INTRODUCTION GÉNÉRALE
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La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
2
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
Notre mémoire s'intitule : « La
médiatisation de la « question anglophone » dans les journaux
camerounais à partir de la célébration du cinquantenaire
de la réunification du Cameroun ». Il s'agit d'un travail
présenté en vue de l'obtention du master 2 recherches en
communication médiatique. Le contexte d'étude justifie le choix
de ce thème de recherche.
1- CONTEXTE D'ÉTUDE
Lundi 2 mai 2015, le quotidien La Nouvelle Expression
dans son numéro 3971 en page 3, titre : « Barreau du Cameroun
: Les avocats anglophones exigent le fédéralisme. Ils arguent
qu'ils doivent préserver leur culture et le Common Law que l'Etat veut
phagocyter ». Cet incident survient un an et trois mois à
peine après la célébration du cinquantenaire de la
réunification du Cameroun. Lors de cet évènement
historique, une série de festivités supposées marquer
l'unité de tous les Camerounais a été organisée
entre anglophones et francophones. Le but étant de
célébrer le vivre ensemble dans la République Unie, une
République bilingue où les libertés individuelles sont un
principe cardinal. Le constat un an plus tard est aux antipodes des
résultats attendus selon certains anglophones. Nous sommes partis des
revendications sécessionnistes des années 90, menées par
quelques groupes radicaux taxés d'indépendantistes et
minimisés en leur temps par la presse et l'opinion publique'
au vu de la nature dite grossière et exagérée de ces
récriminations, à un plaidoyer argumenté mené par
la corporation des avocats anglophones. De 1990 à 2015 nous avons
quitté le terrain de la rue et des tracts, pour rejoindre celui des
médias et des tribunaux. A l'entame de 2015, c'est au tour des avocats
anglophones de devenir « les porte-voix » de cette contestation. Une
contestation qui continue jusqu'en 2016 tel que l'atteste La Nouvelle
Expression dans son numéro 4329 du Mardi 11 Octobre 2016 qui publie
: Barreau du Cameroun : La grève des avocats anglophones commence ce
jour. L'on pourrait être tenté de se demander à quoi
auront servi les réjouissances du cinquantenaire de la
réunification du Cameroun si ce n'était pour ouvrir le
débat sur le « vivre ensemble » et évacuer les
frustrations de toute nature ? D'où vient-il que nous en soyons encore
à spéculer sur la « question anglophone » de nos jours
? Pourtant la presse écrite selon certains observateurs a fait son
travail en relayant l'information. Toutefois, en nous intéressant
à la construction des contenus médiatiques, l'on
s'aperçoit que tous les médias et produits médiatiques
sont conçus et diffusés par des organisations et des entreprises
pour réaliser des objectifs de différentes natures. L'offre
médiatique peut être catégorisée en trois types:
premièrement, des produits
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La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
qui visent à satisfaire les désirs de
divertissement des publics que le diffuseur souhaite pour des raisons
économiques. Deuxièmement, des produits qui visent à
réaliser des objectifs sociopolitiques tels que : informer et
éduquer. Troisièmement, des produits à visée
persuasive explicite, attribués à des organisations (annonceurs)
publiques ou privées qui tentent d'influencer des individus1.
En nous fondant sur ce triptyque, l'étude de la perception de la «
question anglophone » par les journaux locaux, nous en apprendrait
davantage sur la construction médiatique et le traitement
réservé à ce sujet pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
2- PROBLÉMATISATION :
Il sera question à ce niveau de faire une revue de la
littérature, poser le problème de recherche, déterminer
les questions de recherche et émettre des hypothèses.
2.1 REVUE DE LA LITTÉRATURE:
Trois documents nous permettent d'entrée de jeu de nous
faire une idée sur l'identité anglophone au Cameroun, notion
importante pour la bonne compréhension de la « question anglophone
» : Le « problème anglophone » au Cameroun dans les
années 1990 ; Dynamique de positionnement anglophone et
libéralisation politique au Cameroun : de l'identité
à l'identification ; et l'article «
Révision constitutionnelle » du 18 janvier 1996 : Comment
constitutionnalise-t-on le « nous » au Cameroun dans l'Etat post-
unitaire ?
Piet Konings2dans son ouvrage : Le «
problème anglophone » au Cameroun dans les années 1990
estime que: « L'usage du terme Southern Cameroon présenterait
l'avantage de jeter les bases historiques et géographiques de
l'identité Anglophone...dans cette hypothèse, les immigrés
d'origine ethnique francophone, seraient exclus de la citoyenneté du
Southern Cameroon's alors qu'ils peuvent être plus anglophone au sens
culturel et linguistique du terme... ».
Louis-Marie NKOUM-ME-NTSENY3 ajoute : «
L'invention de l'identité anglophone découle de sa
constitution en enjeu colonial par l'administration britannique, puis en
enjeu
1Chabrol C, « La Réception :
étude des processus d'évaluation des débats
médiatiques », pp. 189-230, in : Charaudeau P.,
éd., La Télévision, les débats culturels «
Apostrophes », Paris, (1991), Didier Érudition.
2Konings P, Le « problème anglophone » au
Cameroun dans les années 1990, Ocisca/Orstom, Page 29. 3
NKOUM-ME-NTSENY L, Dynamique de positionnement anglophone et
libéralisation politique au Cameroun : de l'identité
à l'identification, Page 18
4
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
diplomatique et politique par les investisseurs identitaires
de tous bords » dans son mémoire intitulé : Dynamique de
positionnement anglophone et libéralisation politique au Cameroun : De
l'identité à l'identification.
Luc SINDJOUN4quant à lui en parle en ces
termes : « la libéralisation politique est un moment de
constitution de la communauté anglophone en groupe ethnique dont
l'ancêtre fondateur est l'administration britannique, le territoire
identitaire, l'ex-Southern Cameroon's et la langue de référence
l'anglais ».
Pour poser les bases de la « question anglophone »
au Cameroun, « in limine litis », il faudrait au préalable
situer cette problématique par rapport à un questionnement
similaire et antérieur.
