Université de Bretagne Occidentale
UFR Sport
et Education Physique - Brest
Les pratiquants de karaté en France
de l'«artiste martial » à l'«
égaré ».
par Anthony Mettler,
tudiant en 2er année de Master " Sport
et Sciences Sociales, Administration, Territoire, Intégration
"
Spécialité Recherche
2009
Directeur de mémoire : Julien FUCHS
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Les pratiquants de karaté en France
de l'«artiste martial » à l'«
égaré ».
par Anthony Mettler,
tudiant en 2er année de Master " Sport
et Sciences Sociales, Administration, Territoire, Intégration
"
Anthony METTLER 2
Directeur de mémoire : Julien FUCHS
2009
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 3
"La grandeur d'un homme réside dans sa capacité
à corriger ses erreurs et à se renouveler continuellement."
Wang Yang-Ming
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 4
Remerciements
Tout d'abord, je tiens à remercier le Ministère
de la Santé, de la Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative d'avoir
financé ce projet. Je remercie également le président de
Fédération Française de Karaté et Disciplines
Associées, Mr Francis Didier, ainsi que le Directeur Technique National,
Mr Dominique Charré, pour leur confiance et pour m'avoir donné la
possibilité d'accéder à des informations sans lesquelles
il m'aurait été impossible de réaliser ce projet. Enfin,
je remercie l'Université de Bretagne Occidentale ainsi que le
laboratoire Atelier de Recherche Sociologique pour leur contribution.
Plus personnellement, je tiens à remercie les personnes
qui ont contribuées au bon déroulement de cette étude
comme Samuel Julhes, pour ses compétences techniques, Laurie Le
Séhan, pour son aide précieuse dans des moments où parfois
deux mains ne suffisent plus pour avancer, mon directeur de recherche, Julien
Fuchs, pour ses remarques et son oeil expert, et enfin d'autres comme Thierry
Michot, Olivier Lemonon, Antoine Marssac, Fabien Le Saux pour les
échanges et les conseils qui m'ont permis de me construire tel que je
suis aujourd'hui.
Je ne peux oublier l'ensemble des karatéka que j'ai
rencontré, interrogé, à travers la France sur les tatamis,
dans les compétitions ou dans des situations plus
particulières.
Merci à tous les « gros » : Jean
Pierre, Jean Mimi, Régis, Mick, Marjo, Corinne et bien
d'autres pour ses échanges au quotidien, pour m'avoir
inspiré sans qu'ils ne s'en aperçoivent.
Enfin, merci à ma famille d'avoir suivi mes travaux sans
vraiment comprendre les
tenants et les aboutissants, plus particulièrement, mon
père qui m'a transmit la fibre « recherche ».
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Sommaire
I.
Anthony METTLER 5
LE KARATE EN FRANCE AUJOURD'HUI : UNE ACTIVITE AUX
MULTIPLES FACETTES 8
II. COMPRENDRE LES REPRESENTATIONS DES PRATIQUANTS :
UNE PRATIQUE UNIFIEE ? 21
III. ETUDE DES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU KARATE
EN FRANCE : 29
IV. METHODOLOGIE DE L'ANALYSE DE LA POPULATION DE
KARATEKA : 32
V. CARACTERISTIQUES ET ELEMENTS STRUCTURANTS DE LA
POPULATION DE PRATIQUANTS : 40
VI. LES OPINIONS ET LES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE
DU KARATE : 59
VII. DE L'«ARTISTE MARTIAL » A
L'« EGARE » : 82
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 6
Introduction :
La Fédération Française de Karaté
et Disciplines Associées développe depuis quelques années
une politique de recherche et de développement dans différents
domaines scientifiques comme la biomécanique. En effet, le financement
d'un doctorant comme chargé de mission de recherche auprès la
fédération a permis de mettre au point les normes concernant les
protections pied/poing pour la compétition combat. Ce travail a eu pour
résultat de valider les normes de sécurité au niveau de la
fédération mondiale de karaté (World Karate Federation).
Dans cet élan, nous avons répondu à un « appel
à projet de recherche et de développement »,
financé par le ministère des sports, s'inscrivant dans le
programme « Sport » (la loi des finances).
Ce programme se décline en quatre actions : le
développement du sport pour le plus grand nombre, le
développement du sport de haut niveau, la prévention par le sport
et protection des sportifs et la promotion des métiers du sport. Ce type
de financement soutient des actions de recherche et de développement
proposées par des fédérations sportives, des
établissements du ministère, des laboratoires de recherche et des
associations agrées. Dès lors, le projet que nous avons
déposé s'inscrit dans la rubrique «connaissance des
phénomènes sportifs et de leurs évolutions ».
En octobre 2008, nous avons signé une convention
tripartite valable un an entre le Ministère de la Santé, de la
Jeunesse, des Sports et de la Vie Associative (financeur principal), la
Fédération Française de Karaté et Disciplines
Associées (FFKDA-commanditaire) et l'Université de Bretagne
Occidentale en vue de la réalisation d'une étude de nature
sociologique devant aboutir à la réalisation d'une typologie
approfondie sur les pratiquants de karaté en France.
L'intérêt de ce type d'étude pour la
fédération, outre le fait de mieux appréhender l'espace
des pratiquants, est surtout de connaître finement le sens que les
pratiquants donnent à leur discipline, ou encore les attentes de ces
derniers. Ainsi, elle entend par exemple mieux saisir les raisons qui poussent
le public des plus de 18 ans à pratiquer l'une ou l'autre forme de
karaté. Aussi, connaître les caractéristiques sociales des
pratiquants ou bien les représentations qu'ils ont du karaté
contribuera à perfectionner la politique sportive de la
fédération.
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Tout d'abord, nous chercherons à montrer que la
pratique actuelle du karaté en France est une activité aux
multiples facettes. Nous retracerons le parcours de cette pratique du Japon,
plus précisément d'Okinawa, vers la France en portant notre
regard sur les éléments ayant déterminés le
karaté tel que nous le connaissons aujourd'hui. Pour ce faire, nous
présenterons les différents processus entrant en jeu comme le
processus de « sportivisation »1. De plus, nous
exposerons les conséquences de la diversification du karaté sur
le grade, la compétition ou encore sur l'émergence de nouvelles
modalités de pratique en traitant le discours diffusé par la
Fédération Française de Karaté et Discipline
Associées. Ensuite, nous présenterons le cadre théorique
dans lequel nous nous s'inscrivons. Ainsi, nous expliquerons comment l'analyse
des représentations nous permet d'élaborer des profils-type.
La suite de l'étude permettra d'analyser les opinions
sur la pratique par une méthodologie constituée d'un
questionnaire mit en ligne sur internet, s'adressant à une population
représentative, et de plusieurs entretiens semi-directifs. Nous
préciserons la démarche scientifique que nous avons
utilisé afin d'étudier les caractéristiques des
karatéka aboutissant aux profils-type de pratiquants.
Ensuite, nous traiterons les questions d'opinons afin
d'identifier les thèmes marquants une opposition ou contraire un
consensus dans les représentations des pratiquants. Cette analyse
permettra également de prendre connaissance et de hiérarchiser
les différentes orientations de la pratique. Nous chercherons
également les raisons qui conditionnent les résultats. L'objectif
étant de valider ou d'invalider le fait que la pratique du karaté
est socialement diversifiée, de comprendre le sens que les pratiquants
donnent à leur pratique et d'élaborer une typologie des
karatéka.
Nous conclurons ce travail de recherche en exposant les
éléments caractérisant cette population de
karatéka, nous apporterons également des éléments
de réflexion quant au financement de cette étude par l'Etat,
enfin, nous présenterons les ouvertures probables pour la suite.
Defrance, J. (1995) Sociologie du sport, La
découverte, Paris
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Anthony METTLER 8
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
I. Le karaté en France aujourd'hui : une
activité aux multiples facettes
1. Historique :
L'île d'Okinawa2 est le berceau du
Karaté do. Cependant, cette pratique a connu beaucoup de transformations
techniques tout au long de son histoire. Yves Cadot3 a mis en avant,
par traduction de textes japonais, que le Karaté jutsu d'Okinawa a
été créé à partir d'une lutte traditionnelle
de cette île d'où est issu Gichin Funakoshi (1868-1957),
instituteur issu de la petite noblesse Okinawaïenne. Lors d'un entretien
pour la revue Officiel Karaté4, Keneï Mabuni
rappelle qu'avant cette codification, on ne parlait pas de karaté mais
de « l'art du te » (art de la main). Cette pratique faisait
référence aux connaissances des techniques de la guerre et de la
stratégie de combat. Il précise également que ces
connaissances étaient rares et précieuses, ce qui procurait
à son détenteur un respect et une réputation sans
bornes.
D'après Ludovic jeanne5, le Karaté
n'est pas une technique japonaise mais plutôt le produit des
échanges techniques de l'archipel des Ryükyü. Cet archipel
fût annexé par le japon au XVIe siècle. Son île
principale, Okinawa, fût le lieu du développement de techniques de
combat propre à l'esprit de l'archipel, mélangeant diverses
influences chinoises et japonaises. Le changement successif de l'appellation de
cette forme de combat serait due à la volonté d'affirmer cette
technique du corps6 comme japonaise. Ces influences ont
permis de développer des « styles » ou «
écoles » qui peuvent se regrouper sous trois formes de
travail : Shuri te, Naha te et Tomari te. Plus simplement, les trois
catégories de travail se sont développées en fonction de
localisation géographique car ces trois catégories prennent comme
origine le nom des trois villes les plus importantes de l'époque. Ces
formes ont comme particularités d'avoir intégré des
éléments techniques issues d'autres pratiques. Par exemple, la
ville portuaire de Naha aura développé une pratique du
karaté contenant des éléments de boxe chinoise avec un
travail des hanches vertical ayant comme objectif de développer
l'énergie interne par des exercices de respiration. Au contraire, la
forme Shuri aura tendance à développer un travail des hanches
horizontal à la recherche d'une technique
2 Cf. annexe 1
3 Cadot, Y. (2007) OfficielKaraté
n°22
4 Interview de Keneï Mabuni, (2007)
OfficielKaraté n°24
5 Jeanne, L. (2000) La pratique du karaté
en France et au Japon (Okinawa). Identités, idéologies et
cultures, in : Fauches S., Callede JP., Gay-Lescot J-L., Laplagne J-P,
Sport et identités
6 Mauss, M. (1950) Notions de techniques du
corps, in Mauss, M. Sociologie et anthropologie, PUF, Paris
Anthony METTLEK 9
plus dure. Aujourd'hui, il existe un nombre conséquent
de styles de karaté tels que le Shotokan, le Wado-ryu, le Shito-ryu, le
Goju-ryu ou encore le Kyokushin-kaï.
Gichin Funakoshi a vite prit conscience qu'en raison du
contexte culturel et social il était nécessaire de modifier
l'image du « To-dé » d'Okinawa pour faciliter son
intégration dans la société japonaise. Dès lors
« Kara-Té » ne signifiait plus « main de
Chine » mais « main vide » c'est-à-dire
« méthode de combat à main nue ». De plus, il ajouta le
suffixe de « Do », la voie, afin de rattacher le
Karaté à la grande famille des arts martiaux japonais dont les
noms se terminaient tous par « Do » : Judo, l'Aïkido,
Kendo. Ce passage du « To-Dé » au «
Karaté-Do » permettait à la fois d'effacer la
référence à la Chine, adversaire historique de l'empire
japonais, et de rattacher cette pratique à une référence
culturelle dominante à l'époque car l'idéogramme
«Kara» (vide) correspondait à une notion centrale du
bouddhisme japonais (Zen). Ce changement de nom fut officialisé en 1935
lorsque Gichin Funakoshi publia un nouveau livre, intitulé «
Karaté-do Kyohan » qui eut une assez large audience
à l'époque. Dans les mêmes buts Gichin Funakoshi
procéda à une modification des noms des Katas, modification
qualifiée de « japonisation » par Kenji
Tokitsu7.
Dans un contexte de montée du nationalisme
japonais8 (1930), toutes pratiques permettant d'affirmer et de
transmettre les valeurs prioritaires, telles que le judo ou le kendo, furent
intégrées à l'enseignement dans les lycées publics
locaux. En effet, l'idée de « couler les masses dans le moule
d'un corps national »9 prime alors au Japon au
cours des années 1930. Les institutions modernes de la scolarité
obligatoire et de la conscription militaire vont fournir les outils les plus
efficaces pour mettre en place un corps national intégrant une
très large majorité de la population japonaise. Nous pouvons dire
que l'Etat japonais a utilisé le sport et la politique du corps pour
mouler ses citoyens en « une masse disciplinée et soumisse
»10. Notons que les sports jouèrent un rôle
prépondérant pour inculquer discipline et valeurs morales mais
restèrent secondaires en ce qui concerne l'endoctrinement nationaliste.
De plus, les sports au Japon à cette période étaient au
coeur même de la valorisation du
7 Tokitsu K. (1993) Histoire du
Karaté-Do, Editions SEM
8 Manzenreiter, W. (2007) Sport et politique du
corps dans le Japon totalitaire, in Tschudin, JJ. & Hamon, C., La
société Japonaise devant la montée du militarisme :
culture populaire et contrôle social dans les années 30, Ed.
Philippe Picquier, Arles
9 Op. Cit. Manzenreiter, W
10 Manzenreiter, W. (2001) Moderne korper,
moderne ope. Sport und internationalstaat in Japan und osterreich
1850-1900, Minikomi - informationen des akademischen arbeitskreis Japan
2
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLEK 10
sacrifice sur le champ de bataille inculqués aux
citoyens11. L'essor des pratiques martiales, comme le karaté,
peut avoir été propulsé par la dynamique des champs
sociaux du pouvoir, et serait le résultat des rivalités entre
tous les acteurs et agents, athlètes, instructeurs, éducateurs,
médias, administrations et autorités, qui avaient un mot à
dire dans ce domaine. Ainsi, l'Etat cherche à transformer l'individu en
un « corps collectif »12 Toutefois, Wolfram
Manzenreiter précise que le sport au Japon a rempli une fonction
complémentaire dans la mesure où il ne jouait pas un rôle
central. Dès lors, nous pouvons dire que le sport ou les «
pratiques martiales » n'étaient pas des instruments
permettant la diffusion d'une idéologie « fasciste ».
Au contraire, des pratiques telles que le karaté ont pu se
développer au sein du système sportif japonais en raison du peu
de contrôle de l'Etat sur le monde sportif du fait de son manque
d'intérêt. Ce fût le cas pour le karaté jutsu
d'Okinawa en 1892 suite à une démonstration devant un commissaire
japonais en visite sur Okinawa. En 1900, la pratique est incluse dans les
programmes d'éducation physique scolaire et, en 1917, Gichin Funakoshi
est invité par Jigoro Kano à présenter sa pratique devant
les membres du Dai Nippon Butoku Kaï13. Il s'installe en 1921
à Tokyo afin de divulguer et enseigner le karaté do et plus
particulièrement le style Shotokan. C'est en ce sens que l'incorporation
non consciente des normes et pratiques véhiculées par l'Etat a
contribué au développement les « arts martiaux
», plus particulièrement, du karaté.
L'histoire montre que si Funakoshi n'est pas le «
créateur du Karaté » il est en tout cas
«l'inventeur du nom Karaté», et qu'il fut à la
fois l'un des structurateurs du travail d'intégration scolaire
commencé par son maître Itosu et l'initiateur de l'expansion du
Karaté dans les universités japonaises. Nous avons vu que
l'évolution du karaté jutsu d'Okinawa au karaté do au
Japon aura été possible par la « japonisation
» de cette art corporel permettant l'intégration progressive
du karaté au niveau scolaire et universitaire au Japon14.
Dès lors, comment cette pratique « japonisée »
a-t-elle pu se développer en France.
11 Mangan, JA. & Komagome, T. (2000)
Militarism, sacrifice and emperor worship : the expandable male body in facist
japanese martial culture, in Mangan, JA., Superman supreme. Facist
body as political icon - Global facism, Franck Cass, Londres
12 Op. Cit .Manzenreiter, W.
13 Fin 1941, toutes les organisations civiles sont
insérées dans le nouveau Club sportif du Grand Japon placé
sous la présidence du Premier Ministre.
14 Girodet, P. & Mettler, A. (2009)
L'intégration scolaire et universitaire du karaté,
Dossier technique et pédagogique Karaté, revue EPS n°336
Anthony METTLER 11
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
2. Institutionnalisation du karaté en France :
processus de diversification
a) L'appropriation de la culture japonaise par des
karatéka occidentaux
Les pratiques dites « martiales » se sont
institutionnalisées progressivement en France dans les années
1950. Au cours de cette migration le karaté a subi différents
processus du fait des différences culturelles fondamentales entre les
deux pays. En effet, l'orient a subi des influences bouddhistes et
confucéennes tandis que l'occident à subit des influences
cartésiennes et chrétiennes15. Pour Kim Min
Ho16, étudiant ayant fait sa thèse sur les
évolutions liées au corps dans un contexte, la
particularité du contexte actuel de la société
française met en avant deux notions : la volonté
d'égalité entre les individus et la démonstration des
compétences personnelles sous l'influence des normes sportives
basées sur l'excellence individuelle.17
Plus précisément, il défend l'idée
que le développement des pratiques martiales dépend du contexte
sociologique, politique, militaire, psychologique et religieux. Il insiste sur
le fait que l'influence de la culture occidentale va interagir dans la
définition de nos propres finalités. En effet, les pratiquants
garderont quelques aspects de la culture d'origine tout en appréhendant
la pratique par leur propre culture, il parle de « japonisation
» de celle-ci. Précisons que la vision
européocentriste18, c'est-à-dire la vision que les
occidentaux ont du monde en ayant comme référence l'Europe, a
permis de développer les «arts martiaux» en occident
plus qu'ils ne le sont dans la culture asiatique, du fait que celle-ci ait un
mode de transmission discrète. Le monde occidental des « arts
martiaux » aurait perdu le sens de la culture d'origine mais aurait
gagné en « pouvoir initiatique ».
Il est possible d'expliquer les causes sociales d'un tel
phénomène par le processus d'acculturation c'est-à-dire
« l'ensemble des phénomènes qui résultent d'un
contact direct et continu entre des groupes d'individus de cultures
différentes et qui entraînent des changements dans les
modèles culturaux initiaux de l'un ou des deux groupes
»19. Concrètement, le pratiquant de karaté
adopte les éléments de la culture japonaise en
15 Weber, M. (2006) Sociologie de la
religion, traduit par Kalinowski, I., Flammarion, Paris
16 Kim Minho. (1999) L'origine et le
développement des arts martiaux, Ed. Espaces et temps du sport,
Paris
17 Il s'agit du « héros olympique
» dont parle Pierre de Coubertin, in le journal - Paris 27aout
1896
18 Charlot, E. Denaud, P. (1999) Les arts
martiaux, Que sais-je ?, Paris
19 Redfield, R., Linton, R. & Herskovits, M.
(1936) Memorandum for the Study of Acculturation, American
Anthropologist, USA
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 12
abandonnant partiellement ceux de sa propre culture en raison
d'une sélection d'un nombre de traits culturels propres à la
société du pays d'accueil, la réinterprétation de
ses traits culturels empruntés pour qu'ils puissent s'insérer
dans la culture d'origine et enfin l'assimilation des emprunts culturels qui
transforme profondément les manières de faire, de penser.
Dès lors, nous pouvons voir le karaté comme un
« objet culturel assimilé puis transformé par une
société européenne formant un miroir qui reflète
l'évolution de la société qui les accueille »
20. Pour André Terrisse, les efforts de recherche doivent
être faits autour des traces culturelles, des examens des lieux de
pratiques, milieux, mode de sociabilités soit les mécanismes
d'élaboration de transmission. Pour y arriver, il suggère de se
pencher sur les produits culturels qui traduisent le regard des Français
sur le Japon. En effet, lorsqu'un enseignant fait un cours dans un club ou un
dojo, il ne peut transmettre qu'une partie de ce qu'il connaît car il y a
une part d'implicite dans la culture de la discipline pratiquée.
A cela, il faut ajouter les problèmes de traduction
liés à la transmission orale, au sens où l'entend Marcel
Mauss, c'est-à-dire qu'il est possible de perdre le sens de certaines
techniques suite à la traduction de celle-ci par des mots qui n'ont pas
réellement la même signification. En ce qui concerne le
karaté, les premiers experts japonais arrivés en France
n'apprenaient pas forcément le français lors de leur formation
dans les universités nippones. Or, la barrière de la langue et de
la traduction de certains termes subsiste encore aujourd'hui. Comme l'illustre
le problème de la traduction concernant le positionnement de la jambe
arrière lors d'un « jun tsuki dachi », position de
coup de poing direct, où la jambe avant est en flexion et la jambe
arrière doit être « forte » mais pas «
tendue » pour autant. Dès lors, un débat a
été lancé entre les partisans de la jambe «
tendue » et ceux de la jambe « forte ». Cela
semble mineur pour un profane mais ce problème de traduction
amène à un travail technique très difficile en raison des
disponibilités biomécaniques du corps humain. C'est le fondement
même de tout une partie de la culture du karaté qui est
bouleversée.
Hormis le souci de traduction, il est également
intéressant de constater l'existence de conflits au sein de la pratique.
L'exemple du rituel qu'est le salut permet d'illustrer les possibles
divergences culturelles. En effet, certaines questions sans réponses
laissaient ce rituel, pratiqué en début et fin de chaque cours,
à la discrétion des enseignants. La FFKDA a donc
décidé d'entamer une réflexion de fond sur ce sujet avec
la collaboration d'une
20 Terrisse, A. (1998) Recherche en sport de
combat et arts martiaux : état des lieux, Revue EPS, Paris
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 13
vingtaine d'experts majoritairement japonais en 2005.
L'objectif étant de « proposer aux clubs une forme
précise et pertinente »21. Dans cet article sont
expliquées les étapes du rituel illustrées par des images,
le vocabulaire et enfin une explication de l'esprit et de la symbolique
liée au salut. L'intention de la fédération semble
être de transmettre une partie de la culture japonaise afin de pallier
aux déviances existantes et confirme donc la perte lente et progressive
d'une partie de la culture d'origine due à la sportivisation et ainsi
qu'à la diversification progressive de la pratique.
b) Le karaté entre sport et art martial
Une étude de Ludovic
Jeanne22 propose l'idée que
l'horizon de pratique du karaté des Français serait un
équilibre entre une vision sportive et traditionnelle du karaté.
En effet, cet équilibre entre sport et tradition d'une pratique martiale
semble exister du fait que le karaté se soit institutionnalisé
dans les années 1960, dans un contexte de structuration fort du
mouvement sportif autour de nouvelles fédérations. Le processus
de « sportivisation », identifié notamment par
Jacques Defrance23, s'est
vraisemblablement déroulé au sein du karaté sans pour
autant affecter l'aspect plus « traditionnel » de la
pratique. En diffusant largement un discours mythique sur l'émergence du
karaté au Japon, les enseignants français entretiennent
l'idée d'une vision exotique de la pratique. Au Japon par contre, le
karaté se structure davantage autour de discours axés sur
l'aspect martial de la pratique.
Dès lors, la pratique du karaté se serait
développée différemment en fonction de l'orientation des
pratiquants et des enseignants. En effet, certains pratiquants recherchent une
pratique permettant de se défouler et d'autres orienteront leur pratique
dans le sens d'une école de vie. A partir du moment où les
enseignants dispensent des cours différents sur le fond et la forme il
est possible de pratiquer le karaté comme un sport, au sens le plus
commun du terme, ou comme un art martial ancestral. Ainsi, les occidentaux ont
accueilli le karaté en France dans les années 1950 avec une
vision exotique de la pratique en raison des différences culturelles
entre deux pays. La France et le Japon se sont construits sur des
modèles internes complètements différents et ces
différences ont entraînées des pratiques «
culturellement » identiques sur la forme mais différentes sur le
fond. Nous avons là deux cultures différentes et pourtant qui
enseignent les mêmes contenus, une dualité avec d'un
21 Charlot, E. (2005) Réflexion sur le
salut, Officiel karaté n°15
22 Op. Cit. Jeanne, L.
23 Defrance, J. (2006) Sociologie du sport,
Collection Repères, la découverte
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 14
côté la vision orientale avec un travail
basé sur l'interne, favorisant la quête personnelle, spirituelle
ayant comme code implicite le Budo. De l'autre côté la vision
occidentale, basée sur le dépassement de l'autre, où les
règles sont écrites avec un but à atteindre dans un esprit
élitiste. De plus, l'orientation de la pratique dépend de chaque
individu car le pratiquant adaptera son système de valeurs mais
également ses attentes à « son »
karaté.
3. Le karaté en France aujourd'hui : les effets de la
sportivisation du karaté
a) Emergence du karaté fédéral
La ressemblance technique entre la boxe et le karaté
aura pour conséquence, en 1954, d'organiser le karaté au sein de
la Fédération Française de Boxe Libre et de karaté
(FFBLK). Dans un souci de rassemblement des pratiques dites «
martiales », la FFBLK adhère en 1960, à la
Fédération Française de Judo et Disciplines
Associées afin de créer en 1970 l'Union Fédérale de
Karaté. Cependant, le regroupement de la quasi-totalité des
pratiques « martiales » au sein de la FFJDA créa de
fortes tensions internes. En effet, les questions de financement, de
délivrance des grades et de formations des professeurs étaient au
coeur des conflits entre les représentants du judo et les
représentants des disciplines « associées ».
Ces oppositions entraîneront au cours des années 1970 et 1980 une
conjoncture « anti-institutionnelle »24.
Suite à des tensions entre les dirigeants de la FFJDA
et de l'Union Fédérale de Karaté, l'union
fédérale se décompose en 1975. Le ministère
décide alors de rendre indépendantes les
fédérations ayant un nombre de licences représentatives ;
cette décision concerne le karaté et l'Aïkido. En 1977, la
Fédération Française de Karaté et Arts Martiaux
Affinitaires est déclarée indépendante et en 1987, elle
compte 135 000 licenciés. En 2006, la FFKAMA changera de nom pour
devenir la Fédération Française de Karaté et
Disciplines Associées (FFKDA), afin de redonner une identité plus
affirmée aux disciplines qu'elle accueille.
Tout au long de son histoire, la Fédération
Française de Karaté et Disciplines Associées s'est
progressivement sportivisée et la pratique, quant à elle, s'est
diversifiée. Elle propose actuellement un ensemble de d'actions, aussi,
elle touche des publics de pratiquants aussi divers que variées. Ce
processus de sportivisation amène aujourd'hui a des usages sociaux
très différents en ce qui concerne la pratique elle-même.
Nous pouvons dire que ce processus
24 Clément J.-P., Defrance J. (1987)
L'évolution du sport: Structures et Conjoncture in Sport et
changement social. Actes des premières journées
d'étude de la société Française de sociologie du
sport, Maison des sciences de l'homme, Bordeaux
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLEK 15
s'est engagé en France depuis de nombreuses
années en raison d'un cadrage particulier du sport doté par le
législateur. En effet, une loi du sport permet de déléguer
des pouvoirs aux fédérations qui remplissent une mission de
service public. La Fédération Française de karaté
et Disciplines Associées25 fait partie de ces
fédérations. Au-delà de la simple pratique en club, la
fédération a des obligations d'actions de développement
imposées par l'Etat que l'on appel les « publics cibles
» et englobent le public handicapé ou encore le public
féminin. Ainsi, la FFKDA cherche à faire pratiquer le
karaté à un grand nombre de personnes et développe alors
une multitude de messages. C'est pour cela que nous avons cherché
à présenter les différents axes de communication de la
FFKDA.
b) La FFKaraté et DA : une communication aux multiples
orientations
Il nous semble intéressant de présenter les
messages que la FFKDA fait passer au travers des médias qu'elle utilise,
en particulier son site internet, car il s'agit d'un moyen de communication
performant visité par de nombreux pratiquants. En se penchant sur son
site internet26 nous cherchons à identifier les
différentes orientations, c'est-à-dire la direction que
l'individu donne à sa pratique guidée par le sens ainsi que les
valeurs structurantes celle-ci, que la FFKDA présente et propose au
pratiquant qui souhaiterait faire du karaté. Ainsi, nous avons
identifié différents pôles sur lesquelles la FFKDA
communique. Tout d'abord, nous relevons une présentation du
karaté comme une « pratique pour tous »,
c'est-à-dire que la FFKDA présente le karaté comme une
activité ouverte à tous, englobant alors l'ensemble des
orientations possibles comme l'illustre cet extrait :
« Adaptés à toutes et à tous, le
karaté et les disciplines qui l'accompagnent au sein de la
fédération offrent aux pratiquants la possibilité de
s'épanouir physiquement mais aussi d'adhérer à une
«école de vie» chère aux arts martiaux. Les enfants y
trouveront une pratique éducative et ludique qui leur permettra de
canaliser leur énergie et de construire leur confiance en eux. Les
sportifs peuvent s'exprimer au travers de nombreuses compétitions
organisées par la F.F.Karaté. Les femmes représentent plus
du quart de nos effectifs : bien-être, self-défense, confiance en
soi sont parmi les bienfaits d'une pratique régulière. Pour ceux
qui souhaitent aborder une pratique traditionnelle des arts martiaux, ils
trouveront dans les clubs de la F.F.Karaté des professeurs de haut
niveau qui sauront
25 Elle comptait au mois de mai 2009, 194 819
licenciés répartis dans 3 700 clubs.
