Mémoire de recherche
appliquée
QUELS OUTILS MARKETING ET QUELLES STRATEGIES
DE
COMMUNICATION EMPLOYER POUR TRANSFORMER L'IMAGE
NEGATIVE DES FESTIVALS
DE MUSIQUE ELECTRONIQUE EN
FRANCE ?
Antonin VANDERRIEST
Mémoire dirigé par Madame Hélène
Lagardère
Majeure Marketing et Communication
Internationale
Promotion 2021
Remerciements
Tout d'abords, je tiens à remercier ma directrice de
mémoire, Mme. Hélène Lagardère, qui a su se rendre
disponible quand j'en ai eu besoin et qui m'a été d'une aide
très précieuse pour la réalisation de ce mémoire
qui je trouve, finalement, me correspond plutôt bien.
Ensuite, je remercie chaleureusement Nicolas Cuer, Camille
Cabiro, Emilie Angenieux et Mickael Gérard qui m'ont offert de leur
précieux temps pour répondre à mes questions, mais aussi
tout simplement pour faire le travail qu'ils font, c'est-à-dire à
mes yeux rendre les gens heureux.
Enfin, je remercie les 952 personnes qui ont pris le temps de
répondre à mon questionnaire, et j'espère qu'elles
trouveront mon travail intéressant et instructif.
Table des matières
INTRODUCTION 1
PARTIE I. LA MUSIQUE ELECTRONIQUE 3
A. LES FESTIVALS DE MUSIQUES ELECTRONIQUES EN FRANCE 3
1. L'origine de la musique électronique 3
2. L'arrivée de l'électro en France 6
3. La France et l'électro aujourd'hui 8
B. L'IMAGE DES RASSEMBLEMENTS DE MUSIQUE ELECTRONIQUE EN FRANCE
15
1. La culture liée à ces
évènements 15
2. L'image actuelle de l'électro en France 20
3. Les repressions (la loi, les interdits) et protestations
25
C. LES OUTILS MARKETING ET STRATEGIE DE COMMUNICATION DES
FESTIVALS DE MUSIQUE
ELECTRONIQUE EN FRANCE 41
1. Le marketing 41
2. La communication 54
PARTIE II. ETUDES SUR LE SECTEUR DES FESTIVALS DE
MUSIQUES
ELECTRONIQUES 63
A. ETUDE QUANTITATIVE 63
1. Méthode 63
2. Résultats de l'étude 64
B. ETUDE QUALITATIVE 74
1. Méthode 74
2. Résultats de l'étude 75
PARTIE III. ANALYSE DES ETUDES 89
CONCLUSION 101
BIBLIOGRAPHIE 105
A. OUVRAGES ET ARTICLES 105
B. WEBOGRAPHIE 107
C. ENTRETIENS 109
ANNEXES I
RESUME 110
1
INTRODUCTION
Le 22 février dernier, nous avons pleuré la fin
d'un duo ayant eu, et ayant toujours aujourd'hui, un succès mondial
incontestable. Les Daft Punk ont annoncé leur séparation.
Artistes mondialement connus, reconnaissables entre 1000 avec leurs casques de
robot, ils ont contribué au rayonnement de la musique
électronique. Des titres comme « one more time », «
harder, better, faster, stonger » ou encore plus récemment «
get lucky » ont probablement été entendus et
appréciés par des millions voir des milliards de personnes. Pour
nous, français, cette nouvelle a été encore plus terrible
car ces artistes font partis de la French Touch, qui considérablement
marqué la culture musicale de notre pays. Une musique
électronique dansante, parfois avec et parfois sans paroles,
l'électro des Daft Punk était unique et a marqué notre
temps, ainsi que nos esprits. Ce duo, adulé par bon nombre de fans, le
serait sans doute moins si ces fans se renseignaient sur leurs
débuts.
Retour au commencement de l'électro française,
à la fin des années 80. Les Daft Punk qui ne portaient pas encore
ce nom découvrent l'électro dans des clubs parisiens et en
tombent amoureux. Cependant, à cette époque, et toujours
aujourd'hui, cette musique et ses rassemblements sont loin d'être bien
vus. Ainsi, ils se déroulent souvent à l'abris des regards, dans
des clubs miteux surchauffés, dans des hangars désaffectés
ou même dans les champs. Les rave parties légales ou
illégales se font de plus en plus nombreuses, et très rapidement
cette musique électronique est associée aux yeux de tous à
un public marginal, et surtout à une consommation excessive et malsaine
de drogues en tout genre. C'est dans ce milieu de les Daft Punk ont vu le
jour.
Grâce à eux ainsi qu'à d'autres acteurs
majeurs de la scène électro française comme Laurent
Garnier, la musique électronique gagnera en popularité et les
artistes de la French Touch se produiront à l'international. Un peu de
géant pour l'électro française ! Quoiqu'en
réalité, pas tellement. Les clichés sont toujours
présents, et même accentués suite à la
frontière de plus en plus prononcée entre l'électro de la
French Touch, très commerciale, et l'électro « underground
» présente dans les rassemblements illégaux. Le
succès incontestable et les répercussions positives de
l'électro à la française empêche l'Etat de mener une
guerre ouverte contre les musiques électroniques qu'il diabolise. Ainsi,
c'est une image négative tacite qui émerge autour des musiques
électroniques, et qui est toujours plus ou moins présente
aujourd'hui dans tout évènements autour de ces musiques.
2
Ainsi, j'ai voulu aborder dans ce mémoire cette image
négative de la musique électronique, en me focalisant sur le
territoire Français qui semble être de nos jours le pays
européens le plus en froid avec ce genre musical. Mon but était
donc de trouver un moyen pour au pire faire disparaitre cette image
négative, et au mieux pour la changer en image positive. Mon projet
personnel étant d'évoluer dans les festivals de musique j'ai
décidé ce me focaliser sur ce genre d'évènements,
me permettant également de cadrer mes recherches.
Sans contrainte temporelle (la musique électronique
étant relativement jeune, et son arrivée en France encore plus)
mais uniquement géographique, j'ai donc dressé la
problématique suivante : Quels outils marketing et quelles
stratégies de communication employer pour transformer l'image
négative des festivals de musique électronique en France ?
Il s'avère que le marketing et ses outils ne sera
malheureusement pas d'une grande utilité pour atteindre cet objectif.
Cependant les stratégies de communication, elles, le peuvent. Seulement,
même si certaines solutions utilisant la communication sont à la
portée des festivals, elles n'auraient pas d'impacts forts ni durables
sur cette image. Ceux qui en ont réellement le pouvoir sont les
médias, principalement responsables de la diffusion de cette image
négative.
Pour arriver à ces conclusions, les recherches ont
été organisées sous forme d'entonnoir. Tout d'abord une
partie théorique qui abordera les origines de la musique
électronique, son arrivée en France et enfin l'état
économique du secteur Français de l'électro. Par la suite,
ce seront les différents aspects de cette image négative qui
seront abordés avec tout d'abord une présentation de la culture
liée à ce mouvement musical, ainsi qu'un état des lieux de
cette image négative aujourd'hui, pour enfin revenir sur les vagues de
répressions, les lois, les interdits et les protestations
découlant de cette image. La fin de cette partie théorique
concernera le marketing et la communication utilisés par les festivals
de musiques électroniques français.
Suite à cela, deux études seront
présentées. Elles permettront de mieux cerner les goûts et
habitudes de consommation chez les amateurs d'électro, mais
également de dresser un état des lieux fiable de cette image et
de ses conséquences, pour enfin aborder les moyens marketing et les
stratégies de communication qui pourraient permettre de la transformer.
La première étude sera quantitative et menée uniquement
auprès du public de ces festivals. La deuxième étude sera
quant à elle qualitative et menée auprès de leurs
directeurs et organisateurs.
3
PARTIE I. LA MUSIQUE ELECTRONIQUE
A. Les festivals de musiques électroniques en
France
1. L'origine de la musique électronique
Nous n'allons pas ici revenir sur les premiers instruments
électroniques, comme le Theremin ou les Ondes Martenot, et il ne sera
pas non plus fait mention des sons expérimentaux d'avant-guerre
créés en laboratoire. En effet, les premiers faits marquants de
la musique électronique ont été réalisés au
tournant des années 1950 lorsque la musique électro-acoustique,
ayant encore plutôt des tendances expérimentales, a fait appel
à des compositeurs érudits et à une nouvelle forme
d'écriture ayant la capacité de transcrire le langage de ces sons
nouveaux.
Iannis Xenakis, Bernard Parmegiani, Pierre Henry ou encore
Pierre Schaeffer vont être à l'origine et vont concevoir ce
nouveau domaine des possibles dans la musique. Ils sont notamment à
l'origine de nombreuses oeuvres de référence comme "Symphonie
pour un homme seul" de Pierre Schaeffer et Pierre Henry en 1949, ou encore
"Orphée 51" et "Toute la lyre" en 1951. Pour exister, cette musique
pioche dans toutes les ressources technologiques d'alors, comme les bandes
magnétiques et les ordinateurs, mais sans pour autant occulter
l'utilisation des instruments acoustiques.
En France, l'une des références la plus
significative se trouve dans la musique de Pierre Henry dans une collaboration
avec le compositeur Michel Colombier. Intitulée "la Messe pour le temps
présent", cette musique de ballet est utilisée comme illustration
sonore lors d'une chorégraphie de Maurice Béjart en 1967.
Ces nouveaux sons électroniques attirent les
compositeurs ayant soif de découverte et de nouveauté. Autant en
France qu'aux États-Unis, l'expérimentation sonore est un premier
pas vers un futur inconnu. Bien évidemment, ces nouvelles visions
sonores et attitudes dans le domaine de la création musicale vont faire
face à de nombreux rejets de la part de compositeurs "conservateurs" ou
non progressistes. Dans les années 50, et d'un avis
général, la musique électro-acoustique n'est ni plus ni
moins qu'une suite d'expérimentation n'ayant ni queue ni tête, qui
se cherche, et évolue dans de multiples directions avec des idées
parfois irrationnelles sans
4
lendemain. À ce moment-là, il serait plus
adapté de parler d'expériences sonores plutôt que de
musique.
La musique minimaliste a été inspirée par
John Cage. Il a été suivi par Steve Reich, Philip Glass et Terry
Riley qui ont emprunté le même chemin en produisant une musique
aux motifs répétitifs, autant mélodique que rythmique, qui
de fil en aiguille fait évoluer l'image sonore première.
Désormais, l'exploration des sonorités
électroniques relève autant de l'expérimentation
scientifique que de la création artistique. Les avancées
technologiques, au fur et à mesure de leurs apparitions, se couplent
à ces ornementations sonores avant-gardistes. Et notamment, le
synthétiseur, qui n'en est encore qu'à ses débuts attire
pourtant de plus en plus de musiciens grâce à ses capacités
sonores qui jouent un rôle de plus en plus important dans les processus
créatifs.
Vers la moitié des années 60, les techniques
comme les sons fixés sur vinyle, la bande magnétique qui doit
être coupée et collée, ou encore l'arrivée des
magnétophones multipistes ne sont plus uniquement à la
portée des spécialistes du genre. En effet, des groupes comme
Pink Floyd ou les Beatles montre déjà vivement leur
intérêt, et sont prêts à créer et innover
à partir de ces nouveaux moyens.
Saut dans le temps, direction les années 1970 et 1980.
Jusqu'alors, la musique électronique a commencé à faire
son apparition dans des styles déjà existants, le premier
étant le rock, suivi de près par le jazz. Cependant, la musique
électronique n'occupait qu'une partie mineure et souvent mal
maitrisée d'un morceau de rock ou de jazz, cela étant
principalement dû à la faible gamme d'appareils produisant ces
fameux sons électroniques et à leurs prix exorbitants.
Ces années ont été source de nombreuses
innovations et de développement des instruments de musique
électroniques. Les synthétiseur jusqu'alors analogiques sont
devenus numériques et couplés aux samplers. Les premiers
échantillonneurs ainsi que les premiers synthétiseurs
étaient des machines qui coutaient chers et étaient encombrantes.
Fairlight et New England Digital étaient des sociétés
privées qui vendaient ces instruments à plus de 100 000 dollars.
Fort heureusement, l'arrivée de samplers numériques à bas
prix vers le milieu des années 80 a rendu cette technologie accessible
à de nombreux musiciens. Ces nouveaux sons électroniques
provenant des synthétiseurs ont aidé à la création
du genre de la musique industrielle, avec notamment des pionniers comme
Throbbing Gristle ou encore Wavestar. Certains artistes et musiciens ont pris
pour modèle les innovations de la musique concrète et de l'art
acousmatique
5
pour les inclure à la musique dance et rock. S'en est
donc suivi l'apparition et le développement de nombreux styles comme le
dub, l'electronic body music (EBM) étant une combinaison de la pop et de
la dance, ou encore la downtempo ou la trip-hop.
Le commencement des années 90 a vraiment marqué
le développement ainsi que la diffusion de la musique
électronique. Cela est dû au développement et à la
popularisation de la musique house, techno et électro à Chicago
et Détroit dans les années 80, et plus tard le mouvement acid
house de Chicago et de la scène anglaise à la fin des
années 1980.
L'un des genres ayant le plus marqué le début de
cette nouvelle décennie est la techno hardcore. Né à
partir de la techno, du breakbeat, de l'EBM et du new beat, ce genre est apparu
aux Pays-Bas et en Allemagne. Il comprend divers autres genres et sous genres
comme le gabber (qui occupera par la suite une place importante dans la culture
des free party), la makina, le happy hardcore et le speedcore, entre autres.
Pendant les années 2000 il devient très courant,
pour ne pas dire habituel, de distinguer un fond sonore électronique
joué de manière répétitive pendant un morceau,
auquel se superposent toutes sortes d'instruments et samples
électroniques. Cette avancée et cette nouvelle façon de
faire et d'écouter de la musique a été permise par les
progrès techniques mais surtout par le coût abordable des
échantillonneurs, ainsi que l'apparition du numérique et la
popularisation des home-studios.
La musique électronique, notamment durant les
années 90, a donné naissance à un si grand nombre de
genres, styles et sous-styles qu'il serait impossible de tous les citer ici.
Cependant, n'existant pas de frontières rigides et clairement
définies, il est possible d'identifier de manière non-extensive
certains genres :
- Genres et styles contemporains : acousmatique ou
électro-acoustique, musique pour bande,
concrète et improvisée
- Genres et styles expérimentaux : krautrock, nu jazz,
rock progressif, new wave, industriel,
electro, witch house, etc...
- Genres et styles consacrés à la danse : house,
techno, progressive, drum'n'bass, hardcore,
hardstyle, tribe, trance, garage, dance, etc...
- Genres et styles dit de « chill out » : ambient,
downtempo, dub, trip-hop, etc...
6
Aujourd'hui, que ce soit dans les festivals de musique
électronique ou bien encore au sein des free parties, le genre le plus
représenté est celui consacré à la danse. Nous
allons donc nous focaliser sur ce genre.
2. L'arrivée de l'électro en France
Les musiques électroniques se sont rapidement
répandues en Europe. En France et en Angleterre, elles sont
découvertes par la population avec des yeux relativement surpris et
inquiets à travers les free parties et les raves parties. Les raves
parties sont apparues en Grande-Bretagne à cause d'une loi provenant du
gouvernement de Margaret Thatcher qui a eu pour conséquence la fermeture
obligatoire de tous les clubs à deux heures du matin. En réponse
à cette loi, qui selon les fêtards porte atteinte à leur
liberté, sont apparues ces soirées sauvages dans des
entrepôts désaffectés, des hangars ou encore dans les
champs. Le début des années 90 marque l'arrivée de ces
fêtes et de leur lieu d'exécution particulier en France.
Même si notre pays ne subissait aucune loi concernant une fermeture
abusive des discothèques, ce principe d'organisation de fêtes
clandestines n'était pas nouveau et comptait déjà des
adeptes. Cela a évidemment permis une certaine «
démocratisation » auprès d'un public amateur n'ayant pas
encore franchis le pas, car l'organisation de fêtes dans ces conditions
(notamment le fait de ne pas toujours respecter la législation sur le
spectacle vivant) se révélait être une aubaine
d'accessibilité et de coûts moindre. Il est alors apparu plusieurs
types de raves différentes passant des raves clandestines ou
semi-légales créées de toute pièce par des amateurs
de musique électronique, alors tous réunis en associations et se
donnant eux-mêmes la qualification de « tribu », jusqu'à
des rassemblements bien plus important organisés par des professionnels
et entrepreneurs du spectacle. Mais vient alors le milieu de la décennie
et sa vague de répression croissante envers l'essor des raves.
Interventions policières et divers refus d'autorisation s'appuyaient sur
une circulaire ministérielle caractérisant ces rassemblements de
« soirées à haut risques »1. Entrent alors
en jeu les free parties, suscitant un engouement de plus en plus fort chez les
jeunes.
Ces free proviennent également de Grande-Bretagne.
Elles sont le résultat de la rencontre entre le monde des «
travellers » (qui sont des personnes pouvant être
catégorisées comme marginales
1 Fontaine A. et Fontana C. (1996), Raver, Paris,
Economica, p. 98-101
7
et ayant adopté un mode de vie nomade) et cette
nouvelle culture festive émergente des raves et musiques
électroniques. Parmi ces travellers, on rencontre des convertis aux
nouvelles sonorités. Ils sont équipés de systèmes
de sonorisation, et l'organisation de fêtes suit donc leurs
déplacements. Encore une fois, le principe fait école : l'essor
des free parties a eu lieu en France. Les travellers provenant d'Angleterre,
à la recherche d'un environnement plus enclin à leurs
évènements, en sont souvent à l'origine. Cependant ils
sont très vite rejoints par des groupes d'amateurs possédant leur
propre système de sonorisation : il s'agit encore une fois de ces «
tribus », rapidement plus communément auto-nommés «
sound systems ».
Cette fois, contrairement aux raves, il s'agit totalement de
fêtes clandestines. Autrement dit elles ne respectent aucunement les lois
concernant le spectacle vivant. Elles ont la particularité de ne pas
être payantes, et ont adoptés le système de donation libre.
A l'entrée chacun donne ce qu'il peut et/ou ce qu'il veut (faisant bien
entendu appel au civisme des participants). Arrivent alors aux oreilles des
fêtards les styles de musique électronique les plus « durs
» : hardcore, breakcore, hard techno, drum'n'bass, etc...2 En
1998 arrive ce qui ressemble à une bonne nouvelle pour les participants
de raves parties, au détriment des amateurs de free parties. Une
circulaire ministérielle préconise l'autorisation des raves
faisant l'objet d'une demande d'autorisation dans le but d'encourager la
professionnalisation des acteurs de la rave, et remet au goût du jour les
lois de répression des évènements clandestins. En
conséquence de quoi, « depuis 2002, les free parties font l'objet
d'une loi interdisant les rassemblements de plus de 500 personnes n'ayant pas
été déclarés - ceci aboutissant à une
interdiction dans les faits. »3 Cette loi expose ceux à
l'origine de ces évènements à des amendes et saisies de
matériel de sonorisation, représentant un coût très
important pour les sound systems. À la suite de ces nombreuses
répressions des pouvoirs publics, les free parties se sont faites plus
discrètes pendant quelques temps. Cependant certains rassemblements
restent incontournables pour ces « teufeurs » et ne manquent donc
jamais l'occasion de se retrouver lors des teknivals, s'apparentant à
d'énormes festivals ouverts à tous les groupes d'organisateurs
souhaitant diffuser leur musique. Il a même été possible
durant quelques années de tenir des teknivals légaux grâce
aux négociations entre organisateurs et pouvoirs publics. Parmi eux, le
teknival de Chambley en Mai 2004 avec ses 80 000 festivaliers. Malheureusement
la plupart restent illégaux et victimes de nombreuses répressions
à l'image du
2 Grynszpan E. (1999), Bruyante techno. Réflexion sur
le son de la free party, Nantes, Mélanie Seteun
3 Pourteau Lionel (2005), Les interactions entre raves et
législations censées les contrôler, Déviance et
société, vol 29 (n°2) p. 127-139
8
teknival de Mai 2009 en région Parisienne,
organisé clandestinement et conclu par de nombreuses saisies de
matériel.
Passons maintenant à d'autres aspects de cette
diffusion de musique électronique, cette fois en règle face
à la loi. En effet, en parallèle de ces évènements
atypiques on aura observé l'intégration de ce genre musical dans
les clubs, salles de concert et autres festivals. Les musiques
électroniques n'ont d'ailleurs jamais quitté les clubs,
étant le berceau de la house dans le fil du disco. Concernant les salles
de concert et les festivals, certains par amour de la musique et d'autres parce
qu'ils ont senti le bon filon, ont très rapidement intégré
ce nouveau genre de musique. Nous avons donc pu observer dans une grande partie
des festivals populaires français l'apparition d'au moins une «
scène électronique » dès le début des
années 90, avec par exemple les Vieilles Charrues et les Transmusicales
de Rennes. Vers le début des années 2000, la popularisation de la
musique électronique a même permis la création de festival
y étant exclusivement consacrés comme Les Nuits Sonores à
Lyon, l'Ososphère dans la périphérie Strasbourgeoise,
l'Astropolis en Bretagne ou encore l'Electromind de Montpellier.
3. La France et l'électro aujourd'hui
a. L'évolution du secteur
« Ces dernières années, la multiplication
des festivals de musiques électroniques a été
révélateur d'une croissance de cet écosystème
culturel qu'il convenait d'adresser au-delà de la simple intuition.
»4
Les festivals électroniques français
incontournables, comme certains nommés précédemment (Nuit
Sonores, Astropolis) ou encore Nordik Impact à Caen et le N.A.M.E
à Lille se sont vu augmenter en 2013 par l'apparition deux autres
festivals exclusivement consacrés à ce style : le Weather
Festival par l'agence Surprize, ainsi que le Peacock Society par l'agence We
Love Art (également détentrice du célèbre Festival
We Love Green). L'apparition d'autres scènes locales à Bordeaux,
Nantes, ou encore en région PACA travaille à la mise à
jour de la scène électronique française, plutôt en
retard par rapport au reste de l'hexagone. En effet, la plupart des acteurs
de
4 B. Blanckaert, J. Bourgeois, V. Carry, M. Pilot, C. De Rosnay,
T. Vaudecrane, Les musiques électroniques en France, SACEM,
Paris, 2017
9
ce milieu atteste un vide important depuis le début des
années 2000, où les évènements musicaux
électroniques étaient encore relativement timides. Aujourd'hui on
constate l'explosion de ce marché des musiques électroniques sur
l'ensemble du territoire français grâce notamment aux festivals
qui attirent des publics de toutes les régions et même d'Europe
(voir annexe 1). Outre les festivals, cela est également dû
à la prolifération de clubs, soirées, artistes et
collectifs ces dernières années. « Nombreux s'inscrivent
dans une démarche créative à l'identité
marquée, dont les affinités esthétiques
fédèrent des scènes et surtout, des publics
»5.
Ces nouveaux acteurs, jeunes et connectés, manient
à la perfection les nouvelles technologies et remettent au goût du
jour autant la production musicale et les modes de créations (studio
à domicile) que les moyens de diffusion et l'accessibilité aux
oeuvres produites (plateformes spécialisés, réseaux
sociaux, etc...). « Ce sont des digital natives qui créent pour les
digital natives. Loin d'être ignorants des générations qui
les ont précédés, ils font preuve d'une capacité
à s'instruire décuplée par la faculté qu'a internet
de rendre une information pléthorique disponible instantanément
en tout point. Se crée ainsi une acculturation fertile qui bouleverse
sans cesse l'écosystème des musiques électroniques,
rendant ses lignes de démarcation en perpétuel mouvement.
»6
Cet écosystème doit par conséquent se
renouveler de manière continue. En effet, l'apparition et le
développement croissant de ces nouveaux acteurs sur un marché en
progression, autant en ce qui touche à la production, diffusion et
consommation, impactent grandement les comportements et pratiques liés
à ces différents segments. Avec une première analyse, il
est possible de distinguer d'une part un segment de marché actif sur les
canaux traditionnels (clubs, radio, télé) avec pour principe la
monétisation de la diffusion d'oeuvres de dance music, étant
cependant plutôt absente en live. D'autre part, nous avons un segment
comprenant des musiques house/techno, avec beaucoup de production en live, mais
à contrario avec une diffusion sur les canaux traditionnels quasi nulle
et au profit d'une rémunération peu intéressante pour la
diffusion sur internet, utilisé essentiellement pour la communication.
Apparaissent alors des problématiques et stratégies diverses plus
ou moins compatibles, définies par un éventail varié de
structurations et pratiques ou les acteurs de musiques électroniques se
répartissent (voir annexe 2).
5 B. Blanckaert, J. Bourgeois, V. Carry, M. Pilot, C. De Rosnay,
T. Vaudecrane, Les musiques électroniques en France, SACEM,
Paris, 2017
6 Idem
10
On observe également de plus en plus de création
de collectifs. Ils représentent la fédération de DJ et
d'artistes et font bouger la scène actuelle avec une émulation
créative encore jamais vue. L'intérêt de ces collectifs,
outre la stimulation artistique, est la possibilité de mise en commun
des moyens de production et de promotion, avec donc la grande visibilité
qui en résulte et la portée importante qui facilite la
création de soirées et évènements réguliers
tout en fédérant des publics plus larges (voir annexe 3).
b. Le marché de l'électro
En 2015, « les musiques électroniques en France
pèsent 416 millions d'euros HT (annexe 4). 71% (295 millions d'euros)
proviennent du chiffre d'affaires des clubs et discothèques et 11% (47
millions d'euros) du chiffre d'affaires des festivals. Ces deux blocs
représentent à eux seuls 82% du poids économique. 5% (20
millions d'euros) proviennent de l'export de ces musiques, 4% (16 millions
d'euros) de la distribution numérique sur les plateformes de streaming
et de téléchargement, 4% (15 millions d'euros) des droits
d'auteur et droits voisins perçus pour la diffusion des oeuvres à
la télévision et à la radio, 3% (13 millions d'euros) de
la distribution de supports physiques, 1% (5 millions d'euros) proviennent des
droits perçus pour la sonorisation de lieux et
d'événements, et 1% (4,5 millions d'euros) proviennent des
revenus domestiques des synchronisations7 (voir annexe 5 ci-contre).
Le marché total de la synchronisation des musiques électroniques
représente près de 9 millions d'euros. Il se compose des
synchronisations dont l'exploitation est réalisée en France (4,5
millions d'euros), et celles réalisées à l'international
(4,3 millions d'euros inclus dans l'export). »8
Ventilation du secteur économique de
l'électro (en millions d'€ HT)
7 Quote-part (10%) des revenus HT issus des synchronisations
et des commandes de musiques électroniques pour une exploitation en
France pour les films publicitaires et pour la musique à l'image, sur
les émissions de télévisions et sur les oeuvres
cinématographiques. Source CSDEM
8 B. Blanckaert, J. Bourgeois, V. Carry, M. Pilot, C. De
Rosnay, T. Vaudecrane, Les musiques électroniques en France,
SACEM, Paris, 2017
11
« Le marché des musiques électroniques
représente un montant de 416 millions d'euros HT, soit 17% du
marché des musiques actuelles. Ce marché est porté par le
live : le chiffre d'affaires lié aux musiques électroniques
constitue 35% du chiffre d'affaires des clubs et discothèques ; les
festivals de musiques électroniques atteignent 21% du chiffre d'affaires
total généré par les festivals de musiques actuelles. Pour
ce qui concerne la distribution physique et numérique, la consommation
de musiques électroniques est différente des usages des autres
musiques. Sur le marché de la musique en ligne, 7% des revenus des
musiques actuelles sont issus de la distribution numérique des musiques
électroniques. Pour les supports physiques, cette part descend à
3%. »9 (voir annexe 6 ci-contre).
Poids économique par secteur de
diffusion
« Le partage physique/numérique est, là
encore, spécifique dans le domaine des musiques électroniques :
la part du numérique dans les musiques électroniques passe
à 55% et même 71% pour la techno/house. »10 (voir
annexe 7 ci-dessous).
Revenus issus du numérique et des supports
physiques
« Plus de 80% des festivals de musiques
électroniques (techno/house) ont lieu au printemps et en
été et près de 60% en plein air (mêmes
caractéristiques que l'ensemble des festivals). En revanche, les
festivals de musiques électroniques ont tendance à être
plus courts : plus de 85%
9 B. Blanckaert, J. Bourgeois, V. Carry, M. Pilot, C. De Rosnay,
T. Vaudecrane, Les musiques
électroniques en France, SACEM, Paris, 2017
10 Idem
11 Idem
12 Idem
12
durent moins d'une semaine contre 75% des festivals de
musiques actuelles. »11 (voir annexe 8 ci-dessous).
Saisonnalité et durée des festivals
électro
« Les festivals de musiques électroniques
(techno/house) sont de gros festivals, payants et plus portés par des
sociétés commerciales que la moyenne des festivals de musiques
actuelles. »12 (voir annexe 9 ci-dessous)
Caractéristiques économiques du secteur
électro
13
« La proportion d'établissements de techno/house
ayant une capacité égale ou supérieure à 1000
personnes est deux fois plus importante que celle des établissements de
nuits en général. En miroir, on trouve sensiblement moins
d'établissements de petite taille parmi les établissements de
techno/house. »13 (voir annexe 10 ci-dessous)
Capacité d'accueil des établissements
diffusant de l'électro
« Les établissements de musiques
électroniques sont majoritairement des moyens et gros
établissements. La part des établissements dont le chiffre
d'affaires est supérieur à 1 million d'euros est 3 fois
supérieure parmi les clubs techno/house. »14 (voir
annexe 11 ci-dessous)
13 Idem
14 Idem
Caractéristiques économiques (tranches de
chiffre d'affaires)
14
Un autre moyen d'attester du futur fructueux de la musique
électronique est d'observer l'évolution de l'offre (correspondant
au nombre d'évènements électroniques organisés en
France) et la demande (celle du public). En 2018 a été
publié une étude menée par Shotgun et Technopol
basée sur le bilan des années 2014 à 2017. Selon eux,
près de 2000 évènements ont été
organisés en 2014 contre 8000 en 2017, soit quatre fois plus. Quant
à la demande du public, elle est passée de 3 millions de sorties
exprimées en 2014 contre plus de 13 millions début 2018, soit une
demande plus de quatre fois supérieure ici aussi.15 Ce
dynamisme de la demande, ainsi qu'une croissance plus élevée que
celle de l'offre, permet de très optimistes perspectives quant à
l'organisation d'évènements électroniques, avec un
marché loin d'être saturé.
15 Cette étude prouve que le marché des
musiques électroniques n'a jamais été aussi performant,
27/09/2018,
http://durevie.paris/conference-paris-electronic-week/,
consulté le 19/01/2021
15
B. L'image des rassemblements de musique
électronique en France
1. La culture liée à ces
évènements
Il est assez compliqué de définir une seule et
même « culture » des évènements de musique
électronique qui mettrait tout le monde d'accord. Par exemple, un
clubber, soit quelqu'un fréquentant les boites de nuit ne se sentira pas
vraiment appartenir ou partager cette culture car il ne s'y intéresse
peut-être pas. Pour lui musique électronique ou autre ne fait pas
réellement de différence tant qu'il s'amuse. Un festivalier en
revanche se sentira beaucoup plus concerné. Bien qu'ici encore il soit
difficile d'identifier une culture commune, on peut cependant observer des
valeurs, voir des symboles partagés par les festivaliers. Ces
dernières proviennent logiquement des free parties, bien qu'elles soient
souvent moins prononcées. En effet ce sont les rave/free parties qui
sont les premières à avoir fait naitre une sorte de culture
autour de la musique électronique et de ses évènements,
ils ne cachent d'ailleurs absolument pas s'être inspirés de la
culture et du mouvement hippies. Cependant même ici, il est
compliqué de parler de « culture ». Ceci est notamment
dû au fait que la plupart des teufeurs (les participants des free
parties) cherchent à s'émanciper des cases dans lesquelles la
société les range malgré eux, ils ne veulent donc pas se
ranger dans une nouvelle case même si elle leur serait plus
adaptée. Il serait donc ici plus approprié de parler d'une
communauté, partageant et défendant des valeurs communes,
plutôt que d'une culture adaptée à tout un chacun. La free
party, les festivals ou tout évènement de musique
électronique ne sont pas caractérisés par une pratique
liée à une catégorie sociale déterminée,
mais sont des regroupements hétérogènes d'individus. De
bien des façons, il serait simple de penser que les teufeurs notamment
représenteraient « la culture du pauvre » et que leur
étique serait caractéristique de la classe populaire. Il est
cependant vrai que certaines pratiques sont mises en avant dans ces
évènements, comme l'aisance, la débrouillardise et la
camaraderie ainsi qu'une certaine séparation entre « eux » et
« nous » étant plus ou moins imagée ou concrète
selon les participants. Qu'ils s'agissent de free parties ou de festivals, il
s'agit de regroupements d'individus aux trajectoires sociales variées.
