MEMOIRE
La photographie du territoire,
entre donnée personnelle et donnée
publique
Sous la direction de Madame la professeur Anne
DEBET
AzélineBOUCHER
Master 2 - Droit des Activités Numériques
Université Paris Descartes, Faculté de Droit
2017-2018
SOMMAIRE
Introduction
Chapitre 1 - La photographie du territoire : une
donnée géographique nominative
Section 1 - L'image du domicile : une information
à protéger
Section 2 - La collecte et la diffusion des prises de vues
aériennes, spatiales ou depuis la voie publique
Chapitre 2 - La photographie du territoire : une
donnée géographique de référence
Section 1 - Une information au service de
l'intérêt général
Section 2 - La conciliation entre l'ouverture de
l'accès aux documents administratifs et la protection des données
personnelles
Conclusion
LISTE DES PRINCIPALES ABREVIATIONS
SOURCES DU DROIT
C. civ. : Code civil
CRPA : Code des relations entre le public et
l'administration
CPI : Code de la propriété
intellectuelle
Const. : Constitution
RGPD : Règlement général sur la
protection des données
G29 : Groupe de travail de l'Article 29 de la directive
du 24 octobre 1995
PUBLICATIONS
Bull. civ. : Bulletin des arrêts de la Cour de
cassation (chambres civiles)
CCE : Communication Commerce électronique
D. : Recueil Dalloz
JCP G : Jurisclasseur périodique (semaine
juridique), édition générale
JO / JORF : Journal officiel de la République
française
JO AN Q / JO Sénat Q : Journal officiel de la
République française (questions écrites au ministre,
Assemblée nationale, Sénat)
RTD civ. : Revue trimestrielle de droit civil
RTD com. : Revue trimestrielle de droit commercial et de
droit économique
JURIDICTIONS
CA : arrêt d'une Cour d'appel
Cass. Ass. Plén. : arrêt de
l'assemblée plénière de la Cour de cassation
Cass. Civ. : arrêt d'une chambre civile de la Cour
de cassation
CE : arrêt du Conseil d'Etat
CJCE : arrêt de la Cour de justice des
Communautés européennes
Cons. const. : décision du Conseil
constitutionnel
TGI : jugement d'un tribunal de grande instance
ACRONYMES
CADA : Commission d'accès aux documents
administratifs
CNIL : Commission nationale de l'informatique et des
libertés
IGN : Institut national de l'information
géographique et forestière
ABREVIATIONS USUELLES
Aff. : affaire
Art. : article
c/ : contre
cf. : se reporter à
conclu. : conclusions
comm. : commentaire
ib. / ibid. / ibidem : au même endroit
loc. cit. / loco citato : à l'endroit
cité
n. : note
op. cit. / operecitato : dans l'ouvrage
cité
obs. : observations
p. : page
pp. : plusieurs pages
s. : suivants
somm. : sommaires
sté : société
Introduction
Chacun a «le droit de mener sa vie à l'abri
des regards indiscrets, derrière le mur de la vie
privée»1(*).Ce mur, métaphorique, peut
néanmoinssematérialiser par des haies, des palissades ou encore
de véritables blocs de bétons. Les individus construisent
ces murs pour se préserver du regard d'autrui, du jugement, de la
curiosité, de l'indiscrétion. Quel lieuplus protecteur de la vie
privée, en effet, que le domicile ? Pourtant, les prouesses
technologiques du XXIème siècle ont permis au public,
à un amas d'étrangers, de s'approprier ce temple de
l'intimité, ou plus exactement l'image de ce temple. Comment ? Par
la diffusion sur Internet de prises de vues aériennes et satellites ou
de photographies captées depuis la rue. Ainsi, la géographie
s'est découverte une dimension sociale nouvelle. Elle ne
représente plus seulement le territoire, elle localise et identifie
également les Hommes.
La définition de la donnée géographique,
telle qu'appréhendée par les spécialistes, est issue de
l'article 3 de la directive INSPIRE de 20072(*). Ainsi, « toute donnée faisant
directement ou indirectement référence à un lieu
spécifique ou une zone géographique » est une
donnée géographique.
Trois niveaux de description3(*) permettent encore de préciser la notion. Le
niveau géométrique décrit la forme et la localisation de
l'objet géographique à travers des données vecteurs
(points, lignes, figures) ou des données raster (images
pixellisées). La couche sémantique permet de décrire les
informations caractérisant l'objet géographique. Ce sont des
attributs. Par exemple, sont indiquées les caractéristiques du
bâtiment, son adresse, sa surface, etc... Enfin, le niveau topologique
décrit les relations de l'objet géographique avec ceux
l'environnant. Il permet de positionner sur la surface terrestre la zone
géographique ciblée.
Telle que définie et caractérisée, la
donnée géographique recouvre donc plusieurs formes. Elle peut
ainsi consister en des coordonnées de localisation, en une carte du
territoire selon plusieurs échelles, en une représentation 3D de
l'occupation du sol ou encore en une photographie aérienne ou une image
satellite. Ces photographies peuvent être corrigées
géométriquement pour correspondre à la
réalité du sol, elles deviennent alors des ortho-images4(*). Ce travail nécessite
précision, rigueur et créativité. Ainsi, le
spécialiste imprime une part de sa personnalité lorsqu'il modifie
la photographie. La création issue de photographies peut alors
être considérée comme une oeuvre d'art dès lors
qu'il existe « une correction géométrique,
réalisant une mosaïque de dizaines d'images brutes, donnant
à chacun des éléments sa couleur et harmonisant
l'ensemble»5(*).
La photographie satellite ou aérienne bruten'est donc pas
protégeable en elle-même. Elle ne constitue une oeuvre de l'esprit
qu'après avoir été travaillée.Ce sont ces images et
ces photographies qui font l'objet de notre étude.
Une fois collectées, ces données
géographiques sont agrégées au sein d'un ensemble,
permettant alors une utilisation plus efficace. Cet ensemble, c'est la base de
données6(*). Ainsi,la
protection sui generis du droit des bases de données (articles
L341-1 et suivants du Code de la propriété intellectuelle)peut
trouver à s'appliquer dès lors que les informations
géographiques sont rassemblées au sein d'un système
d'information géographique, un SIG.
Les bases de données géographiques sont un
élément central des SIG. Leur intégration permet, en
effet, d'assurer une utilisation efficace et efficiente des données
acquises. Le SIG est « un ensemble organisé
intégrant le matériel, le logiciel et les données
géographiques nécessaires pour permettre la saisie, le stockage,
l'actualisation, la manipulation, l'analyse et la visualisation de toutes les
formes d'informations
géoréférencées»7(*). Il peut également
être défini plus fonctionnellement comme « un
ensemble coordonné d'opérations généralement
informatisées, destinées à transcrire et utiliser un
ensemble d'information (géographique) sur un même territoire. Ce
dispositif vise particulièrement à combiner au mieux les
différentes ressources accessibles : base de données,
savoir-faire, capacité de traitement selon les applications qui lui sont
demandées. »8(*). Le SIG permet alors de « passer d'un
état de savoir (données) à une dynamique de faire-savoir
(informations)»9(*).
L'Institut national de l'information géographique et
forestière (IGN) est un acteur majeur dans la collecte et la diffusion
des données géographiques. Cet établissement public
à caractère administratif a été créé
par un décret du 26 juin 194010(*) puis, en 2011, il a fusionné avec l'Inventaire
forestier national. Un décret du 27 octobre 2011 est venu
préciser le statut et les missions de l'Institut11(*).
L'article 2 de ce décret dispose que
« l'institut a pour vocation de décrire, d'un point de vue
géométrique et physique, la surface du territoire national et
l'occupation de son sol (...) ». Plusieurs missions lui sont
donc attribuées. Le décret en liste treize. Deux apparaissent
particulièrement intéressantes dans le cadre de cette
étude. Ainsi, l'Institut doit notamment « réaliser
et renouveler périodiquement la couverture en imagerie aérienne
ou satellitaire de l'ensemble du territoire national ». Il est
également chargé de « constituer et mettre à
jour sur l'ensemble du territoire les bases de données
géographiques et les fonds cartographiques dont la liste est
fixée par arrêté du ministre chargé du
développement durable, notamment le référentiel à
grande échelle (RGE). (...) » . L'article 3 de ce
même décret précise que pour l'accomplissement de cette
mission, « l'institut a accès, auprès des services
de l'État et des établissements publics nationaux, à
toutes les informations nécessaires (...) ».
Aussi, l'IGN a pu établir de nombreux partenariats avec
d'autres acteurs de la géographie, et plus particulièrement au
niveau local, auprès des collectivités, pour assurer une
coproduction des données. L'IGN développe également des
échanges avec d'autres organismes publics, tels que la Direction
générale des Finances publiques (DGFiP) ou le Conseil national de
l'information géographique (CNIG). Ces coopérations permettent
à l'IGN de proposer des données géographiques
certifiées et homogènes mais aussi de garantir leur
neutralité12(*). Ce
n'est pas toujours le cas pour les nouveaux acteurs privés de la
géographie : les néo-géographes.
En effet, la géographie n'est plus le seul apanage des
acteurs institutionnels. De plus en plus d'acteurs privés se sont
appropriés le secteur depuis le développement des SIG, d'Internet
et des portails cartographiques13(*).
Ainsi, des entreprises telles que Google Maps, Mappy ou encore
Pages Jaunes (pour ne citer que la partie visible de l'iceberg) ont
« constitué des bases de données
géospatiales à des échelles variables afin de
répondre aux objectifs les plus variés»14(*). Ils ont alors permis la
démocratisation des plateformes géographiques. Selon
TeriituteaQuesnot, docteur en géométrie, l'arrivée de
Google Maps en 2005 a radicalement modifié notre manière
d'appréhender l'espace15(*). Google Earth, le navigateur de Google basé
sur les objets géographiques, a également contribué
à cette ouverture et y a acquis en popularité car Google,
géant du web, était le seul serveur capable de supporter un tel
flux de connexions. Un intérêt marqué pour la donnée
géographique s'est alors dessiné et un usage de plus en plus
intense des données géospatiales par un public diversifié
s'est établi16(*).
L'essor des appareils mobiles et de la géolocalisation
a fait émerger la dimension géographique de chaque individu.
Aujourd'hui, il est possible de partager sa position sur la surface du globe en
un seul clic. Le recours à l'information géographique est devenu
quotidien.
La démocratisation de l'information géographique
a également vu le développement de la géographie
contributive. OpenStreetMap permet ainsi à tous les internautes qui le
désirent d'ajouter des informations localisées sur une carte et
de participer alors à une construction citoyenne de l'espace
géographique sur Internet.
L'information géographique a toujours été
d'une grande valeur dans une société. Aujourd'hui, la richesse
des bases de données a accru l'utilisation des SIG.
Nombreuses sont les administrations et entreprises ayant
recours à ces systèmes. La géographie permet, en effet, de
répondre aux besoins des administrations de l'État. Il est
possible, en ayant recours aux données géographiques, de
surveiller localement l'environnement et d'évaluer les catastrophes, de
contribuer à la sécurité nationale, mais également
d'aménager le territoire dans les secteurs du transport, de l'urbanisme
et de l'agriculture notamment.Le SIG contribue ainsi à éclairer
les décisions des établissements publics, des
collectivités et de l'État en général.La
géographie est également au coeur de nombreux services
proposés à la société. En effet, le SIG permet de
projeter des données sur le territoire pour le qualifier, le
décrire17(*). Il
est donc très fréquent d'y avoir recours pour proposer des
services en lien avec la géolocalisation ou les
télécommunications.
Avec la vulgarisation de l'information géographique,
les particuliers s'intéressent également à ces
systèmes. Les données géographiques sont donc de plus en
plus exploitées par les particuliers. La simplification de
l'accès à l'information via Internet a permis à de
nombreux utilisateurs de s'approprier des outils jusqu'alors
réservés à des spécialistes. Les internautes
peuvent désormais consulter facilement les données relatives
à l'occupation du territoire, et ce depuis l'arrivée de Google
Earth en 200518(*) et du
Geoportail en 2006. Ils sont également actifs en matière
d'information géographique puisqu'ils peuvent partager leurs
coordonnées spatiales voire même contribuer au web
géographique.
La forme de la donnée géographique à
laquelle ces internautes ont le plus souvent recours est la photographie, ou
plus précisément l'ortho-image. Sa facilité
d'interprétation permet, en effet, une démocratisation de son
usage. Considérée parfois comme une donnée
d'intérêt général, la photographie peut
également fournir des informations sur une personne. Dès lors,
comment concilier la nature ambivalente de l'image du territoire, entre
donnée d'intérêt public et donnée à
caractère personnel ?
Cette étude a pour ambition de démontrer que
l'image d'un bâtiment d'habitationpeut, dans certains contextes,
identifier l'individu qui occupe les lieux et/ou qui bénéficie
d'un droit de propriété sur ce bâtiment. Cette
démonstration fera l'objet d'un premier chapitre. Dans un second
chapitre, sera envisagéel'ouverture au public des données
géographiques ; et plus particulièrement la conciliation
entre la diffusion d'images décrivant le territoire et la protection des
données à caractère personnelrelatives aux individus
identifiés parles bâtiments reconnaissables sur ces images.
Chapitre 1 - La photographie du territoire : une
donnée géographique nominative
Photographier le territoire permet d'observer l'occupation de
son sol. Ainsi, il est possible d'identifier des maisons individuelles ou des
immeubles. Lorsque la personne physique qui habite ou possède ce
logement peut être reconnaissable, cette image devient nominative et
touche à la vie privée (Section 1). Il est alors
nécessaire de respecter la loin°78-17 du 6 janvier 1978 relative
à l'informatique, aux fichiers et aux libertés, dite loi
Informatique et Libertés, pour la collecte et la diffusion de ces
photographies (Section 2).
Section 1 - L'image du domicile : une information
personnelle à protéger
Le domicile est une notion-clé de la vie du citoyen. Il
est, en effet, une composante de son droit à la vie privée (I) et
permet d'identifier la personne qui y habite (II).
I - Le domicile au coeur de la vie privée de
l'individu
L'atteinte au domicile constitue une atteinte à la vie
privée de son habitant (A). Qu'en-est-il alors de l'image du
domicile ? Porte-t-elle également atteinte à cette vie
privée ? (B)
A/ L'atteinte à la vie privée
Le respect du domicile découle du droit au respect
à la vie privée (1). Ainsi, un préjudice causé
à ce domicile peut constituer une atteinte à la vie privée
(2).
1. La protection de l'adresse et du domicile
Le droit à la vie privée est un droit
fondamental reconnu par l'ensemble des textes fondateurs. Ainsi, l'article 12
de la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 reconnait
que « Nul ne sera l'objet d'immixtions arbitraires dans sa vie
privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d'atteintes
à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit
à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles
atteintes. ». L'article 8 de la Convention de sauvegarde des
droits de l'homme et des libertés fondamentales dispose que
« Toute personne a droit au respect de sa vie privée et
familiale, de son domicile et de sa correspondance. (..) ».
L'article 7 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne
considère que « Toute personne a droit au respect de sa
vie privée et familiale, de son domicile et de ses
communications. ».
En droit interne, c'est l'article 9 du Code civil qui
protège la vie privée : « Chacun a droit au
respect de sa vie privée. ». La seule constatation de
l'atteinte à la vie privée ouvre droit à
réparation.Ce principe a également été
constitutionnalisé par la jurisprudence du Conseil
constitutionnel19(*).
L'article 1er de la loi Informatique et Libertésconsacre,
quant à lui, le fait que l'informatique ne doivepas porter atteinte
à la vie privée. En effet, le droit à la protection des
données personnelles intègre le droit à la vie
privée et le transcende même20(*).
La vie privée peut être définie comme
« la sphère des activités de la personne qui
relèvent de l'intimité et qui doivent rester à l'abri du
regard d'autrui»21(*). C'est « la partie secrète de la
vie personnelle»22(*).
Tous les textes fondateurs reconnaissent le
domicile comme une composante de la vie privée. L'article 9 du Code
civil, néanmoins, n'y fait pas référence. C'est
l'interprétation des juges internes23(*)qui a façonnécette approcheet qui a
consacré le droit au respect du domicile.
Le domicile est intrinsèquement lié à la
personne puisqu'il est le lieu de préservation de son intimité.
Quel autre temple, en effet,que la demeure pour assurer le respect de la vie
privée ? C'est en son seinque l'individu a choisi d'habiter et donc
de vivre comme il l'entend, préservé des regards indiscrets. Le
domicile ne coïncide alors pas toujours avec la propriété.
Il s'attache à l'habitant24(*) et non au propriétaire.
Le domicile permet également de localiser la personne
car il est considéré comme son principal établissement.
Aussi, il relève d'une liberté de choix : le choix de
s'installer à tel ou tel endroit. Le domicile est alors associé
à une adresse25(*),
c'est-à-dire qu'il est localisé statiquement sur le territoire.
Cette adresse permet donc d'identifier l'habitant du domicile. Aussi, tout
traitement de cette donnée devra respecter la loi Informatique et
Libertés.
L'habitant bénéficie du droit à la
protection de son domicile et à la protection de l'adresse de ce
domicile. La jurisprudence a notamment pu considérer que
« toute personne est en droit de refuser de faire connaitre le
lieu de son domicile ou de sa résidence »26(*). Toute atteinte à ce
droit est sanctionnée.
2. La caractérisation de l'atteinte à la vie
privée
L'atteinte à la vie privée correspond au fait de
léser « le droit de chaque citoyen au respect de sa
personnalité, dans le cadre de sa vie privée ou de
l'intimité de celle-ci»27(*). Elle s'apprécie donc in concreto,
selon chaque situation. Cette approche est extrêmement subjective.Par
exemple, le fait de diffuser l'adresse d'une personne au sein d'un annuaire ne
saurait être considéré comme une atteinte à la vie
privée alors que la divulgation dans la presse de l'adresse du domicile
d'une personne en est une28(*).En outre, cette atteinte ne peut être
caractérisée qu'a posteriori. Ainsi, il convient
d'apporter la preuve d'un préjudice et d'un lien de causalité
afin de sanctionner l'atteinte à la vie privée. Il n'est pas
possible d'intervenir en amont.
La question se pose alors de savoir si la diffusion de la
photographie d'un bâtiment d'habitation porte atteinte à la vie
privée de l'habitant ou du propriétaire de la demeure.
B/ L'image des biens
Le droit à l'image du bien n'est plus débattu et
plus à débattre. Ainsi, le propriétaire du domicile n'a
pas de droit exclusif sur son image (1). Il pourra néanmoins agir en cas
de trouble anormal (2).
1. Le principe : l'absence de droit exclusif sur
l'image du bien
Avec la démocratisation des appareils photographiques
et l'amélioration de la qualité de l'image à la fin des
années 1980, de nouvelles questions se sont posées quant à
l'exclusivité sur l'image d'un bien.Toute personne peut-elle
photographierla maison d'un tiers ? Le droit de propriété
s'étend-il à l'image du bien ?
En 1999, la Cour de cassation fonde le droit à l'image
du bien sur les attributs du droit de propriété,
considérant que « l'exploitation du bien sous la forme de
photographies porte atteinte au droit de jouissance du
propriétaire»29(*). Elle étendalors, de façon
démesurée, le droit de propriété de l'article 544
du Code civil et le placeau-dessus de la liberté d'informer ou de la
liberté d'expression du photographe. Ainsi, le propriétaire d'une
maison est également le propriétaire de toute image de cette
maison.
Dans un arrêt de 200130(*), la Cour reprend la solution de 1999 en y ajoutant
une condition : pour être répréhensible,
« l'exploitation de la photographie par les titulaires du droit
incorporel de son auteur doit porter un trouble certain au droit d'usage ou de
jouissance du propriétaire ». Cette exigence du trouble
certain devait ainsi permettre de trouver un équilibre entre la
liberté d'expression de l'auteur de la photographie et le droit de
propriété.
En 2003, Patrick Bloche et Jean-Marc Ayrault,alors
députés, rédigent une proposition de loi visant à
donner un cadre juridique au droit à l'image et à concilier ce
dernier avec la liberté d'expression31(*). Ils dénoncent un droit absolu à
l'image et suggèrent d'introduire un article 544-1 au sein du Code civil
selon lequel « Chacun a droit au respect de l'image des biens
dont il est propriétaire. Toutefois, la responsabilité de
l'utilisateur de l'image du bien d'autrui ne saurait être engagée
en l'absence de trouble causé par cette utilisation au
propriétaire de ce bien. »Ils espèrent ainsi codifier
la jurisprudence de 2001. Néanmoins, la proposition n'aboutira pas.
En 200332(*) également, la Cour de cassation dénonce
pour la première fois le fondement selon lequel le droit à
l'image serait un attribut du droit de propriété. Elle retient la
protection du respect de la vie privée pour sanctionner la publication
dans la presse de la photographie d'une résidence, accompagnée du
nom du propriétaire et de sa localisation précise.
