut-on comprendre le contexte historique de la
migration Haïtienne?
III. Quels sont les causes du phénomène de la
migration haïtienne et de l'exode des cerveaux?
IV. En quoi consiste la politique migratoire des migrants,
des réfugiés haïtiens et des demandeurs d'asile?
V. Pourquoi la discrimination est-elle un problème
envers les travailleurs migrants haïtiens dans les pays d'accueil ?
39
https://lenouvelliste.com/article/182376/ocde-la-diaspora-haitienne-incarne-une-migration-reussie-qui-peut-contribuer-au-developpement-du-pays
40 Roberts, H. S., Roberts' Dictionary of Industrial
Relations, Washington, Bureau of National Affairs, 1994)
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1.6 Hypothèse
I. La législation souffre d'une carence de texte de
loi pour protéger les travailleurs migrants haïtiens et de faire
respecter leur droit.
II. Pour comprendre le contexte historique de la migration
haïtienne, il faut analyser l'impact de l'occupation États-Unienne
1915-1934 et ses conséquences. La période de la dictature des
Duvalier de 1957 à 1986. Ainsi que l'impact du tremblement de terre de
2010 à date.
III. Ces causes sont d'ordre
socio-politico-économiques, environnementale, éducationnelles,
psychologiques, institutionnelles, volontaires.
IV. Après le terrible tremblement de terre qui a
dévasté Haïti en 2010, de nombreux Haïtiens ont
quitté leur île pour trouver refuge aux États-Unis. Avec
l'appui du président américain Barack Obama, il leur accorde un
statut de protection temporaire aux refugies haïtiens (TPS). Ce statut
leur permet de vivre et de travailler légalement aux
États-Unis41.
V. La xénophobie est considérée comme
l'une des grandes sources du racisme contemporain. Les discriminations
concernent des secteurs aussi divers que le logement, l'éducation, la
santé, le travail ou la sécurité sociale.
41
LEXPRESS.fr avec AFP, publié le
13/01/2010 à 19:22
https://www.lexpress.fr/actualite/monde/haiti-s-attend-a-un-bilan-effroyable-apres-le-seisme_841883.html
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1.7 Cadre théorico-conceptuel
Définition de migration Nom féminin singulier
1. Déplacement de populations d'un pays vers un autre.
2. Déplacement saisonnier en groupe de certains
animaux.
3. Déplacement d'une substance, d'une
cellule42.
Migration
Selon George et Verger (2007), une migration est un ensemble
de déplacements ayant pour effet de transférer la
résidence des intéressés d'un certain lieu d'origine ou
lieu de départ à un certain lieu de destination ou lieu
d'arrivée.
Levy et Lussault (2006), souligne que « l'emploi
scientifique du terme doit privilégier un sens restreint associant
nécessairement les paramètres principaux suivants : un
déplacement qui doit être marqué par le franchissement
d'une échelle d'espace, des acteurs du champ migratoire qui sont les
migrants et tous ceux qui assurent la possibilité de migrer (passeurs,
transporteurs, hôtes, employeurs), la résidence et l'habitat ainsi
que la vie quotidienne du migrant » 43.
Immigration
Selon le nouveau Petit Robert de la langue française
(2009), « l'immigration consiste à l'entrée dans un pays de
personnes non autochtones qui viennent s'établir
généralement pour trouver un emploi ». Il s'applique aux
personnes à qui les autorités de l'immigration ont accordé
le droit de résider en permanence.
Cependant, dans la majorité des cas, les populations
n'attendent guère cette autorisation avant leur établissement.
Par conséquent, les immigrants sont classés selon la
période d'immigration dans le but de faire la distinction entre les
personnes arrivées récemment et
42
https://www.cordial.fr/dictionnaire/definition/migration.php
43 GEORGE, Pierre et VERGER, Fernand (2006)
Dictionnaire de la Géographie. 9e édition, Paris, Presses
universitaires de France, 472 p.
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celles y résidant depuis un certain nombre
d'années (Monde et développement cité par Dossia,
2010).
Lascoux (1994), estime que la connaissance des
phénomènes migratoires est imparfaite et les évaluations
chiffrées sont peu fiables et fait remarquer que l'observatoire des
migrations internationales de l'OCDE (Organisation de la Coopération et
du développement Économiques) déplorent
périodiquement le manque d'harmonisation des sources statistiques. Elle
affirme que «le flou qui préside aux débats sur les
migrations internationales joue sur la méconnaissance et entretient les
fantasmes des opinions publiques dans les pays d'accueil »Parlant des flux
migratoires, elle soutient qu'ils soulignent les déséquilibres
engendrés par le développement inégal et par les
écarts considérables des évolutions
démographiques.
Elle distingue trois types de migrations que sont les
«migrations pendulaires» qui conduisent les
travailleurs à s'exiler quelques mois pour un salaire décuplant
leur revenu initial, et à revenir chargés de biens de
consommation dont la revente s'avère lucrative. Les
«migrations tournantes» qui se font à
l'échelle d'une région planétaire, d'un pays à
l'autre et au gré des événements. Les
«migrations de santé» qui se développent
à la mesure des progrès scientifiques des pays du nord et de la
dégradation de la situation sanitaire dans les pays du sud.
Migrant
Le terme «migrant» doit être utilisé
avec précaution, car il n'est dénué ni d'idéologie,
ni d'ambiguïté. Il arrive qu'il serve à opérer un tri
entre les personnes qui quittent leur pays selon les causes supposées de
leur départ. Les «migrants» feraient ce choix pour des raisons
économiques, quand les réfugiés ou les demandeurs d'asile
y seraient forcés pour des motifs politiques. Or les contraintes
économiques et politiques se confondent souvent, et la distinction entre
différentes catégories de «migrants» est
généralement arbitraire44.
44 Simon, Gildas (2008) La planète
migratoire dans la mondialisation, Paris, Armand Colin, 256 p.
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Il n'existe pas de définition juridique uniforme du
terme « migrant » au niveau international. Certains décideurs,
organisations internationales et organes de presse comprennent et utilisent le
mot « migrant » comme un terme général pour couvrir
à la fois les migrants et les réfugiés. Par exemple, les
statistiques mondiales sur les migrations internationales emploient en
général une définition du « migrant international
» qui engloberait beaucoup de demandeurs d'asile et de
réfugiés.45
Migrant international : Toute personne qui
vit de façon temporaire ou permanente dans un pays dans lequel il n'est
pas né et qui a acquis d'importants liens sociaux avec ce pays [UNESCO].
À des fins statistiques, les Nations Unies proposent de distinguer le
«migrant à long terme» (personne s'installant dans un pays
autre que son pays de résidence habituelle pour une période d'au
moins douze mois) du «migrant temporaire».
Travailleur migrant : Personne qui va
exercer, exerce ou a exercé une activité
rémunérée dans un État dont elle n'est pas
ressortissante [Convention internationale des Nations-Unies sur la protection
des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs
familles46.
Réfugié : Au sens de la
Convention de Genève de 1951, est éligible au statut de
réfugié toute personne qui, craignant avec raison d'être
persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa
nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de
ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la
nationalité et qui ne peut, ou, du fait de cette crainte, ne veut se
réclamer de la protection de ce pays. Il existe aussi une acception non
juridique de la notion de réfugié, qui désigne toute
personne contrainte à quitter son pays d'origine et ne pouvant y
rentrer47.
45 La convention des Nations unies de 1990 sur la
protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur
famille définit le terme « travailleur migrant ». Voir aussi
l'article 11 de la Convention de l'OIT de 1975 concernant les migrations dans
des conditions abusives et la protection de l'égalité de chances
et de traitement des travailleurs migrants (n ° 143) et de la Convention
de l'OIT sur les travailleurs migrants de 1979 (n ° 97) ; ainsi que
l'article 1 de la Convention européenne de 1977 sur le statut juridique
des travailleurs migrants.
46 Le Monde Diplomatique 1990-2007 "Article du Monde
Diplomatique
47 Robert Fossaert 1996 "L'avenir du socialisme
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Demandeur d'asile : Personne qui a
quitté son pays d'origine et souhaite obtenir le statut de
réfugié.
Migrant environnemental : Il n'existe pas de
définition figée de la migration environnementale. On peut
cependant considérer la migration environnementale comme une migration
causée, directement ou non, totalement ou en grande partie, par des
phénomènes environnementaux, qu'ils soient multiples ou uniques,
catastrophiques ou graduels, naturels ou anthropiques48.
Déplacé interne : Personne
forcée ou contrainte à fuir son lieu de résidence
habituel, notamment en raison d'un conflit armé, de situations de
violence généralisée, de violations des droits de l'homme
ou de catastrophes naturelles ou provoquées par l'homme et qui n'ont pas
franchi les frontières internationalement reconnues d'un État
[ONU] 4'.
Clandestins ou sans-papiers : Le terme
«clandestin», empreint d'un caractère péjoratif et
criminalisant, est communément mais abusivement utilisé pour
désigner des étrangers en situation irrégulière, et
laisse penser que ces personnes ont volontairement franchi
irrégulièrement la frontière du pays où elles se
trouvent, pour y rester dans l'illégalité. En
réalité, la plupart des étrangers en situation
irrégulière sont entrés régulièrement sur le
territoire européen : avec un visa de touriste, d'étudiant ou
autre, ou encore en déposant une demande d'asile à leur
arrivée. C'est le fait de demeurer dans le pays où ils se
trouvent une fois leur visa expiré, parce qu'ils n'ont pas pu obtenir le
droit d'y séjourner durablement, ou après le rejet de leur
demande d'asile, qui les fait basculer dans la catégorie des
«sans-papiers»50.
48 Agence Télégraphique Suisse 1993-1995
"Dépêches de presse de l'agence SDA-ATS
49 Le Monde 1994 "Extrait du Monde d'octobre 1994
50
https://www.lacimade.org/faq/qu-est-ce-qu-un-migrant/
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1.8 Méthodes utilisées
Analyse des stocks de migrants à partir de données
quantitatives et qualitatives tendance des migrations internes
Caractérisation des profils des migrants Comparaison des types de
déplacement suivant les dimensions des migrations
Nous retenons, pour collecter les informations et les
données, des méthodes et des techniques adaptées
aux objectifs que nous poursuivons. Notre choix reflète aussi les
ressources, le temps dont nous disposons ainsi que la globalité de la
réalité á saisir.
Nous optons pour la méthode descriptive
qui nous permet de photographier le terrain et la méthode
historique qui préconise l'observation et l'analyse de documents.
Les techniques que nous privilégions sont
la revue documentaire (écrits, documents, statistiques administratifs),
l'entretien libre qui libère la conversation et permet d'entrer dans les
détails d'un monde complexe et l'observation directe libre qui nous
livre l'espace51.
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51
https://www.memoireonline.com
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Section II : Cadres Théoriques ou la
littérature des auteurs
Il existe une carence d'études en matière de la
migration en Haïti, cependant quelques travaux ont été
réalisés. A part les données consacrées à la
migration internes des recensements de 1950, 1971, 1982 et 2003, nous
utiliserons, tout aussi bien, les rapports et études traitant du
phénomène. Au recensement de 1971, une étude a
été réalisée en deux phases à la Division
d'Analyse et de Recherches Démographiques de l'Institut Haïtien de
Statistique et d'Informatique, qui a porté respectivement sur la mesure
et les déterminants des migrations internes.
La première phase dressait un bilan des migrations
internes en Haïti et faisait état des principales zones d'origine
et de destination52. La deuxième phase identifiait, en
premier lieu, les causes de la migration dans les lieux de départ et, en
second lieu, mettait en corrélation les taux d'accroissement de la
population avec une série d'indicateurs sociaux et économiques
par commune. Cette dernière approche a permis de constater que les
communes les plus urbanisées ont perdu moins de leur population par la
migration tandis que celles qui ont des proportions très
élevées de leur Population Économiquement Active (PEA) en
agriculture ont connu de plus fortes émigrations de leurs
populations53.
Dans l'Enquête à Passages
Répétés de 1971-73, une section du rapport global
d'analyse a été consacrée à l'étude du
phénomène. Au recensement de 1982, le professeur Raymond
Gardiner, sur la base des données provenant d'un échantillon de
2,5 % extrapolé, a établi la matrice «origine - destination
» qui a permis de constater que l'Aire Métropolitaine de
Port-au-Prince représente le point de convergence des courants
migratoires qui traversent le pays54.
52 IHSI. 1981. Étude de la migration
interne, cahier Nos 4, phase I : les données démographiques. Port
-au - Prince, p 47.
53 IHSI, avril 1983.Cahier # 4 : Étude de la
Migration Interne, Phase II : Aspects Socio- économiques. Port-au-
Prince, p 46
54 Gardiner, Raymond. 1996. Détermination
des flux migratoires internes d'Haïti à partir de la matrice `'
origine destination de recensement général de la population et du
logement de 1982. Port-au-Prince, pp 1516.
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à 2018.
En 2002, l'enquête sur la migration vers les quartiers
défavorisés de l'aire métropolitaine de Port-au-Prince,
réalisée par l'Organisation Internationale pour la migration
(OIM) et le Fonds des nations unies pour la population (FNUAP), dont le rapport
d'analyse a été rédigé par le professeur Jacques
Hendry Rousseau, a permis d'avancer les principales causes de départ des
migrants de la zone ciblée. De plus, les principaux résultats de
l'enquête ont été présentés suivant trois
grands points à savoir : l'aspect quantitatif, les
caractéristiques socio- démographique et économique des
migrants et les motifs de la migration55.
A) La migration selon la pensée de
Frédéric Boyer : Migrants, mémoire du monde
La littérature la plus ancienne, celle qui nous a
formés et instruits depuis des millénaires, nous a décrit
l'expérience déchirante et inestimable de celui qui quitte sa
patrie et connaît l'exil. C'est à lui que nous devons notre monde
et notre identité, racontent les Anciens. Son récit est devenu le
nôtre. Sa migration est notre fondation. En témoigne
déjà Salluste, au début de notre ère: La tradition
m'a appris que Rome a été fondée initialement par des
Troyens fugitifs qui, sous la conduite d'Énée, erraient au
hasard56.
La guerre totale, la destruction d'une ville, Troie. Ceux qui
refusent d'endurer l'exil et meurent. Les vieillards poussant les plus jeunes
à fuir, à inventer une nouvelle vie ailleurs. Énée
qui décide de partir avec son tout petit garçon, Iule, sa femme
qu'il perdra net son vieux père Anchise qui mourra. Le héros de
Virgile fuit la nuit du monde qui était le sien, quand il n'y a plus
rien à espérer. L'errance est longue et cruelle. Des femmes
troyennes se lamentent avec des mots que nous pouvons entendre deux mille ans
plus tard: Depuis la ruine de Troie, sept ans qu'on nous transporte, qu'on nous
fait traverser les flots, toutes les terres, des rochers inhospitaliers, sous
tous les cieux, roulées par les vagues de la grande mer, à la
poursuite d'une Italie qui se dérobe57.
55 Rousseau, Jacques Hendry. 2002. Enquête
sur la migration vers les quartiers défavorisés de l'aire
métropolitaine de Port - au- Prince, Organisation Internationale pour la
migration (OIM) et Fonds des nations unis pour la population (FNUAP) : Port
-au- Prince. pp 76-85p
56 Salluste, Catilina -Jugurtha - Fragments des
Histoires, éd., trad. A. Ernout, Paris, 1947
57 Chant II de l'Énéide : La chute de
Troie Virgile, traduit du latin par Dominique Buisset Dans Poésie 2014/1
(N° 147), pages 121 à 141
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Ces grands récits rappellent ce que notre monde doit
à l'expérience fondatrice du déchirement, du voyage, de
l'exode. Énée fonde Lavinium, en mémoire de sa femme
Lavinie, fiction littéraire d'une ville fondée par un migrant,
célébrée comme modèle d'une Rome ouverte à
tous les étrangers, selon les mots de Sénèque (Consolation
à ma mère Helvia) qui, exilé en Corse par l'empereur
Claude en 41, écrit: Nous sommes appelés à nous retourner
vers l'exilé qui nous a fondés, qui en fuite, sa patrie
tombée, traînant ses maigres reliques, dut chercher un lointain
asile, et se réfugier en Italie. C'est lui qui détient notre
identité. Chaque migrant emporte avec lui comme Énée ses
Pénates, petite patrie errante. C'est aussi Ulysse, héros
paradoxal, « aux mille tours », d'une épopée de la
perte, et dont le voyage est la matrice narrative de l'expérience
même du monde.
C'est ce que rappellera Simone Weil en 1943 : les
réfugiés sont l'avant-garde de la condition humaine ». Que
sommes-nous en cette vie s'interrogeait déjà saint Augustin,
dès ses premiers textes, sinon « des voyageurs désireux de
mettre fin aux misères de l'exil 58?
L'existence même est « ce lointain voyage qui nous
éloigne de la patrie », alienare a patria, un éloignement
qui est aliénation (De Doctrina christiana). Nous sommes des peregrini
en cette vie, pèlerins, voyageurs, migrants. Tous des exilés. Qui
est d'autre Abraham, dans la Bible, sinon celui qui reçoit la promesse
d'une terre faisant de lui et de ses descendants un migrant, un ger en
hébreu (Gn 15, 13), celui qui s'arrache de son lieu et séjourne
en terre étrangère?
La racine du mot hébreu signifiant bien chercher
l'hospitalité. La promesse de Dieu à Abraham fait d'abord de lui
un migrant qui réclame l'hospitalité. Expérience
éthique fondatrice.
Mais l'éthique n'a de valeur que si nous en
éprouvons l'expérience, et ce que nous permet ici la
littérature : partager le sentiment d'autrui, éprouver sa
misère, découvrir qu'elle est peut-être fondatrice. «
Le sentiment de la misère humaine est une condition de la justice
59», affirmait encore Simone Weil. Renoncer à
éprouver ce sentiment c'est perdre toute justice.
58 Catherine Millot, La passion de Simone Weil Dans
La clinique lacanienne 2005/1 (no 8), pages 25 à
37
59 Emmanuel Gabellieri, LE DONNÉ ET LE
MYSTÈRE Notes sur phénoménologie, métaphysique et
révélation chez S. Weil Centre Sèvres « Archives
de Philosophie » 2009, 4 Tome 72, pages 627 à 644
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Notre tâche, si nous voulons demeurer qui nous sommes,
fidèles à notre mémoire du monde, c'est de nous porter au
secours de l'altérité persécutée. Fugitifs,
migrants, naufragés incarnent la figure la plus haute de notre
humanité. Nos plus grands récits racontent que ce sont eux qui
ont construit, imaginé, le monde dans lequel nous
vivons60.
B) La Migration d'après François
Crépeau : Le danger, c'est l'immobilité.
Le phénomène s'est accéléré
parce que les moyens de communication le permettent. Mais la migration est
l'état normal de fonctionnement de l'humanité. La
sédentarité n'est que très récente et n'est
même pas très fréquente: nous bougeons tout le temps. C'est
dans notre ADN. Nous sommes une espèce migrante, et ce n'est pas 400 ans
de théorie de la souveraineté territoriale qui vont changer cela.
Il y a en ce moment sur la planète plus de 250 millions de migrants.
Ce nombre devrait atteindre les 400 millions vers 2050. En
proportion, on reste à 3%, 3,5% de la population mondiale, comme c'est
le cas aujourd'hui61. La réduction de la population active,
notamment en Europe, va être un facteur majeur dans la transformation des
migrations. Il y a des tas de choses que nous faisions dans nos
sociétés que nous ne ferons plus. On aura besoin de migrants,
mais il faudra que cela se passe dans des contextes qui ne soient pas ceux de
l'exploitation. À cause de la globalisation, il y a un blocage autour
des migrations qu'il faudra dénouer, et cela prendra au moins une
génération. Ce blocage, c'est celui de la
délocalisation.
On a délocalisé vers le sud tout le secteur
manufacturier, mais au même moment, on a délocalisé vers le
nord les conditions de travail du Sud dans bien des secteurs de nos
économies, en ayant des migrants en situation irrégulière
ou des travailleurs étrangers avec des contrats très
précaires.
60 Frédéric Boyer, Migrants,
mémoire du monde le 17/09/2015
https://www.la-croix.com/Culture/Livres-Idees/Livres/Migrants-memoire-du-monde-2015-09-17-
61 Cf.
wwww. worldpopclock. com.
Nombre de pays ne disposant pas d'un système censitaire fiable, ou ayant
des données trop anciennes, on peut considérer que l'incertitude
concernant les effectifs de population mondiale est approximativement de 2
à 3%.
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Il s'agit de quelque chose de très structurel dans nos
sociétés: il y a toujours eu une main-d'oeuvre docile, flexible
pour faire des boulots terribles comme les esclaves, les serfs au Moyen
Âge ou les ouvriers du XIXe siècle, et aujourd'hui, ce
sont les travailleurs migrants qui occupent cette fonction. Cette
précarité est connue de tous, surtout de nos dirigeants, mais ils
ne font rien parce que c'est la condition de survie, dans la situation
actuelle, de toute une série de secteurs de l'économie.
a) Le droit pourrait-il régler cette
situation?
Le droit n'a jamais changé la vie des gens tout seul.
C'est un outil: il y a régulièrement des jugements de la Cour
européenne des droits de l'homme, de tribunaux partout en Europe qui
disent aux gouvernements ce qu'ils n'ont pas le droit de faire avec ces
populations. Le droit sert à quelque chose, mais par rapport aux
millions de migrants dont les droits sont bafoués, on n'a que quelques
dizaines de décisions.
Pour une raison assez simple: le migrant ne se plaint pas, ne
va pas devant les tribunaux. Il a investi énormément d'argent
pour venir dans nos pays. Il a aussi passé des mois qui peuvent avoir
été extrêmement durs avec de la torture, de l'extorsion,
avant d'arriver dans le pays où il travaille. Il porte entre ses mains
l'espoir de sa famille qui attend de l'argent en retour, qui attend qu'il
réussisse, qu'il puisse s'établir, se marier, avoir des
enfants.
b) Comment en est-on arrivé
là?
Parce qu'il n'y a pas, sur cette question, d'opposition dans
les systèmes dans lesquels nous sommes. Les personnels politiques
fonctionnent à l'incitatif électoral, et comme les migrants n'ont
pas de droit de vote, ils sont sans capacité de punir ou de
récompenser les politiciens. On ne connaît pas de politiciens,
sauf dans des partis marginaux, qui ont un discours pro-immigration, demandant
des chiffres supplémentaires d'immigration ou une bien meilleure
protection des travailleurs migrants... Il n'y en a pas.
Dans les faits, l'évaluation de l'insertion de ces
personnes est généralement celle d'un déclassement: des
personnes qui étaient ingénieurs chez eux deviennent simples
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techniciens dans le meilleur des cas. Après des
années d'attente, la personne a changé totalement de projet de
vie. Le danger, ce n'est pas la mobilité, c'est
l'immobilité62.
C) La migration selon L'archéologue Jean-Paul
Démoule : De tout temps, l'homme s'est déplacé
Revient sur les vagues migratoires qui ont fait la France
depuis que le premier «Homo Erectus» a posé le pied dans
l'Hexagone, il y a 1,5 million d'années, jusqu'à l'aube du XXe
siècle.
Vous avez organisé à la Cité de
l'immigration un colloque intitulé « Archéologie des
migrations » Pourquoi ne pas l'avoir intitulé « Histoire des
migrations63» ? Parce que l'histoire, qui repose sur les
écrits produits par les hommes, n'est pas suffisante pour retracer les
mouvements de notre humanité : elle couvre seulement les 5 000
dernières années, quand les migrations des humains remontent
à plusieurs centaines de milliers d'années. Seule
l'archéologie est à même de retracer les mouvements de
populations antérieurs, grâce aux traces de peuplement
retrouvées partout dans le monde.
a) De quand datent les premières migrations
dans l'Hexagone ?
L'homme s'est toujours déplacé. La
première grande vague migratoire à toucher l'Europe et la France
est celle d'Homo erectus64, l'ancêtre de Néandertal,
arrivé d'Afrique il y a... 1,5 million d'années de cela. La vague
suivante, aussi appelée deuxième sortie d'Afrique, correspond au
déplacement d'Homo sapiens, notre ancêtre direct : parti d'Afrique
il y a environ 100 000 ans, il mettra près de 60 000 ans avant
d'atteindre le territoire correspondant à la France actuelle, 40 000
avant notre ère donc. Les migrations de l'époque n'ont pas
grand-chose à voir avec les déplacements de population plus
récents : elles se font de proche en proche, génération
après génération, sur des périodes de temps
beaucoup plus longues donc, c'est la vague migratoire massive qui « suit
» celle de Sapiens en Europe, si l'on peut s'exprimer ainsi concernant des
plages de temps aussi longues. Elle
62François Crépeau, Le danger,
c'est l'immobilité»
https://www.laicite.be/magazine-article
le-danger-cest-limmobilite
63 Dominique Garcia et Hervé Le Bras,
Archéologie des migrations, Collection : Recherches/INRAP,
Éditeur : La Découverte. Année : 2017, France, Pages :
392
64 Claude-Louis Gallien, Les archanthropiens : Homo
erectus Dans Homo, Presses Universitaires de France, 2002, pages 280 à
314
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part du Proche-Orient, où naît l'agriculture, il
y a 10 000 ans environ et arrive en Europe de l'Ouest il y a 7 000 à 8
000 ans. Avec la sédentarisation et le développement de
l'agriculture, on assiste en effet à un boom démographique dans
les régions du Proche-Orient qui pousse une partie des populations
d'agriculteurs à la migration, les terres arables n'étant pas
extensibles à l'infini : des flux se créent vers l'Europe, via
l'Europe centrale et le Bassin méditerranéen, mais aussi vers
l'Asie centrale à l'est, et vers l'Égypte et l'Afrique du Nord.
Cette expansion très progressive des agriculteurs 20 kilomètres
par génération environ finit par submerger les populations «
indigènes » européennes de chasseurs-cueilleurs, comme le
confirment les études génétiques les plus
récentes65.
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65
https://lejournal.cnrs.fr/articles/de-tout-temps-lhomme-s'est-deplace
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Critique de la pensée de Frédéric
Boyer
L'écrivain, nous invite à retrouver la figure du
réfugié dans Homère, saint Augustin, la Bible ou Simone
Weil, montrant que les migrations ont été fondatrices de nos
civilisations, il nous montre la valeur et la capacité des travailleurs
migrants, celui qui a fui la guerre, la misère et la faim mais, peuvent
donner l'espoir dans un autre environnement de paix.
C'est une réflexion sur l'identité comme
possibles, une invitation à ne pas voir celui qui voudrait nous
rejoindre comme « le nouveau venu de trop, la goutte qui ferait tout
déborder, tout basculer ». C'est, pour considérer la page 36
du livre comme son centre névralgique, une invitation à en finir
avec « la peur de disparaître » qui pollue tant de discours sur
l'identité, les civilisations, la nation, le fantasme puant du «
grand remplacement 66».
Cependant, nous pouvons constater que l'auteur n'a pas mis
accent sur le droit des migrants, comme victime de toute
stéréotypes comment les migrants devons protéger leurs
droits?