En outre, le but de ces évènements n'est pas de revendiquer une
appartenance, mais au contraire, de faire une totale abstraction des statuts et
rôles sociaux. Pour savoir d'où viennent ces valeurs, il faut
s'intéresser aux débuts des free parties.
16
a. Les travellers et le communautarisme
Parmi les participants à ces évènements
musicaux et festifs, on constate une réelle attirance pour la vie
marginale ainsi que le non-conventionnel. L'un des meilleurs moyens de s'en
rendre compte est d'observer l'intérêt profond dirigé vers
la figure des travellers. Pour rappel, les travellers sont ces gens
qui dans l'Angleterre des années 70 et dans la continuité du
mouvement hippie ont opté pour un mode de vie nomade. Ils se
déplacent alors en camion, en roulotte ou en bus16. Un peu
avant le début des années 90 commence à s'observer le
développement d'un nomadisme propre aux musiques électroniques.
Son but : voyager avec les membres de sa tribu, et surtout organiser des
fêtes afin de populariser cette musique, ses fêtes et sa culture
dans le monde entier17. Ces voyages sont possibles grâce
à l'aménagement de leurs véhicules. Il est donc possible
d'y dormir, d'y manger, mais aussi et principalement d'y faire de la musique
étant donné qu'ils doivent également transporter tout le
matériel musical et logistique nécessaire à l'organisation
de leurs fêtes.
« Le traveller est une force d'attraction pour les
amateurs de free party parce qu'il représente le modèle de vie
techno poussé à son terme, mais aussi la rupture la plus
complète avec le mode de vie conventionnel. En adoptant un mode de vie
communautaire et nomade, il rompt avec l'individualisme et la
sédentarité caractéristiques de la vie dans le monde
moderne. Sa vie semble également tout entière liée aux
musiques électroniques et à ses fêtes, en ce qu'il
délaisse la norme du travail et l'assignation à résidence
pour se consacrer au voyage, à la musique, à l'organisation de
fêtes et de festivals. Enfin, parce qu'il organise des fêtes
gratuites (principe de la donation), il représente également une
alternative au monde capitaliste. »18
Même si ce désir d'errance est associé
à la figure du traveller, il serait en fait plus juste de l'associer
à l'attraction de la vie marginale et l'expérimentation de
situations sociales précaires ou incertaines. En réalité,
le terme d'errance est un peu plus vaste et caractérise plus une sorte
de « tension vers l'ailleurs ». Elle peut s'exprimer par l'envie
d'être ailleurs sur un plan
16 Delorme A. (2001), « Les News Age travellers. Une
tentative d'individualisation dans la société du risque »,
Sociétés, n° 72, pp. 107-123
17 Grynzspan E. (1998), Bruyante techno. Réflexion sur
le son de la free party, Nantes, Mélanie Séteun, pp.
24-26
18 Petiau A. (2011), « L'« âme
tigrée » des musiques électroniques. Les imaginaires des
jeunes et les courants musicaux », Sociétés, vol. 112,
no. 2, pp. 115-122
17
géographique, mais aussi sur un plan social en voulant
changer son rôle ou l'ordre social institué, ou encore sur le plan
de la vie quotidienne en cherchant à changer ses
habitudes19.
On constate également à travers ce milieu festif
électronique la marque d'un « idéal communautaire
»20 perçue par ses partisans comme une alternative
à l'individualisme de la société moderne. On l'observe
d'abord dans l'expérimentation musicale des rave/free parties : la
recherche d'expérience collective forte et d'un sentiment
d'appartenance, de perte de soi dans un collectif qui se laisse aller ensemble
aux sons des musiques électroniques. La création de collectifs
comme les sound systems ainsi que toutes les formes qu'ils peuvent prendre
représentent également la manifestation de cet idéal
communautaire. Ces collectifs peuvent s'apparenter à d'autres groupes
sociaux comme des bandes ou des groupes de musique, mais se
différencient cependant assez facilement de ces modèles bien
connus lorsqu'ils prônent la vie communautaire et la
propriété collective.
Cependant, même si les travellers sont des sortes
d'idoles pour les participants de free party moins investis, il n'y en a en
fait que très peu qui s'engagent aussi profondément dans ce mode
de vie déviant. Rejoindre ou créer un collectif peut donner lieu
à un mode de vie communautaire et à l'expérimentation du
nomadisme, mais pas obligatoirement. Ceux qui en font l'expérience sont
en fait le plus souvent des « travellers à temps partiel », le
voyage restant une expérience limitée dans le temps et le plus
généralement en période estivale. Il y a en fait tout un
monde entre ces deux extrémités que sont les travellers et la vie
communautaire, et la simple participation aux évènements : faire
partie d'un collectif, vie en colocation avec d'autres amateurs,
propriété collective d'un sound system, d'un bus ou d'un camion,
ou encore la pratique du nomadisme « occasionnelle » en font partis.
C'est donc un engagement très fort dans les musiques
électroniques qui peut donner lieu à ces expérimentations
de modes de vie, qui sont alors identifiables aux expérimentations
hippies des années 60 et 7021.
Pour ces travellers, et finalement pour tous les adeptes de
free party, marginalité n'est ni synonyme de pauvreté, ni
d'exclusion. La marginalité est ce qui pointe une différence par
rapport aux normes et aux valeurs dominantes. Même si souvent elle est le
fait d'individus instables ou exclus qui pour des raisons de survie ont
créé des moyens économiques et adoptent des comportements
sociaux atypiques pour pallier leur situation instable, la marginalité
reste
19 Maffesoli M. (1997), Du nomadisme, Paris, Le Livre de
Poche
20 Maffesoli M. (1993), La Contemplation du monde. Figures du
style communautaire, Paris, Grasset et Fasquelle
21 Delannoy P. (1995), L'aventure hippie, Le
Lézard, Paris
18
attractive car elle « représente aussi l'aventure,
l'envers du système des normes dominantes, une incarnation (même
si celle-ci est cher payée) de la liberté, dans une
société où celle-ci a très peu de
place22 ». Ces « déviants sociaux » peuvent
même faire office de modèle pour les «
normaux23
».
Ces soucis d'apparences sont d'ailleurs chroniques dans ce
milieu et auprès des « marginaux ». Dans la
société actuelles le poids des apparences influence grandement
les interactions sociales d'un individu, alors que dans ces
évènements festifs ils expliquent pouvoir se lâcher. Ils se
séparent de leur Moi socialisé et se sentent plus libres et
authentiques. Une société démocratique est en partie
fondée sur cette question récurrente du regard porté sur
autrui, où chacun réclame reconnaissance et respect et où
la discrimination est monnaie courante. « Le regard est ce qui peut donner
ou briser la valeur de l'individu, lui confirmer ou lui ôter son
existence sociale, l'impression d'appartenir à une « commune
humanité » »24.
b. La consommation de substances illicites
Enfin, il serait difficile et surtout peu
révélateur de la réalité de parler de la culture
des musiques électroniques sans aborder le sujet épineux des
différentes substances qui y sont consommée. Tout d'abord il est
bon de préciser que l'utilisation de drogues dans le cadre de rites,
cérémonies ou fêtes n'est pas caractéristiques des
free parties, des festivals, ou de notre époque. La question n'est pas
directement liée à la consommation de drogues mais aux usages qui
en sont fait, aux effets escomptés mais également à leur
représentation dans un contexte culturel particulier. « L'usage de
drogues renferme un assortiment de significations. La recherche, par exemple,
d'une perception sensorielle immédiate de l'environnement et de l'autre.
La nécessité de parler s'évanouit, tout se joue à
présent dans le domaine des sensations. Ou bien encore une
volonté d'expérimentation. Par le biais des états
modifiés de conscience, on apprécie l'opportunité
d'appréhender différemment les choses et les gens. Une autre
vision du monde alentour, empreinte d'une certaine imagination, qui donne la
possibilité de découvrir, ou plutôt de redécouvrir,
les choses banales et habituelles du quotidien auxquelles on ne prête
plus guère
22 Castel R. (1996), « Les marginaux dans l'histoire
», in PAUGAM S, L'exclusion : l'état des savoirs, La
Découverte, Paris p. 35
23 Goffman E. (1975), Stigmate, Les Éditions de
minuit, Paris, p. 135
24 Gicquel C. (2007), « Free party : une aire de Je(u)
dans l'air du temps », Espace populations sociétés p.
345-356
25 Queudrus S. (2001), La free-party, sociologie d'un
vagabondage festif, In: Quaderni, n°44, Les industries de
l'évasion, pp. 129-142
19
attention. Poussé par le désir de
d'expérimenter et de se construire soi-même, on aime à
changer de dimension, à se déstabiliser. Les voyages
intérieurs ouvrent les portes de la perception et encouragent
l'exploration du champ de conscience. [...] Ainsi, si l'idée de
"s'éclater" prédomine dans l'imagerie qui entoure l'usage de
drogues, elle prend néanmoins plusieurs sens qui se chevauchent : la
recherche du plaisir immédiat et la libération des
énergies ; l'abandon et la dérive de l'esprit ; l'exaltation et
le dépassement de soi. Mais, l'acte semble cependant guidé, dans
les grandes lignes, par la recherche d'une forme d'enivrement qui bascule dans
l'ivresse, lisible au travers des quantités absorbées et des
associations pratiquées ainsi que dans la multiplication des prises.
Cette quête de l'ivresse paraît déboucher sur un certain
nihilisme : la négation de tout et de soi-même
»25. Ainsi, du fait des expériences recherchées
dans ces évènements et les expériences apportées
par ces diverses substances, il est bien plus facile de comprendre le lien qui
les unis.
c. Les valeurs partagées
Pour en revenir aux valeurs partagées lors de ces
évènements, elles sont en général partagées
par tous les amateurs de musiques électroniques et participants de ces
évènements. Par exemple, la première valeur
prônée est celle de l'amour en général. L'amour de
son prochain, l'amour de soi, l'amour de la musique, et de tout ce qui nous
entoure. L'entraide, l'équité aussi bien sociale que raciale ou
religieuse, l'altruisme ou encore le relâchement de soi font partie de
ces valeurs. Tout cela est possible grâce à l'impression
donnée d'être hors du monde où nous vivons tous les jours,
hors d'atteinte des jugements et problèmes de la vie réelle. Ces
regroupements sont des lieux de découverte et de partage. Là-bas
les rencontres, les amitiés créées, les bons moments
partagées se font sur un aspect d'affinités, et non par filiation
ou dépendance à une tradition, religion, culture ou classe
sociale déterminée. En réalité, on constate que
cette communauté (pas celle des membres d'un collectif, mais celle des
participants aux évènements) est fictive. La plupart des
individus n'y croient pas mais font semblant. Sans cette imaginaire
nécessaire, la fête serait bien différente et bien plus
difficile, voire impossible. L'important est la relation en soi. Les rencontres
sont hasardeuses et éphémères, juste le temps de s'amuser
l'espace d'une nuit, d'un week-end ou d'une semaine pour les plus gros
festivals/teknivals. Malgré la présence physique et
20
synchronique des individus, les relations se rapprochent de
celles des internautes. Les participants communiquent, partagent,
échanges, puis se « zappent » facilement. Ils peuvent
être proches et anonymes. Cela explique donc le sentiment de
liberté ressenti dans ces évènements. De plus, il est
très fréquent d'associer la musique électronique et la
spiritualité. Il n'est pas rare de voir apparaitre le symbole AUM
(provenant du bouddhisme) dérivé de toute sorte : en festival,
free party, tatouage, bijoux, vêtements, etc...
En claire, il n'est pas simple de parler de « culture de
la musique électronique » de par ses nombreuses formes. Bien que
comme partout l'on puisse des personnes n'ayant que faire de cet aspect
culturel ou des valeurs véhiculées, et qui ne pensent qu'à
s'amuser quitte à en empêcher les autres, il serait plus juste
d'imager les rassemblements de musiques électroniques comme des
sanctuaires ouverts à tous. Avec des valeurs propres et définies
mais clairement pas imposées, où les classes sociales, races et
religieux sont entremêlés et oubliés, créant des
évènements hors du temps, où des individus de tous
horizons se rencontrent, échangent, partagent et s'oublient, et surtout
se caractérisent comme « le peuple qui danse ».
2. L'image actuelle de l'électro en France
Il est en réalité très compliqué
d'avancer des faits avérés pour donner une image de la musique
électronique en France. Pour s'en rapprocher il faudrait d'abord
s'intéresser plus en profondeur aux différents genre et
sous-genres, le terme valise « électro » étant
utilisé à tout va et par conséquent beaucoup trop
généraliste. Aujourd'hui l'électro est présente
à un moment donné dans pratiquement tout type de musique. Pour
certains, dire que l'on n'aime pas la musique électronique revient
à dire que l'on n'aime pas la musique tout court. Après une
différenciation des plus gros genres d'électro, il faut encore
déterminer le point de vue adopté. Les plus important
étant les politiques, les médias, les amateurs, et enfin les
« non-initiés ». Enfin, bien que nous nous intéressions
à son image actuelle, il faut également prendre en compte
certaines conceptions passées de la musique électronique en
France. Tous ces facteurs nous permettrons d'établir avec un peu plus de
réalisme ce à quoi inspire la musique électronique en
France.
21
a. La musique électronique et la politique
Pour parler de ce qui se passe aujourd'hui, encore faudrait-il
savoir dans les grandes lignes comment l'on y est arrivé. Tout d'abord,
il faut savoir que toutes les musiques électroniques et ses genres
distinctifs, en France en tout cas, descendent des premières rave/free
parties où beaucoup de genre différent s'y confondaient. Vers la
fin des années 90 apparait ce que l'on nomme toujours aujourd'hui la
French Touch ainsi que certaines de ces stars tel que les Daft Punk et Laurent
Garnier. Vient alors un début tout de même balbutiant de
popularisation de la musique électronique, et de sa sortie de
l'environnement oppressé des rave/free et donc de
l'illégalité encore et toujours opprimés par les
politiques. Le problème, c'est que seulement deux genres en font partie
: la techno et la house.
En plus d'offrir un nouveau regard sur la musique techno, les
différents succès de la French Touch permettent de montrer un
aspect bien plus présentable et soutenable de la techno. Finalement, il
est assez étonnant d'observer qu'il doit être presque frustrant
pour certaines personnalités politiques de ne pas pouvoir s'accaparer le
soutien de ce mouvement. Pour cause, la techno est toujours liée aux
rave parties. Cependant, les politiques ne peuvent pas se permettre de passer
à côté d'un nouvel électorat, d'autant plus que ce
nouvel essor musical s'invite de plus en plus chez les classes moyennes. Elles
ne sont évidemment pas adeptes de rave parties, mais elles prennent de
plus en plus de plaisir à écouter cette techno et pourraient
surtout montrer les crocs si l'on venait à tenter d'étouffer
l'avènement d'un nouveau mouvement artistique. Le dilemme des politiques
est donc de remporter le jeu du « je suis le premier à avoir
soutenu » tout en s'efforçant de ne soutenir que l'aspect culturel
du mouvement sans donner l'impression de soutenir les rassemblements qui en
découlent.
Il est donc nécessaire pour ces politiques de mettre la
main sur des interlocuteurs qu'ils souhaiteront « présentables
» au sein du mouvement. Ils vont en trouver un en la personne morale de
l'association Technopol, étant le premier groupement
d'intérêt du genre. Elle a été créée
en 1996 à la suite d'une énième annulation de rave,
étant cette fois celle de Polaris pourtant préalablement
autorisée, légale et tout ce qu'il y a de plus
présentable. Cette association a pour but de défendre la
professionnalisation du milieu techno et sa juste insertion, aussi bien civile
que marchande. Elle bénéficie donc très rapidement d'une
forme de reconnaissance institutionnelle, sous forme de subventions du
ministère de la culture, bien content d'enfin avoir son mot à
dire sur le mouvement. Technopol jouit donc inévitablement d'une plus
grande
22
attention parmi le cercle politique. Elle est d'ailleurs, en
1998, à l'origine d'une circulaire intitulée « Instruction
sur les manifestations rave et techno » signée par les ministres de
la Culture, de l'Intérieur et de la Défense. Dans cette
dernière, l'Etat reconnait le caractère culturel des
évènements techno, et quant à elle Technopol
dénonce la discrimination contre les soirées se voulant
légales en appelant finalement à séparer le bon grain de
l'ivraie. Concernant la discrimination, cette circulaire n'aura malheureusement
aucun impact notable, cependant elle sera très clairement perçue
comme une trahison pour les membres des free parties. Cela marque
définitivement une « exclusion » de la techno dans les free
parties mais aussi et surtout un changement dans les moeurs, la techno
n'étant plus associée par personne aux autres styles
d'électro encore présent en free pouvant encore être
qualifiés de « musique de sauvage ».
Aujourd'hui encore, bien que les raves aient disparu depuis
longtemps, il n'y a toujours pas de techno en free parties (bien qu'on y
retrouve la tekno, relativement différente). Elle est quant à
elle associée à la house et ont une réputation plus «
propre », plus huppée, et surtout plus légale. Cette
différenciation, largement aidée par la presse, a notamment
contribuée à creuser l'écart de considération entre
les différents styles de musique électronique (là encore,
aidée par la presse) en en mettant certains sur un piédestal les
qualifiant de musique élégante et racée tandis que
d'autres se verront rabaissés plus bas que terre et qualifiés de
sons primitifs et impensés. Pendant un temps donc, dû à sa
mise en avant et surtout à cause de l'oublie des free parties à
cause d'un mouvement de répression très important, quand on
parlait de musique électronique on ne pensait pratiquement que techno et
son image était positive pour tout le monde. Seulement le temps passe,
et les goûts et les couleurs changent. Cela est d'autant plus valable en
France.
De nos jours, avec ses 4000 free parties par an26,
notre pays n'aura jamais autant été soumis à un conflit si
important d'opinions envers la culture de la musique électronique. Bien
que parmi les amateurs on puisse souvent trouver des divergences d'opinions sur
les styles de musique (la plus importante opposant le hardcore et plus
globalement tout le genre hard, contre la trance et ses dérivés),
les opinions se basent généralement entre l'appréciation
de deux extrêmes : la techno/house remise au goût du jour,
plutôt toujours élégante et destinée aux classes
moyennes, et la « musique de teuf » ou encore le « boum »
inaudible des free parties critiqué globalement par quiconque ne
s'étant jamais rendu dans ce genre d'évènements. Ce
constat est d'autant plus vrai depuis la free party du 31 Décembre
dernier à Lieuron, grandement critiquée par les médias et
les politiques.
26 B. Blanckaert, J. Bourgeois, V. Carry, M. Pilot, C. De Rosnay,
T. Vaudecrane, Les musiques électroniques en France, SACEM,
Paris, 2017
23
Bien que la musique électronique, ses genres et ses
évènements aient évolué, les politiques quant
à eux ont préféré garder leurs opinions
inchangées malgré la tentative de certains, à l'instar de
Nicolas Sarkozy, lorsqu'il était ministre de l'Intérieur.
Après avoir « contribué » à l'organisation d'une
free party légale et se montrant satisfait du résultat, les
médias comme TF1 se sont empressés de faire état non plus
d'évènements inquiétants et de jeunesse perdue, mais de
« réussite » se passant dans « la joie et la bonne
humeur27 ». Cependant à la suite de cela ce sont les
autorités locales qui ont décidé de montrer leur
mécontentement, suite à quoi Nicolas Sarkozy fait volteface, et
les médias ne manquèrent pas de faire de même.
Les médias ont en effet une très grande part de
responsabilité dans l'image générale que se font les gens
des musiques électroniques. La plupart des médias avec de la
visibilité étant politisés, et la plupart des politiques
étant contre ces rassemblements (à plus ou moins grande
échelles en fonction de leur légalité), il est donc
pratiquement impossible de trouver des articles ou reportages n'abordant pas le
sujet des drogues et ne qualifiant pas cette musique et ses amateurs de
marginaux, quand ils ne sont pas directement appelés « punks
à chiens fumeurs de joints » à l'instar de Jordan
Bardella28, député européen, après la
free party de Lieuron. Ces médias orientent leurs reportages de sorte
à « diaboliser » ces évènements et ces
pratiques, en effet illégales et où la consommation de
stupéfiants est présente, allant jusqu'à interviewer des
teufeurs correspondant presque toujours à l'archétype du
marginal, du punk à chien, ou du jeune dépravé et
consommateur de drogue. Il est alors impossible pour les lecteurs ou
spectateurs de ces médias de ne pas se faire, consciemment ou
inconsciemment, une mauvaise image de ces évènements mais surtout
d'y associer cette musique encore une fois rangée sous le terme trop
généraliste « d'électro ». Certains
médias, principalement des magazines ou des sites internet, abordent ces
évènements avec déjà beaucoup plus
d'objectivité. Il s'agit malheureusement de médias moins
importants avec beaucoup moins de visibilité, principalement
orientés culture voir même uniquement musique, et ne peuvent donc
toucher qu'un public ayant déjà un certain intérêt
ou du moins une considération pour la musique électronique. Cela
a notamment pour conséquence la répercussion de cette image
négative sur les festivals de musique électronique,
évènements pourtant légaux et encadrés, jusqu'alors
généralement dans une sorte de « no man's land » des
opinions puisqu'ils diffusent des styles allant de la techno/house à la
hardcore en passant par la trance et étant par conséquent
classés entre les soirées techno parisienne huppées et les
teufs illégales et marginales dans un champ « volé »
à leur propriétaire le temps d'une nuit.
27 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 191
28
https://www.dailymotion.com/video/x7yg8pc?syndication=249290
24
Tout le monde s'accorde cependant pour identifier à ces
évènements un public relativement jeune et sujet à la
consommation de drogue.
b. L'association de l'électro à la
consommation de drogues
Outre l'image d'une musique bruyante et inaudible, et d'un
peuple de vagabonds ou de délabrés, celle de la consommation de
drogue est également plus que mentionnée. Bien que cela ait
toujours été le cas, on continue d'observer que cette
consommation se pose comme un obstacle direct à la légitimation
de cette musique. C'est d'ailleurs l'argument phare des tirades des personnes
qui la rejettent, utilisant cette consommation comme l'un des facteurs de sa
non-valeur artistique. Elle est de ce fait et depuis le début l'une des
motivations principales de la répression.
Il est donc légitime de se demander pourquoi une telle
obstination est observée à associer la musique
électronique et la drogue alors qu'elle peut être retrouvée
dans d'autres genres musicaux, cela étant la principale justification
invoquée par les défenseurs de l'électro. Le rock par
exemple est un genre musical n'étant plus soumis à des
repressions et comptant également son lot d'adeptes, cela ne signifiant
pourtant pas la légalisation de l'héroïne et du LSD durant
les années rock. A l'époque il était en fait
observé une dissociation analytique : le rock d'un côté et
la drogue de l'autre, les deux ayant évidemment des liens mais
aucunement de nature consubstantielle. Il est possible d'apprécier et de
faire du rock sans pour autant apprécier et consommer de
l'héroïne, et c'est cette vision des choses que le monde de
l'électro aimerait voir se populariser. Ses acteurs ont d'ailleurs rendu
omniprésentes ces comparaisons dans leurs discours légitimaires.
Certes, la drogue est présente, mais reste à déterminer si
cela est dû à la musique électronique ou au milieu festif.
Il est difficile voire impossible de donner une réponse juste à
ce questionnement, cependant si l'on aborde certains regroupements
particuliers, il est déjà possible d'apporter une défense
à ce milieu. En effet, si l'on a tendance à cause de leur
exposition médiatique à associer aisément la drogue aux
free parties plutôt qu'aux soirée légales, ce n'est pas
nécessairement avéré : « Il serait difficile
d'affirmer que les jeunes se droguent « plus » en free party qu'en
boîte de nuit, puisque dans ces dernières, l'achat et la
consommation de drogues sont au contraire complètement masqués :
on ne les montre pas, on n'en parle pas, tout le monde fait comme si elles
n'existaient pas, les organisateurs les premiers, dans la mesure
25
où la reconnaissance de leur existence dans la
boîte signifierait bien sûr sa fermeture
immédiate29 ». Evidemment, du fait du
développement des nouveaux moyens de communication, ces boites de nuit
et autres établissements se sont adaptés en conséquence et
l'on peut donc en trouver de plus en plus interdisant les photos et
vidéos, comme le club Concrete30.
L'image actuelle de la musique électronique est donc en
réalité principalement liée à ses
évènements et représentations, son histoire, et à
ce qu'en disent les médias, plutôt que basée sur une
réelle appréciation artistique. En effet, du fait de ses origines
contestataires, ses liens avec l'illégalité (free parties et
drogues), et ses affinités avec des classes sociales
caractérisées par la société de « pauvre
», « marginales » ou encore « dépravées
» il est pour l'instant compliqué d'imaginer un jour ce milieu
intégré dans les moeurs françaises. Cependant ce ne serait
pas le premier genre musical à subir des répressions pour ensuite
finalement s'intégrer. Petit à petit ces images néfastes
commencent à disparaitre, ou plutôt à se faire oublier
notamment remplacées par la fierté, à l'instar d'artiste
français comme David Guetta, Laurent Garnier, Daft Punk ou encore Petit
Biscuit qui popularisent petit à petit certains genres de musique
électronique, plus accessibles aux oreilles des classes sociales
majoritaires de notre temps. Nous sommes cependant encore très loin,
contrairement à nos voisins Allemand ou Néerlandais, d'entendre
passer sur nos radios populaires françaises comme NRJ ou FUN Radio des
hits Hardcore du DJ Angerfist ou Psy-Trance du DJ Astrix.
3. Les repressions (la loi, les interdits) et
protestations
a. Soirées rave : situations à hauts
risques
Due à l'origine des musiques électroniques, les
répressions concernant cette culture et la culture elle-même ont
plus ou moins émergé en même temps. L'ironie vient du fait
que le mouvement culturel de l'électro et de ses pratiques
étaient déjà apparues comme une forme de répression
en soi, cela revient à se demander qui est arrivé en premier
entre l'oeuf et la poule. Quoi qu'il en soit, les critères de
répression de la part des autorités et de l'état ont
toujours concernés les deux mêmes facteurs : la drogue et le
bruit, l'illégalité et donc le non-respect de la loi étant
intrinsèques à ces facteurs. En France, il existait (et existe
d'ailleurs toujours plus ou moins) un
29 TESSIER L. (2003), « Musiques et fêtes techno :
l'exception franco-britannique des free parties », Revue
française de Sociologie, vol. 44, no 1, pp. 63-91
30 Lecarpentier C. (27/02/2015), « La nuit, Paris rave
encore »,
NextLibération.fr
26
certain vide juridique en ce qui concerne la manière de
réagir à ce genre d'évènements illégaux
(rave/free parties), et ce manque d'informations sur la conduite à tenir
n'est d'ailleurs pas exempt de responsabilités dans l'origine de
certains accrochages entre les autorités et les participants.
De la clarté est apporté pour la première
fois par Jean-Louis Debré, ministre de l'Intérieur à ce
moment-là, qui décide de s'occuper pleinement de ce qui selon lui
pourrait s'élever au rang de problème public. Une première
circulaire est diffusée par la Mission de Lutte antidrogues (Milad) de
la Direction Générale de la Police Nationale à destination
de toutes les mairies de France. Il y est dénoncé une situation
« extrêmement préoccupante au plan de l'ordre, de la
sécurité et de la santé publique ». Son but n'est pas
caché, son intitulé ne permet d'ailleurs aucune mauvaise
interprétation : « Les soirées rave, des situations à
hauts risques ». Cette circulaire expose tous les moyens juridiques
à la disposition des élus locaux pour lutter contre ces
évènements. Ils sont priés de s'adonner pleinement
à faire cesser ces rave parties (légales ou non), et ils ont
à leur disposition en annexe des modèles d'arrêtés
d'interdictions. Michel Bouchet, patron de la Milad, affirme que « le but
est de mettre les organisateurs dos au mur pour qu'ils se
civilisent31 ». Malheureusement, comme le fait remarquer M.
Lafargue de Grangeneuve, ce sont majoritairement les raves légales qui
subiront ces nouvelles dispositions. « Les raves légales sont plus
faciles à contrôler parce qu'il est possible d'intervenir en amont
: ces soirées sont les plus visibles, elles sont annoncées et
bénéficient d'une certaine publicité ; or, le maire - qui
possède le pouvoir de police administrative sur sa commune - peut assez
aisément annuler ce type d'évènements, même au
dernier moment, notamment en invoquant un trouble à l'ordre public ou un
manque de garanties en matière de sécurité.32
»
Ce n'est cependant pas aussi simple pour les free parties
(clandestines et illégales) qui sont bien plus compliquées
à réprimer. Dû au fait qu'elles sont en
général bien dissimulées, il faut d'abord organiser des
recherches pour en trouver le lieu et s'informer à l'avance, ce qui a un
certain coût. Il est plutôt rare pour les autorités
d'arriver avant le début de la fête, et il est quasiment mission
impossible d'intervenir de quelques manières que ce soit une fois
qu'elles ont commencé. Les autorités ne veulent en effet pas
courir le risque de déclencher une émeute en tentant d'y
mettre
31 Bernier A. (27/04/2000), « Des raves à la
réalité. Après le boom des grands rendez-vous officiels,
la scène techno se replie sur les fêtes et l'underground »,
Libération n°5893, p. 33-34
32 Lafargue de Grangeneuve L. (2010), L'Etat face aux
rave-parties, les enjeux politiques du mouvement techno, Toulouse, ed.
Sociologiques, Presses Universitaires du Mirail, p. 159
27
fin, étant à chaque fois largement
dépassées en nombre. « Pour les organisateurs, il suffisait
donc de rester discrets jusqu'à ce que la fête ait vraiment
démarré33 ».
Il y a bien entendu des conséquences imprévues
à ces répressions, la première étant qu'au lieu de
faire diminuer puis disparaitre ce phénomène des raves, elles
vont en fait les radicaliser et principalement les faire plonger dans la
clandestinité. Ce texte sera perçu comme une injustice de la part
de nombre d'adeptes des soirées rave, principalement car il interdit ces
rassemblements pour cause d'usage de drogue généralisé
sans même chercher à faire de distinction (tous les participants
ne sont pas des consommateurs). Cette circulaire est donc vécue par ces
adeptes comme une attaque claire à la globalité d'un mouvement
culturel. Il apparait alors des rhétoriques justificatives faisant des
comparaisons avec d'autres genres musicaux (« est-ce qu'on interdit le
rock à cause de l'héroïne ? ») chez les amateurs, et
qui est toujours d'actualité. Le succès de ces soirées
rave, étant dos au mur, a pour conséquence l'augmentation notable
des free parties. Michel Bouchet reconnait d'ailleurs que cette circulaire
était « un texte d'inspiration assez prohibitionniste » et
qu'elle a donc indirectement promu les rave clandestines et
incontrôlables34.
Une autre conséquence notable concerne le réel
impact de cette circulaire. Au lieu de s'attaquer au problème des
drogues, ce pour quoi elle était prévue, c'est en fait le
problème du bruit (qui n'était pas prioritaire pour la Milad)
qu'elle va d'une certaine façon régler. En effet, il est
désormais nécessaire pour les organisateurs de trouver des
endroits éloignés de tout voisinage pour ne pas alerter la
police. Ceci n'est en fait qu'un contournement du problème, puisqu'une
fois la free commencée il est très rare voir même
inconcevable que le nombre de décibels respecte une quelconque norme.