Nathan Weinstock5 dans son ouvrage : Le
Sionisme contre Israël nous permet d'avoir une idée de la
question juive. L'auteur cite tout d'abord Jean-Paul Sartre qui s'exprime sur
la haine des juifs : « L'antisémitisme est une tentative pour
valoriser la médiocrité en tant que telle, pour créer
l'élite des médiocres. Pour l'antisémite, l'intelligence
est juive, il peut donc la mépriser en toute tranquillité comme
toutes les autres vertus que possède le juif...l'antisémite est
donc un homme qui a peur, non pas des juifs mais de sa conscience, de sa
liberté, de ses instincts, de ses responsabilités, de la
solitude, du changement, de la société et du monde ; de tout sauf
les juifs. C'est un lâche ». Ensuite il cite Lénine qui
parle de la nation juive comme étant « la nation la plus
opprimée et la plus traquée ». Lénine qui
reconnait que déjà en 1905, les « travailleurs juifs
souffrent à la fois d'une oppression économique et politique
[...] en tant que nationalité privée de tout droit
6». Pour Lénine, « la
nation juive est la seule nation ex-territoriale [...] qui ne jouit
pas d'une autonomie nationale culturelle ». Nathan Weinstock ainsi
que d'autres auteurs tels que Maxime Rodinson7, Abraham
Léon8 et Isaac Deutscher9présentent la
question juive comme une question de minorité et de discrimination de
classe sociale ayant abouti à un holocauste sous Hitler. De la question
juive nous retenons les thématiques suivantes : haine, mépris,
peur, lâcheté, autonomie culturelle, oppression, minorité
et discrimination. Le contexte dans lequel émerge la question juive
n'est pas le même que celui dans lequel émerge le problème
anglophone. La
4Sindjoun L, « Identité nationale
et « Révision constitutionnelle » du 18 janvier 1996: Comment
constitutionnalise-t-on le « nous » au Cameroun dans l'Etat post-
unitaire ? »
5 Weinstock N, Le Sionisme contre
Israël, Quatrième Internationale, (1969), Page 19.
7Rodinson M, Peuple juif ou problème
juif, Maspero
8Abraham L, La Conception matérialiste de
la question juive, EDI 9Deutscher I, Essais sur le
problème juif, Payot
5
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
thématique qui pourrait nous permettre d'établir
un lien entre les deux est la discrimination. Le problème anglophone se
pose en termes de discrimination de la majorité francophone
vis-à-vis de la minorité anglophone.
Yves Bénot dans idéologies des
indépendances africaines10, donne trois principales
connotations au terme idéologie : système de pensée
politique, mobilisateur des énergies et représentation des
réalités vécues. L'auteur de cet ouvrage a
travaillé dans l'optique de comprendre la nature de ces idées
susceptibles de devenir des forces matérielles lorsqu'elles
pénètrent les masses. L'auteur évoque le fait que
l'Afrique Anglophone soit plus empirique du fait du colonialisme anglais avec
un cadre institutionnel qui a été moins rigide.
L'indépendance apparait plus tôt en Afrique Anglophone et n'avait
pas la même résonnance subversive qu'en AOF. Ensuite l'auteur
évoque l'unité africaine qui doit comporter selon lui trois
volets : culturel, politique et économique ; et il reconnait avec regret
le recul de l'unification en Afrique du fait selon lui des divergences
profondes sur l'orientation politique à donner aux indépendances.
Cet ouvrage nous permet de prime à bord de comprendre dans quelles
logiques les indépendances africaines ont été
amorcées pour traiter de manière plus scientifique « la
question anglophone ». Ensuite, il nous permet d'envisager les
idéologies qui sont sous-jacentes à la médiatisation d'une
question aussi délicate que « la question anglophone » par la
presse écrite camerounaise.
Ngomba Endeley dans l'oeuvre issues of minority rights in
the context of political liberalization : The case of Anglophone Cameroon,
met en exergue les droits des minorités, notamment des anglophones, qui
sont bafoués au Cameroun dans un contexte où nous parlons
beaucoup de droits de l'homme et des libertés. L'objectif de sa
recherche est de comprendre la corrélation entre le droit des
minorités et la libéralisation politique au Cameroun. L'auteur
estime que la minorité anglophone a été flouée dans
le partage des avantages politiques. Il propose même de revisiter les
traités fondateurs du Cameroun dans lequel les anglophones ont selon
l'auteur des motifs de frustration. Cet ouvrage nous facilite la
compréhension de la « question anglophone ». Mais nous
comptons nous focaliser sur l'analyse des articles de journaux locaux
rédigés sur la « question anglophone » pendant le
cinquantenaire de la réunification.
10 Bénot Y,
Idéologies des indépendances africaines. In:
Tiers-Monde, tome 14, n°53, (1973).
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La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
Dans son ouvrage, Virtual activism on Cameroon : The
Camnet Files, Isaac Endeley fait une compilation de correspondances
électroniques des camerounais se trouvant de part et d'autre du globe
sur les questions de sociopolitique intérieure. Son objectif est de
montrer l'influence de l'Internet dans les affaires sociales et politiques au
Cameroun. Il répertorie des emails envoyés par les camerounais de
tous bords sur le forum Camnet et revisite les grandes thématiques de la
politique générale du Cameroun à partir des
élections parlementaires de 1997. Ensuite l'auteur s'attarde sur le
problème anglophone, en faisant un rappel historique, dans le but de
permettre aux lecteurs de mieux comprendre comment ce problème a
été fabriqué. Isaac Endeley s'intéresse dans cet
ouvrage à des thématiques telles que : La liberté
d'expression au Cameroun, la violence politique et le caractère des
institutions Camerounaises. Notre problématique dans ce travail de
recherche est différente. Nous voulons essayer de comprendre comment la
presse locale a traité cette « question anglophone » pendant
le cinquantenaire de la réunification.
Wakata Bolvine François nous intéresse avec sa
thèse qui porte sur : Politique d'information et pratiques
journalistiques : Les différences de traitement de l'information entre
journalistes anglophones et francophones à Cameroon Tribune. Ici
l'auteur met l'accent sur la dimension conflictuelle de l'analyse des
pratiques, les différences et les divergences de conception et
d'application des exigences normatives et pragmatiques du journalisme à
l'intérieur d'un même organe de presse11. Il
s'intéresse aux différences et particularités du
journalisme tel qu'il est pratiqué au Cameroun. Une situation
évocatrice des disparités de références sociales et
politiques des journalistes. Il ouvre le débat sur le traitement de
l'information opéré dans le journal « bilingue »
gouvernemental et constate un bilinguisme discriminatoire au profit des
francophones. Cette thèse nous permet d'entrevoir de manière
claire la « question anglophone » dans la presse écrite.