Critique la thèse de François
Crépeau
L'auteur nous d'écrire la migration depuis la
genèse de l'humanité, la migration c'est notre ADN, pour lui
l'homme et la femme sont nés migrants, Pour lui les politiques
migratoires sont fondées sur des fantasmes, très souvent sur des
discours de fantasmes, de stéréotypes, de peurs et de menaces. Et
il va falloir que nous changions ça, il va falloir que les migrants, que
la voix des migrants, soit entendue, de manière à ce qu'on puisse
faire diminuer ces fantasmes, ces peurs, ces stéréotypes et qu'on
puisse commencer à réfléchir à des politiques
migratoires qui répondent aux push factors et aux pull factors, et qui
donc s'appuient sur une réalité économique, sociale,
politique et non pas sur les fantasmes dont sont nourris les
électoraux.
Nous pouvons constater, il a été trop direct
dans son texte, il s'est fait passer comme un défenseur de gauche en
prenant la défense des migrants, nous pensons qu'il allait utiliser un
style indirect pour faire valoir le droit des travailleurs migrants en outre
l'auteur était
66
https://la-philosophie.com/prologue-ainsi-parlait-zarathoustra
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trop centré sur le cas des migrants mais il n'a pas
tenu compte la misère des refugies et les demandeurs
d'asiles67.
Critique la pensée de Jean-Paul
Démoule
L'auteur a fait un travail colossale afin qu'il puise retracer
l'histoire de la migration, il nous donne quelques idées reçues
sur notre histoire et nos origines. Le travail de cet archéologue gagne,
de fait, à être mieux connu. C'est un travail qui mérite
d'être apprécié mais qui ne traite pas la question sur le
plan globalisation de la migration, il ne traite pas les questions d'ordre
juridique, le vécu des migrants, la vie des refugies
Prises de positions
Notre tour d'horizon permet d'identifier les principales
propositions théoriques issues de c'est trois littératures
scientifiques pour comprendre la thématique de la migration. Au fil des
trois travaux étudient leurs littératures nous aide à
mieux cerner le concept de la migration sur plusieurs angles :
Frédéric Boyer : Migration, mémoire du monde.
(Anthropologie de la migration) François Crépeau : Le danger,
c'est l'immobilité (Droit et Migration) et Jean-Paul Démoule : De
tout temps, l'homme s'est déplacé (Archéologie de la
migration) mettre en avant le caractère multidimensionnel du
phénomène migratoire.
Donc, après avoir analysé et
synthétisé les trois textes, nous avons choisi le texte de
François Crépeau pour voir mener à bien notre travail car
nous avons trouvé comment il a pu traiter cette thématique avec
rigueur et une littérature scientifique capable de nous aider à
mieux comprendre le champ de notre travail scientifique.
67 PARKINS N. (2010). Push and Pull factors of
Migration, American Review of Political Economy, vol. 8, n°2, 6-24.
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Chapitre II : Valeurs institutionnelles juridiques de
la recherche
Section I : Cadres institutionnels de la recherche
Dans notre pays, le contrôle et la gestion de la
migration sont attribués à diverses instances qui se manifestent
généralement par l'offre de certains services et de prestations
sociales. Le Ministère de l'Intérieur et des Collectivités
Territoriales assure les fonctions régaliennes, la défense
nationale; il contrôle, entre autres, le service de l'immigration qui
délivre les passeports. Le ministère de la justice analyse les
dossiers qui se rapportent à la justice; le ministère des
haïtiens vivant á l'étranger intervient dans les relations
nationales et celles des pays étrangers, il se préoccupe des
haïtiens de l'extérieur. Le Ministère des Affaires
Étrangères, auquel est confié le rôle d'officier
d'état civil, crée un cadre propice pour les Haïtiens
résidant à l'étranger et octroie les visas
d'entrées. En dernier lieu, le Ministère des Affaires Sociales
qui se charge des problèmes de la société joue un
rôle très actif dans la distribution des dons aux
rapatriés.
Par ailleurs, le gouvernement de l'époque a
créé deux autres institutions après la conférence
mondiale du CIPD en 1994 tenue à Mexico.
Le premier est le Ministère des Haïtiens vivant
à l'Étranger. Il est créé par un décret en
janvier 1995 et a une triple mission :
a) Conduire la politique du pouvoir exécutif en
matière de coopération entre les haïtiens de
l'extérieur et ceux de l'intérieur.
b) Faciliter, au besoin, la concertation entre les
différentes communautés haïtiennes en ce qui a trait
à leur coopération avec Haïti.
c) Participer à la commission mixte haïtiano -
dominicaine.68
Le second, l'Office National de la Migration (ONM) qui
fonctionne sur la tutelle du Ministère des Affaires Sociales. Le
décret du 27 mars 1995 lui donne naissance. Sa mission est d'accueillir
et d'insérer les rapatriés, les déplacés internes;
et ensuite de proposer une politique migratoire.
68 Office nationale de la migration (ONM). 2000.
Projet de politique migratoire, document préliminaire. Port-au-Prince, p
48.
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Le Ministère des Haïtiens vivant à
l'étranger est prévu comme structure institutionnelle lors de
l'exécution du décret de janvier 1995, cependant
l'ambiguïté se manifeste lors de la prise de décision. La
situation n'est pas différente de celle de l'ONM, le décret
créant l'institution n'est pas publié. Il n'existe pas de loi qui
énonce clairement ses objectifs et ses critères. Le
contrôle et la gestion du phénomène migratoire haïtien
ne sont pas bien définis. Les déplacements à
l'intérieur du pays se font sans la moindre intervention de
l'État, les décisions pénales ne sont pas prises et ni
exécutées par le tribunal correctionnel.
1.1Impact des travailleurs migrant sur le plan social
Il visait à examiner l'attitude du ministère du
Travail face à la couverture sociale des travailleurs migrants dans
l'entre-deux-guerres. Cet angle d'analyse engageait plusieurs processus
historiques de portée large et requérait de reconstituer le tissu
d'institutions, tant nationales qu'internationales, qui fixait l'horizon
d'action et de réflexion du ministère du Travail.
En effet, l'intérêt de l'entre-deux-guerres pour
les droits sociaux des migrants ne peut être compris à
l'échelle nationale. Il est partagé par toutes les nations du
monde industrialisé, depuis qu'elles ont entrepris de développer
des systèmes nationaux de protection sociale : le franchissement des
frontières nationales pose désormais la question des droits
à conférer aux étrangers, processus dans lequel chaque
État, un peu à la manière d'un vaste système de
compensation à l'échelle mondiale, est engagé.
Dès la fin du XIXe siècle, des
conférences internationales se consacrent spécifiquement à
la question. Dans les années vingt, elles sont relayées par les
grandes organisations internationales nées au lendemain de la
Première Guerre mondiale. Plusieurs solutions sont adoptées et,
parfois, se combattent pour réglementer le statut des migrants, des
conventions internationales patronnées par le Bureau international du
Travail, aux traités bilatéraux entre pays émetteurs et
récepteurs.
Dans ce processus, le ministère du Travail joue, dans
chaque pays, un rôle majeur, qui ne peut être compris qu'en
adoptant une perspective « relationnelle ». À travers la
question « stratégique » des droits sociaux des migrants, on
peut reconstituer l'univers des contraintes
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qui pèsent sur le ministère, circonscrire son
périmètre d'action et son efficacité propre,
étudier sa réaction aux pressions politiques et institutionnelles
qui s'exercent sur lui, et enfin examiner sa façon d'utiliser et de
s'approprier des propositions et des projets conçus par des experts dans
des instances qui échappent à son contrôle direct.
La démarche permet également de franchir les
frontières nationales. Partir d'un objet circonscrit mais sensible
permet en effet d'inclure dans l'analyse les connexions internationales qui
font partie prenante de l'horizon du ministère du Travail. Nous avons
suivi ses représentants dans les grandes instances consacrées aux
migrations de travail : les conférences internationales tout d'abord,
qu'elles soient administratives, savantes, ou suscitées par des
associations de défense des migrants ; mais aussi les organismes
internationaux. Nous avons prêté une attention particulière
au Bureau international du Travail, et aux pressions de divers types qu'il a
exercées sur le ministère du Travail. Le cas des migrations de
travail nous a permis de mieux mesurer les modalités et
l'efficacité relative de ces pressions extérieures, et du
même coup les limites de l'autonomie du ministère du
Travail69.
Notons au passage que ces divergences ou incohérences,
qui peuvent affaiblir la maîtrise étatique des migrations, ne
minimisent en rien les inconforts de la condition des immigrants ni les
pratiques discrétionnaires dont ils sont l'objet, car elles se
traduisent par des changements d'attitude souvent brusques de la part des
institutions qui déterminent leur sort dans le pays
d'accueil70.
69 Premières publications issues du rapport
de recherche : Caroline Douki, David Feldman et Paul-André Rosental,
« Pour une histoire relationnelle du ministère du Travail en
France, en Italie et au Royaume-Uni dans l'entre-deux-guerres : le
transnational, le bilatéral et l'interministériel en
matière de politique migratoire », in Alain Chatriot, Odile
Join-Lambert et Vincent Viet (ed.), Les politiques du travail (1906-2006).
Acteurs, institutions, réseaux, Rennes, Presses universitaires de
Rennes, 2006, p. 143-159.
Paul-André Rosental, « Géopolitique et
État providence : le BIT et la politique mondiale des migrations dans
l'entre-deux-guerres », Annales. Histoire, sciences sociales, 61, 1, 2006,
numéro thématique « Histoire politique des populations
», p. 99-134.
70 Caroline Douki, David Feldman et
Paul-André Rosental, La protection sociale des travailleurs migrants
dans l'entre-deux-guerres : le rôle du ministère du Travail dans
son environnement national et international (France, Italie, Royaume-Uni) Note
de synthèse du rapport de recherche. Dans Revue française des
affaires sociales 2007/2, pages 167 à 171.
https://www.cairn.info/revue-francaise-des-affaires-sociales-2007-2-page-167.
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1.2 Impact des travailleurs migrants sur le plan politique
:
La migration sur le territoire d'un autre pays non seulement
facilite l'engagement dans la politique du pays d'origine, mais est
également source d'une influence inédite. Premièrement,
l'installation sur le territoire d'un État démocratique
entraîne l'accès aux droits, même si ces derniers sont
variables et contestés. À long terme, le matériel et le
politique sont complémentaires.
La même logique encourageant l'économie familiale
Trans-étatique appuie les projets poursuivis par les migrants qui
s'engagent dans la politique à longue distance : puisqu'ils
réunissent des fonds dans un pays où les salaires sont
élevés d'aider la mobilisation politique dans les pays ou le
coût de la vie est moindre, de petites contributions venant des ouvriers
immigrés travaillant dans les situations les plus défavorables
fournissent aux exilés les ressources qu'ils requièrent d'exercer
de l'influence dans le pays d'origine.
De plus, même parmi les plus défavorisés
des migrants, il y en a toujours qui progressent bien au-delà des
positions désavantageuses qu'ils ont initialement occupées.
Certains d'entre ces derniers sont prêts à mettre leurs ressources
et leurs contacts trans-étatiques. Que les migrants puissent se
mobiliser dans un pays plus puissant, jouissant de la capacité d'agir
d'une manière qui pourrait aider ou nuire aux régimes des pays
d'émigration, ajoute à l'influence que peuvent exercer les
expatriés.
De plus, le blocage qu'ils auraient éprouvé
s'ils étaient restés chez eux, se trouve dépassé
dans le pays d'accueil, où ils arrivent à ériger des
alliances avec des acteurs détenant de l'influence dans un pays
puissant, ce qui oblige les dirigeants du pays d'émigration à
prêter attention à ceux qu'ils ont antérieurement
négligés. Bien entendu, cette possibilité ne fait pas
l'objet de la préférence des États émetteurs.
Puisque les États d'émigration peuvent se servir d'amis bien
placés, ils préfèrent plutôt que la politique des
émigrants se transforme en politique des immigrants, ce qui permettrait
aux immigrants de se convertir en lobbyistes ethniques71.
71 Roger Waldinger is Distinguished Professor of
Sociology at UCLA, where he served as Interim Associate Vice-Provost for
International Studies from 2010-2012, Chair of the Department of Sociology from
1999 to 2004 and Director of the Lewis Center for Regional Policy from 1995 to
1998
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à 2018.
L'espoir partagé par tous est d'imiter ce qu'on
perçoit être la réussite du lobby juif, comme l'a
indiqué Jean-Baptiste Aristide il y a trente ans quand, en tant que chef
de la révolte populaire contre la dictature Haïtienne au
début des années 90, il a fait appel aux Haïtiens
résidant aux États-Unis pour les encourager à imiter les
Juifs Américains. Malgré des divergences de contexte et
d'expérience assez marquées, l'idée n'est pas seulement
partagée parmi les États émetteurs des pays
américains, mais se répand bien plus largement.
Pour donner un exemple, nous citons le travail de la
sociologue Eva Ostergaard-Nielsen (2003 : 90), spécialiste de la
migration turque qui raconte qu'un membre de l'Assemblée turque lui a
dit que « tout le monde veut un lobby juif »
Mais le mariage entre politique des émigrants et
politique des immigrants n'est pas si facile à arranger. Puisque les
émigrants se sont soustraits au contrôle de l'État
émetteur, ils peuvent poursuivre la politique en tant qu'immigrants de
mettre en place une politique à l'opposée de celle
préconisée par l'élite dans le pays
d'origine72.
L'exemple des Cubains illustre ce modèle. Dès
qu'ils touchent le sol américain, les Cubains reçoivent la
résidence permanente ; ils procèdent rapidement à la
démarche suivante, obtenir la citoyenneté aussi vite que possible
; s'étant munis de la citoyenneté, ils votent, et à un
haut pourcentage ; ils se concentrent dans les États de Floride et du
New Jersey où le résultat des élections
présidentielles est souvent décisif ; Enfin, ils votent en bloc,
ce qui les rend irrésistibles aux candidats en quête de votes. Par
conséquent, les deux partis s'efforcent de soutenir le programme mis en
avant par les exilés et qui visent à accroître la pression
subie par le régime cubain73.
72 Roger Waldinger, « La politique
au-delà des frontières : la sociologie politique de
l'émigration », Revue européenne des migrations
internationales [En ligne], vol. 32 - n°3 et 4 | 2016, mis en ligne
le 01 décembre 2018, consulté le 07 juillet 2019.
73 Arthur M. Eckstein is Professor of History at
the University of Maryland, College Park, and the author of Moral Vision in the
Histories of Polybius and Senate and General: Individual Decision Making and
Roman Foreign Relations, 264-194 B.C., both from UC Press.
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1.3 Impact des travailleurs migrants sur le plan
économique :
L'accélération de la mondialisation de
l'économie a créé plus de travailleurs migrants que jamais
auparavant. Le chômage et la pauvreté croissante ont amené
de nombreux travailleurs dans les pays en développement à
rechercher du travail ailleurs. Dans les pays industrialisés, la demande
de main-d'oeuvre, en particulier de main-d'oeuvre non qualifiée, a
augmenté. C'est pourquoi, des millions de travailleurs et leur famille
émigrent pour trouver du travail. Il y aurait 232 millions de migrants
dans le monde aujourd'hui, soit 3.1 %de la population mondiale. Près de
la moitié des migrants sont des femmes. Il n'est estimé par
ailleurs qu'un migrant sur huit est âgé de 15 à 24 ans.
Les travailleurs migrants contribuent à
l'économie du pays d'accueil et les fonds qu'ils envoient chez eux
aident à dynamiser l'économie de leur pays d'origine. Pourtant,
ils bénéficient souvent d'une protection sociale insuffisante et
sont à la merci de l'exploitation et de la traite. Si les risques
d'exploitation sont moindres pour les travailleurs migrants qualifiés,
leur départ prive certains pays en développement d'une
main-d'oeuvre précieuse nécessaire à leur économie.
Les normes de l'OIT sur la migration donnent les moyens aux pays qui envoient
des migrants ou les accueillent de gérer les flux migratoires et
d'assurer une protection adéquate à cette catégorie
vulnérable de travailleurs74.
1.4 Impact des travailleurs migrants sur le plan culturel
:
Le contexte mondial actuel se caractérise par une
accélération de la circulation des capitaux, des biens et des
services, créant des pressions sur les mouvements migratoires
internationaux. Depuis les dix dernières années, on assiste
effectivement à une augmentation de la migration internationale, en
particulier dans les pays développés qui deviennent par le fait
même de plus en plus multi-ethniques et multiculturels. La
diversité culturelle qui en découle engendre de nouveaux
défis de «gestion» pour les États et les organisations
internationales.
74
https://www.ilo.org/global/docs/WCMS_306655/lang--en/index.htm
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Les réponses politiques à ces défis se
situent à la fois au niveau international, par l'augmentation du
multilatéralisme en matière de migrations internationales, et au
niveau national, par l'adoption de solutions qui empruntent soit la voie
législative (e.g. interdiction des symboles religieux à la
française), soit la voie légale (e.g. jugements des cours de
justice basés sur la notion d'accommodement raisonnable à la
canadienne). Même si la voie de l'accommodement semble davantage
appropriée aux sociétés multiculturelles, elle n'est pas
exempte de dérives comme pourrait l'être l'introduction de la
charia dans les médiations conjugales et familiales75.
De par la multitude des définitions - elles sont plus
de deux cents - consacrées au terme « culture », il est plus
pertinent de parler d'un concept que d'un simple mot de langue. Au-delà
des croyances et des pratiques, une culture se caractérise par ses
manières de penser le monde, les individus, la famille, etc., à
partir des mythes fondateurs et des interdits fondamentaux. Les rencontres
cliniques avec les familles migrantes mettent le clinicien face aux
difficultés du « travail de la culture » comme processus
d'élaboration intrapsychique et « Trans individuel » de
l'expérience de vie (Zaltmann, 2007). Ces difficultés constituent
le socle du « travail de la migration » (Truffaut, 2006) qui s'ajoute
au « travail de deux ou plusieurs cultures » et permettent
d'apprécier la créativité des familles migrantes, celle
des professionnels.
Le problème ne réside donc ni dans les cultures
d'origine des familles migrantes, ni dans celle du pays d'accueil ; il
réside dans l'absence de cadres et de dispositifs susceptibles de
contenir les métissages culturels et les dynamiques de transition
initiées par l'ensemble des mutations individuelles, familiales et
sociales à l'oeuvre au sein de la société
française. Si la migration provoque inéluctablement des mutations
dans les familles migrantes, le travail de la culture apparaît de
manière plus intense chez leurs enfants à la période de
l'adolescence76.
75 Piché, V. (2005). Immigration,
mondialisation et diversité culturelle : comment « gérer
» les défis ? Les Cahiers du Grès, 5 (1), 7-28.
https://doi.org/10.7202/010877ar
76 Isam Idris, Cultures, migration et
sociétés : destin des loyautés familiales et culturelles
chez les enfants de migrants : Dans Dialogue 2009/2 (n° 184), pages 131
à 140.
https://www.cairn.info/revue-dialogue-2009-2-page-131.htm#pa
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1.5 Impact des travailleurs migrants sur le plan juridique
:
Les débats sur les politiques migratoires ne se
déroulent pas dans un vide juridique, dans un espace de non-droit
où règnerait la raison d'État. Des principes, des textes
et des outils existent, notamment pour un internationaliste. Certes l'audace de
la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 est toute
relative lorsqu'elle proclame à l'article 13, alinéa 2, que
« toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de
revenir dans son pays »77. Cette liberté d'aller et
venir n'implique pas une obligation pour les pays tiers, en dehors de
l'hypothèse du droit d'asile, qui est prévue à l'article
14, alinéa 1 : « Devant la persécution, toute personne a le
droit de chercher asile et de bénéficier de l'asile en d'autres
pays78 » Tout au plus doit-on relever que ce droit de
bénéficier de l'asile n'a pas pour contrepartie une obligation
incombant à un État déterminé, même si la
convention de Genève de 1951 relative au statut des
réfugiés, consacrant le principe de non-refoulement, fait peser
ce poids sur le pays de premier asile.
Les politiques d'harmonisation européenne n'ont que
trop tendance à aborder en même temps les questions d'asile et
d'immigration en voyant dans les demandeurs d'asile des immigrants clandestins
pour qu'il soit nécessaire de souligner qu'il s'agit là de deux
problématiques différentes et de deux régimes juridiques
distincts. Dans notre contribution, nous nous en tiendrons à la question
générale des droits de l'homme des étrangers et notamment
des migrants.
Rares sont les travaux consacrés à la question
migratoire en Méditerranée sous un angle juridique qui tiennent
compte de l'influence normative européenne sans la survaloriser.
D'autres, plus nombreux, répondent à des commandes
institutionnelles et relèguent au second plan la problématique de
la convergence normative pour porter leur attention sur la description des
dispositifs législatifs et réglementaires à l'oeuvre dans
les différents foyers migratoires nationaux. Il nous semble,
malgré des différences de fond certaines, que les premiers comme
les seconds s'appuient sur des présupposés théoriques qui
considèrent le droit, au mieux comme un reflet du politique, au pire
comme un instrument à son service.
77 Emmanuel Decaux, Droits des travailleurs
migrants et droit international des droits de l'Homme Dans Migrations
Société 2008/3-4 (N° 117-118), pages 185 à 198.
http://www.un.org/french/aboutun/dudh.htm
78 Ibidem
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Cette politique est, en l'occurrence, dicté par un
acteur puissant en Méditerranée : l'Union européenne.
De ce fait, la marge de manoeuvre des États du littoral
sud de Méditerranée occidentale se trouverait réduite
à néant et, par suite, le législateur aurait, dans ces
pays, une sorte de compétence liée ou, pour utiliser le
vocabulaire idoine, une souveraineté limitée. S'il convient de
leur donner raison quant à l'intérêt soudain
manifesté, nolens volens, par les États du Maghreb pour la «
chose juridique » en matière migratoire, on ne saurait suivre plus
avant leur raisonnement sauf, d'une part, à escamoter la dimension
géopolitique qui imprègne fortement les relations
Euro-méditerranéennes et, d'autre part, à nier toute
autonomie normative aux systèmes juridiques autochtones et,
au-delà, à la règle juridique en
général79 .
La production de la norme juridique en matière
migratoire en Méditerranée met à nu plusieurs
réalités. Tout d'abord, celle de la communautarisation des
politiques d'immigration et d'asile soumise, non pas comme c'était
l'objectif tracé à Tampere à des standards
élevés en matière de protection des droits de l'homme mais
à des standards a minima imposés par les États.
L'harmonisation normative qui en était attendue est ainsi
distillée dans une politique « utilitariste » conduite par les
États réduisant l'asile à l'immigration et celle-ci
à l'illégalité.
Ensuite, elle montre la complexité du processus «
d'exportation » de la norme juridique et des limites de son «
implantation » dans des environnements politiques et institutionnels
nationaux différents, particulièrement dans le domaine sensible
de la « surveillance et du contrôle » des étrangers,
domaine toujours corrélé à la souveraineté
nationale qui, dans bien des cas, est mâtinée
d'autoritarisme80.
79 Hocine Zeghbib, « Normativité
juridique et géopolitique des migrations en Méditerranée
», Méditerranée, 113 | 2009, 93-104.
80Hocine Zeghbib, Normativité juridique et
géopolitique des migrations en Méditerranée ,
Méditerranée [En ligne], 113 | 2009, mis en ligne le 31
décembre 2011, consulté le 08 juillet 2019. URL :
http://journals.openedition.org/mediterranee/3741
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Critiques de la prise de position.
Sur le plan socioéconomique, d'anciens
émigrés aspirent à rentrer (définitivement ou
périodiquement) en Haïti, mais les conditions de la concurrence
sont faussées. Les règles éthiques de compétition
loyale non seulement font défaut dans le système
économique traditionnel haïtien, mais surtout les structures
familiales archaïques sont entretenues par des groupes
hégémoniques qui profitent de la grave fracture
socioéconomique du pays. Des banques commerciales haïtiennes
liées principalement au secteur de l'importation (et moins à
l'investissement productif) trouvent leur compte dans les transferts financiers
des émigrés et utilisent ces devises pour compenser le
déficit presque constant de la balance commerciale d'Haïti. Selon
la Banque inter-américaine de développement (BID), en 2006 les
émigrés haïtiens ont transféré la somme de
1,65 milliard de dollars américains vers leurs familles restées
en Haïti.
Dans cette perspective, la crise haïtienne c'est aussi le
retour (périodique) potentiel de nouveaux acteurs
«rémigrés» exigeant une démocratisation du champ
économique et la peur des tenants d'un système mercantile mafieux
(centralisé principalement à Port-au-Prince) qui ne jurent que
par la franchise douanière, l'argent rapide et le financement des
troubles sociopolitiques. La décennie 1990 a montré qu'un embryon
de groupes d'acteurs économiques transnationaux haïtiens
émerge et manifeste sa volonté d'être actif entre les
sociétés de départ et d'arrivée. Cela engendre des
changements sociaux profonds dans le mode de consommation, d'habillement, etc.,
par l'accès aux liquidités monétaires et les transferts de
nourriture des membres d'une famille, installés en Floride par exemple,
vers le reste de la famille habitant les zones rurales en Haïti. Les
mouvements de population ont non seulement largement
«dédensifié» les campagnes, mais surtout beaucoup de
ceux qui y habitent sont, en matière d'habitat et de nouvelles pratiques
socioéconomiques, touchés par les rémigrations. Ainsi, les
transferts financiers de l'étranger vers les zones rurales
haïtiennes rendent le paysan tributaire de ces transferts d'argent. Pour
vivre, il est obligé de suivre de manière périodique les
fluctuations des devises américaine, canadienne (le dollar de Miami et
de Montréal) et européenne (l'euro de Cayenne) par rapport
à la monnaie haïtienne (la gourde) pour dégager des marges
de manoeuvre financières et réaliser ses projets individuels ,
dans un va-et-vient identitaire entre les campagnes et les
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bidonvilles en Haïti. Les transferts financiers
transnationaux et leurs conséquences socioéconomiques
détruisent donc le sens du « pays en dehors », puisque le
paysan haïtien malgré lui et à cause de l'émigration
familiale au cours de plusieurs décennies est connecté au jeu
spéculatif du marché financier international, même si c'est
par le bas.
En Méditerranée, plus particulièrement
dans sa partie occidentale, se joue, pour le contrôle des mouvements
migratoires, une partie d'échec à double entrée :
verticalement entre les États littoraux du nord et ceux du sud,
horizontalement entre les membres de chacun de ces deux sous-ensembles
étatiques ce qui n'est pas sans incidence sur les politiques migratoires
de ces États pris séparément et sur leur traduction
législative et réglementaire81.
En tous temps et en tous lieux, les migrations
entraînent l'extension des réseaux de populations, d'informations,
et de biens au-delà du territoire de l'État. En partant d'un pays
pour un autre, les migrants se déplacent d'une société au
territoire d'un autre État, ce qui produit une convergence des
sociétés. La manière de comprendre ce déplacement
dépend du lieu depuis lequel on l'observe. Du point de vue des
États récepteurs et de leurs peuples, la migration entraîne
l'arrivée ici, de personnes étrangères qui auraient
dû rester là-bas, dans les terres étrangères.
Les migrants, en revanche, se trouvent entre les deux rives,
une situation qui leur fournit des ressources qui comptent dans les relations
avec les parents, les communautés, et l'État du lieu d'origine.
Cependant, bien que dans les relations avec ceux qui restent là-bas les
migrants tirent des avantages de leur mouvement d'un pays à l'autre, la
condition d'étranger soit dans le sens social, soit dans le sens
juridique les laisses vulnérables82.
