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UNIVERSITÉ D'ABOMEY-CALAVI
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FACULTE DES SCIENCES HUMAINES ET SOCIALES
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DEPARTEMENT DE SOCIOLOGIE-ANTHROPOLOGIE
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LABORATOIRE D'ANALYSE ET DE RECHERCHE
RELIGIONS,
ESPACES ET DÉVELOPPEMENT
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MEMOIRE DE MAÎTRISE
Sujet
ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS
L'ÉGLISE CATHOLIQUE ROMAINE À COTONOU
Réalisé et soutenu par
:
CAPO Yaovi Martin
Co-direction du :
Dr Bruno MONTCHO
Enseignant-Chercheur à l'UAC
Assistant
Sous la direction du :
Dr. Dodji AMOUZOUVI
Professeur Titulaire /CAMES
Président/Rapporteur :
Dr. Dodji AMOUZOUVI, Professeur Titulaire du CAMES
Membre : Dr. Charlotte ALE,
Assistante
Examinateur : Dr. Bruno MONTCHO,
Enseignant-Chercheur à l'UAC, Assistant
Mention : Très Bien
Note : 17/20
Date de soutenance : 23 mai 2018
SOMMAIRE
DEDICACE
2
SIGLES ET ACRONYMES
6
LISTE DES TABLEAUX ET PHOTOS
7
RESUME
8
ABSTRACT
8
INTRODUCTION
9
PREMIERE PARTIE :
LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES COMME CHAMP DE
RECHERCHE DE LA SOCIOLOGIE DES RELIGIONS
2
CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE DE LA
RECHERCHE
13
CHAPITRE 2 : CADRE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA
RECHERCHE
29
DEUXIEME PARTIE :
LES ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS
L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE
2
CHAPITRE 3 : L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE DANS
LA DYNAMIQUE DU MARCHE RELIGIEUX
40
CHAPITRE 4 : LES NOUVELLES PRATIQUES
RELIGIEUSES
52
CHAPITRE 5 : QUAND LES ENJEUX DETERMINENTLES
NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE
71
CONCLUSION
84
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
86
REFERENCES WEBOGRAPHIQUES
89
ANNEXES
91
IN MEMORIUM
A mon feu père Awlouvi CAPO
et à ma feue mère Dogbo SAGBO
DEDICACE
A ma chère épouse Alice A.
KAKPOSSA ;
A mon fils Elphège Seyram CAPO ;
A mes frères et soeurs Augustin, Yves-Urbain,
Eugène, Odette et Pierrette.
REMERCIEMENTS
La réalisation de ce document a été
possible grâce aux efforts conjugués de plusieurs personnes
à qui nous tenons à exprimer nos sincères reconnaissances.
Nous adressons donc nos sentiments de sincère gratitude :
Au Dr. Dodji AMOUZOUVI, Professeur Titulaire /
CAMES, pour avoir accepté diriger ce travail et d'apporter tout le
soutien nécessaire à sa rédaction ;
Au Dr. Bruno MONTCHO, Enseignant-Chercheur à l'UAC,
notre Co-directeur de mémoire pour son accompagnement
scientifique ;
À tous les enseignants du Département de
Sociologie-Anthropologie pour avoir contribué à notre formation
;
Au Dr. Emile GBEDJANHOUNGBO pour son encouragement et ses
conseils pour un travail scientifique ;
À toute l'équipe d'encadrement du Laboratoire
d'Analyse et de Recherche : Religions, Espaces et Développement (LARRED)
de l'UAC, en particulier Pascal DOHOU ;
Aux amis Marcellin DJANATO, Senyon A. AMEGANVI, Hervé
A. MEKOUN, Bertin K. FONTON, Serge ASSOUTOVI et Alfred ADJAKA pour leur soutien
moral, intellectuel et matériel ;
À mes collègues de service Charbel O.
SABI YABA, Ange H. DEGBOUE et Modeste BOCO pour leur soutien, leurs conseils et
leurs accompagnements ;
À mes cousins Sylvain AGOUGNON, Parfait
AGBANGLA, Marcus AGOUGNON, Louis AMOUSSOU et Gustave TOHONON pour leur soutien
de tout genre ;
Au père Barnabé ZOMAKPE pour son encouragement
et ses conseils ;
À tous les frères et soeurs du groupe du
Renouveau Charismatique Catholique de Gbodjè pour leurs soutiens moral
et spirituel ;
À tous ceux qui de loin ou de près ont
contribué d'une quelconque façon à la réalisation
de ce mémoire, nous leur témoignons notre sincère
reconnaissance.
SIGLES ET ACRONYMES
CEB : Communautés ecclésiales
de base
ECR : Eglise Catholique Romaine
FASHS : Faculté des Sciences Humaines et
Sociales
INSAE : Institut National de la Statistique et
de l'Analyse Economique
LARRED : Laboratoire d'Analyse et de
Recherche Religions, Espaces et Développement
NMR : Nouveaux Mouvements Religieux
ONG : Organisation Non Gouvernementale
PDC : Plan de Développement Communal
RCC : Renouveau Charismatique Catholique
RGPH4 : Quatrième Recensement
Général de la Population et de L'Habitat
SCEAM : Symposium des Conférences
Episcopales d'Afrique et Madagascar
UAC : Université d'Abomey-Calavi
LISTE DES TABLEAUX ET PHOTOS
Liste des tableaux
Tableau 1 : Synthèse de la
recherche documentaire
2
Tableau 2 : Constitution de groupes
cibles
37
Tableau 3 : Calendrier de la recherche
38
Liste des photos
Photo 1 : Découpage administratif
de la Commune de Cotonou
2
Photo 2 : Planche : Objets de
piété catholique
53
Photo 3 : Recueillement devant une statue
de la vierge Marie
56
Photo 4 : Recueillement devant une statue
de Sainte Rita
57
Photo 5 : Prière des fidèles
au cours d'un Jéricho
62
Photo 6 : Planche : L'intérieur et
la façade de la paroisse Sainte Rita envahis par des fidèles au
cours de la messe de guérison
64
Photo 7 : L'intérieur de
l'église au cours de la messe de guérison
65
RESUME
De nouvelles pratiques religieuses connaissent un regain
d'intérêt de la part des fidèles dans l'Eglise Catholique
Romaine, mais ce sont des pratiques qui ont pour spécificité
d'évoluer en marge de la liturgie officielle. L'objectif
général de cette recherche est d'étudier
l'émergence de ces nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise
Catholique Romaine. Pour y parvenir, le choix raisonné nous a permis de
mobiliser un échantillon de 125 enquêtés sur la base des
outils tels que le guide d'entretien, la grille d'observation et le
questionnaire semi-structuré. Cette recherche s'est fondée sur la
théorie de l'interactionnisme symbolique de Goffman (1967), pour saisir
et comprendre les motivations des différents choix opérés
par les acteurs ainsi que les interactions entre eux. Il convient de souligner
au terme de la recherche que les nouvelles pratiques religieuses satisfont les
attentes des fidèles en leur garantissant salut et
prospérité. C'est ainsi qu'elles deviennent un instrument de
captage de rente, de leadership et de positionnement de l'Eglise sur le
marché de la religion pour freiner l'exode des fidèles.
Mots clés : Nouvelles pratiques
religieuses, Marché de la religion, Eglise catholique Romaine,
Cotonou
ABSTRACT
New religious
practices are experiencing a renewed interest on the part of the faithful in
the Roman Catholic Church, but they are practices that have the specificity of
evolving on the margins of the official liturgy. The general objective of this
research is to study the emergence of these new religious practices within the
Roman Catholic Church. To achieve this, the reasoned choice enabled us to
mobilize a sample of 125 surveyed on the basis of tools such as the interview
guide, the observation grid and the semi-structured questionnaire. This
research was based on Goffman's (1967) theory of symbolic interactionism, to
grasp and understand the motivations of the different choices made by the
actors as well as the interactions between them. It should be emphasized at the
end of the research that the new religious practices satisfy the expectations
of the faithful by guaranteeing them salvation and prosperity. In this way,
they become an instrument for capturing income, leadership and positioning the
Church on the religion market to curb the exodus of the faithful.
Keywords : New religious practices, Religion
market, Roman Catholic Church, Cotonou
INTRODUCTION
Le continent africain apparaît, depuis quelques
décennies, comme un terrain favorable au déploiement du
christianisme d'autant plus que çà et là se rencontrent
plusieurs pratiques religieuses d'obédience chrétienne, se
réclamant pour la plupart de l'évangélisme ou du
pentecôtisme. En effet, depuis fort longtemps, les Nouveaux Mouvements
Religieux (NMR) s'implantent dans nombre de pays africains et rivalisent
«de plus en plus avec les Eglises chrétiennes traditionnelles et
avec l'Islam » (Perretant-Aubourg, 2011, p. 91). Ces NMR progressent
avec un élan de conquête des membres dont la plupart leur viennent
d'anciennes institutions religieuses établies ou des religions
endogènes. Aux noms évocateurs, ils s'installent avec des
programmes alléchants, lisibles sur des pancartes, enseignes ou plaques,
et des techniques de propagande novatrices : orchestre, rythme musical
adapté au milieu, campagnes d'évangélisation publique,
émissions télévisées, prosélytisme, etc. En
outre, les NMR usent de la critique, comme moyen de propagande, à
l'égard des religions endogènes et des religions
chrétiennes historiques, en particulier l'Eglise catholique, et semblent
détenir la vérité, comme l'écrit Alladaye (2003, p.
337) : « Chaque secte qui se fonde pense que toutes les autres
et les grandes Eglises originelles se sont trompées avant elle (...)
Plus encore que la vérité, la secte prétend détenir
seule le salut et les rituels pour y parvenir, elle prétend même
être le salut. »
Dès lors, la prolifération des NMR est
perçue par nombre d'observateurs comme un défi ou une menace, en
témoignent plusieurs publications annonçant la régression
du catholicisme. Il s'agit entre autres de « L'Eglise catholique
et les sectes à la fin du XXe siècle »
(Bernos, 2002), « Le phénomène des nouveaux
mouvements religieux en Afrique, l'Eglise catholique en
déroute » (Cakpo, 2013), L'Eglise catholique face au
défi des groupes évangéliques (Gauthier, 2011),
etc. Toute cette littérature décrit le climat
malaisé dans lequel se trouve l'Eglise catholique romaine en Afrique,
concurrencée par les NMR. A ce sujet, le Monseigneur camerounais Patrick
Lafon (2005) donne une appréciation objective sur un ton plus
qu'incitatif : « Nous considérons ce phénomène
comme un véritable défi, dans la mesure où si les gens
vont vers les sectes, cela signifie qu'il y a quelque chose qu'ils ne trouvent
pas chez nous ».
Ce quelque chose que proposent les NMR est, comme le
dit Mbodo (2011), inspiré par « une éthique du
présent », c'est-à-dire une offre religieuse qui
« contribue ou prétend contribuer à résoudre les
problèmes de la vie présente ». Selon toujours Mbodo,
il arrive que cette « éthique du présent »
prenne « la forme de religions constituées [et] demeure
visible au fond de cultures africaines ». C'est ainsi que les
pratiques de religiosité populaire observées en plusieurs
endroits en Afrique deviennent en général l'apanage des NMR. Au
Bénin, le phénomène est identique comme partout
ailleurs : « Le champ religieux béninois est
travaillé par l'expansion de courants chrétiens
évangéliques et pentecôtistes qui, bien que minoritaires,
ont acquis une forte visibilité » (Mayrargue C., 2014, p. 91).
Et, toujours dans la dynamique de se faire visibles et prégnants, les
NMR saisissent l'opportunité de satisfaire hic et nunc les
besoins exprimés par l'individu ; ce qui leur permet d'avoir bonne
audience, d'attirer beaucoup plus de membres et de pouvoir se maintenir sur le
marché de la religion. Ce n'est guère sans susciter
d'inquiétudes et de réflexions au sein du clergé
catholique jusqu'au plus haut niveau de la hiérarchie.
Cette croissance du nombre des évangéliques et
pentecôtistes a amené le pape Benoît XVI (2007) à
dire qu'il urge de prendre le phénomène au sérieux :
« Aujourd'hui, la présence très consolidée [de
l'Eglise] doit tenir compte entre autres choses du prosélytisme des
sectes et de l'influence croissante de la sécularisation
hédoniste post-moderne. Sur les causes de l'attraction des sectes, nous
devons réfléchir sérieusement pour trouver les
réponses adéquates. » Etait-ce dans ce souci que les
autorités de l'Eglise catholique romaine, dans la période
post-conciliaire, c'est-à-dire dans les années 70 du
siècle dernier, avaient déjà admis la naissance des
mouvements charismatiques, constitués en communautés ou groupes
de prière ? Ces mouvements charismatiques qui ont vu le jour au
sein de l'Eglise se développent depuis lors sur tous les continents.
« Ils proposent une forme de religiosité qui tout en
étant insérée et contrôlée par l'institution
catholique s'apparente à bien des égards à l'offre
pentecôtiste » (Mayrargue, 2015).
Ce travail, consacré aux nouvelles pratiques
religieuses dans l'Eglise catholique romaine, se propose de répondre aux
interrogations suivantes :
- Qu'est-ce qui caractérise le contexte de
l'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique
romaine ?
- A quoi est dû le succès de plus en plus
grandissant que connaissent les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise
catholique ?
- Le bon accueil dont elles font l'objet de la part des
populations et leur approbation par les autorités de l'Eglise catholique
sont-ils stratégiques pour s'inscrire dans la logique du marché
concurrentiel du religieux ?
Dans la perspective des objectifs de cette recherche, la
présente recherche articule autour de deux parties.
La première partie, intitulée les nouvelles
pratiques religieuses comme champ d'étude de la sociologie des
religions, se décline en deux chapitres et s'intéresse aux
aspects théorique et méthodologique qui ont structuré la
recherche.
La deuxième partie s'intitule les enjeux des nouvelles
pratiques religieuses dans l'Eglise Catholique Romaine et s'est
consacrée à la présentation des résultats de la
recherche et leur analyse. Elle se décline donc en deux chapitres:
l'Eglise catholique dans la dynamique du marché religieux, les nouvelles
pratiques religieuses dans l'Eglise Catholique Romaine et les enjeux qui
fondent les nouvelles pratiques religieuses.
PREMIERE PARTIE :
LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES COMME CHAMP DE RECHERCHE DE
LA SOCIOLOGIE DES RELIGIONS
CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE DE LA RECHERCHE
Dans ce chapitre, il sera traité successivement de la
problématique, de la délimitation thématique, de la
pertinence de la recherche, de la clarification des concepts et enfin de
quelques axes actuels de la recherche.
1.1.
Problématique
1.1.1. Constats et
problème central
Le déclin des grandes institutions religieuses
annoncé par la théorie de la sécularisation due à
la modernité, et observé dans plusieurs régions du monde
et même au-delà d'elles, n'a pas empêché l'expansion
du phénomène religieux. Ce qui amène Berger P. (1971)
à reconnaître sans ambages le retour galopant du religieux en
affirmant que « L'idée selon laquelle nous vivons dans un
monde sécularisé est fausse. Le monde d'aujourd'hui est aussi
furieusement religieux qu'il l'a toujours été. » Cette
soif accrue du religieux pousse plusieurs auteurs, comme Kepel G. (1991),
à penser à la revanche de Dieu. C'est ainsi que le monde
est, aujourd'hui, traversé par l'effervescence religieuse qui, de plus
en plus, retient l'attention de nombre de personnes. En effet, il n'est pas
rare d'observer, çà et là, ailleurs comme en Afrique, un
engouement sans précédent pour le religieux. De même au
Bénin, les populations sont attirées vers une forme de
religiosité qui est caractérisée par la quête de la
réussite sociale, de la protection contre la sorcellerie, de la
guérison, de la prospérité matérielle, du
merveilleux, etc. « "Cette religiosité-miracle" a
imprégné en grande partie l'imaginaire collectif africain. Elle
est devenue un mode de croire et de penser, d'agir et de réagir d'une
bonne partie de la population africaine » (Muanda Kienga J., 2015).
De ce fait, les différentes formes de religiosité, toujours en
croissance permanente, deviennent « un terreau du développement des
Eglises évangéliques » (Peloux R. et Pian C., 2010, p.
84).
Le phénomène, planétaire, est soutenu par
la mondialisation qui crée un vaste marché économique
commun où tout le monde est invité à mener ses
activités, avec un point de mire l'homogénéisation, dans
différents domaines, de modèles communs provoquant une
interdépendance entre différents ensembles géographiques.
En accroissant l'interdépendance des hommes, la mondialisation recherche
l'uniformisation de la culture, de la consommation, de la religion en vue de
bâtir une civilisation nouvelle. Ainsi elle s'est emparée du fait
religieux et l'a transformé en une marchandise. Sur ce, Roy O. (2008)
affirme que « la mondialisation a créé un marché
du religieux. Aujourd'hui, les produits religieux circulent et les religions ne
s'arrêtent plus aux frontières. Résultat : alors que
traditionnellement les religions se sont connectées aux cultures, voire
ont créé du culturel, elles se détachent de leurs
territoires et de leur culture d'origine. » Cette
déterritorialisation permet donc aux religions de s'adapter au courant
culturel mondialement reconnu et peuvent facilement s'exporter à tous
les points du monde ; comme le dit Olivier Roy, « pour qu'un
produit soit accessible partout et au plus grand nombre, il faut qu'il soit
standardisé. S'il est trop identifié à une culture
donnée, il ne se vendra pas en dehors de cette culture ». Ce
faisant, le monde s'installe peu à peu dans une monoculture
selon le mot de Levi-Strauss C. (1955, p. 37). Sur le plan religieux, du point
de vue du christianisme, cette monoculture a pour nom le
pentecôtisme.
Ce sont, selon Roy O. (2008), toutes les formes
d'évangélisme qui s'adaptent le mieux à cette nouvelle
réalité dans le christianisme. Elles sont portées par le
courant d'air pentecôtiste qui se manifeste au travers des nouvelles
pratiques de religiosité axées sur le quotidien des populations.
Gadou D. M. (2004, p. 147) dira à cet effet que « C'est... une
population en quête de santé spirituelle, biologique et
psychologique, de mieux-être, d'identité, de promotion sociale et
culturelle, etc., qui a recours à ces prophétismes qui, sous
l'influence de la logique économique mondiale du marché,
s'organisent comme des sortes de prestataires de services ou de biens
symboliques à caractère marchand. »Cela montre, comme
le prouve Amouzouvi (2005), qu'il existe un marché pour la religion, un
marché autour de la religion et un marché dans la religion. De ce
fait, la religion est devenue comme un business. A ce titre, dans ce
marché au sens économique du terme, une dure concurrence
règne et les religions gagnantes sont celles qui proposent une offre
séduisante. Ainsi les mouvements évangéliques et
pentecôtistes qui arrivent à calquer le prosélytisme sur
les techniques de marketing des entreprises commerciales parviennent à
s'imposer sur le marché en arrachant aux Eglises établies des
fidèles. Sur ce, Blé G. R. (2013) écrit :
« les Eglises établies sont trop prudentes à prendre
position sur des problématiques urgentes qui préoccupent les
populations et certains, déçus, partent ailleurs à la
recherche d'un dérivatif. Les gourous des sectes en profitent pour les
récupérer en mettant en place une machine stratégique de
recrutement. »
Une telle situation ébranle les
intérêts1(*)des
tenants des institutions religieuses historiques, protestantes et catholiques,
qui dans la foulée se sont ouvertes au courant pentecôtiste,
lequel embrase tout le christianisme depuis les années 1970. En effet,
l'Eglise catholique romaine a vu émerger en son sein un mouvement
qualifié par les spécialistes des sciences sociales de
pentecôtisme catholique (Giblet, 1973), mais communément
appelé le renouveau charismatique catholique. L'avènement de ce
groupe a ouvert la voie à une flopée de mouvements charismatiques
de plus en plus dynamiques, observables sur la plupart des paroisses. Et sans
cérémonie, ils deviennent dans l'Eglise catholique les canaux de
développement de nouvelles pratiques religieuses. Ces pratiques semblent
imprimer chez plusieurs chrétiens catholiques des attitudes analogues
à celles des fidèles des NMR et constituent de nouvelles
manières de vivre la foi qui évoluent à côté
d'un catholicisme officiel. Cela a amené nombre de sociologues à
parler de la pentecôtisation du catholicisme (Bastian, 2008).
Faudrait-il voir dans une telle démarche le signe d'une
crise inavouée de l'institution catholique à pouvoir jouer
efficacement son rôle dans l'accompagnement spirituel de ses
fidèles dont les attentes réclament d'autres manières de
faire ou de pratiquer la foi ? Le fait que l'Eglise catholique en soit
venue à admettre ces pratiques ne relevant pas a priori de son
orthodoxie stimule notre curiosité. Il n'en demeure donc pas moins
pertinent de s'interroger sur les raisons d'une telle souplesse. A cet effet,
la question suivante a été formulée : Quels sont les
enjeux qui fondent l'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans
l'Eglise catholique romaine aujourd'hui ?
Quelques hypothèses serviront de pistes pour
répondre à cette préoccupation et permettront de mener la
recherche.
1.1.2. Hypothèses :
§ Les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise
catholique romaine s'expliquent par la montée des nouveaux mouvements
religieux ;
§ Les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise
catholique romaine se justifient par les besoins existentiels et spirituels des
populations ;
§ L'approbation des nouvelles pratiques religieuses dans
l'Eglise catholique romaine relève d'une stratégie de
positionnement aux enjeux multiples dans le marché religieux.
Afin de vérifier ces hypothèses, des objectifs
sont formulés et subdivisés en objectif général et
en objectifs spécifiques.
1.1.3. Objectifs de la recherche
Les objectifs sont de deux ordres à
savoir l'objectif général et les objectifs
spécifiques.
L'objectif général est d'analyser les enjeux qui
justifient l'émergence des nouvelles pratiques religieuses au sein de
l'Eglise catholique romaine.
De façon spécifique, il s'agit de :
v Décrire le contexte du regain d'intérêt
pour les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine
;
v Identifier les besoins que satisfont les nouvelles pratiques
religieuses dans l'Eglise catholique romaine ;
v Présenter les enjeux de l'approbation des nouvelles
pratiques religieuses dans l'Eglise catholique romaine.
1.2.
Délimitation thématique
Dans cette recherche, il ne s'agit pas
d'aborder toutes les pratiques de religiosité populaire qui existent
dans l'Eglise catholique romaine, ni d'appréhender l'institution dans
son entièreté. Mais il semble opportun de focaliser
essentiellement l'attention sur les nouvelles pratiques religieuse ainsi que
certaines pratiques populaires anciennes, qui sont aujourd'hui
revitalisées et passent pour la chasse gardée des mouvements
charismatiques de l'Eglise. De ce fait, l'intérêt sera
porté sur les cultes populaires qui privilégient les
expériences spirituelles exceptionnelles, les guérisons
miraculeuses, la dévotion personnelle, et toutes sortes de charismes.
A la lumière de tout ce qui précède, le
sujet de cette recherche s'inscrit certes dans la sociologie des religions,
mais, vu qu'il porte sur le catholicisme dans une approche comparative avec les
NMR, il se retrouve dans la sociologie du christianisme.
1.3.
Pertinence de la recherche
Elle renferme la justification du choix du sujet, du cadre de
la recherche, et la pertinence sociale et scientifique du sujet.
1.3.1. Justification du choix du sujet
L'Eglise catholique romaine a toujours été
confrontée aux mouvements schismatiques ou sectaires. Son histoire en
est remplie depuis les Apôtres jusqu'à notre époque. Mais
elle n'a jamais été aussi mise à l'épreuve du
sectarisme qu'elle ne l'est depuis plus de cinq décennies. Dans tous les
pays, comme au Bénin, on constate la désaffection des Eglises
catholiques locales au profit des NMR dont la prolifération paraît
remarquable. Un véritable défi semble lancé à
toutes les institutions religieuses historiques. Ainsi le développement
de nouvelles pratiques religieuses acceptées par le clergé et qui
relèvent souvent de l'initiative des laïcs semble redonner espoir
à plus d'un tant du côté des autorités de l'Eglise
que du côté des fidèles. C'est la raison fondamentale du
choix d'investiguer sur les probables enjeux qui encourageraient une telle
ouverture aux pratiques qui parfois dérogent à l'orthodoxie de
l'Eglise.
1.3.2. Justification du choix du cadre
Nous avons choisi la ville de Cotonou parce qu'elle est
située dans « l'archidiocèse de Cotonou, [qui est] la
circonscription ecclésiale la plus ancienne, la plus peuplée, et
la plus active du pays » (Alladaye, 2003, p. 299). Aussi faut-il
reconnaître que cette ville est le foyer d'émergence de toutes
sortes de NMR à l'image des grandes métropoles du monde2(*). Au surplus, les menaces qui
secouent l'Eglise catholique locale commencent toujours dans les villes avant
de s'étendre vers les zones périurbaines et villageoises.
De même les nouvelles pratiques de religiosité
les plus remarquables dans l'Eglise catholique locale ont aussi
émergé dans les villes, en l'occurrence Cotonou, dans un contexte
de crise sociopolitique et de pauvreté inhérente à la vie
citadine. En conséquence, Cotonou offre plus d'opportunités pour
observer le phénomène de l'effervescence religieuse et la
concurrence que se livrent ostensiblement ou non les différentes Eglises
présentes dans le champ religieux. La facilité d'avoir
accès aux informations a motivé ce choix.
1.3.3. Pertinence sociale du sujet
Les nouvelles pratiques religieuses semblent gagner du terrain
au sein de l'Eglise catholique romaine prouvant ainsi l'augmentation des
demandes de bénédiction, d'exorcisme, de prière et de
pèlerinage, puis traduisant une satisfaction non assurée par la
liturgie officielle. Elles deviennent si fréquentes que des
départs vers les NMR sont par moments notés. Alors les mouvements
charismatiques ainsi que les autres groupes de prière de dévotion
mariale, qui naissent de plus en plus dans l'Eglise, tentent de satisfaire ces
multiples demandes soit sous la tutelle d'un clerc soit sous la direction d'un
responsable laïc.
La plupart du temps cette soif de religiosité
observée chez certains chrétiens catholiques fait l'objet de
critiques de la part des autres membres de l'Eglise et même du
clergé, et est considérée comme l'expression d'un manque
de foi. De ce fait, les mouvements qui sont les instances de déploiement
de ces nouvelles pratiques religieuses sont souvent tancés à
cause des manifestations émotionnelles et sonores les
caractérisant. Ainsi, dans l'aire catholique, les acteurs
n'appréhendent pas que ces nouvelles pratiques religieuses jouent un
rôle très particulier. Même si elles s'apparentent aux
pratiques des NMR, elles demeurent l'expression visible des besoins inassouvis
de nombre de fidèles et qui attendent des réponses de la part de
l'institution ecclésiale. Alors chercher à mieux comprendre le
pourquoi de leur émergence, de leur approbation ainsi que de leur
accompagnement par les autorités ecclésiastiques semble tout
à fait pertinent.