Toutefois l'auteur s'est appesanti uniquement sur le cas de Cameroon
Tribune. L'analyse que nous comptons réaliser, concerne un corpus
plus élargit comprenant en plus de Cameroon Tribune, The Post, Le
Messager et permettant d'avoir une meilleure lisibilité sur le
processus de médiatisation de la « question anglophone » dans
les journaux camerounais.
11 Wongo Ahanda A, La Communication au Cameroun :
Bibliographie annotée et commentée de 40 ans de recherche,
L'Harmattan, (2005), Page 19
7
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
Dans sa thèse de doctorat soutenue en 2011 à
l'Université de Paris-Sorbonne intitulée : Aspects de la
construction nationale après les indépendances Camerounaises : Le
désir de sécession (1960-2009), Michel Olinga traite du
problème de la construction nationale dans un contexte de multi
appartenance. Il analyse les aspirations de sécession des anglophones,
les revendications à la fois modérées et
sécessionnistes qu'il qualifie de stratégie complexe. L'auteur
s'intéresse également aux différentes manifestations
autour du désir de sécession anglophone, les actions ou les
attitudes des différents facteurs et acteurs de la question. Michel
Olinga pense le problème anglophone existe au Cameroun et se pose en
termes politico historique. Ce problème ne saurait être comme le
défend le Gouvernement Camerounais et comme nous pourrions être
tentés de le croire, un appel à la destruction de l'unité
nationale et encore moins, un frein à la construction nationale en
cours, mais plutôt un appel à la déconstruction du type
d'unité et de construction nationale entretenue jusqu'ici, pour mettre
en avant un type de construction nationale plus inclusif. Sa thèse nous
a été utile, bien que nous ne voulions plus mettre en
lumière les velléités sécessionnistes. Notre
objectif est d'analyser le traitement réservé par la presse
écrite à cette question.
La publication d'Aboya Manassé Endong intitulée
: Menaces sécessionnistes sur l?Etat Camerounais, parut dans le
numéro 285 de décembre 2002 du Monde Diplomatique nous
intéresse. Dans cet article l'auteur met davantage en exergue le conflit
qui oppose les sécessionnistes et l'Etat du Cameroun. Il
s'intéresse aux affrontements qui ont eu lieu le 30 décembre 1999
et le 1er octobre 2000 et qui ont fait réagir le
Secrétaire Général des Nations Unies Koffi Annan, en
visite à Yaoundé. L'auteur traite de la « question
anglophone » en faisant un rappel socio politico historique. Il
présente la dangerosité de ce problème pour la
stabilité du pays. Cet article sera utile dans notre travail dans la
mesure où il nous permettra d'aborder le contexte politico historique de
la « question anglophone ». Cependant l'auteur n'a traité de
ce problème que sous l'angle socio-politique. Nous allons plutôt
aborder cette question en examinant le processus de construction
médiatique de la « question anglophone », en nous interrogeant
sur les modalités d'apparition de la « question anglophone »
dans l'agenda des médias.
Marc Joseph Omgba Etoundi dans sa thèse d'habilitation
à diriger les recherches en sciences et techniques de l'information et
de la communication intitulée : La presse camerounaise dans tous ses
états : Esquisse de présentation de la presse écrite
camerounaise des origines à nos jours avec un gros plan sur la presse
écrite de langue française pour la
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La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
période de 1982 à 199712
pose le problème du rôle joué par la presse en
général dans l'évolution des sociétés. Cet
auteur en se focalisant uniquement sur la presse écrite de langue
française pose même déjà de manière implicite
le problème anglophone, de par son omission de la presse écrite
de langue anglaise dans sa recherche. C'est un travail qui nous
intéresse dans la mesure où le chercheur distingue
différents types de presse écrite : la presse écrite de
service public, la presse d'entreprise, la presse privée d'information
générale et politique, la presse spécialisée.
Toutefois, nous n'allons plus nous interroger sur le rôle de la presse
écrite mais plutôt sur le traitement fait par la presse
écrite de la « question anglophone ».
Dans sa thèse intitulée : Journalismes,
discours et publics : une approche comparative de trois types de presses, de la
production à la réception de l?information soutenue le 5
novembre 2010 à l'Université de Toulouse 2, Emmanuel Marty estime
que depuis la production du discours de presse, jusqu'à sa
réception en passant par le discours lui-même, une
société et sa presse ont des relations d'interdépendance.
Ici l'auteur pose le problème du rôle démocratique de la
presse. Il se pose la question de savoir si la presse permet au public
d'accéder à une information libre, diversifiée et
exhaustive, formulant et alimentant dans ses instances un débat social
contradictoire à l'échelle de son audience ? Pour l'auteur, il
existe des mécanismes qui empêchent à la presse
d'être objective dans le traitement de l'information. Notre recherche ne
sera pas axée sur le problème devenu vétuste du rôle
de la presse écrite. Nous allons travailler sur la perception de la
« question anglophone » qui est inhérente au traitement de
cette thématique par les journaux locaux.
Thomas Atenga dans son article paru dans les cahiers du
journalisme numéro 26 de 2014, intitulé : Communication et
journalisme au Cameroun : « affaires » de lucidités
croisées, du terme emprunté à Pierre Bourdieu, essaye
de comprendre les mécanismes, le mode opératoire, la coordination
de ces « lucidités croisées » pour voir comment elles
contribuent à la productivité, aux performances ainsi qu'à
la notoriété ou la délégitimation d'un
média. Cet article nous apporte beaucoup dans la compréhension
des logiques sociales qui peuvent sous-tendre la rédaction d'un article.