81 Cf. Hocine Zeghbib, « Normativité
juridique et géopolitique des migrations en Méditerranée
», Méditerranée, 113 | 2009, 93-104.
82 Roger Waldinger, La politique au-delà des
frontières : la sociologie politique de l'émigration,
FMSHWP-2012-20, septembre 2012.
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Section II : Cadre juridique
2.1 La Constitution Haïtienne
L'adoption de la constitution du 29 mars 1987 rend caduques
toutes lois qui lui sont contraires. Elle risque de contrarier les
prévisions établies antérieurement. Ainsi, se
présente le problème de l'étendue de l'application des
lois anciennes. D'après le code civil, la loi ne dispose que pour
l'avenir, elle ne peut rétroagir.
La législation haïtienne sur les migrations
internes est contenue dans le code civil et autres recueils de lois en vigueur.
En effet, la loi # 4 ayant pour titre déterminant le domicile (article
91 à 97) et dans le code rural François Duvalier en vigueur Loi
III et VIII concernant respectivement les paysans et les citadins (articles 17
à 18) ; et la police rurale (article 330 à 347) 83.
Des décrets ont été pris ; des accords et
conventions ont été signés. Le 14 mars 1977 un
décret autorise le laisser passer pour se rendre en République
Dominicaine.
Le décret du 26 septembre 1978 se préoccupe de
la réglementation de l'immigration. Plus récemment, un projet de
loi visant à lever une série de barrières relatives
à l'intégration des
D'après le décret du 25 mars 1995, l'Office
national de la migration (ONM), est chargé de l'élaboration du
projet de la politique migratoire, mais sa mise en oeuvre concerne les
ministères, particulièrement le Ministère des
Haïtiens vivant à l'étranger qui devient l'organisme
central, chargé de la gestion du phénomène migratoire
haïtien, si l'on se réfère à l'une des missions de
cette instance exécutoire84.
83
https://www.memoireonline.com/07/17/9983/m_Le-projet-de-politique-de-la-migration-de-l-ONM-contraintes-et-perspectives17
84 Office nationale de la migration (ONM). 2000.
Projet de politique migratoire, document préliminaire. Port-au-Prince, p
59
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2.2 La réglementation internationale actuelle sur
les travailleurs migrants
A) Instruments élaborés par l'ONU
Instrument concernant spécifiquement les
travailleurs migrants
En 1990, les Nations Unies ont adopté un instrument
d'ensemble réglementant la plupart des aspects des migrations
internationales: la Convention internationale sur la protection des droits de
tous les travailleurs migrants et des membres de leurs familles («La
convention des Nations Unies»)85. Les instruments de l'OIT et
la convention des Nations Unies ont des objectifs similaires: promouvoir les
droits et la protection des personnes qui émigrent en vue d'obtenir un
emploi, décourager et éliminer progressivement les migrations
irrégulières. La convention des Nations Unies donne une
définition plus large du «travailleur migrant» que les
conventions de l'OIT puisqu'elle inclut les travailleurs frontaliers, les gens
de mer et les travailleurs indépendants; cela vaut aussi pour la
définition de la «famille».
La Déclaration universelle des droits de l'homme,
adoptée en 1948, par l'Assemblée générale des
Nations Unies, proclame que tous êtres humains naissent libres et
égaux en dignité et en droits, sans distinction de race, de
couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre
opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute
autre situation. Plusieurs autres instruments de l'ONU prévoient la
protection des travailleurs migrants contre la discrimination et l'exploitation
pour des motifs autres que leur statut de non-nationaux, y compris la
Convention internationale sur l'élimination de toutes les formes de
discrimination raciale (1965). C'est l'une des conventions des Nations Unies
sur les droits de l'homme la plus largement ratifiée86 et,
s'il est vrai qu'elle oblige les États parties à bannir la
discrimination fondée sur la race, la couleur, l'ascendance ou l'origine
nationale ou ethnique à l'encontre de toutes les personnes relevant de
leur juridiction et à appliquer des sanctions pour les activités
procédant d'une telle discrimination, elle ne s'applique pas à la
discrimination fondée sur la nationalité, à laquelle les
migrants sont par définition très exposés.
85 Entrée en vigueur le 1er juillet 2003, elle
totalisait 25 ratifications au 12 février 2004.
86 169 ratifications au 1er février 2004.
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B) Instruments élaborés par l'OIT
Parmi les instruments relatifs aux travailleurs migrants, on
peut citer les conventions spécifiques nos 97 et 143 et les
recommandations qui les accompagnent, les instruments sur les principes et
droits fondamentaux et, en principe, toutes les autres normes de l'OIT.
Conformément à la Déclaration de l'OIT relative aux
principes et droits fondamentaux au travail et son suivi, adoptée en
1998, tous les États Membres de l'OIT ont l'obligation, du seul fait de
leur appartenance à l'Organisation, de respecter, promouvoir et
réaliser, de bonne foi et conformément à la Constitution,
quatre catégories de principes et droits au travail, même
lorsqu'ils n'ont pas ratifié les conventions en question: la
liberté d'association et la reconnaissance effective du droit de
négociation collective; l'élimination de toute forme de travail
forcé ou obligatoire; l'abolition effective du travail des enfants;
l'élimination de la discrimination en matière d'emploi et de
profession. Les principes et droits fondamentaux au travail sont universels et
applicables à tous les individus dans tous les États, quel que
soit le niveau de développement économique. Ils s'appliquent donc
à tous les travailleurs migrants sans distinction, que leur
séjour soit temporaire ou permanent, qu'ils soient en situation
régulière ou irrégulière. En outre, la
Déclaration de 1998 fait expressément référence aux
groupes ayant des besoins particuliers, y compris les travailleurs
migrants87.
Au cours des dix à quinze dernières
années, le statut spécial reconnu à ces principes et
droits fondamentaux a évolué; ils constituent l'essence des huit
conventions «fondamentales» de l'OIT, qui définissent plus en
détail et dans un cadre juridique formel leur portée et leur
contenu. La campagne en faveur de la ratification universelle de ces
instruments a été couronnée de succès. Le nombre de
ratifications a fait un bond au cours de la dernière décennie.
Toutes ces normes, qui visent les travailleurs migrants au même titre que
tous les autres travailleurs, sont donc contraignantes pour une grande
majorité d'États Membres88.
87 Conférence internationale du Travail, 92e
session, 2004 Rapport VI, Une approche équitable pour les travailleurs
migrants dans une économie mondialisée, Sixième question
à l'ordre du jour Bureau international du Travail Genève,
Première édition 2004 p- 84.
88 BIT, Bureau international du Travail, CH-1211
Genève 22, Suisse, ou par
e-mail: pubvente@ilo.org ou par
notre site web:
www.ilo.org/pblns.
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La Convention exige des États parties, entre autres, de
maintenir ou de faciliter un service raisonnable et libre afin d'aider les
travailleurs migrants et de leur fournir des informations adéquates ; de
prendre toutes mesures nécessaires contre la propagande trompeuse
concernant l'immigration et l'émigration ; et d'assurer
l'égalité juridique en matière de travail
(égalité de chances et de traitement) entre migrants avec papier
et ressortissants. La Convention n'aborde pas particulièrement la
question des travailleurs sans papier ou illégaux, hormis en exigeant
des États qu'ils imposent « des peines appropriées »
à ceux qui encouragent la migration illégale ou clandestine.
En 1975, l'OIT adopte la Convention concernant les migrations
dans des conditions abusives et sur la promotion de l'égalité de
chances et de traitement des travailleurs migrants89. La Convention
oblige les États parties à respecter les principaux droits de
l'homme de tous les travailleurs migrants90 indépendamment de
leur situation légale dans le pays de l'emploi. Cependant, comme pour la
Convention de 1949 sur les travailleurs migrants, cette obligation ne
s'étend pas au droit d'égalité des chances et de
traitement avec les ressortissants91.
a) Principes et droits fondamentaux au
travail
Liberté syndicale et négociation collective
La convention (no 87) sur la liberté syndicale et la
protection du droit syndical,
194892, et la convention (no 98) sur le droit
d'organisation et de négociation collective,
89 Convention concernant les migrations dans des
conditions abusives et sur la promotion de l'égalité de chances
et de traitement des travailleurs migrants, 1975, OIT n° 143,
entrée en vigueur le 9 décembre 1978 [Ci-après :
Convention de l'OIT sur les travailleurs migrants (Dispositions
complémentaires)].
90 Ryszard Cholewinski cite un Comité
d'experts de l'OIT pour soutenir la thèse que la référence
aux principaux droits de l'homme est en fait extrêmement limitée
et devrait être comprise comme se référant aux droits de
l'homme les plus fondamentaux, notamment le droit à la vie,
l'interdiction de la torture et le droit à un procès
équitable ; elle n'engloberait pas le droit à
l'égalité des chances et à l'égalité de
traitement avec les ressortissants : Migrant Workers in International Human
Rights Law: Their Protection in Countries of Employment (1997), p. 103 et
133.
91 Dans les deux conventions, le droit à
l'égalité des chances et à l'égalité de
traitement avec les ressortissants est étendu seulement aux migrants
« en situation régulière » sur le territoire du pays de
l'emploi : Convention de l'OIT sur les travailleurs migrants
(révisée), article 6 ; Convention de l'OIT sur les travailleurs
migrants (Dispositions complémentaires), Partie II.
92 142 ratifications au 12 février 2004.
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194993, sont les deux conventions fondamentales qui
traitent de la liberté syndicale. La convention no 87 garantit le droit,
librement exercé, des travailleurs et employeurs, sans distinction, de
s'organiser pour poursuivre et défendre leurs intérêts. La
convention no 98 protège les travailleurs et les employeurs qui exercent
le droit de s'organiser, interdit les actes d'ingérence dans les
activités des organisations de travailleurs et d'employeurs et encourage
la négociation collective volontaire. La représentation et la
possibilité de faire entendre sa voix au travail sont des moyens
importants par lesquels les travailleurs migrants peuvent obtenir d'autres
droits et améliorer leurs conditions de travail.
b) Élimination du travail des enfants
L'élimination du travail des enfants est visée
par la convention (no 138) sur l'âge minimum, 197394, et la
convention (no 182) sur les pires formes de travail des enfants,
199995. La convention no 138 fixe des limites d'âge pour
l'admission des enfants au travail et interdit les travaux dangereux pour les
enfants de moins de 18 ans. La convention no 182 appelle à prendre
«des mesures immédiates et efficaces pour assurer l'interdiction et
l'élimination des pires formes de travail des enfants, et ce de toute
urgence», et désigne ainsi les pires formes de travail des enfants:
a) l'esclavage et le travail forcé, y compris la traite des
enfants et leur recrutement forcé en vue de leur utilisation dans des
conflits armés; b) la prostitution des enfants et leur
utilisation à des fins de pornographie; c) la production et le
trafic de stupéfiants; et d) les travaux susceptibles de nuire
à la santé, la sécurité ou à la
moralité des enfants.
c) Égalité de chances et de
traitement
La convention (n° 111) concernant la discrimination (emploi et
profession), 195896, exige des États qui la ratifient qu'ils
formulent et appliquent une politique nationale visant à promouvoir
l'égalité de chances et de traitement et à éliminer
toutes formes de discrimination dans l'emploi et la profession fondées
sur la race, la couleur, le sexe, la
93 154 ratifications au 12 février 2004.
94 131 ratifications au 12 février 2004.
95 147 ratifications au 12 février 2004.
Adoptée récemment, la convention no 182 a fait l'objet d'un grand
nombre de ratifications ces dernières années, tout comme la
convention no 138. Le système en est donc aux premiers stades du
contrôle de l'application de ces instruments dans beaucoup de pays du
monde.
96 159 ratifications au 12 février 2004.
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religion, l'opinion politique, l'ascendance nationale ou
l'origine sociale. En outre, les États parties à la convention
(n° 100) sur l'égalité de rémunération,
195197, ont accepté de poursuivre une politique
d'égalité de rémunération entre la main-d'oeuvre
masculine et la main-d'oeuvre féminine pour un travail de valeur
égale.
Les conventions s'appliquent pareillement aux nationaux et aux
non-nationaux sans distinction fondée sur leur statut. La
nationalité ne figure pas parmi les motifs de discrimination
formellement prohibés par la convention no 111. Cependant, les organes
de contrôle ont fréquemment réaffirmé98
que les travailleurs migrants sont protégés par cet instrument
dans la mesure où ils sont victimes d'actes de discrimination dans
l'emploi ou la profession sur la base de l'un quelconque des motifs de
discrimination susmentionnés99. En ce qui concerne la
convention no 100, les études et les statistiques nationales sur les
migrations font état de disparités salariales entre les migrants
et les migrantes, quel que soit leur statut juridique100.
d) Sécurité sociale
Les travailleurs migrants sont confrontés à des
difficultés particulières dans le domaine de la
sécurité sociale, car les droits en la matière sont
habituellement liés à des périodes d'emploi, de
cotisation, ou de résidence. Ils courent le risque de perdre leurs
droits aux prestations de sécurité sociale dans leur pays
d'origine du fait de leur absence, et de ne bénéficier que d'une
couverture restreinte dans le pays d'accueil. Trois aspects de la question sont
pour eux particulièrement importants: 1) accéder à la
même couverture, aux mêmes prestations que les nationaux; 2)
conserver les droits acquis lorsqu'ils quittent le
97 161 ratifications au 12 février 2004.
98 Voir, notamment, le rapport de la commission
d'experts, op. cit., 2001, observations particulières
concernant les conventions nos 97 et 111, pp. 395-400 et 513-515.
99 Le Conseil d'administration a été
saisi d'une proposition visant à adopter un protocole relatif à
la convention no 111, lequel permettrait aux Etats Membres d'accepter
formellement des motifs additionnels d'interdiction de la discrimination, qui
compléteraient la protection contre la discrimination accordée
par l'OIT. Parmi ces motifs figurent la nationalité et l'état de
santé. L'inclusion d'une disposition interdisant la discrimination pour
raison de santé, y compris le VIH/SIDA, donnerait une force
supplémentaire au Recueil de directives pratiques sur le
VIH/SIDA et le monde du travail. Voir Conseil
d'administration, 289e session, Genève, document GB.289/2, paragr.
8-15.
100 P. Wickramasekara et M. Abella: «Protection of migrant
workers in Asia: Issues and policies», Labour migration in Asia:
Trends, challenges and responses in countries of origin (Genève,
Organisation international pour les migrations, 2003).
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pays (y compris l'exportation des prestations); 3)
bénéficier du cumul des droits acquis dans différents
pays101.
Toutes les normes actuelles de sécurité sociale
définissent le champ personnel de la couverture sans tenir compte de la
nationalité102 et presque toutes contiennent des clauses
similaires sur l'égalité de traitement avec les nationaux dans le
pays d'accueil. Toutefois, la convention (no 19) sur l'égalité de
traitement (accidents du travail), 1925103, établit
expressément le droit à l'égalité de traitement des
ressortissants de tout autre État ayant ratifié la convention, en
ce qui concerne l'indemnisation des accidents du travail. La convention (n°
118) sur l'égalité de traitement (sécurité
sociale), 1962104 prévoit l'égalité de
traitement en ce qui concerne l'ensemble des neuf branches de
sécurité sociale. Pour chacune des neuf branches qu'il accepte,
un État partie à la convention s'engage à accorder, sur
son territoire, aux ressortissants de tout autre État qui a
ratifié la convention l'égalité de traitement avec ses
propres ressortissants. Les dispositions des deux conventions dépendent
donc de la réciprocité.
D) Instruments élaborés par l'OMC
L'OMC a aussi élaboré un ensemble important de
dispositions internationales, qui comportent certaines prescriptions auxquelles
les individus doivent satisfaire pour aller travailler à
l'étranger. Bien qu'elle ne représente qu'un peu plus de 1% du
commerce mondial des services jusqu'à présent, la présence
des personnes physiques, qui correspond à ce qu'on appelle le mode
quatre, est l'une des quatre formes possibles de fourniture de services dans le
cadre de l'Accord général sur le commerce des services (AGCS).
Les
101 Les prestations de sécurité sociale sont
habituellement divisées en neuf branches: soins médicaux,
indemnités de maladie, indemnités de chômage, prestations
de vieillesse, prestations d'accidents du travail, allocations familiales,
prestations de maternité, prestations de survivants. Pour une
présentation détaillée des instruments de l'OIT sur la
sécurité sociale, voir M. Humblet et R. Silva:
Sécurité sociale - Des normes pour le XXe
siècle,
Genève, BIT, 2002, pp. 43-47.
102 Leur applicabilité aux travailleurs migrants est
démontrée, entre autres choses, par le fait que les organes de
contrôle du BIT ont fait expressément référence
à cette catégorie de travailleurs dans le contexte du suivi
périodique: par exemple, concernant l'application de la convention (no
121) sur les prestations en cas d'accidents du travail et de maladies
professionnelles, 1964, et la convention (no 130) concernant les soins
médicaux et les indemnités de maladie, 1969.
103 33 120 ratifications au 12 février 2004.
104 38 ratifications au 12 février 2004.
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engagements des Membres à ce titre concernent
l'admission temporaire de personnes physiques étrangères en tant
que fournisseurs de services sur leur territoire (comptables, médecins,
infirmières, enseignants par exemple). La migration permanente n'est pas
visée par le mode quatre105.
2.3 Convention Européenne relative au statut
juridique du travailleur migrant La Convention vise à
éliminer les discriminations basées sur les législations
nationales et à garantir l'égalité de traitement entre les
nationaux et les travailleurs migrants et des membres de leur famille.
La Convention couvre les principaux aspects de la situation
juridique des travailleurs migrants, en particulier le recrutement, les examens
médicaux et professionnels, les voyages, le permis de séjour, le
permis de travail, le regroupement familial, les conditions de travail, le
transfert des économies, ainsi que la sécurité sociale,
l'assistance sociale et médicale, l'expiration des contrats de travail,
le licenciement, le réemploi et le droit de recours devant une
autorité judiciaire ou administrative de l'État
d'accueil106.
2.4 Droits de l'Homme relatifs aux migrants et aux
travailleurs migrants Outre leur situation de non-ressortissant les
victimes de la traite en-dehors de leur pays peuvent aussi entrer dans des
catégories juridiques connexes, notamment celles de migrant ou de «
travailleur migrant ». C'est un point important dans la mesure où
cette classification fournit des moyens supplémentaires ou autres
d'assurer protection et soutien107.
Les États et le système international relatif
aux droits de l'homme ont affirmé à diverses reprises les
vulnérabilités particulières auxquelles sont
confrontés les migrants et la nature particulière des violations
auxquelles ils sont soumis108. Cependant, le droit international
105 Selon des estimations récentes communiquées
par le secrétariat de l'OMC (Symposium conjoint OMC-Banque mondiale sur
le mouvement des personnes physiques (mode 4)) dans le cadre de l'AGCS, OMC,
Genève,
11-12 avril 2002).
106
https://www.coe.int/t/dg3/migration/archives/Documentation/Default_conv_fr.asp
107 Pour plus d'informations sur les victimes de la traite en
tant que migrants et travailleurs migrants, voir Gallagher, International Law
of Human Trafficking, chap. 3.
108 Voir, par exemple, la Convention internationale sur la
protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leurs
famille ; la résolution 54/166 de l'Assemblée
générale sur la protection des migrants ; la résolution
11/9 du Conseil des droits de l'homme sur les droits de l'homme des migrants
dans les centres
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relatif aux droits de l'homme n'offre pas de protections
élargies aux migrants ou aux travailleurs migrants au-delà de
celles qui ont été identifiées ci-dessus comme
étant applicables à tous les non-ressortissants.
Les obligations des États envers les victimes de la
traite en tant que migrants ou travailleurs migrants découlent
généralement des clauses de non-discrimination qui sont
présentes dans les principaux traités des droits de l'homme et
des règles juridiques internationales qui ne permettent pas une
différence de traitement entre ressortissants et non-ressortissants dans
le domaine des droits de l'homme fondamentaux. Il arrive que ceci ne suffise
pas à garantir les droits de ce groupe en particulier de ses membres les
plus vulnérables : les travailleurs migrants qui sont entrés et
ou qui résident de façon illégale dans un État
d'accueil et qui sont, peut-être, victimes de la traite. Plusieurs
traités internationaux offrent d'importantes protections
supplémentaires qui sont identifiées ci-dessous.
2.5 Droits de l'Homme relatifs aux refugies, aux demandeurs
d'asile et aux personnes déplacées internes
Les victimes de la traite peuvent aussi être
réfugié, demandeurs d'asile ou personnes déplacées
internes (PDI). Les réfugiés, les demandeurs d'asile et les PDI
ont tous droit à la protection des principaux droits de l'homme ainsi
qu'à des protections supplémentaires en relation avec leur
statut, comme nous le verrons brièvement ci-dessous. Nous examinerons
séparément, lors du débat dans le Principe 3 et directives
y relatives ci-dessous, la question juridique technique de savoir si la traite
peut à elle-seule constituer la base d'une demande
de rétention ; la résolution 9/5 du Conseil des
droits de l'homme sur les droits de l'homme des migrants ; la résolution
8/10 du Conseil des droits de l'homme sur les droits de l'homme des migrants :
Mandat du Rapporteur spécial sur les droits de l'homme des migrants ;
Commission des droits de l'homme, résolutions 2004/53 et 2005/47 sur les
droits des migrants ; Commission des droits de l'homme, résolution
2004/49 sur la violence à l'égard des travailleuses migrantes ;
Commission des droits de l'homme résolution 2002/59 sur les protections
des migrants et de leur famille ; Comité pour l'élimination de la
discrimination raciale recommandation générale n° 30 :
discrimination contre les non-ressortissants ; Rapport de la Conférence
mondiale sur les droits de l'homme, Vienne, 14 à 25 juin 1993
(A/CONF.157/24, Chapitre III, Programme d'action, Partie 1, par. 24 ; partie
II, par. 33 à 35) ; Déclaration sur les droits de l'homme des
personnes qui ne possèdent pas la nationalité du pays dans lequel
elles vivent.
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de statut de réfugié (comme la question connexe
du non-refoulement qui concerne la réponse de l'État à la
traite)109.
Le droit international, quand il s'attache aux
réfugiés, cherche à offrir certaines mesures de protection
juridique pour des personnes qui sont contraintes de fuir leur pays d'origine
pour des raisons de race, religion, nationalité, appartenance à
un groupe social particulier ou opinion politique110. Dans le cas de
la traite, une demande de protection internationale peut survenir dans des cas
divers.
La traite au sein des frontières d'un pays partage de
nombreuses caractéristiques avec le déplacement interne. C'est
pourquoi il existe une thèse qui soutient que les personnes qui ont
été victimes de la traite interne devraient être
considérées comme PDI111.
L'introduction des Principes directeurs sur le
déplacement interne112 définit les PDI comme «
des personnes ou des groupes de personnes qui ont été
forcés ou contraints à fuir ou à quitter leur foyer ou
leur lieu de résidence habituel... et qui n'ont pas franchi les
frontières internationalement ».
Le Manuel d'application des Principes directeurs confirme que
« le déplacement interne est avant tout un mouvement forcé
ou involontaire qui a lieu à l'intérieur des frontières du
territoire national. Les raisons en sont diverses et tiennent soit à des
conflits armés, soit à des situations de violence
généralisée, à des violations des droits de l'homme
ou à des
109 Pour un examen plus détaillé des questions
relatives à la traite et à l'asile, voir Gallagher,
International Law of Human Trafficking, chap. 3.
110 La Convention relative au statut des
réfugiés, amendée par
le Protocole relatif au statut des réfugiés,
définit réfugié à l'article 1A (2) comme une
personne qui : « craignant avec raison d'être
persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa
nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de
ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la
nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se
réclamer de la protection de ce pays ; ou qui, si elle n'a pas de
nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa
résidence habituelle à la suite de tels événements,
ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner ».
111Susan Martin, « Internal trafficking
», Forced Migration Review, n°. 25 (mai 2006) p 12.
112 Principes directeurs relatifs au déplacement de
personnes (E/CN.4/1998/53/Add.2, annexe). Les Principes directeurs, qui «
se fondent sur le droit international humanitaire existant et sur les
instruments des droits de l'homme », ont été
développés pour : « servir comme norme international afin de
guider les gouvernements ainsi que les ONG internationales humanitaires et de
développement pour offrir assistance et protection aux PDI ».
Déclaration du Secrétaire général adjoint aux
affaires humanitaires, M. Sergio Vieira de Mello dans Walter Kälin,
Guiding Principles on Internal Displacement: Annotations (American Society
of International Law and Brookings Institution Project on Internal
Displacement, 2000).
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catastrophes naturelles ou d'origine humaine
»113. Les éléments de contrainte et de
circulation involontaire entrent dans la définition de la traite et il
est partout reconnu que les conflits, les catastrophes et les violations des
droits de l'homme augmentent la vulnérabilité des personnes et
des groupes à la traite et aux formes d'exploitation qui en
résultent.
2.6 Le droit de demander et de recevoir l'Asile
Quant à la question de savoir si une victime de la
traite a le droit de demander et de recevoir l'asile, le droit international
est clair sur ce point en statuant que les demandes d'asile doivent être
considérées sur le fond et non en fonction des modalités
d'entrée du demandeur1114. En d'autres termes, une personne
peut se voir refuser le statut de réfugié ou la
possibilité de revendiquer ce statut simplement parce que cette personne
était victime de la traite ou encore transportée
illégalement vers le pays de destination. Cette règle a une
signification pratique de prime importance. De nombreux États imposent
des sanctions pour entrer illégale, usage de faux documents de voyage,
etc. Il a été constaté que ces sanctions consistent de
plus en plus en un refus de droits dans le cadre des procédures de
décision du statut de réfugié115. La
possibilité d'accorder la protection internationale de
réfugié à certaines victimes avérées ou
potentielles de la traite est explicitement reconnue à l'article 14 du
Protocole relatif à la traite et à l'article 40 de la Convention
du Conseil de l'Europe sur la lutte contre la traite des êtres
humains.
a) Le Rapport explicatif sur ce dernier instrument
confirme que :
Le fait d'être victime de la traite des êtres
humains ne peut porter préjudice aux droits de rechercher et de
bénéficier de l'asile. Les Parties doivent s'assurer que les
victimes de la traite disposent d'un accès approprié à des
procédures d'asile équitables et efficaces.
113 Projet de l'Institut Brookings sur le déplacement
interne et le Bureau des Nations Unies pour la coordination des affaires
humanitaires, Manuel d'application des Principes directeurs relatifs aux
déplacements internes (1999) [Ci-après : Manuel PDI].
114 Voir la Convention relative au statut des
réfugiés, art.
31 ; voir aussi Guy S. Goodwin-Gill, « Article 31 of the
1951 Convention Relating to the Status of Refugees: Nonpenalization, detention,
and protection » in Erika Feller, Volker Türk et Frances Nicholson
(éd.), La Protection des réfugiés en droit international :
Consultations mondiales sur la protection internationale HCR (2003), p. 183.
115 Hathaway, The Rights of Refugees..., p. 408.
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Il faudrait examiner les demandes d'asile sur le fond et non
en fonction des modalités d'entrée du demandeur.
Concrètement, cela signifie que toutes les personnes, y compris les
migrants entrés clandestinement, ainsi que les victimes de la traite,
devraient avoir l'entière possibilité (notamment par la mise
à disposition d'informations appropriées) de déposer une
demande d'asile ou de présenter toute autre justification qui motive le
maintien dans le pays de destination.
b) Protection de l'État
Le droit international sur les réfugiés
prévoit une alternative à la protection de l'État, lorsque
cette protection n'est pas disponible ou encore accessible à la personne
qui la nécessite. Savoir si l'État remplit ou non les
critères requis est par conséquent un aspect essentiel de la
procédure de détermination du statut de réfugié.