C'est un arrêt d'assemblée plénière
du 7 mai 2004, société civile particulière Hôtel de
Girancourt33(*), qui a
toutefois posé les fondements de ce « non-droit »
à l'image du bien. « Le propriétaire d'une chose ne
dispose pas d'un droit exclusif sur l'image de celle-ci. »,
« il peut toutefois s'opposer à l'utilisation de cette
image par un tiers lorsqu'elle lui cause un trouble anormal. »
Ainsi, lorsque la reproduction de l'image d'un bien cause un préjudice
anormal au propriétaire de ce bien, l'auteur de l'image est responsable
du préjudice causé34(*). Cette jurisprudence est constante35(*).
L'exploitation de l'image d'un bien n'est donc plus
rattachée à la propriété de ce bien. Ainsi, le
droit d'exploiter l'image d'une maison n'est plus réservéà
son propriétaire. Il n'y a alors pas besoin d'obtenir son
consentement.La collecte des photographies de façades prises par les
capteurs de Google Street View et leur diffusion sur Internet ne
nécessitent plus l'accord des personnes concernées. Le trouble
anormal reste sanctionné. Le géant du net a néanmoins
trouvé une parade pour prévenir une action en
responsabilitéen proposant un « signalement des photos
inappropriées ».
Reste à savoir comment les services de Google
apprécient le caractère
« inapproprié » de la photographie et sur quel
fondement : trouble anormal du propriétaire ou préjudice de
la personne liée au domicile ?
Ce processus de signalement semble s'aligner avec le trouble
anormal caractérisé par les juges de la première chambre
civile. Pour autant, ces mêmes juges ont précisé que le
trouble anormal était celui du propriétaire, et non du locataire,
de l'habitant ou de toute autre personne liée au domicile. Comment
Google peut-il alors vérifier la qualité de l'internaute lui
signalant un trouble ? Ce signalement serait plutôt à
rapprocher de la responsabilité de droit commun. Dès lors qu'un
individu, propriétaire ou locataire, subit un préjudice du fait
de la diffusion de la photographie de son logement sur Internet, il peut
demander à Google de flouter cette image. Si Google s'y refuse,
l'individu pourra toujours l'attraire en justice selon divers fondements.
L'action contre le photographe n'est plus rattachée au
droit de propriété mais à un régime de
responsabilité pour trouble anormal. Seul le propriétaire est en
droit d'agir selon la solution de l'arrêt de 2004. Cela peut paraitre
paradoxal puisque le fondement s'est pourtant écarté du droit de
propriété. En outre, le propriétaire n'est pas toujours
l'habitant de la demeure photographiée. Ses locataires peuvent alors
être les victimes directes du « trouble anormal ».
Quel recours ont-ils ? Ils pourront envisager d'agir contre l'auteur de la
photographie sur le fondement de la responsabilité de droit commun si la
diffusion de cette photographie leur cause un préjudice.La
responsabilité est subordonnée à cette preuve. Aussi, la
victime, dans cette hypothèse,peut être l'habitant, le
propriétaire, le locataire, le sous-locataire ou toute autre personne
qui présente un lien avec la demeure photographiée et qui se
trouve lésée.
Il est intéressant de souligner que s'il n'est plus
nécessaire de demander l'accord du propriétaire pour diffuser la
photographie de sa demeure, le photographe doit toujours obtenir l'autorisation
de l'auteur ou de ses ayant-droits pour reproduire et diffuser les
photographies d'une oeuvre architecturale (Article L122-4 du Code de la
propriété intellectuelle). L'image constitue, en effet, une
atteinte au droit de reproduction de l'auteur. En revanche, si l'oeuvre ne
constitue pas le sujet principal de la photographie, le photographe sera en
mesure de se passer d'une telle autorisation. L'exception de panorama pourrait,
en effet, trouver à s'appliquer36(*).
Dans un arrêt de 200637(*), la Cour de cassation s'est également
penchée sur la photographie de l'intérieur du domicile. Les juges
ont considéré que « le droit de chacun au respect
de sa vie privée s'étend à la présentation interne
des locaux constituant le cadre de son habitat » et que
« l'utilisation faite des photographies qui en sont prises
demeure soumise à l'autorisation de la personne concernée
». Il n'y a donc pas besoin de démontrer un trouble anormal
pour caractériser l'atteinte du fait de la publication des photographies
de l'intérieur d'une demeure puisque les juges se fondent sur l'article
9 du Code civil.De même, c'est l'habitant qui agira pour faire respecter
son droit à la vie privée et non le propriétaire subissant
un trouble anormal. Enfin, l'exploitation d'une telle photographie demeure
soumise à l'autorisation de la personne concernée, ce qui n'est
plus le cas pour l'exploitation de la photographie de la façade.
La question se pose alors de savoir si la diffusionde la
photographie aérienne ou spatiale du domicile, c'est-à-dire la
photographie « du dessus » du domicile, nécessite le
consentement de la personne concernée, comme c'est le cas pour la
photographie de l'intérieur d'une demeure ; ou si elle peut
s'effectuer librement à condition qu'elle ne provoque pas un trouble
anormal pour cette même personne, comme c'est le cas pour la
photographie de la façade d'une demeure ?
La solution adoptée pour préserver le respect de
la vie privée à l'intérieur du domicile pourrait trouver
à s'étendre à l'exploitation d'une photographie
aérienne ou spatiale. En effet, dans les deux situations, l'image
représente ce qui n'est pas accessible aux yeux depuis la voie
publique : l'intérieur du logement pour l'une ; les
accès à la propriété, sa surface, celle des espaces
verts l'entourant et l'aménagement de ces espacespour l'autre.
La vie privée s'étend à l'intimité
de l'individu, c'est-à-dire ce qu'il ne montre pas au public. Il en est
ainsi d'une maison qui n'est rendue visible aux yeux de tous que par l'une de
ses façades. Le reste de la demeure et du terrain, caché du
public (entouré de palissades ou de haies par exemple),fait donc partie
intégrante de l'intimité de cette personne. Selon nous, la
diffusion d'une prise de vue aérienne ou spatiale, dès lors
qu'elle permet d'identifier des caractéristiques du logement qui ne sont
pas visibles depuis la voie publique, et qu'elle ne découle pas d'une
mission de service public38(*), devrait être soumise à l'autorisation
de l'habitant39(*).
En pratique néanmoins, large est la diffusion sans
autorisation d'images aériennes ou spatiales représentant des
parcelles clôturées. En veut pour seule preuve Google Earth.
Ainsi, il semblerait que ce soit la jurisprudence relative à la
photographie des façades qui s'applique. Le principe de la
liberté d'exploitation, et donc de la liberté d'expression et
d'information, l'a emporté au détriment de la protection de
l'intimité des personnes concernées. L'exception du trouble
anormal trouve, selon nous, toujours à s'appliquer,bien qu'ilne soit pas
possible de « signaler un problème » sur Google
Earth40(*).
2. L'exception : le trouble anormal
Le propriétaire d'un immeuble peut s'opposer à
l'exploitation de l'image du bien dès lors qu'elle lui cause un trouble
anormal.
Ce trouble anormal ne saurait néanmoins constituer le
dommage de l'article 1240 du Code civil. La différence entre les deux
notions est une différence de degré et non de nature. En
l'absence de définition, le professeur Reboul-Maupin41(*) se réfère
à un arrêt de la 1ère chambre civile du 5
juillet 200542(*) pour
considérer que le trouble anormal se caractérise notamment par
une perturbation de la tranquillité et de l'intimité. Le
parasitisme, la concurrence déloyale, l'atteinte à la
sécurité, aux droits de la personnalité ouaux droits de
propriété intellectuelle peuvent également
caractériser le trouble anormal. En revanche, la seule exploitation
commerciale de l'image du bien ne suffit pas à constituer ce
trouble43(*). Ainsi, la
conception retenue du trouble anormal semble relativement large puisqu'il ne se
réfère pas uniquement à la vie privée.
L'admission par les juges reste néanmoins difficile.
Critère éminemment subjectif, l'appréciation du trouble
anormal se faitin concreto. Le rapport de cause à effet entre
l'image diffusée et le préjudice causé par le trouble qui
résulte de la diffusion doit être direct.
Un auteur44(*) propose, au contraire, d'objectiver le trouble
anormal. Il considère ainsi que « l'utilisation d'une
image représentant un bien non accessible depuis la voie publique,
à l'insu du propriétaire, constituerait un trouble anormal en
raison de la violation du droit de se clore ». Le trouble
anormal serait alors caractérisé dès lors que la
photographie permet de visualiser ce qui n'est pas accessible aux yeux du
public depuis la rue : l'espace privé.L'auteur considère
encore qu'il conviendrait de « fixer le seuil d'anormalité
en fonction de la fréquence d'utilisation de l'image d'un bien. Ainsi,
plus l'image sera diffusée, plus l'anormalité sera
patente ». Le trouble, en effet, n'est pas lié au seul
fait de photographier la maison. C'est la publication de l'image, et
au-delà son impact, qui cause un dommage au propriétaire.Il
convient, selon nous, pour caractériser l'anormalité,de rajouter
à ce critère de diffusion massive un critère de
localisation. En effet, plus l'image du domicile permettra de localiser
celui-ci et plus le risque de trouble sera démultiplié45(*). De même, l'augmentation
croissante de la résolution des photographies sera un
élément important à prendre en considération pour
qualifier ce trouble.
Il semblerait donc que Google Earth, en publiant en ligne (ce
qui équivaut à une diffusion massive et continue) les images
représentant des demeures qui ne sont pas accessibles depuis la voie
publique, participe à aggraver le trouble causé aux
propriétaires de ces demeures.
En effet, depuisla mise en ligne de ce système,
plusieurs affaires ont fait émule auprès de la population. Elles
portaient notamment sur de la prospection répétée et
continue, pour des vérandas46(*) plus particulièrement, sur des cambriolages
pour lesquels les malfaiteurs avaient utilisé des prises de vue
aérienne afin de déterminer les points d'accès47(*) ou encore sur des absences de
déclaration de constructions de piscine aux services fiscaux48(*).
Google Earth associe l'image du bien à son adresse.
Aussi, la preuve d'une atteinte ou d'un trouble anormal lié à la
seule diffusion des photographies (sans adresseet donc sans localisation)semble
plus difficile à apporter. Le critère de l'empreinte
géographique nous apparait donc pertinent.
Le contrôle du trouble anormal s'opère
encorea posteriori. Il convient d'apporter la preuve d'un trouble
anormal pour pouvoir engager la responsabilité de l'auteur. Il n'est
donc pas possible d'interdire, a priori, la diffusion de la
photographie, encore moins le simple fait de prendre cette photographie.
Pour autant, si cette photographie du domicile permet
d'identifier un individu, alors le régime de protection des
données personnelles trouverait à s'appliquer. Le
propriétaire, le locataire ou le sous-locataire pourrait
bénéficier sans discrimination de cette réglementation
dès lors qu'il est identifié par la photographiedu
bâtiment.
II - Le caractère indirectement identifiant de
l'image du domicile
L'information géographique a pour mission principale de
décrire la surface terrestre. Toutefois, avec le développement de
la qualité des appareils photographiques et du numérique, la
précision permet d'aller au-delà d'une simple description. C'est
désormais un véritable inventaire qu'opèrent les prises de
vue aérienne et spatiale. Ainsi, l'image du domicile prise depuis un
avion, un satellite ou tout simplement depuis la voie publique peut
indirectement identifier son propriétaire ou l'occupant des lieux selon
deux aspects.Tout d'abord, l'image en elle-mêmedécrit les
attributs particuliers d'un immeuble ou d'une maison individuelle. Ces
attributs peuvent être liés à un ou plusieurs individu(s)
(A). Si tel n'est pas le cas, il est encore possible de recouper cette image
avec d'autres informations. En effet, replacée dans un contexte, tel
qu'une plateforme permettant la superposition de diverses couches de
données, l'image du domicile permet de connaitre sa localisation, et
donc indirectement la personne liée à cette adresse (le
propriétaire ou l'occupant des lieux) (B). Peu importe en outre que ces
informations soient publiques.
A/ La description des caractéristiques du
logement
La photographie fige la réalité d'un instant.
Aussi, l'image d'une maison fixe sur un support la représentation des
caractéristiques de cette maison telle que nos yeux ont pu les percevoir
à un moment précis : la couleur de la toiture, la forme des
fenêtres, la surface du bâtiment, le nombre d'étages, etc...
Si cela est vrai pour les photographies prises depuis la voie publique (1), les
prises de vue aérienne ou spatiale (2) permettent, quant à elles,
de dépasser les limites humaines puisque l'individu a alors recours
à un drone, un aéronef ou un satellite.
1. L'image de la façade prise depuis la voie
publique
Dans l'inconscient collectif, c'est Google qui, en
lançant son service Google Street View en 2007, aurait le premier
révolutionné l'accès à la « photographie
géographique ». Néanmoins, en 2002, France Telecom
proposait déjà via le site Pages Jaunes un service
permettant d'associer une adresse à l'image de l'immeuble correspondant
et de naviguer ensuite dans les rues environnantes49(*).
Ces images, dès lors qu'elles permettent d'identifier,
directement ou indirectement, le propriétaire ou l'occupant de
l'habitation sont considérées comme des données à
caractère personnel au sens de l'article 2 de la loi Informatique et
Libertés. Ainsi, la Commission nationale de l'informatique et des
libertés (la CNIL) a considéré, de manière
extensive selon certains auteurs50(*), que les images d'un immeuble constituent des
données nominatives dès lors qu' « elles
permettent de rattacher une photo d'immeuble à une personne
physique ».
Figure 1 : Google Street View Figure 2 : Mappy
Les photographies ci-dessus représentent la
façade d'une grande maison de deux étages, du début du
XXème siècle, construite en pierre rouge/rosée,
avec une toiture en ardoise, dont les fenêtres sont placées
symétriquement et dont la porte d'entrée est
particulièrement large puisqu'elle est à deux vantaux. Il est
également possible de remarquer que le terrain est entouré d'une
grille et que des places de parking sont situées devant la maison.
Ces informations permettent-elles alors d'identifier
l'occupant des lieux ou le propriétaire de cette demeure ? Dans le
périmètre restreint qui l'entoure, oui. Il serait possible de
décrire ses différents attributs à la mairie pour
identifier la personne qui y vit ou qui en est propriétaire. Pour
autant, ces seules photographies ne permettent pas de localiser la demeure.
Elles ne sont, en effet, nullement recontextualisables.
Ainsi, c'est lorsqu'elle est reliée à une
adresse que la photographie du domicile peut être
considérée comme une donnée indirectement nominative et
qu'elle acquiert de la valeur aux yeux des entreprises. Les services
proposés par Google Street View ouMappyassocient donc les prises de vue
à des adresses.
Dans leurs déclarations à la CNIL, ces
responsables de traitement ont ainsi indiqué, pour des finalités
relatives à la « gestion d'une base de données de
photos des rues de villes et mise en ligne de ces photos sur
Internet »51(*) ou à la « mise à
disposition du service Internet Google Street View»52(*), traiter des données
touchant à l'adresse et aux caractéristiques du logement.
L'opinion publique a pu être émue par cette
diffusion massive des adresses et des photographies des logements sur Internet.
Aussi, en 2004, le député Jean-Christophe Lagardes'était
offusqué de la précision des photographies de Google Street View
qui permettraient de rendre accessibles « les intérieurs
de propriétés non visibles par les passants»53(*) et de
« l'exposition à la vue du monde entier de ces
photographies d'espaces privés sans l'accord du propriétaire ou
de l'occupant des lieux ». Il considérait alors que les
risques d'atteinte à la protection des données personnelles et
à la vie privée s'étaient démultipliés. Le
député proposait donc de renverser la charge de la protection de
la vie privée en exigeant l'accord des personnes concernées par
la diffusion de l'image d'un domicile.
Pour cela, il suggérait de qualifier les données
relatives au logement de données particulières en introduisant la
disposition suivante au sein de l'article 8 de la loi Informatique et
Libertés : « Il est interdit de collecter ou de
traiter des données faisant apparaître des immeubles d'habitation
et leurs dépendances, des chemins privés ou des jardins et des
cours privés sauf dans le cas où les propriétaires de ces
lieux ont expressément donné leur accord à cette collecte
et à son traitement. ».
Le député ne précisait rien sur la
localisation de la photographie de l'immeuble d'habitation. Il se bornait
à la seule photographie de cet immeuble. Selon nous pourtant, cette
image, dès lors qu'elle n'est pas localisable, n'est pas nominative non
plus. Ce n'est que dans de rares casque les attributs d'un immeuble, seuls,
permettrontd'identifier la personne qui y est liée : dans un
périmètre restreint et/ou lorsque la demeure présente des
particularités visuelles. Ainsi, la diffusion sur Internet de la seule
photographie d'un immeuble entraine moins de risques de porter atteinte
à la vie privée de son occupantou de causer un trouble anormal
à son propriétaire dès lors que l'internaute n'est pas en
mesure de connaitre la localisation de cet immeuble ou le nom de ce
propriétaire. Il aurait, selon nous, fallu introduire la dimension
relative à la localisation de l'immeuble au sein de cette proposition de
loi. En tout état de cause, le texte n'a pas été
adopté.
Si l'imagede la façaded'un immeubledélivre
nombre d'informations sur son occupant ou son propriétaire, qu'en-est-il
d'une prise de vue aérienne ou par satellite ?
2. Les images satellites et aériennes
Les photographies aériennes et satellites permettent
d'accéder à des informations qui ne sont pas visibles depuis la
voie publique. Ces images sont souvent retouchées pour correspondre
à la réalité géométrique du sol. La
directive INSPIRE définit ainsi l'ortho-imagerie comme des «
images géoréférencées de la surface terrestre,
provenant de satellites ou de capteurs
aéroportés » (Article 3 de la directive).
Aujourd'hui, la technologie permet également d'obtenir une vision en
trois dimensions du bâtiment photographié.
L'autorisation unique AU-001, concernant les SIG,
considère notamment que les informations sur les
propriétés bâties sont des données
personnelles54(*).
Aussi, ces images (à résolution de 5m)
permettent-elles d'identifier l'occupant des lieux ou le propriétaire de
la demeure ?
Figure 3 : Google Earth 3D Figure 4 : Google Earth,
3D
Figure 5 : Google Earth Figure 6 : Géoportail,
IGN
La comparaison des photographies permetde remarquer que les
attributs visibles du logement sont différents sur ces images que sur
celles représentant la façade. Il est possible ici d'observer la
superficie de l'habitat, sa forme ainsi que la présence d'un balcon.
L'image 3D rassemble plus d'informations sur le logement puisqu'elle conjugue
la photographie de la façade avec la photographie aérienne ou
spatiale.
Ainsi, les informations issues d'une prise de vue
« du dessus » sont des données en lien avec
l'urbanisme et le dessin cadastral. Une telle photographie permet, en effet, de
représenter ce qui a été déclaré par le
propriétaire lors de la construction du logement ou de bâtiments
ultérieurs (piscines, dépendances, etc...). Elle informe
également sur la valeur du logement puisqu'elle donne accès
à la taille de la parcelle et à la superficie du bâtiment.
Toutefois, la valeur d'une maison s'apprécie également en
fonction de sa localisation.
Les seules caractéristiques du logement ne semblent
donc pas pertinentes pour permettre d'identifier son habitant ou son
propriétaire.C'est l'association de l'image du logement et de l'adresse
qui liel'individu55(*). En
outre, le degré de précision d'une photographie n'est pas un
critère prépondérant en matière de données
à caractère personnel puisqu'il suffit que la personne physique
soit identifiée ou identifiable.Aussi, c'est un degré de
précision à un certain seuil qui est nécessaire. Ce seuil,
c'est la résolution permettant de localiser la maison. Une
résolution plus précisepourratoujours être
considérée comme un élément majeur pour
caractériser l'atteinte à la vie privée ou le trouble
anormal du propriétaire.
Dès lors, il convient de recontextualiser la
photographie de l'immeuble pour connaitre l'identité de son
propriétaire ou de l'occupant des lieux.
B/ La contextualisation de la donnée
L'immeuble est localisé, de même que tout
individu est lié à une adresse (1). Ainsi, l'association des
caractéristiques du logement et de l'adresse permet d'identifier cet
individu (2).
1. Le cadastre et la base adresse nationale (BAN)
Deux documents sont relatifs au cadastre. Le plan cadastral
permet de reporter les numéros et limites des parcelles tandis que la
matrice cadastrale a une vocation plus identifiante puisqu'y sont notamment
inscrits le nom du propriétaire, son adresse, sa date et lieu de
naissance, voire parfois la description du bâtiment. Ils
représentent également la forme du terrain ainsi que les
éléments immobiliers et naturels qui y sont présents.
« A ce plan, sont liés l'identité du (des)
propriétaire(s), les éléments d'évaluation fiscale
et d'autres données foncières permettant de calculer l'imposition
de la propriété»56(*).
Quant à l'adresse, la directive INSPIRE la
définit, dans son Annexe I, comme la «localisation des
propriétés fondée sur les identifiants des adresses,
habituellement le nom de la rue, le numéro de la maison et le code
postal ».
