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Le projet géostratégique des à‰tats-Unis d'Amérique dans le golfe de Guinée. Analyse de l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013.

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par François Xavier NOAH EDZIMBI
Yaoundé II Soa - Master II en Sciences politiques 2014
  

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ABSTRACT

For the United States of America (USA), end of Communism means the end of strategic guardianship which was used by their allied, like France, in Africa. Disturbances which happened in the Middle East pushed their interests in others areas which were considered as not important. In spite of the fact that it was their main zone for supplying in strategic resources, which contribute in their national security and economic reliance, they started coveting Gulf of guinea which has an increasing important petroleum production. So, they had full investments in States as Nigeria but, it appears many difficulties which annoy its security and stability. In fact these problems lead USA to find another partner which can make their deployment easier in the Gulf of Guinea. So, Cameroon is seen as their best choice for achieving their strategic goals. This country is well known because of its economic and politic stability. Also, its maritime facade is an advantage for USA in controlling of different flux and maritime crossroads in the world. Therefore, they are investing in politic, economic, and military domains which can help Cameroon to emerge 2035. But, the crux of the matter is that: others countries like France, which has an old relationship with Cameroon, continue to pursue their multidimensional undertakings. So, they put all in place to destroy American's plans. In addition, Asiatic States like China which need more strategic resources for their developing industries, try to improve their cooperation with Cameroon which stay an opportunity in a part of the world where conflicts are recurrent. Finally, many countries are jeopardizing American's blueprints in Cameroon which is however an asset to reach in Gulf of Guinea resources and it is why they are on their way of reinforcing their initiatives.

Mémoire en Master II Science Politique François Xavier NOAH EDZIMBI, UY II-SOA 9

Le projet géostratégique des États-Unis d'Amérique dans le Golfe de Guinée : analyse de
l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013

INTRODUCTION GENERALE

Les États-Unis d'Amérique font leur apparition sur la scène africaine dès le XIXème siècle, par l'intermédiaire de l'Association Internationale Africaine (AIA). Cette association accorde une aide à Léopold II, roi des belges, le 22 avril 1884. Ce dernier a pour ambition de fonder un État libre autour du fleuve Congo. Ils participent aussi à la conférence de Berlin qui se tient du 15 novembre 1884 au 26 février 1885, destinée à limiter les futurs conflits à des négociations diplomatiques entre les grandes puissances européennes et américaines1. Bien que participant au partage de l'Afrique, leur présence sur le terrain reste limitée jusqu'à la fin de la guerre froide, conflagration les opposant à l'ex-URSS. C'est pour cela qu'Henry Kissinger a affirmé qu'en l'absence d'adversaire stratégique menaçant le Continent, ou d'État africain inamical nourrissant des ambitions hégémoniques, une nouvelle politique africaine n'a aucune justification stratégique2.

Il a donc été observé un désintérêt américain pour cette partie du monde. Ce sentiment est confirmé par les allégations de l'ancien président américain, Georges WALKER BUSH qui, avant son accession au pouvoir en janvier 2001, déclarait sans ambages ne pas intégrer l'Afrique dans la stratégie globale des États-Unis3. Mais, un regain d'intérêt porté au Continent par ces derniers se fera ressentir dès la fin du communisme. Il s'exprime par le désir de ne plus laisser les puissances européennes exercer, à elles seules, une tutelle politique sur l'Afrique4. En effet, en visite à Johannesburg en Afrique du Sud, le 12 octobre 1996, le secrétaire d'État américain, Warren CHRISTOPHER, déclarait : « le temps est fini où l'Afrique pouvait être divisée en sphère d'influences, où les puissances extérieures pouvaient considérer des groupes entiers de pays comme leur domaine réservé5 ». Par la suite, ce regain d'intérêt pour l'Afrique s'est accentué avec l'importance accordée au continent après les attentats du 11 Septembre 2001. Selon le document de stratégie de sécurité nationale des États-Unis d'Amérique de septembre 2002, l'Afrique revêt une grande importance pour la

1 Péan P. 2010, « Carnages: les guerres secrètes des grandes puissances en Afrique », pp.132-133.

2 Henry Kissinger, « La nouvelle puissance américaine », Paris, Fayard 2003, p.223.

3 P. N. Lyman, « A strategic approach to terrorism », in Rotchild, D. and Keller, J. E. Africa-US relations: strategic encounters, Reinner Publishers, 2006, p.49 ; Servant J. C. « Offensive sur l'or noir africain: une priorité géostratégique » in Le Monde Diplomatique, janvier 2003.