Savoir si l'État est capable de protéger les victimes
dépend d'un grand nombre de facteurs, et plus encore de savoir si les
mécanismes sont en place pour prévenir et combattre la traite et
si ces mécanismes sont appliqués efficacement116.
Les Principes directeurs du HCR concernant la traite sont
clairs sur ce point : « Lorsqu'un État ne prend pas les mesures
raisonnables qui relèvent de sa compétence pour lutter contre la
traite et fournir une protection et une assistance efficaces aux victimes, la
crainte de persécution que nourrit une personne a des chances
d'être fondée » (par. 23).
Toutefois, l'évolution du droit et de la politique
internationale décrite dans le présent Commentaire permet de
confirmer une vision commune croissante sur ce qu'il convient de faire pour
combattre efficacement la traite. Les droits et obligations qui sont
établis dans le Protocole relatif à la traite, ainsi que ceux qui
découlent du droit international relatif aux droits de l'homme
prévoient en particulier des orientations importantes en vue
d'évaluer l'opportunité de la protection et de
l'assistance117.
116 Voir aussi le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les
réfugiés, Principes directeurs sur la protection internationale :
« L'appartenance à un certain groupe social » dans le cadre de
l'article 1A(2) de la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatif au
Statut des réfugiés (HCR/GIP/02/02, par. 18
117 Voir aussi le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les
réfugiés, Principes directeurs sur la protection internationale :
« L'appartenance à un certain groupe social » dans le cadre de
l'article 1A(2) de la Convention de 1951 et/ou son Protocole de 1967 relatif au
Statut des réfugiés (HCR/GIP/02/02, par. 19- [ci-après :
Principes directeurs du HCR sur le groupe social].
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Prise de position
L'Office National de la Migration (ONM) et le ministère
des haïtiens à l'étranger ont été
créés par deux décrets émis respectivement en
janvier et en mars 1995. Ces textes n'ont pas la force exécutoire
puisqu'ils n'ont pas été publiés. Or, ils devraient
être portés à la connaissance des citoyens. Comme, la
publication de ces décrets ne s'est opéré au journal
officiel le moniteur, ils ne sont pas rentrés en vigueur, car les sujets
de droit ne prennent pas conscience de ces textes.
On sait qu'il existe dans L'État plusieurs
législateurs qui sont les trois pouvoirs (pouvoir constituant, pouvoir
législatif et réglementaire). Chacun de ces pouvoirs fait des
lois et a un domaine où il est particulièrement compétent.
Considérés comme une fonction de l'État, les pouvoirs sont
des éléments de la souveraineté,
délégués à autant d'organes. Toutefois, on parle de
la hiérarchie des pouvoirs comme on parle de la hiérarchie des
lois.
Toutefois, en ses articles 276.1, 276.2, la constitution de
1987 relate les attributions de l'assemblée nationale quant à
l'approbation et le rejet des traités et les conventions, l'article 271
« la ratification des traités , conventions et des accords
internationaux sont donnés sous forme de décret; » et
l'article 276.2 « les traités ou accords internationaux, une fois
sanctionnés et ratifiés dans les formes prévues par la
Constitution font partie de la législation du pays et abrogent toutes
lois qui leur sont contraires ».
En réalité, ces décrets devraient
être en vigueur dès le surlendemain à zéro heure et
pour les provinces un jour franc après l'arrivée au journal
officiel au chef-lieu du département. Le délai impartie aux dits
décrets, est donc suspendu selon la présomption bien connue du
dicton " nul n'est censé ignorer la loi" c'est à dire nul ne
saurait échapper à l'application de la loi sous prétexte
de son ignorance. Cependant un grand nombre d'haïtiens n'ont pas les
moyens d'accéder à la connaissance des lois118.
118 Le projet de politique de la migration de l'ONM ... -
Mémoire Online
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Le but de la Convention est de protéger les
travailleurs migrants et les membres de leur famille. De par son existence,
elle constitue un standard moral, servant de guide et de tremplin pour la
promotion des droits des travailleurs migrants dans tous les pays.
Il est temps de se pencher attentivement sur les multiples
dimensions de l'enjeu que représentent les migrations, qui concernent
aujourd'hui des centaines de millions de personnes et ont une incidence sur les
pays d'origine, de transit et de destination. Il nous est nécessaire de
mieux comprendre les causes des flux internationaux humains et leurs relations
complexes avec le développement119.
La Convention internationale sur la protection des droits de
tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille a
été adoptée en 1990 par l'Assemblée
générale. Comme il est déclaré dans le
préambule, la Convention entend étendre plutôt que
remplacer ou modifier les droits existants. Elle adopte une définition
de « travailleur migrant »120
119 Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) :
http://www.iom.int
120 « L'expression « travailleurs migrants »
désigne les personnes qui vont exercer, exercent ou ont exercé
une activité rémunérée dans un État dont
elles ne sont pas ressortissantes ». La Convention définit aussi
les termes suivants : « travailleurs frontaliers », «
travailleurs saisonniers », « gens de mer », « travailleurs
d'une installation en mer », « travailleurs itinérants »,
« travailleurs employés au titre de projets », «
travailleurs admis pour un emploi spécifique » et «
travailleur indépendant » (tous dans l'article 2).
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Deuxième :
Cadres Opérationnelles
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Chapitre I: Cadre Historique de la migration
Section I : Histoire de la migration
La Bible abonde en récits de migrations. Le mot «
Hébreu » a des liens avec la racine « abar » qui signifie
« passer, traverser ». Il a des liens également avec un terme
signifiant « poussière » : poussière des chemins.
L'Orient ancien est un territoire sans cesse balayé par
des déplacements de populations : déplacements contraints, quand
le pouvoir dominant déportait une partie d'un peuple,
déplacements volontaires, quand il s'agissait de transhumance, de la
recherche d'une terre fertile, d'un appel de Dieu121.
Nous savons qu'il y a environ 60 000 ans, un petit groupe
d'« homo sapiens » émigra d'Afrique, accompagné de ses
troupeaux, vers le Moyen-Orient, à cause de la sécheresse. Nous
le savons grâce à l'analyse de l'ADN d'êtres humains de
différentes parties du monde. Ce premier voyage allait entraîner
le peuplement de la planète entière.
Ces hommes sont partis avec le même désir
fondamental que celui qui anime les migrants d'aujourd'hui : survivre et mener
une vie meilleure.
Les mouvements de population furent terrestres, fluviaux et
maritimes. Au Ve siècle avant J.-C., les tribus celtes, qui ont
remonté le Danube, ont conquis des terres par les armes ; à
l'ouest, elles ont pénétré en Gaule : les Romains
nommaient les Celtes « Galli » qui donnera Gaulois. Aux IVe et Ve
siècles après J.-C, la ruée vers l'ouest des peuples
barbares (Francs, Burgondes...) a contribué à la chute de
l'Empire romain. Du IXe siècle au XIe siècle, les Vikings ont
mené leurs incursions maritimes et fluviales du Groenland jusqu'en
Méditerranée. Il y eut aussi les migrations provoquées par
l'installation d'un Empire mongol en Asie au XIIIe siècle. On mettra
l'accent sur les autres mouvements de population de cette période,
concernant la Méditerranée, l'Afrique, les migrations
forcées et l'émigration des Européens au XIXe
siècle122.
121 HORS SÉRIE LA VIE, De la Préhistoire
à aujourd'hui. Migrations une aventure humaine, 2016, page 82
122 HORS SÉRIE LA VIE, Migrations une aventure
humaine, page 88
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1.1 Antiquité et Moyen-Âge
Pour l'Antiquité, l'historiographie s'est longtemps
représenté les migrations de façon très globale,
comme des migrations de peuplement, en les reliant souvent aux conflits
militaires, faute de pouvoir en cerner finement les contours. En revanche,
à partir du Moyen-Âge, l'historien est capable d'individualiser
les flux migratoires avec une relative précision qui bien sûr va
croissante à mesure que l'on se rapproche de la période
actuelle123.
L'essentiel de la population résidant dans les
campagnes, on pense volontiers de nos jours que la mobilité y
était réduite. En réalité, les recherches
historiques montrent que le principe de mobilité est au coeur du
fonctionnement des sociétés anciennes. Beaucoup de villages de
l'Europe moderne ont des ressources insuffisantes. Parmi les manières
d'y remédier figurent les migrations, généralement
temporaires. Elles s'effectuent selon de véritables « canaux de
mobilité » entretenus à l'échelle du village ou des
groupes familiaux. Pour ajuster le nombre de bouches à nourrir à
la taille des exploitations, il est par ailleurs fréquent que les jeunes
aient à circuler jusqu'à leur mariage, notamment dans l'Europe du
Nord-Ouest. Ils se font d'abord domestiques d'où leur surnom de «
domestiques de cycle de vie » avant d'accéder à la
propriété d'une exploitation agricole et de former un
couple124.
Les migrations du Moyen-Âge et de l'époque
moderne peuvent aussi être le fait de professions très
spécialisées, organisées sous forme de corporations : les
verriers, les mineurs, etc., qui opèrent sur des « niches »
recherchées. Dans toute l'Europe, les apprentis circulent pour parfaire
leur formation on connaît dans notre pays le fameux « Tour de France
». Les migrants qui ne peuvent pas se réclamer d'une
spécialisation professionnelle aussi poussée mettent souvent en
oeuvre des stratégies collectives, à l'image des migrations
« clef en main » des maçons limousins ou auvergnats vers Paris
ou Lyon qui intègrent à la fois le trajet, le logement en
chambrées et le placement. Une autre ressource qui leur est offerte est
l'encadrement par les familles, qui non sans contraintes permet par exemple
aux
123 Paul-André Rosental Une histoire longue des migrations
Dans Regards croisés sur l'économie 2010/2 (n° 8), pages 74
à 80
124 Assemblée Nationale - Question de B. Carayon
à V. Pécresse, publiée au J.O. le : 24/11/2009 p. 11066.
Réponse publiée au J.O. le : 02/02/2010 p. 1158.
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à 2018.
colporteurs dans les régions montagneuses de trouver le
financement nécessaire à leur activité125.
Les migrations antiques : des régions distinctes qui
entrent en contact
La mobilité est un phénomène
intrinsèquement lié à l'humanité. Elle permet dans
un premier temps de peupler les espaces terrestres selon des routes difficiles
à reconstituer. Homo sapiens126, apparu vers 200 000
ans avant notre ère, s'impose partout aux autres hominidés
à partir de son berceau africain. Le mode de vie des premiers hommes,
fondé sur la cueillette et la chasse, favorise cette mobilité,
qui ne cesse pas avec l'apparition de l'agriculture voici 15 000 ans.
Dans l'Antiquité, la perception d'une
étrangeté irréductible est à l'origine du terme
« barbare », que les Grecs attribuent à quiconque parle une
langue incompréhensible par eux idée reprise par les Romains. Ces
derniers, bâtissant un empire autour de la Méditerranée,
facilitent les migrations dans cet espace, que ce soit parmi les élites
aspirant à la citoyenneté romaine ou les esclaves venus de tout
l'Empire et au-delà. Mais, dans le même temps, ils cherchent
à limiter les intrusions extérieures des peuples qu'ils ne sont
pas parvenus à dominer (Germains, Pictes, Maures, Parthes...) par la
construction d'une barrière plus ou moins fortifiée : le
limes. Les notions de confins et de frontières comme espaces
intermédiaires se développent donc aux marges des
empires127.
125 Assemblée Nationale - Question de B. Carayon
à V. Pécresse, publiée au J.O. le : 24/11/2009 p. 11066.
Réponse publiée au J.O. le : 02/02/2010 p. 1158.
126 Anne-Marie Tillier : directrice de recherche au cnrs
(Département des Sciences de l'Homme et de la Société),
elle assure la direction du Laboratoire d'Anthropologie des Populations du
Passé à l'Université Bordeaux 1 (umr 5199 pacea).
127 Patrick Manning, professeur d'histoire globale à
l'université de Pittsburgh (Etats-Unis). Auteur de Migration in World
History (Routledge, 2005
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1.2 Temps Modernes
La mondialisation du monde moderne a entraîné une
hausse importante de la migration dans des lieux à la fois proches et
éloignés, soutenue par de nombreux facteurs. Par exemple, le
développement des systèmes de transport modernes
sophistiqués et de réseaux a rendu les déplacements plus
faciles, moins chers et plus rapides qu'à aucun moment de l'histoire.
Néanmoins, les attitudes sociales et culturelles envers les migrants et
les relations entre les populations locales et les nouveaux arrivants ne sont
pas toujours aisées ni harmonieuses.
Nos sociétés et nos économies
post-industrielles requièrent la mobilité et le transfert des
compétences, de l'expertise et de l'expérience dans divers lieux
géographiques, à la fois à l'intérieur et à
l'extérieur des États. Selon les estimations du Programme des
Nations Unies pour le développement (PNUD), la planète compte 200
millions de migrants internationaux et 740 millions de migrants internes.
L'innovation et la concurrence ainsi que le développement rapide des
technologies de l'information et de la communication et des nouveaux
médias exigent le recrutement, le déploiement et le
redéploiement rapides de talents dans des lieux spécifiques du
monde, parfois imprévisibles.
Les cultures nomadiques, contrairement aux communautés
sédentaires dans les ères préindustrielle et industrielle,
ont été constamment confrontées à la migration. Par
exemple, les nomades du Kazakhstan ont dû traiter les questions
économiques, culturelles et sociales relatives au déplacement des
populations. Les sociétés nomadiques, cependant, ont eu tendance
à gérer les priorités de façons très
différentes. Contrairement aux sociétés modernes
industrielles et post- industrielles, où les considérations
économiques dominent, les sociétés nomades
privilégient souvent les dimensions culturelles et sociales et
intègrent ensuite les aspects économiques128.
128 Programme des Nations Unies sur le développement,
Rapport mondial sur le développement humain 2009: Lever les
barrières : mobilité et développement humains
(Basingstoke, United Kingdom, Palgrave MacMillan, 2009), p.2.
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1.3 Les migrations contemporaines au prisme des droits de
l'homme
Lorsqu'il migre, un individu dissocie la nationalité
dont il est titulaire de son cadre naturel d'exercice. Si cette dissociation
est au centre des préoccupations modernes relatives aux
phénomènes migratoires à travers,
précisément, les discussions relatives à l'étendue
des droits du migrant sur un territoire distinct de son territoire d'origine,
c'est parce qu'elle s'inscrit dans un contexte fortement marqué par les
droits de l'homme. Après avoir exposé ce contexte, nous nous
demanderons si, paradoxalement, il n'érige pas la religion en
élément central et transnational de l'identité du
migrant129.
Le fait que les premières Déclarations des
droits de l'homme datent de plus de deux cents ans ne signifie pas que ceux-ci
aient été dès cette époque consacrés, ni,
non plus, que l'identité des termes entre les déclarations
implique une identité de sens. Sous ces deux aspects, il y a une
spécificité contemporaine du cadre juridique dans lequel
s'exercent à notre époque les phénomènes
migratoires, spécificité accentuée par l'adoption de la
convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs
migrants et des membres de leur famille en date du 18 décembre 1990 et
entrée en vigueur le 1er juillet 2003130.
C'est l'une des grandes caractéristiques de ces trente
dernières années : la référence aux droits de
l'homme innerve non plus seulement la sphère du discours politique mais
également l'ensemble des contentieux et surtout le contentieux
pénal, domaine traditionnel du champ d'application des droits de l'homme
à travers la référence à la présomption
d'innocence. Ce phénomène apparaît très clairement
à travers les statistiques élaborées par la Cour
européenne des droits de l'homme pour mesurer l'évolution des
contentieux : entre 1998 et 2008, quatre fois plus d'affaires ont
été soumises que durant la période s'étendant de
1959 à 1998131.
129 Maurice Halbwachs, La Morphologie religieuse, 1935, p. 5
[en ligne], disponible sur le site de l'Uqac :
http://classiques.uqac.ca.
130 Pour un exposé plus complet sur le plan
méthodologique, Jacques Amar, Les Identités religieuses
contemporaines dans le miroir des droits de l'homme, contribution à une
sociologie des droits de l'homme, Paris, Presses académiques
francophones, 2013.
131 Sabine Corneloup, «Réflexion sur
l'émergence d'un droit de l'Union européenne en matière de
nationalité», in Journal du droit international (Clunet), juillet
2011, p. 15.
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Le phénomène se retrouve à l'identique en
droit interne à partir des années 1990 à travers
l'invocation des droits de l'homme comme moyen de droit par les
requérants devant les cours suprêmes françaises : Conseil
d'État ou Cour de cassation2. Comparativement, sur la période
1970-1980, alors même que se succèdent d'importants flux
migratoires, les droits de l'homme sont absents des contentieux.
Autrement dit, il y a bien une imprégnation des
contentieux par les droits de l'homme qui déborde le contentieux
pénal. L'expression des prétentions change de forme, voire de
nature. Les individus, et notamment les migrants, prennent en quelque sorte
possession des règles et modifient progressivement la consistance des
relations sociales132.
Car, et c'est le changement majeur, le droit d'agir en justice
ne concerne plus uniquement les nationaux. La Déclaration universelle
des droits de l'homme de 1948, texte dont la Convention européenne des
droits de l'homme constitue un dérivé, diffère de la
Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 en ce qu'elle
rompt le lien classique entre nationalité et citoyenneté et
érige pour cela le principe de nondiscrimination en règle
cardinale. Elle rend ainsi illégitimes les distinctions entre deux
situations identiques fondées sur un critère de
nationalité.
Dans ce cadre, les processus d'intégration des vagues
d'immigration intervenues avant et après la Seconde Guerre mondiale ne
sont en rien comparables. Les immigrés arrivés avant la
Première Guerre mondiale ne disposaient ni de droits, ni de textes, ni
d'exemples susceptibles de légitimer leurs revendications. À
l'inverse, ceux de l'après-Seconde Guerre mondiale structurent de plus
en plus leurs actions et comportements à partir des
textes133. Il s'opère ici un renversement des perspectives :
les individus sont les destinataires des droits par-delà les
prérogatives étatiques. La dynamique juridique disqualifie la
distinction entre national et étranger et remet en cause les
équilibres territoriaux reposant sur les frontières. Ainsi, le
droit de l'étranger s'apprécie à compter des années
1990-2000 à l'aune des valeurs d'une «société
démocratique» et non plus de celles de
l'État-nation134.
132 Discours du président du Conseil de l'Europe, 9
novembre 2010, PCE 256/10.
133 Abadelmalek Sayad, «Y a-t-il une sociologie du droit
de l'immigration ?», in Le Droit et les Immigrés,
Aix-en-Provence, Édisud, janvier 1983, pp. 98-104.
134 Voir la conception de la communauté proposée
par Zygmunt Bauman comme étant «le principal cadre de
référence de l'analyse sociale». «Soil, blood and
identity», in The Sociological Review, vol. 40, n° 4, novembre 1992,
pp. 675-701.
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a) Historicité de la migration
haïtienne
On ne peut pas comprendre l'ampleur phénoménale
de l'émigration haïtienne, sa remarquable dispersion au cours du
temps et ses conséquences de plus en plus incontournables sur le destin
d'Haïti, si on ne se replonge pas au préalable dans l'histoire
tourmentée du pays. Dans ce tiers d'île au coeur du système
d'exploitation capitaliste esclavagiste moderne, les hommes et la nature ont
été traités sans ménagement. Par les «
anomalies » historiques qu'ils ont constitués dans le cadre de
l'économie transatlantique moderne, les luttes pour la liberté
des années 1790, l'indépendance de 1804 et les
développements ultérieurs du XIXe siècle ont
fourni un contexte singulier à la mise en place d'une culture du
marronnage, de la mobilité et de la migration.
Au sein de la société haïtienne en
formation, cette culture de la migration interne dans un premier temps s'est
construite en écho à la quête d'une liberté dont les
fondements n'ont cessé d'être remis en cause de l'intérieur
par les élites dirigeantes et de l'extérieur par l'ostracisme de
puissances coloniales longtemps restées sous le choc de la rupture
historique de 1804. Après une période de relatif repli sur soi,
l'entrée dans le XXe siècle a été pour
Haïti celle de l'inauguration d'une émigration régionale
d'une intensité sans précédent, liée à la
pénétration croissante du capital
états-unien.135
b) Aux origines de l'émigration
haïtienne
La Révolution française de 1789 mettant fin
à l'ancien régime aboutit à Saint-Domingue à la
revendication de droits politiques par les affranchis, puis à une
agitation sociale plus générale. L'insurrection
générale ultérieure des esclaves suivie de leur
affranchissement en 1793 eut pour conséquence l'institution d'un
régime d'autonomie interne dirigé par Toussaint Louverture mais
aussi l'occupation de parties du territoire par l'Espagne et l'Angleterre. La
tentative de rétablissement de l'esclavage par une expédition
napoléonienne déclencha un nouveau soulèvement des anciens
esclaves appuyés par les affranchis et se solda par la première
défaite coloniale de la France.
135 Audebert, Cédric (2012) La diaspora haïtienne.
Territoires migratoires et réseaux transnationaux, Rennes, Presses
Universitaires de Rennes, 198 p. (Géographie sociale)
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La brutale interruption du système esclavagiste sur
lequel était fondée l'économie de plantation et qui
restait à l'origine de l'immigration de grande ampleur qu'avait connu la
colonie jusqu'ici introduisit une nouvelle donne dans l'histoire migratoire du
pays. Dès lors, l'évolution postcoloniale de Saint-Domingue,
devenue Haïti, se singularisa grandement de celle des autres territoires
de la Caraïbe, restés sous domination
coloniale.136
c) L'impact de l'occupation Etats-Unienne
(1915-1934)
La fonction de pourvoyeur de main-d'oeuvre d'Haïti pour
les pays de la région était ancienne, et que les flux vers Cuba
et la République dominicaine avaient déjà concerné
plusieurs centaines de milliers de travailleurs agricoles haïtiens au
début du XXe siècle. Les conditions dans lesquelles
s'étaient développés ces courants initiaux étaient
directement liées au contexte de la présence croissante de
l'armée et des investissements états-uniens dans la
région, s'incarnant en Haïti dans une occupation militaire et la
mise sous tutelle du gouvernement local. Suite aux expropriations massives de
paysans locaux, à leur mise au travail forcé et à
l'échec du projet nord-américain de développement à
grande échelle des plantations dans le pays, des flux saisonniers de
travailleurs agricoles furent organisés vers les plantations de sucre
nord-américaines des pays voisins en dépit des protestations des
autorités haïtiennes. Ces courants migratoires se sont inscrits sur
plusieurs décennies et ont contribué à construire et
reproduire dans le temps la représentation réductrice d'un
travailleur migrant haïtien « taillable et corvéable
»137.
De fait, lorsque les flux ont repris à destination de
la République dominicaine, et ont été amplifiés
à destination des Turks et Caïques et des Bahamas dans les
années 1950, de la Guyane dans les années 1960 et d'autres
territoires caribéens la décennie suivante, l'insertion des
immigrés haïtiens s'est partout opérée au bas de
l'échelle socio-économique des sociétés
d'installation. Aux antipodes de la réalité de
l'émigration haïtienne qualifiée (médecins,
professeurs, cadres techniques) vers l'Afrique francophone répondant aux
besoins en encadrement au moment des indépendances ou vers
l'Amérique du Nord sous
136 Annuaires statistiques des Services fédéraux de
l'immigration et de la naturalisation (1960-1971).
137 AUDEBERT, Cédric. Chapitre 2. Le traitement
politique de la migration Haïtienne In : La diaspora haïtienne :
Territoires migratoires et réseaux [en ligne]. Rennes : Presses
universitaires de Rennes, 2012 (généré le 29 août
2019). Disponible sur Internet : <
http://books.openedition.org/pur/26974>.
ISBN : 9782753536784. DOI : 10.4000/books.pur.26974.
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la dictature de Duvalier, l'imaginaire des
sociétés caribéennes et nord-américaines notamment
celui des gouvernements et des employeurs associe l'immigration haïtienne
à une main-d'oeuvre peu qualifiée, peu instruite, laborieuse, peu
regardante sur les conditions de travail et d'emploi et peu onéreuse.
Dans ce contexte, les secteurs de l'économie
caribéenne reposant sur le recrutement informel et l'exploitation d'une
main-d'oeuvre peu qualifiée tels que le tourisme, la construction et
l'agriculture ont été les principales niches de l'emploi
haïtien. Certains types de territoires se sont alors
révélés plus attractifs que d'autres : les pays fondant
une partie substantielle de leur économie sur les grandes plantations de
l'agriculture commerciale (République dominicaine), les territoires
micro-insulaires à forte attractivité touristique (Bahamas, Turks
et Caïques, les Antilles néerlandaises ou les Îles Vierges
britanniques et états-uniennes), et les territoires dépendants
économiquement de leur métropole ayant vu leur niveau de vie
dopé par une économie de transfert et constituant un
marché important pour le commerce informel transnational haïtien
(Guyane et Antilles françaises notamment) 138.
Depuis près d'un siècle, la main-d'oeuvre
haïtienne joue un rôle essentiel dans l'agriculture dominicaine, et
en particulier dans l'industrie du sucre qui grâce à elle a pu
traverser les crises économiques les plus aigües. Alors que la
crise des années 1930 a freiné un peu partout les migrations de
travail, elle a contribué à amplifier la migration haïtienne
en République dominicaine : face à la chute des cours du sucre,
la substitution partielle des Haïtiens aux coupeurs de canne
anglo-caribéens a permis de sauver la production en réduisant
drastiquement le coût du travail. Un premier accord bilatéral
haïtiano-dominicain a organisé la migration annuelle de 16 500
travailleurs haïtiens dans l'industrie sucrière du pays voisin,
accord qui a été reconduit de 1966 au milieu des années
1980 et a concerné 20 000 migrants par an.
138 INSEE, Recensement général de la population
1999.
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Critiques et prise de position
Dans chaque généalogie, il peut y avoir une
histoire d'immigration, cela concerne chaque continent, avec des règles
particulières pour chaque pays, d'où la difficulté de
trouver la trace, l'histoire de cette migration. L'ancêtre partait vers
de nouveaux horizons pour des raisons diverses : économique, la
misère, le chômage, politique : guerre dans son pays,
discrimination raciale ou politique. Familiale rejoindre des membres de la
famille déjà installée un pays.
De tout temps l'immigration a existé, l'histoire est
mêlée de peuple qui partait pour découvrir et peupler de
nouveau monde. Qui ne connaît pas l'exode des juifs avec moïse vers
la terre promise ; de l'épopée des '''celtes''' qui traversent
l'Europe d'est en ouest et dans le sud de l'Europe en Espagne et en Afrique du
nord ; de ces grands marins les '''vikings''' qui partirent explorer le monde
pour commercer et fonder de nouveaux états ; des '''Conquistadores'''
partit découvrir et coloniser l'Amérique.139
L'immigration a joué un rôle capital dans
l'économie des pays, tous les pays ont fait appel à une main
d'oeuvre étrangère qui manquait pour reconstruire leurs
infrastructures après les guerres, pour développer leurs
industries, leurs axes routiers...