L'article L127-10 du Code de l'environnement prévoit la
diffusion des informations contenues dans les bases de données
géographiques nationales ou locales de référence. Il
précise encore que « ces bases de données
géographiques nationales ou locales de référence ne
peuvent inclure aucune information à caractère personnel autre
que le découpage parcellaire et les adresses des
parcelles ».
Le décret n° 2011-223 du 1er mars 2011
pris pour l'application de l'article L127-10 du Code de l'environnement et
après avis de la CNIL, fixe les modalités de constitution des
bases de données géographiques de référence et des
informations susceptibles d'être diffusées. Ainsi, les
informations qui peuvent être publiées en ligne sont
« les données de localisation géographique
relatives au découpage parcellaire cadastral : référence
des parcelles cadastrales, localisation de celles-ci, localisation de leurs
contours » et « les données de localisation
géographique relatives aux adresses des parcelles : localisation et, le
cas échéant, voie de situation, numéro dans la voie et
compléments éventuels ».
Dans une délibération de 201257(*), la CNIL a mis en place une
dispense de déclaration n°16concernant la communication de
données géographiques.La CNIL reconnait qu' « une
adresse postale, des coordonnées géographiques comme un
numéro de parcelle cadastrale identifient indirectement une personne
physique, locataire ou propriétaire ». Ainsi, les
découpages cadastraux et les adresses des parcelles, bien que
considérés comme des données à caractère
personnel, doivent être publiés en ligne.
Le Code des relations entre le public et l'administration
(CRPA) a confirmé, en 2016, cette mise à disposition. Le plan
cadastral informatisé produit par la direction générale
des finances publiques ; le registre parcellaire graphique produit par l'Agence
de services et de paiement et la base adresse nationale coproduite par l'IGN,
La Poste et l'association OpenStreetMap France sont, en effet, qualifiés
de données de référence. Dès lors, l'État,
les collectivités territoriales ainsi que les autres personnes de droit
public ou les personnes de droit privé chargées d'une mission de
service public doivent les publier (Article L321-4 du CRPA).
Tous ces textes précisent donc que les localisations
des parcelles cadastrales et de leurs contours, ainsi que les données de
localisation géographique des adresses des parcelles sont des
données à caractère personnel mais doivent
néanmoins être diffusées en ligne. Pour autant, rien n'est
précisé concernant l'immeuble bâti, sa localisation, ses
caractéristiques, etc... Le plan cadastral et l'adresse sont des
données relatives à une parcelle dans son ensemble et non pas
spécifiquement à l'immeuble construit sur cette parcelle.
La dispense de déclaration n°16
prévoit58(*)la
communication de renseignements aux personnes ayant déposé une
demande d'informations concernant une propriété bâtie
déterminée pour obtenir des renseignements plus précis sur
les immeubles du territoire d'une commune.
Ainsi, le demandeur doit désigner avec précision
l'immeuble concerné par la demande de renseignements, par son adresse
notamment, mais il n'a pas à justifier d'un motif légitime. Peu
importe l'usage qu'il fera des informations auxquelles il a eu
accès59(*). La
seule condition à l'accès relève du principe de
ponctualité, le nombre de demandes de communication et l'étendue
des informations requises ne devant pas être excessifs. De même, le
propriétaire de la parcelle dont les informations sont
communiquées à un tiers ne peut s'opposer à ce processus
en raison du principe de libre communication des documents cadastraux (Article
L311-1 du CRPA).
Les informations faisant l'objet de la communication sont
néanmoins limitées aux références cadastrales,
à l'adresse et, le cas échant, aux noms et adresses du
propriétaire, à la contenance cadastrale de la parcelle ou encore
à la valeur locative des immeubles (Article L107-A du Livre des
procédures fiscales).
Quel est alors le lien entre l'image du logement et
l'ouverture des adresses et des données cadastrales ?
L'image du logement peut être considérée
comme une représentation du plan cadastral dans une dimension
réelle. Elle apporte ainsi beaucoup plus d'informations que le dessin en
deux dimensions.
En outre, ce logement est construit sur une parcelle, laquelle
bénéficie d'une adresse propre, d'une empreinte spatiale. Ce
bâtiment est donc localisable sur la surface terrestre :
« Cette adresse correspond à telle maison ». Si cette
adresse est liée à un individu, alors elle permet de l'identifier
et c'est donc une donnée personnelle : « Monsieur X
habite à telle adresse. » Indirectement, l'adresse permet
alors de relier l'individu à un logement. Ce logement devient donc
identifiant en lui-même : « Monsieur X habite dans telle
maison. »60(*).
Ce syllogisme peut être représentéselon le schéma
suivant :
LOGEMENT ADRESSE
ADRESSE INDIVIDU
LOGEMENT INDIVIDU
Aussi, les images aériennes, satellites ou prises
depuis la rue peuvent être croisées ou rapprochées de
fichiers comportant des données directement ou indirectement nominatives
comme les bases de données BD Parcellaire et BD Adresse. Dès
lors, cela peut permettre d'identifier l'individu lié au
bâtiment.
2. L'individu lié au bâtiment
Le système de zoom in et de zoom out
permet de recontextualiser l'image de l'immeuble et de le localiser. Il est
alors possible de rattacher une adresse à un bâtiment
d'habitation. Aujourd'hui, les plateformes proposent plutôt de recouper
les informations à travers une superposition de couches de
données : les images du territoire + les adresses des parcelles par
exemple.
La CNIL, dans son rapport d'activité de 200261(*), considère que la
photographie d'un immeuble ne constitue pas une donnée nominative
lorsqu'elle est considérée en tant que telle. Pour autant,
dès lors qu'elle est associée à l'adresse correspondante,
elle devient une donnée indirectement nominative.
La donnée à caractère personnel est
définie par l'article 2 de la loi Informatique et Libertés comme
« toute information relative à une personne physique
identifiée ou qui peut être identifiée, directement ou
indirectement, par référence à un numéro
d'identification ou à un ou plusieurs éléments qui lui
sont propres ».
La loi précise encore que « pour
déterminer si une personne est identifiable, il convient de
considérer l'ensemble des moyens en vue de permettre son identification
dont dispose ou auxquels peut avoir accès le responsable du traitement
ou toute autre personne. »Le groupe de l'Article 29 propose un
test, le test de l'intrus motivé62(*), pour vérifier la force de l'anonymisation de
données à caractère personnel, c'est-à-dire pour
s'assurer que les données ne permettent plus d'identifier la personne
concernée. Selon nous, ce processus peut également être
utile à qualifier une donnée comme étant personnelle
dès lors que son caractère identifiant est débattu.
Reprenons alors l'exemple vu précédemment.
Qu'en-est-t-il désormais lorsque nous essayons de replacer l'image du
domicile dans son contexte ? Est-ce une opération difficile
à réaliser selon les moyens dont nous disposons ?
Figure 7 : Google Street View, contexte
Figure 8 : Mappy, contexte
Figure 9 : Géoportail, IGN, contexte
Figure 10 : Géoportail, IGN, contexte
Figure 11 : Google Maps, contexte
Figure 12 : Google Maps, contexte
Ces figures permettent de démontrer la facilité
d'accès à l'adresse d'un immeuble sur les plateformes
géographiques disponibles sur Internet. Si elles ne diffusent pas encore
le nom de la personne habitant cet immeuble ou celui de son
propriétaire, cela peut apparaitre bien hypocrite puisqu'en deux
clics...
Figure 13 : Pages Blanches
Figure 14 : Pages Blanches
... L'identité de l'occupant des lieux63(*) peut être
découverte.Il est, en effet, très simple, à partir d'une
adresse, de rattacher un individu (le propriétaire ou l'habitant)
à la photographie d'un immeuble. L'annuaire inversé des pages
blanches en est le parfait exemple.
Aussi, le test de l'intrus motivé, appliqué dans
un autre contexte que celui pour lequel il a été pensé, a
rencontré un franc succès dans cette démonstration
puisqu'il permet, par corrélation, d'identifier une personne physique
liée à un immeuble.
Néanmoins, ce testpeut être voué à
l'échec dans plusieurs hypothèses ; et plus
particulièrement lorsque l'adresse ne permet plus de
« remonter à un individu ». Ce sera notamment le cas
si celui-ci a demandé à ce que son adresse soit en liste rouge.
Ce peut également être le cas lorsque l'adresse n'est pas ou plus
liée à la personne concernée, en cas de
déménagement par exemple64(*).
Lorsqu'il n'est pas ou plus possible d'établir le lien
entre l'adresse et l'individu, l'image du logement n'est donc pas
considérée comme une donnée à caractère
personnel, sauf bien sûr à ce que les caractéristiques du
logement soient uniques et permettent d'identifier la personne
concernée. Ainsi, toutes les photographies d'immeubles ne sont pas des
données à caractère personnel.
LOGEMENT ADRESSE
ADRESSE INDIVIDU
LOGEMENT INDIVIDU
Serait-il également possible de considérer que
l'image d'un immeuble, qui comporte donc plusieurs logements et est
associé à un certain nombre de personnes, puisse également
être considérée comme une donnée à
caractère personnel ? La CNIL rappelle que c'est le rattachement de
l'immeuble à l'adresse et de la personne à l'adresse qui est ici
au coeur de l'identification. Aussi, il importe peu « que la
photographie de la propriété corresponde à un immeuble
comportant plusieurs logements ou à une maison
individuelle »65(*).
La donnée personnelle n'est pas
caractérisée par le fait qu'elle fournisse ou non des
informations sur la personne concernée. Elle est qualifiée ainsi
dès lors qu'elle identifie une personne physique. Néanmoins, la
photographie de l'immeuble, dès lors qu'elle franchit un certain seuil
de qualité et de précision, transmet des informations sur la
personne : il est possible de savoir si l'habitation de cet individu est
un appartement ou une maison individuelle, de connaitre son niveau de vie, son
patrimoine, etc... Schématiquement, l'internaute est face à la
photographie d'un immeuble ; grâce à la localisation de cet
immeuble, il est en mesure d'avoir accès à l'adresse et de
recouper cette information avec d'autres données pour obtenir le nom de
la personne liée à cette adresse ; la photographie de
l'immeuble lui donne ainsi des informations sur cette personne telles qu'une
approximation de son patrimoine, du nombre de personnes avec qui elle vit, de
ses goûts, etc...
Cette donnée apporte, en outre, des informations non
négligeables sur la personne concernée. Elle permet, en effet, de
manière incidente, d'évaluer la valeur de la maison66(*) selon ses
caractéristiques (surface, état, etc...) et sa localisation
(quartier huppé, résidentiel, etc..) et donc de déduire
des informations sur le patrimoine de la personne concernée. La valeur
d'une maison constitue un élément d'information sur un
objet : l'immeuble ; mais également sur son
propriétaire.
Une telle identification de l'habitant ou du
propriétaire de l'immeuble présente donc certaines vertus,
notamment en matière fiscale ou d'urbanisme. Il est, en effet, possible
d'observer la présence de piscines ou de bâtiments dans les
jardins clôturés. Les services publics peuvent alors recouper les
informations en leur possession et sanctionner les particuliers qui ont fait
construire sans permis et/ou qui n'ont pas déclaré ces
constructions aux impôts locaux.
Le règlement général sur la protection
des données67(*),
dit RGPD, a notamment inséré dans la définition des
données à caractère personnel une référence
aux données de localisation. Comment cette notion est-elle
caractérisée ? La localisation est le fait
d' « être situé dans l'espace et le
temps»68(*). La
directive INSPIRE définit la donnée géographique comme
« toute donnée faisant directement ou indirectement
référence à un lieu spécifique ou une zone
géographique ». Il semblerait donc, selon nous, qu'une
interprétation extensive de ces données de localisation permette
d'intégrer les images représentant des immeubles69(*), dès lors que ces
images sont localisables sur une carte. Ainsi, lorsqu'une photographie fait
référence à un lieu spécifique (celui du logement
photographié) et permet donc de situer la personne qui y habite ou qui
en est propriétaire, elle est considérée à la fois
comme une donnée géographique et comme une donnée
personnelle. La photographie est alors une donnée de localisation
nominative.
Section 2 - La collecte et la diffusion des prises de
vues aériennes, spatiales ou depuis la voie publique
Dès lors que l'image d'un immeuble est
considérée comme une donnée permettant l'identification
d'une personne physique, sa collecte et sa diffusion doivent se faire dans le
respect de la loi Informatique et Libertés et du règlement
général sur la protection des données. Ainsi, le
traitement doit notamment avoir un fondement légitime (I) mais le
responsable de traitement doit encore remplir certaines obligations et assurer
les droits des personnes concernées (II).
I - Les fondements de la collecte et de la diffusion des
prises de vues
Concernant la représentation d'un immeuble, les images
sont d'abord collectées (A), traitées puis diffusées sur
Internet (B).
A/ La collecte des photographies
Les photographies des immeubles peuvent provenir d'un capteur
situé sur la voie publique, dans un plan horizontal (2), ou d'un capteur
dans le ciel, sur un plan vertical (1).
1. Les photographies aériennes et spatiales
Les prises de vue aérienne et spatiales sont
encadrées par la loi (a). Aussi, les possibles fondements
légitimant leur collecte sont limités (b).
a) L'encadrement par la loi des techniques de
photographie
La collecte d'images aériennes par des capteurs
aéroportés est encadrée. Ainsi, toute personne qui
souhaite réaliser des enregistrements d'images au-dessus du territoire
national doit faire une déclaration dans les quinze jours
précédant l'opération auprès du chef de service
territorial de l'aviation civile (Article D133-10 du Code de l'aviation
civile).
Le recours aux satellites pour observer la surface terrestre
est également limité. Notamment, la résolution 41/65,
adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies
le 3 décembre 1986, prévoit que l'État, dans le cadre de
ses activités de télédétection, doit respecter le
droit international.
Concernant les drones, plusieurs dispositions restreignent son
utilisation au-dessus des propriétés privées. L'article
544 du Code civil énonce que « la propriété
est le droit de jouir et disposer des choses de la manière la plus
absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois ou
par les règlements ». L'article 552 du même Code
précise que « la propriété du sol emporte la
propriété du dessus et du dessous ». Qu'en est-il
alors du volume se trouvant à l'aplomb du sol ? Si les droits du
propriétaire ont été sacrifiés quant à
l'espace survolé par des avions (Article L6211-3 du Code des
transports), ils subsistent néanmoins lorsqu'un drone vient à se
trouver dans cet espace. Il appartiendra alors au propriétaire de
prouver que ce survol porte atteinte à ses droits. Il est
néanmoins reconnu que « dès lors qu'il est
équipé d'un appareil photo (...), un drone peut potentiellement
porter atteinte à la vie privée, capter et diffuser des
données personnelles»70(*).
De même, deux arrêtésdu 17 décembre
201571(*) relatifs
à l'encadrement des drones rappellent le respect de la vie privée
et de la protection des données personnelles.
b) Le fondement légitime de la collecte de
photographies aériennes
L'article 7 de la loi Informatique et Libertés expose
les différents fondements sur lesquels peuvent s'appuyer les traitements
de données à caractère personnel : le consentement,
le respect d'une obligation légale, la sauvegarde de la vie de la
personne concernée, l'exécution d'une mission de service public,
l'exécution d'un contrat ou la réalisation de
l'intérêt légitime du responsable de traitement ou du
destinataire.
L'IGN a notamment pour mission de
« réaliser et renouveler périodiquement la
couverture en imagerie aérienne ou satellitaire de l'ensemble du
territoire national»72(*). Sa mission de service public l'exonère donc
de respecter les dispositions du Code de l'aviation civile. Celui-ci
prévoit notamment qu'elles ne s'appliquent pas aux
« escadrilles photographiques » de l'IGN. Aussi, l'Institut
collecte des données personnelles relatives aux images des logements
captées par avion ou par satellite sur le fondement de
l'exécution d'une mission de service public.
Un organisme public peut-il alors requérir de l'IGN
qu'il collecte des images ? Le sénateur Jean-Louis Masson a
notamment demandé au ministre de la transition écologique et
solidaire si « une commune peut utiliser un drone pour procéder
à des contrôles de propriétés privées
à l'effet, notamment, de relever d'éventuelles infractions aux
règles d'urbanisme ou de non-déclaration de création de
piscines pour le calcul de l'assiette des impôts locaux
»73(*). Il lui a
été répondu que « la captation d'images par la
voie des airs au moyen d'un drone survolant une propriété
privée peut être considérée comme une
ingérence dans la vie privée » et que
« le constat d'une infraction sur une propriété
privée à l'aide d'un drone peut être
considéré comme illicite dès lors que la zone
contrôlée est inaccessible aux regards»74(*).
Qu'en est-il alors d'images aériennes prises par l'IGN
pour le compte d'une commune afin de contrôler le respect de contraintes
d'urbanisme ainsi que la déclaration de piscines ? L'article 4 du
décret statutaire de l'IGN prévoit qu'il peut apporter son
concours, par convention, à des administrations, collectivités et
services publics. Aussi, l'IGN peut collecter des images aériennes pour
le compte d'une commune lorsque cela répond à l'exercice des
compétences propres de cette commune. Pour autant, l'article 25-I
3° de la loi Informatique et Libertés, qui sera abrogé sous
peu,prévoit une autorisation de la CNIL pour « les
traitements, automatisés ou non, portant sur des données
relatives aux infractions, condamnations ou mesures de sûreté
(...)». Ainsi, dès lors que cette collecte comprenait
également des données à caractère personnel
(l'identité de l'habitant ou du propriétaire peut être
identifiée par les images notamment), il convenait de demander
l'autorisation de la CNIL. Le projet de loi Informatique et Libertés ne
prend plus en considération les infractions en matière fiscale ou
d'urbanisme. Toutefois, cette collecte devra être inscrite au registre
des traitements, en vertu du règlement général sur la
protection des données personnelles.
Qu'en-est-il alors des opérateurs privés ?
Quel est le fondement de leurs collecte ? Le site Internet de Google Earth
précise75(*) que
« les images sont collectées au fil du temps auprès
de différents fournisseurs et plates-formes ». La liste
de ces fournisseurs n'est néanmoins pas divulguée. Il semblerait
que ce soit par des relations contractuelles que Google obtienne des images du
territoire. Il n'est donc pas un collecteur lui-même.
Nous n'avons trouvé aucune déclaration relative
à Google Earth auprès de la CNIL76(*). Des données indirectement nominatives sont
pourtant concernées par ce service. Ainsi, quels pourraient être
les fondements de la collecte des images par les partenaires de Google ?
Ils pourraient reposer sur une mission de service public (dans le cas où
Google s'approvisionnerait en données auprès de l'IGN) ou encore
sur l'intérêt légitime du destinataire de ces
données, Google. En effet, le moteur de recherches souhaite fournir un
meilleur accès à l'information géographique. Pour cela, il
ambitionne d'agréger l'ensemble des images du territoire afin d'offrir
la meilleure précision possible. Il a donc besoin de données
collectées par des tiers ayant accès à plus de ressources
que ses services. Aussi, Google achète des données de description
du territoire auprès de différents partenaires, notamment
institutionnels.
La question peut alors se poser de savoir si dans ces
conditions, les partenaires sont qualifiés de responsables de traitement
ou de sous-traitants. Selon nous, cette qualification dépendra selon que
les données sont présentées sur étagères -
le partenaire sera alors responsable de traitement - ou si elles
répondent à des demandes spécifiques du moteur de
recherches. Google pourrait alors déterminer les moyens et les
finalités de la collecte ; le partenaire serait donc
considéré comme un sous-traitant.
2. Les prises de vues depuis la voie publique
La collecte de photographies depuis la voie publique (et le
traitement relatif à l'anonymisation des plaques d'immatriculation et
des visages) faisait quant à lui l'objet de déclarations
auprès de la CNIL.
Si cette autorité offre un accès aux
déclarations qui lui ont été faites et notamment aux
informations relatives aux données concernées, aux
finalités ou aux destinataires, le fondement du traitement n'est
néanmoins pas précisé.
Il semblerait alors qu'il faille, ici aussi, se fonder sur
l'hypothèse de l'intérêt légitime du prestataire qui
collecte les données (Google par exemple). Afin de réaliser sa
finalité, à savoir permettre l'accès à
l'information géographique de précision, il a
« besoin » de collecter des images depuis la rue, ces
images étant parfois relatives à des personnes physiques. Depuis
peu, Google Street View propose également aux internautes de contribuer
à son service77(*).
Ils deviennent alors eux même collecteurs de données personnelles.
Ces photographies des domiciles sont collectées dans le
but, ensuite, de diffuser les images du territoire sur Internet. Avant
publication, ces images sont souvent retraitées pour correspondre
géométriquement à la réalité du sol. Cette
phase de transformation de la prise de vue en ortho-imagerie ne sera pas
développée au sein de cette étude.
