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Les pratiquants de karaté en France: de l'«artiste martial » à  l'« égaré »

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par Anthony Mettler
UBO Brest - Master 2 Staps 2009
  

Disponible en mode multipage

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    Université de Bretagne Occidentale
    UFR Sport et Education Physique - Brest

    Les pratiquants de karaté en France

    de l'«artiste martial » à l'« égaré ».

    par Anthony Mettler,

    tudiant en 2er année de Master " Sport et Sciences Sociales, Administration, Territoire, Intégration "

    Spécialité Recherche

    2009

    Directeur de mémoire : Julien FUCHS

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Les pratiquants de karaté en France

    de l'«artiste martial » à l'« égaré ».

    par Anthony Mettler,

    tudiant en 2er année de Master " Sport et Sciences Sociales, Administration, Territoire, Intégration "

    Anthony METTLER 2

    Directeur de mémoire : Julien FUCHS

    2009

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 3

    "La grandeur d'un homme réside dans sa capacité à corriger ses erreurs et à se renouveler continuellement."

    Wang Yang-Ming

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    Anthony METTLER 4

    Remerciements

    Tout d'abord, je tiens à remercier le Ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative d'avoir financé ce projet. Je remercie également le président de Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées, Mr Francis Didier, ainsi que le Directeur Technique National, Mr Dominique Charré, pour leur confiance et pour m'avoir donné la possibilité d'accéder à des informations sans lesquelles il m'aurait été impossible de réaliser ce projet. Enfin, je remercie l'Université de Bretagne Occidentale ainsi que le laboratoire Atelier de Recherche Sociologique pour leur contribution.

    Plus personnellement, je tiens à remercie les personnes qui ont contribuées au bon déroulement de cette étude comme Samuel Julhes, pour ses compétences techniques, Laurie Le Séhan, pour son aide précieuse dans des moments où parfois deux mains ne suffisent plus pour avancer, mon directeur de recherche, Julien Fuchs, pour ses remarques et son oeil expert, et enfin d'autres comme Thierry Michot, Olivier Lemonon, Antoine Marssac, Fabien Le Saux pour les échanges et les conseils qui m'ont permis de me construire tel que je suis aujourd'hui.

    Je ne peux oublier l'ensemble des karatéka que j'ai rencontré, interrogé, à travers la France sur les tatamis, dans les compétitions ou dans des situations plus particulières.

    Merci à tous les « gros » : Jean Pierre, Jean Mimi, Régis, Mick, Marjo, Corinne et bien

    d'autres pour ses échanges au quotidien, pour m'avoir inspiré sans qu'ils ne s'en aperçoivent.

    Enfin, merci à ma famille d'avoir suivi mes travaux sans vraiment comprendre les

    tenants et les aboutissants, plus particulièrement, mon père qui m'a transmit la fibre « recherche ».

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Sommaire

    I.

    Anthony METTLER 5

    LE KARATE EN FRANCE AUJOURD'HUI : UNE ACTIVITE AUX MULTIPLES FACETTES 8

    II. COMPRENDRE LES REPRESENTATIONS DES PRATIQUANTS : UNE PRATIQUE UNIFIEE ? 21

    III. ETUDE DES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU KARATE EN FRANCE : 29

    IV. METHODOLOGIE DE L'ANALYSE DE LA POPULATION DE KARATEKA : 32

    V. CARACTERISTIQUES ET ELEMENTS STRUCTURANTS DE LA POPULATION DE PRATIQUANTS : 40

    VI. LES OPINIONS ET LES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU KARATE : 59

    VII. DE L'«ARTISTE MARTIAL » A L'« EGARE » : 82

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 6

    Introduction :

    La Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées développe depuis quelques années une politique de recherche et de développement dans différents domaines scientifiques comme la biomécanique. En effet, le financement d'un doctorant comme chargé de mission de recherche auprès la fédération a permis de mettre au point les normes concernant les protections pied/poing pour la compétition combat. Ce travail a eu pour résultat de valider les normes de sécurité au niveau de la fédération mondiale de karaté (World Karate Federation). Dans cet élan, nous avons répondu à un « appel à projet de recherche et de développement », financé par le ministère des sports, s'inscrivant dans le programme « Sport » (la loi des finances).

    Ce programme se décline en quatre actions : le développement du sport pour le plus grand nombre, le développement du sport de haut niveau, la prévention par le sport et protection des sportifs et la promotion des métiers du sport. Ce type de financement soutient des actions de recherche et de développement proposées par des fédérations sportives, des établissements du ministère, des laboratoires de recherche et des associations agrées. Dès lors, le projet que nous avons déposé s'inscrit dans la rubrique «connaissance des phénomènes sportifs et de leurs évolutions ».

    En octobre 2008, nous avons signé une convention tripartite valable un an entre le Ministère de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative (financeur principal), la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées (FFKDA-commanditaire) et l'Université de Bretagne Occidentale en vue de la réalisation d'une étude de nature sociologique devant aboutir à la réalisation d'une typologie approfondie sur les pratiquants de karaté en France.

    L'intérêt de ce type d'étude pour la fédération, outre le fait de mieux appréhender l'espace des pratiquants, est surtout de connaître finement le sens que les pratiquants donnent à leur discipline, ou encore les attentes de ces derniers. Ainsi, elle entend par exemple mieux saisir les raisons qui poussent le public des plus de 18 ans à pratiquer l'une ou l'autre forme de karaté. Aussi, connaître les caractéristiques sociales des pratiquants ou bien les représentations qu'ils ont du karaté contribuera à perfectionner la politique sportive de la fédération.

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    Tout d'abord, nous chercherons à montrer que la pratique actuelle du karaté en France est une activité aux multiples facettes. Nous retracerons le parcours de cette pratique du Japon, plus précisément d'Okinawa, vers la France en portant notre regard sur les éléments ayant déterminés le karaté tel que nous le connaissons aujourd'hui. Pour ce faire, nous présenterons les différents processus entrant en jeu comme le processus de « sportivisation »1. De plus, nous exposerons les conséquences de la diversification du karaté sur le grade, la compétition ou encore sur l'émergence de nouvelles modalités de pratique en traitant le discours diffusé par la Fédération Française de Karaté et Discipline Associées. Ensuite, nous présenterons le cadre théorique dans lequel nous nous s'inscrivons. Ainsi, nous expliquerons comment l'analyse des représentations nous permet d'élaborer des profils-type.

    La suite de l'étude permettra d'analyser les opinions sur la pratique par une méthodologie constituée d'un questionnaire mit en ligne sur internet, s'adressant à une population représentative, et de plusieurs entretiens semi-directifs. Nous préciserons la démarche scientifique que nous avons utilisé afin d'étudier les caractéristiques des karatéka aboutissant aux profils-type de pratiquants.

    Ensuite, nous traiterons les questions d'opinons afin d'identifier les thèmes marquants une opposition ou contraire un consensus dans les représentations des pratiquants. Cette analyse permettra également de prendre connaissance et de hiérarchiser les différentes orientations de la pratique. Nous chercherons également les raisons qui conditionnent les résultats. L'objectif étant de valider ou d'invalider le fait que la pratique du karaté est socialement diversifiée, de comprendre le sens que les pratiquants donnent à leur pratique et d'élaborer une typologie des karatéka.

    Nous conclurons ce travail de recherche en exposant les éléments caractérisant cette population de karatéka, nous apporterons également des éléments de réflexion quant au financement de cette étude par l'Etat, enfin, nous présenterons les ouvertures probables pour la suite.

    Defrance, J. (1995) Sociologie du sport, La découverte, Paris

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

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    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    I. Le karaté en France aujourd'hui : une activité aux multiples facettes

    1. Historique :

    L'île d'Okinawa2 est le berceau du Karaté do. Cependant, cette pratique a connu beaucoup de transformations techniques tout au long de son histoire. Yves Cadot3 a mis en avant, par traduction de textes japonais, que le Karaté jutsu d'Okinawa a été créé à partir d'une lutte traditionnelle de cette île d'où est issu Gichin Funakoshi (1868-1957), instituteur issu de la petite noblesse Okinawaïenne. Lors d'un entretien pour la revue Officiel Karaté4, Keneï Mabuni rappelle qu'avant cette codification, on ne parlait pas de karaté mais de « l'art du te » (art de la main). Cette pratique faisait référence aux connaissances des techniques de la guerre et de la stratégie de combat. Il précise également que ces connaissances étaient rares et précieuses, ce qui procurait à son détenteur un respect et une réputation sans bornes.

    D'après Ludovic jeanne5, le Karaté n'est pas une technique japonaise mais plutôt le produit des échanges techniques de l'archipel des Ryükyü. Cet archipel fût annexé par le japon au XVIe siècle. Son île principale, Okinawa, fût le lieu du développement de techniques de combat propre à l'esprit de l'archipel, mélangeant diverses influences chinoises et japonaises. Le changement successif de l'appellation de cette forme de combat serait due à la volonté d'affirmer cette technique du corps6 comme japonaise. Ces influences ont permis de développer des « styles » ou « écoles » qui peuvent se regrouper sous trois formes de travail : Shuri te, Naha te et Tomari te. Plus simplement, les trois catégories de travail se sont développées en fonction de localisation géographique car ces trois catégories prennent comme origine le nom des trois villes les plus importantes de l'époque. Ces formes ont comme particularités d'avoir intégré des éléments techniques issues d'autres pratiques. Par exemple, la ville portuaire de Naha aura développé une pratique du karaté contenant des éléments de boxe chinoise avec un travail des hanches vertical ayant comme objectif de développer l'énergie interne par des exercices de respiration. Au contraire, la forme Shuri aura tendance à développer un travail des hanches horizontal à la recherche d'une technique

    2 Cf. annexe 1

    3 Cadot, Y. (2007) OfficielKaraté n°22

    4 Interview de Keneï Mabuni, (2007) OfficielKaraté n°24

    5 Jeanne, L. (2000) La pratique du karaté en France et au Japon (Okinawa). Identités, idéologies et cultures, in : Fauches S., Callede JP., Gay-Lescot J-L., Laplagne J-P, Sport et identités

    6 Mauss, M. (1950) Notions de techniques du corps, in Mauss, M. Sociologie et anthropologie, PUF, Paris

    Anthony METTLEK 9

    plus dure. Aujourd'hui, il existe un nombre conséquent de styles de karaté tels que le Shotokan, le Wado-ryu, le Shito-ryu, le Goju-ryu ou encore le Kyokushin-kaï.

    Gichin Funakoshi a vite prit conscience qu'en raison du contexte culturel et social il était nécessaire de modifier l'image du « To-dé » d'Okinawa pour faciliter son intégration dans la société japonaise. Dès lors « Kara-Té » ne signifiait plus « main de Chine » mais « main vide » c'est-à-dire « méthode de combat à main nue ». De plus, il ajouta le suffixe de « Do », la voie, afin de rattacher le Karaté à la grande famille des arts martiaux japonais dont les noms se terminaient tous par « Do » : Judo, l'Aïkido, Kendo. Ce passage du « To-Dé » au « Karaté-Do » permettait à la fois d'effacer la référence à la Chine, adversaire historique de l'empire japonais, et de rattacher cette pratique à une référence culturelle dominante à l'époque car l'idéogramme «Kara» (vide) correspondait à une notion centrale du bouddhisme japonais (Zen). Ce changement de nom fut officialisé en 1935 lorsque Gichin Funakoshi publia un nouveau livre, intitulé « Karaté-do Kyohan » qui eut une assez large audience à l'époque. Dans les mêmes buts Gichin Funakoshi procéda à une modification des noms des Katas, modification qualifiée de « japonisation » par Kenji Tokitsu7.

    Dans un contexte de montée du nationalisme japonais8 (1930), toutes pratiques permettant d'affirmer et de transmettre les valeurs prioritaires, telles que le judo ou le kendo, furent intégrées à l'enseignement dans les lycées publics locaux. En effet, l'idée de « couler les masses dans le moule d'un corps national »9 prime alors au Japon au cours des années 1930. Les institutions modernes de la scolarité obligatoire et de la conscription militaire vont fournir les outils les plus efficaces pour mettre en place un corps national intégrant une très large majorité de la population japonaise. Nous pouvons dire que l'Etat japonais a utilisé le sport et la politique du corps pour mouler ses citoyens en « une masse disciplinée et soumisse »10. Notons que les sports jouèrent un rôle prépondérant pour inculquer discipline et valeurs morales mais restèrent secondaires en ce qui concerne l'endoctrinement nationaliste. De plus, les sports au Japon à cette période étaient au coeur même de la valorisation du

    7 Tokitsu K. (1993) Histoire du Karaté-Do, Editions SEM

    8 Manzenreiter, W. (2007) Sport et politique du corps dans le Japon totalitaire, in Tschudin, JJ. & Hamon, C., La société Japonaise devant la montée du militarisme : culture populaire et contrôle social dans les années 30, Ed. Philippe Picquier, Arles

    9 Op. Cit. Manzenreiter, W

    10 Manzenreiter, W. (2001) Moderne korper, moderne ope. Sport und internationalstaat in Japan und osterreich 1850-1900, Minikomi - informationen des akademischen arbeitskreis Japan 2

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

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    sacrifice sur le champ de bataille inculqués aux citoyens11. L'essor des pratiques martiales, comme le karaté, peut avoir été propulsé par la dynamique des champs sociaux du pouvoir, et serait le résultat des rivalités entre tous les acteurs et agents, athlètes, instructeurs, éducateurs, médias, administrations et autorités, qui avaient un mot à dire dans ce domaine. Ainsi, l'Etat cherche à transformer l'individu en un « corps collectif »12 Toutefois, Wolfram Manzenreiter précise que le sport au Japon a rempli une fonction complémentaire dans la mesure où il ne jouait pas un rôle central. Dès lors, nous pouvons dire que le sport ou les « pratiques martiales » n'étaient pas des instruments permettant la diffusion d'une idéologie « fasciste ». Au contraire, des pratiques telles que le karaté ont pu se développer au sein du système sportif japonais en raison du peu de contrôle de l'Etat sur le monde sportif du fait de son manque d'intérêt. Ce fût le cas pour le karaté jutsu d'Okinawa en 1892 suite à une démonstration devant un commissaire japonais en visite sur Okinawa. En 1900, la pratique est incluse dans les programmes d'éducation physique scolaire et, en 1917, Gichin Funakoshi est invité par Jigoro Kano à présenter sa pratique devant les membres du Dai Nippon Butoku Kaï13. Il s'installe en 1921 à Tokyo afin de divulguer et enseigner le karaté do et plus particulièrement le style Shotokan. C'est en ce sens que l'incorporation non consciente des normes et pratiques véhiculées par l'Etat a contribué au développement les « arts martiaux », plus particulièrement, du karaté.

    L'histoire montre que si Funakoshi n'est pas le « créateur du Karaté » il est en tout cas «l'inventeur du nom Karaté», et qu'il fut à la fois l'un des structurateurs du travail d'intégration scolaire commencé par son maître Itosu et l'initiateur de l'expansion du Karaté dans les universités japonaises. Nous avons vu que l'évolution du karaté jutsu d'Okinawa au karaté do au Japon aura été possible par la « japonisation » de cette art corporel permettant l'intégration progressive du karaté au niveau scolaire et universitaire au Japon14. Dès lors, comment cette pratique « japonisée » a-t-elle pu se développer en France.

    11 Mangan, JA. & Komagome, T. (2000) Militarism, sacrifice and emperor worship : the expandable male body in facist japanese martial culture, in Mangan, JA., Superman supreme. Facist body as political icon - Global facism, Franck Cass, Londres

    12 Op. Cit .Manzenreiter, W.

    13 Fin 1941, toutes les organisations civiles sont insérées dans le nouveau Club sportif du Grand Japon placé sous la présidence du Premier Ministre.

    14 Girodet, P. & Mettler, A. (2009) L'intégration scolaire et universitaire du karaté, Dossier technique et pédagogique Karaté, revue EPS n°336

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    2. Institutionnalisation du karaté en France : processus de diversification

    a) L'appropriation de la culture japonaise par des karatéka occidentaux

    Les pratiques dites « martiales » se sont institutionnalisées progressivement en France dans les années 1950. Au cours de cette migration le karaté a subi différents processus du fait des différences culturelles fondamentales entre les deux pays. En effet, l'orient a subi des influences bouddhistes et confucéennes tandis que l'occident à subit des influences cartésiennes et chrétiennes15. Pour Kim Min Ho16, étudiant ayant fait sa thèse sur les évolutions liées au corps dans un contexte, la particularité du contexte actuel de la société française met en avant deux notions : la volonté d'égalité entre les individus et la démonstration des compétences personnelles sous l'influence des normes sportives basées sur l'excellence individuelle.17

    Plus précisément, il défend l'idée que le développement des pratiques martiales dépend du contexte sociologique, politique, militaire, psychologique et religieux. Il insiste sur le fait que l'influence de la culture occidentale va interagir dans la définition de nos propres finalités. En effet, les pratiquants garderont quelques aspects de la culture d'origine tout en appréhendant la pratique par leur propre culture, il parle de « japonisation » de celle-ci. Précisons que la vision européocentriste18, c'est-à-dire la vision que les occidentaux ont du monde en ayant comme référence l'Europe, a permis de développer les «arts martiaux» en occident plus qu'ils ne le sont dans la culture asiatique, du fait que celle-ci ait un mode de transmission discrète. Le monde occidental des « arts martiaux » aurait perdu le sens de la culture d'origine mais aurait gagné en « pouvoir initiatique ».

    Il est possible d'expliquer les causes sociales d'un tel phénomène par le processus d'acculturation c'est-à-dire « l'ensemble des phénomènes qui résultent d'un contact direct et continu entre des groupes d'individus de cultures différentes et qui entraînent des changements dans les modèles culturaux initiaux de l'un ou des deux groupes »19. Concrètement, le pratiquant de karaté adopte les éléments de la culture japonaise en

    15 Weber, M. (2006) Sociologie de la religion, traduit par Kalinowski, I., Flammarion, Paris

    16 Kim Minho. (1999) L'origine et le développement des arts martiaux, Ed. Espaces et temps du sport, Paris

    17 Il s'agit du « héros olympique » dont parle Pierre de Coubertin, in le journal - Paris 27aout 1896

    18 Charlot, E. Denaud, P. (1999) Les arts martiaux, Que sais-je ?, Paris

    19 Redfield, R., Linton, R. & Herskovits, M. (1936) Memorandum for the Study of Acculturation, American Anthropologist, USA

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    abandonnant partiellement ceux de sa propre culture en raison d'une sélection d'un nombre de traits culturels propres à la société du pays d'accueil, la réinterprétation de ses traits culturels empruntés pour qu'ils puissent s'insérer dans la culture d'origine et enfin l'assimilation des emprunts culturels qui transforme profondément les manières de faire, de penser.

    Dès lors, nous pouvons voir le karaté comme un « objet culturel assimilé puis transformé par une société européenne formant un miroir qui reflète l'évolution de la société qui les accueille » 20. Pour André Terrisse, les efforts de recherche doivent être faits autour des traces culturelles, des examens des lieux de pratiques, milieux, mode de sociabilités soit les mécanismes d'élaboration de transmission. Pour y arriver, il suggère de se pencher sur les produits culturels qui traduisent le regard des Français sur le Japon. En effet, lorsqu'un enseignant fait un cours dans un club ou un dojo, il ne peut transmettre qu'une partie de ce qu'il connaît car il y a une part d'implicite dans la culture de la discipline pratiquée.

    A cela, il faut ajouter les problèmes de traduction liés à la transmission orale, au sens où l'entend Marcel Mauss, c'est-à-dire qu'il est possible de perdre le sens de certaines techniques suite à la traduction de celle-ci par des mots qui n'ont pas réellement la même signification. En ce qui concerne le karaté, les premiers experts japonais arrivés en France n'apprenaient pas forcément le français lors de leur formation dans les universités nippones. Or, la barrière de la langue et de la traduction de certains termes subsiste encore aujourd'hui. Comme l'illustre le problème de la traduction concernant le positionnement de la jambe arrière lors d'un « jun tsuki dachi », position de coup de poing direct, où la jambe avant est en flexion et la jambe arrière doit être « forte » mais pas « tendue » pour autant. Dès lors, un débat a été lancé entre les partisans de la jambe « tendue » et ceux de la jambe « forte ». Cela semble mineur pour un profane mais ce problème de traduction amène à un travail technique très difficile en raison des disponibilités biomécaniques du corps humain. C'est le fondement même de tout une partie de la culture du karaté qui est bouleversée.

    Hormis le souci de traduction, il est également intéressant de constater l'existence de conflits au sein de la pratique. L'exemple du rituel qu'est le salut permet d'illustrer les possibles divergences culturelles. En effet, certaines questions sans réponses laissaient ce rituel, pratiqué en début et fin de chaque cours, à la discrétion des enseignants. La FFKDA a donc décidé d'entamer une réflexion de fond sur ce sujet avec la collaboration d'une

    20 Terrisse, A. (1998) Recherche en sport de combat et arts martiaux : état des lieux, Revue EPS, Paris

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    vingtaine d'experts majoritairement japonais en 2005. L'objectif étant de « proposer aux clubs une forme précise et pertinente »21. Dans cet article sont expliquées les étapes du rituel illustrées par des images, le vocabulaire et enfin une explication de l'esprit et de la symbolique liée au salut. L'intention de la fédération semble être de transmettre une partie de la culture japonaise afin de pallier aux déviances existantes et confirme donc la perte lente et progressive d'une partie de la culture d'origine due à la sportivisation et ainsi qu'à la diversification progressive de la pratique.

    b) Le karaté entre sport et art martial

    Une étude de Ludovic Jeanne22 propose l'idée que l'horizon de pratique du karaté des Français serait un équilibre entre une vision sportive et traditionnelle du karaté. En effet, cet équilibre entre sport et tradition d'une pratique martiale semble exister du fait que le karaté se soit institutionnalisé dans les années 1960, dans un contexte de structuration fort du mouvement sportif autour de nouvelles fédérations. Le processus de « sportivisation », identifié notamment par Jacques Defrance23, s'est vraisemblablement déroulé au sein du karaté sans pour autant affecter l'aspect plus « traditionnel » de la pratique. En diffusant largement un discours mythique sur l'émergence du karaté au Japon, les enseignants français entretiennent l'idée d'une vision exotique de la pratique. Au Japon par contre, le karaté se structure davantage autour de discours axés sur l'aspect martial de la pratique.

    Dès lors, la pratique du karaté se serait développée différemment en fonction de l'orientation des pratiquants et des enseignants. En effet, certains pratiquants recherchent une pratique permettant de se défouler et d'autres orienteront leur pratique dans le sens d'une école de vie. A partir du moment où les enseignants dispensent des cours différents sur le fond et la forme il est possible de pratiquer le karaté comme un sport, au sens le plus commun du terme, ou comme un art martial ancestral. Ainsi, les occidentaux ont accueilli le karaté en France dans les années 1950 avec une vision exotique de la pratique en raison des différences culturelles entre deux pays. La France et le Japon se sont construits sur des modèles internes complètements différents et ces différences ont entraînées des pratiques « culturellement » identiques sur la forme mais différentes sur le fond. Nous avons là deux cultures différentes et pourtant qui enseignent les mêmes contenus, une dualité avec d'un

    21 Charlot, E. (2005) Réflexion sur le salut, Officiel karaté n°15

    22 Op. Cit. Jeanne, L.

    23 Defrance, J. (2006) Sociologie du sport, Collection Repères, la découverte

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    côté la vision orientale avec un travail basé sur l'interne, favorisant la quête personnelle, spirituelle ayant comme code implicite le Budo. De l'autre côté la vision occidentale, basée sur le dépassement de l'autre, où les règles sont écrites avec un but à atteindre dans un esprit élitiste. De plus, l'orientation de la pratique dépend de chaque individu car le pratiquant adaptera son système de valeurs mais également ses attentes à « son » karaté.

    3. Le karaté en France aujourd'hui : les effets de la sportivisation du karaté

    a) Emergence du karaté fédéral

    La ressemblance technique entre la boxe et le karaté aura pour conséquence, en 1954, d'organiser le karaté au sein de la Fédération Française de Boxe Libre et de karaté (FFBLK). Dans un souci de rassemblement des pratiques dites « martiales », la FFBLK adhère en 1960, à la Fédération Française de Judo et Disciplines Associées afin de créer en 1970 l'Union Fédérale de Karaté. Cependant, le regroupement de la quasi-totalité des pratiques « martiales » au sein de la FFJDA créa de fortes tensions internes. En effet, les questions de financement, de délivrance des grades et de formations des professeurs étaient au coeur des conflits entre les représentants du judo et les représentants des disciplines « associées ». Ces oppositions entraîneront au cours des années 1970 et 1980 une conjoncture « anti-institutionnelle »24.

    Suite à des tensions entre les dirigeants de la FFJDA et de l'Union Fédérale de Karaté, l'union fédérale se décompose en 1975. Le ministère décide alors de rendre indépendantes les fédérations ayant un nombre de licences représentatives ; cette décision concerne le karaté et l'Aïkido. En 1977, la Fédération Française de Karaté et Arts Martiaux Affinitaires est déclarée indépendante et en 1987, elle compte 135 000 licenciés. En 2006, la FFKAMA changera de nom pour devenir la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées (FFKDA), afin de redonner une identité plus affirmée aux disciplines qu'elle accueille.

    Tout au long de son histoire, la Fédération Française de Karaté et Disciplines Associées s'est progressivement sportivisée et la pratique, quant à elle, s'est diversifiée. Elle propose actuellement un ensemble de d'actions, aussi, elle touche des publics de pratiquants aussi divers que variées. Ce processus de sportivisation amène aujourd'hui a des usages sociaux très différents en ce qui concerne la pratique elle-même. Nous pouvons dire que ce processus

    24 Clément J.-P., Defrance J. (1987) L'évolution du sport: Structures et Conjoncture in Sport et changement social. Actes des premières journées d'étude de la société Française de sociologie du sport, Maison des sciences de l'homme, Bordeaux

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    s'est engagé en France depuis de nombreuses années en raison d'un cadrage particulier du sport doté par le législateur. En effet, une loi du sport permet de déléguer des pouvoirs aux fédérations qui remplissent une mission de service public. La Fédération Française de karaté et Disciplines Associées25 fait partie de ces fédérations. Au-delà de la simple pratique en club, la fédération a des obligations d'actions de développement imposées par l'Etat que l'on appel les « publics cibles » et englobent le public handicapé ou encore le public féminin. Ainsi, la FFKDA cherche à faire pratiquer le karaté à un grand nombre de personnes et développe alors une multitude de messages. C'est pour cela que nous avons cherché à présenter les différents axes de communication de la FFKDA.

    b) La FFKaraté et DA : une communication aux multiples orientations

    Il nous semble intéressant de présenter les messages que la FFKDA fait passer au travers des médias qu'elle utilise, en particulier son site internet, car il s'agit d'un moyen de communication performant visité par de nombreux pratiquants. En se penchant sur son site internet26 nous cherchons à identifier les différentes orientations, c'est-à-dire la direction que l'individu donne à sa pratique guidée par le sens ainsi que les valeurs structurantes celle-ci, que la FFKDA présente et propose au pratiquant qui souhaiterait faire du karaté. Ainsi, nous avons identifié différents pôles sur lesquelles la FFKDA communique. Tout d'abord, nous relevons une présentation du karaté comme une « pratique pour tous », c'est-à-dire que la FFKDA présente le karaté comme une activité ouverte à tous, englobant alors l'ensemble des orientations possibles comme l'illustre cet extrait :

    « Adaptés à toutes et à tous, le karaté et les disciplines qui l'accompagnent au sein de la fédération offrent aux pratiquants la possibilité de s'épanouir physiquement mais aussi d'adhérer à une «école de vie» chère aux arts martiaux. Les enfants y trouveront une pratique éducative et ludique qui leur permettra de canaliser leur énergie et de construire leur confiance en eux. Les sportifs peuvent s'exprimer au travers de nombreuses compétitions organisées par la F.F.Karaté. Les femmes représentent plus du quart de nos effectifs : bien-être, self-défense, confiance en soi sont parmi les bienfaits d'une pratique régulière. Pour ceux qui souhaitent aborder une pratique traditionnelle des arts martiaux, ils trouveront dans les clubs de la F.F.Karaté des professeurs de haut niveau qui sauront

    25 Elle comptait au mois de mai 2009, 194 819 licenciés répartis dans 3 700 clubs.

    26 www.ffkama.fr : notons que l'adresse du site de la FFKDA a conservé l'ancienne appellation à savoir FFKaraté et Arts Martiaux Affinitaires.

