BESOINS ENERGETIQUES
89 Achille Mbembe cité par W. Mvomo Ela dans
« Le concept de « mise en valeur » dans la politique de
développement colonial de la France : cas du Cameroun » cf.
Repenser le développement à partir de l'Afrique, sous la
direction de Jean-Emmanuel Pondi, Afrédit, Africaine d'Edition,
Yaoundé, mai 2011, p.314.
90 Ibid.
91 M. Kounou 2006, « Pétrole et
pauvreté au sud du Sahara : analyse des fondements de l'économie
politique du pétrole dans le Golfe de Guinée »,
Yaoundé, éditions Clé, p.15.
92 Péan P., « Carnages: les guerres
secrètes des grandes puissances... », p.128.
93 Voir Georges Washington cité par Alain FOGUE
TEDOM dans : « Histoire diplomatique, extraversion étatique et
conflits politiques en Afrique noire », Thèse de Doctorat,
2002.
Mémoire en Master II Science Politique François
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Le projet géostratégique des
États-Unis d'Amérique dans le Golfe de Guinée : analyse
de l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013
L'intérêt des États-Unis pour le Cameroun
part de l'important besoin de ce pays en ressources stratégiques
indispensables pour son économie (paragraphe 1), et de leur
volonté de réduire leur dépendance vis-à-vis du
Moyen-Orient (paragraphe 2).
Paragraphe 1 : l'insuffisance de réserves
liée à une exploitation très élevée
Il importe de souligner en premier que le pétrole a
été, et demeure, d'une importance capitale et stratégique
pour la survie des États-Unis en tant que première puissance
économique et militaire. Cette énergie joue un rôle crucial
dans la vie des Américains au point où il influence leur
politique intérieure et extérieure94. Le
développement de l'industrie pétrolière gagne les
États-Unis vers 1850 à Titusville en Pennsylvanie. Le 27
août 1859, une compagnie fait jaillir du pétrole à
seulement vingt-trois mètres de profondeur : c'est le premier puits
pétrolier de l'histoire95 qui va structurer la politique
économique et surtout sécuritaire des États-Unis. En
effet, en son absence, l'économie des États-Unis s'effondrerait
et partant leur sécurité ainsi que leur rang
international96.
Il se trouve que les États-Unis ont intensément
exploité leurs réserves de pétrole qu'elles sont
aujourd'hui menacées d'épuisement97. Les
données relatives aux réserves de pétrole des
États-Unis ne sont jamais fiables à cause de la réserve
dont fait montre les institutions américaines d'informations. La
différence que l'on observe dans les chiffres publiés par les
rapports internationaux sont illustratifs à cet égard. Il s'agit
en réalité des marges relatives ne pouvant influencer
fondamentalement les tendances générales.
De ce fait, en prenant compte des chiffres fournis par les
experts d'une part, l'OPEP et l'administration en charge de l'information sur
les questions énergétiques des États-Unis d'autre part
(EIA), il est aisé de se rendre compte que les capacités
productrices des États-Unis sont menacées. En effet, selon les
estimations de l'OPEP, les États-Unis disposaient en 2002 d'une
réserve de 21.891 millions de barils de pétrole contre un total
mondial de 1.157.610 million de barils correspondant à une
capacité de 1,89% du total.
94 A. NOUSCHI, Pétrole et relations
internationales depuis 1945, Paris, Armand Colin, 2003, pp.9-10.
95 Kounou 2006, « Pétrole et
pauvreté au sud du Sahara... », p.19.
96 De LESTRANGE, ZELINKO et PAILLARD,
Géopolitique du pétrole, un nouveau Marché, de nouveaux
risques, de nouveaux Mondes, Paris, Techniq, 2005, p.87.
97 Pierre Noel, « Les États-Unis et le
pétrole du Moyen-Orient » in Les Cahiers de l'Orient,
août 2005.
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Le projet géostratégique des
États-Unis d'Amérique dans le Golfe de Guinée : analyse
de l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013
Le rythme d'exploitation du pays a naturellement
entrainé la chute de ce volume qui ne s'élevait plus en 2008
qu'à 21.317 million de barils sur 1.295.085 million pour le reste du
monde. Ce qui correspondait cette fois à 1,64% du total98.
