INTRODUCTION DE LA DEUXIÈME PARTIE
Dans la perspective de la «
démarginalisation » de la CEMAC pour sortir du peloton des
pays sous-développés, la contribution de l'Union
Européenne repose sur un ensemble de déterminants (chapitre III)
qui sont les principes et les mécanismes mis en oeuvre par cette
Organisation régionale afin d'accompagner la CEMAC dans son processus
d'intégration sous-régionale et partant, son
développement. Parmi ces principes figurent : le respect de
l'État de droit, la conditionnalité du dialogue politique comme
regard posé par les partenaires européens sur la gouvernance des
pays de la CEMAC, ainsi que la lutte contre la corruption. Le non-respect de
ces principes de coopération donnant lieu à des sanctions qui
portent un coup fatal à l'économie des pays ciblés dans le
domaine des différents programmes de développement. À
coté de cela, s'ajoute comme déterminants, les mécanismes
de financement de l'Union Européenne qui sont une menace pour la
stabilité et l'intégration sous-régionale en zone CEMAC
où il existe des modes de levée des fonds autonomes bien que
limités par le déficit d'engagement nécessaire des
États membres n'ayant pas toujours les moyens financiers suffisants pour
réaliser les objectifs escomptés. Ces mécanismes de
recouvrement propres à la CEMAC renvoient à : la Taxe
Communautaire d'Intégration (TCI), le Fonds de Développement de
la CEMAC (FODEC), ou le Fonds Émergence CEMAC, opérationnel
depuis 2013. Ceci étant, après une radiographie de la
contribution de l'Union Européenne dans le processus
d'intégration de la CEMAC, comment justifier l'inefficacité des
programmes de l'Union Européenne en dépit du volume des moyens
techniques et financiers mobilisés dans la cadre de la consolidation de
l'intégration de la CEMAC sur les plans : politique, économique
et social et comment la CEMAC peut-elle tirer meilleure parti de la
contribution européenne pour intensifier son processus
d'intégration en vue de l'optimisation de ladite coopération
(chapitre IV) ?
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CHAPITRE III : LES DÉTERMINANTS DE LA
CONTRIBUTION EUROPÉENNE DANS LE DÉVELOPPEMENT DE LA
CEMAC.
Les piliers sur lesquels reposent la
coopération entre l'Union Européenne et la CEMAC sont de divers
ordres alliant à la fois des principes tout comme des mécanismes
de financement (section I). Ces déterminants sont jugés
nécessaires pour l'établissement des échanges entre ces
deux méta-entités et se présentent comme des
conditionnalités dont les corollaires affectent la cible à
atteindre, en l'occurrence les couches les plus diverses de la
communauté de l'Afrique centrale, à qui sont destinés
prioritairement les programmes de développement en vue d'un
mieux-être. En telle occurrence, l'évaluation desdits programmes
à partir d'une matrice S.W.O.T. (section II) nous permettra de lever le
voile sur les forces, les faiblesses, les opportunités et les menaces
qui guettent le déploiement de la coopération Union
Européenne - CEMAC.
SECTION I : LES PRINCIPES ET MÉCANISMES DE
FINANCEMENT DE LA COOPÉRATION UNION EUROPÉENNE -
CEMAC.
La coopération entre l'Union Européenne
et CEMAC repose sur un ensemble de principes (paragraphe I) essentiels et
fondamentaux d'ordre sociopolitique et économiques parmi lesquels le
respect des principes de démocratie et d'État de droit, mis en
articulations par des mécanismes de financement, malgré les
freins observables (paragraphe II) liés à la contestation des APE
et la concurrence des puissances étrangères.
PARAGRAPHE I : LES PRINCIPES DE LA COOPÉRATION
UNION EUROPÉENNE - CEMAC.
A- Le respect des conditionnalités d'ordre
sociopolitique.
1- La transvalorisation du principe de respect de
l'État de droit au fil du temps.
Avec l'avènement de l'Union Européenne,
les exigences du respect de l'État de droit et des droits de l'Homme
sont de plus en plus prises en compte. Historiquement, l'Annexe IV de l'Accord
de Lomé II s'est intéressé le premier aux droits humains
à travers une déclaration commune sur les droits des travailleurs
- exerçant légalement une activité salariée -
ressortissants des États ACP à qui aucune discrimination ne
devait leur être faite en raison de leur nationalité. La
Convention de Lomé III n'est pas en reste et affirme dans son
préambule « [son] attachement aux principes de [la] Charte [des
Nations Unies] et [sa] foi dans les droits fondamentaux de l'Homme, dans la
dignité et la valeur de la personne humaine, dans
l'égalité des droits des hommes et des femmes, ainsi que des
nations grandes et petites ». Dans la même veine, l'article 4
dudit Accord stipulait que « la coopération ACP-CEE appuie les
efforts des États ACP en vue d'un développement plus autonome et
auto-entretenu fondé sur leurs valeurs sociales et culturelles, leurs
capacités humaines, leurs ressources naturelles, leurs
potentialités économiques afin de promouvoir le progrès
social et économique des États ACP et le bien-être de leurs
populations, par la satisfaction de leurs besoins fondamentaux, la
reconnaissance du rôle de la femme et de l'épanouissement des
capacités humaines dans le respect de leur dignité ».
Tout comme le préambule sus-cité, celui de la
quatrième Convention de Lomé faisait référence dans
les mêmes termes à la promotion des droits humains à
l'instar de l'alinéa 3 de l'article 5 de ladite Convention qui ira plus
loin à travers
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une possibilité de financement des
activités liées aux droits humains. Cet article
énonçait qu' « à la demande des États ACP,
des moyens financiers pourront être consacrés, en
conformité avec les règles de la coopération pour le
financement du développement, à la promotion des droits de
l'homme dans les États ACP, au travers d'actions concrètes,
publiques ou privées, qui seraient décidées, en
particulier dans le domaine juridique, en liaison avec des organismes dont la
compétence en la matière est reconnue internationalement.»
À partir de 1995, les exigences de démocratie et de respect
de l'État de droit se font plus explicites en relation avec le
développement conformément à l'article 5 de la
quatrième Convention révisée de Lomé qui stipule
que « le respect des droits de l'Homme, des principes
démocratiques et de l'État de droit, sur lequel se fondent les
relations entre les États ACP et la Communauté ainsi que toute
les dispositions de la présente convention, et qui inspire les
politiques internes et internationales des parties contractantes, constitue un
élément essentiel de la présente
convention235», dont la transgression entraine des
sanctions suivant les termes de l'article 366 bis 236 de ladite
convention. À titre d'illustration, le Togo du général
EYADEMA GNASSINGBE a été mis en cause237 en 1992 pour
violation grave les droits de l'Homme perpétrés par ses forces de
l'ordre et en 1998 pour irrégularité aux élections
présidentielles. Ces éléments essentiels sont repris dans
l'Accord de Cotonou révisé qui précise que « Le
respect de tous les droits de l'homme et des libertés fondamentales, y
compris le respect des droits sociaux fondamentaux, la démocratie
basée sur l'État de droit, et une gestion transparente et
responsable des affaires publiques font partie
intégrante du développement durable238. »
En cas de non respect de ces conditionnalités
politiques, l'article 96 dudit accord doit être
appliqué.
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