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    répondre à leurs demandes. Que vos aspirations aillent vers une pratique compétitive, traditionnelle, de loisirs ou vers une recherche plus philosophique, vous trouverez les réponses à vos attentes dans la pratique des disciplines martiales de la F.F.Karaté. »

    Parmi l'ensemble des propositions que la FFKDA fait, nous pouvons distinguer, dans

    un premier temps, le karaté comme un « art martial », c'est-à-dire que la FFKDA présente sa pratique comme une voie d'accomplissement de soi autant physique et spirituel :

    « Souvent pratiqué comme une technique guerrière, la pratique des arts martiaux était à son origine tenue secrète. Comme beaucoup de disciplines, l'enseignement du karaté en tant que Budo (voie de la protection) se concrétisa par l'adjonction du suffixe «Do» qui exprimait ainsi qu'il n'était pas qu'une technique guerrière, mais aussi une voie d'épanouissement physique et spirituelle. Dans les disciplines que vous pratiquerez au sein de la F.F.Karaté, c'est vers cette harmonie propre aux arts martiaux que vous irez. »

    Ensuite, la FFKDA présente le karaté comme « une philosophie et un art de vivre »,

    c'est-à-dire qu'elle propose d'aller au-delà de l'activité physique en recherchant à acquérir tout un ensemble de valeurs par l'intermédiaire d'un code moral, plus précisément :

    « Outre les bienfaits physiques que vous apportera la pratique du karaté, vous irez aussi vers un épanouissement philosophique. La spécificité des arts martiaux est de vous permette, si vous le souhaitez, d'aller au-delà de la simple activité sportive. La recherche d'intégration et d'adaptation sociale s'exprime au travers de son code moral qui prône le sens de l'honneur, la fidélité, la sincérité, le courage, la bonté, la bienveillance, la droiture, le respect, la modestie, le contrôle de soi... »

    Toutefois, la FFKDA propose de pratiquer le karaté également comme un « sport

    complet, en toute sécurité », le message ici est de considérer la pratique comme une source de bonne santé dans un cadre sécuritaire :

    « La pratique martiale est depuis longtemps considérée comme une excellente activité physique, source de bonne santé. L'attention de votre professeur, le respect entre les pratiquants, des protections étudiées, et des normes strictes d'hygiène et de sécurité dans les salles éliminent quasiment tous les risques d'accidents. »

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    Enfin, le dernier aspect de la pratique, évoqué par la FFKDA, concerne l'orientation « défense personnelle » du karaté :

    « Le karaté-do, le karaté-jutsu avec son karaté-défense ou les disciplines associées de la F.F. Karaté répondent toutes à la demande spécifique de pratique de défense personnelle. L'étude de mouvements simples ou d'enchaînements techniques permettra à chacune et à chacun de trouver la réponse adaptée en cas d'agression. Nos enseignants sont formés aux lois régissant la légitime défense et vous permettront dans le dojo d'aborder une pratique sans risque et dans le respect de vos partenaires. »

    Notons que la fédération ne considère pas la pratique du karaté comme un tout uni mais plutôt comme un ensemble d'orientations définissants la pratique elle-même, c'est-à-dire que nous retrouvons dans la communication qui est faite du karaté différentes orientations possibles de la pratique qu'elle soit martiale, philosophique, self-défense ou plus sportive. Plus précisément, la FFKDA ne définit pas la pratique mais propose des façons de voir et de concevoir le karaté. Comme nous l'avons vu il est possible de pratiquer le karaté pour l'aspect self-défense et apprendre à se défendre en cas d'agression ou bien de pratiquer pour rechercher à s'accomplir comme être social guidé par des valeurs et un code moral. Concrètement, « l'indéfinition »27 des termes tels que « art martial » ou « karaté » laisse le choix au pratiquant de s'inscrire dans l'une ou l'autre orientation de sa pratique et pose les bases de notre travail : chercher à comprendre et identifier les différents types orientations afin d'établir des profils de pratiquants. Toutefois, la FFKDA insiste sur un point particulier de la pratique car il s'agit de l'élément qui semble lier tous les pratiquants entre eux sans discrimination d'orientation, c'est le grade.

    c) Du grade « symbolique » au grade « législatif »

    La particularité du karaté comme d'autres pratiques telles que le judo ou encore l'aïkido est la délivrance de grades. D'ailleurs, le système des grades en karaté est basé sur celui des grades en judo créé par Jigoro Kano. D'après Emmanuel Charlot28, nous devons considérer le grade comme une marque « d'encouragement des combattants dans leur pratique en leur

    27 Christian Pocciello (1999) parle à ce sujet « d'individualisation et de personnalisation de la pratique des activités » in Sports et sciences, histoire, sociologie et prospective, Vigot

    28 Journaliste pour la télévision et la presse écrite, écrivain, judoka ceinture noire, il se consacre depuis de nombreuses années à l'approfondissement et à la diffusion des connaissances dans le domaine des arts martiaux, du judo en particulier.

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    fournissant des repères plus fréquents » avec la volonté d'« éduquer l'homme » 29. Le grade peut être vu comme « le symbole de la progression physique et technique mais aussi de l'approfondissement intérieur ». Dès lors, le grade « offre aux pratiquants des indices quant au sens de leur pratique, c'est à dire acquérir d'abord les éléments d'une première compétence, en suivant l'enseignement du professeur et des élèves les plus expérimentés pour construire « l'étoffe » d'une véritable ceinture noire, s'engager ensuite dans un processus de travail et de recherche pouvant conduire à un véritable accomplissement humain. » Même si le grade valorise la compétence technique ainsi que les savoir-faire, il montre aussi l'approfondissement de soi dans l'idée de transformation humaine par une pratique soutenue et sincère. De plus, l'Etat reconnaît le grade :

    « L'adhésion à la F.F. Karaté est la certitude d'obtenir des grades reconnus par la loi du 16 juillet 1984 modifiée par la loi du 6 juillet 2000. Celle-ci précise : (extrait de l'article 17-2) (...). Dans les disciplines relevant des arts martiaux, nul ne peut se prévaloir d'un grade ou d'un dan équivalent sanctionnant les qualités sportives et les connaissances techniques et, le cas échéant, les performances en compétition, s'il n'a pas été délivré par la commission spécialisée des grades et Dan équivalents de la fédération délégataire (...). La Commission Spécialisée des Dan et Grades Equivalents de la F.F. Karaté est donc la seule habilitée à valider les grades de karaté-do, karaté-jutsu et disciplines associées dont la fédération à la délégation. »

    Précisons qu'il existe une hiérarchisation des grades. Les ceintures blanche, jaune, orange, verte, bleue ainsi que marron sont délivrées à la discrétion de l'enseignant au sein du club où l'on pratique. En revanche, les passages de grades à partir de la ceinture noire 1er dan jusqu'au 3ème dan se déroulent au niveau de la région, ou ligue. Puis les passages de 4ème et 5ème dan se déroulent en inter région. L'ensemble des passages de grades sont composés de jurys ayant passés un examen validé par la commission CNSDGE30. Toutefois, nous constatons l'existence de deux visions concernant le grade, celle exprimée par Emmanuel Charlot fait référence à une progression externe ou technique dans l'idée de développement interne et personnel tandis que la loi conçoit le grade comme une validation de compétences compétitives et techniques. Il y a là une divergence entre le grade « symbolique » créé par Jigoro Kano et le grade « législatif » comme le définit la loi. Nous sommes là dans un

    29 Charlot, E. (2003) L'échelle intérieure, Officiel karaté n°4

    30 Commission Nationale Spécialisée des Dans et Grades Equivalents de la FFKDA

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    processus de rationalisation du grade par l'institution qui démontre, d'une part, l'inscription du karaté dans une démarche sportive. D'autre part, cette rationalisation du grade est fortement liée au processus de sportivisation de la pratique et implique une possible perte de sens de la pratique dans la mesure où les karatéka chercheront à développer les compétences techniques et compétitives au détriment de l'approfondissement intérieur que permet la pratique.

    d) La compétition en karaté

    C'est en 1957 qu'eurent lieu les premiers championnats de karaté au Japon. Presque tous les arts martiaux modernes ont développé des formes de compétitions, avec des règles spécifiques qui leur permettent d'ouvrir leur pratique vers les médias et le grand public. Il existe deux formes de compétition aujourd'hui : le kata et le combat. « La compétition combat est une opposition de type duel. L'incertitude émane de l'adversaire. L'objectif pour le combattant est d'organiser sa conduite de manière à la rendre opaque pour son adversaire. La compétition combat est une activité de percussion qui confronte deux combattants. » En ce qui concerne les kata, nous pouvons dire qu'il s'agit « de séquences de mouvements de combat prédéfinies qu'il faut reproduire dans un état de concentration extrême. » Comme le précise Bruce Neuffer, la transmission des techniques, comme le kata, inculque une culture corporelle spécifique aux pratiquants. En effet, « il est maintenant clairement avéré que les techniques utilisés par l'individu sont intimement liées à la manière dont la société à laquelle il appartient aime à se penser et à se représenter. »31 Notons que les titres délivrés dans les championnats auxquels participent les athlètes, sont officiellement reconnus par les instances sportives nationales et internationales. L'équipe de France de karaté est parmi les leaders depuis de très nombreuses années sur le plan international et sont titulaires de très nombreux titres européens et mondiaux. Une filière de haut niveau particulièrement efficace a été mise en place dans les pôles France et les pôles espoirs comme Chatenay Malabry ou encore Montpellier.

    Nous pouvons voir que l'offre de pratique de la fédération est construite sur un modèle à la fois sportif mais également « traditionnel ». L'instauration de la compétition et de ses règlements, la légalisation du grade, la définition d'un des aspects du karaté comme « sport » et le développement des « publics cibles » imposée par le Ministère de la Jeunesse, de la Santé, des Sports et la Vie Associative confirme l'idée d'une « sportivisation » progressive

    31 Neuffer, B. (2009) Les formes de compétition, Cahier technique de la revue EPS, Revue EPS n° 336

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    de cette pratique. Dès lors, il y a une multiplication des offres que propose la FFKDA auprès du grand public, telle de que le body-karaté.

    e) Les nouvelles modalités de pratique : l'exemple du body karaté

    Depuis quelques années la FFKDA met en place un certain nombre d'actions afin de développer la pratique. C'est en ce sens qu'ont émergé des modalités de pratique différentes telles que le body-karaté. Cette forme de pratique du karaté est développée par Catherine Belrhiti32 ancienne compétitrice de haut niveau. Le body-karaté cherche à allier des techniques de karaté avec de la musique afin d'en tirer le meilleur parti du potentiel corporel, cette pratique a recourt à des postures, des mouvements, des enchaînements qui exigent une discipline mentale tout autant que physique. « C'est une activité thérapeutique, dans le sens où elle assouplit le corps et détend l'esprit tout en permettant une remise en forme et le développement d'une bonne condition physique. L'énergie circule à travers le corps, les mouvements sont plus fluides, on constate une amélioration du bien-être et de la santé. » 33 Nous avons là une pratique utilisant les techniques de karaté (pied/poing) afin de participer la recherche de bien être. Cependant, l'existence de ce type de pratique pose la question de définition de celle-ci. En effet, s'agit-il d'un style ou d'une forme de karaté ou d'une pratique issue du karaté mais qui n'en est plus ?

    Cette partie à permis de mettre en évidence que l'évolution du karaté, de sa forme d'origine à celle d'aujourd'hui, a été conditionnée par des facteurs géographiques, culturels et sociaux. Surtout, nous avons démontré que cette pratique s'est progressivement sportivisée depuis les années 1960. En effet, les différents processus engagés semblent avoir eu pour conséquence de diversifier les formes de la pratique telles que le body-karaté. Cette diversification des formes de pratique a entrainé une multiplication du sens que les pratiquants accordent au karaté. C'est pour cela que le message de la FFKDA propose différentes orientations de la pratique, sans pour autant les définir. Désormais, il va être nécessaire de présenter les bases théoriques qui permettront de questionner la pratique actuelle du point de vue de ses acteurs afin de constituer les profils de pratiquant.

    32Elle est quadruple championne du monde en plus de 60 kilos. Elue au comité directeur de la Fédération Française de karaté, elle y prend la responsabilité de la commission féminine. Expert fédéral 6ème dan.

    33 Site du body-karaté France : http://www.body-karate.com/

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    II. Comprendre les représentations des pratiquants : une pratique unifiée ?

    1. Des orientations variées de la pratique:

    Diverses études scientifiques sur le karaté ont été entreprises depuis les années 1980. Celles-ci s'intéressent, par exemple, à la modification des représentations des pratiquants. L'étude de Patrick Trabal et Muriel Augustini34 sur l'évolution de l'image sous l'effet de la pratique du karaté, met à jour l'existence d'une évolution des représentations par le fait de pratiquer le karaté. Plus précisément, le facteur de cette transformation est le discours utilisé par les enseignants, discours basé notamment sur le côté « philosophique » voire « mystique » et « ésotérique » du karaté. En effet, le pratiquant se représente le karaté en référence à l'ensemble des discours traditionnels, philosophiques, sportifs ou de self défense. Dès lors, le pratiquant construit ses représentation avec l'ensemble des images cinématographiques, avec les propos des enseignants, de la fédération avec ce que le karatéka voit, entend ou échange avec les autres pratiquants au moment des stages et des entrainements. Etudier les représentations revient à recomposer et synthétiser l'ensemble des éléments propre à chaque individu. Ainsi, s'intéresser aux représentations sociales d'un groupe de karatékas permet de savoir en quoi elles sont « socialement élaborés et partagées »35. Cependant, les catégories élaborées par le chercheur pour l'analyse des orientations de la pratique sont restrictives et ne prennent pas en compte l'ensemble des possibilités. Donc, nous cherchons à construire une typologie des pratiquants la plus réaliste possible.

    Une étude de Ludovic Jeanne36 met en évidence l'existence de différents « idéals-types » en ce qui concerne la pratique du karaté. L'auteur repère en effet des catégories telles que le « karaté-sport », le « karaté-art corporel traditionnel », le « karaté-technique martiale ». Ces trois types idéaux ont marqué l'évolution du karaté et la mondialisation de celui-ci. Selon l'auteur, il semblerait en effet qu'il y ait eu au cours de l'histoire de cette pratique en France une adaptation de la pratique d'un type « martial » vers un type plus sportif avec une étape intermédiaire proche des « arts corporels », que l'on reconnaît comme étant la forme actuelle. L'idéal-type « martial » semblerait aujourd'hui inactif, dans la

    34 Augustini, M. & Trabal, P. (1998) les représentations du karaté pour les cadres, les enseignants et les pratiquants. Rapport de recherche, laboratoire de sociologie INSEP/FFKAMA, Paris

    35 Jodelet, D. (1993), Représentations sociales : un domaine en expansion, in Jodelet, D., Les représentations sociales, PUF, Paris

    36 Jeanne, L. (2001) Les géométries de corps, diffusion socio-spatiale et idéaux types de pratiques du karaté : essai de modélisation, Vème rencontre de Théo Quant, Université de Caen

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    mesure où aucune forme concrète de pratique ne semble pouvoir être observée et rattachée à cette dimension « originelle ». L'art martial ancien d'Okinawa, qui se rapproche d'une forme de lutte de percussion pied/poing sans armes, se serait éteint. A l'inverse, Ludovic Jeanne formule l'hypothèse que des dimensions plus communautaires de la pratique du karaté sont susceptibles d'apparaître, ce qui pourrait également faire émerger une nouvelle façon de voir cette pratique. Dès lors, la mulipication du sens accordé à la pratique entraîne une modification de l'idéal que les pratiquants peuvent avec de celle-ci. Ainsi, il serait possible de pratiquer le karaté dans une forme propre à chacun en fonction de ses propres valeurs. Concrètement, chaque pratiquant reçoit, interagit et pose les propres bases de sa pratique. Aussi, les orientations de la pratique, c'est-à-dire la direction et le sens que l'individu donne à sa pratique, sont étroitement liées aux représentations que les pratiquants ont de leur karaté. Maintenant, il est important de savoir comment s'opère le choix d'une pratique telle que le karaté.

    2. Les déterminants sociologiques de la pratique du karaté

    Tout d'abord, nous savons que « les choix (et les rejets) de sports sont d'abord et essentiellement soumis à la logique de l'habitus »37 ; plus précisément « la place que l'on occupe dans la société conditionne le type de rapport que l'on entretient avec son corps et détermine grandement les usages, notamment sportifs, que l'on en fait »38. Aussi, nous pouvons dire que « les dispositions à l'égard du corps, de la pratique sportive, sont cohérentes avec les dispositions à l'égard d'autres pratiques culturelles »39. Nous avons décidé de nous appuyer sur les travaux de Pierre Bourdieu en raison de la sociologie qu'il développe, construite autour d'une idée centrale : la réalité du monde social ne repose ni sur les individus ni sur les groupes mais sur les relations entretenues entre ses éléments. Aussi, nous pouvons retenir la définition de l'habitus comme un « ensemble de dispositions incorporées » mais aussi comme un « principe générateur de pratiques »40. Il s'agit de dispositions que nous intériorisons et incorporons de façon durable qui résistent au changement. L'habitus fonctionne comme un système de dispositions unifiées qui constitue un élément d'unité de la personne. Il renvoie à tout ce qu'un individu possède et qui le constitue. Finalement, l'habitus désigne des manières d'être, de penser et de faire communes,

    37 Pociello, C. (1981) La force, l'énergie, la grâce et les réflexes in Pociello, C. Sport et sociétés, Vigot, Paris

    38 Op. Cit. Pociello, C.

    39 Op. Cit. Defrance, J.

    40 Bourdieu, P. (1986) habitus, code et codification, Actes de recherche en sciences sociales, n°64

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    issues de l'incorporation non consciente des normes et pratiques véhiculées par le groupe d'appartenance.

    Dans Sociologie du sport41, Jacques Defrance soulève une des questions posées par le programme de recherche de Pierre Bourdieu. C'est Jean-Paul Clément qui traite alors la question du lien entre la pratique sportive et les choix culturels du même agent. Dans une enquête42 comparative de trois sports de combats de préhension, la lutte, le judo et l'aïkido, il met en évidence que la manière d'engager le corps dans le combat n'est pas la même en fonction de la position sociale que l'on occupe dans la société. En effet, dans chacune des disciplines se manifeste une conception particulière de l'affrontement, avec des façons de d'engager son corps et de s'affronter à l'adversaire qui différe d'une pratique à une autre.

    Par exemple, le lutteur privilégie un contact rugueux des corps, travaillant sur des appuis solides, avec un effort soutenu. L'étude de Jean-Paul Clément met en évidence que la lutte « est un sport de prolo » et que les lutteurs sont dans leur grande majorité d'origine ouvrière. En ce qui concerne le judo, il s'agit d'une pratique ayant comme objectif de projeter et de maîtriser au sol comme la lutte. L'élément qui permet de différencier ces deux pratiques est le médiateur utilisé : le kimono. Il a également été mis en évidence que les pratiquants sont issus des couches moyennes, c'est-à-dire des cadres moyens, employés ou encore techniciens. L'aïkidoka, quant à lui, utilise une mobilité dans le déplacement à « distance sociale »43. Il se prépare silencieusement à l'entrainement, par des exercices de contrôle de soi et de méditation. Dans ce cas, le kimono ne joue pas un rôle essentiel contrairement au pantalon (hakama). Cette activité est pratiquée par des cadres supérieurs avec une grande proportion de professions « intellectuelles ». Finalement, le choix d'une pratique de combat reconnues et légitime à un moment donné est socialement et culturellement conditionné44.

    En ce qui concerne la pratique du karaté, nous pourrions donc dire que la manière dont nous pratiquons, c'est-à-dire le type de rapport au corps, expliquerait la place que l'on occupe dans la société. Aussi, le choix de la pratique du karaté serait conditionné par l'habitus et que

    41 Defrance, J. (1995) Sociologie du sport, La découverte, Paris

    42 Clément, JP. (1981) La force, la souplesse et l'harmonie, in Pociello, C. Sport et sociétés, Vigot, Paris

    43 Hall, E. (1971) La dimension cachée, Seuil, Paris

    44 Op. Cit. Clément, JP.

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    la forme de pratique ne sera pas la même en fonction du statut social, des capitaux économiques et culturels dont le pratiquant dispose.

    Plus précisément, les orientations de la pratique du karaté seraient socialement déterminées. Par exemple le karaté-jutsu45 pourrait rassembler des individus ayant les mêmes caractéristiques sociales à savoir un emploi proche ou encore un niveau d'étude similaire. Dès lors, il serait possible qu'au sein d'une même pratique identifiée socialement comme étant du karaté, il puisse y avoir des logiques d'habitus différents en raison de la multitude de formes, de styles donc d'usages sociaux existants. Alors, se pose la question de la diversification lors du développement de la pratique.

    3. La diversification et modification de la structure sociale

    Les recherches de Jean-Paul Clément apportent un éclairage intéressant quant aux raisons de la diversification d'une pratique. En effet, dans son étude comparative de la lutte, du judo et de l'aïkido, il explique que le judo occupe une place originale dans le système des sports de combat en raison d'une grande diversité de modalité de pratique, allant de la compétition à l'esthétique, et donc différents usages sociaux. Même si le judo moderne est plus orienté sur une pratique sportive compétitive, il est possible de trouver un dojo proposant une pratique du judo axée sur d'autres aspects comme le taïso46. Jean-Paul Clément expose le fait que tout au long de l'histoire le judo a élargi son éventail de pratiquants et dès son implantation l'élite intellectuelle de Paris fréquente les dojos. Ce fait aura pour conséquence une modification de son public, en effet, « du grand public succède les universitaires »47. Dès lors, le judo connaît ses premiers conflits ayant comme raison la diversification et la transformation de la structure sociale de la pratique. La notion de « champ »48 est sous jacente ici. En effet, chaque champ se caractérise par un rapport de forces entre dominants et dominés où les agents sociaux s'affrontent pour conserver ou transformer ces rapports de forces. Un certain nombre de traits invariants peuvent être

    45 Le karaté-jutsu est une forme de pratique récente qui propose une synthèse de différentes pratiques martiales. Concrètement, le karaté-justuka peut utiliser toutes les techniques de karaté (coup de poing, coup de pied) mais également certaines techniques issues du judo comme les projections ou bien du jiu-jitsu comme les étranglements.

    46 A l'origine, le Taïso nommait les activités physiques complémentaires pratiquées par les compétiteurs de judo ou de jujitsu dans le cadre de leur entrainement. De nos jours cette discipline intéresse un public de plus en plus large, sans limite d'âge, qui n'a pas forcément pratiqué de sport auparavant et qui recherche un loisir axé sur la culture et l'entretien physique.

    47 Thibault, C. (2000) Entretien avec les pionniers du Judo, édition- Broché, Paris

    48 Bourdieu, P ; (1994) Raisons pratiques, sur la théorie de l'action, Seuil, Paris

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    discernés comme le degré d'autonomie, l'opposition entre les positions les plus autonomes et les moins autonomes, l'opposition actuelles entre dominants et dominés. Dès lors, ce processus ne s'applique pas qu'au judo, mais d'après Jean-Paul Clément, semble « caractériser tous les sports ayant connu une forte expansion ». D'après Christian Pociello, il existe un rapport entre la diversification de la pratique, qui peut aller jusqu'à la modification de la logique interne, et l'usage social de celle-ci49.

    Contrairement au judo, la lutte n'aurait pas connu de divergence de ce genre en ce qui concerne la conception de la pratique. La raison invoquée serait que la pratique de la lutte ne semblerait pas avoir été « un enjeu de lutte entre les différents groupes sociaux ». C'est cette absence de concurrence qui permettrait d'expliquer que cette pratique apparaisse comme la « force rudimentaire » tandis que le judo à valoriser la « souplesse », la « technique » ou encore l' « esthétique ». Pour reprendre les mots de Jean-Paul Clément, « chaque pratique se définit par rapport et en opposition aux autres pratiques ».

    En ce qui concerne le karaté, il existe aujourd'hui plus d'une vingtaine de styles de karaté comme le Shotokan, l'Uechi ryu ou encore le Kempo. Or, il y a très peu de styles qui se sont implantés dans les années 1950 en France. Au sens où l'entend Jean-Paul Clément, la diversification et la multiplication de la pratique du karaté serait due aux conflits d'idéaux et de sens entre les différents groupes sociaux qui composent la population de karatéka. C'est pour cela qu'aujourd'hui d'autres formes de pratique se développent comme le karaté-jutsu, le karaté-contact, le karaté enfant ou le body-karaté. Dès lors, les modalités de pratique ont beaucoup évolué et d'autres sont apparues depuis plus de 60 ans. L'exemple du body-karaté démontre bien la modification de l'usage social qui peut être fait du karaté. Aussi cette forme de pratique, qui s'inscrit dans une logique hygiéniste, utilise les techniques de karaté sur de la musique afin de rechercher du plaisir et du bien-être50. Toute fois, le body-karaté permet également d'orienter l'offre de la pratique afin de toucher un public plus féminin.

    Nous pouvons dire que le karaté a connu une forte expansion ainsi qu'une modification de son public, ce qui a entraîné une diversification des modalités de pratique illustrée par le body-karaté. La diversité des publics au sein de la pratique pourrait amener à la constitution de groupes sociaux ayant chacun sa propre définition et conception du karaté. Il en résulterait

    49 Pociello, C. (1980) Eléments pour la constitution d'une histoire des pratiques sportives. Travaux de recherche de l'INSEP, n°6, édition spéciale histoire des sports

    50 Gleyse, J. (1999) Yves TRAVAILLOT, Sociologie des pratiques d'entretien du corps, Corps et Culture, N° 4

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    alors une transformation de la structure sociale en raison de la variété des usages et des

    logiques internes existantes. Toutefois, ce propos est à nuancer car ce n'est pas strict.

    Rappelons que « chaque pratique se définit par rapport et en opposition aux autres pratiques »51, ce qui nous laisse penser qu'au sein même de l'espace social du karaté il puisse y avoir des enjeux de lutte afin que chaque groupe social puisse défendre sa conception, ses valeurs ainsi que sa vision de pratique. Autrement dit, accéder aux définitions, aux valeurs, aux représentations des pratiquants nous permettra de faire émerger les conflits entre les différentes conceptions du karaté. Puis nous élaborerons une typologie des profils types de pratiquants. Il est donc nécessaire de présenter le mécanisme de constitution des représentations et des opinions afin de pouvoir proposer une méthodologie pertinente.