Notre recherche sera plus précise en ce sens que nous n'allons pas
travailler sur le grand ensemble, communication et journalisme, qui semble
être un champ très vaste, nous allons affiner notre recherche en
nous intéressant uniquement à la presse
12 Omgba Etoundi M.-J., «
La presse camerounaise dans tous ses états: Esquisse de
présentation de la presse écrite camerounaise des origines
à nos jours avec un gros plan sur la presse écrite de langue
française pour la période de 1982 à 1997 »,
Université de Droit, d'Économie et de Sciences sociales de Paris
II-Panthéon, (2000)
9
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
écrite. Nous allons recenser et analyser les articles
de journaux parus pendant le cinquantenaire de la réunification sur la
« question anglophone » pour essayer de comprendre quelle est la
perception de ce problème par la presse écrite locale.
Antoine Wongo Ahanda, dans cette publication : La
Communication au Cameroun : Bibliographie annotée et commentée de
40 ans de recherche préfacée par Jacques Fame Ndongo, se
pose la question : quelle communication pour la société
camerounaise ? Il peint le contexte Camerounais marqué par un mouvement
permanent de libéralisation effective de la communication sur une
surface médiatique où se construit une liberté de presse
et d'expression dont certaines illustrations constituent une réelle
exception camerounaise. Ici l'auteur pose le problème de
l'objectivité de la communication au Cameroun, dans la mesure où
la communication peut être utilisée selon le préfacier
comme un mode d'avilissement des masses, par l'instrumentalisation des
techniques modernes dans un but de désinformation voir de
clochardisation et de viol des consciences. Le problème que
soulève cette étude nous intéresse au plus haut point,
dans la mesure où il nous permettra de peindre le contexte de la
communication au Cameroun. Ce qui nous emmènera à montrer
l'impact de ce contexte dans la cristallisation de la « question
anglophone », bien que nous n'envisagions pas de travailler sur le concept
de l'objectivité des médias. Nous allons nous intéresser
à la perception de la « question anglophone » par la presse
camerounaise. Une perception qui aboutit à une certaine construction
médiatique de la « question anglophone » et à un
traitement bien précis de la question pendant le cinquantenaire de la
réunification.
Jacques Fame Ndongo dans Médias et enjeux des
pouvoirs. Essai sur le vouloir-faire, le savoir-faire et le
pouvoir-faire13 fait une analyse de l'impact des médias
sur la réalisation des actions menées par les pouvoirs. Il met en
relief la relation entre médias et pouvoirs en soulignant que les
pouvoirs sont pluriels. Selon l'auteur il existe souvent une opposition entre
savoir-faire, vouloir-faire et pouvoir-faire. Ce travail nous servira à
comprendre les éventuelles interactions qui peuvent exister entre
médias et monde politique. Nous nous en inspirerons pour vérifier
l'agenda des médias dans le but de savoir comment apparait la «
question anglophone » dans l'agenda des journaux camerounais.
13Fame Ndongo J, Médias et enjeux des
pouvoirs. Essai sur le vouloir-faire, le savoir-faire et le pouvoir-faire,
Yaoundé, Presses Universitaires de Yaoundé, (2006)
10
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
Misse Misse dans son article intitulé la
médiatisation de la catastrophe de N'SAM dans la presse hebdomadaire
camerounaise essaye dans un premier temps de comprendre la dynamique du
processus de construction politico médiatique de la catastrophe de N'SAM
dans la presse hebdomadaire camerounaise. Ensuite il s'intéresse aux
stratégies utilisées par ces journaux pour porter cet
évènement à la connaissance du grand public. Les objectifs
de cet article rejoignent les nôtres. Seulement dans notre
démarche scientifique nous voulons éluder l'aspect politique pour
nous concentrer sur le processus de construction médiatique et les
stratégies éditoriales de la presse écrite locale. Cet
auteur a travaillé avec des journaux hebdomadaires tels que Dikalo
et Le Messager qui était à l'époque un
hebdomadaire. Nous allons travailler avec des quotidiens et nous souhaitons
avoir un spectre plus large en sélectionnant : un journal bilingue, un
journal anglophone et un journal francophone. De plus notre problème
porte sur la perception de la « question anglophone » et nous aurons
une approche quantitative en plus de l'approche qualitative utilisée par
l'auteur dans son article.
Eliseo Véron dans construire
l'évènement14 nous permet d'entrer de plein pied
dans notre problème de recherche. Ici l'auteur pose le postulat selon
lequel les événements sociaux ne sont pas des objets qui se
trouveraient tous faits quelque part dans la réalité et dont les
médias nous feraient connaître après coup les
propriétés : ils n'existent que dans l'exacte mesure où
ces médias les façonnent. Pour Véron, les médias
doivent s'en tenir à une idéologie de la représentation
dont l'axe majeur demeure le principe d'objectivité. Il se pose la
question de savoir comment les choses se passent-elles dans les faits ? Pour
lui, l'évènement s'impose partout dans l'intersubjectivité
des acteurs sociaux. Véron nous permet de comprendre les logiques qui
sous-tendent la construction de l'évènement. Cet ouvrage est
très enrichissant pour nos travaux bien qu'à la différence
de Véron nous ne travaillons pas sur la notion d'objectivité. De
plus la « question anglophone » n'est pas un évènement
dans son sens premier. C'est un ensemble de revendications qui apparaissent et
disparaissent des médias au gré de leurs agendas respectifs.
Maurice Mouillaud et Jean-François Têtu dans
le journal quotidien15, posent le problème de la
spécificité des quotidiens. L'objectif des auteurs étant
de rendre compte des modalités de production du sens dans le journal, en
partant de l'information, jusqu'aux pratiques citatives
14Véron E, Construire
l'événement - les médias et l'accident de Three Miles
Island, Paris, Éditions de Minuit, (1981)
15 Mouillaud M, Tetu J.F, Le journal
quotidien, Lyon, Presses Universitaires de Lyon, (1989)
11
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
et argumentatives. Ce travail nous permettra de repérer
les logiques d'argumentations et les stratégies éditoriales de la
presse écrite. Nous allons nous intéresser non pas aux
modalités de production du sens dans les journaux comme Maurice
Mouillaud et Jean-François Têtu, mais à la perception d'une
question par les journaux qui construiront son sens par la suite. Nous voulons
démontrer que : si la perception d'une question est viciée
dès le départ par des stéréotypes ou par des
préjugés, la construction médiatique qui s'en suivra sera
faussée.