26
www.ffkama.fr : notons que l'adresse
du site de la FFKDA a conservé l'ancienne appellation à savoir
FFKaraté et Arts Martiaux Affinitaires.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 16
répondre à leurs demandes. Que vos
aspirations aillent vers une pratique compétitive, traditionnelle, de
loisirs ou vers une recherche plus philosophique, vous trouverez les
réponses à vos attentes dans la pratique des disciplines
martiales de la F.F.Karaté. »
Parmi l'ensemble des propositions que la FFKDA fait, nous pouvons
distinguer, dans
un premier temps, le karaté comme un « art
martial », c'est-à-dire que la FFKDA présente sa
pratique comme une voie d'accomplissement de soi autant physique et spirituel
:
« Souvent pratiqué comme une technique
guerrière, la pratique des arts martiaux était à son
origine tenue secrète. Comme beaucoup de disciplines, l'enseignement du
karaté en tant que Budo (voie de la protection) se concrétisa par
l'adjonction du suffixe «Do» qui exprimait ainsi qu'il n'était
pas qu'une technique guerrière, mais aussi une voie
d'épanouissement physique et spirituelle. Dans les disciplines que vous
pratiquerez au sein de la F.F.Karaté, c'est vers cette harmonie propre
aux arts martiaux que vous irez. »
Ensuite, la FFKDA présente le karaté comme
« une philosophie et un art de vivre »,
c'est-à-dire qu'elle propose d'aller au-delà de
l'activité physique en recherchant à acquérir tout un
ensemble de valeurs par l'intermédiaire d'un code moral, plus
précisément :
« Outre les bienfaits physiques que vous apportera la
pratique du karaté, vous irez aussi vers un épanouissement
philosophique. La spécificité des arts martiaux est de vous
permette, si vous le souhaitez, d'aller au-delà de la simple
activité sportive. La recherche d'intégration et d'adaptation
sociale s'exprime au travers de son code moral qui prône le sens de
l'honneur, la fidélité, la sincérité, le courage,
la bonté, la bienveillance, la droiture, le respect, la modestie, le
contrôle de soi... »
Toutefois, la FFKDA propose de pratiquer le karaté
également comme un « sport
complet, en toute sécurité », le
message ici est de considérer la pratique comme une source de bonne
santé dans un cadre sécuritaire :
« La pratique martiale est depuis longtemps
considérée comme une excellente activité physique, source
de bonne santé. L'attention de votre professeur, le respect entre les
pratiquants, des protections étudiées, et des normes strictes
d'hygiène et de sécurité dans les salles éliminent
quasiment tous les risques d'accidents. »
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 17
Enfin, le dernier aspect de la pratique, évoqué
par la FFKDA, concerne l'orientation « défense personnelle
» du karaté :
« Le karaté-do, le karaté-jutsu avec
son karaté-défense ou les disciplines associées de la F.F.
Karaté répondent toutes à la demande spécifique de
pratique de défense personnelle. L'étude de mouvements simples ou
d'enchaînements techniques permettra à chacune et à chacun
de trouver la réponse adaptée en cas d'agression. Nos enseignants
sont formés aux lois régissant la légitime défense
et vous permettront dans le dojo d'aborder une pratique sans risque et dans le
respect de vos partenaires. »
Notons que la fédération ne considère pas
la pratique du karaté comme un tout uni mais plutôt comme un
ensemble d'orientations définissants la pratique elle-même,
c'est-à-dire que nous retrouvons dans la communication qui est faite du
karaté différentes orientations possibles de la pratique qu'elle
soit martiale, philosophique, self-défense ou plus sportive. Plus
précisément, la FFKDA ne définit pas la pratique mais
propose des façons de voir et de concevoir le karaté. Comme nous
l'avons vu il est possible de pratiquer le karaté pour l'aspect
self-défense et apprendre à se défendre en cas d'agression
ou bien de pratiquer pour rechercher à s'accomplir comme être
social guidé par des valeurs et un code moral. Concrètement,
« l'indéfinition »27 des termes tels que
« art martial » ou « karaté »
laisse le choix au pratiquant de s'inscrire dans l'une ou l'autre orientation
de sa pratique et pose les bases de notre travail : chercher à
comprendre et identifier les différents types orientations afin
d'établir des profils de pratiquants. Toutefois, la FFKDA insiste sur un
point particulier de la pratique car il s'agit de l'élément qui
semble lier tous les pratiquants entre eux sans discrimination d'orientation,
c'est le grade.
c) Du grade « symbolique » au grade «
législatif »
La particularité du karaté comme d'autres
pratiques telles que le judo ou encore l'aïkido est la délivrance
de grades. D'ailleurs, le système des grades en karaté est
basé sur celui des grades en judo créé par Jigoro Kano.
D'après Emmanuel Charlot28, nous devons considérer le
grade comme une marque « d'encouragement des combattants dans leur
pratique en leur
27 Christian Pocciello (1999) parle à ce
sujet « d'individualisation et de personnalisation de la pratique des
activités » in Sports et sciences, histoire, sociologie et
prospective, Vigot
28 Journaliste pour la télévision et
la presse écrite, écrivain, judoka ceinture noire, il se consacre
depuis de nombreuses années à l'approfondissement et à la
diffusion des connaissances dans le domaine des arts martiaux, du judo en
particulier.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLEK 18
fournissant des repères plus fréquents
» avec la volonté d'« éduquer l'homme
» 29. Le grade peut être vu comme « le
symbole de la progression physique et technique mais aussi de
l'approfondissement intérieur ». Dès lors, le grade
« offre aux pratiquants des indices quant au sens de leur pratique,
c'est à dire acquérir d'abord les éléments d'une
première compétence, en suivant l'enseignement du professeur et
des élèves les plus expérimentés pour construire
« l'étoffe » d'une véritable ceinture noire, s'engager
ensuite dans un processus de travail et de recherche pouvant conduire à
un véritable accomplissement humain. » Même si le grade
valorise la compétence technique ainsi que les savoir-faire, il montre
aussi l'approfondissement de soi dans l'idée de transformation humaine
par une pratique soutenue et sincère. De plus, l'Etat reconnaît le
grade :
« L'adhésion à la F.F. Karaté
est la certitude d'obtenir des grades reconnus par la loi du 16 juillet 1984
modifiée par la loi du 6 juillet 2000. Celle-ci précise :
(extrait de l'article 17-2) (...). Dans les disciplines relevant des arts
martiaux, nul ne peut se prévaloir d'un grade ou d'un dan
équivalent sanctionnant les qualités sportives et les
connaissances techniques et, le cas échéant, les performances en
compétition, s'il n'a pas été délivré par la
commission spécialisée des grades et Dan équivalents de la
fédération délégataire (...). La Commission
Spécialisée des Dan et Grades Equivalents de la F.F.
Karaté est donc la seule habilitée à valider les grades de
karaté-do, karaté-jutsu et disciplines associées dont la
fédération à la délégation. »
Précisons qu'il existe une hiérarchisation des
grades. Les ceintures blanche, jaune, orange, verte, bleue ainsi que marron
sont délivrées à la discrétion de l'enseignant au
sein du club où l'on pratique. En revanche, les passages de grades
à partir de la ceinture noire 1er dan jusqu'au
3ème dan se déroulent au niveau de la région,
ou ligue. Puis les passages de 4ème et 5ème dan se
déroulent en inter région. L'ensemble des passages de grades sont
composés de jurys ayant passés un examen validé par la
commission CNSDGE30. Toutefois, nous constatons l'existence de deux
visions concernant le grade, celle exprimée par Emmanuel Charlot fait
référence à une progression externe ou technique dans
l'idée de développement interne et personnel tandis que la loi
conçoit le grade comme une validation de compétences
compétitives et techniques. Il y a là une divergence entre le
grade « symbolique » créé par Jigoro Kano et
le grade « législatif » comme le définit la
loi. Nous sommes là dans un
29 Charlot, E. (2003) L'échelle
intérieure, Officiel karaté n°4
30 Commission Nationale Spécialisée des
Dans et Grades Equivalents de la FFKDA
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 19
processus de rationalisation du grade par l'institution qui
démontre, d'une part, l'inscription du karaté dans une
démarche sportive. D'autre part, cette rationalisation du grade est
fortement liée au processus de sportivisation de la pratique et implique
une possible perte de sens de la pratique dans la mesure où les
karatéka chercheront à développer les compétences
techniques et compétitives au détriment de l'approfondissement
intérieur que permet la pratique.
d) La compétition en karaté
C'est en 1957 qu'eurent lieu les premiers championnats de
karaté au Japon. Presque tous les arts martiaux modernes ont
développé des formes de compétitions, avec des
règles spécifiques qui leur permettent d'ouvrir leur pratique
vers les médias et le grand public. Il existe deux formes de
compétition aujourd'hui : le kata et le combat. « La
compétition combat est une opposition de type duel. L'incertitude
émane de l'adversaire. L'objectif pour le combattant est d'organiser sa
conduite de manière à la rendre opaque pour son adversaire. La
compétition combat est une activité de percussion qui confronte
deux combattants. » En ce qui concerne les kata, nous pouvons dire
qu'il s'agit « de séquences de mouvements de combat
prédéfinies qu'il faut reproduire dans un état de
concentration extrême. » Comme le précise Bruce Neuffer,
la transmission des techniques, comme le kata, inculque une culture corporelle
spécifique aux pratiquants. En effet, « il est maintenant
clairement avéré que les techniques utilisés par
l'individu sont intimement liées à la manière dont la
société à laquelle il appartient aime à se penser
et à se représenter. »31 Notons que les titres
délivrés dans les championnats auxquels participent les
athlètes, sont officiellement reconnus par les instances sportives
nationales et internationales. L'équipe de France de karaté est
parmi les leaders depuis de très nombreuses années sur le plan
international et sont titulaires de très nombreux titres
européens et mondiaux. Une filière de haut niveau
particulièrement efficace a été mise en place dans les
pôles France et les pôles espoirs comme Chatenay Malabry ou encore
Montpellier.
Nous pouvons voir que l'offre de pratique de la
fédération est construite sur un modèle à la fois
sportif mais également « traditionnel ».
L'instauration de la compétition et de ses règlements, la
légalisation du grade, la définition d'un des aspects du
karaté comme « sport » et le développement des
« publics cibles » imposée par le Ministère de
la Jeunesse, de la Santé, des Sports et la Vie Associative confirme
l'idée d'une « sportivisation » progressive
31 Neuffer, B. (2009) Les formes de
compétition, Cahier technique de la revue EPS, Revue EPS n°
336
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 20
de cette pratique. Dès lors, il y a une multiplication
des offres que propose la FFKDA auprès du grand public, telle de que le
body-karaté.
e) Les nouvelles modalités de pratique : l'exemple du
body karaté
Depuis quelques années la FFKDA met en place un certain
nombre d'actions afin de développer la pratique. C'est en ce sens qu'ont
émergé des modalités de pratique différentes telles
que le body-karaté. Cette forme de pratique du karaté est
développée par Catherine Belrhiti32 ancienne
compétitrice de haut niveau. Le body-karaté cherche à
allier des techniques de karaté avec de la musique afin d'en tirer le
meilleur parti du potentiel corporel, cette pratique a recourt à des
postures, des mouvements, des enchaînements qui exigent une discipline
mentale tout autant que physique. « C'est une activité
thérapeutique, dans le sens où elle assouplit le corps et
détend l'esprit tout en permettant une remise en forme et le
développement d'une bonne condition physique. L'énergie circule
à travers le corps, les mouvements sont plus fluides, on constate une
amélioration du bien-être et de la santé. » 33
Nous avons là une pratique utilisant les techniques de karaté
(pied/poing) afin de participer la recherche de bien être. Cependant,
l'existence de ce type de pratique pose la question de définition de
celle-ci. En effet, s'agit-il d'un style ou d'une forme de karaté ou
d'une pratique issue du karaté mais qui n'en est plus ?
Cette partie à permis de mettre en évidence que
l'évolution du karaté, de sa forme d'origine à celle
d'aujourd'hui, a été conditionnée par des facteurs
géographiques, culturels et sociaux. Surtout, nous avons
démontré que cette pratique s'est progressivement
sportivisée depuis les années 1960. En effet, les
différents processus engagés semblent avoir eu pour
conséquence de diversifier les formes de la pratique telles que le
body-karaté. Cette diversification des formes de pratique a
entrainé une multiplication du sens que les pratiquants accordent au
karaté. C'est pour cela que le message de la FFKDA propose
différentes orientations de la pratique, sans pour autant les
définir. Désormais, il va être nécessaire de
présenter les bases théoriques qui permettront de questionner la
pratique actuelle du point de vue de ses acteurs afin de constituer les profils
de pratiquant.
32Elle est quadruple championne du monde en plus de 60
kilos. Elue au comité directeur de la Fédération
Française de karaté, elle y prend la responsabilité de la
commission féminine. Expert fédéral 6ème
dan.
33 Site du body-karaté France :
http://www.body-karate.com/
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 21
II. Comprendre les représentations des
pratiquants : une pratique unifiée ?
1. Des orientations variées de la pratique:
Diverses études scientifiques sur le karaté ont
été entreprises depuis les années 1980. Celles-ci
s'intéressent, par exemple, à la modification des
représentations des pratiquants. L'étude de Patrick Trabal et
Muriel Augustini34 sur l'évolution de l'image sous
l'effet de la pratique du karaté, met à jour l'existence d'une
évolution des représentations par le fait de pratiquer le
karaté. Plus précisément, le facteur de cette
transformation est le discours utilisé par les enseignants, discours
basé notamment sur le côté « philosophique
» voire « mystique » et «
ésotérique » du karaté. En effet, le
pratiquant se représente le karaté en référence
à l'ensemble des discours traditionnels, philosophiques, sportifs ou de
self défense. Dès lors, le pratiquant construit ses
représentation avec l'ensemble des images cinématographiques,
avec les propos des enseignants, de la fédération avec ce que le
karatéka voit, entend ou échange avec les autres pratiquants au
moment des stages et des entrainements. Etudier les représentations
revient à recomposer et synthétiser l'ensemble des
éléments propre à chaque individu. Ainsi,
s'intéresser aux représentations sociales d'un groupe de
karatékas permet de savoir en quoi elles sont « socialement
élaborés et partagées »35. Cependant,
les catégories élaborées par le chercheur pour l'analyse
des orientations de la pratique sont restrictives et ne prennent pas en compte
l'ensemble des possibilités. Donc, nous cherchons à construire
une typologie des pratiquants la plus réaliste possible.
Une étude de Ludovic Jeanne36 met
en évidence l'existence de différents «
idéals-types » en ce qui concerne la pratique du
karaté. L'auteur repère en effet des catégories telles que
le « karaté-sport », le « karaté-art
corporel traditionnel », le « karaté-technique
martiale ». Ces trois types idéaux ont marqué
l'évolution du karaté et la mondialisation de celui-ci. Selon
l'auteur, il semblerait en effet qu'il y ait eu au cours de l'histoire de cette
pratique en France une adaptation de la pratique d'un type « martial
» vers un type plus sportif avec une étape
intermédiaire proche des « arts corporels », que l'on
reconnaît comme étant la forme actuelle. L'idéal-type
« martial » semblerait aujourd'hui inactif, dans la
34 Augustini, M. & Trabal, P. (1998) les
représentations du karaté pour les cadres, les enseignants et les
pratiquants. Rapport de recherche, laboratoire de sociologie INSEP/FFKAMA,
Paris
35 Jodelet, D. (1993), Représentations
sociales : un domaine en expansion, in Jodelet, D., Les
représentations sociales, PUF, Paris
36 Jeanne, L. (2001) Les
géométries de corps, diffusion socio-spatiale et idéaux
types de pratiques du karaté : essai de modélisation,
Vème rencontre de Théo Quant, Université de Caen
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 22
mesure où aucune forme concrète de pratique ne
semble pouvoir être observée et rattachée à cette
dimension « originelle ». L'art martial ancien d'Okinawa,
qui se rapproche d'une forme de lutte de percussion pied/poing sans armes, se
serait éteint. A l'inverse, Ludovic Jeanne formule l'hypothèse
que des dimensions plus communautaires de la pratique du karaté sont
susceptibles d'apparaître, ce qui pourrait également faire
émerger une nouvelle façon de voir cette pratique. Dès
lors, la mulipication du sens accordé à la pratique
entraîne une modification de l'idéal que les pratiquants peuvent
avec de celle-ci. Ainsi, il serait possible de pratiquer le karaté dans
une forme propre à chacun en fonction de ses propres valeurs.
Concrètement, chaque pratiquant reçoit, interagit et pose les
propres bases de sa pratique. Aussi, les orientations de la pratique,
c'est-à-dire la direction et le sens que l'individu donne à sa
pratique, sont étroitement liées aux représentations que
les pratiquants ont de leur karaté. Maintenant, il est important de
savoir comment s'opère le choix d'une pratique telle que le
karaté.
2. Les déterminants sociologiques de la pratique du
karaté
Tout d'abord, nous savons que « les choix (et les
rejets) de sports sont d'abord et essentiellement soumis à la logique de
l'habitus »37 ; plus précisément «
la place que l'on occupe dans la société conditionne le type
de rapport que l'on entretient avec son corps et détermine grandement
les usages, notamment sportifs, que l'on en fait
»38. Aussi, nous pouvons dire que « les
dispositions à l'égard du corps, de la pratique sportive, sont
cohérentes avec les dispositions à l'égard d'autres
pratiques culturelles »39. Nous avons décidé
de nous appuyer sur les travaux de Pierre Bourdieu en raison de la sociologie
qu'il développe, construite autour d'une idée centrale : la
réalité du monde social ne repose ni sur les individus ni sur les
groupes mais sur les relations entretenues entre ses éléments.
Aussi, nous pouvons retenir la définition de l'habitus comme un «
ensemble de dispositions incorporées » mais aussi comme un
« principe générateur de pratiques
»40. Il s'agit de dispositions que nous
intériorisons et incorporons de façon durable qui
résistent au changement. L'habitus fonctionne comme un système de
dispositions unifiées qui constitue un élément
d'unité de la personne. Il renvoie à tout ce qu'un individu
possède et qui le constitue. Finalement, l'habitus désigne des
manières d'être, de penser et de faire communes,
37 Pociello, C. (1981) La force, l'énergie,
la grâce et les réflexes in Pociello, C. Sport et
sociétés, Vigot, Paris
38 Op. Cit. Pociello, C.
39 Op. Cit. Defrance, J.
40 Bourdieu, P. (1986) habitus, code et
codification, Actes de recherche en sciences sociales, n°64
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 23
issues de l'incorporation non consciente des normes et
pratiques véhiculées par le groupe d'appartenance.
Dans Sociologie du sport41, Jacques
Defrance soulève une des questions posées par le programme de
recherche de Pierre Bourdieu. C'est Jean-Paul Clément qui traite alors
la question du lien entre la pratique sportive et les choix culturels du
même agent. Dans une enquête42 comparative de trois
sports de combats de préhension, la lutte, le judo et l'aïkido, il
met en évidence que la manière d'engager le corps dans le combat
n'est pas la même en fonction de la position sociale que l'on occupe dans
la société. En effet, dans chacune des disciplines se manifeste
une conception particulière de l'affrontement, avec des façons de
d'engager son corps et de s'affronter à l'adversaire qui différe
d'une pratique à une autre.
Par exemple, le lutteur privilégie un contact rugueux
des corps, travaillant sur des appuis solides, avec un effort soutenu.
L'étude de Jean-Paul Clément met en évidence que la lutte
« est un sport de prolo » et que les lutteurs sont dans leur
grande majorité d'origine ouvrière. En ce qui concerne le judo,
il s'agit d'une pratique ayant comme objectif de projeter et de maîtriser
au sol comme la lutte. L'élément qui permet de
différencier ces deux pratiques est le médiateur utilisé :
le kimono. Il a également été mis en évidence que
les pratiquants sont issus des couches moyennes, c'est-à-dire des cadres
moyens, employés ou encore techniciens. L'aïkidoka, quant à
lui, utilise une mobilité dans le déplacement à «
distance sociale »43. Il se prépare
silencieusement à l'entrainement, par des exercices de contrôle de
soi et de méditation. Dans ce cas, le kimono ne joue pas un rôle
essentiel contrairement au pantalon (hakama). Cette activité est
pratiquée par des cadres supérieurs avec une grande proportion de
professions « intellectuelles ». Finalement, le choix d'une
pratique de combat reconnues et légitime à un moment donné
est socialement et culturellement conditionné44.
En ce qui concerne la pratique du karaté, nous
pourrions donc dire que la manière dont nous pratiquons,
c'est-à-dire le type de rapport au corps, expliquerait la place que l'on
occupe dans la société. Aussi, le choix de la pratique du
karaté serait conditionné par l'habitus et que
41 Defrance, J. (1995) Sociologie du sport,
La découverte, Paris
42 Clément, JP. (1981) La force, la
souplesse et l'harmonie, in Pociello, C. Sport et sociétés,
Vigot, Paris
43 Hall, E. (1971) La dimension
cachée, Seuil, Paris
44 Op. Cit. Clément, JP.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 24
la forme de pratique ne sera pas la même en fonction du
statut social, des capitaux économiques et culturels dont le pratiquant
dispose.
Plus précisément, les orientations de la
pratique du karaté seraient socialement déterminées. Par
exemple le karaté-jutsu45 pourrait rassembler des individus
ayant les mêmes caractéristiques sociales à savoir un
emploi proche ou encore un niveau d'étude similaire. Dès lors, il
serait possible qu'au sein d'une même pratique identifiée
socialement comme étant du karaté, il puisse y avoir des logiques
d'habitus différents en raison de la multitude de formes, de styles donc
d'usages sociaux existants. Alors, se pose la question de la diversification
lors du développement de la pratique.
3. La diversification et modification de la structure
sociale
Les recherches de Jean-Paul Clément apportent un
éclairage intéressant quant aux raisons de la diversification
d'une pratique. En effet, dans son étude comparative de la lutte, du
judo et de l'aïkido, il explique que le judo occupe une place originale
dans le système des sports de combat en raison d'une grande
diversité de modalité de pratique, allant de la
compétition à l'esthétique, et donc différents
usages sociaux. Même si le judo moderne est plus orienté sur une
pratique sportive compétitive, il est possible de trouver un dojo
proposant une pratique du judo axée sur d'autres aspects comme le
taïso46. Jean-Paul Clément expose le fait que tout au
long de l'histoire le judo a élargi son éventail de pratiquants
et dès son implantation l'élite intellectuelle de Paris
fréquente les dojos. Ce fait aura pour conséquence une
modification de son public, en effet, « du grand public succède
les universitaires »47. Dès lors, le judo
connaît ses premiers conflits ayant comme raison la diversification et la
transformation de la structure sociale de la pratique. La notion de «
champ »48 est sous jacente ici. En effet, chaque champ
se caractérise par un rapport de forces entre dominants et
dominés où les agents sociaux s'affrontent pour conserver ou
transformer ces rapports de forces. Un certain nombre de traits invariants
peuvent être
45 Le karaté-jutsu est une forme de pratique
récente qui propose une synthèse de différentes pratiques
martiales. Concrètement, le karaté-justuka peut utiliser toutes
les techniques de karaté (coup de poing, coup de pied) mais
également certaines techniques issues du judo comme les projections ou
bien du jiu-jitsu comme les étranglements.
46 A l'origine, le Taïso nommait les
activités physiques complémentaires pratiquées par les
compétiteurs de judo ou de jujitsu dans le cadre de leur entrainement.
De nos jours cette discipline intéresse un public de plus en plus large,
sans limite d'âge, qui n'a pas forcément pratiqué de sport
auparavant et qui recherche un loisir axé sur la culture et l'entretien
physique.
47 Thibault, C. (2000) Entretien avec les
pionniers du Judo, édition- Broché, Paris
48 Bourdieu, P ; (1994) Raisons pratiques, sur la
théorie de l'action, Seuil, Paris
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Anthony METTLER 25
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
discernés comme le degré d'autonomie,
l'opposition entre les positions les plus autonomes et les moins autonomes,
l'opposition actuelles entre dominants et dominés. Dès lors, ce
processus ne s'applique pas qu'au judo, mais d'après Jean-Paul
Clément, semble « caractériser tous les sports ayant
connu une forte expansion ». D'après Christian Pociello, il
existe un rapport entre la diversification de la pratique, qui peut aller
jusqu'à la modification de la logique interne, et l'usage social de
celle-ci49.
Contrairement au judo, la lutte n'aurait pas connu de
divergence de ce genre en ce qui concerne la conception de la pratique. La
raison invoquée serait que la pratique de la lutte ne semblerait pas
avoir été « un enjeu de lutte entre les
différents groupes sociaux ». C'est cette absence de
concurrence qui permettrait d'expliquer que cette pratique apparaisse comme la
« force rudimentaire » tandis que le judo à valoriser
la « souplesse », la « technique » ou
encore l' « esthétique ». Pour reprendre les mots de
Jean-Paul Clément, « chaque pratique se définit par
rapport et en opposition aux autres pratiques ».
En ce qui concerne le karaté, il existe aujourd'hui
plus d'une vingtaine de styles de karaté comme le Shotokan, l'Uechi ryu
ou encore le Kempo. Or, il y a très peu de styles qui se sont
implantés dans les années 1950 en France. Au sens où
l'entend Jean-Paul Clément, la diversification et la multiplication de
la pratique du karaté serait due aux conflits d'idéaux et de sens
entre les différents groupes sociaux qui composent la population de
karatéka. C'est pour cela qu'aujourd'hui d'autres formes de pratique se
développent comme le karaté-jutsu, le karaté-contact, le
karaté enfant ou le body-karaté. Dès lors, les
modalités de pratique ont beaucoup évolué et d'autres sont
apparues depuis plus de 60 ans. L'exemple du body-karaté démontre
bien la modification de l'usage social qui peut être fait du
karaté. Aussi cette forme de pratique, qui s'inscrit dans une logique
hygiéniste, utilise les techniques de karaté sur de la musique
afin de rechercher du plaisir et du bien-être50. Toute fois,
le body-karaté permet également d'orienter l'offre de la pratique
afin de toucher un public plus féminin.
Nous pouvons dire que le karaté a connu une forte
expansion ainsi qu'une modification de son public, ce qui a
entraîné une diversification des modalités de pratique
illustrée par le body-karaté. La diversité des publics au
sein de la pratique pourrait amener à la constitution de groupes sociaux
ayant chacun sa propre définition et conception du karaté. Il en
résulterait
49 Pociello, C. (1980) Eléments pour la
constitution d'une histoire des pratiques sportives. Travaux de recherche de
l'INSEP, n°6, édition spéciale histoire des sports
50 Gleyse, J. (1999) Yves TRAVAILLOT,
Sociologie des pratiques d'entretien du corps, Corps et
Culture, N° 4
Anthony METTLER 26
alors une transformation de la structure sociale en raison de la
variété des usages et des
logiques internes existantes. Toutefois, ce propos est à
nuancer car ce n'est pas strict.
Rappelons que « chaque pratique se définit par
rapport et en opposition aux autres pratiques »51, ce qui
nous laisse penser qu'au sein même de l'espace social du karaté il
puisse y avoir des enjeux de lutte afin que chaque groupe social puisse
défendre sa conception, ses valeurs ainsi que sa vision de pratique.
Autrement dit, accéder aux définitions, aux valeurs, aux
représentations des pratiquants nous permettra de faire émerger
les conflits entre les différentes conceptions du karaté. Puis
nous élaborerons une typologie des profils types de pratiquants. Il est
donc nécessaire de présenter le mécanisme de constitution
des représentations et des opinions afin de pouvoir proposer une
méthodologie pertinente.