    4. L'opinion et les représentations comme construits sociaux

    L'opinion individuelle, définie par Jean Stoetzel comme une « formule nuancée qui, sur une question déterminée, reçoit l'adhésion sans réserve d'un sujet »52, ne peut être convoquée sur le champ par le questionnaire ou l'entretien comme s'il existait, toute fabriquée, une opinion qui n'aurait jamais été modifiée. Beaucoup d'études en ethnologie, linguistique ou sociologie, convergent pour indiquer que le fruit des interactions entre individus, comme une conversation dans le métro ou au travail, qui permet de construire ou de rappeler à soi une opinion et de s'y tenir. Cette construction varie selon les interlocuteurs ou plutôt selon la valeur qu'ils prennent. Par exemple, une opinion exprimée devant un supérieur n'entre pas dans la même stratégie qu'une opinion formulée avec un collège, en privée ou en public, dans une relation amoureuse ou autre. Ainsi, l'opinion est toujours un « construit social »53dépendant de la situation dans laquelle elle s'exprime. Nous pouvons également la considérer comme une contrainte sociale ou politique qui pousse un individu à se rallier à un discours sous peine de ne pas être compris.

    Dès lors, nous considérons que l'étude des pratiques sportives par les opinions nécessite de préciser la construction des représentations sociales, au sens où en parle Jean Claude Abric54, à savoir « un processus au centre de tensions participantes à la prise d'opinions ». Ce sont des « représentations construites dans le cadre des pratiques quotidiennes et

    51 Op. Cit. Clément, JP.

    52 Stoetzel, J. (1943) La théorie des opinions, P.U.F, Paris

    53 Duclos, D. & Meynaud, HY. (1985) Les sondages d'opinion, La découverte, Paris

    54 Abric, JC. (2003) Méthodes d'études des représentations sociales (dir.), Erès, Ramonville

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    Anthony METTLER 27

    partagées par l'ensemble d'un groupe social au-delà des particularités individuelles » pour Serge Moscovici55. Les représentations sont des constructions sociales qui aident à poser le réel, c'est-à-dire qu'elles permettent « de donner un sens à ses conduites, et de comprendre la réalité, à travers son propre système de références, donc de s'y adapter, de s'y définir une place »56, en fonction des expériences, des émotions, donc de la réalité vécue par l'individu.

    Jean Corneloup, dans son enquête d'opinion sur l'étude des pratiques sportives de montagne57, rappel que le processus décisionnel permettant d'exprimer son opinion sur un sujet renvoie à un jeu complexe. En effet, il propose de redonner de l'importance à l'idée de co-production de la représentation si l'individu est considéré comme producteur de valeurs, tout en restant engagé dans des champs de force multiples avec lesquels il doit composer. Il rappel également que l'opinion n'est pas fixe et peut évoluer dans le temps comme l'ont montrés les travaux de Vérène Chevalier en équitation58. Donc, les karatéka produisent leurs représentations sur la pratique en fonction des expériences, des émotions et de leur réalité vécue, tout en composant avec de multiples champs de forces. De plus, le karatéka produira une opinion qui évoluera et se transformera dans le temps.

    Ainsi, l'individu peut être pensé comme faisant partie d'un champ de symboles au sein duquel il choisit ceux qui l'attirent et ceux qu'il rejette. « Ce jeu d'attirance et de répulsion permet à l'individu de se situer en composant son univers symbolique de référence » pour Jean Corneloup. Toute fois, l'opinion traduit une position sociale marquant la manière dont l'individu compose sa relation avec le social. Donc, si nous souhaitons comprendre au mieux le pratiquant nous devons prendre en compte tout un ensemble de facteurs. En effet, nous avons vu qu'une opinion est un construit social qui résulte d'une interaction et qu'elle dépendant de la situation dans laquelle elle s'exprime. Aussi, la représentation est un processus au centre de tensions participantes à la prise d'opinions.

    55 Moscovici, S. (1989) Les représentations sociales, P.U.F, .Paris

    56 Abric, JC. (1994) Pratiques sociales et représentations, P.U.F, Paris

    57 Corneloup, J. (2008) L'enquête d'opinion dans l'étude des pratiques sportives de montagne, Bulletin de méthodologie sociologique

    58 Chevalier, V. (1994) Démographie sportive. Itinéraire et abandons dans les pratiques de l'équitation, Thèse pour le Doctorat Histoire et Civilisation des Sociétés Occidentales. Paris VII

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    Anthony METTLER 28

    Nous avons vu que chaque individu oriente sa pratique en fonction des valeurs et du sens qu'il donne au karaté, ce qui abouti a différentes conceptions de la pratique (sportive, philosophique, self-défense). Ces orientations sont étroitement liées aux représentations que les pratiquants ont de leur pratique. Aussi, il serait possible qu'au sein d'une même pratique il existe des orientations complètement différentes en raison de la multitude de formes, de styles donc d'usages sociaux. De plus, nous avons vu que qu'au sein même de l'espace social du karaté émergent des tensions en raison d'enjeux de lutte afin que chaque pratiquant puisse défendre sa conception, ses valeurs ainsi que son orientation de pratique. Enfin, nous avons vu que les représentations sont construites dans le cadre des pratiques quotidiennes et partagées par l'ensemble d'une population. Dès lors, acquérir les opinions du pratiquant par l'intermédiaire de questions simples nous permettra de mettre à jour les représentations ainsi que les enjeux existants dans l'espace de la pratique.

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    III. Etude des orientations de la pratique du karaté en France :

    Un individu possède un habitus qui désigne des manières d'être, de penser et de faire communes à plusieurs personnes de même origine sociale, issues de l'incorporation non consciente des normes et pratiques véhiculées par le groupe d'appartenance. Cet habitus n'est pas pour autant identiques à chaque individu et n'entraîne pas des conduites identiques mais plutôt des tendances à certaines conduites. C'est en ce sens que Jacques Defrance affirme que « la position sociale que l'on occupe dans la société conditionne le type de rapport que l'on entretient avec son corps et détermine les usages que l'on en fait ». C'est-à-dire que la manière dont on engage le corps dans une pratique, dans notre cas le karaté, ne sera pas le même en fonction de la position sociale que l'on occupe au sein de la société.

    Chaque pratique a sa propre logique d'affrontement et les façons d'engager le corps diffèrent d'une discipline à une autre. Dès lors, au sein d'une même pratique, comme le judo, il est possible d'identifier une grande diversité des modalités de pratique. En effet, Jean-Paul Clément a démontré que le judo a subit un processus de diversification suite à l'intégration de l'élite « intellectuelle » au sein des dojos parisiens. La diversification ainsi que la transformation de la structure sociale de la pratique sont à l'origine des premiers conflits. Plus précisément, les études de Christian Pociello nous montrent l'existence d'un rapport entre la diversification de la pratique, qui peut aller jusqu'à la modification de la logique interne, et l'usage social de celle-ci.

    Aussi, nous pouvons retenir des études de Ludovic Jeanne, sur les « idéaux-type » en karaté, ou de Muriel Augustini et Patrick Trabal, sur l'évolution des repésentations sous l'effet de la pratique, que chaque pratiquant pose les bases de sa propre pratique en fonction de ce qu'il vit du karaté, mais aussi de ce qu'il en sait ou de ce qu'il en perçoit. La typologie des profils de pratiquants fait donc bien appel à deux dimensions : à la manière dont les pratiquants vivent, au quotidien, leur pratique mais aussi à la perception que les pratiquants ont de leur karaté, c'est-à-dire aux facteurs qui déterminent leurs représentations.

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    Anthony METTLER 30

    La pratique du karaté aujourd'hui semble s'être diversifiée sous de multiples modalités comme le « body-karaté », le « karaté-contact » ou encore le « karaté-jutsu ». Cette diversification du karaté et de ses modalités semble correspondre à des adaptations de l'usage qui en est fait, hygiéniste pour le body-karaté et auto défense pour le karaté contact. Comme pour le judo, la définition de la pratique du karaté semblerait être un enjeu de lutte entre différentes forces en présence, ce qui permettrait de dire qu'il existe des oppositions au sein de ses pratiquants en ce qui concerne la conception de la pratique. Par exemple, la forme de karaté dite « traditionnelle » ne pourrait se définir que par rapport et en opposition à la forme « body-karaté » ou « karaté contact ».

    Dès lors, la pratique du karaté aujourd'hui semble être conditionnée par l'orientation que chacun donne à sa propre pratique, c'est-à-dire que la pratique du karaté en France ne serait pas unifiée mais fédère un certain nombre de pratiquants ayant des valeurs et des opinions propres à chaque orientation. Toutefois, cela n'est pas péjoratif et répond à une logique existante dans différentes pratiques.

    Nous pouvons nous demander comment les pratiquants de karaté en France conçoivent leur pratique. En ce sens, nous avons identifié trois questions qui nous semblent fondamentales afin de « photographier » le karaté actuel et qui permettront également de construire une argumentation claire et cohérente :

    - Qui pratique le karaté en France aujourd'hui ? Tout d'abord, il est intéressant de connaître les déterminants sociologiques des pratiquants, à savoir la répartition par âge, le niveau de diplôme ou encore les professions des pratiquants. Aussi, nous pouvons nous demander si le karaté ne regrouperait pas des personnes ayant des origines et des caractéristiques sociales différentes. Aussi cette population de karatéka serait constituée de pratiquants appartenant à des milieux sociaux différents et possédants des capitaux culturels et économiques variées. De plus, il va être pertinent de vérifier la place que le grade occupe dans la structure de cette pratique, en effet, le grade semble être le lien entre ses individus aux caractéristiques variées.

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    Anthony METTLER 31

    - Quelles sont les orientations, les opinions ainsi que les conceptions que les pratiquants ont de leur karaté ? Nous récolterons les définitions ainsi les opinions sur le thème du grade, les modalités de pratiques émergentes ou encore le karaté pour les enfants. Les définitions nous permettront de déterminer les orientations dominantes et les opinions contribueront à révéler l'existence de divergences ou de convergences au sein de la population de karatéka sur les thèmes proposés. Tout en ayant des conceptions différentes quant aux valeurs qui façonnent leur propre pratique, nous pouvons faire l'hypothèse que les karatéka se représentent leur pratique comme un « art martial » qu'ils considèrent comme une « école de vie ».

    - Enfin, quels profils de pratiquants résultent des différentes conceptions existantes ? Une fois que les orientations ainsi que les opinions qui constituent la population de pratiquants seront identifiées, nous établirons des profils de pratiquants. Concrètement, pour construire des profils de pratiquants il est nécessaire de mettre en évidence les différentes conceptions de la pratique en questionnant le sens et les valeurs que le pratiquant donne à sa pratique. Il existe différents profils en lien avec les orientations proposées de la pratique mais pas seulement. En effet, nous distinguerons les pratiquants qui recherchent une pratique plus sportive/compétitive, les pratiquants ayant une conception du karaté comme art de vivre ou encore les pratiquants en quête d'idéal.

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    Anthony METTLEK 32

    IV. Méthodologie de l'analyse de la population de Karatéka :

    La démarche que nous avons mit en place avait pour contrainte de recueillir un grand nombre de données en un temps très court, à peine 1 mois pour le questionnaire et 3 mois pour les entretiens. Tout d'abord, nous avons procédé courant novembre 2008 à l'élaboration ainsi qu'à la diffusion d'un pré-test au près d'une population choisie et identifiée comme hétérogène dans les opinions et les orientations de la pratique. Cet échantillon test était composé de 15 personnes. Ensuite, nous avons construit sur la base de ce pré-test le questionnaire qui a été diffusé de fin janvier 2009 à début mars 2009 par mail à un échantillon représentatif constitué à partir de la base de données59 de la FFKDA. Au moment de la diffusion du questionnaire par mail nous avons réalisé différents entretiens semi-directifs afin de recueillir les impressions de certains pratiquants. Cette partie à pour objectif de présenter les outils qui ont contribuées à la réalisation de ce travail de recherche.

    1. Le pré-test :

    Dans un premier temps, nous avons établit un pré-test60 à partir des questions de terrain61 que nous avons identifiées comme pertinentes. Nous avons construit le pré-test sous forme d'un questionnaire composé de quatre parties, la première sur les caractéristiques sociales du pratiquant, la seconde sur le lien pratique/pratiquant, la troisième sur les représentations que les pratiquants ont de leur pratique et, pour finir, des questions d'opinions sur le karaté. Suite à l'élaboration de ce pré-test, nous avons constitué un échantillon de 15 personnes ayant des opinions et des orientations différentes de la pratique. Cela a été possible grâce à un accès facilité sur le terrain ce qui nous a permis d'obtenir des informations pertinentes afin de construire le questionnaire définitif. La particularité de ce pré-test est que les personnes sollicitées avaient la possibilité d'apporter des commentaires sur les items proposés ou sur les informations demandés. Ainsi, nous avons constitué un questionnaire prenant en compte les modifications effectuées. Par exemple, nous avons supprimé de la version finale les questions sur le salaire et nous avons amélioré la tournure de certaines phrases qui ne semblaient pas être suffisamment claires.

    59 Nous avons eu l'autorisation d'accéder à cette base de données par le Directeur Technique National, Mr Dominique Charré ainsi que le président de la FFKDA, Mr Francis Didier

    60 Cf. annexe 5

    61 Nous avons été présents sur le terrain à des moments clés comme l'assemblée générale de la Ligue de Bretagne ou encore lors de compétitions régionales et nationales. Nous avons observé dans l'idée de recueillir des informations nous permettant de construire le pré-test puis le questionnaire sans pour autant observer de manière systématique avec une grille.

    Anthony METTLER 33

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    2. Le questionnaire :

    Ensuite, nous avons construit le système de recueil de données ou questionnaire62 que nous avons auto-administré par internet afin de vérifier les hypothèses théoriques. Diffuser le questionnaire par ce moyen permet de faire des économies de temps pour le chercheur mais également pour la personne sollicitée. En effet, recevoir un mail avec un lien, cliquer dessus et répondre aux questions est plus facile que de remplir une feuille papier puis d'aller poster l'enveloppe. Notons que ce système permet un traitement simplifié car il n'y a pas besoin d'entrer les données dans un logiciel ou sur un tableur. Concrètement, lorsqu'un individu valide son questionnaire, les données sont récoltées dans un tableur Excel® ce qui évite des pertes de temps de retranscriptions parfois longues. Ainsi, pour l'ensemble des questions il a été possible de coder en chiffre ou en lettre les réponses afin de faciliter l'analyse par la suite. Ce qui signifie qu'une personne qui s'identifiait comme « ouvrier » sera codifiée dans la base de données par un « H ». L'ensemble du questionnaire est basé sur ce principe, hormis les questions ouvertes qui sont littéralement reportées. Ainsi, au moment de prendre l'opinion des pratiquants, nous avons laissé la possibilité de répondre par une échelle allant de 1 à 4, de « pas du tout d'accord » à « tout à fait d'accord » à un certain nombre d'items. Une échelle sur 4 points permet d'éviter les réponses neutres que l'on peut retrouver sur une échelle à 5 points par exemple. Toute fois, une réponse sur 4 points oblige le répondant à prendre une opinion, le cas contraire il aura tendance à ne pas répondre à la question. N'oublions pas que les enquêtes ont pour présupposées que toute personne a une opinion mais aussi qu'elle a envie de l'énoncer. Or, les enquêtes par questionnaire oublient le fait que les individus ont des réserves d'information, « des faits qui concernent l'individu et dont il entend contrôler l'accès lorsqu'il est en présence d'autrui. »63 La logique du questionnaire étant de récolter des données permettant de connaître les caractéristiques sociales des pratiquants mais aussi de questionner les opinions sur la pratique afin de faire émerger les points de divergences entre les pratiquants.

    Une fois le questionnaire stabilisé, nous avons créé puis mis en ligne une version numérique accessible par un lien. Nous avons laissé le questionnaire sur internet de fin janvier à début mars afin que les pratiquants aient un temps suffisant pour y participer. Afin d'y répondre, nous avons envoyé le lien, par mail, aux 2002 personnes composant

    62 Cf. annexe 6

    63 Goffman, E. (1973) Les relations en public, Minuit, Paris

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    l'échantillon représentatif. Ce système a permis d'avoir une base de données pour remercier ensuite les participants de leur participation à l'étude.

    3. L'échantillonnage :

    Avec l'accord de la FFKDA, nous avons réalisé une extraction de la base de données des licenciés en prenant en compte les critères d'extraction suivant : la catégorie « Senior » et la discipline « karaté ». Cette extraction a été réalisée Inter Région par Inter Région soit au total 7 extractions. Suite à l'extraction d'une partie de la base de données fédérale pour la saison 2009, a été retenue la population senior pratiquant le karaté, soit 53121 personnes. Trois caractéristiques de la population sont observées afin d'aider à la constitution de la structure de l'échantillon : la répartition géographique ; le sexe ; l'âge.

    Répartition géographique : Répartition par sexe

    Sexe

    Effectifs

    Fréquence

    Homme

    36031

    67,8%

    Femme

    17090

    32,2%

    Total

    53121

     

    Inter-Région

    Effectifs

    Fréquence

    1

    13158

    24,8%

    2

    7060

    13,3%

    3

    5352

    10,1%

    4

    7272

    13,7%

    5

    6418

    12,1%

    6

    7419

    14,0%

    7

    6442

    12,1%

    Total

     

    53121

    Anthony METTLER 34

    Profitant de l'information portant sur l'année de naissance, il est possible de calculer l'âge des individus et ainsi obtenir un histogramme précis. Partant de la forme particulière de cette répartition, nous avons choisi de décomposer la population en 5 tranches d'âge, couvrant des volumes de populations similaires.

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    Répartition par tranches d'âge

    Classes d'âge

    Effectifs

    Fréquence

    Non réponse

    1110

    2,1%

    Moins de 27

    10386

    19,6%

    de 27 à moins de 36

    10412

    19,6%

    de 36 à moins de 42

    9945

    18,7%

    de 42 à moins de 49

    10732

    20,2%

    49 et plus

    10536

    19,8%

    Total

    53121

     

    Ensuite, nous avons vérifié qu'il n'y avait pas de grandes disparités dans le croisement de ces trois variables : la répartition par âge n'est pas significativement différente d'une Inter Région à l'autre, la répartition par sexe n'est pas significativement différente d'une Inter Région à l'autre, exceptée pour l'Inter Région 5, qui compte 28 % de femmes au lieu des 32,2% en moyenne, la répartition par sexe est significativement différente en fonction des tranches d'âge retenues (cf. tableau ci-dessous). Ainsi, au-delà de 40 ans, la proportion de femmes diminue fortement, et plus encore au-delà de 49 ans.

    Tableau : % Colonnes. Khi2=687,6 ddl=4 p=0,001 (Très significatif)

    Moins de 27 de 27 à

    moins de 36

    de 36 à
    moins de 42

    de 42 à
    moins de 49

    49 et plus Total

    Homme

    65,8%

    64,3%

    63,5%

    66,9%

    78,2%

    67,8%

    Femme

    34,2%

    35,7%

    36,5%

    33,1%

    21,8%

    32,2%

    Total

    100,0%

    100,0%

    100,0%

    100,0%

    100,0%

    100,0%

    En définitive, compte tenu de ces informations, nous proposons de construire l'échantillon de la manière suivante : partir d'une base de 1001 individus est appliqué une répartition par zones géographiques, puis par sexes et enfin par tranches d'âge. Cela donne les répartitions suivantes :

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    Int.
    Rég.

    Echan t.

    Sexe

    - de
    27 ans

    27 à - de
    36 ans

    36 à - de
    42 ans

    42 à - de
    49 ans

    49 ans et +

    Total

    1

    248

    H

    33

    33

    30

    34

    40

    170

    F

    16

    19

    16

    16

    11

    78

    2

    133

    H

    18

    18

    16

    17

    19

    88

    F

    10

    10

    10

    9

    5

    45

    3

    101

    H

    14

    13

    11

    14

    16

    68

    F

    8

    7

    7

    6

    5

    33

    4

    137

    H

    18

    17

    18

    20

    19

    92

    F

    8

    11

    10

    10

    6

    45

    5

    121

    H

    17

    16

    15

    17

    22

    87

    F

    7

    7

    8

    7

    5

    34

    6

    140

    H

    18

    16

    17

    19

    21

    91

    F

    11

    10

    11

    11

    7

    49

    7

    121

    H

    15

    15

    14

    17

    20

    81

    F

    8

    9

    9

    8

    6

    40

    Total

    1001

    H

    133

    128

    121

    138

    157

    677

    F

    68

    73

    71

    67

    45

    324

    Total

    201

    201

    192

    205

    202

    1001

    Ce tableau rassemble l'ensemble des données de l'échantillon représentatif. La première colonne nous renseigne sur l'Inter Région concernée, la seconde colonne nous indique le nombre de personnes composant l'échantillon par Inter Région puis la troisième colonne précise la répartition de chaque échantillon en fonction du sexe des pratiquants. Dès lors, nous avons la répartition de l'échantillon par Inter Région, par sexe et par tranche d'âge.

    L'échantillon est ensuite construit selon ces quotas et par tirage aléatoire sur les 9329

    personnes disposant d'une adresse mail que compte les 53121 personnes de la base de données ayant plus de 18 ans et ayant une adresse mail.

    Anthony METTLER 37

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    4. L'envoi des mails

    Afin d'expliquer au mieux la méthode utilisée mais aussi pour valider le taux de participation à l'enquête, il est nécessaire de mettre en lien l'échantillonnage avec le nombre de mails invalides afin d'avoir le chiffre exact de participants. C'est en ce sens qu'il est important de présenter les synthèses d'envoi des deux échantillons composés chacun de 1001 personnes, soit au total un échantillonnage complet de 2002 individus. A noter, que nous avons envoyé les mails par tranches comprises entre 150 et 210 mails journaliers64.

    Premier échantillon65 :

     

    Nombre de mails envoyés

    Nombre de mails erreurs

    1er envoi

    156

    26

    2ème envoi

    180

    33

    Sème envoi

    218

    46

    4ème envoi

    230

    76

    5ème envoi

    217

    66

    Total

    1001

    247

    Deuxième échantillon66 :

     

    Nombre de mails envoyés

    Nombre de mails erreurs

    1er envoi

    241

    42

    2ème envoi

    142

    38

    Sème envoi

    203

    48

    4ème envoi

    205

    59

    5ème envoi

    210

    54

    Total

    1001

    241

    64 Cf. annexe 7

    65 Nous avons eu un retour de 247 mails invalides que nous avons appelé « mails erreurs ».

    66 Nous avons un retour de 241 « mails erreurs » sur l'envoi du second échantillon.

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    Anthony METTLER 38

    Nous pouvons donc dire que sur l'ensemble de l'échantillon composé de 2002 individus, nous avons eu un retour total de 488 « mails erreurs ». Cela signifie qu'il y a en réalité 1514 individus qui ont reçu un mail et 442 personnes ont participé à l'enquête soit un taux de retour de 29,2%. Cependant, l'échantillon reste représentatif étant donné que la répartition des pratiquants par sexe et âge sont respectés. Dès lors, nous n'avons pas effectué de redressement. Aussi, nous avons établit un échantillon sur la base de quotas ce qui signifie que nous avons sélectionné des pratiquants de karaté se répartissant selon les mêmes caractéristiques et les mêmes proportions que l'ensemble de la population étudiée67.

    5. Les entretiens :

    L'entretien se distingue de la méthode par questionnaire en raison de « la mise en oeuvre de processus fondamentaux de communication et d'interaction humaine »68. Dès lors, nous avons recherché à aller au plus près des pratiquants afin de privilégier un contact direct avec l'interviewé sans pour autant être trop directif. Aussi, nous avons cherché à recueillir des informations et des éléments de réflexion riches et nuancés qu'il n'est pas possible d'avoir par questionnaire. Ici, nous parlons d'échange dans le sens où l'entretien est le moment où le chercheur va pouvoir récolter les perceptions que l'interlocuteur a des événements ou des situations mais aussi des interprétations ou des expériences.

    L'idée directrice de l'ensemble des entretiens que nous avons réalisé est d'accéder et de garantir un degré maximum d'authenticité et de profondeur. Nous avons continuellement cherché à rester en éveil de sorte que nos interventions proposent des éléments d'analyse pertinents. Plus précisément, nous cherchions à faciliter l'échange tout en essayant de mettre en confiance la personne interviewée. Ainsi, la « chaleur » que nous avions au moment des entretiens participe à ne pas oublier que nous cherchons à prendre le point de vue du pratiquant avec toute la richesse que cela inclue.

    Dès lors, nous avons interrogé des pratiquants69 ayant répondus au pré-test ainsi qu'au questionnaire en ligne. Toutefois, réaliser des entretiens avec des individus aux profils différents nous semblait nécessaire. En effet, pour rendre de compte de la diversité des conceptions et des expériences nous avons sélectionné des personnes d'après les critères suivant : l'âge, le sexe, le grade, le niveau d'engagement dans la pratique (fonctions,

    67 Meynaud, HY. & Duclos, D. (2007) Les sondages d'opinion, La Découverte, Paris

    68 Quivy, R. Van Campenhoudt, L. (2005) Manuel de recherche en sciences sociales, Dunod, Paris

    69 Cf. annexe 8

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    Anthony METTLER 39

    responsabilités, élu, arbitre, enseignant...), la pratique de compétition ou non. De plus, nous avons pris en compte le lieu géographique de la pratique afin de respecter la logique que nous avions établie pour l'échantillon du questionnaire, à savoir une répartition par Inter Région.

    Afin de garantir la régularité des thèmes abordés avec l'ensemble des interlocuteurs nous avons construit un guide d'entretien70. Cependant, nous avons réalisé ces entretiens sous la forme semi-directive, c'est-à-dire que nous avons construit le guide d'entretien autour d'axes ou de thèmes afin de ne pas restreindre les possibilités de réponse par des questions fermées. Etant donné que chaque entretien a son propre rythme et que les vécus de chacun sont différents, nous avons abordé certains thèmes et d'autres fois cela n'a pas été possible. Il n'empêche que nous avons privilégié le fait que le pratiquant amène lui-même certains sujets afin que celui-ci puisse parler le plus librement et naturellement possible.

    Une fois l'entretien réalisé puis retranscrit, nous le traitons71 de sorte à faire ressortir les thèmes important tels que la définition de la pratique ou encore des éléments plus personnels comme les déterminants sociaux. Ainsi les éléments récoltés par entretien permettront, dans un premier temps, de donner du sens aux résultats que nous trouverons, dans un second temps, d'établir les profils de pratiquants.

    6. Les biais résultants de ce type de méthodologie :

    Malgré la pertinence de l'utilisation d'un questionnaire en ligne sur internet, nous relevons différents biais possible. En effet, le nombre de fois où l'on peut répondre au questionnaire n'est pas limité car il n'y a pas contrôle d'entrée sur le site d'hébergement. Aussi, l'accès à la messagerie internet n'est pas facile pour des personnes n'ayant pas l'habitude de l'utilisation d'une telle procédure. Un autre biais serait le temps passé à remplir le questionnaire en raison du nombre de questions, presque 90 en tout. En ce qui concerne les entretiens, nous avons identifié un biais n'excluant pas d'autres encore. Il s'agit de la distanciation du chercheur avec le terrain et l'objet de recherche. En effet, la connaissance des réseaux et du « milieu » karaté a permis d'interviewer des personnes de caractéristiques très différentes, cependant, les règles et codes implicites n'ont peu être pas suffisamment été explicité.