C'est donc le début du jeu du chat et de la souris,
toujours d'actualité, qui émerge entre les autorités et
les raveurs. La circulaire qui était censée mettre fin au
mouvement dans sa globalité et la consommation de drogue y étant
liée (que ce soit dans un contexte légal ou clandestin) a en
réalité beaucoup plus impacté la partie légale,
voir commerciale du mouvement. En parallèle, c'est le nombre de free
parties qui augmente de façon exponentielle en réaction au refus
constant des autorités de leur accorder la permission d'exister. On peut
encore ici constater des contradictions entre les motivations
juridico-politiques et leurs conséquences, puisque l'un des
33 Tessier L. (2003), « Musiques et fêtes techno :
l'exception franco-britannique des free parties », Revue
française de Sociologie, vol. 44, no 1, p. 63-91
34 Thibaud C. (18/06/1998), « Faut-il avoir peur des
raves ? », L'Express n°2450, p. 98
28
problèmes de ces regroupements illégaux est
qu'elles ne sont pas tenues (entendez qu'elles ne sont pas régies par
une entité reconnue par l'Etat et soumise à ses lois) et qu'on
assite par conséquent à des dégradations importantes
notamment en ce qui concerne la pollution et l'atteinte aux droits de
propriété. La majorité des sound-systems évoluant
dans le milieu free « par défaut » diffusent cependant un
discours de responsabilisation auprès de leur public et mettent
même en place des actions spécifiques. Il n'est donc pas rare de
voir la possibilité d'échanger un sac poubelle plein (qui sont
d'ailleurs distribués par les sounds à chaque véhicule
arrivant sur l'évènement) contre une bière, ou bien encore
des coupures dans la diffusion du son pendant lesquelles tout le monde est
invité à faire peu de ménage. Finalement, on observe un
basculement assez conséquent du mouvement vers les free parties, qui
sont estimés en 1997 à environ 80035.
b. Amendement Mariani et Loi Sécurité
Globale
Cela continua jusqu'en 2001, moment où les rave parties
n'étaient pas encore vraiment illégales à proprement
parler. Le champ d'action des élus est restreint au refus de donner
l'accès aux installations publiques et au fait d'arriver au début
de la fête dans la mesure du possible, mais il n'existe encore aucun
moyen réel de contraindre les organisateurs à mettre fin à
l'évènement une fois celui-ci débuté. Lionel
Pourteau a confié : « Jusqu'à la loi Mariani-Vaillant, les
rapports avec la police ou la gendarmerie étaient bon enfant. Si elles
le pouvaient, celles-ci essayaient d'empêcher l'installation. Sinon,
elles laissaient faire jusqu'au dimanche midi en devenant peu à peu de
plus en plus menaçantes. Il fallait alors négocier une heure
d'arrêt. »36 Les interruptions violentes ou quelques peu
musclées sont toutefois bien existantes, comme le prouve le
député-maire UDF Charles Amédée de Courçon
qui « face à cette figure radicale de l'altérité
» que représentait pour lui les teufeurs, ne manqua pas de
demander au préfet de donner l'ordre à la police de disperser les
participants d'une free party en leur tirant dessus37. Fort
heureusement, ce genre d'actions restent exceptionnelles.
C'est au printemps 2001 que les choses vont commencer à
s'accélérer, lorsque le député RPR Thierry Mariani
dépose un projet de loi ayant pour but d'encadrer les rave en
général (bien que
35 Thibaud C. (18/06/1998), « Faut-il avoir peur des
raves ? », L'Express n°2450, p. 98
36 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 68
37 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 43
29
ce soit en réalité les free parties qui sont
visées, un levier d'action efficace concernant les rave étant
déjà existant). En théorie, ce texte permet simplement
d'imposer un régime d'obligation préalable à
l'organisation de soirées techno, mais en réalité il offre
des moyens légaux d'interrompre ces dernières par la force en les
faisant hors-la-loi par défaut et légalisant des recours «
pragmatiques » pour y mettre fin.
Ce dernier ne lésinera pas sur les constatations
dramatiques : « Il y a régulièrement des morts dus
à des accidents ou à des overdoses. Nous devons protéger
notre jeunesse, malgré elle, de ce danger. ». Ces dangers
énoncés sont en réalité loin d'être si
évidents. Il n'y a cependant pas que cette protection de la jeunesse
contre elle-même qui semble être à l'origine de tout cela,
comme le soulignent Renaud Epstein et Astrid Fontaine : « ce
député s'était signalé au cours de la
législature par le dépôt de plusieurs propositions de loi
et amendements particulièrement favorables aux établissements de
nuit (bars et clubs)38 ». M. Mariani est en
réalité très lié au milieu des boites de nuits du
Sud-Est français (il s'en servira d'ailleurs comme défense lors
d'une interview à Valeurs Actuelles à l'accusation d'être
contre la liberté culturelle, en avançant qu'il a lui-même
été DJ en club à Aix39) qui se plaignent
beaucoup de la concurrence déloyale que représentent ces
évènements, à tel point que beaucoup voient alors en ce
projet de loi une action clientéliste. Toutefois cela restait pour
certain une nécessité, à l'instar de Jean-Christophe
Videlin : « les attributions du maire étaient juridiquement
suffisantes mais concrètement insuffisantes pour empêcher ou
encadrer une rave-party40 ». A cette époque, son pouvoir
de police administrative ne permettait donc pas l'interdiction des
manifestations dont il n'était pas préalablement
informé.
A l'assemblée, l'amendement fait débat. On
observe une transcendance des clivages politiques due à la sortie des
sentiers battus de cette problématique. Du côté des
partisans, on a la volonté de protéger les citoyens du tapage
aussi bien que les jeunes d'eux-mêmes, et du côté des
détracteurs il ne s'agit ni plus ni moins d'une disposition
sécuritaire n'ayant pas lieu d'être visant un mouvement avant tout
festif. On en fait trop ou pas assez, ce qui est sûr c'est que personne
ne reste indifférent. Il ne faut cependant pas oublier de prendre en
compte la portée électoraliste des discussions selon le but
recherché : plaire aux parents ou aux jeunes, aux populations urbaines
ou rurales.
38 Lafargue De Grangeneuve L. (2010), L'Etat face aux
rave-parties, les enjeux politiques du mouvement techno, Toulouse, ed.
Sociologiques, Presses Universitaires du Mirail
39 Pochat J. (11/10/2007), « Mariani le rebelle »,
Valeursactuelles.fr
40 Lafargue De Grangeneuve L. (2010), L'Etat face aux
rave-parties, les enjeux politiques du mouvement techno, Toulouse, ed.
Sociologiques, Presses Universitaires du Mirail
30
C'est alors qu'apparaissent les premières
manifestations dans les grandes villes françaises, bien qu'elles
n'attirent que quelques milliers de participants (un très faible
pourcentage si on tient compte du nombre d'adeptes à cette
époque). On notera la volonté d'apaisement du gouvernement par le
retrait de l'amendement initié par Lionel Jospin fin juin 2001.
Cependant, de par la médiatisation qui a découlé de ces
débats qui perdurent ainsi qu'après l'attentat du 11 Septembre,
le contexte politique déjà assez sécuritaire le deviendra
encore plus. L'amendement Mariani en profitera pour se faire
discrètement réintégrer à l'article 53 d'un projet
de loi plus large nommé Loi de Sécurité Quotidienne (LSQ)
ayant un champ d'actions allant jusqu'aux rassemblements dans les cages
d'escaliers. Il traite des « rassemblements festifs à
caractère musical » et demande qu'ils fassent l'objet d'une
déclaration préalable au préfet responsable. Une certaine
limite est cependant posée par le Conseil d'Etat, faisant en sorte que
seuls les rassemblements de plus de 250 personnes soient touchés. C'est
cependant quelque chose de bien maigre si l'on prend en compte le
caractère liberticide de ce « plancher » de 250 personnes,
représentant une atteinte au droit de réunion.
Il est possible de contester la légitimité de
cet article 53 pour au moins 2 raisons. Premièrement, lors de la
production de cette loi il a été établi qu'aucune
consultation d'éventuels organisateurs de free parties ou de quelqu'un
ayant un quelconque lien avec le mouvement n'ait été faite de la
part des fonctionnaires41. Si cela avait été le cas,
il est probable que nombres d'incompatibilités légales auraient
pu être évitées. Malheureusement, il n'y a aucune
obligation pour le législateur de procéder à des
entretiens avec les entités faisant l'objet de la loi.
Deuxièmement, à l'époque il est constaté par
certains juristes que cette disposition a en réalité plus de
similitudes avec un régime d'autorisation. En effet, dans le cas
où il estime qu'aucun problème de sécurité ou de
trouble à l'ordre public n'est à déclarer, et que
l'évènement peut se dérouler sans accrocs, le
préfet doit délivrer un récépissé. A
l'inverse, dans le cas d'un avis négatif ou tout simplement d'une
absence de réponse, celui-ci sera déclaré illégal
s'il est maintenu. Le souci, c'est qu'il est en réalité
constamment possible de trouver une raison à l'annulation d'un
regroupement festif, que ce soit un souci d'infrastructure, de
sécurité, de trouble à l'ordre public ou autre.
Il sera en effet confié plus tard par Emmanuelle
Mignon, à ce moment conseillère juridique du ministre de
l'Intérieur, que cet article permettait surtout
d'interdire42. Cette façon de faire usant à tout va de
déclarations préalables sera d'ailleurs plus qu'adoptée
par les autorités puisqu'on la retrouvera dans des contextes bien
différents de celui de la free party, due à sa grande
41 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 80
42 Idem
31
efficacité43. En effet, entre la mise en
place de la LSQ en octobre 2001 et mai 2003 lors du premier teknival
organisé conjointement avec l'Etat, sur la totalité du territoire
français aucune soirée techno ne se sera vu accorder une seule
autorisation.
c. La répression des free parties...
Jusqu'à ce moment-là, on ne pouvait pas encore
noter de confrontation directe entre les forces de police ou de gendarmerie et
les teufeurs, cela va vite changer. Une période nouvelle arrive,
marquée par la LSQ, durant laquelle n'importe quel type de regroupement
techno est aussitôt soumis à l'illégalité. Bien que
comparées aux mesures prisent dans le même contexte par la Grande
Bretagne les dispositions légales adoptées en France ne semblent
pas aussi prohibitionnistes, elles ne sont en réalité pas moins
dangereuses pour les amateurs de free. Nombre de leviers sont à la
disposition des autorités souhaitant mettre fin à une
soirée, et celui faisant le plus de ravages permet aux gendarmes la
saisie des « caissons » (sorte de grosses enceintes) ainsi que de
tout le matériel nécessaire à la diffusion de la musique.
Ce nouveau risque touche directement le capital économique du mouvement,
débouchant sur des effets dévastateurs.
La conséquence directe de la LSQ est de rendre
systématique l'interruption de la soirée en cours par les
autorités. Alors qu'avant, les force de l'ordre ne pouvaient que laisser
libre court à la soirée et seulement négocier un
arrêt de la musique aux premières lueurs du jours, elles ciblent
désormais le centre de la fête et font saisir, ou au moins
interrompre le son. Cette technique est dans les faits on ne peut plus efficace
tout simplement car privés de ce pourquoi les participants sont venus,
c'est-à-dire de la musique, ils n'ont alors plus de raison de rester et
quittent donc les lieux assez rapidement.
Seulement, ces arrêts brusques sont en
réalité assez dangereux pour les participants. En effet, pour les
consommateurs de produits stupéfiants, Lionel Pourteau précise
que cette fin précipitée de la fête peut donner lieu
à des bad trips puisque cela ne permet pas une
évacuation normale de la drogue par l'organisme, qui est habituellement
lente et progressive44. En plus de ces potentiels bad trips, il y a
bien entendu la dangerosité de faire reprendre la route à ces
teufeurs sous l'effet de psychotropes ou de l'alcool tard dans la nuit
là où le corps cherche d'habitude le sommeil,
43 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 81
44 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 85
32
sommés par les autorités de quitter
l'évènement. Bien entendu, si les forces de l'ordre constatent un
état bien trop élevé d'ébriété ou de
défonce ils demandent aux personnes concernées de se reposer dans
leur voiture. Cependant ces décisions sont prises au cas par cas
relevant de l'appréciation des autorités présentes. De
plus, les barrages routiers ne couvrent souvent pas toutes les sorties et
nombre de participants arrivent à quitter la free dans un état
totalement inadapté à la conduite.
Ces répressions, évidemment jamais
effectuées dans la joie et la bonne humeur que ce soit pour les
autorités ou les technophiles, ne sont pourtant que très rarement
violentes. Malheureusement, quelques évènements font faire parler
d'eux et contribuer à l'abandon ou la radicalisation de bons nombres de
teufeurs.
Connu pour être à l'origine de pas moins d'une
quarantaine de free parties entre 96 et 99, Voodoo'Z Cyrkle, un collectif du
Sud-Ouest, s'offre un certain prestige au sein du mouvement. D'autant plus
qu'il est connu pour privilégier l'aspect musical au détriment de
la consommation de drogues, proscrite. Avec un quota de presque une free par
mois, il fait tourner la tête des gendarmes locaux qui décident un
beau jour de mettre définitivement fin à leurs rassemblements.
Après 8 mois d'enquêtes mais aussi d'infiltrations, menées
par une unité de 6 hommes, les domiciles des membres de ce collectif
sont perquisitionnés par la police et pas moins de 11 personnes sont
interpellées. Ils sont notamment accusés de délit
d'agression sonore, d'infraction à la SACEM, de travail
dissimulé, d'usage et détention de stupéfiants (trop peu
pour être destinés à de la revente) ainsi que
d'exploitation de débit de boisson sans autorisations. Même si
finalement le chef d'accusation d'infraction à la SACEM n'est pas retenu
(en effet, la musique de rave étant très souvent
improvisée en live et donc non couverte de droit d'auteur) ces membres
écopent de 10000 francs d'amende chacun, en comprenant 5000 avec sursis,
mais sont également interdit de présence dans n'importe quel
évènement de type rave ayant l'obligation de se présenter
au commissariat tous les dimanche matin. Au sein du mouvement techno cette
nouvelle se répand comme une trainée de poudre et devient dans
les représentations free l'image type de la répression aveugle de
l'Etat. Ces conséquences poussent les organisateurs à redoubler
d'effort pour trouver des lieux de regroupement suffisamment dissimulés
pour ne pas entrainer leur découverte et donc l'intervention des
autorités. Ces recherches vont cependant parfois un peu trop loin,
à l'instar de Ben Lagren qui se verra écoper de 191 000€
d'amende pour la tenue d'une free party dans une grotte sans avoir pris en
compte les risques d'éboulements ou
33
d'intoxications au monoxyde de carbone45. D'autres
évènements notoires vont également servir à la mise
en récit et à la diffusion d'une histoire commune de la
répression. Ces derniers serviront de base tangible dans les discours
des organisateurs, se définissants comme les victimes de ce conflit.
Pour les organisateurs, c'est donc avec la boule au ventre
qu'ils organisent leurs soirées, jamais à l'abri des effets
dévastateurs de la LSQ et de se voir saisir tout leur matériel
sonore, ce qui aura un effet considérable sur l'enthousiasme
général en comparaison aux débuts du mouvement. Si ces
saisies sont les plus grosses craintes lors de ces évènements,
c'est parce le matériel en question constitue l'essentiel du patrimoine
des sound systems, que ce soit économiquement parlant (il y a pour
plusieurs milliers d'euros de matériel) ou culturellement parlant, la
musique étant la base du mouvement. Il faut savoir que pour que ces
mesures aient un réel effet, le matériel saisi n'est quasiment
jamais rendu, ou alors gardé suffisamment longtemps pour faire retenir
la leçon. Représentant une arme économique redoutable, due
aux coûts plus qu'onéreux du matériel et à la
difficulté d'en racheter, ces actes de répression mettent bien
souvent un terme définitif à l'activité des sound systems
concernés ainsi qu'à leurs existences même en tant que
groupe social.
Déjà loin d'être évidentes, ce ne
sont pas ces nouvelles méthodes d'intervention qui vont faciliter les
actions des forces de l'ordre, toujours largement dépassées en
nombre et provoquant lors de leur arrivée non désirée au
coeur de la fête une certaine tension de la part des teufeurs. Existant
à l'origine un certain rejet réciproque entre ces deux groupes
sociaux, les négociations déjà compliquées et peu
courtoises avant la création de la LSQ, elles s'effectuent maintenant
dans un contexte d'animosité accrue.
d. ...menant à leurs radicalisations
Bien qu'elle touche d'abord les évènements
légaux, il a bien été démontré ici que cette
répression de l'Etat est à l'origine de la clandestinité.
Il est indéniable que techno et marginalité soient liées
dû au fait qu'à l'origine, c'est effectivement une population
marginale qui s'est appropriée cette musique. Cependant, bien que
l'illégalité se soit développée comme une sorte de
sous culture de la techno, sa signification conventionnelle étant
constamment mise en avant elle appelle en réalité une population
préalablement en rupture avec la société : « A
partir du moment où une opposition institutionnelle s'est
créée et où la fête techno a cherché à
se
45 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 94
34
maintenir contre les pressions, elle a
bénéficié de l'aura de la transgression et de la dimension
libertaire46».
C'est en fait une situation assez classique, démontrant
un cercle vicieux où plus la répression des rave sera grande,
plus elles consolideront leur allure contestataire et politique,
s'enfonçant dans la clandestinité, plus elles appelleront des
populations idéologiquement en marge (tel les travellers, alors
plutôt qualifiés de « punk à chiens »). A cause
de cela, ceux pouvant avoir un attrait pour ce mouvement et faisant partie de
groupes sociaux plus « intégrés » et donc ayant plus
à perdre, vont petit à petit délaisser ces
regroupements.
Une free party
Cela va déboucher sur une politisation partielle du
mouvement. On assistera alors à des actions coups de poings, à
l'instar de l'Heretik sound system, qui choisiront les lieux de leurs
évènements de manière idéologique et s'attaqueront
à des symboles au lieu de trouver des lieux en fonction de
critères pratiques et esthétiques. Ils seront notamment à
l'origine d'une rave clandestine dans les sous-sols de Bercy, mais leur action
la plus importante est indéniablement l'investissement de la piscine
Molitor située au plein centre du tranquille et fortunée
16e arrondissement de Paris. Cette fête rassemblera presque
5000 teufeurs et se déroulera sous le nez de la police qui n'a rien pu
faire pour l'endiguer, craignant une émeute47.
46 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 85
47 Raclot-Dauliac D. (2013), «Heretik - We had a
dream»,
https://www.youtube.com/watch?v=HB4R-yN1nBk
35
Pour en revenir aux saisies, elles ont également une
portée symbolique dans le sens où elles touchent la raison
même du mouvement. C'est en réalité assez ironique car bien
que comme le fait remarquer Renaud Epstein, ce mouvement s'est
développé aisément suite à l'apport de la
technologie48, ce dernier constitua en même temps son
principal point faible car les saisies et confiscations sont faciles à
entreprendre.
Une scène de liesse en free party
Si cette répression est aussi efficace, c'est
principalement que cette culture de la free avait pour principale
représentant sociologique une population assez jeune, qui était
par ailleurs suffisamment intégrée pour avoir trop à
perdre en cas d'opposition violente mais ne l'était cependant pas assez
pour réussir à s'organiser dans le but de défendre son
espace culturel, sans compter le fait qu'elle n'avait par-dessus le
marché aucun pouvoir économique pour faire la
différence49. Une grande partie de cette culture a par
conséquent été annihilée par cette
répression. A cet égard, Loic Lafargue de Grangeneuve pose une
différence nette entre la pré-LSQ marquant une faible
répression des free parties et autre regroupements illégaux, et
la post-LSQ où les consignes de répression font monnaie courante.
En termes de chiffres, 582 free parties sont répertoriées en 2000
contre 712 en 2001, 372 en 2002 étant la première année ou
la LSQ s'est vue appliquée, et enfin seulement 275 en
200350.
48 Epstein R. (03/2004), « Villes défaites
», Vacarme (n° 28), pp. 15-19
49 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 136
50 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 90
36
Les Heretik envahissent la piscine Molitor
En temps normal, dans la gestion des problèmes publics
l'Etat doit habituellement faire face à des revendications au sujet du
réagencement du cadre légal. Seulement, dans le cas de celui-ci
qui revendique simplement le droit d'exister du fait de sa culture
intrinsèquement libertaire, l'Etat ne peut agréer à cette
volonté tant elle s'écarte du cadre légal. En effet, il
s'agit là d'une réclamation du droit à la fête, mais
aussi en bonne partie du droit d'existence hors de la légalité.
« Ils n'ont pas d'attente messianique du type : « un jour viendra
où nous serons reconnus ». Ils ne veulent pas plus détruire
l'ordre existant. Pas d'attentat, pas de violence contre l'ordre ou l'Etat. En
fait, ils font ou souhaiteraient pouvoir faire comme si ce dernier n'existait
pas51 ».
e. L'Etat, maître du jeu
En somme, malgré les quelques années où
ils ont pu avoir lieux sans tenir compte de la sphère politique, les
rassemblements techno vont malheureusement rapidement subir cette
dernière. Confrontée aux problèmes provoqués par
ces rassemblements, comme le bruit et la drogue, elle
51 Pourteau L. (2012), Techno, une subculture en marge
2, Paris, ed. CNRS Editions, p. 91
37
choisit la manière forte et décide de faire
entrer ces rassemblements dans les carcans de la légalité, en les
détruisant. S'appuyant sur une argumentation du genre « S'il
n'y a pas de rave, il n'y a pas d'illégalité », les
politiques glaneront un succès global mais vont cependant entrainer
malgré eux bon nombre d'adeptes vers la radicalisation. Le
problème de ce mouvement est donc dû à son contact avec la
politique.
Pendant quelques années après ces
évènements, les free parties ont quasiment disparues. Cependant,
on observe l'apparition de teknivals (sorte de free parties géantes)
coorganisées par l'Etat et donc légales, réunissant
jusqu'à 90000 personnes par exemple en 2004 lors du premier «
Sarkoval ». Cependant ces dernières sont beaucoup trop
médiatisées et feront encore et toujours l'objet de plaintes
diverses et variées. Les relations entre forces de l'ordre et teufeurs
ne s'arrangent pas et les affrontements violents se font de plus en plus
fréquent, menant parfois à de graves blessures chez les teufeurs
et même parfois à la mort. On observera la première
manifestive (entendez manifestation festive et musicale) à Strasbourg en
2006, bien que malheureusement pas très efficace. Suite à des
retournements constants de veste de la part de l'Etat, on assistera à
d'autres évènements revendicatifs du genre comme les 3 ayant eu
lieu en 2013 à Rennes et Nantes, qui bien que réussis n'avaient
pas encore assez de portée. C'est en 2015 que le mouvement commence
à réellement faire parler de lui avec des manifestations
simultanées dans plus de 41 villes à la suite d'un
énième acte répressif de l'Etat. Enfin, les fameuses
manifestations organisées après le Maskarade de Lorient le 31
décembre dernier ont elles aussi fait parler d'elles, bien que
grandement étouffées et soumises à répression de la
part des forces de l'ordre. L'organisateur présumé de la free
party risque toujours 10 ans de prison.
Concernant ces évènements, mais également
les rave, on ne constate qu'aujourd'hui encore rien n'a vraiment
évolué et la culture techno est toujours soumise à des
répressions. Le 22 octobre 2019, une nouvelle proposition de loi a
été adoptée par les sénateurs ayant pour but de
renforcer l'encadrement des rave ainsi que les sanctions à
l'égard de leurs organisateurs52. Cette loi oblige les
organisateurs à déclarer les évènements de plus de
500 participants « auprès du représentant de
l'État dans le département ou, à Paris, du préfet
de police » un mois à l'avance. Ils devront également
mentionner dans cette charte « les mesures envisagées pour
garantir la sécurité, la salubrité, l'hygiène et la
tranquillité publiques, éviter les nuisances subies par le
voisinage et
52 Proposition de loi tendant à renforcer
l'encadrement des rave-parties et les sanctions à l'encontre de leurs
organisateurs, Proposition de Loi, 22/09/2019,
https://www.senat.fr/petite-loi-ameli/2019-2020/71.html?fbclid=IwAR2O4m1yRE5LNN8qIEhzSjiMqXYkzMx8Ay3f2-OibC0Vjx_N3w1S0j23CuU
38
limiter l'impact sur la biodiversité ». Dans
le cas où cette déclaration préalable ne serait pas faite,
ou faites contre « une interdiction prononcée par
le préfet du département ou le préfet de police à
Paris, ou le maire de la commune » les organisateurs s'exposent
à une amende de 3750€, une peine de travaux d'intérêt
généraux de 400h, la confiscation de l'ensemble de leur
matériel ainsi qu'à de la garde à vue et à des
sanctions complémentaires. Il y sera pointé du doigt par
Freeform, l'association de défense et d'organisation des free parties,
« une grave atteinte à la liberté de réunion »
ainsi qu'un manque notable de précisions entre ce qui caractérise
les free parties, rave parties, et fêtes techno en général
donnant une formulation bancale pouvant en réalité concerner tout
type de fête diffusant de la musique. En clair, cette loi oblige une
déclaration préalable pour tout rassemblement autour de la
musique dans un lieu n'y étant pas aménagé (salle de
concert, club, bar, etc...) qu'il s'agisse d'un mariage, anniversaire ou tout
autre évènement de plus de 500 personnes.
Alors, si ce qui est pleinement et ouvertement ciblé
par l'Etat et les politiques concerne les évènements
illégaux que sont les free parties, on remarque en réalité
une certaine volonté de toucher tout le secteur des musiques
électroniques. Même si cela peut être sujet à
confusion, certains politiques se montrant ouvertement contre tout type
d'évènement techno et d'autres tentant de faire bonne figure
auprès d'un électorat le plus large possible, certains signes ne
trompent pas. Notamment, le rejet de l'amendement visant à soutenir ce
secteur par le Sénat, dans la nuit du 16 au 17 Novembre 2020.
Proposé par Technopol et la Chambre syndicale des lieux musicaux,
festifs et nocturne (CSLMF), cet amendement visait à offrir 20 millions
d'euros aux musiques électroniques gravement impactées par la
crise de la Covid, dans le cadre du dernier projet de loi finances
rectificatives de 2020 visant à répartir 20 milliards d'euros
pour aider l'économie du pays face à cette crise. Olivier
Dussopt, ministre chargé des Comptes publics, a en effet estimé
que ce secteur culturel avait bénéficié de suffisamment de
soutiens financiers, bien que la musique électronique ait
été presque totalement délaissée par les derniers
plans d'action. Nous pouvons ici y voir au pire une volonté d'ignorer ce
secteur culturel, au mieux une totale ignorance de ce dernier de la part des
politiques. Ces derniers jugeront d'autres secteurs ou activités plus
nécessiteuses, comme par exemple les centres équestres et poney
clubs qui profiteront d'aides à hauteur de 35 millions d'euros. On
remarque donc que malgré un patrimoine culturel exceptionnel en termes
de musiques électroniques, la France décide continuellement de
renier les acteurs et amateurs de cette culture et du monde de la nuit en
général.
39
f. La répressions des festivals
Il n'a pas encore été fait mention des
répressions des festivals de musique électroniques, pourtant bien
présentes, mais beaucoup plus subtiles et en réalité assez
similaires au problème des rave. En effet, les festivals
diffèrent des rave de par leur légalité mais
également par leur système économique, bien plus
avantageux pour les acteurs externes au mouvement. Il est cependant
nécessaire ici d'appuyer le terme de musique électronique,
car cela a malheureusement son importance. Il est devenu tout à
fait normal aux yeux des participants de ces festivals, outre les forces de
sécurité nécessaires à tout type de regroupement en
fonction d'un certain nombre de personnes, de voir des hordes de policiers et
gendarmes que personne n'imaginerait jamais à l'entrée d'un
festival de jazz ou de musique du monde par exemple. Il ne serait pas non plus
imaginable pour ces participants aux festivals de musique
non-électronique de subir une deuxième fouille de la part de ces
forces de l'ordre après celle effectuée par les employés
du festival. Quand l'on cherche à savoir pourquoi, dans un cadre
similaire de structure et de fréquentation, il y a plus de forces de
l'ordre lors des rassemblements techno que les autres, on obtient seulement une
réponse du type « question de sécurité » ou
« prévention des risques ». En clair des réponses
globales et détournées. En réalité, c'est bien
encore une fois les participants de ces évènements qui
inquiètent. Bons nombres de festivals, à la base avec une
programmation entièrement réservée aux musique
électroniques, évoluent avec des programmations hybrides
composées de rap ou de « commercial » visant à toucher
un public plus large et varié dans le but de « diluer » le
public des musiques électroniques.
Nombres de festivals électroniques ont d'ailleurs
été annulés dans les derniers moments par les
préfets ou autres détenteurs de pouvoir pour ces mêmes
raisons sécuritaires ou préventives, alors que ces mêmes
raisons avaient été validées par cette autorité
quelques semaines, voire quelques jours avant. En effet, il est en
réalité fréquent pour ces préfectures ou structures
de voir d'abords les apports économiques d'un festival. Utiliser les
entreprises et artisans locaux, apporter du tourisme, de la visibilité,
etc... Ils vont donc avoir tendance à accepter assez rapidement.
Cependant quand ils se rendent compte de l'univers culturel autour de cette
musique ainsi que de la population qui sera présente, et souvent
poussés par des plaintes de locaux au sujet des nuisances sonores et
parfois très clairement de la classe sociale représentée,
ils décident de ne pas donner leur accord à l'organisation de ces
évènements et même parfois de les annuler en court de
préparation ou à la dernière minute. Ces volontés
d'étouffement viennent parfois même
40
de plus haut. L'été 2020 a été
catastrophique pour les festivals, des mesures diverses et variées ayant
été appliquées au niveau national et d'autres
également aux niveaux régionaux et départementaux. Les
festivals n'étaient cependant pas officiellement interdits mais soumis
à diverses règles de sécurités comme le port
obligatoire du masque, une distance de sécurité, mais surtout une
jauge de 5000 personnes maximum. Pour la plupart des festivals, ces mesures ou
cette jauge étant impossible à respecter, ils n'avaient d'autres
choix que de reporter leur édition 2020 à l'année 2021 ou
bien après septembre 2020 (ceux ayant fait ce choix reporteront
finalement à 2021). Lors d'un entretien téléphonique (qui
n'était initialement pas destiné à servir ce
mémoire) avec le directeur du Positiv Festival (festival consacré
aux musiques électroniques) qui s'avéra être l'un des seul
à avoir eu lieu durant la saison estival de 2020, il m'a
été confié que malgré le suivi à la lettre
des règles imposées, la demande faite à la
préfecture pour la tenue du festival a été refusé
car selon eux « la population du festival Positiv n'est pas apte à
respecter les règles imposées » et n'ont d'autre choix que
de demander l'annulation du festival. Ces propos discriminants ont
été utilisés par la suite par les avocats du festival lors
d'affaires juridiques débouchant sur une autorisation au bon
déroulement du festival. Malgré cet accord, d'autres bâtons
ont par la suite été mis dans les roues du Positiv Festival
puisque 3 jours avant le jour J on les obligea à abaisser leur jauge de
participants de 5000 à seulement 1500. L'évènement s'est
tout de même déroulé sans encombre, les participants
étant restés assis et masqués durant toute la durée
du festival.
Les festivals se sont réellement sentis
abandonnés durant cette période et c'est toujours le cas
aujourd'hui, le dernier coup de gueule en date étant l'annonce de la
tenue des festivals pour l'été 2021, à conditions de
respecter une jauge de 5000 personnes maximum qui devront rester assises, mais
également de ne proposer à la vente ni boissons ni nourriture.
Annoncée avec beaucoup de satisfaction par la ministre de la Culture
Mme. Bachelot, cette annonce a été beaucoup moins bien
reçue par les acteurs des festivals de musique actuelles en
général et spécifiquement par les festivals de musique
électronique. Outre la jauge de 5000 personnes n'étant tout
simplement pas supportable pour certaines structures accueillant initialement
plusieurs dizaines de milliers de festivaliers, c'est l'impossibilité
logique de rester assis durant ce genre d'évènement qui pousse
déjà beaucoup de festivals à reporter une fois de plus
leur édition à l'année suivante bien que ces mesures
soient « soumises à évolution en fonction de la crise
sanitaire ». Tous ces festivals, entre autres à travers des
tribunes comme « Festivals 2021, on y
41
croit !53 » et d'autres communiqués,
dénoncent une totale ignorance de l'Etat envers la jeunesse et la
culture électronique. Bien que cela ne puisse être reconnu comme
des actes de répression en soi, ils montrent bien l'intérêt
faible que porte l'Etat à l'égard de la culture techno.