4. L'opinion et les représentations comme construits
sociaux
L'opinion individuelle, définie par Jean Stoetzel comme
une « formule nuancée qui, sur une question
déterminée, reçoit l'adhésion sans réserve
d'un sujet »52, ne peut être convoquée sur le
champ par le questionnaire ou l'entretien comme s'il existait, toute
fabriquée, une opinion qui n'aurait jamais été
modifiée. Beaucoup d'études en ethnologie, linguistique ou
sociologie, convergent pour indiquer que le fruit des interactions entre
individus, comme une conversation dans le métro ou au travail, qui
permet de construire ou de rappeler à soi une opinion et de s'y tenir.
Cette construction varie selon les interlocuteurs ou plutôt selon la
valeur qu'ils prennent. Par exemple, une opinion exprimée devant un
supérieur n'entre pas dans la même stratégie qu'une opinion
formulée avec un collège, en privée ou en public, dans une
relation amoureuse ou autre. Ainsi, l'opinion est toujours un «
construit social »53dépendant de la situation
dans laquelle elle s'exprime. Nous pouvons également la
considérer comme une contrainte sociale ou politique qui pousse un
individu à se rallier à un discours sous peine de ne pas
être compris.
Dès lors, nous considérons que l'étude
des pratiques sportives par les opinions nécessite de préciser la
construction des représentations sociales, au sens où en parle
Jean Claude Abric54, à savoir « un processus au
centre de tensions participantes à la prise d'opinions ». Ce
sont des « représentations construites dans le cadre des
pratiques quotidiennes et
51 Op. Cit. Clément, JP.
52 Stoetzel, J. (1943) La théorie des
opinions, P.U.F, Paris
53 Duclos, D. & Meynaud, HY. (1985) Les
sondages d'opinion, La découverte, Paris
54 Abric, JC. (2003) Méthodes
d'études des représentations sociales (dir.), Erès,
Ramonville
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 27
partagées par l'ensemble d'un groupe social
au-delà des particularités individuelles » pour Serge
Moscovici55. Les représentations sont des constructions
sociales qui aident à poser le réel, c'est-à-dire qu'elles
permettent « de donner un sens à ses conduites, et de
comprendre la réalité, à travers son propre système
de références, donc de s'y adapter, de s'y définir une
place »56, en fonction des expériences, des
émotions, donc de la réalité vécue par
l'individu.
Jean Corneloup, dans son enquête d'opinion sur
l'étude des pratiques sportives de montagne57, rappel que le
processus décisionnel permettant d'exprimer son opinion sur un sujet
renvoie à un jeu complexe. En effet, il propose de redonner de
l'importance à l'idée de co-production de la
représentation si l'individu est considéré comme
producteur de valeurs, tout en restant engagé dans des champs de force
multiples avec lesquels il doit composer. Il rappel également que
l'opinion n'est pas fixe et peut évoluer dans le temps comme l'ont
montrés les travaux de Vérène Chevalier en
équitation58. Donc, les karatéka produisent leurs
représentations sur la pratique en fonction des expériences, des
émotions et de leur réalité vécue, tout en
composant avec de multiples champs de forces. De plus, le karatéka
produira une opinion qui évoluera et se transformera dans le temps.
Ainsi, l'individu peut être pensé comme faisant
partie d'un champ de symboles au sein duquel il choisit ceux qui l'attirent et
ceux qu'il rejette. « Ce jeu d'attirance et de répulsion permet
à l'individu de se situer en composant son univers symbolique de
référence » pour Jean Corneloup. Toute fois, l'opinion
traduit une position sociale marquant la manière dont l'individu compose
sa relation avec le social. Donc, si nous souhaitons comprendre au mieux le
pratiquant nous devons prendre en compte tout un ensemble de facteurs. En
effet, nous avons vu qu'une opinion est un construit social qui résulte
d'une interaction et qu'elle dépendant de la situation dans laquelle
elle s'exprime. Aussi, la représentation est un processus au centre de
tensions participantes à la prise d'opinions.
55 Moscovici, S. (1989) Les représentations
sociales, P.U.F, .Paris
56 Abric, JC. (1994) Pratiques sociales et
représentations, P.U.F, Paris
57 Corneloup, J. (2008) L'enquête
d'opinion dans l'étude des pratiques sportives de montagne,
Bulletin de méthodologie sociologique
58 Chevalier, V. (1994) Démographie
sportive. Itinéraire et abandons dans les pratiques de
l'équitation, Thèse pour le Doctorat Histoire et
Civilisation des Sociétés Occidentales. Paris VII
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 28
Nous avons vu que chaque individu oriente sa pratique en
fonction des valeurs et du sens qu'il donne au karaté, ce qui abouti a
différentes conceptions de la pratique (sportive, philosophique,
self-défense). Ces orientations sont étroitement liées aux
représentations que les pratiquants ont de leur pratique. Aussi, il
serait possible qu'au sein d'une même pratique il existe des orientations
complètement différentes en raison de la multitude de formes, de
styles donc d'usages sociaux. De plus, nous avons vu que qu'au sein même
de l'espace social du karaté émergent des tensions en raison
d'enjeux de lutte afin que chaque pratiquant puisse défendre sa
conception, ses valeurs ainsi que son orientation de pratique. Enfin, nous
avons vu que les représentations sont construites dans le cadre des
pratiques quotidiennes et partagées par l'ensemble d'une population.
Dès lors, acquérir les opinions du pratiquant par
l'intermédiaire de questions simples nous permettra de mettre à
jour les représentations ainsi que les enjeux existants dans l'espace de
la pratique.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 29
III. Etude des orientations de la pratique du
karaté en France :
Un individu possède un habitus qui désigne des
manières d'être, de penser et de faire communes à plusieurs
personnes de même origine sociale, issues de l'incorporation non
consciente des normes et pratiques véhiculées par le groupe
d'appartenance. Cet habitus n'est pas pour autant identiques à chaque
individu et n'entraîne pas des conduites identiques mais plutôt des
tendances à certaines conduites. C'est en ce sens que Jacques Defrance
affirme que « la position sociale que l'on occupe dans la
société conditionne le type de rapport que l'on entretient avec
son corps et détermine les usages que l'on en fait ».
C'est-à-dire que la manière dont on engage le corps dans une
pratique, dans notre cas le karaté, ne sera pas le même en
fonction de la position sociale que l'on occupe au sein de la
société.
Chaque pratique a sa propre logique d'affrontement et les
façons d'engager le corps diffèrent d'une discipline à une
autre. Dès lors, au sein d'une même pratique, comme le judo, il
est possible d'identifier une grande diversité des modalités de
pratique. En effet, Jean-Paul Clément a démontré que le
judo a subit un processus de diversification suite à
l'intégration de l'élite « intellectuelle » au sein des
dojos parisiens. La diversification ainsi que la transformation de la structure
sociale de la pratique sont à l'origine des premiers conflits. Plus
précisément, les études de Christian Pociello nous
montrent l'existence d'un rapport entre la diversification de la pratique, qui
peut aller jusqu'à la modification de la logique interne, et l'usage
social de celle-ci.
Aussi, nous pouvons retenir des études de Ludovic
Jeanne, sur les « idéaux-type » en karaté, ou
de Muriel Augustini et Patrick Trabal, sur l'évolution des
repésentations sous l'effet de la pratique, que chaque pratiquant pose
les bases de sa propre pratique en fonction de ce qu'il vit du karaté,
mais aussi de ce qu'il en sait ou de ce qu'il en perçoit. La typologie
des profils de pratiquants fait donc bien appel à deux dimensions :
à la manière dont les pratiquants vivent, au quotidien, leur
pratique mais aussi à la perception que les pratiquants ont de leur
karaté, c'est-à-dire aux facteurs qui déterminent leurs
représentations.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 30
La pratique du karaté aujourd'hui semble s'être
diversifiée sous de multiples modalités comme le «
body-karaté », le « karaté-contact
» ou encore le « karaté-jutsu ». Cette
diversification du karaté et de ses modalités semble correspondre
à des adaptations de l'usage qui en est fait, hygiéniste pour le
body-karaté et auto défense pour le karaté contact. Comme
pour le judo, la définition de la pratique du karaté semblerait
être un enjeu de lutte entre différentes forces en
présence, ce qui permettrait de dire qu'il existe des oppositions au
sein de ses pratiquants en ce qui concerne la conception de la pratique. Par
exemple, la forme de karaté dite « traditionnelle »
ne pourrait se définir que par rapport et en opposition à la
forme « body-karaté » ou « karaté
contact ».
Dès lors, la pratique du karaté aujourd'hui
semble être conditionnée par l'orientation que chacun donne
à sa propre pratique, c'est-à-dire que la pratique du
karaté en France ne serait pas unifiée mais fédère
un certain nombre de pratiquants ayant des valeurs et des opinions propres
à chaque orientation. Toutefois, cela n'est pas péjoratif et
répond à une logique existante dans différentes
pratiques.
Nous pouvons nous demander comment les pratiquants de
karaté en France conçoivent leur pratique. En ce sens, nous avons
identifié trois questions qui nous semblent fondamentales afin de «
photographier » le karaté actuel et qui permettront
également de construire une argumentation claire et cohérente
:
- Qui pratique le karaté en France aujourd'hui ? Tout
d'abord, il est intéressant de connaître les déterminants
sociologiques des pratiquants, à savoir la répartition par
âge, le niveau de diplôme ou encore les professions des
pratiquants. Aussi, nous pouvons nous demander si le karaté ne
regrouperait pas des personnes ayant des origines et des
caractéristiques sociales différentes. Aussi cette population de
karatéka serait constituée de pratiquants appartenant à
des milieux sociaux différents et possédants des capitaux
culturels et économiques variées. De plus, il va être
pertinent de vérifier la place que le grade occupe dans la structure de
cette pratique, en effet, le grade semble être le lien entre ses
individus aux caractéristiques variées.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 31
- Quelles sont les orientations, les opinions ainsi que les
conceptions que les pratiquants ont de leur karaté ? Nous
récolterons les définitions ainsi les opinions sur le
thème du grade, les modalités de pratiques émergentes ou
encore le karaté pour les enfants. Les définitions nous
permettront de déterminer les orientations dominantes et les opinions
contribueront à révéler l'existence de divergences ou de
convergences au sein de la population de karatéka sur les thèmes
proposés. Tout en ayant des conceptions différentes quant aux
valeurs qui façonnent leur propre pratique, nous pouvons faire
l'hypothèse que les karatéka se représentent leur pratique
comme un « art martial » qu'ils considèrent comme une
« école de vie ».
- Enfin, quels profils de pratiquants résultent des
différentes conceptions existantes ? Une fois que les orientations ainsi
que les opinions qui constituent la population de pratiquants seront
identifiées, nous établirons des profils de pratiquants.
Concrètement, pour construire des profils de pratiquants il est
nécessaire de mettre en évidence les différentes
conceptions de la pratique en questionnant le sens et les valeurs que le
pratiquant donne à sa pratique. Il existe différents profils en
lien avec les orientations proposées de la pratique mais pas seulement.
En effet, nous distinguerons les pratiquants qui recherchent une pratique plus
sportive/compétitive, les pratiquants ayant une conception du
karaté comme art de vivre ou encore les pratiquants en quête
d'idéal.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLEK 32
IV. Méthodologie de l'analyse de la population de
Karatéka :
La démarche que nous avons mit en place avait pour
contrainte de recueillir un grand nombre de données en un temps
très court, à peine 1 mois pour le questionnaire et 3 mois pour
les entretiens. Tout d'abord, nous avons procédé courant novembre
2008 à l'élaboration ainsi qu'à la diffusion d'un
pré-test au près d'une population choisie et identifiée
comme hétérogène dans les opinions et les orientations de
la pratique. Cet échantillon test était composé de 15
personnes. Ensuite, nous avons construit sur la base de ce pré-test le
questionnaire qui a été diffusé de fin janvier 2009
à début mars 2009 par mail à un échantillon
représentatif constitué à partir de la base de
données59 de la FFKDA. Au moment de la diffusion du
questionnaire par mail nous avons réalisé différents
entretiens semi-directifs afin de recueillir les impressions de certains
pratiquants. Cette partie à pour objectif de présenter les outils
qui ont contribuées à la réalisation de ce travail de
recherche.
1. Le pré-test :
Dans un premier temps, nous avons établit un
pré-test60 à partir des questions de
terrain61 que nous avons identifiées comme pertinentes. Nous
avons construit le pré-test sous forme d'un questionnaire composé
de quatre parties, la première sur les caractéristiques sociales
du pratiquant, la seconde sur le lien pratique/pratiquant, la troisième
sur les représentations que les pratiquants ont de leur pratique et,
pour finir, des questions d'opinions sur le karaté. Suite à
l'élaboration de ce pré-test, nous avons constitué un
échantillon de 15 personnes ayant des opinions et des orientations
différentes de la pratique. Cela a été possible
grâce à un accès facilité sur le terrain ce qui nous
a permis d'obtenir des informations pertinentes afin de construire le
questionnaire définitif. La particularité de ce pré-test
est que les personnes sollicitées avaient la possibilité
d'apporter des commentaires sur les items proposés ou sur les
informations demandés. Ainsi, nous avons constitué un
questionnaire prenant en compte les modifications effectuées. Par
exemple, nous avons supprimé de la version finale les questions sur le
salaire et nous avons amélioré la tournure de certaines phrases
qui ne semblaient pas être suffisamment claires.
59 Nous avons eu l'autorisation d'accéder
à cette base de données par le Directeur Technique National, Mr
Dominique Charré ainsi que le président de la FFKDA, Mr Francis
Didier
60 Cf. annexe 5
61 Nous avons été présents sur
le terrain à des moments clés comme l'assemblée
générale de la Ligue de Bretagne ou encore lors de
compétitions régionales et nationales. Nous avons observé
dans l'idée de recueillir des informations nous permettant de construire
le pré-test puis le questionnaire sans pour autant observer de
manière systématique avec une grille.
Anthony METTLER 33
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
2. Le questionnaire :
Ensuite, nous avons construit le système de recueil de
données ou questionnaire62 que nous avons
auto-administré par internet afin de vérifier les
hypothèses théoriques. Diffuser le questionnaire par ce moyen
permet de faire des économies de temps pour le chercheur mais
également pour la personne sollicitée. En effet, recevoir un mail
avec un lien, cliquer dessus et répondre aux questions est plus facile
que de remplir une feuille papier puis d'aller poster l'enveloppe. Notons que
ce système permet un traitement simplifié car il n'y a pas besoin
d'entrer les données dans un logiciel ou sur un tableur.
Concrètement, lorsqu'un individu valide son questionnaire, les
données sont récoltées dans un tableur Excel® ce qui
évite des pertes de temps de retranscriptions parfois longues. Ainsi,
pour l'ensemble des questions il a été possible de coder en
chiffre ou en lettre les réponses afin de faciliter l'analyse par la
suite. Ce qui signifie qu'une personne qui s'identifiait comme «
ouvrier » sera codifiée dans la base de données par
un « H ». L'ensemble du questionnaire est basé sur ce
principe, hormis les questions ouvertes qui sont littéralement
reportées. Ainsi, au moment de prendre l'opinion des pratiquants, nous
avons laissé la possibilité de répondre par une
échelle allant de 1 à 4, de « pas du tout d'accord
» à « tout à fait d'accord »
à un certain nombre d'items. Une échelle sur 4 points permet
d'éviter les réponses neutres que l'on peut retrouver sur une
échelle à 5 points par exemple. Toute fois, une réponse
sur 4 points oblige le répondant à prendre une opinion, le cas
contraire il aura tendance à ne pas répondre à la
question. N'oublions pas que les enquêtes ont pour
présupposées que toute personne a une opinion mais aussi qu'elle
a envie de l'énoncer. Or, les enquêtes par questionnaire oublient
le fait que les individus ont des réserves d'information, « des
faits qui concernent l'individu et dont il entend contrôler
l'accès lorsqu'il est en présence d'autrui.
»63 La logique du questionnaire étant de récolter
des données permettant de connaître les caractéristiques
sociales des pratiquants mais aussi de questionner les opinions sur la pratique
afin de faire émerger les points de divergences entre les
pratiquants.
Une fois le questionnaire stabilisé, nous avons
créé puis mis en ligne une version numérique accessible
par un lien. Nous avons laissé le questionnaire sur internet de fin
janvier à début mars afin que les pratiquants aient un temps
suffisant pour y participer. Afin d'y répondre, nous avons envoyé
le lien, par mail, aux 2002 personnes composant
62 Cf. annexe 6
63 Goffman, E. (1973) Les relations en
public, Minuit, Paris
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
l'échantillon représentatif. Ce système a
permis d'avoir une base de données pour remercier ensuite les
participants de leur participation à l'étude.
3. L'échantillonnage :
Avec l'accord de la FFKDA, nous avons réalisé
une extraction de la base de données des licenciés en prenant en
compte les critères d'extraction suivant : la catégorie «
Senior » et la discipline « karaté ».
Cette extraction a été réalisée Inter Région
par Inter Région soit au total 7 extractions. Suite à
l'extraction d'une partie de la base de données fédérale
pour la saison 2009, a été retenue la population senior
pratiquant le karaté, soit 53121 personnes. Trois
caractéristiques de la population sont observées afin d'aider
à la constitution de la structure de l'échantillon : la
répartition géographique ; le sexe ; l'âge.
Répartition géographique : Répartition par
sexe
Sexe
|
Effectifs
|
Fréquence
|
Homme
|
36031
|
67,8%
|
Femme
|
17090
|
32,2%
|
Total
|
53121
|
|
Inter-Région
|
Effectifs
|
Fréquence
|
1
|
13158
|
24,8%
|
2
|
7060
|
13,3%
|
3
|
5352
|
10,1%
|
4
|
7272
|
13,7%
|
5
|
6418
|
12,1%
|
6
|
7419
|
14,0%
|
7
|
6442
|
12,1%
|
Total
|
|
53121
|
Anthony METTLER 34
Profitant de l'information portant sur l'année de
naissance, il est possible de calculer l'âge des individus et ainsi
obtenir un histogramme précis. Partant de la forme particulière
de cette répartition, nous avons choisi de décomposer la
population en 5 tranches d'âge, couvrant des volumes de populations
similaires.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 35
Répartition par tranches d'âge
Classes d'âge
|
Effectifs
|
Fréquence
|
Non réponse
|
1110
|
2,1%
|
Moins de 27
|
10386
|
19,6%
|
de 27 à moins de 36
|
10412
|
19,6%
|
de 36 à moins de 42
|
9945
|
18,7%
|
de 42 à moins de 49
|
10732
|
20,2%
|
49 et plus
|
10536
|
19,8%
|
Total
|
53121
|
|
Ensuite, nous avons vérifié qu'il n'y avait pas
de grandes disparités dans le croisement de ces trois variables : la
répartition par âge n'est pas significativement différente
d'une Inter Région à l'autre, la répartition par sexe
n'est pas significativement différente d'une Inter Région
à l'autre, exceptée pour l'Inter Région 5, qui compte 28 %
de femmes au lieu des 32,2% en moyenne, la répartition par sexe est
significativement différente en fonction des tranches d'âge
retenues (cf. tableau ci-dessous). Ainsi, au-delà de 40 ans, la
proportion de femmes diminue fortement, et plus encore au-delà de 49
ans.
Tableau : % Colonnes. Khi2=687,6 ddl=4 p=0,001 (Très
significatif)
Moins de 27 de 27 à
moins de 36
|
de 36 à moins de 42
|
de 42 à moins de 49
|
49 et plus Total
|
Homme
|
65,8%
|
64,3%
|
63,5%
|
66,9%
|
78,2%
|
67,8%
|
Femme
|
34,2%
|
35,7%
|
36,5%
|
33,1%
|
21,8%
|
32,2%
|
Total
|
100,0%
|
100,0%
|
100,0%
|
100,0%
|
100,0%
|
100,0%
|
En définitive, compte tenu de ces informations, nous
proposons de construire l'échantillon de la manière suivante :
partir d'une base de 1001 individus est appliqué une répartition
par zones géographiques, puis par sexes et enfin par tranches
d'âge. Cela donne les répartitions suivantes :
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 36
Int. Rég.
|
Echan t.
|
Sexe
|
- de 27 ans
|
27 à - de 36 ans
|
36 à - de 42 ans
|
42 à - de 49 ans
|
49 ans et +
|
Total
|
1
|
248
|
H
|
33
|
33
|
30
|
34
|
40
|
170
|
F
|
16
|
19
|
16
|
16
|
11
|
78
|
2
|
133
|
H
|
18
|
18
|
16
|
17
|
19
|
88
|
F
|
10
|
10
|
10
|
9
|
5
|
45
|
3
|
101
|
H
|
14
|
13
|
11
|
14
|
16
|
68
|
F
|
8
|
7
|
7
|
6
|
5
|
33
|
4
|
137
|
H
|
18
|
17
|
18
|
20
|
19
|
92
|
F
|
8
|
11
|
10
|
10
|
6
|
45
|
5
|
121
|
H
|
17
|
16
|
15
|
17
|
22
|
87
|
F
|
7
|
7
|
8
|
7
|
5
|
34
|
6
|
140
|
H
|
18
|
16
|
17
|
19
|
21
|
91
|
F
|
11
|
10
|
11
|
11
|
7
|
49
|
7
|
121
|
H
|
15
|
15
|
14
|
17
|
20
|
81
|
F
|
8
|
9
|
9
|
8
|
6
|
40
|
Total
|
1001
|
H
|
133
|
128
|
121
|
138
|
157
|
677
|
F
|
68
|
73
|
71
|
67
|
45
|
324
|
Total
|
201
|
201
|
192
|
205
|
202
|
1001
|
Ce tableau rassemble l'ensemble des données de
l'échantillon représentatif. La première colonne nous
renseigne sur l'Inter Région concernée, la seconde colonne nous
indique le nombre de personnes composant l'échantillon par Inter
Région puis la troisième colonne précise la
répartition de chaque échantillon en fonction du sexe des
pratiquants. Dès lors, nous avons la répartition de
l'échantillon par Inter Région, par sexe et par tranche
d'âge.
L'échantillon est ensuite construit selon ces quotas et
par tirage aléatoire sur les 9329
personnes disposant d'une adresse mail que compte les 53121
personnes de la base de données ayant plus de 18 ans et ayant une
adresse mail.
Anthony METTLER 37
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
4. L'envoi des mails
Afin d'expliquer au mieux la méthode utilisée
mais aussi pour valider le taux de participation à l'enquête, il
est nécessaire de mettre en lien l'échantillonnage avec le nombre
de mails invalides afin d'avoir le chiffre exact de participants. C'est en ce
sens qu'il est important de présenter les synthèses d'envoi des
deux échantillons composés chacun de 1001 personnes, soit au
total un échantillonnage complet de 2002 individus. A noter, que nous
avons envoyé les mails par tranches comprises entre 150 et 210 mails
journaliers64.
Premier échantillon65 :
|
Nombre de mails envoyés
|
Nombre de mails erreurs
|
1er envoi
|
156
|
26
|
2ème envoi
|
180
|
33
|
Sème envoi
|
218
|
46
|
4ème envoi
|
230
|
76
|
5ème envoi
|
217
|
66
|
Total
|
1001
|
247
|
Deuxième échantillon66 :
|
Nombre de mails envoyés
|
Nombre de mails erreurs
|
1er envoi
|
241
|
42
|
2ème envoi
|
142
|
38
|
Sème envoi
|
203
|
48
|
4ème envoi
|
205
|
59
|
5ème envoi
|
210
|
54
|
Total
|
1001
|
241
|
64 Cf. annexe 7
65 Nous avons eu un retour de 247 mails invalides que
nous avons appelé « mails erreurs ».
66 Nous avons un retour de 241 « mails erreurs » sur
l'envoi du second échantillon.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 38
Nous pouvons donc dire que sur l'ensemble de
l'échantillon composé de 2002 individus, nous avons eu un retour
total de 488 « mails erreurs ». Cela signifie qu'il y a en
réalité 1514 individus qui ont reçu un mail et 442
personnes ont participé à l'enquête soit un taux de retour
de 29,2%. Cependant, l'échantillon reste représentatif
étant donné que la répartition des pratiquants par sexe et
âge sont respectés. Dès lors, nous n'avons pas
effectué de redressement. Aussi, nous avons établit un
échantillon sur la base de quotas ce qui signifie que nous avons
sélectionné des pratiquants de karaté se
répartissant selon les mêmes caractéristiques et les
mêmes proportions que l'ensemble de la population
étudiée67.
5. Les entretiens :
L'entretien se distingue de la méthode par
questionnaire en raison de « la mise en oeuvre de processus
fondamentaux de communication et d'interaction humaine
»68. Dès lors, nous avons recherché à
aller au plus près des pratiquants afin de privilégier un contact
direct avec l'interviewé sans pour autant être trop directif.
Aussi, nous avons cherché à recueillir des informations et des
éléments de réflexion riches et nuancés qu'il n'est
pas possible d'avoir par questionnaire. Ici, nous parlons d'échange dans
le sens où l'entretien est le moment où le chercheur va pouvoir
récolter les perceptions que l'interlocuteur a des
événements ou des situations mais aussi des
interprétations ou des expériences.
L'idée directrice de l'ensemble des entretiens que nous
avons réalisé est d'accéder et de garantir un degré
maximum d'authenticité et de profondeur. Nous avons continuellement
cherché à rester en éveil de sorte que nos interventions
proposent des éléments d'analyse pertinents. Plus
précisément, nous cherchions à faciliter l'échange
tout en essayant de mettre en confiance la personne interviewée. Ainsi,
la « chaleur » que nous avions au moment des entretiens
participe à ne pas oublier que nous cherchons à prendre le point
de vue du pratiquant avec toute la richesse que cela inclue.
Dès lors, nous avons interrogé des
pratiquants69 ayant répondus au pré-test ainsi qu'au
questionnaire en ligne. Toutefois, réaliser des entretiens avec des
individus aux profils différents nous semblait nécessaire. En
effet, pour rendre de compte de la diversité des conceptions et des
expériences nous avons sélectionné des personnes
d'après les critères suivant : l'âge, le sexe, le grade, le
niveau d'engagement dans la pratique (fonctions,
67 Meynaud, HY. & Duclos, D. (2007) Les
sondages d'opinion, La Découverte, Paris
68 Quivy, R. Van Campenhoudt, L. (2005) Manuel de
recherche en sciences sociales, Dunod, Paris
69 Cf. annexe 8
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 39
responsabilités, élu, arbitre, enseignant...),
la pratique de compétition ou non. De plus, nous avons pris en compte le
lieu géographique de la pratique afin de respecter la logique que nous
avions établie pour l'échantillon du questionnaire, à
savoir une répartition par Inter Région.
Afin de garantir la régularité des thèmes
abordés avec l'ensemble des interlocuteurs nous avons construit un guide
d'entretien70. Cependant, nous avons réalisé ces
entretiens sous la forme semi-directive, c'est-à-dire que nous avons
construit le guide d'entretien autour d'axes ou de thèmes afin de ne pas
restreindre les possibilités de réponse par des questions
fermées. Etant donné que chaque entretien a son propre rythme et
que les vécus de chacun sont différents, nous avons abordé
certains thèmes et d'autres fois cela n'a pas été
possible. Il n'empêche que nous avons privilégié le fait
que le pratiquant amène lui-même certains sujets afin que celui-ci
puisse parler le plus librement et naturellement possible.
Une fois l'entretien réalisé puis retranscrit,
nous le traitons71 de sorte à faire ressortir les
thèmes important tels que la définition de la pratique ou encore
des éléments plus personnels comme les déterminants
sociaux. Ainsi les éléments récoltés par entretien
permettront, dans un premier temps, de donner du sens aux résultats que
nous trouverons, dans un second temps, d'établir les profils de
pratiquants.
6. Les biais résultants de ce type de
méthodologie :
Malgré la pertinence de l'utilisation d'un
questionnaire en ligne sur internet, nous relevons différents biais
possible. En effet, le nombre de fois où l'on peut répondre au
questionnaire n'est pas limité car il n'y a pas contrôle
d'entrée sur le site d'hébergement. Aussi, l'accès
à la messagerie internet n'est pas facile pour des personnes n'ayant pas
l'habitude de l'utilisation d'une telle procédure. Un autre biais serait
le temps passé à remplir le questionnaire en raison du nombre de
questions, presque 90 en tout. En ce qui concerne les entretiens, nous avons
identifié un biais n'excluant pas d'autres encore. Il s'agit de la
distanciation du chercheur avec le terrain et l'objet de recherche. En effet,
la connaissance des réseaux et du « milieu » karaté a
permis d'interviewer des personnes de caractéristiques très
différentes, cependant, les règles et codes implicites n'ont peu
être pas suffisamment été explicité.