    70 Cf. annexe 9

    71 Cf. annexe 10

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    V. Caractéristiques et éléments structurants de la population de pratiquants :

    1. Les caractéristiques de la population de pratiquants :
    a) Répartition entre Hommes et Femmes

    Le tableau ci-dessous rassemble les résultats issus du questionnaire. Il nous indique que la répartition Homme/Femme est inégale au sein de la population de pratiquants. En effet, il y a 299 Hommes soit 67,6% contre 143 Femmes soit 32,4% de l'effectif total des licenciés de plus de 18ans.

    Or, cette répartition respecte les proportions de l'échantillon représentatif réalisé à partir de la base de données de la FFKDA, à savoir :

    Homme

    36031

    67,8%

    Femme

    17090

    32,2%

    Cette information nous permet d'affirmer que l'échantillon est représentatif car les valeurs de répartitions entre les hommes et les femmes ayant plus d 18 ans restent sensiblement les mêmes. De plus, le tableau nous renseigne sur le fait que le nombre d'hommes est significativement plus important que le nombre de femme. Toute fois, en comparaisons des chiffres statistiques concernant « les femmes dans la pratique sportive en 2002 »72 pour un total de 209 948 licenciés Homme/Femme, il y avait un pourcentage de 26,6% de licenciées Femme pratiquant le karaté. Ce qui signifie que depuis 7 ans nous assistons à une féminisation de la population de pratiquants. Concrètement, au mois de mai 2009, il y avait 194 819 licenciés à la FFKDA soit 135 864 Hommes (69,73%) pour 58 955

    72 Source Ministère de la santé des Sports et le Vie Associative (2002) les femmes dans la pratique sportive en 2002, bulletin de statistiques et d'études

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    Anthony METTLER 41

    Femmes (30,26%). Autant dire que malgré une diminution de 15 129 licenciés sur 7 ans, il y a une différence de +3,66%. Cela peut s'expliquer par une diversification de l'offre de la pratique mais également par le fait que le message de la fédération ce soit réorienté sur le public féminin. L'appelation que propose le ministère comme « public cible » permet de faciliter l'accès des femmes au karaté. Aujourd'hui, une pratique comme le body-karaté illustre ce nouvel aspect de la pratique.

    b) La répartition par tranche d'âges

     

    Moins de

    27

    de 27 à
    moins de

    de 36 à
    moins de

    de 42 à
    moins de

    49 et plus

    Total

     
     

    36

    42

    49

     
     

    Echantillon
    issu

    402

    402

    384

    410

    404

    2002

    FFKAD

    20,07%

    20,07%

    19,19%

    20,48%

    20,18%

    100%

    Population
    étudiée

    86

    88

    77

    79

    90

    420

     

    20,47%

    20,95%

    18,34%

    18,81%

    21,42%

    100%

    Concernant les années de naissances nous pouvons dire qu'il y a une répartition des années de naissance assez homogène sur l'ensemble de la population. Dès lors, la pratique du karaté ne semble pas intéresser que les plus jeunes, au contraire, cette répartition homogène de la population nous montre que chacun trouve un intérêt à pratiquer le karaté quelque soit l'âge. Toutefois, nous ne pouvons par recouper différentes données pour l'instant. Par exemple, nous ne savons pas combien de pratiquants de moins de 27 ans ont commencé cette année. Aussi, nous avons établit un échantillon sur la base de quotas ce qui signifie que nous avons sélectionné des pratiquants de karaté se répartissant selon les mêmes caractéristiques et les mêmes proportions que l'ensemble de la population étudiée73. Dès lors, nous pourrons dire que l'échantillon est représentatif que s'il reste fidèle à l'original, c'est-à-dire qu'il comprend les mêmes pourcentages de femmes et d'hommes ou, dans notre cas, une répartition par styles fidèle aux données fédérales. En ce sens, nous cherchons à vérifier que les résultats obtenus respectent les mêmes proportions que l'échantillon. Pour le moment, la répartition par sexe et tranche d'âge restent fidèle à l'ensemble des caractéristiques de l'échantillon.

    73 Op. cit. Meynaud, HY. & Duclos, D.

    Anthony METTLER 42

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    c) Professions et Catégories Socioprofessionnelles (PCS)

    Afin de connaître les catégories socioprofessionnelles des pratiquants nous avons établi les paramètres sur un code allant de 1 (Etudiants) à 9 (Retraités). Dès lors, la population de pratiquants se compose de 13,8% d'étudiants, de 0,7% de personnes n'ayant jamais occupé d'emploi, de 0,2% d'agriculteur exploitant, de 6,1% d'artisans, commerçant et chefs d'entreprise, de 36,2% de cadres et professions intellectuelles supérieures. Concernant les professions intermédiaires, elles sont représentées à 12%, il y a 21,7% d'employés, 5% d'ouvriers, enfin, 2,5% de retraités.

    En effet, le nombre de cadres ou de professions intellectuelles supérieures ainsi que le nombre des employés sont plus important par rapport au reste des PCS. Les deux PCS que nous venons de citer sont significativement représentées. Elles totalisent ensemble 57,9% des PCS présentent au sein de la population. Contrairement aux études de Jean Paul Clément sur les pratiques telles que le judo, la lutte ou bien l'aïkido qui disent que les pratiquants ont des caractéristiques sociales similaires ; le karaté semblerait atypique en raison des PCS en présence au sein de la population et du type de rapport au corps proposé par la pratique. Le fait qu'il puisse coexister des cadres ou professions intellectuelles supérieures ainsi que des employés traduit le fait que la pratique du karaté aujourd'hui répond à plusieurs logiques en raison de la diversification de l'utilisation des techniques du corps, c'est-à-dire que l'on peut travailler le karaté d'une façon rude basée sur l'efficacité technique qui pourrait correspondre aux PSC de type employés ou bien travailler le karaté d'une manière plus souple basée sur une recherche sur soi pour apprendre à mieux se maîtriser qui pourrait correspondre aux cadres ou professions intellectuelles supérieures. Dès lors, il va être important de connaître le niveau d'étude des pratiquants et d'analyser les différentes orientations de la pratique par l'intermédiaire des questions d'opinions.

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    Anthony METTLER 43

    d) Le temps de pratique en karaté

    Au moment de la création de l'échantillon représentatif il n'y avait pas de renseignements concernant le temps de pratique en karaté par individu. En effet, la base de données ne tient pas compte du passé des pratiquants. Or, cette donnée est intéressante dans le sens où nous connaissons dès à présent la manière dont se répartie la population en fonction du temps de pratique. Notons que le temps de pratique est indépendant du grade obtenu car il est possible de pratiquer toute une vie sans pour autant passer la ceinture noire.

    45,00%

    40,00%

    35,00%

    30,00%

    25,00%

    20,00%

    15,00%

    10,00%

    5,00%

    0,00%

    moins de 2

    De 2 àDe 4 à De 6 à De 8 à De 10 à 12 et

    4 6 8 10 12 plus

    années de pratique

    Aussi, nous pouvons voir que les pratiquants de karaté sont inégalement répartis. Concrètement, 40% des karatéka pratiquent depuis plus de 12 ans et 60% des karatéka pratiquent depuis moins de 12 ans. Ce qu'il est pertinent de relever est la diminution de la répartition des pratiquants entre 6 à 12 ans de pratique. Cela pourrait signifier que plus l'on avance dans le temps de pratique moins il y aurait de personnes par tranche d'ancienneté. Nous pourrions imaginer, au-delà des 12 ans de pratique, qu'il y ait de moins en moins de pratiquants. L'autre point important concerne l'idée que 29,2% des karatéka pratiquent depuis moins de 6 ans, ce qui nous informe sur l'idée que la population de karatéka aujourd'hui est jeune en temps de pratique.

    Donc, cette population semble être structurée sur un modèle pyramidale, c'est-à-dire

    que nous retrouvons beaucoup de pratiquants ayant peu d'ancienneté dans la pratique et de moins en moins de pratiquants anciens. Ici se pose la question de l'évaporation et de la

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    Anthony METTLER 44

    fidélité des pratiquants pour le karaté. Il serait intéressant de questionner les raisons qui amènent à continuer et à stopper la pratique.

    e) Présentation des styles pratiqués

    Pour cette question, les paramètres sont établis sur un code de 1 (karaté contact) à 10 (autre). L'intention de cette question est de mettre à jour la répartition des pratiquants en fonction des principaux styles de karaté. C'est en ce sens que la fédération identifie et catégorise la pratique du karaté, cependant, il manque trois données : le « body-karaté », le « shotokaï » et le « kempo ». En effet, la question de l'intégration du body-karaté comme « style » de karaté se pose ici. La catégorie « autre » représente 4,8% des styles que nous venons de citer. Or, nous pourrions penser que ses 4,8% regrouperaient les pratiquants de body-karaté ou de kempo. Ce qui signifie que les pratiquants ayant répondu « autre » se considèrent comme étant karatéka. Toute la difficulté de notre travail se cristallise ici.

    En effet, nous parlons d'un karaté ayant de multiples facettes alors que les styles engendrent des perceptions différentes de cette pratique. Quoiqu'il en soit, nous pouvons dire que la « suprématie » du style « shotokan » est belle et bien présente pour 68,6% des pratiquants. Suivie des pratiquants du style « wado-ryu » à 13,3%, puis des « shito-ryu » à 5,2%, des « shukokaï » à 2%, des « kyokushinkaï » à 1,8%. Enfin, les styles très peu représentés sont les pratiquants de style « shorinji-ryu » (0,9%), « goju-ryu » (0,5%) et « uechi-ryu » (0,5%). Dès lors, il va être intéressant de faire la relation entre la répartition des données fédérales et la population de répondants74. La comparaison nous montre que la hiérarchisation des styles est respectée, au regard des données fédérales, à savoir le « shotokan » à 69,98%, le « wado-ryu » à 9,28%, le « shito-ryu » à 5,38% et le « shukokaï »

    74 Cf. annexe 11

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    à 1,59%. Notons que les pourcentages entre les deux types de données sont proportionnels et fidèles donc la population analysée est toujours représentative.

    f) La répartition des pratiquants par grade

    30,00%

    25,00%

    20,00%

    15,00%

    10,00%

    5,00%

    0,00%

    Couleur Marron 1er dan 2ème dan 3ème dan 4ème dan 5ème dan 6ème dan

    Grade

    Les paramètres sont codifiés comme : Couleur/kyu, Marron/1er kyu , 1er dan, 2ème dan, 3ème dan, 4ème dan, 5ème dan, 6ème dan, 6ème dan et plus. Tout d'abord, nous pouvons dire qu'il n'y a pas d'individu ayant un grade supérieur au 6ème dan. Ensuite, Il est important de rappeler que le grade en karaté, que nous appelons « Dan », est une validation du niveau de compétence technique reconnu par l'Etat par l'intermédiaire de la Commission Nationale Spécialisée des Dans et Grades Equivalents de la FFKDA75. Nous pouvons voir que les pratiquants titulaires du 1er dan sont les plus nombreux à 28,1% suivi de très près par les pratiquants ayant une ceinture de couleur à 26%. Ensuite, cette population est constituée de 18% de personnes ayant la ceinture marron, de 12,2% de pratiquants ayant un 2ème dan, de 2,5% de personnes ayant le 4ème dan et le 5ème dan, enfin, 0,5% des pratiquants ont le grade de 6ème dan. A noter qu'il existe des paliers entre chaque grade, entre le 1er dan et le 2ème dan il faut attendre 2 ans ; entre le 2ème dan et le 3ème dan il faut attendre 3 ans. Ceci jusqu'au 6ème dan.

    Il importe que la répartition des grades soit organisée de façon pyramidale. Concrètement, plus l'on « monte » en grade moins il y a de pratiquants gradés avec,

    75 C'est-à-dire que « l'usage irrégulier d'un titre protégé (le Dan) est constitutif d'une usurpation de titre susceptible de faire l'objet de poursuites sur la base de l'article 259 du code pénal. Cet article puni d'un emprisonnement de 6 mois à 2 ans et d'une amende de 230€ à 6 100€ "celui qui, sans remplir les conditions exigées pour le porter aura fait usage ou se sera réclamé d'un titre attaché à une profession légalement réglementée, d'un diplôme officiel ou d'une qualité dont les conditions d'attribution ont été fixées par l'autorité publique », source : site officiel de la Fédération Française de Judo et Disciplines Associées.

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    Anthony METTLER 46

    toutefois, une base composée de nombreux pratiquants. Ce phénomène s'explique par le fait que les exigences techniques, physiques et de recherche sont de plus en plus importantes. L'exemple le plus marquant est l'obtention du 6ème dan. En effet, il est impératif de produire un mémoire suivi d'une soutenance pour obtenir ce grade. Pourtant, si l'on additionne les pratiquants ayant une ceinture dite de « couleur » et les pratiquants ayant un « Dan », nous pouvons voir que sur l'ensemble des répondants soit un total de 96,7%, il y a 44,1% de pratiquants ayant une ceinture de couleur contre 52,6% de « gradés »76. Cette tendance peut s'expliquer par la politique mise en place par la fédération en ce qui concerne les grades, c'est-à-dire de faciliter l'accès aux grades pour tous. D'ailleurs, cette politique semble être très controversée par certains pratiquants suite à nos observations informelles sur le terrain.

    g) Les stages de karaté

    A la question « au cours des 12 derniers mois, avez-vous participé à un ou plusieurs stages de karaté ? », 64,3% des pratiquants répondent « oui » contre 34,6% qui répondent « non ». Plus particulièrement, lorsque que nous demandons aux personnes ayant répondu « oui » de préciser la nature des stages réalisés, nous avons 73,31% qui répondent en faveur d'un stage expert, 36,4% ont fait un stage avec leur enseignant référent, 37,01% ont fait un stage de préparation aux passages de grade, 26,33% ont participé à un stage d'arbitrage, 16,37% se sont présentés à un stage de préparation à la compétition, enfin, 9,61% ont suivi un stage de formation comme juge de passage de grade. Ce classement nous montre l'importance accordée par les pratiquants aux stages avec les experts.

    d'un stage expert

    73.31%

    d'un stage de préparation au passage de grade

    26.33%

    d'un stage de préparation à la compétition

    16.37%

    d'un stage avec votre enseignant référant

    37.01%

    d'un stage d'arbitrage

    19.57%

    d'un stage de juge en passage de grade

    9.61%

    76 L'expression « gradé »dépend du contexte dans lequel ce situe le pratiquant. Par exemple, un 3ème dan parlera des « gradés » en référence au 5ème dan présent à ce moment. Tandis qu'« une ceinture de couleur », autrement dit un pratiquant n'ayant pas la ceinture noire, considérera quelqu'un comme « gradé » à partir du 1er dan.

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    En effet, certaines régions, comme la Bretagne, ont mis en place un pool d'experts régionaux77 en complément du pool d'experts fédéraux, reconnu par la fédération, constitué des karatéka les plus haut gradés sur le territoire. Cependant, si l'on regarde la répartition des réponses et l'importance accordée à certains types de stage, nous pouvons affirmer que les pratiquants recherchent avant tout des stages techniques avec un expert, leur enseignant ou bien des stages permettant de se préparer aux passages de grade.

    h) La part de compétition dans la pratique

    Ici, la question posée est « au cours des 12 derniers mois, avez-vous participé à une ou plusieurs compétitions de karaté (kata et/ou combat) ? ». Les répondants, au nombre de 435, ont majoritairement dit « non » à 83,91% contre 16,09% qui ont répondu « oui ». Ce qui signifie qu'un nombre conséquent de pratiquants ayant au dessus de 18 ans ne sont pas intéressés par l'aspect compétitif du karaté. Toutefois, nous pouvons voir les réponses à cette question dans l'autre sens, c'est-à-dire qu'une partie des karatéka pratiquent la compétition. En ce sens nous avons ici deux orientations possibles du karaté : les compétiteurs et les non compétiteurs. Pourtant, cette catégorisation reste assez réductrice car il a beaucoup de cas qui peuvent se présenter. En effet, cette donnée ne nous informe pas au-delà des 12 derniers mois. Prenons l'exemple d'un compétiteur combat qui a fait une carrière de plus de 10 ou 15 années et qui a arrêté il y a 13 ou 14 mois, il ne pourra pas répondre « oui » à cette question. Il n'empêche que cette question contribue fortement à photographier la population de pratiquants d'aujourd'hui.

    77 Le pool d'experts régionaux au sein de la Ligue de Bretagne a pour objectif de proposer les compétences et l'expérience de pratiquants, gradés au minimum du 5ème dan, pris en charge en partie par la ligue et le département qui accueil le stage.

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    i) Le type de dojo pour la pratique du karaté

    Nous pouvons dire qu'actuellement les pratiquants de karaté peuvent s'exercer au sein de club municipaux pour 45,98% d'entre eux et dans d'autres types de dojo pour 46,44% pour d'autres. Nous n'avons pas plus d'informations concernant les autres types de dojo cependant il est possible qu'il s'agisse de salle de sport de type remise en forme mais sans avoir plus de détail. Si nous prenons en considération le fait qu'il puisse s'agir de clubs de type « salle de sport » nous pouvons penser que les intentions ne seront pas les mêmes que le club ou dojo municipal. En effet, la pratique au sein d'une salle de sport répond à une logique de commercialisation et de multiplication des offres afin d'avoir un maximum de rendement dans l'objectif de gagner de l'argent pour exister. Tandis que le dojo municipal sera dans l'idée de ne pas rentabiliser mais plutôt demander le minimum pour assurer les actions ou l'encadrement des activités.

    j) L'activité « administrative » des pratiquants

    A cette question nous demandions aux pratiquants de nous informer sur les possibles activités « administratives » qu'ils peuvent exercer dans le domaine du karaté comme président, trésorier, responsables de commission ou alors dans une direction technique. Nous constatons que 61,19% n'ont pas d'activité administrative et que 38,81% en exerce une.

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    Pour affiner le propos, ceux ayant répondu « oui » à cette question s'occupent principalement de leur club (91,07%), puis du département (23,21%), ensuite de leur région (10,12%) et 1,19% ont une activité administrative au niveau national. Notons que l'activité au sein des clubs est très importante et que plus on monte dans les strates de l'organisation fédérale moins il y a de monde. Or, actuellement la fédération a fait le constat qu'il manquait de gens pour faire fonctionner cet ensemble complexe comme dans toutes les fédérations d'ailleurs. Et dans certain cas, il arrive que des clubs fonctionnent avec une composition de bureau dit « familiale ».

    Cette tendance confirme les travaux d'Emmanuelle Walter concernant la crise du bénévolat c'est-à-dire que « les propos des bénévoles sur le thème de "la crise du bénévolat« varient en fonction du type d'associations sportives dans laquelle ils oeuvrent ; en effet, si les causes profondes de ce« malaise« sont produites par des mutations sociales, économiques et symboliques qui dépassent très largement le cadre du monde sportif et associatif, on peut aussi analyser ce sentiment de «crise du bénévolat« comme produit par l'inadaptation (voulue ou subie) des associations sportives aux réalités économiques et symboliques actuelles ; or ce «décalage« entre une certaine conception du sport associatif et de l'engagement bénévole et les attentes en matière de pratique sportive n'est pas le même pour toutes les associations sportives. » En karaté, l'indicateur le plus marquant de ce phénomène est l'arbitrage comme nous avons pu l'entendre au cours de l'Assemblée Générale de la FFKDA qui s'est déroulé en Décembre 2007 au Comité National Olympique et Sportif Français. Au cours de cette assemblée, un certains nombre de Présidents de Ligues apportaient leurs témoignages quant à la difficulté de recruter des arbitres bénévoles au niveau départemental et régional. Le point suivant permet de mieux éclairer ce problème.

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    k) Les diplômes d'arbitrage des pratiquants

    Concernant les diplômes relatifs à l'arbitrage que peuvent posséder les pratiquants, 85,08% d'entre eux disent « aucun », puis 5,13% en ont un au niveau départemental, 6,29% au niveau régional, 3,03% au niveau national et 0,47% au niveau international. Toutefois, il est nécessaire de préciser que la possession d'un diplôme ne veut pas dire que l'arbitre est en activité. Il faut donc nuancer ceci au même titre que la catégorie stagiaire n'apparaît pas comme choix possible. Plus précisément, il est de plus en plus dur de trouver et de former des arbitres pour veiller au bon déroulement des compétitions en raison du temps passé le weekend end sur les manifestations sportives, ce qui est peut-être la raison de la faible participation des pratiquants à l'arbitrage. Il est possible d'accéder à l'arbitrage dès 14 ou 15 ans par l'intermédiaire de l'école des jeunes arbitres qui, normalement, existe au sein de chaque ligue. Après 18 ans, il est obligatoire de passer par la commission régionale ou départementale d'arbitrage qui forme les arbitres jusqu'au niveau national, ensuite, il y a un examen national d'arbitrage en combat et en kata une fois par an en alternance. En ce qui concerne l'influence de l'arbitrage sur la perception de la pratique, nous pouvons relever des entretiens que les arbitres interrogés tentent de faire respecter les codes et l'esprit qui leur semble important. Les deux pratiquants/arbitres interrogés voient le karaté comme une école de vie permettant d'apprendre à se cadrer. Toutefois, les entretiens ne sont pas suffisamment accès sur cette question, il n'empêche que nous pouvons nous demander si la vocation d'arbitre ne serait pas conditionnée par la vision que les arbitres ont de leur propre pratique du karaté.

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    l) Les diplômes d'enseignement des pratiquants

    En ce qui concerne les diplômes d'enseignement78, nous constatons que 70,02% des pratiquants n'en ont pas. Le DIF est représenté à 14,75%, puis le BEES1 à 8,67%, le DAF à 3,28%, l'AFA à 1,17%, enfin le BEES2 à 1,1%. Il y a seulement deux pratiquants titulaires du BEES3 en karaté en France. Il n'empêche que les pratiquants de karaté semblent être plus intéressés par le DIF ou bien le BEES1 que les autres diplômes.

    Pour plus de précisions, il faut savoir que les diplômes fédéraux comme l'AFA, le DAF et le DIF ne permettent pas de travailler contre rémunération, a contrario du BEES1 et BEES2. De plus, les formations fédérales sont accessibles tant sur les contenus que sur les tarifs contrairement aux diplômes d'Etat de type BEES dont la formation est proposée par le Ministère des Sports, pour le tronc commun, et la fédération pour la partie spécifique. Il faut compter environ 30€ pour l'AFA (8h de formation), 100€ pour le DAF (14h de formation et stage d'organisation compris) et 280€ pour le DIF (94h de formation plus stages d'organisation et d'expert). Ce qui nous amène à penser que les pratiquants de karaté privilégient des formations fédérales courtes qui ne sont pas très onéreuses et qui leurs permettront d'avoir une base de connaissances et de compétences suffisante pour enseigner dans un club. Les pratiquants sont ici dans la logique de l'utilité de la formation sans pour autant qu'il y est une recherche de qualité.

    78 AFA = Attestation de Formation d'Assistant ; DAF = Diplôme d'Animateur Fédéral ; DIF = Diplôme d'Instructeur Fédéral ; BEES 1 = Brevet d'Etat d'Educateur Sportif 1er Degré ; BEES 2 = Brevet d'Etat d'Educateur Sportif 2ème Degré

    m) Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 52

    L'enseignement du karaté

    Dans la mesure où 69,66% des pratiquants n'ont pas d'activité d'enseignement contre 30,34% d'enseignant, si l'on compare le nombre de personnes identifiées comme « enseignant » et les personnes qui disent enseigner, nous pouvons dire qu'il semblerait qu'il y ait une différence. En effet, si l'on comptabilise les données des titulaires de diplômes fédéraux ou bien d'Etat cela représente 28,5% soit légèrement moins que les pratiquants qui se disent enseigner. Ce qui signifie qu'il y a 1,4% des personnes se disant « enseignant » qui n'ont pas de diplôme pour. Nous pouvons dire que la politique de formation menée par la fédération fonctionne dans le sens il y a très peu de personne qui enseigne sans diplôme.

    n) La « motivation » pour l'entrainement

    A la question « selon vous, il vous arrive de manquer un de vos cours de karaté », nous pouvons voir qu'il y a peu de pratiquants qui manquent un cours.

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    Anthony METTLER 53

    De plus, les raisons invoquées par ces individus concernant le fait de manquer un cours sont, premièrement, le « travail » pour 66,05%, puis la « maladie » pour 27,02%, ensuite la « famille ou le conjoint » pour 26,33%, suivi d'une « blessure » pour 25,40%, puis la « fatigue » pour 17,78%, mais aussi le « manque de motivation » pour 6,24%, les « transports » pour 3,7%, puis « autre loisir » 3,46%, enfin 6,24% ne précisent pas leur raison et ont répondu « autre ». Ce qui est important de retenir dans le cas des cours manqués c'est que les pratiquants sont très assidus et ne ratent que rarement ou très rarement leur cours de karaté. Donc, nous pouvons dire que les karatéka voient leur pratique comme essentielle pour laquelle une raison indépendant de leur volonté les empêchera de pratiquer.

    2. La perte de sens de la pratique illustrés par les pratiques « périphériques »:

    a) Ceux qui pratiquent un autre art martial ou activité de combat

    Nous pouvons voir que les karatéka ne pratiquent pas d'activités périphériques c'est-à-dire des activités de combat ou qui s'apparentent à des arts martiaux. Parmi ceux qui répondent positivement à cette question, nous relevons deux choses, l'une concerne le fait qu'il existe une diversité de pratiques qui sont aussi bien des disciplines considérées comme « dure » telles que le « kickboxing » avec un travail de renforcement du corps, à l'inverse, nous retrouvons ici des pratiques plus « souples » en terme de contact, l'« aïkido » est un exemple. Nous retrouvons également des pratiques utilisant les armes telles que le « kobudo » ou bien l'« escrime ». La proximité entre le karaté et les autres disciplines peut s'expliquer par les travaux de Jean-Paul Clément dans le sens où le type de pratique en karaté conditionnerait le type de rapport au corps. Dès lors, un pratiquant axant sa pratique sur un

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    renforcement corporel aura tendance à pratiquer une activité telle que le kick boxing, au contraire, un karatéka qui souhaite travailler sur les déplacements et la fluidité dans le mouvement s'orientera vers une pratique telle que l'aïkido.

    Le second élément est la catégorisation du « body-karaté » et du « karaté-contact » comme « autre art martial ou activité de combat ». Dès lors, l'inscription de ces deux facettes du karaté au sein de cette rubrique semble illustrer le manque de définition et de lisibilité de ses pratiques comme styles ou pratiques issues du karaté. Cela veut dire que les pratiquants ayant répondu ces deux modalités de combat ne semblent pas considérer le « body-karaté » et le « karaté-contact » comme du karaté. Plus particulièrement, il est possible que les personnes pratiquant le « body-karaté » aient précisé leur pratique ici en raison de l'absence de cette possibilité dans les styles proposés.

    Nous avons vu que les 14,55% de karatéka pratiquent une autre activité que le karaté, ces pratiques ont des formes particulières de travail, certaines avec armes d'autres non, certaines sur des distances de corps à corps proches, d'autres non. En effet, les 27 activités précisées sur les 60 répondants nous montrent qu'il n'existe pas de lien strict entre le karaté et une autre pratique. Au contraire, le karatéka cherchera dans une autre activité les éléments qui lui permettront de continuer à progresser en accord avec le sens qu'il accorde à sa propre pratique. Cependant, qu'en est-il des activités physiques et sportives et des loisirs, au sens plus large du terme ?