B/ La diffusion sur Internet des photographies
Les images collectées (puis traitées) sont
ensuite diffusées sur Internet. Cette publication est également
considérée comme un traitement. Pour autant, elle ne faisait pas
l'objet de déclaration à la CNIL pour les images aériennes
ou satellites. La question se pose toutefois de son fondement : obligation
légale (1) ou intérêt légitime (2) ?
1. L'obligation légale
La diffusion de données géographiques par l'IGN
répond à l'intérêt du public d'avoir accès
à l'information géographique, lequel a été
consacré par l'exigence d'ouverture imposée par la loi
n°2016-1321 du 7 octobre 2016, dite loi Lemaire ou loi pour une
République numérique.
La publication d'ortho-images découle donc d'une
obligation légale. Elle devra néanmoins toujours fait l'objet
d'une inscription au sein du registre des traitements. La question de savoir si
l'obligation de publication s'étend à la diffusion, plus
particulièrement, des images des immeubles, est détaillée
dans le second chapitre de cette étude.
2. L'intérêt légitime
Concernant les opérateurs privés, le fondement
de la diffusion des images aériennes, spatiales ou prises depuis la vue
reposerait, comme pour la collecte, sur l'intérêt légitime
de cet opérateur. Toutefois, l'intérêt légitime
considéré n'est plus limité à celui de ces seuls
opérateurs privés, alors responsables de traitement, il peut
également s'agir de l'intérêt légitime poursuivi par
le destinataire de la diffusion, à savoir les internautes. Le public a,
en effet, un intérêt à accéder aux informations
géographiques.
Il conviendra néanmoins de ne pas méconnaitre
les droits et libertés fondamentaux de la personne
concernée : l'habitant ou le propriétaire du domicile.
Aussi, comme en matière de droit à l'image du bien, il convient
d'assurer un équilibre entre le droit à la vie privée et
au respect du domicile ; et le droit du public d'accéder à
l'information. La diffusion trouverait ici une limite dans le droit
d'opposition pour motifs légitimes dont bénéficie la
personne concernée. Ces motifs légitimes pourraient alors
être rapprochés du trouble anormal en droit des biens. Une telle
solution permettrait de concilier les règles relatives au droit à
l'image d'un bien et celles protégeant le droit des données
personnelles.
En outre, plus la photographie est précise et plus le
risque d'atteinte à la vie privée est grand. De même, ce
risque est également accru par le nombre de personnes ayant accès
à la photographie. Ainsi, le caractère proportionné de la
collecte des données pourrait également être une limite
à la diffusion des images du domicile relatives à une personne
physique.
II - Les obligations du responsable de traitement et les
droits de la personne concernée
La collecte et la diffusion d'images relatives à une
habitation sont des traitements de données à caractère
personnel. Le responsable de traitement doit donc informer les personnes
concernées (A) et mettre en place des droits pour protéger
l'utilisation des données les identifiant (B).
A/ L'information relative au traitement
L'information présentée à la personne
concernée doit comporter certaines précisions sur le traitement
(1). Dans le cas d'une collecte indirecte, l'information s'avère plus
complexe. Aussi, la forme collective peut être envisagée pour
diffuser ces renseignements (2).
1. Les informations relatives à la durée de
conservation des données, la finalité et les destinataires du
traitement
En 2012, Philippe Meunier, alors député, avait
demandé au Ministère de l'Intérieur à ce que les
prises de vue aérienne de propriétés privées
disponibles sur Google Maps78(*) soient encadrées et que, notamment l'accord
des propriétaires soit sollicité79(*).
Le Ministère de la Justice, et non celui
interrogé, avait alors répondu qu'en application de la loi
Informatique et Libertés, « lorsque les données n'ont
pas été recueillies auprès de la personne
concernée, ce qui est le cas s'agissant des données personnelles
obtenues par Google Maps, le responsable du traitement ou son
représentant est tenu, dès l'enregistrement des données
ou, si une communication des données à des tiers est
envisagée, au plus tard lors de la première communication des
données, de fournir à la personne visée les informations
suivantes : l'identité du responsable du traitement, la finalité
poursuivie par le traitement, le caractère obligatoire ou facultatif des
réponses aux demandes faites par la personne concernée, les
conséquences éventuelles à son égard d'un
défaut de réponse, ainsi que les destinataires ou
catégories de destinataires des données et les droits dont elle
dispose ».
Il avait ajouté que « la loi ouvre la
possibilité à toute personne concernée de s'opposer, pour
des motifs légitimes, à ce que les données personnelles la
concernant fassent l'objet d'un traitement et lui permet de demander la
rectification ou l'effacement de données inexactes notamment »
et rappelé que la CNIL était chargée de veiller au respect
de ces dispositions80(*).
Les images des domiciles relatives à des personnes sont
aujourd'hui largement diffusées sur Internet. Aussi, cette publication
ne connait pas de limite de temps, ni de destinataire. Si cette diffusion
massive et continue se justifie pour les données de l'IGN en raison de
sa mission de service public et du mouvement d'ouverture des données
publiques81(*), elle est
plus difficilement acceptable pour les données des opérateurs
privés.
La personne concernée devra, dans tous les cas,
être informée de l'identité de la personne qui collecte
et/ou diffuse les images de son domicile, de la raison pour laquelle elle le
fait, de l'identité des personnes pouvant accéder à ces
images, de la durée de conservation de ces photographies, de son droit
d'opposition, d'accès, de rectification.
2. Une information collective
La loi Informatique et Libertés prévoit que
lorsque les données n'ont pas été recueillies
auprès de la personne concernée, le responsable de traitement
peut fournir les informations prescrites lors de la première diffusion
des données.
Néanmoins, il n'est pas envisageable d'informer
individuellement chaque personne concernée. Aussi, concernant la
collecte d'images aériennes, satellites ou depuis la rue, il peut
être prévu une information sur le site Internet des communes
concernées, au sein du journal local ou sur le site du collecteur, comme
c'est le cas pour Google Street View :
Pour la diffusion, l'information pourra être rendue
disponible via un lien sur la page Internet du site concerné.
Néanmoins, cela ne prend pas en considération les personnes dont
la maison est photographiée puis diffusée en ligne alors
qu'eux-mêmes n'ont pas accès à Internet. De même,
cela peut s'avérer problématique lorsque l'habitant ou le
propriétaire de la maison photographiée déménage ou
vend son domicile. Le nouvel occupant ne sera pas nécessairement
informé qu'il y a eu une collecte de l'image de son nouveau domicile.
Peut-il alors s'opposer à ce traitement ?
B/ L'exercice des droits d'accès, de rectification, de
mise à jour, d'effacement des données et d'opposition au
traitement
Le responsable de traitement devra assurer les droits de la
personne concernée sur ses données personnelles (1), notamment le
droit d'opposition à la collecte et/ou à la diffusion des images
de la maison (2).
1. La mise en place du dispositif d'accès, de
rectification, de mise à jour et d'effacement des données
collectées
L'IGN ou Google, pour ne citer que les acteurs les plus
importants, doivent permettre à l'habitant ou au propriétaire de
la maison photographiée de rectifier les images diffusées (si des
travaux ont été réalisés notamment), mais
également d'effacer ces photographies lorsqu'elles ne sont plus à
jour (la maison a été démolie par exemple). Pour autant,
les mises à jour continues sont coûteuses. Aussi, une
tolérance pourrait être observée.
2. L'opposition à la collecte et/ou à la
diffusion des données issues des photographies
géographiques
Si le fondement de la collecte ou de la diffusion des
photographies aériennes, spatiales ou prises depuis la voie publique ne
repose jamais sur le consentement de la personne concernée, celle-ci
conserve néanmoins la possibilité de s'y opposer. Ce droit est
conditionné (a) et délicat à respecter (b).
a) Des motifs légitimes
L'article 38 de la loi Informatique et Libertés
conditionne l'exercice du droit de s'opposer au traitement à des
« motifs légitimes ». L'article 21 du
règlement général sur la protection des données
personnelles est plus souple puisqu'il reconnait un « droit de
s'opposer à tout moment, pour des raisons tenant à sa situation
particulière ».
Cette situation particulière et ces motifs
légitimes peuvent être rapprochés du « trouble
anormal » ou de l'atteinte à la vie privée. En effet,
dans le cas de la diffusion sur Internet de la photographie des maisons et
immeubles par France Telecom, les plaignants considéraient que cela
constituait une atteinte à leur vie privée82(*). De même, les
renseignements publiés sur Internet (surface de l'habitation,
état des menuiseries, couleur de la toiture) peuvent être
utilisés à leur insu pour leur proposer des démarchages
ciblés.
Toutefois,l'article 38 de la loi Informatique et
Libertés précise encore que lorsque la collecte ou la diffusion
des photographies se fonde sur une base légale, comme ce peut être
le cas pour les traitements de l'IGN, la personne concernée ne peut
bénéficier d'un droit d'opposition.
b) L'exercice délicat de la mise en oeuvre de
l'opposition
Les services de Google ou de Mappy ne proposent la
faculté de s'opposer à la diffusion des images d'une maison que
lorsque la photographie est prise depuis la voie publique. Cela peut paraitre
étonnant puisque les prises de vue aérienne ou satellite
permettent pourtant un accès à l'intimité de la personne,
à ce qui n'est pas visible depuis la rue. Il conviendrait donc, selon
nous, d'assurer un droit d'opposition pour ces photographies
également.
La CNIL considère que l'exercice du droit d'opposition
à la diffusion de l'image du domicile en ligne appartient à la
personne dont le nom est rattaché à l'adresse, et à elle
seule puisque c'est elle qui est identifiée. C'est donc l'occupant du
lieu ou le propriétaire qui peut agir. A la différence de la Cour
de cassation pour la jurisprudence relative au droit à l'image du bien,
la CNIL n'opère pas de distinction entre la qualité de
propriétaire ou de locataire.
La prise en compte du droit d'opposition peut constituer dans
le retrait de la donnée concernée ou encore dans le floutage de
l'immeuble ou de la maison individuelle. La solution la plus efficace serait de
supprimer le lien entre l'image du logement et l'adresse de ce logement.
Néanmoins, ce procédé est impossible dès lors que
la photographie est recontextualisable.
En outre, plusieurs points peuvent également être
débattus. S'il est possible de s'opposer à la diffusion,
qu'en-est-il de la collecte ? Comment organiser le filtrage des images
collectées ? Cela nous semble impossible. De même, si la
personne concernée parvient à obtenir que sa maison soit
dépixellisée ou floutée sur le site, il persiste encore le
risque qu'un internaute ait fait une capture d'écran de cette image.
Enfin, comment la personne qui n'a pas accès à Internet peut-elle
s'opposer à la diffusion de la photographie de son logement ?
Dès lors que l'image d'une maison est
considérée comme une information indirectement nominative, elle
doit être protégée. Néanmoins, avant même
d'être une donnée personnelle, cette image est une donnée
géographique. Comment concilier alors l'ouverture des données
géographiques avec la protection des individus ?
Chapitre 2 - La donnée géographique de
référence
La donnée géographique peut être
qualifiée de document administratif dès lors qu'elle est produite
par un organisme public ou privé dans le cadre d'une mission de service
public. Aussi, l'ouverture des données publiques favorise-t-elle
l'accès à ces données géographiques, et notamment
aux photographies du territoire (Section 1). La question se pose
néanmoins de l'accès et de la publication de ces données
dès lors qu'elles contiennent des informations nominatives (Section 2).
Section 1 - Une information au service de
l'intérêt général : l'ouverture de la
donnée géographique
Deux textes fondamentaux ont participé à
l'ouverture des données géographiques : la directive
INSPIRE(I) et la loi pour une République numérique, dite aussi
loi Lemaire (II).
I - L'ouverture des données environnementales :
la directive INSPIRE
La directive 2007/2/CE du Parlement européen et du
Conseil du 14 mars 2007 établissant une infrastructure d'information
géographique dans la Communauté européenne (INSPIRE)
s'inscrit dans un mouvement d'ouverture des données environnementales
puisqu'elle fait suite à la Convention d'Aarhussurl'accès
à l'information, la participation du public au processus
décisionnel et l'accès à la justice en matière
d'environnement du 25 juin 1998 et à la directive 2003/4/CE du Parlement
européen et du Conseil du 28 janvier 2003concernant l'accès du
public à l'information en matière d'environnement. Une ordonnance
n° 2010-1232 du 21 octobre 2010 a transposé la directive INSPIRE en
droit interne et a modifié le Code de l'environnement pour y
insérer un chapitre relatif à l'infrastructure d'information
géographique.
Les données environnementales, dès lors qu'elles
participent à une mission d'intérêt public (A) doivent
être harmonisées et partagées (B).
A/ La description du territoire : une mission
d'intérêt public
La directive INSPIRE, en son article 11, impose aux
États membres de rendre accessibles certaines des données
géographiques détenues par des autorités publiques en les
publiant sur Internet.Quelles sont ces données?
Dans son article 3, la directive INSPIRE définit la
donnée géographique comme « toute donnée
faisant directement ou indirectement référence à un lieu
ou une zone géographique spécifique ». L'article 4
précise que ce sont les données liées à une zone
où l'État exerce ses compétences, qui sont en format
électronique, détenues par une autorité publique ou un
tiers ayant eu accès au réseau de services de recherche,
consultation, téléchargement ou consultation mis en place par
l'État83(*), et qui
concernent plusieurs thèmes
spécifiquesénumérés dans les annexes de la
directive. Ces thèmes visent notamment les
référentiels de coordonnées, les adresses, les zones
cadastrales, l'ortho-imagerie, la situation géographique des
bâtiments ou encore l'usage des sols (par exemple, résidentiel,
industriel, commercial, agricole, etc...).
Le Conseil national de l'information géographique et
forestière (CNIG)considère ainsi que ces thèmes couvrent
à la fois les données géographiques de
référence et les données environnementales84(*).La frontière entre les
deux catégories reste néanmoins très perméable.
La majorité des données collectées par
l'Institut national de l'information géographique et forestière
(IGN), notamment les photographies aériennes et spatiales ainsi que
certaines ortho-images,rentrealors dans le champ d'application de la directive
INSPIRE.L'article 2, 3° du décret relatif à l'IGN de 2011
précise, en effet,que « (...) le référentiel
à grande échelle, système intégré
d'information géographique couvrant l'ensemble du territoire national,
est composé de bases de données numérisées et
interopérables décrivant les thèmes, dénominations
géographiques, unités administratives, adresses, parcelles
cadastrales issues du plan cadastral, réseaux de transport,
hydrographie, altitude, occupation des terres, ortho-imagerie et
bâtiments mentionnés aux annexes I, II et III de la directive du
14 mars 2007 susvisée». Le Géoportail prend
également en compte les exigences de la directive en matière de
services offerts au public.
B/ L'harmonisation et le partage des données
environnementales
Si la directive de 2003 avait pour but de garantir le droit
d'accès sur demande aux informations environnementales détenues
par les autorités publiques, la directive de 2007aspire, quant à
elle, à assurer la disponibilité, la qualité et
l'accessibilité de l'information géographique grâce
à l'établissement d'une infrastructure géographique
harmonisée au sein de l'Union européenne : le portail
INSPIRE. La compatibilité des différentes structures permet, en
effet, un meilleur partage des données et favorise leur
réutilisation.
Selon les ingénieurs et géographes
François Merrien, MarcLéobet et M. Francès85(*), la directive INSPIRE
présente deux intérêts majeurs. Elle ne concerne, tout
d'abord, que l'information géographique86(*). Elle dépasse, ensuite, la communication sur
demande puisqu'elle « impose » la publication des
données sur Internet.
II - L'ouverture des données
géographiques : la loi pour une République
numérique
La donnée géographique peut
bénéficier d'un statut particulier et être
considérée comme une donnée de référence
(A). La loi Lemaire reconnait également l'accès et la
réutilisation de cette information géographique, qu'elle soit ou
non de référence (B).
A/ La donnée géographique : une
donnée de référence
La loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une
République numériquea introduit un article L 321-4 au sein du
Code des relations entre le public et l'administration (CRPA) selon lequel la
mise à disposition des données de référence (en vue
de faciliter leur réutilisation) constitue une mission de service public
à laquelle doivent concourir l'État, les collectivités
territoriales ainsi que les autres personnes de droit public ou les personnes
de droit privé chargées d'une mission de service public.
Les données de référencey sont
définies comme des informations publiques figurant dans des documents
communiqués ou publiés par les administrations87(*) et qui répondent
à trois critères. Ces données doivent, en premier lieu,
constituer une « référence commune pour nommer ou
identifier des produits, des services, des territoires ou des
personnes ». En second lieu, ces données doivent faire
l'objet d'une réutilisation fréquente par des personnes
(publiques ou privées) autres que celle qui les détient. Enfin,
ces données doivent présenter un niveau élevé de
qualité, permettant alors une meilleure réutilisation.
Un décret en Conseil d'État a dressé la
liste des données de référence et a désigné
les administrations responsables de leur production et de leur mise à
disposition. Sont notamment des données de
référence le plan cadastral informatisé, produit par
la direction générale des finances publiques ; le registre
parcellaire graphique, produit par l'Agence de services et de paiement ; le
« référentiel à grande
échelle », produit par l'Institut national de l'information
géographique et forestière ; ou encore la base adresse nationale,
coproduite par l'Institut national de l'information géographique et
forestière, la société anonyme La Poste et l'association
OpenStreetMapFrance. Ainsi, les ortho-images du référentiel
à grande échelle (RGE), certaines données parcellaires et
les adresses des bâtiments situés sur le territoire sont
considérés comme des données de
référence.
Au-delà de la donnée de référence,
la donnée géographique est parfois même qualifiée de
donnée souveraine. La donnée géographique est souveraine
lorsque l'Etat y a recours dans le cadre de ses activités
régaliennes88(*).
Un décret du 5 février 2018 a ainsi chargé la
députée Mme Valéria Faure-Muntian d'une mission
temporaire89(*) ayant pour
objet la transformation de la production, de l'entretien et de la diffusion des
données géographiques souveraines. Dans un communiqué de
presse90(*), le
Ministère de la transition écologique et solidaire précise
que cette mission vise à renforcer la coopération entre les
administrations pour la production de données géographiques
souveraines. C'est notamment l'une des ambitions exprimées par le
Premier Ministre dans sa lettre à Mme
ValériaFaure-Muntian91(*)puisqu'il souhaite qu'elle s'interroge sur le
rôle de chaque acteur du secteur.Cette mission participe ainsi à
accroître la qualité de la donnée géographique au
bénéfice de tous.
B/ L'accès aux données géographiques et
leur réutilisation par des personnes privées
Les documents de l'IGN, dès lors qu'ils sont produits
ou reçus dans le cadre de sa mission de service public, peuvent
être communiqués ou publiés (1) et réutilisés
(2).
1. L'accès et la diffusion des documents
administratifs de l'IGN
« L'information géographique est au coeur
des stratégies d'innovation sur lesquelles se rejoignent les pouvoirs
publics, les entreprises et plus largement la société
civile »92(*). Aussi, l'ouverture de l'accès à ces
données géographiques ne peut avoir qu'un effet vertueux. Dans
son article « Open data : la protection des données
comme vecteur de confiance »93(*), la CNIL rappelle que l'un des objectifs majeurs de
l'open data, c'est de « communiquer au public une image
détaillée du territoire et de son fonctionnement
actuel ». Quelle image plus détaillée que la
photographie aérienne ou spatiale pour décrire le territoire
?
La loi n° 78-753 du 17 juillet 197894(*), dite loi CADA (pour la
Commission d'accès aux documents administratifs),a érigé
les prémisses de ce qui deviendrait l'open data. Elle consacre,
en effet, la liberté d'accéder aux documents administratifs sur
demande de l'administré. Son champ d'application comprend notamment
« tous dossiers, rapports, études, (...) statistiques,
(...) revêtant la forme (...) d'enregistrements (...) visuels, de
traitements automatisés d'informations non nominatives. »
Cette exigence a été reprise par la loi Lemaire
et se retrouve au sein de l'article L311-1 du Code des relations entre le
public et l'administration.La loi pour une République numérique a
également étendu ce droit à la communication des documents
administratifs puisque désormais les administrations (et les personnes
privées chargés d'une mission de service public) sont tenues de
publier en ligne certaines informations.
Le Code précise encore la définition des
documents administratifs en son article L300-2. Ce sont ceux reçus ou
produits, dans le cadre de leur mission de service public, par l'Etat, les
collectivités territoriales ainsi que par les autres personnes de droit
public ou les personnes de droit privé chargées d'une telle
mission. Peu importe la date de ces documents, leur lieu de conservation, leur
forme ou leur support.