4 Alain Fogue T. « Enjeux géostratégiques et conflits politiques en Afrique noire », Paris, L'Harmattan 2008, p.287.

5 Ibid., p.292.

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l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013

paix et la sécurité mondiale6. Les attentats du 11 Septembre 2001 ont relevé que la menace à grande échelle ne vient plus uniquement des grandes puissances, mais davantage des États en faillite, faibles, des acteurs et facteurs internationaux de nuisance, qui trouvent en Afrique un terrain fertile à leur épanouissement7. Cet intérêt porté à l'Afrique est d'une grande importance dans la région du Golfe de Guinée où se trouve le Cameroun.

I- HISTORIQUE DES RELATIONS AMERICANO-CAMEROUNAISES ET
RAISONS DE LEURS INTENSIFICATIONS

« In May 1957, Robert C. Foulon was appointed Consular Officer to Cameroon, and a U.S. Consulate was opened at Yaounde on July 5, 1957. On April 10, 1959, the Consulate became a Consulate General. According to a U.S. Department of State press release issued on January 5, 1960, the American Consulate General at Yaounde, Cameroun, was elevated to an Embassy on January 1, 1960, upon formal attainment of independence by the former United Nations Trust Territory under French administration8. » En d'autres termes, en mai 1957, Robert C. Foulon avait été nommé consul au Cameroun. Mais c'est seulement le 05 juillet 1957 que le consulat américain fut ouvert à Yaoundé. Plus tard, le 10 avril 1959, il devint consulat général. Dans ce sens, le département de la presse d'État américain observe : « le consulat général américain à Yaoundé au Cameroun a été élevé au rang d'ambassade le 01 janvier 1960 dans la mouvance de l'indépendance sous l'administration française ». C'est dire que les relations entre les deux États ont été établies bien avant la vague d'indépendances africaines. Elles ont toutefois connu une évolution en dents de scie.

Entre 1960 et 1989, ces relations américano-camerounaises se caractérisent par le désintérêt qu'affichent les États-Unis à l'Afrique, l'important pour eux se trouvant en Asie et au Moyen-Orient. Ils préféreront accorder la tutelle politique de cette zone du monde à leurs alliés européens. Mais cette situation a changé après leur victoire sur le communisme. La deuxième phase, qui se situe entre 1990-1996, sera tendue. En effet, les États-Unis d'Amérique exigent des réformes en faveur de la démocratie que la jeune République du Cameroun ne maitrise pas suffisamment. Cette situation conduira à la détérioration des rapports entre les deux États. Les États-Unis remettent en cause à la fois l'organisation

6 Alexis Nzeugang, « Les États-Unis en Afrique après le 11 septembre 2001 : dynamiques locales d'une puissance globale. » Thèse de doctorat/Ph.D en science Politique, Université de Yaoundé II, 2009/2010, p.11.

7 Ibid.

8 Document internet sur les Relations bilatérales entre le Cameroun et les USA sur Google.com, p.9.

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gouvernementale et celle du régime politique camerounais. L'autorité représentative des États-Unis au Cameroun de l'époque, l'ambassadeur Frances Cook, apportera même son soutien à « l'opposition radicale », pendant la période de fortes tensions politiques de 1991 à 1992.

Aussi, les rapports d'Organisations non-gouvernementales américaines sont sévères sur l'état de la démocratie au Cameroun. La National Democratic Institute (NDI), dans son rapport de 1992, affirme que la République du Cameroun est une « République multipartite seulement de nom. Le Cameroun continue à être gouverné en réalité par le président Biya et son cercle de conseillers, issus principalement de son groupe ethnique et de son parti le Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais »9. Cette tension trouvera son point d'orgue avec la suspension de l'aide de l'Agence Américaine de Développement International (USAID) au Cameroun, le 19 novembre 1993. Mais par la suite, il se présentera une accalmie et un renforcement des relations entre les deux pays, vers la fin des années 199010.

