ABSTRACT
Gambling are old practices in human societies, and their
expansion has been lasting since the industrial revolution that Europe
experienced in the late XVIIIe century. Although, relatively new in
Africa, this industry is now booming in Cameroonian cities. the study of
gambling and social change has been motivated by the observations of the
greatness that take this phenomenon in are cities thought its multiples
manifestations. This research shows, the question of the becoming of the
countries which expose their citizens to failure, to mechanisms of poverty and
different forms of deviations. Therefore, the problem who emerge is that
attributed to gambling by the social actors of the town of Yaoundé,
taking fact of their participation to these games by many social variables
which can be interpreted: it means those which attributes them the eclosion of
a certain chance, or certain distraction. or furthermore, that which calls
motivations which calls motivations which are deeper like that which animes the
ignorant, desperate or lazy persons targeting a providential gain. The
principal question of the research is knowing: which are the new behavior
induct by the proliferation of gambling in Yaoundé? for the principal
hypothesis, it says that: the proliferation of practices of gambling in the
city of Yaoundé generated in the society, spirit of lucratively, search
of easy money, and illusion of rapid enrichment. Two, analytical theories led
to guide research which the matrix constructivist and the sociological dynamist
and critic approach, we permitted to understand the modalities of which the
individuals labored their mechanisms and scheme to construct a perspective in
their social lives. these sturdies served as unprovability tester to guide the
research on the field, or the choice of town. The collection of data then
mobilized different techniques: direct observation, documentary research, semi
directive discussion and the questionnaire. The results of these study put in
relief, the representations in different stage practices at individuals while
evaluating their impact on the Cameroonian society in general, and the youth,
which has the tendency to research on ways to rapid gain. with consequence, the
risk for these players to immerge in dependency, to germs delinquency? failure
unsureness etc.
Keys words: Gambling, Social change.
INTRODUCTION
1 La capacité de chaque
société à produire ses propres orientations sociales et
culturelles à partir de son activité et de donner un sens
à ses pratiques. TOURAINE, A. 1974, Pour la Sociologie, Paris,
Seuil, p.59.
2
1. Contexte justificatif du choix du
thème
À partir de l'historicité1 ;
caractéristique des sociétés humaines, les hommes ont
toujours su modifier les matériaux ou les règles, donnant
prétexte à leurs jeux ou paris. Ces réaménagements
permanents dans leurs activités s'arriment aux « dynamiques
sociales » G. BALANDIER (1986), qui se révèlent dans notre
société engagée dans un élan de transformation de
la vie publique, par un processus d'adaptation de nouvelles manières
d'être, d'agir et de sentir à l'ère du temps. C'est ainsi
que chaque jour qui passe, des mécanismes plus perfectionnés
apparaissent et de façon graduelle, l'automatisation s'installe. Il en
résulte des mutations profondes dans tous les domaines
d'activités. Dans le rayon culturel par exemple, les pratiques ludiques
ont subi une nette progression, les jeux de divertissement traditionnels
tendent à la disparition ; seuls les jeux d'enfants semblent avoir
gardé leur caractère désintéressé, tandis
que les jeux d'adultes se sont scindés en deux catégories
majeures : le sport dont « l'agôn » ou compétition est
la qualité principale et les jeux d'argent rythmés par «
1'aléa », connaissent depuis quelques années un
succès croissant R. CAILLOIS (1958).
Au Cameroun, depuis la libéralisation de
l'économie et la publication du décret no 92/050/PM du 17
février 1992 portant régime des jeux, les métropoles ont
vu sortir de terre une multitude d'opérateurs de jeux d'argent. Ceux-ci,
dont l'offre est variée, semblent au fil du temps se mettre à
hauteur de la demande dans un marché jusqu'alors officiellement couvert
par la fameuse LONACAM, et ce, malgré les pratiques clandestines de jeux
résumées sous le vocable de « ndjambo », même si
la notion désigne aussi une forme officielle de jeux d'argent
prônée par les sociétés de jeux. De la publication
de ce décret à nos jours, il est largement constaté que
les occasions de proposer le jeu sont légion. Dans une ville comme
Yaoundé, l'on serait même tenté avec A. COTTA (1993), de
parler d'un envahissement de la société par le jeu.
C'est-à-dire une société où les individus de tout
âge confondu participent à différents types de jeux, une
société où la propension aux activités ludiques est
perçue sous l'angle de la conséquence directe de la banalisation
des jeux d'argent et de leur acceptation comme des formes de divertissement.
Mieux encore, en s'accordant avec J-P. MARTIGNONI (2000 :195), « les
jeux sont devenus un passe-temps populaire parmi les fonctionnaires, les jeunes
ou les chômeurs ». C'est de cette manière que, ce qui
semblait jusque-là être une
3
réalité relativement stable, s'est
progressivement transformé en questionnements, voire en un
phénomène social.