Les photographies aériennes et spatiales entrent ainsi
dans le champ d'application de l'accès aux documents administratifs
lorsqu'elles sont prises par ou pour l'IGN et dans le cadre de sa mission de
service public. La Commission d'accès aux documents administratifs, dans
un avis 2007/102395(*),
confirme cette position : « la réalisation de
photographies aériennes qui couvrent l'ensemble du territoire national
-qu'elles soient numériques ou argentiques-, leur mise à
disposition du public et leur diffusion auprès de celui-ci sous forme de
tirages, agrandissements, redressements ou assemblages sont au nombre des
missions de service public confiées à l'IGN. La commission
considère par conséquent que ces photographies constituent des
documents administratifs au sens de l'article 1er de la loi du 17
juillet 1978. L'accomplissement, à l'initiative de l'IGN et
préalablement à la remise des tirages ou agrandissements,
d'opérations de retraitement, notamment chromique, destinées
à garantir la qualité de l'image apparaît comme
étant inhérente à cette activité de diffusion et
n'est pas de nature à mettre en cause cette qualification de document
administratif des tirages. » Aussi, l'ortho-imagerie, ou le fait
d'ajuster géométriquement les photographies pour qu'elles
correspondent à la réalité de la surface terrestre, est un
critère inopérant dans la qualification d'un document
administratif.
Les bases de données détenues par l'IGN peuvent
également être considérées comme des documents
administratifs.
Les photographies aériennes et spatiales peuvent
également être considérées comme des données
de référence puisque le RGE, inséré dans la
liste des données de référence par un décret du 14
mars 2017, est constitué des composantes orthophotographique,
topographique et adresse, parcellaire et altimétrique. Il comporte
notamment la BD ORTHO® 5m ; et la BD ORTHO® 50cm pour certains
départements. L'article 3 de l'arrêté du 19 avril 2005
définissant les conditions de constitution et de mise à jour du
référentiel à grande échelle, précise que la
composante orthophotographique du RGE est « une image
numérique multispectrale comportant au moins trois bandes spectrales, au
pas de 50 cm, réalisée à partir du redressement au sol
d'images aériennes ou spatiales. Elle est actualisée au moins
tous les 5 ans. »
Aussi, ces données, considérées comme des
données de référence, doivent être mises à la
disposition du public. La Commission nationale de l'informatique et des
libertés (CNIL)considère que l'on est passé
« d'une logique de demande d'accès par des personnes
privées à une logique d'offre par les
administrations »96(*). Dans l'article 4 de sa délibération de
2012 portant autorisation unique pour les bases de données
géographiques de référence utilisées dans les SIG,
la CNIL affirme déjà que « le public peut accéder
directement par internet à une interface de consultation des
informations contenues dans une « base de données
géographiques, locale ou nationale, de référence »
(« BGR »). »LeGéoportail remplit cette fonction de
diffusion des données géographiques de référence
depuis 200697(*).
Qu'en est-il alors des données de l'IGN qui ne font pas
partie intégrante du RGE ? L'institut doit-il néanmoins les
publier en ligne ?
Les personnes de droit public diffusent, de manière
obligatoire, les bases de données qu'elles produisent ou qu'elles
reçoivent dans le cadre de leur mission de service public (et qui ne
font pas déjà l'objet d'une diffusion publique) ainsi que les
données disponibles sous forme électronique dont la publication
présente un intérêt économique, social, sanitaire ou
environnemental, dès lors que ces bases de données et ces
données sont mises à jour de façon régulière
(article L 312-1-1 du CRPA).
L'IGN publie en ligne les photographies aériennes qu'il
collecte et certaines photographies spatiales qui n'ont pas fait l'objet d'un
traitement. La diffusion de ces images répond, en effet,à
l'intérêt économique, social, sanitaire ou environnemental.
L'IGN produit également des prises de vue
aérienne ou spatiale d'une qualité supérieure à
celles diffusées au sein du RGE. C'est le cas de la BD ORTHO HR®
(de l'ordre des 20 cm sur certaines zones). Ces données sont, pour la
plupart, organisées en bases de données. Il semblerait alors
qu'elles doivent être publiées.
La question se pose toutefois de savoir si ces ortho-images
sont créées dans le cadre des missions de service public de l'IGN
et si elles peuvent alors être considérées comme des
documents administratifs. Cette question centrale permet, en effet, la
qualification du document administratif. Aussi, deux interprétations
peuvent être retenues.
Un tel traitement des prises de vues pourrait répondre
à l'article 2 du décret statutaire de l'IGN de 2011 qui
prévoit notamment la réalisation et le renouvellement
périodique de la couverture en imagerie aérienne et satellitaire
de l'ensemble du territoire national.Les données issues de
l'ortho-imagerie doivent donc être publiées sur Internet
dès lors qu'elles sont mises à jour
régulièrement98(*). Toutefois, si de telles imagesne sont pas
considérées comme répondant aux missions de service public
de l'IGN99(*), alors elles
n'ont pas à faire l'objet d'une communication auprès du public.
L'IGN a fait le choix de proposer certaines des données
de la base de données ORTHO HR® de plusieurs départements en
téléchargement gratuit et sous licence ouverte version 2.0.
La loi Lemaire a, ainsi, instauré un principe
d'ouverture par défaut des données publiques et
d'intérêt général et a encouragé la diffusion
des données de toute sorte. Des restrictions ont néanmoins
été posées concernant l'accès à certaines
données (qu'elles soient ou non des données de
référence).
Notamment, l'article L311-4 du Code des relations entre le
public et l'administration dispose que « les documents
administratifs sont communiqués ou publiés sous réserve
des droits de propriété littéraire et
artistique ». Si l'originalité de la prise de vue
aérienne ou satellite peut être débattue en raison des
contraintes techniques qui y sont liées ainsi que de leur
caractère automatique, l'orthophotographie peut, elle, être
considérée comme une oeuvre bénéficiant de la
protection par le droit d'auteur. Des choix esthétiques sont
effectués et les auteurs impriment une part de leur
personnalité.Le droit d'auteur des fonctionnaires trouve alors à
s'appliquer. Ainsi, en vertu de l'article L131-3-1 du Code de la
propriété intellectuelle, « dans la mesure strictement
nécessaire à l'accomplissement d'une mission de service public,
le droit d'exploitation d'une oeuvre créée par un agent de
l'État dans l'exercice de ses fonctions ou d'après les
instructions reçues est, dès la création,
cédé de plein droit à l'État ». L'article
L131-3-2 du même Code précise que ces dispositions s'appliquent
aux établissements publics à caractère administratif
« à propos des oeuvres créées par leurs
agents dans l'exercice de leurs fonctions ou d'après les instructions
reçues ».
Aussi, les agents de l'IGN en charge de corriger les
déformations des prises de vue aérienne ou spatiale se voient
retirer ab initioleurs droits patrimoniaux sur l'ortho-image
originale. Leurs droits moraux sont également réduits puisqu'ils
ne peuvent, selon les termes de l'article L 121-1-7 « s'opposer
à la modification de l'oeuvre décidée dans
l'intérêt du service par l'autorité investie du pouvoir
hiérarchique, lorsque cette modification ne porte pas atteinte à
son honneur ou à sa réputation » ou
« exercer le droit de repentir et de retrait, sauf accord de
l'autorité investie du pouvoir hiérarchique ».
Ainsi, la diffusion intègre, par l'IGN, des ortho-images sur Internet ne
porte pas atteinte aux droits moraux des auteurs-agents. Le droit des bases de
données ne saurait non plus être opposé à la
réutilisation du contenu des bases de données publiées par
les administrations (article L321-2 du CRPA).
En outre, les documents administratifs dont la communication
porterait atteinte à la protection de la vie privée ne sont
communicables qu'à la personne concernée (article L311-6 du
CRPA). Néanmoins, la protection des données à
caractère personnel transcende celle de la vie privée. Aussi, il
est à regretter que la loi Lemaire n'ait pas fait explicitement mention
du respect de la loi Informatique et Libertés de 1978 pour la
communication des documents administratifs. Toutefois, les prises de vue
aérienne et spatiale ne relèvent pas, en règle
générale, du régime de communication des documents
administratifs mais plutôt du régime de diffusion.
Ainsi, les bases de données faisant l'objet d'une
publication en ligne obligatoire en vertu de l'article L312-1-1 du Code des
relations entre le public et l'administration, comme c'est le cas des prises de
vue ou de la BD ORTHO HR®, lorsqu'elles comportent des données
à caractère personnel, ne peuvent être rendues publiques
que dans trois cas : après avoir fait l'objet d'un traitement
permettant de rendre impossible l'identification des personnes
concernées ; si la législation le prévoit ; ou
si la personne concernée donne son consentement (article L312-1-2 du
Code des relations entre le public et l'administration). Cet encadrement sera
étudié dans la seconde partie de ce chapitre.
Concernant la mise à disposition des données de
référence, notamment pour les BD ORTHO® du RGE, elle doit se
faire « dans le respect du titre II du livre III du Code des
relations entre le public et l'administration et des conditions de
fiabilité, de disponibilité et de sécurité
fixées par un arrêté du Premier ministre »
(article R321-7 du CRPA). L'arrêté n'est pas encore paru100(*). Il est à
espérer que la protection des données à caractère
personnel y soit considérée.
2. La réutilisation des informations publiques de
l'IGN
La loi Lemaireconsacre, outre la diffusion des documents
administratifs, la réutilisation des informations publiques. Ces
données, une fois publiées, doivent, en effet, pouvoir être
exploitées et réutilisées facilement par tous, particulier
comme entreprise.
Il est précisé, dans le Code des relations entre
le public et l'administration, que l'accès est réservé aux
documents administratifs tandis que la réutilisation a trait aux
informations publiques. Aussi, y-a-t-il une différence entre les «
informations publiques » et les « documents administratifs » ?
Les informations publiques sont celles qui figurent dans des documents produits
ou reçus par les administrations, donc dans les documents
administratifs. Deux catégories d'informations sont néanmoins
exclues par l'article L321-2 du Codes des relations entre le public et
l'information : les informations sur lesquelles un tiers détient des
droits de propriété intellectuelle et les informations qui ne
sont accessibles qu'à certaines personnes en raison de leur
qualité ou de leur intérêt.
Ainsi, les informations publiques contenues dans des documents
sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété
intellectuelle sont exclues du droit à réutilisation.
Qu'entend-on alors par la détention d'un droit de
propriété intellectuelle par un tiers ? Lorsque des images
aériennes numériques ont été obtenues dans le cadre
d'un marché public, la Commission d'accès aux documents
administratifs, la CADA, a estimé que la qualification d'informations
publiques devait être écartée101(*). Qu'en est-t-il alors de
l'auteur-agent ? Peut-il être considéré comme un
tiers ? Non, il a cédé tous ses droits patrimoniaux à
l'IGN. Il pourra néanmoins, sur le fondement de ses droits moraux,
s'opposerà la réutilisation de l'ortho-image qu'il a
créé si cette réutilisation porte atteinte à
son honneur.
La CADA102(*)considère également que les documents
administratifs qui font l'objet d'une diffusion publique (c'est le cas des BD
ORTHO® du RGE) ne sont pas soumis aux règles de communication, mais
à celles de réutilisation dès lors que ce sont des
données géographiques de référence.
Comme pour le droit de communication, il existe
également des restrictions à la réutilisation des
informations.L'article R322-3 du Code des relations entre le public et
l'administration prévoit que « la réutilisation
d'informations publiques comportant des données à
caractère personnel est subordonnée au respect des dispositions
de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux
fichiers et aux libertés ».
Section 2 -La conciliation entre l'ouverture de
l'accès aux documents administratifs et la protection des données
personnelles
L'ortho-image produite par l'IGN ainsi que ses prises de vue
aérienne et spatiale peuvent être considérées comme
des documents administratifs dès lors qu'elles relèvent de sa
mission de service public. De tels documents permettent de décrire la
surface du territoire : routes, forêts, bâtiments publics mais
également habitations privées. Dès lors que cette image de
l'habitation privée permet d'identifier un individu (le locataire ou le
propriétaire bien souvent), elle est qualifiée de donnée
à caractère personnel. Aussi, une ortho-image ou une prise de vue
peut avoir une nature ambivalente : un document administratif comportant
des données personnelles. Comment concilier alors l'ouverture des
documents administratifs et la protection des données à
caractère personnel contenues au sein de ces documents ? Comment
créer un équilibre entre la transparence et le respect de la vie
privée ?103(*)
Il convient d'opérer une balance entre
l'intérêt que présente la divulgation des ortho-images pour
le public et l'intérêt de limiter cet accès pour l'individu
dont le domicile peut être clairement identifié. La Commission
nationale de l'informatique et des libertés, la CNIL, considère
que les objectifs d'ouverture des données publiques et de protection des
données personnelles sont « pleinement
conciliables »104(*) dès lors qu'un équilibre entre le
droit de toute personne à l'information (article L300-1 du CRPA) et le
droit à la protection des données personnelles est établi.
En aucun cas, il ne saurait y avoir de dérogation au respect de la loi
Informatique et Libertés. Pour autant, l'interdiction de diffusion n'est
avancéeque de manière exceptionnelle.
La directive INSPIRE prévoit que les Etats membres
peuvent restreindre l'accès du public aux données
géographiques concernées105(*) lorsque cet accès serait susceptible,
notamment, de nuire à « la confidentialité des
données à caractère personnel et/ou des fichiers
concernant une personne physique lorsque cette personne n'a pas consenti
à la divulgation de ces informations au public, lorsque la
confidentialité de ce type d'information est prévue par la
législation nationale ou communautaire » (article 13 1.f)
de la directive INSPIRE). Deux conditions alternatives sont donc prévues
pour la diffusion des ortho-images du RGE : le consentement de la personne
concernée ou l'absence de dispositions législatives
consacrant la confidentialité de ces ortho-images.Or, la
législation française prévoit la protection des
données à caractère personnel.
La loi Informatique et Libertés et la loi CADA ont
toutes deux été promulguées en 1978. Cette
coïncidence, qui n'en est certainement pas une, rappelle le lien
indéfectible entre documents administratifs et données
personnelles. Ils « font partie du même
écosystème : celui de la donnée, qu'elle soit
personnelle ou non »106(*).
Le cadre juridique établi parla loi Informatique et
Libertés a été modifié pour être conforme au
RGPD tandis que celui de la loi CADA aété renouvelé au
sein de la loi pour une République numérique. Désormais,
trois étapes sont distinguées : la communication des
documents administratifs ; leur publication ; et la
réutilisation des informations publiques.
L'encadrement prévu par la loi Lemaire pour
préserver les données à caractère personnel
apparait logique. L'accès individuel (et non la publication
étendue) à des documents contenant des données
personnelles n'est pas restreint sauf si cette communication porte atteinte
à la protection de la vie privée. La loi est, en revanche, plus
stricte concernant la publication en ligne de ces informations et a donc
posé trois conditions alternatives à cette diffusion massive
: le consentement ; l'anonymisation ; ou bien un fondement
légal. Enfin, concernant la réutilisation de ces données
à caractère personnel, elle est également encadrée
puisqu'elle est conditionnée au respect de la loi Informatique et
Libertés.
La CNIL considère alors que « le triple
filtre prévu (interdiction de publication de documents portant atteinte
à la vie privée ; publication sous condition de documents
comportant des données personnelles ; réutilisation de
telles données dans le respect de la loi Informatique et
Libertés) permet de garantir la protection des données des
personnes concernées par les informations
publiques »107(*).
Les images du territoire (orthophotographie ou prise de
vue)considérées comme des documents administratifspeuvent
également contenir des données à caractère
personnel lorsque la photographie de certains bâtiments permet
d'identifier les individus qui s'y rattachent. Dans cette hypothèse,
comment la communication et la publication des images du territoire est-elle
appréhendée (I) ? Comment réutiliser de telles images
(II) ?
I - La diffusion des prises de vues, entre restriction et
ouverture
La loi pour une République numérique a
harmonisé les régimes de communication et de publication des
documents administratifs. Le principe est donc l'ouverture par défaut.
Toutefois, cette ouverture est conditionnée lorsque les prises de vue
contiennent des données à caractère personnel. Elle peut
être restreinte (A) ou nécessiter une autorisation
spécifique (B).
A/Une restriction à l'accès
La diffusion de documents portant atteinte à la vie
privée des personnes concernées n'est pas autorisée, seul
l'intéressé peut se les voir communiquer (1). De même, la
publication de documents comportant des données à
caractère personnel est encadrée par l'article L312-1-2 du Code
des relations entre le public et l'administration (CRPA). Notamment, si les
données à caractère personnel ont fait l'objet d'un
traitement permettant de rendre impossible l'identification des personnes
concernées, alors le document peut être diffusé (2).
1. L'interdiction de la diffusion de données
personnelles portant atteinte à la protection de la vie
privée
L'accès (et non la publication) à des documents
contenant des données personnelles n'est pas restreint sauf si cette
communication porte atteinte à la protection de la vie privée,
alors seul l'intéressé pourra se les voir communiquer (article
L311-6 1° du CRPA108(*)). Cette positionn'est pas sans rappeler la
jurisprudence relative au droit à l'image d'un bien109(*). Néanmoins, le Code
des relations entre le public et l'administration apprécie a
priori l'atteinte110(*) tandis que la jurisprudence sur l'image du bien
prévoit un contrôle a posterioridu trouble anormal
causé au propriétaire111(*). Aussi, la communication de certains documents
administratifs, que la CADA a considéré comme ne portant pas
atteinte à la protection de la vie privée, pourrait
s'avérer, en réalité, préjudiciable par la suite
à l'intimité de la personne concernée. Tel pourrait
être le cas de photographies aériennes ou spatiales du domicile.
Au niveau européen, il est possible de se
référer aux articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux
de l'Union européenne qui consacrent le droit au respect de la vie
privée et familiale, et notamment le droit au respect du domicile ;
et la protection des données à caractère personnel (que
les rédacteurs de l'article L311-6 1° semblent avoir
oubliée).
Prenons l'exemple d'un individu qui demande à avoir
accès à la photographie détaillée (d'une
résolution de 20 cm) d'une petite ville, photographie si précise
qu'elle permet d'individualiser chacune des maisons qui la composent et
d'identifier indirectement les propriétaires de ces maisons. Ces
données concernent alors la vie privée de ces
propriétaires puisque l'adresse et le domicile sont des composantes de
cette notion. Pour autant, y-a-t-il atteinte à la protection de la vie
privée ? Une telle atteinte est difficile à caractériser
puisqu'elle s'apprécie in concreto. Elle l'est d'autant plus
lorsqu'elle est liée à la communication d'une donnée
puisqu'elle doit alors être caractérisée a
priori.
L'article L311-6 1° du Code des relations entre le public
et l'administration,en se limitant à la protection de la vie
privée, favorise donc l'accès aux documents administratifs. A
contrario, cet article dispose, en effet, que les données
personnelles dont la communication ne porte pas atteinte à la protection
de la vie privée peuvent être rendues accessibles sur demande d'un
individu.
La CADA rappelle ainsi qu'un tiers peut
« accéder à des informations qui, seraient-elles
« nominatives » au sens de la loi du 6 janvier 1978, (...)
ne concernent pas la vie privée. »112(*)Cet accès est
doublement limité :il ne se fait que sur demande
individuelle ; et il ne concerne pas les données portant atteinte
à la vie privée. Une communication individuellepourrait, en
effet, sembler moins préjudiciable à la protection des
données personnelles puisqu'elle se fonde sur une action, sur une
demande de la part du tiers. Une diffusion massive serait, quant à elle,
source de plus de contentieux puisque la probabilité d'une atteinte est
fonction du nombre de personnes ayant accès à la donnée
personnelle.
Cette position peut être débattue puisqu'elle
favorise l'accès aux documents administratifs au détriment de la
protection des données personnelles113(*).Néanmoins, l'article 37 de la loi
Informatique et Libertés, modifié par l'ordonnance
n°2015-1341 du 23 octobre 2015 pour s'adapter à l'ouverture des
données publiques, prévoit que les dispositions de la loi
Informatique et Libertés ne s'opposent pas à l'accès aux
documents administratifs et à la réutilisation des informations
publiques. « En conséquence, ne peut être
regardé comme un tiers non autorisé (...) le titulaire d'un droit
d'accès aux documents administratifs (...) ». Est-il
alors nécessaire d'inscrire cet accès au sein du registre des
traitements ? La question est sujette à interprétation.
Il pourrait sembler nécessaire, pour l'administration
à qui la demande d'accès à l'image du territoire a
été adressée, de respecter la loi Informatique et
Libertés, dès lors que cette image permet d'identifier une ou
plusieurs personne(s) physique(s). En effet, la mise à disposition de
l'image constituerait alors un traitement de données à
caractère personnel et devrait donc être intégrée au
registre des traitements. Néanmoins, l'article 37 considère que
le demandeur n'est pas un tiers non autorisé et qu'il peut donc
accéder aux données. Une distinction est alors à
opérer entre le destinataire du traitement et le titulaire d'un droit
d'accès. Il semblerait donc qu'il ne soit pas nécessaire de
formaliser cet accès au sein du registre des traitements.
L'administration doit tout de même informer la personne concernée
qu'un accès à ses données personnelles est rendu possible.
La question se pose alors de l'exercice de son droit d'opposition.
L'accès d'un particulier à une information personnelle
détenue par l'administration répond àl'obligation
légale de communication des documents administratifs. Il n'y a
alors pas de droit d'opposition à cet accès pour la personne
concernée.