70 Cf. annexe 9
71 Cf. annexe 10
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 40
V. Caractéristiques et éléments
structurants de la population de pratiquants :
1. Les caractéristiques de la population de pratiquants
:
a) Répartition entre Hommes et Femmes
Le tableau ci-dessous rassemble les résultats issus du
questionnaire. Il nous indique que la répartition Homme/Femme est
inégale au sein de la population de pratiquants. En effet, il y a 299
Hommes soit 67,6% contre 143 Femmes soit 32,4% de l'effectif total des
licenciés de plus de 18ans.
Or, cette répartition respecte les proportions de
l'échantillon représentatif réalisé à partir
de la base de données de la FFKDA, à savoir :
Homme
|
36031
|
67,8%
|
Femme
|
17090
|
32,2%
|
Cette information nous permet d'affirmer que
l'échantillon est représentatif car les valeurs de
répartitions entre les hommes et les femmes ayant plus d 18 ans restent
sensiblement les mêmes. De plus, le tableau nous renseigne sur le fait
que le nombre d'hommes est significativement plus important que le nombre de
femme. Toute fois, en comparaisons des chiffres statistiques concernant «
les femmes dans la pratique sportive en 2002 »72 pour
un total de 209 948 licenciés Homme/Femme, il y avait un pourcentage de
26,6% de licenciées Femme pratiquant le karaté. Ce qui signifie
que depuis 7 ans nous assistons à une féminisation de la
population de pratiquants. Concrètement, au mois de mai 2009, il y avait
194 819 licenciés à la FFKDA soit 135 864 Hommes (69,73%) pour 58
955
72 Source Ministère de la santé des
Sports et le Vie Associative (2002) les femmes dans la pratique sportive en
2002, bulletin de statistiques et d'études
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 41
Femmes (30,26%). Autant dire que malgré une diminution
de 15 129 licenciés sur 7 ans, il y a une différence de +3,66%.
Cela peut s'expliquer par une diversification de l'offre de la pratique mais
également par le fait que le message de la fédération ce
soit réorienté sur le public féminin. L'appelation que
propose le ministère comme « public cible » permet de
faciliter l'accès des femmes au karaté. Aujourd'hui, une pratique
comme le body-karaté illustre ce nouvel aspect de la pratique.
b) La répartition par tranche d'âges
|
Moins de
27
|
de 27 à moins de
|
de 36 à moins de
|
de 42 à moins de
|
49 et plus
|
Total
|
|
|
36
|
42
|
49
|
|
|
Echantillon issu
|
402
|
402
|
384
|
410
|
404
|
2002
|
FFKAD
|
20,07%
|
20,07%
|
19,19%
|
20,48%
|
20,18%
|
100%
|
Population étudiée
|
86
|
88
|
77
|
79
|
90
|
420
|
|
20,47%
|
20,95%
|
18,34%
|
18,81%
|
21,42%
|
100%
|
Concernant les années de naissances nous pouvons dire
qu'il y a une répartition des années de naissance assez
homogène sur l'ensemble de la population. Dès lors, la pratique
du karaté ne semble pas intéresser que les plus jeunes, au
contraire, cette répartition homogène de la population nous
montre que chacun trouve un intérêt à pratiquer le
karaté quelque soit l'âge. Toutefois, nous ne pouvons par recouper
différentes données pour l'instant. Par exemple, nous ne savons
pas combien de pratiquants de moins de 27 ans ont commencé cette
année. Aussi, nous avons établit un échantillon sur la
base de quotas ce qui signifie que nous avons sélectionné des
pratiquants de karaté se répartissant selon les mêmes
caractéristiques et les mêmes proportions que l'ensemble de la
population étudiée73. Dès lors, nous pourrons
dire que l'échantillon est représentatif que s'il reste
fidèle à l'original, c'est-à-dire qu'il comprend les
mêmes pourcentages de femmes et d'hommes ou, dans notre cas, une
répartition par styles fidèle aux données
fédérales. En ce sens, nous cherchons à vérifier
que les résultats obtenus respectent les mêmes proportions que
l'échantillon. Pour le moment, la répartition par sexe et tranche
d'âge restent fidèle à l'ensemble des
caractéristiques de l'échantillon.
73 Op. cit. Meynaud, HY. & Duclos, D.
Anthony METTLER 42
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
c) Professions et Catégories Socioprofessionnelles
(PCS)
Afin de connaître les catégories
socioprofessionnelles des pratiquants nous avons établi les
paramètres sur un code allant de 1 (Etudiants) à 9
(Retraités). Dès lors, la population de pratiquants se compose de
13,8% d'étudiants, de 0,7% de personnes n'ayant jamais occupé
d'emploi, de 0,2% d'agriculteur exploitant, de 6,1% d'artisans,
commerçant et chefs d'entreprise, de 36,2% de cadres et professions
intellectuelles supérieures. Concernant les professions
intermédiaires, elles sont représentées à 12%, il y
a 21,7% d'employés, 5% d'ouvriers, enfin, 2,5% de retraités.
En effet, le nombre de cadres ou de professions
intellectuelles supérieures ainsi que le nombre des employés sont
plus important par rapport au reste des PCS. Les deux PCS que nous venons de
citer sont significativement représentées. Elles totalisent
ensemble 57,9% des PCS présentent au sein de la population.
Contrairement aux études de Jean Paul Clément sur les pratiques
telles que le judo, la lutte ou bien l'aïkido qui disent que les
pratiquants ont des caractéristiques sociales similaires ; le
karaté semblerait atypique en raison des PCS en présence au sein
de la population et du type de rapport au corps proposé par la pratique.
Le fait qu'il puisse coexister des cadres ou professions intellectuelles
supérieures ainsi que des employés traduit le fait que la
pratique du karaté aujourd'hui répond à plusieurs logiques
en raison de la diversification de l'utilisation des techniques du corps,
c'est-à-dire que l'on peut travailler le karaté d'une
façon rude basée sur l'efficacité technique qui pourrait
correspondre aux PSC de type employés ou bien travailler le
karaté d'une manière plus souple basée sur une recherche
sur soi pour apprendre à mieux se maîtriser qui pourrait
correspondre aux cadres ou professions intellectuelles supérieures.
Dès lors, il va être important de connaître le niveau
d'étude des pratiquants et d'analyser les différentes
orientations de la pratique par l'intermédiaire des questions
d'opinions.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 43
d) Le temps de pratique en karaté
Au moment de la création de l'échantillon
représentatif il n'y avait pas de renseignements concernant le temps de
pratique en karaté par individu. En effet, la base de données ne
tient pas compte du passé des pratiquants. Or, cette donnée est
intéressante dans le sens où nous connaissons dès à
présent la manière dont se répartie la population en
fonction du temps de pratique. Notons que le temps de pratique est
indépendant du grade obtenu car il est possible de pratiquer toute une
vie sans pour autant passer la ceinture noire.
45,00%
40,00%
35,00%
30,00%
25,00%
20,00%
15,00%
10,00%
5,00%
0,00%
moins de 2
De 2 àDe 4 à De 6 à De 8 à De 10
à 12 et
4 6 8 10 12 plus
années de pratique
Aussi, nous pouvons voir que les pratiquants de karaté
sont inégalement répartis. Concrètement, 40% des
karatéka pratiquent depuis plus de 12 ans et 60% des karatéka
pratiquent depuis moins de 12 ans. Ce qu'il est pertinent de relever est la
diminution de la répartition des pratiquants entre 6 à 12 ans de
pratique. Cela pourrait signifier que plus l'on avance dans le temps de
pratique moins il y aurait de personnes par tranche d'ancienneté. Nous
pourrions imaginer, au-delà des 12 ans de pratique, qu'il y ait de moins
en moins de pratiquants. L'autre point important concerne l'idée que
29,2% des karatéka pratiquent depuis moins de 6 ans, ce qui nous informe
sur l'idée que la population de karatéka aujourd'hui est jeune en
temps de pratique.
Donc, cette population semble être structurée sur
un modèle pyramidale, c'est-à-dire
que nous retrouvons beaucoup de pratiquants ayant peu
d'ancienneté dans la pratique et de moins en moins de pratiquants
anciens. Ici se pose la question de l'évaporation et de la
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 44
fidélité des pratiquants pour le karaté.
Il serait intéressant de questionner les raisons qui amènent
à continuer et à stopper la pratique.
e) Présentation des styles pratiqués
Pour cette question, les paramètres sont établis
sur un code de 1 (karaté contact) à 10 (autre). L'intention de
cette question est de mettre à jour la répartition des
pratiquants en fonction des principaux styles de karaté. C'est en ce
sens que la fédération identifie et catégorise la pratique
du karaté, cependant, il manque trois données : le «
body-karaté », le « shotokaï » et
le « kempo ». En effet, la question de l'intégration
du body-karaté comme « style » de karaté se
pose ici. La catégorie « autre » représente
4,8% des styles que nous venons de citer. Or, nous pourrions penser que ses
4,8% regrouperaient les pratiquants de body-karaté ou de kempo. Ce qui
signifie que les pratiquants ayant répondu « autre » se
considèrent comme étant karatéka. Toute la
difficulté de notre travail se cristallise ici.
En effet, nous parlons d'un karaté ayant de multiples
facettes alors que les styles engendrent des perceptions différentes de
cette pratique. Quoiqu'il en soit, nous pouvons dire que la «
suprématie » du style « shotokan » est
belle et bien présente pour 68,6% des pratiquants. Suivie des
pratiquants du style « wado-ryu » à 13,3%, puis des
« shito-ryu » à 5,2%, des « shukokaï
» à 2%, des « kyokushinkaï » à
1,8%. Enfin, les styles très peu représentés sont les
pratiquants de style « shorinji-ryu » (0,9%), «
goju-ryu » (0,5%) et « uechi-ryu » (0,5%).
Dès lors, il va être intéressant de faire la relation entre
la répartition des données fédérales et la
population de répondants74. La comparaison nous montre que la
hiérarchisation des styles est respectée, au regard des
données fédérales, à savoir le « shotokan
» à 69,98%, le « wado-ryu » à 9,28%,
le « shito-ryu » à 5,38% et le «
shukokaï »
74 Cf. annexe 11
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 45
à 1,59%. Notons que les pourcentages entre les deux types
de données sont proportionnels et fidèles donc la population
analysée est toujours représentative.
f) La répartition des pratiquants par grade
30,00%
25,00%
20,00%
15,00%
10,00%
5,00%
0,00%
Couleur Marron 1er dan 2ème dan 3ème dan
4ème dan 5ème dan 6ème dan
Grade
Les paramètres sont codifiés comme :
Couleur/kyu, Marron/1er kyu , 1er dan, 2ème dan, 3ème dan,
4ème dan, 5ème dan, 6ème dan, 6ème dan et plus.
Tout d'abord, nous pouvons dire qu'il n'y a pas d'individu ayant un grade
supérieur au 6ème dan. Ensuite, Il est important de
rappeler que le grade en karaté, que nous appelons « Dan
», est une validation du niveau de compétence technique
reconnu par l'Etat par l'intermédiaire de la Commission Nationale
Spécialisée des Dans et Grades Equivalents de la
FFKDA75. Nous pouvons voir que les pratiquants titulaires du
1er dan sont les plus nombreux à 28,1% suivi de très
près par les pratiquants ayant une ceinture de couleur à 26%.
Ensuite, cette population est constituée de 18% de personnes ayant la
ceinture marron, de 12,2% de pratiquants ayant un 2ème dan,
de 2,5% de personnes ayant le 4ème dan et le
5ème dan, enfin, 0,5% des pratiquants ont le grade de
6ème dan. A noter qu'il existe des paliers entre chaque
grade, entre le 1er dan et le 2ème dan il faut
attendre 2 ans ; entre le 2ème dan et le
3ème dan il faut attendre 3 ans. Ceci jusqu'au 6ème
dan.
Il importe que la répartition des grades soit
organisée de façon pyramidale. Concrètement, plus l'on
« monte » en grade moins il y a de pratiquants gradés
avec,
75 C'est-à-dire que « l'usage
irrégulier d'un titre protégé (le Dan) est constitutif
d'une usurpation de titre susceptible de faire l'objet de poursuites sur la
base de l'article 259 du code pénal. Cet article puni d'un
emprisonnement de 6 mois à 2 ans et d'une amende de 230€ à 6
100€ "celui qui, sans remplir les conditions exigées pour le porter
aura fait usage ou se sera réclamé d'un titre attaché
à une profession légalement réglementée, d'un
diplôme officiel ou d'une qualité dont les conditions
d'attribution ont été fixées par l'autorité
publique », source : site officiel de la Fédération
Française de Judo et Disciplines Associées.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 46
toutefois, une base composée de nombreux pratiquants.
Ce phénomène s'explique par le fait que les exigences techniques,
physiques et de recherche sont de plus en plus importantes. L'exemple le plus
marquant est l'obtention du 6ème dan. En effet, il est
impératif de produire un mémoire suivi d'une soutenance pour
obtenir ce grade. Pourtant, si l'on additionne les pratiquants ayant une
ceinture dite de « couleur » et les pratiquants ayant un
« Dan », nous pouvons voir que sur l'ensemble des
répondants soit un total de 96,7%, il y a 44,1% de pratiquants ayant une
ceinture de couleur contre 52,6% de « gradés
»76. Cette tendance peut s'expliquer par la politique mise
en place par la fédération en ce qui concerne les grades,
c'est-à-dire de faciliter l'accès aux grades pour tous.
D'ailleurs, cette politique semble être très controversée
par certains pratiquants suite à nos observations informelles sur le
terrain.
g) Les stages de karaté
A la question « au cours des 12 derniers mois,
avez-vous participé à un ou plusieurs stages de karaté ?
», 64,3% des pratiquants répondent « oui »
contre 34,6% qui répondent « non ». Plus
particulièrement, lorsque que nous demandons aux personnes ayant
répondu « oui » de préciser la nature des
stages réalisés, nous avons 73,31% qui répondent en faveur
d'un stage expert, 36,4% ont fait un stage avec leur enseignant
référent, 37,01% ont fait un stage de préparation aux
passages de grade, 26,33% ont participé à un stage d'arbitrage,
16,37% se sont présentés à un stage de préparation
à la compétition, enfin, 9,61% ont suivi un stage de formation
comme juge de passage de grade. Ce classement nous montre l'importance
accordée par les pratiquants aux stages avec les experts.
d'un stage expert
|
73.31%
|
d'un stage de préparation au passage de grade
|
26.33%
|
d'un stage de préparation à la
compétition
|
16.37%
|
d'un stage avec votre enseignant référant
|
37.01%
|
d'un stage d'arbitrage
|
19.57%
|
d'un stage de juge en passage de grade
|
9.61%
|
76 L'expression « gradé
»dépend du contexte dans lequel ce situe le pratiquant. Par
exemple, un 3ème dan parlera des « gradés
» en référence au 5ème dan
présent à ce moment. Tandis qu'« une ceinture de couleur
», autrement dit un pratiquant n'ayant pas la ceinture noire,
considérera quelqu'un comme « gradé » à
partir du 1er dan.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 47
En effet, certaines régions, comme la Bretagne, ont mis
en place un pool d'experts régionaux77 en complément
du pool d'experts fédéraux, reconnu par la
fédération, constitué des karatéka les plus haut
gradés sur le territoire. Cependant, si l'on regarde la
répartition des réponses et l'importance accordée à
certains types de stage, nous pouvons affirmer que les pratiquants recherchent
avant tout des stages techniques avec un expert, leur enseignant ou bien des
stages permettant de se préparer aux passages de grade.
h) La part de compétition dans la pratique
Ici, la question posée est « au cours des 12
derniers mois, avez-vous participé à une ou plusieurs
compétitions de karaté (kata et/ou combat) ? ». Les
répondants, au nombre de 435, ont majoritairement dit « non
» à 83,91% contre 16,09% qui ont répondu « oui
». Ce qui signifie qu'un nombre conséquent de pratiquants
ayant au dessus de 18 ans ne sont pas intéressés par l'aspect
compétitif du karaté. Toutefois, nous pouvons voir les
réponses à cette question dans l'autre sens, c'est-à-dire
qu'une partie des karatéka pratiquent la compétition. En ce sens
nous avons ici deux orientations possibles du karaté : les
compétiteurs et les non compétiteurs. Pourtant, cette
catégorisation reste assez réductrice car il a beaucoup de cas
qui peuvent se présenter. En effet, cette donnée ne nous informe
pas au-delà des 12 derniers mois. Prenons l'exemple d'un
compétiteur combat qui a fait une carrière de plus de 10 ou 15
années et qui a arrêté il y a 13 ou 14 mois, il ne pourra
pas répondre « oui » à cette question. Il
n'empêche que cette question contribue fortement à photographier
la population de pratiquants d'aujourd'hui.
77 Le pool d'experts régionaux au sein de la
Ligue de Bretagne a pour objectif de proposer les compétences et
l'expérience de pratiquants, gradés au minimum du
5ème dan, pris en charge en partie par la ligue et le
département qui accueil le stage.
Anthony METTLER 48
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
i) Le type de dojo pour la pratique du karaté
Nous pouvons dire qu'actuellement les pratiquants de
karaté peuvent s'exercer au sein de club municipaux pour 45,98% d'entre
eux et dans d'autres types de dojo pour 46,44% pour d'autres. Nous n'avons pas
plus d'informations concernant les autres types de dojo cependant il est
possible qu'il s'agisse de salle de sport de type remise en forme mais sans
avoir plus de détail. Si nous prenons en considération le fait
qu'il puisse s'agir de clubs de type « salle de sport » nous
pouvons penser que les intentions ne seront pas les mêmes que le club ou
dojo municipal. En effet, la pratique au sein d'une salle de sport
répond à une logique de commercialisation et de multiplication
des offres afin d'avoir un maximum de rendement dans l'objectif de gagner de
l'argent pour exister. Tandis que le dojo municipal sera dans l'idée de
ne pas rentabiliser mais plutôt demander le minimum pour assurer les
actions ou l'encadrement des activités.
j) L'activité « administrative » des
pratiquants
A cette question nous demandions aux pratiquants de nous
informer sur les possibles activités « administratives
» qu'ils peuvent exercer dans le domaine du karaté comme
président, trésorier, responsables de commission ou alors dans
une direction technique. Nous constatons que 61,19% n'ont pas d'activité
administrative et que 38,81% en exerce une.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 49
Pour affiner le propos, ceux ayant répondu «
oui » à cette question s'occupent principalement de leur
club (91,07%), puis du département (23,21%), ensuite de leur
région (10,12%) et 1,19% ont une activité administrative au
niveau national. Notons que l'activité au sein des clubs est très
importante et que plus on monte dans les strates de l'organisation
fédérale moins il y a de monde. Or, actuellement la
fédération a fait le constat qu'il manquait de gens pour faire
fonctionner cet ensemble complexe comme dans toutes les
fédérations d'ailleurs. Et dans certain cas, il arrive que des
clubs fonctionnent avec une composition de bureau dit « familiale
».
Cette tendance confirme les travaux d'Emmanuelle Walter
concernant la crise du bénévolat c'est-à-dire que «
les propos des bénévoles sur le thème de "la crise du
bénévolat« varient en fonction du type d'associations
sportives dans laquelle ils oeuvrent ; en effet, si les causes profondes de
ce« malaise« sont produites par des mutations sociales,
économiques et symboliques qui dépassent très largement le
cadre du monde sportif et associatif, on peut aussi analyser ce sentiment de
«crise du bénévolat« comme produit par l'inadaptation
(voulue ou subie) des associations sportives aux réalités
économiques et symboliques actuelles ; or ce «décalage«
entre une certaine conception du sport associatif et de l'engagement
bénévole et les attentes en matière de pratique sportive
n'est pas le même pour toutes les associations sportives. » En
karaté, l'indicateur le plus marquant de ce phénomène est
l'arbitrage comme nous avons pu l'entendre au cours de l'Assemblée
Générale de la FFKDA qui s'est déroulé en
Décembre 2007 au Comité National Olympique et Sportif
Français. Au cours de cette assemblée, un certains nombre de
Présidents de Ligues apportaient leurs témoignages quant à
la difficulté de recruter des arbitres bénévoles au niveau
départemental et régional. Le point suivant permet de mieux
éclairer ce problème.
Anthony METTLER 50
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
k) Les diplômes d'arbitrage des pratiquants
Concernant les diplômes relatifs à l'arbitrage
que peuvent posséder les pratiquants, 85,08% d'entre eux disent «
aucun », puis 5,13% en ont un au niveau départemental,
6,29% au niveau régional, 3,03% au niveau national et 0,47% au niveau
international. Toutefois, il est nécessaire de préciser que la
possession d'un diplôme ne veut pas dire que l'arbitre est en
activité. Il faut donc nuancer ceci au même titre que la
catégorie stagiaire n'apparaît pas comme choix possible. Plus
précisément, il est de plus en plus dur de trouver et de former
des arbitres pour veiller au bon déroulement des compétitions en
raison du temps passé le weekend end sur les manifestations sportives,
ce qui est peut-être la raison de la faible participation des pratiquants
à l'arbitrage. Il est possible d'accéder à l'arbitrage
dès 14 ou 15 ans par l'intermédiaire de l'école des jeunes
arbitres qui, normalement, existe au sein de chaque ligue. Après 18 ans,
il est obligatoire de passer par la commission régionale ou
départementale d'arbitrage qui forme les arbitres jusqu'au niveau
national, ensuite, il y a un examen national d'arbitrage en combat et en kata
une fois par an en alternance. En ce qui concerne l'influence de l'arbitrage
sur la perception de la pratique, nous pouvons relever des entretiens que les
arbitres interrogés tentent de faire respecter les codes et l'esprit qui
leur semble important. Les deux pratiquants/arbitres interrogés voient
le karaté comme une école de vie permettant d'apprendre à
se cadrer. Toutefois, les entretiens ne sont pas suffisamment accès sur
cette question, il n'empêche que nous pouvons nous demander si la
vocation d'arbitre ne serait pas conditionnée par la vision que les
arbitres ont de leur propre pratique du karaté.
Anthony METTLER 51
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
l) Les diplômes d'enseignement des pratiquants
En ce qui concerne les diplômes
d'enseignement78, nous constatons que 70,02% des pratiquants n'en
ont pas. Le DIF est représenté à 14,75%, puis le BEES1
à 8,67%, le DAF à 3,28%, l'AFA à 1,17%, enfin le BEES2
à 1,1%. Il y a seulement deux pratiquants titulaires du BEES3 en
karaté en France. Il n'empêche que les pratiquants de
karaté semblent être plus intéressés par le DIF ou
bien le BEES1 que les autres diplômes.
Pour plus de précisions, il faut savoir que les
diplômes fédéraux comme l'AFA, le DAF et le DIF ne
permettent pas de travailler contre rémunération, a contrario du
BEES1 et BEES2. De plus, les formations fédérales sont
accessibles tant sur les contenus que sur les tarifs contrairement aux
diplômes d'Etat de type BEES dont la formation est proposée par le
Ministère des Sports, pour le tronc commun, et la
fédération pour la partie spécifique. Il faut compter
environ 30€ pour l'AFA (8h de formation), 100€ pour le DAF (14h de
formation et stage d'organisation compris) et 280€ pour le DIF (94h de
formation plus stages d'organisation et d'expert). Ce qui nous amène
à penser que les pratiquants de karaté privilégient des
formations fédérales courtes qui ne sont pas très
onéreuses et qui leurs permettront d'avoir une base de connaissances et
de compétences suffisante pour enseigner dans un club. Les pratiquants
sont ici dans la logique de l'utilité de la formation sans pour autant
qu'il y est une recherche de qualité.
78 AFA = Attestation de Formation d'Assistant ; DAF
= Diplôme d'Animateur Fédéral ; DIF = Diplôme
d'Instructeur Fédéral ; BEES 1 = Brevet d'Etat d'Educateur
Sportif 1er Degré ; BEES 2 = Brevet d'Etat d'Educateur
Sportif 2ème Degré
m) Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
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Anthony METTLER 52
L'enseignement du karaté
Dans la mesure où 69,66% des pratiquants n'ont pas
d'activité d'enseignement contre 30,34% d'enseignant, si l'on compare le
nombre de personnes identifiées comme « enseignant »
et les personnes qui disent enseigner, nous pouvons dire qu'il semblerait qu'il
y ait une différence. En effet, si l'on comptabilise les données
des titulaires de diplômes fédéraux ou bien d'Etat cela
représente 28,5% soit légèrement moins que les pratiquants
qui se disent enseigner. Ce qui signifie qu'il y a 1,4% des personnes se disant
« enseignant » qui n'ont pas de diplôme pour. Nous pouvons dire
que la politique de formation menée par la fédération
fonctionne dans le sens il y a très peu de personne qui enseigne sans
diplôme.
n) La « motivation » pour l'entrainement
A la question « selon vous, il vous arrive de manquer un
de vos cours de karaté », nous pouvons voir qu'il y a peu de
pratiquants qui manquent un cours.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 53
De plus, les raisons invoquées par ces individus
concernant le fait de manquer un cours sont, premièrement, le «
travail » pour 66,05%, puis la « maladie »
pour 27,02%, ensuite la « famille ou le conjoint » pour
26,33%, suivi d'une « blessure » pour 25,40%, puis la «
fatigue » pour 17,78%, mais aussi le « manque de
motivation » pour 6,24%, les « transports » pour
3,7%, puis « autre loisir » 3,46%, enfin 6,24% ne
précisent pas leur raison et ont répondu « autre
». Ce qui est important de retenir dans le cas des cours
manqués c'est que les pratiquants sont très assidus et ne ratent
que rarement ou très rarement leur cours de karaté. Donc, nous
pouvons dire que les karatéka voient leur pratique comme essentielle
pour laquelle une raison indépendant de leur volonté les
empêchera de pratiquer.
2. La perte de sens de la pratique illustrés par les
pratiques « périphériques »:
a) Ceux qui pratiquent un autre art martial ou
activité de combat
Nous pouvons voir que les karatéka ne pratiquent pas
d'activités périphériques c'est-à-dire des
activités de combat ou qui s'apparentent à des arts martiaux.
Parmi ceux qui répondent positivement à cette question, nous
relevons deux choses, l'une concerne le fait qu'il existe une diversité
de pratiques qui sont aussi bien des disciplines considérées
comme « dure » telles que le « kickboxing
» avec un travail de renforcement du corps, à l'inverse, nous
retrouvons ici des pratiques plus « souples » en terme de
contact, l'« aïkido » est un exemple. Nous retrouvons
également des pratiques utilisant les armes telles que le «
kobudo » ou bien l'« escrime ». La
proximité entre le karaté et les autres disciplines peut
s'expliquer par les travaux de Jean-Paul Clément dans le sens où
le type de pratique en karaté conditionnerait le type de rapport au
corps. Dès lors, un pratiquant axant sa pratique sur un
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 54
renforcement corporel aura tendance à pratiquer une
activité telle que le kick boxing, au contraire, un karatéka qui
souhaite travailler sur les déplacements et la fluidité dans le
mouvement s'orientera vers une pratique telle que l'aïkido.
Le second élément est la catégorisation
du « body-karaté » et du «
karaté-contact » comme « autre art martial ou
activité de combat ». Dès lors, l'inscription de ces
deux facettes du karaté au sein de cette rubrique semble illustrer le
manque de définition et de lisibilité de ses pratiques comme
styles ou pratiques issues du karaté. Cela veut dire que les pratiquants
ayant répondu ces deux modalités de combat ne semblent pas
considérer le « body-karaté » et le «
karaté-contact » comme du karaté. Plus
particulièrement, il est possible que les personnes pratiquant le «
body-karaté » aient précisé leur pratique
ici en raison de l'absence de cette possibilité dans les styles
proposés.
