Annexe 3 : Le rôle du « justu » et
glissement vers le « do »
On assiste au cours de l'aire Meiji à une
transformation des pratiques101 dites jutsu,
travaillées sur les champs de batailles par les bushi issu des milieux
sociaux élevés, vers le « do », qui est une
activité a visée morale constituée d'un ensemble de
valeurs guidant les pratiquants. En 1878, le Taïso Denshujô qui est
le « centre d'enseignement de la gymnastique » illustre
cette volonté politique du Japon d'établir une activité
physique permettant le soutien de la croissance du pays. Dans ce contexte
positif, les pratiques de combat à visée éducative tels
que le judo seront reconnues comme d'intérêt pour la nation. Mais
c'est la montée du nationalisme à partir des années 30 au
japon qui favorisera la diffusion et l'implantation des pratiques corporelles
dans les programmes scolaires.
Anthony METTLER 97
101 Brousse, M. (2005) Les racines du judo
français, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux,
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 98
Annexe 4 : La montée du nationalisme au Japon
dans les années 30
C'est grâce au nouveau système éducatif
que l'Etat aura une ouverture totale sur la jeunesse de cette période et
permet de transmettre le nationalisme intense des classes supérieures
à l'ensemble de la population. Dès les premières
décennies de l'Aire Meiji (1868-1912), l'éducation physique est
devenue obligatoire, le corps et son éducation sont au coeur des
politiques visant à développer les sentiments d'identités
nationales et de loyauté. Ces valeurs sont centrales dans
l'idéologie de l'Etat-Famille autoritaire102. Depuis la fin
des années 1880, le programme des cycles d'éducation
supérieure comprend des exercices de gymnastique militaire qui se
pratiquent avec des exercices de marche et des combats simulés. En 1917,
le Comité spécial sur l'éducation recommande au Parlement
que tous les étudiants au dessus du secondaire soient formés pour
devenir des soldats obéissants, durs de corps et d'esprit, faisant
preuve d'esprit martial et d'un patriotisme sans faille. Alors que
débute un conflit entre les éducateurs libéraux et le
ministère des Armées et qui aboutira à protéger les
jeunes classes d'âges et les étudiantes de ses exigences, ceci
jusque dans les années 1920. C'est également ce genre de conflit
qui va retarder l'introduction des «arts martiaux» dans les
programmes scolaires nationaux. Les débats entre éducateurs et
bureaucrates portent sur la pertinence des «arts martiaux»
dans l'éducation des jeunes enfants en raison des préoccupations
d'ordre physiologiques quant à leurs effets sur les jeunes corps.
Dès lors, le classique Bujutsu ainsi que les variantes modernes de la
tradition et de la culture physique sont considérés comme des
instruments d'endoctrinement performant en vertu de leur insistance sur
l'obéissance, l'endurance et l'autodiscipline.
102 Manzenreiter, W. (2001) Moderne korper, moderne ope.
Sport und internationalstaat in Japan und osterreich 1850-1900, Minikomi -
informationen des akademischen arbeitskreis Japan 2
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Par ailleurs, la pratique du Budô permet de nouer des
liens immédiats avec la continuité historique du Japon
féodal comme berceau de l'éthique du guerrier et de ses
glorieuses traditions. L'école primaire avait réussi à
persuader une population paysanne qui « pendant presque trois
siècles n'avait pas eu le droit de porter des armes, qu'elle
appartenait, elle aussi à une race de guerriers » et à
lui « inoculer la gloire des grandes traditions militaires du Japon
ainsi que l'idéal d'une mort sur le champ de bataille au service de
l'empereur »103. C'est au cours des années 30 que
l'influence l'emporte sur les conceptions plus libérales et que les
«arts martiaux » sont inclus dans les programmes scolaires.
En 1931, l'année de l'invasion de la Mandchourie, le kendo et le judo
deviennent obligatoires pour les étudiants du second degrès, puis
en 1936, pour ceux des degrès supérieurs de l'école
primaire. A cela, il faut préciser qu'à partir de 1939 une
nouvelle activité intitulée « défense nationale
» est ajoutée au programme alors que les sports occidentaux
sont de plus en plus marginalisés voire réprimés.
Dès 1940, le ministère de l'Education n'autorise les
étudiants à pratiquer qu'une à deux heures de sports de
compétitions par semaine et les engagent plutôt à pratiquer
et s'investir dans les « arts martiaux ».
Anthony METTLER 99
103 Reischauer, E. (1970) Japan. The story of a nation,
Knopf, New York
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
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