2.2- PROBLÈME DE RECHERCHE :
Au lendemain de la célébration du cinquantenaire
de la réunification, le problème relatif à la perception
de la « question anglophone » se pose avec acuité. Les
idées arrêtées et préconçues de certaines
rédactions sur ce sujet peuvent avoir eu une influence sur le traitement
de cette question pendant la période citée ci-dessus. D'ailleurs,
la « question anglophone » n'a toujours pas été
évacuée des colonnes des journaux camerounais et des
débats dans la sphère médiatique, même si l'on a
constaté sur le terrain pendant nos repérages une certaine
gêne, une certaine réticence à parler de ce sujet
ouvertement et librement.
2.3- QUESTIONS DE RECHERCHE : - Question
principale :
Quelle perception de la « question anglophone » se
dégage des journaux camerounais au lendemain de la
célébration du cinquantenaire de la réunification du
Cameroun ?
- Question secondaire 1 :
Quelles sont les stratégies éditoriales
utilisées par les journaux camerounais pour traiter de la «
question anglophone » pendant le cinquantenaire de la réunification
?
- Question secondaire 2 :
Comment apparait « la question anglophone » dans
l'agenda des journaux camerounais?
2.4- HYPOTHÈSES :
- Hypothèse principale :
Nous pouvons supposer que la « question anglophone »
est perçue dans les journaux camerounais comme un problème de
revendications de prébendes politiques.
12
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
- Hypothèse secondaire 1 :
Le traitement de la « question anglophone » dans les
journaux camerounais est dépendant des différentes lignes
éditoriales.
- Hypothèse secondaire 2 :
La « question anglophone » apparait dans l'agenda
des journaux camerounais en fonction des interactions.
3- LES OBJECTIFS DE LA RECHERCHE : -
Objectif principal :
Analyser les articles de journaux parus sur la «
question anglophone » pendant la période de la
célébration du cinquantenaire de la réunification du
Cameroun pour comprendre comment est perçue cette question par la presse
écrite locale.
- Objectif secondaire 1 :
Comprendre le processus de construction médiatique qui
a abouti à la médiatisation de la « question anglophone
» dans la presse écrite locale.
- Objectif secondaire 2 :
Procéder à l'exploitation des personnes
ressources pour desceller les modalités d'apparition de la «
question anglophone » dans l'agenda des médias.
4- CORPUS DE L'ÉTUDE :
Notre corpus est soumis au respect de quatre
règles16 : la règle de l'exhaustivité, la
règle de la représentativité, la règle de
l'homogénéité et la règle de la pertinence. Dans
l'optique du respect scrupuleux de ces règles, nous avons
sélectionné des quotidiens d'informations générales
avec comme premier critère de choix l'ancienneté. Le second
critère est la structuration et l'organisation. Nous avons choisi des
tabloïdes 17 dont les archives sont disponibles et qui
possèdent une organisation pyramidale avec une certaine
lisibilité dans la
16Bardin L, L?analyse de contenu, Presse
Universitaire de France, Paris, 1977, Page 127
17 Le format tabloïde est un format de journal qui
correspond à la moitié des dimensions d'un journal traditionnel.
Son format plié est 11 pouces X 17 pouces, soit 280 mm X 430 mm. Ce type
de format est né en Grande-Bretagne, où il a longtemps
été réservé à la presse populaire voire
« de caniveau ». Le format tabloïde a en effet pour avantages
non seulement d'être plus aisément manipulable, mais aussi
d'attirer davantage les jeunes lecteurs, avec un contenu souvent
allégé.
13
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
répartition des rôles. Pour respecter les
règles de l'exhaustivité et de
l'homogénéité, nous avons opté pour trois (3)
journaux parmi lesquels : un journal « bilingue » ou à
vocation bilingue, un journal francophone et un d'obédience
anglo-saxonne.
Cameroon Tribune : C'est le
quotidien18 national gouvernemental basé à
Yaoundé et qui se veut bilingue. Il est édité par la
SOPECAM et son Directeur de Publication est Marie Claire Nnana. Il existe
depuis 1974 : c'est-à-dire qu'il a 42 ans d'âge. Il est le
quotidien qui bénéficie du plus grand nombre de tirages par jour.
En effet, selon les chiffres obtenus à la Délégation
Régionale de la Communication pour le Littoral, Cameroon Tribune
tire 20 000 exemplaires par jour et est vendu en moyenne à 3500
exemplaires par jour dans la Région du Littoral, lorsqu'on comptabilise
aussi ses abonnés. Ce quotidien a déjà
dépassé le cap du onze millième numéro. Sa ligne
éditoriale est pro-gouvernementale et ses archives sont consultables en
version papier et numérique.
Le Messager est un quotidien
d'informations générales privé francophone basé
à Douala et qui appartient au Free Media Group. Il a été
fondé le 17 novembre 1979 par Pius Njawe de regrettée
mémoire. Il bénéficie de 37 années
d'ancienneté dans le métier. Son actuel Directeur de Publication
est Frédéric Boungou. Il vend en moyenne 2000 à 3000
exemplaires de journaux par jour dans la Région du Littoral. Nous sommes
certes loin des 5000 exemplaires par jours vendus par Le quotidien
de l'économie journal thématique ; mais son
caractère généraliste, son ancienneté, sa
notoriété, sa structuration, son organisation, la
disponibilité de ses archives en format papier, sa posture de critique
perpétuel et son traitement régulier de « la question
anglophone » lui confèrent un certain poids. En novembre 2014,
Le Messager était rendu à son numéro 4200.
La Nouvelle expression de Sévérin
Tchounkeu au numéro 3800, Le jour de Haman
Mana n'était qu'au numéro 1800 et Mutations
de Xavier Messe au numéro 3790 ; ce qui atteste encore de
son ancienneté et de sa régularité. Ce quotidien se
caractérise par sa liberté de ton et son caractère quelque
peu « subversif » par moment. Il est l'un des quotidiens
privés francophones qui traite le plus régulièrement de la
« question anglophone ».