Cette migration a permis à de nombreux étrangers
de fuir les persécutions, religieuses (Cathares, protestants, juifs),
politiques (Espagnols au 19ème siècle, kurdes et
Arméniens, Communistes, Argentins, répressions
artistiques...)140
Pour l'Antiquité, l'historiographie s'est longtemps
représenté les migrations de façon très globale,
comme des migrations de peuplement, en les reliant souvent aux conflits
militaires, faute de pouvoir en cerner finement les contours. En revanche,
à partir du Moyen-Âge, l'historien est capable d'individualiser
les flux migratoires avec une relative précision qui bien sûr va
croissante à mesure que l'on se rapproche de la période
actuelle.
139 Marie Christine, Les phases de l'immigration portugaise,
des années vingt aux années soixante-dix -
Volovitch-Tavarès - Mars 2001
140 http://www.histoire-immigration.fr/
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Le Moyen-Âge et l'époque moderne partagent
certains traits caractéristiques. L'essentiel de la population
résidant dans les campagnes, on pense volontiers de nos jours que la
mobilité y était réduite. En réalité, les
recherches historiques montrent que le principe de mobilité est au coeur
du fonctionnement des sociétés anciennes. Beaucoup de villages de
l'Europe moderne ont des ressources insuffisantes. Parmi les manières
d'y remédier figurent les migrations, généralement
temporaires.
Elles s'effectuent selon de véritables « canaux de
mobilité » entretenus à l'échelle du village ou des
groupes familiaux. Pour ajuster le nombre de bouches à nourrir à
la taille des exploitations, il est par ailleurs fréquent que les jeunes
aient à circuler jusqu'à leur mariage, notamment dans l'Europe du
Nord-Ouest. Ils se font d'abord domestiques d'où leur surnom de «
domestiques de cycle de vie » avant d'accéder à la
propriété d'une exploitation agricole et de former un couple.
Les migrations du Moyen-Âge et de l'époque
moderne peuvent aussi être le fait de professions très
spécialisées, organisées sous forme de corporations : les
verriers, les mineurs, etc., qui opèrent sur des « niches »
recherchées. Dans toute l'Europe, les apprentis circulent pour parfaire
leur formation on connaît dans notre pays le fameux « Tour de France
».
Les migrants qui ne peuvent pas se réclamer d'une
spécialisation professionnelle aussi poussée mettent souvent en
oeuvre des stratégies collectives, à l'image des migrations
« clef en main » des maçons limousins ou auvergnats vers Paris
ou Lyon qui intègrent à la fois le trajet, le logement en
chambrées et le placement. Une autre ressource qui leur est offerte est
l'encadrement par les familles, qui non sans contraintes permet par exemple aux
colporteurs dans les régions montagneuses de trouver le financement
nécessaire à leur activité.141
141 Paul-André Rosental, Une histoire longue des
migrations. Dans Regards croisés sur l'économie 2010/2
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Section II : Cadre international de la migration
Les migrations internationales concernent directement la
discipline de l'économie, et plus encore l'économie du
développement. Mais le regard de la science politique, pour peu qu'il
prenne en compte les contributions connexes de l'histoire, de la
démographie, de l'anthropologie, de la sociologie, de la
géographie, bref des autres sciences sociales et humaines, peut fournir
un éclairage complémentaire en réintroduisant dans le
débat la prise en considération des pratiques sociales effectives
et des rapports de pouvoir dont elles sont les
véhicules142.
Il existe un corpus de normes internationales conférant
des droits et des protections aux travailleurs migrants durant l'ensemble du
processus migratoire, auquel les pays peuvent se référer pour
élaborer et mettre en oeuvre leur législation et leurs politiques
nationales. Elles sont contenues dans les conventions internationales et celles
de l'OIT, et dans d'autres instruments internationaux, tels ceux sur les droits
de l'homme. Les pays peuvent décider de ratifier ces instruments
internationaux au bénéfice des travailleurs migrants, le jeu
devenant plus égal lorsque tous les pays obéissent aux
mêmes règles. L'application des mécanismes de
contrôle prévus par les instruments en matière de droits de
l'homme et les conventions internationales contribue à faire progresser
les droits des travailleurs migrants. Même s'ils n'ont pas ratifié
les instruments internationaux favorables aux travailleurs migrants, les pays
ont la faculté d'en appliquer les dispositions.
La législation internationale sur les droits de l'homme
intègre les droits humains fondamentaux, comme la Déclaration
universelle des droits de l'homme de 1948143, qui énonce les
droits reconnus à toute personne «sans distinction aucune», le
Pacte
142 En l'occurrence mon propos s'appuie sur deux programmes de
recherche du FASOPO qui ont reçu le concours de la Direction de la
recherche de l'Agence Française de Développement : «
Migrations internationales et anthropologie du voyage » (sous la direction
de F. Adelkhah et J.-F. Bayart, avec la participation de C. Autant-Dorier, M.
L. Berg, A. Battegay, J.-F. Havard, V. Manry, R. Marchal, M. Peraldi, J.
Schmitz, S. de Tapia) et « Migration in post-apartheid South Africa.
Challenges and questions to policymakers » (sous la direction de A. Wa
Kabwe-Segatti, avec la participation de S. Ellis, L. B. Landau, D.
Vigneswaran).
143
http://www.un.org/fr/documents/udhr/.
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à 2018.
international de 1966 relatif aux droits économiques,
sociaux et culturels144, et le Pacte international de 1966 relatif
aux droits civils et politiques145.
Trois conventions internationales, dont deux sont des
conventions de l'OIT, traitent spécifiquement des droits des
travailleurs migrants: la convention (n° 97) sur les travailleurs migrants
(révisée), 1949146, et la convention (no 143) sur les
travailleurs migrants (dispositions complémentaires),
1975147, chacune d'elles étant complétée par
une recommandation148.
La convention no 97 s'applique aux travailleurs migrants
réguliers et couvre des sujets tels que le départ du pays
d'origine, le voyage, l'accueil dans le pays de destination et les virements
des fonds. Deux annexes traitent du recrutement, du placement et des conditions
de travail. Cette convention stipule que les travailleurs migrants
réguliers ne doivent pas être traités moins favorablement
que les travailleurs nationaux en ce qui concerne certaines questions
d'emploi.
La convention no 143 vise plutôt les abus survenant lors
des migrations de main-d'oeuvre et les questions relatives à
l'égalité des chances et de traitement. Elle invoque la
nécessité de supprimer les mouvements migratoires clandestins et
l'emploi irrégulier des travailleurs migrants, en ciblant les
organisateurs du trafic et les employeurs plutôt que les travailleurs
eux-mêmes. Cet instrument donne également aux travailleurs
migrants irréguliers certains droits découlant de leur emploi.
144www.ohchr.org/french/law/cesr.htm.
145www.ohchr.org/french/law/ccpr.htm.
L'application de ces instruments, et des quatre autres traités
internationaux sur les droits de l'homme, est supervisée par les Organes
conventionnels, qui peuvent faire
observer les droits des travailleurs migrants,
http://www.ohchr.org/ FR/HRBodies/Pages/HumanRightsBodies.aspx. Il s'agit
des traités suivants: convention internationale sur l'élimination
de toutes les formes de discrimination raciale, 1965,
http://www.oh
chr.org/french/law/cerd.htm;
Convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination
à l'égard des femmes, 1979,
http://www2.ohchr.org/french/law/cedaw.htm;
Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains
ou dégradants, 1984, http://
www.ohchr.org/french/law/cat.htm;
Convention relative aux droits de l'enfant, 1989,
http://
www.ohchr.org/french/law/crc.htm.
146
http://www.ilo.org/ilolex/cgi-lex/convde.pl?C097.
147
http://www.ilo.org/ilolex/cgi-lex/convde.pl?C143.
148
http://www.ilo.org/ilolex/cgi-lex/convde.pl?R086;
http://www.ilo.org/ilolex/cgilex/conv
de.pl?R151.
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2.1 Un regard sur la migration des États-Unis
Une nation d'immigrants, ainsi parlait des États-Unis
le président John Fitzgerald Kennedy afin de rappeler leur tradition
d'accueil des étrangers issus de tous les continents. Mais l'immigration
n'est pas seulement un fait du passé. Après une période de
restriction, des années 1920 aux années 1960, les
États-Unis sont redevenus aujourd'hui un grand pays d'immigration : en
2000, près de 30 millions d'Américains d'origine
étrangère étaient recensés, soit 10,4 % de la
population totale ; chaque année, environ 1 million de visas de
résidents sont délivrés. En chiffres absolus, les
États-Unis sont le premier pays d'accueil au monde149.
Les raisons de cette générosité sont
multiples : elles sont non seulement liées aux idéaux
américains, mais aussi à des intérêts nationaux et
internationaux, le fonctionnement des institutions fédérales
jouant également en faveur d'une politique d'ouverture. Alors que
l'hostilité envers l'immigration a resurgi au sein de la population
américaine et dans les milieux politiques, la législation
actuelle, qui autorise la délivrance annuelle de 675 000 visas de
résidents et permet l'admission supplémentaire de certaines
catégories d'immigrants, est en place depuis bientôt quarante ans
et a résisté aux pressions politiques. La législation
contemporaine trouve ses origines dans une loi d'immigration votée en
1965. Avant cette date régnait le régime des quotas fondés
sur l'origine nationale, mis en place en 1921 et en 1924.
Ce régime imposait une limite annuelle de 150 000 visas
à l'immigration européenne, interdisait l'immigration asiatique
et établissait des quotas nationaux destinés à favoriser
l'admission d'étrangers provenant d'Europe de l'Ouest et du Nord.
Après la Seconde Guerre mondiale, et en particulier dans les
années 1950, une telle discrimination devint difficile à
maintenir150.
Ce contexte permet de comprendre l'esprit de la loi de 1965.
La réforme des quotas avait sa place dans le cadre du chantier
législatif sur les droits civiques.
149 D. M. Reimers, op. cit., 1985, p. 92.
150 Dominique Daniel, L'immigration aux États-Unis
(1965-1995) : le poids de la réunification familiale, Paris,
L'Harmattan, coll. « Le monde nord-américain », 1996 ; David
M. Reimers, « An Unintended Reform : The 1965 Immigration Act and Third
World Immigration to the United States », Journal of American Ethnic
History, vol. 3, no 1, automne 1983, p. 9-28; David M. Reimers, Still the
Golden Door: The Third World Comes to America, New York, Columbia University
Press, 1985.
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Avant son assassinat, le président J. F. Kennedy avait
annoncé son souhait de remodeler complètement la politique des
quotas. Son successeur, Lyndon B. Johnson, hérita des conseillers de J.
F. Kennedy en matière d'immigration et reprit le flambeau de la
réforme dans son discours sur l'état de l'Union en 1964.
La loi qui fut adoptée en 1965 remplaça le
régime des quotas nationaux par un système où les
étrangers pouvaient être admis en fonction de leur
caractère propre, et non de leur origine nationale ou
raciale151.
Insistant surtout sur la nécessité d'abolir un
régime dépassé et discrédité, les partisans
de la réforme affirmèrent que le nouveau système n'allait
pas augmenter les flux ou modifier leur composition. Tromperie
délibérée dans le souci de rallier à la
réforme les sceptiques et les conservateurs ou simple erreur sur les
conséquences pratiques de leur projet, cette affirmation allait en tout
cas s'avérer profondément erronée : sous le régime
mis en place en 1965, le nombre total d'admissions a plus que triplé et
l'origine nationale des nouveaux venus a radicalement changé, l'Asie et
l'Amérique latine remplaçant l'Europe comme source principale de
l'immigration152.
a) L'administration d'Obama et Trump : une alternance
politique pour un changement de politique migratoire ?
La politique migratoire aux États-Unis est une
politique protéiforme avec autour d'elle, des acteurs publics et
privés que l'on peut, de manière peut-être caricaturale,
classés comme pro ou anti immigration. Ces acteurs portent en eux des
représentations multiples et divergentes, qui peuvent influencer les
politiques publiques. Ces représentations sociales sont composées
d'éléments divers qui ont longtemps été
étudiés de façon isolée : des attitudes, des
opinions, des croyances, des valeurs et des idéologies. Elles ont une
influence sur les prises de décision des acteurs qui fabriquent les
politiques. Partant de cette complexité, quel peut être l'effet
des représentations de l'immigration, exprimées par les deux
derniers présidents des États-Unis sur la conception des
politiques migratoires ?
A représentation opposée de l'immigration,
réponse politique différente ?
151 HORS SÉRIE LA VIE, De la Préhistoire
à aujourd'hui. Migrations une aventure humaine, 2016, 82 p.
152 D. M. Reimers, op. cit., 1985, p. 157-206.
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Pour B.Obama, les États-Unis se sont construits avec
l'arrivée de migrants : « nous sommes et nous serons toujours une
nation d'immigrants. Nous avons tous été un jour des
étrangers ». Il pense que la migration a beaucoup apporté
à la société américaine puisqu'elle « nous a
maintenu jeunes, dynamiques et entreprenants » (Obama 2014). Cette vision
de l'immigration illustre la volonté du Président Obama de
réformer la politique migratoire afin de régulariser certaines
catégories de migrants. En 2012 il met ainsi en place le DACA (Deferred
Action for Childhood Arrivals) qui permet de régulariser de
manière temporaire les jeunes majeurs étrangers qui ont fait leur
scolarité aux États-Unis153.
En 2013 une proposition de réforme globale de la
politique migratoire a été proposée visant à
régulariser de manière temporaire 11 millions de migrants. Obama
a soutenu cette initiative et a promis d'émettre son propre projet de
réforme si le Congrès temporise. La réforme a
été rejetée par la Chambre des représentants
à majorité républicaine et Obama a décidé de
régulariser plus de cinq millions d'immigrés par
décret154.
Le président Donald Trump a exprimé une vision
nettement plus négative de l'immigration. Il a dénoncé les
immigrants clandestins mexicains comme étant de « mauvais gens
» : « Quand le Mexique nous envoie ses gens, ils n'envoient
pas les meilleurs éléments. Ils envoient ceux qui posent
problèmes. Ils apportent avec eux la drogue. Ils apportent le crime. Ce
sont des violeurs». (Trump 2016)
La politique migratoire de Trump semble en cohérence
avec cette vision de la migration. En effet, il a annoncé la suppression
du programme DACA mis en place par Obama, a émis un décret
présidentiel qui vise à interdire l'entrée aux
ressortissants de 7 pays majoritairement musulmans et enfin, il a retiré
les États-Unis du pacte mondial des Nations Unies permettant
d'améliorer la gestion internationale des migrants et des
réfugiés.
Comme le dit Pierre Muller, « les politiques publiques
sont des espaces où les différents acteurs concernés vont
construire et exprimer un rapport au monde qui renvoie à la
manière
153Sauviat Catherine. « Obama et les
immigrés : les illusions perdues ». Plein droit, 2015/3
(n° 106). P 2427.
154Ibid.
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dont ils perçoivent le réel, leur place dans le
monde et ce que le monde devrait être155». On peut alors
admettre que la politique migratoire soit le résultat des
représentations des décideurs sur la migration. Pour autant,
l'expression de ces représentations ne peut être isolée du
contexte dans lequel elles sont exprimées. Les politiques migratoires ne
sont pas détachées du contexte dans lequel elles sont
conçues.
b) L'effet des attentats terroristes sur les
représentations de l'immigration Les attentats du 11 septembre
2001 font des migrants une menace pour la sécurité nationale. A
la suite de cet évènement, selon Catherine Sauviat « les
initiatives législatives et exécutives de lutte anti-terroriste
intègrent une dimension sécuritaire et répressive au
contrôle intensif et minutieux des migrants »156.
La réforme migratoire d'Obama témoigne de
l'intégration de ce volet sécuritaire. Le budget de la
sécurité nationale et de la police des frontières a
augmenté considérablement (de 47,4 à 60,4 milliards de
dollars entre 2008 et 2014), les frontières ont été
renforcées et de nombreux migrants clandestins ont été
expulsés157. Le contexte post-attentats a cadré le
choix des possibles en politique migratoire. Obama a été
contraint de montrer sa volonté d'agir pour garantir la
sécurité des citoyens états-uniens.
Pour Donald Trump, dont l'immigration a été un
point important de son programme présidentiel et l'est aussi de sa
politique actuelle, le contexte d'attentats terroristes fait figure de «
fenêtre d'opportunité politique » pour mettre en place et
légitimer des politiques anti-migratoires au nom de la
sécurité nationale.
Les attentats terroristes de 2001 et ceux qui se sont
déroulés plus récemment ont servi de cadre à la
construction d'une représentation négative de l'immigration. La
prise en compte de cette représentation dominante dans l'étude
des politiques migratoires d'Obama et Trump nous permet de comprendre
l'existence de similitudes dans ces politiques malgré l'alternance
politique. Les mesures sécuritaires visant à limiter la
migration, que ce soit par
155 Muller Pierre. « L'analyse cognitive des politiques
publiques : vers une sociologie politique de l'action publique », Revue
française de science politique, 2000/2 (Vol. 50).P 189-208
156 Sauviat Catherine. « Obama et les immigrés :
les illusions perdues ». Plein droit, 2015/3 (n° 106). P 2427.
157 Catherine Sauviat, op. cit.
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l'expulsion des migrants ou par l'interdiction d'entrée
de ces derniers, ont été présentes dans les mandats des
deux présidents. Pour autant, ce contexte n'est pas qu'un environnement
avec lequel il faut faire, il est travaillé, utilisé par les
acteurs de la mise en oeuvre des politiques migratoires.
c) La justice, la rue et les groupes
d'intérêt
Les politiques migratoires d'Obama et Trump ont
été confrontées aux pressions et oppositions issues des
institutions judiciaires, des mouvements sociaux et de groupes
d'intérêts. Malgré l'existence d'une représentation
dominante de la migration, ce sujet fait débat au sein de la
société américaine. De nombreuses organisations et acteurs
sociaux mènent des actions visant à influencer et orienter les
politiques migratoires. Par exemple, les organisations de défense des
droits des migrants ont fait pression sur le gouvernement Obama afin qu'il
tienne sa promesse de campagne et régularise une partie des migrants.
Cependant, les mesures de régularisation mises en place par Obama se
sont heurtées aux oppositions de 26 États gouvernés par
des républicains et finalement un juge fédéral s'est saisi
de la question et a ordonné un gel durable de ce
programme158.
Le décret anti-migration de Trump a quant à lui
provoqué des contestations de la part d'associations en défense
des droits civiques. De nombreux activistes se sont rassemblés dans les
aéroports afin de demander la libération des personnes retenues
par les services migratoires à cause du décret. Les associations
de défense des droits civiques ont saisi une juge fédérale
qui a provisoirement interdit l'expulsion des migrants retenus dans les
aéroports et leur a permis d'entrer sur le territoire.
En réponse à cette décision D. Trump a
proposé un nouveau décret interdisant de manière
permanente l'entrée aux ressortissants de sept pays et aux
fonctionnaires Vénézuéliens. Les organisations de
défense des migrants, à l'exemple du National Immigration Law
Center, ont dénoncé l'intention de porter atteinte aux
musulmans. Aussi, le dernier décret a été
bloqué par un magistrat de Hawaï affirmant que le texte «
effectue à l'évidence une discrimination fondée sur une
nationalité » et ne peut pas démontrer en quoi le
permis
158 Catherine Sauviat, op. cit.
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d'entrer sur le territoire à plus de 150 millions
de ressortissants des pays visés « « nuirait aux
intérêts des États-Unis ». (Juge Watson 2017)
Cependant, malgré les oppositions des juges fédéraux au
décret, la Cour suprême a autorisé son application
interdisant ainsi l'entrée aux ressortissants de 6 pays musulmans, le
Venezuela et la Corée du Nord. Bien qu'il s'agisse d'une victoire pour
Trump, ce sujet doit encore être traité par des tribunaux
fédéraux. La bataille judiciaire continue.
De plus, certains groupes d'intérêts
économiques s'opposent à la politique migratoire de Trump
notamment à la suppression du programme de protection des jeunes sans
papiers. En effet, le secteur agricole, l'hôtellerie et le bâtiment
sont très dépendants de la main d'oeuvre immigrée. Ces
tâches ne sont pas accomplies par les américains qui, de plus en
plus diplômés, aspirent à des emplois plus
qualifiés. Ainsi, Trump mais également Obama ont dû faire
face à des pressions de la part des groupes patronaux qui les
encouragent à régulariser les travailleurs clandestins afin de
servir l'économie américaine. Ces intérêts sont
également défendus par la plupart des démocrates et
quelques républicains qui cherchent à influencer les
décisions de Trump. Récemment, deux représentants
démocrates de la chambre des représentants et du sénat ont
rencontré Trump pour trouver un compromis sur la situation des «
dreamers » et celui-ci souhaite désormais protéger les
jeunes étrangers d'expulsion tout en renforçant la
sécurité des frontières.
d) Changement de ton, continuité dans les
faits
Les représentations d'Obama et Trump sur la question
migratoire jouent un rôle important dans la conception des politiques car
la manière dont ils perçoivent cette problématique
détermine les réponses politiques qui sont apportées. Pour
autant, les politiques migratoires sont également le résultat
d'une multitude de facteurs qui contribuent à les façonner et les
transformer et limitent ainsi le volontarisme politique.
La représentation dominante de l'immigration dans un
contexte d'attentats terroristes délimite le choix des possibles en
politique. Cela dit, les politiques migratoires sont également l'objet
d'actions de la part d'acteurs sociaux qui souhaitent imposer leur vision de
l'immigration et influencer la conception des politiques. Les oppositions aux
politiques
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migratoires peuvent prendre la forme de blocages juridiques
qui limitent concrètement la portée et la mise en oeuvre des
politiques.
Ainsi, la politique migratoire est le fruit d'un compromis
visant à prendre en compte deux représentations opposées
de l'immigration afin de contourner les barrières institutionnelles et
les oppositions sociales. Ceci nous permet d'expliquer les contradictions de la
politique d'Obama (régulariser des migrants en même temps qu'il en
expulse) et les inflexions de la politique de Trump (protéger les «
dreamers » en contrepartie d'un renforcement des frontières). Il
est encore tôt pour savoir si les autres politiques anti-migratoires de
Trump pourront aboutir, mais du fait des contraintes institutionnelles et
sociales, l'alternance politique Obama-Trump représente un changement
radical dans le discours mais pas vraiment dans les faits159.
159 Mandeville Laure. 29/01/2014. Barack Obama dévoile
sa réforme de l'immigration. [En ligne]. Consulté le
10/12/2017
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2.2 Migration en République Dominicaine
Historiquement, la République Dominicaine a
été un pays d'accueil pour les travailleurs étrangers.
À partir de la seconde moitié du 19e siècle, des
travailleurs (principalement originaires de Haïti et des pays anglophones
des Caraïbes) sont recrutés pour travailler dans les plantations de
canne à sucre. L'immigration de travailleurs haïtiens a
été activement encouragée durant l'occupation
américaine de la République Dominicaine (1916-24), en raison de
l'expansion de l'industrie du sucre sous la présence
américaine160.
Suite à des tensions de plus en plus vives concernant
la définition des frontières entre les deux pays (entamée
en 1937), les autorités dominicaines ont mis en place une
régulation des flux d'immigrants haïtiens. En raison des
pénuries de main d'oeuvre et de l'intérêt grandissant des
autorités pour les plantations de canne à sucre, une série
d'accords bilatéraux (convenios) furent signés entre Haïti
et la République Dominicaine, autorisant l'entrée sur le
territoire dominicain de Haïtiens pour des périodes
définies. C'est ainsi que les campements permanents de Haïtiens
autour des plantations sucrières (connus sous le nom de bateys) se sont
multipliés.
Durant les années 1960, des bouleversements
économiques et politiques ont conduit à une augmentation de
l'émigration au départ de la République Dominicaine,
à destination principalement des États-Unis. Au cours de cette
période, les Dominicains ont émigré à travers
différents canaux, bénéficiant de l'assouplissement de
l'attribution des visas et des restrictions d'immigration de la loi
américaine sur l'immigration de 1965, et de politiques d'asile et de
protection des réfugiés favorables. Une forte proportion de cette
migration était néanmoins clandestine161.
Ces trois dernières décennies ont ainsi vu la
République Dominicaine changer radicalement de position migratoire, et
devenir un pays de départ. L'émigration dominicaine s'est
accélérée depuis 1980 en réponse aux crises
économiques.
160 SEGUY, Franck. A catástrofe de janeiro de 2010,
a «Internacional Comunitária» e a recolonização
do Haiti. Dissertação (Doutorado em Sociologia). Instituto
de Filosofia e Ciências Huamnas, Universidade Estadual de Campinas,
2014.
161 OCDE (2008), A Profile of Immigrant Populations in the
21st Century: Data from OECD Countries, OCDE, Paris
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La décennie 1980 a connu par ailleurs une importante
réduction de la production de sucre dans l'économie dominicaine,
encourageant de nombreux immigrants haïtiens à se reconvertir dans
d'autres secteurs comme le bâtiment, le commerce, l'industrie
manufacturière et les services domestiques. Bien que la
République Dominicaine ait connu, au cours de la dernière
décennie, une croissance soutenue et une grande stabilité
politique, l'émigration n'a pas diminué162.
Les recensements des années 2000 permettent d'estimer
que 716 586 Dominicains vivent à l'étranger (13 % de la
population), dont 633 000 aux États-Unis. Une estimation plus
récente (2008) de l'Enquête de la Communauté
Américaine évoque un chiffre supérieur à 1.3
million (en incluant les Dominicains nés aux États-Unis).
D'importantes communautés de Dominicains se sont ainsi établies
en Espagne, en Italie et à Porto Rico163.
Le gouvernement dominicain a mis en place des initiatives pour
renforcer ses liens avec la diaspora. Parmi ces initiatives, on compte
l'amendement constitutionnel reconnaissant la double nationalité (1994),
l'extension du droit de vote aux Dominicains installés à
l'étranger (1997), et le projet de loi constitutionnelle instaurant des
sièges de sénateurs et de députés pour
représenter les Dominicains expatriés.
Sur le territoire national, les conditions précaires
subies par les Haïtiens ont suscité une préoccupation
croissante de la part des pouvoirs publics, amenant les autorités des
deux pays à signer une déclaration contre le recrutement de
clandestins et l'immigration illégale en 2000. De plus, la Loi
générale sur les migrations de 2004 (Acte n° 285) et le Plan
national de régularisation en cours mettent l'accent sur la
régulation des immigrés sans papiers présents dans le
pays164.
162 WARGNY, Christophe. Haïti n'existe pas 1804-2004:
deux cents ans de solitude. Paris: Éditions Autrement
Frontières, 2008.
163 BARUDY, J., 1981, Integracion critica: meta de una terapia
liberadora en el exilio latino-americano, Asi Buscamos Rehacernos,
Éd. Colat-Celadec, Peru, 225-240.
164 OCDE (2009), Perspectives économiques de l'OCDE 2009,
n° 85, OCDE, Paris
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a) Le marché du travail
Les émigrants dominicains dans les pays de l'OCDE et
les autochtones de ces pays présentent des caractéristiques
similaires en termes de taux de participation au marché du travail.
À titre d'exemple, 68.1 % des Dominicains
résidant aux États-Unis sont employés ou en recherche
active d'emploi, un taux très proche des 65.4 % d'Américains dans
la même situation.