C. Les outils marketing et stratégie de
communication des festivals de musique électronique en France
1. Le marketing
a. Ce qui est recherché dans un festival
Outre la programmation des festivals, offrant toujours la
possibilité de voir un grand nombre d'artistes réunis au
même endroit, les festivals de musiques actuelles sont perçus par
les individus comme un lieu d'expression personnelle. Pour un festivalier, ces
évènements sont synonymes d'évasion, de sociabilisation
ainsi que de transformation physique et mentale. En effet, les individus
perçoivent les festivals comme des lieux hors du monde, des
parenthèses dans leur vie, en ce sens les festivals de musiques
actuelles sont une source d'évasion. Dans une société
où les situations stressantes sont de plus en plus nombreuses et les
occasions d'évacuer ce stresse beaucoup moins présentes, et
où la routine du quotidien commence à peser sur le moral, ces
festivals représentent une formidable alternative. Ils offrent un cadre
particulier et unique à leurs participants en leur offrant la
possibilité de quitter leur vie ordinaire pendant un court moment et par
la même occasion de laisser derrière eux les soucis du quotidien.
Pendant quelques jours ou quelques nuits, ils se retrouvent immergés
dans un monde où ils peuvent se laisser aller. Ces
évènements constituent un espace-temps unique, où chacun
peut se comporter comme il l'entend, faire ce qu'il veut, sans aucune crainte
d'être jugé.
L'une des nombreuses particularités des festivals de
musiques actuelles est la totale destruction des distinctions sociales,
favorisant ainsi la création de ce qui est appelé une «
hypercommunauté temporaire » et qui est d'ailleurs un argument
marketing intrinsèque aux festivals. Il s'agit d'une communauté
d'individus ne se connaissant pas, mais se rassemblant pourtant
spontanément dans
53 Festivals 2021, pourquoi on y croit : les festivals
déterminés, Tribune, 27/11/2020,
https://www.touslesfestivals.com/actualites/festivals-2021-pourquoi-on-y-croit-les-festivals-determines-271120,
consulté le 17/03/2021
42
le but de vivre une expérience forte, et qui est par la
suite dissoute à la fin du festival et donc de l'expérience. Les
festivals exacerbent la sociabilisation. Etant donné que la classe ou le
statut social de chacun est moins, voir plus du tout visible, tous les
festivaliers sont par conséquent sur un pied d'égalité,
favorisant ainsi les échanges. Il n'y a plus ni avocats, ni cadres, ni
agriculteurs ou sans emplois, mais uniquement des festivaliers partageant un
même moment, une même expérience. Le collectif est
également une force des festivals pour créer cette
expérience. Les individus peuvent par exemple ressentir un puissant
enthousiasme pour n'importe quel artiste grâce à un effet de
contagion. Ces derniers ne sont pas de simples musiciens, ce sont des stars,
voir même des héros pour certains, à qui les festivaliers
viennent rendre hommage. Dans ces festivals, tout est plus intense, vécu
plus fort et exagéré. C'est cet aspect de collectivité, et
même d'unité, qui rend l'expérience des festivals si
puissante sur le plan émotionnel. Les festivals connaissent très
bien cet aspect de leurs évènements, et font leur possible pour
rendre cette hypercommunauté encore plus attrayante, en la mettant en
avant lors de leur communication.
Enfin, la taille de la foule permet aux festivaliers de se
sentir anonymes, et se sentent ainsi insignifiants, perdus dans la masse.
Alors, comme ils peuvent passer complètement inaperçus, ils
peuvent prendre certaines libertés sur leur façon de s'habiller,
sur leur comportement, ou encore sur leur façon de danser étant
donné qu'ils ne seront pas reconnus. Ces transformations physiques,
assez poussées pour certains et pouvant donc être pointées
du doigt en société, sont totalement banales dans ces festivals
et participent même au sentiment de vivre une expérience
libératrice. Aussi important qu'une tenue traditionnelle chez une
certaine culture, cette expérience festivalière est
marquée par ce changement d'apparence unique marquant le
détachement du quotidien. Chacun s'échappe des codes de bonne
conduite quotidiens pour expérimenter la liberté. D'ailleurs, on
constate que cette expérience d'un look différent permet la
création d'une véritable homogénéité dans un
festival, ce qui consolide encore la force du collectif et le sentiment
d'appartenance. Ici encore, cela représente des arguments marketing mis
en avant par les festivals. Beaucoup cherchent en réalité
à préserver cet aspect communautaire créé pendant
le festival, surtout durant la saison post-festival, comme par exemple le
Hellfest avec son groupe de fan Hellfest Cult sur Facebook.
Quand ils quittent ce lieu d'expérience, les
festivaliers se réadaptent petit à petit à une vie «
normale » sans pour autant redevenir « comme avant ». Le
festival les a fait évoluer sur plan mental. Ils ont lâché
prise pendant quelques jours, ont pu réduire et même briser des
barrières sociales, rencontré des personnes à qui ils
n'auraient jamais adressé un regard dans d'autres circonstances. Ils ont
vécu quelque chose de fort, une expérience certes musicale sur le
papier,
43
mais une expérience sociale et émotionnelle
intense sur le plan humain. Ils ont expérimenté la vie de
festivalier. Ici encore nous sommes face à un argument marketing, la
promesse d'un changement drastique dans notre manière d'être, de
nous comporter, de penser. Ces festivals garantissent de vivre quelque chose de
différent apportant une sorte de parenthèse dans la vie des
festivaliers. Peu importe le festival, dans tous les cas ils ne seront pas
déçus.
b. Le marketing culturel
Vous l'aurez donc compris, ce que recherche un festivalier
c'est une expérience, et non un simple produit ou service
périssable. Cependant, d'un point de vue marketing, les festivals
doivent quant à eux vendre un produit (leur festival) sous forme
d'expérience. Etant lié en plus de cela au domaine culturel, il
convient alors d'adapter un peu son marketing « conventionnel » vers
un marketing culturel. Le marketing culturel possède évidemment
nombre de similitudes avec les démarches marketing utilisées par
toute structure non culturelle. Cependant, les missions spécifiques
découlant des institutions artistiques et culturelles vont engendrer des
particularités dans leur démarche, dues aux caractères
artistiques, culturelles et sociales de ces missions. Et notamment, alors que
le marketing traditionnel sera plutôt orienté marché, le
marketing culturel est quant à lui plutôt orienté produit.
Le marketing culturel peut se définir comme l'art de toucher les
segments de marché susceptibles de s'intéresser au produit. Pour
cela, il faut jouer sur différentes variables comme la communication, la
distribution ou encore le prix, dans le but de mettre le produit en relation
avec un nombre suffisant de consommateurs et donc d'être en
adéquation avec les objectifs préalablement définis. Pour
cela, il faut adapter les moyens et méthodes marketing à la
culture, et plus précisément aux produits culturels.
Ce « produit » culturel peut caractériser
différentes choses, comme un évènement culturel (festival,
concert, spectacle de danse, théâtre, etc.) ou bien encore comme
une oeuvre (disque, film, livre, etc.). Il résulte d'un moyen
d'expression provenant de l'un des domaines du champ culturel (musique,
cinéma, chorégraphie, lyrique, audiovisuel, etc.) Il est
caractérisé par un cycle de production qui intègre
à différentes échelles un travail artistique, ainsi que
par un processus de diffusion particulier. Ses propriétés sont
à la base de sa spécificité, mais également de sa
complexité dû à son intangibilité et son aspect peu
fonctionnel. Ce produit culturel est unique, possède une forte valeur
symbolique, est un vecteur d'hédonisme et d'esthétisme, et enfin
il existe dans une temporalité spécifique à la fois
durable, éphémère et chronophage. Ainsi, nous pouvons
parfaitement définir un festival comme un produit culturel qui sera donc
sujet à des
44
outils et des méthodes marketing. Dans ce cas
précis des festivals, la stratégie marketing à utiliser
dépendra grandement, voir majoritairement de leur positionnement.
Face à une concurrence de plus en plus importante (sur
les 100 plus grands festivals français, on observe en 2019 une
augmentation de 5% par rapport à 2018 et de 10% par rapport à
201754), l'organisation culturelle doit s'adapter. Les festivals de
musique, en tant que produits culturels, sont soumis à trois types de
concurrence : la concurrence avec les produits culturels de même type
(les festivals diffusant le même genre de musique), la concurrence avec
les produits culturels de type différent (un festival diffusant un ou
plusieurs genres différents) et enfin la concurrence avec les autres
produits culturels et de loisirs (voyages, théâtre, concerts...).
De plus, ils ne sont pas comparables aux autres produits pour trois raisons :
une consommation de produit culturel implique la capacité et la
volonté d'y consacrer son temps. Il s'agit aussi bien d'un
investissement d'argent que de temps. C'est un bien « expérientiel
», qui n'est donc évaluable qu'à l'usage, et qui touche
à l'aspect hédonique et affectif du public plutôt que leur
aspect utilitariste. Enfin, le marché culturel se compose de
différents segments qui, comme les autres marchés,
répondent aux mêmes qualités : rentables, mesurables,
stables dans le temps, etc. Les entreprises culturelles que sont les festivals
de musique suivent les mêmes genres de stratégie : la segmentation
différenciée, indifférenciée, ou de niche.
Tandis que le marketing traditionnel est plutôt
orienté marché, consistant à déterminer les
attentes des consommateurs pour adapter l'offre en adaptant le produit ou l'une
de ses variables, le marketing culturel quant à lui consiste à
trouver le consommateur en fonction du produit culturel, possédant
déjà une identité propre, et non à confectionner ce
produit en fonction du consommateur. Les festivals partent de leur
identité et de leurs valeurs puis cherchent le public le plus à
même de s'y intéresser. Il s'agit donc d'un marketing
centré sur le produit.
Pour un festival de musique, le positionnement est donc au
coeur de la stratégie marketing des organisations culturelles et
artistiques, représentant leur première source d'avantage
concurrentiel. Pilier de la stratégie marketing notamment en valorisant
l'offre culturelle et artistique, c'est ce sur quoi s'appuie la
déclinaison du marketing mix. Le positionnement c'est la capacité
à sortir du lot, à se différencier de ce qui se fait
déjà sur le marché. Et donc dans le cas des festivals,
même si ici il y a une différentiation simplement grâce
à la notion d'existence
54 Festivals de musique : un bilan 2019, Lehalle E.
(16/01/2020),
https://www.nouveautourismeculturel.com/blog/2020/01/16/festivals-de-musique-un-bilan-2019/,
consulté le 10/04/2021
45
(chaque festival étant différent d'un autre, les
expériences ne sont jamais identiques), il convient pour cela d'avoir
une connaissance du marché. Connaitre les caractéristiques des
projets en place, la cartographie des festivals sur un territoire, le
calendrier global, etc. sont des facteurs à analyser pour garantir le
succès d'un festival. Les réseaux d'acteurs du milieu
(sociétés de production, associations, réseaux et
organisateurs de festivals, institutions culturelles...) ainsi que la
présence sur le plan culturel comme sur le plan médiatique (sites
internet spécialisés) sont notamment des actions indispensables
à l'identification du marché et pour parvenir à cet
objectif de différenciation. Les axes de différenciation et
d'identification majeurs du produit culturel se situent dans ses
qualités objectives, ses attributs imaginaires, symboliques ou
affectifs, mais aussi dans la cible visée par ce produit (autrement dit,
le groupe de personnes à qui le produit est censé
particulièrement convenir). Les critères de sélection du
positionnement peuvent également être impactés par les
attentes du publics, les atouts potentiels du produit considéré,
ou encore le positionnement des concurrents, ces informations pouvant
être révélées grâce à des études
de marché. Ainsi, il est possible d'établir une offre centrale,
autour de laquelle viendront s'agrémenter des offres
spécifiques.
L'offre centrale du produit culturel, c'est-à-dire dans
le cas des festivals la programmation, en relation avec l'identité
artistique du projet, représentera la clé de voute sur laquelle
jouera le programmateur pour mettre des étoiles dans les yeux des
festivaliers. Parmi les styles de musique existants nous pouvons en distinguer
beaucoup, comme la pop, l'électro, le hip-hop, le rap, le reggae, le
rock en encore plusieurs dizaines d'autres. C'est dans cette diversité
de styles musicaux que se jouera le premier gros choix d'un festival : la
segmentation. Il leur faut en effet choisir le style, ou les styles, qui seront
représentés et qui détermineront donc une grande partie de
l'identité du festival.
c. Les segmentations marketing en festival
Pour créer l'affiche, certains festivals peuvent miser
sur le mélange de différents styles, comme nous pouvons le voir
dans beaucoup de grands festivals de musiques actuelles55 (les
fameuses grosses entreprises abordées précédemment). Sur
leurs affiches sont très souvent, voir
55« Les musiques actuelles sont une appellation assez floue
du ministère de la Culture français, qui caractérise et
regroupe les différents styles musicaux de la fin du XXe siècle,
début du XXIe siècle. Elle regroupe quatre grandes familles
musicales, à savoir la chanson, le jazz, les musiques amplifiées
et la musique traditionnelle (si elle est accompagnée d'instruments
modernes tels que la batterie ou la guitare basse...). Cette appellation n'est
pas véritablement satisfaisante car elle entend non "musique actuelle"
mais "musique populaire actuelle. » D'après le site web
culture41
46
exclusivement présents des groupes ou artistes
classés au « hits parades ». Il s'agit d'une
compétition en continue des musiques populaires organisée par
diverses chaines de radio ou de télévision. Un « hit »
représente une chanson ayant eu un succès objectivement flagrant,
autrement dit ayant atteint des sommets de vente et été
diffusé sans modération sur des radios généralistes
populaires (NRJ, Fun Radio, Skyrock, Radio Nova, Oui FM, etc...). Il est en
effet nécessaire de préciser que les plus grands festivals (grand
signifiant ici accueillant le plus de personnes) proposent de la musique «
populaire ». En France, les plus gros festivals diffusant ce genre de
musique sont notamment les Eurockéennes, Solidays, les Francofolies de
La Rochelle ou encore le Printemps de Bourges. Ces festivals sont d'ailleurs
dans les 15 plus important en France. En 2019, ces festivals ont
comptabilisé à eux quatre 705000 festivaliers, soit 9,4% des 7,5
millions de festivalier cette année-là en France56.
Cette catégorie de musique actuelle symbolise une musique de masse,
jouissant de la plus grande popularité (d'où l'appellation de
musique « populaire »). En effet, la musique populaire se
caractérise avant tout comme la musique la plus consommée dans
les pays industrialisés et influencés par le monde occidental. On
y retrouve les groupes ou artistes des principaux styles musicaux comme la pop,
dance, rock, jazz ou électro étant universellement connus. Se
basant sur des critères déjà établis, ils peuvent
généraliser les études de marché pour s'assurer
d'attirer le plus grand nombre de personne dans le but de générer
un maximum de profit, car c'est un effet le but premier de ces festivals. Il
leur est bien plus simple d'identifier leur cible, puisqu'elle est
déjà existante, mesurable et utilisée par d'autres
institutions comme la radio ou la télévision, et ont uniquement
à s'adapter en fonction de l'évolution du Hit-Parade, de
l'apparition de nouvelles pépites, et du déclin des artistes se
faisant remplacer au pied levé. Ces facteurs révélant
intrinsèquement la volonté du public, la tâche la plus dure
les concernant sera de décrocher un contrat avec ces artistes ou groupes
populaires le plus rapidement possible et au moindre coût. Ces festivals
ont choisi la segmentation indifférenciée, cherchant à
toucher un public le plus large possible avec un positionnement central sur des
musiques plaisant à une « masse ».
Fort heureusement, d'autres festivals décident de baser
leur positionnement sur un aspect plus culturel qu'économique, et misent
sur un ou plusieurs genres musicaux en accords avec leur identité
originelle. Pour citer quelques festivals avec plusieurs genres musicaux, nous
retrouvons par exemple le festival Beauregard et Main Square avec leur
programmation Pop / Rock
56 Festivals de musique : un bilan 2019, Lehalle E.
(16/01/2020),
https://www.nouveautourismeculturel.com/blog/2020/01/16/festivals-de-musique-un-bilan-2019/,
consulté le 10/04/2021
47
(respectivement 108000 et 115731 festivaliers en 2019,
17e et 16e festival français en termes de
fréquentation57). Ces festivals ayant adopté une
segmentation différenciée, c'est-à-dire ciblant quelques
catégories de public au lieu de viser la majorité. Enfin, nous
retrouvons les festivals ne représentant qu'un seul genre musical. Pour
en citer quelques-uns, nous avons notamment le Hellfest et sa programmation
100% rock (180000 festivaliers en 2019, 9e festival
français58), le festival Interceltique de Lorient
basée uniquement sur les musiques et la culture Celtes (800000
festivaliers, 1er festival français59), ou bien le
festival Nordik Impact de Caen offrant une affiche exclusivement
électronique. Ces festivals ont adopté une segmentation de niche,
c'est-à-dire qu'ils visent essentiellement les amateurs du genre musical
représenté. D'ailleurs, on observe d'année en année
que les publics de festivals sont de plus en plus attirés par la
spécialisation et la différenciation. Sur les 100 plus gros
festivals de musique français en 2019, ces festivals avec un genre
musical clairement défini et arboré en représentent plus
d'1 sur 3 (37%)60. Ces festivals cependant accordent leur offre
centrale musicale à d'autres types de produits culturels, comme le
festival Art Rock qui propose des spectacles de rue ainsi qu'une grosse
exposition d'arts numériques. D'ailleurs, ces festivals de niche
comprennent aussi des festivals avec une offre centrale autre qu'une
spécialisation musicale représentant 9% des 100 plus gros
festivals français, faisant ainsi passer les 37% abordés
précédemment à 46%. En effet, la spécificité
des festivals de musique français est grandement dû à leurs
engagements, qui peuvent être écologiques (We Love Green, Terres
du Son, Climax Festival...), solidaires (comme les Solidays qui aide à
la lutte contre le sida), ou encore politiques (comme la Fête de
l'Humanité, 450000 festivaliers en 2019 soit le 2e festival
français61). Ils utilisent leur notoriété pour
sensibiliser le public à différentes causes. Ils sont d'ailleurs
de plus en plus nombreux à proposer des choses différentes du
programme musical comme des conférences, des talks, ou encore des
rencontres avec des personnalités extérieurs au monde de la
musique. Ils essaient de se différencier de leurs concurrents qui
choisissent de tout miser sur la musique, et ces opérations marketing
sont de plus en plus appréciées.
On a beaucoup tendance à juger de la qualité
d'un festival par sa fréquentation, ou encore à se dire qu'un
festival avec une segmentation indifférenciée attire plus de
monde qu'un festival avec
57 Festivals de musique : un bilan 2019, Lehalle E.
(16/01/2020),
https://www.nouveautourismeculturel.com/blog/2020/01/16/festivals-de-musique-un-bilan-2019/,
consulté le 10/04/2021
58 Idem
59 Idem
60 Idem
61 Idem
48
une segmentation de niche, cependant cela peut être
trompeur. Comparer des festivals en fonction de leur fréquentation n'est
pas une méthode valable, car il n'existe à ce jour aucune
obligation d'harmonisation des moyens de calculs, chaque festival
possède ses propres méthodes et annonce les chiffres qui lui
paraissent les plus adéquats. Il s'agit d'un levier marketing grandement
utilisé par ces festivals. Ces méthodes peuvent changer d'une
année sur l'autre, et ainsi donner des augmentations de
fréquentation drastiques. Par exemple, le festival du Printemps de
Bourges a annoncé 80000 festivaliers en 2018 en se basant uniquement sur
la billetterie, tandis qu'en 2019 ils ont choisi de communiquer sur la
totalité des festivaliers présents en ville, passant ainsi
à 200000 festivaliers soit une augmentation de 150%.
d. Le positionnement central et ses
difficultés
Dans la majorité des cas le positionnement central
reste musical. Alors, dans le but d'avoir un positionnement central fort, et
donc une programmation alléchante, les programmateurs doivent
réaliser une veille artistique perpétuelle sur internet et sur le
terrain (concerts, autres festivals, tremplins...) pour dénicher des
artistes et groupes sortant du lot car rares, nouveaux ou encore innovants. Ils
devront également analyser les tendances des
téléchargements et achats des musiques pour déterminer les
groupes du moment, mais également faire appel à leur
réseau professionnel et leur instinct pour mettre la main sur des
pépites encore inconnues. Pour un programmateur, l'instinct, la
négociation mais aussi le réseau sont des notions indispensables.
Ce réseau professionnel gravite grandement autour des autres directeurs
de festivals. Il existe en effet une certaine solidarité entre
organisateurs, mais aussi avec les sociétés de production qui
possèdent des catalogues de groupes tendances du moment et proposant
leur touche artistique. De ce fait, tous les partis sont gagnants et on observe
la création d'une fidélité, donnant lieu par la même
occasion à une pérennité artistique dans le temps.
Cependant, après la complexité de la
création de l'affiche, vient l'aspect financier et la question des
cachets des groupes et artistes. En effet, si repérer des artistes n'est
déjà pas chose facile, il faut faire les bons choix et trouver
des compromis financiers. Plus une programmation aura un caractère
détonnant, insolite ou rare et plus elle sera tributaire et
limitée par le coût de ces artistes. Cela est dû à la
constante augmentation du cachet des grands artistes, citons par exemple le
groupe anglais Blur qui coutait 45000 € en 1999 et 200000 € en 2010.
Dans ces situations, il faut plus qu'une âme de programmateur, il faut
avoir des qualités de commerçant et de leadership. Lorsque
l'anticipation et le flair artistique sont au rendez-vous, les
économies
49
peuvent être conséquentes. En l'espace de
seulement quelques semaines, le cachet de certains artistes populaires peut
passer du simple au double, il convient donc pour un organisateur de
prévoir à l'avance ces évolutions de coût.
Pour un programmateur, certaines méthodes et attitudes
sont obligatoires. Cependant, il leurs est aussi indispensable de trouver des
valeurs sûres pour leurs affiches qui seront synonyme de réussite
mais aussi parfois de non-originalité. En effet, lorsque le début
des beaux jours arrive, et que les festivaliers trépignent d'impatience
à l'idée de voir leurs artistes préférés sur
des affiches et de prévoir leur itinéraire des festivals
estivaux, ces derniers ne se montrent souvent pas très originaux entre
eux en termes de têtes d'affiche. En effet, la concurrence du
marché des festivals est mondiale, et pour beaucoup l'enjeu se situe sur
quelques têtes d'affiches de plus en plus dures à obtenir. Que ce
soit au Japon, en Espagne ou encore dans les pays de l'Est, les festivals sont
régulièrement soutenus par de gros sponsors (souvent des marques
d'alcool) et peuvent donc s'offrir des artistes incroyablement chers alors que
même les grands festivals français (qui rappelons-le, ne peuvent
pas se faire sponsoriser par des marques d'alcool) peinent beaucoup plus.
Cependant quand ils y arrivent ces groupes et artistes sont un gage de
sécurité car même si les gros festivals sont lourds de
coûts, ces artistes permettent de le rentabiliser.
Malheureusement, ce sont ces valeurs sûres qui font
courir le risque d'uniformiser les programmations. Ce qui a pour
conséquence de ne pas se positionner, et de ne pas se
différencier artistiquement. Par exemple, en 2009 les festivals des
Eurockéennes, des Francofolies, des Vieilles Charrues, de Musilac, du
Printemps de Bourges et de Paléo possédaient une dizaine de
têtes d'affiche identiques. Ces programmations et leur approche
artistique, bien qu'évidemment liés à l'identité
artistique du festival, sont également dépendant de la taille du
festival et du nombre de festivaliers attendus et donc du coût allouable
aux artistes et aux ressources financières. Car en effet, les
programmateurs s'accordent pour dire que les tarifs des groupes et artistes
auraient augmenté d'au moins 30 à 40% depuis le début du
millénaire. Ils expliquent cela par une évolution de l'offre et
la demande ainsi qu'une augmentation du coût de la vie et des coûts
de production. Certains programmateurs, pour contrer ces méthodes peu
atypiques, tentent donc de se différencier notamment en ouvrant leur
porte à des artistes méconnues, via les tremplins ainsi que les
scènes annexes. Par exemple, certains festivals se caractérisent
comme des ambassadeurs d'artistes émergents à l'instar du
Printemps de Bourges et de son programme Les Inouïs (qui a
été le premier dispositif national de repérage et de
sélection de nouveaux talents artistiques), des Francofolies et de leur
Chantier des Francos (qui a pour mission de découvrir les nouvelles
tendances de la scène musicale française et d'accompagner les
artistes au
50
démarrage de leur carrière) ou encore des Trans
musicales ainsi que d'autres festivals proposant des tremplins (Rock en Seine,
Jazz à Vienne, Nuit de l'Erdre...).
Au milieu de cette concurrence festivalière, devenant
dès lors une industrie comme la caractérise nombre de
professionnels, même s'il peut parfois exister des pseudo-partenariats il
devient de plus en plus difficile de créer une programmation à la
fois attirante, cohérente et originale. Surtout que la concurrence est
internationale, à l'image de l'Europe de l'Est où l'apparition de
nouveaux festivals pullulent, et dont le meilleur exemple est celui du festival
Hongrois Dziget, plus grand évènement d'Europe avec ses 400000
festivaliers quotidiens. Le libéralisme économique faisant loi,
la notion d'offre et de demande ne laisse que peu d'espoir à certains
festivals lorsque d'autres tels que ceux possédés par le
géant mondial de l'Entertainment musical Live Nation ne peuvent
qu'écraser la concurrence.
Par exemple, selon l'étude réalisée
annuellement par Touslesfestivals62, sur les 100 festivals
visités en 2018 quinze d'entre eux ne l'ont pas été en
2019 car ils ne respectaient plus les critères de l'étude (en
termes de taille notamment). Parmi ces quinze festivals, six n'ont pas pu avoir
lieu pour des raisons financières : le festival Couvre Feu, The City
Trucks et le Festival Démon d'Or sont en liquidation judiciaire. Une
annulation révèle très souvent une certaine
précarité financière, le festival Nordik Impact a par
exemple suspendu son édition 2019 pour se réadapter en 2020 (ce
qui n'a évidemment pas pu avoir lieu). Fort heureusement, malgré
les difficultés à créer et faire perdurer un festival en
France, on observe plus de création de festival que de disparition.
e. L'importance de l'identité culturelle
Si ces festivals internationaux géant restent
très appréciés à l'instar de TomorrowLand en
Belgique, du Dziget en Hongrie, ou encore du Burning Man aux Etats-Unis, la
mode revient aux festivals de taille humaine, c'est-à-dire entre 10000
et 20000 festivaliers par jours voir beaucoup moins. C'est d'ailleurs autant le
cas pour les festivaliers que pour les artistes, pour qui il est bien plus
simple de créer un lien avec quelques milliers de festivaliers
plutôt qu'avec une foule dont ils ne voient parfois pas le bout. Il est
d'ailleurs de plus en plus fréquent, bien que ce ne soit pas une
généralité mais plutôt une sorte de
supplément, que certains festivaliers ne viennent pas dans
62 Festivals de musique : un bilan 2019, Lehalle E.
(16/01/2020),
https://www.nouveautourismeculturel.com/blog/2020/01/16/festivals-de-musique-un-bilan-2019/,
consulté le 10/04/2021
51
un festival précis pour sa programmation, alors
reléguée au second plan, mais pour ce qui différencie ce
festival des autres. Ses valeurs, l'expérience proposée, le
cadre, etc. Alors, s'il est essentiel de créer une offre centrale pour
se positionner dans ce milieu et donner vie au festival, que ce soit par son
genre, sa programmation, ses artistes, le charisme du directeur, le lieu et ses
services, l'expérience proposée, l'image et la réputation,
la qualité ou le prix, la marque (quand il y en a une) ou autre, il ne
faut pas oublier de créer et d'assumer son identité culturelle et
de faire preuve d'originalité.
Tout évènement culturel, et donc tout festival
qui se respecte doit offrir ses propres originalités et
spécificités, qui définiront l'identité du projet,
et qui évolueront d'années en années pour s'adapter aux
nouveaux besoins, aux nouvelles tendances, aux nouvelles évolutions
technologiques ou encore aux évolutions des valeurs que la
société véhicule. Nous disposons d'ailleurs en France et
en Europe de plusieurs festivals dont l'offre centrale, les services
périphériques, ou encore le lieu font preuves
d'originalité. Il s'agit en quelques sorte des leviers marketing des
festivals.
Voici quelques festivals usant de moyens marketing adaptés
:
Le festival Art Rock de Saint-Brieuc propose une scène
de groupes et artistes de la RATP, composée de musiciens
repérés dans les métros et gares de la capitale, et
possède également un village (nom couramment donné
à des zones d'un festival et pouvant être décliné de
bien de manières) appelé Rock N'Toques qui est animé en
permanence par des cuisiniers étoilés et locaux qui mettent en
avant des produits du terroir local de manière ludique. Une très
bonne idée pour pallier le cliché de la malbouffe en festival.
Le festival Rock en Seine de Boulogne Billancourt, quant
à lui, a créé un espace « festival pour les enfants
» proposant des ateliers découvertes du monde musical les
après-midis, et des concerts en fin de journées. Idéal
pour mettre en avant l'aspect familial que peut offrir un festival.
A Rennes, le festival Cultures Electronik fait passer une nuit
blanche aux festivaliers avec des musiques électroniques et
psychédéliques dans un lieu patrimonial plein d'histoire, un
château médiéval, dans le but de créer un
décalage entre ambiance et lieu. Ils organisent également dans
une cathédrale un concert d'oiseaux, dont les bruits sont remixés
en direct par un DJ.
52
En Ukraine cette fois, et plus précisément sur
les plages de Crimée, a lieu le festival de KaZantip étant une
gigantesque beach party proposant de la musique électronique 24h/24 et
regroupant costumes extravagants, maquillages excentriques et explosions de
couleurs.
Le festival Powerstock, se revendiquant comme un remake de
Woodstock et ayant eu lieu dans un parc à éoliennes en Italie a
été le rendez-vous incontournable de tous les amateurs de
musiques électroniques et de défenseurs de l'environnement.
Parrainé par Jean Michel Jarre, son objectif était de marier le
respect de l'environnement et les énergies renouvelables avec les
nouvelles technologies (jeux de lumières complexes, écrans
géants, sonorisations amplifiées, etc.).
f. Les outils marketing des festivals
Ces exemples de festivals atypiques et originaux sont
très, très loin d'être exhaustifs. Car bien que certains
sortent effectivement du lot, chaque festival, par sa simple existence, est
différent d'un autre et offrira sa propre expérience. Pour ceux
qui n'ont pas la chance de disposer d'un cadre entre les montagnes ou au bord
d'un lac à l'eau transparente, d'une programmation avec les derniers
artistes à la mode ou de moyens faramineux, reste alors les «
petites opérations marketing » faisant parfois la
différence.
Beaucoup de festivals ont eu l'occasion de percer grâce
à des opérations marketing bien menées, et qui se sont
d'ailleurs par la suite développées dans d'autres festivals. Par
exemple, certains proposent des applications mobiles. Certaines sont bien plus
développées que d'autres, ne proposant parfois que de simples
rappels de la programmation avec quelques vidéos des artistes, mais
pouvant aller jusqu'à proposer un plan du festival en temps réel
avec la possibilité de géolocaliser ses amis possédant
l'application, cela dépend des moyens que le festival souhaite investir.
La simple présence d'une application aura un impact positif sur la
visibilité et la communication du festival. De plus, on retrouve
maintenant partout dans leur enceinte des points Wifi et des bornes de recharge
pour smartphone. Dans tous les cas, une application jouera également un
rôle important pour le festival car elle apporte de précieuses
données, qui seront réutilisables par le festival pour adapter
leur marketing.