L'accalmie dans les relations américano-camerounaises est le fait de deux évènements. En premier, l'élection de Kofi ANNAN, candidat favori des Américains à la tête de l'Organisation des Nations Unies (ONU), avec le soutien du Cameroun. En second, l'élection présidentielle au Cameroun en 1997 qui fut présentée, par l'organisme américain International Foundation for Election System (IFES), comme exemplaire. Elle conduira à la publication, par cet organisme, d'un rapport positif sur l'avancée démocratique du Cameroun. Ce temps de grâce pour le Cameroun sera ponctué en juillet et novembre 1998 respectivement par la visite du ministre américain des transports, Rodney SLOTER, et d'une délégation importante conduite par le maire de New York C. M. Mario BARRYERE. Il se poursuivra après les attentats du 11 septembre 2001, grâce au passage du Cameroun à la présidence tournante du conseil de sécurité de l'ONU, sustenté par la visite du président Paul Biya à Washington à la veille de l'« opération liberté pour l'Irak ». Ce moment marquant l'âge d'or de la relation américano-camerounaise11.

À partir de ces relations cordiales entre les deux États, grâce aux richesses du Cameroun et à ses avantages géographiques et géostratégiques, se développera un intérêt

9 M. D. Ebolo, 1998, « L'implication des puissances occidentales dans le processus de démocratisation en Afrique : analyse des actions américaines et françaises au Cameroun, 1989-1997 », in Polis, Vol.6, no 2, pp.19-55.

10Alexis Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001 : contribution à l'étude des dimensions pétrolières et militaires. » Master II en Science Politique, Université de Yaoundé II, 2005/2006, Pp.2-3.

11 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », pp. 2-3.

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grandissant de Washington pour Yaoundé. La stabilité du Cameroun dans le Golfe de Guinée, région assez instable, est l'une des qualités appréciées par les États-Unis, comme sa richesse en ressources naturelles stratégiques. Ces atouts sont une particularité qu'utilisent les américains pour atteindre leurs objectifs.

Plusieurs raisons sont à l'origine de la convoitise américaine pour le Cameroun. Sur le plan politique, Il fait preuve d'une stabilité en Afrique et dans la région subsaharienne12. Ensuite, dans l'Afrique Centrale, spécifiquement dans la sous-région CEMAC constituée de six États (le Cameroun, le Tchad, la République Centrafricaine, le Gabon, le Congo et la Guinée-Équatoriale)13, Il s'impose comme leader sur le plan économique. Concernant les atouts socioculturels, le Cameroun est un pays bilingue dont les langues officielles sont le français et l'anglais14. L'usage de l'anglais fait de lui un enjeu non négligeable pour les États-Unis, tant il est vrai que la culture, voire la langue, participe des critères qui justifient l'orientation géographique des investisseurs15. Dans un autre registre s'apprécie la multiplicité de ses groupes ethniques (plus de 250) et de ses langues nationales chiffrées à 270 environ16.

La diversité religieuse n'est pas en reste, les plus en vue étant le christianisme (53%), l'islam (22%) et les cultes africains (25%)17. Cette diversité présente, pour les Américains, une richesse et un avantage pour son développement. Le « paradigme américain de la diversité dans l'union »18, est de ce fait loué et mis en évidence par les États-Unis qui voient, en cette diversité culturelle et religieuse, un terrain fertile, un véritable catalyseur pour la promotion de la démocratie et des droits de l'homme ; lesquels principes sont officiellement présentés comme raisons d'être de la présence américaine au Cameroun19.

La position géographique du Cameroun est aussi d'un intérêt certain pour les États-Unis à cause de son ouverture maritime dans le Golfe de Guinée, région importante dans l'agenda géopolitique et géostratégique des États-Unis. La région n'est pas aisée à délimiter parce qu'elle dépend de la configuration que lui donnent différents États et institutions

12 GAFC, 2003. Rapport d'information présenté par le groupe d'amitié France-Cameroun, du 2 au 8 février.

13 Ibid., p.19.

14Article 1 alinéa 3 de la Loi no 96/06 du 18 janvier portant révision de la constitution du 02 juin 1972, modifiée et complétée par la loi no2008/001 du 14 avril 2008.

15 Nzeugang Op.cit., p.20.

16 Ibid.

17 Ibid.

18 L. Sindjoun, 2000, « La démocratie est-elle soluble dans le pluralisme ? Éléments pour une discussion politiste de la démocratie dans les sociétés plurales », in Introduction inaugurale au colloque international Francophonie-Commonwealth Démocratie et société plurielle, Yaoundé, 24-26 janvier.

19 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », p.20.