Avec une consommation estimée à 20,7 millions de barils de
pétrole par jour en décembre 2007, les États-Unis se
situaient-et c'est encore le cas aujourd'hui- en tête des pays
consommateurs. Or, lorsqu'on fait le ratio production/consommation, on se rend
rapidement compte qu'ils produisent quotidiennement 10% du pétrole
mondial et en consomment 24%.
En fait, avec une production nationale de 5,1
millions99 de barils par jour, à laquelle s'ajoutent d'autres
liquides de diverses natures, les États-Unis parviennent à
couvrir à peine les 42% de leurs besoins journaliers. Ce qui suppose
plus concrètement qu'ils ont encore besoin d'environ 13,5 millions de
barils de pétrole qu'ils devraient importer tous les jours. Cependant,
lorsqu'on soustrait à cela le volume des produits pétroliers
exportés chaque jour par les États-Unis (soit 1,4 million de
barils par jours), on se rend compte qu'au final, les besoins américains
en importations s'élèvent plutôt à 12,0 millions de
barils chaque jour. Par conséquent, on estimait à 58% de leurs
besoins nationaux, le taux net des importations américaines en
2007100.
A ce rythme, les experts estiment qu'en 2025, les
États-Unis importeront 70% de leur pétrole et 23% de leur gaz
naturel101. Concrètement, la demande américaine de
pétrole devrait passer d'environ 19,7 millions de barils en 2002,
à environ 26 millions de barils par jour dans un contexte de stagnation
de la production intérieure des États-Unis102. Ce qui
ferait alors passer leur dépendance à l'égard de cette
matière première stratégique à 66%103.
En outre, certains experts estiment que des gisements actuels des
États-Unis risquent de s'épuiser vers la période
2015104.
Toutefois, ces chiffres contrastent légèrement
avec les prévisions des experts américains. En effet, l'Energy
Information Administration (EIA) projette que les importations
98 Nzeugang, « Les États-Unis en
Afrique après le 11 septembre 2001... », p 238.
99 Ibid., pp.232-234.
100 Ibid, p.231.
101 G. CARUSO et L. DOMAN, « L'offre mondiale
d'énergie et le Marché des Etats-Unis » in Foreign
Policy, Vol. 9, no 2, 2004, p.31 ; T. Z. COLLINA, « Oil dependence and
U.S. Foreign Policy : real dangers, realistic solutions », Testimony
before the Committee on Foreign Relations, Subcommittee on Near Eastern and
South Asian Affairs, United States senate executive director, 2005, October
19.
102 T. L. Karl et G. Ian, « Le fond du baril, boom
pétrolier et pauvreté en Afrique », publié
par Catholic Relief services, juin 2003, p.14. ; D. VOLMAN and M. T.
KLARE, « Africa's oil and American national security » in Current
History, 2004, p.226.
103 W. Mvomo Ela, « L'Irak : « pas décisif
» vers l'empire ? » in Une lecture africaine de la guerre en
Irak, sous la direction de Jean-Emmanuel Pondi, Maisonneuve et Larose/
Afredit, Paris, décembre 2003, p.51.
104 De LESTRANGE, ZELINKO et PAILLARD, Géopolitique du
pétrole, un nouveau Marché, de nouveaux risques, de nouveaux
Mondes, Paris, Techniq, 2005, p.158.
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Le projet géostratégique des
États-Unis d'Amérique dans le Golfe de Guinée : analyse
de l'action américaine au Cameroun entre 1997 et 2013
américaines de pétrole brut devront, au
contraire, chuter d'ici 2030 passant ainsi de 12,1 millions de barils par jour
à 8,8 millions105. Évaluée en pourcentage, il
s'agira de passer d'une dépendance de 58% à 41%. Les
États-Unis comptent sur plusieurs sources d'énergies
parallèles pour pallier à cette situation. Il s'agit d'augmenter
les capacités de production du Golfe du Mexique à laquelle
s'ajoutent d'autres sources telles les biocarburants106.
L'incapacité des États-Unis de satisfaire leurs besoins les
conduit à s'approvisionner au Moyen-Orient.
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