Malgré une intégration effective dans le
marché du travail américain, certains objectifs ne sont pas
encore atteints. En effet, la concentration des immigrés dominicains
dans les emplois peu qualifiés demeure plus élevée que
celle de leurs homologues autochtones.
La répartition des Dominicains et des autochtones aux
États-Unis en fonction de leurs catégories occupationnelles. Plus
de 76 % des Dominicains occupent des emplois non qualifiés contre
seulement 61 % des travailleurs autochtones. Les immigrés dominicains se
concentrent dans les secteurs de la vente, des soins à la personne et
des transports.
Cette segmentation du marché du travail et le niveau
d'éducation plus faible observé chez les immigrés
dominicains en comparaison avec la population native peuvent expliquer les
différences de revenus observées entre les travailleurs
dominicains et américains par la littérature165.
Malgré le fait que la plupart des immigrés
dominicains aux États-Unis occupent des postes peu qualifiés, on
observe un nombre de plus en plus important de migrants hautement
qualifiés. L'enquête de la Communauté Américaine de
2008 révèle que près de 90 000 Dominicains ont le
baccalauréat ou un diplôme universitaire ou technique.
b) Relation avec le pays d'origine et intégration
dans le pays d'accueil
À partir des années 1990, la République
Dominicaine a connu une croissance significative des entrées de
transferts privés, reflétant l'augmentation de
l'émigration dominicaine. Ces transferts privés sont ainsi
passés de 0.8 milliard USD en 1995 à 3.1 milliard USD en 2008
(représentant respectivement 5 et 6.8 % du PIB dominicain).
Néanmoins, la progression de
165 Hernández, Ramona and Rivera-Batiz, Francisco L.,
"Dominicans in the United States: A Socioeconomic Profile, 2000" (2003).
CUNY Academic Works.
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à 2018.
ces apports de capitaux privés s'est ralentie à
partir de 2007, et les transferts sont mêmes en déclin depuis le
premier trimestre 2009.
L'étude nationale des ménages de 2007 (ENHOGAR)
a révélé que les transferts privés sont une source
de revenus importante. Près de 17 % des familles dominicaines
bénéficient de transferts monétaires sous une forme ou une
autrre. Le transfert mensuel moyen s'élevait à 100 USD, soir 16 %
du revenu d'un ménage dominicain moyen166.
En 2004, la BID a réalisé une enquête sur
l'emploi des transferts privés par les familles
bénéficiaires en République Dominicaine (BID/MIF, 2004b).
Comme l'illustre la figure 3, l'argent des transferts est principalement
affecté aux biens de consommation (60 %). Dans une moindre mesure mais
qui reste néanmoins importante, les fonds sont alloués à
l'éducation (17 %) ou investis dans un commerce (5 %).
La bancarisation des transferts monétaires en
République Dominicaine demeure faible. Selon les données de
l'enquête ENHOGAR, 92 % des ménages bénéficiaires
utilisent des compagnies privées de transferts de fonds pour recevoir
l'argent, tandis que seul 1 % le font au travers de banques commerciales.
Les transferts privés en République Dominicaine
sont réglementés par la loi Monétaire et de Finance
n° 183 (2002) qui régule les opérations des compagnies de
bureaux de change et de transferts de fonds167.
Après trois ans d'émigration à grande
échelle vers les États-Unis, les liens transnationaux (transferts
privés compris) ont conforté le sentiment d'appartenance
communautaire entre les Dominicains168.
Les dimensions politiques, culturelles et sociales de ces
liens se reflètent dans la mise en place de branches américaines
par les principaux partis politiques dominicains, dans la participation des
Dominicains aux campagnes politiques aux États-Unis, dans l'augmentation
de la participation des communautés dominicaines aux élections de
leurs pays d'accueil, ainsi que dans l'existence d'associations civiques et
sociales à l'étranger169.
166 Wang Meiyan. L'impact des envois de fonds des migrants sur
la réduction de la pauvreté et sur les dépenses
deconsommation des ménages en milieu rural . In: Perspectives chinoises,
n°113, 2010. pp. 64-75;
167
https://www.oecd.org/fr/dev/ameriques
168 BID/MIF, 2004b.
169 UNIVERSIDADE FEDERAL DA INTEGRAÇO LATINO-AMERICANA.
Conselho Universitário. Edital n° 004/2014/ PROINT-UNILA, de 17 de
dezembro de 2014.
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à 2018.
c) La République Dominicaine change de
politique migratoire
Dans son arrêt 168-13 rendu en septembre 2013, la Cour
constitutionnelle dominicaine a estimé que les enfants nés en
République dominicaine de parents étrangers en situation
irrégulière n'avaient pas le droit de recevoir la
nationalité dominicaine. L'arrêt a été
appliqué à titre rétroactif aux personnes nées
après 1929 ; il a touché de manière
disproportionnée les Dominicains d'origine haïtienne. Il constitue
une privation rétroactive, arbitraire et discriminatoire de
nationalité170
Entre autres mesures, l'arrêt ordonnait au Conseil
national des migrations de préparer un « plan national de
régularisation des étrangers en situation
irrégulière vivant dans le pays », prévu de longue
date. Le 29 novembre 2013, le président de la République a
signé le décret 327-13 instaurant un plan de
régularisation de 18 mois171. Le texte déclarait un
moratoire sur les expulsions de migrants en situation
irrégulière, valable pendant la durée du
plan172. Dans les semaines précédant la date limite de
dépôt des demandes de régularisation, qui avait
été fixée au 17 juin 2015, les autorités
dominicaines ont annoncé que les renvois de migrants en situation
irrégulière reprendraient à compter du 18 juin.
La République dominicaine a procédé dans
le passé à des expulsions collectives menées dans le cadre
d'opérations dans des quartiers où vivent les immigrés
haïtiens et leurs descendants. La plupart du temps, ces expulsions ne
respectaient pas les dispositifs de
170 Pour une analyse de la décision et de ses
implications sous l'angle des droits humains, ainsi qu'une analyse des mesures
adoptées par les autorités dominicaines pour atténuer ses
effets, voir Amnesty
International, « Sans papiers, je ne suis personne ».
Les personnes apatrides en République dominicaine (AMR 27/2755/2015),
novembre 2015, disponible sur
https://www.amnesty.org/fr/documents/
amr27/2755/2015/fr/.
171 Le plan s'adressait à tous les étrangers en
situation irrégulière arrivés en République
dominicaine avant le 19 octobre 2011 (date d'entrée en vigueur de la
réglementation d'application de la loi sur l'immigration de 2004).
Après une étape préparatoire, la deuxième phase du
plan a débuté le 1er juin 2014 ce qui laissait 12 mois aux
migrants pour demander leur régularisation. Les personnes
déposant une demande devaient présenter un document
d'identité de leur pays d'origine, ainsi que des documents attestant de
la durée de leur séjour en République dominicaine, de
leurs liens avec la société dominicaine et de leur situation
socioéconomique et professionnelle.
172 Malgré le moratoire, des organisations dominicaines
et haïtiennes de défense des droits humains ont recensé un
certain nombre d'expulsions, y compris de personnes pouvant prétendre au
plan de régularisation et d'autres ayant vocation à
bénéficier de la nationalité dominicaine.
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protection prévus par le droit international, notamment
le droit à un examen individualisé, les garanties pour une
procédure légale et le droit de recours173.
Dans les semaines précédant l'expiration du plan
de régularisation, la crainte a grandi chez les migrants haïtiens
et leurs descendants, en proie à la peur d'être expulsés en
grand nombre et soumis à toutes sortes d'abus, comme cela avait
été le cas dans le passé. Des organisations de la
société civile dominicaines, haïtiennes et internationales,
dont Amnesty International, se sont en outre déclarées
préoccupées par le fait que des personnes sans papiers
nées en République dominicaine et pouvant légitiment
prétendre à la nationalité dominicaine pourraient se
retrouver prises dans des opérations de renvoi et être
expulsées de leur propre pays174.
Le risque d'expulsions massives de migrants haïtiens,
mais aussi de Dominicains d'origine haïtienne, a suscité
l'attention de la presse internationale et créé des tensions
entre Haïti et la République dominicaine. En juillet 2015,
l'Organisation des États américains (OEA) a
dépêché une mission dans les deux pays afin
d'évaluer la situation à la frontière et de formuler des
recommandations à leurs gouvernements respectifs.
Les autorités haïtiennes ont reconnu que la
République dominicaine avait le droit d'expulser des migrants en
situation irrégulière sur son territoire, mais demandé
qu'un protocole soit négocié entre les deux pays de
manière à garantir le respect et la protection des droits des
migrants et à empêcher l'expulsion de personnes ayant vocation
à bénéficier de la nationalité dominicaine. L'OEA a
formulé une recommandation similaire175.
173 Voir, par exemple, Amnesty International, Une vie en
transit. La situation tragique des migrants haïtiens et des Dominicains
d'origine haïtienne (AMR 27/001/2007), 2007. En août 2014, la
Cour interaméricaine des droits de l'homme a rendu un arrêt dans
l'affaire Personas dominicanas y haitianas
expulsadas vs República dominicana. Elle a
estimé que la République dominicaine avait violé plusieurs
droits fondamentaux en expulsant collectivement et de manière arbitraire
plusieurs migrants haïtiens et Dominicains d'origine haïtienne entre
1999 et 2000. L'arrêt est disponible sur
http://corteidh.or.cr/docs/
casos/articulos/seriec_282_esp.pdf.
174 Amnesty International, Un avenir incertain. Des Dominicains
d'origine haïtienne menacés d'expulsion en République
dominicaine (AMR 27/1830/2015), juin 2015.
175 Organisation des États américains, Rapport de
la mission technique chargée d'examiner la situation dans la zone
frontalière entre la République dominicaine et Haïti, 29
juillet 2015, disponible sur
https://
www.oas.org/fr/centre_medias/communique_presse.asp?sCodigo=F-030/15.
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Les autorités dominicaines sont toutefois
restées campées dans leur refus de négocier un tel
protocole, considérant que la politique migratoire et ses
mécanismes de mise en oeuvre étaient du seul ressort de
l'État dominicain176.
Les expulsions n'ont pas officiellement repris avant le 14
août 2015, mais peu après la fin du programme de
régularisation (17 juin), la presse et les autorités dominicaines
ont indiqué qu'un grand nombre de familles haïtiennes qui se
trouvaient en situation irrégulière en République
dominicaine rentraient « spontanément » en Haïti.
Après que le plan de régularisation eut
expiré, les pouvoirs publics dominicains se sont engagés
expressément à ne pas expulser les personnes à même
de prouver qu'elles étaient nées sur le territoire dominicain.
Ils ont également promis d'évaluer chaque cas individuellement,
dans le respect des procédures légales, d'identifier les
personnes nées dans le pays et de les protéger contre toute
expulsion177.
2.3 Migration au chili
La préhistoire du continent montre que des migrations
internes existent depuis longtemps. Celle qui touche de plus près la
population originaire du Chili est le déplacement et la colonisation
forcés du territoire du Tihuantinsuyo opérés par l'Empire
inca pendant le XVe siècle. Afin d'organiser l'administration
et l'exploitation de ses vastes possessions, la monarchie impériale de
Cusco arrachait certaines populations à leurs régions d'origine
en les installant sur des territoires qu'elle voulait coloniser et
contrôler. Ces colonisateurs forcés étaient appelés
«mitimaës» et le Chili en a reçu un certain
nombre.
Avant la conquête espagnole, les territoires des actuels
Équateur, Pérou et Bolivie, ainsi que le Sud colombien et le Nord
argentin et chilien appartenaient à l'Empire inca. L'arrivée des
Européens est venue se superposer aux migrations commandées juste
quelques décennies plus tôt par le gouvernement
impérial178.
176 Al Momento, «Gobierno RD cuestiona informe OEA ; rechaza
su intermediación en conflicto», 29 juillet 2015, disponible sur
http://almomento.net/gobierno-dominicano-rechaza-informe-oea-y-suoferta-de-mediar-en-conflicto-con-haiti/122493.
177 Entretiens d'Amnesty International avec le directeur des
Migrations et avec le vice-ministre de la Présidence, juin 2015.
178 Ricardo Parvex, « Le Chili et les mouvements migratoires
», Hommes & migrations, 1305 | 2014, 71-76.
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a) Le Chili, pays d'accueil de migrants
Comme tous les pays du Cône sud de l'Amérique
latine, le Chili a accueilli depuis des migrants venus de divers horizons,
notamment des Européens du Sud. C'est une évidence que la plus
importante population immigrante dans le pays a été espagnole. En
ne prenant en considération que les immigrants d'origine
européenne, nous devons ajouter les Italiens, 600 000 Chiliens
étant de cette origine selon les estimations actuelles ; les Grecs, avec
plus de 100 000 descendants directs, en particulier à l'extrême
nord (Antofagasta) et à l'extrême austral (Punta Arenas).
Comparativement, cela fait du Chili l'un des cinq pays ayant le plus grand
nombre de descendants de Grecs au monde. On estime, par ailleurs, à
environ 400500 000 le nombre de Chiliens descendant de Croates, ce qui fait du
Chili l'un des plus importants centre d'accueil de Croates du
monde179.
8L'importance de l'immigration française
n'apparaît pas liée à une activité, à une
époque ou à une région particulière, c'est pourquoi
elle est moins visible. Cependant, le Chili est peut-être le pays
latino-américain où l'influence française se fait sentir
de la manière la plus claire. On estime qu'environ 800 000 Chiliens
seraient d'ascendance française.
a) Immigration au Chili : ce que dit le décret du
Président Sebastian Piñera
En parallèle de cette annonce, le Président
chilien a déclaré prendre un décret, à effet
immédiat, ne nécessitant pas l'accord du Parlement pour
être appliqué.
Ainsi, à partir du 23 avril 2018, il n'est plus
possible de solliciter et obtenir un visa pour motifs professionnels. Par
conséquent, à partir du 1er août 2018, trois nouveaux visas
seront disponibles : un visa temporaire d'opportunités :
accessible pour tout migrant qui souhaiterait venir travailler au Chili pour
une période de douze mois, renouvelable une fois pour douze mois
supplémentaires, avec la possibilité ensuite de demander la
résidence permanente. un visa temporaire d'orientation international
: accessible pour tout professionnel étranger en possession d'un
diplôme d'enseignement supérieur issu d'une université
prestigieuse, qui souhaiterait venir au Chili pour une période de douze
mois, renouvelable une fois pour douze mois supplémentaires, avec la
possibilité ensuite de
179 Rosenfeld Martin, Gois Pedro, Rea Andrea, Lenz Annika et
Reyntjens Pascal (2009) Immigration brésilienne en Europe. Dimension
transnationale, Hommes et Migrations, 1281, pp. 54-63.
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demander la résidence permanente. un visa
temporaire d'orientation national : accessible pour tout professionnel
étranger en possession d'un diplôme d'enseignement
supérieur issu d'une université chilienne, qui souhaiterait
revenir au Chili pour une période de douze mois, renouvelable une fois
pour douze mois supplémentaires, avec la possibilité ensuite de
demander la résidence permanente180.
b) Le cas chilien
Au Chili, outre la discrimination et la stigmatisation, la
grande difficulté à laquelle sont confrontés les migrants
haïtiens est l'obtention de leur permis de résidence. Pour
régulariser leur situation migratoire, ils n'ont guère d'autres
choix que de demander à l'État chilien un visa de
résidence sujet à contrat de travail. Malheureusement, le
peu d'employeurs qui acceptent de leur donner du travail le font de
manière informelle sans contrat de travail, et ce, en vue de se
soustraire au respect des droits des travailleurs. La chaîne de
télévision chilienne Chilevisión a
réalisé, en mai 2011, un reportage montrant les conditions
infrahumaines des Haïtiens travaillant dans le secteur agricole non loin
de la ville chilienne de Santa Cruz. Ces travailleurs haïtiens «
saisonniers » y sont traités comme «des esclaves». Ils ne
disposaient pas de contrat de travail, rapporte le média chilien.
Puisque les Haïtiens ont besoin d'un contrat de travail
pour demander leur visa de résidence, des délinquants en
profitent pour leur offrir de faux contrats. Les autorités chiliennes
ont finalement découvert et démantelé ces réseaux.
Ainsi, les migrants ayant présenté de faux contrats de travail
pour leur demande de résidence ont reçu l'ordre de quitter le
pays dans un délai de 15 jours. Beaucoup d'Haïtiens
concernés par cet ordre d'expulsion ne savent que faire. Certains
d'entre eux ont quitté le Chili le plus rapidement possible pour se
rendre au Brésil ou en Guyane Française afin d'éviter le
rapatriement vers Haïti181.
180 Lepetitjournal Santiago | Publié le 08/05/2018
à 22:30 | Mis à jour le 14/05/2018 à 23:48
181 L'Équateur et le Chili figurent parmi les rares pays
qui n'exigent pas de visas de tourisme aux Haïtiens comme obligation pour
entrer sur leur territoire.
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Chapitre II: Vers une politique publique internationale
de la migration
Section I: Politique publique et regard d'action
Les migrations internationales sont aujourd'hui un des enjeux
majeurs de la gouvernance globale. Elles restent pourtant l'objet de politiques
régaliennes où dominent les accords bilatéraux sans que
s'impose un régime de gestion multilatéral. Les migrations sont
une des pierres d'achoppement du multilatéralisme et leur gestion est
revendiquée par les États comme une dimension inaliénable
de leur souveraineté (économique, territoriale...). Les
institutions multilatérales tentent de proposer des modalités de
gouvernance multilatérale des migrations comme phénomène
social global. À l'Onu, le Haut-commissariat aux réfugiés
(Hcr) s'occupe des réfugiés et l'Organisation internationale du
travail (Oit) des migrants en leur qualité de travailleurs. La Banque
mondiale et le Fmi sont particulièrement actifs sur la question des
migrations et des transferts financiers qui les accompagnent alors que l'Unicef
s'intéresse aux conséquences sociales de la mobilité sur
les familles dans les pays d'origine ou d'accueil182.
L'Organisation internationale des migrations travaille quant
à elle en marge de l'Onu. L'Onu n'est pas parvenue à imposer la
Convention sur les droits des migrants de 1990 et ne parvient pas à
faire émerger une ligne d'action collective dans l'arène
multilatérale sur la question migratoire. Pourtant, dans la
sphère onusienne et au-delà, les organisations internationales
négocient l'émergence d'une agence spécialisée dans
les migrations. À partir de la stratégie historique du HCR dans
le champ multilatéral et d'une innovation juridique récente le
concept de « migrations mixtes », on décrit une des tentatives
de gestion juridique de la mobilité forcée et volontaire. En
2006, le concept émerge avec l'expérience des migrations
sub-sahariennes à travers la Méditerranée. On
s'intéresse ici à son utilisation dans le cas de migrations
depuis la corne de l'Afrique vers le Yémen.
182 Marx Ive, Rea Andrea, Verbist Gerlinde, Godin Marie et
Corluy Vincent (2008) L'intégration sociale et économique des
personnes ayant bénéficié de la procédure de
régularisation en 2000 (loi de 1999), Bruxelles, Centre pour
l'égalité des chances et la lutte contre le racisme, 175 p., [en
ligne]. URL :
http://germe.ulb.ac.be/uploads/pdf/articles%20online/anciens/BeforeAfter-rapport.pdf
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a) Les champs migratoires internationaux :
nécessité d'une vision globale du phénomène
migratoire
Le champ migratoire ou les diasporas représentent plus
une perception nouvelle du processus migratoire qu'une nouvelle
réalité. Mondialisation des échanges économiques
comme fluidité et rapidité des flux de transports, informations
et communications facilitent et accélèrent les processus
d'échanges généralisés. Ainsi, le projet individuel
ou la trajectoire migratoire ne sont plus conçus comme des actes
isolés ou des allers simples sans retour coupant définitivement
le migrant de ses origines, de sa famille, de sa culture, mais comme des actes
réfléchis et responsables, à tout moment susceptibles
d'inflexions nouvelles. Même en cas de retour, volontaire ou non,
l'émigration n'est pas non plus une coupure définitive avec le
pays d'accueil du fait du maintien de liens facilités par les nouvelles
technologies d'information et de communication ainsi que par les nouvelles
technologies et organisations de transports internationaux et l'abaissement de
leurs coûts respectifs. On assiste de plus en plus à
l'émergence d'espaces migratoires transnationaux (champs migratoires)
animés par des échanges culturels, d'idées et
informations, commerciaux et sociaux, des relations touristiques
internationales (circulations migratoires)183.
La notion de champ migratoire est conçue pour relier
les éléments à première vue épars du fait
migratoire contemporain, inclure les traits nouveaux et contribuer à
concevoir le phénomène dans sa globalité, à la fois
dans son interactivité et son dynamisme. Le champ migratoire est une
construction permettant, d'une part, de prendre conscience du continuum de
divers processus migratoires dans l'espace géographique et le temps,
d'autre part, de concevoir le migrant dans son individualité, où
trajectoire et projet migratoire font partie intégrante du
développement personnel. Cette approche insiste également sur le
droit de circulation du migrant, entre pays d'origine et pays d'immigration,
sans nécessairement se couper de sa société d'origine :
culture lato sensu, famille, patrimoine économique (circulation
migratoire) ; capital social (éducation, formation, socialisation,
appartenance à des réseaux sociaux) ; capital économique
acquis en émigration.
183 Les principales définitions de la terminologie
employée dans ce texte sont données en annexe 3
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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Elle met enfin en relief les interdépendances existant
de facto entre tous les pays concernés (origine, transit, immigration)
et rendant plus que jamais nécessaires les impératifs d'une
coopération multilatérale pour la gestion de la migration
internationale.
Le champ migratoire permet surtout de « dégager la
globalité d'une migration internationale en associant, dans une
même vision, comme le fait le migrant lui-même, l'espace
transnational qu'il pratique »184. Ce faisant, cette
définition, pertinente pour la réalité sociale
contemporaine, peut à tout le moins indisposer les gestionnaires des
territoires politiques. Elle a toutefois l'avantage d'insister sur les effets
d'interaction et d'interdépendance existant entre pays /
sociétés / économies des pays d'émigration,
d'immigration et de transit et de considérer le fait migratoire comme un
phénomène global, complexe, interactif, essentiellement dynamique
et potentiellement positif en termes de développement humain.
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184 Réf : Simon 1995 : 16
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2.1 Essence d'une politique publique de la migration
À l'aube du XXIe siècle,
l'incapacité d'Haïti à contrôler sa propre population
tant dans sa quantité (croissance démographique) que dans ses
caractéristiques économiques (faible ou forte valeur
ajoutée) ouvre le débat sur la continuation de l'exercice plein
et entier de sa souveraineté, puisque les vagues migratoires
multipolaires et incontrôlées d'Haïtiens dans l'espace
interaméricain185 sont dans leurs causes et leurs effets
internes et externes des facteurs de fragilisation de l'État, qui dans
les conditions actuelles de déprises institutionnelles et d'effondrement
socioéconomique ne peut rendre viable un accord (bilatéral ou
multilatéral) sur les flux migratoires haïtiens. Certes, il existe
de faibles actions ponctuelles en ce sens, mais ne s'inscrivant pas dans la
durée.
Par-delà les déterminants structurels de
l'échec en matière de gestion de l'immigration en Haïti, il
y a aussi un énorme retard à la fois pratique et théorique
par rapport à l'importance de la question dans les relations
internationales. Cela explique en partie que les mesures prises par Haïti
et liées aux accords internationaux sur cette question tiennent souvent
plus de déclarations de bonnes intentions que d'une efficacité
politique à la fois sur les flux et les stocks de
départ et de retour.
En d'autres termes, par-delà l'aptitude et l'attitude
d'une certaine élite à financer des troubles politiques pour
garder la haute main sur un certain monopole commercial, l'instabilité
de l'État haïtien vient de l'immixtion d'États limitrophes
dans les affaires haïtiennes destinée à obliger le pays
à prendre en charge sa population (pour plusieurs raisons, y compris
dans le cadre de la «lutte contre le terrorisme»...). La politique de
soustraction et de substitution186 de population
menée dans les années 60 par l'État en
Haïti187, conjuguée à une déprise publique
des gouvernements de l'après-Duvalier en 1986 en matière de
démographie, a placé la question de la population haïtienne
et des risques d'une émigration incontrôlée au centre des
divers enjeux des relations internationales
185Ibidem, p. 136.
186Cf. WEINER, Myron; TEITELBAUM, Michael S.,
Political demography: demographic engineering, New York: Berghahn
Books, 2001, 148 p.
187Cf. ZÉPHIRIN, Romanovski, Le champ
migratoire haïtiano-guyanais, op. cit., p. 134.
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interaméricaines188. C'est l'exclusion
sociale d'une partie de la population haïtienne exclue pendant près
de deux siècles de toute modernité (éducation et cadre de
vie), ajoutée à l'émigration massive et à la
rémigration (ou un désir de rémigration), qui pose au
début du XXIe siècle la question du maintien de la
stabilité institutionnelle de l'État. Ce n'est pas, comme le
considère Gérard Barthélémy, une conséquence
du refus ontologique de l'État par le « pays en dehors
», dominé par la dualité
Créoles/Bossales189.
Tout compte fait, quatre types de réalités
sociodémographique, socioéconomique, spatiale et politique
émergent et expliquent les mutations sociétales rapides du monde
rural haïtien. Les quatre décennies d'émigration et de
rémigration des familles haïtiennes dans l'espace
interaméricain ont révélé non seulement une crise
grave dans l'organisation sociospatiale d'Haïti, mais aussi par son
ampleur, l'incapacité de l'État et des «classes dominantes
traditionnelles» à esquisser un compromis pour moderniser le
territoire. L'émigration-rémigration détruit les
catégories des espaces traditionnels et leurs hiérarchies.
L'émigration et la rémigration ont dans leurs causes et effets
conjugués déstructuré le territoire par un morcellement
accéléré des parcelles, alors que la rémigration et
ses conséquences spatiales en termes de production urbaine et rurale
sauvage ne suscitent pas encore de réelles perspectives
institutionnelles modernistes de restructuration. Et cela, en dépit des
flux financiers conséquents résultant des transferts
effectués par les émigrés.
L'émigration-rémigration et ses pratiques
sociales transnationales actuelles dans le domaine de l'habitat urbain/rural en
Haïti ont largement réduit et éclaté le fort dualisme
spatial ville-campagne. Ainsi, il est clair que les pertinences
dépassent les permanences et qu'Haïti est devenue une
société d'émigration-rémigration. Et elle le sera
pour au moins deux décennies encore. Donc, poser les termes de la
problématique de développement liée à la
stabilité institutionnelle en Haïti actuellement revient à
prendre en compte, par exemple, la transnationalisation des familles, le poids
des transferts financiers des migrants dans l'économie du pays
d'origine, la sous-bancarisation des flux monétaires
transférés et le potentiel d'investissements productifs des
migrants de longue durée pour refonder et
188 Ibidem, p. 132.
189 Cf. BARTHÉLÉMY, Gérard,
«Haïti, l'ordre sous le chaos apparent», art. cité.
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décentraliser des territoires éclatés par
la mobilité transnationale. En d'autres termes, il convient de repenser
le développement et les possibilités de bonne gouvernance en
recherchant la population haïtienne là où elle s'est
principalement redéployée/réorganisée, avec ses
acteurs, ses pratiques et ses enjeux dans des hiérarchies de lieux
interaméricains transnationalisés, reconfigurés ou en
reconfiguration, et non dans un « pays en dehors »
isolé, devenu un paradigme dépassé.