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internationales ou régionales. D'un point de vue géographique, le Golfe de Guinée est situé dans la zone que la FAO (Food and Agriculture Organisation) désigne par l'expression Atlantique Sud-est20, c'est-à-dire la bordure occidentale du continent africain, du détroit de Gibraltar au Cap de bonne espérance. Sur le plan institutionnel, elle peut être circonscrite au domaine maritime des huit États adhérents à la Commission du Golfe de Guinée (CGG) que sont l'Angola, le Cameroun, le Gabon, la Guinée-Équatoriale, le Nigeria, la République Démocratique du Congo et Sao-Tomé et Principe. Pour un travail efficient, nous utiliserons ici la délimitation géographique faite par le professeur Joseph Vincent NTUDA EBODE, qui considère que la région du Golfe de Guinée va de la Côte d'Ivoire à l'Angola21.

La région est convoitée par les États-Unis parce qu'elle regorge de nombreuses matières premières vitales pour son industrie en générale et sa sécurité en particulier. En effet, la région du Golfe de Guinée est l'une des régions d'Afrique dont la production et les réserves en pétrole ont le plus augmenté depuis une dizaine d'années22. Avec une production de plus de quatre millions de barils par jour23, dont l'essentiel provient du Golfe de Guinée, l'Afrique subsaharienne affiche une capacité de production égale à celle de l'Iran, du Mexique et du Venezuela réunis, soit 6% des extractions mondiales24. De plus, en dix ans cette production aura augmenté de 36%, contre 16% seulement pour les autres continents25. Pour parvenir à exploiter ces différentes richesses, les États-Unis ont besoin d'un partenaire stable dans la région d'où le dévolu jeté sur le Cameroun.

Pour les États, la position stratégique d'un pays ne se réduit pas uniquement à son emplacement géographique mais dépend aussi de l'enjeu géopolitique voire géostratégique que l'on lui porte, notamment dans la réalisation des objectifs escomptés26. Les côtes du Sud-ouest du Cameroun, qui s'ouvrent dans l'océan Atlantique, lui octroient de nombreuses facilités aux échanges de toutes natures sur le continent, lui procurant une position stratégique27. Selon les analyses de Damien AWOUMOU28 et NTUDA EBODE29 dans leurs

20 Come Damien George Awoumou, « Le Golfe de Guinée face aux convoitises », in Enjeux n° 22, janvier-mars 2005, p.15.

21 J. V. Ntuda Ebodé, « Les enjeux pétroliers du Golfe de Guinée », in Diplomatie Magazine, no 7, février-mars 2004, p.44.

22 Michel KOUNOU, « Pétrole et pauvrette au sud du Sahara : analyse des fondements de l'économie politique du pétrole dans le Golfe de Guinée », Yaoundé, éditions Clé, 2006, p.33.

23 Bernath, « Le pétrole africain dans la ligne de mire des Etats-Unis » in Eco Finance, no 48, octobre 2005, p.4.

24 Ibid.

25 Wullson MVOMO ELA, « Pétro stratégie et appel d'empire dans le Golfe de Guinée », in Enjeux n°22, janvier-mars 2005, p.7.

26 Nzeugang, « Une lecture de la coopération américano-camerounaise depuis 2001... », p.21.

27 J. V. Ntuda Ebodé, « Géopolitique des régions africaines : quel destin pour l'Afrique médiane latine ? », in Diplomatie, affaires stratégiques et culture internationale, no 11, novembre-décembre 2004a, p.38.

28 Come Damien George Awoumou, Op. Cit, pp.15-20.

29 J. V. Ntuda Ebodé, Op. Cit.

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travaux respectifs, le Golfe de Guinée, et notamment sa composante Afrique centrale, bénéficie d'une position privilégiée, qui le met en contact avec toutes les autres régions d'Afrique. À partir de l'Afrique centrale, plusieurs opérations sont possibles : l'accès à Afrique de l'Ouest et la remontée du Sahel, l'accès à la Corne de l'Afrique, (considérée comme la porte d'entrée et le poste avancé des terroristes en Afrique) en passant par la Centrafrique, le Tchad et le Soudan ; puis la descente vers les pays des grands lacs dont bon nombre sont membres de la communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC)30.

Présenté comme hégémon de l'Afrique centrale par le premier analyste, le Cameroun apparait, à la fois comme le leader potentiel du Golfe de Guinée et le heartland africain. Et d'après NTUDA EBODE, qui tient le Golfe de Guinée tient l'Afrique31. C'est à partir de cette position que les États-Unis apprécient le « leadership » du Cameroun et pensent que ce pays est un « partenaire de choix » sur lequel ils peuvent compter dans la sous-région32.

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