Nous avons vu que les 14,55% de karatéka pratiquent une
autre activité que le karaté, ces pratiques ont des formes
particulières de travail, certaines avec armes d'autres non, certaines
sur des distances de corps à corps proches, d'autres non. En effet, les
27 activités précisées sur les 60 répondants nous
montrent qu'il n'existe pas de lien strict entre le karaté et une autre
pratique. Au contraire, le karatéka cherchera dans une autre
activité les éléments qui lui permettront de continuer
à progresser en accord avec le sens qu'il accorde à sa propre
pratique. Cependant, qu'en est-il des activités physiques et sportives
et des loisirs, au sens plus large du terme ?
Anthony METTLER 55
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
b) Ceux qui pratiquent d'autres activités physiques et
sportives et de loisirs
Contrairement à la question précédente,
ici, 60,87% des karatéka ont une activité physique et sportive ou
de loisirs en plus de leur pratique du karaté, contre 39,13% qui n'en
pratiquent pas. Cette question était posée ainsi : « au
cours des 12 derniers mois, hormis les pratiques martiales, avez-vous
pratiqué d'autres activités physiques et sportives
régulière ? ». Dès lors, ce que nous pouvons
dire c'est qu'il existe des pratiques assez différentes allant de la
« danse » à « l'équitation
» ou encore du « handball », de la « moto
sur circuit ». L'ensemble des 60,87% de pratiquants ont
précisé cette question et nous pouvons ajouter qu'il y a une
majorité de pratiquants qui font du jogging ou de la course à
pied. Ce qui signifie qu'au-delà de la pratique du karaté, il y a
un intérêt pour l'entretien physique et corporel.
A la question « au cours des 12 derniers mois, hormis
les pratiques martiales, quelles ont été vos autres principales
activités de loisirs régulières ? ». Nous
pouvons indiquer que les pratiquants de karaté ont des activés de
loisirs très variées telles que le «
théâtre », la « chasse » ou
encore le « poker ». Cependant, nous constatons qu'il y a
très peu de pratiquants de karaté qui ont des activités ou
des loisirs en lien avec l'origine culturelle de la pratique : le Japon.
Concrètement, nous n'avons que deux réponses en lien avec la
culture japonaise, c'est l'apprentissage du japonais et l'entretien de
bonsaï79.
79 L'origine de la culture des bonsaïs (l'art
de « cultiver de petits arbres ») remonte à environ
200 ans avant J.C. Ce n'est que plusieurs années plus tard que les
bonsaïs firent leur apparition au Japon (10e siècle). On dit qu'un
moine bouddhiste chinois, lors d'un voyage au Japon, apporta avec lui le
premier bonsaï et en fit cadeau à un Japonais. Les Japonais ont par
la suite amélioré la technique de culture des bonsaïs. C'est
pourquoi la culture des bonsaïs est si populaire au Japon.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 56
Une recherche effectuée sur une population de
pratiquants en Aïkiryu80 en 2007, démontrait qu'il
existait une recherche de lien culturel par des loisirs proches de la culture
japonaise. En effet, certains Aïkiryuka étaient dans l'optique de
pratiquer leur « art du geste » qu'est l'Aïkiryu tout en
cherchant à « réenchanter » leur pratique en
intégrant certaines caractéristiques culturelles orientales. Cela
se traduisait par des activités telles que la calligraphie ou du
théâtre japonais. Donc, le peu d'activités en lien avec la
culture d'origine traduirait le fait que les karatéka ne cherchent pas
nécessairement à avoir ce lien avec la culture japonaise en
raison du « désenchantement » existant depuis l'arrivée
de la pratique en France. Aussi, ce phénomène peut s'expliquer
par la perte progressive du sens de la pratique du fait de sa sportivisation et
de son intégration progressive au sien de la culture occidentale, plus
rationnelle81. Le processus de rationalisation qu'a subi le
karaté peut être la raison pour laquelle les karatéka ne
recherchent pas cette attache culturelle. Pour Max Weber, les principales
civilisations du monde ont connu un processus de rationalisation, par lequel
les actions et les représentations des hommes sont devenues plus
systématiques et méthodiques. Toutefois, il lui semble que ce
processus a connu une direction spécifique en Occident. Pour Max Weber,
le monde occidental se caractérise, en effet, par une rationalisation
orientée vers l'action pratique dans le monde, c'est-à-dire par
une volonté de contrôle et de domination systématique de la
nature et des hommes dans la production de biens matériels. Dès
lors, il est possible qu'il puisse y avoir une certaine perte de sens au sein
de cette pratique devenue elle-même plus rationnelle.
3. Le rôle du grade dans la pratique :
a) Corrélation grade actuel / temps de
pratique
Il faut comprendre la corrélation comme une «
variation concomitante de deux phénomène
»82, c'est-à-dire qu'en
statistique la corrélation entre deux ou plusieurs variables
aléatoires ou statistiques détermine l'intensité de la
liaison qui peut exister entre ces variables. Une mesure de cette
corrélation est obtenue par le calcul du coefficient de
corrélation qui est compris entre -1 et 1. Concrètement, plus le
coefficient se rapproche de ces valeurs plus la corrélation explique la
dépendance des variables. Le graphique ci-dessous représente les
426 points de coordonnées du temps de pratique et du grade actuel.
80 Mettler, A. (2007) Aïkiryu : un art, une
communauté, Mémoire de Master, UFR SEP Brest
81 Weber, M. (2006) Sociologie de la
religion, traduit par Kalinowski, I., Flammarion, Paris
82 Op. cit. Alpes, Y. Beitone, A. Dolo, C. Lambert,
JR. Parayre, S.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Ce graphique nous renseigne sur une dépendance
significative entre le temps de pratique et le grade actuel (équation de
la droite de régression : grade actuel = 0,13 * temps de pratique +
1,26). Le coefficient de corrélation est de +0,80, ce qui signifie que
le temps de pratique explique 64% de la variance du grade actuel. Cette
corrélation confirme ce qui se passe dans la pratique du karaté,
à savoir que plus on avance dans le temps de pratique plus un pratiquant
est susceptible de passer des grades. Par exemple, un débutant qui
commence le karaté mettra en moyenne 5 ans pour atteindre le niveau
ceinture noire sachant que les exigences de la fédération sont
d'avoir au moins deux licences. Si l'on prend en compte qu'entre chaque grade
il faut attendre un certain nombre d'années, nous pouvons dire que ce
résultat illustre tout à fait une réalité de la
pratique.
0,88
4,95
temps de pratique
grade actuel
b) Le grade comme élément structurant de la
pratique
0,81
0,69
0,67
0,57
année de naissance profession
niveau de diplôme temps de pratique style
pratiqué
grade actuel
diplôme arbitrage diplôme enseigneme
coef.>0,85 0,85>coef.>0,70 0,70>coef.>0,50
Nous avons analysé différentes variables telles
que l'année de naissance, la profession, le niveau de diplôme, le
temps de pratique, le style pratiqué, le grade actuel, le diplôme
arbitrage ainsi que le
0,54 diplôme d'enseignement afin de voir s'il des liens
entre chacune de ses variables mais surtout pour vérifier la place
qu'occupe le grade au sein de la pratique.
Anthony METTLER 57
Cette analyse conforte l'idée d'une forte
corrélation entre le « temps de pratique » et le
« grade actuel » (0,81) comme nous l'avons
vu précédemment. Aussi, il y a un élément fort :
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 58
le « diplôme d'enseignement » qui est
à la fois en corrélation entre le « grade actuel »
(à 0,69), le « temps de pratique » (0,67), le «
diplôme d'arbitrage » (0,57). Il y a également une
corrélation entre le « grade actuel » et le «
diplôme d'arbitrage » (0,54).
Il est possible d'expliquer ces différentes
corrélations par le fait que le système fédéral
français est construit sur la base du grade que l'on obtient avec de
l'ancienneté dans la pratique. Notons que le grade est un diplôme
d'Etat qui valide un certain nombre de compétences et confère
à son détenteur un statut reconnu. En effet, la validation d'un
grade donne la possibilité de passer des diplômes d'enseignement
de type fédéral ou d'Etat. Aussi, pour passer le Diplôme
d'Instructeur Fédéral, il est exigé d'avoir le
1er dan et plus de 18 ans. Plus précisément, un
pratiquant souhaitant enseigner sa pratique contre rémunération
doit avoir un diplôme d'enseignement de type Brevet d'Etat accessible
sous condition d'obtenir le 2ème dan et avoir plus de 18 ans. De plus,
étant donné qu'avoir un grade pour obtenir un diplôme
d'enseignement est nécessaire, il est donc logique d'avoir de
l'ancienneté dans sa pratique. Ce qui explique la corrélation
entre ces deux éléments.
Toutefois, la nécessité d'avoir un grade ne
s'arrête pas là. En effet, pour passer un examen d'arbitrage il
faut également avoir un grade minimum, par exemple, pour être
arbitre national combat il faut être 3ème dan. Ainsi,
plus le niveau des compétitions augmente plus il faut être
gradé pour passer les examens arbitrage. Pour être juge
international en combat, c'est-à-dire avoir le droit d'exercer lors des
Championnats d'Europe combat de karaté, il faut être
4ème dan et avoir au moins 30 ans. Ainsi, le lien entre le
diplôme d'arbitrage et le diplôme d'enseignement peut s'expliquer
par le fait que les arbitres, d'une manière générale,
doivent aider à former les nouveaux arbitres et participent activement
à la formation continue sur chaque compétition. Egalement, en
raison du manque d'arbitres au sein des ligues et des départements, il
est possible de retrouver bon nombre d'enseignants à l'arbitrage.
Nous avons démontré que le grade est
l'élément structurant de la pratique du karaté en
Français mais également de l'ensemble du système sportif
du karaté mondial. En effet, être titulaire d'un grade permet de
valider des compétences dans des domaines tels que l'enseignement,
l'arbitrage et permet de lier les pratiquants entre eux sans tenir compte des
origines sociales ou des caractéristiques de chaque pratiquants.
Anthony METTLER 59
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
VI. Les opinions et les orientations de la pratique du
karaté :
1. Les résultats de l'étude quantitative :
Nous avons cherché à questionner les
karatéka sur l'orientation de leur propre pratique. La question
était posée de cette façon : «
hiérarchisez les affirmations suivantes, la première
étant celle qui vous correspond le mieux et la dernière celle qui
vous correspond le moins ». Ainsi, nous cherchons à
détecter, par une catégorisation préétablie suite
au pré-test, les grandes orientations de la pratique83.
Concrètement, les pratiquants devaient hiérarchiser les
orientations de la plus importante à la moins importante pour eux. Ces
pôles sont :
- le pôle « sport/fitness »
identifié par l'idée que « le karaté est une
pratique qui me permet d'abord de me dépenser ». Cette
orientation se rapproche des pratiques sportives, c'est-à-dire que les
pratiquants peuvent évacuer les tensions par de l'activité
physique qui amène à un état que l'on peut assimiler
à de la détente ou du bien être.
- le pôle « philosophique/mythique »
identifié par le fait que « pratiquer le karaté c'est
surtout pratiquer un «art martial«, c'est-à-dire une pratique
ancestrale imprégnée d'une philosophie ». Ici, nous
proposons une orientation du karaté comme la possibilité
d'atteindre un idéal par une pratique continuellement en
réflexion sur soi et les autres. Il est nécessaire de percevoir
ce pôle comme une « épistémologie » du
karaté par les pratiquants eux-mêmes, l'intention est de pratiquer
tout en ayant une étude critique du karaté.
- le pôle « self défense »
identifié par l'idée que « le karaté est surtout
une pratique d'inspiration «guerrière« qui permet d'apprendre
le self-défense ». Cette orientation correspond à
l'idée de pratiquer le karaté afin de pouvoir répondre
à une agression. Plus précisément, les karatéka
peuvent également pratiquer leur discipline pour atteindre un
état « d'esprit guerrier ». Ne pas avoir peur de
l'autre ni de la confrontation et résister à n'importante quelle
attaque semble être au coeur du sens qu'accordent certains pratiquants au
karaté.
83 Or, la méthodologie pose un biais car le
logiciel utilisé ne permet pas de faire une hiérarchisation
stricte dans le sens où chaque réponse ne bloque pas la suivante.
Par exemple, si l'orientation première d'un pratiquant est « le
karaté est une pratique qui me permet d'abord de me dépenser
», rien ne l'empêche de répondre la même chose
à la question concernant la deuxième ou la troisième
orientation la plus importante
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 60
- le pôle « social » identifié
par « pratiquer le karaté est un moyen d'apprendre à
vivre en groupe » renvoi à l'idée que l'une des
orientations possibles du karaté réside dans le fait de vivre et
de partager des moments particuliers sur le tatami mais également en
dehors. Le karaté serait alors le lien qui uni des individus d'origines
diverses.
- le pôle « éthique »
identifié par le fait que « pratiquer le karaté c'est
d'abord respecter une certaine éthique personnelle de vie ».
Les pratiquants qui respectent cette éthique de vie personnelle sont
guidés par des valeurs ainsi qu'une conduite de vie, sans pour autant
avoir de regard critique sur leur pratique.
Les résultats sont recueillis de façon à
avoir le nombre de réponse par orientation. Ce qui implique que les
orientations les plus souvent citées seront prises en compte afin de les
hiérarchiser. Dès lors, nous pouvons voir que la première
orientation significative est « pratiquer le karaté c'est
surtout pratiquer un «art martial«, c'est-à-dire une pratique
ancestrale imprégnée d'une philosophie » citée
175 fois soit 39,6%84, suivie de très près par la
seconde orientation « pratiquer le karaté c'est d'abord
respecter une certaine éthique personnelle de vie »
citée 147 fois soit 33,3%. Nous pouvons dire qu'il existe deux
orientations principales de la pratique du karaté aujourd'hui.
Dès lors, nous pouvons affirmer que les pratiquants sont dans une vision
d'une pratique du karaté comme une pratique ancestrale qui contient une
certaine philosophie et que ce « karaté » permet
aussi de respecter une certaine éthique de vie.
Ensuite, nous pouvons voir que l'orientation « le
karaté est une pratique qui me permet d'abord de me dépenser
» est citée 95 fois soit 21,5% et l'orientation « le
karaté est surtout une pratique d'inspiration
«guerrière« qui permet d'apprendre le self-défense
» est citée 111 fois soit 25,1%. Ces deux orientations sont
très proches. Enfin, la dernière orientation est «
pratiquer le karaté est un moyen d'apprendre à vivre en
groupe ». En effet, nous retrouvons dans les tris à plat 41,9%
de pratiquants qui la citent. Toutefois, nous ne savons pas qui la cite en
premier choix, c'est ce qui sera intéressant de préciser par la
suite.
La hiérarchisation de ces orientations nous informe sur
la vision globale que les pratiquants ont du karaté. Aussi, nous pouvons
dire que les pratiquants semblent percevoir leur pratique d'abord comme un
« art martial » emprunt d'une « philosophie
» constitutive d'une « éthique de vie ».
Ensuite, le karaté semble permettre aux pratiquants de se
dépenser
84 Cf. annexe 12
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 61
et d'apprendre à se défendre. Enfin, l'aspect
social, c'est-à-dire le fait d'apprendre à vivre en groupe,
serait l'orientation la moins importante. Nous pourrions considérer que
la hiérarchisation de ses orientations partirait de l'individu, de soi,
pour aller vers les autres. Ainsi le pratiquant chercherait d'abord une
éthique de vie imprégnée d'une certaine philosophie, puis
il chercherait à se défendre et à se dépenser, pour
finir sur l'apprentissage de la vie en groupe.
2. La définition du karaté vue par ses
pratiquants : résultats de la question ouverte85
En complément des résultats quantitatifs, nous
apportons des éléments de réponses concernant la
hiérarchisation des orientations que les pratiquants ont du
karaté afin de préciser le sens que chaque karatéka
accorde à sa pratique. Pour ce faire, nous avons recueilli par le
questionnaire en ligne 383 réponses à la question : « en
quelques mots quelle serait votre définition du karaté ?
». L'analyse des questions ouvertes86 par le logiciel
Sphinx® nous donne 39 thèmes qui apparaissent et qui correspondent
aux possibilités de réponses. Dès lors, deux logiques
peuvent être appliquées, l'une serait de créer des
catégories limitées afin de classifier les définitions
dans des « cases », l'autre consisterait à prendre chaque
définition afin de représenter la richesse de celles-ci. Dans
notre cas, nous avons choisi de conserver la richesse des
définitions.
~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~~
confiance en sol
compétences techniques
mode de vie/ethique/ecole
s'ouvrir aux
de vie/art de vivre
~~~~~~~~~~~~~~~~
sport/sport de combat
loisir
art de guerre
art de combat
plaisir
passion
spirituel
sérénité
pratique/art martial
corps/esprit
état d'esprit
progression/dépense physique
maîtrise de sol
conservation
corps/santé/condition physique
dépassement de sol
valeurs/philosophie
~~~~~~~~~~~~~~~~~~
conscience du corps/se bien
être/détente
connaitre/dev
personnel/épanouissement self défense/auto
défense
respect soi/autres
86Nous avons procédé à une
analyse lexicale par thèmes. Concrètement, nous avons repris les
383 définitions de la pratique du karaté et nous avons
classé chaque définition par thème et mots clés.
Nous avions la possibilité de créer des thèmes à
chaque fois qu'il nous semblait nécessaire de le faire.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 62
Le graphique ci-dessus nous montre le classement des
thèmes en fonction du nombre de citations. Plus un thème est
cité plus il devient important. Nous pouvons voir que le karaté
est perçu par ses pratiquants comme « pratique ou art martial
». Ce thème est le plus souvent cité, 100 fois pour une
fréquence de 26,1%.
« Le karaté est un art martial complet, en ce
qu'il induit en dynamique interne et
externe un art spirituel, respectueux de l'autre et de soi,
porteur de valeurs, un défouloir
physique intelligent »
La pratique du karaté permettrait d'amener le pratiquant
vers un équilibre, une maîtrise ainsi qu'un lien entre le corps et
l'esprit. (98 citations pour une fréquence de 25,6%)
« Le karaté permet d'arriver à un
équilibre physique et psychique »
D'ailleurs nous avons retrouvé un certain nombre de fois
le slogan que la fédération
propose dans ses communications qui est « un esprit sain
dans un corps sain ». Plusieurs réponses mentionnent cette
phrase pour définir leur pratique.
Toujours d'après les pratiquants, le karaté permet
de se « maîtriser » (80 citations pour une
fréquence de 20,9%).
« Le karaté est art martial enseignant avant tout
la maitrise de soi. »
Il apporte certaines « valeurs » ainsi qu'une
« philosophie » (79 citations pour une fréquence de
20,6%).
« Le karaté est une philosophie de vie pour
apprendre à se défendre sans avoir recours
à la violence physique. »
Les pratiquants voient également leur pratique comme un
mode de vie, une école de ou bien un art de vivre (68 citations pour une
fréquence de 17,8%).
« Le karaté est un art de vivre (apprendre
à se connaitre, le respect de l'autre, savoir
se maîtriser, savoir se faire mal) »
Enfin, une partie des pratiquants voient le karaté comme
un « sport » ou bien un « sport de combat
» (65 citations pour une fréquence de 17%).
« Un sport de combat de percussion, polyvalent,
permettant de garder une bonne forme
physique, et qui apprend la maitrise de soi. »
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Par exemple, nous avons des individus qui nous ont
définit le karaté comme « art martial » et qui
explique ensuite que ce « sport » à des
qualités particulières.
« Une pratique sportive et martiale qui maintient une
hygiène physique et mentale
saine ainsi qu'un lien social avec un ensemble de personnes
adultes et surtout les jeunes
pratiquants. »
Nous avons vu que l'analyse lexicale mettait en avant un
certain nombre de thèmes, nous pouvons dire qu'il existe beaucoup
d'interprétations possibles en ce qui concerne la définition du
karaté. Cependant, les notions d'« art martial »,
d'« école de vie », de « valeurs
», de « philosophie » permettent de mieux cerner
le sens que les pratiquants donnent à leur pratique.
Toute fois, nous pouvons dire qu'il existe des oppositions
dans les représentations de la pratique, du fait de la présence
du thème « sport/sport de combat ». Nous
démontrons ici qu'il n'existe pas de consensus stricte quand à la
perception que l'ensemble des pratiquants ont du karaté. C'est en ce
sens qu'il est impossible de donner une définition stricte du
karaté mais plutôt de proposer une règle
générale, à savoir que le karaté est une pratique
culturelle qui peut être spécifiée par l'usage qui en fait,
soit self défense, sportive, social, éthique ou philosophique.
Afin de mettre à jour les profils de pratiquants nous allons
étudier les opinions que les pratiquants ont du karaté.
3. Les opinions sur le karaté et ses différents
aspects :
Anthony METTLER 63
a) La ceinture noire :
« Obtenir la ceinture noire c'est un but dans la
pratique ». Nous constatons ici que 1/3 des pratiquants ne sont pas
en accord avec l'idée que la ceinture noire soit un « but
». Cette affirmation peut amener à confusion car il est
possible que les pratiquants ne fassent pas la différence entre le but
et l'objectif de l'obtention de la ceinture noire. Il faut donc nuancer ce
propos.
CN = un but
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
4
|
0,9%
|
pas du tout d'accord
|
58
|
13,1%
|
pas d'accord
|
112
|
25,3%
|
plutôt d'accord
|
180
|
40,7%
|
tout à fait d'accord
|
88
|
19,9%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
CN =
reconnaissance
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
3
|
0,7%
|
pas du tout d'accord
|
21
|
4,8%
|
pas d'accord
|
51
|
11,5%
|
plutôt d'accord
|
247
|
55,9%
|
tout à fait d'accord
|
120
|
27,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
CN = plus facile
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
15
|
3,4%
|
pas du tout d'accord
|
68
|
15,4%
|
pas d'accord
|
186
|
42,1%
|
plutôt d'accord
|
120
|
27,1%
|
tout à fait d'accord
|
53
|
12,0%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Obtenir la ceinture noire c'est une reconnaissance
de sa valeur de pratiquant ». La majorité des
répondants sont en accord avec l'idée que la ceinture noire soit
une reconnaissance de la valeur du pratiquant. Pourtant, nous devons comprendre
la notion de ceinture noire au sens idéal du terme. Plus
précisément, le sens de la question n'est pas «
aujourd'hui, pensez-vous que la ceinture noire corresponde à la
valeur des pratiquants ? » mais bien sur la valeur qu'ils accordent
à ce grade.
« Obtenir sa ceinture noire c'est de plus en plus
facile ». Bien que 57, 5% des pratiquants soient en désaccord
avec cette idée, nous notons qu'il y a tout de même 39,1% des
karatéka qui sont en accord avec l'idée que la ceinture noire
soit de plus en plus facile à obtenir. D'ailleurs, les entretiens que
nous avons réalisés nous ont informés sur l'idée
que l'on « donne » les grades et qu'il semble avoir une
perte de valeurs de sens dans les grades d'une manière
générale.
Anthony METTLER 64
Richard87 quant à lui dit « j'ai
tendance à devenir irritable lorsque je vois qu'on rend le karaté
plus facile, plus aisé, qu'on donne des grades ou des médailles
pour récompenser. Tout ça me heurte ! Vers le 2e, 3e dan, on doit
connaître quand même de manière poussée son corps.
» Il ajoute que « aujourd'hui passer un 1er dan est plus
aisé, moi j'entends souvent qu'autrefois on n'était plus
méchant, du coup maintenant on délivre plus facilement, comme
pour se rattraper des erreurs du passé. » Pour lui «
le geste juste fait partie du Budo. Dans les passages de grades, on doit
oublier ça, on oublie d'être juste, on flatte. Il ne faut rien
dire dans ces cas-là, sinon tu peux être sur de ne pas être
convoqué la fois d'après. »
87 Professeur de karaté, 59 ans,
7ème dan, a commencé le karaté en 1971,
titulaire du BEES 2ème degrés, 38 ans de pratique
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
CN = étape
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
7
|
1,6%
|
pas du tout d'accord
|
5
|
1,1%
|
pas d'accord
|
7
|
1,6%
|
plutôt d'accord
|
141
|
31,9%
|
tout à fait d'accord
|
282
|
63,8%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Obtenir la ceinture noire c'est une étape
dans son parcours de pratiquant ». L'idée de la ceinture comme
étape semble être assez consensuelle et ne démontre pas
d'oppositions importante. Pour Eric88 « la ceinture noire
c'est une finalité pour un débutant. Mais en
réalité c'est le véritable premier grade. C'est une porte
aux autres grades. C'est le seul grade qui compte vraiment, vu de
l'extérieur. C'est un aboutissement, en même temps une
première étape,
Anthony METTLER 65
un palier, c'est un objectif. Ce n'est pas
négligeable du tout. » De plus, sachant que la ceinture noire
est le lien entre tous les pratiquants et que sans elle il est impossible
d'accéder à certains diplômes, il peut paraître
logique que la ceinture noire soit une étape dans le parcours du
pratiquants.
En ce qui concerne la question de la ceinture noire et plus
largement des grades, nous pouvons apporter de plus amples informations en nous
appuyant sur les entretiens. Tout d'abord, nous pouvons dire que les
pratiquants estiment que le niveau d'exigence a baissé depuis quelques
années. En effet, Mickael89 trouve par exemple
«qu'on perd en qualité, qu'il y a beaucoup moins d'exigences
qu'avant. » Pour lui, son 1er dan était un vrai
passage, par contre, le 2ème dan lui est paru moins exigent
que le 1er dan, il y avait un écart entre ses deux grades.
« Par exemple, le kata, Kankudaï, qui se trouvait au passage du
1e dan et qui maintenant est dans la liste du 2 dan. Et pour moi il reste un
kata du 1e dan. Je trouve qu'il y a eu un véritable décalage vers
le bas qui me dérange. Les katas pour avoir la ceinture marron, ou noire
se retrouvent aujourd'hui au passage du 2e dan. C'est plus accessible.
» Il pense que la ceinture noire se mérite mais «
maintenant ça devient plus une ceinture pour passer une ceinture.
»
88 Marin d'Etat, 46 ans, ceinture blanche, a
commencé le karaté en 1976, 5 ans de pratique
89 Etudiant, sans emploi, 20 ans,
2ème dan, a commencé le karaté en 1993/1994,
titulaire du DAF/DIF, 16 ans de pratiques
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 66
De plus, certains pratiquants estiment que le niveau
d'engagement au moment du passage de grade n'est pas suffisant.
Angélique90 nous dit « je suis effarée quand
je vois la réduction des difficultés dans les passages de grades.
Je suis deuxième dan. Moi je trouve que le passage de grade ne
correspond pas à l'esprit du karaté, ce n'est pas en 10 kihons,
deux katas, et un petit combat codifié que l'on peut noter quelqu'un
», pour elle le grade serait « une épreuve où
l'on doit être à la limite », elle estime que lorsque
« tu sors du passage d'un grade sans avoir l'impression d'avoir tout
donné, d'avoir était au bout de quelque chose. C'est très
superflu. Alors que dans notre dojo, j'ai vraiment l'impression de me
donné plus qu'au passage de grade. Je ne ressens pas l'existence du kata
chez les gens, peut-être que cela vient de moi aussi ».
En ce qui concerne l'âge minimum des pratiquants qui se
présentent au passage de la ceinture noire, Martine91 pense
que « le fait d'apporter des gens qui sont jeunes, ça
dévalue beaucoup la pratique et le grade car ces personnes-là
n'ont pas le respect qu'il faut. Ce n'est pas pour rien qu'au Japon, c'est soit
tu as la ceinture blanche, soit c'est la noire. Dans notre
société, on retrouve une pratique occidentale, surtout dans
l'esprit, c'est adapter à notre vie aussi. Je pense que ce n'est pas
bien de donner trop jeune les grades, c'est mauvais pour le jeune, pour la
pratique et pour l'image. Le fait de permettre de passer le grade à 14
ans contribue à une dévalorisation et une perte de l'esprit qui a
été mis en place par les ancêtres.»