Finalement, cette nouvelle donne résultant des
mouvements de population dans l'espace ouvre une nouvelle piste de recherche
pour recadrer le pays rural profond haïtien par rapport aux nouvelles
mutations sociodémographiques et environnementales.
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2.2 Quid de la politique publique de la migration?
De nombreux travaux menés au sein du laboratoire ont
abordé la question des politiques des migrations, sans que ces
dernières ne fassent cependant l'objet de recherches spécifiques.
Les approches en termes de transnationalisme, de diaspora et de circulations
migratoires ont cependant montré un renforcement du rôle des
États, dans les pays du Nord comme dans ceux du Sud.
Dès lors, la gestion des migrations par les
États, mais aussi par les organisations internationales et
intergouvernementales en devenant un des enjeux majeurs des relations
interétatiques nécessite de construire de nouvelles
problématiques qui tiennent compte de la diversification croissante des
mouvements migratoires, des processus d'externalisation des contrôles et
du développement d'instruments de gestion des flux de population encore
inédits jusqu'à une période
récente190.
Ainsi, les frontières extérieures de l'Union
européenne se matérialisent désormais par des
contrôles qui se font de plus en plus le long des routes migratoires,
incluant de fait les pays de départ et ceux dits de » transit
«. Ces derniers sont confrontés à la présence et/ou
à l'installation plus ou moins longue de migrants » en attente
«, qui se retrouvent dans des situations précaires, voire dans
l'illégalité.
Dans les quatre années à venir,
l'intérêt se portera sur les politiques des migrations, entendues
comme l'action de la puissance publique dans la gestion du fait migratoire et
des populations migrantes. Dans la continuité des travaux menés
sur les réfugiés, les demandeurs d'asile et les politiques
migratoires les recherches mettront plus directement l'accent sur
l'articulation entre politiques migratoires et politiques publiques en
mobilisant les approches géographiques, sociologiques et historiques sur
différents terrains d'enquêtes.
190 Décision n° 93-325 DC, 13 août 1993 :
JO 18 août 1993 ; JCP 1993, G, III, 66372.
L. FAVOREU, « Commentaire de la décision n°
93-325 du 13 août 1993, Maîtrise de l'immigration », RFD
const.1993, 599 ; H. LABAYLE, « Le droit de l'étranger
à mener une vie familiale normale, lecture nationale et exigences
européennes », RFD adm. 1993, p. 511 ;
B. GENEVOIS, « Un statut constitutionnel pour les
étrangers, À propos de la décision du Conseil
constitutionnel n° 93-325 DC du 13 août 1993 », RFD
adm. 1993, p. 871.
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Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des
travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
la République Dominicaine, des États-Unis et du Chili de 2008
à 2018.
Une première orientation de recherche traitera de la
gestion des populations et des frontières. L'étude des
différentes formes et applications des politiques de migrations aborde
les migrations » contraintes «, de réfugiés, de
demandeurs d'asile, de rapatriés, et de façon
générale, de personnes déplacées. Les recherches
menées par Véronique Lassailly-Jacob et Yann Scioldo-Zürcher
s'intéresseront tout d'abord aux multiples composants du concept de
rapatriement. Les » terrains d'analyse » incluent à la fois
des situations » de retour » de populations vers les pays du Nord,
anciennement colonisateurs, mais aussi des situations particulières au
contexte géopolitique propre aux pays du Sud, où les
rapatriements prennent le plus souvent la forme d'un refuge
frontalier191.
Ces travaux incluront l'étude des constructions
juridiques des rapatriements pour chacun des pays concernés et l'analyse
des pratiques administratives mises en place par les différentes
instances internationales, institutions onusiennes (HCR) et ONG, et leurs
répercussions sur les populations concernées192.
191 Deng, F. « Les réfugiés de
l'intérieur. Un défi pour la communauté internationale
», The Brookings Institution, 1993, p.166.
192
https://migrinter.hypotheses.org/axes-de-recherche/axe-1
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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a) Regard migratoire sur la politique extérieure
de l'État
Le spécialiste argentin des migrations internationales,
Lelio Mamora dans Las políticas de migraciones internationales (2002),
considère généralement que quatre stratégies sont
susceptibles d'influencer une politique migratoire:
a) Les stratégies de pression d'un État sur un
autre pour obtenir des avantages;
b) Les stratégies de rétribution qui consistent
à accorder un privilège à un autre État en
fonction, par exemple, de la configuration de leurs rapports historiques
(rapports privilégiés entre ancienne puissance coloniale et
ancienne colonie);
c) Les stratégies de représailles qui, dans
certaines conjonctures, prennent forme de politiques d'expulsions ou de
rapatriements et;
d) Les stratégies de négociations qui dominent
particulièrement dans les dynamiques d'intégration
régionale. Dans trois cas sur quatre, Marmora se réfère
à Haïti comme un cas type pour son illustration193.
Entre autres, d'autres pays peuvent utiliser l'arme de
rapatriement des migrants irréguliers comme stratégie de
représailles pour obtenir des avantages. Dans d'autres, migrations
peuvent jouer un rôle éminemment important dans les
stratégies de négociations régionales. Dans le cas
d'Haïti, il importe de souligner le fait que les deux principaux pays
récepteurs de migrants haïtiens, respectivement les
États-Unis et la République Dominicaine, sont ainsi ses
principaux partenaires économiques et commerciaux avec lesquels
Haïti enregistre un grave déficit chronique de sa balance
commerciale194.
193 Marmorá Lelio, Les politiques de migrations
internationales, préface H. Doménách, Paris,
L'Harmattan (Coll. Populations), 2002, 276 p.
194 Depuis le mouvement des boat people haïtiens
au cours de la deuxième moitié des années 1970 et des
années 1980, l'émigration clandestine, les tentatives
d'entrées irrégulières dans un autre pays, à partir
d'embarcations de fortune ouà l'aide de passeurs, parfois sans documents
d'identité et de voyage, rapidement devenu un cas classique des
migrations internationales, a constitué un enjeu international majeur.
Cela avait pris de l'ampleur quand, dans les années 1990-1994, des
dizaines de milliers de boat people haïtiens ont été
interceptés en mer et retenus sur la base militaire de Guantanamo. Alors
qu'ils demandaient le statut de réfugiés (politiques), les
États-Unis les ont considérés plutôt comme des
réfugiés économiques et ont refusé leur demande
bien qu'ils fussent tenus moralement à ne pas les refouler
immédiatement en Haïti. Cela se pose autant avec d'autres petits
États de la Caraïbe, ce qui donne une portée globale
à la question et en fait une question diplomatique de premier plan.
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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Section II : Les principes d'application de la
politique migratoire des travailleurs migrants haïtiens.
La disposition naturelle des hommes à migrer vers des
territoires abondant en ressources est sans nul doute considérée
dans le circuit économique comme un phénomène
traditionnel.
Au XXIème siècle, les migrations sont
généralement ordonnées par l'existence de facteurs
économiques, politiques ou encore sociaux. Les mouvements migratoires de
la diaspora caribéenne s'inscrivent dans ce contexte. Loin d'être
une exception notable, elle présente un échantillon du monde
mettant en exergue l'existence des multiples causes de départs des flux
de migrants. Analysé en détail, un point témoigne avec
acuité d'une caractéristique commune : une tendance forte au
départ de la main-d'oeuvre qualifiée. L'ensemble des îles
de la Caraïbe insulaire, de Cuba à Trinidad sont enclines à
ce qui est communément appelé la fuite des cerveaux. Selon Ratha
et Xu (2008), quatre des îles appartenant à l'arc caribéen
sont dénombrées dans les dix premiers pays ayant un taux
d'émigration qualifiée élevé en 2005. À
titre d'illustration, la Jamaïque enregistre un taux d'émigration
qualifiée de près de 82,5 %, Haïti de 81,6 %. Trinidad et
Tobago et Grenade enregistrent respectivement des taux de 78,6 % et 66,7
%195.
a) Migration, droit et institution
La migration est également une question de droit :
droit de l'immigration, du séjour et de l'asile politique, droit des
immigrés à vivre en famille, droit de la nationalité pour
ce qui est de la procédure de naturalisation, droits à
prestations (droits sociaux)... Le droit de la famille est sans cesse
sollicité en matière de migration. En ce qui concerne l'union par
exemple, il est question de regroupement familial ou de mariage « mixte
». Par ailleurs, le législateur, puis les autorités
judiciaires peuvent vouloir empêcher les mariages dits « de
complaisance » ou mariages « blancs ». En matière de
filiation, il est possible d'évoquer le regroupement familial,
l'adoption, la kafala... En dehors de toute union ou de filiation,
nous
195 Beine, M., F. Docquier and H. Rapoport (2001). «Brain
drain and economic growth: Theory and evidence», Journal of
Development Economics, 64 (1): 276-289.
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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pouvons également citer la situation des mineurs
isolés étrangers qui arrivent sur le territoire national, sans
qu'aucun détenteur de l'autorité parentale n'y soit
présent196.
Certes, il n'y aucune obligation à « franciser
» et l'on peut garder une référence à ses origines
via son nom. Toutefois, que l'on fasse ou non la démarche,
l'acte dénote une « projection identitaire », liée
à la migration. Ainsi, la migration, pratique sociale de
mobilité, question socio-anthropologique en lien avec la construction
identitaire, est souvent aussi, en complément, une question juridique ou
judiciaire197.
b) Dialogue social
Le dialogue social est au coeur du mandat de l'OIT; il est
considéré comme essentiel pour l'élaboration de
législations et de politiques sur les migrations de main-d'oeuvre, qui
soient fondées sur les droits, cohérents et transparents et qui
tiennent compte des besoins du marché du travail198. Dans son
étude d'ensemble de 2016, la CEACR souligne le «rôle
fondamental» des partenaires sociaux dans une gouvernance efficace des
migrations de main-d'oeuvre et notamment dans «l'élaboration, la
mise en oeuvre et l'adaptation en permanence d'une législation et d'une
politique relatives à la réglementation des migrations de
main-d'oeuvre et à la promotion de l'égalité de chances et
de traitement en faveur des travailleurs migrants»199. Elle
cite des cas dans lesquels les organisations d'employeurs et de travailleurs
sont présentes dans des forums tripartites nationaux, des organismes
gouvernementaux et des comités consultatifs sur les migrations de
main-d'oeuvre et participent à des procédures et
mécanismes de consultation traitant de sujets
196 PORTES Alejandro and ZHOU Min (1993) The New Second
Generation: Segmented Assimilation and Its Variants Among Post-1965 Immigrant
Youth, Annals of the American Academy of Political and Social
Sciences, 530.
197 ROGERS Reuel (2006) Afro-Caribbean Immigrants and the
Politics of Incorporation: Ethnicity, Exception, or Exit, Cambridge,
Cambridge University Press.
198 BIT: Conclusions, Réunion technique tripartite sur
les migrations de main-d'oeuvre, Genève, 4-8 nov. 2013, paragr. 8. Voir
aussi BIT: Cadre multilatéral de l'OIT pour les migrations de
main-d'oeuvre. Principes et lignes directrices non contraignants pour une
approche des migrations de main-d'oeuvre fondée sur les droits
(Genève, 2006), p. 16, principe 6: «Le dialogue social est
essentiel pour élaborer une politique relative aux migrations de
main-d'oeuvre bien conçue et devrait être encouragé et mis
en oeuvre».
199 BIT: Promouvoir une migration équitable, op. cit.
paragr. 131 et 189, respectivement.
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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tels que la réforme de la législation et des
politiques concernant les migrations, l'intégration des travailleurs
migrants et l'emploi non autorisé de ressortissants
étrangers200.
c) Coopération internationale
Si, au regard du droit international, les États sont
responsables de la protection de toutes les personnes qui relèvent de
leur juridiction, y compris les travailleurs migrants, aucun pays ne peut,
à lui seul, gérer efficacement les migrations. Une
coopération internationale dans ce domaine est indispensable
nécessité qui est reconnue dans les normes et cadres d'action
pertinents de l'OIT et soulignée dans les discussions internationales
relatives aux migrations. Malgré cet appel à une meilleure
coopération en matière de migrations internationales, la
situation politique et économique nationale et l'état du
marché du travail peuvent constituer autant d'obstacles à une
véritable coopération.
Le fait que leur contexte politique et économique
pousse de nombreux pays à faible revenu à envoyer leurs
ressortissants chercher un emploi à l'étranger engendre une
concurrence malsaine entre les pays d'origine qui, en conséquence,
ferment les yeux sur la manière dont sont traités les
travailleurs migrants dans les pays de destination. De plus, la
coopération bilatérale et multilatérale entre pays de
destination à revenu élevé ou intermédiaire et pays
d'origine à faible revenu se déroule rarement sur un pied
d'égalité, les premiers étant en position de force dans la
négociation pour l'accès à leurs marchés du
travail.
c) Importance de la coopération internationale
dans le domaine des migrations Outre les dispositions traitant
spécifiquement de la coopération bilatérale, la convention
(no 97) sur les travailleurs migrants (révisée), 1949, et la
convention (no 143) sur les travailleurs migrants (dispositions
complémentaires), 1975, ainsi que les recommandations correspondantes,
contiennent des dispositions qui soulignent l'importance de la
coopération internationale, s'agissant par exemple de prévenir la
propagande trompeuse, d'établir des services publics de l'emploi, de
lutter contre la migration irrégulière et de garantir les droits
à la sécurité sociale201.
200 Ibid., paragr. 133-136
201 1 Convention no 97, articles 3 et 7; convention no 143,
Partie I; recommandation no 151, paragr. 34(1) (c)(ii).
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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à 2018.
Le Cadre multilatéral de 2006 pour les migrations de
main-d'oeuvre préconise la promotion, le cas échéant,
« d'accords bilatéraux et multilatéraux entre les pays de
destination et les pays d'origine qui visent différents aspects des
migrations de main-d'oeuvre, tels que les procédures d'admission, les
flux, les possibilités de regroupement familial, la politique
d'intégration et le retour, y compris en particulier les tendances
propres à chaque sexe»202. La Déclaration de New
York pour les réfugiés et les migrants, adoptée par
l'Assemblée générale des Nations Unies en septembre 2016,
rappelle la nécessité d'une meilleure coopération
internationale à tous les niveaux en matière de migrations.
Les États membres se sont engagés à
s'appuyer sur les mécanismes de coopération et de partenariat
bilatéraux, régionaux et mondiaux existants, dans le respect du
droit international, pour faciliter les migrations conformément au
Programme 2030, et ont reconnu l'importance de cette coopération pour
que les migrations puissent se dérouler en toute
régularité, dans la sécurité et en bon ordre, dans
le plein respect des droits fondamentaux des migrants203.
e) Inspection du travail et accès à la
justice
Les services d'inspection du travail et les mécanismes
de plainte sont d'une importance cruciale. Des services d'inspection du travail
qui procèdent à des inspections régulières,
conseillent les employeurs et les travailleurs, y compris les travailleurs
migrants, et font véritablement appliquer la loi contribuent de
façon déterminante à la réduction des
déficits de travail décent. La CEACR a attiré l'attention
sur la vulnérabilité particulière des travailleurs
migrants en situation irrégulière, qui ne sont pas toujours
disposés à coopérer avec les services d'inspection du
travail, parce qu'ils craignent des conséquences négatives pour
eux perdre leur emploi ou être expulsés du pays, par exemple. Elle
a rappelé à ce sujet que l'objectif premier de l'inspection du
travail était de protéger les droits et intérêts de
tous les travailleurs et d'améliorer leurs conditions de travail, et non
pas de faire appliquer la législation relative à l'immigration,
et que par conséquent toute coopération entre les
202 Cadre multilatéral de l'OIT pour les migrations de
main-d'oeuvre, op. cit. p. 9, ligne directrice 2.3.
203 Déclaration de New York pour les
réfugiés et les migrants, op. cit. paragr. 54 et appendice II,
paragr. 5.
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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à 2018.
services de l'inspection du travail et ceux de l'immigration
devrait être gérée avec discernement204. Les
travailleurs migrants doivent pouvoir déposer des réclamations
auprès du ministère du travail, par exemple pour recouvrer les
salaires qui leur sont dus et les frais de recrutement qu'ils ont payés,
sans craindre de manoeuvres d'intimidation ni de représailles et en
ayant l'assurance que des mesures seront rapidement prises pour que les faits
soient vérifiés grâce à une enquête
sérieuse205.
f) Diaspora haïtienne et l'essence de son
identité
Pour bien comprendre l'expression identitaire dans la
diaspora, il y a lieu de distinguer les deux générations actrices
de cette expression. À l'intérieur même du
phénomène de diaspora on distingue, d'un côté, les
primo-arrivants, qui cultivent une certaine nostalgie du pays et le revisitent
en pèlerinage ; de l'autre côté, il y a la jeune
génération pour qui le territoire d'origine s'est
éloigné. Cette génération ne cultive ni nostalgie
ni espoir de retour206. Elle vit alors, selon Elbaz (2010a), une
sorte d'hybridation. En d'autres termes, il n'y a pas d'oubli de la culture
d'origine, mais une forte intégration dans un mouvement identificatoire
qui prend en compte la culture d'accueil.
Selon Elbaz (2010b), parler de
«dédiasporisation» serait une erreur, car
dépendamment de la raison et des conditions de l'émigration, les
liens avec le pays d'origine sont maintenus plus ou moins fortement. Dans le
cas d'Haïti, où l'émigration politique fut progressivement
remplacée par l'émigration économique207, la
conservation des liens avec le territoire d'origine se manifeste à
travers la construction et le développement de communautés
(Dufoix, 2003). Ces dernières sont créatrices sinon
conservatrices de liens entre une population sur plus d'un territoire. Ainsi,
dans une recherche sur l'identité haïtienne
204BIT: Promouvoir une migration équitable,
étude d'ensemble concernant les instruments relatifs aux travailleurs
migrants, rapport de la Commission d'experts pour l'application des conventions
et recommandations, Conférence internationale du Travail, 105e session
(Genève, 2016), paragr. 482.
205 BIT: Employer-migrant worker relationships in the Middle
East: Exploring scope for internal labour market mobility and fair migration,
Bureau régional de l'OIT pour les Etats arabes, Livre blanc, à
paraître en 2017.
206 Chantal Bordes-Benayoun, «Les diasporas, dispersion
spatiale, expérience sociale», Autrepart, n° 22,
2002
207 Bénédique Paul, «Migration et
pauvreté en Haïti : impacts économiques et sociaux des
envois de fonds sur l'inégalité et la pauvreté ?»,
communication à la journée thématique Envois de fonds,
inégalité et pauvreté dans les pays en
développement (16 octobre 2008, université Bordeaux 4),
2008.
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Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des
travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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à 2018.
publiée en 2009 par Bénédique Paul, il a
été souligné le fait que l'haïtianité est
très fortement exprimée dans les communautés
haïtiennes de la diaspora208.
Pour l'anthropologue Maud Laëthier qui analyse la
diaspora haïtienne de la Guyane française, l'expression identitaire
apparaît sous trois configurations : une première configuration
liée à des stigmatisations, une deuxième qui montre une
unité communautaire et une troisième visant
l'intégration209.
Qualifie cette expression identitaire
d'«haïtianité». Cette dernière a pris un
sens très fort au sein de la diaspora haïtienne tantôt comme
nécessité d'être soi-même dans un contexte
d'exclusion, tantôt comme besoin de nourrir les liens avec le pays.
En effet, la diaspora est impliquée, pour des raisons
de mémoire210 et d'insertion211, dans le
façonnement de deux territoires (d'origine et d'accueil). L'analyse
menée ici relève, selon Denis-Constant Martin et le groupe IPI
(Identité, pouvoirs et identifications), d'une approche peu
documentée qui considère le rôle économique de
l'identité, notamment en matière de formes du
développement économique territorial212.
L'expression identitaire dans la diaspora haïtienne,
comme dans d'autres diasporas, s'est progressivement structurée autour
d'une motivation économique et dépasse les
stéréotypes traditionnels. Loin d'être une expression de
simple patriotisme ou de nationalisme, elle est devenue une volonté et
la traduction concrète de celle-ci en des termes économiques dont
les retombées sont désormais visibles à travers la
réussite professionnelle, notamment dans le cas de la diaspora
haïtienne des États-Unis et du Canada ; à travers les
nombreux petits projets sur le territoire haïtien qui ont
été mis en oeuvre à l'initiative des individus ou des
organisations de la diaspora. Ces projets sont d'envergure soit collective
(école, route, centre de santé, etc.), soit individuelle
(construction de maisons, création de micro-
208 Bénédique Paul, L'Haïtianité.
Institutions et identité en Haïti,
TheBookEdition.com, 2009.
209 Maud Laëthier, Être haïtien et migrant
en Guyane française, thèse de doctorat en anthropologie
sociale et ethnologie, EHESS Paris, 2007.
210 Laëthier Maud (2011) Être migrant et
Haïtien en Guyane (Préface de Marie-José Jolivet),
Paris, Éditions du CTHS, 319 p
211 AUDEBERT Cédric (2006), L'insertion
socio-spatiale des Haïtiens à Miami,Paris, L'Harmattan,
collection Populations, 297 p.
212 Denis-Constant Martin (dir.), L'Identité en jeux.
Pouvoirs, identifications, mobilisation, Karthala, 2010.
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
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entreprises dans le domaine du tourisme : hôtels,
cafés, restaurants, services connexes et annexes). Ils semblent
contribuer, dans une certaine mesure, à refaçonner le territoire
d'origine qui devient de plus en plus un mélange entre l'autochtone et
l'importation culturelle diasporique213.
g) La diaspora haïtienne au Chili, deuxième
plus grand fournisseur de transferts après celle des
États-Unis
Selon économiste Ezer Émile l'année 2017,
les migrants haïtiens vivant au Chili ont envoyé à leurs
proches en Haïti des transferts de l'ordre de 7,5 millions de dollars
américains. Ce qui fait du Chili désormais la deuxième
principale source d'envois de fonds vers Haïti en mai 2017, après
les États-Unis qui, eux, ont atteint 126 millions de dollars. En
troisième et quatrième position, on retrouve le Canada et la
France qui ont tous deux contribué à hauteur de 7,42 millions,
suivis de la République dominicaine et du Brésil qui ont
contribué respectivement à hauteur de 5,5 millions et 4,8
millions de dollars sur la même période. Y a-t-il lieu de dire que
les Haïtiens au Chili, moins nombreux d'ailleurs, sont plus
généreux que ceux qui vivent au Canada, en France ou en
République dominicaine ?
Peut-être faut-il chercher la cause ailleurs. À
noter que le flux de 7,5 millions de dollars de transferts en provenance du
Chili enregistré uniquement pour le mois de mai 2017 est
supérieur au total des envois de fonds en provenance de ce pays sur les
douze mois de l'année 2015. 2016 a été une année
exceptionnelle marquant le début d'une nouvelle configuration au niveau
du marché des transferts d'argent en Haïti.
Au total, les immigrants haïtiens au Chili ont
envoyé 36 millions de dollars en 2016, soit une augmentation de 386,48%
par rapport aux 7,4 millions de l'année précédente. En ce
qui a trait aux sorties de fonds, le Chili est le troisième pays
récepteur des transferts en provenance d'Haïti avec 2,04 millions
de dollars en mai 2017 après les États-Unis (12.46 millions) et
la République dominicaine (3.75 millions). Bref ! En si peu de temps,
Haïti est donc devenue la cinquième plus importante destination du
monde des envois de fonds partant du Chili avec une part de 5,9%, devant des
pays comme la République dominicaine
213 Marjolein C. Groot et Patt Gibbons, «Diasporas as
`agents of development': Transforming brain drain into brain gain? The Dutch
example», Development in Practice, vol. 17, n° 3, 2007.
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Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des
travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
la République Dominicaine, des États-Unis et du Chili de 2008
à 2018.
(4,9%), États-Unis (4,5%) et l'Équateur (4,2%).
À rappeler qu'en 2015, Haïti n'a été que
dixième dans ce classement. Les données ont complètement
changé depuis le déplacement massif des Haïtiens vers le
Chili214.
La banque centrale chilienne estime en effet qu'environ 300
Haïtiens débarquent au Chili chaque jour, ce qui donnerait un total
de près de 110 000 seulement en 2016. À noter qu'en 2006, selon
les statistiques migratoires du Departamento de Extranjería y
Migración du Chili, le nombre d'entrées d'Haïtiens au Chili
était seulement de 56. Ce chiffre est passé de 113 en 2007
à 304 en 2009 et 917 en 2011. Jusqu'en 2013, le nombre d'Haïtiens
arrivés au Chili était de 2577. Aujourd'hui, la croissance est
exponentielle. À ce rythme de 300 arrivées par jour, on risque
d'avoir un total supérieur à 200 000 migrants haïtiens au
Chili à la fin de l'année. On se rappelle qu'entre 2011 et 2014,
la destination de choix était le Brésil pour les Haïtiens en
quête de mieux-être. À cette époque, les
préparatifs pour la Coupe du monde de football en termes de construction
d'infrastructures offraient d'énormes opportunités d'emploi. En
plus, l'économie brésilienne était plutôt stable.
Depuis plus de deux ans, la crise politique, sociale et économique qui
ravage ce géant latino-américain pousse nos compatriotes à
revoir leurs plans215.
Le Chili, l'une des économies les plus stables en
Amérique latine, ayant l'un des meilleurs niveaux de vie de la zone est
sans contexte la meilleure option pour les Haïtiens. Ici, nous parlons du
Chili comme étant la 38e économie mondiale avec un PIB
supérieur à 400 milliards de dollars américains pour un
revenu par habitant en PPA supérieur à 23 000 dollars
américains et un taux de chômage autour de 6%. En attendant la
relance économique en Haïti, une gouvernance plus intelligente et
des emplois massifs que nous attendons tous, l'option pour ces Haïtiens
d'aller s'établir là-bas est tout à fait logique. Ces
milliers de personnes non seulement s'assurent de leur survie au Chili mais
aussi prennent soin de leurs proches restés en Haïti avec ces flux
de transferts d'argent qui ont été multipliés presque par
cinq en seulement un an.
214
https://www.latercera.com/pulso/noticia/remesas-al-exterior-alcanzan-record-2017-envios-haiti-crecen-mas-1-100-dos-anos/239876/
215 SEN A. (2000) Un nouveau modèle économique.
Développement, Justice, Liberté, Paris, Ed. Odile Jacob, pp-
57-68
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
la République Dominicaine, des États-Unis et du Chili de 2008
à 2018.
Si l'économie du Chili devenait en crise ou
saturée par rapport à la demande de main-d'oeuvre de migrants, il
faudrait encore trouver un autre endroit pour accueillir nos frères et
soeurs qui n'ont plus d'espoir qu'Haïti pourra être différent
un jour. Aux autorités de prouver le contraire et de rendre Haïti
un pays accueillant, attractif et vivable pour ses propres fils et
filles216.
h) Diaspora haïtienne et développement
territorial
Les Haïtiens ont reçu de leur diaspora, en 2012,
quelque 1,988 milliard de dollars américains contre 2,057 milliards en
2011. En 2014, selon les données officielles de la Banque mondiale, le
montant de ces transferts est aussi élevé. D'un point de vue
micro-économique, et de manière générale, les
transferts de fonds représentent une source importante de revenus pour
des millions de familles qui les reçoivent, même dans les pays
ayant un produit intérieur brut (PIB) élevé. En
Haïti, ces transferts contribuent largement à lisser la
consommation des bénéficiaires régulièrement
touchés par des crises d'origine politique ou naturelle217.