Une autre opération marketing des plus pertinentes a
été la création de système de paiement
électronique comme des cartes ou bracelets. En effet, la consommation
dans les festivals est fréquente, mais se fait surtout souvent sur un
coût de tête. L'idéal quand on se promène dans un
53
festival étant de ne pas avoir de sac, et même
idéalement de pas avoir de trop grosses sommes d'argent sur soi (les
pertes sont vites arrivées). Certains festivals s'associent donc avec
des startups spécialisées dans les paiements électroniques
pour proposer des systèmes, offrant la possibilité de
précharger avant le festival une certaine somme d'argent qu'il sera
possible de récupérer à la fin si tout n'a pas
été utilisé. C'est par exemple le cas du Hellfest et de la
société PavinTech qui ont créé une carte de
paiement sans contact. Cette carte est même sécurisée en
cas de perte ou de vol, car il est possible de la bloquer, de la recréer
et de la recréditer.
Après les cartes et les systèmes de paiement
sont apparus les bracelets connectés, pouvant toujours être
utilisés pour payer, mais également pour faire office de billets
d'entrée. Certains festivals ayant adoptés ce système se
sont même associés à Spotify pour proposer aux festivaliers
de lier leur bracelet à leur compte, pour que la playlist du festival
leur soit directement envoyée, leur permettant également
l'accès à des contenus « inédits » s'il se
rendent au stand Spotify du festival. Les utilisations de ces bracelets sont
multiples, et il a déjà été vu des
fonctionnalités comme la visualisation de l'activité de la foule
(récompensant les danseurs les plus actifs), la consommation de boisson,
l'heure d'arrivée, etc. Toutes ces fonctionnalités offrent, en
plus des facilitations pour les festivaliers, des données importantes
pour les festivals qui, si elles sont bien analysées, peuvent aider les
organisateurs à ajuster certaines actions logistiques et marketing pour
les prochaines éditions.
Ces actions marketing, bien que ne remplaçant pas une
offre principale en béton et une identité culturelle originale,
permettent parfois de faire la différence avec les festivals
représentant les plus proches concurrents.
Enfin, l'une des opérations marketing la plus
répandues en festival reste les partenariats. Les aides publiques
étant relativement maigres, ces partenariats avec des entreprises
privées leur sont grandement utiles. Par exemple, le village partenaire
du festival des Eurockéennes permet de récolter plus d'1,5
millions d'euros, représentant près de 25% du budget du festival.
Ces partenariats permettent simplement d'exposer le nom du partenaire,
possédant souvent un stand à son nom dans le festival, contre une
certaine somme d'argent. Mais au-delà de ce simple sponsoring,
représentant une sorte d'implication passive, on assiste de plus en plus
à une implication plus conséquente des marques grâce au
naming qui consiste à associer leur nom avec celui de
l'évènement.
54
Certaines marques ont également recours à cette
stratégie en utilisant des marques liées à l'industrie
musicale. Ainsi, c'est l'opportunité pour un festival de
bénéficier d'une source de revenus supplémentaire mais
également d'accroitre sa visibilité et sa résonnance
grâce à cette association avec une marque connue. Par exemple, le
festival des Inrockuptibles change régulièrement de nom en
fonction de l'entreprise partenaire : les Inrocks Black XS en 2011, les Inrocks
Volkswagen en 2012, ou encore les Inrocks Philips en 2014.
Nous retrouvons également ce naming à moindre
échelle, touchant alors les scènes des festivals. Ce partenariat
permet à une marque de donner son nom à l'une des scènes,
qui sera alors habillées aux couleurs de cette marque et portera son
nom. Nous pouvons alors retrouver sur ce principe la scène Green Room
(l'activation musicale de Heineken) aux Eurockéennes, mais
également au Main Square festival et à I Love Techno France.
Le marketing n'est donc pas le même d'un festival
à l'autre, certains appartenant à des multinationales de
l'Entertainment et d'autres étant simplement des associations cherchant
à mettre en avant une culture spécifique. Il va être pour
certains bien plus simple que pour d'autres de savoir quels artistes ou groupes
il faudra démarcher, un festival populaire pouvant se baser sur
l'évolution du Hit-Parade, mais pour d'autres comme des festivals de
musique électroniques underground les études de marchés
sont déjà bien moins présentes. Cependant il est possible
d'y voir ici un certain avantage. Les festivaliers cherchant avant tout une
expérience, s'ils se sentent touchés par la culture
revendiquée par un festival, peu importe sa taille ou ses moyens ce
festival aura ses chances. S'ils arrivent à faire de ses points faibles
(comparés à d'autres gros festivals) des points forts, ces
festivals n'ont rien à envier aux mastodontes du secteur. Tout cela
passe notamment par une bonne communication.
2. La communication
Les festivals de musique sont devenus des
évènements culturels incontournables en France. Ils font par
conséquent l'objet d'importantes actions de communication pour attirer
leur public, qui croule souvent sous la masse des informations culturelles.
C'est pour cela que même si la majeure partie de cette stratégie
de communication est effective sur les réseaux sociaux des festivals en
question, une part non négligeable de la communication s'effectue hors
réseaux.
55
a. La communication hors réseaux
- Les communiqués de presse
La base pour tout évènement attendant un public
reste les communiqués de presse. Il s'agit d'un document assez court
servant à présenter le projet aux journalistes. Le but est donc
d'être assez court et le plus concis possible dans sa rédaction.
Il faut donc mentionner les informations nécessaires, ainsi que les
renseignements pratiques essentiels sur une page A4 recto maximum. Pour ces
informations le plus simple reste de se baser sur les 3Q2COP pour ne rien
oublier, c'est-à-dire : qui, quoi, quand, comment, combien, où,
pourquoi ? Ainsi, les journalistes retrouveront les informations brutes et
contacteront les festivals pour avoir plus d'informations si le festival a
attiré leur attention. Les informations phares sont donc à
privilégier dans ce document pour séduire les journalistes,
étant la cible de ces documents. Il n'est pas non plus rare de
téléphoner aux journalistes concernés pour s'assurer de la
bonne réception du document, permettant ainsi de commencer à
créer un lien. Cependant, si les communiqués de presse sont
particulièrement adaptés pour communiquer sur des petits
évènements, pour les festivals ils sont loin d'être
suffisant. Une fois les journalistes aguichés, vient alors le dossier de
presse.
- Le dossier de presse
Les évènements que sont les festivals ne peuvent
passer à côté de la réalisation d'un dossier de
presse pour leur promotion. Il s'agit d'un ensemble de documents relatifs au
festival mais également à l'association/entreprise
concernée. En plus d'un communiqué de presse (le dossier de
presse pouvant accompagner l'envoie du communiqué ou bien le suivre), ce
dossier doit également comprendre une présentation de
l'édition, des visuels, l'intégralité (au possible) de la
programmation ainsi que les coordonnées de la personne s'occupant des
relations médiatiques. Il peut également faire mentions d'autres
informations qui seront jugées pertinentes, comme quelques indications
biographiques des artistes qui seront utiles à la rédaction d'un
article. D'autres éléments sont également importants,
notamment un plan de communication et/ou une revue de presse pouvant servir
à la presse pour appréhender l'ampleur que pourra prendre
l'évènement et donc faciliter la rédaction d'un article
à son sujet. Ce dossier peut être disponible sur demande, ou bien
être à disposition de tous selon les moyens et la stratégie
du festival. Il faut faire attention à soigner la rédaction de ce
dossier, car étant donné sa longueur il faut parvenir à
accrocher son lecteur. Cela passe notamment par un titre d'accroche parlant
ainsi qu'une introduction claire et efficace, puis une organisation et une
structuration pertinente.
56
Concernant le communiqué et le dossier de presse, la
cible des festivals sont les journalistes et plus largement les médias.
Dans le cadre des festivals de musique électro, des médias
nationaux globaux ne sont pas réellement adaptés (sauf
évidemment s'il s'agit d'un très grand festival, comme l'est par
exemple TomorrowLand en Belgique). Il convient alors de viser soit des
médias nationaux culturels ou bien orientés sur la musique
(là encore il est possible de trouver des médias musicaux
généralistes ou bien centrés sur des genres musicaux
spécifiques comme Trax ou encore Rave Feed), ou alors des médias
généralistes locaux qui pourront toucher une cible
peut-être pas forcément adepte mais suffisamment proche de
l'évènement pour s'y intéresser. Le but de ces
démarches étant évidemment de décrocher un article
au sujet du festival, qui sera souvent relayé par la suite sur les
réseaux sociaux et accroitra la visibilité du festival
concerné.
- Les affiches et les flyers
Enfin, concernant les supports papiers comme les affiches et
les flyers, les festivals doivent faire attention à ne pas trop les
surcharger d'informations pour ne pas nuire à leur lisibilité. Le
nom, la date, et le lieu sont obligatoires. Enfin, ce qui attire
réellement l'attention (outre la charte graphique) c'est la
programmation. Les festivals essayant au plus tôt de dénicher des
têtes d'affiche, ce sont elles qui prennent le plus de place sur les
affiches et flyers, les festivals jouant sur les polices de taille (plus une
tête d'affiche est importante, plus elle sera écrite en gros).
Certains festivals décidant de lancer leur campagne de communication
hors médias avant d'avoir définis leur programmation
complète, il est d'usage de voir mentionné à la fin de la
programmation, et donc avec la plus petite police présente sur le
support, quelques mots précisant qu'elle n'est pas complète comme
« et d'autres artistes » ou bien « et d'autres surprises ».
En général cependant, ces affiches et flyers comportent toute la
programmation, quitte à ce que la police utilisée pour les
artistes « les moins attendus » soit deux fois voire trois fois plus
faible que celle des têtes d'affiche.
Concernant les cibles touchées, les affiches seront
exposées sur les panneaux d'affichage publics principalement au niveau
local bien qu'aussi plus faiblement au niveau national. Les affiches sont
quasiment toujours au format A3 ou A4, bien que l'on puisse également
voir ces affiches sur des panneaux publicitaires mécaniques ou
numériques au bord des routes ou bien dans des abris bus par exemple,
bien que ce ne soit souvent le cas que dans la ville où se
déroule le festival (les Francofolies de La Rochelle utilisent notamment
ce procédé). Les flyers quant à eux sont distribués
dans les boites aux lettres (beaucoup plus au niveau local cette fois, cette
57
démarche coutant beaucoup plus de temps et
d'énergies) ou bien mis à disposition dans des commerces
locaux.
- Les sites internet
Les sites internet des festivals représentent des
outils incontournables dans le cadre des actions de communication. Ce sont eux
qui seront le plus exposés à la vue de tous et doivent donc
refléter le festival. Ces sites sont pratiquement toujours
abordés lors des communications, la façon la plus répandue
étant de mentionner quelque chose comme « plus d'informations sur
notre site ». Nous en reparlerons plus tard dans cette partie, mais le
plus souvent les communications sur les médias sont souvent des
informations ayant déjà été postées sur le
site et seulement relayées par les médias, ce qui justifie cette
phrase renvoyant au site web.
Ils doivent offrir aux festivaliers un visuel complet sur la
programmation, mais également sur la structure organisatrice. Ils
regroupent également toutes les informations pouvant être utiles
aux festivaliers et au bon déroulement de leur séjour, comme des
plans d'accès, différentes propositions de lieux
d'hébergement, les divers types de restaurations possibles, etc. Un site
internet a pour cible quiconque s'intéressant de près ou de loin
au festival concerné, mais est notamment très utiles aux
différents médias. Il est donc judicieux de rendre accessible sur
ces sites différents supports de communication en
téléchargement libre comme le dossier de presse, mais
également des photos et vidéos des éditions
précédentes, ainsi que la charte visuelle de
l'évènement si possible.
Un site internet se révèle donc indispensable,
mais ce n'est pas la seule possibilité des organisateurs de festivals
pour s'annoncer. Il est possible de trouver d'autres sites internet, comme par
exemple
AgendaCulturel.fr qui met en
avant une catégorie spécifique pour ces évènements
culturels. D'autres sont totalement dédiés aux festivals avec des
spécialisations dans des domaines particuliers, comme la musique,
à l'instar du site France Festival.
b. La communication
Bien que ces outils représentent une part
conséquente de la communication d'un festival, c'est sur les
réseaux sociaux que la différence se fait. La classe d'âge
la plus représentée en festival étant les jeunes les
jeunes, les réseaux sociaux sont en effet les moyens les plus efficaces
de les toucher.
58
Présence des festivals sur les réseaux sociaux
en 2016
En effet, lors d'une étude de 2016, 87% des
festivaliers disposaient des applications mobiles de ces réseaux
sociaux, les plus utilisés par les festivals étant Facebook,
Instagram et Tweeter. En 2016 (et toujours aujourd'hui) c'est le Hellfest qui
compte la plus grande communauté sur Facebook et Instagram. Il n'a
d'ailleurs pendant longtemps pas eu de compte YouTube, principalement pour des
raisons de droit à l'image entre les artistes et les boites de
production. Les contraintes liées aux vidéos sont effectivement
un peu plus nombreuses sur YouTube, ce qui peut expliquer que ce réseau
soit un peu moins utilisé par les festivals. Tout réseaux sociaux
confondues, la communication digitale est sans conteste la plus pertinente pour
les festivals de musique.
Bien que l'on retrouve des schémas similaires dans
cette communication digitale, chaque festival tente de différencier sa
communication. Pour beaucoup il suffit de mettre en avant l'univers de son
festival, représentant déjà une forte
différenciation étant donné qu'aucun festival ne se
ressemble. Tous les outils de communication médias qui seront
abordés dans cette partie auront donc une effectivité sur les
réseaux sociaux Facebook, Instagram et Tweeter, les communications
étant les mêmes (seule la présentation peut différer
d'un réseau à l'autre en fonction de la politique de ce dernier,
mais le contenu de la publication reste inchangé). De plus, les cibles
sont également les mêmes d'un réseau à l'autre. Ces
publications sont faites sur les pages/groupes d'évènement du
festival, elles ne touchent donc que ceux en faisant déjà
partis.
59
Cependant il arrive parfois de voir certains festivals relayer
des post d'autres festivals, ou encore certains post relayés par
d'autres pages publics ou par des participants à destination de leurs
amis, touchant ainsi un public peut être nouveau.
- L'annonce de la programmation
Pour donner des exemples concrets de communication, on
retrouve partout la fameuse annonce de la programmation dont la méthode
pourra changer du tout au tout en fonction du festival. Certains choisissent de
la faire très longtemps à l'avance, à l'instar de l'Arena
Sound Festival en Espagne qui suivait un rythme de publication hebdomadaire
correspondant à un artiste, avec des pistes pour laisser deviner aux
festivaliers qui sera le prochain artiste annoncé. Cette méthode
permet de créer le buzz et laisse également les questions en
suspens, ainsi chaque festivalier se demandera jusqu'au dernier moment si son
artiste préféré sera présent ou non. Cette
stratégie a porté ses fruits, puisqu'en 2018 le festival a fait
sold-out plus de 7 mois à l'avance. Ce festival mène d'autres
stratégies en parallèle comme un concours pour gagner des pass en
backstage, un voyage en jet privé jusqu'au festival ainsi que d'autres
récompenses, n'étant cependant accessibles qu'aux personnes ayant
acheté leur place dans les premières 24h après le
lancement officiel de la billetterie. D'autres festivals comme Rock en Seine se
contente de faire des teasings et d'inviter à rejoindre le groupe de
l'évènement ou la plupart de la communication est
effectuée. Ou encore, des évènements comme les
Francofolies de La Rochelle annoncent leur programmation seulement quelques
semaines à l'avance, mais ce sont les artistes eux-mêmes qui
s'annoncent en vidéo postées sur le groupe de
l'évènement. Il s'agit d'une bonne façon de créer
une certaine proximité entre les artistes invités et les
festivaliers, puisqu'ils s'adressent directement à eux, mais cela
créer également plus d'engagement sur le groupe de
l'évènement. Enfin, certains choisissent la simplicité et
la sobriété, comme le Hellfest qui se contente de changer sa
couverture sur les réseaux sociaux avec les têtes d'affiche.
- L'avancée de la mise en place du festival
Outre cette annonce de la programmation, les festivals font
également patienter les fans en publiant l'avancée de la
préparation du terrain et des scènes. Ils sont en effet de plus
en plus désireux de connaitre l'envers du décor, et ce genre de
post contribue à maintenir l'excitation mais créer
également un intérêt encore plus personnel pour la
participation à ce festival étant donné que l'on a suivi
toute sa préparation. Cela passe notamment par des post à date
fixe suivant par exemple la création d'une scène ou d'un village,
commençant toujours par une
60
photo/vidéo du terrain vide et terminant par une
photo/vidéo du même terrain avec cette fois l'installation
totalement terminée. Le nombre de post concernant cette avancée
peut varier en fonction des festivals.
- Présentation des artistes
En complément de la programmation, et en toute logique,
les artistes sont régulièrement mis en avant. Les festivals ont
en effet eux aussi intérêt à mettre en avant les chansons
et clips des artistes qui monteront sur leur scène. Manoeuvre
parfaitement adaptée pour durcir la motivation des fans de ces derniers,
mais également pour attiser la curiosité de ceux qui ne les
connaissent pas encore.
- La mise en avant de la communauté
Les festivals aiment également mettre en avant leur
communauté, dont ils sont très fiers. Ce sont en effet eux qui
sont le plus souvent au centre des publications et non les artistes comme on
pourrait le penser. Cette communauté est en effet le coeur du festival,
car sans elle un festival n'existerait tout simplement pas. Qu'un festivalier
ne soit venu qu'une ou plusieurs fois dans un festival, il fait partie de cette
communauté car il participé à la vie de ce festival
à un moment donné. Si ce sont souvent les artistes qui donnent
envie de venir en festival, c'est sa communauté qui rend ce festival
réellement vivant et inoubliable. Il est donc important de communiquer
sur cette communauté, autant pour fidéliser ceux en ayant
déjà fait partie que pour attirer et donner envie à ceux
n'en ayant pas encore eu l'occasion. Pouvant croire que certains festivaliers
viennent dans ce genre d'évènement uniquement pour se montrer
dans des tenus des plus extravagantes, ce sont en effet ces festivaliers qui
font deviner l'ambiance d'un festival. Du fun au plus m'as-tu vu, en passant
par le décontracté ou le pointu, c'est l'occasion de s'imaginer
l'ambiance que l'on pourrait ressentir au milieu de tous ces looks et
déguisements. Certains festivals mettent en avant les festivaliers les
plus « cools », tandis que d'autres se contente de retweeter
l'enthousiasme de leurs participants, ou encore proposent aux festivaliers de
s'identifier dans les photos prises durant l'évènement pour
revivre son ambiance. Ils ne manquent pas non plus de partager des infos
pratiques et de donner des conseils aux participants, les organisateurs
montrant ainsi à quel point ils sont soucieux de leur bien-être.
Le Hellfest a même créé une page dédiée
à son fanclub : le Hellfest Cult. Etant donné que ces post ne
sont pas considérés comme essentiel au même titre que les
post sur l'avancée de la mise en place du festival, c'est-à-dire
qu'ils ne transmettent pas d'informations réellement utiles comme
celles
61
concernant les artistes par exemple, c'est au CM (Community
Manager) du festival de gérer ces post. Si la stratégie de
communication implique la diffusion d'informations essentiels à
intervalles fixes, elle laisse cependant une certaine liberté au CM pour
animer les réseaux du festival. Ainsi, c'est à lui de trouver une
communication qui ne soit ni trop fréquente pour que les post importants
ne passent pas inaperçus ni trop occasionnelle pour continuer à
susciter l'intérêt du public. Le CM peut donc choisir de mettre en
avant la communauté du festival à travers différents
moyens qu'il jugera pertinents, et en accords avec la stratégie de
communication du festival ainsi que son identité et ses valeurs.
- La communication pendant le festival
Une bonne partie de la communication se fait également
durant le festival. Avant le seul moyen de connaitre l'ambiance d'un festival
était d'y assister, ou bien d'attendre plusieurs mois
d'hypothétiques rediffusions sur des chaines spécialisées.
Aujourd'hui grâce aux réseaux sociaux, il est presque possible de
s'y croire et de s'imprégner de l'univers d'un festival. Les festivals
des Eurockéennes ou du Main Square notamment partagent plusieurs fois
par jours durant le festival des photos et vidéos des concerts
journaliers.
C'est une façon de mettre en avant la programmation et
les artistes. Faisant autant plaisir à ceux absents qu'à ceux
présents, le Main Square a en 2018 fait venir un chroniqueur qui allait
à la rencontre des artistes et festivaliers pour recueillir leurs
impressions. Le but étant de faire découvrir l'envers du
décor ainsi que l'ambiance grâce à de courts reportages
vidéo, postés sur les réseaux sociaux et sur leur site.
Tweeter est notamment grandement utilisé pour les live tweet pour
proposer des conférences de presse et des interviews, les Francofolies
ont même utilisé la fonction Periscope en 2018 pour offrir
à leurs abonnés des streams live des concerts. Ils ont même
proposé des concerts en direct sur leur site web, réjouissant les
amateurs de musique n'ayant pas pu faire le déplacement.
- La communication post-festival
Enfin, même après la fin des festivals, la
communication continue. Après les traditionnels remerciements et
félicitations, suivis du fameux « à l'année prochaine
», les festivals doivent continuer de stimuler l'engouement des
festivaliers via les réseaux sociaux et ainsi entretenir leur lien. Pour
cela, ils poursuivent la publication de contenus jusqu'à la prochaine
édition, bien qu'en réduisant logiquement sa fréquence. Il
s'agit de photos et vidéos des concerts, des festivaliers, mais
également des informations sur les artistes qui étaient
présents comme des
62
sorties de titres ou d'albums. Il est également
possible de voir des blogs tenus continuellement comme celui du Hellfest,
proposant notamment des interviews d'artistes et de stars s'étant
retrouvés sur leur scène. Si l'un des points communs des
festivals consiste à lutter pour continuer d'exister l'année
suivante, un autre prend place dans la communication sur les réseaux
sociaux entre artistes et festivaliers et démontre la force de la
musique à réunir les gens.
Ces exemples ne sont pas exhaustifs, ils offrent tout de
même un bon aperçu du large choix de communication qui s'offrent
aux festivals. Bien que cette communication soit similaire entre les festivals
par sa présence quasi exclusive sur les réseaux sociaux, elles
sont en réalité toutes différentes et
révélatrices de l'univers du festival qui communique. Il leur est
autant possible d'adapter leur contenu que leur stratégie de
communication à leur identité.
63
PARTIE II. ETUDES SUR LE SECTEUR DES FESTIVALS DE
MUSIQUES ELECTRONIQUES
Dans cette partie, j'ai fait le choix de présenter deux
types d'étude. La première est une étude quantitative
menée auprès des festivaliers, la deuxième est une
étude qualitative menée auprès de directeur et
créateur de festivals de musiques électroniques.
A. Etude Quantitative
1. Méthode
Pour cette étude, j'ai fait le choix de mener une
étude quantitative auprès de personnes s'étant
déjà rendu au moins une fois dans un festival de musiques
électroniques. Ce choix a été fait pour deux raisons :
tout d'abord j'ai jugé intéressant de mettre en
corrélation les avis des festivaliers à travers cette
étude mais également les avis des directeurs à travers une
étude qualitative. Deuxièmement, étant donné que
comme vu dans la partie théorique la très grande majorité
de la communication se passe sur les réseaux sociaux, je me suis dit
qu'il serait facile de cibler des personnes aptes à respecter les
critères de mon étude.
Pour se faire, j'ai créé mon questionnaire
grâce à Google Form. Pour la rédaction de ce questionnaire,
je m'étais fixé deux objectifs. Le premier était
d'identifier les participants aux festivals de musiques électronique
ainsi que leurs habitudes. Mon but était d'obtenir une image claire de
qui sont les festivaliers, que cherchent-ils dans les festivals de musiques
électroniques, comment les choisissent-ils, quels styles ils
écoutent, etc. Mon deuxième objectif était d'identifier
les causes de l'image négative des festivals électro selon les
festivaliers. Mon but était de savoir si les festivaliers ressentent
cette image ou non, d'où vient-elle, quels sont ses conséquences,
etc.
Pour cela, j'ai décidé à travers mes
questions d'aborder 3 points :
- Les habitudes et comportements des festivaliers
- La position des festivaliers par rapport à cette image
négative - Identification des festivaliers
J'ai donc uniquement administré mon questionnaire
(annexe 13) sur des groupes Facebook. Pour obtenir des résultats les
plus éclectiques, j'ai choisi des groupes de festivals diffusants
différents styles d'électro, mais également des groupes
d'amateurs de musiques électroniques en tout
64
genre. J'ai volontairement évité les groupes
regroupant uniquement des amateurs de free parties, bien que l'on en retrouve
dans l'échantillon, puisque nous nous intéressons aux
festivals.
Mon échantillon est composé de 952 personnes. Ce
nombre sera réduit à 612 personnes pour la seconde partie du
questionnaire. Le seul critère obligatoire pour répondre à
cette étude était d'avoir au moins une expérience d'un
festival de musiques électroniques.
2. Résultats de l'étude
a. Les goûts musicaux des festivaliers
Tout d'abord, je me suis intéressé au nombre de
festival auxquelles se rendent les festivaliers au cours d'une année.
Nous constatons que presque la moitié des festivaliers (46,6%) se
rendent à 2 ou 3 festivals électro par an, et que 20,9% se
rendent à 4 ou 5 festivals par an. Les festivaliers qui ne participent
qu'à un seul festival par an et moins représentent 17,9% de notre
échantillon, tandis que ceux participant à 6 festivals minimum
par an en représentent 14,6%. Même sans comparaisons possibles
avec d'autres genres musicaux, ces chiffres nous montrent bien que les
décisions de se rendre en festival pour un amateur de musiques
électroniques sont bien plus fréquentes (pouvant même
s'apparenter à un mode de vie pour les plus gros consommateurs)
qu'occasionnelles.
Pour se faire une meilleure idée, je me suis ensuite
intéressé au nombre de festivals fréquenté sur une
plus longue période. Entre 2017 et 2019, soit sur une période de
3 ans où les festivals n'avaient pas encore été
affectés par la COVID, on constate que 38,9% de notre échantillon
se sont rendus à entre 2 et 5 festivals électro. Ce pourcentage
comprend donc tous ceux qui ne participent en moyenne qu'à un festival
par an, ainsi que la partie basse de ceux participant à entre 2 ou 3
festivals par an. Sur
65
cette même période, 26,1% de
l'échantillons participent à entre 6 et 9 festivals soit la
partie haute de ceux se rendant en moyenne à 2 ou 3 festivals par an.
Nous avons également 14,6% de festivaliers ayant participé
à entre 10 et 13 évènements sur cette période et
6,2% à entre 14 et 17 évènements, représentant ceux
se rendant en moyenne à entre 4 et 5 festivals par an. Enfin, tandis que
sur l'ensemble de l'échantillons seulement 4,4% ne se sont rendu
qu'à un festival maximum sur cette période de 3 ans, 9,8% en ont
fréquenté plus de 18. Ces données concordent plutôt
bien avec les moyennes de fréquentation abordées à la
question précédente.
A la question des styles de musiques électroniques
écoutés quotidiennement, on constate ici qu'un style de musique
écrase tous les autres en matière de consommation par les
festivaliers hors évènement. Il s'agit de la Techno avec 77,7% de
l'échantillon. Arrive en seconde place la House avec 54,2%. Ces
résultats font sens avec la partie théorique abordée dans
la première partie de ce mémoire, la Techno et la House
étant les premiers styles de musique électro s'étant
sortis du milieu underground en France. Cependant, cette deuxième place
se joue de peu puisque le 3e style le plus écouté est
la Trance/Psy-Trance/Goa (certains pourraient contester cette association de
styles musicaux, mais elles sont assez de similitudes pour être
associées) avec 53,6%. Ce résultat est marquant par sa forte
présence, d'autant plus que le style Trance n'est pas
particulièrement présent dans le milieu underground (rave/free
parties) et n'est pas spécialement sur-représenté dans les
festival Français bien qu'il soit quasi impossible de ne pas en entendre
dans un festival électronique. Cependant, dans beaucoup d'autres pays
d'Europe, mais également en Moyen-Orient et en Amérique du Sud ce
style est très présent et jouit de nombres de festivals lui
étant exclusivement dédié. C'est notamment le cas de
l'Hadra festival en France bien qu'il n'ait pas la notoriété de
ses homologues européens. La Trance est cependant l'un des styles
d'électro pouvant être qualifié des plus « doux »
aux oreilles des novices de la musique électronique tout en étant
très apprécié des amateurs, ce qui peut donc expliquer ce
pourcentage élevé. En 4e position se trouve
l'Acid/Acidcore avec 45%. Ce chiffre est également étonnant, et
peu potentiellement être faussé. Tout d'abord, l'Acidcore est un
style présent en très grande majorité dans le milieu
underground (free parties principalement) et est d'ailleurs l'un des plus
populaire dans ce milieu, cependant il est très difficilement associable
à la Techno ou encore à la Trance, et il serait probable qu'une
grande partie des consommateurs de ces deux styles ne consomme que très
peu voire pas du tout d'Acidcore. Cela pourrait s'expliquer par une grande part
d'amateurs underground dans ce questionnaire, rendant donc ce pourcentage
totalement légitime. Cependant, c'est l'Acid qui pourrait porter
à confusion. Ce style se caractérisant par des tonalités
spécifiques, il peut en réalité être couplé
à beaucoup de styles et pourra notamment
66
donner l'Acid-House ou encore l'Acid-Techno, qui ne sont pas
des styles underground comme l'Acidcore. Dans ce cas, si des personnes ayant
voté pour la Techno et/ou la House ont également voté pour
l'Acid en pendant aux styles de l'Acid-Techno ou l'Acid-House, ce pourcentage
peut donc être faussé. Je ne me suis malheureusement rendu compte
trop tard de ce risque et je n'ai pas pu y remédier. Dans tous les cas
l'Acid reste assez particulier et est foncièrement reconnaissable
malgré des variations de style, donc même faussé ce
pourcentage reste cohérent. Ensuite, pour les styles se situant entre
32% et 36,6%, bien que certains soient underground et d'autres non il s'agit de
styles écoutés bien que ce ne soient pas forcément les
plus populaires. Enfin, pour tous les autres il peut s'agir soit de styles
« de niche » (en France tout du moins) comme la Dubstep ou la
Drum'n'Bass, de styles étant surtout populaire dans les pays voisins
comme le Gabber, la Frenchcore et la Hardcore (bien que ce style soit
également assez présent dans les free parties françaises)
ou encore de styles jugés trop commerciaux pour des amateurs
d'électro, à l'instar de l'EDM étant les musiques
électroniques grand public passant à la radio.
Quand nous demandons aux festivaliers les styles
d'électro qu'ils souhaitent le plus écouter en festival, au lieu
de faire ressortir les styles les plus désirés en festivals se
sont les styles les moins désirés qui sont le plus visible.
Ainsi, avec une grosse majorité de 74%, les festivaliers ne souhaitent
pas retrouver d'EDM en festival de musique électro, soit pas de musique
commerciale. Ensuite, en lien avec les résultats obtenus à la
question précédente, ce sont les styles « de niche »
(Raggaetek, Drum'n'Bass, Dubstep) et les styles populaires dans les pays
voisins (Gabber, Frenchcore, Hardstyle) qui sont le moins attendus dans les
festivals se situant tous entre 58,8% et 68,2% des styles que les festivaliers
veulent le moins écouter dans ces
67
évènements. Pour les autres styles, on observe
une petite partie de l'échantillons qui ne semble pas accorder une si
grande importance à leur présence ou non, puisque
l'indifférence des festivaliers pour chaque style ne varie que de 21,4%
à 26,8% de volonté d'écoute en festival. Cependant, deux
styles sortent du lot. Tout d'abord la Trance/Psy-Trance/Goa avec 44,2% de
l'échantillon souhaitant retrouver ce style en festival, et la Techno
avec 59,1%. Ces données correspondent à la réalité
puisqu'en France, le style d'électro que l'on peut le plus retrouver en
exclusivité dans un festival est la Techno, suivi de la Trance qui bien
que ne comptant que très peu de festivals français lui
étant exclusivement dédiés, peut se réjouir
d'être présent (à plus ou moins grande échelle) dans
quasiment tous les festivals électro français.
Quand l'on demande aux festivaliers s'ils se rendent
uniquement en festival de musiques électroniques, on observe que
seulement 32,2% de l'échantillon ne se rend qu'exclusivement en festival
de musiques électro. Parmi ces 307 personnes, les explications sont
toutes presque identiques : ils préfèrent l'ambiance des
festivals électro à l'ambiance des autres festivals, et ventent
la large gamme de styles musicaux que l'on peut y trouver. Moins nombreux,
certains abordent également un prix plus abordable comparé
à des évènements d'autres genres musicaux.