Aussi, elle conçoit « le début de la
pratique du karaté qu'à partir du1e dan. On m'a toujours dit que
par la pratique du karaté, les instincts humains s'en vont en laissant
la place aux codes. Maintenant baisser l'âge de la ceinture noire a 14
ans, je trouve ça vraiment nul. À cet âge, les personnes
n'ont pas le recul nécessaire pour porter ce grade. Ils n'ont pas non
plus l'esprit pour cette ceinture car ils n'ont pas l'évolution
requise. »
90 Assistante d'éducation, 22 ans,
2ème dan, a commencé le kobudo en 1999 et le
karaté en 2001, BEES 1 karaté, Licence STAPS, 8 ans de
pratique
91 Militaire, 23 ans, 2ème dan, a
commencé le karaté en 1991, Juge National Combat, vice-championne
de France combat par équipe, 17 ans de pratique
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Enfin, nous avons retenu les paroles de Mathieu92
en ce qui concerne « les passe-droits qui sont attribués dans
certains cas, par exemple un compétiteur qui gagne les championnats
d'Europe se voit attribuer des grades sans passage officiel. On brade
clairement les ceintures et je pense que la valeur d'un karatéka n'a
rien à voir avec ses compétences de compétiteur ou de
dirigeant. »
Comme nous venons de le voir, les grades posent un certain
nombre de questions quant à l'âge d'obtention, les critères
de jugement ou encore le message à faire passer auprès des
pratiquants. Nous pouvons dire que les pratiquants se représentent la
ceinture noire comme un symbole fort de la pratique mais qui semble perdre de
sa valeur. Nous expliquons ce phénomène par le fait que le grade
« législatif » prend le pas sur le grade «
symbolique ». Concrètement, les jurys de passage de grade
auront tendance à noter les pratiquants en fonction de critères
sportifs ou compétitifs plutôt que sur des critères de
progression et de recherche personnelle.
b) La compétition en karaté et dans les arts
martiaux
Compétition = important
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
7
|
1,6%
|
pas du tout d'accord
|
65
|
14,7%
|
pas d'accord
|
174
|
39,4%
|
plutôt d'accord
|
151
|
34,2%
|
tout à fait d'accord
|
45
|
10,2%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« La compétition dans les arts martiaux c'est
important pour connaître sa valeur de pratiquant ». Cette
affirmation met en évidence une opposition importante dans le sens
où il y a autant de personnes en accord (44,4%) que de personnes en
désaccord (54,1%) sur cette question. Aussi la compétition ne
semble pas être le lieu qui permet de démontrer la valeur du
pratiquant. Plus précisément, le thème de la
compétition
Anthony METTLER b7
fait émerger des conflits d'opinions au sein des
pratiquants. Rappelons que 16% des karatékas ont participé
à une compétition kata ou combat au cours des 12 derniers mois.
Nous pouvons également nous interroger sur l'importance de la
compétition dans le parcours de celui-ci. En effet, un pratiquant ayant
fait de la compétition n'a pas les mêmes expériences qu'un
pratiquant qui n'en a pas fait. Dès lors, la compétition
conditionnerait le sens et les valeurs des karatéka, donc, les
orientations de la pratique.
92 Étudiant, sans emploi,
2ème dan, a commencé le karaté en 1989, Arbitre
national combat, 20 ans de pratique
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Compétition = contraire AM
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
6
|
1,4%
|
pas du tout d'accord
|
99
|
22,4%
|
pas d'accord
|
216
|
48,9%
|
plutôt d'accord
|
95
|
21,5%
|
tout à fait d'accord
|
26
|
5,9%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Compétition = appliquer acquis
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
5
|
1,1%
|
pas du tout d'accord
|
30
|
6,8%
|
pas d'accord
|
96
|
21,7%
|
plutôt d'accord
|
247
|
55,9%
|
tout à fait d'accord
|
64
|
14,5%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Compétition = progrès discipline
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
12
|
2,7%
|
pas du tout d'accord
|
70
|
15,8%
|
pas d'accord
|
155
|
35,1%
|
plutôt d'accord
|
157
|
35,5%
|
tout à fait d'accord
|
48
|
10,9%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« La compétition dans les arts martiaux c'est
contraire à la pratique d'un art martial ». Une fois encore,
il existe une opposition entre les pratiquants en accord (27,4%) et en
désaccord (71,3%). Cette affirmation nous montre justement que les
pratiquants estiment que l'on peut pratiquer un art martial tout en faisant de
la compétition, par contre la compétition n'est pas le lieu qui
permet de prouver sa valeur. Alors quelle est la fonction de la
compétition si elle ne permet pas de prouver sa valeur ?
Anthony METTLER 68
D'après les réponses à l'affirmation
suivante : « La compétition dans les arts martiaux c'est une
manière d'appliquer ce que l'on a appris », nous pouvons dire
que la fonction principale de la compétition est d'expérimenter
ses acquisitions techniques. Autrement dit, pour certains la compétition
n'est pas le lieu de prouver sa valeur de pratiquant, il n'empêche
qu'elle semble être un moyen efficace de pratiquer et d'appliquer les
techniques et de faire valoir les valeurs acquises pour une grande
majorité des pratiquants.
« La compétition dans les arts martiaux c'est
essentiel au progrès dans la discipline ». Une fois encore
nous avons une opposition remarquable entre deux manières de penser le
progrès de la discipline. A noter qu'il y a autant de pratiquants en
accord (46,4%) qu'en désaccord (50,9%). Il faut préciser que nous
avons quatre réponses possibles, deux étant plutôt en
accord et deux plutôt en désaccord avec l'item proposé.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Nous devons préciser qu'il peut y avoir des pratiquants
des pratiquants qui s'orienteraient vers de la compétition, d'autres qui
s'orienteraient vers une pratique plus traditionnelle et enfin certains peuvent
avoir fait de la compétition tout en travaillant l'aspect «
traditionnel ». C'est pour cela qu'il existe des divergences dans les
réponses à ce type de questions.
c) Le karaté olympique
Olympique = rêve
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
15
|
3,4%
|
pas du tout d'accord
|
115
|
26,0%
|
pas d'accord
|
199
|
45,0%
|
plutôt d'accord
|
84
|
19,0%
|
tout à fait d'accord
|
29
|
6,6%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Le karaté olympique c'est un rêve qui
n'aboutira jamais ». Nous pouvons relever que les pratiquants pensent
que le karaté a toute sa place parmi les disciplines olympiques. En
effet, la question de l'olympisme du karaté existe depuis les
années 1990. A l'époque déjà, la
fédération pensait faire entrer le karaté aux Jeux
Olympiques. D'ailleurs, nous pouvons nous interroger sur la nature du message
qu'a diffusé la FFKDA à ce propos et ce qui l'en reste.
Olympique = reconnaissance
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
9
|
2,0%
|
pas du tout d'accord
|
12
|
2,7%
|
pas d'accord
|
32
|
7,2%
|
plutôt d'accord
|
198
|
44,8%
|
tout à fait d'accord
|
191
|
43,2%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
En effet, les karatéka semblent être conscients
que « le karaté olympique c'est davantage de reconnaissance du
grand public et des pouvoirs publics ». Ici, l'idée de la
reconnaissance du karaté par les instances publiques est centrale. En
effet, avoir une pratique olympique permet d'intégrer des dispositifs et
de bénéficier de financements plus conséquents qu'à
l'heure actuelle. Il semble donc nécessaire pour les pratiquants que le
karaté devienne une pratique olympique ce qui permettrait de
développer cette
Anthony METTLER 69
pratique qui se situe sur un champ concurrentiel de plus en
plus fort et qui ne dispose pas d'une image très médiatique pour
le moment. Mathieu nous dit « je suis clairement pour l'olympisme,
nous ne sommes pas sport olympique et je pense que ça n'arrange pas le
karaté qui reste très obscure pour les non-pratiquants. »
Se pose alors la question de la de la perte des valeurs et de la peur de
voir le karaté comme discipline sportive et moins comme cet «
art martial ».
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Olympique = perte sens
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
10
|
2,3%
|
pas du tout d'accord
|
94
|
21,3%
|
pas d'accord
|
200
|
45,2%
|
plutôt d'accord
|
93
|
21,0%
|
tout à fait d'accord
|
45
|
10,2%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Nous pouvons dire que 1/3 des pratiquants sont en accord avec
l'idée que « le karaté olympique c'est la perte de sens
de la pratique ». Nous avons 2/3 des pratiquants qui sont
plutôt en désaccord. Cette affirmation nous montre que les
pratiquants pensent que le karaté peut conserver tout son sens
même s'il devient olympique. Toutefois, il semblerait que les pratiquants
puissent à la fois se représenter et orienter leur pratique comme
un « art martial » tout en acceptant le fait que le
karaté puisse
être olympique. Bien sûr, il est important de nuancer
car il y a des pratiquants qui ne souhaitent pas que le karaté soit
olympique en raison de la perte de sens que cela amènerait.
Olympique = motivation
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
12
|
2,7%
|
pas du tout d'accord
|
29
|
6,6%
|
pas d'accord
|
82
|
18,6%
|
plutôt d'accord
|
214
|
48,4%
|
tout à fait d'accord
|
105
|
23,8%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Le karaté olympique c'est une manière
de motiver les pratiquants ». Notons qu'une grande majorité
des pratiquants pensent que le fait que le karaté soit olympique puisse
motiver les pratiquants. Cependant, cette affirmation sous entend qu'il y
aurait un élément motivateur une fois le karaté devenu
olympique : la compétition. Or, nous avons vu précédemment
que le karaté ne peut pas être réduit qu'à l'aspect
compétitif, au contraire, cette discipline rassemble des pratiquants
ayant des orientations
Anthony METTLER 70
très différentes. Donc, il est nécessaire
de prendre en compte le fait qu'une majorité des pratiquants pensent que
le karaté olympique puisse motiver les karatékas mais il ne faut
pas exclure les pratiquants qui ne le pensent pas. Pour Alex93,
« l'esprit Olympique «plus vite, plus fort, plus haut« me
plaît beaucoup et j'aimerai bien entendu voir le kumite dans cette
compétition. Cependant je ne veux pas que le kata qui est basé
plus sur le côté spectaculaire et esthétique rentre dans
les Jeux Olympique. C'est, je pense, une image erronée que le
karaté donnerai au monde Olympique. »
93 Etudiant, sans emploi, 21 ans, 2ème dan, a
commencé le karaté en 1993, titulaire du DAF, 16 ans de
pratique
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
En ce qui concerne la question du karaté olympique,
nous pouvons dire que les pratiquants pensent dans l'ensemble que cela serait
positif pour la discipline. Plus encore, il espère que ce rêve
aboutisse un jour. Cependant, l'apport des entretiens à ce sujet nous
montre que certains pratiquants sont très sceptiques quant à
l'intégration du karaté dans les disciplines olympiques. Des
peurs existent et apparaissent comme nous le dit Alain94, «
j'émets beaucoup de réserves sur le système, c'est une
fête du sport avec pleins de magouilles derrière. »
d) Le travail du combat
Combat + interess que technique
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
9
|
2,0%
|
pas du tout d'accord
|
104
|
23,5%
|
pas d'accord
|
260
|
58,8%
|
plutôt d'accord
|
51
|
11,5%
|
tout à fait d'accord
|
18
|
4,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Travailler le combat (compétitif ou
traditionnel) c'est plus intéressant que de travailler la technique
». Cette affirmation nous renseigne sur le fait que les pratiquants
travaillent autant l'aspect technique que l'aspect combat du karaté. Le
fait qu'une grande partie des pratiquants ne semble pas d'accord avec
l'idée que le combat soit plus intéressant que la technique nous
renseigne sur l'idée que les karatéka travaillent l'ensemble des
aspects de leur discipline.
Par l'intermédiaire de cet item : « travailler
le combat (compétitif ou traditionnel) c'est apprendre à
gérer ses émotions (peur, stress, agressivité ...)
», nous pouvons affirmer que les pratiquants voient l'aspect combat
du karaté comme un outil permettant d'apprendre à gérer
les émotions telles que la peur ou l'agressivité.
Combat = gestion émotions
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
6
|
1,4%
|
pas du tout d'accord
|
7
|
1,6%
|
pas d'accord
|
20
|
4,5%
|
plutôt d'accord
|
227
|
51,4%
|
tout à fait d'accord
|
182
|
41,2%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Anthony METTLER 71
94 Professeur de karaté à mi-temps, responsable de
l'enfance et de la jeunesse à la Communauté de communes, 26 ans,
a commencé le karaté en 1988, titulaire du Brevet d'Etat, 21 ans
de pratique.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Combat = prepa agression
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
5
|
1,1%
|
pas du tout d'accord
|
18
|
4,1%
|
pas d'accord
|
81
|
18,3%
|
plutôt d'accord
|
249
|
56,3%
|
tout à fait d'accord
|
89
|
20,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
C'est l'aspect self-défense qui est questionné
par l'affirmation : « travailler le combat (compétitif ou
traditionnel) c'est se préparer à répondre à une
éventuelle agression ». Nous pouvons voir que le travail du
combat semble préparer à une éventuelle agression. Pour
autant, 22,4% des pratiquants ne sont pas en accord avec cette idée ce
qui nous ramène à la question des formes de pratique du
karaté, à savoir que les karatéka qui pratiquent dans
l'idée du bien être ou dans la recherche
d'une école de vie sans pour autant être sur une
pratique de self-défense ne se retrouveront pas dans cette affirmation.
Donc, nous voyons ici que la fonction self défense du karaté a
une grande importance mais n'est obligatoirement recherchée par
l'ensemble des pratiquants.
Combat = dev qualité physique
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
3
|
0,7%
|
pas du tout d'accord
|
4
|
0,9%
|
pas d'accord
|
15
|
3,4%
|
plutôt d'accord
|
231
|
52,3%
|
tout à fait d'accord
|
189
|
42,8%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Travailler le combat (compétitif ou
traditionnel) c'est une manière de développer ses qualités
physiques (force, vitesse, réflexe ...) ». Au même titre
que la gestion des émotions, le combat permettrait de développer
les qualités physiques des pratiquants. En effet, 95,1% des
karatéka sont en accord avec cette idée. Dès lors le
combat compétitif ou traditionnel participerait au développement
du potentiel physique des pratiquants.
Nous avons vu que les karatéka ne
Anthony METTLER 72
pratiquent pas que l'aspect combat du karaté, ils
s'exercent également sur la forme technique. Aussi, la fonction self
défense est importante mais n'est pas nécessairement
recherchée par le pratiquant. Cependant, il y a une forte convergence
sur les apports de ce type de travail, en effet, nous avons vu que la pratique
du combat compétitif ou traditionnel contribue au développement
du potentiel physique du karatéka et permet également d'apprendre
à gérer ses émotions.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
e) Les modalités de pratique en voie de
développement
Dans cette partie nous avons questionné les pratiquants
sur ce que nous appelons les modalités de pratique en voie de
développement. Concrètement, il s'agit des pratiques issues du
karaté qui sont le résultat du processus de diversification de la
pratique telles que le body-karaté, le karaté jutsu, le
karaté contact ou encore le karaté artistique.
Artistique pas karaté
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
12
|
2,7%
|
pas du tout d'accord
|
27
|
6,1%
|
pas d'accord
|
102
|
23,1%
|
plutôt d'accord
|
192
|
43,4%
|
tout à fait d'accord
|
109
|
24,7%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
A l'affirmation : « le karaté artistique ce
n'est plus vraiment du karaté. », nous constatons que 68,1%
des pratiquants sont en accord avec cette idée
contre 29,2% des pratiquants qui sont en
désaccord.
Dans ce cas, le karaté artistique qui est une pratique de
compétition, proche des activités gymniques, basée sur la
chorégraphie de mouvements de karaté sur de la musique ne semble
pas correspondre à la représentation que les pratiquants ont du
karaté.
Anthony METTLER 73
Pour appuyer cette idée nous avons pu entendre lors des
entretiens qu'une pratiquante « n'adhère pas aux nouvelles
pratiques dérivées. Pour moi ça n'a pas de sens
»95 ou encore qu' « à l'heure actuelle, on
fait des cases pour classer par exemple, le karaté do, le body
karaté, le karaté pour les jeunes, pour les anciens. Et dans
l'esprit des gens, ces cases deviennent totalement hermétiques et on
finit par ne plus rien comprendre. »96.
Donc, les pratiquants semblent être conscients que le
karaté se diversifie mais ne sont pas d'accord avec cela. Cependant,
l'idée de la perte de sens proposée dans la question du
karaté olympique se révèle ici. En effet, les pratiquants
sont d'accord avec l'idée que le karaté puisse être
olympique tandis qu'il ne sont pas d'accord avec le fait que la pratique puisse
se diversifier alors que dans les deux cas il y a une remise en question des
valeurs, du sens et de l'orientation que les pratiquants donnent au
karaté.
95 Op. Cit. Entretien avec Angélique
96 Op. Cit. Entretien avec Richard
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Nous pouvons ajouter que le sentiment général
dans l'ensemble des entretiens correspond à l'idée «
qu'on associe le nom du karaté à des disciplines qui n'y
ressemblent pas forcément, comme le body karaté. On utilise les
techniques du karaté, mais sans vraiment y mettre l'efficacité du
karaté. »97.
Une possible explication de ce phénomène a
été abordé par Mathieu, « je pense qu'au niveau
fédéral il y a un morcellement, je ne sais pas si c'est bien pour
le karaté. Selon moi il n'y a qu'un karaté et pas un baby
karaté, un karaté féminin, du body karaté etc.
personnellement je ne trouve pas ça positif, ça ne fait juste que
créer des licences. » Il analyse ce phénomène
comme une sorte d'opération séduction de la
fédération vers le grand public car « tout le monde doit
trouver son compte ». L'idée de développer l'offre pour
qu'il y ait une augmentation des licences est justifiée par
l'affirmation suivante :
Body = amener vers karaté
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
21
|
4,8%
|
pas du tout d'accord
|
64
|
14,5%
|
pas d'accord
|
133
|
30,1%
|
plutôt d'accord
|
186
|
42,1%
|
tout à fait d'accord
|
38
|
8,6%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Le body karaté est une façon d'amener
des pratiquant(e)s vers le karaté. » Ici, il n'y a que les
pratiquants de karaté qui répondent et non pas les pratiquants
qui ont commencé par du body karaté, par exemple, et qui se sont
orientés vers une pratique plus traditionnel par la suite. Nous pouvons
voir qu'il existe une opposition dans les opinions sur ces thèmes.
Notons que 44,6% des pratiquants sont en désaccord avec l'idée
Anthony METTLER 74
que les pratiques telles que le body karaté puissent
amener des pratiquant(e)s vers le karaté plus « traditionnel
» contre 56,7% qui sont en accord avec cette idée. Il serait
donc intéressant par la suite de questionner directement les
pratiquant(e)s de body karaté afin de connaître leur opinion plus
clairement.
97 Op. Cit. Entretien avec Mickael
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Contact = retour principe
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
28
|
6,3%
|
pas du tout d'accord
|
41
|
9,3%
|
pas d'accord
|
193
|
43,7%
|
plutôt d'accord
|
154
|
34,8%
|
tout à fait d'accord
|
26
|
5,9%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Le karaté-contact est un retour vers ce qui
fait le principe du karaté. » Cet item nous renseigne sur la
perception que les pratiquants ont du karaté contact qui est une forme
de karaté créé par Dominique Valéra98
dont l'objectif est de laisser libre recours à la diversité
technique du karaté sans pour autant restreindre sur la notion de
« skin touch »99 en arbitrage. Nous avons une
fois de plus une opposition dans les opinions sur ce type de
pratique, cependant, nous pouvons affirmer que majoritairement
les pratiquants ne sont pas d'accord avec l'idée que le karaté
contact soit un retour vers ce qui fait le principe du karaté. Nous
devons tout de même préciser ce que nous entendons par le principe
du karaté. En fait, ce principe n'ayant été définit
dès le départ, il dépend de la manière dont le
pratiquants se représente la pratique.
Jutsu distingue pas karaté
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
51
|
11,5%
|
pas du tout d'accord
|
24
|
5,4%
|
pas d'accord
|
172
|
38,9%
|
plutôt d'accord
|
168
|
38,0%
|
tout à fait d'accord
|
27
|
6,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« Le karaté-jutsu ne se distingue pas
véritablement du karaté. » Nous constatons qu'il y a
très peu d'écart entre les pratiquants en accord et en
désaccord sur cette affirmation. En effet, 44,8% des pratiquants sont en
désaccord contre 44,1% qui sont en accord avec cette affirmation. Pour
explication, le karaté jutsu est une forme de pratique qui
intègre des techniques issues du judo et du jiu-jitsu (projection,
saisies, étranglements). De plus, certains pratiquent du karaté
jutsu sans pour autant s'identifier comme karaté jutsuka.
Anthony METTLEK 75
98 Dominique Valéra est Champion du Monde
par équipe (1972), plusieurs fois Champion d'Europe, il rencontra son
ami Bill Wallace, Champion du Monde du Karate Professionnel (l'ancêtre de
la Boxe Américaine) et fit une formation intensive à cette
nouvelle discipline révolutionnaire. Il participa à une
compétition dans ce style aux USA et fit une forte impression. Dominique
Valera est alors le pionnier dans le Full Contact en Europe et le diffusera en
Europe.
99 Le « skin touch » est la notion de
contrôle absolu sur les technique de poing et de jambe en
compétition de karaté classique, par exemple, un coup de poing
ayant un impact diminuant le potentiel physique de l'adversaire entraine une
sanction pouvant aller jusqu'à la disqualification.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Dans le cas du karaté Jutsu, il est possible
d'expliquer ce résultat en fonction de la conception qui est faite du
karaté. Dans un premier temps il y aurait une vision qui permettrait
d'intégrer la partie jutsu dans la pratique du karaté sans
distinction particulière. Tandis que l'autre conception viserait
à rendre le karaté justu plus autonome et existerait en tant que
tel. Dès lors, nous pouvons retrouver ces différents types de
distinctions pour chacune des affirmations sur les pratiques qui sont
techniquement et culturellement proches du karaté dit « classique
».
Le thème des modalités de pratique en voie de
développement nous montre qu'il existe des conflits d'opinions qui
laissent penser que les valeurs que les pratiquants donnent au karaté
sont également très hétérogènes. Toutefois,
il semble exister une résistance quant au sens qui est donné au
karaté, en effet, certains pratiquants semblent se représenter le
karaté comme un ensemble aux mulitples facettes tandis que d'autres se
représenteraient le karaté comme plusieurs éléments
qui coexisteraient sans pour autant avoir de lien entre eux.
f) La question du karaté enfant
Karaté enfants = detect champion
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
13
|
2,9%
|
pas du tout d'accord
|
67
|
15,2%
|
pas d'accord
|
185
|
41,9%
|
plutôt d'accord
|
158
|
35,7%
|
tout à fait d'accord
|
19
|
4,3%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
« La pratique du karaté chez les enfants c'est
un moyen de détecter de futurs champions. » Cette affirmation
met en évidence le fait que 41,9% des pratiquants ne pensent pas le
karaté enfant comme un outil de sélection par
l'intermédiaire des compétitions poussins, pupilles et benjamin.
Cependant 35,7% sont « plutôt d'accord » avec cette
affirmation, 15,2% ne sont « pas du tout d'accord », et 4,3%
sont « tout à fait d'accord ». Dès lors, nous
pouvons dire qu'il existe deux façons de voir le karaté enfant et
les
Anthony METTLER 76
compétitions enfants d'une manière
générale, d'un côté il y a ceux qui
conçoivent le karaté enfant comme un outil de sélection
permettant d'alimenter les vivier d'athlètes et donc de copier le
fonctionnement de l'élite Junior-Senior en karaté pour des enfant
de moins de 10 ans, au contraire, l'autre possibilité serait de
concevoir le karaté enfant comme un outils d'éducation avant tout
permettant à l'enfant de se développer au sens d'Edouard
Claparède (1937) c'est-à-dire que « l'enfant n'est pas
un adulte miniature, il n'est pas seulement différent d'un point de vue
morphologique, mais aussi de par sa physiologie et son psychisme. »
Bien sûr, ces deux conceptions sont compatibles et ne sont pas
exclusives.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Karaté enfants diff adulte
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
10
|
2,3%
|
pas du tout d'accord
|
24
|
5,4%
|
pas d'accord
|
126
|
28,5%
|
plutôt d'accord
|
180
|
40,7%
|
tout à fait d'accord
|
102
|
23,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Karaté enfants = éducatif
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
6
|
1,4%
|
pas du tout d'accord
|
2
|
0,5%
|
pas d'accord
|
5
|
1,1%
|
plutôt d'accord
|
151
|
34,2%
|
tout à fait d'accord
|
278
|
62,9%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
En effet, 40,7% des pratiquants sont « plutôt
d'accord » avec l'idée que « la pratique du
karaté chez les enfants c'est très différent du
karaté pour adulte. » Pourtant 28,5% ne sont « pas
d'accord », 23,1% sont « tout à fait d'accord
» et 5,4% ne sont « pas du tout d'accord ». Les
réponses apportées nous renseignent sur l'idée que 1/3 des
pratiquants pensent qu'il n'y a pas de différenciation à faire
entre le karaté pour les adultes et le karaté pour les
enfants.
Cependant, 62,9% des pratiquants ont répondu «
tout à fait d'accord » et 34,2% ont répondu «
plutôt d'accord » à l'affirmation : « la
pratique du karaté chez les enfants c'est éducatif sur le plan
physique et moral. » Soit un total de 97,1% des pratiquants qui sont
en accord avec l'idée d'un enjeu éducatif de la pratique du
karaté pour les enfants. Il reste à voir les moyens
pédagogiques utilisés pour y parvenir.
Ici, l'idée que « la pratique du karaté
chez les
Anthony METTLER 77
Karaté enfants = occuper
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
9
|
2,0%
|
pas du tout d'accord
|
91
|
20,6%
|
pas d'accord
|
192
|
43,4%
|
plutôt d'accord
|
125
|
28,3%
|
tout à fait d'accord
|
25
|
5,7%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
enfants c'est un moyen comme un autre de les occuper.
» nous renseigne sur le constat qui et fait quant à la pratique du
karaté pour les enfants. En effet, 1/3 des pratiquants sont en accord
avec l'idée que le karaté pour enfant est un moyen d'occupation
contre 2/3 qui pensent le contraire. Il faut avoir à l'esprit qu'il peut
avoir d'autres éléments externes à la pratique
elle-même qui rentrent en compte comme le fait qu'il s'agit d'une
activité pratique qui occupe le mercredi mais aussi que le groupe de
jeunes pratiquants peut être agréable ou encore que l'enseignant
est sympathique.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Ce qu'il faut retenir des résultats sur le thème
du karaté enfant concerne l'idée que les pratiquants sont
conscients de l'intérêt de l'éducation tant physique que
psychique de l'enfant par le karaté ou les sports plus
généralement. Nous pouvons ajouter que le thème du
karaté enfant révéle l'existence de différentes
conceptions de la pratique. En effet, nous avons vu qu'il existait des
divergences sur les thèmes de la détection de futurs champion ou
encore du temps d'occupation pour les enfants. Aussi, pour d'autres et peut
être les mêmes, la pratique du karaté pour les adultes ne
semble pas se différencier de celle des enfants.
Ces deux constats posent la question de la formation des
enseignants en karaté et c'est en ce sens que la Direction Technique
Nationale a nommé deux experts en « pédagogie enfant
», Michel Kervadec et Philippe Sauvage, afin de proposer une nouvelle
approche dans l'enseignement du karaté vers ce public.
g) Les femmes et le karaté
Karaté s'adresse H/F
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
6
|
1,4%
|
pas du tout d'accord
|
7
|
1,6%
|
pas d'accord
|
6
|
1,4%
|
plutôt d'accord
|
76
|
17,2%
|
tout à fait d'accord
|
347
|
78,5%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Concernant la pratique du karaté féminin, nous
constatons qu'une grande partie des pratiquants sont en accord avec
l'affirmation « le karaté s'adresse autant aux hommes qu'aux
femmes. ». Nous pouvons voir que les pratiquants perçoivent le
karaté comme une pratique hétérogène et pas
seulement masculine. Si nous mettons en lien cette donnée avec la
répartition d'hommes (67,6%) et de femmes (32,4%) au sein de cette
population, il semblerait que les femmes soient également d'accord avec
cette affirmation. Afin d'appuyer cette idée nous pouvons voir que
sur
Anthony METTLER 78
les questions plus technique il y a également une opinion
majoritairement en faveur d'une reconnaissance positive des femmes.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Femmes moins douées combat
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
4
|
0,9%
|
pas du tout d'accord
|
235
|
53,2%
|
pas d'accord
|
161
|
36,4%
|
plutôt d'accord
|
37
|
8,4%
|
tout à fait d'accord
|
5
|
1,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
En effet, l'affirmation « les femmes sont moins
douées en combat que les hommes » apporte un
élément complémentaire concernant la pratique du combat
féminin, en effet, il semblerait que les pratiquants pensent que les
femmes soient aussi douées que les hommes en combat. Précisons
que le terme « moins douées » signifie que les femmes
ne développeraient pas les
mêmes compétences que les hommes en combat.
