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Le geste de sauvegarde des objets numériques: L'éditorialisation de soi à  l'épreuve des réseaux

( Télécharger le fichier original )
par Francois Pelissolo
CELSA - Master 2 Recherche 2018
  

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D.3.d. - Les solutions artisanales de sauvegarde

Lors de nos entretiens et de la consultation des questionnaires, il semble que le copier - coller manuel de certains messages privés soit une procédure assez courante chez les utilisateurs accordant une importance à leurs conversations. Cette procédure impose d'une part une sélection des messages à conserver, d'autre part un geste assez complexe en termes de copier-coller (la plage de sélection des messages est en effet plutôt difficile à « attraper » à la souris dès qu'elle dépasse une plage), et enfin de ne pas trop tarder à le faire car les vieux messages sont souvent difficiles à retrouver, voire très longs s'ils ont été recouverts par de nombreux messages suivants.

Enfin le résultat obtenu (par exemple dans le cas d'une copie dans Word) est assez pauvre, aussi bien en termes de multimédias (perte de l'essentiel des images, pas d'aperçu des liens) mais aussi de lisibilité, depuis qu'une modification majeure de Messenger en février 2017 a rendu la présentation des MP nettement plus succincte que la version précédente (par exemple pour l'affichage des dates et heures).

Néanmoins, dans la mesure où le même changement de version de février 20173 a rendu la recherche dans les MP extrêmement peu fiable (alors que la version précédente était sans reproche), la sauvegarde manuelle devient plus ou moins incontournable, au moins pour les utilisateurs qui ignorent qu'il existe des solutions dédiées telles que celles présentées dans le chapitre précédent.

C'est ainsi qu'une sauvegarde manuelle de ses MP a pu permettre à l'auteur de ce mémoire de retrouver la trace d'une copie de déclaration d'impôts qu'il n'avait a priori aucun moyen d'espérer retrouver autrement.

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3 En 2018, cet aspect a été notablement amélioré

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D.3.e. - Bilan sur le geste de sauvegarde sous Facebook

[IMPORTANT : ce chapitre a été rédigé en 2017. Suite au scandale de Cambridge Analytica, début 2018, l'outil de sauvegarde de Facebook a été considérablement amélioré, aussi bien sur le plan des fonctionnalités que de l'ergonomie. Il reste qu'il ne traite toujours pas les groupes et que les outils « complémentaires » restent supérieurs pour la sauvegarde des MP]

Le cas de Facebook et de Messenger est une nouvelle illustration des tactiques de bricolage/braconnage décrites par Michel de Certeau dans son étude des interactions entre l'individu « faible » et les institutions (Certeau, 1990). Là où Facebook tente de rassurer sur sa toute-puissance en conservant à notre place une part de notre histoire personnelle sur ses serveurs centralisés sur le Cloud - et à la condition par exemple d'un respect strict des règles d'emploi, pourtant à géométrie variable, de l'application - nombre de ses utilisateurs, pas dupes du risque qu'ils courent à tout moment d'une perte de compte (sur dénonciation pour choix d'une image non conforme aux bonnes moeurs ou d'un pseudo « illégitime »), optent pour leur propre dispositif de sauvegarde artisanal. Cela, au prix d'un temps passé à exécuter des gestes peu pratiques, mais avec la garantie que leurs souvenirs sont bien « chez eux », à la manière de ces petites boites cadenassées où les jeunes gens rangeaient leurs carnets intimes. Le bricolage a pourtant ses limites : nous n'avons pas trouvé à ce jour de moyen simple de sauvegarder les contenus des groupes Facebook. Ce qui rend par exemple l'outil inadapté à la création d'un réseau de partage de connaissances - malgré l'existence de travaux de recherche sur le sujet (Phosaard & Wiriyapinit, 2011) - car il semble peu raisonnable d'investir, ne serait-ce que du temps, dans un outil de KM qui ne dispose pas de solution fiable de sauvegarde de ses contenus.