1.3.4. Pertinence scientifique du sujet
« Si chaque religion est un univers complexe et
diversifié qui se déploie dans le temps et dans l'espace, le
monde des religions, a fortiori, l'est encore plus » (Willaime,
2012). Cette complexité et cette diversité caractérisant
le fait religieux justifient l'analyse plurielle dont il fait l'objet de la
part des spécialistes des sciences des religions. A cet effet,
historiens, philosophes, sociologues, anthropologues, politistes, juristes,
théologiens ont chacun un regard spécifique sur la religion.
Voilà ce qui explique la multitude d'études scientifiques sur les
NMR et les Eglises historiques.
En sociologie des religions des études sont
légion et s'intéressent à l'évolution des faits
religieux sur tous les continents et dans le temps. Ainsi, en Afrique, les
pratiques de religiosité populaire ont servi de matière à
plusieurs travaux tant en sciences sociales qu'en sciences
théologico-religieuses. Mais les nouvelles pratiques religieuses au sein
de l'institution catholique au Bénin ont fait peu l'objet de recherche.
C'est ce qui justifie l'intérêt d'investiguer sur la question en
vue de relever les enjeux qui soutiennent leur existence dans l'Eglise
catholique romaine, quand l'évidence d'une concurrence entre elle et les
NMR sur le marché religieux n'est plus à démontrer.
Peut-être les enjeux portent-ils les raisons de sa stabilité dans
le champ religieux au sens bourdieusien3(*) du terme. Cette recherche, dans sa modestie, pourra
alors apporter un plus à la communauté scientifique.
1.4.
Clarification des concepts
Emile Durkheim (1937, p. 34) nous enseigne
que « la première démarche du sociologue doit
être de définir les choses dont il traite, afin que l'on sache et
qu'il sache bien de quoi il est question ». Alors, afin
d'éviter tout malentendu au sujet des concepts utilisés dans
cette recherche, certains vont être définis. Il s'agit entre
autres de : religion, religieux, religiosité pratiques religieuses,
église, secte, nouveaux mouvements religieux, marché de la
religion et enjeu.
La religion est une notion dont la
définition est problématique. « La littérature
sur le sujet est immense et indique que l'unanimité est loin d'exister
sur une définition de la religion... Les définitions abondent et
renvoient en fait à des écoles et des auteurs de
référence » (Peloux et Pian, 2010). Néanmoins,
l'étymologie latine nous indique que le mot religion vient de
religio c'est-à-dire « attention
scrupuleuse », d'où « respect religieux,
vénération ». Selon Cicéron4(*), le terme religion vient de
relegere qui signifie « recueillir,
rassembler » ou, selon Lucrèce, de religare qui
veut dire « relier ». Willaime (2012, p. 60)
précise qu'une telle étymologie est hésitante, mais
soutient que la conception de Cicéron permet de définir la
religion comme une « activité symbolique traditionnelle ».
Même si cette étymologie n'est pas satisfaisante, elle donne tout
de même l'idée d'une activité qui rassemble des personnes
autour de quelque chose qui mérite scrupule, respect,
vénération. Sur ce, nous abondons dans le même sens que
Willaime dont nous adoptons la définition. Selon lui, la religion est
« une activité sociale régulière mettant en jeu,
en lien avec un pouvoir charismatique se référant à des
entités invisibles, des représentations et des pratiques
relatives à la vie et à la mort, au bonheur et au
malheur. » Cette définition a l'avantage de saisir toute
religion et ses effets sociaux sous un triple niveau des acteurs (qui sont en
lien avec un monde symbolique et vivent une expérience
singulière), des organisations (dispositif qui met en place des
procédures de fonctionnement et de pouvoir) et des idéologies (un
ensemble de représentations et de pratiques qui sont dites,
consignées dans des textes, et constamment commentées). Lorsque
nous considérons la religion chrétienne, les trois niveaux sont
repérables : les fidèles sont en lien avec Dieu comme
entité invisible, une liturgie assure le fonctionnement de tous les
cultes ou célébrations et l'idéologie est consignée
dans le livre de référence qu'est la Bible. Au cours de cette
activité religieuse, à grande portée symbolique, les
hommes et les femmes interagissent entre eux et « ont le sentiment
d'être rassemblées au nom d'un Autre » (Willaime, 2003).
C'est l'intersection des différentes relations qui fait surgir le
religieux (Caillé, 2003).
Le religieux est l'ensemble des relations
créées et entretenues par la société des humains
vivants et visibles avec l'ensemble des entités invisibles
(défunts, non-nés, esprits des animaux, des minéraux ou
des corps célestes, esprits flottants et non affectés). Ou encore
« la relation de la société des humains avec la
société universelle des invisibles étendue jusqu'à
l'infini et à l'éternité »
(Caillé, 2003, p. 318). Le religieux manifeste ainsi la religion dans sa
matérialité pour rendre compte des convictions et des croyances
sacralisées propres à chaque acteur, autrement dit sa
religiosité, selon qu'il appartient à tel ou tel groupe
religieux.
D'après le dictionnaire Grand Robert, la
religiosité signifie aspect sentimental de la religion chez une
personne ou attirance pour la religion en général, avec ou sans
adhésion formelle à une religion précise. Autrement dit,
la religiosité traduit la soif du religieux chez l'homme. Elle est dite
populaire pour désigner les comportements religieux de la masse (Sabuni
Kitutu, 2011), qui se déploient et s'extériorisent sous diverses
pratiques religieuses.
Alors, les pratiques
religieuses désignent l'ensemble des exercices
extérieurs de la piété, de la dévotion religieuse
propres à une religion. L'expression « nouvelles pratiques
religieuses » a été envisagée pour signaler que
ces pratiques sont inspirées ou influencées par la mondialisation
du religieux. Sous ce vocable, on peut ranger les demandes de
bénédiction diverse, les messes de guérison, les campagnes
d'évangélisation, les séances d'exorcisme, les
prières de protection, les ressourcements spirituels, la quête de
l'émotionnel et du sensationnel, etc. Il s'agit des
« pratiques collectives de haute intensité
émotionnelle, observables dans bien des cultures non-occidentales
où, précisément le pentecôtisme rencontre des
succès. » (Sabuni Kitutu, 2011, p. 81). Il faut noter que les
anciennes pratiques religieuses seront évoquées quand elles sont
impliquées dans le processus d'une quête particulière
d'autant plus qu'elles sont de plus en plus redynamisées et donc
toujours en vogue (les pèlerinages, les processions de Christ roi ou de
la Vierge Marie, le chemin de croix, les visites de sanctuaires, le culte des
saints, l'utilisation de l'huile sainte et de l'eau bénite, etc.). Ces
pratiques religieuses se vivent tant à l'intérieur qu'à
l'extérieur de l'Eglise catholique Romaine.
Le mot « église »
vient du latin ecclesia, issu du grec ekklesia, qui
signifie assemblée. Pris dans ce sens, le mot désignerait avec
Durkheim (2002, p. 48) « une société dont les membres
sont unis parce qu'ils se représentent de la même manière
le monde sacré et ses rapports avec le monde profane, et parce qu'ils
traduisent cette représentation commune dans des pratiques
identiques ». Cette définition générale peut
s'appliquer à toutes les formes de religion qui existent dans le monde,
puisqu'il n'en existe pas sans Eglise. Néanmoins, utilisé dans le
contexte du christianisme, le mot « église »,
signifie une communauté locale et l'institution qui regroupe les
chrétiens d'une même confession. De ce fait, l'Église
catholique, ou Église catholique, apostolique et romaine, est l'ensemble
des Églises locales ou particulières, c'est-à-dire ayant
chacune un territoire et un évêque à sa tête.
Celles-ci sont chacune pleinement l'Église catholique dans la mesure
où elles sont en communion avec le pape, qui est l'évêque
de Rome et considéré comme étant le successeur de saint
Pierre, et en communion les unes avec les autres. Mais il faut noter que
l'harmonie n'a pas toujours régné au sein de cette institution,
les groupes dissidents qui y avaient émergé depuis Martin
Luther5(*) avaient
donné naissance aux sectes ou mouvements sectaires.
D'un point de vue étymologique, le mot secte
vient de deux mots latins « secare » qui veut dire
séparer ou couper et « sequi » qui signifie suivre.
L'aspect « suivre » un nouveau maître est
plus fort que l'aspect « se séparer » d'un
autre mouvement. Alors la secte est un groupe qui se coupe d'un tronc originel,
d'une Eglise établie, pour suivre un nouveau maître
inspiré, un prophète, ou un guide spirituel. Le terme a pris une
dimension polémique, et désigne de nos jours un groupe ou une
organisation, souvent à connotation religieuse, dont les croyances ou le
comportement sont jugés obscurs ou malveillants par le reste de la
société. A ce sujet, Altglas V. (2008) écrit en note 64
que « pour le sens commun, le terme « secte » a un sens
péjoratif et disqualifiant. [Elle est définie] par la
déstabilisation mentale, le caractère exorbitant des exigences
financières, la rupture induite avec l'environnement d'origine, les
atteintes à l'intégrité physique, l'embrigadement des
enfants, le discours anti-social, les troubles à l'ordre
public... ». Alors, pour éviter de tomber dans ce jugement
négatif et dévalorisant, et à l'instar de certains
sociologues, nous préférerons employer dans cette recherche
l'expression Nouveaux Mouvements Religieux (NMR).
L'expression fut inventée par Eileen Barker dans les
années 1970, sociologue britannique, pour désigner aussi bien les
groupes réellement nouveaux que les anciens :
néo-chrétiens, judéo-chrétiens d'inspiration
orientale, para-religieux (mormons, adventistes et témoins de
Jéhovah). « L'hétérogénéité
de ces groupes est considérable... En effet, par la
simultanéité de leur émergence et la dynamique commune de
leur développement, ils relèvent d'un même
mouvement. », affirme Champion F.(1988). Mais dans cette recherche,
seront privilégiés les NMR chrétiens où dominent
les Eglises évangéliques et pentecôtistes. Ils sont
caractérisés par leur dynamisme et leur aptitude à
innover. Malgré leur taille réduite, ils ont une dimension
internationale et fonctionnent en réseaux pouvant se répandre
d'un pays à l'autre et s'adapter aux circonstances
particulières ; ce qui fait leur succès sur le marché
de la religion.
Permettant de décrire le nouveau paysage du croire,
le marché de la religion, est un espace qui offre
à l'individu la possibilité de choisir, en fonction des offres
disponibles et des besoins spirituels particuliers, le service religieux
désiré. Ainsi le marché de la religion fonctionne
exactement comme un marché financier où les différents
mouvements religieux cherchent à s'adapter aux réalités
des populations. C'est pour cela que Amouzouvi (2005, p. 16) dira qu'il est
« l'ensemble des activités économiques (qu'elles soient
intentionnelles ou non) et des transactions (production - circulation -
consommation) de ressources économiques qui trouvent leur origine et
leur développement dans la religion. » Selon lui,
« l'une des conséquences de ce marché de la religion
est l'individualisation des affaires religieuses et la commercialisation des
positions des responsables religieux. » (2005, p. 58). De ce fait,
les pratiques de religiosité modernes se caractérisent par des
enjeux qui crédibilisent et nourrissent la concurrence entre les
différents prestataires de sorte que seules les stratégies bien
élaborées parviennent à maintenir les Eglises sur le
marché en drainant beaucoup de membres.
Accroître son effectif, déstabiliser les autres,
conserver son hégémonie, constituer sa crédibilité
sont autant d'enjeux qui font mouvoir tant d'institutions religieuses de nos
jours. L'enjeu, c'est donc, d'après le dictionnaire
Robert, ce que l'on peut gagner ou perdre (mais que l'on ne veut surtout pas
perdre) dans une entreprise ou une compétition. Voilà ce que nous
voudrons bien saisir à travers la recherche sur les nouvelles pratiques
religieuses au sein de l'Eglise catholique Romaine.
1.5.
Quelques axes actuels de la discussion
Les religiosités populaires, à l'heure actuelle,
constituent un élément explicatif du revivalisme religieux, qui
met en cause certaines conceptions théoriques comme la
sécularisation et en suscite d'autres comme celle du marché de la
religion. A cet effet, la littérature en la matière est
pléthorique et éclaire davantage notre recherche.
La première partie du mémoire de Bastin (2003)
intitulée Sociologie et religion aborde la religion sous ses
différentes dimensions dans la société ultramoderne. Elle
y démontre que la religion est par nature un fait social. S'il est vrai
que traditionnellement le collectif imprègne le religieux,
souligne-t-elle, les facteurs individuels sont autant d'indices du religieux
dans la postmodernité. Par ailleurs, elle met en relief les besoins
structurels de l'être humain et les stratégies de satisfaction des
besoins. « Les stratégies de satisfaction sont
anthropologiquement sédimentées dans l'espèce et
utilisées au cas par cas, par les individus pour construire des
systèmes culturels complexes ou des constellations de valeurs
socialement diffusées ». En effet, dans la
société moderne, les individus tentent de rationaliser leur
croyance et cherchent à faire l'expérience religieuse qui, selon
Bastin, est « une expérience dé-structurante
créatrice d'un nouvel ordre de pensées et de valeurs qui survient
à un moment précis de la vie individuelle ».
Bastin montre que bien qu'il soit coercitif, le fait
religieux, dans la modernité, offre à chacun la liberté de
choisir ses croyances et ses pratiques à cause de sa conformité
aux normes de la mondialisation. Elle rejoint Roy O. (2008) qui démontre
que, dans le cadre d'un marché mondialisé, les nouvelles
pratiques de religiosité et les nouvelles religions sont de plus en plus
déterritorialisées, déculturées et formatées
pour offrir à tous le libre choix de ses convictions religieuses. Ainsi,
le religieux étant déconnecté de la culture, les nouveaux
convertis "font leur marché, goûtent et expérimentent..."
Ces produits religieux, prêts-à-consommer, selon Roy, sont
standardisés et bénéficient d'un marketing qui facilite
leur exportation et la concurrence.
En effet, les stratégies utilisées par tels ou
tels acteurs, dans le marché de la religion, visent la satisfaction des
intérêts personnels et la conquête de positions dominantes,
comme l'expliquent Amouzouvi D. (2005) et Gauthier V. (2011).
Avec Amouzouvi, la religion est perçue comme business.
En effet, après une analyse approfondie des réalités
religieuses, le fonctionnement des différentes religions qui existent
dans le champ béninois, il conclut l'existence d'un marché dans
la religion. Les biens marchands ainsi que les différents services
rendus aux fidèles correspondent à des prestations qui sont
payés à travers diverses souscriptions financières comme
les tarifs de consultation (chez un devin), les zindo, les quêtes, les
demandes de messe (dans les Eglises chrétiennes), etc. Ainsi, Amouzouvi
démontre le processus par lequel des représentants des
différentes religions utilisent la religion pour devenir riches.
L'autre volet du marché de la religion qui vise le
positionnement privilégié des acteurs religieux est décrit
par Gauthier. Elle étudie la relation complexe entre Eglise catholique
et groupes évangéliques, à Lima, de 1990 à 2010.
Elle note la croissance des Eglises évangéliques qui se fait aux
dépens de l'Eglise catholique ; ce qui amène la
hiérarchie catholique, soumise à ce qu'elle considère
comme un « défi pressant », à développer des
stratégies pour empêcher l'exode des fidèles catholiques.
Dans le domaine pastoral, elle privilégie les dévotions
traditionnelles qui s'expriment dans de grandes manifestations populaires
à caractère nationaliste, comme le culte au Seigneur des Miracles
qui rassemble des centaines de milliers de fidèles dans plusieurs
processions, et les services du Renouveau charismatique. Mais au niveau des
croyants, la logique est différente. Gauthier souligne que les
évangéliques doivent leur succès au fait qu'ils
reproduisent des modes de fonctionnement des cultes catholiques d'où la
facilité avec laquelle les catholiques transitent vers une
dénomination évangélique.
L'exemple de l'Amérique Latine s'observe en Afrique
où les institutions traditionnelles (catholicisme, protestantisme,
islamisme) connaissent une désaffection au profit des mouvements
évangéliques et pentecôtistes qui ventilent partout un
nouveau langage religieux. La réalité de l'effervescence
religieuse en Afrique amène Muanda Kienga J. (2015) à y voir
à la fois crise et vitalité de la foi. La crise, c'est que
l'Afrique contemporaine est traversée çà et là par
une effervescence religieuse sans précédent, qui s'exprime par la
recherche effrénée de biens matériels, du succès,
de la guérison, de la protection, des miracles, etc. Selon lui, une
telle religiosité est devenue l'exutoire salutaire d'une grande partie
des populations africaines, lesquelles n'espèrent que par elle.
L'effervescence religieuse pourrait être signe d'une vitalité de
la foi, mais encore faudra-t-il qu'elle soit assainie, réorientée
et encadrée.
C'est le même souci d'encadrement qui, en vue de
préserver les fidèles de l'Eglise catholique et l'homme en
général, a inspiré Peloux et Pian (2010). Selon eux, bien
que « les repères habituels de la pratique religieuse (messes
dominicales, nombre de mariages ou d'enfants en catéchèse)
indiquent une baisse importante de l'influence de l'Eglise dans la vie
quotidienne », les manifestations de la religiosité
requièrent une attention particulière et informent sur
l'engouement pour le religieux. C'est ainsi que la confiance aux grandes
institutions religieuses s'érode et naît alors chez les acteurs un
attachement aux petites communautés où les relations sont plus
chaleureuses. Dans ces communautés, les fidèles retrouvent et
vivent les pratiques religieuses qui semblent dépassées, mais qui
sont revitalisées. Sur la plupart des paroisses, les responsables de la
pastorale sont confrontés à des demandes de
bénédiction, de guérison, de dévotion ou de
pèlerinage, etc. Les auteurs soulignent que ces démarches se
situent dans un contexte de mondialisation qui « recomposent les
attentes religieuses, de sociétés qui fragilisent les individus
et ne favorisent pas leur propre épanouissement ». Devant une
telle soif de satisfaction des besoins légitimes des populations, Peloux
et Pian cherchent d'abord à les comprendre, ensuite proposent qu'on les
accompagne et, enfin, qu'elles soient orientées de sorte qu'elles
conduisent à Christ « déjà présent dans
leur vie... en vue d'un plein épanouissement de la vie humaine et afin
que les hommes réussissent leur vie ».
La plupart des NMR clament haut et fort que leur
préoccupation majeure, c'est la réussite tant humaine que
spirituelle des hommes, comme l'ont démontré Peloux et Pian en
proposant l'encadrement des pratiques religieuses populaires. Mais la
tâche s'avère très ardue pour les institutions
traditionnelles. Comme Gauthier (2008) l'a démontré, l'exode des
fidèles catholiques ne cesse de s'observer. Alors, Perretant-Aubourg
(2011) dira que L'Eglise est à l'épreuve du
pentecôtisme. Car dans sa thèse, elle aborde le
développement des mouvements pentecôtistes-charismatiques à
l'île de La Réunion et démontre que leur attraction est due
à l'importance particulière qu'ils accordent à
l'émotion religieuse. Ces groupes religieux donnent des preuves
tangibles que l'agir de Dieu ne dépend pas des dogmes. Ainsi selon
l'auteur, « ils concourent à l'imprécision des
croyances et à la fluidification des itinéraires religieux, ils
contribuent à la poussée des individualismes religieux, ils
encouragent la scissiparité ecclésiale ». L'Eglise
catholique est, sans ambages, mise à l'épreuve. Alors,
Perretant-Aubourg ouvre l'étude au Renouveau charismatique catholique
qui, à la différence du pentecôtisme, est vu comme
l'expression d'une contestation interne à l'Église d'autant plus
que les groupes se réclamant de cette mouvance demeurent
rattachés à Rome et « ses pratiques et
références empruntées au pentecôtisme ont
été ré-acculturées dans le cadre de la tradition
catholique ». Néanmoins, cette protestation, en se voulant
davantage culturelle et existentielle que socio-économique,
dénonce le rationalisme privilégié par l'Église au
détriment des besoins émotionnels de ses fidèles.
Parlant des pratiques qui aident et soulagent, Kennedy D.
(2004) montre que l'évangélisme est bel et bien une solution. Car
selon lui, il trouve un écho favorable auprès des individus et
des populations en perdition, dont l'itinéraire est marqué par
l'alcool, les crises familiales, la drogue, la solitude. A ceux-là, le
discours des prédicateurs apporte plus qu'un réconfort : la
conversion des « born-again » correspond bien
à une expérience existentielle de renouveau. L'individu est
reconnu et accepté par une communauté, Dieu lui propose une voie
individuelle de salut par une sorte de ressourcement moral. De ce point de vue,
la religion oeuvre pour un développement personnel. Les
born-again évangéliques décrits par Kennedy ne
demandent pas forcément la vie éternelle. Ils cherchent à
redonner du sens à leur existence, ils veulent de l'aide pour combattre
tel ou tel démon intérieur : l'alcool ou la sexualité
extraconjugale. L'encouragement à changer d'existence, à
reprendre sa vie en main, ne relève pas que de la sollicitation verbale.
Les communautés apportent une aide concrète par les petits
groupes de soutien, par le recours à des actes
« miraculeux » de guérisons, des aides
matérielles directes, etc.
Kennedy soulève un problème capital de la
pastorale, celui de l'accompagnement, de l'écoute et du soutien qui font
défaut dans les villes où de plus en plus les individus ont
besoin de la disponibilité de quelqu'un à qui ils peuvent se
confier. Et il rejoint Mbodo O. (2011) qui affirme que les formes actuelles de
la religiosité en Afrique invitent à découvrir des
pratiques religieuses inspirées par une éthique du
présent, de l'ici et maintenant. Leur succès, selon lui,
s'explique par leur capacité réelle ou supposée à
fournir des réponses aux problèmes vécus au quotidien.
Ainsi, pour les populations africaines, dont la maladie et la misère
sont le lot, une offre religieuse est d'autant plus intéressante qu'elle
aide à trouver des solutions aux problèmes de la vie
présente. Partout donc, devant les vicissitudes de la vie et les
épreuves de l'existence, on attend de l'Évangile des
remèdes efficaces aux maux du destin et des solutions infaillibles aux
problèmes du milieu (Semporé, 1994, p. 21).
Voilà pourquoi les NMR acquièrent de plus en
plus de succès et envahissent tous les univers. Depuis plus d'une
vingtaine d'années, Mayrargue C. (2014) fait constater que le champ
religieux béninois est occupé par plusieurs courants
chrétiens évangéliques et pentecôtistes. Bien qu'ils
soient minoritaires, écrit Mayrargue, ils sont parvenus à
acquérir une forte visibilité depuis les années 1990
où la liberté religieuse est devenue une réalité
dans un contexte de libéralisation politique et de
démocratisation. Ces dynamiques contemporaines sont l'expression de la
pluralisation religieuse. Pour n'en point douter, ces mouvements
chrétiens sont à l'origine du processus de fragmentation des
paysages religieux et d'éclatement de l'offre et de la pratique. Mais
ils nouent de nouvelles interactions avec les autres acteurs religieux avec qui
ils se trouvent en situation de compétition. Ces relations se traduisent
par un partage nouveau des territoires et des formes inédites de
porosité religieuse. Qu'ils soient d'origine nord-américaine ou
européenne, ou africaine, voire béninoise, ces groupes de
prière, associations, ou mouvements religieux, grands ou petits en
termes d'effectifs, utilisent largement les technologies de l'information
(émissions radio, programmes télévisés,
consultations par téléphone), des théologies produites au
sein de l'évangélisme mondial (comme les théologies de la
prospérité), des espaces publics et privés, marqués
de signes, d'images, de symboles (affiches annonçant des manifestations
religieuses, pancartes indiquant la présence d'églises,
autocollants apposés sur des véhicules avec des versets
bibliques). Ils sont tous mus par l'esprit du prosélytisme et
envahissent tous les espaces de la ville : établissements
scolaires, centres de santé, marchés, prisons, bâtiments
collectifs (Salle de cinéma, Hall des Arts, Palais de Sports),
concessions, domiciles privés, etc. En fin de compte
l'évangélisme valorise et promet la réussite individuelle,
encourage le succès personnel, garantit la délivrance, la
prospérité, l'abondance, et le succès.
Un tel contexte d'occupation des espaces urbains et
périurbains, voire villageois, par les NMR est l'un des graves
problèmes que relève Alladaye C. J. (2003) dans son ouvrage et
qui menacent l'Eglise catholique dans sa pureté et sa
prédominance. Le second problème se trouve être le
syncrétisme religieux. Que ce soit l'un ou l'autre, Alladaye, affirme
que « ces phénomènes imposèrent à
l'Eglise catholique des efforts d'adaptation qui se traduisirent par des
mutations... ». En effet, la manière dont les chrétiens
béninois pratiquent la religion catholique ne respecte pas les
prescriptions de l'Eglise. Bien qu'ils soient dévoués pour les
oeuvres de l'Eglise, plusieurs d'entre eux n'hésitent pas à
adopter le syncrétisme, en restant attachés aux rites
traditionnels et en recourant au « bo » dans des
situations particulières de la vie. En outre, l'auteur présente
le panorama des différentes catégories de mouvements religieux
qui partagent le pays avec les institutions établies :
Christianisme céleste, Chérubins et Séraphins,
Témoins de Jéhovah, Baptistes, Pentecôtistes,
Assemblées de Dieu, Eglise du Fa, etc.
A la lumière de tout ce qui précède, nous
retenons que les nouvelles pratiques de religiosité ne cessent pas
d'interpeller nombre de spécialistes tant des sciences sociales et
humaines que ceux des sciences théologiques et religieuses. Leurs
contributions éclairent davantage le sujet de cette recherche :
elles situent bien le contexte de la prolifération des NMR, la
nécessité du religieux pour le bien-être des hommes, le
développement des stratégies par les acteurs des
différentes religions pour se maintenir en bonne place sur le
marché de la religion, afin de tirer plus de profits, le déclin
des institutions religieuses établies, etc.
Dès lors, le présent travail portera sur les
nouvelles pratiques religieuses qui ont cours actuellement dans l'Eglise
Catholique Romaine et les enjeux qui justifient leur existence. La
manière dont les fidèles vivent le phénomène et
l'appréciation qu'ils en font eux-mêmes sera cernée.
CHAPITRE 2 : CADRE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA
RECHERCHE
Il sera présenté
dans ce chapitre le cadre de la recherche et les approches
méthodologiques y afférentes.