Cependant, il n'est pas précisé dans l'affirmation le type de
combat questionné car il est possible de parler de combat dit
traditionnel ou bien de combat de compétition.
Femmes plus technique
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
10
|
2,3%
|
pas du tout d'accord
|
96
|
21,7%
|
pas d'accord
|
213
|
48,2%
|
plutôt d'accord
|
105
|
23,8%
|
Tout à fait d'accord
|
18
|
4,1%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
En ce qui concerne l'affirmation « les femmes sont
plus techniques que les hommes », nous pouvons voir que les
pratiquants sont 69,9% en accord avec cette idée contre 27,9% des
pratiquants qui sont en désaccord. Il y a tout de même 1/3 des
individus qui pensent que les femmes développent plus de
compétences en technique que les hommes. Donc, il semblerait qu'une
partie importante des pratiquants voient le public féminin en
karaté comme étant compétent autant en combat qu'en
technique. Toutefois, il subsiste encore des
Anthony METTLER 79
opinions divergentes sur ce thème, en faible proportion
tout de même.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Monde karaté = univers machiste
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
6
|
1,4%
|
pas du tout d'accord
|
131
|
29,6%
|
pas d'accord
|
201
|
45,5%
|
plutôt d'accord
|
85
|
19,2%
|
tout à fait d'accord
|
19
|
4,3%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Lorsque l'on pose l'idée que « le monde du
karaté est un univers machiste » nous pouvons dire que 23,5%
des pratiquants se représentent le monde du karaté comme
machiste, ce qui n'est pas négligeable. Si l'on met ce chiffre en
rapport avec la répartition des femmes (32,4%), il est possible que les
femmes perçoivent quant à elles le milieu du karaté comme
machiste.
Anthony METTLER 80
Nous pouvons dire que les représentations sur la place
qu'occupent les femmes dans la pratique du karaté sont mulitples. En
effet, nous avons vu que la pratique du karaté correspond autant aux
hommes qu'aux femmes. Pourtant, lorsque l'on précise le propos et que
l'on questionne les représentations que les pratiquants ont des
compétences des femmes sur le plan technique ou combat, nous relevons
des disparités. Aussi, l'univers du karaté est perçu comme
machiste pour 26,5% des pratiquants. Cependant, cette opinion regroupe à
la fois les hommes et les femmes, il serait donc nécessaire
d'approfondir cette question.
En ce qui concerne les orientations et les opinions sur le
karaté, nous savons qu'il y a une hiérarchisation des
orientations de la pratique. En effet, les pratiquants se représentent
leur pratique d'abord comme un « art martial » emprunt d'une
« philosophie » constitutive d'une « éthique
de vie ». Puis, le karaté semble permettre aux pratiquants de
« se dépenser et d'apprendre à se défendre
». Enfin, l'aspect social, c'est-à-dire le fait «
d'apprendre à vivre en groupe », est l'orientation qui la
moins importante.
Ainsi, le pratiquant chercherait d'abord une éthique de
vie imprégnée d'une certaine philosophie, puis il chercherait
à se défendre et à se dépenser, pour finir, il
chercherait à apprendre à vivre en groupe. De plus, l'analyse
lexicale des définitions confirme l'idée que les pratiquants se
représentent le karaté comme étant un « art
martial » qui contribue à un « équilibre entre
le corps et l'esprit » par la « maîtrise de soi
». Des mots comme « valeurs », «
philosophie », « art de vivre » mais
également « sport de combat » représentent le
karaté pour ses pratiquants.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 81
L'analyse des opinions nous montre que les
représentations des karatéka sont très variées.
Nous avons révélé l'existence de divergences dans les
représentations que les pratiquants ont du karaté. En effet, nous
avons mit en évidence des oppositions sur les thèmes comme la
ceinture noire et plus largement sur la question des grades. Ainsi nous avons
vu que la ceinture a une valeur symbolique forte dans les
représentations des pratiquants mais ceux-ci s'inquiètent du
devenir des valeurs et du sens accordés aux grades.
Ensuite, les représentations sur la compétition
nous montrent l'importance de celle-ci dans la construction et l'orientation du
sens que le pratiquant lui accordera. C'est en ce sens qu'il existe certaines
oppositions dans les rerpésentations sur ce thème au même
titre que le karaté olympique. Nous avons vu que les pratiquants
espèrent que leur pratique devienne olympique tout en ayant des
inquiétudes quant au sens et à l'image qui sera faite de leur
pratique.
Toutefois, les karatéka pensent qu'il est
nécessaire de devenir olympique pour se développer et motiver les
pratiquants. Il existe aussi des divergences dans les représentations en
ce qui concerne la fonction du karaté, nous avons relevé que
pratiquer le karaté pour répondre à une agression n'est
pas l'ultime orientation possible. Les thèmes sur la place des femmes et
sur le karaté enfant présentent également bon nombres de
divergences. Enfin, le thème sur les nouvelles modalités de
pratiques met en avant le fait qu'il puisse y avoir des conceptions très
différentes du karaté lui-même.
Cependant, il existe des éléments convergents
sur l'idée que le karaté puisse être un outil
éducatif permettant d'apprendre à gérer ses
émotions et développer ses qualités physiques. Dès
lors, nous pouvons dire que le consensus existe sur les finalités
éducatives du karaté mais que les oppositions sont fortes
dès l'instant où l'on aborde des thèmes qui correspondent
à des orientations de pratique. C'est en ce sens qu'il est pertinent de
mettre à jour les différents profils de pratiquants.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 82
VII. De l'«artiste martial » à l'«
égaré » :
Nous avons vu très concrètement que chaque
pratiquant pose les bases de sa propre pratique en fonction de ce qu'il vit du
karaté mais aussi de ce qu'il en sait ou de ce qu'il en perçoit.
Réaliser une typologie des pratiquants de karaté en France fait
appel à la manière dont les pratiquants vivent, au quotidien,
leur pratique mais aussi à la perception et au sens que les pratiquants
ont de leur karaté, c'est-à-dire aux facteurs qui
déterminent leurs représentations. Nous avons construit ces
profils en accentuant les traits les plus caractéristiques des groupes
de pratiquants. Ainsi, chaque profil que nous avons réalisé
correspond à un ensemble de variables telles que le sens accordé
au karaté, les valeurs importantes, la vision du karaté, de la
tradition ou encore de la philosophie. Ces éléments permettent de
construire un classement. Aussi, nous avons élaboré ce classement
à partir des entretiens qualitatifs semi-directifs ce qui permet
d'illustrer par des mots le sens que chaque individu-type donne à sa
pratique. Dès lors, nous avons mit en évidence l'existence de
cinq profils-type.
1. Le « compéti-do » :
Il s'agit d'un pratiquant qui voit le karaté par
l'aspect sportif compétitif, il cherche à transposer les valeurs
éducatives du karaté « traditionnel » vers le
karaté sportif plus compétitif. Il se voit comme un pratiquant
loyal et juste. « Je suis très dur avec moi-même et mes
élèves, j'ai une exigence maximale car il y a une ligne de
conduite à suivre. Je suis très tolérant et
j'écoute beaucoup aussi. ». Il pense avoir une pratique du
karaté « assez complet qui lie le traditionnel et la
compétition. Dans l'ensemble j'essaie de toucher à tout, je fais
du Shito-ruy alors que je suis shotokan. » Il construit sa pratique
actuelle aussi en regardant le passé «J'ai eu de la chance de
connaître plusieurs professeurs, ce qui me permet aujourd'hui d'assembler
plusieurs idées.» Pour ce pratiquant, lier un «
karaté compétition à un karaté traditionnel »
est essentiel.
D'après lui, « il y a un code moral à
respecter, le karaté c'est une philosophie de sport qui devient une
philosophie de vie. » En quelques mots, il y a « le
karaté en interne où l'on transmet des valeurs, et le
karaté en externe où c'est à la vie qu'on transmet, tout
cela avec l'idée d'être ensemble. » Il parle
également de l'amour du travail et du respect de l'autre. Cependant, il
ne se sent pas très ancré dans l'aspect « traditionnel
» du karaté. En effet, il « accorde beaucoup
d'importance au salut, aux rituels, mais je ne suis pas à cheval sur
certains points. Je n'impose pas à mes élèves le silence
absolu dans mes cours, il y a un aspect social de la pratique, c'est
indissociable de la société d'aujourd'hui. La pratique
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 83
évolue avec la société. »
Concernant l'aspect philosophique du karaté, « j'aime beaucoup
les manières de penser de chacun des maîtres, moi je n'en ai pas,
car je n'ai pas assez de recul, je m'intéresse aussi au bouddhisme et
à l'évolution du karaté. »
Enfin, il tente « d'avoir une manière d'enseigner
qui est la plus ouverte possible afin de
donner le plus d'informations aux
élèves.» Aussi, il essaie d'« avoir une
façon ouverte d'enseigner, avoir le maximum d'informations à
donner aux élèves. »
Le « compéti-do » est un pratiquant
qui s'est construit sur deux plans, l'un est le karaté traditionnel dont
il n'a pas conservé de lien particulier hormis les rituels, l'autre est
le karaté plus sportif voire compétitif par lequel il enseigne
les valeurs qui lui paraissent importantes. Enfin, il voit le karaté
comme une pratique évolutive nécessairement sociale à
laquelle il apporte des éléments d'autres cultures comme le
bouddhisme.
2. L'« égaré » :
Ce pratiquant n'a pas reçu les bases de la culture
karaté, il la construit au fur et à mesure de sa pratique du
karaté. Ainsi, les valeurs qu'il enseigne et véhicule viennent de
la vie quotidienne. Plus précisément, il pratique un
karaté qui lui permet de mieux se connaitre et de le lier le corps et
l'esprit : « je cherche à évoluer et comprendre aussi
bien sur le plan physique, que spirituel. » il voit sa pratique comme
un « plaisir de l'étude, de la pratique. Faire attention
à son travail, se regarder dans ses techniques, savoir se placer, faire
le bon mouvement. Je trouve que cette phase-là est très
importante, s'il n'y avait eu que le côté sport, je ne pense pas
que cela m'aurait intéressé. Cette pratique c'est un moyen de
s'entretenir, de se maintenir en forme. Je n'ai pas cet esprit de
compétition, en plus, ça permet de s'entretenir, de se
dépenser physiquement. » Notons que l'ambiance est un
élément central de sa pratique : « C'est vrai que sa
joue énormément, c'est peut-être ça qui m'a fait
venir en tout premier. » Les moments passés en dehors de la
pratique permettent de « parler de soi, c'est un temps de parole. Il y
a une bonne ambiance, on est soudé. »
Par sa pratique, il recherche « le geste parfait,
même si c'est impossible. Je préfère travailler les katas
que les combats. Je recherche davantage l'efficacité que la force ou la
violence. Protéger mon corps, non, me sentir bien, oui forcément.
Je suis plus dans l'idée de développer cette harmonie entre mon
corps et mon esprit. »
En ce qui concerne les valeurs, ce qui lui semble important
c'est « tout ce qui touche le
respect, je trouve cela très important. Le corps sain,
pratiquer santé, sans risque. Je
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Anthony METTLER 84
trouverai dommage de faire une pratique qui finisse par te
blesser. J'ai fait plusieurs pratiques, du coup cela m'a ouvert sur d'autres
visions. Lorsque l'on voit les enfants, on ressent bien cette éducation.
Ils ont un respect de l'autorité, même si en dehors du dojo ce
n'est pas forcément la même chose. Il y a des choses que tu ne
permets pas de faire dans le karaté, ni dans la vie courante, il faut
respecter les gens, ça passe par avoir un kimono propre, cheveux
attachés, pas de port de bijoux. C'est une base pour établir un
respect au sein d'un travail en collectif. C'est aussi une question
d'éducation, de respect en vers l'autre, en vers son partenaire.
»
Il n'a jamais eu l'occasion d'échanger sur l'aspect
culturel du karaté avec son professeur ou ses pairs. En effet, il
construit ses connaissances et l'éthique du pratiquant au fur et
à mesure qu'il enseigne, « on ne nous a jamais appris les
raisons du pourquoi on saluait le tatami, qu'on se saluait entre nous. C'est
peut-être parce que je suis arrivée en milieu d'année et
aujourd'hui je ne sais pas quoi dire aux jeunes qui s'inscrivent.
C'est au moment que j'ai pris les débutants dans mon cour, que je
leur ai parlé de l'importance d'avoir un kimono propre, et tout
ça. » Ce qu'elle transmet vient de l'extérieur de la
pratique : « j'applique au karaté, ce que j'applique à
ma vie. » Il recherche mais ne trouve pas les éléments
qui lui permettraient de construire une culture karaté : « je
n'arrive pas à trouver ce qui me correspondrait le plus. C'est justement
la base qui me manque, des codes et la culture du karaté. ».
Il n'a pas eu accès aux connaissances sur le karaté au sein de
son club mais plutôt lors des formations en tant qu'encadrant de
l'activité : « il n'y a que quand j'ai passé mon DAF que
j'en ai appris davantage. »
L'« égaré » cherche à
se sentir bien dans sa pratique en accordant une part importante aux aspects
relationnel et éducatif du karaté, sur le tatami mais aussi en
dehors. N'ayant pas reçu la culture karaté de manière
directe, il tire des leçons de son expérience personnelle afin de
faire partager aux autres pratiquants les valeurs qui lui semblent
essentielles. Il les transmet au moment de la pratique par interaction avec les
autres pratiquants.
3. Le « penseur » :
Ce karatéka est « assez curieux, intellectuels
selon certains, voir compliqué selon d'autres » et il
réfléchit « au pourquoi du comment » de sa
pratique. Il voit sa pratique comme la continuité de sa vie, «
au départ c'est quand même une gymnastique physique. Mais
à partir du moment où l'on commence à analyser : comment
je pourrais faire pour améliorer mon geste pour qu'il soit plus efficace
que celui de mon voisin ? Je cherche à
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 85
chaque fois à comprendre ce mécanisme.
» D'après lui il faudrait voir le karaté comme une
gymnastique corporelle avec une philosophie qui subit une «
sportivisation » et qui devient, alors, un sport qui ne transmet
plus d'idéal et qui met en avant des aspects commerciaux.
Par sa pratique, il a appris « la connaissance du
corps humain, ses mécanismes, les mécanismes aussi sur un plan
psychologique, également sur la biomécanique. Et sur un plan
mental, j'ai pris connaissances de certaines philosophies comme le Zen, la
sophrologie. Le karaté a été pour moi une
expérience, une aventure, une ouverture vers un monde différent.
Je suis plutôt ouvert, et curieux mais aussi sélectif, et
élitiste ». D'après lui, le karaté permet de
« se débarrasser de tout ce qui est inutile dans le mouvement
et le geste. On se rend compte qu'il y a plein de mouvements parasites. Pour
évacuer ses gestes inutiles il faut en prendre conscience.
»
En ce qui concerne la tradition, il voit cela comme «
la transmission continue d'un contenu culturel à travers l'histoire
depuis un évènement fondateur et d'un passé
mémorial. Cet héritage immatériel peut constituer le
vecteur d'identité d'une communauté humaine, dans son sens absolu
la tradition est une mémoire est un projet, c'est une conscience
collective, une ouverture de conscience, le souvenir de ce qui a
été, le devoir de le transmettre, et de l'enrichir.
Immatériel, car c'est une idée, une manière de
véhiculer une pensée qui va se concrétiser. Les mots se
concrétisent par des actions qui peuvent être le karaté, le
judo. Mais à chaque fois on décline, toute construction humaine
passe tout d'abord par une pensée. »
Pour lui, l'aspect philosophique du karaté permet
d'« aider l'homme à se construire, tant sur le plan mental, et
sur le plan physique par le karaté. L'art martial est une technique de
guerre, il est évident qu'aujourd'hui nous ne sommes plus dans le
même contexte. La question était comment pouvait-on ré
exploiter ces arts de guerre dans une époque plus moderne ? Orienter non
plus le combat vers l'autre, mais davantage vers soi, vers l'autre. »
Pour reprendre son raisonnement, « aujourd'hui il n'y a plus de
transmission de la tradition d'un idéal de la pratique du karaté.
Au départ, il y semblerait qu'il y ait eu un esprit mystique autour du
karaté, avec des visions exotiques. »
Le « penseur » est un pratiquant qui
conçoit le karaté comme une gymnastique
physique de santé qui est le socle de son mode de vie
à la recherche d'un équilibre entre le corps et l'esprit. Ainsi,
il s'inscrit dans une démarche réflexive sur sa pratique en
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
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Anthony METTLER 86
questionnant continuellement celle-ci. Il estime
qu'actuellement il n'y a plus d'idéal transmit par la pratique en raison
de la perte de sens suite à la sportivisation progressive du
karaté.
4. Le « rationaliste » :
Ce pratiquant s'incrit dans une démarche lui permettant
de donner un sens à sa pratique. « C'est un karaté qui
s'adapte à mon âge et qui évolue selon les attentes. Quand
on était petit c'était tonic, sportif, maintenant j'attends plus
de recherches dans le sens où je veux avoir une compréhension
beaucoup plus approfondie des mouvements, des kata. » D'après
lui, le karaté « c'est plus quelque chose qui va me suivre au
cours de ma vie, ce n'est pas comme la compétition que peut
s'avérer être ponctuelle ». Il voit le karaté
comme « une pratique qui conduirait ma vie » c'est une
« nécessité » pour lui. Il a une vision
évolutive du karaté, c'est-à-dire, « prendre des
idées à droite, à gauche, et faire mon karaté. On
ne peut pas évoluer en restant dans son coin. ». Il pose
l'idée que « l'évolution de ma pratique dépend de
ce que l'on cherche, dépend aussi de l'âge. »
Par sa pratique, il recherche une liberté dans
l'utilisation du répertoire technique du karaté par les katas, il
propose de faire un « mélange » dans sa pratique avec
un peu de santé, du renforcement du corps, faire travailler le corps et
l'esprit en même temps. Aussi, « j'aime bien garder un aspect
traditionnel de cette pratique. Et moins ramener comme aujourd'hui un
côté ludique pour les enfants notamment. ». Cependant,
il serait possible de partir d'un aspect ludique de la pratique et d'amener le
pratiquant vers du « traditionnel ».
Il voit la tradition « comme un savoir qui se
transmet, mais sans forcément dissocier de l'idée que ce savoir
soit figé dans le temps. Chacun peut y rajouter sa part de
connaissances. C'est quelque chose qui peut évoluer dans le temps, mais
tout en gardant la base des valeurs communes à chacun. Des valeurs qui
m'ont été enseigné. » Pour lui la tradition
c'est « le fondement du karaté, si je devais donner des termes
se serait le Japon, le Maître Funakoshi, mais c'est aussi le
développement du karaté en France. » La tradition c'est
aussi « savoir d'où l'on vient pour pouvoir mieux avancer.
» Au sein de son dojo, il ne voit pas de perte de tradition et «
les deux professeurs sont les garants des valeurs dans le dojo. Il est
important de se saluer et de se respecter, sinon les valeurs s'oublient
vite. »
Il pense qu'il y a « un certain code à avoir,
après on le respect ou pas. Il y a quelques éléments de ce
code qui peuvent évoluer. Par exemple en ce qui concerne les
activités ludiques pour les plus petits, je pense qu'il faut y mettre
des limites. Cela dénaturerait peut-être le karaté en
lui-même », pour lui, il est important que « chacun
adopte les choix
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 87
souhaités selon leur vision de la pratique
». Avec l'idée « qu'il faut savoir jouer sur deux
tableaux différents, un karaté plus traditionnel, et d'un autre
côté une pratique plus ouverte aux évolutions
».
Le « rationaliste » est un pratiquant qui
ne se représente pas sa pratique comme un art martial ancestral
constitué de mythes, au contraire, il s'agit d'un karatéka qui
cherche à donner du sens à ce qu'il fait, plus
précisément à la technique. Il voit le karaté comme
une activité ayant de multiples facettes. Elle peut être à
la fois traditionnelle et évolutive à condition de conserver les
valeurs qui guident son éthique de vie.
5. L'« artiste martial » :
Ce pratiquant se représente le karaté comme un
art. Il pratique le karaté d'une manière rigide physiquement et
mentalement. « Moi je me force, je m'accroche, je me dis qu'il y a
quelque chose, même si j'ai des périodes de creux. »
Lorsqu'il parle de sa pratique, il la nomme le « karaté-do
» et dit qu'elle a elle voit le « karaté-do »
comme « un art. C'est la recherche du bien-être. Dès
que tu réalises quelque chose et que tu es en harmonie, je pense que tu
exerces un art. La calligraphie, la musique, ce sont des arts, après
ça dépend de comment c'est pratiquer aussi. Certaines personnes
pratiquent, mais elles ne vont pas plus loin dans la recherche, ils ne tentent
pas de faire passer l'énergie. Si c'est juste pour être le plus
fort, avoir un titre, pour moi il n'y a pas de do là-dedans »,
elle ajoute que « ce n'est pas la pratique qui rassemble les
gens, mais la vision que tu t'en fais », finalement « le
karaté c'est un art de vivre et quand je ne pratiquais pas et bien je ne
me sentais pas moi.»
D'après lui, il existe « une évolution
collective dans le sens où c'est tout un dojo qui évolue dans la
spiritualité car sans les autres tu ne peux pas avancer. Tu te retrouves
face aux autres, ils te renvoient quelque chose, c'est une forme de
transcendance », aussi « l'évolution dans la
pratique, c'est la communauté du dojo qui te l'a fait. Un dojo c'est un
rassemblement de personnes qui viennent de milieux différents et qui ont
un vecteur commun, ces personnes recherchent la même chose.
»
Il voit la tradition comme étant « le respect
des enseignements des anciens, prendre en considération ce qu'on a
reçu dont les codes. Par rapport à l'enseignement, il faut
prendre la tradition comme un tout, de l'analyser et de le comprendre
», elle précise que la transmission de la tradition est le
plus important « c'est l'essentiel, surtout si l'on veut que
le
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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partage se fasse, pour aller plus loin dans l'enseignement
et l'équilibre entre le yoko et le také100
»
L'idée qu'il se fait de la philosophie dans sa pratique
c'est de se consacrer à fond dans le perfectionnement de la pratique
« le corps est un moyen d'expression et il faut vivre à fond.
C'est cette vie intérieure qu'il faut mettre en face », c'est
comme cela qu'il définit la notion de do et « peut
importe la pratique » pour lui le budo a « prouvé
qu'il rentrait dans l'équilibre de l'Etre, alors après tu ne te
poses plus de questions. Tu fais confiance à ta pratique »
plus précisément « le budo c'est quelque chose qui se
vit, il y a plein de chose comme ça où tu ne peux pas
l'expliquer. Le budo c'est l'harmonie pure entre ton équilibre
intérieur, l'environnement autour de soi et la passion que tu as pour ce
sport. C'est impressionnant de voir que dans une société
comme la nôtre, où c'est très individualiste, où les
bases reposent sur l'argent, le matériel, nous avons réussi
à sauver une part d'humanisme à travers notre art. Ce qui
importe, c'est vraiment de vivre bien en soi, et de vivre les
événements de façon pure, sans artifices. »
Art, harmonie, Budo ou partage sont les mots qui peuvent
définir l'« artiste martial ». Pour lui, la tradition
est au coeur de sa pratique qu'il considère comme un véritable
art de vivre contribuant à équilibrer l'être physiquement
comme spirituellement. Travailler avec un partenaire va au-delà de la
participation à une simple évolution technique. Notons que le
champ lexical utilisé est caractéristique des «
communautés de pratique » comme l'Aïkiryu,
c'est-à-dire proche d'un vocabulaire enchanté plus humaniste que
les autres profils-type de pratiquants que nous avons pu réaliser.
Ces profils-type illustrent les multiples sens, orientations
et conceptions qu'accordent les karatéka français à leur
pratique. Nous avons vu que certains pratiquants utilisent la
compétition comme support permettant la transmission des valeurs
éducatives. D'autres encore voient le karaté comme un art
permettant d'évoluer et de se construire autant sur le plan physique que
spirituel. Aussi, le rapport que le karatéka entretient avec la
tradition, les valeurs ou la philosophie, détermine son orientation,
donc, son appartenance à l'un ou l'autre des profils-type. Notons que la
construction du sens que le pratiquant a du karaté dépend de
facteurs tels que l'enseignement qu'il reçoit et qu'il partage mais
aussi de sa capacité à faire s'ouvrir sur d'autres cultures.
100 Les notions de take et yoko d'après
l'interviewé : « le Yoko c'est tout ce qui est la base, la
technique pure, c'est l'horizontale » aussi « c'est
très construit, très terre-à-terre », le take
peut se définir comme « tout ce qui du côté de
l'évasion, les sentiments, le ressentis, les émotions, c'est
très pulsionnel. »
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 89
Discussion
Au cours de notre étude nous avons cherché
à élaborer une typologie des pratiquants de karaté en
France. L'idée est à la fois de connaître finement les
pratiquants, c'est-à-dire les grades, l'âge, les motivations ou
encore la perception qu'ils ont de leur pratique et, à partir de ses
données, d'identifier des profils-type de pratiquants. Nous avons
démontré que la sportivisation progressive du karaté,
depuis son introduction en France dans les années 1960, a
contribué à diversifier les modalités de pratique. Cette
diversification a entraîné la multiplication du sens que les
pratiquants accordent au karaté. En effet, l'orientation de la pratique
dépend de chaque individu car il adapte son système de valeurs et
ses attentes à « son » karaté. Ainsi, chaque
pratiquant aura une orientation particulière de sa discipline qu'il est
possible de mettre en évidence par l'analyse des conceptions et des
opinions.
Nous avons formulé les hypothèses selon
lesquelles la population de karatéka, constituée d'individus
ayant des origines et des caractéristiques sociales variées, se
représentent leur pratique comme un « art martial ».
Toutefois, les opinions et les représentations que les pratiquants ont
du karaté divergent sur les thèmes du grade ou encore des
nouvelles modalités de pratique. Enfin, il existe plusieurs profils-type
comme les karatéka qui recherchent une pratique plus
sportive/compétitive, les pratiquants ayant une conception du
karaté comme art de vivre ou encore les karatéka en quête
d'idéal.
La méthodologie de notre étude repose sur la
collecte par questionnaires puis par entretiens, des caractéristiques
principales des pratiquants ainsi que de leurs opinions sur la pratique du
karaté en France. Plus précisément, nous avons
établi un échantillon représentatif de 2002 pratiquants,
à partir de la base de données des licences de la
fédération, à qui nous avons envoyé par mail le
lien d'un questionnaire construit préalablement sur internet. Nous avons
touché 1514 individus (taux de retour = 29,2%) avec 488 « mails
erreurs » sur 2002 mails envoyés. Ensuite, nous avons
réalisé 6 entretiens semi-directifs auprès de pratiquants
identifiés comme ayant des profils variés ; il s'agit ici de
comprendre qualitativement les orientations de la pratique et de
préciser certains points des résultats.
Tout d'abord, nous pouvons dire que la pratique du
karaté en France tend à se féminiser progressivement
depuis 7 ans car le public féminin est passé de 26,6%, en 2002,
à 30,96% de pratiquantes aujourd'hui. Cette féminisation de la
population s'explique par l'émergence de nouvelles formes de pratique
comme le body-karaté. Ensuite, nous pouvons affirmer que cette
population est socialement très diversifiée. Les indicateurs tels
que les professions et
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 90
catégories socioprofessionnelles (PCS), la
répartition par style, les autres pratiques martiales ou de combat nous
permettent de le dire. Les multiples formes de rapport au corps issues de la
diversification du karaté peuvent justifier le fait, par exemple, que
les « employés » ainsi que les « cadres et
professions supérieures intellectuelles » soient fortement
représentées. Aussi, la répartition des pratiquants, en
fonction du temps de pratique et du grade, se fait de manière «
pyramidale ». En ce sens, plus un pratiquant avance et progresse
dans sa pratique, plus il aura tendance à passer ses grades. Notons, que
40% de la population détient un grade de niveau 1er dan ou un
grade inférieur. De plus, les pratiquants privilégient surtout
les stages d'expert, les stages avec le professeur référent ainsi
que les stages de préparation au passage de grade. En effet, il semble
qu'une partie de la population se tourne vers une pratique du karaté
plus « traditionnelle », ce qui expliquerait le fait que
seulement 16% des pratiquants aient participé à une
compétition kata ou combat au cours des 12 derniers mois. Nous savons
également que 48,96% des karatékas pratiquent dans des clubs
municipaux et nous supposons que 46,44% pratiquent dans des clubs de type
« club fitness ». Nous pouvons ajouter que 61,19% des
karatékas ne s'investissent pas dans des activités
administratives, cependant, ceux qui s'investissent le font majoritairement au
niveau du club. En ce qui concerne les diplômes, 14,92% des
karatéka ont un diplôme relatif à l'arbitrage et 29,98% des
pratiquants ont un diplôme lié à l'enseignement. Ensuite,
nous pouvons dire que 48,49% des karatékas manquent rarement leur
entrainement et 27,38% jamais ou très rarement. Nous relevons
également que 60,79% des karatékas pratiquent une activité
physique et sportive et de loisirs. Donc, le peu d'activités en lien
avec la culture d'origine traduirait le fait que les karatéka ne
cherchent pas nécessairement à avoir ce lien avec la culture
japonaise en raison du « désenchantement » existant
depuis l'arrivée de la pratique en France. L'ensemble de ces
données nous montrent que les pratiquants de karaté en France ont
des caractéristiques variées. Toutefois, nous avons
démontré qu'il existe un élément commun qui semble
lier les karatéka et structurer la pratique : le grade.