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D.4. - Essai des dispositifs décrits en entretiens D.4.a. - Sauvegarde numérique de documents papiers

La sauvegarde numérique de documents papier peut constituer en un simple scan (lecture optique) ou en l'enchaînement d'un scan et d'une reconnaissance de caractères (OCR : reconnaissance optique de caractères) permettant de les transformer en un document textuel, donc accessible à une indexation.

Ce besoin étant fréquent pour un étudiant-chercheur - en particulier concernant des ouvrages disponibles uniquement au format papier - nous avons jugé utile pour nos éventuels lecteurs d'en détailler le mode opératoire ainsi que les éventuelles astuces et limites techniques inhérentes.

Le point de départ de l'analyse des dispositifs a été l'entretien avec Emma, puis des échanges téléphoniques pour en approfondir certains points. Elle a décrit les dispositifs suivants :

- Evernote (payant, sur PC et smartphone Android) - Scanbot (payant, sur smartphone Android)

- Acrobat DC Pro (payant, sur PC)

Nos propres tentatives d'appropriation des gestes décrits par Emma n'ayant pas été complètement satisfaisants, nous avons complété ce corpus de dispositifs par les deux outils suivants :

- ABBYY FineReader 14 (payant, sur PC, par recherche d'un outil d'OCR « haut de gamme » sur Google)

- Google Docs (gratuit, sur PC et navigateur Chrome, choisi par recommandation d'une des personnes ayant répondu au questionnaire)

Chacun de ces outils logiciels a été essayé dans le contexte suivant :

- Ordinateur portable PC sous système Windows 10 Professionnel

- Scanner de bureau à plat Canon CanoScan 4400F (modèle de 2008), format A4

- Téléphone Samsung Galaxy Note 3, système Android 5.0

- Photocopieuse de bureau Xerox WorkCentre 7120 avec mode scanner à chargeur de page

Même si les personnes interrogées utilisaient souvent du matériel Apple (iphone en particulier), il y a peu d'écart dans les procédures suivant la marque du matériel. Nous avons noté que les utilisateurs d'iphone semblaient plus à l'aise pour photographier des pages de texte, mais n'avons pas cherché à en déterminer ni les raisons ni l'éventuelle subjectivité de cette appréciation.

Le premier point qu'a révélé l'étude de ces dispositifs est la grande multiplicité des modes

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opératoires possibles avec ces outils. L'étude s'est donc limitée à l'appropriation des procédures et des gestes décrits par les personnes interviewées, sauf pour ABBYY dont l'essai s'est fait par tâtonnements.

Le besoin principal d'Emma était de numériser et d'indexer ses factures, mais il s'est avéré que son mode opératoire convenait à d'autres besoins, comme celui d'un chercheur en phase de collecte de documentation. Même si in fine, la solution technique qui s'est avérée de loin la meilleure (Google Docs) est celle qui nous a été suggérée par une autre personne, le principe général est le même avec les 5 dispositifs étudiés :

1. Scan du document papier (par photo numérique ou scanner dédié) vers un format image

2. Mise en forme éventuelle du fichier image

3. Reconnaissance du texte de l'image (OCR)

4. Correction manuelle des erreurs et remise en forme du texte

Scan du document papier

C'est l'étape du processus de numérisation la plus dépendante de l'aspect gestuel. Avec un scanner à plat, un livre posé à l'envers peut avoir tendance à se redresser.

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Il devient donc nécessaire d'appuyer plus ou moins fortement sur le capot du scanner, afin « d'aplatir » le livre - sauf s'il s'agit d'un ouvrage de bibliothèque, pour lequel un tel aplatissement est le plus souvent interdit.

L'autre problème dans le cas des scanners à plat est celui des formats de papier. Les formats A4 et A5 sont idéaux pour un scanner mais tous les autres formats peuvent occasionner des pertes de temps, surtout dans le cas de journaux de format supérieur à A4.