The Cameroon Post qui a
existé début des années 1990, devenu The Post
depuis le 11 juillet 1997, c'est-à-dire depuis 19 ans, est
un journal anglo-saxon basé à Bondoma à Buéa. Son
actuel Manager est Innocent Mbunwe. A la différence des autres journaux
anglo-saxons
18Selon l'UNESCO un quotidien est un journal qui
parait au moins quatre fois par semaine.
14
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
comme : Chronicles (rendu au
numéro 409), Life Time (rendu au numéro
109), Guardian Post (rendu au numéro 689),
The star (rendu au numéro 389),
The Median, Eden (rendu au
numéro 88), Cameroon herald (rendu au
numéro 88), Watchdog tribune, The post
était déjà rendu à son numéro 1587 en
Novembre 2014. Ce qui atteste largement de l'ancienneté de ce journal.
Selon l'article 26 alinéa b1 de la recommandation révisée
de l'organisation des nations unies pour l'éducation, la science et la
culture, émanant de la conférence générale de
l'UNESCO qui a eu lieu dans la ville de Sofia le 9 novembre 1985, concernant la
normalisation internationale des statistiques relatives à la production
et à la distribution de livres, de journaux et de périodiques :
« un quotidien est un journal qui parait au moins 4 fois par semaine
». Partant de ce postulat, aucun journal anglo-saxon camerounais ne
pourrait être considéré comme un quotidien vu que les
journaux majeurs que sont The Post et The Guardian Post
paraissent respectivement 2 et 3 fois par semaine. Certes les journaux qui
paraissent 2 à 3 fois par semaine sont considérés comme
des « non quotidiens » par l'UNESCO qui les a classifiés. Mais
ils ne sont pas non plus considérés comme des hebdomadaires.
The Post est basé à Buéa lieu de
célébration du cinquantenaire de la réunification et
évènement autour duquel gravite notre recherche ; tandis que
The Guardian Post comme Cameroon Tribune est situé
à Yaoundé ville réputée très
politisée. Pour effectuer une étude scientifique, respecter les
règles de la pertinence et de la représentativité il
serait plus judicieux dans notre recherche, de travailler avec un journal
anglophone situé dans la zone anglo-saxonne dans l'optique de
réduire au maximum toute forme d'interaction.
Notre corpus est composé au final de : Cameroon
Tribune (quotidien à capitaux publics, bilingue, basé
à Yaoundé), Le Messager (quotidien privé,
francophone, basé à Douala) et The Post (journal
privé, en langue anglaise, basé à Buéa).
5- CADRE MÉTHODOLOGIQUE :
Ce travail s'inscrit dans le champ de la communication
médiatique. Notre démarche consiste d'une part à analyser
les articles de journaux parus sur la « question anglophone » et
à comprendre le processus de construction médiatique qui a abouti
à la médiatisation de la « question anglophone » dans
la presse écrite locale ; D'autre part à procéder à
l'exploitation des personnes ressources pour desceller les modalités
d'apparition de la « question anglophone » dans l'agenda des
médias.
15
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
5.1- MÉTHODE DE RECHERCHE:
Nous allons utiliser l'analyse de contenu et la méthode
inductive avec la technique d'inférence statistique. Elle permettra
l'observation, l'analyse, l'interprétation et la
généralisation. Une première approche qualitative rendra
possible : l'analyse de la titraille, de la mise en pages, du choix des
illustrations, des figures de style, des angles de traitement, des champs
lexicaux, des genres journalistiques et l'analyse de l'argumentation. Une
seconde approche quantitative nous permettra d'obtenir des données
chiffrées sur notre recherche. Un logiciel nous facilitera le traitement
de ces données. La technique comparative nous permettra de confronter
les données recueillis à partir du journal anglophone, du journal
francophone et du journal bilingue choisis dans notre corpus, de repérer
les constantes et les divergences dans le discours de ces journaux sur la
« question anglophone ».
Pour mener à bien nos travaux, nous allons collecter,
traiter, analyser et interpréter les données recueillies sur le
terrain.
5.2- COLLECTE :
Pour collecter les données sur le terrain, nous
utiliserons les outils de collecte suivants :
La grille d'observation comportant : le nom du journal, la
date de création du journal, le jour et la date de parution de
l'article, le titre de l'article, la page de l'article dans le journal, la
rubrique de l'article, le genre journalistique auquel il appartient et le nom
de l'auteur de l'article.
Le guide d'entretien : Il comprendra une dizaine de questions.
Il a été conçu sous forme de questions à choix
multiples pour diminuer de manière considérable, le temps de
l'entretien, les personnes ressources n'ayant pas beaucoup de temps à
consacrer aux enquêtes. Ce guide d'entretien nous permettra d'interroger
une dizaine de personnes ressources parmi lesquels des hommes politiques et des
journalistes.
- ÉCHANTILLONNAGE :
En accord avec notre problématique, nos objectifs, nos
hypothèses et la délimitation de notre sujet, notre
échantillon sera constitué de journalistes dans une large mesure
pour comprendre les stratégies de construction médiatique et
d'hommes politiques dans une moindre mesure pour vérifier des
éventuelles interactions entre l'agenda des médias et le
16
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
calendrier politique. Nous allons utiliser la proportion 80/20
(80% de journalistes et 20% d'hommes politiques) pour coller à la
réalité sociologique et au découpage administratif du
Cameroun qui compte 10 Régions dont 08 sont francophones et 02 seulement
sont anglophones. Nous avons choisi un échantillon représentatif
constitué de 10 personnes ressources. En ce qui concerne la langue
officielle parlée nous avons choisis d'interroger 08 francophones et 02
anglophones. Sur la question genre nous aurons 02 femmes et 08 hommes (les
femmes étant supposées à tort ou à raison
s'intéresser un peu moins aux questions politiques au Cameroun) ; En ce
qui concerne la catégorie professionnelle 02 hommes politiques et 08
journalistes (notre travail étant une thématique aux relents
politiques et que nous aborderons dans le champ de la communication
médiatique).