2.1.
Cadre de la recherche
La ville de Cotonou est la commune la plus importante sur
presque tous les plans au Bénin. Elle abrite les principaux centres de
décision pour l'administration du pays : la Présidence de la
République, la quasi-totalité des ministères, la Cour
Constitutionnelle, la Haute Autorité de l'Audiovisuel et de la
Communication, le Conseil Economique et Social, la Cour Suprême etc. Sont
également domiciliées à Cotonou, la totalité des
représentations diplomatiques de pays étrangers et d'institutions
internationales près le Bénin et la direction de grands projets
socio-économiques. De même, on y trouve la nonciature, la
mosquée centrale, le siège de plusieurs Eglises
évangéliques et des ordres ésotériques. En somme,
le Bénin est administré et dirigé depuis la commune de
Cotonou.
Photo 1 :
Découpage administratif de la Commune de Cotonou
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou1.png)
Source : Extrait du PDC de Cotonou,
2008
2.1.1. Les caractéristiques
physiques
La ville de Cotonou est
érigée en département par le dernier découpage
administratif. Il est le plus petit des douze (12) départements du
Bénin en termes de superficie. Il s'étend sur 10 km à
l'Ouest où il est limité par la commune d'Abomey-Calavi du
département de l'Atlantique et sur 6 km à l'Est en côtoyant
la commune de Sème-kpodji du département de
l'Ouémé. Il est situé au croisement des 6°20 de
parallèle Nord et de 2°20 méridien Est. L'océan
Atlantique forme la limite sud du département. Au nord, il se trouve
limité par le lac Nokoué. Cotonou a une superficie de 79 Km²
et compte 13 arrondissements et 144quartiers de ville6(*).
2.1.2. Les caractéristiques
démographiques
La population de Cotonou est de 679 012 habitants en 2013
contre 665 100 en 2002, soit une légère hausse, 2,09% sur la
période 2002-2013, après un accroissement de 2,17% sur la
décennie 1992-2002. Cette situation s'associe à une
densité de 8.595,1 habitants au kilomètre carré. Un
début probable de saturation de la ville de Cotonou dont les
problèmes environnementaux (pollution sonore, atmosphérique et du
sol) et la cherté du coût de vie contraignent au jour le jour les
populations à s'y retirer pour les communes voisines, Abomey-Calavi,
Ouidah et Sèmè-Kpodji, devenues de véritables
cités-dortoirs.
Les ethnies les plus significatives rencontrées sont :
les Fon et apparentées (56,6%), les Adja et apparentées (17,7%),
les Yoruba et apparentées (10,9%), les Dendi et apparentés
(1,9%), les Yoa, Lokpa et apparentés (1,6%), les Bariba et
apparentés (0,9%). On note une forte présence d'ethnies
étrangères (8,9%)7(*).
2.1.3. Les activités économiques
Les activités pratiquées dans le
département du Littoral sont multiples. La majorité des
industries, les petites et moyennes entreprises et le plus grand nombre
d'usines au plan national y sont concentrés. On y pratique la
pêche (continentale, maritime artisanale, maritime industrielle),
l'élevage, le jardinage et surtout le commerce. Les activités
d'artisanat sont aussi assez diversifiées.
Sur le plan commercial, le département abrite beaucoup
de marchés d'importance locale, nationale et un marché
international. Les activités commerciales sont orientées aussi
bien vers la consommation intérieure que vers l'importation et
l'exportation. Le département offre d'énormes possibilités
touristiques et dispose d'hôtels de luxe et des plages pittoresques.
En dépit de tous ces atouts, à Cotonou, le taux
de chômage est peu élevé, il concerne plus d'un actif sur
vingt, 5,5%. En prenant en compte les chômeurs découragés
ce taux est de 6,8%. Le chômage frappe tant les hommes que les femmes.
Cette situation amène les personnes qui n'ont pas d'emploi fixe à
évoluer dans le secteur informel ou encore
à recourir à tous les moyens pour sortir de la
précarité financière, d'où l'engouement pour les
nouvelles formes de religiosité qui promettent prospérité,
succès, etc.
2.1.4. Les caractéristiques religieuses
Le Bénin étant un Etat laïc, sa
Constitution a prévu en son article 23 la liberté de religion et
d'autres textes de loi ont contribué à la pratique
généralement libre de la religion.
Selon le recensement de la population de 2013, 51,2% de la
population du département du Littoral sont des fidèles de
l'Eglise catholique romaine, 16,9% sont des musulmans, 12,2%
représentent les évangéliques, les pentecôtistes et
autres chrétiens comme les membres de l'Eglise de Jésus-Christ et
des Saints des derniers Jours (Mormones), les Témoins de Jéhovah,
etc.,5,8% sont protestants (toutes catégories confondues), 5,7%
pratiquent le Christianisme Céleste, 1,6% sont des pratiquants du culte
vodoun et 0,3% d'autres types de religions traditionnelles locales. Les
Rosicruciens, les Eckistes, les Baha'is, etc. sont regroupés sous le
vocable « Autres religions » et représentent 2,7% de
la population. 2,8% affirment n'appartenir à aucune religion.
Les catholiques, les musulmans et les membres des NMR sont les
représentants des religions dominantes à Cotonou.
2.2. Considérations
méthodologique du travail
2.2.1. Modèle d'analyse
« Dans le contexte de la globalisation et de la
mondialisation, l'adepte choisit désormais sa manière de croire
parmi des multiples offres dans les "supermarchés du religieux" ; cette
possibilité lui permet d'hiérarchiser lui-même ses
croyances ou ses pratiques, et souvent de manière provisoire,
"jusqu'à ce que ça marche..." » (Sabuni Kitutu, 2011, p.
82). Il ressort de cette assertion que l'acte de croire et les choix
opérés en matière de pratiques religieuses relèvent
de plus en plus d'une décision individuelle que d'un repliement de
l'individu aux systèmes religieux traditionnels de son groupe
d'appartenance. Ainsi pour cerner le sens des nouvelles pratiques religieuses
pour lesquelles optent les fidèles, il a été jugé
pertinent d'inscrire la recherche dans le paradigme de l'interactionnisme
symbolique selon Erving Goffman (1967). Cette théorie relève de
l'individualisme méthodologique qui se fonde sur l'approche
compréhensive de Max Weber. Ce dernier met, en fait, l'individu à
la base de sa sociologie, en cherchant à comprendre la relative
signification des comportements.
L'engouement des fidèles catholiques pour les nouvelles
pratiques religieuses s'inscrit dans la démarche d'une quête
personnelle de satisfaction qui a un sens pour eux. Par l'interactionnisme
symbolique, il s'agira de saisir et de comprendre les motivations qui fondent
leurs différents choix à partir des explications qu'ils en
donnent eux-mêmes. De même, l'approbation par le clergé de
ces nouvelles pratiques religieuses sera analysée pour mieux en cerner
les enjeux.
Etant donné que la vie sociale, pour les
interactionnistes comme Goffman, se compose d'actions individuelles, d'analyses
des actions d'autrui, puis ensuite d'interactions, alors les interactions entre
les acteurs catholiques (fidèles, clergé) et avec le champ
religieux ambiant seront analysées. Comme le champ religieux est
dominé par la concurrence, il faudra voir comment l'Eglise catholique
romaine, en sa qualité d'organisation, parvient à s'y positionner
aux côtés des NMR. En somme, il sera question de reproduire le
sens de ce que disent les fidèles catholiques de leurs comportements en
matière de nouvelles pratiques religieuses et de leurs interactions avec
les autres.
2.2.2. Nature de la recherche
En fonction des objectifs définis, la présente
recherche s'avère être à la fois qualitative et
quantitative. Ces modes d'investigation se justifient en ce sens qu'ils sont
complémentaires. L'approche qualitative permet de récolter des
informations relatives aux nouvelles pratiques religieuses en observant les
acteurs sociaux dans les Eglises au cours des messes, des séances ou
assemblées de prière ou sur des places publiques lors des
campagnes d'évangélisation. Elle aide aussi à recueillir
des informations par des entretiens (semi-structurés). Cette approche
vise à comprendre et non à démontrer, ni à
contrôler en fournissant des données de contenu, et non des
données chiffrées. Quant à l'approche quantitative, elle
sert à recueillir des données observables et quantifiables comme
les proportions de ceux qui prennent part aux différentes pratiques
religieuses dites populaires. Elle aboutit à des données
chiffrées qui permettent de faire des analyses descriptives et
statistiques, des tableaux et graphiques, etc. Cette approche mixte aide donc
à appréhender les nouvelles pratiques religieuses dans toutes
leurs dimensions.
2.2.3. Recherche documentaire
Nul ne peut entreprendre une recherche sérieuse sans
franchir l'étape de la recension qui lui permet d'avoir une idée
précise sur le sujet. La revue documentaire permet donc de faire un
état des lieux sur la question soulevée et de clarifier sa
position. Comme outil, il a été fait des fiches de lectures suite
à chaque document consulté. Ainsi, afin d'avoir des informations
subséquentes, des centres de recherche ont été
visités. Le tableau ci-dessous en présente la synthèse.
Tableau 1 : Synthèse de la
recherche documentaire
Centres de documentation
|
Nature des documents
|
Informations obtenues
|
Bibliothèques de l'UAC, FLASH, LARRED
|
Ouvrages généraux, ouvrages sociologiques, recueils
d'articles ; mémoires
|
Informations relatives au sujet de recherche et à la
méthodologie
|
Bibliothèque personnelle
|
Ouvrages généraux, ouvrages sociologiques, recueils
d'articles, dictionnaires
|
Informations relatives au sujet de recherche et à la
méthodologie
|
Internet
|
Articles, revues, thèses, ouvrages de méthodologie,
mémoires, lexique de sciences sociales
|
Informations relatives au sujet de recherche et à la
méthodologie
|
Source : Données de terrain,
2016 et 2017
2.2.4. Sources orales
Elles renvoient aux personnes
ressources que nous avions interviewées, compte tenu de leurs
spécialités, leurs connaissances du sujet ainsi que leurs
expériences en matière de pratiques religieuses.
2.2.5. Enquête préliminaire
Elle a servi à vérifier les hypothèses et
à tester les outils élaborés. Au cours de cette
étape, nous avons réajusté les outils de collecte de
données et avons pris des dispositions en vue de la réussite de
l'enquête proprement dite.
2.2.6. Enquête de terrain proprement dite
Cette étape a permis la collecte des données
empiriques durant environ trois mois, de février à Avril 2017.
Elle s'est déroulée à Cotonou, sur des paroisses, dans des
chapelles de l'Eglise Catholique Romaine et parfois à domicile,
où des rencontres ont été effectuées avec des
prêtres, des responsables des mouvements catholiques et des
fidèles. Dans un premier temps, avec les autorités ou
responsables, des entretiens ont été faits au sujet de
l'effervescence religieuse au Bénin de nos jours, des problèmes
auxquels sont confrontés les fidèles, des nouvelles pratiques
religieuses qui deviennent récurrentes dans l'Eglise catholique et
à propos de leurs itinéraires religieux. Des questions relatives
à la désaffection de l'Eglise Catholique Romaine, aux
défis des NMR et aux enjeux des nouvelles pratiques religieuses dites
populaires ont été aussi abordées avec eux. Dans un second
temps les fidèles catholiques ont fait l'objet d'attention
particulière : ils ont été soumis à des
entretiens pour recueillir leurs points de vue sur le besoin qui les pousse
à rechercher des bénédictions, des guérisons, des
accompagnements spirituels, des protections..., en allant de paroisse en
paroisse où s'organisent des campagnes d'évangélisation ou
des messes de guérison sous la houlette des prêtres exorcistes ou
des mouvements charismatiques dirigés par des laïcs. Enfin,
à titre exceptionnel et par souci de vérification, trois pasteurs
des Eglises évangéliques et pentecôtistes ont
été interviewés, en vue de saisir la provenance de leurs
fidèles, les problèmes qu'ils leur exposent et la nature des
solutions qu'ils leur proposent.
2.2.7. Techniques et outils de collecte de données
La collecte des données a été faite
grâce à deux techniques. Il s'agit de l'observation participante
et l'entretien semi-directif.
2.2.7.1. L'observation directe
La collecte des données a été
réalisée grâce à l'observation directe. Cette
technique a été privilégiée tout en mettant en
application le principe de l'agnosticisme méthodologique8(*) que recommandent les sciences
sociales des religions. Il exige donc, dans la rédaction d'un
mémoire ou la réalisation d'une étude scientifique, de
rester « confessionnellement neutre » en laissant de
côté les croyances personnelles. A cet effet, Willaime J.-P.
(1992, p. 203) écrivait : « ... nous restons situés
à un point de vue méthodologiquement agnostique qui tente de
mesurer des effets sociaux indépendamment de la valeur religieuse et
éthique que l'on peut reconnaître aux systèmes religieux
considérés. Ce point de vue permet de mettre froidement à
jour un certain nombre de mécanismes sans faire intervenir ses options
personnelles et sans présupposer qu'une religion est meilleure sous
prétexte qu'elle est socialement plus efficace. » De même,
Sébastien Fath renchérit en ces termes : « Le meilleur
travail possible, pour un chercheur, (...) c'est une analyse distanciée,
dépassionnée, informée et rigoureuse, utile à la
société pour la qualité de sa recherche.»9(*)
L'observation directe implique la présence du chercheur
sur son terrain de recherche, autrement dit, dans le cadre de ce travail, sur
les lieux de prière, aux messes de guérison, aux
assemblées de prières des mouvements charismatiques, tant du
côté catholique que du côté des NMR afin d'observer
les rites et les pratiques collectifs, de les décrire et d'en faire une
analyse.
L'outil associé à cette technique est la grille
d'observation. Les éléments privilégiés sont les
attitudes des fidèles au cours des messes de guérison, des
campagnes d'évangélisation, des séances de prière
de délivrance, leurs comportements dévotionnels devant les
grottes mariales ou les statues d'un saint, leurs postures devant un
prêtre au moment de recevoir une bénédiction, etc.
2.2.7.2. L'entretien
Outre l'observation directe, l'entretien a été
pour le travail une technique importante dans la récolte des
données. A ce sujet, A. Blanchet et A. Gotman (1992, p.
27) pensent que « l'enquête par entretien est ainsi
particulièrement pertinente lorsque l'on veut analyser le sens que les
acteurs donnent à leur pratique, aux événements dont ils
ont pu être les témoins actifs ; lorsque l'on veut mettre en
évidence les systèmes de valeur et les repères normatifs
à partir desquels ils s'orientent et se déterminent. Elle aura
pour spécificité de rapporter les idées à
l'expérience du sujet. Elle donne accès à des idées
incarnées, et non pas préfabriquées, à ce qui
constitue les idées en croyance et qui, pour cette raison, sera
dotée d'une certaine stabilité. » Cette technique
s'inscrit dans la logique du modèle d'analyse susmentionné. Alors
elle s'explique par le souci de recueillir des informations
complémentaires, indispensables, pour comprendre les motivations qui
justifient telles ou telles attitudes des acteurs, saisir les raisons qui
poussent les uns et les autres à prendre part activement aux
séances de prière de tel mouvement charismatique au sein ou hors
de l'Eglise ou aux messes de guérison. De même, cette technique a
permis de recueillir auprès des autorités de l'Eglise les
données qui aident à cerner les enjeux qui fondent l'approbation
des nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise Catholique à
Cotonou.
Comme outil, le guide d'entretien a été
utilisé et il a varié selon que l'entretien s'effectue avec les
prêtres, les pasteurs, les responsables de mouvements charismatiques,
tandis que le questionnaire semi-structuré a été
utilisé pour les fidèles ; sans oublier l'importance
accordée aux récits de vie, qui ont permis de saisir la
pertinence de leurs multiples quêtes.
2.2.8. Groupes cibles et échantillonnage
Il sera question des différents acteurs
stratégiques dont le statut social est en relation avec la
problématique des nouvelles pratiques religieuses ainsi que des
techniques de leur choix.
2.2.8.1. Groupes cibles
Les groupes cibles sont constitués des
catégories de personnes en position de fournir des réponses aux
préoccupations de cette recherche. A cet effet, ils sont composés
d'acteurs impliqués dans le champ d'action catholique, ou pouvant
contribuer à la compréhension du phénomène de
l'effervescence religieuse, des enjeux des nouvelles pratiques religieuses au
sein de l'Eglise Catholique Romaine, de la pastorale des malades, à
savoir: les clercs catholiques, les responsables des mouvements charismatiques
catholiques, les pasteurs évangéliques et pentecôtistes,
les fidèles catholiques de la base.
2.2.8.2. Echantillonnage
Les groupes cibles étant identifiés, il va
falloir déterminer la taille de l'échantillon,
c'est-à-dire le nombre de personnes à enquêter à
l'intérieur de chaque groupe cible. Pour ce faire, la technique non
probabiliste, telle que le choix raisonné, a été
utilisée, à cause de la portée qualitative de la
recherche. L'échantillonnage par choix raisonné consiste à
sélectionner des acteurs sur la base de certains critères pouvant
conduire à l'obtention d'informations susceptibles de satisfaire les
attentes du chercheur. Les unités d'échantillonnage qui semblent
représentatives sont donc sélectionnées. Ainsi, la gestion
spirituelle des fidèles, l'administration de la vie paroissiale sont les
critères qui ont déterminé le choix des prêtres, des
responsables de mouvements charismatiques et des pasteurs. Tandis que le statut
de chrétien catholique a justifié le choix des fidèles
laïcs.
Ainsi, nous avons retenu un échantillon de 125
informateurs, détaillés dans le tableau ci-dessous. Mais il est
à noter qu'il existe 30 paroisses à Cotonou et sur 15 d'entre
elles, les 110 fidèles enquêtés ont été
sélectionnés.
Tableau 2 : Constitution de groupes
cibles
Catégorie d'acteurs
enquêtés
|
Effectif
|
Prêtres de l'Eglise catholique romaine
|
5
|
Pasteurs d'Eglises évangéliques ou
pentecôtistes
|
3
|
Responsables de groupes de prière charismatiques
|
7
|
Fidèles catholiques baptisés,
catéchumènes et autres membres se considérant comme
chrétiens ou fidèles de l'Eglise catholique romaine
|
110
|
Total
|
125
|
Source : Données de terrain,
2017
2.2.9. Dépouillement et traitement des
données
Le dépouillement des données empiriques a
été fait manuellement : elles ont été
triées et organisées par thématique selon qu'elles sont
exploitables ou non en rapport avec les objectifs spécifiques. Ensuite,
avec les logiciels Word et Excel, nous les avons transcrites et saisies ;
ce qui nous a permis de produire des tableaux statistiques ayant servi à
l'analyse. En ce qui concerne les données issues des guides d'entretien
adressés aux prêtres, pasteurs et responsables de mouvements, nous
avons analysé les contenus des propos selon trois axes : les points
communs, les points divergents et les points spécifiques.
2.2.10. Calendrier de la recherche
La recherche s'est déroulée pendant neuf (9)
mois environ. Le tableau ci-dessous récapitule chaque étape.
Tableau 3 : Calendrier de la
recherche
Période
|
Activités
|
Lieu
|
Personnes Impliquées
|
Du 1er novembre au 31 décembre 2016 (2
mois)
|
- Documentation
- Entretiens exploratoires
- Rédaction du protocole de recherche
|
- Centres de documentation
- Bibliothèques
- Laboratoires
- Cybercafés
|
- Personnes ressources
- Directeur de mémoire
|
Du 1er janvier au15 janvier 2017 (15 jours)
|
Elaboration des outils de collecte de données et
révision
|
LARRED (UAC)
|
Directeur de mémoire
|
Du 16 janvier au 31 janvier 2017 (15 jours)
|
Pré-enquête
|
Commune de Cotonou
|
- Personnes ressources
- Enquêtés
|
De 1er février 2017 au 30 avril 2017 (3
mois)
|
Enquête proprement dite
|
Commune de Cotonou
|
-Personnes ressources
-Enquêtés
|
Du 1er mai 2017 au 14 juillet 2017 (2 mois et demi)
|
Dépouillement, rédaction, correction et
relecture
|
Gbodjè (Abomey-Calavi)
|
Directeur de mémoire
|
Mai 2018
|
Soutenance
|
UAC
|
Membres du jury
|
Source : Données de terrain,
2017
2.2.11. Difficultés rencontrées
Les difficultés rencontrées dans le cadre de
cette recherche sont de deux ordres. La première est l'accès
à l'information. En effet, nous nous sommes heurté au refus de
collaboration de certains responsables de mouvements et des fidèles qui
attendent recevoir de mots d'ordre de leur curé avant de se prêter
à nos questions. Pour contourner cette difficulté, nous avons
réussi à créer, à chaque entretien, un climat de
confiance et d'intérêt pour la collaboration sur ces questions.
La seconde difficulté a été de trouver
des prêtres et pasteurs pour l'entretien, compte tenu de la taille de
notre guide qui exigeait au moins une heure par entretien. Pour contourner une
telle difficulté des rendez-vous à domicile ou à des
heures où ils sont plus ou moins libres ont été
négociés.
DEUXIEME PARTIE :
LES ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE
CATHOLIQUE ROMAINE
CHAPITRE 3 : L'EGLISE
CATHOLIQUE ROMAINE DANS LA DYNAMIQUE DU MARCHE RELIGIEUX
L'effervescence religieuse a été
favorisée au Bénin par des facteurs historiques
indéniables et aussi par un cadre juridique légitime grâce
à la Constitution du 11 décembre 1990. Avec l'émergence
des NMR, les prestations religieuses s'offrent partout d'autant plus que les
demandes se font de plus en plus fortes tant en milieu urbain que rural. Alors,
il s'agira de voir comment l'institution catholique se positionne sur le
marché de la religion, comment elle réagit face au défi
que lui lancent les NMR qui tentent de lui arracher des fidèles.
3.1. Effervescence religieuse au
Bénin et à Cotonou
L'effervescence religieuse au Bénin, voire à
Cotonou, se justifie par des facteurs historiques mais également par le
cadre juridique de la période démocratique.
3.1.1. Les facteurs
historiques
L'émergence en grand nombre des mouvements religieux et
mystiques était une réalité au Dahomey bien avant
l'ère démocratique, comme le souligne Alladaye C. J. (2003). Elle
eut des conditions favorables grâce à la
« révolution marxiste » qui fut proclamée
comme guide philosophique de l'Etat en 1974 et le socialisme scientifique comme
voie de développement du pays. L'année suivante, le Dahomey
était devenu la République Populaire du Bénin et le Parti
de la Révolution Populaire du Bénin (P.R.P.B) a été
créé avec pour statut de parti unique. Le 26 août 1977, par
la « Loi fondamentale », toutes les institutions du pays
furent soumises au P.R.P.B. Dès lors, la répression fut
décrétée et fit des ravages dans le pays, puis les
opposants, réels ou supposés, furent pourchassés,
arrêtés, emprisonnés ou contraints à l'exil.
Le pouvoir révolutionnaire connut un échec sur
le plan économique. La plupart des entreprises créées
firent faillite. La misère alors s'installe à cause des revenus
peu sûrs, du faible pouvoir d'achat, du chômage, de la
précarité des soins sanitaires, etc.
Devant l'angoisse existentielle les citoyens béninois,
surtout d'obédience catholique, se heurtaient, dans leur religion,
à une structure ecclésiale qui manquait de souplesse, de
convivialité et d'initiative à même d'assister les
miséreux. Quand bien même qu'Alladaye (2003) souligne que
« dans ces conditions, la religion devint un refuge », il
était constaté que ce sont les Eglises évangéliques
et pentecôtistes qui étaient prisées à
l'époque, en particulier dans les grandes villes comme Cotonou. A la
solitude qui fait souffrir les citadins, « les sectes opposent la
convivialité fraternelle de leurs groupements, communautaires ou non.
Chacun y est connu et nommé par son nom » (Schlegel, 1995, p.
95). Ces « profonds bouleversements politiques, économiques et
sociaux [vont conduire] à la Conférence Nationale des Forces
Vives de la Nation. Laquelle conférence a inauguré à son
tour une ère nouvelle de démocratie et de libertés. L'une
des caractéristiques majeures de cette période est la forte
demande religieuse et l'expression d'une ferveur populaire... »
(Amouzouvi, 2005, p. 48)
3.1.2. Le cadre juridique
Le renouveau démocratique au Bénin qui a
marqué les années 1990, après la période
révolutionnaire, a été déterminant pour la
liberté religieuse. Celle-ci trouve un appui favorable dans un cadre
juridique qui est garanti par la Constitution béninoise. En effet,
l'article 23 stipule que « Toute personne a droit à la
liberté de pensée, de conscience, de religion, de culture,
d'opinion et d'expression dans le respect de l'ordre public établi par
la loi et les règlements. L'exercice du culte et l'expression des
croyances s'effectuent dans le respect de la laïcité de
l'État ». Il transparaît clairement que chacun est libre
de ses opinions religieuses et ne doit en aucun cas s'en inquiéter, sauf
si elles empiètent sur les droits des autres et perturbent l'ordre
public établi.
Comme bien d'autres Etats de l'Afrique subsaharienne, le
Bénin a ainsi ouvert la voie à la création des Eglises qui
ne cesseront de naître depuis lors : « Au Bénin,
tout groupe religieux qui se fait enregistrer au Ministère de
l'Intérieur, est considéré comme Eglise à part
entière » Alladaye C. J. (2003, p. 322).Parmi ces Eglises de
tendance évangélique et pentecôtiste, certains sont
d'origine étrangère, plus particulièrement
américaine, et d'autres sont purement d'essence africaine voire
béninoise comme le Christianisme Céleste, les Chérubin et
Séraphins, l'Eglise du fa, etc. Toutes ces Eglises partagent le paysage
béninois avec les institutions religieuses traditionnelles et donnent la
preuve de l'intérêt sans cesse croissant qu'a la population pour
le religieux.
3.2. Intensification du
phénomène religieux
La laïcité de l'Etat béninois
promulguée en 1990 a été déterminante dans
l'amplification de l'effervescence religieuse et l'émergence des NMR.
Cette ébullition religieuse vient étancher une soif de besoins
tant fondamentaux que spirituels.
3.2.1. La quête
quotidienne des besoins fondamentaux
Cette intensification du phénomène religieux
intervient dans la logique de la satisfaction des aspirations auxquelles
tiennent nombre d'acteurs, lesquelles aspirations « sont de plusieurs
ordres: idéologico-politiques, morales, sociales, identitaires,
communautaires, existentielles, matérielles et même
thérapeutiques. » Dortier J.-F. et Testot L. (2005).