2. L'occultation et l'anonymisation des données
personnelles
Le groupe de travail « Article 29 » a pu
considérer que l'anonymisation, dans le cadre de l'accès aux
données ouvertes, présentait un intérêt majeur
puisqu'elle « atténue les risques pour les personnes
concernées. »114(*)
Si les documents administratifs dont la communication au
public porterait atteinte à la protection de la vie privée ne
peuvent être accessibles, une fois anonymisés, les tiers sont en
mesure de se les voir communiquer (article L311-7 du CRPA).
La CADA115(*)a posé deux conditions à cette
communication partielle d'informations : il faut que le document soit
« divisible », c'est-à-dire
qu' « il doit permettre de procéder en pratique
à l'occultation » ; et « l'occultation
ne doit pas dénaturer le sens du document ni priver
d'intérêt la communication». Cette seconde condition ne
se retrouve pourtant pas dans l'article L311-7 du Code des relations entre le
public et l'administration. Elle s'induit néanmoins de
l'intérêt recherché par l'ouverture des
données : la réutilisation.
Ainsi, l'administration doit s'efforcer, avant de communiquer
une information portant sur la vie privée, de détacher celle-ci
des informations publiques ou bien de l'anonymiser lorsque cela n'est pas
possible.
La loi Lemaire a égalementinséré un
article L312-1-2 dans le Code des relations entre le public et l'administration
qui prévoit trois conditions alternatives à la publication
des documents administratifs comportant des données à
caractère personnel : le consentement ; l'anonymisation ; ou
bien un fondement légal. Cet endurcissement se justifie car
l'accès aux informations n'est plus individuel mais multiple.
Les conditions de l'article L312-1-2 sont en
réalité hiérarchisées. Ce n'est qu'en l'absence de
dispositions législatives expresses ou de consentement de la personne
concernée que l'administration peut anonymiser la donnée pour la
publier. La CADA, dans un avis de 2012116(*), précise que si la publication est prescrite
par une disposition législative, alors l'information ne peut être
anonymisée. En effet, l'une des conditions principales de l'article
L312-1-2 du Code des relations entre le public et l'administration serait alors
remplie : le fondement légal.
Ainsi, pour la communication de données pouvant porter
atteinte à la vie privée, l'administration doit tâcher
d'occulter ou de détacher ces données des autres informations
publiques tandis que pour la publication de données personnelles,
l'administration doit d'abord vérifier si la personne concernée
n'a pas consenti à cette publication ou s'il n'existe pas une
disposition législative prescrivant une telle publication avant de
rendre anonymes ces données personnelles.
Concernant la communication de données pouvant porter
atteinte à la protection de la vie privée, l'enjeu n'est pas
nécessairement de rendre impossible l'identification de la personne
concernée, mais d'éviter cette atteinte. Ainsi, le texte
évoque l'occultation et la disjonction. Ces deux procédés
permettent de communiquer les données sans que les informations ne
puissent porter atteinte à la vie privée de la personne. Peu
importe que la personne reste identifiable. L'anonymisation des données
personnelles avant publication, au contraire, a pour fonction essentiellede
rendre impossible l'identification de l'individu.
Y-a-t-il alors une distinction à établir entre
l'occultation et l'anonymisation ? Il semblerait plutôt que la
différence entre les deux notions soit une différence de
degré et non de nature. L'anonymisation est irréversible,
l'occultation ne l'est pas. En effet, l'intéressé peut demander
à se voir communiquer les informations le concernant et qui sont
susceptibles de porter atteinte à sa vie privée. L'administration
devra alors lui fournir l'information totale. En revanche, si un tiers fait la
même demande, l'administration ne pourra lui fournir qu'une information
partielle. L'anonymisation des données dépend alors de
l'identité du demandeur.Pour la publication en ligne de données
à caractère personnel, cette diffusion sera nécessairement
anonymiséepour tous et ce, de façon irréversible.
Le groupe de travail « Article 29 »
évoque deux techniques d'anonymisation117(*) : la randomisation, c'est-à-dire la
transformation des données pour que le lien avec l'individu soit rompu
(il n'est plus possible d'identifier la personne) ; et la
généralisation des données pour qu'elles se fondent dans
un ensemble (une masse d'individus est liée à la donnée).
Il est possible d'anonymiser les données par un transcodage ou par un
chiffrement cryptographique118(*).
La CNIL bénéficie d'un pouvoir de certification
et d'homologation de ce processus d'anonymisation des données
« notamment en vue de la réutilisation d'informations
publiques mises en ligne dans les conditions prévues au titre II du
livre III du code des relations entre le public et
l'administration. » (article 11 g) de la loi Informatique et
Libertés). Il convient de ne pas oublier que le processus
d'anonymisation, en lui-même, est un traitement de données
à caractère personnel. Ainsi, la CNIL, en étant
responsable de la qualité de l'occultation, a parfois la
possibilité d'assurer une ouverture respectueuse de la protection des
données à caractère personnel119(*).
Néanmoins, ces techniques peuvent s'avérer
inadaptées. L'anonymisation doit aboutir à un « effacement
» des données personnelles puisqu'elle a pour objectif
d'empêcher l'identification de manière irréversible. Il
subsiste pourtant toujours un risque résiduel d'identification lorsqu'il
est possible de recouper des informations pour obtenir l'identification de
l'individu.
Le règlement général sur la protection
des données (RGPD), en son considérant 26, définit
implicitement la donnée anonyme comme la donnée qui ne permet pas
ou qui ne permet plus de rendre une personne physique identifiable dès
lors que « l'ensemble des moyens raisonnablement susceptibles
d'être utilisés par le responsable du traitement ou par toute
autre personne pour identifier la personne physique directement ou
indirectement » n'y parvient pas. Le règlement précise
encore que les moyens raisonnablement susceptibles d'être utilisés
s'observent en considération notamment du coût de
l'identification, du temps nécessaire, des technologies disponibles et
de leur évolution.
Toutefois, l'évolution de la technique ne peut
être anticipée. De même les moyens susceptibles d'être
utilisés ne sont pas identiques pour tous. Les moyens du responsable de
traitement peuvent être moins importants que ceux du réutilisateur
des données. L'éventualité qu'un tiers puisse
bénéficier de technologies que le responsable de traitement ne
possède pas ou dont il n'a même pas connaissance pourrait alors
faire passer l'anonymisation pour une solution obsolète. Le groupe de
l'Article 29 propose donc un test pour vérifier la solidité
de l'anonymisation d'une donnée. Une anonymisation efficace doit, en
effet, s'opérer dans la continuité et doit être
régulièrement contrôlée selon les évolutions
des techniques. Le groupe de l'Article 29 préconise un triple test afin
de vérifier si la donnée résiste toujours à
l'individualisation, à la corrélation et à
l'inférence120(*).
L'administration peut également refuser d'anonymiser
les données à caractère personnel lorsque cela
représente pour elle des « efforts
disproportionnés ». Initialement prévue par l'article
40 du décret du 30 décembre 2005121(*), cette dérogation se
retrouve désormais à l'article R322-3 du Code des relations entre
le public et l'administration.En effet, l'occultation peut être lourde
financièrement et humainement pour l'administration. Elle peut
s'avérer complexe et minutieuse, dépassant alors la puissance de
certains algorithmes.
En outre, certains risques sont impossibles à
éliminer par des procédés d'anonymisation. Le rapport
d'information au Sénat sur la protection des données personnelles
dans l'open data122(*) préconise alors d'adapter la diffusion en
fonction du risque.
Concernant les images du territoire, il est évident que
les données dont la communication serait susceptible de porter atteinte
à la vie privée des individus, telles que les images de certains
domiciles, ne peuvent être détachées de la photographie. En
effet, l'image est un ensemble indivisible. Pour autant, il serait envisageable
d'occulter certaines zones géographiques de ces photographies
aériennes ou spatiales. Deux solutions peuvent être ici
évoquées : la diffusion uniquement de photographies dont la
résolution ne permet pas d'identifier les individus ; ou le
floutage des immeubles concernés. La première solution
semble néanmoins contrevenir à l'intérêt même
de la publication puisque la photographie, moins précise, perdrait de sa
valeur aux yeux des réutilisateurs. Quant à la seconde solution,
elle ne permet pas une anonymisation irréversible. Même
flouté, il reste possible de localiser l'immeuble (et d'obtenir des
informations sur la taille de la parcelle ou du bâtiment). Il nous semble
impossible, à ce jour, d'effacer sur une image le lien entre un immeuble
et sa localisation, son adresse. Dès lors, le propriétaire ou le
locataire de l'immeuble reste identifiable, même si celui-ci est
flouté.
L'administration devra-t-elle refuser de communiquer ou de
diffuser les images du territoire en sa possession dès lors qu'elles
identifient un individu ?La directive INSPIRE prévoit que les
États membres peuvent restreindre l'accès du publicaux
données géographiques concernées123(*) lorsque cet accès
serait susceptible, notamment, de nuire à « la
confidentialité des données à caractère personnel
et/ou des fichiers concernant une personne physique lorsque cette personne n'a
pas consenti à la divulgation de ces informations au public, lorsque la
confidentialité de ce type d'information est prévue par la
législation nationale ou communautaire » (article 13 1.f)
de la directive INSPIRE).Pour autant, nombre d'ortho-images et de photographies
aériennes et spatiales124(*) sont publiées en ligne via le portail
« data.gouv.fr ».Sur quel fondement ?
B/L'autorisation de publication
Avant d'avoir recours à l'anonymisation pour publier
ses documents, l'administration peut s'appuyer sur deux autres fondements pour
légitimer sa diffusion. Des dispositions législatives peuvent
prévoirla publication dedocuments administratifs comportant des
données à caractère personnel (1). Les personnes
concernées peuvent égalementdonner leur accord à cette
publication (2).
1. L'autorisation donnée par la loi de
diffuser
L'article L312-1-2 du Code des relations entre le public et
l'administration prévoit qu'en cas de dispositions législatives
expresses, les documents administratifs comportant des données à
caractère personnel peuvent faire l'objet d'une publication. Il n'existe
toutefois pas de dispositions législatives prévoyant
expressément la diffusion d'images du territoire comportant des
données nominatives. En revanche, l'article 11 de la directive INSPIRE,
l'article L127-10 du Code de l'environnement ou encore l'article 2 du
décret statutaire de l'IGN prévoient la diffusion des bases de
données géographiques et donc des images du territoire. Il
convient alors de savoir si ces bases de données peuvent être
publiées même lorsqu'elles contiennent des données
personnelles.Si tel était le cas, le traitement devra encore être
en conformité avec le reste des obligations inhérentes à
la protection des données à caractère personnel.
L'article L312-1-2 du Code des relations entre le public et
l'administration prévoit qu'un décret, pris après avis
motivé de la CNIL, établira une liste des catégories de
documents qui peuvent être rendus publics sans avoir fait l'objet d'une
anonymisation. Prévu pour janvier 2017, nous sommes toujours dans
l'attente de sa publication. Aussi, la diffusion, sur un fondement
légitime, des données géographiques comportant des
informations nominatives reste sujette à interprétation.
Dans sa délibération n°2012-087 du 29 mars
2012 portant autorisation unique de traitements automatisés de
données à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre
d'un SIG, la CNIL a déjà conscience de la nature ambivalente de
la donnée géographique : « Une base de
données géographiques de référence a pour
finalité de cartographier un territoire, local ou national, aux fins
d'une meilleure gouvernance de l'aménagement territorial. Elle comporte
les références, le dessin et/ou l'adresse de la parcelle qui
permettent indirectement d'identifier le propriétaire de la parcelle.
Ces données constituent donc des données à
caractère personnel. » Ainsi, une donnée de
référence peut comporter des données personnelles.
Cette délibération est en date de 2012, la loi
Lemaire n'était donc pas encore promulguée et la publication des
bases de données géographiques de référence
imposée. Néanmoins, l'IGN publiait déjà sur son
Géoportail les données du RGE. Comment s'organisait alors la
diffusion de ces données avec la protection des données
nominatives issues des informations concernant l'adresse ou la parcelle ?
Comment était définie l'étendue des destinataires de cette
base de données géographiques de référence ?
Dans l'article 4 de la délibération, la CNIL affirme que
« le public peut accéder directement par internet à
une interface de consultation des informations contenues dans une « base
de données géographiques, locale ou nationale, de
référence » (« BGR ») qui ne peut
inclure « aucune information aÌ caracteÌre personnel
autre que le deìcoupage parcellaire et les adresses des
parcelles ».Aussi, la diffusion des informations relatives aux
propriétés bâties sur la parcelle (habitations
principalement) repose sur un autre fondement que la déclaration de
2012.
Les membres de la CADA ont également fait valoir que si
cette autorisation précise que «Toute publication sur internet
de cette géolocalisation est soumise à un droit d'opposition de
la personne concernée. Ce droit se matérialise par une
échelle de publication garantissant l'absence d'identification directe
ou indirecte des personnes concernées par les
résultats. »,cette disposition d'une norme
édictée par la CNIL ne saurait déroger à l'article
38 de la loi Informatique et Libertés, qui permet d'écarter le
droit d'opposition en cas d'obligation légale125(*).Sur quel fondement
législatif repose alors la diffusion des images du domicile ?
La directive INSPIREdisposea contrarioque
l'administration peut publier des ortho-images comportant des données
à caractère personnel dès lors qu'il n'existe pas de
législation nationale ou communautaire prévoyant la
confidentialité de ces données personnelles. Néanmoins, la
loi Informatique et Libertés, ainsi que le RGPD ont mis en place un
régime de protection de telles données. Ainsi, dès lors
que l'ortho-image comporte des données à caractère
personnel, l'accès du public à ces photographies devrait
être encadré.
La directive INSPIRE précise encore que les motifs de
restriction à l'accès des données personnelles sont
« interprétés de manière stricte, en tenant
compte, dans chaque cas, de l'intérêt que l'accès à
ces informations présenterait pour le public ».
L'accès à la représentation complète et
détaillée du territoire prévaut-il alors sur la
préservation de la vie privée d'individus dont le domicile ou la
propriété peut être identifié ? La description
du territoire est consacrée dans le décret statutaire de l'IGN
comme une mission de service public, de même que la diffusion des bases
de données géographiques. Aussi, il peut être
considéré que la description du territoire comprend la
représentation des immeubles. L'intérêt de la diffusion
serait donc plus important que celui de la protection de l'information
personnelle entourant un bâtiment.
A l'inverse, comment établirquela protection des
données à caractère personnel est plus importante
que l'intérêt de l'accès du public aux ortho-images? Il
pourrait être envisagé une appréciation in
concreto selon un« seuil », en s'inspirant
peut-être du trouble anormal de la jurisprudence relative au droit
à l'image des biens.
Dans un arrêt Volker und Markus Scheckedu 9
novembre 2010126(*),
relatif à la diffusion en ligne, en vertu d'un règlement
européen, des noms de personnes physiques bénéficiaires de
fonds européens dans le cadre de la politique agricole commune, la Cour
de justice de l'Union européenne rappelle également la
nécessité d'un équilibre entre l'intérêt de
la diffusion en ligne pour le public et l'intérêt de l'absence de
publication pour la personne concernée. Il convient donc de
vérifier, alors même que la publication des données est
prescrite, si des mesures alternatives à la diffusion de données
à caractère personnel sont envisageables. Si tel n'est pas le
cas, il convient alors de mettre en balance les deux intérêts pour
savoir lequel prévaut.
En matière de description du territoire et de diffusion
des photographies ou ortho-images, il n'existe néanmoins aucune
alternative permettant à la fois de publier des données
précises ; et de préserver le droit à la protection des
données personnelles des individus dont le domicile ou la
propriété apparait sur ces images. Il semblerait, en outre, que
dans une société où la transparence s'accroit de jour en
jour et où les entreprises, et désormais les particuliers, sont
friands de données de qualité, l'intérêt de
l'accès aux informations géographiques prévaut sur le
« droit de se clore ».
Peut-être alors que le seul véritable
fondement127(*) à
la publication des documents administratifs comportant des données
à caractère personnel repose sur le consentement de la personne
concernée.
2. Le consentement de la personne concernée
Deux conditions alternatives sont prévues par la
directive INSPIRE pour la diffusion des ortho-images du RGE qui comportent
des données nominatives :l'absence de dispositions
législatives consacrant la confidentialité de ces
données ; ou le consentement de la personne concernée.
La collecte des prises de vue aérienne ou spatiale ne
fait pas l'objet d'un consentement de la part des personnes dont le domicile ou
la propriété apparait sur les images. Aussi, il parait inopportun
d'envisager l'accord de ces mêmes personnes pour la diffusion de ces
images. En outre, les modalités de recueil du consentement seraient trop
lourdes à mettre en place pour l'administration puisqu'il conviendrait
d'établir une liste des photographies d'immeubles permettant
d'identifier le locataire ou le propriétaire ; puis de contacter
ces personnes et de s'assurer de leur accord.
La publication des images du territoire comportant des
informations nominativesse fonde donc sur une obligation légale.
Qu'en-est-il alors de la réutilisation de ces informations par des
personnes privées ou des entreprises ?
II -La réutilisation des prises de vues
L'individu ou la multitude d'individus, en possession de
documents administratifs comportant des données à
caractère personnel, n'est pas nécessairement libre de les
exploiter. L'article L322-2 du Code des relations entre le public et
l'administration conditionne, en effet, cette réutilisation au respect
de la loi Informatique et Libertés(A). Afin d'assurer le respect de la
vie privée dans la réutilisation de ces données, la CNIL a
prévu d'adopter un pack de conformité en matière de
données publiques (B).
A/ Le respect de la loi Informatique et Libertés
La réutilisation d'informations publiques apparait
comme la « suite logique » de la communication et de la publication
des documents administratifs au public. Aussi, cette réutilisation doit
être la plus libre possible. Une condition doit toutefois être
remplie lorsque ces informations publiques comportent des données
à caractère personnel : le respect des dispositions de la loi
Informatique et Libertés. La licence Etalab participe à cet
encadrement (1). Une licence spécifique avait également
été homologuée pour les informations géographiques
de l'IGN (2).
1. La licence Etalab
L'article L321-1 dispose que les informations publiques
peuvent être utilisées par toute personne qui le souhaite
« à d'autres fins que celles de la mission de service
public pour les besoins de laquelle les documents ont été
produits ou reçus ». Aussi, lorsque des données
personnelles font partie intégrante de ces documents, la finalité
pour laquelle elles avaient été collectées n'est plus
nécessairement respectée. Il convient alors, pour le
réutilisateur, d'effectuer les démarches nécessaires afin
de se mettre en conformité avec la législation relative à
la protection des données à caractère personnel.
L'établissement d'une licence n'est pas obligatoire
(sauf si la réutilisation est soumise au paiement d'une redevance). Elle
a pour avantage d'asseoir un cadre juridique sécurisé à la
réutilisation.
La licence ouverte Etalab 2.0128(*), aussi nommée
« licence ouverte de réutilisation d'informations
publiques », fixe les conditions de réutilisation de
l'information publique. Elle a pour vocation d'être utilisée par
les administrations et de faciliter la « réutilisation libre
et gratuite des informations publiques » figurant dans des documents
communiqués ou publiés par une administration mentionnée
au premier alinéa de l'article L300-2 du CRPA.
Dans sa version 1.0, il était précisé que
les informations publiques contenant des données à
caractère personnel n'étaient pas susceptibles d'être
réutilisées, sauf dans trois cas : les personnes
intéressées y avaient consenti ; ces informations avaient
fait l'objet d'une anonymisation ; ou une disposition légale ou
réglementaire le permettait. La licence indiquait alors que la
réutilisation était subordonnée au respect de la loi
n°78-17 du 6 janvier 1978, c'est-à-dire la loi Informatique et
Libertés.
Dans sa version 2.0 de 2017, le texte de la licence ouverte
prend acte de la loi Lemaire et prévoit que
« l'information mise à disposition peut contenir des
données à caractère personnel pouvant faire l'objet d'une
réutilisation. Si tel est le cas, le concédant informe le
réutilisateur de leur présence. L'information peut être
librement réutilisée, dans le cadre des droits accordés
par la présente licence, à condition de respecter le cadre
légal relatif à la protection des données à
caractère personnel »129(*).
Aussi, la licence Etalab est désormais plus ouverte
à la réutilisation des données à caractère
personnel. Elle consacre, en effet, la possibilité d'une telle
réutilisation alors que la version 1.0 consacrait le principe de
l'interdiction. Les trois conditions de la version initiale ne se retrouvent
pas non plus au sein de la version 2.0.
La version 2.0 participe également à simplifier
le droit puisque le détenteur des données n'a plus à
vérifier, auprès du réutilisateur, son autorisation par la
CNIL à traiter les données réutilisées ou la
légitimité de la finalité de son traitement. La
responsabilité du respect de la loi Informatique et Libertés
incombe désormais au réutilisateur. Le détenteur n'a
qu'une obligation d'information, auprès du réutilisateur, de la
présence de données à caractère personnel.