Une bonne majorité, représentant 67,8% de
l'échantillon, ne se rend pas uniquement en festival de musiques
électroniques. Pour ces 645 personnes, nous retrouvons ici encore des
explications presque identiques : ils n'écoutent pas uniquement des
musiques électroniques et aiment la diversité, l'ambiance
festival en général (qui dénote donc apparemment de
l'expérience d'un festival exclusivement électro) est toujours
plaisante, et ils ne veulent pas se limiter qu'à un seul genre musical
qui réduirait leur champ des possibles en matière
d'expériences festivalières et de rencontres. Une grosse partie
de ces 67,8% précise cependant ne pas se rendre en festival si les
musiques électroniques ne sont pas un minimum
représentées. Les free parties ont également
été abordés, car on y retrouve des styles qui ne sont pas
ou rarement présent même dans des festivals exclusivement
électro, mais également pour l'expérience encore
différente des festivals. Quoi qu'il en soit, pour ces 645 personnes ne
se rendant pas uniquement en festival électro il est intéressant
de se demander quels sont les genres principaux des autres festivals dans
lesquels ils se rendent. On peut observer que trois genres musicaux dominent.
Le Rap étant le genre musical le plus consommé en France, il
serait
68
logique que ce soit le genre possédant la plus grande
part mais il se retrouve en réalité en troisième position
avec 20,9%, derrière le Reggae/Ska (21,2%) et le Rock (27,9%).
Cependant, parmi ces 67,8%, on constate que pour 81% d'entre eux ce sont les
festivals de musiques électroniques qu'ils fréquentent le
plus.
A la question de comment il est amené à entendre
parler d'un festival, et faisant encore une fois lien avec la partie
théorique, c'est par les réseaux sociaux des festivals que 93,9%
de l'échantillon entend parler d'un festival. Un autre moyen qui
pourrait paraitre plus surprenant est le bouche à oreille (78,8%). Il
apparait donc que les festivaliers discutent beaucoup entre eux de leurs
expériences et se font donc mutuellement découvrir des festivals.
Ces moyens sont les deux plus représentés, étant largement
plus utilisés que d'autres mais qui restent cependant indispensable
comme les artistes représentant 40,5% (bien que ce moyen passe
également par les réseaux sociaux, dans le sens où
l'artiste communique sur ses réseaux les festivals dans lesquels il sera
présent), les autres festivals (34,7%) ou encore les affiches (31,5%).
Il s'agit des moyens les plus utilisés, la presse écrite (12%)
étant plutôt destinée aux localités et aux
professionnels qu'aux festivaliers (quasiment tous présents uniquement
sur les réseaux sociaux), et les médias
télévisés (2,2%) n'étant pas du tout
adaptés.
Si l'on recherche les critères sur lesquels se basent
les festivaliers pour choisir un festival parmi les autres, ici encore il est
aussi bien possible de voir ce qui motive que ce qui importe peu pour les
festivaliers. Nous pouvons donc constater au moins trois critères qui ne
semble pas si importants à leurs yeux. Tout d'abord nous avons les
activités hors musique avec 60,7% de l'échantillon qui n'y
apporte pas ou peu d'intérêt. Cela montre bien que même si
un festival se doit d'être différent et de proposer diverses
activités pour faire vivre pleinement une expérience, ce n'est
pas ce qui fera la différence au moment la décision d'achat et
l'offre centrale reste musicale comme l'implique les 62% et les 54,7% de notre
échantillon qui se basent beaucoup ou principalement sur respectivement
les styles représentés et les têtes d'affiche qu'ils
retrouveront en festival pour savoir lequel ou lesquels choisir. Ensuite, la
distance du festival par rapport au domicile ne semble pas non plus
décisive puisque 56,3% de l'échantillon n'y apporte pas ou peu
d'importance. Enfin, le dernier critère est intéressant, il
s'agit de la taille du festival. Comme abordé dans la partie
théorique, il semble que pour les festivaliers un grand
évènement ne soit pas forcément synonyme
d'expérience de qualité, puisque pour 46,5% de notre
échantillon la taille d'un festival n'importe peu ou pas du tout. Bien
que ces critères soient ceux qui semblent le moins décisifs dans
la prise de décision finale des festivaliers, il est tout de même
intéressant de noter que le prix (43,9%), les avis (43,8%) ainsi que la
présence d'un camping (42,5%) ne
69
semblent pas non plus être si importants aux yeux des
festivaliers. Concernant les critères primordiaux, en plus des styles
représentés et des têtes d'affiche, nous retrouvons
également l'ambiance qui semble aussi importante que les styles
présents avec 62% de l'échantillon qui se basent beaucoup ou
principalement sur l'ambiance du festival. Ces résultats sont en accords
avec la partie théorique, prouvant que les festivaliers recherchent
avant tout une expérience lors de ces évènements. Les
autres critères sont équilibrés et dépendant des
goûts de chacun à l'instar des valeurs défendues, de la
durée et de l'environnement du festival qui bien qu'étant des
critères non négligeables compte autant de festivaliers y
accordant de l'importance que de festivaliers ne leur en accordant pas.
Quand l'on demande aux membres de notre échantillon
s'ils se sont déjà rendu en free party, 75,1% de
l'échantillon a répondu oui. Il me semble donc nécessaire
de préciser que ce questionnaire n'a volontairement pas
été diffusé sur des groupes d'amateurs de free parties
mais uniquement sur des groupes de festivaliers et d'amateurs de musiques
électroniques. Bien qu'ici aucune donnée ne puisse prouver qu'une
communauté de festivaliers soit plus susceptible de s'intéresser
aux free parties plutôt qu'une communauté de teufeurs ne soit
susceptible de s'intéresser aux festivals, de par l'origine de la
musique électronique ainsi que le cadre légal ou illégal
il semble que beaucoup de festivaliers soient un jour amenés à
vouloir vivre l'expérience de la free party. Encore une fois, aucune
donnée ne permet de réfuter la possibilité qu'une
majorité d'adeptes des festivals n'aient pas d'abord découvert
les musiques électroniques en free party pour ensuite privilégier
les festivals. Avec cette question nous pouvons seulement démontrer
qu'un lien fort et établi existe entre festivals électro et free
parties.
Quand nous demandons aux festivaliers s'ils ont l'impression
que les festivals électro ont une image négative, nous pouvons
constater que la majorité de notre échantillon (52,6%) est
plutôt d'accord pour attester de l'image négative que subissent
les festivals électro, cette part de l'échantillon monte
même à 64,3% si l'on y ajoute ceux qui sont totalement d'accord
avec cela. Il est tout de même intéressant que dans notre
échantillon, 35,7% ne sont pas ou pas du tout d'accord. Bien qu'il
aurait été intéressant de savoir pourquoi, j'ai
préféré centrer la suite de mon questionnaire sur la part
de l'échantillon ressentant cette image négative.
Pour cette partie uniquement, qui concernera l'image
négative des festivals de musiques électroniques, la taille de
l'échantillon est réduite à 612 puisque les 340 personnes
représentants
b. L'image négative des festivals électro
perçue par les festivaliers
Quand l'on demande aux festivaliers s'ils ont l'impression
d'être impacté ou de subir cette image négative, les
résultats sont cohérant avec ceux obtenus
précédemment. Parmi les 64,3% soit la
70
les 35,7% ne ressentant pas d'image négative en
festivals électro auraient potentiellement pu fausser les questions
suivantes qui reposent sur la présence de cette image
négative.
A la question de savoir sur quoi est basée cette image
négative selon les festivaliers, ici même si toutes les
propositions ont plus été approuvées que
réfutées, certaines l'ont été bien plus que
d'autres. Toujours en accords avec la partie théorique, quatre
critères sortent du lot. Le plus important, qui s'approche d'ailleurs
énormément d'une unanimité, est l'usage de
stupéfiants avec 96,4% de l'échantillon (ce critère est
par ailleurs le seul à ne compter aucun membre de l'échantillon
n'étant pas du tout d'accord), suivi de près par les
médias non spécialisés dans la musique ainsi que par
l'affiliation aux rave/free parties illégales avec respectivement 86,6%
et 86,4% (il parait tout de même intéressant de noter que
malgré une quasi égalité, contrairement à
l'affiliation aux free parties les médias non spécialisés
compte une part plus importante de l'échantillon étant tout
à fait d'accord que plutôt d'accord). Enfin, le public de ces
festivals semble également avoir une part de responsabilité dans
cette image, comme semble le penser 66,5% de notre échantillon (bien que
dans cette part, seulement 9,8% soient tout à fait d'accord). Certains
critères, bien qu'étant quand même jugés comme
causes de cette image négative, se retrouvent avec une opposition plus
présente. Nous constatons que 32,5% de l'échantillon ne pense pas
que le fait que la musique électro ne soit pas considérée
par certains comme de la vraie musique joue un rôle si important dans
cette image négative. Il en va de même pour l'aspect trop bruyant
de ces évènements et de la musique qui y est diffusée avec
45,9%. Enfin, l'esprit contestataire de ces festivals aurait presque pu
être le seul critère à avoir une majorité pensant
qu'elle ne joue pas un rôle dans cette image négative,
malheureusement seulement 49,3% de l'échantillon étaient de cet
avis.
A la question de savoir si les festivaliers trouvent que les
médias non spécialisés dans la musique sont
majoritairement à l'origine de cette image négative, et bien
qu'étant évoquée dans la partie théorique, la part
de responsabilité de ces médias semble plus importante que
prévue. En effet, 87,1% de l'échantillon jugent ces médias
responsables, dont 37,3% sont totalement d'accord avec cette idée. Ces
pourcentages élevés semblent avoir encore plus de poids en
considérant que cette question demandait si l'échantillon jugeait
les médias comme principalement à l'origine de cette
image. De plus, parmi les 12,9% ne partageant pas cet avis, seulement 0,8% ne
sont pas du tout d'accord avec cette idée.
71
majorité de notre échantillon de départ
qui ressentent que les festivals électro subissent une image
négative, cette fois c'est avec 55,5% que la majorité de
l'échantillon se sent impactée par cette image négative
lorsqu'ils sont en festival. Il convient tout de même de noter que
malgré le fait qu'ils reconnaissent la présence de cette image
négative, 45,5% de notre échantillon ne semble cependant pas la
subir, avec notamment plus de personne étant en total désaccord
qu'étant en total accord (14,1% contre 11,4%).
A la question de savoir comment les membres de notre
échantillon se défendent lorsqu'ils sont confrontés
à cette image négative, ce qui est sûr c'est qu'une
confrontation entre un « converti » et cette image négative
donne quasiment toujours lieu à des débats, puisque seulement
2,1% de l'échantillon préfèrent simplement l'ignorer et ne
pas débattre. Cela montre bien la volonté de cette
communauté à vouloir partager ses ressenties et ses
expériences plutôt qu'à renier ceux qui les rejettent comme
les clichés le font croire. Nous constatons que trois défenses
sortent du lot, la première étant la description subjective de
pourquoi l'on aime ces festivals avec 80,4% de l'échantillon, suivi de
près par l'incitation à l'ouverture d'esprit avec 77,9%, et sur
la dernière marche du podium la dissociation en drogue et musique avec
66,7%. La troisième place de ce critère peut paraitre
étonnante étant donné les 96,4% de l'échantillon
jugeant que la consommation de stupéfiants est à l'origine de
cette image négative. Cela dénote encore plus avec les
critères utilisés comme arguments vus précédemment,
montrant que même si l'avis extérieur aura tendance à
pointer du doigt ces substances, l'avis intérieur montre que cet aspect
est relativement intégré chez les festivaliers. Consommation de
stupéfiants n'est pas synonyme d'excès ou de débauche, et
joue probablement un rôle dans les raisons qui font que les festivaliers
aiment ces évènements et qui poussent à l'ouverture
d'esprit. Ensuite arrivent d'autres arguments, comme par exemple la mise en
avant de la diversité sociale présente en festival (56,7%),
malheureusement probablement utiliser pour contrer le cliché classique
des « punk à chiens » et autres marginaux. Certains incitent
également à la participation à au moins un de ces
évènements (51,1%), car beaucoup de personnes ne jugent
malheureusement qu'avec les on-dit qui atteignent leurs oreilles ou bien avec
ce qu'en disent les médias. Enfin, certains tentent un réel
travail d'abnégation en tentant de faire découvrir des musiques
(49,8%), tout amateur de musique électronique sachant qu'il est
impossible de n'aimer aucun son de ce genre musical tant il est divers et
varié. Il est important de spécifier que beaucoup de membre de
cet échantillon affirment respecter les goûts et les opinions de
chacun, ils ne cherchent donc aucunement dans ces débats à
convertir leurs interlocuteurs aux musiques électroniques, mais ils
72
les incitent plutôt à considérer cette
musique et cette culture pour que, même si au final ils
n'apprécient pas cette musique, ils n'aient au moins plus d'idées
reçues à son sujet.
Quand l'on demande aux festivaliers si selon eux cette image
est exclusive aux festivals de musiques électroniques, on observe que la
majorité de l'échantillon réfute cette idée
à 58,5%, avec ici encore une part plus élevée de sujets en
total désaccords qu'en total accords (11,6% contre 4,2%). Bien qu'on ne
soit pas à l'abri d'une majorité obtenue suite à une
volonté de l'échantillon de se dédouaner, les causes les
plus probables à cette part majoritaire serait que les autres festivals
ou évènements avec des genres musicaux différents n'ont
pas/plus d'image négative ou qu'ils la dissimulent efficacement, ou bien
alors cette image pourrait résulter d'une obstination contre cette
culture de la part de ses oppresseurs.
A la question de savoir si les festivaliers trouvent que cette
image renforce leurs liens avec les autres festivaliers en donnant l'impression
de faire partie d'une communauté, il apparait nécessaire de
préciser une observation portée lors d'une question
précédente. On constate que 72,5% de l'échantillon ont
effectivement l'impression que cette image renforce leurs liens (avec 17,3%
étant en total accord avec cette idée), alors que nous avions vu
que 55,5% de cet échantillon se sentaient impactée par cette
image. Cela signifie que parmi ceux qui ne se sentent pas impactés par
cette image, 17% en profitent quand même pour solidifier leurs liens.
Cela peut faire sens avec la partie théorique où il avait
été fait mention de cet attrait pour cette culture, qui ne serait
pas devenue ce qu'elle est sans cette part de marginalité que l'on peut
ici imaginer responsable de cette impression de communauté.
Cependant, parmi ces 72,5% ayant l'impression que cette image
renforce leurs liens, on constate que 79,3% choisiraient quand même de
changer cette image s'ils en avaient la possibilité. Cela montre deux
choses : cette communauté pourrait continuer à prospérer
même sans être poussée à la marginalité (bien
qu'il apparaisse peu probable qu'elle choisisse de rentrer dans les rangs pour
autant) mais aussi que même parmi ceux trouvant leur compte dans cette
mise à l'écart due à cette image négative ils
préfèreraient que cette culture soit estimée à sa
juste valeur par le plus de monde, comme elle peut l'être dans les pays
voisins.
Quand l'on demande à notre échantillon s'il
existe selon eux des moyens autre que le temps pour faire disparaitre cette
image négative, 59% de l'échantillon ont répondu oui,
signifiant que 41% d'entre eux ont malheureusement en quelque sorte «
acceptés » cette image. Parmi les moyens proposés par la
part de l'échantillon pour qui des solutions existent, se sont
73
souvent les mêmes idées qui reviennent. Beaucoup
s'accordent pour dire qu'il faudrait augmenter la sécurité et les
fouilles pour éviter une trop grande présence de
stupéfiants ou bien des risques de débordements/bagarres. La
prévention a également beaucoup été citée,
avec une petite dissociation en public « expérimenté »
et « inexpérimenté ». En effet, beaucoup d'adeptes des
évènements électroniques en général (qu'il
s'agisse de festival ou de free party) déplorent les agissements des
nouveaux venus, souvent jeunes (voir même mineurs dans les milieux
où cela est autorisé ou où il n'y a pas de
législation), qui viennent uniquement pour le contexte festif sans tenir
compte des autres et qui ne se gèrent pas, nourrissant donc les
clichés et donc cette image néfaste. Ces moyens sont pourtant en
constante amélioration de la part des festivals qui y allouent parfois
un budget colossal, mais qui malheureusement n'a que peu de répercussion
sur cette image. On constate qu'une idée revient bien plus que les
autres : la communication. Il est autant question d'une communication encore
plus poussée de la part des festivals que ce soit au niveau de la
distinction avec les free parties, des valeurs défendues ou encore d'une
organisation irréprochable. Cependant ici aussi les festivals s'adaptent
constamment et redoublent d'inventivité, seulement il apparait que ce
n'est pas forcément le contenu de leur communication qui n'est pas
adapté, mais plutôt les canaux où elle est diffusée.
En effet, les communications des festivals touchant principalement un public
déjà adepte, c'est à un public « ignorant »
qu'ils devraient s'adresser. Vient alors l'idée d'une meilleure
communication médiatique, là aussi énormément
abordée par les membres de notre échantillon. Cependant, comme ce
ne sont malheureusement pas les festivals eux-mêmes qui peuvent faire un
reportage et ensuite le diffuser massivement sur des chaines à fortes
auditions, ce moyen parait quelque peu compliqué.
c. Critères sociaux-démographiques
Comme abordé dans la partie théorique, le public
des festivals de musiques électronique est en grande majorité
jeune, avec 58,5% de l'échantillon étant âgé de 18
à 25 ans, et 32% de 26 ans à 35 ans. Bien que plus l'âge
augmente et moins il y a de chance de retrouver cette tranche d'âge en
festival, il apparaît tout de même que 3,4% de nos
échantillons sont âgés de plus de 45 ans ce qui,
reporté à l'échelle d'un festival de 15/20k personnes,
représente plus ou moins 500 à 600 personnes. Ces classes
d'âge plus élevées que la moyenne ne sont pas pour autant
négligeables et font partie intégrante de cette communauté
festivalière.
74
Contrairement aux idées reçues, ce sont les
femmes qui sont les plus présentes en festival électro avec 55,8%
de l'échantillon contre 43,2% d'hommes (1,1% de l'échantillon n'a
pas souhaité répondre).
En accord avec les résultats précédents,
ce sont les étudiants qui sont le plus représentés en
festival avec 34,7% de l'échantillon, suivis de près par les
employés avec 30,7%. La troisième catégorie
sociaux-professionnelle peut étonner, puisqu'il s'agit des cadres avec
16,7%. Pour démontrer que les clichés ne sont pas fondés,
on pourra observer que seulement 5% de notre échantillon est
actuellement sans activités professionnelles.
Comme on pouvait s'en douter, de par les résultats
précédents mais surtout à cause des contraintes
logistiques et temporelles des festivals, ce sont les festivaliers n'ayant pas
d'enfants que l'on retrouve le plus en festival avec 56,1% de
célibataires et 35,5% de personnes en couple. Cependant on constate tout
de même que 8,4% de l'échantillon sont parents, s'expliquant par
la possibilité de confier son ou ses enfants à son conjoint ou
à sa famille, ou bien tout simplement de venir en famille en festival.
Cela montre bien qu'une vie de famille n'implique pas nécessairement la
fin des festivals.
B. Etude Qualitative
1. Méthode
Pour cette étude, j'ai fait le choix de mener une
étude qualitative auprès de directeur et créateur de
festival de musiques électroniques. Ce choix a été fait
pour deux raisons : tout d'abord j'ai jugé intéressant de mettre
en corrélation les avis des festivaliers à travers une
étude quantitative avec les avis des directeurs à travers une
étude qualitative. Deuxièmement, étant donné que je
cherche depuis un an à effectuer un stage dans un festival, j'ai pu
regrouper les coordonnées personnelles de plusieurs directeurs ce qui me
facilita grandement les choses.
75
Pour la rédaction du questionnaire (annexe 14) que j'ai
administré lors des interviews, je m'étais fixé trois
objectifs. Le premier était d'identifier des outils marketing et des
stratégies de communication clés utilisés en festivals de
musiques électroniques. Mon deuxième objectif était de
déterminer l'impact de l'image négative des festivals
électro sur leur réalisation. Enfin, mon dernier objectif
était d'identifier des outils marketing et des stratégies de
communication qui pourraient pallier cette image négative. Ce sont sur
ces trois objectifs que j'ai orienté mes questions.
J'ai réalisé mon étude à travers les
interviews téléphoniques des quatre personnes suivantes :
- Nicolas Cuer, Directeur du Positiv Festival
- Camille Cabiro, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival
- Emilie Angenieux, Directrice de l'Hadra Festival - Mickael
Gérard, Directeur du Millésime Festival
Ces festivals sont tous des festivals de musiques
électroniques, cependant leur positionnement central en termes de styles
musicaux diffère. Ainsi, les résultats devraient logiquement
être variés.
2. Résultats de l'étude
a. Outils marketing et stratégies de
communication spécifiques aux festivals d'électro
Concernant l'existence d'outils marketings spécifiques
aux festivals de musiques électronique, les directeurs de festivals
s'accordent tous pour dire qu'il n'y en a pas. « Je pense pas qu'il y ait
de spécificités particulières d'un style à un autre
par rapport aux festivals »63. Les outils utilisés par
les festivals électro peuvent donc être retrouvé dans
n'importe quel type de festival de musique. Certains outils, stratégies
ou moyens peuvent être innovants, mais rien ne limitera leur utilisation
aux simples festivals électro. Cependant, ce qui pourrait le plus se
rapprocher de spécificités concerne le contenu plutôt que
le contenant. C'est-à-dire que comme tous les festivals de musique, les
festivals électro utilisent et communiquent majoritairement via les
réseaux sociaux, cependant ils adopteront une certaine forme et un
certain ton qui sera vraiment
63 CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone
76
en lien avec la personnalité du festival, mais surtout
ils mettront en avant la même chose : l'expérience. « Pour
moi, les gros festivals de musiques électroniques utilisent à peu
près les mêmes codes que les festivals de musiques actuelles,
à la différence que je pense qu'ils ont compris ces
dernières années qu'il fallait parier sur l'expérience
», « Maintenant un festival de musique électro se vend un peu
au-delà du line-up par une expérience festivaliers
»64. Bien que maintenant tous les festivals aient compris
l'importance de l'expérience et mettent donc en avant celle qu'ils
proposent, ce sont les festivals de musiques électroniques qui ont
dû les premiers adopter cela pour pallier la simple line-up qui, lors des
premières éditions de ce genre de festivals, n'étaient
encore que peu significatives. Aujourd'hui donc, même si leur utilisation
diffère logiquement, les outils marketing utilisés par les
festivals électro sont les mêmes que ceux utilisés par des
festivals de genres musicaux différents.
Concernant cette fois la spécificité de la
stratégie de communication dans les festivals électro, ici encore
les directeurs n'en voient pas vraiment. Bien que chaque stratégie
dépende du festival, de ce qu'il souhaite mettre en avant, ou bien
encore de ses contraintes, les stratégies de communication des festivals
électro n'ont rien de spécifique et peuvent être
retrouvé dans des festivals d'autres genres. Encore une fois, ce sera le
message en lui-même qui se rapprocherait le plus d'une
spécificité plutôt que comment ce message est mis en avant.
Cependant, c'est un milieu qui ne se professionnalise pas depuis si longtemps,
et ces stratégies s'affinent donc petit à petit. Peut-être
que dans un futur proche il sera possible de réellement identifier une
stratégie de communication spécifique. En attendant, cette
stratégie claire et posée n'a même pas forcément le
besoin d'être très poussée : « Dans les festivals de
musiques électroniques à plus petites jauges et avec moins
d'années d'existence on est moins sur de la communication de
stratégie, moins sur de la réflexion et plus effectivement sur de
la facilité comme ça peut être les réseaux sociaux
»65. Donc ici encore, pas de stratégie de communication
spécifique aux festivals de musiques électroniques.
Quant l'on demande à ces directeurs les outils
marketing utilisés pour leur festival, les réponses sont en
corrélations avec la partie théorique. Nous retrouvons donc la
communication hors médias avec les flyers et les affiches, les sites
internet ou encore les newsletters, la communication média avec la
radio, la télé, la presse écrite/en ligne ou encore des
blogs (principalement, voir uniquement via des médias
spécialisés dans la musique ou la culture), et enfin les fameux
réseaux sociaux avec Facebook, Instagram, Tweeter ou encore YouTube
et
64 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
65 Idem
77
Snapchat. Ces outils sont les plus répandues, mais
n'empêche pas l'utilisation d'outils moins répandus (comme par
exemple des cookies qui contiennent un message, sensé appuyer l'impact
de celui-ci) ou même encore de faire d'un outil la non-présence
d'autres outils comme par exemple de ne proposer aucuns goodies pour appuyer
ses valeurs environnementales : « on est un festival 0 déchets
»66. D'après Emilie Angenieux, les outils
utilisés dépendent en fait ce que l'on veut montrer, et des
moyens financiers que l'on peut y allouer : « Les outils marketing ou de
communication ne décident pas des valeurs, c'est l'inverse »,
« La stratégie est aussi définie par le budget qu'on donne
sur la globalité pour qu'après ça, une fois que les axes
sont bien définis, on définisse les partenariats médias,
etc. ».
En ce qui concerne les stratégies de communication
utilisées, nous avons cette fois des réponses qui
diffèrent. Tout d'abord au niveau de la fréquence de
communication le Positiv festival communique tout au long de l'année
contrairement au Millésime, à l'Open Air et à l'Hadra qui
communiquent respectivement de Décembre à Mai (« C'est
uniquement 6 mois de communication, les 6 autres mois on est quasiment absent
de la toile »67), de Mai à Novembre, et seulement
à partir du moment où l'édition de l'année suivante
est officiellement validée. Chaque festival définit son
rétroplanning à respecter, bien que ce ne soit pas toujours
évident : « Même si la stratégie elle est
définie, qu'il y a un rétroplanning où on définit
vraiment les grandes phases un peu tous les mois, le contenu vient souvent
d'ailleurs en retard parce que y a plein de choses qui se modifient, qui
arrivent, etc. »68. Tous ces festivals s'accordent cependant
pour dire que les annonces artistiques sont prioritaires. Ensuite, cela
dépend des valeurs, des messages, et de l'image que veut renvoyer le
festival. Pour l'Hadra festival, c'est même plus qu'important : « on
a quand même une vigilance à ce que la communication soit en
accord avec nos valeurs », « Après ces grosses phases
d'annonces, que sont les annonces artistiques, y a souvent des post sur
vraiment des actions un peu de fond de Hadra ». Donc, nous pouvons
retrouver une structure stratégique similaire entre ces festivals,
cependant comme un point d'honneur est mis à faire une communication qui
correspond au festival, chaque stratégie devient vite unique. Par
exemple pendant le Positiv deux personnes sont chargés exclusivement des
publications en live et nous pouvons également retrouver un magazine du
festival, pour l'Open Air les festivaliers seront beaucoup mis en avant avec
des photos et des vidéos, et enfin le Millésime utilise quant
à lui beaucoup le format des interviews : « Plus on se rapproche du
festival plus on va accentuer la
66 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
67 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
68 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
78
communication sur des interviews d'artistes, sur des
interviews du maire, sur des interviews de l'équipe technique, ce genre
de choses quoi »69. Ce qui est sûr, c'est que le nerf de
la guerre dans la stratégie de communication des festivals de musiques
électroniques, c'est que les communications et les façons dont
elles sont faites sont en accord avec les valeurs et l'image du festival qui
communique.
Avec ces informations, nous pouvons nous demander si ces
outils marketing et ces stratégies de communication ne seraient donc pas
à l'origine de l'identité des festivals. Ce à quoi les
directeurs ont eu du mal à répondre par un simple oui. Pour
Camille Cabiro c'est évident : « Notre communication est à
l'image de notre festival ». Cependant, pour Emilie Angenieux c'est
l'inverse. La communication ayant évolué au cours des
dernières années, c'est plutôt l'identité du
festival qui est à l'origine des outils et des stratégies :
« Les choses pour lesquelles on ne fait pas d'écart c'est vraiment
les valeurs, et c'est ça qui définit notre stratégie de
com en soi et à travers les années ». Tout cela
relève donc d'une appréciation propre à chacun, certains
auront une idée de communication précise qui influera grandement
sur l'identité du festival, tandis que d'autres festivals auront
déjà des valeurs très présentes qui
définiront les outils et stratégies utilisées. Pour
certain, à l'instar de Mickael Gerard cela relève même d'un
état d'esprit présent avant même la naissance du
Millésime qui n'a pas pour but de faire une communication qui attirera
le plus de monde possible : « On veut une communication assez
légère et plutôt toujours dans l'humour et dans le
côté un peu rock'n'roll, c'est ce qui fait notre identité.
On est issu du mouvement free, donc on a pas cette culture de l'argent entre
guillemets ». Il n'est donc pas possible de déterminer si ce sont
les outils et stratégies qui sont à l'origine de
l'identité du festival ou bien l'inverse, mais ce qui est sûr
c'est que ces facteurs sont liés et influent l'un sur l'autre.
b. L'image négative des festivals électro
perçue par les directeurs
A la question de comment ces festivals ont été
impactés par l'image négative dont souffre les festivals
électro français, ici encore nous retrouvons les mêmes
genres de réponses. Tout d'abord, il est nécessaire de mentionner
qu'ils ne sont aujourd'hui plus, ou en tout cas beaucoup moins qu'avant
impactés par cette image en comparaison aux premières
éditions : « Cette image négative elle est difficile
à changer mais petit à petit on y arrive »70 et
cela notamment grâce à la
69 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
70 Idem
79
popularisation de l'électro avec le temps : « il
l'est moins qu'y a 10 ans »71. Cependant, peu importe le
moment, ces festivals sont tous impactés de la même façon
par les institutions publiques, les mairies ou encore les forces de l'ordre :
« Ils avaient au début un oeil sur nous, ils nous attendaient au
tournant »72, « Autant dans ma carrière d'artiste
que dans ma carrière d'organisateur, c'est des choses auxquelles j'ai
été confronté très souvent, ça c'est
sûr »73, « on est quand même dans une optique
très underground, on est très peu reconnu »74.
Pour Camille Cabiro, ces constantes réticences (au début tout du
moins) sont souvent explicables par l'écart d'âge entre les
différents partis : « C'est très lié à la
tranche d'âge de nos interlocuteurs, quand on est arrivé au
début et qu'on avait des personnes plutôt ayant passé la
cinquantaine en face de nous et qu'on leur parlait d'un festival de musique
électro, tout de suite ils pensaient aux free parties ». Fort
heureusement, à force de dialoguer et de montrer patte blanche, les
stéréotypes disparaissent et des liens se créer entre les
festivals et les institutions, mais également avec les publics qui
pouvaient eux aussi être réticents : « Ces
stéréotypes ne sont plus autant présents, et les festivals
électro sont plus en avance sur certaines questions que les festivals de
musique actuelles, comme les questions environnementales et
d'égalité femme/homme »75, « Grosse
confiance de la mairie qui malgré les réticences d'autres laisse
un festival se produire dans un lieu classé UNESCO », « On a
pas d'image négative nous, on est fâché avec personne, on
veut marcher sur personne, on respecte tout le monde. On a toujours
respecté le public, le public nous suit »76. Ces
réponses sont donc en accord avec la partie théorique, les plus
gros obstacles à la bonne organisation (ou plutôt à la
création) de ces festivals de musiques électroniques étant
les institutions publiques et les mairies qui sont aveuglés par les
stéréotypes que subissent ce milieu, comme l'explique Mickael
Gérard : « Aux yeux des gens techno = drogues, techno = se mettre
à l'envers ou quoi que soit alors que pas plus qu'une fête
étudiante, pas plus qu'un concert reggae, pas plus que n'importe quel
type de concert ».