    Anthony METTLER 55

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    b) Ceux qui pratiquent d'autres activités physiques et sportives et de loisirs

    Contrairement à la question précédente, ici, 60,87% des karatéka ont une activité physique et sportive ou de loisirs en plus de leur pratique du karaté, contre 39,13% qui n'en pratiquent pas. Cette question était posée ainsi : « au cours des 12 derniers mois, hormis les pratiques martiales, avez-vous pratiqué d'autres activités physiques et sportives régulière ? ». Dès lors, ce que nous pouvons dire c'est qu'il existe des pratiques assez différentes allant de la « danse » à « l'équitation » ou encore du « handball », de la « moto sur circuit ». L'ensemble des 60,87% de pratiquants ont précisé cette question et nous pouvons ajouter qu'il y a une majorité de pratiquants qui font du jogging ou de la course à pied. Ce qui signifie qu'au-delà de la pratique du karaté, il y a un intérêt pour l'entretien physique et corporel.

    A la question « au cours des 12 derniers mois, hormis les pratiques martiales, quelles ont été vos autres principales activités de loisirs régulières ? ». Nous pouvons indiquer que les pratiquants de karaté ont des activés de loisirs très variées telles que le « théâtre », la « chasse » ou encore le « poker ». Cependant, nous constatons qu'il y a très peu de pratiquants de karaté qui ont des activités ou des loisirs en lien avec l'origine culturelle de la pratique : le Japon. Concrètement, nous n'avons que deux réponses en lien avec la culture japonaise, c'est l'apprentissage du japonais et l'entretien de bonsaï79.

    79 L'origine de la culture des bonsaïs (l'art de « cultiver de petits arbres ») remonte à environ 200 ans avant J.C. Ce n'est que plusieurs années plus tard que les bonsaïs firent leur apparition au Japon (10e siècle). On dit qu'un moine bouddhiste chinois, lors d'un voyage au Japon, apporta avec lui le premier bonsaï et en fit cadeau à un Japonais. Les Japonais ont par la suite amélioré la technique de culture des bonsaïs. C'est pourquoi la culture des bonsaïs est si populaire au Japon.

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    Anthony METTLER 56

    Une recherche effectuée sur une population de pratiquants en Aïkiryu80 en 2007, démontrait qu'il existait une recherche de lien culturel par des loisirs proches de la culture japonaise. En effet, certains Aïkiryuka étaient dans l'optique de pratiquer leur « art du geste » qu'est l'Aïkiryu tout en cherchant à « réenchanter » leur pratique en intégrant certaines caractéristiques culturelles orientales. Cela se traduisait par des activités telles que la calligraphie ou du théâtre japonais. Donc, le peu d'activités en lien avec la culture d'origine traduirait le fait que les karatéka ne cherchent pas nécessairement à avoir ce lien avec la culture japonaise en raison du « désenchantement » existant depuis l'arrivée de la pratique en France. Aussi, ce phénomène peut s'expliquer par la perte progressive du sens de la pratique du fait de sa sportivisation et de son intégration progressive au sien de la culture occidentale, plus rationnelle81. Le processus de rationalisation qu'a subi le karaté peut être la raison pour laquelle les karatéka ne recherchent pas cette attache culturelle. Pour Max Weber, les principales civilisations du monde ont connu un processus de rationalisation, par lequel les actions et les représentations des hommes sont devenues plus systématiques et méthodiques. Toutefois, il lui semble que ce processus a connu une direction spécifique en Occident. Pour Max Weber, le monde occidental se caractérise, en effet, par une rationalisation orientée vers l'action pratique dans le monde, c'est-à-dire par une volonté de contrôle et de domination systématique de la nature et des hommes dans la production de biens matériels. Dès lors, il est possible qu'il puisse y avoir une certaine perte de sens au sein de cette pratique devenue elle-même plus rationnelle.

    3. Le rôle du grade dans la pratique :

    a) Corrélation grade actuel / temps de pratique

    Il faut comprendre la corrélation comme une « variation concomitante de deux phénomène »82, c'est-à-dire qu'en statistique la corrélation entre deux ou plusieurs variables aléatoires ou statistiques détermine l'intensité de la liaison qui peut exister entre ces variables. Une mesure de cette corrélation est obtenue par le calcul du coefficient de corrélation qui est compris entre -1 et 1. Concrètement, plus le coefficient se rapproche de ces valeurs plus la corrélation explique la dépendance des variables. Le graphique ci-dessous représente les 426 points de coordonnées du temps de pratique et du grade actuel.

    80 Mettler, A. (2007) Aïkiryu : un art, une communauté, Mémoire de Master, UFR SEP Brest

    81 Weber, M. (2006) Sociologie de la religion, traduit par Kalinowski, I., Flammarion, Paris

    82 Op. cit. Alpes, Y. Beitone, A. Dolo, C. Lambert, JR. Parayre, S.

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    Ce graphique nous renseigne sur une dépendance significative entre le temps de pratique et le grade actuel (équation de la droite de régression : grade actuel = 0,13 * temps de pratique + 1,26). Le coefficient de corrélation est de +0,80, ce qui signifie que le temps de pratique explique 64% de la variance du grade actuel. Cette corrélation confirme ce qui se passe dans la pratique du karaté, à savoir que plus on avance dans le temps de pratique plus un pratiquant est susceptible de passer des grades. Par exemple, un débutant qui commence le karaté mettra en moyenne 5 ans pour atteindre le niveau ceinture noire sachant que les exigences de la fédération sont d'avoir au moins deux licences. Si l'on prend en compte qu'entre chaque grade il faut attendre un certain nombre d'années, nous pouvons dire que ce résultat illustre tout à fait une réalité de la pratique.

    0,88

    4,95

    temps de pratique

    grade actuel

    b) Le grade comme élément structurant de la pratique

    0,81

    0,69

    0,67

    0,57

    année de naissance profession

    niveau de diplôme temps de pratique style pratiqué

    grade actuel

    diplôme arbitrage diplôme enseigneme

    coef.>0,85 0,85>coef.>0,70 0,70>coef.>0,50

    Nous avons analysé différentes variables telles que l'année de naissance, la profession, le niveau de diplôme, le temps de pratique, le style pratiqué, le grade actuel, le diplôme arbitrage ainsi que le

    0,54 diplôme d'enseignement afin de voir s'il des liens entre chacune de ses variables mais surtout pour vérifier la place qu'occupe le grade au sein de la pratique.

    Anthony METTLER 57

    Cette analyse conforte l'idée d'une forte corrélation entre le « temps de pratique » et le

    « grade actuel » (0,81) comme nous l'avons vu précédemment. Aussi, il y a un élément fort :

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    Anthony METTLER 58

    le « diplôme d'enseignement » qui est à la fois en corrélation entre le « grade actuel » (à 0,69), le « temps de pratique » (0,67), le « diplôme d'arbitrage » (0,57). Il y a également une corrélation entre le « grade actuel » et le « diplôme d'arbitrage » (0,54).

    Il est possible d'expliquer ces différentes corrélations par le fait que le système fédéral français est construit sur la base du grade que l'on obtient avec de l'ancienneté dans la pratique. Notons que le grade est un diplôme d'Etat qui valide un certain nombre de compétences et confère à son détenteur un statut reconnu. En effet, la validation d'un grade donne la possibilité de passer des diplômes d'enseignement de type fédéral ou d'Etat. Aussi, pour passer le Diplôme d'Instructeur Fédéral, il est exigé d'avoir le 1er dan et plus de 18 ans. Plus précisément, un pratiquant souhaitant enseigner sa pratique contre rémunération doit avoir un diplôme d'enseignement de type Brevet d'Etat accessible sous condition d'obtenir le 2ème dan et avoir plus de 18 ans. De plus, étant donné qu'avoir un grade pour obtenir un diplôme d'enseignement est nécessaire, il est donc logique d'avoir de l'ancienneté dans sa pratique. Ce qui explique la corrélation entre ces deux éléments.

    Toutefois, la nécessité d'avoir un grade ne s'arrête pas là. En effet, pour passer un examen d'arbitrage il faut également avoir un grade minimum, par exemple, pour être arbitre national combat il faut être 3ème dan. Ainsi, plus le niveau des compétitions augmente plus il faut être gradé pour passer les examens arbitrage. Pour être juge international en combat, c'est-à-dire avoir le droit d'exercer lors des Championnats d'Europe combat de karaté, il faut être 4ème dan et avoir au moins 30 ans. Ainsi, le lien entre le diplôme d'arbitrage et le diplôme d'enseignement peut s'expliquer par le fait que les arbitres, d'une manière générale, doivent aider à former les nouveaux arbitres et participent activement à la formation continue sur chaque compétition. Egalement, en raison du manque d'arbitres au sein des ligues et des départements, il est possible de retrouver bon nombre d'enseignants à l'arbitrage.

    Nous avons démontré que le grade est l'élément structurant de la pratique du karaté en Français mais également de l'ensemble du système sportif du karaté mondial. En effet, être titulaire d'un grade permet de valider des compétences dans des domaines tels que l'enseignement, l'arbitrage et permet de lier les pratiquants entre eux sans tenir compte des origines sociales ou des caractéristiques de chaque pratiquants.

    Anthony METTLER 59

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    VI. Les opinions et les orientations de la pratique du karaté :

    1. Les résultats de l'étude quantitative :

    Nous avons cherché à questionner les karatéka sur l'orientation de leur propre pratique. La question était posée de cette façon : « hiérarchisez les affirmations suivantes, la première étant celle qui vous correspond le mieux et la dernière celle qui vous correspond le moins ». Ainsi, nous cherchons à détecter, par une catégorisation préétablie suite au pré-test, les grandes orientations de la pratique83. Concrètement, les pratiquants devaient hiérarchiser les orientations de la plus importante à la moins importante pour eux. Ces pôles sont :

    - le pôle « sport/fitness » identifié par l'idée que « le karaté est une pratique qui me permet d'abord de me dépenser ». Cette orientation se rapproche des pratiques sportives, c'est-à-dire que les pratiquants peuvent évacuer les tensions par de l'activité physique qui amène à un état que l'on peut assimiler à de la détente ou du bien être.

    - le pôle « philosophique/mythique » identifié par le fait que « pratiquer le karaté c'est surtout pratiquer un «art martial«, c'est-à-dire une pratique ancestrale imprégnée d'une philosophie ». Ici, nous proposons une orientation du karaté comme la possibilité d'atteindre un idéal par une pratique continuellement en réflexion sur soi et les autres. Il est nécessaire de percevoir ce pôle comme une « épistémologie » du karaté par les pratiquants eux-mêmes, l'intention est de pratiquer tout en ayant une étude critique du karaté.

    - le pôle « self défense » identifié par l'idée que « le karaté est surtout une pratique d'inspiration «guerrière« qui permet d'apprendre le self-défense ». Cette orientation correspond à l'idée de pratiquer le karaté afin de pouvoir répondre à une agression. Plus précisément, les karatéka peuvent également pratiquer leur discipline pour atteindre un état « d'esprit guerrier ». Ne pas avoir peur de l'autre ni de la confrontation et résister à n'importante quelle attaque semble être au coeur du sens qu'accordent certains pratiquants au karaté.

    83 Or, la méthodologie pose un biais car le logiciel utilisé ne permet pas de faire une hiérarchisation stricte dans le sens où chaque réponse ne bloque pas la suivante. Par exemple, si l'orientation première d'un pratiquant est « le karaté est une pratique qui me permet d'abord de me dépenser », rien ne l'empêche de répondre la même chose à la question concernant la deuxième ou la troisième orientation la plus importante

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    Anthony METTLER 60

    - le pôle « social » identifié par « pratiquer le karaté est un moyen d'apprendre à vivre en groupe » renvoi à l'idée que l'une des orientations possibles du karaté réside dans le fait de vivre et de partager des moments particuliers sur le tatami mais également en dehors. Le karaté serait alors le lien qui uni des individus d'origines diverses.

    - le pôle « éthique » identifié par le fait que « pratiquer le karaté c'est d'abord respecter une certaine éthique personnelle de vie ». Les pratiquants qui respectent cette éthique de vie personnelle sont guidés par des valeurs ainsi qu'une conduite de vie, sans pour autant avoir de regard critique sur leur pratique.

    Les résultats sont recueillis de façon à avoir le nombre de réponse par orientation. Ce qui implique que les orientations les plus souvent citées seront prises en compte afin de les hiérarchiser. Dès lors, nous pouvons voir que la première orientation significative est « pratiquer le karaté c'est surtout pratiquer un «art martial«, c'est-à-dire une pratique ancestrale imprégnée d'une philosophie » citée 175 fois soit 39,6%84, suivie de très près par la seconde orientation « pratiquer le karaté c'est d'abord respecter une certaine éthique personnelle de vie » citée 147 fois soit 33,3%. Nous pouvons dire qu'il existe deux orientations principales de la pratique du karaté aujourd'hui. Dès lors, nous pouvons affirmer que les pratiquants sont dans une vision d'une pratique du karaté comme une pratique ancestrale qui contient une certaine philosophie et que ce « karaté » permet aussi de respecter une certaine éthique de vie.

    Ensuite, nous pouvons voir que l'orientation « le karaté est une pratique qui me permet d'abord de me dépenser » est citée 95 fois soit 21,5% et l'orientation « le karaté est surtout une pratique d'inspiration «guerrière« qui permet d'apprendre le self-défense » est citée 111 fois soit 25,1%. Ces deux orientations sont très proches. Enfin, la dernière orientation est « pratiquer le karaté est un moyen d'apprendre à vivre en groupe ». En effet, nous retrouvons dans les tris à plat 41,9% de pratiquants qui la citent. Toutefois, nous ne savons pas qui la cite en premier choix, c'est ce qui sera intéressant de préciser par la suite.

    La hiérarchisation de ces orientations nous informe sur la vision globale que les pratiquants ont du karaté. Aussi, nous pouvons dire que les pratiquants semblent percevoir leur pratique d'abord comme un « art martial » emprunt d'une « philosophie » constitutive d'une « éthique de vie ». Ensuite, le karaté semble permettre aux pratiquants de se dépenser

    84 Cf. annexe 12

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    Anthony METTLER 61

    et d'apprendre à se défendre. Enfin, l'aspect social, c'est-à-dire le fait d'apprendre à vivre en groupe, serait l'orientation la moins importante. Nous pourrions considérer que la hiérarchisation de ses orientations partirait de l'individu, de soi, pour aller vers les autres. Ainsi le pratiquant chercherait d'abord une éthique de vie imprégnée d'une certaine philosophie, puis il chercherait à se défendre et à se dépenser, pour finir sur l'apprentissage de la vie en groupe.

    2. La définition du karaté vue par ses pratiquants : résultats de la question ouverte85

    En complément des résultats quantitatifs, nous apportons des éléments de réponses concernant la hiérarchisation des orientations que les pratiquants ont du karaté afin de préciser le sens que chaque karatéka accorde à sa pratique. Pour ce faire, nous avons recueilli par le questionnaire en ligne 383 réponses à la question : « en quelques mots quelle serait votre définition du karaté ? ». L'analyse des questions ouvertes86 par le logiciel Sphinx® nous donne 39 thèmes qui apparaissent et qui correspondent aux possibilités de réponses. Dès lors, deux logiques peuvent être appliquées, l'une serait de créer des catégories limitées afin de classifier les définitions dans des « cases », l'autre consisterait à prendre chaque définition afin de représenter la richesse de celles-ci. Dans notre cas, nous avons choisi de conserver la richesse des définitions.

    ~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~

    confiance en sol

    compétences techniques

    mode de vie/ethique/ecole

    s'ouvrir aux

    de vie/art de vivre

    ~~~~~~~~~~~~~~~~

    sport/sport de combat

    loisir

    art de guerre

    art de combat

    plaisir

    passion

    spirituel

    sérénité

    pratique/art martial

    corps/esprit

    état d'esprit

    progression/dépense physique

    maîtrise de sol

    conservation

    corps/santé/condition physique

    dépassement de sol

    valeurs/philosophie

    ~~~~~~~~~~~~~~~~~~

    conscience du corps/se bien être/détente

    connaitre/dev

    personnel/épanouissement self défense/auto défense

    respect soi/autres

    86Nous avons procédé à une analyse lexicale par thèmes. Concrètement, nous avons repris les 383 définitions de la pratique du karaté et nous avons classé chaque définition par thème et mots clés. Nous avions la possibilité de créer des thèmes à chaque fois qu'il nous semblait nécessaire de le faire.

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    Anthony METTLER 62

    Le graphique ci-dessus nous montre le classement des thèmes en fonction du nombre de citations. Plus un thème est cité plus il devient important. Nous pouvons voir que le karaté est perçu par ses pratiquants comme « pratique ou art martial ». Ce thème est le plus souvent cité, 100 fois pour une fréquence de 26,1%.

    « Le karaté est un art martial complet, en ce qu'il induit en dynamique interne et

    externe un art spirituel, respectueux de l'autre et de soi, porteur de valeurs, un défouloir
    physique intelligent »

    La pratique du karaté permettrait d'amener le pratiquant vers un équilibre, une maîtrise ainsi qu'un lien entre le corps et l'esprit. (98 citations pour une fréquence de 25,6%)

    « Le karaté permet d'arriver à un équilibre physique et psychique »

    D'ailleurs nous avons retrouvé un certain nombre de fois le slogan que la fédération

    propose dans ses communications qui est « un esprit sain dans un corps sain ». Plusieurs réponses mentionnent cette phrase pour définir leur pratique.

    Toujours d'après les pratiquants, le karaté permet de se « maîtriser » (80 citations pour une fréquence de 20,9%).

    « Le karaté est art martial enseignant avant tout la maitrise de soi. »

    Il apporte certaines « valeurs » ainsi qu'une « philosophie » (79 citations pour une fréquence de 20,6%).

    « Le karaté est une philosophie de vie pour apprendre à se défendre sans avoir recours

    à la violence physique. »

    Les pratiquants voient également leur pratique comme un mode de vie, une école de ou bien un art de vivre (68 citations pour une fréquence de 17,8%).

    « Le karaté est un art de vivre (apprendre à se connaitre, le respect de l'autre, savoir

    se maîtriser, savoir se faire mal) »

    Enfin, une partie des pratiquants voient le karaté comme un « sport » ou bien un « sport de combat » (65 citations pour une fréquence de 17%).

    « Un sport de combat de percussion, polyvalent, permettant de garder une bonne forme

    physique, et qui apprend la maitrise de soi. »

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    Par exemple, nous avons des individus qui nous ont définit le karaté comme « art martial » et qui explique ensuite que ce « sport » à des qualités particulières.

    « Une pratique sportive et martiale qui maintient une hygiène physique et mentale

    saine ainsi qu'un lien social avec un ensemble de personnes adultes et surtout les jeunes

    pratiquants. »

    Nous avons vu que l'analyse lexicale mettait en avant un certain nombre de thèmes, nous pouvons dire qu'il existe beaucoup d'interprétations possibles en ce qui concerne la définition du karaté. Cependant, les notions d'« art martial », d'« école de vie », de « valeurs », de « philosophie » permettent de mieux cerner le sens que les pratiquants donnent à leur pratique.

    Toute fois, nous pouvons dire qu'il existe des oppositions dans les représentations de la pratique, du fait de la présence du thème « sport/sport de combat ». Nous démontrons ici qu'il n'existe pas de consensus stricte quand à la perception que l'ensemble des pratiquants ont du karaté. C'est en ce sens qu'il est impossible de donner une définition stricte du karaté mais plutôt de proposer une règle générale, à savoir que le karaté est une pratique culturelle qui peut être spécifiée par l'usage qui en fait, soit self défense, sportive, social, éthique ou philosophique. Afin de mettre à jour les profils de pratiquants nous allons étudier les opinions que les pratiquants ont du karaté.

    3. Les opinions sur le karaté et ses différents aspects :

    Anthony METTLER 63

    a) La ceinture noire :

    « Obtenir la ceinture noire c'est un but dans la pratique ». Nous constatons ici que 1/3 des pratiquants ne sont pas en accord avec l'idée que la ceinture noire soit un « but ». Cette affirmation peut amener à confusion car il est possible que les pratiquants ne fassent pas la différence entre le but et l'objectif de l'obtention de la ceinture noire. Il faut donc nuancer ce propos.

    CN = un but

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    4

    0,9%

    pas du tout d'accord

    58

    13,1%

    pas d'accord

    112

    25,3%

    plutôt d'accord

    180

    40,7%

    tout à fait d'accord

    88

    19,9%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

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    CN =

    reconnaissance

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    3

    0,7%

    pas du tout
    d'accord

    21

    4,8%

    pas d'accord

    51

    11,5%

    plutôt d'accord

    247

    55,9%

    tout à fait d'accord

    120

    27,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    CN = plus facile

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    15

    3,4%

    pas du tout d'accord

    68

    15,4%

    pas d'accord

    186

    42,1%

    plutôt d'accord

    120

    27,1%

    tout à fait d'accord

    53

    12,0%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Obtenir la ceinture noire c'est une reconnaissance de sa valeur de pratiquant ». La majorité des répondants sont en accord avec l'idée que la ceinture noire soit une reconnaissance de la valeur du pratiquant. Pourtant, nous devons comprendre la notion de ceinture noire au sens idéal du terme. Plus précisément, le sens de la question n'est pas « aujourd'hui, pensez-vous que la ceinture noire corresponde à la valeur des pratiquants ? » mais bien sur la valeur qu'ils accordent à ce grade.

    « Obtenir sa ceinture noire c'est de plus en plus facile ». Bien que 57, 5% des pratiquants soient en désaccord avec cette idée, nous notons qu'il y a tout de même 39,1% des karatéka qui sont en accord avec l'idée que la ceinture noire soit de plus en plus facile à obtenir. D'ailleurs, les entretiens que nous avons réalisés nous ont informés sur l'idée que l'on « donne » les grades et qu'il semble avoir une perte de valeurs de sens dans les grades d'une manière générale.

    Anthony METTLER 64

    Richard87 quant à lui dit « j'ai tendance à devenir irritable lorsque je vois qu'on rend le karaté plus facile, plus aisé, qu'on donne des grades ou des médailles pour récompenser. Tout ça me heurte ! Vers le 2e, 3e dan, on doit connaître quand même de manière poussée son corps. » Il ajoute que « aujourd'hui passer un 1er dan est plus aisé, moi j'entends souvent qu'autrefois on n'était plus méchant, du coup maintenant on délivre plus facilement, comme pour se rattraper des erreurs du passé. » Pour lui « le geste juste fait partie du Budo. Dans les passages de grades, on doit oublier ça, on oublie d'être juste, on flatte. Il ne faut rien dire dans ces cas-là, sinon tu peux être sur de ne pas être convoqué la fois d'après. »

    87 Professeur de karaté, 59 ans, 7ème dan, a commencé le karaté en 1971, titulaire du BEES 2ème degrés, 38 ans de pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    CN = étape

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    7

    1,6%

    pas du tout d'accord

    5

    1,1%

    pas d'accord

    7

    1,6%

    plutôt d'accord

    141

    31,9%

    tout à fait d'accord

    282

    63,8%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Obtenir la ceinture noire c'est une étape dans son parcours de pratiquant ». L'idée de la ceinture comme étape semble être assez consensuelle et ne démontre pas d'oppositions importante. Pour Eric88 « la ceinture noire c'est une finalité pour un débutant. Mais en réalité c'est le véritable premier grade. C'est une porte aux autres grades. C'est le seul grade qui compte vraiment, vu de l'extérieur. C'est un aboutissement, en même temps une première étape,

    Anthony METTLER 65

    un palier, c'est un objectif. Ce n'est pas négligeable du tout. » De plus, sachant que la ceinture noire est le lien entre tous les pratiquants et que sans elle il est impossible d'accéder à certains diplômes, il peut paraître logique que la ceinture noire soit une étape dans le parcours du pratiquants.

    En ce qui concerne la question de la ceinture noire et plus largement des grades, nous pouvons apporter de plus amples informations en nous appuyant sur les entretiens. Tout d'abord, nous pouvons dire que les pratiquants estiment que le niveau d'exigence a baissé depuis quelques années. En effet, Mickael89 trouve par exemple «qu'on perd en qualité, qu'il y a beaucoup moins d'exigences qu'avant. » Pour lui, son 1er dan était un vrai passage, par contre, le 2ème dan lui est paru moins exigent que le 1er dan, il y avait un écart entre ses deux grades. « Par exemple, le kata, Kankudaï, qui se trouvait au passage du 1e dan et qui maintenant est dans la liste du 2 dan. Et pour moi il reste un kata du 1e dan. Je trouve qu'il y a eu un véritable décalage vers le bas qui me dérange. Les katas pour avoir la ceinture marron, ou noire se retrouvent aujourd'hui au passage du 2e dan. C'est plus accessible. » Il pense que la ceinture noire se mérite mais « maintenant ça devient plus une ceinture pour passer une ceinture. »

    88 Marin d'Etat, 46 ans, ceinture blanche, a commencé le karaté en 1976, 5 ans de pratique

    89 Etudiant, sans emploi, 20 ans, 2ème dan, a commencé le karaté en 1993/1994, titulaire du DAF/DIF, 16 ans de pratiques

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 66

    De plus, certains pratiquants estiment que le niveau d'engagement au moment du passage de grade n'est pas suffisant. Angélique90 nous dit « je suis effarée quand je vois la réduction des difficultés dans les passages de grades. Je suis deuxième dan. Moi je trouve que le passage de grade ne correspond pas à l'esprit du karaté, ce n'est pas en 10 kihons, deux katas, et un petit combat codifié que l'on peut noter quelqu'un », pour elle le grade serait « une épreuve où l'on doit être à la limite », elle estime que lorsque « tu sors du passage d'un grade sans avoir l'impression d'avoir tout donné, d'avoir était au bout de quelque chose. C'est très superflu. Alors que dans notre dojo, j'ai vraiment l'impression de me donné plus qu'au passage de grade. Je ne ressens pas l'existence du kata chez les gens, peut-être que cela vient de moi aussi ».