La licence Etalabpeut ainsi trouver à s'appliquer aux
images du territoire qui contiennent des informations nominatives. Pour la
réutilisation des données géographiques produites par
l'IGN, une licence d'utilisation à titre gratuit anéanmoins
été homologuée le 5 mai 2017. Elle est arrivée
à échéance le 4 mai 2018, il est donc à
espérer qu'elle sera renouvelée.
2. La licence d'utilisation à titre gratuit de
l'IGN
Le champ d'application de la licence de l'IGN est
extrêmement large puisqu'elle s'applique aux
« données géographiques produites par l'IGN et sur
lesquelles aucun tiers n'a un droit de propriété
intellectuelle ».Les BD ORTHO®, la BD PARCELLAIRE® et
la BD ADRESSE® font notamment partie des données concernées.
En outre,l'article D324-5-1 du Code des relations entre le public et
l'administration prévoit que la réutilisation des
orthophotographies et ortho-images d'une résolution inférieure ou
égale à 50 cm, des images issues de capteurs embarqués
dans des véhicules terrestres, des bases de données du
parcellaire cadastral ou des bases de données d'adresses
géolocalisées, peut être soumise au paiement d'une
redevance. Ainsi, ces informations, bien qu'ouvertes à la
réutilisation, ne sont pas soumises à la licence d'utilisation
à titre gratuit de l'IGN. Le coût de leur production peut
justifier, en effet, le paiement d'une redevance.
La licence d'utilisation à titre gratuit limite
considérablement le cadre de la réutilisation des données.
Quatre domaines seulement sont concernés par cette
réutilisation : l'enseignement, la recherche publiable, la
démonstration ou l'évaluation et la mission de service public. La
licence restreint encore, pour chacune de ces catégories d'usage,
l'utilisation qui est faite des données. Il peut alors être
considéré qu'une telle restriction à la
réutilisation des BD ORTHO®, BD PARCELLAIRE® et BD
ADRESSE® participe également à la protection des
données à caractère personnel. Bien que des personnes
privées ou des entreprises aient accès à des informations
nominatives, elles ne peuvent les utiliser librement.
Si le texte de la licence n'indique pas la présence de
données à caractère personnel au sein des bases de
données concédées, il prévoit néanmoins que
« le licencié est responsable de la conformité
à la réglementation des traitements de données à
caractère personnel qu'il effectue dans le cadre de l'utilisation des
données ».
Il est également à espérer bientôt
la publication du pack de conformité de la CNIL en matière
d'ouverture des documents administratifs comportant des données
personnelles.
B/Dans l'attente du pack de conformité Open Datade
la CNIL
La coopération entre la CNIL et la CADA a
été renforcée par la loi pour une République
numérique. Notamment, les deux autorités peuvent se réunir
dans un collège unique lorsqu'une problématique
intéressant leurs compétences propres est posée. La CNIL a
également proposé la rédaction d'un « pack de
conformité open data » afin d'établir un
référentiel pour l'ouverture et la réutilisation
d'informations publiques comportant des données à
caractère personnel. Dans l'attente de ce pack, il convient
d'interpréter les textes en vigueur, notamment le récent
règlement général sur la protection des données (2)
et de suivre les conseils du groupe de l'Article 29 (1).
1. L'avis du groupe de l'Article 29
Dans un avis de 2013130(*), le groupe de l'Article 29 s'est
intéressé à la réutilisation des informations du
secteur public et des données ouvertes, et plus particulièrement
à la conciliation de cette ouverture avec la protection des
données personnelles.
Ses auteurs définissent la réutilisation comme
le fait de rendre disponibles des bases de données, dans un format
standardisé et réutilisable, à toute personne,
gratuitement et à toutes fins.
Qu'en-est-il alors si ces bases de données contiennent
des données personnelles ? Les auteurs considèrent que
« les règles relatives à la protection des
données à caractère personnel ne devraient pas constituer
un obstacle excessif au développement du marché de la
réutilisation ». Ils ajoutent qu'il convient
néanmoins de respecter le droit à la protection des
données à caractère personnel et le droit à la vie
privée (ajoutant là une condition non prévue par l'article
L322-2 du CRPA). Le groupe de l'Article 29 rappelle en effet que l'open
data est basé sur la transparence des acteurs publics et non des
particuliers.
Ainsi, l'administration, en possession de données
à caractère personnel, peut ne pas les rendre disponibles (il n'y
a pas eu de consentement, il n'existe pas de dispositions législatives
expresses ou la donnée n'est pas
« désidentifiable »), les anonymiser ou bien les
diffuser.
Le groupe de l'Article 29 recommande également aux
administrations d'évaluer l'impact d'une réutilisation ouverte
sur la protection des données personnelles afin d'identifier les
risques. Il conseille une approche pro-active, c'est-à-dire que
l'administration doit faire un état des lieux de ses documents pour
identifier les données personnelles. En outre, il rappelle que
l'ouverture des données pour permettre leur réutilisation doit
être compatible avec la finalité telle que décrite dans le
registre des traitements.
Le groupe de l'Article 29 souhaiterait que le droit national
précise plus clairement quelles sont les données
considérées sont des données publiques. La loi pour une
République numérique a entamé ce travail en
définissant les documents administratifs susceptibles d'ouverture. Reste
à la jurisprudence d'apprécier les qualifications ambiguës
comme ce peut être le cas pour certaines ortho-images ou photographies de
l'IGN.131(*)
2. L'arrivée du règlement
général sur la protection des données et son apport en
matière d'Open Data
L'article 86 du règlementest relatif au traitement et
à l'accès du public aux documents officiels. Il prévoit
que « les données à caractère personnel
figurant dans des documents officiels détenus par une autorité
publique ou par un organisme public ou un organisme privé pour
l'exécution d'une mission d'intérêt public peuvent
être communiquées par ladite autorité ou ledit organisme
conformément au droit de l'Union ou au droit de l'État membre
auquel est soumis l'autorité publique ou l'organisme public, afin de
concilier le droit d'accès du public aux documents officiels et le droit
à la protection des données à caractère personnel
au titre du présent règlement. » Il n'apporte
néanmoins aucune précision sur les modalités de cette
communication.
C'est le considérant 54 qui permet d'appréhender
la conciliation entre ouverture des données publiques et protection des
données personnelles. Il fait notamment référence à
la directive 2003/98/CE du Parlement européen et du Conseilrelative
à la réutilisation des informations du secteur public.
« L'acceÌs du public aux documents officiels peut
e^treconsideìreì comme eìtant dans l'inteìre^t
public. Les donneìes aÌ caracteÌre personnel figurant dans
des documents deìtenus par une autoriteì publique ou un organisme
public devraient pouvoir e^tre rendues publiques par ladite autoriteì ou
ledit organisme si cette communication est preìvue par le droit de
l'Union ou le droit de l'Eìtat membre dont releÌve
l'autoriteì publique ou l'organisme public. »
Il considère également que l'acceÌs du
public aux documents officiels et la reìutilisation des informations du
secteur public doivent être conciliés avec le droit aÌ la
protection des donneìes aÌ caracteÌre personnel.
Le règlement souhaite notamment protéger les
documents dont l'acceÌs est exclu ou limiteì pour des motifs de
protection des donneìes aÌ caracteÌre personnel, et les
parties de documents accessibles qui contiennent des
donneìespersonnelles dont la reìutilisationest incompatible,
selon la loi, avec la protection des personnes physiques aÌ
l'eìgard du traitement des donneìes aÌ caracteÌre
personnel.
Le règlement introduit également les notions de
« privacy by design », c'est-à-dire la
protection de la vie privée dès la collecte ; et de
« privacy by default », la protection de la vie
privée par défaut. Si le concept de « privacy by
design » trouvait à s'appliquer aux photographies de
bâtiments, il serait interprété commela mise en place d'un
système floutant les domiciles concernés dès la prise de
vue. Ce floutage contreviendrait alors à la mission de description
précise du territoire de l'IGN.
Conclusion
Cette étude a permis de démontrer que les images
du territoire diffusées sur Internet sont susceptibles de
représenter des bâtiments d'habitation ; et au-delà,
de les localiser. Cette empreinte géographique peut alors, le cas
échéant, relier un individu, le propriétaire ou l'occupant
des lieux, à un logement. L'habitat devient identifiant en
lui-même. Ainsi, l'image du logement peut être
appréhendée comme une donnée à caractère
personnel. La protection relative à de telles données permet de
dépasser le cadre strict du droit à l'image du domicile et la
difficile caractérisation de l'atteinte à la vie privée.
En effet, l'individu bénéficie de cette protection dès
lors qu'il est identifié ou identifiable. Il n'a donc pas besoin
d'apporter la preuve d'un trouble anormal ou d'un préjudice.
Après avoir établi que l'image du logement
pouvait être considérée comme une donnée
personnelle, nous avons envisagé et développé des
hypothèses de fondementspoursa collecte et sa diffusion. Ainsi, les
acteurs privés pourraient motiver ces traitements par la
nécessité de photographier le territoire afin de proposer leur
service au public, à savoir l'accès à une plateforme de
données géographiques. La collecte et la diffusion d'images
représentant des habitations seraient donc fondées sur les
intérêts légitimes défendus par ces entreprises.
Pour les acteurs publics, et plus particulièrement pour l'IGN, la prise
de vues et la publication des photographies reposeraient sur d'autres
fondements, moins sujets à débat que celui envisageable pour les
entreprises. Ainsi, les traitements réalisés par l'IGN pourraient
être fondés, pour la collecte, sur l'une des missions de service
public de l'établissement, relative à la couverture en
photographie aérienne et spatiale du territoire; et pour la diffusion,
sur l'obligation légale d'ouverture des données, et plus
particulièrement des données géographiques.
Cet accès généralisé aux
photographies aériennes, spatiales ou prises depuis la voie publique par
un acteur étatique a fait l'objet d'approfondissements au sein du second
chapitre de cette étude.Si les images de bâtiments d'habitation
peuvent être considérées comme des données
personnelles, elles peuvent également constituer des documents
administratifs susceptibles d'être diffusés et
réutilisés dès lors que ces photographies ont
été prises dans le cadre d'une mission de service public. Deux
intérêts sont alors mis en balance : l'accès du public
à l'information géographique et aux données de description
du territoire; et la protection de la vie privée et des données
personnelles des individus identifiés sur les photographies. Plusieurs
alternativespermettentde concilier l'ouverture des données et la
protection des individus, notamment le consentement des personnes
concernées à la diffusion, l'anonymisation des données
nominatives ou encore l'existence d'une disposition législative
prévoyant expressément la publication des données
personnelles. Selon nous, la diffusion des photographies comprenant des
données nominatives serait fondée sur une base légale,
à savoir l'obligation de diffuser les images du territoire. Les
photographies des bâtiments d'habitation font, en effet, partie
intégrante de ces images. Il ne serait donc pas possible de flouter les
données nominatives sans dénaturer la photographie et, dès
lors, sa valeur intrinsèque. Il semblerait ainsi que
l'intérêt du public à accéder à des
informations précises et de qualité prévale sur la
protection des données personnelles des individus identifiés.Cet
effet serait néanmoins compensé par le fait que ces individus
puissent toujours agir sur le terrain de la responsabilité de droit
commun et/ou, pour le propriétaire, sur celui du trouble anormal en
matière de droit à l'image du bien. Ces recours paraissent
néanmoins bien futiles pour protéger l'intimité de
l'individu puisqu'ils s'exercent a posteriori, et donc
« trop tard ».
Dans une société où la transparence
devient la norme et où « Big Brother » se
démultiplie, l'individu est en lutte permanente contre les
ingérences dans sa vie privée. Avecledéploiement des
drones et l'amélioration constante de la précision des
photographies aériennes et spatiales, les murs opaques qu'il a
érigés pour préserver sa vie privée semblent ainsi
se fissurer un peu plus.
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GéoInformations, Espace interministériel de l'information
géographique, 5 juin 2014
« Les bases de l'information
géographique », L'essentiel de la géomatique,
École nationale des techniciens de l'équipement, 15 mai 2013
« Usages des drones et protection des
données personnelles », Protection de la vie personnelle,
Centre national de la recherche scientifique, http://www.cil.cnrs.fr, 15
novembre 2012
Proposition de loi tendant à restreindre les immixtions
des moteurs de recherches dans la vie privée n°2111,
enregistrée à l'Assemblée nationale le 27 novembre 2009 et
présentée par Jean-Christophe LAGARDE
Proposition de loi n°1029 à l'Assemblée
nationale visant à donner un cadre juridique au droit à l'image
et à concilier ce dernier avec la liberté d'expression,
enregistrée à la Présidence de l'Assemblée
nationale le 16 juillet 2003, présentée par Patrick BLOCHE et
Jean-Marc AYRAULT
« Quand Google Earth devient l'arme des
cambrioleurs », Faits divers, Le Parisien, 8 juin 2009
TEXTES DE REFERENCE
Code des relations entre le public et l'administration
Code civil
Code de la propriété intellectuelle
Code de l'environnement
Loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à
l'informatique, aux fichiers et aux libertés
Règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et
du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes
physiques à l'égard du traitement des données à
caractère personnel et à la libre circulation de ces
données, et abrogeant la directive 95/46/CE (règlement
général sur la protection des données)
Directive 2007/2/CE du Parlement européen et du Conseil
du 14 mars 2007 établissant une infrastructure d'information
géographique dans la Communauté européenne (INSPIRE)
Loi n°78-753 du 17 juillet 1978 portant diverses mesures
d'amélioration des relations entre l'administration et le public et
diverses dispositions d'ordre administratif, social et fiscal
Loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une
République numérique
Décret n° 2011-1371 du 27 octobre 2011 relatif
à l'Institut national de l'information géographique et
forestière (IGN)
Décret n°2005-1755 du 30 décembre 2005
relatif à la liberté d'accès aux documents administratifs
et à la réutilisation des informations publiques, pris pour
l'application de la loi n° 78-753 du 17 juillet 1978
Arrêté du 17 décembre 2015 relatif
à la conception des aéronefs civils qui circulent sans personne
à bord, aux conditions de leur emploi et aux capacités requises
des personnes qui les utilisent
Arrêté du 17 décembre 2015 relatif
à l'utilisation de l'espace aérien par les aéronefs qui
circulent sans personne à bord
Délibération n°2012-087 du 29 mars 2012
portant autorisation unique de traitements automatisés de données
à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre d'un
système d'information géographique (SIG) et abrogeant la
délibération n° 2006-257 du 5 décembre 2006
(décision d'autorisation unique AU-001)
Délibération n°2012-088 du 29 mars 2012
dispensant de déclaration les traitements automatisés de
données personnelles mis en oeuvre aux fins de consultation de
données issues de la matrice cadastrale par toute commune, groupement et
organisme privé ou public chargé d'une mission de service public
ainsi que la diffusion sur internet de base géographique de
référence au sens du code de l'environnement, et abrogeant la
délibération n° 2004-074 du 21 septembre 2004 (DI-016)
TABLE DES MATIERES
Introduction...............................................................................................p.1
Chapitre 1 - La photographie du territoire : une
donnée géographique nominative...... p.7
Section 1 - L'image du domicile : une information
personnelle à protéger...................... p.7
I - Le domicile au coeur de la vie privée de
l'individu............................................... p.7
A/ L'atteinte à la vie
privée.........................................................................
p.7
1. La protection de l'adresse et du
domicile................................................ p.7
2. La caractérisation de l'atteinte à la vie
privée.......................................... p.9
B/ L'image des
biens.................................................................................
p.10
1. Le principe : l'absence de droit exclusif sur l'image
du bien........................... p.10
2. L'exception : le trouble
anormal.......................................................... p.15
II - Le caractère indirectement identifiant de
l'image du domicile................................. p.17
A/ La description des caractéristiques du
logement............................................. p.17
1. L'image de la façade prise depuis la voie
publique..................................... p.17
2. Les images satellites et
aériennes.........................................................
p.20
B/ La contextualisation de la
donnée.....................................................................p.22
1. Le cadastre et la base adresse nationale
(BAN)......................................... p.22
2. L'individu lié au
bâtiment..................................................................
p.25
Section 2 - La collecte et la diffusion des prises de vues
aériennes, spatiales ou depuis la voie
publique....................................................................................................
p.32
I - Les fondements de la collecte et de la diffusion des
prises de vues............................ p.32
A/ La collecte des
photographies........................................................................p.32
1. Les photographies aériennes et
spatiales................................................ p.32
a) L'encadrement par la loi des techniques de
photographie........................ p.32
b) Le fondement légitime de la collecte de
photographies aériennes............... p.33
2. Les prises de vues depuis la voie
publique................................................ p.35
B/ La diffusion sur Internet des
photographies................................................... p.36
1. L'obligation
légale..........................................................................
p.36
2. L'intérêt
légitime............................................................................
p.37
II - Les obligations du responsable de traitement et les
droits de la personne concernée...... p.37
A/ L'information relative au
traitement........................................................... p.37
1. Les informations relatives à la durée de
conservation des données, la finalité et les destinataires du
traitement.................................................................
p.38
2. Une information
collective.................................................................
p.39
B/ L'exercice des droits d'accès, de rectification, de
mise à jour, d'effacement des données et d'opposition au
traitement...........................................................................
p.40
1. La mise en place du dispositif d'accès, de
rectification, de mise à jour et d'effacement des données
collectées......................................................................
p.40
2. L'opposition à la collecte et/ou à la
diffusion des données issues des photographies
géographiques.......................................................................................
p.40
a) Des motifs
légitimes...................................................................
p.40
b) L'exercice délicat de la mise en oeuvre de
l'opposition........................... p.41
Chapitre 2 - La donnée géographique de
référence.............................................. p.43
Section 1 - Une information au service de
l'intérêt général : l'ouverture de la
donnée
géographique...............................................................................................p.43
I - L'ouverture des données environnementales :
la directive INSPIRE........................... p.43
A/ La description du territoire : une mission
d'intérêt public................................. p.43
B/ L'harmonisation et le partage des données
environnementales........................... p.44
II - L'ouverture des données
géographiques : la loi pour une République
numérique........... p.45
A/ La donnée géographique : une
donnée de
référence......................................... p.45
B/ L'accès aux données géographiques et
leur réutilisation par des personnes privées.... p.47
1. L'accès et la diffusion des documents administratifs
de l'IGN....................... p.47
2. La réutilisation des informations publiques de
l'IGN.................................. p.52
Section 2 - La conciliation entre l'ouverture de
l'accès aux documents administratifs et la protection des données
personnelles....................................................................
p.53
I - La diffusion des prises de vues, entre restriction et
ouverture.................................. p.55
A/ Une restriction à
l'accès.........................................................................
p.55
1. L'interdiction de la diffusion de données
personnelles portant atteinte à la protection de la vie
privée..............................................................................
p.55
2. L'occultation et l'anonymisation des données
personnelles........................... p.58
B/ L'autorisation de
publication....................................................................
p.62
1. L'autorisation donnée par la loi de
diffuser............................................. p.62
2. Le consentement de la personne
concernée............................................. p.65
II - La réutilisation des prises de
vues.................................................................. p.66
A/ Le respect de la loi Informatique et
Libertés..................................................... p.66
1. La licence
Etalab............................................................................
p.66
2. La licence d'utilisation à titre gratuit de
l'IGN.......................................... p.68
B/ Dans l'attente du pack de conformité Open Data de
la CNIL...............................p.69
1. L'avis du groupe de l'Article
29.......................................................... p.69
2. L'arrivée du règlement général
sur la protection des données et son apport en matière d'Open
Data.................................................................................
p.70
Conclusion................................................................................................
p.73
* 1 DERIEUX Emmanuel,
« Vie privée et données personnelles - Droit
à la protection et « droit à l'oubli » face à la
liberté d'expression », Nouveaux Cahiers du Conseil
constitutionnel n° 48 (dossier : vie privée), juin 2015,
pp.21-33
* 2 Directive 2007/2/CE du
Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2007 établissant une
infrastructure d'information géographique dans la Communauté
européenne (INSPIRE)
* 3 « Les bases
de l'information géographique », L'essentiel de la
géomatique, École nationale des techniciens de
l'équipement, 15 mai 2013
* 4 Glossaire de
l'information géographique, GéoInformations, Espace
interministériel de l'information géographique, 5 juin 2014
L'orthophotographie est une « image
photographique sur laquelle ont été corrigées les
déformations dues au relief du terrain, à l'inclinaison de l'axe
de prise de vue et à la distorsion de l'objectif pour la transformer en
projection cartographique ».
* 5CA Riom, 14 mai 2003,
Société Rubie's France c/ Société M SatEditions, D.
2003, p.2754, obs. P. Sirinelli, RTD Com. 2004, p.308, note P. Gaudrat
* 6 L'article L112-3 du Code
de la propriété intellectuelle dispose, en effet, qu'une base de
données est « un recueil d'oeuvres, de données ou
d'autres éléments indépendants, disposés de
manière systématique ou méthodique, et individuellement
accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen
».