Par cette étude, nous avons mit en évidence
l'existence d'une hiérarchisation des orientations de la pratique. En
effet, les pratiquants se représentent leur pratique d'abord comme un
« art martial » emprunt d'une « philosophie
» constitutive d'une « éthique de vie ».
Puis, le karaté semble permettre aux pratiquants de « se
dépenser et d'apprendre à se défendre ». Enfin,
l'aspect social, c'est-à-dire le fait « d'apprendre à
vivre en groupe », est l'orientation la moins importante. De plus,
l'analyse lexicale des définitions confirme l'idée que les
pratiquants se représentent le karaté comme étant un
« art martial » qui contribue à un «
équilibre entre le corps et l'esprit » par la «
maîtrise de soi ». Aussi, nous avons mit en
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 91
évidence des oppositions sur les thèmes comme la
ceinture noire et plus largement sur la question des grades. Ainsi, nous avons
vu que la ceinture a une valeur symbolique forte dans les repésentations
des pratiquants, ceux-ci s'inquiètent du devenir des valeurs et du sens
accordés aux grades. Il existe des éléments convergents
comme l'idée que le karaté soit un outil éducatif
permettant d'apprendre à gérer ses émotions et de
développer ses qualités physiques. Dès lors, nous pouvons
dire que le consensus existe sur les finalités éducatives du
karaté mais que les oppositions sont fortes dès l'instant
où l'on aborde des thèmes qui correspondent aux orientations de
la pratique.
L'analyse des profils-type permet de préciser deux
points de convergence. Tout d'abord, le karaté est perçu par ses
pratiquants comme un outil de socialisation et d'intégration social.
Nous pouvons illustrer cette idée par le fait que les karatéka
peuvent avoir des caractéristiques sociales différentes tout en
ayant comme vecteur communs la pratique. Ensuite, nous avons relevé que
le karatéka considère sa pratique comme « un art de
vivre » ou comme « une école de vie » qui
cadre et conditionne les comportements du pratiquant. Les valeurs ainsi que
l'éthique que le karatéka doit avoir sont
représentées par le « respect de soi », le
« respect de l'autre ». Alors, nous pouvons nous demander
dans quelle mesure le karaté participerait à une «
éducation citoyenne » de ses pratiquants.
Une étude de ce genre peut contribuer largement au
développement de la politique sportive du karaté. Cependant, elle
peut aussi faire émerger et cristalliser bon nombre de conflits internes
à la fédération. Ici, si la dissonance entre les
résultats proposés par le chercheur et les attentes de la
fédération est trop forte, il existe un risque que le lien
fragile qui s'est construit entre la fédération et le chercheur
soit rompu. Dès lors, il nous semble possible de dire que, si la
recherche scientifique menée dans le cadre de la FFKDA a une
portée heuristique indiscutable, elle a aussi une utilité «
politique » à long terme. L'intérêt du
chercheur en sciences sociales nous semble être ici de comprendre que ces
deux intérêts, s'ils s'accompagnent d'une vraie attitude de
vigilance et d'un effort de distanciation conséquents, ne sont pas
nécessairement contradictoires. C'est en ce sens qu'il est important de
rester vigilant quant à la place qu'occupe le chercheur et à
l'instrumentalisation qui est faite de ses travaux. Toutefois, cette
étude doit être perçue comme le symbole d'un lien entre
trois entités, la FFKDA, le Ministère des Sports et
l'Université de Bretagne Occidentale. C'est dans un état d'esprit
d'ouverture du même ordre qu'il serait intéressant de poursuivre
ces travaux en questionnant notamment les représentations des individus
non-pratiquant.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 92
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Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 94
Annexes
Annexe 1 : Okinawa
Annexe 2 : Aire Edo et Meiji
Annexe 3 : Le rôle du « justu » et
glissement vers le « do »
Annexe 4 : La montée du nationalisme au Japon dans les
années 30
Annexe 5 : Questionnaire exploratoire - Enquête
Typologie Karaté
Annexe 6 : questionnaire Avlar vierge
Annexe 7 : évolution des votes sur le questionnaire en
ligne
Annexe 8 : récapitulatif des pratiquants
interviewés
Annexe 9 : Guide d'entretien « vision de pratiques en
Karaté »
Annexe 10 : exemple de synthèse d'entretien vierge
Annexe 11 : répartition par styles de karaté
Annexe 12 : les orientations de la pratique
Annexe 13 : analyse lexicale de la définition du
karaté
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 95
Annexe 1 : Okinawa
L'île d'Okinawa
Okinawa est un archipel situé entre l'océan
Pacifique et la mer de Chine orientale, situé à égale
distance du Japon, de la Chine continentale et de Taiwan. L'archipel fait
partie des îles Ryûkyû.
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 96
Annexe 2 : Aire Edo et Meiji
Au cours de la période Edo (1603-1867), le Japon se
pacifie par un encadrement social est très rigoureux. Le Japon ainsi que
ses archipels sont sous un régime très contrôlé
où la société est hiérarchisée allant de la
noblesse, issue des rangs des bushi (guerriers), aux personnes exerçants
des métiers considérés comme « impurs
». Ce système est basé sur les valeurs
confucéennes mais également sur une
étanchéité entre les groupes sociaux.
Les bushi étaient guidés par un ensemble de
« lois » visant à prescrire « un code
d'honneur des hommes qui ne connaissent d'autre objectifs que celui du
dévouement clanique ostentatoire et sanglant ». Ils ont connu
une transformation notable en un demi-siècle et sont devenus les
défenseurs du régime shogunal de l'époque. Ils ont
accédé aux connaissances intellectuelles et philosophiques,
l'exemple le plus marquant étant le traité des cinq roues de
Miyamoto Musashi. L'accès aux connaissances a entrainé une
dualité entre les arts raffinés et l'esprit combatif/militaire ce
qui catalysera alors une codification des techniques martiales.
Au cours de l'aire Meiji (1868-1912), le Japon va s'ouvrir
politiquement et économiquement au monde. Cette ouverture va provoquer
une transformation importante du pays. En effet, cette aire modernisatrice
verra disparaître le shogunat, l'abolition des différentes classes
et la disparation des bushi. La pratique des bugei ou des bujutsu est remise en
cause. Les deux possibilités de survie des pratiques martiales restent
le spectacle ou l'éducation. Cette ouverture favorisera également
les échanges avec l'occident qui aura une très forte influence
avant 1895, date de la création du Dai Nippon Butoku Kai, organisme
visant à conserver l'identité japonaise.
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Annexe 3 : Le rôle du « justu » et
glissement vers le « do »
On assiste au cours de l'aire Meiji à une
transformation des pratiques101 dites jutsu,
travaillées sur les champs de batailles par les bushi issu des milieux
sociaux élevés, vers le « do », qui est une
activité a visée morale constituée d'un ensemble de
valeurs guidant les pratiquants. En 1878, le Taïso Denshujô qui est
le « centre d'enseignement de la gymnastique » illustre
cette volonté politique du Japon d'établir une activité
physique permettant le soutien de la croissance du pays. Dans ce contexte
positif, les pratiques de combat à visée éducative tels
que le judo seront reconnues comme d'intérêt pour la nation. Mais
c'est la montée du nationalisme à partir des années 30 au
japon qui favorisera la diffusion et l'implantation des pratiques corporelles
dans les programmes scolaires.
Anthony METTLER 97
101 Brousse, M. (2005) Les racines du judo
français, Bordeaux, Presses universitaires de Bordeaux,
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 98
Annexe 4 : La montée du nationalisme au Japon
dans les années 30
C'est grâce au nouveau système éducatif
que l'Etat aura une ouverture totale sur la jeunesse de cette période et
permet de transmettre le nationalisme intense des classes supérieures
à l'ensemble de la population. Dès les premières
décennies de l'Aire Meiji (1868-1912), l'éducation physique est
devenue obligatoire, le corps et son éducation sont au coeur des
politiques visant à développer les sentiments d'identités
nationales et de loyauté. Ces valeurs sont centrales dans
l'idéologie de l'Etat-Famille autoritaire102. Depuis la fin
des années 1880, le programme des cycles d'éducation
supérieure comprend des exercices de gymnastique militaire qui se
pratiquent avec des exercices de marche et des combats simulés. En 1917,
le Comité spécial sur l'éducation recommande au Parlement
que tous les étudiants au dessus du secondaire soient formés pour
devenir des soldats obéissants, durs de corps et d'esprit, faisant
preuve d'esprit martial et d'un patriotisme sans faille. Alors que
débute un conflit entre les éducateurs libéraux et le
ministère des Armées et qui aboutira à protéger les
jeunes classes d'âges et les étudiantes de ses exigences, ceci
jusque dans les années 1920. C'est également ce genre de conflit
qui va retarder l'introduction des «arts martiaux» dans les
programmes scolaires nationaux. Les débats entre éducateurs et
bureaucrates portent sur la pertinence des «arts martiaux»
dans l'éducation des jeunes enfants en raison des préoccupations
d'ordre physiologiques quant à leurs effets sur les jeunes corps.
Dès lors, le classique Bujutsu ainsi que les variantes modernes de la
tradition et de la culture physique sont considérés comme des
instruments d'endoctrinement performant en vertu de leur insistance sur
l'obéissance, l'endurance et l'autodiscipline.
102 Manzenreiter, W. (2001) Moderne korper, moderne ope.
Sport und internationalstaat in Japan und osterreich 1850-1900, Minikomi -
informationen des akademischen arbeitskreis Japan 2
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Par ailleurs, la pratique du Budô permet de nouer des
liens immédiats avec la continuité historique du Japon
féodal comme berceau de l'éthique du guerrier et de ses
glorieuses traditions. L'école primaire avait réussi à
persuader une population paysanne qui « pendant presque trois
siècles n'avait pas eu le droit de porter des armes, qu'elle
appartenait, elle aussi à une race de guerriers » et à
lui « inoculer la gloire des grandes traditions militaires du Japon
ainsi que l'idéal d'une mort sur le champ de bataille au service de
l'empereur »103. C'est au cours des années 30 que
l'influence l'emporte sur les conceptions plus libérales et que les
«arts martiaux » sont inclus dans les programmes scolaires.
En 1931, l'année de l'invasion de la Mandchourie, le kendo et le judo
deviennent obligatoires pour les étudiants du second degrès, puis
en 1936, pour ceux des degrès supérieurs de l'école
primaire. A cela, il faut préciser qu'à partir de 1939 une
nouvelle activité intitulée « défense nationale
» est ajoutée au programme alors que les sports occidentaux
sont de plus en plus marginalisés voire réprimés.
Dès 1940, le ministère de l'Education n'autorise les
étudiants à pratiquer qu'une à deux heures de sports de
compétitions par semaine et les engagent plutôt à pratiquer
et s'investir dans les « arts martiaux ».
Anthony METTLER 99
103 Reischauer, E. (1970) Japan. The story of a nation,
Knopf, New York
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 100
Annexe 5 : Questionnaire exploratoire - Enquête
Typologie Karaté
Je mène actuellement une enquête sur « les
visions de pratique des karatékas en France » ayant comme ambition
d'élaborer une typologie pratiquants. Je souhaiterai connaître vos
opinions ainsi que votre point de vue sur des éléments de votre
pratique personnelle mais aussi sur le karaté en général.
Veuillez répondre au questionnaire le plus sincèrement possible,
merci d'avance pour le temps accordé à ce travail. (à
renvoyer par mail avant le 15 novembre 2008)
I) Qui êtes-vous ?
Age :
Profession (code en annexe) : .....
Salaire : .€/mois
Situation maritale (soulignez la réponse):
Célibataire Concubinage Marié(e) Divorcé(e)
Veuf (ve)
Diplôme : CAP/BEP/Brevet BAC BAC +2 Bac +3 et +
Autres
diplômes (hors karaté) :
;
Loisirs : lecture, écriture, musique, sport, peinture,
jardinage, télévision, jeux vidéo ...
I) Vous et votre pratique :
Nombre d'années de pratique : Budget pour la
pratique :
Autre pratique artistique/sportive : Oui Non
Si Oui lequel :
.€/an
Année de début :
La fréquence de pratique : heures par semaine
Ligue
:
Le grade (kyu/Dan) : . Le style :
Experts suivis :
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 101
Avez-vous fait une autre « pratique martiale » avant :
Oui Non
Si Oui, le(s)quelle(s)
Avez-vous des responsabilités (ex : élu, club,
arbitrage) au sein du karaté :
Diplômes en karaté :
III) Le karaté pour vous :
Parmi cette liste de mots, entourez les 3 plus important
en relation avec votre pratique: amour, force, tranquillité,
échange, individualisme, philosophie, mode de vie, beauté,
santé, contrainte, rigide, transformation, sport, rire, partage,
potentiel, fluidité, souplesse, martialité, détente, self
défense, Quels mots ajouteriez vous ?
Comment définiriez-vous votre pratique du
«karaté» en quelques lignes :
IV) Votre opinion sur le karaté :
Répondre par une note de 1 à 5 soit de « pas
du tout d'accord » à « tout à fait d'accord »
Il est bon de pratiquer le karaté, c'est bon pour le corps
! ....
Le plus important au karaté, c'est la beauté du
geste ....
Le karaté c'est du sport ....
On se valorise en étant le meilleur ....
Il est nécessaire de faire de la compétition en
karaté ....
La pratique du karaté permet de se dépenser !
....
Les femmes sont considérées de la même
façon que les hommes en karaté ....
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 102
Pour vous, le karaté est un art martial ....
Un « Dan » marque l'aboutissement d'un travail de
recherche technique et personnel
La pratique du karaté permet d'être bien dans sa
tête ....
La pratique corporelle est indispensable à tout
individu ! ....
Le body karaté est une évolution possible du
karaté-do ....
Le karaté est une pratique « guerrière
» ....
Certains individus recherchent la reconnaissance par le
karaté ....
Ce que l'on recherche dans la pratique c'est le bien
être physique, mental et social
Un grade peut être honorifique ....
Le karaté est une pratique de self défense
....
Commentaires :
PCS 2003 Niveau 1 - Liste des catégories
socioprofessionnelles
Code Libellé
1 Agriculteurs exploitants
2 Artisans, commerçants et chefs d'entreprise
3 Cadres et professions intellectuelles supérieures
4 Professions Intermédiaires
5 Employés
6 Ouvriers
7 Retraités
8 Autres personnes sans activité professionnelle
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 103
Annexe 6 : questionnaire Avlar vierge
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Les pratiquants de karaté en France : de l'«
artiste martial» à l'« égaré ».
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Les pratiquants de karaté en France : de l'«
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Annexe 7 : évolution des votes sur le
questionnaire en ligne
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karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Annexe 8 : récapitulatif des pratiquants
interviewés
Anthony METTLER 110
Numéro d'entretien/genre
|
Caractéristiques
|
1/masculin
|
Etudiant, sans emploi, 20 ans, 2ème dan, a
commencé le karaté en 1993/1994, titulaire du DAF/DIF, 16 ans
de pratique
|
2/masculin
|
Professeur de karaté, 59 ans, 7ème
dan, a commencé le karaté en 1971, titulaire du BEES
2ème degrés, 38 ans de pratique
|
3/féminin
|
Chargée de relation entreprise, 37 ans,
1ème dan, a commencé le karaté en 1985,
titulaire du DAF, 14 ans de pratique
|
4/masculin
|
Marin d'Etat, 46 ans, ceinture blanche, a commencé le
karaté en 1976, 5 ans de pratique
|
5/féminin
|
Militaire, 23 ans, 2ème dan, a
commencé le karaté en 1991, Juge National Combat,
vice-championne de France combat par équipe, 17 ans de pratique
|
6/féminin
|
Assistante d'éducation, 22 ans, 2ème dan, a
commencé le kobudo en 1999 et le karaté en 2001, BEES 1
karaté, Licence STAPS, 8 ans de pratique
|
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
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Anthony METTLER 111
Annexe 9 : Guide d'entretien « vision de pratiques
en Karaté »
Introduction
Je vous remercie d'avoir accepté de me rencontrer.
Suite au pré-test sur l'étude des « visions de pratique des
karatékas » à laquelle vous avez répondu, je
souhaiterai connaitre vos opinions ainsi que votre point de vue sur des
éléments généraux de votre pratique personnelle
mais aussi sur le karaté en général.
1. parcours du pratiquant :
Comment êtes vous venu au karaté ?
Quels sont les moments important de votre vie de karatéka
?
Aujourd'hui, comment pratiquez vous le karaté ?
Quel karatéka êtes-vous ?
2. définition du karaté :
Je souhaiterai ainsi que vous me racontiez votre façon de
voir le karaté ?
Qu'est ce qui vous semble important dans votre pratique du
karaté ?
Que pensez-vous de la philosophie, de la tradition en
karaté ?
Quelles sont vos impressions sur la pratique du karaté
actuel ?
Si enseignant : quel message transmettez vous ?
Si adhérent : quel message recevez vous ?
3. relation pratiquant/fédération :
Comment voyez-vous votre relation avec la
fédération ?
Quel est votre sentiment en ce qui concerne l'image qu'elle
donne ?
Impressions sur le karaté olympique ?
Quelles sont vos attentes ?
4. engagement :
Avez-vous eu des responsabilités au sein du karaté
? Comment avez-vous vécu ses responsabilités ?
Caractéristiques sociales : Age, Profession, Grade,
Année de début, Diplôme karaté, Profession
père, Profession mère
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 112
Annexe 10 : exemple de synthèse d'entretien
vierge
Synthèse entretien n°...
PRENOM : ...., (lieu),
«Citation résumant le
profil.«
Caractéristiques : profession, âge, temps de
pratique ...
1 - RESUME DE L'ENTRETIEN :
Ce qui l'a conduit au karaté :
Expériences avec différents
enseignants/maîtres :
Les moments marquants de la pratique :
Les stages de karaté :
2 - CADRE BIOGRAPHIQUE ET FACTUEL :
Né à ... en 19.., elle/il a grandi à ....
(..)
Père : ...
Mère:
La pratique actuelle :
3 - DETERMINANTS DE LA VISION DE LA PRATIQUE
:
Quel karatéka est-elle/il ?
Comment voit-elle/il son karaté ?
Que recherche-t-elle/il dans sa pratique ? :
Contribution du karaté dans la réalisation du
projet de vie :
Valeurs et principes de sa pratique :
Comment voit-elle le traditionnel ?
La part de philosophie dans la pratique :
Le message à faire passer par l'enseignement du
karaté :
4 - OPINIONS SUR LA PRATIQUE : Les passages de
grades :
C'est quoi la ceinture noire ?
Les impressions sur le karaté actuel : L'image de la
fédération d'après ... : Le lien qu'elle/il a avec la
fédération :
5 - PROJETS/ATTENTES :
Au niveau personnel : Au niveau de la pratique :
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 113
Annexe 11 : répartition par styles de
karaté
Styles
|
SENIOR
(base FD mars 09)
|
%
|
POP. (etude)
|
%
|
AUTRE STYLE
|
3589
|
6,23
|
21
|
4,81
|
GOJU RYU
|
517
|
0,90
|
2
|
0,46
|
KYOKUSHINKAI
|
1468
|
2,55
|
8
|
1,83
|
SHITO RYU
|
3098
|
5,38
|
23
|
5,26
|
SHORIN JI RYU
|
429
|
0,74
|
4
|
0,92
|
SHOTOKAN
|
40318
|
69,98
|
303
|
69,34
|
SHUKOKAI
|
916
|
1,59
|
9
|
2,06
|
UECHI RYU
|
184
|
0,32
|
2
|
0,46
|
WADO RYU
|
5347
|
9,28
|
59
|
13,50
|
KARATE CONTACT
|
1745
|
3,03
|
6
|
1,37
|
Total
|
57611
|
100,00
|
437
|
100,00
|
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Orientation 1
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
1
|
0,2%
|
dépenser
|
76
|
17,2%
|
art martial/philo
|
175
|
39,6%
|
self défense
|
34
|
7,7%
|
sociale
|
9
|
2,0%
|
éthique de vie
|
147
|
33,3%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Orientation 3
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
7
|
1,6%
|
dépenser
|
95
|
21,5%
|
art martial/philo
|
66
|
14,9%
|
self défense
|
111
|
25,1%
|
sociale
|
87
|
19,7%
|
éthique de vie
|
76
|
17,2%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
|
Orientation 5
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
7
|
1,6%
|
dépenser
|
82
|
18,6%
|
art martial/philo
|
37
|
8,4%
|
self défense
|
116
|
26,2%
|
sociale
|
185
|
41,9%
|
éthique de vie
|
15
|
3,4%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Orientation 2
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
2
|
0,5%
|
dépenser
|
75
|
17,0%
|
art martial/philo
|
125
|
28,3%
|
self défense
|
68
|
15,4%
|
sociale
|
31
|
7,0%
|
éthique de vie
|
141
|
31,9%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Orientation 4
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
Non réponse
|
11
|
2,5%
|
dépenser
|
104
|
23,5%
|
art martial/philo
|
43
|
9,7%
|
self défense
|
104
|
23,5%
|
sociale
|
119
|
26,9%
|
éthique de vie
|
61
|
13,8%
|
TOTAL OBS.
|
442
|
100%
|
Anthony METTLER 114
Annexe 12 : les orientations de la pratique
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
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Annexe 13 : analyse lexicale de la définition du
karaté
Définition de la pratique
|
Nb. cit.
|
Fréq.
|
pratique/art martial
|
100
|
26,1%
|
équilibre-maîtrise-lien corps/esprit
|
98
|
25,6%
|
maîtrise de soi
|
80
|
20,9%
|
valeurs/philosophie
|
79
|
20,6%
|
mode de vie/éthique/école de vie/art de
vivre
|
68
|
17,8%
|
sport/sport de combat
|
65
|
17,0%
|
respect soi/autres
|
59
|
15,4%
|
self défense/auto défense
|
45
|
11,7%
|
bien être/détente
|
42
|
11,0%
|
conscience du corps/se
connaitre/dev personnel/épanouissement
|
39
|
10,2%
|
s'ouvrir aux autres/relations sociales/rassemble
|
37
|
9,7%
|
compétences techniques
|
34
|
8,9%
|
dépassement de soi
|
32
|
8,4%
|
conservation corps/santé/condition physique
|
31
|
8,1%
|
progression/dépense physique
|
30
|
7,8%
|
état d'esprit
|
24
|
6,3%
|
confiance en soi
|
17
|
4,4%
|
spirituel
|
17
|
4,4%
|
activité physique/gym corporelle
|
14
|
3,7%
|
sérénité
|
12
|
3,1%
|
maitriser l'énergie
|
11
|
2,9%
|
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 116
efficacité
|
11
|
2,9%
|
budo/voie
|
11
|
2,9%
|
main ouverte/nues
|
9
|
2,3%
|
éducation du corps
|
8
|
2,1%
|
pratique traditionnelle
|
8
|
2,1%
|
progression mentale
|
8
|
2,1%
|
plaisir
|
7
|
1,8%
|
bonne ambiance/famille
|
6
|
1,6%
|
expression artisitique/corporelle
|
6
|
1,6%
|
art de combat
|
5
|
1,3%
|
loisir
|
3
|
0,8%
|
culture
|
3
|
0,8%
|
art de guerre
|
2
|
0,5%
|
passion
|
2
|
0,5%
|
pratique de compétition
|
2
|
0,5%
|
échange
|
1
|
0,3%
|
beauté
|
1
|
0,3%
|
transmission expérience/savoirs
|
1
|
0,3%
|
TOTAL OBS.
|
383
|
|
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
Anthony METTLER 117
Table des matières
INTRODUCTION : 6
I. LE KARATE EN FRANCE AUJOURD'HUI : UNE ACTIVITE AUX
MULTIPLES FACETTES... 8
1. Historique : 8
2. Institutionnalisation du karaté en France :
processus de diversification 11
a) L'appropriation de la culture japonaise par des
karatéka occidentaux 11
b) Le karaté entre sport et art martial 13
3. Le karaté en France aujourd'hui : les effets de la
sportivisation du karaté 14
a) Emergence du karaté fédéral 14
b) La FFKaraté et DA : une communication aux multiples
orientations 15
c) Du grade « symbolique » au grade «
législatif » 17
d) La compétition en karaté 19
e) Les nouvelles modalités de pratique : l'exemple du
body karaté 20
II. COMPRENDRE LES REPRESENTATIONS DES PRATIQUANTS :
UNE PRATIQUE
UNIFIEE ? 21
1. Des orientations variées de la pratique:
21
2. Les déterminants sociologiques de la pratique du
karaté 22
3. La diversification et modification de la structure
sociale 24
4. L'opinion et les représentations comme construits
sociaux 26
III. ETUDE DES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU KARATE EN
FRANCE : 29
IV. METHODOLOGIE DE L'ANALYSE DE LA POPULATION DE
KARATEKA : 32
1. Le pré-test : 32
2. Le questionnaire : 33
3. L'échantillonnage : 34
4. L'envoi des mails 37
5. Les entretiens : 38
6. Les biais résultants de ce type de
méthodologie : 39
V. CARACTERISTIQUES ET ELEMENTS STRUCTURANTS DE LA
POPULATION DE
PRATIQUANTS : 40
1. Les caractéristiques de la population de
pratiquants : 40
a) Répartition entre Hommes et Femmes 40
b) La répartition par tranche d'âges 41
c) Professions et Catégories Socioprofessionnelles (PCS)
42
d) Le temps de pratique en karaté 43
e) Présentation des styles pratiqués 44
f) La répartition des pratiquants par grade 45
g) Les stages de karaté 46
h) La part de compétition dans la pratique 47
i) Le type de dojo pour la pratique du karaté 48
j) L'activité « administrative » des
pratiquants 48
Anthony METTLER 118
Master 2 SEP, Brest Juin 2009 Les pratiquants de
karaté en France : de l'« artiste martial» à l'«
égaré ».
k) Les diplômes d'arbitrage des pratiquants 50
l) Les diplômes d'enseignement des pratiquants 51
m) L'enseignement du karaté 52
n) La « motivation » pour l'entrainement 52
2. La perte de sens de la pratique illustrés par les
pratiques « périphériques »: 53
a) Ceux qui pratiquent un autre art martial ou activité
de combat 53
b) Ceux qui pratiquent d'autres activités physiques et
sportives et de loisirs 55
3. Le rôle du grade dans la pratique : 56
a) Corrélation grade actuel / temps de pratique 56
b) Le grade comme élément structurant de la
pratique 57
VI. LES OPINIONS ET LES ORIENTATIONS DE LA PRATIQUE DU
KARATE : 59
1. Les résultats de l'étude quantitative :
59
2. La définition du karaté vue par ses
pratiquants : résultats de la question ouverte 61
3. Les opinions sur le karaté et ses
différents aspects : 63
a) La ceinture noire : 63
b) La compétition en karaté et dans les arts
martiaux 67
c) Le karaté olympique 69
d) Le travail du combat 71
e) Les modalités de pratique en voie de
développement 73
f) La question du karaté enfant 76
g) Les femmes et le karaté 78
VII. DE L'«ARTISTE MARTIAL » A
L'« EGARE » : 82
1. Le « compéti-do » : 82
2. L'« égaré » : 83
3. Le « penseur » : 84
4. Le « rationaliste » : 86
5. L'« artiste martial » : 87
DISCUSSION 89
BIBLIOGRAPHIE 92
ANNEXES 94
TABLE DES MATIERES 117