Voilà pourquoi les nouveaux acteurs religieux qui ont
émergé depuis la période démocratique ne
ménagent aucun effort et ne tarissent pas d'initiatives pour offrir
à leurs ouailles tous les moyens pour faire face aux difficultés
de la vie. De même, dans l'Eglise catholique, comme engagés dans
un combat ultime pour la survie, les responsables à divers niveaux se
mobilisent tant bien que mal pour aider les fidèles à trouver la
porte de sortie appropriée aux problèmes qui les embarrassent.
Le souci permanent des enquêtés reste, en effet,
la résorption des difficultés existentielles. Ainsi
reconnaissent-ils tous que les conditions de vie deviennent de plus en plus
difficiles de nos jours et soutiennent que cela est dû au manque de
débouchés (35,45%), au faible pouvoir d'achat (28,18%) et
à la mal gouvernance (10%). En dehors de ces raisons qui semblent plus
relever de la gestion du pouvoir politique, les enquêtés ont
souligné une raison qui paraît justifier leur quête dans les
religiosités chrétiennes : 12,73% précisent que les
difficultés de la vie s'expliquent par le fait que les hommes ne
respectent pas les lois de Dieu ou de la nature, autrement dit, ils
pèchent. Or, il n'y a aucun recours humain susceptible de conjurer le
sort dû à une transgression pareille, si ce n'est pas que des
doléances soient formulées à l'endroit du Dieu
Créateur. Donc, selon ces enquêtés, la solution face aux
difficultés de la vie réside dans la prière, surtout la
prière assidue, persévérante en faisant beaucoup plus
confiance à Dieu.
En dépit des prières, la ville impose son primat
de milieu de combat ardu pour la survie, d'autant plus qu'elle traîne
toujours les indicateurs de la misère, de la pauvreté, de la
violence et de l'insécurité. Le revenu moyen obtenu dans notre
échantillon est certes légèrement au-dessus du Smig
(40.000f CFA) et s'élève à 58.866 f CFA, mais il convient
de signaler que plus de la moitié des personnes enquêtées,
c'est-à-dire 68 sur les 110, soit 61,82%, vivent maritalement,
mariées coutumièrement ou chrétiennement. Ainsi est-il
aisé de comprendre que ces populations éprouvent beaucoup de
difficultés à nourrir leurs enfants, à assurer leur
scolarité et à affronter la vie citadine. Surtout que l'absence
d'un système de sécurité socio-sanitaire adéquat
pour tous et à un coût abordable et le manque de garantie
d'employabilité à long terme étouffent l'espérance
d'une existence paisible à Cotonou. Dès lors, à la
question de savoir ce qui fait le plus courir les hommes à Cotonou, les
enquêtés ont cité : Pauvreté/Misère
(30%), Argent ou Moyens financiers (26,36%), Bien-être familial/social
(21,82%), Travail (17,27%), etc. Mais si malgré tous les efforts
consentis pour venir à bout de ces maux, l'acteur se voit aux prises
avec des forces occultes ou des maux qu'il lui est difficile de comprendre et
de vaincre facilement, l'insécurité gagne une autre
dimension : il est en insécurité spirituelle. Dans ce cas,
sa quête de solution devient encore plus effrénée, qu'il se
permet parfois de la pousser jusqu'au seuil de l'irrationnel.
3.2.2.
L'insécurité spirituelle
Des situations embarrassantes ont cours dans la vie des
citadins ; ce qui relève de l'ordre normal des choses. Mais elles
viennent empirer l'existence déjà fragilisée et
chargée de malheurs paralysants. C'est ainsi que derrière un
problème de santé, des échecs répétés
dans les affaires ou à des examens ou concours, la persistance du
chômage, une rupture de relation conjugale, une difficulté de
conception, etc., chacun appréhende un problème spirituel,
soupçonne un esprit malveillant. Sur ce, la quasi-totalité des
enquêtés, soit 98,18%, pensent que les problèmes dont
souffrent beaucoup de personnes sont à la fois d'ordre matériel
et spirituel et 62 enquêtés sur les 110, soit 56,36%,
déclarent avoir été confrontés à un
problème quelconque de la vie qui, selon eux, aurait eu une source
spirituelle. Parmi ces 62 enquêtés, il se dégage 33 femmes
contre 29 hommes ; ce qui montre que tous les deux sexes sont sujets
à des problèmes spirituels avec un léger écart.
Le phénomène de la confrontation à un
problème d'ordre spirituel est ressenti ou vécu
différemment selon l'âge, la profession ou le niveau
d'études. En effet, la tranche d'âges [25-55[,
considérée comme la plus active, est plus touchée par les
problèmes spirituels que les autres (72,58%). Cela peut se comprendre
dans la mesure où il s'agit des citadins qui donnent l'impression de
réussir dans leur famille ou dans leur quartier à cause de leurs
activités. Aux yeux de tous, ils remuent ciel et terre en dépit
des problèmes liés à la vie en ville, toujours
animés par le souci du progrès. La convoitise des uns et des
autres peut se muer en haine farouche pouvant conduire à nuire à
autrui. C'est ainsi que 77,41% des enquêtés concernés
par les problèmes spirituels sont des artisans, des commerçants
et des fonctionnaires.
S'agit-il d'une présomption subjective pour
justifier la précarité de la situation dans laquelle l'on vit en
voulant trouver un bouc émissaire, pour se libérer moralement ?
Assurément non, d'autant plus que ces acteurs exposent des
problèmes spirituels ou non qui s'inscrivent dans une objectivité
sans précédent. Ils sont les seuls à savoir ce qu'ils
endurent. C'est ce qui fonde leur détermination à vouloir s'en
sortir. Au nombre des problèmes spirituels récurrents dans la vie
des enquêtés, on note l'envoûtement, les maladies
provoquées ou incurables, la sorcellerie, les possessions
démoniaques, etc.
Dès lors, rechercher le sens des infortunes qui se
présentent comme sans issues et qui perturbent l'existence, amenuisent
les maigres ressources, devient légitime. De même, les
problèmes ne sont plus perçus comme susceptibles d'être
résorbés avec les seuls moyens habituels. Par exemple,
« la protection des attaques de la sorcellerie constitue un
impératif. Tous les moyens sont bons pour y parvenir » (Mbodo,
2011, p. 232). Ceci nous conduit donc sur le terrain du marché de la
religion.
3.3. Marché de la religion
et quête de solution
La dynamique des croyances et des pratiques religieuses rend
disponible un vaste marché du religieux où chacun, en fonction de
ses aspirations, peut s'offrir les services de tels ou tels acteurs religieux.
3.3.1. Le marché de la
religion
La quête de solution aux problèmes de la vie est
un fait. L'existence d'une gamme variée de recours en est un autre.
Ainsi la liberté religieuse offre à tous les hommes la
possibilité de choisir la religion de leur prédilection, religion
qui « n'est plus dicté[e] à la naissance ni
n'obéit plus à un processus établi par avance »
(Amouzouvi, 2005, p. 14). Cette même liberté rend
disponible un pluralisme religieux où n'importe qui au nom de la
liberté peut créer sa propre religion et offrir ses prestations
selon que la demande existe et est grande, et partant une gamme variée
de choix est offerte aux fidèles (cf. Amouzouvi, 2005 ; p. 14). La
possibilité de choisir ou de ne pas choisir, comme si on était
dans une sorte de supermarché, est à la portée de tous.
Voilà l'idée que l'on peut se faire du marché de la
religion : il « permet aux croyants de prier ici et là,
d'être membre de telle organisation ou de telle autre juste pour un
certain temps, bref de faire preuve d'une certaine fluctuation : regarder
autour de soi et aller là où les choix individuels de chacun
s'expriment le mieux » Gerdien (1998 : 56)10(*). Dans ce marché donc, cohabitent toutes les
formes de pratiques à savoir les religions endogènes, les groupes
ou mouvements ésotériques (Rose-croix, Ekanckar, Franc
maçonnerie, etc.) et les institutions religieuses chrétiennes.
Les hommes, sans distinction aucune, peuvent consulter les alpha, les
marabouts, les visionnaires, les guérisseurs, les bokonon, les
tradi-praticiens, les maîtres spirituels, les mystiques, les pasteurs des
Eglises évangéliques ou pentecôtistes, les prêtres
exorcistes de l'Eglise catholique ou les responsables de groupes de
prière charismatiques, etc. Comment les fidèles de l'Eglise
catholique font le marché dans cette variété de recours
religieux ?
3.3.2. Les fidèles
catholiques et la quête de solution aux problèmes spirituels
Le recours aux pratiques religieuses est systématique
chez les fidèles enquêtés et traduit de plus en plus un
attachement au religieux dans le but surtout de la satisfaction personnelle en
fonction des préoccupations des uns et des autres. Cette quête se
fait soit au sein de l'Eglise catholique à travers des messes de
guérison, des séances d'exorcisme et de délivrance, des
prières dites Jéricho11(*), soit ailleurs chez les NMR. Ce qui parfois met
en doute leur adhésion formelle à la foi de leur religion,
c'est-à-dire le catholicisme. En effet, 80% des enquêtés
apprécient positivement les services que rendent les NMR aux populations
tandis que 16,36% s'inscrivent en faux contre leurs services et 3,64% demeurent
sans avis. Aux yeux de ceux qui paraissent tolérants, les Eglises
évangéliques et pentecôtistes connaissent du succès
et attirent du monde parce qu'elles font des miracles (26,36%), prient
efficacement et opèrent des guérisons et délivrances
(20,91%), sont plus fraternelles et solidaires (13,64%) et prêchent bien
tout en promettant la prospérité, la réussite dans la vie
(10,91%). Pour ceux qui récusent la légitimité des NMR, il
est de notoriété de se tenir loin de ces groupes religieux
d'autant plus que la plupart instrumentalisent le nom de Dieu ou de
Jésus (10,91%) ou font usage des forces occultes (5,45%) pour conduire
les hommes à la perdition.
Il s'agit d'un regard plein de subjectivité que les
acteurs jettent les uns sur les autres. Un pasteur (P3), par exemple, disait au
cours d'un entretien :
« Il ne faut pas se mettre sous un autre joug si ce
n'est celui de Jésus Christ. Je ne collabore pas avec l'Eglise
catholique, ni avec le Christianisme céleste, ni avec les religions
endogènes. Même avant de collaborer avec une Eglise
évangélique, il faut la discerner d'abord et se laisser diriger
pas l'Esprit Saint. »
Une manière de se révéler pur aux yeux du
monde et de stigmatiser les autres. Aussi un fidèle catholique
affirme-t-il sans ambages que :
« Les fidèles catholiques vont dans ces
églises pour être possédés; ces églises
dépossèdent les gens financièrement. »
Cette assertion rejoint une des visions de l'Eglise catholique
qui stipule que « Hors de l'Eglise, point de salut. »
Voilà pourquoi même la tolérance dont font preuve certains
fidèles catholiques à l'égard des NMR ne les amène
cependant pas à vouloir renier leur religion au profit d'eux, ni ne les
blanchit d'aucun jugement de valeur. Pour ce faire, ils trouvent que ces
mouvements religieux représentent des menaces potentielles pour l'Eglise
catholique.
3.4. Défi des NMR et
réaction de l'Eglise catholique romaine
La menace se présente comme un défi lancé
à l'Eglise catholique romaine. Et sur le marché de la religion,
pour son repositionnement, elle prend des initiatives devant venir à
bout de l'exode pressenti.
3.4.1. Le défi des
NMR
Les nouvelles pratiques de religiosité qui s'observent
de nos jours à Cotonou visent à chasser les mauvais esprits,
à exorciser, à délivrer, et à guérir. Comme
la demande est de plus en plus grande, les prestataires se font inventifs et
saisissent l'opportunité. C'est ainsi que les NMR paraissent plus actifs
dans le marché religieux.
Le pasteur (P1) dit :
« A un nouveau venu, nous proposons l'Etude
biblique, nous lui offrons la communion fraternelle et l'invitons au
Baptême du Saint Esprit. Mais s'il est venu présenter un
problème - et c'est souvent le cas -, nous lui proposons un seul
message : Jésus. Car il est écrit dans Romains 10, 9-10 que
quiconque invoquera le nom de Jésus Christ sera sauvé. Parfois
les fidèles trouvent cela banal, mais c'est la vérité,
Jésus est la solution de tous les problèmes de l'humanité.
Maintenant pour opérer une délivrance, nous prions en fonction
des problèmes présentés en essayant de diagnostiquer le
mal, de rompre les liens contractés avec des esprits et la
libération se réalise grâce à la Parole de
Dieu. »
Ces propos montrent le soin avec lequel sont entourés
ceux qui frappent à la porte des NMR : Parole de Dieu
partagée, communion fraternelle, baptême, solution aux
problèmes trouvée. C'est-à-dire le salut éternel
est proposé et l'obtention de la solution aux problèmes
existentiels est garantie par des séances de délivrance. A ce
sujet Mbodo (2011, p. 232) dit que « L'offre des nouvelles formes de
religiosité paraît mieux adaptée aux situations
vécues par l'individu dans le besoin. » Cela éclaire
donc l'attitude de certains fidèles catholiques qui n'hésitent
pas à tourner dos à leur église pour se retrouver dans un
mouvement religieux.
En effet, les trois pasteurs que nous avons interviewés
au cours de notre recherche nous ont signalé que la plupart de leurs
fidèles viennent de l'Eglise catholique, des religions endogènes
et de l'Islam. Pour preuve, deux sur les trois pasteurs étaient
d'anciens fidèles catholiques partis à cause de
l'incapacité de l'Eglise de les délivrer des
problèmes dans lesquels ils étaient. Nous pouvons alors dire que
le succès des NMR peut être attribué à quelques
traits significatifs : une prédication tranchante avec des messages
attractifs comme « Avec Jésus tu connaîtras la
prospérité ! », « Venez à Jésus
et vous serez sauvés ! », l'importance
accordée à la conversion personnelle, le souci d'afficher une
singularité chrétienne, l'accent mis sur le témoignage, et
enfin des communautés à l'ambiance chaleureuse et fraternelle.
Autant de caractéristiques qui permettent de valoriser l'homme. C'est la
raison pour laquelle « dans l'anomie régnant dans les immenses
mégapoles du Sud, les citadins (...) retrouvent dans les groupes
évangéliques une communauté chaleureuse où leur est
proposée une expérience de foi, dans des
célébrations enthousiastes, animées par de
véritables orchestres » (Lecaros, 2011). Ces NMR mettent donc
à l'épreuve les instituions religieuses traditionnelles comme
l'Eglise catholique. Ils les défient littéralement par leur
programme et leur spécificité. De ce fait, 60% des
enquêtés perçoivent les NMR comme des menaces potentielles
pour l'Eglise catholique et les raisons sont multiples. Selon eux,
« (...), les NMR détournent les
fidèles catholiques, ils attirent les fidèles de l'Eglise qui
sont dans les difficultés ou qui souffrent, ils remettent en cause une
bonne partie de la doctrine de l'Eglise catholique, les pasteurs se rendent
plus disponibles que les prêtres catholiques, l'Eglise catholique
elle-même n'oeuvre pas pour l'affermissement des chrétiens dans la
foi, l'Eglise catholique n'assiste pas les gens, etc. »
Quant à ceux qui n'appréhendent aucune menace
(38,18%), ils tiennent des propos à la fois réalistes et
valorisants pour leur église :
« (...), le mouvement des adhésions est dans
les deux sens, l'Eglise catholique est la racine, Dieu veille sur son Eglise,
les fidèles catholiques croissent toujours, l'Eglise catholique est bien
assise sur les Apôtres, etc. »
Néanmoins le constat de la désaffection est
d'actualité et fait l'objet de réflexion au sein de l'Eglise
catholique. Cakpo E. (2013) écrit que « la
caractéristique principale des NMR en Afrique est de proposer un
christianisme réajusté et réinterprété, un
christianisme africain. Ils cherchent avant tout à mieux répondre
aux conditions de vie en développant une religion adaptée aux
besoins sociaux et religieux des populations. » Cette assertion se
vérifie dans la mesure où n'en pouvant plus dans leur quête
de solution aux problèmes existentiels dans leur église, certains
fidèles catholiques n'hésitent pas à recourir aux services
des NMR quel que soit le prix que cela coûte. En effet, les NMR
parviennent autant que faire se peut à offrir des solutions
adaptées aux problèmes présentés. La satisfaction
amène certains fidèles catholiques à devenir membres de
ces NMR, tandis que d'autres reviennent au bercail, au grand dam des
frères et soeurs ayant été au courant de
l'itinéraire thérapeutique emprunté. En
général, à leur encontre, fusent des critiques venant des
catholiques se disant fidèles à la doctrine de l'Eglise
qui trouvent que ces fluctuations dans la foi, selon le mot de Gerdien,
couramment qualifiées dans le milieu catholique de prostituions
spirituelles, ne sont pas dignes des enfants de Dieu. Ainsi les
départs des fidèles de l'Eglise catholique vers les NMR sont
différemment appréciés.
Les avis sont divers à propos de l'exode des
fidèles catholiques vers les NMR, allant d'un ton critique (65,45%)
à un ton objectif ou modéré (33,64%). En effet, 34,54% des
enquêtés qualifient l'acte comme l'expression d'un manque de foi,
12,72% pensent que ceux qui partent méconnaissent les richesses de
l'Eglise catholique et estiment qu'on peut trouver sur place tout ce qu'on va
chercher ailleurs, 11,82% estiment que les fidèles sont à la
recherche du merveilleux, des miracles et 6,36% arguent qu'ils sont
assoiffés de biens matériels, de la prospérité,
etc. Tandis que ceux qui ont adopté un ton plus objectif se
réservent le droit de juger: 18,18% affirment que ceux qui vont ailleurs
sont libres du choix de culte, car chacun sait ce qu'il endure, ce qu'il attend
de son église et qu'il n'obtient pas, et 15,45% soulignent que les
sectes proposent des solutions plus adéquates que l'Eglise catholique.
Que fait alors l'Eglise catholique face à une telle situation et qu'en
est-il de ce qu'elle propose ?
3.4.2. La réaction de
l'Eglise catholique
René Luneau (2002, p. 74) disait que « les
évêques africains ont conscience du défi à relever.
Ils comprennent que la demande de guérison est un enjeu-clé et
que, " l'avenir du christianisme en Afrique pourrait bien se jouer sur cette
question". » Pour ce faire, des synodes ont été
organisés pour plancher sur la question.
Le Secrétariat pour l'unité des
chrétiens, le Secrétariat pour les non-croyants et le Conseil
pontifical pour la culture ont organisé un synode en 1985, pour
réfléchir sur la présence et l'activité des NMR et
autres " sectes". Des propositions ont été faites, en guise
de réponses pastorales. Elles se déclinent en six points :
1) Développer le sens de la communauté, 2) Renforcer la formation
des prêtres et la formation continue des laïcs, 3) Mener une
approche personnelle et intégrale de la foi, 4) Travailler
l'identité culturelle des Eglises locales (l'inculturation), 5)
Revaloriser la prière et le culte en revoyant les modèles
classiques de la liturgie, 6) Harmoniser le ministère des prêtres
et celui des laïcs en donnant priorité à la promotion des
ministères diversifiés. Le rapport souligne également que
les orientations du synode sont une réponse aux besoins et aux
aspirations que certains fidèles recherchent dans les nouveaux
mouvements religieux.
En 1992, toujours pour répondre aux défis que
les NMR posent aux Églises traditionnelles, le Comité permanent
du Symposium des Conférences Episcopales d'Afrique et Madagascar (SCEAM)
a tenté d'apporter des réponses lors de sa réunion. Entre
autres propositions, il a été suggéré de
créer une Église bien africaine sans tomber dans le
syncrétisme, pour donner vie à une Église dans laquelle
les Africains s'identifieront plus facilement et d'imaginer des cultes plus
participatifs. Pour finir, l'accent était mis sur l'étude de la
Bible et sur l'évangélisation des fidèles. Les
revendications pour une Eglise typiquement africaine, l'un des atouts majeurs
des NMR, vont être relayées par le Synode africain de 1994.
Au Bénin, avec l'accord du Vatican, en juillet 2007,
l'Eglise catholique a désigné dans chacun des dix diocèses
des prêtres exorcistes pour aider les fidèles à lutter
contre "des attaques de sorciers ou de puissances maléfiques" (Cakpo,
2013). Depuis lors, il est facile de remarquer que sur nombre de paroisses sont
organisées des messes de guérison à l'intention des
malades ou des veillées d'évangélisation centrées
sur la délivrance et la libération, sous la houlette des
prêtres exorcistes. En outre, des communautés ecclésiales
de base (CEB) et des groupes de prière charismatiques
foisonnent12(*) sur des
paroisses et initient des activités de grande envergure, comme des
campagnes d'évangélisation, des pèlerinages, des sessions
de formation, des retraites, des journées d'amitié, etc. Toutes
les occasions sont opportunes pour les leaders de ces groupes ou mouvements
d'évangéliser, de délivrer et d'intercéder pour
ceux qui sont sous la domination des forces occultes.
Selon le prêtre (E2), cette autorisation de
création de groupes de prière pour animer la vie des paroisses
s'inscrit dans l'esprit du Concile Vatican II.
« C'est la réalisation de ce que le Concile
Vatican II a anticipé. A savoir qu'il y a des besoins nouveaux dans le
monde par rapport à l'Église, les besoins spirituels, sociaux,
humains, économiques nouveaux du monde d'aujourd'hui par rapport au
monde ancien. L'Église était restée figée dans le
monde ancien et c'est ça qui a provoqué le Concile Vatican II.
C'est d'adapter le langage de l'Église aux réalités et au
langage du monde d'aujourd'hui. Plus on avance, plus le monde catholique
commence à découvrir ces nouvelles opportunités
données par le Concile Vatican II. Les fidèles commencent
à les découvrir. Ce n'est pas seulement à cause des
besoins, mais aussi c'est parce que l'Église a ouvert les portes
nouvelles. »
Les portes ouvertes par l'Eglise catholique ont permis la
naissance de l'un des tous premiers mouvements charismatiques, le Renouveau, en
1967 en Occident et au Bénin en 1977. Ce mouvement charismatique
symbolisait à juste titre la réponse aux besoins des
fidèles de plus en plus attirés par la vague de
l'évangélisme et du pentecôtisme. Dans son sillage,
d'autres groupes de prière charismatiques vont émerger en faisant
éclore davantage au sein de l'Eglise catholique cette effervescence
religieuse axée sur la recherche de guérison, de miracles, de
réussite, etc. Il s'agit de Fiat, Communauté Emmanuel,
Cité de l'Immaculée, Fifaton, Feu nouveau, Amis de saint Michel,
Evangélisation pour tous, etc. Sur ce, le prêtre (E2) dira que
« On n'a plus besoin maintenant pour approfondir sa
piété, approfondir sa communion en Jésus Christ et en
Dieu, de créer une secte et de sortir de l'Église. Mais de faire
comme saint François d'Assise, comme saint Dominique, comme saint Ignace
de Loyola, de réformer l'Église de l'intérieur,
d'approfondir sa relation à Dieu à l'intérieur de
l'Église. Ce n'est pas en sortant de l'Église qu'on a plus de
piété, plus d'amour pour Dieu, mais en restant, en creusant les
trésors de l'Église laissés par Jésus Christ, qui
sont infinis. C'est pourquoi je salue les initiatives spirituelles,
communautaires, que prennent de plus en plus les fidèles pour pouvoir
vivre leur foi en profondeur et leur piété comme il se doit par
rapport à Dieu. Saint Paul avait déjà dit :
"N'éteignez pas l'Esprit..." »
De l'avis du prêtre (E5), en paraphrasant le pape Paul
VI, ces mouvements charismatiques constituent une chance pour l'Eglise,
« (...), car les groupes sont des indicateurs de vie
et de vivacité de la religion... Ils répondent à un besoin
de l'Eglise, qui va au-delà de la hiérarchie. Comme la
plupart d'entre eux sont de l'ordre charismatique, c'est l'Esprit Saint qui
souffle. Et selon le besoin du contexte, ces groupes naissent pour
répondre à un besoin immédiat des fidèles. C'est
important qu'ils s'expriment, qu'ils aient un lieu d'expression de leur foi...
Mais l'Eglise n'admet pas de désordre. Même s'ils sont
charismatiques, ils sont toujours suivis d'une certaine manière. Ils ne
naissent pas comme des cheveux sur la tête. Les fidèles sont
libres de créer, mais il y a une procédure. »
Les besoins que satisfont ces mouvements charismatiques sont
en réalité le fondement des pratiques de religiosités de
plus en plus nouvelles qui provoquent souvent l'évasion de certains
fidèles catholiques vers les NMR. Mais depuis quelque temps, le
dynamisme de ces mouvements charismatiques crée en marge de la liturgie
officielle des pratiques qui apparaissent comme des réponses au
défi des NMR engagés dans une forte concurrence vis-à-vis
de l'Eglise catholique et d'autres institutions religieuses traditionnelles.
C'est pourquoi Bastian (2008) dira que « La principale force
religieuse sectaire, le pentecôtisme, ne se [trouve] plus seulement
à l'extérieur, mais aussi à l'intérieur de
l'institution [catholique]... » Cette force meut chaque jour les
nouvelles pratiques religieuses comme une soif à étancher chez
les catholiques.
En définitive, le marché de la religion semble
favorable aux églises qui savent tenir compte des besoins
exprimés par les populations en difficulté. Pour ne pas voir son
hégémonie réduite à néant, à cause
des départs de ses fidèles vers d'autres groupes religieux
très dynamiques, l'Eglise catholique a su mesurer l'ampleur de la menace
et a pu trouver la formule adéquate en promouvant de nouvelles pratiques
religieuses et en admettant en son sein des mouvements religieux qui portent le
courant pentecôtiste. A n'en point douter, ces pratiques religieuses
attirent plusieurs fidèles catholiques ainsi que des croyants d'autres
religions. Comment se présentent-elles concrètement, ces
nouvelles pratiques religieuses à caractère populaire à
côté de la foi catholique officielle ?
CHAPITRE 4 : LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES
Les nouvelles pratiques religieuses dites populaires qui
s'observent dans l'Eglise Catholique Romaine sont influencées par les
NMR et ne sont pas uniquement spécifiques à une couche sociale
particulière. Selon les conditions et les situations de vie, elles
peuvent prendre des formes diverses, allant des demandes individuelles aux
pratiques communautaires, mobilisant des foules immenses. Après avoir
inventorié ces demandes et ces pratiques, les implications que leur
engouement suscite chez les fidèles ainsi que leurs influences sur la
liturgie officielle seront mises en relief. Enfin une attention sera
accordée à l'institutionnalisation des messes de guérison,
des veillées d'adoration et d'évangélisation, puis
à la montée des mouvements charismatiques catholiques, pionniers
dans l'expansion des nouvelles pratiques religieuses à caractère
populaire dans l'Eglise catholique.