« Jeux d'argent et changement social à
Yaoundé » est le thème du présent travail.
Élaborée autour du diptyque jeux d'argent et changement social,
cette thématique renvoie à une nouvelle approche sociologique
enrichissante, qui émerge de la quête d'une culture de gain
d'argent sujet à plusieurs facteurs sociaux. Il s'agit d'une sorte de
rénovation dans laquelle les jeux d'argent occupent une place de choix
dans une société qui devient de plus en plus basée sur le
plaisir, l'intérêt et l'immédiateté. Parce qu'en
réalité, les thématiques du ludique au Cameroun d'une
façon générale sont abordées sous l'angle de
l'impact socioculturel des structures de loisir modernes dans les grandes
métropoles. Rarement, les préoccupations de l'invention du
quotidien sont abordées en relation avec les lieux ludiques,
reléguant ainsi au second plan les phénomènes qui
relèvent du « banal » et qui suscitent l'adhésion
massive des individus aux modèles de « pratique de la ville »
M. BERTRAND (1978).
Il est donc question dans ce travail, de parler des logiques
de socialisation des jeux d'argent par les acteurs sociaux de la ville de
Yaoundé, suivant 1'idée qu'il serait possible de prospérer
voire de s'enrichir non pas en travaillant, mais en jouant. Et cela se produit
lorsque les voies habituelles de promotion financière sont plus ou moins
bloquées ou ne sont pas du tout aisées. Les jeux d'argent
deviennent pour ainsi dire un phénomène social à partir
duquel se construit une nouvelle forme d'urbanité au sein des
populations de cette ville, d'autant qu'elles leur accordent une place
importante dans sa dynamique quotidienne.
Cette étude a une ambition limitée. Elle ne
cherche pas à faire la sociologie de « tout ce qui se passe
dans la ville » Y. GRAFMEYER (1994 :5) ; au contraire, elle entend se
focaliser sur le phénomène des jeux d'argent en tant que produit
socioculturel, donnant l'illusion de combler un « manque à gagner
». Et dans le même temps, il est catalyseur du changement social
qui, depuis l'école de Chicago, a toujours été un centre
d'intérêt de la Sociologie urbaine.
4
2. Problème de recherche
Les deux décennies qui ont suivi l'indépendance
du Cameroun ont été marquées par la
prospérité économique. À cette époque, le
pays, « avec ses énormes potentialités naturelles (...),
se situait au 5e rang mondial des producteurs de cacao et au
2e rang des exportateurs de café » C. MALLIAT (1996
:165). Plus encore, au milieu des années 1970, il accède au club
des pays exportateurs de pétrole. C'est l'avènement de la crise
économique au cours des années 1980 qui vient rompre cet
équilibre. En effet, selon ABUI MAMA (1996 :168), « en 1985, le
Cameroun subit une importante perte de recettes à cause de la chute
brutale des coûts des produits de base » sur le marché
international. Les dirigeants camerounais pourtant optimistes au début
de la crise, sont par la suite contraints d'adhérer au programme
d'ajustement structurel proposé par le Fond Monétaire
International. Cependant, les conditionnalités imposées par cette
institution vont entraîner des conséquences néfastes pour
les populations. Entre autres, le désengagement de l'État dans
plusieurs secteurs d'activités, la baisse des salaires dans la fonction
publique, la privatisation de plusieurs sociétés avec pour
corolaire la compression de bon nombre de travailleurs. La dévaluation
du franc CFA et la flambée des prix des produits, même ceux dits
de première nécessité sont venues accentuer la
pauvreté au sein des ménages.
C'est dans ce contexte de récession économique
que les jeux d'argent qui n'existaient que de façon timide vont
proliférer dans les villes camerounaises et plus particulièrement
à Yaoundé. Nous pouvons citer entre autres, la
société Foot pool, qui exerçait dans les paris sportifs
avant l'arrivée en 1994 du PMUC. Cette entreprise qui
précède l'arrivée en 1998 de LOTELEC, va aussitôt
s'imposer comme le principal opérateur des jeux d'argent en raison de sa
puissance financière et managériale2. Si bien que dans
la même période, on assiste à une multiplication des salles
de jeux à l'instar de la chaîne « campéro » et
des bars qui totalisent à la fin de l'année 1994 plus de 1900
machines à sous MOTAZE AKAM (1998 :7). Et à grand renfort de
publicité, les promoteurs de ces différents jeux vont faire
miroiter aux populations les opportunités de gagner beaucoup d'argent en
misant des sommes minables. Faisant face à des conditions de vie de plus
en plus difficiles, de nombreux yaoundéens vont succomber
à ces opérations de charme pour devenir des adeptes des jeux
d'argent.