* 7 Glossaire de
l'information géographique, GéoInformations, Espace
interministériel de l'information géographique, 5 juin 2014
* 8 Glossaire de
l'information géographique, GéoInformations, Espace
interministériel de l'information géographique, 5 juin 2014
* 9 BRIETZ Aurélien,
« De la donnée géographique à l'information
territoriale », Wikiterritorial, Urbanisme / aménagement
urbain / SIG, 20 janvier 2014
* 10 Décret du 27
juin 1940 portant suppression du service géographique de l'armée
et création de l'Institut géographique national, JO 12-07-1940,
p.4518
* 11 Décret n°
2011-1371 du 27 octobre 2011 relatif à l'Institut national de
l'information géographique et forestière (IGN), JORF n°0251
du 28 octobre 2011, p.18186, texte n°7
* 12
« Compte-rendu de la rencontre AFIGEO avec Mme Valéria
FAURE-MUNTIAN, Ministère de la Transition Ecologique, 17 avril
2018 », site de l'Association française pour
l'information géographique, rubrique documentation
* 13JOLIVEAU Thierry,
« Le Geoweb, un nouveau défi pour les bases de
données géographiques », L'Espace
géographique, Tome 40, DOI 10.3917/eg.402.0154, 2011-2012, p.154
* 14Ibid., p.156
* 15QUESNOT Teriitutea,
« L'involution géographique : des données
géosociales aux algorithmes », Netcom, 22 mars 2017
* 16JOLIVEAU Thierry,
op. cit., p.163
* 17 BRIETZ Aurélien,
loc. cit.
* 18 Google Earth a franchi
la barre du milliard de téléchargements. Il est devenu le SIG le
plus utilisé sur la planète. « Google Earth
downloaded more than one billion times », blog de Google Maps, 5
octobre 2011
* 19 MAZEAUD Vincent,
« La constitutionnalisation du droit au respect de la vie
privée », Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel
n° 48 (dossier : vie privée), juin 2015, pp.7-20
Voir également décision n°2017-752 DC du 8
septembre 2017, Loi pour la confiance dans la vie politique (JO 16 septembre
2017, texte n°5), Conseil constitutionnel : « La
liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration de
1789 implique le droit au respect de la vie privée. Par suite, la
collecte, l'enregistrement, la conservation, la consultation et la
communication de données à caractère personnel doivent
être justifiées par un motif d'intérêt
général et mis en oeuvre de manière adéquate et
proportionnée à cet objectif. »
* 20 DEBET Anne, MASSOT
Jean, METALLINOS Nathalie, avec la collaboration de DANIS-FATOME Anne et
LESOBRE Olivier, « Informatique et Libertés, La protection des
données à caractère personnel en droit français et
européen », Les intégrales 10, Lextenso, 2015,
pp.246-247
* 21Lexique des termes
juridiques 2013, 20ème édition, Dalloz, p.237
* 22 Convention collective
nationale des télécommunications du 26 avril 2000, Textes
Attachés, Accord du 22 septembre 2017 relatif à l'accompagnement
du développement numérique, Article 3.1
* 23Cass.
1ère civ., 6 mars 1996, pourvoi n°94-11.273 ; Cass.
3ème civ., 25 février 2004, Bull. civ. III,
n°41 ; Cass. 1ère civ., 7 novembre 2006, Bull. civ.
I, n°466
* 24 La résidence est
également protégée par le droit à la vie
privée.
* 25L'adresse du domicile peut
néanmoins évoluer au fur et à mesure des
déménagements de l'individu.
* 26Cass.
1ère civ., 19 mars 1991, D.1991, p.568, note D.
Velardocchio
* 27 Lexique des termes
juridiques 2013, 20ème édition, Dalloz, p.87
* 28Cass,
2ème civ., 5 juin 2003, Bull. civ. II, n°175
* 29Cass.
1ère civ., 10 mars 1999, Bull. civ. I, n°87, p.58,
D.1999, p.319, concl. J. Sainte-Rose, RTD Civ. 1999, p.859, obs. F. Zenati
* 30 Cass.
1ère civ., 2 mai 2001, D.2001, p.1973, note J.-P. Gridel, RTD
Civ. 2001, p.618, note Th. Revet
* 31 Proposition de loi
n°1029 à l'Assemblée nationale visant à donner un
cadre juridique au droit à l'image et à concilier ce dernier avec
la liberté d'expression, enregistrée à la
Présidence de l'Assemblée nationale le 16 juillet 2003,
présentée par Patrick BLOCHE et Jean-Marc AYRAULT
* 32Cass.
2ème civ., 5 juin 2003, Bull. civ. II n°175, p.150,
D.2003, p.2461, note E. Dreyer
* 33Cass. Ass. Plén.,
7 mai 2004, sté civ. Particulière Hôtel de Girancourt,
Bull. 2004 A. P. n°10, p.2, D.2004, p.1545, note J.-M.
Bruguière et E. Dreyer, D.2004. Somm. 2046, obs. N. Reboul-Maupin,
JCP G 2004.II, p.10085, note C. Caron
* 34 MALAURIE Philippe et
AYNES Laurent, « Les Biens », Defrénois,
collection Droit civil, 5ème édition, Lextenso,
janvier 2013, p.81
* 35Cass.
1ère civ, 5 juillet 2005, Bull. civ. I, n°297 ;
Cass. 1ère civ., 28 juin 2012, D.2012, p.2218, note F.
Pollaud-Dulian
* 36L'article 39 de la loi
n°2016-1321 du 7 octobre 2016 pour une République numérique
a pour ambition d'introduire un 11° à l'article L122-5 du Code de
la propriété intellectuelle. Ainsi, l'auteur ne pourrait
interdire « les reproductions et représentations d'oeuvres
architecturales et de sculptures, placées en permanence sur la voie
publique, réalisées par des personnes physiques, à
l'exclusion de tout usage à caractère
commercial ».
* 37Cass.
1ère civ., 7 novembre 2006, Bull. civ. I, n°466, D.2007,
p.700, note J.-M. Bruguière
* 38 L'article 2 du
décret statutaire de l'IGN dispose que l'établissement a pour
mission de réaliser la couverture en imagerie aérienne ou
satellitaire de l'ensemble du territoire national.
* 39 L'atteinte à la
vie privée du propriétaire qui n'habite pas les lieux serait plus
difficile à démontrer.
* 40Seul Google Street View
propose cette fonctionnalité.
* 41REBOUL-MAUPIN
Nadège, « Droit des biens »,
6ème édition, HyperCours, droit privé, Dalloz,
août 2016, p. 32
* 42 Cass.
1ère civ., 5 juillet 2005, Bull. civ. 2005 I n°297,
p.248
* 43 CA Orléans, 15
février 2007, n°06/00988, CCE 2007, n°78, note C. Caron
* 44 DORSEMAIRE G.,
« Le trouble anormal en droit privé »,
mémoire de master 2 en droit des contrats et des biens, direction G.
LOISEAU, 2004-2005, n°52s.
* 45 Notamment, l'individu
sera plus facilement identifiable.
* 46 23ème
rapport d'activité 2002, Commission nationale de l'Informatique et des
Libertés, La documentation Française, édition 2003,
pp.142-143
* 47 « Quand
Google Earth devient l'arme des cambrioleurs », Faits divers, Le
Parisien, 8 juin 2009
* 48 HERY Jean-Jacques,
« Grâce à Google Maps, le fisc découvre 300
piscines de particuliers non déclarées », Europe1,
2 mars 2017
* 49 23ème
rapport d'activité 2002, Commission nationale de l'Informatique et des
Libertés, La documentation Française, édition 2003,
pp.142-143
* 50 DEBET Anne, MASSOT
Jean, METALLINOS Nathalie, avec la collaboration de DANIS-FATOME Anne et
LESOBRE Olivier, op. cit., pp.240-241
* 51Déclaration
à la Commission nationale de l'Informatique et des Libertés
(CNIL), Pages Jaunes, 2001 et 2009 (accessible via le site de la CNIL,en
consultant le « fichier des fichiers »)
* 52 Déclaration
à la CNIL, Google, 2008 (accessible via le site de la CNIL,en consultant
le « fichier des fichiers »)
* 53Proposition de loi
tendant à restreindre les immixtions des moteurs de recherches dans la
vie privée n°2111, enregistrée à l'Assemblée
nationale le 27 novembre 2009 et présentée par Jean-Christophe
LAGARDE
*
54Délibération n°2012-087 du 29 mars 2012 portant
autorisation unique de traitements automatisés de données
à caractère personnel mis en oeuvre dans le cadre d'un
système d'information géographique (SIG) et abrogeant la
délibération n° 2006-257 du 5 décembre 2006
(décision d'autorisation unique AU-001), JORF n°0088 du 13 avril
2012, texte n° 83
* 55
« Determining what is personal data », Information
Commissioner's Office, 2012, p.12
* 56 « Les
nouveaux développements en matière de cartographie du
territoire », site de la CNIL, 24 avril 2012
*
57Délibération n°2012-088 du 29 mars 2012
dispensant de déclaration les traitements automatisés de
données personnelles mis en oeuvre aux fins de consultation de
données issues de la matrice cadastrale par toute commune, groupement et
organisme privé ou public chargé d'une mission de service public
ainsi que la diffusion sur internet de base géographique de
référence au sens du code de l'environnement, et abrogeant la
délibération n° 2004-074 du 21 septembre 2004 (DI-016)
* 58Elle s'applique encore
au début du mois de juin 2018.
* 59Toutefois, s'il
réutilise certaines données personnelles communiquées, il
devra respecter les dispositions de la loi Informatique et Libertés.
* 60L'adresse seule ne
permet pas de savoir dans quel type de logement Monsieur X habite.
* 61 23ème
rapport d'activité 2002, Commission nationale de l'Informatique et des
Libertés, La documentation Française, édition 2003,
pp.142-143
* 62 Avis du groupe de
l'Article 29 (G29), 6/2013 sur la réutilisation des informations du
secteur public (ISP) et des données ouvertes, 1021/00/FR, WP 207, 5 juin
2013, p.19
* 63 Avec l'aimable
autorisation de Monique Drogoul.
* 64 Pour autant, le fait
d'avoir habité telle maison pendant telle période peut être
considéré comme une donnée à caractère
personnel.
* 65 23ème
rapport d'activité 2002, Commission nationale de l'Informatique et des
Libertés, La documentation Française, édition 2003,
p.142-143
* 66Avis du groupe de
l'Article 29 (G29), 04/2007 sur le concept de données à
caractère personnel, 01248/07/FR, WP 136, 20 juin 2007, p.10
* 67Règlement (UE)
2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif
à la protection des personnes physiques à l'égard du
traitement des données à caractère personnel et à
la libre circulation de ces données, et abrogeant la directive 95/46/CE
(règlement général sur la protection des données,
RGPD)
* 68Dictionnaire en ligne
Larousse
* 69
« Guidelines for public administrations on location
privacy », JRC Technical Reports, European Union Location
Framework, 2016, p.4 : « location data such as addresses
(...) or camera images (...) »
* 70« Usages
des drones et protection des données personnelles »,
Protection de la vie personnelle, Centre national de la recherche scientifique,
http://www.cil.cnrs.fr, 15 novembre 2012
* 71 Arrêté du
17 décembre 2015 relatif à la conception des aéronefs
civils qui circulent sans personne à bord, aux conditions de leur emploi
et aux capacités requises des personnes qui les utilisent, JORF
n°0298 du 24 décembre 2015, p.23897, texte n° 22 ;
Arrêté du 17 décembre 2015 relatif à l'utilisation
de l'espace aérien par les aéronefs qui circulent sans personne
à bord, JORF n°0298 du 24 décembre 2015, p.23890, texte
n° 20
* 72Article 2 2° du
décret statutaire de l'IGN, n° 2011-1371
* 73Question écrite
n°01425 de Jean-Louis MASSON, JO Sénat, 5 octobre 2017, p.3053
* 74 Réponse du
Ministère de la cohésion des territoires à la question
n°01425 de Jean-Louis MASSON, JO Sénat, 11 janvier 2018, p.94
* 75« Comment
les images sont-elles collectées ? », Aide Google
Earth
* 76 Le service Google Maps
a néanmoins fait l'objet d'une déclaration, accessible via le
site de la CNIL,en consultant le « fichier des
fichiers ».
* 77
https://play.google.com/store/apps/details?id=com.google.android.street&hl=fr
* 78En
réalité, Google Earth.
* 79 Question n°3763 de
Philippe MEUNIER, JO Assemblée nationale, 4 septembre 2012, p.4887
* 80Réponse du
Ministère de la Justice à la question n°3763 de Philippe
MEUNIER, JO Assemblée nationale, 5 mars 2013, p.2609
* 81 L'autorisation unique
AU 001 reconnait notamment le droit d'accès du public aux bases de
données géographiques de référence.
* 82 23ème
rapport d'activité 2002, Commission nationale de l'Informatique et des
Libertés, La documentation Française, édition 2003,
pp.142-143
* 83La directive INSPIRE
n'impose pas aux autorités publiques de collecter de nouvelles
données mais de mettre à disposition les données qu'elles
détiennent (considérant 13 de la directive INSPIRE).
* 84Présentation de
la directive INSPIRE, site du CNIG
* 85MERRIEN François,
LEOBERT Marc, FRANCES M., « La directive INSPIRE pour les
néophytes », version 4.5, Mission de l'information
géographique du Ministère de l'Environnement, 12 octobre 2016
* 86 Les auteurs
considèrent ainsi que la donnée
géographique transcende la donnée environnementale.
* 87 État,
collectivités, personnes de droit public ou personnes de droit
privé en charge d'une mission de service public
* 88En matière de
défense, de sécurité, de fiscalité, de protection
de l'environnement ou de transports, l'État a notamment recours aux
données géographiques de référence.
* 89Le rapport de Mme
Valéria FAURE-MUNTIAN devait être remis fin avril 2018. Il est
toujours pendant au début du mois de juin.
* 90
« Valéria Faure-Muntian, députée de la
Loire, est nommée parlementaire en mission temporaire auprès de
Nicolas Hulot », Communiqué de presse du Ministère
de la transition écologique et solidaire, 6 février 2018
* 91 Lettre de mission
n°173/18 SG du Premier ministre à Mme la députée
Valéria Faure-Muntian, 5 février 2018
* 92
« L'information géographique et l'Open
Data », Afigéo, Groupe de travail Open Data, janvier
2017
* 93 « Open
data : la protection des données comme vecteur de
confiance », site de la CNIL, 29 août 2017
* 94Loi n° 78-753 du 17
juillet 1978 portant diverses mesures d'amélioration des relations entre
l'administration et le public et diverses dispositions d'ordre administratif,
social et fiscal
* 95 Avis 20071023, CADA,
séance du 3 mai 2007
* 96« Open
data : la protection des données comme vecteur de
confiance », site de la CNIL, 29 août 2017
* 97 L'article L311-2 du
Code des relations entre le public et l'administration (CRPA) précise
que « le droit à communication ne s'exerce plus lorsque
les documents font l'objet d'une diffusion publique ». Aussi, il
n'est pas possible de demander à se voir communiquer les données
du Géoportail puisqu'elles sont déjà publiées sur
Internet.
* 98 Si cette condition
n'est pas remplie, la donnée collectée dans le cadre de la
mission de service public peut toujours être communiquée à
tout administré qui en fait la demande, sur la base de l'article L311-1
du CRPA. Il serait alors nécessaire d'établir une demande
précise portant sur un document et non sur un renseignement.
* 99 La BD ORTHO HR®
n'est pas intégrée dans le RGE. Certains pourraient alors
considérer qu'elle ne répond pas à la mission de service
public de l'IGN.
* 100 Ce mémoire a
été rendu le 10 juin 2018.
* 101Conseil 20063777,
CADA, séance du 14 septembre 2006
* 102 « Le
droit de propriété intellectuelle », La
réutilisation des informatiques publiques, Les cas particuliers, site de
la CADA
* 103 AUBY Jean-Bernard,
« Fascicule 109-30 : Données publiques -
Définitions. Principes. Orientation », JurisClasseur
Administratif, LexisNexis, 10 avril 2018, n°7
* 104 « Open
data : la protection des données comme vecteur de
confiance », site de la Commission nationale de l'Informatique
et des Libertés (CNIL), 29 août 2017
* 105Cf. « A/ La
description du territoire : une mission d'intérêt
public », pp.43-44 de cette étude
*
106« Première réunion du collège
unique CADA-CNIL : une approche conjointe de la donnée
publique », site de la CNIL, 24 octobre 2017
* 107 « Open
data : la protection des données comme vecteur de
confiance », 29 août 2017, CNIL
* 108 L'article L311-6 du
CRPA prévoit d'autres restrictions à l'ouverture des
données, notamment le secret médical, le secret industriel,
l'appréciation ou le jugement de valeur sur une personne physique.
* 109Cass. Ass.
Plén., 7 mai 2004, sté civ. Particulière Hôtel de
Girancourt, Bull. 2004 A. P. n°10 p.2, D.2004.1545, note J.-M.
Bruguière et E. Dreyer, D.2004. Somm. 2046, obs. N. Reboul-Maupin, JCP G
2004.II.10085, note C. Caron
* 110 L'article L311-6
1° du CRPA dispose que « Ne sont communicables qu'à
l'intéressé les documents administrations dont la communication
porterait atteinte à la protection de la vie
privée. »
* 111 En outre, ce trouble
anormal transcende l'atteinte à la vie privée puisqu'il
intègre également le parasitisme ou la concurrence
déloyale.
* 112 « La
loi CNIL », Les régimes concurrents, Les régimes
particuliers de communication, L'accès aux documents administratifs,
site de la CADA
* 113 Si l'exigence de la
protection de la vie privée permet de maintenir un équilibre
entre l'accès individuel aux documents et la préservation de
certaines données personnelles, cet équilibre est trop
précaire, selon nous, puisqu'il ne bénéficie pas à
toutes les données à caractère personnel.
* 114 Avis du groupe de
l'Article 29 (G29), 05/2014 sur les techniques d'anonymisation, 0829/14/FR, WP
216, 10 avril 2014, p.3
* 115 « Les
modalités d'occultation », Les modalités d'occultation,
Les modalités de communication, L'exercice du droit d'accès,
L'accès aux documents administratifs, site de la CADA
* 116Conseil 20121488,
CADA, séance du 7 juin 2012
* 117Avis du groupe de
l'Article 29 (G29), 05/2014 sur les techniques d'anonymisation, 0829/14/FR, WP
216, 10 avril 2014, p.3
* 118 PIETTE-COUDOL
Thierry, « Fascicule 109-50 : DONNÉES PUBLIQUES - Gestion
administrative et exploitation technique », JurisClasseur
Administratif, 30 novembre 2017, n°71
* 119 « Open
data : la protection des données comme vecteur de
confiance », 29 août 2017, CNIL
* 120Avis du groupe de
l'Article 29 (G29), 05/2014 sur les techniques d'anonymisation, 0829/14/FR, WP
216, 10 avril 2014, p.11
* 121 Décret
n°2005-1755 du 30 décembre 2005 relatif à la liberté
d'accès aux documents administratifs et à la réutilisation
des informations publiques, pris pour l'application de la loi n° 78-753 du
17 juillet 1978
* 122 « La
protection des données personnelles dans l'open data : une exigence et
une opportunité », Rapport d'information n°469
(2013-2014) de MM. Gaëtan GORCE et François PILLET, fait au nom de
la commission des lois, 16 avril 2014
* 123Cf. « A/ La
description du territoire : une mission d'intérêt
public », pp.43-44 de cette étude
* 124Notamment les
ortho-images du RGE.
* 125Conseil 20171751,
Ministère des solidarités et de la santé, CADA,
séance du 24 mai 2017
* 126CJCE, 9 novembre 2010,
aff. C-92/09 et C-93/09, Volker und Markus ScheckeGbR et HartmutEifert c/ Land
Hessen, § 59 ; Europe 2011, comm. 2, note D. Simon
Voir également : CE, ss-sect. 10, 30
décembre 2015, n° 376845, Association Juricom et associés c/
CNIL ; CCE 2016, comm. 36, note A. Debet
* 127 Il est moins sujet
à débat que l'anonymisation ou l'existence d'une disposition
légale.
* 128Elle est
consacrée dans le décret n°2017-638 du 27 avril 2017 relatif
aux licences de réutilisation à titre gratuit des informations
publiques et aux modalités de leur homologation.
* 129Il nous apparait
malheureux que cette exigence ait été introduite juste
après la disposition suivante : « Le
réutilisateur est libre de réutiliser l'information sous
réserve de mentionner la paternité de
l'information ». Il aurait été opportun
d'insérer à la suite de cette disposition « et
sous réserve de respecter le cadre légal relatif à la
protection des données à caractère personnel lorsque
l'information contient de telles données ».
* 130 Avis du groupe de
l'Article 29 (G29), 06/2013 sur la réutilisation des informations du
secteur public (ISP) et des données ouvertes,1021/00/FR, WP 207, 5 juin
2013
* 131 Notamment la BD ORTHO
HR®.
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