3.1. Demandes individuelles
diversifiées
La plupart des chrétiens aspirent à une vie
heureuse, sans aucun embarras lié à un manque ou à une
menace d'être invisible nuisible. L'insécurité ambiante
qu'ils côtoient au quotidien les conduit, pour la plupart du temps,
à se doter d'armures efficaces, lesquelles sont
généralement des demandes de bénédiction, des
prières de protection, de guérison, de délivrance, etc.
3.1.1. La
bénédiction d'objets de piété, de maison,
d'oratoire
Très souvent, les fidèles catholiques
sollicitent de la part des prêtres à être bénis
(39,09%) ou présentent des objets de piété à
bénir à des fins d'utilisation personnelle (85,45%). Des croix,
des médailles, des crucifix, des statuettes, des chapelets, des gravures
ou photos de Jésus, de la Vierge Marie ou des saints, des foulards
à l'effigie d'un saint, d'un évêque, du pape, etc. sont
bénis (cf. Photo 1 ci-dessous). Ainsi acquièrent-ils une certaine
puissance à même de procurer à leur détenteur une
immunité efficace contre les maléfices de n'importe quelle
nature. C'est pourquoi il est fréquent de voir des chrétiens
catholiques portant à leur cou des croix, des médailles ou
parfois même des chapelets en lieu et place de chaîne ou de
collier.
Photo 2 :
Planche : Objets de piété catholique
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou2.png)
Source : Compilation d'images faite par CAPO,
2017
Certains fidèles font déplacer des prêtres
pour qu'ils aillent bénir leur maison ou leur oratoire. Ce sont parfois
des occasions de réunir la famille et de recevoir tous ensemble
opportunément la bénédiction du prélat. Tous les
coins de la maison sont aspergés d'eau bénite et de sel
béni. Et l'homme de Dieu prononce les formules de
bénédiction qui conviennent. Cela a pour effet de purifier la
demeure de tout esprit malveillant, de protéger la maisonnée et
de procurer à tous une santé spirituelle vivifiante. Mais une
telle sollicitation n'est pas à la portée de tous les
chrétiens : seuls quelques-uns arrivent à faire
déplacer un prêtre pour la bénédiction de leur
maison (28,18%) et de leur oratoire (6,36%).
La demande de bénédiction est un acte de foi
mais qui ne réclame pas forcément au préalable
l'adhésion à la religion catholique, puisqu'il y a parfois des
croyants d'autres religions qui bénéficient de ces services ou
prennent part à des séances de bénédiction, en
pensant aux grâces qui, selon les témoignages, en
découlent. C'est dans la même logique que l'usage des sacramentaux
(sel béni, eau bénite, huile sainte, etc.) est à la
portée de tout le monde, surtout pour leur efficacité. Ils sont
93,64% à en recourir en cas de nécessité.
La finalité de toutes ces demandes, selon les
enquêtés, c'est de se protéger contre les forces
maléfiques ou les attaques des sorciers, purifier son environnement,
obtenir la guérison en situation de maladie, etc. Mais lorsque la
souffrance persiste beaucoup de chrétiens demandent des prières
de délivrance.
3.1.2. Les prières de
délivrance, de guérison et de protection
Les sollicitations pour les prières de
délivrance, de guérison ou de protection sont souvent
adressées aux prêtres exorcistes. Dans l'archidiocèse de
Cotonou, ce sont eux qui ont reçu la délégation du pouvoir
d'exercer le ministère d'exorcisme de la part de l'archevêque.
Officiellement, ils sont au nombre de trois : le père Pamphile
Fanou de la paroisse Sainte Rita, le père Pio Hounyèmè de
la paroisse Jésus Eucharistie et le père Gilles
Nougbodohoué de la paroisse Sainte Marie Mère du Sauveur. Mais en
face de la souffrance des fidèles ou de toute personne humaine, bien
d'autres prêtres, sans autorisation préalable de
l'évêque, pratiquent la prière de délivrance qui est
un ministère similaire sur leur paroisse, parfois au coeur des messes de
guérison.
L'absence du ministère d'exorcisme dans l'Eglise
catholique avait occasionné plusieurs départs vers les NMR, comme
en témoigne une jeune femme de 32 ans qui déclare :
« Avant, nous n'avions pas de prêtres pour
nous aider quand on a des attaques de sorciers ou des puissances
maléfiques. Maintenant que nous en avons la possibilité il est
clair que partir ailleurs serait une perte de temps. »
En 2002, cette femme victime d'une paraplégie,
s'était détournée de l'Eglise catholique pour "chercher
ailleurs", mais a décidé de revenir vers elle cinq ans plus
tard13(*),
c'est-à-dire en 2007 où est née l'association des
prêtres exorcistes du Bénin. Ce ministère d'exorcisme
permet donc d'aider certains fidèles à se libérer des
maléfices, de faciliter la réinsertion d'autres fidèles
dans la communauté chrétienne afin de les amener à vivre
pleinement leur foi en Dieu. Ils retrouvent la confiance en Dieu en voyant
désormais en lui un Père qui pourvoit à leurs besoins.
C'est une occasion qui leur est offerte pour se sentir en famille.
Ainsi les paroisses où se trouvent des prêtres
exorcistes ou sur lesquelles se pratiquent l'exorcisme avec ou sans des messes
de guérison sont souvent envahies par des personnes, catholiques ou non,
en quête de solution à un problème rendant parfois la
tâche difficile aux prêtres. De longues files d'attente
s'observent. De nombreux malades espèrent tous être reçus
par le prêtre, parfois seul. Or le ministère s'avère un
travail très exigeant. Il faut que l'exorciste parvienne à
identifier ce qui relève d'un problème purement humain et ce qui
est spirituel afin de savoir comment venir à bout de la situation
présentée par le fidèle. Car nombreux sont ceux qui se
disent être possédés alors qu'en réalité leur
mal est d'ordre psychique ou même imaginaire. A ce sujet, le prêtre
(E4), exorciste, s'explique :
« J'écoute et je prie pour ceux qui viennent
vers moi, l'entrevue peut durer plusieurs heures. Elle permet de distinguer
entre la possession et l'imagination... Je leur montre que ce qui arrive
peut être permis soit pour grandir dans la foi, soit pour soulager un
autre dans l'épreuve. Je les amène à cheminer avec Dieu et
à être attentifs aux signes, même les plus
anodins ».
Donc le travail nécessite non seulement une
disponibilité réelle mais aussi une disposition spirituelle afin
de faire accepter aux fidèles la réalité de leur mal,
qu'il convient parfois de considérer comme nécessaire pour
grandir dans la foi. Pour ce faire, beaucoup repartent chez eux insatisfaits,
la mort dans l'âme, car ils sont loin d'approuver un tel message :
selon eux, Dieu est capable de les guérir et l'homme de Dieu est
là pour intercéder pour eux. La déception amplifie la
douleur et les fidèles n'hésitent pas à bouder les
prêtres, en les traitant d'indisponibles pour les écouter ou
d'incapables de les guérir.
En réalité, le problème qui se pose
demeure plus celui de disponibilité que d'incapacité des
prêtres. Alors certains trouvent la solution dans les prières de
protection, des neuvaines, etc. qu'ils reçoivent parfois des
prêtres et qu'ils récitent eux-mêmes. Ou bien, d'aucuns
recourent aux responsables de groupes de prière charismatiques ou
intègrent tout simplement ces mouvements à cause des charismes
d'intercession qui leur sont reconnus tout en s'adonnant à d'autres
pratiques religieuses.
3.2. Pratiques religieuses
révélant le souci de s'épanouir
Les nouvelles pratiques religieuses se caractérisent
par leur spécificité à évoluer en marge de la
liturgie officielle de l'Eglise catholique. Comme le souligne le
Directoire, « les pieux exercices du peuple chrétien,
comme aussi les autres formes de dévotion, sont accueillis et
recommandés, pourvu qu'ils ne se substituent pas et qu'ils ne se
mélangent pas aux célébrations liturgiques ». Ce
sont des expressions publiques ou privées de la piété
chrétienne ou de diverses pratiques extérieures (prières,
chants, visite de lieux particuliers, insignes, médailles, etc.), qui
mettent un accent particulier sur la relation entre le fidèle et Dieu ou
les saints. Elles visent l'obtention d'une réponse de la part de
Dieu et, pour ce faire, varient d'un individu à un autre. Ici,
l'attention sera portée sur le culte de Marie, des saints, la visite aux
sanctuaires et le pèlerinage, compte tenu de l'importance que leur
accordent les fidèles catholiques.
3.2.1. Les dévotions
diverses : Marie et les saints
De par leur foi en Jésus et la compréhension
qu'ils ont de la mission que Dieu a confiée à Marie, Mère
de Jésus de Nazareth, les fidèles catholiques considèrent
cette dernière non pas seulement comme la Mère de Jésus,
mais aussi comme la Mère de tous les hommes. De ce fait, en sa
qualité de celle qui est comblée de grâce, elle est en
mesure d'obtenir de Dieu et de Jésus l'exaucement des demandes
formulées. Voilà pourquoi les catholiques recourent à
Marie dans leurs difficultés en lui vouant un culte très
particulier. De toutes les dévotions, celle liée à Marie
est de loin celle qui est plus prisée par de nombreux fidèles.
Ils sont donc 67 sur les 110 enquêtés, soit 60,91%, à
pratiquer le plus cette dévotion dans le but de se libérer des
soucis, de se protéger contre les forces du mal, d'avoir la paix
intérieure, d'obtenir la solution appropriée à toute
situation pénible traversée, etc. Tout cela explique les
attroupements qu'on observe dans les Eglises catholiques devant les statues de
la Vierge Marie, les bougies allumées, les intentions écrites
déposées dans la boîte à lettres au pied des statues
de Marie, les méditations de chapelet ou du rosaire faites à
longueur de journée, etc. (cf. Photo 2 ci-dessous).
Photo 3 :
Recueillement devant une statue de la vierge Marie
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou3.png)
Source : Cliché CAPO, 2017
Tellement les catholiques s'accrochent à ce culte qu'il
est parfois difficile de distinguer ce qui est une démarche de foi de ce
qui est une démarche humaine voire une émanation d'anciennes
pratiques traditionnelles de la religion vodoun. C'est aussi l'une des raisons
pour lesquelles les NMR ont de la peine à faire la différence
entre vénération et adoration en matière
du culte de Marie, tout comme celui des saints.
La quête de solution amène aussi les
fidèles à tourner leur regard vers les saints de leur
église. Peloux et Pian (2010, p. 37) écrivent que :
« le culte des saints est une pratique très répandue
qui passe par des gestes concrets qui peuvent prendre des apparences de
superstition. Ils sont parfois jugés sévèrement du point
de vue de la "foi officielle". Mais, quand on prend au sérieux la
démarche des personnes ... on se rend compte de la foi qui les
anime ». En effet, il n'est pas rare de voir des chrétiens
s'accrocher à la statue d'un saint, en la touchant, en l'embrassant, en
se cognant la tête contre elle, en couvrant de baisers ses pieds, en
multipliant des signes de croix, en faisant des offrandes, en murmurant des
prières instantes, parfois en coulant des larmes, etc. Et l'audience
varie d'un saint à un autre selon qu'il est spécialiste d'une
cause avérée. Selon le martyrologe romain, Sainte Rita est
reconnue pour les causes désespérées qu'elle résout
(cf. photo 3 ci-dessous), la Sainte Vierge Marie défait les noeuds
quelle que soit leur complication, saint Antoine de Padoue permet de retrouver
les objets perdus, saint Camille est invoqué pour recouvrer la
santé, etc.
Photo 4 :
Recueillement devant une statue de Sainte Rita
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou4.png)
Source : Cliché CAPO, 2017
Une telle attitude, de l'avis des fidèles
enquêtés ou observés, s'inscrit dans une dynamique de
parvenir à gagner les faveurs du saint. Aussi convient-il de souligner
que les fidèles catholiques, au coeur de certains contextes difficiles
de leur vie, ne s'adressent plus directement à Dieu. Ils ne se sentent
pas dignes de le faire, mais préfèrent passer par le truchement
des saints comme intermédiaires fort bien efficaces à même
de rallier à leur cause Dieu. Ainsi 30 enquêtés sur 110,
soit 27,27%, pratiquent fréquemment ce culte. Néanmoins
l'Église met en garde ses fidèles contre l'exagération de
telles pratiques en veillant à ce que ne soient pas
vénérées des images indignes, ou qui les inciteraient
à s'adonner à des pratiques superstitieuses : « Nous
imitions leur exemple pour suivre le Seigneur et parvenir à la
plénitude de l'homme parfait, qu'est le Christ »
(Directoire n°244).
Ces deux dévotions et bien d'autres encore prennent
surtout d'ampleur quand les fidèles se rendent à un
pèlerinage ou visitent un sanctuaire.
3.2.2. Le pèlerinage et
la visite aux sanctuaires
Selon le dictionnaire Robert, le pèlerinage est un
voyage, individuel ou collectif, fait à un lieu saint pour des motifs
religieux et dans un esprit de dévotion. C'est dire donc que cette
pratique religieuse est inséparable d'un sanctuaire (église par
exemple ou tout autre lieu sacré) et est entreprise dans un souci
dévotionnel mais elle a des motifs bien personnels qui peuvent
être : trouver des réponses à des questions vitales,
des solutions à des problèmes particuliers, faire la rencontre de
Dieu, etc.
De plus en plus, les nouvelles pratiques religieuses de masse
rendent plus vivace la propension à participer aux pèlerinages
parmi les fidèles. Car pour les fidèles catholiques,
« les sanctuaires sont souvent, à cause de leur origine, la
mémoire d'un événement considéré par eux
comme extraordinaire, et qui a provoqué l'émergence de
manifestations de dévotion durable, ou des témoignages de
piété et de reconnaissance de tout un peuple pour les
grâces reçues en ce lieu. » (Directoire
n°263). Ainsi les sanctuaires d'Allada, de Dassa, la paroisse de
Maria-Tokpa à Porto-Novo sont devenus des lieux de pèlerinage
pour les catholiques de Cotonou comme ceux du Bénin tout entier. Chacun
se rend en ces lieux à cause des nombreux signes miraculeux qui s'y sont
produits et qui témoignent de la proximité de Dieu et de sa
miséricorde. Ces sanctuaires sont devenus pour les fidèles comme
des lieux privilégiés où Dieu vient en aide aux hommes, et
où se manifeste l'intercession de Marie ou des saints.
Durant ces pèlerinages, les prières des
pèlerins s'adressent très souvent à Marie, aux Anges et
aux Saints, qu'ils considèrent comme des intercesseurs auprès de
Dieu. Ce sont souvent des prières de supplications dans les besoins, des
prières exprimant la douleur de celui qui est affligé, des
prières de jubilation et de remerciements de la part de celui qui a
obtenu grâces et miséricorde. Et ils assistent aussi à des
célébrations de l'Eucharistie, c'est-à-dire des messes. A
la fin, chacun retourne chez lui le coeur soulagé,
déchargé, rempli d'espoir.
3.3. Quand la liturgie officielle
fait une place aux nouvelles pratiques religieuses
La messe est le lieu de rassemblement par excellence des
catholiques. Ils y refont le geste que Jésus leur a demandé de
faire en mémoire de lui, dans le partage du pain et du vin dans
lesquels, selon la foi catholique, son corps et son sang sont donnés.
Son déroulement officiel sera présenté et la
manière dont elle est vécue par les fidèles sera
analysée, selon qu'elle est célébrée ordinairement
ou qu'elle est dite dans une logique de pratiques de religiosité
populaire.
3.3.1. Le déroulement de
la messe catholique
La messe catholique est célébrée chaque
jour, partout dans le monde, mais les fidèles sont invités
à y participer chaque dimanche, en mémoire du jour de la
résurrection de Jésus. Seuls les prêtres et les
évêques peuvent la célébrer. Elle crée un
lien d'unité entre les fidèles qui sont présents et ceux
du monde entier. Deux grandes parties constituent l'ossature de la messe :
la liturgie de la Parole et la liturgie eucharistique, c'est-à-dire un
temps d'écoute de la Parole de Dieu (lecture des textes tirés de
la Bible) et un temps de bénédiction et de partage de la
communion.
3.3.1.1. La liturgie de la
parole
En franchissant le seuil d'une église, les catholiques
font de la main droite le signe de croix. Souvent un chant d'entrée
ouvre la célébration. Puis les fidèles sont invités
à se reconnaître humblement pécheurs et à accueillir
le pardon de Dieu. Le dimanche, est introduit ici le chant de louange du Gloria
ou Gloire à Dieu, dans lequel les fidèles reconnaissent la
grandeur de Dieu. Une Prière d'ouverture rassemble alors la
prière des fidèles, appelant sur eux la grâce de Dieu pour
la disponibilité au mystère qu'ils célèbrent. Les
textes sont lus par les laïcs et le prêtre (ou le diacre). Celui-ci,
dans une homélie, met en relation les textes des Écritures avec
la vie quotidienne des fidèles, l'enseignement de l'Église ou le
sens de la célébration en cours (mariage ou autre). Il exhorte le
peuple en lui faisant voir les merveilles que Dieu lui destine et l'invite
à demeurer fidèle à Dieu. La profession de foi (ou le
credo) suit, surtout le dimanche et les jours de fête, et signifie
l'adhésion des fidèles à la parole de Dieu et à sa
présence. La prière universelle vient clore cette partie :
les fidèles partagent leurs intentions de prière, celles de
l'Église et du monde.
3.3.1.2. La liturgie de
l'eucharistie
La seconde partie porte sur les offrandes. Les fidèles
sont invités à faire leurs dons (quête) en signe de
l'offrande de leur vie, de leur participation à l'offrande du pain et du
vin. L'offertoire se conclut par une prière sur les offrandes. Ensuite,
dans une longue prière, le célébrant fait mémoire
de la Cène, le dernier repas de Jésus, et prie Dieu de faire
reposer sur l'assemblée et sur les dons (le pain et le vin) son Esprit,
pour qu'ils deviennent corps et sang du Christ. Dès cet instant, les
prières montent : les fidèles multiplient les intentions
adressées à Jésus afin d'être exaucés. Au
terme de ces prières, on récite le Notre Père et les
fidèles, sur l'invitation du prêtre, se donnent la paix, en se
serrant la main. Vient après le moment d'aller communier. Seuls doivent
se lever les fidèles qui sont dans une disposition adaptée,
c'est-à-dire avoir fait sa «première communion», ne pas
avoir conscience de péchés graves, ne pas afficher ouvertement et
publiquement un désaccord avec l'enseignement de l'Église
catholique. La messe prend fin avec l'envoi où le
célébrant conclut la prière et envoie l'assemblée
partager et répandre la Bonne Nouvelle qu'elle vient de
célébrer.
Quelle conception les fidèles se font de la messe et
comment la vivent-ils ordinairement ?
3.3.2. La Messe ordinaire ou
dominicale : une exigence sacramentelle
Les fidèles catholiques conçoivent
l'assiduité à la messe dominicale comme une exigence
sacramentelle. Car tout baptisé est tenu de prendre part à cette
célébration eucharistique comme le recommande le troisième
commandement : « Tu sanctifieras le jour du
Seigneur ». C'est ainsi que 90% des enquêtés
déclarent être à la messe tous les dimanches. Pour eux,
elle est obligatoire d'autant plus que nul ne peut être chrétien
tout seul en restant chez soi. La nécessité de faire
Église exige donc des fidèles qu'ils se réunissent au
moins une fois par semaine. C'est une occasion qu'ils ont pour nourrir leur foi
et se familiariser. En effet, ils prient ensemble, écoutent les lectures
et l'homélie qui les éclairent sur la Parole de Dieu et la
manière de la vivre au quotidien.
Dans l'imaginaire de plusieurs chrétiens catholiques,
représentés par 71,82% des enquêtés, la messe
dominicale telle que présentée plus haut est une occasion
d'adoration de Dieu, de reconnaissance de sa souveraineté. Seuls 15,45%
des enquêtés estiment que la messe dominicale leur permet de se
protéger contre les forces maléfiques et 10,91% recherchent
à travers la messe la paix intérieure. Donc la grande masse vient
rendre un culte à Dieu, mais comment ? Nos multiples observations
nous permettent de souligner que, de plus en plus, les messes sont
vécues comme une routinisation qui ne dit pas son nom. Sur ce, le
prêtre (E2) affirme que :
« Les messes du matin et du soir où
l'Église donne les textes bibliques et l'explique pour la nourriture du
fidèle, combien viennent à ces messes ? La plupart ne viennent
pas. C'est le dimanche qu'on les trouve. Et même le dimanche, combien
vivent réellement la messe ? Ils ont le coeur dans leurs affaires, ils
ont la tête dans leurs affaires. On se lève à tout instant
durant la messe. On parle, on dort... Combien reçoivent vraiment la
Parole de Dieu le dimanche pour en vivre dans la semaine ? L'attention à
accorder à la Parole de Dieu, voilà le problème de
l'Église catholique. »
On note une certaine banalisation de la messe qui n'est plus
trop perçue ni vécue comme une occasion où Dieu est
censé venir à la rencontre de son peuple, selon la doctrine
catholique, pour lui communiquer sa vie, donc le délivrer de ses lourdes
charges, de ses problèmes existentiels. Voilà pourquoi, certaines
célébrations eucharistiques sont vides, les chrétiens
étant à leurs affaires : services, marché, etc. ou
les fidèles, bien que présents à la messe, semblent
remplir une formalité. Mais quand il s'agit d'une messe de
guérison ou de délivrance, l'attitude paraît autre.
3.3.3. La Messe ouverte aux
nouvelles pratiques religieuses : une nécessité du
moment
La soif du merveilleux influence nombre de chrétiens
catholiques dans leur manière de vivre leur foi à cause des
soucis de délivrance, de prospérité,
d'épanouissement, etc. qu'ils portent. Cela justifie les choix qu'ils
opèrent parmi les diverses pratiques religieuses qu'offrent leur
religion ou les NMR, au point que certaines options, très peu
recommandables qu'ils font comme la course aux miracles, mettent souvent en
doute la crédibilité de leur foi. C'est ce qui explique parfois
la désertion des églises certains jours de messe, alors qu'au
moment des messes de guérison ou des prières de Jéricho,
les églises sont remplies. Le berger (R2) explique la situation :
« Vous allez constater que quand il y a
Jéricho ou prière de guérison quelque part, la foule est
tellement immense que l'Église se remplit. Si l'Église se
remplissait à un tiers avant, quand il y a Jéricho ou
prière de guérison, elle se remplit à plus de dix tiers,
c'est-à-dire dix fois plus, à telle enseigne qu'il n'y plus de
place pour passer : la cour, les alentours, tout cela est envahi.
Qu'est-ce qu'ils cherchent ceux-là ? - Le merveilleux. Ils n'ont pas la
foi. La foi n'existe pas en eux...Ils viennent remplir l'Église. On fait
les sept jours de prière. Il y en a qui sont guéris et d'autres
non. Or le Seigneur guérit tout le monde. Mais les prédicateurs
qui font des révélations ne peuvent pas révéler les
signes opérés par Dieu dans la vie de tout le
monde... »
Photo 5 :
Prière des fidèles au cours d'un
Jéricho
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou5.png)
Source : Cliché CAPO, 2017
Il ressort que l'attachement à certains principes de
l'Eglise tombe en désuétude parce que les fidèles font
plus preuve d'un intérêt personnel selon qu'ils recherchent un
avantage particulier. Alors les services de l'Eglise sont asservis pour des
buts bien précis, détournés de leurs objectifs premiers.
Par exemple, la messe dominicale est desservie au profit des messes de
guérison auxquelles assistent 91,82% des enquêtés ;
cela est dû au fait qu'ils sont convaincus que les messes ordinaires ne
sont pas destinées à produire des miracles contrairement aux
prières de Jéricho ou prières de délivrance. En
effet, tandis que 15,45% des enquêtés vont à la messe
dominicale pour trouver la protection de Dieu, 53,64% pensent qu'on peut
l'obtenir en assistant aux messes de guérison ou au Jéricho. Et
variablement, il existe d'autres motivations qui poussent les fidèles
catholiques à aimer ou à accorder plus d'importance à ces
messes : 84,54% recherchent la guérison ou la délivrance,
62,73% attendent des miracles, et 40% espèrent que Dieu leur procure la
prospérité.
Il est à noter par là que ces soifs que la
liturgie officielle ne satisfait pas totalement rappellent que la doctrine
catholique s'inscrit dans une sorte de rigidité contre
l'actualité, contre la tendance du moment aux fins de préserver
son identité dans la tempête pentecôtiste qui souffle sur le
monde. Néanmoins, comme le savent plusieurs autorités
ecclésiastiques, les nouvelles pratiques religieuses populaires
suggèrent implicitement de revoir les modèles classiques de la
liturgie du samedi soir (pour la messe anticipée) et du dimanche (pour
la messe dominicale), qui demeurent souvent étrangers à la
situation de la vie quotidienne. A ce sujet, le cardinal Danneels (2008, p. 8)
paraît encore explicite lorsqu'il signale un enrichissement possible de
la liturgie par les nouvelles pratiques de religiosité populaire :
« La religion populaire est naturellement proche de la vie. Elle n'a
pas à être "rapprochée de la vie" comme c'est le cas de la
liturgie, dite "savante". Elle imprègne la vie même, le coeur et
le sentiment, les mains et les pieds... Elle résout le problème
en refusant de s'engouffrer dans une liturgie ennuyeuse, rugueuse ou
"épurée"... »
Alors, le décalage qui se dégage entre l'offre
de l'Eglise catholique et la demande des fidèles fait peu ou prou
l'objet d'attention particulière des évêques et des
prêtres qui tentent à leur manière de concilier les
nouvelles pratiques religieuses et la liturgie. Le souci est d'adapter la
liturgie officielle aux circonstances de la vie de sorte que les
célébrations comblent les attentes des fidèles. A cet
effet, le Directoire (n°58) précise que
« La liturgie et la piété populaire sont deux
expressions authentiques, quoique non équivalentes, du culte
chrétien. De fait, la Constitution sur la sainte Liturgie montre bien
qu'au lieu de vouloir les opposer ou de considérer qu'ils sont deux
éléments interchangeables, il convient plutôt de les
harmoniser... La piété populaire, avec ses valeurs symboliques et
expressives, est en mesure d'aider la Liturgie à réussir son
travail d'inculturation, et elle peut aussi lui procurer des
éléments stimulants en vue d'accroître d'une manière
efficace son dynamisme et sa créativité. »
Ces mesures vont favoriser, dans l'esprit du Concile Vatican
II, d'une part l'institutionnalisation des messes de guérison, des
veillées d'évangélisation et d'autre part la promotion des
mouvements charismatiques catholiques.