    En ce qui concerne l'âge minimum des pratiquants qui se présentent au passage de la ceinture noire, Martine91 pense que « le fait d'apporter des gens qui sont jeunes, ça dévalue beaucoup la pratique et le grade car ces personnes-là n'ont pas le respect qu'il faut. Ce n'est pas pour rien qu'au Japon, c'est soit tu as la ceinture blanche, soit c'est la noire. Dans notre société, on retrouve une pratique occidentale, surtout dans l'esprit, c'est adapter à notre vie aussi. Je pense que ce n'est pas bien de donner trop jeune les grades, c'est mauvais pour le jeune, pour la pratique et pour l'image. Le fait de permettre de passer le grade à 14 ans contribue à une dévalorisation et une perte de l'esprit qui a été mis en place par les ancêtres

    Aussi, elle conçoit « le début de la pratique du karaté qu'à partir du1e dan. On m'a toujours dit que par la pratique du karaté, les instincts humains s'en vont en laissant la place aux codes. Maintenant baisser l'âge de la ceinture noire a 14 ans, je trouve ça vraiment nul. À cet âge, les personnes n'ont pas le recul nécessaire pour porter ce grade. Ils n'ont pas non plus l'esprit pour cette ceinture car ils n'ont pas l'évolution requise. »

    90 Assistante d'éducation, 22 ans, 2ème dan, a commencé le kobudo en 1999 et le karaté en 2001, BEES 1 karaté, Licence STAPS, 8 ans de pratique

    91 Militaire, 23 ans, 2ème dan, a commencé le karaté en 1991, Juge National Combat, vice-championne de France combat par équipe, 17 ans de pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Enfin, nous avons retenu les paroles de Mathieu92 en ce qui concerne « les passe-droits qui sont attribués dans certains cas, par exemple un compétiteur qui gagne les championnats d'Europe se voit attribuer des grades sans passage officiel. On brade clairement les ceintures et je pense que la valeur d'un karatéka n'a rien à voir avec ses compétences de compétiteur ou de dirigeant. »

    Comme nous venons de le voir, les grades posent un certain nombre de questions quant à l'âge d'obtention, les critères de jugement ou encore le message à faire passer auprès des pratiquants. Nous pouvons dire que les pratiquants se représentent la ceinture noire comme un symbole fort de la pratique mais qui semble perdre de sa valeur. Nous expliquons ce phénomène par le fait que le grade « législatif » prend le pas sur le grade « symbolique ». Concrètement, les jurys de passage de grade auront tendance à noter les pratiquants en fonction de critères sportifs ou compétitifs plutôt que sur des critères de progression et de recherche personnelle.

    b) La compétition en karaté et dans les arts martiaux

    Compétition = important

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    7

    1,6%

    pas du tout d'accord

    65

    14,7%

    pas d'accord

    174

    39,4%

    plutôt d'accord

    151

    34,2%

    tout à fait d'accord

    45

    10,2%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « La compétition dans les arts martiaux c'est important pour connaître sa valeur de pratiquant ». Cette affirmation met en évidence une opposition importante dans le sens où il y a autant de personnes en accord (44,4%) que de personnes en désaccord (54,1%) sur cette question. Aussi la compétition ne semble pas être le lieu qui permet de démontrer la valeur du pratiquant. Plus précisément, le thème de la compétition

    Anthony METTLER b7

    fait émerger des conflits d'opinions au sein des pratiquants. Rappelons que 16% des karatékas ont participé à une compétition kata ou combat au cours des 12 derniers mois. Nous pouvons également nous interroger sur l'importance de la compétition dans le parcours de celui-ci. En effet, un pratiquant ayant fait de la compétition n'a pas les mêmes expériences qu'un pratiquant qui n'en a pas fait. Dès lors, la compétition conditionnerait le sens et les valeurs des karatéka, donc, les orientations de la pratique.

    92 Étudiant, sans emploi, 2ème dan, a commencé le karaté en 1989, Arbitre national combat, 20 ans de pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Compétition =
    contraire AM

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    6

    1,4%

    pas du tout d'accord

    99

    22,4%

    pas d'accord

    216

    48,9%

    plutôt d'accord

    95

    21,5%

    tout à fait d'accord

    26

    5,9%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Compétition =
    appliquer acquis

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    5

    1,1%

    pas du tout d'accord

    30

    6,8%

    pas d'accord

    96

    21,7%

    plutôt d'accord

    247

    55,9%

    tout à fait d'accord

    64

    14,5%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Compétition =
    progrès discipline

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    12

    2,7%

    pas du tout d'accord

    70

    15,8%

    pas d'accord

    155

    35,1%

    plutôt d'accord

    157

    35,5%

    tout à fait d'accord

    48

    10,9%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « La compétition dans les arts martiaux c'est contraire à la pratique d'un art martial ». Une fois encore, il existe une opposition entre les pratiquants en accord (27,4%) et en désaccord (71,3%). Cette affirmation nous montre justement que les pratiquants estiment que l'on peut pratiquer un art martial tout en faisant de la compétition, par contre la compétition n'est pas le lieu qui permet de prouver sa valeur. Alors quelle est la fonction de la compétition si elle ne permet pas de prouver sa valeur ?

    Anthony METTLER 68

    D'après les réponses à l'affirmation suivante : « La compétition dans les arts martiaux c'est une manière d'appliquer ce que l'on a appris », nous pouvons dire que la fonction principale de la compétition est d'expérimenter ses acquisitions techniques. Autrement dit, pour certains la compétition n'est pas le lieu de prouver sa valeur de pratiquant, il n'empêche qu'elle semble être un moyen efficace de pratiquer et d'appliquer les techniques et de faire valoir les valeurs acquises pour une grande majorité des pratiquants.

    « La compétition dans les arts martiaux c'est essentiel au progrès dans la discipline ». Une fois encore nous avons une opposition remarquable entre deux manières de penser le progrès de la discipline. A noter qu'il y a autant de pratiquants en accord (46,4%) qu'en désaccord (50,9%). Il faut préciser que nous avons quatre réponses possibles, deux étant plutôt en accord et deux plutôt en désaccord avec l'item proposé.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Nous devons préciser qu'il peut y avoir des pratiquants des pratiquants qui s'orienteraient vers de la compétition, d'autres qui s'orienteraient vers une pratique plus traditionnelle et enfin certains peuvent avoir fait de la compétition tout en travaillant l'aspect « traditionnel ». C'est pour cela qu'il existe des divergences dans les réponses à ce type de questions.

    c) Le karaté olympique

    Olympique = rêve

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    15

    3,4%

    pas du tout d'accord

    115

    26,0%

    pas d'accord

    199

    45,0%

    plutôt d'accord

    84

    19,0%

    tout à fait d'accord

    29

    6,6%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Le karaté olympique c'est un rêve qui n'aboutira jamais ». Nous pouvons relever que les pratiquants pensent que le karaté a toute sa place parmi les disciplines olympiques. En effet, la question de l'olympisme du karaté existe depuis les années 1990. A l'époque déjà, la fédération pensait faire entrer le karaté aux Jeux Olympiques. D'ailleurs, nous pouvons nous interroger sur la nature du message qu'a diffusé la FFKDA à ce propos et ce qui l'en reste.

    Olympique =
    reconnaissance

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    9

    2,0%

    pas du tout d'accord

    12

    2,7%

    pas d'accord

    32

    7,2%

    plutôt d'accord

    198

    44,8%

    tout à fait d'accord

    191

    43,2%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    En effet, les karatéka semblent être conscients que « le karaté olympique c'est davantage de reconnaissance du grand public et des pouvoirs publics ». Ici, l'idée de la reconnaissance du karaté par les instances publiques est centrale. En effet, avoir une pratique olympique permet d'intégrer des dispositifs et de bénéficier de financements plus conséquents qu'à l'heure actuelle. Il semble donc nécessaire pour les pratiquants que le karaté devienne une pratique olympique ce qui permettrait de développer cette

    Anthony METTLER 69

    pratique qui se situe sur un champ concurrentiel de plus en plus fort et qui ne dispose pas d'une image très médiatique pour le moment. Mathieu nous dit « je suis clairement pour l'olympisme, nous ne sommes pas sport olympique et je pense que ça n'arrange pas le karaté qui reste très obscure pour les non-pratiquants. » Se pose alors la question de la de la perte des valeurs et de la peur de voir le karaté comme discipline sportive et moins comme cet « art martial ».

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Olympique = perte sens

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    10

    2,3%

    pas du tout d'accord

    94

    21,3%

    pas d'accord

    200

    45,2%

    plutôt d'accord

    93

    21,0%

    tout à fait d'accord

    45

    10,2%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Nous pouvons dire que 1/3 des pratiquants sont en accord avec l'idée que « le karaté olympique c'est la perte de sens de la pratique ». Nous avons 2/3 des pratiquants qui sont plutôt en désaccord. Cette affirmation nous montre que les pratiquants pensent que le karaté peut conserver tout son sens même s'il devient olympique. Toutefois, il semblerait que les pratiquants puissent à la fois se représenter et orienter leur pratique comme un « art martial » tout en acceptant le fait que le karaté puisse

    être olympique. Bien sûr, il est important de nuancer car il y a des pratiquants qui ne souhaitent pas que le karaté soit olympique en raison de la perte de sens que cela amènerait.

    Olympique =
    motivation

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    12

    2,7%

    pas du tout d'accord

    29

    6,6%

    pas d'accord

    82

    18,6%

    plutôt d'accord

    214

    48,4%

    tout à fait d'accord

    105

    23,8%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Le karaté olympique c'est une manière de motiver les pratiquants ». Notons qu'une grande majorité des pratiquants pensent que le fait que le karaté soit olympique puisse motiver les pratiquants. Cependant, cette affirmation sous entend qu'il y aurait un élément motivateur une fois le karaté devenu olympique : la compétition. Or, nous avons vu précédemment que le karaté ne peut pas être réduit qu'à l'aspect compétitif, au contraire, cette discipline rassemble des pratiquants ayant des orientations

    Anthony METTLER 70

    très différentes. Donc, il est nécessaire de prendre en compte le fait qu'une majorité des pratiquants pensent que le karaté olympique puisse motiver les karatékas mais il ne faut pas exclure les pratiquants qui ne le pensent pas. Pour Alex93, « l'esprit Olympique «plus vite, plus fort, plus haut« me plaît beaucoup et j'aimerai bien entendu voir le kumite dans cette compétition. Cependant je ne veux pas que le kata qui est basé plus sur le côté spectaculaire et esthétique rentre dans les Jeux Olympique. C'est, je pense, une image erronée que le karaté donnerai au monde Olympique. »

    93 Etudiant, sans emploi, 21 ans, 2ème dan, a commencé le karaté en 1993, titulaire du DAF, 16 ans de pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    En ce qui concerne la question du karaté olympique, nous pouvons dire que les pratiquants pensent dans l'ensemble que cela serait positif pour la discipline. Plus encore, il espère que ce rêve aboutisse un jour. Cependant, l'apport des entretiens à ce sujet nous montre que certains pratiquants sont très sceptiques quant à l'intégration du karaté dans les disciplines olympiques. Des peurs existent et apparaissent comme nous le dit Alain94, « j'émets beaucoup de réserves sur le système, c'est une fête du sport avec pleins de magouilles derrière. »

    d) Le travail du combat

    Combat + interess que
    technique

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    9

    2,0%

    pas du tout d'accord

    104

    23,5%

    pas d'accord

    260

    58,8%

    plutôt d'accord

    51

    11,5%

    tout à fait d'accord

    18

    4,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Travailler le combat (compétitif ou traditionnel) c'est plus intéressant que de travailler la technique ». Cette affirmation nous renseigne sur le fait que les pratiquants travaillent autant l'aspect technique que l'aspect combat du karaté. Le fait qu'une grande partie des pratiquants ne semble pas d'accord avec l'idée que le combat soit plus intéressant que la technique nous renseigne sur l'idée que les karatéka travaillent l'ensemble des aspects de leur discipline.

    Par l'intermédiaire de cet item : « travailler le combat (compétitif ou traditionnel) c'est apprendre à gérer ses émotions (peur, stress, agressivité ...) », nous pouvons affirmer que les pratiquants voient l'aspect combat du karaté comme un outil permettant d'apprendre à gérer les émotions telles que la peur ou l'agressivité.

    Combat = gestion émotions

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    6

    1,4%

    pas du tout d'accord

    7

    1,6%

    pas d'accord

    20

    4,5%

    plutôt d'accord

    227

    51,4%

    tout à fait d'accord

    182

    41,2%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Anthony METTLER 71

    94 Professeur de karaté à mi-temps, responsable de l'enfance et de la jeunesse à la Communauté de communes, 26 ans, a commencé le karaté en 1988, titulaire du Brevet d'Etat, 21 ans de pratique.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Combat = prepa
    agression

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    5

    1,1%

    pas du tout d'accord

    18

    4,1%

    pas d'accord

    81

    18,3%

    plutôt d'accord

    249

    56,3%

    tout à fait d'accord

    89

    20,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    C'est l'aspect self-défense qui est questionné par l'affirmation : « travailler le combat (compétitif ou traditionnel) c'est se préparer à répondre à une éventuelle agression ». Nous pouvons voir que le travail du combat semble préparer à une éventuelle agression. Pour autant, 22,4% des pratiquants ne sont pas en accord avec cette idée ce qui nous ramène à la question des formes de pratique du karaté, à savoir que les karatéka qui pratiquent dans l'idée du bien être ou dans la recherche

    d'une école de vie sans pour autant être sur une pratique de self-défense ne se retrouveront pas dans cette affirmation. Donc, nous voyons ici que la fonction self défense du karaté a une grande importance mais n'est obligatoirement recherchée par l'ensemble des pratiquants.

    Combat = dev qualité
    physique

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    3

    0,7%

    pas du tout d'accord

    4

    0,9%

    pas d'accord

    15

    3,4%

    plutôt d'accord

    231

    52,3%

    tout à fait d'accord

    189

    42,8%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Travailler le combat (compétitif ou traditionnel) c'est une manière de développer ses qualités physiques (force, vitesse, réflexe ...) ». Au même titre que la gestion des émotions, le combat permettrait de développer les qualités physiques des pratiquants. En effet, 95,1% des karatéka sont en accord avec cette idée. Dès lors le combat compétitif ou traditionnel participerait au développement du potentiel physique des pratiquants.

    Nous avons vu que les karatéka ne

    Anthony METTLER 72

    pratiquent pas que l'aspect combat du karaté, ils s'exercent également sur la forme technique. Aussi, la fonction self défense est importante mais n'est pas nécessairement recherchée par le pratiquant. Cependant, il y a une forte convergence sur les apports de ce type de travail, en effet, nous avons vu que la pratique du combat compétitif ou traditionnel contribue au développement du potentiel physique du karatéka et permet également d'apprendre à gérer ses émotions.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    e) Les modalités de pratique en voie de développement

    Dans cette partie nous avons questionné les pratiquants sur ce que nous appelons les modalités de pratique en voie de développement. Concrètement, il s'agit des pratiques issues du karaté qui sont le résultat du processus de diversification de la pratique telles que le body-karaté, le karaté jutsu, le karaté contact ou encore le karaté artistique.

    Artistique pas karaté

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    12

    2,7%

    pas du tout d'accord

    27

    6,1%

    pas d'accord

    102

    23,1%

    plutôt d'accord

    192

    43,4%

    tout à fait d'accord

    109

    24,7%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    A l'affirmation : « le karaté artistique ce n'est plus vraiment du karaté. », nous constatons que 68,1% des pratiquants sont en accord avec cette idée

    contre 29,2% des pratiquants qui sont en
    désaccord. Dans ce cas, le karaté artistique qui est une pratique de compétition, proche des activités gymniques, basée sur la chorégraphie de mouvements de karaté sur de la musique ne semble pas correspondre à la représentation que les pratiquants ont du karaté.

    Anthony METTLER 73

    Pour appuyer cette idée nous avons pu entendre lors des entretiens qu'une pratiquante « n'adhère pas aux nouvelles pratiques dérivées. Pour moi ça n'a pas de sens »95 ou encore qu' « à l'heure actuelle, on fait des cases pour classer par exemple, le karaté do, le body karaté, le karaté pour les jeunes, pour les anciens. Et dans l'esprit des gens, ces cases deviennent totalement hermétiques et on finit par ne plus rien comprendre. »96.

    Donc, les pratiquants semblent être conscients que le karaté se diversifie mais ne sont pas d'accord avec cela. Cependant, l'idée de la perte de sens proposée dans la question du karaté olympique se révèle ici. En effet, les pratiquants sont d'accord avec l'idée que le karaté puisse être olympique tandis qu'il ne sont pas d'accord avec le fait que la pratique puisse se diversifier alors que dans les deux cas il y a une remise en question des valeurs, du sens et de l'orientation que les pratiquants donnent au karaté.

    95 Op. Cit. Entretien avec Angélique

    96 Op. Cit. Entretien avec Richard

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Nous pouvons ajouter que le sentiment général dans l'ensemble des entretiens correspond à l'idée « qu'on associe le nom du karaté à des disciplines qui n'y ressemblent pas forcément, comme le body karaté. On utilise les techniques du karaté, mais sans vraiment y mettre l'efficacité du karaté. »97.

    Une possible explication de ce phénomène a été abordé par Mathieu, « je pense qu'au niveau fédéral il y a un morcellement, je ne sais pas si c'est bien pour le karaté. Selon moi il n'y a qu'un karaté et pas un baby karaté, un karaté féminin, du body karaté etc. personnellement je ne trouve pas ça positif, ça ne fait juste que créer des licences. » Il analyse ce phénomène comme une sorte d'opération séduction de la fédération vers le grand public car « tout le monde doit trouver son compte ». L'idée de développer l'offre pour qu'il y ait une augmentation des licences est justifiée par l'affirmation suivante :

    Body = amener vers karaté

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    21

    4,8%

    pas du tout d'accord

    64

    14,5%

    pas d'accord

    133

    30,1%

    plutôt d'accord

    186

    42,1%

    tout à fait d'accord

    38

    8,6%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Le body karaté est une façon d'amener des pratiquant(e)s vers le karaté. » Ici, il n'y a que les pratiquants de karaté qui répondent et non pas les pratiquants qui ont commencé par du body karaté, par exemple, et qui se sont orientés vers une pratique plus traditionnel par la suite. Nous pouvons voir qu'il existe une opposition dans les opinions sur ces thèmes. Notons que 44,6% des pratiquants sont en désaccord avec l'idée

    Anthony METTLER 74

    que les pratiques telles que le body karaté puissent amener des pratiquant(e)s vers le karaté plus « traditionnel » contre 56,7% qui sont en accord avec cette idée. Il serait donc intéressant par la suite de questionner directement les pratiquant(e)s de body karaté afin de connaître leur opinion plus clairement.

    97 Op. Cit. Entretien avec Mickael

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Contact = retour principe

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    28

    6,3%

    pas du tout d'accord

    41

    9,3%

    pas d'accord

    193

    43,7%

    plutôt d'accord

    154

    34,8%

    tout à fait d'accord

    26

    5,9%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Le karaté-contact est un retour vers ce qui fait le principe du karaté. » Cet item nous renseigne sur la perception que les pratiquants ont du karaté contact qui est une forme de karaté créé par Dominique Valéra98 dont l'objectif est de laisser libre recours à la diversité technique du karaté sans pour autant restreindre sur la notion de « skin touch »99 en arbitrage. Nous avons une fois de plus une opposition dans les opinions sur ce type de

    pratique, cependant, nous pouvons affirmer que majoritairement les pratiquants ne sont pas d'accord avec l'idée que le karaté contact soit un retour vers ce qui fait le principe du karaté. Nous devons tout de même préciser ce que nous entendons par le principe du karaté. En fait, ce principe n'ayant été définit dès le départ, il dépend de la manière dont le pratiquants se représente la pratique.

    Jutsu distingue
    pas karaté

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    51

    11,5%

    pas du tout
    d'accord

    24

    5,4%

    pas d'accord

    172

    38,9%

    plutôt d'accord

    168

    38,0%

    tout à fait d'accord

    27

    6,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « Le karaté-jutsu ne se distingue pas véritablement du karaté. » Nous constatons qu'il y a très peu d'écart entre les pratiquants en accord et en désaccord sur cette affirmation. En effet, 44,8% des pratiquants sont en désaccord contre 44,1% qui sont en accord avec cette affirmation. Pour explication, le karaté jutsu est une forme de pratique qui intègre des techniques issues du judo et du jiu-jitsu (projection, saisies, étranglements). De plus, certains pratiquent du karaté jutsu sans pour autant s'identifier comme karaté jutsuka.

    Anthony METTLEK 75

    98 Dominique Valéra est Champion du Monde par équipe (1972), plusieurs fois Champion d'Europe, il rencontra son ami Bill Wallace, Champion du Monde du Karate Professionnel (l'ancêtre de la Boxe Américaine) et fit une formation intensive à cette nouvelle discipline révolutionnaire. Il participa à une compétition dans ce style aux USA et fit une forte impression. Dominique Valera est alors le pionnier dans le Full Contact en Europe et le diffusera en Europe.

    99 Le « skin touch » est la notion de contrôle absolu sur les technique de poing et de jambe en compétition de karaté classique, par exemple, un coup de poing ayant un impact diminuant le potentiel physique de l'adversaire entraine une sanction pouvant aller jusqu'à la disqualification.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Dans le cas du karaté Jutsu, il est possible d'expliquer ce résultat en fonction de la conception qui est faite du karaté. Dans un premier temps il y aurait une vision qui permettrait d'intégrer la partie jutsu dans la pratique du karaté sans distinction particulière. Tandis que l'autre conception viserait à rendre le karaté justu plus autonome et existerait en tant que tel. Dès lors, nous pouvons retrouver ces différents types de distinctions pour chacune des affirmations sur les pratiques qui sont techniquement et culturellement proches du karaté dit « classique ».

    Le thème des modalités de pratique en voie de développement nous montre qu'il existe des conflits d'opinions qui laissent penser que les valeurs que les pratiquants donnent au karaté sont également très hétérogènes. Toutefois, il semble exister une résistance quant au sens qui est donné au karaté, en effet, certains pratiquants semblent se représenter le karaté comme un ensemble aux mulitples facettes tandis que d'autres se représenteraient le karaté comme plusieurs éléments qui coexisteraient sans pour autant avoir de lien entre eux.

    f) La question du karaté enfant

    Karaté enfants = detect
    champion

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    13

    2,9%

    pas du tout d'accord

    67

    15,2%

    pas d'accord

    185

    41,9%

    plutôt d'accord

    158

    35,7%

    tout à fait d'accord

    19

    4,3%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    « La pratique du karaté chez les enfants c'est un moyen de détecter de futurs champions. » Cette affirmation met en évidence le fait que 41,9% des pratiquants ne pensent pas le karaté enfant comme un outil de sélection par l'intermédiaire des compétitions poussins, pupilles et benjamin. Cependant 35,7% sont « plutôt d'accord » avec cette affirmation, 15,2% ne sont « pas du tout d'accord », et 4,3% sont « tout à fait d'accord ». Dès lors, nous pouvons dire qu'il existe deux façons de voir le karaté enfant et les

    Anthony METTLER 76

    compétitions enfants d'une manière générale, d'un côté il y a ceux qui conçoivent le karaté enfant comme un outil de sélection permettant d'alimenter les vivier d'athlètes et donc de copier le fonctionnement de l'élite Junior-Senior en karaté pour des enfant de moins de 10 ans, au contraire, l'autre possibilité serait de concevoir le karaté enfant comme un outils d'éducation avant tout permettant à l'enfant de se développer au sens d'Edouard Claparède (1937) c'est-à-dire que « l'enfant n'est pas un adulte miniature, il n'est pas seulement différent d'un point de vue morphologique, mais aussi de par sa physiologie et son psychisme. » Bien sûr, ces deux conceptions sont compatibles et ne sont pas exclusives.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Karaté enfants diff
    adulte

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    10

    2,3%

    pas du tout d'accord

    24

    5,4%

    pas d'accord

    126

    28,5%

    plutôt d'accord

    180

    40,7%

    tout à fait d'accord

    102

    23,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Karaté enfants =
    éducatif

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    6

    1,4%

    pas du tout d'accord

    2

    0,5%

    pas d'accord

    5

    1,1%

    plutôt d'accord

    151

    34,2%

    tout à fait d'accord

    278

    62,9%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    En effet, 40,7% des pratiquants sont « plutôt d'accord » avec l'idée que « la pratique du karaté chez les enfants c'est très différent du karaté pour adulte. » Pourtant 28,5% ne sont « pas d'accord », 23,1% sont « tout à fait d'accord » et 5,4% ne sont « pas du tout d'accord ». Les réponses apportées nous renseignent sur l'idée que 1/3 des pratiquants pensent qu'il n'y a pas de différenciation à faire entre le karaté pour les adultes et le karaté pour les enfants.

    Cependant, 62,9% des pratiquants ont répondu « tout à fait d'accord » et 34,2% ont répondu « plutôt d'accord » à l'affirmation : « la pratique du karaté chez les enfants c'est éducatif sur le plan physique et moral. » Soit un total de 97,1% des pratiquants qui sont en accord avec l'idée d'un enjeu éducatif de la pratique du karaté pour les enfants. Il reste à voir les moyens pédagogiques utilisés pour y parvenir.

    Ici, l'idée que « la pratique du karaté chez les

    Anthony METTLER 77

    Karaté enfants =
    occuper

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    9

    2,0%

    pas du tout
    d'accord

    91

    20,6%

    pas d'accord

    192

    43,4%

    plutôt d'accord

    125

    28,3%

    tout à fait
    d'accord

    25

    5,7%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    enfants c'est un moyen comme un autre de les occuper. » nous renseigne sur le constat qui et fait quant à la pratique du karaté pour les enfants. En effet, 1/3 des pratiquants sont en accord avec l'idée que le karaté pour enfant est un moyen d'occupation contre 2/3 qui pensent le contraire. Il faut avoir à l'esprit qu'il peut avoir d'autres éléments externes à la pratique elle-même qui rentrent en compte comme le fait qu'il s'agit d'une activité pratique qui occupe le mercredi mais aussi que le groupe de jeunes pratiquants peut être agréable ou encore que l'enseignant est sympathique.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Ce qu'il faut retenir des résultats sur le thème du karaté enfant concerne l'idée que les pratiquants sont conscients de l'intérêt de l'éducation tant physique que psychique de l'enfant par le karaté ou les sports plus généralement. Nous pouvons ajouter que le thème du karaté enfant révéle l'existence de différentes conceptions de la pratique. En effet, nous avons vu qu'il existait des divergences sur les thèmes de la détection de futurs champion ou encore du temps d'occupation pour les enfants. Aussi, pour d'autres et peut être les mêmes, la pratique du karaté pour les adultes ne semble pas se différencier de celle des enfants.

    Ces deux constats posent la question de la formation des enseignants en karaté et c'est en ce sens que la Direction Technique Nationale a nommé deux experts en « pédagogie enfant », Michel Kervadec et Philippe Sauvage, afin de proposer une nouvelle approche dans l'enseignement du karaté vers ce public.

    g) Les femmes et le karaté

    Karaté s'adresse H/F

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    6

    1,4%

    pas du tout d'accord

    7

    1,6%

    pas d'accord

    6

    1,4%

    plutôt d'accord

    76

    17,2%

    tout à fait d'accord

    347

    78,5%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Concernant la pratique du karaté féminin, nous constatons qu'une grande partie des pratiquants sont en accord avec l'affirmation « le karaté s'adresse autant aux hommes qu'aux femmes. ». Nous pouvons voir que les pratiquants perçoivent le karaté comme une pratique hétérogène et pas seulement masculine. Si nous mettons en lien cette donnée avec la répartition d'hommes (67,6%) et de femmes (32,4%) au sein de cette population, il semblerait que les femmes soient également d'accord avec cette affirmation. Afin d'appuyer cette idée nous pouvons voir que sur

    Anthony METTLER 78

    les questions plus technique il y a également une opinion majoritairement en faveur d'une reconnaissance positive des femmes.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Femmes moins douées combat

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    4

    0,9%

    pas du tout d'accord

    235

    53,2%

    pas d'accord

    161

    36,4%

    plutôt d'accord

    37

    8,4%

    tout à fait d'accord

    5

    1,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    En effet, l'affirmation « les femmes sont moins douées en combat que les hommes » apporte un élément complémentaire concernant la pratique du combat féminin, en effet, il semblerait que les pratiquants pensent que les femmes soient aussi douées que les hommes en combat. Précisons que le terme « moins douées » signifie que les femmes ne développeraient pas les

    mêmes compétences que les hommes en combat. Cependant, il n'est pas précisé dans l'affirmation le type de combat questionné car il est possible de parler de combat dit traditionnel ou bien de combat de compétition.