Confrontés à tous ces obstacles, il est
intéressant de se demander comment ces festivals y font
concrètement face. Là encore, la réponse est unanime : il
faut dialoguer, beaucoup, et être patient, méthode
également utilisée par les festivaliers comme nous avons pu le
voir dans la précédente étude : « Alors ça...
c'est de la patience, c'est de la pédagogie et puis c'est lié
à pleins
71 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
72 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
73 CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone
74 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
75 Idem
76 CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone
80
d'autres actions »77, « Nous on a
contré ça avec beaucoup de dialogues »78, «
On discute, on rencontre les gens notamment »79. Ces dialogues
et discussions se font autant envers le public que les institutions et les
forces de l'ordre, qui nourrissent le même ressentiment. Pour cela, il
faut jouer sur l'image du festival que l'on renvoie, mais également
savoir jongler avec les mots, comme le font Nicolas Cuer : « On essaie
vraiment d'axer notre image sur quelque chose de très frais, de
très positif, et qu'il y ait pas de malentendus » et Camille Cabiro
: « Hormis dans les médias spécialisés, on parle
plutôt d'une fête populaire plus que d'un festival de musique
électro. Le mot électro est peut-être présent mais
alors en dernier ». Leurs but est de démonter les clichés
auprès du public comme le fait l'Hadra : « On essaye de travailler
avec les habitants, on essaye de les faire venir, on les invite, on leur
explique le projet, et à partir du moment où les gens viennent
sur ton évènement ils sont déjà à
moitié convaincus en fait » mais également auprès des
institutions et des forces de l'ordre en rappelant notamment la
différence entre un festival et une free party, à l'instar du
Millésime : « Le nombre de réunions qu'on a avec les
pompiers, les gendarmes pour mettre en place la bonne tenu du festival. Au fur
et à mesure des réunions on voit qu'ils se rendent compte qu'ils
ont des gens sensés face à eux ». Au début il faut
donc instaurer un climat de confiance entre tous les partis concerné
pour que ces festivals puissent avoir leur chance de faire leurs preuves, et en
général une fois les bilans des premières éditions
sortis les clichés se brisent et des liens commencent à se
créer, comme nous l'explique Mickael Gérard : « Et puis
surtout il y a la preuve que quand on fait le bilan du festival, bah qu'au
final ils ont moins d'intervention (les gendarmes et pompiers) sur le
Millésime qui draine 5000 personnes par jour que sur une fête de
village qui va ramener en un seul soir 1000 personnes quoi, ce sont leurs dires
et donc des faits avérés ».
Nous avons vu tout à l'heure qu'il n'existe pas
d'outils marketing ni de stratégie de communication propres aux
festivals de musiques électroniques. Cependant, même si ces moyens
ne leur sont pas spécifiques, ne peuvent-ils pas pour autant jouer un
rôle dans l'image négative qu'ils subissent ? Les directeurs de
festivals interrogés sont globalement d'accord avec cela. Pour Nicolas
Cuer « Chacun a sa manière de communiquer », cependant il faut
faire attention à se rappeler d'où l'on vient mais surtout
où l'on va : « Dès qu'ils sortent de leur but premier,
c'est-à-dire faire rêver les gens, là pour moi c'est pas
bon. On est là pour vendre du rêve, pas pour faire de la
politique. Avec la période covid, beaucoup de festival se sont
prononcé
77 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
78 CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone
79 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
81
"politiquement" ce qui n'est pas ce que leur demande les
festivaliers. Il faut faire attention à l'image que l'on renvoie, faire
en sorte qu'elle ne s'éloigne pas trop de ce qu'elle devrait être
c'est à dire positive ». On peut donc voire encore une fois que
l'image et la communication sont très liées. Il n'y a cependant
pas que la communication des festivals d'aujourd'hui qui jouent un rôle
dans cette image : « Quand on pense musique électro plus dub/tribal
c'est vrai que leur com sont très marquées et donc ça
renvoie un peu à cette mauvaise image qu'a pu avoir l'électro
dans les années 90 »80, « Effectivement, si tu
regardes des évènements qui ont eu lieux par le passé,
ça ne joue pas en notre faveur »81. Il faut donc
être extrêmement rigoureux dans sa communication. Il n'existe
d'ailleurs pas de communication commune aux festivals électro,
malheureusement il suffit qu'un festival ne communique pas correctement pour
tout le secteur puisse en pâtir en plus du festival concerné :
« Bah ouais, nous on a toujours essayé de faire les choses de
manières très professionnelles, très rigoureuses pour
justement qu'on n'ait rien à nous reprocher. Sur des esthétiques
comme les nôtres, si tu travailles pas comme il faut avec la
préfecture bah tu peux pas réorganiser un festival
»82. Cependant, la communication en elle-même des
festivals n'est pas forcément responsable (ou bien alors en partie
seulement) de la mauvaise image qu'elle véhiculera au final. En effet,
le public peut également en être la cause comme le dit Mickael
Gérard : « Alors pas nous qui la mettons en place, après les
gens qui la commentent oui certainement ». Le public a en effet un
très grand impact sur l'image que véhicule un festival comme nous
avons pu le voir dans l'étude précédente. Il n'est
malheureusement pas rare, surtout sur les réseaux sociaux, de voir un
déversement de haine totalement injustifié de la part du public
simplement car ils ne sont pas satisfaits, ou même juste pour le plaisir
car ils ne partagent pas les mêmes valeurs et ne souhaitent en aucun cas
s'y intéresser. Le public étant la principale cible des
communications des festivals, certains se sentent donc obligé de
s'adapter quitte à mettre de côté leurs valeurs et l'image
qu'ils veulent véhiculer. En effet, il est malheureusement toujours plus
simple de croire ce que l'on voit ou ce que l'on entend plutôt que de se
faire ses propres idées : « mais les gens devraient aussi se faire
leur propre opinion, j'espère pas que des festivals avec un style un peu
plus hard que le nôtre changent leur com pour changer l'image qu'ont les
gens de nous »83.
Nous pouvons donc dire que la communication des festivals a
effectivement sa part de
80 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
81 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
82 Idem
83 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
82
responsabilité dans l'image négative qu'ils
subissent bien que ce soit loin d'en être la cause majeure. Ce sont les
stéréotypes qui sévissent dans ce secteur qui rendent les
erreurs de communication (qui n'en sont d'ailleurs pas toujours, seulement
elles ne plaisent pas à tous) si impactantes pour les festivals de
musiques électroniques.
Mais alors, si elle ne provient pas du marketing ni de la
communication des festivals, d'où vient cette image négative ?
Pour nos directeurs cela vient de plusieurs raisons. Tout d'abord, il y a un
contexte historique avec les rave, les free, ainsi que ses publics et la
consommation de stupéfiants qui y est faite : « Les années
90, les free parties l'utilisation de sites sans autorisation, ou plus
récemment en termes de pollution »84, « C'est
l'image des rave je pense un peu avant, c'est la drogue c'est l'alcool c'est
les chiens... »85. Ensuite, il faut comprendre qu'à
l'origine les musiques électroniques étaient principalement un
mouvement contestataire : « C'est à la base une musique de
rébellion »86. Donc logiquement, puisque ce mouvement
essayait de bousculer les moeurs établis, il a pu faire peur comme
l'explique M. Gérard : « Je pense que depuis toujours la techno est
assimilée à une musique qui fait peur. Elle est assimilée
au côté drogue. De l'origine d'une musique qui n'est pas connue
par le public lambda et qui fait peur »87. Enfin, la
dernière raison principale selon eux concerne la jeunesse. En effet,
comme vu dans l'étude précédente le public des musiques
électroniques est majoritairement jeune. Dans les free et rave parties,
autant aujourd'hui que dans les années 90, il est même
fréquent d'y trouver beaucoup de mineurs. De ce fait, ce mouvement a
été associé par les politiques à la jeunesse comme
l'explique Nicolas Cuer et Emilie Angenieux : « Il y a eu historiquement
des présidents et autre qui se sont insurgés contre ce mouvement
là parce que c'était mauvais pour les jeunes... Et puis c'est
resté comme ça », « On a
stéréotypé ce public sans trop le connaitre et du coup on
a stéréotypé une jeunesse qui va subir encore maintenant.
On stéréotype encore un mouvement, encore un type de personne, et
encore une jeunesse aussi à travers ça alors qu'en fait c'est
juste le festif ». En clair cette image est présente depuis
l'apparition des musiques électroniques, de par ce que ces musiques
véhiculaient (et véhiculent toujours), des publics qui
l'écoutaient, mais surtout de la part de ceux qui ne la comprenaient pas
et qui souhaitaient la voir disparaitre.
Maintenant que nous avons démontré que cette
image négative est bien réelle, il convient de se demander si
elle est réellement si impactante pour les festivals de musiques
électroniques. En
84 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
85 CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone
86 Idem
87 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
83
effet, cette image négative n'empêche pas la
musique électro de se développer et de se propager en France
(étant déjà relativement présente et
intégrée dans nos pays voisins). Selon nos directeurs, cette
image pose de réels problèmes auprès des institutions
comme nous avons pu le voir précédemment : « Auprès
des institutions qui devraient nous soutenir, puisqu'on reste dans le secteur
culturel et dans le secteur des musiques »88. Il faut en effet
être très prudent lors de l'exposition d'un projet à ces
institutions qui peuvent vite prendre peur et tomber dans les clichés,
comme le fait M. Cuer : « ça fait à peu près 10 ans
que lors des réunions à la Mairie je n'ai plus employé ni
le mot "techno" ni les mots "musique électro" ». C'est un peu
différent en ce qui concerne le public. En effet, un amateur de musiques
électroniques se fichera totalement de l'image négative de la
musique qu'il écoute ou des évènements dans lesquels il se
rend, ce n'est malheureusement pas le cas pour ceux qui ne connaissent pas
cette musique et se laisse atteindre par des clichés : « ça
dépend, je pense que pour un public qui connait les musiques
électroniques et qui a déjà été dans ce type
de festival, non et au contraire je pense que c'est eux qui le défendent
et qui sont assez solides sur leurs appuis. Par contre pour le public lambda et
les gens qui regardent la télé c'est clivant »89.
Il est cependant important de préciser que ces cas ne sont pas des
généralités et que même si presque tous les
festivals ou évènements électro vont rencontrer des
difficultés à leurs débuts face aux institutions, un
climat de total confiance peut s'installer avec le temps et l'image
négative disparait, comme l'explique M. Gérard : « En tout
cas nous pas à notre niveau. Les personnes qui sont importantes et qui
sont décisionnaires sont de notre côté donc pour nous
ça n'a plus un réel impact ». Le Millésime est
pourtant un festival très underground, mais cela ne l'a pas
empêché de démonter les idées reçues. Cette
image négative est donc réellement impactante pour les festivals
électro, bien que cela n'empêche pas l'augmentation du nombre de
fans ainsi que la croissance du secteur des musiques électroniques.
Maintenant que nous savons que les festivals électro
sont impactés par cette image négative, il serait
intéressant de connaitre les aspects des festivals les plus
touchés. Sans grande surprise, c'est l'organisation des
évènements qui en pâtit le plus et notamment au niveau de
la sécurité comme l'explique Nicolas Cuer : « Si tu vas
à la Mairie pour dire on fait un festival de musique classique,
derrière on te fera pas chier pour les pompiers ou pour la sécu,
mais comme c'est de l'électronique on te dit que c'est beaucoup plus
compliqué à gérer au niveau du public, qu'il faut
88 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
89 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
84
faire attention, et ça entraine des surcoûts qui
sont colossaux ». Ces impacts vont également être
présent au niveau des relations avec cette sécurité
présente que sont les forces de l'ordre et les pompiers : « Alors
nous je dirai la seule chose qui peut être impactée c'est la
relation qu'on va avoir avec les pompiers et les gendarmes. Ils ont beaucoup
plus d'aprioris ça va être effectivement plus compliqué,
vraiment il faut qu'on parte dans la discussion pour pouvoir apaiser le truc et
arriver à une vraie entente »90, « Les flics vont
trembler parce qu'ils vont se dire là c'est que des acharnés qui
arrivent »91. Le public est également touché par
cette image, ce sont même peut-être les plus impactés :
« Le public, parce que tu vas stéréotyper tout un courant
musical à partir de la pub qui en est faite quoi. Du fait d'avoir une
image négative, pour moi ça se renvoie autant sur le public que
sur l'orga »92. Cependant, cela n'a que peu de
conséquence puisque comme il a déjà été dit,
le public de ces évènements n'a que faire de l'image
négative qu'ils subissent, cela ne les empêchera aucunement de s'y
rendre. Ce sont donc les aspects relationnels avec les institutions ou les
forces de l'ordre au niveau de l'organisation qui sont le plus impactés
par cette image négative, les stéréotypes étant
malheureusement plus que présents (bien que l'on ait vu qu'ils peuvent
disparaitre à force de dialogues et de bilans positifs).
Maintenant que cette image négative et ses
conséquences sont avérés, il serait intéressant de
savoir comment il serait possible de la faire évoluer selon les
directeurs de festivals. Tout d'abord, selon Nicolas Cuer il n'y a plus
grand-chose à faire au niveau de la communication, surtout qu'elle n'est
pas mauvaise mais plutôt mal reçue par certains : « Changer
l'image alors que de manière interne elle est bonne, je vois pas comment
on pourrait faire. Sinon avec des visuels qui dénoteraient des visuels
des free party du début des années 2000, du graphisme, des
images, du message qu'on passe ». Une autre possibilité qu'il
émet serait d'adapter sa programmation : « Tu peux rester quand
même essentiellement techno mais si par exemple tu rajoutes un soir pop
et ça ne serait pas incohérent » bien que cela
dépende du festival et ne soit pas une possibilité si l'on
cherche à rester uniquement électro. D'autres moyens, pourtant
déjà bien présents mais pas forcément
remarqués, seraient des actes de sensibilisation comme l'explique
Camille Cabiro : « De notre part c'est de la sensibilisation, montrer que
nos évènements ça se passe bien, qu'il y a pas plus de
risque de venir à un évènement électro plutôt
qu'un évènement d'un autre style musical... ». Cependant,
ces actes de sensibilisation ont toujours été présents et
le sont de plus en plus d'années en années, sans que cela fasse
réellement
90 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
91 CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone
92 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
85
évoluer l'image des évènements
électro. Pour Emilie Angenieux et Mickael Gérard cela se joue
grandement au niveau temporel : « Du fait qu'on vieillit, que les
années passent, le mouvement commence à être de plus en
plus reconnu », « En continuant à faire ce qu'on fait,
c'est-à-dire continuer à faire des festivals et prouver que
ça se passe toujours bien, que les médias surtout continuent de
faire leur travail en relayant les aspects positifs de ces festivals-là
». Les médias ont également leur rôle à jouer
dans cette image, comme nous avons pu le voir dans l'étude
précédente. En effet, les médias ne montrent pas toujours,
pour ne pas dire jamais les aspects positifs des festivals et ne font au final
qu'entretenir et propager des idées reçus, qui sont ensuite
assimilées par le public et les institutions qui nourrissent cette image
négative : « Le meilleur moyen resterait que ce soit ceux qui
alimentent cette image négative qui cherchent à se renseigner
plutôt qu'à diffuser et retransmettre ce qu'on leur a juste dit
»93. Les idées pour faire évoluer cette image
négative sont donc nombreuses, malheureusement il n'est soit pas
possible de les mettre en application soit elles n'ont au final que peu
d'effets.
c. Les moyens pour pallier cette image
négative
Pour faire évoluer cette image, peut-être que
l'adaptation d'outils marketing existants ou bien la création de
nouveaux seraient utiles. A cela, les avis des directeurs sont mitigés.
Certains ne voient pas trop quoi faire mais ne doutent pas que de bonnes
idées pourraient émerger à tout moment, certains ont
déjà quelques idées comme par exemple des réseaux
sociaux spécialisés : « A mon avis, il peut y avoir des
réseaux sociaux qui peuvent se créer pour des plateformes
spéciales peut être qui peuvent être diffusés
à grande échelle pour des comptes rendus de tel ou tel festival
»94 et enfin certains pensent que le problème est
ailleurs : « A partir du moment où les gros médias, la
télé, en parlent d'une manière négative
forcément ça a un impact" "Donc bien sûr que les outils
marketing ont leur place, mais à partir du moment où y a pas de
reconnaissance des médias de masse, je suis pas sûr que ça
fasse avancer le schmilblick quoi... »95. Les outils marketing
ne semblent donc pas être le meilleur moyen de faire évoluer
positivement cette image, ou du moins pas à grande échelle.
Dans ce cas, peut-être que l'adaptation de
stratégie de communication existantes ou bien la création de
nouvelles pourraient être plus appropriées. Ici la réponse
est unanime et c'est un
93 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
94 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
95 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
86
grand oui, cependant aux yeux des directeurs cette nouvelle
communication ne doit pas provenir des festivals. Tout d'abord, c'est l'Etat
qui pourrait s'investir un peu plus dans ce secteur : « Que les
ministères mettent en place une stratégie de directives pour
justement rassurer les élus, dire si une association vous
présente un projet sérieux bah aidez-les, accompagnez-les
»96. Mais pour la plupart ce sont les médias qui posent
problème comme le font respectivement remarquer Nicolas Cuer, Camille
Cabiro et Emilie Angenieux : « Cette image étant fondée sur
des on-dit, le moyen le plus simple d'y palier serait d'avoir une grosse
exposition sur des médias avec une grosse visibilité comme TF1,
si on y montre que tout se passe bien et qu'il y a dans les festivals
électro des gens comme tout le monde cette image évoluera »,
« Je pense pas que ce soit la manière de communiquer des festivals
qui ait besoin de changer, mais les médias eux auraient besoin de
changer un peu leur manière de communiquer pour ceux qui ne connaissent
pas le secteur mais je pense qu'ils n'y voient pas d'intérêts pour
eux. Donc oui ça aiderait l'opinion public s'il y avait des
stratégies de communication différentes mais je pense pas que ce
soit celles des festivals qui doivent changer », « Pourquoi les
festivals de musiques électro doivent en venir à se poser ces
questions alors qu'en fait on se pose pas ces questions pour un festivals de
jazz ou pour un festival de musique actuelle grand public. Nous on en arrive
à justement se dire qu'il faut aller plus loin, qu'il faut qu'on soit
hyper transparent, qu'on soit revendicateur aussi mais sincèrement je
pense qu'on se pose tous cette question dans le monde des musiques actuelles et
je trouve que encore une fois les musiques électroniques on doit encore
et toujours prouver, et encore être en avance et démontrer qu'on a
notre place ». Comme lors de la précédente étude, ce
sont encore les médias qui sont grandement pointés du doigt.
Mais alors finalement, quel serait le meilleur moyen de
pallier cette image négative ? Ici encore la réponse est unanime.
Pour les directeurs de festival, le meilleur moyen serait que tous ceux qui ont
une mauvaise image des festivals de musiques électroniques s'y rendent
au moins une fois pour voir qu'ils se trompent : « Je trouverai ça
assez intéressant que au moins une fois dans sa vie, plutôt quand
ils sont jeunes, que chaque personne assiste à un
évènement de musique électronique et le découvre de
l'intérieur, qu'il y ait un vrai temps d'échange entre nouveaux
et habitués »97, « Eh bah qu'ils viennent à
notre évènement »98, « Le moyen le plus
efficace ce serait de pouvoir attirer un public qui n'est à la base pas
concerné quoi, faire venir ces gens-là, tous ces gens qui ont une
image négative et qui vont dire ça c'est de la merde c'est de la
musique
96 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
97 CABIRO Camille, Cocréatrice du Bordeaux Open Air
Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
98 ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival,
France, 27/04/2021, Téléphone
87
de drogué ou quoi que ce soit, c'est la faire venir
pour qu'ils se rendent compte par eux-mêmes que bah non, que ça
peut être un bon moment à passer »99. Si chaque
année il y a de plus en plus d'adeptes des musiques
électroniques, c'est que ce mouvement devrait au moins mériter
une considération, que l'on s'y intéresse plus en profondeur
avant de se faire un avis. Le meilleur moyen pour cela serait effectivement de
s'y rendre et de constater les choses par soi-même pour se fonder sa
propre opinion.
99 GERARD Mickael, Directeur du Millésime Festival,
France, 12/05/2021
89
PARTIE III. ANALYSE DES ETUDES
a. Les festivals de musiques électroniques
Tout d'abord, en total cohérence avec la partie
théorique, le public des festivals électro est majoritairement
jeune puisque plus de 90% de notre échantillon ne dépassaient pas
35 ans. Bien qu'il ne faille pas oublier les 10% restant, la stratégie
de communication des festivals visant principalement un public jeune est donc
justifiée. D'un point de vue sociaux-démographique, il n'y a pas
vraiment d'autre informations surprenantes mis à part le faible
pourcentage de festivaliers actuellement sans activités professionnelles
(5%). Un cliché très connu présente les amateurs
d'électro (peut-être tout de même visant plus les teufeurs
que les festivaliers) comme des personnes en marge de la société,
pour ne pas dire des cas sociaux. Bien que cela dénigre grandement des
personnes se trouvant peut-être simplement dans une situation
professionnelle temporairement instable, il n'y a tout simplement rien de
valable là-dedans puisque seulement 5% sont très loin de
représenter une majorité. Cette majorité est quant
à elle constituée de personnes intégrées à
la société (sur le plan professionnel tout du moins). C'est
pourtant un stéréotype que l'on retrouve souvent, et qui est
sûrement aussi répandu à cause des médias et des
politiques qui l'utilisent à tout va.
Concernant la fréquentation des festivals de musiques
électroniques, même sans avoir d'éléments de
comparaisons avec des festivals d'autres genres, nous pouvons tout de
même dire qu'ils ont le vent en poupe. Nous avons constaté qu'il y
a beaucoup plus de personnes se rendant énormément en festivals
que de personnes s'y rendant peu, avec des moyennes très raisonnables.
Comme vu dans la partie théorique, le nombre d'adeptes de musiques
électroniques ne font qu'augmenter. Même si faire partie de ces
adeptes ne signifie pas forcément qu'ils se rendent en festivals, ces
festivals représentent tout de même de très bon voire les
meilleurs endroits où profiter de ce genre de musique et de sa culture.
Il me parait donc plutôt logique de supposer que le nombre de
festivaliers augmente. Nous pouvons aussi observer que sur une période
de plusieurs années, la fréquentation totale a tendance à
être supérieure à la moyenne sur un an, ce qui montre bien
que les habitudes des festivaliers ne sont pas fixes. Les moyennes
énoncés sont donc plutôt à considérer comme
des minimums pouvant correspondre aux festivals préférés
ou habituels, auxquels peuvent s'ajouter un ou deux autres festivals (et
même plus) qui auront touché le festivalier que ce soit par sa
programmation, ses valeurs, son ambiance ou encore les
90
retours qu'il en a eu. Alors malgré les
difficultés rencontrées lors de la création d'un festival
mais aussi lors de ses rééditions ainsi que l'image
négative qu'ils subissent, ces festivals et leurs publics sont la preuve
qu'il en faudra plus pour stopper cette culture. De nouveaux festivals
électro continuent d'apparaitre, tandis que les plus anciens continuent
à mener une existence pérenne et se développent même
pour certains. La fin de cette période de Covid qui a mis à
l'arrêt ce secteur d'activité pendant un an, et même deux
pour énormément de festivals, promet cependant une reprise
intense et soutenue par nombre de festivaliers. Comme l'ont montré les
différentes free parties qui ont eu lieu pendant les confinements, mais
également les gros rassemblements musicaux à Lyon et Paris
récemment, la volonté de faire la fête est plus
présente que jamais.
En ce qui concerne les différents styles que les
festivaliers veulent retrouver sur scène, ils sont en grande partie en
accord avec les styles qu'ils écoutent quotidiennement. La techno et la
house occupent les premières marches du podium dans les deux cas, ce qui
n'a rien de surprenant étant donné que ce sont les deux premiers
styles à non seulement sortir du cadre illégal des rave en France
mais également à être autant popularisés par son
public que par ses artistes. La French Touch a évidemment sa part de
responsabilité dans la consommation actuelle d'électro en
général mais surtout de techno et de house. Il est cependant
intéressant de se demander si cette French Touch n'a pas en
réalité plutôt pénalisé le
développement de l'électro en France. Comme abordé dans la
partie théorique, le gouvernement qui n'approuvait pas du tout ce
mouvement n'a pas eu d'autre choix que de retourner sa veste au moment de
l'essor de cette musique et de ses acteurs, ce qui a permis à certains
DJ's français de se produire d'avantage et de se faire un nom à
l'international. Fierté française oblige, ces artistes ont
été très largement mis en avant sur cette nouvelle
scène électro française, au détriment des autres
styles pourtant si nombreux. Nous pouvons voir ici des causes au
non-développement de ces styles : techno trop mise en avant, artistes
connus à l'international offrant une bonne image culturelle, ou encore
beaucoup de politiques contre le mouvement mais pas contre l'idée de se
montrer associés de quelque manière que ce soit à une
culture émergente et rassemblant de plus en plus de monde. Sans la
French Touch, il aurait été intéressant de voir s'il y
aurait aujourd'hui une si grande différence de popularité entre
les styles. L'électro se serait peut-être développée
équitablement, et cette notion d'électro « underground
» n'aurait peut-être pas vu le jour. Cependant, étant
donné les réticences du gouvernement, il serait aussi juste de
penser que l'électro pourrait être encore moins
développée aujourd'hui. Nos voisins européens ont eux
aussi subis cette vague de rave et free parties illégales, pourtant la
France est la seule à encore se battre contre cette culture plutôt
que
91
de la mettre en avant, ce qui explique qu'elle soit beaucoup
plus développée à l'étranger. Dans tous les cas, la
techno et la house se sont assurées un avenir prospère en France.
Cependant, d'autres styles caractérisés d'underground sont
également bien présents, à l'instar de la Trance qui
compte (selon notre échantillon) presque autant de personne voulant
l'écouter en festival que la house. Il en est de même pour les
styles comme l'Acidcore et la Hardcore. Dans un festival exclusivement
électro (qui ne serait cependant pas exclusivement consacré
à la techno) ces styles seront forcément présents. Il est
même de plus en plus courant pour des festivals non
spécialisés dans l'électro de présenter des
artistes Trance à l'instar d'artistes Techno. Ceci est justement un
point important : il faut différencier le style, et l'artiste qui
l'interprète. En effet, pour reprendre les résultats obtenus, la
Frenchcore n'est par exemple pas un style forcément attendu dans un
festival électro. Cependant, il est maintenant très
fréquent de retrouver en festival électro le DJ « Dr.
Peacock », un artiste Allemand spécialisé dans la
Frenchcore. Il est très populaire, et certains le caractérise
même d'artiste commercial dans le milieu de l'électro. Un festival
voulant diffuser de l'électro ne prendrait donc pas trop de risque en
diffusant Dr. Peacock même si son style n'est pas le plus attendu, et ce
grâce à sa notoriété. En clair, même s'il y a
objectivement des styles qui sont préférés à
d'autres, il n'est pas rare de voir en festival un nombre équivalent
d'artistes représentants différents styles, plutôt qu'un
nombre d'artiste proportionnel à la popularité d'un style, et ce
grâce à la notoriété. Il serait donc plus
approprié de parler d'artistes préférés que de
styles préférés en festival.
Nous avons vu qu'environ un tiers des festivaliers se rendant
en festival électro ne se rendent pas dans des festivals d'autres
genres. Sans élément de comparaison, il est difficile de bien
apprécier cette donnée. Cependant nous pouvons appuyer son
importance par le fait que parmi les deux tiers restants, qui se rendent donc
dans des festivals d'autres genres musicaux, plus de 80% se rendent tout de
même majoritairement en festivals électro. Parmi le premier tiers,
les raisons étaient toutes très similaires et portent
principalement sur l'expérience qui est préférée
à celle des autres festivals (en faisant évidemment abstraction
d'une attirance plus élevée pour un genre musical que pour un
autre) signifiant que ce n'est qu'après avoir expérimenté
des festivals de différents genres qu'ils ont choisis de se rendre
exclusivement en festival d'électro. Nous pouvons donc supposer que les
festivaliers qui se rendent tout de même encore dans d'autres festivals
sont en train de se forger leur opinion, d'autant que parmi les 80%
précisant qu'ils se rendent majoritairement en festival électro,
ils le justifient par le fait qu'ils y préfèrent l'ambiance et
l'expérience globale. Alors, même si cela est discutable, il
paraît approprier de dire qu'en France, les festivals électro
offrent une meilleure expérience que les autres festivals. C'est
92
un peu contradictoire étant donné que ces
festivals sont censés avoir une mauvaise image. Cependant cela pourrait
justement en être la raison comme l'a expliqué Mme. Angenieux :
« nous on en arrive à justement se dire qu'il faut aller plus loin,
qu'y faut qu'on soit hyper transparent, qu'on soit revendicateur aussi mais
sincèrement je pense qu'on se pose tous cette question dans le monde des
musiques actuelles et je trouve que encore une fois les musiques
électroniques on doit encore et toujours prouver, et encore être
en avance et démontrer qu'on a notre place », « les festivals
électro sont plus en avance sur certaines questions que les festivals de
musique actuelles, comme les questions environnementales et
d'égalité femme/homme ». C'est peut-être donc cette
mauvaise image, qui a obligé ces festivals à redoubler d'effort
lors de leurs débuts pour continuer d'exister et de rester dans la
course, qui justifie aujourd'hui cette expérience plus qualitative. Ils
ont dû se développer sur autre chose qu'une simple programmation
comme des valeurs, des idées et des notions qui permettent aujourd'hui
de justifier leur avance par rapport aux autres festivals en termes
d'expérience globale proposée.
Concernant les façons dont un festivaliers est
amené à entendre parler d'un festival, les résultats sont
en total accord avec la partie théorique. Presque 95% de ces
festivaliers découvre un festival sur les réseaux sociaux,
où tous les festivals communiquent majoritairement. Cela est
expliqué par la présence quasi-totale de leurs cibles sur ces
plateformes. Le public des festivals étant très majoritairement
jeune, et les réseaux sociaux regroupant également un très
large panel de jeunes utilisateurs, c'est en effet le meilleur moyen de
communication pour ces festivals. Il est donc très simple de suivre la
communication d'un festival si on le connait déjà, cependant
étant donné le nombre de festival présents sur ces
réseaux les festivals que l'on ne connait pas mais qui pourraient nous
intéressons passent facilement inaperçus. C'est alors
qu'intervient le bouche à oreille. Principalement pendant un festival,
mais également dans la vie de tous les jours, la participation à
ces évènements rapproche. Il est donc extrêmement simple de
rencontrer de nouvelles personnes et de très rapidement en venir
à présenter nos précédentes expériences
festivalières. Ainsi, il est très facile de connaitre de nouveaux
festivals et d'en avoir des retours. Enfin arrivent en troisième
position les affiches. Souvent avec des couleurs et des
écritures/polices tape à l'oeil, ces affiches sont
également très utiles pour se rappeler du nom du festival et de
se renseigner par la suite sur les réseaux. Cependant ces affiches ne
restent présentes que dans un périmètre restreint autour
du lieu du festival, ou bien sont présentes dans les grandes villes les
plus proches. Les réseaux sociaux seraient donc capables d'assumer la
quasi-totalité de la communication des festivals, cependant cela serait
au détriments des festivals qui n'auraient par exemple pas de
communication à l'année et donc peut-être moins de
visibilité.
93
Avec ces données, l'idée de M. Gérard
abordée dans la partie précédente se
révèlerait plus qu'adaptée. Un réseau social
spécial pour les festivaliers, où les festivals pourraient
communiquer à leur guise sans les contraintes des réseaux sociaux
actuels, avec un système de recherche pouvant se baser sur la zone
géographique, les styles présents, les dates ou encore le nombre
de festivaliers. Cela parait réalisable, et permettrait sûrement
d'améliorer encore la communication et la visibilité des
festivals.
Au sujet des critères faisant la différence
auprès des festivaliers pour choisir un festival parmi les autres,
encore une fois c'est l'expérience proposée qui domine. C'est en
réalité plutôt avantageux pour les festivals. Une
expérience étant basé sur un ensemble de chose, une bonne
expérience dépend des goûts de chacun. Même si les
styles musicaux et les têtes d'affiche représente la partie la
plus importante du festival pour tous ceux qui y participent, tout le reste
sera à l'appréciation de chacun. Certains seront touchés
par les valeurs défendues et par la façon dont elles le sont,
d'autres seront ravis de profiter de toutes les activités
proposées, ou encore du cadre de l'évènement. En clair,
plus un festival propose une expérience variée, plus elle est
susceptible de plaire à chacun car tout le monde y trouvera son compte.