2 Jeune Afrique., 2015, Les nouveaux maîtres
du jeu, 56e année, no 2862 du 15 au 21
novembre, p.p. 24-33.
5
Partant, le problème qui émerge de la
présente étude relève du sens attribué à ces
jeux par les acteurs sociaux de la ville de Yaoundé, en tenant compte du
fait que leurs pratiques ludiques peuvent être influencées par
plusieurs variables sociales qui s'interprètent. Il s'agit notamment de
celles qui leur attribuent l'éclosion à une certaine chance,
à une distraction, ou encore, de celles qui font appel à des
motivations plus profondes comme celles qui animent les naïfs, les
désespérés et les paresseux en quête d'argent. Tout
au moins, il est question d'interroger l'émergence d'une nouvelle
civilisation, d'un nouvel itinéraire qui, de plus en plus, semble
être significatif de promotion financière chez les populations
urbaines à travers un phénomène qui fait l'objet d'une
étrange actualité dans la ville de Yaoundé.
3. Problématique
Le 11 novembre 1993, l'État du Cameroun a signé
un protocole d'accord avec la société Pari Mutuel Urbain
Camerounais. Ce texte était relatif au projet d'installation d'un
réseau de collecte des paris sur les courses de chevaux sur l'ensemble
du territoire national. Suite à ce contrat, le PMUC est arrivé au
pays le 27 janvier 1994, quinze jours seulement après la
dévaluation du franc CFA. Les responsables de cette entreprise
étaient alors conscients du climat économique camerounais.
Décrivant ce contexte de morosité, le Directeur
Général du PMUC de l'époque déclarait lors de la
réunion du 18 Mai 1996 avec les délégués du
personnel que « le PMUC s'est installé au Cameroun dans un
contexte de crise économique aigue ». Face à une
population éprouvant de plus en plus des difficultés à
gagner la vie par les créneaux ordinaires du travail, ces jeux vont donc
apparaître comme un moyen de spéculations boursières et
partant, d'amélioration des conditions de vie des individus en faisant
miroiter le gain facile.
Outre les paris licites proposés par le PMUC et
d'autres opérateurs, on observe paradoxalement un détournement de
toutes sortes de jeux dans les quartiers populaires : le bonneteau ou «
three cards », les dés, le damier, le Ludo etc., sont à leur
tour érigés en des activités lucratives auxquelles les uns
et les autres participent au point de ne plus se contrôler. Ils y
consacrent temps et argent. Et pour mieux les accrocher, les promoteurs de ces
jeux entretiennent l'illusion qui fait qu'avec la médiatisation des
gains de quelques millions décrochés par certains, chaque joueur
garde l'espoir que son tour arrivera un jour. Cette espérance de gain
les incite alors à participer régulièrement à ces
jeux et par là, à augmenter les sommes misées. Un
phénomène qui n'est pas passé inaperçu à
certains arbitres des faits sociaux.
6
P. NDEDI PENDA, dans « L'ami du peuple », livraison
no 001 du 8 octobre 1991, titrait dans sa une : interdits en 1978
par Ahidjo, la mafia revient au galop ! L'auteur écrit : «
Selon les informations publiées par des confrères de « la
lettre du continent », no 146 du 27 août 1991, les jeux
de hasard interdits par Ahidjo en 1978 sont de retour ! Aujourd'hui, le milieu
des gangsters est à nos portes et notre jeunesse sacrifiée
à l'autel des sous ». D'après ce quotidien, cette
interdiction visait entre autres à protéger la jeunesse de la
drogue et de la perversion qui accompagnent souvent la pratique de ces jeux. En
revanche, si les jeux d'argent se bâtissent une image d'attraction des
acteurs qui partiraient de l'extrême pauvreté à la plus
grande richesse ostentatoire, « on sait désormais que cette
forme de jeux ne vise qu'à plumer davantage les camerounais »
selon J.P. ONANA (2003 :3).
Cette observation est reprise par l'hebdomadaire « Aurore
Plus » dans un article paru le 31 mars 2004, où en une de ce
journal, on peut lire : Jeux de hasard, les escrocs ont envahi le Cameroun. Le
journal poursuit en affirmant que « Lorsque les camerounais jouent
pour perdre, les autorités ne contrôlent plus rien. Les escrocs
notoires ont envahi la scène pour dépouiller davantage les
camerounais ». Autant dire que, si ces jeux sont des lieux où
l'on s'appauvrit parce que ça brasse beaucoup d'argent, ils apparaissent
à V. NGA NDONGO, dans un entretien accordé au journal «
Cameroon Tribune » paru le 27 août 2003, comme :
Des déviances, des pratiques marginales, occultes
qui sont le fait d'initiation d'individus aux comportements douteux dans la
société ; certains sont des lieux de blanchiment de l'argent
sale, d'autres participent de l'exploitation de cette mentalité
primitive résiduelle. V. NGA NDONGO (2003 : 18).