- LES PERSONNES RESSOURCES :
Les personnes ressources sont celles avec qui nous avons eu
des entretiens après notre descente sur le terrain et qui nous ont
fournies des informations utiles pour rédiger notre mémoire. Nous
avons choisi premièrement des cadres dans les différents journaux
de notre corpus qui ont d'une manière ou d'une autre travaillé
sur la « question anglophone »: Blaise Pascal Dassie (REC du
Messager), Armand Essogo (Directeur Régional SOPECAM/Littoral),
Innocent MBOUNWE (Manager de The Post). Ensuite nous avons
complété notre liste avec des jeunes journalistes dans un souci
de neutralité et de pertinence : Lucienne Wouassi (La Nouvelle
Expression), Yaboa Ndula (Cameroon Tribune), Emmanuel Yimga (DP
de l'Ouragan Indépendant), Henri Franck Log Gwet (MINCOM),
Serge KWIN (MINCOM) et enfin nous avons sélectionné deux hommes
politiques un jeune et un plus ancien connus pour leur pertinence et leur franc
parler : Franck ESSI (CPP) et Anicet Ekane (MANIDEM).
5.3- TRAITEMENT :
La recherche documentaire nous aidera à traiter les
données qualitatives. Nous allons effectuer des opérations
statistiques simples, élaborer des indices et calculer les
fréquences pour traiter les données quantitatives. L'analyse
de contenus de Laurence Bardin nous servira d'outil de traitement du
discours de la presse écrite. Le logiciel de traitement de
données Sphinx plus 2 nous sera utile dans le traitement des
données recueillies à partir de la grille d'entretien. Il nous
permettra de construire des tableaux pour l'interprétation facile de nos
résultats.
17
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
5.4- ANALYSE ET INTERPRÉTATION :
Après avoir obtenu des données brutes, nous
allons procéder à une synthèse et une sélection de
nos résultats. Ces résultats seront soumis à des
épreuves statistiques et à des tests de validité. Ils nous
permettront d'étudier chaque observation pour en dégager des
constats pertinents par rapport au problème de recherche. Nous allons de
ce fait vérifier nos hypothèses de départ. Les
résultats significatifs et fiables ainsi obtenus, nous pourrons alors
proposer des inférences et avancer des interprétations par
rapport aux objectifs prévus ou à d'autres découvertes
imprévues.
6- CADRE THÉORIQUE:
Ce travail s'appuiera sur trois théories : les
théories de la perception, la théorie de l'argumentation et celle
de l'agenda setting.
- Les théories de la perception :
Les sciences de l'information et de la communication en tant
que discipline transversale ont emprunté les théories de la
perception à la psychologie sociale. Bernard Miège et Yves de la
Haye ont mis en lumière la perspective de la pluralité de
perceptions de l'espace public en travaillant sur le concept des relations
publiques généralisées. Les théories de la
perception ont pour précurseur la théorie de Reid et les
théories nativistes et pour auteurs contemporains Konrad Lorenz et
Nikolaas Timbergen. Ils posent pour postulat que toute communication entre
individus a pour base la perception. Pour les nativistes, la perception peut
être comprise comme une représentation et une compréhension
de quelque chose par l'esprit. Ici les caractéristiques du style
perceptif sont liées à la structure héréditaire du
système nerveux. Pour les empiristes, la perception n'est pas un
phénomène passif. Pour eux, dans toute perception, il y a action,
acte perceptif, au cours duquel nous structurons le monde, nous attendons
quelque chose, d'où la notion de « set » ou attente ou cadre
interprétatif prédéfini. Notre perception est donc
déterminée par un ensemble de facteurs innés et acquis
liés à la structure du système nerveux qui sont
héréditaires et en rapport avec des structures motrices. Cette
théorie nous permettra de comprendre comment la presse locale
elle-même perçoit la « question anglophone » dans un
pays comme le Cameroun avec une variété de culture, de groupes
humains, de catégories d'âges, de sexes, de classes sociales et de
ce fait de cadres de
18
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
référence. Cette perception est liée
à des clichés ou à des stéréotypes sociaux.
D'où le problème de la distanciation entre le sujet et
l'objet.
- La théorie de l'argumentation :
Le modèle argumentatif est principalement basé
sur la construction d'arguments et de contre-arguments, la définition
d'une relation d'attaque entre arguments, la comparaison d'arguments et la
sélection d'arguments jugés acceptables. Cependant,
l'argumentation ne se résume pas seulement à l'exposition du
cheminement argumentatif et à l'étude d'une stratégie
argumentative. D'ailleurs parler et communiquer ne sont pas des actes si
simples que cela. Un seul énoncé peut donner lieu à
diverses interprétations et significations. L'argumentation suppose
aussi un langage, un émetteur et un récepteur. A travers
l'étude des stratégies éditoriales de la presse locale sur
la « question anglophone », cette théorie nous permettra de
repérer et d'analyser les différents arguments utilisés
par les journaux camerounais. Elle nous permettra également de desceller
les différentes manoeuvres de captation de l'audience utilisées
par les quotidiens.
- La théorie de l'agenda-setting :
L'effet d'agenda désigne l'influence que les
médias exercent sur la définition des problèmes
considérés comme les plus importants dans la
société et appelant une intervention des pouvoirs publics.
Traditionnellement, pour mesurer l'effet d'agenda des médias sur les
lecteurs, on étudie d'abord l'agenda des médias,
c'est-à-dire les problèmes que les médias
privilégient19. Puis on étudie l'agenda des lecteurs,
c'est-à-dire les problèmes que ceux-ci considèrent comme
les plus importants20. Enfin, on compare les deux agendas en
s'efforçant de repérer une relation entre eux21.
» Dans le cadre des études d'agenda setting, les médias nous
disent non pas ce qu'il faut penser, mais à quoi il faut penser ; ils
jouent le rôle d'un « maître de cérémonie »
ou encore d'un tableau d'affichage sur lequel viendraient s'inscrire les
problèmes qui doivent faire l'objet du débat dans une
société. La théorie de l'agenda setting
19Par exemple en analysant les unes et titres
principaux des quotidiens, ou les sujets présentés dans les JT.
20Par exemple à travers des enquêtes par sondage.
21Par exemple, l'inscription d'un problème
sur l'agenda médiatique est suivie quelque temps plus tard par
l'apparition de ce problème dans l'agenda des électeurs.
19
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
pourrait nous servir dans le cadre de notre travail pour
comprendre le processus qui aboutit à l'apparition de la « question
anglophone » dans l'agenda des médias.