Cependant cela n'est pas obligatoire, un festival basant son expérience
uniquement sur une programmation millimétrée et
réfléchie, et surtout s'il communique bien sur cet aspect,
rassemblera uniquement le public y étant sensible et qui vivra donc une
bonne expérience. Il est en réalité bien plus simple de
vivre une superbe expérience que d'en vivre une mauvaise.
C'est justement cette envie d'expérience qui
mène le public des festivals de musiques électroniques en free
parties. Si plus de 75% du public de ces festivals s'est déjà
rendu en free party, il est impossible de ne pas voir de lien entre ces deux
types d'évènements. Il aurait été
intéressant de savoir dans lequel de ces évènements un
actuel festivaliers s'est rendu en premier, et s'il se rend toujours en free
parties en plus de fréquenter des festivals. En effet, c'est souvent la
première expérience qui détermine l'attrait pour la suite.
Les festivals électro sont la descendance directe des free et rave
parties, cependant l'expérience y est tout de même
différente. C'est d'ailleurs selon moi pour cette raison qu'autant de
festivaliers se rendent en free parties. La culture de l'électro
encourage la découverte de l'inconnu, du nouveau, de l'extravagant.
Ainsi, un participant de free parties sera curieux de voir l'expérience
vécue en festival, et un festivalier sera curieux de voir
l'expérience vécue en festival. Si ces deux types
d'évènements proposaient les mêmes expériences, de
par le cadre illégal des free et le cadre légal des festivals il
me semble évident que le pourcentage abordée plus tôt
serait bien moins élevé. Les festivals et les free parties se
complètent et selon moi, dans la majorité des cas, toute
94
personne commençant à s'intéresser
à la culture des musiques électroniques sera amené
à vivre ces expériences.
b. L'image négative des festivals de musiques
électroniques
Au sujet de l'origine de l'image négative que subissent
les festivals électro, les avis des festivaliers et des directeurs se
rejoignent. Si tout le monde s'accorde pour dire que l'usage de
stupéfiants dans ces évènements, et l'affiliation des
festivals électro aux free et rave parties sont les principales causes
de cette image, pour les directeurs cela est aussi dû à l'origine
du mouvement électro : un esprit contestataire, des envies de
rébellion, une jeunesse très investie, et enfin une nouvelle
musique qui brise les codes établis. Voilà de quoi faire peur au
gouvernement en place, qui va donc stéréotyper toute une
jeunesse. Cependant, l'électro n'est pas le premier courant musical
à subir une telle image. C'est un argument phare de tout fan
d'électro, qui même s'il est utilisé à tout va reste
avéré. Le rock a lui aussi été associé
à la consommation de drogue et visé par l'état.
Aujourd'hui pourtant le rock n'est plus tant considéré comme une
musique de « drogué » et n'est plus réprimé par
l'Etat. Elle ne subit plus cette image négative, pourtant la
consommation de stupéfiants qui en était la cause au début
est toujours bien présente comme dans tout regroupement festifs. La
présence des stupéfiants est liée à la fête
et non à un genre de musique particulier. C'est l'idée pour
laquelle se sont battus nombre de fans de rock, et qui a finalement
été intégrée. Mais alors pourquoi cela ne s'est pas
déroulé de la même façon pour les musiques
électroniques ? Tout mène à croire que ce sont bien
l'usage de stupéfiants qui en est principalement à l'origine,
ainsi qu'un mouvement de pensés nouveau et des regroupements (qui bien
que plus nombreux pour l'électro que pour le rock) n'étaient pas
toujours légaux. A part la musique et la période, les mouvements
rock et électro semblent similaires. Mais c'est peut-être
justement la période qui a changé la donne. L'électro
étant apparu en France environ 30 ans après le rock, les moyens
médiatiques étaient bien plus développés. Fortement
liés à l'Etat, qui étaient contre ce mouvement
électro, il a été facile de diffuser cette image qui
n'était peut-être pas aussi négative à la base.
Qu'il s'agisse des festivaliers ou des directeurs de festival, tout le monde
s'accorde pour dire que les médias non spécialisés dans la
musique ont leur part de responsabilité (certains les tenants pour
principaux responsables) dans cette image négative. Comme abordée
dans la partie précédente, il est plus que rare de voir un
reportage ou un article de ces médias qui ne collerait pas avec les
stéréotypes du mouvement. L'usage à tout va de mots comme
« drogue », « alcool », « stupéfiants »,
« punk à chiens » et autres noms d'oiseaux plus ou moins polis
est toujours présent. Sans pour autant leur donner tort, car tout
stéréotype ayant
95
une part de vérité, cela ne représente
pas une généralité. Il y a énormément
à dire sur ces évènements, mais ce sont toujours ces
clichés négatifs que l'on retrouve dans ces médias. Alors,
si aux origines du mouvement l'image négative qu'ils subissaient peut
effectivement être principalement liée à l'esprit
contestataire, l'illégalité, et à la consommation de
stupéfiants, elle n'était pas forcément si
prononcée et rependue que cela. Cependant aujourd'hui cette image a pris
une bien plus grande ampleur, et cela est dû à sa diffusion
massive et exagérée par les médias, eux même
encouragés par l'Etat. En clair, si à l'origine cette image
négative est issue de la consommation de drogue et d'un mouvement
évoluant principalement dans l'illégalité, ce sont les
médias qui en ont fait celle que nous connaissons aujourd'hui et qui se
répercutent sur les festivals légaux de musiques
électroniques.
Bien que la très grosse majorité des
festivaliers reconnaissants une image négative jugent les médias
non spécialisés comme principaux responsables de cette
dernière, seulement un tout petit plus de la moitié (selon notre
échantillon) estiment la subir ou en être impactée. En
accord avec les avis des directeurs de festivals, ce n'est donc pas le public
qui se retrouve ciblée par cette image. En effet dans ces
évènements il est quasi-impossible de faire face à ces
clichés étant donné que ceux qui les colportent ne s'y
rendent jamais. Seule la présence souvent bien plus importante que
nécessaire des forces de l'ordre à l'entrée et à la
sortie de ces festivals peut la rappeler. C'est donc bien au niveau
organisationnel et relationnel que cette image se révèle
réellement impactante. Ce sont donc surtout les directeurs et
organisateurs qui en pâtissent. Contrairement à des festivals de
musiques actuelles n'étant pas principalement électro ou n'en
diffusant pas du tout, il sera très difficile pour des festivals
exclusivement électro de créer tout de suite des relations saines
avec les préfectures, les départements ou les mairies. Il est
dommage pour les organisateurs de devoir constamment peser leurs mots pour
éviter que leurs interlocuteurs ne prennent peur, se basant sur des
clichés qu'ils ne feront qu'alimenter. D'autant plus que pour beaucoup
de festivals électro, des relations de forte confiance se créent
par la suite avec les administrations comme le montre le Positiv Festival qui
pour chaque édition est autorisé à se produire dans le
théâtre antique d'Orange, classé au patrimoine mondial de
l'UNESCO. Malgré tous ces faits montrant qu'un festival électro
ne présente pas plus de risques que n'importe quel autre festival de
musiques actuelles, il est toujours autant difficile pour ces festivals de se
vendre auprès des institutions. Les clichés ont la vie dure, et
comme l'évoquent les directeurs de festival cela changera
peut-être lorsqu'ils auront en face d'eux des interlocuteurs plus jeunes
qui seront donc peut-être plus ouverts, ou en tout cas moins
fermés. En attendant, il est nécessaire pour construire
progressivement ces relations de confiance de
96
dialoguer longuement, d'exposer des faits et des
résultats, pour petit à petit faire oublier cette image
négative.
Cependant, cette image négative n'a pas que des aspects
néfastes. Parmi les festivaliers, se sentant impactés par cette
image ou non, une grande partie l'utilisent pour renforcer leurs liens. En
effet, l'une des spécificités premières des festivals
(mais aussi des free parties) est de rapprocher les gens. Ce qui diffère
tout de même entre les festivals électro/free parties et les
autres festivals de musiques actuelles, c'est que suite à l'image
négative dont sont victimes les fans d'électro, la
création d'une hypercommunauté à la base
éphémère dans tout festival se transforme en
communauté permanente pour les festivals électro et les free
parties. Tout amateur de musiques électroniques se retrouvera un jour
face aux mêmes clichés, et y faire face ensemble renforce leurs
liens. Evidemment, la culture des musiques électroniques prône de
base cette communauté (principalement grâce aux rave et free
parties) mais subir collectivement cette image la renforce encore plus, ce qui
pourrait expliquer pourquoi le public des festivals électro ne se sent
pas tant impacté par cette image. Ils s'en servent pour profiter encore
plus intensément de ces moments de fête. Cependant, ils restent
tout de même terre à terre puisque même s'ils y trouvent
leur compte, la très grosse majorité d'entre eux
préfèreraient voir disparaitre cette image. Nous pouvons donc
clairement affirmer que cette image se révèle bien plus
impactante pour les festivals eux-mêmes que pour leurs publics, qui eux
arriveront toujours à passer outre les clichés dont ils sont la
cible pour même s'ils le peuvent les retourner à leur avantage.
Les festivals doivent donc constamment faire face à
cette image. Pour cela, le maitre mot est « dialogue ». Il faut
dialoguer autant auprès des institutions que des riverains ou des
personnes tout simplement contre l'électro. Cela passe par beaucoup de
réunion avec chacun, mais aussi avec les forces de l'ordre et les
pompiers qui seront présents sur le festival. De grande campagnes de
préventions sont organisées, mais également des
périodes de découverte pour les publics qui auraient plutôt
tendance à dénigrer sans connaitre. Les festivals essaient
d'inviter les riverains à leurs évènements, de leurs
expliquer leur projet, de les sensibiliser. Le but de tout cela est de
démonter les clichés que subissent ces festivals et leurs public.
Malheureusement dans les cas où cela est efficace, il aura fallu
dépenser énormément d'énergie et de moyens, mais
aussi de temps, pour qu'au final les clichés disparaissent surtout sur
le festival en question plutôt que sur la culture électronique en
général. Les gens auront tendance à voir ce festival ou
cet évènement comme l'exception à la règle
plutôt que comme une preuve que les clichés qu'ils nourrissent ne
sont peut-être pas avérés. Cependant toute avancée
est bonne à prendre, et ces festivals continuent à se battre.
Certains ont déjà convaincu leur communauté, qu'il
s'agissent du public
97
ou de l'administration, et n'ont pas besoin de plus. Tandis
que d'autres ne cessent de redoubler d'efforts, de créer de nouveaux
projets, d'innover pour faire évoluer cette image.
Mais comment la faire évoluer ? Il n'y a
malheureusement pas de solution miracle selon les directeurs de festivals.
Chacun ont leur propre avis, cela peut passer par une communication très
minutieuse qui sera la plus différente possible des visuels pouvant
être identifiés aux free parties. Cependant, il est
compliqué pour nombre de festivals électro d'améliorer
leur communication qui est déjà plus que poussée et
réfléchie pour éviter ces malentendus. Certains tenteront
d'intégrer d'autres styles à leur programmation, d'autres
appuieront encore plus les actions de sensibilisation. Mais de manière
générale, aux yeux de ces directeurs et organisateurs, il s'agit
surtout d'un problème générationnel. Pour beaucoup le seul
moyen de parvenir à changer cette image est donc de continuer à
faire ce qu'ils font, à montrer des résultats positifs, à
démontrer que tous ces clichés ne sont pas avérés.
Il semble que malheureusement, les cartes qui permettraient de faire grandement
avancer les choses ne se trouvent pas dans les mains des festivals.
c. Moyens marketing, stratégies de
communication, et image négative
Cependant, peut-être que s'intéresser aux moyens
marketing et aux stratégies de communication pourrait débloquer
la situation. Tout d'abord, nous avons pu voir qu'il n'y a pas vraiment de
différence entre les festivals de musiques électroniques et les
festivals. Concernant le marketing, il n'y a rien de spécifiques.
Même si parfois nous pouvons voir un moyen innovant qui n'est pour le
moment utilisé que par un seul festival, rien ne l'empêchera
d'être utilisé par la suite dans d'autres festivals avec des
genres musicaux différents. Concernant les stratégies de
communication, ici encore pas de spécificités. Chaque
communication est adaptée au festival, avec leur propre
rétroplanning, leur propre contrainte, etc. La seule chose qui pourrait
paraitre différente sera au niveau du ton ou de la forme, mais cela
correspond plutôt aux contraintes qu'ils subissent suite à l'image
de l'électro. Le contenu est donc logiquement adapté, mais la
stratégie adoptée est loin d'être spécifique. Les
festivals de musiques électro combattent donc cette image
négative avec les mêmes armes que ceux qui ne la subissent pas.
Cependant, la communication est un domaine qui s'affine de plus en plus. Il est
donc totalement possible de pouvoir un jour identifier une stratégie de
communication propre aux festivals de musiques électroniques, bien que
malheureusement rien ne garantisse que cela fera évoluer leur image.
98
Les festivals électro n'ont pas de moyens marketings ni
de stratégies de communication spécifiques, cependant cela ne
veut pas dire que l'utilisation qu'ils en font ne joue pas un rôle dans
cette image négative. En effet certains festivals, par leur
programmation parfois underground, adopte une communication qui se rapprochera
de celle utilisée par les free parties. Ce n'est en soit pas une erreur
de communication de la part des festivals, mais plutôt une erreur
d'appréciation de la part de ceux qui reçoivent cette
communication. D'autres festivals font des communications parfois « hors
contexte », ils peuvent notamment diffuser des contenus plus ou moins
politisés comme certains ont pu le faire depuis le début de cette
crise de la COVID. Le problème, c'est que ces festivals électro
sont par nature déjà montré du doigt. Ainsi, une mauvaise
communication de la part d'un seul festival peut se répercuter sur
beaucoup d'autres voir même l'intégralité des festivals
électro français. Ces festivals, en plus de devoir en faire bien
plus que les autres à cause de leur image, n'ont en plus de cela qu'une
très faible et même inexistante marge d'erreur. Le pire dans ces
erreurs, c'est que bon nombre n'en sont pas réellement. Un festival peut
passer énormément de temps à travailler sa communication
pour qu'elle transmette les mêmes valeurs que le festival en question, en
faisant très attention aux mots ou encore au ton utilisé,
étant donné que cette communication sera faite sur les
réseaux sociaux il sera extrêmement simple pour une personne qui
n'aimera pas cette publication de le faire savoir. De plus, ces messages sont
rarement polis, pas toujours justifiés (il est très courant de
voir sur ces réseaux de la violence gratuite) mais surtout très
facilement envenimable. Ainsi, une communication appropriée peut virer
au drame. Cependant, ces cas sont loin d'être à l'origine de cette
image négative et nous pouvons plutôt les considérer comme
des conséquences.
Dans ce cas, il suffirait peut-être de trouver de
nouveaux moyens marketings et/ou de nouvelles stratégie de communication
qui aurait comme principal but de faire évoluer cette image. Concernant
les moyens marketing, les directeurs sont mitigés. Ils ne doutent pas
qu'un moyen pourrait voir le jour et grandement contribuer au
développement des festivals électro, comme par exemple un
réseau social spécialisé, cependant ils ne pensent pas que
le problème vienne du marketing et que ce n'est donc pas dans le
marketing que se trouve le moyen de pallier cette image. Cependant, les
stratégies de communication semblent bien plus appropriées aux
yeux des directeurs. A la subtilité que selon eux, ces nouvelles
stratégies de communication ne devraient pas venir des festivals, qui en
font déjà bien assez, mais bien des médias de masse non
spécialisés dans la musique, comme le JT de TF1. Il serait
grandement intéressant de voir ce que pourrait un reportage d'au moins
un de ces médias qui soit mené de manière totalement
objective, ou encore mené en collaboration avec le festival en question.
Selon eux, une fois que
99
ces médias offriront une meilleure communication, celle
des festivals pourra ensuite réellement prendre de la valeur et avoir
plus d'impact positif. Malheureusement, les médias ne semblent pas y
voir d'avantages pour eux, et il est serait difficile pour les festivals d'y
remédier par eux-mêmes. De nouvelles stratégies de
communication semblent donc être le moyen approprié pour faire
évoluer l'image négative des festivals de musiques
électroniques, cependant ici encore ce ne sont pas les festivals qui
sont en mesure de faire quelque chose.
Avec tous ces résultats, quel serait donc le meilleur
moyen de faire disparaitre cette image ? Pour les festivaliers, il faudrait
augmenter la sécurité sur site, faire encore plus de
prévention concernant les stupéfiants, ou encore que les
festivals aient une communication vraiment irréprochable.
Malheureusement ces moyens sont déjà grandement utilisés
et le sont encore plus d'années en années, malheureusement ne
faire aucune erreur est quasi-impossible pour ce genre de structure lié
de près au public, d'autant que comme nous avons pu le voir quelque
chose qui ne conviendrait pas à absolument tout le monde peut être
considéré comme une erreur. Pour les directeurs et organisateurs
de festival, il faudrait que ceux qui ont une mauvaise image de ces
évènements s'y rendent, tout simplement. Il s'agirait du meilleur
moyen pour que ces gens puissent se forger leur propre opinion, quitte à
ce qu'il reste inchangé, mais ils sauront au moins définitivement
de quoi ils parlent et ne feront pas que retransmettre ce qu'ils ont entendu
dire à la télé ou ailleurs. Les directeurs sont convaincus
que ces gens se rendront ainsi compte qu'ils se trompent, et que les festivals
électro sont totalement différents des stéréotypes
qu'ils subissent. Cependant il parait difficile de faire venir ces gens de leur
plein gré. Pour cela, un moyen serait pourtant très probablement
efficace, autant selon les festivaliers que selon les directeurs, et il
s'agirait que les médias changent leur communication et leurs opinions
sur les festivals de musiques électroniques. Ce serait en effet le moyen
le plus « simple » qui permettrait de débloquer la situation
de tous les côtés, qui permettrait à la fois de ne plus
alimenter cette image négative mais également d'encourager ceux
qui le faisait à la détruire. Ainsi, peut-être qu'un jour
l'électro pourra prospérer comme le fait le rock,
c'est-à-dire sans préjugés, et surtout librement.
101
CONCLUSION
Ce mémoire de recherche appliquée avait pour
thèse les moyens marketing et les stratégies de communication
à employer pour transformer l'image négative des festivals de
musiques électroniques en France. La complexité de cette
problématique reposait sur deux choses : le manque d'informations
concrètes sur le territoire français, ainsi qu'une image
négative qui paraissait bien plus exister en tant que ressentie
plutôt qu'avec des conséquences réellement observables.
Alors, pour traiter correctement ce sujet, j'ai utilisé l'approche de
l'entonnoir.
L'objectif était en premier lieu de présenter le
marché des musiques électroniques. Pour cela, il a d'abord fallu
aborder ce que sont les musiques électroniques. Alors, après
avoir présenté l'origine de la musique électronique et ce
qui la caractérise, allant de son contexte d'apparition jusqu'aux
valeurs qu'elle transmet, en passant par toutes ses adaptations et ses moyens
de création, nous avons abordé son arrivée en France. Bien
qu'il fût déjà possible d'entendre cette musique sur notre
territoire, c'est surtout suite à l'arrivée des premiers
travellers et sound-systems britanniques qui cherchaient à fuir les lois
répressives de leur pays que la musique électronique a
commencé à se propager en France à travers les rave
parties, des évènements principalement illégaux regroupant
plusieurs centaines et même plusieurs milliers d'amateurs. Enfin, dans un
contexte plus actuel, c'est le marché français des musiques
électroniques qui a été étudié.
Malgré le manque de données diverses et variées, nous
avons tout de même constaté que ce secteur est en constante
évolution, qu'il représente une économie de plus en plus
importante et surtout que le nombre d'adeptes ne fait que croitre
d'année en année. Il a été établi que le
secteur des musiques électroniques est en constant développement
qu'il a de beaux jours devant lui.
Une fois leur marché présenté, est venu
le sujet complexe de l'image négative que ces musiques subissent. Pour
l'aborder correctement, il a d'abord été nécessaire de
développer le contexte culturel de ces musiques et de ses
évènements, avant de pouvoir correctement parler de cette image
à partir de faits réels. Ainsi c'est la culture liée
à ces évènements qui a d'abord été
observée, ayant plutôt pour but de cerner le public de ces
musiques. Qui sont-ils, quelles valeurs partagent-ils, comment et pourquoi sont
notamment des questions qui ont été posées. Ensuite,
après avoir eu une image claire de ce que sont les regroupements autour
de la musique électronique, il a été bien plus simple de
traiter de l'image actuelle de cette musique en France, qui s'apparente
effectivement grandement à une image négative voir même
néfaste. Enfin, en revenant un peu en arrière, nous nous sommes
intéressés aux origines de cette image négative via
102
ses vagues de répression et les protestations qui en
ont découlées. Ainsi, nous avons pu nous faire une idée
claire de l'image négative que subissent les musiques
électroniques en France.
Enfin, pour avoir toutes les cartes en main et traiter
correctement ce sujet, il a été nécessaire d'aborder les
notions de marketing et de communication des festivals de musiques
électroniques français. Le marketing étant la notion la
plus complexe, plusieurs points importants ont été
abordés. Nous avons présenté la notion de marketing
culturel, différente du marketing classique, mais aussi des
différents choix de positionnement des festivals, de leur unicité
intrinsèque à leur création, mais également du lien
entre les moyens marketing utilisés et les valeurs/l'image du festival.
Enfin, pour terminer, c'est donc la notion de communication de ces festivals
qui a été traité, développant tous les outils
à leur disposition et les multitudes de choix de communication qui
s'offrent à eux.
Après avoir approché cette thèse de
façon théorique, c'est à travers des enquêtes
concrètes que le sujet a été approfondi. Menés
auprès des festivaliers et des directeurs/organisateurs de festivals,
ces études ont permis de mieux cerner les goûts et attentes des
amateurs de musiques électroniques, de nous faire une idée
concrète de l'image négative que subissent les festivals
électro à travers des ressentis d'individus concernés, et
enfin de traiter des moyens marketing et de communication spécifiques
à ces évènements et de leur lien avec cette image. Il a
ainsi été confirmée que cette image est bien réelle
et qu'elle a de lourdes conséquences au niveau de l'organisation de ces
évènements mais aussi que le marketing n'apparait pas comme une
solution efficace pour transformer cette image négative. Les
stratégies de communication quant à elles semblent bien plus
appropriées, cependant celles qui pourraient réellement se
montrer efficaces ne sont pas à leur portée. En effet, la
stratégie de communication à employer et qui permettrait de
transformer l'image négative des festivals de musiques
électroniques en France n'est pas utilisable par ces festivals, mais par
les médias de masse non spécialisée dans la culture
musicale. Ces médias ne font que répandre cette image et sont,
d'après ces études, les principaux responsables de cette image
négative. Ainsi, les moyens d'une future éclaircie pour ces
festivals ne se trouvent pas dans leurs mains, mais dans celles de ces
médias.
Bien que ce mémoire offre des bases exploitables pour
des recherches plus approfondies, il a dû faire face à certaines
limites. Tout d'abord, il n'y a que très peu de données
officielles et fréquentes concernant le secteur des musiques
électroniques en France. Aussi, le public de ces musiques et de ses
évènements est extrêmement hétérogène,
aussi bien sur le plan social que mental. Ainsi, si une étude est
menée auprès d'un échantillon bien plus grand
d'amateurs
103
d'électro, ou bien justement de manière
proportionnelle en fonction des amateurs de chaque style et de ses
différentes représentations, les résultats pourraient
être différents. Cependant, tous les résultats obtenus
restent justes et exploitables, ils pourraient juste être plus
précis.
Il pourrait par ailleurs être intéressant de
pousser ces recherches en intégrant d'autres facteurs. Les
résultats de celles-ci pointant du doigt les médias, il pourrait
être intéressant de s'intéresser à cette image
négative du point de vue de ces médias et de l'Etat plutôt
que de celui des festivals. Des recherches prenant en compte une zone
géographique plus vaste, comme à l'échelle de l'Europe ou
au moins des pays frontaliers, sur comment y est intégrée la
musique électronique par rapport à la France serait
peut-être également un moyen de mieux comprendre pourquoi elle a
une image négative dans notre pays. Cependant, ces recherches seraient
longues et rien ne garantit que les résultats seraient comparables
à cause des différences culturelles.
Ce qui est sûr, c'est que peu importe l'image que les
musiques électroniques subissent, le mouvement est déjà
bien trop en place pour être stoppé. Avec l'augmentation du nombre
d'amateurs et d'évènements autour de cette culture d'année
en année, les musiques électroniques sont vouées à
continuer de se développer. Ainsi, en tenant compte de tous ces facteurs
ainsi que de la relation aux musiques électroniques des pays voisins, il
parait impossible que cette image négative qui sévie aujourd'hui
en France ne disparaisse pas dans un futur plus ou moins proche.
105
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consulté le 21/03/2021
https://www.dailymotion.com/video/x7yg8pc?syndication=249290
C. Entretiens
CUER Nicolas, Directeur du Positiv Festival, France,
14/04/2021, Téléphone CABIRO Camille, Cocréatrice du
Bordeaux Open Air Festival, France, 15/04/2021, Téléphone
ANGENIEUX Emilie, Directrice de l'Hadra Festival, France, 27/04/2021,
Téléphone GERARD Mickael, Directeur du Millésime
Festival, 12/05/2021, Téléphone
I
ANNEXES
Table des Annexes
ANNEXE 1. TOP DES FESTIVALS FRANÇAIS DE MUSIQUE
ELECTRONIQUES EN 2016 II
ANNEXE 2. L'ECOSYSTEME DES MUSIQUE ELECTRONIQUES EN
FRANCE III
ANNEXE 3. LES COLLECTIFS FRANÇAIS LES PLUS EN
VUE EN 2016 IV
ANNEXE 4. POIDS ECONOMIQUE DU SECTEUR ELECTRO EN FRANCE
(EN MILLIONS D'€
HT) V
ANNEXE 5. VENTILATION DU SECTEUR ECONOMIQUE DE
L'ELECTRO (EN MILLIONS D'€
HT) V
ANNEXE 7. REVENUS ISSUS DU NUMERIQUE ET DES SUPPORTS
PHYSIQUES VI
ANNEXE 8. SAISONNALITE ET DUREE DES FESTIVALS ELECTRO
VI
ANNEXE 9. CARACTERISTIQUES ECONOMIQUES DU SECTEUR
ELECTRO VII
ANNEXE 10. CAPACITE D'ACCUEIL DES ETABLISSEMENTS
DIFFUSANT DE L'ELECTRO
VII
ANNEXE 11. CARACTERISTIQUES ECONOMIQUES (TRANCHES DE
CHIFFRE D'AFFAIRES)
VIII
ANNEXE 12. PRESENCE DES FESTIVALS SUR LES RESEAUX
SOCIAUX EN 2016 VIII
ANNEXE 13. QUESTIONNAIRE ETUDE QUANTITATIVE
IX
ANNEXE 14. QUESTIONNAIRE ETUDE QUALITATIVE
XI
II
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Annexe 1. Top des festivals français de musique
électroniques en 2016
Institutionnels
Gestion droits d'auteur
t dro its
voisins
Artistes
des musiques électroniques
Créateurs
DJ
Créateurs tiers
idition
IPF
Live
Clubs 1 Festivals 1 Lieux
hAL.
Bookers
captotian
Diffusion traditionnelle
Radio I TV 1
·..
Lieux
accueillant du public
Disquaires Magasins
·
·;i~
E-canmen[e
P atefanne de diffusion et ~
·s
de tiltthargement
Distribution physique CD, Vinyles
Di stributi
117
numérique
I
Production II
et promotion
Marques f prances synchronisation
14
L
III
Annexe 2. L'écosystème des musique
électroniques en France
IV
Annexe 3. Les collectifs français les plus en
vue en 2016
V
Annexe 4. Poids économique du secteur
électro en France (en millions d'€ HT)
Annexe 5. Ventilation du secteur économique de
l'électro (en millions d'€ HT)
VI
Annexe 6. Poids économique par secteur de
diffusion
Annexe 7. Revenus issus du numérique et des
supports physiques
Annexe 8. Saisonnalité et durée des
festivals électro
VII
Annexe 9. Caractéristiques économiques du
secteur électro
Annexe 10. Capacité d'accueil des
établissements diffusant de l'électro
VIII
Annexe 11. Caractéristiques économiques
(tranches de chiffre d'affaires)
Annexe 12. Présence des festivals sur les
réseaux sociaux en 2016
IX
Annexe 13. Questionnaire Etude Quantitative
- A quelle fréquence vous rendez-vous en festivals de
musique électroniques ?
- Approximativement, à combien de festivals de musiques
électroniques avez-vous
participé ?
- Quels styles de musiques électroniques
écoutez-vous dans la vie de tous les jours ?
- Quels styles de musiques électroniques voudriez-vous
le plus écouter en festival ?
- Fréquentez-vous uniquement des festivals de musique
électroniques/N'allez-vous en
festival que pour des musiques électroniques ?
- Si non, quels sont les principaux genres musicaux des autres
festivals que vous
fréquentez ?
- Si non, considérez-vous que les festivals de musiques
électroniques soient ceux que vous
fréquentez le plus ?
- En général, comment êtes-vous
amené à entendre parler d'un festival électro ?
- Sur quels critères vous basez-vous pour choisir
d'aller à tel ou tel festival électro ?
- Avez-vous déjà participé à une
free party ?
· Avez-vous l'impression que les festivals de musique
électroniques ont une image négative ?
· Trouvez-vous que les médias non
spécialisés dans la musique (presse écrite, JT...) sont
majoritairement à l'origine de cette image négative ?
· Selon-vous, sur quoi est basée cette image
négative ?
· Avez-vous l'impression, en tant que participant
à ces festivals électro, d'être impacté/de subir
cette image négative ?
· Confronté(e) à cette image
négative, si vous ne la reconnaissez pas, comment vous en
défendez-vous ?
· Selon vous, cette image négative est-elle
dissociable des festivals électro ?
· Trouvez-vous que cette image négative des
festivals électro permet la consolidation des liens de leurs
communautés ?
· Alors, si vous aviez le choix en tant que participant
à ces festivals de faire disparaître cette image, le feriez-vous
?
· Selon vous existe-t-il des moyens, autre que le temps,
pour faire disparaitre cette image négative ?
·
X
Si oui, lesquels ?
Ø Age ?
Ø Sexe ?
Ø Catégorie socio-professionnelle ?
Ø Situation familiale ?
XI
Annexe 14. Questionnaire Etude Qualitative
- Existe-t-il des outils marketing spécifiques aux
festivals de musiques électroniques ?
- Existe-t-il des stratégies de communication
spécifiques aux festivals de musiques
électroniques ?
- Quels outils marketing utilisez-vous pour votre festival ?
- Quelle stratégie de communication utilisez-vous pour
votre festival ?
- Ces outils et cette stratégie sont-elles à
l'origine de l'identité de votre festival ?
· Comment votre festival est-il impacté par cette
image négative dont souffrent les festivals d'électro
français ?
· Comment faites-vous concrètement face à
cette image négative ?
· Pensez-vous que les outils marketing et la
stratégie de communication utilisés par ces festivals ont leur
part de responsabilité dans cette image négative ?
· Selon vous, d'où vient cette image négative
?
· Dans un contexte général, pensez-vous que
cette image négative se révèle réellement
impactante pour les festivals de musique électro ?
· Quelles sont les aspects des festivals les plus
impactés par cette image négative ?
Ø Selon vous, comment est-il possible de faire
évoluer cette image négative ?
Ø Cette image pourrait-elle évoluer grâce
à l'adaptation d'outils marketing existants ou encore en en
créant de nouveaux ?
Ø Cette image pourrait-elle évoluer grâce
à l'adaptation de la stratégie de communication ou encore en en
créant une nouvelle ?
Ø Pour vous, quel serait le meilleur moyen de palier
à cette image négative ?
110
RESUME
Ce mémoire porte sur les festivals de musiques
électroniques et sur l'image négative qu'ils subissent. De
l'origine des musiques électroniques jusqu'aux moyens marketing et de
communication utilisés en festival, il y sera abordé des notions
tels qu'un état des lieux du secteur français de
l'électro, la culture de la musique électronique, ou encore la
répression et les protestations que ce genre musical a subies et continu
de subir. Des études de terrains y seront également
présentées, recueillants les avis, opinions et points de vue de
festivaliers mais également de directeurs et d'organisateurs de
festivals français de musiques électroniques.