3.4. Messe de guérison et
Mouvements charismatiques catholiques
Il n'est plus à démontrer que le peuple a soif
de signes merveilleux, de miracles, de guérison, de
prospérité pour se sentir à l'abri de
l'insécurité spirituelle. La nécessité de valoriser
et de pratiquer le ministère de la guérison s'impose donc dans
l'Église. C'est la réponse à une telle urgence qui a
amené les autorités à instituer sur des paroisses des
messes de guérison et des prières de Jéricho, des
veillées d'évangélisation et à donner aux
mouvements charismatiques l'approbation de s'installer et d'animer la vie
paroissiale.
3.4.1. La messe de
guérison et les veillées d'évangélisation
Les aspirations des fidèles catholiques
recensées font état de plusieurs manquements qu'ils
souhaiteraient voir régler par leur Eglise. Entre autres, nous pouvons
signaler : la disponibilité de beaucoup de prêtres (surtout
de prêtres exorcistes) pour les écouter et les assister tant
spirituellement que matériellement, l'organisation des études
bibliques pouvant les aider à mieux comprendre la parole de Dieu, la
formation des fidèles en vue de mieux vivre leur foi et de ne plus
chercher des solutions hors de l'Eglise, la solidarité, etc.
Face à toutes ces préoccupations, les
autorités de l'Eglise ne sont pas restées sans initiatives.
Seulement, il y a des pesanteurs qui annihilent parfois certaines mesures. Le
nombre pléthorique que font les catholiques rend difficile la
disponibilité des prêtres pour recevoir et écouter chaque
fidèle. Dans cette optique, pour contourner les longues files d'attente
de ceux qui cherchent à voir coûte que coûte le prêtre
pour une bénédiction ou pour une prière, la coutume s'est
établie sur les paroisses de Cotonou de célébrer des
messes de guérison et de délivrance, qui mobilisent beaucoup de
fidèles comme le montre la photo 5. Ladite image présente d'une
part l'intérieur d'une église rempli de fidèles et d'autre
part sa façade occupée par ceux qui n'ont trouvé au cours
d'une messe de guérison.
Photo 6 :
Planche : L'intérieur et la façade de la
paroisse Sainte Rita envahis par des fidèles au cours de la messe de
guérison
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou6.png)
Source : Cliché CAPO, 2017
Ces messes se déroulent dans la journée, le plus
souvent, entre 12h45 ou 13h et 14h30, et les jours varient d'une paroisse
à une autre. Mais beaucoup choisissent le vendredi en
référence au jour de la passion de Jésus Christ. Comme il
a été dit plus haut, bien que ces messes suivent la liturgie
habituelle, elles sont fusionnées avec les nouvelles pratiques
religieuses. En effet, au cours des célébrations, que le
prêtre soit exorciste ou non, le peuple de Dieu réuni fait le
chemin de croix, loue longuement Dieu, chante et danse, les textes bibliques
sont lus, suivis de l'homélie du prêtre célébrant,
de la procession du Saint Sacrement et d'intenses prières
d'intercession, qui sont assurées soit par le prêtre, soit par un
laïc d'un mouvement charismatique. Au grand bonheur des fidèles,
des signes se réalisent : transe, délivrance des cas de
possession, guérison d'une quelconque infirmité, etc. Ensuite le
prêtre procède à la bénédiction de la foule
(hommes, femmes, enfants) et des objets de piété (eau,
huile, sel, médailles, chapelets, crucifix, images, etc.).
Photo 7 :
L'intérieur de l'église au cours de la messe de
guérison
![](Enjeux-des-nouvelles-pratiques-religieuses-dans-lglise-catholique-romaine--Cotonou7.png)
Source : Cliché CAPO, 2017
Il y a aussi des veillées d'adoration et
d'évangélisation qui se déroulent une fois par mois et ce,
le premier vendredi de chaque mois jusqu'à l'aube du samedi. Au cours de
ces veillées, le programme prévoit souvent des enseignements, des
louanges, des prières et la messe. L'opportunité est offerte aux
fidèles de poser des questions sur la thématique de
l'enseignement reçu. Cela fonctionne comme si les autorités
tentent de répondre aux critiques des NMR à l'endroit de l'Eglise
catholique selon lesquelles elle cache aux fidèles des "choses". Alors
les prêtres insistent que des questions soient posées de sorte que
progressivement nul ne soit ignorant sur un aspect de la doctrine catholique ni
sur la Bible. Tous reconnaissent que le temps d'une homélie pendant les
messes du dimanche ne suffit pas pour régler certaines grandes
questions.
En somme, ces dispositions répondent un tant soit peu
aux préoccupations des fidèles qui, au coeur de la tourmente
existentielle, n'hésitent pas à exploiter la diversité des
recours que leur offre le monde d'aujourd'hui et beaucoup sont satisfaits.
Néanmoins, des cas marginaux existent toujours ; ils sont souvent
gérés par des groupes de prières ou mouvements
charismatiques.
3.4.2. Les mouvements de
prière charismatiques
3.4.2.1. Un aperçu
sur les mouvements charismatiques paroissiaux
La vie paroissiale dans l'Eglise catholique est animée
par des groupes, associations, mouvements et communautés aux multiples
fonctions, étant entendu qu'être catholique c'est être
membre d'une famille. Au sein donc de cette famille, il est conseillé
qu'en fonction de ses aspirations, chacun puisse intégrer un groupe pour
vivre et approfondir sa foi, se sentir en famille, partager ses
expériences avec les autres chrétiens, dénommés
frères ou soeurs, comme les premiers chrétiens aux lendemains de
la pentecôte. C'est ainsi que 70% des enquêtés sont membres
d'un groupe et 30% sont sans appartenance. Selon la spiritualité
reconnue à chaque groupe ou association, quatre catégories se
sont dégagés d'après notre enquête : groupe de
service (11,82%), groupe d'action catholique (9,09%), groupe de prière
(15,45%) et groupe de prière charismatique (33,64%).
Les groupes ou mouvements charismatiques enregistrent plus
d'adhésions que les autres groupes. Cette prédilection dont ils
jouissent de la part de la population (catholique et autre) découle des
charismes qui leur sont reconnus. Les promesses qui ont été
faites par Jésus à ses apôtres et à ceux qui auront
cru en sa parole ne sont pas inhérentes seulement à une frange de
croyants, mais à tous. Ainsi ces mouvements font l'expérience de
l'exercice des charismes de guérison, de miracles, promeuvent l'esprit
de groupe, de solidarité, de fraternité et cultivent des valeurs
qui leur permettent de répondre aux questions quotidiennes des hommes et
des femmes.
3.4.2.2. Les
caractéristiques des mouvements charismatiques
Les mouvements charismatiques tentent de renouveler
l'Église catholique, mais ne sont guère désireux de faire
scission, de fonder de nouvelles structures ecclésiales et demeurent
fidèles à l'Église. Leurs membres sont
caractérisés par une assiduité à la messe et
reçoivent les sacrements, puis ils encouragent les membres qui ne sont
pas en règle vis-à-vis de l'Eglise à régulariser
leur situation (mariage, réadmission aux sacrements). Ce sont en
général des membres actifs des communautés paroissiales
qui oeuvrent au sein du diocèse et qui sont très impliqués
dans la participation active à la vie de leurs paroisses. Ils se
réunissent fréquemment de façon hebdomadaire pour les
prières, les séances de formation et d'étude biblique,
etc. Ils pratiquent une lecture assidue et méditative de la Bible, sont
particulièrement attachés à certaines dévotions
comme l'Adoration du Saint Sacrement et la prière mariale, etc. Ces
mouvements, sur chaque paroisse, sont dirigés par un premier responsable
parfois appelé berger et un noyau qui l'entoure dont les membres sont
élus. Sur le plan national, on note la même structure : le
noyau ou le bureau est composé de membres en provenance des paroisses.
Les prêtres ne sont pas membres, mais ils participent parfois aux
activités de ces groupes, soit en qualité de formateur, de
confesseur, soit pour célébrer l'Eucharistie, au cours d'une
réunion ou d'une retraite.
Le déroulement d'une réunion charismatique
diffère selon les groupes, mais les moments essentiels, centraux sont
les mêmes. Elle peut commencer par la prière de louange
initiée par un membre du bureau ou autre et reprise par les membres. Une
ou plusieurs lectures bibliques ponctuent la réunion qui aboutit
fréquemment à une prière d'intercession. Nonobstant ces
éléments fondateurs communs qui constituent comme le canevas des
réunions, la caractéristique essentielle de la prière
charismatique est sa spontanéité. On intervient quand on le
désire, on se sert des paroles de la vie quotidienne, on recourt
à des passages bibliques selon son inspiration et son discernement. En
plus de la louange et la lecture ou la récitation des textes bibliques,
l'assemblée de prière charismatique donne une large place aux
dons de l'Esprit Saint qui constituent les signes distinctifs de leur pratique
religieuse. Inspirés par l'exemple des apôtres, de nombreux
participants de l'assemblée charismatique s'expriment dans des langues
qui ne font partie d'aucune de celles connues. La glossolalie ou le don des
langues vise l'édification de la communauté. Mais le plus souvent
le défaut d'interprétation de ces paroles constitue le point de
désaccord entre certains prêtres et les responsables des
mouvements charismatiques, parce que cela les assimile aux groupes
évangéliques et pentecôtistes.
En substance leur mission consiste à aider
à la dévotion à l'Esprit Saint, diffuser la doctrine
catholique pour son approfondissement chez les fidèles et le
renforcement de la foi, ranimer la ferveur catholique, contrecarrer par la
sensibilisation les influences des NMR et des mouvements
ésotériques sur les fidèles catholiques, encourager
à vivre véritablement la messe au quotidien si possible, inviter
les fidèles à la pénitence et au sacrement de
réconciliation, encourager les fidèles à utiliser les
sacramentaux pour se libérer des pratiques occultes, redonner de
nouvelles valeurs à la jeunesse et la sensibiliser contre le vent
libertaire qui souffle sur elle, aider les catholiques à ne plus avoir
honte de porter leur croix, les médailles, etc. Ces différents
objectifs visés s'expriment concrètement à travers
diverses activités qu'ils mènent sur les paroisses.
3.4.2.3. Les
activités des mouvements charismatiques
Toutes les activités des groupes de prière
charismatiques ont pour finalité l'épanouissement tant physique
que spirituel du fidèle et de toute autre personne.
- Assemblées de
prière
Les mouvements charismatiques sont reconnus pour la
fréquence de leur prière en communauté chaque semaine. Ils
intercèdent pour eux-mêmes, pour l'Eglise, pour les
autorités, pour le monde entier. Souvent les assemblées de
prière sont des occasions de l'expérimentation de la
miséricorde de Dieu car des signes14(*) se réalisent au sein du peuple : il
arrive que des délivrances s'opèrent, des malades
guérissent, etc.
- Prière de
délivrance
L'un des problèmes majeurs de beaucoup de
chrétiens catholiques, c'est la lutte contre les mauvais esprits, les
attaques des sorciers, la possession démoniaque, etc. A défaut de
trouver un prêtre exorciste, ils sollicitent les groupes de prière
charismatiques. C'est ainsi que des séances de prière de
délivrance sont organisées par les membres avisés de ces
groupes. Et beaucoup de fidèles font l'expérience de la
délivrance : ils obtiennent le soulagement de leurs maux physiques
et spirituels, parfois de façon spectaculaire.
- Ecoute et Accompagnement
spirituel
Lorsque les fidèles n'arrivent pas à rencontrer
un prêtre pour lui exposer leurs problèmes, ils s'adressent aux
responsables des groupes de prière charismatiques. Ceux-ci les
écoutent attentivement, prient avec eux en leur montrant quelques
astuces de prière pour mener le combat contre le mal. Mais si le mal
nécessite plus de temps et de persévérance dans la
prière, un accompagnement spirituel se déclenche et
l'accompagnateur et l'accompagné passent plus de temps à prier
sur une longue période jusqu'à ce que l'objectif visé ne
soit atteint ou le résultat attendu ne soit obtenu. De tels services
rendus aux fidèles en difficulté renforcent leur croissance
spirituelle, leur sanctification et aussi leur réussite au plan
socio-économique.
- Campagne d'évangélisation et
Jéricho
Parfois en accord avec le curé de leur paroisse, ou
selon leur programme d'activités annuel, les groupes charismatiques
organisent des campagnes d'évangélisation, soit sur une paroisse,
soit sur une place publique du quartier, soit encore au stade de
l'Amitié. Ces campagnes drainent du monde. Il en est de même pour
les Jéricho. Les populations viennent certes prier, mais surtout elles
espèrent un miracle de Dieu, une guérison, etc.
- Enseignements
A travers des retraites spirituelles15(*), des récollections ou
des sessions de formation, les mouvements charismatiques proposent aux
fidèles des cheminements qui les aident à approfondir leur foi
à travers des enseignements thématiques bien ciblés. Par
leur biais, beaucoup de chrétiens redécouvrent mieux la
vérité biblique et la doctrine de l'Eglise catholique ; ce
qui amène certains chrétiens à changer de vie et d'autres
à prendre conscience de leur égarement et à revenir
à la foi catholique.
- Solidarité et assistance
matérielle
Le manque de soutien matériel ou de solidarité,
au coeur des difficultés de la vie, avait poussé nombre de
catholiques à quitter l'Eglise. Alors les initiatives des mouvements
charismatiques consistent à assister les malades, à faire des
dons aux nécessiteux de sorte que nul ne se sente seul et
abandonné. A travers les relations qui s'établissent entre
différents groupes, ils tentent de s'entraider dans la lutte contre le
chômage.
3.4.2.4. Quelques exemples
de mouvements charismatiques
Il existe plusieurs groupes ou mouvements de prière
charismatiques au sein de l'Eglise catholique. En réalité, ce
sont eux les pionniers des nouvelles pratiques religieuses. Il s'agit entre
autres de: Renouveau charismatique catholique, Fiat, Cité de
l'Immaculée dite Awadjidjè kèdè, Fifaton,
Communauté Emmanuel, Feu nouveau, Amis de saint Michel,
Communauté Catholique Marie Mère de la foi audacieuse,
Evangélisation pour tous, Communauté Saint Augustin, etc.
On les retrouve sur les paroisses de Cotonou, voire du
Bénin. Mais leur répartition n'est pas égalitaire d'une
paroisse à une autre. Leur présence dépend plutôt du
besoin exprimé par les paroissiens, du désir d'expansion du
mouvement de la part des responsables ou de l'existence d'anciens membres en
nombre sans cesse croissant. Même si chaque groupe paroissial jouit d'une
certaine autonomie, les activités de masse s'organisent en synergie pour
plus d'efficacité et de résultats. De même les responsables
au sommet essaient d'avoir un oeil sur l'évolution de chaque groupe
paroissial afin d'apporter des appuis techniques si cela s'avère
nécessaire et de prévenir aussi les éventuels
dérapages. Car ils sont eux aussi sous la supervision des
autorités ecclésiastiques.
Somme toute, les aspirations des fidèles sont
énormes et, selon leurs différentes expériences,
l'instance de la messe dominicale seule ne suffit pas pour qu'ils obtiennent
satisfaction. Cette situation suscite plusieurs pratiques religieuses qui
évoluent en marge de la liturgie officielle, mais acceptées par
les autorités de l'Eglise catholique. Leur prégnance
légitime progressivement la place qui leur est faite dans certaines
célébrations eucharistiques, consacrées à la
guérison ou à la délivrance. L'indisponibilité en
nombre suffisant de prêtres, surtout exorcistes, laisse une marge de
manoeuvre aux mouvements charismatiques qui naissent pour accompagner
l'Eglise catholique dans sa mission. Leur feuille de route montre qu'ils
constituent une réponse à l'affaiblissement d'intensité de
la vie religieuse et qu'ils permettent à l'Eglise catholique de se
défendre autant que faire se peut contre l'attrait des NMR et des ordres
ésotériques. Ceci permet d'entrevoir les différents enjeux
qui peuvent sous-tendre les nouvelles pratiques religieuses.
CHAPITRE 5 : QUAND LES ENJEUX DETERMINENTLES NOUVELLES
PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE
La survie dans le champ religieux tient à la
capacité d'innovation des groupes religieux dans l'optique de satisfaire
les demandes exprimées ou les attentes des fidèles. A cet effet,
ils s'inscrivent dans une démarche de concurrence. Cependant certains
prêtres nient l'idée de concurrence dans laquelle se serait
engagée l'Eglise catholique et la situent plutôt au niveau des NMR
qui seraient déterminés à conquérir plus de monde.
Or telle n'est pas la position des évêques, car ils se sentent
très interpellés par la situation depuis des décennies.
C'est pour cela qu'au synode africain de 1994, ils avaient planché avec
lucidité sur la question de l'exode des catholiques vers les groupes
religieux. « Si aujourd'hui on constate une grande affluence vers les
nouveaux mouvements religieux de tous bords ou vers les Églises
africaines indépendantes, cela tient en partie au fait que les gens se
sentent mieux pris au sérieux jusque dans leur dimension
thérapeutique dans ces Églises et nouveaux mouvements religieux.
Il n'y a rien de plus évident dans les Évangiles que le
ministère de Jésus comme "guérisseur ". Il a guéri
les malades et à travers ces guérisons, il a manifesté
l'avènement du Règne de Dieu. En outre, la mission qu'il confie
à ses disciples, selon Saint Luc, est de "proclamer le Royaume de Dieu
et faire des guérisons" (Lc 9, 2). » (Sabuni Kitutu, 2011, p.
239)
Cette prise de conscience montre combien, en Afrique, l'Eglise
catholique est soucieuse de sa position dans le marché de la religion et
prend, en conséquence, des initiatives pour répondre aux
aspirations de ses fidèles. Quels sont alors les enjeux que
recèlent les nouvelles pratiques religieuses observables dans l'Eglise
catholique à Cotonou ?
4.1. Nouvelles pratiques
religieuses comme stratégie de freiner l'exode des fidèles
L'enjeu des nouvelles pratiques religieuses consiste à
soulager les fidèles souffrants, les délivrer de toute emprise
d'esprits maléfiques et les aider à mieux vivre leur foi afin de
ralentir leur exode vers les NMR.
4.1.1. Soulager la souffrance
des fidèles
Les nouvelles pratiques religieuses répondent à
un besoin fondamental des fidèles : soulager leur souffrance. De ce
fait, elles s'imposent comme une nécessité et tant que la douleur
ne trouve pas de solution adéquate les personnes souffrantes continuent
de multiplier les recours. C'est ainsi que parmi les enquêtés, il
y a plusieurs personnes qui recourent aux prêtres avec ou sans charisme
d'exorcisme, aux responsables des groupes de prière charismatiques et
certains sortent même du cadre de l'Eglise catholique pour consulter des
pasteurs, des guérisseurs ou des maîtres spirituels. Ce qui
rejoint l'inquiétude du nouvel archevêque de Cotonou, Monseigneur
Roger Houngbédji qui dit que « lors du [dernier synode
diocésain de Cotonou (1975-2015)], il est apparu que, malgré la
grande vitalité de notre Église, qui se manifeste par le nombre
important de baptêmes et de vocations, le manque d'approfondissement de
la foi demeure. Le syncrétisme religieux est très
prononcé. Beaucoup de catholiques croient encore à d'autres
divinités ou participent aux cultes d'autres
églises. »16(*)
Alors, l'autorisation des nouvelles pratiques religieuses dans
l'Eglise catholique apparaît comme un pas décisif pour porter
assistance aux fidèles souffrants. Cependant, d'après les propos
de l'archevêque, elles ne suffisent pas : il y a un travail capital
en amont qui reste à faire, c'est-à-dire
l'évangélisation en profondeur. Mais que peut l'homme en face de
la douleur, de la misère, de la maladie, etc. ?
La maladie, la possession et toutes sortes de
déconvenues survenues dans la vie sont pour les fidèles
attribuées aux forces démoniaques, alors que les
délivrances, les succès, les guérisons sont l'oeuvre de
Dieu tel que la Bible l'établit. Et Jésus est venu confirmer
cette thérapie divine par son ministère public pour asseoir chez
les fidèles la croyance à cette guérison religieuse
léguée à l'Eglise. Alors l'impuissance de la
médecine biomédicale à traiter des maladies
provoquées, qui sont en général des maladies incurables,
aguerrit les fidèles à se tourner vers leur religion, recours
idéal pouvant apporter la solution souhaitée. Cette propension
qui se généralise révèle en outre que ce recours
devient pour certains un palliatif à la précarité
financière pour faire face aux coûts des soins médicaux.
Ceux dont le niveau financier est relativement faible privilégient les
instances des nouvelles pratiques religieuses en vue de recevoir gratuitement
la guérison divine et avec l'assurance du non retour desdits maux, car
la foi renforce la conviction que la guérison divine est totale et
définitive.
Et comme la guérison divine est globale, en touchant
toutes les dimensions de l'être humain, de plus en plus les
fidèles attendent de Dieu une délivrance totale, qui mettrait fin
à tous les déboires de la vie: les problèmes conjugaux,
les difficultés affectives, la misère, le chômage, la peur
ambiante due à la sorcellerie, à l'envoûtement, à la
jalousie, etc. Pour eux, Jésus a fait mieux que tout cela, alors
pourquoi l'Eglise catholique ne permettrait-elle pas à ses
fidèles de jouir de ces miracles ? Plutôt que d'asseoir toute
la doctrine sur la souffrance libératrice en imitation de Jésus
Christ comme serviteur souffrant, de mieux en mieux, avec les nouvelles
pratiques religieuses et l'obsession galopante de la peur des esprits
maléfiques, de la sorcellerie, les fidèles croient en un
Jésus guérisseur, libérateur et sauveur qui a vaincu la
mort et qui peut les délivrer de toutes formes de possession.
4.1.2. Délivrer les
personnes qui sont sous l'emprise des esprits maléfiques
Dans leur quête quotidienne de vaincre la maladie
polymorphe, les fidèles s'aperçoivent que la lutte ne se limite
pas seulement aux maux physiques et psychologiques. Il y a des puissances
sataniques, des forces maléfiques qu'il faut combattre. C'est ainsi que
parfois aux guérisons visant à rétablir un
équilibre se rajoutent les délivrances d'esprits diaboliques
venus posséder l'individu malade. Pour le chrétien, cela n'est
possible que grâce à la puissance de Dieu. Dès lors, on
comprend pourquoi dans l'Eglise catholique les fidèles s'acharnent sur
les prêtres : ils croient au geste de ces derniers qui consiste
à leur imposer les mains et à prier sur eux pour faire jaillir
cette puissance de Dieu.
Les pratiques de religiosité populaire viennent apaiser
la tension chez nombre de fidèles d'autant plus que de nouvelles
perspectives de délivrance leur sont offertes, avec plus de
disponibilité des officiants car ce ministère est
désormais partagé avec des laïcs. En effet, en dehors de
l'exorcisme pratiqué par les prêtres mandatés par
l'évêque, au cours des assemblées de prière
charismatique ou Jéricho, les fidèles vivent des occasions de
délivrance. Sous leurs yeux une effervescence grandiose se produit lors
des transes qui s'emparent des malades possédés : perte de
contrôle de soi, agitation, culbute, paroles arrogantes et impertinentes,
etc. Ces manifestions sont souvent interprétées comme signe d'une
intervention bénéfique ou maléfique, et selon le cas la
suite de la prière détermine le vrai sens à donner. Mais
toujours est-il que la fin de telles séances de prière garantit
la guérison au possédé. En définitive, les
nouvelles pratiques religieuses se présentent comme des
opportunités où Dieu fait des clins d'oeil aux hommes en vue de
fortifier leur foi.
4.1.3. Aider les fidèles
à mieux vivre leur foi
Pour beaucoup de chrétiens catholiques, les nouvelles
pratiques religieuses sont nécessaires dans l'Eglise pour aider ceux qui
sont faibles dans la foi et qui souffrent. Elles constituent des occasions
qu'empruntera Dieu pour faire des miracles afin de soulager les hommes et de
les amener à croire davantage en lui. Car les hommes sont de plus en
plus gagnés par la tendance à croire plus aux signes qu'aux
doctrines ; ce qui les pousse à rechercher partout ces
signes-là qui les rassurent d'être dans le vrai, d'être avec
un Jésus-qui-sauve. C'est une foi qui devient plus personnelle, remplie
de subjectivité et de rationalité, et qui cesse d'être
dogmatique. Elle se fonde sur ce que Jésus est cru capable de faire. Et
si une église chrétienne enseigne un autre Jésus, pour
eux, elle est vite taxée de désuète : elle est
perçue comme ne pas se préoccuper des questions vitales des
fidèles.
Bien que le christianisme soit définie comme une
religion de salut où la guérison n'est pas l'objectif final, les
malades ou les éprouvés de l'Eglise catholique font de leur
guérison présente comme une fin en soi. C'est pourquoi Rosny E.
(1992, p. 42) fait remarquer qu'« Un "ministère de la
guérison" proprement dit, avec des rites liturgiques à l'appui,
comme il se pratique dans les Églises indépendantes,
connaît un regain de faveur... Le christianisme détient, en effet,
d'étonnantes promesses de guérison et un réel pouvoir. Il
est une religion qui a autant que les autres les capacités
d'intégrer la vie totale de ses fidèles... » Ce qui
paraît évident ici, c'est que ces nouvelles pratiques religieuses
offrent à l'Eglise catholique la possibilité de freiner l'exode
de ses fidèles et de ramener certains de ceux qui sont partis.
4.1.4. Freiner l'exode des
fidèles catholiques
De l'avis de la quasi-totalité des fidèles, ces
nouvelles pratiques viennent à propos pour endiguer les départs
vers d'autres Eglises en essayant d'assouvir les soifs des fidèles qui
souffrent. Beaucoup de fidèles regagnent espoir, reviennent dans
l'Eglise catholique, intègrent des groupes de prière, surtout
charismatiques, avec la ferme conviction de bénéficier de la
sollicitude de Dieu d'un jour à l'autre. Même si le salut
éternel interviendra après le passage dans l'au-delà,
celui du monde présent est garanti et consiste en « la
satisfaction des besoins fondamentaux, l'élimination
des maux du corps, la solidarité et enfin la prospérité
» (Monhidé, 2016, p. 200). Ainsi comme nous pouvons le constater,
la promotion des nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise catholique et
l'autorisation des mouvements charismatiques sont des mesures qui prouvent
l'option de l'Eglise catholique à valoriser les fidèles et
à soutenir qu'il n'y a point d'opposition entre la foi et la quête
de la prospérité, du mieux-être spirituel et social. De ce
fait, les fidèles peuvent être traités non plus comme de
simples participants aux cultes religieux, mais comme des partenaires qu'il
faut être en mesure de fidéliser par la qualité des
services qu'elle leur rend. Et les retombées peuvent être le
maintien de son hégémonie sur le marché de la religion et
le captage de rente.