7- INTÉRÊT DU SUJET :
L'intérêt de ce sujet réside sur le plan
scientifique. Ce travail qui s'inscrit dans le champ de la communication
médiatique nous permettra de faire des recherches sur les récits
médiatiques et sur l'analyse de contenus. Nous nous pencherons sur le
processus de construction médiatique, les stratégies
éditoriales de la presse écrite, les manoeuvres de captation de
l'audience, les interactions dans les médias. Mais aussi sur le plan
historique : Il nous ramènera à la genèse et à
l'évolution de la « question anglophone » au Cameroun et sur
le plan politique : ce travail nous conduira à nous intéresser au
multipartisme des années 90 et à la célébration du
cinquantenaire de la réunification.
8- DÉLIMITATION DU SUJET :
Notre étude porte sur la médiatisation de la
« question anglophone » dans les journaux camerounais pendant la
célébration du cinquantenaire de la réunification du
Cameroun. La période de la célébration du cinquantenaire
de la réunification du Cameroun est l'espace-temps autour duquel gravite
notre recherche. Nous allons nous situer dans nos travaux : avant, pendant et
après cet important évènement qui a eu lieu en
février 2014 dans la ville de Buéa. Le but étant de savoir
comment les journaux camerounais perçoivent et ont traité cette
question depuis ce tournant historique.
9- PLAN DETAILLÉ :
Notre étude est structurée en quatre chapitres :
Le chapitre premier qui a pour titre 'la « question anglophone » au
Cameroun' a pour but de nous plonger dans les généralités
sur « la question anglophone ». Nous y abordons l'origine de cette
question et la perception de la notion d'anglophone au Cameroun. Ensuite nous
intéressons aux termes en lesquels se pose la « question anglophone
» au Cameroun en nous fondant sur les avis recueillis sur le terrain lors
de notre descente sur le terrain, notamment en termes de revendication
politique et de repli identitaire.
Le deuxième chapitre s'intitule 'le cinquantenaire de
la réunification du Cameroun'. Ici nous faisons un flash-back historique
en nous arrêtant sur les prémices de la réunification du
Cameroun. Nous revisitons le consensus de Bamenda qui a eu lieu avant la
conférence
20
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
constitutionnelle de Foumban et a jeté les bases de la
réunification du Cameroun. Ensuite nous nous intéressons au
déroulement du cinquantenaire de la réunification du Cameroun qui
s'est tenu à partir du 17 février 2014. Nous relatons les
préparatifs et les festivités de cet évènement
historique.
Le troisième chapitre intitulé
stratégies de construction de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais' nous permet d'entrer de plein pied dans
l'analyse de contenus des récits médiatiques. Grâce
à l'approche qualitative nous avons repéré dans les
journaux soumis à notre étude, les manoeuvres de captation de
l'audience propres aux journaux camerounais, les stratégies de mise en
page, les angles de traitement, la titraille, les illustrations. Nous nous
intéressons aussi aux stratégies de mise en discours en
identifiant les figures de styles, les arguments, les genres journalistiques et
les champs lexicaux.
Enfin nous aborderons le quatrième chapitre dont le
titre est Analyse quantitative de la « question anglophone
». C'est ici que nous procédons à l'exploitation de notre
matériel de travail à l'aide des opérations de codage,
nous enregistrons les données du logiciel Sphinx 2 Plus qui nous permet
de réaliser des tableaux et de traiter nos données recueillies
sur le terrain. Par la suite nous entamons l'analyse et l'interprétation
des résultats obtenus sur le terrain.
CHAPITRE I:
LA « QUESTION ANGLOPHONE » AU
CAMEROUN
21
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
22
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
Au rang des débats qui ont eu court au Cameroun et qui
sont toujours d'actualité dans les espaces publics au sens
d'Habermas22, l'on peut énumérer : l'harmonisation du
système éducatif avec de nos jours, la montée du
bilinguisme et la création des classes de 3e, seconde,
première et terminale bilingues. En mars 1993, parlant du bilinguisme
à la camerounaise le quotidien Le Messager titrait :
«...les anglophones doivent étudier le français pendant que
les francophones se détendent 23». L'on peut citer
également parmi les grands débats actuels, l'harmonisation du
système judiciaire au Cameroun qui connait une cohabitation incestueuse
entre le droit civil, la Common Law et le droit coutumier. D'ailleurs l'absence
de version anglaise du traité OHADA a récemment suscité
une grève des avocats anglophones. De plus, le projet de loi
n°989/PJL/AN portant code pénal au Cameroun est contesté par
l'ordre des avocats qui demande le retrait de ce texte pour plusieurs motifs
dont l'un des principaux se trouve être : « le défaut de
concordance entre les versions française et anglaise du texte qui ne
peuvent que produire des interprétations et applications divergentes
d'une même loi, entrainant ainsi une aggravation de
l'insécurité juridique et judiciaire »24. Pour
Louis Marie Nkoum-Me-Ntseny, dans dynamique de positionnement anglophone et
libéralisation politique au Cameroun : de l?identité à
l?identification, au-delà des problèmes «
Bamiléké », « Kirdi », et « Béti
» qui ont été théorisés au Cameroun, il existe
un problème « anglophone » qui est non négligeable. Il
nous revient dans notre étude d'aborder les
généralités sur la « question anglophone » et
d'étudier les termes en lesquels se pose la question anglophone au
Cameroun.
I- GÉNÉRALITÉS SUR « LA QUESTION
ANGLOPHONE »
Pour appréhender « la question anglophone »
nous devons dans un premier temps comprendre l'origine de ce problème en
faisant un rappel historique. La compréhension de la perception de la
notion d'anglophone au Cameroun serait également un atout
indéniable dans cette optique.
22L'espace public au sens d'HABERMAS, la
catégorie idéale, typique et historique est celle de l'espace
public bourgeois.
23Le Messager, 8 mars 1993
24Propos de Ngnié Kamga, La Nouvelle Expression
n°4250 du vendredi 17 juin 2016, article projet de code pénal :
l'ordre des avocats demande le retrait du texte.
23
La médiatisation de la « question anglophone
» dans les journaux camerounais pendant la célébration du
cinquantenaire de la réunification du Cameroun.
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