La photocopieuse de bureau à fonction scanner avec chargeur de pages est idéale pour reproduire des pages indépendantes et sans aspérités (agrafe, etc...), par exemple des piles de factures ou des documents imprimés, mais perd presque tout intérêt pour des pages assemblées (revue ou livre). Pire encore, la reconnaissance automatique de format de papier de ce type de machine peut s'avérer un piège pour l'utilisateur novice. Enfin un scanner dédié à Evernote a été étudié (Fujitsu ScanSnap Evernote Edition, photo ci-dessous) sur papier (Branco, 2014). Son avantage est un mode « chargeur » (frontal), mais son prix élevé et le fait qu'Emma - qui l'a acheté - ait dit ne plus s'en servir l'a exclu de l'étude pratique.

L'intérêt de cet appareil semble finalement être de permettre au fabricant d'afficher une promesse marketing alléchante, celle de « tout numériser » sans effort :

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Détails sur la procédure d'OCR avec Google Docs

- Régler le scanner en .jpg à 300 dpi : la qualité est suffisante et Google Docs peut refuser d'importer les documents trop gros (poids d'une page : 2.5 Mo à 300 dpi, 10 Mo à 600 dpi)

- Faire glisser le .jpg de l'ordinateur vers le dossier cible de Google Drive

- Sous Google Drive, cliquer droit sur le .jpg et faire « ouvrir avec Google Doc ». La conversion de l'image en texte prend quelques secondes

- Les livres format A5 peuvent être lus sans erreurs par groupes de 2 pages simultanément. Il faut juste utiliser un éditeur comme Paint pour faire pivoter la page dans le bon sens, car la fonction « Pivoter » de Windows donne un résultat non utilisable par Google Docs. Des erreurs peuvent se produire dans le cas de pages « composites » (images ou tableaux). Si c'est le cas, appliquer l'OCR séparément sur chacune des 2 pages fonctionne mieux.

- Dans le cas de tableaux, il est recommandé d'exporter le résultat comme du « texte brut » et de le repositionner dans un tableau Word. L'export texte brut a l'avantage de permettre un copier-coller simultané de plusieurs lignes de texte d'une même colonne.

Un bon point est que même une page scannée légèrement de travers semble être lue correctement

par l'OCR de Google Docs.

Scanner vs. smartphone ?

Suite au questionnaire et aux échanges avec différentes personnes contactées, nous avons pu constater qu'il y avait deux écoles en matière de scan :

- Les adeptes du scanner « à plat »

- Ceux qui utilisent leur smartphone en mode « appareil photo »

Il semble que la seconde catégorie soit très majoritairement composée d'utilisateurs d'iphones. Nos propres essais sur un Samsung de 2015 ont été peu concluants. La prise de photo avec une seule main s'avère compliquée, car l'autre main sert souvent à empêcher le livre de se refermer et à tenter de le maintenir à plat. Les conseils de plusieurs utilisateurs d'iphone ont été testés, à savoir :

- Utiliser le flash pour améliorer l'éclairage

- Placer le téléphone à la verticale du document pour limiter les effets trapézoïdaux

- Mettre le téléphone « tête en bas » pour que le bouton de prise de photo se trouve en haut et donc accessible par l'index, le pouce et le majeur étant utilisés pour maintenir le smartphone.

Malgré toutes ces tentatives, la qualité du .jpg obtenu reste de loin inférieure à celle obtenue

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avec un scanner à plat.

Nos essais suivants nous ont permis de constater que la qualité de l'appareil photo intégré au smartphone était déterminante pour l'utilisation possible comme scanner. Les derniers modèles « haut de gamme » disponibles en 2018 répondent à ce besoin, alors que les modèles de « génération » 2015 semblent trop peu performants, à la fois en termes de précision et de luminosité.

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"Et il n'est rien de plus beau que l'instant qui précède le voyage, l'instant ou l'horizon de demain vient nous rendre visite et nous dire ses promesses"   Milan Kundera