4.2. Nouvelles pratiques
religieuses comme source de ressources financières
« Il n'est pas évident de rendre compte d'une
évidence », écrivait Amouzouvi D. (2005, p. 9), en
parlant du rapport entre la religion et le business qui est si évident
que, dans l'entendement des personnes, il serait inutile de lui consacrer une
recherche. En un mot, l'évidence de l'enjeu économique des
nouvelles pratiques religieuses n'est plus à démontrer.
Néanmoins, il sera analysé à travers toutes les
composantes des pratiques religieuses comme les demandes de
bénédiction, les exorcismes, les messes et les
pèlerinages.
4.2.1. Le maintien de
l'hégémonie de l'Eglise catholique
Le succès des nouvelles pratiques religieuses sur une
paroisse draine du monde, chrétien ou non, vers cette dernière,
les fidélise et fait parler du curé ou du groupe de prière
responsable de ces activités pastorales. Les témoignages de
guérison, de libération ou de prospérité sont de
nouveaux indicateurs de la vitalité de l'Eglise catholique en dehors des
nombreux baptêmes et de vocations, puisqu'ils redessinent un autre visage
de ladite institution. Du coup, elle pourra conserver son statut de religion
dominante dans la ville de Cotonou. Une telle hégémonie est
favorisée par la visibilité de certaines paroisses dont les
activités liées aux nouvelles pratiques religieuses sont
très développées. Il s'agit des paroisses comme Saint
Jean-Baptiste17(*), saint
Michel, sainte Rita, Sacré-Coeur d'Akpakpa, saints Pierre et Paul
d'Agla18(*)
étiquetée entre temps par les fidèles comme
« Chez Jesu agbonnon19(*) », sainte Thérèse de l'Enfant
Jésus de Godomey, saint François d'Assise de Fidjrossè.
Leur impact est si flagrant que d'autres prêtres s'engagent dans les
mêmes initiatives, comme nous l'avons notifié plus haut, parce que
ces prestations procurent des ressources insoupçonnées.
4.2.2. Les demandes de
bénédiction requièrent des honoraires
Ordinairement les demandes de bénédiction, sous
quelque forme que ce soit, ne nécessitent pas de payement de la part du
fidèle, ce qui permet à tout chrétien de pouvoir
bénéficier de ces services. Mais la multiplicité des
demandes de bénédiction visant la purification des habitations et
les nouvelles habitudes de la monétarisation des services de tout genre
instaurent dans les esprits le poids de rendre le don reçu, la gratitude
verbale étant estimée insuffisante. Alors ce contre-don acquiert
peu à peu une valeur numéraire. De ce fait, sans que l'homme de
Dieu ne réclame d'honoraire, quand il est déplacé de la
paroisse pour une demeure, la délicatesse amène les uns et les
autres à faire une offrande. Selon la possibilité de chacun,
cette offrande peut être en nature ou en espèce : des vivres,
des gadgets de valeur, des billets de banque. Dans ce dernier cas, un minimum
de 5.000f CFA est requis pour assurer la carburation du prêtre.
Dès qu'une messe est associée à cette
bénédiction, l'honoraire passe à 10.000f CFA. Une telle
sollicitude, voulue exempte de tout frais, sur certaines paroisses, a
commencé par se vicier et fait l'objet d'une tarification payable au
secrétariat des paroisses. Mais dans le cas général, le
soin est souvent laissé au fidèle d'exprimer sa
générosité. Alors, les gestes vont souvent au-delà
des attentes comme celui d'un nanti qui veut rendre grâce pour une
séance d'exorcisme réussi.
4.2.3. Les réussites des
délivrances font parfois pleuvoir des billets de banque
Tout comme les demandes de bénédiction, les
séances d'exorcisme ou les prières de délivrance ne
connaissent pas de facturation. Mais c'est souvent la joie débordante du
fidèle délivré après tant de sacrifices consentis
ailleurs ou après tant d'années de souffrance endurée qui
le pousse à une action de grâce. Il peut donc commander une messe
et les frais de cette messe varient du prix habituel, 1.200f CFA, à un
seuil où peut aller la capacité de l'intéressé. La
même joie peut se manifester par une reconnaissance à
témoigner au serviteur de Dieu. Surtout quand il s'agit d'un homme
riche, enclin à la générosité, des sommes
colossales dans l'ordre de million ou des voitures de luxe sont offertes, ou
encore ce sont des activités de la paroisse qui sont financées
à coup de millions. Les actes de générosité
analogues se posent au cours des messes de guérison et de
délivrance où l'animateur principal invite les fidèles
à répondre à la miséricorde de Dieu par des
quêtes d'action de grâce.
4.2.4. Les messes de grands
rassemblements ne se passent pas de quêtes
Les prières de Jéricho, les campagnes
d'évangélisation et les assemblées de prière sont
des activités propres aux mouvements charismatiques. Quant à la
messe de guérison et de délivrance, elle relève plus des
initiatives des prêtres charismatiques ou exorcistes. Quelles qu'elles
soient, ces pratiques religieuses ont pour spécificité de drainer
du monde. A ce titre, en dehors de l'enjeu thérapeutique qui les
caractérise, elles deviennent des instruments de captage de rente et, de
ce fait, certaines d'entre elles vont faire l'objet d'appropriation par les
prêtres et les conseils paroissiaux.
Ce fut le cas des prières de Jéricho qui
étaient, il y a encore quelques années, l'arme
d'évangélisation et de combat du Renouveau Charismatique
Catholique. Vu qu'elles enregistraient une forte participation de la part des
membres du groupe, des fidèles de la paroisse et des non catholiques,
elles sont récupérées par les autorités
paroissiales, qui désormais l'organisent pour toute la
communauté.
Il est aisé de noter que les ressources
financières constituent le soubassement d'une telle prise en main,
étant donné qu'au dire des différents acteurs
interrogés, les fonds collectés sont mis à contribution
pour les travaux des paroisses. Nul ne s'empêche donc de voir qu'au cours
des prières de Jéricho les recettes des paroisses montent
considérablement. L'enquêté (R7) déclare :
« Regardez ce qui se passe sur les paroisses.
Regardez l'affluence et regardez ceux qui viennent. Il est clair qu'à
cette prière, les gens donnent plus parce qu'ils sont plus nombreux,
même si ce ne sont que des jetons. Je pourrai même dire qu'il y a
une certaine motivation de l'argent derrière ces organisations, il y a
un grossissement des recettes paroissiales. Même si nous n'avons pas
le point des quêtes, ce que nous observons nous montre qu'il y a quelque
chose qui motive ça. Et là, ce sont les ressources
financières. »
Cette motivation influe sur les prédications pendant
les Jéricho. La thématique des enseignements, les
témoignages, la louange, la musique, tout est minutieusement
taillé sur mesure: les animateurs insistent davantage sur la
bonté de Dieu, sur ses merveilles, sur ses prévenances, sur son
amour indéfectible, etc. afin de susciter la
générosité des fidèles. L'enquêté (R4)
illustre le contexte :
« C'est pour que les gens donnent beaucoup que le
prédicateur tient des propos comme : « Si vous avez des
billets, apportez-les pour rendre grâce ! Apportez tout ce que vous avez
dans votre poche et déposez ça dans le panier ! Qu'avez-vous
que vous n'ayez reçu ! » Parfois quand la quête est
maigre, le prédicateur insiste encore : « Avec tout ce
que Dieu vous a fait, c'est ça là que vous avez donné
comme quête ? Complétons encore pour voir la gloire de Dieu. Dieu
vous a déjà fait des merveilles, donnez pour le mettre à
l'épreuve. » Bon, on se lève et on donne, parfois je
crois que c'est pour faire plaisir au curé. »
Outre les prières de Jéricho, les messes de
guérison et de délivrance mobilisent aussi les fidèles en
quête de solution à leurs problèmes. Leur succès
financier amène d'autres prêtres à initier les mêmes
pratiques religieuses. Etant donné que les fidèles qui assistent
à ces messes et à ces prières, viennent de plusieurs
paroisses d'un même doyenné20(*) ou des vicariats voisins, alors en organisant ces
messes, chaque prêtre essaie de maintenir ses fidèles. Ce faisant,
il capte une partie des recettes qui devraient aller au confrère voisin
qui connaît du succès dans ce ministère. Ainsi son attitude
cache-t-elle une réaction contre l'exode inter-paroissial des
fidèles, dont la conséquence est la désertion des messes
dominicales et par ricochet un transfert de ressources financières
importantes vers les autres paroisses.
4.2.5. Les pèlerinages
offrent des occasions de collecte de fonds
L'organisation des pèlerinages annuels de
l'archidiocèse qui se déroulent soit à Allada, soit
à Dassa est aussi une source de revenus que voile le sentiment d'aller
se ressourcer, prier, rencontrer son Dieu. Chaque pèlerin, comme
d'habitude, prend en charge son transport et sa restauration durant son
séjour au sanctuaire. Mais une somme de 500f CFA ou 1.000f CFA lui est
réclamée pour les frais généraux couvrant la
fabrication des badges, la location des chaises et bâches, la
sonorisation, l'entretien des toilettes et des cabinets d'aisance, etc. De
cette somme est défalquée une partie qui est donnée au
recteur ou directeur du centre d'accueil en fonction du nombre de participants.
A cela viendront s'ajouter les quêtes faites aux différentes
célébrations eucharistiques.
Les sites reçoivent de pèlerins tout au long de
l'année et les différents groupes et associations de
l'archidiocèse organisent leur voyage selon un calendrier
approprié. En outre, il y a un pèlerinage de grande envergure dit
national. Il se tient à Dassa et réunit au mois d'août tous
les diocèses du territoire national. C'est aussi un pèlerinage de
renommée internationale qui enregistre la participation des
ressortissants des pays de la sous-région. La liesse emplit le site,
l'effervescence se décuple et les actions de grâce sont
interminables pour les merveilles accomplies par Dieu pour tel ou tel
fidèle.
4.2.6. Le commerce d'objets de
piété et la littérature spirituelle fleurissent
Le développement des nouvelles pratiques religieuse sa
fait accroître la consommation des biens spirituels chez les
fidèles. Sur ce, deux pratiques, aussi vieilles que la religion,
connaissent un essor florissant : le commerce d'objets de
piété et la littérature spirituelle. Il est devenu
fréquent chez le fidèle catholique le port de croix, de
médaille, l'usage de chapelet ou d'images pieuses pour la prière,
l'érection chez soi d'un oratoire ou d'une petite grotte mariale ou
dédiée à un saint, etc. La proximité du Nigeria
facilite l'acquisition à des prix raisonnables de ces objets de
piété, qui venaient habituellement de l'Europe ou de la Chine. Ce
commerce a une portée fortement économique et beaucoup de
personnes s'y investissent: des fidèles laïcs, des religieuses ou
des structures ecclésiales de l'archidiocèse. A la librairie
Notre Dame, dans les boutiques sises sur les paroisses ou dans les rues de
Cotonou, la vente des milliers d'articles de prière fait brasser aux
promoteurs des liasses de billets de banque. Tout un discours mélioratif
accompagne ces objets de piété, le plus souvent
recommandés par les prêtres ou les responsables de mouvements
charismatiques pour que ceux qui désirent se protéger contre les
esprits maléfiques ou chasser le diable en fassent usage.
Le même souci d'aider les fidèles à
préserver leur santé tant physiologique que spirituelle favorise
une production littéraire très diversifiée. Elle est
axée sur une thématique générale dont sont friands
les fidèles comme : la sorcellerie, les forces du mal, les oeuvres
de Satan, les esprits incubes et succubes, les moyens pour vaincre le Mal,
Jésus chemin, vérité et vie, la victoire par le
précieux sang de Jésus, les neuvaines de guérison ou de
libération, etc. Ces ouvrages, publiés par des prêtres ou
des laïcs, sont vivement conseillés aux fidèles et sont
souvent à la portée du grand nombre : 500f, 1.000f, 2.000f,
3.000f CFA, etc. Chacun s'en procure selon ses besoins et ses moyens
financiers. A titre illustratif, voici quelques ouvrages accompagnés de
leurs prix sur le marché : Prier avec Marie dans les moments
difficiles (500f), La Neuvaine de protection spirituelle et de
libération de Jean Pliya (800f), Apprendre à prier pour
la guérison du père Marcus Y. E. SABA (1.500f), Pratique
du combat spirituel de l'Abbé Kisito Vodounon (1.500f), Brisons
les chaînes du Diable de Maxime Biaou (1.300f), Le
chrétien et les attaques occultes d'Augustin M. R.
Guèdègbé (2.000f), Ma délivrance des oeuvres
des sorciers de Georges Koumadoli (2.500f), Prières pour se
libérer de l'Anti-Christ de l'Abbé Rock Aniambossou
(3.000f), De la mort spirituelle à la vie abondante en Jésus
Christ de Marcel Kakpo (2.500 f),L'exorcisme face au défi de la
sorcellerie du père Pamphile Fanou (3.500f), etc.
Somme toute, il convient de dire que les nouvelles pratiques
religieuses offrent à beaucoup de personnes l'opportunité de
développer une capacité et d'exercer un pouvoir, un charisme en
vue du bien de tous.
4.3. Nouvelles pratiques
religieuses comme opportunité d'exercice de charisme
L'émergence des nouvelles pratiques religieuses dans
l'Eglise catholique a suscité l'exercice de charisme chez des laïcs
en vue de faire face aux aspirations de nombreux fidèles. Pour Weber M.
(1971, p. 320), le charisme est « la qualité extraordinaire
(...) d'un personnage, qui est, pour ainsi dire, doué de force ou de
caractères surnaturels ou surhumains ou tout au moins en dehors de la
vie quotidienne, inaccessibles au commun des mortels ; ou encore qui est
considéré comme envoyé par Dieu ou comme un exemple, et en
conséquence considéré comme un "chef". » En
effet, la présence de ces nouveaux « chefs »
charismatiques dans le corps de l'Eglise catholique passait pour inhabituelle
et soulevait des inquiétudes autour de la question du pouvoir et du
leadership. Il ne faut pas s'en douter, les prérogatives propres au
ministère du clergé volent en éclat devant la
légitimité qu'acquièrent les laïcs dans la mise en
oeuvre des multiples charismes dont ils font l'expérience. De
même, lorsque sans autorisation, des prêtres exercent des charismes
d'exorcisme et de guérison par la prière, ils se trouvent parfois
en posture de non obéissance à l'ordinaire des lieux,
c'est-à-dire l'évêque. Autant d'interactions qui
s'établissent entre plusieurs acteurs de l'Eglise catholique autour des
nouvelles pratiques religieuses.
4.3.1. La
désobéissance à l'autorité épiscopale
Il est souvent constaté qu'en dehors des trois
prêtres exorcistes mandatés par l'archevêque, d'autres
prêtres se reconnaissant détenteurs de charismes exceptionnels se
mettent à exercer le ministère pour répondre à la
demande qui se fait de plus en plus forte. Il est évident que si chaque
prêtre devait envoyer ceux qui ont des problèmes ou ceux qui
demandent l'assistance de l'Église à ces trois prêtres, il
serait vraiment difficile de satisfaire la demande. Alors faut-il se taire
devant les souffrances des fidèles et les voir peut-être
partir ailleurs, sans avoir l'assurance du salut de leur âme ? Aussi
lorsqu'on sait ce que représente financièrement un fidèle
gagné pour l'Eglise, il est maladroit de ne vouloir rien tenter pour son
maintien. Pour ce faire, l'implication de ces prêtres non
autorisés dans le ministère, même pour une noble cause,
semble une désobéissance21(*) à l'endroit de l'autorité. C'est ainsi
que plusieurs prêtres deviennent des délivreurs pour leur
communauté. La modestie de certains succès ne dérange pas
l'évêque. Mais lorsque des affluences tumultueuses se dirigent
chaque semaine vers la paroisse du délivreur dont la
réussite fait écho dans la ville et dans tout
l'archidiocèse, la mesure répressive s'applique aussitôt:
soit le prêtre est mis en demeure de stopper ses activités, soit
il est muté ailleurs sur une autre paroisse avec interdiction formelle
d'exercer ou bien encore il est mis sous tutelle d'un doyen. Parfois, cette
mesure procure implicitement aux autres confrères une quiétude
sans rivalité dans leur fief paroissial.
4.3.2. La concurrence tacite
entre les prêtres
Le succès avéré des prêtres qui
exercent le charisme de guérison et de délivrance soulève
une rivalité mitigée dans le corps presbytéral d'autant
plus qu'il leur confère une certaine notoriété qui les
suit partout. La quête d'un tel prestige que certains prêtres
souhaitent avoir, ne serait-ce qu'auprès de leurs paroissiens, fonde
aussi les mêmes initiatives qu'ils prennent, étant donné
que ne pas être en mesure de satisfaire les attentes des paroissiens peut
se traduire valablement comme une incompétence. Alors chaque
prêtre fait tout pour que ses paroissiens l'aiment, que tout le monde
voie qu'il remplit aussi son église comme tel ou tel confrère, de
sorte qu'il fasse bonne impression auprès du Monseigneur, etc.,
voilà autant de motivations qui aiguillent la pastorale de plusieurs
d'entre eux.
Dans ce même ordre d'idée, l'affectation d'un
prêtre sur une paroisse où était curé un
prêtre charismatique ou exorciste aimé de tous les fidèles
parce qu'il a le pouvoir de chasser le diable, pose aussi problème. Le
nouveau curé remue ciel et terre pour se faire un nom, sans quoi il
serait l'ombre de lui-même. Les nouvelles pratiques religieuses
deviennent un tremplin pour lui afin de rejoindre les paroissiens dans leurs
problèmes et leurs attentes. Ainsi pourra-t-il éviter la
désertion de la paroisse au profit de celles environnantes. Cette
situation va amener beaucoup de prêtres à organiser ces
prières, même s'il faut faire venir un prêtre exorciste ou
associer les responsables des mouvements charismatiques à cet effet.
4.3.3. La relation complexe
entre clergé et laïcat
L'exercice de charismes par les laïcs au coeur des
nouvelles pratiques religieuses fragilise sur certaines paroisses les relations
entre laïcs et prêtres. Cela est généralement dû
à des malentendus relatifs à la liturgie, à la
théologie ou au leadership. Sur ce, les prêtres estiment que les
laïcs ne sont pas assez outillés pour aborder certaines questions
d'ordre dogmatique, théologique, liturgique, etc. et qu'au cours de
leurs différentes prédications ils commettent
énormément de fautes doctrinaires. Aussi soulignent-ils que les
laïcs charismatiques cherchent à imiter les
évangéliques ou pentecôtistes. Selon eux, il leur incombe
le devoir de discerner et d'orienter le ministère des laïcs qui
font malheureusement montre d'orgueil et de suffisance. C'est ainsi qu'«
on observe, au fil du temps et des circonstances, des malaises et des tensions
qui s'installent de part et d'autre, et qui [débouchent] sur de graves
crises ; il arrive même que, face aux injonctions ou à une
tentative de mise au pas venant de l'autorité instituée, certains
groupes choisissent de s'installer dans la dissidence... » (Sabuni Kitutu,
2011, p. 297). Alors, l'insoumission vaut à ces groupes charismatiques,
dirigés par des laïcs, l'interdiction d'activités sur des
paroisses, tandis que les mêmes groupes, ailleurs, continuent d'exister
et de fonctionner.
Les prêtres déplorent aussi la liberté que
prennent certains laïcs charismatiques, pétris
d'expériences, qui commencent à officier chez eux ou dans des
cabinets hors de la paroisse. Il y en a qui prennent le nom de
mystiques et se disent mandatés par l'Esprit Saint ou par la Vierge
Marie pour aider ceux qui souffrent dans l'Eglise catholique ou dans le monde.
Cela pose un problème de gestion des pratiques de religiosité au
sein de l'Eglise catholique. Face à de telles situations, les
prêtres rappellent ces fidèles à l'ordre, parfois en vain.
Ces genres de dérapages, selon eux, ne sont pas loin de créer des
scissions et de provoquer des problèmes d'ordre spirituel difficilement
contrôlables. Car ils ne sauraient répondre des déconvenues
qui surviendraient au cours de ces activités se déroulant hors du
giron de l'Eglise catholique.
Du côté des laïcs, ils pensent souvent que
ces malentendus seraient dus au privilège que leur confèrent les
charismes qu'ils exercent dans la communauté, que n'ont peut-être
pas les prêtres, en dépit de leur sacerdoce. Néanmoins, ils
ne marchandent pas leur collaboration aux activités de leurs paroisses.
De ce fait, ils sont souvent associés au ministère des
prêtres. C'est ainsi que sur certaines paroisses, des mouvements
charismatiques prospèrent et la vie paroissiale s'épanouit. Les
manifestations collectives sont fréquemment organisées avec une
forte participation de la communauté. La variété des
groupes charismatiques crée aussi une compétition en leur propre
sein.
4.3.4. La compétition
entre différents mouvements charismatiques
S'il est vrai que l'exercice de charisme confère une
notoriété, il faut reconnaître qu'il engendre une
concurrence entre laïcs du même groupe ou des groupes
différents. Chacun cherche à prouver aux autres qu'il est plus
disposé à servir de canal à l'Esprit Saint, donc à
opérer des prodiges au cours des pratiques religieuses. Ces personnes
s'efforcent à être partout présentes : on les voit de
paroisse en paroisse, pendant les prières de Jéricho ou les
messes de guérison en train de prêcher, d'enseigner et de prier
pour le peuple de Dieu. Ainsi les fidèles qui ont besoin de soutien
spirituel les envahissent, les visitent parfois chez eux. Les groupes
charismatiques qui n'ont pas trop de visibilité vilipendent ceux qui
progressent ou font des prouesses, les affublent de critiques acerbes. Selon
les dires, on les traite d'être trop zélés, trop
illuminés, plus saints que les autres, etc., comme l'illustrent les
propos du responsable (R6) :
« ... Certains parmi nous exagèrent dans leur
manière de faire et mécontentent les curés : ils se
croient tout permis, refusent de se soumettre aux curés et croient que
sans eux l'Eglise ne va pas fonctionner. On dirait qu'ils veulent modifier les
choses dans l'Eglise puisqu'il arrive qu'ils organisent des séances
d'écoute ; ce qui ne plaît pas du tout aux prêtres,
c'est un peu comme s'ils confessent les gens. C'est toujours eux qu'on voit
animer les messes de guérisons ou les nuits d'adoration. »
Il est aussi noté que des personnes
déçues dans des groupes, qui n'entrevoient aucune lueur
d'être nommées responsables, s'en vont créer leur groupe
charismatique. C'est ce qui explique la multiplication des mouvements
charismatiques dans l'Eglise catholique : ils annoncent une
spiritualité apparemment différente de celle des autres groupes,
mais développent des pratiques et activités qui sont très
similaires.
Des simples motivations charismatiques viennent s'ajouter des
visées pécuniaires, comme le dit l'enquêté (R7) :
« Il y a aussi l'argent. Il faut le dire, ne pas le
dire, c'est mentir. Il s'agit certes des groupes de prière, mais
beaucoup d'argent circule ... Chacun veut gérer ça pour lui. Donc
ce que nous constatons, au niveau par exemple de l'État où on a
des guerres de leader par-ci, des dissidents de parti par-là, il y en a
aussi dans l'Eglise, même si les choses ne se présentent pas de la
même manière que dans le domaine politique. »
En fin de compte, les différents enjeux
évoqués indiquent clairement que les nouvelles pratiques
religieuses dans l'Eglise catholique répondent à des attentes
dont la satisfaction ne saurait être différée au risque
d'encourager l'exode des fidèles catholiques vers d'autres religions.
Aussi justifient-ils les multiples implications des différents acteurs
qui promeuvent ces pratiques religieuses.
CONCLUSION
Analyser les enjeux qui justifient l'émergence des
nouvelles pratiques religieuses au sein de l'Eglise catholique, tel
était l'objectif principal de cette recherche. Pour y parvenir, nous
avions décidé de décrire le contexte du regain
d'intérêt pour les nouvelles pratiques religieuses dans l'Eglise
catholique, d'identifier les besoins qu'elles satisfont avant de pouvoir
analyser les enjeux de leur approbation.
Il nous a été donné de constater que la
montée en puissance des nouveaux mouvements religieux et de toutes
sortes de sectes sur le marché de la religion constitue une menace
potentielle pour l'Eglise catholique qui se doit de réajuster ses
pratiques religieuses en vue de satisfaire les attentes de ses fidèles.
Il s'est avéré que devant les difficultés de la vie
à Cotonou, truffée de peur, d'insécurité
spirituelle et de misère croissante, les fidèles de l'Eglise
catholique n'hésitent pas à s'ouvrir à plusieurs recours,
le plus souvent, très peu approuvés par les autorités de
leur religion. L'effervescence religieuse qui prévaut offre
l'opportunité à tout le monde de pratiquer la religion de son
choix pourvu qu'elle satisfasse les intérêts visés. Alors,
pour ne pas perdre son statut de religion dominante, à cause de l'exode
de ses fidèles vers d'autres religions, l'Eglise catholique entreprend
de promouvoir de nouvelles pratiques religieuses qui rejoignent les
fidèles dans leur quête et les mouvements charismatiques qui
fonctionnent à l'image des églises pentecôtistes.
Rejoindre les fidèles dans leurs aspirations suppose
que ce qu'ils vont chercher ailleurs soit disponible dans leur église.
En effet, les demandes de bénédiction, de guérison, de
délivrance, de protection, d'écoute, d'accompagnement spirituel
et d'assistance matérielle sont assurées aux fidèles de
diverses manières. L'institutionnalisation des messes de
guérison, de délivrance, des prières de Jéricho,
des veillées d'adoration et d'évangélisation est une
initiative qui permet à l'Eglise catholique non seulement de maintenir
ses fidèles, mais aussi d'attirer de nouveaux membres. Aussi la mise
à contribution des mouvements charismatiques supplée-t-elle
à l'indisponibilité des prêtres. Ces mouvements deviennent
des creusets de formation, de soutien spirituel, d'approfondissement de la foi
catholique, de solidarité, de revitalisation d'anciennes
dévotions, etc. parce qu'ils sont les pionniers de la promotion des
nouvelles pratiques religieuses de masse au sein de l'Eglise catholique.
Dès lors, ces pratiques religieuses finissent par trouver une place
à côté de la liturgie officielle, ce qui change la
configuration de certaines messes célébrées au grand
bonheur des fidèles qui sont attirés par des cultes
enthousiastes, enflammés et pleins d'émotions.