    Femmes plus technique

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    10

    2,3%

    pas du tout d'accord

    96

    21,7%

    pas d'accord

    213

    48,2%

    plutôt d'accord

    105

    23,8%

    Tout à fait d'accord

    18

    4,1%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    En ce qui concerne l'affirmation « les femmes sont plus techniques que les hommes », nous pouvons voir que les pratiquants sont 69,9% en accord avec cette idée contre 27,9% des pratiquants qui sont en désaccord. Il y a tout de même 1/3 des individus qui pensent que les femmes développent plus de compétences en technique que les hommes. Donc, il semblerait qu'une partie importante des pratiquants voient le public féminin en karaté comme étant compétent autant en combat qu'en technique. Toutefois, il subsiste encore des

    Anthony METTLER 79

    opinions divergentes sur ce thème, en faible proportion tout de même.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Monde karaté = univers
    machiste

    Nb.
    cit.

    Fréq.

    Non réponse

    6

    1,4%

    pas du tout d'accord

    131

    29,6%

    pas d'accord

    201

    45,5%

    plutôt d'accord

    85

    19,2%

    tout à fait d'accord

    19

    4,3%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Lorsque l'on pose l'idée que « le monde du karaté est un univers machiste » nous pouvons dire que 23,5% des pratiquants se représentent le monde du karaté comme machiste, ce qui n'est pas négligeable. Si l'on met ce chiffre en rapport avec la répartition des femmes (32,4%), il est possible que les femmes perçoivent quant à elles le milieu du karaté comme machiste.

    Anthony METTLER 80

    Nous pouvons dire que les représentations sur la place qu'occupent les femmes dans la pratique du karaté sont mulitples. En effet, nous avons vu que la pratique du karaté correspond autant aux hommes qu'aux femmes. Pourtant, lorsque l'on précise le propos et que l'on questionne les représentations que les pratiquants ont des compétences des femmes sur le plan technique ou combat, nous relevons des disparités. Aussi, l'univers du karaté est perçu comme machiste pour 26,5% des pratiquants. Cependant, cette opinion regroupe à la fois les hommes et les femmes, il serait donc nécessaire d'approfondir cette question.

    En ce qui concerne les orientations et les opinions sur le karaté, nous savons qu'il y a une hiérarchisation des orientations de la pratique. En effet, les pratiquants se représentent leur pratique d'abord comme un « art martial » emprunt d'une « philosophie » constitutive d'une « éthique de vie ». Puis, le karaté semble permettre aux pratiquants de « se dépenser et d'apprendre à se défendre ». Enfin, l'aspect social, c'est-à-dire le fait « d'apprendre à vivre en groupe », est l'orientation qui la moins importante.

    Ainsi, le pratiquant chercherait d'abord une éthique de vie imprégnée d'une certaine philosophie, puis il chercherait à se défendre et à se dépenser, pour finir, il chercherait à apprendre à vivre en groupe. De plus, l'analyse lexicale des définitions confirme l'idée que les pratiquants se représentent le karaté comme étant un « art martial » qui contribue à un « équilibre entre le corps et l'esprit » par la « maîtrise de soi ». Des mots comme « valeurs », « philosophie », « art de vivre » mais également « sport de combat » représentent le karaté pour ses pratiquants.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 81

    L'analyse des opinions nous montre que les représentations des karatéka sont très variées. Nous avons révélé l'existence de divergences dans les représentations que les pratiquants ont du karaté. En effet, nous avons mit en évidence des oppositions sur les thèmes comme la ceinture noire et plus largement sur la question des grades. Ainsi nous avons vu que la ceinture a une valeur symbolique forte dans les représentations des pratiquants mais ceux-ci s'inquiètent du devenir des valeurs et du sens accordés aux grades.

    Ensuite, les représentations sur la compétition nous montrent l'importance de celle-ci dans la construction et l'orientation du sens que le pratiquant lui accordera. C'est en ce sens qu'il existe certaines oppositions dans les rerpésentations sur ce thème au même titre que le karaté olympique. Nous avons vu que les pratiquants espèrent que leur pratique devienne olympique tout en ayant des inquiétudes quant au sens et à l'image qui sera faite de leur pratique.

    Toutefois, les karatéka pensent qu'il est nécessaire de devenir olympique pour se développer et motiver les pratiquants. Il existe aussi des divergences dans les représentations en ce qui concerne la fonction du karaté, nous avons relevé que pratiquer le karaté pour répondre à une agression n'est pas l'ultime orientation possible. Les thèmes sur la place des femmes et sur le karaté enfant présentent également bon nombres de divergences. Enfin, le thème sur les nouvelles modalités de pratiques met en avant le fait qu'il puisse y avoir des conceptions très différentes du karaté lui-même.

    Cependant, il existe des éléments convergents sur l'idée que le karaté puisse être un outil éducatif permettant d'apprendre à gérer ses émotions et développer ses qualités physiques. Dès lors, nous pouvons dire que le consensus existe sur les finalités éducatives du karaté mais que les oppositions sont fortes dès l'instant où l'on aborde des thèmes qui correspondent à des orientations de pratique. C'est en ce sens qu'il est pertinent de mettre à jour les différents profils de pratiquants.

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 82

    VII. De l'«artiste martial » à l'« égaré » :

    Nous avons vu très concrètement que chaque pratiquant pose les bases de sa propre pratique en fonction de ce qu'il vit du karaté mais aussi de ce qu'il en sait ou de ce qu'il en perçoit. Réaliser une typologie des pratiquants de karaté en France fait appel à la manière dont les pratiquants vivent, au quotidien, leur pratique mais aussi à la perception et au sens que les pratiquants ont de leur karaté, c'est-à-dire aux facteurs qui déterminent leurs représentations. Nous avons construit ces profils en accentuant les traits les plus caractéristiques des groupes de pratiquants. Ainsi, chaque profil que nous avons réalisé correspond à un ensemble de variables telles que le sens accordé au karaté, les valeurs importantes, la vision du karaté, de la tradition ou encore de la philosophie. Ces éléments permettent de construire un classement. Aussi, nous avons élaboré ce classement à partir des entretiens qualitatifs semi-directifs ce qui permet d'illustrer par des mots le sens que chaque individu-type donne à sa pratique. Dès lors, nous avons mit en évidence l'existence de cinq profils-type.

    1. Le « compéti-do » :

    Il s'agit d'un pratiquant qui voit le karaté par l'aspect sportif compétitif, il cherche à transposer les valeurs éducatives du karaté « traditionnel » vers le karaté sportif plus compétitif. Il se voit comme un pratiquant loyal et juste. « Je suis très dur avec moi-même et mes élèves, j'ai une exigence maximale car il y a une ligne de conduite à suivre. Je suis très tolérant et j'écoute beaucoup aussi. ». Il pense avoir une pratique du karaté « assez complet qui lie le traditionnel et la compétition. Dans l'ensemble j'essaie de toucher à tout, je fais du Shito-ruy alors que je suis shotokan. » Il construit sa pratique actuelle aussi en regardant le passé «J'ai eu de la chance de connaître plusieurs professeurs, ce qui me permet aujourd'hui d'assembler plusieurs idées.» Pour ce pratiquant, lier un « karaté compétition à un karaté traditionnel » est essentiel.

    D'après lui, « il y a un code moral à respecter, le karaté c'est une philosophie de sport qui devient une philosophie de vie. » En quelques mots, il y a « le karaté en interne où l'on transmet des valeurs, et le karaté en externe où c'est à la vie qu'on transmet, tout cela avec l'idée d'être ensemble. » Il parle également de l'amour du travail et du respect de l'autre. Cependant, il ne se sent pas très ancré dans l'aspect « traditionnel » du karaté. En effet, il « accorde beaucoup d'importance au salut, aux rituels, mais je ne suis pas à cheval sur certains points. Je n'impose pas à mes élèves le silence absolu dans mes cours, il y a un aspect social de la pratique, c'est indissociable de la société d'aujourd'hui. La pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 83

    évolue avec la société. » Concernant l'aspect philosophique du karaté, « j'aime beaucoup les manières de penser de chacun des maîtres, moi je n'en ai pas, car je n'ai pas assez de recul, je m'intéresse aussi au bouddhisme et à l'évolution du karaté. »

    Enfin, il tente « d'avoir une manière d'enseigner qui est la plus ouverte possible afin de

    donner le plus d'informations aux élèves.» Aussi, il essaie d'« avoir une façon ouverte d'enseigner, avoir le maximum d'informations à donner aux élèves. »

    Le « compéti-do » est un pratiquant qui s'est construit sur deux plans, l'un est le karaté traditionnel dont il n'a pas conservé de lien particulier hormis les rituels, l'autre est le karaté plus sportif voire compétitif par lequel il enseigne les valeurs qui lui paraissent importantes. Enfin, il voit le karaté comme une pratique évolutive nécessairement sociale à laquelle il apporte des éléments d'autres cultures comme le bouddhisme.

    2. L'« égaré » :

    Ce pratiquant n'a pas reçu les bases de la culture karaté, il la construit au fur et à mesure de sa pratique du karaté. Ainsi, les valeurs qu'il enseigne et véhicule viennent de la vie quotidienne. Plus précisément, il pratique un karaté qui lui permet de mieux se connaitre et de le lier le corps et l'esprit : « je cherche à évoluer et comprendre aussi bien sur le plan physique, que spirituel. » il voit sa pratique comme un « plaisir de l'étude, de la pratique. Faire attention à son travail, se regarder dans ses techniques, savoir se placer, faire le bon mouvement. Je trouve que cette phase-là est très importante, s'il n'y avait eu que le côté sport, je ne pense pas que cela m'aurait intéressé. Cette pratique c'est un moyen de s'entretenir, de se maintenir en forme. Je n'ai pas cet esprit de compétition, en plus, ça permet de s'entretenir, de se dépenser physiquement. » Notons que l'ambiance est un élément central de sa pratique : « C'est vrai que sa joue énormément, c'est peut-être ça qui m'a fait venir en tout premier. » Les moments passés en dehors de la pratique permettent de « parler de soi, c'est un temps de parole. Il y a une bonne ambiance, on est soudé. »

    Par sa pratique, il recherche « le geste parfait, même si c'est impossible. Je préfère travailler les katas que les combats. Je recherche davantage l'efficacité que la force ou la violence. Protéger mon corps, non, me sentir bien, oui forcément. Je suis plus dans l'idée de développer cette harmonie entre mon corps et mon esprit. »

    En ce qui concerne les valeurs, ce qui lui semble important c'est « tout ce qui touche le

    respect, je trouve cela très important. Le corps sain, pratiquer santé, sans risque. Je

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 84

    trouverai dommage de faire une pratique qui finisse par te blesser. J'ai fait plusieurs pratiques, du coup cela m'a ouvert sur d'autres visions. Lorsque l'on voit les enfants, on ressent bien cette éducation. Ils ont un respect de l'autorité, même si en dehors du dojo ce n'est pas forcément la même chose. Il y a des choses que tu ne permets pas de faire dans le karaté, ni dans la vie courante, il faut respecter les gens, ça passe par avoir un kimono propre, cheveux attachés, pas de port de bijoux. C'est une base pour établir un respect au sein d'un travail en collectif. C'est aussi une question d'éducation, de respect en vers l'autre, en vers son partenaire. »

    Il n'a jamais eu l'occasion d'échanger sur l'aspect culturel du karaté avec son professeur ou ses pairs. En effet, il construit ses connaissances et l'éthique du pratiquant au fur et à mesure qu'il enseigne, « on ne nous a jamais appris les raisons du pourquoi on saluait le tatami, qu'on se saluait entre nous. C'est peut-être parce que je suis arrivée en milieu d'année et aujourd'hui je ne sais pas quoi dire aux jeunes qui s'inscrivent. C'est au moment que j'ai pris les débutants dans mon cour, que je leur ai parlé de l'importance d'avoir un kimono propre, et tout ça. » Ce qu'elle transmet vient de l'extérieur de la pratique : « j'applique au karaté, ce que j'applique à ma vie. » Il recherche mais ne trouve pas les éléments qui lui permettraient de construire une culture karaté : « je n'arrive pas à trouver ce qui me correspondrait le plus. C'est justement la base qui me manque, des codes et la culture du karaté. ». Il n'a pas eu accès aux connaissances sur le karaté au sein de son club mais plutôt lors des formations en tant qu'encadrant de l'activité : « il n'y a que quand j'ai passé mon DAF que j'en ai appris davantage. »

    L'« égaré » cherche à se sentir bien dans sa pratique en accordant une part importante aux aspects relationnel et éducatif du karaté, sur le tatami mais aussi en dehors. N'ayant pas reçu la culture karaté de manière directe, il tire des leçons de son expérience personnelle afin de faire partager aux autres pratiquants les valeurs qui lui semblent essentielles. Il les transmet au moment de la pratique par interaction avec les autres pratiquants.

    3. Le « penseur » :

    Ce karatéka est « assez curieux, intellectuels selon certains, voir compliqué selon d'autres » et il réfléchit « au pourquoi du comment » de sa pratique. Il voit sa pratique comme la continuité de sa vie, « au départ c'est quand même une gymnastique physique. Mais à partir du moment où l'on commence à analyser : comment je pourrais faire pour améliorer mon geste pour qu'il soit plus efficace que celui de mon voisin ? Je cherche à

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    chaque fois à comprendre ce mécanisme. » D'après lui il faudrait voir le karaté comme une gymnastique corporelle avec une philosophie qui subit une « sportivisation » et qui devient, alors, un sport qui ne transmet plus d'idéal et qui met en avant des aspects commerciaux.

    Par sa pratique, il a appris « la connaissance du corps humain, ses mécanismes, les mécanismes aussi sur un plan psychologique, également sur la biomécanique. Et sur un plan mental, j'ai pris connaissances de certaines philosophies comme le Zen, la sophrologie. Le karaté a été pour moi une expérience, une aventure, une ouverture vers un monde différent. Je suis plutôt ouvert, et curieux mais aussi sélectif, et élitiste ». D'après lui, le karaté permet de « se débarrasser de tout ce qui est inutile dans le mouvement et le geste. On se rend compte qu'il y a plein de mouvements parasites. Pour évacuer ses gestes inutiles il faut en prendre conscience. »

    En ce qui concerne la tradition, il voit cela comme « la transmission continue d'un contenu culturel à travers l'histoire depuis un évènement fondateur et d'un passé mémorial. Cet héritage immatériel peut constituer le vecteur d'identité d'une communauté humaine, dans son sens absolu la tradition est une mémoire est un projet, c'est une conscience collective, une ouverture de conscience, le souvenir de ce qui a été, le devoir de le transmettre, et de l'enrichir. Immatériel, car c'est une idée, une manière de véhiculer une pensée qui va se concrétiser. Les mots se concrétisent par des actions qui peuvent être le karaté, le judo. Mais à chaque fois on décline, toute construction humaine passe tout d'abord par une pensée. »

    Pour lui, l'aspect philosophique du karaté permet d'« aider l'homme à se construire, tant sur le plan mental, et sur le plan physique par le karaté. L'art martial est une technique de guerre, il est évident qu'aujourd'hui nous ne sommes plus dans le même contexte. La question était comment pouvait-on ré exploiter ces arts de guerre dans une époque plus moderne ? Orienter non plus le combat vers l'autre, mais davantage vers soi, vers l'autre. » Pour reprendre son raisonnement, « aujourd'hui il n'y a plus de transmission de la tradition d'un idéal de la pratique du karaté. Au départ, il y semblerait qu'il y ait eu un esprit mystique autour du karaté, avec des visions exotiques. »

    Le « penseur » est un pratiquant qui conçoit le karaté comme une gymnastique

    physique de santé qui est le socle de son mode de vie à la recherche d'un équilibre entre le corps et l'esprit. Ainsi, il s'inscrit dans une démarche réflexive sur sa pratique en

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    questionnant continuellement celle-ci. Il estime qu'actuellement il n'y a plus d'idéal transmit par la pratique en raison de la perte de sens suite à la sportivisation progressive du karaté.

    4. Le « rationaliste » :

    Ce pratiquant s'incrit dans une démarche lui permettant de donner un sens à sa pratique. « C'est un karaté qui s'adapte à mon âge et qui évolue selon les attentes. Quand on était petit c'était tonic, sportif, maintenant j'attends plus de recherches dans le sens où je veux avoir une compréhension beaucoup plus approfondie des mouvements, des kata. » D'après lui, le karaté « c'est plus quelque chose qui va me suivre au cours de ma vie, ce n'est pas comme la compétition que peut s'avérer être ponctuelle ». Il voit le karaté comme « une pratique qui conduirait ma vie » c'est une « nécessité » pour lui. Il a une vision évolutive du karaté, c'est-à-dire, « prendre des idées à droite, à gauche, et faire mon karaté. On ne peut pas évoluer en restant dans son coin. ». Il pose l'idée que « l'évolution de ma pratique dépend de ce que l'on cherche, dépend aussi de l'âge. »

    Par sa pratique, il recherche une liberté dans l'utilisation du répertoire technique du karaté par les katas, il propose de faire un « mélange » dans sa pratique avec un peu de santé, du renforcement du corps, faire travailler le corps et l'esprit en même temps. Aussi, « j'aime bien garder un aspect traditionnel de cette pratique. Et moins ramener comme aujourd'hui un côté ludique pour les enfants notamment. ». Cependant, il serait possible de partir d'un aspect ludique de la pratique et d'amener le pratiquant vers du « traditionnel ».

    Il voit la tradition « comme un savoir qui se transmet, mais sans forcément dissocier de l'idée que ce savoir soit figé dans le temps. Chacun peut y rajouter sa part de connaissances. C'est quelque chose qui peut évoluer dans le temps, mais tout en gardant la base des valeurs communes à chacun. Des valeurs qui m'ont été enseigné. » Pour lui la tradition c'est « le fondement du karaté, si je devais donner des termes se serait le Japon, le Maître Funakoshi, mais c'est aussi le développement du karaté en France. » La tradition c'est aussi « savoir d'où l'on vient pour pouvoir mieux avancer. » Au sein de son dojo, il ne voit pas de perte de tradition et « les deux professeurs sont les garants des valeurs dans le dojo. Il est important de se saluer et de se respecter, sinon les valeurs s'oublient vite. »

    Il pense qu'il y a « un certain code à avoir, après on le respect ou pas. Il y a quelques éléments de ce code qui peuvent évoluer. Par exemple en ce qui concerne les activités ludiques pour les plus petits, je pense qu'il faut y mettre des limites. Cela dénaturerait peut-être le karaté en lui-même », pour lui, il est important que « chacun adopte les choix

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    souhaités selon leur vision de la pratique ». Avec l'idée « qu'il faut savoir jouer sur deux tableaux différents, un karaté plus traditionnel, et d'un autre côté une pratique plus ouverte aux évolutions ».

    Le « rationaliste » est un pratiquant qui ne se représente pas sa pratique comme un art martial ancestral constitué de mythes, au contraire, il s'agit d'un karatéka qui cherche à donner du sens à ce qu'il fait, plus précisément à la technique. Il voit le karaté comme une activité ayant de multiples facettes. Elle peut être à la fois traditionnelle et évolutive à condition de conserver les valeurs qui guident son éthique de vie.

    5. L'« artiste martial » :

    Ce pratiquant se représente le karaté comme un art. Il pratique le karaté d'une manière rigide physiquement et mentalement. « Moi je me force, je m'accroche, je me dis qu'il y a quelque chose, même si j'ai des périodes de creux. » Lorsqu'il parle de sa pratique, il la nomme le « karaté-do » et dit qu'elle a elle voit le « karaté-do » comme « un art. C'est la recherche du bien-être. Dès que tu réalises quelque chose et que tu es en harmonie, je pense que tu exerces un art. La calligraphie, la musique, ce sont des arts, après ça dépend de comment c'est pratiquer aussi. Certaines personnes pratiquent, mais elles ne vont pas plus loin dans la recherche, ils ne tentent pas de faire passer l'énergie. Si c'est juste pour être le plus fort, avoir un titre, pour moi il n'y a pas de do là-dedans », elle ajoute que « ce n'est pas la pratique qui rassemble les gens, mais la vision que tu t'en fais », finalement « le karaté c'est un art de vivre et quand je ne pratiquais pas et bien je ne me sentais pas moi.»

    D'après lui, il existe « une évolution collective dans le sens où c'est tout un dojo qui évolue dans la spiritualité car sans les autres tu ne peux pas avancer. Tu te retrouves face aux autres, ils te renvoient quelque chose, c'est une forme de transcendance », aussi « l'évolution dans la pratique, c'est la communauté du dojo qui te l'a fait. Un dojo c'est un rassemblement de personnes qui viennent de milieux différents et qui ont un vecteur commun, ces personnes recherchent la même chose. »

    Il voit la tradition comme étant « le respect des enseignements des anciens, prendre en considération ce qu'on a reçu dont les codes. Par rapport à l'enseignement, il faut prendre la tradition comme un tout, de l'analyser et de le comprendre », elle précise que la transmission de la tradition est le plus important « c'est l'essentiel, surtout si l'on veut que le

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    partage se fasse, pour aller plus loin dans l'enseignement et l'équilibre entre le yoko et le také100 »

    L'idée qu'il se fait de la philosophie dans sa pratique c'est de se consacrer à fond dans le perfectionnement de la pratique « le corps est un moyen d'expression et il faut vivre à fond. C'est cette vie intérieure qu'il faut mettre en face », c'est comme cela qu'il définit la notion de do et « peut importe la pratique » pour lui le budo a « prouvé qu'il rentrait dans l'équilibre de l'Etre, alors après tu ne te poses plus de questions. Tu fais confiance à ta pratique » plus précisément « le budo c'est quelque chose qui se vit, il y a plein de chose comme ça où tu ne peux pas l'expliquer. Le budo c'est l'harmonie pure entre ton équilibre intérieur, l'environnement autour de soi et la passion que tu as pour ce sport. C'est impressionnant de voir que dans une société comme la nôtre, où c'est très individualiste, où les bases reposent sur l'argent, le matériel, nous avons réussi à sauver une part d'humanisme à travers notre art. Ce qui importe, c'est vraiment de vivre bien en soi, et de vivre les événements de façon pure, sans artifices. »

    Art, harmonie, Budo ou partage sont les mots qui peuvent définir l'« artiste martial ». Pour lui, la tradition est au coeur de sa pratique qu'il considère comme un véritable art de vivre contribuant à équilibrer l'être physiquement comme spirituellement. Travailler avec un partenaire va au-delà de la participation à une simple évolution technique. Notons que le champ lexical utilisé est caractéristique des « communautés de pratique » comme l'Aïkiryu, c'est-à-dire proche d'un vocabulaire enchanté plus humaniste que les autres profils-type de pratiquants que nous avons pu réaliser.

    Ces profils-type illustrent les multiples sens, orientations et conceptions qu'accordent les karatéka français à leur pratique. Nous avons vu que certains pratiquants utilisent la compétition comme support permettant la transmission des valeurs éducatives. D'autres encore voient le karaté comme un art permettant d'évoluer et de se construire autant sur le plan physique que spirituel. Aussi, le rapport que le karatéka entretient avec la tradition, les valeurs ou la philosophie, détermine son orientation, donc, son appartenance à l'un ou l'autre des profils-type. Notons que la construction du sens que le pratiquant a du karaté dépend de facteurs tels que l'enseignement qu'il reçoit et qu'il partage mais aussi de sa capacité à faire s'ouvrir sur d'autres cultures.

    100 Les notions de take et yoko d'après l'interviewé : « le Yoko c'est tout ce qui est la base, la technique pure, c'est l'horizontale » aussi « c'est très construit, très terre-à-terre », le take peut se définir comme « tout ce qui du côté de l'évasion, les sentiments, le ressentis, les émotions, c'est très pulsionnel. »

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    Discussion

    Au cours de notre étude nous avons cherché à élaborer une typologie des pratiquants de karaté en France. L'idée est à la fois de connaître finement les pratiquants, c'est-à-dire les grades, l'âge, les motivations ou encore la perception qu'ils ont de leur pratique et, à partir de ses données, d'identifier des profils-type de pratiquants. Nous avons démontré que la sportivisation progressive du karaté, depuis son introduction en France dans les années 1960, a contribué à diversifier les modalités de pratique. Cette diversification a entraîné la multiplication du sens que les pratiquants accordent au karaté. En effet, l'orientation de la pratique dépend de chaque individu car il adapte son système de valeurs et ses attentes à « son » karaté. Ainsi, chaque pratiquant aura une orientation particulière de sa discipline qu'il est possible de mettre en évidence par l'analyse des conceptions et des opinions.

    Nous avons formulé les hypothèses selon lesquelles la population de karatéka, constituée d'individus ayant des origines et des caractéristiques sociales variées, se représentent leur pratique comme un « art martial ». Toutefois, les opinions et les représentations que les pratiquants ont du karaté divergent sur les thèmes du grade ou encore des nouvelles modalités de pratique. Enfin, il existe plusieurs profils-type comme les karatéka qui recherchent une pratique plus sportive/compétitive, les pratiquants ayant une conception du karaté comme art de vivre ou encore les karatéka en quête d'idéal.

    La méthodologie de notre étude repose sur la collecte par questionnaires puis par entretiens, des caractéristiques principales des pratiquants ainsi que de leurs opinions sur la pratique du karaté en France. Plus précisément, nous avons établi un échantillon représentatif de 2002 pratiquants, à partir de la base de données des licences de la fédération, à qui nous avons envoyé par mail le lien d'un questionnaire construit préalablement sur internet. Nous avons touché 1514 individus (taux de retour = 29,2%) avec 488 « mails erreurs » sur 2002 mails envoyés. Ensuite, nous avons réalisé 6 entretiens semi-directifs auprès de pratiquants identifiés comme ayant des profils variés ; il s'agit ici de comprendre qualitativement les orientations de la pratique et de préciser certains points des résultats.

    Tout d'abord, nous pouvons dire que la pratique du karaté en France tend à se féminiser progressivement depuis 7 ans car le public féminin est passé de 26,6%, en 2002, à 30,96% de pratiquantes aujourd'hui. Cette féminisation de la population s'explique par l'émergence de nouvelles formes de pratique comme le body-karaté. Ensuite, nous pouvons affirmer que cette population est socialement très diversifiée. Les indicateurs tels que les professions et

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    catégories socioprofessionnelles (PCS), la répartition par style, les autres pratiques martiales ou de combat nous permettent de le dire. Les multiples formes de rapport au corps issues de la diversification du karaté peuvent justifier le fait, par exemple, que les « employés » ainsi que les « cadres et professions supérieures intellectuelles » soient fortement représentées. Aussi, la répartition des pratiquants, en fonction du temps de pratique et du grade, se fait de manière « pyramidale ». En ce sens, plus un pratiquant avance et progresse dans sa pratique, plus il aura tendance à passer ses grades. Notons, que 40% de la population détient un grade de niveau 1er dan ou un grade inférieur. De plus, les pratiquants privilégient surtout les stages d'expert, les stages avec le professeur référent ainsi que les stages de préparation au passage de grade. En effet, il semble qu'une partie de la population se tourne vers une pratique du karaté plus « traditionnelle », ce qui expliquerait le fait que seulement 16% des pratiquants aient participé à une compétition kata ou combat au cours des 12 derniers mois. Nous savons également que 48,96% des karatékas pratiquent dans des clubs municipaux et nous supposons que 46,44% pratiquent dans des clubs de type « club fitness ». Nous pouvons ajouter que 61,19% des karatékas ne s'investissent pas dans des activités administratives, cependant, ceux qui s'investissent le font majoritairement au niveau du club. En ce qui concerne les diplômes, 14,92% des karatéka ont un diplôme relatif à l'arbitrage et 29,98% des pratiquants ont un diplôme lié à l'enseignement. Ensuite, nous pouvons dire que 48,49% des karatékas manquent rarement leur entrainement et 27,38% jamais ou très rarement. Nous relevons également que 60,79% des karatékas pratiquent une activité physique et sportive et de loisirs. Donc, le peu d'activités en lien avec la culture d'origine traduirait le fait que les karatéka ne cherchent pas nécessairement à avoir ce lien avec la culture japonaise en raison du « désenchantement » existant depuis l'arrivée de la pratique en France. L'ensemble de ces données nous montrent que les pratiquants de karaté en France ont des caractéristiques variées. Toutefois, nous avons démontré qu'il existe un élément commun qui semble lier les karatéka et structurer la pratique : le grade.