Ils représentent une part importante du PIB d'Haïti et
dépassent parfois les investissements directs étrangers ou l'aide
externe. Ce qui en fait un potentiel considérable de
développement, notamment lors des périodes de crises.
La diaspora haïtienne peut véritablement
être considérée comme un lieu d'élaboration et de
financement d'activités génératrices de fonds pour
Haïti. Il a été argumenté que la contribution de la
diaspora haïtienne, par ses caractéristiques anticycliques et non
contractuelles (Paul, 2008), est une source financière
particulièrement précieuse pour Haïti, qu'il convient de
mobiliser de manière efficace et intelligente218. Par
exemple, la crise économique de 2008-2009 avait réduit les flux
de transferts effectués par la diaspora vers Haïti, mais la
solidarité provoquée par le séisme du 12 janvier 2010 a
permis d'accroître ces transferts à un rythme encore plus
élevé pour atteindre presque 2 milliards de dollars
216Etzer EMILE Economiste Publié le 2017-07-04
| Le Nouvelliste
217 Manuel Orozco, Understanding the remittance economy in
Haiti, World Bank, 2006.
218 Marvel Dandin, «Pour une intégration efficace
de la diaspora au développement d'Haïti», Rencontre,
n° 24-25, 2012.
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en 2014 selon les données officielles. Selon la Banque
mondiale, ces transferts représentent 21,1 % du PIB
d'Haït219.
La diaspora constitue incontestablement une solution aux
problèmes de pauvreté en Haïti. Le développement
économique d'Haïti passe par une mobilisation de ses ressources
propres. Parmi ces dernières, les plus précieuses sont ses
ressources humaines qualifiées. Même si une grande majorité
de celles-ci se trouvent en dehors du territoire national, pour peu que les
liens soient conservés et traductibles en des opportunités, il y
va de la stratégie de chercher à impliquer au mieux la diaspora
dans le développement territorial. L'argumentation de Paul et
Michel220, continuant Barré et al. (2003), sur la
mobilisation de la diaspora académique haïtienne est un exemple de
stratégie capable de transformer le brain drain en brain
gain dans l'enseignement supérieur en Haïti.221
i) Revue de la littérature sur les effets des
transferts sur le développement des économies d'origine.
En effet, bien que l'existence d'interactions fortes entre le
développement et la migration internationale soit en
général admise, la question des conséquences des flux
migratoires et des flux financiers qui leur sont associés sur les
économies d'origine demeure largement débattue222. La
littérature démontre que les transferts financiers issus de
l'émigration n'agissent pas de façon automatique comme des
leviers déclencheurs d'un processus de
développement223.
a) Effets seconds ou « négatifs
»
Au niveau national, les envois de fonds des migrants peuvent
provoquer une augmentation de la demande de biens d'importation au
détriment des biens produits localement, et n'auraient pas d'effets
multiplicateurs sur l'économie224. Les transferts de fonds
seraient
219
http://journals.openedition.org/tourisme/docannexe/image/990/img-1.jpg
220 Michel Bruneau, «Les territoires de l'identité
et la mémoire collective en diaspora», L'Espace
géographique, vol. 35, n° 4, 2006.
221 Gilbert Elbaz, «L'hybridation transnationale des
diasporas», Études caribéennes, n° 16, 2010a [
http://etudescaribeennes.revues.org/4627]
222 F. Gubert, OCDE, 2005, P. 50
223 Op.cit.
224 Dayton Johnston, OCDE 2007
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également à l'origine d'inflation et donc
d'appréciation du taux de change réel dans des pays
caractérisés par la faible flexibilité de leur appareil
productif225.
Lorsqu'une grande partie de ces transferts est affectée
à des achats de logement ou de terre, le taux de change réel a
tendance à s'apprécier, rendant par conséquent les
exportations moins compétitives. Les transferts de fonds peuvent
également engendrer un autre effet négatif dans les cas où
ils induisent une augmentation de la demande supérieure à la
capacité de production de l'économie. Lorsque cette demande
concerne des biens marchands, ils peuvent provoquer une appréciation du
taux de change réel. Or, un taux de change surévalué
réduit la compétitivité des entreprises du pays sur les
marchés étrangers (parce que les exportations deviennent
chères) et sur les marchés intérieurs (parce que les
importations sont peu coûteuses), et redirige les ressources du secteur
des biens marchands vers celui des biens non marchands, par un effet connu sous
le nom de « syndrome hollandais ».
Ce phénomène peut à son tour créer
des pressions sur la balance des paiements, ralentir l'accroissement des
opportunités d'emploi et, par conséquent, renforcer l'incitation
à émigrer226.
Enfin, les transferts de fonds sont aussi à l'origine
de comportements rentiers. Au niveau local, les communautés qui
reçoivent ces remises ont tendance à développer une
culture de dépendance qui se traduit par une certaine
vulnérabilité. Les jeunes ne veulent plus des emplois locaux, ils
préfèrent tous « partir227».
En effet, ce constat est confirmé par la volonté
affirmée de la quasi-totalité des jeunes de partir du
Sénégal par tous les moyens. La majeure partie des jeunes
rencontrés lors des enquêtes de terrain pour cette étude
pensent effectivement que le « salut » viendra de l'autre
côté de l'Atlantique, c'est-à-dire partir du
Sénégal et aller en Occident.
225 Gubert, 2005
226 Op.cit. Thomas Straubhaar et Florin P. Vcentsadean, 2005
227 Pour plus d'informations sur le départ des jeunes
migrants « clandestins » sénégalais, voir Cheikh Oumar
Bâ 2008, OSIWA Publications
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b) Effets positifs
Les transferts de fonds contribuent aussi d'une manière
ou d'une autre au développement des pays d'origine des migrants. Les
transferts ont l'avantage d'être contra-cycliques : ils augmentent en cas
de ralentissement économique ou en cas de chocs macroéconomiques
dus par exemple à des crises financières. Les envois de fonds
permettent d'éviter à la demande intérieure de chuter trop
lourdement. En référence au double déficit dont
souffriraient les PED (épargne et devises), les transferts
constitueraient, au plan macroéconomique, une source significative de
devises, augmentant le revenu national et finançant une partie des
importations nécessaires à la croissance. De par leur ampleur,
les seuls flux officiels peuvent avoir un impact considérable sur la
balance des paiements des pays et contribuer à réduire leur
déficit d'épargne intérieure228. En outre, les
transferts constituent une source de devises beaucoup plus stable que les
autres flux de capitaux privés et, dans certains pays, présentent
un caractère conjoncturel.
Les pays en développement et le monde
développé se sont rendus compte de cet effet positif des
transferts d'argent sur leur balance des paiements, et ont pris des mesures
pour encourager et accroître cet afflux de devises. Mais ces mesures
doivent être appliquées avec prudence parce que, mis à part
leurs effets positifs sur la balance des paiements, les transferts influent sur
l'activité économique du pays d'origine. Selon la manière
dont cet argent est dépensé ou investi, il n'aura pas le
même impact sur la production, l'inflation et les
importations229. Sur le terrain, les remises constituent une source
vitale de revenus pour une partie de la population et contribuent au
financement de ses dépenses de santé et d'éducation. La
stabilité de ces flux leur confère le caractère d'une
épargne de précaution et permet de jouer un rôle efficace
d'assurance en cas de choc externe. Au-delà de ces aspects relatifs
à la consommation et à l'épargne, il faut mentionner
l'utilisation de ces fonds pour l'équipement collectif de
proximité.
Certaines études évoquent également comme
éléments positifs les effets induits de l'émigration sur
certains secteurs de services utilisés par les migrants et leurs
familles, en
228 Op. Cit. Gubert, 2005
229 Thomas Straubhaar et Florin P. Vcentsadean, Les transferts
de fonds internationaux des émigrés et leur rôle dans le
développement, OCDE, 2005.
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particulier les télécommunications, le tourisme,
les transports et le commerce. Ces effets, dénommés « 4 T
» dans la littérature anglo-saxonne, ne relèvent toutefois
pas toujours directement des remises230. La question de l'impact des
transferts financiers sur le développement ne se résume pas au
seul aspect économique. La transmission de savoir-faire, l'influence des
idées en matière sociale et politique constituent autant de
questions qui mériteraient à elles seules d'être
analysées à part. De nombreuses études apportent des
éclairages, au niveau de régions bien déterminées,
et les conclusions auxquelles elles parviennent sont rarement
généralisables.
j) Migrations et l'exode des cerveaux
Née de courants migratoires, la Caraïbe
s'avère être une construction mosaïque où ces
phénomènes multiples et diversifiés sont
traditionnellement établis. Des premières périodes
coloniales jusqu'à aujourd'hui, les économies insulaires
caribéennes sont entièrement dynamisées par les
déplacements internationaux de sa population (main d'oeuvre non
qualifiée et qualifiée). La nature et les causes des fortes
propensions à l'émigration de la main d'oeuvre dans ces
territoires proviennent à la fois de leurs spécificités
économiques liées à leur configuration territoriale, de
leur insularité et de fondements historiques. La présente section
expose successivement, les lignes historiques des migrations dans la
Caraïbe insulaire. Puis, l'état de l'émigration
qualifiée, phénomène particulièrement
prégnant dans les économies insulaires
caribéennes231.
La fuite constante des cerveaux haïtiens est un
déficit intellectuel considérable pour le pays qui vient
d'enclencher un processus de reconstruction après la catastrophe de
janvier 2010. Que faire afin de provoquer le retour de ces cerveaux qui ont
leur part à jouer dans ce vaste projet qui a tant besoin de bras?
Nombreux sont ceux qui affirment que le président François
Duvalier était l'ennemi acharné des intellectuels et, c'est ce
qui explique la fuite de beaucoup d'intellectuels du pays au cours des
années 60 et 70 pour se réfugier dans certains pays d'Europe,
d'Afrique et surtout en Amérique du Nord. La chute du régime
230 Op.cit. Les notes du jeudi DGCID Numéro 54 16 Mars
2006 P. 3-5
231 Fanny-Aude Bellemare, « Migrations et fuite des
cerveaux dans les économies insulaires caribéennes :
éléments de réflexion », Études
caribéennes [Online], 16 | Août 2010, Online since 15 August 2010,
connection on 04 August 2019.
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duvaliériste en 1986, qui allait tourner une page
d'histoire du pays a déclenché une autre forme de lutte et de
revendication sociales, celle de la démocratie et de la liberté
d'expression. Ceci étant dit, Haïti a connu sa deuxième
indépendance après 29 ans de répression sous le
régime des Tontons macoutes. Faute de vision et de leadership, qui
d'ailleurs sont des faiblesses haïtiennes, la vague de violence due au
laxisme des moins-disant révolutionnaires vient ajouter aux maux de
cette population inoffensive. Depuis, on constate l'intensification de la fuite
des cerveaux en raison de l'incertitude d'un changement tant attendu.
Aujourd'hui, près de 70% des intellectuels formés en Haïti
se retrouvent à l'étranger en quête d'un avenir meilleur.
Que faut-il faire pour freiner ou ralentir ce phénomène? Il est
pourtant clair que si ce phénomène continue encore à ce
même rythme la rareté des ressources humaines en Haïti seront
plutôt alarmante. Un pays en stade de reconstruction avec près de
70% de ses ressources à l'extérieur, ce projet, ne serait-il pas
hypothétique232?
k) L'exportation des cerveaux dans la Caraïbe
Le tableau 1233 met en exergue la propension
à l'émigration de la main d'oeuvre qualifiée (par niveau
d'enseignement) dans la Caraïbe. La tendance à l'émigration
est d'autant plus forte que les niveaux d'éducation sont
élevés. La part des migrants ayant un niveau d'éducation
primaire reste faible. Soit un taux d'émigration de la main d'oeuvre
ayant atteint un niveau primaire d'éducation de 8 % contre un taux
d'émigration qualifiée de 37 % (pour les migrants disposant d'un
niveau secondaire). Parallèlement, le taux moyen d'émigrants
qualifiés ayant un niveau d'éducation supérieur atteint en
moyenne 63 % pour l'ensemble de la Caraïbe sur la période
1970-2000. Les îles de la Jamaïque, Haïti, sont les plus
fortement enclines au départ de la main d'oeuvre qualifiée. Les
taux d'émigration de la main d'oeuvre disposant d'un niveau
d'éducation supérieur dans ces territoires, s'alignent autour de
80 %. Suivent les îles d'Antigua et Barbuda, Saint-Kitts et Nevis,
Trinidad et Tobago et Grenade avec des taux de l'ordre de 70 %.
232Wadner Isidor Publié le 2011-10-04 | Le
Nouvelliste
https://lenouvelliste.com/article/97077/la-fuite-constante-des-cerveaux-haitiens
233 Docquier. F, A. Marfouk, 2005.
http://journals.openedition.org/etudescaribeennes/docannexe/image/4702/img-3.jpg
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|
Primaire
|
Secondaire
|
Supérieur
|
Antigua et Barbuda
|
6
|
36
|
71
|
Bahamas
|
2
|
12
|
36
|
Barbade
|
10
|
24
|
61
|
Dominique
|
8
|
61
|
59
|
Grenade
|
10
|
70
|
67
|
Haïti
|
3
|
28
|
82
|
Jamaïque
|
8
|
30
|
83
|
République Dominicaine
|
6
|
31
|
22
|
Saint-Kitts et Nevis
|
10
|
37
|
22
|
Sainte-Lucie
|
3
|
32
|
36
|
Saint-Vincent et les Grenadines
|
6
|
53
|
57
|
Trinidad et Tobago
|
6
|
21
|
78
|
Par ailleurs, l'analyse par région révèle
sans nul doute le cas atypique de la Caraïbe en matière de
migration de la main d'oeuvre qualifiée. L'évolution des seuls
taux d'émigration qualifiée des plus de 25, soulignent
indiscutablement la fuite des cerveaux dans la Caraïbe (figure1). Si dans
les diverses régions du monde, les taux d'émigration des
personnes hautement qualifiées suivent la même évolution,
la figure 1 révèle a priori une évolution plus soutenue de
l'évolution des taux d'émigration des personnes hautement
qualifiée dans la Caraïbe comparativement aux autres
régions.
En procédant à l'analyse par région
établit l'existence d'une relation décroissante entre la taille
de la population et le taux d'émigration. Dans le cas de la
Caraïbe, cette évidence ne semble pas vérifiée. Pour
cause, d'autre déterminants des migrations dans la Caraïbe tels :
l'instabilité politique, la conservation des liens coloniaux avec les
anciennes métropoles, ou encore la proximité à certains
pays développés, sont négligés234.
234 Docquier, F. (2007). « Fuite des cerveaux et
inégalités entre pays », Revue d'économie politique
du développement, 21 (2) : 49-88.
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En effet, notons parmi les îles les plus peuplées
appartenant à la cohorte Grandes Antilles, certaines d'entre elles
enregistrent de faible taux émigration qualifiée. A titre
d'exemple, les îles de Cuba, la République Dominicaine
présentent des taux relativement faibles soit respectivement 28,9 %
alors que leur population approche les 10 millions d'habitants. À
l'inverse, la Jamaïque et Haïti parmi les taux d'émigrants
qualifiés les plus élevés, soit 82,5 % et 81,6 %, sont des
pays à forte population235.
235Docquier, F. and A. Marfouk (2005).
«International migration by educational attainment (1990-2000)», in
C. Ozden et M. Schiff (eds), International Migration, Remittances and the
Brain Drain, Palgrave-Macmillan
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Conclusion
À la lumière des obstacles relevés dans
les diverses expériences mentionnées dans le présent
travail, il convient de remarquer que les facteurs limitant sont multiples et
relèvent à la fois du sous-développement institutionnel,
des États mais aussi de l'inefficacité des politiques. Il est
à souligner également que la plupart des initiatives en
matière de protection des droits des travailleurs migrants sont le fait
d'organisations internationales qui dans le cadre de programmes cherchent
à impulser une dynamique au sein des organisations régionales,
sous régionales voire nationales.
Les conditions définies par les autorités
administratives sont difficilement appliquées, pour ne pas dire jamais.
Dans la plupart des pays d'accueil le nombre de clandestins dépasse
celui des migrants réguliers du fait de la porosité du dispositif
administratif et des complicités de tous ordres. Le cloisonnement de la
citoyenneté uniquement au niveau régionale et national est une
entrave à l'ouverture237236, parce qu'elle risque de
contribuer à leur stigmatisation par l'introduction administrative de
restrictions et le renforcement de l'amalgame, fait généralement
entre migrants, faux demandeurs d'Asile, refugiés et délinquants.
Elles verrouillent, en plus, le champ du travail légal et affectent les
droits des travailleurs migrants qu'elles finissent par rejeter dans le secteur
informel.
Pour lever les obstacles et inciter à la ratification
de la convention des travailleurs migrants et les membres de leur famille
signée par l'État haïtien , il convient alors de
développer des partenariats directs entre organisations internationales,
organisations régionales et sous régionales dans le but de
promouvoir, à travers des programmes communs, des initiatives visant
à enraciner dans les pratiques institutionnelles le respect des droits
des travailleurs migrants, de favoriser la formation des travailleurs migrants
par rapport à leurs droits par le biais des associations de
ressortissants, de mettre sur pied une instance de recours supranationale qui
puisse permettre aux travailleurs migrants de se défendre en cas de
violations de leurs droits dans les pays d'accueil, de développer des
cadres d'échanges dans les pays d'accueil pour promouvoir le dialogue
interculturel, d'harmoniser les législations
236 L'OIM communication sur « le droit international de
la migration » l'enjeu Genève, le 13 avril 2004 p .213
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au niveau national, régional et continental ainsi que
les structures qui sont chargées de les mettre en oeuvre, de diffuser
par divers supports pédagogiques la dimension protectrice de la loi,
d'ouvrir au sein des institutions régionales des concertations entre
États importateurs et exportateurs et enfin relancer la campagne de
ratification auprès des États non encore signataires.
Arrivé au terme de notre travail « Plaidoyer pour
un cadre juridique de la protection des travailleurs migrants haïtiens et
haïtienne : cas de la République Dominicaine, les États-Unis
et le Chile de 2008 à 2018 », il nous revient de résumer les
faits saillants auxquels son étude a conduit, tâche n'est
aisé car comme le souligne Yves GUYON « toute conclusion est
périlleuse et nécessairement partielle ou partiale
»237. Toutes fois l'examen fourni nous pousse à croire
que l'exposé qui suit est une vue quasi suffisante complète ;
objective de l'ensemble de cette étude.
La protection des travailleurs migrants réguliers,
irréguliers, réfugiers et demandeurs d'asiles trouvent son
fondement dans les normes à caractères régionales, sous
régional et interne relatives aux droits de l'homme. Mais
également et surtout dans les différents instruments et textes
internationaux spécifiques comme la convention de 1990238.
Pour l'application et le respect de ces normes, aux droits de
l'homme en général et des migrants en particulier une
série de mécanismes de contrôle a été
instituée. Il s'agit de mécanismes qui cherchent en
résumé l'efficacité requise pour une réelle
protection de la personne quelle que soit son statut. Malgré tout ce
dispositif de protection, on constate une violation récurrente des
droits de l'homme et des droits des travailleurs migrants en particulier.
Les rouages internationaux semblent impuissants à
appréhender et à solutionner les situations des atteintes
massives aux droits de l'homme239. Or pour que les
mécanismes
237 GUYON Y., Droit des affaires, Tome 1, 8ème éd.
Economica, Paris, 1994, p.1987.
238
https://www.ohchr.org/FR/ProfessionalInterest/Pages/CMW.aspx
239 AMNESTY INTERNATIONAL, Manuel relative à la
surveillance et à la documentation des violations des droits humains en
Afrique CODESRIA (2001), 88 pages.
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internationaux puissent effectivement être
utiles240, il faudrait construire un double étage de la
normalité (interne et internationale).
En effet, comme le rappelle si bien le préambule de la
déclaration universelle de 1948241, c'est l'institution d'un
régime de droit sur le plan national qui est la meilleure garantie des
droits fondamentaux. Si les systèmes juridiques nationaux ne deviennent
pas performants sur le terrain des droits de l'homme, en vain
s'échinera-t-on à sophistiquer les rouages internationaux ? Par
son caractère supranational, la convention constitue une source
d'enrichissement du droit interne en l'occurrence du Code du Travail au vu de
la référence à des catégories juridiques
jusqu'alors méconnues dans la législation actuellement en
vigueur: les « travailleurs frontaliers(art. 2 § 2, a)» ou les
« travailleurs itinérants » (article 2, alinéa 2)
Travailleurs employés au titre de projet (art. 2 § 2, f).
De plus, à mesure que les avantages de la concertation
régionale deviennent inéluctables, il s'avère de plus en
plus évident qu'un dialogue interrégional sur la gestion des
migrations est également nécessaire. Bien sûr, la
multiplication des colloques, conférences242et des
séminaires sur les questions de liberté de circulation est
à encourager.
En outre, même si une grande partie de la migration se
produit à l'intérieur des régions, il est
indéniable que d'importants flux migratoires se produisent aussi entre
les régions243. Malgré tout, aujourd'hui, les
États doivent se rendre à l'évidence : les migrations se
font, à différents niveaux et sous différentes formes,
parties intégrales de notre présent et de notre
futur244. Dans cet ordre d'idées, la consécration de
la liberté de circulation dans les espaces régionaux et sous
régionaux est surtout synonyme d'espoir. Toutefois, pour que ces
espérances ne restent pas vaines, il serait indiqué de faire la
part des choses. Ou bien la
240 C ASTLES (Stephen) and MILLER, (Mark J). The Age of
Migration, op. cit., p. 47.
241 L'ensemble des archives sur la rédaction de la
Déclaration Universelle des Droits de l'Homme peut être
consulté sur le site
http://www.unog.ch/library.
242 CONFERENCE PARLEMENTAIRE AFRICAINE « L'Afrique et les
migrations : défis, problèmes et solutions » (Rabat, Royaume
du Maroc, du 22 au 24 mai 2008) p.5-9. CONFERENCE INTERNATIONALE DU TRAVAIL,
Etude d'ensemble sur les travailleurs migrants, Rapport III (Partie 1 B),
Section II.B, 87e session, Genève, juin 1999 p.10-15.
243 ORGANISATION INTERNATIONALE DES MIGRATIONS (OIM), Gestion
des migrations au niveau régional : Stratégies de consultation,
op. cit., p. 15.
244 SPENCER (Sarah), the Politics of Migration, Grande-Bretagne,
the Political Quarterly, 2003, p. 2.
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communauté internationale accepte dans son ensemble
d'intégrer sa stratégie globale de gestion du
phénomène migratoire et de lutte contre l'immigration clandestine
dans les limites de la Convention de 1990 et ainsi profite des effets
bénéfiques de l'immigration ,ou bien elle se réfugie dans
le nationalisme ou le régionalisme juridique avec ses contingences et
ses complexités par des systèmes de quotas qu'il soit par pays,
par filière économique ou encore par regroupement familial ou
encore par d'autres initiatives unilatérales qui créent davantage
de problèmes qu'ils n'en résolvent. Dans ce dernier cas, non
seulement les retombées positives des flux migratoires lui
échapperont mais également se créeront et couveront les
germes d'une déstabilisation sociale sur le long terme.
Dès lors, faire de la Convention un instrument
universel par une adhésion massive devient plus qu'une
nécessité mais un objectif à atteindre. Pour y parvenir,
il faudrait joindre aux actes concrets une diplomatie active. Faire tomber
aussi des barrières Nord/Sud semble aussi indispensable. De surcroit, la
mondialisation en cours met au centre de l'activité la circulation des
biens et services au détriment de la promotion des droits des migrants.
Un recadrage s'impose si le monde a encore un souci d'humanisme. Cela pose
toute l'importance du respect et de la reconnaissance des droits des
travailleurs migrants dans la société. C'est le gage d'une
société où la justice, la dignité, le travail
décent, la protection sociale, le dialogue social, la démocratie
en sont les socles indestructibles. Car, en tant que consommateurs, il se peut
que la nourriture que nous mangeons où les vêtements que nous
portons soient le fruit de l'exploitation ou de la maltraitance d'un individu.
Et en définitive, le XXIe siècle ne se fera pas sans la
maîtrise des flux migratoires et la protection des travailleurs migrants.
Et si les États ne prennent pas suffisamment la mesure du défi et
des enjeux, la vague de l'immigration clandestine245 risque
d'emporter sur son passage les efforts réalisés
jusque-là.
245 BENSAAD (ALI) « Voyage au bout de la Peur avec les
clandestins du Sahel » LE MONDE DIPLOMATIQUE | septembre 2001 | Pages 16 -
17
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Plaidoyer pour un cadre juridique de la protection des
travailleurs migrants et migrantes haïtiens et haïtiennes: le cas de
la République Dominicaine, des États-Unis et du Chili de 2008
à 2018.
Recommandation
Cette recommandation reconnaît la situation
particulière dans laquelle se trouvent les migrants de la
deuxième génération (les enfants qui sont nés dans
le pays d'accueil de parents étrangers immigrés), où ils
ont de nombreux liens avec la société d'accueil mais
entretiennent des liens étroits avec les pays d'origine. Elle donne des
recommandations sur la manière de les intégrer au mieux dans la
société d'accueil, s'ils choisissent d'y rester tout en leur
permettant de continuer à faire des contributions à la
société d'origine. La recommandation souligne en particulier la
nécessité de veiller à ce que les migrants de
deuxième génération soient en situation
régulière pour ce qui est de la nationalité et de la
résidence; dans ce contexte, les recommandations portant sur la
restriction des décisions d'expulsion et le maintien des droits acquis
après une absence temporaire du pays ont suscité un grand nombre
de réserves. En règle générale, les recommandations
visent à aider les migrants de la deuxième
génération à assurer la stabilité et le
bien-être qui leur est nécessaire pour apporter des contributions
significatives à la fois aux pays d'accueil et pays
d'origine246.
De manière succincte, nous formulons les
recommandations que voici :
I. La publication les décrets créant l'ONM et
le Ministère des Haïtiens vivant à l'étranger au
journal officiel du Pays.
II. Créer un cadre institutionnel et juridique pouvant
conduire à l'élaboration et l'exécution de la politique
migratoire haïtienne.
III. La ratification de la convention des travailleurs
migrants et les membres de leur famille.
IV. Inventorier les obstacles à l'élaboration
et à l'exécution de la politique nationale de la migration qui
sera proposée.
V. Octroyer un budget et faciliter des moyens qui permettront
une meilleure gestion des migrations.
VI. Sensibiliser le public en vue d'une parfaite
collaboration avec les autorités locales.
246
https://www.coe.int/t/dg3/migration/archives/Documentation/Default_rec_fr.asp#Integration%20(ge
neral)
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travailleurs migrants et migrantes haïtiens et
haïtiennes: le cas de la République
Dominicaine, des États-Unis et du Chili de 2008 à
2018.
VII. Mettre sur pieds des priorités nationales de
développement (quoique limitées) de manière á
infléchir les décisions de dépense des ménages
(rapatriement des salaires des migrants).
VIII. Demander á l'Institut Haïtien de
Statistique (IHSI) de faire des études plus régulières
sur certains enjeux de la migration spécialement sur le nombre des
travailleurs migrants haïtiens.
IX. Encourager la production de rapports sur la migration en
Haïti.
X. Mesurer la capacité d'accueil de notre
société
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