Tout compte fait, ces nouvelles pratiques religieuses se
dévoilent fort bien comme des stratégies de repositionnement de
l'Eglise catholique sur le marché de la religion. Elles recèlent
plusieurs enjeux dont trois ont été principalement retenus. Tout
d'abord, elles permettent de freiner l'exode des fidèles catholiques en
soulageant leur souffrance, en délivrant les personnes qui sont sous
l'emprise des esprits maléfiques et en les aidant à mieux vivre
leur foi. Ensuite, les nouvelles pratiques religieuses constituent de
véritables sources de rentes. Car toutes les prestations ont une valeur
numéraire ou l'acquièrent selon les circonstances :
l'augmentation des fidèles induit un accroissement des recettes des
paroisses au cours des messes ou des pèlerinages, les demandes de
bénédiction requièrent des honoraires, les
réussites des délivrances réveillent la
générosité des personnes délivrées qui font
des dons et les dévotions encouragent le commerce d'objets de
piété et la littérature spirituelle. Enfin, les pratiques
de religiosité nouvelle sont vues comme une opportunité
d'exercice de charisme. Tous les acteurs qui s'y engagent, prêtres ou
laïcs, sont souvent animés par l'esprit de concurrence
vis-à-vis des autres selon les intérêts poursuivis par
chacun. Cela occasionne des tensions, des crises, des malentendus ou des
conflits dans l'Eglise et sur des paroisses. Il s'ensuit parfois la
désobéissance à l'autorité de tutelle qui
applique la sanction de sa convenance : des prêtres sont affectés
de leurs paroisses par l'évêque, des groupes de prière
charismatiques suspendus par les curés.
Les nouvelles pratiques religieuses à caractère
populaire montrent que les fidèles sont de plus en plus
intéressés par la religion, non plus comme pratique
institutionnelle, mais comme des instances d'échappatoire, où ils
viennent se soulager. Ils sont donc prêts à faire des essais pour
voir si cela marche, et si un groupe leur procure satisfaction, ils peuvent
rester ou non selon leur bon vouloir. Alors, elles s'imposent comme de
nouvelles manières de croire que l'Eglise catholique doit essayer de
cerner et d'accompagner afin d'éviter des dérapages qui peuvent
lui être préjudiciables.
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http://www.lemonde.fr/afrique/article/2015/11/30/, consulté le 28
novembre 2016 à 11h 00
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16- Ministère de l'intérieur, Bénin : Des
"exorcistes catholiques" en première ligne contre les
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consulté le 17 janvier 2017 à 11h 42
ANNEXES
GRILLE D'OBSERVATION
- Attitudes au cours des messes dominicales
- Attitudes au cours des processions du Saint Sacrement
- Attitudes au cours des séances des messes de
guérison, des prières de délivrance, des - campagnes
d'évangélisation
- Demande de bénédiction à la sortie des
messes
- Rites et pratiques collectifs
- Visite aux grottes de la Vierge Marie ou des statues d'un
saint, lors d'un pèlerinage
GUIDE D'ENTRETIEN I
(Adressé aux prêtres et aux responsables des
mouvements charismatiques catholiques)
1- Eglise catholique à l'ère de l'effervescence
religieuse
2- Explication de la désaffection de l'Eglise :
constat, cause, conséquence, solution
3- Réactions de l'Eglise catholique face au pluralisme
religieux
4- Produits religieux proposés par les NMR :
fondé ou non, justification
5- Explication de l'émergence des nouvelles pratiques
religieuses dans l'Eglise catholique : contexte, justification et regard
sur les nouvelles pratiques religieuses
6- Valeurs chrétiennes véhiculées par les
mouvements charismatiques nés dans l'Eglise : pratiques à
l'échelle des paroisses (messes de guérison, exorcisme,
Jéricho, bénédictions diverses, etc.)
7- Pentecôtisation du christianisme ou du
catholicisme : satisfaction des aspirations des fidèles,
réponse à la concurrence
8- Enjeux des nouvelles pratiques religieuses de masse
GUIDE D'ENTRETIEN II
(Adressé aux Pasteurs des NMR)
1- Justification de l'effervescence religieuse de nos jours
2- Provenance religieuse des membres de l'Eglise
3- Problèmes récurrents des membres
4- Nature des solutions proposées
5- Fondement de l'Eglise : spécificité,
structure, programme, etc.
6- Désaffection : départ, retour, reproche,
division
7- L'Eglise en question face aux autres NMR : entente,
désaccord, concurrence
8- L'Eglise en question face aux institutions établies
et autres religions
QUESTIONNAIRE
SECTION I : IDENTIFICATION DES
ENQUETES
|
No
|
QUESTIONS
|
MODALITES ET CODES
|
PASSER A
|
Q 101
|
Sexe
|
Masculin .......... 1 ; Féminin ............
2
|
|
Q 102
|
Quel âge avez-vous ?
|
/____ / ans(Mettre le nombre d'années)
|
|
Q 103
|
Dans quel quartier habitez-vous ?
|
................................................
|
|
Q 104
|
Vous êtes de quelle paroisse ?
|
................................................
|
|
Q 105
|
Quels sacrements avez-vous reçus ?
|
Baptisé(e) ........ 1 ; Communion ......... 2
Confirmation .......... 3 ; Aucun ......... 4
Catéchuménat ......... 5
|
|
Q 106
|
Quelle est votre situation matrimoniale ?
|
Marié (e) à l'Eglise ... 1 ;
Célibataire ...... 2
En concubinage ....... 3 ; Séparé
.......... 4
Veuf (ve) ............... 5
|
|
Q 107
|
Etes-vous scolarisé(e) ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
|
Q 109
|
Q 108
|
Quel est votre niveau d'instruction ?
|
Primaire ......... 1 ; Secondaire I ......... 2
Secondaire II ...... 3 ; Supérieur ......... 4
|
|
Q 109
|
Quelle est la profession que vous exercez actuellement
?
|
Artisan ............ 1 ; Commerçant ........ 2
Fonctionnaire ..... 3 ; Etudiant ............ 4
Sans emploi ......... 5 ;
Autres (à préciser) ...........................
6
|
|
Q 110
|
A combien estimez-vous votre revenu mensuel ?
|
Moins de 20.000 .................... 1
[20.000 - 40.000[................... 2
[40.000 - 60.000[................... 3
[60.000 - 80.000[................... 4
[80.000 - 100.000[................... 5
[100.000 et + [.......................... 6
|
|
Q 111
|
Quelle est la profession que votre conjoint(e) exerce
actuellement ?
|
Artisan ............ 1 ; Commerçant ........ 2
Fonctionnaire ..... 3 ; Etudiant ............ 4
Sans emploi ......... 5 ;
Autres (à préciser) ...........................
6
|
|
SECTION II : CONTEXTE DE L'EFFERVESCENCE
RELIGIEUSE
|
Q 201
|
Les conditions de vie deviennent de plus en plus difficiles de
nos jours. Etes-vous de cet avis ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Si non pourquoi ?
.....................................
|
|
Q 202
|
A quoi cela peut être dû ?
|
......................................................
......................................................
|
|
Q 203
|
Beaucoup de personnes souffrent et leurs souffrances ne sont
pas que d'ordre matériel, mais aussi spirituel. Etes-vous de cet
avis ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
|
|
Q 204
|
Avez-vous déjà été
confronté (e) à un problème quelconque de la vie qui,
selon vous, aurait eu une source spirituelle ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Si oui lequel .....................................
.....................................................
|
|
Q 205
|
Connaissez-vous des personnes ayant eu des problèmes
spirituels ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
|
|
Q 206
|
Quels sont les problèmes spirituels auxquels les
gens sont souvent confrontés dans votre entourage ?
|
......................................................
......................................................
......................................................
|
|
Q 207
|
Citez quelques problèmes autres que spirituels qui font
courir les hommes ici à Cotonou.
|
.....................................................
.....................................................
.....................................................
|
|
Q 208
|
De nos jours, il y a beaucoup de personnes, de mouvements
religieux ou spirituels, d'Eglises qui promettent des solutions pour soulager
les souffrances des hommes. En avez-vous connaissance ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Si oui lesquels ? .................................
......................................................
......................................................
|
|
Q 209
|
A votre avis, qu'est-ce qui fait que les Eglises
évangéliques ou pentecôtistes attirent de plus en plus de
monde ?
|
......................................................
......................................................
.....................................................
|
|
Q 210
|
Ces Eglises constituent-elles, selon vous, une menace pour
votre Eglise ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Expliquez-vous .................................
.....................................................
|
|
Q 211
|
Que pouvez-vous dire du départ des fidèles de
l'Eglise catholique vers les Eglises évangéliques ou
pentecôtistes (dites sectes) ?
|
.....................................................
.....................................................
.....................................................
|
|
Q 212
|
Votre Eglise possède-t-elle, selon vous, les moyens
pour combler les attentes de ceux qui vont ailleurs ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Expliquez-vous .................................
.....................................................
|
|
Q 213
|
Dansl'Eglise catholique, on note l'existence de certains
mouvements charismatiques qui prient avec des personnes en difficultés,
en connaissez-vous ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Si oui lesquels ? .................................
......................................................
.....................................................
|
|
Q 214
|
Les services qu'ils rendent sont-ils utiles à la
communauté ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Expliquez-vous ..................................
......................................................
......................................................
|
|
SECTION III : LES BESOINS EXISTENTIELS ET
SPIRITUELS DES FIDELES
|
Q 301
|
A qui vous adressez-vous pour des problèmes que vous
n'arrivez pas à résoudre par vous-même ?
|
Prêtre ......................................... 1
Prêtre exorciste ............................. 2
Responsables de groupe de prière ...... 3
Autres (à préciser) .........................
4
|
|
Q 302
|
Obtenez-vous satisfaction ?
|
Toujours ......... 1 ; Souvent ........... 2
Parfois ............ 3 ; Rarement ......... 4
Jamais ............. 5
|
|
Q 303
|
Avez-vous une fois consulté une autre autorité
en dehors de votre Eglise pour un problème ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
|
Si non,
Q 306
|
Q 304
|
Quel est le titre de cette personne ?
|
Prêtre ou prêtre exorciste .............. 1
Pasteur ......... 2 ; Médecin ........ 3
Maître spirituel ou gourou ............ 4
Guérisseur ou tradi-praticien .......... 5
Autres (à préciser) ....................... 6
|
|
Q 305
|
Avez-vous obtenu satisfaction ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
|
|
Q 306
|
Quelles dispositions prenez-vous contre les problèmes
de la vie ?
|
......................................................
.....................................................
......................................................
|
|
Q 307
|
Comment pouvez-vous qualifier votre assiduité à
la messe dominicale ?
|
Chaque semaine ......................... 1
Quelques fois par mois ................. 2
Quelque fois dans l'année .............. 3
Rarement ................................. 4
Jamais ..................................... 5
|
|
Q 308
|
Quelles sont les raisons qui justifient votre assiduité
à la messe ?
|
Adorer Dieu ................................... 1
Se protéger contre les forces maléfiques .. 2
Rechercher la paix intérieure ................ 3
Autres (à préciser) ............................
4
|
|
Q 309
|
Pour quelle chose avez-vous déjà
sollicité la bénédiction d'un prêtre ?
|
Maison, moto, voiture ... 1 ; Oratoire ... 2
Objets de piété.. 3 ; Soi-même ou
enfants. 4
Autres (à préciser) ............................
5
|
|
Q 310
|
Vous est-il déjà arrivé d'utiliser les
sacramentaux comme le sel bénit, l'eau bénite, l'huile sainte,
les médailles, etc. ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Pourquoi .........................................
.....................................................
|
|
Q 311
|
Quelles pratiques dévotionnelles aimez-vous dans
l'Eglise ?
|
Chemin de croix .............................. 1
Processions de Christ roi .................... 2
Pèlerinages ou Visites aux sanctuaires .... 3
Culte de la Vierge Marie .................... 4
Culte des saints .............................. 5
Autres (à préciser) ............................
6
|
|
Q 312
|
Qu'est-ce que vous gagnez dans ses pratiques
dévotionnelles ?
|
......................................................
......................................................
|
|
Q 313
|
Assistez-vous aux Jéricho ou aux messes de
guérison ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
|
Si non
Q 315
|
Q 314
|
Que recherchez-vous en assistant à ces messes ?
|
......................................................
......................................................
|
|
Q 315
|
Que recherchent ceux qui assistent souvent aux messes de
guérison ou aux assemblées de prière des mouvements
charismatiques ?
|
Miracles ... 1 ; Guérison /
délivrance ... 2
Protection ......... 3 ; Prospérité
........... 4
Autres (préciser) .............................. 5
|
|
SECTION IV : LES ENJEUX DES NOUVELLES DE
RELIGIOSITE POPULAIRE
|
Q 401
|
Selon vous, pourquoi l'Eglise a-t-elle institué les
messes de guérison, les Jéricho, les nuits d'adoration ?
|
......................................................
......................................................
|
|
Q 402
|
Pensez-vous ces différentes sortes de messe ou de
dévotion, ainsi que les séances de délivrance
permettent-elles à l'Eglise de soulager ceux qui souffrent dans l'Eglise
et d'éviter leur départ vers d'autres Eglises ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Expliquez-vous ................................
...................................................
...................................................
|
|
Q 403
|
Les prêtres exorcistes vous semblent-ils suffisants face
aux sollicitations des fidèles souffrants ?
|
Oui ................. 1 ; Non .................. 2
|
|
Q 404
|
Qu'attendez-vous de votre Eglise pour votre
épanouissement social et spirituel ainsi que celui de tous les
fidèles catholiques ?
|
......................................................
.....................................................
.....................................................
|
|
Q 405
|
Qu'est-ce que ces nouvelles pratiques autorisées
rapportent à l'Eglise ?
|
.....................................................
.....................................................
|
|
Q 406
|
Etes-vous membre d'un groupe sur votre paroisse ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Si oui lequel .....................................
|
Si non
Q 409
|
Q 407
|
De quel type de groupe s'agit-il ?
|
Groupe de service ............................ 1
Groupe de prière charismatique ............ 2
Autres (à préciser) ...........................
3
|
|
Q 408
|
Qu'est-ce qui vous plaît le plus dans ce groupe ?
|
Solidarité .... 1 ; Miracles/Guérisons
... 2
Formation ...... 3 ; Retraite ........ 4
Autres (précisez-les) .................. 5
|
|
Q 409
|
Y a-t-il quelque chose que vous reprochez aux groupes de
prière charismatiques ?
|
Oui .............. 1 ; Non ............... 2
Si oui, quoi ? ....................................
Et pourquoi ? ....................................
|
|
Q 410
|
La relation entre ces groupes de prière charismatiques
et le clergé est-elle ?
|
Toujours bonne ... 1 ; Parfois mauvaise ...4
Pas toujours bonne ... 2
Parfois en tension ... 3
Pourquoi ? .......................................
......................................................
|
|
TABLE DES MATIERES
SOMMAIRE
2
DEDICACE
4
SIGLES ET ACRONYMES
6
LISTE DES TABLEAUX ET PHOTOS
7
RESUME
8
ABSTRACT
8
INTRODUCTION
9
PREMIERE PARTIE :
LES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES COMME CHAMP DE
RECHERCHE DE LA SOCIOLOGIE DES RELIGIONS
12
CHAPITRE 1 : CADRE THEORIQUE DE LA
RECHERCHE
13
1.1. Problématique
13
1.1.1. Constats et problème central
13
1.1.2. Hypothèses :
15
1.1.3. Objectifs de la recherche
16
1.2. Délimitation thématique
16
1.3. Pertinence de la recherche
17
1.3.1. Justification du choix du sujet
17
1.3.2. Justification du choix du cadre
17
1.3.3. Pertinence sociale du sujet
18
1.3.4. Pertinence scientifique du sujet
18
1.4. Clarification des concepts
19
1.5. Quelques axes actuels de la discussion
23
CHAPITRE 2 : CADRE ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE DE LA
RECHERCHE
29
2.1. Cadre de la recherche
29
2.1.1. Les caractéristiques physiques
30
2.1.2. Les caractéristiques
démographiques
30
2.1.3. Les activités économiques
30
2.1.4. Les caractéristiques religieuses
31
2.2. Considérations méthodologique du
travail
31
2.2.1. Modèle d'analyse
31
2.2.2. Nature de la recherche
32
2.2.3. Recherche documentaire
33
2.2.4. Sources orales
33
2.2.5. Enquête préliminaire
34
2.2.6. Enquête de terrain proprement dite
34
2.2.7. Techniques et outils de collecte de
données
34
2.2.7.1. L'observation directe
35
2.2.7.2. L'entretien
35
2.2.8. Groupes cibles et échantillonnage
36
2.2.8.1. Groupes cibles
36
2.2.8.2. Echantillonnage
36
2.2.9. Dépouillement et traitement des
données
37
2.2.10. Calendrier de la recherche
38
2.2.11. Difficultés rencontrées
38
DEUXIEME PARTIE :
LES ENJEUX DES NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS
L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE
39
CHAPITRE 3 : L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE DANS
LA DYNAMIQUE DU MARCHE RELIGIEUX
40
3.1. Effervescence religieuse au Bénin et
à Cotonou
40
3.1.1. Les facteurs historiques
40
3.1.2. Le cadre juridique
41
3.2. Intensification du phénomène
religieux
41
3.2.1. La quête quotidienne des besoins
fondamentaux
42
3.2.2. L'insécurité spirituelle
43
3.3. Marché de la religion et quête de
solution
44
3.3.1. Le marché de la religion
44
3.3.2. Les fidèles catholiques et la
quête de solution aux problèmes spirituels
45
3.4. Défi des NMR et réaction de
l'Eglise catholique romaine
46
3.4.1. Le défi des NMR
46
3.4.2. La réaction de l'Eglise
catholique
48
CHAPITRE 4 : LES NOUVELLES PRATIQUES
RELIGIEUSES
52
3.1. Demandes individuelles diversifiées
52
3.1.1. La bénédiction d'objets de
piété, de maison, d'oratoire
52
3.1.2. Les prières de délivrance, de
guérison et de protection
54
3.2. Pratiques religieuses révélant
le souci de s'épanouir
55
3.2.1. Les dévotions diverses : Marie
et les saints
56
3.2.2. Le pèlerinage et la visite aux
sanctuaires
58
3.3. Quand la liturgie officielle fait une place
aux nouvelles pratiques religieuses
59
3.3.1. Le déroulement de la messe
catholique
59
3.3.1.1. La liturgie de la parole
59
3.3.1.2. La liturgie de l'eucharistie
60
3.3.2. La Messe ordinaire ou dominicale : une
exigence sacramentelle
60
3.3.3. La Messe ouverte aux nouvelles pratiques
religieuses : une nécessité du moment
61
3.4. Messe de guérison et Mouvements
charismatiques catholiques
63
3.4.1. La messe de guérison et les
veillées d'évangélisation
63
3.4.2. Les mouvements de prière
charismatiques
66
3.4.2.1. Un aperçu sur les mouvements
charismatiques paroissiaux
66
3.4.2.2. Les caractéristiques des mouvements
charismatiques
66
3.4.2.3. Les activités des mouvements
charismatiques
68
3.4.2.4. Quelques exemples de mouvements
charismatiques
69
CHAPITRE 5 : QUAND LES ENJEUX DETERMINENTLES
NOUVELLES PRATIQUES RELIGIEUSES DANS L'EGLISE CATHOLIQUE ROMAINE
71
4.1. Nouvelles pratiques religieuses comme
stratégie de freiner l'exode des fidèles
71
4.1.1. Soulager la souffrance des
fidèles
71
4.1.2. Délivrer les personnes qui sont sous
l'emprise des esprits maléfiques
73
4.1.3. Aider les fidèles à mieux
vivre leur foi
73
4.1.4. Freiner l'exode des fidèles
catholiques
74
4.2. Nouvelles pratiques religieuses comme source
de ressources financières
75
4.2.1. Le maintien de l'hégémonie de
l'Eglise catholique
75
4.2.2. Les demandes de bénédiction
requièrent des honoraires
75
4.2.3. Les réussites des délivrances
font parfois pleuvoir des billets de banque
76
4.2.4. Les messes de grands rassemblements ne se
passent pas de quêtes
76
4.2.5. Les pèlerinages offrent des occasions
de collecte de fonds
78
4.2.6. Le commerce d'objets de piété
et la littérature spirituelle fleurissent
78
4.3. Nouvelles pratiques religieuses comme
opportunité d'exercice de charisme
80
4.3.1. La désobéissance à
l'autorité épiscopale
80
4.3.2. La concurrence tacite entre les
prêtres
81
4.3.3. La relation complexe entre clergé et
laïcat
81
4.3.4. La compétition entre
différents mouvements charismatiques
82
CONCLUSION
84
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
86
REFERENCES WEBOGRAPHIQUES
89
ANNEXES
91
* 1 « Ce qui
retient désormais l'attention ce sont les nouvelles offres
émotionnelles, pentecôtistes, évangélistes,
charismatiques, etc., offres dont le succès fait pâlir d'envie les
anciennes Églises constituées. » (Mbodo, 2011 ; p.
197)
* 2 « En effet, que
ce soit le catholicisme tout d'abord, l'Église adventiste (...), les
Assemblées de Dieu (...), puis l'Église évangélique
(...) et enfin le Renouveau catholique (...), toutes ces formations religieuses
[s'implantent] dans les principales villes, comme les « grains d'un
chapelet » » (Perretant-Aubourg 2011, p. 186)
* 3 « Relativement
autonome par rapport à la structure sociale, le champ religieux est en
effet structuré par des enjeux internes et par des enjeux externes. Les
positions de pouvoirs dans le champ résultent de la confrontation de la
« demande religieuse (...) et de l'offre religieuse (...). Il
apparaît donc que le « fonctionnement » du champ religieux est
le produit d'une concurrence interne entre différentes instances (dont
les principales sont l'Église, les prophètes, les sectes et les
sorciers) en relation avec les lignes de force de la structure sociale.»,
(Dianteill, 2002)
* 4 Cicéron et
Lucrèce sont cités par Willaime J.-P. (2012)
* 5 Martin Luther avait
écrit 95 thèses en 1517 contre la « vertu des
indulgences » (indulgences censées permettre la remise de
peine de certains péchés). Mais il y avait aussi le pouvoir
temporel de plus en plus hégémonique de l'Église
catholique en Europe qui faisait soulever beaucoup de critiques contre les
pesanteurs et les compromissions de l'appareil clérical. Les
thèses de Martin Luther ont marqué le début de la
Réforme, qui donne naissance aux Églises protestantes. Ce
mouvement de contestation aspire à une simplification et à une
personnalisation de la religion, en préconisant notamment la lecture
directe de la
Bible par
le croyant.
* 6 Cf. INSAE, 2004, Cahier
des villages et quartiers de ville. Département du Littoral
* 7 Cf. INSAE, Principaux
indicateurs socio démographiques et économiques du
département du littoral (RGPH4, 2013)
* 8 L'expression agnosticisme
méthodologique est parfois remplacée par l'athéisme
méthodologique. A ce sujet, voir Lassave Pierre « Les
sociologues des religions et leur objet » in Sociologie
N°2, vol. 5 | 2014, consulté le 22 février 2017 à 16h
28.
* 9 Propos recueillis par
Ricardo Matalbert, in Fath, 2006, « Chercheur, citoyen et chrétien
dans la cité, Sébastien Fath s'explique », Aleloo
magazine [en ligne], Disponible sur :
http://www.aleloo.com/journal/index.php/2006/03/17/95-chercheur-citoyen-et-chretien-dans-la-cite-entretienavec-sebastien-fath,
consulté le 17 Janvier 2017 à 13h23.
* 10 Cité par
Amouzouvi H. D. A., 2005, Le marché de la religion au Bénin,
Verlag Dr. Köster, Berlin, 291 pages
* 11 Dans l'Église
catholique, les Jéricho sont des prières de sept jours
d'affilée intégrées aux messes, mobilisant beaucoup de
monde, au cours desquelles les prédicateurs intercèdent pour le
peuple et des prodiges se réalisent. Le nom est adopté en
souvenir de la victoire remportée par Josué sur la ville de
Jéricho dont il a fait le tour en prière avec le peuple juif
pendant sept jours avant de la conquérir (cf. le livre de Josué,
chapitre 6, dans la Bible).
* 12 Le Code du droit
canonique de l'Eglise catholique n°215 stipule que « les
fidèles ont la liberté de fonder et de diriger librement des
associations ayant pour but la charité ou la piété, ou
encore destinées à promouvoir la vocation chrétienne dans
le monde, ainsi que de se réunir afin de poursuivre ensemble ces
mêmes fins. »
* 13 Cf.
http://www.stambroise.org/ds/rb/beninexorcisme.html, consulté le
02-11-2016 à 17h31
* 14 Manifestations
extraordinaires de la puissance de Dieu se produisant sous forme de miracles ou
de prodiges.
* 15 La retraite est un
temps privilégié, d'une durée de quelques jours à
plusieurs semaines, au cours duquel on se met en retrait de ses
activités ordinaires, dans un monastère, un centre de
spiritualité ou dans une maison appropriée, pour se consacrer
exclusivement à la réflexion, la méditation et la
prière. Mais la récollection est une retraite courte d'une
durée d'un ou deux jours.
* 16Propos recueillis par
Lucie Sarr (à Abidjan), le 10/01/2017 à 17h09
* 17 Au temps où le
père Pamphile Fanou était encore curé de la paroisse saint
Jean-Baptiste ; actuellement, il est curé de la paroisse sainte
Rita depuis la dernière nomination de 2016.
* 18 Au temps où le
père Jean-Eric Tchibozo était curé. A cause des
déraillements dus au monde qui se draine vers cette paroisse pour les
prodiges accomplis par le curé, les autorités de l'Eglise ont
pris des résolutions pour l'affecter ailleurs. Il sert actuellement sur
une paroisse du nord.
* 19 « Jesu
agbonnon » signifie Jésus le tout puissant.
* 20 Le
doyenné est une circonscription ecclésiastique regroupant un
certain nombre de paroisses et ayant à sa tête un curé
doyen, c'est-à-dire un prêtre qui a la paroisse la plus
importante. Le vicariat, quant à lui, est un territoire composé
de plusieurs doyennés, sur lequel s'étend la compétence
d'un vicaire épiscopal, qui est un auxiliaire de
l'évêque.
* 21 Cf. Le Code du droit
canonique 1172 §1 de l'Eglise catholique qui stipule
que« Personne ne peut légitimement prononcer
des exorcismes sur les possédés, à moins d'avoir obtenu de
l'Ordinaire du lieu une permission particulière et
expresse ».
|
|