En réalité, nul ne saurait aujourd'hui douter du
fait que la frénésie du jeu s'est emparée des camerounais.
Ces derniers seraient prêts à miser tout à la vue de menus
gains toujours incertains qu'on leur fait miroiter. C'est ainsi que les
retombées de ces mises englouties au jeu, vont d'abord se ressentir au
sein de leurs familles respectives : on assiste çà et là,
à quelques ruptures dans les ménages, on a droit à
quelques procès pour dettes impayées, on s'endette un peu plus,
mais on garde l'espoir qu'au prochain tour, on aura bien sa chance. J.P. ONANA
(idem), ajoute qu'à travers les jeux d'argent :
3 Lire ; V. NGA NDONGO, Violence,
délinquance et insécurité à
Yaoundé, (information générale), rapport
d'étude, Yaoundé, 2000, p.7.
7
Des fortunes ont fondu et des chefs de famille
méchamment mordus par le virus du jeu, ont tout sacrifié pour
l'illusion de la fortune. Des ménages se sont brisés et des
familles disloquées du fait des paris qui font oublier jusqu'à la
responsabilité du chef de famille.
Abondant dans le même sens, J.L. NDJOU'OU AKONO (1999
:134), va plus loin dans ses analyses. Pour ce chercheur, depuis que les jeux
d'argent prolifèrent dans nos villes, « certains camerounais
ont baissé les bras, se sont exclus du chantier de la construction
nationale ». Une réalité qui laisse percevoir à
quel point ces formes de pratiques ludiques traduisent l'émergence d'un
relent de crédulité, de défaitisme et de paresse à
l'endroit de ceux qui s'y adonnent.
Toutes ces constatations alarmistes qui présentent les
jeux d'argent comme une pratique « dangereuse », loin de les
discréditer, émettent des réserves quant aux
dérives qu'ils pourraient engendrer sur le plan social. Cette
appréhension a d'ailleurs fait l'objet de controverses entre les
députés camerounais lors de l'amendement de l'article 44 du
projet de loi de 2015 intitulé : « De la contribution du secteur
des jeux à la solidarité et à l'action sanitaire et
sociale ». L'hebdomadaire « La Nouvelle Expression » du 1er
juillet 2015 rapporte que la loi en question fut qualifiée de « loi
immorale » par une partie des députés. Celle-ci leur a paru
imprécise, notamment en ce qui concerne la protection des mineurs, mais
elle a été également vue comme un moyen de promotion de la
feymania3. Ces observations nous situent donc au coeur de ce qui
fonde la préoccupation de ce travail à savoir ; les
conséquences qu'auraient le temps et l'argent que les uns et les autres
consacrent à ces jeux.
Si l'analyse des discours sur les jeux d'argent atteste qu'au
Cameroun, cette question reste un sujet épineux qui mérite
d'être étudié sous ses formes les plus variées, elle
ouvre ainsi la voie à plusieurs interrogations. En effet, le laxisme
dont font preuve les pouvoirs publics en matière d'encadrement des
pratiques de jeux d'argent ne rend-t-il pas l'État complice des
coûts sociaux conséquents de la prolifération de ces formes
de « loisirs » ? La société camerounaise, minée
par les problèmes de sous-emploi ne contribue-t-elle pas au
8
renforcement de la vulnérabilité des individus
au « ndjambo » ? Quelle facture sociale la pratique de ces jeux
impute-t-elle à la société urbaine à Yaoundé
?
Après avoir construit la problématique, il
revient de poser un certain nombre de questions qui orienteront la recherche.
Il s'agit de la question principale et des questions de recherche.
4. Questions de recherche
La construction d'un objet d'étude passe
nécessairement par la conception d'un ensemble de questionnements. Point
de départ de l'enquête, ces questions sont corrélées
à des hypothèses qui participent à la délimitation
du champ d'analyse.
4.1. Question principale
Pour M. BEAUD (1996), une question principale est une question
qui sert de fil conducteur pour le chercheur. Elle doit être
précise, cruciale et centrale par rapport au thème choisi. Cette
question vise non seulement à décrire le phénomène
à étudier, mais aussi à le faire comprendre. Dans le cadre
de la présente étude, la question principale est la suivante :
Quels sont les nouveaux comportements induis par la
prolifération des jeux d'argent à Yaoundé ?
De cette question principale, découlent trois questions de
recherche.
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