    Par cette étude, nous avons mit en évidence l'existence d'une hiérarchisation des orientations de la pratique. En effet, les pratiquants se représentent leur pratique d'abord comme un « art martial » emprunt d'une « philosophie » constitutive d'une « éthique de vie ». Puis, le karaté semble permettre aux pratiquants de « se dépenser et d'apprendre à se défendre ». Enfin, l'aspect social, c'est-à-dire le fait « d'apprendre à vivre en groupe », est l'orientation la moins importante. De plus, l'analyse lexicale des définitions confirme l'idée que les pratiquants se représentent le karaté comme étant un « art martial » qui contribue à un « équilibre entre le corps et l'esprit » par la « maîtrise de soi ». Aussi, nous avons mit en

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    évidence des oppositions sur les thèmes comme la ceinture noire et plus largement sur la question des grades. Ainsi, nous avons vu que la ceinture a une valeur symbolique forte dans les repésentations des pratiquants, ceux-ci s'inquiètent du devenir des valeurs et du sens accordés aux grades. Il existe des éléments convergents comme l'idée que le karaté soit un outil éducatif permettant d'apprendre à gérer ses émotions et de développer ses qualités physiques. Dès lors, nous pouvons dire que le consensus existe sur les finalités éducatives du karaté mais que les oppositions sont fortes dès l'instant où l'on aborde des thèmes qui correspondent aux orientations de la pratique.

    L'analyse des profils-type permet de préciser deux points de convergence. Tout d'abord, le karaté est perçu par ses pratiquants comme un outil de socialisation et d'intégration social. Nous pouvons illustrer cette idée par le fait que les karatéka peuvent avoir des caractéristiques sociales différentes tout en ayant comme vecteur communs la pratique. Ensuite, nous avons relevé que le karatéka considère sa pratique comme « un art de vivre » ou comme « une école de vie » qui cadre et conditionne les comportements du pratiquant. Les valeurs ainsi que l'éthique que le karatéka doit avoir sont représentées par le « respect de soi », le « respect de l'autre ». Alors, nous pouvons nous demander dans quelle mesure le karaté participerait à une « éducation citoyenne » de ses pratiquants.

    Une étude de ce genre peut contribuer largement au développement de la politique sportive du karaté. Cependant, elle peut aussi faire émerger et cristalliser bon nombre de conflits internes à la fédération. Ici, si la dissonance entre les résultats proposés par le chercheur et les attentes de la fédération est trop forte, il existe un risque que le lien fragile qui s'est construit entre la fédération et le chercheur soit rompu. Dès lors, il nous semble possible de dire que, si la recherche scientifique menée dans le cadre de la FFKDA a une portée heuristique indiscutable, elle a aussi une utilité « politique » à long terme. L'intérêt du chercheur en sciences sociales nous semble être ici de comprendre que ces deux intérêts, s'ils s'accompagnent d'une vraie attitude de vigilance et d'un effort de distanciation conséquents, ne sont pas nécessairement contradictoires. C'est en ce sens qu'il est important de rester vigilant quant à la place qu'occupe le chercheur et à l'instrumentalisation qui est faite de ses travaux. Toutefois, cette étude doit être perçue comme le symbole d'un lien entre trois entités, la FFKDA, le Ministère des Sports et l'Université de Bretagne Occidentale. C'est dans un état d'esprit d'ouverture du même ordre qu'il serait intéressant de poursuivre ces travaux en questionnant notamment les représentations des individus non-pratiquant.

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    Annexes

    Annexe 1 : Okinawa

    Annexe 2 : Aire Edo et Meiji

    Annexe 3 : Le rôle du « justu » et glissement vers le « do »

    Annexe 4 : La montée du nationalisme au Japon dans les années 30

    Annexe 5 : Questionnaire exploratoire - Enquête Typologie Karaté

    Annexe 6 : questionnaire Avlar vierge

    Annexe 7 : évolution des votes sur le questionnaire en ligne

    Annexe 8 : récapitulatif des pratiquants interviewés

    Annexe 9 : Guide d'entretien « vision de pratiques en Karaté »

    Annexe 10 : exemple de synthèse d'entretien vierge

    Annexe 11 : répartition par styles de karaté

    Annexe 12 : les orientations de la pratique

    Annexe 13 : analyse lexicale de la définition du karaté

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    Annexe 1 : Okinawa

    L'île d'Okinawa

    Okinawa est un archipel situé entre l'océan Pacifique et la mer de Chine orientale, situé à égale distance du Japon, de la Chine continentale et de Taiwan. L'archipel fait partie des îles Ryûkyû.

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    Annexe 2 : Aire Edo et Meiji

    Au cours de la période Edo (1603-1867), le Japon se pacifie par un encadrement social est très rigoureux. Le Japon ainsi que ses archipels sont sous un régime très contrôlé où la société est hiérarchisée allant de la noblesse, issue des rangs des bushi (guerriers), aux personnes exerçants des métiers considérés comme « impurs ». Ce système est basé sur les valeurs confucéennes mais également sur une étanchéité entre les groupes sociaux.

    Les bushi étaient guidés par un ensemble de « lois » visant à prescrire « un code d'honneur des hommes qui ne connaissent d'autre objectifs que celui du dévouement clanique ostentatoire et sanglant ». Ils ont connu une transformation notable en un demi-siècle et sont devenus les défenseurs du régime shogunal de l'époque. Ils ont accédé aux connaissances intellectuelles et philosophiques, l'exemple le plus marquant étant le traité des cinq roues de Miyamoto Musashi. L'accès aux connaissances a entrainé une dualité entre les arts raffinés et l'esprit combatif/militaire ce qui catalysera alors une codification des techniques martiales.

    Au cours de l'aire Meiji (1868-1912), le Japon va s'ouvrir politiquement et économiquement au monde. Cette ouverture va provoquer une transformation importante du pays. En effet, cette aire modernisatrice verra disparaître le shogunat, l'abolition des différentes classes et la disparation des bushi. La pratique des bugei ou des bujutsu est remise en cause. Les deux possibilités de survie des pratiques martiales restent le spectacle ou l'éducation. Cette ouverture favorisera également les échanges avec l'occident qui aura une très forte influence avant 1895, date de la création du Dai Nippon Butoku Kai, organisme visant à conserver l'identité japonaise.

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    Annexe 3 : Le rôle du « justu » et glissement vers le « do »

    On assiste au cours de l'aire Meiji à une transformation des pratiques101 dites jutsu, travaillées sur les champs de batailles par les bushi issu des milieux sociaux élevés, vers le « do », qui est une activité a visée morale constituée d'un ensemble de valeurs guidant les pratiquants. En 1878, le Taïso Denshujô qui est le « centre d'enseignement de la gymnastique » illustre cette volonté politique du Japon d'établir une activité physique permettant le soutien de la croissance du pays. Dans ce contexte positif, les pratiques de combat à visée éducative tels que le judo seront reconnues comme d'intérêt pour la nation. Mais c'est la montée du nationalisme à partir des années 30 au japon qui favorisera la diffusion et l'implantation des pratiques corporelles dans les programmes scolaires.

    Anthony METTLER 97

    101 Brousse, M. (2005) Les racines du judo français, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux,

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    Anthony METTLER 98

    Annexe 4 : La montée du nationalisme au Japon dans les années 30

    C'est grâce au nouveau système éducatif que l'Etat aura une ouverture totale sur la jeunesse de cette période et permet de transmettre le nationalisme intense des classes supérieures à l'ensemble de la population. Dès les premières décennies de l'Aire Meiji (1868-1912), l'éducation physique est devenue obligatoire, le corps et son éducation sont au coeur des politiques visant à développer les sentiments d'identités nationales et de loyauté. Ces valeurs sont centrales dans l'idéologie de l'Etat-Famille autoritaire102. Depuis la fin des années 1880, le programme des cycles d'éducation supérieure comprend des exercices de gymnastique militaire qui se pratiquent avec des exercices de marche et des combats simulés. En 1917, le Comité spécial sur l'éducation recommande au Parlement que tous les étudiants au dessus du secondaire soient formés pour devenir des soldats obéissants, durs de corps et d'esprit, faisant preuve d'esprit martial et d'un patriotisme sans faille. Alors que débute un conflit entre les éducateurs libéraux et le ministère des Armées et qui aboutira à protéger les jeunes classes d'âges et les étudiantes de ses exigences, ceci jusque dans les années 1920. C'est également ce genre de conflit qui va retarder l'introduction des «arts martiaux» dans les programmes scolaires nationaux. Les débats entre éducateurs et bureaucrates portent sur la pertinence des «arts martiaux» dans l'éducation des jeunes enfants en raison des préoccupations d'ordre physiologiques quant à leurs effets sur les jeunes corps. Dès lors, le classique Bujutsu ainsi que les variantes modernes de la tradition et de la culture physique sont considérés comme des instruments d'endoctrinement performant en vertu de leur insistance sur l'obéissance, l'endurance et l'autodiscipline.

    102 Manzenreiter, W. (2001) Moderne korper, moderne ope. Sport und internationalstaat in Japan und osterreich 1850-1900, Minikomi - informationen des akademischen arbeitskreis Japan 2

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    Par ailleurs, la pratique du Budô permet de nouer des liens immédiats avec la continuité historique du Japon féodal comme berceau de l'éthique du guerrier et de ses glorieuses traditions. L'école primaire avait réussi à persuader une population paysanne qui « pendant presque trois siècles n'avait pas eu le droit de porter des armes, qu'elle appartenait, elle aussi à une race de guerriers » et à lui « inoculer la gloire des grandes traditions militaires du Japon ainsi que l'idéal d'une mort sur le champ de bataille au service de l'empereur »103. C'est au cours des années 30 que l'influence l'emporte sur les conceptions plus libérales et que les «arts martiaux » sont inclus dans les programmes scolaires. En 1931, l'année de l'invasion de la Mandchourie, le kendo et le judo deviennent obligatoires pour les étudiants du second degrès, puis en 1936, pour ceux des degrès supérieurs de l'école primaire. A cela, il faut préciser qu'à partir de 1939 une nouvelle activité intitulée « défense nationale » est ajoutée au programme alors que les sports occidentaux sont de plus en plus marginalisés voire réprimés. Dès 1940, le ministère de l'Education n'autorise les étudiants à pratiquer qu'une à deux heures de sports de compétitions par semaine et les engagent plutôt à pratiquer et s'investir dans les « arts martiaux ».

    Anthony METTLER 99

    103 Reischauer, E. (1970) Japan. The story of a nation, Knopf, New York

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    Anthony METTLER 100

    Annexe 5 : Questionnaire exploratoire - Enquête Typologie Karaté

    Je mène actuellement une enquête sur « les visions de pratique des karatékas en France » ayant comme ambition d'élaborer une typologie pratiquants. Je souhaiterai connaître vos opinions ainsi que votre point de vue sur des éléments de votre pratique personnelle mais aussi sur le karaté en général. Veuillez répondre au questionnaire le plus sincèrement possible, merci d'avance pour le temps accordé à ce travail. (à renvoyer par mail avant le 15 novembre 2008)

    I) Qui êtes-vous ?

    Age :

    Profession (code en annexe) : .....

    Salaire : .€/mois

    Situation maritale (soulignez la réponse):

    Célibataire Concubinage Marié(e) Divorcé(e) Veuf (ve)

    Diplôme : CAP/BEP/Brevet BAC BAC +2 Bac +3 et +
    Autres diplômes (hors karaté) :

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    Loisirs : lecture, écriture, musique, sport, peinture, jardinage, télévision, jeux vidéo ...

    I) Vous et votre pratique :

    Nombre d'années de pratique : Budget pour la pratique :

    Autre pratique artistique/sportive : Oui Non

    Si Oui lequel :

    .€/an

    Année de début :

    La fréquence de pratique : heures par semaine
    Ligue :

    Le grade (kyu/Dan) : . Le style :
    Experts suivis :

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 101

    Avez-vous fait une autre « pratique martiale » avant : Oui Non

    Si Oui, le(s)quelle(s)

    Avez-vous des responsabilités (ex : élu, club, arbitrage) au sein du karaté :

    Diplômes en karaté :

    III) Le karaté pour vous :

    Parmi cette liste de mots, entourez les 3 plus important en relation avec votre pratique: amour, force, tranquillité, échange, individualisme, philosophie, mode de vie, beauté, santé, contrainte, rigide, transformation, sport, rire, partage, potentiel, fluidité, souplesse, martialité, détente, self défense, Quels mots ajouteriez vous ?

    Comment définiriez-vous votre pratique du «karaté» en quelques lignes :

    IV) Votre opinion sur le karaté :

    Répondre par une note de 1 à 5 soit de « pas du tout d'accord » à « tout à fait d'accord »

    Il est bon de pratiquer le karaté, c'est bon pour le corps ! ....

    Le plus important au karaté, c'est la beauté du geste ....

    Le karaté c'est du sport ....

    On se valorise en étant le meilleur ....

    Il est nécessaire de faire de la compétition en karaté ....

    La pratique du karaté permet de se dépenser ! ....

    Les femmes sont considérées de la même façon que les hommes en karaté ....

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    Anthony METTLER 102

    Pour vous, le karaté est un art martial ....

    Un « Dan » marque l'aboutissement d'un travail de recherche technique et personnel

    La pratique du karaté permet d'être bien dans sa tête ....

    La pratique corporelle est indispensable à tout individu ! ....

    Le body karaté est une évolution possible du karaté-do ....

    Le karaté est une pratique « guerrière » ....

    Certains individus recherchent la reconnaissance par le karaté ....

    Ce que l'on recherche dans la pratique c'est le bien être physique, mental et social

    Un grade peut être honorifique ....

    Le karaté est une pratique de self défense ....

    Commentaires :

    PCS 2003 Niveau 1 - Liste des catégories socioprofessionnelles

    Code Libellé

    1 Agriculteurs exploitants

    2 Artisans, commerçants et chefs d'entreprise

    3 Cadres et professions intellectuelles supérieures

    4 Professions Intermédiaires

    5 Employés

    6 Ouvriers

    7 Retraités

    8 Autres personnes sans activité professionnelle

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    Anthony METTLER 103

    Annexe 6 : questionnaire Avlar vierge

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009

    Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

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    Anthony METTLER 104

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    Anthony METTLER 105

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    Anthony METTLER 106

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009

    Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

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    Master 2 SEP, Brest Juin 2009

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    Anthony METTLER 108

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Annexe 7 : évolution des votes sur le questionnaire en ligne

    Anthony METTLER 109

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    Annexe 8 : récapitulatif des pratiquants interviewés

    Anthony METTLER 110

    Numéro d'entretien/genre

    Caractéristiques

    1/masculin

    Etudiant, sans emploi, 20 ans, 2ème dan, a commencé le karaté en
    1993/1994, titulaire du DAF/DIF, 16 ans de pratique

    2/masculin

    Professeur de karaté, 59 ans, 7ème dan, a commencé le karaté en
    1971, titulaire du BEES 2ème degrés, 38 ans de pratique

    3/féminin

    Chargée de relation entreprise, 37 ans, 1ème dan, a commencé le
    karaté en 1985, titulaire du DAF, 14 ans de pratique

    4/masculin

    Marin d'Etat, 46 ans, ceinture blanche, a commencé le karaté en
    1976, 5 ans de pratique

    5/féminin

    Militaire, 23 ans, 2ème dan, a commencé le karaté en 1991, Juge
    National Combat, vice-championne de France combat par équipe,
    17 ans de pratique

    6/féminin

    Assistante d'éducation, 22 ans, 2ème dan, a commencé le kobudo
    en 1999 et le karaté en 2001, BEES 1 karaté, Licence STAPS, 8
    ans de pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 111

    Annexe 9 : Guide d'entretien « vision de pratiques en Karaté »

    Introduction

    Je vous remercie d'avoir accepté de me rencontrer. Suite au pré-test sur l'étude des « visions de pratique des karatékas » à laquelle vous avez répondu, je souhaiterai connaitre vos opinions ainsi que votre point de vue sur des éléments généraux de votre pratique personnelle mais aussi sur le karaté en général.

    1. parcours du pratiquant :

    Comment êtes vous venu au karaté ?

    Quels sont les moments important de votre vie de karatéka ?

    Aujourd'hui, comment pratiquez vous le karaté ?

    Quel karatéka êtes-vous ?

    2. définition du karaté :

    Je souhaiterai ainsi que vous me racontiez votre façon de voir le karaté ?

    Qu'est ce qui vous semble important dans votre pratique du karaté ?

    Que pensez-vous de la philosophie, de la tradition en karaté ?

    Quelles sont vos impressions sur la pratique du karaté actuel ?

    Si enseignant : quel message transmettez vous ?

    Si adhérent : quel message recevez vous ?

    3. relation pratiquant/fédération :

    Comment voyez-vous votre relation avec la fédération ?

    Quel est votre sentiment en ce qui concerne l'image qu'elle donne ?

    Impressions sur le karaté olympique ?

    Quelles sont vos attentes ?

    4. engagement :

    Avez-vous eu des responsabilités au sein du karaté ? Comment avez-vous vécu ses responsabilités ?

    Caractéristiques sociales : Age, Profession, Grade, Année de début, Diplôme karaté, Profession père, Profession mère

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 112

    Annexe 10 : exemple de synthèse d'entretien vierge

    Synthèse entretien n°...

    PRENOM : ...., (lieu),

    «Citation résumant le profil.«

    Caractéristiques : profession, âge, temps de pratique ...

    1 - RESUME DE L'ENTRETIEN :

    Ce qui l'a conduit au karaté :

    Expériences avec différents enseignants/maîtres :

    Les moments marquants de la pratique :

    Les stages de karaté :

    2 - CADRE BIOGRAPHIQUE ET FACTUEL :

    Né à ... en 19.., elle/il a grandi à .... (..)

    Père : ...

    Mère:

    La pratique actuelle :

    3 - DETERMINANTS DE LA VISION DE LA PRATIQUE :

    Quel karatéka est-elle/il ?

    Comment voit-elle/il son karaté ?

    Que recherche-t-elle/il dans sa pratique ? :

    Contribution du karaté dans la réalisation du projet de vie :

    Valeurs et principes de sa pratique :

    Comment voit-elle le traditionnel ?

    La part de philosophie dans la pratique :

    Le message à faire passer par l'enseignement du karaté :

    4 - OPINIONS SUR LA PRATIQUE : Les passages de grades :

    C'est quoi la ceinture noire ?

    Les impressions sur le karaté actuel : L'image de la fédération d'après ... : Le lien qu'elle/il a avec la fédération :

    5 - PROJETS/ATTENTES :

    Au niveau personnel : Au niveau de la pratique :

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 113

    Annexe 11 : répartition par styles de karaté

    Styles

    SENIOR

    (base FD
    mars 09)

    %

    POP.
    (etude)

    %

    AUTRE STYLE

    3589

    6,23

    21

    4,81

    GOJU RYU

    517

    0,90

    2

    0,46

    KYOKUSHINKAI

    1468

    2,55

    8

    1,83

    SHITO RYU

    3098

    5,38

    23

    5,26

    SHORIN JI RYU

    429

    0,74

    4

    0,92

    SHOTOKAN

    40318

    69,98

    303

    69,34

    SHUKOKAI

    916

    1,59

    9

    2,06

    UECHI RYU

    184

    0,32

    2

    0,46

    WADO RYU

    5347

    9,28

    59

    13,50

    KARATE
    CONTACT

    1745

    3,03

    6

    1,37

    Total

    57611

    100,00

    437

    100,00

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Orientation 1

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    1

    0,2%

    dépenser

    76

    17,2%

    art martial/philo

    175

    39,6%

    self défense

    34

    7,7%

    sociale

    9

    2,0%

    éthique de vie

    147

    33,3%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Orientation 3

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    7

    1,6%

    dépenser

    95

    21,5%

    art martial/philo

    66

    14,9%

    self défense

    111

    25,1%

    sociale

    87

    19,7%

    éthique de vie

    76

    17,2%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

     

    Orientation 5

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    7

    1,6%

    dépenser

    82

    18,6%

    art martial/philo

    37

    8,4%

    self défense

    116

    26,2%

    sociale

    185

    41,9%

    éthique de vie

    15

    3,4%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Orientation 2

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    2

    0,5%

    dépenser

    75

    17,0%

    art martial/philo

    125

    28,3%

    self défense

    68

    15,4%

    sociale

    31

    7,0%

    éthique de vie

    141

    31,9%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Orientation 4

    Nb. cit.

    Fréq.

    Non réponse

    11

    2,5%

    dépenser

    104

    23,5%

    art martial/philo

    43

    9,7%

    self défense

    104

    23,5%

    sociale

    119

    26,9%

    éthique de vie

    61

    13,8%

    TOTAL OBS.

    442

    100%

    Anthony METTLER 114

    Annexe 12 : les orientations de la pratique

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 115

    Annexe 13 : analyse lexicale de la définition du karaté

    Définition de la pratique

    Nb. cit.

    Fréq.

    pratique/art martial

    100

    26,1%

    équilibre-maîtrise-lien corps/esprit

    98

    25,6%

    maîtrise de soi

    80

    20,9%

    valeurs/philosophie

    79

    20,6%

    mode de vie/éthique/école de vie/art de

    vivre

    68

    17,8%

    sport/sport de combat

    65

    17,0%

    respect soi/autres

    59

    15,4%

    self défense/auto défense

    45

    11,7%

    bien être/détente

    42

    11,0%

    conscience du corps/se connaitre/dev
    personnel/épanouissement

    39

    10,2%

    s'ouvrir aux autres/relations
    sociales/rassemble

    37

    9,7%

    compétences techniques

    34

    8,9%

    dépassement de soi

    32

    8,4%

    conservation corps/santé/condition
    physique

    31

    8,1%

    progression/dépense physique

    30

    7,8%

    état d'esprit

    24

    6,3%

    confiance en soi

    17

    4,4%

    spirituel

    17

    4,4%

    activité physique/gym corporelle

    14

    3,7%

    sérénité

    12

    3,1%

    maitriser l'énergie

    11

    2,9%

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 116

    efficacité

    11

    2,9%

    budo/voie

    11

    2,9%

    main ouverte/nues

    9

    2,3%

    éducation du corps

    8

    2,1%

    pratique traditionnelle

    8

    2,1%

    progression mentale

    8

    2,1%

    plaisir

    7

    1,8%

    bonne ambiance/famille

    6

    1,6%

    expression artisitique/corporelle

    6

    1,6%

    art de combat

    5

    1,3%

    loisir

    3

    0,8%

    culture

    3

    0,8%

    art de guerre

    2

    0,5%

    passion

    2

    0,5%

    pratique de compétition

    2

    0,5%

    échange

    1

    0,3%

    beauté

    1

    0,3%

    transmission expérience/savoirs

    1

    0,3%

    TOTAL OBS.

    383

     

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    Anthony METTLER 117

    Table des matières

    INTRODUCTION : 6

    I. LE KARATE EN FRANCE AUJOURD'HUI : UNE ACTIVITE AUX MULTIPLES FACETTES... 8

    1. Historique : 8

    2. Institutionnalisation du karaté en France : processus de diversification 11

    a) L'appropriation de la culture japonaise par des karatéka occidentaux 11

    b) Le karaté entre sport et art martial 13

    3. Le karaté en France aujourd'hui : les effets de la sportivisation du karaté 14

    a) Emergence du karaté fédéral 14

    b) La FFKaraté et DA : une communication aux multiples orientations 15

    c) Du grade « symbolique » au grade « législatif » 17

    d) La compétition en karaté 19

    e) Les nouvelles modalités de pratique : l'exemple du body karaté 20

    II. COMPRENDRE LES REPRESENTATIONS DES PRATIQUANTS : UNE PRATIQUE

    UNIFIEE ? 21

    1. Des orientations variées de la pratique: 21

    2. Les déterminants sociologiques de la pratique du karaté 22

    3. La diversification et modification de la structure sociale 24

    4. L'opinion et les représentations comme construits sociaux 26

    III. ETUDE DES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU KARATE EN FRANCE : 29

    IV. METHODOLOGIE DE L'ANALYSE DE LA POPULATION DE KARATEKA : 32

    1. Le pré-test : 32

    2. Le questionnaire : 33

    3. L'échantillonnage : 34

    4. L'envoi des mails 37

    5. Les entretiens : 38

    6. Les biais résultants de ce type de méthodologie : 39

    V. CARACTERISTIQUES ET ELEMENTS STRUCTURANTS DE LA POPULATION DE

    PRATIQUANTS : 40

    1. Les caractéristiques de la population de pratiquants : 40

    a) Répartition entre Hommes et Femmes 40

    b) La répartition par tranche d'âges 41

    c) Professions et Catégories Socioprofessionnelles (PCS) 42

    d) Le temps de pratique en karaté 43

    e) Présentation des styles pratiqués 44

    f) La répartition des pratiquants par grade 45

    g) Les stages de karaté 46

    h) La part de compétition dans la pratique 47

    i) Le type de dojo pour la pratique du karaté 48

    j) L'activité « administrative » des pratiquants 48

    Anthony METTLER 118

    Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de karaté en France : de l'« artiste martial» à l'« égaré ».

    k) Les diplômes d'arbitrage des pratiquants 50

    l) Les diplômes d'enseignement des pratiquants 51

    m) L'enseignement du karaté 52

    n) La « motivation » pour l'entrainement 52

    2. La perte de sens de la pratique illustrés par les pratiques « périphériques »: 53

    a) Ceux qui pratiquent un autre art martial ou activité de combat 53

    b) Ceux qui pratiquent d'autres activités physiques et sportives et de loisirs 55

    3. Le rôle du grade dans la pratique : 56

    a) Corrélation grade actuel / temps de pratique 56

    b) Le grade comme élément structurant de la pratique 57

    VI. LES OPINIONS ET LES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU KARATE : 59

    1. Les résultats de l'étude quantitative : 59

    2. La définition du karaté vue par ses pratiquants : résultats de la question ouverte 61

    3. Les opinions sur le karaté et ses différents aspects : 63

    a) La ceinture noire : 63

    b) La compétition en karaté et dans les arts martiaux 67

    c) Le karaté olympique 69

    d) Le travail du combat 71

    e) Les modalités de pratique en voie de développement 73

    f) La question du karaté enfant 76

    g) Les femmes et le karaté 78

    VII. DE L'«ARTISTE MARTIAL » A L'« EGARE » : 82

    1. Le « compéti-do » : 82

    2. L'« égaré » : 83

    3. Le « penseur » : 84

    4. Le « rationaliste » : 86

    5. L'« artiste martial » : 87

    DISCUSSION 89

    BIBLIOGRAPHIE 92

    ANNEXES 94

    TABLE DES MATIERES 117






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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld